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Pascal Olive

PHYSIQUE
en PC/PC*

Le cours complet
PHYSIQUE
en PC/PC*

Le cours complet

Pascal Olive
Du même, chez le même éditeur
Physique-Chimie en PSI/PSI* - Le cours complet, 928 pages, 2022.

ISBN 9782340-066571
©Ellipses Édition Marketing S.A., 2023
8/10 rue la Quintinie 75015 Paris
III

AVANT-PROPOS

Cet ouvrage aborde l’ensemble du cours de Physique de la classe de


PC / PC*. Il reprend également de nombreux points du programme de PCSI. Il
est conforme au programme en vigueur depuis 2022.

 Le cours proposé est très complet. Sa rédaction est particulièrement


rigoureuse et soignée, et s’appuie sur de nombreuses illustrations. Les points
délicats sont discutés en détail, afin de fournir aux étudiants les plus exigeants
des réponses à beaucoup de leurs questions. Les résultats et définitions les
plus importants sont indiqués ainsi :

δP = J x ( x, t )dt est le transfert de probabilité à l’abscisse x entre t et t + dt .

Des résultats intermédiaires, ou un peu moins importants, sont grisés de


la façon suivante :
G G G
Finalement, ar (M ) = g (M ) − g (G ) .

Certaines définitions, ou points sur lesquels il est nécessaire de


porter une attention particulière, sont mis en italique :
Les phénomènes ondulatoires, en présence de phénomènes dissipatifs, sont irréversibles.

 De très nombreuses applications sont intégrées au cours. Elles sont


indiquées à l’aide du symbole . Elles ont été choisies pour l’éclairage qu’elles
lui apportent, leur intérêt culturel, et pour la diversité des techniques de
résolution qu’elles font intervenir. Beaucoup d’applications classiques, qui font
l’objet de nombreux sujets d’écrits et d’oraux, sont ainsi proposées.
— Si une section entière d’un chapitre est consacrée à des applications, elle
est indiquée ainsi :

3. TURBORÉACTEUR 
— Une sous-section détaillant une application est indiquée ainsi :
3.1 Miroir de Lloyd 

 Le livre est scindé en sept parties conformément au programme. Les


outils mathématiques nécessaires pour aborder les différents contenus du
programme sont regroupés dans la première partie du livre.

 Quelques compléments hors-programmes sont présentés pour leur


apport culturel, leur utilisation fréquente dans les T.I.P.E, ou pour mieux
appréhender certaines notions. Ils peuvent être réservés à une deuxième

I
IV .  

lecture plus approfondie. Ces compléments sont identifiés à l’aide d’une barre
dans la marge de gauche et d’un interligne plus petit :
C’est un cas particulier du théorème de Reynolds :
dx x (t + d t ) − x ( t ) ∂ρ x 3
= =  d V + ρ x 2 ( t ) S 2 v 2 ( t ) − ρ x 1 ( t ) S 1 v 1( t )
dt dt ∂t 
N M ∈V c
dérivée totale  dérivée convective
(Lagrange) dérivée locale (Euler)

Cet outil de travail complet, utile et agréable par la clarté du cours, la


rigueur du contenu, la variété et la richesse des applications proposées, est écrit
spécialement pour les étudiants qui préparent les concours d’entrée aux E.N.S.
et aux plus grandes écoles d’ingénieurs, les étudiants en Master et les
candidats aux concours d’enseignement (CAPES, Agrégation).

Je souhaite remercier ma compagne, Nathalie Martinez, qui m’a soutenu


sans faiblir lors des longs mois d’écriture intense de cet ouvrage, et m’a
prodigué de précieux conseils.
Je lui dédie ce livre, ainsi qu’à mon fils Pierre, ma fille Natalia et à mes
parents Suzanne et Pierre.
Mes collègues Isabelle Bricaud, Catherine Métayer, Yann Millot et
Valérie Monturet ont eu la gentillesse de relire certaines parties de l’ouvrage et
de me faire des commentaires constructifs. Mention spéciale à Benoît Malet…
Je n’oublie pas mon collègue et ami de 30 ans, Lionel « Cocosinus »
Cozar, qui a relu les parties les plus mathématiques.
Je remercie enfin mes étudiants, Olivier Baesen, Louis Bardinet, Naïs
Baubry, Axel Brulavoine, Olivier Courmont, Amandine Darrigade, Anna
Decrock, Achille Domens, Jules Morand, Florian Picq et Léo Simplet, ainsi que
les étudiants de PC / PC* Thomas Fajolle et Baptiste Perrier, qui m’ont fait
l’honneur de lire certains chapitres, de repérer des coquilles, et de me suggérer
des améliorations.

Pascal OLIVE

II
1

[PREMIÈRE PARTIE]

BOÎTE À OUTILS

Les chapitres :
1. Différentielles et formes différentielles 3
2. Les systèmes de coordonnées 11
3. Analyse de Fourier 17
4. Champs et opérateurs différentiels 33
5. Grandeurs physiques : dimensions et unités 57

Dans cette première partie du livre sont exposés les outils nécessaires à l’étude
des parties suivantes.
Le chapitre sur les champs et les opérateurs différentiels introduit de
nouveaux opérateurs, ainsi que la notion de bilan local. Il doit impérativement
être maîtrisé avant d’aborder les parties portant sur l’électromagnétisme, la
mécanique, la thermodynamique et la Physique des ondes.

f
En mathématiques, une fonction est notée f ou bien x ֏ f(x) , pour la distinguer
de l’image f(x) de x par f. En Physique, la notation g(x,t) est souvent utilisée pour
indiquer que la grandeur g dépend des variables x et t.

1
2
3

[BOÎTE À OUTILS 1]

DIFFÉRENTIELLES ET FORMES
DIFFÉRENTIELLES
1. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
1.1 Dérivées partielles
f
On raisonne sur une fonction f de deux variables réelles : ( x, y ) ֏ f ( x, y ) , à va-
leurs réelles, de classe C1 .

 ∂f 
On note   la dérivée de la fonction f par rapport à la variable x, les autres
 ∂x  y
variables (ici y) étant fixées.

∂f
On note simplement cette dérivée partielle lorsqu’il n’y a pas d’ambiguïté.
∂x
Par exemple, en thermodynamique, une fonction d’état d’un corps pur sous une seule
phase, comme l’entropie S, est une fonction de deux variables indépendantes. On peut
choisir comme couple de variables la température T et la pression p, mais aussi T et
 ∂S   ∂S 
le volume V. Il faut distinguer   et  ∂T  , qui sont a priori différentes.
 ∂T  p  V

1.2 Théorème de Schwarz


∂f ∂f
( x, y ) ֏ et ( x, y ) ֏ sont des fonctions de deux variables qui peuvent
∂x ∂y
∂ 2f
être dérivées par rapport à x ou y si elles sont de classe C 1 . On peut former ,
∂x 2
∂ 2f ∂  ∂f  ∂ 2f ∂  ∂f  ∂ 2f ∂f ∂f
=   , =   , et 2
. Si ( x, y ) ֏ et ( x, y ) ֏ sont de
∂y ∂x ∂y  ∂x  ∂x∂y ∂x  ∂y  ∂y ∂x ∂y

classe C 1 , f est de classe C 2 et le théorème de Schwarz s’applique :

∂  ∂f  ∂  ∂f  ∂ 2f ∂ 2f
 =   , soit = : peu importe l’ordre des dérivations.
∂x  ∂y  ∂y  ∂x  ∂x ∂y ∂y ∂x

f
Par exemple : ( x, y ) ֏ x 2 ln( y ) est de classe C 2 sur son domaine de définition.

3
4 Partie I.  Boîte à outils

∂f ∂f x2 ∂  ∂f  2 x ∂  ∂f 
On calcule = 2 x ln( y ) et = . On a bien  = = .
∂x ∂y y ∂x  ∂y  y ∂y  ∂x 

2. DIFFÉRENTIELLES
2.1 Fonction d’une seule variable
f
La fonction f : x ֏ f ( x ) étant suffisamment régulière, elle admet au voisinage
de x un développement de Taylor :
(δx )2
⋅ f ′′( x ) + O (δx )3  .
f ( x + δx ) = f ( x ) + δx ⋅ f ′( x ) +
2!  
Intéressons-nous à la différence f ( x + δx ) − f ( x ) , quand δx est très petit :
(δx )2
f ( x + δx ) − f ( x ) = δx ⋅ f ′( x ) + ⋅ f ′′( x ) + O (δx )3  . On a donc :
2!  
f ( x + δx ) − f ( x ) δx
= f ′( x ) + ⋅ f ′′( x ) + O (δx )2  .
δx 2!  
On note dx un accroissement δx infiniment petit :
f ( x + dx ) − f ( x ) f ( x + δx ) − f ( x )
= lim = f ′( x ) , ce qu’on écrit sous la forme :
dx δx →0 δx
f ( x + dx ) − f ( x ) = f ′( x )dx .

La différence df = f ( x + dx ) − f ( x ) est appelée différentielle de f en x.


On a df = f ′( x )dx pour une fonction d’une seule variable.

df
Ceci fait tout l’intérêt de la notation de Leibniz : f ′( x ) = .
dx
df = f ( x + dx ) − f ( x ) est la variation infinitésimale de f au voisinage de x, due à
une variation infinitésimale dx de x.
Remarquons que, contrairement au cas d’un accroissement fini δx , il n’y a pas
dans df de termes en (dx )2 , (dx )3 , etc. Ceci n’est pas une approximation car :
Adx + B(dx )2 = dx [ A + Bdx ] = dx ⋅ lim [ A + Bδx ] = Adx .
δx →0

Un infiniment petit du premier ordre dx est infiniment plus grand qu’un infini-
ment petit du second ordre (dx )2 . Des termes en (dx )2 n’interviennent que s’il n’y a
pas de termes en dx ( A = 0 ).

Pour le calcul de différentielles, on utilise souvent les dérivations composées.


F dF df dg
Si x ֏ F ( x ) = f [ g ( x )] alors = ⋅ : on retrouve la formule (f � g )′ = (f ′ � g ) ⋅ g ′ .
dx dg dx

4
Chapitre 1.  Différentielles et formes différentielles 5

df dg exp(2 x )
On en déduit dF = ⋅ dx . Par exemple, si F ( x ) = exp(2 x ) , dF = dx .
dg dx x

2.2 Fonction de plusieurs variables


f
On raisonne sur une fonction f de deux variables réelles : ( x, y ) ֏ f ( x, y ) , de
classe C 2 , à valeurs réelles.
La fonction f étant suffisamment régulière, elle admet au voisinage de (x,y) un
développement de Taylor à l’ordre 2 (à des termes d’ordre 3 près, comme ( δx )3 ou
δx ⋅ ( δy )2 ) :
∂f ∂f 1 ∂ 2f ∂ 2f ∂ 2f 
f ( x + δx, y + δy ) = f ( x, y ) + δx ⋅
+ δy ⋅ + (δx )2 2 + 2δx ⋅ δy + (δy )2 2  .
∂x ∂y 2!  ∂x ∂x∂y ∂y 
En notant dx et dy les infiniment petits d’ordre 1, on a :

∂f ∂f
df = f ( x + dx, y + dy ) − f ( x, y ) = dx + dy , différentielle de f en (x,y).
∂x ∂y

df = f ( x + dx, y + dy ) − f ( x, y ) est la variation infinitésimale de f au voisinage de


( x, y ) , due à une variation infinitésimale dx de x et dy de y.
f ∂f ∂f x2
Par exemple, si f : ( x, y ) ֏ x 2 ln( y ) , df = dx + dy = 2 x ln( y )dx + dy .
∂x ∂y y

2.3 Intégration
Pour une fonction d’une seule variable, découpons l’intervalle [a, b ] en N inter-
N
 ( f [a + i δx ] − f [a + (i − 1)δx ]) .
b−a
valles de longueur δx = et calculons I =
N i =1
Cette somme discrète se simplifie :
I = f (b) −f (b − δx ) + f (b − δx ) − ... −
��������� f (a + δx ) + f (a + δx ) − f (a) , soit I = f (b) − f (a) .
���������
0 0
δx devient infiniment petit si N → ∞ , et est noté dx. La somme I n’est alors plus
x =b x =b
discrète, mais continue, et s’écrit I =  [ f ( x + d x ) − f ( x )] =  df = f ( b ) − f (a ) .
x =a x =a
Ce résultat est bien traduit par la notation de Leibniz :
x =b x =b

 df =  f ′( x )dx = [f ( x )] ab = f (b ) − f (a ) .
x =a x =a

5
6 Partie I.  Boîte à outils

Pour une fonction de deux variables,


B ( xB , y B )

 df prend le sens suivant : on somme,


A( x A , y A )

le long d’un chemin γ menant de A à B, les dif-


férences df = f ( x + dx, y + dy ) − f ( x, y ) entre
les points M et M ′ de coordonnées respec-
tives (x,y) et ( x + dx, y + dy ) .

B
La somme continue  df = f (B ) − f ( A) = f ( xB , yB ) − f ( xA, y A ) ne dépend que de
A
A et B, et ne dépend donc pas du chemin γ suivi pour aller de A à B.

3. FORMES DIFFÉRENTIELLES
3.1 Définition
Pour un système décrit par deux variables x et y, une forme différentielle s’écrit
δW = P ( x, y )dx + Q( x, y )dy .
G G G
Par exemple, dans un champ de force F ( x, y ) = P ( x, y )ex + Q( x, y )ey , le travail
reçu par une particule se déplaçant de M ( x, y ) à M ′( x + dx, y + dy ) vaut :
G →
δW = F ⋅ d OM = P ( x, y )dx + Q( x, y )dy .
Malgré la notation, qui est la même que celle d’un accroissement fini, c’est un
travail élémentaire, ou infinitésimal, défini pour un déplacement élémentaire :
→ 
→ G G
d OM = MM ′ = dx ex + dy ey de la particule, se produisant entre les dates t et t + d t .

Une forme différentielle est donc définie pour une transformation infinitésimale
correspondant à une variation dx de x et dy de y au voisinage de ( x, y ) .

Lorsqu’on somme les formes différentielles δW le long d’un chemin γ entre deux
points A et B, on obtient la grandeur WAγ →B (par exemple, le travail de la force s’exer-
çant sur la particule qui se déplace entre A et B le long de γ).


La grandeur WAγ →B = δW dépend a priori du chemin γ suivi entre A et B.
A

6
Chapitre 1.  Différentielles et formes différentielles 7

3.2 Théorème de Poincaré

À quelle condition WAγ →B ne dépend-il que de A et de B, et pas de γ ? Autrement


f
dit, à quelle condition existe-t-il f : ( x, y ) ֏ f ( x, y ) telle que WAγ →B = f (B ) − f ( A) ?
Pour un déplacement élémentaire, la relation précédente s’écrit :
δW = f ( x + dx, y + dy ) − f ( x, y ) , soit δW = df . On cherche donc la condition pour qu’il
∂f ∂f
existe une fonction f telle que δW = P ( x, y )dx + Q( x, y )dy = df = dx + dy . Si c’est
∂x ∂y
 ∂f
P ( x, y ) = ∂x
le cas, on identifie  , et, d’après le théorème de Schwarz, on a nécessai-
Q( x, y ) = ∂f
 ∂y
∂P ∂Q
rement = . La réciproque n’est pas toujours vraie (elle l’est à certaines condi-
∂y ∂x
tions sur le domaine des valeurs prises par x et y, conditions généralement vérifiées
en Physique). Retenons l’implication suivante (théorème de Poincarré) :
f ∂P ∂Q
∃ f : ( x, y ) ֏ f ( x, y ) telle que δW = P ( x, y )dx + Q( x, y )dy = df  = .
∂y ∂x

Prenons des exemples :


∂P ∂Q
(i) La forme différentielle δW = ydx n’est pas une différentielle car = 1≠ = 0.
∂y ∂x
En conséquence WAγ →B dépend du chemin γ suivi entre A et B.

(ii) La forme différentielle δW = 2 x sin( y )dx +  x 2 cos( y ) − 1 dy peut être une différen-
 
∂P ∂Q
tielle puisque = 2 x cos( y ) = . Cherchons donc s’il existe une fonction f telle que
∂y ∂x
 ∂f
 ∂x = 2 x sin( y )
δW = df . On identifie pour cela les dérivées partielles :  .
 ∂f = x 2 cos( y ) − 1
∂
 y
On intègre alors une de ces deux relations, par exemple la première :
∂f
= 2 x sin( y )  f ( x, y ) = x 2 sin( y ) + ϕ( y ) .
∂x

Attention ! On a intégré à y constant, donc ϕ n’est pas une constante, mais


ϕ
n’importe quelle fonction de y à ce stade. En effet, la dérivée de y ֏ ϕ( y ) par rapport
à x donne bien 0.

7
8 Partie I.  Boîte à outils

En reportant f ( x, y ) = x 2 sin( y ) + ϕ( y ) dans la deuxième relation, on obtient :


∂f dϕ
= x 2 cos( y ) + = x 2 cos( y ) − 1  ϕ( y ) = − y + Cte . Finalement, on a bien :
∂y dy aussi

δW = df , avec f ( x, y ) = x 2 sin( y ) − y + Cte .


Revenons sur les différentes notations :

Pour une transformation infinitésimale, on note δW une forme différentielle et df une


B


différentielle. Pour une transformation finie, on note WAγ →B = δW , ou simplement W
A
B


s’il n’y a pas d’ambiguïté, et ∆f = df = f (B ) − f ( A) .
A

Par exemple, le premier principe de la thermodynamique s’écrit dE = δW + δQ


pour une transformation infinitésimale, et ∆E = W + Q pour une transformation finie.

4. APPLICATIONS 
4.1 Fonctions implicites 
Considérons trois variables x, y et z liées par une relation f ( x, y , z ) = 0 (∗) , par
exemple f ( x, y , z ) = yx 3 + z ln( x ) + 1 = 0 . Les variables x, y et z ne sont donc pas indé-
pendantes. Si par exemple on fixe les valeurs de y et de z, alors x ne peut prendre que
certaines valeurs, solutions de (∗) . Cependant, comme dans l’exemple, on ne peut
pas toujours expliciter x en fonction de y et de z, c’est-à-dire exprimer analytiquement
x
la fonction ( y , z ) ֏ x ( y , z ) : x est alors une fonction implicite de y et de z.
On peut néanmoins obtenir des relations entre les dérivées partielles. En effet,
comme f est une constante, on a, en prenant la différentielle de (∗) :
 ∂f   ∂f   ∂f 
d f =   d x +   d y +   dz = 0 .
  y ,z
∂x  z, x
∂y  ∂z  x, y
 ∂f   ∂f  dy
Si z est constant ( dz = 0 ), on a   dx +   dy = 0 , or à z constant
 ∂x  y ,z  ∂y z,x dx
y
est la dérivée partielle par rapport à x de la fonction implicite ( z, x ) ֏ y ( z, x ) . On a donc
 ∂y   ∂f   ∂f 
 ∂x  = −  ∂x   ∂y  . On constate qu’il faut bien se garder de « simplifier » par
 z   y ,z   z, x
∂f , cette simplification étant dénuée de sens, et amenant à un résultat faux.

8
Chapitre 1.  Différentielles et formes différentielles 9

−1
 ∂x   ∂f   ∂f   ∂x   ∂y  
De même   = −    ∂x  , d’où la relation
  =    .
 ∂y z  ∂y  z, x   y ,z   z   ∂x  z 
∂y
Un certain nombre de résultats peuvent être ainsi démontrés sans avoir à ex-
z x y
pliciter les fonctions ( x, y ) ֏ z( x, y ) , ( y , z ) ֏ x ( y , z ) et ( z, x ) ֏ y ( z, x ) .

4.2 Calculs intégraux 


Le calcul de grandeurs finies se ramène souvent au découpage du domaine
d’intégration en parties infinitésimales. Prenons quelques exemples.

Exemple 1 : longueur d’une courbe d’équation polaire θ ֏ r (θ


θ)
On découpe la courbe en segments élé-
mentaires [MM ′] , où M a pour coordonnées po-
laires (r,θ) et M ′ : (r + dr , θ + dθ) . Le vecteur po-

→ �
sition est OM = rer . On obtient le déplacement
→
élémentaire en prenant la différentielle de OM :

→  →  →  → � � der �
d OM = OM ′ − OM = MM ′ = drer + r dθeθ , car = eθ . La longueur élémentaire vaut

2
→ →
 dr 
dL = d OM = MM ′ = (dr )2 + ( r dθ)2 = dθ r 2 +   , en parcourant la courbe dans
 dθ 
le sens des θ croissants afin d’avoir dθ > 0 . On obtient la longueur de la courbe com-
θmax θmax 2
→
 dr 
prise entre θmin et θmax en calculant L =  d OM =  r 2 +   dθ .
 dθ 
θmin θmin

Exemple 2 : charge d’une boule


Une boule de rayon R possède une densité volu-
mique de charges ρ(r ) qui ne dépend que de la distance
r au centre O de la boule : il y a symétrie sphérique (inva-
riance du système par toute rotation autour de O). Si ρ
était uniforme, la charge Q de la boule serait le produit de
ρ par son volume V , mais ici on doit découper la sphère
de façon à ce que ρ(r ) reste constant dans un volume
élémentaire.
On peut prendre le volume compris entre deux sphères de centre O, et de
4
rayons r et r + d r . Ce volume vaut dV = V (r + dr ) − V (r ) où V (r ) = πr 3 est le vo-
3
lume d’une boule de rayon r. On a donc dV = 4πr 2dr , d’où :

9
10 Partie I.  Boîte à outils

R
Q=  ρ( r ) 4πr 2dr .
r =0
Tout l’intérêt des différentielles est le passage à une variation infiniment petite.
Si le rayon de la boule subissait un accroissement fini δr , on aurait :
4 4
δV = V (r + δr ) − V (r ) = π (r + δr )3 − r 3  = π 3r 2δr + 3r (δr )2 + (δr )3  ≠ 4πr 2δr .
3   3  
En revanche, dV = 4πr 2dr est une relation exacte.

Exemple 3 : volume d’un cône


On peut calculer le volume V d’un cône de sommet O,
d’axe Oz, de hauteur H, et de demi-angle au sommet α, en le
découpant en tranches infinitésimales de hauteur dz. Le vo-
lume d’une telle tranche se confond avec celui d’un cylindre
circulaire de hauteur dz et de rayon r, soit dV = πr 2dz .
Là encore, ce qui ne serait qu’une approximation pour
un petit accroissement δz devient rigoureux pour dz infiniment
petit. En effet la différence de volume entre le cylindre et la por-
tion du cône de hauteur dz est de l’ordre de r dr dz , donc c’est
un infiniment petit d’ordre 2 en dz puisque r = z tan α .
H H
1 1
Finalement, V =  πr 2dz =  π tan2 α ⋅ z2dz =
3
π tan2 α ⋅ H 3 = πR 2H .
3
z =0 z =0

Exemple 4 : énergie reçue par un conducteur ohmique


Un conducteur ohmique de résistance R parcouru par un courant d’intensité i(t)
reçoit une puissance instantanée p(t ) = Ri 2 (t ) . Pendant une durée finie ∆t, le conduc-
W
teur reçoit un travail W, ce qui permet de définir la puissance moyenne P = reçue
∆t
pendant ∆t. Pour définir la puissance instantanée à la date t, on effectue le rapport
entre le travail élémentaire δW reçu entre t et t + d t (attention ! δW est une forme
différentielle, et pas une différentielle), et la durée dt infinitésimale.

δW
La puissance instantanée, définie par p(t ) = , n’est pas une dérivée puisque
dt
W n’est pas une fonction du temps (parler du « travail reçu à la date t » n’a pas de
sens ; parler du travail δW reçu entre t et t + d t en a un).

Le travail reçu par le conducteur entre t1 et t2 s’obtient en sommant les travaux


t2 t2


élémentaires : W = δW = Ri 2 (t )dt . 
t1 t1

10
11

[BOÎTE À OUTILS 2]

LES SYSTÈMES DE
COORDONNÉES
1. COORDONNÉES CARTÉSIENNES
1.1 Définition

G G G G
On définit le repère orthonormé direct (O, ex , ey , ez ) : le sens de ez est celui du
G G
déplacement d’un tire-bouchon quand on tourne de ex vers ey .

x (abscisse), y (ordonnée) et z (cote) sont les coordonnées cartésiennes du


G → G G G
point M. Le vecteur position s’écrit r = OM = xex + yey + zez .

1.2 Déplacement, volume et surfaces élémentaires


G
Si x varie de dx, le point se déplace de dx selon le vecteur ex .
G
Si y varie de dy, le point se déplace de dy selon le vecteur ey .
G
Si z varie de dz, le point se déplace de dz selon le vecteur ez .

Sous l’effet d’une variation infinitésimale dx, dy, dz de ses coordonnées x, y, z,


G G G G
le vecteur position varie de dr = dxex + dyey + dzez .

G → 

dr = MM ′ = d OM est le déplacement élémentaire entre un point M et un point
M ′ infiniment proche.

11
12 Partie I.  Boîte à outils

Le parallélépipède représenté sur la figure ci-dessus permet de calculer l’élé-


ment différentiel de volume en coordonnées cartésiennes : d3V = dx dy dz .

Le volume d’un domaine (D) de l’espace est donc :


V =  d3V =  d xd yd z .
M ∈( D ) M ∈( D )

On balaie l’espace entier en prenant ( x, y , z ) ∈ R3 .


Les différentes surfaces élémentaires se déduisent aussi de la figure.

2. COORDONNÉES CYLINDRIQUES
2.1 Définition

G G G
Soit un repère orthonormé direct cartésien (O, ex , ey , ez ) .
G G G
On définit la base mobile (elle dépend du point M) ( er , eθ , ez ), orthonormée et
directe, ainsi que les coordonnées cylindriques de M, de la manière suivante :
G
— Si m est le projeté orthogonal de M sur le plan xOy, le vecteur unitaire radial er est


G Om 

er = , avec r = Om .
r

12
Chapitre 2.  Les systèmes de coordonnées 13

G G
— θ est l’angle orienté ( ex , er ) dans le plan xOy : cet angle est positif si un tire-bou-
G G G
chon se déplace dans le sens du vecteur ez quand on tourne de ex vers er .
G G π
— Le vecteur unitaire orthoradial eθ se déduit de er par une rotation de + autour
2
de Oz.
G
— Le vecteur unitaire ez complète le trièdre direct.

r (rayon polaire), θ (angle polaire) et z (cote) sont les coordonnées cylindriques


G → G G
de M. Le vecteur position s’écrit r = OM = rer + zez (attention ! r n’est pas ici la norme
du vecteur position).

2.2 Déplacement, volume et surfaces élémentaires


G
Si r varie de dr, le point se déplace de dr selon le vecteur er .
G
Si θ varie de dθ, le point se déplace de r dθ selon le vecteur eθ .
G
Si z varie de dz, le point se déplace de dz selon le vecteur ez .
Remarquons que dθ étant infiniment petit, l’arc de cercle de longueur r dθ se
confond avec un segment rectiligne (ce qu’on ne peut pas représenter sur une figure,
où les déplacements sont nécessairement finis).

Sous l’effet d’une variation infinitésimale dr, dθ, dz de ses coordonnées r, θ, z,


G G G G
le vecteur position varie de dr = dr er + r dθeθ + dzez .

G → 

dr = MM ′ = d OM est le déplacement élémentaire entre un point M et un point
M ′ infiniment proche.

13
14 Partie I.  Boîte à outils

Le parallélépipède représenté sur la figure précédente permet de calculer l’élé-


ment différentiel de volume en coordonnées cylindriques : d3V = r dr dθ dz .

Le volume d’un domaine (D) de l’espace est donc :


V =  d3V =  r d r d θd z .
M ∈( D ) M ∈( D )

On balaie l’espace entier en prenant r ∈ [ 0, +∞[ , θ ∈ [0,2π[ , z ∈ R .


Les différentes surfaces élémentaires se déduisent aussi de la figure.

3. COORDONNÉES SPHÉRIQUES
3.1 Définition

G G G
Soit un repère orthonormé direct cartésien (O, ex , ey , ez ) .
G G G
On définit la base mobile (elle dépend du point M) ( er , eθ , eϕ ), orthonormée et
directe, ainsi que les coordonnées sphériques de M, de la manière suivante :


G G OM → G
— Le vecteur unitaire radial er est er = , avec r = OM = r .
r
G G
— θ ∈ [0, π] est l’angle ( ez , er ). Lorsque θ = 0 , le point M se trouve sur l’axe Oz du
côté des z positifs ; lorsque θ = π , le point M se trouve sur l’axe Oz du côté des z
négatifs.

14
Chapitre 2.  Les systèmes de coordonnées 15

G G G
— Le vecteur unitaire orthoradial eθ est un vecteur du plan vectoriel ( ez , er ) se dédui-
G π
sant de er par une rotation de dans le sens des θ croissants.
2
— Si m est le projeté orthogonal de M sur le plan xOy, l’angle ϕ est l’angle orienté
G →
( ex , Om ) dans le plan xOy : cet angle est positif si un tire-bouchon se déplace dans
G G →
le sens du vecteur ez quand on tourne de ex vers Om .
G
— Le vecteur unitaire eϕ complète le trièdre direct. C’est un vecteur du plan vectoriel
G G G
( ex , ey ) car il est orthogonal à ez .

r (rayon), θ (colatitude) et ϕ (azimut) sont les coordonnées sphériques de M.


G → G
Le vecteur position s’écrit r = OM = rer (r est bien ici la norme du vecteur position).
G G
Pour visualiser les directions de eθ et eϕ , on peut tracer la sphère de centre O
G G
et de rayon r. eθ est alors porté par un méridien et eϕ par un parallèle.
Ces références au repérage d’un point à la surface de la Terre sont précisément
à l’origine du nom colatitude porté par l’angle θ.
G → π
La latitude λ est l’angle ( er , Om ). On a donc θ + λ = , comme on peut le voir
2
sur la figure dans le plan méridien.

3.2 Déplacement, volume et surfaces élémentaires

15
16 Partie I.  Boîte à outils

G
Si r varie de dr, le point se déplace de dr selon le vecteur er .
G
Si θ varie de dθ, le point se déplace de r dθ selon le vecteur eθ .
G
Si ϕ varie de dϕ , le point se déplace de r sin θ dϕ selon le vecteur eϕ .

Sous l’effet d’une variation infinitésimale dr, dθ, dϕ de ses coordonnées r, θ, ϕ,


G G G G
le vecteur position varie de dr = drer + r dθ eθ + r sin θdϕ eϕ .

G → 

dr = MM ′ = d OM est le déplacement élémentaire entre un point M et un point
M ′ infiniment proche.

Le parallélépipède représenté sur la figure ci-dessus permet de calculer l’élé-


ment différentiel de volume en coordonnées sphériques : d3V = r 2 sin θ dr dθ dϕ .

Le volume d’un domaine (D) de l’espace est donc :


V =  d3V =  r 2 sin θdr dθdϕ .
M ∈( D ) M ∈( D )

On balaie l’espace entier en prenant :


r ∈ [0, +∞[ ,θ ∈ [0, π] , ϕ ∈ [0,2π[ . Ainsi l’élément de volume d3V est positif.
On aurait également pu choisir r ∈ [ 0, +∞[ , θ ∈ [ 0,2π[ , ϕ ∈ [ 0, π] , mais il aurait

fallu, pour garder un élément de volume positif, prendre d3V = r 2 sin θ dr dθ dϕ .


Les différentes surfaces élémentaires se déduisent aussi de la figure.

16
17

[BOÎTE À OUTILS 3]

ANALYSE DE FOURIER
1. SÉRIE DE FOURIER
1.1 Théorème pour une fonction f à valeurs réelles

Théorème
f
Toute fonction T-périodique du temps t ֏ f (t ) , à valeurs réelles, peut être dé-
composée en une somme d’un nombre fini, ou infini, de composantes sinusoïdales

discrètes, dont les pulsations sont multiples de la pulsation fondamentale Ω = :
T
+∞ +∞
f ( t ) = c0 +  [an cos(nΩt ) + bn sin(nΩt )] = c0 +  cn cos(nΩt + ψn ) .
n =1 n =1

Puisque cn cos(nΩt + ψn ) = cn cos ψ n cos(nΩt ) −cn sin ψ n sin(nΩt ) , cn est lié à


 
an bn
2 2 2
an et bn par cn = an + bn . On peut prendre cn ≥ 0 (il existe d’autres conventions).

On a alors cn = an 2 + bn 2 .

Calcul des coefficients


T
1
Le coefficient c0 =
T 
f (t )dt = f est égal à la valeur moyenne de la fonction f.
0
Les coefficients an et bn valent :
T T
2 2
an =
T 
f (t )cos(nΩt )dt bn =
T 
f (t )sin(nΩt )dt .
0 0
En conséquence, les coefficients an sont tous nuls si f est impaire et les coeffi-
cients bn sont tous nuls si f est paire.

Convergence
Il existe des conditions pour que la série de Fourier (somme infinie) d’une fonc-
tion converge bien vers cette fonction. Dans le cas des fonctions de classe C 1 par
+∞
morceaux, c0 +  cn cos(nΩt0 + ψn ) converge bien vers f (t0 ) pour toute valeur t0 où
n =1

17
18 Partie I.  Boîte à outils

+∞
f est continue, mais si f est discontinue en t0 , la série c0 +  cn cos(nΩt0 + ψn ) con-
n =1

f (t 0 − ) + f (t 0 + )
verge vers , qui peut être différent de f (t0 ) .
2

Vocabulaire
t ֏ c0 = f est une fonction constante (période infinie ⇔ pulsation ω = 0 ).
t ֏ c1 cos(Ωt + ψ1) est le fondamental de f (même période T que f).
t ֏ cn cos(nΩt + ψ n ) est l’harmonique de rang n de f (période T / n ).

Spectre de f
L’analyse de Fourier permet une représenta-
tion de l’amplitude des harmoniques d’un signal en
fonction de la pulsation, appelée spectre du signal.
Chaque composante sinusoïdale apparaît comme
une ligne verticale, appelée raie. On représente
souvent, comme sur la figure ci-contre, l’amplitude
cn des harmoniques en fonction de la pulsation ω
(qui ne prend que les valeurs discrètes ω = nΩ ,
avec n ∈ N ).

Approximation de f
Pour toute fonction « physique », on a cn → 0 , ce qui permet d’approximer f
n →∞
par une somme finie de fonctions sinusoïdales. Pour les fonctions qui présentent des
discontinuités (créneaux par exemple), donc des variations infiniment rapides, les cn
décroissent lentement avec n puisque ces variations rapides correspondent à de
grandes pulsations.

Exemples de calcul
— Fonction « créneaux »
Prenons f paire et :
f (t ) = F0 pour 0 ≤ t < T / 4

f (T / 4 ) = 0 .

f (t ) = −F0 pour T / 4 < t ≤ T / 2
Il s’agit de créneaux symétriques
(sur une période T, le signal prend pen-
dant T / 2 la valeur « haute » et pendant T / 2 la valeur « basse »), de valeur
moyenne nulle. On a donc : c0 = f = 0 et bn = 0 ∀n car f est paire.

18
Chapitre 3.  Analyse de Fourier 19

Il reste à calculer les coefficients an :


T /2 T /2
2 4
an =
T  f (t )cos(nΩt )dt =
�� ���� � T  f (t )cos( nΩt )dt
−T /2 paire 0

T / 4 T /2 
4 
=  �
T  f ( t )cos( n Ω t )d t + f�(t )cos( nΩt )dt 

 0 F0 T / 4 −F0

4F0   sin(nΩt ) T / 4  sin(nΩt ) T /2  4F   nπ   4F0  nπ 


0
an =   −   = nΩT 2 sin  2   = nπ sin  2  puisque
T
  n Ω  0  n Ω  
T /4       
Ω = 2π / T . Il faut distinguer les cas n pair et impair : pour n = 2 p : a2 p = 0 ; pour
4F0
n = 2 p + 1 : a2 p +1 = ( −1)p .
(2 p + 1)π
Les conditions de convergence étant vérifiées pour toutes les valeurs de t, on a
+∞
4F0 ( −1)p
finalement f (t ) =
π
 2p + 1cos [(2p + 1)Ωt ] .
p =0

4F0  1 1 1 
f (t ) = cos(Ωt ) − 3 cos(3Ωt ) + 5 cos(5Ωt ) − 7 cos(7Ωt ) + ... .
π  

4F0
Le fondamental t ֏ cos( Ωt ) des créneaux possède une amplitude plus
π
grande que celle des créneaux.

On a représenté ci-dessus le signal temporel, les premiers harmoniques non


nuls (rangs 1 : fondamental, 3 et 5), et la somme de ces trois premiers harmoniques.
On constate que la convergence est non uniforme (l’écart entre la somme d’un
nombre fini de sinusoïdes, même très grand, et les créneaux, reste borné inférieure-
ment). Ceci est dû à la présence de la discontinuité dans les créneaux.

19
20 Partie I.  Boîte à outils

Le spectre des créneaux est


donné ci-contre. Les créneaux symé-
triques ne contiennent que des harmo-
niques de rang impair.
L’amplitude des harmoniques
étant proportionnelle à 1/ n , elle dé-
croît « lentement » avec n et il faut
beaucoup d’harmoniques pour bien ap-
proximer les créneaux. C’est une con-
séquence de la discontinuité.

— Fonction « triangles »
Prenons une fonction g impaire
et de valeur moyenne nulle (on a donc
c0 = g = 0 ), correspondant à des
triangles symétriques (la pente, en va-
leur absolue, est la même lorsque le
signal croît que lorsqu’il décroît).
Il est possible d’éviter le calcul
des coefficients an et bn en remar-
quant que la dérivée de g est la fonc-
tion en créneaux paire, symétrique et
de valeur moyenne nulle étudiée pré-
cédemment, dont la série de Fourier
est connue.
+∞
4F0 ( −1)p
On a ainsi g ′(t ) = f (t ) =
π
 2p + 1cos [(2p + 1)Ωt ] à tout instant en prenant
p =0

g ′ (T / 4 ) = 0 . Entre −T / 4 et T / 4 , g (t ) = 4G0t / T , d’où g ′(t ) = 4G0 / T = F0 .

20
Chapitre 3.  Analyse de Fourier 21

On obtient g(t) par intégration :


t +∞
16G0 ( −1)p
g (t ) = g
� 
(0) + f (t )dt =
πΩT  (2p + 1)2 sin [(2p + 1)Ωt ] , avec Ω = 2π / T , soit :
=0 0 p =0
+∞
8G0 ( −1)p
g (t ) =
π2
 (2p + 1)2 sin [(2p + 1)Ωt ] .
p =0

8G0  1 1 1 
g (t ) = 2 
sin(Ωt ) − 2 sin(3Ωt ) + 2 sin(5Ωt ) − 2 sin(7Ωt ) + ... .
π  3 5 7 

8G0
Le fondamental t ֏ f (t ) = sin(Ωt ) des triangles possède une amplitude
π2
plus petite que celle des triangles.

On a de nouveau représenté ci-dessus le signal temporel ; les premiers harmo-


niques non nuls (rangs 1 : fondamental, 3 et 5), et la somme de ces trois premiers
harmoniques. La convergence est cette fois-ci uniforme (l’écart entre les triangles et
la somme d’un nombre fini de sinusoïdes tend vers 0 quand ce nombre augmente).
Le spectre des triangles est
donné ci-contre. Les triangles symé-
triques ne contiennent que des harmo-
niques de rang impair.
L’amplitude des harmoniques
étant proportionnelle à 1/ n 2 , elle dé-
croît « rapidement » avec n et il faut
peu d’harmoniques pour bien approxi-
mer les triangles.

21
22 Partie I.  Boîte à outils

1.2 Théorème de Parseval


Soit une fonction f T-périodique qui peut donc être décomposée en série de
+∞ +∞

Fourier : f (t ) = c0 +  [an cos(nΩt ) + bn sin(nΩt )] =  cn cos(nΩt + ψn ) , avec Ω = T
n =1 n =0
et ψ0 = 0 .
Dans l’expression de f 2 interviennent les produits :
cn cos(nΩt + ψ n ) ⋅ cn′ cos(n′Ωt + ψ n′ )
cn cn′
= cos ( (n + n′)Ωt + ψ n + ψ n′ ) + cos ( (n − n′)Ωt + ψ n − ψ n′ )  .
2 
Leur valeur moyenne est nulle, sauf dans le cas n′ = n où elle vaut c02 si n = 0

cn 2 an 2 + bn 2
et = si n ≠ 0 . On a donc :
2 2

1 +∞ 1 +∞ 2
f 2 = c02 + 
2 n =1
(an 2 + bn 2 ) = c02 +
2 n =1 
cn (théorème de Parseval).

En Physique, la puissance moyenne d’un signal T-périodique est définie, à une


constante multiplicative près, comme la valeur moyenne du signal au carré. C’est par
exemple le cas de la puissance moyenne dans un conducteur ohmique de résistance
R parcouru par un courant d’intensité i(t) : P = R i 2 .

On déduit du théorème de Parseval que la puissance moyenne d’un signal est


égale à la somme des puissances moyennes de ses composantes sinusoïdales.

1.3 Théorème pour les fonctions f à valeurs complexes (complément hors-


programme)
Théorème
Toute fonction T0 -périodique du temps f, à valeurs complexes, peut être décom-
posée en une somme d’un nombre fini, ou infini, de composantes sinusoïdales discrè-
1
tes, dont les fréquences sont multiples de la fréquence fondamentale ν0 = .
T0
+∞
Le développement en série de Fourier s’écrit f (t ) =  Cne2i πnν t .
0

n =−∞
Les coefficients Cn ∈ C de la série de Fourier se calculent à l’aide de la formule
T0
1
 f (t )e
−2i πnν 0t
suivante : Cn = dt . Le spectre de f fait donc intervenir des fréquences
T0
0

négatives, mais pour une fonction f réelle, on a C−n = C ∗n (conjugué de Cn ), d’où :

22
Chapitre 3.  Analyse de Fourier 23

+∞ +∞ +∞
f (t ) = C0 +  C−n e −2i πnν0t +  Cn e 2i πnν0t = C0 +  Cne2i πnν t + (Cne2i πnν t )∗  .
0 0

n =1 n =1 n =1
 +∞ 
On a donc f (t ) = C0 + 2Re  Cn e2i πnν0t  . 
 n =1 
Ainsi, on peut ne considérer que les fréquences positives. Le spectre est alors
par exemple la représentation de 2 Cn = cn pour ν = ν 0 , 2ν 0 , 3ν 0 ,…, nν 0 , et de la
T0
1
valeur moyenne C0 = c0 =
T0  f (t )dt = f correspondant à la fréquence ν = 0 .
0

Autre forme pour les fonctions à valeurs réelles


1 2π
Posons Cn = (an − ibn ) pour n > 0 et Ω = = 2πν0 . On a alors :
2 T0
 +∞  +∞

 n =1

f (t ) = C0 + 2Re  Cn e inΩt  = c0 +


[an cos(nΩt ) + bn sin(nΩt )] .
n =1
T0
1
De Cn =
T0  f (t )[cos(nΩt ) − i sin(nΩt )] dt on tire les coefficients c0 , an et bn :
0
T0 T0 T0
1 2 2
c0 =
T0  f (t )dt = f , an =
T0  f (t )cos(nΩt )dt et bn =
T0  f (t )sin(nΩt )dt . On retrou-
0 0 0
+∞
ve la forme f (t ) = c0 +  cn cos(nΩt + ψn ) , avec cn = an 2 + bn 2 = 2 Cn , vue au 1.1.
n =1

2. TRANSFORMÉE DE FOURIER
2.1 Théorème
Toute fonction du temps f, non périodique, à valeurs complexes, telle que
+∞

 f (t ) dt converge (ce qui implique lim f (t ) = 0 ), est une somme continue de fonc-
t →±∞
−∞
+∞
tions sinusoïdales : f (t ) =  fɶ(ν)e
2i πνt
dν , où fɶ , fonction continue de la fréquence ν,
−∞
+∞
est donnée par fɶ(ν ) =  f (t )e
−2i πνt
dt . La fonction fɶ = TF(f ) est la transformée de Fou-
−∞

rier de f, et f = TF-1(fɶ ) est la transformée de Fourier inverse de fɶ .

Le spectre de f fait donc intervenir des fréquences négatives, mais pour une
fonction f réelle, on a fɶ( −ν ) = fɶ ∗ ( ν ) , d’où :

23
24 Partie I.  Boîte à outils

0 +∞ +∞ +∞
f (t ) =  fɶ(ν )e 2i πνt dν +  fɶ(ν )e 2i πνt dν =  fɶ( −ν )e −2i πνt dν +  fɶ(ν)e
2i πνt
dν , soit :
−∞ 0 0 0


+∞
∗  +∞ 
f (t ) = fɶ(ν )e 2i πνt + fɶ(ν )e2i πνt  dν = 2Re  fɶ(ν )e 2i πνt dν  .
 ( ) 
0
   0 
On peut donc ne considérer que les fréquences positives. Le spectre est alors
par exemple la représentation de 2 fɶ(ν ) pour ν ≥ 0 .

2.2 Démonstration (complément hors-programme)


On peut appliquer le théorème de Fourier à la fonction fT0 , « périodisée de f »,
T0 -périodique, qui s’identifie à f sur l’intervalle [ −T0 / 2,T0 / 2] . Si ν0 = 1/ T0 , on a :
+∞ T0 /2
1 1 ɶ
fT0 (t ) =  Cn e2i πnν0t , avec Cn =
T0  fT0 (t )e −2i πnν0t dt =
déf T0
fT0 (nν0 ) .
n =−∞ −T0 /2

Comme ∆ν = (n + 1)ν0 − nν0 = ν0 = 1/ T0 est l’écart entre deux fréquences con-


+∞
sécutives dans le spectre de fT0 (t ) , on peut écrire fT0 (t ) =  fɶT (nν0 )e2i πnν t ∆ν .
0
0

n =−∞
+∞
Si T0 → +∞ , fT0 (t ) → f (t ) , fɶT0 (nν0 ) → fɶ(nν0 ) =  f (t )e
−2i πnν0t
dt et ∆ν → dν .
−∞
+∞ +∞
Ainsi  fɶT (nν0 )e2i πnν t ∆ν →  fɶ(ν)e2i πνt dν
0
0
puisque, pour n ∈ Z , ν = nν0 varie
n =−∞ −∞
continûment entre −∞ et +∞ lorsque ν 0 = ∆ν devient infiniment petit.
+∞ +∞
On a bien f (t ) =  fɶ(ν )e2i πνt dν , avec fɶ(ν ) =  f (t )e
−2i πνt
dt .
−∞ −∞

2.3 Propriétés
— La TF est linéaire : TF(λf + µg ) = λTF(f ) + µTF(g ) .
— TF [ TF(f )] (t ) = f ( −t ) .

— Translation : TF [t ֏ f (t − t0 )] (ν ) = e −2i πνt0 ⋅ fɶ(ν ) .

24
Chapitre 3.  Analyse de Fourier 25

— TF [t ֏ f ′(t )] (ν) = 2i πν ⋅ fɶ(ν) . En effet, en intégrant par parties :


+∞ +∞
+∞
TF [t ֏ f ′(t )] (ν ) = f ′(t )e −2i πνt dt = f (t )e −2i πνt  + 2i πν f (t )e −2i πνt dt = 2i πν ⋅ fɶ(ν ) .

������  −∞

−∞ −∞
0

dfɶ
+∞

dν 
= −2i π t ⋅ f (t )e −2i πνt dt = −2i π ⋅ TF [t ֏ t ⋅ f (t )] (ν ) .
−∞

— Similitude : pour λ ∈ R + , TF t ֏ f ( t / λ )  (ν ) = λ ⋅ fɶ(λν ) . Démontrons cela :


+∞

 f (t / λ ) e
−2i πνt
TF t ֏ f ( t / λ )  (ν ) = dt . Après le changement de variables t ′ = t / λ :
−∞
+∞
TF t ֏ f ( t / λ )  (ν ) =  f (t ′)e
−2i πνλt ′
λdt ′ = λ ⋅ fɶ(λν ) .
−∞
Cette propriété est fondamentale : une dilatation de l’échelle des temps ( λ > 1)
implique une contraction de celle des fréquences. Une contraction de l’échelle des
temps ( λ < 1 ) implique une dilatation de celle des fréquences. En d’autres termes :

Plus un signal temporel est bref, plus il est riche en fréquences (spectre étalé) ; plus il
dure longtemps, moins il contient de fréquences (spectre étroit).

On a représenté ci-après le cas λ = 2 . Si on caractérise le signal t ֏ f (t ) par


une durée ∆ t , le signal t ֏ f (T / 2) est caractérisé par une durée 2∆t .

2.4 Théorème de Parseval-Plancherel (hors-programme) et conséquences


Le théorème de Parseval-Plancherel (admis) traduit que l’énergie d’un signal
est égale à la somme des énergies de ses composantes sinusoïdales :
+∞ +∞
2
fɶ(ν ) dν .
2
E=  f (t ) dt = 
−∞ −∞

25
26 Partie I.  Boîte à outils

2
f (t )
2
fɶ(ν )
On peut donc considérer que et sont des densités de probabilité :
E E
2
f (t )
dt est la probabilité que le signal soit détecté entre t et t + dt , et on a bien sûr
E
2
+∞
f (t )
2
fɶ( ν )
 E
dt = 1 . De même
E
dν est la probabilité que la fréquence du signal se
−∞
2
+∞ fɶ(ν )
trouve entre ν et ν + dν , et on a  E
dν = 1 .
−∞
Par la suite, on posera E = 1 pour alléger les notations.
+∞
2
L’instant moyen de détection est t = t0 =  t f (t ) dt , et la fréquence moyen-
−∞
+∞
2
ne du signal est ν = ν0 =  ν fɶ(ν) dν .
−∞

On peut ainsi définir sans ambiguïté la durée ∆ t du signal et sa largeur


fréquentielle ∆ν comme les écarts-types temporels et spectraux :
+∞ +∞
2
fɶ(ν ) dν − ν02 .
2
( ∆t )2 = t 2 − t02 =  t 2 f (t ) dt − t02 , et ( ∆ν )2 = ν2 − ν02 = ν
2

−∞ −∞
On peut supposer t0 = 0 et ν0 = 0 sans nuire à la généralité du propos car
l’écart-type est conservé si on décale l’origine des temps ou des fréquences :

+∞ +∞
2
fɶ(ν ) dν .
2
On a alors ( ∆t )2 =  t 2 f (t ) dt et ( ∆ν )2 = ν
2

−∞ −∞
Cherchons maintenant à trouver une relation entre ∆ t et ∆ν .
 df 
Comme on l’a montré au 2.3, TF t ֏  (ν ) = 2i πν ⋅ fɶ(ν ) donc la relation de
 dt 
Parseval-Plancherel nous assure que :
+∞ 2 +∞ +∞
df 2 2
 dt =  2i πν ⋅ fɶ(ν ) dν = 4π2 ν
2
fɶ(ν ) dν = 4π2 ( ∆ν )2 .
dt
−∞ −∞ −∞
+∞ 2
df
Considérons la fonction λ ֏ Γ(λ ) =  t ⋅ f (t ) + λ
dt
dt de la variable réelle λ.
−∞

26
Chapitre 3.  Analyse de Fourier 27

2 ∗ 2 2
df  df   df  2 d f (t ) df
Comme t ⋅ f (t ) + λ =  t ⋅ f (t ) + λ   t ⋅ f (t ) + λ  = t 2 f (t ) + λ t + λ2 ,
dt  d t  d t  d t dt
+∞ +∞ 2 +∞ 2
2 d f (t ) df
on a Γ(λ ) =  t 2 f ( t ) dt + λ  t
dt
dt + λ 2  dt
dt .
��
−∞ ����
� −∞ �����
−∞
( ∆t )2 4 π2 ( ∆ν )2
L’intégrale du milieu se calcule par parties :
+∞ 2 +∞
d f (t ) +∞
dt = t ⋅ f (t )  − f (t ) dt , car la fonction t ֏ t ⋅ f (t ) doit s’annuler en
2 2
 
2
t
dt �� ����  � −∞
−∞
−∞
0
�����
1
+∞
2
±∞ pour que  f (t ) dt existe.
−∞
Finalement Γ( λ ) = ( ∆t )2 − λ + 4 π2 ( ∆ν )2 λ 2 est un polynôme du second degré, or
Γ(λ ) ≥ 0 ∀t car l’intégrande qui intervient dans la définition de la fonction Γ est
positive.
Le discriminant du polynôme doit être négatif : 1 − 16π2 ( ∆t )2 ( ∆ν )2 ≤ 0 . Les
1
écarts-type sont liés par l’inégalité 16π2 ( ∆t )2 ( ∆ν )2 ≥ 1 soit ∆t ⋅ ∆ν ≥ .

1
La relation ∆t ⋅ ∆ν ≥ est fondamentale en Physique.

On peut aussi utiliser la pulsation ω = 2πν pour caractériser le spectre d’une
+∞
1
fonction f. On a alors f (t ) =  fɶ(ω)e
i ωt
dω . La fonction ω → fɶ(ω) n’est pas la
2π −∞
1
même que la précédente où la variable était la fréquence ν. Le choix du facteur

pour définir cette transformée de Fourier inverse permet d’obtenir une forme
+∞
1
« symétrique » pour la transformée de Fourier directe : fɶ(ω) =  f (t )e
−i ωt
dt .
2π −∞

1
La relation entre les écarts-types s’écrit aussi ∆t ⋅ ∆ω ≥
.
2
On a raisonné sur un signal temporel, mais les résultats sont bien sûr valables
pour une fonction ψ d’une coordonnée d’espace x. Dans ce cas, la transformée de
+∞
1
Fourier inverse s’écrit ψ( x ) =
2π  ψɶ (k )e ikx dk , et la transformée de Fourier directe
p =−∞
+∞
1 2π 2π
ɶ (k ) =
ψ
2π  ψ( x )e −ikx dx , où k =
λ
est le nombre d’onde, analogue de ω =
T
,
p =−∞
avec λ la longueur d’onde (période spatiale) et T la période temporelle.

27
28 Partie I.  Boîte à outils

1
La relation entre les écarts-types s’écrit alors ∆x ⋅ ∆k ≥
.
2
On peut se demander s’il existe des fonctions pour lesquelles on atteint l’égalité
1
∆t ⋅ ∆ω = . Dans ce cas, Γ(λ ) = 0 admet une racine double λ0 = 2( ∆t )2 . Pour cette
2
+∞ 2
df df
valeur, on a Γ(λ0 ) =  t ⋅ f (t ) + λ 0
dt
dt = 0 , ce qui entraîne t ⋅ f (t ) + λ0
dt
= 0 , équa-
−∞
t2 t2
− −
2λ 0 4( ∆t )2
tion différentielle qui s’intègre en f (t ) = Ae = Ae . C’est une fonction
gaussienne, et ∆ t est bien l’écart-type temporel pour une densité de probabilité égale
t2

2
à f ( t ) = A 2e 2( ∆t )2
.
Dans le cas où la valeur moyenne t = t0 n’est pas nulle, on aurait :
( t − t0 )2 t2 t ⋅t 0
− −
2 2 2( ∆t )2 2 2( ∆t )2 ( ∆t )2
f (t ) = A e =B e e . En conclusion, pour les fonctions gaussiennes
2
du type t ֏ Be−αt eβt , avec α et β réels, la relation entre ∆ t et ∆ν n’est plus une
inégalité, mais une égalité : ∆t ⋅ ∆ν = 1/ 4π .

2.5 Exemples
Fonction « fenêtre »

τ /2 τ /2
 e −2i πνt  e i πντ − e −i πντ
fɶ(ν ) =  e −2i πνt dt =   =τ = τ ⋅ sinc( πντ) .
−τ /2  −2i πν  −τ /2 2i πντ

La fonction sinc est la fonction sinus cardinal, définie par sinc( X ) = sin X / X
pour X ≠ 0 et sinc(0) = 1 (elle est continue en X = 0 ). fɶ(ν ) est ici à valeurs réelles.

2
Le calcul des écarts-types ∆ t et ∆ν pour des densités de probabilité t → f (t )
2 1
et ν ֏ fɶ(ν ) définies au 2.4 donne ∆ t = τ / 12 et ∆ν → +∞ . L’inégalité ∆t ⋅ ∆ν ≥

est bien vérifiée.
Avec les définitions de la durée δt = τ du signal et de la largeur de bande spec-
trale δν données sur la figure ci-dessus, on a δt ⋅ δν = 2 . On retrouve dans tous les
cas que plus le signal dure longtemps, plus sa bande spectrale est petite.

28
Chapitre 3.  Analyse de Fourier 29

Fonction « gaussienne »
t2

C’est la fonction t ֏ f (t ) = e 4 τ2 . Elle obéit à l’équation différentielle :
df t 1 dfɶ
+ 2 f (t ) = 0 , dont la T.F donne 2i πνfɶ(ν) − = 0 en utilisant les propriétés
dt 2τ 4i πτ2 dν
dfɶ
+ 8π2 τ2ν ⋅ fɶ(ν ) = 0 . On obtient fɶ(ν) = fɶ(ν = 0) ⋅ e−4π τ ν .
2 2 2
vues au 2.3, soit

+∞ +∞ t2 +∞

Par définition, fɶ(ν = 0) =   e
4 τ2 d t −βu 2
f (t )dt = e , or le calcul de du donne
−∞ −∞ −∞

π
, donc fɶ(ν = 0) = 2τ π . Finalement fɶ(ν) = 2τ π ⋅ e−4π τ ν est ici à valeurs réelles.
2 2 2

β
La transformée de Fourier d’une gaussienne est également une gaussienne.

2
Le calcul des écarts-types ∆ t et ∆ν pour des densités de probabilité t → f (t )
2 1
et ν ֏ fɶ(ν ) définies au 2.4 donne ∆t = τ et ∆ν = . Pour une fonction f gaus-
4πτ
1
sienne, on a l’égalité ∆t ⋅ ∆ν = .

Le calcul des largeurs à mi-hauteur des deux gaussiennes donne δt = 4 τ ln 2
ln 2 4ln2
et δν = d’où δt ⋅ δν = ≃ 1. On retrouve que plus le signal dure longtemps,
πτ π
plus sa bande spectrale est petite.

2.6 Distribution de Dirac δ


Définition
On obtient une telle distribution en prenant la limite des fonctions fε , définies
sur le graphe ci-après, lorsque ε → 0 . On note δ = lim fε .
ε→ 0

0 pour t ≠ 0
δ correspond à une impulsion idéale : δ(t ) =  .
+∞ pour t = 0

29
30 Partie I.  Boîte à outils

+∞
1
Comme  fε (t )dt = ε ⋅ ε = 1 (l’aire sous la courbe des fonctions fε est la même
−∞
+∞
quel que soit ε), cette propriété reste vraie pour la distribution :  δ(t )dt = 1.
−∞
La distribution de Dirac n’est pas une fonction, car pour une fonction f nulle
+∞ +∞
partout, sauf en t = 0 , on aurait  f (t )dt = 0 , alors que  δ(t )dt = 1.
−∞ −∞

Propriétés
+∞ +∞
— Si f est une fonction régulière quelconque,  f (t )δ(t )dt = f (0)  δ(t )dt = f (0) . En ef-
−∞ −∞
fet, puisque δ(t ≠ 0) = 0 , l’intégrale est la même que pour une fonction constante égale
à f (0) .
+∞
—  f (t )δ(t − t0 )dt = f (t0 ) .
−∞
— La transformée de Fourier de la distribution de Dirac est :
+∞
ν ֏ δɶ (ν) =  δ(t )e
−2i πνt
dt = 1 . On retrouve qu’un signal de durée nulle possède une
−∞
largeur spectrale infinie.
+∞ +∞
— e2i πν0t =  δ(ν − ν0 )e2i πνt dν . Comme f (t ) =  fɶ(ν)e
2i πνt
dν , on en déduit que la
−∞ −∞

transformée de Fourier de t ֏ f (t ) = e 2i πν0t vaut ν ֏ fɶ( ν ) = δ( ν − ν0 ) . On retrouve que


le spectre d’un signal sinusoïdal (de durée infinie) ne contient qu’une raie pour sa fré-
quence ν 0 . Sa largeur spectrale est nulle.

Ainsi, pour qu’un instrument de musique produise un son le plus sinusoïdal pos-
sible, il faut qu’il vibre longtemps. C’est ce que réalise approximativement un diapason.

30
Chapitre 3.  Analyse de Fourier 31

Néanmoins, la durée d’un signal réel étant forcément finie, sa largeur spectrale
peut être faible, mais jamais nulle.
Un signal rigoureusement sinusoïdal n’a donc pas de réalité physique.

— Lorsqu’une fonction est T0 -périodique, elle admet un développement en série de


+∞ T0
1 1
Fourier : f (t ) =  Cn e 2i πnν0t , avec ν0 =
T0
et Cn =
T0  f (t )e
−2i πnν 0t
dt .
n =−∞ 0
2i πnν0t
Comme la transformée de Fourier de t ֏ e est ν ֏ δ( ν − nν0 ) , celle de f
+∞
est ν ֏ fɶ(ν ) =  Cn δ(ν − nν0 ) . On retrouve que le spectre d’une fonction périodique
n =−∞
est discontinu : c’est un spectre de raies qui ne contient que les fréquences multiples
de ν0 = 1/ T0 .
L’amplitude des raies est infinie et proportionnelle aux coefficients Cn .
Le spectre est par convention la représentation de 2 Cn pour les fréquences
T0
1
ν = ν 0 , 2ν 0 , 3ν 0 ,…, nν 0 , et de C0 =
T0  f (t )dt = f pour ν = 0 .
0

2.7 Réponse d’un système linéaire à une entrée quelconque 


La représentation usuelle d’une grandeur physique est la représentation tem-
porelle. Comme les systèmes linéaires possèdent la propriété de donner à une exci-
tation sinusoïdale une réponse forcée sinusoïdale de même fréquence, on voit tout
l’intérêt de la décomposition d’un signal quelconque en une somme de sinusoïdes de
fréquences différentes (représentation fréquentielle). On peut, grâce à cette représen-
tation fréquentielle, déterminer la réponse d’un système linéaire à une excitation quel-
conque.
+∞

 fɶ(ν)e
2i πνt
Soit t ֏ R(t ) la réponse à une entrée t ֏ f (t ) = dν .
−∞

La réponse à une entrée sinusoïdale t ֏ e 2i πνt est sinusoïdale et de même fré-


quence : elle s’écrit t ֏ H ( ν )e 2i πνt , où ν ֏ H (ν) est la fonction de transfert du sys-
tème linéaire, plus souvent notée ω ֏ H ( j ω) , avec ω = 2πν .
La linéarité du système implique que la réponse à une somme d’entrées est
+∞

 H(ν)fɶ(ν)e
2i πνt
égale à la somme des réponses : on a R(t ) = dν .
−∞
Étudions maintenant la réponse à une impulsion. On a dans ce cas :

31
32 Partie I.  Boîte à outils

+∞ +∞
f (t ) = δ(t ) =  δɶ (ν )e2i πνt dν . Comme δɶ (ν) = 1, on a R(t ) =  H(ν)e
2i πνt
dν . Ainsi :
−∞ −∞

H (ν) = Rɶ (ν) = TF [t ֏ R(t )] (ν) . La fonction de transfert d’un système linéaire est égale
à la transformée de Fourier de la réponse impulsionnelle.

On peut expérimentalement obtenir la fonction de transfert d’un circuit linéaire


à l’aide d’un générateur d’impulsions et d’un analyseur de spectre.
Exciter à l’aide d’une impulsion revient à envoyer des signaux sinusoïdaux de
même amplitude pour toutes les fréquences. Cette méthode peut être utilisée dans le
domaine de l’acoustique en réalisant l’analyse spectrale de la réponse d’une salle à
une impulsion sonore (coup de feu à blanc).

32
33

[BOÎTE À OUTILS 4]

CHAMPS ET OPÉRATEURS
DIFFÉRENTIELS
1. DÉFINITIONS ET OPÉRATIONS DE BASE
1.1 Définitions
V
Un champ de scalaire R 4 → R (par exemple un champ de température) est une
fonction du point M et de l’instant t :

(M, t ) ֏ V (M, t ) , soit, en coordonnées cartésiennes : ( x, y , z, t ) ֏ V ( x, y , z, t ) .



A
Un champ de vecteur R → R3 (par exemple un champ de force) est une fonc-
4

tion du point M et de l’instant t :


� �
(M, t ) ֏ A(M, t ) , soit, en coordonnées cartésiennes : ( x, y , z, t ) ֏ A( x, y , z, t ) .

Ces champs peuvent n’être définis que dans un domaine restreint de l’espace.
Un champ est uniforme s’il est indépendant du point M. En coordonnées carté-
� � �
∂V ∂V ∂V ∂A ∂A ∂A �
siennes, on a pour un champ uniforme : = = = 0 , ou = = = 0,
∂x ∂y ∂z ∂x ∂y ∂z
 ∂Ax   ∂Ax   ∂Ax 
 ∂x   ∂y   ∂z 
�   �   �  
∂A  ∂Ay  ∂A  ∂Ay  ∂A  ∂Ay 
avec =  , ∂y =  ∂y  et ∂z =  ∂z  . On peut représenter en quelques
∂x  ∂x  
   
 ∂Az   ∂Az   ∂Az 
 ∂x     ∂z 
   ∂y   
points un champ vectoriel uniforme à deux instants différents :

Un champ est stationnaire (ou permanent) s’il garde la même valeur en un point

∂V ∂A �
M donné au cours du temps : = 0 , ou = 0 , avec en coordonnées cartésiennes :
∂t ∂t

33
34 Partie I.  Boîte à outils

G
∂A ∂Ax G ∂Ay G ∂A G
= ex + ey + z ez . On peut représenter en quelques points un champ
∂t ∂t ∂t ∂t
vectoriel stationnaire à deux instants différents :

1.2 Lignes, tubes et cartes de champ pour un champ de vecteur


À un instant t fixé, une ligne de champ relie les points M tels que le champ
G
A(M, t ) soit tangent à la ligne. On l’oriente dans le sens du champ.

→
Un déplacement élémentaire d OM le long d’une ligne de champ est donc co-
G → G
 G
linéaire au point M à A(M, t ) , soit d OM ∧ A(M, t ) = 0 , ce qui fournit un système d’équa-
tions différentielles permettant de trouver l’équation d’une ligne de champ. Par
G G
exemple pour un champ Ax ( x, y , t )ex + Ay ( x, y , t )ey en coordonnées cartésiennes :

 dx   Ax ( x, y , t )   0 
     
 dy  ∧  Ay ( x, y , t )  =  0  ⇔ Ay ( x, y , t )dx − Ax ( x, y , t )dy = 0 .
     
0  0  0

Un ensemble de lignes de champ passant par un réseau de points donnés cons-


titue une carte de champ.

L’ensemble des lignes de champ qui s’appuient sur un contour fermé γ constitue
un tube de champ (c’est donc une surface).

34
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 35

1.3 Opérations de base sur les vecteurs


G G
Considérons deux vecteurs A et B non colinéaires. On peut choisir deux orien-
G
tations différentes pour un vecteur N normal au plan vectoriel engendré par ces deux
G G
vecteurs. Lorsqu’on a choisi l’une des deux orientations, l’angle θ = ( A, B ) est alors
orienté selon la règle du tire-bouchon : θ > 0 si un tire-bouchon se déplace dans le
G G G
sens du vecteur N quand on tourne de A vers B ; θ < 0 si un tire-bouchon se dé-
G G G
place dans le sens du vecteur −N quand on tourne de A vers B .

G G G
— Produit scalaire dans une base orthonormée (e1, e2 , e3 ) :
G G G G G G
V = A ⋅ B = A B cos( A, B ) = A1B1 + A2B2 + A3B3 .

G G G G
— Produit vectoriel dans une base orthonormée directe (e1, e2 , e3 ) : e3 est orienté
G G
dans le sens de déplacement d’un tire-bouchon quand on tourne de e1 vers e2 .
 A   B   A B − A3B2 
G G G  1  1  2 3 
C = A ∧ B =  A2  ∧  B2  =  A3B1 − A1B3  .
     
 A3   B3   A1B2 − A2B1 
G G G G G G
C est orthogonal à A et à B , et tel que ( A , B , C ) soit direct. En norme :
G G G G G G G
C = A ⋅ B ⋅ sin( A, B ) = A ⋅ B ⋅ sin θ .

G G G
Le signe de la projection C de C sur N dépend de l’orientation choisie pour N
comme on le voit sur la figure ci-dessus.
G G G
L’aire S du parallélogramme formé par A et B vaut S = A ⋅ h (base × hau-
G G
teur). On a donc aussi S = A ⋅ B ⋅ sin θ :

35
36 Partie I.  Boîte à outils

G G
La norme du produit vectoriel A ∧ B est égale à l’aire du parallélogramme formé
G G
par A et B .

G G G G G
— Double produit vectoriel : A ∧ (B ∧ C ) est orthogonal à B ∧ C . Il est donc dans le
G G G G G G G
plan vectoriel généré par B et C , soit A ∧ (B ∧ C ) = βB + γC . On retient alors facile-
G G G G G G G G G
ment la formule A ∧ (B ∧ C ) = B ( A ⋅ C ) − C ( A ⋅ B ) .
G G G G G G
— Un produit mixte  A, B,C  = ( A ∧ B ) ⋅ C est invariant par permutation circulaire :
déf

G G G G G G G G G G G G
 A, B,C  = ( A ∧ B ) ⋅ C = (C ∧ A) ⋅ B = (B ∧ C ) ⋅ A .
 

1.4 Circulation d’un champ de vecteur


On définit la circulation d’un champ de vecteur à un instant t si
G
le champ n’est pas stationnaire. On omettra le temps t dans A(M, t )
pour ne pas alourdir les notations. Considérons un déplacement élé-
→
mentaire d OM à partir du point M.
G
Par définition, la circulation élémentaire du champ de vecteur A(M ) le long de
G →
ce déplacement élémentaire est le produit scalaire δC = A(M ) ⋅ d OM .

Attention ! Ce n’est pas a priori une différentielle, c’est-à-dire la variation élé-



→ →
mentaire d’une fonction du point f : δC ≠ df = f (M ′) − f (M ) , avec MM ′ = d OM .
G
Par exemple, le travail élémentaire d’une force F (M ) s’exerçant sur un point
→ G →
matériel qui se déplace de d OM est une circulation : δW = F (M ) ⋅ d OM .

La circulation d’un champ de vecteur le long d’un contour orienté γ allant de


M1 à M 2 est la somme des circulations élémentaires sur ce chemin, et dépend a priori
M2
G →
 A(M ) ⋅ d OM .
γ
du chemin γ choisi pour aller de M1 à M 2 : C M1 →M 2
=
M1

γ γ
On a en conséquence C M1 →M2
= −C M 2 →M1
.

36
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 37

G 

Si γ est fermé, on note C γ = v A(M ) ⋅ d OM la circulation, a priori ≠ 0 .
γ

1.5 Flux d’un champ de vecteur


On définit le flux d’un champ de vecteur à un instant t si le champ n’est pas
G
stationnaire. On omettra de nouveau le temps t dans A(M, t ) pour alléger les nota-
tions.
Considérons une surface élémentaire d2 S autour
d’un point M. Cette surface est limitée par un contour élémen-
taire fermé γ dont l’orientation détermine, grâce à la règle du
G
tire-bouchon, celle du vecteur surface d2 S (de norme d2 S
et orthogonal à l’élément de surface).
G
Le flux élémentaire du champ A(M ) à travers d2 S est égal au produit scalaire
G G G
d2Φ = A(M ) ⋅ d2 S . Son signe dépend de l’orientation de d2 S .

Le flux Φ S d’un champ de vecteur à travers une surface finie S est défini de
la façon suivante :

— Si la surface s’appuie sur un contour fermé γ orienté :


G G
ΦS = 
A(M ) ⋅ d2 S .
S (γ)
Ce flux dépend a priori de la surface
S choisie s’appuyant sur γ.
Comme le montre la figure ci-contre,
les vecteurs surface élémentaires sont
orientés grâce à la règle du tire-bouchon
dès que le contour γ l’est.

— Si la surface S est fermée, tous les vecteurs


surface élémentaires sont orientés par conven-
tion de l’intérieur vers l’extérieur. Le flux du
G
champ A(M ) est alors noté ainsi :
G G
ΦS = 
wA(M ) ⋅ d2 S .
S

37
38 Partie I.  Boîte à outils

2. LES OPÉRATEURS DIFFÉRENTIELS LINÉAIRES


2.1 Gradient
Définition dans un système de coordonnées cartésiennes
→
L’opérateur gradient, noté grad , est un opérateur linéaire qui s’applique à un
→
champ de scalaire V(M) et le transforme en champ de vecteur : gradV ∈ R3 .

 ∂V 
 
 ∂x 
→
 ∂V  G G G
gradV = 
∂y  sur la base de coordonnées cartésiennes (ex , ey , ez ) .
 
 ∂V 
 
 ∂z 
G
Remarque : on introduit parfois l’opérateur « nabla », noté ∇ , dont l’expression
 ∂ 
 
 ∂x 
G  ∂  → G
en coordonnées cartésiennes est ∇ =   , si bien que gradV = ∇V .
∂y
 
 ∂ 
 
 ∂z 
Définition intrinsèque
Lorsqu’on passe du point M(x,y,z) au point M ′( x + dx, y + dy , z + dz ) infiniment
∂V ∂V ∂V → →
proche, la fonction V varie de dV = dx + dy + dz = gradV ⋅ d OM .
∂x ∂y ∂z
Cette relation fournit la définition intrinsèque (indépendante du système de coor-
→
données choisi) de l’opérateur grad :

→
Lors d’un déplacement élémentaire d OM au voisinage d’un point M, V varie de dV,

→ →
avec dV = (gradV )(M ) ⋅ d OM .

Expression dans un système de coordonnées cylindriques


→ G G G
Puisque d OM = dr er + r dθeθ + dzez , on a :
∂V ∂V ∂V ∂V 1 ∂V ∂V → 

dV = dr + dθ + dz = dr + rdθ + dz = gradV ⋅ d OM .
∂r ∂θ ∂z ∂r r ∂θ ∂z

38
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 39

 ∂V 
 ∂r 
 
1 ∂V  sur la base (eG , eG , eG ) .
→
gradV = 
 r ∂θ  r θ z
 
 ∂V 
 ∂z 
 
Expression dans un système de coordonnées sphériques
→ G G G
Puisque d OM = drer + r dθ eθ + r sin θdϕ eϕ , on a :

∂V ∂V ∂V ∂V 1 ∂V 1 ∂V → →
dV = dr + dθ + dϕ = dr + rdθ + r sin θdϕ = gradV ⋅ d OM .
∂r ∂θ ∂ϕ ∂r r ∂θ r sin θ ∂ϕ
 ∂V 
 
 ∂ r 
→
 1 ∂V  G G G
gradV =   sur la base (er , eθ , eϕ ) .
r ∂θ
 
 1 ∂V 
 r sin θ ∂ϕ 
 

Interprétation physique de l’opérateur gradient




gradV calculé au point M « mesure » les variations spatiales locales de V :


→ →
plus V varie fortement au voisinage de M, plus gradV est grand. Le vecteur gradV

indique la direction et le sens de la plus grande variation locale de V.

2.2 Rotationnel
Définition dans un système de coordonnées cartésiennes
→
L’opérateur rotationnel, noté rot , est un opérateur linéaire qui s’applique à un
G → G
champ de vecteur A(M ) et le transforme en champ de vecteur : rot A ∈ R 3 .

 ∂   A   ∂Az − ∂Ay 
   x   ∂y 
∂z 
 ∂x    
→ G  ∂A ∂A  G G G
 ∂ 
rot A =   ∧  Ay  =  x − z  sur la base (ex , ey , ez ) .
∂y   ∂z ∂x 
    
   
∂  ∂A y ∂A 
   Az   − x 
 ∂z   ∂x ∂y 

→ G G G
Remarque : rot A = ∇ ∧ A .

39
40 Partie I.  Boîte à outils

Définition intrinsèque
→ G
Pour donner une définition intrinsèque de rot A , on calcule la circulation élé-
G
mentaire δ2C de A le long d’un contour fermé. Ce contour étant élémentaire, peu im-
porte sa forme : on choisit un rectangle de côtés dx et dy.

G → G → G → G →


δ2C = A(M ) ⋅ MM1+ A(M1) ⋅ M1M2 + A(M2 ) ⋅ M2M3 + A(M3 ) ⋅ M3M . Or :
G → G → → G
A(M ) ⋅ MM1 = A(M1) ⋅ MM1 , puisque MM1 = dxex est déjà d’ordre 1 en dx, et de même
G → G →
A(M1) ⋅ M1M2 = A(M2 ) ⋅ M1M2 . On a donc :
G G G G G G
δ2C =  A(M1) − A(M2 ) ⋅ dxex +  A(M2 ) − A(M3 ) ⋅ dyey .

 ∂A   ∂Ay   ∂Ay ∂Ax 


δ2C =  − x dy  dx +  dx  dy =  −  dxdy , terme d’ordre 2.
 ∂y   ∂x   ∂x ∂y 
 → G  G  → G G → G G
Finalement δ2C =  rot A  ⋅ ez  dxdy = rot A ⋅ dxdyez = rot A ⋅ d2 S .
 
  
→
Cette relation fournit la définition intrinsèque de l’opérateur rot :
G
On considère un contour élémentaire orienté γ au voisinage d’un point M, et d2 S le
vecteur surface élémentaire d’une surface quelconque s’appuyant sur γ . La circulation
G → G G
du champ vectoriel A sur ce contour est δ2C = ( rot A)(M ) ⋅ d2 S .

Théorème de Stokes
On obtient la forme intégrale de cette relation, appelée théorème de Stokes, en
découpant en surfaces élémentaires une surface quelconque S s’appuyant sur un
contour fermé γ. On considère deux de ces surfaces élémentaires voisines (elles pos-
sèdent un bout de contour commun) autour de M1 et M 2 :

40
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 41

Les contours élémentaires sur lesquels elles s’appuient sont orientés dans le
même sens que γ, si bien que la circulation sur le segment commun est comptée avec
des signes opposés dans le calcul des circulations élémentaires δ2C 1 et δ2C 2 .
La circulation δ2C sur le contour qui entoure les deux surfaces élémentaires
 → G G → G G
vaut donc δ2C = δ2C 1 + δ2C 2 = ( rot A)(M1) ⋅ d2 S 1 + ( rot A)(M2 ) ⋅ d2 S 2 .
En sommant les circulations sur tous les contours élémentaires, on obtient :

G 
→ → G G
v A ⋅ d OM =  rot A ⋅ d2 S . C’est le théorème de Stokes.
γ S (γ)
G → G
La circulation du champ A sur un contour fermé γ est égale au flux de rot A
sur une surface quelconque S ( γ ) s’appuyant sur γ.

Grâce à la définition intrinsèque de l’opérateur rotationnel, on trouve, après cal-


→ G
culs, les expressions de rot A dans d’autres systèmes de coordonnées.

Expression dans un système de coordonnées cylindriques


 1 ∂Az ∂Aθ 
 − 
 r ∂θ ∂z 
→ G  ∂A ∂ A  G G G
rot A =  r − z  sur la base (er , eθ , ez ) .
 ∂z ∂r 
1 ∂ ∂Ar 
 r  ∂r [ rAθ ] − ∂θ 
  

41
42 Partie I.  Boîte à outils

Expression dans un système de coordonnées sphériques


 1 ∂ ∂Aθ  

sin  ∂θ  Aϕ sin θ  − ∂ϕ  
 r θ  
→ G  1 ∂Ar 1 ∂  G G G
rot A =  − rAϕ   sur la base (er , eθ , eϕ ) .
 
 r sin θ ∂ϕ ∂
r r 
1 ∂ ∂Ar  
  [ rAθ ] − 
 r  ∂r ∂θ  
Interprétation physique de l’opérateur rotationnel
→ G G → G
De δ2C = rot A ⋅ d2 S on déduit que rot A permet de quantifier le caractère
tourbillonnaire d’un champ vectoriel au voisinage d’un point M.
→ G G
Prenons l’exemple d’un champ localement radial : δ2C = 0  rot A = 0 , alors
→ G G
que pour un champ orthoradial, rot A ≠ 0 .

2.3 Divergence
Définition dans un système de coordonnées cartésiennes
L’opérateur divergence, noté div, est un opérateur linéaire qui s’applique à un
G G
champ de vecteur A(M ) et le transforme en un champ de scalaire : divA ∈ R .

 ∂  A 
   x
 ∂x 
G  ∂    ∂A ∂Ay ∂Az
divA =   ⋅  Ay  = x + + .
∂y   ∂x ∂y ∂z
   
 ∂   
   Az 
 ∂z 
G G G
Remarque : divA = ∇ ⋅ A .

42
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 43

Définition intrinsèque
G G
Pour donner une définition intrinsèque de divA , on calcule le flux d3Φ de A à
travers une surface fermée élémentaire entourant un volume d3V . Ce volume étant
élémentaire, peu importe sa forme : on choisit un parallélépipède de côtés dx, dy et
dz. On a donc d3V = dxdydz .

G G
Considérons les flux A(Mz + dz ) ⋅ dxdyez à travers la surface supérieure (qui se
G G
trouve dans le plan de cote z + dz ) et A(Mz ) ⋅ ( −dxdyez ) à travers la surface inférieure

(qui se trouve dans le plan de cote z). Leur somme vaut [ Az (Mz + dz ) − Az (Mz )] ⋅ dxdy .
Les surfaces dxdy étant d’ordre 1 en dx et d’ordre 1 en dy, le calcul de cette
∂Az
somme donne dz ⋅ dxdy : elle est d’ordre 3. Le flux total vaut donc :
∂z
 ∂A   ∂Ay   ∂A   ∂A ∂Ay ∂Az 
d3Φ =  x dx  ⋅ dydz +  dy  ⋅ dxdz +  z dz  ⋅ dxdy =  x + +  dxdydz.
 ∂x   ∂y   ∂z   ∂x ∂y ∂z 
G
Finalement d3 Φ = divA d3V .
Cette relation fournit la définition intrinsèque de l’opérateur div :

On considère une surface élémentaire fermée entourant un point M. On note d3V le


G
volume élémentaire à l’intérieur de cette surface. Le flux d3Φ d’un champ vectoriel A
G
à travers cette surface est d3 Φ = (divA )(M )d3V .

Théorème de Green-Ostrogradski
On obtient la forme intégrale de cette relation, appelée théorème de Green-
Ostrogradski, en découpant en volumes élémentaires un volume V à l’intérieur d’une
surface fermée S .

43
44 Partie I.  Boîte à outils

On considère deux de ces volumes élémentaires voisins (ils possèdent une sur-
face commune) autour de M1 et M 2 . Les surfaces élémentaires entourant ces vo-
lumes sont orientées de l’intérieur vers l’extérieur, si bien que le flux à travers la surface
commune est compté avec des signes opposés dans le calcul des flux élémentaires
d3Φ1 et d3Φ 2 . Le flux d3Φ à travers la surface qui entoure les deux volumes élémen-
G G
taires vaut donc d3Φ = d3Φ1 + d3Φ 2 = (divA )(M1)d3V 1 + (divA )(M2 )d3V 2 .
En sommant les flux à travers toutes les surfaces élémentaires, on obtient :
G G G
 A ⋅ d S
w 
2
= divA d3V . C’est le théorème de Green-Ostrogradski.
S V (S )
G
Le flux du champ A à travers une surface fermée S est égal à l’intégrale de
G
divA sur le volume V ( S ) à l’intérieur de S .

Grâce à la définition intrinsèque de l’opérateur divergence, on trouve après cal-


G
culs les expressions de divA dans d’autres systèmes de coordonnées.

Expression dans un système de coordonnées cylindriques


G 1 ∂ 1 ∂A ∂A
divA =
r ∂r
[rAr ] + r ∂θθ + ∂zz .

44
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 45

Expression dans un système de coordonnées sphériques


G 1 ∂ 2
r Ar  + 1 ∂ [ Aθ sin θ] + 1
∂Aϕ
divA = 2 .
r ∂r   r sin θ ∂θ r sin θ ∂ϕ

Interprétation physique de l’opérateur divergence


G G
De d3 Φ = divA d3V on déduit que divA permet de quantifier le caractère diver-
gent d’un champ vectoriel au voisinage d’un point M. Par exemple pour un champ
G
localement radial et divergent : d3 Φ > 0  divA > 0 , alors que pour un champ locale-
G
ment radial et convergent : divA < 0 , et que pour un champ localement uniforme :
G
divA = 0 . Par souci de lisibilité, le champ n’est représenté ci-dessous que dans un plan
passant par M.

2.4 Laplacien scalaire


Définition dans un système de coordonnées cartésiennes
L’opérateur laplacien scalaire, noté ∆, est un opérateur linéaire qui s’applique à
un champ de scalaire V(M) et le transforme en un champ de scalaire ∆V ∈ R .

∂ 2V ∂ 2V ∂ 2V
∆V = 2
+ 2
+ .
∂x ∂y ∂z 2

Définition intrinsèque

 → 
On a ∆V = div gradV  , relation qui constitue la définition intrinsèque du lapla-
 
cien de V.
G G G
Remarque : ∆V = ∇ ⋅ (∇V ) = ∇ 2V .
Grâce à la définition intrinsèque de l’opérateur laplacien scalaire, on trouve les
expressions de ∆V dans d’autres systèmes de coordonnées.

45
46 Partie I.  Boîte à outils

Expression dans un système de coordonnées cylindriques


2 2
1 ∂  ∂V  1 ∂ V ∂ V 1 ∂V ∂ 2V 1 ∂ 2V ∂ 2V
∆V = r ∂r  + 2 2 + 2 , ou ∆V = r ∂r + 2 + 2 2 + 2 .
r ∂r   r ∂θ ∂z ∂r r ∂θ ∂z

Expression dans un système de coordonnées sphériques

1 ∂  2 ∂V  1 ∂  ∂V  1 ∂ 2V
∆V = r ∂r  + 2  sin θ  + 2 2 .
r 2 ∂r   r sin θ ∂θ  ∂θ  r sin θ ∂ϕ2
1 ∂  2 ∂V  2 ∂V ∂ 2V 1 ∂ 2
On a aussi r ∂r  = r ∂r + 2 = r 2 [ rV ] .
r 2 ∂r   ∂r ∂r

2.5 Laplacien vectoriel


Définition dans un système de coordonnées cartésiennes
L’opérateur laplacien vectoriel, noté ∆, est un opérateur linéaire qui s’applique
G G
à un champ de vecteur A(M ) et le transforme en un champ de vecteur ∆A ∈ R3 .

 ∂ 2 Ax ∂ 2 Ax ∂ 2 Ax 
 2
+ + 
 ∂x ∂y 2 ∂z 2 
 ∆A   2 2 2 
G  x  ∂ Ay ∂ Ay ∂ Ay  sur la base (eG , eG , eG ) .
∆A =  ∆Ay  = + +
∂z 2 
x y z
  ∂x 2 ∂y 2
 
 ∆Az   ∂2A ∂ 2 Az ∂ 2 Az 
 z
+ + 
 ∂x 2
∂y 2 ∂z 2 

GG
Remarque : on peut trouver également la notation ∆A , plus explicite quant au
caractère vectoriel du résultat obtenu, mais moins utilisée.

Définition intrinsèque
On en déduit après calcul la définition intrinsèque :

G → G →  → G 


∆A = grad  divA  − rot  rot A  .
 
G
Cette relation permet de trouver l’expression de ∆A dans d’autres systèmes de
coordonnées.

Expression dans un système de coordonnées cylindriques et sphériques


Attention ! Sauf dans un système de coordonnées cartésiennes, les compo-
santes du laplacien vectoriel ne sont pas égales au laplacien scalaire des compo-
G
santes de A :

46
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 47

 ∆A   ∆A 
G  r G G G G  r  G G G
∆A ≠  ∆Aθ  sur la base (er , eθ , ez ) , et ∆A ≠  ∆Aθ  sur la base (er , eθ , eϕ ) .
 ∆A   ∆A 
 z  ϕ
L’expression la plus générale est lourde et très rarement utilisée. En revanche,
G
on calcule facilement ∆A dans des cas particuliers. Par exemple en coordonnées
G G G → G →  → G  G
sphériques, si A = Aϕ (r , θ)eϕ , on a ∆A = grad  divA  − rot  rot A  , avec ici divA = 0
 
 1 ∂  
 r sin θ ∂θ  Aϕ sin θ  
   ar (r , θ) 
→ G 1 ∂ G  

et rot A =  − rAϕ   = a =  aθ (r , θ)  . On calcule alors :
r ∂r   
a = 0 
 
 0   ϕ 
 
 
 1  ∂aθ  
 −    
 r sin θ  ∂ϕ    0

→G  1 ∂ar   
rot a =  = 0 .
 r sin θ ∂ϕ   
1 ∂   1 ∂2 1 ∂  1 ∂ 
∂a  −  
rA −  
A sin θ  
  [ raθ ] − r 2  ϕ  r ∂θ  r sin θ ∂θ  ϕ
   r ∂r  
 r  ∂r ∂θ  
G  1 ∂ 2 1 ∂  1 ∂ G
Finalement, dans ce cas : ∆A =   rA  +  A sin θ    eϕ .
2  ϕ 2 ∂θ  sin θ ∂θ  ϕ 
 ∂r
r r   

2.6 Formules utiles


Les formules intrinsèques suivantes peuvent par exemple être démontrées en
coordonnées cartésiennes :

→  
→  G  → G 
rot gradV  = 0 . div  rot A  = 0 .
   

G G → G
div(VA) = VdivA + gradV ⋅ A .
→ G → G → G
rot (VA) = V rot A + gradV ∧ A .
G G G → G G → G
div( A ∧ B ) = B ⋅ rot A − A ⋅ rot B .

→  → G  → G G


rot  rot A  = grad divA  − ∆A (définition intrinsèque du laplacien vectoriel).
 

47
48 Partie I.  Boîte à outils

Deux théorèmes intégraux dérivés respectivement des théorèmes de Stokes et


de Green-Ostrogradski peuvent être démontrés en utilisant les formules précédentes :
→ G →
vV ⋅ d OM = 
d2 S ∧ gradV .
γ S (γ)

G 

 V ⋅ d S
w 
2
= gradV d3V .
S V (S )

2.7 Théorème de Helmholtz (complément hors-programme)


G
Ce théorème assure l’unicité d’un champ de vecteur A dont on connaît le rota-
tionnel et la divergence en tout point M d’un volume V contenu dans une surface
G G
fermée S , à condition qu’on connaisse les conditions aux limites : A(P ) ⋅ N en tout
G
point P de S , où N est la normale extérieure à S en P.

Pour un champ de scalaire, le théorème de Helmholtz assure l’unicité de V dont


on connaît le laplacien en tout point M de V , à condition qu’on connaisse les conditions
→ G
aux limites : V(P) ou gradV ⋅ N en tout point de S .
Ces théorèmes d’unicité fonctionnent également quand le volume V est infini,
à condition de connaître les conditions aux limites en l’infini.

3. CHAMPS PARTICULIERS
3.1 Champ à circulation conservative
Définition et propriétés
Les propositions suivantes sont équivalentes :
G
Un champ de vecteur A est à circulation conservative
M2
G →

γ
⇔C M1 →M2
= A ⋅ d OM est indépendante du chemin γ suivi entre M1 et M 2
M1

G →
⇔ C γ= v A ⋅ d OM = 0 sur tout contour fermé γ
γ

48
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 49

⇔ ∃ V : M ֏ V (M ) / δC = −dV (V est appelé potentiel scalaire)


� →
⇔ ∃ V : M ֏ V (M ) / A = − gradV
→ � �
⇔ rot A = 0 en tout point.

Les démonstrations de ces équivalences ne sont pas au programme. Nous al-


lons nous limiter à démontrer quelques implications :
γ

— Supposons C M →M
indépendant du chemin suivi γ (d’où : « champ A à circulation
1 2

conservative »). Considérons un contour fermé γ quel-


conque et deux points distincts M1 et M 2 sur ce contour.
En suivant γ on a alors deux chemins différents γ1 et γ 2
permettant d’aller de M1 à M 2 . D’après notre hypothèse :
γ1 γ
C M1 → M 2
= C M2 → M . Avec l’orientation de γ précisée sur le
1 2

γ1 γ
schéma ci-contre, on a C γ = C M1 →M 2
− C M2 →M = 0 , ce qui montre bien que :
1 2

� →
C γ= � A ⋅ d OM = 0 pour tout contour fermé.
γ
γ
— Supposons de nouveau que C M1 →M2
est indépendant du chemin suivi γ. Ceci si-
gnifie que la circulation entre M1 et M 2 ne dépend que de ces deux points, donc qu’il
γ
existe une fonction V du point M telle que C M1 → M2
= V (M1) − V (M2 ) , soit :
� →
δC = A ⋅ d OM = −dV , pour une circulation entre deux points infiniment proches.
→ → � → → →
Comme on a aussi dV = gradV ⋅ d OM , on en déduit A ⋅ d OM = − gradV ⋅ d OM pour
→ � →
tout déplacement élémentaire d OM , ce qui n’est possible que si A = − gradV .
� →
— Supposons C γ = � A ⋅ d OM = 0 sur tout contour fermé. Le théorème de Stokes im-
γ

� → → � �
plique alors que � A ⋅ d OM =  rot A ⋅ d2 S = 0 quelle que soit la surface S s’ap-
γ S (γ)
→ � �
puyant sur γ, ce qui n’est possible que si rot A = 0 en tout point.

Une conséquence fondamentale de ces équivalences est la suivante : quel que


� →
soit le champ scalaire V, le champ A = − gradV est à circulation conservative, donc
→  →  �
son rotationnel est nul en tout point. On démontre ainsi l’identité rot gradV  = 0 .
 

49
50 Partie I.  Boîte à outils

Surfaces équipotentielles et autres propriétés


L’ensemble des points M vérifiant V (M ) = Cte forme une surface appelée sur-
face équipotentielle.

Nous allons énoncer deux propriétés supplémentaires d’un champ à circulation


conservative.

Les lignes de champ sont orthogonales aux surfaces équipotentielles.

Démontrons ce résultat. Soit M un


point de la surface équipotentielle S et M ′
un autre point de S , infiniment proche de
→
M : MM ′ est tangent à S . Entre M et M ′ , la
variation
� → � →
dV = − A(M ) ⋅ MM ′ = − A(M ) ⋅ d OM de po-
� →
tentiel est nulle : A(M ) ⋅ d OM = 0 , et ceci
→ �
quel que soit d OM tangent à S en M. On en conclut que A(M ) est orthogonal au
plan tangent à S en M : la ligne de champ passant par M est bien orthogonale au plan
tangent à S en M.

Les lignes de champ sont orientées dans le sens des potentiels V décroissants.
Les lignes d’un champ à circulation conservative ne peuvent donc pas être fermées.

Considérons pour démontrer ce


résultat une ligne de champ quel-
conque. On repère un point M le long
de cette ligne, orientée dans le sens du

champ A , grâce à son abscisse curvi-
ligne s qui est la distance parcourue le
long de la ligne entre un point O et le
point M. Entre M et un point M ′ sur la
même ligne de champ, infiniment proche de M, le potentiel passe de V à V + dV , avec
� → � → → �
dV = − A(M ) ⋅ MM ′ = − A(M ) ⋅ d OM . Le vecteur MM ′ est colinéaire à A(M ) . Suppo-
sons-le dans le même sens : la distance algébrique ds = MM ′ le long de la ligne de

champ est positive. On a donc dV = − A(M ) ⋅ ds < 0 : le potentiel décroît bien le long

d’une ligne de champ. D’autre part, à dV constant, A(M ) = dV / ds ր si ds ց .

Un champ à circulation conservative est intense là où les équipotentielles sont


resserrées.

50
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 51

3.2 Champ à flux conservatif


Définition et propriétés
Les propositions suivantes sont équivalentes :

Un champ de vecteur B est à flux conservatif
� �
⇔ ΦS = 
B ⋅ d2 S est indépendant de la surface qui s’appuie sur γ
S (γ)
� �
 B ⋅ d S

2
⇔ ΦS = = 0 à travers toute surface fermée S
S
� � � → � �
⇔ ∃ A : M ֏ A(M ) / B = rot A ( A est appelé potentiel vecteur)

⇔ divB = 0 en tout point.

Les démonstrations de ces équivalences ne sont pas au programme. Nous al-


lons nous limiter à démontrer quelques implications :
— Supposons que Φ S ne dépende pas de la surface S qui s’appuie sur un contour
fermé γ, mais seulement de γ. Considérons une surface fermée S quelconque et un
contour fermé γ orienté tracé sur cette surface. Sur ce contour s’appuient deux sur-
faces distinctes S1 et S 2 dont S est la réunion.

Les vecteurs surface élémentaires de S1 et S 2 sont orientés en accord avec


l’orientation de γ en suivant la règle du tire-bouchon. On a d’après notre hypothèse
Φ S1 = Φ S2 . En revanche, les vecteurs surface élémentaires de S sont orientés de
l’intérieur vers l’extérieur. Avec l’orientation de γ précisée sur le schéma ci-dessus, on
� �
a Φ S = Φ S2 − Φ S1 = 0 , ce qui montre bien que Φ S = 
�B ⋅ d2 S = 0 à travers toute
S
surface fermée.
� � → �
— Supposons qu’il existe un champ de vecteur A tel que B = rot A . On a alors
� � → � � � →
d’après le théorème de Stokes : B ⋅ d2 S =  �
rot A ⋅ d2 S = A ⋅ d OM . Le flux
S (γ) S (γ) γ

51
52 Partie I.  Boîte à outils

G
de B à travers une surface S s’appuyant sur un contour fermé γ ne dépend pas de S
mais seulement de γ.
G G
 B ⋅ d S
w
2
— Supposons que Φ S = = 0 à travers toute surface fermée. Le théorème
S
de Green-Ostrogradski implique alors que :
G G G
ΦS = 
wB ⋅ d2 S = 
divB d3V = 0 dans tout volume V limité par une surface fer-
S V (S )
G
mée, ce qui n’est possible que si divB = 0 en tout point.

Une conséquence fondamentale de ces équivalences est la suivante : quel que


G G → G
soit le champ vectoriel A , le champ B = rot A est à flux conservatif, donc sa diver-
 → G 
gence est nulle en tout point. On démontre ainsi l’identité div  rot A  = 0 .
 
Tubes de champ et autres propriétés
G G
Le flux de B se conserve le long d’un tube de champ, d’où « champ B à flux
conservatif ».

Démontrons cette pro-


G
priété. B étant à flux conser-
G
vatif, le flux de B à travers la
surface S fermée, réunion de
deux sections S1 et S 2 d’un
tube de champ et de la sur-
face latérale du tube entre
G
ces deux sections, est nul. B
G G
étant par définition tangent au tube, B ⋅ d2 Slat = 0 sur la surface latérale donc son flux
à travers la surface latérale est nul. Les vecteurs surface élémentaires de S1 et S 2
G
sont orientés dans le sens du champ B alors que les vecteurs surface élémentaires
de S sont orientés de l’intérieur vers l’extérieur. On a donc bien, avec l’orientation
G
dans le sens de B : Φ S = Φ S2 − Φ S1 + Φ Slat = 0  Φ S2 = Φ S1 .
N
0
Considérons maintenant un tube de champ élémentaire qui entoure une ligne
de champ entre deux points M1 et M 2 . Les sections droites d2 S1 et d2 S2 de ce tube
G
passant par M1 et M 2 sont infiniment petites. La conservation du flux de B le long de
G G G G G G
ce tube de champ implique que B1 ⋅ d2 S1 = B2 ⋅ d2 S2 , or B et d2 S sont colinéaires
G G
pour un tube de champ élémentaire : B1 ⋅ d2 S1 = B2 ⋅ d2 S2 .

52
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 53

G G
On en déduit que si d2 S2 < d2 S1 , alors B2 > B1 .

Un champ à flux conservatif est intense là où les lignes de champ sont resser-
rées.

4. BILAN LOCAL D’UNE GRANDEUR EXTENSIVE x


4.1 Bilan global
Le système étudié Σ se trouve dans un volume V à l’intérieur d’une surface S
fermée (au sens géométrique : elle entoure un volume intérieur), fixe par rapport au
référentiel d’étude R .

Si de la matière traverse S , ce dernier est un système ouvert (au sens phy-


sique : il échange de la matière avec le milieu extérieur).
On peut effectuer des bilans de n’importe quelle grandeur extensive x pour Σ,
par exemple un bilan de masse, de quantité de mouvement, d’énergie, d’entropie…
Entre deux instants t1 et t 2 > t1, cette grandeur varie de ∆x = x (t2 ) − x (t1) .

On distingue deux causes de variation pour x : l’échange avec le milieu exté-


rieur, et la production de la grandeur x au sein de Σ : ∆x = x (t2 ) − x (t1) = x r + x p .

Entre t1 et t2 , x r est la grandeur reçue de la part du milieu extérieur, et x p la

grandeur produite. x r et x p sont algébriques ( x r est positif si la grandeur est effecti-


vement reçue par Σ, négatif si la grandeur est cédée au milieu extérieur ; x p est positif
si la grandeur est produite, négatif si elle est détruite) et dépendent de la transforma-
tion suivie entre t1 et t2 (la notation ∆x r , ∆x p est proscrite), alors qu’il suffit de con-
naître l’état de Σ à t1 et t2 pour calculer ∆x = x (t2 ) − x (t1) .

53
54 Partie I.  Boîte à outils

Dans le cas d’une transformation élémentaire entre deux instants infiniment


proches t et t + dt , le bilan s’écrit :
dx = x(t + dt ) − x(t ) = δx r + δx p (la notation dx r , dx p est proscrite).
dx est une différentielle. δx r et δx p sont des formes différentielles ; elles dé-
pendent du chemin suivi.

d3 x
En notant ρ x = la densité volumique de la grandeur x, on a :
d3V

 ρx (M,t )d V
3
— À la date t : x(t ) = .
M ∈V

 ρx (M,t + dt )d V
3
— À t + d t : x ( t + dt ) = , soit une variation pendant une durée in-
M∈V
 ∂ρ x 3 
finitésimale dt : dx = x (t + dt ) − x(t ) =  
M ∈V ∂t
dV  dt .


4.2 Grandeur reçue

La grandeur reçue par Σ pendant dt, à travers un élément de surface d2 S au-


G G
tour d’un point P de la surface S , s’écrit δ3 x r = J x (P, t ) ⋅ d2 S ⋅ dt .
G
J x (P, t ) est le vecteur densité volumique de courants de la grandeur x.

En effet :
— La grandeur reçue est proportionnelle à la durée dt de l’échange.
Si par exemple, à un instant donné, une section d’un fleuve est traversée par
300 m3 d’eau en une seconde, cette même section sera traversée par 600 m3 d’eau
G
en deux secondes. Si la densité de courants J x (P, t ) n’est pas stationnaire, la relation
de proportionnalité entre la grandeur échangée et la durée n’est rigoureuse que pen-
dant une durée infinitésimale dt (cela reste une bonne approximation dans notre
exemple pendant une durée de deux secondes, petite devant la durée caractéristique
des variations de débit volumique).

54
Chapitre 4.  Champs et opérateurs différentiels 55

— La grandeur reçue est proportionnelle à la surface d’échange d2 S .


Dans l’exemple précédent, si
1000 m3 d’eau traversent une surface
de 1 m2 autour d’un point P en une
heure, ce sera le triple pour une surface
de 3 m2 autour du même point pen-
dant la même durée. Si la densité de
G
courants J x (P, t ) n’est pas uniforme, la
relation de proportionnalité entre la grandeur échangée et la surface n’est rigoureuse
que pour une surface infinitésimale d2 S (cela reste une bonne approximation dans
notre exemple pour une surface de 3 m2 si la vitesse du fleuve varie peu d’un point à
l’autre de cette surface).
G G
— δ3 x r est proportionnelle au produit scalaire J x (P, t ) ⋅ d2 S .
Par exemple, si la densité volumique de courants (la vitesse du fleuve dans
G G
notre exemple) est tangente à la surface d’échange d2 S , on a J x ⋅ d2 S = 0 . La sur-
face d2 S n’est pas traversée par la grandeur x (le volume d’eau dans l’exemple).
Dans le cas général, on obtient δx r reçu pendant dt en sommant sur S :
 G G
δx r = −  
w
P∈S
J x ⋅ d2 S  dt . Le signe « − » provient de l’orientation des vecteurs surface

G G
élémentaires de l’intérieur vers l’extérieur. En effet, si J x (P, t ) ⋅ d2 S > 0 , le système Σ
G G
perd localement la grandeur x : δ3 x r < 0 , alors que si J x (P, t ) ⋅ d2 S < 0 , Σ gagne lo-
calement la grandeur x : δ3 x r > 0 .
On peut donner une autre forme à cette expression en utilisant le théorème de
 G 
Green-Ostrogradski : δx r = − 
M ∈V
divJ x d3V  dt .


4.3 Grandeur produite

La grandeur produite δ 4 x p pendant dt dans un élément de volume d3V autour


d’un point M du volume V s’écrit δ4 x p = σ x (M, t ) ⋅ d3V ⋅ dt .
σ x (M, t ) est le taux (c’est-à-dire par unité de temps) de production volumique
de la grandeur extensive x.

En effet :
— La grandeur produite est proportionnelle à la durée dt de la production.

55
56 Partie I.  Boîte à outils

Par exemple, si à un moment donné, 5 ⋅ 1012 neutrons sont produits en une se-
conde dans 1 cm3 de réacteur nucléaire autour d’un point M, le double sera produit
en deux secondes dans le même volume. Si le taux de production volumique σ x (M, t )
n’est pas stationnaire, la relation de proportionnalité entre la grandeur produite et la
durée n’est rigoureuse que pendant une durée infinitésimale dt.
— La grandeur produite est proportionnelle au volume d3V .
Dans l’exemple précédent, 1013 neutrons de fission seront produits par se-
conde dans un volume de 2 cm3 autour de M. Si σ x (M, t ) n’est pas uniforme, la rela-
tion de proportionnalité entre la grandeur échangée et le volume n’est rigoureuse que
pour un volume infinitésimal d3V , et on obtient la quantité δx p produite pendant dt
 
par sommation sur le volume V : δx p = 
M ∈V
σ x d3V  dt .


4.4 Bilan local

Le bilan global (pour un volume fini) dx = δx r + δx p se traduit finalement par :


 ∂ρx G  3
  ∂t + divJ x − σ x  d V = 0 .
 
M ∈V

Si le bilan de la grandeur x est effectué sur le système de volume d3V autour


 ∂ρ G 
du point M, il devient un bilan local  x + divJ x − σ x  d3V = 0 , soit :
 ∂t 

∂ρ x G
+ divJ x = σ x , bilan local de la grandeur extensive x.
∂t

La détermination d’un champ de température dans un solide, celle d’un champ


de pression et de vitesse dans un fluide, passent entre autres par l’écriture de bilans
locaux d’énergie interne, de masse, etc.

56
57

[BOÎTE À OUTILS 5]

GRANDEURS PHYSIQUES :
DIMENSIONS ET UNITÉS
1. UNITÉS ET SYSTÈME INTERNATIONAL D’UNITÉS
(SI)
1.1 Grandeur mesurable / Unités
Soit une grandeur physique qui caractérise un objet ou un phénomène. Elle est
mesurable si on sait lui appliquer les opérations élémentaires : addition, soustraction,
rapport, multiplication et division par un nombre réel.
Pour faire correspondre une valeur numérique à une grandeur X, on choisit ar-
bitrairement une grandeur unité X u de même espèce. La valeur numérique de X est
alors égale à x = X / X u .
Par exemple, si un phénomène périodique possède une période T0 , toute durée
peut s’exprimer sous la forme τ = λT0 avec λ ∈ R . Si on choisit de prendre cette pé-
riode comme durée unité, la valeur numérique de la durée τ est égale à λ. Plus géné-
ralement, si X1 et X 2 sont deux grandeurs de même espèce (par exemple deux
masses), x1 = X1 / X u , x2 = X 2 / X u d’où x2 / x1 = X 2 / X1 .

Le rapport de deux grandeurs de même espèce est indépendant de l’unité choi-


sie pour exprimer ces deux grandeurs.

Dans le cas du calcul d’un rapport de températures, il faut obligatoirement ex-


primer ces températures en kelvin et pas en degrés Celsius. En effet, si T est la tem-
pérature en K et θ en °C, on a θ = T − 273,15 : les deux échelles ne sont pas propor-
tionnelles. Le rapport de deux températures exprimées en kelvin a un sens physique
(par exemple, pour un gaz parfait maintenu à pression constante, c’est un rapport de
volume), pas avec des températures en °C.

1.2 Choix des unités / Système international (SI)


Les problèmes liés à l’existence de systèmes d’unités propres à chaque pays,
voire à chaque région, ont conduit à l’adoption d’un système international d’unités sim-
plifiant les échanges scientifiques (et commerciaux...), et les communications.
Il existe sept unités de base indépendantes, les autres s’en déduisent par des
relations entre les grandeurs correspondantes.

57
58 Partie I.  Boîte à outils

Unité de temps : la seconde (s). Symbole dimensionnel : T.


Unité de longueur : le mètre (m). Symbole dimensionnel : L.
Unité de masse : le kilogramme (kg). Symbole dimensionnel : M.
Unité d’intensité de courant électrique : l’ampère (A). Symbole dimensionnel : I.
Unité de température thermodynamique : le kelvin (K). Symbole dimensionnel : Θ.
Unité de quantité de matière : la mole (mol). Symbole dimensionnel : N.
Unité d’intensité lumineuse : la candela (cd). Symbole dimensionnel : J.

Ces unités sont définies en fixant la valeur numérique de certaines constantes


fondamentales :

La fréquence de transition hyperfine de l’état fondamental de l’atome de cé-


sium 133 non perturbé, ∆νCs , est égale à 9 192 631 770 Hz.
La seconde est donc définie comme la durée pendant laquelle il y a exacte-
ment 9 192 631 770 périodes de la radiation correspondant à cette transition.
La vitesse c de la lumière dans le vide est égale à 299 792 458 m ⋅ s-1 .
Le mètre est donc défini comme la longueur du trajet que parcourt la lumière
dans le vide pendant une durée de 1/ 299 792 458 s .
La constante de Planck h est égale à h = 6,626 07015 ⋅ 10−34 J ⋅ s .
Comme 1 J ⋅ s = 1 kg ⋅ m2 ⋅ s-1 , le kilogramme est donc défini en fixant la valeur
de h.
La charge élémentaire e est égale à e = 1,602176 634 ⋅ 10−19 C .
Comme 1 C = 1 A ⋅ s , l’ampère est donc défini en fixant la valeur de e.
La constante de Boltzmann kB est égale à kB = 1,380 649 ⋅ 10−23 J ⋅ K -1 .
Comme 1 J = 1 kg ⋅ m2 ⋅ s-2 , le kelvin est défini en fixant la valeur de kB .

La constante d’Avogadro N A est égale à N A = 6,02214076 ⋅ 1023 mol-1 .


La mole est donc définie en fixant la valeur de N A .
La candela est l’intensité lumineuse, dans une direction donnée, d’une
source qui émet un rayonnement monochromatique de fréquence 540 ⋅ 1012 Hz et
dont l’intensité énergétique dans cette direction est de 1/ 683 watt par stéradian.
Le stéradian est l’unité d’angle solide (c’est l’équivalent dans l’espace d’un angle dans le plan). L’in-
tensité lumineuse caractérise la sensation visuelle humaine. Cette dernière est maximale pour une
longueur d’onde de 555 nm (soit une fréquence de l’onde électromagnétique de 540 THz). Deux
objets lumineux ponctuels émettant la même puissance et regardés sous le même angle solide, mais
à des longueurs d’onde différentes, ne correspondent pas à la même intensité lumineuse.

La dernière modification des définitions des unités fondamentales est entrée en


vigueur le 20 mai 2019. À chaque changement correspond une précision accrue : le
critère retenu dans le choix des unités de base est celui de l’exactitude maximale avec
laquelle une unité peut être réalisée expérimentalement.

58
Chapitre 5.  Grandeurs physiques : dimensions et unités 59

Par exemple, pour définir une unité de temps, il faut une horloge (système évo-
luant périodiquement). Avant 1960, la seconde était définie comme la fraction
1/ 86 164,090 55 de la durée de la rotation propre de la Terre. Or, la Terre tournant de
moins en moins vite autour de son axe de rotation, il a fallu trouver une meilleure hor-
loge. C’est le cas des horloges atomiques permettant la définition actuelle de la se-
conde, et dont on peut penser que la période est une vraie période (invariable dans le
temps). Des résultats d’observations sont alors utilisables en tout temps.
Il est à noter que l’utilisateur courant ne doit pas être perturbé par le change-
ment : la « taille » de l’unité reste la même.
La définition du mètre revient à fixer la vitesse de la lumière dans le vide à
299 792 458 m ⋅ s-1 . La définition initiale de 1798 posait 1 km = longueur d’un méridien
terrestre / 40 000 (actuellement, cette longueur vaut 40 008 km).
La nouvelle définition du kilogramme obéit à la même logique. L’ancienne défi-
nition était la suivante : « le kilogramme est la masse de l’étalon prototype en platine
iridié à 10% réalisé en 1889 sous la forme d’un cylindre dont le diamètre est égal à la
hauteur ». Cette définition manquait d’universalité (l’étalon était conservé à Sèvres) et
surtout de constance dans le temps (la masse de l’étalon variait dans le temps). La
nouvelle définition permet, grâce à des expériences menées avec une balance de
Kibble (ou balance de Watt), de mesurer des masses avec moins d’incertitudes que
par comparaison avec l’étalon. Cette expérience a permis de mesurer la constante de
Planck avec une incertitude relative de 5,7 ⋅ 10-8 .

2. DIMENSIONS
2.1 Homogénéité
Toute grandeur peut s’exprimer en fonction des grandeurs de base.

En mécanique par exemple, toute grandeur s’exprimera en fonction d’un temps


G G
T, d’une longueur L et d’une masse M. La norme d’une force est d’après ma = Fext 
le produit d’une masse et d’une longueur et de l’inverse d’un temps au carré, et ceci
indépendamment du système d’unités dans lequel on l’exprime : on dit qu’une force
est homogène à M ⋅ L ⋅ T -2 , ou bien on écrit [F ] = M ⋅ L ⋅ T -2 , où [F ] est la dimension de
F. Dans le système international d’unités (SI), l’unité de F est le newton (N), unité
dérivée valant 1 kg ⋅ m ⋅ s-2 .

On ne peut faire la somme (ou la différence) de deux grandeurs que si elles ont
même dimension, on ne peut appliquer les fonctions sinus, cosinus, tangente, loga-
rithme, exponentielle, etc., qu’à une grandeur sans dimension.
Ces règles permettent de vérifier l’homogénéité d’une formule (une formule non
homogène est incorrecte, la réciproque est bien entendu fausse).

59
60 Partie I.  Boîte à outils

Prenons quelques exemples :


d2u 1 du u
— Équation différentielle dans un circuit électrique : + + = 0 . Le pro-
dt 2 RC dt (RC )2
duit RC d’une résistance et d’une capacité étant homogène à un temps, l’équation est
homogène car tous les termes de la somme sont homogènes à une tension divisée
 d2u   1 du   u  [u ]
par un temps au carré :  2  =  = 2
= 2.
 dt   RC dt   (RC )  T

Il n’est pas nécessaire de revenir aux grandeurs de base pour vérifier l’homo-
généité.

d2θ g
— Équation différentielle du pendule simple : 2
+ sin θ = 0 . Comme [ g ] = L ⋅ T -2 et
dt ℓ
[ℓ] = L , l’équation est homogène car tous les termes de la somme sont homogènes à
T -2 (un angle étant par définition un rapport entre deux longueurs, c’est une grandeur
sans dimension).
 Mgz 
— Pression de l’atmosphère de température uniforme : p( z ) = p0 exp  −  , où M
 RT 
est la masse molaire de l’air. Mgz est homogène à une énergie par mole puisque mgz
est une énergie potentielle de pesanteur : [Mgz ] = [E ] / N . Le terme RT est également
homogène à une énergie par mole. En effet [ pV / n ] = [RT ] , d’après la loi des gaz
parfaits, or une pression est par définition homogène à une force divisée par une sur-
Mgz
face, soit [ p ] = [F ] / L2 , d’où [ pV ] = [F ] L = [E ] . Le terme − est bien sans dimen-
RT
sion : on peut prendre son exponentielle (également sans dimension), et on a donc de
part et d’autre de l’égalité deux termes homogènes à une pression.

2.2 Équation aux dimensions


Théorème de Vaschy-Buckingham (hors programme)
Considérons N grandeurs physiques ( g1,..., gN ) qui font intervenir d dimensions
de base (D1,...,Dd ) . Par exemple, pour des problèmes de mécanique, d = 3 (temps T,
longueur L, masse M).
Si la grandeur g i est constituée d’une somme de termes, ils doivent tous être
homogènes entre eux, si bien que la dimension de g i est celle d’un seul de ces termes
α ij
et s’écrit [ g i ] = D1αi 1 ⋅ D2αi 2 ⋅ ... ⋅ D j ⋅ ... ⋅ Dd αid , où les coefficients α ij sont des réels.
On cherche à former des nombres sans dimensions à partir de ( g1,..., gN ) : ces
nombres sont de la forme Nk ∗ = g1βk 1 g2βk 2 ⋅ ... ⋅ gi βki ⋅ ... ⋅ gN βkN avec βki ∈ R . On a alors

60
Chapitre 5.  Grandeurs physiques : dimensions et unités 61

β β
  ( ) ( )
Nk ∗  = D1α11 ⋅ D2α12 ⋅ ... ⋅ Dd α1d k 1 ⋅ ... ⋅ D1αN 1 ⋅ D2αN 2 ⋅ ... ⋅ Dd αNd kN = 1 , puisque Nk ∗ est

sans dimension. Les βki sont donc solution du système linéaire de d équations et N
α11 ⋅ βk 1 + ... + αN1 ⋅ βkN = 0

inconnues :  ... .
α ⋅β + ... + α ⋅ β = 0
 1d k1 Nd kN
Si ces équations sont indépendantes, on peut former p = N − d (le nombre de
grandeurs moins le nombre de dimensions) nombres sans dimension indépendants à
partir de ( g1,..., gN ) . Il peut cependant arriver que les équations régissant les βki ne
 α11 α21 . . α N1 
 
α α22 . . αN 2 
soient pas indépendantes. Si r est le rang de la matrice  12 , le
 . . . . . 
 
 α1d α2d . . αNd 
nombre de paramètres sans dimension qu’on peut former à partir de ( g1,..., gN ) est
p = N − r . L’entier r est le rang dimensionnel du système des N grandeurs.
Prenons l’exemple d’une vitesse v, d’une longueur ℓ et d’une masse m. Ces
trois grandeurs sont dimensionnellement indépendantes : r = 3 . On a donc p = 0 et
on ne peut pas former de nombre sans dimension à partir de ces grandeurs.
En revanche, une vitesse v, une longueur ℓ et une durée τ ne sont pas
indépendantes puisque [v ] = L / T : r = 2 . On a donc p = 1 et on peut former un
α
vτ  vτ 
nombre sans dimension, par exemple N ∗ =

, ou tout nombre  ℓ  , avec α ∈ R .
 

Soient N grandeurs physiques ( g1,..., gN ) . On peut former p = N − r nombres


sans dimension Nk ∗ = g1βk 1 g2βk 2 ⋅ ... ⋅ gi βki ⋅ ... ⋅ gN βkN , avec βki ∈ R , à partir de ces
grandeurs, où r est le rang dimensionnel du système des N grandeurs.
Si ces grandeurs sont liées par une relation f (g1,..., gN ) = 0 , les Nk ∗ sont liés
par une relation F (N1∗,..., N p∗ ) = 0 .
C’est le théorème de Vaschy-Buckingham, ou théorème Π.

Célérité d’une onde transversale le long d’une corde vibrante


La célérité de l’onde le long d’une corde dépend de sa tension T0 et de sa
masse linéique µ : on a une relation f (c,T0 , µ ) = 0 . Ces 3 grandeurs font intervenir 3
dimensions (M, L et T). Cherchons à former des nombres sans dimension à partir de
ces grandeurs : Nk ∗ = c αT0βµ γ . On en déduit :
β + γ = 0 (1) β + γ = 0 (1)
α β γ  
(L ⋅ T ) (M ⋅ L ⋅ T ) (M ⋅ L )
-1 -2 -1
= 1  α + β − γ = 0 (2) ⇔ α + 2β = 0 (1) + (2)
 
−α − 2β = 0 (3) α + 2β = 0 (3)

61
62 Partie I.  Boîte à outils

On n’a ici que r = 2 équations indépendantes : on peut par exemple fixer la va-
β = −α / 2
leur de α, et on a alors :  . On peut former p = N − r = 3 − 2 = 1 nombre sans
γ = α / 2
dimension. Ce nombre N1∗ est une constante numérique puisqu’il est solution d’une
1 α
 µ  ∗ α T0 T
équation F (N1∗ ) = 0
. On a donc = c N1∗
 = Cte ⇔ c = N1 = K 0 . La
 T0  µ µ
constante numérique sans dimension K vaut 1, mais on ne peut pas le montrer à partir
de l’analyse dimensionnelle.

Explosion atomique
Le physicien G.I. Taylor es-
tima correctement l’ordre de gran-
deur de l’énergie dégagée par la
première explosion atomique, le 16
juillet 1945 dans le désert du Nou-
veau-Mexique, simplement à l’aide
de séries de photos de cette explo-
sion, comme celle-ci-contre.
Il mena pour cela une étude
physique détaillée de l’explosion, faisant l’objet de deux articles, que la légende ré-
sume à une simple analyse dimensionnelle…
L’explosion commence à t = 0 . Dans notre approche simplifiée, l’onde de choc
générée au point O où la bombe a explosé est sphérique. Elle sépare l’air extérieur de
l’air intérieur, fortement comprimé et porté à de grandes températures. Le point délicat
est de trouver les grandeurs physiques dont dépend le rayon R du nuage à la date t :
l’énergie E dégagée quasi-instantanément, la date t, la masse volumique ρ de l’air
extérieur. Il n’est pas évident que l’état de l’air dans le nuage n’intervienne pas, mais
c’est une bonne approximation, discutée dans les travaux de Taylor. Ces grandeurs
sont donc liées par f (R, E, t , ρ) = 0 . On cherche à former des nombres Nk ∗ = E αt βργ R δ
sans dimension à partir de ces 4 grandeurs, soit :
α + γ = 0  γ = −α
α γ  
(M ⋅ L ⋅ T )
2 -2
T β
(M ⋅ L )
-3 δ
L = 1  2α − 3 γ + δ = 0 ⇔ β = 2α , la valeur de α étant
−2α + β = 0  δ = −5 α
 
α
quelconque. On en déduit qu’on ne peut former qu’un seul nombre N1∗ = Et 2ρ−1R −5 ( )
qui est une constante numérique puisqu’il est solution d’une équation F (N1∗ ) = 0 . On
1
1 2 2
2 −1 −5  E 5
a donc Et ρ R = N1∗ α = Cte d’où R(t ) = K   t 5 ∝ t 5 .
ρ

62
Chapitre 5.  Grandeurs physiques : dimensions et unités 63

D’après la photo ci-dessus, on estime la valeur du rayon R = 140 m au bout de


t = 0,025 s . En prenant ρ = 1,25 kg ⋅ m-3 , et en supposant que la constante numérique
K est de l’ordre de 1, l’énergie dégagée E ≃ ρR 5 / t 2 est de l’ordre de 1,1⋅ 1014 J , très
proche de la valeur 8,4 ⋅ 1013 J obtenue par les physiciens ayant travaillé sur l’élabo-
ration de la bombe et connaissant ses caractéristiques. Si l’étude théorique de G.I
Taylor présentait en réalité plusieurs mo-
dèles permettant d’encadrer cette valeur,
l’analyse dimensionnelle, moyennant cer-
taines hypothèses sur les grandeurs phy-
siques pertinentes, permet parfois, sans étu-
de théorique, et donc sans mise en équation
du problème, de trouver la relation entre ces
grandeurs. C’est le cas quand on ne peut for-
mer qu’un seul nombre sans dimension
comme dans les exemples précédents. Pour
l’explosion atomique, l’analyse de la série de
photos montre (figure ci-contre issue des ar-
ticles de G.I Taylor) que R 5/2 est bien pro-
portionnel à t. Pour en déduire une valeur nu-
mérique, comme l’énergie dégagée, il faut faire une hypothèse sur la valeur numérique
du nombre adimensionné intervenant, ou le déterminer expérimentalement. Lorsqu’on
peut former plus de deux nombres sans dimension, on peut réduire l’étude expérimen-
tale à l’établissement de la relation F (N1∗,..., N p∗ ) = 0 entre ces nombres.

2.3 Intérêt de l’adimensionnalisation / Facteur d’échelle 


Pendule simple
Un point matériel de masse m est attaché à l’extré-
mité M d’une tige rigide de masse négligeable, de lon-
gueur ℓ, dont l’autre extrémité O est fixe dans le référentiel
terrestre R supposé galiléen. On note g l’intensité du
champ de pesanteur, et θ l’angle que fait le fil avec la ver-
ticale. Le pendule est lâché sans vitesse initiale dans la
position θ = θ0 ≤ π : il oscille alors autour de la position
d’équilibre θ = 0 . On obtient, en appliquant dans R le
d2θ g
P.F.D au point matériel, l’équation du mouvement + sin θ = 0 . Dans l’approxima-
dt 2 ℓ
d2θ g
tion linéaire sin θ = θ , valable aux petits angles, elle s’écrit 2
+ θ = 0.
dt ℓ

63
64 Partie I.  Boîte à outils


C’est l’équation d’un oscillateur harmonique de période T0 = 2π indépen-
g
dante des conditions initiales. Lorsque cette approximation n’est plus vérifiée, la for-
mule précédente n’est plus valable, et on ne sait pas résoudre l’équation différentielle
non linéaire du mouvement. Comment varie alors la période du pendule ?
Soit τ une durée quelconque. Posons t ∗ = t / τ où t ∗ est un temps réduit (sans
dimension), et effectuons le changement de variable t → t ∗ . On obtient :
1 d2θ g d2θ g 2 d2θ
sin
+ θ = 0 , soit + τ sin θ = 0 , ou + N ∗ sin θ = 0 (∗) , en introdui-
τ2 dt ∗2 ℓ dt ∗2 ℓ dt ∗2
g
sant le nombre sans dimension N ∗ = τ2 . Comme l’angle θ est sans dimension,

l’équation (∗) est adimensionnée.
g 2
Pour N ∗ = τ fixé, par exemple N ∗ = 5 , on peut résoudre numériquement

l’équation adimensionnée (non linéaire) en prenant par exemple pour conditions ini-
4π dθ
tiales (C.I) : θ(t ∗ = 0) = et ∗ (t ∗ = 0) = 0 . La solution est tracée ci-dessous :
5 dt

Dans l’approximation linéaire, l’équation différentielle adimensionnée devient :


2
d θ
∗2
+ N ∗θ = 0 , dont la solution analytique est θ = θ0 cos( N ∗ ⋅ t ∗ ) , compte tenu des
dt
C.I. La période réduite T0∗ = 2π / N ∗ = 2π / 5 = 2,81 diffère beaucoup de la période

réduite réelle T ∗ = 4,65 car, pour θ0 = 4 π / 5 , l’approximation des petits angles n’est
pas du tout vérifiée.
Étudions maintenant le mouvement de deux pendules de longueurs différentes,
lâchés tous deux sans vitesse initiale dans la position θ0 = 4 π / 5 , en prenant N ∗ = 5 .

N ∗ℓ
On effectue le changement de variable t ∗ → t = t ∗ ⋅ τ = t ∗ qui permet de passer
g
de l’échelle de temps réduite à l’échelle de temps réelle. On parle de similitude. Ici, il

64
Chapitre 5.  Grandeurs physiques : dimensions et unités 65

s’agit de dilater ou de contracter la courbe donnant θ(t ) , selon l’axe des temps.
Par exemple, pour ℓ = 1,00 m , g = 9,81 m ⋅ s-2 et N ∗ = 5 , on a t = 0,714 ⋅ t ∗ . On
en déduit la période T = 3,32 s des oscillations, qui est très différente de la période
T0 = 2,01 s des oscillations dans l’approximation des petits angles.
Pour le second pendule de longueur différente, on peut procéder de même. La
valeur de N ∗ est sans importance (la changer revient à modifier la définition du temps
τ), du moment que c’est la même pour tous les pendules.
On en tire une conséquence fondamentale : la période des oscillations s’écrit
N ∗ℓ ℓ
T =T∗ =K .
g g
Elle est proportionnelle à ℓ : lâché dans les mêmes conditions, un pendule de
longueur ℓ = 2,00 m aura une période 2 fois plus grande que celle du pendule de
1,00 m. Ce résultat n’est valable que si les C.I sont les mêmes pour les deux pendules,
car K dépend des C.I (par exemple, pour un même pendule lâché sans vitesse initiale,
la période augmente avec θ0 , contrairement au cas des petits angles pour lequel la
période T0 est indépendante des C.I).

Diffusion thermique
1 ∂T ∂ 2T
Prenons maintenant l’exemple de l’équation = de diffusion thermique
∂x 2 a ∂t
à une dimension : la température T(x,t) ne varie que selon l’abscisse x et le temps t.
Le coefficient a est appelé diffusivité thermique.
On peut à l’aide de grandeurs caractéristiques du problème : amplitude T0 des
variations de température, longueur L, durée τ, définir des grandeurs sans dimension :
T ∗ = T / T0 , x ∗ = x / L , t ∗ = t / τ . En effectuant les changements de variables T → T ∗ ,
T0 ∂ 2T ∗ 1 T0 ∂T ∗ ∂ 2T ∗ L2 ∂T ∗ ∗ ∂T

x → x ∗ et t → t ∗ , on obtient = , soit = = N (∗) ,
L2 ∂x ∗2 a τ ∂t ∗ ∂x ∗2 aτ ∂t ∗ ∂t ∗
L2
qui est l’équation adimensionnée, avec N ∗ = nombre sans dimension.

Dans notre exemple, pour N ∗ fixé, notons T ∗N ∗ ( x ∗, t ∗ ) la solution de (*) corres-

pondant à certaines conditions initiales ( T ∗ connu à t ∗ = 0 ) et certaines conditions aux


limites (par exemple T ∗ connu à tout instant sur les frontières du domaine des valeurs
 x aN ∗ 
de x ∗ ). La solution recherchée est T ( x, t ) = T0 ⋅ T ∗N ∗  , 2 t  puisqu’il suffit, pour ob-
L L 
 
L2
tenir la solution du problème, de multiplier T ∗ par T0 , x ∗ par L et t ∗ par τ = ,
aN ∗
c’est-à-dire d’appliquer des facteurs d’échelle. Pour une longueur L fixée, on peut

65
66 Partie I.  Boîte à outils

définir la durée caractéristique de la diffusion par N ∗ = 1 : on a alors τ = L2 / a .

Supposons un problème défini par :


— Une équation différentielle aux dérivées partielles régissant une grandeur
g ( x, y , z, t ) et contenant des paramètres ( p1,..., pN ) .
— Des conditions initiales.
— Des conditions aux limites.
Soient les grandeurs caractéristiques : G0 pour g, une longueur L, un temps τ.

On peut adimensionner l’équation différentielle en posant g ∗ = g / G0 , x ∗ = x / L ,

y ∗ = y / L , z∗ = z / L , t ∗ = t / τ (grandeurs réduites). L’équation sans dimension régis-


sant g ∗ ( x ∗, y ∗, z∗, t ∗ ) fait alors intervenir des nombres sans dimension (N1∗,..., N p∗ ) qui
sont fonction de p1,..., pN , G0 , L et τ.
Les solutions du problème correspondant à la même géométrie réduite, les
mêmes conditions initiales réduites, les mêmes conditions aux limites réduites, et à la
même valeur des nombres sans dimension, se déduisent toutes de la solution de
l’équation adimensionnée, en appliquant des facteurs d’échelle.

Les lois d’échelle (ou de similitude) étant connues, on peut expérimenter sur un
modèle réduit et en déduire les grandeurs en situation réelle. Dans le cas le plus gé-
néral, plusieurs grandeurs physiques sont couplées par des systèmes d’équations dif-
férentielles aux dérivées partielles, mais la technique reste la même. D’autre part, la
recherche d’une solution numérique est largement facilitée par une adimensionnalisa-
tion préalable des équations.

Équation de Navier-Stokes
L’analyse dimensionnelle est particulièrement utile en mécanique des fluides
G
car les équations qui régissent le champ de vitesse v (M , t ) et de pression p(M, t ) d’un
écoulement fluide, même incompressible, admettent rarement des solutions analy-
tiques. Ces équations sont :
G
— divv = 0 , qui traduit l’incompressibilité du fluide.
G
 ∂v G → G  G → G
— ρ  + (v ⋅ grad)v  = −ρgez − grad p + η∆v , qui provient du P.F.D appliqué à une
 ∂t 
particule fluide de masse volumique ρ et de viscosité η (équation de Navier-Stokes).
L’axe Oz est vertical ascendant. ∆ est l’opérateur laplacien.
Introduisons une longueur caractéristique L, une fréquence caractéristique f (ou
une durée caractéristique τ), une vitesse caractéristique u, et une variation de pression
caractéristique ∆p.
G G
On pose x ∗ = x / L , y ∗ = y / L , z∗ = z / L , t ∗ = f ⋅ t , v ∗ = v / u et p∗ = p / ∆p .

66
Chapitre 5.  Grandeurs physiques : dimensions et unités 67

 ∂   ∂2 ∂2 ∂2 
 ∗  ∗ 2
+ ∗2 + ∗2 
 ∂x ∂y ∂z 
 ∂x   
→ ∗  ∂  ∂ 2
∂ 2
∂2
Notons grad l’opérateur  ∗  , ∆∗ l’opérateur  ∗2 + ∗2 + ∗2  , et en-
 ∂y   ∂x ∂y ∂z 
 ∂   
2 2
 ∗  ∂ ∂ ∂2 
 ∂z   ∗2 + ∗2 + ∗2 
 ∂x ∂y ∂z 
∂Ax ∂Ay ∂Az
fin div ∗ l’opérateur + + . Après le changement de variables x → x ∗ ,
∂x ∗ ∂y ∗ ∂z∗
G G
y → y ∗ , z → z∗ , t → t ∗ , v → v ∗ et p → p∗ , on obtient :
G
— div ∗v ∗ = 0 , qui ne fait intervenir aucun nombre sans dimension ;
 ∂vG ∗ u 2  G ∗ → ∗  G∗  G ∆p → ∗ ∗ ηu ∗ G ∗
— ρ fu ∗ +  v ⋅ grad  v  = −ρgez − grad p + 2 ∆ v , soit :
 ∂t L    L L
G
 fL ∂v ∗  G ∗ → ∗  G∗  gL G ∆p → ∗ η ∗ G∗
 +  v ⋅ grad  v  = − 2 ez − 2 grad p∗ + ∆ v . L’équation de Navier-
∗   ρ
 ∂t
u    u ρu Lu

 G
∂v ∗  G → ∗  G  1 G  → ∗ 1 ∗ G∗
Stokes prend la forme : St ⋅ ∗ +  v ∗ ⋅ grad  v ∗  = − 2 ez − Eu ⋅ grad p∗ + ∆v .
 
 ∂ t    Fr Re
Elle fait intervenir 4 nombres sans dimension :
— Le nombre de Strouhal St = fL / u .
— Le nombre de Froude Fr = u / gL .
∆p
— Le nombre d’Euler Eu = .
ρu 2
— Le nombre de Reynolds Re = ρLu / η .
Là encore, tous les écoulements correspondant à la même géométrie réduite,
aux mêmes conditions aux limites réduites, aux mêmes conditions initiales réduites, et
aux mêmes valeurs données de ces 4 nombres, se déduisent de la résolution numé-
rique des équations adimensionnées (par la méthode des éléments finis quand c’est
un écoulement à 3D). D’autre part, selon les valeurs numériques des nombres sans
dimension, on peut négliger certains termes devant d’autres. Par exemple :
G
∂v ∗
—Pour St suffisamment petit, on peut négliger St ⋅ ∗ devant les autres termes :
∂t
l’écoulement est quasi-stationnaire.
→ ∗
— Pour Eu suffisamment petit, c’est le terme − Eu ⋅ grad p∗ qu’on peut négliger : les
variations de pression sont négligeables dans l’écoulement.
G
— Pour Fr suffisamment grand, on peut négliger le terme −1/ Fr 2 ez : la gravité n’in-
flue pas sur l’écoulement.

67
68 Partie I.  Boîte à outils

1 ∗ �∗
— Pour Re suffisamment grand, on peut négliger le terme visqueux ∆ v : l’écou-
Re
lement est celui d’un fluide parfait.

2.4 Simplification des équations par comparaison des ordres de grandeur


Ordres de grandeur numériques
On peut négliger dans une équation certains termes devant d’autres en compa-
rant leurs valeurs numériques. Par exemple, faut-il tenir compte de l’attraction lunaire
pour étudier la chute d’un point matériel M à la surface de la Terre ?

Comparons la norme du champ de gravitation lunaire G ℓ (M ) = Gmℓ / rℓ 2 à celle

du champ de gravitation terrestre G t (M ) = Gmt / rt 2 , où rℓ et rt sont les distances du
point M respectivement au centre de la Lune (de masse mℓ ) et au centre de la Terre
(de masse mt ), et G la constante de gravitation. On peut pour cela former le rapport
� � m r2
des deux normes, qui est un nombre sans dimension N ∗ = G ℓ / G t = ℓ ⋅ t 2 .
mt rℓ
La distance rℓ varie selon la position de M à la surface de la Terre : est-il du
côté de la Lune ? du côté opposé ? On peut s’affranchir de cette connaissance, car
dans tous les cas, rℓ reste de l’ordre de la distance Terre-Lune, soit 400 000 km, très
supérieure au rayon terrestre.

L’ordre de grandeur numérique d’une grandeur physique est exprimé sous la


forme d’un entier compris entre 1 et 9 (souvent 1), multiplié par une puissance de 10.
Par exemple :
— L’ordre de grandeur du rayon de la Terre est 6 ⋅ 103 km , mais on peut aussi dire
qu’il est de l’ordre de 1⋅ 103 km .
— L’ordre de grandeur de la masse d’un être humain est 1⋅ 102 kg .
— L’ordre de grandeur de la conductivité électrique d’un métal est 107 S ⋅ m-1 .
Moins la grandeur est définie précisément (matériau, conditions expérimen-
tales…), plus les variations sont fortes autour de l’ordre de grandeur (par exemple pour
les métaux purs, la conductivité électrique varie de 1 à 88 à température ambiante).

Quant à rt , il est de l’ordre de grandeur du rayon de la Terre : 6 000 km. Les

masses des astres valent mt = 6 ⋅ 1024 kg et mℓ = 7 ⋅ 1022 kg . On en déduit que N ∗


est de l’ordre de 3 ⋅ 10 −6 : l’attraction lunaire est négligeable devant l’attraction ter-
restre pour un objet à la surface de la Terre.
De façon générale, quand on raisonne par ordre de grandeur, il faut, pour né-
gliger un terme devant un autre, que le rapport entre ces deux termes soit suffisam-
ment petit, ou suffisamment grand.

68
Chapitre 5.  Grandeurs physiques : dimensions et unités 69

Ordres de grandeur littéraux


Lorsqu’un problème est régi par des équations différentielles, il devient plus dif-
ficile de comparer numériquement des termes homogènes entre eux car ces derniers
varient dans le temps et dans l’espace. On donne alors des ordres de grandeurs cette
fois-ci littéraux (à l’aide de lettres), et non plus numériques de ces termes. Les lettres
qui interviennent sont des grandeurs caractéristiques du système.

La notation « O » signifie « de l’ordre de ».

Dans l’exemple précédent, si D est la distance Terre-Lune, le champ de gravi-


tation lunaire en un point de la Terre est de l’ordre de grandeur de Gmℓ / D2 , ce qu’on
� �
( ) ( )
peut noter G ℓ (M ) = O Gmℓ / D 2 , ou G ℓ (M ) = O Gmℓ / D2 car le caractère scalaire,

vectoriel ou matriciel n’intervient pas pour les ordres de grandeur.


∂ 2T 1 ∂T
Prenons l’exemple de l’équation locale de diffusion thermique : = . La
∂x 2 a ∂t
température subit des fluctuations temporelles et spatiales.
Introduisons une différence de température ∆T caractéristique (pour les varia-
tions temporelles et spatiales), une longueur caractéristique L et un temps caractéris-
tique τ.
 ∂ 2T ∆T
 2 = A( x, t ) ⋅ 2
 ∂x L
Par analyse dimensionnelle, on obtient  . A et B sont deux
 1 ∂T = B( x, t ) ⋅ 1 ∆T
 a ∂t a τ
fonctions sans dimension, dont la valeur numérique est de l’ordre de 1 si les grandeurs
∂ 2T  ∆T  1 ∂T  1 ∆T 
caractéristiques sont bien choisies, et on note = O  2  et = O .
∂x 2  L  a ∂t a τ 
∂ 2T 1 ∂T
L’équation
∂x 2
=
a ∂t
( )
entraîne donc que τ = O L2 / a . Pour une longueur ca-

ractéristique L donnée, L2 / a est la durée caractéristique de la diffusion thermique.


Pour un temps caractéristique τ donné, aτ est la longueur caractéristique de la dif-
fusion thermique.
Par exemple, considérons un cylindre calorifugé d’axe Ox et de longueur L, dont
initialement la moitié gauche est à la température T1 , et la moitié droite à la tempéra-
ture T2 < T1 . En régime transitoire, la température T ( x, t ) évolue jusqu’à ce qu’elle de-
vienne uniforme et stationnaire. La longueur caractéristique est ici la longueur L du
cylindre (mais on aurait aussi pu prendre L / 2 ) et on peut définir la durée caractéris-
tique du régime transitoire par τ = L2 / a . La différence de température caractéristique
est, quant à elle, ∆T = T1 − T2 .

69
70 Partie I.  Boîte à outils

Simplifications
Reprenons l’exemple de l’équation de Navier-Stokes :
G
 ∂v G → G  G → G
ρ  + (v ⋅ grad)v  = −ρgez − grad p + η∆v .
 ∂t 
Si on introduit une longueur caractéristique L et une vitesse caractéristique u,
on peut comparer les ordres de grandeur des termes suivants :
G → G  ρu 2  G  ηu 
ρ(v ⋅ grad)v = O  (terme convectif), et η∆v = O  2  (terme diffusif).
 L  L 
 
Le rapport des ordres de grandeur de ces termes est un nombre sans dimension
 G → G 
 ρ(v ⋅ grad)v  ρLu .
appelé nombre de Reynolds : Re = O  G = η
 η∆v 
 
G
Ainsi, dans un écoulement pour lequel Re >> 1 , on peut négliger le terme η∆v
G → G
devant ρ(v ⋅ grad)v , c'est-à-dire considérer que le fluide est parfait (sans viscosité), et
G → G G
au contraire négliger ρ(v ⋅ grad)v devant η∆v si Re << 1 .

Ce raisonnement par ordre de grandeur a bien sûr ses limites car il introduit des
grandeurs caractéristiques globales (ici définies pour tout l’écoulement). Une analyse
plus fine montre que pour un fluide s’écoulant autour d’un obstacle, la vitesse du fluide
devient très faible près des parois solides (elle s’annule sur les parois). Même si
G
Re >> 1 , on ne peut pas négliger le terme η∆v dans cette zone appelée couche limite.
D’autre part, les grandeurs caractéristiques peuvent être délicates à estimer.
Pour l’écoulement autour d’une sphère de rayon R, dont la vitesse u est uniforme loin
de la sphère, on sait que la viscosité ne peut être négligée que si le nombre de Rey-
nolds Re = 2ρRu / η est suffisamment grand, et on pourrait penser que Re = 10 con-
vient. L’expérience montre que Re doit être vraiment très grand (supérieur à 2000). Le
terme convectif est lui négligeable pour Re < 1 et pas nécessairement pour Re << 1 .
Enfin, selon la géométrie du problème, des longueurs caractéristiques diffé-
rentes Lx , Ly et Lz (selon les axes Ox, Oy et Oz) peuvent intervenir.

Dans une équation différentielle aux dérivées partielles couplant des grandeur
g1( x, y , z, t ) , g 2 ( x, y , z, t ) , …, on peut comparer en ordre de grandeur des termes ho-
mogènes entre eux en faisant intervenir des grandeurs caractéristiques globales ( G1
pour g1 , G2 pour g 2 ,…, longueur L, temps τ). Un terme sera négligeable devant un
autre si le rapport de leurs ordres de grandeur est suffisamment petit (ou grand). Le
critère numérique pour pouvoir effectivement négliger un terme devant l’autre n’est
souvent obtenu que grâce à des études expérimentales.

70
71

[DEUXIÈME PARTIE]

ÉLECTRONIQUE

Le chapitre :
Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 73

71
72
73

[ÉLECTRONIQUE]

PRODUCTION, ACQUISITION ET
TRAITEMENT D’UN SIGNAL
ÉLECTRIQUE
1. NOTIONS SUR L’AMPLIFICATEUR LINÉAIRE
INTÉGRÉ (A.L.I)
1.1 Présentation
L’A.L.I, ou Amplificateur Opérationnel (A.O), est un composant électronique qui
possède deux bornes d’entrée et une borne de sortie. On le représente par un rec-
tangle.
Il est généralement alimenté sous 30 V. L’alimentation possède un point milieu
qui est la référence des potentiels du montage comprenant des A.L.I : on a donc une
borne d’alimentation +Vcc = +15 V et une borne d’alimentation −Vcc = −15 V . Sou-
vent, ces bornes ne sont pas représentées, mais il ne faut pas oublier d’alimenter un
A.L.I…
Une des entrées est appelée entrée inverseuse, ou entrée « moins », l’autre est
appelée entrée non inverseuse ou entrée « plus ». On note V − et V + les potentiels
des entrées. On note Vs le potentiel de la sortie.
Par construction, les intensités des courants i − et i + dans les entrées sont ex-
cessivement faibles, inférieures à 1 µA , donc très inférieures aux intensités caracté-
ristiques des circuits électroniques, qui sont de l’ordre du mA :

Les courants d’entrée d’un A.L.I peuvent être considérés comme nuls : i + = 0 et
i− = 0.

73
74 Partie II.  Électronique

Bien qu’aucune puissance ne soit absorbée en entrée puisque les courants


d’entrée sont quasiment nuls, le courant de sortie i s est non nul et dépend du mon-
tage. C’est bien sûr grâce à l’alimentation que l’A.L.I peut fournir une puissance de
sortie ps = Vsi s non nulle (mais limitée à quelques dixièmes de watt). De même, Vs
ne peut pas dépasser une valeur maximale, appelée tension de saturation, légèrement
plus faible que les tensions d’alimentation : Vsat ≃ 14 V .
Dans un montage à A.L.I, des composants sont placés entre les entrées et la
sortie (boucles de rétroaction). C’est ce qu’indiquent les pointillés sur la figure précé-
dente.
Le potentiel de sortie Vs dépend de la différence de
potentiel ε = V + − V − entre les entrées, ce qui fait l’objet
d’une caractéristique Vs = f (ε ) appelée caractéristique de
transfert. Cette caractéristique est donnée ci-contre en ré-
gime stationnaire (fréquence nulle) et en sortie ouverte
( i s = 0 ).
Elle présente une partie linéaire pour laquelle
Vs = µ0ε , avec µ0 de l’ordre de 105 , tant que Vs < Vsat ,
Vsat
donc pour ε < = ε sat ≃ 0,14 mV , tension très inférieure aux tensions caractéris-
µ0
tiques des circuits électroniques (de l’ordre du volt).
Si ε ≥ εsat : Vs = Vsat , et si ε ≤ −εsat : Vs = −Vsat . On dit alors que l’A.L.I est « sa-
turé » et, malgré son nom, il ne fonctionne plus dans le domaine linéaire.

Un A.L.I possède :
— Un domaine linéaire pour lequel Vs = µ0ε , avec µ0 ≃ 105 , grandeur sans dimension
appelée amplification différentielle statique. On a alors Vs < Vsat .

— Des domaines non linéaires pour lequel il sature : Vs = Vsat ≃ 14 V .

1.2 Principaux défauts linéaires et non linéaires


L’A.L.I réel utilisé en T.P présente des « défauts » linéaires et non-linéaires.
Défaut linéaire
Vs
Le seul défaut que nous mentionnerons est le fait que le gain µ = dé-
ε
croisse avec la fréquence.

L’amplification différentielle de l’A.L.I est correctement modélisée par une fonc-


tion de transfert de type passe-bas :

74
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 75

Vs µ0
µ= = , avec une fréquence de coupure fc 0 ≃ 10 Hz .
ε f
1+ j
fc 0

Défauts non-linéaires
À ce défaut linéaire s’ajoutent certains défauts non linéaires :
— Comme on l’a vu, la tension de sortie de l’A.L.I est limitée : Vsat − ≤ Vs ≤ Vsat + , avec

Vsat + ≃ −Vsat − , tension de l’ordre de 14 V. Cette limitation implique que même dans un
montage stable, les signaux d’entrée ne doivent pas dépasser une valeur maximale si
l’on veut que l’A.L.I fonctionne dans le domaine linéaire.
Cette saturation est par ailleurs utilisée dans certains montages, par exemple
dans l’oscillateur à pont de Wien que nous verrons en section 2.
— Le courant de sortie est limité : Isat − ≤ i s ≤ Isat + , avec Isat + ≃ −Isat − , courant de
l’ordre de 25 mA. Il faut donc que le circuit de charge présente une résistance d’entrée
suffisamment grande pour que cette limitation ne soit pas rencontrée.
dVs
— La pente du signal de sortie est limitée : σ− ≤ ≤ σ + (vitesse de balayage limite :
dt
slew-rate). La pente maximale σ+ ≃ −σ − est de l’ordre de 0,5 V ⋅ µs-1 .

1.3 A.L.I idéal


L’A.L.I ne fonctionne dans le domaine linéaire que si la différence de potentiel
entre les entrées reste en valeur absolue inférieure à une valeur très faible εsat .

On définit l’A.L.I idéal par µ0 → ∞ .

Ceci entraîne µ = Vs / ε → ∞ ∀ω en fonctionnement


linéaire, et donc ε = 0 puisque Vs est bornée.
Un tel fonctionnement linéaire n’est possible que si le
montage est bouclé entre les entrées et la sortie.
La caractéristique de transfert d’un A.L.I idéal est re-
présentée ci-contre. Elle comporte une partie linéaire verti-
cale et des parties saturées horizontales.

En fonctionnement linéaire, la tension de sortie Vs vérifie −Vsat < Vs < Vsat , et se


déduit du montage en écrivant i + = i − = 0 et ε = 0 .
En fonctionnement non-linéaire, ε ≠ 0 . On a alors soit Vs = Vsat ⇔ ε > 0 , soit
Vs = −Vsat ⇔ ε < 0 .

75
76 Partie II.  Électronique

1.4 Stabilité des montages à A.L.I


Sauf exceptions, si la chaîne de retour est constituée de dipôles linéaires pas-
sifs :
— Le montage est stable si le bouclage se fait uniquement sur l’entrée − .
— Le montage est instable s’il se fait uniquement sur l’entrée + .
— Dans le cas où il y a bouclage sur les deux entrées, une étude de stabilité (hors
programme) serait nécessaire. En pratique, la stabilité du montage est indiquée.
En l’absence de bouclage, la tension ε = V + − V − est imposée et provoque la
saturation de l’A.L.I à cause de son très grand gain statique µ0 .

Un A.L.I peut être en fonctionnement non-linéaire, même si le montage qui le


contient est stable, quand l’amplitude de la tension de sortie devient trop grande : la
saturation Vs = ±Vsat est atteinte. Des phases de fonctionnement linéaire et non li-
néaire peuvent alors s’alterner.
Lorsque le montage est instable, il est, en régime établi, en fonctionnement non
linéaire ∀t (c’est le cas si le montage n’est pas bouclé, ou uniquement sur l’entrée non
inverseuse). La tension de sortie de l’A.L.I ne peut alors prendre que deux valeurs :
Vs = ±Vsat . On admet qu’un A.L.I idéal ( µ0 → ∞ ) bascule instantanément de ±Vsat à
∓Vsat quand ε change de signe.

1.5 Montages linéaires à A.L.I supposé idéal


Montage suiveur
Le montage suiveur consiste à boucler la sortie sur l’entrée inverseuse avec un
simple fil. Le montage est stable, et on a ε = V + − V − = 0 en fonctionnement linéaire.
Pour illustrer l’importance du montage suiveur, considérons une source réelle
connectée à l’entrée non inverseuse, et une charge, par exemple résistive, connectée
à la sortie de l’A.L.I.
On a alors aux bornes de la charge us = V − = V + = ue = e − r i�+ = e .
0

On a donc us = ue = e ∀i s : pour la charge, le montage est une source idéale


de tension.

76
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 77

Montage amplificateur inverseur


Le montage fait intervenir deux dipôles li-
néaires passifs. La sortie est bouclée sur l’entrée
inverseuse par un dipôle d’impédance Z2 . Le
montage est stable, et on a ε = 0 en fonctionne-
ment linéaire. On se place en r.s.f :
V − = V + = 0 . Ainsi ue = Z1i et us = −Z2 i , donc :
Z2
us = − ue .
Z1

La fonction de transfert de l’amplificateur inverseur est H ( j ω) = −Z2 / Z1.

Ce montage doit son nom au cas où les deux dipôles sont résistifs : Z1 = R1 et
Z2 = R2 . On a alors amplification si R2 > R1 , et « inversion » : H est un réel négatif.

Montage intégrateur
Le montage intégrateur se déduit du mon-
tage amplificateur inverseur. Les deux dipôles
sont un conducteur ohmique et un condensateur.
Ce dernier boucle la sortie sur l’entrée inver-
1
seuse : Z1 = R et Z2 = . On a donc :
jC ω
us Z2 1 du
H ( j ω) = =− =− ↔ RC s = −ue
ue Z1 jRC ω dt
(nous verrons au 2.2 qu’une multiplication par jω correspond à une dérivation).
t
1
 ue (t ′)dt ′ + us (0
+
us ( t ) = − ) (montage intégrateur).
RC
t =0

Comme ε = 0 , le condensateur est soumis à la tension us qui est donc une

fonction continue du temps : us (0+ ) = us (0− ) .

Montage dérivateur
Les positions du conducteur ohmique et du
condensateur sont inversées par rapport à l’inté-
1
grateur : Z1 = et Z2 = R . On a donc :
jCω
us Z2
H ( j ω) = =− = − jRC ω .
ue Z1

77
78 Partie II.  Électronique

Le signal de sortie est proportionnel à la dérivée du signal d’entrée.

due
us (t ) = −RC (montage dérivateur).
dt

Montage amplificateur non inverseur


On l’obtient en modifiant le montage ampli-
ficateur inverseur : il suffit de porter au potentiel
nul la borne qui était portée à ue et vice-versa.
Le montage est stable, et ε = 0 en fonction-
nement linéaire.
On se place en r.s.f : V − = V + = ue .
On a ue = Z1i et us = (Z1 + Z2 )i (les deux
dipôles d’impédances Z1 et Z2 étant en série, on
a une structure de diviseur de tension entre ue et
Z1 Z + Z2
us ), donc ue = us ⇔ us = 1 ue .
Z1 + Z2 Z1

Le montage amplificateur non-inverseur permet d’obtenir la fonction de transfert


Z
H ( jω) = 1 + 2 .
Z1

Ce montage doit également son nom au cas où les deux dipôles sont résistifs :
Z1 = R1 et Z2 = R2 . On a alors amplification sans « inversion » : H est un réel > 1.

1.6 Montages non-linéaires à A.L.I supposé idéal


Comparateur simple
Le montage est donné ci-contre. Il est instable
car non bouclé : la moindre différence de potentiel
entre les deux entrées de l’A.L.I provoque la satura-
tion.
On a ue = ε .
Il n’y a que deux états possibles Vs = ±Vsat :
— us = Vsat ⇔ ε > 0 ⇔ ue > 0 .
— us = −Vsat ⇔ ε < 0 ⇔ ue < 0 .
On a tracé ci-après la courbe us = f (ue ) ainsi que les chronogrammes ue (t ) et

us (t ) , avec ue (t ) = E sin(Ωt ) , de période T = :

78
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 79

Le comparateur simple permet de réaliser une commande « tout ou rien ». Pre-


nons l’exemple d’un éclairage public qui s’allume quand la lumière naturelle n’est plus
suffisante. On compare la tension ue délivrée par un capteur, fonction croissante de
l’éclairement, à une valeur seuil (supposée nulle). Lorsque la tension de sortie us du
comparateur simple vaut −Vsat , l’éclairage est allumé, alors qu’il est éteint si elle vaut
+Vsat . La présence de bruit (passage de nuages par exemple) sur le signal issu du
capteur est néanmoins susceptible de provoquer plusieurs basculements lorsque le
signal moyen passe par la valeur seuil, comme on le constate sur la figure ci-dessous.

Comparateur à hystérésis
Pour éviter les basculements intempestifs du
comparateur simple, on peut envisager d’utiliser un
comparateur à hystérésis. Celui qui est représenté
ci-contre se déduit du montage amplificateur inver-
seur par permutation des entrées inverseuse et
non-inverseuse. Le montage est donc instable :
Vs = ±Vsat .
Le courant dans l’entrée + étant nul, les con-
ducteurs ohmiques sont en série. On a donc une structure de diviseur de tension entre
R1 R u + R1us R
ε − ue et us − ue : ε − ue = (us − ue ) ⇔ ε = 2 e . On pose V0 = 1 Vsat .
R1 + R2 R1 + R2 R2
— Supposons us = Vsat ⇔ ε > 0 ⇔ R2ue + R1us > 0  R2ue + R1Vsat > 0 .
Remarquons que l’on n’a ici qu’une implication et pas une équivalence car on a
utilisé l’hypothèse us = Vsat pour aboutir à R2ue + R1Vsat > 0 .
On en conclut que us = Vsat  ue > −V0 , donc que ue < −V0  us = −Vsat .

79
80 Partie II.  Électronique

— Supposons us = −Vsat ⇔ ε < 0 ⇔ R2ue + R1us < 0  R2ue − R1Vsat < 0 .


On en conclut que us = −Vsat  ue < V0 , donc que ue > V0  us = Vsat .

Une étude de stabilité montre que si us = Vsat , elle garde cette valeur tant que
ue > −V0 , et que si us = −Vsat , elle garde cette valeur tant que ue < V0 .
Prenons par exemple ue (t ) = E cos(Ωt ) , de période T = 2π / Ω , avec E > V0 .
Initialement ue = E > V0 , donc us = Vsat , et reste égal à Vsat tant que ue > −V0 .
Lorsque ue devient inférieur à −V0 , us bascule à −Vsat et reste égal à −Vsat
tant que ue < V0 .
Lorsque ue devient supérieur à V0 , us bascule à Vsat et le cycle recommence.

Un tel cycle us = f (ue ) est appelé cycle d’hystérésis : le chemin suivi est diffé-
rent selon que ue est croissant ou décroissant.

us décroît de Vsat à −Vsat quand ue décroît, et croît de −Vsat à Vsat quand ue


croît. Le cycle d’hystérésis est parcouru dans le sens trigonométrique.
Représentons le cycle ainsi que les chronogrammes ue (t ) et us (t ) :

Pour une commande « tout ou rien », l’avantage d’un comparateur à hystérésis


par rapport à un comparateur simple est d’éviter des basculements intempestifs lors-
que ue est bruité, comme pour l’éclairage public évoqué précédemment.
Après un premier basculement (par exemple us = Vsat et bascule à −Vsat lors-
que ue passe par la valeur −V0 en décroissant), la valeur que doit prendre ue pour
qu’un nouveau basculement se produise change ( us ne rebascule à Vsat que lorsque
ue passe par la valeur V0 en croissant, et pas la valeur −V0 ).
L’éclairage s’allume lorsque l’éclairement naturel passe en-dessous d’une va-
leur seuil correspondant à −V0 , mais ne s’éteint que lorsqu’il passe au-dessus d’une
deuxième valeur seuil correspondant à V0 .

80
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 81

2. EXEMPLE DE PRODUCTION D’UN SIGNAL


ÉLECTRIQUE : OSCILLATEUR QUASI-
SINUSOÏDAL
2.1 Exemple fondamental : oscillateur à pont de Wien
Nous allons étudier un oscillateur quasi-sinusoïdal obtenu en bouclant un mon-
tage amplificateur (qu’on appelle chaîne d’action) par un filtre passe-bande du second
ordre (qu’on appelle chaîne de retour).
Prenons l’exemple de l’oscillateur
à pont de Wien représenté ci-contre.
La chaîne d’action est un mon-
tage amplificateur non inverseur, dont la
us R
fonction de transfert est µ = = 1+ 2 .
ue R1
La chaîne de retour (rétroaction) est un
filtre de Wien, ou pont de Wien, passe-
bande du second ordre, dont la fonction
de transfert est :
ue 1 1
β= = , où ω0 = ,
us  ω ω0  RC
3+ j − 
 ω0 ω 
ω
j
ue ω0
soit β = = 2
.
us ω  ω 
1+ 3 j − 
ω0  ω0 

2.2 Équations du système


Équivalence entre fonction de transfert et équation différentielle
Considérons un système linéaire pour lequel la sortie s et l’entrée e sont reliées
par une équation différentielle, qui est alors linéaire :

81
82 Partie II.  Électronique

ds dn s de dme
a0s + a1 + ... + an n = b0e + b1 + ... + bn m , avec (a0 , b0 ) ≠ (0,0) , soit :
dt dt dt dt
n
dk s m
dℓe
 ak dt k =  bℓ dt ℓ . L’entier n s’appelle l’ordre du système.
k =0 ℓ =0

Lorsque l’excitation t ֏ e(t ) est sinusoïdale, de pulsation ω, la réponse


t ֏ s(t ) en régime forcé est également sinusoïdale et de même pulsation (elle a la
même forme que l’excitation, et on dit que les signaux sinusoïdaux sont des fonctions
isomorphes des systèmes linéaires). On est en régime sinusoïdal forcé (r.s.f).
Le système étant linéaire, on peut utiliser la notation complexe. La réponse à
t ֏ e(t ) = E 2e j ωt est alors t ֏ s(t ) = S 2e j ( ωt +ϕ) .

s S jϕ
La fonction de transfert du système est H ( j ω) = = e = G(ω)e j ϕ( ω) .
e E
S(ω)
— G(ω) = H ( j ω) = , module de la fonction de transfert, est le gain : rapport de la
E
valeur efficace S du signal de sortie sur celle E du signal d’entrée (c’est aussi le rapport
des valeurs maximales).
— ϕ(ω) = arg [H ( j ω)] est le déphasage du signal de sortie par rapport à celui d’entrée.

ds
En régime sinusoïdal forcé, s(t ) = S 2e j (ωt +ϕ)  = j ωs , et plus générale-
dt
dk s n
dk s m
dℓ e
ment
dt k
= ( j ω)k s . L’équation différentielle  ak dt k =  bℓ dt ℓ qui relie en nota-
k =0 ℓ =0
tion complexe la sortie s et l’entrée e d’un système linéaire est la même que celle qui
n m
relie s et e. Elle s’écrit donc  ak ( j ω)k s =  bℓ ( j ω)ℓ e , d’où :
k =0 ℓ =0

m n
P ( j ω)
  ak ( j ω)k = Q( j ω) .
s
H ( j ω) = = bℓ ( j ω)ℓ La fonction de transfert est donc un
e ℓ =0 k =0
quotient de polynômes P et Q de la variable jω.

Inversement, la connaissance de la fonction de transfert permet de trouver


l’équation différentielle qui relie s et e. Pour cela, il suffit de :

s P ( j ω)
— Mettre H ( j ω) = sous la forme d’un quotient de polynômes de jω .
e Q( j ω)

82
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 83

n m
— Effectuer le produit en croix pour obtenir  ak ( j ω)k s =  bℓ ( j ω)ℓ e .
k =0 ℓ =0
k ℓ
d s de
— Utiliser les équivalences ( j ω)k s ↔ et ( j ω)ℓ e ↔
.
dt k
dt ℓ
Ainsi le passage par le r.s.f permet de trouver une équation différentielle qui est
valable quel que soit le régime étudié.

Application au filtre de Wien


On déduit de la fonction de transfert du pont de Wien l’équation différentielle
linéaire reliant ue à us par la chaîne de retour :
d2ue d ue du
( j ω)2 ue + 3 j ωω0 ue + ω02 ue = j ωω0 us ↔ 2
+ 3ω0 + ω02ue = ω0 s .
dt dt dt

Chaîne directe
Pour la chaîne directe, on a :
 R 
— us = 1 + 2  ue = µue si l’A.L.I est en fonctionnement linéaire, ce qui est vérifié si
 R1 
Vsat V
on a −Vsat < us < Vsat ⇔ − < ue < sat .
µ µ
Vsat V
— us = +Vsat si ue ≥ , et us = −Vsat si ue ≤ − sat , l’A.L.I étant alors saturé.
µ µ

2.3 Démarrage des oscillations


due +
En raison du bruit de fond, les conditions initiales ue (0+ ) et (0 ) ne sont
dt
pas rigoureusement nulles. Néanmoins on a −Vsat / µ < ue (0+ ) < Vsat / µ , donc l’A.L.I
est initialement en fonctionnement linéaire, ce qui entraîne us = µue . On en déduit :

d2ue due d2ue  R  du


+ ω0 [3 − µ ] + ω0 2ue = 0 ⇔ 2
+ ω0 2 − 2  e + ω02ue = 0 . Le coefficient
dt 2 dt dt  R1  dt
1 R2 
d’amortissement est σ = 2 −  . Ainsi :
2 R1 
— Si R2 / R1 < 2 , σ > 0 : le régime est amorti. Les signaux restent du bruit de fond.
— Si R2 / R1 > 2 , σ < 0 : le régime est amplifié. Les signaux divergent et le système
donne naissance à un signal.

On n’a donc un oscillateur que si R2 / R1 > 2 .

Nous nous placerons dans ce cas par la suite.

83
84 Partie II.  Électronique

L’oscillateur étant alimenté à partir de t = 0 , l’amplitude de ue augmente donc.


Vsat
Lorsque ue devient supérieur à , l’A.L.I sature et ue n’est plus régi par la
µ
Vsat
même équation différentielle. Par exemple, si à t 0 , ue = , on a par la suite :
µ
d2ue due
us = +Vsat , et ue est désormais régi par 2
+ 3ω0 + ω02ue = 0 . Le signal ue est
dt dt
Vsat
maintenant amorti… jusqu’à ce qu’il redevienne, à un instant t 0′ , inférieur à .
µ

Il s’ensuit une nouvelle phase où ue est amplifié, etc. Le système oscille donc
et atteint un régime périodique (établi) :

2.4 Simulations / Conditions d’oscillations quasi-sinusoïdales


On a tracé ci-après deux simulations avec σ = −0,5 : « σ est loin de 0 » et
σ = −0,00005 : « σ est proche de 0 ».
Plus σ est éloigné de 0, plus le régime transitoire est court, et moins les oscilla-
tions en régime établi sont sinusoïdales.
Plus σ est proche de 0, donc R2 / R1 proche de 2, plus le régime transitoire est
long, et plus les oscillations en régime établi sont proches d’une sinusoïde. On a alors
quasiment à tout instant :

84
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 85

d2ue
+ ω0 2ue = 0 , donc des oscillations quasi-sinusoïdales de pulsation ω0 .
dt 2
On peut, à l’aide d’un asservissement, contrôler l’amplitude des oscillations, et
rendre le signal plus pur en le filtrant.

2.5 Entretien des oscillations


On cherche à quelle condition un montage bouclé,
sans signal d’entrée, peut osciller de façon quasi-sinusoïdale.
Il faut d’abord que la chaîne d’action et la chaîne de
retour puissent fonctionner dans le domaine linéaire (pas
d’A.L.I bouclé uniquement sur l’entrée non inverseuse par
exemple…).
Supposons que le système soit en régime sinusoïdal
(qui n’est pas un régime sinusoïdal forcé, puisqu’il n’y a ici aucune excitation sinu-
soïdale imposée au système par un G.B.F, mais un régime spontané). Cela ne change
rien pour le traitement des équations : on peut utiliser la notation complexe.
On a donc us = µ( j ω)ue et ur = ue = β( j ω)us , d’où ue [1 − µ( j ω)β( j ω)] = 0 .

85
86 Partie II.  Électronique

La condition pour avoir un signal sinusoïdal non nul dans le circuit est :
µ( j ω)β( j ω) = 1 . On appelle cette condition le critère de Barkhausen.
Remarquons qu’il faut également que l’ordre de T ( j ω) = µ( j ω)β( j ω) soit au
moins égal à 2 pour que l’équation différentielle régissant ue admette des solutions
sinusoïdales.

La relation complexe µ( j ω)β( j ω) = 1 fournit deux équations réelles qui peuvent


se combiner pour donner :
— La condition pour que le système soit le siège d’oscillations sinusoïdales.
— La pulsation de ces oscillations.
Pour l’oscillateur à pont de Wien, la condition µ( j ω)β( j ω) = 1 donne :
ω
j 2
 R2  ω0  R  ω  ω  ω
1 +  2
= 1 ⇔ j 1 + 2  = 1−   +3j .
 R1  ω  ω   R1 0ω ω
 0 ω 0
1+ 3 j − 
ω0  ω0 
On retrouve, en prenant la partie imaginaire et la partie réelle :
— La condition R2 / R1 = 2 pour que le système soit le siège d’oscillations sinu-
soïdales.
1
— La pulsation ω = ω0 = de ces oscillations.
RC
On a vu qu’en pratique, une sinusoïde de pulsation ω0 doit être légèrement
amplifiée par la boucle : il faut ur > ue ⇔ µβ > 1 (cette notation signifie que µβ doit
≃ ≃
être légèrement plus grand que 1).
Ainsi l’oscillateur à pont de Wien fournira des oscillations quasi-sinusoïdales de
1
pulsation ω0 = si R2 > 2R1 .
RC ≃

3. ACQUISITION : ÉCHANTILLONNAGE ET
QUANTIFICATION
3.1 Principe de la numérisation
Un signal physique s (température, pression, champ électrique…) est une fonc-
tion du temps à évolution continue, définie de R vers R . Pendant une durée finie, le
signal peut prendre, à une infinité d’instants différents, une infinité de valeurs s(t). Un
tel signal est qualifié d’analogique.
Un capteur permet de convertir un signal physique en une tension électrique,
qui peut alors être numérisée. L’opération de numérisation correspond à la succession
de 2 étapes :

86
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 87

— L’échantillonnage qui permet de prélever un en-


semble de valeurs prises à des instants discrets { t k } .
— La quantification qui fait correspondre à chacun de
ces échantillons une valeur approchée parmi un
nombre fini de valeurs, codées en binaire sur N bits (2
bits sur l’exemple de la figure ci-contre).
Cette opération est réalisée à l’aide d’un C.A.N
(convertisseur analogique / numérique) ; l’opération inverse avec un C.N.A.
Alors que le traitement d’un signal analogique est réalisé par des circuits élec-
troniques contenant des conducteurs ohmiques, des condensateurs, des A.L.I…, le
traitement d’un signal numérique est effectué à l’aide d’un calculateur. Il en résulte une
plus grande reproductibilité. Par exemple, la fréquence de coupure d’un filtre numé-
rique est une donnée numérique de l’algorithme de calcul, alors que la fréquence de
coupure d’un filtre analogique est entachée d’une incertitude relative du même ordre
de grandeur que celle des résistances et capacités qui le constituent (en général de 5
à 10%). D’autre part, les algorithmes peuvent être modifiés pour faire évoluer les fonc-
tionnalités d’un matériel, sans modification de sa carte électronique. Enfin, la présence
d’un bruit additif de faible niveau n’est pas gênante car on reconstitue les 0 et les 1 à
l’aide d’une détection à seuil. Un signal numérique est plus robuste qu’un signal ana-
logique, et on peut réaliser des copies parfaites d’un signal numérique.

3.2 Théorème de Shannon

Le signal se obtenu en échantillonnant s aux instants { t k = kTe } , avec k ∈ Z ,


Te la période d’échantillonnage, et fe = 1/ Te la fréquence d’échantillonnage, n’a pas
le même spectre que s.
Le spectre de se est périodique, de période fe . C’est la somme de l’ensemble
des spectres que l’on obtient en translatant celui de fe ⋅ s de nfe , avec n ∈ Z .

On admettra ce résultat.
Si l’amplitude des composantes sinusoïdales de s s’annule au-dessus d’une
fréquence maximale fmax , deux cas se présentent :
— Si fe − fmax ≥ fmax , les différentes parties du spectre de se ne se chevauchent pas.

87
88 Partie II.  Électronique

— Si fe − fmax < fmax , les différentes parties du spectre de se se chevauchent : la por-


tion du spectre de se comprise entre −fmax et fmax ne s’identifie pas au spectre de s.

Pour que l’opération d’échantillonnage soit réversible, c’est-à-dire pour pouvoir


repasser sans perte d’information de se à s, il ne faut donc pas que les différents mo-
tifs du spectre se chevauchent, ce qui implique fe − fmax ≥ fmax , soit fe ≥ 2fmax .

Théorème de Shannon : Pour que l’échantillonnage se fasse sans perte d’infor-


mation, la fréquence d’échantillonnage doit être supérieure ou égale à deux fois la
fréquence maximale du signal : fe ≥ 2fmax .

On peut également écrire cette condition sous la forme fmax ≤ fe / 2 = fN . La fré-


quence fN est appelée fréquence de Nyquist.
On pourra alors retrouver le signal d’origine s par filtrage passe-bas :

3.3 Repliement de spectre


Si le spectre du signal a une amplitude non négligeable pour des fréquences
supérieures à la fréquence de Nyquist fe / 2 , des composantes fictives apparaissent
dans le spectre du signal échantillonné (composantes qui ne sont pas présentes dans
le spectre du signal réel).

88
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 89

Illustrons le problème avec un signal sinusoïdal s de fréquence f0 = 100 Hz :


s0 −2πjf0t s0 2πjf0t
s(t ) = s0 cos(2πf0t ) = e + e .
2 2

Si s est échantillonné à fe = 250 Hz > 2f0 = 200 Hz , le critère de Shannon est


respecté. Il y a plus d’un échantillon par demi-période (ronds sur la courbe ci-dessus)
et le signal s est correctement échantillonné.
Si s est échantillonné à fe = 150 Hz < 2f0 = 200 Hz , le critère de Shannon n’est
plus respecté. Il n’y a plus assez d’échantillons (croix sur la courbe ci-dessus) et c’est
une sinusoïde de fréquence 50 Hz, plus basse que celle de s, qui apparaît.
Le spectre du signal échantillonné permet de comprendre ce phénomène. Le
spectre du signal réel contient deux raies pour les fréquences ±f0 .

L’effet de l’échantillonnage est une répétition périodique du spectre réel : on


retrouve dans l’intervalle de fréquences [0, fe / 2 = 75 Hz] représenté à l’oscilloscope
une raie correspondant à la fréquence −f0 translatée de fe : raie fictive de fréquence
fe − f0 = 50 Hz qui n’existe pas dans le signal réel, alors que la raie réelle de fréquence
(fe − f0 ) + f0 fe
f0 n’apparaît pas ! Comme = , la raie fictive et la raie réelle sont symé-
2 2
triques par rapport à la fréquence de Nyquist fe / 2 : on parle de repliement de spectre.

89
90 Partie II.  Électronique

3.4 Filtre anti-repliement


Nous avons postulé l’existence d’une fréquence maximale fmax dans le spectre
d’un signal, mais une telle fréquence maximale n’existe pas pour un signal de durée
finie, et on a nécessairement repliement de spectre.
Prenons l’exemple de l’échantillonnage d’un signal sonore. Le spectre audible
correspond aux fréquences comprises entre 20 Hz et 20 kHz : nous supposerons pour
simplifier que c’est le spectre des fréquences inférieures à 20 kHz.
Un microphone capte des fréquences non audibles (supérieures à 20 kHz).
Lorsqu’on échantillonne à la fréquence fe le signal capté, la partie du spectre non au-
dible de ce signal, symétrique du spectre audible par rapport à la fréquence de Nyquist
fe / 2 , va se replier dans le domaine audible, détériorant fortement le signal sonore.
Pour éviter cela, on utilise avant l’échantillonnage un filtre passe-bas anti-replie-
ment qui atténue fortement ces fréquences, sans atténuer celles du spectre audible.
Ce filtre est analogique puisqu’il intervient avant la numérisation.
La fréquence fe = 40 kHz ne convient pas, car même avec des ordres très éle-
vés, les filtres analogiques passe-bas ne peuvent pas passer brutalement d’un gain G
proche de 1 pour f < 20 kHz à un gain proche de 0 pour f > 20 kHz . La fréquence
d’échantillonnage a été fixée à fe = 44,1 kHz , ce qui donne une marge de 4,1 kHz pour
que le gain du filtre anti-repliement passe de 1 à 0.

3.5 Quantification : codage binaire


L’échantillonnage permet de passer d’un signal continu dans le temps à un en-
semble dénombrable de valeurs numériques. Néanmoins, le signal échantillonné est
encore analogique : chaque échantillon peut encore prendre une infinité de valeurs
dans un intervalle donné, ce qui ne permet toujours pas de le stocker ou de le traiter.
On discrétise alors ces valeurs et on les code en binaire : c’est la quantification du
signal.
Pour un C.A.N qui quantifie sur N bits, le nombre d’états possibles en sortie est

90
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 91

2N : il renvoie des entiers p ∈ cde 0,2N − 1fgh , soit entre (000...00)2 et (111...11 )2 en code

binaire.
Pour une quantification uniforme, si la plage de tensions traitées par le C.A.N
est comprise entre 0 V et une valeur maximale en volt vPE (valeur « pleine échelle »),
la tension d’entrée analogique v a est comparée aux valeurs seuils v k = kq avec

k ∈ ced1,2N − 1fgh , où q = vPE / 2N est le quantum de tension (plus petit écart entre deux
tensions qui seront à coup sûr codées différemment). La figure ci-dessous représente
la quantification linéaire par défaut d’un C.A.N à 2 ou 3 bits.

L’échantillonnage n’altère pas le signal si fe ≥ 2fmax . Ce n’est pas le cas de la


quantification puisque les valeurs des échantillons sont approximées.
Le quantum dépend du nombre N de bits en sortie, appelé résolution.
Dans le tableau ci-contre, on donne q pour diffé- N q
rentes valeurs de N, si vPE = 8 V . Plus la résolution est 8 31,25 mV
10 7,81 mV
élevée, plus la sortie numérique est proche du signal
12 1,95 mV
analogique d’entrée, le cas idéal correspondant à 14 488 µV
N → ∞ (cas limite où il n’y aurait pas de pertes d’infor-
mation).

3.6 Analyse spectrale numérique


Principe
L’algorithme F.F.T (Fast Fourier Transform : transformée de Fourier rapide) cor-
respond à une transformée de Fourier discrète où une partie du signal de durée Ta est
échantillonnée en 2 p valeurs (l’algorithme nécessite que le nombre d’échantillons soit
une puissance de 2).
Ta 1 2p
Te = est la période d’échantillonnage, fe = = est la fréquence d’échantillon-
2p Te Ta
nage.

91
92 Partie II.  Électronique

Pour les oscilloscopes numériques les plus


courants, p = 11 : on a 2048 échantillons. La durée
d’acquisition Ta correspond souvent à la partie cen-
trale de l’écran de l’oscilloscope. Par exemple,
l’écran est divisé verticalement en 10 carreaux et
l’acquisition se fait sur les 8 carreaux centraux.

Problèmes liés à Ta finie

— Résolution fréquentielle.
Les échantillons du signal s dont on recherche la transformée de Fourier sont
pris sur une durée Ta finie. Les calculs ne se font donc pas sur la fonction t ֏ s(t ) ,
mais sur la fonction sTa , Ta -périodique, qui ne s’identifie à la fonction s que sur l’inter-
valle [0,Ta [ . La fonction sTa s’appelle « périodisée de s ». L’algorithme calcule donc
n nfe
en réalité 2p coefficients d’une série de Fourier pour les fréquences = , avec
Ta 2p

n ∈ ��� 0,2 p − 1��� . Le plus souvent, seules sont affichées les fréquences correspondant

aux valeurs n ∈ ��� 0,2 p −1��� , c’est-à-dire qui vont du continu f = 0 jusqu’à la fréquence

de Nyquist f = fe / 2 .

La résolution en fréquence est d’autant meilleure que Ta est grand : l’écart


1/ Ta entre deux raies du spectre calculé par l’algorithme diminue si Ta augmente.

— Fenêtrage
Dans le cas d’un signal périodique, si le signal s analysé contient un nombre
entier de périodes, la périodisation ne crée pas de discontinuité.
En revanche, dans le cas où la partie du signal analysée ne contient pas un
nombre entier de périodes, l’algorithme F.F.T réalise l’analyse de Fourier d’un signal
périodique discontinu, les discontinuités étant provoquées par les transitions entre les
points de début et de fin. L’effet est l’apparition de raies parasites autour des fré-
quences que contient réellement le signal.
Le fait d’appliquer une fenêtre au signal s (on multiplie le signal par une fonction
adaptée qui s’annule sur les bords de la zone d’acquisition) réduit les discontinuités et
améliore la précision des mesures de fréquence et d’amplitude.
Le choix d’une fenêtre F.F.T (différentes fenêtres peuvent être implémentées)
résulte d’un compromis entre la résolution en fréquence et la précision en amplitude.
Il dépend donc de ce qu’on veut mesurer et des caractéristiques du signal.

92
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 93

Citons :
— La fenêtre rectangulaire : Rectangular
Elle correspond à un échantillonnage sans fenêtre appliquée. Elle convient pour
des signaux périodiques contenant un nombre entier de périodes, et pour des signaux
transitoires qui n’ont pas de discontinuités entre le début et la fin de la fenêtre.
— La fenêtre de Hanning
Elle est utile pour des signaux périodiques lorsqu’on cherche à séparer deux
fréquences proches, et pour effectuer des mesures de fréquence.
— La fenêtre à sommet plat, Flattop
C’est la mieux adaptée pour effectuer des mesures d’amplitude. La résolution
en fréquence est moins bonne qu’avec la fenêtre de Hanning.

Paramètres optimaux
L’échantillonnage est, comme on l’a vu, responsable d’une périodisation du
spectre avec une période fe . Il faut donc absolument échantillonner avec une fré-
quence fe ≥ 2fmax pour éviter le repliement de spectre. Néanmoins, le nombre

d’échantillons N = 2p étant limité, prendre fe trop grande revient à prendre Ta = N / fe


trop petite, et donc à perdre en résolution fréquentielle.

Lorsqu’on a le choix (c’est le cas pour les cartes d’acquisition), on prend N


grand, puis on s’assure que le critère de Nyquist fe ≥ 2fmax est vérifié, mais en limitant
la valeur de fe pour obtenir la résolution en fréquence souhaitée.
On évite enfin de faire apparaître des discontinuités en analysant le signal entre
deux points de même ordonnée, ou en utilisant un fenêtrage.

93
94 Partie II.  Électronique

Il ne faut cependant pas prendre N trop grand car on peut alors rencontrer des
problèmes de stockage ou de temps de calcul trop élevé lors du traitement du signal.

4. EXEMPLE DE TRAITEMENT : DÉTECTION


SYNCHRONE
4.1 Multiplieur
Fonction réalisée
Un multiplieur est un composant actif, alimenté, comme un A.L.I, par un géné-
rateur de tension continue de 30 V, dont le point milieu est la référence des potentiels
(« masse ») du montage contenant le multiplieur. Le multiplieur possède deux bornes
d’alimentation portées aux potentiels +Vcc = +15 V et −Vcc = −15 V .

Un multiplieur admet deux tensions d’entrée : u1 = U − V et u2 = W − X . Il four-


nit alors en sortie une tension us = Y − Z = k ⋅ u1 ⋅ u2 , avec k = 0,1 V -1 . On impose sou-
vent Z = 0 en connectant la borne corres-
pondante à la masse du montage. Le
schéma-bloc du multiplieur est donné ci-
contre.
Le multiplieur est un composant non-linéaire puisque si on multiplie u1 et u2
par λ ∈ R , la réponse us est multipliée par λ 2 .

— Les courants dans les entrées sont très faibles (du nA au µA) et peuvent être con-
sidérés comme nuls.

Principaux défauts linéaires et non-linéaires


Le multiplieur présente des défauts similaires à ceux de l’A.L.I, dont voici les
principaux :
— Un comportement passe-bas comme l’A.L.I, mais avec une grande bande passante
d’environ 1 MHz.

94
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 95

— La tension us de sortie du multiplieur est bornée par des valeurs proches des ten-
sions d’alimentation : −Vsat ≤ us ≤ Vsat . La valeur k = 0,1 V -1 est choisie pour ne pas
avoir de saturation avec des entrées allant jusqu’à une dizaine de volts.

4.2 Détection synchrone d’un signal sinusoïdal


Si un signal est constitué d’une somme de sinusoïdes, comme c’est le cas pour
un signal périodique, on peut détecter une de ses composantes en exploitant les for-
mules de trigonométrie suivantes, prises en valeur moyenne :
  0 si Ω2 ≠ Ω1
1 
cos(Ω1t )cos(Ω2t ) = cos [(Ω1 − Ω2 )t ] + cos [(Ω1 + Ω2 )t ]  =  1 .
2 �������� �   si Ω2 = Ω1
 0   2
  0 si Ω2 ≠ Ω1
1 
sin(Ω1t )sin(Ω2t ) = cos [(Ω1 − Ω2 )t ] − cos [(Ω1 + Ω2 )t ]  =  1 .
2 �������� �   si Ω2 = Ω1
 0   2
 
1 0 si Ω2 ≠ Ω1
sin(Ω1t )cos(Ω2t ) = sin [(Ω1 − Ω2 )t ] + sin [(Ω1 + Ω2 )t ]  =  .
2 ��� ����� �  0 si Ω2 = Ω1
 0 
Prenons l’exemple d’un signal ue T-périodique qui peut être décomposé en sé-
+∞
rie de Fourier : ue (t ) = c0 +  [an cos(nΩt ) + bn sin(nΩt )] , en posant Ω = 2π / T .
n =1

En faisant le produit de ue par t ֏ u0 (t ) = U0 cos(n0 Ωt ) , avec n0 ∈ N∗ , puis en


prenant la valeur moyenne à l’aide d’un filtre passe-bas de gain unité dans la bande
passante, et de pulsation de coupure ωc telle que ωc << Ω , on obtient un signal us
constant proportionnel à an0 : us = kU0an0 / 2 .

On obtient de même un signal de sortie us = kU0bn0 / 2 constant et proportion-


nel à bn0 en faisant le produit de ue par t ֏ u0 (t ) = U0 sin(n0 Ωt ) .

95
96 Partie II.  Électronique

De façon générale, pour détecter une pulsation ω0 présente dans un signal, on


multiplie ce dernier par un signal sinusoïdal de pulsation ω = ω0 , et on prend la valeur
moyenne du produit à l’aide d’un passe-bas de pulsation de coupure ωc << ω0 afin
d’obtenir un signal de sortie us constant.

4.3 Application à la démodulation d’amplitude


Nécessité de la modulation
Pour transmettre par voie hertzienne un signal sonore ou vidéo, on le convertit
en onde électromagnétique. Cependant, on doit au préalable modifier son spectre, en
le décalant vers de plus hautes fréquences, pour plusieurs raisons :
— Différents signaux, tous dans la même bande de fréquences, se mélangeraient.
— Le signal serait perturbé par les signaux industriels, comme le 50 Hz du secteur.
∆f f −f
— Les variations relatives de fréquence = 2 max min sont très grandes, ce qui
fmoyen fmax + fmin
provoque la déformation du signal car la vitesse de propagation dans l’air, milieu dis-
persif, dépend de la fréquence. ∆f / fmoyen est de l’ordre de 200% car fmin << fmax pour
les signaux audio dont le spectre est compris entre 20 Hz et 20 kHz, et les signaux
vidéo dont le spectre est compris entre 50 Hz et 6 MHz.
— On montre que les antennes rectilignes permettant de capter de faibles signaux
doivent avoir une longueur au moins égale à un quart de la longueur d’onde du signal
électromagnétique reçu, or λ = c / f est compris entre 15 km et 15 000 km pour les
fréquences sonores…

Les différentes modulations


On procède alors à la mo-
dulation du signal : le signal à
transmettre module un signal, ap-
pelé porteuse, dont la fréquence
fp est beaucoup plus grande que
la fréquence fm du signal modu-
lant. On peut moduler soit l’ampli-
tude de la porteuse (modulation
d’amplitude, ou AM pour ampli-
tude modulation), soit sa fré-
quence (modulation de fréquence,
ou FM pour frequency modula-
tion), soit encore sa phase (modu-
lation de phase, ou PM pour phase
modulation).

96
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 97

Les signaux de la figure précédente correspondent au cas où le signal modulant


um à transmettre est un signal numérique binaire (il ne prend qu’une valeur haute cor-
respondant à 1 et une valeur basse correspondant à 0). La fréquence fp de la porteuse
doit ici être très grande devant la fréquence d’échantillonnage fe du signal modulant.

Modulation d’amplitude
Le signal à transmettre, signal modulant um , est dans un premier temps sup-
posé sinusoïdal : um (t ) = Um cos( ωmt ) .

Le signal modulé ue est construit à partir du signal modulant et d’une porteuse


ωp 1 ω 1
sinusoïdale de fréquence fp = = très supérieure à la fréquence fm = m =
2π Tp 2π Tm
du signal modulant : ue (t ) = U0 [1 + m cos(ωmt )] cos(ωpt ) . Le coefficient m ≥ 0 sans di-
mension s’appelle taux de modulation, il est défini pour un signal modulant sinusoïdal,
et est alors proportionnel à son amplitude Um : m = K ⋅ Um .

ue s’exprime sous la forme du produit de t ֏ F (t ) = U0 [1 + m cos(ωmt )] par une


fonction sinusoïdale t ֏ cos(ωpt ) , comprise entre les valeurs −1 et 1, et qui varie,
puisque ωp >> ωm , beaucoup plus rapidement que F. La courbe représentative de ue
oscille donc entre deux enveloppes d’équations ±U0 [1 + m cos(ωmt )] . Dans le cas où
m < 1, ces enveloppes ne se coupent pas car F > 0 ∀t ; dans le cas où m > 1 , elles
se coupent (on parle de surmodulation).

97
98 Partie II.  Électronique

On a ue (t ) = U0 cos(ωpt ) + m cos(ωpt )cos(ωmt ) , soit :

 m m 
ue (t ) = U0 cos(ωpt ) + cos (ωp + ωm )t  + cos (ωp − ωm )t   : le spectre de ue / U0
 2 2 
contient trois raies de pulsations ωp − ωm , ωp et ωp + ωm , beaucoup plus grandes que
la pulsation ωm du signal modulant.

Un signal modulant quelconque se décompose en somme de sinusoïdes, par


exemple um (t ) = Um1 cos(ωm1t ) + Um2 cos(ωm2t ) .
On a alors ue (t ) = U0 1 + K (Um1 cos(ωm1t ) + Um2 cos(ωm2t ) )  cos(ωpt ) . D’où :
ue ( t ) KUm1 KUm1
= cos(ωpt ) + cos (ωp + ωm1)t  + cos (ωp − ωm1)t 
U0 2 2
KUm2 KUm2
+ cos (ωp + ωm2 )t  + cos (ωp − ωm2 )t 
2 2

On retrouve bien, à un coefficient de proportionnalité K / 2 près, le spectre de


um dans le spectre du signal modulé ue , mais translaté de ωp (bande latérale supé-
rieure), et aussi la bande symétrique de cette bande par rapport à ω = ωp (bande laté-
rale inférieure), ainsi qu’une raie pour ω = ωp .

Si ωmax est la plus grande pulsation pour laquelle l’amplitude est non négli-
geable dans le spectre de um , les variations relatives de pulsation sont désormais très
∆ω 2ωmax
faibles : = << 1 (le spectre du graphe précédent n’est pas à l’échelle).
ωmoyen ωp

Démodulation d’amplitude par détection synchrone


Le spectre du signal modulé ne contenant pas la pulsation ωm , il est nécessaire
de recourir à une opération non linéaire (une opération linéaire ne modifierait pas les
pulsations du signal) pour démoduler. Le schéma-bloc de la démodulation par détec-
tion synchrone est le suivant :

98
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 99

Le signal modulé ue (t ) = U0 [1 + m cos(ωmt )] cos(ωpt ) est tout d’abord multiplié


par un signal up (t ) = Up cos(ωpt ) synchrone (de même fréquence) et en phase avec la
porteuse, ce qui donne le nom à ce procédé de démodulation.

On a donc, en sortie du multiplieur, une tension u :


kU0Up
u(t ) = kU0Up [1 + m cos(ωmt )] cos2 (ωpt ) = [1 + m cos(ωmt )] ⋅ 1 + cos(2ωpt ) .
2
En posant U = kU0Up / 2 , on obtient :
 m m 
u(t ) = U 1 + m cos(ωmt ) + cos(2ωpt ) + cos (2ωp − ωm )t  + cos (2ωp + ωm )t   .
 2 2 

Grâce à cette multiplication, on retrouve, à un coefficient de proportionnalité


près, le spectre de um (ici la raie de pulsation ωm ) dans le spectre de u.

On y trouve aussi une composante continue ( ω = 0 ), le spectre de um translaté


de 2ωp (bande latérale supérieure), la bande symétrique de cette bande par rapport à
ω = 2ωp (bande latérale inférieure), et enfin une raie pour ω = 2ωp .
Pour extraire le signal um , il est plus facile de procéder en deux étapes que
d’appliquer directement un filtre passe-bande :
— On effectue un filtrage passe-bas de gain unité dans la bande passante, et de pul-
sation de coupure ωc telle que ωm << ωc << ωp . On élimine ainsi les composantes

2ωp − ωm , 2ωp et 2ωp + ωm . Le signal de sortie du filtre est us (t ) = U [1 + m cos(ωmt )] .


— On effectue un filtrage passe-haut de gain unité dans la bande passante, et de
pulsation de coupure ω′c telle que ω′c << ωm . On élimine ainsi la composante continue.
Le signal de sortie de ce filtre est bien proportionnel au signal que l’on cherchait à
transmettre : us′ (t ) = Um cos(ωmt ) = KU ⋅ Um cos(ωmt ) = KU ⋅ um (t ) .

99
100 Partie II.  Électronique

5. FILTRAGE ANALOGIQUE ET NUMÉRIQUE


5.1 Réponse à un signal T-périodique
On considère un système linéaire. On se place en régime forcé (établi).
Rappelons que la réponse à un signal d’entrée sinusoïdal de pulsation ω est un
signal sinusoïdal de même pulsation, d’amplitude différente de celle du signal d’entrée,
et déphasé par rapport à ce même signal.
La fonction de transfert H ( j ω) = G(ω)e j ϕ( ω) permet de trouver cette réponse en

notation complexe : si e(t ) = E 2e j Ωt , alors s(t ) = G(Ω )E 2e [


j Ωt +ϕ( Ω )]
. En repassant
en réel : la réponse à e(t ) = E 2 cos(Ωt ) est s(t ) = G(Ω)E 2 cos [ Ωt + ϕ(Ω)] .
Cette propriété n’est pas vraie pour un signal d’entrée non sinusoïdal : par
exemple une entrée en créneaux donnera rarement une sortie en créneaux. En parti-
culier, multiplier un signal non sinusoïdal par H ( jΩ ) n’a pas de sens puisque ce signal
ne contient pas qu’une seule pulsation Ω !

En revanche, la linéarité du système permet d’écrire que la réponse à une


somme de signaux sinusoïdaux de pulsations ω1 , ω2 ,… est la somme des réponses
à chaque signal pris séparément.

Dès lors, l’analyse de Fourier est très utile puisqu’elle permet justement de dé-
composer tout signal d’entrée T-périodique en une somme de signaux sinusoïdaux de
pulsations ω = 0 (signal constant égal à la valeur moyenne du signal), ω = Ω = 2π / T
(fondamental), ω = 2Ω (harmonique de rang 2), ω = 3Ω , etc…

100
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 101

+∞
La réponse exacte à un signal périodique : e(t ) = c0 +  cn cos [nΩt + ψn ] est :
n =1
+∞
s(t ) = H (0) ⋅ c0 +  G(nΩ)cn cos [nΩt + ψn + ϕ(nΩ)] .
n =1

5.2 Filtrage analogique


Le critère à 3 dB permet de trouver rapidement la réponse approximée à un
signal T-périodique : on néglige dans le signal de sortie toute composante ne se trou-
vant pas dans la bande passante.
Cependant ce critère peut être mis en défaut car il ne tient pas compte du poids
des différents harmoniques dans le signal d’entrée e. Si certains harmoniques de e
hors de la bande passante du filtre ont une amplitude trop grande, ils peuvent, même
après filtrage (c’est-à-dire dans le signal de sortie s), ne pas être négligeables devant
les harmoniques de s se trouvant dans la bande passante.

101
102 Partie II.  Électronique

Prenons l’exemple d’un filtre passe-bande du second ordre de fonction de trans-


1
fert H ( j ω) = censé ne sélectionner que l’harmonique de rang 2 d’un
 ω ω0 
1 + jQ  − 
 ω0 ω 
signal e périodique : on prend ω0 = 2Ω , où Ω est la pulsation fondamentale de e.
En réalité, seule la composante continue est rigoureusement annulée dans le
signal de sortie puisque H (0) = 0 .

— Dans un premier cas ( Q = Q1 ), on donne ci-dessus les spectres de l’entrée et de la


sortie. Bien que seul l’harmonique de rang 2 se trouve dans la bande passante, on ne
peut pas négliger le fondamental dans le signal de sortie : le filtre n’est pas assez
sélectif.
— Dans le deuxième cas, le facteur de qualité Q2 > Q1 est plus grand. Cette fois ci,
 
l’approximation s(t ) ≃ G(2Ω) c2 cos 2Ωt + ψ 2 + ϕ(2Ω ) est nettement meilleure : le si-
���  � � � 
=1 ici  = 0 ici 
gnal de sortie sera quasiment sinusoïdal.
Remarquons que si l’étude du gain suffit pour savoir quels harmoniques négli-
ger, le calcul des déphasages ϕ( nΩ ) est nécessaire pour connaître la réponse s.

102
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 103

5.3 Filtres actifs / passifs et cascades de filtres


Filtres passifs
Les filtres passifs sont des réseaux de composants non alimentés. On a deux
limitations pour ce type de filtres :
— Il n’y a pas d’amplification dans la bande passante.
— La fonction de transfert du filtre dépend de la charge.
Prenons l’exemple d’un filtre RC passe-haut du premier ordre :

jRCω
En sortie ouverte ( i s = 0 ), la fonction de transfert est H ( j ω) = . Il n’y a
1 + jRCω
pas d’amplification dans la bande passante puisque H0 = 1. D’autre part, si on place
une charge, par exemple résistive, le courant de sortie i s n’est plus nul : les courants
qui traversent le condensateur et la résistance du filtre ne sont plus identiques (on n’a
plus en r.s.f une structure de diviseur de tension). La fonction de transfert dépend donc
de la charge, pas uniquement des composants du filtre. Plus précisément ici, si on
RRc
note Req = la résistance équivalente de l’association parallèle R // Rc , la fonc-
R + Rc
jReqCω
tion de transfert est maintenant H ′( j ω) = ≠ H ( j ω) .
1 + jReqCω
Filtres actifs

Les filtres actifs comprennent des composants alimentés comme les A.L.I, et
offrent la possibilité d’avoir amplification dans la bande passante et/ou une fonction de
transfert indépendante de la charge, c’est-à-dire du courant de sortie i s .

Pour la charge, le montage est


alors une source idéale de tension.
Prenons l’exemple de l’amplifi-
cateur inverseur ci-contre. La fonction
de transfert est H ( j ω) = H0 = −2 . On a
donc ici amplification dans la bande
passante puisque H0 > 1 , et H ( jω)
est indépendant de la charge.

103
104 Partie II.  Électronique

Cascade de filtres
Deux filtres sont en cascade quand la tension de sortie du premier est appliquée
à l’entrée du deuxième.

La fonction de transfert de l’ensemble, H ( j ω) = us / ue , se décompose en :

u2 u1
H ( j ω) = ⋅ = H 2 ( j ω) ⋅ H1( j ω) . On en déduit GdB = GdB1 + GdB2 et pour les
u1 ue
déphasages : ϕ = ϕ1 + ϕ2 : les diagrammes de Bode de deux filtres en cascade se
somment.

Prenons l’exemple du filtre RC ci-contre dont la


1
fonction de transfert est Ho ( jx ) = en sortie ou-
1 + jx
verte, avec x = RCω .
Si on souhaite réaliser un filtre de fonction de
transfert H ( jx ) = Ho2 ( jx ) , on peut penser à mettre en
cascade deux filtres RC identiques :

Cependant, comme le premier filtre n’est plus en sortie ouverte, sa fonction de


transfert n’est plus la même qu’en sortie ouverte : H1( jx ) ≠ Ho ( jx ) . Son calcul fait in-
tervenir la charge que constitue le deuxième filtre, et la décomposition :
H ( jx ) = H1( jx ) ⋅ H2 ( jx ) ne présente pas d’intérêt.
Pour calculer H, il faut appliquer la loi des mailles, la loi des nœuds en N, et les
relations entre tension et intensité pour chaque dipôle :
 i − i s1
ue = Ri + i s1 = jC ωus
 maille 1 jC ω  i − i s1 1
 ⇔ jC ω(ue + us ) , et = (R + )i s1 , d’où :
 i s1 i = jC ω maille 2 jC ω
us = jCω  1 + jRC ω

104
Chapitre 1.  Production, acquisition et traitement d’un signal électrique 105

ue + us
i = ( jRCω + 2)i s1 , soit =( jRC ω + 2)us . On trouve H ( jx ) = 1/ (1 + 3 jx − x 2 ) .
1 + jRC ω
Du point de vue calculatoire aussi bien que pour la conception de filtres d’ordre
élevé, la mise en cascade de montages passifs n’est pas aisée.
En revanche, intercaler un montage suiveur entre les deux cellules RC permet
de maintenir le premier filtre en sortie ouverte, tout en appliquant sa tension de sortie
à l’entrée du second filtre. On obtient bien H ( jx ) = Ho2 ( jx ) = 1/ (1 + 2 jx − x 2 ) .

Lorsqu’on place un montage suiveur en sortie d’un filtre, ce dernier est en sortie
ouverte et sa fonction de transfert est donc indépendante de la charge.

5.4 Filtrage numérique : exemple du filtrage passe-bas du premier ordre


On peut appliquer un filtrage passe-bas à une entrée e à partir des valeurs
{ e(kTe ) = ek } en passant dans le domaine temporel. En effet, la fonction de transfert
s H0 ds
H= = est équivalente à l’équation différentielle τ + s = H0e . Si la période
e 1 + j ωτ dt
d’échantillonnage est suffisamment petite devant la durée caractéristique de l’évolu-
ds
tion de s, on peut approximer la dérivée
dt
[kTe ] de la façon suivante :
ds s [(k + 1)Te ] − s [ kTe ] sk +1 − sk
dt
[kTe ] ≃ Te
=
Te
. Il s’agit de la méthode, ou schéma, d’Eu-

ler, qui permet d’exprimer s [(k + 1)Te ] = sk +1 en fonction de sk et de ek :


Te
sk +1 = sk +
τ
[H0ek − sk ] . Cette relation de récurrence permet de déterminer tous les
sk si on se donne une condition initiale s0 = s(t = 0) . Cette C.I n’intervient que pour le
régime transitoire, or la réponse fréquentielle correspond au régime forcé.
Prenons l’exemple d’un filtre de gain statique H0 = 2 et de fréquence de cou-
1 H0
pure fc = = 10 Hz : H = . L’entrée de ce filtre est sinusoïdale, de fré-
2πτ 1 + jf / fc
quence f0 = 50 Hz et d’amplitude E0 = 1 V : ue = E0 cos(2πf0t ) .
La réponse analogique est us = G(f0 )E0 cos [ 2πf0t + ϕ(f0 )] avec :

105
106 Partie II.  Électronique

H 0 E0
G(f0 )E0 = = 0,392 V , et ϕ(f0 ) = − arctan(f0 / fc ) = −1,37 rad .
1 + (f0 / fc )2

On a tracé ci-contre l’en-


trée, la réponse analogique en
r.s.f, et la réponse numérique
pour la période d’échantillon-
nage Te = 0,1 ms , durée suffi-
samment petite devant la pé-
riode T0 = 20 ms pour que les
deux réponses soient très
proches en régime forcé
(après, dans le cas de la réponse numérique, un régime transitoire dont la durée ca-
ractéristique est τ = 1/ (2πfc ) = 16 ms ).
Si Te augmente, la réponse numérique s’éloigne de la réponse analogique :

Ceci illustre les problèmes rencontrés lors du traitement numérique du signal :


— Ce sont des calculs approchés qui ne donnent un résultat correct que si la période
d’échantillonnage est suffisamment petite. Cependant, une période très petite implique
plus d’échantillons par unité de temps, donc des ressources mémoire plus impor-
tantes, et avec un pas trop petit, ce sont les erreurs d’arrondi qui deviennent limitantes.
— Les schémas utilisés doivent être adaptés au traitement. Pour le schéma d’Euler,
l’erreur globale (écart avec la réponse analogique) est proportionnelle à Te , ce qui
nécessite beaucoup d’échantillons sur une durée donnée. D’autre part, ce schéma est
facilement instable (la réponse peut diverger comme dans le cas d’un passe-bande
d’ordre 2). D’autres schémas, comme celui de Runge-Kutta d’ordre 4 où l’erreur glo-
bale est en Te 4 , sont stables et nécessitent moins d’échantillons, mais plus de calculs
à chaque pas temporel…

106
107

[TROISIÈME PARTIE]

OPTIQUE

Les chapitres :
1. Modèle scalaire des ondes lumineuses 109
2. Interférences lumineuses 121
3. Interférences par division du front d’onde 135
4. Interférences par division d’amplitude : interféromètre de 159
Michelson
5. Interférences à N ondes 173
6. Interférences en lumière polychromatique 189

Les versions couleur de certaines figures (repérées par la présence de l’image


suivante : ) sont regroupées dans un cahier couleur placé au milieu du livre.

107
108
109

[OPTIQUE 1]

MODÈLE SCALAIRE DES ONDES


LUMINEUSES
1. PROPAGATION DES ONDES LUMINEUSES
1.1 O.P.P.H scalaires
Commençons par rappeler quelques résultats fondamentaux sur les ondes
planes progressives et harmoniques (O.P.P.H), vus en première année.
G → G G G
En un point M de vecteur position r = OM = xex + yey + zez , une O.P.P.H sca-
G
laire se propageant à la célérité c selon le vecteur unitaire ex s’écrit sous la forme :

  x  G G
ψ( x, t ) = ψ0 cos ω  t −   = ψ0 cos(ωt − kx ) = ψ0 cos(ωt − k ⋅ r ) , avec :
  c 

— ω= pulsation (temporelle). T est la période (temporelle) de la perturbation.
T
ω 2π G G
— k= = pulsation spatiale. λ est la longueur d’onde (période spatiale). k = kex
c λ
est le vecteur d’onde.

Lorsqu’on applique à ψ( x, t ) des opérateurs linéaires, on peut utiliser la notation


G G
G G G
complexe : ψ(r , t ) = Re  ψ(r , t ) , avec ψ(r , t ) = ψ0ei ( ωt − k ⋅r ) , et i 2 = −1.

L’O.P.P.H considérée se propageant selon les x croissants, le vecteur d’onde


G G
s’écrit k = kex , avec k > 0 .
G G
La grandeur ϕ = ωt − k ⋅ r = ωt − kx est appelée phase de l’onde.

Si t varie de dt, et x de dx, ϕ varie de dϕ = ωdt − kdx . On retrouve la même


dx ω
phase en x + dx à la date t + dt , qu’en x à la date t (soit dϕ = 0 ) si = .
dt k
ω
La vitesse de propagation de la phase (vitesse de phase) est v ϕ = .
k
G G
À un instant fixé, il y a, du fait de la propagation, un déphasage φ = −k ⋅ r entre
G G →
l’onde s(r , t ) = s0 cos(ωt + φ) en un point M dont le vecteur position est r = OM , et
G G G
l’onde s(0, t ) = s0 cos(ωt ) en O. On a donc ϕ(r , t ) = ωt + φ(r ) .

109
110 Partie III.  Optique

� � � �
Si r varie de dr , φ varie de dφ = − k ⋅ dr . Comme on a également, par défini-
→ → �
tion de l’opérateur grad , dφ = grad φ ⋅ dr , on en déduit :

�  → →
k = − grad φ = − grad ϕ .

1.2 La lumière, onde électromagnétique


L’aspect ondulatoire de la lumière a été mis en évidence par Young et Fresnel
au XVIIIe siècle grâce à des expériences d’interférences et de diffraction. Maxwell a le
premier émis l’hypothèse que la lumière était une onde électromagnétique, ce qui fut
vérifié par la suite.
Les ondes électromagnétiques sont présentées dans ce livre, mais il n’est pas
nécessaire à ce stade de les étudier car les principaux éléments sont donnés ci-des-
sous.
Considérons le champ électrique d’une O.P.P.H électromagnétique, grandeur
� � � � � �
cette fois-ci vectorielle : E (r , t ) = E0 cos(ωt − k ⋅ r ) = E0 cos(ωt − kx ) .

Dans le vide (milieu non dispersif), l’onde se propage, quelle que soit la pulsa-
ω
tion, à la vitesse de phase v ϕ = = c = 299 792 458 m ⋅ s-1 ≃ 3 ⋅ 108 m ⋅ s-1 .
k

Ce n’est plus le cas dans un milieu homogène transparent (dans lequel la lu-
mière se propage sans perdre d’énergie) où v ϕ dépend de ω, et on définit l’indice de
ω c
réfraction n de ce milieu par v ϕ = = . On a n > 1 dans le domaine de l’optique.
k n
Comme n dépend de ω (ou de la longueur d’onde λ dans le vide), on a disper-
sion : les différentes composantes sinusoïdales du signal ne se propagent pas à la
même vitesse. C’est ce phénomène qu’on observe quand un prisme sépare les diffé-
rentes couleurs d’un faisceau incident de lumière blanche.
ω 2π
Si dans le vide k vide = = , où λ est la longueur d’onde dans le vide, on a
c λ
ω nω 2πn 2π nω λ
dans le milieu transparent k = = = = , d’où k = et λmilieu = .
vϕ c λ λmilieu c n

Donnons quelques valeurs de n à 15°C :

air sec n = 1,000277 ≃ 1


eau n = 1,333 ≃ 4 / 3
verre « crown » (classique) n = 1,520 ≃ 1,5
verre « flint » n = 1,650
diamant n = 2,415

110
Chapitre 1.  Modèle scalaire des ondes lumineuses 111

1.3 Théorie scalaire de Fresnel


Bien que la lumière soit une onde électromagnétique, donc vectorielle, on peut
souvent décrire les phénomènes ondulatoires en optique à l’aide d’une théorie sca-
laire, la théorie de Fresnel.
Donnons les hypothèses fondamentales de cette théorie :
— Tout se passe comme si, lorsque deux champs électriques se superposent en M,
G
ils ont même direction, caractérisée par un vecteur unitaire e , et s’écrivent :
G G G G
E1(r , t ) = E1(r , t )e
G G G G , où E1 et E 2 sont les valeurs algébriques des champs électriques
E2 (r , t ) = E2 (r , t )e
G
selon e , grandeurs que nous noterons ψ1 et ψ 2 .
G G G
ψ(r , t ) = ψ 0 cos(ωt − k ⋅ r ) est le « signal lumineux », scalaire, algébrique, se
G
propageant selon un rayon lumineux, ligne de champ du vecteur d’onde k .
Dans un milieu homogène, le rayon lumineux est porté par une droite (la lumière
se propage en ligne droite).

— Les signaux lumineux s’additionnent en un point :


G G G
ψ(r , t ) = ψ1(r , t ) + ψ 2 (r , t ) .

— L’intensité I d’une onde plane (ou éclairement), définie comme la puissance surfa-
cique moyenne (en W ⋅ m-2 ) reçue par unité de surface orthogonale à la direction de
G
propagation de l’onde, est proportionnelle à la valeur moyenne de ψ 2 (r , t ) :
T
G G 1 G
I (r ) = K ψ 2 (r , t ) = K ⋅
T 
ψ 2 (r , t )dt .
0

La définition officielle de l’intensité lumineuse est différente (son unité est la


candela, et pas des W ⋅ m-2 ), mais dans ce cours seules nous importent les variations
relatives de ces grandeurs.
Ces hypothèses seront justifiées dans le cours sur les ondes électromagné-
tiques.

1.4 Chemin optique


Dans un milieu transparent non homogène, l’indice de réfraction dépend du
G
point : n(r ) . Il faut, pour que le rayon lumineux soit encore défini, qu’on puisse négliger
le phénomène de diffraction, ce qui signifie que n doit varier sur une distance caracté-
ristique a >> λ .
Ce rayon peut être incurvé, et l’onde lumineuse n’est que localement plane,
G G
c’est-à-dire que k et ψ 0 dépendent de r le long d’un rayon lumineux donné, mais

111
112 Partie III.  Optique

G G G G G
varient sur une distance caractéristique a >> λ : ψ(r , t ) = ψ0 (r )cos ωt − k (r ) ⋅ r  .
Si la lumière se propage du point A vers le point B le long d’un tel rayon lumineux
orienté dans le sens de la propagation, on définit l’abscisse curviligne s = OM q de M
avec origine en un point O du rayon (distance algébrique parcourue entre O et M en
G
se déplaçant le long du rayon), ainsi que le vecteur unitaire T tangent en M au rayon
lumineux et orienté dans le sens de la propagation.

G nω G 2πn G
On a k = T = T au point M, où λ est, on le rappelle, la longueur d’onde
c λ
G JJJJJ
G G
dans le vide, et dr = MM ′ = dsT , déplacement élémentaire entre M et M ′ le long du
rayon lumineux. On en déduit le déphasage de l’onde en M ′ par rapport à celle en M :
G G 2πn
dφ = − k ⋅ dr = − ds .
λ

On définit le chemin optique entre A et B le long d’un rayon lumineux γ reliant A


sB
et B par ( AB ) =  n(s )ds . Dans un milieu homogène, ( AB ) = nAB .
sA

Le déphasage de l’onde en B par rapport à celle en A vaut donc :


sB
2π 2π
φB − φA = −
λ  n(s )ds = − λ ( AB) , où λ est la longueur d’onde dans le vide.
sA

c
Remarquons que l’O.P.P.H progresse de ds = v ϕdt = dt pendant dt. La durée
n
sB
n ( AB )
de propagation entre A et B est donc t A →B =  c ds = c
, soit ( AB ) = c ⋅ t A → B .
sA

(AB) est donc la distance que parcourrait la lumière dans le vide pendant la
G
durée qu’elle met pour aller de A à B le long de γ dans le milieu d’indice n(r ) .

En pratique, des systèmes optiques homogènes (par exemple des lentilles en


verre) sont placés entre des milieux également homogènes (air, eau…), et les rayons
lumineux sont constitués de segments de droites. S’ils parcourent entre A et B une

112
Chapitre 1.  Modèle scalaire des ondes lumineuses 113

distance Li dans le milieu d’indice ni , le chemin optique s’écrit ( AB ) =  ni Li .


i
Considérons maintenant une source lumineuse ponctuelle S.

Une surface équiphase (ou surface d’onde) est une surface reliant les points M
G 2π 2πc
de même déphasage φM − φS = φ( r ) − φS = − (SM ) = − tS → M .
λ λ

Deux points M1 et M2 sur la même surface équiphase vibrent en phase, les


chemins optiques (SM1) et (SM2 ) le long des rayons lumineux reliant S à M1 , et S à
M2 , sont égaux, et le temps que met la lumière pour aller de S à M1 est le même que
celui pour aller de S à M2 . On en déduit la phase en M de l’onde émise en S :

G G 2π
ϕ( r , t ) = ωt + φ( r ) = ωt + φS − (SM ) ( +π) .
λ
On admet qu’il faut rajouter un déphasage de π dans les cas suivants :
— Il y a entre S et M une réflexion en un point P sur un conducteur, ou sur un milieu
plus réfringent (l’onde provient d’un milieu d’indice de réfraction n1 , et se réfléchit sur
un milieu d’indice de réfraction n2 > n1 ).
— Entre S et M l’onde passe par un point de convergence comme le foyer image F ′
d’une lentille.

Un déphasage de π traduit simplement un changement de signe de ψ.


Par exemple, dans le cas de la réflexion, si juste avant le passage par P le
G G
signal lumineux s’écrit ψ(P − , t ) = ψ0 cos(ωt − k ⋅ r ) , alors :
G G
ψ(P + , t ) = r ψ0 cos(ωt − k ⋅ r + π) = − r ψ(P − , t ) = r ψ(P − , t ) , avec r < 0 .
Le déphasage de π est ici dû à un coefficient r de réflexion négatif.

113
114 Partie III.  Optique

1.5 Théorème de Malus


G  → →
On a vu au 1.1 que k = − grad φ = − grad ϕ , où ϕ = ωt + φ est la phase de l’onde
émise par un point source S.

On en déduit que les surfaces équiphases, ou surfaces d’onde, sont normales


G
au champ k , c’est-à-dire aux rayons lumineux.

Prenons l’exemple fondamental d’un point source à l’infini sur l’axe focal ∆ d’une
lentille mince convergente L. Les rayons issus de S parviennent donc sur L parallèle-
ment à ∆ (l’onde incidente est une O.P.P.H). Les surfaces d’onde sont donc, avant la
traversée de L, des plans orthogonaux à ∆.
Dans les conditions de Gauss, les rayons qui émergent de L convergent en son
foyer image F ′ . Le théorème de Malus montre que les surfaces d’onde sont, avant et
après passage par F ′ , des sphères de centre F ′ (les ondes sont sphériques, conver-
gentes et harmoniques avant passage par F ′ : O.S.C.H, puis sphériques, divergentes
et harmoniques : O.S.D.H). Comme on l’a admis plus haut, la phase présente une
discontinuité de +π à la traversée de F ′ .

Ainsi L modifie progressivement les plans d’onde en sphères. Par retour inverse
de la lumière, on montre qu’une onde sphérique émise au foyer objet F de L est trans-
formée par L en une onde plane :

114
Chapitre 1.  Modèle scalaire des ondes lumineuses 115

On montre ainsi que le chemin optique entre F et son image à l’infini est indé-
pendant du rayon suivi par la lumière. Établissons maintenant une propriété fonda-
mentale qui généralise ce résultat :

Si deux points A et A′ sont rigoureusement stigmatiques par un système optique S.O


(celui de la figure ci-dessous est centré, mais cette condition n’est pas nécessaire), le
chemin optique ( AA′) le long d’un rayon lumineux est indépendant du rayon.

Rappelons qu’il y a stigmatisme rigoureux si tout rayon incident passant par A


est transformé par S.O en un rayon émergent passant par A′ .
Si A et A′ sont placés dans des milieux homogènes d’indices de réfraction res-
pectifs n et n′ , le théorème de Malus montre que dans ces milieux, les surfaces d’onde
sont des sphères centrées sur A et A′ , de rayons respectifs ε et ε′ .
Si les milieux ne sont pas homogènes, cette propriété reste valable localement
(c’est-à-dire au voisinage de A et A′ , donc pour ε et ε′ suffisamment petits).
Le chemin optique étant indépendant du rayon lumineux suivi entre deux sur-
( AA′)1 = nε + (II ′) + n′ε′ → (II ′)
 ε→ 0, ε′ →0
faces d’onde, on a (II ) = (JJ ) , or 
′ ′ .
( AA′ )2 = n ε + ( JJ ′ ) + n ′ε ′ → (JJ ′)
 ε→ 0, ε′ → 0

Le chemin optique ( AA′) est bien le même le long du rayon 1 que le long du
rayon 2.

115
116 Partie III.  Optique

2. ÉMISSION / RÉCEPTION DES ONDES


LUMINEUSES
2.1 Émission de la lumière / Longueur de cohérence
Les niveaux d’énergie d’un atome, comme ceux d’un ion ou d’une molécule,
sont quantifiés. Un atome dans son état fondamental (état de plus basse énergie, no-
tée E0 ) peut, à la suite d’une excitation, passer dans un état d’énergie E 2 . Cet état
est instable, et l’atome va, au bout d’une durée très courte, se désexciter spontané-
ment pour passer dans un état d’énergie plus basse E1 < E2 .
Le plus souvent, la désexcitation spontanée s’accompagne de l’émission d’un
photon d’énergie hν0 = E2 − E1 , où h = 6,63 ⋅ 10 −34 J ⋅ s est la constante de Planck.

Le photon est le quantum d’énergie échangée entre la matière et le rayonne-


ment électromagnétique. Un photon d’énergie E = hν0 est associé à une onde élec-
tromagnétique de fréquence ν 0 .

Cependant, une onde parfaitement sinusoïdale, de durée ∆t → ∞ (dont le


spectre ne contient que la fréquence ν 0 ) n’est pas concevable physiquement (l’émis-
sion doit avoir un début et une fin).
Les relations de Heisenberg montrent qu’en réalité, il y a une indétermination
∆E sur l’énergie d’un état, d’autant plus grande que la durée de vie τ de l’atome dans
cet état est faible : ∆E2 ⋅ τ ≃ h pour l’état d’énergie E 2 . Comme la durée de vie dans
l’état d’énergie E1 < E2 , plus stable, est plus grande, on peut négliger ∆E1 devant ∆E2

116
Chapitre 1.  Modèle scalaire des ondes lumineuses 117

et considérer que l’indétermination ∆ν sur la fréquence de l’onde émise est liée à ∆E2
par ∆E2 = h∆ν . L’onde associée à l’émission d’un photon contient donc toute une
bande de fréquences de largeur ∆ν ≃ 1/ τ autour de ν 0 .

Or, si ∆t est la durée du train d’ondes émis, on a (comme on l’a vu dans le


chapitre sur l’analyse de Fourier) ∆ν ⋅ ∆t ≃ 1 .
On en conclut que la durée du train d’ondes est du même ordre de grandeur
1
que celle de l’état excité : ∆t ≃ τ ≃ . Ces grandeurs, ainsi que l’amplitude du signal
∆ν
émis et la phase du signal lors de l’émission, varient aléatoirement autour d’une valeur
moyenne, d’un train d’ondes à l’autre.
Nous avons ici raisonné sur une seule raie spectrale (qu’on peut isoler à l’aide
d’un filtre). Pour une source dont le spectre contient plusieurs raies, ou dans le cas
d’un spectre continu, on peut toujours définir une largeur spectrale ∆ν .

Pour une source lumineuse donnée caractérisée par la largeur spectrale ∆ν ,


1
on appelle temps de cohérence la durée τc = ∆t = .
∆ν

Donnons quelques ordres de grandeur :

Lampe spectrale à basse pression


Le principe en est le suivant : on fait éclater des étincelles dans un tube conte-
nant un gaz à basse pression (vapeur de mercure ou de sodium par exemple), provo-
quant ainsi une excitation de certains atomes. Un rayonnement correspondant à un
spectre de raies est émis.
Pour la raie verte d’une lampe à vapeur de mercure ( λ0 = 546,1 nm ), la largeur

relative est ∆ν / ν0 ≃ 5 ⋅ 10−5 . Comme ν0 = c / λ0 ≃ 5 ⋅ 1014 Hz , on a ∆ν ≃ 2,5 ⋅ 1010 Hz

et donc ∆t ≃ τ ≃ τc ≃ 4 ⋅ 10−11 s >> T0 = 1/ ν0 ≃ 2 ⋅ 10−15 s .


On a de l’ordre de 2 ⋅ 104 oscillations pendant un train d’ondes, soit beaucoup
plus que sur la figure ci-dessus.

117
118 Partie III.  Optique

On définit également l’étalement spa-


tial d’un train d’ondes comme la longueur du
train d’onde s’il se propageait dans le vide :
ℓ c = c ∆t ≃ 1 cm , valeur typique pour une raie
spectrale d’une lampe à basse pression.

Plus généralement, la longueur de cohérence temporelle d’une source est défi-


nie par ℓ c = c ⋅ τc .

Lorsque la pression, ou la température, augmente, les chocs entre atomes sont


plus fréquents, ce qui induit une désexcitation plus rapide : τ et donc ∆t diminuent, et
∆ν augmente. Les raies du spectre sont de plus en plus larges.
L’effet Doppler est souvent le facteur prépondérant dans l’élargissement des
raies spectrales : plus la température est grande, plus l’agitation thermique et la vitesse
moyenne des particules (atome, molécule) est grande. Même si elles émettaient toutes
exactement la fréquence ν 0 dans leur référentiel, la fréquence dans le référentiel du
laboratoire varierait autour de ν 0 (elle serait plus grande que ν 0 pour l’émission par
des particules qui se rapprochent du capteur, plus petite si elles s’en éloignent).
L’excitation d’un atome peut être obtenue, comme on l’a vu, par décharges élec-
triques (l’accélération d’atomes ionisés et des électrons obtenus provoque des chocs
avec les atomes, dont certains induisent une excitation), ou bien par absorption d’un
photon d’énergie hν0 = E2 − E1 .
Ainsi, lorsqu’un atome peut émettre spontanément un rayonnement de fré-
quence ν 0 , il peut aussi l’absorber (avec des probabilités néanmoins différentes).

Source de lumière blanche


Dans ce cas, le spectre émis est large : [ λmin = 0,4 µm, λmax = 0,75 µm] , soit
 c c 
en fréquence : νmin = ,νmax = .
 λmax λmin 
1 1 1 λmin ⋅ λmax
On a donc τc = = = ≃ 3 ⋅ 10−15 s , et une longueur
∆ν νmax − νmin c λmax − λmin
de cohérence ℓ c = c ⋅ τc ≃ 1 µm .

Laser
Le principe de fonctionnement du laser est étudié dans un chapitre dédié. Il
exploite l’émission stimulée d’un photon : un photon incident d’énergie hν0 = E2 − E1
(photon résonant) peut provoquer la désexcitation de l’atome d’énergie E 2 vers l’état
d’énergie E1 < E2 , avec émission d’un second photon d’énergie hν0 = E2 − E1 ,
« clone » du photon incident (ces deux photons ont mêmes direction et sens, leurs

118
Chapitre 1.  Modèle scalaire des ondes lumineuses 119

ondes électromagnétiques associées sont en phase et dans le même état de polarisa-


tion).

Pour les lasers Hélium-Néon souvent utilisés en T.P, les fréquences émises se
situent autour de ν0 = 4,74 ⋅ 1014 Hz (correspondant à une longueur d’onde
λ0 = 632,8 nm ) et un résonateur optique permet d’obtenir une faible largeur spectrale
∆ν ≃ 1 GHz .
∆ν c
On a ainsi ≃ 2 ⋅ 10 −6 , soit une longueur de cohérence ℓ c = ≃ 30 cm bien
ν0 ∆ν
supérieure à celle des lampes spectrales.

Une source monochromatique (« une seule couleur »), ou sinusoïdale, est une
source modélisée dont le spectre ne serait constitué que d’un pic de largeur nulle. Ce
sont les lasers qui s’approchent le plus de ce modèle.

2.2 Réception par un capteur / Domaine de l’optique


Le spectre des ondes électromagnétiques est très étendu (la lumière n’en est
qu’une toute petite partie). On le représente en échelle logarithmique, avec en abs-
cisses la longueur d’onde λ en m, ou la fréquence ν en Hz. On passe de l’une à l’autre
c
grâce à la relation λ = cT = , avec c ≃ 3,00 ⋅ 108 m ⋅ s-1 .
ν

119
120 Partie III.  Optique

Les frontières entre les différents domaines sont conventionnelles, sauf celles
entre les ultra-violets (U.V) et le visible, et les infra-rouges (I.R) et le visible, car c’est
la sensibilité de l’œil qui intervient.

La lumière est une onde électromagnétique à laquelle l’œil humain est sensible.
Sa longueur d’onde se situe dans l’intervalle 0,4 µm ≤ λ ≤ 0,75 µm .

Tout comme les limites du spectre acoustique audible, les limites du spectre
électromagnétique visible varient d’un être humain à l’autre. Certains auteurs donnent
pour le visible le domaine 400 nm ≤ λ ≤ 800 nm .
Les photorécepteurs sont constitués par deux groupes de cellules de la rétine :
les bâtonnets et les cônes. Les bâtonnets sont plus sensibles et permettent la vision
en faible luminosité, mais seulement en niveaux de gris. Les cônes sont moins sen-
sibles, mais permettent de voir les couleurs, car ils se répartissent en trois types selon
les longueurs d’ondes auxquelles ils sont les plus sensibles : les bleus, les verts et les
rouges. Toutes ces cellules ont un comportement passe-bande, et l’œil n’est finale-
ment sensible qu’à la bande du spectre électromagnétique comprise entre 400 et 750
nm.
La vision est un phénomène complexe : les cellules de la rétine, sensibles à des
ondes électromagnétiques de fréquence ν0 ≃ 5 ⋅ 1014 Hz , envoient des influx élec-
triques au cerveau, à la fréquence du signal qui module ces ondes. Le cerveau inter-
prète ces informations pour créer une image, en se basant sur notre expérience (et en
se trompant parfois, ce qui est exploité dans les illusions d’optique). Ce traitement
global de l’information prend un temps variable selon la complexité de l’image, de
l’ordre de 50 ms. Si une alternance d’images est trop rapide, deux images successives
ne peuvent pas être distinguées (ce qui s’accompagne d’une perte d’information). Ce
phénomène est exploité au cinéma ou à la télévision pour créer une sensation de
mouvement continu à partir d’images se succédant à une fréquence de 24 ou 25 Hz.

Pour une cellule photo-électrique, le temps de réponse est de l’ordre de la mi-


croseconde.

De façon générale, les capteurs optiques agissent comme des filtres passe-bas
sur le signal qui module les ondes lumineuses qu’ils reçoivent. Ils possèdent des temps
de réponse τcapteur bien supérieurs à la période T0 des ondes lumineuses, mais aussi
à la durée ∆t des trains d’ondes. Ils délivrent donc des signaux proportionnels à la
puissance moyenne du signal (moyennée sur la durée τcapteur ), d’où l’intérêt de définir

l’intensité lumineuse par I = K ψ 2 .

120
121

[OPTIQUE 2]

INTERFÉRENCES LUMINEUSES
1. SUPERPOSITION DE DEUX ONDES LUMINEUSES
1.1 Somme de deux ondes scalaires harmoniques
Ondes de fréquences différentes
Au point M se superposent deux ondes :
— La première, de pulsation ω1 , issue d’un point source S1 :
1
ψ1(M, t ) = a1(M )cos [ ω1t + φ1(M )] , d’intensité I1(M ) = K ψ12 (M , t ) = Ka12 (M ) .
2
— La seconde, de pulsation ω2 , issue d’un point source S2 :
1
ψ 2 (M , t ) = a2 (M )cos [ ω2t + φ2 (M )] , d’intensité I2 (M ) = K ψ 22 (M , t ) =
Ka22 (M ) .
2
Les signaux s’additionnent : ψ(M, t ) = ψ1(M, t ) + ψ 2 (M, t ) . L’intensité au point M

vaut donc I (M ) = K ψ12 (M, t ) + ψ 22 (M, t ) + 2ψ1(M, t ) ⋅ ψ 2 (M, t ) , soit :

I (M ) = I1(M ) + I2 (M ) + 2K ψ1(M, t ) ⋅ ψ 2 (M, t )


 
terme d'interférences
On constate qu’elle n’est pas a priori égale à la somme des intensités des deux
ondes prises séparément, du fait de la présence du terme 2K ψ1(M , t ) ⋅ ψ 2 (M, t ) ap-
pelé terme d’interférences. Explicitons ce terme :
2Ka1(M )a2 (M ) cos [ ω1t + φ1(M )] ⋅ cos [ ω2t + φ2 (M )]
 
 
= Ka1(M )a2 (M )  cos [(ω1 + ω2 )t + φ1(M ) + φ2 (M )] + cos [(ω1 − ω2 )t + φ1(M ) − φ2 (M )] .
  0
 

Si ω1 ≠ ω2 , cos [(ω1 − ω2 )t + φ1(M ) − φ2 (M )] = 0 .

Deux ondes de fréquences (ou pulsations, ou longueurs d’ondes) différentes


n’interfèrent pas (on dit qu’elles sont incohérentes). Leurs intensités au point M s’ad-
ditionnent alors : I = I1 + I2 .

ω1 − ω2
En réalité, la réponse du capteur n’est pas nulle si ∆ν =< fc = 1/ τcapteur

car la fréquence ∆ν reste dans la bande passante du capteur. Avec τcapteur = 1 µs ,

cette condition s’écrit ∆ν < 106 Hz , valeur très inférieure à la largeur spectrale d’émis-
sion, même pour un laser (de l’ordre de 1 GHz). On pourra en pratique décomposer la

121
122 Partie III.  Optique

lumière en bandes élémentaires [ ν, ν + dν ] , ou [ λ, λ + dλ ] , incohérentes.

Ondes de mêmes fréquences


Il ne peut y avoir d’interférences qu’entre deux ondes de même pulsation ω
(donc de même fréquence ν et de même longueur d’onde λ). Dans ce cas, on a :
2Ka1(M )a2 (M ) cos [ ωt + φ1(M )] ⋅ cos [ ωt + φ2 (M )] = Ka1(M )a2 (M ) cos [ φ1(M ) − φ2 (M )] .
Les déphasages φ1(M ) et φ2 (M ) dus à la propagation des ondes entre les
points sources S1 et S2 , et le point M, étant indépendants du temps, on a finalement :
2K ψ1(M, t ) ⋅ ψ 2 (M, t ) = K a1(M ) ⋅ a2 (M ) cos [ φ1(M ) − φ2 (M )]
� ���
2I1( M ) 2I2 ( M )
K K

= 2 I1(M )I2 (M ) cos [ φ1(M ) − φ2 (M )]

On obtient, pour deux ondes de même longueur d’onde, la formule de Fresnel


donnant l’intensité au point M : I = I1 + I2 + 2 I1I2 cos [ φ1 − φ2 ] = I1 + I2 + 2 I1I2 cos φ , où
φ(M ) est le déphasage en M entre les deux ondes qui y interfèrent. La fonction
φ ֏ I = I1 + I2 + 2 I1I2 cos φ est ici une fonction sinusoïdale.

On peut ainsi réaliser des interférences acoustiques à l’aide de deux haut-par-


leurs auxquels on applique le même signal électrique e(t ) = E cos(ωt ) .

1.2 Somme de deux ondes scalaires harmoniques lumineuses


Contrairement aux ondes sonores, les ondes lumineuses sont émises de façon
aléatoire par les atomes, par « bouffées », ou trains d’onde, de longueur dans le vide
ℓ c (longueur de cohérence).
Ce mode d’émission fait qu’on ne peut pas obtenir d’interférences électroma-
gnétiques dans le domaine optique avec deux sources différentes (deux atomes diffé-
rents), même si elles émettent la même longueur d’onde.
Considérons en effet un signal de référence de même pulsation que celui émis
par les deux sources S1 et S2 . En ces deux points, les signaux émis présentent des
déphasages γ1(t ) et γ 2 (t ) par rapport à ce signal de référence :
ψ1(S1, t ) = a1(S1)cos [ ωt + γ1(t )] et ψ 2 (S2 , t ) = a2 (S2 )cos [ ωt + γ 2 (t )] .
Les signaux issus de S1 et S2 arrivent en M après des durées respectives
tS1 →M et tS2 →M , et le retard à la propagation depuis leur source se traduit par un dé-
  2π 
ψ1(M, t ) = a1(M )cos ωt + γ1(t − tS1 →M ) − λ (S1M )
  
phasage supplémentaire :  .

ψ (M, t ) = a (M )cos ωt + γ (t − t 2 π 
 2 2  2 S2 →M ) − (S2M )
 λ 

122
Chapitre 2.  Interférences lumineuses 123

On a donc une intensité au point M :


 2π 
I (M ) = I1(M ) + I2 (M ) + 2 I1(M )I2 (M ) cos  δ(M ) + γ1(t − tS1 →M ) − γ 2 (t − tS2 →M ) .
λ 

δ(M ) = (S2M ) − (S1M ) est la différence de marche entre les rayons lumineux re-
liant les sources à M.

Même au niveau des sources, le déphasage γ(t ) = γ1(t ) − γ 2 (t ) ne reste cons-


tant que sur une durée ∆t caractéristique de l’émission d’un train d’onde, puis il varie
aléatoirement. Comme on effectue les moyennes sur une durée τcapteur bien supé-

 2π 
rieure à ∆t , on a cos  δ(M ) + γ1(t − tS1 → M ) − γ 2 (t − tS2 →M ) = 0 .
λ 
Il y a donc absence d’interférences.

Deux ondes lumineuses émises par des sources différentes n’interfèrent pas ;
leurs intensités au point M s’additionnent : I = I1 + I2 . De telles sources sont dites inco-
hérentes.

On en conclut qu’il faut, pour obtenir des interférences en M, superposer deux


ondes issues de la même source. On a alors γ(t ) = 0 , c’est-à-dire même phase à l’ori-
gine. Cette condition n’est pas suffisante, car si les trains d’onde qui se superposent
en M ne sont pas issus du même train d’onde, γ1(t − tS1 →M ) − γ 2 (t − tS2 →M ) varie aléa-

toirement. C’est ce qui arrive quand tS2 →M − tS1 →M > ∆t ⇔ c tS2 →M − tS1 →M > c ∆t ,

soit quand δ(M ) > ℓ c . Alors I = I1 + I2 comme pour deux sources incohérentes.

Au contraire, si tS2 →M − tS1 →M << ∆t ⇔ δ(M ) << ℓ c , on a :


γ1(t − tS1 →M ) − γ 2 (t − tS2 →M ) = 0 , les trains d’onde qui se superposent en M étant alors
issus du même train d’onde.
Si enfin δ < ℓ c , avec δ et ℓ c du même ordre de grandeur, on a cohérence par-
tielle, cas que nous n’étudierons pas ici.

Pour obtenir des interférences lumineuses, il faut superposer en M deux ondes


issues d’une même source S, ayant suivi des chemins optiques (SM )1 et (SM )2 diffé-
rents, mais que la différence de marche δ(M ) = (SM )2 − (SM )1 soit en valeur absolue
très inférieure à la longueur de cohérence ℓ c de la source. La formule de Fresnel
 2π 
donne alors l’intensité en M : I = I1 + I2 + 2 I1I2 cos  δ  = I1 + I2 + 2 I1I2 cos φ .
λ 

Pour obtenir deux rayons lumineux distincts, interférant en M, à partir d’une


seule source S, on peut utiliser deux types de dispositifs interférométriques :

123
124 Partie III.  Optique

Dispositif à division du front d’onde


L’onde issue de S passe par deux systèmes optiques différents. Les images S1
et S2 de S par ces deux systèmes optiques constituent des sources secondaires co-
hérentes. La division est géométrique : les rayons qui interfèrent sont issus de deux
rayons différents émis par S. Les interférences s’observent dans tout un volume de
l’espace appelé champ, ou zone d’interférence (on dit qu’elles sont non localisées).

Dispositif à division d’amplitude


Ici, la séparation est énergétique : un rayon unique issu de S est séparé en deux
grâce à une lame semi-réfléchissante Sp (appelée séparatrice). On dévie alors ces
deux rayons, par exemple à l’aide de miroirs plans M1 et M2 , pour les faire interférer
en M.

124
Chapitre 2.  Interférences lumineuses 125

Là encore, on obtient deux sources secondaires cohérentes S1 et S2 :


— S1 est l’image de S par M1 .
— Si S ∗ est l’image de S par la séparatrice Sp, S2 est l’image de S ∗ par M2 .

Un tel dispositif pourrait aussi être utilisé comme diviseur de front d’onde (les
deux rayons interférant en M seraient issus de deux rayons différents issus de S), mais
nous verrons que c’est lorsqu’il est utilisé comme diviseur d’amplitude qu’on obtient
des interférences très lumineuses. Dans ce cas, les interférences ne sont observables
qu’au voisinage d’une surface et sont dites localisées.

Dans tous les cas, la lumière a bien suivi deux chemins optiques différents,
(SM )1 et (SM )2 , pour aller de S à M.

Comme S1 est l’image de S par le système optique SO1, le chemin optique


(SS1) est indépendant du rayon issu de S. Il en va de même pour le chemin optique
(SS2 ) puisque S2 est l’image de S par SO2.
La différence de marche δ(M ) = (SM )2 − (SM )1 s’écrit donc :

δ(M ) = [(SS2 ) + (S2M )] − [(SS1) + (S1M )] = (S2M ) − (S1M ) + Cte . La différence de mar-
che est indépendante du rayon issu de S.

125
126 Partie III.  Optique

1.3 Notation complexe / Diagramme de Fresnel


Lorsque deux sources S1 et S2 sont incohérentes, les intensités en M des
ondes qu’elles émettent s’ajoutent : I (M ) = I1(M ) + I2 (M ) , ce qui peut être pris comme
la définition de l’incohérence de deux sources.

Soit deux sources lumineuses cohérentes (qui sont donc obtenues à partir d’une
même source S). Si de plus δ(M ) << ℓ c , les trains d’ondes qui se superposent en M
sont issus du même train d’onde émis par S, et le déphasage φ en M entre les deux
ondes qui parviennent à ce point est uniquement dû à la propagation des ondes de S
à M selon les deux différents chemins.
On peut donc écrire les amplitudes en M sous la forme :
ψ
 1(M , t ) = a1(M )cos [ ωt + φ1(M )] 2π 2π
 , avec φ1(M ) = − (SM )1 et φ2 (M ) = − (SM )2 .
ψ 2 (M, t ) = a2 (M )cos [ ωt + φ2 (M )] λ λ

Le signal résultant prend la forme ψ(M, t ) = a(M )cos [ ωt + φ(M )] et son intensité
1 2
est I (M ) = K ψ 2 (M, t ) = Ka (M ) .
2

Notation complexe

En notation complexe, ψ = ae [
i ωt +φ]
, et si ψ∗ = ae [
− i ωt +φ]
est son conjugué, on
1
a ψ ⋅ ψ = a 2 d’où I =

K ψ ⋅ ψ∗ .
2

Puisque ψ1 = a1e [
i ωt +φ1 ]
et ψ 2 = a2e [
i ωt +φ2 ]
, on retrouve la formule de Fresnel :
1 1 1 1
I= K (ψ1 + ψ 2 ) ⋅ (ψ1 + ψ 2 )∗ = K ψ1 ⋅ ψ1∗ + K ψ 2 ⋅ ψ 2 ∗ + K (ψ1 ⋅ ψ 2 ∗ + ψ 2 ⋅ ψ1∗ )
2 2 2 2
1
= I1 + I2 + K a1 ⋅ a2 ei ( φ1 −φ2 ) + ei ( φ2 −φ1 )  = I1 + I2 + 2 I1 ⋅ I2 cos φ .
2 � � ���������
2I1 2I2 2 cos( φ1 −φ2 )
K K

Diagramme de Fresnel
Un signal sinusoïdal ψ = a cos [ ωt + φ] peut également être représenté dans la
� � � � �
base orthonormée ( ex , ey ) par le vecteur ψ = a cos [ ωt + φ] ex + a sin [ ωt + φ] ey . On a
� �
alors la relation linéaire ψ = ψ ⋅ ex . Le choix qui est fait ici implique que la norme
� �
ψ = a de ψ est la valeur maximale a du signal.
En notant O l’origine du plan affine xOy, la représentation de Fresnel consiste
� →
donc à tracer ψ = OM , où M est le point d’affixe ae i ( ωt +φ ) .

126
Chapitre 2.  Interférences lumineuses 127

G G
Ainsi ωt + φ est l’angle que fait ψ avec l’axe Ox : le vecteur ψ , de norme cons-
tante a, tourne dans le sens trigonométrique à la vitesse angulaire ω.

On veut former la somme de deux signaux homogènes de même pulsation


(dans notre cas deux signaux lumineux) :
G G
ψ1 = a1 cos [ ωt + φ1] , associé à ψ1 , et ψ 2 = a2 cos [ ωt + φ2 ] , associé à ψ 2 .
G
Par linéarité de la projection sur ex , le signal ψ = ψ1 + ψ 2 = a cos [ ωt + φ] est as-
G G G
socié à ψ = ψ1 + ψ 2 .
G G G
L’ensemble des vecteurs ψ1 , ψ 2 et ψ tournant en bloc à la vitesse angulaire
G
ω, on peut construire ψ à un instant quelconque.
G
Prenons par exemple l’instant pour lequel ωt + φ1 = 0 . Le vecteur ψ1 est alors
G
aligné sur Ox, et les angles sont repérés par rapport à ψ1 .
On dit que le signal ψ1 est pris comme référence (ou origine) des phases :

Les angles φ′2 = φ2 − φ1 et φ′ = φ − φ1 correspondent aux déphasages (ou diffé-


rence de phases) de ψ 2 et de ψ par rapport à ψ1 .
On déduit φ′ et a de la construction.
G G
On remarque que, sauf si φ2 = φ1 ⇔ φ′2 = 0 , c’est-à-dire sauf si ψ1 et ψ 2 sont
alignés et de même sens, les valeurs maximales ne se somment pas : a ≠ a1 + a2 .

127
128 Partie III.  Optique

1.4 Ordre d’interférence


Dans ce qui précède, les amplitudes a1(M ) et a2 (M ) , et donc les intensités
I1(M ) et I2 (M ) des deux ondes issues d’un même point source S, dépendaient du
point M où ces ondes interfèrent. C’est le cas par exemple pour des ondes sphériques
(l’intensité à une distance r d’une source ponctuelle décroît en 1/ r 2 ), ou lorsque les
ondes secondaires sont obtenues en faisant passer l’onde issue de S par deux trous
percés dans un écran (on exploite alors le phénomène de diffraction).
En pratique, on se place souvent dans des cas où ces intensités varient peu sur
l’écran où l’on observe le phénomène d’interférences. On a alors I1 = Cte et I2 = Cte :
lorsqu’une seule des deux ondes arrive sur l’écran, ce dernier est uniformément
éclairé. Nous nous placerons dans ce cas par la suite.

Les deux ondes présentent en M un déphasage φ lié à leur différence de


2π 2π
marche : φ(M ) =
λ
δ(M ) =
λ
[(SM )2 − (SM )1] .
L’intensité sur l’écran s’écrit donc :

 II 
I = I1 + I2 + 2 I1I2 cos φ = (I1 + I2 ) 1 + 2 1 2 cos φ  . On définit l’ordre d’interférence en
 I1 + I2 
φ δ
M par p = = .
2π λ

Étudions deux cas particuliers :


— Interférences totalement constructives : les ondes sont en phase au point M.
C’est le cas où p = k ∈ Z ⇔ φ = 2k π ⇔ δ = k λ .
Les deux ondes qui se superposent se renforcent : l’onde résultante a pour am-
plitude a = a1 + a2 . L’intensité est maximale et vaut Imax = I1 + I2 + 2 I1I2 .
— Interférences totalement destructives : les ondes sont en opposition de phase au
point M.
1 λ
C’est le cas où p = k + avec k ∈ Z ⇔ φ = (2k + 1)π ⇔ δ = (2k + 1) .
2 2
Les deux ondes qui se superposent s’affaiblissent : l’onde résultante a pour am-
plitude a = a1 − a2 . L’intensité est minimale et vaut Imin = I1 + I2 − 2 I1I2 .
Un diagramme de Fresnel permet de visualiser la construction de l’onde résul-
tante dans ces deux cas :

128
Chapitre 2.  Interférences lumineuses 129

Les signaux temporels en M ainsi que leur intensité sont représentés ci-des-
sous :

Imax − Imin II
Le contraste (ou visibilité) des interférences est C = = 2 12 .
Imax + Imin I1 + I2

I2 x
Si on pose x = , on a C = 2 .
I1 1+ x
dC 1− x
En dérivant par rapport à x on obtient = . Le contraste est maxi-
dx x (1 + x )2
mal, et vaut 1 pour x = 1 ⇔ I1 = I2 = I0 ; il s’annule en x = 0 et x → ∞ , soit quand
I1 >> I2 ou quand I2 >> I1 .
La formule de Fresnel s’écrit simplement I = (I1 + I2 ) [1 + C cos φ] .

On a représenté ci-contre l’allure de l’intensité en fonction du déphasage φ entre


les deux ondes, au point où elles interfèrent.
C’est une fonction sinusoïdale de valeur moyenne I = I1 + I2 , valeur correspon-
dant au cas où il n’y aurait pas d’interférences.

Le contraste est compris entre 0 et 1. On obtient le contraste maximal C = 1


(c’est le cas recherché) pour des interférences à deux ondes de même amplitude a0
et donc de même intensité I0 .

129
130 Partie III.  Optique

On se placera dans ce cas par la suite : les deux ondes lumineuses cohérentes
s’écrivent ψ1(M, t ) = a0 cos [ ωt + φ1(M )] et ψ 2 (M, t ) = a0 cos [ ωt + φ2 (M )] .

  2πδ  
On a alors I = 2I0 [1 + cos φ] = 2I0 1 + cos    , formule de Fresnel pour des
  λ 
interférences à deux ondes de même amplitude.

Les signaux temporels en M ainsi que leur intensité sont représentés ci-des-
sous :

L’intensité maximale est 4 fois plus


grande que celle obtenue avec une seule
source.
L’intensité minimale est nulle.
La valeur moyenne de I (φ) est I = 2I0 ,
valeur correspondant au cas où il n’y aurait pas
d’interférences.

1.5 Franges d’interférence


On définit les surfaces d’interférence comme le lieu des points M tels que δ(M )
est le même (l’ordre d’interférence p est le même sur une telle surface), et les franges
d’interférence comme les intersections entre les surfaces d’interférence et un plan (par
exemple l’écran d’observation).

Nous avons vu que la différence de marche en M peut se calculer en introdui-


sant les sources secondaires S1 et S2 , images de la source S par deux systèmes op-
tiques : δ(M ) = (S2M ) − (S1M ) + Cte .
Plaçons-nous pour simplifier dans le cas (fréquent) où les rayons S1M et S2M
se propagent dans un milieu transparent homogène comme le vide (d’indice de réfrac-
tion n = 1) ou l’air ( n ≃ 1 ), et que les symétries imposent Cte = 0 .
On a alors δ(M ) = S2M − S1M .

130
Chapitre 2.  Interférences lumineuses 131

On montre que les surfaces telles que δ(M ) = S2M − S1M = pλ sont des hyper-
boloïdes de révolution autour de la droite (S1S2 ) . La surface correspondant à l’ordre 0
est telle que S2M = S1M : c’est le plan médiateur du segment [S1S2 ] .
Leurs intersections avec un plan orthogonal à (S1S2 ) sont des franges circu-
laires.
Leurs intersections avec un plan contenant la direction de (S1S2 ) sont des
branches d’hyperboles.

2. COHÉRENCE SPATIALE / LOCALISATION DES


FRANGES
2.1 Théorème de localisation (complément hors programme)
Lorsque la source S qui illumine un interféromètre est ponctuelle, les
interférences sont visibles dans tout un volume de l’espace (champ ou zone
d’interférence).
Considérons un interféromètre à deux ondes issues des sources secondaires
S1 et S2 . Le champ d’interférence est l’intersection des faisceaux issus de S1 et de
S2 qui traversent les différents systèmes optiques constituant respectivement la voie
1 et la voie 2 de l’interféromètre.
Soit M un point du champ d’interférence. La différence de marche entre
G lesGdeux
rayons issus de S qui se coupent en M est δ = (SM )2 − (SM )1 . On pose e1 et e2 les
vecteurs unitaires qui portent les rayons issus de S qui passent par M en suivant les
voies 1 et 2.
Considérons maintenant un second point source S ′ , infiniment proche du
précédent : on note dr la distance SS ′ La différence de marche entre les deux rayons

131
132 Partie III.  Optique

issus de S ′ qui interfèrent en M est δ′ = (S ′M )2 − (S ′M )1 .


→
La variation SS ′ de la position du point source entraîne une variation :
dδ = δ − δ = [(S ′M )2 − (SM )2 ] − [(S ′M )1 − (SM )1] de la différence de marche en M.


Si ≠ 0 , les franges créées par les points S ′ au voisinage de S ne coïncident
dr
pas en M et les interférences sont brouillées. Pour que les interférences ne soient pas

brouillées en M quand la source est faiblement étendue, il faut = 0 . Les franges
dr
dues à S et S ′ coïncident alors en M.

On suppose que S et S ′ sont placées dans un milieu homogène d’indice n. Ce


milieu étant souvent l’air, assimilé à du vide, nous prendrons n = 1.
Commençons par calculer (S ′M )1 − (SM )1 . Si M1 est le conjugué de M par SO1,
le chemin optique (M1M ) est indépendant du rayon lumineux suivi.

On a donc (M1M ) = M1S + (SM )1 = M1S ′ + (S ′M )1 , donc la différence entre les


aussi
chemins optiques : (S ′M )1 − (SM )1 = M1S − M1S ′ , est la différence entre les deux
distances de M1 aux deux points S et S ′ infiniment proches.
Effectuons le calcul de la différentielle M1S ′ − M1S = d [M1S ] :

132
Chapitre 2.  Interférences lumineuses 133

→
→2 → → →2
 M1S → G →
M1S′ − M1S = d[ M1S ] = d M1S = 2 M1S ⋅ d M1S 2 M1S = ⋅ SS ′ = e1 ⋅ SS ′ .
M1S
G → G →
On a donc (S ′M )1 − (SM )1 = −e1 ⋅ SS ′ , et de même (S ′M )2 − (SM )2 = −e2 ⋅ SS ′ .
G G → → G G
On en déduit dδ = (e1 − e2 ) ⋅ SS ′ , et si on pose SS ′ = dr er où er est le vecteur
dδ G G G
unitaire de S vers S ′ , on a finalement = (e1 − e2 ) ⋅ er , indépendant de M.
dr
On distingue alors deux types d’interféromètres :
— Interféromètre à division du front
d’onde. Les rayons interférant en M sont
issus de deux rayons incidents distincts
provenant de S, puis qui passent par
des systèmes optiques différents.
G G
Puisque e1 ≠ e2 , on n’aura une
variation de chemin optique ∆δ = 0 à
→ G G
l’ordre 1 en SS ′ que si SS ′ ⊥ (e1 − e2 ) .
On ne peut donc étendre la sour-
ce qu’orthogonalement aux deux rayons
qui en sont issus et qui interfèrent en M.
Cette condition est très contraignante
car il faut alors utiliser une fente très fine passant par S.
Néanmoins, si on élargit cette fente, les franges seront brouillées partout, ce qui
interdit de travailler avec une source large : les franges brillantes sont peu lumineuses
(on ne pourra les observer sur un écran qu’avec une source laser ; sinon il faudra les
observer à la lunette). En revanche les interférences sont non localisées (on peut les
observer dans toute la zone d’interférence).
— Interféromètre à division d’amplitude.G LesG rayons interférant en M sont issus du
même rayon incident provenant de S : e1 = e2 . Ce n’est possible, comme on l’a vu,
que si l’interféromètre possède
une lame semi-réfléchissante
(appelée séparatrice) permettant
d’obtenir deux rayons lumineux à
partir d’un seul rayon incident, le
rayon transmis étant dirigé vers
le système optique 1 et le rayon
réfléchi vers le système optique
2. On pourra alors élargir la
source sans que les franges
soient brouillées : le dispositif
permet d’obtenir des franges
brillantes très lumineuses et de
les projeter sur un écran. En revanche, elles ne sont observables qu’au voisinage de
la surface reliant les points où se coupent les rayons issus d’un même rayon incident :
les franges sont localisées sur cette surface. Ailleurs que sur cette surface, les franges
sont brouillées (le contraste chute rapidement).

133
134 Partie III.  Optique

Remarquons qu’un interféromètre qui utilise une séparatrice ne fonctionne par


division d’amplitude que lorsqu’il est éclairé par une source large, car ce n’est que
dans ce cas qu’il y a localisation sur la surface où se coupent deux rayons issus du
même rayon incident. S’il est éclairé par une source ponctuelle, il fonctionne par
division du front d’onde, et les interférences sont non localisées : elles s’observent
dans toute la zone d’interférence.
Les résultats précédents constituent le théorème de localisation.

2.2 Résultats à connaître sur la localisation


La démonstration du théorème précédent est hors-programme, mais les résul-
tats doivent être connus :

Pour tout dispositif interférométrique éclairé par une source ponctuelle S, les interfé-
rences sont non localisées : on peut les observer dans toute une zone de l’espace
appelée zone d’interférence. Même si la lumière issue de S rencontre une lame sépa-
ratrice, le dispositif est à diviseur du front d’onde : les interférences en un point M
quelconque de la zone d’interférence sont dues à deux rayons différents issus de S.

Lorsqu’on élargit la source, seuls les dispositifs pour lesquels la lumière issue
de la source rencontre une lame séparatrice permettent d’observer des interférences
contrastées, mais alors seulement sur une surface Σ sur laquelle se coupent deux
rayons issus du même rayon incident : les interférences sont localisées, et le dispositif
est à division d’amplitude.

134
135

[OPTIQUE 3]

INTERFÉRENCES PAR DIVISION


DU FRONT D’ONDE
1. DIFFRACTION DES ONDES LUMINEUSES
Les dispositifs interférométriques à division du front d’onde au programme
(trous et fentes d’Young, réseaux optiques) utilisent le phénomène de diffraction pour
obtenir des sources secondaires cohérentes à partir d’une source primaire. Nous al-
lons rappeler les principales propriétés de ce phénomène, et donner quelques com-
pléments.
Le phénomène de diffraction est inhérent aux ondes, et intervient dès qu’elles
sont limitées spatialement, ou qu’elles se propagent dans un milieu inhomogène.
Nous nous limiterons ici à la diffraction à l’infini (diffraction de Fraunhofer).

1.1 Diffraction à l’infini d’une onde plane par un trou circulaire


Dans le domaine optique, la diffraction peut être mise en évidence en éclairant
sous incidence normale une ouverture circulaire de rayon a percée dans un écran
opaque. La source est un laser qui délivre une onde plane de longueur d’onde λ. On
observe la figure (appelée tache d’Airy) formée à l’infini, c’est-à-dire dans le plan focal
image d’une lentille convergente, ou sur un écran éloigné, parallèle à l’écran opaque,
comme représenté ci-dessous (la figure n’est pas à l’échelle).

Si l’optique géométrique s’appliquait, les rayons ne subiraient pas de déviation


à la traversée de la fente, et il n’y aurait qu’un point lumineux sur l’écran dans la direc-
tion du faisceau laser incident. En réalité, on observe une tache principale de diffrac-
tion, circulaire, autour de ce point. Il y a également des taches secondaires (anneaux
concentriques), mais la tache principale concentre la quasi-totalité de l’énergie qui a
traversé le trou.

135
136 Partie III.  Optique

La longueur d’onde étant de l’ordre de 0,6 µm et a variant typiquement entre


quelques µm et quelques mm, le rayon angulaire θ de la tache de diffraction est petit,
1,22 λ
et on montre qu’il vaut θ ≃ . Si la distance du trou à l’écran est D, le rayon de la
2a
1,22 λD
tache sur l’écran est R = D tan θ ≃ D ⋅ θ ≃ .
2a
Pour λ = 0,6 µm , a = 10 µm et D = 1 m , le rayon R n’est que de 3,7 cm.

1,22 λ
Le rayon angulaire de la tache principale de diffraction vaut θ ≃ (il est
2a
défini tel que l’intensité s’annule sur les bords de cette tache).
Pour une ouverture ou un obstacle de dimension a, ce résultat reste valable en
λ
ordre de grandeur : le rayon angulaire caractéristique du faisceau diffracté est θ ≃ .
a

Dans le cas où l’on utilise une lentille convergente L de distance focale f ′ et de


centre optique Ω, on peut représenter le phénomène dans un plan méridien (plan quel-
conque contenant l’axe optique ∆ de L). La source S est à l’infini sur ∆ : l’onde plane
qui en provient est en incidence normale sur l’écran contenant la pupille diffractante.

L’effet de la diffraction est « d’éparpiller » la lumière : tous les points de l’ouver-


ture, tels que D, se comportent comme des sources ponctuelles cohérentes car « pi-
lotées » par la même source S. De la lumière peut ainsi parvenir à un point M quel-
conque de l’écran placé dans le plan focal image de L, alors que dans le cadre de
l’optique géométrique, les rayons incidents sur L seraient tous parallèles à ∆ et

136
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 137

convergeraient donc au foyer image F ′ de L, point très lumineux entouré de noir. En


M convergent tous les rayons diffractés dans une certaine direction faisant l’angle θ
avec ∆. Ces rayons y interfèrent, et c’est ainsi que l’intensité varie continument sur
l’écran (l’étude quantitative de la diffraction n’est pas au programme). Retenons que,
bien que l’intensité soit maximale pour l’image géométrique, sa répartition diffère d’au-
tant plus de celle prévue par l’optique géométrique que le rapport λ / a est grand. Ci-
dessous on a représenté une même zone carrée de l’écran de 2 cm de côté, centrée
sur F ′ . On a pris f ′ = 60 cm . Les rapports λ / a sont indiqués.
Pour des rapports λ / a suffisamment grands (donc pour a suffisamment petit)
on peut même considérer que la portion observée de l’écran est uniformément éclai-
rée..

Pour des rapports λ / a suffisamment petits (donc pour a suffisamment grand),


la tache se resserre autour de F ′ .

L’optique géométrique correspond au cas limite λ / a → 0 .

1.2 Application à la formation des images optiques


Considérons un montage (de Fraunhofer) où une source ponctuelle S est pla-
cée au foyer objet d’une lentille convergente L1. L’onde qui émerge de L1 est donc
une onde plane dirigée selon l’axe optique ∆ de L1. Cette onde éclaire en incidence
normale une pupille diffractante circulaire de rayon R. La figure de diffraction à l’infini
de cette onde plane par la pupille s’observe dans le plan focal image d’une seconde
lentille convergente L 2 également d’axe optique ∆, c’est-à-dire autour du foyer image

137
138 Partie III.  Optique

F2′ de L 2 , qui est aussi l’image géométrique S ′ de S par l’association { L1 , L 2 }.


Les caractéristiques de la figure de diffraction ne dépendant pas de la distance
D = O1O2 entre les centres optiques des lentilles, on peut prendre D → 0 . Le système
est alors équivalent à une lentille unique L, et le faisceau lumineux est limité par la
monture de cette lentille de rayon R (rayon d’ouverture). La diffraction est due à la
valeur finie de R, et c’est la lentille L qui constitue dans ce cas la pupille diffractante.

La diffraction à l’infini permet donc l’étude de la répartition d’intensité lumineuse


au voisinage des images géométriques.

Ainsi, même si l’image S ′ et l’objet S sont deux points rigoureusement stigma-


tiques par un système optique centré, on observe encore une tache d’Airy autour de
S′ .
La diffraction devient limitante lorsque la tache de diffraction devient plus grande
que celle due aux aberrations géométriques du système optique. C’est ce qui peut
arriver en photographie quand on utilise un trop grand nombre d’ouverture N = f ′ / 2R
(plus N est grand, plus le rayon R du diaphragme est petit).
On peut diminuer la taille de la tache d’Airy en augmentant l’ouverture des sys-
tèmes optiques, c’est-à-dire le rayon R, mais on ne peut pas la rendre nulle. Le miroir
principal des grands télescopes possède un rayon allant de 5 m à 20 m. Si ces miroirs
sont indéformables, leur grande taille permet surtout d’obtenir des images plus lumi-
neuses, car la turbulence atmosphérique déforme les fronts d’onde provenant de l’es-
pace, et la tache obtenue correspond à ce qu’on obtiendrait avec un télescope de
rayon R ≃ 10 cm placé au-dessus de l’atmosphère. Pour passer outre cette limitation,
il faut utiliser l’optique adaptative, c’est-à-dire analyser et corriger en temps réel le front
d’onde déformé par l’atmosphère à l’aide d’actionneurs qui déplacent les nombreuses
facettes du miroir principal du télescope.

138
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 139

Rendre la tache de diffraction plus pe-


tite est essentiel pour la résolution d’un ins-
trument d’optique. Considérons en effet deux
points objets A et B dans un plan de front
d’une lentille L de rayon d’ouverture R. Ils
sont vus sous un angle ∆θ depuis le centre
optique O de L. Ces points étant des sources lumineuses incohérentes, les intensités
lumineuses qu’ils créent sur un écran, placé dans le plan de front conjugué de celui
contenant A et B, s’ajoutent. Les taches d’Airy autour des images géométriques A′ et
B ′ de A et B peuvent empêcher de distinguer ces deux images si ∆θ est trop petit. Si
on prend le critère de Rayleigh, on considère qu’on arrive à distinguer les deux images
si le maximum d’intensité due à B se forme plus loin que la première annulation de
1,22 λ
l’intensité due à A, soit si ∆θ > . Ce critère ne serait plus valable si les intensités
2R
maximales dues à A et B n’étaient pas du même ordre de grandeur.

1.3 Diffraction à l’infini d’une onde plane par une fente fine
On éclaire maintenant avec le laser de longueur d’onde λ une fente de largeur
a (typiquement entre quelques µm et quelques mm) et de longueur très supérieure à
a (fente fine) percée dans un écran opaque. On observe la figure de diffraction formée
sur un écran éloigné parallèle à l’écran opaque (la figure ci-après n’est pas à l’échelle).
On est dans le cas d’un point source S0 à l’infini dans la direction orthogonale
au plan diffractant. Contrairement aux prédictions de l’optique géométrique, il n’y a pas
qu’un seul point lumineux sur l’écran dans la direction du faisceau laser incident, c’est-
à-dire en l’image géométrique S0′ de S0 . On observe une tache principale de diffrac-
tion autour de S0′ , alignée dans une direction orthogonale à la fente. Il y a également
des taches secondaires, mais la tache principale concentre de nouveau la quasi-tota-
lité de l’énergie qui a traversé la fente.

139
140 Partie III.  Optique

Le rayon angulaire de la tache de diffraction vaut θ ≃ λ / a (sur les bords de la


tache, l’intensité s’annule) si cet angle est petit (sinon, on montre que sin θ = λ / a ).

Remarquons que la figure de diffraction constituée par un fil de même géométrie


que la fente serait la même, à l’exception d’un point très lumineux au niveau de l’image
géométrique. Cette propriété est utilisée pour mesurer par exemple l’épaisseur d’un
cheveu.

Plus généralement, dans l’approximation des petits angles, l’amplitude de


l’onde diffractée à l’infini se déduit de la transparence t(x,y) de la pupille diffractante
(la transparence vaut 1 en un point M de coordonnées (x,y) où la pupille laisse passer
la lumière, et 0 en un point où elle est complètement opaque) par une transformée de
Fourier spatiale à deux dimensions (optique de Fourier). On peut donc déduire t(x, y)
de la figure de diffraction.

Considérons maintenant le cas où l’on éclaire la fine fente diffractante de centre


C, placée dans le plan xCy, avec une fine fente source à l’infini qui lui est parallèle,
centrée sur le point S0 placé sur l’axe Cz. La fente diffractante est étirée selon Cy.
Avec le seul point source S0 , la lumière est diffractée dans le plan contenant le rayon
incident et la direction Cx orthogonale à la fente. La figure de diffraction est alors ali-
gnée parallèlement à Cx autour de l’image géométrique S0′ de S0 . Il en va de même
pour un autre point S de la fente source à l’infini dans le plan yCz : la lumière est
diffractée dans le plan contenant le rayon incident (qui fait un angle β avec l’axe Cz)
et la direction Cx orthogonale à la fente, et la figure de diffraction est alignée parallè-
lement à Cx autour de l’image géométrique S ′ de S.
On obtient donc avec une fine fente source la même figure de diffraction que
celle due à S0 , mais étirée selon la direction des fentes (l’image géométrique de la
fente se trouve sur l’axe X = 0 ).
Pour des rapports λ / a suffisamment grands (donc pour a suffisamment faible)
on peut considérer que la portion observée de l’écran est uniformément éclairée.

140
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 141

2. TROUS D’YOUNG / FENTES D’YOUNG


2.1 Nature des franges / Interfrange
Deux trous de même rayon R, de centres respectifs S1 et S2 distants de a, sont
percés dans un écran opaque placé dans le plan xOy, où O est le milieu de [S1S2 ] . La
lumière est émise par une source ponctuelle S à l’infini sur l’axe Oz, monochromatique.
L’O.P.P.H de longueur d’onde λ issue de S arrive normalement à la pupille diffractante.
Le milieu de propagation est l’air, d’indice de réfraction n = 1.
On observe la figure de diffraction à l’infini, soit ici sur un écran parallèle à la
pupille diffractante, à une distance D >> a .

a est de l’ordre du mm, D du m, les dimensions LX et LY de l’écran de l’ordre


du cm. On a donc a << D , LX << D et LY << D .

D’autre part, le rayon R des trous est suffisamment petit pour qu’on puisse

141
142 Partie III.  Optique

considérer que l’intensité sur l’écran serait uniforme, égale à I0 , si un seul des trous
était ouvert. On se ramène donc à deux sources ponctuelles S1 et S2 cohérentes
(puisque pilotées par la même source S) et à des interférences à deux ondes de même
amplitude sur l’écran d’observation.
Soient ( x = X , y = Y , z = D ) les coordonnées d’un point M sur l’écran. L’état d’in-
terférences en M ne dépend que de la différence de marche δ(M ) = (SM )2 − (SM )1 ,
soit ici δ(M ) = SS2 + S2M − (SS1 + S1M ) = S2M − S1M , car SS2 = SS1 , la source S se
trouvant dans le plan médiateur de [S1S2 ] .
Les coordonnées de S1 sont ( +a / 2,0,0 ) , celles de S2 sont ( −a / 2,0,0 ) . On a
2 2 2
 a  X − a / 2  Y 
donc S1M =  X −  + Y 2 + D 2 = D 1 +   +  .
 2  D  D
Comme a, X et Y sont très inférieurs à D, on peut utiliser le développement
u  1  X − a / 2 2 1  Y 2 
limité à l’ordre 1 : 1 + u = 1 + . On obtient S1M = D 1 +   + 2  D   , et
2  2  D    

 1  X + a / 2 2 1  Y 2 
de même S2M = D 1 +   + 2  D   , d’où :
 2  D    

aX aX
δ(M ) = S2M − S1M = , et l’ordre d’interférence en M est p(M ) = . Les franges sur
D λD
l’écran correspondent à δ(M ) = Cte . Ce sont donc des droites d’équation X = Cte ,
c’est-à-dire orthogonales à la droite (S1S2 ) .

La frange d’ordre 0 ( p = 0 ) a pour équation X = 0 . C’est l’intersection de l’écran


avec le plan médiateur de [S1S2 ] . Les symétries du système imposent que sur l’axe
ΩY , les rayons interfèrent constructivement puisqu’ils ont parcouru le même chemin
optique. Cette frange d’ordre 0 est donc brillante.
λD
On trouve d’autres franges brillantes sur l’écran si p = k ∈ Z ⇔ X = k , et
a
1  1  λD
des franges sombres si p = k + avec k ∈ Z ⇔ X =  k +  .
2  2  a

L’intensité sur l’écran est :


  2πδ( X )     2πaX  
I ( X ) = 2I0 [1 + cos φ( X )] = 2I0 1 + cos    = 2I0 1 + cos   .
  λ    λD  
λD
C’est une fonction périodique de X. Sa périodicité ∆X = est appelée inter-
a
frange. C’est la distance entre deux franges successives de même intensité : ∆X cor-
respond à ∆φ = 2π , soit à ∆δ = λ , ou encore à ∆p = 1 .

142
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 143

Nous avons vu à la sous-section 1.5 du chapitre précédent que les franges sont
en fait des branches d’hyperboles (seule la frange d’ordre 0 est rigoureusement recti-
ligne), mais comme l’observation se fait au voisinage du plan médiateur de [S1S2 ] ,
elles sont assimilables à des droites.
Pour a = 500 µm , D = 1 m et λ = 500 nm , l’interfrange vaut ∆X = 1 mm . Si
R = 50 µm , l’ordre de grandeur du diamètre de la tache principale de diffraction d’un
trou est d = λD / R = 1 cm : on peut bien considérer que l’intensité I0 créée par un seul
trou sur l’écran de dimensions LX = LY = 1 cm est uniforme. Sans interférences, l’in-
tensité sur l’écran serait égale à 2I0 . Le phénomène d’interférences entraîne une ré-
partition non uniforme de l’intensité à l’écran, avec ici des franges brillantes d’intensité
4I0 , et des franges noires (d’intensité nulle). L’intensité moyenne sur l’écran reste ce-
pendant égale à 2I0 , ce qui traduit le fait que la puissance totale sur l’écran reste égale
à P = 2I0 ⋅ LX ⋅ LY .
La figure d’interférence est représentée ci-
contre. Remarquons qu’en impression noir et blanc,
les franges brillantes sont représentées en blanc
alors qu’en impression couleur elles seraient de la
couleur de la source, qui est monochromatique, par
exemple rouge pour un laser He-Ne.
Un laser est suffisamment puissant pour que
les franges soient visibles sur un écran malgré la pe-
titesse des trous. Avec une lampe spectrale (munie
d’un filtre ne laissant passer qu’une seule de ses ra-
diations), on ne peut les observer qu’en plaçant l’œil
derrière une lunette de visée réglée sur l’infini.

143
144 Partie III.  Optique

2.2 Élargissement de la source


Les franges d’interférences sont inchangées lorsque le point source S n’est plus
à l’infini sur Oz, du moment qu’il reste dans le plan médiateur x = 0 des deux trous.
En effet, on a alors SS2 = SS1, et la différence de marche en un point M donné de
l’écran reste δ(M ) = aX / D .
Considérons un tel point source S sur l’axe Oz, à une distance D ′ de la pupille
diffractante. On peut ajouter d’autres points sources S ′′ se déduisant de S par une
G
translation selon ey sans brouiller les franges : les franges créées par les points S ′′
coïncident : la figure résultante est la même que celle due à S, mais plus lumineuse.
En revanche, si on ajoute des points sources S ′ se déduisant de S par une
G
translation selon ex , les franges créées par ces points ne coïncident plus.

On peut donc envisager d’utiliser une fente fine de largeur b selon Sx ′ et de


longueur L selon Sy ′ , à condition que b soit suffisamment petit pour ne pas brouiller
les franges. C’est cette condition sur b que nous cherchons à établir.
Considérons pour cela un point S ′ ( x = x ′ << D′, y = y ′, z = −D′) de cette fine
fente source orthogonale à (S1S2 ) et centrée sur Oz, située à une distance D′ >> a de
la pupille diffractante. À la différence de marche S2M − S1M = aX / D s’ajoute mainte-
nant la différence de marche S ′S2 − S ′S1 = ax ′ / D′ , indépendante de la position du
point M, le calcul étant identique à celui de S2M − S1M .
aX ax ′
On a donc δ′(M ) = δ′( X ) = + = p′(M )λ . Les franges dues à S ′ sont tou-
D D′
jours des droites d’équation X = Cte , et l’interfrange ∆X = λD / a , correspondant à
G
∆δ′ = λ , est inchangé : les franges ont juste subi une translation selon ex . Par
exemple, l’ordre 0 qui se trouvait en X = 0 se trouve maintenant en X 0 = −Dx ′ / D′ .

144
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 145

Remarquons que si x ′ > 0 , le chemin S ′S2 est plus long que S′S1 . Pour trouver
l’ordre 0 en X = X 0 (même chemin optique de la source S ′ au point M0 d’abscisse
X 0 ), il faut que le chemin S2M0 soit plus court que S1M0 , donc que X 0 soit négatif,
d’où le signe moins dans l’expression de X 0 .
λD
Si X 0 << ∆X = , les franges dues à S ′ sont quasiment confondues avec
a
celles dues à S, et les franges résultantes gardent un contraste proche de 1. Cette
condition s’écrit également sous la forme x ′ << λD′ / a , qui est du même ordre de
grandeur que l’interfrange, soit le mm… Une fente étirée orthogonalement à (S1S2 )
doit être très fine (sa largeur doit vérifier b << λD′ / a ) pour garder un bon contraste.

On peut présenter ce résultat sous une forme plus générale. Si on note mainte-
nant ∆p la variation (en valeur absolue) de l’ordre d’interférence en un point M fixé
aX
lorsqu’on passe des interférences dues à S à celles dues à S ′ , on a p(M ) = et
λD
aX ax ′ a x′ X
p′(M ) = +  ∆p(M ) = p′(M ) − p(M ) = = 0 (ici indépendant de M).
λD λD′ λD′ ∆X
Ainsi, la condition pour que le contraste reste proche de 1 est ∆p(M ) << 1 .

Dans le cas d’une source étendue, l’ordre d’interférence en un point M varie


d’un point source à un autre On note ∆p(M ) = pmax (M ) − pmin (M ) .
— Si ∆p(M ) << 1 , la figure d’interférences garde un contraste proche de 1 au voisinage
de M.
— Si ∆p(M ) >> 1, il n’y a plus de variation d’intensité lumineuse au voisinage de M (le
contraste en M est proche de 0).

ab
Dans le cas des fentes d’Young, ∆p est indépendant de M. On a ∆p =
λD ′
pour une fente source de largeur b. On peut définir une extension spatiale bc telle que
∆p = 1 ⇔ bc = λD′ / a . Le contraste vaut C ≃ 1 si b << bc , et C ≃ 0 si b >> bc .
Ce résultat peut être établi de façon plus quantitative en
calculant l’intensité à l’écran due à la fente source de largeur b,
mais cette démarche n’est pas exigible.
Comme la puissance émise est proportionnelle à la sur-
face de la source, un élément de source de largeur dx ′ et de
longueur dy′ autour de S ′ ( x = x ′, y = y ′, z = −D′) créerait une
intensité d2I0 = Kdx ′dy ′ uniforme sur l’écran en présence d’un
seul trou. Avec les deux trous, l’intensité créé par cet élément

145
146 Partie III.  Optique

  2πaX 2πax ′  
vaut d2I = 2d2I0 1 + cos  + au point M ( x = X , y = Y , z = D ) .
  λD λD′  
Les sources S ′ étant incohérentes entre elles, on obtient l’amplitude en M en
sommant toutes les intensités créées par les points S ′ :
b /2 L /2
  2πaX 2πax ′  
I = 2K   1 + cos  λD + λD′   dx ′dy ′
 
x′ =− b /2 y ′ =−L / 2 
b /2
  2πaX 2πax ′  
I = 2KL  1 + cos  λD + λD′   dx ′ , soit :
 
x ′=− b /2 

 λD ′  2πaX πab  λD′  2πaX πab  


I = 2KLb 1 + sin  +  − sin  − .
 2πab  λD λD′  2πab  λD λD′  
 p−q   p+q
Comme sin p − sin q = 2 sin   cos   , on obtient :
 2   2 
 λD ′  πab   2πaX     πab   2πaX  
I = 2KLb 1 + sin   cos  λD   = 2I0 1 + sinc  λD′  cos  λD   .
 πab  λ D ′         
L’intensité I0 est celle qu’on obtiendrait uniformément sur l’écran avec un seul
trou. Elle est proportionnelle à la surface Lb de la fente.
La fonction sinc est la fonction sinus cardinal, définie par sinc( X ) = sin X / X
pour X ≠ 0 et sinc(0) = 1 en prolongeant par continuité.
  2πaX    πab 
L’intensité est de la forme I = 2I0 1 + V cos    , où V = sinc   est un
  λD    λD ′ 
contraste algébrique (ou visibilité), ici indépendant du point M sur l’écran. Il dépend de
la largeur b de la fente. b ֏ V (b ) s’annule pour la première fois pour b = bc = λD′ / a .

On retrouve C = V ≃ 1 pour b << bc et C ≃ 0 pour b >> bc .


On peut remarquer que si on associe deux à deux des fentes élémentaires dis-
λD ′ λD′
tantes de (l’une correspond à l’abscisse x ′ , l’autre à x ′ + ) on obtient sur
2a 2a
l’écran une intensité totale :

146
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 147

  2πaX 2πax ′   2πaX 2πax ′ 


dI = 2KLdx 1 + cos  +  + 1 + cos  λD + λD′ + π   = 4KLdx .
  λ D λ D ′   
Dans ce cas, les franges dues à une fente sont décalées à l’écran d’un demi-
interfrange par rapport aux franges dues à l’autre fente (une frange noire créée par
une fente coïncide avec une frange brillante créée par l’autre). Il en résulte une inten-
λD′
sité uniforme sur l’écran. C’est pour cette raison que lorsque b = n , avec n ∈ N∗ ,
a
on peut associer de telles fentes élémentaires deux à deux, et que le contraste est nul.
Lorsque la visibilité devient négative, il y a inversion des franges par rapport au
cas b = 0 . On retrouve alors une frange sombre, et non pas brillante, en X = 0 .
L’aspect de l’écran est représenté ci-dessous pour plusieurs valeurs de visibi-
lité.

2.3 Fentes d’Young


Si on éclaire des trous d’Young avec une fine fente source monochromatique à
l’infini, le contraste vaut 1 puisque l’intensité minimale est nulle, mais les franges bril-
lantes obtenues sont peu lumineuses. On peut, pour remédier à ce problème, rempla-
cer les trous par deux fentes identiques parallèles à la fente source.
Les fentes diffractantes sont fines (leur longueur est très grande devant leur
largeur ℓ), placées dans le plan xCy, parallèles à Cy, et distantes de a. On supposera

ℓ suffisamment faible pour que la portion observée de l’écran soit uniformément éclai-
rée dans le cas où une seule fente est ouverte.
La figure de diffraction est alors étendue selon la direction des fentes par rapport
au cas où il n’y aurait qu’un point source S0 (on ne pourrait dans ce cas observer de

147
148 Partie III.  Optique

la lumière que selon la droite (S0′ X ) où S0′ est l’image géométrique de S0 ). On l’ob-
serve autour de l’image géométrique de la fente source sur l’axe X = 0 .

On a en conséquence la même figure d’interférence avec deux fentes d’Young


et une fine fente source à l’infini qui leur est parallèle, qu’avec deux trous d’Young
(avec source ponctuelle, ou avec fine fente source orthogonale à (S1S2 ) ), mais avec
des franges brillantes plus lumineuses puisque les fentes laissent passer plus de lu-
mière que les trous.

Ce résultat n’est vrai que parce qu’on a pris le rayon R des trous, ou la largeur
ℓ des fentes, suffisamment petit pour que l’intensité sur la zone observée de l’écran
soit uniforme lorsqu’il n’y a qu’un trou ou qu’une fente. On peut montrer que la figure
d’interférences, soit ici des franges rectilignes régulièrement espacées, est modulée
par la figure de diffraction d’un seul trou, ou d’une seule fente.
Par exemple, on a représenté ci-dessous le cas des trous d’Young avec a = 8R
et des fentes d’Young avec a = 4ℓ .

148
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 149

2.4 Montages pour l’étude expérimentale des trous ou des fentes d’Young
Source et écran très éloignés de la pupille
Dans les études précédentes, la distance D ′ entre la source et la pupille dif-
fractante, et la distance D entre la pupille diffractante et l’écran, ont été prises très
grandes devant la distance a entre les trous, ou entre les fentes. On a effectué un
développement limité à l’ordre 1 en a / D′ et a / D , qui donne un résultat exact quand
a / D′ → 0 et a / D → 0 .
Si a est fixé, cela correspond à D′ → ∞ et D → ∞ : source et écran sont à l’infini
de la pupille. On est alors dans les conditions de la diffraction de Fraunhofer (diffraction
à l’infini par une pupille éclairée par une onde plane).
En pratique, a << D′ et a << D , ce qui est très bien réalisé avec a de l’ordre du
mm, D et D ′ de l’ordre du m.
On peut se passer du développement limité en étudiant uniquement la réparti-
tion d’intensité sur l’axe ΩX de l’écran, puisque la figure d’interférence est, dans tous
les cas étudiés, invariante par translation selon ΩY . Il suffit d’étudier les rayons con-
tenus dans le plan zOx, et on se ramène pour le calcul de la différence de marche à la
figure suivante :

Sur la figure de gauche, on ne voit pas le point source S ni le point M de l’écran


puisqu’ils sont à l’infini, et les rayons issus de S1 et S2 qui se dirigent vers M sont
parallèles, de même que ceux qui proviennent de la source S. Ces rayons font respec-
tivement des angles orientés θ et α avec l’axe Oz. L’angle α peut être non nul si la fine
fente source (orthogonale au plan de la figure) n’est pas sur Oz.
D’après le théorème de Malus, tout plan orthogonal aux rayons issus de S est
un plan d’onde. Les chemins optiques (SH) et (SS2 ) sont donc identiques (H et S2
vibrent en phase).
Si la lumière était émise par le point M, les points K et S1 vibreraient en phase
d’après le théorème de Malus. Ce n’est pas le cas, mais un chemin optique étant in-
dépendant du sens de parcours de la lumière, on a (S1M ) = (KM ) .

149
150 Partie III.  Optique

Finalement, la différence de marche entre les deux rayons issus de S parvenant


en M est δ(M ) = (SM )2 − (SM )1 = S2K − S1H = a sin θ − a sin α , avec :
tan θ = X / D et tan α = − x ′ / D′ (on a x ′ < 0 si α > 0 ).
La figure précédente n’est pas à l’échelle : comme X << D et x ′ << D′ ; les
angles θ et α sont très petits, et on peut linéariser les expressions précédentes. On a
aX ax ′
donc δ(M ) = aθ − aα = + . On retrouve bien l’expression obtenue au 2.2.
D D′

Montage de Fraunhofer
Le montage précédent est encombrant puisqu’il faut des distances de l’ordre du
mètre entre la pupille et la source lumineuse, et entre la pupille et l’écran.
On peut réaliser le montage de Fraunhofer, plus compact, sur un banc optique.
La fente source est placée dans le plan focal objet d’une lentille convergente L1 d’axe
optique ∆ = Oz , l’écran dans le plan focal image d’une lentille convergente L 2 de
même axe optique ∆.

On peut se limiter à l’étude de la répartition d’intensité sur l’axe ΩX de l’écran,


la figure d’interférence étant dans les cas étudiés précédemment (trous d’Young ou
fentes d’Young) invariante par translation selon ΩY . Il suffit d’étudier les rayons con-
tenus dans le plan zOx.
Sur le schéma, les lentilles minces sont représentées par des traits mais il ne
faut pas oublier que les rayons qui les traversent effectuent un chemin optique non nul
à l’intérieur des lentilles, et qui dépend de la longueur traversée et de l’indice de ré-
fraction du verre les constituant.

150
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 151

Cependant, grâce au théorème de Malus, on n’a pas besoin de calculer ces


chemins optiques. En effet, comme précédemment, puisque L1 transforme une onde
sphérique en une onde plane, (SH ) = (SS2 ) . De même, si la lumière est émise en M,
L 2 transforme l’onde sphérique issue de M en une onde plane, donc (S1M ) = (KM ) .
X
On a de nouveau δ(M ) = (SM )2 − (SM )1 = S2K − S1H = a sin θ − a sin α , avec tan θ =
f2′
x′
et tan α = − (on a x ′ < 0 si α > 0 ).
f1′
Les conditions de Gauss imposent que les angles θ et α soient très petits afin
que les franges soient nettes. On peut linéariser les expressions précédentes. On a
aX ax ′
donc δ(M ) = aθ − aα = + .
f2′ f1′
Cette expression s’obtient en remplaçant D ′ par f1′ et D par f2′ , par rapport au
cas où la source et l’écran sont dans des plans très éloignés de la pupille

2.5 Interposition d’une lame à faces parallèles 


Considérons le cas où la source S
est ponctuelle et à l’infini sur l’axe Oz.
On place parallèlement à la pupille
diffractante et devant le trou S1 une lame à
faces parallèles d’épaisseur e, constituée
par un matériau transparent d’indice de ré-
fraction n.
La différence de marche des trous
au point M sur l’écran est inchangée :
aX
S2M − S1M = . En revanche, on n’a plus (SS2 ) = (SS1) car le rayon issu de S qui
D
passe par S1 a traversé une épaisseur e de matériau d’indice de réfraction n alors que
celui qui passe par S2 a traversé une épaisseur e d’air d’indice 1. On a donc :
aX
(SS2 ) − (SS1) = (1 − n ) e , et δ′(M ) = (SM )2 − (SM )1 =
− ( n − 1) e .
D
Les franges sont toujours des droites d’équation X = Cte , et l’interfrange
λD
∆X = correspondant à ∆δ′ = λ est inchangé : les franges ont juste subi une tran-
a
G
slation selon ex .
( n − 1)eD
L’ordre 0 qui se trouvait en X = 0 se trouve maintenant en X 0 = .
a
En mesurant cette position, on a par exemple accès à l’indice de réfraction de
la lame, connaissant son épaisseur e.

151
152 Partie III.  Optique

Il est cependant difficile de savoir où se trouve l’ordre 0 avec de la lumière mo-


nochromatique puisque la figure d’interférence est périodique.

2.6 Mesure de l’indice de réfraction de l’air 


On ne peut plus bien sûr pour cette
mesure considérer que l’indice de réfrac-
tion est na = 1 pour l’air. C’est celui du vide
qui vaut 1.
Afin de mesurer na , on place deux
tubes identiques de longueur ℓ, initialement
remplis d’air, devant les trous d’Young.
La source S est ponctuelle et à l’in-
fini sur l’axe Oz, donc l’ordre 0 se trouve
initialement en X = 0 .
On fait progressivement le vide dans le tube placé devant S1 . Un capteur op-
tique placé sur l’écran enregistre les variations d’intensité lumineuse lorsque l’indice
de réfraction dans la cuve que l’on vide passe de na à 1.
Pour une longueur d’onde dans le vide λ = 0,5893 µm , une distance a = 2 mm
entre les fentes, une longueur ℓ = 20,0 cm de tubes, on observe une translation de
99,5 interfrange.
naaX λD
Initialement, on a δ(M ) = (SM )2 − (SM )1 = et l’interfrange vaut ∆X = .
D naa
naaX
En fin d’expérience δ′(M ) = + (na − 1) ℓ .
D
L’interfrange n’a pas varié mais l’ordre 0 se trouve désormais en :
(n − 1) ℓD (n − 1) ℓ∆X
X0 = − a =− a .
naa λ
(na − 1) ℓ λ
On en déduit = 99,5  na = 1 + 99,5 = 1,000293 dans les conditions
λ ℓ
de température et de pression de l’expérience.

3. AUTRES EXEMPLES DE DIVISION DU FRONT


D’ONDE 
Le seul dispositif interférométrique à division du front d’onde explicitement au
programme est celui des trous ou des fentes d’Young. Nous allons présenter deux
autres dispositifs simples, qui ne font pas appel au phénomène de diffraction pour
obtenir deux sources secondaires cohérentes.

152
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 153

3.1 Miroir de Lloyd 


Description du dispositif
Une fine fente source lumineuse parallèle à Oy, monochromatique, de longueur
d’onde λ, est placée à une distance a / 2 d’un miroir plan ML parfait (la norme du coef-
ficient de réflexion du champ électrique vaut r = 1).
On observe la figure d’interférence sur un écran orthogonal au miroir, situé à
une distance D >> a de la fente.
Deux rayons sont susceptibles de se couper en un point M : un rayon direct (1)
issu d’un point S1 de la fente, et un rayon (2) issu de S1 , et qui s’est réfléchi en P sur
ML . Ce rayon semble provenir de S2 , image de S1 par ML .
Pour que ces deux rayons existent, il faut que M se trouve dans la zone d’inter-
férence, c’est-à-dire dans le faisceau de rayons issus de S2 qui s’appuie sur ML .

L’écran est collé au miroir, et la zone d’observation possède des dimensions


très petites devant D. S2 étant le symétrique de S1 par rapport à ML , on se ramène à
des fentes d’Young distantes de a, qui créent sur l’écran des franges rectilignes
d’équation X = Cte , invariantes par translation selon ΩY : on peut se contenter d’une
figure dans le plan zOx.

Intensité sur l’écran


Puisque S1 P = S2 P , Le calcul de la différence de marche est identique à celui
pour les trous ou les fentes d’Young, qui donnait δ(M ) = S2M − S1M = aX / D .

Il faut cependant ici tenir compte de la réflexion en P sur le miroir, qui s’accom-
pagne d’un déphasage de π. Le déphasage dû à la propagation d’une onde entre deux

points A et B étant φB − φ A = − ( AB ) , un déphasage de π correspond à une diffé-
λ
rence de marche supplémentaire de λ / 2 (en valeur absolue).
On pourrait bien sûr également prendre un déphasage de −π . Le contenu phy-
sique est le même : il y a un changement de signe du champ électrique lors de la
réflexion : ici r = −1 .

153
154 Partie III.  Optique

aX λ
La différence de marche vaut donc δ(M ) = (S1M )2 − (S1M )1 = + , et l’inten-
D 2
sité sur l’écran est :
  2πδ( X )     2πaX  
I ( X ) = 2I0 [1 + cos φ( X )] = 2I0 1 + cos     I ( X ) = 2I0 1 − cos  λD   .
  λ    
C’est le même système de franges que pour les fentes d’Young, avec un inter-
frange ∆X = λD / a , mais, du fait de la réflexion d’un des deux rayons, on a des inter-
férences totalement destructives et non plus totalement constructives dans le plan mé-
diateur de [S1S2 ] , donc une frange noire en X = 0 .

Élargissement de la fente source


Le calcul est similaire à celui effectué pour les
trous d’Young. La fente a pour largeur b. Un point S1′ de
a b a b 
cette fente est repéré par x ∈  − , +  , soit, en po-
2 2 2 2
a  b b
sant u = x − , par u ∈  − ,  .
2  2 2
Si L est la longueur de la fente, la fente élémen-
taire de largeur du passant par S1′ crée en M une inten-
  2π(a + 2u ) X  
sité dI ( X ) = 2KLdu 1 − cos    puisqu’il suf-
  λD 
fit de changer a en a + 2u pour avoir la distance entre S1′ et son symétrique S2′ par
rapport à ML .
Les points source étant incohérents entre eux, on somme les intensités en M :
b /2
  2π(a + 2u ) X  
I = 2KL  1 − cos 
  λD   du

x ′=− b /2

 λD  2π(a + b ) X  λD  2π(a − b ) X 
I = 2KLb 1 − sin  + sin    , soit :
 4 πXb  λD  4πXb  λD 
 λD  2πbX   2πaX 
I = 2KLb 1 − sin   cos  λD 
 2πXb  λD   
  2πbX   2πaX  
= 2I0 1 − sinc   cos   .
  λD   λD  
  2πaX  
L’intensité est donc de la forme I = 2I0 1 − V ( X )cos   .
  λD  
 2πbX 
Le contraste algébrique V ( X ) = sinc   dépend ici du point M sur l’écran.
 λD 

154
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 155

λD
La première annulation de X ֏ V ( X ) a lieu pour X c = . On a C = V ≃ 1
2b
pour X << X c et C ≃ 0 pour X >> X c .
On a représenté ci-dessous les franges sur la même zone de l’écran pour
b = a / 10 et b = a / 5 .
Dans tous les cas la frange noire en X = 0 garde un contraste C(0) = 1 puisque
tous les jeux de fentes {S1′, S2′ } créent une frange noire en X = 0 .
λD
En revanche, l’interfrange dû à {S1′, S2′ } dépend de u, ce qui explique les
a + 2u
oscillations de la visibilité.
Lorsque b augmente, X c diminue, et le contraste diminue plus vite lorsqu’on
s’écarte de X = 0 . On vérifie qu’une fente étirée selon y doit être très fine pour garder
un bon contraste.

3.2 Vélocimétrie laser à franges / Biprisme de Fresnel 


On peut déterminer la vitesse d’un écoulement fluide en un point O en ense-
mençant l’écoulement de particules qui, si elles sont suffisamment petites, se dépla-
cent à la vitesse de l’écoulement.
On crée autour du point O un système de franges rectilignes. Lorsqu’une parti-
cule (dont la taille est petite devant l’interfrange) traverse ces franges, elle diffuse dans
toutes les directions une partie de la lumière reçue. Un détecteur reçoit la lumière dif-
fusée ; le signal qu’il émet est proportionnel à l’intensité reçue, et va donc passer par
des maximums quand la particule traverse une frange brillante, et des minimums
quand elle traverse une frange noire.
Pour créer les franges, on utilise un laser de longueur d’onde λ qui émet une
onde plane (c’est l’équivalent d’une source ponctuelle S à l’infini). Le faisceau de faible
diamètre est séparé en deux par une lame semi-réfléchissante Sp.

155
156 Partie III.  Optique

La première partie du faisceau traverse sous incidence normale un prisme de


demi-angle au sommet A très petit, la seconde partie du faisceau traverse symétrique-
ment un autre prisme identique au premier.

Étudions la déviation due à un prisme constitué


d’un matériau d’indice de réfraction n. À l’entrée dans le
prisme, le faisceau n’est pas dévié car il est en incidence
normale. Il arrive donc sur la face de sortie avec un
angle d’incidence A, et en émerge avec un angle A′ .
Les lois de Descartes de la réfraction donnent sin A′ = n sin A , qui se linéarise
en A′ = nA . On en déduit l’angle α = A′ − A = (n − 1)A dont a été dévié le faisceau par
le prisme.
On constate que tous les systèmes optiques rencontrés (Sp, miroirs, prisme)
sont afocaux : les deux ondes qui émergent des prismes sont planes, et semblent pro-
venir des images S1 et S2 de S par l’ensemble de ces systèmes, images situées à
l’infini.
Du fait du faible diamètre du laser, la zone d’interférence est très petite, assimi-
lable à un point de l’écoulement fluide.
Il y a donc interférences entre deux ondes planes se propageant respectivement
G G G G G G
selon les vecteurs unitaires e1 = cos α ez − sin α ex et e2 = cos α ez + sin α ex dans le
fluide, dont on note N l’indice de réfraction :
 G G G  2πN 2πN 
ψ1(r , t ) = ψ0 cos(ωt − k1 ⋅ r ) = ψ0 cos  ωt − λ z cos α + λ x sin α 
  
 .
G G G
ψ (r , t ) = ψ cos(ωt − k ⋅ r ) = ψ cos  ωt − 2πN z cos α − 2πN x sin α 
 2 0 2 0  
 λ λ 
En effet, les deux ondes ont la même amplitude et sont en phase sur l’axe de
symétrie x = 0 (il n’y a pas de différence de marche supplémentaire à prendre en
compte car les deux ondes ont subi chacune deux réflexions).
L’onde résultante vaut donc :
G  2πN   2πN 
ψ(r , t ) = 2ψ 0 cos  ωt − z cos α  cos  x sin α  .
 λ   λ 
On en déduit l’intensité :

156
Chapitre 3.  Interférences par division du front d’onde 157

 2πN   2πN   2πN 


I ( x ) = 4K ψ02 cos2  ωt − z cos α  cos2  x sin α  = 2K ψ02 cos2  x sin α 
�����  �������
λ
�  λ   λ 
1/2

  4πN    4πN 
soit I ( x ) = K ψ 02 1 + cos  x sin α   = 2I0 1 + cos  x sin α   puisque l’intensité
  λ    λ 
1
d’une des ondes est I0 = K ψ 0 2 .
2
On retrouve bien la formule des interférences à deux ondes de même amplitude
λ λ
I ( x ) = 2I0 [1 + cos φ( x )] , et on en déduit l’interfrange ∆x = ≃ .
2N sin α 2N α

On peut trouver ce résultat en calculant la différence de marche entre les deux


rayons qui parviennent en un point M d’abscisse x.
′ et (2′) sont en phase au point M0 projeté orthogonal de M sur
Les rayons (1)
l’axe Oz car le plan x = 0 est un plan de symétrie du système.

D’après le théorème de Malus, le rayon (2) a effectué une marche supplémen-


taire (KM ) = N ⋅ KM par rapport à (2′) pour arriver sur (M0M ) , et le rayon (1)
′ a effec-
tué une marche supplémentaire (HM0 ) = N ⋅ HM0 par rapport à (1) pour arriver sur
(M0M ) . On a donc δ2/1(M ) = N (KM + HM0 ) = 2Nx sin α .
λ λ
L’interfrange correspond à ∆δ2/1 = λ , donc on a bien ∆x = ≃ .
2N sin α 2N α
Pour un prisme en verre d’indice de réfraction n = 1,50 , et d’angle au sommet
A = 2° , on a une déviation d’angle α = (n − 1)A = 1° .
Dans un écoulement d’eau ( N = 1,33 ) éclairé par un laser vert de longueur
515 ⋅ 10−9 × 180
d’onde λ = 515 nm , on obtient un interfrange ∆x ≃ = 11,1 µm .
2 × 1,33 × π

157
158 Partie III.  Optique

La tension u délivrée par le détecteur possède


la forme ci-contre, et on obtient, en effectuant son
1
analyse de Fourier, la fréquence f = = 287 kHz .
T
Si on note v x la composante de la vitesse se-
∆x
lon Ox, la période T du signal est telle que v x =
T
(la particule se déplace de ∆x selon Ox pendant T), soit v x = f ⋅ ∆x = 3,18 m ⋅ s-1 .

On n’a ici accès qu’à la valeur absolue de v x , mais on sait obtenir le signe en
faisant défiler les franges. On place pour cela un modulateur acousto-optique sur l’une
des deux voies de l’interféromètre afin d’obtenir deux ondes planes de fréquences très
légèrement différentes. On obtient ainsi des oscillations de u(t) de fréquence f0 , même
si le fluide est au repos. S’il est en mouvement, le signe de f − f0 renseigne sur le sens
de déplacement du fluide selon Ox.
Pour obtenir les autres composantes, on crée avec deux autres lasers deux
autres systèmes de franges rectilignes d’équations y = Cte et z = Cte au voisinage
de O. Les trois longueurs d’onde utilisées doivent être distinctes deux à deux pour que
l’on garde des interférences à deux ondes sur chaque axe (sinon les franges ne se-
raient plus rectilignes). Il reste à placer des filtres correspondant à ces longueurs
d’onde sur chacun des trois détecteurs pour atteindre le triplet (v x ,v y ,v z ) .

158
159

[OPTIQUE 4]

INTERFÉRENCES PAR DIVISION


D’AMPLITUDE :
INTERFÉROMÈTRE DE
MICHELSON
1. PRÉSENTATION / INTÉRÊT
1.1 Description de l’interféromètre
Le faisceau lumineux en entrée de l’interféromètre rencontre une lame sépara-
trice Sp sous une incidence proche de 45°. Le traitement de surface de cette lame, par
dépôt métallique ou diélectrique, permet sous cette incidence d’obtenir un faisceau
transmis (voie 1) et un faisceau réfléchi (voie 2), de même intensité. Les directions
moyennes des faisceaux sont Ox pour (1) et Oy pour (2).

Chaque faisceau rencontre un miroir plan de grande qualité (les défauts de sur-
face sont inférieurs à λ visible / 20 ), sous une incidence proche de 90°.

On obtient ainsi en sortie de l’interféromètre de Michelson des interférences à


deux ondes de même amplitude.

159
160 Partie III.  Optique

Le miroir M1 de la voie 1 est « chariotable », c’est-à-dire qu’on peut le déplacer


selon Ox en conservant sa direction (translation pure). On peut également régler son
inclinaison (réglage dit grossier avec des vis qui permettent des rotations de l’ordre du
degré).
Le miroir M2 de la voie 2 ne se déplace qu’en rotation. On règle son inclinaison
avec des vis de réglage fin (de quelques secondes à quelques minutes d’arc).
Ces réglages permettent de placer dans un même plan la direction moyenne du
faisceau incident, la direction des normales aux miroirs, et celle de la séparatrice. Par
la suite, tous les rayons lumineux que nous tracerons appartiendront à ce plan.
En pratique, on utilise une lame de verre, appelée compensatrice C, identique
à Sp mais non traitée. On règle la position de C de façon à ce qu’elle soit parallèle à
Sp. En sortie, les rayons ont subi 4 traversées de lame de verre, qu’ils soient passés
par la voie 1 ou par la voie 2. Sans C, il y aurait 3 traversées de lame de verre pour un
rayon passé par (1) et seulement une pour un rayon passé par (2). Il en résulterait une
différence de marche qui s’ajouterait à celle due à des parcours de longueurs diffé-
rentes dans l’air. Cette différence de marche dépendant de l’inclinaison des rayons,
elle compliquerait l’étude théorique. Comme elle dépend aussi de la longueur d’onde,
puisque l’indice de réfraction du verre en dépend, les interférences en lumière blanche
seraient difficilement exploitables.

La compensation, qui serait parfaite dans le cas de la figure ci-dessus (rayon


incident porté par Ox, M1 orthogonal à Ox et M2 orthogonal à Oy, et Sp selon la bis-
sectrice de xOy), reste excellente lorsqu’on reste au voisinage de cette configuration,
ce qui permet de ne représenter que Sp, avec une épaisseur nulle, et pas C, sur les
schémas théoriques.
Il est à noter que selon le traitement de surface de la séparatrice, un déphasage
supplémentaire de π peut être introduit par l’interféromètre. Si le dépôt (extrêmement
mince) est un diélectrique d’indice de réfraction n, on constate que si n est plus grand
que l’indice nv du verre, le déphasage de π qui apparaît lors de la réflexion sur ce

160
Chapitre 4.  Interférences par division d’amplitude : interféromètre de Michelson 161

dépôt du rayon de la voie 1 en provenance du verre, compense celui dû à la réflexion


du rayon de la voie 2 en provenance de l’air lors de la séparation en deux du rayon
incident. Si n < nv , il y a toujours un déphasage de π pour le rayon de la voie 2 lors de
la réflexion sur Sp, mais plus pour celui de la voie 1. Par la suite, nous considérerons
que l’interféromètre de Michelson n’introduit pas de déphasage supplémentaire, mais
nous signalerons les changements qui résulteraient de ce déphasage de π.
Enfin, nous utiliserons une source « large » (cette notion sera affinée), permet-
tant d’obtenir des franges brillantes très lumineuses. Dans ce cas, les interférences
sont localisées et se font entre deux rayons issus du même rayon incident émis par un
point S de la source.
Cette source est ob-
tenue à l’aide d’un dia-
phragme à iris, éclairé par
une lampe spectrale par
l’intermédiaire d’un conden-
seur qui sert à rabattre la lu-
mière sur le diaphragme.
On utilise une lentille
convergente placée après
le diaphragme pour obtenir un faisceau approximativement parallèle. Pour cela, il faut
placer le diaphragme dans le plan focal objet de L1 . On utilise la méthode de l’auto-
collimation : on place un miroir plan derrière L1 et on déplace l’ensemble { L1 , miroir
plan} de façon à ce que l’image du trou lumineux formé par le diaphragme peu ouvert
se forme dans le même plan que le diaphragme. En enlevant le miroir plan, on obtient
alors en sortie de L1 un faisceau dont la direction moyenne est parallèle à l’axe optique
de L1 , qui est approximativement orthogonal au miroir M1 . On peut alors ouvrir plus
ou moins le diaphragme pour obtenir une source large.

1.2 Montage équivalent


Un rayon incident issu d’un point source S est séparé en deux en I par Sp. Le
rayon non dévié (voie 1) se réfléchit en K sur M1 , le rayon réfléchi (voie 2) provient de
l’image S ∗ de S par Sp, et se réfléchit sur M2 en J.
Pour la voie 1, l’image du rayon SK par M1 est le rayon S1′L où S1′ est l’image
de S par M1 , puis l’image de S1′L par réflexion sur Sp est S1M , où S1 est l’image de
S1′ par Sp.
Pour la voie 2, l’image du rayon S ∗J par M2 est le rayon S2M , où S2 est
l’image de S ∗ par M2 .

161
162 Partie III.  Optique

Comme les rayons se réfléchissent une et une seule fois sur Sp, quelle que soit
la voie empruntée, on peut, sans modifier les chemins optiques, remplacer les rayons
avant leur réflexion sur Sp par leurs symétriques par rapport à Sp. Ainsi, pour la voie
2, SI est remplacé par son symétrique S ∗I par rapport à Sp, et pour la voie 1, c’est
tout le bloc des rayons SIK, S1′KL et du miroir M1 que l’on peut remplacer par leurs
symétriques S ∗IK ′ , S1K ′L et M1′ par rapport à Sp.

162
Chapitre 4.  Interférences par division d’amplitude : interféromètre de Michelson 163

On peut donc raisonner sur un montage équivalent dans lequel n’apparaissent


plus le point source S, ni M1 , ni Sp, mais uniquement les symétriques S ∗ et M1′ , res-
pectivement de S et de M1 par rapport à Sp.
Dans ce montage équivalent, un rayon issu de S ∗ se réfléchit à la fois sur M2
et sur M1′ pour donner deux rayons qui proviennent des images S1 et S2 de S ∗ , res-
pectivement par M1′ et M2 , et interfèrent en M.

Par la suite nous raisonnerons le plus souvent sur le montage équivalent.

1.3 Montage en coin d’air et en lame d’air (à faces parallèles)


Montage en coin d’air
Dans cette configuration, l’angle α entre M1′ et M2 peut atteindre une dizaine
de minutes d’arc. Le nom « coin d’air » fait bien sûr référence au montage équivalent.
Les rayons issus du même rayon émis par S ∗ interfèrent en un point M situé à
proximité du miroir M2 .

Montage en lame d’air


Les réglages de l’interféromètre de Michelson permettent de rendre M1 et M2
orthogonaux, c’est-à-dire M1′ et M2 parallèles (lorsque ces réglages sont bien faits,
l’angle entre M1′ et M2 n’excède pas quelques secondes d’arc !). Là encore c’est le
montage équivalent qui justifie le nom donné à cette configuration.
Si on note e la distance entre les deux miroirs, la distance entre les sources
secondaires S1 et S2 vaut 2e. Les rayons issus du même rayon émis par S ∗ donnent
donc deux rayons réfléchis par M1′ et M2 , parallèles entre eux. Les interférences se
produisent donc à l’infini. En pratique, on les observe sur un écran éloigné, mais le
plus souvent dans le plan focal image d’une lentille convergente, par manque de place,
et pour obtenir une intensité maximale plus grande.

163
164 Partie III.  Optique

2. INTERFÉROMÈTRE DE MICHELSON EN COIN


D’AIR
2.1 Localisation, différence de marche et interfrange
Lorsque l’interféromètre de Michelson, réglé en coin d’air d’angle α << 1 rad ,
est éclairé par une source « large », les interférences sont localisées.
Comme le diaphragme à iris (dont le
rayon maximal R est de l’ordre du cm), qui
constitue la source, est placé dans le plan focal
objet d’une lentille convergente L1 de focale f1′
égale par exemple à 20 cm, l’angle maximal
imax ≃ R / f1′ que font les rayons en sortie de L1
avec son axe optique (c’est-à-dire l’angle d’in-
cidence maximal avec le miroir M1 ) est de l’ordre de 1/20 rad. Comme imax << 1 rad
(source peu étendue), on peut considérer que les franges d’interférences dues aux
différents points du diaphragme coïncident sur une surface Σ, intersection des rayons
issus du même rayon incident, avec celles dues à F1 ( i = 0 ). La différence de marche
δ(M ) entre les deux rayons qui interfèrent en un point M de Σ est alors quasiment
indépendante de i ∈ [ −imax , imax ] . On raisonne donc sur le cas i = 0 pour trouver Σ et

la différence de marche δ(M ) définie par δ(M ) = (S∗M )1 − (S∗M )2 . Le montage équiva-
lent est le suivant :

Les interférences sont donc localisées sur le miroir M2 .

La différence de marche δ(M ) = (S∗M )1 − (S∗M )2 en un point M de M2 , repéré


par sa distance algébrique X à l’arête du coin d’air, est égale à deux fois l’épaisseur
locale du coin d’air, soit δ = 2e( X ) ≃ 2αX puisque α << 1 rad .
La figure d’interférence est donc constituée de franges rectilignes d’équation
X = Cte , correspondant à une épaisseur locale e = Cte , qui sont donc appelées
franges d’égale épaisseur (franges de Fizeau).
λ
L’interfrange correspond à ∆δ = λ  ∆X = .

164
Chapitre 4.  Interférences par division d’amplitude : interféromètre de Michelson 165

On peut donc observer ces franges à l’œil nu (si l’interfrange n’est pas trop petit)
en regardant le miroir M2 .

2.2 Montage expérimental


On projette les franges sur un écran en conjuguant l’écran et M2 à l’aide d’une
lentille convergente L 2 de focale suffisamment faible, par exemple 15 cm. On rappelle
en effet que, pour conjuguer un objet réel et une image réelle distants de D par une
lentille convergente de focale f ′ , il faut que D ≥ 4f ′ , donc dans notre cas que la focale
f2′ de L 2 soit inférieure à un quart de la distance D entre M2 et l’écran.

Les rayons (1) et (2) se coupent en un point M de M2 et interfèrent donc au


point M ′ conjugué de M par rapport à L 2 . Comme le chemin optique entre deux points
conjugués est indépendant du rayon, la différence de marche entre (2) et (1) au point
M ′ est toujours égale à 2αX , comme au point M.
Si on observe M2 à l’œil nu, c’est le cristallin de l’œil qui joue le rôle de L 2 et la
rétine le rôle de l’écran.

165
166 Partie III.  Optique

La condition de non brouillage porte sur


l’angle imax . Le contraste est meilleur si on n’ouvre
pas complètement le diaphragme, et il faut chercher
un compromis entre une bonne luminosité et un bon
contraste, comme sur l’image ci-contre.
Une fois les franges projetées, leur extension
sur l’écran est limitée par la taille de M2 . On doit
régler la position de la lentille de projection L 2 de
façon à ce que les bords de M2 soient le plus net
possible, ce qui assure qu’on a mis au point sur les
franges.
Pour passer au montage en lame d’air ( α → 0 ), il faut jouer sur la rotation des
λ
miroirs afin que l’interfrange augmente : ∆X = → ∞ . En pratique, on rend l’intensité

la plus uniforme possible à l’écran, ce qui assure que l’interfrange est bien plus grand
que le diamètre de M2 , l’angle α étant alors égal au plus à quelques secondes d’arc.
Supposons par exemple que M2 tourne autour de l’axe Cz comme sur la figure
ci-dessous. Une fois le réglage effectué, l’interféromètre de Michelson est en lame d’air
d’épaisseur e qu’on va pouvoir modifier en translatant M1 .

2.3 Mesure de l’indice de réfraction d’un gaz 


L’interféromètre de Michelson est réglé en
coin d’air. On expulse devant M1 un jet de gaz d’in-
dice de réfraction n. Le jet est supposé cylindrique,
à section circulaire de diamètre D, et est orthogonal
à la direction des franges rectilignes. Sur l’écran
(représenté figure ci-contre), on observe l’image de
M2 . On constate que le rapport entre le diamètre D
du jet et celui de M2 est environ égal à 1/5.
Une frange d’interférence donnée corres-
pond à δ = Cte . C’est une droite d’équation X = Cte en l’absence de jet, mais elle est
déformée au niveau du jet. Le montage en coin d’air permet de visualiser des objets
transparents placés devant M1 , les défauts des miroirs…

166
Chapitre 4.  Interférences par division d’amplitude : interféromètre de Michelson 167

Il faut rajouter une différence de marche supplémentaire pour le rayon passé


par la voie 1, qui a traversé le jet, par rapport au rayon passé par la voie 2. Cette
différence est maximale et vaut δsupp = 2(n − 1)D si le rayon passé par la voie 1 a tra-
versé l’axe du jet ( Y = 0 ). Les deux rayons interfèrent sur M2 au point M ( X ,Y = 0) et
la différence de marche vaut alors δ = δ1/2 = 2 [ αX + (n − 1)D ] .

On retrouve la même valeur de δ en un point M ′( X ′,Y ) où le rayon passé par la


voie 1 n’a pas traversé le jet, c’est-à-dire pour Y > D / 2 si :
2 [ αX + (n − 1)D ] = 2αX ′  n − 1 = α( X ′ − X ) / D . Les points M et M ′ sont choisis sur la
même frange noire, et sont indiqués sur la figure obtenue à l’écran. Comme l’inter-
λ λ( X ′ − X )
frange en absence de jet vaut ∆X = , on a n − 1 = . Dans le cas étudié, le
2α 2D ⋅ ∆X
décalage est d’un interfrange : X ′ − X ≃ ∆X . Avec λ = 546 nm (raie verte du mercure)
λ 546 ⋅ 10−9
et pour un diamètre des miroirs de 2 cm, on obtient n − 1 ≃ ≃ ≃ 7 ⋅ 10−5 .
2D 4 ⋅ 10 −2 / 5

3. INTERFÉROMÈTRE DE MICHELSON EN LAME


D’AIR
3.1 Localisation
Si l’interféromètre de Michelson, réglé en lame d’air, est éclairé par une source
ponctuelle S ∗ , le dispositif est un diviseur de front d’onde, et les interférences sont non
localisées. S ∗ et les deux sources secondaires S1 et S2 , images de S ∗ respective-
ment par M1′ et M2 , sont alignées selon une droite ∆ orthogonale à l’écran où l’on ob-
serve donc des anneaux possédant la symétrie de révolution autour de ∆.
Si l’on étend la source, chaque point de la source étendue crée sur l’écran son
propre système de franges dont les intensités s’ajoutent. Les franges dues à tous ces
points ne coïncidant pas, la figure d’interférence est brouillée, sauf si l’écran est à l’in-
fini.

167
168 Partie III.  Optique

Avec une source de taille quelconque à distance quelconque des miroirs, les
interférences sont localisées à l’infini pour l’interféromètre de Michelson réglé en lame
d’air.

3.2 Différence de marche


On se place donc dans le cas d’une source large. L’écran est placé à l’infini, là
où sont localisées les interférences, c’est-à-dire dans le plan focal image d’une lentille
convergente L de distance focale f ′ , de foyer image F ′ , de centre O et d’axe focal ∆.
On s’intéresse à la différence de marche δ en un point M de l’écran situé à une
distance ρ de F ′ . Soit i l’angle que fait avec ∆ le rayon OM, non dévié par la lentille.
Le point M étant un foyer image secondaire, il est conjugué d’un point à l’infini dans la
direction i : les deux rayons (1) et (2) qui interfèrent en M font un angle i avec ∆.
Si M émettait de la lumière, la lentille L transformerait l’onde sphérique issue de
M en une onde plane. Les points H et K se trouvant sur un plan d’onde, ils vibreraient
en phase. Ce n’est pas le cas, mais les chemins optiques étant indépendants du sens

168
Chapitre 4.  Interférences par division d’amplitude : interféromètre de Michelson 169

de parcours de la lumière, les chemins optiques (HM) et (KM) sont égaux.


La marche supplémentaire de (1) par rapport à (2) vaut donc δ = IJ + JK − IH .

JL e IL
— Le triangle ILJ est rectangle en L : cos i =  IJ = et tan i = .
IJ cos i e
IH IH
— Le triangle IHK est rectangle en K : sin i = =  IH = 2IL sin i = 2e sin i tan i .
IK 2IL
2e 2e 
Finalement δ = 2IJ − IH = − 2e sin i tan i = 1 − sin2 i  = 2e cos i .
cos i cos i  
On peut retrouver ce résultat en utilisant les sources secondaires S1 et S2 .

Comme S1J = S∗J et S2I = S∗I , la différence de marche est δ = (S1M ) − (S2M ) , soit
δ = S1N d’après le théorème de Malus.
Le triangle S1NS2 est rectangle en N, et S1S2 = 2e  δ = 2e cos i .

La différence de marche δ = 2e cos i ne dépend que de l’inclinaison i des rayons


par rapport à la normale aux miroirs. Elle est donc la même pour tous les points M se
trouvant à la même distance ρ = f ′ ⋅ tan i du foyer image F ′ de la lentille. Les franges
sont donc des anneaux d’axe ∆, que l’on appelle donc franges d’égale inclinaison
(franges de Haidinger).

Les franges créées par d’autres points sources S ′∗ coïncident bien avec celles
créées par S ∗ : on vérifie qu’il y a localisation à l’infini pour une source large à distance
quelconque des miroirs.

169
170 Partie III.  Optique

3.3 Rayon des anneaux


L’utilisation d’une lentille implique qu’on doive respecter les conditions de Gauss
pour obtenir des franges nettes. L’angle i reste donc très inférieur à 1 rad, et on peut
ρ i2 ρ2
écrire i ≃ tan i = , et cos i ≃ 1 − ≃ 1 − 2 .
f′ 2 2f ′
 ρ2  2e  ρ2 
On a donc δ = 2e cos i ≃ 2e 1 − 2  = pλ , soit p(ρ) = 1 − 2  , relation
 2f ′  λ  2f ′ 
entre l’ordre d’interférence et la distance ρ au foyer image F ′ de L.
2e
L’ordre est maximal en F ′ ( ρ = 0 ) et vaut p0 = . C’est l’ordre au centre des
λ
anneaux.
Supposons pour simplifier p0 ∈ N , ce qui correspondrait à un point brillant en
F ′ (c’est rarement le cas). Comme p décroît quand ρ augmente, le premier anneau
brillant correspond à p = p0 − 1 , le second à p = p0 − 2 , le mième anneau brillant à

2e  ρm 2  2e mλ
p = p0 − m . Son rayon vérifie donc 1 − 2  = − m , soit ρm = f ′ ∝ m : la
λ  2f ′  λ e
distance entre deux franges de même intensité n’est pas constante.

Si on chariote doucement M1′ (on fait varier e), on peut suivre l’évolution d’un
anneau donné ( p = Cte ⇔ δ = Cte ). Comme δ = 2e cos i , si e diminue, cos i aug-
mente donc i diminue, ainsi que ρ.

Les anneaux « rentrent » (leur rayon diminue) lorsque la distance e entre les
miroirs diminue.

Si maintenant on se fixe une zone d’observation de rayon R autour de F ′ , tou-


jours dans l’hypothèse où p0 ∈ N , on a un anneau brillant en ρ = R quand e = e1 si :
e1 R 2
m1 = ∈ N∗ . On retrouve un anneau brillant en ρ = R quand e = e2 < e1 si :
λ f ′2
e2 R 2 e
m2 = 2
∈ N∗ . On a donc m2 = m1 2 < m1 , or les entiers m1 et m2 sont les
λ f′ e1
nombres d’anneaux observés dans la zone de rayon R autour de F ′ .

Le nombre d’anneaux observés diminue lorsque la distance e entre les miroirs


diminue.

Ces résultats sont d’une grande utilité lors de la recherche expérimentale de la


position pour laquelle e = 0 lorsque M1′ et M2 sont parallèles, appelée « contact op-
tique » car dans le montage équivalent, les miroirs M1′ et M2 sont en contact.

170
Chapitre 4.  Interférences par division d’amplitude : interféromètre de Michelson 171

Dans cette position, pour laquelle les miroirs réels M1 et M2 sont orthogonaux
entre eux et équidistants de la séparatrice, δ = 0 ∀i : les interférences sont totalement
constructives en tout point de l’écran qui est donc uniformément lumineux.

On se rapproche du contact optique quand le nombre d’anneaux observé dimi-


nue et que le rayon d’un anneau donné diminue.

Les figures d’interférence ci-dessous ont été obtenues en utilisant un filtre per-
mettant d’isoler une raie spectrale d’une lampe, et d’obtenir de la lumière que l’on peut
considérer comme monochromatique. L’épaisseur e diminue jusqu’à ce qu’on arrive
au contact optique. La zone d’observation circulaire centrée sur F ′ est toujours la
même.

3.4 Montage expérimental


Si M1 était éclairé en incidence normale, il
n’y aurait sur l’écran de la lumière qu’au foyer F ′ .
La zone éclairée de l’écran dépend donc de
l’angle maximal imax que font les rayons incidents
sur M1 avec la normale à M1 .
Même en ouvrant au maximum le dia-
phragme, ce qui est possible puisqu’il n’y a au-
cune condition sur l’étendue de la source pour
garder le contraste maximal, imax reste faible.

171
172 Partie III.  Optique

On focalise donc sur M1 le faisceau de lumière, issu du diaphragme puis colli-


maté par L1 , à l’aide d’une lentille convergente L 2 de faible focale (par exemple 15
cm).
On observe en sortie de l’interféromètre les franges d’égale inclinaison sur un
écran placé dans le plan focal image d’une lentille de projection de grande focale (de
50 cm à 1 m) afin d’agrandir les anneaux.

172
173

[OPTIQUE 5]

INTERFÉRENCES À N ONDES
1. INTERFÉRENCES À N ONDES PAR DIVISION DU
FRONT D’ONDE : RÉSEAUX OPTIQUES
1.1 Superposition de N ondes cohérentes de même amplitude dont les
phases sont en progression arithmétique
Au point M, le champ électrique est la somme des champs des N ondes, de
mêmes amplitude et intensité, notés ψ 0 (M , t ) , ψ1(M, t ) ,…, ψ j (M, t ) ,…, ψN −1(M, t ) . Le
premier champ ψ 0 (M , t ) , d’amplitude ψ 0 et d’intensité I0 en M, est pris comme réfé-
rence des phases. Le deuxième est déphasé en M de φ(M ) par rapport au premier, le
troisième de φ(M ) par rapport au deuxième, donc de 2φ(M ) par rapport au premier,
etc. : ψ(M, t ) = ψ0ei ωt + ψ 0ei ( ωt +φ) + ψ0ei ( ωt + 2φ) + ... + ψ0ei ( ωt + j φ) + ... + ψ 0e i ( ωt + ( N −1)φ) .
   
ψ 0 ( M ,t ) ψ1( M ,t ) ψ j ( M ,t ) ψ N −1( M ,t )

Il n’est pas nécessaire de calculer l’intensité I(φ) pour trouver les principales
caractéristiques de la figure d’interférence. On peut en effet raisonner sur un dia-
gramme de Fresnel dans lequel ψ 0 (M , t ) (en gras) est pris pour référence des phases.

173
174 Partie III.  Optique

L’intensité est bien sûr maximale lorsque les N ondes sont en phase en M, soit
si φ = 2k π , avec k ∈ Z . Dans ce cas les amplitudes des champs se somment, donc
ψ = ψ max = N ψ0 , et l’intensité maximale vaut Imax = N 2I0 .
2mπ
Si φ = , avec m ∈ �1, N − 1� , en
N
sommant les N vecteurs représentant les
champs électriques au point M, on forme un
polygone à N côtés. Cette courbe étant fer-
mée, la somme est nulle :
ψ = ψ min = 0  Imin = 0 . Par exemple, pour
N = 3 , on a deux annulations d’intensité
2π 4π
lorsque φ ∈ [0,2π[ pour φ = et φ = .
3 3

L’intensité présente des pics pour lesquels Imax = N 2I0 lorsque φ = 2k π . La



demi-largeur de ces pics vaut , et devient très faible pour N >> 1. Entre deux pics,
N
l’intensité s’annule N − 1 fois et passe donc par N − 2 maximums secondaires d’inten-
sité très faible devant Imax , et ceci d’autant plus que N est grand.

En effet, lorsque N >> 1 , dès que l’on n’est pas très proche de la condition d’in-
terférences totalement constructives, soit φ = 2k π , l’intensité, même pour un maximum
secondaire, est beaucoup plus faible que Imax , comme on le constate sur un dia-
gramme de Fresnel :

Retrouvons ces résultats en calculant I (φ) :


iN φ
1− e
ψ(M, t ) = ψ 0e i ωt 1 + e i φ + e2i φ + ... + e i ( N −1)φ  = ψ 0e i ωt
  1 − ei φ
2
Nφ Nφ Nφ
 φ Nφ  Nφ 
i −i i sin  sin
2  .
e 2 e 2 −e 2 i ωt + ( N −1) 
ψ(M , t ) = ψ 0e i ωt  2 2  I ( φ) = I
0
φ 
φ
⋅ φ φ
= ψ0 e
φ
i −i i sin  sin 
e2 e 2 −e 2
2  2 
La fonction φ ֏ I (φ) est 2π -périodique donc on peut l’étudier pour φ ∈ [0,2π[ .

174
Chapitre 5.  Interférences à N ondes 175

2
 Nφ 
 
Elle est maximale pour φ = 0 , or I (φ) ∼ I0  2  = N 2I0  Imax = N 2I0 .
φ→ 0 φ
 
 2 
Enfin, la fonction s’annule quand le numérateur s’annule sans que le dénomi-
Nφ 2m π
nateur ne le fasse, soit pour = mπ ⇔ φ = , avec m ∈ �1, N − 1� .
2 N
Représentons I (φ) pour plusieurs valeurs de N :

En pratique, pour N grand, on n’observera de la lumière qu’en des points M tels


que φ = 2k π .

1.2 Exemple : réseau de N trous alignés équidistants


On reprend l’expérience des trous d’Young, avec non plus deux, mais N trous
alignés, tous équidistants de a, percés dans un écran opaque placé dans le plan xOy.
La lumière est émise par une source ponctuelle S à l’infini sur l’axe Oz, monochroma-
tique. L’O.P.P.H de longueur d’onde λ issue de S arrive normalement sur la pupille
diffractante. On observe la figure de diffraction à l’infini, soit ici dans le plan focal image
d’une lentille convergente L de centre optique C, de distance focale f ′ , et d’axe focal
Cz.

Le rayon R des trous est suffisamment petit pour qu’on puisse considérer que

175
176 Partie III.  Optique

l’intensité sur l’écran éloigné serait uniforme, égale à I0 , si un seul des trous était ou-
vert. On se ramène donc à N sources ponctuelles S0 ≡ O , S1 ,…, SN −1 , cohérentes,
et à des interférences à N ondes de même amplitude sur l’écran d’observation.

Calcul du déphasage en M entre les rayons issus des trous


� 2π �
La lentille L transforme une onde plane de vecteur d’onde k = e , où le vec-
λ
� � � �
teur e = αex + βey + γez est unitaire, en une onde sphérique qui converge au point M
de coordonnées ( x = X , y = Y , Z = f ′) dans le repère Cxyz.
Dans les conditions de Gauss, les rayons sont peu inclinés par rapport à l’axe
� 2π � � � �
optique Cz ( γ ≃ 1 ) : k ≃  αex + β ey + ez  , avec α << 1 et β << 1 . Comme k et
λ  
→
CM sont colinéaires, leur produit vecto-

 α   X   0  α = X
       f′
riel est nul :  β  ∧  Y  =  0    .
 1   f ′   0  β = Y
       f′
Dans les conditions de Gauss,
 X
α ≃ tan α ≃ f ′
 sont des angles, repré-
β ≃ tan β ≃ Y
 f′
sentés sur la figure ci-contre.
Les trous vibrent en phase puisqu’ils se trouvent sur un
plan d’onde de l’onde émise par S. Cependant, le chemin op-
tique des trous au point M n’est pas le même. D’après le théo-
rème de Malus, la différence de marche entre le rayon (j) et le
rayon (0) est égale à OH j , où H j est le projeté orthogonal de
S j sur le rayon (0). On a donc δ j = (OM ) − (S j M ) = OH j , et le
déphasage en M entre les deux rayons vaut :
2π � → �  → →  � → � →
φj = δ j = k ⋅ OH j = k ⋅ OS j + S j H j  = k ⋅ OS j , car k ⊥ S j H j .
λ  
2π 2π
 αx j + β y j  =  
φj =
λ   λf ′  Xx j + Yy j  , où ( x j = j ⋅ a, y j = 0, z j ) sont les coordonnées
du trou S j , avec j ∈ �0, N − 1� .
2πaX 2πaX
On a donc φ j = j = j φ , avec φ = .
λf ′ λf ′
On est bien dans un cas d’interférences à N ondes cohérentes de même ampli-
tude, dont les phases sont en progression arithmétique.

176
Chapitre 5.  Interférences à N ondes 177

2πaX
Ici, φ = est proportionnel à X (dans les
λf ′
conditions de Gauss), donc les franges sont des droites
λf ′
d’équation X = Cte . L’interfrange est ∆X = comme
a
pour les trous d’Young.
Quand N est grand, on ne trouve de la lumière
qu’au voisinage des points d’abscisse X telle que :
φ = 2k π ⇔ X = X k = k λf ′ / a , c’est-à-dire là où les inter-
férences sont totalement constructives.
La figure est donc constituée de raies : fines
franges brillantes équidistantes d’ordre k. Ailleurs
l’écran est noir. On voit sur la figure ci-contre la diffé-
rence avec les franges d’interférences de deux trous
d’Young, où l’intensité varie sinusoïdalement avec X.

1.3 Réseau d’amplitude par transmission


Montage expérimental, le goniomètre
On obtient un réseau optique d’excellente
qualité en gravant N >> 1 longues fentes rectilignes
identiques de largeur ℓ, parallèles entre elles,
toutes équidistantes de a, dans un matériau opaque
déposé sur une lame de verre.
On parle de réseau d’amplitude par trans-
mission : en sortie du réseau, l’amplitude est la
même pour les rayons qui sont passés par les
fentes ; elle est nulle pour les autres.
Un réseau comportant n = 106 fentes par mètre (soit 1000 fentes par mm) pos-
sède un pas a = 1/ n = 1 µm . La largeur des fentes est de l’ordre de la longueur d’onde.
Il existe d’autres réseaux (réseaux à échelette par réflexion, réseaux sinu-
soïdaux obtenus en enregistrant sur un film photosensible les interférences entre deux
ondes planes…), mais nous raisonnerons sur des réseaux de fentes.
L’étude expérimentale se fait en éclairant le réseau à l’aide d’une fine fente
source de largeur réglable, parallèle aux fentes du réseau, et centrée sur le foyer objet
d’une lentille convergente (on place la fente dans le plan focal objet de la lentille en
jouant sur la bague de tirage du collimateur).
On étudie la figure d’interférence à l’infini, soit, comme précédemment, dans le
plan focal image d’une lentille convergente : l’objectif d’une lunette de visée. On ob-
serve cette figure à l’œil à l’aide d’une « loupe » appelée oculaire, au lieu de la projeter
sur un écran.

177
178 Partie III.  Optique

Comme on l’a vu dans le chapitre sur les interférences par division du front
d’onde, la figure observée est la même avec N fentes d’Young et une fine fente source
à l’infini qui leur est parallèle, qu’avec N trous d’Young équidistants. La longueur des
franges brillantes est limitée par la longueur de la fente source dont on peut considérer
qu’elles sont les images.

Le réseau est posé


sur un plateau qui peut tour-
ner autour d’un axe vertical
∆, et on peut ainsi l’orienter
par rapport au faisceau issu
du collimateur afin de travail-
ler sous une incidence i quel-
conque.
De même, la lunette
peut tourner autour de ∆, ce
qui permet d’étudier la lumière diffractée au voisinage d’une direction caractérisée par
une angle i ′ quelconque par rapport à la normale au plan du réseau.
L’angle dont tourne la lunette par rapport au collimateur se lit avec une résolu-
tion de 1’ d’arc sur un vernier dont la partie fixe est liée au collimateur, et la partie
mobile à la lunette.

Une fois les réglages optiques faits, la lunette de visée est afocale : le plan focal
image de l’objectif est confondu avec le plan focal objet de l’oculaire, et le réticule
(deux fils très fins qui se croisent à 90°) se trouve dans ce plan. Lorsqu’on vise direc-
tement la fente source, on doit observer simultanément et sans fatigue les images
nettes de la fente et du réticule.
Ceci est vrai pour un œil normal
ou corrigé qui voit nettement
sans fatiguer des objets situés à
l’infini, mais en pratique, une fois
que le réticule est placé dans le

178
Chapitre 5.  Interférences à N ondes 179

plan focal image de l’objectif (ce qu’on obtient en jouant sur la bague de tirage de
l’objectif), l’image de la fente par l’objectif se superpose au réticule, et une personne
dont l’œil présente des défauts verra les deux nets en jouant sur la bague de tirage de
l’oculaire.

Formule des réseaux


Les réglages mécaniques du goniomètre permettent de placer dans un même
plan horizontal π l’axe focal du collimateur, celui de la lunette, et la normale au plan du
réseau. Comme nous l’avons vu pour les fentes d’Young éclairées dans les mêmes
conditions, la figure de diffraction est étirée selon la direction des fentes, et il suffit donc
pour la déterminer de raisonner dans le plan π.

L’onde plane incidente dans une direction caractérisée par l’angle i est diffractée
par les fentes. La direction de l’onde diffractée reste dans le plan π, et on s’intéresse
à l’onde plane diffractée à l’infini dans une direction quelconque caractérisée par
l’angle i ′ . Comme les angles orientés i et i ′ peuvent varier entre −π / 2 et +π / 2 , on
ne peut plus linéariser les fonctions de ces angles au voisinage de 0.

179
180 Partie III.  Optique

On applique le théorème de Malus pour trouver la différence de marche à l’infini


dans la direction i ′ entre les rayons passés par deux fentes consécutives :
δ = δ1/2 = a sin i ′ − a sin i , marche supplémentaire de (1) par rapport à (2).

Comme N >> 1, pour une longueur d’onde λ donnée, on n’a de la lumière que

dans les directions i ′ telles que δ = k λ , avec k ∈ Z  sin i ′ = sin i + , ce qui consti-
a
tue la formule des réseaux.

Observations en incidence normale


En incidence normale, i = 0 . On n’a donc de la lumière que dans les directions

i ′ = ik′ telles que sin i k′ = , avec k ∈ Z .
a
Dans l’ordre k = 0 , on a i0′ = 0 ∀λ : la lumière n’est pas déviée (la raie d’ordre
0 correspond à l’image géométrique de la fente). Les différentes longueurs d’onde
n’étant pas séparées angulairement, l’image de la fente dans l’ordre 0 est de même
couleur que la source lumineuse si cette dernière est polychromatique (le spectre est
inchangé).
Les ordres ± k sont symétriques par rapport à l’ordre 0.
 kλ 
ik′ = arcsin   ne varie pas linéairement avec k.
 a 
Effectuons une application numérique
pour un réseau de n = 570 fentes par mm avec
une largeur de fente ℓ = 400 nm , pour une lon-
gueur d’onde de 546,1 nm (raie verte de Hg).
On ne peut observer l’ordre k > 0 que si
kλ 1
sin i k′ = = knλ ≤ 1 ⇔ k ≤ = 3,21.
a nλ
On peut donc observer pour cette lon-
gueur d’onde 7 ordres dans les directions indi-
quées ci-dessous :

ordre k −3 −2 −1 0 1 2 3
ik′ (°) −69,0 −38,5 −18,1 0 18,1 38,5 69,0

On peut, pour déterminer le nombre de fentes par mm du réseau, viser l’ordre


0 : on déplace la lunette de façon à superposer le trait vertical du réticule avec l’image
de la fente dans l’ordre 0. On vise ensuite de la même façon la raie colorée correspon-
dant à la longueur d’onde λ (connue) dans l’ordre k = 1. On déduit i1′ de la différence
sini1′
entre les deux angles mesurés au vernier, puis n de la formule n = . Pour dimi-
λ
nuer l’incertitude sur la mesure, on effectue plusieurs mesures avec la même longueur

180
Chapitre 5.  Interférences à N ondes 181

d’onde pour différents ordres, ou avec différentes longueurs d’ondes dans un ordre
donné.
La largeur ℓ des fentes n’étant pas infiniment petite, l’écran ne serait pas unifor-
mément éclairé si une seule fente était ouverte. On montre que le rayon angulaire θ
de la tache principale de diffraction vérifie θ = arcsin ( λ / ℓ ) . Ici, ℓ < λ donc cet angle
n’existe pas : la zone observable comprise entre −90° et 90° se trouve dans la tache
centrale. Cependant, l’intensité décroît quand l’ordre augmente en valeur absolue, ce
qui ne permet pas, avec des réseaux de fentes, d’observer certaines raies peu in-
tenses d’une lampe spectrale dans les ordres k > 1 alors qu’elles étaient observables
pour k = 1. On donne ci-dessous l’allure de l’intensité en fonction de i ′ pour le réseau
choisi, et pour λ = 546,1 nm .

Minimum de déviation
Si on fait tourner le plateau du goniomètre constamment dans le même sens,
par exemple de façon à ce que i augmente à partir de l’incidence rasante i = −90° , et
qu’on suit une raie correspondant à une longueur d’onde λ donnée dans un ordre k
donné, on s’aperçoit qu’elle passe par un minimum de déviation : elle se rapproche de
l’ordre 0 (c’est-à-dire de l’image géométrique de la fente) puis s’en éloigne. La dévia-
tion algébrique D = i ′ − i (relation 1) passe par un minimum D = Dmin .

181
182 Partie III.  Optique

On peut le démontrer en étudiant la fonction i ֏ D . On élimine i ′ en utilisant la


formule des réseaux sin i ′ − sin i = knλ (relation 2) : D(i ) = arcsin [ sin i + knλ ] − i .
L’étude analytique (« à la main ») de
cette fonction étant délicate, on peut s’aider
d’un outil de calcul numérique. La courbe re-
présentative de i ֏ D est tracée sur la figure
ci-contre, pour plusieurs longueurs d’onde
(traits pleins pour λ = 546,1 nm , pointillés pour
λ = 404,7 nm et pour λ = 623,4 nm ). Dans
tous les cas, n = 570 mm-1 .
En revanche, on trouve aisément la va-
leur de Dmin en différenciant les relations (1)
et (2). Comme on suit une raie donnée dans
un ordre donné, k et λ sont constants, ainsi
 dD = di ′ − di
que n. On obtient  et on en
cos i ′ di ′ = cos i di
dD  cos i 
déduit = − 1 , qui s’annule pour cos i ′ = cos i . On a donc deux solutions.
di  cos i ′ 
La première, i ′ = i , correspond d’après (2) à l’ordre 0, et donc à une déviation
nulle. C’est une solution évidente qui ne correspond pas à ce qui est étudié.
knλ
La deuxième, i ′ = −i = i0′ , donne d’après (2) sin i 0′ = , et donc une déviation
2
D
minimale Dmin = 2i0′ , d’où 2sin min = knλ .
2
Cette formule permet de déduire une longueur d’onde inconnue de la valeur
mesurée de Dmin pour la raie d’ordre k correspondant à cette longueur d’onde, la va-
leur de n étant donnée par le constructeur du réseau, ou déterminée préalablement
par étalonnage, grâce à une lumière dont le spectre est connu.

1.4 Réseau échelette 


Pour les réseaux de fente, on montre que l’intensité est le produit de l’intensité
du réseau de N fentes de largeur nulle par l’intensité diffractée par une seule fente de
largeur ℓ. Cette dernière est maximale dans la direction prévue par l’optique géomé-
trique, soit dans l’ordre 0 où les longueurs d’ondes ne sont pas séparées angulaire-
ment, puis elle diminue.
Pour remédier à ce problème, on utilise un réseau échelette de pas a = 1/ n .
Les motifs sont gravés sur la surface métallique du réseau. Leur profil est un triangle
rectangle dont la face utile est inclinée d’un angle α par rapport au support.
Le réseau est éclairé en incidence normale par rapport au support, donc sous

182
Chapitre 5.  Interférences à N ondes 183

une incidence α par rapport aux faces inclinées. Chacune de ces faces diffracte la
lumière. La tache de diffraction est centrée sur la direction prévue par l’optique géo-
métrique, c’est-à-dire selon l’angle −α par rapport à la normale d’une face inclinée, et
λ a
son rayon angulaire θ vérifie θ = arcsin   , où ℓ = est la largeur d’une face in-
ℓ cos α
clinée.

D’après le théorème de malus, la différence de marche entre deux rayons dif-


fractés par deux motifs consécutifs est nulle à l’arrivée sur le réseau, et vaut
 π π
δ = a sin(α − β) lorsque ces rayons interfèrent à l’infini, si β ∈  − ,  est la direction
 2 2
quelconque sous laquelle les rayons sont diffractés.
On a donc δ = a sin(2α ) = pλ dans la direction β = −α où l’intensité diffractée
par une face est maximale. Contrairement aux réseaux de fentes, on peut imposer un
ordre d’interférence non nul dans cette direction.
Par exemple, on peut imposer l’ordre p = 2 pour la longueur d’onde λ en choi-

sissant α tel que sin(2α ) = . En gardant les valeurs numériques λ = 546,1 nm et
a
1
n = 570 mm-1 , on obtient α = 19,3° puis ℓ = = 1,86 µm .
n cos α
Les autres ordres correspondent à δ = a sin(α − βk ) = k λ , avec k ∈ Z , et n’exis-
kλ 1
tent que si sin(α − βk ) ≤ 1, soit pour = k nλ ≤ 1 ⇔ k ≤
= 3,21 comme précé-
a nλ
demment. On peut donc de nouveau observer 7 ordres pour λ = 546,1 nm dans les
directions correspondant à βk = α − arcsin ( knλ ) indiquées ci-dessous :

ordre k −3 −2 −1 0 1 2 3
βk (°) 88,3 57,8 37,4 19,3 1,1 −19,3 −49,8

On donne ci-après l’allure de l’intensité en fonction de β pour le réseau choisi


et λ = 546,1 nm . Les ordres autre que k = 2 sont très atténués.
Pour les autres longueurs d’onde du visible, l’intensité ne sera pas exactement
maximale dans l’ordre 2 mais en restera proche.

183
184 Partie III.  Optique

2. INTERFÉRENCES À N ONDES PAR DIVISION


D’AMPLITUDE : INTERFÉROMÈTRE DE FABRY-
PÉROT 
La connaissance de l’interféromètre de Fabry-Pérot n’est pas exigible. Son uti-
lisation peut en revanche être envisagée en travaux pratiques.

2.1 Description de l’interféromètre de Fabry-Pérot


Cet interféromètre est constitué de deux lames de verre à faces parallèles d’in-
dice de réfraction nv , parallèles entre elles. Entre ces deux lames se trouve une lame
d’air d’épaisseur e. Les faces des lames de verre en regard sont traitées par dépôt
d’une fine couche métallique ou diélectrique, de façon à ce que le coefficient de ré-
flexion en puissance R de l’onde provenant de l’air soit très proche de 1.

La lumière est émise par une source large monochromatique extérieure au dis-
positif. Un rayon issu de cette source en incidence avec un angle i sur l’interféromètre
traverse la première lame de verre.

184
Chapitre 5.  Interférences à N ondes 185

Ce rayon est donc dévié deux fois, et d’après les lois de Descartes il reste dans
le plan d’incidence (plan de la figure ci-dessous contenant le rayon incident et la nor-
male à la lame). Les lois de Descartes fournissent sin i = nv sin i v pour la première ré-
fraction, et nv sin i v = sin i ′  i ′ = i pour la seconde : le rayon n’est pas dévié par les
lames de verre.

Le rayon se réfléchit un grand nombre de fois sur les parois internes, et donne
naissance à N >> 1 rayons transmis par le dispositif, qui émergent parallèlement entre
eux en faisant l’angle i avec la normale à la lame d’air. Ces rayons interfèrent à l’infini,
ici dans le plan focal image d’une lentille convergente L de distance focale f ′ .
Comme pour l’interféromètre de Michelson en lame d’air, lorsqu’on utilise une
source large, les interférences sont localisées à l’infini : deux points source distincts
créent à l’infini des franges d’interférence qui coïncident. Les N rayons qui interfèrent
à l’infini sont issus d’un seul et même rayon provenant de la source.

2.2 Différence de marche et franges d’interférence


La première figure du 2.1 explique la construction des N rayons qui interfèrent
à partir du même rayon incident.
La différence de marche à l’infini, dans la direction i, entre deux rayons issus du
même rayon incident et qui émergent consécutivement de l’interféromètre, est la
même que pour le Michelson en lame d’air (l’épaisseur des lames de verre n’intervient
pas puisque les deux rayons traversent la même longueur de verre) :
e e 
δ = δn +1/ n = IJ + JK − I ′H = 2 − ��K�� ′I ′ � sin i = 2 1 − sin2 i  = 2e cos i .
cos i = KI = 2e tan i cos i  

4 πe cos i
Le déphasage entre ces deux rayons vaut φ = φn +1/ n = − (le rayon
λ
(n + 1) est en retard par rapport à (n) car il a effectué une marche supplémentaire). Il
ne dépend que de i, et les franges d’interférences sont des anneaux d’égale inclinai-
son. L’intensité lumineuse sur l’écran ne dépend donc que de ρ = f ′ tan i ≃ f ′ ⋅ i , dis-
tance entre le point M sur l’écran et le foyer image F ′ de la lentille.

L’intensité lumineuse est la même en tous les points de l’écran placés sur un
cercle de centre F ′ : les franges sont des anneaux centrés sur l’axe focal de L.

185
186 Partie III.  Optique

2.3 Intensité en fonction du déphasage


Nous admettrons qu’on peut ne pas
prendre en compte l’épaisseur des lames de
verre, et qu’on a le même coefficient de trans-
mission τ pour le champ électrique, de l’exté-
rieur vers la lame d’air, que de la lame d’air
vers l’extérieur. On note r le coefficient de ré-
flexion sur les faces traitées des lames de
verre, et ψ 0 l’amplitude du champ électrique
incident.
Les coefficients r et τ dépendent de
l’angle d’incidence, mais ici on se place en in-
cidence quasi-normale ( i << 1 rad ), et ils peu-
vent être considérés comme des constantes.
On pose R = r 2 et T = τ2 . Si on néglige la puissance absorbée par les lames
de verre, R et T vérifient R + T = 1 .
L’amplitude de l’onde émergente vaut :

ψ(M, t ) = τ2ψ 0ei ωt + τ2r 2ψ 0e i ( ωt +φ) + τ2r 4 ψ 0e i ( ωt + 2φ) + ... + τ2r 2(N −1)ψ 0e i ( ωt + ( N −1)φ)
���� � ������� �����������
ψ 0 ( M ,t ) ψ 1 ( M ,t ) ψ N −1(M ,t )

1 − r 2N eiN φ
= τ2ψ0ei ωt 1 + r 2e i φ + r 4e 2i φ + ... + r 2( N −1)ei (N −1)φ  = τ2ψ 0e i ωt
  1 − r 2e i φ
On a donc superposition de N ondes cohérentes dont les phases sont en pro-
gression arithmétique, mais donc les amplitudes décroissent exponentiellement.
τ2ψ 0e i ωt
Comme r < 1 et N >> 1 , on a r 2N e iN φ ≃ 0 et ψ(M , t ) ≃ .
1 − r 2e i φ
K K τ4ψ 02
On en déduit l’intensité I = ψ(M, t ) ⋅ ψ∗ (M, t ) ≃ , soit :
2 2 (1 − r 2ei φ ) ⋅ (1 − r 2e −i φ )
K 4 2 K 4 2
τ ψ0 τ ψ0
2 2 φ
I (M ) = = . Comme cos φ = 1 − 2 sin2 , on a :
1 + r − r (e + e ) 1 + r − 2r 2 cos φ
4 2 iφ −i φ 4 2

K 4 2 K 4 2 K ψ 02 τ4
τ ψ0 τ ψ0 2 (1 − r 2 )2
I (M ) = 2 = 2 = .
1 + r 4 − 2r 2 + 4r 2 sin2
φ
(1 − r 2 )2 + 4r 2 sin2
φ 4r 2 2 φ
1+ sin
2 2 (1 − r 2 )2 2

K ψ02
Comme R + T = 1 , on a τ4 = T 2 = (1 − R )2 . D’autre part, I0 = est l’inten-
2
sité de l’onde incidente.

186
Chapitre 5.  Interférences à N ondes 187

I0 4R
Finalement I (φ) = , avec m = . La fonction φ ֏ I (φ) est une
1 + m sin
φ 2 (1 − R )2
2
fonction d’Airy, 2π-périodique, de paramètre m.
L’intensité est maximale pour φ = 2k π , avec k ∈ Z : I ( φ) = Imax = I0 .
On obtient des franges brillantes très fines grâce au traitement de surface des
lames de verre, qui permet d’obtenir par exemple R = 0,95 . On a m >> 1 (par exemple
m = 1520 pour R = 0,95 ).
Sauf quand φ = 2k π , I ( φ) << I0 . La courbe de φ ֏ I (φ) présente donc des pics
très fins autour de φ = 2k π . On se rapproche des constructions de Fresnel vues pour
les réseaux, car si R ≃ 1 , l’amplitude des ondes transmises successivement décroît
lentement, et on peut en première approximation la considérer comme constante.
En revanche, pour des valeurs plus faibles de R, les pics sont plus larges, et on
ne peut plus considérer que l’intensité minimale est nulle.

Lorsque φ = 2k π , avec k ∈ Z , l’intensité émergente (transmise par l’interféro-


mètre de Fabry-Pérot) est égale à celle de l’onde incidente, ce qui veut dire que l’in-
tensité entre les lames de verre et également l’intensité réfléchie par la première lame
de verre sont nulles. Dans ce cas en effet, les interférences entre les ondes multiples
dans la lame d’air et du côté de la source sont totalement destructives : la somme de
leurs amplitudes est nulle. Cette propriété est utilisée pour les verres anti-reflet : avec
un traitement de surface adapté, l’amplitude réfléchie par un verre s’annule en inci-
dence normale pour la longueur d’onde moyenne du visible. La condition n’étant pas
exactement réalisée sur tout le spectre visible, de légers reflets colorés apparaissent.
L’interféromètre de Fabry-Pérot, dont l’épaisseur de la lame d’air est réglable
de 0,05 mm à 10 mm, permet de séparer des raies très fines mais très proches du
spectre d’une source lumineuse. Considérons par exemple la fine raie rouge d’une
lampe à vapeur de cadmium basse pression dont la longueur de cohérence est grande
( ℓ c = 20 cm ). Prenons e = 1 mm : la différence de marche maximale entre deux
rayons consécutifs qui émergent du système vaut 2e = 2 mm . On ne peut plus consi-
dérer que les rayons émergents appartiennent au même train d’onde quand le nombre

187
188 Partie III.  Optique

de réflexions sur une lame de verre devient supérieur à la centaine.


Cependant, R N ψ0eiN φ tend suffi-
samment rapidement vers 0 pour que
l’approximation R N eiN φ ≃ 0 soit bien véri-
fiée pour quelques dizaines de rayons lu-
mineux, même si R est proche de 1. C’est
par exemple le cas pour R = 0,95 avec
N = 80 comme on le voit sur la simulation
ci-contre : les courbes représentatives de
φ ֏ I (φ) tracées dans les cas N → ∞ et
N = 80 sont très proches.

2.4 Rayon des anneaux


Puisque i << 1 rad , les conditions de Gauss sont respectées, et on obtient des
ρ i2 ρ2
franges nettes. On peut écrire i ≃ tan i = et cos i ≃ 1 − ≃ 1 − 2 .
f′ 2 2f ′
Comme la différence de marche δ = 2e cos i = pλ est la même que dans le cas
de l’interféromètre de Michelson en lame d’air, le rayon des franges d’interférence (p
fixé) est le même pour une même épaisseur e.
2e
Si par exemple on suppose que l’ordre p0 = en F ′ ( ρ = 0 ) est un entier, le
λ

rayon du mième anneau brillant vaut ρm = f ′ ∝ m.
e
Cependant, le fait qu’un grand nombre de rayons interfèrent rend la condition
pour avoir une intensité proche de sa valeur maximale beaucoup plus stricte, et on
n’observe en pratique de la lumière que sur des anneaux très fins.

188
189

[OPTIQUE 6]

INTERFÉRENCES EN LUMIÈRE
POLYCHROMATIQUE
1. BATTEMENTS OPTIQUES
1.1 Interférences avec un doublet de longueurs d’onde très proches
Le phénomène de battements intervient lorsqu’on isole, à l’aide d’un filtre op-
tique, deux raies spectrales de longueurs d’onde très proches, et qu’on utilise un in-
terféromètre à deux ondes de même amplitude. On note δ la différence de marche
entre les deux ondes au point M où elles interfèrent. Dans le cas d’une lampe basse
pression à vapeur de sodium, le filtre est inutile car le doublet jaune de longueurs
d’onde λ1 = 589,0 nm et λ 2 = 589,6 nm prédomine largement en intensité dans le
λ1 + λ 2
spectre. La longueur d’onde moyenne vaut λ0 = = 589,3 nm , et l’écart entre
2
les longueurs d’onde est ∆λ = λ 2 − λ1 = 0,6 nm << λ0 .
L’intensité lumineuse au point M sur l’écran est la somme des intensités dues
aux deux radiations puisqu’elles sont incohérentes entre elles, soit, en introduisant les
1 1
fréquences spatiales σ1 = et σ2 = :
λ1 λ2
I (δ) = 2I01 [1 + cos 2πσ1δ] + 2I02 [1 + cos 2πσ2δ] .
Supposons que les deux raies soient de même intensité I0 (c’est pratiquement
le cas pour le sodium). On a alors :
   σ + σ2     σ1 − σ2   
I (δ) = 2I0 [ 2 + cos 2πσ1δ + cos 2πσ2δ] = 4I0 1 + cos  2πδ  1   cos 2πδ  2    .
   2     
σ1 + σ2
Posons σ0 = , et ∆σ = σ1 − σ2 : I (δ) = 4I0 [1 + cos(2πσ0δ)cos( πδ∆σ)] .
2
1 1 λ 2 − λ1 ∆λ 1 1 λ + λ2 1
Or ∆σ = − = ≃ 2 << σ0 = + = 1 ≃ .
λ1 λ 2 λ1λ 2 λ0 2λ1 2λ 2 2λ1λ 2 λ0
La visibilité δ ֏ V (δ) = cos( πδ∆σ) varie beaucoup plus lentement que la fonc-
tion δ ֏ cos(2πσ0δ) dont les valeurs sont comprises entre −1 et 1.
Ainsi, la courbe correspondant à I ( δ) est comprise entre deux enveloppes
d’équations 4I0 [1 ± cos( πδ∆σ)] .
On a un phénomène de battements : lorsque δ varie, la visibilité varie, en valeur
absolue, entre 0 et 1.

189
190 Partie III.  Optique

Prenons l’exemple de franges rectilignes (fentes d’Young, interféromètre de Mi-


chelson en coin d’air) où δ est proportionnel à l’abscisse X des franges. On a V ≃ 1
lorsque les franges dues aux deux longueurs d’onde coïncident (une frange brillante
avec une frange brillante, une frange noire avec une frange noire). C’est ce qu’on ob-
serve ci-dessous dans la zone de coïncidence C. On a V ≃ 0 lorsque les franges dues
aux deux longueurs d’onde anti-coïncident (une frange brillante coïncide avec une
frange sombre). C’est ce qu’on observe dans la zone d’anti-coïncidence A.

Un battement correspond à la variation ∆δ entre deux annulations successives


1
de la visibilité (c’est la demi-période de δ ֏ V (δ) ), soit ∆δ = , alors que la pseudo-
∆σ
1
période de l’intensité est ∆′δ = . Ainsi, le nombre de franges dans un battement vaut
σ0
∆δ σ λ
N= , soit N = 0 = 0 .
∆′δ ∆σ ∆λ

190
Chapitre 6.  Interférences en lumière polychromatique 191

λ0
Dans le cas du doublet jaune du sodium, N = ≃ 982 . Le nombre d’oscilla-
∆λ
tions de l’intensité à l’intérieur d’un battement est de l’ordre de 1000, contrairement à
λ
la figure précédente, pour laquelle on a choisi N = 0 = 20 .
∆λ

1.2 Interféromètre de Michelson en lame d’air avec le doublet jaune du so-


dium 

 ρ2 
Dans ce cas, la différence de marche vaut δ ≃ 2e  1 − 2  en un point M de
 2f ′ 
 
l’écran, situé à une distance ρ du foyer image F ′ de la lentille L de projection dont la
distance focale est notée f ′ .
Lorsque l’épaisseur e de la lame d’air est fixée, la visibilité, dont la période cor-
respond à environ 2000 anneaux sombres, varie très peu à l’écran puisqu’on n’observe
en pratique au maximum que quelques dizaines d’anneaux sombres. La visibilité à
l’écran reste donc proche de celle observée en F ′ , où δ = 2e .
Lorsqu’on chariote le miroir M1 , la visibilité des anneaux varie donc de façon
quasi-uniforme sur l’écran. Elle s’annule lorsqu’il y a anti-coïncidence en F ′ , c’est-à-
dire par exemple si F ′ est un point brillant pour la longueur d’onde λ1 , et un point noir
 2e
 λ = k1, k1 ∈ Z
 1
pour la longueur d’onde λ 2 , soit  . On obtient par différence :
 2e =  k + 1  , k ∈ Z
 λ 2  2 2  2

1 1 1 1 1 1 λ λ
2e  −  = k1 − k2 − = k − , k ∈ Z , soit e = ek =  k −  1 2 , k ∈ Z .
 λ1 λ 2  2 2 2 2  λ2 − λ1
Lors de l’annulation suivante, k a varié de 1, et on obtient la distance ∆e dont il
1 λ1λ 2 1 λ02
faut charioter M1 entre deux brouillages : ∆e = ek +1 − ek = ≃ .
2 λ 2 − λ1 2 ∆λ
Le programme privilégie cette méthode où l’on raisonne sur l’ordre d’interfé-
1
rence, mais on aurait pu également utiliser la période ∆δ = des battements, avec
∆σ
1 1 λ1λ 2 1 λ 02
ici ∆δ = 2∆e : ∆e = = ≃ .
2∆σ 2 λ 2 − λ1 2 ∆λ
1 λ02
Cette expression permet d’accéder à l’écart ∆λ = entre les longueurs
2 ∆e
d’onde du doublet. On mesure ∆e = 290 µm , et on en déduit ∆λ = 0,60 nm .
La figure ci-après montre des photographies des franges de l’interféromètre de
Michelson en lame d’air.

191
192 Partie III.  Optique

Une annulation de la visibilité (quasi-annulation en réalité car les deux compo-


santes du doublet jaune de sodium n’ont pas exactement la même intensité) se produit
entre deux maximums de visibilité.

2. INTERFÉRENCES AVEC UNE SOURCE DE


LUMIÈRE BLANCHE
2.1 Figures d’interférence en lumière blanche
Le spectre d’une source de lumière blanche est continu, et contient l’intervalle
de longueurs d’onde λmin = 0,4 µm ≤ λ ≤ λmax = 0,75 µm .

Fentes d’Young ou Interféromètre de Michelson en coin d’air


Dans les deux cas, la différence de marche ne dépend que d’une coordonnée
X du point de l’écran : δ = κX où κ est une constante, et les franges sont rectilignes.
Nous allons raisonner sur l’interféromètre de Michelson en coin d’air.
Sur l’arête du coin d’air δ = 0 ∀λ . On a des interférences totalement construc-
tives pour toutes les longueurs d’onde, donc on a une frange brillante de même couleur
que la source, soit ici une frange brillante blanche (frange d’ordre 0).
δ
Lorsqu’on s’écarte de l’arête, δ augmente. L’ordre d’interférence p = dépen-
λ
 1 1 
dant de λ, il varie de ∆p = δ  −  sur l’intervalle de longueurs d’onde visible.
 λmin λmax 
Tant que ∆p reste de l’ordre de 1, quelques longueurs d’onde visibles donnent
au point d’abscisse X des interférences constructives, l’addition de leurs intensités
donne une frange colorée par synthèse additive, pendant que d’autres longueurs
d’onde visibles donnent au même point des interférences destructives.
 1 1  λmin ⋅ λmax
Si au contraire ∆p = δ  −  >> 1 ⇔ δ >> ≃ 1 µm = ℓ c , où
λ
 min λ max  λ max − λmin

192
Chapitre 6.  Interférences en lumière polychromatique 193

ℓ c est la faible longueur de cohérence de la lumière blanche, beaucoup de couleurs


se superposent, et on trouve du blanc en M, mais il s’agit de blanc d’ordre supérieur,
ou plutôt du gris, bien moins lumineux que la frange centrale, puisque l’intensité s’an-
nule pour beaucoup de longueurs d’onde.
λ
La période spatiale de l’intensité ∆X = (l’interfrange) est proportionnelle à

la longueur d’onde. L’intensité en X = 0 est maximale pour toutes les longueurs
d’onde visible, puis les maximums d’intensité se produisent à des abscisses différentes
selon la longueur d’onde.

Les irisations obtenues pour δ ≃ ℓ c = 1 µm définissent l’échelle des teintes de


Newton à centre blanc. Par exemple, pour δ = 267 nm , on observe du rouge carmin.

193
194 Partie III.  Optique

Nous avons raisonné jusque-là dans le cas où la frange centrale est brillante.
Pour certains interféromètres de Michelson, la séparatrice introduit un déphasage de
π entre les deux voies, et la frange centrale est noire (c’est aussi le cas pour le miroir
de Lloyd). La différence de marche géométrique est toujours 2αX , mais il faut lui ra-
jouter λ / 2 du fait du déphasage supplémentaire de π entre les deux ondes. On obtient
alors les teintes de Newton à centre noir.

Spectre cannelé
Si on analyse le spectre, par exemple avec un spectroscope à prisme, lorsque
δ est supérieur à 1 µm , l’intensité de plusieurs longueurs d’onde du visible s’annule.
λ
Ce sont celles telles que δ = (2n + 1) avec n ∈ N , et λmin ≤ λ ≤ λmax .
2
2δ δ 1 δ 1
On en déduit λmin ≤ ≤ λmax ⇔ − ≤n≤ − . Par exemple, si
2n + 1 λmax 2 λmin 2
3500 1 3500 1
δ = 3500 nm , nmin = − = 4,2 ≤ n ≤ nmax = − = 8,25 .
750 2 400 2
On a donc 4 annulations dans le spectre, appelées cannelures sombres, pour

les longueurs d’onde λ n = , n ∈ a5,8 b , soit 412 nm, 467 nm, 538 nm et 636 nm.
2n + 1

En termes de distance du point M à la frange centrale brillante, l’extinction de la


longueur d’onde λ en M correspond au cas où cette distance est égale à un nombre
impair de demi-interfrange.

Interféromètre de Michelson en lame d’air


Au contact optique, e = 0 , donc δ = 2e cos i = 0 ∀i , ∀λ . Les interférences sont
totalement constructives partout sur l’écran et pour toutes les longueurs d’onde. On
retrouve en tout point de l’écran un spectre proportionnel au spectre de la source :
l’écran est donc uniformément éclairé et possède la couleur de la source : on parle de
teinte plate. Ici, il est blanc.
Si on chariote très légèrement M1 , des couleurs défilent à l’écran avant de lais-
ser la place à du blanc d’ordre supérieur.

La détermination précise du contact optique est possible grâce à la faible lon-


gueur de cohérence d’une source de lumière blanche.

194
Chapitre 6.  Interférences en lumière polychromatique 195

2.2 Mesure de l’épaisseur d’une lame de verre 


La faible longueur de cohérence de la lumière
blanche peut être mise à profit.
Considérons l’interféromètre de Michelson en
coin d’air réglé de façon à observer la frange centrale
brillante sur l’écran. On interpose alors devant M1 une
lame de verre d’épaisseur h et d’indice de réfraction n,
parallèle à M1 . Dans la zone de l’écran où interfèrent
les rayons (2) et (1), ce dernier ayant traversé la lame,
les franges disparaissent (image du haut), laissant
place à du blanc d’ordre supérieur, car la différence de
marche supplémentaire créée par la lame entre les
deux voies, 2(n − 1)h , est plus grande que ℓ c .
Il faut rapprocher M1 de la séparatrice d’une distance ∆e afin de retrouver des
franges colorées dans cette zone. On a alors compensé la différence de marche :
2∆e = 2(n − 1)h . On mesure ∆e = 80 µm pour une lamelle de microscope d’indice
n = 1,5 . On en déduit son épaisseur h = 160 µm .
La lame n’étant pas parfaitement parallèle à M1 , on constate que les franges
apparaissent, lorsqu’on n’a charioté que de ∆e / 2 , dans la zone où interfèrent (2) et
(1), ce dernier n’ayant traversée la lame qu’une fois car il est passé près de son bord.
La différence de marche à compenser n’est alors que (n − 1)h . C’est pour cela qu’on
a du blanc d’ordre supérieur dans cette zone quand on chariote de ∆e .

3. SPECTROSCOPIE / POUVOIR DE RÉSOLUTION


3.1 Intérêt de la spectroscopie
Il existe de nombreuses applications de l’analyse spectrale de la lumière. Elle
permet d’identifier un élément chimique dont le spectre d’émission constitue la signa-
ture (spectroscopie atomique). On a pu ainsi identifier le spectre émis par un atome

195
196 Partie III.  Optique

d’hydrogène d’une autre galaxie, et constater que ce spectre était décalé vers le rouge
par rapport à celui observé sur Terre, ce qui a permis de montrer que les galaxies
s’éloignaient de la nôtre (effet Doppler). Comme un élément chimique absorbe les
mêmes longueurs d’onde que celles qu’il émet, on a également pu, en analysant le
spectre solaire, déduire de ses raies noires quels éléments sont contenus dans la
couche extérieure de l’atmosphère solaire.
Dans le domaine du visible et des ultra-violets, les longueurs d’onde absorbées
par les électrons contenus dans les molécules chromophores (par exemple des molé-
cules contenant des liaisons doubles et simple alternées) permettent d’identifier ces
molécules. Dans le domaine des infra-rouges, les longueurs d’onde absorbées par les
molécules, du fait de leurs vibrations et de leurs rotations, renseignent sur les liaisons
chimiques entre leurs atomes (par exemple, la liaison O–H d’une fonction alcool ab-
sorbe autour de σ = 1/ λ = 3400 cm-1 ).

Il faut parfois atteindre une


grande résolution spectrale pour pou-
voir séparer des longueurs d’onde très
proches, comme celles dues à l’effet
Zeeman, où l’application d’un champ
magnétique intense à une lampe spec-
trale provoque la division des raies en
deux raies ou plus, l’écart entre deux
raies voisines étant de l’ordre de la dizaine de pm ! On arrive à atteindre cette résolu-
tion avec un interféromètre de Fabry-Pérot.

3.2 Spectroscopie avec un réseau de fentes


Décomposition de la lumière en incidence normale
En incidence normale, on n’a de la lumière que dans les directions i ′ = ik′ telles

que sin i k′ = , avec k ∈ Z . Sauf dans l’ordre 0, ik′ dépend de λ donc le réseau forme
a

196
Chapitre 6.  Interférences en lumière polychromatique 197

des raies colorées. Dans un ordre k ≠ 0 donné, les grandes longueurs d’onde sont
plus déviées. Par exemple, pour une lampe à vapeur de mercure, on trouve d’abord,
en s’écartant de l’ordre 0, du violet, puis de l’indigo, du bleu-vert, du vert, un doublet
jaune et du rouge si on se limite aux raies d’émission les plus intenses.


En différenciant sin i k′ = lorsque λ varie dans un ordre k donné, on obtient
a
kd λ di ′ k k k 1
cos i k′ di k′ =  k = = = = .
a dλ a cos i k′ a 1 − sin2 i ′ 2 2
k a 1 − ( k λ / a ) (a / k ) − λ2
di k′
La résolution augmente avec l’ordre (les raies sont mieux séparées dans

l’ordre 2 que dans l’ordre 1).

Pouvoir de résolution
Pour une incidence i quelconque et une
longueur d’onde λ, on observe dans l’ordre k
une raie lumineuse dans la direction i k′ ( λ ) telle

que sin [ i k′ ( λ )] = sin i + . Dans le même ordre,
a
on observe la raie correspondant à une autre
longueur d’onde λ + δλ (avec δλ << λ ) dans la
direction i k′ ( λ + δλ ) telle que :
k ( λ + δλ )
sin [ i k′ ( λ + δλ )] = sin i + .
a
L’écart entre les deux valeurs de sin i k′
k δλ
est δ [ sin i k′ ] = sin [ i k′ ( λ + δλ )] − sin [ i k′ ( λ )] =
.
a
Les deux longueurs d’onde étant incohérentes, leurs intensités lumineuses
s’ajoutent. Pour les séparer, l’écart δ [ sin i k′ ] doit être suffisamment grand, car les raies
ne sont pas infiniment fines. On a en effet vu que le pic de la fonction φ ֏ I (φ) dans

197
198 Partie III.  Optique

2π 2π
l’ordre k pour λ possède une demi-largeur ∆φ =
N
, où φ =
λ
[a sin i ′ − a sin i ] est le
déphasage entre deux ondes passées par des fentes consécutives. L’intensité, fonc-
λ
tion de la variable sin i ′ , présente des pics de demi largeur δ1/ 2 [ sin i ′] = .
Na
On adopte généralement le critère de séparation de Rayleigh : il y a séparation
si les pics dus à λ et λ + δλ sont séparés de plus de δ1/2 [ sini ′] :
k δλ λ λ
δ [ sin i k′ ] = > δ1/ 2 [ sin i ′] = ⇔ δλ > = ( δλ )min .
a Na kN
On ne pourra donc pas séparer deux longueurs d’onde dont l’écart est inférieur
λ
à ( δλ )min . On définit le pouvoir de résolution par R = . Il est d’autant plus grand
( δλ )min
que ( δλ )min est petit, et vaut R = kN pour un réseau de fentes.
On retrouve que le pouvoir de résolution augmente avec l’ordre k et avec le
nombre de fentes N.
Pour un réseau de 5 cm de largeur contenant n = 570 fentes par mm, on a dans
l’ordre 1 : R = 50 × 570 = 2,85 ⋅ 10 4 .
Le doublet jaune du sodium a pour longueurs d’onde λ = 588,995 nm et
588,995
λ + δλ = 589,592 nm . Comme δλ = 0,597 nm > (δλ )min = = 0,021 nm , la ré-
2,85 ⋅ 104
solution du réseau est suffisante pour séparer le doublet.

Application : le monochromateur à réseau 


Considérons un réseau par réflexion de pas a = 1,50 µm , constitué de fines
bandes réfléchissantes parallèles à l’axe Oy. Ce réseau peut tourner d’un angle α au-
tour de l’axe Oy. Il est éclairé par de la lumière blanche dans la direction faisant l’angle
β avec l’axe fixe Oz (direction normale au plan du réseau lorsque α = 0 ). On s’inté-
resse à la lumière diffractée dans la direction faisant l’angle β′ avec Oz.

198
Chapitre 6.  Interférences en lumière polychromatique 199

Par application du théorème de Malus, on détermine la différence de marche


δ = a [ sin(α − β) + sin(α − β′)] entre deux rayons passés par des fentes consécutives.
On choisit l’angle β de façon à sélectionner la longueur d’onde λ0 = 600 nm
dans le spectre d’ordre 2 et la direction β′ = 0 , lorsque α = 0 :
 2λ 
−a sin β = 2λ 0  β = − arcsin  0  = −53,1° .
 a 
On peut alors, en faisant tourner le réseau de α, sélectionner tout le spectre
d’ordre 2 entre λmin = 400 nm et λmax = 800 nm dans la direction β′ = 0 .

Pour sélectionner λ quelconque, il faut choisir α tel que sin( α − β) + sin α = ,
��� ����� � a
2 sin( α−β /2 ) cos( β /2)

2 sin β 2 β β β λ β
avec =− =− sin cos , d’où α = − arcsin  sin  . α doit varier entre
a λ0 λ0 2 2 2  λ0 2

β λ β β λ β
αmin = − arcsin  min sin  = −9,22° et αmax = − arcsin  max sin  = 10,04° .
2 λ
 0 2  2 λ
 0 2
Une fente placée dans le plan fo-
cal image d’une lentille convergente L
permet de sélectionner les rayons diffrac-
tés sous la direction moyenne β′ = 0 . Elle
possède une demi-largeur b non nulle,
mais petite devant la distance focale f ′
de L donc, pour un angle α donné, on sé-
lectionne une petite bande de longueur d’onde de largeur δλ autour de λ.
b b
Comme − ≤ β′ ≤ << 1, la longueur d’onde λ′ sélectionnée dans la direction
f′ f′
β′ et l’ordre 2 vérifie a [ sin(α − β) + sin(α − β′)] = 2λ′ , or sin( α − β′) ≃ sin α − β′ cos α . On
  aβ′
obtient donc a sin(α − β) + sin α − β′ cos α  = 2λ′ , soit λ′ = λ − cos α .
 ��� � ���� �  2
 2λ / a 
ab
On a δλ = δλ′ = cos α . L’angle α restant petit ( −9,22° ≤ α ≤ 10,24° ), on peut
f′
ab
faire les approximations cos α ≃ 1 et δλ ≃ ∀λ . Pour f ′ = 15 cm et b = 0,2 mm on
f′
1500 × 0,2 ⋅ 10 −3
a δλ ≃ = 2 nm .
15 ⋅ 10 −2
En collimatant la lumière issue de la fente du monochromateur, on envoie vers
la cuve d’un spectrophotomètre un faisceau de lumière parallèle dont le spectre con-
tinu est une bande de longueur d’onde de largeur 2 nm, centrée sur une longueur
d’onde réglable entre 400 nm et 800 nm.

199
200 Partie III.  Optique

3.3 Spectroscopie avec un interféromètre de Fabry-Pérot


Décomposition de la lumière
L’ordre d’interférence dans la direction i vaut
2e cos i
p= . Pour un ordre d’interférence p = k ∈ N , on ob-
λ
serve une frange brillante pour la longueur d’onde λ dans la

direction cos i k = . C’est la même expression que pour
2e
l’interféromètre de Michelson en lame d’air, sauf que les an-
neaux brillants sont beaucoup plus fins dans le cas de l’in-
terféromètre de Fabry-Pérot, ce qui permet de séparer dans
l’ordre k des longueurs d’onde très proches.

En différenciant cos i k = lorsque λ varie dans un ordre k donné, on obtient :
2e
kd λ di k k k 1
sin i k di k =  k = = = =
2e dλ 2e sin ik 2e 1 − cos i
2 2
k 2e 1 − ( k λ / 2e ) ( 2e / k )2 − λ2
di k
donc la résolution augmente avec l’ordre k. Or l’ordre peut être très grand (il est

2e 2 ⋅ 10 −3
maximal pour i = 0 et vaut par exemple pmax = = = 4000 si on prend
λ 500 ⋅ 10−9
e = 1 mm et λ = 500 nm ). On s’attend à un fort pouvoir de résolution.

Pouvoir de résolution
Pour une incidence i quel-
conque et une longueur d’onde λ, on
observe dans l’ordre k un anneau lu-
mineux dans la direction ik′ (λ ) telle

que cos [ i k ( λ )] = . Dans le même
2e
ordre, on observe l’anneau lumineux
correspondant à une autre longueur
d’onde λ + δλ (avec δλ << λ ) dans la
direction ik (λ + δλ ) telle que :
k ( λ + δλ )
cos [ i k ( λ + δλ )] = . On a un
2e
k δλ
écart δ [cos i k ] = cos [ i k ( λ + δλ )] − cos [ i k ( λ )] =
entre ces deux valeurs.
2e
Les deux longueurs d’onde étant incohérentes, leurs intensités lumineuses
s’ajoutent. Pour les séparer, l’écart δ [cos i k ] doit être suffisamment grand car les raies

200
Chapitre 6.  Interférences en lumière polychromatique 201

ne sont pas infiniment fines. Contrairement au cas du réseau de fentes où l’intensité


s’annule, on ne peut pas définir la demi-largeur d’un pic en cherchant les premières
annulations autour de ce pic. La fonction d’Airy φ ֏ I (φ) étant 2π-périodique, on peut
étudier le pic centré en φ = 0 , et on définit la largeur δ1/2 [ φ] à demi-hauteur :
I0 I0 δφ 1
δ1/2 [ φ] = 2δφ , avec δφ tel que I (δφ) = = ⇔ sin2 = . Pour un inter-
1 + m sin2
δφ 2 2 m
2
δφ δφ
féromètre de Fabry-Pérot, m >> 1 , et donc δφ << 1 rad  sin ≃ . On en déduit
2 2
2 4 4 πe cos i λ
δφ = , et δ1/2 [ φ] = . Comme φ = − , on a δ1/2 [cosi ] = .
m m λ πe m
On considère qu’il y a séparation si les pics dus à λ et λ + δλ sont séparés de
k δλ λ 2λ
plus de δ1/2 [cos i ] : δ [cos i k ] = > δ1/2 [cos i ] = ⇔ δλ > = (δλ )min .
2e πe m πk m
On ne pourra donc pas séparer deux longueurs d’onde dont l’écart est inférieur
λ πk m
à (δλ )min . Le pouvoir de résolution R = vaut R = .
(δλ )min 2
On retrouve que le pouvoir de résolution augmente avec l’ordre k et avec m,
donc avec le coefficient de réflexion des lames de verre.
Pour un interféromètre de Fabry-Pérot tel que e = 1 mm et m = 1520 , on ob-
tient au voisinage du centre des anneaux R = π × 4000 × 1520 / 2 = 2,45 ⋅ 105 . Autour
500
de λ = 500 nm , on a (δλ )min = = 0,002 nm . Les interféromètres de Fabry-
2,45 ⋅ 105
Pérot permettent d'obtenir des résolutions supérieures à celles des meilleurs réseaux.

Application : le filtre interférentiel 


Le filtre est constitué par une lame transpa-
rente d’indice n et de très faible épaisseur e dont
les faces sont traitées pour avoir un grand coeffi-
cient de réflexion R.
Les résultats précédents restent valables
mais la différence de marche entre deux rayons
consécutifs émergents vaut δ = 2ne cos r , où r est
l’angle sous lequel un rayon incident sous l’angle
i est réfracté dans la lame. Le filtre est éclairé par de la lumière blanche en incidence
quasi-normale : i << 1 rad et r << 1 rad . Dans l’approximation des petits angles, on a
δ ≃ 2ne . Le produit ne est choisi de façon à ne sélectionner qu’une seule longueur
d’onde du visible. Par exemple, si ne = 546 nm , on ne sélectionne que les longueurs
d’onde λ k telles que 2ne = k λ k ⇔ λ k = 2ne / k = 1092 / k (nm) . Seule λ 2 = 546 nm
se trouve dans le visible, et alors l’ordre est k = 2 .

201
202 Partie III.  Optique

Autour de cette longueur d’onde centrale, le filtre laisse passer une petite bande
2λ 2 λ
de longueurs d’onde de largeur (δλ )min = = 2 à mi-hauteur, soit la bande
πk m π m
[ λ2 − (δλ)min, λ2 + (δλ)min ] .
Pour m = 1520 ( R = 0,95 ), on obtient (δλ )min = 4,5 nm . L’interféromètre trans-
met la bande de longueur d’onde de largeur 9 nm autour de 546 nm.

3.4 Spectroscopie par transformée de Fourier


On utilise l’interféromètre de Michelson en lame
d’air d’épaisseur algébrique x. Un capteur de lumière est
placé au foyer image F ′ de la lentille convergente L pla-
cée en sortie de l’interféromètre.
Pour une source polychromatique, la puissance
totale émise se répartit suivant les radiations de fré-
quence ν. Lorsqu’une voie de l’interféromètre est occul-
tée, l’intensité reçue en F ′ dans le domaine de fré-
quences [ ν, ν + dν ] vaut dI0 = Iν (ν )dν , où Iν (ν ) carac-
térise le spectre de la source. Les radiations de fré-
quences différentes étant incohérentes, les intensités correspondant à deux intervalles
+∞ +∞
spectraux différents s’ajoutent, et l’intensité totale en F ′ vaut I0 =  d I0 =  Iν (ν)dν .
0 0
Lorsque la lumière passe par les deux voies de l’interféromètre, on a des inter-
férences à deux ondes de même intensité en F ′ , avec une différence de marche
δ = 2x puisque les rayons interférant en F ′ sont issus d’un rayon en incidence nor-
male sur les miroirs du montage équivalent. Dans le domaine [ ν, ν + dν ] , l’intensité en
F ′ est donc égale à dI = 2dI0 1 + cos ( 2πδ / λ )  = 2Iν (ν )dν 1 + cos ( 2πνδ / c )  , où c est
la vitesse de la lumière dans le vide. Si on introduit le retard temporel τ = δ / c de l’onde
+∞
(1) par rapport à (2), l’intensité en F ′ s’écrit I ( τ) = 2  Iν (ν)[1 + cos(2πντ)] dν .
0
Pour une fonction ν ֏ f (ν ) supposée réelle et paire, la transformée de Fourier
+∞ +∞
τ ֏ fɶ( τ) est définie par fɶ( τ) =  f (ν )cos(2πντ)dν = 2  f (ν)cos(2πντ)dν . Elle est éga-
−∞ 0
lement réelle et paire. On obtient réciproquement, à l’aide d’une transformée de Fou-
+∞ +∞
rier inverse (ou directe dans ce cas), f (ν ) =  fɶ( τ)cos(2πντ)dτ = 2  fɶ(τ)cos(2πντ)dτ .
−∞ 0
Comme on peut étendre la fonction ν ֏ Iν (ν ) à des valeurs négatives de

202
Chapitre 6.  Interférences en lumière polychromatique 203

fréquence, en posant Iν (ν ) = Iν ( −ν ) pour ν < 0 , I ( τ) s’écrit sous la forme :


+∞ +∞
I ( τ) = 2  Iν (ν)dν + 2  Iν (ν)cos(2πντ)dν = 2I0 + Iɶν (τ) .
0 0
L’intensité I0 lorsqu’une des deux voies est occultée ne dépend pas de τ.
+∞
τ ֏ Iɶν ( τ) =  Iν (ν)cos(2πντ)dν est appelé interférogramme de la source, il con-
−∞
tient toutes les informations sur son spectre.
+∞
On a donc Iν (ν ) =  Iɶν (τ)cos(2πντ)dτ . Le spectre de la source est obtenu en
−∞
prenant la transformée de Fourier de l’interférogramme.
On déplace M1 à vitesse V = xɺ constante à l’aide d’un moteur : δ = 2x , et donc
τ varient. Le capteur délivre une tension u proportionnelle à l’intensité lumineuse reçue
en F ′ . On effectue l’acquisition de I ( τ) en chariotant M1 sur tout l’intervalle de posi-
tions possibles (la valeur algébrique x varie de − xmax < 0 à xmax ). Un filtre passe-haut
permet d’éliminer la composante continue correspondant à 2I0 , et enfin on effectue la
transformée de Fourier de la composante de la tension correspondant à Iɶν ( τ) afin d’af-
ficher le spectre ν ֏ Iν (ν ) de la source. On a bien réalisé un spectroscope. En pra-
tique on affiche plutôt le spectre λ ֏ Iλ (λ ) .
L’amplitude ∆τ de l’intervalle dans lequel varie le retard τ = δ / c = 2 x / c de (1)
par rapport à (2) vaut ∆τ = 4 xmax / c . D’après les propriétés de la transformée de Fou-
rier, la résolution ∆ν en fréquence est liée à ∆τ par ∆τ ⋅ ∆ν ≃ 1 .
On pourra donc séparer deux fréquences ν et ν + δν si δν > ∆ν , d’où le pouvoir
ν 4x ν
de résolution R = = ν ⋅ ∆τ = max . Comme 2xmax est de l’ordre du cm, et les fré-
∆ν c
c
quences optiques de l’ordre de ν0 = 5 ⋅ 1014 Hz , ∆ν ≃ = 1,5 ⋅ 1010 Hz << ν 0 .
4 xmax
Le pouvoir de résolution peut aussi s’exprimer à l’aide de la résolution ∆λ en
c dλ dν ν λ
longueur d’onde : λ =  =− R = ≃ ≃ 3,5 ⋅ 10 4 . Le pouvoir de réso-
ν λ ν ∆ν ∆λ
lution effectivement atteint est plus petit du fait des vibrations et de l’irrégularité de la
vitesse du moteur qui déplace M1 .

Prenons l’exemple du spectre de sortie d’un filtre absorbant vert placé devant
une source de lumière blanche. Le miroir M1 se déplaçant à V = 1 µm ⋅ s-1, l’interféro-
gramme est ici la courbe donnant la partie fluctuante de la tension aux bornes du cap-
teur, en fonction du temps.

203
204 Partie III.  Optique

On obtient en prenant sa transformée de Fourier un profil spectral gaussien


centré sur λ0 = 546 nm .

On retrouve les principales caractéristiques de ce spectre en remarquant


d’abord que pour un filtre parfait qui ne laisserait passer que la longueur d’onde λ0 ,
  4πx  
on aurait I = 2I0 1 + cos    , fonction sinusoïdale de x. Ceci reste vrai en première
  λ 0  
approximation : I(x) est localement sinusoïdale, et on a un maximum local quand :
δ = 2 x = 2Vt = k λ 0 , avec k ∈ Z . M1 se déplace donc de ∆x = λ 0 / 2 entre deux maxi-
mums consécutifs.
Comme on a 30 oscillations en 8,19 s, soit pour un déplacement de M1 de
8,19 µm , on en déduit que 30 λ 0 / 2 = 8,19 µm , soit λ0 = 546 nm .
Cependant, l’amplitude des maximums locaux diminue lorsqu’on s’écarte du
contact optique. En effet, le filtre laisse passer une fine bande de longueurs d’onde
autour de λ0 : [ λ 0 − δλ / 2, λ0 + δλ / 2] , avec δλ << λ 0 . Au contact optique, toutes ces
longueurs d’onde donnent des interférences constructives en F ′ , mais quand x aug-
2x 2x 2x
mente, les variations δp = − ≃ δλ de l’ordre d’interférence
λ0 − δλ / 2 λ0 + δλ / 2 λ02
p = 2 x / λ sur la bande de longueurs d’onde augmentent progressivement. Lorsque
ces variations sont très grandes devant 1, les franges dues aux différentes longueurs
d’onde ne coïncident plus du tout ; en F ′ un grand nombre d’entre elles donnent des
interférences totalement constructives, d’autres des interférences totalement destruc-
tives, et le contraste tend vers 0. Si x1/2 > 0 est la valeur de x pour laquelle l’ampli-
tude des maximums d’intensité a chuté de moitié par rapport au contact optique, on
2x
peut définir δλ par δp ≃ 1/2 δλ = 1.
λ02

λ 02
On lit sur l’interférogramme 2 x1/2 = 4,40 µm  δλ = = 68 nm . Le filtre ne
2x1/2
laisse donc passer que la bande de longueurs d’ondes [512 nm , 580 nm] .

204
205

[QUATRIÈME PARTIE]

ÉLECTROMAGNÉTISME

Les chapitres :
1. Les équations de Maxwell 207
2. Électrostatique 229
3. Magnétostatique 259
4. Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 291

D’autres chapitres portent sur l’électromagnétisme : « Ondes électroma-


gnétiques dans le vide » et « Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques
dans les plasmas et les conducteurs » sont intégrés dans la septième partie du livre
qui traite de la Physique des ondes.

205
206
207

[ÉLECTROMAGNÉTISME 1]

LES ÉQUATIONS DE MAXWELL


1. CHARGE ET COURANT ÉLECTRIQUES
1.1 Charge
Charge ponctuelle
Considérons un système Σ qui possède une charge électrique totale q non nulle.
Pour le calcul du champ électrique que crée Σ en un point M situé à une distance
grande devant la taille de Σ, l’approximation consistant à considérer Σ comme un point
est excellente. Ce modèle de charge ponctuelle q est souvent utilisé pour les particules
chargées (protons, électrons, ions). Nous verrons d’autre part que si Σ possède la sy-
métrie sphérique de centre O, le champ qu’il crée hors de ses frontières est le même
que celui créé par une charge q placée au point O.

Charge volumique
L’échelle mésoscopique est intermédiaire entre l’échelle microscopique et ma-
croscopique (une discussion complète est menée dans le chapitre sur la statique des
fluides). Considérons un volume mésoscopique de matière chargée autour d’un point
M (noté d3V car il est très petit à l’échelle macroscopique), contenant une charge
d3q . On introduit la densité volumique de charges ρ(M , t ) en M à l’instant t, comme le
d3q
rapport ρ = 3
en coulomb par mètre-cube ( C ⋅ m-3 ). Pour une meilleure lisibilité, on
dV
notera souvent ρ au lieu de ρ(M , t ) . Il en sera de même par la suite pour toutes les
densités qui interviendront.
d3N
On définit également la densité volumique n = de particules portant la
d3V
charge q, en m-3 , où d3N est le nombre de ces charges dans le volume d3V . On a
en conséquence d3q = q ⋅ d3N = nqd3V  ρ = nq . S’il existe plusieurs types de parti-
cules chargées (des ions Fe3 + et des ions Cl− par exemple), de densité ni , et portant
une charge qi , la densité volumique de charges s’écrit ρ =  ni qi .
i
Charge surfacique
Dans certains cas, le volume qui contient les charges possède une épaisseur ε
très faible devant ses deux autres dimensions (comme par exemple une feuille de

207
208 Partie IV.  Électromagnétisme

papier). En un point dont la distance à cette répartition de charges est grande devant
ε, cette dernière est vue comme une répartition surfacique. On introduit dans ce cas
un modèle où la distribution de charges est une surface, en faisant tendre ε vers 0.

Ainsi, la charge d2q = ρεd2 S , qui se trouve en réalité dans un volume εd2 S ,
s’écrit d2q = σd2 S , avec σ = lim (ρε ) densité surfacique de charges (en C ⋅ m-2 ).
ε→ 0
σ étant finie, on en déduit que ρ → ∞ dans cette modélisation.
ε→0

Charge linéique
C’est le cas où le volume qui porte les charges est un fil de longueur L et de
rayon r << L . En un point dont la distance à cette répartition de charges est grande
devant r, cette dernière est vue comme une répartition linéique. On introduit dans ce
cas un modèle où la distribution est une courbe, en faisant tendre la surface S = πr 2
vers 0.

Ainsi, la charge dq = ρS dℓ , qui se trouve en réalité dans un volume S dℓ ,


s’écrit dq = λdℓ , avec λ = lim (ρS ) densité linéique de charges (en C ⋅ m-1 ). λ étant
S →0
finie, on en déduit que ρ → ∞ dans cette modélisation.
S →0

1.2 Courant
Courant volumique
Prenons tout d’abord le cas où
il n’y a qu’un seul type de particules
chargées qui se déplacent par rapport
au référentiel d’étude R .
On considère une surface élé-
mentaire d2 S autour d’un point M,
s’appuyant sur un contour orienté.
Soit δ3q la charge qui traverse pendant dt la surface d2 S , dans le sens du

208
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 209

G
vecteur d2 S qui se déduit de celui du contour grâce à la règle du tire-bouchon. Cette
charge est algébrique : positive si une charge positive traverse d2 S dans le sens po-
sitif, ou bien si une charge négative traverse dans le sens opposé ; négative dans les
autres cas.
G G
Soit v = v (M , t ) la vitesse par rapport à R des particules chargées au point M
et à l’instant t (c’est la vitesse d’ensemble de ces particules : moyenne à t dans un
volume mésoscopique autour du point M).
Les particules qui traversent d2 S pendant dt proviennent d’un cylindre dont la
G
génératrice est parallèle à v , de longueur vdt selon cette génératrice, et dont la base
G G
est d2 S . Si on note θ = (d2 S ,v ) , la hauteur du cylindre est vdt cos θ , et son volume
G G
vaut d3V = vdt cos θ d2 S = v ⋅ d2 S dt .
On en conclut que la charge δ3q qui traverse d2 S pendant dt vaut :
G G
δ3q = ρmv ⋅ d2 S dt , avec ρm = ρm (M , t ) densité volumique de charges mobiles (les
charges fixes par rapport à R ne traversent pas d2 S ).
G G
On définit le vecteur densité volumique de courants J = ρmv ( A ⋅ m-2 ).

Ce vecteur permet de calculer le débit de charges qui est par définition l’inten-
sité d i du courant traversant d2 S :
2

δ3 q G 2 G
d2i = = J ⋅ d S , en ampère A ( 1 A = 1 C ⋅ s-1 ).
dt
L’intensité du courant traversant une surface S finie, orientée grâce à la règle
du tire-bouchon en fonction de l’orientation du contour sur lequel elle s’appuie, est
δq G G
donc le flux du vecteur densité de courants à travers S : i =
dt 
= J ⋅ d2 S (A).
S

209
210 Partie IV.  Électromagnétisme

Dans le cas où il existe plusieurs types de particules chargées mobiles, de


� �
charge volumique ρmi = ρmi (M , t ) , et de vitesse d’ensemble v i = v i (M , t ) , le vecteur
densité volumique de courants s’écrit :
� � �
J=  ρmi v i = 
ni qi v i .
i i

Courant surfacique (complément hors-programme)


Lorsque le volume qui contient les courants possède une épaisseur ε très faible
devant ses deux autres dimensions, on introduit un modèle de distribution surfacique
de courants en faisant tendre ε vers 0.

� � � � � �
Ainsi, l’intensité di = J ⋅ dS = J ⋅ εdℓN = ρmv εdℓN du courant qui traverse en

réalité une surface εdℓ autour du point M ( N est un vecteur unitaire normal à la
� � �
surface traversée), s’écrit di = J S ⋅ dℓN , où J S est la densité surfacique de courants
(en A ⋅ m-1). Comme σm = lim (ρmε ) est la densité surfacique de charges mobiles, on
ε→0
� �
a J S = σmv , vecteur tangent par construction à la surface qui porte les courants.

1.3 Conservation de la charge à 1D


Commençons par faire un
bilan de charge dans un cas
simple où les charges se dépla-
cent selon l’axe Ox, les grandeurs
ne dépendant spatialement que
� �
de la coordonnée x : charge volumique ρ( x, t ) , vitesse v ( x, t ) = v ( x, t )ex , densité volu-
� �
mique de courants J ( x, t ) = ρm ( x, t )v ( x, t ) .
Le système Σ étudié est un cylindre de section S , situé entre les abscisses x et
x + dx , fixe par rapport au référentiel d’étude R : c’est un système ouvert, traversé
par des charges mobiles. À la date t, sa charge vaut dq(t ) = ρ( x, t ) S dx ; à la date
t + dt , elle vaut dq(t + dt ) = ρ( x, t + dt ) S dx . Cette charge subit donc, pendant une du-
rée infinitésimale dt, une variation :
∂ρ
d2q = dq(t + dt ) − dq(t ) = [ ρ( x, t + dt ) − ρ( x, t )] S dx =
S dxdt .
∂t
On note δq x = J ( x, t ) S dt la charge qui traverse la section S à l’abscisse x
pendant la durée dt, orientée dans le sens des x croissants.

210
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 211

Le bilan de charge pour le système Σ pendant dt s’écrit :


∂J
d2q = δq x − δq x + dx = [ J ( x, t ) − J ( x + dx, t )] S dt , soit d2q = − S dxdt .
∂x
On obtient ainsi un bilan local de charge à 1D qui traduit le fait que la variation
∂ρ ∂J
de charge n’est due qu’aux échanges, donc que la charge se conserve : + = 0.
∂t ∂x

1.4 Conservation de la charge à 3D


Le bilan local d’une grandeur extensive quelconque a été établi dans le chapitre
sur les champs et les opérateurs différentiels.
∂ρq G
Si la grandeur est la charge, ce bilan est + divJq = σq , mais on note ρ et
∂t
G G G
pas ρq la densité volumique de charges, J = ρmv et pas Jq la densité volumique de
courants, et le taux de production volumique est nul puisque la charge est une gran-
deur conservative : σq = 0 .

∂ρ G
L’équation locale de conservation de la charge s’écrit + divJ = 0 .
∂t
G G ∂ρ ∂J
On retrouve le cas 1D si J = J ( x, t )ex : + = 0.
∂t ∂x

2. ÉQUATIONS DE MAXWELL / PREMIÈRES


PROPRIÉTÉS
2.1 Les équations
Entre 1864 et 1865, Maxwell a établi un système de quatre équations régissant
le champ électromagnétique et permettant de rendre compte des phénomènes élec-
tromagnétiques connus à l’époque :
G
divB = 0 équation de Maxwell - Thomson (M.T)
 G
 → G ∂B
 rot E = − équation de Maxwell - Faraday (M.F)
∂t
 G
divE = ρ équation de Maxwell - Gauss (M.G)
 ε0
 G G
 → G G ∂E  G 1 ∂E
 rot B = µ0 J + ε0  = µ0 J + 2 équation de Maxwell - Ampère (M.A)
  ∂t  c ∂t

Ces équations sont valables quel que soit le milieu.

211
212 Partie IV.  Électromagnétisme

ε0 ≃ 8,85 ⋅ 10−12 F ⋅ m-1 est la permittivité du vide (ou constante électrique), ex-
primée en farad par mètre ; µ0 ≃ 1,26 ⋅ 10−6 H ⋅ m-1 est la perméabilité du vide (ou cons-
tante magnétique), exprimée en henry par mètre.
Ces deux constantes sont liées à la célérité c de la lumière dans le vide :
1
2
ε0µ0 c = 1 ⇔ c = , avec c = 299 792458 m ⋅ s-1 , valeur fixée par la définition du
ε0 µ0
mètre. Pour les calculs avec trois chiffres significatifs, on peut retenir :
1
c ≃ 3,00 ⋅ 108 m ⋅ s-1 µ0 ≃ 4π ⋅ 10−7 H ⋅ m-1 ε0 ≃ F ⋅ m-1 .
36 ⋅ π ⋅ 109
Les équations de Maxwell sont écrites pour des distributions volumiques de

charges et de courants, de densités ρ et J . Comme les densités volumique ρ(M , t ) et
� � �
J (M, t ) , les champs E (M, t ) et B(M, t ) sont des champs moyennés (ou nivelés) dans
un volume mésoscopique autour du point M.

2.2 Les différents régimes étudiés


Caractérisons le champ électromagnétique par son domaine spectral :

Régime stationnaire

À une fréquence nulle ( f = 0 ⇔ = 0 ), le champ électromagnétique est sta-
∂t

divB = 0 (M.T)

 → � �
 rot E = 0 (M.F)
tionnaire. Les équations de Maxwell se simplifient :  � ρ . On cons-
divE = ε (M.G)
 0
 → � �
 rot B = µ0J (M.A)
� �
tate que le couplage entre E et B disparaît.
� �
Les champs stationnaires E (M ) et B(M ) sont indépendants.

 → � �
�  rot E = 0 (M.F)
E (M ) est régi par  � ρ .
divE = (M.G)
 ε0

212
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 213

Si l’espace entier est vide de charge ( ρ(M ) = 0 ∀M ), on peut montrer que la


solution de ce système d’équations est la solution nulle.

Les sources du champ électrique stationnaire sont les charges.



� divB = 0 (M.T)

B(M ) est régi par  → � � .
 rot B = µ0 J (M.A)

Si l’espace entier est vide de courant ( J (M ) = 0 ∀M ), on peut montrer que la
solution de ce système d’équations est la solution nulle.

Les sources du champ magnétique stationnaire sont les courants.

A.R.Q.S : Approximation des Régimes Quasi-Stationnaires


Cette approximation sera détaillée dans le chapitre sur l’électromagnétisme
dans l’A.R.Q.S. Selon qu’on impose des courants ou des charges, on peut, à des fré-
quences suffisamment faibles (inférieures à une valeur caractéristique f0 ), écrire selon
� �
∂E � ∂B �
les cas : ≃ 0 (A.R.Q.S magnétique), ou ≃ 0 (A.R.Q.S électrique)
∂t ∂t
Propagation des ondes électromagnétiques
Lorsque la fréquence est trop grande, aucune approximation ne peut être faite,
� �
et on garde les équations complètes. E (M, t ) et B(M, t ) sont couplés : on parle de
� �
champ électromagnétique ( E, B ), et c’est ce couplage qui est à l’origine du phénomène
de propagation des ondes électromagnétiques.

2.3 Linéarité des équations de Maxwell


→ ∂
Tous les opérateurs (div, rot , ) sont linéaires. Les équations de Maxwell
∂t
sont donc linéaires, ce qui signifie qu’en régime quelconque, on peut appliquer le théo-
rème de superposition :
� � �
Si une première distribution de charges et de courants (ρ1, J1) crée (E1, B1) , et qu’une
� � �
deuxième distribution (ρ2 , J2 ) crée (E2 , B2 ) , alors, quels que soient les réels λ1 et
� � � � � �
λ 2 , la distribution (λ1ρ1 + λ 2ρ2 , λ1J1 + λ 2J2 ) crée (λ1E1 + λ 2E2 , λ1B1 + λ 2B2 ) .

Cependant, si les charges et les courants sont sources de champ électroma-


gnétique, elles sont également soumises à une force de la part de ce dernier (force de
Lorentz). Il en résulte que la densité de charges et de courants est fonction du champ
� � � � � � � �
électromagnétique ( E, B ) : ρ = ρ(E, B ) et J = J (E, B ) .

213
214 Partie IV.  Électromagnétisme

Dans un milieu linéaire, ces fonctions


sont linéaires (par exemple, nous verrons
que dans un conducteur ohmique, on a
� �
ρ = 0 et J = γE ). Le système bouclé consti-
tué par l’ensemble {charges et courants,
champ électromagnétique} est alors linéaire.
Il ne l’est plus si l’une des deux relations
� � � � � �
ρ = ρ(E, B ) et J = J (E, B ) n’est plus linéaire.

2.4 Courant de déplacement et conservation de la charge


Prenons la divergence de l’équation de Maxwell-Ampère :

 → �   � ∂(divE ) 
div  rot B  = µ0  divJ + ε0  . On peut en effet permuter les dérivations tempo-
   ∂t 
 → � 
relles et spatiales d’après le théorème de Schwarz. Comme div  rot B  = 0 et que
 
� ρ ∂ρ �
divE = (équation de Maxwell-Gauss), on obtient + divJ = 0 .
ε0 ∂t

∂ρ �
L’équation locale de conservation de la charge + divJ = 0 est contenue dans
∂t
les équations de Maxwell.

À l’époque de Maxwell, on ne savait pas réaliser des circuits électriques oscil-


lant à une fréquence suffisante pour générer des ondes électromagnétiques détec-
tables : on était cantonné au domaine de l’A.R.Q.S magnétique ( f < f0 ) dans lequel
→ � �
l’équation de Maxwell-Ampère s’écrit rot B = µ0 J . Maxwell a introduit dans cette

� ∂E
équation le terme Jd = ε0 : « courant de déplacement », homogène à une densité
∂t
volumique de courants, afin que son système d’équations soit compatible avec la con-
servation de la charge. Il en a déduit que le champ électromagnétique vérifie dans le
vide (en combinant les 4 équations, ce que nous ferons dans le chapitre sur les ondes
� �
électromagnétiques dans le vide), une équation de propagation : le champ (E, B ) se
propage à la célérité c = 1/ ε0µ0 ≃ 3 ⋅ 108 m ⋅ s-1 .
Ce qui restait une prédiction fut vérifié par les expériences de Hertz sur les
ondes radio, neuf ans après la mort de Maxwell, survenue en 1879. D’autre part, cons-
tatant la proximité de la valeur c trouvée avec les valeurs obtenues expérimentalement
pour la vitesse de la lumière dans le vide, Maxwell en tira la conclusion que la lumière
est une onde électromagnétique, ce que les expériences confirmèrent là encore.

214
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 215

3. CONDUCTION ÉLECTRIQUE EN RÉGIME


STATIONNAIRE DANS UN CONDUCTEUR
OHMIQUE
3.1 Conservation de I le long d’un tube de courant en régime stationnaire
∂ρ G
En régime stationnaire l’équation locale + divJ = 0 qui traduit la conserva-
∂t
tion de la charge devient :
G G G G
 J ⋅ d S
2
divJ = 0 ⇔ J est à flux conservatif ⇔ I = , intensité du courant électrique,
S
G
se conserve le long d’un tube du champ J , appelé tube de courant.

On a donc I1 = I2 = I , où I1 et I2 sont les intensités des courants à travers deux


sections quelconques S1 et S 2 du tube de courant. On retrouve ce résultat en raison-
nant sur le système Σ : portion du tube de courant comprise entre S1 et S 2 . Le cou-
G G
rant à travers la surface latérale de Σ est nul ( J ⊥ d2 S lat. ), donc Σ a reçu pendant dt la
charge δq1 = I1dt à travers S1 , et a perdu la charge δq2 = I2dt à travers S 2 . En ré-
gime stationnaire, la charge qΣ de Σ est constante, donc δq2 = δq1  I2 = I1 = I .
En présence d’une bifurcation, on obtient I = I1 + I2 . La loi des nœuds est une
conséquence directe de la conservation de la charge.

3.2 Conducteur ohmique


Un conducteur contient des charges mobiles qui
se mettent en mouvement en présence d’un champ élec-
G G
trique. Le champ E est source de J . Pour des conduc-
teurs L.H.I (Linéaires, Homogènes et Isotropes), la rela-
G G
tion entre J et E est une relation de proportionnalité :
G G
J = γE , avec γ uniforme dans le matériau. En effet :

215
216 Partie IV.  Électromagnétisme

 J x   γ xx γ xy γ xz   E x 
     
— Dans un milieu linéaire, la relation est linéaire :  J y  =  γ yx γ yy γ yz  ⋅  Ey  , si on
     
NJ z   γ zx γ zy γ zz   Ez 
G  N G
J [γ] E
G G G
projette les vecteurs sur une base orthonormée cartésienne ( ex , ey , ez ).

— Dans un milieu homogène, les coefficients de la matrice [ γ ] sont indépendants du


point.
— Dans un milieu isotrope, il n’y a pas de direction privilégiée. [ γ ] est diagonale et ses
 γ 0 0
 
trois éléments diagonaux (valeurs propres) sont identiques : [ γ ] =  0 γ 0  .
0 0 γ 
 
G G
On a bien J = γE .

De tels conducteurs électriques L.H.I sont des conducteurs ohmiques. La rela-


G G
tion J = γE est appelée loi d’Ohm locale, et le coefficient γ > 0 est appelé conductivité
électrique du matériau, en siemens par mètre ( S ⋅ m-1 ).

La loi d’Ohm locale est bien vérifiée dans les métaux et les électrolytes (solu-
tions ioniques) qui sont donc des conducteurs ohmiques.
Un conducteur parfait correspond à la limite γ → ∞ (le moindre champ élec-
trique crée des courants). Les valeurs numériques sont de l’ordre de 106 à 108 S ⋅ m-1
pour les matériaux dits « conducteurs de l’électricité ». Un isolant parfait correspond à
la limite γ → 0 (aucun courant n’apparaît, même en présence de forts champs élec-
triques). Les valeurs numériques pour γ sont de l’ordre de 10 −20 à 10 −8 S ⋅ m-1 pour
les matériaux dits « isolants ». En réalité, un matériau isolant, soumis à un champ
électrique trop intense, finit par s’ioniser et donc se met à conduire soudainement.
Pour de l’air sec à température et pression ambiantes, le champ disruptif à partir du-
quel il devient conducteur est Edisruptif = 3,6 ⋅ 106 V ⋅ m-1 . Pour un matériau semi-con-

ducteur, γ est de l’ordre de 10 −7 à 105 S ⋅ m-1 .

3.3 Le modèle de Drude


Modèle classique de Drude
Drude a élaboré en 1900 un modèle classique de la conduction électrique dans
les métaux :
— Le métal est constitué d’un réseau de cations, chaque atome ayant perdu un ou
plusieurs électrons.
— Ces électrons ont la particularité de pouvoir se déplacer à l’échelle mésoscopique :

216
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 217

ce sont des électrons libres contrairement aux électrons de valence qui assurent les
liaisons entre les atomes du métal, et qui restent localisés au voisinage de ces liaisons.
Les électrons libres forment un gaz parfait : ils ne subissent aucune action de la part
des autres charges du métal, hors collisions avec les noyaux atomiques.
— Soit Σ le système constitué à la date t par un vo-
lume mésoscopique de métal autour d’un point M. Ce
système contient N électrons libres de vitesses indivi-
G
duelles v ei , avec i ∈ a1, N b , et de masse m.
Entre deux chocs, ces électrons sont unique-
ment soumis à l’action d’un champ électrique exté-
G
rieur E , supposé pour le moment stationnaire et uni-
forme. Le i ème électron a subi son dernier choc avec
G G
dv
le réseau à t = t i < t . En lui appliquant le P.F.D : m ei = −eE dans le référentiel du
dt
G
G eE G
laboratoire supposé galiléen, on obtient v ei (t ) = − (t − t i ) + v ei ( t = t i ) .
m
La moyenne d’ensemble de la vitesse des électrons dans Σ est :
G
G G 1 N G G 1 N
 
eE
v = ve = v ei = − t − t i + v ei (t = ti ) . Le terme t − t i = (t − t i ) = τ est la durée
N i =1 m N i =1
G G
moyenne qui s’est écoulée depuis le dernier choc, et v ei (t = ti ) = 0 est la vitesse
moyenne des électrons juste après leur dernier choc, nulle puisqu’il y a isotropie de la
G eτ G
répartition des vecteurs vitesses après un choc. On obtient donc v = − E , où τ est
m
la durée moyenne entre deux chocs.
Si le champ électrique est nul, les vitesses individuelles des électrons libres ne
sont pas nulles, mais elles sont réparties aléatoirement du fait de l’agitation thermique,
G G G G
sans direction privilégiée (isotropie du matériau) : v = 0 . En revanche, si E ≠ 0 , une
G G
force électrique s’applique sur les électrons libres, et alors v ≠ 0 .

On arrive à la même conclusion en supposant que tous les électrons libres pos-
G
sèdent la même vitesse v , l’effet moyen des chocs étant pris en compte via une force
G G
de frottement −mv / τ linéaire en v . Le P.F.D appliqué à un électron libre fournit :

217
218 Partie IV.  Électromagnétisme

G G t
dv v e G G eτ G G − τ
+ = − E , qui s’intègre en v (t ) = − E + Ae . Après un régime transitoire de
dt τ m m
G eτ G
durée caractéristique τ, les électrons libres acquièrent une vitesse v = − E coli-
m
G
néaire à E .
Les cations étant immobiles, seuls les électrons libres participent à la conduc-
tion électrique, et si on note n leur densité (nombre d’électrons libres par unité de vo-
G G ne 2 τ G G
lume), la charge mobile volumique vaut ρm = n( −e ) , et J = ρmv = E = γE .
m
Le modèle de Drude a le mérite de rendre compte de la loi d’Ohm locale dans
les métaux et les électrolytes et d’aboutir au résultat correct pour la conductivité :
ne 2 τ
γ= . On peut en déduire la valeur de τ dans les métaux, en faisant l’application
m
numérique dans le cas du cuivre, dont on donne la masse volumique :
µ = 8,96 ⋅ 103 kg ⋅ m-3 , la masse molaire MCu = 63,5 ⋅ 10−3 kg ⋅ mol-1 et la conductivité
électrique γ = 5,96 ⋅ 107 S ⋅ m-1 . Les atomes de Cu perdent en moyenne un électron :
on a même densité n en cations qu’en électrons, le métal étant globalement neutre.
La masse volumique du cuivre est égale à la densité en atomes de cuivre multipliée
M
par la masse d’un atome : µ = n Cu , où N A = 6,02 ⋅ 1023 mol-1 est la constante
NA
µN A 8,96 ⋅ 103 × 6,02 ⋅ 1023
d’Avogadro. On a n = = = 8,49 ⋅ 1028 m-3 . On en déduit :
MCu 63,5 ⋅ 10−3
mγ 9,11⋅ 10−31 × 5,96 ⋅ 107
τ= = = 2,50 ⋅ 10−14 s . La durée du régime transitoire
ne2 8,49 ⋅ 1028 × (1,60 ⋅ 10−19 )2
G eτ G
(durée moyenne entre deux chocs) est très courte. La relation v = − E reste valable
m
même si le champ électrique varie dans le temps, du moment que ce champ varie sur
des durées caractéristiques très supérieures à τ. Ce sera bien vérifié pour des champs
variant avec une période T >> τ .
G G
La loi d’Ohm J = γE est valable pour les matériaux bons conducteurs pour des
fréquences inférieures à 1012 Hz , soit sur un grand domaine du spectre électroma-
gnétique.

Remarquons que si l’on cherche des solutions pour la vitesse des électrons
libres en régime sinusoïdal forcé de pulsation ω, on peut utiliser la notation complexe :
G G G G
v = v 0ei ( ωt +ϕ) , le champ électrique étant E = E0ei ωt . L’équation différentielle linéaire
G G
G dv v e G G −eτ / m G G eτ G
régissant v est + = − E v = E . On retrouve que v = − E , et donc
dt τ m 1 + i ωτ m

218
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 219

� ne 2 τ � �
J= E = γ 0 E , pour ω << 1/ τ (l’accélération de l’électron est alors négligeable de-
m
vant eE / m ). En revanche, à des fréquences plus grandes, la conductivité est com-
� � ne 2 τ / m γ0
plexe : J = γE , avec γ = = .
1 + i ωτ 1 + i ωτ
Limites du modèle et résultats de mécanique quantique (complément hors-
programme)
Dans le modèle du gaz parfait d’électrons libres, on calcule la vitesse thermique
définie par v th = kBT / m , avec kB = 1,38 ⋅ 10−23 J ⋅ K -1 , constante de Boltzmann. On

1,38 ⋅ 10 −23 × 300


a v th = = 6,7 ⋅ 10 4 m ⋅ s-1 à 300 K. On peut ainsi calculer la longueur
9,11⋅ 10 −31
h 6,63 ⋅ 10−34
d’onde de de Broglie d’un électron libre λ = = ≃ 1,1⋅ 10−8 m .
mv th 9,1⋅ 10−31 × 6,7 ⋅ 104
Cette longueur d’onde n’est pas très petite devant la distance entre deux atomes, de
l’ordre de 10−10 m , mais au contraire supérieure à cette distance : l’étude rigoureuse
de la conduction dans un solide relève de la mécanique quantique. La distribution
statistique des vitesses utilisée pour obtenir v th = kBT / m est une distribution
classique (de Maxwell-Boltzmann), mais la « bonne » distribution est celle de Fermi-
Dirac, qui permet d’établir que les électrons possèdent une vitesse « de Fermi » de
norme v F indépendante de la température, égale à 1,6 ⋅ 106 m ⋅ s-1 pour du cuivre.
Imaginons les atomes placés aux nœuds d’un réseau d’abord extrêmement peu
dense. La distance d entre deux atomes voisins tendant vers l’infini, les atomes
seraient isolés, tous avec les mêmes niveaux d’énergies électroniques discrets.
Lorsqu’on diminue d, les atomes interagissent, ce qui se traduit par l’apparition de
nouveaux niveaux d’énergie. Lorsque d est égale à la valeur réelle dcristal pour le
cristal considéré (quelques 10−10 m , un solide cristallin se caractérisant par sa très
grande densité d’atomes), les niveaux d’énergie électroniques sont répartis de façon
quasi continue dans des bandes, séparées par des bandes « interdites ».
Le niveau de fermi EF est un niveau énergétique qu’on peut considérer comme
indépendant de la température, et qui est tel qu’à T = 0 K , seuls les états d’énergie
E < EF sont peuplés. On peut dès lors distinguer conducteurs, isolants, et semi-
conducteurs :
— Dans un isolant et un semi-conducteur, le niveau de Fermi se trouve dans une
bande interdite. La bande au-dessus de EF , appelée bande de conduction (BC), est
vide, alors que la bande au-dessous de EF , appelée bande de valence (BV), est
complètement remplie. Comme il n’y a pas d’électrons de conduction, ces matériaux
ne conduisent pas à T = 0 K . La différence entre isolant et semi-conducteur est
l’énergie à franchir pour passer du haut de la bande de valence au bas de la bande de
conduction. Cette énergie Eg , appelée gap (« saut »), est faible pour un semi-
conducteur comme le silicium ( Eg = 1,1 V ), alors qu’elle est beaucoup plus grande pour
un isolant comme le diamant ( Eg = 5,0 V ). Ainsi, l’agitation thermique permet à des

219
220 Partie IV.  Électromagnétisme

électrons d’un semi-conducteur d’accéder à la bande de conduction. Ils se déplacent


alors, sous l’action d’un champ électrique, dans le sens opposé à ce champ. Les
« trous » laissés dans la bande de valence peuvent être occupés par des électrons de
valence : ces trous, qui portent une charge +e , se déplacent dans le sens du champ

E . Un semi-conducteur conduit l’électricité à température ambiante, et d’autant mieux
que la température est grande, car la bande de conduction est alors plus peuplée (la
résistance d’un semi-conducteur varie en eT0 /T , où T0 > 0 est homogène à une
température). Pour un isolant, le gap est trop grand : il ne conduit pas à 300 K.
— Dans un conducteur, le niveau de Fermi se trouve dans une bande autorisée, qui
n’est donc pas pleine (c’est à la fois une bande de valence et de conduction), ce qui
permet au matériau de conduire à 0 K. Contrairement à un semi-conducteur, la
résistance augmente avec la température : R varie en αT + β , avec α > 0 . En effet, la
densité électronique reste constante, mais la fréquence des collisions entre les
électrons et les défauts du réseau augmente avec la température.

Le libre parcours moyen ℓ des électrons de conduction est la distance moyenne


parcourue entre deux chocs. Comme leur vitesse individuelle est la vitesse de Fermi
vF = 1,6 ⋅ 106 m ⋅ s-1 et la durée moyenne entre deux chocs est τ = 2,50 ⋅ 10−14 s , on a
ℓ = vF τ = 4,0 ⋅ 10−8 m , conforme à l’expérience, mais bien supérieure à ce que
donnerait la théorie classique : ℓ = v thτ = 1,7 ⋅ 10−9 m .

Si E (M ) n’est pas uniforme, mais varie sur une longueur caractéristique δ, la loi
d’Ohm reste valable si δ >> ℓ = 4,0 ⋅ 10−8 m , car alors l’électron rencontre un champ
uniforme entre deux chocs.
En réalité, les chocs ont lieu entre les électrons libres et les défauts cristallins
du réseau (par exemple la présence d’impuretés, d’atomes en surnombre, de lacunes,
de discontinuité de structure…), pas entre les électrons et les atomes du réseau : la
conductivité devient très grande dans un monocristal très pur.

3.4 Résistance d’un conducteur ohmique filiforme / Loi d’Ohm


Considérons un conducteur rec-
tiligne : c’est un cylindre de génératrice
Ox, délimité par deux sections droites.
On note ℓ la longueur du cylindre et

220
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 221

S la surface d’une section droite. Les courants sont supposés unidirectionnels : les
� � � �
charges se déplacent uniquement selon Ox : J = J x ( x ) ex  E = Ex ( x ) ex .
→ � �
En régime stationnaire, l’équation de Maxwell-Faraday rot E = 0 montre qu’il
�  →
existe un potentiel électrique M ֏ V (M ) tel que E = − gradV . Les deux sections

droites étant orthogonales à E , elles sont équipotentielles. On note respectivement V1
et V2 leur potentiel.
L’intensité I se conservant le long du tube de courant que constitue le conduc-
� � I

teur, on a I = γ E ⋅ d2 S = γE x ( x ) S  E x =
γS
à travers une section droite x = Cte
S
� I �
quelconque, donc le champ électrique est uniforme : E = ex .
γS
M2
� → Iℓ
On en tire V1 − V2 =  E ⋅ d OM = γS .
M1


La résistance du conducteur filiforme (de section constante) vaut R = , et
γS
V1 − V2 = RI = RI1→ 2 . La loi d’Ohm est une conséquence de la loi d’Ohm locale.
Une résistance électrique (Ω) est homogène à l’inverse du produit de γ par une
longueur.

On a en conséquence choisi pour l’unité de γ le siemens ( 1 S = 1 Ω -1 ) par


mètre.
Les valeurs usuelles des résistances des conducteurs ohmiques utilisés en T.P
vont du Ω au MΩ.

Effectuons une application numérique pour un fil de cuivre de conductivité


γ = 5,96 ⋅ 107 S ⋅ m-1 , de longueur ℓ = 1 m et de section S = 2,5 mm2 . On obtient :
1
R= ≃ 6,7 m Ω , valeur négligeable devant les résistances usuelle-
5,96 ⋅ 107 ⋅ 2,5 ⋅ 10 −6
ment utilisées en T.P.

3.5 Effet thermique du courant électrique : loi de Joule locale


La puissance reçue par un électron libre de la part du champ électrique est :
� �
pe = −eE ⋅ v . Comme il y a d3N = n d3V électrons dans le volume d3V , la puissance,
notée d3P en régime stationnaire, reçue par un volume d3V de conducteur est :
� � � � � �
d3P = −neE ⋅ v d3V = ρmv ⋅ E d3V = J ⋅ E d3V = γE 2d3V ≥ 0 . Le conducteur ne peut
que recevoir de la puissance, il est à tout instant récepteur, jamais générateur.

221
222 Partie IV.  Électromagnétisme

La puissance volumique reçue par les charges mobiles du conducteur ohmique


3
d P � �
est 3 = J ⋅ E = γE 2 ≥ 0 (loi de Joule locale).
dV

La puissance reçue s’obtient par intégration sur le volume V = ℓ ⋅ S du con-


1 I2 ℓ 2
ducteur. Elle vaut P =  γE 2d3V =
γS 2
⋅V =
γS
I = RI 2 .
V

On retrouve l’expression P = RI 2 vue dans le cours d’électrocinétique.



dv
Aux fréquences pour lesquelles la loi d’Ohm s’applique, m est négligeable
dt
� � �
devant les normes des forces Fe = −eE et −mv / τ , qui se compensent donc : la puis-
sance électrique reçue par un électron libre est intégralement transmise au réseau
cristallin lors des chocs. C’est l’effet Joule.
Le premier principe de la thermodynamique appliqué au conducteur d’énergie
interne U fournit dU = Ri 2dt + δQ .
En régime stationnaire thermique, dU = 0  δQ = −Ri 2dt < 0 : le conducteur
fournit un transfert thermique à l’extérieur par effet Joule.
Si le conducteur est calorifugé, δQ = 0  dU = Ri 2dt > 0 : l’effet Joule se tra-
duit par l’augmentation de l’énergie interne du système, donc par une élévation de sa
température.
Les constantes de temps thermiques étant beaucoup plus grandes que les
constantes de temps électriques, le conducteur peut ne pas être en régime stationnaire
thermique alors que les courants sont, eux, indépendants du temps.

4. FORCE DE LAPLACE SUR UN CONDUCTEUR /


EFFET HALL

Nous allons maintenant étudier l’action d’un champ magnétique B sur un con-
ducteur ohmique en régime stationnaire.

4.1 Force de Laplace volumique



En régime stationnaire, divJ = 0 . Dans le cas d’un conducteur ohmique,
� � � � �
J = γE , ce qui implique div(γE ) = γdivE = 0 , soit divE = 0 . L’équation de Maxwell-
� ρ
Gauss divE = permet de montrer qu’en régime stationnaire, il n’y a pas de charges
ε0
volumiques dans le conducteur ohmique : ρ = 0 .
Lorsqu’un conducteur parcouru par des courants est plongé dans un champ
� �
électromagnétique (E, B ) , il subit une force qui résulte de la force de Lorentz :

222
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 223

G G G G
Fk = qk (E + v k ∧ B ) , s’exerçant sur les charges du conducteur, de type « k » : fixes ou
mobiles, par rapport au conducteur.
G G
Nous placerons notre étude dans le référentiel du laboratoire : v k = v k / R labo est
la vitesse moyenne des charges de type « k » du conducteur par rapport à R labo .
Pour donner plus de généralité à notre étude, nous envisageons le cas où le
conducteur est en mouvement par rapport à R labo .
Décomposons le conducteur en éléments mésoscopiques de volumes d3V :
G
un élément donné autour du point M possède une vitesse v e par rapport à R labo .
On définit le référentiel
R cond (référentiel « tangent »), lié
à cet élément de conducteur, en
translation par rapport à R labo
G
avec la vitesse d’entraînement v e .
La loi de composition des vi-
G G G
tesses donne v k = v k / R cond + v e .
— Les charges fixes du conducteur (les cations du réseau métallique), qui ont une
G G
densité volumique ρ f , possèdent par rapport à R labo une vitesse v f = v e .
— Les charges mobiles du conducteur (les électrons de conduction), qui ont une den-
G
sité volumique ρm , possèdent par rapport à R cond une vitesse v , et par rapport à
G G G
R labo une vitesse v m = v + v e .
G G
S’il règne un champ électromagnétique ( E, B ) au point M, les charges de l’élé-
ment de conducteur sont soumises aux forces de Lorentz, de résultante :
G G G G G G G
d3FL = d3V ρm (E + v m ∧ B ) + ρf (E + v f ∧ B ) , or, en régime stationnaire, la densité vo-
lumique de charges du conducteur est nulle : ρ = ρm + ρ f = 0 (en réalité, elle ne l’est
G G G
plus tout à fait, car on n’a plus rigoureusement J = γE de par la présence de B , mais
les écarts à la neutralité sont insignifiants).
La force de Laplace sur l’élément de volume d3V du conducteur autour du

G  G G G G G G G
point M se réduit donc à d3FL = d3V (ρm + ρf )(E + v e ∧ B ) + ρmv ∧ B  , or J = ρmv est
 
 0 
la densité volumique de courants dans le référentiel du conducteur :

L’expression de la force de Laplace par unité de volume que subit un conducteur,


éventuellement en mouvement par rapport à R labo , plongé dans un champ magné-
G
d3F G G
tique, est 3 L = J ∧ B .
dV

223
224 Partie IV.  Électromagnétisme

� �
Le flux de J = ρmv à travers une section du conducteur permet de calculer l’in-
tensité I du courant traversant cette section dans le référentiel du conducteur.

4.2 Force de Laplace sur un conducteur filiforme


Un conducteur filiforme
possède une faible section S ,
ce qui permet de considérer
� �
que J = ρmv est uniforme sur
une section : dans le référen-
tiel du conducteur, le courant
I traversant cette section vaut
� �
I = J ⋅ S . Dans ce cas, la force de Laplace sur un élément de conducteur de longueur
� � � � � �
dℓ s’écrit dFL = J ∧ B dV , soit dFL = J S dℓ ∧ B .
� � � � � � �
En orientant I, S et d ℓ dans le même sens, on a dFL = (J ⋅ S )d ℓ ∧ B soit :
� � �
dFL = I d ℓ ∧ B , force de Laplace sur un élément de conducteur filiforme.

Cette expression est fondamentale pour calculer la résultante des forces s’exer-
çant sur un conducteur filiforme plongé dans un champ magnétique.

4.3 Effet Hall


On note n la densité volumique d’électrons libres d’un conducteur, qui, en pra-
tique, est découpé sous forme d’un ruban de longueur ℓ parallèle à l’axe Ox, de section
rectangulaire de largeur L parallèle à Oy, et d’épaisseur d parallèle à Oz.
Un générateur de courant impose le courant continu i = i0 > 0 dans le ruban ;
le flux d’électrons correspondant est parallèle à Ox. On place l’échantillon dans un
� �
champ magnétique constant uniforme : B = Bez .

224
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 225

En régime transitoire, les électrons, qui rentrent par la face arrière située dans
� �
le plan x = ℓ , subissent la force magnétique −ev ∧ B qui les dévie vers la face située
dans le plan y = 0 . Les charges négatives s’accumulent sur cette face ainsi que des
charges positives sur la face opposée, qui présente un déficit en électrons. Il en résulte
� �
un champ électrique de Hall EH = EHey , avec EH < 0 .
En régime permanent, les électrons adoptent une trajectoire rectiligne parallèle
� � �
à Ox, imposée par le générateur : v = v 0 = −v 0ex , avec v 0 > 0 , car la force due à l’ac-
� � � � �
tion du champ EH compense la force magnétique : −eEH − ev 0 ∧ B = 0 .
� � � �
On en déduit EH = −v 0 ∧ B = −v 0Bey .
� � �
Le courant i 0 est le flux du vecteur densité de courant J = −nev 0 = nev 0ex à
travers une section droite de surface S = Ld :
� � � � i0
 
i0 = J ⋅ d2 S = nev 0ex ⋅ d2 S ex = nev 0 S  v 0 =
neLd
.
S S
i 0B
On a donc EH = − , et une différence de potentiel :
neLd
y =0
� → i B
UH = V ( y = L ) − V ( y = 0) : UH =  EH ⋅ d OM = −LEH , d’où UH = 0 .
ned
y =L

Prenons ℓ = 20 mm , L = 1 mm , d = 0,2 mm , et i0 = 10 mA , grandeurs fré-


quemment rencontrées dans les sondes à effet Hall dont le but est de mesurer le
champ magnétique B.
Avec un champ B = 0,1 T , on obtient, pour un conducteur comme le cuivre
( n = 8,5 ⋅ 1028 m-3 ), une tension Hall UH de l’ordre de 4 ⋅ 10 −10 V , inversement pro-
portionnelle à n, beaucoup trop faible pour être mesurée.
On utilise donc en pratique des semi-conducteurs comme le germanium Ge
dans lequel on introduit des impuretés en très faible concentration, par exemple de
l’antimoine Sb. La conductivité électrique du germanium augmente fortement : on ob-
tient un semi-conducteur dopé Ge/Sb, dont les propriétés électriques dépendent du
nombre n d’atomes Sb introduits par unité de volume, et de la température T.
Dans Ge/Sb, à température ambiante, chaque atome Sb libère un électron dans
le réseau cristallin. La conductivité électrique vaut γ = 82,0 S ⋅ m-1 pour un échantillon
dans lequel n = 1,60 ⋅ 1021 m-3 . La masse molaire de Ge étant M = 72,6 g ⋅ mol-1 et sa
masse volumique µ = 5,32 ⋅ 103 kg ⋅ m-3 , le nombre n′ d’atomes de germanium par
unité de volume (on suppose n′ >> n ) est n′ = µN A / M = 4,41⋅ 1028 m-3 . L’hypothèse
n′ >> n est largement confirmée puisqu’il y a n′ / n = 2,76 ⋅ 107 atomes de germanium
pour un atome d’antimoine.

225
226 Partie IV.  Électromagnétisme


D’autre part τ = = 1,82 ⋅ 10−12 s : l’établissement du régime permanent est
ne 2
très rapide.
Avec cette valeur de n, beaucoup plus faible que pour un conducteur, on obtient
UH = 19,5 mV . Cette valeur est suffisamment grande pour pouvoir être mesurée avec
précision, et permet, après étalonnage, la mesure de champs magnétiques par simple
lecture de la tension UH sur un voltmètre.

En fait, on ne mesure que la composante de B selon Oz, et il faut déplacer la
sonde dans trois directions orthogonales pour connaître toutes ses composantes.

Le modèle présenté donne ici les bons ordres de grandeur, mais une description
plus réaliste de l’effet Hall fait appel à la mécanique quantique.
� � �
Remarquons que la force magnétique Fm = qv0 ∧ B , qui ne s’exerce que sur les
charges mobiles du conducteur, est compensée, en régime stationnaire, par la force
� � � �
de Hall FH = qEH = −qv 0 ∧ B qu’exerce sur elles l’ensemble du conducteur. En vertu
du principe des actions réciproques, les charges mobiles exercent sur le conducteur
� � �
la force −FH = qv0 ∧ B . Pour les cations du réseau cristallin, immobiles, cette force
n’est pas compensée. Finalement, la force magnétique s’exerce indirectement sur le
réseau : il s’agit de la force de Laplace.
� �
Pour un élément de conducteur de longueur d ℓ = dℓex , les charges mobiles se
trouvent dans un volume dV = S dℓ , et cette force est bien :
� � � � � � � � � � �
dFL = dqv 0 ∧ B = ρm S dℓ v 0 ∧ B = S dℓJ ∧ B = J S d ℓ ∧ B = i0d ℓ ∧ B , puisque la den-
� � � �
sité volumique de courants est J = ρmv 0 = −nev 0 = Jex , et que l’intensité i 0 du cou-
� � � � �
rant, orienté dans le sens de ex , est égale à J ⋅ S = Jex ⋅ S ex = J S .

5. THÉORÈME DE POYNTING, ÉNERGIE ET


PUISSANCE ÉLECTROMAGNÉTIQUES
5.1 Localisation de l’énergie dans le champ électromagnétique
Considérons une sonde qui envoie une impulsion
électromagnétique de courte durée vers la Terre.
La vitesse de propagation des ondes électromagné-
tiques étant finie, l’émetteur a cessé d’émettre alors que le
récepteur n’a pas encore commencé à recevoir l’impulsion.
L’espace étant vide entre la sonde et la Terre, l’énergie qu’a fourni l’émetteur
n’est pas stockée par de la matière.
� �
L’énergie est donc localisée dans le champ (E, B ) même.

226
Chapitre 1.  Les équations de Maxwell 227

5.2 Interaction entre le champ électromagnétique et la matière : force de


Lorentz
Nous avons vu que les charges et les courants sont sources de champ électro-
G G
magnétique. Inversement, la champ (E , B ) agit sur les charges via la force de Lorentz.

Dans un référentiel d’étude R que nous supposerons être celui du laboratoire,


G
une particule ponctuelle de charge q, placée en M, et animée d’une vitesse v , subit la
G G G G G G G G
force de Lorentz F = q(E + v ∧ B ) , où E = E (M , t ) et B = B(M, t ) sont les champs ins-
tantanés en M.
G G G
On note Fm = qv ∧ B la force magnétique. La puissance
G G G
( )
pm = qv ∧ B ⋅ v = 0 de cette force est nulle, si bien que :
 G
⊥v

La puissance de la force de Lorentz que reçoit une particule chargée est égale à la
G G G G
puissance pe = qE ⋅ v de la force électrique Fe = qE .

Le champ électromagnétique connaît d’énormes fluctuations spatiales à


l’échelle des particules chargées microscopiques (électrons, ions…). Nous admettrons
que tout se passe comme si une particule donnée était soumise au champ moyen des
autres particules (champ nivelé spatialement dans un volume mésoscopique).

5.3 Puissance cédée par le champ électromagnétique aux porteurs de charge


Considérons une distribution volumique de courants. Dans le cas où il existe
plusieurs types de particules chargées mobiles, de densité volumique de charges
G G
ρmi = ρmi (M, t ) et de vitesse v i = v i (M, t ) , la puissance reçue par un élément de vo-
G G
lume d3V de la part du champ E = E (M , t ) vaut :
G G d3 p  G G G G
d3 p =  (ρmi d3V E ⋅ v i ) , soit 3 = 
dV 
 ρmi v i  ⋅ E . Or J =  ρmi v i :
i d3qi i  i

G G
La puissance volumique reçue par les charges de la part du champ (E , B ) vaut
d3 p G G
3
= J ⋅ E (en W ⋅ m-3 ).
dV

Cette puissance instantanée est algébrique : positive si les charges reçoivent


G G
de la puissance de la part du champ (E , B ) , comme c’est le cas pour une antenne
réceptrice, négative si les charges en mouvement émettent un rayonnement électro-
magnétique comme pour une antenne émettrice.

227
228 Partie IV.  Électromagnétisme

5.4 Théorème de Poynting


G
Sommons le produit scalaire de l’équation de Maxwell-Faraday par B / µ0 et
G
celui de l’équation de Maxwell-Ampère par −E / µ0 :
G G G G G G
 → G  B  → G   E  ∂B B G ∂E   E 
 rot E  ⋅ +  rot B  ⋅  −  = −
 
⋅ + µ 0  J + ε0  ⋅− 
  µ0    µ0  ∂t µ0  ∂t   µ0 
G → G G → G
B ⋅ rot E − E ⋅ rot B ∂  B 2 ε0E 2  G G
 =−  +  − J ⋅E .
µ0 ∂t  2µ0 2 
G → G G → G G G
Comme B ⋅ rot E − E ⋅ rot B = div E ∧ B  , on a finalement :
G G
∂  ε0E 2 B 2  E ∧ B  G G G G
 +  + div   = −J ⋅ E . Le terme −J ⋅ E est l’énergie électromagné-
∂t  2 2µ0  µ
 0 
tique volumique produite par les charges (et non pas reçue par les charges, à cause
du signe moins) par unité de temps (car c’est une puissance volumique). On reconnaît
∂ρU G
un bilan local d’énergie électromagnétique U : + divJU = σU , mais on utilise
∂t
d’autres notations : u et non pas ρU pour la densité volumique d’énergie électroma-
G G
gnétique, SP et non pas JU pour le vecteur densité volumique de courants d’énergie
électromagnétique.

ε0 E 2 B 2
u= + est la densité volumique d’énergie électromagnétique (en
2 2µ0
ε0 E 2
J ⋅ m-3 ), somme de l’énergie électrique volumique ue = et de l’énergie magné-
2
B2
tique volumique um = . L’énergie électromagnétique contenue dans un volume fini
2µ0
 ε0E 2 B 2  3
V s’obtient par intégration : U =  
 2
+ d V .
2µ0 
V
G G
G E ∧B
SP = est le vecteur de Poynting (vecteur densité volumique de courants
µ0
d’énergie électromagnétique, en W ⋅ m-2 ). Son flux à travers une surface S orientée
δU G G
donne la puissance instantanée algébrique p =
dt 
= SP ⋅ d2 S qui traverse cette
S
surface.
∂u G G G
Le bilan local d’énergie est + divSP = −J ⋅ E (théorème de Poynting).
∂t

228
229

[ÉLECTROMAGNÉTISME 2]

ÉLECTROSTATIQUE
1. PROPRIÉTÉS DU CHAMP ÉLECTROSTATIQUE
1.1 Équations locales / Potentiel électrique
� �
En régime stationnaire, les champs E (M ) et B(M ) sont indépendants.

 → � �
�  rot E = 0 M.F
E (M ) est régi par deux équations :  � ρ .
divE = M.G
 ε0

Le champ E stationnaire est donc irrotationnel. En conséquence :

� →
Il existe un champ de scalaire M ֏ V (M ) tel que E = − gradV . V est appelé potentiel
électrique.
� ρ  →  ρ
De divE = on tire l’équation locale −div gradV  = −∆V = :
ε0   ε 0

ρ
L’équation ∆V + = 0 qui régit V(M) est appelée équation de Poisson.
ε0

Sa résolution est souvent plus facile que celle des équations locales régissant

E (M ) , car V est un scalaire (une seule équation scalaire à résoudre).

1.2 Équations intégrales / Théorème de Gauss


→ � �
La formulation intégrale de rot E = 0 est la suivante :
Le champ électrique stationnaire est à circulation conservative :
M2
� → � →
� 
E ⋅ d OM = 0 ⇔ E ⋅ d OM = V (M1) − V (M 2 ) .
γ M1

� ρ �
La formulation intégrale de divE = s’obtient en calculant le flux de E à tra-
ε0
vers une surface fermée S entourant un volume V :

229
230 Partie IV.  Électromagnétisme

� � �
 E ⋅ d S
� 
2
= divE d3V , d’après le théorème de Green-Ostrogradski.
S V dans S
En utilisant l’équation de Maxwell-Gauss, on obtient :
� 2 � ρ 3 d3q q

� E ⋅d S = 
ε0
dV = 
ε0
= int , car ρd3V
ε0
est la charge d3q
S V dans S V dans S
3
contenue dans le volume d V . Finalement :

� � qint �
 E ⋅ d S

2
= : Le flux de E à travers une surface fermée est égal à la charge
ε0
S
intérieure à cette surface, qint , divisée par ε0 (théorème de Gauss).

Rappelons que les vecteurs surface élémentaires sont orientés de l’intérieur


vers l’extérieur pour une surface fermée.

1.3 Unités et ordres de grandeur


Le potentiel V s’exprime en volt (V). Pour une ligne à très haute tension, la dif-
férence de potentiel efficace entre deux fils vaut ∆V = 400 000 V .

E s’exprime à l’aide d’une unité dérivée, le V ⋅ m -1 .
Les charges présentes dans l’atmosphère créent à la surface de la Terre, même
par beau temps, un champ électrique dont la norme est de l’ordre de 100 V ⋅ m-1 .
On considère qu’un champ électrique résiduel, dans une zone éloignée de

toutes sources électromagnétiques, est E ≃ 10 V ⋅ m-1 .
résiduel

Pour une particule élémentaire chargée, le poids sera toujours négligeable de-
vant la force électrique.

En effet, dans le référentiel du laboratoire ( g ≃ 10 m ⋅ s-2 ), le poids d’un « gros »


ion contenant une centaine de nucléons ( mnucléon ≃ 10−27 kg ) est de l’ordre de
mg ≃ 100 × 10−27 × 10 ≃ 10 −24 N .
Même si cet ion ne possède qu’une charge élémentaire e ≃ 10−19 C , il est sou-
mis à une force électrique au moins de l’ordre de eE ≃ 10−19 × 10 ≃ 10−18 N >> mg .

230
Chapitre 2.  Électrostatique 231

1.4 Calcul du champ électrique et du potentiel électrique créés par des dis-
tributions de charges fixes
G
Le théorème de Gauss permet d’obtenir l’expression du champ E créé par une
particule ponctuelle de charge q, placée en un point fixe P du référentiel du laboratoire.
Comme il n’y a pas de direction privilégiée, le potentiel V(M) ne dépend que de
la distance r de P à M, et pas des autres coordonnées sphériques permettant de re-
pérer M dans un repère centré sur P. Le champ électrique, qui se déduit de V(r) par la
G → dV G G
relation E = − gradV = − er = Er (r )er , est ici radial et ne dépend que de r.
dr

G
Le flux de E à travers une sphère S de centre P et de rayon r vaut :
G G G G

w E ⋅ d2 S = 
w
Er (r )er ⋅ d2 S er = 
w 
w
Er (r )d2 S = Er (r ) d2 S = Er (r ) S = 4πr 2Er (r ) .
S S S S
On peut en effet « sortir » Er ( r ) de l’intégrale car il est le même en tout point de la
surface de la sphère de rayon r.
Quel que soit r > 0 , la sphère contient la charge qint = q .
G
On déduit l’expression de E (M ) du théorème de Gauss :

G q G q G
E (M ) = 2
er = 2
eP →M , champ électrique créé en M par la charge ponc-
4πε0r 4πε0PM
tuelle q placée en P.

La deuxième expression est intrinsèque : elle est valable quel que soit le sys-
tème de coordonnées choisi.
Une charge q1 en P1 crée donc en un point P2 un champ :
G q1 G G G
E1(P2 ) = 2
eP1 →P2 . Notons e1→ 2 le vecteur unitaire eP1 →P2 dirigé de P1 vers
4πε0P1P2
P2 , et r la distance P1P2 .
Une charge ponctuelle q2 en P2 subit donc une force à distance de la part de

231
232 Partie IV.  Électromagnétisme

G G qq G
la charge q1 : F1/2 = q2E1(P2 ) = 1 2 2 e1→ 2 . On retrouve la loi de Coulomb énoncée
4πε0 r
en 1795 suite aux mesures qu’il avait réalisées avec une balance de torsion : loi d’in-
teraction attractive (entre charges de signes opposés) ou répulsive (entre charges de
même signe), proportionnelle à q1q2 et à 1/ r 2 , et portée par la droite qui relie les deux
charges.
Le potentiel créé par une charge ponctuelle s’obtient par intégration :
dV q q
− =  V (r ) = + Cte .
dr 4πε0r 2 4πε0r

On adopte la convention suivante pour la détermination de la constante : le po-


tentiel est nul à l’infini, soit V → 0 .
r →∞

Cette convention n’a de sens que si la distribution D de charges est localisée,


c’est-à-dire si toutes ses charges sont à une distance finie les unes des autres (D est
contenue dans une sphère de rayon fini). Finalement :

q q
V (M ) = = est le potentiel électrique créé en M par la charge ponctuelle
4πε0r 4πε0PM
q placée en P.

Dans le cas de plusieurs charges, les équations de Maxwell étant linéaires, il


G
suffit pour obtenir E (M ) (dans tous les cas) et V (M ) (seulement si D est localisée) de
sommer les champs créés en M par chacune des charges. Pour une distribution volu-
mique D, on se ramène à des distributions de charges ponctuelles en découpant D en
volumes élémentaires :
G
nature de D expression de E (M ) expression de V(M)
charges ponctuelles

q G q
 4πε Pi M 2 eP →M i  4πε0iPi M
i 0 i i

charges volumiques

ρ(P )d3V G ρ(P )d3V


 4πε0PM 2 eP →M  4πε0PM
P ∈D P ∈D

232
Chapitre 2.  Électrostatique 233

1.5 Continuité / discontinuité des champs


On peut montrer que le champ électrique est continu dans le cas d’une distribu-
G → G
tion volumique. Comme E = − gradV , V est obtenu par intégration spatiale de E . On
G G
peut donc imposer que V soit continu en tout point où E est fini, même si E est dis-
continu en ce point.
Les résultats sont rassemblés dans le tableau ci-dessous.
G
distribution D E V
2 ∞ sur D ; ∝ 1/ r au voisinage
ponctuelle ∞ sur D ; ∝ 1/ r au voisinage
de D de D
volumique continu continu

1.6 Caractère polaire du champ électrique


G q G
Le sens du champ E = 2
eP →M créé en M par une charge ponctuelle q
4πε0PM
en P est indépendant de la règle d’orientation choisie pour l’espace.

Le sens du champ électrique ne dépend pas de l’orientation de l’espace. On dit


G
que E est un vecteur polaire.
G G
La force F = qE qui s’exerce sur une charge q est bien sûr également un vec-
teur polaire (le sens d’une force ne peut pas dépendre de l’orientation de l’espace).

1.7 Symétries
G
Les symétries de E sont celles de tout champ vectoriel polaire.
Soit une distribution de charges D. Il faut distinguer :
— La recherche de plans de symétrie ou d’antisymétrie de D passant par un point M
G
donné (ce qui permet de montrer que certaines composantes de E sur une base lo-
cale en M, judicieusement choisie, sont nulles).
G
— La recherche des invariances de D (ce qui permet de montrer que E est indépen-
dant de certaines coordonnées de M).

Symétrie plane / antisymétrie plane


Un plan π′ est un plan de symétrie de D si les charges, en deux points P et P ′
symétriques par rapport à π′ , sont identiques.

Si M appartient à π′ plan de symétrie de la distribution de charges D, alors


G
E (M ) appartient à π′ .

233
234 Partie IV.  Électromagnétisme

Cette propriété est due au fait que les composantes normales à π′ des champs
créés en M par q située en P, et par q située en P ′ , symétrique de P par rapport à
π′ , se compensent.

Un plan π′′ est un plan d’antisymétrie de D si les charges, en deux points P et


P ′′ symétriques par rapport à π′′ , sont opposées.

Si M appartient à π′′ , plan d’antisymétrie de la distribution de charges D, alors


G
E (M ) est orthogonal à π′′ .

Cette propriété est due au fait que les composantes tangentes à π′′ des champs
créés en M par q située en P, et par −q située en P ′′ symétrique de P par rapport à
π′′ , se compensent.

Invariance des distributions


Si D est invariante par une isométrie I (translation, rotation, symétrie plane) et
G G
M ′ = I (M ) , alors E (M ′) = I E (M ) et V (M ′) = V (M ) .

G
— Si une translation T de vecteur u laisse invariante D (qui doit donc être de taille
infinie), on doit avoir le même champ en M qu’au point M ′ qui se déduit de M par la
translation T.

234
Chapitre 2.  Électrostatique 235

G G
Si la propriété est vraie pour u = zez avec z quelconque (toute translation selon
G G
ez laisse D invariante) alors E est indépendant de z.
G
— Si une rotation R d’angle θ et d’axe Oz laisse invariante D, le champ E (M ′) au
G
point M ′ qui se déduit de M par R, se déduit de E (M ) par la rotation R.
Si la propriété est vraie pour tout angle θ (toute rotation autour de Oz laisse D
G
invariante), E est indépendant de θ .

— Si une symétrie S ′ par rapport à un plan π′ laisse invariante D, le champ au point


M ′ , qui se déduit de M par S ′ , est le symétrique par rapport à π′ de celui en M.

Si π′′ est un plan d’antisymétrie de la distribution de charges D.


Si M ′′ = S ′′(M ) , où S ′′ est la symétrie plane par rapport à π′′ , alors :
G G
E (M ′′) = −S ′′ E (M ) , et V (M ′′) = −V (M ) en prenant V = 0 sur π′′ .

On peut illustrer certaines de ces propriétés de symétrie par l’exemple d’un dou-
blet de charges opposées.
Le plan yOz (ou tout plan contenant Oz) est un plan π′ de symétrie de D, alors
que le plan xOy (plan médiateur des charges) est un plan π′′ d’antisymétrie de D.

235
236 Partie IV.  Électromagnétisme

En un point de l’axe Oz portant les deux charges, le champ doit être contenu
dans tous les plans de symétrie passant par ce point, donc dans tout plan contenant
G
Oz : le champ est porté par ez .
G
En un point du plan xOy, le champ est normal à ce plan, donc porté par ez .
G
Le plan de la figure ( y = 0 ) est un plan de symétrie, donc il contient E :
G G G E ( − x, z ) = −E x ( x, z ) E ( x, −z ) = −E x ( x, z )
E ( x, z ) = E x ( x, z )ex + Ez ( x, z )ez , avec  x et  x .
Ez ( − x, z ) = Ez ( x, z ) Ez ( x, −z ) = Ez ( x, z )

1.8 Énergie d’une distribution de charges


Particule de charge q placée dans un champ électrique extérieur stationnaire
G G → →
La force électrique s’écrit F = qE = −q gradV = − grad(qV ) . Il s’agit donc d’une
G →
force conservative qui s’écrit F = − grad(Ep ) . On aurait également pu calculer le travail
G G →
élémentaire de F : δW = qE ⋅ d OM = −qdV = −d(qV ) = −dEp .

L’énergie potentielle électrostatique d’une charge vaut Ep = qV .

Prenons l’exemple d’une particule de masse


m et de charge q, accélérée sous la différence de
potentiel U = V1 − V2 . On se place dans le référen-
tiel du laboratoire supposé galiléen et on suppose

236
Chapitre 2.  Électrostatique 237

que la particule est initialement au repos au point M1 porté au potentiel V1 .


Le poids de la particule étant négligeable devant la force électrique, cette der-
nière est la seule force qui s’exerce sur la particule. Or cette force est conservative,
donc l’énergie mécanique de la particule se conserve :
Em = Ec + Ep = Cte  Ec (M2 ) + Ep (M2 ) = Ec (M1) + Ep (M1) .

0
Ainsi, à son arrivée au point M 2 porté au potentiel V2 , la particule possède une
1 2qU
vitesse v 2 telle que mv 22 = q(V1 − V2 )  v 2 = .
2 m

L’énergie acquise par un électron ( q = −e ) accéléré sous une différence de po-


tentiel de 1 volt ( U = −1 V ), est à l’origine de l’unité « électron-volt » (eV) qui vaut
1,6 ⋅ 10−19 J .

Cas d’une distribution de charges


On dispose d’une relation permettant de calculer cette énergie, vue dans le cha-
ε0E 2 3
pitre sur les équations de Maxwell : Ue =  2
d V . C’est l’énergie contenue
espace

dans le champ électrique créé par la distribution D. La somme porte sur le domaine où
G
E est non nul, donc a priori sur tout l’espace.

2. CALCULS DE CHAMP ÉLECTROSTATIQUE AVEC


LE THÉORÈME DE GAUSS
2.1 Méthode
La méthode préconisée par le programme pour calculer un champ électrique
stationnaire consiste à appliquer le théorème de Gauss. Cette méthode est beaucoup
plus simple que celle consistant à résoudre les équations locales (Maxwell-Faraday et
G
Maxwell-Gauss) régissant E .
Cependant, le calcul littéral ne peut être effectué que lorsque la distribution de
charges D possède de « hautes » symétries. Nous allons préciser ce point.
G
Pour calculer E par application du théorème de Gauss, il faut :

(i) Choisir un système de coordonnées (cartésiennes, cylindriques ou sphériques) pour


repérer un point M quelconque, adapté à la géométrie de D afin d’analyser les symé-
G G
tries et de simplifier l’expression de E . Il s’agit de trouver les composantes de E qui
G
sont nulles dans la base locale en M, ainsi que les coordonnées de M dont E ne dé-
pend pas.

237
238 Partie IV.  Électromagnétisme

G
(ii) Dans le cas où D possède de hautes symétries, c’est-à-dire si la direction de E est
G
connue en tout point M, alors E peut être calculé par application du théorème de
G G q
Gauss 
w E ⋅ d2 S = int . On prendra si possible, pour la surface fermée S passant
ε0
S
G
par M, une surface équipotentielle, car alors E est orthogonal à S , donc colinéaire à
G
d2 S , ce qui simplifie le calcul du flux.

Remarquons qu’on n’utilise en apparence que le théorème de Gauss, qui est la


G
version intégrale de l’équation de Maxwell-Gauss, alors que E est également régi par
G
l’équation de Maxwell-Faraday. En réalité, les symétries de E découlent de ces deux
G
équations locales. On pourra d’ailleurs constater que le champ E , simplifié dans le
→ G G
cas des hautes symétries, vérifie rot E = 0 .

2.2 Sphère chargée uniformément 


On note σ la charge surfacique uniforme d’une
sphère de centre O et de rayon R. Elle porte donc la
charge σ 4πR 2 .

(i) On choisit de repérer un point M par ses coordon-


nées sphériques ( r , θ, ϕ) . Tout plan contenant la droite
(OM) est un plan de symétrie de la distribution de
G G G
charges D, donc le champ E (M ) appartient à tous ces plans : E (M ) = Er (r , θ, ϕ)er .
D’autre part, D est invariante par toute rotation autour de O (tout axe passant
par O est un axe de symétrie de révolution), donc Er est indépendant de θ et de ϕ.
G G
Finalement, E (M ) = Er (r )er : les lignes de champ sont des droites passant par
O, et les équipotentielles des sphères de centre O. On remarque, en utilisant l’expres-
 → G G G
sion de rot E en coordonnées sphériques, avec E (M ) = Er (r )er , qu’on a bien :

→ G G
rot E = 0 .
G
(ii) On calcule le flux de E à travers une sphère de centre O et de rayon r :
G G G G

w E ⋅ d2 S = 
wEr (r )er ⋅ d2 S er = 
w
Er (r )d2 S
S S S

 d S
w
2
= Er ( r ) = Er (r ) S = 4πr 2Er (r ) .
S
Il reste à calculer qint , la charge intérieure à la surface S .
— Si r < R , il n’y a aucune charge à l’intérieur de S puisque la surface chargée est à
l’extérieur de la sphère de rayon r : qint = 0 .

238
Chapitre 2.  Électrostatique 239

— Si r > R , S entoure toute la charge de D : qint = σ4πR 2 .


Finalement, par application du théorème de Gauss :
G G
Eint = 0 pour r < R

G σ R2 G .
Eext = 2
er pour r > R
 ε0 r

2.3 Boule chargée uniformément


On note ρ la charge volumique uniforme d’une boule de centre O et de rayon
4
R. Elle contient donc la charge ρ πR 3 .
3
Comme dans la sous-section précédente, le champ électrique est de la forme
G G
E (M ) = Er (r )er , et son flux à travers une sphère S de centre O et de rayon r est :
G G

w E ⋅ d2 S = 4πr 2Er (r ) .
S
Il reste à calculer qint , la charge intérieure à la surface S .
4
— Si r < R : qint = ρ πr 3 .
3
4
— Si r > R , S entoure toute la charge de D : qint = ρ πR 3 .
3
Finalement, par application du théorème de Gauss :
G ρ G
Eint = 3ε r er pour r < R
 0
G 3
.
E = ρ R eG pour r > R
 ext 3ε r 2 r
 0
G → dV G G
On déduit de E = − gradV = − er = Er (r )er l’expression du potentiel à l’exté-
dr
ρ R3
rieur de la sphère : Vext (r ) = N . La constante est nulle car on a V r →
+ Cte 0, D
3ε 0 r 0 →∞

étant localisée.
ρ 2
À l’intérieur de la sphère, Vint (r ) = − r + K . On détermine la constante K par
6ε 0
 ρ 2 2
Vint = 6ε (3R − r ) pour r < R
ρ 2  0
continuité du potentiel en r = R : K = R :  3
.
2ε0 V = ρ R pour r > R
 ext 3ε r
 0
ρ 2
Le potentiel à la surface de la boule de rayon R vaut V (R ) = R .
3ε 0

239
240 Partie IV.  Électromagnétisme

2.4 Application au calcul de l’énergie de constitution d’un noyau atomique


Le noyau atomique est constitué de Z protons de charge + e et de A − Z neu-
trons. Les protons se repoussant, la cohésion du noyau s’explique grâce à l’interaction
forte (ou plutôt : force nucléaire), de très courte portée ( 10−15 m ), qui compense les
interactions électrostatiques répulsives.
Sans ces forces nucléaires, l’énergie du noyau se-
rait supérieure à l’énergie de ses constituants immobiles
dispersés à l’infini les uns des autres. En réalité, elle est
inférieure car l’énergie de liaison El (qui lie les protons)
est supérieure à l’énergie de constitution Ec . Nous allons,
à l’aide d’un modèle de noyau sphérique de centre O,
possédant une charge volumique uniforme, calculer l’énergie de constitution qu’il faut
fournir pour constituer le noyau à partir de ses constituants dispersés à une distance
infinie de O.
Pour cela, formons progressivement la boule de charge Q = Ze en ajoutant une
couche de rayon dr à la boule de rayon r. Il faut transférer la charge dq = ρ4πr 2dr de
r ′ → ∞ , où le potentiel est nul, à r ′ = r , où le potentiel est celui à la surface d’une boule
ρ 2
de rayon r. Ce potentiel V (r ) = r a été calculé à la sous-section précédente.
3 ε0
ρ 2
L’énergie à fournir est donc dEc = dq [V (r ′ = r ) − V (r ′ → ∞ )] = ρ4πr 2dr ⋅ r .
3ε 0
R
4πρ2 4πρ2R 5
Pour former la boule de rayon R, il faut fournir Ec =
3ε 0  r 4 dr =
15ε0
,
r =0

3Q 3Q 2 3Z 2e2
avec ρ = , d’où Ec = = .
4πR 3 20πε0R 20πε0R
Le rayon atomique suit approximativement la loi R = R0 A1/3 où A est le nombre

de nucléons (nombre de masse), avec R0 = 1,4 ⋅ 10−15 m . Dans le cas de 56


26 Fe (le plus

stable des noyaux atomiques), on a A = 56 et Z = 26 . On en déduit R = 5,4 ⋅ 10−15 m


3 × 262 × (1,6 ⋅ 10−19 )2
et Ec = = 1,7 ⋅ 10−11 J = 109 MeV soit 1,9 MeV par nu-
20π × 8,85 ⋅ 10−12 × 5,4 ⋅ 10−15
cléon, à comparer à la valeur de l’énergie de liaison par nucléon qui vaut 8,8 MeV.
Selon le principe d’équivalence masse – énergie d’Einstein, l’énergie de liaison
correspond à un défaut de masse du noyau par rapport à la somme des masses de
ses nucléons : El = Zmp + ( A − Z )mn − m  c 2 , où m, mp et mn sont respectivement
les masses du noyau, du proton et du neutron, et c la célérité de la lumière.
Si on trace (courbe d’Aston) l’énergie de liaison par nucléon en fonction du
nombre de nucléons du noyau, on constate que les noyaux pour lesquels A < 56

240
Chapitre 2.  Électrostatique 241

tendent à se stabiliser par fusion nucléaire avec un autre noyau léger, comme celle
entre le deutérium D ( 21H ) et le tritium T ( 31H ) : 21H + 31H → 42He + 01n . Au contraire, les
noyaux pour lesquels A > 56 tendent à se stabiliser par fission, comme l’uranium 238 :
238 234 4
92 U → 90Th + 2 He .

2.5 Cylindre infini à section circulaire chargé uniformément en volume 


On note ρ la charge volumique uniforme d’un cylindre d’axe Oz et de rayon R.
Une longueur h de cylindre porte donc la charge ρπR 2h .

(i) On choisit de repérer un point M


par ses coordonnées cylindrique
(r , θ, z ) .
Le plan contenant M et l’axe
Oz est un plan de symétrie de la dis-
G
tribution de charges D, donc E (M )
appartient à ce plan : Eθ = 0 .
Le plan contenant M et ortho-
gonal à l’axe Oz est aussi un plan de
G
symétrie de D, donc le champ E (M )
G G
appartient à ce plan : Ez = 0 . On a donc E (M ) = Er (r , θ, z )er .
D’autre part, D est invariante par toute rotation autour de Oz et par toute tran-
slation selon Oz, donc Er est indépendant de θ et de z. Il en est de même pour le
potentiel V qui ne dépend que de r : les équipotentielles sont des cylindres infinis d’axe
Oz.

241
242 Partie IV.  Électromagnétisme

G G → G
Finalement E (M ) = Er (r )er . On remarque, en utilisant l’expression de rot E
→ G G G G
en coordonnées cylindriques, qu’on a bien rot E = 0 si E (M ) = Er (r )er .
(ii) La surface équipotentielle passant par M n’étant pas fermée, on n’utilise qu’une
longueur arbitraire h de ce cylindre de rayon r et de surface latérale Slat .
On obtient une surface fermée S = S1 ∪ S2 ∪ Slat en lui ajoutant deux sections
droites S1 et S2 (dans des plans z = Cte ) :

G
En tout point de S1 ou S2 le vecteur surface élémentaire d2 S est porté par
G G G G
ez , alors que E est porté par er , donc les flux de E à travers S1 et S2 sont nuls :
G G G G

w 
E ⋅ d2 S = Er (r )er ⋅ d2 Slat er . Comme r est constant sur la surface latérale :
S Slat
G G
 E ⋅ d S =  Er (r )d Slat
w  d Slat
2 2 2
= Er ( r ) = Er (r ) Slat = Er (r )2πrh .
S Slat Slat

Il reste à calculer qint , la charge intérieure à S .

— Si r < R , tout le volume intérieur à S est chargé uniformément : qint = ρπr 2h .

— Si r > R , S entoure toute la charge que porte D sur la longueur h : qint = ρπR 2h .
Finalement, par application du théorème de Gauss :
 G ρ G
Eint = 2ε r er pour r < R
 0
G .
E = ρ R2 G
e pour r > R
 ext 2ε r r
 0

3. CONDENSATEUR PLAN / CAPACITÉ


3.1 Champ électrostatique créé par un plan infini chargé uniformément
Le plan z = 0 est chargé avec une charge surfacique σ uniforme.
(i) Le plan parallèle à yOz passant par M est un plan de symétrie de la distribution de

242
Chapitre 2.  Électrostatique 243

G
charges D, donc le champ E (M ) appartient à ce plan : E x = 0 . Le plan parallèle à zOx
G
passant par M est aussi un plan de symétrie de D, donc le champ E (M ) appartient à
G G
ce plan : Ey = 0 . On a donc E (M ) = Ez ( x, y , z )ez .

D’autre part, D est invariante par toute translation selon Ox et Oy, donc Ez est
indépendant de x et de y. Il en est de même pour le potentiel V qui ne dépend que de
z : les équipotentielles sont des plans d’équation z = Cte .
G G → G
Finalement E (M ) = Ez ( z )ez . On remarque, en utilisant l’expression de rot E
→ G G G G
en coordonnées cartésiennes, qu’on a bien rot E = 0 si E (M ) = Ez ( z )ez .

(ii) La surface équipotentielle passant par M n’étant pas fermée, on n’en utilise qu’une
portion Sz contenant le point M de cote z > 0 .
On obtient une surface fermée S = S z ∪ S − z ∪ Slat en lui ajoutant la surface
S− z , symétrique de Sz par rapport au plan z = 0 , et la surface latérale Slat obtenue
en translatant parallèlement à Oz le contour γ sur lequel s’appuie Sz .

243
244 Partie IV.  Électromagnétisme

Au point M ′ symétrique de M par rapport au plan z = 0 , qui est un plan de sy-


G G
métrie de D, le champ E (M ′) est symétrique de E (M ) , soit ici son opposé :
G G
E (M ′) = −Ez ( z )ez . On a donc E z ( − z ) = −Ez ( z ) : la fonction Ez ( z ) est impaire.
En deux points symétriques par rapport au plan z = 0 , respectivement sur Sz
et S− z , les vecteurs surfaces (orientés de l’intérieur vers l’extérieur de S ) sont oppo-
sés, ainsi que les champs électriques, donc les flux à travers Sz et S− z sont égaux.
G G
En tout point de Slat le vecteur surface élémentaire d2 Slat est orthogonal à ez
G
donc au champ en ce point : le flux de E à travers Slat est nul.
Finalement, comme z est constant sur la surface Sz :
G 2 G G G

w  
E ⋅ d S = 2 Ez ( z )ez ⋅ d2 Sz ez = 2 Ez ( z )d2 Sz = 2Ez ( z ) Sz .
S Sz Sz

La charge intérieure à S se trouve sur la portion de surface Sz du plan chargé,


donc qint = σS z .
Par application du théorème de Gauss :
G σ G G σ G
E= ez pour z > 0 et E = − ez pour z < 0 .
2ε0 2ε0
Le champ électrique est uniforme dans chaque
demi-espace, mais on constate que la modélisation surfa-
cique pour la distribution de charges fait apparaître une dis-
G
continuité du champ E à la traversée de cette surface :
G G σ G
E ( x, y , z = 0+ ) − E ( x, y , z = 0− ) = ez .
ε0

3.2 Condensateur plan


Un condensateur plan est constitué par
deux conducteurs identiques séparés par du
vide. Ce sont des plaques circulaires de rayon R
et de même axe Oz. Les faces des conducteurs
en regard (« armatures ») sont distantes de e ;
leur surface est S = πR 2 . Elles se trouvent dans
les plans z = 0 et z = e , et sont portées aux po-
V ( z = 0) = V1
tentiels  .
V ( z = e) = V2
G
Nous allons négliger les effets de bord pour calculer les champs V et E dans
le vide entre les armatures, c’est-à-dire que nous ferons comme si le système n’avait
pas de bords : R → ∞ . Les armatures sont donc considérées comme des plans infinis.

244
Chapitre 2.  Électrostatique 245

On peut montrer qu’alors les armatures en regard portent des charges surfa-
ciques uniformes et opposées : +σ pour l’armature (1) en z = 0 et −σ pour l’armature

(2) en z = e . Le calcul du champ électrique Eint entre les armatures s’obtient donc en
sommant les champs créés par les deux plans infinis, calculés dans la sous-section
précédente. Pour un tel système :
� σ � � σ �
— E1 = ez pour z > 0 ; E1 = − ez
2ε0 2ε0
pour z < 0 , champ créé par l’armature (1).
� −σ � � σ �
— E2 = ez pour z > e ; E2 = + ez
2ε0 2ε0
pour z < e , champ créé par l’armature (2).
� �
Finalement Eext = 0 pour z < 0 et
� σ �
pour z > e , et Eint = ez pour 0 < z < e . Le
ε0
champ électrique est uniforme entre les ar-
matures.
On en déduit la différence de potentiel :
z =e
� → z =e
σe qe
V1 − V2 =  Eint ⋅ d OM = Eint  dz = Eint ⋅ e = = 1
ε0 ε0 S
, où q1 = q = σS est la
z =0 z =0
charge portée par l’armature en z = 0 , l’autre armature portant la charge q2 = −q .

La charge portée par les armatures en regard est donc proportionnelle à la ten-
ε S
sion U = V1 − V2 appliquée au condensateur : q = q1 = CU = C(V1 − V2 ) , où C = 0
e
est la capacité du condensateur plan.
Une capacité (en farad : F) est homogène au produit de ε0 par une longueur.

On a en conséquence choisi pour l’unité de ε0 le farad par mètre.


En pratique, on place un diélectrique (matériau isolant) entre les armatures du
condensateur afin d’augmenter sa capacité. On montre en effet qu’il suffit de remplacer
la permittivité du vide ε0 par εr ε0 , où εr ≥ 1 est la permittivité relative du matériau
(sans dimension). L’air sec se comporte comme le vide ( εr est très proche de 1), mais
certains matériaux comme le polystyrène ( εr ≃ 2,4 à basses fréquences) permettent,
avec la même d.d.p V1 − V2 , d’obtenir une plus grande charge sur les armatures.
On peut proposer une application numérique pour de grandes plaques conduc-
1 π ⋅ 12
trices ( R = 1 m ), très proches ( e = 1 mm ). On obtient C ≃ ≃ 30 nF , ce

36 ⋅ π ⋅ 109 10−3
qui est faible. Les valeurs usuelles des capacités des condensateurs utilisés en T.P
vont du pF au µF. Ces condensateurs sont constitués de fines lames métalliques

245
246 Partie IV.  Électromagnétisme

séparées par un diélectrique (céramique, mica, polymère…), et enroulées pour obtenir


un ensemble compact.

Revenons maintenant sur les effets de bord.


En les négligeant, nous avons obtenu des lignes de champ parallèles à Oz. En
réalité, ceci n’est vrai que dans la zone suffisamment proche de l’axe Oz, c’est-à-dire
loin des bords. Près des bords, ces lignes de champ sont déformées comme le montre
la simulation ci-dessous.
Dans le cas où e n’est pas très inférieur à R, cette zone, dans laquelle les
champs calculés précédemment diffèrent notablement des champs réels, occupe une
portion importante de l’espace entre les armatures. Le calcul numérique de C, obtenu
en négligeant les effets de bord, ne donnera qu’un ordre de grandeur de la valeur
réelle.
En revanche, si e << R , cette zone n’est qu’une faible portion de l’espace entre
les armatures. La valeur numérique obtenue pour C en négligeant les effets de bord,
est très proche de la valeur réelle.

3.3 Énergie emmagasinée


C’est l’énergie électrostatique contenue dans le champ entre les armatures :
ε0Eint 2 3
UC =  2
dV .
V entre les
armatures

246
Chapitre 2.  Électrostatique 247

On montre qu’on obtient également les formules vues dans le cours d’électroci-
nétique :

1 1 q2 1
UC = CU 2 = = qU , avec U = V1 − V2 .
2 2C 2

Dans le cas du condensateur plan, la densité volumique d’énergie électrosta-


2
ε0Eint 2 1  V1 − V2  1 U2
tique vaut = ε0  = ε0 . Comme cette densité volumique est uni-
2 2  e  2 e2
1 U2
forme, on a UC = ε0 V , avec V = S e , volume entre les armatures. On trouve
2 e2
1 ε0 S 2 1
bien UC = U = CU 2 .
2 e 2
Un des intérêts des condensateurs est précisément de pouvoir stocker de
l’énergie. Ils sont également indispensables dans les circuits électroniques car ils per-
mettent dans l’A.R.Q.S de réaliser des filtres, de « lisser » des tensions, etc.

4. LE DIPÔLE ÉLECTROSTATIQUE
4.1 Définition / Moment dipolaire électrique
Considérons une distribution D de charges localisée, c’est-à-dire d’extension
finie (nous noterons a sa taille caractéristique). On se place
dans le cas où D est « petite ». Précisons ce point :
— On ne s’intéresse qu’au champ électrique créé par D « au
loin » : en un point M tel que r = OM >> a , si O est un point
au voisinage de D (à une distance de D de l’ordre de a).
— Si D est placée dans un champ électrique extérieur (autre
que celui qu’elle crée), ce champ est « localement » uni-
forme (il varie sur une distance caractéristique λ >> a ).

Si la charge totale Q de D est non nulle, D se com-


porte comme une charge ponctuelle Q en O, et crée au loin les
Q � Q � �
champs V (M ) = et E (M ) = 2
er , où er est le vec-
4πε0 r 4πε0r
teur unitaire de O vers M. Le champ électrique est radial et
varie en 1/ r 2 .
� � �
D subit d’autre part la force F ≃ QEext (O) où Eext (O )
est le champ extérieur à la distribution en O.
On parle de monopôle électrique.

247
248 Partie IV.  Électromagnétisme

En revanche, si Q = 0 , alors le point A, barycentre des charges négatives, et B,


celui des charges positives, sont affectés de charges opposées (respectivement −q
et q).
Si A et B ne sont pas confondus, la distribution D est dite dipolaire et on définit
G G →
son moment dipolaire p par p = q AB (en C ⋅ m ).

On note O le milieu de [ AB ] et 2a la distance AB.


G
On a donc p = p = 2aq .
Comme la distribution dipolaire D est « petite », la répartition exacte
G G
des charges n’intervient pas : si p ≠ 0 , D est équivalente au doublet de
charges A( −q ) et B( +q ). Plus généralement, le moment dipolaire d’une dis-
G →
tribution de charges ponctuelles qi en Pi est donné par p =  qi OPi . Il est
i

indépendant du point O puisque Q =  qi = 0 .


i
Un exemple de distribution de charge totale nulle, mais non dipolaire,
est celui de deux charges identiques −q en P et en P ′ , et d’une charge
+2q en O milieu de [PP ′] : le barycentre des charges négatives est con-
G
fondu avec celui des charges positives. Le moment dipolaire p est nul.
On parle dans ce cas de distribution quadrupolaire.

4.2 Champ électrique créé


La distribution D située au point O est dipolaire.
G
Prenons son moment dipolaire p porté par Oz et re-
pérons un point M à l’aide de ses coordonnées sphé-
riques. Les barycentres A( −q ) et B( +q ) de D se trou-
vent sur l’axe Oz aux cotes respectives −a et a.
Calculons d’abord le potentiel V(M) créé par le
dipôle en un point éloigné :
−q q
V (M ) = VA (M ) + VB (M ) = + .
4πε0 AM 4πε0BM
Pour calculer 1/ AM , on commence par mettre la relation de Chasles au carré :

→ → → →2 →2 → → →2

AM = AO + OM  AM = AO + 2 AO ⋅ OM + OM , soit :
 a a2 
AM 2 = a 2 + 2ar cos θ + r 2 = r 2 1 + 2 cos θ + 2  , puis :
 r r 

248
Chapitre 2.  Électrostatique 249

−1/2
1 −1/ 2 1 a a2 
=  AM 2  = 1 + 2 cos θ + 2  .
AM   r  r r 
Comme a / r << 1 , on effectue le développement limité de
1 1 a 
1/ AM à l’ordre 1 en a / r : = 1 − cos θ . Pour 1/ BM , il suffit
AM r  r 
d’effectuer le changement θ → π − θ et donc cos θ → − cos θ , d’où
1 1 a 
= 1 + cos θ . Finalement :
BM r  r 
q  a a  2aq cos θ
V (M ) =  −1 + r cos θ + 1 + r cos θ  = .
4πε0 r   4πε0 r 2
Les termes d’ordre 0 en a / r dans le crochet s’éliminent. En effet, à l’ordre 0,
tout se passe comme si les charges q et −q étaient confondues en O : le champ élec-
G
trique E et le potentiel V sont nuls à cet ordre d’approximation.
Le potentiel est une différentielle du potentiel en 1/ r créé par les deux charges
p cos θ
ponctuelles. Il est donc en 1/ r 2 : V (M ) = . V ne dépend pas de ϕ car l’axe Oz
4πε0r 2
est un axe de symétrie de révolution : D est invariante par toute rotation autour de Oz.
G
Le champ E , différentielle du champ en 1/ r 2 créé par les deux charges ponc-
tuelles est lui en 1/ r 3 . On le calcule à partir de V :
G → ∂V G 1 ∂V G G 2 p cos θ G p sin θ G
E = − gradV = − er − eθ , soit E = 3
er + eθ .
∂r r ∂θ 4πε0r 4πε0r 3
On obtient grâce à une simulation numérique les lignes de champ électrique
dipolaire (valables seulement à grande distance de D) suivantes :

249
250 Partie IV.  Électromagnétisme

4.3 Actions subies par un dipôle électrostatique


G
Considérons d’abord que le dipôle de moment dipolaire p est plongé dans un
G
champ électrique extérieur uniforme noté E .
La résultante des forces s’exerçant sur A( −q ) et B( +q ) est :
G G G G G G
F = F/ A + F/ B = −qE + qE = 0 .
Le moment des actions électriques extérieures qui s’exercent sur le dipôle, cal-
culé au point de réduction O, vaut :
G → G → G  → →  G → G G G
ΓO = OA ∧ ( −qE ) + OB ∧ qE =  OB − OA  ∧ qE = q AB ∧ E = p ∧ E .
 
 
G G
La résultante F est nulle dans un champ E uniforme : le dipôle subit un couple
G G G G
de moment Γ = p ∧ E indépendant du point de réduction. Ce couple tend à aligner p
G
sur E .
On peut le constater sur la figure ci-contre : le mo-
G G
ment Γ z = − p ⋅ E sin θ est du signe opposé à celui de
sinθ .
G G G
Cette expression Γ = p ∧ E reste valable dans l’approximation dipolaire où le
champ électrique extérieur n’est que localement uniforme, mais alors la résultante
G G → G
n’est pas rigoureusement nulle. On montre qu’elle vaut F = ( p ⋅ grad)E .
Ce résultat permet d’expliquer pourquoi un dipôle a tendance à se déplacer
dans le sens des champs électriques intenses. Par exemple, à une dimension, si le
G G ∂E x
moment dipolaire s’écrit p = pex et que > 0 (le champ E x augmente si on se dé-
∂x
∂E
place dans le sens des x croissants), on a bien Fx = p x > 0 .
∂x

Calculons maintenant l’énergie potentielle d’un dipôle rigide (la distance a, et


G G
donc p , ne dépendent pas du champ E extérieur, localement uniforme, appliqué).
L’énergie de constitution (énergie due aux interactions entre A et B) est alors cons-
tante, et on peut sommer les énergies −qV ( A) et qV (B ) des charges −q en A et +q
en B placées dans le potentiel extérieur, pour former l’énergie potentielle du système :
B G 
→ B G → G B →
  
Ep = −q [V ( A) − V (B )] = −q E (M ) ⋅ d OM = −q E ⋅ d OM = −qE ⋅ d OM .
A A A
G → G G G
On a donc Ep = −qE ⋅ AB = − p ⋅ E , où E est le champ extérieur localement uni-
forme dans la zone où est placé le dipôle.

250
Chapitre 2.  Électrostatique 251

G G G G
L’énergie potentielle d’un dipôle rigide est Ep = − p ⋅ E = − p ⋅ E ⋅ cos θ .
G G
La position θ = 0 ( p et E alignés) est une position d’équilibre stable (énergie
G G
potentielle minimale), alors que θ = π ( p et E « anti-alignés ») est une position
d’équilibre instable (énergie potentielle maximale).
Des grains de semoule placés dans de l’huile de ricin ont la propriété de se
polariser en présence d’un champ électrique assez faible. Ils se comportent alors
comme des dipôles et s’orientent selon les lignes de champ électrique.

4.4 Applications du dipôle électrostatique


Dipôle induit / polarisabilité
Un matériau isolant (ou diélectrique) peut se polariser sous l’action d’un champ
électrique extérieur. Il se comporte alors comme un ensemble de dipôles, créant ainsi
un champ électrique propre.

Lorsqu’un atome, ou une molécule, est placé dans un champ électrique exté-
G G G
rieur uniforme E0 , il acquiert un moment dipolaire p = αε0E0 , où α est la polarisabilité
de l’atome.

L’expression du champ électrique créé par un dipôle montre que :


[ p ] = [ε0E0 ] ⋅ L3 , donc que la polarisabilité est homogène à un volume.
Nous allons calculer α dans le cadre du modèle de Thom-
son de l’atome d’hydrogène (proposé en 1904) : l’électron de
charge −e se déplace à l’intérieur d’une boule de centre O et de
rayon R, de charge + e uniformément répartie, et donc de den-
3e
sité volumique ρ = . Le champ électrique créé par la boule
4πR 3
en son intérieur a été calculé au 2.3 :
G ρ G e G
Eint = r er = 3
r er .
3ε 0 4πε0R
L’électron en M est soumis à la force élastique :
G G e2 G G →
Fe = −eEint = − 3
r er = −kr er = −k OM .
4πε0R
Sa position d’équilibre est donc le centre O de la boule en l’absence de champ
extérieur appliqué.
G
Si on applique maintenant un champ extérieur uniforme E0 , l’électron est sou-
G 
→ G
mis à Fe = −k OM − eE0 , et la nouvelle position d’équilibre M0 est telle que :
→ e G 4πε0R 3 G
OM0 = − E0 = − E0 . Le point M0 est le barycentre des charges négatives, le
k e

251
252 Partie IV.  Électromagnétisme

point O celui des charges positives, et le moment dipolaire du système est :


G → G
p = e M0O = 4πε0R 3E0 . On en déduit α = 4πR 3 , soit trois fois le volume de l’atome.
Le modèle de Thomson est bien sûr erroné, mais il donne le bon ordre de gran-
deur. Plus généralement, la polarisabilité est de l’ordre de grandeur du volume d’une
molécule : plus une molécule est volumineuse, plus elle est polarisable.

Interactions ion – molécule (ion – dipôle)


Dans la molécule d’eau, l’atome d’oxygène, plus électronégatif
que l’atome d’hydrogène, porte une charge partielle δ− < 0 , et chaque
atome d’hydrogène une charge partielle δ+ = ξ ⋅ e = −δ− / 2 > 0 . Le mo-
ment dipolaire de la liaison O–H est pO −H = 5,12 ⋅ 10−30 C ⋅ m , et la dis-
tance internucléaire dO −H = 95,84 pm . L’atome d’oxygène portant deux
doublets non liants, la théorie V.S.E.P.R permet de montrer que la mo-
n = 104,5° .
lécule est coudée : β = HOH
Par définition, pO −H = ξ ⋅ e ⋅ dO −H , ce qui permet de calculer le
pO −H
pourcentage de liaison ionique de la liaison O–H : ξ = = 33,4% . Si la liaison
edO −H
était totalement ionique, O porterait la charge −e (donc −2e au total puisqu’il y a deux
liaisons O–H) et H la charge + e , soit ξ = 100% . Si au contraire la liaison était totale-
ment covalente, il n’y aurait aucune charge partielle, soit ξ = 0% .
G
Le moment dipolaire de l’eau p H2O est la somme vectorielle des moments di-

polaires des deux liaisons O–H, donc p H2O = 2pO −H cos(β / 2) = 6,27 ⋅ 10−30 C ⋅ m . On
utilise souvent une unité dans laquelle les valeurs numériques sont de l’ordre de gran-
1
deur de 1, le debye (D), défini par 1 D = ⋅ 10−29 C ⋅ m . On a alors p H2O = 1,88 D .
3
Le moment dipolaire permanent de l’eau est élevé, et la taille de la molécule est
petite, ce qui lui permet d’être un très bon solvant polaire. Elle solvate les ions de
charge q. Ces derniers créant un
G
champ électrique monopolaire E
en 1/ r 2 , les moments dipolaires
des molécules d’eau tendent à s’ali-
G
gner sur E . La force d’interaction
G G → G
F = ( p ⋅ grad)E est donc en 1/ r 3 ;
l’énergie d’interaction est en 1/ r 2 . C’est vrai pour les solides, mais pas pour les fluides
car l’agitation thermique tend à rendre aléatoire l’orientation des dipôles (une étude

252
Chapitre 2.  Électrostatique 253

(qp)2
statistique montre que l’énergie d’interaction est proportionnelle à − ).
kBT ⋅ r 4

Interactions molécule – molécule (dipôle – dipôle)


Les molécules sont neutres, mais peuvent posséder un moment dipolaire per-
manent ou induit. Les interactions se font alors entre dipôles. Ce sont des interactions
de Van Der Waals. Elles sont de trois types :
— Interactions entre dipôles permanents (interaction de Keesom). Un dipôle de mo-
G G
ment dipolaire p1 crée un champ électrique E1 en 1/ r 3 , un autre dipôle de moment
G G G G → G
dipolaire p2 tend à s’aligner sur E . On s’attend à une force F1/2 = ( p2 ⋅ grad)E1 en

1/ r 4 . C’est vrai pour les solides, mais pas pour les fluides car l’agitation thermique
tend à rendre aléatoire l’orientation des molécules. Une étude statistique montre que
( p1p2 )2
l’énergie d’interaction est EKeesom ∝ − , et donc que la force est en 1/ r 7 (at-
kBT ⋅ r 6
tractive car un dipôle tend à se déplacer dans les zones de champ intense, donc à se
rapprocher d’un autre dipôle).
— Interactions entre dipôle permanent et dipôle induit (interaction de Debye). Un di-
G G
pôle de moment dipolaire p1 crée un champ électrique E1 en 1/ r 3 , une molécule po-
G G
larisable placée dans ce champ acquiert un moment dipolaire p2 = α 2ε0E1 également
G G → G
en 1/ r 3 . La force F1/2 = ( p2 ⋅ grad)E1 est en 1/ r 7 . L’énergie d’interaction est :

α 2 p12 G G
EDebye ∝ − . La température n’intervient plus car p2 et E1 sont constamment
r6
colinéaires. Cette interaction se superpose à celle de Keesom si les deux molécules
sont polaires.
— Interactions entre dipôle instantané et dipôle instantané (interaction de London). Ce
sont les interactions qui expliquent pourquoi les gaz nobles passent sous phase con-
densée à basse température, alors que leurs atomes sont apolaires. L’effet ne s’ex-
plique correctement que dans le cadre de la mécanique quantique. Une interprétation
classique est la suivante : bien que l’atome (ou la molécule) ne possède pas de mo-
ment dipolaire moyen, les fluctuations de la densité électronique font qu’il possède un
moment dipolaire instantané. Le champ électrique dipolaire qu’il crée polarise un autre
atome, qui a son tour polarise le premier atome… Si les polarisabilités des deux
αα
atomes sont α1 et α 2 , l’énergie d’interaction est ELondon ∝ − 16 2 . La température
r
n’intervient pas, et cette interaction se superpose à celle de Debye (si l’une des molé-
cules est polaire) et à celle de Keesom (si les deux molécules sont polaires).

253
254 Partie IV.  Électromagnétisme

Finalement, les interactions de Van Der Waals dans les fluides sont radiales,
attractives, en 1/ r 7 (donc décroissent très vite avec la distance), de faible énergie (de
l’ordre de 10 kJ ⋅ mol-1 , au lieu de 100 kJ ⋅ mol-1 pour les interactions ion – dipôle).

4.5 Topologie du champ électrostatique


G
La topologie de E est une conséquence des équations locales le régissant.
G
— Le champ électrique n’est pas à flux conservatif car divE = ρ / ε0 ≠ 0 aux points où
G
ρ ≠ 0 . Cependant, dans les zones vides de charge, on a divE = ρ / ε0 = 0 . Dans ces
zones, comme pour un champ à flux conservatif,
G
E est d’autant plus intense que les lignes de
champ sont resserrées.
Dans le cas d’une distribution de charges D
localisée, le champ électrique décroît lorsqu’on
s’écarte de D. En conséquence, les lignes de
champ électrique s’écartent les unes des autres
(les tubes de champ s’évasent) lorsqu’elles s’éloi-
gnent des charges.

— Les lignes de champ sont orthogonales aux sur-


faces équipotentielles.

— Les lignes de champ ne peuvent pas être fermées car le potentiel décroît le long
d’une telle ligne. Les lignes de champ dipolaires, tracées plus haut, peuvent donner
l’impression du contraire car elles se coupent en O, mais un « zoom » avant montrerait
qu’en réalité, elles partent des charges positives pour aboutir sur les charges néga-
tives.

— Les lignes de champ électrique se coupent en une charge ponctuelle. Une des con-
G G
séquences de divE = ρ / ε0 ≠ 0 est d’ailleurs le fait que le champ E diverge à partir
des charges positives (et converge vers les charges négatives).

— Hormis en un point où se trouve une charge ponctuelle (où le champ est infini), ou
en un point de champ nul, les lignes de champ ne peuvent pas se couper en M car par
G G
définition E (M ) ≠ 0 est tangent à la ligne de champ passant par M.

À titre d’exemple, on a tracé ci-après les lignes du champ créé par un doublet
de charges identiques dont le point O est le milieu.
G
Tous les plans contenant Ox sont des plans de symétrie de D : E (O ) est dans
tous ces plans, donc porté par Ox, d’où Ey (O ) = Ez (O ) = 0 . Le plan x = 0 médiateur
G
des charges est aussi plan de symétrie de D donc il contient E (O ) : E x (O ) = 0 .

254
Chapitre 2.  Électrostatique 255

G G
Finalement E (O) = 0 .
Des lignes de champ se coupent en ce point O de champ nul. Certaines de ces
lignes convergent vers O (celles qui sont confondues avec l’axe Ox), alors que celles
qui se trouvent dans le plan x = 0 divergent à partir de ce point.
Dans le cas d’une charge ponctuelle, toutes les lignes de champ partent de ce
point, ou toutes arrivent en ce point.

5. ANALOGIES AVEC LA GRAVITATION


5.1 Théorème de Gauss « gravitationnel »
G mm G
La force d’attraction gravitationnelle F1/2 = −G 12 2 e1→2 exercée par la masse
r
m1 au point P1 sur la masse m2 au point P2 , est analogue à la force de Coulomb
G qq G
F1/ 2 = 1 2 2 e1→ 2 . Ces deux types d’interactions en 1/ r 2 , portées par la droite reliant
4πε0 r
P1 vers P2 , portent le nom d’interactions newtoniennes.

La détermination d’un champ gravitationnel est analogue à celle du champ élec-


trique créé par des charges fixes.

Dressons un tableau de grandeurs analogues :

255
256 Partie IV.  Électromagnétisme

électrostatique gravitation
caractéristique de la particule
à la fois source du champ et la charge q la masse m
soumise à une force
G G
champ au point M champ électrique E (M ) champ de gravitation G (M )
G G G G
force subie par la particule F = qE (M ) F = mG (M )
G qq G G mm G
force entre deux particules F1/ 2 = 1 2 2 e1→ 2 F1/2 = −G 12 2 e1→2
4πε0 r r
−G , avec G constante uni-
constante intervenant dans la 1
verselle de gravitation :
force 4πε0
G = 6,67 ⋅ 10−11 N ⋅ m2 ⋅ kg-2
constante intervenant dans le 1
−4πG
théorème de Gauss ε0
G G
G G qint  G
w ⋅ d2 S = −4πGmint
 E ⋅ d S
w
2 S
Théorème de Gauss =
ε0 théorème de Gauss
S
gravitationnel

Le théorème de Gauss gravitationnel permet, dans le cas des hautes symétries,


G
de déterminer aisément G en tout point.
G
Les propriétés de symétrie de G se déduisent de celles de la distribution de
G
masses de la même façon que les propriétés de symétrie de E se déduisent de celles
de la distribution de charges.

5.2 Champ de gravitation d’un astre sphérique homogène 


Prenons l’exemple fondamental d’un astre
sphérique homogène de centre O, de rayon R et de
masse volumique ρ.

(i) On choisit de repérer un point M par ses coordon-


nées sphériques (r , θ, ϕ) . Tout plan contenant la
droite (OM) est un plan de symétrie de la distribution
G G G
de masses D, donc G (M ) appartient à tous ces plans : G (M ) = G r (r , θ, ϕ)er .
D’autre part, D est invariante par toute rotation autour de O (tout axe passant
par O est un axe de symétrie de révolution), donc G r est indépendant de θ et de ϕ.
G G
Finalement le champ G (M ) = G r (r )er est radial.
G
(ii) On calcule le flux de G à travers une sphère de centre O et de rayon r :

256
Chapitre 2.  Électrostatique 257

G G
 G
w ⋅ d2 S = 4πr 2G r (r ) .
S
Il reste à calculer mint , la masse intérieure à la surface S .
— Si r < R , la masse intérieure à S est celle contenue dans la sphère de rayon r :
4
mint = ρ πr 3 .
3
4
— Si r > R , S entoure toute la masse de D : mint = ρ πR 3 .
3
Finalement par application du théorème de Gauss :
 G 4 G GMastre r G
G int = − 3 πρGr er = − er pour r < R
 R3 4
 G 3 G
, puisque Mastre = ρ πR 3 .
G 4 R GM astre G 3
= − πρG 2 er = − er pour r > R
 ext 3 r r2
Le champ gravitationnel à l’intérieur de l’astre varie linéairement avec la dis-
tance r au centre de l’astre. La force s’exerçant sur une masse m dans l’astre vaut
G GMastrem G GMastrem → →
F =− 3
r er = − 3
OM = −k OM . On reconnaît la force de Hooke li-
R R
néaire exercée à son extrémité M par un ressort de raideur k attaché à l’autre extrémité
O, et de longueur à vide nulle. Ainsi, un corps qui ne serait soumis qu’à cette force
k GMastre
serait un oscillateur harmonique de pulsation ω0 = = . C’est la même
m R3
pulsation que celle d’un corps en mouvement circulaire uniforme à la surface de l’astre,
sous l’effet de la force gravitationnelle exercée par ce dernier.

Le champ gravitationnel à l’extérieur de l’astre est identique à celui créé par un


astre ponctuel dont toute la masse Mastre serait concentrée en O.

5.3 Énergie gravitationnelle d’un astre sphérique homogène 


L’énergie électrostatique d’une boule de charge volumique ρ uniforme est :
ε0E 2 3 G
Ue = 
2
d V , où E est le champ électrique créé par la boule. L’analogie dé-
espace

veloppée précédemment nous permet de connaître l’énergie gravitationnelle d’un astre


1 G2 3 G2
sphérique homogène : Ug = −
4πG  2
d V . On peut vérifier que
G
est bien
espace
une énergie volumique.
Le champ de gravitation prenant une forme différente à l’intérieur et à l’extérieur

1  
R ∞
de l’astre, on a Ug = −
8πG  
 G int 2 4πr 2dr + 
G ext 2 4πr 2dr  , soit :

r =0 r =R

257
258 Partie IV.  Électromagnétisme

1   GMastre r  2  GMastre  2 
R 2 ∞ 2
Ug = −  
2G   R 3 

r d r +  
 r 2 

r dr  .

r =0 r =R

GMastre2  1 R ∞
1  GMastre2  1 1
On a donc Ug = −
2

 R 6  r 4 dr +  2
r
dr  = −
 2  5R + R  , et
 
r =0 r =R
2
3GMastre 3Q 2
finalement Ug = − (analogue à l’énergie de constitution Ec = d’une
5R 20πε0R
boule de charge Q répartie uniformément). Dans le cas de la Terre :
Mastre = MT = 6 ⋅ 1024 kg , et R = RT = 6,4 ⋅ 103 km . On obtient U g = −2,3 ⋅ 1032 J .
Pour mieux appréhender la notion d’énergie gravitationnelle, voici un peu de
science-fiction. Déterminons l’énergie qu’un empire ennemi devrait fournir pour dé-
truire la Terre à l’aide d’une bombe dont l’effet serait de partager la Terre en N boules
identiques disséminées dans l’espace sans vitesse finale.
L’étude se fait dans le référentiel géocentrique supposé galiléen. Dans l’état
3GMT 2
initial, l’énergie gravitationnelle est Ug1 = − . Dans l’état final, les distances
5RT
entre les N boules étant infinies, et leur vitesse nulle, l’énergie du système est pure-
3GM 2
ment gravitationnelle et vaut Ug2 = −N . La masse M de chaque petite boule est
5R
M = MT / N . La conservation de la masse du système permet de calculer le rayon R
4 4
de chaque petite boule : MT = ρ πRT3 = N ⋅ M = Nρ πR 3 . D’où R = N − 1/3RT .
3 3
3G  M 2 M 2
L’énergie à fournir vaut donc ∆U = Ug2 − Ug1 =  −N 2 T−1/3 + T .
5  N ⋅N RT RT 

3GMT 2 
On a finalement ∆U = 1 − N − 2/3  .
5RT  

Cette énergie est positive (les interactions entre les masses contenues dans la
Terre sont attractives) et augmente avec N. Elle tend vers l’opposé de l’énergie gravi-
tationnelle de la Terre si on souhaite la pulvériser totalement ( N → ∞ ).

Inversement, la formation de la Terre à partir de ses constituants pris à l’infini


les uns des autres sans vitesse initiale dégage l’énergie −Ug > 0 (il faut au contraire
apporter de l’énergie pour former une boule uniformément chargée du fait des interac-
tions répulsives entre les charges contenues dans la boule).
Même si l’empire ennemi se « contente » de partager la Terre en deux, l’énergie
qu’il doit fournir reste colossale : ∆U = 8,3 ⋅ 1031 J (la somme des énergies des
bombes atomiques ayant à ce jour explosé sur Terre est de 2 ⋅ 1018 J ).

258
259

[ÉLECTROMAGNÉTISME 3]

MAGNÉTOSTATIQUE
1. PROPRIÉTÉS DU CHAMP MAGNÉTOSTATIQUE
1.1 Équations locales
G G
En régime stationnaire, les champs E (M ) et B(M ) sont indépendants.
G
G divB = 0 M.T

B(M ) est régi par deux équations :  → G G .
 rot B = µ0 J M.A

1.2 Équations intégrales / Théorème d’Ampère


G
La formulation intégrale de divB = 0 est la suivante :
G G
 B ⋅ d S
w
2
Le champ magnétique est un champ à flux conservatif ⇔ =0
S
G G
⇔ Le flux Φ =  B ⋅ d2 S se conserve le long d’un tube de champ.
S

→ G G
La formulation intégrale de rot B = µ0 J s’obtient en calculant la circulation de
G G 
→ → G G
B le long d’un contour fermé γ : v B ⋅ d OM =  rot B ⋅ d2 S d’après le théorème de
γ S (γ)

Stokes, où S ( γ ) est une surface quelconque s’appuyant sur γ.


G 
→ G G
En utilisant l’équation de M.A, on obtient : v B ⋅ d OM = µ0  J ⋅ d2 S , or le flux
γ S (γ)
G G
 J ⋅ d2 S est égal à l’intensité du courant qui traverse γ, ou plus exactement n’im-
S (γ)

porte quelle surface s’appuyant sur γ, cette surface étant orientée en fonction de
l’orientation de γ en suivant la règle du tire-bouchon.
G G
Notons Iint = 
J ⋅ d2 S l’intensité (algébrique) de ce courant qui passe par
S (γ)

l’intérieur du contour fermé γ . Dans l’exemple ci-après, Iint = −I1 + I3 .

259
260 Partie IV.  Électromagnétisme

� → �
� B ⋅ d OM = µ0Iint : la circulation de B le long d’un contour fermé est égale à
γ

µ0 fois l’intensité du courant traversant ce contour (théorème d’Ampère).

1.3 Unités et ordres de grandeur



B s’exprime à l’aide d’une unité dérivée, le tesla (T). Avec une bobine supra-

conductrice, on peut atteindre B ≃ 30 T pendant quelques minutes. Les bobines

usuelles de laboratoire permettent d’atteindre B ≃ 10 − 3 T .
Les champs magnétiques résiduels sur Terre sont dus au géomagnétisme : en
� �
France B ≃ 4,7 ⋅ 10−5 T et Bhorizontal ≃ 2 ⋅ 10−5 T .

1.4 Calcul du champ magnétique créé par des distributions de courants sta-
tionnaires (complément hors-programme)
On sait exprimer le champ magnétique créé par un circuit filiforme γ parcouru
par un courant d’intensité
� I à l’aide de l’intégrale suivante :
� µ0 Id ℓ � �
B(M ) = �
4π PM 2
∧ eP →M , en orientant le déplacement élémentaire d ℓ le long du
P∈γ
circuit dans le même sens que le courant d’intensité I. C’est la loi de Biot et Savart.

Remarquons qu’en régime stationnaire, les circuits forment des contours γ


fermés.

260
Chapitre 3.  Magnétostatique 261

1.5 Continuité / discontinuité du champ magnétique


On peut montrer que le champ magnétique est continu dans le cas d’une distri-
bution volumique. Les résultats sont rassemblés dans le tableau ci-dessous :

distribution D B
volumique continu
linéique ∞ sur D ; ∝ 1/ r au voisinage de D

1.6 Caractère axial du champ magnétique


� � �
Soit un trièdre (ex , ey , ez ) direct. Ceci signifie qu’un tire-bouchon se déplace
� �
dans le sens du vecteur ez quand on tourne de ex vers

ey . Supposons qu’on utilise le sens inverse du tire-bou-
chon pour orienter l’espace. Le trièdre direct ne serait
� � � � � �
plus (ex , ey , ez ) mais (ey , ex , ez ) . Les courants qui tra-
versent un contour fermé γ orienté changent alors de
signe. L’intensité Iint que l’on obtient avec la règle du tire-
bouchon est changée en −Iint avec la règle inverse. Le
� → �
théorème d’Ampère � B ⋅ d OM = µ0Iint montre qu’alors la circulation de B change
γ

également de signe. L’orientation du contour n’ayant pas changée, c’est le sens de B
qui est modifié.

Le sens du champ magnétique dépend de l’orientation de l’espace. On dit que



B est un vecteur axial (ou pseudo-vecteur).
� � �
La force de Laplace dFL = Id ℓ ∧ B , qui fait intervenir un produit vectoriel, garde
le même sens, quelle que soit la règle d’orientation, comme on peut le constater sur le
schéma ci-dessous. Cette force est bien, comme il se doit (le sens d’une force ne peut
dépendre de l’orientation de l’espace), un vecteur polaire.

261
262 Partie IV.  Électromagnétisme

1.7 Symétries

Les symétries de B sont celles de tout champ vectoriel axial.
Soit une distribution de courants D. Il faut distinguer :
— La recherche de plans de symétrie ou d’antisymétrie de D passant par un point M

donné (ce qui permet de montrer que certaines composantes de B sur une base lo-
cale en M, judicieusement choisie, sont nulles).

— La recherche des invariances de D (ce qui permet de montrer que B est indépen-
dant de certaines coordonnées de M).

Symétrie plane / antisymétrie plane

Un plan π′ est un plan de symétrie de D si les éléments de courant, en deux


points P et P ′ symétriques par rapport à π′ , sont eux-mêmes symétriques par rapport
à π′ .

Si M appartient à π′ , plan de symétrie de la distribution de courants D, alors



B(M ) est orthogonal à π′ .

� µ Id ℓ �
Si on admet l’expression dBP (M ) = 0 ∧ eP →M (hors-programme) du
4π PM 2

champ créé au point M par un élément de courant Id ℓ situé au point P, on constate
que les composantes tangentes à π′ des champs créés en M par l’élément de courant
situé en P, et par celui situé en P ′ , symétrique de P par rapport à π′ , se compensent.

262
Chapitre 3.  Magnétostatique 263

Un plan π′′ est un plan d’antisymétrie de D si l’élément de courant en P ′′ , sy-


métrique de P par rapport à π′′ , est l’opposé du symétrique de celui en P.

Si M appartient à π′′ , plan d’antisymétrie de la distribution de courants D, alors


G
B(M ) appartient à π′′ .

Cette propriété est due au fait que les composantes orthogonales à π′′ des
champs créés en M par l’élément de courant situé en P, et par celui situé en P ′′ sy-
métrique de P par rapport à π′′ , se compensent.

Invariance des distributions

Si la distribution D est invariante par une isométrie I positive (translation, rota-


G G
tion), et M ′ = I (M ) , alors B(M ′) = I B(M ) .
Si la distribution D est invariante par une isométrie négative S ′ (symétrie plane),
G G
et M ′ = S ′(M ) , alors B(M ′) = − S ′ B(M ) .

G
— Si une translation T de vecteur u laisse invariante D (qui doit donc être de taille
infinie), on doit avoir le même champ en M qu’au point M ′ , qui se déduit de M par la
translation T.

G G
Si la propriété est vraie pour u = zez avec z quelconque (toute translation selon
G G
ez laisse D invariante), B est indépendant de z.

— Si une rotation R d’angle θ et d’axe Oz laisse invariante D, le champ au point M ′ ,


qui se déduit de M par R, se déduit de celui en M par la rotation R.

263
264 Partie IV.  Électromagnétisme

Si la propriété est vraie pour tout angle θ (toute rotation autour de Oz laisse D
G
invariante), B est indépendant de θ .

— Si une symétrie S ′ par rapport à un plan π′ laisse invariante D, le champ au point


M ′ , qui se déduit de M par S ′ , est antisymétrique par rapport à π′ de celui en M.

Si π′′ est un plan d’antisymétrie de la distribution de courants D et M ′′ = S ′′(M ) ,


G G
où S′′ est la symétrie plane par rapport à π′′ , alors B(M ′′) = S′′ B(M ) .

On peut illustrer certaines de ces propriétés de symétrie par l’exemple d’une


spire circulaire de centre O et d’axe Oz parcourue par un courant d’intensité I.
Le plan yOz (ou tout plan contenant Oz) est un plan d’antisymétrie de D, alors
que le plan xOy (plan contenant la spire) est un plan de symétrie de D.
En un point de l’axe Oz, le champ doit être contenu dans tous les plans d’anti-
symétrie passant par ce point, donc dans tout plan contenant Oz : le champ est porté
G
par ez .
G
En un point du plan xOy, le champ est normal à ce plan, donc porté par ez .
G
Le plan de la figure ( y = 0 ) est un plan d’antisymétrie donc il contient B :
G G G Bx ( − x, z ) = −Bx ( x, z ) Bx ( x, −z ) = −Bx ( x, z )
B( x, z ) = Bx ( x, z )ex + Bz ( x, z )ez , avec  et  .
B
 z ( − x, z ) = Bz ( x, z ) Bz ( x, −z ) = Bz ( x, z )

264
Chapitre 3.  Magnétostatique 265

1.8 Énergie d’une distribution de courants


C’est l’énergie contenue dans le champ magnétique créé par D :
B2 3
Um =  2µ0
dV .
espace

2. CALCULS DE CHAMP MAGNÉTOSTATIQUE


AVEC LE THÉORÈME D’AMPÈRE
2.1 Méthode
La méthode préconisée par le programme pour calculer un champ magnétique
stationnaire consiste à appliquer le théorème d’Ampère. Cette méthode est beaucoup
plus simple que celle consistant à résoudre les équations locales (Maxwell-Thomson
G
et Maxwell-Ampère) régissant B . Cependant, le calcul littéral ne peut être effectué
que lorsque la distribution de courants D possède des « hautes » symétries. Nous al-
lons préciser ce point.
G
Pour calculer B par application du théorème d’Ampère, il faut :

(i) Choisir un système de coordonnées (cartésiennes, cylindriques ou sphériques) pour


repérer un point M quelconque, adapté à la géométrie de D, afin d’analyser les symé-
G G
tries et de simplifier l’expression de B . Il s’agit de trouver les composantes de B qui

265
266 Partie IV.  Électromagnétisme

G
sont nulles dans la base locale en M, ainsi que les coordonnées de M dont B ne dé-
pend pas.
G
(ii) Dans le cas où D possède de hautes symétries, c’est-à-dire si la direction de B est
G
connue en tout point M, alors B peut être calculé par application du théorème d’Am-
G →
v
père B ⋅ d OM = µ0Iint .
γ

On prendra si possible, pour le contour γ passant par M, une ligne de champ


G  →
magnétique, car alors B et d OM sont colinéaires, ce qui simplifie le calcul de la cir-
culation.

Remarquons qu’on n’utilise en apparence que le théorème d’Ampère, qui est la


G
version intégrale de l’équation de Maxwell-Ampère, alors que B est également régi
G
par l’équation de Maxwell-Thomson. En réalité, les symétries de B découlent de ces
G
deux équations locales. On pourra d’ailleurs constater que le champ B , simplifié dans
G
le cas des hautes symétries, vérifie divB = 0 .

2.2 Bobine torique 


Une telle bobine est constituée de spires enroulées sur un tore d’axe Oz et de
section carrée :

Toutes les spires sont en série, et sont parcourues par un courant stationnaire
d’intensité I. Ces spires sont régulièrement enroulées. Par exemple, leur nombre par
N
unité de longueur sur la surface intérieure du tore est constant et vaut n = . Il y a
2πR
un grand nombre N >> 1 de spires, donc on peut considérer que leur distribution est
continue et qu’une spire donnée se trouve dans un plan méridien (plan contenant Oz).

(i) On choisit de repérer un point M par ses coordonnées cylindriques (r , θ, z ) . Le plan


passant par M et contenant Oz est un plan de symétrie π′ de la distribution de courants
G G G
D, donc le champ B(M ) est orthogonal à ce plan : B(M ) = Bθ (r , θ, z )eθ .

266
Chapitre 3.  Magnétostatique 267

D’autre part, D est invariante par


toute rotation autour de Oz (Oz est un axe
de symétrie de révolution), donc Bθ est
indépendant de θ.
� �
Finalement B(M ) = Bθ ( r , z )eθ : les
lignes de champ sont des cercles d’axe
Oz.
On remarque, en utilisant l’expres-

sion de divB en coordonnées cylin-

driques, qu’on a bien divB = 0 si
� �
B = Bθ (r , z )eθ .

(ii) On calcule la circulation de B sur un

cercle γ d’axe Oz et de rayon r, orienté selon eθ :
� → � �
� B ⋅ d OM = � Bθ (r , z )eθ ⋅ dℓeθ = � Bθ (r , z )dℓ = ℓBθ (r , z) , car r et z sont constants le
γ γ γ

� →
long de γ. On a � B ⋅ d OM = 2πrBθ (r , z ) .
γ

Il reste à calculer Iint à travers γ. Tout dépend de la position du cercle γ.

a
— Si z > , aucun courant ne traverse γ : Iint = 0 .
2
a a
— Si z < et r < R ou r > R + a , on a aussi Iint = 0 . Si z < et R < r < R + a , on a
2 2
Iint = NI .

267
268 Partie IV.  Électromagnétisme

Finalement, par application du théorème d’Am-


G G
Bext = 0

père, on obtient  G µ0NI G . Le champ magné-
Bint = eθ
 2πr
G
tique Bext est nul à l’extérieur de la bobine.
Remarquons que la forme de la section (ici car-
rée) est sans importance : seule l’invariance par toute
G G
rotation autour de Oz intervient pour montrer B = Bθ (r , z )eθ , et, quelle que soit la forme
d’une bobine torique, on a Iint = 0 pour γ à l’extérieur de la bobine, et Iint = NI pour γ à
G G G µ NI G
l’intérieur de la bobine, donc Bext = 0 et Bint = 0 eθ .
2πr

2.3 Solénoïde 
Un solénoïde est une longue bobine droite d’axe O′x , considérée comme infinie
G
pour la détermination du champ B qu’elle crée (on néglige les effets de bord).
On peut obtenir l’expression de
G
B en remarquant que cette situation
correspond au cas de la bobine torique
lorsque R → ∞ , alors que le nombre
de spires par unité de longueur
N
n= reste constant (on a bien sûr
2πR
G G
N → ∞ ). En tout point du solénoïde eθ → ex , et comme R < r < R + a , on a :
R →∞
r a  a r G G
1< < 1 + , avec  1 +  → 1, donc → 1 . On en déduit que Bext = 0 , et que
R R  R  R →∞ R R →∞
G G
G  µ0 2πRnI G  G Bext = 0
Bint = lim  eθ  = µ0nIex :  G G .
R →∞  2πr  Bint = µ0 nIex uniforme

De nouveau, ce résultat est indépendant de la forme de la section du solénoïde.

2.4 Solénoïde à section circulaire


Le programme invite à calculer
G
Bint dans le cas particulier d’un solé-
noïde à section circulaire, et en suppo-
G G
sant que Bext = 0 . Le nombre n de spires
par unité de longueur est toujours uniforme. Le solénoïde est d’axe Oz (c’est préférable
ici à O′x pour retrouver les notations des coordonnées cylindriques).

268
Chapitre 3.  Magnétostatique 269

(i) Le plan passant par M et orthogonal à


Oz est un plan de symétrie π′ de la distri-
G
bution de courants D, donc B(M ) est or-
G G
thogonal à ce plan : B(M ) = Bz (r , θ, z )ez .
D’autre part, D est invariante par
toute rotation autour de Oz et par toute
translation selon Oz donc Bz est indé-
pendant de θ et de z.
G G
Finalement B(M ) = Bz (r )ez : les
lignes de champ sont des droites parallèles à Oz.
G
On remarque, en utilisant l’expression de divB en coordonnées cylindriques,
G G G
qu’on a bien divB = 0 si B = Bz (r )ez .

(ii) La ligne de champ passant par un


point M à l’intérieur du solénoïde
n’étant pas fermée, on n’utilise qu’un
bout AB de cette ligne, de longueur h
arbitraire, pour former un contour
fermé γ.
On complète alors par deux
segments BC et DA orthogonaux à Oz
et par le segment CD extérieur au solénoïde, afin d’obtenir un rectangle ABCD dans
le plan méridien contenant M.
G G
La circulation de B est nulle sur BC et DA car le champ, porté par ez , y est
G
orthogonal au déplacement élémentaire, porté par er . Elle est également nulle sur CD
puisque le champ extérieur est nul. On a donc :
G → B G G
B

v  
B ⋅ d OM = Bz (r )ez ⋅ dzez = Bz (r )dz = hBz (r ) , car r est constant sur AB.
γ A A

Avec l’orientation choisie pour γ, Iint = + nhI , puisqu’il y a nh spires sur la lon-
gueur h.
G G
Finalement, par application du théorème d’Ampère : Bint = µ0 nIez . Le champ
G
magnétique Bint est uniforme dans le solénoïde.

269
270 Partie IV.  Électromagnétisme

2.5 Câble rectiligne infini / Fil rectiligne infini


Le câble est un cylindre d’axe Oz et de rayon R,
parcouru par des courants de densité uniforme :
� �
J0 = J0ez .

(i) Le plan passant par M et contenant Oz est un plan de



symétrie π′ de la distribution de courants D, donc B(M )
� �
est orthogonal à ce plan : B(M ) = Bθ (r , θ, z )eθ .
D’autre part, D est invariante par toute rotation
autour de Oz et par toute translation selon Oz donc Bθ
est indépendant de θ et de z.
� �
Finalement B(M ) = Bθ (r )eθ : les lignes de champ
sont des cercles d’axe Oz. On remarque qu’on a bien
� � �
divB = 0 si B(M ) = Bθ (r )eθ .

(ii) On calcule la circulation de B sur un cercle γ d’axe Oz et de rayon r, orienté selon
� � → � �
� � �
eθ : B ⋅ d OM = Bθ (r )eθ ⋅ dℓeθ = Bθ (r )dℓ = ℓBθ (r ) = 2πrBθ (r ) .
γ γ γ

Avec l’orientation choisie pour γ, Iint = J0 πr 2 si r ≤ R , et Iint = J0 πR 2 si r ≥ R


car il n’y a pas de courants à l’extérieur du cylindre.
Finalement, par application du théorème d’Ampère, on obtient :
� µ J r � � µ J R2 � µI �
B = 0 0 eθ si r ≤ R , et B = 0 0 eθ = 0 eθ si r ≥ R , où I = J0 πR 2 est l’intensité
2 2r 2πr
du courant traversant le cylindre.
Le cas du câble infiniment mince, c’est-à-dire d’un fil, est obtenu en faisant
tendre R vers 0 tout en maintenant I fini (on a alors J0 → ∞ ). On obtient :
� µ I �
B = 0 eθ ∀r > 0 .
2πr

270
Chapitre 3.  Magnétostatique 271

3. LE DIPÔLE MAGNÉTIQUE
3.1 Définition / Moment magnétique
Considérons tout d’abord un circuit filiforme γ orienté, parcouru par un courant
d’intensité I orienté dans le même sens que γ. Remarquons que γ n’est pas nécessai-
rement contenu dans un plan. En régime stationnaire, ce
circuit est nécessairement fermé (des distributions comme
le fil infini n’ont pas de réalité physique, mais permettent
G
de calculer B en un point M suffisamment proche d’un cir-
cuit fermé pour que ce circuit soit vu, depuis le point M,
comme un fil infini).
Soit une surface quelconque S s’appuyant sur γ. Le
vecteur surface de γ est défini comme la somme des vec-
G G G
teurs surface élémentaires de S : S = 
d2 S . On montre que S ne dépend que
S (γ)

de γ.
G G
Le moment dipolaire magnétique de γ est par définition m = I S (en A ⋅ m2 ). On
G
note m = m sa norme. On l’appelle simplement « moment magnétique ».

Considérons maintenant une distribution D de courants localisée, c’est-à-dire


d’extension finie (nous noterons a sa taille caractéristique).

La distribution D est dite dipolaire si son moment magnétique total (somme des
G G
moments magnétiques des circuits qu’elle contient) est non nul : m ≠ 0 .

On a représenté ci-contre un exemple (rare) de distri-


bution de moment magnétique nul : deux spires circulaires
identiques, de même axe, parcourues par des courants de
même intensité, mais de sens opposés.
G G G G
On a bien m = I S − I S = 0 .

On se place dans le cas où la distribution dipolaire D est « petite » :


— On ne s’intéresse qu’au champ magnétique créé par D « au loin » : en un point M
tel que r = OM >> a , si O est un point au voisinage de D (à une distance de D de l’ordre
de a).
— Si D est placée dans un champ magnétique extérieur, ce champ est « localement »
uniforme (il varie sur une distance caractéristique λ >> a ).
G G
Dans tous les cas, la répartition exacte des courants n’intervient pas si m ≠ 0 :
G G
D est équivalente à un circuit filiforme de moment m ≠ 0 .

271
272 Partie IV.  Électromagnétisme

3.2 Champ magnétique créé


Considérons un circuit filiforme γ orienté parcouru
par un courant I.
Le champ magnétique créé en un point M éloigné
( r = OM >> a ) peut se calculer grâce à la loi de Biot et Sa-

� µ 0 Id ℓ �
vart : B(M ) = � 4π PM 2
∧ eP →M (hors-programme).
P∈γ
� � �
e e er
Si on fait l’approximation P → 2M = O → M = , on
PM OM 2 r2

� µ I � e �
obtient B(M ) = 0 
4π  � d ℓ  ∧ 2r = 0 .
 r
P�∈γ
� �� �

=0
Le champ magnétique créé au loin est nul à l’ordre 2 en a / r (il est au moins
d’ordre 3, donc en a 3 / r 3 ).
Ceci constitue une différence majeure avec le champ électrique créé par une
distribution de charges D de charge totale non nulle ( Q = 0 ), c’est-à-dire non neutre.
Au loin, un tel champ est radial, en 1/ r 2 , équivalent à celui d’une charge ponctuelle Q
en O (champ monopolaire).

Il n’existe pas de champ magnétique monopolaire (champ radial en 1/ r 2 ) donc


pas de monopôle magnétique.

En un point éloigné d’une distribution de courants de taille finie, le champ ma-


gnétique est au moins en 1/ r 3 .
� �
Ceci vient bien sûr du fait que les équations locales régissant E et B sont dif-
� �
férentes. L’équation de Maxwell-Thomson divB = 0 entraîne que le flux de B est nul
à travers une surface fermée. Ce ne serait pas le cas si le champ magnétique diver-
geait radialement à partir d’un point O (son flux serait non nul à travers une sphère de
centre O).

Soit une distribution de courants D dipolaire au


voisinage du point O.

On montre que si on prend m porté par Oz, le
champ magnétique créé en un point M repéré par ses
coordonnées sphériques (r,θ,ϕ) vaut :

� 2µ m cos θ � µ0 m sin θ �
B( M ) = 0 3 er + eθ .
4πr 4πr 3

Il y a donc une analogie formelle avec le champ électrostatique dipolaire : il suffit

272
Chapitre 3.  Magnétostatique 273

de remplacer p / ε0 par µ0 m dans l’expression de ce dernier pour obtenir le champ


magnétique dipolaire.
On obtient grâce à une simulation numérique les lignes de champ magnétique
suivantes :

3.3 Actions subies par un dipôle magnétique


Considérons un circuit γ parcouru par un courant I, et dont le moment magné-
� �
tique est m = I S . Le dipôle considéré est plongé dans un champ magnétique exté-

rieur uniforme B . Ce circuit est soumis à des actions de Laplace de résultante :
� � �  � � � �
FL = �   �
Id ℓ ∧ B  = I 

d ℓ  ∧ B = 0 . On peut en effet sortir B de l’intégrale puisqu’il

P ∈γ P�∈γ
� �� � 

=0
est uniforme.

La résultante FL des forces de Laplace s’exerçant sur un dipôle magnétique
� �
plongé dans un champ B uniforme est nulle : le dipôle subit un couple de moment Γ
indépendant du point de réduction.
� � � � �
On montre que ce couple vaut Γ = m ∧ B : il tend à aligner m sur B .

On peut le constater sur la figure ci-contre : le mo-


� �
ment Γ z = − m ⋅ B sin θ est du signe opposé à celui de
sinθ .

273
274 Partie IV.  Électromagnétisme

G G G
L’expression Γ = m ∧ B reste valable dans l’approximation dipolaire où le
champ magnétique extérieur n’est que localement uniforme, mais alors la résultante
G G → G
n’est pas nulle : elle vaut FL = (m ⋅ grad)B . Ce résultat permet d’expliquer pourquoi un
circuit a tendance à se déplacer dans le sens des champs magnétiques intenses. Par
G G ∂Bx
exemple, à une dimension, si le moment magnétique s’écrit m = mex et que >0
∂x
(le champ Bx augmente si on se déplace dans le sens des x croissants), on a bien
∂Bx
FLx = m > 0.
∂x
D’autre part :
G
Le champ magnétique B créé par un aimant droit en un point suffisamment éloigné
est dipolaire : l’aimant droit se comporte comme une boucle de courant.

Par définition, les lignes de champ « sortent » du pôle nord et « rentrent » dans
le pôle sud.
G → G G G
L’aimant est donc soumis à F = grad(m ⋅ B ) s’il est placé dans un champ B ex-
térieur non uniforme, par exemple celui créé par un deuxième aimant. On ne parle plus
de force de Laplace dans ce cas, car ce ne sont pas des courants macroscopiques qui
sont responsables de l’aimantation.

274
Chapitre 3.  Magnétostatique 275

G
La norme du champ B créé par l’aimant de droite augmente dans les zones où
∂ Bx
les lignes de champ sont resserrées. On a donc en O : > 0 dans les deux cas
∂x
∂Bx
de la figure suivante. Dans le premier cas, Bx > 0 donc > 0 : pôles nord et sud
∂x
∂Bx
s’attirent, alors que dans le second cas, Bx < 0 donc < 0 : des pôles de même
∂x
nature se repoussent.

Enfin, on montre que :


G G
Si le dipôle est rigide ( m est indépendant du champ B extérieur localement uni-
G G G G
forme), l’énergie potentielle du système vaut Ep = −m ⋅ B = − m ⋅ B ⋅ cos θ .

G G
La position θ = 0 ( m et B alignés) est donc une position d’équilibre stable
G G
(énergie potentielle minimale), alors que θ = π ( m et B « anti-alignés ») est une po-
sition d’équilibre instable (énergie potentielle maximale).
Ainsi, si une petite aiguille aimantée peut être mise en rotation autour de son
G G G G
centre fixe O, elle est soumise au moment Γ = m ∧ B , qui a tendance à aligner m sur
G
B . En présence de frottements fluides, elle s’immobilise dans la position d’équilibre
G
stable, son moment m (dirigé de son pôle sud vers son pôle nord) indiquant alors la
G
direction et le sens du champ B(O ) : c’est le principe de la boussole.
La limaille de fer, posée sur un support, s’aimante dans le champ magnétique
d’un aimant, puis s’oriente selon les lignes de champ magnétique (les frottements avec
le support l’empêchant de se concentrer autour des pôles, zones de champ intense).
De nouveau, on constate une analogie avec les actions subies par un dipôle
G G G G
électrique dans un champ E localement uniforme : moment Γ = p ∧ E dans tous les
G G
cas, et énergie potentielle Ep = − p ⋅ E si le dipôle est rigide.

275
276 Partie IV.  Électromagnétisme

3.4 Magnéton de Bohr


Le modèle de Bohr de l’atome d’hydro-
gène (constitué d’un seul proton et d’un seul
électron) est revu dans le chapitre sur l’intro-
duction à la mécanique quantique. L’électron,
de masse me et de charge −e , décrit une tra-
jectoire circulaire autour du proton dans un plan
contenant le point fixe O où se trouve le proton,

et orthogonal au vecteur unitaire ez . On note
→ �
r = OM le rayon de sa trajectoire, et v son vecteur vitesse.

� → � �
Le moment cinétique orbital de l’électron est LO = OM ∧ mev = me r 2ωez , où ω
est la vitesse angulaire de l’électron.
On peut modéliser ce système par une boucle de courant parcourue par la
2π −e −eω
charge −e toutes les périodes T = , donc par un courant moyen I = = . Le
ω T 2π
� � −eω 2 � er 2ω �
moment dipolaire magnétique du système, m = I S = πr ez = − ez , est pro-
2π 2
� � e
portionnel au moment cinétique orbital : m = γ eLO avec γ e = − .
2me
Ce modèle planétaire classique entraîne l’instabilité de l’atome H (l’électron,
dont l’accélération est non nulle, émet un rayonnement électromagnétique, perd de
l’énergie, et finit par s’écraser sur le proton). Bohr proposa un modèle selon lequel :
— (1) Il existe des orbites circulaires stables pour lesquelles l’électron ne rayonne pas.
� → �
— (2) Pour ces trajectoires, le moment cinétique LO = OM ∧ mev de l’électron vaut en
� h
norme LO = n = nℏ , où ℏ est la constante de Planck réduite, et n ∈ N∗ . Il y a donc

quantification du moment cinétique.

Dans le modèle de Bohr de l’atome d’hydrogène, le moment magnétique est


� � e
proportionnel au moment cinétique orbital de l’électron : m = γ eLO , où γ e = − est
2me
� � �
le rapport gyromagnétique de l’électron. Comme LO , m est quantifié : m = nµB avec
eℏ
n ∈ N∗ . µB = , homogène à un moment magnétique ( A ⋅ m2 ), est appelé magné-
2me
ton de Bohr. Numériquement, µB = 9,27 ⋅ 10−24 A ⋅ m2 .

276
Chapitre 3.  Magnétostatique 277

Les particules élémentaires (électron, quark, neutrino, photon, boson de


Higgs…) possèdent un moment magnétique intrinsèque (de spin). Ces moments se
somment pour les particules composées (proton, neutron, noyaux atomiques…). Le
moment magnétique total de l’atome d’hydrogène est la somme des moments magné-
tiques intrinsèques du proton et de l’électron, et du moment magnétique orbital de
l’électron.
Tous ces moments s’ajoutent vectoriellement, et si un matériau est magnétisé,

il existe un moment magnétique d3 m dans un volume mésoscopique d3V .

� d3m �

On définit l’aimantation M de ce matériau par M = 3 ( A ⋅ m-1 ).
dV

Pour un matériau ferromagnétique, nous pouvons estimer l’aimantation à satu-


ration, obtenue quand tous les moments magnétiques des atomes sont alignés et de
même sens, le moment magnétique d’un atome restant de l’ordre de grandeur de µB .

Si n∗ est la densité atomique, de l’ordre de 1029 m-3 , on a Msat ≃ n∗µB ≃ 106 A ⋅ m-1 ,

ce qui est le bon ordre de grandeur ( Msat = 1,6 ⋅ 106 A ⋅ m-1 pour du fer doux).
Ainsi, pour un aimant cubique de 1 cm de côté, le moment magnétique est de
l’ordre de 1 A ⋅ m2 .

3.5 Expérience de Stern et Gerlach / Moment magnétique de spin


Cette expérience, réalisée en 1922, consistait à faire passer dans l’entrefer d’un
électro-aimant un jet d’atomes d’argent confondu avec l’axe Ox. En entrée du disposi-

tif, les atomes ont une vitesse v 0 = v 0ex .
Le champ magnétique est négligeable à l’extérieur de l’électro-aimant. Dans
l’électro-aimant, il est intense, de l’ordre du tesla.

On réalise un vide poussé autour du dispositif afin que les chocs avec les mo-
lécules de l’air soient très improbables.
Le champ magnétique créé par l’électro-aimant est symétrique par rapport au
plan y = 0 ( By = 0 dans ce plan), et les pièces polaires suffisamment allongées selon
Ox pour qu’on puisse considérer, en négligeant les effets de bord, que tout plan

277
278 Partie IV.  Électromagnétisme


x = Cte est plan de symétrie de B , donc que Bx = 0 .
Si on suppose que les atomes restent dans le plan de symétrie y = 0 , le champ
� �
qu’ils rencontrent est de la forme B = Bz ( y = 0, z )ez .


Si les atomes de fer possèdent un moment magnétique permanent m , la force
� �
qu’ils subissent dérive de l’énergie potentielle Ep = −m ⋅ B = −mz Bz , donc cette force
� → ∂B � ∂B �
est F = − grad Ep = mz z ey + mz z ez .
∂y ∂z
La forme des pièces de l’électro-aimant permet, comme
on le constate sur la simulation ci-contre, d’obtenir un champ
fortement inhomogène selon Oz. En effet, les lignes de champ
partant de la pointe (pôle nord) s’écartent en arrivant sur le pôle

sud. Comme le flux de B se conserve le long d’un tube de
champ, on en conclut que Bz diminue lorsqu’on se déplace
∂Bz
dans l’entrefer le long de Oz : ( y = 0, z ) < 0 .
∂z
D’autre part, la fonction y ֏ Bz ( y , z ) est paire puisque le
� ∂Bz � ∂B �
plan y = 0 est un plan de symétrie pour B , donc ( y = 0, z ) = 0 : F = mz z ez .
∂y ∂z
En mécanique classique, le moment magnétique des atomes d’argent en entrée
du dispositif est réparti de façon isotrope. La composante mz prend des valeurs con-
tinues entre −mmax et mmax , et une observation de l’écran au microscope devrait ré-
véler l’existence d’une tache centrée sur le point Ω de l’écran situé sur Ox, et allongée
selon ΩZ .
Au lieu de cela, ce sont deux petites taches sur Ωz , symétriques par rapport à
Ω, que Stern et Gerlach ont observées. Le moment magnétique mz de l’atome d’ar-
gent est donc quantifié et ne prend que deux valeurs opposées.

278
Chapitre 3.  Magnétostatique 279

La mécanique quantique permit dans les années suivantes de montrer que la


norme du moment cinétique orbital d’un électron est quantifiée, ainsi que sa projection
sur un axe quelconque. Si n ∈ N∗ est le nombre quantique principal qui caractérise
une couche électronique :

— LO = ℏ ℓ(ℓ + 1) , avec ℓ ∈ �0, n − 1� , nombre quantique azimutal. Le doublet (n,ℓ)

caractérise une sous-couche électronique.


— LOz = mℓ ℏ , avec mℓ ∈ � −ℓ, +ℓ � , nombre quantique magnétique. Le moment magné-
tique mz = γ eLOz est donc lui aussi quantifié : mz = mℓµB où µB est le magnéton de
Bohr. Le triplet (n,ℓ, mℓ ) définit une orbitale atomique (O.A). Il y a 2ℓ + 1 O.A dans une
sous-couche, soit un nombre impair.
Si l’état d’un électron était entièrement caractérisé par les trois nombres quan-
tiques (n,ℓ, mℓ ), la grandeur mz,atome , somme des mz de tous ses électrons, ne pour-
rait prendre qu’un nombre impair de valeurs. En effet :
— Il y a toujours une configuration pour laquelle mz,atome est nul (il suffit d’associer à
chaque électron pour lequel mℓ = k ≠ 0 , un électron pour lequel mℓ = −k , et, si le
nombre d’électrons est impair, de prendre mℓ = 0 pour l’électron resté sans associé).
— Pour chaque configuration telle que mz,atome = r ≠ 0 , il en existe une telle que :
mz,atome = −r .
L’expérience de Stern et Gerlach devrait faire apparaître un nombre impair de
taches !
En 1925, Goudsmit et Uhlenbeck introduisirent le concept de spin électronique
pour interpréter des phénomènes jusqu’alors inexpliqués, comme la structure hyper-
fine des raies spectrales, et l’expérience de Stern et Gerlach.

 1 1
Un quatrième nombre quantique ms ∈ − ,  (nombre quantique magnétique
 2 2

de spin) quantifie la projection Lz du moment cinétique intrinsèque L de l’électron
(sans équivalent « classique ») : Lz = ms ℏ .

279
280 Partie IV.  Électromagnétisme

� e �
Cependant, la relation n’est plus m = − LO comme pour les grandeurs or-
2me
� e �
bitales, mais m = −g L , où le facteur de Landé est g = −2 pour l’électron.
2me

On a donc finalement mz = ±µB pour le moment magnétique de spin électro-


nique projeté sur un axe quelconque.

Pauli énonça, toujours en 1925, son principe d’exclusion : deux électrons ne


peuvent se trouver dans le même état quantique. On ne peut donc placer que deux
électrons dans une même O.A, l’un de nombre de spin +1/ 2 (« spin up ») et l’autre
de nombre de spin −1/ 2 (« spin down »).
Ce principe s’est par la suite généralisé à tous les fermions, particules de spin
demi-entier, avant de devenir un théorème.

La configuration électronique de l’argent ( Z = 47 ) est la suivante :


1s 2s 2p6 3s2 3p6 4s2 3d10 4p6 5s1 4d10 . L’argent est une des exceptions à la règle de
2 2

remplissage de Klechkowski, car la sous-couche 4d remplie est très stable.



La projection selon ez du moment magnétique orbital total de Ag est donc nulle
puisque pour les sous-couche remplies,  mℓ = 0 à ℓ fixé, et que mℓ = 0 pour l’élec-
tron célibataire de l’orbitale atomique 5s.

Pour les couches remplies, la somme des projections selon ez du moment ma-
gnétique de spin est nulle, un électron « spin down » annulant la contribution de l’élec-
tron « spin up » de la même orbitale. En revanche, l’électron célibataire de l’O.A 5s
peut être dans les deux états ms = ±1/ 2 de façon équiprobable. On a donc finalement
pour un atome d’argent mz = ±µB . Les deux taches observées sont dues à l’existence
du spin électronique. La mesure de la position Z des centres des taches sur l’écran
donna accès à une valeur de µB en concordance avec la théorie.

3.6 Topologie du champ magnétique stationnaire



La topologie de B est une conséquence des équations locales le régissant.

— Comme tous les champs à flux conservatif, B est d’autant plus intense que les
lignes de champ sont resserrées.
Dans le cas d’une distribution de courants D localisée, le champ magnétique
décroît lorsqu’on s’écarte des courants. En conséquence, les lignes de champ magné-
tique s’écartent les unes des autres (les tubes de champ s’évasent) lorsqu’elles s’éloi-
gnent des courants.
— Les lignes de champ peuvent être fermées : c’est dû au caractère tourbillonnaire de
� → � � �
B (en certains points : rot B = µ0 J ≠ 0 ).

280
Chapitre 3.  Magnétostatique 281

Le théorème d’ampère appliqué sur une ligne de champ γ fermée montre qu’un
G
courant traverse γ : le champ B « tourbillonne » autour des courants comme c’est le
cas autour d’un fil infini.

— Comme il n’existe pas de monopôle magnétique, il n’y a pas d’équivalent magné-


tique à une charge ponctuelle. Contrairement aux lignes de champ électrique qui peu-
vent se couper en une charge ponctuelle, si des lignes de champ magnétique se cou-
pent, ce ne peut être qu’en un point de champ nul.
À titre d’exemple, on a tracé ci-après les lignes du champ créé par deux spires
circulaires identiques, de même axe Oz, parcourues par des courants de même inten-
sité, mais de sens opposés. Le point O est le centre du système.

G
Tous les plans contenant Oz sont des plans d’antisymétrie de D : B(O ) est dans
tous ces plans, donc porté par Oz, soit Bx (O ) = By (O ) = 0 . Le plan z = 0 est aussi un
G G G
plan de d’antisymétrie de D donc il contient B(O ) : Bz (O ) = 0 . Finalement B(O ) = 0 .
Des lignes de champ se coupent en O qui est un point de champ nul. Certaines
de ces lignes convergent vers O (celles qui se trouvent dans le plan z = 0 ), alors que
les lignes confondues avec l’axe Oz divergent à partir de ce point.

281
282 Partie IV.  Électromagnétisme

4. INDUCTANCE D’UN CIRCUIT


4.1 Inductance propre
Considérons un contour fermé γ orienté, placé dans un
G
champ magnétique B .
G
Le flux magnétique est par définition le flux de B à travers
n’importe quelle surface S s’appuyant sur γ, orientée en fonction
de l’orientation de γ selon la règle du tire-bouchon :
G G G
Φ= 
B ⋅ d2 S . Il ne dépend que de γ car B est à flux conser-
S (γ)
vatif.
Dans le cas où γ est un circuit parcouru par un courant d’intensité i (pas néces-
G
sairement stationnaire, nous le noterons en minuscule), il crée un champ B dont le
flux à travers S s’appuyant sur γ est un flux propre.
G
D’après le théorème d’Ampère, B est lié linéairement à i : si on multiplie i par
G
un scalaire λ, le champ B est lui aussi multiplié par λ et donc le flux Φ l’est également.
Autrement dit, Φ et i sont proportionnels :

Le flux propre à travers un circuit parcouru par un courant d’intensité i s’écrit Φ = Li .


Le coefficient de proportionnalité L est par définition l’inductance propre, en henry (H),
du circuit. Elle ne dépend que de sa géométrie.

L est un coefficient positif, car si i > 0 , le


G
champ B traverse γ dans le sens positif donc son
flux à travers le circuit est positif comme on le cons-
tate sur la figure ci-contre.
D’après, par exemple, le théorème d’Am-
père, la dimension du champ magnétique est :
[µ0 ] ⋅ [i ] , donc
[B ] = L
[Φ ] = [B ] ⋅ L2 = [µ0 ] ⋅ [i ] ⋅ L .
On en déduit la dimension d’une induc-
tance : [L ] = [ Φ ] / [ i ] = [µ0 ] ⋅ L .

Une inductance est homogène à µ0 fois une longueur. On a en conséquence


choisi pour l’unité de µ0 le henry par mètre.

Sauf si on utilise des bobinages, les inductances sont très faibles. Par exemple,
l’inductance propre d’une spire de 5 cm de rayon et de 1 mm d’épaisseur n’est que de
0,3 µH .

282
Chapitre 3.  Magnétostatique 283

Les valeurs des inductances propres des bobines de 1000 spires utilisées en
T.P sont de l’ordre de 50 mH. On obtient des valeurs plus importantes (pouvant at-
teindre 1 H), en introduisant un noyau de fer doux dans la bobine, mais la relation entre
Φ et i n’est plus linéaire.

Considérons à titre d’exemple un solénoïde de longueur ℓ, de rayon R, constitué


d’un enroulement régulier de N = n ℓ spires.

Nous allons calculer son inductance propre en négligeant les effets de bord.
� �
Le champ magnétique intérieur est uniforme et vaut Bint = µ0 niez , d’où le flux
� � µ N πR 2
Φ1 = Bint ⋅ S = µ0ni πR 2 = 0 i à travers une spire.

Le solénoïde possédant N spires, le flux magnétique total est :
µ0N 2πR 2
Φ = NΦ1 = i.

µ0N 2 πR 2
On en déduit l’inductance propre du solénoïde : L = , qui est bien ho-

mogène à µ0 fois une longueur.
On note la dépendance en N 2 de L au nombre N de spires : si on multiplie par
un scalaire λ ce nombre, le champ propre, donc le flux à travers une spire, est multiplié
par λ, mais comme il y a λ fois plus de spires, le flux total est multiplié par λ 2 .

Les effets de bord sont négligeables si ℓ >> R .

Effectuons une application numérique pour une longue bobine ( ℓ = 1 m ), de


4π ⋅ 10−7 ⋅ 10002 ⋅ π ⋅ (5 ⋅ 10 −2 )2
rayon R = 5 cm . On obtient L ≃ ≃ 10 mH , ce qui est un
1
bon ordre de grandeur pour les bobines utilisées en T.P.
On obtient cependant des valeurs jusqu’à 10 fois plus grandes avec des lon-
gueurs plus faibles ( ℓ ≃ 10 cm ) en enroulant des fils de cuivre sur plusieurs couches.
Ces fils doivent être isolés à l’aide d’un vernis.

Sauf en présence de hautes symétries comme c’était le cas ici, les calculs litté-
raux de champs magnétiques en tout point de S sont impossibles, et on détermine L
par intégration numérique.

283
284 Partie IV.  Électromagnétisme

4.2 Inductance mutuelle


Considérons maintenant deux circuits γ1 et γ 2 , parcourus par des courants res-
pectifs i1 et i 2 .

G
Le flux du champ magnétique B1 créé par γ1 à travers n’importe quelle surface
S2 s’appuyant sur γ 2 (orientée en fonction de l’orientation de γ 2 selon la règle du tire-
G G
bouchon) vaut Φ1/2 = 
B1 ⋅ d2 S2 .
S2 ( γ 2 )
G
Comme B1 est proportionnel à i1 , Φ1/2 l’est aussi : Φ1/2 = M12 i1 .
G G
De même γ 2 crée un flux à travers γ1 : Φ2/1 = B2 ⋅ d2 S1 = M21 i2 .
S1( γ1 )

On montre que les coefficients M21 et M12 sont égaux : M 21 = M12 = M . La


grandeur M est appelée inductance mutuelle des deux circuits, en henry (H). Sa valeur
absolue ne dépend que de la géométrie de l’ensemble.

Contrairement à une inductance propre, une inductance mutuelle peut être né-
gative, son signe dépendant de l’orientation relative des deux circuits.

Si on note Φ1 et Φ 2 les flux magnétiques totaux à travers γ1 et γ 2 , on a finale-


Φ1 = L1 i1 + M i 2
ment  .
Φ 2 = L2 i 2 + M i1

Considérons l’exemple de l’inductance mutuelle entre une bobine torique de N


spires à section carrée, parcourues par un courant d’intensité i 2 , et un fil infini con-
fondu avec l’axe Oz de la bobine, parcouru par un courant d’intensité i1 .

284
Chapitre 3.  Magnétostatique 285

On repère un point M par ses coordonnées cylindriques d’axe Oz. Nous avons
G µ i G
vu que le fil infini créait un champ B1 = 0 1 eθ .
2πr
G
Avec l’orientation choisie pour la bobine, le flux de B1 à travers une spire de la
bobine de surface S vaut :
R +a a / 2
G G µ0 i1 G G µ i 1
Φ11/2 =  B1 ⋅ d2 S2 =  2πr
eθ ⋅ ( − d2 S2 eθ ) = − 0 1
N 2π   r
dr dz
S S dr dz R −a /2
R +a a /2
µ0 i1 1 µ0a  R + a 
=−
2π  r
dr  dz = − ln
2π  R 
i1
R −a /2

1 µ0Na  R + a 
À travers toute la bobine, Φ1/2 = N Φ1/2 =− ln   i1 . On en déduit l’in-
2π  R 
µ0Na  R + a 
ductance mutuelle qui vaut M = − ln  .
2π  R 
On note la dépendance en N de M au nombre N de spires : si on multiplie par
G
un scalaire λ ce nombre, le champ B1 donc le flux à travers une spire n’est pas affecté
par la multiplication par λ, mais comme il y a λ fois plus de spires, le flux total est
multiplié par λ.

Le champ créé par la bobine torique a également déjà été calculé, et fournit, en
G G
B2 ext = 0

tenant compte de l’orientation de i 2 :  G µ0Ni2 G .
B2 int = − eθ
 2πr
G
Il semble difficile de parler du flux de B2 à travers le fil, mais il ne faut pas perdre
de vue que le fil infini n’est qu’une portion d’un circuit, fermé « très loin » de la bobine.
À l’intérieur de ce circuit, le champ créé par la bobine n’est non nul que sur la
surface d’une spire (zone grisée sur le schéma suivant), d’où :

285
286 Partie IV.  Électromagnétisme

� � µ0Ni 2 � � µ Na  R + a 
 B2 ⋅ d  −
2
Φ 2/1 = S1 = eθ ⋅ d2 S1 eθ = − 0 ln   i2 .
2πr � 2π  R 
S S dr d z

µ0Na  R + a 
On retrouve la valeur de l’inductance mutuelle M = − ln   . Avec les
2π  R 
conventions choisies pour l’orientation des deux circuits, elle est ici négative.

4.3 Énergie magnétique d’un ensemble de circuits


Pour un seul circuit, l’énergie magnétique est celle contenue dans le champ
B2 3
magnétique créé par ce circuit : Um =  2µ0
dV .
espace

Calculons cette énergie dans le cas du solénoïde de longueur ℓ, constitué d’un


enroulement régulier de N = n ℓ spires, en négligeant les effets de bord.
� N � � �
On a Bint = µ0 iez uniforme, et Bext = 0 d’où :

Bint 2 (µ Ni )2 1 µ0N 2 πR 2 2 1 2
Um = V = 0 2 πR 2ℓ , soit Um = i = Li .
2µ0 2µ0 ℓ 2 ℓ 2
1 2
On retrouve donc l’expression Um = Li de l’énergie emmagasinée par une
2
bobine.

1 2
L’énergie magnétique d’un circuit isolé s’écrit Um = Li .
2

1
Comme le flux à travers cette bobine est Φ = Li , on a aussi Um = i Φ.
2
N
1
Pour N circuits, on montre que Um =  2 ik Φk , Φk étant le flux total à travers
k =1
le circuit γ k .

286
Chapitre 3.  Magnétostatique 287

Dans le cas de deux circuits, cette expression devient :


1 1 Φ1 = L1 i1 + M i 2
Um = i1 Φ1 + i 2 Φ 2 , avec  , soit :
2 2 Φ 2 = L2 i 2 + M i1

1 1
Um = L1 i1 2 + L2 i2 2 + M i1 i 2 pour un ensemble de deux circuits. Le terme M i1 i 2 est
2 2
un terme de couplage énergétique entre les deux circuits.

B2 3
Comme l’énergie magnétique des deux circuits, Um =  2µ0
dV (avec
espace
G G G
B = B1 + B2 , champ magnétique total), est toujours positive, on a :
1 1 1  i  i 1 
Um = L1 i1 2 + L2 i 2 2 + M i1 i 2 ≥ 0 , soit Um = i 2 2  L1  1  2 + M 1 + L2  ≥ 0 .
2 2  2  i2  i 2 2 
i1 1 1
On doit en conséquence avoir, ∀x = , L1 x 2 + Mx + L2 ≥ 0 .
i2 2 2
1 1
Le discriminant du polynôme du second degré L1 x 2 + Mx + L2 doit donc être
2 2
négatif : ∆ = M 2 − L1L2 ≤ 0 .
On en déduit un majorant de M : M ≤ L1L2 .
On a ainsi deux cas limites :

— Pour M = 0 , on n’a pas de couplage entre les deux circuits.


— Pour M = L1L2 , le couplage est parfait.

Lorsque les deux circuits sont placés dans l’air, le couplage est médiocre, même
si on réalise pour les deux circuits un bobinage serré autour d’un même tore. En effet,
les pertes de flux sont importantes : ce n’est pas le même flux qui traverse chaque
spire.
Un tore ferromagnétique a pour propriété de canaliser le champ magnétique.
Le flux magnétique est quasiment le même à travers toutes les spires des deux circuits
bobinés autour du tore. Le couplage peut être considéré comme parfait. C’est le prin-
cipe du transformateur.

287
288 Partie IV.  Électromagnétisme

5. COMPARAISON DES CHAMPS


ÉLECTROSTATIQUE ET MAGNÉTOSTATIQUE
5.1 Sources du champ / Action du champ sur une particule chargée
G G
E est créé par les charges B est créé par les courants
G G G G G
force Fe = qE force Fm = qv ∧ B

5.2 Équations locales

 → G G G
 rot E = 0 M.F divB = 0 M.T

 G ρ  → G G
divE = M.G  rot B = µ0 J M.A
 ε0

5.3 Circulation
G
E à circulation conservative : Théorème d’Ampère :
G → G → G →
vE ⋅ d OM = 0 ⇔ E = − gradV v
B ⋅ d OM = µ0Iint
γ γ

Les lignes de champ ne peuvent pas être Les lignes de champ peuvent être
fermées. fermées

5.4 Flux
G
Théorème de Gauss : B champ à flux conservatif :
G G q G G

w E ⋅ d2 S = int
ε0 
w
B ⋅ d2 S = 0
S S

5.5 Continuité / discontinuité des champs


G G
D volumique E continu B continu
D linéique ∝ 1/ r au voisinage de D ∝ 1/ r au voisinage de D

5.6 Caractère polaire ou axial


G G
E est un vecteur polaire : son sens est B est un vecteur axial : son sens
indépendant de la règle d’orientation de dépend de la règle d’orientation de l’es-
l’espace pace

288
Chapitre 3.  Magnétostatique 289

5.7 Symétrie / antisymétrie plane


Si M appartient à π′ plan de symétrie de Si M appartient à π′ , plan de symétrie de
G G
la distribution de charges D, alors E (M ) la distribution de courants D, alors B(M )
appartient à π′ est orthogonal à π′
Si M appartient à π , plan d’antisymétrie Si M appartient à π′′ , plan d’antisymétrie
′′
de la distribution de charges D, alors de la distribution de courants D, alors
G G
E (M ) est orthogonal à π′′ B(M ) appartient à π′′

5.8 Invariance des distributions


Si D est invariante par une isométrie I
positive (translation, rotation), et
Si D est invariante par une isométrie I G G
(translation, rotation, symétrie plane), et M ′ = I (M ) , alors B(M ′) = I B(M )
G G Si D est invariante par une isométrie né-
M ′ = I (M ) , alors E (M ′) = I E (M )
gative S ′ (symétrie plane), et
G G
M ′ = S ′(M ) , alors B(M ′) = − S ′ B(M )
Si π′′ est un plan d’antisymétrie de la dis- Si π′′ est un plan d’antisymétrie de la dis-
tribution de charges D, et M ′′ = S ′′(M ) , où tribution de courants D, et M ′′ = S ′′(M ) ,
S′′ est la symétrie plane par rapport à où S′′ est la symétrie plane par rapport à
G G G G
π′′ , alors E (M ′′) = −S′′ E (M ) π′′ , alors B(M ′′) = S′′ B(M )

5.9 Énergie de D
G G
Elle est contenue dans le champ E créé Elle est contenue dans le champ B créé
ε0 E 2 3 B2 3
par D : Ue =  2
dV par D : Um =  2µ0
dV
espace espace

5.10 Distribution monopolaires / dipolaires


G
Si Q =  qi ≠ 0 : monopôle. E ∝ 1/ r 2 Pas de monopôle magnétique
G G G G
Si Q = 0 et p ≠ 0 : dipôle électrique. Si m ≠ 0 : dipôle magnétique.
G G
E ∝ 1/ r 3 B ∝ 1/ r 3
Champ (coordonnées sphériques) : Champ (coordonnées sphériques) :
2 p cos θ p sin θ 2µ m cos θ µ m sin θ
Er = , Eθ = , Eϕ = 0 Br = 0 3 , Bθ = 0 , Bϕ = 0
4πε0 r 3 4πε0r 3 4πr 4πr 3

289
290 Partie IV.  Électromagnétisme

Actions subies par un dipôle : Actions subies par un dipôle :


G G → G G G G G G → G G G G
F = ( p ⋅ grad)E , Γ = p ∧ E F = (m ⋅ grad)B , Γ = m ∧ B
G G G G
Ep = − p ⋅ E pour un dipôle rigide Ep = −m ⋅ B pour un dipôle rigide

Lignes de champ des dipôles :

290
291

[ÉLECTROMAGNÉTISME 4]

ÉLECTROMAGNÉTISME DANS
L’A.R.Q.S
1. INDUCTION ÉLECTROMAGNÉTIQUE DANS
L’A.R.Q.S
1.1 A.R.Q.S magnétique dans le vide
Approximation
G
En régime stationnaire, le champ magnétique, qu’on note B0 (M ) , est indépen-
G
M.T divB0 = 0

dant du champ électrique, et est régi par :  → G G . Une distribution D
M.A rot B0 = µ0 J0
G G
de courants J0 (P ) est la source de B0 (M ) en tout point M.
Par exemple, pour un solénoïde infini d’axe Oz et de rayon R, contenant n spires
par unité de longueur parcourues par un courant I, la solution en un point M du vide
G G G G
est B0 (M ) = µ0 nIez à l’intérieur du solénoïde, B0 (M ) = 0 à l’extérieur.
G
Si les courants de densité J0 (P, t ) gardent la même géométrie, mais sont main-
G G
tenant variables, la solution consistant à remplacer le champ B0 (M ) par B0 (M , t ) de-
vient une approximation de la solution exacte du problème (Approximation des Ré-
gimes Quasi-Stationnaires : A.R.Q.S), puisque les équations de Maxwell, en un point
M du vide, sont modifiées en régime variable. Dans l’A.R.Q.S :
G
M.T divB0 = 0
 G
 → G G → G 1 ∂E .
 M.A rot B 0 = 0 au lieu de rot B0 =
 c 2 ∂t
Par exemple, pour le solénoïde parcouru par un courant i(t) variable, la solution :
G G G G
B0 (M, t ) = µ0 ni (t )ez à l’intérieur du solénoïde, B0 (M, t ) = 0 à l’extérieur, n’est plus
qu’une approximation.
On conçoit que cette approximation sera d’autant meilleure que la fréquence
f = 1/ T caractéristique des fluctuations des courants est faible.
L’équation de Maxwell-Faraday montre qu’il y a désormais en M apparition d’un
G
G → G ∂B
champ électrique E1(M, t ) induit, tel que rot E1 = − 0 .
∂t

291
292 Partie IV.  Électromagnétisme

Si L est la taille caractéristique du système, et B0 l’ordre de grandeur du champ


G G
magnétique B0 (M , t ) créé par les courants de densité volumique J0 (M, t ) , on peut
donner, grâce à l’équation de M.F, l’ordre de grandeur E1 du champ électrique induit :
G
→ G B   LB 

 E1  ∂B0
rot E1 = O   , et = O  0   E1 = O  0  .
L ∂t T   T 
G G
Or le champ E1(M, t ) est lui-même source d’un champ magnétique B1(M, t ) qui
G
G → G 1 ∂E
s’ajoute à B0 (M , t ) , en vertu de l’équation de Maxwell-Ampère rot B = 2 . Cette
c ∂t
G G
→ G G 1 ∂E1 → G 1 ∂E
( )
équation donne ici rot B0 + B1 = 2
c ∂t
, soit rot B1 = 2 1 . On en déduit l’ordre
c ∂t
G  LE   L2B 
de grandeur B1 de B1(M, t ) : B1 = O  2 1  = O  2 02  .
c T   c T 
G G
Remarquons que B1(M, t ) est à son tour source de E2 (M, t ) d’après M.F, et
ainsi de suite, ce qui suggère qu’on puisse chercher la solution en régime quelconque
G G G G
B = B0 + B1 + B2 + ...
sous la forme de séries :  G G G .
E = E1 + E2 + ...
G G
B ≃ B0
Dans l’A.R.Q.S magnétique, on a  � � . L’A.R.Q.S est donc valable dans le
E ≃ E1
vide si B1 << B0  L2 << c 2T 2 , soit si L << λ = cT , où λ est la longueur d’onde de
l’onde électromagnétique rayonnée par le système, cette onde étant due au double
couplage entre le champ magnétique et le champ électrique (équations de M.F et M.A).
Ainsi, l’A.R.Q.S consiste à négliger le phénomène de propagation, c’est-à-dire
les retards à la propagation entre les différents points du système.
Cette approximation se traduit par l’écriture de M.A dans le vide sous la forme
 → � �
rot B = 0 comme en régime stationnaire : les champs ne se propagent plus.
Dans le cas du solénoïde, pour une fréquence f donnée du courant i(t), l’ap-
proximation ne sera valable dans son voisinage que si son rayon R vérifie :
R << λ = c / f . Sinon, le champ intérieur n’est plus uniforme, le champ extérieur n’est
plus nul, et il faut tenir compte, entre autres, d’un retard à la propagation.

Aspect énergétique

ε0E12 (M, t ) ε L2B 2


L’énergie électrique volumique ue = est de l’ordre de 0 2 0 .
2 T
B02 (M, t ) B2
L’énergie magnétique volumique um = est de l’ordre de 0 .
2µ0 µ0

292
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 293

ue  L2   L2   L 2 
On a donc = O ε0µ0 2  = O  2 2  = O    << 1.
 T   c T    
um λ

Conclusion

Dans l’A.R.Q.S magnétique ( L << λ ), le champ magnétique B(M, t ) dans le vide

M.T divB = 0

se calcule comme en régime stationnaire :  → � � , mais il apparaît un champ
M.A rot B ≃ 0

 → � ∂B
� M.F rot E = −
électrique induit E (M, t ) qui se calcule à l’aide de  ∂t .
M.G divE� = 0

L’énergie électrique due à ce champ est négligeable devant l’énergie magné-
tique : u ≃ um .

1.2 Étude d’un solénoïde dans l’A.R.Q.S magnétique 


Dans l’A.R.Q.S, le champ magné-
� �
tique est B0 (M, t ) = µ0 ni (t )ez à l’intérieur
d’un solénoïde d’axe Oz et de rayon R
comportant n spires par unité de lon-
� �
gueur, et B0 (M, t ) = 0 à l’extérieur. Cal-

culons le champ électrique induit E1(M, t ) à l’intérieur du solénoïde. Il vérifie :

divE1 = 0  di
 � Ξ(r , t ) = −n pour r < R
 → � ∂B0 � , avec  d t , en utilisant des coor-
 rot E1 = − = µ0 Ξ(r , t )ez Ξ(r , t ) = 0 pour r > R
 ∂t

données cylindriques d’axe Oz. La détermination de E1(M, t ) est analogue à celle d’un

champ magnétique B créé par des courants possédant la symétrie de révolution au-
� �
tour de Oz, de densité J (M, t ) = J (r , t )ez , avec J (r , t ) = J0 (t ) uniforme pour r < R et

� divB = 0

J ( r , t ) = 0 pour r > R . B est en effet régi par le même système  → � .

 rot B = µ0 J (r , t )ez

Le calcul de B a été fait dans le chapitre sur la magnétostatique, et donne :
 � µ 0 J0 r � � di r �
B = 2 eθ pour r ≤ R E1 = −µ0 n dt 2 eθ pour r ≤ R
  , puisque J ( r , t ) est
B� = µ0 J0R e� pour r ≥ R E� = −µ n di R e� pour r ≥ R
2 2

 
θ 1 0 θ
2r dt 2r
analogue à Ξ( r , t ) .

293
294 Partie IV.  Électromagnétisme

Une longueur ℓ de solénoïde contient l’énergie magnétique :

B0 2 3 1 �
Um = 2µ0
d V = µ0 n 2 i 2 πR 2 ℓ , puisque le champ magnétique intérieur µ0 ni (t )ez
2
V

est uniforme. Du fait de l’apparition de E1(M, t ) , il contient aussi une énergie électrique
R 2 2
ε0E12 3 ε 0 2 2  di  2 ε  di 
Ue =  2
dV =  8
µ0 n   r 2πr dr ℓ = 0 µ02n 2   πR 4 ℓ .
d
  t 16  dt 
V r =0
2
U e ε 0 µ 0  1 di  2
Ainsi = R . Pour un courant sinusoïdal de période T, on a :
Um 8  i dt 

 2π  di 2π  2π  U  R  2   R  2 
i (t ) = I0 cos  t = −I0 sin  t  , donc e = O   = O    , et on
dt cT  
T  T     
T Um λ

retrouve la condition de validité de l’A.R.Q.S : Ue << Um si R << λ .
Effectuons un bilan énergétique pour une longueur ℓ de solénoïde.
Les échanges se font à travers le cylindre d’axe Oz et de rayon R. La puissance
instantanée p reçue par le système est l’opposé du flux du vecteur de Poynting à tra-

vers cette surface latérale S , qui est orientée vers l’extérieur, donc selon er :
� � � �
E1(R, t )eθ ∧ B0 (R, t )ez 2 � di R
  
2
p = − SP ⋅ d S = − ⋅ d S er = n µ0ni ⋅ d2 S , soit :
µ0 dt 2
S S S
di R di R d 1 
p=n µ0 ni S = n µ0 ni 2πR ℓ =  µ0n 2 πR 2ℓi 2  .
dt 2 dt 2 dt  2 
Il est à noter qu’on a choisi, pour calculer le flux, de prendre le vecteur de Poyn-
ting en r = R − . Ce vecteur présente une discontinuité inacceptable en r = R du fait de

la discontinuité de B0 . En réalité, à l’extérieur du solénoïde, on ne peut pas négliger

� � → � 1 ∂E
le champ magnétique B1(M, t ) , induit par E1(M, t ) selon rot B1 = 2 1 (M.A), de-
c ∂t

vant B0 qui est nul !

Le flux de B0 à travers une spire du solénoïde est Φ1 = µ0ni ⋅ πR 2 donc il vaut

Φ = NΦ1 = µ0ni ⋅ N πR 2 à travers les N = nℓ spires d’une tranche de solénoïde de lon-


gueur ℓ, dont l’inductance propre est donc L = µ0n 2 πR 2ℓ .
d 1 2
Le bilan énergétique prend donc la forme attendue p = Li  : dans
dt  2 
l’A.R.Q.S, la puissance électromagnétique reçue par le solénoïde est stockée sous
1
forme d’énergie magnétique Um = Li 2 .
2

294
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 295

1.3 A.R.Q.S magnétique dans un conducteur / Effet de peau



La différence avec le cas du vide est que le champ induit E1(M, t ) crée des cou-
� �
rants volumiques dans le conducteur J1 = γE1(M, t ) , appelés courants de Foucault.

Ces courants induits sont différents des courants de densité J0 (M, t ) .
Par exemple, si on place un matériau métallique dans un solénoïde parcouru

par un courant variable, il apparaît des courants induits J1(M, t ) en un point M du ma-
tériau, alors qu’aucun courant n’est imposé dans le matériau par l’intermédiaire d’un
� � �
générateur : J0 (M, t ) = 0 . En revanche, en un point M des spires du solénoïde, J1(M, t )
� �
vient se superposer à J0 (M, t ) ≠ 0 .

→ � � � � ∂E1 
( )
M.A s’écrit donc dans le conducteur rot B0 + B1 = µ0 J0 + J1 + ε0  . Or les
∂t 

� � → � �
courants imposés J0 créent B0 : rot B0 = µ0 J0 . On a donc :
� �
→ � � ∂E   � ∂E 
rot B1 = µ0 J1 + ε0 1  = µ0  γE1 + ε0 1  . En introduisant de nouveau une fré-
 ∂t   ∂t 
1 ω
quence f = = caractéristique de l’évolution temporelle du système, l’analyse
T 2π

∂E1
ε0
∂t ε f  γ
d’ordres de grandeur montre que � = O  0  << 1 pour f << . Pour un bon
γE1  γ  ε 0

conducteur ( γ ≃ 107 S ⋅ m-1 ), cette condition devient f << γ / ε0 ≃ 1018 Hz . La loi d’Ohm
étant vérifiée jusqu’à 1012 Hz , l’A.R.Q.S magnétique dans un conducteur est en pra-
tique bien vérifiée jusqu’à cette fréquence, donc sur un grand domaine du spectre
électromagnétique, et notamment pour toutes les applications industrielles.

Pour un conducteur, l’A.R.Q.S magnétique, qui consiste à écrire M.A sous la


→ � � �
forme rot B ≃ µ0 J = µ0 γE , est valable dans un conducteur jusqu’à de très grandes
fréquences.

Les conséquences de l’A.R.Q.S dans un conducteur sont les suivantes :

 → �  � �
— div  rot B  = 0  divJ = 0 : J est à flux conservatif, et l’intensité i(t) du courant
 

(flux de J à travers une section) se conserve le long d’un tube de courant :
— Le courant i(t) est le même en tout point d’un circuit constitué de conducteurs placés
en série.
— La loi des nœuds reste valable dans l’A.R.Q.S.

295
296 Partie IV.  Électromagnétisme

� �
— div(γE ) = 0  divE = 0  ρ = 0 . Un conducteur est neutre dans l’A.R.Q.S. Cette
M.G
neutralité permet de montrer (cf. le chapitre « Les équations de Maxwell ») que l’ex-
� � �
pression de la force de Laplace dFL = id ℓ ∧ B reste valable dans l’A.R.Q.S.

Épaisseur de peau
 LB 
D’après M.F, l’ordre de grandeur du champ électrique induit est E1 = O  0  .
 T 

M.A montre que le champ B1(M, t ) induit est cette fois-ci créé par les courants dans le
→ � �
conducteur : rot B1 ≃ µ0 γE1, ce qui entraîne B1 = O [µ0 γLE1] = O µ0 γL2B0 / T  .
 
T �
Si L << , le champ propre B1(M, t ) créé par le conducteur est négligeable
µ0 γ

devant le champ B0 (M , t ) créé par le circuit extérieur (donc le phénomène d’auto-in-
duction est négligeable). En introduisant la pulsation ω = 2π / T , on définit l’épaisseur
2
de peau δ = .
µ0 γω

2
Si la dimension L caractéristique du conducteur vérifie L << δ = , où la
µ0 γω
longueur δ est appelée épaisseur de peau, le champ magnétique induit dans le con-
� �
ducteur est négligeable. Le champ B dans le conducteur est alors égal à B0 , champ

créé par les courants de densité J0 qu’on impose.

Sinon, il faut prendre en compte le champ induit et calculer le champ total


 �
divB = 0 (M.T) �
� �  → � ∂B
B ≠ B0 dans le conducteur en résolvant  rot E = − (M.F) .
 ∂t
 → � � � �
 rot B ≃ µ0 J = µ0 γE (M.A) (  divE = 0)

1.4 A.R.Q.S électrique dans le vide (complément hors-programme)


Approximation �
En régime stationnaire, le champ électrique, qu’on note E0 (M ) , est indépendant
 → � �
M.F rot E0 = 0
du champ magnétique, et est régi par :  � ρ . Une distribution D de
M.G divE0 = 0
 ε0

296
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 297


charges ρ0 (P ) est la source de E0 (M ) en tout point M.
Par exemple, pour un condensateur plan à base circulaire de rayon R, d’axe Oz
� σ �
et d’épaisseur e << R , la solution est E0 (M ) = ez en tout point du vide à l’intérieur
ε0
du condensateur.
Si les charges de densité ρ0 (P, t ) gardent la même géométrie, mais sont
� �
maintenant variables, la solution consistant à remplacer le champ E0 (M ) par E0 (M, t )
devient une approximation de la solution exacte du problème (Approximation des
Régimes Quasi-Stationnaires : A.R.Q.S), puisque les équations de Maxwell, en un
point M du vide, sont modifiées en régime variable. Dans l’A.R.Q.S :

 → � � → � ∂B
M.F rot E 0 = 0 au lieu de rot E 0 = −
 ∂t .

M.G divE = 0
 0
Par exemple, pour le condensateur dont les armatures sont connectées à un
� σ(t ) �
circuit dans lequel circule un courant i(t) variable, la solution E0 (M , t ) = ez à
ε0
l’intérieur des armatures, n’est plus qu’une approximation.
On conçoit que cette approximation sera d’autant meilleure que la fréquence
f = 1/ T caractéristique des fluctuations des charges est faible.
L’équation de Maxwell-Ampère montre qu’il y a désormais� en M apparition d’un
� → � 1 ∂E0
champ magnétique B1(M, t ) induit, tel que rot B1 = 2 .
c ∂t
Si L est la taille caractéristique du système, et E0 l’ordre de grandeur du champ

électrique E0 (M, t ) créé par les charges de densité volumique ρ0 (M , t ) , on peut
donner, grâce à l’équation de M.A, l’ordre de grandeur B1 du champ magnétique

→ � E   LE 
 B1  1 ∂E0
induit : rot B1 = O   , et 2 = O  20   B1 = O  2 0  .
L c ∂t c T  c T 
� �
Or le champ B1(M, t ) est lui-même source d’un champ électrique E1(M, t ) qui

� → � ∂B
s’ajoute à E0 (M, t ) , en vertu de l’équation de Maxwell-Faraday rot E = − .
∂t
� �
→ � � ∂B → � ∂B
( )
M.F donne ici rot E0 + E1 = − 1 , soit rot E1 = − 1 . On en déduit l’ordre
∂t ∂t
�  LB   LE2 
de grandeur E1 de E1(M, t ) : E1 = O  1  = O  2 02  .
 T   c T 
� �
Remarquons que E1(M, t ) est à son tour source de B2 (M , t ) d’après M.A, et
ainsi de suite, ce qui suggère que l’on puisse chercher la solution en régime
� � � �
E = E0 + E1 + E2 + ...
quelconque sous la forme de séries :  � � �
B = B1 + B2 + ...
� �
E ≃ E0
Dans l’A.R.Q.S électrique on a  � � . L’A.R.Q.S est donc valable dans le
B ≃ B1

297
298 Partie IV.  Électromagnétisme

vide si E1 << E0  L2 << c 2T 2 , soit si L << λ = cT , où λ est la longueur d’onde de


l’onde électromagnétique rayonnée par le système, cette onde étant due au double
couplage entre le champ magnétique et le champ électrique (équations de M.F et M.A).
Ainsi l’A.R.Q.S consiste à négliger le phénomène de propagation, c’est-à-dire
les retards à la propagation entre les différents points du système.
→ � �
Cette approximation se traduit par l’écriture de M.F sous la forme rot E = 0
comme en régime stationnaire : les champs ne se propagent plus.
Dans le cas du condensateur, pour une fréquence f donnée du courant i(t),
l’approximation ne sera valable dans son voisinage que si R << λ = c / f . Sinon, le
champ intérieur n’est plus uniforme et il faut tenir compte, entre autres, d’un retard à
la propagation.
Aspect énergétique
ε 0 E0 2 ( M , t )
L’énergie électrique volumique ue = est de l’ordre de ε0E02 .
2
B 2 (M, t ) L2E02
L’énergie magnétique volumique um = 1 est de l’ordre de .
2µ0 µ0c 4T 2
um  L2   L2   L 2 
On a donc =O 4 2
= O  2 2 = O    << 1.
 ε0µ0c T   c T    
ue λ
Conclusion

Dans l’A.R.Q.S électrique ( L << λ ), le champ électrique E (M, t ) dans le vide se
 → � �

calcule comme en régime stationnaire : M.F rot �E ≃ 0 , mais il apparaît un champ
M.G divE = 0

M.T divB = 0
�  �
magnétique induit B(M, t ) qui se calcule à l’aide de  → � 1 ∂E
M.A rot B =
 c 2 ∂t
L’énergie magnétique due à ce champ est négligeable devant l’énergie
électrique : u ≃ ue .

Étude d’un condensateur plan dans l’A.R.Q.S électrique 


Dans l’A.R.Q.S, le champ électrique
entre les armatures d’un condensateur plan à
base circulaire de rayon R, d’axe Oz et
d’épaisseur e << R est :
� σ(t ) � q (t ) �
E0 (M , t ) = ez = ez .
ε0 πR 2ε0
On néglige les effets de bord. q(t) est la
charge portée par l’armature placée dans le
plan z = 0 ; l’armature en regard, placée dans le plan z = e , porte la charge −q (t ) .

Calculons le champ magnétique induit B1(M, t ) à l’intérieur du condensateur.

298
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 299

G
divB1 = 0
 G 1 dq
Il vérifie  → G ∂E0 G , avec J (r , t ) = , en utilisant
 rot B1 = ε0µ0 = µ0J (r , t )ez πR 2 dt
 ∂t
des coordonnées cylindriques d’axe Oz.
G G
La détermination de B1(M, t ) est analogue à celle d’un champ magnétique B
G G
créé par des courants de densité J (M, t ) = J0 (t )ez uniforme.
G
Le calcul de B a été fait dans le chapitre sur la magnétostatique, et donne :
G µ J r G G µ 0 dq G
B = 0 0 eθ  B1 = r eθ .
2 2πR 2 dt
ε0 S ε πR 2
Le condensateur de capacité C = = 0 contient l’énergie électrique :
e e
ε 0 E0 2 3 ε q 2 (t ) q 2 (t ) 1 q 2 (t )e 1 q 2 (t )
Ue =  2
dV = 0
2  2  2
V = 2
2ε0 π R 4
πR 2e = =
2 ε0 πR 2 2 C
.
V πR ε0
 
G
Du fait de l’apparition de B1(M, t ) , il contient aussi une énergie magnétique :
R 2 2
B12 3 µ0  dq  2 µ e  dq 
Um =  2µ0
dV =  8 π2 4  dt 
R  
r 2πrdr e = 0 
16 π  dt 
.
V r =0
2
Um ε 0 µ 0  1 d q  2
Ainsi =   R .
Ue 8  q dt 
Pour une charge sinusoïdale de période T, on a :
 2π  dq 2π  2π  U  R  2   R  2 
q(t ) = q0 cos  t = −q0 sin  t  , donc m = O    = O    et on
T  dt T T  Ue  cT    λ  
retrouve la condition de validité de l’A.R.Q.S : Um << Ue si R << λ .

Effectuons pour terminer un bilan énergétique.


Les échanges se font à travers le cylindre d’axe Oz et de rayon R. La puissance
instantanée p reçue par le système est l’opposé du flux du vecteur de Poynting G à
travers cette surface latérale S qui est orientée vers l’extérieur, donc selon er :
G G G G
E0 (R, t )ez ∧ B1(R, t )eθ 2 G 1 dq 2

p = − SP ⋅ d2 S = −  µ0
⋅ d S er = 
2
2π ε 0 R 3
q
dt
⋅ d S soit :
S S S

1 dq 1 dq d 1 e  d  1 q2 
p= 2 3
q S = 2 3
q 2πR e =  2
q2  =  .
2 π ε0R dt 2 π ε0R dt dt  2 ε0 πR  dt  2 C 
d  1 q2 
Le bilan énergétique prend donc la forme attendue p =   : dans
dt  2 C 
l’A.R.Q.S, la puissance électromagnétique reçue par le condensateur est stockée sous
1 q2
forme d’énergie électrique U e = .
2 C

299
300 Partie IV.  Électromagnétisme

2. F.E.M ET LOIS EXPÉRIMENTALES DE


L’INDUCTION DANS l’A.R.Q.S MAGNÉTIQUE
2.1 Force électromotrice
Définition
Cherchons à quelle condition il est possible de faire circuler des courants en
régime établi (par exemple des courants sinusoïdaux), d’intensité i(t), dans une spire
filiforme métallique de conductivité γ 0 , assimilable à un contour fermé γ. Comme nous
l’avons vu dans le modèle de Drude, les électrons libres, de charge q = −e , sont sou-
G G
mis à la force électrique Fchamp/e− = qE , et à la force de « frottement » exercée par le
réseau cristallin. Le travail de ces forces sur un électron qui parcourt la boucle γ est
G → G →
v v
Wchamp/e− = q E ⋅ d OM et Wcristal/e− = Fcristal/e− ⋅ d OM < 0 . Le théorème de l’éner-
γ γ

gie cinétique appliqué à l’électron libre, sur un tour, dans le référentiel du laboratoire
supposé galiléen, donne ∆Ec = Wchamp/e− + Wcristal/e− . Si Wchamp/e − = 0 , on a ∆Ec < 0 :
les électrons libres perdent de l’énergie à chaque tour, les courants ne peuvent être
que transitoires et finissent par s’annuler. Il faut donc pour avoir des courants établis
G →
v
que W = Wchamp/e− = q E ⋅ d OM ≠ 0 , donc que la circulation du champ électrique ne
γ

soit pas nulle sur un contour fermé.


Plus généralement :

G →
On appelle force électromotrice (f.e.m) la circulation e = v E ⋅ d OM sur un contour
γ

fermé γ quelconque. e, homogène à un potentiel électrique, est en volt (V).


G
Pour avoir e ≠ 0 , il ne faut pas que E soit à circulation conservative, contraire-
G  →
ment au champ E = − gradV en régime stationnaire.

Nous allons montrer que la f.e.m ainsi défi-


nie est bien celle qui caractérise un générateur de
tension en électrocinétique.
Reprenons pour cela l’exemple de la spire.
En présence d’une f.e.m, un courant d’intensité i
parcourt la spire filiforme de section S .
Cherchons la relation entre e et i = J S . On
G G
a J = γ 0E pour un conducteur, donc :

300
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 301


� → J → J JS dℓ dℓ
e= � E ⋅ d OM = � γ0
⋅ d OM = � γ0 dℓ = � γ0 S dℓ = � γ0 S i =i � γ0 S , puisque dans
γ γ γ γ γ γ
l’A.R.Q.S l’intensité i est la même en tout point de la spire. On reconnaît la résistance
dℓ
dR = du tronçon de spire de longueur dℓ .
γ0 S

� →
La définition de la f.e.m e = � E ⋅ d OM permet bien de retrouver la relation
γ
e = Ri pour un conducteur de résistance R soumis à la f.e.m e d’un générateur, e et i
étant orientés dans le même sens.

Le champ électrique n’étant plus à circulation conservative, on peut l’écrire :


� → � �
E = − gradV + Em . Le champ Em à circulation non-conservative est appelé champ
électromoteur. Il provient de phénomènes électriques, chimiques, de différences de

températures, de l’induction… La force qEm s’exerçant sur un porteur de charges est

→ →
non conservative, alors que la force −q gradV = − grad(qV ) est associée à l’énergie
potentielle qV, où V est le potentiel électrique.
� → → → � →
Sur un contour fermé γ : e = E ⋅ d OM = � � − gradV ⋅ d OM + � Em ⋅ d OM : la
γ γ γ
���
�����

0
� �
f.e.m du contour est égale à la circulation de Em , ou de E , sur le contour fermé.
Ce n’est plus vrai si l’on ne considère qu’une portion AB d’un circuit conducteur.
B
� →
On définit la f.e.m qui apparaît entre ces deux points par e = Em ⋅ d OM . On a alors 
A
B
� → B → → B � →
  
E ⋅ d OM = − gradV ⋅ d OM + Em ⋅ d OM , or, comme on l’a vu précédemment :
��
A ��� ���
A �����
� ��
A ����

RAB i VA −VB ≠ 0 e
B
� →
 E ⋅ d OM = RAB i , où R AB est la résistance de la portion AB, où i est le courant orienté
A
de A vers B. On retrouve donc la loi d’Ohm « généralisée » VA − VB = RAB i − e dans
une portion de circuit qui contient un générateur.

301
302 Partie IV.  Électromagnétisme

2.2 Lois expérimentales de l’induction


On se place dans le domaine de l’A.R.Q.S magnétique : on crée un champ ma-
gnétique avec des circuits ou avec des aimants. On peut, par exemple, utiliser un ai-
mant pour créer un champ magnétique dans une spire conductrice de résistance R.
G
Le moment magnétique m de l’aimant est aligné avec l’axe de la spire.
Plusieurs expériences sont réalisables : on peut déplacer l’aimant (la spire res-
tant fixe dans R labo ), ou déplacer la spire (l’aimant restant fixe dans R labo ), ou encore
déplacer simultanément l’aimant et la spire. Un capteur permet de détecter un courant
dans la spire, ainsi que son sens. On constate que si l’aimant et la spire sont écartés
l’un de l’autre à la vitesse v, un courant apparaît dans la spire, identique que ce soit
l’aimant qui se déplace par rapport à R labo , la spire, ou les deux :

302
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 303

Faraday a déduit sa loi à partir d’expériences du même type (avec un circuit


alimenté pour créer le champ magnétique au lieu d’un aimant) :
� �
Si Φ =  B ⋅ d2 S est le flux magnétique à travers un contour fermé γ, une variation
S (γ)


de ce flux génère le long du contour la f.e.m e = − (loi de Faraday).
dt

Dans le cas de la spire, qui constitue un circuit fermé, il


apparaît un courant i = e / R . La f.e.m e et le courant i sont orien-
tés dans le sens choisi pour γ. L’orientation de la surface S s’ap-
puyant sur γ, qui conditionne le signe du flux, se fait à partir de
celle de γ en appliquant la règle du tire-bouchon.

Lenz précisa la loi de Faraday : « la f.e.m induite tend par ses conséquences à
s’opposer aux causes qui l’ont produites » (loi de Lenz).

Illustrons la loi de Lenz par l’exemple de l’induction de Lorentz :

En se déplaçant vers la droite, le circuit reçoit un flux positif, mais décroissant,


de la part de l’aimant fixe. La f.e.m induite est donc positive et crée un courant i(t)
positif. Ce dernier est responsable d’un flux propre positif qui tend en effet à s’opposer
à la diminution du flux. À cet effet électrique, s’ajoute un effet mécanique :

La spire est parcourue par un courant, et comme elle est placée dans le champ
� � �
de l’aimant, elle subit des forces de Laplace dFL = i d ℓ ∧ B . En examinant ces forces
dans un plan méridien (plan contenant l’axe de la spire), on s’aperçoit que leur résul-
tante est portée par l’axe de la spire, et qu’en effet elle s’oppose au déplacement de
cette dernière.

303
304 Partie IV.  Électromagnétisme

La loi de Lenz est une loi de modération due à la présence du signe « moins »
dans la loi de Faraday.
Le champ magnétique étant ici stationnaire, son flux à travers la spire ne dé-
pend que de la position de cette dernière, repérée par l’abscisse x.
dΦ dΦ dx dΦ
Comme = = v = f ( x ) v est proportionnelle à v, la f.e.m e, le cou-
dt dx dt dx
� � �
rant i et donc FL le sont également : FL = −λv , avec λ > 0 , est équivalente à une force
de frottement linéaire (mais avec λ qui dépend de x). L’apparition de cette force de
frottement dans un conducteur en mouvement auquel on applique un champ magné-
tique intense, constitue le principe du freinage électromagnétique.

3. INDUCTION DE NEUMANN ET APPLICATIONS


3.1 Démonstration de la loi de Faraday


→ ∂B
L’équation de Maxwell-Faraday rot E = − montre qu’un champ magné-
∂t
tique dépendant du temps est source d’un champ électrique induit.
La loi de Faraday découle de cette équation locale, dans le cadre de l’induction
de Neumann (conducteur fixe dans un champ magnétique dépendant du temps). En
� →
�
effet, la f.e.m e = E ⋅ d OM qui apparaît sur un contour fermé γ quelconque, s’écrit
γ


→ � � ∂B 2 �
en vertu du théorème de Stokes : e =  rot E ⋅ d2 S = −  ∂t
⋅ d S , or le flux du
S (γ) S (γ)

champ magnétique à travers γ ne varie que parce que B varie dans le temps :
� � � �
dΦ = 
B(M , t + dt ) ⋅ d2 S − 
B(M , t ) ⋅ d2 S . Le contour γ étant fixe par rapport au
S (γ) S (γ)

référentiel du laboratoire, les points de la surface S ( γ ) sur laquelle on intègre pour



calculer le flux de B sont les mêmes à t qu’à t + dt . On peut donc écrire :

� � �  ∂B 2 � 


  
2
 B( M , t + dt ) − B( M , t )  ⋅ d S =
dΦ =   ⋅ d S dt . On a bien e = − .
 ∂t  dt
S (γ)  S ( γ ) 

3.2 Chauffage par induction dans un conducteur cylindrique


On considère un conducteur cylindrique massif, de conductivité γ 0 , de rayon R,
d’axe Oz et de hauteur ℓ très grande devant R de façon à pouvoir négliger les effets
de bord : les champs seront calculés dans le cas d’un cylindre infini. Le conducteur est
placé à l’intérieur d’un solénoïde qui crée un champ magnétique variable :

304
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 305

G G
B0 (t ) = B0 cos(ωt )ez uniforme.
Avec ces hypothèses, le problème pos-
sède la symétrie cylindrique : il y a invariance
par rotation autour de Oz et par translation se-
lon Oz.
On cherche à calculer les courants de
Foucault induits dans le conducteur, ainsi que
la puissance dissipée par effet Joule.
G
On suppose que le champ B1 induit est
G
négligeable devant B0 . Le champ magnétique
G G
total vaut donc B0 (t ) = B0 cos(ωt )ez en tout
point du vide ou du conducteur.
Ce champ dépendant du temps, on a apparition d’un champ électrique induit
G
E1(M, t ) , qui vérifie, aussi bien dans le vide que dans le conducteur (où l’on a ρ = 0
G
divE1 = 0
 G
dans l’A.R.Q.S) :  → G ∂B0 G . C’est le même système que celui
 rot E1 = − = B0 ω sin(ωt )ez
 ∂t
régissant un champ magnétique créé par des densités volumiques de courants
G
G G divB = 0

J = Jez :  → G G.
 rot B = µ0 J

On aura donc des solutions analogues, à condition d’imposer la symétrie cylin-


G G G G
drique à la distribution D de courants de densité J = Jez : J = J (r , t )ez . Dans un tel
problème, pour tout point M hors de l’axe Oz, le plan contenant M et Oz est un plan de
G
symétrie π′ de la distribution de courants, donc B(M, t ) est orthogonal à ce plan :

305
306 Partie IV.  Électromagnétisme

� �
B(M, t ) = Bθ (r , θ, z, t )eθ . D étant invariante par toute rotation autour de Oz et par toute
� �
translation selon Oz, Bθ est indépendant de θ et de z : B(M, t ) = Bθ (r , t )eθ .
� �
On en déduit que le champ électrique induit est de la forme E1(M , t ) = E1θ (r , t )eθ
dans le problème étudié. Pour le calculer, on utilise la loi de Faraday :
� → d � �
�
e = E1 ⋅ d OM = −
dt 
B0 ⋅ d2 S , qui est analogue au théorème d’Ampère :
γ S (γ)

� 
→ � �
� B ⋅ d OM = µ0  J ⋅ d2 S .
γ S (γ)

On prend pour contour fermé γ une ligne de champ,


soit un cercle d’axe Oz et de rayon r. On a alors :
� → � �
� �
E1 ⋅ d OM = E1θ ( r , t )eθ ⋅ dℓeθ = ℓE1θ (r , t ) = 2πrE1θ (r , t )
γ γ
� �
car r est constant le long de γ. B0 (t ) = B0 cos(ωt )ez étant
uniforme, on a, avec l’orientation choisie pour γ :

d � � d � � d

dt  B0 ⋅ d2 S = −
dt
(
B0 ⋅ S = −
dt
) ( )
B0 cos(ωt )πr 2 = B0 ω sin(ωt )πr 2 .
S (γ)
� 1 �
Finalement E1(M, t ) = B0ω sin(ωt )r eθ dans le conducteur et dans le vide. Dans
2
le conducteur, ce champ crée des courants de Foucault de densité volumique :
� � 1 �
J1(M, t ) = γ 0E1(M, t ) = γ 0B0 ω sin(ωt )r eθ .
2
La puissance moyenne reçue par les porteurs de
charges de la part du champ s’obtient par intégration sur
le volume V du conducteur : PJ =  γ0 E12 d3V .
V
Comme la puissance volumique moyenne :
γ
γ 0 E12 = 0 B02ω2 sin2 (ωt ) r 2 ne dépend que de r, on
4 �����
1/2
peut intégrer sur une couronne cylindrique entre r et
r + dr , de volume 2πr dr ℓ et on obtient :
R
γ0 2 2 π
PJ =
8
B0 ω  r 2 ⋅ 2πr dr ℓ =
16
γ 0B02ω2ℓR 4 .
r =0
Du fait de l’inertie thermique du conducteur, seule la puissance moyenne inter-
vient, et on atteint un régime stationnaire dans lequel toute la puissance moyenne
reçue est dissipée par effet Joule. C’est le principe du chauffage par induction.

306
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 307


Il reste à chercher à quelle condition le champ magnétique propre B1 créé par
� �
les courants induits de densité J1 est bien négligeable devant B0 .

Pour calculer B1 , commençons par remarquer qu’une couronne cylindrique du
conducteur, comprise entre r ′ et r ′ + dr ′ , parcourue par des courants orthoradiaux de
� �
densité J1(M, t ) = J1(r ′, t ) eθ , est équivalente à un solénoïde de rayon r ′ . Le champ ma-
gnétique créé par un tel solénoïde est nul en tout point situé à l’extérieur du solénoïde,
donc à une distance r > r ′ de l’axe Oz.
En un point situé dans le vide ( r ≥ R ), donc à l’extérieur de tous ces solénoïdes,

le champ magnétique B1 est ainsi nul. En un point dans le conducteur ( r ≤ R ), le
champ magnétique est la somme de tous
les champs créés par les solénoïdes de
rayons r ′ > r , or ces champs sont portés
� �
par ez : B1 est donc, en négligeant les ef-
� �
fets de bord, de la forme B1 = B1(r , t )ez .
On peut calculer B1(r , t ) en appli-
quant le théorème d’Ampère sur le contour
rectangulaire γ = ABCD situé dans un plan
� →
méridien : � B1 ⋅ d OM = µ0iint .
γ

La circulation est nulle sur le segment CD extérieur au conducteur, ainsi que


sur les segments BC et DA pour lesquels le déplacement élémentaire est orthogonal
� →
�
au champ magnétique. On a donc B1 ⋅ d OM = B1(r , t ) ⋅ ℓ .
γ

L’intensité iint s’obtient en sommant les di1 = J1(r ′, t )ℓdr ′ traversant le contour
R R
1
entre r ′ et r ′ + dr ′ : iint =  J1(r ′, t )ℓdr ′ =  2
γ 0 ωB0 sin(ωt )ℓr ′dr ′ . On obtient :
r ′=r r ′= r
1
iint = γ 0 ω(R 2 − r 2 )ℓB0 sin(ωt ) .
4
� 1 �
On en déduit B1(r , t ) = µ0 γ 0 ω(R 2 − r 2 )B0 sin(ωt )ez . Le champ propre est maxi-
4
� 1 �
mal sur l’axe Oz où il vaut B1(0, t ) = µ0 γ 0 ωR 2B0 sin(ωt )ez .
4
� � 1
Finalement, B1 est négligeable devant B0 si son amplitude µ0 γ 0 ωR 2B0 est
4
1 2 2
très faible devant B0 , soit si µ0 γ 0 ωR 2 << 1 ⇔ R << = δ 2 , où δ =
4 µ0 γ 0 ω µ0 γ 0 ω

307
308 Partie IV.  Électromagnétisme

est l’épaisseur de peau du conducteur. On retrouve bien le résultat obtenu au 1.3 par
analyse d’ordres de grandeur.
Même à 50 Hz, l’épaisseur de peau d’un bon conducteur est faible (de l’ordre
de 1 cm), ce qui fait qu’en pratique cette condition n’est pas vérifiée : le calcul de la
puissance dissipée par effet Joule mené ici ne s’applique pas aux chauffages par in-
duction.

3.3 Conducteur cylindrique semi-infini / Épaisseur de peau 


L’épaisseur de peau δ étant faible, considérons un matériau parallélépipédique
dont les trois dimensions sont grandes devant δ, placé dans un solénoïde dont le
� �
champ intérieur Bsol. (t ) = Bsol. cos(ωt )ez est uniforme en l’absence du matériau.
En négligeant les effets de bord, on se ramène au calcul du champ électroma-
gnétique dans un conducteur semi-infini qui occupe le demi-espace x > 0 .

Les équations régissant dans l’A.R.Q.S le champ électromagnétique dans le


 �
divB = 0 �
 → � ∂B
conducteur sont :  rot E = − .
 ∂t
 → � � � �
 rot B ≃ µ0 J = µ0 γE (  divE = 0)
� �
Les deux dernières équations couplent E et B . Pour découpler le système, on
→  → �  → � � � → �
utilise la relation rot  ���
rot B  = grad( div
� B ) − ∆B , soit ∆B = −µ0 γ ���
rot E .
 � 
=0

 0 
=µ γE
=−
∂B
∂t

� ∂B
On obtient l’équation de Kelvin ∆B = µ0 γ , connue aussi comme équation de
∂t
diffusion, et que l’on retrouve dans d’autres domaines de la Physique (ondes ther-
miques, écoulements visqueux…).
En négligeant les effets de bord, le système est invariant par toute translation
� �
� � ∂ 2B ∂B
selon Oy ou Oz, donc B(M, t ) = B( x, t ) et l’équation de Kelvin s’écrit = µ 0 γ . Le
∂x 2 ∂t

308
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 309

champ imposé est sinusoïdal, or les équations de Maxwell sont linéaires : après un

régime transitoire, B( x, t ) varie sinusoïdalement dans le temps en tout point du con-
� � � �
ducteur : B( x, t ) = b( x )cos [ ωt + ϕ( x )] = Re b( x )e [
i ωt +ϕ( x )] 
= Re b( x )ei ϕ( x )ei ωt  .
   
� �
� � � 3
� ∂ B2
∂B
Posons B( x, t ) = β( x )e , avec β( x ) ∈ C�. B( x, t ) est solution de
i ωt
= µ0 γ
∂x 2 ∂t

2
d β �
d’où 2
= i µ0 γωβ . On cherche des solutions de cette équation différentielle linéaire
dx
� �
du second ordre à coefficients constants sous la forme β( x ) = λe rx .
π
i
r est donc solution de l’équation caractéristique : r 2 = i µ0 γω = e 2 µ0 γω , d'où
π
i
4 1+ i 1+ i 2
r = ±e µ0 γω = ± µ0 γω = ± , où δ = est l’épaisseur de peau du con-
2 δ µ0 γω

� � � (1+ i ) x � −(1+ i ) x
ducteur. La forme la plus générale pour β( x ) est donc β( x ) = λ +e δ +λ e

δ , et

 x  x
� � � x i  ωt + δ  � − x i  ωt − δ 
pour le champ magnétique : B( x, t ) = β( x )e = λ + e δ e 
i ωt  + λ e δe 

.

Le terme e x / δ diverge pour x → +∞ et ne correspond pas à une solution phy-


� �
siquement acceptable pour un matériau infini selon Ox : on a λ + = 0 . Pour un matériau
� �
d’épaisseur ℓ, l’approximation λ + = 0 est excellente si ℓ >> δ .
 x  x
� � − x i  ωt − δ  −
x i ωt −
 δ  �
On a donc B( x, t ) = λ −e δ e   = B e δe 
0 ez en écrivant que le champ
� �
magnétique en x = 0 est, comme Bsol. (t ) , porté par ez , et est donc de la forme :
� �
B( x = 0, t ) = B0ei ωt ez .
On détermine facilement le champ électrique dans le conducteur grâce à l’équa-
1 ∂  �
x
� 1 → � 1 ∂B z � −(1+ i )
tion de M.A : E = rot B = − ey = − B0e δ e i ωt  e , soit :
y
µ0 γ µ0 γ ∂x µ0 γ ∂x  
 
π
x i x x  x π
� 1+ i −(1+ i ) � 2e 4 −(1+ i ) � ω − i  ωt − +  �
δ 4
E= B0e δ e i ωt e =
y B0e δ e i ωt e
y = B0e δ e  ey . On
µ 0 γδ 2 µ0 γ
µ0 γ
µ0 γω
� x
x �
B( x, t ) = B0e δ cos  ωt −  ez

� �   δ
repasse en réel pour obtenir B et E :  .
x
� ω −  x π�
E ( x, t ) = B0e cos  ωt − +  ey
δ
 µ0 γ  δ 4
Ces champs sont évanescents : leur amplitude décroît avec la profondeur dans

309
310 Partie IV.  Électromagnétisme

le conducteur. Représentons par exemple Bz ( x, t ) en fonction de x à t fixé. C’est le


produit d’une fonction cos ( ωt − x / δ ) qui varie entre −1 et 1, de période ∆x = 2πδ , et

de la fonction B0e − x / δ : la courbe est comprise entre les deux enveloppes ±B0e − x / δ ,
qu’elle touche tous les ∆x = 2πδ .

À une profondeur égale à la période spatiale des oscillations ∆x = 2πδ , l’ampli-


� �
tude du champ est déjà très faible devant B0 . Les courants de densité J = γE ne cir-
culent que dans la « peau » d’épaisseur caractéristique δ.
On retrouve que pour x << δ , on a e − x / δ ≃ 1 : le champ dans cette zone du con-
ducteur reste le même qu’en x = 0 . Le champ induit y est négligeable (on peut négliger
� �
l’auto-induction). Pour x >> δ , les champs E et B sont nuls : dans cette zone, le
champ magnétique induit annule le champ extérieur.

Le calcul de la puissance moyenne dissipée par effet Joule pour un chauffage


par induction est maintenant beaucoup plus réaliste. Pour une portion cylindrique du
conducteur d’axe parallèle à Oz et de section S dans le plan x = 0 , on obtient :
∞ x
ω −2  x π
PJ =  γ E 2 S dx , avec E 2 =
µ0 γ
B02e δ cos2  ωt − +  , soit :
 δ 4
x =0 ���������
=1/2
∞ x
1 ω 2 −2 δ ω 2 ω
PJ =
2 µ0
B0 S  e δ dx =
4 µ0
B0 S =
8µ03 γ
B02 S .
x =0
On constate que l’on ne doit pas prendre un trop bon conducteur puisque PJ

décroît avec γ. On prend souvent du fer ( γ = 9,96 ⋅ 106 S ⋅ m-1 ). Pour des champs ma-
gnétiques obtenus sur une table de cuisson de l’ordre de 3 mT et de fréquence 20 kHz,
on obtient pour un fond de casserole de 10 cm de rayon :
2π × 20 ⋅ 103
PJ ≃ −7 3 6
(3 ⋅ 10−3 )2 × π × (0,1)2 = 8 W , bien trop faible pour chauf-
8(4π ⋅ 10 ) × 9,96 ⋅ 10
fer rapidement un aliment. Il faut en réalité utiliser des matériaux ferromagnétiques
pour obtenir des puissances plus élevées.

310
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 311

4. INDUCTION DE LORENTZ ET APPLICATIONS


4.1 Exemple fondamental des rails de Laplace
Présentation
Les rails sont des barres conductrices parallèles posées sur un support hori-
zontal. Une tige conductrice peut se déplacer sur les rails en leur restant orthogonale.
Le circuit électrique γ est fermé grâce à une barre conductrice CD fixe. Un générateur
délivrant une tension constante e0 est intégré au circuit.
La tige possède une masse m, une résistance électrique R entre les points A et
B de contact avec les rails, supposée très supérieure à la résistance du reste du circuit.
� �
On repère par x = OG la position de la tige on note v = xeɺ x sa vitesse. On lui applique
� �
une force constante F0 = F0ex .

� �
Le système est placé dans un champ magnétique B = Bez vertical, uniforme et
constant.
On tient compte ici de l’inductance propre L du circuit, supposée constante (bien
que la géométrie du circuit varie du fait du déplacement de la barre), et d’une force de
� �
frottement fluide F = −λv s’exerçant sur la tige. On néglige en revanche tout frotte-
ment solide.
Établissement des équations
Commençons par établir l’équation électrique
du circuit. Comme la tige se déplace, la surface du cir-
� �
cuit varie ainsi que le flux Φ = B ⋅ S = Bax , en tenant

compte du fait que B est uniforme, et de l’orientation
de la surface, déduite de celle de γ par la règle du tire-
bouchon. Il apparaît donc dans le circuit une f.e.m don-

née par la loi de Faraday e = − = −Baxɺ = −Bav . Le
dt
circuit équivalent est représenté ci-contre.

311
312 Partie IV.  Électromagnétisme

di di
La loi des mailles fournit e + e0 = Ri + L , soit e0 − Bav = Ri + L (1) , équa-
dt dt
tion électrique.
La tige est soumise à son poids, compensé par la réaction normale des rails, à
� � � �
la force de frottement F = −λv , à la force appliquée F0 = F0ex , et à la force de Laplace
� B � � → �
 �

FL = i d ℓ ∧ B = i AB ∧ B = iaBex . L’équation mécanique est obtenue en projetant sur
A
Ox le théorème du centre d’inertie appliqué à la tige dans le référentiel du laboratoire
dv
supposé galiléen : m = F0 − λv + iaB (2) , équation mécanique.
dt

Les équations (1) et (2) sont des équations différentielles linéaires couplées :
l’équation électrique (1) fait intervenir la vitesse v, grandeur mécanique, via la f.e.m
induite, et l’équation mécanique (2) fait intervenir l’intensité i, grandeur électrique, via
la force de Laplace. Il y a couplage électromécanique.

Bilan énergétique

C’est le champ magnétique B qui est à l’origine du couplage. Sans lui, pas de
f.e.m induite ni de force de Laplace.
Pour obtenir un bilan énergétique, on élimine B entre les deux équations, en
effectuant la combinaison linéaire i ⋅ (1) − v ⋅ (2) :
dv di
e0 i − Bavi − mv = Ri 2 + Li − F0v + λv 2 − iaBv , soit :
dt dt
e0 i + F0v = Ri 2 + λv 2
��������� ���
������ ������� �������
puissance électrique puissance électrique puissance dissipée puissance dissipée
fournie par le générateur fournie par l'opérateur par effet joule par frottement

d 1 2 d 1 
+  Li  + mv 2 
dt  2  dt  2 �
������� ��� �����
puissance puissance
magnétique cinétique

Un bilan de puissance (ou d’énergie) pour un système (ici électromécanique)


s’écrit sous la forme preçue = pdissipée + pstockée .

La puissance reçue par le système (à la fois électrique et mécanique) qui n’est


pas dissipée (ici par effet Joule et par frottement) permet d’augmenter l’énergie du
système (ici magnétique et cinétique) : c’est une puissance stockée. La puissance re-
çue et la puissance stockée sont algébriques, la puissance dissipée est positive.
La conversion électromécanique permet de transformer de l’énergie mécanique
en énergie électrique et vice-versa.

312
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 313

Fonctionnement moteur / générateur


Revenons maintenant à la combinaison qui a permis d’éliminer le champ ma-
gnétique : ei = −Bavi = −iaBv = −FLv soit ei + FLv = 0 . Cette relation peut se mettre
sous la forme :

pL + ei = 0 . La somme de la puissance des actions de Laplace et de la puissance


fournie par la f.e.m induite dans le circuit est nulle.

Cette relation reste vraie pour tout mouvement de conducteur dans un champ
magnétique stationnaire (induction de Lorentz), que ce soit un mouvement de transla-
tion ou de rotation.
— Si pL > 0 , les actions de Laplace sont motrices, mais alors ei < 0 : la puissance
fournie par le générateur de f.e.m e est négative, ce qui signifie que de la puissance
électrique est prélevée au circuit. On parle de fonctionnement moteur. Le rendement
p
de cette conversion est L = 1 .
−ei
— Si ei > 0 , le générateur de f.e.m e fournit de la puissance au circuit, mais alors
pL < 0 : les actions de Laplace sont résistantes et prélèvent de la puissance au sys-
tème mécanique (freinage). On parle de fonctionnement générateur. Le rendement de
ei
cette conversion est = 1.
− pL
Ces rendements sont unitaires lors de la conversion électrique → mécanique
et de la conversion mécanique → électrique, mais les pertes interviennent en amont
et en aval (résistance des circuits, frottements).

On peut illustrer le fonctionnement moteur et générateur par l’exemple des rails


de Laplace en régime stationnaire :
— On obtient un mouvement de la tige sans exercer de forces ( F0 = 0 ). En effet :
e0 − Bav = Ri (1) e0
 v= ∝ e0 .
0 = −λ v + iaB (2) aB +
λR
aB
La vitesse de la tige est proportionnelle à la f.e.m e0 appliquée.
— On obtient un courant dans le circuit sans source de tension ( e0 = 0 ). En effet :
−Bav = Ri (1) −F0
 i= ∝ F0 .
0 = F0 − λv + iaB (2) aB +
λR
aB
L’intensité est proportionnelle à la force F0 appliquée.

313
314 Partie IV.  Électromagnétisme

4.2 Le haut-parleur électrodynamique 


Le principe est donné ci-dessous :

L’aimant fixe crée un champ magnétique radial de norme B constante dans l’en-
trefer. Ce dernier est situé à une distance a de l’axe de symétrie Oz du système.
La membrane est solidaire d’une bobine constituée de N spires circulaires de
rayon a, de longueur totale ℓ 0 = N 2πa , d’inductance propre L et de résistance R.
La bobine peut coulisser sans frottement selon Oz autour du pôle nord central
de l’aimant. Un système de ressorts se comportant comme un ressort unique de rai-
deur k la relie à l’aimant. La résistance de l’air au déplacement de la membrane est
� � �
modélisée par une force F = −λv , où v est le vecteur vitesse de l’attelage {bobine,
membrane}. La force de la membrane sur l’air est donc, dans ce modèle simple, égale
� �
à l’opposée de la force de frottement F = −λv . On note m la masse de l’attelage.
Lorsqu’on soumet la bobine à une tension u, un courant d’intensité i circule dans
ses spires, et la force de Laplace met en mouvement l’attelage à la même fréquence
que la tension u appliquée, ce qui génère dans l’air une onde de même fréquence.
� � � � �
La force de Laplace vaut FL =  i dℓeθ ∧ Ber = − 
i dℓBez = −i ℓ 0Bez , le
bobine bobine
champ magnétique étant supposé de norme uniforme dans l’entrefer.
Commençons par établir l’équation mécanique en projetant sur Oz le théorème
du centre d’inertie appliqué à l’attelage dans le référentiel du laboratoire, galiléen :
dv
m = −kz − λv − i ℓ 0B (1) , équation mécanique
dt

La loi de Faraday e = − ne permet pas ici de calculer la f.e.m induite dans
dt
le circuit car le champ magnétique n’est connu que sur la surface latérale de la bobine
(dans l’entrefer) et pas sur ses sections. On déduit plutôt e de la relation pL + ei = 0 :
FLv + ei = 0  −i ℓ 0Bv + ei = 0  e = ℓ 0Bv .
Le circuit équivalent est représenté ci-contre.
di
La loi des mailles fournit u = Ri + L − e ,
dt
di
soit u = Ri + L − ℓ 0Bv (2) , équation électrique.
dt

314
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 315

Les équations différentielles linéaires (1) et (2) sont couplées.


On se place en régime sinusoïdal forcé de pulsation ω et on utilise la notation
dz
complexe. u , i , z et v = = j ω z sont de la forme x = X 2e j ωt , d’où :
dt
v −i ℓ 0B
mj ωv = −k z − λv − iℓ 0B (1) , soit mj ωv = −k − λv − iℓ 0B  v =
jω k
λ + jmω +

On obtient, en reportant dans l’équation électrique (2), u = Ri + jLωi − ℓ 0Bv :
 
 ℓ 0 2B 2 
u = R + jLω +  i = Zi .
 k 
λ + jmω +
 j ω 
Le circuit possède donc une impédance Z = R + jLω + Zm .
ℓ 0 2B 2
L’impédance Zm = est appelée impédance motionnelle, car elle
k
λ + jmω +

est due au mouvement de la bobine (si on bloque son mouvement : v = 0 , on retrouve
l’expression Z = R + jLω de l’impédance d’une bobine de résistance R et d’inductance
1 λ jmω k 1 1
propre L). On peut écrire = 2 2+ 2 2+ 2 2
= + jC0 ω + .
Zm ℓ 0 B ℓ0 B j ℓ 0 B ω R0 jL0 ω
Comme dans une association parallèle, les inverses des impédances s’ajoutent,
on en déduit que le dipôle d’impédance Zm est équivalent à une association R0 , C0 ,

ℓ 0 2B 2 m ℓ 2B 2
L0 parallèle, avec R0 = , C0 = 2 2 et L0 = 0 .
λ ℓ0 B k
Ces grandeurs électriques sont liées à des paramètres mécaniques (λ, m et k)
1
du fait du couplage. On constate que la pulsation de résonance ω0 = vaut
L0C0
aussi k / m : c’est la pulsation des oscillations non amorties de l’attelage de masse
m, soumis à la force de rappel des ressorts de raideur k.

Nous allons maintenant chercher à quelle condition le système « restitue » bien


une pulsation ω, c'est-à-dire si la puissance électrique est bien convertie en puissance
sonore.

315
316 Partie IV.  Électromagnétisme

Pour effectuer ce bilan de puissance, on élimine B entre l’équation mécanique


et l’équation électrique, en effectuant la combinaison linéaire v ⋅ (1) − i ⋅ (2) :
dv di dz
mv − ui = −kvz − λv 2 − i ℓ 0Bv − Ri 2 − Li + i ℓ 0Bv , soit, puisque v = :
dt dt dt
dz dv di d 1 1 1 
ui = Ri 2 + λv 2 + kz + mv + Li ⇔ ui = Ri 2 + λv 2 +  mv 2 + kz 2 + Li 2  .
dt dt dt dt  2 2 2 
La puissance reçue par le système (ici uniquement électrique) qui n’est pas
dissipée (ici par effet Joule et par rayonnement sonore) est stockée (ici sous forme
cinétique, potentielle élastique, et magnétique).

Si on prend la valeur moyenne de ce bilan sur une période T = , on obtient :
ω
d 1 1 2 1 2
ui = Ri 2 + λv 2 + 2
 2 mv + 2 kz + 2 Li  .
dt  
Or, pour une fonction f T-périodique, on a :
t0 +T t0 +T
df 1 df 1 1
dt
=
T  dt
dt =
T  df =
T
[f (t0 + T ) − f (t0 )] = 0 . On obtient donc :
t0 t0

2 2
ui = Ri + λv . Ainsi, la puissance électrique ui fournie au haut-parleur n’est

pas entièrement convertie en puissance sonore, car une partie de cette puissance est
perdue par effet Joule. Le rendement électroacoustique du haut-parleur est :
λv 2 ui − Ri 2 Ri 2
ρ= = , soit ρ = 1 − .
ui ui ui
On calcule les deux valeurs moyennes à partir des grandeurs complexes.
Si i = I 2 cos ωt = Re(i ) , avec i = I 2e j ωt , et u = U 2 cos(ωt + ϕ) = Re(u ) ,
avec u = U 2e j ( ωt +ϕ) , on a ui = 2UI cos ωt ⋅ cos(ωt + ϕ) = UI [cos(2ωt + ϕ) + cos ϕ] ,
donc ui = UI cos ϕ .
∗ 1
On remarque que u i = 2UIe j ϕ , et donc que ui = Re(u i ∗ ) .
2
1 1 R
Ainsi i 2 = Re(i i ∗ ) = I 2 , et ui = Re(Zi i ∗ ) = Re(Z )I 2 d’où ρ = 1 − .
2 2 Re(Z )
Comme Z = R + jLω + Zm , on a Re(Z ) = R + Re(Zm ) . Calculons Rm :
�����
Rm

  1 
R0  1 − jR0 C0 ω −  

1 R0   L0ω  
Zm = = =
1 1  1  2
+ jC0 ω + 1 + jR0 C0 ω − 2 1 
R0 jL0 ω  1 + R0 C0 ω − 
 L0ω  L0 ω 

316
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 317

R0
 Rm = 2
.
 1 
1 + R02 C0 ω − 
 L0ω 
R 1
Le rendement ρ = 1 − = est maximal quand Rm est maximal,
R + Rm 1 + R
Rm
1 k 1
donc pour ω = ω0 = = . Le rendement maximal vaut ρmax = .
L0C0 m R
1+
R0
Pour ω → 0 et ω → ∞ , Rm → 0  ρ → 0 : le rendement du haut-parleur passe
1 k
par un maximum pour la fréquence f0 = .
2π m
Cette valeur est imposée par des constantes mécaniques (raideur des ressorts,
masse de la bobine et de la membrane). Idéalement, il faudrait un rendement « plat »
sur toute la plage de fréquences sonores pour restituer un son sans le filtrer. Comme
ce n’est pas le cas, on n’utilise que la partie « plate » de la courbe, c’est à-dire une
plage de fréquences qui se trouve haut-dessus de la fréquence de résonance.
Dans cette plage, malheureusement,
le rendement est très faible (quelques %).
Des filtres électroniques permettent
de n’envoyer au haut-parleur que cette
plage de fréquences.
En pratique, il faut plusieurs haut-par-
leurs électrodynamiques pour couvrir conve-
nablement le spectre sonore, souvent trois
(un « « boomer », ou « woofer », pour les
basses fréquences : 40 Hz - 300 Hz, un
« médium » pour les fréquences intermé-
diaires : 200 Hz -7 kHz, et un « tweeter » pour les hautes fréquences : 5 kHz – 20 kHz).

5. ÉLECTROCINÉTIQUE DANS L’A.R.Q.S


5.1 Dipôles dans l’A.R.Q.S
Câble
Les longueurs L de câble utilisées doivent rester très inférieures à la longueur
de l’onde électromagnétique produite : on doit avoir L << λ = c / f .
Dans un câble coaxial, la vitesse de propagation est inférieure à celle de la
lumière dans le vide (l’onde électromagnétique, guidée par des conducteurs, se pro-
page dans un milieu diélectrique), mais reste du même ordre de grandeur :

317
318 Partie IV.  Électromagnétisme

Il faut f << c / L ≃ 3 ⋅ 108 Hz si on prend une longueur caractéristique de câble de 1 m,


qui est la taille caractéristique des circuits usuels.

Cette condition est réalisée avec les G.B.F dont la fréquence maximale délivrée
est souvent de 20 MHz. A contrario, pour montrer que les tensions aux deux extrémités
d’un câble coaxial ne sont pas en phase, et ainsi mesurer c, il faut utiliser une grande
longueur de câble, 100 m par exemple.
À des fréquences allant jusqu’à 10 MHz, la loi des nœuds et la loi des mailles
restent valables.

Conducteur ohmique
La loi d’Ohm u (t ) = Ri (t ) reste valable pour de
bons conducteurs jusqu’à de grandes fréquences, de
l’ordre de 1012 Hz .
En revanche, l’effet de peau se traduit pour les fils conducteurs par une aug-
mentation de la résistance avec la fréquence (les courants ne circulent plus que dans
la peau du conducteur ; la section traversée est donc plus faible).
Les constructeurs fournissent des conducteurs ohmiques dont les valeurs de
résistances sont normalisées et varient très peu, même pour des fréquences élevées.
Les résistances des fils de connexion étant souvent négligeables devant les
résistances de quelques kΩ utilisées dans les circuits, leur augmentation avec la fré-
quence est le plus souvent sans conséquence.
2
Le conducteur ohmique reçoit une puissance R [ i (t )] qui est perdue du point
de vue électrique. La puissance qui n’est pas évacuée sous forme de chaleur est égale
au taux de variation de l’énergie interne U du dipôle (la température du composant
augmente). En régime stationnaire thermique, U est constante, et toute la puissance
reçue est évacuée vers l’extérieur par effet Joule.

Enfin, on a toujours dans l’A.R.Q.S, R = pour un conducteur rectiligne.
γS

Condensateur
Dans l’A.R.Q.S électrique, la tension entre les ar-
matures ainsi que leur charge varie dans le temps. Les
armatures portent toujours des charges opposées, et la
dq
relation u (t ) = q (t ) / C reste valable. Un courant i (t ) =
dt
peut faire varier la charge portée par une armature, et on obtient, en convention ré-
du
cepteur, la relation i (t ) = C .
dt
Un champ magnétique apparaît entre les armatures, mais l’énergie magnétique
reste négligeable devant l’énergie électrique : le condensateur emmagasine une

318
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 319

1 2
énergie UC (t ) = C [ u (t )] .
2
On a toujours, dans l’A.R.Q.S, C = ε0 S / e pour un condensateur plan.

Bobinages

Dans l’A.R.Q.S magnétique, il apparaît une f.e.m e = − non négligeable aux
dt
bornes d’un circuit comportant un nombre suffisant de bobinages.
Quand cette f.e.m correspond à de l’auto-induction, on a Φ = Li , et donc :
di
e = −L , avec i et e orientés dans le même sens (convention générateur).
dt
di
On retrouve donc la relation u = L en convention récepteur pour une bobine
dt
di
idéale, et u = L + ri pour une bobine de résistance r.
dt

Dans le cas où le champ magnétique traversant la bobine n’est pas seulement


di
son champ propre, on a Φ = Li + Φ′  e = −L + e′ . Il faut prendre garde à ne pas
dt
di
prendre deux fois en compte le terme L :
dt
— Soit on place en série avec le symbole celui d’un générateur de f.e.m
e′ ;
— Soit on remplace le symbole par celui d’un générateur de f.e.m
di
e = −L + e′ .
dt
Un champ électrique induit apparaît dans la bobine, mais l’énergie électrique
reste négligeable devant l’énergie magnétique : la bobine emmagasine une énergie
1 2
U L (t ) = L [ i (t )] .
2
µ0N 2 πR 2
On a toujours, dans l’A.R.Q.S, L = pour un solénoïde.

On retrouve finalement tous les résultats utilisés précédemment pour l’électro-
cinétique dans l’A.R.Q.S.
La nouveauté est le couplage entre deux circuits électriques, dû à une induc-
tance mutuelle entre les deux circuits. Un exemple générique est traité dans la sous-
section suivante.

319
320 Partie IV.  Électromagnétisme

5.2 Couplage par inductance mutuelle 


On considère les circuit suivants, couplés par une inductance mutuelle :

Le générateur délivre une f.e.m E constante. Les deux conducteurs ohmiques


sont identiques et possèdent une résistance R. Les deux bobines sont identiques :
même inductance propre L. On note M l’inductance mutuelle, supposée positive.
On suppose d’abord que le couplage n’est pas parfait : M < L .
Pour t < 0 les courants i1 et i2 sont nuls. À l’instant t = 0 , on ferme l’interrup-
teur K.

Détermination des courants dans les deux circuits


Comme les courants i1 et i2 varient dans le temps, les flux magnétiques varient
également, et il apparaît des f.e.m dans chaque circuit :
— Dans le circuit de gauche :
dΦ1
e1 = − , avec Φ1 = L i1 + M i2 .
dt
— Dans le circuit de droite :
dΦ 2
e2 = − , avec Φ 2 = L i 2 + M i1 .
dt
La loi des mailles fournit alors deux équations différentielles linéaires couplées :
 d i1 d i2
E = R i1 + L dt + M dt (1)

0 = R i + L d i 2 + M d i1 (2)
2
 dt dt
 S +D
S = i1 + i 2  i1 = 2
On découple ce système en posant  ⇔ .
D = i1 − i 2 i = S − D
 2 2
On effectue alors les deux combinaisons linéaires suivantes :

 dS  E −
R
t
E = RS + (L + M ) dt (1) + (2) S = + λe L + M
 R
   .
E = R D + (L − M ) d D (1) − (2)
R
 E − t
 dt D = + µe L − M
 R

320
Chapitre 4.  Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S 321

1 1
L’énergie magnétique du système Um = L i1 2 + L i2 2 + M i1 i 2 étant une fonc-
2 2
dUm
tion continue du temps (la puissance magnétique ne peut pas être infinie), on
dt
en déduit que t ֏ i1(t ) et t ֏ i 2 (t ) sont continues, ainsi que t ֏ S(t ) et t ֏ D(t ) .
S(0 + ) = 0
On a donc les conditions initiales  , ce qui permet de trouver les cons-
+
D(0 ) = 0
tantes d’intégration.
  R    R R 
 i1 = E 1 − 1 e L + M − 1 e L −M 
− t − t − t
S = E 1 − e L + M 
 R   R 2 2 
     
On en déduit  , puis  .
 E  −
R 
t  E  −
R
t −
R 
t
D = 1 − e L − M  i 2 = e L − M − e L + M 
R  2R  
     
Pour tracer les courbes représentant i1 et i2 en fonction du temps, on peut re-
R R
R R − t − t
marquer que, comme ≥ , e L −M décroît plus vite que e L + M : avec les
L−M L+M
conventions choisies, i 2 < 0 .

D’autre part, comme i 2 (0+ ) = 0 et i2 → 0 , i2 passe par un minimum à l’instant


t →∞

d i2 L2 − M 2  L + M 
t0 tel que (t0 ) = 0 , soit, après calcul, pour t0 = ln  .
dt 2MR L−M 
E
i1 passe, quant à lui, de i1(0+ ) = 0 à i1(∞ ) = .
R

On constate qu’un courant apparaît dans le circuit de droite même en l’absence


de générateur : c’est la f.e.m induite qui génère ce courant. Il est ainsi possible d’ali-
menter en énergie un circuit passif contenant un bobinage. C’est par exemple le prin-
cipe des cartes RFID passives.

321
322 Partie IV.  Électromagnétisme

Bilan énergétique
On peut établir un bilan de puissance en effectuant i1 ⋅ (1) + i2 ⋅ (2) :
 
d 1 2 1

Ei1 = R i12 + R i2 2
+ 2
 L i1 + L i 2 + M i1 i2  .
dt  2 2 
 Um 
Toute la puissance fournie par le générateur qui n’est pas dissipée par effet
Joule dans les deux circuits, est stockée sous forme magnétique.

Couplage parfait
Remarquons enfin que si on se place dans le cas d’école M = L (couplage par-
1 1 1
fait), on a Um = L i1 2 + L i 2 2 + L i1 i 2 = L( i1 + i 2 ) 2 .
2 2 2
La continuité de Um n’implique alors plus que celle de S = i1 + i2 .
 dS
E = RS + 2L (1) + (2)
Après découplage, on aboutit cette fois-ci à  dt
E = R D (1) − (2)

    − t
R
− t
R
S = E 1 − e 2L   i1 = E 1 − 1 e 2L 
 R  , puis  R 2


.
On en déduit    
 E  R
− t
D =  i 2 = − E e 2L
 R  2R
Les courants ne sont plus continus à t = 0 et leur différence est constante pour
t > 0 . Ils sont représentés sur la figure précédente.

322
323

[CINQUIÈME PARTIE]

MÉCANIQUE

Les chapitres :
1. Révisions et compléments : mouvement d’un solide 325
2. Dynamique dans un référentiel non galiléen 345
3. Statique des fluides 381
4. Description d’un fluide en mouvement 397
5. Dynamique des fluides 417
6. Écoulements parfaits 455
7. Bilans macroscopiques 475

L’étude d’une tuyère et d’un turboréacteur menée au chapitre 7 sur les bilans
macroscopiques nécessite l’application du premier principe pour un écoulement
stationnaire à une dimension. Ce premier principe « industriel » est exposé dans la
sixième partie de ce livre, qui traite de la thermodynamique, page 537.

323
324
325

[MÉCANIQUE 1]

RÉVISIONS ET COMPLÉMENTS :
MOUVEMENT D’UN SOLIDE
1. THÉORÈMES GÉNÉRAUX POUR LES SYSTÈMES
DE POINTS MATÉRIELS
1.1 Théorème de la quantité de mouvement / Théorème du centre d’inertie
Étudions un système Σ de N points matériels Mi de masse mi , soumis à des
G G
forces extérieures Fext /i et à des forces intérieures F j / i , avec j ≠ i , dans un référen-
tiel R galiléen.

Soit O un point quelconque. Le centre d’inertie G de Σ, ou barycentre de Σ, est





→  mi OMi → 

défini par OG = i
⇔ m OG =  mi OMi , en notant m =  mi .
 mi i i

En dérivant dans R cette relation par rapport au temps, on obtient :


G G G G G G

m [v (G ) − v (O )] = 
mi [v (Mi ) − v (O )] = 
mi v (Mi ) − v (O ) mi .
i i N
i
m
G G G G G G
En notant v i = v (Mi ) , on a mv (G ) =  mi v i =  pi = p .
i i

325
326 Partie V.  Mécanique

G G
p = mv (G ) : la quantité de mouvement de Σ par rapport à R , somme des quan-
G
tités de mouvement pi des N points matériels par rapport à R , est égale à celle du
centre d’inertie G affecté de la masse totale de Σ.

Appliquons le P.F.D à M i dans R pour tout i ∈ a1, N b :


G G G G
G G dv i dpi
mi a(Mi ) = mi ai = mi
dt
=
dt 
= Fext / i + Fj / i . Sommons ces N relations :
j ≠i
G
d  pi G
dp G G G G G
i
dt
=
dt
=  Fext / i +  F j / i = Fext +  Fj / i + Fi / j  , or, d’après la troisième loi
i ( i , j ), j ≠ i i< j
 G
Fint
G G G
de Newton (principe des actions réciproques), on a Fj / i + Fi / j = 0 .

Seules les actions extérieures interviennent dans le théorème de la quantité de


G G G
dp
mouvement appliqué à Σ dans R galiléen :
dt
= Fext / i = Fext . 
i

G G
En écrivant p = mv (G ) , on a aussi :
G G
ma(G ) = Fext : le mouvement de G dans R galiléen est celui d’un point matériel affecté
de la masse totale du système et soumis à la résultante des actions extérieures à Σ.
Ceci constitue le théorème du centre d’inertie.

1.2 Théorème du moment cinétique


Soit O un point fixe par rapport à R . Appliquons le théorème du moment ciné-
tique à M i dans R au point de réduction O, pour tout i ∈ a1, N b :
G
dLOi → G → G G → G → G
dt 
= OMi ∧ Fext / i + OMi ∧ Fj / i , avec LOi = OMi ∧ mi v i = OMi ∧ pi , moment ciné-
j ≠i

tique de Mi par rapport à R au point de réduction O. Sommons ces N relations :


G

d LOi G
dLO  → G   → G  G G G G
i
dt
=
dt
= 
OMi ∧ Fext / i  + 
OMi ∧ F j / i  = MOext + MOint , où LO = LOi 
i 
  ( i , j ), j ≠ i   i

est le moment cinétique de Σ par rapport à R au point de réduction O.


G  → G 
MOext =  OMi ∧ Fext / i  est le moment au point de réduction O des actions ex-
i  
térieures.
Celui des actions intérieures peut s’écrire :

326
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 327

G  → G → G  G G
MOint =  OMi ∧ Fj / i + OM j ∧ Fi / j  , or, d’après la troisième loi de Newton, Fi / j = −Fj / i
i< j  
→
et ces forces sont colinéaires à M j Mi . On a donc :

 
G  → →  G   →  G  G
MOint =   OMi − OM j  ∧ Fj / i  =
   
 M M  ∧ F  = 0 .
 j i j /i

i < j    i < j  
G 
 0 

Seules les actions extérieures interviennent dans le théorème du moment ciné-


G
dLO G  → G 
tique appliqué à Σ dans R galiléen :
dt
= MOext = OMi ∧ Fext / i  . 
i 
 

1.3 Théorème de l’énergie cinétique

Appliquons le théorème de l’énergie cinétique à Mi dans R , pour tout i ∈ a1, N b

1  G → G →
entre t et t + dt : dEci = d  mi v i 2  = Fext / i ⋅ dOMi +
2 
 Fj / i ⋅ dOMi .
j ≠i

Sommons ces N relations :


G →  G → 
d  Eci = dEc = 
Fext / i ⋅ d OMi  + 
Fj / i ⋅ dOMi  , où Ec =  Eci est l’énergie
i i 
   ( i , j ), j ≠ i   i

δWext δWint

cinétique de Σ par rapport à R , δWext et δWint les travaux, respectivement des ac-
tions extérieures et intérieures, sur Σ entre t et t + dt .
 
G → G →  G → 
On peut écrire δWint = 
Fj / i ⋅ dOMi + F
N i / j ⋅ d OM j  = 
Fj / i ⋅ d M j Mi  en utili-
i<j  G  i < j  
 − Fj / i 
G G G
sant la troisième loi de Newton, qui permet aussi d’écrire Fj / i = Fj / i e j → i où e j → i est
→ →
M j Mi M j Mi → G
le vecteur unitaire = : M j Mi = rij e j → i . On a donc :
→ rij
M j Mi

 
G G F eG 2 dr + F r eG G G 2
δWint =  Fj / i e j → i ⋅ d(rij e j → i ) =
  
 j /i N
j →i ij j / i ij j → i

⋅ d e 
j → i  car e j → i = 1
i< j  
i<j
 1 0
G G G
puisque e j → i est unitaire, relation qui, une fois différenciée, donne 2 e j →i ⋅ de j → i = 0 .

327
328 Partie V.  Mécanique

Finalement, le travail des actions intérieures s’écrit δWint =  Fj / i drij , il n’est


i< j

pas inconditionnellement nul, contrairement à la résultante des actions intérieures


G G G G
( Fint = 0 ), ou au moment des actions intérieures ( MO int = 0 ).
En revanche, dans le cas d’un solide, les distances mutuelles rij entre deux
quelconques de ses points sont invariantes, et on a δWint = 0 .

Cette propriété peut être mise à profit pour savoir si un œuf est cru ou s’il a été
cuit suffisamment pour être dur : on le fait tourner sur lui-même après l’avoir posé sur
une table.
Dans le référentiel de la table, le travail des actions intérieures est négligeable
pour l’œuf dur, que l’on peut assimiler à un solide : δWint = 0 ; il ne l’est pas pour l’œuf
cru dans lequel les forces visqueuses intérieures travaillent et dissipent de l’énergie.
L’œuf dur tourne plus longtemps car seuls les frottements avec la table et l’air le ra-
lentissent. Si on stoppe sa rotation en le bloquant brièvement avec un doigt, il ne se
remet pas à tourner alors que pour l’œuf cru, bien que la coquille soit à l’arrêt, le jaune
et le blanc continuent à tourner et provoquent la rotation de la coquille dès qu’on re-
lâche la pression, puis l’œuf s’arrête rapidement de tourner car on a toujours δWint < 0
du fait de la viscosité.

1.4 Cas d’un solide Σ en translation


Si Σ est en translation par rapport à un référentiel galiléen R , tous ses points
G G G
Mi possèdent la même vitesse et donc v (G ) = v (Mi ) = v i .

Pour obtenir l’équation du mouvement, il suffit donc d’appliquer le théorème du


G G
centre d’inertie ma(G ) = Fext lorsqu’on étudie un solide en translation.
L’étude d’un solide en translation se ramène à celle d’un point matériel affecté
de la masse totale du solide.

328
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 329

2. SOLIDE EN ROTATION AUTOUR D’UN AXE FIXE


2.1 Théorème du moment cinétique
Si Σ est en rotation autour d’un axe fixe ∆ = Oz par rapport à un référentiel ga-
� �
liléen R avec le vecteur rotation ω = ωez , chacun de ses points Mi de masse mi dé-
crit un cercle d’axe Oz, à la vitesse angulaire ω. On note ri = Hi Mi le rayon de ce
cercle, où H i , centre du cercle, est le projeté orthogonal de Mi sur ∆.
� � �
Utilisons la base de coordonnées cylindriques ( eri , eθi , ez ) pour repérer le point
� �
Mi . La vitesse de Mi s’écrit v i = ri ωeθi .

� → �  → →  �


Le moment cinétique de Σ s’écrit LO =  OMi ∧ mi v i =  OHi + Hi Mi  ∧ mi v i .
i i  
→ � �
→ �
OHi étant porté par ez , OHi ∧ mi v i est orthogonal à ez : la projection L∆ = LOz de
� �
LO sur ez , moment cinétique par rapport à ∆, ne dépend pas du point O sur ∆, et

� � �  
s’écrit L∆ = LOz =  ri eri ∧ mi ri ωeθi  ⋅ ez =  mi ri 2  ω .
i  i 

J∆ = JOz =  mi ri 2 (en kg ⋅ m2 ) est le moment d’inertie de Σ par rapport à l’axe


i
∆, et le moment cinétique de Σ en rotation autour de l’axe fixe ∆ s’écrit, en projection
sur ∆ : L∆ = J ∆ ω .

Pour une fine barre homogène de masse m et de longueur ℓ,


on obtient le moment d’inertie par rapport à l’axe ∆ qui lui est orthogo-
nal et passe par son centre d’inertie G en décomposant la barre en
éléments de longueur dr situés à une distance r de ∆ :

329
330 Partie V.  Mécanique

ℓ /2 ℓ /2 3
2m  ℓ  1 m
J∆ =  r 2dm = µ  r 2 dr =
3ℓ  2 
=
12
mℓ2 où µ =

est la masse linéique, uni-
− ℓ /2 − ℓ /2
forme, de la barre.

Le point M i est soumis à des forces extérieures Fext /i que l’on peut décompo-
� � � � �
ser en Fext / i = Fext ⊥ / i + Fext z / i ez , où Fext ⊥ /i est orthogonale à ez .
Le moment des actions extérieures au point de réduction O sur l’axe ∆, fixe par
�  → �   → →  � 
rapport à R, est MOext =  OMi ∧ Fext / i  =   OHi + Hi Mi  ∧ Fext / i  .
i   i   


→ � � �
Comme OH i ∧ Fext / i est orthogonal à ez , la projection M∆ext de MOext sur ez ,
moment des actions extérieures par rapport à ∆, est indépendante du point O sur ∆ et
� �  → � �  �  → �  �
s’écrit M∆ext = MOext ⋅ ez =  Hi Mi ∧ ( Fext ⊥ / i + Fext z / i ez ) ⋅ ez =  Hi Mi ∧ Fext ⊥ / i  ⋅ ez
i   i  
 → � �
puisque Hi Mi ∧ Fext z / i ez est orthogonal à ez . On a finalement :
� � � �
M∆ext = 
ri eri ∧ ( Fext r / i eri + Fext θ / i eθi )  ⋅ ez = 
ri Fext θ / i .
i i

� � F d
Si on note α i l’angle ( eri , Fext ⊥ / i ), on a sin α i = �ext θ / i et sin α i = i où di
Fext ⊥ / i ri

est la distance entre l’axe de rotation et la droite d’action Di de Fext ⊥ / i passant par

M i et qui a la direction de Fext ⊥ / i . La distance di est appelée bras de levier.

On a donc M∆ext = 
εi di Fext ⊥ / i , avec εi = ±1 . Le signe de εi est le même
i

que celui de Fext θ / i , et donc de sin α i , l’angle α i étant orienté dans le sens du tire-

bouchon.

330
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 331

Pour un solide en rotation autour d’un axe fixe ∆ = Oz de R galiléen, l’équation


du mouvement est obtenue par l’application au solide du théorème du moment ciné-
G dL∆
tique au point de réduction O, en projection sur ez : = M∆ext , soit :
dt
dω G G
J∆
dt
=  εi d i Fext ⊥ / i , avec εi = +1 si Fext ⊥ / i fait tourner Σ dans le sens positif et
i
G
εi = −1 si Fext ⊥ / i fait tourner Σ dans le sens négatif.

Il est à noter que seule la composante Fext θ / i intervient. Si cette composante


G
est nulle, la force Fext / i est parallèle à l’axe de rotation ou bien sa droite d’action passe

par cet axe. Dans les deux cas elle n’a aucun effet sur la rotation de Σ autour de ∆.

G G
On constate également que le moment MOz = d ⋅ F⊥ d’une force F⊥ de norme
donnée augmente avec le bras de levier d.
Prenons l’exemple d’une tenaille qui serre un objet. Un des leviers de la tenaille
étant fixé, l’autre levier peut tourner autour d’un axe ∆. Ce levier subit une force de
G
norme F0 exercée par l’opérateur, avec un bras de levier a, ainsi que la force F exer-
cée par l’objet, de norme F et de bras de levier b. Ces forces étant supposées ortho-
G G
radiales, on a à l’équilibre F0a = Fb , donc la force F ′ = −F exercée par le levier étudié
a a
sur l’objet a pour norme F ′ = F = F0 . Avec par exemple un rapport = 4 , on obtient
b b
une force F ′ quatre fois plus intense que celle exercée par l’opérateur.

C’est aussi le principe de la brouette : en exerçant des forces modérées sur les
poignées placées aux extrémités de deux longs brancards, on peut compenser le mo-
ment du poids de la brouette lourdement chargée lors de la rotation autour de l’axe ∆
orthogonal au plan médiateur de la brouette et passant par le point de contact entre le

331
332 Partie V.  Mécanique

G
sol et la roue. Le moment par rapport à ∆ de la réaction R du sol est quant à lui nul si
on suppose que le contact avec la roue est ponctuel.

2.2 Théorème de l’énergie cinétique

1 1 
L’énergie cinétique de Σ s’écrit Ec =
2
 mi v i 2 = 2  mi ri 2  ω2 .
i  i 

1
L’énergie cinétique de Σ en rotation autour de l’axe fixe ∆ est Ec = J ∆ ω2 .
2

Le travail des actions intérieures s’appliquant sur un solide Σ est nul, celui des
actions extérieures vaut :
G →
 G G  
δWext =  Fext / i ⋅ dOMi  =  Fext / i ⋅ v i dt  =  [Fext θ / i ⋅ ri ωdt ] =  ri Fext θ / i  ωdt , or
i   i i  i 
G G G G G G
 ri Fext θ / i = MOext ⋅ ez , donc δWext = MOext ⋅ ωez dt = MOext ⋅ ωdt
i

Le travail des actions extérieures sur un solide en rotation autour de ∆ s’exprime


à l’aide du moment des actions extérieures par rapport à ∆ :
G G δWext
δWext = MOext ⋅ ωdt = M∆ext ωdt , soit une puissance pext = = M∆ext ⋅ ω .
dt

Le théorème de l’énergie cinétique appliqué à Σ s’écrit :


1 
dEc = d  J ∆ ω2  = δWext = M∆ext ωdt , soit J ∆ ωdω = M∆ext ωdt .
 2 
On retrouve l’expression fournie par le théorème du moment cinétique :

J∆ = M∆ext .
dt

332
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 333

2.3 Liaison pivot, couple et analogies avec le solide en translation


Liaison pivot

Deux solides Σ et Σ′ sont en liaison pivot s’il existe une droite ∆ de points de Σ
qui restent constamment confondus avec des points de Σ′ .
Les surfaces de liaison entre les deux solides sont des surfaces de révolution
autour de ∆ , mais non cylindriques, qui permettent la rotation relative de Σ par rapport
à Σ′ autour de ∆, mais pas la translation le long de ∆.
Dans le cas d’une liaison pivot idéale (sans frottement), les réactions surfa-
ciques de Σ′ sur Σ sont normales aux surfaces élémentaires de liaison, donc elles
n’ont pas de composante orthoradiale (elles passent par ∆ ou lui sont parallèles).
En conséquence :

Le moment par rapport à ∆ des actions de contact entre deux solides en liaison pivot
idéale sont nulles. Ces actions de contact ne travaillent donc pas. En revanche, la
résultante de ces actions n’est pas nécessairement nulle.

Si Σ′ est fixe dans le référentiel d’étude R , Σ est en rotation autour de l’axe ∆


fixe dans R , et il n’y a qu’un seul degré de liberté pour le mouvement de Σ : l’angle θ
qui caractérise sa rotation. Pour déterminer l’équation différentielle du mouvement qui
régit cet angle, on peut appliquer le théorème du moment cinétique ou bien le théo-
rème de l’énergie cinétique.
G G
L’application du théorème du centre d’inertie ma(G ) = Fext n’est donc pas utile,
sauf si l’on veut déterminer les actions de contact entre le bâti Σ′ et Σ au niveau des
paliers de liaison qui permettent de maintenir fixe l’axe ∆. Si G n’est pas sur ∆, il n’est
pas confondu avec son projeté orthogonal H sur ∆. Son accélération, dans le cas d’une
G 

rotation uniforme, est a(G ) = −ω2 HG et vaut en norme ω2HG .
Pour un écart HG = 1 mm et ω = 3000 tr ⋅ min-1 , cette accélération est 10 fois
supérieure à l’accélération de la pesanteur, donc les forces au niveau des paliers de
liaison valent 10 fois le poids du solide en rotation (le rotor d’une machine tournante),
et tournent avec ce solide, d’où une usure rapide des paliers.
Pour éviter cette usure, on place le centre d’inertie G sur ∆. On a alors, comme
G G
en statique, 0 = Fext : on dit qu’on a réalisé l’équilibrage statique de la machine.

333
334 Partie V.  Mécanique

Couple
Un couple est un ensemble de forces dont la résultante est nulle, mais dont le
moment résultant par rapport à ∆ ne l’est pas.

Le nom provient du fait qu’un tel en-


semble de forces est équivalent à deux
forces opposées.
L’application d’un couple sur un so-
lide permet de provoquer ou d’empêcher sa
rotation autour de ∆ sans exercer de forces
au niveau de la liaison pivot, forces respon-
sables d’une usure des liaisons.

Analogies avec le solide en translation


Le mouvement de rotation d’un solide autour d’un axe fixe est analogue au mou-
vement de translation rectiligne :

degré de liberté x θ
vitesse linéaire v = xɺ angulaire ω = θɺ
inertie masse m moment d’inertie J ∆
1 1
énergie cinétique Ec = mv 2 Ec = J ∆ ω2
2 2
puissance des actions ex-
pext = Fext ⋅ v pext = M∆ext ⋅ ω
térieures
théorème du centre théorème du moment ci-
équation du mouvement dv dω
d’inertie m = Fext nétique J ∆ = M∆ext
dt dt

2.4 Pendule pesant 


Considérons un solide Σ de masse m en rota-
tion autour d’un axe horizontal ∆ = Oz fixe par rap-
port au référentiel du laboratoire R , supposé gali-
léen. La liaison pivot est supposée idéale. On note
J ∆ le moment d’inertie de Σ par rapport à ∆.
L’axe ∆ ne passe pas par le centre d’inertie G
de Σ ; on note a = OG la distance de G à ∆, c’est-à-
dire au projeté orthogonal O de G sur ∆.
On repère la position de Σ grâce à l’angle
� → �
orienté θ = (ex , OG ) où ex est vertical descendant.
Σ est soumis aux actions de pesanteur et aux actions de contact du bâti.

334
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 335

Pour déterminer le moment résultant des actions de pesanteur, découpons le


solide en volumes élémentaires. Le volume élémentaire d3V autour d’un point M de

Σ contient la masse d3m . Il est donc soumis à son poids d3m ⋅ g dont le moment cal-
� → �
culé au point de réduction O est d3 MO = OM ∧ d3m ⋅ g . Le moment résultant est donc :
� → �  →  � → �
 → �
MO =  OM ∧ d3 m ⋅ g =  
M ∈Σ
OM d3m  ∧ g = m OG ∧ g = OG ∧ mg , par définition du

M ∈Σ
centre d’inertie de Σ.

Le champ de pesanteur étant supposé uniforme, les actions de pesanteur se



réduisent à une force unique, le poids mg de Σ, appliqué au centre d’inertie G.

Le bras de levier du poids est égal à a sin θ . Le moment du poids par rapport à
∆ étant négatif, il vaut M∆pesanteur = −mga sin θ .

La résultante des actions de contact du bâti sur Σ est notée R , son moment
résultant par rapport à ∆ est nul puisque la liaison pivot est idéale : M∆contact = 0 .
Le théorème du moment cinétique en projection sur ∆ appliqué à Σ dans R
mga
θ = −mga sin θ , soit ɺɺ
fournit J ∆ ɺɺ θ + ω02 sin θ = 0 avec ω0 = .
J∆
On obtient la même équation en écrivant que l’énergie mécanique de Σ dans R
se conserve en l’absence de frottements. La seule énergie potentielle est celle de pe-
santeur puisque les actions de contact ne travaillent pas :
1
Ep = Ep pesanteur = −mgx = −mga cos θ . On a donc Em = Ec + Ep = J ∆ θɺ 2 − mga cos θ ,
2
et on obtient en dérivant par rapport au temps : 0 = θɺ J ∆ ɺɺ
θ + mga sin θ  , c’est-à-dire
l’équation du mouvement, une fois écartée la solution parasite θɺ = 0 , qui correspond
à l’équilibre ( θ = Cte ).
Une position d’équilibre est telle que si on place le pendule sans vitesse initiale
dans cette position, il y reste indéfiniment. Le moment des actions extérieures doit
donc être nul dans cette position : sin θ = 0 . On a bien alors ɺɺ
θ = 0  θɺ = θɺ = 0 , donc
0
θ = Cte . Il existe donc, dans le cas du pendule pesant, deux positions d’équilibre, θ = 0
et θ = π .
La première correspond à un mimimum de l’énergie potentielle Ep = −mga cos θ
et est donc stable, la seconde à un maximum et est donc instable. On retrouve la
stabilité d’une position d’équilibre θ = θéq en perturbant cet équilibre, c’est-à-dire en
posant θ(t ) = θéq + ε(t ) , où t ֏ ε(t ) , t ֏ εɺ (t ) et t ֏ ɺεɺ(t ) sont considérés comme des
infiniment petits du premier ordre. On effectue le développement au premier ordre de
l’équation du mouvement afin de conclure (l’équilibre est stable si les solutions t ֏ ε(t )

335
336 Partie V.  Mécanique

sont bornées, instable dans le cas contraire). Pour la position θéq = 0 , on obtient :

ɺɺε + ω02ε = 0 . La position d’équilibre θéq = 0 est donc stable, et les petits mouvements

mga
autour de cette position sont sinusoïdaux, de pulsation ω0 = . Au contraire,
J∆
puisque sin( π + ε ) = − sin ε , la position d’équilibre θéq = π est instable puisque t ֏ ε(t )

est régie par ɺɺε − ω02ε = 0 dont les solutions ε = Ae −ω0t + Be +ω0t ne sont pas bornées
(l’approximation « ε est infiniment petit » n’est vraie que sur une durée au-delà de la-
quelle la solution trouvée n’est plus convenable).
Le tracé de la courbe représentative de θ ֏ Ep (θ) permet, comme pour tout
mouvement conservatif à un degré de liberté, de discuter le mouvement selon l’énergie
mécanique du système (fixée dès qu’on se donne des conditions initiales).

— Pour −mga ≤ Em1 ≤ mga , le mouvement se fait dans la cuvette de potentiel corres-
pondant à −θmax ≤ θ ≤ θmax , avec Ep (θmax ) = Em1 .
En effet, les positions telles que θmax < θ ≤ π sont interdites car pour ces posi-
tions, l’énergie cinétique du pendule, Ec = Em1 − Ep (θ) , serait négative. Le pendule os-
cille autour de θ = 0 , mais les oscillations ne sont pas a priori sinusoïdales.
Elles ne le sont que dans le cas particulier où Em1 = −mga + η , l’énergie η étant
telle que 0 ≤ η << mga . Ce cas correspond à des petits mouvements autour de la po-
sition d’équilibre stable, tels que θmax est suffisamment petit pour qu’on puisse utiliser

le développement limité à l’ordre 1 : sin θ ≃ θ . La période du pendule T0 = est alors
ω0
indépendant de l’angle θmax . On dit qu’il y a isochronisme des oscillations, et dans ces
conditions, même si le pendule est légèrement amorti, la période reste constante, ce
qui permet de fonctionnement des pendules à balancier.

336
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 337

— Pour Em2 > mga , le mouvement n’est pas borné, le pendule n’oscille plus, mais
effectue des tours complets, ou révolutions, autour de ∆, la vitesse angulaire ne chan-
geant plus de signe. On obtient ces révolutions par exemple en lançant le pendule à
partir de θ = 0 , avec une vitesse angulaire θɺ > 0 telle que :
0
1
Em = Em (t = 0) = Ec (t = 0) + Ep (t = 0) = J ∆ θɺ 02 − mga > mga , soit pour θɺ 0 > 2ω0 .
2
Revenons au cas où −mga ≤ Em ≤ mga et cherchons à déterminer la période
des oscillations. L’énergie mécanique du pendule se conserve :
1
Em = J ∆ θɺ 2 − mga cos θ = −mga cos θmax . On en déduit :
2
2
 dθ  mga 2
 dt  = 2 J ( cos θ − cos θmax ) = 2ω0 ( cos θ − cos θmax ) (1) . Lorsque θ passe de 0 à
  ∆
θmax , il s’écoule un quart de période. Effectuons un changement de variable : θ est
θ θ 
remplacé par ϕ défini par sin   = sin  max  sin ϕ . Le changement de variable pré-
2
   2 
π
conisé est alors valable car il y a une bijection entre θ et ϕ qui varie de 0 à . La
2
2
 dθ  θ  θ 
relation (1) devient   = 4ω02 sin2  max  (1 − sin2 ϕ) = 4ω02 sin2  max  cos2 ϕ , en
d
 t  2   2 
θ dθ
utilisant cos θ = 1 − 2 sin2   , et, puisque est positif sur le quart de période consi-
2 dt
dθ θ  dθ
déré : = 2ω0 sin  max  cos ϕ (2) . Il reste à exprimer en fonction de ϕ et de ses
dt  2  dt
θ θ 
dérivées temporelles. Prenons pour cela la différentielle de sin   = sin  max  sin ϕ :
2
   2 
θ 
2 sin  max  cos ϕ
 θ  dθ θ  dθ  2  dϕ θ
cos   = sin  max  cos ϕdϕ  dt = (3) car cos   ,
2
  2  2  θ  d t 2
1 − sin2  max  sin2 ϕ
 2 
θ θ θ 
positif, peut s’écrire cos   = 1 − sin2   = 1 − sin2  max  sin2 ϕ . Nous pouvons
2
  2
   2 

maintenant éliminer entre (2) et (3) :
dt
π /2
1 dϕ 4 dϕ
dt =
ω0 2  θmax
 2
, d’où T =
ω0  2  θmax
 2
. Cette inté-
1 − sin  0
 sin ϕ 1 − sin   sin ϕ
 2   2 
grale, appelée intégrale elliptique, n’est pas calculable analytiquement.

337
338 Partie V.  Mécanique

π θ  π
Cependant, si θmax est inférieur à , on a sin2  max  ≤ sin2   = 0,25 , or,
3  2  6
1
même pour cette valeur, (1 − 0,25)−1/2 ≃ 1,155 est peu différent de 1 + 0,25 ≃ 1,125
2
−1/2
 θ  2  1 2  θmax  2
ce qui justifie qu’on utilise 1 − sin2  max  sin ϕ ≃ 1+ sin   sin ϕ , c’est-
  2   2  2 
−1/2
à-dire le développement limité de [1 − X ] à l’ordre 1 en X = 0 :
π /2 π/ 2
4 dϕ 4  1  2 
2  θmax
T =
ω0  θ  2

ω0  1 + 2 sin  2  sin ϕ  dϕ . On obtient :
  
0 1 − sin2  max  sin ϕ
0
 2 

4  π 1 2  θmax  π  1 2  θmax    θmax 2 


T ≃  + sin   4  ≃ T0 1 + 4 sin  2    T ≃ T0 1 + 16  (formule de
ω0 2 2  2       
Borda), car on a également :
θ  θ π
sin  max  ≃ max pour θmax ≤ . Il
 2  2 3
n’y a plus isochronisme des oscilla-
tions. La période est une fonction
croissante de θmax (et tend vers l’in-
fini quand θmax → π , puisque la va-
leur critique de l’énergie Em = mga
correspond à l’équilibre instable du
pendule : placé exactement dans
cette position, il y reste indéfiniment).

2.5 Pendule de torsion 


Considérons un solide
Σ suspendu en son centre
d’inertie G par un fil de torsion
dont l’autre extrémité O est
fixe. Le fil OG est porté par
l’axe vertical ∆ qui est égale-
ment l’axe de rotation du so-
lide. Si on fait subir au fil une
torsion d’angle θ par rapport
au cas où il n’en subit aucune,
il exerce sur Σ un couple de torsion de moment M∆torsion = −C θ .
La constante de torsion C est en N ⋅ m ⋅ rad-1 .

338
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 339

En l’absence de frottements visqueux, les actions de torsion sont les seules


dont le moment par rapport à ∆ est non nul. Si on note J ∆ le moment d’inertie de Σ par
rapport à l’axe ∆, le théorème du moment cinétique appliqué à Σ, en projection sur ∆,
dans le référentiel du laboratoire supposé galiléen, fournit J ɺɺ
θ = −C θ . C’est l’équation

ɺɺ C
θ + ω02θ = 0 d’un oscillateur harmonique, avec ω0 = .
J∆
En présence de frottements fluides, il faut rajouter un couple dont le moment
est supposé varier linéairement avec la vitesse angulaire de Σ :
M = −βω = −βθɺ . L’équation du mouvement devient :
∆frottements

J ∆ɺɺ
θ = −C θ − βθɺ . On peut compléter le tableau des analogies avec un solide en tran-
slation soumis à l’action d’un ressort et de frottements fluides linéaires :

degré de liberté x (élongation algébrique) θ (angle de torsion)


couple de moment
actions élastiques tension T = −kx
M∆torsion = −C θ
énergie potentielle élas- 1 2 1 2
Ep = kx Ep = Cθ
tique 2 2
actions de frottements vis- couple de moment
force F = −λv
queux M∆frottements = −βω
équation du mouvement mxɺɺ + λxɺ + kx = 0 J ∆ ɺɺ
θ + βθɺ + C θ = 0

pulsation des oscillations k C


ω0 = ω0 =
non amorties m J∆

2.6 Pendules couplés par torsion 


On considère deux pen-
dules pesants identiques qui os-
cillent dans des plans verticaux
parallèles, autour du même axe
∆. On note J ∆ le moment d’iner-
tie d’un pendule par rapport à cet
axe, m sa masse, et a la distance
du centre d’inertie d’un pendule à
l’axe de rotation.
Les mouvements des pendules sont repérés par les angles orientés θ1 et θ2
qu’ils font avec la verticale descendante, et on note C la constante de torsion du fil de
torsion horizontal qui relie les points O1 et O2 des pendules sur l’axe ∆. Il n’y a aucune
torsion quand les deux pendules sont dans leur position d’équilibre stable θ1 = 0 ,
θ2 = 0 .

339
340 Partie V.  Mécanique

Appliquons à chaque pendule le théorème du moment ciné-


tique en projection sur ∆ dans le référentiel du laboratoire supposé
galiléen. Le pendule 1 est soumis à un couple de torsion de mo-
ment +C(θ2 − θ1) car il est positif si θ2 > θ1 , ainsi qu’au moment du
poids qu’on détermine à l’aide du bras de levier et en appliquant
un signe « moins » du fait que le poids seul ferait tourner le pen-
dule autour de ∆ dans le sens négatif. Le moment des actions du
bâti sur les pendules est nul si on suppose la liaison pivot idéale. Il en va de même
pour le pendule 2, sauf que le couple de torsion est −C (θ2 − θ1) , car il est négatif si
J ∆ ɺɺ
θ1 = −mga sin θ1 + C (θ2 − θ1)
θ2 > θ1 :  . Si on suppose que les pendules restent fai-
J ∆ ɺɺ
θ2 = −mga sin θ2 − C (θ2 − θ1)
blement écartés de leur position d’équilibre stable lors du mouvement, on peut linéari-
J ɺɺ θ + mga θ1 = C(θ2 − θ1)
ser les sinus :  ∆ 1 . Ce système d’équations différentielles li-
ɺɺ
J ∆ θ2 + mga θ2 = −C(θ2 − θ1)
néaires est couplé. On le découple en posant S = θ1 + θ2 et D = θ1 − θ2 , et en faisant
 ɺɺ mga
S + J S = 0
 ∆
la somme et la différence des deux équations :  .
D ɺɺ + mga + 2C
D=0
 J∆

mga mga + 2C
Les pulsations propres sont ω+ = et ω− = .
J∆ J∆
S = θ1 + θ2 = 2 A+ cos(ω+ t + ϕ+ )
On a donc  , d’où :
D = θ1 − θ2 = 2 A− cos(ω−t + ϕ− )
 S +D
θ1 = 2 = A+ cos(ω+ t + ϕ+ ) + A− cos(ω−t + ϕ− )
 .
θ = S − D = A cos(ω t + ϕ ) − A cos(ω t + ϕ )
 2 2
+ + + − − −

Les quatre constantes d’intégration A+ , A− , ϕ+ et ϕ− sont déterminées à partir


des quatre conditions initiales : θ1(0) , θɺ 1(0) , θ2 (0) et θɺ 2 (0) .
Dans le cas général, les oscillations ne sont pas sinusoïdales ni périodiques
puisque les deux pulsations sont incommensurables (leur rapport est irrationnel). Le
spectre de θ1 ou θ2 contient deux raies de pulsations ω+ et ω− > ω+ .
Avec des conditions initiales particulières, par exemple θ1(0) = α , θ2 (0) = α ,
θɺ 1(0) = 0 et θɺ 2 (0) = 0 , on obtient θ1(t ) = θ2 (t ) = α cos(ω+ t ) . La pulsation propre ω+
correspond au mode propre symétrique où les deux barres oscillent sinusoïdalement
à la même pulsation, en phase et avec la même amplitude. On peut remarquer que le
fil de torsion n’est alors jamais tordu, si bien qu’on se ramène à deux oscillateurs

340
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 341

mga
identiques indépendants de pulsation ω+ = .
J∆
D’autres conditions initiales particulières, par exemple θ1(0) = α , θ2 (0) = −α ,
θɺ 1(0) = 0 et θɺ 2 (0) = 0 , permettent d’obtenir θ1(t ) = −θ2 (t ) = α cos(ω−t ) . La pulsation
propre ω− correspond au mode propre antisymétrique où les deux barres oscillent si-
nusoïdalement à la même pulsation, en opposition de phase et avec la même ampli-
tude. On peut remarquer que la grande torsion initiale du fil ramène plus vite les oscil-
lateurs vers leur position d’équilibre que pour le mode symétrique : ω− > ω+ .

Plus généralement : pour N oscillateurs linéaires couplés, apparaissent N


modes propres. Un mode propre est obtenu pour des conditions initiales particulières
telles que tous les oscillateurs oscillent sinusoïdalement à la même pulsation. Dans le
cas général, les oscillations sont des combinaisons linéaires des N modes propres.

Plaçons-nous dans le cas où le système n’est pas dans un mode propre, en


prenant par exemple comme conditions initiales : θ (0) = α , θ (0) = 0 , θɺ (0) = 0 et
1 2 1

α = A+ cos ϕ+ + A− cos ϕ−

ɺθ (0) = 0 . On obtient 0 = A+ cos ϕ+ − A− cos ϕ−  A+ sin ϕ+ = 0
2 , d’où  .
0 = − A+ ω+ sin ϕ+ − A−ω− sin ϕ−  A− sin ϕ− = 0
0 = − A ω sin ϕ + A ω sin ϕ
 + + + − − −

 A + A− = α
Avec ϕ+ = ϕ− = 0 , les deux premières équations deviennent  + , d’où
 A+ − A− = 0
α α α
A+ = A− = . Ainsi θ1 = [cos(ω+t ) + cos(ω−t )] et θ2 = [cos(ω+t ) − cos(ω−t )] : le
2 2 2
système est dans une combinaison linéaire des deux modes propres.
On peut écrire les solutions sous la forme :
 ω + ω−   ω − ω+   ω + ω−   ω − ω+ 
θ1 = α cos  + t  cos  − t  et θ2 = α sin  + t  sin  − t .
 2   2   2   2 
Tout se passe comme si les oscillations étaient sinusoïdales, de pulsation
ω + ω− ω − ω+
moyenne ω0 = + , mais dont l’amplitude varie à la pulsation ωenv = − .
2 2
Si le couplage est faible (C << mga ), on a :
mga + 2C mga 2C  C  C
ω− = = ⋅ 1+ ≃ ω+  1 +  = ω+ (1 + k ) , avec k = << 1 ,
J∆ J∆ mga  mga  mga
ω+ + ω− mga ω − ω+ k
d’où ω0 = ≃ ω+ = et ωenv = − ≃ ω0 . On en déduit :
2 J∆ 2 2
 kω t   kω t 
θ1 = α cos(ω0t )cos  0  , et θ2 = α sin(ω0t )sin  0  .
 2   2 

341
342 Partie V.  Mécanique


θ1(t ) est donc le produit de la fonction t ֏ cos(ω0t ) de période T0 = par la
ω0
 kω t  4π 2T
fonction t ֏ α cos  0  , de période Tenv = = 0 >> T0 , et dont la courbe re-
 2  k ω0 k
présentative joue donc le rôle d’enveloppe de la courbe représentative de t ֏ θ1(t ) . Il
 kω t 
en est de même pour t ֏ θ2 (t ) , son enveloppe d’équation t ֏ α sin  0  se trou-
 2 
vant en quadrature de phase avec celle de θ1(t ) . On a donc un phénomène de batte-
Tenv T0
ments pour les deux pendules, de période Tbatt = = .
2 k
1
On peut vérifier que la valeur de l’énergie Emi = J ∆ θɺ i 2 − mga cos θi du pendule
2

i ( i ∈ {1,2} ) à la date t, moyennée sur une pseudo-période T0 = , est proportionnelle
ω0
 kω t   kω t 
au carré de l’amplitude α cos  0  ou α sin  0  des oscillations. L’énergie totale
 2   2 
du système est constante en l’absence de frottement, et est égale à l’énergie des deux
oscillateurs puisqu’on néglige l’énergie potentielle de torsion, le couplage étant faible.
On retrouve bien le fait que lorsque l’amplitude des oscillations d’un des pendules est
maximale, elle est minimale pour l’autre (transfert d’énergie par le fil de torsion).

342
Chapitre 1.  Révisions et compléments : mouvement d’un solide 343

2.7 Modes propres des oscillations de trois disques couplés par torsion 
Trois disques identiques homogènes de centres
respectifs O1 , O2 et O3 ont leur axe commun vertical ∆
constitué de quatre fils de torsion A1O1 , O1O2 , O2O3 et
O3 A2 , de même constante de torsion C. On repère la
position des disques grâce aux angles θ1 , θ2 et θ3 dont
ils ont tourné autour de ∆ par rapport à leur position
d’équilibre dans laquelle aucun fil n’est tordu. On note J ∆
le moment d’inertie d’un disque par rapport à l’axe ∆.
Le disque de centre O1 est soumis au couple de
torsion du fil A1O1 de moment −Cθ1 et au couple de tor-
sion du fil O1O2 de moment −C(θ1 − θ2 ) (ce moment est
bien un moment de rappel si on bloque θ2 à la valeur θ2 = 0 , et est nul si θ1 = θ2 ).
Le disque de centre O2 est soumis au couple de torsion du fil O1O2 de moment
−C(θ2 − θ1) et au couple de torsion du fil O2O3 de moment −C (θ2 − θ3 ) .
Le disque de centre O3 est soumis au couple de torsion du fil O2O3 de moment
−C (θ3 − θ2 ) et au couple de torsion du fil O3 A2 de moment −Cθ3 .
En appliquant à chaque disque le théorème du moment cinétique par rapport à
J ∆ ɺɺθ1 = −Cθ1 − C(θ1 − θ2 ) ɺɺ
θ = −2ω02θ1 + ω02θ2
 ɺɺ  1
l’axe ∆, on obtient J ∆ θ2 = −C(θ2 − θ1) − C(θ2 − θ3 ) , soit ɺɺθ2 = ω02θ1 − 2ω02θ2 + ω02θ3 ,
 ɺɺ ɺɺ 2 2
J ∆ θ3 = −C(θ3 − θ2 ) − Cθ3 θ3 = ω0 θ2 − 2ω0 θ3

C
en posant ω0 = .
J∆
Les modes propres du système correspondent à des oscillations sinusoïdales
des trois disques à la même pulsation. On peut donc se placer en notation complexe
et rechercher des solutions du système d’équations différentielles couplées précédent
de la forme θ1 = Θ1e i ωt , θ2 = Θ2e i ωt et θ3 = Θ3e i ωt . On a alors :

 2ω 2 − ω2  Θ − ω 2 Θ = 0
 0  1 0 2

−ω0 Θ1 + 2ω0 − ω  Θ2 − ω0 Θ3 = 0 .
2 2 2 2


−ω02 Θ2 + 2ω02 − ω2  Θ3 = 0
  
Il n’existe des solutions non nulles pour les amplitudes complexes Θ1 , Θ2 et
Θ3 que si le déterminant du système est nul, soit :

343
344 Partie V.  Mécanique

2ω02 − ω2 −ω02 0
2 2 2
−ω0 2ω0 − ω −ω02 = 0 . La pulsation ω est donc solution de l’équation
2 2 2
0 −ω0 2ω0 − ω
3
2ω02 − ω2  − 2ω04 2ω02 − ω2  = (2ω02 − ω2 )(ω4 − 4ω02ω2 + 2ω04 ) = 0 dont les ra-
   
cines positives sont ωa = ω0 2 , ωb = ω0 2 + 2 et ωc = ω0 2 − 2 .
On résout le système d’équations reliant Θ1 , Θ2 et Θ3 pour chaque pulsation
propre :
— pour le mode propre « a » : ω2 = 2ω02 . On a alors :
−ω02 Θ2 = 0

 2 2
−ω0 Θ1 − ω0 Θ3 = 0 , d’où Θ2 = 0 et Θ3 = −Θ1 . Le disque du milieu reste immobile
 2
−ω0 Θ2 = 0
alors que les deux autres subissent des oscillations de même amplitude, mais en op-
position de phase.
− 2 Θ1 − Θ2 = 0


( )
— pour le mode propre « b » : ω2 = 2 + 2 ω02 . On a alors −Θ1 − 2 Θ2 − Θ3 = 0 ,

−Θ2 − 2 Θ3 = 0

d’où Θ2 = −Θ1 2 et Θ3 = Θ1 . Le disque du milieu oscille en opposition de phase avec


les deux autres qui subissent des oscillations identiques. L’amplitude des oscillations
du second disque est plus grande que celle des deux autres d’un facteur 2.
 2 Θ1 − Θ2 = 0


( )
— pour le mode propre « c » : ω2 = 2 − 2 ω0 2 . On a alors −Θ1 + 2 Θ2 − Θ3 = 0 ,

−Θ2 + 2 Θ3 = 0

d’où Θ2 = Θ1 2 et Θ3 = Θ1 . Le disque du milieu oscille en phase avec les deux autres


qui subissent des oscillations identiques. L’amplitude des oscillations du second
disque est plus grande que celle des deux autres d’un facteur 2.

344
345

[MÉCANIQUE 2]

DYNAMIQUE DANS UN
RÉFÉRENTIEL NON GALILÉEN
Même s’il n’est pas galiléen, il peut être intéressant de se placer dans un réfé-
rentiel R ′ dans lequel le mouvement d’un point matériel est simple, ou dans lequel
l’observateur est fixe. Les vecteurs position, vitesse et accélération sont exprimés dans
R ′ . Il est alors nécessaire de changer de référentiel, c’est-à-dire de calculer ces gran-
deurs dans un référentiel R galiléen, afin de pouvoir appliquer au point matériel le
principe fondamental de la dynamique.

1. CHANGEMENT DE RÉFÉRENTIEL
1.1 Repère et référentiel

Un repère d’espace est constitué par un solide de référence (ensemble rigide


de points, c’est-à-dire dont les distances mutuelles sont constantes), comme la Terre.

En choisissant un point O de ce solide comme origine, et une base orthonormée


G G G
directe (ex , ey , ez ) liée à ce solide, on repère un point à l’aide de trois coordonnées
→ G G G
spatiales cartésiennes x, y et z (en mètre) telles que OM = xex + yey + zez . Par
exemple, un trièdre Oxyz lié à la tour Eiffel et un autre O ′x ′y ′z′ lié à l’Empire State
Building appartiennent tous les deux au même repère d’espace, le repère terrestre.

Un repère de temps est constitué d’une origine et d’une unité de mesure cons-
tante. Un événement est repéré par la durée t (en seconde) qui le sépare de l’évène-
ment origine.

Un référentiel R est constitué d’un re-


père d’espace et d’un repère de temps.
En mécanique classique, la durée
entre deux évènements est la même qu’elle
soit mesurée dans un référentiel R ou dans
un référentiel R ′ en mouvement quelconque
par rapport à R . On confond donc souvent
(par abus de langage) trièdre, repère et réfé-
rentiel.

345
346 Partie V.  Mécanique

1.2 Vecteur rotation instantané


On étudie le mouvement d’un solide R ′ dans un référentiel R . On considère
G G G
une base orthonormée directe ( e1′ , e2′ , e3′ ) liée à R ′ . La distance entre deux points
quelconques A et B appartenant au solide R ′ reste constante dans R . Ainsi, si on
G
G → G G G  du 
pose u = AB , on a u = Cte , soit u 2 = Cte  2u ⋅   = 0 . L’application A définie
 dt  R
G
G  du  G G G G
par A ( u ) =   est linéaire : si u = u1e1′ + u2 e2′ + u3 e3′ on a :
 dt  R
G  a11 a12 a13  u1  G
G  du     G  du 
A (u ) =   = a21 a22 a23  u2  . Si on applique la formule u ⋅  dt  = 0 à l’un
 dt  R     R
 a31 a32 a33  u3 
3
G G G
des vecteurs de base ek′ , avec k ∈ a1,3b , on obtient ek′ ⋅  aik ei′ = akk = 0 . D’autre
i =1
G G
G G G  de′j  G  de′ 
part, comme ei′ ⋅ e′j = 0 si j ≠ i , on a ei′ ⋅   + e′j ⋅  i  = 0 en dérivant par rap-
 dt  R  dt  R
port au temps, soit aij + a ji = 0 . La matrice de A est antisymétrique et s’écrit :

 0 −a21 a13  G  −a21u2 + a13u3   a32   u1 


 du       
[ A ] =  a21 0

−a32  , d’où 
d  =  a21u1 − a32u3  =  a13  ∧  u2  .
 −a  t R 
 13 a32 0   a  u 
 −a13u1 + a32u2  N 21   3 
G
ω

G
G →  du  G G
Ainsi, pour tout vecteur u = AB fixe dans R ′ , on a   = ω ∧ u . Le vecteur
 dt  R
G G G
ωR ′ / R = ω = ω(t ) est appelé vecteur rotation instantané de R ′ par rapport à R .
G
 du  G G
Comme   = v (B ) − v ( A) , les vitesses dans R de deux points A et B du
 d t R
G G G → G G
solide R ′ sont liées par la relation v (B ) = v ( A) + ω ∧ AB , avec ω = ωR ′ / R .

3
G G
Si u (t ) =  ui (t )ei′ est un vecteur mobile dans R ′ , on a :
i =1
G 3 3 G G
 du  dui G  de′   du  G G
  =
 dt  R
 d 
ei′ + ui  i  = 
d  d  + ω ∧ u . On obtient :

i =1  R
i =1
t t t R
G G
ω∧ ei′

G G
 du   du  G G
 dt  =   + ω ∧ u (formule de dérivation vectorielle).
  R  dt  R ′

346
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 347

G
La formule de dérivation vectorielle appliquée à ω donne :
G G G G
 dω   dω  G G  dω  dω G
 dt  =  d t  + ωN ∧ω=  = : la dérivée temporelle de ω est la même
 R  R ′ G
0  dt  R ′ dt
dans R et R ′ . D’autre part, si un solide R ′′ est lui-même en mouvement par rapport
G
à R ′ avec un vecteur rotation instantané ωR ′′ / R ′ , son vecteur rotation instantané par
G G G
rapport à R vérifie ωR ′′ / R = ωR ′′ / R ′ + ωR ′ / R (composition des vecteurs rotation).

1.3 Mouvement de translation


Définition

Un solide R ′ est en mouvement de translation par rapport à un référentiel R


→
si pour deux points quelconques A et B de ce solide, le vecteur AB garde dans R
mêmes direction, sens et norme au cours de temps : à deux instants quelconques t1

→ →
et t2 , AB (t2 ) = AB (t1) . Les trajectoires dans R de tous les points du solide sont
superposables.

Si ces trajectoires sont des droites parallèles, on parle de translation rectiligne ;


si ce sont des cercles de même rayon, on parle de translation circulaire.

Prenons quelques exemples fondamentaux :

347
348 Partie V.  Mécanique

— Le référentiel de Copernic RC est constitué d’un repère dont l’origine est le centre
d’inertie C du système solaire, et dont les axes pointent vers trois étoiles fixes, et d’un
repère de temps.
— Le référentiel héliocentrique RS (ou de Képler) est constitué d’un repère dont l’ori-
gine est le centre d’inertie S du Soleil, et qui est en translation par rapport à RC , et
d’un repère de temps.
— Le référentiel géocentrique Rg est constitué d’un repère dont l’origine est le centre
d’inertie T de la Terre, et qui est en translation par rapport à RC , et d’un repère de
temps. T décrivant une trajectoire elliptique par rapport à RC , le repère de Rg est en
translation elliptique par rapport à celui de RC . Par abus de langage, nous confon-
drons repère et référentiel et nous dirons que Rg est en translation elliptique par rap-
port à RC .

Vecteur rotation instantané


→ → G G
Comme AB (t ) = Cte , on obtient v (B ) = v ( A) ∀t en dérivant dans R :
G G
Le vecteur rotation instantané ω = ωR ′ / R est nul dans le cas où R ′ est en translation
G
par rapport à R , et la dérivée d’un vecteur u est la même dans R et R ′ ; on peut
G
du
la noter simplement .
dt

Composition des vitesses


Soit un point M en mouvement par rapport à R ′ , lui-même en translation par
G G G
rapport à R (les vecteurs d’une base orthonormée directe ( e′x , ey′ , ez′ ) de R ′ étant
G G G G G G
fixes par rapport à R , on peut faire le choix e′x = ex , ey′ = ey , ez′ = ez ).
En introduisant les origines O et O′ respectives des repères choisis pour R et
→ → →
R ′ , on peut écrire la relation de Chasles OM = OO′ + O′M , qu’on dérive par rapport
→ → →
d OM d OO′ d O′M
au temps : = + .
 dt  dt  dt
G G G
v a (M ) v e (M ) vr (M )

On a donc :
G G G G
v a (M ) = v r (M ) + v e (M ) , où v a (M ) est la vitesse absolue de M (vitesse de M par rapport
G
à R ), v r (M ) la vitesse relative de M (vitesse de M par rapport à R ′ ), et
G G
v e (M ) = v a (O′) la vitesse d’entraînement de M.

348
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 349

On définit le point coïncidant M ∗ qui coïncide avec le point M à l’instant t, mais


qui est fixe par rapport à R ′ .
Dans le cas où R ′ est en translation par rapport à R , tous les points fixes de
G G G G
R ′ ont la même vitesse par rapport à R , donc v e (M ) = v a (M ∗ ) = v a (O′) . Ainsi v e (M )
est la vitesse par rapport à R du point coïncidant.

La dénomination « absolue » et « relative » est arbitraire lorsqu’il s’agit de dé-


crire le mouvement d’un point (étude cinématique) : il n’y a pas de référentiel privilégié.

Composition des accélérations


On dérive de nouveau par rapport au temps la relation obtenue par composition
G G G
dv a (M ) dv r (M ) dv a (O′)
des vitesses : = + .
 dtG  dtG  dt G
aa ( M ) ar ( M ) ae (M )

G G G G
aa (M ) = ar (M ) + ae (M ) , où aa (M ) est l’accélération absolue de M (accélération
G
de M par rapport à R ), ar (M ) l’accélération relative de M (accélération de M par rap-
G G
port à R ′ ), et ae (M ) = aa (O′) l’accélération d’entraînement de M.
Dans le cas où R ′ est en translation par rapport à R , tous les points fixes de
G G G
R ′ ont la même accélération par rapport à R , donc ae (M ) = aa (M ∗ ) = aa (O′) . Ainsi
G
ae (M ) est l’accélération par rapport à R du point coïncidant M ∗ .

1.4 Mouvement de rotation autour d’un axe fixe


Définition

Un solide R ′ est en mouvement de rotation par rapport à un référentiel R ,


autour d’un axe fixe ∆ = Oz de R , si tous les points de R ′ décrivent entre deux ins-
tants quelconques t1 et t2 un arc de cercle d’axe ∆, d’angle au centre ∆θ , orienté dans
le sens du tire-bouchon.

349
350 Partie V.  Mécanique

Le référentiel terrestre Rt est lié au solide « Terre ». Par rapport au référentiel


géocentrique Rg dont les axes pointent vers des étoiles fixes, il est en rotation autour
de l’axe des pôles, fixe dans Rg .

Vecteur rotation instantané


On repère la rotation de R ′ par rapport à R grâce à l’angle orienté θ, et on
� � � � �
prend comme base liée à R ′ la base orthonormée directe ( e′x , ey′ , ez′ = ez ) où e′x et
� � �
ey′ se déduisent respectivement des vecteurs ex et ey , fixes par rapport à R , par
une rotation d’angle θ autour de ∆ = Oz . On prend O′ ≡ O pour origine de R ′ .

On a donc :

 de′x  � � � � �
� � �   = −θɺ sin θex + θɺ cos θey = θɺ ey′ = θɺ ez ∧ e′x
ex′ = cos θex + sin θey  dt  R
� � �  � .
ey′ = − sin θex + cos θey  dey′  = −θɺ cos θe� − θɺ sin θe� = −θɺ e�′ = θɺ e� ∧ e�′
 dt  x y x z y
 R
� � � �
Soit maintenant u = x ′(t ) e′x + y ′(t ) ey′ + z′(t ) ez une fonction vectorielle du temps.
On peut exprimer sa dérivée temporelle dans R ′ comme dans R :

 du  � � � � � �
 dt  = xɺ ′e′x + yɺ ′ey′ + zɺ ′ez puisque (ex′ , ey′ , ez ) sont fixes dans R ′ .
 R ′
� � �
 du  � � �  de′x   dey′ 
 dt  = xɺ ′e′x + yɺ ′ey′ + zɺ ′ez + x ′  dt  + y ′  dt 
 R  R  R
� � .
 du  ɺ � � � �  d u � �
=  + θez ∧  x ′e′x + y ′ey′ + z′ez  =  dt  + ω ∧ u
 dt  R ′  R ′
� � �
On reconnait la formule de dérivation vectorielle, avec ω = ωR ′ / R = θɺ ez .

Si pendant une durée infinitésimale dt le solide R ′ tourne de dθ autour de l’axe


dθ ɺ
∆ = Oz fixe dans R , sa vitesse angulaire instantanée est ω = ωR ′ / R = = θ , et son
dt
� � �
vecteur rotation instantané ω = ω = θɺ e .
R ′/ R z

350
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 351

Composition des vitesses


Soit un point M en mouvement par rapport à R ′ , lui-même en rotation autour
→
d’un axe fixe Oz par rapport à R . En dérivant OM dans R , on obtient à l’aide de la
 →   → 
 d OM   d OM  � →
formule de dérivation vectorielle :   =  +ω
��∧�� OM�.
 dt   dt  �
v e (M )
�����  R ����� R ′
� �
v a (M ) vr (M )

� � � �
v a (M ) = v r (M ) + v e (M ) , où v a (M ) est la vitesse absolue de M (vitesse de M par

rapport à R ), v r (M ) la vitesse relative de M (vitesse de M par rapport à R ′ ), et
� � →
v e (M ) = ω ∧ OM la vitesse d’entraînement de M.

v e (M ) est la vitesse par rapport à R du point M ∗ qui coïncide avec le point M


� � �
à l’instant t, mais qui est fixe par rapport à R ′ : v e (M ) = v a (M ∗ ) = ω ∧ OM ∗ .

Le point coïncidant M ∗ décrit dans R


un mouvement circulaire d’axe Oz (centré sur
le projeté orthogonal H de M ∗ sur cet axe), sa
vitesse par rapport à R , orthoradiale et de
norme ωHM ∗ , s’écrit bien :

→ →
� � � � �
v (M ∗ ) = ω ∧ HM ∗ = ω ∧ OM ∗ , car ω = θɺ ez et
→
OH sont colinéaires.

Composition des accélérations


On dérive de nouveau par rapport au temps la relation obtenue par composition
� � �  → 
 dv a ( M )   dv r (M )  dω → �  d OM 
des vitesses :  = + ∧ OM + ω ∧  .
�� dt  R  dt  R dt  dt 

� � ��� �  
aa ( M ) R

La formule de dérivation vectorielle donne :


� �  →   → 
 dv r ( M )   dv r ( M )  � �  d OM   d OM  � →
 dt  =  dt  + ω ∧ v r (M ) , et  dt  =  dt  + ω ∧ OM .
  R �� � �    
����
R′
  R ����� R ′
ar ( M ) �
vr (M )

� � dω → �  � →  � �
Finalement aa (M ) = ar (M ) + ∧ OM + ω ∧  ω ∧ OM  + 2ω ∧ v r (M ) .
dt  

351
352 Partie V.  Mécanique

L’accélération d’entraînement est l’accélération absolue du point coïncidant M ∗


fixe par rapport à R ′ , donc :
G →
G G
→ 
G G G dω G G
ae (M ) = aa (M ∗ ) = ar (M ∗ ) + ∧ OM ∗ + ω ∧ ω ∧ OM ∗  + 2ω ∧ v r (M ∗ ) .
G dt   G
0   0
G G G G G G G G G
On peut la simplifier en utilisant la relation A ∧ (B ∧ C ) = B ( A ⋅ C ) − C ( A ⋅ B ) :

G G
→  → → →
G G G G →
ω ∧ ω ∧ OM ∗  = ω (ω ⋅ OM ∗ ) − ω2 OM ∗ = ω (ω ⋅ OH ) − ω2 OM ∗
 
 

→ → 

= ω2 OH − ω2 OM ∗ = −ω2 HM ∗
→ → → G
G dω dω G →
On a en effet OM ∗ = OH + HM ∗ or ω et = ez sont colinéaires à OH et
dt dt


orthogonaux à HM ∗ .
→ G →
G G dω
On trouve ae (M ) = aa (M ∗ ) = −ω2 HM ∗ + ∧ HM ∗ dont on peut vérifier que c’est
dt
bien l’accélération d’un point décrivant dans R un cercle d’axe Oz et de rayon HM ∗ .
Il est inutile de mémoriser cette formule puisqu’on retrouve facilement l’accélération
d’un point matériel en mouvement circulaire dans R .
G G G G G
aa (M ) = ar (M ) + ae (M ) + ac (M ) , où aa (M ) est l’accélération absolue de M (ac-
G
célération de M par rapport à R ), ar (M ) l’accélération relative de M (accélération de
G G
M par rapport à R ′ ), ae (M ) = aa (M ∗ ) l’accélération d’entraînement de M, accélération
par rapport à R du point M ∗ qui coïncide avec le point M à l’instant t, mais qui est
fixe par rapport à R ′ (et qui décrit donc un cercle autour de Oz à la vitesse angulaire
ω).
G G G
On appelle accélération de Coriolis ac (M ) = 2ω ∧ v r (M ) le terme supplémen-
taire.

1.5 Changement quelconque de référentiel


On peut dans tous les cas écrire la composition des vitesses et des accéléra-
G G G G G G G
tions sous les formes v a (M ) = v r (M ) + v e (M ) et aa (M ) = ar (M ) + ae (M ) + ac (M ) .
Le mouvement d’entraînement est le mouvement absolu du point coïncidant
G
G G dω → G  G →  G G
M ∗ , et on a ae (M ) = aa (M ∗ ) = ∧ OM + ω ∧ ω ∧ OM  si ω = ωR ′ / R (cette formule
dt  
n’est pas à retenir dans le cadre du programme).
G G G
L’accélération de Coriolis est ac (M ) = 2ω ∧ v r (M ) .
G G
Dans le cas d’une translation, ω = 0 , et l’accélération de Coriolis est nulle.

352
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 353

2. DYNAMIQUE DANS UN RÉFÉRENTIEL NON


GALILÉEN
2.1 Ensemble des référentiels galiléens
D’après la première loi de Newton, ou principe d’inertie, il existe un référentiel
galiléen Rgal tel que tout point matériel M isolé ou pseudo-isolé est en mouvement

G G →
rectiligne uniforme par rapport à Rgal : v (M )/ Rgal = v a (M ) = Cte
G G G G
Dans un autre référentiel R , on a v r (M ) = v (M )/ R = v a (M ) − v e (M ) .
G → G G → G
R est également galiléen si v r (M ) = Cte  v e (M ) = v a (M ∗ ) = Cte = u . Tous
G
les points fixes de R doivent donc avoir la même vitesse u , constante dans le temps,
par rapport à Rgal . Ceci correspond à un mouvement de translation uniforme de R
par rapport à Rgal .

Tous les référentiels galiléens sont en translation rectiligne uniforme les uns par
rapport aux autres.

2.2 Principe fondamental et forces d’inertie


P.F.D dans un référentiel non galiléen
L’expérience du pendule de Foucault (décrite au 4.4) a montré que le référentiel
terrestre n’est pas galiléen. Le principe fondamental de la dynamique du point matériel
ne peut y être appliqué directement tel quel.
Pour pouvoir appliquer le P.F.D à un point matériel M de masse m dans un
référentiel non galiléen, il faut prendre en compte le mouvement de ce référentiel
d’étude par rapport à un référentiel galiléen, et introduire des grandeurs homogènes à
des forces, qu’on appelle forces d’inertie.
Soit R le référentiel d’étude non galiléen et Rgal un référentiel galiléen. On dé-
G G
signe par ar l’accélération relative de M par rapport à R et par aa son accélération
absolue par rapport à Rgal . On peut écrire dans Rgal le P.F.D :
G G G G G
maa = Fi = F , F étant la résultante de toutes les forces Fi s’appliquant sur M.
i
G G G G
La formule de composition des accélérations aa = ar + ae + ac conduit à la rela-
G G G G
tion mar = F − mae − mac .
G G G G
Les deux grandeurs Fe = −mae et Fc = −mac , homogènes à des forces, sont
appelées forces d’inertie. On parle parfois de pseudo-forces car elles ne résultent pas
d’interactions entre deux corps.

353
354 Partie V.  Mécanique

Dans un référentiel non galiléen R en mouvement par rapport à un référentiel


G G G G G G
galiléen Rgal , le P.F.D s’écrit ma/ R = F + Fe + Fc où Fe = −mae est la force d’inertie
G G
d’entraînement et Fc = −mac la force d’inertie de Coriolis.

Relativité de Galilée et d’Einstein


Si R est en translation rectiligne uniforme par rapport à Rgal , il est également
galiléen. Tous les points fixes de R possèdent un mouvement rectiligne uniforme par
G G G G
rapport à Rgal , donc ae = 0 . Comme ω = 0 pour un mouvement de translation, on a
G G G G
également ac = 0 . On retrouve ma/ R = F : le P.F.D s’exprime de la même façon dans
tous les référentiels galiléens (principe de relativité de Galilée).

Si en revanche R est en translation rectiligne, mais non uniforme par rapport


à Rgal , un point matériel M de masse m est soumis à la force d’inertie d’entraînement
G G
Fe = −mae . Supposons qu’il ne soit soumis dans Rgal qu’à la force de gravitation
G G
m∗G (M ) , où G (M ) est le champ de gravitation en M dû à la présence de corps at-
tracteurs (Terre, Lune, Soleil…). On note ici m∗ la masse gravitationnelle, intervenant
dans la loi universelle de la gravitation de Newton, pour la distinguer de la masse
d’inertie m intervenant dans le principe fondamental. Le P.F.D appliqué au point ma-
G G G
tériel dans R s’écrit ma(M )/ R = m∗G (M ) − mae (M ) .
L’identité entre les deux masses m∗ et m, moyennant un choix d’unité, étant un
G G G
fait d’expérience, on a la relation a(M )/ R = G (M ) − ae (M ) : il y a équivalence locale
entre le champ de gravitation et l’opposé du champ d’accélération d’entraînement.
Par exemple, dans une cabine spatiale R en apesanteur (loin de tout astre
G G
attracteur) on a G (M ) = 0 , mais si la cabine accélère avec une accélération constante,
les objets dans la cabine « tombent » vers le « bas » avec une accélération relative
G G
a(M )/ R = −ae (M ) , et il est impossible de savoir si la cause de cette chute est une
accélération ou la présence d’un champ de gravitation.
Cette équivalence est à la base de la théorie de la relativité générale d’Einstein
dans laquelle l’égalité entre masse gravitationnelle et masse d’inertie est un postulat,
et plus un fait d’expérience.

2.3 Théorème du moment cinétique et théorème de l’énergie cinétique dans


un référentiel non galiléen
Le théorème du moment cinétique (T.M.C) en un point O fixe de R non gali-
léen, appliqué au point matériel M de masse m s’écrit :

354
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 355

G
 dLO  → G → G → G G → G
 OM ∧ F + OM ∧ Fe + OM ∧ Fc , avec LO = OM ∧ mv / R .
 =   
 dt R G G
MO (F ) G G
M (F )
G G
M (F )
O e O c

Le théorème de l’énergie cinétique (T.E.C) appliqué au point matériel M de


masse m dans R non galiléen s’écrit entre deux instants infiniment proches t et
G → G → G →
t + dt : dEc = F ⋅ d OM + Fe ⋅ d OM + Fc ⋅ d OM . Comme le déplacement élémentaire de
→ G G G G G G
M dans R est d OM = v / R dt = v r dt et que Fc = −mac = −2mω ∧ v r , le travail élémen-
G → G 

taire de la force d’inertie de Coriolis est nul : dEc = F ⋅
 G d OM + Fe ⋅ d OM .
 G
δW ( F ) δW (Fe )

Dans le cas où R est en mouvement de rotation uniforme autour d’un axe fixe
G G →
Oz par rapport à Rgal , la force d’inertie d’entraînement s’écrit Fe = −mae = mω2 HM ,
où H est le projeté orthogonal de M sur l’axe de rotation. Elle a pour tendance à expul-
ser radialement le point matériel de l’axe de rotation, et s’appelle force centrifuge. Son
G → → →  → → 
travail élémentaire s’écrit δW (Fe ) = mω2 HM ⋅ d OM = mω2 HM ⋅ d  OH + HM  , or
 
→ 
→ G
HM est orthogonal à d OH qui est porté par ez , donc, en posant r = HM , on obtient

G 1 →2 
→ → 
1 
δW (Fe ) = mω HM ⋅ d HM = d mω HM  = d  mω2r 2  = −dEpe .
2  2
 2   2 
 

La force d’inertie de Coriolis ne travaille jamais.


Dans le cas où R est en mouvement de rotation uniforme autour d’un axe fixe
G →
Oz par rapport à Rgal , la force d’inertie d’entraînement Fe = mω2 HM est centrifuge
1
et conservative : elle dérive de l’énergie potentielle d’entraînement Epe = − mω2r 2 ,
2
avec r = HM , et H le projeté orthogonal de M sur l’axe de rotation.

355
356 Partie V.  Mécanique

3. DYNAMIQUE DANS UN RÉFÉRENTIEL EN


MOUVEMENT PAR RAPPORT AU RÉFÉRENTIEL
TERRESTRE R t SUPPOSÉ GALILÉEN
3.1 Force d’inertie de Coriolis dans un manège
On expérimente régulièrement la force d’inertie d’entraînement. Par exemple
dans un avion qui accélère au décollage, un passager ressent une force qui le « colle »
au siège. De même dans une voiture qui prend un virage vers la gauche, un passager
ressent une force qui le déporte vers la droite. Dans tous les cas, c’est l’inertie des
corps qui est responsable de ces pseudo-forces : le passager a tendance à conserver
son mouvement antérieur : à rester au repos par rapport à la piste, ou à rester sur une
ligne droite.
La force d’inertie de Coriolis est moins intuitive. On peut l’expérimenter dans
des manèges qui tournent suffisamment vite. Considérons par exemple un manège
circulaire, de rayon a = 3 m , tournant à la vitesse angulaire ω = 4 tr ⋅ min-1 . Un profes-
seur se place sur l’axe Oz du manège, qui est vertical. Des élèves situés sur la péri-
phérie lui lancent des balles en mousse avec une vitesse horizontale v 0 = 10 m ⋅ s-1 ,
mais aucune ne l’atteint ! Cherchons à comprendre pourquoi et à déterminer de com-
bien les balles manquent leur cible.
Le référentiel R lié au manège est en rotation uniforme par rapport au référen-
tiel terrestre et n’est donc pas galiléen. La balle de masse m est donc soumise à la
G
force d’inertie d’entraînement −mae , centrifuge, et à la force d’inertie de Coriolis,
G G G G
−mac = −2mω ∧ v r , qui dévie la balle perpendiculairement à v r . Une personne se dé-
plaçant sur un rayon du manège subit cette « force » qui l’entraîne sur sa droite, qu’elle
se rapproche ou qu’elle s’éloigne du centre.

Le principe fondamental de la dynamique appliqué à la balle dans R donne


G G G G
mar = mg − mae − mac . En utilisant une base de projection cylindrique, on a :

356
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 357

rɺɺ − r θɺ 2 = ω2r + 2ωr θɺ


 0   rɺ   2ωr θɺ  
� 2 � �        1 d(r 2θɺ )
−ae = ω rer et −ac = −2  0  ∧  r θɺ  =  −2ωrɺ  , d’où
 = −2ωrɺ .
       r dt
 ω   zɺ   0  zɺɺ = −g

1
La troisième équation fournit la loi z(t) : z = z0 − gt 2 : le mouvement vertical
2
n’est pas affecté par la rotation.
On cherche à partir de ce système à obtenir une relation entre r et rɺ (c’est-à-
dire à éliminer θɺ entre les deux premières équations) pour pouvoir calculer la valeur
minimale de r. La seconde équation s’écrit :
d(r 2θɺ ) d( −ωr 2 )
= −2ωrrɺ =  r 2θɺ + r 2ω = Cte = a2ω , puisque pour r = a (au moment
dt dt

où la balle est lancée) on a θɺ = 0 (la vitesse initiale v 0 est radiale dans R ). On en
 a2 
déduit θɺ = ω  2 − 1 (équation 1) . En reportant la valeur de θɺ dans la première équa-
 r 
a4 a2 a2 a4
tion, on obtient rɺɺ − ω2 3 + 2ω2 − ω2r = ω2r + 2ω2 − 2ω2r ⇔ rɺɺ − ω2 3 = 0 .
r r r r
En multipliant par rɺ cette relation et en intégrant par rapport à t, on obtient l’in-
4
a
tégrale première rɺ 2 + ω2 2 = Cte = v 02 + ω2a 2 (équation 2) , en utilisant rɺ = −v 0 pour
r
r = a (toujours au moment où la balle est lancée). La distance d’approche minimale
a 2ω
rmin de la balle à l’axe du manège correspond à rɺ = 0 , soit rmin = . Avec
v 0 2 + a 2ω2

ω ≃ 0,419 rad ⋅ s-1 , on obtient rmin ≃ 37 cm .


On peut également trouver rmin en raisonnant dans le référentiel terrestre. Dans

Rt , la vitesse initiale V0 s’obtient par composition des vitesses : c’est la somme de la

vitesse relative v 0 dans R , radiale, et de la vitesse d’entraînement, vitesse dans Rt
du point A du manège d’où est envoyé la balle, orthoradiale et de norme aω . C’est
cette composante qui explique pourquoi la cible est manquée. Comme dans Rt la
seule force est le poids, le mouvement de la balle y est une parabole contenue dans

le plan vertical contenant V0 . Sa projection sur un plan horizontal est une droite et la
distance rmin est la distance entre O et son projeté orthogonal H sur cette droite. On
� �
retrouve l’angle α que fait V0 avec v 0 dans le triangle OHA.
rmin aω a 2ω
On en déduit sin α = =  rmin = .
a aussi V0 v 02 + a2ω2

357
358 Partie V.  Mécanique

3.2 Mouvement d’un anneau sur un cerceau en rotation


Un cerceau vertical de rayon R et de centre C est en rotation uniforme avec la
vitesse angulaire ω autour d’un axe vertical passant par C. Un petit anneau de masse
m assimilable à un point matériel peut coulisser sans frottement le long du cerceau et
se trouve en un point M à l’instant t. Nous allons chercher à déterminer l’équation du
mouvement de l’anneau dans le référentiel R lié au cerceau ainsi que les positions
d’équilibre et leur stabilité. R est associé au repère Cxyz, tel que le cerceau se trouve
dans le plan xCz, l’axe Cx étant horizontal et l’axe Cz vertical ascendant, M est repéré
� →
grâce à l’angle θ = (ez , CM ) et on note r sa distance à l’axe de rotation Cz.
Dans R non galiléen, le mouvement de l’anneau est
à un seul degré de liberté et il est dans ce cas très fructueux
de raisonner sur l’énergie du point matériel.
Dans R l’anneau est soumis à son poids qui dérive de
l’énergie potentielle de pesanteur Epp = mgz = mgR cos θ , à
la force d’inertie d’entraînement qui, dans le cas de la rotation
uniforme autour d’un axe fixe, dérive de l’énergie potentielle
1
d’entraînement Epe = − mω2r 2 , à la réaction du cerceau qui
2
ne travaille pas dans R (ce ne serait pas le cas dans Rt ) car elle est, en l’absence
de frottements, normale au déplacement de l’anneau par rapport au cerceau, et enfin
à la force d’inertie de Coriolis qui ne travaille pas dans R (son travail élémentaire
� � �
−2m( ω ∧ v r ) ⋅ v r dt est nul).
L’énergie mécanique dans R de l’anneau se conserve donc et vaut, puisque
1 1
r = HM = R sin θ : Em = mR 2θɺ 2 + mgR cos θ − mω2R 2 sin2 θ = Cte .
2 2
Remarquons qu’en dérivant cette expression par rapport au temps et après l’éli-
mination de la solution parasite θɺ = 0 , on peut obtenir l’équation différentielle du mou-
ɺɺɺ − g θɺ sin θ − ω2θɺ sin θ cos θ = 0  ɺɺ g 
vement : θθ θ − sin θ  + ω2 cos θ  = 0 .
R R 
Nous allons ici déterminer les positions d’équilibre et leur stabilité grâce à l’éner-
1
gie potentielle Ep (θ) = mgR cos θ − mω2R 2 sin2 θ du point matériel. Étudions cette
2
g 
fonction pour θ ∈ [0, π] : Ep′ (θ) = −mR 2 sin θ  + ω2 cos θ  .
R 
g
Si ω ≤ ωc = , le terme entre crochets est toujours positif, Ep décroît sur
R

[0, π] . On a Ep  π  = − 1 mR 2ω2 < 0 .


2 2

358
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 359

g  g 
Si ω > ωc = , le terme entre crochets s’annule pour θeq = arccos  − ,
R  Rω2 
π
angle supérieur à : Ep décroît sur 0, θeq  et croît sur θeq, π  .
2
L’énergie potentielle est maximale quel
que soit ω en θ = 0 , qui correspond donc à une
position d’équilibre instable.
La position d’équilibre θ = π est stable si
ω ≤ ωc car elle correspond alors à un minimum
d’énergie potentielle, et elle devient instable si
ω > ωc .
 g 
La position d’équilibre θeq = arccos  −  n’existe que si ω > ωc et elle est
 Rω2 
alors stable. Les équilibres stables sont représentés en trait plein, les instables en
pointillés.
G G
La force de Coriolis −2mω ∧ v r est ici orthogonale au plan du cerceau et ne joue
aucun rôle sur les positions d’équilibre et leur stabilité. Ce n’est pas toujours le cas.
G G
Par exemple, elle peut (tout comme la force magnétique qv ∧ B qui ne travaille pas
non plus), rendre stable des positions pour lesquelles l’énergie potentielle est maxi-
male. Le point matériel, placé sans vitesse initiale en un de ces points noté A, n’y reste
pas, mais en s’en écartant, il acquiert une vitesse et subit la force de Coriolis (ou la
force magnétique), qui peut incurver sa trajectoire et le contraindre à rester au voisi-
nage de A. Dans ces cas, la détermination de la stabilité ne peut plus se faire en rai-
sonnant sur l’énergie potentielle, mais en résolvant l’équation du mouvement.

3.3 Impesanteur / Effet de marée


Impesanteur
À quelle condition il y a-t-il impesanteur à l’intérieur d’un véhicule spatial se dé-
plaçant à proximité de la surface de la Terre ?
G
Notons g le champ de pesanteur.

359
360 Partie V.  Mécanique

Un objet libre de tout contact se trouvant en un point M quelconque à l’intérieur


du véhicule est en état d’impesanteur s’il se trouve au repos ou en mouvement recti-
ligne uniforme dans R ∗ (référentiel du centre de masse du véhicule lié à son centre
d’inertie G et en translation par rapport au référentiel terrestre Rt ). Il y a donc impe-
santeur à l’intérieur du véhicule si le champ d’accélération relative dans le référentiel
� � � � � � � � �
R ∗ est nul : ar (M ) = g (M ) − ae (M ) − ac (M ) = 0 , or ac (M ) = 0 et ae (M ) = aa (G ) car
R ∗ est en translation par rapport à Rt .
� �
On doit donc avoir aa (G ) = g , en supposant le champ de pesanteur uniforme à
l’intérieur du véhicule : il y a impesanteur à l’intérieur du véhicule si celui-ci est en chute
libre (il n’est soumis qu’à son poids). La trajectoire la plus générale du véhicule est
donc parabolique.

Ceci est utilisé pour l’entraînement des astronautes, et à but commercial, à l’in-
térieur d’un avion (comme celui dénommé ZERO G) dont on coupe momentanément
les gaz après l’avoir cabré à 50° (l’état d’impesanteur dure une vingtaine de secondes).
La présence de frottements entre le véhicule et l’atmosphère rend imparfaite l’impe-
santeur et provoque des petits déplacements de l’objet à l’intérieur du véhicule.

Effet de marée
La condition précédente est supposée remplie. Si l’on tient compte à l’intérieur
du véhicule des très légères variations du champ de pesanteur terrestre dues à des
différences d’altitude, il apparaît dans R ∗ un champ d’accélération relative :
� � �
ar (M ) = g (M ) − ae , non uniforme.

On note Oz la verticale ascendante, z l’altitude de M, zG celle de G : g (M )

s’écrit g ( z )ez .
Les dimensions du véhicule étant très petites devant le rayon terrestre, on a :

∂g � �  → ∂g �
g ( z ) ≃ g ( zG ) + ( z − zG ) ( zG ) , soit g (M ) ≃ g (G ) +  GM ⋅ (G )  ez .
∂z  ∂z 
 

Le véhicule de masse m et de volume V n’étant soumis qu’à son poids P , on
obtient en lui appliquant le théorème du centre d’inertie :
� � � �  →  ∂g� � �
maa (G ) = P =  
g (M )d3 m = g (G )

d3 m + 

GM d3m  ⋅
 ∂z
(G ) ez = mg (G ) .

M ∈V M ∈V  M∈V  
→ �
En effet, puisque G est le centre d’inertie du véhicule, on a  GM d3m = 0 .
M ∈V
� � �
Finalement ar (M ) = g (M ) − g (G ) .

360
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 361

En un point M2 au-dessus de G, le champ de pesanteur est légèrement plus


G
faible qu’en G et ar (M2 ) est selon la verticale ascendante, alors qu’en M1 au-dessous
G
de G, le champ de pesanteur est légèrement plus faible qu’en G et ar (M1) est selon la
verticale descendante. On parle d’effet de marées (ici dû à la Terre). C’est un effet
différentiel « dislocateur » puisque ce champ tend à écarter les points du plan horizon-
tal passant par G.

4. DYNAMIQUE DANS LE RÉFÉRENTIEL


TERRESTRE R t EN MOUVEMENT PAR RAPPORT
AU RÉFÉRENTIEL GÉOCENTRIQUE R g SUPPOSÉ
GALILÉEN
Dans la section précédente, nous avons considéré que le référentiel terrestre
était galiléen. C’est une approximation puisqu’il n’est pas en translation rectiligne uni-
forme par rapport au référentiel géocentrique supposé galiléen, mais en rotation uni-
forme autour de l’axe des pôles. Cette approximation est donc valable quand on peut
négliger la rotation de la Terre autour de l’axe des pôles. Comme la vitesse angulaire

de rotation vaut ωt = = 7,292 ⋅ 10−5 rad ⋅ s-1 (la période de la rotation, appelée
86164
jour sidéral, étant de 86164 s), c’est souvent le cas puisque cette rotation est lente, et
notamment pour des expériences à petite échelle et dont la durée est petite devant un
jour sidéral.
Néanmoins, la force centrifuge due à la rotation de la Terre modifie légèrement
le champ de pesanteur terrestre, et la force de Coriolis dévie les projectiles rapides
comme les obus ou les missiles, ainsi que les masses atmosphériques ou océaniques.
Nous ne considérerons donc plus dans cette section que le référentiel terrestre Rt est
galiléen, mais nous supposerons en revanche que le référentiel géocentrique l’est.

361
362 Partie V.  Mécanique

Nous utiliserons le repère Oxyz ci-dessous associé au référentiel terrestre Rt :

O est un point de la surface de la Terre (de centre T). L’axe Ox est porté par un
parallèle et orienté dans le sens Ouest-Est. L’axe Oy est porté par un méridien et
orienté dans le sens Sud-Nord. L’axe Oz est porté par le rayon terrestre (TO) et orienté
de T vers O. En notant o le projeté orthogonal de O sur le plan équatorial, on définit la

→ 

latitude λ comme étant l’angle orienté ( TO , To ) . L’orientation dans un plan méridien
G
se faut selon le vecteur ex grâce à la règle du tire-bouchon. Pour un point O dans
l’hémisphère nord, 0 ≤ λ ≤ 90° alors que −90° ≤ λ ≤ 0 pour l’hémisphère sud.

4.1 Étude du champ de pesanteur terrestre


Définition du poids d’un corps et du champ de pesanteur
Considérons un fil à plomb en équilibre dans le référentiel terrestre. La poussée
d’Archimède qu’exerce l’air sur le plomb de masse m est très faible devant la force
gravitationnelle exercée par la Terre, mais ici on l’annule en plaçant le dispositif dans
le vide.

Le poids du plomb est alors par définition égal à l’opposé de la tension du fil :
G G
P = −T . La direction prise par le fil définit la verticale au lieu de l’expérience.

362
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 363

Supposons que le plomb soit ponctuel, placé en un point M de Rt . Le champ


� � �
de pesanteur g (M ) en M est défini par P = mg (M ) .

Comme Rt est en rotation par rapport à Rg , il faut inclure les forces d’inertie
dans le bilan des forces s’exerçant sur le plomb. Ce dernier étant en équilibre dans
Rt , seule la force d’inertie d’entraînement est à prendre en compte. Le plomb est en

outre soumis à la tension du fil et à la force gravitationnelle mG t (M ) exercée par la

Terre, en notant G t le champ gravitationnel terrestre. Le principe fondamental de la
dynamique appliqué au plomb dans Rt fournit donc :
� � � � � � � � �
0 = T + mG t (M ) − mae (M )  −T = m G t (M ) − ae (M ) = P = mg (M ) .
aussi

� �
Si on suppose que le référentiel géocentrique est galiléen, le poids P = mg d’un
objet de masse m inclut la force d’inertie d’entraînement due à la rotation de la Terre.
� � �
Le champ de pesanteur est donc g = G t − ae .

G t est quasiment uniforme dans un objet, comme le plomb, de très petites di-
mensions devant le rayon terrestre.

Calcul de g(λ
λ)
Supposons la Terre sphérique, de
centre T et de rayon Rt = 6,37 ⋅ 106 m . On
note λ la latitude d’un point O à la surface de

la Terre, et ωt le vecteur rotation de la Terre
par rapport au référentiel géocentrique. Le
plomb se trouve en un point M au voisinage
de O.
Calculons la norme ae (M ) de l’accélé-
� →
ration d’entraînement. Pour une rotation uniforme, ae = −ωt 2 HM  ae = ωt 2Rt cos λ ,
où H est le projeté orthogonal de M sur l’axe des pôles.
ae est donc maximale à l’équateur et vaut aemax = ωt 2Rt ≃ 3,4 ⋅ 10−2 m ⋅ s-2 .

Elle est très inférieure à la valeur g0 = 9,807 m ⋅ s-2 du champ de pesanteur à la lati-
π
tude λ = : le poids d’un corps est en première approximation égal à la force d’attrac-
4
a a
tion gravitationnelle exercée par la Terre. On a donc e ≃ e << 1, en notant G t la
g0 G t
norme du champ de gravitation à la surface terrestre.

363
364 Partie V.  Mécanique

� � �
Pour calculer g ( λ ) , élevons la relation g = G t − ae au carré en remarquant que

��  a  
2
ae
l’angle ( G t ,ae ) vaut λ : g = G t − 2G t ⋅ ae cos λ + ae = G t 1 − 2 cos λ +    , soit
2 2 2 2 e
 Gt  G t  
   
1/2
  ae  
2
 a 
ae
g = G t 1 − 2 cos λ +   
 ≃ G t  1 − e cos λ   g ≃ G t − ae cos λ , en ne conser-
 Gt  G t    Gt 
     
ae
vant que les termes de degré inférieur ou égal à 1 en . On a donc :
Gt
π 1
g ≃ G t − ae cos λ = G t − ωt 2Rt cos2 λ . Pour λ = , on obtient g0 = G t − ωt 2Rt , ce qui
4 2
1 2
permet d’éliminer G t : g = g0 +
2
(
ωt Rt 1 − 2cos2 λ . )
Le calcul donne un champ de pesanteur à l’équateur ge = 9,790 m ⋅ s-2 et aux
pôles gp = 9,824 m ⋅ s-2 .

Les valeurs expérimentales sont ge = 9,780 m ⋅ s-2 et gp = 9,833 m ⋅ s-2 . La dif-


férence de pesanteur entre les pôles et l’équateur est plus grande que celle calculée
car la Terre n’est pas tout à fait sphérique (la distance entre le centre de la Terre et les
pôles vaut 6357 km alors que la distance entre le centre de la Terre et l’équateur vaut
6378 km). L’attraction gravitationnelle en « 1/ r 2 » est donc plus grande aux pôles qu’à
l’équateur.

Calcul de α(λ
λ)
On peut également calculer l’angle α entre la verticale d’un lieu et la droite re-
liant ce lieu au centre de la Terre T.
La relation d’Al-Kashi dans le triangle MAB fournit :
sin α sin λ a a a
=  sin α = e sin λ ≃ e sin λ à l’ordre 1 en e . On en déduit sinα :
ae g g g0 g0
ωt 2Rt ω 2R
sin α = cos λ sin λ  sin α = t t sin2λ .
g0 2g0

π  ω 2R 
sinα (et donc α ) est maximal pour λ = et αmax = arcsin  t t  . Numéri-
4  2g0 
 
quement on obtient αmax = 1,73 ⋅ 10−3 rad ≃ 6' . Cet angle est très petit et c’est une ex-
cellente approximation que de confondre la verticale d’un lieu avec la droite reliant ce
� �
lieu avec le centre de la Terre, ainsi que de confondre g et G t , ce que nous ferons
par la suite.

364
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 365

4.2 Déviation vers l’Est d’un corps lâché sans vitesse initiale
Étudions dans Rt un corps de masse m assimilable à un point matériel. Il est

lâché en M0 avec une vitesse initiale v 0 à la verticale du point origine O du repère
associé à Rt . On note H la hauteur OM0 . À l’instant t, le point matériel se trouve en
M. On néglige dans cette étude les frottements dus à l’air.
� �
On note v ( xɺ, yɺ , zɺ ) et a( xɺɺ, yɺɺ, zɺɺ) respectivement la vitesse et l’accélération du
point matériel dans le référentiel terrestre Rt associé au repère Oxyz défini en intro-
duction de la section 4.
Rt n’étant pas galiléen, il faut tenir compte des forces d’inertie dues au passage
du référentiel géocentrique, supposé galiléen, au référentiel terrestre :
� �
� � � � � � dv � � �
ma = mG t (M ) − mae (M ) − mac (M ) = mg − 2mωt ∧ v  = g − 2ωt ∧ v (∗) , puisque le
dt
� � �
poids mg = mG t (M ) − mae (M ) comptabilise la force d’inertie d’entraînement. Cette
� �
dernière est de toutes façons négligée : g est porté par ez .
On peut résoudre numériquement l’équation différentielle obtenue, mais ici nous
allons tirer profit de la très faible valeur de ωt pour appliquer une méthode de pertur-
bation : les termes en ωt seront considérés comme des infiniment petits du premier

ordre, ceux en ωt 2 comme des infiniment petits du second ordre, etc. On se limite aux
termes du premier ordre.
→∗ �
d2 OM dv �
À l’ordre 0, l’équation précédente devient = = g , et s’intègre en :
dt 2 dt

→∗ 1�2 � →
OM (t ) = gt + v 0t + OM0 . C’est la solution « classique » correspondant à ωt = 0
2
donc à Rt galiléen. On parle de solution intrinsèque car elle est exprimée sous forme
vectorielle et donc indépendante de la base de projection choisie.

→ →∗ � �
À l’ordre 1 cette solution s’écrit donc OM (t ) = OM (t ) + ε(t ) , où ε(t ) est un
terme d’ordre 1 en ωt , or l’équation « complète » (∗) peut s’intégrer une première fois,
� →
� dv � � d OM � � � �  → → 
ωt étant constant : = g − 2ωt ∧  v − v 0 = gt − 2ωt ∧  OM − OM0  .
dt dt  
 

→ →∗ �
Reportons la solution recherchée OM (t ) = OM (t ) + ε(t ) dans cette dernière
→
d OM � � �  → ∗ →  � � � �
relation : = gt + v 0 − 2ωt ∧  OM − OM0  − 2ωt ∧ ε . Le terme −2ωt ∧ ε est d’or-
dt  
 

365
366 Partie V.  Mécanique


→∗ → 1�2 �
dre 2 en ωt , donc négligeable devant les autres, et OM − OM0 = gt + v 0t .
2
→
d OM � � � 1 � � 
L’équation précédente devient donc = gt + v 0 − 2ωt ∧  gt 2 + v 0t  à
dt 2 

→ 1�2 � → 1 � � � �
l’ordre 1 en ωt . Elle s’intègre en OM = gt + v 0t + OM0 − ωt ∧ gt 3 − ωt ∧ v 0t 2 .
2 3
���������� �

ε
� � � � � �
On a ωt = ωt cos λey + ωt sin λez et ωt ∧ g = −ωt g cos λex . Dans le cas où le
� �
corps est lâché sans vitesse initiale ( v 0 = 0 ) d’une hauteur H, la projection de la rela-
 1 1 
tion précédente donne :  x = ωt g cos λt 3 , y = 0, z = H − gt 2  .
 3 2 
Pour λ = 45° , on a g = 9,81 m ⋅ s-2 . Prenons H = 100 m : le corps atterrit alors

2H 2ωt cos λ 2H 3
sur le plan z = 0 à t = ∆t = = 4,515 s et en x = ∆x = = 1,55 cm ,
g 3 g
donc à l’Est de O. L’effet est faible, et on peut constater qu’il n’est pas affecté par le
changement λ → −λ : la déviation d’un corps lâché sans vitesse initiale par rapport au
référentiel terrestre se fait vers l’Est, quel que soit l’hémisphère où a lieu l’expérience.
� �
En revanche, si v 0 ≠ 0 , toutes les déviations sont possibles et peuvent atteindre
plusieurs centaines de mètres pour des projectiles lancés avec de grandes vitesses
(missiles...), la force de Coriolis responsable de leur déviation dépendant linéairement
de la vitesse. L’approximation à l’ordre 1 en ωt peut alors s’avérer insuffisante.

4.3 Vents géostrophiques


On considère ici un modèle simple de vents moyens dans la troposphère
(couche de l’atmosphère qui s’étend de la surface terrestre à une dizaine de km d’al-
titude), loin de l’équateur et des pôles, c’est-à-dire dans deux bandes centrées sur les
latitudes λ = ± 45° . Pour comprendre la circulation de ces vents, étudions une parti-
cule fluide de l’atmosphère de masse m dans le référentiel terrestre Rt dont le repère
associé est défini en introduction de la section 4. Elle est soumise à la force de pres-
� � � � � �
sion Fp = Fx ex + Fy ey + Fzez . On note v ( xɺ, yɺ , zɺ ) et a( xɺɺ, yɺɺ, zɺɺ) respectivement la vitesse
et l’accélération de la particule dans Rt et p(M) le champ de pression.
Moyennées sur une durée T = 24 h et sur une distance de l’ordre de 1000 km,
les composantes horizontales xɺ et yɺ sont de l’ordre de U = 10 m ⋅ s-1 , et la compo-
sante verticale zɺ de l’ordre de W = 1 cm ⋅ s-1 : les vents sont quasiment horizontaux.
Appliquons le principe fondamental de la dynamique à la particule fluide dans
Rt , en tenant compte des forces d’inertie dues au passage de Rg à Rt :

366
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 367

� � � � � � � � � � �
ma = Fp + mG t (M ) − mae (M ) − mac (M ) , soit ma = Fp + mg − 2mωt ∧ v . Le poids mg
comptabilise la force d’inertie d’entraînement, qui est de toutes façons négligée, et on
� � �
a ωt = ωt cos λey + ωt sin λez .
Projetons le P.F.D sur le repère Oxyz :
 Fx
 xɺɺ = m + 2ωt ( yɺ sin λ − zɺ cos λ )
 xɺɺ   Fx  0   xɺ  
 ɺɺ         Fy
m  y  =  Fy  − 2m  ωt cos λ  ∧  yɺ    yɺɺ = − 2ωt xɺ sin λ
 zɺɺ         m
   Fz − mg   ωt sin λ   zɺ   Fz
zɺɺ = m − g + 2ωt xɺ cos λ

On peut donner l’ordre de grandeur des termes intervenant dans ce système
d’équations pour λ ≃ π / 4 . En négligeant les « coups de vent » (effets turbulents),
pour ne retenir qu’un vent moyen, les composantes xɺɺ et yɺɺ de l’accélération sont de
l’ordre de U / T ≃ 10−4 m ⋅ s-2 , et zɺɺ est de l’ordre de W / T ≃ 10 −7 m ⋅ s-2 . D’autre part,
g ≃ 9,8 m ⋅ s-2 , 2ωt xɺ sin λ ≃ 2ωt yɺ sin λ ≃ 2ωt xɺ cos λ = O ( )
2ωtU ≃ 10−3 m ⋅ s-2 , et en-

fin 2ωT zɺ cos λ = O ( )


2ωTW ≃ 10 −6 m ⋅ s-2 .

Le terme ma étant négligeable, on parle pour les vents étudiés d’équilibre
géostrophique c’est-à-dire que les forces de pression équilibrent la force de Coriolis :
 Fx  Fy
0 = m + 2ωt yɺ sin λ  xɺ =
 2 mω t sin λ

 Fy  Fx
0 = − 2ωt xɺ sin λ ⇔  yɺ = − .
 m  2mωt sin λ
 Fz F
0 = m − g  z =g
  m

Le produit scalaire entre les parties horizontales v h de
� �
la vitesse et Fh de la force Fp vaut xF ɺ x + yF
ɺ y = 0.
� �
La construction de v h pour Fh donné montre que
� �
l’angle (Fh ,v h ) vaut −π / 2 dans l’hémisphère Nord ( λ > 0 ) et
+π / 2 dans l’hémisphère Sud ( λ < 0 ). D’autre part :
Fx 2 + Fy 2 Fh2 Fh
v h2 = xɺ 2 + yɺ 2 = 2
=  vh = .
(2mωt sin λ ) (2mωt sin λ )2 2mωt sin λ
Nous avons ici simplifié les notations car en toute rigueur, l’air étant un milieu
continu, on le découpe en particules fluides de volume d3V = dxdydz centrées sur un
� →
point M. La force de pression que subit une telle particule est d3Fp = − grad p ⋅ d3V soit

367
368 Partie V.  Mécanique

G → d3 m d3 m
d3Fp = − grad p ⋅ en introduisant la masse volumique ρ = 3 de la particule.
ρ dV
G
Fz d3Fp G 1 → G 1 ∂p
L’équation non utilisée = g s’écrit 3 ⋅ ez = − grad p ⋅ ez = − = g . Cette re-
m d m ρ ρ ∂z
lation classique permet de déterminer la loi de variation de pression avec l’altitude
lorsqu’on suppose que l’atmosphère est en équilibre. En première approximation, la
présence de vents essentiellement horizontaux ne modifie donc pas la loi p(z).
G →
Calculons le produit scalaire entre Fp et un déplacement élémentaire d OM :
G → m → → m 

Fp ⋅ d OM = − grad p ⋅ d OM = − dp . Pour tout déplacement élémentaire d OM le
ρ ρ
G → G → G
long d’une courbe isobare horizontale, Fp ⋅ d OM = Fh ⋅ d OM = 0 car dp = 0 , donc Fh
est orthogonale aux courbes isobares. Il en découle que la vitesse horizontale d’une
particule est portée par les courbes isobares.
Envisageons maintenant un déplacement élé-


mentaire horizontal d OM normal à la courbe iso-
G
bare (et donc colinéaire à Fh ) et orienté dans le sens
des pressions décroissantes (soit dp < 0 ) :
G → m
Fh ⋅ d OM = Fhds = − dp > 0 . Il en résulte que la va-
ρ
leur algébrique Fh est positive pour un déplacement
G
orienté vers les pressions décroissantes (abscisse curviligne s croissante) : Fh est or-
thogonale aux courbes isobares et dirigée dans le sens des pressions décroissantes.
m dp
De plus, on obtient Fh = , relation qui montre que Fh est d’autant plus
ρ ds
grande que les courbes isobares sont
resserrées.
On en conclut que dans l’hémis-
phère Nord, les vents géostrophiques
tournent selon une courbe isobare dans
le sens trigonométrique autour d’une dé-
pression (minimum local de pression),
dans le sens des aiguilles d’une montre
autour d’un anticyclone (maximum local
de pression). C’est ce qu’on peut consta-
ter sur la vue satellite ci-contre. Dans l’hé-
misphère Sud c’est l’inverse.

368
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 369

Fh
Comme v h = , la vitesse des vents hori-
2mωt sin λ
zontaux est également d’autant plus grande que les
courbes isobares sont resserrées. On peut dans le cas de
la dépression ci-contre estimer la valeur moyenne spatiale
de la vitesse des vents en constatant que la pression varie
de ∆p = 2 ⋅ 103 Pa sur ∆s = 5 ⋅ 105 m . Avec ρ = 1,3 kg ⋅ m-3
1 ∆p
on obtient v h ≃ ≃ 110 km ⋅ h-1 . Cette valeur
2ρωt sin λ ∆s
qui correspond à une moyenne spatiale et temporelle laisse présager des plus grandes
vitesses au centre de la dépression. Une telle situation barométrique est en fait une
tempête (vents pouvant atteindre 150 km ⋅ h-1 ).

4.4 Pendule de Foucault


On étudie un pendule simple dans le référentiel terrestre
Rt dont le repère associé est défini au début de la section 4. Le
pendule est une boule de masse m = 30 kg assimilée à un point
matériel, reliée au point A, fixe dans Rt , de coordonnées (0,0,ℓ),
par l’intermédiaire d’un fil de masse négligeable, de longueur
ℓ = 67 m , toujours tendu. À l’instant initial, on écarte la boule du
point O, où elle se trouvait à l’équilibre, en la plaçant en un point M0 (a,0, b ) situé à
l’Est de O, avec a = 3 m , et on la lâche sans vitesse initiale. À l’instant t, la boule se
→  → � �
trouve au point M(x,y,z). On note θ l’angle ( AO , AM ) , v ( xɺ, yɺ , zɺ ) et a( xɺɺ, yɺɺ, zɺɺ) respecti-
vement la vitesse et l’accélération de la boule dans le référentiel terrestre Rt .

L’expérience a lieu à Paris ( λ = 48°51' = 48,85° ) où g = 9,81 m ⋅ s-1 .


Si on suppose dans un premier temps Rt galiléen, l’application du principe fon-
� � �
damental de la dynamique à la boule dans Rt donne ma = mg + T . Puisque le pen-
dule est lâché sans vitesse initiale, le mouvement se fait dans le plan vertical contenant
initialement le fil, c’est-à-dire le plan zOx. On retrouve par projection sur la direction
orthogonale à (AM) dans le plan zOx l’équation du mouvement du pendule simple :
g
θ = −mg sin θ , soit ɺɺ
mℓɺɺ θ + ω02 sin θ = 0 , avec ω0 = = 0,383 rad ⋅ s-1 . L’angle initial

θ0 est aussi l’angle maximal. Calculons-le :
a
sin θ0 = = 0,0448  θ0 = 0,0448 rad << 1 rad . On peut constamment confondre

sinθ et θ. L’équation du mouvement est donc linéaire et la solution recherchée vaut :

369
370 Partie V.  Mécanique

θ = θ0 cos(ω0t ) , d’où x = ℓsinθ ≃ ℓθ  x ≃ ℓθ0 cos(ω0t ) et :


θ2 1
z = ℓ(1 − cos θ) ≃ ℓ  z ≃ ℓ θ0 2 cos2 (ω0t ) . Les valeurs maximales de x, z et de
2 2
leurs dérivées premières et secondes sont :
— xmax = 3 m , zmax = 6,72 cm ;

— xɺmax = 1,15 m ⋅ s-1 , zɺmax = 2,57 ⋅ 10−2 m ⋅ s-1 ;

— xɺɺmax = 0,439 m ⋅ s-2 , zɺɺmax = 1,97 ⋅ 10−2 m ⋅ s-2 .


On peut conclure que le mouvement est pratiquement rectiligne, et confondre
la trajectoire circulaire avec sa tangente en θ = 0 .
Lorsqu’on ne suppose plus Rt galiléen, il faut tenir compte des forces d’inertie
dues au passage du référentiel géocentrique supposé galiléen au référentiel terrestre :
� � � � � � � � � �
ma = T + mG t (M ) − mae (M ) − mac (M ) , soit ma = T + mg − 2mωt ∧ v .

La tension T est portée par le vecteur unitaire :
→
MA x� y � ℓ−z � �
= − ex − ey + ez . Comme ωt se décom-
ℓ ℓ ℓ ℓ
� � �
pose en ωt = ωt cos λey + ωt sin λez , la projection de la
relation précédente donne donc :
 x 
 −T ℓ 
 xɺɺ    0   xɺ 
 ɺɺ   y     
m  y  = −T − 2m  ωt cos λ  ∧  yɺ  , soit :
 ℓ 
 zɺɺ     ω sin λ   zɺ 
  ℓ − z  t   
T − mg 
 ℓ 
 
 ɺɺ T x
ɺ ɺ
 x = − m ℓ + 2ωt ( y sin λ − z cos λ )

 ɺɺ T y
y = − − 2ωt xɺ sin λ
 mℓ
 ɺɺ T ℓ − z
z = m ℓ − g + 2ωt xɺ cos λ

Les ordres de grandeur calculés précédemment permettent d’établir :
yɺ sin λ ≃ xɺ sin λ >> zɺ cos λ , zɺɺ << g , 2ωt xɺ cos λ << g et z << ℓ . Des simplifications
sont donc possibles :
 T
0 = m − g ⇔ T = mg (projection sur Oz )
 T = mg
 ɺɺ T x g 
x = − + 2ωt yɺ sin λ ⇔ xɺɺ + x = 2ωt yɺ sin λ ⇔  xɺɺ + ω02 x = 2ωt yɺ sin λ (1) .
 mℓ ℓ  2
 ɺɺ T y g  yɺɺ + ω0 y = −2ωt xɺ sin λ (2)
 y = − − 2ωt xɺ sin λ ⇔ yɺɺ + y = − 2ωt
ɺ
x sin λ
 m ℓ ℓ

370
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 371

Remarquons qu’à l’équateur ( λ = 0 ), yɺ sin λ ≃ xɺ sin λ >> zɺ cos λ n’est plus


vrai, mais ωt zɺ cos λ est négligeable devant xɺɺ . On y retrouve le système d’équations

du pendule simple : xɺɺ + ω02 x = 0 et yɺɺ + ω02 y = 0 .


T = mg traduit le fait que le mouvement étant en première approximation hori-
zontal, les forces verticales, poids et tension du fil, se compensent. Le mouvement a
lieu dans le plan horizontal z = 0 tangent en O à la calotte sphérique de centre A.
Pour résoudre ce système d’équations différentielles linéaires couplées (1) et
(2), on peut utiliser une méthode complexe. Posons Z = x + iy avec i 2 = −1, et for-
mons (1) + i (2) :
xɺɺ + i yɺɺ + 2ωt sin λ(i xɺ − yɺ ) + ω02 ( x + i y ) = 0 ⇔ Zɺɺ + 2i ωt sin λZɺ + ω02Z = 0 .
Les solutions de cette équation se décomposent toutes sur une base ( Z1 , Z2 )
de deux fonctions solutions : Z (t ) = α1Z1(t ) + α 2Z2 (t ) . On recherche Z1 et Z2 sous la
forme t ֏ Cer t , fonction qui est solution de cette équation différentielle si et seule-
ment si r 2 + 2i ωt sin λr + ω02 = 0 , équation du second degré dont le discriminant est
∆ = −(2ωt sin λ )2 − 4ω02 ≃ −4ω02 car ω0 = 0,383 rad ⋅ s-1 et ωt = 7,29 ⋅ 10−5 rad ⋅ s-1 .
Les deux solutions complexes sont donc :
r1 = −i ωt sin λ + i ω0 et r2 = −i ωt sin λ − i ω0 .
Z1 Z2
Les fonctions t ֏ e r1 t et t ֏ e r2 t forment une base des solutions de l’équation
différentielle et la solution recherchée s’écrit :
Z (t ) = α1Z1(t ) + α2Z2 (t ) = e −i ( ωt sin λ )t  α1e i ω0t + α 2e −i ω0t 
 
De la condition initiale Z0 = x0 + i y 0 = a , on tire α1 + α 2 = a .
La dérivée de Z (t ) est :

Zɺ = e −i ( ωt sin λ )t α1(i ω0 − i ωt sin λ )e i ω0t + α2 ( −i ω0 − i ωt sin λ )e −i ω0t 


 
≃ e −i ( ωt sin λ )t α1i ω0e i ω0t + α2 ( −i ω0 )e −i ω0t  , puisque ωt << ω0 .
 
ɺ
De la condition initiale Z = xɺ + i yɺ = 0 , on tire α = α . Finalement :
0 0 0 1 2
a a
α1 = α2 = , et Z = e −i ( ωt sin λ )t e i ω0t + e −i ω0t  = a cos(ω0t ) e −i ( ωt sin λ )t .
2 2  
Si T0 = 2π / ω0 est la période qu’aurait le mouvement si Rt était galiléen, on a :

Z (t + T0 ) = Z (t ) e −i ( ωt sin λ )T0 ≃ Z (t ) car ωtT0 = 1,20 ⋅ 10−3 : pendant T0 , l’influence du


terme en ωt , c’est-à-dire du caractère non galiléen du référentiel terrestre, est négli-
geable. On retrouve donc le mouvement dans un plan vertical du pendule simple de
pulsation ω0 .

371
372 Partie V.  Mécanique

Considérons la transformation plane qui à un point M


d’affixe Z = ρe i θ fait correspondre un point M ′ d’affixe
Z ′ = Ze i ϕ = ρei ( θ+ϕ) .
L’analyse des coordonnées polaires de M et de M ′
montre que M ′ se déduit de M d’une rotation de centre O et
d’angle ϕ. La solution Z précédemment trouvée peut donc
s’écrire Z (t ) = ρ(t )e i θ(t ) , avec ρ(t ) = a cos(ω0t ) qui correspond
aux oscillations rapides du pendule, et θ(t ) = −(ωt sin λ )t , qui correspond à une rotation
lente du plan des oscillations.

On en conclut donc que le plan vertical qui contient le mouvement du pendule


de Foucault est en très lente rotation autour de l’axe vertical Oz avec une vitesse an-
gulaire constante −ωt sin λ (il a tourné à l’instant t d’un angle − [ ωt sin λ ] t ).

À Paris, où Foucault a réalisé cette expérience en mars 1851 sous la coupole


du Panthéon, la période de rotation du plan du mouvement est :

Tr = = 31 h 47 min (Foucault avait mesuré Tr = 31 h 46 min ). La période des
ωt sin λ

oscillations du pendule est T0 = 2π = 16,4 s .
g
Le sens de rotation est inversé selon qu’on se trouve dans l’hémisphère Nord
(sens des aiguilles d’une montre vu de dessus) ou l’hémisphère Sud.
π 2π
Aux pôles ( λ = ± ), le plan du mouvement tourne en un jour ( Tr = ).
2 ωt
À l’équateur ( λ = 0 ), le plan du mouvement est fixe (période infinie).
Représentons le mouvement du pendule à Paris pour t compris entre 0 et 2T0
en exagérant la vitesse de rotation du plan vertical du mouvement (l’angle [ ωt sin λ ]T0
vaut en réalité 3’) :

372
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 373

5. LES MARÉES
5.1 Champ de pesanteur, terme de marée
Dans la section précédente, nous avons considéré que le référentiel géocen-
trique Rg était galiléen. C’est une approximation puisqu’il n’est pas en translation rec-
tiligne uniforme par rapport au référentiel de Copernic RC supposé galiléen, mais en
translation elliptique. Cette approximation s’avérant insuffisante pour expliquer le phé-
nomène de marées, nous tiendrons par la suite compte de la force d’inertie d’entraî-
nement due au passage de RC à Rg .
Un plomb, point matériel M de masse m, maintenu en équilibre dans le référen-
� �
tiel terrestre Rt grâce à la tension T du fil auquel il est attaché, est soumis à T , à la

force gravitationnelle mG (due à toutes les masses de l’univers), à la force d’inertie

d’entraînement −mae due au passage de RC à Rg , et à la force d’inertie d’entraîne-
→
ment mωt 2 HM due au passage de Rg à Rt , H étant le projeté orthogonal de M sur
� � � � 

l’axe des pôles : 0 = T + mG − mae + mωt 2 HM .
� � � � � →
Par définition du poids, P = mg = −T = mG − mae + mωt 2 HM . Le champ de
� � � →
pesanteur dans Rt est g (M ) = G (M ) − ae (M ) + ωt 2 HM .
Le champ de gravitation est créé par la Terre, la Lune, le Soleil :
� � � �
G (M ) = G t (M ) + G ℓ (M ) + G s (M ) + ...
����������
Ga ( M )

Appliquons maintenant dans RC le théorème du centre d’inertie à la Terre de



masse mt , de centre d’inertie T, soumise à l’attraction G a (T ) des autres astres :
� �
mt a(T )/ RC = mtG a (T ) .

Rg étant en translation par rapport à RC , l’accélération d’entraînement ae (M )
est celle par rapport à RC de n’importe quel point fixe de Rg , donc de T :
� � �
ae (M ) = a(T )/ RC = G a (T ) . Le champ de pesanteur s’écrit donc :

� � → � �
g (M ) = G t (M ) + ωt 2 HM + G a (M ) − G a (T ) . Nous allons voir que le terme différentiel
�������
terme de marée
� �
G a (M ) − G a (T ) est responsable du phénomène de marées.

373
374 Partie V.  Mécanique

5.2 Terme de marée dû à la Lune


On suppose que la Terre est sphérique, de rayon Rt , entièrement entourée
d’une couche océanique, l’ensemble étant en équilibre dans Rt . Une particule fluide
de masse m, étudiée dans le référentiel terrestre Rt , se trouve à une distance r du

→ G
centre T de la Terre : TM = rer , et à la latitude λ .

Absence de marées si on suppose R g galiléen


La particule fluide est soumise :
G m →
— À des forces de pression F = − grad p (p est la pression au point M où se trouve
ρ
la particule fluide de masse m et ρ la masse volumique du fluide, supposée uniforme).
G Gmmt G
— À l’attraction de la Terre mG t (M ) = − er (on néglige la perturbation du champ
r2
de gravitation due à la couche océanique, qui n’a pas la symétrie sphérique comme
on va le voir).
→
— À la force d’inertie d’entraînement mωt 2 HM due au passage Rg → Rt .
G G
— À la force d’inertie de Coriolis due au passage Rg → Rt : −2mωt ∧ v .

Les valeurs numériques sont G = 6,67 ⋅ 10−11 N ⋅ m2 ⋅ kg-2 (constante universelle


de gravitation), mt = 5,97 ⋅ 1024 kg , Rt = 6370 km , ωt = 7,29 ⋅ 10−5 rad ⋅ s-1 .

Calculons l’énergie potentielle associée aux forces intervenant dans le référen-


tiel terrestre :
m → 
→ m
— Forces de pression, de travail élémentaire δW = − grad p ⋅ d TM = − dp soit
ρ ρ
 mp  mp
δW = −d    Epp = si on suppose le fluide incompressible ( ρ = Cte ).
 ρ  ρ
Gmmt G →
— Force d’attraction de la Terre, de travail élémentaire δW = − 2
er ⋅ d TM soit :
r
Gmmt  Gmmt  Gmmt
δW = − dr = − d  −   Ept = − r .
r2  r 
— Force d’inertie d’entraînement de rotation uniforme, qui dérive de :
1
Epe = − mωt 2r 2 cos2 λ (la distance de M à l’axe des pôles est r cos λ ).
2
— Force d’inertie de Coriolis, qui ne travaille pas dans le référentiel terrestre (son tra-
G G G
vail élémentaire 2(ω ∧ v ) ⋅ vdt est nul).

374
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 375

mp Gmmt 1
Finalement Ep = − − mωt 2r 2 cos2 λ . Cette énergie potentielle doit
ρ r 2
être la même en tout point de la surface des océans pour que cette dernière soit en
� → �
équilibre. Dans le cas contraire, des forces de résultante F = − grad Ep ≠ 0 déplace-
raient cette surface.
π
En particulier c’est la même aux pôles ( λ = ± ), où r est minimal, qu’à l’équa-
2
mp0 Gmmt mp0 Gmmt 1
teur ( λ = 0 ), où r est maximal : − = − − mωt 2rmax 2 , (la pres-
ρ rmin ρ rmax 2
sion atmosphérique est supposée être uniforme à la surface et on note p0 sa valeur).
Gmt Gmt 1 2
On a donc = + ωt rmax 2 , or ∆r = rmax − rmin << rmin ≃ rmax ≃ Rt :
rmin rmax 2
−1
Gmt Gmt Gmt Gmt  ∆r  Gmt  ∆r 
= = = 1−  ≃ 1+  . Ainsi :
rmin rmax − rmax + rmin rmax − ∆r rmax  rmax  rmax  rmax 

Gmt  ∆r  Gmt 1 2 ω 2r 4 ω 2R 4
1+ = + ωt rmax 2  ∆r ≃ t max , soit ∆r ≃ t t .
rmax  rmax  rmax 2 2Gmt 2Gmt
Numériquement : ∆r ≃ 11 km . La force centrifuge rendrait les océans plus pro-
fonds à l’équateur qu’aux pôles d’une dizaine de km si la Terre était une surface lisse
et sphérique, entièrement recouverte de ces mêmes océans. Mais ce n’est pas le cas...
En géodésie, la Terre est modélisée comme un ellipsoïde de révolution autour de l’axe
des pôles, de demi-grand axe a = 6378 km (distance entre le centre de la Terre et
l’équateur) et de demi-petit axe b = 6357 km (distance entre le centre de la Terre et
un pôle). La différence de rayon terrestre entre l’équateur et les pôles est donc juste-
ment de l’ordre de grandeur de la dizaine de km : la forme de la Terre, aplatie aux
pôles, est en effet due à la force centrifuge. L’aplatissement ε = (a − b ) / a ≃ 1/ 298 est
faible : la Terre est « plus » sphérique qu’une balle de ping-pong.
L’épaisseur de la couche océanique est la même en tout point
du plan équatorial ou de tout plan parallèle au plan équatorial : il n’y a
pas de différence de niveau des océans lors d’une rotation de la Terre
sur elle-même et le phénomène de marées n’est pas ainsi expliqué.

Prise en compte du terme de marée : on ne suppose plus R g galiléen


Désormais, on ne néglige plus la force de marée et on suppose que la Lune est
sphérique, de centre L, de masse mℓ , qu’elle est fixe dans le référentiel géocentrique,
et qu’elle se trouve dans le plan équatorial de la Terre à une distance a = LT de la

→ →
Terre. On définit l’angle θ = ( TL , TM ) . Les grandeurs vectorielles seront désormais
� � �
projetées dans la base de coordonnées sphériques ( er , eθ, eϕ ).

375
376 Partie V.  Mécanique

Nous prendrons pour valeurs numériques :


mℓ = 7,34 ⋅ 1022 kg et a = LT = 384 400 km .
La particule fluide en M est, en plus des forces précédentes, soumise dans Rt
à la force de marée due à la Lune, différence d’attraction lunaire entre M et T :
� � � � �
Fℓ (M ) = fℓ (M ) − fℓ (T ) = m G ℓ (M ) − G ℓ (T ) .
Gmmℓ
Calculons l’énergie potentielle d’attraction lunaire Epℓ = − de la particule
LM
→ 
→ 

fluide. Comme LM = LT + TM , on obtient en élevant au carré :
→ →  r r2 
LM 2 = LT 2 + 2 LT ⋅ TM + TM 2 = a2 + 2ar cos( π − θ) + r 2 = a 2  1 − 2 cos θ + 2  , avec
 a a 

r 1 3
<< 1. On utilise le développement limité (1 + X )−1/ 2 ≃ 1 − X + X 2 en 0 à l’ordre 2 :
a 2 8
−1/2
Gmmℓ  r  
2
Gmmℓ  r r2  1 r2 3 r
Epℓ =− 1 − 2 cos θ + 2  ≃− 1 + cos θ − +  2 cos θ  
a  a a  a  a 2 a2 8  a  

Gmmℓ  r r2 2 
soit EpL ≃ − 1 + cos θ + 2 (3 cos θ − 1) .
a  a 2a 
� →
La force fℓ = − grad Epℓ exercée par la Lune sur la particule fluide en un point M
� Gmmℓ r
se décompose donc en trois termes : fℓ0 associée au terme − d’ordre 0 en ,
a a
� �
fℓ1 associée au terme d’ordre 1 et fℓ 2 au terme d’ordre 2.
→ ∂f � 1 ∂f �
En utilisant grad [f (r , θ)] = er + eθ , on obtient :
∂r r ∂θ
� →
 Gmmℓ  �
— fℓ0 = − grad  − =0 .
 a 

376
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 377

� →
 Gmmℓ r cos θ  Gmmℓ � � � Gmmℓ �
— fℓ1 = − grad  − 2 = 2
cos θer − sin θeθ   fL1 = ez .
 a  a a2
� →  Gmm r 2 (3 cos2 θ − 1)  Gmmℓ r  � �
— fℓ 2 = − grad  − ℓ
= (3cos2 θ − 1)er − 3 cos θ sin θeθ  .
2a 3 3  
  a
On retrouve que la force qu’exercerait la Lune sur une particule de masse m en
� Gmmℓ � � � � �
T ( r = 0 , θ = 0 ) est fℓ (T ) = ez . On en déduit : Fℓ ( M ) = fℓ ( M ) − fℓ (T ) = fℓ 2 (M ) ,
a2
� Gmmℓ r  � �
soit Fℓ (M ) = (3cos2 θ − 1)er − 3 cos θ sin θeθ  .
a 3  

On peut construire Fℓ (M ) pour des points à la surface de la terre ( r = Rt ) et
GmmℓRt
différentes valeurs de θ, en posant Γ = :
a3
π π 3π
θ 0 π
4 2 4
Γ Γ
Fℓr 2Γ −Γ 2Γ
2 2
3Γ 3Γ
Fℓθ 0 − 0 0
2 2

Comme Fℓr (θ + π) = Fℓr (θ) et F ℓθ (θ + π) = −F ℓθ (θ) ; le plan z = 0 est un plan de



symétrie du champ de vecteurs Fℓ (M ) .
En représentant la couche océanique dans le plan
équatorial, on rend bien compte du phénomène de ma-
rées : lors d’une rotation de la terre sur elle-même, un point
de l’équateur subit deux marées hautes (pleine mer) et
deux marées basses (basse mer). On parle de marées semi-diurnes. Si la Lune ne
bougeait pas, leur période serait de 12h, mais du fait du mouvement de la Lune autour
de la Terre dans le même sens que celui de la rotation de la Terre autour de l’axe des
pôles, leur période est de 12h 25min.

377
378 Partie V.  Mécanique

� � �
Puisque Fℓ (M ) = fℓ 2 (M ) , l’énergie potentielle Epℓ marée associée à Fℓ corres-

Gmmℓ r 2
pond au terme d’ordre 2 de EpL , soit Epℓ marée = − (3cos2 θ − 1) .
2a3
Plaçons-nous à l’équateur ( λ = 0 ). Toujours dans l’hypothèse d’un équilibre hy-
drostatique, l’énergie potentielle totale doit être la même en tout point à la surface des
mp0 Gmmt 1 Gmmℓ r 2 (3cos2 θ − 1)
océans : Ep = − − mωt 2r 2 − .
ρ r 2 2a3
π
Cette fois r est minimal pour θ = et maximal pour θ = 0 , d’où :
2
2Gmt Gmℓ rmin2 2Gmt Gmℓ rmax 2
+ ωt 2rmin2 − = + ωt
2
rmax
2
+ 2 , soit, en posant comme
rmin a3 rmax a3
précédemment rmin = rmax − ∆r , avec ∆r << rmin ≃ rmax ≃ Rt :
−1
2Gmt 2Gmt 2Gmt 2Gmt  ∆r  2Gmt  ∆r 
— = = = 1−  ≃ 1+ .
rmin rmax − rmax + rmin rmax − ∆r rmax  rmax  rmax  rmax 
2
 Gm   2 Gmℓ  2  2 Gmℓ  2 ∆r 
—  ωt 2 − 3 ℓ 2
 rmin =  ωt − 3  [ rmax − ∆r ] =  ωt − 3  rmax 1 − r 
 a   a   a   max 

 Gm   ∆r 
≃  ωt 2 − 3 ℓ  rmax 2 1 − 2 .
 a   rmax 

2Gmt ∆r 2Gmℓ Gmℓ rmax 2


On obtient − 2ωt 2rmax ∆r + rmax ∆r = 3 , d’où :
rmax 2 a3 a3
 Gm Gm  3 Gmℓ Rt 2
∆r  2t − ωt 2Rt + 3 ℓ Rt  = 3
, le calcul numérique des termes entre cro-
 Rt a  2 a
Gmt
chets montre que le champ de gravitation ≃ 9,8 m ⋅ s-2 créé par la Terre à sa sur-
Rt 2
face, prédomine devant les deux autres termes :
Gm
ωt 2Rt ≃ 3,4 ⋅ 10−2 m ⋅ s-2 et 3 ℓ Rt = 5,7 ⋅ 10 −7 m ⋅ s-2 .
a
3 mℓRt 4
On a donc ∆r ≃ , soit numériquement ∆r = 53 cm . Ce faible marnage
2 mt a3
est observé pour des îles du Pacifique, mais il est généralement plus grand et peut
atteindre 17 m (baie de Fundy, Canada), amplifié par des phénomènes de résonance.
La théorie exposée ici est en effet une théorie statique, mais les mouvements des
océans dans Rt sont de nature ondulatoire. La vitesse de propagation de ces ondes
dépend de la profondeur des océans, elles se réfléchissent sur les îles, les continents,
et selon la géométrie des bassins océaniques, on peut observer des marées semi-
diurnes, mais aussi diurnes (une seule marée haute par jour) ou plus complexes.

378
Chapitre 2.  Dynamique dans un référentiel non galiléen 379

D’autre part, la force de Co-


riolis dévie les masses océa-
niques : la pleine mer (marée
haute) ne suit pas un méridien
mais tourne autour de points am-
phidromiques où le marnage est
nul, dans le sens trigonométrique
dans l’hémisphère Nord, dans le
sens des aiguilles d’une montre
dans l’hémisphère Sud.

5.3 Influence du Soleil

Le Soleil, de centre S et de masse ms = 1,99 ⋅ 1030 kg , est situé à une distance

d = ST = 1,496 ⋅ 108 km de la Terre. La norme maximale de la force de marée due à


2GmmℓRt 2GmmsRt
la Lune est 3
. Pour le Soleil, cette norme maximale vaut donc .
LT ST 3
3
mℓ  ST 
Le rapport ≃ 2,2 montre que les influences de ces deux astres sont
ms  LT 
du même ordre de grandeur, la Lune restant l’astre le plus influent.
On note S0 le projeté orthogonal de S sur le plan équatorial. Au cours d’une
lunaison (période de l’alignement S0 TL dans cet ordre), les effets dus au Soleil peu-
vent accentuer les effets dus à la Lune ou au contraire s’y opposer.
� �
Comme le montre la construction du champ de vecteurs Fℓ (M ) + Fs (M ) en pro-
jection dans le plan équatorial, le Soleil accentue les effets dus à la Lune (marées de
vives eaux) lorsque S0 , L et T sont alignés (un observateur terrestre peut alors obser-
ver la nouvelle Lune ou la pleine Lune), et les contrarie (marées de mortes eaux) lors-
que ( S0 T) et (TL) forment un angle droit (un observateur terrestre peut alors observer
le premier ou le dernier quartier de Lune).

379
380 Partie V.  Mécanique

� �
Lorsque le Soleil se trouve dans le plan équatorial, les vecteurs Fℓ (M ) et Fs (M )
sont alignés dans les cas que nous venons de citer : les plus grandes marées de vives
eaux sont observées aux équinoxes. Le marnage dû au Soleil s’ajoute alors à celui dû
à la Lune.
En réalité, le plan de la trajectoire de la Lune n’est pas le plan équatorial ter-
restre : ses déclinaisons (latitudes) maximales sont ± 28,72° et les éclipses solaires
(S, L et T alignés dans ce sens) ou lunaires (S, T et L alignés dans ce sens) sont rares.
Ces alignements contribuent à augmenter le coefficient de marée (les petites varia-
tions des distances Terre-Lune et Terre-Soleil interviennent aussi).

380
381

[MÉCANIQUE 3]

STATIQUE DES FLUIDES


1. ACTIONS DE PRESSION DANS UN FLUIDE
1.1 Définition d’un fluide
Commençons par quelques rappels sur la structure de la matière.
On distingue deux grands états : l’état ordonné (solide cristallin), et l’état désor-
donné (solide amorphe, liquide, gaz).
Dans un solide cristallin, il n’y a pas de mouvement relatif moyen des consti-
tuants élémentaires (atomes, ions, molécules), que nous appellerons de façon géné-
rale molécules. Les molécules sont parfaitement rangées dans une structure pério-
dique, dont elles occupent les nœuds. Elles sont proches des molécules voisines (dis-
tances de l’ordre de 10−10 m : c’est un état condensé), et du fait de l’agitation ther-
mique, vibrent autour de leur position moyenne. Le solide cristallin réel présente ce-
pendant des défauts, comme des lacunes (absence de molécule à un nœud du ré-
seau), ce qui permet à des molécules de changer de position, en allant occuper une
lacune. Ce phénomène de diffusion dans les solides est un phénomène extrêmement
lent. Un solide cristallin ne peut pas s’écouler ni s’adapter à la forme d’un récipient.
Un liquide est également dans un état condensé : les molécules sont « tas-
sées », et leur distance moyenne reste de l’ordre de 10−10 m . De ce fait, elles gardent
les mêmes voisines, et l’ordre des solides cristallins subsiste pour les liquides, mais
seulement à petite distance (quelques fois la taille d’une molécule). Il arrive cependant
qu’à la suite d’un choc, une molécule donnée échappe à ses voisines. C’est le phéno-
mène de diffusion, plus rapide que pour les solides, même si on verra qu’il reste très
lent. Entre deux chocs, une molécule parcourt une distance moyenne, le libre parcours
moyen ℓ, qui est du même ordre de grandeur que la distance moyenne entre molé-
cules. À plus grande distance, l’ordre disparaît : le mouvement relatif des molécules
est possible dans un liquide. Un liquide peut s’écouler.

381
382 Partie V.  Mécanique

Dans un gaz, le désordre est quasi-total (il est total pour un gaz parfait) : une
molécule parcourt une distance moyenne très grande devant 10−10 m (pour de l’air à
300 K et sous 1 bar, le libre parcours moyen ℓ est de l’ordre de 100 nm).
Citons le cas des solides amorphes, comme le verre, qui ne sont ordonnés qu’à
petite distance. Lorsqu’on les refroidit, le passage de l’état liquide à un état « rigide »
se fait progressivement, sans discontinuité des propriétés physiques, en passant par
un état « pâteux ». On peut les considérer comme des liquides, mais extrêmement
visqueux et rigides : le déplacement relatif des molécules est très difficile, et ils s’écou-
lent si lentement que leur écoulement ne s’observe pas, même à l’échelle du siècle !

Les fluides sont caractérisés par l’absence d’ordre à des distances supérieures
à quelques fois la taille des molécules, et donc par leur capacité à s’écouler.

1.2 Évaluation du libre parcours moyen dans un fluide


Les chocs entre molécules n’ont pas lieu dans un modèle faisant intervenir des
constituants ponctuels (la probabilité de tels chocs est nulle). On utilise donc un mo-
dèle de sphères rigides non ponctuelles (de rayon R > 0 ). Ce modèle peut être com-
patible avec celui du gaz parfait si le volume propre des molécules le constituant reste
faible devant le volume du système.
Considérons une molécule
« cible », supposée, pour simpli-
fier, immobile dans le référentiel
du laboratoire. Elle est assimilée,
comme les molécules « projec-
tiles », à une sphère rigide de
rayon R. Une molécule projectile

animée d’une vitesse v ne peut
heurter la molécule cible que si son centre C se trouve dans un cylindre d’axe ∆ coli-

néaire à v et passant par le centre O de la molécule cible, de section droite (appelée
section efficace de choc σ) égale à π(2R )2 , soit σ = 4πR 2 . Dans un modèle simple où

toutes les molécules projectiles sont animées du même vecteur vitesse v (dont la
norme est donc égale à la vitesse moyenne v des molécules), celles qui heurtent la
cible pendant dt se trouvent dans un cylindre de section σ et de longueur vdt . Si on
note n ∗ la densité moléculaire (nombre de molécules par unité de volume), leur
nombre dN = n∗σvdt est une bonne estimation du nombre moyen de chocs subis par
une molécule donnée pendant dt. Le libre parcours moyen ℓ est le rapport vd t / d N
de la distance parcourue pendant dt par le nombre de chocs subis sur la même durée :

1 ℓ 1
Le libre parcours moyen est ℓ = ∗
, et le temps moyen de vol τ = = ∗ .
nσ v n σv

382
Chapitre 3.  Statique des fluide 383

p k T
Pour un gaz qu’on considère parfait, on a n∗ = , d’où ℓ = B . Le libre par-
kBT pσ
cours moyen augmente donc avec la température, et diminue avec la pression. En
prenant un rayon moléculaire R de l’ordre de 10−10 m , on a, à 300 K et sous 1 bar :
σ = 1,3 ⋅ 10−19 m2 , et ℓ = 3,3 ⋅ 10−7 m = 330 nm . On retrouve l’ordre de grandeur an-
noncé pour l’air dans ces conditions.
Si on note d la distance moyenne entre molécules, le volume V occupé par N
−1/3
particules vaut V ≃ Nd 3 = N /n∗  d ≃ n∗  , soit d = 3,5 ⋅ 10−9 m >> R . Le mo-
aussi  
dèle de gaz parfait est donc validé (les interactions entre particules sont négligeables,
4
sauf lors des chocs, et le volume πR 3 occupé par une particule est très inférieur au
3
volume d 3 disponible pour cette particule).

1.3 Particule fluide, échelle mésoscopique


À notre échelle, un fluide apparaît comme un milieu continu, et sa description
ne nécessite pas de connaître les positions et les vitesses de chaque molécule.

Elle se fait à l’échelle mésoscopique, dont la longueur caractéristique a est pe-


tite devant la longueur macroscopique L caractéristique du système étudié, mais
grande devant le libre parcours moyen ℓ.

Si la première condition a << L n’est pas remplie, la description n’est pas assez
fine. Par exemple, si a = 5 m , la pression sera considérée comme uniforme sur une
aile d’avion, et on ne pourra pas expliquer le phénomène de portance. En revanche,
a = 5 m peut être suffisant pour étudier des phénomènes météorologiques à l’échelle
d’une ville… Il faut dans tous les cas que la cellule de volume a 3 puisse être considé-
rée comme ponctuelle à l’échelle du système macroscopique étudié.
Si la deuxième condition a >> ℓ n’est pas remplie, le nombre de molécules N,
la quantité de mouvement, etc. contenues dans une cellule cubique de volume a 3 , fixe
par rapport au référentiel d’étude R , varient fortement à un instant donné d’une cellule
à sa voisine. Au contraire, pour a >> ℓ , les molécules (de masses mi et de vitesses

v i par rapport à R ) qui rentrent dans une cellule centrée sur un point M ont subi de
nombreux chocs dans les cellules voisines, ce qui assure la continuité spatiale de
N N N
1 � 1 � 1 1
   2 mi v i 2 ,
N m
n ∗ (M ) = 3
, ρ(M ) = 3
mi = 3
, v (M ) = mi v i , ec (M ) = 3 p(M )
a a i =1 a m i =1 a i =1
et T (M ) , respectivement densité moléculaire, masse volumique, vitesse macrosco-
pique (vitesse du centre d’inertie des particules de la cellule), énergie cinétique volu-
mique, pression et température ; grandeurs obtenues en faisant des moyennes

383
384 Partie V.  Mécanique

d’ensemble sur les particules d’une cellule. La structure discontinue de la matière n’ap-
paraît plus. Ces moyennes sont très peu sensibles à la valeur de a, du moment que la
condition ℓ << a << L est vérifiée.
Si l’écoulement n’est pas stationnaire, on peut ainsi définir, à tout instant t, des

champs g(M,t) en un point M fixe de R : densité n∗ (M , t ) , vitesse v (M , t ) , masse vo-
lumique ρ(M, t ) , pression p(M, t ) , température T (M, t ) .
On obtient par sommation continue les grandeurs extensives dans un volume

 ρ(M,t )d V
3
macroscopique V , par exemple la masse m(t ) = , et l’énergie cinétique
M∈V
1
macroscopique Ec (t ) =  2
ρ(M, t ) ⋅ v 2 (M, t )d3V .
M ∈V
Les volumes, surfaces et longueurs élémentaires intervenant dans le décou-
page d’un volume, d’une surface et d’une longueur macroscopiques sont en réalité
des grandeurs mésoscopiques d3V = O(a3 ) , d2 S = O(a 2 ) et dℓ = O(a) .

On définit une particule fluide comme un système fermé mésoscopique, c’est-


à-dire à une échelle intermédiaire entre l’échelle microscopique et macroscopique :
ℓ << a << L .

Le choix d’un système fermé, au moins entre deux instants proches, est indis-
pensable pour pouvoir appliquer à la particule fluide le principe fondamental de la dy-
namique. En particulier, la masse d3m d’une particule fluide est constante.
Sauf pour des gaz très dilués, a = 10 µm convient. C’est le cas à 300 K et 1 bar
pour l’air : a >> ℓ = 0,1 µm , et pour l’eau liquide : a >> ℓ ≃ R = 10−10 m .

1.4 Pression dans un fluide


Les forces de pression sont surfaciques : elles s’exercent à travers la surface S
séparant virtuellement un fluide en deux parties (1) et (2).
Considérons un point M du fluide sur S . Pour définir la pression en M, prenons
une portion élémentaire d2 S de S centrée en M.

� �
Soit N1→ 2 = ex le vecteur normal à cette surface, orienté de (1) vers (2).
Le fluide (2) exerce sur (1) à travers d2 S une force normale à d2 S :

384
Chapitre 3.  Statique des fluide 385

G G G G
d2F2/1 = d2Fp = − p(M )d2 S ⋅ N1→ 2 = − p(M )d2 S .
La pression p(M) est positive et indépendante de l’orientation du vecteur surface
G G
d S = d2 S ⋅ N1→ 2 . C’est une force par unité de surface, en pascal ( 1 Pa = 1 N ⋅ m-2 ).
2

G G G G
On définit la contrainte de pression σp par la relation d2Fp = σp d2 S ( σp est
G G
homogène à une pression) : σp = − p(M )N1→2 . On dit que la contrainte de pression est

normale car elle est orthogonale à d2 S .


Une partie de la force de pression est due aux transferts de quantité de mouve-
ment entre les deux particules fluides séparées par d2 S , qu’on note maintenant S
pour alléger les expressions à venir. Même si on se place au repos où les vitesses des
particules fluides sont nulles, les vitesses des molécules sont non nulles du fait de
G
l’agitation thermique, et possèdent une composante selon ex , normal à S .
Pendant une durée dt, des molécules de (2)
passent dans (1) et réciproquement : une quantité
G
de mouvement δp2 passe de (2) vers (1), et une
G
autre, δp1 , de (1) vers (2). Il en résulte un transfert
G G G
total δp = δp2 − δp1 de (2) vers (1). En projection sur
G
ex , on a δpx = δp2 x − δp1x < 0 , puisque les parti-
N N
<0 >0
cules qui passent de (2) à (1) ont une vitesse néga-
G
tive selon ex , contrairement à celles qui passent de
(1) à (2). Les autres projections δpy et δpz sont
nulles pour un fluide au repos.
G
Le système (1) reçoit δp pendant dt. D’après le théorème de la quantité de
G δp G
mouvement, il subit donc de la part de (2) une force normale F2/1 N = x ex , dirigée
dt
de (2) vers (1) : c’est la force de pression qu’exerce (2) sur (1), force normale à la
surface. La quantité de mouvement δpx qui traverse S pendant dt étant proportion-
nelle à S , F2/1 x l’est aussi. Les forces de pression sont surfaciques.
RT
Dans n mol de gaz parfait de volume V, la pression vaut pc = n à la tempé-
V
rature T. En l’absence d’interactions entre molécules, cette pression s’appelle pression
cinétique.
Dans un liquide, ou lorsqu’on réduit fortement le volume offert à n mol de gaz,
les interactions attractives de très courte portée (forces de Van Der Waals) entre les
molécules rendent la pression p inférieure à la pression cinétique. On introduit parfois
la pression moléculaire pm < 0 telle que p = pc + pm < pc .

385
386 Partie V.  Mécanique

nRT n 2a
Certaines équations d’état, comme celle de Van Der Waals : p = − 2 ,
− nb N
V V
pc pm

où a et b sont deux coefficients positifs, prennent en compte la pression moléculaire


du fluide (et ici, le volume propre b occupé par une mol de fluide).

1.5 Résultante des actions de pression / Équivalent volumique


Pour un système macroscopique Σ contenu dans une
surface fermée S , la résultante des actions de pression du
G G

w
fluide extérieur s’écrit Fp = − p(M )d2 S .
S
Le signe moins provient de l’orientation des vecteurs
surface de l’intérieur vers l’extérieur de S , la force de pres-
sion élémentaire étant dirigée vers l’intérieur.
On peut remplacer cette intégrale surfacique par une intégrale volumique. Pour
G G
cela, on fait le produit scalaire de Fp par un vecteur a indépendant de M (champ uni-
G G G G G

w
forme) : a ⋅ Fp = − p(M )a ⋅ d2 S (on peut rentrer a dans l’intégrale). On utilise alors
S
G G G
 div  p(M )a  d V
3
le théorème de Green-Ostrogradski a ⋅ Fp = − , puis la formule :
V
G G G → G G G 

 grad p d V
3
div  p(M )a  = p(M )div
N a + a ⋅ grad p , d’où a ⋅ Fp = −a ⋅ .
0 V
G
Cette relation doit être vérifiée quelle que soit la direction de a , ce qui entraîne
G →
que Fp = −  grad p d3V .
V

Dans le cas où le système étudié est une particule fluide de volume d3V , la
G →
résultante des actions de pression s’écrit d3Fp = − grad p d3V .
→
Cette expression, qui fait intervenir grad p en un point M, n’a de sens que pour
un volume d3V infiniment petit du troisième ordre autour de M. Les actions de pres-
sion sont surfaciques, mais comme leur résultante sur une particule fluide est propor-
tionnelle à son volume, on parle d’équivalent volumique des forces de pression.
→ G
Dans un champ de pression uniforme p(M ) = p0 ∀M , on a grad p = 0 et donc :
G
La résultante des actions de pression Fp sur une surface fermée est nulle si la pres-
G
sion est uniforme sur cette surface. Il en va de même pour le moment résultant MOp ,
calculé au point de réduction O quelconque.

386
Chapitre 3.  Statique des fluide 387

Le résultat reste valable même si la surface


S fermée ne contient pas de fluide puisque seule
la valeur de la pression du fluide à la surface inter-
G G

w
vient dans Fp = − p(M )d2 S . Si cette pression
S
G
est uniforme, égale à p0 , Fp est la même que si S
était remplie de fluide à p0 .
G G G
Montrons que MOp = 0 en le multipliant par a uniforme :

G → G G G G  → G G →  G


 OM ∧ p0d S
w  a ⋅  OM ∧ d S
w   a ∧ OM  ⋅ d S
w
2 2 2
MOp = −  a ⋅ MOp = − p0  = − p0
S S  S
car le produit mixte est invariant par permutation circulaire.

G G G →   G →  → → G G →  → 


 div a ∧ OM  d V
3
a ⋅ MOp = − p0 , or div a ∧ OM  = OM ⋅ 
rot a − a ⋅ rot  OM  .
G  
V   0  
 ∂ 
 
 ∂x   x 
→  → 
 ∂    G
Comme rot  OM  =   ∧  y  = 0 , on obtient bien le résultat annoncé.
 
   ∂y   z 
 
 ∂ 
 
 ∂z 

2. RELATION FONDAMENTALE DE LA STATIQUE


DES FLUIDES ET APPLICATIONS
2.1 Actions sur une particule fluide
Une particule fluide est soumise à des forces surfaciques :
— Les forces de pression, normales.
— Les forces visqueuses.
Les forces visqueuses possèdent en général des composantes normales et tan-
gentielles, mais sont nulles en l’absence de mouvement relatif des particules fluides,
donc en statique. Nous y reviendrons dans le chapitre sur la dynamique des fluides.
Une particule fluide est en outre soumise à des forces volumiques (ici dans le
G G G
sens : « proportionnelles au volume »), comme le poids d3P = d3 mg = ρd3V g , ou les
G G G
forces de Laplace d3FL = J ∧ B d3V , pour un fluide conducteur parcouru par des cou-
G G
rants de densité J et placé dans un champ magnétique B (ce cas de couplage entre
un écoulement et l’électromagnétisme s’appelle la magnétohydrodynamique…).

387
388 Partie V.  Mécanique

On écrit les forces volumiques s’exerçant sur une particule fluide sous la forme
� � � �
d Fv = ϕv d3V . Dans le cas des forces de pesanteur, ϕv = ρg .
3

2.2 Relation fondamentale de la statique (R.F.S)

On étudie une particule fluide de masse volumique ρ et de volume d3V , dans


un référentiel galiléen R . En l’absence d’écoulement, la particule est fixe par rapport
à R (son accélération est nulle), et n’est pas soumise à des forces visqueuses. Elle
� →
n’est donc soumise qu’à des forces de pression de résultante d3Fp = − grad p d3V , et
� �
à des forces volumiques d3Fv = ϕv d3V .
Le principe fondamental de la dynamique aboutit donc, dans le cas particulier
� → �
où il n’y a pas d’écoulement, à 0 = − grad p d3V + ϕv d3V :

→ �
Le champ de pression est régi en statique par la R.F.S : grad p = ϕv .

2.3 Fluide incompressible au repos dans le champ de pesanteur


On caractérise la compressibilité d’un fluide par le coefficient de compressibilité
1  ∂V 
isotherme χT = −   .
V  ∂p T

Notons V , et pas d3V , le volume d’une particule fluide, afin d’alléger les ex-
pressions. Comme la masse m de cette particule fluide est constante, on a :
dρ dV 1 dV 1 dρ 1  ∂ρ 
m = ρV = Cte  + = 0 , soit à T = Cte : − =  χT =   .
ρ V V dp ρ dp ρ  ∂p T

Pour un fluide incompressible, la pression est sans influence sur le volume et


donc sur la masse volumique d’une particule fluide : χT = 0 .

Pour un fluide indilatable, l’influence de la température sur le volume, mesurée


1  ∂V  1  ∂ρ 
par le coefficient α de dilatation isobare, est nulle : α =   =−  = 0.
V  ∂T  p ρ  ∂T  p
Dans les conditions usuelles, un liquide peut être considéré comme incompres-
sible et indilatable : χT ≃ 0 et α ≃ 0 . En conséquence, pour un liquide homogène, la
masse volumique est la même en tout point, même si la pression et la température ne
sont pas uniformes.

Par abus de langage, on dit souvent qu’un fluide est incompressible si la pres-
sion et la température sont sans influence sur le volume, et donc sur la masse volu-
mique d’une particule fluide (un tel fluide est en fait incompressible et indilatable).

388
Chapitre 3.  Statique des fluide 389

Considérons un liquide homogène et choisissons


l’axe Oz vertical descendant.
Dans le référentiel du laboratoire R galiléen où le
→ � �
liquide est au repos, la R.F.S fournit grad p = ρg = ρgez .
∂p ∂p
On en déduit = = 0 : p ne dépend que de la pro-
∂x ∂y
fondeur z (les surfaces isobares sont des plans horizon-
dp
taux d’équation z = Cte ), et = ρg = Cte .
dz
Puisque ρ est uniforme, on obtient p( z ) = ρgz + p(0) par intégration. La surface
libre (surface entre deux fluides, non contrainte par une paroi solide) est isobare si on
suppose qu’au-dessus du liquide se trouve de l’air à la pression uniforme p0 : c’est
donc un plan horizontal d’équation z = 0 . La condition aux limites est p(0) = p0 .

Le champ de pression dans le liquide est donné par p( z ) = ρgz + p0 . La pres-


sion augmente de façon affine avec la profondeur. C’est la loi de l’hydrostatique.

Donnons un ordre de grandeur du gradient de pression vertical pour de l’eau.


En prenant ρ ≃ 103 kg ⋅ m-3 et g ≃ 10 m ⋅ s-2 , la pression augmente tous les 10 m de :
∆p = ρg ∆z ≃ 105 Pa = 1 bar .

On a admis la continuité de la pression à la surface libre. On peut démontrer ce


résultat en raisonnant sur un système Σ fluide parallélépipédique, de surface S et
d’épaisseur ε, situé entre z = 0 et z = ε .
Au repos, la résultante des forces qu’il subit (poids, force de pression exercée
par l’air, force de pression exercée par liquide qui se trouve en dessous) est nulle. En
projetant sur Oz, on obtient 0 = ρS εg + [ p0 − p(ε)] S . En faisant tendre ε vers 0 on

montre bien que p(0+ ) = p0 .

Le principe des manomètres à colonne de liquide est basé


sur la loi de l’hydrostatique. Un liquide de masse volumique ρ est
placé dans un tube en U, fermé d’un côté et ouvert de l’autre.
On suppose que le vide a été fait du côté fermé (pression
pref = 0 ). On mesure la pression p du côté ouvert en lisant la dif-
férence de hauteur h du fluide entre les deux côtés du tube.
À l’équilibre, on a p = ρgh + pref = ρgh .
p
La hauteur h = est proportionnelle à la pression qu’on
ρg
souhaite mesurer.

389
390 Partie V.  Mécanique

Avec de l’eau, on aurait h ≃ 10 m pour p = 1 bar ! On réduit la taille des mano-


mètres en utilisant le mercure, métal liquide à température ambiante, très dense :
ρ = 13,6 ⋅ 103 kg ⋅ m-3 . La hauteur est alors divisée par 13,6 pour une même pression.
Plus précisément, avec g = 9,81 m ⋅ s-2 , on obtient pour la pression atmosphérique
moyenne qui vaut 1,013 ⋅ 105 Pa = 1 atm (l’atmosphère, atm, est une ancienne unité
1,013 ⋅ 105
de pression) : h = = 76,0 cm , et h = 75,0 cm pour p = 1 bar .
13,6 ⋅ 103 × 9,81
On donne désormais rarement des mesures de pression en « centimètre de
mercure », et le mercure lui-même disparaît des laboratoires du fait de sa toxicité.
Remarquons que la pression pref n’est pas tout-à-fait nulle : placé dans le vide,
le liquide utilisé se vaporise : pref est égale à la pression de vapeur saturante ps du
liquide utilisé. ps est faible pour l’eau et très faible pour Hg : 2 ⋅ 10−6 bar à tempéra-
ture ambiante : l’approximation pref = 0 est excellente.

Il est remarquable que la loi de l’hydrostatique ne


fasse intervenir que la hauteur de liquide, mais pas sa
masse. L’expérience du crève-tonneau de Pascal illustre
bien ce phénomène.
On perce le sommet d’un tonneau rempli d’eau et on
y place un tube de 10 m et de 1 cm2 de section. En rem-
plissant d’eau le tube, le bas de tonneau « explose » car la
pression a augmenté de 1 bar. On n’a pourtant versé qu’un
volume V = 10 × 10−4 = 10−3 m3 = 1 L , soit un kilogramme
d’eau !
Cette expérience est attribuée à Blaise Pascal en
1646. Elle a depuis été réalisée avec succès sous des
formes diverses.

Donnons enfin le principe d’un frein (ou


d’un vérin) hydraulique, représenté sur la figure
ci-contre. Les deux pistons de sections S A et
SB ont une masse négligeable et assurent
l’étanchéité de l’ensemble.
Si on n’appuie pas sur celui de gauche,
la pression au point A est la pression atmosphérique p0 . Au repos, la pression au point
B, de même altitude, est également p0 . Si on appuie maintenant sur le piston de
FA
gauche, appliquant ainsi une force FA , la pression en A et donc en B vaut p0 + à
SA
l’équilibre, résultat obtenu en appliquant le P.F.D au piston de gauche.

390
Chapitre 3.  Statique des fluide 391

En appliquant de même le P.F.D au piston de droite, on en déduit qu’il faut


appuyer dessus avec une force supplémentaire FB pour maintenir l’ensemble en équi-
 F  S
libre : SB  p0 + A  = FB + p0 SB  FB = B FA . D’après le principe des actions réci-
 S A S A
proques, le piston de droite exerce une force vers le haut d’intensité FB sur le système
SB
qui le maintient en équilibre. Ainsi, pour un grand rapport , on peut exercer à l’aide
SA
d’une force FA modérée une force FB intense sur les plaquettes de frein.
Dans le cas où les points A et B ne sont pas à la même altitude, les résultats
restent vrais si leur différence d’altitude h vérifie ρgh << FA / S A .

2.4 Fluide compressible au repos dans le champ de pesanteur


Prenons l’exemple fondamental de la loi de pression de l’atmosphère, de tem-
pérature supposée uniforme T0 = 288 K . L’axe Oz est vertical ascendant, et z = 0
correspond au niveau de la mer, là où règne une pression p0 = 1,013 bar .
Dans le référentiel terrestre R galiléen, où l’air est au repos, la R.F.S fournit
→ G G dp
grad p = ρg = −ρgez : p ne dépend que de l’altitude z, et = −ρg .
dz
Les gaz étant compressibles, leur masse volumique ne peut plus être considé-
Mp
rée comme uniforme. En prenant le modèle du gaz parfait, on obtient ρ = , où
RT0
M = 29,0 g ⋅ mol-1 est la masse molaire de l’air.
dp Mp
L’équation différentielle =− g se résout en séparant les variables :
dz RT0
dp Mg  p  Mg
=− dz , puis en intégrant : ln   = − z.
p RT0  p0  RT0

Mgz z
− −
RT0
La loi p(z) est exponentielle : p( z ) = p0e = p0e H .

La valeur numérique de la hauteur caracté-


ristique H des variations de pression est :
RT0 8,314 × 288
H= = = 8,4 km .
Mg 29,0 ⋅ 10 −3 × 9,81
À une telle altitude, la pression a chuté d’un
facteur e1 = 2,72 . Elle n’est plus que de 0,35 bar
au sommet de L’Everest (8848 m) où y il a approxi-
mativement trois fois moins d’oxygène qu’au sol
dans le même volume d’air.

391
392 Partie V.  Mécanique

Pour une altitude z << H allant jusqu’à quelques centaines de mètres, on peut
 Mgz  Mp0
effectuer un développement limité de p(z) : p( z ) ≃ p0 1 −  = p0 − gz .
 RT0 RT0
Mp0
Comme = ρ0 , masse volumique de l’air au niveau de la mer, on retrouve
RT0
la loi de l’hydrostatique p( z ) = p0 − ρ0 gz (ici, Oz est ascendant) : l’air statique se com-
porte comme un fluide incompressible à des altitudes << 8 km .
Nous retrouverons, en dynamique, des situations d’écoulements pour les-
quelles un gaz, bien que compressible, peut être considéré comme un fluide incom-
pressible.

2.5 Fluide incompressible au repos dans un référentiel non galiléen


Un liquide de masse volumique ρ est placé dans un récipient cylindrique à sec-
tion circulaire de rayon R. Par rapport au référentiel du laboratoire R , supposé gali-
léen, le récipient est en rotation uniforme autour de son axe de symétrie de révolution
Oz, à la vitesse angulaire Ω.
En régime transitoire, le récipient met progressivement en rotation le liquide,
initialement immobile par rapport à R , à partir de la périphérie ; c’est dû aux actions
visqueuses.
On se place en régime stationnaire par la suite. Le liquide est alors en équilibre
dans le référentiel R ′ en rotation uniforme autour de Oz à la vitesse angulaire Ω. Il
tourne en bloc dans R , comme un solide, et il n’y a plus de forces visqueuses puisqu’il
n’y a plus de mouvement relatif des particules fluides.
Étudions dans R ′ non galiléen l’équilibre d’une
particule fluide de masse d3 m = ρd3V . La particule est
repérée à l’aide de coordonnées cylindriques.
La force d’inertie d’entraînement est :
3 � �
−d mae = −ρd3V  −r Ω2er  , si r est la distance de la par-
 
ticule à l’axe de rotation Oz.
Appliquons dans R ′ le P.F.D à cette particule
� → � � → � �
fluide : 0 = − grad p d3V + ρd3V r Ω2er + ρd3V g  grad p = ρg + ρr Ω2er .
∂p ∂p � �
On obtient = ρr Ω2 et = −ρg en projetant le P.F.D sur er et ez .
∂r ∂z
1
On en déduit p(r , z ) = ρr 2Ω2 − ρgz + Cte .
2
Au centre du bécher, la hauteur de la surface libre est a : p(0, a ) = p0 , ce qui
1 2 2
fixe la constante : p(r , z ) = ρr Ω − ρg ( z − a ) + p0 .
2

392
Chapitre 3.  Statique des fluide 393

La loi de pression dans le liquide étant connue, on peut trouver l’équation de la


Ω2 2
surface libre z = a + r qui correspond aux points du liquide de pression p0 . C’est
2g
l’équation d’un paraboloïde d’axe Oz (surface obtenue en faisant tourner une parabole
d’axe Oz autour de cet axe).

L’obtention d’un tel paraboloïde reçoit des ap-


plications en astronomie. Un télescope à miroir liquide
de plusieurs mètres de diamètre est constitué d’un
bain de métal liquide comme le mercure, placé dans
un récipient en rotation à la vitesse angulaire Ω cons-
tante autour d’un axe vertical Oz. Le miroir obtenu ré-
alise une relation de conjugaison parfaite entre un
point à l’infini sur l’axe Oz (au zénith) et le foyer F ′ du
paraboloïde, et permet par exemple de détecter des
étoiles très peu lumineuses, de rechercher des qua-
sars… Les aberrations géométriques étant éliminées,
c’est la diffraction qui limite la résolution.

La valeur de a est déterminée par la conservation du volume V du liquide. Si la


hauteur de liquide est H en l’absence de rotation, on a initialement V = πR 2H . En
découpant le volume du liquide en rotation en couronnes cylindriques comprises entre
R
r et r + dr , il s’écrit V =  z(r )2πr dr . On a donc :
r =0
R
 Ω2 2  Ω2 R 4 Ω2 2
R 2H = 2  a + r  r dr = aR 2 +
2g  g 4
a=H−
4g
R . Bien entendu, a diminue
r =0 

quand Ω augmente.
La loi de pression trouvée précédemment est valable si le fond du récipient reste
2
mouillé ( a > 0 ), donc si la vitesse de rotation reste inférieure à gH .
R

393
394 Partie V.  Mécanique

2.6 Poussée d’Archimède


Théorème
Un corps quelconque (système Σ) de masse m est placé dans un fluide. Le
fluide peut ne pas être homogène. Par exemple, une partie du corps peut être dans de
l’huile (fluide 1), l’autre dans de l’eau (fluide 2) (on parle alors de fluide stratifié).
L’ensemble est au repos dans le référentiel du laboratoire. Les surfaces libres
entre les fluides sont donc horizontales.
Σ est soumis à son poids, à des actions de pression, et à d’éventuelles autres
actions nécessaires à le maintenir en équilibre.
Les actions de pesanteur s’appliquent au centre d’inertie G de Σ, ce qui signifie
G
que leur résultante est mg , et leur moment résultant, calculé en un point de réduction
G → G
O quelconque, est MOpes = OG ∧ mg .
Si S est la surface entourant Σ, les actions de pression ont une résultante :
G G G → G
Fp = − 
w 
p(M )d2 S , et un moment résultant MOp = − OM ∧ p(M )d2 S . Pour déter-
w
S S
miner ces deux grandeurs, remarquons d’abord que le champ de pression dans le
fluide à l’équilibre est indépendant de la présence ou non d’un corps immergé Σ. En
→ G
effet, il est régi dans les deux cas par la R.F.S : grad p = ρg , avec la même condition
aux limites aux interfaces entre les fluides. Il reste par exemple égal à p( z ) = ρgz + p0
dans un liquide dont l’interface avec l’air de pression p0 se trouve en z = 0 .

Il en résulte que les actions de pression sur Σ (représenté sur la partie de


gauche du schéma ci-dessous) sont les mêmes que sur le système Σ′ de masse m′
(représenté sur la partie de droite), constitué par le fluide au repos que Σ « remplace »
(on parle pour Σ′ du fluide « déplacé »).

394
Chapitre 3.  Statique des fluide 395

G G G G G G
On obtient Fp + m′g = 0  Π = Fp = −m′g en appliquant le théorème du centre
d’inertie à Σ′ .
G
La poussée d’Archimède Π , qui est la résultante des actions de pression
s’exerçant sur un corps Σ immobile immergé dans un fluide au repos, est égale à l’op-
posé du poids du fluide déplacé : c’est une force verticale ascendante.

De même, le théorème du moment cinétique appliquée à Σ′ , dont le centre


G → G G G → G → G
d’inertie est noté C, fournit MOp + OC ∧ m′g = 0  MOp = OC ∧ ( −m′g ) = OC ∧ Π .

Le moment résultant des actions de pression s’identifie au moment de la pous-


sée d’Archimède appliquée au centre d’inertie C du fluide déplacé, appelé centre de
poussée.

À l’équilibre d’un corps Σ plongé dans un fluide et soumis uniquement aux ac-
G G G
tions de pesanteur et de pression, on a mg − m′g = 0  m′ = m , et :

→ G → G G  → →  G G
OG ∧ mg + OC ∧ ( −m′g ) = 0 , soit  OG − OC  ∧ mg = 0 .
 

→ → →
On en déduit que OG − OC = CG est vertical :

À l’équilibre, G et C sont à la verticale l’un de l’autre.

Envisageons maintenant le cas où Σ est un solide. On perturbe son équilibre en


le faisant légèrement tourner autour d’un axe horizontal ∆ passant par G (G et C ne
sont plus à la verticale l’un de l’autre), puis on le lâche sans vitesse initiale. La résul-
tante des forces est toujours nulle donc G reste immobile.
En revanche, Σ se met alors en rotation autour de ∆.
On constate que le moment des actions de pression ramène Σ vers la position
d’équilibre si G est en-dessous de C (position d’équilibre stable), alors qu’il le déstabi-
lise si G est au-dessus de C.

La position du centre de poussée C dépend de l’angle dont on fait tourner Σ


(angle qu’on a supposé faible ici), ce qui rend délicate l’étude dynamique.
D’autre part, le théorème d’Archimède n’est valable qu’à l’équilibre, car lorsque

395
396 Partie V.  Mécanique

le fluide est en mouvement, le champ de pression à la surface de Σ est modifié : on


doit en tenir compte pour une étude dynamique…
Il donne cependant une bonne approximation de l’expression des actions de
pression lorsque le mouvement relatif de Σ par rapport au fluide est lent (cas d’un
aérostat : montgolfière, dirigeable, ballon-sonde…).

Fonte d’un glaçon 


Prenons pour finir l’exemple d’un glaçon placé dans un verre d’eau plein à ras-
bord. L’eau va-t-elle déborder lorsque le glaçon aura fondu ?
Examinons l’équilibre initial du glaçon de masse m : ce dernier est soumis à son
poids et à la poussée d’Archimède de l’eau liquide et de l’air. On note ρs , ρℓ et ρa les
masses volumiques du glaçon (eau solide), de l’eau liquide, et de l’air. On note Vim le
volume de la partie du glaçon immergée et Vem celui de la partie qui émerge.

La poussée d’Archimède de l’eau correspond à l’opposé du poids de l’eau dont


le glaçon a pris la place, c'est-à-dire sous la surface libre horizontale entre l’eau et l’air.
Celle de l’air correspond au poids de l’air déplacé donc au-dessus de cette sur-
� � � �
face libre. Ainsi à l’équilibre : 0 = mg − ρℓVimg − ρaV emg  m = ρℓVim + ρaV em .
On en déduit le rapport entre le volume qui émerge et le volume immergé :
V ρ − ρs
m = ρs (Vim + V em ) = ρℓVim + ρaV em  em = ℓ .
Vim ρs − ρa
V em ρℓ
On a bien sûr ρa << ρs < ρℓ : le glaçon flotte bien, et ≃ − 1 ≃ 9% (la den-
Vim ρs
Vim ρ
sité de la glace vaut ρs ≃ 0,92ρℓ ). ≃ s ≃ 92% du volume d’un iceberg est
V em + Vim ρℓ
situé sous la surface de l’eau.
La masse ρaV em est insignifiante devant ρℓVim : m = ρℓVim .
m
Lorsque le glaçon a fondu, sa masse m occupe un volume V = = Vim . C’est
ρℓ
le même que celui qui était immergé, donc la surface de l’eau reste à la même hauteur.
La fonte de la banquise n’est pas responsable de l’élévation du niveau des
océans. Cette dernière est due à la dilatation de l’eau liquide sous l’effet d’une aug-
mentation de la température, ainsi qu’à la fonte des glaciers.

396
397

[MÉCANIQUE 4]

DESCRIPTION D’UN FLUIDE EN


MOUVEMENT
1. CHAMP DE VITESSE D’UN FLUIDE
1.1 Description eulérienne
L’écoulement d’un fluide, par rapport au référentiel d’étude R , est décrit par les
G
champs de vitesse v (M , t ) , de masse volumique ρ(M, t ) , de pression p(M, t ) et de
température T (M, t ) .
Cette description de l’écoulement à l’aide de champs est dite eulérienne.

Si on connaît ces grandeurs en tout point de l’écoulement, et à tout instant, on


est capable de calculer toutes les grandeurs que transporte l’écoulement (masse,
énergie, quantité de mouvement…), ainsi que les forces de pression et les forces vis-
queuses qu’il exerce sur un obstacle.
Pour obtenir expérimentalement ces champs, il faudrait placer un capteur ponc-
tuel (plus exactement de taille mésoscopique) en chaque point M de l’écoulement, et
enregistrer à tout instant les valeurs de la grandeur gEUL (M, t ) (vitesse, pression…)
pour les différentes particules fluides qui passent par M.
La description eulérienne est bien adaptée pour décrire les conditions aux li-
mites régissant un écoulement (champ de vitesse nul sur une paroi solide fixe dans R
par exemple).
Dans le cas du champ de vi-
G G
tesse v (M, t ) = v EUL (M, t ) , une ligne
de champ, qui est la ligne reliant, à
un instant t fixé, les points M tels que
G
v (M , t ) soit tangent à la ligne, est ap-
pelée ligne de courant.

→ →
Si d OM est un déplacement élémentaire le long d’une ligne de courant, d OM
G
est colinéaire en M à v (M , t ) , soit :

→ G G
d OM ∧ v (M, t ) = 0 , ce qui fournit un système d’équations différentielles permettant de
trouver à la date t l’équation de la ligne de courant passant par le point M0 .

397
398 Partie V.  Mécanique

1.2 Description lagrangienne


Les équations permettant de déterminer les champs gEUL (M, t ) sont des équa-
tions différentielles aux dérivées partielles, qui font intervenir des dérivées spatiales
∂ ∂2 ∂
, 2
…, et temporelles , calculées au point M : ce sont des équations locales.
∂x ∂x ∂t
Certaines de ces équations proviennent d’un bilan sur le système ouvert mé-
soscopique de volume d3V autour du point M, comme l’équation de conservation de
la masse. D’autres, comme le principe fondamental de la dynamique, nécessitent
d’étudier un système fermé : une particule fluide donnée. Cette particule se déplace
par rapport au référentiel R . Elle est décrite à l’échelle macroscopique comme un
point matériel dont on repère la position grâce au repère cartésien Oxyz, fixe par rap-
port à R :
→ G G G
— Vecteur position OM (t ) = x (t )ex + y (t )ey + z(t )ez .


G d OM G G G
— Vecteur vitesse v (t ) = = xɺ (t )ex + yɺ (t )ey + zɺ(t )ez .
dt
→
� d2 OM � � �
— Vecteur accélération a(t ) = 2
= xɺɺ(t )ex + yɺɺ(t )ey + zɺɺ(t )ez .
dt

Cette description, appelée description lagrangienne, où l’on suit une particule


donnée au cours du temps, correspond à celle utilisée dans les cours de mécanique
pour l’étude d’un point matériel.

Une particule peut être caractérisée par sa position à un instant donné t0 : c’est
la particule qui se trouve au point M0 à t0 . Pour cette particule, la grandeur g ne dé-
pend que du temps et on la note temporairement gLAG (t ) . Par exemple sa vitesse sera

notée vLAG (t ) .
Pour obtenir expérimentalement gLAG (t ) , il faudrait placer un capteur ponctuel
sur la particule, et enregistrer à tout instant les valeurs de la grandeur gLAG (t ) que
rencontre la particule dans son déplacement.
La trajectoire de la particule (en-
semble des positions qu’elle occupe au
cours du temps) est donnée par le système
 x (t )

d’équations paramétriques  y (t ) .
 z( t )

398
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 399

Si on parvient à éliminer le temps, on aboutit à une équation cartésienne de la


y = f ( x )
trajectoire, par exemple, pour une trajectoire plane :  .
z = 0

1.3 Passage de la description eulérienne à la description lagrangienne


Ce passage se fait de la façon suivante :

Si on veut suivre une particule donnée, on doit se placer à tout instant t au point M(t)
où elle se trouve. Pour cette particule, la grandeur g à l’instant t vaut :
gLAG (t ) = gEUL [M (t ), t ] .

Étudions les variations de (M , t ) ֏ gEUL (M , t ) quand on passe de M(x,y,z) à un


→ 
→ → 

point M ′( x + dx, y + dy, z + dz) infiniment proche ( MM ′ = OM ′ − OM = d OM ), et de
∂gEUL ∂g ∂g ∂g
l’instant t à t + d t : dgEUL = dt + EUL dx + EUL dy + EUL dz .
∂t ∂x ∂y ∂z
Pour calculer la variation dgLAG de g pendant dt pour la particule, on doit la
suivre dans son déplacement, donc se déplacer comme elle entre t et t + d t de

→ � �
d OM = v LAG (t )dt = vEUL [M (t ), t ] dt . On a alors dgLAG = dgEUL , et :
→
dgLAG ∂gEUL ∂gEUL dx ∂gEUL dy ∂gEUL dz d OM �
= + + + , avec = v EUL [M (t ), t ] , soit :
dt ∂t ∂x dt ∂y dt ∂z dt dt
dgLAG ∂gEUL ∂gEUL ∂g ∂g
= + vEUL x [M (t ), t ] + EUL vEUL y [M (t ), t ] + EUL vEUL z [M (t ), t ] .
dt ∂t ∂x ∂y ∂z
On peut simplifier les notations et écrire tout simplement :

dg ∂g ∂g ∂g ∂g ∂g � →
= + vx + vy + vz = + v ⋅ grad g .
dt ∂t ∂x ∂y ∂z ∂t � ��� �
� � dérivée
dérivée dérivée convective
particulaire locale

∂g � →
La seconde forme, + v ⋅ grad g , a l’avantage d’être indépendante du système
∂t
de coordonnées choisi (forme intrinsèque).
dg Dg
La dérivée particulaire , parfois notée , est la dérivée temporelle de la
dt Dt
grandeur gLAG (t ) pour la particule.
La dérivée locale est la dérivée par rapport au temps de gEUL (M, t ) , obtenue en
restant au point M.
La dérivée convective est due au déplacement de la particule dans un champ
gEUL (M, t ) non uniforme.

399
400 Partie V.  Mécanique

G
Dans le cas où g est une grandeur vectorielle, et pas scalaire, le résultat pré-
G
cédent s’applique aux projections g x , g y et g z de g :

 ∂g x ∂g x ∂g x ∂g x 
 ∂t + v x ∂x + v y ∂y + v z ∂z 
G   G
dg  ∂g y ∂g y ∂g y ∂g y  ∂g G → G
= + vx + vy + vz = + (v ⋅ grad)g .
dt 
N  ∂t ∂x ∂y ∂z  ∂t
N dérivée
dérivée  ∂g z ∂g ∂g ∂g  dérivée convective
particulaire + v x z + vy z + vz z locale
 
 ∂t ∂x ∂y ∂z 

Là encore, la deuxième forme est intrinsèque et fait intervenir un nouvel opéra-


G → ∂ ∂ ∂
teur : (v ⋅ grad) , qui vaut v x + vy + vz dans un système de coordonnées car-
∂x ∂y ∂z
tésiennes. Dans d’autres systèmes de coordonnées, les vecteurs de base peuvent
être affectés par les dérivations spatiales. Par exemple, en coordonnées cylindriques :
 G →  G  ∂ 1 ∂ ∂  G  ∂g  G  g  G
v ⋅ grad  gr (r )er  =  v r ⋅ + v θ ⋅ + v z ⋅  gr (r )er  = v r ⋅ r  er + v θ r  eθ ,
   ∂r r ∂θ ∂z   ∂r   r 
 
G
G ∂er G
car si er ne dépend ni de r, ni de z, il dépend de θ : = eθ .
∂θ
Prenons quelques cas particuliers de champs vectoriels pour illustrer le pas-
G
G G dgLAG
sage d’un champ donné v EUL (M , t ), gEUL (M , t ) à :
dt
G G
G ∂g
— Cas d’un champ stationnaire : gEUL (M ) ⇔ EUL = 0 ∀M , ∀t .
∂t

G G
Bien qu’en un point M, la grandeur gEUL ne dépende pas du temps, gLAG dé-
pend du temps, car la particule se déplace dans un champ non uniforme, et rencontre

400
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 401

des valeurs gEUL [ M (t )] différentes au cours du temps. Sur la figure précédente, la


particule est en M1 à t1 , en M 2 à t2 , etc.
G G
dg ∂g G → G G G
On a bien = + (v ⋅ grad)g ≠ 0 . La grandeur gLAG (t ) varie car la particule
dt N ∂t  G
G ≠0
0
G G
se déplace ( v ≠ 0 ) dans un champ non uniforme.
G G
En statique (absence d’écoulement : v = 0 ), la particule resterait au même point
G G
M0 , et sa grandeur gLAG (t ) = gEUL [M 0 ] serait indépendante du temps.

Dans le cas d’un écoulement station-


G G G
naire, v LAG (t ) = v EUL [M (t )] donc vEUL (M )
est tangent en tout point M à la trajectoire
de la particule :

Pour un écoulement stationnaire, la trajectoire d’une particule qui passe par le point
M0 est confondue avec la ligne de courant passant par M0 .

Ce n’est plus vrai pour un écoulement instationnaire où les lignes de courant


changent à chaque instant.
G G G G
G ∂g ∂g ∂g
— Cas d’un champ uniforme : gEUL (t ) ⇔ EUL = EUL = EUL = 0 ∀M, ∀t .
∂x ∂y ∂z

G G
La particule se déplace, mais la grandeur gLAG (t ) = gEUL (t ) qu’elle rencontre à
la date t est indépendante du point où elle se trouve : c’est la même que si elle restait
G G
dg ∂g
toujours au même point : = . Sur la figure précédente, la particule est en M1 à
dt ∂t
t1 , en M 2 à t2 , etc.
G G G
dg ∂g G → G ∂g G
On a bien = + (v ⋅ grad)g = : la grandeurs gLAG (t ) varie comme si la
dt ∂t  G ∂t
0

G G → G G
particule ne bougeait pas, car dans un champ gEUL (t ) uniforme, (v ⋅ grad)g = 0 .

401
402 Partie V.  Mécanique

1.4 Champ de vitesse au voisinage d’un point (complément hors-pro-


gramme)
Considérons deux points M et M ′
fixes par rapport au référentiel d’étude R,

→ →
et infiniment proches : MM ′ = d OM (la
différentielle notée « d » concerne une
variation spatiale). Les vecteurs vitesse
de ces deux points à l’instant t sont notés
G G
v (M ) et v (M ′) . On omet d’indiquer le
temps pour alléger les notations. On a :
G G G
v ( M ′) = v ( M ) + d v .
Soient x1 = x , x2 = y et x3 = z
les coordonnées cartésiennes de M dans un repère lié à R . Les coordonnées de M ′
 x1 + dx1 
  G
sont  x2 + dx2  . La variation dv du champ de vitesse, lorsqu’on passe à t fixé de M
 x + dx 
 3 3
G G G 3 G
G ∂v

∂v ∂v ∂v
à M ′ , est dv = dx1 + dx 2 + dx 3 = dx j .
∂x1 ∂x2 ∂x3 j =1
∂x j
3
G ∂v
La composante v i ( i = 1,2,3 ) de v varie donc de dv i =  ∂x ij dx j .
j =1
À l’instant t + Dt (on note différemment les variations infinitésimales
temporelles des variations spatiales pour éviter toute confusion), les particules fluides
qui étaient à t respectivement en M et M ′ se sont
→ G
déplacées de D OM = v (M )Dt et de :

→ G
D OM ′ = v (M ′)Dt , si bien que la longueur du segment
→ →
MM ′ = d OM varie pendant Dt.

2
→  → 
D d OM D  d OM   →
→   → D OM
 → G
Calculons = 2 d OM ⋅   = 2 d OM ⋅ d = 2 d OM ⋅ dv :
Dt Dt Dt
2
→
D d OM 3
∂v  ∂v ∂v 
Dt
=2  dxi dv i = 2 ∂x ij dxi dx j =   ∂x ij + ∂xij  dxi dx j = 2 Dij dxi dx j .
i =1 i, j i, j   i, j
2Dij


Dans le cas du champ de vitesse d’un solide, on aurait d OM = Cte (les deux

points M et M ′ du solide resteraient à distance constante), et donc Dij = 0 ∀( i , j ) .

402
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 403

1  ∂v i ∂v j

La matrice [D ] , de coefficients Dij =   traduit donc la déformation
+
2  ∂x j ∂xi


locale du fluide : c’est la matrice déformation. Elle est symétrique : D ji = Dij .

∂v i 1  ∂v i ∂v j  1  ∂v i ∂v j 
On peut écrire =  + +  −  . La matrice [ Ω ] est anti-
∂x j 2  ∂x j ∂xi  2  ∂x j ∂xi
  



Dij Ω ij

symétrique : Ω ji = −Ω ij
On peut maintenant exprimer la variation spatiale de la composante v i :
3 3 3
∂v
dv i =  ∂x ij dx j =  Dij dx j +  Ωij dx j . On en déduit :
j =1 j =1 j =1

G G G G → → → →


v (M ′) = v (M ) + dv = v (M ) + [ Ω ] ⋅ d OM + [D ] ⋅ d OM , où [ Ω ] ⋅ d OM et [D ] ⋅ d OM sont
 dx1 
 


les produits des matrices [ Ω ] et [D ] par le vecteur colonne d OM =  dx2  .
 dx 
 3
 0 −Ω21 Ω13 
 
Comme [ Ω ] est antisymétrique, elle s’écrit [ Ω ] =  Ω21 0 −Ω32  , d’où :
 −Ω 0 
 13 Ω32
 0 −Ω21 Ω13   dx1   −Ω21dx2 + Ω13 dx3   Ω32   dx1 
        
[ Ω ] ⋅ d OM =  Ω21
→
0 −Ω32  ⋅  dx2  =  Ω21dx1 − Ω32dx3  =  Ω13  ∧  dx2  , soit
 0   dx3   −Ω13 dx1 + Ω32dx2   Ω21   dx3 
 −Ω13 Ω32
G
ω
 ∂v 3 ∂v 2   ∂ 
 −     v1 
 ∂x2 ∂x3   ∂x1   
 32 

G G 1  ∂v ∂v  1  ∂    1 → G
[ Ω ] ⋅ d OM = ω ∧ d OM , avec ω =  Ω13  = 2  ∂x 1 − ∂x3  = 2  ∂x  ∧  v 2  = 2 rot v .
→ →

Ω   3 1   2  
 21   ∂v ∂v   ∂   
 2 − 1     v 3 
 ∂x1 ∂x2   ∂x3 

G 1 → G
Le vecteur tourbillon ω = rot v mesure la rotation locale du fluide.
2
Finalement, à l’instant t :

Cette relation n’est valable que localement : M et M ′ doivent être infiniment


proches. Le vecteur tourbillon et la matrice déformation dépendent de M et de t.

403
404 Partie V.  Mécanique

On peut représenter l’influence de


chaque terme sur l’évolution de quatre
particules fluides formant, à l’instant t, un carré
au voisinage de M :
G G
— On a une translation pure si à t en M, ω = 0
et [D ] = 0 .
G G
— On a une rotation pure si à t en M, v = 0 et
[D ] = 0 .
G G G G
— On a une déformation pure si à t en M, v = 0 et ω = 0 .
— Dans le cas général, on a translation + rotation + déformation.

1.5 Écoulement irrotationnel / tourbillonnaire

G 1 → G
On montre que le vecteur tourbillon ω = rot v mesure la rotation locale du
2
→ G G
fluide. Un écoulement est irrotationnel si rot v = 0 ∀M .

On peut montrer qu’un écoulement incompressible, homogène et parfait (la vis-


cosité du fluide y est négligeable) possède cette propriété.

Pour un tel écoulement, il existe un potentiel des vitesses ϕ(M, t ) tel que
G 

v = + grad ϕ .

Contrairement à la définition du potentiel électrique à partir du champ électrique


G →
stationnaire par E = − gradV , on a ici fait le choix d’un signe « + ». Un tel écoulement
G
irrotationnel est aussi appelé « potentiel ». Les propriétés du champ v (M , t ) sont celles
G
de tout champ à circulation conservative : la circulation de v (M , t ) est nulle sur un con-
tour fermé, le champ est orthogonal aux surfaces équipotentielles, et il est dirigé (du
fait du choix du signe « + ») dans le sens des potentiels croissants.
Un écoulement peut être irrotationnel dans un certain domaine de l’espace, et
 →G G
tourbillonnaire dans la zone où rot v ≠ 0 .

2. CONSERVATION DE LA MASSE
2.1 Vecteur densité volumique de courants de masse / Débits massique et
volumique
Le fluide, en s’écoulant, transporte du volume et de la masse. On considère une
surface élémentaire d2 S autour d’un point M, s’appuyant sur un contour orienté.

404
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 405

Soit δ3 m la masse qui traverse


pendant dt la surface d2 S , dans le
G
sens du vecteur d2 S qui se déduit de
celui du contour grâce à la règle du
tire-bouchon. Cette masse est algé-
brique : positive si de la masse tra-
G
verse effectivement d2 S dans le sens de d2 S , négative si de la masse traverse
d2 S dans le sens opposé.
G G
Si v = v (M, t ) est la vitesse du fluide par rapport à R au point M, les particules
fluides qui traversent d2 S pendant dt proviennent d’un cylindre dont la génératrice
G
est parallèle à v , de longueur vdt selon cette génératrice, et dont la base est d2 S . Si
G G
on note θ = (d2 S ,v ) , la hauteur du cylindre est vd t cos θ , et son volume vaut donc
G G
d3V = vdt cos θ d2 S = v ⋅ d2 S dt . On en conclut que le volume δ3V et la masse
G G G G
δ3 m qui traversent d2 S pendant dt valent respectivement v ⋅ d2 S dt et ρv ⋅ d2 S dt ,
en notant ρ = ρ(M, t ) la masse volumique du fluide en M à t.
G G
On définit le vecteur densité volumique de courants de masse J m = ρv
( kg ⋅ m-2 ⋅ s-1) .
G G G
On peut à l’aide de J m = ρv et de v calculer le débit massique qm ( kg ⋅ s-1) et
le débit volumique qv ( m3 ⋅ s-1) à travers une surface S finie, orientée grâce à la règle
du tire-bouchon en fonction de l’orientation du contour sur lequel elle s’appuie :
δm G G G G δV G G
 Jm ⋅ d S =  ρv ⋅ d S  v ⋅ d S
2 2 2
qm = = , et qv = = .
dt dt
S S S

405
406 Partie V.  Mécanique

2.2 Conservation de la masse à 1D


Commençons par faire un bilan de masse dans un cas simple où le fluide
s’écoule selon l’axe Ox, les grandeurs ne dépendant spatialement que de la coordon-
G G
née x : masse volumique ρ( x, t ) , vitesse v ( x, t ) = v ( x, t )ex , densité volumique de cou-
G G
rants de masse J m ( x, t ) = ρ( x, t )v ( x, t ) .
Le système Σ étudié est un cylindre de section S , situé entre les abscisses x et
x + d x , fixe par rapport au référentiel d’étude R : c’est un système ouvert, traversé
par des particules fluides.

La masse de Σ vaut :
— À la date t, dm(t ) = ρ( x, t ) S dx ;
— À la date t + d t , dm(t + dt ) = ρ( x, t + dt ) S dx .
Elle subit donc une variation pendant une durée infinitésimale dt :
∂ρ
d2m = dm(t + dt ) − dm(t ) = [ ρ( x, t + dt ) − ρ( x, t )] S dx = S dxdt .
∂t
On note δmx = Jm (x, t ) S dt la masse qui traverse la section S à l’abscisse x
pendant la durée dt, orientée dans le sens des x croissants. Le bilan de masse pour le
système Σ pendant dt s’écrit :
∂J
d2m = δmx − δmx + dx = [ Jm (x, t ) − Jm (x + dx, t )] S dt , soit d2m = − m S dxdt .
∂x
∂ρ ∂Jm
On obtient ainsi un bilan local de masse + = 0 à 1D qui traduit le fait
∂t ∂x
que la variation de masse n’est due qu’aux échanges, donc que la masse se conserve.
G
Le vecteur Jm étant peu utilisé, on retiendra plutôt cette équation locale de con-
∂ρ ∂(ρv )
servation de la masse sous la forme + = 0.
∂t ∂x

2.3 Conservation de la masse à 3D


Le bilan local d’une grandeur extensive quelconque a été établi dans le chapitre
sur les champs et les opérateurs différentiels.
∂ρm G
Si la grandeur est la masse, ce bilan est + divJm = σm , mais on note ρ et
∂t
G G
pas ρm la masse volumique. D’autre part, Jm = ρv , et le taux de production volumique
est nul puisque la masse est une grandeur conservative : σm = 0 .

406
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 407

L’équation locale de conservation de la masse, appelée également équation de


∂ρ G
continuité, s’écrit + div(ρv ) = 0 .
∂t

G G ∂ρ ∂(ρv )
On retrouve le cas 1D si v ( x, t ) = v ( x, t )ex : + = 0.
∂t ∂x

2.4 Écoulement stationnaire


∂ρ
En régime stationnaire, = 0 , et l’équation locale de conservation de la masse
∂t
∂ρ G
+ div(ρv ) = 0 devient :
∂t
G G G
div(ρv ) = 0 ⇔ Jm = ρv est un champ à flux conservatif ⇔ le débit massique :
G G

qm = ρv ⋅ d2 S se conserve le long d’un tube du courant.
S

Représentons un tel tube de courant :


On a donc qm1 = qm2 = qm , où qm1
et qm2 sont les débits massiques à travers
deux sections quelconques S1 et S2 .
On retrouve ce résultat en raison-
nant sur le système Σ : portion du tube de
courant comprise entre S1 et S2 .
Le débit massique à travers la sur-
G G
face latérale de Σ est nul ( Jm ⊥ d2 S lat. ),
donc, pendant dt, le système Σ a reçu la masse δm1 = qm1dt à travers S1 , et a perdu
la masse δm2 = qm2dt à travers S2 . En régime stationnaire, la masse qΣ de Σ est
constante, donc δm2 = δm1  qm2 = qm1 = qm .

2.5 Écoulement incompressible


Rappelons que pour un fluide incompressible, la pression et la température sont
sans influence sur la masse volumique d’une particule fluide. C’est le cas des liquides
dans les conditions usuelles, mais pas des gaz.
Pour un écoulement de gaz dans lequel la température et la pression varient
peu, le volume d’une particule fluide varie peu, et on parle d’écoulement incompres-
sible. C’est par exemple le cas d’un écoulement de gaz à des vitesses très petites
devant la vitesse c du son dans le gaz.
Pour un écoulement incompressible et homogène (le fluide est sous une seule
phase : écoulement d’eau ou écoulement d’air, mais pas écoulement d’eau avec des

407
408 Partie V.  Mécanique

bulles d’air, ou d’eau mélangée à de l’huile), la masse volumique est la même en tout
point de l’écoulement, et à tout instant. Par exemple ρ = 1000 kg ⋅ m-3 ∀M,∀t pour un
écoulement d’eau liquide, même instationnaire.
∂ρ G
L’équation locale de conservation de la masse + div(ρv ) = 0 , devient,
∂t
G
puisque ρ est indépendant du temps et du point : ρdivv = 0 :
G
En tout point d’un écoulement incompressible et homogène, on a divv = 0 .

L’équation de conservation de la masse s’écrit :


∂ρ G ∂ρ G G →
+ div(ρv ) = + ρdivv + v ⋅ grad ρ = 0 . Comme la dérivée particulaire de la masse
∂t ∂t
dρ ∂ρ G → G 1 dρ 1 dV
volumique ρ est = + v ⋅ grad ρ , on obtient divv = − = en combinant
dt ∂t ρ dt V dt
ces deux relations.
G
divv est donc une mesure du taux de variation relative du volume V d’une
particule fluide qu’on suit dans son mouvement.
Comme dans un écoulement incompressible, une particule fluide garde le
G
même volume, le champ de vitesse vérifie en tout point divv = 0 . Cette relation ne
nécessite donc pas de faire l’hypothèse que le fluide est homogène.
G
Le champ de vitesse de tout écoulement incompressible vérifie divv = 0 . En
G G G

conséquence v est à flux conservatif ⇔ le débit volumique qv = v ⋅ d2 S se con-
S
serve le long d’un tube du courant pour un écoulement même instationnaire.

Considérons un tube de courant


élémentaire qui entoure une ligne de
courant passant par deux points M1 et

M 2 . Les sections droites d2 S1 et

d2 S2 de ces tubes, passant par M1 et


M 2 , sont infiniment petites, si bien que
G G G G G G
v (M1, t ) = v1 et d2 S 1 sont colinéaires, ainsi que v (M2 , t ) = v 2 et d2 S 2 . On a donc par
G G G G
conservation du débit volumique d2qv = v1 ⋅ d2 S 1 = v 2 ⋅ d2 S 2  v1 ⋅ d2 S 1 = v 2 ⋅ d2 S 2 .

Si d2 S 2 < d2 S 1, alors v 2 > v1 :

Dans un écoulement incompressible, la vitesse est grande dans les zones où les lignes
de courant sont resserrées.

408
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 409

On peut en déduire l’influence


d’un obstacle sur un écoulement incom-
pressible. Les tubes de courant se res-
serrent sur les bords latéraux de l’obs-
tacle puisque le fluide doit le contour-
ner, et que les lignes de courant « au
loin » ne sont pas perturbées. C’est
dans ces zones que la vitesse est la
plus grande.

3. EXEMPLES D’ÉCOULEMENTS 
3.1 Écoulement parallèle cisaillé entre deux plaques 
Les deux plaques sont planes et parallèles. Celle d’équation y = 0 est fixe par
rapport au référentiel d’étude R , celle d’équation y = h est en translation rectiligne
G G
uniforme lente par rapport à R , avec la vitesse u = uex .

G u G
On montre qu’alors le champ de vitesse est v = yex .
h
Caractérisons cet écoulement.
G G u G G
— vEUL ( x, y , z, t ) = v = yex = vEUL ( y ) ne dépend pas de t : l’écoulement est station-
h
naire. Les différentes particules fluides qui passent au cours du temps par un point M
donné ont la même vitesse.
G ∂v
— divv = x = 0 : l’écoulement est incompressible.
∂x
0 
  vx 
G 1 G 1 ∂


  1 ∂v x G u G
— ω = rot v =   ∧  0  = − ez = − ez : l’écoulement est tourbillon-
2 2  ∂y    2 ∂y 2h
  0 
0 

409
410 Partie V.  Mécanique

naire. Le vecteur tourbillon qui caractérise la rotation des particules fluides est uni-
forme (le même en tout point).

— On peut, pour l’écoulement étudié, déterminer de


manière qualitative la transformation subie par un seg-
JJJJJJJJJG G
ment A(t )D(t ) = dyey avec dy > 0 . Les deux points A
et D se déplacent selon une droite parallèle à Ox, mais
G u G
comme v = yex , D se déplace plus vite que A. On
h
en déduit que le segment s’est allongé : il y a donc dé-
formation.

 1 ∂v x 
 0 0  0 u
0

2 ∂y  2h
   
 1 ∂v x 
0 =  0  n’est pas nulle : il
u
— La matrice déformation [D ] =  0 0
 
 2 ∂y   2h 
 0 0 0  0 0 0
   
   
y a déformation des particules fluides, ici uniforme.
— Il y a donc ici translation + rotation + déformation.
Nous allons étudier les effets séparés de chacune
de ces transformations.
Pour cela, étudions de quelle façon est transformé
JJJJJJJJJJG
un segment M (t )M ′(t ) joignant deux particules fluides
infiniment proches à la date t.
La relationGdeJJJJJJJJJJJJJJJ
JJJJJJJJJJJJJJJJJJJJJ Chasles fournit :
G JJJJJJJJJJG JJJJJJJJJJJJJJJJG
M (t + dt )M ′(t + dt ) = M (t + dt )M (t ) + M (t )M ′(t ) + M ′(t )M ′(t + dt ) , soit :
JJJJJJJJJJJJJJJJJJJJJG JJJJJJJJJJG G G JJJJJJJJJJG  G → → 
M (t + dt )M ′(t + dt ) = M (t )M ′(t ) + [v (M ′) − v (M )] dt = M (t )M ′(t ) + ω ∧ MM ′+ [D ] ⋅ MM ′ dt
 
G G G → 

puisque v (M ′) = v (M ) + ω ∧ MM ′+ [D ] ⋅ MM ′ .
JJJJJJJJJJG G G → u G
Dans le cas particulier où M (t )M ′(t ) = dxex , on a ω ∧ MM ′ dt = − dx dt ey et
2h
→ u G G
[D ] ⋅ MM ′ dt = 2h dx dt ey : les deux termes se compensent, et le segment dxex est en
translation pure.
JJJJJJJJJJG G G → u G
Dans le cas particulier où M (t )M ′(t ) = dyey , on a ω ∧ MM ′ dt = dy dt ex et
2h
G G G u G
[D ] ⋅ MM ′ dt = 2h dy dt ex : le segment dyey est transformé en dy ey + h dt ex  , ce
→ u
 
u G
qui correspond à une rotation d’un angle 2dθ = − dt < 0 autour de ez .
h

410
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 411

Considérons le fluide se trouvant


G à tG dansJJJJJJJJJ
JJJJJJJJJ un carré
G A(t)B(t)C(t)D(t) au voisinage
G
du point A(t). Les côtés sont A(t )B(t ) = dxex et A(t )D(t ) = dyey .
Pendant dt on a :
G u G
(i) Translation : le carré se déplace de v ( A)dt = y dt ex .
h
u G
(ii) Rotation : le carré tourne de dθ = ωdt = − dt < 0 autour de ez .
2h
JJJJJJJJJG u
(iii) Déformation : le segment A(t )B(t ) s’allonge et tourne de −dθ = dt > 0 autour
2h
G JJJJJJJJJG u G
de ez . Le segment A(t )D(t ) s’allonge et tourne de dθ = − dt autour de ez .
2h
On en déduit la transformation globale :

La surface ABCD n’a pas varié entre t et t + dt (à t + dt , la figure formée est un


G G
parallélogramme dont la base dxex et la hauteur dyey sont les mêmes que dans le
carré formé à t). G
Comme un segment dzez est en translation pure, on en déduit qu’une particule
fluide paralléllépipédique à t, de volume d3V = dxdydz se déplace, tourne et se
déforme, en gardant le même volume puisque l’écoulement est incompressible.

On peut remarquer qu’en recherchant les vecteurs propres de [D ] , on trouve :

411
412 Partie V.  Mécanique

G G u
— ex + ey , associé à la valeur propre .
h
G G u
— ex − ey , associé à la valeur propre − .
h
On peut donc trouver un parallélogramme dont la
déformation ne provoquera pas la rotation des côtés,
puisqu’à chaque vecteur propre s’ajoute entre t et t + dt un
vecteur qui lui est colinéaire.
Dans l’écoulement étudié, c’est le cas par exemple
d’un carré dont les côtés sont parallèles aux bissectrices
des axes.

— Une particule donnée qui passe par un point M [ x(t ), y (t ), z(t )] à la date t possède
G G G G
la vitesse vLAG (t ) = vEUL [ y (t )] ex = vLAG (t )ex , constamment portée par ex . La trajec-
 x (t )

toire de la particule est donc une droite parallèle à Ox, d’équation  y (t ) = Cte = y 0 .
z(t ) = Cte

Les lignes de courant sont également des droites parallèles à Ox.

Le caractère irrotationnel ou tourbillonnaire de l’écoulement n’est pas lié à la


courbure des lignes de courant. Ici, elles sont rectilignes, et pourtant l’écoulement est
tourbillonnaire.

G G G →
D’autre part, comme vLAG (t ) = v EUL [ y (t )] ex = v EUL [ y 0 ] ex = Cte , la particule
fluide possède un mouvement rectiligne uniforme, donc son accélération est nulle.
On peut trouver ce résultat à l’aide de la formule de dérivation particulaire :
G G G
dv ∂v G → G ∂ G ∂v G
= + (v ⋅ grad)v = v x v x ex  = v x x ex = 0 .

dt N ∂t ∂x N∂x
G
0 0

3.2 Analogie électromagnétique / Exemple du vortex 


Considérons un écoulement incompressible, dont le champ de vecteur tourbil-
G
lon ω est connu.
Le champ de vitesse est alors régi par un système de deux équations :
G G
 div v = 0 divB = 0
 
 → G , analogue au système  → G G qui régit le champ magnétique en
G
 rot v = 2ω  rot B = µ0 J
régime stationnaire.
G
On parle de vortex lorsque ω est non nul le long d’une ligne de faible épaisseur,
alors qu’il est nul ailleurs. C’est donc l’analogue d’un fil électrique parcouru par une
G
densité de courants J .

412
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 413

Des phénomènes météorologiques comme les tornades, ou bien l’écoulement


de vidange d’un récipient dont le fond est percé, sont bien modélisés par des vortex.
Nous allons étudier un vortex rectiligne de rayon R : dans un système de coor-
� � �
ω = ω0 = ω0ez pour r < R
données cylindriques,  � � .
ω = 0 pour r > R
Ce vortex est analogue à un fil rectiligne de rayon R parcouru des courants de
� �
densité uniforme J0 = J0ez .
� � �
Le champ de vitesse est donc orthoradial : v (M ) = v θ (r ) eθ , et stationnaire si ω0
ne dépend pas du temps.
� → � �
Le théorème de Stokes, Γ = � v ⋅ d OM = 2  ω ⋅ d2 S , analogue au théorème
γ S (γ)

� → � �
d’Ampère � B ⋅ d OM = µ0  J ⋅ d2 S , permet de calculer le champ de vitesse dont la
γ S (γ)

circulation le long d’un contour fermé γ est notée Γ.


On prend pour contour γ une ligne de courant, soit ici un cercle d’axe Oz et de
rayon r.
� → � �
On a alors � v ⋅ d OM = � v θ (r )eθ ⋅ dℓeθ = � v θ (r )dℓ = ℓv θ (r ) , car r est constant
γ γ γ

� →
le long de γ : � v ⋅ d OM = 2πr v θ (r ) .
γ

� �
ω = ωez étant uniforme dans la zone où il est non nul, on a avec l’orientation
� � � �
choisie pour γ : 2 
ω⋅ d2 S = 2ω0 πr 2 si r < R , et 2 
ω ⋅ d2 S = 2ω0 πR 2 si r > R .
S (γ) S (γ)
� �
v = ω0r eθ pour r < R

Finalement,  � R2 � .
v = ω0 eθ pour r > R
 r

413
414 Partie V.  Mécanique

La vitesse maximale v max = ω0R est obtenue pour r = R .


Dans le domaine r < R , on reconnaît le champ de vitesse d’un solide en rota-
tion uniforme autour de Oz avec la vitesse angulaire ω0 : le fluide tourne en bloc. Dans
cette zone, il n’y a donc pas de déformation des particules fluides.
En revanche, dans la zone r > R , il n’y a pas de rotation des particules fluides
� �
puisque ω = 0 , mais il y a déformation.

Dans les deux cas, la vitesse d’une particule fluide donnée est :
� � � � � �
ɺ r + r θɺ eθ + ze
vLAG (t ) = re ɺ z = vEUL [M (t )] = v θ [ r (t )] eθ  r = Cte et z = Cte .
La particule possède un mouvement circulaire autour de Oz de vitesse angu-
v (r )
laire θɺ = θ constante puisque r = Cte (mouvement circulaire uniforme) :
r
θɺ = ω0 pour r < R

 R
2 .
ɺ
 θ = ω0  pour r > R
 r 
On remarque de nouveau que le caractère irrotationnel ou tourbillonnaire de
l’écoulement n’est pas lié à la courbure des lignes de courant. Ici, elles sont circulaires
dans les deux zones : tourbillonnaire et irrotationnelle.

 −r ω02er pour r < R
� � 
L’accélération de la particule est aLAG (t ) = −r θɺ 2er =  4 .
2R
 −ω0 3 pour r > R
 r
On peut trouver ce résultat à l’aide de la formule de dérivation particulaire :

� � 2 � 2
−r ω02er pour r < R
dv ∂v �  → � 1 ∂ � v ∂eθ v � 
= + (v ⋅ grad)v = v θ v θeθ  = θ = − θ er =  4 .
dt � ∂t r ∂θ  r � ∂θ r  −ω 2R
pour r > R
� � 0
0 −er  r3

On peut faire tendre R vers 0, tout en conservant un champ de vitesse non nul,
à condition de maintenir constante la circulation Γ = 2ω0 πR 2 , ce qui entraîne ω0 → ∞ :
� Γ �
r ֏ ω(r ) devient une distribution de Dirac. On a alors v = eθ ∀r > 0 : le système
2πr

414
Chapitre 4.  Description d’un fluide en mouvemen 415

G µ I G
est analogue à un fil infini pour lequel B = 0 eθ ∀r > 0 . Bien que l’écoulement soit
2πr
G
irrotationnel partout sauf sur Oz, la circulation de v n’est nulle que le long d’un contour
n’entourant pas Oz ; elle vaut Γ si le contour entoure Oz.

4. LES TECHNIQUES EXPÉRIMENTALES D’ÉTUDE


D’UN ÉCOULEMENT
On apprend beaucoup, par exemple sur la résistance d’un véhicule à un écou-
lement, de la simple visualisation du champ de vitesse à l’aide de traceurs, comme
des particules métalliques en suspension. Dans l’eau on peut utiliser également des
bulles obtenues par électrolyse, des colorants…. Dans les gaz, on utilise plutôt des
fumées colorées.

Les mesures de vitesse permettent une étude quantitative d’un écoulement.


Elles mettent en œuvre des techniques très variées. En voici quelques-unes :

— Anémométrie à fil chaud : on place dans l’écoulement un fil


métallique très mince (épaisseur de 10 µm) et court (quelques
mm). Il est chauffé à une température supérieure à celle de
l’écoulement, par un courant électrique d’intensité i, asservi afin
de maintenir constante la température du fil.
La composante v du vecteur vitesse, normale au fil, est
responsable du phénomène de convection qui a tendance à re-
froidir le fil : plus v est grande, plus i doit augmenter pour que T
reste constante.
On déduit v de la mesure de i, mais on ne connaît pas sa
direction dans le plan orthogonal au fil. Pour avoir accès aux trois composantes, on
utilise un fil chaud triple.

— Tube de Pitot : il permet la mesure de la vitesse d’un écoulement grâce à une dif-
férence entre deux pressions (nous en reparlerons dans le chapitre sur les fluides par-
faits).

415
416 Partie V.  Mécanique

— Vélocimétrie laser : on crée au voisinage d’un point M du fluide un système de


franges d’interférences à deux ondes. Des petites particules diffusantes (de diamètre
de l’ordre du µm), parsemées dans le fluide, sont entraînées par ce dernier et émettent
un signal lumineux alternatif à la traversée des franges (elles renvoient beaucoup de
lumière à la traversée des franges brillantes, et très peu à la traversée des franges
sombres). En mesurant la fréquence de ce signal, on en déduit la composante de la
vitesse du fluide normale aux franges. C’est une méthode non intrusive.

— Vélocimétrie par images de particules (P.I.V) : on éclaire l’écoulement à l’aide d’un


faisceau laser plan afin de déterminer la vitesse de l’écoulement dans ce plan. Le laser
envoie des impulsions de période T (brève et réglable). On réalise une image nette du
plan éclairé par le laser avec un appareil photo, et on prend une image à chaque im-
pulsion laser, puis on procède à un traitement numérique d’un couple d’images con-
sécutives obtenues. On peut ainsi mesurer le déplacement local des particules diffu-
santes en suspension dans le fluide autour d’un point M et en déduire la vitesse locale
G
v (M, t ) dans le plan éclairé.

416
417

[MÉCANIQUE 5]

DYNAMIQUE DES FLUIDES


1. ACTIONS DE CONTACT SUR UN FLUIDE
1.1 Contraintes tangentielles / Viscosité
Nous avons vu, dans le chapitre sur la statique des fluides, que les seules con-
traintes dans un fluide au repos étaient les contraintes, normales, de pression. Il en va
différemment lorsque les particules fluides se déplacent les unes par rapport aux
autres. Ce « glissement » s’accompagne de forces de frottement dans un fluide réel
(visqueux). Comme les forces de pression, les forces de viscosité sont surfaciques :
elles s’exercent à travers la surface séparant un fluide en deux parties (1) et (2).
Considérons un écoulement de Couette (du nom du physicien français Maurice
Couette) : un fluide incompressible, initialement au repos, est placé entre deux
grandes plaques parallèles horizontales distantes de h. On met en mouvement la
G G
plaque supérieure avec une vitesse u = uex constante, tangente à la plaque.
Après un régime transitoire pendant lequel le fluide se met à son tour en mou-
vement, on atteint un régime stationnaire. Le champ de vitesse est alors de la forme
G G
v = v x ( y ) ex , où Oy est la direction orthogonale aux plaques. Un tel écoulement où il
existe un gradient de vitesse orthogonal à l’écoulement est dit « cisaillé ».

G u G
Plus précisément, on a v = yex . On parle de « profil » linéaire des vitesses.
h
Le caractère visqueux du fluide est responsable des forces tangentielles qui le
mettent en mouvement : la plaque mobile met en mouvement le fluide juste au-des-
sous, qui met en mouvement la couche inférieure, etc. À travers une surface

417
418 Partie V.  Mécanique

élémentaire d2 S = dxdz parallèle aux plaques, le fluide (2) du dessus exerce sur le
G G G
fluide (1) du dessous une force « visqueuse » d2F2/1 = d2Fv = σv d2 S .

L’expérience montre que la contrainte visqueuse (force par unité de surface),


ou contrainte de cisaillement, est ici tangente à la surface, et de la forme :
G
G d2Fv ∂v G
σv = 2 = η x ex , où η ≥ 0 est la viscosité dynamique du fluide dont l’unité est le
d S ∂y
pascal seconde ( Pa ⋅ s ). L’ancienne unité, le poiseuille (Pl : 1 Pl = 1 Pa ⋅ s ) est encore
couramment utilisée.
G
La contrainte σv ( y ) est exercée par le fluide qui se trouve du côté y ′ > y sur
celui qui se trouve du côté y ′ < y .

 ∂v 
Comme  x  = T −1 , et qu’une contrainte
 ∂y 
est homogène à une pression p, la dimension de η
est bien [ η] = [ p ] ⋅ T .

La viscosité ainsi définie est une caractéristique du fluide.


Elle est nulle dans la limite des fluides parfaits, et ne dépend que de la tempé-
rature T (elle augmente avec T pour un gaz, elle diminue pour un liquide) pour un fluide
« classique », dit newtonien (l’eau, l’air, l’huile, le miel…).

En revanche pour un fluide non newtonien, elle dépend :


— De la contrainte de cisaillement. Elle diminue avec σ v pour un fluide dit « rhéoflui-
difiant » comme le sang, alors qu’elle augmente pour un fluide « rhéoépaississant »
comme un mélange eau-maïzena.
— De la durée pendant laquelle est exercée une contrainte de cisaillement constante
(par exemple pour un fluide « thixotrope » comme une peinture, qu’on remue avec une
spatule, la viscosité diminue au bout d’un certain temps).
Nous n’étudierons que des fluides newtoniens dont nous donnons quelques va-
leurs de viscosité à 298 K :

air eau huile de ricin miel


−5 −3 ≃ 1 Pa ⋅ s ≃ 10 Pa ⋅ s
1,85 ⋅ 10 Pa ⋅ s 1,0 ⋅ 10 Pa ⋅ s

418
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 419

Plus généralement, on définit une


matrice [ σ ] des contraintes visqueuses
s’exerçant, de la part du fluide extérieur,
sur une particule fluide cubique à travers
les faces j ( j ∈ a1,3 b ) de surface d2 S :
d2Fij
σij = , où d2Fij est la composante
d2 S
G
selon le vecteur unitaire ei de la force
G
d2F j s’exerçant sur la face j.
G
On a dans le cas d’un écoulement incompressible ( div v = 0 ) :
 ∂v ∂v j 
σij = η  i +  = 2ηDij , où [D ] est la matrice déformation.
 ∂x j ∂xi 
 
G G
On retrouve pour l’écoulement de Couette, où v = v x ( y )ex :
∂v1 ∂v
σ12 = σ xy = η =η x .
∂x2 ∂y
Dans le cas d’un écoulement compressible de fluide newtonien, une seconde
viscosité intervient (elle intervient dans l’étude de l’atténuation d’une onde sonore)…

1.2 Conditions aux limites pour un écoulement réel


G G
v ( y = 0) = 0
L’expérience de Couette montre qu’on a  G G : il y a adhérence du
v ( y = h ) = u
fluide sur les parois.

De façon générale, un fluide visqueux adhère aux parois solides (il y a non-
glissement du fluide sur le solide).

En revanche, dans le cas d’un fluide parfait, il peut y avoir glissement du fluide
sur le solide. La condition aux limites ne porte alors que sur la composante normale
de la vitesse en un point P de la paroi solide (ce qui traduit le fait que cette paroi est
imperméable au fluide : en P, la vitesse normale du fluide est nulle dans le référentiel
lié au solide).

419
420 Partie V.  Mécanique

D’autre part, un obstacle, une paroi solide…, de dimensions finies ne perturbent


que localement un écoulement : on retrouve, loin de l’obstacle, le même champ de
G G
vitesse que sans l’obstacle : lim v (M ) = u(M ) .
OM →∞
sans obstacle

1.3 Interprétation microscopique de la viscosité pour les gaz


Considérons l’écoulement de Couette d’un gaz pur. Une particule fluide (2) en
N2
G G 1 G
y + dy se déplace à la vitesse v 2 = v( y + dy ) ex =
N2  vmi : c’est la moyenne des
v2 i =1

vitesses des N2 molécules que contient (2). Elle « glisse » sur un particule (1) en y
N1
G G 1 G
dont la vitesse est différente : v1 = vN
( y ) ex =
N1  vmj , avec par exemple v 2 > v1 .
v1 j =1
G
Même si les vitesses moyennes sont portées par ex , les vitesses des molécules
G
possèdent aussi une composante selon ey du fait de l’agitation thermique. Pendant
une durée dt, des molécules de (2) vont passer dans (1) et réciproquement : une quan-
G G
tité de mouvement δp2 passe de (2) vers (1), et une autre δp1 de (1) vers (2). Il en
G G G
résulte un transfert total δp = δp2 − δp1 de (2) vers (1).
G
En projection sur ex , on a δpx = δp2 x − δp1x > 0 puisque les particules qui pro-
G
viennent de (2) ont en moyenne une vitesse selon ex plus grande que celles qui pro-
viennent de (1). D’après le théorème de la quantité de mouvement, le système (1)
G δp G
subit de la part de (2) une force de composante tangentielle F2/1 T = x ex , dans le
dt

420
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 421

G
sens de ex : (1) est entrainée par (2) (qui va plus vite) dans le sens de l’écoulement,
et bien sûr (2) est retenue par (1).

Les actions de contact visqueuses sont dues à un transfert de quantité de mou-


vement entre deux particules fluides en mouvement relatif.

La quantité de mouvement δpx qui traverse S pendant dt étant proportionnelle


à S , F2/1 x l’est aussi. Les forces visqueuses sont surfaciques.

1.4 Équivalent volumique des actions visqueuses pour un écoulement in-


compressible
Considérons un écoulement unidirectionnel cisaillé, dont le champ de vitesse
G G G ∂v
est v = v x ( y , t ) ex . Comme divv = x = 0 , l’écoulement étudié est incompressible.
∂x
On considère une particule fluide parallé-
lépipédique de côtés dx, dy et dz (de volume
d3V = dxdydz ).
Les forces de viscosité ne s’exercent que
sur les faces portées par les plans y et y + dy ,
G
puisque la vitesse ne varie que selon ey .
La force visqueuse exercée par le fluide
au-dessus de la particule (situé en y ′ > y + dy ) à travers la face de dessus (de surface
G ∂v G
dxdz) est d2Fv ( y + dy ) = η x ( y + dy , t )dxdzex .
∂y
La force visqueuse exercée par le fluide au-dessous de la particule (situé en
G ∂v G
y ′ < y ) à travers la face de dessous est −d2Fv ( y ) = −η x ( y , t )dxdzex .
∂y
La résultante des actions visqueuses vaut donc :

421
422 Partie V.  Mécanique

G G G ∂  ∂v  G ∂ 2v G
d3Fv = d2Fv ( y + dy ) − d2Fv ( y ) = η  x  dydxdzex = η 2x dydxdzex , soit :
∂y  ∂y  ∂y
G ∂ 2v G G G G G
d3Fv = η 2x ex d3V = η( ∆v x )ex d3V = η∆vd3V , où ∆v est le laplacien de v .
∂y
G G
L’expression d3Fv = η∆vd3V est valable pour tout écoulement newtonien in-
compressible.

La démonstration ci-dessous est hors-programme.


Pour la particule fluide cubique définie au 1.1, la contrainte s’exerçant
G de la part
du fluide extérieur sur la face j (en x j + dx j ), vaut en projection sur ei :
 ∂v ∂v j 
σij = η  i ( x j + dx j ) + ( x j + dx j )  .
 ∂x j ∂xi 
En vertu de la loi des actions réciproques, celle s’exerçant sur la face opposée
G  ∂v ∂v j 
(en x j ) vaut en projection sur ei : σij = −η  i ( x j ) + ( x j )
 ∂x j ∂xi 
Considérons
G la somme des actions visqueuses s’exerçant sur les 6 faces, en
projection sur ei :
d2Fi 1( x1 + dx1) − d2Fi 1( x1) + d2Fi 2 ( x2 + dx2 ) − d2Fi 2 ( x2 ) + d2Fi 3 ( x3 + dx3 ) − d2Fi 3 ( x3 )
  
∂  ∂v i ∂v1  ∂  ∂v i ∂v 2  ∂  ∂v i ∂v 3 
ηd2 S  +  dx ηd2 S  +  dx ηd2 S  +  dx 3
∂x1  ∂x1 ∂xi  1 ∂x2  ∂x2 ∂xi  2 ∂x3  ∂x3 ∂xi 

 ∂  ∂v1 ∂v 2 ∂v 3  
= ηd3V  ∆v i +  + + 
 ∂xi  ∂x1 ∂x2 ∂x3  
G ∂v ∂v ∂v
Or div v = 1 + 2 + 3 = 0 puisque l’écoulement est incompressible : on a
∂x1 ∂x2 ∂x3
G G
bien d3Fv = η∆vd3V pour tout écoulement newtonien incompressible.

1.5 Loi de pression dans une direction orthogonale à un écoulement paral-


lèle
On considère un écoulement parallèle dont
le champ de vitesse dans un référentiel galiléen R
G G
est donc de la forme v EUL = v x ( x, y , z, t ) ex .
Une particule fluide donnée, de volume
3
d V , se déplace parallèlement à Ox et possède
G
G G dv dv x G G
une vitesse v LAG = v x (t ) ex : son accélération = ex est portée par ex ainsi
dt dt
G G
que la force visqueuse qu’elle subit : d3Fv = d3Fv ex . La particule est en outre soumise
→
à des actions de pression, de résultante − grad p d3V , et à la force de pesanteur :

422
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 423

G G G G
ρg d3V = ρ d3V g x ex + g y ey + g z ez  (aucun axe n’est a priori vertical, l’écoulement
pouvant par exemple suivre un plan incliné).
Appliquons le P.F.D à la particule dans R :
dv x G G → G
ρ d3V ex = ρgd3V − grad p d3V + d3Fv ex .
dt
G G
En faisant le produit scalaire de cette relation par ey puis ez , on obtient :

 ∂p
 ∂y = ρg y
 : la loi de pression est la même qu’en statique (loi hydrostatique) dans les
 ∂p = ρg
 ∂z
z

directions orthogonales à l’écoulement.

2. ÉQUATION DE NAVIER-STOKES / NOMBRE DE


REYNOLDS
2.1 Types d’écoulement et dimensions caractéristiques
On peut classer les écoulements en deux groupes.
— Écoulements externes (autour d’un obstacle).
Prenons l’exemple de l’écoulement autour d’une aile d’avion :

La vitesse caractéristique est la vitesse u de l’air en amont, dans le référentiel


de l’avion. Une longueur caractéristique est par exemple la longueur L de la corde.
— Écoulements internes (dans une conduite).
Prenons l’exemple de l’écoulement dans une canalisation de section circulaire :

La longueur caractéristique est par convention le diamètre de la conduite (on


aurait pu prendre le rayon) : L = D .
Comme la vitesse n’est pas uniforme dans une section (le fluide adhère aux
parois, où la vitesse est donc nulle, alors qu’elle est maximale sur l’axe de la conduite),
on définit la vitesse débitante u, telle que le débit volumique qv soit le produit de u par

423
424 Partie V.  Mécanique

πD 2
la section traversée : qv = u . C’est une vitesse moyenne, correspondant à un
4
écoulement uniforme de même débit volumique que l’écoulement étudié.

2.2 Les deux modes de transfert de quantité de mouvement


Une surface S , placée dans un écoulement, peut être traversée pendant une
G
durée dt par une quantité de mouvement δp selon deux modes différents dont on
cherche les durées caractéristiques.
G G
Nous raisonnerons de nouveau sur l’écoulement de Couette où v = v x ( y ) ex .

— Transfert convectif : dû au mouvement macroscopique.


Soit une surface S orthogonale à l’écoule-
ment. Pendant dt, la quantité de mouvement qui la
G G
traverse est δp = ρS v x dt v x ex (on suppose S suf-

δm
fisamment petite pour pouvoir y considérer l’ordon-
née y constante, dans le but d’éviter de la noter
G G
δp G δp
d2 S ). On a = ρS v x 2e x  = O(ρS u 2 ) , et
dt dt
G
δp  p
aussi = O   , si τc est la durée caractéristique de la convection.
dt  τc 
p est l’ordre de grandeur de la quantité de mouvement pour un système de
longueur caractéristique L et de vitesse caractéristique u, donc p = O(ρS Lu ) .
Finalement, ρS u 2 = O ( ρS Lu / τc ) , soit τc = O ( L / u ) .

La durée caractéristique du transfert de quantité de mouvement par convection


L
sur la longueur L est définie par τc = .
u

— Transfert diffusif : dû au mouvement microscopique.


Soit une surface S dans un plan y = Cte .
Pendant dt, la quantité de mouvement qui la
traverse dans le sens des y décroissants vaut :
G G
δp = δpex , comme on l’a vu au 1.3.
La quantité de mouvement du système Σ
constitué par le fluide en dessous de cette surface
G G
varie de dp = δp . Il subit donc une force visqueuse
G G
δp ∂v G  ηu S 
Fv = = η x S ex = O   de la part du flui-
dt ∂y  L 
de au-dessus de S .

424
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 425

Or, si τd est la durée caractéristique de la diffusion, on a aussi :



δp  p  ρS Lu  ηu S  ρS Lu   ρ L2 
= O  = O  , d’où = O  soit τd = O   .
dt  τd   τd  L  τd   η 

η
On introduit la viscosité cinématique d’un fluide : ν = en m2 ⋅ s-1 .
ρ

On tire la dimension de ν par exemple de [ ν ] = L2 / τd  .


 
Comme la viscosité cinématique prend en compte la masse volumique des
fluides, on peut avoir pour deux fluides η1 > η2 mais ν1 < ν 2 . Par exemple, ν eau est
inférieure à ν air dans les conditions usuelles. Retenons les ordres de grandeur :
10−3 10−5
ν eau ≃ = 10 −6 m2 ⋅ s-1 et νair ≃ = 10−5 m2 ⋅ s-1 .
103 1

La durée caractéristique de transfert de quantité de mouvement par diffusion


ρ L2 L2
est définie par τd = = .
η ν

2.3 Définition du nombre de Reynolds et signification


On définit le nombre de Reynolds Re global d’un écoulement, nombre sans di-
mension, par :

τd ρu L uL
Re = = = .
τc η ν

Si Re << 1 , on a τd << τc : les phénomènes diffusifs (liés à la viscosité), beau-


coup plus rapides, dominent les phénomènes convectifs (liés au déplacement macros-
copique). Dans un tel écoulement, la viscosité doit être prise en compte.
Inversement, si Re >> 1 , on a τc << τd : les phénomènes convectifs dominent
les phénomènes diffusifs ; on peut négliger la viscosité du fluide et adopter le modèle
de fluide parfait. Nous verrons cependant que même si le Re global est grand, il y a
des zones de l’écoulement dans lesquelles la viscosité ne peut pas être négligée.
Les expériences permettent de donner des valeurs « seuil » de Re permettant
de négliger ou non un phénomène devant l’autre.

2.4 Équation de Navier-Stokes pour un écoulement incompressible


On applique le principe fondamental de la dynamique à une particule fluide de
volume d3V , de masse volumique ρ, dans un référentiel galiléen.
On suppose que la seule force volumique s’exerçant sur la particule est son

425
426 Partie V.  Mécanique

G
poids ρg d3V . La particule est en outre soumise à deux types de forces surfaciques :


— Les forces de pression qui se mettent sous la forme − grad p d3V .
G
— Les forces visqueuses qui se mettent sous la forme η∆v d3V .
G
dv G → G
On obtient alors ρd3V = ρg d3V − grad p d3V + η∆v d3V .
dt
G
dv G → G
Le P.F.D s’écrit donc ρ = ρg − grad p + η∆v , où chaque terme est homogène
dt
à une force volumique (c’est-à-dire ici par unité de volume…).
En utilisant la formule permettant de calculer l’accélération particulaire à partir
du champ eulérien des vitesses, on obtient l’équation de Navier-Stokes, centrale en
mécanique des fluides :
G
 ∂v G → G  G → G
ρ  + (v ⋅ grad)v  = ρg − grad p + η∆v , équation de Navier-Stokes, valable pour un
 ∂t 
fluide newtonien incompressible.

L’équation de Navier-Stokes est une des équations les plus complexes de la


Physique, et admet très rarement des solutions analytiques. Ceci est dû :
G → G
— Au caractère non-linéaire du terme (v ⋅ grad)v (accélération convective).
— Au couplage entre les composantes v x , v y et v z qu’induit ce même terme. Par
G
exemple, sa projection selon ex ne fait pas intervenir que v x , mais aussi v y et v z :

G → ∂v ∂v ∂v
(v ⋅ grad)v x = v x x + v y x + v z x .
∂x ∂y ∂z
G
— Au fait que cette équation est d’ordre 2, de par la présence du laplacien ∆v .

Ces propriétés sont à l’origine du comportement chaotique ou turbulent de cer-


tains écoulements fluides. Néanmoins, on peut dans certains cas simplifier cette équa-
tion en négligeant un terme devant un autre.

 G → G 
O ρ(v ⋅ grad)v 
 
Le nombre de Reynolds Re =  donne l’ordre de grandeur du
G
O [ η∆v ]
G → G G
rapport du terme « convectif » ρ(v ⋅ grad)v au terme « diffusif » η∆v .

Si on note u la vitesse caractéristique de l’écoulement, et L une longueur carac-


téristique de l’écoulement (diamètre d’une conduite, taille d’un obstacle), on a :
 G → G  ρu 2 G ηu ρuL uL
O ρ(v ⋅ grad)v  = et O [ η∆v ] = 2 , soit Re = = . On retrouve l’expression
  L L η ν

426
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 427

obtenue en faisant le rapport des temps caractéristiques diffusif et convectif de trans-


fert de quantité de mouvement sur une longueur L.

On distingue alors deux situations :

— Re << 1 : le terme convectif est négligeable. L’équation de Navier-Stokes devient



∂v � → �
celle de Stokes ρ = ρg − grad p + η∆v (du second ordre, mais linéaire).
∂t
— Re >> 1 : le terme visqueux est négligeable, et l’écoulement est donc « parfait » (on
se ramène au cas d’une viscosité nulle). L’équation de Navier-Stokes devient celle

 ∂v � → �  � →
d’Euler : ρ  + (v ⋅ grad)v  = ρg − grad p (non linéaire, mais du premier ordre).
 ∂t 

� ∂v � → �
L’accélération de la particule fluide a = + (v ⋅ grad)v se décompose en accé-
∂t

∂v � → �
lération locale , et accélération convective (v ⋅ grad)v . Une autre expression de
∂t
→  v 2  → � �
l’accélération convective est grad   + rot v ∧ v .
 2 
 

L’équation de Navier-Stokes s’écrit également :



 ∂v →  v 2  → � �  � → �
ρ + grad   + rot v ∧ v  = ρg − grad p + η∆v .
 
 ∂t  2  

3. ÉCOULEMENT EXTERNE STATIONNAIRE


INCOMPRESSIBLE AUTOUR D’UN OBSTACLE
3.1 Couche limite
Considérons d’abord l’écoulement autour d’une aile d’avion. Prenons une corde
uL 1× 100
de longueur L = 1 m , et une vitesse u = 100 m ⋅ s-1 . On a Re = ≃ −5
= 107 .
νair 10
Considérons maintenant l’écoulement autour d’un modèle réduit de sous-marin,
de largeur L = 10 cm , qui avance dans l’eau à une vitesse u = 10 cm ⋅ s-1 . Le nombre
uL 10 −1 × 10 −1
de Reynolds est encore très grand : Re = ≃ = 10 4 .
νeau 10−6

On constate que, sauf exceptions (petits objets en mouvement lent dans un


fluide visqueux), le nombre de Reynolds global pour les écoulements externes est très
grand. On peut négliger la viscosité du fluide et considérer l’écoulement parfait sauf :

427
428 Partie V.  Mécanique

— Dans une couche limite proche des parois (puisque la vitesse tend vers 0 en se
rapprochant de la paroi, les effets convectifs finissent par être dominés par les effets
diffusifs).
— Dans le sillage, zone tourbillonnaire en aval de l’obstacle.

Cherchons un ordre de grandeur de l’épaisseur de la couche limite. Prenons le


cas d’un écoulement sur une plaque de longueur L. Loin de la plaque, l’écoulement
G
est uniforme, de vitesse u parallèle à la plaque.

La couche fluide qui entre en contact avec la plaque y adhère. Les particules
de la couche juste au-dessus sont ralenties progressivement par cette première
couche, et ralentissent à leur tour celles de la couche juste au-dessus. Ainsi, la zone
dans laquelle les phénomènes diffusifs sont non négligeables (couche limite) s’épaissit
orthogonalement à la plaque. Les particules fluides qui se trouvent à l’abscisse x = 0
à t = 0 arrivent dans la couche limite à l’abscisse x en une durée ∆t = O ( x / u ) .

On a vu que les phénomènes diffusifs se faisaient en une durée τd = L2 / ν sur


une longueur L imposée. Ici, c’est la durée ∆ t qui est imposée, et l’épaisseur δ(x) de
couche « visqueuse » est donc de l’ordre de ν∆t , soit δ( x ) = O ( )
νx / u ∝ x . Cette

croissance en x est bien vérifiée expérimentalement.


δ( x )  ν 
On a = O = O Re( x )−1/2  , en faisant apparaître un nombre de Rey-
x  ux   
 
ux
nolds local : Re( x ) = . En particulier, l’épaisseur δ(L) de couche limite en bout de
ν
plaque ( x = L ) est de l’ordre de L / Re , où Re = uL / ν est le nombre de Reynolds
global de l’écoulement.

428
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 429

Par exemple, pour l’écoulement d’air autour d’une voiture (on prend L = 1 m et
u = 10 m ⋅ s-1 soit Re ≃ 106 ), on a δ(L) ≃ 1 mm .

Dans les situations courantes d’écoulements externes, l’épaisseur de couche


limite est très faible. Le fluide est parfait « presque partout ».
Cependant, bien que très mince, la couche limite joue un rôle fondamental et
doit être prise en compte :
— Les conditions aux limites sont celles d’un fluide réel (adhérence à la paroi), pas
celles d’un fluide parfait qui glisserait sur la paroi.
— Les forces tangentielles sur l’obstacle ne sont pas nulles à cause de la viscosité
dans la couche limite, alors qu’elles le seraient si le fluide était parfait partout.

On peut donner l’allure du champ de vitesse pour l’écoulement au-dessus de la


plaque.

Dans la couche limite, l’écoulement est cisaillé : il y a un fort gradient de vitesse


orthogonalement à l’écoulement. L’écoulement y est tourbillonnaire.
Dans la zone où l’écoulement est parfait, ce gradient est très faible et l’écoule-
ment est quasiment irrotationnel.

3.2 Traînée / Portance



Considérons un solide en translation rectiligne uniforme avec une vitesse u
dans un fluide initialement au repos dans le référentiel d’étude R . Là où passe le
solide, le fluide est mis en mouvement, puis revient au repos : l’écoulement est insta-
tionnaire dans R .
On peut raisonner dans le référentiel R solide lié au solide : le fluide est en mou-

vement rectiligne uniforme avec la vitesse −u loin du solide, et l’écoulement est sta-
tionnaire.

429
430 Partie V.  Mécanique

Les forces qu’exerce le fluide sur le solide sont dues au mouvement relatif des
deux corps et sont donc les mêmes dans les deux situations. On les décompose en :
G
— Force de traînée Ft , souvent appelée simplement « traînée », qui s’oppose à la
G
vitesse u .
G
— Force de portance Fp , souvent appelée simplement « portance », qui est orthogo-
G
nale à la vitesse u .

L’expérience montre que ces forces font intervenir la surface obtenue en proje-
tant le solide sur un plan orthogonal à la vitesse, appelée maître-couple S .

πD2
Dans le cas d’une sphère de diamètre D, le maître couple vaut S = .
4
Nous allons raisonner sur ce cas pour déterminer les nombres sans dimension
G G
intervenant dans l’étude de la traînée ou de la portance. On note F = Ft ou Fp .
F dépend de D, de u, de la masse volumique ρ du fluide, et de sa viscosité
dynamique η. Il existe une relation de la forme f (F , D, u, ρ, η) = 0 .
Cherchons d’abord à former des nombres sans dimension indépendants à partir
de ces 5 grandeurs. Ces nombres sont de la forme N ∗ = F α Dβu γ ρδ ηλ .
Par analyse dimensionnelle, on obtient :
[F ] = M ⋅ L ⋅ T−2 [D ] = L [u ] = L ⋅ T−1 [ρ] = M ⋅ L−3 [η] = M ⋅ L−1 ⋅ T−1.
Seules interviennent trois dimensions : masse M, longueur L et temps T.
On obtient donc N ∗ = Mα+δ+λ ⋅ Lα+β+ γ − 3δ−λ ⋅ T −2α−γ −λ . Comme N ∗ est sans di-
α + δ + λ = 0
∗ 0 0 0 
mension, il s’écrit N = M ⋅ L ⋅ T , d’où le système α + β + γ − 3δ − λ = 0 .
−2α − γ − λ = 0

C’est un système à 3 équations (les 3 dimensions M, L et T), et à 5 inconnues
(correspondant aux 5 grandeurs F, D, u, ρ et η). On peut donc fixer 2 coefficients, par
γ = β

exemple α et β, et résoudre le système, ce qui donne δ = α + β .
λ = −2α − β

430
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 431

α β
 ρF   ρuD  α β
∗ α
On a N = F D u ρ ηβ β α +β −2α −β ∗
, soit N =  2  ⋅   ∗  ∗
 η   η  =  n1  ⋅ n2  .
 
Il n’y a donc que 2 nombres sans dimension indépendants formés à partir de F,
D, u, ρ et η. Tous les nombres sans dimension qu’on peut former à partir de ces gran-
α β
deurs sont en effet de la forme N ∗ = n1∗  ⋅ n2∗  .
   
On fait le choix :

— α = 0, β = 1 , car le nombre sans dimension est alors le nombre de Reynolds


ρuD
Re = (on choisit par convention le diamètre comme longueur caractéristique).
η
F
— α = 1, β = −2 . Le nombre sans dimension obtenu est alors indépendant de
ρu 2 D 2
la viscosité.
2F 2F
On préfère l’écrire sous la forme C = , soit :
2
=
πD ρu 2 S
2
ρu
4
G G
2 Ft 2 Fp
Cx = 2 dans le cas de la traînée, et Cz = 2 dans le cas de la portance.
ρu S ρu S
Dans le cas d’un solide quelconque, on écrit les forces de traînée et de portance
respectivement sous la forme :
G 1 G 1
Ft = ρS Cx u 2 et Fp = ρS Czu 2 , où S est le maître-couple.
2 2
Cx et Cz sont des coefficients sans dimension appelés respectivement coeffi-
cient de traînée et de portance.

G G 1 G
La traînée qui s’oppose à la vitesse u du solide est Ft = − ρS Cx uu .
2
Cx dépend du profil du solide : à ρ, S et u fixés, plus il est faible, plus la traînée
est faible. Cz dépend aussi du profil du solide : à ρ, S et u fixés, plus il est grand, plus
la portance est importante.
Comme les grandeurs F, D, u, ρ et η ne sont pas indépendantes, les nombres
sans dimension Re et C ( Cx ou Cz ) sont liés par une relation du type g (C, Re ) = 0 .

Pour une même géométrie, Cx et Cz ne dépendent que du nombre de Rey-


nolds Re.

Ce résultat est fondamental : si on veut mesurer ces coefficients pour un objet


donné (avion, missile, voiture…), on peut réaliser une maquette à échelle réduite de

431
432 Partie V.  Mécanique

ρuD
cet objet et l’étudier en soufflerie de façon à obtenir un nombre de Reynolds Re =
η
proche de celui de l’écoulement réel autour de l’objet.
Si le fluide est le même (l’air dans le cas d’une maquette d’avion par exemple),
le produit uD doit rester constant alors que D est plus petit pour la maquette que pour
l’objet réel : il peut être difficile, voire impossible, d’atteindre le même nombre de Rey-
nolds dans une soufflerie. Une solution est, comme dans le cas de la figure ci-dessous,
de placer la maquette dans un tunnel hydrodynamique puisque ν eau ≃ νair / 10 : la vi-
tesse à atteindre est alors sensiblement 10 fois plus petite.

3.3 Écoulement autour d’une sphère


De nombreuses études expérimentales ont été menées. Elles ont permis de
visualiser les lignes de courant autour d’une sphère et de mesurer la force de traînée.
Avec des diamètres, des vitesses d’écoulement, et des fluides différents, on a pu faire
varier le nombre de Reynolds sur une grande gamme allant de 0,1 à 106 .
Les effets visqueux sont sous-estimés par l’analyse en ordres de grandeur
puisque les phénomènes diffusifs dominent en réalité dès que Re est plus petit que 1
(et pas Re << 1 ). Il suffit au contraire que Re soit plus grand que quelques milliers pour
que l’épaisseur de la couche visqueuse autour de la sphère devienne suffisamment
petite devant le diamètre et qu’on puisse parler de couche limite.
On distingue 2 domaines particuliers.
— Domaine A : Re < 1. L’écoulement est laminaire : les différentes couches, ou la-
mes, de fluide, s’écoulent sans se mélanger. On parle aussi d’écoulement rampant par
référence à la lame de fluide qui s’enroule sur une demi-circonférence.
Un tel écoulement est stable (une pertur-
bation ne provoque pas de changement durable),
et stationnaire. Il est également prédictible. On
sait d’ailleurs résoudre les équations régissant le
champ de vitesse et de pression en coordonnées
sphériques.
Comme le système présente la symétrie
de révolution autour de Oz, les champs de vitesse

432
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 433

G G
et de pression sont indépendants de ϕ, et v (M ) = v (r , θ) est dans le plan méridien zOx
contenant M. On trouve :

  3 R R3 
v r = u cos θ 1 − + 3
  2 r 2r 

  3 R R3  3u ηR
v θ = −u sin θ 1 − − 3  , et p( r , θ) = p0 − cos θ , en prenant p → p0 .
  4 r 4r  2r 2 r →∞


v ϕ = 0

Les particules fluides passant de θ = π à θ = 0 , la pression diminue le long


d’une ligne de courant. Elle est plus forte en amont qu’en aval.
G G G G G
Les C.A.L : v (r = R, θ) = 0 et lim v (r , θ) = −u = uez , sont bien vérifiées.
r →∞
En régime stationnaire, et pour Re < 1, l’équation de Navier et Stokes prend la
→ G G
forme grad p = ρg + η∆v . Si on prend le rotationnel de cette équation, on élimine la
G
pression et ρg qui est uniforme pour un écoulement incompressible homogène. On
G → G G
obtient une deuxième équation régissant v : rot ( ∆v ) = 0 , la première équation étant
G
divv = 0 qui traduit l’incompressibilité de l’écoulement. Ces deux équations et les
C.A.L permettent de trouver l’expression donnée du champ de vitesse. Ce dernier est
indépendant de la prise en compte ou non de la pesanteur. En revanche, la pesanteur
→ G
est négligée dans l’expression de la pression donnée, qui vérifie donc grad p = η∆v .
→
La linéarité de l’opérateur grad permet d’écrire la pression, lorsque la
pesanteur n’est plus négligée, sous la forme :
3u ηR
p( r , θ) = phydrostatique ( r , θ) − cos θ , où phydrostatique = p0 + ρgZ est le champ de
2r 2
→ G
pression du fluide à l’équilibre, vérifiant grad phydrostatique = ρg , l’axe OZ étant vertical
descendant. La prise en compte de la pesanteur revient donc à ajouter la poussée
d’Archimède à la traînée.

On calcule à partir de ces champs la force de traînée :


G G G
Ft = −6 πR ηu , appelée force de Stokes, force linéaire en u .

Cette force est due à la résultante des actions de pression, non nulle puisque
la pression est plus forte en amont qu’en aval, et aux forces visqueuses qui entraînent
la sphère dans le sens de l’écoulement. La sphère est en outre soumise à la poussée
d’Archimède si on prend en compte la pesanteur.
On obtient grâce à une simulation numérique les lignes de courant suivantes :

433
434 Partie V.  Mécanique

→ G G G
Dans ce domaine, le champ de vitesse est régi par rot ( ∆v ) = 0 et divv = 0 .
G G
Ainsi, si le champ v (M ) est solution de ce système d’équations, le champ −v (M ) en
est aussi une solution. Or cette deuxième solution correspond à l’écoulement inversé
dans le temps par rapport à la première.
G
Dans le cas de l’écoulement laminaire autour de la sphère, soit v + (M ) la
vitesse en un point M lorsque l’écoulement se fait de gauche à droite. Au point M ′
symétrique de M par rapport au plan xOy qui est un plan de symétrie de la sphère, la
G
vitesse v − (M ′) lorsque l’écoulement se fait de droite à gauche est symétrique de
G
v + (M ) par rapport à xOy (c’est la même situation physique que le fluide arrive de la
droite ou de la gauche).
L’écoulement étant réversible, si on change le sens de l’écoulement, la vitesse
G G
en M ′ est changée en son opposé : v + (M ′) = −v − (M ′) .
Le champ des vitesses en donc antisymétrique par rapport à xOy (la vitesse en
G
M ′ symétrique de M est l’opposée du symétrique de v (M ) ) : les lignes de courant sont
symétriques par rapport à xOy.

La réversibilité des écoulements stationnaires (ou quasi-stationnaires) à faible


nombre de Reynolds peut également être mise en évidence grâce à une expérience
classique où l’on place du miel entre deux cylindres coaxiaux. Le cylindre extérieur
peut tourner autour de son axe, et entraîner le miel en rotation du fait de la viscosité
(c’est un écoulement de Couette).
Si on tourne lentement (écoulement quasi-stationnaire), un trait d’encre déposé
dans le miel se déforme progressivement, puis reprend la forme initiale quand on
tourne lentement dans l’autre sens.

434
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 435

— Domaine B : Re > 2000 , l’écoulement est turbulent dans le sillage.

Les tourbillons dus au cisaillement dans la couche limite sont transportés dans
le sillage, où l’écoulement est instationnaire et subit de grandes fluctuations spatiales

et temporelles : v (M, t ) varie fortement d’un point à un autre et d’un instant à l’autre.
Cet écoulement est imprédictible car il y a une
grande sensibilité aux conditions initiales : si deux parti-
cules initialement très proches, sont transportées dans
le sillage, leurs trajectoires vont devenir très différentes
comme on le voit sur la figure ci-contre.
La turbulence a d’ailleurs pour effet positif de brasser les particules fluides et
joue un rôle fondamental dans la dispersion des polluants, et dans les mélanges.
Dans un grand domaine de Re allant de 2000 à 200 000, le Cx reste pratique-
� 1
ment constant : C x ≃ 0,4 . La traînée Ft = ρS Cx u 2 est alors quadratique en u.
2
La couche limite décolle pour un angle α : à partir de cet angle apparaît une
zone de recirculation dans laquelle le champ de vitesse change de sens (le fluide « re-
brousse chemin »).

435
436 Partie V.  Mécanique

Après le décollement, on ne parle plus de couche limite mais il y a encore une


frontière entre le sillage, siège de forts gradients de vitesse, et le reste de l’écoulement
qui peut être considéré comme parfait car très peu cisaillé.

La courbe C x = f (Re ) en échelle log-log est donnée ci-après.


� 2ρuR 2ρuR
— Dans le domaine A ( Re < 1 ), on a Ft = 6πR ηu , avec Re = η= ,
η Re
� 1 24 2 24
d’où Ft = ρ π�R2 u  Cx = .
2 S Re Re
On en déduit logC x = Cte − log Re : en échelle log-log, la courbe est une droite
de pente −1.
— Dans le domaine B ( 2000 < Re < 2 ⋅ 105 ), on a C x ≃ 0,4 .
— On a une zone de transition entre le domaine A et le domaine B, où Cx décroît
moins fortement avec Re que dans la zone A.

436
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 437

On peut à l’aide de cette courbe chercher le sens de variation de la traînée avec


la vitesse u pour une sphère de rayon donné (D fixé) dans un fluide donné (ρ et η
G
fixés). Le cas où Ft ∝ C x (u )u 2 ne varie pas quand u ∝ Re varie, est celui où :

Cx (Re) ⋅ Re2 = Cte , soit logCx = Cte − 2log Re . Il correspond à une pente de −2 en
G
échelle log-log. Pour que Ft décroisse avec u, il faut donc que la pente de la courbe

logCx = f (log Re ) soit inférieure à −2 .


Ceci ne se produit pas, et la traînée augmente avec la vitesse, sauf pour de très
grands nombres de Reynolds (vers Re = 3 ⋅ 105 ) où se produit une crise de traînée.
L’étude expérimentale montre que cette crise est provoquée par une transition
dans la couche limite qui passe de laminaire à turbulente (seule une sous-couche
d’épaisseur extrêmement faible près de la paroi reste laminaire). Une conséquence
est que la couche limite décolle plus en aval et que le sillage est réduit. Comme la
dissipation d’énergie est essentiellement due aux tourbillons dans le sillage, un sillage
réduit implique une traînée qui diminue. Cette transition peut être obtenue à des Re
plus faibles en introduisant des aspérités sur la sphère :

Si les balles de golf étaient lisses, le nombre de Reynolds atteint lors d’un
« drive » ne suffirait pas pour atteindre la crise de traînée, alors que la présence d’al-
véoles permet d’obtenir cette crise pour des Re plus petits : une balle de golf alvéolée
va plus loin qu’une balle lisse de mêmes rayon et poids, lancée de façon identique.

On constate bien sur la courbe ci-dessus que la crise de traînée est avancée
quand la rugosité relative ε / D (écart-type des variations de rayon ∆r dues aux

437
438 Partie V.  Mécanique

aspérités, ramené au diamètre D de la sphère) augmente, ce qui permet d’obtenir à


même Re une traînée plus faible avec aspérités que sans aspérités. Pour des Re en-
core plus grands, le Cx redevient plus faible pour la sphère lisse.

3.4 Écoulement autour d’autres corps


Les résultats vus pour la sphère sont généralisables à d’autres corps dits « pro-
filés », c’est-à-dire arrondis (sans arêtes vives), comme le cylindre. Voici quelques
photographies commentées d’écoulements autour d’un cylindre :

On retrouve une zone A (écoulement de Stokes), une transition vers la zone B


où C x ≃ Cte , puis une crise de traînée.
La plupart des véhicules, édifices, etc. ne sont pas profilés. Ils présentent des
arêtes vives qui provoquent le décollement de la couche limite et on n’observe pas de
crise de traînée. Dans le cas d’un véhicule, on cherche même à l’éviter : la partie avant
est bien profilée ; des lignes de décollement la séparent de la partie arrière.

438
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 439

Le Cx des voitures, avions, etc. est quasiment constant dans les conditions où
nous les utilisons (domaine B). On peut donner quelques ordres de grandeur du Cx
de certains corps dans ce domaine où Re > 2000 :

Dans le cas d’une voiture, une diminution du Cx de 0,01 est appréciable en


matière d’économie d’énergie…

3.5 Écoulement autour d’une aile d’avion / Portance

G
L’aile est comprise entre deux plans orthogonaux à la vitesse u de l’avion par
rapport à l’air. Ces plans touchent l’aile en un point A en amont de l’écoulement d’air
par rapport à l’avion, appelé bord d’attaque, et en un point F en aval, appelé bord de
fuite.
La corde est la droite reliant A et F ; l’angle d’attaque (ou d’incidence) i, orienté,
G →
est l’angle (u, FA ) . On appelle extrados la surface supérieure de l’aile entre A et F ;
intrados la surface inférieure.
En réalité, l’aile n’est pas cylindrique : la corde diminue lorsqu’on se rapproche
du bout de l’aile. La longueur moyenne L de la corde est définie par la relation :
S = L ⋅ H , où S est la surface alaire (surface de l’aile vue de dessus) et H l’envergure
de l’aile (distance entre le fuselage et le bout de l’aile).
Pour définir les coefficients Cx et Cz dans le cas d’une aile d’avion, la surface
utilisée dans les expressions de la traînée est la surface alaire (qui est invariante) et
pas le maître-couple, qui lui varie avec l’incidence.
L’aile d’avion est bien mieux profilée que le cylindre : lorsqu’elle est peu inclinée,
la couche limite ne décolle que très près du bord de fuite. Le sillage est restreint, ce

439
440 Partie V.  Mécanique

qui limite la traînée. Lorsque l’incidence augmente (pendant les phases de décollage
et d’atterrissage), la traînée augmente, ainsi que la portance.

Cependant, pour une incidence critique (de 16° à 20°), la couche limite décolle
près du bord d’attaque, ce qui provoque une chute importance de la portance. On parle
de décrochage. L’allure des courbes C x = f (i ) et Cz = f (i ) est la suivante :

La portance n’est pratiquement due qu’à la différence de pression entre l’intra-


dos et l’extrados. Dans la couche limite laminaire de l’aile, l’écoulement est tangent à
l’aile, et localement parallèle. Nous avons vu au paragraphe 1.4 que dans ce cas, la
pression dans la direction normale à l’aile varie selon les lois de la statique.
Comme l’épaisseur de couche limite est très
faible, la différence de pression due à la pesanteur est
négligeable : la pression est la même au point A′ de
l’écoulement parfait qu’en son projeté orthogonal A sur
l’aile. Un modèle de fluide parfait qui tient compte des
conditions aux limites dues à la présence de la couche limite peut permettre de calculer
la portance.

3.6 Décollage et commande d’un avion / Finesse et polaire d’Eiffel 


Nous allons illustrer les notions de traînée et
de portance sur le cas d’un Airbus A380.
Calculons sa vitesse au décollage au niveau
de la mer, à une température de 20°C, pour une
masse de m = 425 tonnes , une surface alaire totale
S = 845 m2 et un coefficient de portance Cz = 1,38 . La portance doit devenir plus

440
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 441

1 2mg
grande que le poids : ρS Czu 2 ≥ mg  u ≥ . On calcule la masse volu-
2 ρ S Cz
Mp0 29,0 ⋅ 10 −3 × 1,013 ⋅ 105
mique ρ = = = 1,21 kg ⋅ m-3 de l’air grâce à la loi des gaz
RT 8,314 × 293
parfaits.
2mg
Le décollage a lieu pour u ≥ = udéc = 277 km ⋅ h-1 . Cette vitesse est at-
ρS Cz
teinte grâce à la poussée Π = 1200 kN des réacteurs.

Estimons la longueur de piste nécessaire pour atteindre udéc en supposant la


poussée constante et C x = 0,330 .
Le principe fondamental de la dynamique appliqué à l’avion dans le référentiel

du � 1 �
terrestre donne : m = Π − ρS Cxuu (La réaction normale et la portance compen-
dt 2
sent le poids lors du roulement sur la piste, et on néglige les frottements avec le sol).
On obtient en projetant sur l’axe Ox du mouvement du centre d’inertie de l’avion :
du Π 1 ρSCx 2 du
= − u = a − bu 2  = dt , qui s’intègre en :
dt m 2 m  2
a 1 − b / a u 
 
( )
1 a 1 + b / a u 
ln   = t + Cte . La constante est nulle car u = 0 à t = 0 . On en déduit
2a b  1 − b / a u 

e2 ab t
−1 Π 1 ρS C x
u = ulim . On calcule a = = 2,82 m ⋅ s-2 , b = = 3,97 ⋅ 10 −4 m-1 ,
e 2 ab t
+1 m 2 m

et finalement ulim = a / b = 304 km ⋅ h-1 .


L’avion atteint donc la vitesse de décollage en une durée :
1  1 + udéc / ulim 
τ= ln   = 45,9 s . En intégrant de nouveau on obtient la distance
2 ab  1 − udéc / ulim 

e ab t
− e− ab t
1 e ab t
+ e− ab t 
parcourue : xɺ = u = ulim x= ln   . On en déduit la
e ab t
+ e− ab t b  2 

1  e ab τ + e − ab τ 
distance parcourue au moment du décollage : D = ln   = 2240 m .
b  2 

On peut déduire de ces relations l’influence de la masse volumique de l’air sur
la longueur D de la piste. a est indépendant de ρ ; b ∝ ρ ; udéc ∝ ρ−1/2 et ulim ∝ ρ−1/2
donc τ ∝ ρ−1/ 2 . On a alors ab τ indépendant de ρ et D ∝ ρ−1 .
À température identique, ρ ∝ p( z ) . En prenant p( z ) = p0e − z / H , on a D ∝ e z / H :
les pistes des aéroports situés à haute altitude doivent être plus longues qu’au niveau

441
442 Partie V.  Mécanique

de la mer. En prenant H = 8500 m on trouve un rapport D / D0 = ez / H = 1,3 entre les


longueurs de piste D à Mexico (altitude 2250 m) et D0 au niveau de la mer.
L’influence de la température est moindre : ρ( z = 0) ∝ T −1 donc D ∝ T . Plus il
fait chaud, plus la piste doit être longue. On a entre un pays chaud (température de
30°C) et un pays tempéré (15°C) un rapport de longueurs de piste de 1,05.
Le décollage se fait face aux vents dominants car c’est la vitesse relative par
rapport à l’air qui intervient dans la portance. Lorsque la vitesse de décollage est at-
teinte, le pilote actionne la gouverne de profondeur, ce qui provoque la rotation de
l’avion (le nez s’élève). L’angle d’incidence du vent relatif augmente alors et la portance
est accrue.
Les autres gouvernes permettent à l’avion de prendre un virage sans tourner
autour d’un axe vertical.

En effet, on tourne à droite en abaissant l’aileron gauche et en levant l’aileron


droit, ce qui augmente la portance à gauche et la diminue à droite.
La traînée augmentant avec la portance, cette manœuvre a aussi pour effet de
faire tourner l’avion autour d’un axe vertical, dans le sens opposé au virage (le nez de
l’avion part à gauche : lacet inverse). Il faut corriger cela en tournant la gouverne de
direction vers la droite.

Des éléments hypersustentateurs (becs au bord d’attaque des ailes, ou volets


au bord de fuite) peuvent être orientés vers le bas pour augmenter la portance au
décollage bien sûr mais aussi à l’atterrissage, qui doit se produire à vitesse réduite.

442
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 443

Cz
La finesse est définie comme le rapport F = , pour l’avion comme pour une
Cx
aile seule.

1,38
On a pour l’Airbus A380 au décollage F = = 4,2 . La finesse dépend du
0,330
nombre de Reynolds et de l’incidence du vent sur l’avion. Sa valeur maximale est de
22 pour l’A380.
Considérons un vol « plané » (moteurs coupés) : l’avion perd de l’altitude.

G G
On utilise la base de projection ( ex , ez ) définie sur le schéma ci-dessus. Le
G
du G 1 G 1 G
théorème du centre d’inertie fournit m = mg − ρS Cxu 2ex − ρS Czu 2ez .
dt 2 2
En effet, la traînée s’oppose à la vitesse, et est portée par le même axe Ox que
cette dernière, alors que la portance est orthogonale à la vitesse et est portée par Oz.
du 1
En projection sur Ox : m = mg cos α − ρS Cxu 2 .
dt 2
Après un court régime transitoire, l’avion atteint une vitesse limite :
2mg cos α
u= qui va diminuer lentement lors de la descente (car ρ augmente). On
ρS C x
1 1
a alors mg cos α = ρS Cxu 2 , et, en projection sur Oz : mg sin α = ρS Czu 2 .
2 2
C L
En faisant le rapport de ces deux relations, on obtient F = z = tan α = .
Cx ∆h
Le rapport entre la distance horizontale parcourue L et la perte d’altitude ∆h
augmente avec la finesse.

443
444 Partie V.  Mécanique

Avec F = 22 , l’Airbus A380 peut avancer, moteurs coupés, de 220 km s’il se


trouve initialement à une altitude de 10 km.
La polaire d’Eiffel d’un avion est le diagramme paramétrique donnant Cz en
fonction de Cx pour différentes incidences i du vent relatif sur l’avion. Sur l’exemple
ci-avant, le décrochage a lieu au point B correspondant à i = 18° .
C 
α = arctan  z  est l’angle entre l’axe des Cx et la droite passant par l’origine
 Cx 
O et le point M de la polaire. Il est maximal quand (OM) est tangente à la polaire : c’est
au point A que la finesse est maximale.

4. ÉCOULEMENT INTERNE STATIONNAIRE


INCOMPRESSIBLE DANS UNE CONDUITE
CIRCULAIRE
4.1 Les différents régimes
ρu D
Tant que Re = < 2000 , l’écoulement dans la conduite est un écoulement
η
laminaire parallèle, dont nous allons montrer qu’il possède un profil parabolique :

Pour Re > 2000 , l’écoulement parallèle devient instable : lorsqu’elles s’écartent


de leur trajectoire parallèle à l’axe, les particules ne la retrouvent plus. L’écoulement
devient très sensible à la rugosité des parois :

Pour Re > 3000 , l’écoulement est turbulent, mais en effectuant des moyennes
G G
temporelles, on obtient un champ de vitesses v = v z ez porté par l’axe de l’écoule-
ment. Le profil est plat : l’écoulement moyen est quasiment uniforme, sauf très près
des parois, où la vitesse s’annule par adhérence. L’écoulement n’est pas parfait car la
turbulence dissipe de l’énergie, mais c’est surtout près des parois que cette dissipation
a lieu :

444
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 445

4.2 Écoulement laminaire / Loi de Poiseuille

Prenons l’exemple de l’écoulement d’eau à une vitesse débitante u = 0,1 m ⋅ s-1


uD 10 −1 × 10−2
dans une conduite de diamètre D = 1 cm . On a Re = ≃ −6
= 103 . L’écou-
ν eau 10
lement est laminaire, parallèle à l’axe Oz de la conduite.

Accélération des particules fluides


Avant de déterminer le champ de vitesse et de pression, nous allons établir
l’expression de l’accélération d’une particule fluide dans un écoulement incompres-
sible, parallèle, stationnaire ou non. Pour un tel écoulement, l’incompressibilité en-
� ∂v z
traîne que divv = 0 , soit = 0.
∂z
On en déduit que l’accélération convective est nulle :
� � � �
� → � ∂v � dv ∂v � → � ∂v
(v ⋅ grad)v = v z z ez = 0  = + (v ⋅ grad)v = .
∂z dt ∂t ∂t

Dans le cas d’un écoulement parallèle incompressible et stationnaire, l’accélé-



dv �
ration des particules fluides est donc nulle : = 0.
dt

→ � �
L’écoulement est alors régi par l’équation de Stokes grad p = ρg + η∆v .
� → �
L’absence du terme de convection (v ⋅ grad)v n’est pas ici due à l’approxima-
tion Re < 1 (convection dominée par la viscosité), mais au fait que ce terme est nul

pour un écoulement parallèle selon ez , incompressible, et donc pour lequel v z est
indépendant de z. En revanche, Re ne doit pas dépasser 2000 car un tel écoulement
parallèle devient alors instable.

Détermination du champ de vitesse et de pression


� �
Dans le cas de la conduite circulaire, v = v z (r , θ, z, t ) ez , en utilisant les coordon-
nées cylindriques pour repérer un point. L’écoulement est :
� � �
— Stationnaire donc v est indépendant du temps : v = v z (r , θ, z ) ez .
� ∂v � �
— Incompressible : divv = 0  z = 0 donc v = v z (r , θ) ez .
∂z

445
446 Partie V.  Mécanique

� �
— Invariant par toute rotation autour de l’axe Oz de la conduite : v = v z (r )ez .

Supposons la conduite horizontale. Le champ de pression orthogonal à l’écou-


lement est le champ statique dû au poids, et est quasi-uniforme pour une conduite de
faible diamètre. On néglige désormais les actions de pesanteur (elles seraient en re-
vanche à prendre en compte pour une conduite inclinée par rapport à l’horizontale).
∂v z dv z
D’autre part, v z ne dépendant que de r, on peut noter = , et l’expres-
∂r dr
� � � 1 d  dv z  �
sion du laplacien de v = v z (r )ez est ∆v = r ez . L’écoulement est régi par
r dr  dr 

→ η d  dv z  �
l’équation grad p = r dr  ez .
r dr  
 ∂p
=0
� �  ∂r
En projetant cette équation sur er et eθ , on obtient  . La pression p ne
 1 ∂p = 0
 r ∂θ
dépend donc que de z. On la note p(z).
� d p η d  dv z 
La projection sur ez fournit = r .
dz r dr  dr 
� ��
���� �
F (z) G( r )

Soit l’équation F ( z ) = G(r ) ∀( z, r ) , couple de variables indépendantes. La fonc-


tion z ֏ F ( z ) ne dépend que de z et la fonction r ֏ G(r ) ne dépend que de r.
On doit donc avoir, par exemple, pour tout z : F ( z ) = G(r = 0) = Cte . On en dé-
duit que ces fonctions sont constantes, égales à une seule et même constante A :
F ( z ) = G(r ) = A ∀( z, r ) .

dp
On a donc = Cte = A , qui s’intègre en p( z ) = A z + B . La pression est une
dz
fonction affine de z.

Pour une conduite de longueur L, en notant


p( z = 0) = p1 et p( z = L ) = p2 , la loi de pression est
z
p( z ) = ( p2 − p1) + p1 .
L

On appelle perte de charge la différence de pression ∆p = p1 − p2 entre l’entrée


et la sortie de la conduite. La pression le long de la conduite est une fonction affine de
∆p
z qui s’écrit p( z ) = − z + p1 .
L

446
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 447

η d  dv z  ∆p
On peut maintenant déterminer v z (r ) , qui vérifie r dr  = A = − L .
r dr  
d  dv z  ∆p dv z ∆p 2 dv z ∆p C
dr r dr  = − ηL r  r dr = − 2ηL r + C , puis dr = − 2ηL r + r , qui s’intègre en :
 
∆p 2
vz = − r + C ⋅ ln r + Cte . La vitesse étant finie sur l’axe Oz, on a C = 0 , d’où :
4ηL
∆p 2
vz = − r + Cte . Le fluide adhère à la paroi, donc la condition aux limites est :
4η L
v z (r = R ) = 0 . On en déduit :

∆p 2
v z (r ) = (R − r 2 ) pour 0 ≤ r ≤ R . Le profil de vitesse d’un écoulement laminaire
4ηL
est parabolique.
Comme v z est positif, ∆p l’est aussi : la pression décroît le long d’un écoule-
ment visqueux.

Il faut une pompe pour maintenir un écoulement stationnaire dans une conduite
horizontale.
R2
La vitesse est maximale sur l’axe : vmax = v z (r = 0) = ∆p .
4ηL
Le calcul du vecteur tourbillon :
G 1 → G 1 dv z G ∆p G G
ω= rot v = − eθ = + r eθ = ω (r )eθ , montre
2 2 dr 4ηL
que l’écoulement est tourbillonnaire, avec un vecteur
tourbillon non uniforme.
La rotation des particules fluides augmente avec
leur distance à l’axe Oz, et se fait dans le sens positif.
À cette rotation s’ajoute une déformation.

Débit volumique / loi de Poiseuille


Calculons maintenant le débit volumique qv à travers la conduite :
G 2π R R
G G G
qv =  v ⋅ d2 S =  v z (r )ez ⋅ d2 S ez =   v z (r )r dr dθ =  v z (r )2πr dr , soit :
S S θ= 0 r = 0 r =0

π∆p  2 R 2 R 4  πR 4 ∆p
R
∆p
qv =  4 ηL
(R 2 − r 2 )2πrdr = R ⋅
2ηL  2
− =
4  8 ηL
.
r =0

πR 4
La relation qv = ∆p , qui régit les écoulements stationnaires laminaires
8ηL
dans une conduite circulaire, est appelée loi de Poiseuille.

447
448 Partie V.  Mécanique

Elle trouve des applications dans les écoulements de liquides à l’intérieur de


tubes fins, donc en micro-fluidique, dans les modèles grossiers d’écoulement sanguins
(le sang n’est pas un fluide newtonien), etc.
Elle est analogue à la loi d’Ohm ∆V = V1 − V2 = Rélec ⋅ I1→ 2 pour un conducteur
électrique soumis à une différence de potentiel V1 − V2 . Précisons les analogies :

G G
 J ⋅ d S
conducteur 2
∆V = V1 − V2 I1→2 = ∆V = Rélec ⋅ I1→ 2
électrique S
G G
 v ⋅ d S
écoulement 2
∆p = p1 − p2 qv 1→2 = ∆p = Rhyd ⋅ q v 1→ 2
en conduite S

Rhyd est appelée résistance hydraulique. Plus elle est grande, plus il faut une
grande différence de pression pour obtenir un débit volumique donné.
On peut comparer la résistance électrique d’un
conducteur de conductivité γ, de rayon R et de longueur
L
L, Rélec = à la résistance hydraulique d’une con-
γπR 2
8ηL
duite de mêmes rayon et longueur, Rhyd = .
πR 4
Les deux résistances sont proportionnelles à la
longueur L. La viscosité η joue le même rôle que la ré-
sistivité 1/ γ .
On note cependant que le rayon R influe plus sur l’écoulement de fluide que sur
l’écoulement de charges (puissance 4 au lieu de 2). Par exemple, avec un rayon 2 fois
plus petit, la résistance hydraulique est multipliée par 16, au lieu de 4 pour la résistance
électrique. Faire s’écouler un fluide dans une conduite très fine demande de grandes
différences de pression. Cette différence est due à la condition d’adhérence à la paroi
(vitesse normale et tangentielle nulle sur la paroi) pour l’écoulement d’un fluide vis-
queux, sans équivalent pour le conducteur électrique, où seule la composante normale
de la vitesse s’annule sur la surface latérale.
πR 4
La vitesse débitante u est définie par qv = u πR 2 = ∆p . Son calcul donne
8ηL
R2 v
u= ∆p = max .
8ηL 2

Puissance
Terminons notre étude par un bilan de puissance. Pour cela, appliquons entre t
et t + dt le théorème de l’énergie cinétique à une particule fluide dans le référentiel du
laboratoire, galiléen : dEc = δWp + δWv . δWp et δWv sont respectivement les travaux
des forces de pression et de viscosité, extérieures et intérieures à la particule fluide.

448
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 449

Il faut en effet prendre en compte le travail des actions visqueuses intérieures.


Pour le montrer, considérons un système constitué par deux particules fluides (1) et
(2) qui « frottent » l’une sur l’autre, comme celles de la figure ci-dessous :
G G G G G G G
d2F2/1 ⋅ v1dt + d2F1/2 ⋅ v 2dt = d2F2/1 ⋅ (v1 − v 2 )dt est non nul car les deux particules ont
une vitesse différente en raison du cisaillement.

Le travail des actions de pression intérieures au système constitué par deux


G
particules fluides (1) et (2) ne peut être non nul que si ces forces sont portées par ez ,
donc pour deux particules comme celles de la figure ci-dessus. On a alors :
G G G G G G G G
d2F2/1 ⋅ v1dt + d2F1/2 ⋅ v 2dt = d2F2/1 ⋅ (v1 − v 2 )dt = 0 car les deux particules considérées
ont la même vitesse, l’écoulement étant incompressible.

Le travail des forces de pression intérieures est nul pour un écoulement incom-
pressible.

La particule se déplaçant à vitesse constante, dEc = 0  δWp + δWv = 0 , soit


en divisant par dt : Pp + Pv = 0 . La puissance des actions de pression compense la
puissance perdue par viscosité.
La particule fluide étudiée possède en fait un volume d3V : on note d3Pp la
puissance des actions extérieures de pression. Cette puissance est nulle sur les faces
où la vitesse est normale aux forces de pression, non nulle sur les surfaces qui se
trouvent dans les plans z et z + dz .

G G G G dp
On a d3Pp = d2Fp ( z ) ⋅ v z (r )ez − d2Fp ( z + dz ) ⋅ v z (r )ez = − v z (r )r dr dθ dz ,
 G  G dz
p( z )r dr dθez p( z + dz )r dr dθez

449
450 Partie V.  Mécanique

∆p
soit d3Pp = v z (r )r dr dθ dz .
L
La puissance des forces de pression sur tout le fluide contenu dans la conduite
R R
∆p
de longueur L vaut Pp =  L
v z (r )r dr 2πL = ∆p  v z (r )2πr dr .
r =0 =0
r
qv

La puissance des forces de pression, donc de la pompe qui permet l’écoulement


stationnaire en compensant les pertes par viscosité, vaut Pp = ∆p ⋅ qv = Rhyd ⋅ qv 2 .

Elle est analogue à la puissance P = Rélec ⋅ I 2 reçue par un conducteur ohmique


(et intégralement dissipée par effet Joule en régime stationnaire).

Cas de l’écoulement entre deux plaques parallèles


Revenons pour finir sur l’écoulement de Couette décrit au 1.1. Le champ de
G G
vitesse est de la forme v = v x ( y ) ex et l’application du P.F.D à une particule fluide
→ G ∂ 2v G
aboutit à grad p = −ρgey + η 2x ex en supposant que les plaques sont horizontales.
∂y
On retrouve la loi de l’hydrostatique p( x, y ) = f ( x ) − ρgy en intégrant la projec-
G G df d2v x
tion sur ey . La projection sur ex fournit alors =η = Cte puisque le membre
dx dy 2
de gauche ne dépend que de x, et celui de droite que de y.
Supposons Cte = 0 , c’est-à-dire qu’on n’applique pas de gradient de pression
u
dans la direction de l’écoulement (pas de pompe). On a alors v x ( y ) = Ay + B = y
h
v (0) = 0
conformément aux mesures, puisque les C.A.L sont  x (adhérence aux
v x (h ) = u
plaques).

Contrairement à un écoulement de Poiseuille où le « moteur » de l’écoulement


est un gradient de pression longitudinal (pompe, tuyau incliné par rapport à l’horizon-
tale), un tel gradient n’est pas nécessaire dans un écoulement de Couette dont le mo-
teur est le déplacement d’une paroi. On peut bien sûr déplacer la plaque en y = h et
∂p ∆p
appliquer un tel gradient : =− = Cte . L’écoulement sera alors de type Couette-
∂x L
Poiseuille, avec un profil parabolique dissymétrique par rapport au plan médiateur
y = h / 2 des deux plaques :
d2v x ∆p ∆p 2  ∆p u
η 2
=−  v x (y ) = − y + h+ y .
dy L 2ηL  2ηL h

450
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 451

4.3 Complément : régime quelconque, diagramme de Moody


Quel que soit le régime, la perte de charge est pro-
portionnelle à la longueur L de la conduite. On parle de perte
de charge régulière, par opposition à une perte de charge
singulière provoquée par exemple par la présence, en un
point de l’installation, d’un coude, d’un raccord entre deux tubes de sections diffé-
∆p
rentes… L’expérience montre que la perte de charge linéique dépend du diamètre
L
D = 2R , de la vitesse débitante u, de la masse volumique du fluide ρ, de sa viscosité
dynamique η et aussi de la rugosité ε de la conduite.

Si la conduite était parfaitement lisse, tous les points de sa surface intérieure se


trouveraient à une distance r = R de son axe. En réalité, cette distance varie à cause
de dépôts, de la corrosion, des irrégularités du matériau dont est faite la conduite : un
point de la surface intérieure se trouve à une distance r = R + ∆r de l’axe. L’écart-type
de la distribution des ∆r sur tous les points de la surface intérieure est par définition
la rugosité.
 ∆p 
Il existe donc une relation de la forme f  , D, ε, u, ρ, η  = 0 .
 L 
∆p
À partir des 6 grandeurs , D, ε, u, ρ et η qui ne font intervenir que 3 dimen-
L
sions, M, L et T, on ne peut former que 6 − 3 = 3 nombres sans dimension indépen-
α
 ∆p  β1 β2 γ δ λ
dants de la forme N ∗ =   D ε u ρ η .
 L 
Une analyse dimensionnelle, analogue à celle effectuée au 3.2, montre qu’on
peut choisir les trois nombres sans dimension suivants :

451
452 Partie V.  Mécanique

ρu D
— Nombre de Reynolds Re = .
η
ε
— Rugosité relative .
D
∆p / L
— Coefficient de perte de charge linéique λ = .
1 2
ρu / D
2

 ∆p 
Puisqu’il existe une relation f  , D, ε, u, ρ, η  = 0 , les trois nombres sans di-
 L 
ε  ε
mension Re, et λ sont liés : λ = f  Re,  . On peut donc tracer, en échelle log-log,
D  D 
un réseau de courbes, donnant le coefficient de perte de charge linéique λ en fonction
de Re, pour différentes rugosités relatives (diagramme de Moody).
Le tracé des courbes en régime turbulent est basé sur la formule empirique
(obtenue à partir des résultats expérimentaux) de Colebrook :
 ε 
1  D 2,51  ε
= −2,0log  +  , qui relie Re, et λ.
λ  3,7 Re λ  D
 

— Dans le domaine A, pour lequel Re < 2000 , le régime est laminaire.


La perte de charge linéique est donc donnée par la loi de Poiseuille :

452
Chapitre 5.  Dynamique des fluide 453

∆p 8η 2ρuR 2ρuR
= qv , avec Re = η= , et qv = πR 2u . On a donc :
L πR 4 η Re
∆p 8 2ρuR 2 16 ρu 2
= πR u = .
L πR 4 Re Re R
∆p 1 1
Comme, par définition, = λ ρu 2 . On identifie :
L 2 2R
64
λ= , soit log λ = Cte − log Re . En échelle log-log, la loi de Poiseuille se traduit donc
Re
par une droite de pente −1.
En régime laminaire, la rugosité, dominée par la viscosité, ne joue aucun rôle.
Une aspérité sur la surface intérieure de la conduite ne déstabilise par l’écoulement
parallèle.
— En revanche, dans le domaine de transition ( 2000 < Re < 3000 ), la sensibilité aux
aspérités sur les parois et aux conditions initiales est si importante que la perte de
charge linéique n’est pas la même d’une conduite à l’autre, pourtant de même diamètre
et de même rugosité, ou d’une expérience à l’autre sur la même conduite.

— Dans le domaine B, pour lequel Re > 3000 , le régime est turbulent.


λ décroît avec Re pour une rugosité relative donnée, mais pour Re suffisam-
ment grand, λ ne dépend plus que de la rugosité (zone grisée dans le diagramme).
À Re fixé, λ est minimal pour une conduite lisse, et augmente bien sûr avec la
rugosité.
Si seule la vitesse (ou le débit volumique) d’un fluide donné (ρ et η fixés) varie,
le diamètre et la rugosité de la conduite étant fixés, la perte de charge linéique :
∆p 1 1
= λ ρu 2 ∝ λ(u )u 2 ne varie pas quand u , qui est proportionnel à Re, varie, si :
L 2 D
λ(Re ) ⋅ Re 2 = Cte  log λ = Cte − 2log Re , soit pour une pente égale à −2 en échelle
log-log.
Pour que ∆p / L décroisse avec u, il faudrait donc que la pente de la courbe
log λ = f (log Re ) soit inférieure à −2 , ce qui ne se produit jamais :

La perte de charge linéique augmente toujours avec le débit.

Donnons un exemple d’utilisation : un tube de cuivre, utilisé pour une installation


de chauffage central, présente un diamètre intérieur D = 1 cm et une rugosité relative
ε
= 5 ⋅ 10 −3 .
D
Afin de calculer la perte de charge linéique pour un débit qv = 7,8 ⋅ 10−5 m3 ⋅ s-1
4qv
d’eau, on commence par calculer la vitesse débitante u = 2
= 0,99 m ⋅ s-1 , puis le
πD

453
454 Partie V.  Mécanique

uD
nombre de Reynolds Re = ≃ 104 .
ν eau
ε
On lit alors sur le diagramme λ = 0,039 pour = 5 ⋅ 10 −3 et Re = 10 4 .
D
∆p 1 1
On a donc = λ ρu 2 = 1900 Pa ⋅ m-1 = 0,019 bar ⋅ m-1 .
L 2 D
Pour une pression d’entrée de plusieurs bars, la perte de charge reste faible
pour une longueur de quelques mètres, et l’écoulement peut être considéré comme
parfait.
Malheureusement, les coudes, nécessaires pour obtenir un circuit fermé, pro-
duisent des pertes de charge bien supérieures.
En ajoutant les pertes régulières et singulières, on peut calculer la puissance
minimale de la pompe nécessaire au fonctionnement de l’installation.

454
455

[MÉCANIQUE 6]

ÉCOULEMENTS PARFAITS
1. MODÈLE DU FLUIDE PARFAIT / THÉORÈME DE
BERNOULLI ET APPLICATIONS
1.1 Modèle du fluide parfait
Le fluide parfait n’a pas de viscosité : η = 0 . Il en résulte que les particules
fluides subissent, en l’absence de frottements, une transformation réversible.

L’absence de viscosité est synonyme d’absence de phénomène de diffusion de


quantité de mouvement. Plus généralement, il n’y a aucun phénomène diffusif dans
un fluide parfait. Les transferts thermiques étant des phénomènes de diffusion d’éner-
gie cinétique, il n’y a pas non plus de transferts thermiques dans un fluide parfait.

Dans un fluide parfait, les particules subissent une transformation adiabatique


et réversible, c’est-à-dire isentropique.

Le modèle de fluide parfait est donc un modèle fort : un gaz parfait (dans lequel
il n’y a pas d’interactions entre les molécules) peut ne pas être un fluide parfait ! Il
possède alors une viscosité non nulle et est le siège de transferts thermiques.
Rappelons que le modèle de fluide parfait est acceptable, à grand nombre de
Reynolds :
— Pour un écoulement externe, sauf dans la couche limite et le sillage.
— Pour un écoulement interne de faible longueur (on peut alors négliger les pertes de
charge régulières), sans pertes de charge singulières.
En conséquence, on parle d’écoulement parfait pour décrire un écoulement, ou
une partie de l’écoulement, dans lequel un fluide réel se comporte comme un fluide
parfait.

1.2 Équation d’Euler


Pour un écoulement parfait, l’équation de Navier-Stokes devient celle d’Euler :
G G
dv  ∂v G → G  G →
ρ = ρ  + (v ⋅ grad)v  = ρg − grad p . Cette équation ne faisant plus apparaître le
dt  ∂t 
G
terme η∆v , qui est la force visqueuse volumique pour un écoulement incompressible,
elle reste valable pour un écoulement compressible.
Pour un écoulement incompressible et homogène (cette dernière hypothèse est
nécessaire pour que la masse volumique ne dépende pas du point de l’écoulement),

455
456 Partie V.  Mécanique

G
dv G →  p 
l’équation d’Euler prend la forme = g − grad   .
dt ρ
→ dvG

  G
Prenons le rotationnel de cette expression : on obtient rot   = 0 . On ne
G  dt 
dv
peut pas ici permuter les dérivations car est une dérivée particulaire. On peut
dt
→ dvG
→ G
  d rot v  → G →  G
cependant montrer que rot  = −  rot v ⋅ grad  v , ce qui implique dans
 dt  dt  
 
G
dω  G →  G G 1 → G
notre cas =  ω ⋅ grad  v (∗) , équation régissant ω = rot v , vecteur tourbillon de
dt    2

G G G
la particule qu’on suit dans le temps. Ainsi, si ω(t ) = 0 pour une particule fluide, ω
G  G →  G G G G
varie de dω =  ω ⋅ grad  v ⋅ dt = 0 pendant dt : ω(t + dt ) = 0 .
 
 
G G
On a donc ω(t ) = 0 ∀t : une particule fluide qui se trouve dans une zone où
l’écoulement est parfait garde le vecteur tourbillon nul qu’elle avait initialement en
amont d’un obstacle où l’écoulement est uniforme, ou bien parce qu’elle était au repos
avant le passage d’un véhicule par exemple. Il y a persistance du caractère
irrotationnel pour un écoulement parfait, incompressible et homogène. Ceci constitue
le théorème de Lagrange.

Le théorème de Lagrange est hors-programme, mais il justifie qu’on étudie des


écoulements irrotationnels puisque c’est le cas des écoulements parfaits, incompres-
sibles et homogènes.

1.3 Théorème de Bernoulli


L’équation d’Euler s’écrit :
G G
∂v G → G ∂v →  v 2  → G G G 1 →
+ (v ⋅ grad)v = + grad   + rot v ∧ v = g − grad p .
∂t ∂t  2  ρ
 
Considérons un écoulement parfait, incompressible, et stationnaire (mais pas
nécessairement homogène). L’équation d’Euler devient :
 →  v 2  
→G G G 1 →
grad   + rot v ∧ v = g − grad p . Si on effectue le produit scalaire par un déplace-
 2  ρ
 
→ G → G G
ment d OM = v (M )dt le long d’une ligne de courant, on élimine le terme rot v ∧ v qui
G
est orthogonal à v .
G G G
D’autre part, le champ de pesanteur g = −gez , où ez est le vecteur unitaire ver-
G →
tical ascendant, peut se mettre sous la forme g = − grad(gz ) . On a donc :

456
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 457

→  v 2  → 1 → →  → G


 G  →
grad  + gz  ⋅ d OM + grad p ⋅ d OM +  rot v ∧ v  ⋅ d OM = 0 .
 2  ρ
   
0
Dans un écoulement incompressible, la masse volumique d’une particule fluide
se conserve :
dρ ∂ρ G → G → → →
=0= + v ⋅ grad ρ  v ⋅ grad ρ = 0 . On montre ainsi que grad ρ ⋅ d OM = 0 .
dt ∂t
N
0
→  p  
→ 1 → 
→ p  → →
Comme grad   ⋅ d OM = grad p ⋅ d OM − 2 grad ρ ⋅ d OM , on a finalement :
ρ ρ ρ  0
 → p v2  →  p v2 
grad  + + gz  ⋅ d OM = 0 , soit d  + + gz  = 0 le long d’une ligne de courant.
ρ 2  ρ 2 
   

Pour un écoulement parfait, stationnaire et incompressible, on a conservation


1
de la quantité p + ρv 2 + ρgz le long d’une ligne de courant. Ceci constitue le théo-
2
rème de Bernoulli.

1
On peut donc écrire p + ρv 2 + ρgz = C le long d’une ligne de courant, où la
2
constante C, souvent appelée charge, est homogène à une pression, c’est-à-dire à
p v2
une énergie volumique, ou bien + + z = H , où H est homogène à une hauteur.
ρg 2g
Pour un écoulement inhomogène, la constante C n’est pas nécessairement la
même d’une ligne de courant à l’autre.
Si on suppose de plus l’écoulement homogène, on a vu qu’il est alors irrotation-
nel. Puisque ρ est uniforme dans tout l’écoulement, l’équation d’Euler devient :
G
∂v →  v 2  → G G G 1 → →  p
+ grad   + rot v ∧ v = g − grad p = − grad  gz +  .
 
 2 
∂t G ρ  ρ
N 0
0
→  p v 2  G
On a donc grad  + + gz  = 0 .
ρ 2 
 

Pour un écoulement parfait, homogène, stationnaire et incompressible, on a


1
conservation de la quantité p + ρv 2 + ρgz dans tout l’écoulement.
2

Ces deux théorèmes de Bernoulli doivent être appliqués avec précaution, car
toutes les hypothèses en italique sont nécessaires pour qu’ils s’appliquent.

457
458 Partie V.  Mécanique

1.4 Nombre de Mach et écoulement incompressible


Le nombre de Mach M est le rapport entre la vitesse locale u d’un écoulement
u
et la vitesse du son locale c dans l’écoulement : M = .
c
 ∂p 
On montre que la vitesse du son dans un fluide est c =   (cette formule
 ∂ρ S
est démontrée dans le chapitre sur les ondes acoustiques).
Nous allons établir de façon générale la condition pour qu’un écoulement parfait
stationnaire puisse être considéré comme incompressible. Sous cette hypothèse, le
théorème de Bernoulli s’applique, et montre que la variation de pression ∆p dans
l’écoulement est de l’ordre de ρu 2 . On en déduit les variations de masse volumique :
 ∆p 
∆ρ = O  2  , l’évolution des particules fluides se faisant à entropie constante dans un
c 
 u2  ∆ρ
écoulement parfait. On a finalement ∆ρ = O  ρ 2  , soit = O( M 2 ) .
 c  ρ
 
u
Si M = < 0,3 , la variation relative de masse volumique est inférieure à 9% :
c
ρ peut être considérée comme constante, et donc l’écoulement comme incompres-
sible. L’hypothèse est vérifiée.

1.5 Écoulement quasi-parallèle / Effet Venturi et applications


Effet Venturi
Considérons un écoulement parfait, stationnaire et incompressible, qui possède
un axe Oz de symétrie de révolution.
� � �
Le champ de vitesse s’écrit alors v = v z (r , z )ez + v r (r , z )er .
L’écoulement est quasi-parallèle si en tout point v r << v z . Il est alors égale-
� �
ment quasi-1D : v ≃ v z ( z )ez , puisque pour un écoulement parallèle de fluide parfait, la
vitesse est quasiment uniforme dans une section orthogonale à l’écoulement.
C’est le cas par exemple pour une conduite dont le rayon varie sur une longueur
L d’une quantité ∆R << L , comme celle de la figure ci-dessous.

458
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 459

On note Vr et Vz les ordres de grandeur de v r et v z . Les variations de r et de


z sont, quant à elles, de l’ordre de ∆R et L.
G
L’équation locale divv = 0 traduisant l’incompressibilité de l’écoulement donne
G 1 ∂ ∂v
dans le cas étudié divv =
r ∂r
[rv r ] + ∂zz = 0 .
1 ∂ V  ∂v z V   ∆R 
Comme [ rv r ] = O  r  et = O  z  , on en déduit Vr = O  Vz  :
r ∂r  ∆R  ∂z  L   L 
on a bien Vr << Vz , donc v r << v z , si ∆R << L .
Néanmoins, la composante v r n’est pas rigoureusement nulle, car le rayon de
1 ∂ ∂v
la conduite varie. L’incompressibilité, qui entraîne
r ∂r
[ rv r ] = − z , montre que v r
∂z
varie autant avec r que v z avec z.
Dans le cas où l’on considère v r = 0 , l’incompressibilité de l’écoulement entraî-
∂v z
nerait = 0 (ce qui est effectivement le cas pour une conduite de rayon constant) :
∂z
G G G
L’approximation v = v z ( z ) ez n’est pas compatible avec divv = 0 pour un écou-
lement qui n’est pas rigoureusement parallèle.
L’incompressibilité du fluide se traduit alors, pour un écoulement quasi 1D, par
la conservation du débit volumique le long d’un tube de courant : S ( z ) ⋅ v z ( z ) = Cte .

On a ainsi S1 ⋅ v1 = S2 ⋅ v 2 .
L’écoulement étant supposé parfait, incompressible et stationnaire, on a,
1
d’après le théorème de Bernoulli, conservation de p + ρv 2 + ρgz le long de la ligne
2
de courant confondue avec l’axe Oz, soit, en considérant la conduite horizontale (ou
1 1
en négligeant l’effet de la pesanteur) : p1 + ρv12 = p2 + ρv 22 .
2 2
On en déduit que si S1 > S 2 , alors v1 < v 2 , et donc p1 > p2 :

On a une dépression au niveau du rétrécissement d’un tube de courant. C’est


l’effet Venturi.

Débitmètre Venturi 
Le débitmètre Venturi est une application de cet effet lorsque le fluide est un
liquide.
Des petits tubes cylindriques verticaux (appelés tubes piézométriques, car ils
permettent la mesure de pression) sont insérés dans la conduite au niveau des sec-
tions (connues) S1 et S2 . Le liquide monte dans ces deux tubes à des hauteurs

459
460 Partie V.  Mécanique

différentes z1 et z2 (on note maintenant Ox l’axe horizontal de la conduite pour réser-


ver la notation Oz à l’axe vertical ascendant).

� �
Comme v ≃ v x ( x ) ex , le champ de pression selon Oz est le champ statique d’un
 p1 = p0 + ρgz1
fluide incompressible :   p1 − p2 = ρg ( z1 − z2 ) .
 p2 = p0 + ρgz2
1
D’autre part le théorème de Bernoulli fournit p1 − p2 = ρ v 22 − v12  , avec :
2  

S1 1  S 2 
v2 = v1 , soit p1 − p2 = ρv12  1  − 1 .
S2 2  S2  
 
On obtient, en éliminant les différences de pression entre les deux relations :
2g ( z1 − z2 ) 2g ( z1 − z2 )
v12 = 2
, d’où le débit volumique qv = S1 ⋅ v1 = S1 2
. Ce débit volu-
 S1   S1 
  −1   −1
 S2   S2 
mique, proportionnel à z1 − z2 , se calcule donc à partir des différences de hauteurs
lues sur les tubes piézométriques.

Trompe à eau 
La trompe à eau fonctionne sur le principe de l’effet
Venturi : de l’eau s’écoule dans une conduite qui présente
un rétrécissement. À cet endroit, la conduite est ouverte.
Comme la pression p2 y est faible, un écoulement d’air se
produit. Si la pression de l’eau en amont est p1 , la dépres-

1  S 2 
sion p1 − p2 = ρv12  1  − 1 est d’autant plus grande
2  S2  
 
que le débit est grand. On arrive ainsi à faire le « vide »
dans un récipient (la pression de l’air y diminue jusqu’à at-
teindre la valeur p2 ).

460
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 461

Effet d’une tempête sur un toit 


On peut également invoquer l’effet Venturi pour
expliquer la dépression qui apparaît au-dessus du toit
d’une maison, quand un fort vent souffle parallèlement
au sol, même si l’écoulement n’est pas quasi-parallèle.
Cette dépression augmente avec la vitesse u du vent,
et peut, en cas de forte tempête, arracher des tuiles, voire une partie de la toiture.

1.6 Tube de Pitot 


Le tube est placé parallèlement à l’écoulement d’air à grand nombre de Rey-
nolds. Nous supposerons que la vitesse relative u du tube par rapport à l’air est large-
ment subsonique : le nombre de Mach doit vérifier
u
M = < 0,3 . L’écoulement peut alors être considéré
c
comme incompressible.
On trouve notamment des tubes de Pitot sur les
avions. Ils permettent de mesurer la vitesse u de
l’avion par rapport à l’air.
Le tube de Pitot, de section s, est bien profilé : il n’y a pas de décollement de
couche limite. On considère un tube de courant de section S >> s suffisamment
grande pour que les lignes de courant qui le constituent ne soient pas perturbées par
la présence du tube (la figure ci-dessous n’est pas à l’échelle).

Une première cavité débouche sur une série d’orifices comme le point B ′ , ré-
partis à la surface du tube de Pitot sur une couronne circulaire. Ces points étant suffi-
samment en aval, l’écoulement hors de la couche limite est quasiment uniforme dans
la section droite du tube passant par B ′ . Le point B se trouve dans ce plan, juste en
dehors de la couche limite, dans la zone où l’écoulement est parfait, et comme il n’y a
pas de variation de pression à la traversée de la couche limite, la pression dans cette
première cavité vaut pB′ = pB .
L’écoulement étant incompressible, le débit volumique se conserve dans le tube
de courant, donc u ⋅ S = v B ( S − s ) ≃ v B ⋅ S , ce qui entraîne v B ≃ u .

461
462 Partie V.  Mécanique

Une deuxième cavité débouche sur l’extrémité A du tube de Pitot, placée face
à l’écoulement. A est un point d’arrêt : v A = 0 . La pression dans la deuxième cavité
est pA . Les différences d’altitude sont négligeables. Le théorème de Bernoulli sur la
ligne de courant reliant A∞ , un point suffisamment en amont, et A, puis sur celle entre
B∞ également loin en amont, et B, fournit :
 1 2
 pA = p∞ + 2 ρair u 1
  pA − pB = ρair u 2 .
1
p + ρ u2 = p + ρ u2 1 2
 B 2 air ∞
2
air

1
pB = p∞ est la pression statique, ρair u 2 la pression dynamique et pA la pres-
2
sion totale.

Des capteurs de pression, ou un manomètre hydrostatique, permettent de me-


1
surer pA − pB = ρair u 2 , et d’en déduire la vitesse relative de l’écoulement par rapport
2
au tube de Pitot.
La formule doit être adaptée pour un écoulement compressible subsonique
(pour lequel 0,3 < M < 1) de gaz parfait de masse molaire M :
γ
 γ − 1 2  γ −1 cp γRT
pA = pB 1 + M  , avec γ = . On peut vérifier, en utilisant c = et :
 2  cV M
Mp∞ 1
ρair = , qu’on retrouve pA − pB = ρair u 2 dans la limite M 2
<< 1 .
RT 2

1.7 Formule de Torricelli 


Un liquide est placé dans un réci-
pient cylindrique de diamètre D.
Un petit trou de diamètre d << D
est percé dans la paroi du récipient. Le li-
quide s’écoule par ce trou et sa hauteur z(t)
au-dessus du trou diminue.
On cherche à déterminer la vitesse
d’éjection du fluide par le trou.
L’écoulement est parfait (on néglige les pertes de charge), quasi-stationnaire
(comme d << D , la surface libre descend très lentement), et incompressible : on peut
appliquer le théorème de Bernoulli sur un tube de courant entre un point A de la surface
1 1
libre et le point B du jet au niveau du trou : pA + ρv A2 + ρgz = pB + ρv B 2 .
2 2
En A, la pression est la pression atmosphérique : pA = p0 . En B, l’écoulement

462
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 463

est supposé parallèle, donc il n’y a pas de variation de pression dans les directions
orthogonales au jet. Comme la pression p0 de l’air est uniforme autour du jet (la pous-

sée d’Archimède est négligée), pB = p0 , et donc v B 2 = v A2 + 2gz .

L’écoulement étant incompressible, il y a conservation du débit volumique le


long d’un tube de courant, donc qv = πD2v A / 4 = πd 2v B / 4 .

d2
On a v A = v B << v B , et donc une vitesse d’éjection v = v B = 2gz (formule
D2
de Torricelli).

En réalité, un effet de la visco-


sité du fluide est que le jet en sortie
n’est pas parallèle : il se contracte puis
diverge, si bien que l’écoulement n’est
parallèle qu’au niveau de la section mi-
nimale du jet s ′ = πd ′2 / 4 , qui est plus petite que la section s = πd 2 / 4 du trou car
d ′ < d . On définit le coefficient de contraction C = s′ / s , dont la valeur expérimentale
est C = 0,62 dans les situations usuelles où le diamètre du trou est grand devant
l’épaisseur des parois. Il faut tenir compte de ce phénomène et remplacer d par d ′
pour le calcul du débit volumique de sortie. En revanche, avec des bords profilés au
lieu d’un simple trou, on peut obtenir un jet parallèle en sortie et le rapport de contrac-
tion vaut alors C = 1,00 .
Plaçons-nous dans le cas C = 1,00 pour calculer le temps de vidange du réci-
dz d2 d2
pient, si initialement z(0) = H . On a = −v A = − 2 v B = − 2 2gz , équation diffé-
dt D D
rentielle non linéaire du premier ordre. On peut séparer les variables :
dz d2 d2
=− 2g dt  2  z − H  = − 2 2g t . Le temps de vidange t v pour lequel
z D2   D
D2 2H
z = 0 est donné par t v = 2
.
d g

1.8 Régimes d’un cours d’eau / Nombre de Froude 


L’écoulement est supposé
parfait, incompressible et station-
naire, quasi 1D selon un axe hori-
� �
zontal Ox : v ≃ v ( x ) ex , entre le fond
d’altitude Z(x) et la surface libre. On
note h(x) la hauteur du cours d’eau
et L(x) sa largeur.

463
464 Partie V.  Mécanique

L’altitude z( x ) = Z ( x ) + h( x ) de la surface libre et la profondeur h(x) peuvent va-


rier lentement avec x du fait de légères variations de la largeur L(x) ou du relief Z(x)
du fond du cours d’eau.
Dans la section d’abscisse x = 0 , on a Z0 = 0 et on note h0 l’altitude de la sur-
� �
face libre, L0 la largeur du cours d’eau, et v 0 = v 0ex la vitesse de l’écoulement. On

v 02
pose H = h0 + .
2g
Les conditions nécessaires pour appliquer le théorème de Bernoulli sont réu-
1 1
nies : on a p0 + ρv 02 + ρgh0 = p0 + ρv ( x )2 + ρg [ Z ( x ) + h( x )] entre deux points
2 2
d’abscisses x = 0 et x sur une ligne de courant à la surface libre.
v ( x )2 v 2
Ainsi + Z ( x ) + h( x ) = 0 + h0 = H (1) . D’autre part, le débit volumique se
2g 2g
conserve le long du cours d’eau : qv = Cte = L( x )h( x )v ( x ) (2) .

Fond horizontal, influence du rétrécissement


On considère pour le moment que le fond est plat et horizontal : Z ( x ) = 0 .
En prenant la différentielle logarithmique de (2), on obtient :
dq v dL dh dv vdv
=0= + + , or on a dh = − en différentiant (1). On peut donc étudier
qv L h v g
l’influence d’un rétrécissement ( dL < 0 ) sur la hauteur du cours d’eau et sa vitesse :
dL dh dv d v  v 2  dv
Fr 2 − 1 , en introduisant Fr = v , nombre sans
=− − =  − 1 =
L h v v  gh  v   gh
dimension appelé nombre de Froude. Ainsi :
— Si Fr > 1 (on parle de régime torrentiel), on a dv < 0  dh > 0 . Un rétrécissement
de la largeur entraîne une baisse de la vitesse et une augmentation de la hauteur du
cours d’eau.
— Si Fr < 1 (on parle de régime fluvial), c’est l’inverse. On peut observer ce phéno-
mène au niveau des piles d’un pont d’un fleuve où la surface libre forme localement
un creux).

Fond horizontal, étude du débit volumique en fonction de la profondeur

v2
(1) s’écrit alors + h = H  2g (H − h) , et le débit volumique qv = Lhv prend
2g
la forme qv = L 2g ⋅ h H − h . Si on fixe la largeur L, q v ne dépend que de h.
dq v g
Pour étudier la fonction h ֏ qv , calculons =L ⋅ [ 2H − 3h ] . Le
dh 2(H − h )

464
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 465

2H
débit croît pour 0 ≤ h ≤ hc = et décroît pour hc ≤ h ≤ H . La valeur maximale du dé-
3
3
 2H  8gH
bit qu’on peut obtenir est qvmax = qv   = L 27 .
 3 
Les cas h → 0 et h → H sont des cas limites pour lesquels le débit est nul.
Un débit q v inférieur à
qvmax peut être obtenu avec deux
hauteurs différentes. La plus petite,
ht , correspond à la plus grande vi-
tesse ; la plus grande, hf , corres-
pond à la plus petite vitesse.
 v2  v2
Comme 2H − 3h = 2 h +  − 3h , soit 2H − 3h = − h = h Fr 2 − 1 , on a :
 2g  g  

dq v g
=L ⋅ h Fr 2 − 1 , donc ht correspond au régime torrentiel, hf au fluvial.
dh 2(H − h )  

Largeur constante, perturbation due à une bosse


Le fond est plat à l’exception d’une bosse au niveau de laquelle (1) s’écrit :
2
v(x) dv  dZ dh  dh h( x ) dv
+ Z ( x ) + h( x ) = H  v ( x ) = −g  +  , et (2) : dx = − v ( x ) dx d’où :
2g dx  dx d x 
gh( x ) − v 2 ( x ) dv dZ dv v ( x ) dZ
= gv ( x ) ⇔ 1 − Fr 2 ( x ) = (3) .
  dx dx   dx h( x ) dx
dZ
Comme avant le sommet de la bosse > 0 , l’écoulement ne peut être accé-
dx
dv dh
léré ( >0 < 0 ) que si Fr 2 ( x ) < 1 (écoulement fluvial ou subcritique). Au som-
dx dx
dZ
met de la bosse, = 0 donc (3) montre que l’on n’a que deux possibilités :
dx
dv
— Soit = 0 : la vitesse cesse de croître et Fr n’atteint pas la valeur critique Fr = 1 ,
dx
dZ dv dh
alors par la suite <0 <0 > 0 . La bosse n’a perturbé que localement
dx dx dx
v ( x )2
l’écoulement qui reste en régime fluvial. L’altitude z( x ) = Z ( x ) + h( x ) = H − de la
2g
surface libre diminue d’abord puisque v ( x ) augmente, puis reprend sa valeur initiale,
tout comme la hauteur h(x).
dZ dv dh
— Soit Fr = 1 et la vitesse continue d’augmenter lorsque <0 >0 < 0.
dx dx dx

465
466 Partie V.  Mécanique

L’écoulement devient torrentiel, ou supercritique : Fr > 1 . L’altitude de la surface libre


continue de diminuer.

Ressaut hydraulique stationnaire


L’instabilité d’un écoulement torrentiel se
traduit par l’apparition d’un ressaut hydraulique :
le niveau de l’eau s’élève brusquement (trans-
formation d’énergie cinétique en énergie poten-
tielle, avec dissipation d’énergie par viscosité
dans des remous turbulents). Un tel ressaut
s’observe très facilement dans un évier, il cor-
respond à la transition torrentiel → fluvial.
Le mascaret correspond à un ressaut hy-
draulique en translation, donc non stationnaire : la vague remonte le fleuve.

2. FLUIDE PARFAIT ET PORTANCE 


2.1 Écoulement parfait autour d’un cylindre circulaire en rotation 
On considère un écoulement parfait, incompressible, homogène et stationnaire
autour d’un cylindre de rayon R qui tourne autour de son axe Oz à la vitesse angulaire
constante Ω. L’écoulement est uniforme à l’in-
G G
fini du cylindre : v ∞ = uex .
Les conditions aux limites du champ de
vitesse recherché sont v r (r = R, θ) = 0 ∀θ (il y
a uniquement annulation de la vitesse normale
sur l’obstacle pour un fluide parfait), et :
G G G
lim v ( r , θ) = v ∞ = uex .
r →∞
L’écoulement est incompressible et irro-
G
div v = 0

tationnel : les équations locales régissant le champ de vitesse sont  → .
G G
 rot v = 0

466
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 467

→ � � � →
Comme rot v = 0 , il existe un potentiel ϕ(M ) tel que v = grad ϕ .
Le calcul est plus facile si on passe par le potentiel des vitesses ϕ. L’équation
 → 
locale que doit vérifier ϕ est div  grad ϕ  = 0 ⇔ ∆ϕ = 0 .
 
 
Comme le problème est invariant par toute translation selon Oz, ϕ ne dépend
pas de z : ϕ(r , θ) .
Les conditions aux limites sont :
� → �
— ϕ(r , θ) → ϕ∞ (r , θ) avec v ∞ = grad ϕ∞ = uex . On peut prendre ϕ∞ = u ⋅ x = ur cos θ .
r →∞
∂ϕ
— v r (r = R, θ) = (R, θ) = 0 ∀θ .
∂r
Afin de vérifier ces conditions aux limites, cherchons ϕ sous la forme :
ϕ(r , θ) = f (r ) ⋅ g (θ) .
∂ϕ
La condition (R, θ) = 0 ∀θ entraîne f ′(R ) = 0 . La condition à l’infini entraîne
∂r
qu’on peut prendre g (θ) = cos θ . Alors f (r ) ∼ ur .
r →∞
2 2
1 ∂  ∂ϕ  1 ∂ ϕ ∂ ϕ
En utilisant l’expression ∆ϕ = r ∂r  + 2 2 + 2 dans un système de
r ∂r   r ∂θ ∂z
coordonnées cylindriques, on obtient :
1 d f (r )
cos θ [ r f ′(r )] − 2 cos θ = 0  r 2f ′′(r ) + r f ′(r ) − f (r ) = 0 .
r dr r
Les solutions de cette équation différentielle linéaire d’ordre 2 forment un es-
pace vectoriel de dimension 2, dont on cherche une base sous la forme de fonctions
du type r ֏ f (r ) = r α .
Le coefficient α est donc tel que :
α(α − 1)r α + αr α − r α = 0 ∀r  α2 = 1 ⇔ α = ±1.
Les solutions sont de la forme f (r ) = Ar + B / r .
On détermine A et B grâce aux conditions aux limites :
f (r ) ∼ ur  A = u et f ′(R ) = 0  A − B / R 2 = 0 , soit B = AR 2 = uR 2 .
r →∞

 R2 
Finalement, ϕ( r , θ) = u r +  cos θ , et :
 r 
 ∂ϕ  R2 
v r = = u 1 − 2  cos θ
� →  ∂r  r 
v = grad ϕ =  .
 1 ∂ϕ  R2 
v θ = r ∂θ = −u 1 + 2  sin θ
  r 

467
468 Partie V.  Mécanique

Le champ de pression se détermine à l’aide du théorème de Bernoulli (en né-


gligeant l’influence de la pesanteur) entre un point à l’infini, où la pression vaut p∞ , et
1 1
un point M quelconque : p(M ) + ρv (M )2 = p∞ + ρu 2 .
2 2
G G
En un point M de la surface du cylindre ( r = R ), on a v = −2u sin θeθ , d’où :
1
p(R, θ) = p∞ + ρu 2 1 − 4 sin2 θ  .
2  
En l’absence de viscosité, les seules
forces qui s’exercent sur le cylindre sont les
forces de pression, or :
— p(R, π − θ) = p(R, θ)  Fx = 0 : il n’y a pas
de force de traînée.
— p(R, −θ) = p(R, θ)  Fy = 0 : il n’y a pas de
force de portance.

C’est le paradoxe de d’Alembert : un écoulement parfait stationnaire n’exerce


pas de force de traînée sur un obstacle.
Il est nécessaire de prendre en compte la viscosité dans la couche limite et dans
le sillage pour expliquer et calculer la traînée.

L’absence de portance, malgré la rotation du cylindre, s’explique également par


la non-prise en compte de la couche limite et donc de l’adhérence du fluide aux parois
solides. Dans un fluide parfait, la rotation du cylindre n’entraînerait pas la rotation du
fluide (qui glisserait sans frotter sur la surface du cylindre).

Cependant, comme nous allons le voir, la portance peut, contrairement à la traî-


née, se calculer sans faire intervenir de couche limite, c’est-à-dire en gardant un mo-
dèle où l’écoulement est parfait partout.

Dans le cas du cylindre qui tourne, la rotation est prise en compte en rajoutant
Γ
au potentiel ϕ(r , θ) = u r + R 2 / r  cos θ le potentiel ϕ′(r , θ) = θ pour θ ∈ [ −π, π ] ,
  2π
avec Γ ≥ 0 . Ce potentiel vérifie ∆ϕ′ = 0 , et correspond à un champ de vitesse :
v r′ = 0
G → 
v ′ = grad ϕ′ =  1 ∂ϕ′ Γ .
v θ′ = r ∂θ = 2πr

G G G
Le champ V = v + v ′ est donc également solution du problème puisqu’on a
∆( ϕ + ϕ′) = 0 et que les conditions aux limites :
G G G
Vr ( r = R, θ) = 0 , et lim V (r , θ) = v ∞ = uex restent vérifiées. On constate au passage
r →∞
que le modèle de fluide parfait, associé à une géométrie doublement connexe (voir le
schéma ci-après) n’assure pas l’unicité du champ de vitesse solution du problème.

468
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 469

Montrons que Γ est la circulation du champ de vitesse le long d’un contour quel-
conque entourant le cylindre.

Le premier champ étudié v (M ) , qui correspond à Γ = 0 , est symétrique par rap-

port au plan y = 0 . La circulation du champ de vitesse v le long du cercle γ d’axe Oz
et de rayon r ≥ R est donc nulle.

� �
La circulation de V (M ) est donc égale à celle de v ′(M ) , et vaut sur le cercle γ
� → Γ � � Γℓ
précédent : � v ′ ⋅ d OM = � 2πr eθ ⋅ dℓeθ = 2πr = Γ .
γ γ

Il reste à montrer que cette circulation est indépendante du contour entourant


le cylindre.
Considérons pour cela deux contours différents γ1 et γ 2
orientés dans le même sens, et notons Γ1 et Γ2 les circulations
le long de ces contours. D’après le théorème de Stokes :
� → → � �
�
Γ1 = V ⋅ d OM = 
rot V ⋅ d2 S , et :
γ1 S1( γ1 )

� → → � �
Γ2 = � V ⋅ d OM =  rot V ⋅ d2 S . La différence entre les deux circulations vaut :
γ2 S2 ( γ 2 )

469
470 Partie V.  Mécanique


→ G G
 rot V ⋅ d
2
Γ1 − Γ 2 = S , où S est la surface entre γ1 et γ 2 , entièrement incluse dans
S
le fluide, où l’écoulement est irrotationnel : Γ1 = Γ 2 = Γ .
Il n’y a pas unicité de l’écoulement parfait autour d’un profil cylindrique (il y a
une infinité de solutions correspondant à des circulations différentes autour du cy-
lindre). En revanche, il n’y a qu’un seul écoulement de circulation Γ fixée.
G
Le champ de vitesse v ′(M ) qu’on a rajouté est un champ orthoradial, dirigé
dans le sens trigonométrique. En sa présence, la vitesse du fluide selon Ox augmente
au-dessous du cylindre ( y < 0 ) et diminue au-dessus.

Selon la valeur de Γ, le champ de vitesse prend des allures différentes.


— Pour Γ ≤ Γ c , il y a encore des points d’arrêt sur le cylindre. Ils correspondent à :
Γ Γ
v θ (R, θ) = −2u sin θ + = 0 , soit à sin θ = , ce qui n’est possible que si :
2πR 4πRu
sin θ ≤ 1 , soit Γ ≤ Γ c = 4πRu .
 Γ 
On a alors deux solutions comprises entre 0 et π, θ A = arcsin   et :
 4πRu 
θB = π − θ A : les deux points se trouvent sur le dessus du cylindre. Ils se rejoignent en
θ = π / 2 pour Γ = Γc .
— Pour Γ > Γ c , un unique point d’arrêt existe dans l’écoulement sur l’axe Oy.

Calculons maintenant la traînée et la portance pour Γ ≠ 0 . Comme précédem-


ment, les seules forces qui s’exercent sur le cylindre sont les forces de pression. Le
théorème de Bernoulli fournit la pression sur le cylindre :
1 ρΓ 2 ρuΓ
p(R, θ) = p∞ + ρu 2 1 − 4 sin2 θ  − 2 2 + sin θ .
2   8 πR
 π R 
p0 ( θ ) p1( θ )

Cette pression se décompose en deux termes p1(θ) et p2 (θ) .

470
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 471

Comme p0 (R, π − θ) = p0 (R, θ) = p0 (R, −θ) il n’y a ni traînée, ni portance due à


cette composante de la pression.
Comme p1(R, π − θ) = p1(R, θ) , il n’y a pas non plus de traînée due à cette com-
posante : on vérifie que la traînée est nulle dans un écoulement parfait stationnaire.
En revanche, comme p1(R, −θ) ≠ p1(R, θ) , il y a une portance, résultante selon Oy des
forces de pression, et que nous allons calculer pour une longueur H de cylindre :
π π
G G ρu Γ
Fpy =  [ − p1(θ)HRdθ] er ⋅ ey =−
πR
HR  sin2 θdθ = −ρuH Γ .
θ=−π sin θ θ=−π

La portance est donc proportionnelle à la circulation autour du cylindre, et de


signe opposé à cette circulation, et proportionnelle à la vitesse de l’écoulement à l’in-
G G G
fini. On peut mettre cette relation sous forme vectorielle : Fp = ρHu ∧ Γez .
Dans le cas du cylindre tournant dans le sens Ω > 0 , la vitesse moyenne est,
en norme, supérieure au-dessous du cylindre à celle au-dessus du cylindre. D’après
le théorème de Bernoulli, la pression moyenne sur le dessus du cylindre est alors su-
périeure à celle sur le dessous, ce qui explique une portance négative.

Le modèle de fluide parfait ne permet malheureusement pas de relier la circu-


lation à la vitesse de rotation Ω , puisque pour un tel fluide l’écoulement serait indé-
pendant de la rotation du cylindre en l’absence de forces tangentielles. On constate
G G
d’ailleurs que le champ de vitesse V = ΩReθ de l’écoulement réel à la surface du cy-
lindre (il y a adhérence du fluide à la paroi du cylindre) n’est pas compatible avec
l’expression trouvée pour Vθ (R, θ) qui dépend de θ. D’autre part, le cylindre n’est pas
bien profilé : la couche limite décolle en amont et il y a un important sillage turbulent
derrière le cylindre comme les photos du chapitre précédent le montrent.
En revanche, la direction de la portance, sa dépendance linéaire en u et sa
dépendance linéaire en Ω sont assez bien vérifiées pour une grande gamme de Re.

La portance s’exerçant sur un cylindre tournant autour de son axe avec le vec-
G G
teur rotation Ω , et placé dans un écoulement orthogonal à son axe, de vitesse u à
G G G
l’infini, est Fp = α u ∧ Ω , avec α > 0 . Elle s’appelle dans ce cas force de Magnus.

On peut mettre en évidence ce phénomène à l’aide d’une soufflerie et d’un cy-


lindre motorisé qu’on peut faire tourner dans les deux sens.

471
472 Partie V.  Mécanique

Le cylindre est fixé au fléau d’une balance. On place des masses dans le pla-
teau de façon à ce que le fléau soit horizontal quand la soufflerie est à l’arrêt. Selon le
sens de rotation, le cylindre monte ou descend.

L’effet s’applique aussi à des balles ou des ballons en rotation.


Sur la figure ci-dessous, on a représenté des trajectoires de balles de tennis
frappées avec, et sans effet. La configuration de gauche correspond à un « coupé »,
celle de droite à un « lift ». Les trajectoires sont tracées pour des vitesses initiales
identiques. La trajectoire sans effet est incurvée vers le bas par la pesanteur.
Avec une balle « coupée » (c'est-à-dire brossée de haut en bas par le joueur),
la composante verticale de la portance est positive : la courbure de la trajectoire est
moins grande que sans effet. Cet effet permet à une balle de passer plus facilement
le filet pour retomber juste de l’autre côté (« amorti »).
C’est l’inverse avec une balle « liftée » (brossée de bas en haut) qui va pouvoir
être frappée plus fort, tout en restant dans les limites du terrain.

2.2 Écoulement parfait autour d’une aile d’avion 


L’approximation de l’écoulement parfait autour d’une aile d’avion est bien meil-
leure que pour le cylindre, car l’aile d’avion est bien profilée. Lorsque l’aile est peu
inclinée, la couche limite, très mince, ne décolle que très près du bord de fuite, et le
sillage est restreint.
Comme il n’y a pas de variation de pression à la traversée de la couche limite,
la connaissance du champ de vitesse (et donc du champ de pression, à l’aide du théo-
rème de Bernoulli) dans la zone où l’écoulement est parfait permet de calculer la por-
tance d’une aile d’avion.
Le théorème de Kutta-Joukowski assure que la relation entre la portance et la
circulation Γ dans la zone d’écoulement parfait, établie au 2.1 pour le cylindre circu-
G
dFp G G
laire, s’applique aussi à l’aile en régime stationnaire : = ρu ∧ Γez est la portance
dz
par unité de longueur de l’aile (l’aile est supposée cylindrique et l’écoulement à 2D :
on néglige les effets de bord).
La circulation Γ est due, comme pour le cylindre en rotation, à la viscosité dans
la couche limite (responsable de l’adhérence du fluide à l’aile), mais aussi à la forme
de l’aile (en non plus à la rotation du cylindre).

472
Chapitre 6.  Écoulements parfaits 473

Comment la déterminer sans prendre en compte la couche limite ? La condition


de Kutta le permet : « en régime stationnaire, la vitesse doit s’annuler au bord de
fuite ». Avec cette condition, il y a unicité du champ de vitesse dans la zone d’écoule-
ment parfait, et ce champ est celui de l’écoulement réel, hors couche limite. La circu-
lation calculée avec cette condition est négative : la vitesse moyenne du fluide sur
l’extrados est supérieure à celle sur l’intrados. Les lignes de courant obtenues mon-
trent que le fluide qui interagit avec l’aile est globalement dévié vers le bas, ce qui
correspond bien à une force exercée par l’aile sur le fluide de haut en bas. L’action
réciproque du fluide sur l’aile est la force de portance, dirigée du bas vers le haut.
Le calcul de Γ obtenu avec la condition de Kutta permet d’en déduire la valeur
de la portance.

Revenons sur la condition de Kutta : au démarrage d’un avion, le point d’arrêt


B en aval de l’écoulement est sur l’extrados, à proximité du point de fuite. Le fluide doit
donc contourner le bord de fuite, ce qui provoque un tourbillon de circulation positive,
compensé par une circulation négative autour de l’aile, puisque la circulation initiale
autour de l’ensemble était nulle. Ce tourbillon est instable et se détache, comme les
tourbillons qui se forment autour d’une cuillère qu’on translate dans un bol de boisson
chocolatée, et se détachent quand la vitesse devient constante.
Le point d’arrêt s’est alors déplacé au bord de fuite et la circulation négative
créée autour de l’aile est responsable de la portance.

Considérons maintenant l’écoulement réel à 3D, l’envergure de l’aile étant finie.


Soit un contour γ entourant l’aile, dans la zone d’écoulement parfait. Il existe
une surface S , s’appuyant sur γ, et dont tous les points se trouvent dans la zone où
l’écoulement est parfait, donc irrotationnel. Ceci est en contradiction avec le théorème

473
474 Partie V.  Mécanique

G → → G G
de Stokes N
Γ =
<0
v v ⋅ d OM =  rot v ⋅ d2 S .
 G
γ S (γ) =0

Il existe donc en réalité un tourbillon de bout d’aile, c’est-à-dire une zone tour-
billonnaire, assimilable à une ligne de « vorticité », c’est-à-dire une ligne de champ du
G 1 → G G
vecteur ω = rot v ≠ 0 . Ce n’est qu’au voisinage de cette ligne que l’écoulement n’est
2
pas parfait. Un tel vortex a été étudié à la section 3.2 du chapitre « Description d’un
fluide en mouvement ».

On peut montrer que ces lignes, qui partent du bout de chaque aile, se rejoi-
gnent derrière l’avion, produisant des tourbillons contrarotatifs qui se dissipent après
passage de l’avion, mais qui empêchent des décollages trop rapprochés, au risque de
déstabiliser un avion qui décollerait après un gros porteur…

474
475

[MÉCANIQUE 7]

BILANS MACROSCOPIQUES
1. BILAN D’UNE GRANDEUR EXTENSIVE x
1.1 Description eulérienne / lagrangienne
Dans la description eulé-
rienne, le système étudié Σ se trouve
dans le volume V à l’intérieur d’une
surface S fermée (au sens mathéma-
tique : elle entoure un volume inté-
rieur), fixe par rapport au référentiel
d’étude R .
Dans le cas d’un écoulement, des particules fluides traversent S , ce dernier est
un système ouvert (au sens physique : il échange de la matière avec le milieu exté-
rieur).
On peut donc effectuer des bilans de n’importe quelle grandeur extensive pour
Σ, mais on ne peut pas lui appliquer les théorèmes de la mécanique (théorème de la
quantité de mouvement, théorème du moment cinétique, théorème de l’énergie ciné-
tique), ni les principes de la thermodynamique, car il n’est pas constitué, entre deux
instants, par les mêmes particules.

Cette description eulérienne a déjà été utilisée dans le chapitre sur les champs
et les opérateurs différentiels pour établir l’équation locale traduisant le bilan d’une
grandeur extensive x.
d3 x
En notant ρ x = sa densité volumique, on a à la date t :
d3V

 ρx (M,t )d V  ρx (M,t + dt )d V


3 3
x (t ) = , et à t + dt : x(t + dt ) = , soit une varia-
M∈V M∈V
 ∂ρ x 3 
tion dx = x (t + dt ) − x(t ) =  
M ∈V ∂t
dV  dt .


Notons que le mot « bilan » est utilisé aussi bien pour désigner le calcul du taux
dx
de variation de la grandeur extensive x d’un système Σ, ouvert ou fermé, que pour
dt
relier cette variation à ses causes (les échanges, la production).

475
476 Partie V.  Mécanique

Pour pouvoir appliquer théo-


rèmes et principes à un système Σ, ce
dernier doit être fermé.
Comme Σ est en mouvement
par rapport au référentiel d’étude R ,
on adopte une description lagran-
gienne dans laquelle la surface S
contenant Σ se déforme de façon à
contenir à chaque instant les mêmes
particules. On « suit » Σ dans son déplacement.
Pour cela, on considère le volume de contrôle Vc à travers lequel le système Σ
transite entre t et t + dt . Ce volume de contrôle se trouve à l’intérieur d’une surface
fermée Sc fixe par rapport au référentiel d’étude R , comme pour la description eulé-
rienne.

À l’instant t, Σ est donc constitué des particules à l’intérieur de Vc , et de celles


qui vont rentrer dans Vc entre t et t + dt à travers Sc .
À l’instant t + dt , Σ est constitué des particules à l’intérieur de Vc , et de celles
qui sont sorties de Vc entre t et t + dt à travers Sc .
On a donc :
x (t ) =  
ρ x (M, t )d3V + δx e et x (t + dt ) = ρ x (M, t + dt )d3V + δx s .
M ∈Vc M ∈V c

δx e et δx s sont les grandeurs qui entrent et qui sortent de Vc entre t et t + dt ,


transportées par les particules qui franchissent Sc .
La différence δx s − δx e = −δx r,c est la grandeur cédée (opposée de la grandeur
reçue) par convection au milieu extérieur par le volume de contrôle, entre t et t + dt .
G G
Comme la densité volumique de courants de la grandeur x s’écrit J x,c = ρ xv ,

G G  G G
où v = v (M, t ) est le champ de vitesse du fluide, on a δx s − δx e = 
 
w ρ xv ⋅ d2 Sc  dt .

 P ∈ Sc 
Finalement, pour le système fermé Σ :

476
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 477

   G G
∂ρx 3 
dx = x ( t + dt ) − x ( t ) = 
  ∂t
d V dt + 
  
w ρ xv ⋅ d2 Sc  dt .

M ∈Vc   P ∈ Sc 
On a donc un terme supplémentaire par rapport au cas de la description
eulérienne où Σ est ouvert :
dx ∂ρ x 3 G G
dt
N
=  ∂t
dV + 
w ρ xv ⋅ d2 Sc .
M ∈V c P ∈ Sc
dérivée totale  
(Lagrange) dérivée locale (Euler) dérivée convective
Cette relation constitue le théorème de Reynolds (hors-programme), et relie la
description eulérienne (le système étudié est le système ouvert dans le volume de
contrôle) à la description lagrangienne (le système étudié Σ est fermé et transite par le
volume de contrôle). Elle permet donc de calculer la dérivée de la grandeur x d’un
dx ∂x G →
système fermé macroscopique, ce que la relation = + v ⋅ grad x faisait pour une
dt ∂t
particule fluide.

1.2 Cas des écoulements stationnaires unidimensionnels


Le théorème de Reynolds est hors-programme car seul y figure le cas d’un
écoulement stationnaire, à une dimension en entrée et en sortie du volume de contrôle,
comme lorsque le fluide circule dans une conduite et qu’il traverse des composants
comme un compresseur, un échangeur thermique, une tuyère…
Les sections d’entrée et de sortie sont notées S1 et S 2 . Le champ de vitesse
G G
est supposé uniforme sur ces sections : on note v1 et v 2 les vitesses d’entrée et de
sortie du volume de contrôle.
Pendant dt, un volume S1 v1 dt entre dans le volume de contrôle pendant qu’un
volume S2 v 2 dt en sort.

Le système fermé Σ, étudié entre t et t + dt , est constitué à t par le volume de


contrôle et les particules qui entrent dans Vc entre t et t + dt ; à t + dt par le volume
de contrôle et les particules qui sortent de Vc entre t et t + dt :

 ρx (M, t )d V
3
x (t ) = + ρ x1(t ) S1 v1(t )dt .

M ∈V c δx e

477
478 Partie V.  Mécanique

 ρx (M,t + dt )d V
3
x ( t + dt ) = + ρ x 2 (t ) S2 v 2 (t )dt .

M ∈V c δx s

δx e et δx s sont les grandeurs qui entrent et qui sortent de Vc entre t et t + dt .

C’est un cas particulier du théorème de Reynolds :


dx x ( t + dt ) − x ( t ) ∂ρ x 3
dt
N
=
dt
= 
∂t
d V + ρ x 2 (t ) S2 v 2 (t ) − ρ x1(t ) S1 v1(t ) .

M ∈V c dérivée convective
dérivée totale 
(Lagrange) dérivée locale (Euler)
∂ρ x
Au programme ne figure que le cas d’un écoulement stationnaire : = 0 (le
∂t
volume de contrôle contient à tout instant la même quantité de la grandeur x), ou quasi-
stationnaire ( ρ x varie lentement : la dérivée locale est négligeable devant la dérivée
convective).
dx
On a alors = ρ x 2 S2 v 2 − ρ x1S1 v1 . Le taux de variation de x pour le système
dt  
sortie entrée
fermé Σ n’est dû qu’à la différence entre la grandeur sortante et la grandeur entrante.

Il convient de savoir retrouver cette expression pour la grandeur x étudiée, à


chaque bilan rencontré, car il existe de nombreux cas différents (on peut avoir plu-
sieurs entrées, plusieurs sorties, ou pas d’entrée comme pour une fusée qui expulse
des gaz, issus d’une réaction entre des propergols qu’elle contient dès le décollage).

On peut donner une autre formulation de ce bilan, en introduisant la grandeur


d3 x d3 x d3 x d3 m
massique xm = 3
. On a ρ x = 3
= ⋅ = ρxm , où ρ est la masse volu-
d m dV d3 m d3V
mique du fluide.
Comme, pour un écoulement stationnaire, le débit massique qm se conserve le
long d’un tube de courant, on a ρ1S1 v1 = ρ2 S2 v 2 = qm .

Le bilan pour un écoulement stationnaire 1D s’écrit :


dx  
= ρ2 S2 v 2 xm2 − ρ1S1 v1xm1 = qm  xm2 − xm1  = qm ∆xm .
dt N N
 sortie entrée 

La notation ∆xm = xm2 − xm1 désigne ici une variation spatiale entre l’entrée et
la sortie du volume de contrôle, et pas une variation temporelle.

On remarque que pour un écoulement stationnaire, le bilan de la grandeur ex-


tensive x ne nécessite que sa connaissance en entrée et en sortie du volume de con-
trôle, et pas à l’intérieur.

478
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 479

2. TUYÈRES ET FUSÉES 
2.1 Principe
La tuyère a pour but de transformer en énergie cinétique l’enthalpie du fluide
obtenu après combustion, afin d’expulser le fluide avec une grande vitesse. Nous ver-
rons que cette éjection est responsable de la poussée que subit un avion ou une fusée.

Dans une fusée, la tuyère est placée directement en sortie de la chambre de


combustion. Le fluide en entrée de la tuyère est porté à de grandes température et
pression T1 et p1 , mais sa vitesse v1 est faible.
En sortie, on cherche à atteindre une grande vitesse v 2 , la température T2 et
la pression p2 ayant beaucoup chuté. On note ψ = p2 / p1 < 1 le rapport de compres-
sion entre l’entrée et la sortie.
Nous faisons l’hypothèse d’un écoulement stationnaire, quasi 1D, parfait dans
la tuyère (en revanche, un tel écoulement est compressible). Les grandeurs ne dépen-
dent alors que de la coordonnée x le long de l’axe de la tuyère : température T(x),
pression p(x), vitesse v(x), section S ( x ) , masse volumique ρ(x).

2.2 Géométrie de la tuyère


Cherchons à déterminer la forme de la tuyère qui permet d’accélérer le fluide.
v(x)
Nous introduirons le nombre de Mach M ( x ) = , où c(x) est la célérité du son dans
c( x )
le fluide dans les conditions T(x), p(x). Nous montrerons dans le chapitre sur les ondes
 ∂p 
acoustiques dans les fluides que c =   . Un écoulement parfait étant isentro-
 ∂ρ S
dp
pique, les variations de pression et de masse volumique sont liées par dρ = (1) .
c2
D’autre part, en régime stationnaire, le débit massique qm = ρ( x ) ⋅ S ( x ) ⋅ v ( x ) se
conserve le long du tube de courant formé par la tuyère. En prenant sa différentielle
dqm dρ dS dv
logarithmique, on obtient = + + = 0 (2) .
qm ρ S v

479
480 Partie V.  Mécanique

Appliquons enfin le premier principe au fluide, entre l’entrée et une section quel-
1 
conque, en négligeant l’influence de la pesanteur : ∆  v 2 + h  = wu + q = 0 car la
2 
tuyère ne comporte pas de pièces mobiles et que l’écoulement est adiabatique. On a
1
conservation de v 2 + h le long de la tuyère, soit en différentiant : vdv + dh = 0 .
2
d p dp dp
Comme pour une évolution isentropique, dh = T d
� s+ = , on a vdv = − (3) .
0 ρ ρ ρ
dp dS dv
En éliminant dρ entre (1) et (2), on obtient 2
+ + = 0 , puis en utilisant
ρc S v

vdv dS dv dS dv  v 2 
(3) : − 2
+ + =0⇔ =  − 1 . On en déduit :
c S v S v  c 2 

dS dv 
= M 2
− 1 , relation appelée formule d’Hugoniot.
S v  

Cette formule permet de montrer que tant que l’écoulement est subsonique
( M < 1 ), il faut dS < 0 puisqu’on veut dv > 0 : la section doit diminuer.
Si on atteint la vitesse du son dans la tuyère, il faut au contraire que la section
augmente ( dS > 0 ) pour que la vitesse du fluide augmente alors que l’écoulement est
devenu supersonique ( M > 1 ). Une telle tuyère convergente-divergente s’appelle
tuyère de Laval (du nom de l’ingénieur suédois Gustaf de Laval) ; la vitesse de l’écou-
lement est supersonique au niveau du col.
La transition subsonique → supersonique étudiée ici est analogue à la transition
fluvial (subcritique) → torrentiel (supercritique) étudiée dans le chapitre précédent. La
dS dv  2  dZ d v 
formule d’Hugoniot = M − 1 est l’analogue de = 1 − Fr 2  qui relie
S v   h v  
l’évolution de la vitesse de l’écoulement à celle du profil de la bosse, le nombre de
Mach étant l’analogue du nombre de Froude.

Remarquons que dans le cas où l’écoulement reste subsonique dans la tuyère,


la tuyère est convergente. Si l’écoulement est largement subsonique ( M < 0,3 ), on a :
dS dv  dv dS dv
= M 2
− 1 ≃ − ⇔ + = 0 ⇔ d [ln(S v )] = 0 ⇔ ln(S v ) = Cte , soit :
S v   v S v

480
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 481

qv = S v = Cte . Comme le débit massique qm = ρS v , le débit volumique qv = S v


se conserve le long de l’écoulement, donc ρ = Cte : on retrouve qu’un écoulement
stationnaire parfait à faible nombre de Mach est incompressible.

2.3 Vitesse d’éjection


La tuyère éjecte des gaz qui sont bien sûr considérés comme parfaits dans l’hy-
pothèse, plus forte, d’un écoulement de fluide parfait.
1
Le premier principe a permis de montrer qu’il y a conservation de v 2 + h le
2
1 1
long de la tuyère, donc v 22 + h2 = v12 + h1  v 2 = 2(h1 − h2 ) . Pour un gaz parfait
2 2 N2
<<v 2


de masse molaire M, l’enthalpie massique vaut h(T ) = T + Cte . Comme entre
M ( γ − 1)
l’entrée et la sortie, une particule de gaz parfait subit une transformation isentropique,
1−γ 1−γ 1−γ γ −1
p  γ
la loi de Laplace s’applique : T2 p2 γ
= T1p1 γ  T2 = T1  1  = T1ψ γ
.
 p2 

 γ −1 
2R γ
La vitesse d’éjection vaut v 2 = T1 1 − ψ γ  .
M ( γ − 1)  
 

Cette formule fondamentale montre qu’on doit chercher des propergols (carbu-
rant et comburant) permettant d’obtenir une grande température T1 dans la chambre
de combustion, et possédant une masse molaire faible.
Une fusée est anaérobie : elle se déplace dans des milieux très dilués, pauvres
en dioxygène, et doit embarquer à la fois le réducteur, appelé carburant, et l’oxydant,
appelé comburant, qui vont réagir spontanément et dégager une grande énergie. La
réaction utilisée par les moteurs Vulcain équipant les dernières générations de fusée
Ariane a pour réactifs :
— L’hydrogène liquide de masse molaire M(H2 ) = 2,0 g ⋅ mol -1 .

— L’oxygène liquide de masse molaire M (O2 ) = 32,0 g ⋅ mol -1 .


Comme γ = c p / cV > 1 (il est proche de 1,3 pour le mélange gazeux issu de la
réaction), v 2 est grand si ψ = p2 / p1 est petit. Un faible rapport de compression est
obtenu grâce à des turbopompes qui alimentent la chambre de combustion en proper-
gols à hautes pressions, ce qui augmente p1 , et en jouant sur la longueur de la tuyère
pour diminuer p2 . Pour un moteur Vulcain, dans lequel le rapport des débits mas-
qm (O2 ) n(O2 )
siques injectés dans la chambre de combustion vaut 6, le rapport vaut
qm (H2 ) n(H2 )

481
482 Partie V.  Mécanique

2
6× = 0,375 < 0,5 . Les proportions ne sont pas stœchiométriques, il y a un excès
32
de H2 , qui est gazeux dans l’état final, après la réaction totale suivante :
2H2 (g) + O2 (g) = 2H2O(g)
EI (mol) 2n0 2 × 0,375n0
EE(mol) 0,5n0 ε 1,5n0

0,5 × 2 + 1,5 × 18
On obtient donc un gaz de masse molaire M = = 14,0 g ⋅ mol-1 .
2
La température atteinte par les gaz du fait de l’énergie dégagée par la réaction
vaut 3300 K et la pression atteint 110 bar ! ψ est très faible et on a :
2R γ 2 × 8,31× 1,3
v2 ≃ T1 = × 3300 = 4100 m ⋅ s-1.
M ( γ − 1) 14,0 ⋅ 10−3 × 0,3
La pression extérieure pext joue un rôle important dans la conception de la
tuyère. Si p2 = pext , le jet sortant est parallèle à l’axe de la tuyère (en effet, il n’y a pas
de gradient de pression orthogonal à un écoulement parallèle si on néglige l’influence
de la pesanteur).

En revanche le jet diverge en sortie si p2 > pext (les gaz n’ont pas été assez
détendus) ou se contracte au contraire si p2 < pext (gaz sur-détendus). Aucun de ces
deux cas n’est souhaitable, car la quantité de mouvement sortante est diminuée du fait
de la vitesse radiale dans le jet (on montre par ailleurs que si p2 ≠ pext , des ondes de
choc ou de détente apparaissent et dissipent de l’énergie : l’écoulement s’écarte du
modèle parfait). La tuyère de Laval est dite adaptée quand p2 = pext .
Pour la tuyère du premier étage d’une fusée, qui correspond à la traversée de
l’atmosphère, la condition p2 = pext ne peut pas être obtenue avec une longueur fixe
de tuyère, car pext varie avec l’altitude. On effectue donc un compromis. Pour les
étages supérieurs qui fonctionnent dans le vide, la condition p2 = pext ≃ 0 est obtenue
avec des tuyères suffisamment longues.

2.4 Force de poussée sur la fusée


La fusée, de masse m(t), expulse par ses tuyères des gaz avec un débit total
� �
qm et une vitesse relative u (dans le référentiel de la fusée) colinéaire à la vitesse v
de la fusée dans le référentiel géocentrique R supposé galiléen.

482
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 483

Afin d’étudier la dynamique de la fusée, on


effectue dans R un bilan de quantité de mouve-
ment au système fermé Σ constitué :
— À l’instant t, de la fusée de masse m(t) et de
G
vitesse v .
— À l’instant t + dt , de la fusée de masse m + dm
G G
avec dm < 0 , de vitesse v + dv , ainsi que des gaz
expulsés entre t et t + dt , de masse −dm > 0 .
La composition des vitesses montre que les
G G
gaz expulsés ont une vitesse u + v par rapport à
R.
La variation de la quantité de mouvement de Σ, par rapport à R , est donc, en
ne conservant que les termes d’ordre 1 :
G G G G G G G G G G
dp = p(t + dt ) − p(t ) = [(m + dm )(v + dv ) − (u + v )dm ] − [ mv ] = mdv − udm .
Il est à noter que le régime n’est pas ici stationnaire : la quantité de mouvement
G
que contient la fusée (volume de contrôle) n’est pas constante ; elle varie de d(mv )
pendant dt.
On peut appliquer à ce système fermé Σ le théorème de la résultante cinétique
G G G
dp dv G dm G dv G G
dans R galiléen : =m −u = Fext  m = Fext + Π .
dt dt dt dt
Tout se passe comme si on pouvait appliquer le P.F.D à la fusée, alors que
G
celle-ci est un système ouvert, mais en ajoutant aux forces extérieures, une force Π
appelée force de poussée.
G G dm
Le système ouvert « fusée » est soumis à une force de poussée Π = u , de
dt
G dm
sens opposé à celui de la vitesse u d’éjection des gaz puisque = −qm est négatif.
dt

3. TURBORÉACTEUR 
3.1 Description
Prenons l’exemple d’un des deux turboréacteurs d’un avion de ligne de masse
totale mavion = 40 tonnes , qui vole à une altitude H = 6000 m et à une vitesse cons-

tante v avion = u = 200 m ⋅ s-1 par rapport au référentiel terrestre R t dans lequel l’air
loin de l’avion est immobile.
On se placera dans le référentiel R avion en translation rectiligne uniforme par
rapport à R t , supposé galiléen. R avion est donc galiléen.

483
484 Partie V.  Mécanique

Dans R avion , la vitesse d’entrée de l’air dans le réacteur est v1 = u , ce qui cor-

respond à un débit massique qma = 51 kg ⋅ s-1 . La température extérieure est :


T1 = 250 K , et la pression atmosphérique est notée p1 . Les écoulements en entrée et
en sortie du turboréacteur sont supposés parallèles.
En régime de croisière, la manche d’entrée d’air joue le rôle inverse d’une
tuyère. Elle permet de transformer adiabatiquement l’énergie cinétique en enthalpie :
la température passe à T2 , la pression à p2 .
Dans le compresseur calorifugé l’air reçoit une puissance utile Pu 2 →3 > 0 : il
ressort à pression élevée p3 et à la température T3 = 450 K .
Dans la chambre de combustion, on injecte du kérosène avec un débit mas-
sique qmk = 0,68 kg ⋅ s-1 . Il réagit à pression constante avec l’oxygène de l’air pour
donner des gaz dont les propriétés physiques sont assimilées à celles de l’air. La ré-
action très exothermique permet d’obtenir une température élevée T4 = 970 K . Le gaz
reçoit une puissance thermique Pth > 0 .
Dans la turbine calorifugée, le gaz met en mouvement un rotor : il reçoit une
puissance utile Pu 4 →5 < 0 . La puissance reçue par le rotor est intégralement trans-
mise au rotor du compresseur via l’arbre de transmission. Le gaz sort à la température
T5 et à la pression p5 .
Dans la tuyère, le gaz subit une détente adiabatique : son enthalpie est trans-
formée en énergie cinétique, et il ressort à une grande vitesse v 6 , à la température T6
et à la pression atmosphérique p6 = p1 .

484
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 485

L’air sera considéré comme un fluide parfait et a fortiori comme un gaz parfait
de coefficient γ = c p / cV = 1,4 .

3.2 Pression de l’atmosphère standard internationale


Mgz

RT0
La pression atmosphérique dépend de l’altitude. Si on prend p( z ) = p0e ,
expression correspondant à une atmosphère isotherme considérée comme un gaz
parfait de masse molaire M = 29,0 g ⋅ mol-1 , on obtient une pression de 0,50 bar pour
z = 6000 m , en prenant T0 = 288 K , p0 = 1,013 bar et g = 9,81 m ⋅ s-2 .
L’aviation civile utilise un modèle plus fin d’atmosphère standard internationale
(I.S.A en anglais), valable jusqu’à une altitude de 11 km, dans laquelle la température
au sol est T0 = 288 K puis décroît régulièrement de 6,5 K tous les km :
T = T0 − αz , avec α = 6,5 K ⋅ km-1 . On obtient T (6000 m) = 249 K ≃ T1 = 250 K .
→ � Mpg �
La relation fondamentale de la statique des fluides grad p = ρg = − ez
RT ( z )
dp Mpg
fournit l’équation différentielle =− . On sépare les variables :
dz R(T0 − αz )
dp Mg  p  Mg  α 
=− dz  ln   = ln 1 − z  , en intégrant entre z = 0 et z.
p  α  p
 0 α R  T0 
RT0 1 − z
 T0 

Mg
 α  αR
Le modèle I.S.A aboutit à p = p0 1 − z  , soit numériquement à :
 T0 
5,26
p = 1,013 [1 − 0,0226z ] , avec p en bar et z en km.

On calcule alors p6 = p1 = 0,47 bar .

3.3 Détermination des autres inconnues


Nous allons calculer les grandeurs inconnues T2 , p2 , p3 = p4 , p5 , T5 , T6 et

v 6 . L’énergie cinétique massique de l’air v 2 / 2 n’est pas à prendre en compte dans


le réacteur, sauf en entrée et en sortie.
— Appliquons le premier principe industriel dans la manche d’entrée. En l’absence de
transferts thermiques et de travail utile, on a conservation de v 2 / 2 + h le long de la
1 1 Rγ
manche, donc v12 + h1 = v 22 + h2 . Comme h(T ) = T + Cte , on obtient :
2 2 �2 M ( γ − 1)
<<v1

485
486 Partie V.  Mécanique

1 M ( γ − 1) 2
T2 = T1 + v1 = 270 K .
2 Rγ
L’air est un fluide parfait qui subit des transformations isentropiques dans la
manche d’entrée, le compresseur, la turbine et la tuyère. Les lois de Laplace donnent :
γ
 T  γ −1
— Pour la manche d’entrée : p2 = p1  2  = 0,62 bar .
 T1 
γ
 T  γ −1
— Pour le compresseur : p3 = p2  3  = 3,7 bar = p4 .
 T2 
Pour la turbine, on ne peut pas procéder de même car on ne connaît pas la
température T5 . On applique alors le premier principe industriel au fluide entre l’entrée
et la sortie du compresseur et de la turbine. L’écoulement est stationnaire, et on peut
faire l’approximation qma + qmk ≃ qma :

— Dans le compresseur qma (h3 − h2 ) = Pu 2→3  Pu 2→3 = qma (T3 − T2 ) > 0 .
M ( γ − 1)

— Dans la turbine qma (h5 − h4 ) = Pu 4 →5  Pu 4→5 = qma (T5 − T4 ) < 0 .
M ( γ − 1)
Or, toute la puissance cédée par le gaz à la turbine est fournie au gaz dans le
compresseur via l’arbre de transmission. On a donc Pu 2→3 = −Pu 4 → 5 , soit :
T5 = T4 + T2 − T3 = 790 K . On peut désormais appliquer les lois de Laplace :
γ
 T  γ −1
— Dans la turbine : p5 = p4  5  = 1,8 bar .
 T4 
γ−1
p  γ
— Dans la tuyère : T6 = T5  6  = 539 K .
 p5 
— En l’absence de transferts thermiques et de travail utile, on a conservation de
v 2 / 2 + h le long de la tuyère, donc v 62 / 2 + h6 = v 52 / 2 + h5  v 6 = 2(h5 − h6 ) , ce

<<v 6 2

2R γ
qui permet de calculer la vitesse d’éjection v 6 = (T5 − T6 ) = 710 m ⋅ s-1 .
M ( γ − 1)
Lorsque le réacteur est à l’arrêt à l’aéroport, il n’y a pas d’air pour faire tourner
le rotor de la turbine et donc le compresseur. Il est donc nécessaire de démarrer le
compresseur en lui injectant de l’air comprimé. C’est le rôle de l’APU (auxiliary power
unit), moteur moins puissant, à démarrage électrique, souvent situé dans la queue de
l’avion, et qui fournit en outre l’énergie électrique et hydraulique permettant de faire
fonctionner les instruments de bord, la climatisation, etc. Une fois que le rotor tourne
assez vite, on injecte et on enflamme le kérosène : le réacteur démarre et devient
autonome ; on peut éteindre l’APU.

486
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 487

3.4 Poussée d’un réacteur et rendement


Étudions dans R avion un système Σ fermé constitué :
— À l’instant t, de l’air à l’intérieur du
réacteur (volume de contrôle Vc ), de
celui qui va rentrer dans Vc entre t et
t + dt , et du kérosène injecté entre t et
t + dt (avec une vitesse négligeable
par rapport à R avion ).
— À l’instant t + dt , de l’air à l’intérieur
de Vc , et de celui qui est sorti de Vc
entre t et t + dt .
Dans R avion l’écoulement est stationnaire (ce n’est pas le cas dans R t ,
puisque la vitesse en un point fixe de R t varie lors du passage de l’avion). La quantité
de mouvement de l’air dans Vc est constante. Celle de Σ varie donc de :

� � � dpΣ � �
dpΣ = (qma + qmk )dt v 6ex − qma dt uex , soit = qma (v 6 − u )ex + qmkv 6ex
dt
Le théorème de la résultante cinétique appliqué à Σ dans R avion galiléen fournit
� �
dpΣ � � �
= qma (v 6 − u )ex + qmkv 6ex = Favion/Σ + p1( S1 − S6 )ex . On en déduit :
dt
� � � �
FΣ /avion = −qma (v 6 − u )ex − qmkv 6ex + p1( S1 − S6 )ex .
Comme la pression extérieure p1 est uniforme au niveau du réacteur, la résul-
tante des forces de pression sur la surface fermée S = S 1 ∪ S ∪ S lat est nulle. La
6

force de pression sur la surface latérale du réacteur annule le terme p1( S1 − S6 )ex .

L’avion subit au niveau d’un réacteur la poussée :


� � � �
Π = −qma (v 6 − u )ex − qmkv 6ex ≃ −qma (v 6 − u )ex , car qmk << qma .

Comme v 6 > u , cette force est bien sûr dirigée vers l’avant de l’avion. Le turbo-
réacteur est conçu de façon à éjecter de l’air à une grande vitesse et avec un grand
débit massique.
Pour un seul réacteur la poussée vaut en norme qma (v 6 − u ) , et sa puissance
dans R t est P = qma (v 6 − u )u . En appliquant à l’air, dans R avion , le premier principe
industriel dans la chambre de combustion on obtient, avec toujours qmk << qma , la

puissance thermique reçue par l’air : Pth ≃ qma (h4 − h3 )  Pth = qma (T4 − T3 ) .
M ( γ − 1)
P M ( γ − 1)(v 6 − u )u
On en déduit le rendement d’un réacteur η = = = 20% .
Pth R γ(T4 − T3 )

487
488 Partie V.  Mécanique

3.5 Finesse de l’avion


Dans les conditions du vol étudié, outre la poussée des deux réacteurs, l’avion
est soumis à son poids, à la traînée et à la portance (ces deux dernières forces incluent
les forces de pression sur les autres parties de l’avion).
Comme l’avion est en mouvement de translation rectiligne uniforme, on obtient
en lui appliquant dans R t le théorème de la résultante cinétique :

dpavion � � � � � � � � �
= 0 = Ft + Fp + maviong + 2Π = Ft + Fp + maviong − 2qma (v 6 − u )ex .
dt
En vol horizontal, la poussée compense la traînée et la portance compense le
 � 1
F = ρS Cx u 2 = 2qma (v 6 − u ) = 52 kN
 t 2
poids :  .

 F = 1 ρS C u 2 = m g = 390 kN
 p 2
z avion

On en déduit la finesse dans les conditions de vol horizontal à assiette nulle :



Cz Fp
F = = � = 7,5 pour l’avion étudié.
Cx Ft
Remarquons qu’en toute rigueur, l’avion n’est pas un système fermé puisqu’il
consomme du kérosène : sa masse diminue durant le vol. On peut reprendre le calcul
de la poussée en se ramenant à un système fermé constitué à t de l’avion et de son
kérosène, de l’air dans les réacteurs, et de l’air qui va rentrer dans ceux-ci pendant dt.
�  → �
On a pour l’ensemble dans R t , toujours dans l’hypothèse v avion = Cte = −uex :

dp dmavion � � � dmavion
=− uex + 2qma (v 6 − u )ex + 2qmkv 6ex , avec = −2qmk . D’où :
dt dt dt

dp � � � �
= 2qmk uex + 2qma (v 6 − u )ex + 2qmkv 6ex = 2 [(qma + qmk )v 6 + (qmk − qma )u ] ex .
dt
Le théorème de la résultante cinétique fournit alors :
� � �
dp � � � �
= Ft + Fp + maviong ≃ 2qma (v 6 − u )ex . On retrouve Π = −qma (v 6 − u )ex .
dt

4. TURBINE PELTON 
4.1 Action d’un jet sur un auget en translation rectiligne uniforme
La turbine Pelton, ou roue Pelton, est constituée d’augets de forme similaire à
deux coquilles de noix.
Le jet d’eau incident de vitesse c dans le référentiel R du laboratoire, supposé
galiléen, vient heurter un auget et se séparer en deux. Les deux parties sont guidées
par l’auget et en ressortent sur les côtés de la roue en faisant un angle α proche de π
avec la direction incidente.

488
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 489

Sous l’action du jet, la roue, de rayon R, tourne à la vitesse angulaire Ω suppo-


sée constante : l’auget se déplace à la vitesse u = R Ω . Durant l’interaction avec le jet,
un auget donné se déplace peu si bien qu’on peut considérer qu’il est en translation
G G
rectiligne uniforme à la vitesse u = uex par rapport à R .
G G G
Le système est conçu pour que la vitesse du jet soit colinéaire à u : c = cex .
Nous allons, dans un premier temps, chercher à déterminer la force totale de
pression subie par l’auget, de la part de l’air et de l’eau du jet.
On considérera dans toute la suite que l’écoulement est parfait et incompres-
sible.
L’auget étant mobile dans R , l’écoulement n’y est pas stationnaire (le jet atteint
des points où initialement il n’y avait pas d’écoulement). On se place donc dans le
référentiel R a de l’auget, en translation rectiligne uniforme par rapport à R , et donc
galiléen. Dans R a , l’écoulement est stationnaire. Le jet incident possède la vitesse
G G
v e = (c − u )ex .
Toutes les hypothèses sont réunies pour appliquer le théorème de Bernoulli le
long d’une ligne de courant entre l’entrée et la sortie de l’auget.
On néglige l’influence de la pesanteur. Cette hypothèse est vérifiée pour l’écou-
c
lement sur l’auget, de dimension caractéristique L, si le nombre de Froude Fr =
gL
est grand.
L’écoulement étant parallèle en entrée et en sortie de l’auget, la pression y est
égale à la pression atmosphérique p0 .
1 1
Le théorème de Bernoulli fournit alors p0 + ρv e2 = p0 + ρv s2 . On en déduit
2 2
v s = v e : dans R a , la vitesse de sortie est égale à celle d’entrée.
Comme le débit volumique se conserve dans R a , on a qv = S v e = 2 S ′ v s : le
débit est partagé en deux parts égales par l’auget, dont les sections de sortie sont
S
donc S ′ = .
2

489
490 Partie V.  Mécanique

G G G
Pour déterminer la force totale sur l’auget Fauget = Fair/auget + Feau/auget , on ap-
plique le théorème de la résultante cinétique
au système Σ fermé constitué :
— À l’instant t, de l’eau à l’intérieur du volume
de contrôle Vc entre l’entrée et la sortie de
l’auget, et de l’eau qui va rentrer dans Vc
entre t et t + dt .
— À l’instant t + dt , de l’eau à l’intérieur de
Vc , et de l’eau qui est sortie de Vc entre t et
t + dt .
G S G G
On a dpΣ = 2 ρ (c − u )dt (c − u )cos αex − ρS (c − u )dt (c − u )ex soit :

2 dm
dm /2
G G G G G G
dpΣ G
= ρS (c − u )2 [ cos α − 1] ex = Fp0 /Σ + Fauget/Σ , avec Fauget/Σ = Fauget/eau = −Feau/auget .
dt
G
La force Fp0 /Σ est la force de pression qui s’exerce
sur Σ à travers la surface S eau . La pression vaut p0 en
tout point de cette surface. Elle vaut également p0 sur la
surface S air entre l’auget et l’air. Ainsi :
G G G
Fair/auget + Fp0 /eau = 0 , puisque S eau∪ S air est fermée.
G G G G
D’où Fauget = −Fp0 /eau + Fp0 /eau − ρS (c − u )2 [cos α − 1] ex ,
G G
soit Fauget = ρS (c − u )2 [1 − cos α ] ex .
En pratique, α = 180° − β , avec β un angle de l’ordre de quelques degrés, ce
qui évite le phénomène de talonnage (l’eau rejetée par un auget doit éviter au maxi-
mum le dos de l’auget suivant sous peine de faire chuter le rendement). Par la suite,
G G
on prend α = π donc Fauget = 2ρS (c − u )2 ex .
Repassons dans R pour effectuer un bilan de puissance. La vitesse d’entrée
G G G G
dans R est Ve = cex . Pour α = π , la vitesse de sortie dans R a vaut v s = −(c − u )ex ,

490
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 491

G G G G G G
donc celle dans R vaut Vs = v s + uex = −(c − u )ex + uex = −(c − 2u ) ex , en composant
de nouveau les vitesses.
Pour simplifier, nous prendrons, dans toute la suite, une géométrie d’auget avec
une seule coquille de noix, équivalente au système réel. Dans ce cas, il n’y a qu’une
section de sortie S , identique à celle de l’entrée.
Prenons un volume de contrôle Vc
fixe dans R , et qui contient l’auget. Les
énergies cinétiques qui rentrent et qui sor-
tent de Vc entre t et t + dt sont :
1 1
— dEce = ρS cdt ⋅ c 2 = ρS c 3 dt
2 2
dme

1 1
— dEcs = ρS (c − 2u )dt ⋅ (c − 2u )2 = ρS (c − 2u )3 dt . Les schémas correspondent
2 2
dms

au cas où le jet repart vers la gauche dans R après interaction avec l’auget, soit au
cas où u ≤ c / 2 , mais les calculs effectués sont algébriques et restent vrais si
c / 2 ≤ u ≤ c , car alors l’énergie cinétique « sortante » est négative, ce qui signifie
qu’en réalité, elle rentre dans Vc .
dEce − dEcs 1
Vc a reçu une puissance cinétique P = = ρS c 3 − (c − 2u )3  . En
dt 2  

posant X = u / c , on obtient après calcul P = ρS c 3  4 X 3 − 6 X 2 + 3 X  .


 
Comme l’écoulement n’est pas stationnaire dans R , l’auget ne reçoit pas l’inté-
gralité de cette puissance, puisqu’en s’éloignant de udt entre t et t + dt , il laisse le jet
s’allonger. L’énergie cinétique contenue dans les portions du jet qui correspondent à
l’allongement, est dEc′ = ρS udt ⋅ c 2 / 2 + ρS udt ⋅ (c − 2u )2 / 2 , soit une puissance per-
 
dm ′ d m′
due dans l’allongement :
1
P ′ = ρS u c 2 + (c − 2u )2  = ρS c 3 2 X 3 − 2 X 2 + X  . L’auget ne reçoit donc que :
2    
Pauget = P − P ′ = 2ρS c 3 ( X 3 − 2 X 2 + X ) .
G G
On vérifie bien que c’est la puissance de la force Fauget = 2ρS (c − u )2 ex que
G G
subit l’auget : Pauget = Fauget ⋅ u = 2ρS u(c − u )2 = 2ρS c 3 ( X 3 − 2 X 2 + X ) .

4.2 Bilans d’énergie et de moment cinétique sur la roue Pelton


Pour réduire l’énergie cinétique perdue par allongement du jet, la roue Pelton
contient un grand nombre d’augets (une vingtaine), si bien que le jet heurtant un auget
donné a peu le temps de s’allonger, car un nouvel auget se présente tout de suite.

491
492 Partie V.  Mécanique

Dans l’approximation d’un nombre infini d’augets, le jet ne s’allonge pas du tout
et l’écoulement est stationnaire dans R (il est en fait périodique, de période courte
devant la période de rotation de la roue). Le jet repart dans le sens opposé au jet
incident, avec une vitesse plus faible c − 2u . Le débit volumique se conservant en
régime stationnaire, la section totale du jet est plus grande après interaction avec les
augets de la roue.

Effectuons un bilan de moment cinétique au système Σ fermé constitué, à t, du


volume de contrôle grisé sur la figure ci-dessus, et de ce qui y rentre pendant dt ; à
t + dt , du volume de contrôle, et de ce qui en est sorti pendant dt :
G q dt → G q dt → G → G
dLOΣ = m OB ∧  −(c − 2u )ex  + m OB′ ∧  −(c − 2u )ex  − qm dt OA ∧ cex  , soit :
2 2
G
dLOΣ qm → G → G → G
= 2 OA ∧  −(c − 2u )ex  − qm OA ∧ cex  = −qm N
OA ∧ 2(c − u )ex
dt 2 G
−Rey
G
= −2qmR (c − u )ez
On a considéré, dans ce calcul, que les sections d’entrée sont petites devant le
rayon de la roue, ce qui permet de calculer le moment cinétique comme si ces sections
étaient ponctuelles.
Notons JOz le moment d’inertie de la turbine par rapport à l’axe Oz. En régime
stationnaire, la turbine possède une vitesse angulaire Ω constante, et son moment
cinétique JOz Ω par rapport à Oz est constant : la dérivée temporelle du moment ciné-
G
dLOΣ G
tique du système fermé Σ′ constitué de la turbine et de Σ est = −2qmR (c − u )ez .
dt
Les actions extérieures qui s’appliquent sur Σ′ se limitent à un couple résistant
de moment −Γ , exercé par la génératrice d’électricité que la turbine Pelton fait tourner
(les actions de pression et de pesanteur n’ont aucun effet sur la rotation de la roue :
leur moment par rapport à Oz est nul, et on néglige les frottements solides et fluides).
Le théorème du moment cinétique appliqué à Σ dans R fournit :
dLOzΣ
= −2qmR(c − u ) = −Γ , avec qm = ρS c .
dt
Le couple moteur exercé par la roue vaut donc Γ = 2ρS Rc (c − u ) , et sa

492
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 493

puissance P = ΓΩ = 2ρS uc(c − u ) = 2ρS c 3 X (1 − X ) . Au maximum, la turbine peut ré-


cupérer toute la puissance cinétique du jet, soit Pmax = ρS c 3 / 2 : le rendement de la
turbine vaut r = P / Pmax = 4 X (1 − X ) . L’étude de r montre que le rendement est maxi-
mal pour X = 1/ 2 , et vaut alors 1, ce qui est normal car on a négligé tout phénomène
dissipatif, et que pour u = c / 2 , la vitesse du jet dans R est nulle en sortie de l’auget.
On a bien prélevé toute la puissance cinétique possible.
On peut comparer ce rendement avec celui
de l’auget seul étudié au 4.1 :
Pauget = 2ρS c 3 ( X 3 − 2 X 2 + X ) , soit un

rendement rauget = 4( X 3 − 2 X 2 + X ) , dont la dé-


drauget
rivée = 4(1 − X )(1 − 3 X ) s’annule pour
dX
1 16
X= . On obtient rauget, max = ≃ 59% .
3 27
La conception de la roue Pelton permet de récupérer au mieux la puissance
cinétique du jet.

4.3 Barrage et récupération d’énergie hydraulique


On utilise des turbines
Pelton, couplées à un alterna-
teur, pour transformer de l’éner-
gie hydraulique en énergie élec-
trique dans le cas des chutes
d’eau de grande hauteur (de
plus de 100 m).
L’eau, retenue par un
barrage, s’écoule dans une conduite forcée à section circulaire de diamètre D cons-
tant.
La conduite se termine par un injecteur de diamètre d < D , dont est issu le jet
qui heurte les augets. L’injecteur permet de contrôler le débit de l’écoulement, et donc
la puissance électrique fournie. La surface libre de la retenue d’eau est à une hauteur
H au-dessus de la sortie de l’injecteur ; l’entrée de la conduite à une hauteur h proche
de H.
Si on suppose que l’écoulement est parfait, stationnaire et incompressible, et
de plus parallèle en sortie (point A) de l’injecteur, on peut appliquer la formule de Tor-
ricelli c = 2gH qui donne la vitesse d’éjection de l’eau.
πd 2 πd 2
Le diamètre d est réglable, donc le débit massique qm = c= 2gH
4 4
l’est également.

493
494 Partie V.  Mécanique

Le diamètre de l’injecteur ne doit pas cependant dépasser une valeur critique


pour laquelle le phénomène de cavitation apparaît (il se forme des bulles d’eau), c’est-
à-dire quand la pression dans la conduite devient inférieure à la pression de vapeur
saturante de l’eau, soit ps ≃ 0,012 bar à 10° C.
En supposant que ce phénomène n’apparaît pas, on peut déterminer la loi de
pression p(z) en un point M quelconque de la conduite à l’aide du théorème de Ber-
noulli appliqué entre M et A : p( z ) + ρv 2 / 2 + ρgz = p0 + ρc 2 / 2 .
Comme v = cd 2 / D 2 par conservation du débit volumique, on obtient :
1   d 4 
p( z ) = p0 − ρgz + ρc 2 1 −    .
2   D  
Sans injecteur ( d = D ), on aurait p( z ) = p0 − ρgz , et apparition de la cavitation
à partir d’une hauteur zs au-dessus de l’injecteur telle que ps = p0 − ρgzs avec
p0 105
ps << p0 , soit zs = ≃ 3 = 10 m , ce qui limiterait la hauteur de chute à 10 m !
ρg 10 × 10

1   d 4 
Avec l’injecteur, p( zs ) = ps << p0 entraîne ρgzs = p0 + ρ c�2 1 −    .
2 2gH   D  
 
Il n’y aura jamais cavitation si zs ≥ H soit :
  d 4  1/ 4
 p 
p0 + ρgH 1 −    ≥ ρgH ⇔ d ≤ D  0  . Pour un diamètre D = 60 cm et en pre-
  D    ρgH 
nant une hauteur de chute H = 300 m , on obtient d ≤ dmax = 26 cm .
Le phénomène de cavitation doit absolument être évité car, outre la chute de
rendement qu’il implique, l’implosion des bulles formées par cavitation provoque une
érosion accélérée de la conduite et de la turbine.

Dans le cas de la chute d’eau de 300 m, la valeur mesurée en sortie d’un injec-
teur de diamètre d = 12 cm est c ′ = 74 m ⋅ s-1 , légèrement inférieure à la valeur théo-
rique c = 2gH ≃ 77 m ⋅ s-1 du fait des pertes de charge le long de la conduite.
Tout se passe comme si la hauteur de chute H ′ était légèrement inférieure à la
2
H ′  c′ 
hauteur réelle H : C = = ≃ 0,92 . Le rendement de la conduite est donc égal
H  c 
3
1 1 πd 2 2 3
au rapport entre la puissance cinétique réelle Pcin = ′ c ′2 = ρ
qm C c , et la puis-
2 2 4
1
sance potentielle Ppot = qmc 2 , où qm
′ et qm sont les débits réel et théorique.
2
Ppot = qmgH est la puissance maximale qu’on peut tirer d’une chute d’eau de
hauteur H en l’absence de pertes (le débit serait alors qm ).

494
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 495

1 πd 2 3 P
On a donc Ppot = ρ c et r = cin = C 3/2 = 89% .
2 4 Ppot
Dans ces conditions, la puissance maximale que peut fournir la turbine Pelton
1 πd 2 3
est Pmax = ρ c ′ = 2,3 MW .
2 4
On utilise souvent plusieurs injecteurs sur la même roue pour améliorer le ren-
dement. Les pertes sont dues à la viscosité, au renvoi du jet avec un angle inférieur à
180°, aux éclaboussures, aux pertes mécaniques.
P
Le rendement peut atteindre 90%.
Pmax
c′ c′
Le rendement maximal est obtenu pour u = RΩ ≃ ⇔Ω≃ , or la vitesse de
2 2R
rotation Ω dépend du couple résistant −Γ exercé par la génératrice d’électricité. Ce
dernier est de la forme −λΩ (c’est une conséquence de la loi de Faraday : la généra-
trice, en débitant, freine la turbine avec un couple de moment proportionnel à Ω). Le
coefficient λ est une constante dépendant des caractéristiques de la génératrice et du
circuit électrique qu’elle alimente. On a donc, en régime stationnaire, et en négligeant
πd 2 c ′2 1 2 c′
les frottements : Γ = 2ρS Rc ′(c ′ − u ) = 2ρ R = πd ρRc ′2 = λΩ = λ , lors-
4 2 4 2R
que le rendement est maximal.
πd 2ρR 2c ′
En choisissant un couple (R, λ) vérifiant l’équation = λ , tout en res-
2
pectant les contraintes sur le diamètre de la roue (qui peut atteindre plusieurs mètres),
on optimise le rendement du système global.
c′
On peut enfin calculer le nombre de Froude Fr = , sachant que l’injecteur
gL
est placé près de la roue (à une distance égale à quelques diamètres du jet). Prenons
L = 50 cm , on a Fr ≃ 30 : la pesanteur influe peu sur le système.

5. ÉOLIENNE 
5.1 Principe
L’éolienne est placée dans une zone où les vents moyens ont une vitesse im-
� �
portante v1 = v1ex .
Le nombre de Mach reste cependant suffisamment faible pour que l’écoulement
d’air, de masse volumique ρ, soit incompressible. L’éolienne tourne à la vitesse angu-
laire Ω autour d’un axe horizontal ∆ = Ox . Elle subit un couple de moment M∆ de la
part de l’air, dont elle reçoit une puissance P = M∆ ⋅ Ω .

495
496 Partie V.  Mécanique

Si on note S la section du cylindre d’axe ∆ s’appuyant sur le rotor de l’éolienne,


la puissance maximale récupérable est la puissance cinétique du vent traversant S en
l’absence de l’éolienne.
Comme une masse δm = ρS v1dt traverse S pendant dt, l’énergie cinétique
1 1
qui la traverse est δEc = δm ⋅ v12 = ρS v13 dt , donc la puissance maximale récupé-
2 2
δEc 1
rable est Pc = = ρS v13 .
dt 2
L’efficacité de l’éolienne est définie par η = P / Pc . Un bon dimensionnement de
l’éolienne (diamètre, nombre de pales, torsion des pales…) permet de s’approcher de
l’efficacité maximale, appelée efficacité de Betz.

5.2 Efficacité maximale de Betz


Pour calculer l’efficacité maximale, on néglige tout phénomène dissipatif, ainsi
que les effets de la pesanteur : l’air est considéré comme un fluide parfait.
L’écoulement est supposé stationnaire et quasi unidirectionnel dans la direction
� �
Ox. En conséquence, il exerce une force F = Fex sur l’éolienne, et les échanges
d’énergie entre l’écoulement et l’éolienne font intervenir une translation de cette der-
� �
nière à la vitesse v = vex , et non plus une rotation. La puissance reçue par l’éolienne
est donc P = F ⋅ v au lieu de P = M∆ ⋅ Ω pour un système en rotation.

L’incompressibilité entraîne que la section du tube de courant qui traverse l’éo-


lienne augmente le long de l’écoulement puisque la vitesse décroît, l’éolienne préle-
vant de l’énergie cinétique à l’écoulement.
Loin en amont et en aval de l’éolienne, l’écoulement est parallèle à Ox. On note
v1 la vitesse de fluide et S1 la section du tube en amont ; v 2 et S 2 en aval.
Le débit massique qm le long du tube se conserve en régime stationnaire, ce
qui entraîne qm = ρv1S1 = ρv S = ρv 2 S2 . Comme v 2 < v1 , on a bien S2 > S1 .
L’air extérieur au tube de courant s’appuyant sur S est peu affecté par l’éo-
lienne, il glisse sans frotter sur l’air intérieur, et l’écoulement reste quasi-parallèle, de
� �
vitesse v ext ≃ v1ex . En conséquence, la pression y reste égale à la pression p0 en
amont (ce qu’on montre en appliquant le théorème de Bernoulli le long d’une ligne de
courant).

496
Chapitre 7.  Bilans macroscopiques 497

La pression est différente de p0 pour l’air qui traverse l’éolienne, sauf loin en
amont et loin en aval où l’écoulement est parallèle.
On ne peut pas appliquer le théorème de Bernoulli à la traversée de l’éolienne
car le fluide y reçoit un travail utile.
En revanche, on peut l’appliquer sur une ligne de courant entre un point en
amont et un point situé juste avant l’éolienne, où la pression est notée p − . On peut
également l’appliquer entre un point situé juste après l’éolienne, où la pression est
 1 1
 p0 + ρv12 = p − + ρv 2
 2 2
notée p + , et un point en aval :  .
 p + 1 ρv 2 = p + + 1 ρv 2
 0 2 2 2
Comme v 2 < v < v1 , on a p + < p0 < p − : l’éolienne subit une force de pression
G
( p − − p + ) S ex .
La différence entre la puissance cinétique entrante et sortante du tube est égale
1 1 1
à la puissance P reçue par l’éolienne : P = ρS v13 − ρS v 23 = qm (v12 − v 22 ) .
2 2 2
Un bilan de quantité de mouvement appliqué à l’air qui transite par le volume
G
dp G
de contrôle entre S1 et S 2 fournit = qm (v 2 − v1) ex .
dt
G
Ce système fermé n’est soumis qu’à la force −F de l’éolienne, car la pression
étant uniforme, égale à p0 , à l’extérieur du tube de courant, la résultante des actions
de pression est nulle.
G G
On en déduit F = qm (v1 − v 2 )ex , et une autre expression de la puissance :
G G
P = F ⋅ v = qmv (v1 − v 2 ) .
v1 + v 2
De ces deux expressions de puissance on tire celle, v = , de la vitesse
2
du vent au niveau de l’éolienne. On a donc v 2 = 2v − v1 et v1 − v 2 = 2(v1 − v ) .

Si λ = v / v1 , avec λ ∈ [0,1] , on obtient P = ρv 2 S (v1 − v 2 ) = 2ρv13 S λ2 (1 − λ ) .

L’efficacité de l’éolienne est donc η(λ ) = 4 λ2 (1 − λ ) .

497
498 Partie V.  Mécanique

Comme la dérivée de λ ֏ η est η′( λ ) = 4 λ(2 − 3λ ) , l’efficacité est maximale


2 2 v
pour λ = ⇔ v = v1 , et v 2 = 1 .
3 3 3

16
On obtient l’efficacité maximale ηmax = ≃ 59% lorsque le vent loin en aval
27
de l’éolienne a perdu 2/3 de sa vitesse.

En pratique, on obtient des efficacités proches de celle de Betz, et des efficaci-


Pélec
tés légèrement supérieures à 50%, compte-tenu de rendement de la génératrice
Pc
transformant l’énergie cinétique du rotor en énergie électrique.
Pour un diamètre de rotor de D = 90 m , on obtient, en prenant ρ = 1,2 kg ⋅ m-3 ,
un vent de 10 m ⋅ s-1 , et l’efficacité maximale de 59%, une puissance :
π × 902
P = 0,59 × 0,5 × 1,2 × × 103 = 2,3 MW .
4
Les grandes éoliennes délivrent des MW.

Remarquons qu’on aurait pu également effectuer un bilan de quantité de mou-


vement à l’air qui transite par le volume de contrôle infiniment mince entourant l’éo-
� �
dp �
lienne : = qm (v − v )ex = 0 puisqu’il n’y a pas de discontinuité de vitesse à la traver-
dt
sée de l’éolienne dans notre modèle.
Il y a en revanche une discontinuité de pression : le système fermé étudié est
� �
soumis à −F et à ( p − − p + ) S ex , force de pression qu’on calcule grâce aux expres-

sions de p + et p − trouvées précédemment.



dp � � � 1 �
On a finalement = 0  F = ( p − − p + ) S ex = ρ(v12 − v 22 ) S ex . On retrouve
dt 2
1 1
bien l’expression de la puissance P = Fv = ρS v (v12 − v 22 ) = qm (v12 − v 22 ) obte-
2 2
nue par un bilan de puissance cinétique.

498
499

[SIXIÈME PARTIE]

THERMODYNAMIQUE

Les chapitres :
1. Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 501
2. Systèmes ouverts en régime stationnaire 537
3. Diffusion de particules 555
4. Diffusion thermique 575
5. Rayonnement thermique 607

499
500
501

[THERMODYNAMIQUE 1]

RÉVISIONS ET COMPLÉMENTS :
LES PRINCIPES DE LA
THERMODYNAMIQUE
1. SYSTÈME THERMODYNAMIQUE
1.1 État d’un système macroscopique
Prenons comme système Σ un échantillon de matière macroscopique dont les
constituants élémentaires (atomes, ions, molécules) seront appelés, de façon géné-
rale, molécules. Le nombre de molécules que contient ce système est de l’ordre de
1023 , voire plus.
Σ est séparé du milieu extérieur par une surface S . On distingue les systèmes
fermés, qui n’échangent pas de matière avec le milieu extérieur à travers S , des sys-
tèmes ouverts, pour lesquels on peut avoir de la matière qui rentre, qui sort, ou les
deux à la fois. Un système fermé peut échanger de l’énergie avec l’extérieur, contrai-
rement à un système isolé qui n’échange ni matière, ni énergie avec l’extérieur.
La donnée de la position et du vecteur vitesse des molécules de Σ permet de
définir un micro-état. Vu le nombre gigantesque de ces molécules, il est impossible de
décrire un micro-état, encore plus de prévoir son évolution à partir d’interactions mi-
croscopiques.
Heureusement, un observateur « macroscopique » est insensible au mouve-
ment désordonné des molécules, et il lui suffit de quelques paramètres, appelés para-
mètres d’état (pression, température, volume, énergie…), pour définir l’état macrosco-
pique du système Σ (macro-état).
On distingue les paramètres d’état extensifs x, qui sont proportionnels au vo-
lume V de matière homogène (volume bien sûr, masse, énergie…), des paramètres
d’état intensifs X, au contraire indépendants de V (pression, température, et tout rap-
m
port de grandeurs extensives, comme la masse volumique ρ = ).
V
Ces paramètres d’état se déduisent des grandeurs microscopiques en effec-
tuant des moyennes sur un grand nombre de molécules. On ne sait faire le lien que
pour des modèles microscopiques très simples. C’est le cas de la théorie cinétique
des gaz parfaits. Dans un cours de thermodynamique classique, on ignore le plus sou-
vent la nature microscopique des corps, et les relations entre paramètres d’état sont
issues de l’expérience (relations phénoménologiques, appelées équations d’état).
Ainsi, tous les paramètres d’état nécessaires à la description de Σ étant fixés, tout

501
502 Partie VI.  Thermodynamique

autre paramètre d’état Y du système Σ est fixé, ce qui se traduit par une équation d’état
Y = f ( x, X ,...) . La grandeur Y est alors arbitrairement appelée fonction d’état.
L’état d’un système est défini lorsque ce dernier est à l’équilibre thermodyna-
mique, dont la définition est la suivante :

À l’équilibre thermodynamique, les paramètres d’état sont indépendants du


temps, et les paramètres d’état intensifs sont uniformes.

Néanmoins, pour un système faiblement hors d’équilibre, les paramètres d’état


intensifs restent définis localement. Ils dépendent alors du point M du système et du
temps t, et sont décrits par des champs : X(M,t). On parle d’équilibre thermodynamique
local (E.T.L).

1.2 Bilan différentiel d’une grandeur extensive


La grandeur extensive x caractérisant le système Σ peut varier entre deux ins-
tants t1 et t 2 > t1 . On distingue deux causes de variation de x : l’échange avec le milieu

extérieur, et la production de la grandeur x au sein de Σ : ∆x = x(t2 ) − x(t1) = x r + x p .


Entre t1 et t2 , x r est la grandeur reçue, et x p la grandeur produite. x r et x p
sont algébriques ( x r est positif si la grandeur est effectivement reçue par Σ, négatif si
elle est cédée au milieu extérieur, x p est positif si la grandeur est produite, négatif si
elle est détruite). D’autre part, x r et x p dépendent de la transformation suivie entre t1
et t2 (la notation ∆x r , ∆x p est proscrite), alors qu’il suffit de connaître l’état de Σ à t1
et t2 pour pouvoir calculer ∆x = x (t2 ) − x (t1) .

Pour une transformation élémentaire entre deux instants infiniment proches t et


t + dt , le bilan s’écrit : dx = x(t + dt ) − x(t ) = δx r + δx p (la notation dx r , dx p est pros-
crite). dx est une différentielle, δx r et δx p sont des formes différentielles, dépendant
du chemin suivi.

Certaines grandeurs extensives sont conservatives : le terme de production


p
δx est alors nul quelle que soit la transformation suivie. Une telle grandeur ne peut
donc être qu’échangée, et se conserve si le système est isolé. C’est par exemple le
cas de la masse, de la charge, ou de l’énergie totale d’un système.

1.3 Transformations réversibles / irréversibles


Premier exemple
Un cylindre d’axe vertical est fermé à sa base. Un piston étanche mobile ferme
l’autre extrémité, et permet d’emprisonner un gaz. Initialement (à t = t1 ), le système
est en équilibre thermodynamique. L’état du gaz est caractérisé par son volume V1 , sa

502
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 503

pression p1 et sa température T1 . Cet équilibre est rompu par modification du milieu


extérieur : on impose une contrainte externe en posant une masse M sur le piston (ce
qui revient à imposer une pression extérieure pext = p2 ≠ p1 ). Le système n’est plus en
équilibre mécanique, il évolue : le
piston descend et finit par se stabi-
liser. Après un temps de relaxation,
le système se trouve dans un nou-
vel état d’équilibre (à t = t2 ). L’état
du gaz est alors caractérisé par son
volume V2 , sa pression p2 égale à
la pression extérieure, et sa tempé-
rature T2 . Lorsque le piston s’im-
mobilise, il y a équilibre des pressions.
Lors de la transformation ( t1 < t < t2 ), l’état du gaz n’est pas rigoureusement
défini puisque ce dernier ne se trouve pas à l’équilibre thermodynamique. Les para-
mètres intensifs, comme la pression et la température, prennent des valeurs diffé-
rentes en des points différents du gaz. Les fluctuations autour d’une valeur moyenne
sont d’autant plus grandes que la transformation est « brutale », c’est-à-dire plus la
masse M est importante (grande différence p2 − p1 ). On ne peut pas représenter l’évo-
lution du gaz sur un diagramme (p,V) ou (p,T) ; seuls les états d’équilibre sont repré-
sentables par des points sur ces diagrammes.

Deuxième exemple
Un corps dont les parois sont diathermanes (elles permettent les échanges ther-
miques) est initialement (à t = t1 ) en équilibre thermodynamique avec un thermostat
de température T1 . L’état du corps est caractérisé par son volume V1 , sa pression p1
et sa température T1 . Cet équilibre est rompu par modification du milieu extérieur : on
impose une contrainte
externe en plaçant le
corps dans un ther-
mostat de tempéra-
ture Text = T2 ≠ T1 . Le
système n’étant plus
en équilibre ther-
mique, il évolue. Après un temps de relaxation, le système se trouve dans un nouvel
état d’équilibre (à t = t2 ). L’état du corps est alors caractérisé par son volume V2 , sa
pression p2 et sa température T2 égale à celle du thermostat. Les transferts ther-
miques cessent lorsque la température du corps est uniformément égale à T2 .
Comme précédemment, lors de la transformation ( t1 < t < t2 ), les paramètres

503
504 Partie VI.  Thermodynamique

intensifs, comme la pression et la température, ne sont pas homogènes, et leurs fluc-


tuations autour d’une valeur moyenne sont d’autant plus grandes que la transformation
est « brutale », c’est-à-dire plus la différence de température T2 − T1 est grande. On ne
peut pas représenter l’évolution du corps sur un diagramme (p,V) ou (p,T).

Transformations quasi-statiques
On peut imposer les contraintes extérieures de manière plus douce.
Dans le premier exemple, découpons la masse M en N petites masses M / N .
On pose chaque petite masse sur le piston et on attend à chaque fois l’équilibre.

Le système connaît N + 1 états d’équilibre pour lesquels la pression est impo-


sée par le milieu extérieur. À la fin de l’expérience, sa pression est p2 comme précé-
demment. En revanche, la température T2′ et le volume V2′ sont a priori différents de
T2 et de V2 .
Dans le deuxième exemple, plaçons le corps dans un thermostat de tempéra-
ture T1 + ∆T , avec ∆T = (T2 − T1) / N , puis augmentons cette température à T1 + 2∆T ,
puis encore à T1 + 3∆T ,…, et finalement à T1 + N ∆T = T2 . On attend à chaque fois
l’équilibre avant de changer la température du thermostat.

Le système connaît N + 1 états d’équilibre pour lesquels la température est im-


posée par le milieu extérieur. À la fin de l’expérience, sa température est T2 comme
précédemment. En revanche, la pression p2′ et le volume V2′ sont a priori différents
de p2 et de V2 .
On peut finalement, dans les deux cas, placer N + 1 points correspondant à la
transformation subie par le système étudié, sur un diagramme (p,V) ou (p,T).
Dans la limite théorique où N → ∞ , le système est constamment en équilibre

504
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 505

mécanique (à tout instant, p = pext s’il existe des parois mobiles) et thermique (à tout
instant, T = Text s’il existe des parois diathermanes). On peut parler de sa pression p
et de sa température T puisque ces grandeurs sont homogènes. Si on inverse les
contraintes externes, c’est-à-dire si on fait passer de nouveau la pression extérieure
de p2 à p1 dans le premier exemple, ou la température extérieure de T2 à T1 dans le
deuxième, en une infinité d’étapes, le système repasse exactement par les mêmes
états que lors de la transformation directe. On dit dans ce cas que la transformation
est réversible.
On définit une transformation quasi-statique comme suffisamment lente pour
pouvoir négliger les fluctuations spatiales des grandeurs intensives (p,T,…). On peut
alors représenter une telle transformation dans un diagramme (p,V) ou (p,T). Néan-
moins la lenteur ne suffit pas pour qu’une transformation soit réversible : lors d’une
très lente détente d’un gaz dans le vide, réalisée en perçant un petit trou dans l’en-
ceinte le contenant, il n’y a pas équilibre avec le milieu extérieur ( p ≠ pext = 0 ). D’autre
part, si les frottements fluides disparaissent pour des transformations infiniment lentes,
ce n’est pas le cas des frottements solides, qui rendent irréversibles de telles transfor-
mations. Enfin, certains systèmes présentent des phénomènes d’hystérésis, comme
un fil métallique sur lequel on exerce une traction, et qui s’allonge. Lorsque la force F
exercée devient trop grande, la transformation est irréversible (on passe du domaine
d’élasticité au domaine de plasticité), et la longueur du fil lorsqu’on revient à F = 0 est
plus grande qu’avant la traction. Là encore, la lenteur de la transformation ne suffit pas
à la rendre réversible.
En conclusion, les transformations réelles sont irréversibles, mais lorsque les
contraintes ( pext ,Text …) sur le système varient lentement, il est constamment proche
de l’équilibre thermodynamique et on se rapproche d’une transformation réversible. Il
faut faire appel au second principe de la thermodynamique pour disposer d’un critère
permettant de mesurer « l’irréversibilité » d’une transformation, et de valider éventuel-
lement l’hypothèse d’une transformation réversible. Retenons l’implication :

Un système subit une transformation réversible s’il est constamment en équilibre ther-
 p = pext en présence de parois mobiles
modynamique   .
T = Text en présence de parois diathermanes

On peut alors représenter l’évolution du système par une courbe continue dans
un diagramme (p,V) ou (p,T).

1.4 Réversibilité / irréversibilité en Physique


Prenons quelques exemples simples tirés de la mécanique. Considérons le
mouvement d’un point matériel M soumis à des forces connues. Les conditions initiales
→ G
sur la position, OM (t = 0) , et la vitesse, v (t = 0) , du point matériel étant fixées, son

505
506 Partie VI.  Thermodynamique

→ � � �ɺ
mouvement est entièrement déterminé. On connaît OM (t ) = ξ(t ) , et v (t ) = ξ(t ) , entre
→ �
les dates t = 0 et t = t0 > 0 où le vecteur position est OM0 et le vecteur vitesse v 0 .
� 
→ �
Supposons qu’à t0 on impose un vecteur vitesse −v 0 : on a OM (t ) = ψ(t ) pour
t ≥ t0 . Deux cas se présentent :
� � �ɺ �ɺ
— Si ψ(t0 + t ′) = ξ(t0 − t ′) ∀t ′ ≥ 0 , ce qui entraîne ψ (t0 + t ′) = −ξ(t0 − t ′) ∀t ′ ≥ 0 , le mou-
vement est réversible. Les équations du mouvement sont invariantes par le change-
ment t → −t . On peut formuler cette propriété autrement : le film du mouvement du
point matériel pour t ≤ t0 , passé à l’envers, montre l’évolution qu’on obtiendrait avec
→ �
les conditions initiales ( OM0 , −v 0 ). C’est le cas du mouvement d’un corps uniquement


d2 OM �
soumis à son poids, dont l’équation du mouvement est 2
= g , ou de l’oscillateur
dt
2
d x
harmonique, dont l’équation du mouvement est + ω0 2 x = 0 .
dt 2

� �
— Si ψ(t0 + t ′) ≠ ξ(t0 − t ′) , le mouvement est irréversible. Les équations du mouvement
ne sont pas invariantes par le changement t → −t . Le film du mouvement du point
matériel pour t ≤ t0 , passé à l’envers, décrit une situation physiquement différente.
m�
C’est le cas si on rajoute des frottements fluides de la forme − v dans les
τ
→ 

d2 OM 1 d OM �
deux exemples précédents. L’équation du mouvement devient + =g
dt 2 τ dt

506
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 507

d2 x ω0 dx
pour le corps soumis à son poids, et 2
+ + ω02 x = 0 , avec ω0 / Q > 0 , pour
dt Q dt
l’oscillateur harmonique, désormais amorti.
Dans ce dernier cas, le film passé à l’envers correspond à un mouvement am-
d2 x
ω dx
plifié, dont l’équation est − 0 + ω02 x = 0 . Il est impossible d’obtenir un tel mou-
dt 2 Q dt
vement avec les mêmes forces, c’est-à-dire sans l’intervention d’un opérateur qui four-
nisse de l’énergie au système.

Beaucoup de phénomènes physiques sont régis par des équations différen-


tielles aux dérivées partielles. Lorsque le temps intervient explicitement dans ces
équations, le phénomène est réversible si les équations sont inchangées quand on
procède au changement t → −t , irréversible sinon.

Plus généralement, une transformation est réversible lorsque la transformation


inverse est obtenue en modifiant en sens inverse les contraintes appliquées au sys-
tème, et irréversible si ce n’est pas le cas.
Par exemple, un gaz comprimé dans une bouteille s’échappe lorsqu’on ouvre
le bouchon. Le film passé à l’envers décrit une transformation qui n’est pas possible :
celle d’un gaz qui rentre spontanément dans une bouteille pour y créer une surpres-
sion. On peut en revanche créer cette surpression, par exemple à l’aide d’une pompe,
mais cette pompe n’intervenait pas lors de la transformation directe.

2. LE PREMIER PRINCIPE POUR UN SYSTÈME


FERMÉ
2.1 Grandeurs énergétiques
On note E = Ec + Ep l’énergie totale d’un système fermé Σ, somme de l’énergie
cinétique de ses constituants dans le référentiel galiléen d’étude R , et de son énergie
potentielle.

Dans le référentiel R du laboratoire, on montre que Ec est la somme de Ecmac

(énergie cinétique macroscopique de Σ) et de l’énergie cinétique Ec * due à l’agitation


thermique, qui existe même si Σ est au repos dans R .
On peut également décomposer l’énergie potentielle Ep de Σ en énergie poten-

tielle extérieure Epext (due aux actions qu’exerce le milieu extérieur sur Σ) et énergie

potentielle intérieure Epint .

507
508 Partie VI.  Thermodynamique

Em = Ec mac + Epext est l’énergie mécanique de Σ (telle qu’elle est définie en mé-
canique pour un système macroscopique). Elle ne contient pas l’énergie potentielle
intérieure car on fait le choix de décrire les interactions intérieures au niveau micros-
copique.
Ce « découpage » énergétique convient pour les systèmes usuels, comme un
morceau de métal, qui ne contiennent pas d’énergie potentielle intérieure macrosco-
pique. En revanche, pour un système constitué de deux objets macroscopiques reliés
1
par un ressort, l’énergie potentielle élastique Ep12int = k (ℓ − ℓ 0 )2 , intérieure au sys-
2
tème, est intégrée à l’énergie mécanique. De même pour un système constitué de
deux étoiles distantes de r, l’énergie potentielle gravitationnelle Ep12int = −Gm1m2 / r ,
intérieure au système, est là aussi intégrée à l’énergie mécanique.
Finalement, E = Ec + Ep = Ec mac + Epext + Ec * + Epint  E = Em + U .

L’énergie totale de Σ se décompose en E = Em + U , où U = Ec * + Epint est


l’énergie interne de Σ (énergie « cachée » pour un observateur macroscopique).
U contient toute l’énergie de Σ qui n’est pas prise en compte pour un système
mécanique macroscopique.

Les trois grandeurs, E, Em et U sont des fonctions d’état extensives. On fera


également intervenir l’enthalpie de Σ : H = U + pV . Les grandeurs E, Em , U et H sont
toutes des énergies, et ont pour unité le joule (J). Les grandeurs massiques sont no-
tées u et h (de préférence à Um et Hm qui désignent plutôt des grandeurs molaires).
d3H d3U d3V p d3m
On a h = = +p  h=u+ , où ρ = 3 est la masse volumique
d3 m d3 m d3 m ρ dV
du fluide.

2.2 Échanges énergétiques / Premier principe


Le choix de décrire les interactions intérieures au système Σ comme des forces
entre atomes, molécules ou ions implique qu’il n’y a pas de travail de forces intérieures
non conservatives à prendre en compte pour effectuer un bilan d’énergie totale de Σ.
En effet, ces forces sont conservatives (il n’y a pas de frottements à cette échelle de
la matière). En l’absence de forces extérieures non conservatives, l’énergie totale E
du système se conserve donc. L’énergie totale est une grandeur conservative, qui peut
être échangée, mais pas produite ( E p = 0 ). L’énergie totale de « l’univers » se con-
serve.

Les variations de l’énergie totale E sont donc dues au travail des forces exté-
rieures non conservatives. Ces échanges d’énergie avec l’extérieur peuvent se faire
de deux façons :

508
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 509

— Sous forme ordonnée. L’échange d’énergie est un travail, noté W.


— Sous forme désordonnée. L’échange est une chaleur (ou transfert thermique), no-
tée Q.

— W fait intervenir le déplacement d’ensemble des consti-


tuants microscopiques du système. Si ce déplacement ne con-
cerne que certains constituants (travail de la force électrique
sur les charges mobiles d’un conducteur par exemple), il ne
correspond pas à un mouvement macroscopique, et on le note
G
W mic . Dans les autres cas, il fait intervenir la vitesse v (M ) du
point M du système (travail des forces de pression par exemple), et on le note W mac .
N N
G G
Cette vitesse est une moyenne : v (M ) =  mi v i  mi , à un instant fixé, sur l’en-
i =1 i =1
G
semble des N molécules de masse mi et de vitesse v i présentes dans un volume
mésoscopique autour du point M (nous reviendrons en détail sur la notion d’échelle
mésoscopique dans le chapitre sur la statique des fluides).
— Q fait intervenir le mouvement désordonné des constituants microscopiques. Ce
G
déplacement vaut v i dt pour un de ces constituants. On peut avoir Q ≠ 0 même si le
système est au repos.

Travail et chaleur ne sont pas des fonctions d’état de Σ, ils ne sont définis que
pour une transformation donnée.

Pour une transformation élémentaire réversible, on peut mettre le travail élé-


mentaire sous la forme δW = Xdx , où X est un paramètre d’état intensif et x un para-
mètre d’état extensif.
Au contraire, la chaleur élémentaire δQ ne peut pas s’exprimer en fonction des
paramètres d’état du système. Un système calorifugé ne reçoit pas d’énergie sous
forme de chaleur, il subit une transformation adiabatique : δQ = 0 . Les transferts ther-
miques étant lents, une transformation rapide peut souvent être considérée comme
adiabatique.
Le premier principe appliqué à Σ s’écrit donc :

∆E = W + Q pour une transformation finie.


dE = δW + δQ pour une transformation élémentaire.

Étudions maintenant quelques cas particuliers.

Cas où le système étudié est au repos dans R

Ep = Cte  ∆Ep = 0


ext ext
On a alors  , donc ∆Em = 0 et ∆E = ∆Em + ∆U = ∆U .
Ec mac = 0

509
510 Partie VI.  Thermodynamique

Le premier principe se met alors sous la forme la plus connue (bien que moins
générale) :

∆U = W + Q pour une transformation finie.


dU = δW + δQ pour une transformation élémentaire.

Cas du travail électrique

Le théorème de l’énergie mécanique appliqué à Σ dans R fournit ∆Em = W mac :


travail macroscopique des forces extérieures non conservatives. Le premier principe
fournit quant à lui ∆E = ∆Em + ∆U = W mac + W mic + Q  ∆U = W mic + Q .
Prenons l’exemple d’un système contenant un conducteur ohmique de résis-
tance R parcouru par un courant d’intensité i : pour une transformation élémentaire,
dU = Ri 2dt + δQ . En régime stationnaire, dU = 0  δQ = −Ri 2dt < 0 : le système four-
nit un transfert thermique à l’extérieur par effet Joule, alors que si Σ est calorifugé,
δQ = 0  dU = Ri 2dt > 0 : l’effet Joule se traduit par l’augmentation de l’énergie in-
terne du système.

Cas des frottements intérieurs


Si le système est composé de deux solides frottant l’un contre l’autre, ou d’un
fluide visqueux en écoulement, les forces de frottement internes tendent à faire dimi-
nuer l’énergie mécanique de Σ. Dans ce cas, il faut prendre en compte le travail
Wintmac < 0 des forces intérieures non conservatives dans le théorème de l’énergie
mécanique (alors qu’il n’est pas pris en compte dans le premier principe, puisque les
forces intérieures sont conservatives au niveau microscopique, et que leur énergie
potentielle est incluse dans l’énergie interne) : ∆Em = W mac + Wintmac . Le premier prin-

cipe fournit quant à lui ∆E = ∆Em + ∆U = W mac + Q  ∆U = −Wintmac + Q .

Pour une transformation élémentaire, dU = −δWintmac + δQ . En régime station-

naire, dU = 0  δQ = δWintmac < 0 : le système cède au milieu extérieur l’énergie dis-

sipée par les frottements, alors que si Σ est calorifugé, δQ = 0  dU = −δWintmac > 0 :
l’effet des frottements internes est une augmentation de l’énergie interne du système.

2.3 Travail des forces de pression sur un système


Considérons un système Σ placé
dans un cylindre de section S . Un piston,
mobile en translation selon l’axe du cy-
lindre, repéré par son abscisse x (la base
du cylindre se trouve en x = 0 ) délimite le

510
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 511

volume V = S ⋅ x de Σ. La pression extérieure pext est supposée uniforme au niveau


du piston, si bien que le milieu extérieur exerce sur Σ (qui inclut le piston) des actions
G G
de résultante Fext = − pext S ex , dont le travail élémentaire vaut, pour un déplacement

→ G G 

d OM = dxex du piston : δW = Fext ⋅ d OM = − pext S dx = − pext dV .

Si la pression extérieure pext est uniforme au niveau des parties déformables


de Σ, le travail élémentaire des forces de pression sur un système de volume V vaut :
δW = − pext dV .

Le travail reçu est positif si le volume diminue (transformation résistante), et


négatif si le volume augmente (transformation motrice, Σ fournit du travail au milieu
extérieur, comme c’est le cas pour les moteurs thermiques).
Pour une transformation réversible, le système est en équilibre avec le milieu
extérieur à tout instant, ce qui impose pext (t ) = p(t ) ∀t , où p est la pression de Σ. On
peut alors écrire δWrév = − pdV .

On suppose par la suite que le système est uniquement soumis au travail des
forces de pression.

3. LE SECOND PRINCIPE POUR UN SYSTÈME


FERMÉ
3.1 Énoncé du second principe
Le premier principe traduit la conservation de l’énergie totale. Le second prin-
cipe permet, lui, de prédire le sens d’évolution d’un système.

Le second principe introduit l’entropie S de Σ, qui est une fonction d’état exten-
sive, non conservative. Pour une transformation finie entre les instants t1 et t2 , la va-

riation d’entropie est ∆S = S(t2 ) − S(t1) = Sr + S p , avec :


— S p ≥ 0 ; Sp est l’entropie produite lors de la transformation ( S p > 0 pour une trans-
formation irréversible, S p = 0 dans le cas limite d’une transformation réversible).
t2
δQ
 TS
r
— S = est l’entropie reçue lors de la transformation. δQ est l’énergie reçue
t1

sous forme de chaleur par Σ pendant dt à travers la surface S , de température TS , le


séparant du milieu extérieur. L’entropie a donc pour unité le joule par kelvin ( J ⋅ K -1 ).
δQ
Pour une transformation élémentaire, dS = + δS p .
TS

511
512 Partie VI.  Thermodynamique

Pour une transformation adiabatique (et a fortiori si le


système Σ est isolé), on a ∆S = S p ≥ 0 : l’entropie de Σ ne
peut que croître.
Dans d’autres cas, l’entropie d’un système peut dé-
croître, par exemple pour une transformation réversible telle
que δQ < 0 .

Pour une transformation adiabatique et réversible, on a ∆S = 0 : une telle trans-


formation est isentropique.

Remarquons que si la température TS n’est pas uniforme, il faut décomposer


la surface S en surfaces élémentaires pour pouvoir calculer l’entropie reçue.

3.2 Interprétation statistique de l’entropie


Boltzmann donna en 1877 une interprétation microscopique de l’entropie S d’un
système Σ à l’équilibre. Un grand nombre Ω (appelé nombre de complexions) de micro-
états est accessible pour un macro-état donné (par exemple d’énergie interne U et de
volume V donnés). Si le système est isolé, tous ces micro-états sont équiprobables, et
Boltzmann a défini dans ce cas l’entropie de Σ par S = kB ln Ω .
Par exemple (cf. partie 5), lors d’une détente
de Joule-Gay-Lussac, deux enceintes calorifugées et
indéformables sont reliées par une vanne. Un gaz
parfait occupe initialement une des enceintes de vo-
lume V, alors que la deuxième enceinte, de volume
V ′ , est vide. Lorsqu’on ouvre la vanne, le gaz se dé-
tend à énergie constante (pas de travail ni de chaleur reçus), et occupe finalement le
volume V + V ′ . Le nombre Ω2 de micro-états accessibles après ouverture de la vanne
est plus grand que celui, Ω1 , avant ouverture, et l’entropie augmente bien lors de cette
transformation irréversible d’un système isolé.
De façon générale, lorsqu’on passe d’un état ordonné à un état moins ordonné,
le nombre de complexions croît donc l’entropie du système croît.

L’entropie est une mesure du désordre d’un système.

Pour un corps pur, l’entropie molaire sous phase gazeuse est donc (beaucoup)
plus grande que sous phase liquide, elle-même plus grande que sous phase solide.

3.3 Calcul de variations d’entropie

Pour une transformation élémentaire réversible, on a δS p = 0 , et TS = TΣ = Text


(il y a équilibre thermique à chaque instant). On note simplement T la température TΣ

512
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 513

δQrév
de Σ. T est alors uniforme. Le second principe devient dans ce cas dS = , or le
T
premier principe donne pour une transformation réversible dU = − pdV + δQrév , d’où
1 p
dS = dU + dV , relation connue sous le nom d’identité thermodynamique.
T T
Elle n’est vraie que pour une transformation réversible, mais permet de calculer
une variation d’entropie ∆S = S(t 2 ) − S(t1) entre deux états (1) et (2) connus, puisque
cette variation est indépendante du chemin suivi entre ces deux états.
(2)
1 p 
En prenant un chemin réversible, on obtient ∆S =  T dU + T dV  .
(1)

1 V
Comme H = U + pV  dH = dU + pdV + Vdp , on a aussi dS = dH − dp ,
T T
(2)
1 V 
qui est une autre identité thermodynamique, et ∆S =  T dH − T dp .
(1)
Le concept de transformation réversible est donc très important :
— Théoriquement, car il permet le calcul de ∆S .
— Dans la pratique, car une transformation réelle, irréversible, peut être considérée
comme réversible si la production d’entropie reste petite devant l’entropie échangée.

4. PROPRIÉTÉS DES CORPS PURS


4.1 Coefficients thermoélastiques
Un corps pur ne contient qu’une seule espèce chimique. Le gaz dioxyde de
carbone est un corps pur (il ne contient que des molécules CO2 ), contrairement à un
mélange comme l’air, qui contient grossièrement 20% de O2 (g) et 80% de N2 (g) .
Un corps pur simple ne contient qu’un seul élément chimique, par exemple le
fer Fe(s) ou le dioxygène O2 (g) , alors qu’un corps pur composé en contient plusieurs,
comme l’eau H2O(ℓ ) .

Pour un système fermé constitué de n moles d’un corps pur, les paramètres
d’état p, V et T ne sont pas indépendants, mais liés par une équation d’état thermoé-
lastique, c’est-à-dire une relation f ( p,V ,T ) = 0 .

Par exemple pour un gaz parfait, on a pV − nRT = 0 .


Pour un corps pur, il n’y a donc que deux variables indépendantes parmi p, V
et T. En particulier, le volume V dépend de p et de T : V ( p,T ) . On peut donc écrire

513
514 Partie VI.  Thermodynamique

 ∂V   ∂V 
l’expression différentielle : dV =   dp +   dT .
 ∂p T  ∂T  p
On définit et on tabule les coefficients thermoélastiques suivants :
1  ∂V 
— χT = −   , coefficient de compressibilité isotherme (homogène à l’inverse
V  ∂p T
d’une pression) qui traduit l’influence de la pression sur le volume (V diminue toujours
si p augmente : χT > 0 ).
1  ∂V 
— α= , coefficient de dilatation isobare (homogène à l’inverse d’une tempé-
V  ∂T  p
rature), qui traduit l’influence de la température sur le volume (le plus souvent V aug-
mente quand T augmente : α > 0 , mais pas toujours : α < 0 par exemple pour H2O(ℓ )
entre 0°C et 4°C).

4.2 Coefficients calorimétriques


Ils traduisent l’influence des paramètres d’état parmi p, V et T sur l’énergie d’un
système de masse m, contenant n moles. On note M = m / n sa masse molaire. Les
coefficients calorimétriques ℓ et k ne sont pas au programme ; seule l’influence de la
température l’est.
— On choisit d’exprimer l’énergie interne U (T ,V ) comme une fonction des variables
 ∂U   ∂U 
indépendantes T et V, d’où dU =   dT +  = mcV dT + ( ℓ − p )dV .
 dV déf
 ∂T V  ∂V T

 ∂U  -1 -1
Par définition, mcV = nMcV = CV =   , où cV ( J ⋅ K ⋅ kg ) est la capacité
 ∂T V
thermique massique du corps pur à volume constant, CVm = McV ( J ⋅ K -1 ⋅ mol-1 ) la ca-
pacité thermique molaire du corps pur à volume constant, et CV ( J ⋅ K -1 ) la capacité
thermique du système à volume constant.

1 p
L’identité thermodynamique dS = dU + dV permet d’exprimer la différen-
T T
mcV ℓ
tielle de l’entropie S(T ,V ) : dS = dT + dV . Le théorème de Schwarz permet
T T
d’écrire que les dérivées croisées sont égales car U et S sont des fonctions d’état :
 ∂mcV   ∂( ℓ − p )   ∂mcV   ∂ℓ   ∂p 
  =  ⇔  =  ∂T  −  ∂T 
  ∂V T  ∂ T V  ∂ V T  V  V

 ∂  mcV   =  ∂  ℓ   ⇔ 1  ∂mcV  = − ℓ + 1  ∂ℓ 
 ∂V  T     
 ∂T  T  V T  ∂V T 
T 2 T  ∂T V

 T
 ∂p 
En combinant ces deux relations, on obtient ℓ = T   . Cette relation (hors
 ∂T V

514
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 515

programme) montre que le coefficient calorimétrique ℓ est lié aux coefficients thermo-
élastiques. Il est donc calculable si on connaît l’équation d’état thermoélastique.
— On choisit d’exprimer l’enthalpie H (T , p ) comme une fonction des variables indé-
 ∂H   ∂H 
pendantes T et p, d’où dH =   dT +  ∂p  dp déf
= mc p dT + (k + V )dp .
 ∂T  p  T

 ∂H  -1 -1
Par définition, mc p = nMc p = Cp =   , où c p ( J ⋅ K ⋅ kg ) est la capacité
 ∂T  p
thermique massique du corps pur à pression constante, Cpm = Mc p ( J ⋅ K -1 ⋅ mol-1 ) la

capacité thermique molaire du corps pur à pression constante, et Cp ( J ⋅ K -1 ) la capa-


cité thermique du système à pression constante.

1 V
L’identité thermodynamique dS = dH − dp permet d’exprimer la différen-
T T
mc p k
tielle de l’entropie S(T , p ) : dS = dT + dp . Le théorème de Schwarz permet
T T
d’écrire que les dérivées croisées sont égales car H et S sont des fonctions d’état :
 ∂mc p   ∂( k + V )   ∂mc p   ∂k   ∂V 
  =  ⇔  =  + 
 ∂p T  ∂T  p  ∂p T  ∂T  p  ∂T  p

 ∂  mc p    ∂  k  1  ∂mc p  k 1  ∂k 
 ∂p  T   =  ∂T  T   ⇔ T  ∂p  = − T 2 + T  ∂T 
   T  p  T p

 ∂V 
En combinant ces deux relations, on obtient k = −T   . Cette relation (hors
 ∂T  p
programme) montre que le coefficient calorimétrique k est lié aux coefficients
thermoélastiques. Il est donc calculable si on connaît l’équation d’état thermoélastique.
Finalement, toutes les propriétés thermodynamiques d’un corps pur sont con-
nues si on connaît deux équations d’état :
— L’équation d’état thermoélastique f ( p,V ,T ) = 0 qui permet de calculer α, χT , ℓ et k.
— L’équation d’état calorimétrique f (U ,T ,V ) = 0 , ou f (H ,T , p ) = 0 , qui permet de cal-
culer mcV et mc p .

4.3 Gaz parfait (G.P)


L’équation d’état thermoélastique est pV = nRT .
La constante des gaz parfaits vaut R = 8,314 J ⋅ K -1 ⋅ mol-1 .

On en déduit α = 1/ T , χT = 1/ p , ℓ = p et k = −V , puis :
dU = mcV dT + ( ℓ − p )dV = mcV dT , et dH = mc p dT + (k + V )dp = mc p dT : U et H ne
dépendent que de T (la démonstration présentée ici est hors-programme).

515
516 Partie VI.  Thermodynamique

U = U (T )
Pour un gaz parfait, U et H ne dépendent que de la température :  ,
H = H (T )
lois appelées respectivement première loi de Joule, et seconde loi de Joule.

L’équation d’état calorimétrique se met sous la forme U = β nRT avec, à tem-


pérature ambiante, β = 3 / 2 pour un gaz parfait monoatomique, et β = 5 / 2 pour un
gaz parfait diatomique. On en déduit H = U + pV = U + nRT = (β + 1)nRT d’où :
 ∂U  dU  ∂H  dH
mcV =  =
 ici = β nR , et mc p =  =
 ici = (β + 1)nR .
 ∂T V d T  ∂ T V dT
cp β +1
On pose γ = . On a donc γ = > 1 (on peut montrer que γ > 1 est vrai
cV β
pour tout corps pur), soit β = 1/ ( γ − 1) .
On a γ = 5 / 3 ≃ 1,67 pour un gaz parfait monoatomique et γ = 7 / 5 ≃ 1,40 pour
un gaz parfait diatomique (comme l’air), à température ambiante. On a donc pour un
R Rγ
G.P : CVm = McV = , et Cpm = Mc p = .
γ −1 γ −1

Dans l’hypothèse où γ est indépendant de la température, les fonctions d’état U


nR nR γ
et H d’un G.P sont connues : U (T ) = T + Cte et H (T ) = T + Cte .
γ −1 γ −1

De même on peut, à l’aide des identités thermodynamiques, calculer l’entropie


en fonction des différents jeux de variables :
1 p nR dT dV nR  γ −1
— dS = dU + dV = + nR s’intègre en S(T ,V ) = ln TV + Cte .
T T γ −1 T V γ −1  

 1−γ 
1 V nR γ dT dp nR γ 
— dS = dH − dp = − nR s’intègre en S(T , p ) = ln Tp γ  + Cte .
T T γ −1 T p γ −1  
 
— Comme pV = nRT on obtient ln( p ) + ln(V ) = ln(T ) + Cte , et en différentiant :
dp dV dT
+ = , ce qui permet d’éliminer dT et d’obtenir S( p,V ) :
p V T
nR  dp dV  nR  γ 
dS = +γ , qui s’intègre en S( p,V ) = ln pV + Cte .
γ − 1  p V  γ −1  

On en déduit les lois de Laplace qui s’appliquent à une transformation adiaba-


tique réversible, donc isentropique, de G.P, si γ est indépendant de T :
1−γ
γ−1
TV = Cte Tp γ
= Cte pV γ = Cte

516
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 517

4.4 Phase condensée


Pour des liquides ou des solides, sauf à des pressions très élevées, le volume
ne dépend pratiquement pas de la pression (ils sont incompressibles), et il dépend peu
de la température. L’équation d’état thermoélastique est alors V ≃ Cte (soit α ≃ 0 et
χT ≃ 0 ). On a donc U (T ,V ) ≃ U (T ) .
L’enthalpie s’écrit H = U + pV = m [u + pv ] . Pour des phases condensées, le
volume massique v est très faible : pv << u , et on a H ≃ U . On peut donc négliger
l’influence de la pression sur H et écrire : H (T , p ) ≃ H (T ) ≃ U (T ) .
Pour une transformation infinitésimale, dH ≃ dU ≃ mcdT avec c ≃ c p ≃ cV .
dT 1 p
Enfin, on tire dS ≃ mc de l’identité thermodynamique dS = dU + d�V.
T T T ≈0
En négligeant les variations de c avec la température, on obtient par intégration
les fonctions d’état U, H et S.
Pour une phase condensée, U ≃ H ≃ mcT + Cte et S ≃ mc ln(T ) + Cte , en né-
gligeant l’influence de la température sur c ≃ c p ≃ cV .

5. TRANSFORMATIONS D’UN FLUIDE


5.1 Transformations réversibles
On les représente souvent dans le diagramme de Clapeyron p = f (V ) .

Dans un tel diagramme, l’aire A > 0 sous la courbe correspond au travail reçu
V2


par le système (en valeur absolue), puisque W1→ 2 = − pdV pour une transformation
V1

réversible. On a donc W1→ 2 = − A < 0 si V augmente (travail moteur), et W1→ 2 = A > 0


si V diminue (travail résistant).
Lorsque la transformation est cyclique, on peut la décomposer en deux parties.

517
518 Partie VI.  Thermodynamique

La pression est une fonction p + (V ) lorsque le volume varie de Vmax à Vmin , puis une
fonction p − (V ) lorsqu’il varie de Vmin à Vmax , comme indiqué sur la figure ci-dessous.
La valeur absolue de Wcycle = − v pdV est donc l’aire du cycle Acycle > 0 .
cycle

Wcycle = Acycle > 0 pour un cycle parcouru dans le sens trigonométrique (cycle
résistant). C’est le cas représenté sur la figure ci-dessous.

Wcycle = − Acycle < 0 pour un cycle parcouru dans le sens anti-trigonométrique


(cycle moteur).

5.2 Transformations particulières, applications aux gaz parfaits


On ne considère ici que des systèmes au repos : le premier principe s’écrit :
∆U = W + Q .

Détente de Joule-Gay-Lussac
Une enceinte rigide et calorifugée contient
d’un côté n mol de gaz, de l’autre du vide. On ouvre
la vanne qui relie les deux parties. Le système cons-
titué par le gaz évolue entre deux états d’équilibre (1)
 p1  p2
 
et (2) : T1 → T2
V = V V = V + V ′
 1  2
Le travail des forces de pression reçu par le système entre ces deux états est
V2
nul : W = −  pext
N
dV = 0 , puisque le gaz se détend dans le vide, et la chaleur Q
V1 = 0 (vide)

est également nulle puisque la transformation est adiabatique.

Une telle détente est d’après le premier principe iso-énergétique : ∆U = 0 .

518
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 519

Dans le cas d’un gaz parfait, ou de tout gaz obéissant à la première loi de Joule
(U ne dépend que de T, et T ֏ U est strictement croissante), on en déduit ∆T = 0 .
V +V ′  p
Pour un G.P, ∆S = nR ln   = S > 0 (la transformation est irréversible).
 V 
Détente de Joule-Thomson
Un fluide s’écoule à travers un milieu poreux. L’écoulement est stationnaire et
adiabatique. Le fluide passe de l’état (1) en entrée à l’état (2) en sortie, la pression
p  p2 < p1
diminuant entre ces deux états (on parle de pertes de charge) :  1 →  .
T1 T2
Le premier principe appliqué à un tel écou-
lement fournit ∆h = wu + q (expression qui sera
démontrée dans un cadre plus général dans le
chapitre suivant). En l’absence de travail utile
massique wu (pas de pièces mobiles en mouve-
ment) et de chaleur massique q, on montre donc que l’enthalpie massique h du fluide
se conserve.

Une telle détente est isenthalpique : ∆h = 0 .

Dans le cas d’un gaz parfait, ou de tout gaz obéissant à la deuxième loi de Joule
(H ne dépend que de T, et T ֏ H est strictement croissante), on en déduit ∆T = 0 .
R  p1 
Pour un G.P de masse molaire M, on a ∆s = ln   = sp > 0 (la transforma-
M  p2 
tion est irréversible).

Transformation isochore
C’est une transformation dans laquelle le volume est constant, donc W = 0 .

Pour une transformation isochore, ∆U = Q .

nR nR  T2 
Dans le cas d’un G.P, on a Q = ∆U = (T2 − T1) , et ∆S = ln   .
γ −1 γ − 1  T1 
Transformation monobare
C’est une transformation qui se fait à pression extérieure constante entre l’état
(1), qui était un état d’équilibre avant qu’on ne modifie une contrainte, et l’état d’équi-
libre final (2) : pext = Cte = p2 = p1 . Le travail des forces de pression reçu par le sys-
(2)
tème entre ces deux états vaut W = −  pext dV = − pext (V2 − V1) = − p2V2 + p1V1 .
(1)
Le premier principe appliqué au système s’écrit donc :

519
520 Partie VI.  Thermodynamique

∆U = U2 − U1 = W + Q = − p2V2 + p1V1 + Q , soit H2 − H1 = [U2 + p2V2 ] − [U1 + p1V1] = Q .

Pour une transformation monobare, on a ∆H = Q .

Si de plus la transformation est réversible, elle est isobare : p = Cte .


nR γ nR γ  T2 
Dans le cas d’un G.P, on a donc Q = ∆H = (T2 − T1) et ∆S = ln   .
γ −1 γ − 1  T1 

Transformation monotherme
C’est une transformation qui se fait à température extérieure constante entre
l’état (1), qui était un état d’équilibre avant qu’on ne modifie une contrainte, et l’état
d’équilibre final (2) : Text = Cte = T2 = T1.
Dans le cas d’un G.P, on en tire :
V  p 
∆U = 0  Q = −W , et ∆S = nR ln  2  = nR ln  1  .
V
 1  p2 
Si de plus la transformation est réversible, elle est isotherme : T = Cte .
Dans le cas d’un G.P, on peut alors calculer W :
dV V  nRT Cte
δW = − pdV = −nRT  W = −nRT ln  2  = −Q . L’isotherme p = = d’un
V V
 1 V V
G.P dans le diagramme p = f (V ) est une branche d’hyperbole.

Transformation adiabatique
C’est une transformation telle que Q = 0  ∆U = W .
nR
Dans le cas d’un gaz parfait, on en tire W = ∆U = (T2 − T1) .
γ −1
Si de plus la transformation est réversible, elle est isentropique : ∆S = 0 .
Dans le cas d’un G.P on peut alors appliquer les lois de Laplace. L’isentropique
Cte
a pour équation p = γ dans le diagramme p = f (V ) .
V
Pour une isentropique de G.P, on a :
pV γ = Cte  ln p + γ lnV = Cte
dp dV  ∂p  p.
 +γ =0  = −γ
p V  ∂V S V
Pour une isotherme de G.P, on a :
pV = Cte  ln p + lnV = Cte
dp dV  ∂p  p.
 + =0  =−
p V  ∂V T V
On en déduit qu’en un point (V0 , p0 ) du diagramme de Clapeyron, la pente de
l’isentropique d’un G.P est γ > 1 fois plus grande que celle de l’isotherme.

520
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 521

6. TRANSITIONS DE PHASE DU CORPS PUR


6.1 Diagramme d’équilibre (p,T)
Rappelons les principaux résultats pour les corps purs.

Par définition, la variance v d’un système est le nombre de paramètres d’état


intensifs indépendants à l’équilibre thermodynamique.

Pour un corps pur A à l’équilibre thermodynamique sous une seule phase, la


variance du système est v = 2 puisqu’on peut fixer indépendamment p et T.
Pour le corps pur A de masse m à l’équilibre thermodynamique sous deux
phases : A(ϕ1) = A(ϕ2 ) , la composition du système est par exemple décrite par la
masse m2 = ξ de A sous la phase ϕ2 . On a une masse m1 = m − m2 mol de A sous la
phase ϕ1 .

ξ est donc l’avancement massique de la transformation physique suivante :


A(ϕ1) = A(ϕ2 )
E.I m 0
E.E m−ξ ξ

À l’équilibre diphasique (ou diphasé) A(ϕ1) = A(ϕ2 ) , p et T sont liées par la re-
lation f ( p,T ) = 0 (la variance vaut 1). On ne peut pas les fixer indépendamment sans
rompre l’équilibre, car la pression est une fonction de la température.

On peut représenter l’état du système à l’équilibre dans un diagramme d’équi-


libre p = f (T ) . La courbe d’équilibre A(ϕ1) = A(ϕ2 ) sépare le plan en deux parties : le
domaine A(ϕ1) et le domaine A(ϕ2 ) .

521
522 Partie VI.  Thermodynamique

Si A est maintenant à l’équilibre sous trois phases : A(ϕ1) = A(ϕ2 ) = A(ϕ3 ) , p et


T doivent vérifier deux relations : f1( p,T ) = 0 et f2 ( p,T ) = 0 .

Dans le diagramme p = f (T ) , le système triphasé correspond à l’intersection


des courbes des équilibres A(ϕ1) = A(ϕ2 ) , A(ϕ2 ) = A(ϕ3 ) et A(ϕ1) = A(ϕ3 ) , c'est-à-
dire à un point appelé point triple, de coordonnées (Tt , pt ).
La variance du système triphasé est nulle.

Voici l’allure du diagramme d’équilibre d’un corps qui peut se présenter sous
trois phases :

Le corps pur A peut se trouver sous phase solide, liquide ou gazeuse. Il existe
souvent plusieurs phases solides, correspondant à des structures cristallines diffé-
rentes. Pour certains matériaux, l’état ne dépend pas que des paramètres intensifs p
et T, mais aussi de l’excitation magnétique appliquée (matériau présentant une phase
supraconductrice), du champ électrique appliqué (phase plasma), etc.
L’eau peut exister sous phase solide, liquide ou gazeuse.
La glace présente plusieurs variétés cristallines que nous ne distinguerons pas
dans le diagramme d’équilibre. À des pressions inférieures à 2130 bar et des tempé-
ratures supérieures à 70 K, la forme ordinaire de la glace possède une structure hexa-
gonale.
Sous 1 bar et à 273 K, la glace est moins dense que l’eau liquide (densité
d = 0,917). Très peu de corps purs possèdent cette propriété (on peut citer le silicium,
le gallium, l’antimoine et le bismuth). On peut montrer que c’est lié à la pente négative
de la courbe d’équilibre entre la glace et l’eau liquide, alors que cette pente est positive
pour presque tous les autres corps purs. Ceci a plusieurs conséquences : la glace
occupant un volume plus grand que l’eau liquide, une bouteille remplie d’eau placée
au congélateur éclate ; on peut par une élévation isotherme de pression faire fondre
de la glace.
Le point triple de l’eau a pour coordonnées ( Tt = 273,16 K, pt = 0,0061 bar ).
Sous cette pression très faible, la glace coexiste avec l’eau liquide et l’eau vapeur.

522
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 523

Sous une pression de 1 bar, l’eau fond à une température à peine inférieure à
0
celle du point triple : Tfus = 273,15 K (c’est dû à la grande pente de la courbe d’équi-
0
libre entre la glace et l’eau liquide), et se vaporise à Tfus = 373 K (à 99,98°C).
Lorsque la température augmente, la pression de vapeur saturante (pression
de l’équilibre entre l’eau liquide et l’eau vapeur) augmente, et les caractéristiques phy-
siques des deux phases en équilibre (enthalpie massique, entropie massique, masse
volumique) convergent. Lorsqu’on atteint le point critique C, il n’existe plus qu’une
seule phase (phase « fluide » ou « supercritique »). La température critique de l’eau
est de 647 K et la pression critique est de 221 bar.
On donne ci-dessous le diagramme d’équilibre semi-logarithmique de l’eau
(l’échelle des pressions est logarithmique).

6.2 Grandeurs massiques de transition de phase

Définitions
Puisque la variance vaut 1 pour un système constitué d’un corps pur A à l’équi-
libre sous deux phases : A(ϕ1) = A(ϕ2 ) , les grandeurs massiques (volume v, enthalpie
h, entropie s…) ne dépendent que de la température T.

On définit l’enthalpie massique de transition de phase de A(ϕ1) = A(ϕ2 ) , ou


« chaleur latente », par : h1→2 (T ) = h2 (T ) − h1(T ) = ℓ1→2 (T ) en J ⋅ kg-1 .

On utilise dans les cas particuliers des notations explicites :

523
524 Partie VI.  Thermodynamique

Fusion A S = AL ℓ fus = h [ AL ,T ] − h [ A S ,T ] > 0 .


Sublimation AS = A V ℓ sub = h [ A V ,T ] − h [ A S ,T ] > 0 .
Vaporisation AL = A V ℓ vap = h [ A V ,T ] − h [ A L ,T ] > 0 .
Les transformations inverses sont la solidification, la condensation et la liqué-
faction, et on a bien sûr ℓ sol = − ℓ fus , ℓ cond = −ℓ sub et ℓ liq = −ℓ vap .
L’entropie massique de transition de phase A(ϕ1) = A(ϕ2 ) est notée :
s1→2 (T ) = s2 (T ) − s1(T ) en J ⋅ K -1 ⋅ kg-1 .
L’entropie massique augmente lorsqu’on passe de A S à A L , et encore plus
lorsqu’on passe de A L à A V car l’état gazeux est beaucoup plus désordonné.

Signification physique
Pour une température T fixée, lorsque le corps pur A est en équilibre sous deux
phases : A(ϕ1) = A(ϕ2 ) , la pression est fixée : p = p(T ) .
L’enthalpie massique de transition de phase est égale à la variation d’enthalpie
lorsque le système constitué d’un kg de A passe de la phase ϕ1 à la phase ϕ2 , dans
les conditions de l’équilibre entre les deux phases, où T est fixée et p = p(T ) .
A(ϕ1) = A(ϕ2 )
E.I (kg) 1 0
E.F (kg) 0 1

h1→2 (T ) et s1→2 (T ) étant indépendants du chemin suivi, on peut supposer que


cette transformation est réversible. Elle est donc isotherme et également isobare.
Le premier principe appliqué au système fournit alors :
h2 (T ) − h1(T ) = h1→2 (T ) = Q (car la transformation est isobare).
Le second principe fournit :
Q p
s2 (T ) − s1(T ) = s1→2 (T ) = + S
� (car la transformation est réversible et isotherme).
T 0

h1→2 (T )
On a donc s1→2 (T ) = .
T

6.3 Étude de l’équilibre liquide-vapeur


Cet équilibre est utilisé dans de nombreuses machines thermiques. Les éner-
gies mises en jeu sont en effet très importantes.
Prenons l’exemple de l’eau liquide sous p = p0 = 1 bar et à 298 K. L’enthalpie
massique de vaporisation vaut ℓ fus = 2260 kJ ⋅ kg-1 , et la capacité thermique massique
à pression constante vaut c p 0 = 4,18 kJ ⋅ kg-1 ⋅ K -1 (une ancienne unité d’énergie, la

524
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 525

calorie, était définie comme l’énergie à apporter à 1 g d’eau pour élever sa température
de 1 K, soit 4,18 J dans ces conditions de température et pression).
Ainsi, avec l’énergie nécessaire pour vaporiser 1 kg d’eau, on peut élever de
10 K la température de 54 kg d’eau !

Isothermes d’Andrews
On effectue la compression réversible d’une masse m d’un corps pur A V placé
dans un thermostat à la température T : la transformation est isotherme, et le volume
V du système diminue constamment.
V
On note v = le volume massique du système. Lorsque ce dernier est dipha-
m
sé, v est une valeur moyenne entre le volume massique de la phase gazeuse, et celui
de la phase liquide.

Pour une température T inférieure à la température critique Tc , on définit la


pression de vapeur saturante ps (T ) comme la pression de l’équilibre A L = A V à la
température T.

Il n’y a qu’une seule phase A V tant que la pression reste inférieure à ps (T ) . La


masse mL de liquide est alors nulle, et la masse de gaz est mV = m .
Si on caractérise la composition du système par le titre massique en vapeur,
m
défini par x = V , on a x = 1 tant que p < ps (T ) .
m

Lorsque la pression atteint ps (T ) , la première goutte de A L apparaît (rosée),


le volume massique du système vaut alors v V (T ) .
Tant que les deux phases coexistent, la pression reste égale à ps (T ) , mais le
volume massique diminue. On a V = vL (T ) lorsque la dernière bulle de gaz disparaît
(ébullition).
Si on continue la compression, il n’y a plus qu’une seule phase A L . Le volume
continue à diminuer, mais très peu car la phase liquide est très peu compressible. On
a x = 0 pour p > ps (T ) .

525
526 Partie VI.  Thermodynamique

La transformation décrite correspond à une température comprise entre la tem-


pérature du point triple Tt , et celle du point critique Tc au-delà de laquelle il n’y a plus
qu’une seule phase fluide.
Le diagramme d’équilibre p = f (T ) s’avère insuffisant pour décrire le système
lorsque les deux phases coexistent, car à l’équilibre A L = A V , tous les états possibles
( 0 ≤ x ≤ 1) correspondent au même point de coordonnées (T , ps (T )) .

En revanche, tous ces états correspondent à des points différents dans le dia-
gramme de Clapeyron p = f (v ) :

Dans un tel diagramme, le domaine d’équilibre A L = A V se trouve à l’intérieur


d’une courbe en cloche appelée courbe de saturation, et dont le sommet est le point
critique C.

526
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 527

La partie gauche de cette courbe est appelée courbe d’ébullition (c’est en ces
points qu’apparaissent les premières bulles de gaz lorsqu’on effectue une détente du
liquide), la partie droite est appelée courbe de rosée.
Les domaines A L et A V se trouvent sous l’isotherme critique, respectivement
à gauche et à droite de la courbe de saturation.
Le point critique C est un point d’inflexion de l’isotherme critique. La tangente
en C à cette isotherme est horizontale.

Si l’on considère une fonction d’état extensive Y du système diphasé, on définit


Y
la grandeur massique y = .
m
Cette grandeur est une moyenne pondérée :
Y mL yL (T ) + mV y V (T ) (m − mV )yL (T ) + mV y V (T )
y (T ) = = = .
m m m
On a donc :

y ( x,T ) = (1 − x )yL (T ) + xy V (T ) pour le système diphasé.

Si l’on applique cette relation au volume V du système, on obtient :


v − vL AM
v ( x,T ) = (1 − x )vL (T ) + xv V (T )  x = = (règle des moments) .
v V − vL AB

— Le point A(T , ps (T ),v = v L , x = 0) correspond au liquide saturé (dans les conditions


d’apparition du gaz).
— Le point B(T , ps (T ),v = v V , x = 1) correspond à la vapeur saturée (dans les condi-
tions d’apparition du liquide).
— Le point M (T , ps (T ),v , x ) correspond à un équilibre entre ces deux phases, avec un
titre massique en vapeur 0 ≤ x ≤ 1.

La courbe reliant les points de même composition, pour des températures dif-
férentes, s’appelle une courbe isotitre.

Diagramme enthalpique (diagramme de Mollier)


Dans le but de concevoir une machine thermique, les diagrammes les plus uti-
lisés sont des diagrammes semi-logarithmiques, où l’enthalpie massique du système
est portée en abscisses et la pression en ordonnées (en échelle logarithmique).

Le diagramme de Mollier ci-après est celui du dioxyde de carbone, soit le réfri-


gérant R744 selon les notations des frigoristes. Par souci de clarté, seules quelques
courbes (isothermes, isobares…) ont été tracées.
Dans ce diagramme, les isenthalpiques sont des droites verticales et les iso-
bares des droites horizontales.

527
528 Partie VI.  Thermodynamique

La courbe de saturation est une cloche dont le point critique C est le sommet.

On trouve aussi sur ce diagramme :


h − hL AM
— Des courbes isotitres x = = à l’intérieur de la courbe de saturation.
hV − hL AB
— Des isothermes qui sont confondues avec les isobares à l’intérieur de la courbe de
saturation.
Comme la pression influe très peu sur l’état d’un liquide (faible compressibilité),
l’enthalpie d’un liquide ne dépend quasiment que de la température : les isothermes
de A L sont presque confondues avec les isenthalpiques, donc sont quasiment des
droites verticales.
C’est aussi le cas dans le domaine de A V lorsque la pression est faible, car
alors la vapeur se comporte comme un gaz parfait, dont l’enthalpie ne dépend que de
la température.
— Des isochores (le volume massique v est constant).
— Des isentropiques (l’entropie massique s est constante).

528
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 529

7. LOI DE BOLTZMANN / THÉORIE CINÉTIQUE DES


GAZ
7.1 Loi de Boltzmann
Dans le chapitre sur la statique des fluides, on démontre, en considérant que
l’air est un gaz parfait de masse molaire M, que la pression varie avec l’altitude, pour
Mgz

l’atmosphère isotherme de température T, selon la loi p( z ) = p0e RT .

Considérons l’air comme du diazote pur. On peut réécrire cette loi, en introdui-
sant la masse m d’une molécule de diazote, et :

R 8,31
kB = ≃ ≃ 1,38 ⋅ 10 −23 J ⋅ K -1 , constante de Boltzmann.
N A 6,02 ⋅ 1023

La densité volumique n∗ ( z ) = d3N / d3V de molécules N2 à l’altitude z s’écrit


mgz mgz Ep ( z )
− − −
p( z ) p
n∗ ( z ) = d’après la loi des G.P, d’où n∗ ( z ) = 0 e kBT = n0∗e kBT = n0∗e kBT
.
kBT kBT
Considérons une colonne d’atmosphère de surface au sol S . Le nombre de
molécules de N2 de cette colonne entre les altitudes z et z + dz est n∗ ( z ) S dz . La
probabilité de trouver une molécule de diazote entre les altitudes z et z + dz est donc
Ep ( z )

proportionnelle à e kBT dz . Cette probabilité décroît avec l’altitude, donc avec l’éner-
gie potentielle Ep = mgz de la molécule.
C’est l’agitation thermique qui permet, suite à des chocs entre molécules, à une
molécule donnée de se trouver à une altitude strictement positive.

Le terme kBT , homogène à une énergie, est donc l’énergie caractéristique de


l’agitation thermique pour une molécule.

La loi de Boltzmann généralise le résultat précédent :

La probabilité qu’une particule placée dans un thermostat à la température T se


E E
− −
kBT kBT
trouve dans un état d’énergie E, est P = Cte ⋅ e . Le terme e s’appelle facteur
de Boltzmann.

Ceci est valable lorsque les niveaux d’énergie sont discontinus (c’est le cas pour
les systèmes qui relèvent d’une description quantique). Dans une approche classique,
les niveaux d’énergie sont continûment répartis, et si la particule est décrite par une
seule variable continue z, comme la molécule de diazote de l’atmosphère, la probabi-
lité qu’elle se trouve dans l’état défini par l’intervalle [ z, z + dz ] , d’énergie E(z), est :

529
530 Partie VI.  Thermodynamique

E(z )

kBT
dP = Cte ⋅ e dz .

7.2 Modèle du gaz parfait


C’est un modèle de sphères dures ponctuelles : les molécules sont considérées
comme des points matériels (ne possédant que trois degrés de liberté) qui ne subis-
sent des forces que lors de chocs. Le modèle de point matériel est valable si les mo-
lécules se trouvent dans un volume très supérieur à celui qu’elles occuperaient si on
les entassait (volume propre). Les interactions extérieures sont toujours négligeables
(l’énergie cinétique d’une molécule est très supérieure au travail du poids entre deux
chocs). Les interactions intérieures, de type Van Der Waals, en 1/ r 7 , décroissent for-
tement avec la distance r entre deux molécules, et sont en conséquence négligeables
dès que la distance moyenne entre les molécules est suffisamment grande. C’est le
cas pour un volume suffisamment grand à pression fixée, ou à pression suffisamment
faible à volume fixé.

Tout gaz réel se comporte donc comme un gaz parfait si V → ∞ , ou p → 0 .

7.3 Distribution des vitesses pour un gaz parfait (complément hors pro-
gramme)
On se place à l’équilibre thermodynamique, ce qui se traduit par une distribution
des vitesses stationnaire (indépendante du temps), homogène (c’est la même en tout
point), et isotrope (il n’y a pas de direction privilégiée).
La loi de Boltzmann fournit la probabilité qu’une particule possède à l’équilibre
G G
thermodynamique un vecteur vitesse v (v x ,v y ,v z ) à dv (dv x ,dv y ,dv z ) près, son
énergie (cinétique seulement ici) associée à la translation étant alors Ec = 1/ 2 ⋅ mv 2 :
m(v x 2 + v y 2 +v z 2 )

2kBT
d3 P = Cte ⋅ e dv x dv y dv z .
L’ensemble des états qui correspondent à
une norme de vitesse dans l’intervalle [v ,v + dv ]
possède, dans l’espace (v x ,v y ,v z ) d’origine O,
un volume 4πv 2dv compris entre les deux
sphères de rayons v et v + dv (isotropie), et de
centre O. La probabilité dP = f (v )dv que la
norme du vecteur vitesse soit v (à dv près), est la
somme des probabilités de tous ces états, soit
mv 2

2 2kBT
dP = Cte ⋅ 4πv e dv .
On détermine la constante grâce à la condition de normalisation :
∞ ∞ mv 2

 
2 2kBT
dP = 1  Cte ⋅ 4π v e dv = 1 , d’où, après une intégration par partie, et en
v =0 v =0

530
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 531

∞ 3/2
1 π  m 

−βv 2
utilisant le résultat classique e dv = : Cte =   .
2 β  2πkBT 
v =0
3/2 mv 2
4  m  −
2 2k T
On a dP =   v e B dv , distribution de Maxwell-Boltzmann.
π  2kBT 
On peut, grâce à cette distribution, calculer :

8kBT 8RT
— La vitesse moyenne en norme des particules v = vdP =  πm
=
πM
.
0

3kBT 3RT
v
2
— La vitesse quadratique moyenne des particules u = dP = = .
m M
0

Les moyennes notées g sont des moyennes d’ensemble (réalisées à t fixé sur
un grand nombre de particules). Dans le cas d’un gaz monoatomique, on en déduit
l’énergie cinétique moyenne d’un atome Ec = 1/ 2 ⋅ mv 2 = 1/ 2 ⋅ mu 2 = 3 / 2 ⋅ kBT , ainsi
que l’énergie interne du gaz U = NEc = 3 / 2 ⋅ nRT , où N est le nombre d’atomes, et n
le nombre de moles. On constate que la valeur moyenne de chaque composante
quadratique de l’énergie : 1/ 2 ⋅ mv x 2 , 1/ 2 ⋅ mv y 2 , 1/ 2 ⋅ mv z 2 , vaut 1/ 2 ⋅ kBT .
Ce résultat est général et s’appelle le théorème d’équipartition de l’énergie.
Dans le cas d’un gaz diatomique, il faut 6 paramètres pour décrire la position de la
molécule dans un référentiel R : les trois coordonnées ( xG , yG , zG ) de son centre
d’inertie G, et les trois angles d’Euler θ, ψ et ϕ. On montre que l’énergie cinétique de
la molécule AB dans R est :
1 1 1 1 1 1
E = Ec = mxɺG 2 + myɺG 2 + mzɺG 2 + I ω12 + I ω22 + J ω32 .
2 2 2 2 2 2
La mécanique quantique
permet de montrer que les rotations
autour des axes instantanés ∆1 ,
∆2 ne s’activent qu’à partir d’une
température minimale, et que, du
fait du très faible moment d’inertie
J, la rotation de la molécule autour
de ∆3 n’est jamais activée.
Aux basses températures,
un gaz parfait diatomique se comporte donc comme un gaz parfait monoatomique
d’énergie interne U = 3 / 2 ⋅ nRT , alors qu’à température ambiante, U = 5 / 2 ⋅ nRT .

7.4 Pression cinétique


Dans un gaz parfait, les forces de pression ne sont dues qu’aux chocs des mo-
lécules contre un élément de surface S : on parle de pression cinétique. Conformé-
ment au programme, on n’établit son expression que dans un modèle à une dimension.
La surface S est normale à l’axe Ox, et toutes les molécules sont censées ne

531
532 Partie VI.  Thermodynamique

se déplacer que selon les axes Ox, Oy ou Oz, avec la


même probabilité. En conséquence, seul 1/ 6 des mo-
lécules se déplace selon Ox dans le sens des x crois-
sants. Les molécules qui heurtent S avec une vitesse
de norme v pendant dt, proviennent d’un cylindre de
1
longueur vdt , et leur nombre est d2N = n∗ S vdtdP .
6
En effet, sur les n∗ S vdt molécules que contient le cylindre, seules n∗ S vdtdP mo-
lécules ont une vitesse comprise en norme dans l’intervalle [v ,v + dv ] ; le facteur 1/ 6
tenant compte du fait que toutes ces molécules n’ont pas la bonne direction et le bon
sens pour heurter S . Ces molécules forment un système fermé Σ possédant une
G 1 G
quantité de mouvement incidente d2 p + = n∗ S vdtdP mvex . Après leur choc sur S
6
elles repartent avec une vitesse v en norme dans le sens des x décroissants donc leur
G 1 G
quantité de mouvement est d2 p − = − n∗ S vdtdP mvex . Σ subit une variation de quan-
6
2G 2 G− 2 G+ G
d p d p −d p 1
tité de mouvement = = − mn∗ S v 2dP ex .
dt dt 3
En intégrant sur toutes les normes de vitesse possibles, on obtient :
G
dp 1 G
= − mn∗ S u 2 ex (c’est donc la vitesse quadratique moyenne qui intervient).
dt 3
G
Le principe fondamental, appliqué à Σ, permet d’en déduire la force F subie par
G G G 1
dp G
l’élément de surface : = −F , d’où F = mn∗ S u 2 ex . Par définition de la pression :
dt 3
G G 1
F = p S ex . On obtient donc l’expression de la pression cinétique p = mn∗ u 2 . On
3
trouve la même expression à l’aide d’un calcul (plus délicat) à 3 dimensions.

7.5 Résultats de la théorie cinétique des gaz


La théorie cinétique permet de relier le comportement d’un système macrosco-
pique à celui de ses constituants microscopiques. Nous avons ainsi établi l’équation
d’état « calorimétrique » U = 3 / 2 ⋅ nRT pour un gaz parfait monoatomique, en reliant
la température, grandeur « macroscopique », à l’énergie cinétique moyenne d’un
atome Ec = 3 / 2 ⋅ kBT , donc à l’agitation thermique. La pression, autre grandeur « ma-
croscopique » est reliée aux transferts de quantité de mouvement lors des chocs des
1 RT mNRT 3RT
molécules sur les parois. On a p = mn∗ u 2 = mn∗ = , puisque u 2 = .
3 M VM M
Or mN est la masse des N molécules, donc c’est le nombre de moles n, fois la masse
molaire M. La théorie cinétique des gaz permet d’établir l’équation d’état « thermoé-
lastique » pV = nRT , soit la loi des gaz parfaits.

532
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 533

8. INTERPRÉTATION STATISTIQUE DE
L’ENTROPIE (complément hors-programme)
Il s’agit ici d’un complément non exigible, seule la formule S = kB ln Ω permet-
tant de relier l’entropie à la mesure du désordre est au programme.

8.1 Exemple fondamental


On considère N boules numérotées de 1 à N
dans une boîte de volume V. On suppose les boules
animées d’un mouvement brownien (aléatoire) et que
la probabilité de présence de la boule est la même en
tout point de la boîte.
La boîte est partagée en deux parties de même
volume V / 2 : si a est la probabilité pour une boule de
se trouver dans la moitié droite, et b celle de se trouver
dans la moitié gauche, on a a = b = 1/ 2 .
Le système est dans le macro-état « k » s’il y a
k boules dans la moitié droite. Un micro-état correspondant à ce macro-état est défini
par la connaissance exacte des boules occupant la moitié droite (par exemple : boules
N 
2, 4, 5, 11...). Pour k fixé, il y a Ω(k) =   façons de placer à droite k boules prises
k 
parmi les N boules : c’est le nombre de micro-états accessibles correspondant au
macro-état « k ».
N  1 N 
La probabilité P (k ) =   ak bN − k = N   de trouver k boules à droite est
 
k 2 k 
proportionnelle à Ω( k ) . Si N est très grand, on peut considérer P (k ) comme une
fonction continue de k, et l’étudier en utilisant la formule de Stirling, ln N ! ∼ N ln N − N .
 N! 1 
Étudions donc plutôt ln P (k ) = ln  N
:
 k !(N − k )! 2 
ln P (k ) ≃ N ln N − N − k ln k + k − (N − k )ln(N − k ) + N − k − N ln 2 .
dln P (k ) N −k  ∗
≃ ln    P (k ) est extrémal pour k = N / 2 .
dk  k 
d2 ln P (k ) 1 1
2
≃− − < 0 : ln P (k ) , et donc P (k ) , est maximum pour k ∗ = N / 2
dk N − k k
qui est donc la valeur la plus probable. Le calcul de la valeur moyenne donne :
N
k=  k P (k ) = N / 2 : la valeur moyenne de k est également N / 2 .
k =0
Le calcul de l’écart-type qui caractérise les fluctuations par rapport à la valeur
moyenne k donne σ = N / 2 .
La fluctuation relative vaut donc : σ / k = 1/ N → 0 .
N →∞
Un état macroscopique est beaucoup plus probable que les autres, c’est celui
qui correspond au plus grand nombre de micro-états. Plus N est grand, plus les
fluctuations relatives autour de ce macro-état sont faibles.

533
534 Partie VI.  Thermodynamique

Ainsi, pour N = 1023 , σ / k = 1/ 1023 : les fluctuations relatives autour de


k = N / 2 sont indécelables.

N
N 
Dans l’exemple étudié, le nombre total de micro-états est 2N =   k  , le
k =1
N 
nombre de micro-états correspondant à k = N / 2 est   .
N 2
N  N N N N N N N  N
Or ln   ≃ N ln N − N − ln + − ln + ≃ N ln2    ≃ 2 : pour
N 2 2 2 2 2 2 2 N 2
N grand, pratiquement tous les micro-états correspondent au macro-état « k = N / 2 ».

8.2 Entropie statistique et information


Soit un système, comme un dé après un lancer, qui ne puisse se trouver qu’en
un nombre fini d’états (x1, x2,..., xi ,..., xN ) , la probabilité qu’il se trouve dans l’état x i
N
étant P i . On définit l’entropie du système par S = −  ( P i log2 P i ) .
i =1
Montrons que S traduit le « manque d’information » sur le système.
— Remarquons d’abord que S ≥ 0 car 0 ≤ P i ≤ 1.
— Prenons un système dont l’état est connu avec certitude, par exemple P 1 = 1 et
P i = 0 ∀i ∈ �2, N � . On a bien, en vertu de lim x ln x = 0 , le « manque d’information »
x →0
nul : S = 0 .
— Supposons tous les états équiprobables : P i = 1/ N ∀i ∈ �1, N � . On a S = log2 N .
L’entropie S est une fonction croissante du nombre d’états N. On a en effet moins
d’information sur le résultat du jet d’un dé ( N = 6 ) que sur celui d’une pièce de
monnaie ( N = 2 ).
N
— On montre que S = −  ( P i log2 P i ) est maximale si P i = 1/ N ∀i ∈ �1, N � , donc le
i =1
« manque d’information » est maximal si tous les états sont équiprobables. Par

534
Chapitre 1.  Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique 535

exemple, on a plus d’information sur le résultat du jet d’une pièce de monnaie truquée,
où P (pile) = 2 / 3 et P (face) = 1/ 3 , que sur celui d’une pièce normale où :
P (pile) = P (face) = 1/ 2 , et si P (pile) = 0,999 , on est pratiquement sûr du résultat du
jet.
L’entropie de deux systèmes indépendants est additive. Considérons un second
système ne pouvant se trouver qu’en un nombre fini d’états ( x1′ , x 2′ ,..., x ′j ,..., xM
′ ) , la
probabilité qu’il se trouve dans l’état x ′j étant P j′ . Son entropie vaut :
M
S′ = −  ( P j′ log2 P j′ ) . Le système global peut se trouver dans les NM états xi ∪ x′j ,
j =1
avec (i , j ) ∈ �1, N � × �1, M � , la probabilité de l’état xi ∪ x ′j étant le produit des
probabilités P i P j′ . L’entropie de ce système vaut donc :
N M N M N M
Ξ=−   P i P j′ log2 ( P i P j′ ) = −
   ( P i P j′ log2 P i ) − ( P i P j′ log2 P j′ ) , soit :
i =1 j =1 i =1 j =1 i =1 j =1

N  M N M 

Ξ = −  ( P i log2 P i ) ⋅ P j′ −   
P i ⋅  ( P j′ log2 P j′ ) = S + S ′ .
 
 i =1  �
j =1
�� � ��  j =1
i =1
1 1

8.3 Définition de l’entropie thermodynamique


Pour un système physique, la définition de l’entropie fait intervenir la constante
de Boltzmann au lieu de 1 / ln 2 . S’il y a Ω micro-états accessibles pour le système
macroscopique, on définit S par :
Ω N N
1
S = −kB  ( P i ln P i ) au lieu de S = −  ( P i log2 P i ) = − 
ln 2 i =1
( P i ln P i ) .
i =1 i =1
On postule que pour un système isolé, tous les micro-états accessibles sont
équiprobables : P i = 1/ Ω , donc S (k ) = kB ln Ω .
Reprenons l’exemple des boules placées dans une boîte. Il correspond à la
situation physique où un gaz parfait est enfermé dans une boîte indéformable.
Supposons qu’initialement il se trouve entièrement dans la moitié gauche : une
paroi l’empêchant d’aller occuper la moitié droite qui est donc vide. Il n’y a qu’une seule
façon de placer les N atomes dans cet état : Ω i = 1 .
On enlève cette contrainte : le gaz va se détendre. Juste après que la paroi ait
été enlevée, la probabilité de présence d’un atome en un point de la boîte n’est pas
encore uniforme, mais lorsque le nombre de chocs des atomes avec les parois est
suffisant, tous les micro-états sont équiprobables, et le nombre de micro-états
accessibles est Ω f = 2N . Tous les macro-états « k » peuvent exister, mais du fait du
grand nombre d’atomes à l’échelle macroscopique, le nombre k d’atomes à droite va
présenter des fluctuations négligeables autour de k ∗ = N / 2 , qui est le macro-état
observé : Ω(k ∗ ) ≃ 2N .
L’entropie initiale Si = kB ln Ω i = 0 est nulle, et l’entropie finale vaut :

535
536 Partie VI.  Thermodynamique

Sf = kB ln Ω f = kB ln2N = NkB ln2 .


Entre l’état d’équilibre initial k = 0 et l’état d’équilibre final k ∗ = N / 2 obtenu
après avoir enlevé la paroi, l’entropie a donc augmenté.
N
On a donc ∆S = S f − S i = R ln 2 = nR ln2 > 0 , où n est le nombre de moles
NA
de gaz.
Ce résultat est le même dans le cas d’une détente de Joule-Gay-Lussac d’un
gaz parfait qui double de volume, ce qui peut paraître surprenant puisque la
connaissance d’un micro-état de gaz parfait nécessite celle des vitesses de chaque
molécules le constituant. Cependant, le système étant isolé, la température du gaz
parfait est la même dans l’état final que dans l’état initial, donc la distribution des
vitesses est la même. La variation d’entropie n’est due qu’à la variation du volume
offert au gaz. Le résultat obtenu n’est vrai que parce que le système est isolé.
On définit l’entropie S d’un système thermodynamique à l’équilibre par
S = kB ln Ω , où Ω est le nombre de micro-états accessibles (appelé nombre de
complexions), pratiquement égal au nombre de micro-états correspondant au macro-
état observé à l’équilibre.
Un macro-état étant fixé, Ω, et donc S sont fixés : S est une fonction d’état.
Un système isolé, placé hors d’équilibre par modification d’une contrainte,
évolue vers un équilibre macroscopique correspondant à la quasi-totalité des micro-
états accessibles, ce nombre de micro-états accessibles étant plus grand que dans
l’état initial. L’entropie (définie ici seulement à l’équilibre) d’un système isolé croît donc
lors d’une transformation irréversible : S f > Si .

Un système isolé subit donc une transformation réversible s’il est constamment
à l’équilibre, c’est-à-dire si le nombre de micro-états accessibles reste constant. Son
entropie est la même dans l’état final que dans l’état initial : on a S f = Si . C’est le cas
si la cloison est enlevée alors qu’il y a déjà N / 2 boules dans chaque moitié (le
nombre d’états accessibles augmente en fait, mais très peu puisqu’il est déjà très
proche initialement de 2N ). La transformation est bien réversible puisque si on replace
la cloison, on retrouve l’état initial.
Les phénomènes microscopiques sont réversibles (pas de « frottement », de
« viscosité », les équations d’évolution sont invariables par le changement t → −t ), et
pourtant l’irréversibilité existe bel et bien au niveau macroscopique. L’exemple étudié
permet de comprendre ce phénomène. En l’absence de cloison, le système possède
une probabilité non nulle de revenir spontanément dans l’état « k = 0 » où toutes les
boules se trouvent dans la moitié gauche de la boîte, mais cette probabilité (égale à
1/ 4 si N = 2 ) est prodigieusement petite pour N ≃ 1023 : il faudrait des milliards de
milliards...d’années pour que cela se produise, et le système resterait trop peu de
temps dans ce macro-état pour qu’un observateur, sensible à des valeurs moyennes,
puisse détecter autre chose que k = N / 2 . Le phénomène est bien irréversible au
niveau macroscopique : si on replace la cloison séparant à nouveau en deux la boîte,
on ne retrouve pas l’état initial.
On peut bien sûr à l’aide d’un piston repousser les boules dans la partie de
gauche de volume V / 2 , mais le système n’est plus isolé.

536
537

[THERMODYNAMIQUE 2]

SYSTÈMES OUVERTS EN
RÉGIME STATIONNAIRE
1. BILANS D’ÉNERGIE ET D’ENTROPIE
1.1 Premier principe pour un écoulement stationnaire 1D
En présence d’un écoulement, le premier principe doit être écrit dans le cas le
plus général où il y a une variation de l’énergie mécanique du système étudié.
On note E = Em + U = Ec mac + Ep ext + U l’énergie totale de Σ, Em son énergie
mécanique et U son énergie interne.
Le premier principe appliqué à Σ s’écrit ∆E = W + Q pour une transformation
finie ; dE = δW + δQ pour une transformation élémentaire.
On fera également intervenir l’enthalpie H = U + pV de Σ.
Les grandeurs massiques sont notées u et h (de préférence à Um et Hm qui
désignent plutôt des grandeurs molaires).
d3H d3U d3V p d3 m
On a enfin h = 3
= 3
+p 3
 h=u+ , où ρ = 3 est la masse vo-
d m d m d m ρ dV
lumique du fluide.

Appliquons maintenant le premier principe à un fluide en écoulement station-


naire 1D.

537
538 Partie VI.  Thermodynamique

G
On note ui , hi , v i , pi , ρ i et zi , avec i ∈ {1,2} , les énergies internes massi-
ques, enthalpies massiques, vitesses de l’écoulement, pressions, masses volumiques
et altitudes en entrée ( i = 1), et en sortie ( i = 2 ) du volume de contrôle.
Pendant une durée dt, une masse dm traverse le volume de contrôle.
Le système fermé Σ étudié est constitué :
dm
— À l’instant t par le volume de contrôle et le volume dV 1 = qui rentre dans Vc
ρ1
entre t et t + dt .
dm
— À l’instant t + dt par le volume de contrôle et le volume dV 2 = qui sort de Vc
ρ2
entre t et t + dt .

L’énergie totale de Σ vaut donc :


1
— E (t ) = EVc + dmv12 + dmgz1 + dmu1 à l’instant t.
2
1
— E (t + dt ) = EVc + dmv 22 + dmgz2 + dmu2 à l’instant t + dt .
2
Entre t et t + dt , cette énergie varie de dE = E (t + dt ) − E (t ) , soit :
1 
dE = dm ⋅ ∆  v 2 + gz + u  , ce qui constitue un bilan d’énergie totale entre t et t + dt .
2 
1  1  1 
La notation ∆  v 2 + gz + u  =  v 22 + gz2 + u2  −  v12 + gz1 + u1  désigne,
 2   2   2 
comme on l’a vu, une variation spatiale entre l’entrée et la sortie du volume de contrôle.

Le système Σ reçoit un travail δW et une chaleur δQ entre t et t + dt , c’est-à-


dire quand une masse dm s’est écoulée à travers le volume de contrôle.
Un transfert thermique a lieu par exemple si le volume de contrôle est placé
dans un thermostat dont la température est différente de celle du fluide, et que ses
parois ne sont pas calorifugées (échangeur thermique, souvent en forme de serpen-
tin), ou si on place une résistance chauffante dans le volume de contrôle (chauffe-eau
électrique). Sinon, δQ = 0 : le fluide subit une transformation adiabatique.

On peut de même amener au système Σ un travail, dit travail utile δWu , en com-
primant ou en détendant le fluide à l’aide de pièces mobiles, comme c’est le cas avec
un compresseur ( δWu > 0 ) ou dans une turbine ( δWu < 0 ).

Même en l’absence de travail utile, Σ reçoit un travail de la part du fluide exté-


rieur, qui exerce des forces de pression. Ce travail est appelé travail de transvasement
δWt et vaut δWt = + p1dV1 − p2dV 2 (en entrée, les forces de pression exercées par le
fluide en amont sont dirigées dans le sens de l’écoulement, et sont motrices ; c’est
l’inverse en sortie où le fluide en aval exerce des forces de pression qui résistent à

538
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 539

dm dm p
l’écoulement). On a finalement δWt = + p1 − p2 = −dm ⋅ ∆   .
ρ1 ρ2 ρ
Le premier principe appliqué à Σ fournit dE = δW + δQ , soit :
1  p
dE = dm ⋅ ∆  v 2 + gz + u  = −dm ⋅ ∆   + δWu + δQ .
2  ρ
1 p
On obtient donc dm ⋅ ∆  v 2 + gz + u +  = δWu + δQ , et on écrit finalement le
2 ρ
premier principe, puisque h = u + p / ρ , sous deux formes différentes :

1  δWu δQ
— ∆  v 2 + gz + h  = w u + q , où w u = est le travail utile massique et q = la
2  dm dm
chaleur massique (ce sont des grandeurs reçues par le système qui traverse le volume
de contrôle, par unité de masse de fluide qui s’écoule).
1  δWu δQ
— qm ⋅ ∆  v 2 + gz + h  = Pu + Pth , où Pu = est la puissance utile et Pth = la
2  dt dt
puissance thermique (énergies reçues par le système qui traverse le volume de con-
trôle, par unité de temps).

On parle souvent de premier principe « industriel » en faisant référence à ses


nombreuses applications dans l’industrie (pompes, turbines, compresseurs, déten-
deurs, tuyères, échangeurs thermiques, chambres de combustion…).

1.2 Bilan d’énergie mécanique pour un écoulement stationnaire 1D


Appliquons maintenant le théorème de l’énergie mécanique à un fluide en écou-
lement stationnaire 1D.
On considère le même système fermé Σ que précédemment, qu’on l’étudie
entre t et t + dt .
L’énergie mécanique Em = Ec mac + Ep ext de Σ vaut donc :
1
— Em (t ) = EmVc + dmv12 + dmgz1 à l’instant t.
2
1
— Em (t + dt ) = EmVc + dmv 22 + dmgz2 à l’instant t + dt .
2
1 
Entre t et t + dt , elle varie de dEm = dm ⋅ ∆  v 2 + gz  , ce qui constitue un bilan
2 
d’énergie mécanique entre t et t + dt .
L’énergie mécanique varie si Σ reçoit un travail δWnc des forces non conserva-
tives, extérieures et intérieures, entre t et t + dt , c’est-à-dire quand une masse dm
s’est écoulée à travers le volume de contrôle. Pour un écoulement fluide, δWnc est
constitué par les travaux des forces de pression, de viscosité (noté δWv ), et par un

539
540 Partie VI.  Thermodynamique

éventuel travail utile exercé par des pièces mobiles extérieures au fluide :
dEm = δWu + δWp int + δWp ext + δWv . On décompose le travail des forces de pression
en travail intérieur et travail reçu de la part du fluide extérieur, car on sait calculer ce
p
dernier : c’est le travail de transvasement δWp ext = δWt = −dm ⋅ ∆   .
ρ
1 p
On obtient donc dm ⋅ ∆  v 2 + gz +  = δWu + δWp int + δWv .
 2 ρ 
Nous nous limiterons par la suite au cas d’un écoulement incompressible pour
lequel le travail δWp int des forces intérieures de pression est nul :

Le bilan d’énergie mécanique pour un écoulement incompressible stationnaire


1 p
1D se traduit par ∆  v 2 + gz +  = w u + w v , où w v ≤ 0 est le travail massique des
 2 ρ 
forces visqueuses internes au fluide et externes (avec les parois), ou par :
1 p δWv
qm ⋅ ∆  v 2 + gz +  = Pu + Pv , où Pv = est la puissance des forces visqueuses.
 2 ρ  dt

Un tel bilan permet de déterminer la puissance minimale qu’on doit fournir à une
pompe pour amener le fluide de « l’état » ( v1, z1, p1 ) à « l’état » ( v 2 , z2 , p2 ) :
1 p 1 p
Pu = qm ⋅ ∆  v 2 + gz +  −Pv ≥ qm ⋅ ∆  v 2 + gz +  = Pumin . La mesure de la puis-
 2 ρ N
 ≥0  2 ρ 
sance Pu donne accès à la puissance perdue par viscosité : −Pv = Pu − Pu min .
Considérons maintenant, dans un fluide en écoulement, un tube de courant élé-
mentaire qui entoure une ligne de courant comprise entre deux points M1 et M 2 .

Les sections droites d2 S1 et d2 S2 de ce tube, passant respectivement par M1


et M 2 , sont infiniment petites, si bien que l’écoulement est unidirectionnel en entrée
et en sortie du volume de contrôle délimité par ces sections et le tube de courant.

Si on suppose l’écoulement stationnaire et incompressible, le bilan d’énergie


1 p
mécanique s’écrit ∆  v 2 + gz +  = w u + w v entre les deux points M1 et M 2 qui se
 2 ρ 
trouvent sur une même ligne de courant.

540
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 541

Le travail utile massique est nul puisqu’il n’y a aucune pièce mobile dans le tube,
et le travail des forces visqueuses est négatif.

1 2
La charge C = p + ρv + ρgz diminue le long d’une ligne de courant pour un
2
écoulement stationnaire incompressible. Pour un écoulement entre deux points M1 et
M 2 , la grandeur C1 − C2 ≥ 0 est appelée perte de charge.

Si on rajoute l’hypothèse d’un écoulement parfait, alors le travail des forces vis-
1
queuses est nul, et la charge C = p + ρv 2 + ρgz se conserve le long d’une ligne de
2
courant. On démontre ainsi le théorème de Bernoulli grâce à un raisonnement éner-
gétique.

1.3 Second principe pour un écoulement stationnaire 1D


Appliquons maintenant le second principe à un fluide en écoulement station-
naire 1D. On note si ( i ∈ {1,2} ) les entropies massiques en entrée ( i = 1) et en sortie
( i = 2 ) du volume de contrôle.
On considère le même système fermé Σ que précédemment, qu’on l’étudie
entre t et t + dt .
L’entropie de Σ vaut donc :
— S(t ) = SVc + dm s1 à l’instant t.
— S(t + dt ) = SVc + dm s2 à l’instant t + dt .
Entre t et t + dt , cette entropie varie de dS = S (t + dt ) − S (t ) = dm ⋅ ∆s , ce qui
constitue un bilan d’entropie entre t et t + dt .
On note ∆s = s2 − s1 la variation spatiale d’entropie entre l’entrée et la sortie du
volume de contrôle.

δQ δQ
Le second principe appliqué à Σ s’écrit dS = + δS p , soit dm ⋅ ∆s = + δS p
TS TS
en supposant que la température TS est uniforme sur la surface, notée S , du volume
de contrôle. On l’écrit sous deux formes différentes :

q δQ δS p
— ∆s = + s p , où q = est la chaleur massique reçue, et s p = ≥ 0 l’entropie
TS dm dm
massique produite (grandeurs par unité de masse de fluide qui s’écoule à travers le
volume de contrôle).
Pth δSp δQ δS p
— qm ⋅ ∆s = + , où Pth = est la puissance thermique, et le taux de
TS dt dt dt
production d’entropie (entropie produite par unité de temps).

541
542 Partie VI.  Thermodynamique

2. MACHINES THERMIQUES
2.1 Machines thermiques dithermes, cycle de Carnot
Lors de ses transformations, un fluide échange de l’énergie entre l’entrée et la
sortie d’un composant (détendeur, échangeur thermique, etc.), sous forme de travail
massique utile wu avec les pièces mécaniques mobiles, et de chaleur massique q
avec diverses sources thermiques (on parle de fluide caloporteur, car il échange des
calories avec l’extérieur).
En régime stationnaire, le premier principe industriel s’écrit :
1 
∆  v 2 + gz + h  = w u + q pour un écoulement unidirectionnel en entrée et en sortie.
 2 
Donnons des ordres de grandeur des variations d’énergie massique entre l’en-
trée et la sortie du composant :
— Pour des vitesses qui varient beaucoup, et prennent des valeurs importantes, v
1 
passant par exemple de 0 à 10 m ⋅ s-1 , on a ∆  v 2  ≃ 50 J ⋅ kg-1 .
2 
— Pour des différences d’altitude de l’ordre de 10 m, ∆ [ gz ] ≃ 100 J ⋅ kg-1 .

— Pour de l’eau ( c p ≃ 4 ⋅ 103 J ⋅ K -1 ⋅ kg-1 ) dont la température varie seulement de 1K,

∆h = c p ∆T ≃ 4 ⋅ 103 J ⋅ kg-1 .
Pour un gaz parfait diatomique, comme l’air, de masse molaire :
7
M ≃ 3 ⋅ 10−2 kg ⋅ mol-1 , de capacité thermique molaire c pm = R ≃ 30 J ⋅ K -1 ⋅ mol-1 , on
2
c pm
a cp = ≃ 103 J ⋅ K -1 ⋅ kg-1 , donc pour ∆T ≃ 1 K , on a ∆h ≃ 103 J ⋅ kg-1.
M

En conclusion, à l’exception du passage dans une tuyère (les vitesses peuvent


passer d’une faible vitesse à plus de 1000 m ⋅ s-1 ), les variations d’énergie cinétique
macroscopique massique sont faibles devant ∆h .
De même, sauf par exemple dans le cas d’une pompe qui aspire puis rejette un
fluide à température quasiment constante à des altitudes très différentes (plusieurs
mètres), l’énergie potentielle massique de pesanteur varie peu devant ∆h .

Le premier principe appliqué au fluide, en écoulement entre l’entrée et la sortie


d’un composant d’une machine thermique, se simplifie alors en ∆h = w u + q .

Le principe des machines thermiques a été exposé en première année. Un


fluide circule dans un circuit fermé. En régime stationnaire, une particule fluide retrouve
le même état thermodynamique au bout d’un tour : elle a suivi un cycle de transforma-
tions.

542
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 543

C’est ce qui se passe effectivement dans les machines frigorifiques.


Dans les moteurs thermiques, de l’air est aspiré puis mélangé avec du carbu-
rant. Après combustion, le mélange est rejeté et ne repasse pas dans le moteur, mais
une particule d’air aspirée revient dans le même état thermodynamique (caractérisé
par la pression et la température extérieures) après refoulement : le fonctionnement
reste cyclique.

Quelle que soit la fonction d’état thermodynamique Y, on a ∆Y = 0 sur un cycle.

Les machines frigorifiques fonctionnent par définition avec deux sources : une
source chaude à la température T1 , et une source froide de température T2 < T1 .
Par exemple, une pompe à chaleur prélève des calories à la source froide (l’air
extérieur), et en fournit à la source chaude (l’intérieur de l’habitation). Pour pouvoir
effectuer ces échanges, le fluide reçoit sur un cycle un travail utile massique w u > 0 .
Un cycle monotherme (où l’échange d’énergie sous forme de chaleur se fait
avec une seule source de température Ts ) ne s’applique pas à ces machines.
S’applique-t-il à un moteur dans lequel le fluide fournit sur un cycle un travail
utile massique ( w u < 0 ) aux pièces mobiles ?
Pour répondre à cette question, on applique sur un cycle les deux principes de
 ∆h = w u + q = 0

la thermodynamique au fluide circulant dans le moteur :  q p .
 ∆s = T + sN = 0
 s ≥0

On en déduit wu = −q = +Tssp ≥ 0 . Une machine thermique cyclique mono-


therme ne peut fournir du travail.
Ceci constitue l’énoncé de Kelvin du second principe de la thermodynamique :

Il n’y a pas de moteurs cycliques monothermes.

Nous considérerons donc par la suite des machines dithermes.


Le système M étudié est le fluide circulant dans la
machine. Il reçoit sur un cycle des énergies massiques q1
et q2 sous forme de chaleur, respectivement de la part de
la source chaude de température T1 , et de la source froide
de température T2 < T1 , ainsi qu’un travail utile massique
wu . Par convention, ces grandeurs algébriques sont positives si elles sont effective-
ment reçues par M, négatives si M les fournit.
Appliquons, sur un cycle, les deux principes de la thermodynamique à M :
∆h = wu + q1 + q2 = 0

 q1 q2 p .
∆s = T + T + sN = 0
 1 2 ≥0

543
544 Partie VI.  Thermodynamique

Afin de déterminer quelles sont les transformations possibles, motrices ou ré-


sistantes, nous utilisons un diagramme de Raveau q1 = f (q2 ) .
Dans un tel diagramme, le lieu des transformations réversibles ( sp = 0 ) a pour
T T
équation q1 = −q2 1 : c’est une droite de pente − 1 < −1 passant par l’origine O.
T2 T2
T1 T
Les points du demi-plan défini par q1 = − q2 − T1s p < − 1 q2 (au-dessous de
T2 T2
la droite) correspondent aux transformations irréversibles ( sp > 0 ), ceux du demi-plan
au-dessus de cette droite à des transformations impossibles.
Parmi les transformations possibles, le lieu de celles de travail utile massique
nul est la deuxième bissectrice q1 = −q2 . Les transformations motrices ( w u < 0 ) se
trouvent au-dessus de cette droite ( q1 = −q2 − w u > −q2 ), les transformations résis-
tantes au-dessous.
Finalement, il ne reste que 4 domaines.

Le domaine (2) ne présente pas d’intérêt car la machine consomme du travail


utile pour prélever des calories à la source chaude ( q1 > 0 ), et en fournir à la source
froide ( q2 < 0 ), alors que ce processus se produit naturellement.
Le domaine (3) correspond à une transformation résistante, également sans
intérêt, bien qu’elle fournisse des calories à la source chaude ( q1 < 0 ), car elle en
fournit aussi à la source froide ( q2 < 0 ).

544
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 545

Le domaine (1) correspond aux moteurs thermiques


dont le principe est de fournir du travail en prélevant des
calories à la source chaude, et en en cédant à la source
wu
froide. Leur efficacité est définie par η = : l’énergie ré-
q1
cupérable est l’opposée du travail utile, l’énergie coûteuse
est celle que reçoit M de la part de la source chaude.
À l’aide des deux principes, on obtient :
−w u q T T T
η= = 1 + 2 = 1 − 2 − 2 s p ≤ 1 − 2 . L’efficacité maximale correspond à des
q1 q1 T1 q1 T1
transformations toutes réversibles. C’est l’efficacité de Carnot, qui ne dépend que des
T
températures de la source chaude et de la source froide : ηrév = 1 − 2 < 1 .
T1
Le cycle de Carnot correspondant à ce moteur est constitué de 4 transforma-
tions réversibles : deux isothermes (lors d’un échange d’énergie réversible avec une
source, la température de M est celle de la source) et deux isentropiques (si M n’est
pas en contact avec une source, il n’échange pas d’énergie sous forme de chaleur,
donc la transformation réversible qu’il subit est adiabatique).
On peut donc tracer le cycle suivi dans un diagramme
entropique T = f (s ) , où s est l’entropie massique de M. Ce
cycle est indépendant du fluide qui circule dans la machine,
et de son état physique (liquide, vapeur). Comme pour une
δq
transformation réversible ds = , où T est la température de
T
M, on a sur un cycle q = q1 + q2 = v Tds > 0 , ce qui implique
que le cycle est suivi dans le sens anti-trigonométrique.

Le domaine (4) correspond aux machines frigori-


fiques, dont le principe est de prélever des calories à la
source froide et d’en fournir à la source chaude, grâce au
q
travail utile reçu. Leur efficacité est définie par η = 2 , si
wu
l’intérêt est de maintenir la source froide à une tempéra-
−q
ture T2 < T1 (réfrigérateur), ou bien η = 1 , si l’intérêt est
wu
de maintenir la source chaude à une température T1 > T2 (pompe à chaleur).
À l’aide des deux principes, on obtient des efficacités maximales dans le cas
réversible :
T2
— ηrév = pour le réfrigérateur.
T1 − T2

545
546 Partie VI.  Thermodynamique

T1
— ηrév = pour la pompe à chaleur.
T1 − T2
C’est encore pour un cycle de Carnot que ces efficacités, qui ne dépendent que
de T1 et T2 , sont atteintes. Dans le diagramme entropique, c’est le même cycle que
pour un moteur de Carnot, mais il est décrit dans le sens trigonométrique.
Notons que l’efficacité de la pompe à chaleur est supérieure à 1, et que c’est
aussi le cas en pratique pour le réfrigérateur, la relation T1 < 2T2 étant numériquement
vérifiée. Par exemple, pour T2 = 280 K et T1 = 300 K , l’efficacité maximale d’un réfri-
gérateur vaut 14, ce qui signifie que lorsque le fluide reçoit un travail de 1 J, il prélève
14 J à la source froide.

Lors d’un cycle réel, les transformations suivies sont irréversibles, et on définit
η
leur rendement thermodynamique par r = .
ηrév

2.2 Cas des pseudo-sources


On peut étendre les résultats obtenus précédemment au cas des régimes quasi-
stationnaires pour lesquels les températures des sources varient (on parle alors de
pseudo-sources), mais lentement devant la durée d’un cycle.
Prenons l’exemple d’un climatiseur dans lequel le fluide subit des transforma-
tions réversibles. Il faut un grand nombre de cycles pour que le climatiseur fasse bais-
ser de 10°C la température T2 d’une pièce initialement à la température extérieure de
35°C.
La durée d’un cycle est très inférieure à la durée nécessaire au refroidissement
de la pièce de 35°C à 25°C : sur un cycle, la variation ∆T2 est très petite devant 10°C.

Sur ce cycle, les principes s’écrivent :


∆h = wu + q1 + q2 ≃ 0

 q1 q2 p , avec ∆h et ∆s de l’ordre de ∆T2 . Ces termes sont négli-
∆s = T + T + s ≃ 0
 1 2
geables devant les termes d’échange et de production.

546
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 547

On peut modéliser le cycle par un cycle élémentaire de Carnot de durée dt,


pendant lequel T2 varie de dT2 , et une masse dm = qm dt circule dans la machine.
Pendant un cycle, les grandeurs échangées δWu , δQ1 , et δQ2 , vérifient :
δWu + δQ1 + δQ2 = qmdt ∆h ≃ 0

 δQ1 δQ2 p .
 T + T + δS = qmdt ∆s ≃ 0
 1 2

En notant C2 la capacité thermique à pression constante de la pièce, et H2 son


enthalpie, on a pendant un cycle : dH2 = C2dT2 = −δQ2 , relation obtenue en appli-
quant le premier principe à la pièce (le fluide recevant une énergie δQ2 de la part de
la pièce, cette dernière reçoit une énergie opposée).
T1
Les transformations étant réversibles ( δS p = 0 ), on a δQ1 = − δQ2 , et :
T2
 T 
δWu = −δQ1 − δQ2 = C2 1 − 1  dT2 . Le travail utile que doit recevoir le climatiseur vaut
 T2 
 T 
Wu = C2 T2f − T2i − T1 ln  2f  .
  T2i  
Pour une pièce de capacité C2 = 5 ⋅ 106 J ⋅ K -1 ⋅ kg-1, on obtient :
  298  
Wu = 5 ⋅ 106  −10 − 308ln  5
  ≃ 8,3 ⋅ 10 J .
  308  
L’énergie extraite de la pièce vaut Q2 = C2 (T2i − T2f ) ≃ 5 ⋅ 107 J , soit une effica-

5 ⋅ 107
cité moyenne ηrév = ≃ 60 .
8,3 ⋅ 105
Les valeurs réelles sont, du fait de l’irréversibilité, plutôt de l’ordre de 10 pour
un climatiseur très performant.
Pour obtenir en 30 min la température de 25°C, il faut une puissance moyenne
8,3 ⋅ 105
Pu = ≃ 460 W . Cette valeur est sous-estimée : un climatiseur va consommer
30 × 60
dans ces conditions une puissance de l’ordre de 3 kW.

Le cycle de Carnot correspond à un fonctionnement idéalisé et permet de cal-


culer les efficacités maximales. Les transformations réelles subies par le fluide calo-
porteur dans chaque composant peuvent être isobares, isenthalpiques, isochores,
voire plus complexes, et pas seulement isothermes et isentropiques. Elles ne sont pas
toujours assimilables à des transformations réversibles.
Pour concevoir des machines thermiques les plus efficaces possibles, on mo-
délise de manière plus réaliste ces transformations, puis on calcule les énergies
échangées et l’efficacité grâce aux données sur le fluide caloporteur. On appuie l’étude

547
548 Partie VI.  Thermodynamique

sur le tracé, dans un diagramme judicieusement choisi, du cycle suivi par ce fluide.
Nous allons en donner deux exemples : une installation frigorifique et une cen-
trale nucléaire.

2.3 Installation frigorifique 


Étudions une installation frigorifique de forte puissance, en régime stationnaire.
Le fluide qui la parcourt est l’ammoniac (réfrigérant R717).
On modélise les transformations qu’il subit par :
— Une compression isentropique A → B dans le compresseur. Le fluide y reçoit une
puissance utile Pu . Un des rôles du compresseur est de créer l’écoulement.
— Une transformation isobare B → C dans le condenseur, serpentin en contact avec
l’air extérieur au réfrigérateur. Le fluide y subit une liquéfaction totale à T1 = 25 °C ,
puis un refroidissement jusqu’à la température de 15°C (on parle de sous-refroidisse-
ment, puisque cette température est inférieure à celle de la transition de phase).
Le fluide reçoit une puissance thermique Pth1 < 0 de la part de la source chaude
(il rejette des calories à l’extérieur de la chambre froide).
— Une détente de Joule-Thomson C → D dans le détendeur (milieu poreux sans
pièces mobiles).
— Une transformation isobare D → A dans l’évaporateur, serpentin en contact avec
l’air de la chambre froide. Le fluide y subit une vaporisation totale à la température
T2 = −10 °C , puis un réchauffement jusqu’à la température de 0°C (on parle de sur-
chauffe, puisque cette température est supérieure à celle de la transition de phase).
Le fluide reçoit une puissance thermique Pth2 > 0 de la part de la source froide ;
c’est l’étape qui permet d’extraire des calories de la chambre froide pour maintenir sa
température constante malgré les pertes thermiques. La puissance frigorifique Pth2
vaut 110 kW.

Nous allons, à partir du diagramme de Mollier p = f ( h ) (diagramme enthal-


pique) du R717, tracer le cycle suivi et en déduire l’efficacité théorique de l’installation.

548
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 549

Pour tracer le cycle, on commence par tracer les isobares correspondant aux
transitions de phase à T1 = 25 °C et T2 = −10 °C . On lit les pressions correspon-
dantes : p1 = 10 bar et p2 = 2,9 bar .
Pour placer le point A, on prolonge l’isobare p2 = 2,9 bar jusqu’à l’isotherme
0°C.
Puis on suit l’isentropique s = 5,87 kJ ⋅ K -1 ⋅ kg-1 jusqu’au point B sur l’isobare
p1 = 10 bar .
On suit cette isobare jusqu’au point C de température 15°C.
On suit enfin l’isenthalpique (détente de Joule-Thomson) jusqu’au point D sur
l’isobare p2 = 2,9 bar .

On peut alors dresser un tableau des pressions, températures, enthalpies mas-


siques et titres massiques en vapeur x aux différents points du cycle :

p (bar) T (°C) h( kJ ⋅ kg-1) x


A 2,9 0 1490 1
B 10 90 1660 1
C 10 15 270 0
D 2,9 −10 270 0,09

549
550 Partie VI.  Thermodynamique

Il est désormais possible, en appliquant le premier principe industriel au fluide


entre l’entrée et la sortie de chaque composant, de déterminer le débit massique, puis
toutes les puissances mises en jeu :
— Dans l’évaporateur :
Pth2 110 ⋅ 103
qm (hA − hD ) = Pth2  qm = = = 90 g ⋅ s-1 .
hA − hD (1490 − 270) ⋅ 103

— Dans le compresseur qm (hB − hA ) = Pu  Pu = 0,090 × (1660 − 1490) ⋅ 103 = 15 kW .


— Dans le condenseur :
qm (hC − hB ) = Pth1  Pth1 = 0,090 × (270 − 1660) ⋅ 103 = −125 kW .
On remarque qu’une installation frigorifique rejette plus de calories à l’extérieur
qu’elle n’en prélève à la chambre froide.
— Dans le détendeur (transformation adiabatique sans puissance utile) : hD = hC .
L’efficacité théorique de l’installation est appelée C.O.P : coefficient de perfor-
P 110
mance, et vaut C.O.P = th2 = = 7,3 .
Pu 15
On peut la comparer à l’efficacité de Carnot d’un réfrigérateur dont la source
chaude serait à T1 = 25 °C , et la source froide à T2 = −10 °C :
T2 273 − 10
ηC = = = 7,5 . Le cycle étudié est proche du cycle de Carnot.
T1 − T2 35
Une mesure de la puissance réellement consommée fournit Pu réelle = 19 kW .
Pth2 110
On en déduit le coefficient de performance réel C.O.Préel = = = 5,8 , soit
Pu réelle 19
C.O.Préel 5,8
un rendement de l’installation défini par r = = = 77% .
ηC 7,5
Les pertes sont dues au fait que le cycle réel s’écarte du cycle décrit ici (trans-
ferts thermiques non pris en compte, pertes de charge) et par les pertes mécaniques
dans le compresseur.
Remarquons enfin que la surchauffe et le sous-refroidissement permettent
d’augmenter les énergies mises en jeu par unité de masse dans l’évaporateur et le
condenseur, donc d’obtenir une puissance thermique frigorifique plus importante à dé-
bit massique égal.

2.4 Circuit secondaire d’une centrale REP 


Dans les réacteurs à eau bouillante (REB), l’eau est directement mise en ébul-
lition lors du passage par le cœur du réacteur où se déroulent les réactions de fission,
et entraîne la turbine.
Nous allons plutôt nous pencher sur la technologie la plus répandue dans le
monde (celle de tous les réacteurs français) qui est celle des réacteurs à eau pressu-
risée (REP).

550
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 551

Dans les REP, l’eau du circuit primaire est portée à une pression suffisante pour
ne pas entrer en ébullition. Elle constitue la source chaude qui permet de porter à
ébullition l’eau du circuit secondaire dans un générateur de vapeur.
L’eau du circuit secondaire entraîne des turbines haute et basse pression, avant
d’être refroidie dans le condenseur par l’eau du circuit tertiaire (source froide).
L’eau du circuit tertiaire peut être pompée puis rejetée dans un fleuve de fort
débit, ou dans la mer (circuit ouvert), après avoir refroidi l’eau du circuit secondaire.
Lorsque le débit du cours d’eau n’est pas suffisant, sa température serait trop
élevée après la centrale. On utilise alors des tours aéroréfrigérantes où l’eau du circuit
tertiaire est liquéfiée et refroidie (cas de la figure ci-dessous). Le circuit tertiaire est
alors (quasiment) fermé, l’eau refroidie repasse dans le condenseur, et les prélève-
ments dans la rivière sont limités : ils permettent de faire l’appoint en compensant les
pertes d’eau qui s’échappe des tours sous forme de vapeur.

Le cycle décrit dans le circuit secondaire est complexe, mais peut être modélisé
de façon à en conserver les principaux aspects :
— Les échanges d’énergie entre le circuit primaire et le circuit secondaire ont lieu dans
le générateur de vapeur. L’eau, liquide en entrée, y subit une vaporisation totale iso-
bare à 70 bar (transformation G → H → I → A ).
— Une petite partie de la vapeur d’eau (débit massique qm2 ) passe dans la veine de
surchauffe où elle subit une liquéfaction totale isobare ( A → I ).

551
552 Partie VI.  Thermodynamique

— La plus grande partie de la vapeur d’eau (débit massique qm1 ) est détendue dans
la turbine haute pression d’où elle ressort avec un titre massique en vapeur de 90% à
une pression de 11 bar (point B).
Cette vapeur est trop humide pour continuer la détente car les gouttelettes d’eau
détérioreraient les aubes de la turbine, et accéléreraient leur corrosion. On doit donc
au préalable la sécher et la surchauffer.
— Le sécheur sépare les deux phases par gravité : en haut, il en sort la vapeur satu-
rante avec un débit massique qm3 (point C), qui est surchauffée jusqu’à la température
de 281°C (point D) grâce à la liquéfaction totale du prélèvement de vapeur en sortie
du générateur de vapeur.
— Une fois surchauffée, elle est détendue dans la turbine basse pression dont elle sort
avec un titre massique en vapeur de 88% sous 0,05 bar (point E).
— Elle subit ensuite une liquéfaction totale isobare E → F dans le condenseur par
échange thermique avec le circuit tertiaire.
— Enfin, on collecte l’eau liquide issue du bas du sécheur, du surchauffeur, et du con-
denseur, qui est alors comprimée jusqu’à 70 bars et réchauffée jusqu’à 76°C (trans-
formation F → G ) dans un compresseur alimenté par un prélèvement de vapeur, avant
d’être réinjectée dans le générateur de vapeur.

Les tables fournissent les caractéristiques de l’eau aux différents points :

p (bar) T (°C) h( kJ ⋅ kg-1) s( J ⋅ K -1 ⋅ kg-1) x


A 70,0 286 2773 5,81 1
B 11,0 184 2581 6,11 0,90
C 11,0 184 2781 6,55 1
D 11,0 281 3008 7,00 1
E 0,05 33 2270 7,44 0,88
F 0,05 33 138 0,48 0
G 70,0 76 323 1,02 0
H 11,0 184 781 2,18 0
I 70,0 286 1268 3,12 0

552
Chapitre 2.  Systèmes ouverts en régime stationnaire 553

Le cycle principal suivi par l’eau qui traverse les turbines est tracé dans le dia-
gramme entropique T = f (s ) ci-dessous.

Le débit massique en sortie du générateur de vapeur est qm = 640 kg ⋅ s-1 .


Puisque xB = 90% de la masse d’eau sortant de la turbine haute pression avec
un débit qm1 est sous phase vapeur, le débit qm3 de vapeur dirigée vers la turbine
basse pression après passage par le sécheur vaut qm3 = xB ⋅ qm1 .
Cette vapeur reçoit, en supposant que le surchauffeur est parfaitement calori-
fugé, toute l’énergie thermique dégagée par la liquéfaction de la fraction d’eau vapeur
issue du générateur de vapeur.
En appliquant le premier principe industriel aux deux systèmes, on obtient :
h − hC
qm3 (hD − hC ) = PthC →D , et qm2 (hI − hA ) = PthA →I = −PthC→D  qm2 = D qm3 .
hA − hI
On peut désormais calculer tous les débits car :
 h −h  qm
qm = qm1 + qm2 = qm1 1 + xB ⋅ D C   qm1 = = 564 kg ⋅ s-1.
 hA − hI  hD − hC
1 + xB ⋅
hA − hI

553
554 Partie VI.  Thermodynamique

On a donc qm2 = qm − qm1 = 76 kg ⋅ s-1 , qm3 = xB ⋅ qm1 = 507 kg ⋅ s-1 et enfin :

qm4 = (1 − xB ) ⋅ qm1 = 56 kg ⋅ s-1 .


Calculons les différentes puissances mises en jeu.
La puissance mécanique fournie à la turbine haute pression est :
PHP = qm1(hA − hB ) = 108 MW .
Celle fournie à la turbine basse pression est PBP = qm3 (hD − hE ) = 374 MW .
La puissance thermique reçue de la part du circuit primaire est :
Pth = qm (hA − hG ) = 1568 MW .
Le cycle décrit est un cycle de Rankine-Hirn dont l’efficacité est :
PHP + PBP
η= = 31% .
Pth
Cette valeur est proche de la valeur réelle η ≃ 34% , bien sûr inférieure à l’effi-
T2 33 + 273
cacité du cycle de Carnot ηcarnot = 1 − = 1− = 45% , calculée en prenant
T1 286 + 273
pour températures T1 de la source chaude et T2 de la source froide (en kelvin) celles
des transitions de phase dans le générateur de vapeur et dans le condenseur. Un tel
cycle a été tracé dans le diagramme entropique précédent, et on constate qu’une com-
pression isentropique de l’eau liquide est irréalisable (elle nécessiterait des pressions
gigantesques).
Le diagramme entropique permet de bien mettre en évidence l’irréversibilité des
transformations adiabatiques réelles comme la compression F → G ou les détentes
A → B et D → E dans les turbines : la variation d’entropie y est positive, or elle cor-
respond à de l’entropie produite.

554
555

[THERMODYNAMIQUE 3]

DIFFUSION DE PARTICULES
1. FLUX DE PARTICULES
1.1 Système hors équilibre
Dans ce chapitre, le mot « particules » désigne des atomes, ions, ou molécules,
d3N
et on note n∗ (M, t ) = la densité volumique d’un type de particules présentes dans
d3V
un milieu, en un point M et à l’instant t (nombre de ces particules par unité de volume).
Lorsque n ∗ n’est pas uniforme, il y a un transport de ces particules des zones
les plus concentrées vers les zones les moins concentrées.
Prenons l’exemple des molécules de sucre dans le café. En l’absence de mou-
vement macroscopique, un morceau de sucre déposé au fond de la tasse va « fondre »
très lentement. Ses molécules vont peu à peu diffuser dans le café. Si on agite le café
avec une cuillère, l’homogénéisation se fait désormais par convection, et elle est beau-
coup plus rapide.

De façon générale, dans les fluides, la convection, où le transport de particules


se fait par mouvement macroscopique, est plus efficace que la diffusion. La convection
peut être naturelle si des différences de température existent dans le fluide, mais sera
moins efficace que la convection forcée.
Il n’y a pas de convection dans les solides. Ce sont les seuls corps dans les-
quels on a de la diffusion pure. Le phénomène
de diffusion est encore beaucoup plus lent
dans les solides que dans les fluides, mais se
fait plus rapidement à hautes températures.
On peut par exemple effectuer un traitement

555
556 Partie VI.  Thermodynamique

de surface d’un acier pauvre en carbone (contenant moins de 0,3% en masse


d’atomes de carbone C), pour l’enrichir en carbone et améliorer ses propriétés méca-
niques.
On constate, dans les deux exemples précédents que les particules (molécules
de sucre ou atomes de carbone) qui diffusent, le font à travers d’autres particules (l’eau
du café, les atomes de fer), appelées particules « support ». Le cadre de la diffusion
est celui où la densité volumique ns∗ de particules support est très supérieure à celle

des particules diffusantes : n∗ (M, t ) << ns∗ , ce qui permet de considérer que ns∗ est
uniforme et constant.
Dans le cas d’un corps pur inhomogène, on parle d’autodiffusion. Les inhomo-
généités de densité doivent rester faibles pour qu’on puisse parler de diffusion.

1.2 Densité volumique de courants de particules

Considérons une surface élémentaire d2 S


autour d’un point M, s’appuyant sur un contour
orienté. La surface d2 S est fixe dans le référentiel
d’étude R . Soit δ3N le nombre de particules diffu-
G
santes qui traversent pendant dt la surface d2 S , dans le sens du vecteur d2 S , qui
se déduit de celui du contour grâce à la règle du tire-bouchon. Ce nombre est algé-
brique : il est positif si les particules traversent d2 S dans le sens positif, et négatif si
elles le traversent dans le sens opposé.
G
On définit le vecteur densité volumique de courants de particules diffusantes J
G G
(en m-2 ⋅ s-1 ) par la relation δ3N = J ⋅ d2 S dt . Le débit (en s-1 ) de particules diffu-
δ3N G 2 G
santes à travers la surface d2 S est donc = J ⋅d S .
dt
G
On notera J d le vecteur densité volu-
mique de courants correspondant au phéno-
G
mène de diffusion, et J c celui correspondant
au phénomène de convection.
G
Le vecteur J permet de calculer le dé-
bit de particules diffusantes ( s-1 ), souvent
noté Φ, qui traverse une surface S finie,
orientée grâce à la règle du tire-bouchon, en
fonction de l’orientation du contour sur lequel
δN G G
elle s’appuie : Φ =
dt 
= J ⋅ d2 S .
S

556
Chapitre 3.  Diffusion de particules 557

1.3 Diffusion / Loi de Fick


En se basant sur les observations, et par analogie avec la loi de Fourier (voir le
G
chapitre suivant), Fick a proposé une loi reliant J d aux différences de densité :
G →
J d = −D grad n ∗ , avec D coefficient positif appelé diffusivité des particules dans le sup-

port où elles diffusent ( m2 ⋅ s-1 ). C’est la loi de Fick.

La loi de Fick est linéaire : les matériaux pour lesquels elle est bien vérifiée sont
des matériaux L.H.I (linéaires, homogènes et isotropes).
Elle concorde bien avec les phénomènes observés : transport dans la direction
→
de grad n∗ où les variations spatiales locales de densité sont les plus intenses, et dans


le sens de − gradn∗ , c’est-à-dire celui des densités décroissantes.
On peut vérifier ce dernier point sur l’exemple précédent pour lequel on suppose
que la densité ne dépend que de l’abscisse x et du temps : n ∗ ( x, t ) . Si la densité dé-
G ∂n ∗ G
croît avec x, on a bien J d = − D ex .
 ∂x
>0

Donnons quelques ordres de grandeur pour la diffusivité D, à p = p0 = 1bar et


T = T0 = 298 K :

gaz liquides solides


2 -1 −6 −3 −12 −7
D (m ⋅ s ) de 10 à 10 de 10 à 10 de 10−30 à 10−13

Ce sont des ordres de grandeurs grossiers : le type de particules diffusantes et


le support interviennent beaucoup, ainsi que la température et la pression pour les
gaz.
Une augmentation de température favorise toujours la diffusion. Des théories
donnent D ∝ T 3/2 pour les gaz et D ∝ T pour les liquides. Dans le cas des solides, la
particule diffusante doit franchir une barrière de potentiel pour passer d’un site du ré-
Ea

kBT
seau cristallin à un site voisin. Il en résulte une loi du type D ∝ e (loi d’Arrhénius),
où Ea est une énergie d’activation.

En chimie, on préfère utiliser des concentrations molaires c en mol ⋅ m-3 , plutôt


-3
que des densités volumiques n ∗ en m , et des densités volumiques de courants mo-
G
laires Jn en mol ⋅ m-2 ⋅ s-1 plutôt que des densités volumiques de courants particu-
G G →
laires J d en m-2 ⋅ s-1 . La loi de Fick s’écrit alors Jn = −D grad c .

557
558 Partie VI.  Thermodynamique

1.4 Approche microscopique de la diffusion / Marche au hasard


Le transport de particules diffusantes se fait par
chocs avec les particules support, sans mouvement ma-
croscopique.
Le mécanisme de la diffusion est celui de la
marche au hasard : une particule diffusante se déplace
en moyenne de ℓ (libre parcours moyen) entre deux chocs
avec les particules support. On note τ la durée moyenne
entre deux chocs, et v la vitesse moyenne des particules
(toutes ces moyennes sont des moyennes d’ensemble
sur un grand nombre de particules). On a ℓ = v ⋅ τ .

Modèle à une dimension


Nous allons raisonner à une dimension avec le modèle de diffusion suivant :
— Une particule diffusante ne peut se déplacer que selon l’axe Ox. Elle se trouve à
t = 0 en x = 0 .
� �
— Pendant une durée τ, elle se déplace de +ℓ ex ou de −ℓ ex de façon équiprobable.
Elle se trouve donc en x = ±ℓ à t = τ , en x = ±2ℓ ou en x = 0 à t = 2τ , etc.

On cherche à caractériser à la date t = N τ avec N ∈ N , c’est-à-dire après N



déplacements de ±ℓ ex , la distribution spatiale d’un grand nombre Ω0 de particules,
toutes placées en x = 0 à t = 0 .
Pour une particule donnée, on note k ∈ �0, N � le nombre de déplacements de
� �
+ℓ ex effectués à la date t = N τ . Il y a donc eu N − k déplacements de −ℓ ex , et la
position de la particule est égale à x = xk = +k ℓ − (N − k )ℓ = (2k − N )ℓ .
On a 2 possibilités de déplacement pendant la durée τ, donc 2N possibilités en
N  �
tout. Il y a   façons de choisir k déplacements de +ℓ ex sur les N déplacements,
 
k
1 N 
donc une probabilité P (k ) =   de l’événement « la particule effectue k déplace-
2N  k 

ments de +ℓ ex ».
Étudions la distribution des positions de la particule après N déplacements :

558
Chapitre 3.  Diffusion de particules 559

N
ℓ N
 N  
La valeur moyenne de x est x =  xk P ( k ) =
2 N   k  (2k − N ) = 0 .
k =0 k =0
N 2 N
 N  

La variance est σ2 =  ( xk − x )2 P (k ) = 2N   k  (2k − N )2  = Nℓ2 .
k =0 k =0

On a ici donné sans démonstration les résultats des calculs de x et de σ2 . Ce-


lui portant sur la valeur moyenne : x = 0 , est intuitif, celui portant sur l’écart-type
σ = ℓ N est très important car il montre que ce dernier augmente avec N, donc avec
le temps, mais lentement : σ ∝ t .
Représentons à N fixé P en fonction de x / ℓ , pour N = 5 , 10 et 50 :

On constate que la probabilité est maximale au voisinage de x = 0 puis décroît


rapidement selon une courbe en cloche dont on peut démontrer qu’elle tend vers une
« gaussienne » lorsque N augmente. La répartition est alors continue et la probabilité
dP que la particule se trouve entre x et x + dx à la date t vaut :
2
 x − x ( t )
1 − 
ℓ2
dP ( x, t ) = e 2 σ2 ( t )
dx , avec ici x (t ) = 0 , t = N τ et σ2 (t ) = N ℓ2 = t .
σ(t ) 2π τ
τx 2 τx 2
1 τ − 2ℓ2t Ω τ − 2ℓ2t
On a donc dP ( x, t ) = e dx et dΩ = 0 e dx = ϕ( x, t )dx par-
ℓ 2πt ℓ 2πt
ticules entre x et x + dx à la date t.

La longueur caractéristique de la diffusion peut être caractérisée par l’écart-type


t
σ(t ) = ℓ .
τ

559
560 Partie VI.  Thermodynamique

La distribution s’élargit dans le temps pendant que la densité linéique maximale


de particules ϕ( x = 0, t ) diminue.
+∞ τx 2
Ω0 τ −
Le nombre ℓ 2πt
e 2 ℓ 2t d x = Ω0 de particules reste bien sûr constant.
−∞
Remarquons que le modèle de distribution continue est valable si N >> 1 , soit
t >> τ et σ >> ℓ : ϕ( x, t ) varie sur des distances et des durées grandes devant les dis-
tances et durées microscopiques.
On peut retrouver ce résultat en raisonnant sur la probabilité P ( xi , t j ) qu’une
particule se trouve à la date t j = j ⋅ τ à la position xi = i ⋅ ℓ .
Pour que ce soit le cas, il faut nécessairement qu’avant le dernier déplacement,
c’est-à-dire à la date t j −1 = ( j − 1) ⋅ τ , la particule se trouve en xi −1 = (i − 1) ⋅ ℓ ou en
xi +1 = (i + 1) ⋅ ℓ . Dans les deux cas, elle a une chance sur deux de se retrouver en xi
à tj :
1 1 1 1
P ( xi , t j ) = , t j − τ) .
× P ( xi −1, t j −1 ) + × P ( xi +1, t j −1 ) = × P ( xi − ℓ, t j − τ) + × P ( xi + ℓ
2 2 2 2
Pour une durée t >> τ , c’est-à-dire après un grand nombre j de sauts, la proba-
bilité P ( xi , t j ) peut s’écrire P ( xi , t j ) = P ( x = i ⋅ ℓ, t = j ⋅ τ) où P (x,t) est la probabilité
pour la particule de se trouver en x quelconque à t quelconque, fonction continue qui
varie sur une distance caractéristique grande devant ℓ et une durée caractéristique
grande devant τ.
On peut donc effectuer les développements limités suivants :
∂P ∂P ℓ2 ∂ 2 P
P ( xi −1, t j −1) = P ( xi − ℓ, t j − τ) = P ( xi , t j ) − ℓ ( xi , t j ) − τ ( xi , t j ) + ( xi , t j )
∂x ∂t 2 ∂x 2
∂P ∂P ℓ2 ∂ 2 P
P ( xi +1, t j −1) = P ( xi + ℓ, t j − τ) = P ( xi , t j ) + ℓ ( xi , t j ) − τ ( xi , t j ) + ( xi , t j )
∂x ∂t 2 ∂x 2
1 ∂P ∂2 P 
On a alors P ( xi , t j ) =  P ( x i , t j ) + P ( x i , t j ) − 2τ ( xi , t j ) + ℓ 2 2
( xi , t j ) (les
2  ∂t ∂x 
dérivées premières par rapport à x s’éliminent, c’est pour cela qu’il faut aller à l’ordre
∂2 P 2τ ∂P
2 en x). On en déduit l’équation différentielle 2
= .
∂x ℓ2 ∂t
Le nombre de particules entre x et x + dx à la date t est proportionnel à P (x,t)
et à dx : dΩ = K P ( x, t )dx = ϕ( x, t )dx .

La densité linéique de particules ϕ( x, t ) vérifie donc une équation de diffusion


2
∂ ϕ 1 ∂ϕ ℓ2
= , avec un coefficient de diffusion D = .
∂x 2 D ∂t 2τ

560
Chapitre 3.  Diffusion de particules 561

x2
Ω0 −
Cette solution admet pour solution e 4Dt comme on le verra au 3.6, soit
4πDt
τx 2
Ω0 τ − 2ℓ 2t ℓ2
e en utilisant D = . On retrouve bien l’expression précédente.
ℓ 2πt 2τ
Ce modèle unidimensionnel met en évidence les principales propriétés de la
diffusion (irréversibilité, distance caractéristique ∝ t comme nous allons le montrer
par la suite).

Justification de la loi de Fick


Prenons l’exemple d’un matériau cylindrique, dont la moitié gauche contient ini-
tialement une densité de particules diffusantes plus importante que la moitié droite
( n1∗ > n2∗ ). Considérons deux cellules élémentaires
du matériau, voisines (l’une à l’abscisse x, l’autre à
l’abscisse x + dx ), dans lesquelles les densités ne
sont pas les mêmes (comme c’est le cas initialement
de part et d’autre de la surface séparant les deux
moitiés du cylindre). En revanche, vitesse moyenne,
libre parcours moyen des molécules, température,
pression et nombre de particules support sont les
mêmes dans chaque cellule, donc la probabilité
pour une particule de traverser pendant dt la surface de séparation entre les deux
cellules est la même. Le nombre δN + de particules qui traversent pendant dt dans le
sens (1) vers (2) (sens des x croissants) est égal au produit de cette probabilité par le
nombre de particules dans (1). Puisqu’il y a plus de particules diffusantes dans la cel-
lule (1) que dans la cellule (2), δN + est supérieur au nombre δN − de particules qui
traversent pendant dt de (2) vers (1) : δN = δN + − δN − > 0 . Ce processus, qui com-
mence au voisinage de la surface séparant les deux moitiés du cylindre, se reproduit
de proche en proche, avec toujours un transport des zones de forte densité vers les

zones de basse densité. J d est donc orienté des hautes vers les basses densités.

Après ce régime transitoire, la densité de particules diffusantes neq∗ est uni-


forme dans le cylindre. La conservation du nombre de ces particules (en l’absence de
réactions les créant ou les consommant) implique que n2∗ < neq∗ < n1∗ .

561
562 Partie VI.  Thermodynamique

1.5 Convection
Dans le cas d’un fluide en écoulement, le transport de particules se fait aussi
G
par mouvement macroscopique. Si on note v (M , t ) le champ de vitesse de l’écoule-
ment, le nombre de particules diffusantes traversant par convection pendant dt la sur-
G G G
face d2 S autour de M, dans le sens du vecteur d2 S , est δ3N = n∗v ⋅ d2 S dt .
G G
Le vecteur densité volumique de courants de convection s’écrit Jc = n∗v .

2. ÉQUATION DE LA DIFFUSION DE PARTICULES


2.1 Diffusion avec production

Diffusion à 1D
Considérons un cylindre de section S , de longueur L, et d’axe Ox. Sa surface
latérale est imperméable aux particules diffusantes.
Si S = πr 2 << L2 ⇔ r << L , on peut négliger la variation de densité dans une
section droite x = Cte : n ∗ ( x, t ) . Le transport de particules se fait alors uniquement
G G
selon Ox : J d = J d ( x, t )ex .
Pour établir l’équation locale qui régit n ∗ ( x, t ) , nous allons effectuer un bilan de
particules diffusantes au système Σ, constitué par la portion du cylindre située entre
les abscisses x et x + dx .

Le nombre de particules de Σ à la date t est dN (t ) = n∗ ( x, t ) S dx , et à t + dt :


dN (t + dt ) = n∗ ( x, t + dt ) S dx . La variation de ce nombre entre ces deux dates vaut
∂n∗
d2N = dN (t + dt ) − dN (t ) = S dxdt . Cette variation est due aux particules reçues et
∂t
aux particules produites entre t et t + dt : d2N = δ2N r + δ2N p = δNx − δNx + dx + δ2N p .
Pour le transport diffusif, orienté dans le sens des x croissants, on a :
∂J
δN x − δN x + dx = J d ( x, t ) S dt − Jd ( x + dx, t ) S dt = − d S dx dt .
∂x
Le nombre de particules produites est δ2N p = σ( x, t ) S dx dt , en introduisant le
taux de production volumique de particules σ( x, t ) .

562
Chapitre 3.  Diffusion de particules 563

∂n∗ ∂Jd
On en déduit + = σ , bilan local de particules à 1D.
∂t ∂x
∂n∗
La loi de Fick Jd = −D relie le transport diffusif au gradient de densité, ce
∂x
qui permet d’obtenir l’équation locale régissant n ∗ ( x, t ) :

∂ 2n∗ σ 1 ∂n∗
+ = . C’est l’équation de la diffusion à 1D, avec terme de production.
∂x 2 D D ∂t

Diffusion à 3D
On obtient, en procédant comme pour les transferts thermiques dans le chapitre
précédent, ou plus généralement pour une grandeur extensive quelconque dans le
∂n∗ G
chapitre sur les champs et opérateurs différentiels : + divJd = σ , bilan local de par-
∂t
ticules à 3D.
G →
En utilisant la loi de Fick Jd = −D grad n∗ , on obtient l’équation locale régissant

n ∗ (M , t ) :

σ 1 ∂n∗
∆n∗ + = . C’est équation de diffusion à 3D, avec terme de production.
D D ∂t

2.2 Propriétés de la diffusion


Raisonnons dans le cas où il n’y a pas de terme de production.
1 ∂n ∗
L’équation de diffusion ∆n ∗ = est linéaire : une combinaison linéaire de
D ∂t
solutions sera encore solution.
1 ∂n ∗
∆n ∗ = n’est pas invariante par le changement t → − t : le phénomène de
D ∂t
diffusion de particules est irréversible.
Par exemple, l’entropie produite dans la transformation étudiée au 1.4 est stric-
tement positive. La transformation inverse, dans laquelle la diffusion dans un milieu
initialement homogène créerait spontanément deux moitiés à des densités différentes
est bien sûr impossible : elle respecte le premier principe mais pas le second.

563
564 Partie VI.  Thermodynamique

De l’équation de diffusion on peut tirer une relation entre une longueur caracté-
ristique L et une durée caractéristique τ. Si on note n0∗ l’ordre de grandeur des varia-
1 ∂n ∗
tions de particules, on a ∆
N n∗ = , soit L2 = O(Dτ) .
=O( n0∗ / L2 )
D N∂t
=O( n0∗ / τ )

Le temps caractéristique de la diffusion de particules sur une longueur L donnée


est τd = L2 / D .

Cette expression est analogue à celle de la durée caractéristique τd = L2 / ν du


transport diffusif de quantité de mouvement dans un fluide.
Vu les ordres de grandeurs de D, les phénomènes de diffusion de particules
sont extrêmement lents…

La longueur caractéristique sur laquelle la diffusion de particules se fait pendant


une durée donnée T est δ = D ⋅ T .

3. RÉSOLUTION DE L’ÉQUATION DE DIFFUSION ET


APPLICATIONS
3.1 Conditions aux limites
Présentons deux conditions aux limites qu’on peut rencontrer, sur l’exemple du
transport à une dimension.

Extrémité x = 0 imperméable
∂n∗
Comme Jd ( x, t ) = −D ( x, t ) d’après la loi
∂x
de Fick, l’absence de transport de particules dans
la section d’abscisse x = 0 se traduit par :
∂n∗
Jd (0, t ) = 0 ∀t  (0, t ) = 0 ∀t .
∂x

Connexion en x = 0 avec un réservoir parfaitement agité (de densité uniforme)

On a dans ce cas n∗ (0, t ) = n1∗ (t ) ∀t .

564
Chapitre 3.  Diffusion de particules 565

3.2 Les différents régimes


Considérons un système Σ de volume V à l’in-
térieur d’une surface fermée S perméable aux parti-
cules diffusantes.
On se donne :
— Des conditions initiales (C.I) : la densité de parti-
cules n∗ (M, t = 0) est connu pour tout point M de V .
— Des conditions aux limites (C.A.L). Par exemple, en
G
tout point P de la surface S , n∗ (P, t ) , ou Jd (P, t ) , est
connu à tout instant t.
C.A.L uniformes et stationnaires, équilibre thermodynamique

Supposons par exemple qu’on impose n∗ (P, t ) = next∗ = Cte ∀P ∈ S , ∀t .


Après un régime transitoire de durée caractéristique τd , on atteint l’équilibre

thermodynamique : n∗ (M, t ) = next∗ ∀M ∈ V , ∀t .

C.A.L stationnaires mais non uniformes, régime stationnaire

Supposons qu’on impose n∗ (P ) indépendant du temps, mais dépendant du


point P à la surface S .
Après un régime transitoire de durée caractéristique τd , on atteint un régime

stationnaire pour lequel n∗ (M ) dépend du point M de V , mais pas du temps.

C.A.L variant sinusoïdalement dans le temps, régime sinusoïdal forcé

Supposons qu’on impose n∗ (P, t ) = f (P ) ⋅ cos [ ωt + ψ(P )] ∀P ∈ S .


Après un régime transitoire de durée caractéristique τd , on atteint un régime

sinusoïdal forcé : n∗ (M, t ) = g (M ) ⋅ cos [ ωt + ϕ(M )] ∀M ∈ V , ∀t , de même pulsation que


la densité imposée à la surface.
C’est une conséquence de la linéarité de l’équation de la diffusion.
On peut, grâce à l’analyse de Fourier, traiter des cas où les C.A.L ne sont pas
des fonctions sinusoïdales du temps.

Régime transitoire (cas le plus général)


Les différents régimes que nous venons de citer sont des régimes établis, qui
ne font pas intervenir les C.I.
En revanche, on a besoin des C.I si l’on veut déterminer le régime transitoire
amenant à ces régimes établis.

565
566 Partie VI.  Thermodynamique

C.A.L instationnaires mais variant lentement : A.R.Q.S

Si les C.A.L varient sur une durée τ >> τd = L2 / D , alors n∗ (M, t ) , solution
1 ∂n ∗
exacte de l’équation de la diffusion ∆n∗ = , est bien approximée par n′∗ (M, t ) ,
D ∂t
solution de ∆n ′∗ = 0 . C’est l’Approximation des Régimes Quasi-Stationnaires.

En effet, si on pose n∗ (M, t ) = n′∗ (M, t ) + ε(M, t ) , et qu’on note ξ l’ordre de gran-
deur de l’écart ε entre la solution exacte et la solution approchée, et n0∗ l’ordre de

grandeur de n ∗ , on obtient, en prenant le laplacien de n∗ = n′∗ + ε :


1 ∂n∗

Nn∗ = ∆
Nn′∗ + ∆ε , soit ∆ε
N = , puisque la durée caractéristique des varia-
1 ∂n∗ 0 O ξ / L2 
D N∂t
D ∂t O n0∗ / τ 

ξ  L2  τ 
tions de n ∗ , imposée par les C.A.L, est τ. On a bien = O   = O  d  << 1.
n0∗  
D τ τ

3.3 Influence de la gravité pour les fluides en régime stationnaire 


G
Dans un fluide, la gravité impose un flux descendant de particules. On note ez
le vecteur unitaire vertical ascendant.

Atmosphère isotherme, autodiffusion


L’air est considéré comme un gaz parfait. Entre deux chocs, les particules, qui
n’interagissent pas entre elles, ne sont soumises qu’à leur poids.
Considérons, à la date t, les N particules contenues dans un volume mésosco-
pique V autour d’un point M.
La particule i, avec i ∈ a1, N b , suite à son dernier choc subi à t = t i < t , possède
G
une vitesse « initiale » v i (t = t i ) . Entre deux chocs, elle n’est soumise qu’à son poids.
En lui appliquant le P.F.D dans le référentiel terrestre supposé galiléen, entre t i et t,
G
on montre que son accélération est égale au champ de pesanteur g . Sa vitesse s’écrit
G G G
donc v i (t ) = g ⋅ (t − ti ) + v i (t = t i ) . La moyenne d’ensemble de la vitesse des particules
G 1 N
G G G 1 N
est V =
N  v i = g ⋅ t − ti + v i (t = ti ) , or t − ti =
N i =1 
(t − ti ) = τ est la durée moyenne
i =1
G G
qui s’est écoulée depuis le dernier choc, et v i (t = t i ) = 0 est la vitesse moyenne des
particules juste après leur dernier choc, nulle puisqu’il y a isotropie de la répartition
des vecteurs vitesses après un choc.
G G G
On obtient donc V = g ⋅ τ = −g τez , où τ est la durée moyenne entre deux chocs.

566
Chapitre 3.  Diffusion de particules 567

Il ne faut pas confondre la vitesse V = τg de dérive des particules vers le bas


avec la vitesse moyenne v ∝ T d’agitation thermique des particules d’un gaz parfait.
Ainsi, en l’absence de diffusion, le gaz serait animé d’un mouvement macros-
copique (de convection) descendant. Le vecteur densité volumique de courants de
� �
convection est Jc = n∗V , avec n∗ ( z, t ) car le système est invariant par toute translation
horizontale. L’hypothèse de l’absence de diffusion n’est vérifiée que si la densité de
particules est uniforme. Ce n’est pas le cas puisque la convection seule provoquerait
une accumulation des particules de l’atmosphère au niveau du sol. On a donc néces-
sairement diffusion des particules vers le haut, avec un vecteur densité volumique de
� ∂n∗ � dn∗ �
courants de diffusion Jd = −D ez = −D ez .
∂z dz
En régime stationnaire, les deux flux, con-
vectif et diffusif, doivent se compenser à toute alti-
� � �
tude : J d + Jc = 0 ∀z (si ce n’était pas le cas, le
nombre de particules de la tranche d’atmosphère
z′ ≤ z varierait). On en déduit l’équation différen-
dn∗ dn∗ g τ ∗
tielle −D − g τn∗ = 0 ⇔ + n =0.
dz dz D
z
− D
On a donc n∗ ( z ) = n∗ (0)e H , avec H = .

On a démontré, dans le chapitre sur la statique des fluides, que la loi de pression
de l’atmosphère isotherme, considérée comme un gaz parfait est :
Mgz z

RT
− n∗
p( z ) = p0e = p0e H , or la loi des gaz parfaits p = RT montre que n ∗ subit la
NA
D RT
même variation en fonction de l’altitude que la pression. On a donc H = = , et
g τ Mg
RT ℓ T
on identifie D = τ . Comme τ = , avec ℓ ∝ (relation démontrée dans le même
M v p
T2
chapitre sur la statique des fluides), on a D ∝ .
pv
T 3/2
On en tire la forme du coefficient d’autodiffusion D ∝ .
p

Sédimentation
Le fluide est un liquide au repos dans le référentiel R du laboratoire, galiléen.
Il possède une masse volumique ρ0 , une viscosité dynamique η, et contient des par-
ticules microscopiques sphériques de rayon r et de masse volumique ρ > ρ0 , en faible

concentration. On note v leur vitesse par rapport à R . Elles sont soumises à leur

567
568 Partie VI.  Thermodynamique

G
poids, à la poussée d’Archimède et à la force de Stokes −6 πr η v .
Après un court régime transitoire, elles atteignent une vitesse limite constante
G 4 πr 3 (ρ − ρ ) G
0 G G 2r 2 (ρ − ρ0 ) G
qui vérifie : 0 = g − 6 πr ηv lim . On a donc v lim = g , et des cou-
3 9η
G G
rants convectifs de densité volumique Jc = n∗ (z, t )vlim .
En régime stationnaire, ce flux descendant de particules est compensé par le
G dn ∗ G
flux diffusif Jd = −D ez .
dz
On obtient l’équation différentielle régissant n∗ ( z ) en écrivant :
G G G dn∗ 2r 2 (ρ − ρ0 )g ∗ dn∗ 2r 2 (ρ − ρ0 )g ∗
Jd + Jc = 0 ∀z  −D − n = 0 , soit + n = 0 . On a
dz 9η dz 9ηD
z
− 9 ηD
donc n∗ ( z ) = n∗ (0)e H , avec H = 2
.
2r (ρ − ρ0 )g
Ep

kBT
La loi de Boltzmann donne la probabilité P ∝ e que la particule possède
4πr 3 (ρ − ρ0 )
l’énergie potentielle Ep = gz (l’énergie potentielle tient compte de la pous-
3
sée d’Archimède). La densité n∗ ( z ) suit donc la même loi, et on identifie :
9ηD 3kBT kBT
H= 2
= 3
. Dans un liquide, on a D = ∝T .
2r (ρ − ρ0 )g 4πr (ρ − ρ0 )g 6πηr
Pour des particules de masses volumiques, ou de rayons, très différents, la
hauteur H, appelée hauteur de sédimentation, peut être suffisamment différente pour
permettre une séparation de ces particules. Par exemple si H1 = 1 mm et H 2 = 1 m ,
on élimine pratiquement toutes les particules (1) et on garde pratiquement toutes les
particules (2) en prélevant le liquide au-dessus d’une hauteur z = 1 cm .
Jean Perrin mesura la constante d’Avogadro N A
en observant au microscope une cuve d’un dixième de
millimètre de hauteur, remplie avec une goutte d’eau
dans laquelle il avait placé des petites sphères de
gomme-gutte (caoutchouc végétal), dont le rayon est
r = 0,212 µm . En comptant le nombre de ces sphérules
à différentes hauteurs, il a pu vérifier que n∗ ( z ) obéissait
bien à la loi de Boltzmann.
Si, à la hauteur prise pour origine z = 0 , on
compte N0 = 100 sphérules, il n’y en a plus que Nh = 17
à l’altitude h = 90 µm . On en déduit que :

568
Chapitre 3.  Diffusion de particules 569

 N  4πr 3 (ρ − ρ0 )gh R 3RT N 


ln  0  = , avec kB = , d’où N A = 3
ln  0  .
 Nh  3kBT NA 4πr (ρ − ρ0 )gh  Nh 
À la température T = 293 K de l’expérience, les masses volumiques valent
ρ = 1,194 ⋅ 103 kg ⋅ m-3 et ρ0 = 1,003 ⋅ 103 kg ⋅ m-3 . On calcule alors :
3 × 8,314 × 293  100  23 -1
NA = 3
ln   = 6,4 ⋅ 10 mol .
 17 
(
4π × 2,12 ⋅ 10 −7
) × 191× 9,81× 9 ⋅ 10 −5

Cette valeur est proche de la valeur réelle N A = 6,02 ⋅ 1023 mol-1, l’écart s’ex-
pliquant par les incertitudes de mesure, notamment sur Nh , r et h.

3.4 A.R.Q.S : durée d’évaporation de l’éther 


Un liquide, placé dans un tube à essai dont l’extrémité est ouverte, finit par
s’évaporer.
Considérons, à la température T = 293 K , de l’éther liquide C 4H10O , de masse
molaire M = 74,1 g ⋅ mol-1 , de masse volumique ρ = 714 kg ⋅ m-3 , placé dans un tube à
essai cylindrique vertical de section S . La diffusivité de la vapeur d’éther dans l’air est
D = 1,45 ⋅ 10−5 m2 ⋅ s-1 .
La surface libre de l’éther liquide se trouve à une
distance h(t) de l’ouverture du tube, distance qui va aug-
menter au fur et à mesure que l’éther s’évapore. Un point
du tube est repéré par son abscisse x à partir de l’ouver-
ture. Le renouvellement de l’air au niveau de l’ouverture
du tube implique que la pression partielle en éther y est
pratiquement nulle.
Au niveau de la surface libre, l’éther subit une va-
porisation : sa pression partielle y est égale à la pression
de vapeur saturante ps (293 K) = 0,586 bar .
On peut négliger la pesanteur dans la partie du
tube remplie d’air.
Si la section S est suffisamment petite, la densité de l’éther dans l’air ne dé-
∂ 2n∗ 1 ∂n∗
pend spatialement que de x : n ∗ ( x, t ) , et elle est régie par = .
∂x 2 D ∂t
Nous allons faire l’hypothèse que le régime de diffusion de l’éther dans l’air est
∂ 2 n∗
quasi-stationnaire : ≃ 0 , ce qui implique que n ∗ ( x, t ) est de la forme :
∂x 2
n∗ (0, t ) = 0
n∗ ( x, t ) = a(t )x + b(t ) . Or les C.A.L sont  ∀t .
∗ ∗
n (h(t ), t ) = ns

569
570 Partie VI.  Thermodynamique

La densité ns∗ est reliée à la pression de vapeur saturante ps grâce à la loi des
ps N A
gaz parfaits : ns∗ = .
RT
ps N A x
On a finalement n∗ ( x, t ) = .
RT h(t )
On en déduit, grâce à la loi de Fick, le nombre de molécules d’éther qui traver-
sent une section S du tube pendant dt dans le sens des x croissants :
∂n∗ p S NA
δN = −D S dt , soit δN = −D s dt . Ce nombre est négatif car les molécules
∂x RT ⋅ h(t )
diffusent vers le haut.
δN
Le nombre de mol d’éther vaporisé pendant dt vaut donc dn = − , soit :
NA
ps S M Mps S
dn = D dt , ce qui correspond à un volume S dh = dn = D dt .
RT ⋅ h(t ) ρ ρRT ⋅ h(t )
MDps
On en déduit l’équation différentielle hdh = dt régissant h(t). Cette équa-
ρRT
MDps MDps
tion s’intègre en h2 = h02 + 2 t , soit h = h02 + 2 t.
ρRT ρRT
Le temps nécessaire pour évaporer totalement l’éther remplissant les trois-
quarts d’un tube à essai de longueur totale L = 20 cm est donc :
15 ρRT 2 L
τ= L , puisque h0 = et hfinal = L .
32 MDps 4
On obtient τ = 5,2 ⋅ 105 s = 6,0 j . Cette durée est très grande devant le temps
caractéristique maximal de la diffusion (sur une hauteur L) :
τd = L2 / D = 2,8 ⋅ 103 s = 46 min : l’A.R.Q.S est bien vérifiée.

3.5 Régime transitoire : réacteur nucléaire 


Le fonctionnement du cœur d’un réacteur nucléaire cylindrique de section S ,
L
limité par deux plans d’abscisses x = ± , est modélisé à 1D par :
2
n∗ ( x, t )
— Une production volumique de neutrons par unité de temps σ = , où n ∗ ( x, t )
τ
est la densité volumique de neutrons. Cette production est positive car les neutrons
sont produits par les réactions de fission.
L L
— Une zone de piégeage appelée couverture : pour x ≥ ou x ≤ − , on a n∗ ≃ 0 .
2 2
— La diffusion dans le cœur obéit à la loi de Fick avec un coefficient de diffusion D.

570
Chapitre 3.  Diffusion de particules 571

∂ 2n∗ σ 1 ∂n ∗
Le bilan local avec terme de production s’écrit ici + = soit :
∂x 2 D D ∂t
∂ 2 n∗ n∗ 1 ∂n∗
2
+ = .
∂x τD D ∂t
∂n∗ n∗
Sans le phénomène de diffusion ( D → 0 ), on aurait − = 0 , dont la solu-
∂t τ
t
tion en x fixé est n∗ ( x, t ) = n∗ ( x,0)e τ , soit une croissance exponentielle du nombre de
neutrons : τ est le temps caractéristique des réactions de fission.
d2n∗ n∗
En régime permanent, on a + = 0 , dont la solution est :
dx 2 τD
 x   x 
n∗ ( x ) = A cos   + B sin  .
 τD   τD 
 L  L 
Avec les C.A.L n∗  x = ±  = 0 , on obtient B = 0 et cos   = 0 soit :
 2  2 τD 
L π
= (2p + 1) , avec p ∈ N , ce qui quantifie les modes de diffusion.
2 τD 2
Nous ne nous intéresserons ici pour simplifier qu’au mode fondamental p = 0 :
L2
la longueur L vérifie L = π τD ⇔ τ = = τd . Le temps τ caractéristique de la fission
π 2D
L2
est alors égal au temps caractéristique de la diffusion τd = (les deux phéno-
π2D
mènes « se compensent »).
 πx 
On a donc n∗ ( x ) = n0∗ cos  .
 L 
Le nombre N0 de neutrons dans le réacteur vaut :
L
2
 πx  2n0∗ S L
N0 =  L
n0∗ cos 
 L 
 S d x =
π
.

2
Le nombre de neutrons évacués, pendant dt, vers les zones de couverture est :

571
572 Partie VI.  Thermodynamique

 L ∂n∗  L 2πDn0∗
δNévacués = 2 ⋅ Jd  x =  S dt = −2D x = S d t = S dt .
 2 ∂x  2  L
Le nombre de neutrons produit par les réactions de fission vaut quant à lui :
L 
2 n∗  πx   2n ∗ S L L2
δN p = 
 L τ
0
cos   S dx  dt = 0
 L   πτ
dt . Puisque τ = 2 , on vérifie qu’on a
π D
 − 2 

2 πDn0∗
bien, en régime stationnaire δN p = S dt = δNévacués .
L
Pour contrôler les réactions, on utilise des barres de commande, constituées de
matériaux absorbant les neutrons, qu’on fait plus ou moins rentrer dans le cœur du
réacteur. Le taux de production volumique global des neutrons peut alors être négatif
n∗ ( x, t )
(si le piégeage l’emporte sur la fission) : σ = avec τ′ algébrique.
τ′
On recherche alors la solution de l’équation de diffusion en régime transitoire
sous la forme n∗ ( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t ) . En injectant dans l’équation locale, on obtient :
f ( x )g (t ) 1
f ′′( x )g (t ) + = f ( x )g ′(t ) .
τ′D D
f ′′( x ) 1 g ′(t )
On sépare alors les variables : D + = = Cte = K . Si on suppose que
f ( x ) τ N
′ g (t )
F(x) G( t )

 πx 
le régime permanent n∗ ( x ) = n0∗ cos   était atteint à l’instant t = 0 , on a :
 L 
π2D 1 1 1
K =− 2
+ = − . Comme g (t ) = g0eKt , on en déduit que :
L τ′ τ′ τd
1 1
— Si K = − < 0 , le réacteur s’arrête au bout d’un temps caractéristique −1/ K .
τ′ τd
Cette situation se produit si τ′ < 0 (le piégeage l’emporte sur la production), mais aussi
si τ′ > 0 , du moment que τd < τ′ . La production l’emporte alors sur le piégeage, mais,
si τd < τ′ , la diffusion, plus rapide que la production globale, l’emporte.
1 1
— Si K = − > 0 ⇔ τ′ < τd , le réacteur s’emballe, et le nombre de neutrons aug-
τ′ τd
mente exponentiellement, avec un temps caractéristique 1/ K . Cette situation se pro-
duit si la production globale, plus rapide que la diffusion, l’emporte.
L2
Le régime permanent τ′ = τ = τd = est donc instable dans notre modèle. En
π 2D
réalité, il faut prendre en compte les effets thermiques (les réactions dégagent de la
chaleur, ce qui est d’ailleurs le but recherché, or l’augmentation de la température peut
diminuer la vitesse des réactions de fission), la dilatation du réacteur, etc.

572
Chapitre 3.  Diffusion de particules 573

3.6 Diffusion d’un pic de concentration (complément hors-programme)


On considère la diffusion 1D dans un cylindre infini d’axe Ox et de section S .
∂ 2n∗ 1 ∂n∗
On peut trouver une solution générale à l’équation de diffusion =
∂x 2 D ∂t
sans terme de production en cherchant des solutions sous la forme :
1 f ′′( x ) g ′(t )
n∗ ( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t )  f ′′( x )g (t ) = f ( x )g ′(t ) , soit D = = Cte = −K .
D

���f ( x�) � g (t )
F(x) G(t )
Les solutions physiquement acceptables en l’absence de production ne doivent
pas diverger dans le temps, donc K > 0 . Ainsi :
K  K 
g (t ) = Ae −Kt , et f ′′( x ) + f ( x ) = 0  f ( x ) = B cos  x + ϕ = B cos(kx + ϕ) .
D  D 
k = 2π / λ est une pulsation spatiale et λ est une longueur d’onde. Ces gran-
deurs spatiales sont analogues aux grandeurs temporelles : pulsation ω et période T.
K
k= est un réel positif quelconque. On a K = Dk 2 et on connaît une solution
D
2
de l’équation de diffusion 1D : n∗ ( x, t ) = C cos(kx + ϕ)e−Dk t .
Pour cette solution, on a initialement n∗ ( x,0) = C cos(kx + ϕ) , qui ne vérifie donc
pas des C.I quelconques : n∗ ( x,0) = F ( x ) où F est une fonction quelconque.
Cependant, grâce à l’analyse de Fourier, on peut exprimer F à l’aide de
+∞
1
fonctions sinusoïdales : F ( x ) =  Fɶ (k ) e
ikx
dk , où k ֏ Fɶ (k ) est la transformée de
2π −∞
+∞
1
Fourier de F, donnée par Fɶ ( k ) =  F(x)e
− ikx
dx . F est la transformée de Fourier
2π −∞
inverse de Fɶ .
2
Comme l’équation de la diffusion est linéaire, eikxe−Dk t en est une solution,
2 2
puisque sa partie réelle cos(kx )e−Dk t et sa partie imaginaire sin(kx )e −Dk t
sont toutes
deux solutions de cette équation.
+∞
1
 Fɶ (k ) e
ikx − Dk 2t
n ∗ ( x, t ) = e dk est donc, toujours grâce à la linéarité de
2π −∞
l’équation de diffusion, solution de cette équation, et comme :
+∞
1
n∗ ( x,0) = Fɶ ( k )e ikx dk = F ( x ) , elle vérifie aussi les C.I.

2π −∞

Prenons l’exemple de la diffusion d’un pic de concentration : F ( x ) = a ⋅ δ( x ) , où


δ est la distribution de Dirac, et a une constante.
On a donc :
+∞ +∞
1 a a
Fɶ ( k ) =  
2
a ⋅ δ( x ) e − ikx dx = , d’où n∗ ( x, t ) = e ikx e −Dk t dk .
2π 2π 2π
−∞ −∞

573
574 Partie VI.  Thermodynamique

Le calcul (cf. « Analyse de Fourier ») montre que la T.F inverse de la gaus-


x2
1 −
sienne k ֏ fɶ(k ) = e−Dk t est également une gaussienne x ֏ f ( x ) =
2
e 4Dt :
2Dt
+∞ x2
1 1 −
e
− Dk 2t ikx
e dk = e 4Dt .
2π −∞
2Dt
x2
a 1 −

La solution recherchée est donc n ( x, t ) = ⋅ 2π ⋅ e 4Dt , soit :
2π 2Dt
x2
a −
∗ 4Dt
n ( x, t ) = e . C’est une gaussienne centrée en x = 0 , dont la largeur à mi-
4πDt
hauteur est ∆x = 4 ln2 ⋅ Dt , et qui vérifie bien les C.A.L n∗ ( x → ±∞, t ) = 0 .

On retrouve que, pendant la durée t, la diffusion se fait sur une longueur de


l’ordre de Dt .
+∞ x2 +∞
− π
 e
4Dt dx −βx 2
Comme e = dx = = 4πDt , on vérifie que le nombre de
β
−∞ −∞
+∞ +∞
particules diffusantes se conserve : à t = 0 , N0 =  n∗ ( x,0) S dx =  aδ(x)S dx = aS
−∞ −∞
+∞ +∞ x2
a −
et à t quelconque,  n∗ ( x, t ) S dx =  4πDt
e 4Dt S dx = a S =N0 .
−∞ −∞
x2
N0 −
∗ 4Dt
Finalement n ( x, t ) = e est la solution du problème car elle vérifie
S 4πDt
l’équation de diffusion, les C.A.L et les C.I.
∂n∗ x2
En x fixé, n ∗ passe par un maximum pour =0t = . Là encore, le
∂t 2D
résultat est conforme à ce qu’on attend pour la durée caractéristique de la diffusion sur
une longueur x. On peut tracer les courbes donnant n∗ ( x ) à différents instants, et
n∗ (t ) pour différentes valeurs de x.

574
575

[THERMODYNAMIQUE 4]

DIFFUSION THERMIQUE
1. FLUX THERMIQUES
1.1 Système hors équilibre
À l’équilibre thermodynamique, non seulement les paramètres d’état d’un sys-
tème Σ ne dépendent pas du temps (état stationnaire), mais les paramètres d’état in-
tensifs (p, T…) sont uniformes.
Ainsi, une barre d’un matériau solide, de longueur L, calorifugée sur sa surface
latérale, n’est pas à l’équilibre thermodynamique si on impose à tout instant les condi-
tions aux limites T ( x = 0, t ) = T1 et T ( x = L, t ) = T2 < T1 . Après un régime transitoire, la
température dans la barre ne dépend plus de temps, mais n’est pas uniforme. On n’at-
teint pas l’équilibre thermodynamique tant que la source du déséquilibre (les tempéra-
tures différentes appliquées aux extrémités de la barre) subsiste.

Du point de vue microscopique, l’agitation thermique étant plus importante en


x = 0 qu’en x = L , on a constamment un transport d’énergie cinétique moyenne dans
le sens des x croissants.

1.2 Densité volumique de courants thermiques


De façon générale, des transferts thermiques
(ou plus communément : chaleur), ont lieu quand,
dans un système, la température n’est pas uniforme.
Considérons une surface élémentaire d2 S
autour d’un point M, s’appuyant sur un contour
orienté. La surface d2 S est fixe dans le référentiel d’étude R . Soit δ3Q la chaleur qui
traverse pendant dt la surface d2 S (transferts thermiques à travers d2 S pendant dt),
G
dans le sens du vecteur d2 S qui se déduit de celui du contour grâce à la règle du
tire-bouchon. Cette chaleur est algébrique : elle est positive si une énergie a bien tra-
versé d2 S dans le sens positif, négative si elle l’a traversé dans le sens opposé.

575
576 Partie VI.  Thermodynamique

G
On définit le vecteur densité volumique de courants thermiques J (en W ⋅ m-2 )
G G
par la relation δ3Q = J ⋅ d2 S dt .
La surface d2 S est donc traversée par une puissance thermique élémentaire
δ3Q G 2 G
d2Pth = d2Φ = = J ⋅d S .
dt
G
Le vecteur J permet de calculer la
puissance thermique Pth (W), souvent appe-
lée flux thermique, et notée Φ, qui traverse
une surface S finie, orientée grâce à la règle
du tire-bouchon en fonction de l’orientation du
contour sur lequel elle s’appuie :
δQ G G
Φ = Pth =
dt 
= J ⋅ d2 S .
S
Il existe trois types de transferts ther-
miques : par conduction (ou diffusion ; on no-
G
tera J d le vecteur densité volumique de cou-
rants correspondant à ce phénomène), par
G G
convection ( Jc ) et par rayonnement ( Jr ).

1.3 Conduction (ou diffusion) thermique / Loi de Fourier


La conduction thermique nécessite un support matériel. Elle se produit dans
tous les corps dès que la température n’est pas uniforme. Si la température est plus
grande dans une cellule mésoscopique que dans sa voisine, l’agitation thermique y est
plus forte, et elle cède de l’énergie cinétique à sa voisine. Ce transport se fait de proche
en proche entre particule microscopiques, sans mouvement macroscopique.
Dans les fluides, l’échange d’énergie cinétique se fait lors de chocs entre ces
particules.
Dans les solides, les vibrations des molécules autour de leur position moyenne
(nœuds du réseau cristallin) ne sont pas indépendantes du fait de leurs interactions,
qu’on peut modéliser par des petits ressorts reliant deux molécules voisines. Une mo-
lécule qui vibre avec une amplitude plus grande que sa voisine lui transfère de l’éner-
gie, et ainsi de proche en proche. Les énergies de ces ondes d’agitation thermique, se
propageant à la vitesse du son dans le solide, sont quantifiées : pour un mode propre
de vibration de fréquence ν du réseau cristallin, l’énergie échangée est un multiple de
hν , où h est la constante de Planck. Le quantum hν d’énergie échangé est associé à
une pseudo-particule appelée phonon, analogue au photon, qui est le quantum pour
les ondes électromagnétiques.
Les solides amorphes comme le verre sont faiblement conducteurs de la cha-
leur alors que le diamant, structure périodique dans laquelle il y a 4 liaisons covalentes

576
Chapitre 4.  Diffusion thermique 577

pour chaque atome de carbone, est un bien meilleur conducteur thermique que les
métaux. Les métaux sont cependant de très bons conducteurs thermiques car l’éner-
gie cinétique est également transportée par les électrons de conduction : les métaux
qui conduisent le mieux l’électricité conduisent le mieux la chaleur.
Prenons l’exemple d’une barre d’un matériau solide, coupée en deux, dont on
chauffe l’une des moitiés (on la porte à une température T1 , alors que l’autre moitié
reste à T2 < T1 ). On met en contact les deux barres et on calorifuge l’ensemble. Initia-
lement, les molécules de la moitié chauffée vibrent autour de leur position moyenne
(nœud du réseau cristallin), avec une énergie ciné-
tique plus élevée que les molécules de l’autre moi-
tié. Les molécules des deux moitiés interagissent
au voisinage de la surface de contact et celles de
la moitié (1) perdent de l’énergie cinétique au profit
de celles de la moitié (2). Ce processus se repro-
duit de proche en proche, avec toujours un trans-
port d’énergie cinétique des zones de forte tempé-
rature (la température est une mesure de l’énergie
cinétique moyenne des molécules) vers les zones
de basse température.
G
Le vecteur J d est donc orienté des hautes vers les basses températures.

Après ce régime transitoire, l’énergie cinétique moyenne, et donc la tempéra-


ture, sont également réparties sur toute la barre. Comme il y a conservation de l’éner-
gie (la barre est calorifugée), la température d’équilibre Teq vérifie T2 < Teq < T1 .
G
Fourier a proposé une loi reliant J d aux différences de température :

G  →
Jd = −λ gradT , avec λ coefficient positif appelé conductivité thermique du matériau
( W ⋅ m-1 ⋅ K -1 ). Ceci constitue la loi de Fourier.

Cette loi, issue des observations, est phénoménologique. Elle ne se démontre


pas et n’est pas universelle (ce qui empêche de la considérer comme un postulat),
mais elle donne un bon accord avec les mesures, pour un grand nombre de matériaux,
à condition que le gradient de température ne soit pas trop élevé. Elle est linéaire : les
matériaux pour lesquels elle est bien vérifiée sont des matériaux L.H.I (linéaires, ho-
mogènes et isotropes). Le graphite est un exemple de matériau non isotrope.

577
578 Partie VI.  Thermodynamique

La loi de Fourier est bien en accord avec les phénomènes observés : transferts
→
thermiques dans la direction de gradT où les variations spatiales locales de tempéra-
→
tures sont les plus intenses, et dans le sens de − gradT , c’est-à-dire celui des tempé-
ratures décroissantes. On peut vérifier ce dernier point sur l’exemple précédent pour
lequel on suppose que la température ne dépend que de l’abscisse x, et du temps :
G ∂T G
T ( x, t ) . Si la température décroît avec x, on a bien Jd = −λ ex .
 ∂x
>0

Donnons quelques ordres de grandeur pour la conductivité λ à p = p0 = 1 bar


et T = 300 K :
λ (W ⋅ m-1 ⋅ K -1)
cuivre 403
métaux : très bons conducteurs
fer 81
diamant 2310
graphite // graphène 2000
graphite ⊥ graphène 9,6
solides non métalliques
verre 1,0
bois 0,2
P.V.C 0,16
liquide eau 0,6
gaz air 0,026
laine de verre 0,03
isolants thermiques polystyrène expansé 0,04
brique 0,8

Les isolants thermiques sont souvent des matériaux qui emprisonnent l’air et
qui possèdent de ce fait une conductivité thermique proche de celle de ce dernier.
λ dépend peu de la pression et de la température. On négligera par la suite les
variations de λ avec T.

578
Chapitre 4.  Diffusion thermique 579

1.4 Convection
Les solides sont les seuls corps dans lesquels on a de la diffusion thermique
pure. Dans les fluides intervient aussi le phénomène de convection dans lequel le
transport d’énergie cinétique se fait par mouvement macroscopique.
L’écoulement peut justement être dû à des différences de température dans le
fluide. On parle alors de convection naturelle. Illustrons son mécanisme dans le cas
d’un fluide placé entre deux plaques parallèles horizontales dont celle du bas est
chauffée. Le fluide se réchauffe au contact de la plaque inférieure et devient moins
dense que le fluide du dessus. Lorsque la différence de température entre les deux
plaques dépasse une valeur critique, une instabilité (de Rayleigh-Bénard) naît, et des
rouleaux de convection apparaissent : le fluide chaud subit une poussée d’Archimède
de la part du fluide froid qui l’environne, et monte, pendant que le fluide froid, plus
dense, descend. Deux rouleaux voisins tournent en sens opposé.

Lorsqu’on chauffe une pièce avec des radiateurs à eau, les transferts ther-
miques dans l’air dus à la convection naturelle sont beaucoup plus rapides que ceux
dus à la diffusion. Le temps caractéristique de convection est petit devant celui de
diffusion : τc << τd . Notons que ce phénomène fait intervenir la gravité et n’existe pas
en apesanteur.
On peut encore augmenter la puissance thermique en imposant un écoulement.
On parle alors de convection forcée. Le ventilateur d’un ordinateur est par exemple
indispensable pour refroidir les composants électroniques.

Lorsqu’un solide de température T1 est placé dans un écoulement fluide de


température T2 , des transferts thermiques ont lieu à l’interface, que l’écoulement soit
naturel ou forcé. À proximité du solide, la vitesse du fluide est faible et s’annule même
sur la paroi solide (adhérence du fluide) : les transferts thermiques diffusifs sont non
négligeables dans une couche limite thermique, de la même façon que le transport
diffusif de quantité de mouvement est non négligeable dans la couche limite

579
580 Partie VI.  Thermodynamique

« dynamique » étudiée dans le chapitre sur la dynamique des fluides (ces couches
limites sont cependant différentes, par exemple la couche limite thermique peut ne pas
exister si le solide et le fluide sont à la même température).

Hors de cette couche limite thermique de très faible épaisseur, la température


du fluide est quasiment égale à T2 . C’est dans la couche limite que la température
connaît un fort gradient, en passant sur une courte distance de T1 à T2 .

Les transferts thermiques entre le solide et le fluide font intervenir la diffusion et


G
la convection : on parle de transport conducto-convectif, associé au vecteur Jcc .

La détermination de ces transferts nécessite la connaissance du champ de vi-


tesse et de température de l’écoulement, ce qui est n’est pas accessible par le calcul
analytique, et fait donc l’objet de simulations numériques.
G
Cependant, la loi phénoménologique de Newton, reliant Jcc à la différence de
température T1 − T2 , est une bonne approche, bien que simplifiée, du phénomène de
conducto-convection :
G G
Jcc = h [T1 − T2 ] N1→2 , avec h coefficient positif appelé coefficient de transfert ther-
G
mique de surface ( W ⋅ m-2 ⋅ K -1 ), et N1→ 2 vecteur unitaire normal à l’interface solide /
fluide, et dirigé du solide (1) vers le fluide (2). Ceci constitue la loi de Newton.

La loi de Newton est linéaire, et traduit bien les grandes propriétés des phéno-
mènes observés : transferts thermiques normaux à l’interface, d’autant plus importants
G
que T1 − T2 est grande, dans le sens de N1→ 2 si T1 > T2 , c’est-à-dire celui des tempé-
ratures décroissantes. Elle donne un bon accord avec les mesures, à condition que le
gradient de température ne soit pas trop élevé.
On détermine expérimentalement la valeur de h, qui dépend de nombreux pa-
ramètres (géométrie et vitesse de l’écoulement, état de surface…).
Pour de la convection naturelle, l’ordre de grandeur de h est 10 W ⋅ m-2 ⋅ K -1
pour l’air, de 100 à 1000 W ⋅ m-2 ⋅ K -1 pour l’eau. La convection forcée permet d’obtenir
des valeurs allant jusqu’à 500 W ⋅ m-2 ⋅ K -1 pour l’air et 15 000 W ⋅ m-2 ⋅ K -1 pour l’eau.

580
Chapitre 4.  Diffusion thermique 581

2. ÉQUATION DE LA DIFFUSION THERMIQUE


(ÉQUATION DE LA CHALEUR)
2.1 Diffusion pure à 1D

Considérons un solide cylindrique d’axe Ox, de rayon r, de section S = πr 2 , de


longueur L, calorifugé sur sa surface latérale. Le solide est homogène, de conductivité
thermique λ, de masse volumique ρ, et de capacité thermique massique c (pour une
phase condensée, c p ≃ cV ≃ c ). Toutes ces grandeurs sont supposées ne pas dé-
pendre de la température. Le solide est supposé indilatable : son volume reste cons-
tant.
Si S = πr 2 << L2 ⇔ r << L , on peut négliger la variation de température dans
une section droite x = Cte . La température ne dépend alors que de x et du temps t.
� �
Les transferts thermiques se font donc uniquement selon Ox : J d = Jd ( x, t ) ex .
Pour établir l’équation locale qui régit T ( x, t ) , nous allons appliquer le premier
principe au système Σ constitué par le solide situé entre les abscisses x et x + dx .

Pour un solide homogène de masse m et de température T uniforme, l’énergie


interne vaut U = mcT + Cte . La constante n’intervenant pas, puisque ce sont des dif-
férences d’énergie interne qui sont à prendre en compte, prenons la nulle : U = mcT .

L’énergie interne de Σ vaut :


— À la date t, dU (t ) = dm ⋅ cT ( x, t ) ;
— À la date t + dt , dU (t + dt ) = dm ⋅ cT ( x, t + dt ) .
Elle subit donc entre ces deux dates une variation :
∂T
d2U = dU (t + dt ) − dU (t ) = dm ⋅ c dt , avec dm = ρS dx .
∂t
Appliquons maintenant le premier principe à Σ entre t et t + dt :
d2U = δ�
2
W + δ2Q = δQx − δQx + dx . Le travail des forces de pression est nul car le vo-
0
lume de Σ est constant. La chaleur reçue par un volume S dx pendant dt est un infi-
niment petit du second ordre. C’est la différence entre deux chaleurs du premier ordre,
infiniment proches : δQx = Jd ( x, t ) S dt qui traverse la section d’abscisse x entre t et
t + dt , et δQx + dx = J d ( x + dx, t ) S dt qui traverse la section d’abscisse x + dx entre t
et t + dt . Ces deux chaleurs algébriques sont orientées dans le sens des x croissants.

581
582 Partie VI.  Thermodynamique

∂Jd
Pour un transport diffusif on a donc d2U = − S dx dt .
∂x
∂T ∂J ∂(ρcT ) ∂Jd
On en déduit ρc = − d , soit + = 0 . On reconnaît un bilan local
∂t ∂x ∂t ∂x
d’énergie interne 1D.
Les échanges thermiques sont liés au gradient de température par la loi de
∂T
Fourier Jd = −λ . On obtient donc l’équation locale régissant T ( x, t ) :
∂x

∂ 2T 1 ∂T λ
2
= , avec a = diffusivité thermique du matériau en m2 ⋅ s-1 . C’est l’équa-
∂x a ∂t ρc
tion de la chaleur à 1D.

Donnons quelques ordres de grandeur pour a :


— Pour les métaux, a est compris entre 10−5 et 10 −4 m2 ⋅ s-1 .
— Pour l’eau a = 1,5 ⋅ 10−7 m2 ⋅ s-1 .
— Pour l’air a = 2 ⋅ 10−5 m2 ⋅ s-1 .
— Pour le verre a = 5 ⋅ 10−7 m2 ⋅ s-1 .

2.2 Diffusion pure à 3D


Considérons un système Σ so-
lide, homogène (de conductivité ther-
mique λ, de masse volumique ρ, de ca-
pacité thermique massique c, toutes in-
dépendantes de T) de volume V à l’in-
térieur d’une surface S fermée et fixe
par rapport au référentiel d’étude R .
Entre t et t + dt , son énergie interne

 ρcT (M, t )d V


3
U (t ) = varie de :
M ∈V
 ∂T 3 
dU = U ( t + dt ) − U ( t ) =  
M ∈V
ρc
∂t
d V  dt .

La chaleur reçue pendant dt par conduction à travers un élément de surface
G G
d S autour d’un point P de la surface S s’écrit δ3Q = Jd (P, t ) ⋅ d2 S ⋅ dt . Σ reçoit donc
2

 G G  G 
entre t et t + dt : δQ = − 
P ∈S
w  
J d ⋅ d2 S  dt = − 
M∈V
divJd d3V  dt , d’après le théorème

de Green-Ostrogradski.
Σ étant indilatable, son volume reste constant, et il ne reçoit pas de travail des
forces de pression.

582
Chapitre 4.  Diffusion thermique 583

Le premier principe appliqué à Σ entre t et t + dt fournit donc :


 (ρcT )
∂ G  3
  ∂t + divJd  d V = 0 .
 
M ∈V

Si on applique le premier principe au système de volume d3V autour d’un point


 ∂(ρcT ) G  ∂(ρcT ) G
M, on obtient  + divJd  d3V = 0 , soit + divJd = 0 . On reconnaît un bilan
 ∂t  ∂t
local d’énergie interne à 3D.
Les échanges thermiques sont liés au gradient de température par la loi de
G  →
Fourier Jd = −λ gradT . On obtient l’équation locale régissant T (M, t ) :

∂T G  → 
ρc = −divJd = λdiv  gradT  = λ∆T , où ∆T est le laplacien de T. D’où :
∂t  

1 ∂T
∆T = . C’est l’équation de la chaleur à 3D, également appelée équation de diffu-
a ∂t
sion, ou équation de Kelvin.

2.3 Propriétés de la diffusion thermique


1 ∂T
L’équation de la chaleur ∆T = est linéaire : une combinaison linéaire de
a ∂t
solutions sera encore solution.
1 ∂T
∆T = n’est pas invariante par le changement t → −t : les phénomènes
a ∂t
de diffusion thermique sont irréversibles. Par exemple, l’entropie produite dans la
transformation étudiée au 1.3 est strictement positive. La transformation inverse, dans
laquelle les transferts thermiques dans un solide calorifugé initialement de température
uniforme créeraient spontanément deux moitiés à des températures différentes est
bien sûr impossible : elle respecte le premier principe, mais pas le second.

De l’équation de diffusion on peut tirer une relation entre une longueur caracté-
ristique L et une durée caractéristique τ. Si on note T0 l’ordre de grandeur des varia-
1 ∂T
tions de températures, on a ∆
N T = , soit L2 = O(aτ) .
2
=O (T0 / L )
∂t
a N
=O (T0 / τ )

Le temps caractéristique de la diffusion thermique sur une longueur L donnée


est τd = L2 / a .

583
584 Partie VI.  Thermodynamique

Cette expression est analogue à celle de la durée caractéristique τd = L2 / ν du


transport diffusif de quantité de mouvement dans un fluide.
Plus un matériau possède une grande diffusivité thermique, plus la durée
τd = L2 / a du régime transitoire est courte.
Pour un métal excellent conducteur thermique : a ≃ 10 −4 m2 ⋅ s-1 , la durée ca-
ractéristique du transfert thermique sur une longueur L = 10 cm est τd = 100 s . On
peut estimer qu’on commencera à ressentir une sensation de brûlure 2 minutes après
avoir plongé l’extrémité d’une petite cuillère dans de l’eau en ébullition. Avec une
grande louche de longueur L = 30 cm , cette durée, qui est proportionnelle à L2 , est 9
fois plus grande…
On constate que les phénomènes de diffusion thermique sont lents.
La relation τd = L2 / a permet d’évaluer le temps de cuisson au four d’un ali-
ment. Par exemple, pour un poulet de masse m, une longueur caractéristique est ob-
tenue grâce au volume V = m / ρ , où ρ est la masse volumique moyenne du poulet :
 m 1/3  1 m 
2/3

L =O    . On en déduit le temps de cuisson τd = K   , avec K constante
 ρ   a ρ 

sans dimension. S’il faut τd = 1 h pour cuire un poulet de masse m = 1,5 kg , il faudra
2/3
 m′ 
τ′d = τd   = 22/3 τd = 1h 35 min et pas 2 h pour un poulet de masse m′ = 3 kg .
m
Ce résultat est obtenu à partir d’hypothèses raisonnables :
— ρ et a varient peu d’un poulet à l’autre.
— La durée de la diffusion thermique dans le poulet est limitante. Les transferts ther-
miques par rayonnement et convection, entre le dispositif de chauffage et la surface
du poulet, sont en effet beaucoup plus rapides.
— Les réactions chimiques endothermiques qui se produisent lors de la cuisson sont
également beaucoup plus rapides que la diffusion thermique…
La relation L2 = O(aτ) permet également de caractériser la longueur, notée δ,
sur laquelle se fait la diffusion thermique sur une durée donnée τ.

La longueur caractéristique sur laquelle la diffusion thermique se fait pendant


une durée donnée τ est δ = a ⋅ τ .

On peut ainsi prévoir l’existence « d’ondes thermiques » lorsqu’on impose un


flux (ou une température), fonction sinusoïdale du temps, à la surface d’un matériau.
On aura alors, après un régime transitoire, un régime sinusoïdal forcé de pulsation ω.
On prévoit donc que les variations de température ne seront importantes que dans une
épaisseur δ = O  a / ω  (épaisseur de peau, ou profondeur de pénétration) sous la
 
surface du matériau.

584
Chapitre 4.  Diffusion thermique 585

3. RÉSOLUTION DE L’ÉQUATION DE LA CHALEUR


3.1 Conditions aux limites
Présentons quelques conditions aux limites qu’on peut rencontrer, sur l’exemple
du transport à une dimension.

Extrémité x = 0 calorifugée
∂T
Comme Jd ( x, t ) = −λ ( x, t ) d’après la
∂x
loi de Fourier, l’absence de transferts thermiques
dans la section d’abscisse x = 0 se traduit par :
∂T
Jd (0, t ) = 0 ∀t  (0, t ) = 0 ∀t .
∂x

Extrémité x = 0 placée dans un fluide


Dans le modèle qui aboutit à la loi de New-
ton, la température est discontinue en x = 0 :
T (0+ , t ) ≠ Tf , température du fluide.
En revanche, la conservation de l’énergie
impose que la puissance est continue en x = 0 : toute la puissance transférée par
conducto-convection en x = 0− se retrouve en x = 0+ , où elle est transférée par con-
duction.
∂T +
On a donc Jcc (0− , t ) = Jd (0+ , t ) ∀t , qui fournit h Tf − T (0+ , t ) = −λ (0 , t ) ∀t .
  ∂x

Si la loi de Newton n’est pas donnée, on peut supposer que la convection est
parfaite : h → ∞ . On a alors continuité de la température : T (0+ , t ) = Tf ∀t .

Contact entre deux solides en x = 0

On a dans ce cas continuité de la température et de la puissance :

T1(0 − , t ) = T2 (0+ , t ) ∀t

 ∂T1 − ∂T .
−λ1 (0 , t ) = −λ 2 2 (0+ , t ) ∀t
 ∂x ∂x

585
586 Partie VI.  Thermodynamique

3.2 Les différents régimes


Considérons un système Σ de volume V à l’intérieur
d’une surface fermée S diathermane (perméable aux trans-
ferts thermiques). On se donne des conditions initiales (C.I) :
T (M, t = 0) connu pour tout point M de V , et des conditions
aux limites (C.A.L). Par exemple, en tout point P de la surface
G
S , T (P, t ) , ou Jd (P, t ) , est connu à tout instant t.
On supposera ici que T (P, t ) est imposé.

C.A.L uniformes et stationnaires, équilibre thermodynamique


Supposons qu’on impose T (P, t ) = Text = Cte ∀P ∈ S , ∀t .
Après un régime transitoire de durée caractéristique τd , on atteint l’équilibre
thermodynamique : T (M , t ) = Text ∀M ∈ V , ∀t .

C.A.L stationnaires mais non uniformes, régime stationnaire


Supposons qu’on impose T (P ) indépendant du temps, ∀P ∈ S . Après un ré-
gime transitoire de durée caractéristique τd , on atteint un régime stationnaire pour le-
quel la température T (M ) dépend du point M de V , mais pas du temps.

C.A.L variant sinusoïdalement dans le temps, régime sinusoïdal forcé


Supposons qu’on impose T (P, t ) = f (P ) ⋅ cos [ ωt + ψ(P )] ∀P ∈ S . Après un ré-
gime transitoire de durée caractéristique τd , on atteint un régime sinusoïdal forcé :
T (M , t ) = g (M ) ⋅ cos [ ωt + ϕ(M )] ∀M ∈ V , ∀t . C’est une conséquence de la linéarité de
l’équation de la chaleur.
On peut grâce à l’analyse de Fourier traiter des cas où les C.A.L ne sont pas
des fonctions sinusoïdales du temps.

Régime transitoire
Les différents régimes que nous venons de citer sont des régimes établis, qui
ne font pas intervenir les C.I. En revanche, on a besoin des C.I si on veut déterminer
le régime transitoire amenant à ces régimes établis.

C.A.L instationnaires mais variant lentement : A.R.Q.S thermique

Si les C.A.L varient sur une durée τ >> τd = L2 / a , alors T (M, t ) , solution exacte
1 ∂T
de l’équation de la chaleur ∆T = , est bien approximée par T ′(M, t ) , solution de
a ∂t
∆T ′ = 0 . C’est l’Approximation des Régimes Quasi-Stationnaires thermiques.

586
Chapitre 4.  Diffusion thermique 587

En effet, si on pose T (M, t ) = T ′(M, t ) + ε(M, t ) , et qu’on note θ l’ordre de grandeur


de l’écart ε entre la solution exacte et la solution approchée, et T0 l’ordre de grandeur
de T, on obtient, en prenant le laplacien de T = T ′ + ε :
1 ∂T

NT =∆ NT ′ + ∆ε , soit N∆ε = , puisque la durée caractéristique des variations
1 ∂T 0 O θ / L2 
aN∂t
 
a ∂t O [T0 / τ]

θ  L2  τ 
de T, imposée par les C.A.L, est τ. On a bien = O   = O  d  << 1.
T0  aτ  τ
Nous allons étudier dans les sous-sections suivantes le régime stationnaire,
puis, sur des cas particuliers, le régime sinusoïdal forcé et le régime transitoire.

3.3 Régime stationnaire / Résistance thermique


En régime stationnaire, l’équation de la chaleur se simplifie.

En régime stationnaire, la température est régie par l’équation de Laplace


∆T = 0 .

La détermination d’un champ de température stationnaire dans un conducteur


thermique est parfaitement analogue à celle du potentiel électrique stationnaire dans
un conducteur électrique, régi lui aussi par l’équation de Laplace ∆V = 0 .
∂(ρcT )
D’autre part, = 0 en régime stationnaire. Le bilan local d’énergie interne
∂t
∂(ρcT ) G
+ divJd = 0 devient :
∂t
G G G G

divJ d = 0 ⇔ J d est à flux conservatif ⇔ Pth = Φ = Jd ⋅ d2 S , puissance, ou flux ther-
S
mique, se conserve le long d’un tube du courant thermique.
On a donc Φ1 = Φ 2 = Φ , où Φ1 et
Φ 2 sont les flux thermiques à travers deux
sections quelconques S1 et S2 du tube de
courant.
On retrouve ces résultats en raison-
nant sur le système Σ constituée d’une por-
tion du tube comprise entre S1 et S2 . Le
flux thermique à travers la surface latérale
G G
de Σ est nul ( J d ⊥ d2 S lat. ), donc, pendant
dt, le système Σ a reçu l’énergie Φ1dt à travers S1 , et a perdu l’énergie Φ 2dt à tra-
vers S2 . En régime stationnaire, l’énergie interne UΣ de Σ est constante, donc
Φ1 = Φ 2 = Φ .

587
588 Partie VI.  Thermodynamique

Poursuivons l’analogie avec la conduction électrique sous forme de tableau :

conduction électrique conduction thermique


grandeur transportée charge q énergie cinétique Ec
différence de
différence de potentiel
cause du transport température
V1 − V2
T1 − T2
G G G
vecteur densité de courants J = ρmv Jd
G G G G
flux 
I1→ 2 = J ⋅ d2 S 
Φ1→ 2 = Jd ⋅ d2 S
S S
G G → G  →
loi phénoménologique J = γE = −γ gradV Jd = −λ gradT
loi d’Ohm locale loi de Fourier
conductivité électrique γ thermique λ
V1 − V2 = R ⋅ I1→ 2 T1 − T2 = Rth ⋅ Φ1→ 2
relation intégrale
R résistance électrique Rth résistance thermique
conducteur rectiligne
L L
R= Rth =
γS λS

conducteur cylindrique

1 R  1 R 
R= ln  2  Rth = ln  2 
2πγL  R1  2πλL  R1 

conducteur sphérique

1  1 1  1  1 1 
R=  −  Rth =  − 
4πγ  R1 R2  4πλ  R1 R2 

association série

Req = R1 + R2 Rth eq = Rth1 + Rth2

588
Chapitre 4.  Diffusion thermique 589

association parallèle

1 1 1
1 1 1 = +
= + Rth eq Rth1 Rth2
Req R1 R2

T1 − T2
La résistance thermique est le rapport Rth = ( K ⋅ W -1 ) entre la différence
Φ1→2
de températures T1 − T2 et le flux thermique.

Plus Rth est grande, plus le flux thermique est faible pour une différence de
températures donnée.
Nous allons illustrer cette notion par quelques exemples.

Ponts thermiques 
Pour améliorer l’isolation thermique d’une maison, on dépose une épaisseur L
de laine de verre de conductivité thermique λ au-dessus des plafonds du dernier étage.
Cette couche se trouve entre les plans z = 0 et z = L .
Commençons par calculer la résistance thermique Rth0 de la laine de verre
dans le cas où toute la surface S des plafonds est bien couverte.
En l’absence de bords, l’isolant se trou-
verait entre deux plans infinis, et le système
serait invariant par translation selon tout axe
orthogonal à Oz. Si l’on néglige les effets de
bord, ce qui est bien vérifié si L2 est petite de-
vant S , la température de l’isolant ne dépend
que de z.
L’équation de la chaleur s’écrit donc :
d2T T2 − T1
∆T = = 0  T ( z ) = T1 + z , en notant T1 = T (0) et T2 = T (L ) .
dz 2 L
G dT G T −T G G G λS
On a donc Jd = −λ ez = λ 1 2 ez , et Φ1→2 = Jd ⋅ S ez = (T1 − T2 ) . On
dz L L
L
retrouve l’expression Rth0 = de la résistance d’un conducteur rectiligne.
λS
La résistance thermique de la couche de laine de verre s’ajoute à celle des
plafonds, de l’air sous la toiture et de la toiture (association série). Nous négligerons
la somme de ces autres résistances devant Rth0 , qui est alors la résistance thermique
de l’ensemble.

589
590 Partie VI.  Thermodynamique

Lors de la pose, un dixième de la sur-


face n’a pas été couvert, car il manquait de la
laine de verre. On l’a remplacée par un maté-
riau moins isolant, de même épaisseur mais de
conductivité λ′ = 11λ .
On a ainsi une association parallèle entre la laine de verre de résistance :
L L
Rth = , et l’autre matériau isolant, de résistance Rth
′ = .
λ ⋅ 9 S / 10 11λ ⋅ S / 10
La résistance équivalente Rth eq de l’ensemble est telle que :
1 9S S λS 2 R
=λ + 11λ =2 =  Rth eq = th0 .
Rth eq 10L 10L L Rth0 2
Les pertes thermiques sont donc multipliées par 2 ! Il est très important d’éviter
les ponts thermiques (faibles résistances thermiques placées en parallèle de la partie
isolée).

Igloo 
Un igloo hémisphérique de centre O, de
rayon R et d’épaisseur e, posé sur la banquise,
est constitué de neige, qui, si elle n’est pas trop
compactée, peut encore contenir 70% d’air. Sa
conductivité thermique λ = 0,3 W ⋅ m-1 ⋅ K -1 est
alors très inférieure à λ glace = 2,2 W ⋅ m-1 ⋅ K -1 .
Supposons que l’igloo contienne deux
personnes qui dégagent chacune une puissance thermique P de 90 W au repos. Nous
allons calculer en régime stationnaire la température intérieure de l’igloo, pour une
température extérieure Text = −10°C , en négligeant les transferts thermiques convec-
tifs et radiatifs, ainsi que les transferts à travers la banquise dont l’épaisseur est de
plusieurs mètres.
La banquise se trouve sous le plan z = 0 . Il y a symétrie de révolution autour
de Oz donc, dans un système de coordonnées sphériques, la température ne dépend
que de r et θ : Jdϕ = 0 .
On doit résoudre l’équation de la chaleur en régime stationnaire, ∆T = 0 , dans
la neige de l’igloo (pour z > 0 et R < r < R + e ) avec pour conditions aux limites
T (R, θ) = Tint , T (R + e, θ) = Text et Jdθ ( z = 0) = 0 (la banquise est isolante).
Le problème est donc le même que si le système possédait la symétrie sphé-
rique (c’est-à-dire s’il était invariant par toute rotation autour de O). En conséquence,
la température au point M ne dépend que de r = OM et le vecteur densité de courants
G dT G
thermiques est radial : Jd = −λ (r )er .
dr

590
Chapitre 4.  Diffusion thermique 591

dT
En régime stationnaire, le flux Φ = 2πr 2Jd (r ) = −λ2πr 2 qui traverse, de l’in-
dr
térieur vers l’extérieur, une demi-sphère de centre O, est indépendant de r. On obtient
Φ  1 1 Φ
Text − Tint = − en intégrant dT = − dr entre r = R et r = R + e ,
λ 2π  R + e R  λ2πr 2
T − Text 1 1 1 
soit Rth = int = − . Remarquons que dans le cas d’un isolant
Φ 2πλ  R R + e 

sphérique, et pas hémisphérique, entre deux sphères de rayons R1 et R2 , on aurait
1  1 1 
par le même raisonnement l’expression Rth =  − .
4πλ  R1 R2 
Pour l’igloo contenant deux personnes, on a Φ = 2P . La température intérieure
P e
Tint = Text + augmente avec e et diminue avec R, comme Rth .
πλ R(R + e )
Prenons R = 1,5 m et e = 30 cm : on obtient Tint = 0,6 °C . À cette température,
on peut résister au froid en se protégeant avec de chauds vêtements.

3.4 A.R.Q.S 
Deux solides S1 et S2 , de capacités thermiques C1 et C2 , possèdent de
grandes conductivités thermiques λ1 et λ 2 . Leurs températures T1(t ) et T2 (t ) peu-
vent en conséquence être considérées comme uniformes.

591
592 Partie VI.  Thermodynamique

S1 et S2 sont reliés par une barre conductrice thermique, d’axe Ox, de section
S , de masse volumique ρ, de conductivité thermique λ, de capacité thermique mas-
sique c et de longueur L. L’ensemble est calorifugé. Initialement, on a T1 = T10 et

T2 = T20 < T10 .


Nous allons établir les lois T1(t ) et T2 (t ) , dans l’hypothèse où ces températures

varient sur une durée caractéristique très supérieure à celle, τd = L2 / a , de la diffusion


dans la barre. On peut alors écrire pour la température T(x,t) dans la barre :
∂ 2T T2 (t ) − T1(t )
∆T = 2
≃ 0  T ( x, t ) = T1(t ) + x , comme en régime stationnaire, bien que
∂x L
la température dépende du temps, puisque les conditions aux limites en dépendent.
� � λS
Le flux thermique traversant la barre vaut Φ1→ 2 = Jd ⋅ S ex = (T1 − T2 ) , et on a,
� L
∂T �
−λ ex
∂x
T1(t ) − T2 (t ) L
comme en régime stationnaire, Φ(t ) = Φ1→ 2 (t ) = , avec Rth = .
Rth λS
En appliquant le premier principe aux solides entre t et t + dt , on obtient :
 T1 − T2  dT1 T1 − T2
C1dT1 = δQ1 = −Φdt = − R dt C1 dt = − R (1)
 th  th
 ⇔
C dT = δQ = +Φdt = T1 − T2 dt C dT2 = T1 − T2 (2)
 2 2 2
Rth  2 dt Rth
C’est un système de deux équations différentielles linéaires du premier ordre,
couplées, qu’on peut résoudre en effectuant des combinaisons linéaires de (1) et (2).
(1) (2) d 1 1  T1 − T2
La première combinaison, − , donne (T1 − T2 ) +  +  =0,
C1 C2 dt  C1 C2  Rth
d T −T CC
soit (T1 − T2 ) + 1 2 = 0 , avec Ceq = 1 2 . En posant τ = RthCeq , on a pour la
dt RthCeq C1 + C2
t

différence de température : T1 − T2 = (T10 0
− T2 )e τ , en tenant compte des C.I. Puisque
T1 − T2 → 0 , les températures des solides tendent vers la même valeur Tf .
t →∞
La deuxième combinaison linéaire, (1) + (2) , donne :
d
(C1T1 + C2T2 ) = 0  C1T1 + C2T2 = Cte = C1T10 + C2T20 = (C1 + C2 )Tf .
dt
C1T10 + C2T20
Les températures T1(t ) et T2 (t ) convergent vers Tf = . Cette rela-
C1 + C2
tion traduit la conservation de l’énergie interne du système des deux solides : toute
l’énergie que cède le premier est transférée au second à travers la barre. On a finale-
ment :

592
Chapitre 4.  Diffusion thermique 593

 C2 −
t
T1(t ) = Tf + 0 0
(T1 − T2 )e τ
 C1 + C2
 .
t
 C1 −
T2 (t ) = Tf − (T10 − T20 )e τ
 C1 + C2
Cherchons s’il existe un point de la barre où la température reste constante.
∂T T (t ) − T1(t )
Pour cela, on résout = 0 , avec T ( x, t ) = T1(t ) + 2 x.
∂t L
∂T ∂T  x  ∂T x  x x C2
= 0  1 1 −  + 2 = 0 ⇔ C2 1 −  − C1 = 0 ⇔ x = x0 = L.
∂t ∂t  L  ∂t L  L L C1 + C2
C2
Ce point existe puisque 0 ≤ ≤ 1.
C1 + C2
Les solutions trouvées sont une bonne approximation des solutions exactes si
L2 L C1C2 ρcL2 CC
τ = RthCeq >> τd = ⇔ >> ⇔ Ceq = 1 2 >> ρS Lc , c’est-à-dire
a λS C1 + C2 λ C1 + C2
si la capacité thermique des solides est très grande devant celle de la barre (l’énergie
interne de la barre est alors bien négligeable devant celle des solides).
Représentons l’évolution des températures des solides et de la barre :

On peut donner un équivalent électrique de ce système :

C1 et C2 sont analogues à des capacités de condensateurs. Comme on l’a vu,


Rth est analogue à une résistance de conducteur ohmique, T à un potentiel électrique
et Φ à une intensité de courant électrique.

593
594 Partie VI.  Thermodynamique

3.5 Ondes thermiques 


On étudie le champ de température à l’intérieur du sol, supposé homogène. On
note ρ sa masse volumique, λ sa conductivité thermique, c sa capacité thermique mas-
λ
sique, et a = sa diffusivité thermique. Le sol est situé dans le demi-espace z ≥ 0 .
ρc
La température dans le sol ne dépend donc que de la profondeur z et du temps t. On
suppose que les conditions aux limites sont sinusoïdales : la température à la surface
∆T ( z = 0)
du sol s’écrit T (0, t ) = T0 + cos(ωt ) .
2
L’équation de la chaleur étant linéaire, après un régime transitoire, on atteint un
régime sinusoïdal forcé, dans lequel la température dans le sol est de la forme :
∆T ( z )
T ( z, t ) = T0 + cos [ ωt + ϕ( z )] . Il est plus simple, pour trouver ∆T ( z ) et ϕ( z ) , d’uti-
2
liser la notation complexe : θ( z, t ) = T ( z, t ) − T0 = f ( z )ei ωt . On détermine la fonction
complexe f(z) en écrivant que θ( z, t ) est solution de l’équation de la chaleur :
∂ 2T 1 ∂T d2f iω
=  = f ( z ) . C’est une équation différentielle linéaire du second ordre
∂z 2 a ∂t dz 2 a
π
i π
iω e 2ω i ω ω
dont le polynôme caractéristique est r 2 = =  r = ±e 4 = ±(1 + i ) . En
a a a 2a
1+ i 1+ i
2a 1+ i z − z
introduisant l’épaisseur de peau δ = , on a r = ±  f ( z ) = Ae δ + Be δ .
ω δ
On a nécessairement A = 0 car la température ne peut diverger quant z devient grand,
et B = ∆T ( z = 0) / 2 d’après les C.A.L. Finalement :
z  z z
∆T ( z = 0) − δ i  ωt − δ  ∆T ( z = 0) − δ  z
θ( z, t ) = e e , soit T ( z, t ) = T0 + e cos ωt −  .
2 2  δ
L’amplitude des fluctuations de tempéra-
ture est amortie exponentiellement avec la pro-
z

fondeur : ∆T ( z ) = ∆T ( z = 0) e δ . Les fluctuations
z
à la profondeur z sont déphasées de ϕ( z ) = −
δ
par rapport à la fluctuation en surface.
En réalité, les C.A.L ne sont pas sinu-
soïdales, mais leur spectre fait intervenir deux
pics pour les pulsations ωj = 2π / τ et :

ωa = , avec τ = 86 400 s . L’ensoleillement
365 ⋅ τ

594
Chapitre 4.  Diffusion thermique 595

présente en effet deux périodes, le jour solaire de durée τ, et l’année de durée 365 τ .
On a ainsi deux épaisseurs de peau : δ j = 2a / ω j et δa = 2a / ωa ≃ 19 ⋅ δ j .
La profondeur de pénétration thermique δ ⋅ ln(100) est définie comme la profon-
deur telle que l’amplitude des variations n’est plus que 1% de sa valeur en surface.
Elle est 19 fois plus grande pour les variations de températures annuelles, dues aux
saisons, que pour les variations journalières, dues à la rotation propre de la Terre.
On obtient les profondeurs de pénétration suivantes, pour des cycles quotidiens
et annuels, selon le type de sol rencontré :

Profondeur de pénétration
a ( cm2 ⋅ s-1 )
Jour (m) Année (m)
Roc 0,020 1,10 20,5
Argile humide 0,015 0,95 18,0
Sable humide 0,010 0,75 14,5
Argile sèche 0,002 0,35 6,5
Sable sec 0,001 0,25 4,6

Ainsi, les fluctuations journalières sont amorties en un mètre, alors que les fluc-
tuations annuelles se font ressentir jusqu’à 20 m de profondeur. Dans des grottes pro-
fondément enfouies, la température reste constante tout au long de l’année.

3.6 Régime transitoire / Utilisation des séries de Fourier 


Considérons un cylindre plein d’axe Ox, calorifugé sur sa surface latérale et à
ses deux extrémités, de longueur L et de diffusivité thermique a, dont la température
initiale, T ( x, t = 0) = F ( x ) , n’est pas uniforme.
On cherche à déterminer l’évolution de température T ( x, t ) en tout point du cy-
lindre.
Commençons par énoncer toutes les conditions qui portent sur le champ de
température :
∂ 2T 1 ∂T
— T ( x, t ) doit vérifier l’équation locale 2
= , équation de la chaleur.
∂x a ∂t
— T ( x, t ) doit vérifier les conditions aux limites imposées par une paroi calorifugée en
∂T ∂T
x = 0 et x = L : (0) = (L) = 0 ∀t .
∂x ∂x
— T ( x, t ) doit vérifier la condition initiale T ( x, t = 0) = F ( x ) ∀x ∈ [0, L ] , F étant une
fonction de x connue.
On cherche des solutions sous la forme T ( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t ) afin de vérifier les
C.A.L qui s’écrivent alors simplement f ′(0) = f ′(L ) = 0 .
1
En injectant dans l’équation locale, on obtient f ′′( x )g (t ) = f ( x )g ′(t ) .
a
On sépare alors les variables :

595
596 Partie VI.  Thermodynamique

f ′′( x ) g ′(t ) 1
a = = Cte . Si cette constante était positive ( Cte = > 0 ), on aurait pour g
f
��� �( x ) g ( t ) τ
F(x) G( t )
t
des solutions t ֏ g (t ) = g0e τ divergentes, qui ne sont pas physiquement acceptables.
t
1 −
On pose donc Cte = − < 0 , et on a g (t ) = g0e τ . On en déduit que f vérifie
τ
1
f ′′( x ) + f ( x ) = 0 , dont les solutions sont :

 x   x  1   x   x 
f ( x ) = A cos   + B sin    f ′( x ) = B cos   − A sin   .
 aτ   aτ  aτ   aτ   aτ  
 L 
Les C.A.L f ′(0) = 0 et f ′(L ) = 0 imposent B = 0 et sin   = 0.
 aτ 
On voit apparaître une quantification des solutions :
L L2
= n π ⇔ τ = τn = , avec n ∈ N .
aτ π2an 2
À ce stade, on dispose de solutions dénombrables :
π2an 2
 nπx  − L2
t
Tn ( x, t ) = cn cos  e , qui vérifient toutes l’équation de la chaleur et les C.A.L.
 L 
 nπx 
Cependant, aucune ne vérifie la C.I si F ( x ) ≠ cn cos  .
 L 
On cherche alors T ( x, t ) sous la forme de série :
∞ π2an 2
 nπx  − t

T ( x, t ) = cn cos 
 L 
e
L2 .
n =0
T ( x, t ) est encore solution de l’équation de la chaleur, puisque cette dernière
est linéaire, et vérifie les C.A.L.

 nπx 
D’autre part, T ( x,0) =  cn cos  L 
 correspond à un développement en sé-
n =0
rie de Fourier d’une fonction de x qui est 2L-périodique (la période du fondamental
 πx 
c1 cos   est 2L), et paire.
 L 
On trouve donc les coefficients c n en développant en série de Fourier la fonc-
tion x ֏ Θ( x ) paire et 2L-périodique dont la restriction à [0,L ] est F.

Prenons l’exemple où initialement la moitié gauche du cylindre est portée à la


température T1 , et la moitié droite à T2 < T1 :

596
Chapitre 4.  Diffusion thermique 597

T1 + T2
On reconnaît une fonction créneaux paire, de valeur moyenne c0 = et
2
T1 − T2
d’amplitude . Son développement en série de Fourier ne contient que des har-
2
T1 + T2 2(T1 − T2 ) ∞ ( −1)p  (2 p + 1)πx 
moniques de rangs impairs : Θ( x ) =
2
+
π
2 p + 1
cos 
 L  . On

p =0

connaît désormais la solution du problème puisqu’elle vérifie l’équation de la chaleur,


(2 p +1)2 π2a
T +T 2(T1 − T2 ) ∞ ( −1)p  (2p + 1)πx  − t
les C.A.L et la C.I : T ( x, t ) = 1 2 +
2 π 
2p + 1
cos 
 L e

L2 .
p =0

L2 T1 + T2
Pour t >> τ1 = 2
, l’équilibre thermique est atteint : T ( x, t ) ≃ .
π a 2

L2
Les harmoniques ont des constantes de temps τn = qui décroissent for-
π an 2 2

tement avec n, et leurs amplitudes, déjà plus faibles que celle du fondamental du fait
de la décroissance en 1/ n , décroissent plus rapidement que l’amplitude de ce dernier.
Ainsi, pour t > τ3 , il ne subsiste que la valeur moyenne et le fondamental, et la répar-
tition de température dans le cylindre est quasiment sinusoïdale :
π2a
T +T 2(T1 − T2 )  πx  − t
T ( x, t ) ≃ 1 2 + cos   e L2 .
2 π  L 

597
598 Partie VI.  Thermodynamique

4. DÉTERMINATION DU CHAMP DE TEMPÉRATURE


DANS D’AUTRES SITUATIONS
4.1 Autres causes de variation d’énergie interne

Variations d’énergie mécanique


L’énergie interne U d’un système Σ est la somme de l’énergie cinétique due à
l’agitation thermique de ses molécules, et de l’énergie potentielle due aux interactions
entre ses molécules. Comme l’énergie mécanique Em , et contrairement à l’énergie
totale E, l’énergie interne U n’est pas une grandeur conservative.
Par exemple, lors du freinage d’un véhicule sur une route horizontale, son éner-
gie mécanique Em diminue, donc l’énergie interne du système {véhicule, route, air}
augmente, l’énergie totale E de ce système se conservant en l’absence de travail et
de chaleur reçus. Dans le cas de transferts entre énergie mécanique et énergie interne,
on doit écrire le premier principe sous sa forme la plus générale dE = δW + δQ .
Nous nous placerons uniquement par la suite dans le cas où l’énergie méca-
nique reste constante, en l’absence de mouvement macroscopique. L’énergie interne
de Σ est alors conservative : ses variations ne sont dues qu’aux échanges d’énergie,
et le premier principe entre t et t + dt s’écrit dU = δW + δQ .

Transformations physico-chimiques
Dans le cas où Σ est le siège de transformations physico-chimiques (transitions
de phase, réactions chimiques ou nucléaires), l’énergie interne dépend de l’avance-
ment de ces réactions. Par exemple pour un solide (dont le volume V est supposé
constant : le travail des forces de pression est nul), siège d’une seule réaction d’avan-
cement molaire ξ, on a désormais :
 ∂U 
dU = mcdT +   dξ . On ne peut plus écrire U = mcT . Dans un tel système,
 ∂ξ V ,T
même en l’absence de travail et de chaleur reçus (on a alors dU = 0 ), la température
 ∂U 
varie : mcdT = −   dξ . Elle augmente si la réaction dégage de l’énergie, c’est-
 ∂ξ V ,T

 ∂U 
à-dire si   < 0 , et diminue dans le cas contraire.
 ∂ξ V ,T

 ∂U 
Plus généralement, mcdT = δN
W + δQ −   dξ : tout se passe comme si
0  ∂ξ V ,T

on avait encore U = mcT , mais que de l’énergie interne était produite par la réaction,
 ∂U 
le terme −   dξ = δU p correspondant à l’énergie interne produite (algébrique).
 ∂ξ V ,T

598
Chapitre 4.  Diffusion thermique 599

δ4U p
Si en un point M une puissance volumique σ(M, t ) = est dégagée, le bilan local
d3V dt
∂(ρcT ) G σ 1 ∂T
d’énergie interne devient : + divJd = σ , soit ∆T + = .
∂t λ a ∂t

Effet Joule, principe d’un fusible 


Lorsque Σ est un conducteur ohmique parcouru par des courants, ses charges
G G
mobiles reçoivent une puissance volumique σ(M, t ) = J ⋅ E = J 2 / γ de la part du champ
J2 3
électromagnétique, donc un travail élémentaire δ4We = d V dt . En présence de ce
γ
travail, le bilan local d’énergie interne est modifié, et peut s’écrire sous la forme :
∂(ρcT ) G J2 J 2 1 ∂T
+ divJd =  ∆T + = .
∂t γ λγ a ∂t

Prenons l’exemple d’un fusible,


cylindre en plomb, d’axe Ox, de section
S , de longueur L, de conductivité ther-
mique λ, de conductivité électrique γ,
parcouru par un courant I.
La surface latérale est calorifu-
gée, les extrémités x = 0 et x = L sont en contact avec du cuivre que nous suppose-
rons à la température ambiante T0 .
Nous nous placerons en régime stationnaire (le vecteur densité de courants
G G
électriques J = Jex est alors uniforme).
Pour établir l’équation locale qui régit T ( x ) , appliquons le premier principe entre
t et t + dt au système Σ constitué par le fusible situé entre les abscisses x et x + dx :
J2
d2U = δ2We + δ2Q = δ2We + δQx − δQx + dx , avec δ2We = S d x dt .
γ
dx 2 dx
Comme I = J S , on a δ2We = I dt et aussi δ2We = dR ⋅ I 2dt , où dR =
γS γS
est la résistance électrique de la portion de fusible entre x et x + dx .
En régime stationnaire, d2U = 0 :
dx 2 dx 2 dJ
0= I d t + J d ( x ) S dt − J d ( x + dx ) S dt = I dt − d S dx dt . D’où :
γS γS dx
I2 d2T
+ λ 2 S = 0 , en utilisant la loi de Fourier. L’équation régissant T ( x ) est
γS dx
d2T I2 J 2 1 ∂T
=− . C’est un cas particulier, stationnaire, de l’équation ∆T + = .
dx 2 λγS 2 λγ a ∂t

599
600 Partie VI.  Thermodynamique

On obtient, en intégrant deux fois :


I2
T (x) = − 2
x 2 + Ax + B . Or T = T0 sur les deux sections x = 0 et x = L , d’où :
2λγS
I2
T (x) = − 2
x( x − L) + T0 . Le profil de températures est parabolique.
2λγS

dT I2  L L
Comme =− 2  x − 2  s’annule en x = , c’est en ce point que la tem-
dx λγS   2
I 2L2
pérature est maximale, et vaut Tmax = T0 + 2
.
8λγS
Si I augmente, Tmax augmente jusqu’à atteindre la température de fusion du
conducteur Tfus . Le fusible fond alors en son milieu et le courant ne passe plus.
On peut choisir la section du fusible afin que la fusion se produise pour une
Ic 2L2 Ic L
valeur critique I = Ic donnée : Tmax = T0 + 2
≥ Tfus  S ≤ = Sc .
8λγS 8λγ(Tfus − T0 )

Pour le plomb : Tfus = 600 K , λ = 35,3 W ⋅ m-1 ⋅ K -1 , γ = 4,81⋅ 106 S ⋅ m-1 . En

prenant T0 = 290 K et L = 3,0 cm , on obtient une section Sc = 0,74 mm2 . Il faut choi-
Sc
sir un diamètre 2 = 0,97 mm pour que le fusible fonde pour Ic = 16 A .
π
Dans un tel fusible, en régime stationnaire, la puissance RI 2 produite par effet
Joule est intégralement diffusée sur les bords du fusible, où elle est évacuée :
dT dT
Pévacuée = Φ( x = L ) − Φ( x = 0) = −λS ( x = L ) + λS ( x = 0)
dx dx
I2 L L 2
= 2λS 2
= I = RI 2
λγS 2 γS
Ceci n’est pas vrai en régime transitoire où l’effet Joule provoque une élévation
de la température dans le fusible (la puissance dissipée qui n’est pas évacuée sert à
augmenter l’énergie interne, donc la température du fusible).

600
Chapitre 4.  Diffusion thermique 601

4.2 Convection pour un système 1D 


L’équation de la chaleur s’applique
en tout point d’un conducteur plein. La
convection n’intervient que comme C.A.L
à la surface du conducteur (elle n’affecte
pas l’élément de volume d3V du troi-
sième ordre autour d’un point M).

Elle peut cependant intervenir dans un bilan local d’énergie interne, dans le cas
d’une barre très allongée selon l’axe Ox (cylindre de longueur L et de rayon r << L ).
En effet, comme on fait l’approximation que la température ne dépend spatialement
que de x, on peut prendre pour système un élément différentiel situé entre les abs-
cisses x et x + dx , dont le volume dV = πr 2dx n’est plus un volume élémentaire du
troisième ordre d3V autour d’un point M.

La convection (ou plutôt conducto-convection), est alors prise en compte


lorsqu’on applique le premier principe à ce système :
d2U = δ2Qcc + δ2Q = δ2Qcc + δQx − δQx + dx .
Notons Te la température du fluide dans lequel la barre est plongée, la loi de
Newton fournit δ2Qcc = h [Te − T ( x, t )] dSlat dt (ce transfert thermique reçu par l’élé-
N
2πr dx

ment de barre est bien positif si Te ≥ T ( x, t ) ).


∂T 2 ∂ 2T
On a donc ρc πr dx dt = h [Te − T ( x, t )] 2πr dx dt + λ 2 πr 2dx dt et on abou-
∂t ∂x
1 ∂T 2h ∂ 2T
tit à l’équation = [Te − T ( x, t )] + .
a ∂t λr ∂x 2
L’expérience de Ingen-Housz est une
application de cette configuration : une partie
de la barre, correspondant aux abscisses né-
gatives, est plongée dans de l’eau bouillante
de température T0 = 373 K . L’autre partie,
de longueur L, est placée dans l’air de tempé-
rature Te = 293 K .

601
602 Partie VI.  Thermodynamique

d2T 2h 2h
On se place en régime stationnaire : T(x) vérifie 2
− T ( x ) = − Te . La
dx λr λr
λr
longueur δ = est donc caractéristique de l’évolution spatiale de la température le
2h
long de la barre.
Si on suppose L >> δ , la barre est suffisamment longue pour que la température
en bout de barre soit pratiquement celle de l’air : T ( x = L ) ≃ Te . Écrivons alors les so-
x x
d2T 2h 2h −
lutions de − T ( x ) = − Te sous la forme T ( x ) = Te + Ae δ + Be δ .
dx 2 λ r λr
L L

On a donc T (L ) = Te + Ae δ + Be δ .
L
En faisant l’approximation → ∞ , on a B → 0 , car sinon la température diver-
δ
gerait en bout de barre, et on retrouve bien alors que T ( x = L ) = Te . A est déterminé
en utilisant la C.A.L T ( x = 0) = T0 : on a A = T0 − Te . Finalement :
x

T ( x ) = Te + (T0 − Te ) e δ .
Des petits plots de paraffine (de température de fusion Tfus < T0 ) sont répartis
sur la barre : ils fondent sur la partie pour laquelle T ( x ) ≥ Tfus , soit pour :
 T −T 
x ≤ δ ⋅ ln  0 e  = xfus . Si on connaît la conductivité λ1 d’un matériau, on peut dé-
 Tfus − Te 
terminer celle λ 2 d’un second matériau, en réalisant deux barres de même géométrie
avec ces deux matériaux, et en plaçant leur extrémité dans l’eau bouillante. Le rapport
2
xfus 2 δ2 λ2 x 
= = permet d’évaluer λ 2 grâce à la relation λ 2 = λ1  fus 2  .
xfus 1 δ1 λ1  xfus 1 

Si on ne suppose plus L >> δ , la température en x = L ne peut plus être con-


fondue avec Te : on a conducto-convection en x = L , et la C.A.L en bout de barre est
dT
maintenant Jd (L− ) = Jcc (L+ ) ⇔ −λ ( x = L) = h [T ( x = L ) − Te ] .
dx
d2T 2h 2h
Écrivons alors les solutions de 2
− T ( x ) = − Te sous la forme :
dx λr λr
x x
T ( x ) = Te + Ach + Bsh . Les C.A.L fournissent le système suivant :
δ δ
T ( x = 0) = Te + A = T0 ⇔ A = T0 − Te

 λ L L  L L .
− δ  Ash δ + Bch δ  = h  Ach δ + Bsh δ 
    

602
Chapitre 4.  Diffusion thermique 603

 A = T0 − Te

 L λ L L λ L
On en déduit  hch + sh hch + sh , d’où :
δ δ δ = −(T0 − Te ) δ δ δ
B = − A L λ L L λ L
 hsh + ch hsh + ch
 δ δ δ δ δ δ
 L λ L 
 x hch δ + δ sh δ x
T ( x ) = Te + (T0 − Te ) ch − sh  .
L λ L
 δ hsh + ch δ
 δ δ δ 
L
L L 1
Lorsque L >> δ , on a ch ∼ sh ∼ e δ . L’expression précédente devient :
δ δ 2
x
 x x −
T ( x ) ≃ Te + (T0 − Te ) ch − sh  . On retrouve T ( x ) ≃ Te + (T0 − Te ) e δ .
 δ δ
On a tracé ci-
contre les courbes T(x)
pour différentes valeurs
du rapport L / δ .
Lorsque ce rap-
port est supérieur à 5,
l’approximation consis-
tant à dire que la tempé-
rature en bout de barre
est la température am-
biante Te est très bien
vérifiée.

5. ANALOGIES ENTRE PHÉNOMÈNES DIFFUSIFS


5.1 Analogies en régime stationnaire
Même en régime stationnaire, des phénomènes de transport irréversibles se
produisent lorsque certains paramètres d’état intensifs sont non uniformes. Ces phé-
nomènes se retrouvent dans des domaines variés de la Physique :

paramètre d’état intensif


phénomène grandeur transportée
non uniforme
n∗ diffusion de particules particules
T diffusion thermique énergie cinétique
V diffusion de charges
charges
potentiel électrique (conduction électrique)

v viscosité quantité de mouvement

603
604 Partie VI.  Thermodynamique

La non-uniformité des grandeurs scalaires n∗ , T et V se traduit par le fait que


leur gradient est non nul. Dans le cas d’un écoulement incompressible, l’apparition de
G
forces visqueuses est conditionnée par la non-nullité du laplacien ∆v . Dans ce cas il
y a un mouvement relatif entre les particules fluides.

5.2 Analogies entre phénomènes 1D


On peut dans certains cas trouver des équations de diffusion 1D en électroma-
gnétisme et en mécanique des fluides. Ces équations sont analogues à celles de la
diffusion thermique et de la diffusion de particules (sans termes de production).

diffusivité
phénomène équation de diffusion
(m2 ⋅ s-1)
∂ 2n∗ 1 ∂n∗
diffusion de particules = D
∂x 2 D ∂t
∂ 2T 1 ∂T
diffusion thermique 2
= a
∂x a ∂t

conducteur électrique occupant le demi


espace x > 0 :

effet de peau dans un 1


conducteur (i) µ0 γ

∂ 2Bz ∂Bz
2
= µ0 γ
∂x ∂t

fluide newtonien au dessus d’une


plaque mobile :

écoulement de Couette
ν
incompressible (ii)

∂ 2v x 1 ∂v x
2
=
∂y ν ∂t

604
Chapitre 4.  Diffusion thermique 605

(i) Les équations régissant dans l’A.R.Q.S le champ électromagnétique dans le con-
 �
divB = 0 �
 → � ∂B
ducteur sont :  rot E = − .
 ∂t
 → � � � �
 rot B ≃ µ0 J = µ0 γE (  divE = 0)

� ∂B
Elles donnent après découplage ∆B = µ0 γ , équation de Kelvin.
∂t
Si on considère un conducteur occupant le demi-espace x > 0 , le système est
� �
� � ∂ 2B ∂B
invariant par toute translation selon Oy ou Oz donc B(M, t ) = B( x, t )  = µ 0 γ .
∂x 2 ∂t
� ∂ 2Bz ∂B
En projection sur ez cette équation est bien 2
= µ0 γ z .
∂x ∂t
En régime sinusoïdal forcé, il existe, comme pour la diffusion thermique, une
2
peau d’épaisseur δ = à la surface du conducteur, qui est affectée par les per-
µ 0 γω
turbations extérieures. Le champ électromagnétique ne pénètre pas en profondeur.

(ii) L’écoulement incompressible de fluide newtonien est un écoulement de Couette


provoqué par le déplacement de la plaque mobile, à un nombre de Reynolds inférieur
� �
à 2000 : l’écoulement parallèle, pour lequel v = v x ( y , t ) ex , est stable.
� �
d v ∂v ∂v x �
Dans ce cas, l’accélération d’une particule fluide est = = ex dans le
dt ∂t ∂t
référentiel du laboratoire.

La particule de volume d3V est soumise à son poids −ρgd3V ey , ainsi qu’au
→
forces de pression de résultante − grad p d3V , et aux forces de viscosité dont on cal-
∂ 2v x �
cule la résultante qui vaut η d3V ex . Le P.F.D appliqué à la particule fournit
∂y 2
donc :
∂v x ∂p ∂ 2v x �
— ρ =− +η 2
en projection sur ex .
∂t ∂x ∂y
∂p �
— = −ρg en projection sur ey .
∂y
∂p �
— = 0 en projection sur ez .
∂z
∂p
On obtient p( x, y , t ) = f ( x, t ) − ρgy en intégrant = −ρg . On en déduit que la
∂y

605
606 Partie VI.  Thermodynamique

∂p ∂f ∂v ∂ 2v ∂p
dérivée partielle = est indépendante de y. Comme ρ x − η 2x = − , on en
∂x ∂x ∂t ∂y N ∂x
 F ( x ,t )
G( y ,t )
2
∂v x ∂ vx ∂p
conclut que ρ −η 2
=− = K (t ) , fonction du temps uniquement.
∂t ∂y ∂x
On peut à l’aide d’une pompe créer un gradient de pression longitudinal (dans
∂p
le sens de l’écoulement) uniforme : = −K (t ) ≠ 0 , mais il n’est pas nécessaire ici
∂x
pour que le fluide s’écoule du fait de la présence de la plaque mobile.
∂v x ∂ 2v x ∂ 2v x 1 ∂v x
Sans pompe, K (t ) = 0 et on a bien ρ =η 2
, soit = . Là en-
∂t ∂y ∂y 2 ν ∂t
core, en régime sinusoïdal forcé, c’est-à-dire si la plaque oscille sinusoïdalement
G G
( u (t ) = u0 cos( ωt ) ex ), le fluide n’est en mouvement que sur une couche d’épaisseur

caractéristique δ = près de la plaque.
ω

606
607

[THERMODYNAMIQUE 5]

RAYONNEMENT THERMIQUE
Le rayonnement thermique est un rayonnement électromagnétique émis par la
matière qui, suite à une excitation par chocs thermiques (dus à l’agitation thermique),
se désexcite d’un niveau d’énergie à un niveau plus bas. Ce rayonnement se propage
donc dans le vide à la célérité c : c’est le seul mode de transfert thermique qui existe
en l’absence de milieu matériel.

1. RAYONNEMENT D’ÉQUILIBRE
1.1 Flux surfacique spectral
Si on considère une cavité à l’intérieur de conducteurs parfaits (qui réfléchissent
totalement et sans changement de fréquence les ondes électromagnétiques inci-
dentes), le rayonnement, dans le vide de cette cavité, est constitué d’une somme de
modes propres (solutions des équations de Maxwell, linéaires, et vérifiant les condi-
tions aux limites imposées par les conducteurs) dont les fréquences ν = c / λ et les
longueurs d’onde λ sont quantifiées. L’énergie d’un mode propre reste celle qu’on a
initialement injectée dans la cavité, et il n’y a aucun lien entre la fréquence et l’énergie
du rayonnement. La température des conducteurs n’intervient pas dans ce cas et on
ne peut pas parler de rayonnement d’équilibre.
Si en revanche on place dans le vide des corps capables d’absorber et
d’émettre un rayonnement, l’énergie qu’ils rayonnent dépend de leur température, et
on peut envisager l’équilibre thermodynamique du système à la température T. C’est
ce que nous supposerons par la suite. De plus, nous ne considérerons que des corps
opaques, c'est-à-dire des corps qui ne transmettent pas le rayonnement. Un corps
n’est opaque que dans un certain domaine de longueurs d’onde et à partir du moment
où son épaisseur est grande devant l’épaisseur caractéristique de l’absorption. Par
exemple, le verre est transparent au rayonnement visible sur quelques centimètres
mais devient opaque pour ce rayonnement sur plusieurs dizaines de cm.
On note ϕi la puissance surfacique, ou flux surfacique ( W ⋅ m-2 ) incidente sur
un corps, ϕ s celle qui en sort, ϕa et ϕe celles qui sont absorbée et émise par ces
corps, ϕt celle qui est transmise, et enfin ϕr celle qui est réfléchie. Tous ces flux sur-
faciques sont positifs. Pour les corps opaques, le flux transmis ϕt est nul.
La puissance surfacique incidente ϕi sur les corps opaques est soit réfléchie,
soit absorbée : ϕi = ϕr + ϕa . De même, la puissance surfacique sortante ϕ s est due
soit à la réflexion, soit à l’émission : ϕs = ϕr + ϕe .

607
608 Partie VI.  Thermodynamique

On a donc pour un corps opaque ϕs − ϕi = ϕe − ϕa . Ces résultats ne seraient


pas valables pour des corps partiellement transparents.

Plaçons-nous maintenant à l’équilibre thermodynamique. Ces flux surfaciques


s’écrivent dϕ dans un intervalle spectral [ λ, λ + dλ ] , avec dλ ≥ 0 . Le corps n’accumu-
lant pas d’énergie dans cet intervalle spectral, on a dϕs = dϕi  dϕe = dϕa .

À l’équilibre thermodynamique à la température T, pour toute longueur d’onde,


le flux surfacique incident est le même que le flux sortant. On note dϕ ce flux surfa-
cique d’équilibre ; les flux s’écrivent dϕs = dϕi = dϕ = F (λ,T )dλ où F (λ,T ) est le flux
surfacique spectral d’équilibre.

1.2 Densité volumique spectrale d’énergie électromagnétique


Connaissant le flux surfacique spectral d’équilibre F (λ,T ) , on peut en déduire
la densité volumique spectrale d’énergie électromagnétique u(λ,T ) contenue dans le
rayonnement.
Considérons pour cela un élément de surface élé-
mentaire d2 S autour du point O de la surface d’un corps
convexe : si l’axe Oz est dirigé selon la normale extérieure
au corps en O, le flux provient de la partie de l’espace cor-
respondant à z ≥ 0 . Cherchons à calculer le flux incident
(en W) sur d2 S en fonction de la densité volumique d’éner-
gie électromagnétique u ( J ⋅ m-3 ).
Supposons dans un premier temps que le rayonne-
ment provient d’une direction caractérisée en coordonnées sphériques de centre O
par les deux angles θ et ϕ . L’énergie δ3Ui provenant de cette direction reçue par
d2 S pendant dt est contenue dans un cylindre de base d2 S et dont la génératrice
est parallèle à la direction incidente. Comme le rayonnement se propage à la célérité

608
Chapitre 5.  Rayonnement thermique 609

c de la lumière, la hauteur du cylindre est c cos θdt et son volume vaut :


d3V = c ⋅ d2 S cos θ dt . L’énergie que contient ce cylindre vaut uc ⋅ d2 S cos θ dt .

En réalité, les directions d’où provient le rayonnement sont réparties continû-


ment, et pour déterminer l’énergie provenant pendant dt des directions caractérisées
par (θ, ϕ) ∈ [ θ, θ + dθ] × [ ϕ, ϕ + dϕ] , il faut multiplier le résultat précédent par la fraction
du rayonnement parvenant de ces directions. La surface de la sphère de centre O et
de rayon R quelconque correspondant à ces directions est d2 A = R sin θdϕ ⋅ Rdθ . La
surface totale de la sphère étant A = 4 πR 2 et le rayonnement étant isotrope (il n’y a
sin θdϕdθ
pas de direction privilégiée), la fraction cherchée vaut .

L’énergie que reçoit pendant dt l’élément de surface d2 S en provenance de


sin θdϕdθ
ces directions est donc en définitive δ5Ui = ⋅ uc ⋅ d2 S cos θdt .

Comme on ne considère que des surfaces convexes, les flux sont hémisphé-
 π
riques, c’est-à-dire qu’ils correspondent à (θ, ϕ) ∈ 0,  × [ 0,2π] . On a donc :
 2

609
610 Partie VI.  Thermodynamique

π
2π 2
1 1
δ3Ui = ⋅ uc ⋅ d2 S dt  dϕ  cos θ sin θ ⋅ dθ = 4 uc ⋅ d S
2
dt .

0
N 0
�������
2π 1/2

δ3Ui 1
Le flux surfacique incident est ϕi = 2
= uc . Si on se restreint au do-
dt ⋅ d S 4
c c
maine spectral [ λ, λ + dλ ] : dϕi = F ( λ,T )dλ = du = u ( λ,T )dλ .
aussi 4 4

4
On en déduit u ( λ,T ) = F ( λ,T ) .
c

1.3 Loi de Planck


Les modèles théoriques classiques du rayonnement thermique du XIXe siècle
ne concordaient pas avec les résultats expérimentaux. Planck a énoncé sa loi en 1900
et initié la mécanique quantique, en prenant comme postulat que les échanges d’éner-
gie entre la matière et le rayonnement de fréquence ν sont quantifiés : ce sont des
multiples de hν . Il obtint le résultat suivant :

2πhc 2 1
F (λ,T ) = , où F (λ,T ) , souvent exprimé en W ⋅ m-2 ⋅ µm-1 , est le flux
λ5 hc
λkBT
e −1
surfacique spectral d’équilibre. C’est la loi de Planck. Les constantes h, kB et c sont
les constantes de Planck, de Boltzmann, et la célérité de la lumière dans le vide.

Effectuons l’étude de λ ֏ F ( λ,T ) à T fixée :


−2
 hc   hc  hc 
∂F 2πhc 2  λkBT
⋅ − 5  e λkBT − 1  = A( X )⋅  Xe X − 5 e X − 1  , en
 hc λkBT
∂λ
=
λ6 
e − 1
  λkBT
e
   ≥0 
( )
     
hc
posant X = .
λkBT
∂F
(
Soit X 0 la solution non nulle de Xe X − 5 e X − 1 = 0 :
∂λ
)
s’annule pour X = 0

et pour X = X 0 . Par résolution numérique, on trouve X 0 = 4,965114 .


La puissance surfacique spectrale F passe par un maximum pour une longueur
hc
d’onde λm telle que λmT = = 2,8978 ⋅ 10 −3 m ⋅ K .
X 0 kB

Le flux surfacique spectral d’équilibre est maximal pour une longueur d’onde
λm telle que λmT = 2,8978 ⋅ 10−3 m ⋅ K ≃ 3 ⋅ 103 µm ⋅ K .
Cette relation s’appelle la loi de déplacement de Wien.

610
Chapitre 5.  Rayonnement thermique 611

En intégrant sur tout le spectre, on obtient la puissance surfacique totale inci-


∞ ∞
2πkB 4T 4 X3 2π5 kB 4 hc

dente ϕi = F (λ,T )dλ =
h3c 2  eX −1 dX =
15h3c 2
T 4 , avec X =
λkBT
.
0 0
�����
π4 /15

Le flux surfacique totale (sur tout le spectre), à l’équilibre thermodynamique à


2π5 kB 4
la température T, vaut ϕe = σT 4 , avec σ = = 5,670316 ⋅ 10 −8 W ⋅ m-2 ⋅ K -4 ,
15h3c 2
constante de Stefan. C’est la loi de Stefan.

La puissance rayonnée l’est principalement autour de la longueur d’onde λm .


8λm
La puissance rayonnée dans l’intervalle [0,5λm , 8λm ] vaut  F (λ,T )dλ .
0,5λm

hc λ
Après le changement de variable X = = X 0 m , on obtient :
λkBT λ
2 X0 2 X0
2πkB 4T 4 X3 15 X3
h 3c 2  eX −1
dX , soit une fraction
π4  eX −1
dX = 0,9803 ≃ 98% de la
X 0 /8 X 0 /8

puissance totale.
Enfin, la densité volumique d’énergie électromagnétique dans l’intervalle :
−1
 hc 
[λ, λ + dλ ] , vaut du = 4 F (λ,T )dλ = 8πhc e λkBT − 1 dλ . Si on cherche sa répartition
c λ5  
 
c c
fréquentielle : λ =  dλ = − 2 dν (le signe négatif traduit le fait que ν décroît avec
ν ν
−1
 hν 
8πhν3  kBT 
λ), on obtient du = e − 1 dν , en imposant dν ≥ 0 .
c3  
 

611
612 Partie VI.  Thermodynamique

2. CORPS NOIR
2.1 Le modèle de corps noir à l’équilibre thermodynamique

Le corps noir est un absorbeur intégral. Toute la puissance surfacique incidente


est absorbée, quels que soient la longueur d’onde et l’angle d’incidence (aucune puis-
sance n’est réfléchie) : dϕi = dϕa . De même dϕs = dϕe : la puissance sortante s’iden-
tifie à la puissance émise.

Ainsi, à l’équilibre thermodynamique, le rayonnement émis, ou absorbé, par un


corps noir est donné par la loi de Planck :
−1
 hc 
2πhc 2  λkBT 
dϕs = dϕi = dϕa = dϕe = e − 1 dλ , et obéit à la loi de déplacement de
λ5  
 
Wien λmT ≃ 3 ⋅ 103 µm ⋅ K , ainsi qu’à la loi de Stefan ϕe = σT 4 .
Le rayonnement d’un corps noir est donc continu, très différent du spectre de
raies émis par un gaz pur à basse pression. Il est isotrope et indépendant du corps,
du moment que ce dernier absorbe toutes les longueurs d’onde.

Comme aucun corps opaque ne possède


cette propriété, on peut, pour obtenir une réalisa-
tion expérimentale satisfaisante d’un corps noir,
piéger un rayonnement en réalisant un trou de pe-
tite surface S dans une enceinte thermostatée. Un
rayonnement qui pénètre dans l’enceinte se réflé-
chit un grand nombre de fois, et finit par être ab-
sorbé du fait des absorptions partielles qui accom-
pagnent chaque réflexion. Le flux émis par le trou
obéit à la loi de Planck et ne dépend que de la tem-
pérature des parois de l’enceinte.

Considérons maintenant un corps noir dont la température de surface est T (on


parle d’équilibre thermodynamique local, car la température du corps n’est pas néces-
sairement uniforme, ni égale à celle d’autres corps opaques avec lesquels il échange
du rayonnement).
Le corps noir absorbe intégralement le rayonnement qui provient de ses
couches internes, et son rayonnement émis reste le rayonnement d’équilibre isotrope
à la température T. On a toujours dϕs = dϕe , flux obéissant à la loi de Planck, mais ce
n’est plus forcément vrai pour dϕi = dϕa .

612
Chapitre 5.  Rayonnement thermique 613

2.2 Conditions d’application du modèle

Un corps opaque qui absorbe une bande spectrale suffisamment étendue au-
tour de λm (par exemple la bande [0,5λm , 8λm ] ) peut être considéré comme un
corps noir, mais seulement au voisinage de la température T telle que :
λmT ≃ 3 ⋅ 103 µm ⋅ K .

L’ordre de grandeur de la température ambiante est T ≃ 300 K . Un corps noir


à cette température absorbe autour de λm ≃ 10 µm (domaine infra-rouge). C’est le cas
du verre, qui absorbe également les ultra-violets (ce qui nous protège de ces rayon-
nements agressifs). En revanche, le verre est transparent dans le visible (autour de
λm ≃ 0,6 µm , ce qui correspond à une température de l’ordre de 5000 K).
Un corps absorbant le rayonnement visible est noir, mais il peut n’être un corps
noir que pour T ≃ 5000 K .
Les corps opaques en équilibre thermodynamique local émettent un rayonne-
ment dont le spectre dépend de la température de surface T. Le flux surfacique émis
s’écrit Fe (λ,T ) = ε(λ ) ⋅ F (λ,T ) , où F (λ,T ) est le flux surfacique spectral d’équilibre.
Pour un corps noir, ε(λ ) = 1 ∀λ . Pour les autres corps opaques, ε(λ ) ≤ 1 (en effet, le
corps noir, absorbeur intégral, est aussi un émetteur intégral : un corps ne peut pas
émettre plus qu’un corps noir dans l’intervalle spectral [ λ, λ + dλ ] ).
Pour un corps gris, l’émissivité ε est indépendante de λ, et le spectre d’émission
est proportionnel à celui du corps noir. On a donc ϕe = εσT 4 , et un maximum de puis-

sance émise pour λm telle que λmT ≃ 3 ⋅ 103 µm ⋅ K .


Une caméra thermique utilise
cette propriété pour réaliser une thermo-
graphie en fausses couleurs d’objets
dans le domaine infra-rouge. L’émissivité
est forte pour les corps peu réfléchis-
sants dans l’I.R (0,98 pour le corps hu-
main) mais faible pour les corps réfléchis-
sants comme les métaux (0,03 pour un
miroir en aluminium). On trouve l’image
thermique de trois bouteilles de tempéra-
tures différentes dans le cahier couleur.

2.3 Flux solaire


Les mesures montrent que le rayonnement du Soleil au sommet de l’atmos-
phère est proche de celui d’un corps noir de température 5780 K : c’est comme cela
qu’on a pu déterminer sa température de surface.

613
614 Partie VI.  Thermodynamique

Le spectre solaire comporte en outre de fines raies noires correspondant à l’ab-


sorption du rayonnement par des éléments de la couche extérieure de l’atmosphère
solaire (hydrogène, fer, calcium, magnésium, sodium…), ce qui a permis d’identifier
ces éléments.
Le rayonnement solaire au sol est moins intense qu’au sommet de l’atmos-
phère. Dans le visible, c’est principalement dû à l’albédo (réflexion et diffusion des
rayons solaires par l’atmosphère). La couche d’ozone O3 absorbe dans le visible et
dans l’ultra-violet, ce qui protège les humains des rayonnements U.V. L’eau présente
(zones en noir sur le schéma ci-dessous) plusieurs bandes d’absorption dans l’infra-
rouge. Le dioxyde de carbone absorbe dans l’infra-rouge, mais surtout autour de 4 µm
et 15 µm.

La loi de Stefan permet de calculer la puissance émise par le Soleil :


ϕe = σTs4 = 5,67 ⋅ 10−8 × 57804 = 6,33 ⋅ 107 W ⋅ m-2 , en prenant Ts = 5780 K pour tem-
pérature de surface du Soleil. Le Soleil, de rayon Rs = 696 000 km et de centre S,

rayonne donc de façon isotrope une puissance totale Φe = 4πRs2ϕe = 3,85 ⋅ 1026 W .

614
Chapitre 5.  Rayonnement thermique 615

La Terre, de rayon Rt = 6370 km et de centre T, ne reçoit qu’une fraction de ce


rayonnement, égale à la surface A qu’elle occupe sur la sphère de centre S et de
rayon D = ST = 1,50 ⋅ 108 km , divisée par la surface totale 4πD 2 de cette sphère.
2Rt
Comme Rt << D , l’angle α ≃ = 8,49 ⋅ 10 −5 rad << 1 rad sous lequel est vue la
D
Terre depuis S est très petit, donc les rayons issus du point S arrivent parallèlement
entre eux sur la Terre, et A = πRt 2 . La Terre reçoit donc au sommet de l’atmosphère
une puissance par unité de surface normale à la direction Soleil – Terre :
1 πRt 2 Rs2 Rs2
ϕs0 = 4πRs2ϕe = ϕe  ϕs0 = σTs4 = 1,36 kW ⋅ m-2 . Ce flux varie lé-
πRt 2 4πD 2 D2 D2
gèrement du fait de l’excentricité de l’orbite terrestre (D varie pendant l’année) et de
l’activité solaire (périodes de 11 ans).
2Rs
Le Soleil est vu depuis la Terre sous l’angle γ ≃ = 9,28 ⋅ 10 −3 rad ≃ 0,53° .
D
Cet angle est suffisamment faible pour pouvoir considérer que le vecteur densité vo-
lumique de courants thermiques radiatifs, au niveau des plus hautes couches de l’at-
� � � �
mosphère de la Terre, est uniforme : Jr = Jr eS →T = SP ( Jr est en réalité la moyenne

du vecteur de Poynting), avec Jr = 1,36 kW ⋅ m-2 .

Le flux parvenant du Soleil arrive sur une surface A = πRt 2 , mais se répartit

(grâce aux océans et à l’atmosphère) sur toute la surface 4πRt 2 de la Terre. Le flux
solaire moyen est donc 4 fois plus petit, de l’ordre de 340 W ⋅ m-2 .

2.4 Effet de serre 


L’albédo dû à l’atmosphère (réflexion, diffusion du rayonnement solaire par les
particules qui le constituent) est en moyenne de 26%. Celui dû aux océans et aux
continents est de 4% (soit un albédo total A de 30%).
D’autre part, l’atmosphère absorbe une fraction β = 19% du rayonnement so-
laire.
La Terre reçoit donc un flux surfacique ϕs = (1− A − β) ϕs0 .
On peut définir la température Tt de la Terre, moyennée temporellement à
l’échelle de l’année, et spatialement sur sa surface. Même si la température moyenne
pendant l’année dépend de la latitude, la rotation de la Terre, ainsi que l’inertie ther-
mique de l’atmosphère, des océans et de la croûte terrestre, font que les fluctuations
spatiales restent limitées. On détermine Tt en supposant que la Terre est en équilibre
radiatif : toute l’énergie absorbée par la Terre est intégralement réémise, et en suppo-
sant en outre qu’elle se comporte comme un corps noir pour la température Tt . On en

615
616 Partie VI.  Thermodynamique

déduit la puissance émise par la Terre : Φt = ϕt 4πRt 2 = σTt 4 4πRt 2 .

Commençons par négliger toute absorption de l’atmosphère, ce qui entraîne


2
β = 0 . L’équilibre radiatif entraîne que Φt = Φs = ϕsπRt , soit :

Rs2 Rs 1/ 4
σTt 4 4πRt 2 = (1 − A) 2
σTs4 ⋅ πRt 2  Tt = Ts [1 − A]
= 255 K .
D 2D
Cette température moyenne de −19°C ne correspond pas à la valeur mesurée
car elle ne prend pas en compte la présence dans l’atmosphère de gaz à effet de serre
qui absorbent une partie du rayonnement infra-rouge.
En revanche, pour les planètes avec une atmosphère très ténue comme Mars,
Rs
1/ 4
la formule T = Ts [1 − A] , où D est la distance moyenne entre la planète et le
2D
Soleil, et A l’albédo due à la surface de la planète, donne une valeur très proche de la
valeur moyenne mesurée (par analyse du rayonnement infra-rouge émis). Dans le cas
de Mars, on a A = 25% et D = 2,28 ⋅ 108 km , et on retrouve théoriquement la valeur
mesurée T = 210 K .

Il faut donc, pour la Terre, prendre en compte le fait que l’atmosphère absorbe
la fraction β = 19% du rayonnement solaire, et surtout qu’elle absorbe une partie des
rayonnements infra-rouges émis par la Terre. Nous allons considérer qu’elle les ab-
sorbe totalement : elle se comporte alors comme un corps noir autour de Tt .
L’épaisseur H de l’atmosphère étant petite devant Rt , on peut considérer que

les surfaces extérieure et intérieure de l’atmosphère sont égales à 4πRt 2 . Ainsi l’at-
mosphère rayonne toute l’énergie qu’elle absorbe dans le domaine des I.R, pour moitié
vers l’espace, pour moitié vers la Terre. C’est cette moitié qui explique l’effet de serre.
Comme précédemment, on se place en régime stationnaire, et on ne tient
compte que du rayonnement : atmosphère et Terre sont en équilibre radiatif.
Pour l’atmosphère : βϕs0 πRt 2 + Φt = 2× 4 πRt 2 ⋅ ϕatm
  
partie absorbée flux terrestre, to- flux atmosphérique émis
du flux solaire talement absorbé à travers une de ses faces

Pour la Terre : (1 − A − β)ϕs0 πRt 2 + 4πRt 2 ⋅ ϕatm = Φt


  
partie absorbée flux atmosphérique flux émis
du flux solaire absorbé par la Terre par la Terre

En éliminant ϕatm , on obtient βϕs0πRt 2 + Φt = 2Φt − 2(1− A − β)ϕs0πRt 2 , soit


Rs2
Φ t = σTt 4 ⋅ 4πRt 2 = [ 2 − 2 A − β] ϕs0 πRt 2 avec ϕs0 = σTs 4 .
D2
1
Rs
On en déduit Tt = Ts [ 2 − 2 A − β] 4 = 292 K , soit 19°C pour un effet de serre
2D
« maximal ».

616
Chapitre 5.  Rayonnement thermique 617

Les valeurs mesurées actuellement donnent une moyenne de 15°C. En réalité


l’atmosphère n’absorbe pas tout le rayonnement I.R provenant de la Terre. Les gaz à
effet de serre sont la vapeur d’eau qui contribue approximativement pour 60% à l’effet,
le gaz carbonique (26%), l’ozone (8%), le méthane et le protoxyde d’azote N2O (6%).
L’activité humaine influe sur les taux dans l’atmosphère des gaz à effet de serre
CO 2 , CH4 , N2O , gaz fluorés, dont tout indique qu’ils sont responsables du réchauf-
fement climatique. Le protocole de Kyoto (1997) vise à réduire l’émission humaine de
ces gaz.
Notons maintenant Φs = ϕs0πRt 2 le flux solaire reçu par la Terre. La résolution
Φ
 t = [ 2 − 2 A − β] Φ s = 1,21Φ s
du système précédent donne  .
2
Φatm = 4πRt ⋅ ϕatm = [1 − A] Φ s = 0,70 Φ s
La Terre émet une puissance supérieure à celle reçue par le Soleil.
On peut calculer la température moyenne de l’atmosphère, assimilée à un corps
noir dans le domaine des I.R :
Rs2 Rs 1
ϕatm = σTatm4 = [1 − A] ϕs0 = [1 − A] 2
σTs 4  Tatm = Ts [1 − A] 4
= 255 K .
4D 2D
On retrouve logiquement l’expression de la température terrestre sans atmos-
phère, car c’est maintenant l’atmosphère qui absorbe tout le rayonnement solaire non
réfléchi, soit directement dans le domaine visible, soit dans le domaine I.R après son
absorption, puis sa réémission, par la Terre.
On peut représenter, dans le modèle simple où l’atmosphère absorbe l’intégra-
lité du rayonnement I.R, les différents flux en % :

Il faudrait en toute rigueur tenir compte de la partie du rayonnement I.R de la


Terre non absorbée par l’atmosphère. En revanche, les échanges énergétiques cor-
respondant à la convection de l’air à la surface de la Terre, à la vaporisation ou la

617
618 Partie VI.  Thermodynamique

condensation de l’eau, au frottement des océans sur la terre dus aux marées, à la
géothermie, aux dégagements énergétiques humains (combustion, fission radioac-
tive), sont faibles par rapport à ceux mis en jeu par le rayonnement.
Remarquons que « effet de serre » porte mal son nom car, contrairement au
cas du système {Terre, atmosphère} soumis au rayonnement solaire, c’est la réduction
des phénomènes de convection thermique et d’évaporation, et pas le rayonnement,
qui sont les principales causes du réchauffement d’une serre agricole. On parle plutôt
de forçage radiatif dans le cas de la Terre.

2.5 Rayonnement du fond diffus cosmologique


Ce rayonnement s’identifie presque parfaitement au rayonnement du corps noir
à 2,72 K (soit λm = 1,06 mm : domaine des micro-ondes), et est en accord avec les
prévisions de la théorie du Big Bang. Le rayonnement est isotrope à 10 −5 près.

Pendant 380 000 ans après le Big Bang, l’univers était constitué de noyaux
d’hélium, de noyaux d’hydrogène, et d’électrons, formant un plasma dense et chaud.
L’énergie des photons était trop grande pour que les électrons se lient durablement
aux noyaux pour former des atomes (elle était supérieure à l’énergie d’ionisation).
L’univers était donc un plasma totalement ionisé. Un photon émis par une particule
était absorbé par une autre et lui fournissait l’énergie nécessaire pour s’ioniser : aucun
rayonnement n’était émis par le plasma.
Cependant, l’univers se refroidit lors de son expansion. En dessous de 3000 K,
l’énergie des photons ne fut plus suffisante pour ioniser les atomes et empêcher la
formation d’atomes d’hélium et d’hydrogène. Il y eu alors découplage entre matière et
rayonnement : l’univers devint transparent.
Le rayonnement qui nous provient du fond cosmologique est un rayonnement
fossile émis 380 000 ans après le Big Bang, il y a 13,8 milliards d’années.

618
619

[SEPTIÈME PARTIE]

PHYSIQUE DES ONDES

Les chapitres :
1. Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de 621
d’Alembert
2. Ondes acoustiques dans les fluides 659
3. Ondes électromagnétiques dans le vide 687
4. Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans 721
les plasmas et les conducteurs
5. Interfaces entre deux milieux 763
6. Introduction à la Physique du laser 783
7. Révisions et compléments : introduction à la mécanique 801
quantique
8. Approche ondulatoire de la mécanique quantique 823

Les versions couleur de certaines figures du chapitre 3 (repérées par la


présence de l’image suivante : ) sont regroupées dans un cahier couleur
placé au milieu du livre.

619
620
621

[PHYSIQUE DES ONDES 1]

PHÉNOMÈNES DE
PROPAGATION NON DISPERSIFS :
ÉQUATION DE D’ALEMBERT
1. PROPAGATION NON DISPERSIVE LE LONG
D’UNE CORDE / L’ÉQUATION DE D’ALEMBERT
1.1 Exemple fondamental de la corde vibrante, équation de d’Alembert 1D
Cadre de l’étude : petite perturbation
On considère une corde homogène de masse linéique µ = dm / dℓ .
— Au repos, la corde est suffisamment tendue pour qu’elle soit droite : c’est un seg-
ment de longueur L, porté par l’axe Ox. L’influence de la pesanteur est donc négli-
geable : la direction Ox est quelconque. Plus précisément, si la norme de la tension
de la corde est T0 , son poids µLg est très petit devant T0 .
— La corde est quasiment inextensible : un
point de la corde peut être déplacé faible-
ment dans une direction orthogonale à Ox,
mais pas selon Ox. Nous supposerons que
la corde vibre dans le plan xOy : un point
M0 ( x, y = 0 ) de la corde au repos se trouve

(
à un instant t en M x + ψ x ( x, t ), ψ y ( x, t ) , )
avec ψ x ( x, t ) << ψ y ( x, t ) << L . On notera par la suite ψ y ( x, t ) = ψ( x, t ) .
— La corde étant peu déformée par rapport à son état au repos, l’angle θ( x, t ) entre

ex et la tangente à la corde est très faible : θ( x, t ) << 1 rad .

621
622 Partie VII.  Physique des ondes

Les vibrations étudiées correspondent donc à une petite perturbation de la


corde par rapport à son état au repos, si bien qu’il est légitime de mener les calculs à
l’ordre 1 en θ( x, t ) et ψ( x, t ) .

Équation régissant la perturbation ψ(x,t)

Étudions l’élément de corde de longueur dℓ qui correspond au repos au seg-


ment [ x − dx / 2, x + d x / 2] . Nous négligerons la raideur de la corde : les forces de ten-
sion sont tangentes à la corde, et il n’existe aucun couple de rappel quand la corde est
incurvée (en réalité, une corde enroulée a tendance à se déplier).
À l’ordre 1 en θ et ψ, on a cos θ = 1 donc d x = d ℓ cos θ = d ℓ , ainsi que sin θ = θ
∂ψ
dx
ψ( x + dx / 2, t ) − ψ( x − dx / 2, t ) ∂x ∂ψ
et tan θ = θ . Comme tan θ = = , on a θ = , re-
dx dx ∂x
lation qui prouve que θ( x, t ) et ψ( x, t ) sont du même ordre.

On note T ( x, t ) la force de tension exercée à l’abscisse x par la partie droite de
la corde sur la partie gauche, et T ( x, t ) la norme de cette force. Appliquons le P.F.D à
l’élément de corde dans le référentiel du laboratoire supposé galiléen :
� � �
d
� m a = T ( x + dx / 2, t ) − T ( x − dx / 2, t ) , en négligeant le poids.
µdℓ

Comme l’élément de corde ne se déplace que selon e y , son accélération vaut

� ∂ 2ψ � �
a = 2 ey . On obtient en projection sur ex :
∂t
0 = T ( x + dx / 2, t )cos [ θ( x + dx / 2, t )] − T ( x − dx / 2, t )cos [ θ( x − dx / 2, t )]
��������� ���������
1 1
∂T
= T ( x + dx / 2, t ) − T ( x − dx / 2, t ) = dx
∂x
∂T
On en déduit que = 0 : la norme de la tension ne dépend que du temps.
∂x

622
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 623

Elle s’écrit donc T (t ) = T0 + T1(t ) où T0 est la norme de la tension au repos, et T1(t ) la


composante d’ordre 1 en ψ qui se rajoute lors de la perturbation.
G
On obtient en projection sur e y :

∂ 2ψ ∂θ ∂θ
µdx = T (t )sin [ θ( x + dx / 2, t )] − T (t )sin [ θ( x − dx / 2, t )] = [T0 + T1(t )] dx = T0 dx
∂t 2   ∂x ∂x
θ( x + dx /2,t ) θ( x − dx / 2,t )

à l’ordre 1 en ψ.
∂ψ ∂ 2ψ ∂ 2ψ
Comme θ = , on obtient l’équation µ 2 = T0 2 régissant ψ( x, t ) , soit :
∂x ∂t ∂x

∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ T0
2
= 2 2
, avec c = . Cette équation s’appelle équation de d’Alembert à une
∂x c ∂t µ
dimension. C’est une équation d’onde, ou équation de propagation.

1.2 L’équation de d’Alembert 3D, premières propriétés


L’équation d’onde de d’Alembert régissant une grandeur scalaire s( x, y, z, t ) , ou
G
G 1 ∂ 2s G 1 ∂ 2s
vectorielle s ( x, y , z, t ) est ∆s = 2 2 , ou ∆s = 2 2 .
c ∂t c ∂t
∆ est l’opérateur laplacien (scalaire ou vectoriel selon les cas).

Cette équation est linéaire. Dans le cas de la corde, elle est obtenue en linéari-
sant les équations régissant sa déformation. Cette linéarisation n’est possible que
parce que la perturbation est supposée petite. Dans le cas où on impose de plus
grandes déformations à la corde, les développements limités à l’ordre 1 ne sont plus
une bonne approximation. On obtient toujours une équation d’onde régissant ψ( x, t ) ,
mais cette équation, non-linéaire, n’est plus l’équation de d’Alembert. De façon géné-
rale, lorsque des ondes se propagent dans la matière, les équations d’onde ne sont
linéaires que dans le cadre des petites perturbations.
Une autre propriété de l’équation de d’Alembert est son invariance par le chan-
gement t → −t : les phénomènes ondulatoires régis par cette équation sont réver-
sibles. Cette propriété est à relier à l’absence de phénomènes dissipatifs dans le mo-
dèle utilisé. Si on prenait en compte des frottements visqueux linéaires sur l’élément
G G ∂ψ G
de corde de longueur dx : dFv = −αvdx = −α dxey , l’équation d’onde resterait li-
∂t
néaire mais ne serait plus invariante par le changement t → −t .

1.3 Solutions d’onde plane de l’équation de d’Alembert


Par définition, une onde est plane s’il existe un repère cartésien tel que l’onde
ne dépende spatialement que d’une coordonnée, par exemple x :
G G
s = s( x, t ) , ou s = s ( x, t ) .

623
624 Partie VII.  Physique des ondes

On parle d’onde plane, car à un instant t quel-


conque, la perturbation est la même en tout point d’un plan
d’équation x = Cte . Un tel plan s’appelle plan d’onde.
Si une onde plane scalaire est régie par l’équation
∂ 2s 1 ∂ 2s
de d’Alembert, cette dernière s’écrit , comme
2
=
∂x c 2 ∂t 2
dans le cas de la corde vibrante. On peut trouver des solutions de l’équation
∂ 2s 1 ∂ 2s u( x, t ) = t − x / c
2
= 2 2
en effectuant un changement de variable : on pose  .
∂x c ∂t v ( x, t ) = t + x / c
La démonstration qui suit n’est pas au programme.
∂ 2s ∂ 2s
On cherche à exprimer les dérivées partielles eten fonction des
∂x 2 ∂t 2
dérivées partielles de la fonction s(u,v ) par rapport à u et v. Cette fonction dépend de
x et de t car u et v dépendent elles-mêmes de x et de t : s ( x, t ) = s [u ( x, t ), v ( x, t )] .
∂s ∂s
La différentielle de s(u,v ) peut s’écrire ds = du + dv , or les différentielles
∂u ∂v
∂u ∂u ∂v ∂v
des fonctions u( x, t ) et v ( x, t ) sont du = dx + dt et dv = dx + dt , d’où :
∂x ∂t ∂x ∂t
∂s  ∂u ∂u  ∂s  ∂v ∂v   ∂s ∂u ∂s ∂v   ∂s ∂u ∂s ∂v 
ds = dx + dt + dx + dt = + dx +  +  dt
∂u  ∂x ∂t  ∂v  ∂x ∂t   ∂u ∂x ∂v ∂x   ∂u ∂t ∂v ∂t 
∂s ∂s ∂s ∂s ∂u ∂s ∂v ∂s ∂s ∂u ∂s ∂v
= dx + dt  = + et = +
aussi ∂x ∂t ∂x ∂u ∂x ∂v ∂x ∂t ∂u ∂t ∂v ∂t
∂s 1  ∂s ∂s  ∂s ∂s ∂s
On a donc ici =  −  = Sx (u,v ) , et = + = St (u,v ) .
∂x c  ∂v ∂u  ∂t ∂u ∂v
Ces dérivées partielles sont encore des fonctions de u( x, t ) et v ( x, t ) . On sait
désormais les dériver par rapport à x ou à t :
∂ 2s 1  ∂Sx ∂Sx  1  ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s  1  ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s 
=  −  =  − − +  =  − 2 + .
∂x 2 c  ∂v ∂u  c 2  ∂v 2 ∂u∂v ∂v ∂u ∂u 2  c 2  ∂u 2 ∂u∂v ∂v 2 
∂ 2s ∂St ∂St ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s
= + = + + + = + 2 + . On a utilisé le
∂t 2 ∂u ∂v ∂u 2 ∂v ∂u ∂u∂v ∂v 2 ∂u 2 ∂u∂v ∂v 2
théorème de Schwarz pour des fonctions de classe C 2 . L’équation de d’Alembert
1  ∂ 2s ∂ 2s ∂2s  1  ∂ 2s ∂ 2s ∂ 2s  ∂ 2s
s’écrit donc 2  2 − 2 + 2 = 2  2 +2 + 2 ⇔ = 0 après
c  ∂u ∂u∂v ∂v  c  ∂u ∂u∂v ∂v  ∂u∂v
∂  ∂s  ∂s
changement de variables. . Elle est alors très simple à intégrer : =0⇔ ne
∂u  ∂v  ∂v
∂s
dépend pas de u, c’est une fonction de la seule variable v : = g (v ) = G′(v ) , en notant
∂v
∂s
G une primitive de g. En intégrant de nouveau = G′(v ) , on obtient :
∂v
s(u,v ) = G(v ) + F (u ) .

624
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 625

Les solutions d’ondes planes s(x,t) de l’équation de d’Alembert sont de la forme


s( x, t ) = F ( t − x / c ) + G ( t + x / c ) , où F et G sont des fonctions quelconques d’une
seule variable.

Ces fonctions doivent toutefois être de classe C 2 . Pour trouver le sens physique
de ces solutions, considérons le cas particulier où s ( x, t ) = F ( t − x / c ) .On a alors :
s( x, t + ∆t ) = F ( t + ∆t − x / c ) = F ( t − [ x − c ∆t ] / c ) = s( x − c ∆t , t ) . Quels que soient x et t,
la grandeur s est la même en x à l’instant t + ∆ t qu’en x − c ∆t à l’instant t. Ceci signifie
que la grandeur s s’est propagée de ∆x = c ∆t pendant la durée quelconque ∆ t . Si
∆ t > 0 , alors ∆x > 0 : l’onde se propage à la célérité c, ou vitesse, c, dans le sens des
x croissants.

De la même manière, on montre que s ( x, t ) = G ( t + x / c ) correspond à une pro-


pagation dans le sens des x décroissants.

s ( x, t ) = F ( t − x / c ) correspond à une O.P.P : Onde Plane Progressive, se dé-


plaçant sans déformation, à la célérité c, dans le sens des x croissants.
s ( x, t ) = G ( t + x / c ) correspond à une O.P.P se déplaçant sans déformation, à
la célérité c, dans le sens des x décroissants.
L’absence de déformation vient du fait que toutes les composantes sinusoïdales
de la vibration s( x, t ) se propagent à la même célérité c, quelle que soit leur pulsation
ω. On parle dans ce cas de propagation non dispersive.

Prenons l’exemple d’une corde semi-infinie, qui correspond aux abscisses


x ≥ 0 , dont on secoue l’extrémité en x = 0 . L’onde, qui se propage sans déformation
dans le sens des x croissants, possède la forme déterminée par la condition aux limites
ψ( x = 0, t ) qu’on impose. En un point d’abscisse x > 0 , la perturbation vaut à l’instant
t : ψ( x, t ) = ψ ( x = 0, t − x / c ) .

Pour une corde vibrante, la propagation de l’onde se fait le long de la corde


alors que la vibration est orthogonale à la corde : on parle d’onde transversale.

625
626 Partie VII.  Physique des ondes

� �
Dans le cas d’une onde vectorielle plane s = s ( x, t ) obéissant à l’équation de
 ∂ 2s x   ∂ 2s x 
 2   2 
 ∂x   ∂t 
 ∆s x   2  �  2 
�   2
∂ sy 1 ∂ s 1 ∂ sy
d’Alembert, on a ∆s =  ∆sy  =  2  = 2 2 = 2  2  . Chaque composante
  c  ∂t 
   ∂x  c ∂t  2 

 z s 2
 ∂ sz   ∂ sz 
 ∂x 2   ∂t 2 
   

s x ( x, t ) , s y ( x, t ) et sz ( x, t ) de s ( x, t ) vérifiant l’équation de d’Alembert scalaire, on a :
� � �
s ( x, t ) = F ( t − x / c ) + G ( t + x / c ) .

2. ONDES PLANES PROGRESSIVES HARMONIQUES


(O.P.P.H)
2.1 Décomposition d’une O.P.P quelconque
Considérons une O.P.P : s ( x, t ) = F ( t − x / c ) = F (u ) , se propageant dans le
sens des x croissants. La fonction F(u) se décompose en somme de fonctions sinu-
+∞
1
 Fɶ (ω)e
i ωt
soïdales de la variable u (pour une fonction quelconque, F (u ) = dω , où

-∞

Fɶ ( ω) est la transformée de Fourier de F), du type s( x, t ) = s0 cos(ωu ) .

Cette décomposition justifie l’étude de solutions particulières de l’équation de


d’Alembert : les Ondes Planes Progressives Harmoniques (O.P.P.H), qui s’écrivent :
s( x, t ) = s0 cos ω ( t − x / c )  = s0 cos(ωt − kx ) , avec :
— ω = 2 π / T pulsation (temporelle). T est la période (temporelle) de la perturbation.
— k = ω / c = 2 π / λ pulsation spatiale. λ est la période spatiale de la perturbation,
qu’on appelle plutôt longueur d’onde.

Une O.P.P.H possède une double périodicité (spatiale et temporelle), les deux
2π ω 2π
périodes étant liées par k = = =  λ = cT .
λ c cT

λ et T sont liées par λ = cT .

Cette relation indique que pendant une période, l’onde s’est déplacée de λ.
� � � ω� 2π �
On définit le vecteur d’onde k par k = kex = ex = ex : il possède la direc-
c λ
tion et le sens de propagation de l’onde. Sa norme est la pulsation spatiale.

626
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 627

G → G G G
Si on repère un point M par son vecteur position r = OM = xex + yey + zez dans
G G G G G G
le référentiel Oxyz, on a k ⋅ r = kex ⋅ ( xex + yey + zez ) = kx , ce qui permet de donner
une formule intrinsèque de l’expression d’une O.P.P.H :
G G G G
s ( r , t ) = s0 cos( ωt − k ⋅ r ) pour une O.P.P.H se propageant selon k .

À un instant fixé, il existe, du fait de la propagation, un déphasage φ entre la


G →
valeur de l’onde en un point M dont le vecteur position est r = OM , et la valeur de
G G G
l’onde en O : s(r , t ) = s0 cos(ωt + φ) , avec φ = −k ⋅ r .

2.2 Notation complexe


On peut utiliser la notation complexe, tant que les opérateurs qui agissent sur
G G
G G G G
s(r , t ) sont linéaires : s ( r , t ) = Re  s ( r , t ) , avec s( r , t ) = s0e i ( ωt − k ⋅r ) .

Avec cette notation, les dérivées temporelles et spatiales deviennent de simples


multiplications.
G G G G G G G
i ( ωt − k x x − k y y − k z z )
Si k = k x ex + k y ey + k zez , alors s( r , t ) = s0e i ( ωt − k ⋅r ) = s0e :

∂s ∂s ∂s ∂s
= i ωs = −ik x s = −ik y s = −ik z s
∂t ∂x ∂y ∂z

3. ONDES PLANES STATIONNAIRES


3.1 Définition / Obtention
On peut chercher une autre famille d’ondes planes s( x, t ) solutions de l’équa-
∂ 2s 1 ∂ 2s
tion de d’Alembert = , sous la forme s( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t ) .
∂x 2 c 2 ∂t 2

627
628 Partie VII.  Physique des ondes

Les solutions s’exprimant sous la forme s( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t ) , ou plus générale-


ment sous la forme s(M, t ) = f (M ) ⋅ g(t ) , c’est-à-dire comme le produit d’une fonction
de l’espace et d’une fonction du temps, sont appelées ondes stationnaires.

En physique ondulatoire, « stationnaire » ne signifie pas « indépendant du


temps », mais « absence de propagation ». L’onde stationnaire fait « du sur place »
car s(x,t) ne contient pas de termes de propagation en t − x / c ou en t + x / c .

La définition d’une onde stationnaire : s( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t ) , suppose que la gran-


deur s est réelle.
G G G G
G
Par exemple, une O.P.P.H s’écrit s( r , t ) = s0e i ( ωt − k ⋅r ) = s0e i ωt ⋅ e − ik ⋅r en notation
complexe, et se met sous la forme du produit d’une fonction du temps et d’une fonction
de l’espace, alors que ce n’est pas une onde stationnaire, mais progressive.
∂ 2s 1 ∂ 2s
Écrivons que s( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t ) est solution de 2
= :
∂x c 2 ∂t 2
1 g ′′(t ) f ′′( x ) g ′′(t )
f ′′( x ) ⋅ g (t ) = 2 f ( x ) ⋅ g ′′(t ) ⇔ = c2 , ce qui implique = Cte .
c g
N ( t ) f ( x ) g (t )
G(t ) F(x)

— Dans le cas où la constante est positive, on a Cte = 1/ τ2 . Les solutions sont :


t t

g (t ) = Ae τ + Be τ . Elles divergent pour t → ±∞ et ne sont pas des solutions phy-
siques.
— Dans le cas où la constante est nulle, les solutions sont g (t ) = A + Bt et divergent
pour t → ±∞ .
— Dans le cas où la constante est négative, on a Cte = −ω2 . Les solutions sont :
g(t ) = A cos(ωt ) + B sin(ωt ) = C cos(ωt + ϕ) . Seules ces solutions ont un sens physique.
On en déduit que Cte = −ω2 avec ω quelconque. L’équation régissant f(x) est donc :
ω2
f ′′( x ) + f ( x ) = 0 , et admet pour solutions f ( x ) = D sin(kx + α) , avec k = ω / c .
c2

Les ondes planes stationnaires solutions de l’équation de d’Alembert sont de la


forme s( x, t ) = s0 sin(kx + α )cos(ωt + ϕ) , avec ω quelconque et k = ω / c .

Le choix entre une solution d’O.P.P.H et une solution d’onde plane stationnaire
est guidé par les conditions aux limites (C.A.L).
Prenons l’exemple d’une corde vibrante infinie dont on fait vibrer l’extrémité en
x = −∞ à la pulsation ω. La solution d’O.P.P.H : ψ( x, t ) = ψ 0 cos(ωt − kx ) convient.
Comme on l’a vu au 1.3, la vibration est la même en x ′ qu’en x, à un retard près (si
x ′ > x ), ou une avance près (si x ′ < x ) : ∆t = ( x′ − x ) / c est le retard algébrique.

628
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 629

Pour une corde correspondant aux abscisses x ≤ 0 , attachée en x = 0 sur


l’axe Ox, dont on fait vibrer l’extrémité en x = −∞ à la pulsation ω, la solution d’O.P.P.H
ne convient plus. Tous les points de la corde ne peuvent pas vibrer de la même façon
à un retard près, car l’extrémité x = 0 ne vibre pas.
Pour vérifier la C.A.L ψ(0, t ) = 0 ∀t , on cherche une solution d’onde plane sta-
tionnaire : ψ( x, t ) = ψ 0 sin(kx + α )cos(ωt + ϕ) , avec k = ω / c . On peut prendre α = 0 :
ψ( x, t ) = ψ0 sin(kx )cos(ωt + ϕ) . L’onde ne se propage pas, elle fait du « sur place ».

3.2 Nœuds et ventres de vibration


Considérons une onde plane stationnaire comme celle qui anime la corde atta-
chée en x = 0 : ψ( x, t ) = ψ0 sin(kx )cos(ωt + ϕ) , pour x ∈ ] − ∞,0 ] .

Certains points, comme le point d’attache x = 0 , ne vibrent pas. On a :


ψ( x, t ) = 0 ∀t . On les appelle nœuds de vibration.

Leurs abscisses vérifient sin ( 2 πx / λ ) = 0 ⇔ 2 πx / λ = −n π , avec n ∈ N , soit :


x = x n = − nλ / 2 .

L’amplitude de la vibration est au contraire maximale en certains points, qu’on


appelle ventres de vibration.

Leurs abscisses vérifient sin ( 2πx / λ ) = 1 ⇔ 2πx / λ = −(2m + 1)π / 2 , avec


m ∈ N , soit : x = xm = −(2m + 1)λ / 4 .
On peut représenter les nœuds (N) et les ventres (V) de vibration ainsi que
l’allure de la corde à différents instants :

629
630 Partie VII.  Physique des ondes

La distance entre deux nœuds (ou deux ventres) consécutifs est λ / 2 .

En utilisant des relations de trigonométrie, on peut écrire différemment l’onde


stationnaire ψ( x, t ) = ψ0 sin(kx )cos(ωt + ϕ) :

ψ0 ψ
ψ( x , t ) = sin( �� − kx� + ϕ + π) + 0 sin( ��
ωt �� + kx� + ϕ) .
ωt ��
2 O.P.P.H x ր
2 O.P.P.H x ց
On reconnaît la somme de deux O.P.P.H de mêmes pulsation et amplitude,
déphasées de π en x = 0 , l’une se propageant dans le sens des x croissants, l’autre
dans le sens des x décroissants.
La première correspond à une onde incidente émise depuis x = −∞ , la seconde
à une onde réfléchie en x = 0 du fait de la présence d’un nœud de vibration en ce
point.

Cela revient donc ici au même de chercher une solution sous la forme d’une
onde stationnaire, ou sous la forme de la somme d’une O.P.P.H incidente et d’une
O.P.P.H réfléchie.

3.3 Modes propres de vibration


Quantification des pulsations

Lorsqu’on n’impose qu’une seule C.A.L, comme dans l’exemple précédent où


la corde n’était attachée qu’en x = 0 , la pulsation ω est quelconque. Lorsqu’on impose
plusieurs conditions aux limites, toutes les valeurs de ω ne sont pas permises.
Prenons l’exemple d’une corde de longueur
L, fixée sur l’axe Ox à ses deux extrémités x = 0
et x = L . ψ( x, t ) doit vérifier :
∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ
— L’équation locale de propagation = .
∂x 2 c 2 ∂t 2
— La C.A.L 1 : ψ( x = 0, t ) = 0 ∀t .
— La C.A.L 2 : ψ( x = L, t ) = 0 ∀t .
La solution d’onde stationnaire ψ( x, t ) = ψ0 sin(kx )cos(ωt + ϕ) , avec k = ω / c ,
vérifie l’équation d’onde et la C.A.L 1.
Pour vérifier aussi la C.A.L 2, il faut que sin(kL) = 0 ⇔ kL = nπ , avec n ∈ N∗ .

nπ λ
La pulsation spatiale est quantifiée : k = kn =⇔ L = n , avec n ∈ N∗ , ainsi
L 2
nπc nc
que la pulsation ω = ωn = , et donc la fréquence f = fn = .
L 2L
On appelle pulsations propres et fréquences propres les valeurs discrètes ωn
et fn que peuvent prendre la pulsation et la fréquence.

630
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 631

 nπ   nπc 
Une perturbation ψ n ( x, t ) = ψ0n sin  x  cos  t + ϕn  vérifie l’équation
 L   L 
d’onde et les C.A.L. Comme l’équation d’onde est linéaire, la perturbation la plus gé-

nérale vérifiant l’équation d’onde et les C.A.L s’écrit ψ( x, t ) =  ψn ( x,t ) .
n =1

Un raisonnement simple permet de trouver les fréquences propres sans passer


par la détermination de ψ( x, t ) . Comme on a imposé deux nœuds en x = 0 et en x = L
et que la distance entre deux nœuds consécutifs est λ / 2 , on doit avoir L = n λ / 2 ,
c nc
avec n ∈ N∗ . On en déduit L = n ⇔ f = fn = .
2f 2L

Modes propres de vibration


On appelle mode propre de vibration une solution stationnaire variant sinusoïda-
 nπ   nπc 
lement dans le temps : ψ( x, t ) = ψn ( x, t ) = ψ0n sin  x  cos  t + ϕn  .
 L   L 
nc
Un mode propre ne fait intervenir qu’une seule fréquence propre fn = .
2L

On peut représenter la vibration à l’aide de fuseaux enveloppant la corde au


cours du temps. Le nième mode propre de vibration correspond à n fuseaux.

Le mode propre n = 1 est appelé mode propre fondamental, et la fréquence


c
f1 = est appelée fréquence fondamentale. Les autres modes propres sont des har-
2L
nc
moniques de fréquences fn = multiples de la fréquence fondamentale.
2L

3.4 Somme d’ondes stationnaires vérifiant des conditions initiales


Considérons de nouveau une corde attachée en x = 0 et x = L . La perturbation

 nπ   nπc 
ψ( x, t ) =  ψ0n sin  Lx  cos 
  L
t + ϕn  vérifie l’équation d’onde et les deux C.A.L :

n =1
ψ( x = 0, t ) = 0 ∀t et ψ( x = L, t ) = 0 ∀t , quels que soient les coefficients ψ0n et ϕn .

631
632 Partie VII.  Physique des ondes

Ces coefficients sont fixés dès qu’on impose des C.I : position et vitesse de la
∂ψ
corde à t = 0 , soit ψ( x, t = 0) = Ψ( x ) et ( x, t = 0) = V ( x ) ∀x ∈ [0, L ] .
∂t

Prenons l’exemple d’une corde pincée à t = 0 : le point d’abscisse L / m est


amené en y = a , puis la corde est lâchée sans vitesse initiale. Écrivons ψ( x, t ) sous

  nπc   nπc   nπ 
une forme équivalente ψ( x, t ) =  an cos  t + bn sin 
L 
t  sin 
 L   L 
x  . Les C.I
n =1
imposent donc deux relations :

 nπ 
— ψ( x, t = 0) =  an sin  L x  = Ψ( x ) .

n =1

 nπ 

∂ψ nπc
— ( x, t = 0) = bn sin  x  = V ( x ) , fonction nulle ici.
∂t n =1
L  L 

∞ ∞
 nπ   nπ 
 an sin  L  bn
nπc
On remarque que x  et sin  x  correspondent à un
n =1  n =1
L  L 
développement en série de Fourier d’une fonction 2L-périodique et impaire de x.

En effet, le fondamental sin [ πx / L ] = sin [ 2 πx / (2L )] a bien pour période 2L.


On trouve donc les coefficients an et bn en développant en série de Fourier les
fonctions x ֏ Ψ 2L ( x ) et x ֏ V2L ( x ) impaires et 2L-périodiques, dont les restrictions
à [0,L ] sont respectivement x ֏ Ψ( x ) et x ֏ V ( x ) . Représentons x ֏ Ψ 2L ( x ) :

Le calcul des coefficients an , qui correspondent aux termes en sinus, est le


L L
2  nπ  2  nπ 
suivant : an =
2L  Ψ 2L ( x ) sin 

��� �  L 
x  dx =
L 
Ψ 2L ( x )sin  x  dx . Sur [0,L ] ,
 L 
x =−L impaire ����� x =0
impaire
�������� �
paire

 am
 L x pour [0,L / m ]
Ψ 2L ( x ) = Ψ ( x ) =  est une fonction affine par morceaux
 − am ( x − L ) pour [ L / m, L ]
 ( m − 1)L

632
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 633

 L 
2  nπ  
m L
am  nπ  am
et an = 
L  L
x sin  x  dx −
 L  
( m − 1)L
( x − L )sin  x  dx  . On trouve, après
 L  
x =0 L
 x=
m 

2am 2  nπ 
intégration par parties : an = sin   . D’autre part, la vitesse initiale de la
2 2
(m − 1)n π m
corde étant nulle, la fonction V2L ( x ) est la fonction nulle : bn = 0 ∀n .
On connaît désormais la solution du problème, vérifiant l’équation d’onde, les
2am2

1  nπ   nπ   nπc 
C.A.L et les C.I : ψ( x, t ) =
(m − 1)π2
 n2 sin  m  sin  L x  cos 
  L 
t .
n =1

3.5 Application à la corde de guitare 


La hauteur d’un son est sa fréquence fondamen-
c
tale f1 = . Deux instruments différents peuvent jouer
2L
des sons correspondant à la même hauteur. En re-
vanche, le timbre du son qu’ils produisent est différent
car le timbre correspond au spectre du son émis. Pour
des instruments à corde, ce timbre dépend, comme on
vient de le voir, de la manière dont la corde est excitée
(corde pincée pour la guitare, frappée pour le piano…)
mais aussi des interactions entre les cordes via le che-
valet et la table d’harmonie, de la caisse de résonance,
des micros pour une guitare électrique, etc.
Dans le cas d’une corde de guitare, la hauteur
c 1 T0
f1 = = dépend de trois paramètres : la tension T0 de la corde, sa longueur
2L 2L µ
à vide L et sa masse linéique µ.
— Pour une corde donnée (L et µ fixés), on accorde en tournant la clé, ce qui tend
plus ou moins la corde (plus T0 est grand, plus la note est aigue).
— Les six cordes ont la même longueur à vide. Pour que les tensions permettant de
les accorder ne varient pas trop (et ne dépassent pas une valeur trop importante), la
masse linéique augmente de la corde n°1 vers la corde n°6, donc la hauteur diminue.
Pour cela, on joue sur le matériau (acier, nickel, chrome, nylon…) dont sont faites les
cordes, et sur leur section. On obtient, pour un accordage standard, les fréquences et
notes suivantes pour les 6 cordes :

n° corde 1 2 3 4 5 6
f1 (Hz) 329,6 246,9 196,0 146,8 110,0 82,4
note mi3 si2 sol2 ré2 la1 mi1

633
634 Partie VII.  Physique des ondes

— Une fois la corde de guitare accordée (T0 et µ sont fixés), on joue en appuyant la
corde sur une frette (la longueur L n’est plus la longueur à vide, mais la longueur de la
corde entre le chevalet et la frette sur laquelle on appuie), et en pinçant ou frottant la
partie utile de la corde. Plus L est petite, plus la note est aigue.
Lorsqu’on joue une note d’une certaine hauteur, on obtient la même note en
jouant la fréquence double. Ces deux notes sont séparées d’une octave (une octave
correspond à une multiplication par 2, là où une décade correspond à une multiplica-
tion par 10). Par exemple, le la1 de la première octave correspond à une fréquence de
110,0 Hz, le la2 de la deuxième octave à 220,0 Hz, le la3 à 440,0 Hz…
Dans la gamme tempérée, chaque octave est elle-même séparée en douze
demi-tons régulièrement espacés, c’est-à-dire qu’on passe d’une note à la suivante en
multipliant sa fréquence par 21/12 . On donne un nom à seulement certaines de ces
notes (do, ré, mi, fa, sol, la, si). Le symbole dièse (#) appliqué à une note permet de
passer au demi-ton suivant ; le symbole bémol (⋎) appliqué à une note permet de pas-
ser au demi-ton précédent. Par exemple, pour la première octave :

note do do# ré ré# mi fa fa# sol sol# la la# si


ou : ré⋎⋎ mi⋎⋎ sol⋎⋎ la⋎⋎ si⋎⋎
f (Hz) 65,4 69,3 73,4 77,8 82,4 87,3 92,5 98,0 103,8 110,0 116,5 123,5

Pour la guitare, on dispose donc les frettes à une distance du chevalet qui suit
la progression en 21/12 .

Ainsi, si L est la longueur à vide de la corde i, correspondant à une fréquence


1 T0
fi ,0 = , la distance entre le chevalet et la frette d’indice p ∈ a0, 12 b est L / 2 p /12
2L µ
2 p /12 T0
et donc la fréquence jouée est fi , p = = 2p /12 fi ,0 : on joue p demi-tons au-
2L µ
dessus de la fréquence à vide, donc 12 frettes permettent de couvrir une octave.
Les frettes supplémentaires reprennent les divisions par 21/12 , 22/12 , 23/12 ,
etc. de la longueur L / 2 , et permettent de jouer des notes de l’octave suivante. Par
exemple, la corde 1 à vide permet de jouer un mi (de la troisième octave). En posant
le doigt dans la case entre les frettes 2 et 3 de façon à appuyer la corde sur la frette 3,
on joue le sol de la même octave (3 demi-tons au-dessus).

634
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 635

On peut remarquer que 21/12 étant irrationnel, les rapports de fréquences pour
les notes de la gamme tempérée ne sont pas des rapports d’entiers (sauf quand ce
rapport vaut 2). Dans le spectre d’une note, les fréquences des harmoniques sont des
multiples de la fréquence fondamentale, et peuvent différer sensiblement de la fré-
quence des notes de la gamme. Prenons l’exemple d’un do1 de fréquence fondamen-
tale f0 . Le rapport de fréquence f / f0 vaut un entier n pour l’harmonique de rang n. Si
ce rapport était une note de la gamme tempérée, il existerait un entier p tel que :
n = 2p /12 ⇔ p = 12log2 n . Calculons pour n ∈ a1,8 b la valeur de 12log2 n et compa-
rons-la à la note correspondant à l’entier p le plus proche :

n 2 3 4 5 6 7 8
12log2 n 12 19,02 24 27,86 31,02 33,69 36

p 12 = 19 = 24 = 2×12 28 = 2×12 31 = 34 = 2×12 36 =


1×12 1×12 + 7 +4 2×12 + 7 + 10 3×12
note do2 sol2 do3 mi3 sol3 la3# do4

L’harmonique de rang 5 est légèrement dissonant, mais c’est très peu percep-
tible. En revanche, l’harmonique de rang 7 s’écarte fortement du la3#, ce qui est désa-
gréable pour une oreille habituée à la gamme tempérée.
Dans le cas de la guitare, l’amplitude des harmoniques décroît fortement avec
 nπ 
1
leur rang n. Nous avons en effet montré cn ∝ sin   pour une corde pincée de
2
n m
profil triangulaire. L’harmonique de rang 7 n’est pas gênant. En revanche, une corde
de piano est frappée par un petit marteau, ce qui donne un profil de corde plus proche
de créneaux : on montre que l’amplitude des harmoniques est approximativement
1  nπ 
cn ∝ sin   si le marteau frappe le point d’abscisse L / m . Le poids de l’harmo-
n m
nique de rang 7 est plus important que pour la guitare. On supprime cet harmonique
dissonant en plaçant le point d’impact du marteau à l’abscisse L / 7 . On a alors
1  7π 
c7 ∝ sin   = 0 .
7 7 

3.6 Régime sinusoïdal forcé / Corde de Melde


Une corde de longueur
L est fixée sur l’axe Ox à son
extrémité x = L . Un vibreur
impose à l’extrémité x = 0 un
petit déplacement d’amplitude
ψ0 << L : ψ( x = 0, t ) = ψ 0 cos( ωt ) .
ψ( x, t ) doit donc vérifier :

635
636 Partie VII.  Physique des ondes

∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ
— L’équation locale de propagation = .
∂x 2 c 2 ∂t 2
— La C.A.L 1 : ψ( x = L, t ) = 0 ∀t .
— La C.A.L 2 : ψ( x = 0, t ) = ψ 0 cos( ωt ) ∀t .
ω
La solution d’onde stationnaire ψ( x, t ) = A sin [ k ( x − L )] cos( ωt + ϕ) , avec k =
c
, vérifie l’équation d’onde et la C.A.L 1, ω étant la pulsation imposée par le vibreur.
Pour vérifier aussi la C.A.L 2, il faut ψ( x = 0, t ) = − A sin( kL )cos( ωt + ϕ) = ψ0 cos( ωt ) ∀t
. On peut prendre ϕ = 0 , et alors A = −ψ 0 / sin(kL ) .
Remarquons qu’il est inutile de quantifier ϕ en écrivant ϕ = m π , avec m ∈ N .
En effet, soit on choisit m pair, et alors A = −ψ 0 / sin(kL ) , soit on choisit m impair et
alors A = ψ0 / sin(kL ) . La solution obtenue dans les deux cas est la même :
ψ0 ψ0
ψ( x , t ) = − sin [ k ( x − L )] cos( ωt ) = sin [ k ( x − L ) + π] cos( ωt ) .
sin( kL ) sin( kL )
 
m pair m impair

Il est en revanche impératif d’introduire un nombre quantique lorsqu’on déter-


mine les solutions ψ( x, t ) de l’équation de d’Alembert pour une corde attachée à ses
deux extrémités. En effet, les solutions correspondant à deux valeurs différentes du
nombre quantique sont différentes. On rappelle que les C.A.L entraînent dans ce cas :
sin(kL) = 0 ⇔ kL = nπ , n ∈ N∗ , et que les solutions obtenues sont les différents modes
 nπ   nπc 
propres de vibration : ψ n ( x, t ) = ψ0n sin  x  cos  t + ϕn  .
 L   L 
Revenons à la solution trouvée dans le cas du régime sinusoïdal forcé imposé
par le vibreur :

ψ0 ψ0
ψ( x, t ) = − sin [ k ( x − L)] cos(ωt ) , dont l’amplitude A = devient infinie
sin(kL ) sin(kL)
nπ nπc
pour sin(kL) = 0 ⇔ k = kn = ⇔ ω = ωn = .
L L
Il y a résonance d’amplitude lorsque la fréquence du vibreur est égale à l’une
des fréquences propres de la corde attachée à ses deux extrémités.

nc
En réalité, lorsque f = fn = , la raideur de la corde, qui a été négligée pour
2L
de faibles perturbations, ainsi que les phénomènes dissipatifs (frottements…), inter-
viennent, et limitent l’amplitude de la vibration à une valeur A finie, mais très grande
devant ψ0 , si bien que l’extrémité x = 0 peut être confondue avec un nœud de vibra-
tion. La corde de Melde permet donc de visualiser les modes propres de vibration. En
pratique, on place une poulie en l’extrémité x = L . La corde passe dans la gorge de la

636
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 637

poulie, et on y attache une masse m, ce qui permet d’imposer une tension réglable
n T0
T0 = mg . On peut alors vérifier expérimentalement la loi fn = , où n est le
2L µ
nombre de fuseaux qu’on observe à la résonance.

3.7 Autre exemple de C.A.L : corde lestée en son milieu 


Nous avons vu sur l’exemple de la corde attachée à ses deux extrémités que
les pulsations propres dépendent des C.A.L.
Prenons un autre exemple : celui où on
place une masse ponctuelle M au milieu d’une
corde de longueur 2L attachée à ses deux extré-
mités.
La masse étant ponctuelle, elle ne modifie par l’équation locale régissant la vi-
∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ T0
bration ψ( x, t ) , 2
= 2 2
, avec c = . Cependant, elle rajoute des C.A.L en
∂x c ∂t µ
x = L , ce qui entraîne que la solution prend des formes différentes selon l’intervalle :
ψ1( x, t ) pour 0 ≤ x < L , et ψ 2 ( x, t ) pour L < x ≤ 2L . Afin de vérifier les C.A.L, on
cherche ψ1( x, t ) et ψ 2 ( x, t ) sous la forme d’ondes stationnaires de pulsation ω, et on
pose k = ω / c .
∂ 2ψ1 1 ∂ 2ψ1
— ψ1( x, t ) = Y1 sin( kx )cos( ωt ) vérifie = , et ψ1(0, t ) = 0 ∀t .
∂x 2 c 2 ∂t 2
∂ 2ψ1 1 ∂ 2ψ1
— ψ 2 ( x, t ) = Y2 sin [ k (2L − x )] cos( ωt + ϕ) vérifie = , et ψ 2 (2L, t ) = 0 ∀t .
∂x 2 c 2 ∂t 2
Il reste à vérifier les C.A.L en x = L :
G
— Continuité du déplacement. Si la masse ponctuelle se déplace de y (t )ey lors de la

perturbation, on a ψ1(L− , t ) = ψ 2 (L+ , t ) = y (t ) ∀t , ce qui entraîne :


Y1 sin( kL )cos( ωt ) = Y2 sin( kL )cos( ωt + ϕ) ∀t . On peut imposer ϕ = 0 . Y2 est alors lié
à Y1 par la relation Y1 sin(kL ) = Y2 sin(kL ) (1) .
— La présence de la masse implique un cou-
plage entre les tensions de la corde en x = L− et
en x = L+ , via le P.F.D appliqué à la masse
ponctuelle dans le référentiel du laboratoire sup-
posé galiléen :
d2 y
M 2
= T0 ⋅ θ2 (L+ , t ) − T0 ⋅ θ1(L− , t ) . Cette équa-
dt
tion est établie avec les hypothèses du 1.1 : calculs à l’ordre 1 en ψ et θ, poids négligé
devant les forces de tension (au repos la corde est droite).

637
638 Partie VII.  Physique des ondes

∂ψ 2 + ∂ψ1 −
On a y (t ) = Y1 sin( kL )cos( ωt ) , θ2 (L+ , t ) = (L , t ) et θ1(L− , t ) = (L , t ) , d’où
∂x ∂x
−M ω2Y1 sin(kL )cos( ωt ) = T0 [ −kY2 cos( kL ) − kY1 cos( kL )] cos( ωt ) ∀t , soit :

M ω2Y1 sin(kL ) = kT0 [Y1 + Y2 ] cos( kL ) (2) . Il reste à déterminer les valeurs de ω compa-
tibles avec (1) et (2). Deux cas se présentent :
nπ λ
(i) sin(kL) = 0 ⇔ kL = nπ , n ∈ N∗ . (1) est vérifiée, et on a alors k = ⇔ L = n et
L 2
nπc
ω= . Dans ce cas, y (t ) = 0 ∀t : la masse ponctuelle M est immobile. Tout se
L
passe comme si chaque demi-corde de longueur L était attachée à ses deux extrémi-
tés ( x = 0 et x = L pour la demi-corde de gauche ; x = L et x = 2L pour la demi-
nπc
corde de droite). On retrouve donc les pulsations propres ω = . L’équation (2) four-
L
nit Y2 = −Y1 , d’où ψ 2 (L + δ, t ) = −Y1 sin [ k (L − δ )] cos( ωt ) = −ψ1(L − δ, t ) . La corde est
donc symétrique par rapport au nœud en x = L où se trouve la masse M. Un tel mode
est appelé mode antisymétrique.
(ii) sin(kL) ≠ 0 , alors (1) implique Y2 = Y1 , d’où :
ψ 2 (L + δ, t ) = Y1 sin [ k (L − δ )] cos( ωt ) = ψ1(L − δ, t ) . La corde est donc symétrique par
rapport au plan x = L . Un tel mode est appelé mode symétrique. Les pulsations véri-
2kT0  ωL  2T0
fient (2) : tan(kL) = 2
⇔ tan  = . Comme T0 = µc 2 , on obtient, en posant
Mω  c  M ωc
 ωL  2µc 2µLc m c
m = 2µL (masse totale de la corde) : tan  = = = . Si on pose :
 c  M ω M ωL M ωL
ωL m 1
X= , X obéit à tan X = ,
c M X
équation qui admet des solutions
dénombrables, qu’on peut détermi-
ner graphiquement en traçant les
courbes de X ֏ tan X et :
m 1
X֏ . On constate ainsi que
M X
X p ∈ ] ( p − 1)π, pπ[ , avec p ∈ N ∗ , et
les pulsations quantifiées sont :
ω′p = X p c / L . On a X p ∼ ( p − 1)π
p →∞
πc
et ω′p ∼ ( p − 1) : les pulsations
p →∞ L
des modes propres symétriques
tendent vers celles des modes propres antisymétriques.

638
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 639

4. PROPAGATION NON DISPERSIVE LE LONG D’UN


CÂBLE COAXIAL
4.1 Le câble coaxial

Le câble contient un conducteur central cylindrique de rayon a (« l’âme »), d’axe


Ox, et un conducteur périphérique coaxial au premier (« tresse » ou « blindage »), de
rayon intérieur b. L’espace entre les deux conducteurs est rempli d’un matériau dié-
lectrique, c’est-à-dire isolant, par exemple du polyéthylène de permittivité relative
εr = 2,25 . Le tout est protégé par une gaine en plastique. Comme nous le verrons
dans le chapitre sur les ondes électromagnétiques dans le vide, le câble constitue un
guide d’onde : une onde électromagnétique se propage le long du câble, dans le dié-
lectrique, par réflexions successives sur l’âme et la tresse. Il y a plusieurs modes de
propagation, c’est-à-dire différentes struc-
tures pour les ondes électromagnétiques
solutions de l’équation d’onde dans le dié-
lectrique, et vérifiant les C.A.L imposées
par la présence des conducteurs. Pour
des fréquences suffisamment faibles, il
n’existe qu’un mode pour lequel nous
montrerons qu’un élément de câble de longueur dx est équivalent au circuit ci-dessus.

dL
Λ= est l’inductance du câble par unité de longueur (en H ⋅ m-1 ).
dx
dC
Γ= est la capacité du câble par unité de longueur (en F ⋅ m-1 ).
dx

639
640 Partie VII.  Physique des ondes

4.2 Équations de couplage et équation d’onde


En écrivant la loi des nœuds et la loi des mailles pour le circuit équivalent à une
longueur dx de câble, on obtient :
∂u ∂i ∂u
( x + dx, t ) + Γdx ( x + dx, t ) 
— Loi des nœuds i ( x, t ) = i�� = −Γ .
��� ∂t ∂x ∂t
∂i ��� ����� �
i ( x,t ) + dx ∂u
∂x Γdx ( x,t ) à l'ordre 1 en dx
∂t
∂i ∂u ∂i
— Loi des mailles u( x, t ) = u( x + dx, t ) + Λdx ( x, t )  = −Λ .
����� ∂t ∂x ∂t
∂u
u ( x,t ) + dx
∂x

 ∂i ∂u
 ∂x = −Γ ∂t (1)
On obtient donc deux relations de couplage entre u et i :  , qu’on
 ∂u = −Λ ∂i (2)
 ∂x ∂t
peut découpler à l’aide des combinaisons suivantes :
∂(2) ∂(1) ∂ 2u ∂ 2i ∂ 2i ∂ 2u ∂ 2u ∂ 2u
— −Λ  2 −Λ = −Λ + ΛΓ 2 , soit 2
= ΛΓ 2 .
∂x ∂t ∂x ∂x∂t ∂x∂t ∂t ∂x ∂t
∂(1) ∂(2) ∂ 2i ∂ 2u ∂ 2u ∂ 2i ∂ 2i ∂ 2i
— −Γ  2 −Γ = −Γ + ΛΓ 2 , soit 2
= ΛΓ 2 .
∂x ∂t ∂x ∂x ∂t ∂x ∂t ∂t ∂x ∂t

s( x, t ) = u( x, t ) ou i ( x, t ) vérifie pour le mode de propagation étudié l’équation


∂ 2s 1 ∂ 2s 1
d’onde de d’Alembert 1D : 2
= 2 2
, avec c = célérité des ondes électro-
∂x c ∂t ΛΓ
magnétiques dans le diélectrique du câble coaxial.

Nous verrons que dans le vide, la célérité des ondes électromagnétiques est
aussi c0 = 1/ ε0µ0 ≃ 3,00 ⋅ 108 m ⋅ s-1 . Dans un diélectrique, il suffit de multiplier ε0

par εr : c = 1/ εr ε0µ0 = c0 / εr ≃ 2,00 ⋅ 108 m ⋅ s-1 pour εr = 2,25 .

4.3 Impédance caractéristique du câble


u et i vérifiant l’équation de d’Alembert, il existe des solutions d’onde plane pro-
gressive (O.P.P). Lorsqu’une O.P.P se propage le long du câble dans le sens des x
u(x,t ) = Fu ( t − x / c )
croissants, tension et intensité se mettent sous la forme  . Fu et
i (x,t ) = Fi ( t − x / c )
Fi sont des fonctions de la seule variable θ( x, t ) = t − x / c .
∂i dFi ∂θ 1 dFi ∂u dFu ∂θ dFu
Ainsi = ⋅ =− , et = ⋅ = . La relation de couplage
∂x dθ ∂x c dθ ∂t d θ ∂t dθ
∂i ∂u 1 dFi dF 1
(1) : = −Γ , s’écrit donc − = −Γ u . On obtient Fu = Fi + Cte en
∂x ∂t c dθ dθ Γc

640
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 641

intégrant, soit u = Zc ⋅ i + Cte .


La constante n’est pas forcément nulle, car on peut imposer une tension cons-
tante u = Cte = E entre la tresse et l’âme alors que le câble ne débite aucun courant.
Si c’est le cas, on peut étudier à part le régime stationnaire u = Cte et le régime ondu-
latoire u = Zc ⋅ i , puis les ajouter, car les équations sont linéaires (c’est le théorème de
superposition). On n’étudie ici que des solutions ondulatoires, de valeur moyenne
nulle, pour lesquelles Cte = 0 .

Pour une O.P.P qui se propage dans le sens des x croissants, u et i sont pro-
1 Λ
portionnelles : u = Zc ⋅ i , où Zc = = est appelée impédance caractéristique du
Γc Γ
câble (en ohm Ω).

Puisqu’on a utilisé l’équation (1) et l’équation de d’Alembert déduite de (1) et (2)


(en écrivant qu’il existe des solutions d’O.P.P se propageant à la célérité c), l’équation
(2) n’amène aucune information supplémentaire. On peut vérifier qu’on retrouve
u = Zc ⋅ i en utilisant (2) au lieu de (1).
Pour une O.P.P se propageant dans le sens des x décroissants, tension et in-
u(x,t ) = Gu ( t + x / c )
tensité se mettent sous la forme  . Posons ϕ = t + x / c = ϕ( x, t ) .
i (x,t ) = Gi ( t + x / c )
∂i ∂u 1 dGi dG
La relation de couplage (1) : = −Γ , s’écrit donc = −Γ u , qui s’intègre
∂x ∂t c dϕ dϕ
1
en Gu = − Gi .
Γc

Pour une O.P.P qui se propage dans le sens des x décroissants, u = −Zc ⋅ i .

Les câbles sont fabriqués de façon à ce que leur impédance caractéristique


prenne des valeurs standardisées : 50 Ω, 75 Ω…

4.4 Réflexion en bout de ligne, cas d’une charge résistive


Prenons un câble de longueur L qui correspond à des abscisses négatives, et
dont l’extrémité en x = 0 débite sur une charge d’impédance Z ∈ R (résistance).

641
642 Partie VII.  Physique des ondes

La solution la plus générale correspond à la somme :


u(x,t ) = Fu ( t − x / c ) = Zc Fi ( t − x / c )
— D’une O.P.P  qui se propage dans le sens des
i (x,t ) = Fi ( t − x / c )
x croissants (incidente).
u(x,t ) = Gu ( t + x / c ) = −ZcGi ( t + x / c )
— D’une O.P.P  qui se propage dans le sens
i (x,t ) = Gi ( t + x / c )
des x décroissants (réfléchie).
u(x,t ) = Zc Fi ( t − x / c ) − Gi ( t + x / c ) 
On a donc  . Cette onde vérifie les équa-
i (x,t ) = Fi ( t − x / c ) + Gi ( t + x / c )
tions locales du problème (les 2 relations de couplage). Il reste à vérifier la C.A.L en
x = 0 due à la présence de la charge résistive : u(0,t ) = Z ⋅ i (0,t ) ∀t , ce qui entraîne
Zc [Fi (t ) − Gi (t )] = Z [Fi (t ) + Gi (t )] . On a donc :

Gi (t ) Zc − Z
ρi = = . Ce coefficient, qui est le rapport entre l’intensité réfléchie et l’in-
Fi (t ) Zc + Z
tensité incidente, est une constante appelée coefficient de réflexion en intensité. Le
G (t ) −ZcGi (t ) Z − Zc
coefficient de réflexion en tension vaut ρu = u = = −ρi = .
Fu (t ) Zc Fi (t ) Zc + Z

Pour étudier expérimentalement la réflexion en


x = 0 , un G.B.F, placé en entrée x = −L du câble, dé-
livre un peigne d’impulsions (une impulsion positive
de courte durée toutes les périodes T), et on observe
la tension en entrée du câble u( − L,t ) à l’oscillos-
cope. Considérons trois cas particuliers de résistance de charge.
— Z = 0  ρu = −1 . La sortie du câble étant court-cir-
cuitée, on a en effet u(0,t ) = 0 ∀t , soit un nœud de
tension en x = 0 . L’onde de tension réfléchie est né-
gative, et revient en entrée du câble avec un retard
∆ t par rapport à l’onde incidente. De la mesure de
∆ t on déduit la célérité c = 2L / ∆t de l’onde dans le
câble, puisque l’onde a parcouru pendant cette durée
une distance 2L.
— Z = ∞  ρu = +1. La sortie du câble étant ouverte,
on a en effet i (0,t ) = 0 ∀t , soit un nœud d’intensité
en x = 0 . L’onde de tension réfléchie est positive, et
revient en entrée du câble avec un retard ∆ t par rap-
port à l’onde incidente. On mesure c = 2L / ∆t .

642
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 643

— Z = Zc  ρu = ρi = 0 . Il n’y a pas d’onde réfléchie.


En effet, en bout de câble, on a la même relation,
u (0,t ) = Zc ⋅ i (0,t ) , que pour une O.P.P qui se pro-
page dans le sens des x croissants le long d’un câble
infini. L’O.P.P incidente seule est solution du problème (elle vérifie les relations de
couplage et la C.A.L).

Pour Z = Zc , il n’y a pas d’onde réfléchie : ρu = ρi = 0 . On parle alors d’adap-


tation d’impédance : toute la puissance incidente est transmise à la charge.

En pratique, les G.B.F possèdent une résistance interne de 50 Ω. Lorsqu’on les


utilise avec un câble coaxial d’impédance caractéristique Zc = 50 Ω , on évite que les
ondes que transmet le câble ne se réfléchissent sur le G.B.F et on élimine ainsi des
réflexions parasites.
Z − Zc
À part ces trois cas particuliers, ρu = est compris entre −1 et 1. Dans le
Zc + Z
cas d’une onde incidente harmonique de pulsation ω, la résultante des ondes de ten-
 
sion incidente et réfléchie est u ( x, t ) = u0 cos( ωt − kx ) + ρu cos( ωt + kx ) .
  
 f ( x ,t ) g ( x ,t ) 
— f et g sont en phase à tout instant en tout point d’abscisse x telle que :
ωt − kx = ωt + kx + 2nπ ⇔ kx = −nπ ⇔ x = xn = −nλ / 2 , avec n ∈ N puisque x ≤ 0 . En
ces points, u( xn , t ) = u0 [cos( ωt + nπ) + ρu cos( ωt − nπ)] = u0 ( −1)n [1 + ρu ] cos( ωt ) .
Si ρu > 0 , les ondes de tension incidente et réfléchie sont en phase pour :
x = − n λ / 2 , qui sont les abscisses des ventres de tension. Si au contraire ρu < 0 , les
ondes sont en opposition de phase pour x = − n λ / 2 , qui sont les abscisses des nœuds
de tension.
— f et g sont en opposition de phase à tout instant en tout point d’abscisse x telle que :
ωt − kx = ωt + kx + (2m + 1)π ⇔ kx = − (2m + 1)π / 2 ⇔ x = xm = − (2m + 1)λ / 4 , m ∈ N .
En ces points, u( xm , t ) = u0 cos ( ωt + (2m + 1)π / 2 ) + ρu cos ( ωt − (2m + 1)π / 2 )  soit :

u( xm , t ) = u0 ( −1)m +1 [1 − ρu ] sin(ωt ) .
Si ρu > 0 , les ondes de tension incidente et réfléchie sont en opposition de
phase pour x = − (2m + 1)λ / 4 , qui sont les abscisses des nœuds de tension. Si au
contraire ρu < 0 , les ondes sont en phase pour x = − (2m + 1)λ / 4 , qui sont les abs-
cisses des ventres de tension.

L’onde de tension dans le câble est le résultat d’interférences entre l’onde inci-
dente et l’onde réfléchie.

643
644 Partie VII.  Physique des ondes

Prenons par exemple ρu ≤ 0 :


— Pour ρu = 0 ⇔ Z = Zc , il n’y a pas d’onde réfléchie donc pas d’interférences. L’onde
dans le câble est simplement l’onde incidente, purement progressive. Il n’y a pas de
nœuds ni de ventres : l’amplitude de la tension vaut u0 partout.
— Pour −1 < ρu < 0 ⇔ 0 < Z < Zc , l’onde réfléchie interfère destructivement avec
l’onde incidente pour x = − n λ / 2 , mais son amplitude est inférieure à celle de l’onde
incidente. Ces positions sont des nœuds de tension dans le sens où l’amplitude de la
vibration est minimale en ces points, mais elle n’y est pas nulle. L’onde dans le câble
n’est pas purement progressive, ni stationnaire.
— Pour ρu = −1 ⇔ Z = 0 , l’onde réfléchie a même amplitude que l’onde incidente. On
a en x = − n λ / 2 des « vrais » nœuds de tension où l’onde réfléchie annule l’onde in-
cidente. L’onde dans le câble est alors stationnaire. L’amplitude des ventres de tension
situés en x = xm = − (2m + 1)λ / 4 vaut 2u0 .
Les ondes de tension sont représentées ci-dessous à différents instants pour
plusieurs valeurs de ρu ≤ 0 .

4.5 Coefficient de réflexion en puissance pour le câble coaxial avec une


charge linéaire quelconque 
On reprend le câble du 4.4, avec une charge linéaire quelconque d’impédance
Z ∈C en x = 0 , et on mène l’étude en régime sinusoïdal forcé (r.s.f). L’onde de cou-
rant prend la forme i = I + e j ( ωt − kx ) + I − e j ( ωt + kx ) avec I + réel. L’onde de tension corres-
pondante est u = ZcI +e j ( ωt −kx ) − ZcI −e j ( ωt + kx ) . La C.A.L en x = 0 , u(0, t ) = Zi (0, t ) ∀t

644
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 645

I− Zc − Z −ZcI −
fournit Zc I + − Zc I − = Z (I + + I − )  ρi = = , et ρu = = −ρi . Le coefficient
I+ Zc + Z ZcI +

de réflexion en intensité en x = 0 peut être complexe : on écrit ρi = ρi e j ϕ . Nous al-


lons maintenant effectuer un bilan de puissance. Il faut pour cela impérativement re-
venir à la notation réelle.
i = I + cos(ωt − kx )
Pour l’onde incidente,  . La partie x ′ > x du câble reçoit
+
u = ZcI cos(ωt − kx )
de la part de la partie x ′ < x la puissance instantanée p + = ui = ZcI +2 cos2 (ωt − kx ) , et
1
la puissance moyenne P + = p + = ZcI + 2 > 0 .
2
i = ρi I + cos(ωt + kx + ϕ)
Pour l’onde réfléchie,  . La partie x ′ < x du câble
+
u = − ρi Zc I cos(ωt + kx + ϕ)
2
reçoit de la part de la partie x ′ > x : p − = −ui = ρi Zc I + 2 cos2 ( ωt + kx + ϕ) , soit, en
1 2
moyenne : P − = p − = ρi Zc I + 2 > 0 (elle se propage dans le sens des x décrois-
2
2
sants). On a donc un coefficient de réflexion en puissance R = P − / P + = ρi .
En écrivant l’impédance de la charge sous la forme Z = A + jB , avec :
2
Z − A − jB (Zc − A)2 + B 2
( A, B ) ∈ R , on obtient R = c
2
= ≤ 1.
Zc + A + jB (Zc + A)2 + B 2

Si la charge est un condensateur, ou une bobine idéale, Z = jB : A = 0 . On en


déduit R = 1. En effet, comme aucune puissance moyenne n’est absorbée par ces di-
pôles, la puissance est totalement réfléchie.

Dans ce cas, les signaux réfléchis ont la même amplitude que les signaux inci-
dents. En revanche, ils subissent un déphasage en x = 0 , comme on peut le voir dans
1 j
Zc − Zc +
le cas d’un condensateur : ρi =
jCω Cω  ϕ(ω) = 2arctan  1  .
1
=
j  
Zc + Zc −  ZcCω 
jCω Cω
L’onde réfléchie et l’onde incidente ayant même amplitude ( ρi = 1 ), l’onde ré-
sultante est stationnaire. Elle présente des nœuds de tension là où les interférences
sont destructives, c’est-à-dire en x tel que :
ϕ
 ϕ j
u = Zc I + e j ωt e − jkx − e j ( kx +ϕ)  = 0 ∀t ⇔ e − jkx − e j ( kx +ϕ) = 0 ⇔ −2 je
sin  kx +  = 0 . 2
   2
Par rapport au cas ϕ = 0 correspondant à Z = 0 (nœud de tension en x = 0 ),

645
646 Partie VII.  Physique des ondes

ϕ ϕ(ω)c
les nœuds sont décalés de ∆x = − =− (valeur qui dépend de ω).
2k 2ω
Enfin, si A ≠ 0 , R < 1. L’onde réfléchie et l’onde incidente n’ayant pas la même
amplitude, l’onde résultante n’est plus stationnaire : là où les ondes interfèrent des-
tructivement, l’amplitude est encore minimale mais non nulle. L’onde résultante est
partiellement progressive (purement progressive quand R → 0 , purement stationnaire
quand R → 1 ).

5. PROPAGATION NON DISPERSIVE LE LONG


D’UNE CHAÎNE D’OSCILLATEURS 
5.1 Équations de couplage
On considère une chaîne infinie linéaire de points matériels de masse m liés
par des ressorts de raideur K. La chaîne est portée par l’axe Ox. À l’équilibre, les
masses occupent les positions xn = na , avec n ∈ Z , où a est la longueur à vide des
ressorts. En présence d’une perturbation, les masses se déplacent. La nième masse se
déplace par rapport à sa position d’équilibre de ξn << a . Elle est alors soumise à des
G G G G
forces de tension Tn −1/ n = Tn −1/ n ex et Tn +1/ n = Tn +1/ n ex de la part des ressorts la liant
aux masses n − 1 et n + 1 . La force Tn −1/ n est positive si le ressort entre les masses
n − 1 et n est comprimé ( ξn < ξn −1 ), négative s’il est étiré ( ξn > ξn−1 ), donc :
Tn −1/ n = −K (ξn − ξn −1) . De même, on établit que Tn +1/ n = −K (ξn − ξn +1) .

En appliquant le P.F.D à la masse « n » dans le référentiel du laboratoire sup-


posé galiléen, et en ne tenant compte que des forces de tension, on obtient, après
G d2ξ
projection sur ex : m 2n = Tn −1/ n + Tn +1/ n = −K (2ξn − ξn −1 − ξn +1) . Cette équation
dt
couple ξn à ξn −1 et ξn +1, ∀n ∈ Z .
Le mécanisme de la propagation d’une onde le long de la chaîne d’oscillateurs
est le suivant : le déplacement de la masse n modifie la tension des ressorts la liant
aux masses voisines n − 1 et n + 1 , ce qui provoque leur déplacement, puis le dépla-
cement des masses n − 2 et n + 2 , etc.

646
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 647

La direction de propagation de l’onde le long de la chaîne est la même que celle


du déplacement des masses : on parle d’onde longitudinale.

5.2 Approximation des milieux continus, équation de d’Alembert


On note ξn = ξ( xn , t ) : une masse, d’abscisse x au repos, se déplace à l’instant
t de ξ( x,t ) du fait de la perturbation.

Plaçons-nous dans l’approximation des milieux continus : ξ( x,t ) varie spatiale-


ment sur une longueur caractéristique très supérieure à a.
On peut alors effectuer un développement limité spatial de ξn −1 et ξn +1 :
∂ξ a2 ∂ 2ξ
ξn −1 = ξ( xn −1, t ) = ξ( xn − a, t ) ≃ ξ( xn , t ) − a ( xn , t ) + ( xn , t ) .
��� ∂x 2 ∂x 2
ξn

∂ξ a2 ∂ 2ξ
ξn +1 = ξ( xn +1, t ) = ξ( xn + a, t ) ≃ ξ( xn , t ) + a ( xn , t ) + ( xn , t ) .
��� ∂x 2 ∂x 2
ξn

d2ξn
En reportant dans l’équation de couplage m = K (ξn −1 + ξn +1 − 2ξn ) , on ob-
dt 2
d2ξn ∂ 2ξ ∂ 2ξ
tient m =m ( xn , t ) = Ka 2 ( xn , t ) .
dt 2 ∂t 2 ∂x 2

Dans l’approximation des milieux continus, la perturbation ξ( x,t ) est régie par
∂ 2ξ 1 ∂ 2ξ K
l’équation de d’Alembert 2
= 2 2
, avec c = a .
∂x c ∂t m

Prenons par exemple une O.P.P.H de longueur d’onde λ. L’approximation des


milieux continus est vérifiée si λ >> a comme sur la figure ci-dessous :

5.3 Application : ondes sonores dans les solides


Le modèle de la chaîne d’oscillateurs s’applique à un solide cristallin. Les points
matériels sont des atomes. Lorsqu’on écarte peu les atomes n et n − 1 de leur position

d’équilibre, on peut linéariser la force Tn −1/ n qu’exerce l’atome n − 1 sur l’atome n en
fonction de l’écart algébrique ξn − ξn −1 par rapport à leur distance à l’équilibre :
� �
Tn −1/ n = −K ( ξn − ξn −1)ex . La vibration longitudinale le long de la chaîne est une onde
sonore.
On peut relier sa célérité c = a K / m de l’onde à des paramètres macrosco-
piques du solide grâce à la loi de Hooke.

647
648 Partie VII.  Physique des ondes

Pour étirer, ou comprimer, de ∆L << L un matériau cylindrique de section S et


de longueur L, il faut exercer une force F dans la direction de l’élongation.
F ∆L
La contrainte σ = est liée à l’élongation relative par la loi de Hooke :
S L
F ∆L
σ= =E , où E est le module d’Young du matériau, homogène à une pression.
S L
Cette loi n’est valable que dans le domaine des faibles déformations.

On retrouve la loi de force linéaire qu’il faut appliquer à l’extrémité d’un ressort
pour l’étirer ou le comprimer de ∆L : F = E S ∆L / L = K 0 ∆L .
On constate que le produit raideur fois longueur est une constante : K 0L = E S
(la raideur K0 d’un ressort est inversement proportionnelle à sa longueur L). Plus E
est grand, plus il faut une grande force pour obtenir une variation de longueur ∆L
donnée, plus le matériau est rigide.
Au niveau microscopique, la raideur est K, et la longueur a, donc Ka = E S . On
en déduit c = aE S / m . Comme aS est le volume d’une portion microscopique de
m
matériau de longueur a et de masse m, le rapport s’identifie à la masse volumique
aS
ρ du matériau.

La célérité des ondes sonores longitudinales dans un solide de masse volu-


E
mique ρ et de module d’Young E vaut c = . Elle est d’autant plus grande que le
ρ
matériau est rigide et peu dense.

Pour de l’acier, on a ρ = 7,85 ⋅ 103 kg ⋅ m -3 et E = 2,10 ⋅ 1011 Pa , ce qui donne


une célérité c ≃ 5,2 km ⋅ s-1 . En réalité, il faut corriger cette formule, du fait que le ma-
tériau se contracte orthogonalement à la force appliquée, en introduisant le coefficient
de Poisson sans dimension qui vaut ν = 0,30 pour l’acier (ce coefficient dépend de la
masse volumique et de la structure cristalline du matériau) :
E (1 − ν )
cl = ≃ 6,0 km ⋅ s-1 .
ρ(1 + ν )(1 − 2ν )
Il existe d’autre part des ondes sonores qui correspondent à une vibration trans-
versale à la direction de propagation de l’onde, appelées ondes de cisaillement, et
E
dont la célérité vaut c t = .
2ρ(1 + ν )

648
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 649

Plus généralement, la loi de Hooke se traduit par une force :


G ∂ξ G
F ( x, t ) = E S ( x, t )ex exercée par la partie x ′ > x du matériau sur la partie x ′ < x , la
∂x
section d’abscisse x au repos étant déplacée d’une petite quantité ξ( x,t ) lors d’une
perturbation. L’application du P.F.D au segment correspondant au repos à l’intervalle
∂ 2ξ ∂ξ ∂ξ ∂ 2ξ
[ x, x + d x ] donne ρS dx = ES ( x + d x, t ) − E S ( x, t ) = E S dx . ξ( x,t ) est
∂t 2 ∂x ∂x ∂x 2
donc régi par l’équation de d’Alembert et on retrouve la célérité c = E / ρ de l’onde
longitudinale.
Dans le cas où le matériau est en équilibre alors qu’on exerce une force F à son
d2ξ dξ ∆L
extrémité, on obtient 2
= 0  ξ( x ) = Ax + B or ξ(0) = 0 et ξ(L) = ∆L : A = =
dx dx L
∆L
et on retrouve l’expression de la force F = E S = K0 ∆L .
L

6. ANALOGIES ENTRE LES PHÉNOMÈNES


VIBRATOIRES / ASPECT ÉNERGÉTIQUE
6.1 Corde vibrante 
Soit Ty ( x, t ) la composante trans-
versale de la force de tension exercée à
l’abscisse x par la partie x ′ > x de la
corde sur la partie x ′ < x . Cette compo-
sante s’écrit Ty ( x, t ) = T0 ⋅ θ( x, t ) , soit :
∂ψ
Ty ( x, t ) = T0 ⋅
( x, t ) dans l’approxima-
∂x
tion des petites perturbations vue au 1.1.

649
650 Partie VII.  Physique des ondes

∂ψ
En introduisant la vitesse transversale de la corde v ( x, t ) = ( x, t ) , le P.F.D
∂t
appliqué à l’élément de corde qui correspond au repos au segment :
∂v ∂T ∂ψ
[ x − dx / 2, x + dx / 2] , fournit µ = y (1) . En dérivant Ty ( x, t ) = T0 ⋅ ( x,t ) par
∂t ∂x ∂x
1 ∂Ty ∂v
rapport au temps, on obtient d’autre part = (2) . En effectuant la combinai-
T0 ∂t ∂x
son v ⋅ (1) + Ty ⋅ (2) , on fait apparaître un bilan local d’énergie :

∂v Ty ∂Ty ∂Ty ∂v ∂ 1 1  ∂
µv + =v + Ty   µv 2 + Ty 2  +  −Ty v  = 0 (3) .
 
∂t T0 ∂t ∂x ∂x ∂t  2 2T0  ∂x
1
Le terme ec = µv 2 correspond à l’énergie cinétique linéique de la corde. En
2
un point d’abscisse x, la puissance instantanée qui traverse la corde dans le sens des
x croissants est le produit de la force transversale −Ty ( x, t ) exercée par la partie x ′ < x
sur la partie x ′ > x par la vitesse transversale v ( x, t ) : p( x, t ) = −Ty ( x, t )v ( x, t ) . Calcu-
lons la puissance reçue par l’élément de corde de longueur dx au repos, entre t et
∂p ∂
t + d t : dp = p ( x − dx / 2, t ) − p ( x + dx / 2, t ) = − dx = Ty v  dx .
∂x ∂x  
Si on note e = ec + ep l’énergie mécanique linéique de la corde, le théorème de
la puissance mécanique appliqué à l’élément de corde s’écrit :
∂e ∂e ∂ ∂ ∂
dx = dp ⇔ = Ty v  ⇔ ec + ep  +  −Ty v  = 0 , ce qui permet d’identifier
∂t ∂t ∂x   ∂t   ∂x  
1
grâce à (3) l’énergie potentielle linéique de la corde ep = Ty 2 .
2T0
L’équation d’onde de d’Alembert s’obtient en combinant les équations de cou-
2
∂ 2v 1 ∂ Ty
plage (1) et (2). Par exemple, en dérivant (2) par rapport à x : = , et (1)
∂x 2 T0 ∂x∂t

∂ 2v ∂ 2Ty ∂ 2v µ ∂ 2v 1 ∂ 2v
par rapport à t : µ = , on obtient = = .
∂t 2 ∂x ∂t ∂x 2 T0 ∂t 2 c 2 ∂t 2
Comme v et Ty vérifient l’équation de d’Alembert, il existe des solutions d’onde
plane progressive (O.P.P) se propageant dans le sens des x croissants :
v (x,t ) = Fv ( t − x / c ) = Fv [ θ( x, t )] dF 1 dFTy
 . (1) s’écrit donc µ v = − , soit, pour les
Ty (x,t ) = FTy ( t − x / c ) = FTy [ θ( x, t )] dθ c dθ

solutions ondulatoires : Ty = −µcv = −Zcv (les constantes d’intégration sont nulles).


On définit ainsi l’impédance caractéristique de la corde Zc = µc . Pour une
O.P.P se propageant dans le sens des x décroissants, on aurait Ty = Zcv .

650
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 651

1 2 1 1 2 2 2 1 2
Pour une O.P.P, ec = µv et ep = Ty 2 = µ c v = µv : il y a équi-
2 2T0 2T0 2
partition de l’énergie. Pour une onde stationnaire harmonique, par exemple obtenue
en faisant vibrer à la pulsation ω une corde attachée en x = 0 sur l’axe Ox, on a
ψ( x, t ) = ψ 0 sin(kx )cos(ωt ) , avec k = ω / c . Les énergies linéiques sont alors :
2
1 2 1  ∂ψ  1
— ec = µv = µ   = µψ 0 2 ω2 sin2 ( kx )sin2 ( ωt ) .
2 2  ∂t  2
2
1 1  ∂ψ  1
— ep = Ty 2 = 2 2 2 2 2
T0 ⋅ ∂x  = 2T ψ0 T0 k cos (kx )cos (ωt ) , soit, avec k = ω / c
2T0 2T0   0
1
et c 2 = T0 / µ : ep = µψ02ω2 cos2 (kx )cos2 (ωt ) .
2
L’énergie n’est plus équirépartie puisqu’il y a des nœuds de vitesse lorsque
sin(kx ) = 0 (l’énergie en ces points est purement potentielle) et des nœuds de Ty lors-
que cos(kx ) = 0 (l’énergie en ces points est purement cinétique). En prenant la
1 1
moyenne temporelle, on obtient ec = µψ02ω2 sin2 (kx ) et ep = µψ02ω2 cos2 (kx )
4 4
1
donc l’énergie linéique totale moyenne est équirépartie : e = ec + ep = µψ02ω2 .
4

6.2 Câble coaxial 


On peut mener dans le cas du câble coaxial une étude analogue à celle qui
précède sur la corde vibrante. L’élément [ x, x + d x ] de câble possède :
1 1
— Une énergie magnétique dUm = dL ⋅ i 2 ( x, t ) = Λi 2 ( x, t )dx , soit une énergie ma-
2 2
1 2
gnétique linéique um = Λi ( x, t ) .
2
1 1
— Une énergie électrique dUe = dC ⋅ u 2 ( x, t ) = Γu 2 ( x, t )dx , soit une énergie élec-
2 2
1 2
trique linéique ue = Γu ( x, t ) .
2
Cet élément reçoit pendant une puissance p( x, t ) = u( x, t )i ( x, t ) de la part de la
partie gauche du câble ( x ′ < x ), et fournit p( x + dx, t ) = u( x + dx, t )i ( x + dx, t ) à la partie
droite ( x ′ > x + d x ). Le bilan d’énergie pour cet élément s’écrit donc :
∂ ∂p ∂u ∂p
∂t
[um + ue ] dxdt = − ∂x dxdt , soit ∂t + ∂x = 0 (bilan local d’énergie), avec u = ue + uc
et p = ui .
1 Λ 1
Pour une O.P.P, on a u = ± Zc ⋅ i , avec Zc = = , donc um = Λi 2 et
Γc Γ 2

651
652 Partie VII.  Physique des ondes

1 2 1 1
ue = Γu = ΓZc 2i 2 = Λi 2 : il y a équipartition de l’énergie. Pour une onde station-
2 2 2
naire harmonique, par exemple obtenue en ouvrant le câble en x = 0 , et en imposant
une tension sinusoïdale de pulsation ω en entrée, on a : i ( x, t ) = i0 sin(kx )cos(ωt ) ,
i0
avec k = ω / c . On tire l’expression de la tension u ( x, t ) = − cos( kx )sin( ωt ) de la re-
Γc
∂i ∂u
lation de couplage = −Γ (1) , et on en déduit :
∂x ∂t
1 2 1 1
— um = Λi = Λi02 sin2 (kx )cos2 (ωt ) d’où um = Λi02 sin2 (kx ) .
2 2 4
1 2 1 i02 1
— ue = Γu = Γ 2 2 cos2 (kx )sin2 (ωt ) = Λi02 cos2 (kx )sin2 (ωt ) , car ΛΓc 2 = 1 ,
2 2 Γ c 2
1
soit ue = Λi02 cos2 (kx ) .
4
L’énergie n’est plus équirépartie puisqu’il y a des nœuds d’intensité lorsque
sin(kx ) = 0 (l’énergie en ces points est purement électrique) et des nœuds de tension
lorsque cos(kx ) = 0 (l’énergie en ces points est purement magnétique). En revanche,
1
l’énergie linéique totale est en moyenne équirépartie : u = um + ue = Λi02 .
4

6.3 Chaîne d’oscillateurs 


Comme nous l’avons vu au 5.3, la loi de Hooke donne l’expression de la con-
trainte en un point quelconque d’abscisse x d’un matériau cylindrique tracté ou com-
∂ξ
pressé selon l’axe Ox : σ( x, t ) = E ( x, t ) et Tx ( x, t ) = σ( x, t ) S sont respectivement la
∂x
contrainte et la force exercées par la partie x ′ > x sur la partie x ′ < x .
L’analogie avec la corde vibrante est donc immédiate, à ceci près que l’onde
est longitudinale pour la chaîne d’oscillateurs, et pas transversale. Les équations de
∂v ∂Tx 1 ∂Tx ∂v ∂ξ
couplage sont µ = (1) et = (2) , avec v ( x, t ) = ( x, t ) . Les éner-
∂t ∂x E S ∂t ∂x ∂t
1 1
gies cinétique et potentielle linéiques sont donc ec = µv 2 et ep = Tx 2 , la puis-
2 2E S
sance transmise dans le sens des x croissants p( x, t ) = −Tx ( x, t )v ( x, t ) , la célérité de
ES
l’onde c = et impédance de la chaîne Zc = µc .
µ

6.4 Analogies entre phénomènes ondulatoires non dispersifs


Le phénomène de propagation est dû au couplage entre deux signaux, chacun
des signaux étant associé à un type d’énergie du système.

652
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 653

Dans le cas d’une O.P.P, l’énergie instantanée est équirépartie entre les deux
formes.
Ce n’est plus le cas pour une onde plane stationnaire harmonique de pulsation
ω, où il y a des nœuds pour les signaux (les nœuds d’un signal sont les ventres du
signal qui lui est couplé). L’énergie totale reste en moyenne (temporelle) équirépartie.

Les relations de couplage entre les deux signaux étant, pour les ondes planes
∂s ∂s
étudiées, de la forme 1 = K 2 , on a, en un nœud de s1 : s1( x, t ) = 0 ∀t , ce qui
∂t ∂x
∂s1 ∂s2
entraîne ( x, t ) = 0 ∀t . On en déduit ( x, t ) = 0 ∀t : on a à tout instant en ce point
∂t ∂x
un extremum de la courbe d’équation x ֏ s2t ( x ) = s2 ( x, t ) . C’est un ventre de s2 .

6.5 Non-linéarité des grandeurs énergétiques


Les grandeurs énergétiques déjà rencontrées, et celles que nous rencontrerons
dans les prochains chapitres, sont des fonctions quadratiques des signaux (elles sont
proportionnelles au carré des signaux) :
1 1
— ec = µv 2 , ep = Ty 2 et p( x, t ) = −Ty ( x, t )v ( x, t ) pour la corde vibrante.
2 2T0
1 2 1
— um = Λi , ue = Γu 2 et p( x, t ) = u( x, t )i ( x, t ) pour le câble coaxial.
2 2
1 1 � �
— ec = ρ0v 2 , ep = χS p12 et Jac = p1v (cf. « Ondes acoustiques dans les flui-
2 2
des »).
� �
1 2 1 B2 � E ∧B
— ue = ε0E , um = et SP = pour les ondes électromagnétiques.
2 2 µ0 µ0
Si, par exemple, deux ondes ( v1,Ty 1) et ( v 2 ,Ty 2 ) se superposent le long d’une
corde, si les signaux s’ajoutent bien en vertu de la linéarité des équations de couplage :
( v = v1 + v 2 ,Ty = Ty 1 + Ty 2 ), ce n’est pas le cas des grandeurs énergétiques :
1 1 1
— ec = µ(v1 + v 2 )2 = µv12 + µv 22 + µv1v 2 ≠ ec1 + ec2 .
2 2 2 �
��� ��� interférences
ec1 ec2

— p = −(Ty 1 + Ty 2 )(v1 + v 2 ) = −Ty 1v1 −Ty 2v 2 −Ty1v 2 − Ty 2v1 .


��� � ��� � �������
p1 p2 interférences

Ainsi, lorsque les ondes interfèrent, on ne peut pas utiliser le théorème de su-
perposition pour les grandeurs énergétiques.
De même, puisque Re s1(M , t ) ⋅ s2 (M , t ) ≠ Re s1(M , t ) ⋅ Re s2 (M , t ) , il faut re-
venir aux grandeurs réelles avant de leur appliquer des opérateurs énergétiques.

653
654 Partie VII.  Physique des ondes

7. PROPAGATION NON DISPERSIVE À LA SURFACE


D’UNE MEMBRANE CIRCULAIRE 
7.1 Équation d’onde
On considère une membrane circulaire de rayon a, sans raideur, de masse sur-
facique σ constante.
On définit la tension d’une membrane par analogie avec celle d’une corde. Con-
sidérons un segment rectiligne de longueur dℓ autour d’un point M, tracé sur la mem-
brane tendue. Les forces s’exerçant entre deux parties de la membrane de part et
d’autre de ce segment sont égales et opposées, contenues dans le plan tangent à la
membrane au point M, perpendiculaires à la direction du segment, et de valeur
dF = τ0 dℓ . Comme dans le cas de la corde, la grandeur τ0 est, dans le cadre d’une
petite perturbation, une constante indépendante du point envisagé, et également de
l’orientation de la fente.
Le poids est négligeable devant les forces qui s’exercent entre deux moitiés de
la membrane si σπa2g << 2aτ0 , d’où la condition τ0 >> σπag / 2 : la membrane doit
être suffisamment tendue pour être plane au repos.
Si, au repos, la membrane est située dans le plan xOy, lors d’une perturbation,
un point de la membrane ne peut se déplacer que selon la direction Oz (vibrations
transversales).
On considère un élément infinitésimal de la membrane, de dimensions au repos
dx et dy, écarté de sa position d’équilibre selon Oz d’une quantité ψ( x, y, t ) .

Les forces de tension subies par un élément de membrane sont deux forces

s’exerçant sur les bords de l’élément de membrane colinéaires à e y , d’abscisses res-
dx dx
pectives x + et x − , et deux forces s’exerçant sur les bords de l’élément de
2 2

654
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 655

G dy dy
membrane colinéaires à ex , d’ordonnées respectives y + et y − .
2 2

Les calculs sont effectués à l’ordre 1 en α et ψ.


G dx
La projection sur ez de la force s’exerçant sur le bord en x + est alors :
2
dx dx ∂ψ
dFz ( x + , y , t ) = τ0dy ⋅ α( x + , y , t ) , avec α = .
2 2 ∂x
G
On en déduit la contribution des deux bords colinéaires à e y :

dx dx ∂ 2ψ
d2Fz( x ) = dFz ( x + , y , t ) − dFz ( x − , y , t ) = τ0 2 dxdy .
2 2 ∂x
G
De même, la contribution des deux bords colinéaires à ex est :
dy dy ∂ 2ψ
d2Fz( y ) = dFz ( x, y +, t ) − dFz ( x, y − , t ) = τ0 2 dxdy .
2 2 ∂y
G
La projection selon ez du principe fondamental appliqué à l’élément de mem-
brane dans le référentiel du laboratoire donne :
∂ 2ψ  ∂ 2ψ ∂ 2 ψ  ∂ 2ψ ∂ 2ψ σ ∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ
σdxdy = τ0  2 + 2  dxdy  ∆ψ = 2 + 2 = = .
∂t 2  ∂x ∂y  ∂x ∂y τ0 ∂t 2 c 2 ∂t 2

τ0
La célérité de l’onde est c = . Comme [ τ0 ] = [F ] ⋅ L-1 = M ⋅ T-2 , où F est une
σ
force, et [ σ] = M ⋅ L-2 , on a bien [c ] = L ⋅ T -1 homogène à une vitesse.
La vibration ψ( x, y, t ) obéit à une équation de d’Alembert à 2D.

7.2 Ondes stationnaires


Pour une membrane circulaire, de centre O, fixée sur tout son périmètre, les
C.A.L s’expriment naturellement dans un système de coordonnées polaires (r , θ) de
centre O dans le plan xOy : ψ = ψ(r , θ, t ) .

655
656 Partie VII.  Physique des ondes

∂ 2ψ 1 ∂ψ 1 ∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ
L’équation précédente devient ∆ψ = + + 2 2 = 2 2 .
∂r 2 r ∂r r ∂θ c ∂t

Les conditions aux limites : ψ(a, θ, t ) = 0 ∀θ, ∀t , justifient la recherche de solu-


tions d’ondes stationnaires à variables séparées : ψ(r , θ, t ) = R(r )F (θ)φ(t ) .
En injectant dans l’équation d’onde, on obtient :
 d2R 1 dR  1 d2F 1 d2φ
F (θ)φ(t )  2 +  + 2 R(r )φ(t ) 2 = 2 R(r )F (θ) 2
 dr r dr  r dθ c dt
1  d2R 1 dR  1 1 d2F 1 1 d2φ
⇔  2 + + 2 =
R(r )  dr r dr  r F (θ) dθ2 c 2 φ(t ) dt 2
Le premier membre ne dépend que de r et θ, le second ne dépend que de t. On
en déduit que les deux membres sont égaux à une constante. Cette constante doit
être négative car dans le cas contraire les solutions en φ(t ) seraient des fonctions
exponentielles qui divergeraient.
11 d2φ ω2 d2φ
On pose donc = − ⇔ + ω2φ = 0 .
c 2 φ(t ) dt 2 c2 dt 2
On peut prendre comme solution φ(t ) = cos(ωt ) , ce qui revient à imposer que la
vibration soit maximale à t = 0 .
L’équation de d’Alembert se ramène maintenant à :
1  d2R 1 dR  1 1 d2F ω2
 2 + + 2 = −
R(r )  dr r dr  r F (θ) dθ2 c2

1  2 d2R dR  r 2ω2 1 d2F


⇔ r + r  + = − .
R(r )  dr 2 dr  c2 F (θ) dθ2
Le premier membre ne dépend que de r, le second ne dépend que de θ. Les
deux membres sont donc égaux à une constante.
Or la fonction F(θ) doit être 2π-périodique, ce qui n’est le cas que si la constante
vaut m 2 , avec m ∈ N .
On peut prendre comme solution F (θ) = cos(mθ) , ce qui revient à imposer que
la vibration soit maximale sur le demi-diamètre θ = 0 .
L’équation de d’Alembert se ramène finalement à :
1  2 d2R dR  r 2ω2 2 d2R 1 dR  ω2 m2 
r +r + 2 =m ⇔ + + − R = 0 .
R (r )  dr 2 dr  c dr 2 r dr  c 2 r 2 
ωr dR ω dR d2R ω2 d2R
On pose x =  = , et = , d’où :
c dr c dx dr 2 c 2 dx 2
ω2 d2R ω2 1 dR ω2  m2  d2R 1 dR  m2 
+ +  1 −  R = 0 , soit + + 1− 2  R = 0 .
c 2 dx 2 c 2 x dx c 2  x 2  dx 2 x dx  x 
Les solutions de l’équation différentielle adimensionnée :

656
Chapitre 1.  Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert 657

d2 y 1 dy  m 2 
+ +  1 − 2  y = 0 , dite de « Bessel », avec m ∈ N , sont :
dx 2 x dx  x 
y ( x ) = C1J m ( x ) + C2Ym ( x ) , où C1 et C2 sont des constantes, Jm la fonction de Bessel
de première espèce d’indice entier m et Ym la fonction de Bessel de seconde espèce
d’indice entier m.
Les formes asymptotiques de ces fonctions de Bessel sont, pour x << 1 :
m m
1 x 2 x  ( m − 1)!  2 
Jm ( x ) ∼   , Y0 ( x ) ∼  ln + Cte  , Ym ( x ) ∼ − pour m ∈ ℕ*.
m!  2  π 2  π  x 
Comme les solutions physiquement acceptables ne doivent pas diverger en
r = 0 , ce sont les fonctions Jm . Leur graphe est donné ci-dessous pour m ∈ �0,3 � et
x ∈ [0,10 ] . On note sm,n le nième zéro de Jm (le zéro x = 0 est exclu). Ainsi, le premier
zéro numéroté de J1 est s1,1 = 3,832 .

On en déduit la forme des ondes stationnaires recherchées :


 ωr 
ψ m (r , θ, t ) = ψ0Jm   cos(mθ)cos(ωt ) , avec m ∈ N .
 c 
ωa
Les conditions aux limites, ψ(a, θ, t ) = 0 ∀θ, ∀t , impliquent que doit être un
c
ωm,n a
zéro non nul de Jm , soit = sm,n . Les fréquences propres sont donc doublement
c
c
quantifiées : fm,n = sm,n . Elles ne sont pas des multiples d’une fréquence fonda-
2πa
mentale : les sons émis par une membrane vibrante n’ont pas de hauteur déterminée.
Il est difficile de jouer une note avec un tambour : il faut le frapper de façon à ne

657
658 Partie VII.  Physique des ondes

2  π π
sélectionner qu’une valeur de m. En effet, Jm ( x ) ≃ cos  x − m −  , sauf au voi-
πx  2 4
sinage de 0 : les écarts entre les sm,n , quasiment constants, correspondent à une pro-
gression harmonique.
Représentons les lignes nodales dans les cas suivants (la première valeur indi-
quée est celle de m, la seconde celle de n). Les nœuds sont en noir, les ventres en
blanc.

La solution la plus générale est une combinaison linéaire des solutions trou-
vées, appelées modes propres de vibration :
ω r 
ψ m,n (r , θ, t ) = ψ 0m,n Jm  m,n  cos(mθ)cos( ωm,n t ) .
 c 
Selon l’endroit où il frappe la peau d’un tambour, le musicien impose des C.I et
sélectionne plus particulièrement certains modes de vibration, ce qui définit le spectre
de la vibration, donc le son émis.
Sur la figure ci-dessous, on a représenté en 3D (en amplifiant la déformation)
les vibrations de la membrane à deux instants différents pour les premiers modes :

658
659

[PHYSIQUE DES ONDES 2]

ONDES ACOUSTIQUES DANS LES


FLUIDES
1. ÉQUATION DE PROPAGATION
1.1 Modèle étudié
On considère un fluide au repos dans le référentiel R du laboratoire, supposé
galiléen. En négligeant les effets de la pesanteur, il est caractérisé par des champs de
ρ(M , t ) = ρ0

masse volumique, pression et vitesse uniformes et stationnaires :  p(M, t ) = p0 .
G G
v (M , t ) = 0
Une onde acoustique est une perturbation du fluide : ces grandeurs subissent
des variations spatiales et temporelles qui sont notées avec l’indice « 1 », sauf pour le
ρ(M , t ) = ρ0 + ρ1(M, t )

champ de vitesse. On a alors  p(M , t ) = p0 + p1(M , t ) . p1(M, t ) est appelée surpression.
G G G
v (M , t ) = v1(M , t ) ≠ 0

Nous allons étudier une petite perturbation pour laquelle nous effectuerons l’ap-
G
proximation linéaire : ρ1 , p1 et v seront traités comme des infiniment petits du pre-
mier ordre (approximation acoustique).

Nous vérifierons cette hypothèse a posteriori, en faisant les applications numé-


G
riques pour contrôler qu’on a bien ρ1 / ρ0 << 1 , p1 / p0 << 1 et v / c << 1 (nous verrons
G
qu’il faut en effet comparer v à la célérité c de l’onde acoustique).
Le fluide est considéré comme parfait. On peut alors écrire 3 équations reliant
masse volumique, pression et vitesse :
(1) Le principe fondamental appliqué à une particule de fluide parfait (pas de viscosité)
G
dv →
dans R , en négligeant l’action de la pesanteur : ρ = − grad p (1) .
dt
∂ρ G
(2) L’équation locale de conservation de la masse + div(ρv ) = 0 (2) . Le fluide ne
∂t
sera pas ici considéré comme incompressible, car ce sont précisément les variations
de masse volumique (même très faibles, comme on le verra) qui sont à l’origine de la
propagation d’ondes acoustiques.
(3) La relation entre ρ et p traduisant l’évolution isentropique d’une particule de fluide

659
660 Partie VII.  Physique des ondes

parfait. Comme à l’équilibre thermodynamique d’un fluide il n’y a que deux paramètres
d’état indépendants, on peut écrire que ρ est une fonction ρ = ρ( p, S ) de p et de l’en-
 ∂ρ   ∂ρ 
tropie S, soit en différentiant : dρ =   dp +   dS , avec dS = 0 . On introduit la
 ∂p S  ∂S  p
1  ∂V 
compressibilité isentropique χS = −   du fluide, qui caractérise la variation re-
V  ∂p S
lative du volume de fluide due aux variations de pression, à entropie constante. Or une
particule fluide est un système fermé ; sa masse m = ρV est constante, ce qui en-
dρ dV 1  ∂V  1  ∂ρ 
traîne + =0−   =+   .
ρ V V  ∂p S ρ  ∂p S

1  ∂V  1  ∂ρ 
La compressibilité isentropique du fluide est χS = −   =   . Elle
V  ∂p S ρ  ∂p S

est homogène à l’inverse d’une pression : son unité est le Pa-1 .


On a donc pour un fluide parfait la relation = ρχS (3) .
dp

1.2 Linéarisation
(1) Linéarisation du P.F.D
Notons a l’ordre de grandeur de l’amplitude du dé-
placement d’une particule fluide sous l’effet d’une onde
acoustique de célérité c, de période T et de longueur
d’onde λ = cT . Le mouvement de la particule est T-pério-
dique, si bien que l’ordre de grandeur u de sa vitesse est u = O ( a / T ) . On a donc :
u / c = O ( a / λ ) . Dans l’approximation acoustique, u / c << 1 , donc a << λ . Une parti-
cule fluide se déplace sur une longueur très petite devant la longueur d’onde acous-
tique, si bien qu’on peut considérer qu’elle reste en un point M0 fixe pour calculer sa
� �
� � � � dv ∂v
vitesse : v = vLAG (t ) = v EUL (M (t ), t ) ≃ v EUL (M0 , t ) , donc ≃ si u / c << 1 .
dt ∂t
On peut également utiliser la relation entre vitesse particulaire et vitesse locale,
� � �
dv ∂v � → � � → � ∂v  u2 / λ 
+ (v ⋅ grad)v , or (v ⋅ grad)v = O = O ( u / c ) . On a donc bien :
 u / T 
=
dt ∂t ∂t  

∂v  → � → �
ρ = − grad p si u / c << 1 . Le terme (v ⋅ grad)v étant de toutes façons du second
∂t
ordre en la perturbation, il disparaît lorsqu’on linéarise le P.F.D.
�  → � →
∂v ∂v
Le P.F.D s’écrit donc ρ = − grad p , soit (ρ0 + ρ1) = − grad( p0 + p1) dans
∂t ∂t

660
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 661


→ � �
∂v
l’approximation acoustique, avec grad p0 = 0 , et ρ1 terme d’ordre 2.
∂t
� →
∂v
Le P.F.D linéarisé s’écrit finalement ρ0 = − grad p1 (1) .
∂t
En prenant le rotationnel de cette expression, on en tire une conséquence im-
→ �
∂ rot v →  →  � → �
portante : ρ0 = − rot  grad p1  = 0 . En un point donné rot v est indépen-
∂t  
dant du temps, or il est nul en l’absence d’onde acoustique :


→ � �
rot v = 0 . L’écoulement dû à l’onde acoustique est irrotationnel.

→ �
Si on prenait en compte la pesanteur, on aurait grad p0 = ρ0 g au repos, et en

∂v  → � → �
présence de la perturbation (ρ0 + ρ1) = − grad( p0 + p1) + (ρ0 + ρ1)g = − grad p1 + ρ1g .
∂t

� ∂v  → �
Le P.F.D linéarisé contiendrait un terme supplémentaire ρ1g : ρ0 = − grad p1 + ρ1g .
∂t

(2) Linéarisation de l’équation locale de conservation de la masse


∂ρ � ∂(ρ0 + ρ1) � ∂ρ0
+ div(ρv ) = 0 s’écrit + div [(ρ0 + ρ1)v ] = 0 . Comme = 0 et que
∂t ∂t ∂t
� ∂ρ1 �
ρ1v est un terme d’ordre 2, on a finalement + ρ0 divv = 0 (2) .
∂t

(3) Linéarisation de la relation entre ρ et p à entropie constante


dρ ρ
On peut écrire que = ρχS devient 1 = ρ0 χS à l’ordre 1, ou bien, ce qui est
dp p1
 ∂ρ 
équivalent, effectuer le développement limité ρ( p0 + p1) = ρ0 + p1   ( p0 ) à l’ordre 1
����� �����
∂p S
ρ0 +ρ1
ρ0 χS

de la fonction p ֏ ρ( p ) . On obtient donc ρ1 = ρ0 χS p1 (3) : ρ1 est proportionnel à p1 .

1.3 Équation de d’Alembert



On privilégie p1 et v . Pour éliminer ρ1 , on reporte (3) dans (2) et on obtient le

 ∂v →
ρ0 = − grad p1 (1)

système  ∂t couplant p1 et v . Pour découpler ce système, effec-

χ ∂p1 + divv = 0 (4)
 S ∂t
tuons membre à membre des combinaisons de ces deux équations :

661
662 Partie VII.  Physique des ondes

∂(4)
— La première, −div(1) + ρ0 , donne :
∂t
G G
∂divv ∂2 p ∂divv  →  ∂2 p
−ρ0 + ρ0 χS 21 + ρ0 = div  grad p1  , soit ∆p1 = ρ0χS 21 .
∂t ∂t ∂t   ∂t
→ ∂(1)
— La deuxième, grad(4) − χS , donne :
∂t
G


→ ∂p
 → G ∂ 2v 

→ ∂p

χS grad  1  + grad(divv ) − ρ0χS 2 = χS grad  1  . On a donc :
 ∂t  ∂t  ∂t 
G →  → G 
→ G ∂ 2v  → G G  → G G
grad(divv ) − ρ0 χS 2 = 0 , or rot   rot v  = grad(divv ) − ∆v  grad(divv ) = ∆v .
∂t  G 
 0 
2 G
G ∂ v
On aboutit à ∆v = ρ0 χS 2 .
∂t
G
G 1 ∂ 2 p1 G 1 ∂ 2v
p1 et v obéissent à l’équation de d’Alembert : ∆p1 = 2 et ∆v = 2 2 .
c ∂t 2 c ∂t
La célérité c des ondes acoustiques est c = 1/ ρ0χS .

1  ∂ρ   ∂ρ  ρ1
Comme χS =   , on a, à l’ordre 1 en la perturbation,   = = ρ0χS .
ρ  ∂p S  ∂p S p1
 ∂p 
On en déduit c =   . Cette formule a été utilisée pour étudier la forme
 ∂ρ S
d’une tuyère dans la sous-section 2.2 du chapitre sur les bilans macroscopiques.
D’autre part, la prise en compte de la pesanteur amène à écrire le P.F.D linéa-
G
∂v  → G
risé sous la forme ρ0 = − grad p1 + ρ1g . Comme ρ1 / p1 = ρ0χS = 1/ c 2 et que :
∂t
→ G →
grad p1 est de l’ordre de p1 / λ , on a ρ1g ( )
grad p1 = O λg / c 2 . On peut négliger

la pesanteur si λ = c / f << c 2 / g , soit pour des fréquences f >> g / c .

1.4. Calcul de c
Célérité du son dans un gaz
Le modèle de fluide parfait étant plus fort que celui de gaz parfait, lorsqu’un
fluide parfait est gazeux, c’est nécessairement un gaz parfait. Comme l’évolution d’un
fluide parfait est isentropique, pression et volume sont liés par la loi de Laplace :
dp dρ
pV γ = Cte ⇔ pρ −γ = Cte , dont la différentielle logarithmique −γ = 0 fournit :
p ρ

662
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 663

1  ∂ρ  1
χS =   = . Comme la perturbation est traitée à l’ordre 1, les développements
ρ  ∂p S γp
� � 1
limités sont effectués au voisinage du repos (v = 0, p = p0 , ρ = ρ0 ,T = T0 ) : χS = .
γp0
1 γp0 Mp0
On en déduit c = = , avec ρ0 = (gaz parfait de masse molaire M).
ρ0χS ρ0 RT0

γRT0
La célérité du son dans un gaz, c = , ne dépend pas de la pression mais
M
seulement de la température.

Pour de l’air, γ = 1,40 et M = 29,0 g ⋅ mol-1 . À T0 = 293 K , la vitesse du son


γRT0 1, 40 × 8, 314 × 293
dans l’air est c = = = 343 m ⋅ s-1 . La pesanteur est négli-
M 29, 0 ⋅ 10 −3
geable si f >> g / c ≃ 30 mHz , ce qui est bien vérifié pour les ondes sonores

Célérité du son dans un liquide


Si la masse volumique d’un liquide est beaucoup plus importante que celle d’un
gaz, sa compressibilité est extrêmement plus faible. En conséquence, la célérité du
son dans les liquides est généralement plus grande que dans les gaz. Pour de l’eau
pure, à p0 = 105 Pa et T0 = 293 K , ρ0 = 1, 0 ⋅ 103 kg ⋅ m-3 (au lieu de ρ0 ≃ 1 kg ⋅ m-3

pour l’air) et χS = 5,0 ⋅ 10−10 Pa-1 (au lieu de χS = 1/ ( γp0 ) ≃ 7 ⋅ 10−6 Pa-1 pour l’air).
La vitesse du son dans l’eau est c = 1/ ρ0χS ≃ 1400 m ⋅ s-1 . Là encore, la con-
dition f >> g / c ≃ 7 mHz permettant de négliger la pesanteur est vérifiée.

2. ASPECT ÉNERGÉTIQUE
2.1 Bilan d’énergie

 ∂v →
�  0
ρ = − grad p1 (1)
Calculons div(p1v ) à partir des relations de couplage  ∂t :
χ ∂p1 + divv� = 0 (4)
 S ∂t
� � � → ∂ 1 1  1
div(p1v ) = p1 div
� v + v ⋅ grad p1 = −  χS p12 + ρ0v 2  . Comme ec = ρ0v 2 est une

��� �� ∂t  2 2  2
∂p1 ∂v
−χS −ρ0
∂t ∂t
∂ρUac �
énergie cinétique volumique, on reconnaît un bilan local + divJUac = σUac = 0
∂t

663
664 Partie VII.  Physique des ondes

G G
d’énergie acoustique U ac . On utilise les notations uac et pas ρUac , Jac et pas JUac .

1 1
uac = ρ0v 2 + χS p12 ( J ⋅ m-3 ) est la densité volumique d’énergie acoustique.
2 2

1
L’énergie potentielle volumique ep = χS p12 est analogue à l’énergie poten-
2
tielle élastique d’un ressort.
Pour déterminer l’énergie acoustique contenue dans un volume fini V , on le
1 1 
  2 ρ0v
2
découpe en volumes élémentaires et on somme : U ac = + χ p 2 d3V .
2 S 1 
V

G G
Jac = p1v ( W ⋅ m -2 ) est le vecteur densité volumique de courants d’énergie
acoustique.

Son flux à travers une surface S orientée donne la puissance acoustique algé-
δUac G G
brique qui traverse cette surface : pac =
dt 
= Jac ⋅ d2 S .
S
∂uac G
Comme + div Jac = 0 , l’énergie acoustique est conservative ( U ac se con-
∂t
serve pour un système qui n’échange pas d’énergie acoustique).

Si on considère le système fermé Σ


fluide, séparé du reste du fluide par une
surface S mobile par rapport à R , les ap-
ports énergétiques se réduisent, pour un
fluide parfait et en l’absence de pesanteur,
au travail des forces de pression exercées
par le fluide extérieur. Un élément de sur-
face d2 S autour d’un point P de S reçoit
G G G G
pendant dt un travail élémentaire δ3Wp = d2Fp ⋅ vdt , où v = v (P, t ) est la vitesse du
G G
point P lors de la perturbation acoustique. Comme d2Fp = −( p0 + p1)d2 S , ce travail
G G G G
vaut δ3Wp = −( p0 + p1)d2 S ⋅ vdt = −J ⋅ d2 S dt . La puissance acoustique traversant
G G G G G
d2 S dans le sens de d2 S vaut + J ⋅ d2 S , car si J ⋅ d2 S > 0 , le système Σ perd de
la puissance, donc δ3Wp < 0 .
G G
Comme J = ( p0 + p1 )v , on pourrait penser se limiter à l’ordre 1, et effectuer les
G
bilans énergétiques à l’aide du seul vecteur p0v . En réalité, les grandeurs d’ordre 1
G
qui se propagent ( p1 , ρ1 , v …) ont une valeur moyenne temporelle nulle (une compo-
sante continue non nulle ne correspond pas à un phénomène ondulatoire). Dans le

664
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 665

G G
cas du champ de vitesse, v ≠ 0 correspondrait à un écoulement stationnaire. Ainsi,
G G G
pour une onde sonore, p0v = p0 v = 0 : les bilans énergétiques font intervenir des
G G G G
termes d’ordre 2 en la perturbation, soit ici Jac = p1v . Bien que p1 = 0 et v = 0 , on
G G G G G
peut très bien avoir p1v ≠ 0 . En r.s.f par exemple, on a Jac ≠ 0 , sauf si p1 et v
sont en quadrature de phase.

2.2 Intensité acoustique


G G G
En un point M donné, v = ve où e est une vecteur unitaire fixe.

On définit l’intensité acoustique par Iac = p1v en W ⋅ m-2 . C’est donc la puis-
sance surfacique moyenne reçue par unité de surface orthogonale en chacun de ses
G
points à Jac .

Ainsi définie, Iac est algébrique, la surface S traversée


G
par Pac = pac étant orientée dans le sens de e . Si on définit
G
Iac par Iac = J ac , Iac est alors toujours positive.

Les êtres humains détectent les perturbations acoustiques dont les fréquences
se trouvent dans la plage : 20 Hz ≤ f ≤ 20 kHz .

Les fréquences auxquelles nous sommes les plus sensibles se trouvent aux
alentours de 4000 Hz. On a choisi la fréquence f = 1000 Hz pour déterminer le seuil
d’intensité détectée I0 = 10−12 W ⋅ m-2 et le seuil de douleur Imax = 1 W ⋅ m-2 .
L’oreille est un capteur approximativement loga-
rithmique : le volume sonore perçu augmente de la
même quantité chaque fois que l’intensité acoustique est
multipliée par 10. On utilise donc une échelle en dB :
I 
Iac dB = 10log  ac  . Au seuil de détection, I0 dB = 0 , et
 I0 
au seuil de douleur, Imax dB = 120 dB . Le diagramme ci-
contre donne quelques valeurs d’intensité en dB pour des
situations de la vie courante. Les sons correspondant à
ces situations possèdent des spectres étendus, ce qui
rend moins dangereux ceux qui avoisinent les 120 dB.
Néanmoins, plus le niveau sonore est élevé, plus la du-
rée d’exposition doit être courte. Dans les lieux fermés,
le niveau sonore varie peu d’un endroit à l’autre, alors que dans les lieux ouverts, Iac
décroit approximativement en 1/ r 2 , si r est la distance du capteur à la source sonore.

665
666 Partie VII.  Physique des ondes

Le diagramme ci-dessous montre des courbes d’iso-sensibilité de l’oreille


(courbes isophoniques). Pour que les individus testés perçoivent (en moyenne), à une
fréquence donnée, le même volume sonore que celui perçu à 1000 Hz, il faut imposer
une intensité acoustique Iac dB différente de sa valeur (en phone) à 1000 Hz. Par
exemple pour retrouver la même sensation que celle générée par un signal de 10 dB
à 1 kHz, soit 10 phones, il faut un signal de 70 dB à 30 Hz, donc une intensité 1000
fois plus grande. Ces courbes sont des moyennes pour des sujets sans problèmes
d’audition, âgés de 18 à 25 ans. Elles varient selon les individus et évoluent avec l’âge.

3. ONDES PLANES ACOUSTIQUES / TUYAUX


SONORES
3.1 Équations de propagation
Nous allons retrouver les équations de couplage dans le cas simple 1D où les
grandeurs ondulatoires ne dépendent que d’une seule coordonnée cartésienne x.

666
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 667

On peut trouver ce cas lorsque l’onde acoustique est guidée par un tuyau so-
G G ∂ξ G
nore d’axe Ox et de section S . On a ainsi p1( x, t ) , ρ1( x, t ) , v ( x, t ) = v ( x, t ) ex = ex ,
∂t
où ξ( x, t ) est le déplacement, sous l’effet de la perturbation, d’une particule fluide se
trouvant à l’abscisse x au repos. Le système fermé étudié Σ est le système fluide se
trouvant au repos entre les abscisses x et x + d x . Sa masse vaut ρ0 S dx .
Écrivons les 3 équations reliant masse volumique, pression et vitesse (ou dé-
placement).
(1) Le principe fondamental, appliqué à Σ, fournit, en négligeant l’action de la pesan-
∂ 2ξ
teur : ρ0 S dx = ( p0 + p1 [ x + ξ( x, t ), t ] ) S − ( p0 + p1 [ x + dx + ξ( x + dx, t ), t ] ) S .
∂t 2
∂p1
À l’ordre 1 en la perturbation p1 [ x + ξ, t ] = p1( x, t ) + ξ = p1( x, t ) d’où :
∂x
N
ordre 2

∂ 2ξ ∂p ∂ 2ξ ∂p
ρ0 dx 2 = p1( x, t ) − p1( x + dx, t ) = − 1 dx . On retrouve ρ0 2 = − 1 (1) , soit :
∂t ∂x ∂t ∂x
G  →
∂v ∂p ∂v
ρ0 = − 1 , c’est-à-dire le P.F.D linéarisé ρ0 = − grad p1 , à 1D.
∂t ∂x ∂t
(2) La masse de Σ se conserve :
ρ0 S dx = [ρ0 + ρ1( x, t )] S ( x + dx + ξ( x + dx, t ) − [ x + ξ( x, t )] ) , car ρ1 [ x + ξ, t ] = ρ1( x, t ) à
∂ξ  ∂ξ 
l’ordre 1. Comme ξ( x + dx, t ) − ξ( x, t ) = dx , on a ρ0 = [ρ0 + ρ1( x, t )] ⋅  1 + . Cette
∂x  ∂x 
∂ξ
relation donne ρ1 + ρ0 = 0 (2) à l’ordre 1, soit, en dérivant par rapport au temps :
∂x
∂ρ1 ∂v ∂ρ1 G
+ ρ0 = 0 . On retrouve l’équation de continuité + ρ0 div v = 0 , à 1D.
∂t ∂x ∂t
(3) La relation linéarisée traduisant l’évolution isentropique d’une particule d’un fluide
parfait est inchangée : ρ1 = ρ0 χS p1 (3) .
On élimine ρ1 en reportant (3) dans (2), et on obtient le système couplant p1 et
 ∂ 2ξ ∂p1
ρ0 2 = − (1)
 ∂t ∂x ∂(4)
ξ:  , qu’on découple grâce à la combinaison χS (1) − :
χ p + ∂ξ = 0 (4) ∂x
 S 1 ∂x

∂ 2ξ 1 ∂ 2ξ 1
2
= , avec c = .
∂x c 2 ∂t 2 ρ0 χS

Les grandeurs v, p1 et ρ1 étant liées à ξ par des relations scalaires linéaires,


elles obéissent à la même équation de d’Alembert 1D.

667
668 Partie VII.  Physique des ondes

Les particules fluides vibrant dans une direction colinéaire à la direction de pro-
pagation de l’onde acoustique, les ondes acoustiques dans les fluides sont des ondes
de compression / détente longitudinales.

3.2 O.P.P / Impédance acoustique


Impédance acoustique
p1 et v vérifiant l’équation de d’Alembert, il existe des solutions d’onde plane
progressive (O.P.P). Lorsqu’une O.P.P se propage le long du tuyau dans le sens des
 p1(x,t ) = Fp1 ( t − x / c )
x croissants, p1 et v s’écrivent  . Posons θ = t − x / c = θ( x, t ) . On
v (x,t ) = Fv ( t − x / c )
∂p1 dFp1 ∂θ 1 dFp1 ∂v dFv ∂θ dFv
a alors = ⋅ =− , et = ⋅ = . Le P.F.D linéarisé, fournit
∂x dθ ∂x c dθ ∂t d θ ∂t dθ
∂v ∂p dF 1 dFp1
ρ0 = − 1  ρ0 v = , qui s’intègre en Fp = ρ0cFv + Cte , soit (la constante
∂t ∂x dθ c dθ 1

est nulle pour des solutions ondulatoires) p1 = Zac ⋅ v .

Pour une O.P.P acoustique qui se propage dans le sens des x croissants, p1 et
v sont proportionnelles : p1 = Zac ⋅ v . La grandeur Zac = ρ0c = ρ0 / χS est appelée

impédance acoustique du fluide (en kg ⋅ m -2 ⋅ s-1 , donc pas en ohm…).


Pour une O.P.P qui se propage dans le sens des x décroissants, p1 = −Zac ⋅ v .

Pour une O.P.P qui se propage dans le sens des x croissants, on aurait égale-
∂p ∂v
ment pu trouver p1 = Zac ⋅ v en utilisant l’autre relation de couplage χS 1 + = 0.
∂t ∂x
Aspect énergétique
Calculons, en utilisant p1 = Zac ⋅ v = ρ0c ⋅ v , les grandeurs énergétiques pour
une O.P.P qui se propage dans le sens des x croissants.
1 1 1 1 ρ0
— ec = ρ0v 2 , et ep = χS p12 = χS Zac 2v 2 = ρ0v 2 puisque Zac = . En tout
2 2 2 2 χS

point et à tout instant, l’énergie acoustique uac = ρ0v 2 est équirépartie entre sa forme
cinétique et sa forme potentielle.
G G G
— Jac = p1vex = ρ0cv 2ex donc Iac = Zac v 2 = ρ0c v 2 .

668
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 669

G G
On en déduit la vitesse cU = cU ex de propaga-
tion de l’énergie. Pour cela, calculons de deux façons
différentes l’énergie δUac qui traverse pendant dt une
portion de surface S d’un plan x = Cte . L’énergie
δUac = uac S cU dt se trouve dans un cylindre de section S et de longueur cU dt . C’est
G G
aussi le produit par dt de la puissance traversant S : δU ac = Jac S ex dt . On en déduit
G
G Jac G ρ cv 2 G G G
cU = , soit ici cU = 0 2 ex = cex = c . La vitesse de propagation de l’énergie est
uac ρ0v
logiquement celle de l’onde acoustique.

3.3 Calcul numérique d’une perturbation acoustique pour une O.P.P.H


dans l’air
On considère une O.P.P.H se déplaçant dans le sens des x croissants. Sous
l’effet de la perturbation, une particule fluide en x au repos ( v = 0 ) se retrouve en
∂ξ
x + ξ( x, t ) , et acquiert une vitesse v = . Les grandeurs p0 (pression), ρ0 (masse
∂t
 p( x, t ) = p0 + p1( x, t )

volumique) et T0 (température) du fluide au repos deviennent ρ( x, t ) = ρ0 + ρ1( x, t ) .
T ( x, t ) = T + T ( x, t )
 0 1

On prend p0 = 105 Pa et T0 = 293 K . Pour l’air (considéré comme un gaz par-


Mp0 29 ⋅ 10−3 × 105 γRT0
fait), ρ0 = = = 1,19 kg ⋅ m-3 et c = = 343 m ⋅ s-1 .
RT0 8, 314 × 293 M
Pour une O.P.P.H, nous allons montrer que v, p1 , ρ1 et T1 sont des grandeurs
proportionnelles entre elles, donc toutes en phase. La perturbation s’écrit :
 ∂ξ
ξ = Ξ sin(ωt − kx )  v = v1 = ∂t = V1 cos(ωt − kx ) = ωΞ cos(ωt − kx )

2 2
 p1 = P1 cos( ωt − kx )  ρ1 = ρ0 χS p1 = p1 / c = R1 cos( ωt − kx ) = P1 / c cos( ωt − kx )


T1 = Θ1 cos( ωt − kx )
On se propose de calculer les amplitudes de ces perturbations dans le cas où
l’intensité acoustique est Iac = Imax = 1,0 W ⋅ m-2 .
1
— Calcul de V1 . On a p1 = Zacv1 = ρ0cV1 cos(ωt − kx ) , or Imax = p1v = ρ0cV12 . On en
2
2Imax 2 × 1, 0
déduit V1 = = = 7, 0 cm ⋅ s-1 .
ρ0c 1,19 × 343
— Calcul de P1 . On a P1 = ρ0cV1 = 2 ρ0cImax = 2 × 1,19 × 343 × 1,0 = 29 Pa .

669
670 Partie VII.  Physique des ondes

P1 2ρ0Imax 2 × 1,19 × 1,0


— Calcul de R1 . On a R1 = 2
= 3
= = 2, 4 ⋅ 10−4 kg ⋅ m-3 .
c c 3433
1− γ
— Calcul de Θ1 . L’évolution d’une particule d’air obéit à la loi de Laplace Tp γ
= Cte
dT 1 − γ dp T 1 − γ p1
dont la différentielle logarithmique est + = 0 . On a donc 1 + =0
T γ p T0 γ p0
γ − 1 T0 0, 40 293
en linéarisant. On en tire Θ1 = P1 = × × 29 = 0, 024 K .
γ p0 1, 40 105
V1 V
— Calcul de Ξ . On a Ξ = = 1 , avec 20 Hz ≤ f ≤ 20 kHz pour les fréquences au-
ω 2 πf
7, 0 ⋅ 10−2 7, 0 ⋅ 10−2
dibles. On en déduit = 0, 56 μm ≤ Ξ ≤ 0, 56 mm = .
2π × 20 ⋅ 103 2π × 20

En conclusion, Ξ = 11 µm << λ = c / f = 34 cm pour f = 1 kHz , et :


V1 = 7,0 cm ⋅ s-1 << c = 343 m ⋅ s-1 P1 = 29 Pa << p0 = 105 Pa
R1 = 2,4 ⋅ 10−4 kg ⋅ m-3 << ρ0 = 1,19 kg ⋅ m-3 Θ1 = 0,024 K << T0 = 293 K .

Même pour l’intensité maximale, les perturbations sont très faibles. Au seuil de
détection, Iac = I0 = 10−12 W ⋅ m-2 , on aurait des perturbations 106 fois plus petites !
Une onde acoustique est une très petite perturbation. La linéarisation des équations
du problème est parfaitement justifiée.

3.4 Réflexion totale en bout de tuyau / Ondes stationnaires


Le tuyau, rempli d’un fluide d’impédance
Zac , correspond aux abscisses x ≤ 0 . On consi-
dère deux cas particuliers pour lesquels la C.A.L en
bout de tuyau s’écrit p1( x = 0, t ) = Zv ( x = 0, t ) , avec
Z∈R :
— Le cas où le tuyau est fermé par une paroi fixe. On impose alors un nœud de vi-
tesse : v ( x = 0, t ) = 0 ∀t ⇔ Z → ∞ .
— Le cas où le tuyau est ouvert. On impose alors un nœud de surpression :
p1( x = 0, t ) = 0 ∀t ⇔ Z = 0 . Cette C.A.L n’est en réalité correctement réalisée que si le
rayon a du tuyau sonore est suffisamment petit : a << λ pour une onde harmonique.
En notant c la célérité du son dans le fluide, l’onde dans le tuyau s’écrit :
v (x,t ) = v i ( t − x / c ) + v r ( t + x / c )
 .
 p1(x,t ) = Zacv i ( t − x / c ) − Zacv r ( t + x / c )
La C.A.L p1( x = 0, t ) = Zv ( x = 0, t ) implique alors :
Zacv i (t ) − Zacv r (t ) = Z [v i (t ) + v r (t )] .

670
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 671

v r (t ) Zac − Z
On en déduit le coefficient de réflexion en vitesse r = = . Le sys-
v i (t ) Zac + Z
tème est analogue à un câble coaxial fermé par une résistance.
On retrouve que si le tuyau est infini (pas de discontinuité en x = 0 ), ou si l’on
place en x = 0 un matériau d’impédance Z = Zac = ρ0 / χS , il n’y a pas d’onde réflé-
chie. En revanche, dans les cas étudiés, Z = 0 et Z → ∞ , r = 1 : il y a réflexion totale.
Prenons le cas du tuyau fermé en x = 0 : Z → ∞  r = −1 . Dans le cas d’une
O.P.P.H incidente, on peut utiliser la notation complexe : v i ( x, t ) = v 0e i ( ωt − kx ) , avec

v (x,t ) = v 0ei ( ωt − kx ) − v 0ei ( ωt + kx )


k = ω / c . On a alors dans le tuyau :  , ou :
i ( ωt − kx )
 p1(x,t ) = Zacv 0e + Zacv 0ei ( ωt + kx )

v (x,t ) = v ei ωt e − ikx − e ikx 


 0  
 −2i sin( kx ) v (x,t ) = 2v 0 sin( kx )sin( ωt )
 , soit  en notation ré-
 p1(x,t ) = Zacv 0e i ωt  − ikx
e +e ikx 
 p1(x,t ) = 2Zacv 0 cos( kx )cos( ωt )
  
 2 cos( kx )

elle. L’onde acoustique est stationnaire. Les nœuds de vitesse sont les ventres de
surpression et vice versa. Il en résulte un effet de souffle sur la paroi solide en x = 0 .
1
— Les énergies volumiques valent ec = ρ0v 2 = 2ρ0v 02 sin2 (kx )sin2 (ωt ) , et :
2
1
ep = χS p12 = 2χS Zac 2v 02 cos2 (kx )cos2 (ωt ) = 2ρ0v 02 cos2 (kx )cos2 (ωt ) .
2
Il n’y a plus équipartition de l’éner-
gie pour une onde stationnaire comme
c’était le cas pour une O.P.P. Aux nœuds
de vitesse, l’énergie est uniquement po-
tentielle ; aux nœuds de pression, elle est
uniquement cinétique. En moyenne tem-
 ec = ρ0v 02 sin2 (kx )

porelle,  , d’où :
2 2
 ep = ρ0v 0 cos ( kx )

uac = ec + ep = ρ0v 02 . En moyenne,


l’énergie acoustique volumique est la
même en tout point.
G G
— On a Jac = p1vex , soit :
G G
Jac = 4Zacv 02 sin(kx )cos(kx )sin(ωt )cos(ωt )ex :
G
les nœuds de Jac sont ceux de p1 et ceux de v : il
y en a tous les λ / 4 .

671
672 Partie VII.  Physique des ondes

Ces plans d’équation x = − n λ / 4 , avec n ∈ N , sont appelés plans nodaux. Ils


ne sont pas traversés par l’énergie, qui oscille donc entre deux plans nodaux consé-
cutifs.
Remarquons enfin que :
G G
Jac = 0 . Il n’y a pas de propagation de l’énergie en moyenne pour une onde station-
naire.

3.5 Modes propres


Lorsqu’on impose plusieurs C.A.L, les pulsations sont quantifiées : elles ne
prennent que certaines valeurs ωn dénombrables. L’onde se décompose en modes
propres sinusoïdaux de pulsation ωn .
— Prenons le cas d’un tuyau so-
nore de longueur L ouvert à ses
deux extrémités, ou bien fermé à
ses deux extrémités.
Pour ces deux jeux de
C.A.L, L = nλ / 2 ⇔ ω = ωn = nπc / L , avec n ∈ N∗ . Le mode fondamental n = 1 corres-
pond à ω1 = πc / L , les harmoniques à ωn = nω1 .
— Prenons maintenant le cas d’un tuyau de longueur L′ ouvert à une extrémité et
fermé à l’autre. On a donc L ′ + λ / 4 = m λ / 2 , avec m ∈ N∗ , soit :
 1 λ  1  πc
L′ =  m −  ⇔ ω = ω′m =  m −  . Le mode fon-
 2  2  2  L′
πc
damental m = 1 correspond à ω1′ = , les harmo-
2L′
niques à ω′m = (2m − 1)ω1′ . On n’a cette fois-ci que des
harmoniques de rangs impairs.
Si on cherche à avoir la même pulsation fonda-
mentale dans les deux cas, il faut prendre L′ = L / 2 .
Deux instruments de musique à vent comme la flûte (C.A.L : ouvert / ouvert) et
la clarinette (C.A.L ouvert / fermé) peuvent jouer la même note (même hauteur), mais
auront un timbre différent du fait de l’absence des harmoniques de rangs pairs pour la
clarinette. À longueur égale, la fréquence fondamentale de la clarinette est deux fois
inférieure à celle de la flûte : la clarinette joue la même note mais à l’octave inférieure.

3.6 Résonances
On peut imposer une pulsation
ω à l’aide d’un haut-parleur. Un tuyau
sonore, par exemple ouvert / ouvert,
est alors analogue à la corde de Melde.

672
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 673

On observe des résonances d’amplitude de l’onde acoustique quand :


ω = ωn = nπc / L .
Ces résonances sont finies du fait de la viscosité du fluide et des non-linéarités
qui ne sont plus négligeables pour les fortes amplitudes…
Le principe des instruments à vent est basé sur ce phénomène : le tuyau sonore
sert de résonateur. L’excitateur peut être une anche (clarinette, saxophone : tuyau
quasiment fermé à l’extrémité où se trouve l’anche), un biseau (flûte, orgue : l’extrémité
où se trouve le biseau est au contraire largement ouverte), mais aussi les lèvres de
l’instrumentiste (trompette, trombone, cor…). Du fait des interactions entre le résona-
teur et l’excitateur, le système est un oscillateur qui produit à partir d’un souffle continu
des sons dont le spectre ne contient que les pulsations ωn .

4. ONDES SPHÉRIQUES ACOUSTIQUES / EFFET


DOPPLER
4.1 Ondes sphériques
Cas général
Par définition, une onde est sphérique s’il existe un point O tel que l’onde en un
→
point M quelconque ne dépende spatialement que de r = OM .
G G
On a donc s = s(r , t ) pour une onde scalaire, et s = s ( r , t ) pour une onde vec-
torielle, en utilisant une base de coordonnées sphériques (r, θ, ϕ) de centre O.

On parle d’onde sphérique car, à un instant t


quelconque, la perturbation a la même valeur en tout
point d’une sphère d’équation r = Cte (les surfaces
d’onde sont sphériques).
Étudions une onde scalaire régie par l’équa-
1 ∂ 2s
tion de d’Alembert ∆s = . Dans le système de coordonnées sphériques, lorsque
c 2 ∂t 2
1 ∂ 2 ( rs )
s ne dépend spatialement que de r, on a ∆s = .
r ∂r 2

673
674 Partie VII.  Physique des ondes

L’équation de d’Alembert prend donc la forme :


2
1 ∂ ( rs ) 1 ∂ 2s ∂ 2 (rs ) 1 ∂ 2 (rs )
2
= 2 2 ⇔ 2
= 2 . La fonction S(r , t ) = r ⋅ s(r , t ) vérifie l’équation
r ∂r c ∂t ∂r c ∂t 2
∂ 2S 1 ∂ 2S
= , équation de d’Alembert 1D, dont on a montré que les solutions étaient :
∂r 2 c 2 ∂t 2
S(r , t ) = F ( t − r / c ) + G ( t + r / c ) .

Les ondes sphériques scalaires s(r , t ) , solutions de l’équation de d’Alembert,


F (t − r / c ) G (t + r / c )
sont de la forme s( r , t ) = + .
 r  r
O.S.D O.S.C

Le premier terme, F ( t − r / c ) / r , correspond à une onde qui se propage dans


le sens des r croissants (elle s’éloigne de O) : c’est une onde sphérique divergente
(O.S.D), qui peut correspondre au cas où une source (comme une sphère pulsante)
est placée en O. Le deuxième terme, G ( t + r / c ) / r , correspond à une onde qui se
propage dans le sens des r décroissants (elle se rapproche de O) : c’est une onde
sphérique convergente (O.S.C).
G G
Pour une onde vectorielle sphérique s = s ( r , t ) obéissant à l’équation de
G
G 1 ∂ 2s G G G G
d’Alembert ∆s = 2 2 , ∆s ≠ ∆sr er + ∆sθeθ + ∆sϕeϕ : les résultats précédents ne
c ∂t
s’appliquent pas aux composantes d’une onde vectorielle.

Ondes acoustiques sphériques divergentes harmoniques


Considérons maintenant le cas d’une onde acoustique sphérique divergente
harmonique (sinusoïdale). La grandeur scalaire p1( r , t ) s’écrit donc, en notation com-
A i ( ωt − kr ) ω
plexe p1(r , t ) = e , avec k = . Le champ de vitesse du fluide d’une onde
r c
G G G G G
sphérique est v ( r , t ) = v r (r , t ) er = v (r , t ) er , mais, comme ∆v ⋅ er ≠ ∆v r , on ne peut pas
écrire que v (r , t ) est de la même forme que p1( r , t ) . On peut en revanche déduire
G
v (r , t ) d’une relation de couplage entre v et p1 , par exemple le P.F.D linéarisé :
G
∂v  → ∂p G
ρ0 = − grad p1 = − 1 er , équation linéaire. On peut utiliser la notation complexe :
∂t ∂r
∂v ∂ p1 A A A  1
ρ0 =− ⇔ i ρ0 ωv = 2 e i ( ωt − kr ) + ik e i ( ωt − kr ) , soit v = ei ( ωt − kr )  k +  .
∂t ∂r r r ρ0 ωr  ir 

Aspect énergétique
Pour calculer l’intensité acoustique Iac = p1v , il faut revenir aux signaux réels :

674
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 675

 A
 p1(r , t ) = r cos(ωt − kr )

 . On en déduit l’intensité acoustique :
v = A k cos(ωt − kr ) + 1 sin(ωt − kr )
 ρ0ωr  r 

 
A2  k cos2 ( ωt − kr ) + 1 cos( ωt − kr )sin( ωt − kr )  = A
2
1
Iac = 2   ∝ . Cette in-
ρ0 ωr ��� ��� � r ����� ������� � 2ρ0cr 2 r 2
 1/ 2 0 

tensité algébrique est positive pour une onde sphérique divergente (elle serait négative
pour une onde sphérique convergente). Ceci signifie que la puissance acoustique
moyenne traverse une sphère de centre O dans le sens des r croissants pour une
onde sphérique divergente. Pour une telle sphère de centre O et de rayon r (de surface
4 πr 2 ), cette puissance vaut Pac = pac = Iac ⋅ 4πr 2 = 2πA2 / (ρ0c ) . Elle est indépen-
dante de r, ce qui découle du fait qu’il n’y a aucune absorption d’énergie.

La décroissance en 1/ r des ondes sphériques scalaires n’est pas due à l’ab-


sorption de l’énergie mais à sa « dilution » : la même puissance moyenne traversant
des sphères de plus en plus grandes, la puissance surfacique décroît en 1/ r 2 .

Zone de rayonnement
Lorsque le point M se trouve suffisam-
ment loin de la source O, soit pour r >> λ , le
champ de vitesse peut se simplifier.
2π 1 ω
Si r >> λ = ⇔ << k = , on a :
k r c
Ak i ( ωt − kr ) 1 A i ( ωt − kr ) 1
v≃ e = e = p1 .
ρ0ωr ρ0c r ρ0c
Loin de la source ( r >> λ ), l’onde
sphérique divergente harmonique est locale-
ment plane : on retrouve la relation p1 = ρ0cv = Zac v , rigoureusement vraie pour une
O.P.P.H. Dans un domaine dont la dimension caractéristique est de l’ordre de λ, autour
d’un point M de la zone de rayonnement, les surfaces d’onde peuvent être confondues
avec des plans parallèles au plan tangent en M à la sphère de centre O.

Une onde plane n’a pas de réalité physique, mais peut constituer un très bon
modèle, comme ici dans la zone de rayonnement r >> λ .

4.2 Modes propres d’une cavité sphérique 


Un fluide parfait est enfermé dans un récipient indéformable sphérique de
centre O et de rayon a. On note r = OM la distance de O à un point M. Il existe des
modes propres de vibration à symétrie sphérique pour lesquels la surpression s’écrit

675
676 Partie VII.  Physique des ondes

� �
p1( r , t ) et la vitesse v ( r , t ) = v (r , t )er . Dans un mode propre, les vibrations temporelles
sont sinusoïdales, de pulsations ω quantifiées.
On pourrait donc chercher les solutions de l’équation de d’Alembert scalaire
1 ∂ 2 p1
∆p1 = sous la forme p1( r , t ) = f (r )cos( ωt ) , avec f(r) réelle, c’est-à-dire sous la
c 2 ∂t 2
forme d’ondes stationnaires. Il est plus judicieux ici d’utiliser la notation complexe, et
de chercher ces modes propres sous la forme de la somme d’une onde sphérique
divergente Ae i ( ωt − kr ) / r , et d’une onde sphérique convergente Bei ( ωt + kr ) / r . Chacun
de ces termes vérifiant l’équation de d’Alembert, qui est linéaire, c’est aussi le cas pour
la somme. La pression p1( r , t ) = e i ωt  Ae −ikr + Be ikr  / r doit rester finie quand r → 0 :
 
on doit nécessairement avoir B = − A . On a ainsi p1( r , t ) = −2iAe i ωt sin( kr ) / r , qui con-

verge bien vers −2ikAei ωt quand r → 0 .


La C.A.L porte sur la vitesse radiale des particules fluides, qui doit s’annuler au
niveau de la paroi imperméable en r = a . Il faut donc calculer v (r , t ) . Utilisons pour
∂v ∂ p1
cela la relation de couplage ρ0 =− (P.F.D linéarisé) :
∂t ∂r
 sin(kr ) cos(kr ) 
i ρ0ωv = 2iAei ωt − +k  . La C.A.L v ( r = a, t ) = 0 ∀t se traduit donc par :
 r2 r 
tan( ka ) = ka ⇔ tan ( ωa / c ) = ωa / c . Les pulsations sont quantifiées.
On pose X = ω a / c , et on les détermine graphiquement en traçant Y = tan X
et Y = X (figure ci-dessous).

On constate ainsi que les solutions sont bien dénombrables :


X n ∈ ] n π,(2n + 1)π / 2[ , avec n ∈ N∗ . Les pulsations quantifiées sont ωn = X n c / a . On
πc
a X n ∼ (2n + 1)π / 2 et ωn ∼ (2n + 1) .
n →∞ n →∞ 2a

676
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 677

4.3 Effet Doppler


L’effet Doppler intervient pour tout type de phénomènes ondulatoires, lorsque
la distance entre l’émetteur E et le récepteur R varie dans le temps.
La fréquence de l’onde dans le référentiel du récepteur est alors différente de
celle dans le référentiel de l’émetteur.
Notons R le référentiel où la vitesse de l’onde est c.

Cas où l’émetteur est fixe et le récepteur mobile dans R


Prenons l’exemple d’un radar routier E. L’onde émise est électromagnétique.
Elle se déplace à la célérité c (vitesse de la lumière) par rapport au référentiel
R terrestre qui est aussi celui du radar (l’émetteur). La voiture R (le récepteur) est
G
supposée être en translation rectiligne uniforme à la vitesse v par rapport à R .
G →
Nous supposons pour le moment que v et RE sont alignés.
Soit f la fréquence fondamentale de l’onde dans R . Peu importe la nature du
signal émis. Raisonnons sur un signal impulsionnel (une impulsion est émise à t = 0
puis toutes les périodes T = 1/ f ), le raisonnement restant valable pour un signal sinu-
soïdal (par exemple un maximum est émis à t = 0 puis toutes les périodes T ; les
points atteints par ce maximum correspondent à une surface d’onde, ou front d’onde).
L’impulsion émise à t = 0 atteint la voiture à l’instant t = t1 . Si d est la distance
RE à cet instant t1 , on a d = ct1 .

L’impulsion suivante est émise à t = T ; elle atteint la voiture à t = t2 . La dis-


tance RE à cet instant n’est plus d, mais d − v (t2 − t1) , puisque la voiture s’est déplacée

677
678 Partie VII.  Physique des ondes

de v (t 2 − t1) entre les deux instants où elle reçoit une impulsion. L’onde met une durée
d − v (t 2 − t1) d − v (t2 − t1 ) v (t2 − t1 )
pour parcourir cette distance : t 2 = T + = T + t1 − .
c c c
Par définition, T ′ = t2 − t1 est la période de l’onde dans le référentiel R ′ de la
vT ′ T
voiture : T ′ = t2 − t1 = T − . On a donc T ′ = ⇔ f ′ = f (1 + v / c ) . La relation
c 1+ v / c
obtenue est algébrique. Si v > 0 (la voiture se rapproche de l’émetteur), on a f ′ > f ,
alors que si v < 0 (la voiture s’éloigne de l’émetteur), f ′ < f .

Cas où le récepteur est fixe et l’émetteur mobile dans R


La voiture R réfléchit l’onde électromagnétique reçue, et se transforme en émet-
teur, le radar en récepteur. Elle émet des impulsions avec une période T ′ dans son
référentiel R ′ .
L’impulsion émise à t = 0 atteint le radar à l’instant t = t1 . Si d est la distance
RE à l’instant t = 0 , on a d = ct1 .

L’impulsion suivante est émise à t = T ′ ; elle atteint le radar à t = t2 . La distance


RE à t = T ′ n’est plus d, mais d − vT ′ , puisque la voiture s’est déplacée de vT ′ entre
d − vT ′
les deux instants où elle émet une impulsion. L’onde met une durée pour par-
c
d − vT ′ vT ′
courir cette distance : t2 = T ′ + = T ′ + t1 − .
c c
Par définition, T ′′ = t2 − t1 est la période de l’onde dans le référentiel R du radar :

678
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 679

vT ′  v f′
T ′′ = t2 − t1 = T ′ − . On a donc T ′′ = T ′  1 −  ⇔ f ′′ = . On constate encore
c  c  1 − v /c
que f ′′ > f ′ si la voiture se rapproche du radar ( v > 0 ), et f ′′ < f ′ lorsqu’elle s’en éloigne
( v < 0 ).

Dans le domaine des ondes sonores, le cas d’une source mobile est par
exemple celui d’un camion de pompiers qui émet une sirène. Une personne immobile
sur le bord de la route perçoit un son plus aigu si le camion se rapproche d’elle alors
qu’elle perçoit un son plus grave lorsqu’il s’en éloigne.

Prenons maintenant le cas d’un avion, source sonore ponctuelle A se déplaçant


G G
à la vitesse v = vex (avec v > 0 ), par rapport au référentiel R où la vitesse de l’onde
est c. L’avion émet des ondes sphériques de période T ′ = 1/ f ′ dans son propre réfé-
rentiel. On peut appréhender l’effet Doppler en traçant à la date t fixée les fronts d’onde
émis antérieurement par la source à t ′ = 0 , t ′ = T ′ , t ′ = 2T ′ , etc. Dans le plan z = 0
 x = vt ′
contenant l’avion, ses coordonnées à la date t ′ ∈ [0, t ] sont  A .
y A = 0
L’onde sphérique émise à t ′ se propageant à la célérité c par rapport à R , son
rayon à t fixé est R(t ′) = c(t − t ′) .

Plaçons-nous dans le cas d’un vol subsonique : v < c .


La figure ci-après dans le plan z = 0 permet de calculer la longueur d’onde λ ′′
dans la direction caractérisée par l’angle algébrique θ avec l’axe Ax. On obtient
λ′′ = R(t ′) − R(t ′ + T ′) − A(t ′)H , soit λ′′ = cT ′ − vT ′ cos θ = λ′(1− v cos θ / c ) , où λ ′ = cT ′
est la longueur d’onde dans le référentiel de l’avion. On a donc T ′′ = T ′(1 − v cos θ / c ) .

679
680 Partie VII.  Physique des ondes

Pour un récepteur vers qui se dirige l’avion, λ′′0° = λ′(1 − v / c ) < λ′ , et on re-
trouve f ′′ = f ′ / (1 − v / c ) , alors que pour un récep-
teur de qui l’avion s’éloigne, λ180
′′ ° = λ′(1 + v / c ) > λ′ ,
et on retrouve f ′′ = f ′ / (1 + v / c ) . Enfin, dans la direc-
tion transversale au déplacement de l’avion,
λ′′90° = λ′ : il n’y a pas d’effet Doppler. C’est ce que
l’on observe sur la simulation ci-avant où les fronts
d’onde sont des sphères qui ne se coupent pas, rap-
prochées en avant de l’avion et éloignées en arrière.
Le calcul effectué est rigoureux en tout point
de l’axe Ax sur lequel se déplace l’avion car, en ce point, l’angle θ (0° ou 180°) est
indépendant de la position de l’avion. Il l’est également hors de cet axe, c’est-à-dire
pour θ différent de 0 et de 180°, en un point à l’infini, mais n’est qu’une approximation
en un point à distance finie de l’avion, d’autant meilleure que le point est éloigné.

Plaçons-nous maintenant dans le cas d’un vol supersonique : v > c .


Les fronts d’onde sphériques se coupent et leur enveloppe à la date t est un
cône (cône de Mach) comme on le voit sur la simulation. Le sommet de ce cône est la
position de l’avion à t, et on note α son demi-angle au sommet. Contrairement au cas
v < c où les fronts d’onde arrivent progressivement (sans discontinuité) dans le récep-
teur, seuls les points à l’intérieur du cône reçoivent le son émis par l’avion. Prenons
un récepteur B(t ′ = 0) se trouvant sur le cône à la date t, et qui reçoit le front d’onde
émis par l’avion à t ′ = 0 . Il reçoit en même temps tous les fronts d’onde émis au voisi-
nage de t ′ = 0 , d’où une grande intensité sonore (onde de choc) qui correspond au
« bang » caractéristique perçu au passage d’un avion supersonique.
Considérons maintenant à la date t
l’onde sphérique de rayon R(t ′) = c(t − t ′)
générée en A(t ′) à une date t ′ < t quel-
conque. La tangente à cette sphère passant
par la position A(t) de l’avion à la date t
passe par un point B(t ′) de la sphère. Le
triangle A(t ′)B(t ′)A(t ) , rectangle en B(t ′) ,
 c ( t − t ′)  c 
permet de trouver l’angle α : α = arcsin   , soit α = arcsin   . Cette angle, in-
 v (t − t ) 
′ v 
dépendant de t , montre bien l’existence du cône de Mach.

Selon les conditions atmosphériques, la brusque variation de pression et de
température peut entraîner la formation de cristaux de glace sur le cône de Mach,
comme cela arrive, dans le cas subsonique, en bout d’aile où règne une forte dépres-
sion, et surtout en sortie des réacteurs.

680
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 681

Double changement de fréquence


Revenons au radar routier et aux ondes électromagnétiques : la détermination
de la vitesse de la voiture passe par la comparaison entre la fréquence f émise par le
f′ 1+ v / c
radar, et la fréquence f ′′ = =f ⋅ de l’onde réfléchie par la voiture, et cap-
1− v / c 1− v / c
tée par le radar.
Cette formule repose sur un changement de référentiel « classique » (non rela-
tiviste), qui implique que la vitesse de l’onde incidente serait c ′ = c + v dans le référen-
tiel R ′ de la voiture. Or ce changement de référentiel classique n’est pas compatible
avec les équations de Maxwell qui régissent les phénomènes électromagnétiques. La
vitesse de la lumière est en réalité la même dans les référentiels R et R ′ , et il faudrait
traiter le problème du changement de référentiel dans le cadre de la relativité res-
treinte. Heureusement, pour des vitesses v très inférieures à c (c’est-à-dire lorsqu’on
peut effectuer des développements limités à l’ordre 1 en v / c ), les formules précé-
dentes sont une excellente approximation des formules relativistes :

f ′ = f (1 + v / c ) f ′′ ≃ f ′ (1 + v / c ) f ′′ ≃ f (1 + 2v / c )

Effectuons une application numérique pour un radar qui émet une onde électro-
magnétique de fréquence f = 24,125 GHz vers une voiture se déplaçant vers lui à une
vitesse v = 110 km ⋅ h-1 = 30,6 m ⋅ s-1 .
En prenant c = 3,00 ⋅ 108 m ⋅ s-1 pour la vitesse de la lumière dans l’air, on en
v
déduit la différence ∆f = f ′′ − f ≃ 2f = 4910 Hz entre les fréquences reçue et émise.
c
Un dispositif électronique multiplie le signal émis par le signal reçu et fournit un signal
1 1
proportionnel à cos(2πft ) ⋅ cos(2πf ′′t ) = cos [ 2π(f ′′ + f )t ] + cos [ 2π(f ′′ − f )t ] .
2 2
Le premier terme est éliminé par filtrage passe-bas. Un convertisseur fré-
quence-tension permet alors de délivrer une tension proportionnelle à ∆f = f ′′ − f , donc
à v. La vitesse du véhicule est comparée à la vitesse maximale autorisée, ce qui dé-
termine l’attribution ou non d’une amende.

Toujours dans le domaine des ondes électromagnétiques, en 1929, le physicien


Edwin Hubble a relevé le spectre de la lumière issue d’autres galaxies dont la distance

681
682 Partie VII.  Physique des ondes

d à la Terre était connue. Il a reconnu la signature spectrale d’éléments chimiques


connus, mais décalée vers le rouge. La longueur d’onde λ = c / f étant plus grande
dans le référentiel R de notre galaxie que dans celui R ′ des galaxies émettrices, on
en déduit que la fréquence est plus petite dans R que dans R ′ , donc que les galaxies
s’éloignent de la nôtre. En mesurant ce décalage, il en a déduit la vitesse radiale v rad
d’éloignement de ces galaxies. La théorie exacte fait en réalité appel à la relativité
générale d’Einstein, et les mesures confirment l’expansion de l’univers (loi de Hubble :
v rad = H ⋅ d , avec H constante de Hubble).

Cas où la vitesse fait un angle avec (RE)


On doit alors modifier les formules précédentes. Nous n’étudierons que le cas
très fréquent où la distance vT ′ dont se déplace R entre deux réceptions (ou deux
émissions s’il se comporte en émetteur), est très inférieure à la distance RE.
Prenons le cas où R est récepteur. Il est en R1 lors de la première réception à
l’instant t1 , puis en R2 lors de la deuxième réception à l’instant t2 .


→ 

Comme vT ′ << R1E , l’angle α = ( ER1 , ER2 ) est très petit et donc :
� → � →
(v , R1E ) ≃ (v , R2E ) = θ . On peut donc considérer que E est à l’infini.
L’impulsion émise à t = 0 atteint R à l’instant t = t1 . Si d est la distance RE à
cet instant t1 , on a d = ct1 . L’impulsion suivante est émise à t = T ; elle atteint R à
t = t2 = t1 + T ′ . La distance RE à cet instant n’est plus d mais d − vT ′ cos θ puisque la
voiture s’est déplacée de vT ′ entre les deux instants où elle reçoit l’impulsion. Ainsi :
d − vT ′ cos θ vT ′ cos θ T  v cos θ 
t1 + T ′ = T + = T + t1 − ⇔T′ = ⇔ f ′ = f 1+ .
c c 1 + v cos θ / c  c 

682
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 683

Le même raisonnement s’applique si R est l’émetteur en mouvement et E le


f′
récepteur fixe dans R , et on trouve f ′′ = .
1 − v cos θ / c

On utilise l’effet Doppler acoustique pour


déterminer la vitesse de circulation du sang
dans le corps. On peut ainsi repérer des ano-
malies dues à la présence de plaques qui bou-
chent les vaisseaux. Ces plaques augmentent
localement la vitesse moyenne de l’écoule-
ment, et provoquent des turbulences avec des inversions du champ de vitesse. Le
sang réfléchissant l’onde acoustique, il y a deux changements de fréquence. Le dis-
1 + v cos θ / c
positif émetteur / récepteur capte une fréquence f ′′ = f ⋅ différente de la
1 − v cos θ / c
fréquence f émise. En pratique v << c et f ′′ ≃ f (1 + 2v cos θ / c ) .

Pour le radar routier, une correction doit être effectuée du fait que la direction
de l’onde incidente fait un angle θ = 25 ° par rapport à l’axe du déplacement des voi-
v cos θ
tures. Si le changement de fréquence ∆f = f ′′ − f = 2f est de 4910 Hz comme
c
c ∆f
précédemment, on en déduit la vitesse réelle v = = 33,7 m ⋅ s-1 = 121 km ⋅ h-1
2f cos θ
du véhicule, au lieu de 110 km ⋅ h-1 sans la correction…

5. ONDES DE GRAVITATION 1D DANS UN FLUIDE


INCOMPRESSIBLE PEU PROFOND 
5.1 Équations de couplage
Les ondes étudiées ici ne sont pas des ondes acoustiques (le fluide est sup-
posé incompressible). Les techniques utilisées sont en revanche les mêmes :

— Écriture des équations de la mécanique des fluides (uniquement le P.F.D, en pre-


nant en compte le poids, et la conservation de la masse, puisque la masse volumique
du fluide est constante et uniforme), soit 2 équations au lieu de 3.
— Linéarisation dans le cas de petites perturbations.

Nous prendrons l’exemple d’ondes de gravitation dans de grandes étendues


d’eau (lacs, mers, océans…). L’eau est considérée comme un fluide parfait, incom-

pressible, de masse volumique ρ, soumis à l’accélération de la pesanteur g . À l’équi-
libre, l’eau est au repos sur un fond rigide, plan, horizontal, situé à la profondeur h en
dessous de la surface libre d’équation z = 0 .

683
684 Partie VII.  Physique des ondes

L’air au-dessus de la surface libre est à la pression uniforme p0 .


On étudie une onde plane
se propageant selon Ox : les
tranches de fluide [ x, x + d x ] se
déplacent en bloc, avec :
� �
v ≃ v x ( x, t )ex . Les écarts de po-
sition ξ( x, t ) entre la surface
libre et le plan z = 0 sont suppo-
sés très petits devant les autres
dimensions du phénomène étu-
dié (profondeur h, longueur
d’onde λ des oscillations). On montre que de telles ondes existent si h << λ (on parle
d’onde en fluide peu profond).

P.F.D appliqué à une particule fluide


On néglige la viscosité, mais pas le poids des particules fluides. Le P.F.D appli-

dv  → �
qué à une particule fluide fournit ρ = − grad p + ρg . Cette relation se linéarise en
dt
 ∂v x ∂p
� ρ ∂t = − ∂x (1)
∂v → �
ρ = − grad p + ρg   .
∂t 0 = − ∂p − ρg (2)
 ∂z
(2) s’intègre en p( x, z, t ) = −ρgz + ϕ( x, t ) . On détermine ϕ( x, t ) en utilisant la
C.A.L p( x, z = ξ( x, t ), t ) = p0 pour la pression (la pression de l’eau à la surface libre vaut
p0 ), ainsi p( x, z, t ) = −ρg [ z − ξ( x, t )] + p0 . En dérivant cette relation par rapport à x, et
∂v x ∂ξ
en reportant dans (1), on trouve = −g (3) .
∂t ∂x
Conservation de la masse

Comme on l’a vu dans le chapitre sur les bilans, l’équation locale divv = 0 tra-
duisant l’incompressibilité du fluide n’est pas compatible avec l’approximation
∂v x ∂v z
v z ( x, t ) = 0 . Elle donne ici + = 0 , et montre que si Vx et Vz sont les ordres de
∂x ∂z
grandeur de v x et v z , et a l’ordre de grandeur des variations de l’altitude de la surface
Vx V  �
libre, on a = O z  . Ainsi divv = 0 permet de montrer que Vz << Vx si a << λ ,
λ  a 
mais n’apporte pas la deuxième équation de couplage entre v x et ξ.
On traduit alors l’incompressibilité du fluide en faisant un bilan de masse entre

684
Chapitre 2.  Ondes acoustiques dans les fluide 685

t et t + d t à la tranche Σ de fluide [ x, x + d x ] ,
système ouvert de largeur L arbitraire.
À t la masse de Σ vaut :
dm(t ) = ρL [ h + ξ( x, t )] dx ; à t + d t elle vaut :
dm(t + dt ) = ρL [ h + ξ( x, t + dt )] d x .
Entre ces deux instants elle a donc varié
∂ξ
de d2m = ρL dxdt .
∂t
Cette variation est due à la différence
entre la masse :
δm x = ρv x ( x, t )L [ h + ξ( x, t )] dt , qui rentre pendant dt à travers la surface L [ h + ξ( x, t )]
à l’abscisse x, et la masse δm x + dx = ρv x ( x + dx, t )L [ h + ξ( x + dx, t )] dt , qui sort pendant
dt de la surface L [ h + ξ( x + dx, t )] à l’abscisse x + d x .

Comme v x et ξ sont d’ordre 1, le calcul de cette différence δ2m = δmx − δmx + dx


∂v x ∂ξ ∂v
donne δ2m = −ρ Lh dxdt . On déduit donc = −h x (4) du bilan de masse
∂x ∂t ∂x
d2m = δ2m . (4) est la deuxième équation de couplage.

5.2 Vitesse des ondes de gravitation en eau peu profonde et applications


∂(3) ∂(4)
On découple les équations (3) et (4) en faisant par exemple −g :
∂t ∂x
∂ 2v x ∂ 2v x ∂ 2v x 1 ∂ 2v x
= gh ⇔ = , avec c = gh . L’élévation de la surface libre
∂t 2 ∂x 2 ∂x 2 c 2 ∂t 2
ξ( x,t ) , liée à v x par une relation linéaire, vérifie la même équation.

Tsunamis
Les tsunamis naissent à partir d’un choc sismique, et sont caractérisés par des
grandes longueurs d’onde, pouvant dépasser 200 km, très supérieures à la profondeur
des océans (de l’ordre de la dizaine de km). Ce sont bien des ondes gravitationnelles
en eau peu profonde, qui mettent en mouvement une colonne d’eau depuis la surface
jusqu’aux fonds marins, contrairement à la houle qui n’agite l’eau qu’en surface (l’am-
plitude des oscillations décroît rapidement avec la profondeur). La puissance d’un tsu-
nami est bien supérieure à celle de la houle. Pour la calculer, considérons une O.P.P.H
ω
de pulsation ω : l’élévation de la surface libre est ξ( x, t ) = ξ0 cos( ωt − kx ) , où k = .
c
∂v x ∂ξ g
De l’équation (3) : = −g , on tire v x ( x, t ) = ξ0 cos(ωt − kx ) .
∂t ∂x c
L’énergie cinétique moyenne contenue dans la tranche Σ de fluide [ x, x + d x ]

685
686 Partie VII.  Physique des ondes

1 g2 2 1
est donc dEc = ρ 2 ξ0 hLdx = ρgLξ02dx , puisque c = gh .
4 c 4
L’énergie potentielle de pesanteur de Σ due au passage de la perturbation ne
concerne que la masse dm = ρLξ( x, t )dx algébrique d’eau au-dessus de la surface de
1
repos z = 0 : dEp = dm ⋅ g ⋅ zG , où zG = ξ( x, t ) est l’altitude du centre d’inertie de
2
cette masse. On a donc :
1 1 1
dEp = ρgLξ2 ( x, t )dx = ρgLξ02 cos2 (ωt − kx )dx  dEp = ρgLξ02dx = dEc .
2 2 4
Il y a équipartition de l’énergie entre les formes cinétique et potentielle pour une
1
O.P.P.H. L’énergie mécanique totale de Σ est dEm = ρgLξ02dx . L’énergie
2
moyenne qui traverse pendant dt la surface hL dans le sens des x croissants est donc
égale à l’énergie qui se trouve sur une longueur cdt (l’énergie se propage à la célérité
1
de l’onde) : δEm = ρgLξ02cdt , d’où la puissance moyenne du tsunami :
2
δ Em 1 1 1
Pm = = ρgLc ξ02 = ρgL gh ⋅ ξ02 = ρLg 3/ 2h1/ 2 ⋅ ξ02 .
dt 2 2 2
La célérité des ondes de tsunami diminue brutalement lorsqu’elles atteignent la
plate-forme continentale (la profondeur h de l’eau devient bien plus petite). La puis-
sance Pm se conservant (pas de phénomènes dissipatifs), on en déduit que la hauteur
1/2
 2P 
de la surface libre ξ0 varie avec h selon la loi ξ0 =  m  g −3/4h −1/4 ∝ h −1/4 .
 ρL 
La hauteur des vagues augmente donc fortement : elle passe de un mètre en
plein océan, à plusieurs dizaines de mètres sur le littoral (on a pu observer des vagues
de 40 m voire plus), d’où la dangerosité de tels phénomènes.
Seiches
Lorsque le bassin contenant l’eau est fermé, il se forme des ondes stationnaires.
Par exemple, pour un lac de profondeur h et de longueur ℓ, selon laquelle se propage
l’onde de gravitation étudiée, on a les C.A.L suivantes : v x ( x = 0, t ) = v x ( x = ℓ, t ) = 0 ∀t
car l’eau étant bloquée par les bords du bassin.
On voit donc apparaître des modes propres de pulsation
ωn = nπc / ℓ . Ces oscillations de la hauteur de l’eau, causées par
le vent, sont observées dans de nombreux lacs et s’appellent
« seiches ». Leur période fondamentale est T = 2ℓ / c = 2ℓ / gh .
Pour le lac Léman, d’une longueur ℓ = 72 km , et d’une pro-
fondeur moyenne h = 80 m , on obtient une période T = 86 min
(les mesures donnent une période de 73 min et une amplitude
maximale de 30 cm).

686
687

[PHYSIQUE DES ONDES 3]

ONDES
ÉLECTROMAGNÉTIQUES DANS
LE VIDE
1. O.P.P ÉLECTROMAGNÉTIQUES DANS LE VIDE
1.1 Équations de Maxwell dans le vide
G G
Elles s’écrivent dans le vide, où il n’y a ni charges ni courants ( ρ = 0 , J = 0 ) :
G
divB = 0 équation de Maxwell - Thomson (M.T)
 G
 → G ∂B
 rot E = − équation de Maxwell - Faraday (M.F)
∂t
 G
divE = 0 équation de Maxwell - Gauss (M.G)
 → G G
 rot B = 1 ∂E équation de Maxwell - Ampère (M.A)
 c 2 ∂t

Une analyse qualitative de ces équations permet de comprendre comment une


onde électromagnétique peut se propager dans le vide alors que les ondes méca-
niques ou acoustiques nécessitent un support matériel. En effet s’il existe en un point
G
M0 un champ magnétique B(M0 , t ) variant dans le temps, celui-ci crée un champ élec-
G
trique E (M1, t ) dans tout le voisinage de M0 d’après l’équation de Maxwell-Faraday,
G
qui lui-même crée un champ magnétique B(M2 , t ) dans tout le voisinage de M1
d’après l’équation de Maxwell-Ampère : le champ électromagnétique se propage de
proche en proche dans le vide. Même si toutes les équations de Maxwell sont néces-
saires pour établir l’équation d’onde régissant les champs, le mécanisme de la propa-
G G
gation est dû au couplage entre E et B , c’est-à-dire aux équations de M.F et de M.A.

1.2 Équation de d’Alembert


→ → G → G G
La formule rot ( rot A) = grad(divA) − ∆A permet de découpler les équations
de Maxwell dans le vide :
→ G G
G → → G → G G G ∂ rot B 1 ∂ 2E
— Pour E : rot ( rot E ) = grad(divE ) − ∆E , soit ∆E = = .
G  ∂t (M.A) c 2 ∂t 2
∂B 0 (M.G)
− (M.F)
∂t

687
688 Partie VII.  Physique des ondes

→ � �
� → → � → � � � 1 ∂ rot E 1 ∂ 2B
— Pour B : rot ( rot B ) = grad(divB ) − ∆B soit, ∆B = − 2 = 2 2 .
����� � ��� c ∂t (M.F) c ∂t
1 ∂E 0 (M.T)
(M.A)
c 2 ∂t
� �
Dans le vide, E (M , t ) et B(M , t ) obéissent à l’équation de D’Alembert 3D :
� �
� 1 ∂ 2E � 1 ∂ 2B 1
∆E = 2 2 et ∆B = 2 2 , avec c = = 299 792 458 m ⋅ s-1 célérité de toute
c ∂t c ∂t ε0µ0
onde électromagnétique dans le vide, en particulier de la lumière.
On retiendra c ≃ 3,00 ⋅ 108 m ⋅ s-1 .

1.3 Structure des O.P.P dans le vide



� � � � 1 ∂2 A
Soit A l’un des deux champs E ou B , il vérifie donc ∆A = 2 2 . Soit s l’une
c ∂t
des composantes Ax , Ay ou Az dans un système de coordonnées cartésiennes :

1 ∂ 2s
s( x, y , z, t ) vérifie l’équation de D’Alembert scalaire ∆s = .
c 2 ∂t 2
Si on considère une O.P.P se propageant dans le sens des x croissants, s( x, t )
 x x
s’écrit s( x, t ) = F  t −  = F (u ) avec u = t − . On en déduit :
 c c
 ∂s ∂u 1  ∂s 1 ∂s
 ∂x = F ′(u ) ∂x = − c F ′(u )  ∂x = − c ∂t
 , d’où  .
 ∂s = F ′(u ) ∂u = F ′(u )  ∂s = ∂s = 0
 ∂t ∂t ∂
 y ∂z
→
Ces relations permettent de simplifier les opérateurs div et rot :
� � �
� ∂A ∂Ay ∂Az 1 ∂Ax 1 ∂( A ⋅ ex ) 1 � ∂A
divA = x + + =− =− = − ex ⋅ .
∂x � ∂y � ∂z c ∂t c ∂t c ∂t
0 0

 ∂ 
   1 ∂

 ∂x   Ax   c ∂t   Ax  �
→ �    
 ∂    1� ∂A
rot A =  = 0  ∧  Ay  =  0   y
∧ A = − e x ∧ .
∂y       c ∂t
  A 0
 ∂   z    Az 
 = 0   
 ∂z 

Pour une O.P.P qui se propage dans le sens des x croissants, on a :


� �
� 1 � ∂A → � 1� ∂A
divA = − ex ⋅ , et rot A = − ex ∧ .
c ∂t c ∂t

688
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 689

Les équations de Maxwell dans le vide s’écrivent donc pour une telle onde :
G
 1 G ∂B
 − e x ⋅ = 0 (M.T)
 c ∂t
G G
 1G ∂E ∂B
 − e x ∧ = − (M.F)
 c ∂t ∂t
 G
− 1 eG ⋅ ∂E = 0 (M.G)
 c x ∂t
 G G
− 1 eG ∧ ∂B = 1 ∂E (M.A)
 c x ∂t c 2 ∂t
Comme on cherche les solutions ondulatoires (de valeur moyenne nulle), on
rejette les constantes d’intégration (qui correspondent aux champs stationnaires, étu-
diés dans le bloc sur l’électromagnétisme), et l’on obtient donc :
Bx = 0 (M.T)
G G G
B = ex ∧ E (M.F)

 c
E = 0 (M.G)
 Gx G G
E = cB ∧ ex (M.A)
G G
E et B sont orthogonaux à la direction de
propagation. Si on définit le vecteur célérité de
G G G G G G
l’onde par c = cex , on a E ⊥ c et B ⊥ c .

Les O.P.P électromagnétiques dans le vide sont transversales.


G
G eG ∧ E G G G
La relation de couplage B = x montre que ( c , E , B ) forment un trièdre
c
G G
rectangle direct. En norme, on a E = B c , en notant E = E et B = B .

Considérons l’action d’une O.P.P électromagnétique étudiée sur une particule


G
ponctuelle de charge q, animée d’une vitesse v par rapport au référentiel d’étude R .
G G G G G G
La particule est soumise à la force de Lorentz F = q (E + v ∧ B ) , or E et B sont reliés
G G G
par B = (ex ∧ E ) / c .
G G
Le rapport entre les normes de la force magnétique qv ∧ B et de la force élec-
G G G G
G qv ∧ B v ⋅B v v G
trique qE est G ≤ = = , en notant v = v .
qE E c c

Ainsi, pour une particule non-relativiste : v / c << 1, on peut négliger la force ma-
G G
gnétique devant la force électrique lorsque le champ ( E , B ) est celui d’une O.P.P dans
le vide.

689
690 Partie VII.  Physique des ondes

1.4 Aspect énergétique


On a E = B c pour une O.P.P. On en déduit les énergies volumiques électrique
ε0E 2 B2 E2 ε0 E 2 1
ue = et magnétique um = = = = ue , puisque c 2 = . L’éner-
2 2µ0 2µ0c 2 2 ε0µ0

gie électromagnétique volumique u = ε0E 2 est équirépartie entre sa forme électrique


et sa forme magnétique.
G G G G G G G G G
G E ∧ B E  e x ∧ E  E 2ex − E ( E ⋅ ex )
Le vecteur de Poynting s’écrit SP = = ∧ =
µ0 µ0  c  µ0c
G G G G G G G G G G E2 G
en utilisant la relation A ∧ (B ∧ C ) = B ( A ⋅ C ) − C ( A ⋅ B ) . On obtient SP = ex : l’éner-
µ0c
G
gie se propage comme l’onde selon ex .
G
On définit l’intensité d’une onde électromagnétique par I = SP , en W ⋅ m-2 .

I est donc la puissance surfacique moyenne reçue par


G
unité de surface orthogonale en chacun de ses points à SP .
G
Ainsi définie, I est positive : une surface S normale à SP est
traversée par la puissance électromagnétique P = I ⋅ S > 0
dans le sens des x croissants.
E2
On a donc I = = K E 2 pour une O.P.P. Calculons, avec cette relation,
µ 0c

l’ordre de grandeur du champ électrique efficace d’une O.P.P, E0 = E 2 = µ0cI ,

dans diverses situations :

rayonnement solaire sur laser He-Ne 1 mW ,


téléphonie mobile
Terre de diamètre 1 mm

I (W ⋅ m-2 ) 103 103 2

E0 (V ⋅ m-1) 103 103 30

On peut également déterminer la vitesse


G G
cU = cU ex de propagation de l’énergie. Pour cela, on
calcule de deux façons différentes l’énergie δU qui tra-
verse pendant dt une portion de surface S d’un plan
x = Cte . L’énergie δU se trouve dans un cylindre de section S et de longueur cU dt :
elle vaut δU = u S cU dt . C’est aussi le produit par dt de la puissance traversant S :

690
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 691

G
G G G SP G E 2 µ0c G 1 G G G
δU = S SP ⋅ ex dt . On en déduit cU = , soit cU = 2
ex = ex = cex = c . La
u ε0E ε0µ0c
vitesse de propagation de l’énergie est logiquement confondue avec la célérité de
l’onde électromagnétique.

2. O.P.P.H / POLARISATION
2.1 Les différents états de polarisation
Considérons une O.P.P.H se propageant
dans le sens des x croissants : les composantes
du champ électromagnétique sont de la forme
s( x, t ) = s0 cos(ωt − kx ) . Si on introduit le vecteur
G G ωG 2π G
d’onde k = kex = ex = ex , on peut écrire la re-
c λ
G
G G G eG ∧ E
lation entre E et B sous la forme B = x , soit
c
G G
G k ∧E
B= (cette deuxième forme, qui fait interve-
ω
nir k et ω, n’est valable que pour une onde sinusoïdale). L’onde étant transverse, son
champ électrique s’écrit :

 Ex = 0 
G   G G G
E ( x, t ) =  E y = E0 y cos(ωt − kx )  sur la base ( ex , ey , ez ), avec E0 y > 0 et E0 z > 0
 
 E z = E0 z cos(ωt − kx − ϕ ) 
amplitudes des composantes E y et E z .
Les composantes E y et E z n’étant pas nécessairement en phase, on introduit
le retard de phase ϕ ∈ [ −π, π] de E z par rapport à E y , appelé polarisation de l’onde.

L’usage est de définir ϕ comme le retard (du fait du signe « moins ») et pas
comme l’avance de la composante E z par rapport à la composante E y .
Comme pour une O.P.P, le champ est le même à deux abscisses différentes, à
G
un retard ou une avance près, on étudiera par la suite l’évolution temporelle de E en
0  0 
G   G →
 
x = 0 : E ( x = 0, t ) =  E0 y cos(ωt )  , en représentant E ( x = 0, t ) = OA (t ) =  y (t )  à
   z(t ) 
 E0 z cos(ωt − ϕ)   
partir d’un point O fixe, c’est-à-dire en traçant la courbe décrite par le point A.

691
692 Partie VII.  Physique des ondes

G G
G k ∧E G
L’évolution de B = est la même que celle de E , à une rotation près de
ω
G
+π / 2 autour de ex .

Polarisation rectiligne
z Ez E
C’est le cas où ϕ ∈ { 0, π} . On a alors = = ± 0z .
y Ey E0 y
E0 z
Le point A décrit une droite d’équation z = ± y . On parle d’O.P.P.H.P.R :
E0 y
Onde Plane Progressive Harmonique Polarisée Rectilignement. Le point A oscille sur
cette droite, entre les points extrêmes A0 et A0′ . Par exemple, si ϕ = 0 :

Le champ électrique garde donc une direction fixe, appelée direction de polari-
sation, qui est celle de la droite
( A0 A0′ ) . Le champ magnétique
vibre orthogonalement à cette di-
rection. On a représenté ci-contre
l’allure du champ électromagné-
tique à un instant t, dans le cas où
l’onde est polarisée rectilignement
G
selon ey . Cette structure se dé-
place en bloc, à la célérité c, dans
le sens des x croissants.

Polarisation elliptique

 y = E0 y cos(ωt ) 
C’est le cas où ϕ ∉ { 0, π} : on a alors  . Il s’agit de l’équa-
 z = E cos(ωt − ϕ) 
 0z 
tion paramétrique d’une ellipse, qui est donc la courbe décrite par le point A. Cette

692
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 693

ellipse est inscrite dans le rectangle centré sur O, et de côtés de dimensions 2E0 y
G G
selon ey et 2E0 z selon ez . Le signe de ϕ détermine si l’ellipse est décrite dans le
sens trigonométrique ou anti-trigonométrique. En effet, à t = 0 , y est maximal. A se
dz
trouve en A0 , et (t = 0) = ωE0 z sin ϕ .
dt
dz
— Si ϕ ∈ ] 0, π[ , (t = 0) > 0 , l’ellipse est décrite dans le sens trigonométrique. On
dt
parle d’O.P.P.H.P.E.G : Polarisation Elliptique Gauche.
dz
— Si ϕ ∈ ] − π,0[ , (t = 0) < 0 , l’ellipse est décrite dans le sens anti-trigonométrique,
dt
on parle d’O.P.P.H.P.E.D : Polarisation Elliptique Droite.

Polarisation circulaire
C’est le cas particulier de la polarisation elliptique telle que E0 z = E0 y = E0 > 0

 y = E0 cos(ωt ) 
et ϕ = ±π / 2 . On a alors   . Le point A décrit un cercle, dans le sens
 z = ±E0 sin(ωt ) 
trigonométrique si ϕ = π / 2 (O.P.P.H.P.C.G : Polarisation Circulaire Gauche) et anti-
trigonométrique si ϕ = −π / 2 (O.P.P.H.P.C.D : Polarisation Circulaire Droite).

Lumière non polarisée


Un atome n’émet pas des ondes électromagnétiques de façon continue : il émet
des « trains d’ondes » de durée très courte (de l’ordre de 10 −11 s ). D’un train d’ondes
à l’autre, ϕ, E0 y et E0 z varient aléatoirement : sur une durée correspondant au temps
de réponse d’un capteur, très supérieure à la durée d’un train d’ondes, la polarisation
n’est pas définie, et E0 y = E0 z = E0 .
On parle alors de lumière (ou plus généralement d’onde électromagnétique) non
polarisée.

693
694 Partie VII.  Physique des ondes

2.2 Modification de la polarisation


Champ rayonné par un dipôle oscillant
Lorsqu’une onde électromagnétique traverse un milieu transparent, les nuages
électroniques des molécules polarisables sont déformés sous l’action de la force élec-
trique due à l’onde. Une telle molécule, située au point O où le champ électrique de
G G
l’onde incidente est de la forme E (O, t ) = E0 cos(ωt )ez , se comporte comme un dipôle
G
dont le moment dipolaire p est colinéaire à ce champ électrique. Ce dipôle est dit os-
G G
cillant car les électrons vibrent à la pulsation ω de l’onde : p = p0 cos(ωt + φ)ez . Il crée
un champ électromagnétique qui se superpose à celui de l’onde incidente.
L’étude du champ rayonné par un tel dipôle oscil-
lant n’est pas au programme. Nous allons juste donner la
forme du champ électrique en un point M repéré par ses
coordonnées sphériques de centre O, situé dans la zone
de rayonnement, c’est-à-dire à grande distance r >> λ
de la molécule qui rayonne :
G µ sin θ 2 G
Edip (r , θ, ϕ) = − 0 ω p0 cos(ωt − kr + φ) eθ .
4πr
La propriété qui nous intéresse ici est la suivante :
la champ électrique rayonné est nul dans la direction du
G G
moment dipolaire p ( θ = 0 ou π), et il est maximal, et colinéaire à p , dans la direction
G
orthogonale à p ( θ = π / 2 ).

Polarisation par réflexion vitreuse et par diffusion


G
— Polarisation par réflexion vitreuse. L’onde incidente de vecteur d’onde ki provient
d’un milieu transparent (1) d’indice de réfraction n1 et se réfléchit à l’interface (dioptre)
avec un milieu transparent (2) d’indice de réfraction n2 .
Considérons un dioptre plan d’équation x = 0 . Le plan d’incidence de l’onde est
G G
le plan contenant le vecteur d’onde ki de l’onde incidente et la normale ex au dioptre.
G G
On choisit de prendre k zi = 0 : le plan d’incidence est le plan vectoriel ( ex , ey ). On
G G
montre alors (voir le chapitre « Interfaces entre deux milieux ») que si kr et kt sont les
vecteurs d’onde des ondes réfléchie et transmise, k zt = k zr = k zi = 0 : l’onde réfléchie
et l’onde transmise se trouvent dans le plan d’incidence. C’est la première loi de Snell-
Descartes.
On note θi ∈ [0, π / 2] l’angle d’incidence sur le dioptre, θr l’angle de réflexion,
et θt ∈ [ 0, π / 2] l’angle de réfraction. Ces angles sont donnés par la deuxième loi de
Snell-Descartes : θr = π − θi ∈ [ π / 2, π] et n2 sin θt = n1 sin θi .

694
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 695

Sous l’action de l’onde réfractée dans le milieu (2), les molécules de ce milieu
rayonnent un champ électromagnétique qui est responsable de l’onde réfléchie.
Nous allons déterminer la direction du champ réfléchi à l’aide d’un raisonnement
simple : le champ réfléchi est le champ rayonné à grande distance par les molécules
du milieu (2). Les résultats peuvent être établis plus rigoureusement (voir le chapitre
« Interfaces entre deux milieux »).
— Si l’onde incidente est polarisée orthogonalement au plan d’incidence, on montre
que l’onde transmise l’est également. Les dipôles oscillants du milieu (2) vibrent dans
cette direction, et le champ électrique de l’onde réfléchie est aussi dans cette direction.
Son amplitude ne s’annule pas quand l’angle d’incidence varie.
— Si l’onde incidente est polarisée dans le plan d’incidence, on montre que l’onde
transmise l’est également. Les dipôles oscillants du milieu (2) vibrent dans la direction
G G
de E t , c’est-à-dire dans la direction θ = θt + π / 2 avec le vecteur ex normal au
G
dioptre. Il n’y a pas d’onde rayonnée dans la direction de E t .
G
Pour un angle d’incidence θi tel que kr soit dans cette direction, il n’y a donc
pas d’onde réfléchie, soit si θt + π / 2 = θr = π − θi ⇔ θt = π / 2 − θi .
n 
n2 sin θt = n1 sin θi s’écrit alors n2 cos θi = n1 sin θi ⇔ θi = θB = arctan  2  . Il n’y
 n1 
a pas d’onde réfléchie si θi = θB , angle appelé angle de Brewster.
— Pour une onde présentant une polarisation quelconque, en incidence sur le dioptre
avec l’angle θB , il ne subsiste donc plus, après réflexion, qu’un champ électrique nor-
mal au plan d’incidence. L’onde réfléchie est alors polarisée rectilignement. Cette po-
larisation se produit par exemple par réflexion sur une vitre ou sur un glacier. En
photographie, on peut ainsi atténuer les réflexions indésirables sur une vitre au voisi-
nage de θB à l’aide d’un polariseur rectiligne (« filtre polarisant »).

695
696 Partie VII.  Physique des ondes

— Polarisation par diffusion. Le


champ électrique de l’O.P.P pro-
venant du Soleil fait vibrer les
électrons des molécules de l’at-
mosphère, qui absorbent le
rayonnement solaire, et le réé-
mettent. Le spectre est modifié,
car les molécules émettent un
rayonnement dont la puissance
est proportionnelle à 1/ λ 4 , déca-
lant ainsi vers le bleu (de longueur
d’onde plus courte que le rouge)
le spectre solaire, ce qui explique
la couleur bleue du ciel.
Considérons un point M dans une direction orthogonale à l’axe Soleil-molécule.
Le moment dipolaire de la molécule placée en O possède, comme le champ électrique
provenant de S, une composante dirigée vers M qui crée un champ électrique nul dans
cette direction, et une composante orthogonale au plan OMS, qui crée en M un champ
électrique parallèle à cette composante. Finalement, dans une direction orthogonale à
l’axe Soleil-molécule, la lumière est polarisée rectilignement.

Polarisation rectiligne par des matériaux anisotropes / Loi de Malus


Certains matériaux, taillés sous forme de lame et placés orthogonalement à la
direction de propagation Ox d’une O.P.P, absorbent le champ électrique dans une di-
rection Oz, mais pas dans la direction Oy (direction de polarisation). Après traversée
de ce matériau, une O.P.P est donc polarisée rectilignement dans la direction non
absorbée. On réalise ainsi un polariseur.
Remarquons qu’on parle souvent d’onde plane polarisée rectilignement, même
si elle n’est pas progressive ni harmonique, du moment que le champ électrique garde
une direction fixe.
Dans le cas d’une O.P.P.H, les champs électriques en entrée et sortie du pola-
0  0 
G   G  
riseur P sont E ( x, t ) =  E0 y cos(ωt − kx )  et E0 ( x, t ) =  E0 y cos(ωt − kx )  . Plaçons
  0 
 E0 z cos(ωt − kx − ϕ)   
un deuxième polariseur (que l’on appelle alors analyseur A) normalement à l’onde,
derrière P. La direction de polarisation de A fait un angle α avec celle de P.
G
Prenons un vecteur unitaire eα selon cette direction : l’analyseur ne laisse pas-
G G G G
ser que la composante (E0 ⋅ eα ) eα de E0 . Le champ électrique en sortie de l’analy-
G G
seur est E ′( x, t ) = E0 y cos α cos(ωt − kx ) eα .

696
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 697

KE0 y 2
L’intensité I = K E ′2 en sortie de A prend la forme I = cos2 α , soit :
2

I (α) = I0 cos2 α (loi de Malus). I0 est l’intensité de l’O.P.P.H.P.R incidente, que l’on re-
trouve si α = 0 ou α = π (A et P « alignés »). Au contraire, si α = ±π / 2 (A et P « croi-
sés »), on a extinction de l’onde : I = 0 .

En réalité, l’onde est légèrement réfléchie par A et légèrement absorbée selon


sa direction de polarisation. La loi de Malus prend alors la forme I (α ) = I (α = 0)cos2 α
avec I (α = 0) < I0 .

Lames à retard

D’autres matériaux, également anisotropes, propagent plus rapidement une


O.P.P.H polarisée rectilignement selon Oy (axe rapide), que selon un axe orthogonal
Oz (axe lent). On les utilise pour fabriquer des lames à retard qui vont introduire un
retard ψ entre les composantes E z et E y .
Ainsi, une lame demi-onde introduit un retard ψ = π , et une lame quart-d’onde
un retard ψ = π / 2 (ceci est réalisé exactement pour une longueur d’onde λ0 donnée,
et approximativement autour de λ0 ).

Oy et Oz sont appelées lignes neutres de la lame car une O.P.P.H incidente,


polarisée rectilignement selon une de ces lignes, le reste en sortie de la lame.
Prenons l’exemple d’une onde polarisée rectilignement selon la première bis-
0 
G  
sectrice du plan yOz contenant une lame quart-d’onde : E =  E0 cos(ωt )  .
 E cos(ωt ) 
 0 
On a en sortie de la lame, à un instant t ′ différent de t :
0  0 
G   G  
E ′ =  E0 cos(ωt ′)  , soit E ′ = E
 0 cos( ω t ′ ) .
 E cos ωt ′ − π / 2   
 0 ( )  E0 sin(ωt ′) 

697
698 Partie VII.  Physique des ondes

On obtient donc une onde polarisée circulairement à gauche, en plaçant conve-


nablement un polariseur, puis une lame quart-d’onde, orthogonalement à la direction
d’une O.P.P.H (remarquons qu’on aurait en sortie une O.P.P.H.P.C.D en polarisant
rectilignement l’onde selon la deuxième bissectrice de yOz).

Si on place maintenant une lame quart-d’onde orthogonalement à la direction


0 
G  
de propagation d’une O.P.P.H.P.C.G : E =  E0 cos(ωt )  , l’axe rapide de la lame étant
 E sin( ωt ) 
 0 
dans la direction Oy, on a en sortie de la lame :
0  0 
G    
E ′ =  E0 cos(ωt ′)  =  E0 cos(ωt ′)  .
 E sin ωt ′ − π / 2   −E cos ωt ′ 
 0 ( )  0 ( )
La lame transforme l’O.P.P.H.P.C.G en une O.P.P.H.P.R selon la deuxième
bissectrice de la lame (remarquons qu’on aurait en sortie une O.P.P.H.P.R selon la
première bissectrice de la lame avec une O.P.P.H.P.C.D en entrée).

On pourra ainsi éteindre la lumière issue d’une lame λ / 4 en faisant tourner la


direction de polarisation d’un analyseur, à condition que l’onde soit polarisée circulai-
rement en entrée de la lame.

698
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 699

2.3 Analyse de la polarisation d’une onde lumineuse


Si l’onde est polarisée, raisonnons dans le cas le plus général d’une polarisation
elliptique. En choisissant bien les axes Oy et Oz, le champ électrique prend la forme :
0 
G  
E ( x, t ) =  E0 y cos(ωt − kx )  pour une O.P.P.H.P.E.G. On suppose que E0 y ≥ E0 z .
 
 E0 z sin(ωt − kx ) 
Plaçons un analyseur orthogonalement à la direction de propagation de l’onde,
sa direction de polarisation faisant un angle α avec l’axe Oy. En sortie de cet analy-
G G G
seur, le champ électrique est E ′ = E0 y cos(ωt ′)cos α + E0 z sin(ωt ′)sin α  eα , où eα est
le vecteur unitaire dans la direction de polarisation. L’intensité en sortie de l’analyseur
E0 y 2 cos2 α + E0 z 2 sin2 α E0 z 2 + (E0 y 2 − E0 z 2 )cos2 α
est donc I ( α ) = K E ′2 = K =K .
2 2
E0 y 2 E0 z 2
On a donc Imax = K pour α = 0 , et Imin = K > 0 pour α = π / 2 .
2 2
Dans le cas d’une polarisation circulaire, E0 y = E0 z , et l’intensité est indépen-
dante de α.
Dans le cas d’une polarisation rectiligne, donc ici si E0 z = 0 , Imin = 0 .
On en déduit une méthode d’analyse d’une lumière polarisée : si, en faisant
tourner la direction de polarisation de l’analyseur, l’intensité passe par un minimum nul
(extinction), la polarisation est rectiligne et on connait sa direction (elle est orthogonale
à la direction de l’analyseur lorsqu’il y a extinction). Si l’intensité passe par un minimum
non nul, la polarisation est elliptique.
Si l’intensité ne varie pas, la polarisation peut être circulaire, mais il est possible
que la lumière soit non polarisée. Pour distinguer ces deux cas, il suffit de placer une
lame λ / 4 avant l’analyseur. Cette lame est sans effet si la lumière n’est pas polarisée
et on n’aura toujours pas de variation d’intensité en faisant tourner la direction de po-
larisation de l’analyseur. En revanche, si la polarisation est circulaire, la lame λ / 4 la
transforme en polarisation rectiligne, et on obtient une extinction en faisant tourner la
direction de polarisation de l’analyseur.

699
700 Partie VII.  Physique des ondes

Il existe des protocoles permettant de connaître le sens de la polarisation :


gauche ou droite. Par exemple, une lame λ / 4 suivie d’un analyseur dont la direction
de polarisation est portée par la première bissectrice de la lame permet d’éteindre la
lumière si l’onde incidente est une O.P.P.H.P.C.G, alors qu’elle la laisse passer si
l’onde incidente est une O.P.P.H.P.C.D. Ces protocoles ne sont pas au programme.

2.4 Applications de la polarisation


Parmi les applications, on trouve :
— Les verres de lunettes polarisés. Ils permettent de réduire l’intensité lumineuse de
la lumière provenant du ciel ou de la réflexion sur de la neige.
— Les polariseurs qu’on met devant un objectif d’appareil photo pour réduire l’intensité
de la lumière réfléchie par une vitre, et ainsi pouvoir photographier ce qui est de l’autre
côté de la vitre . Sous l’incidence de Brewster, on peut totalement éliminer la
lumière réfléchie.
— L’analyse de molécules chirales.
Une molécule chirale n’est pas superposable à son image dans un miroir. Ces
deux molécules, symétriques par rapport au miroir, sont appelées énantiomères.
Lorsqu’une solution ne contenant qu’un seul des deux énantiomères est éclairée par
de la lumière polarisée rectilignement, elle possède la propriété de faire tourner la di-
rection de polarisation de l’onde.
Pour mettre en évidence cette propriété, on envoie un faisceau parallèle de lu-
mière selon l’axe d’un récipient cylindrique.

Un polariseur P est positionné en entrée du tube, un analyseur A en sortie. P et


A sont orthogonaux à l’axe du cylindre. L’analyseur et le polariseur sont croisés : lors-
que le tube est vide, il y a extinction (l’intensité lumineuse reçue par un capteur est
nulle). Lorsque le tube contient une substance optiquement active, il faut tourner l’ana-
lyseur d’un angle α pour obtenir l’extinction si la direction de polarisation de la lumière
a tourné de α.
Si la direction de polarisation tourne d’un angle α lorsque la solution ne contient
qu’un seul énantiomère de concentration c, elle tourne de −α si elle contient l’autre
énantiomère avec la même concentration. Une solution racémique (contenant les deux
énantiomères avec les mêmes concentrations), ne fera pas tourner la direction de po-
larisation, alors qu’un mélange non racémique la fera tourner d’un angle dont la me-
sure permet d’accéder au rapport des concentrations des deux énantiomères.

700
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 701

— Le cinéma 3D. La stéréoscopie est obtenue en filmant simultanément la même


scène sous deux angles de vue légèrement distincts (les deux objectifs sont distants
de 6,5 cm, soit la distance moyenne entre nos deux yeux). Les deux films sont projetés
simultanément dans la salle de cinéma, et il faut trouver un moyen pour que l’œil droit
ne voit que ce qui a été filmé par la caméra de droite, et l’œil gauche ce qui a été filmé
par la caméra de gauche.
Pour cela, lors de la projection, on polarise circulairement la lumière projetée
sur l’écran, dans des sens différents pour les deux films. Chaque « verre » des lunettes
3D contient une lame λ / 4 qui transforme la polarisation circulaire en polarisation rec-
tiligne, puis un polariseur à ±45° par rapport aux axes de la lame quart d’onde, qui
permet au verre de l’œil droit d’éteindre la lumière qui correspond à ce qu’a filmé la
caméra de gauche, et inversement pour le verre de l’œil gauche.

On peut remarquer que si la lumière provient de l’intérieur des lunettes, elle


rencontre d’abord le polariseur, puis une lame λ / 4 : chaque verre produit alors une
polarisation circulaire de sens différent. Lorsqu’on regarde avec des lunettes 3D une
personne qui porte elle-même de telles lunettes, on observe, en n’ouvrant qu’un œil,
qu’un des verres de la personne est opaque et l’autre transparent, et que le verre
opaque n’est plus le même si on n’ouvre que l’autre œil.

2.5 Notation complexe


G G
Pour une O.P.P.H, on peut utiliser la notation complexe : E = Re(E ) , avec :

701
702 Partie VII.  Physique des ondes

0  0  0 
G  i ( ωt − kx )
  
i ( ωt − kx )
G i ( ωt − kx ) G  
E =  E0 y e  =  E0 y e = E0 e , où E0 =  E0 y  . La compo-
     
 E ei ( ωt − kx −ϕ)   E e −i ϕ   E e −i ϕ 
 0z   0z   0z 
sante E0ze −i ϕ est complexe, sauf pour une O.P.P.H polarisée rectilignement, car alors
ϕ ∈ { 0, π} .
G G G
Pour une O.P.P.H.P.R, on peut écrire E = E0ei ( ωt − kx ) avec E0 ∈ R3 .

Dans tous les cas, le champ magnétique en notation complexe s’écrit :


G G G G
G k ∧ E G i ( ωt − kx ) G k ∧ E0
B= = B0e , avec B0 = .
ω ω
G G G G
Rappelons que lorsque deux ondes électromagnétiques ( E1, B1 ) et ( E2 , B2 ) se
superposent, si les champs s’ajoutent bien en vertu de la linéarité des équations de
G G G G G G
Maxwell : ( E = E1 + E2 , B = B1 + B2 ), ce n’est pas le cas des grandeurs énergétiques,
fonctions quadratiques du champ électromagnétique :
G G G G G G G G G G G G
G (E + E2 ) ∧ (B1 + B2 ) E1 ∧ B1 E2 ∧ B2 E1 ∧ B2 E2 ∧ B1 G G
— SP = 1 = + + + ≠ SP1 + SP2 .
µ0 µ µ µ µ0
 G0  G0  0
SP1 SP2 interférences

1 G G 1 1 G G
— ue = ε0 (E1 + E2 )2 = ε0E12 + ε0E22 + ε0E1 ⋅ E2 ≠ ue1 + ue2 .
2 2
 2
 
interférences
ue1 ue2

Ainsi, lorsque les ondes interfèrent, on ne peut pas utiliser le théorème de su-
perposition pour les grandeurs énergétiques.

Le cas de deux ondes se propageant dans la même direction, polarisées recti-


G G G
lignement dans des directions orthogonales, est une exception car on a E1 ⋅ E2 = 0 ,
G G G G G G
E1 ∧ B2 = 0 et E2 ∧ B1 = 0 . Il n’y a pas d’interférences dans ce cas.
Par la suite, nous nous placerons souvent dans le cas d’ondes polarisées rec-
tilignement. On peut en effet toujours décomposer une onde non polarisée, ou polari-
sée elliptiquement, en une somme d’ondes polarisées rectilignement dans des direc-
tions orthogonales, et sommer les intensités de chaque onde :
0  0  0 
G      
E =  E0 y cos(ωt − kx )   0y
= E cos( ωt − kx ) +
  0 

cos( )
 
0   E cos(ωt − kx − ϕ) 
E
 0z ω t − kx − ϕ     0 z 
G G
O.P.P.H.P.R selon ey O.P.P.H.P.R selon ez

702
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 703

De même puisque Re s1(M , t ) ⋅ s2 (M , t ) ≠ Re s1(M , t ) ⋅ Re s2 (M , t ) , il faut re-
venir aux grandeurs réelles avant de leur appliquer des opérateurs énergétiques.

2.6 Interférences et polarisation


Dans le cours d’optique nous avons utilisé le modèle scalaire de Fresnel des
ondes lumineuses dans lequel les signaux lumineux se superposent en un point :
G G G
ψ( r , t ) = ψ1( r , t ) + ψ 2 (r , t ) , et l’intensité lumineuse est proportionnelle à la moyenne du
G G
signal lumineux au carré : I (r ) = K ψ 2 (r , t ) .

La théorie électromagnétique montre que le signal lumineux est le champ élec-


trique et qu’il y a bien additivité des champs électriques en un point puisque les équa-
tions de Maxwell sont linéaires. D’autre part, pour une O.P.P :
E2 1
I= = K E 2 : la constante K s’identifie à .
µ 0c µ0 c
Cependant, le champ électrique étant un vecteur, le modèle scalaire peut être
mis en défaut dans certaines situations, assez rares.

Cas où la polarisation n’est pas modifiée lors de la propagation des ondes


En un point M se superposent les champs électriques de deux O.P.P.H issues
G G G
de la même source : E (M, t ) = E1(M, t ) + E2 (M, t ) .
Dans le cas où l’angle entre les directions de propagation est petit, on peut les
confondre : les deux champs électriques vibrent quasiment dans le même plan. Les
interférences s’observent si la différence de marche entre les deux ondes, de la source
au point M, est très inférieure à la longueur de cohérence. Les deux ondes qui interfè-
rent sont alors issues du même train d’onde et possèdent donc la même polarisation
ϕ (qui varie d’un train d’onde à l’autre). On suppose que les deux ondes se propagent
selon l’axe Ox et ont même amplitude. En notant φ le déphasage en M entre les deux
ondes, on obtient pour le champ électrique en M :
0  0 
G G G    
E ( x, t ) = E1( x, t ) + E2 ( x, t ) =  E0 y cos( ωt − kx )  +  E0 y cos(ωt − kx + φ)  . On a :
   
 E0 z cos( ωt − kx − ϕ)   E0 z cos(ωt − kx − ϕ + φ) 
I (M ) = K Ey 2 ( x, t ) + K Ez 2 (M, t ) = K (E0 y 2 + E0 z 2 )(1 + cos φ) . On retrouve bien dans

ce cas la formule I (M ) = 2I0 (1 + cos φ) des interférences à deux ondes de même am-
E0 y 2 + E0 z 2
plitude, où I0 = K est l’intensité obtenue dans le cas où une seule onde
2
arrive en M. La nature vectorielle des ondes lumineuses n’intervient pas ici. La théorie
scalaire fonctionne dans ce cas. En revanche, si les deux directions de propagation
font entre elles un angle important, la figure d’interférence sera moins contrastée.

703
704 Partie VII.  Physique des ondes

Les dispositifs expérimentaux sont conçus pour que les ondes qui interfèrent
possèdent des directions faisant entre elles un faible angle afin que la figure d’interfé-
rence soit la plus contrastée possible.

Cas où la polarisation est modifiée lors de la propagation des ondes / Inter-


férences en lumière polarisée
Si on interpose des polariseurs et/ou des lames à retard, le modèle scalaire de
la lumière est mis en défaut. Par exemple, il n’y a pas, comme on l’a remarqué au 2.5,
d’interférences entre deux ondes polarisées rectilignement dans deux directions ortho-
gonales.
De même, il n’y a pas d’interférences entre les composantes E y′ et E z′ du
G G
champ électrique E′ d’une même onde puisque E ′2 = E y′ 2 + Ez′ 2 : il n’y a pas de terme
en E y′ ⋅ Ez′ . Cependant, un analyseur, dont la direction de polarisation fait un angle β
avec Oy, permet de « faire interférer » ces composantes. En effet, si le vecteur unitaire
G G G
selon la direction de polarisation est eβ = cos βey + sin βez , le champ électrique en sor-
G G
tie de l’analyseur est E ′′ = (E y′ cos β + Ez′ sin β)eβ , soit une intensité :

I ′′ ∝ E y′ 2 cos2 β + Ez′ 2 sin2 β + 2 E y′ ⋅ Ez′ sin β cos β . Il est donc possible de faire in-

terférer les composantes E y′ et E z′ d’une même onde, et c’est pour β = ±π / 4 , c’est-


à-dire quand l’analyseur est orienté selon une bissectrice des axes Oy et Oz, que le
terme d’interférence est maximal.
Il faut encore pour obtenir des interférences entre E y′ et E z′ que ces deux com-
posantes soient déphasées l’une par rapport à l’autre. C’est précisément ce que per-
met une lame à retard dans le montage suivant : la lame, d’axe rapide Oy et d’axe lent
Oz, est précédée d’un polariseur dont la direction de polarisation fait un angle α avec
Oy, et suivie d’un analyseur dont la direction de polarisation fait un angle β avec Oy.

En sortie du polariseur, le champ électrique s’écrit :


G G G K
E = E0 cos( ωt )cos αey + E0 cos( ωt )sin αez , d’où une intensité I0 = E02 de l’onde
2

704
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 705

incidente sur la lame à retard. En sortie de la lame à retard, le champ électrique s’écrit
G G G
E ′ = E0 cos( ωt ′)cos αey + E0 cos( ωt ′ − ψ ) sin αez .
Enfin, en sortie de l’analyseur, il s’écrit :
G G
E ′′ = E0 [cos( ωt ′′)cos α cos β + cos(ωt ′′ − ψ )sin α sin β] eβ , et l’intensité obtenue est :

I ′′ = I0 cos2 α cos2 β + sin2 α sin2 β + 2cos ψ sin α cos α sin β cos β .


 
Deux configurations sont très intéressantes :
— A et P croisés : β = α ± π / 2 . L’intensité I ′′ se simplifie et devient :
I ⊥′′ = 2I0 sin2 α cos2 α [1 − cos ψ ] . On retrouve, au signe près pour cos ψ , la formule des
interférences à deux ondes déphasées de ψ. En effet, si on ne place pas de lame à
retard, on a ψ = 0 , et on se retrouve dans le cas où rien n’est placé entre P et A croi-
sés : I⊥′′ = 0 .
Si on fait tourner l’ensemble {P,A}, A et P restant croisés (en pratique, c’est la
lame à retard qu’on fait tourner, ce qui est équivalent), l’intensité s’annule pour α = 0 ,
ou α = π / 2 , ce qui permet de repérer les axes rapide et lent de la lame, et est maxi-
male pour α = π / 4 .
— A et P sont parallèles : β = α ou β = α + π . L’intensité I ′′ devient :
 
I /′′/ = I0   sin4 α + cos4 α + 2cos ψ sin2 α cos2 α  . On a ainsi :
 (sin2 α+ cos2 α )2 − 2 sin2 α cos2 α 
 
I /′′/ = I0 1 − 2 sin2 α cos2 α(1 − cosψ ) = I0 − I⊥′′ .
 
Les intensités dans les cas {A,P} croisés et {A,P} parallèles sont donc complé-
mentaires : I⊥′′ + I /′′/ = I0 .
Nous nous placerons dans le cas où α = π / 4 par la suite. Les intensités de
I0 I
[1 − cos ψ ] et I/′′/ = 20 [1 + cosψ ] .
sortie se simplifient en I ⊥′′ =
2
Les matériaux permettant de réaliser les lames à retard sont dits biréfringents
car ils possèdent deux indices de réfraction différents, ny pour une O.P.P.H polarisée
rectilignement selon l’axe rapide Oy, et nz > ny pour une O.P.P.H polarisée rectiligne-
G 2πny G
ment selon l’axe lent Oz. Les vecteurs d’onde correspondants sont k y = ex et
λ
G 2πnz G
kz = ex , où λ est la longueur d’onde dans le vide.
λ
Ainsi, pour une O.P.P.H de polarisation quelconque, on a :
0 
G  
E ( x = 0, t ) =  E0 y cos(ωt )  en entrée dans la lame d’épaisseur e, et :
 
 E0 z cos(ωt − ϕ) 

705
706 Partie VII.  Physique des ondes

 
 
0 
�   2πny  
E ′( x = e, t ) =  E0 y cos  ωt − e   en sortie de la lame.
  λ  
 
 E cos  ωt − 2 πn z
e − ϕ

 0z  
  λ 
2πny
En posant t ′ = t − e (changement d’origine des temps), on obtient :
λω
0 
�  
E ′( x = e, t ) =  E0 y cos(ωt ′)  . On identifie le retard de phase entre les compo-
 
 E cos ( ωt ′ − ψ − ϕ ) 
 0z 
2π(nz − ny ) 2π∆n
santes E z′ et E y′ introduit par la lame : ψ = e= e.
λ λ
Ainsi, pour un matériau dont la biréfringence est uniforme ( ∆n est le même en
tout point), on observe des franges d’égale épaisseur : pour α et β fixés, l’intensité I ′′
ne dépend que de l’épaisseur locale du matériau. En lumière monochromatique, si A
et P sont croisés, on observe des franges brillantes si ψ = (2k + 1)π , k ∈ Z , et des
franges sombres si ψ = 2k π , k ∈ Z . Ces franges sont inversées si A et P sont paral-
lèles. En lumière blanche, on observe des irisations pour des épaisseurs de lame telles
que δ = e∆n ≃ ℓ c = 1 µm . On réalise de jolies figures d’interférence en posant plusieurs
épaisseurs de ruban adhésif transparent (« scotch ») sur une lame de verre et en pla-
çant l’ensemble entre un polariseur et un analyseur . Le scotch est un polymère
et doit sa biréfringence au fait que ses molécules sont orientées dans un certain sens
lors du processus de fabrication. L’épaisseur du scotch est de l’ordre de 40 µm et
∆n ≃ 10−2 . On observe donc des irisations pour un petit nombre de couches de scotch
toutes alignées les unes sur les autres (afin que leurs lignes neutres coïncident), puis
du blanc d’ordre supérieur, le spectre de la lumière sortant du dispositif présentant
alors des cannelures sombres. Les irisations lorsque P et A sont croisés font appa-
raître les couleurs complémentaires (teintes de Newton à centre noir) de celles obte-
nues lorsque P et A sont parallèles (teintes de Newton à centre blanc) puisque les
longueurs d’onde éteintes dans un cas sont celles qui sont renforcées dans l’autre.
Certains matériaux perdent provisoirement ou définitivement leur isotropie et
deviennent biréfringents lorsqu’ils sont soumis à des contraintes mécaniques. Même
si leur épaisseur est constante, les lignes neutres varient d’un point à l’autre en fonc-
tion des contraintes appliquées. Lorsque ces matériaux sont transparents, on peut vi-
sualiser ces contraintes en les plaçant entre un polariseur et un analyseur, parallèles
ou croisés, et en les éclairant sous incidence normale avec de la lumière blanche.
Cette technique s’appelle photoélasticimétrie .

706
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 707

3. RÉFLEXION NORMALE D’UNE O.P.P.H SUR UN


CONDUCTEUR PARFAIT
3.1 Conditions aux limites imposées par la présence d’un conducteur par-
fait
La propagation des ondes électromagnétiques dans un conducteur ohmique
G G
(pour lequel s’applique la loi d’Ohm locale J = γE ) est étudiée dans le chapitre suivant.
Cette étude montre que le champ électromagnétique, ainsi que les densités vo-
lumiques de charges et de courants, sont nuls dans un conducteur parfait ( γ → ∞ ).
En revanche, des charges et des courants peuvent apparaître à la surface du
G
conducteur. On note σ et J S leurs densités surfaciques. Il en résulte qu’il n’y a plus
continuité du champ électromagnétique à l’interface entre le vide et le conducteur.
Ainsi, un conducteur parfait (1), placé dans le vide (2), impose des C.A.L au
champ électromagnétique dans le vide, du fait des relations de passage :
G G σ G G G G G
E2 − E1 = N1→ 2 , et B2 − B1 = µ0 J S ∧ N1→2 .
NG ε0 NG
0 0
G G
Les champs E1 et B1 sont les champs à l’interface du côté du conducteur, les
G G G
champs E2 et B2 sont les champs à l’interface du côté du vide ; N1→2 la normale à
l’interface dirigée du conducteur vers le vide.

Ces relations étant hors-programmes, nous admettrons les résultats suivants :


G
— E2 est normal au conducteur, donc la composante tangentielle du champ électrique
G G
dans le vide doit s’annuler à la surface du conducteur : E2T = 0 .
G
— B2 est tangent au conducteur, donc la composante normale du champ magnétique
G G
dans le vide doit s’annuler à la surface du conducteur : B2N = 0 .

En conséquence, en présence de conducteurs parfaits, des ondes progressives


ou stationnaires peuvent exister, avec d’éventuelles quantifications des pulsations.
Dans le cas où il n’y a qu’un plan conducteur, on aura une onde résultante sta-
tionnaire pour une onde en incidence normale sur le conducteur, une onde progressive
(mais non plane) pour une onde en incidence oblique :

707
708 Partie VII.  Physique des ondes

S’il y a plusieurs plans conducteurs, on peut avoir des ondes stationnaires :

On peut aussi avoir des ondes progressives, mais non planes :

Bien que le milieu de propagation (le vide) soit non dispersif, la présence des
conducteurs impose des C.A.L qui rendent possible la propagation d’ondes non
planes. De telles ondes peuvent être dispersées, c’est-à-dire se propager à une vi-
tesse de phase v ϕ = ω / k qui dépend de la pulsation ω.

Les ondes sont forcément stationnaires à l’intérieur d’une cavité parallélépipé-


dique, et il faut trois nombres quantiques pour décrire un mode propre. On peut avoir
des ondes stationnaires entre deux plans parallèles ou dans un guide à section rec-
tangulaire, mais dans le cas général, l’onde est progressive et se propage selon des
modes de pulsations quantifiés. Les conducteurs plans, ou cylindriques comme le
câble coaxial, permettent de guider les ondes électromagnétiques.

708
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 709

3.2 Onde réfléchie / Onde résultante


Nous allons étudier la réflexion nor-
male d’une O.P.P.H sur un plan conducteur
parfait en x = 0 . L’onde incidente se pro-
page dans le sens des x croissants, et nous
la supposerons polarisée rectilignement se-
G
lon ey . Utilisons la notation complexe :
G G G ω G
Ei = E0ie j ( ωit − ki x )ey , avec ki = i ex .
c
G G
G ki ∧ Ei
On en déduit Bi = soit :
ωi
G E G
Bi = 0i e j ( ωit − ki x )ez .
c
Le champ incident vérifie les équations de Maxwell dans le vide, mais pas les
C.A.L car à la surface x = 0 du conducteur, la composante du champ électrique tan-
gentielle au conducteur, Eiy ( x = 0, t ) , ne s’annule pas à chaque instant. Le champ in-

cident n’étant pas solution du problème, on en déduit qu’il faut lui ajouter un deuxième
champ, également solution des équations de Maxwell dans le vide, tel que les C.A.L
soient vérifiées. Les équations de Maxwell étant linéaires, le champ résultant sera so-
lution du problème.
Physiquement, ce champ résultant correspond à l’onde réfléchie par le conduc-
teur, créée par les charges mobiles à la surface du conducteur, mises en mouvement
sous l’action de l’onde incidente.
Afin que le champ résultant vérifie les
C.A.L, et pour respecter les symétries du sys-
tème, nous cherchons cette onde réfléchie sous
la forme d’une O.P.P.H se propageant selon
G G
−ex et polarisée rectilignement selon ey :
G G G ω G
Er = E0r e j ( ωrt + kr x )ey , avec kr = − r ex .
c
G G
G kr ∧ Er
On en déduit Br = soit :
ωr
G E G
Br = − 0r e j ( ωr t + kr x )ez .
c
Le champ résultant vérifie bien les équations de Maxwell, et la C.A.L pour le
G G G G
champ magnétique, puisque B( x = 0, t ) = Bi ( x = 0, t ) + Br ( x = 0, t ) = B( x = 0, t )ez est tan-
gent au conducteur.
Il reste à vérifier la C.A.L pour le champ électrique :

709
710 Partie VII.  Physique des ondes

E y ( x = 0, t ) = Eiy ( x = 0, t ) + Ery ( x = 0, t ) = 0 ∀t , soit E0ie j ωit + E0r e j ωrt = 0 ∀t . Ceci n’est

possible que si t ֏ e j ωit et t ֏ e j ωr t forment une famille liée, ce qui implique ωr = ωi .

Il n’y a pas de changement de fréquence lors de la réflexion : ωr = ωi = ω


ω
 kr = ki = k = . On a alors E0r = −E0i = −E0 : le coefficient de réflexion vaut −1
c
pour la composante tangentielle du champ électrique.

L’onde résultante est bien solution du problème. Donnons son expression en


notation complexe puis réelle :

E = E e j ( ωt − kx ) − E e j ( ωt + kx )  e� = E e j ωt e − jkx − e jkx  e�
  0 0  y 0 
��� ����  y
 −2 j sin( kx )
� � �
B =  E0 e j ( ωt − kx ) + E0 e j ( ωt + kx )  ez = E0 e j ωt e − jkx + e jkx  ez
    
 c c  c �������
 2 cos( kx )
� �
E = 2E0 sin(kx )sin(ωt )ey
 �
� E0 � : l’onde dans le vide est stationnaire ; les nœuds de E
B = 2 cos(kx )cos(ωt )ez
 c

sont les ventres de B et vice versa.

3.3 Aspect énergétique / Bilan photonique et pression de radiation


Grandeurs énergétiques
� �
Les grandeurs énergétiques étant quadratiques (d’ordre 2 en E et B ), il est
nécessaire pour les calculer de revenir en notation réelle pour le champ électroma-
gnétique.
ε0E 2 B2 E 2
— ue = = 2ε0E02 sin2 (kx )sin2 (ωt ) et um = = 2 0 2 cos2 (kx )cos2 (ωt ) , soit :
2 2µ0 µ0c

710
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 711

um = 2ε0E02 cos2 (kx )cos2 (ωt ) , car ε0µ0c 2 = 1. Il n’y a plus équipartition de l’énergie
G
pour une onde stationnaire comme c’était le cas pour une O.P.P. Aux nœuds de E ,
G
l’énergie est uniquement magnétique, aux nœuds de B elle est uniquement élec-
trique. En moyenne temporelle : ue = ε0E02 sin2 (kx ) et um = ε0E02 cos2 (kx ) . D’où

u = ue + um = ε0E02 . En moyenne, l’énergie volumique électromagnétique est la


même en tout point.
G G
G E ∧B E 2 G G
— SP = = 4 0 sin(kx )cos(kx )sin(ωt )cos(ωt )ex = SP ex .L’énergie se propage
µ0 µ0c
G G G G
comme l’onde selon ex . Les nœuds de SP sont ceux de E et ceux de B : il y en a
tous les λ / 4 . Les plans nodaux d’équation x = −nλ / 4 , avec n ∈ N , ne sont pas tra-
versés par l’énergie, qui oscille donc entre deux plans nodaux consécutifs. Enfin :
G G
SP = 0 : il n’y a pas de propagation de l’énergie en moyenne pour une onde station-
naire.

Bilan photonique
Nous allons, à l’aide du modèle photonique, calculer la force qui s’exerce sur
une surface S de conducteur parfait soumis à une O.P.P.H en incidence normale.
Pour cela, introduisons le vecteur densité volumique de courants de photons incidents
G G
J = Jex (en m-2 ⋅ s-1 ), défini par la relation δN = J ⋅ S dt , où δN est le nombre de
photons incidents par unité de temps sur la surface S .
ω
Chaque photon, associé à l’onde incidente de fréquence ν = , transporte une

G hν G
énergie hν , et une quantité de mouvement pi = ex . L’énergie incidente sur la sur-
c
face S du conducteur pendant dt vaut donc δUi = δN ⋅ hν = JhνS dt . Cette énergie se
déduit aussi du flux moyen du vecteur de Poynting à travers S : δUi = SPi S dt , avec

Ei2 E0 2 E02
SPi = = . On en déduit J = .
µ 0c 2µ0c 2µ0chν
Le conducteur parfait n’absorbant pas l’onde incidente, les photons sont réflé-
chis en sens inverse, avec la même densité volumique de courants. Les photons re-
G hν G
partent avec la même énergie hν , et une quantité de mouvement pr = − ex .
c
Si on effectue un bilan de quantité de mouvement aux photons qui subissent un
choc sur S pendant dt (système fermé Σ), on a :
G G G hν G E0 2 hν G E 2 G
δp = δN  pr − pi  = −2J ⋅ S dt ⋅ ex = −2 ⋅ S d t ⋅ ex = − 0 2 ⋅ S d t ex .
c 2µ0chν c µ0 c

711
712 Partie VII.  Physique des ondes

G
δp G
Finalement : = −ε0E02 S ex . Le théorème de la quantité de mouvement, ap-
dt
G
pliqué à Σ, montre que −ε0E02 S ex est la force subie par les photons de la part du
conducteur, qui est l’opposée de la force cherchée.

La force qui s’exerce sur une surface S de conducteur parfait soumis à une
G G
O.P.P.H en incidence normale vaut donc Fp = ε0E02 S ex . On peut définir la pression

moyenne de radiation p = ε0E02 s’exerçant sur le conducteur.

Cette force repousse le conducteur. Des voiles solaires de très grande enver-
gure, utilisant la force exercée par le rayonnement solaire, peuvent permettre de pro-
pulser un vaisseau spatial et de naviguer ainsi dans l’espace.

4. RÉFLEXION OBLIQUE, CÂBLE COAXIAL, CAVITÉ


PARALLÉLÉPIPÉDIQUE 
Nous allons donner trois applications de la réflexion d’une onde électromagné-
tique sur un conducteur parfait : interférences à deux ondes, guide d’onde coaxial, et
four à micro-ondes.

4.1 Interférences à deux ondes par réflexion oblique sur un miroir 


Étudions la réflexion oblique d’une
O.P.P.H sur un plan conducteur parfait situé en
x = 0 . On définit les angles d’incidence :
 π π 
θi ∈ 0,  et de réflexion θr ∈  , π  que font
 2 2 
les vecteurs d’onde incident et réfléchi avec
l’axe Ox normal au conducteur. Ainsi :
G G G  ωi
ki = ki (cos θiex + sin θiey ) ki = c
G G G , avec  .
kr = kr (cos θr ex + sin θr ey ) k = ωr
 r c

712
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 713

G
L’onde incidente est supposée polarisée rectilignement selon ez , c’est-à-dire
orthogonalement au plan d’incidence xOy. Pour vérifier les C.A.L, l’onde réfléchie doit
G
également être polarisée rectilignement selon ez . Ces ondes s’écrivent :
G G →
j ( ω t − k ⋅OM ) G G
Ei = E0ie i i ez = E0ie j ( ωit − ki x cos θi − ki y sin θi )ez

 G kG ∧ EG
B = i i E G G
= 0i e j ( ωit − ki x cos θi − ki y sin θi )  sin θiex − cos θiey 
 i ωi c
G G →
j ( ω t − k ⋅OM ) G G
Er = E0r e r r ez = E0r e j (ωr t − kr x cos θr − kr y sin θr )ez

 G kG ∧ EG
B = r r E G G
= 0r e j ( ωr t − kr x cos θr − kr y sin θr ) sin θr ex − cos θr ey 
 r ωr c
On a vu que la composante tangentielle du champ électrique résultant doit être
nulle dans le vide à l’interface :
(Eiz + Erz ) ( x = 0, y,t ) = 0 ∀( y,t ) , soit E0ie j (ω t −k y sin θ ) + E0r e j (ω t −k y sin θ ) = 0 ∀( y,t ) .
i i i r r r

 ω
ωr = ωi = ω  kr = ki = k =
Cela entraîne  c , soit sin θi = sin θr . La solution cor-
k sin θ = k sin θ
 i i r r

respondant à une onde réfléchie dans le vide est telle que θr = π − θi .

Les lois de Descartes de la réflexion stipulent que l’onde est réfléchie dans le
G G
plan d’incidence (défini par ki et le vecteur normal à l’interface, ici ex ), et que :
θr = π − θi = π − θ . Elles se déduisent des relations de passage.

On doit enfin avoir E0r = −E0i = E0ie j π .

La réflexion sur un conducteur parfait induit un déphasage de π entre l’onde


réfléchie et l’onde incidente.

On peut maintenant calculer l’onde résultante.


G G G
E = E0e j ( ωt − kx cos θ− ky sin θ)ez − E0e j ( ωt + kx cos θ− ky sin θ)ez , car cos θr = − cos θ .
G G G
( )
 E = E0e j ( ωt − ky sin θ) e− jkx cos θ − e jkx cos θ ez = −2 jE0 sin(kx cos θ)e j ( ωt − ky sin θ)ez .
G E G G
B = 0 e j ( ωt − ky sin θ) sin θ e − jkx cos θ − e jkx cos θ ex − cos θ e − jkx cos θ + e jkx cos θ ey  .
( ) ( )
c  
G E G G
 B = −2 0 e j ( ωt − ky sin θ)  j sin θ sin(kx cos θ) ex + cos θ cos(kx cos θ) ey  , ce champ est
c
tangentiel au conducteur en x = 0 donc vérifie bien la C.A.L due à la présence du
conducteur parfait.
G G
En notation réelle, E = 2E0 sin(kx cos θ)sin(ωt − ky sin θ)ez , et :

713
714 Partie VII.  Physique des ondes

G 2E0 G G
B= sin θ sin(kx cos θ)sin(ωt − ky sin θ) ex − cos θ cos(kx cos θ)cos(ωt − ky sin θ) ey  .
c 
L’onde résultante est donc progressive. La présence du terme en ωt − ky sin θ
 π
montre en effet qu’elle progresse selon la direction des y croissants si θ ∈  0,  . Ce
 2
n’est pas une onde plane car elle n’est pas uniforme dans un plan y = Cte : elle dé-
pend de x.
En moyenne, le vecteur de Poynting est bien porté par la direction de propaga-
G G
G E ∧B E 2 G
tion : SP = = 2 0 sin θ sin2 (kx cos θ) ey .
µ0 µ0c
Calculons les moyennes temporelles des énergies volumiques :
ε0 E 2
ue = = ε0E02 sin2 (kx cos θ) .
2

B2
um = = ε0E02 sin2 θ sin2 (kx cos θ) + cos2 θ cos2 (kx cos θ) .
2µ0  

Ces énergies ne sont pas équiréparties, même en valeur moyenne.

En reprenant les calculs dans le cas où l’onde est polarisée dans le plan d’inci-
dence, on obtient :
ue = ε0E02  sin2 θ cos2 (kx cos θ) + cos2 θ sin2 (kx cos θ) .
 
um = ε0E02 cos2 (kx cos θ) .
Pour savoir si une pellicule photographique était sensible à ue , um , ou bien
à leur somme, Wiener a réalisé une expérience consistant à placer une mince pellicule
photographique transparente dans un plan faiblement incliné d’un angle ε par rapport
à la surface d’un conducteur parfait. Le plan de la pellicule et le plan conducteur se
coupent selon l’arête Oz. L’onde incidente étant envoyée sous l’angle θ = π / 4 .
Effectuons le calcul des énergies volumiques moyennes pour cet angle.
— Pour une polarisation orthogonale au plan d’incidence :
 2  B2 ε E 2
ue = ε0E02 sin2  k x  , et um = = 0 0 .
 2  2µ0 2
 
— Pour une polarisation dans le plan d’incidence :
ε0E02  2 
, et um = ε0E02 cos2  k x .
 2 
ue =
2  
Dans le cas où l’onde était polarisée orthogonalement au plan d’incidence, il
constata, après développement, que la pellicule avait été impressionnée dans les
zones où se trouvaient des ventres du champ électrique, c’est-à-dire là où ue est
maximale.

714
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 715

Dans le cas où elle était polarisée dans le plan d’incidence, il constata que la
pellicule avait été uniformément impressionnée. La pellicule photographique est donc
sensible à E 2 , pas à B 2 .


Dans le cas de l’incidence quelconque pour une onde polarisée selon ez :

ε0E02
ue = ε0E02 sin2 (kx cos θ) = [1 − cos(2kx cos θ)]
2
ε0E02
 2
 4πx cos θ   ε0E0   2πx  
 ue = 1 − cos    = 1 − cos  i   .
2   λ   2   
On observe, sur un écran placé dans un plan orthogonal au conducteur, par
exemple le plan y = 0 , des franges d’interférences, dont la périodicité spatiale, appe-
λ
lée interfrange, vaut i = . En prenant ε << 1 au lieu de ε = π / 2 , Wiener a pu
2cos θ
i λ
obtenir sur la pellicule un interfrange i ′ ≃ = visible à l’œil nu.
ε ε 2
La détermination de l’interfrange
peut se faire dans le cadre de l’optique
ondulatoire, en utilisant la notion de dif-
férence de marche.
Grâce à la réflexion sur le plan
conducteur, deux rayons provenant
d’un point source S à l’infini parviennent
en un point M sur l’axe Ox : le rayon di-
rect (1), et le rayon réfléchi (2), qui
passe d’après les lois de Descartes par
le symétrique M ′ de M par rapport au
plan x = 0 .
La différence de marche géomé-
trique entre les deux rayons, depuis la
source S jus-qu’au point M, vaut :

715
716 Partie VII.  Physique des ondes

δgéom = SA
 + AM − SM
N  + AM ′ −
= SA SM
N , puisque AM = AM ′ .
chemin (2) chemin (1) chemin (2) chemin (1)

 + HM ′ −
δgéom = SH SM
N , or SM = SH , si H est le projeté orthogonal de M sur la
chemin (2) chemin (1)

droite (SM′) . On a finalement δgéom = HM ′ = MM ′ cos θ = −2 x cos θ .


Cependant, nous avons vu que l’onde était déphasée de π lors de la réflexion,
ce qui correspond à une différence de marche supplémentaire de +λ / 2 .
La différence de marche en M entre les deux rayons provenant de S vaut
λ
δ = − 2x cos θ . Il y aura des interférences constructives (franges brillantes) aux points
2
(2 p − 1)λ
M tels que δ = pλ avec p ∈ N∗ , soit pour x = − , et destructives (franges
4 cos θ
λ pλ
sombres) aux points M tels δ = pλ + avec p ∈ N , soit pour x = − .
2 2 cos θ
On retrouve qu’il y a une frange sombre sur la surface du conducteur (en ces
points, les deux ondes qui interfèrent sont en opposition de phase), et que l’interfrange
λ
vaut i = . En revanche cette démarche ne permet pas d’expliquer l’absence de
2cos θ
franges si la lumière est polarisée dans le plan d’incidence, cas où le modèle scalaire
de la lumière est mis en défaut.

4.2 Mode de propagation non dispersif dans un câble coaxial 


Mode étudié
On utilise les câbles coaxiaux pour transporter des signaux sur des distances
maximales de quelques km. Les débits d’information atteignent 800 Mbits ⋅ s-1 . Un des
avantages des câbles coaxiaux par rapport au transport d’information avec une ligne
bifilaire, est l’insensibilité aux perturbations électromagnétiques extérieures.
Le câble a été décrit dans le chapitre sur les phéno-
mènes ondulatoires non dispersifs. L’âme, de rayon a, et la
tresse, de rayon intérieur b, sont supposées être des con-
ducteurs parfaits. Le champ électromagnétique se propage
dans l’espace, supposé vide pour le moment, situé entre les
deux conducteurs. L’axe de symétrie de révolution du sys-
tème est ici noté Oz.
On réalise ainsi un guide d’onde électromagnétique,
pour lequel plusieurs modes de propagation sont possibles.
Aux fréquences suffisamment faibles, on peut mon-
trer que le seul mode de propagation sinusoïdal est un mode pour lequel le champ
G G
électrique s’écrit en notation complexe E = f (r )ei ( ωt − kz )er : il est radial, et se propage
selon Oz, dans le sens des z croissants si on prend k > 0 .

716
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 717

Détermination du champ électromagnétique


G G
Le champ ( E , B ) vérifie les quatre équations de Maxwell dans le vide. Celle de
G ∂ a
Maxwell-Gauss, div E = 0 , entraîne
∂r
[r f (r )] = 0  f (r ) = E0 r , en introduisant la va-
leur E0 du champ électrique dans le vide à la surface de l’âme.
G a G
Le champ électrique étudié est E = E0 e i ( ωt − kz )er .
r
G
Le champ magnétique B se déduit de l’équation de Maxwell-Faraday :
G
→ G ∂B G G i ∂ Er G i G k G
rot E = − = −i ωB  B = eθ = ( −ikEr )eθ = Er eθ .
∂t ω ∂z ω ω
G a k i ( ωt − kz ) G
Le champ magnétique étudié est B = E0 e eθ .
r ω
G
On constate que l’équation de Maxwell-Thomson div B = 0 est alors vérifiée.
Il reste à vérifier l’équation de Maxwell-Ampère :
G

→ G 1 ∂E ∂Bθ i ω iω k ω ω2
rot B = 2 − = 2 Er  ikBθ = 2 Er , d’où k ⋅ Er = 2 Er ⇔ k 2 = 2 .
c ∂t ∂z c c ω c c
ω
On a k = comme pour une O.P.P.H : il n’y a
c
pas de dispersion pour le mode étudié. L’onde est lo-
G G G
calement plane : ( k , E , B ) forment un trièdre direct, et
G G
on a encore B c = E , mais elle n’est pas plane,
G G
puisque le champ ( E , B ) n’est pas uniforme dans une
section z = Cte .
G G G → G G G
En particulier, les relations div A = −ik ⋅ A , et rot A = −ik ∧ A , valables pour
une O.P.P.H comme on le verra dans le chapitre suivant, ne s’appliquent pas ici.
Il reste à montrer que les C.A.L sont vérifiées.
C’est bien le cas puisqu’à la surface des conducteurs :
G
— Le champ électrique est normal (il est porté par er ).
G
— Le champ magnétique est tangent (il est porté par eθ ).

4.3 Cavité parallélépipédique, four à micro-ondes 


On considère une cavité parallélépipédique li-
mitée par des conducteurs parfaits. On étudie un
mode propre de cette cavité caractérisé par le
champ électrique :
G  πx   πy  i ωt G G
E = E0 sin   sin   e ez = Ez ( x, y , t )ez .
  
a b 

717
718 Partie VII.  Physique des ondes

G ∂E z
L’équation div E = = 0 (M.G) est bien vérifiée.
∂z
G
Le champ électrique E vérifie également les C.A.L :
G
— Comme il est porté par ez , sa composante tangentielle est nulle sur les surfaces
z = 0 et z = e des conducteurs.
Ez ( x = 0, y , t ) = Ez ( x = a, y , t ) = 0 ∀y ∀t
—  : sa composante tangentielle est nulle sur
Ez ( x, y = 0, t ) = Ez ( x, y = b, t ) = 0 ∀x ∀t
les autres surfaces des conducteurs.
En combinant les équations de Maxwell dans le vide, on obtient une deuxième
G
G G 1 ∂2 E
équation ne faisant intervenir que E : l’équation de propagation ∆E = 2 2 . Cette
c ∂t
∂ 2 Ez ∂ 2 Ez 2
1 ∂ Ez π2 π2 ω2
équation entraîne + = ⇔ + = . Le mode propre étudié
∂x 2 ∂y 2 c 2 ∂t 2 a2 b2 c2
1 1
correspond à la pulsation ω = πc + .
a2 b2
On ne peut pas encore en déduire qu’on tient une solution du problème, car
toutes les équations de Maxwell doivent être vérifiées, ainsi que les C.A.L portant sur
G G
le champ magnétique B . Deux des 4 équations de Maxwell, M.F et M.A, couplent E ,
G G
connu, à B . On choisit d’utiliser l’équation de M.F pour calculer B :
G
→ G ∂B G G i  ∂E z G ∂Ez G 
rot E = − = −i ωB  B =  ex − ey  . On en déduit :
∂t ω  ∂y ∂x 
G iei ωt E0  π  πx   πy  G π  πx   πy  G 
B=  sin   cos   ex − cos   sin   ey  . On a donc :
ω b  a   b  a  a   b  
G ∂Bx ∂By iei ωt E  πx   πy   π
2
π2 
0
divB = + = cos   cos    −  = 0 . M.T est bien vérifiée, et
∂x ∂y ω  a   b   ab ab 
M.A également car elle n’est pas indépendante des 4 équations déjà vérifiées.
G
Les C.A.L pour le champ magnétique B sont bien vérifiées :
— Comme Bz = 0 , sa composante normale est nulle sur les surfaces z = 0 et z = e
des conducteurs.
Bx ( x = 0, y , t ) = Bx ( x = a, y , t ) = 0 ∀y ∀t
—  : sa composante normale est nulle sur les
By ( x, y = 0, t ) = By ( x, y = b, t ) = 0 ∀x ∀t
autres surfaces des conducteurs.
Pour effectuer un bilan énergétique, repassons en notation réelle :
G  πx   πy  G
— E = E0 sin   sin   cos( ωt )ez .
 a   b 

718
Chapitre 3.  Ondes électromagnétiques dans le vide 719

� πE  1  πx   πy  � 1  πx   πy  � 
0
— B= − sin   cos   ex + a cos  a  sin  b  ey  sin(ωt ) .
ω  b  
a  b      
Calculons les énergies électrique et magnétique de la cavité :
a b e
ε0E 2
U e (t ) =    2
d xd yd z
x =0 y = 0 z =0
a b e
ε 0 E0 2  πx   πy  ε abeE02
=
2
cos2 (ωt )  sin2 
 a  dx ⋅ sin2 


b 
dy 
dz = 0
8
cos2 (ωt )
x =0
������� y =0 0�
��� ����� � z�
=�
a /2 b /2 e
a b e a b
B2 e π 2E0 2  πx   πy 
Um (t ) =    2µ0
d xd yd z =
2µ 0 b 2 2
ω  a 
sin2 (ωt ) sin2   dx ⋅

cos2  
 b 
 dy
x =0 y = 0 z =0 x =0 y =0
a b
e π 2 E0 2  πx   πy 
+ 2 2
2µ0a ω 
sin2 (ωt ) cos2   dx ⋅
 a  
sin2 
 b 
dy
x =0 y =0

eabπ2E02  1 1  ε abeE02 π2 c 2  1 1
Um (t ) = sin2 (ωt )  2 + 2  = 0 sin2 (ωt ) 2  2 + 2  .
8µ0 ω2 b a  8 ω a
������� b 
1

Finalement Um (t ) = ε0abeE0 sin (ωt ) / 8 et U = Ue (t ) + Um (t ) = ε0abeE02 / 8 .


2 2

L’énergie électromagnétique de la cavité se conserve car l’onde, qui subit de multiples


réflexions sans pertes sur les parois du conducteur parfait, est piégée dans la cavité.
Plus généralement, la quantification des modes propres de la cavité fait inter-
ℓ2 m2 n2
venir trois entiers ℓ, m et n. Les pulsations propres sont ωℓmn = πc + + et
a2 b2 e2
�   ℓπx   mπy   nπz  �  ℓπx   mπy   nπz  �
E = E0 x cos   sin   sin   ex + E0 y sin   cos   sin  e  ey
  a   b   e   a   b   
 ℓπx   mπy   nπz  � 
+E0 z sin   sin  b  cos  e  ez  cos(ωt )
 a      
La fréquence f = 2,45 GHz du spectre électromagnétique est allouée au four
micro-ondes, cavité parallélépipédique. Elle fait partie du spectre absorbé par la mo-
lécule d’eau, mais n’est pas une fréquence de résonance correspondant à un maxi-
mum de l’absorbance. Si c’était le cas, l’onde serait absorbée à la surface des ali-
ments, dont l’intérieur resterait froid. Elle correspond à une profondeur de pénétration
de l’onde d’une dizaine de centimètres, le but étant de chauffer les aliments de façon
λ c
la plus homogène possible. Pour cette fréquence, = = 6,1 cm . Les seuls modes
2 2f
propres possibles dans le four sont ceux pour lesquels il existe un triplet d’entiers ℓ, m
et n tels que ω = ωℓmn .

719
720 Partie VII.  Physique des ondes

Considérons par exemple un four micro-ondes de dimensions a = 44 cm ,


b = 32 cm , et e = 18 cm . On cherche (ℓ, m, n) vérifiant au mieux la condition :

2πc ℓ2 m 2 n 2 λ ℓ2 m 2 n 2
ω= = ωℓmn = πc 2 + 2 + 2 ⇔ + + = 1.
λ a b e 2 a2 b2 e2
On trouve les modes (2,5,0), (4,4,1) et (7,1,0). On a donc dans le four une su-
perposition de modes propres à 3D, pour lesquels la distance entre deux ventres (ou
deux nœuds) du champ électrique ne sera pas nécessairement λ / 2 . On ne peut pas
déduire la valeur de c en mesurant la distance entre deux zones voisines où une
plaque de chocolat chauffée une dizaine de secondes a fondu. On peut en revanche
en déduire la nécessité de placer les aliments sur une plaque tournante pour homogé-
néiser le plus possible leur température.

720
721

[PHYSIQUE DES ONDES 4]

DISPERSION ET ATTÉNUATION /
O.P.P.H ÉLECTROMAGNÉTI-
QUES DANS LES PLASMAS ET
LES CONDUCTEURS
1. PROPAGATION DISPERSIVE LE LONG D’UNE
CORDE / DISPERSION / ATTÉNUATION
1.1 Exemple de la corde vibrante amortie
On garde les mêmes hypothèses sur la nature de la corde et de la perturbation
que dans le chapitre sur les phénomènes ondulatoires non dispersifs, mais en tenant
compte d’un frottement fluide linéaire. L’élément de corde de longueur dℓ , qui corres-
pond au repos au segment [ x − dx / 2, x + dx / 2] , subit les forces de tension de la part
� � � �
du reste de la corde −T ( x − dx / 2, t ) et T ( x + dx / 2, t ) , et une force dFv = −αv ( x, t )dℓ

proportionnelle à sa vitesse v ( x, t ) , et à sa longueur.

� ∂ψ �
Dans le cadre d’une perturbation traitée à l’ordre 1, dFv = −α dxey .
∂t
Appliquons le P.F.D à l’élément de corde, dans le référentiel du laboratoire sup-
posé galiléen :
∂ 2ψ � � � ∂ψ �
µdx 2 ey = T ( x + dx / 2, t ) − T ( x − dx / 2, t ) − α dxey , en négligeant encore le poids.
∂t ∂t
� ∂T
La projection sur ex donne toujours 0 = dx : la norme de la tension ne dé-
∂x
pend que du temps, et s’écrit T (t ) = T0 + T1(t ) , où T1(t ) est la composante de la tension
d’ordre 1 en ψ, qui se rajoute à la tension au repos T0 lors de la perturbation.

721
722 Partie VII.  Physique des ondes

G
On obtient en projection sur ey :

∂ 2ψ ∂θ ∂ψ ∂θ ∂ψ
µdx = [T0 + T1(t )] dx − α dx = T0 dx − α dx , à l’ordre 1 en ψ.
∂t 2 ∂x ∂t ∂x ∂t
∂ψ ∂ 2ψ ∂ 2ψ ∂ψ
Comme θ = , on obtient l’équation µ 2 = T0 2 − α régissant ψ( x, t ) ,
∂x ∂t ∂x ∂t
∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ 1 ∂ψ T T
soit 2
= 2 2
+ avec c = 0 , et ν = 0 homogène à une viscosité ciné-
∂x c ∂t ν ∂t µ α
matique, ou à un coefficient de diffusion : [ ν ] = L2 ⋅ T -1 . On retrouve d’ailleurs une
équation de diffusion si µ → 0  c → ∞ car alors les phénomènes de propagation
sont négligeables.

∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ 1 ∂ψ
L’équation 2
= 2 2
+ est une équation d’onde linéaire, mais ce n’est
∂x c ∂t ν ∂t
∂ 2ψ 1 ∂ 2ψ
pas l’équation de d’Alembert = (qui correspond à α → 0 ).
∂x 2 c 2 ∂t 2

1.2 Recherche de solutions d’O.P.P.H


Comme ψ( x, t ) ne vérifie pas l’équation de d’Alembert, la perturbation ne se met
plus sous la forme ψ( x, t ) = F ( t − x / c ) + G ( t + x / c ) , ce qu’on conçoit aisément. En
effet, le terme F ( t − x / c ) correspond à une onde se propageant à la célérité c dans
le sens des x croissants, sans déformation, alors que la présence de forces de frotte-
ment va atténuer l’onde lors de sa propagation. Il n’y a d’ailleurs plus invariance de
l’équation par le changement t → −t : les phénomènes ondulatoires, en présence de
phénomènes dissipatifs, sont irréversibles.
Cependant, l’équation restant linéaire, on peut rechercher des solutions sinu-
soïdales dans le temps, et utiliser la notation complexe : ψ( x, t ) = f ( x )e i ωt avec f com-
plexe. Ces solutions correspondent par exemple au cas où l’on impose une vibration
sinusoïdale de pulsation ω à une extrémité de la corde.
 ω2 i ω 
On obtient f ′′( x ) +  2 −  f ( x ) = 0 , en injectant ψ( x, t ) = f ( x )e i ωt dans l’équa-
 c ν 
tion d’onde. De façon générale, pour une équation d’onde linéaire, on aboutit à une
équation différentielle linéaire à coefficients complexes régissant f ( x ) . Les solutions
de cette équation se décomposent sur une base de fonctions qu’on cherche sous la
forme x ֏ er x avec r ∈ C , ou plutôt, ce qui est équivalent, sous la forme x ֏ e −ikx
car alors la solution ψ( x, t ) = ψ 0e i ( ωt − kx ) prend la forme d’une O.P.P.H.

722
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 723

Attention cependant, car on n’a plus k = ω / c comme c’était le cas pour l’équa-
tion de d’Alembert : la relation entre k et ω, appelée relation de dispersion, n’est plus
linéaire, et k peut être complexe.
Pour la corde, avec ψ( x, t ) = ψ 0e i ( ωt − kx ) , on obtient :

ω2 iω ω2  ic 2 
k2 − 2
+ = 0 ⇔ k 2 = 2 1 −  . Nous allons supposer pour simplifier que les
c ν c  ων 
frottements visqueux sont un terme correctif : c 2 << ων . On peut alors se contenter
c2 ω c2  ω c 
d’un D.L à l’ordre 1 en : k = ± 1 − i  = ± −i . Les solutions sont donc
ων c  2ων  c 2ν 
c  x c  x
− x i ω t −  x i ω t + 
ψ( x , t ) = ψ 0 + e 2ν e  c  + ψ 0 −e 2ν e  c, et leur sens physique est simple à dé-
gager.
c  x
− x i ω t − 
— Le terme ψ 0 +e 2ν e  c  correspond à une O.P.P.H se déplaçant dans le sens
des x croissants, à la célérité c, en s’atténuant sur une longueur caractéristique
c
− x
δ = 2ν / c , car l’amplitude de l’onde, ψ0 + e 2ν , décroît quand x augmente.
c  x
x i ω t + 
— Le terme ψ 0 − e 2 ν e  c correspond à une O.P.P.H se déplaçant dans le sens
des x décroissants, à la célérité c, en s’atténuant sur la longueur δ , car l’amplitude de
c
x
l’onde, ψ0 −e 2ν , décroît quand x diminue.
On constate sur cet exemple que si k possède une partie imaginaire non nulle,
la solution ψ0ei ( ωt − kx ) est amortie.

On cherche à déterminer les solutions d’une équation d’onde linéaire régissant


une grandeur s( x, t ) , ou bien d’un système d’équations linéaires couplant des gran-
deurs [s1( x, t ), s2 ( x, t ),...] .

Une technique est de les chercher sous la forme complexe s( x, t ) = s0ei ( ωt − kx ) ,

ou bien  s1 = A1ei ( ωt − kx ), s2 = A2ei ( ωt − kx ) ,... , avec ω ∈ R + , et k ( ω) = k ′( ω) + ik ′′( ω) , où


 
(k ′, k ′′) ∈ R 2 , c'est-à-dire des solutions d’O.P.P.H.
La relation qu’on obtient entre k et ω est appelée relation de dispersion.
— Si k ′′ ≠ 0 , l’onde est atténuée lors de sa propagation.
— Si k ′ = 0 , l’onde est stationnaire : elle ne se propage pas.
G G G G G
Plus généralement, on écrit s( r , t ) = s0e i ( ωt − k ⋅r ) , avec k (ω) = [ k ′(ω) + ik ′′(ω)] e ,
G
où e est un vecteur unitaire dans la direction de propagation.

723
724 Partie VII.  Physique des ondes

Cette méthode généralise la recherche de solutions en ei ωt des équations dif-


férentielles linéaires régissant des fonctions temporelles, lorsqu’on s’intéresse au ré-
gime sinusoïdal forcé.
Pour des ondes, la recherche de solutions d’O.P.P.H se propageant selon le
G G G G G G G
i ( ωt − k x x − k y y − k z z )
vecteur d’onde k = k x ex + k y ey + k zez : s( r , t ) = s0e i ( ωt − k ⋅r ) = s0e , per-
met de simplifier les dérivées.

∂s ∂s ∂s ∂s
= i ωs = −ik x s = −ik y s = −ikz s
∂t ∂x ∂y ∂z

∂2 s ∂2 s ∂2 s
Le laplacien ∆s = + + = − k x 2 + k y 2 + kz 2  s devient ∆s = −k 2 s .
∂x 2
∂y 2
∂z2  
Pour une grandeur vectorielle, les opérateurs linéaires prennent une forme très
simple :
G ∂ Ax ∂ Ay ∂ Az
— div A = + + = −i k x Ax + k y Ay + k z Az 
∂x ∂y ∂z  
 ∂ 
   
 ∂x   Ax   k x   Ax 
→ G
 ∂       
— rot A =  ∧ A
  y = − i  k y  ∧  Ay 

∂y
      
 ∂   Az   k z   Az 
 
 ∂z 
G 2
G
— ∆ A = −k A
G G G G G G
Pour une O.P.P.H A( r , t ) = A0e i ( ωt − k ⋅r ) qui se propage selon k , on a :
G
∂A G G G G → G G G G G
= i ωA div A = −ik ⋅ A rot A = −ik ∧ A ∆ A = −k 2 A
∂t

Nous avons cherché une solution d’O.P.P.H : ω ∈ R + (régime temporel sinu-


soïdal) alors que k peut être complexe (il y a alors atténuation spatiale).
x i ω t − x 
−  
Par exemple, la solution ψ = ψ 0e δe  c  correspond au cas où l’on impose
une vibration sinusoïdale de l’extrémité x = 0 d’une corde correspondant aux abs-
cisses x ∈ [0, +∞[ .
Chaque point de la corde vibre à la pulsation ω avec une amplitude qui décroit
lorsqu’on s’éloigne de l’extrémité de la corde, à cause de l’absorption due aux frotte-
ments.
On a représenté ci-après la corde à différents instants : l’onde progresse dans
le sens des x croissants, possède une période temporelle, mais seulement une
pseudo-période spatiale, car elle s’atténue lors de sa propagation.

724
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 725

1.3 Amortissement temporel 


On pourrait aussi chercher k ∈ R (l’onde est une fonction sinusoïdale de x), et
ω ∈ C (il y a alors amortissement temporel).
Prenons l’exemple d’une corde de longueur L, attachée à ses deux extrémités,
et qu’on écarte initialement de sa position de repos. La relation de dispersion est in-
ω2 iω
changée : k 2 − 2
+ = 0 . Elle constitue une équation du second degré en ω, pour k
c ν
2
ic c4
fixé : ω2 − ω − k 2c 2 = 0 , dont le discriminant ∆ = − 2 + 4k 2c 2 ≃ 4k 2c 2 se simplifie
ν ν
si on suppose comme précédemment que les frottements visqueux sont faibles :
c ic 2 i 2ν
<< k . On a alors ω = ± kc = ± kc , où τ = 2 est un temps caractéristique.
ν 2ν τ c
À une valeur k positive correspondent deux valeurs de ω. Or si k > 0 est une
solution du problème, −k < 0 est aussi une solution du problème. On a donc quatre
i
couples de solutions ( ±k , ω = ± kc ) , et les solutions complexes sont :
τ
t

ψ( x, t ) = e τ  Ae ik ( ct − x ) + Be ik ( ct + x ) + Ce −ik ( ct − x ) + De −ik ( ct + x )  . En notation réelle :
 
t t
− −
ψ( x, t ) = ψ0 + e τ cos k ( ct − x ) + ϕ+  + ψ0 −e τ cos  k ( ct + x ) + ϕ−  . C’est la somme
d’une O.P.P se propageant dans le sens des x croissants à la célérité c, et d’une O.P.P
se propageant dans le sens des x décroissants à la célérité c, les deux ondes étant
amorties temporellement avec une durée caractéristique τ.
Il reste à vérifier les C.A.L :
— ψ( x = 0, t ) = 0 ∀t  ψ 0 − cos(kct + ϕ− ) = −ψ 0 + cos(kct + ϕ+ ) ∀t . On peut prendre :
t
ψ0 −
ϕ+ = ϕ− = ϕ , et on a alors ψ0 − = −ψ 0 + = −  ψ( x, t ) = ψ 0 sin(kx )e τ sin(kct + ϕ) .
2
— ψ( x = L, t ) = 0 ∀t  sin(kL ) = 0 ⇔ kL = nπ , avec n ∈ N∗ .

725
726 Partie VII.  Physique des ondes

Les solutions du problème se décomposent alors sur une base de solutions :


t
 nπ   nπc
− 
ψn ( x, t ) = ψ0n e
sin  x  sin 
τ t + ϕn  , qu’on peut encore appeler modes propres
 L   L 
de vibrations, puisque ce sont des solutions sinusoïdales, mais seulement de la coor-
donnée spatiale x. Les ψ 0n et les ϕn dépendent des C.I (forme et vitesse initiale de la
corde). Ces modes propres sont atténués temporellement du fait des frottements.
On a représenté ci-dessous la corde à différents instants, pour le mode propre
n = 3 . L’onde est stationnaire, et possède une période spatiale, mais seulement une
pseudo-période temporelle, car elle s’atténue au cours du temps, et revient au repos.

1.4 Cas des O.P.P.H électromagnétiques

Lorsqu’une onde électromagnétique se propage dans un milieu linéaire (les re-


G G G G G G
lations ρ = ρ(E, B ) , et J = J (E, B ) , sont linéaires dans ce milieu) quelconque, et non
plus dans le vide, on cherchera les solutions des équations de Maxwell sous la forme :
G G G G
E (rG, t ) = E ei ( ωt − k ⋅r ) G G G
 0 3
G G G i ( ωt − kG ⋅rG ) , avec k (ω) = [ k ′(ω) + ik ′′(ω)] e . On prendra souvent E0 ∈ R ,
B(r , t ) = B0e
c’est-à-dire une O.P.P.H polarisée rectilignement, sans restreindre la généralité.
G
divB = 0 (M.T, indépendante du milieu)
 G
 → G ∂B
 rot E = − ∂t (M.F, indépendante du milieu)
 G ρ
Les équations de Maxwell  sont
divE = (M.G)
 ε0
 G G
 → G G ∂E  G 1 ∂E
 rot B = µ 0 J + ε 0  = µ 0 J + (M.A)
  ∂t  c 2 ∂t
valables dans tout milieu.
G G
−ik ⋅ B = 0 (M.T)
M.T et M.F s’écrivent  G G G pour une O.P.P.H.
−ik ∧ E = −i ωB (M.F)

726
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 727

Pour une O.P.P.H électromagnétique dans tout milieu :


G G
— Le champ magnétique est transverse : B ⊥ k (on parle d’onde T.M : transverse ma-
gnétique).
G G
G G G k ∧E
— B et E sont liés par B = .
ω

Cette dernière relation reste valable si k ′′ = Im(k ) ≠ 0 : on peut faire le produit


G G
scalaire, ou vectoriel de k , même s’il est complexe, par E , alors qu’on ne peut pas
G G G G G G
faire de même pour E et B . Ceci est dû au fait que E = Re(E ) et B = Re(B ) sont des
G
signaux, de même que deux tensions ue et us , alors que le vecteur d’onde k n’est
pas un signal. Il est analogue à une fonction de transfert H = us / ue . Lorsque sa partie
G G
imaginaire est non nulle, les deux signaux E et B sont déphasés.
La linéarité du milieu permet de décomposer une onde en somme d’O.P.P.H
solutions des équations de Maxwell. Cette somme en sera encore une solution.

1.5 Vitesse de phase


Définitions
Considérons une O.P.P.H se propageant selon les x croissants avec un vecteur
G G
d’onde k = kex . Nous supposons qu’il n’y a pas d’atténuation de l’onde : k ∈ R + .
G G
La grandeur ϕ = ωt − k ⋅ r = ωt − kx est appelée phase de l’onde.

Si t varie de dt, et x de dx, ϕ varie de dϕ = ωdt − kdx . On retrouve la même


dx ω
phase en x + dx à la date t + dt , qu’en x à la date t (soit dϕ = 0 ), si = .
dt k

ω
La vitesse de propagation de la phase (vitesse de phase) est v ϕ = .
k

Dans un milieu non dispersif, la perturbation s obéit à l’équation de d’Alembert :


1 ∂2 s ω2 ω ω
∆s = 2 2
 −k 2 s = −
s  k = ⇔ v ϕ = = c ∀ω . Toutes les composantes si-
c ∂t c2 c k
nusoïdales de la perturbation (O.P.P.H) se propagent à la même vitesse, donc les
O.P.P se propagent sans déformation.

Dans un milieu dispersif, la vitesse de phase d’une onde plane dépend de ω :


k (ω) = ω / v ϕ (ω) (la relation de dispersion n’est plus linéaire). Un milieu non dispersif
ne disperse pas les ondes planes (mais peut disperser les ondes non planes).
Les composantes sinusoïdales d’une O.P.P se propagent à des vitesses diffé-
rentes, ce qui entraîne la déformation de la perturbation lors de sa propagation.

727
728 Partie VII.  Physique des ondes

Dispersion dans un milieu transparent (c’est-à-dire non absorbant)


Dans le cas des O.P.P.H électromagnétiques dans un milieu transparent, on
définit l’indice de réfraction n de ce milieu par v ϕ = ω / k = c / n .
Comme n dépend de ω (ou de la longueur d’onde λ dans le vide), on a disper-
sion : les différentes composantes sinusoïdales du signal ne se propagent pas à la
même vitesse.
Ces milieux transparents diélectriques sont également caractérisés par leur per-
mittivité relative εr , qui dépend de ω. Par rapport au vide, les résultats sont modifiés
1 c
en changeant ε0 en εr ε0 : v ϕ = =  n = εr .
εr ε0µ0 εr
Si dans le vide, k vide = ω / c = 2π / λ , où λ est la longueur d’onde dans le vide,
ω nω 2πn 2π nω λ
on a dans le milieu transparent k = = = = : k= et λmilieu = .
vϕ c λ λmilieu c n
� E2 � � nE 2 �
Enfin, le vecteur de Poynting SP = ex doit être changé en Sp = ex .
µ0c µ0c

Propagation d’une O.P.P quelconque dans un milieu dispersif

Considérons une O.P.P quelconque se propageant selon les x croissants, sans


atténuation, dans un milieu linéaire dispersif. Utilisons la décomposition fréquentielle
de la perturbation s( x, t ) en un certain point, par exemple en x = 0 :

1  
+∞ +∞
1
s( x = 0, t ) = Fɶ (ω)e i ωt dω = Re  Fɶ (ω)e i ωt dω  , puisque s( x, t ) ∈ R . ω ֏ Fɶ (ω)
 
2π π  
−∞  0 
est la transformée de Fourier de t ֏ s( x = 0, t ) = F (t ) . On peut la calculer (ce ne sera
+∞
pas utile ici) grâce à la formule Fɶ (ω) =  F (t )e
− i ωt
dt . Le facteur 1/ (2π) présent dans
−∞
la transformée inverse, et pas dans la transformée directe, vient du changement de
variable ν (fréquence) → ω ; il est sans importance par la suite.
La composante Fɶ (ω)ei ωt de pulsation ω à l’instant t et en x = 0 se propage à la

vitesse de phase v ϕ (ω) = ω / k (ω) : elle s’écrit Fɶ (ω)e [


i ωt − k ( ω) x ]
en x quelconque.
Le milieu étant linéaire, il suffit, pour déterminer le signal s( x, t ) , de sommer
toutes ses composantes sinusoïdales en x à l’instant t :
1
+∞
1  +∞ 
Fɶ (ω)e [ dω = Re  Fɶ (ω)e [
i ωt − k ( ω) x ] i ωt − k ( ω) x ]
s ( x, t ) =
2π  π   dω  (∗) . Cette formule per-

−∞ 0 
met de connaître la forme de l’onde à tout instant, si on connaît son spectre en x = 0
et la relation de dispersion k (ω) .

728
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 729

En x = 0 , la composante Fɶ (ω0 )ei ω0t , qui se propage à la vitesse de phase


ω0 ω
vϕ = = 0 , est une composante mathématique du signal. Son spectre est une
k (ω0 ) k0
raie infiniment fine. Elle n’a pas de réalité physique, puisqu’elle correspond à une onde
purement sinusoïdale, sans début ni fin.

Ainsi, dans le domaine des ondes électromagnétiques, il est tout à fait possible
de trouver une vitesse de phase strictement supérieure à la célérité c de la lumière
dans le vide. Une O.P.P.H ne transportant ni énergie, ni information, v ϕ > c ne va pas
à l’encontre de la théorie de la relativité d’Einstein.

1.6 Vitesse de groupe


Première approche, somme de deux O.P.P.H
Commençons par sommer deux O.P.P.H s1 et s2 de pulsations très proches
ω0 ± δω / 2 , avec δω << ω0 , et de même amplitude S0 . Ces ondes se propagent dans
un milieu dispersif où la relation de dispersion k (ω) est non linéaire.
On effectue un développement limité de k à l’ordre 1 au voisinage de ω0
puisque δω est petit :
 δω  δω dk δk
k  ω0 ±  = k (ω0 ) ± ⋅ (ω0 ) = k0 ± . On a donc s( x, t ) = s1( x, t ) + s2 ( x, t ) , soit :
 2  2 dω 2
s( x, t ) = S0 cos [(ω0 − δω / 2)t − (k0 − δk / 2)x ] + S0 cos [(ω0 + δω / 2)t − (k0 + δk / 2)x ]
.
= 2S0 cos [ ω0t − k0 x ] cos [ δω ⋅ t / 2 − δk ⋅ x / 2]
En x fixé, on observe au cours du temps des battements : la courbe d’équation
t ֏ cos [ ω0t − k0 x ] , de période T0 = 2π / ω0 , est modulée par la courbe d’équation
t ֏ 2S0 cos [ δω ⋅ t / 2 − δk ⋅ x / 2] , de période T = 2π / δω >> T0 . Ces battements s’expli-
quent par les interférences entre s1 et s2 : aux instants pour lesquels, en x donné, les
signaux sont quasiment en phase, les interférences sont constructives et l’enveloppe
passe par un maximum d’amplitude, aux instants pour lesquels les signaux sont

729
730 Partie VII.  Physique des ondes

quasiment en opposition de phase, les interférences sont destructives et l’enveloppe


s’annule. Le signal s0 ( x, t ) = cos [ ω0t − k0 x ] , qui correspond à une O.P.P.H, se pro-
ω0
page à la vitesse de phase v ϕ = , alors que senv ( x, t ) = 2S0 cos [ δω⋅ t / 2 − δk ⋅ x / 2]
k0
δω dk dω
correspondant à l’enveloppe se propage à la vitesse v g = ≃ 1/ (ω0 ) ≃ ( k0 ) ,
δk dω dk
avec k0 = k (ω0 ) . Cette vitesse est appelée vitesse de groupe car c’est la vitesse des
crêtes du signal, lieu des interférences constructives des différentes O.P.P.H consti-
tuant le signal.

Paquet d’ondes étroit


Nous avons ici raisonné avec deux O.P.P.H, et l’onde résultante, qui n’a toujours ni
début ni fin, n’est pas physiquement réalisable.
Lorsqu’on somme un continuum d’ondes de pulsations très proches de ω0 (pa-
quet d’ondes étroit, ou train d’ondes), la condition pour que toutes ces ondes interfè-
rent constructivement en x à la date t est que leur phase ϕ( x, t , ω) = ωt − k (ω)x + φ(ω)
soit identique au voisinage de ω0 .
Comme ces ondes ne sont pas nécessairement en phase à t = 0 en x = 0 , on
introduit leur phase φ(ω) à t = 0 en x = 0 .
On veut ϕ( x, t , ω) = ωt − k (ω)x + φ(ω) = Cte ∀ω, d’où :
dϕ dk dφ dk dφ dx dω
(ω0 ) = t − (ω0 )x + (ω0 ) = 0 ⇔ (ω0 )x = t + (ω0 )  v g = = ( k0 ) .
dω dω dω dω dω dt dk
La vitesse de groupe est la vitesse de l’enveloppe du signal (là où la phase des
ondes de pulsation très proche de ω0 est constante).

730
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 731

Expression temporelle d’un paquet d’ondes étroit


Une onde pourvue de sens physique possède un début et une fin. Le produit de
sa durée ∆t par la largeur ∆ω de son spectre étant borné inférieurement, une onde
physique doit posséder une largeur spectrale non nulle. Le paquet d’ondes étroit défini
précédemment, dont le spectre possède une largeur ∆ω très petite autour de ω0 ,
mais non nulle, est, lui, un signal réalisable physiquement.
Pour simplifier les calculs, nous considérerons un paquet d’ondes dont le
spectre est un rectangle de largeur ∆ω << ω0 , et de hauteur F0 . Pour une pulsation
ω∈ [ ω0 − ∆ω / 2, ω0 + ∆ω / 2] présente dans le spectre du paquet d’ondes, on peut li-
néariser la relation de dispersion, c’est-à-dire effectuer un développement limité à
l’ordre 1 en η = ω − ω0 :
dk dk
k (ω) = k (ω0 ) + (ω − ω0 )
(ω0 ) = k0 + η (ω0 ) . La relation (∗) permet alors de trouver
dω dω
l’expression temporelle du paquet d’ondes en x quelconque :
 +∞  F  ω0 +∆ω /2 i ωt − k + ( ω−ω ) dk ( ω )  x  
1   0 0  
ɶ ⋅ Re  dω  .
i [ ωt − k ( ω) x ] 0

 

s( x, t ) = Re  F (ω)e dω  = 0
e   
π   π  ω0 −∆ω /2 
0   
On obtient, en effectuant le changement de variable η = ω − ω0 :
 ∆ω /2 i η t − dk ( ω ) x  
F0  
⋅ Re  e [ 0 0 ]   dη 
0
e  dω
i ω t −k x
s ( x, t ) =
π  
 −∆ω /2 
 ∆ω  dk 
F ∆ω
π (
= 0 Re e [ 0 0 ] ⋅ sinc 
i ω t −k x
) 2  t − dω (ω0 )x  
 
X ֏ sinc( X ) = sin X / X est la fonction sinus cardinal. Finalement :
F0 ∆ω  ∆ω  dk 
s ( x, t ) = sinc   t − dω (ω0 )x   ⋅ cos(ω0t − k0 x )
π  2  
F0 ∆ω  ∆ω  x 
= sinc   t −   ⋅ cos(ω0t − k0 x )
π  2  v g   �������
���������� � O.P.P.H, célérité v ϕ = ω0
dω k0
enveloppe, célérité v g = ( k0 )
dk
Le paquet d’ondes temporel est une sinusoïde de pulsation ω0 , à l’intérieur
d’une enveloppe de durée caractéristique ∆t = 4π / ∆ω >> T0 = 2π / ω0 , comme on l’a
représenté sur le graphe ci-après. La durée ∆t est ici définie comme celle du lobe
principal de la fonction sinc [ ∆ωt / 2] , mais sa définition a peu d’importance, tout
comme la forme du spectre du paquet d’ondes autour de ω0 (un profil gaussien serait
par exemple plus réaliste). Le point crucial est que l’enveloppe du signal se propage à

731
732 Partie VII.  Physique des ondes

dω ω
une vitesse différente v g = (k0 ) de la vitesse de phase v ϕ = 0 .
dk k0


La vitesse v g = est appelée vitesse de groupe : c’est la vitesse à laquelle
dk
se déplace l’enveloppe du paquet d’ondes de faible largeur spectrale autour de ω0 .

Cette vitesse a un sens physique car l’enveloppe transporte de l’information, et


devra pour une onde électromagnétique être inférieure ou égale à la célérité de la
lumière dans le vide. On peut faire l’analogie avec la modulation d’amplitude : la « por-
teuse » ne véhicule aucune information, contrairement au signal modulant qui enve-
loppe la porteuse.
Pour un paquet d’ondes de plus grande largeur spectrale, la dispersion est res-
ponsable de sa déformation lors de la propagation. On a représenté ci-dessous, à des
instants différents, un paquet d’ondes non étroit se déplaçant selon les x croissants
dans un milieu dispersif.

732
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 733

En observant bien le signal lors de sa propagation, on constate que dans cet


exemple, les composantes dont les fréquences sont les plus grandes se propagent
plus vite que celles dont les fréquences sont les plus faibles (la vitesse de phase est
ici une fonction croissante de ω) : il y a étalement d’un paquet d’ondes lors de sa pro-
pagation. Les composantes qui interféraient constructivement à t = 0 en x = 0 se dé-
phasent les unes par rapport aux autres lors de la propagation. L’étalement du paquet
d’ondes s’accompagne d’une diminution de l’amplitude de l’enveloppe (le milieu étant
non absorbant, cette propriété se déduit aussi de la conservation de l’énergie que con-
tient le signal).
L’étalement du signal dans un milieu dispersif limite le débit d’information qu’on
peut transmettre. Si un bit d’information est caractérisé à son arrivée par une durée τ,
on ne peut pas envoyer plus d’un bit toutes les durées τ, car sinon deux bits consécutifs
se recouvriraient à leur arrivée, ce qui occasionnerait des erreurs de lecture. La lon-
gueur parcourue par l’onde joue un rôle crucial dans l’étalement : un paquet d’ondes
très étroit finit quand même par se disperser pour une distance parcourue trop impor-
tante (on ne pourra plus négliger les termes d’ordre ≥ 2 dans le développement limité
de k (ω) au voisinage de ω0 ), alors que l’étalement d’un paquet d’ondes, dont le
spectre est plus large, est négligeable sur des distances suffisamment courtes.

1.7 Aspect énergétique


Comme nous l’avons vu pour les phénomènes ondulatoires précédemment dé-
crits, les grandeurs énergétiques d’une O.P.P (énergie volumique, vecteur densité vo-
lumique de courants d’énergie) sont des fonctions quadratiques du signal s( x, t ) . Soit
Φ( x, t ) = A ⋅ s 2 ( x, t ) l’une de ces grandeurs :
Φ( x, t ) ∝ sinc 2  ∆ω (t − x / v g ) / 2 ⋅ cos2 (ω0t − k0 x ) . En prenant la moyenne sur une pé-

enveloppe, reste constante
sur une durée T0

riode T0 = 2π / ω0 , on a Φ T0
( x, t ) ∝ sinc 2  ∆ω (t − x / v g ) / 2 .

En l’absence d’absorption, l’énergie moyenne d’un paquet d’onde étroit est


transportée par l’enveloppe, et se propage donc à la vitesse de groupe cU = v g .

1.8 Atténuation
Les différentes causes

Pour que des ondes planes s( x, t ) = s0ei ( ωt − kx ) , avec ω ∈ R + , soient solutions


de l’équation d’onde dans un milieu linéaire, k doit vérifier une relation de dispersion
le liant à ω : k (ω) = k ′(ω) + ik ′′(ω) , où (k ′, k ′′) ∈ R 2 .
— Prenons une onde qui se propage dans le sens des x croissants : k′(ω) > 0 et

733
734 Partie VII.  Physique des ondes

 x x
i  ωt − k ′x + i  −
supposons k′′(ω) = −1/ δ(ω) < 0 . On a alors s( x, t ) = s0 e  δ
= s0e δ e i ( ωt − k ′x ) .
L’onde s’atténue lors de sa propagation. La distance δ (qui dépend de ω) est une
épaisseur de peau. Ce cas correspond à un milieu absorbant, comme nous allons le
voir pour les ondes électromagnétiques dans un conducteur.
— Prenons maintenant k′(ω) = 0 , toujours avec k′′(ω) = −1/ δ(ω) < 0 . On a alors :
 x x x
i  ωt + i  − −
s( x, t ) = s0e  δ
= s0e δ e i ωt , soit en réel s( x, t ) = s0e δ cos(ωt ) . L’onde est station-
naire (il n’y a plus de propagation) et s’atténue quand x augmente. Ce cas correspond
à un milieu non absorbant, mais pour les valeurs de ω telles que k′′(ω) < 0 , s( x, t ) est
la somme d’un grand nombre d’ondes rayonnées par les constituants du milieu, et ces
ondes interfèrent destructivement. Nous allons voir qu’il en est ainsi pour les ondes
électromagnétiques dans un plasma à certaines fréquences.

x
— Prenons maintenant k′(ω) > 0 , et k′′(ω) = 1/ δ( ω) > 0 : s( x, t ) = s0e δ e (
i ωt − k ′x )
.
L’onde est alors amplifiée lors de sa propagation. Ce cas existe, par exemple
dans le milieu actif d’une cavité laser. Le pompage (apport d’énergie extérieur) permet
d’obtenir des désexcitations stimulées qui amplifient l’onde électromagnétique lors de
sa propagation.

Vitesse de phase
x

Si l’onde est atténuée : s( x, t ) = s0e δ e i ( ωt − k ′x ) . Elle se propage si k ′ ≠ 0 ; sa
phase est alors ϕ = ωt − k ′x et la vitesse de phase de cette O.P.P.H est v ϕ = ω / k ′ .

1  +∞ 
Re  Fɶ (ω)e k ( ω) x e [
i ωt − k ′( ω) x ]
 dω  . Du fait de la pré-
′′
Le signal s’écrit s( x, t ) =
π  
0 
sence du terme e k ′′( ω) x , on ne peut plus, dans le cas d’un paquet d’ondes étroit autour
de la pulsation ω0 , écrire le signal sous la forme du produit d’une sinusoïde de pulsa-
ω0 dω
tion ω0 , se propageant à v ϕ = , par une enveloppe se propageant à v g = (k0′ ) .
k0′ dk ′

734
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 735

La vitesse de groupe ainsi définie n’est plus égale à la vitesse cU de propaga-


tion de l’énergie moyenne.
Pour calculer la vitesse cU de propagation de l’énergie moyenne, on effectue
alors des bilans d’énergie comme on l’a vu dans les chapitres précédents :
� �
� SP � Jac
cU = , cU = ,…
u uac

2. O.P.P.H ÉLECTROMAGNÉTIQUE TRANSVERSALE


DANS UN PLASMA PEU DENSE
2.1 Notions sur les plasmas
Un plasma est un milieu gazeux partiellement ou totalement ionisé.
On estime que plus de 99% de la matière de l’univers est dans « l’état » plasma.
En réalité, le passage, pour un gaz, de l’état isolant à l’état conducteur, se fait progres-
sivement, sans discontinuités, lorsque certains atomes ou molécules reçoivent une
énergie supérieure à leur énergie d’ionisation (de quelques eV à une dizaine d’eV).
C’est le cas pour un gaz porté à plusieurs milliers de degrés : les chocs subis
par les particules neutres sont suffisamment énergétiques pour les ioniser, et les plas-
mas sont totalement ionisés.
La source d’ionisation peut être extérieure. On peut obtenir un plasma grâce à
des décharges électriques. Par exemple, on ionise l’air sec en lui appliquant un champ
électrique disruptif d’intensité 3,6 ⋅ 106 V ⋅ m-1 . Les électrons produits par l’ionisation
sont accélérés par le champ électrique et provoquent à leur tour d’autres ionisations
(effet d’avalanche électronique). Un plasma peut également être créé sous l’action
d’un rayonnement électromagnétique ionisant.
Les tubes à décharges et certains téléviseurs contiennent des plasmas. On
cherche à obtenir la réaction de fusion nucléaire par confinement d’un plasma. Les
étoiles, le vent solaire, les éclairs d’orage et l’ionosphère sont des exemples de plas-
mas naturels.
Contrairement aux espèces neutres d’un gaz, molécules ou atomes, les élec-
trons et les ions d’un plasma créent un champ électromagnétique et subissent des
forces lorsqu’ils sont plongés dans un champ électromagnétique. Ils interagissent donc
à distance et pas seulement lors de chocs. Par choc on entend que deux particules
chargées s’approchent tellement l’une de l’autre que leur interaction l’emporte sur les
interactions extérieures.
Pour savoir si ces chocs binaires sont à prendre en compte, on peut calculer le
paramètre plasma Γ qui donne l’ordre de grandeur du rapport entre leur énergie po-
tentielle moyenne Ep , et leur énergie cinétique moyenne Ec ≃ kBT .

735
736 Partie VII.  Physique des ondes

Nous supposerons que les cations portent la charge +e (ils ne sont ionisés
qu’une fois), et que leur densité n0 est la même que celle des électrons. Le volume
moyen qu’occupe une de ces particules est donc de l’ordre de 1/ n0 : les charges sont

en moyenne à une distance a = n0−1/3 , et leur énergie potentielle moyenne est :

e2 e 2n01/3
Ep = . On définit donc le paramètre plasma par Γ = .
4πε0a 4πε0kBT
Dans les plasmas dilués que nous allons étudier, Γ << 1, si bien que les chocs
entre particules chargées sont peu probables. On peut considérer qu’une particule
chargée est uniquement soumise à des forces électromagnétiques dues au champ
moyen créé par les autres charges du plasma, et à un éventuel champ créé par des
charges extérieures au plasma (le poids est bien sûr négligeable devant les forces
électromagnétiques).
Nous avons supposé que le plasma était à l’équilibre thermodynamique à la
température T du plasma, ce qui est le cas pour des températures suffisamment éle-
vées. En revanche, pour un plasma dilué et froid, que nous n’étudierons pas, les chocs
sont tellement peu fréquents qu’on n’a pas thermalisation : les énergies cinétiques
moyennes des ions et des électrons sont différentes, ainsi que les températures io-
niques et électroniques, définies par Ti = Eci / kB et Te = Ece / kB .

Il existe une grande variété de plasmas qu’on distingue selon leur densité élec-
tronique ne et leur température électronique Te . Pour de basses températures et de

736
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 737

grandes densités, les plasmas sont quantiques (cas du gaz d’électrons dans un métal)
alors qu’ils sont relativistes aux très grandes températures (cas de la magnétosphère
d’un pulsar).
Nous nous limiterons à des plasmas classiques, dilués et chauds, à l’équilibre
thermodynamique, les plus fréquemment rencontrés.
La répartition statistique des cations et des électrons libres en l’absence de per-
turbation peut se déterminer en prenant un cation pour origine O du repère utilisé. Du
fait de la symétrie sphérique de centre O, le potentiel électrique V en un point M ne
dépend que de r = OM . La densité des ions et des électrons à une distance r de O
eV ( r ) eV ( r )
− +
kBT kBT
est donnée par la loi de Boltzmann : ni (r ) = Ae
i et ne (r ) = Aee . Dans la li-
mite des très grandes températures ( T → ∞ ), le plasma étant globalement neutre, on
a ni (r ) → Ai = n0 et ne (r ) → Ae = n0 . Comme eV (r ) << kBT (l’énergie potentielle est
 eV (r ) 
très petite devant l’énergie cinétique pour un plasma dilué), ni (r ) ≃ n0 1 − ,
 kBT 
 eV (r ) 
ne (r ) ≃ n0 1 +  , et la densité volumique de charge est :
 kBT 

2n0e 2V (r )
ρ(r ) = +eni (r ) − ene (r ) = − .
kBT
ρ
Le potentiel est solution de l’équation de Poisson ∆V + = 0 , soit :
ε0
1 d2 2n0e 2V (r ) d2 rV ε0 kBT
r dr 2
[ rV ] − = 0 , ou encore [rV ] − 2 = 0 , avec λD = , appe-
ε0kBT dr 2
λD 2n0e 2
lée longueur de Debye.
On écarte la solution en er / λD qui diverge pour r → ∞ : rV (r ) = Cte ⋅ e −r / λD .
e
Comme on doit retrouver, pour r → 0 , le potentiel créé par le seul cation, l’ex-
4πε0 r
e
pression du potentiel cherché est V (r ) = e −r / λD . Ce potentiel décroît très rapide-
4πε0r
ment du fait de l’écrantage du cation qui s’entoure d’une couche d’électrons libres.
Ainsi, à des échelles très supérieures à λD , le potentiel et le champ électrique sont
nuls dans le plasma. Le plasma est neutre à cette échelle : ρ = 0 dans une sphère de
rayon R >> λD . Cependant, cette neutralité peut être mise en défaut lorsque le plasma
est parcouru par une onde.

2.2 Modèle étudié


Les cations du plasma, beaucoup plus lourds que les électrons, sont considérés
comme fixes dans le référentiel d’étude R galiléen. Les courants électriques dans le

737
738 Partie VII.  Physique des ondes

plasma sont donc uniquement dus aux électrons de masse m, de charge −e , de vi-

tesse v e par rapport à R . Le vecteur densité volumique de courants s’écrit :
� �
J (M, t ) = n0 ( −e )v (M, t ) , la vitesse des électrons étant décrite par un champ eulérien,
� � �
comme le champ électro-magnétique E (M, t ) , B(M, t ) . Cette vitesse v (M , t ) , moyen-

née dans un volume mésoscopique, est différente de la vitesse individuelle v e (t ) d’un
électron de ce volume, car elle fait disparaître l’agitation thermique, dont la vitesse
caractéristique pour un électron est définie par v th = kBTe / m . On supposera qu’on

peut déterminer v (M , t ) en appliquant le P.F.D à un électron « moyen » de vitesse
� �
v (M , t ) et non pas v e (t ) , ce qui est vrai si v th << v (tous les électrons ont alors la
même vitesse). On peut démontrer que cette démarche reste valable, sans condition
� � �
sur la température électronique, pour les ondes transversales ( E et B ⊥ k ) que nous
allons étudier.
Finalement, les électrons sont donc uniquement soumis à la force de Lorentz
� � � � � �
F = −e(E + v ∧ B ) , où E et B ne sont pas indépendants, puisqu’ils forment le champ
électromagnétique qui se propage dans le plasma. Dans le vide, nous avons vu que
� � �
la force magnétique qv ∧ B était négligeable devant la force électrique qE pour des
particules non relativistes. Nous supposerons que c’est aussi le cas dans le plasma
dilué, et nous vérifierons cette hypothèse (H1) a posteriori.
Sous l’effet de l’onde, de longueur d’onde λ et de période T, les oscillations d’un
électron ont une amplitude dont l’ordre de grandeur, noté a, est supposé très inférieur
à λ (hypothèse H2). On peut en conséquence considérer que l’électron reste en un
� � � �
point M0 fixe pour calculer sa vitesse : v = vLAG (t ) = v EUL (M (t ), t ) ≃ v EUL (M0 , t ) . On a
� �
dv ∂v
donc ≃ .
dt ∂t
Nous verrons que ces deux dernières hypothèses sont liées. Ce sont elles qui
� � � → �
rendent le problème linéaire (les termes non linéaires −ev ∧ B et (v ⋅ grad)v , accélé-
ration convective, étant négligés), ce qui autorise la notation complexe pour un régime
sinusoïdal de pulsation ω.
La linéarisation des équations est analogue à celle effectuée pour une onde
� � �
acoustique. Dans ce cadre, la force magnétique F = −ev ∧ B est d’ordre 2 car le
� � � �
champ électromagnétique E (M, t ) = E1(M, t ), B(M, t ) = B1(M , t ) qui se propage est
� � � �
une perturbation du champ E0 (M ) = 0, B0 (M ) = 0  existant dans le plasma « au re-
pos » (sans la perturbation).
Notons que si l’écrantage vu au 2.1 interdit la présence d’un champ statique à
� �
grande échelle (on a toujours E0 (M ) = 0 ), rien n’empêche la présence d’un champ
� � �
magnétique B0 (M ) ≠ 0 à grande échelle. Le plasma est alors dit « magnétisé » : B0

738
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 739

modifie les propriétés des ondes électromagnétiques dans le plasma. Notre étude
porte sur un plasma non magnétisé.
Sous toutes ces hypothèses, on obtient par application du P.F.D dans R à un
G G G
∂v G G e G
électron : m = −eE ⇔ imωv = −eE , soit v = − E.
∂t imω
En présence de la perturbation ondulatoire, la densité électronique est modifiée
par rapport à sa valeur n0 au repos : ne (M , t ) = n0 + n1(M, t ) . Là encore, la perturbation
est traitée comme un infiniment petit : n1v est d’ordre 2, et la densité volumique de
G n e2 G
courants est J = 0 E .
imω

Dans le cadre de notre étude (onde transversale dans un plasma dilué non ma-
G n e2 G ε0ωp2 G n0e2
gnétisé), on a J = 0 E = E , avec ωp = pulsation plasma.
imω iω ε0 m

2.3 Dispersion
Nous recherchons des solutions d’O.P.P.H.P.R transverses électriques (telles
G G
que E ⊥ k ) dans le plasma. Il existe d’autres modes de propagation, dont des modes
G G
longitudinaux (tels que E // k ) pour lesquels le nombre de cations diffère du nombre
d’électrons dans un volume mésoscopique lors du passage de l’onde, soit ρ ≠ 0 .
L’onde étudiée est donc de la forme :
G G
E ( x, t ) = E0e i ( ωt − kx ) G G G G G
3
G G i ( ωt − kx ) , avec k (ω) = [ k ′(ω) + ik ′′(ω)] ex , et E0 ∈ R ⊥ k = kex .
B( x, t ) = B0e
Les équations de Maxwell dans le plasma s’écrivent alors :
G G
−ik ⋅ B = 0 (M.T)
 G G G
−ik ∧ E = −i ωB (M.F)
 G G ρ

−ik ⋅ E = ε = 0  ρ = 0 (M.G)
 0
 G G G G ε µ ω2 G G ω 2 G
−ik ∧ B = µ0 J + i ω E = 0 0 p E + i ω E = 1  p + i ω E (M.A)
 c2 iω c2 c 2  i ω 

L’onde étudiée est donc T.E.M (transverse électromagnétique) puisqu’on a
G G G G G
aussi B ⊥ k . Pour découpler ce système, il suffit de former k ∧ (k ∧ E ) , qui est l’ana-
→ → G
logue de rot ( rot E ) :
G G G G G G G G G G G G 1  ωp2 G
k ∧ ( kN ∧ E ) = k ( kN⋅ E ) − k 2 E ⇔ ωk ∧ B = −k 2 E , or k ∧ B = 2  − ω E d’après
G
0 (M.G) c  ω 
ωB (M.F)

l’équation de M.A.

739
740 Partie VII.  Physique des ondes

On en déduit :

ω2 − ωp2
k2 = , relation de dispersion dans le plasma.
c2

On peut également déterminer l’équation d’onde en procédant comme dans le


G G G G
vide, après avoir écrit en notation réelle la relation entre J et E , J = ε0 ωp2 Edt :
G
divB = 0 (M.T)
 G
→ G
 ∂B
 rot E = − ∂t (M.F)
 G

divE = 0 (car l’onde étudiée est transversale)
G
 → G 1  G ∂E 

 rot B = 2
ωp Edt +  (M.A)
 c2  ∂t 
  → G G
→  →
 G  →  G G G ∂ rot B 1  ∂ 2E G
2
rot   rot E  = grad  div
N E  − ∆E , soit ∆ E = =  + ωp E .
 G  (M.A) c 2  ∂t 2
 0  ∂t  
 − ∂B (M.F) 
 ∂t 
G
G 1  ∂ 2E G G
Cette équation d’onde, ∆E = 2  2 + ωp2E  (on peut vérifier que B est régi
c  ∂t 
par la même équation), valable pour une onde transversale, n’est plus l’équation de
d’Alembert, mais elle reste linéaire et invariante par changement t → −t . La propaga-
tion dans le plasma est réversible, ce qui n’est pas surprenant, vu que l’on n’a pas
introduit de « frottements » dans le modèle microscopique (pas de phénomènes dissi-
patifs).
G G
En injectant E ( x, t ) = E0ei ( ωt − kx ) dans l’équation d’onde, on retrouve bien sûr la
relation de dispersion k 2 = ( ω2 − ωp2 ) / c 2 .
Selon la valeur de ω, deux cas se présentent :
ωp2 − ω2 i
— Si ω ≤ ωp , k est un imaginaire pur : k = ± i = ± . Le champ électrique
c δ
G G − x i ωt G x i ωt
vaut E ( x, t ) = E0e δ e + E0′ e δ e .
Prenons le cas d’un plasma occupant le demi-espace x > 0 : la solution phy-
x
G − G G
sique est E ( x, t ) = E0e δ ei ωt ey , en prenant une onde polarisée selon ey . On en déduit
x
− G x  π
K i G E0e δ e i ωt ey E0 − i  ωt − 2  G
B( x, t ) = − ex ∧ = e δe ez .
δG ω ωδ
k

740
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 741

G −
x
G
E ( x, t ) = E0e δ cos(ωt ) ey
 c
En notation réelle,  x
, avec δ = .
 G E0 − G ω 2
− ω2
p
B( x, t ) = ωδ e sin(ωt ) ez
δ

L’onde est stationnaire : il n’y a pas de propagation, et le champ ne pénètre


dans le plasma que sur une longueur caractéristique δ.
On a représenté ci-dessous le champ électrique dans le plasma à différents
instants.

Pour ω ≤ ωp , il n’y a pas de propagation dans le plasma

ω2 − ωp2
— Si ω > ωp , k = ± est réel. Il y a propagation sans atténuation, mais avec
c
dispersion. Prenons le cas d’une onde se propageant dans le sens des x croissants,

G ω2 − ωp2
et polarisée selon ey : k = > 0 . On a alors :
c
G
G G K G E0e i ( ωt − kx )ey kE0 i ( ωt − kx ) G
E ( x, t ) = E0e i ( ωt − kx )ey , et B( x, t ) = kex ∧ = e ez .
NG ω ω
k
G G
E ( x, t ) = E0 cos(ωt − kx ) ey

En notation réelle :  G kE G .
B( x, t ) = 0 cos(ωt − kx ) ez
 ω
2
ω  ωp 
La vitesse de phase vaut v ϕ = = c / 1−   > c . Elle est supérieure à la
k  ω 
vitesse de la lumière, ce qui ne va pas à l’encontre de la théorie de la relativité,
puisqu’une O.P.P.H de pulsation ω n’est pas réalisable physiquement. En revanche,
on sait envoyer des trains d’ondes de longue durée, contenant un grand nombre d’os-
cillations sinusoïdales, c’est-à-dire dont le profil spectral est un pic de très faible largeur

autour de ω. Ce train d’ondes se déplace à la vitesse de groupe v g = , qu’on peut
dk

741
742 Partie VII.  Physique des ondes

2ωdω ω dω
calculer en différentiant la relation de dispersion : 2kdk = , soit ⋅ = c2 ,
c2 k dk
d’où : v ϕ ⋅ v g = c 2 . Cette relation entre v ϕ et v g (relation de Klein-Gordon), est valable

quand la relation de dispersion est quadratique (de la forme k 2 = ω2 / c 2 + Cte ). Elle


2
donne ici v g = c 2 / v ϕ = c 1 − ωp / ω
( ) < c , comme il se doit.

Pour ω > ωp , l’onde se propage sans atténuation, mais avec dispersion dans le
plasma, qui constitue donc un filtre passe-haut.

On peut résumer le comportement du


plasma selon la pulsation en traçant la partie ré-
elle de k en fonction de ω.
Pour ω ≤ ωp , Re( k ) = 0 , et il n’y a pas de

ω2 − ωp2
propagation. Pour ω > ωp , k = ± (la
c
courbe est une branche d’hyperbole), et il y a
propagation dispersive, mais les ondes telles
que ω >> ωp sont peu dispersées car la relation de dispersion est alors k ≃ ±ω / c .
Un exemple fondamental est fourni par l’ionosphère. Cette partie de l’atmos-
phère, approximativement située entre 60 km et 800 km d’altitude, est ionisée par les
rayonnements solaires ultra-violets. En conséquence, la densité électronique n0 varie
entre la partie de l’atmosphère exposée au Soleil : côté « jour », et celle côté « nuit ».
Un bon ordre de grandeur est n0 = 1011 m-3 , ce qui donne une fréquence plasma :
e n0
fp = ≃ 3 MHz .
2π ε 0 m
Des ondes de fréquences inférieures à fp ne se propageant pas dans l’ionos-
phère, elles s’y réfléchissent.

Une partie du spectre émis par l’univers ne parvient pas jusqu’à la surface ter-
restre.

742
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 743

De même, les grandes ondes radio (autour de 150 kHz), émises depuis la Terre,
se réfléchissent sur l’ionosphère et en partie sur les sols et les océans, ce qui permet
la communication à très grande distance sans relais. Marconi a ainsi réalisé les pre-
mières transmissions radio transatlantiques en 1901. Au contraire, des ondes de fré-
quences supérieures à fp traversent l’ionosphère et peuvent être utilisées pour échan-
ger des informations avec des vaisseaux spatiaux, sondes ou satellites se trouvant au-
dessus de l’ionosphère.

Il reste à vérifier les hypothèses H1 et H2.


— Lorsqu’il y a propagation ( ω > ωp ), la vitesse des électrons, non relativistes, est de
l’ordre de U << c < v ϕ , et B = O(kE / ω) = O(E / v ϕ ) , donc la force magnétique, de
l’ordre de eUB , avec, est très inférieure à la force électrique, de l’ordre de eE . H1 est
donc vérifiée.
D’autre part, si a est l’amplitude caractéristique des oscillations de l’électron et
T la période de l’onde, a / λ = O UT (v ϕT ) = O U / v ϕ  << 1 : H2 est vérifiée.
— Lorsqu’il n’y a pas propagation ( ω ≤ ωp ), les approximations sont vérifiées si :
c c
a = O(UT ) = O(U / ω) << δ = ⇔ U << . Comme U << c , elles
2 2 2
ωp − ω ( ωp / ω) −1

sont vérifiées sauf si la pulsation est excessivement faible (il ne faut pas ω << ωp ), ce
qui est le cas en pratique.

2.4 Aspect énergétique

d3 p G G
Les électrons du plasma reçoivent de la puissance volumique 3
= J ⋅ E de
dV
la part de l’onde.
G −
x
G G ε0 ωp2 G
— Pour ω ≤ ωp , E ( x, t ) = E0e δ ei ωt ey et J = E , soit, en notation réelle :

2x
G ε0 ωp2 −
x
G d3 p ε0 ωp2 −
J= E0e δ sin(ωt ) ey , donc = E 0 2e δ sin(ωt )cos(ωt ) = 0 .
ω d3V ω

G G G ε0 ωp2 G
— Pour ω > ωp , E ( x, t ) = E0 cos(ωt − kx ) ey , et J = E0 sin(ωt − kx ) ey , donc :
ω
d3 p ε0 ωp2
= E02 sin(ωt − kx )cos( ωt − kx ) = 0 .
d3V ω
G G
Dans tous les cas, J et E étant en quadrature de phase, les charges ne prélè-
vent aucune puissance en moyenne à l’onde, même lorsque cette dernière ne se pro-
page pas dans le plasma. Le plasma n’est pas un milieu absorbant.

743
744 Partie VII.  Physique des ondes

Lorsque ω ≤ ωp , l’onde est atténuée du fait d’interférences destructives entre


les ondes rayonnées par les charges, et s’annule à une profondeur x >> δ dans le
plasma.
Effectuons un bilan énergétique dans le cas ω > ωp où l’onde se propage, un
peu plus délicat que dans le vide, car il faut tenir compte de l’énergie moyenne des
électrons.
G G
Comme la puissance moyenne −e E ⋅ v de la force électrique s’exerçant sur
un électron est nulle, on n’a pas à prendre en compte l’énergie potentielle électrique,
donc l’énergie moyenne d’un électron est purement cinétique.

Commençons par calculer les différentes grandeurs énergétiques :


G G
G E ∧ B E0 2 G G E0 2 G
— SP = = cos2 ( ωt − kx ) ex  SP = ex .
µ0 µ0v ϕ 2µ0v ϕ

ε0 E 2 B 2 E 2 cos2 (ωt − kx )  1  ε 0 E0 2  c2 
— u= + = 0  ε0 +   u = 1 + .
2 2µ0 2  µ0v ϕ2  4  v ϕ2 
 
1 G e G
— L’énergie cinétique volumique vaut ec = n0 mv 2 , avec v = − E soit :
2 imω
2
G eE G 1 n0e2E02 ε0E02 ωp
v = − 0 sin(ωt − kx ) ey . On a ec = = et on en déduit :
mω 4 mω2 4 ω2

ε E 2  2 ω  
2
c c2
2
 ωp 
u + ec = 0 0 1 + c +  p   . Or v ϕ =  = 1−   , donc on a
4  v ϕ2  ω  
 ωp 
2 v ϕ2  ω 
 
1−  
 ω 
ε 0 E0 2
simplement u + ec = .
2
Pour déterminer la vitesse de propagation moyenne de l’énergie totale, notée
G
cE , on calcule l’énergie moyenne qui traverse pendant dt une surface S orthogonale
G
à ex , et on l’identifie à dt fois le flux du vecteur de Poynting à travers S :
G
G SP 1 G c2 G G
cE = = ex = ex = v gex : dans un milieu dispersif non absorbant,
u + ec ε0µ0v ϕ vϕ
l’énergie se propage à la vitesse de groupe, pas à celle de phase.
∂u G G G
Remarquons qu’un bilan local d’énergie s’écrit ici + divSP = −J ⋅ E . Comme
∂t
G G
la puissance volumique J ⋅ E cédée par le champ aux charges est, d’après le théo-
rème de l’énergie cinétique, égale à la variation temporelle de leur énergie cinétique
G G ∂e ∂(u + ec ) G
volumique : J ⋅ E = c , le bilan local d’énergie s’écrit + divSP = 0 .
∂t ∂t

744
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 745

2.5 Ondes de type hélicon 


Hypothèses
Nous allons étudier la propagation d’ondes électromagnétiques transversales
de basses fréquences (entre 1 kHz et 30 kHz) dans l’ionosphère, plasma magnétisé
� �
par la présence d’un champ magnétique uniforme et stationnaire B1 = B1ex , colinéaire

à la direction de propagation. La norme B1 de ce champ, de l’ordre de B1 = 10−4 T ,


� �
vérifie B1 >> B , où B est le champ magnétique de l’onde dans le plasma.

eB1
On pose ωc = ≃ 2 ⋅ 107 rad ⋅ s-1 , pulsation cyclotron. Elle est du même ordre
m
n0e2
que la pulsation plasma qui vaut ωp = ≃ 2 ⋅ 107 rad ⋅ s-1 pour n0 = 1011 m-3 . Les
ε0 m

pulsations ω des ondes étudiées ne dépassent pas 2 ⋅ 105 rad ⋅ s-1, et vérifient donc
ω << ωc ≃ ωp .

Densité de courants

En présence de B1 , le P.F.D appliqué à un électron est modifié car si la force
magnétique due à l’onde est négligeable devant la force électrique, ce n’est pas le cas

� � ∂v � � � � � � �
de la force −ev ∧ B1 . On obtient m = −eE − ev ∧ B1 ⇔ imωv = −e(E + v ∧ B1) après
∂t
� � �
linéarisation. La densité de courants J = −n0ev est donc reliée à B1 par :
� n e2 � eB � � � ε0ωp2 � ω � �
J= 0
E− 1
J ∧ ex , soit J = E − c J ∧ ex . Comme ω << ωc , on a :
imω imω iω iω
ε0ωp2 � ωc � � � � � ωp2 �
E− J ∧ ex ≃ 0 , et donc J ∧ ex = ε0 E (1) .
iω iω ωc

Équations de Maxwell
On recherche une solution d’O.P.P.H pour laquelle l’équation de M.A s’écrit :
� � � � � ωp2 � � ωp2
−ik ∧ B = µ 0  J + ε0 i ωE  . Or J ≃ ε0 E >> ε0ω E , puisque ω << . Les équa-
ωc ωc
� �
−ik ⋅ B = 0
 � � �
−ik ∧ E = −i ωB
tions de Maxwell fournissent :  � � .
−ik ⋅ E = 0 (car l'onde est transversale)  ρ = 0
 � � �
−ik ∧ B = µ0 J
� �
� � � � k ∧E k2 � �
On a donc k ∧ B = i µ0 J , avec B = d’après M.F, d’où − E = i µ0 J (2) .
ω ω

745
746 Partie VII.  Physique des ondes

Le produit vectoriel intervenant dans (1) ne permet pas d’obtenir une relation de
dispersion en combinant (1) et (2).

Relations de dispersion
G G
Projetons alors ces deux relations sur ey et ez :

 ω2 
 J z = ε0 p E y ε c 2k 2
 Jy = i 0 Ey
 ωc  ω
(1) :  , et (2):  . On en tire, en éliminant J y et Jz :
 ωp2  ε 0c 2k 2
J y = −ε0 Ez J z = i ω Ez
 ωc
 ωω 2
E y − i 2 2p Ez = 0
 k c ωc
 . Ce système linéaire homogène n’admet des solutions non
2
 ωωp
i 2 2 E y + E z = 0
 k c ωc
ωωp2
nulles (E y , Ez ) ≠ (0,0) que si son déterminant est nul, soit = ±1.
k 2c 2ωc
ωωp2 ωp ω
— Dans le premier cas où 2 2
= +1, la relation de dispersion donne k = ,
k c ωc c ωc
en se limitant à une O.P.P.H qui se propage dans le sens des x croissants. Il y a donc
ω ωωc
propagation avec dispersion. La vitesse de phase vaut v ϕ = =c et la vitesse
k ωp

dω dk ωωc
de groupe : v g = = 1/ = 2c . Toutes deux sont très petites devant c.
dk dω ωp
La relation entre Ey et Ez est alors Ez = −iE y .

Si Ey = E0 cos(ωt − kx ) , alors Ez = E0 sin(ωt − kx ) : l’onde est polarisée circu-


lairement à gauche. Les O.P.P.H.P.C.G se propagent avec dispersion, mais sans at-
ténuation.
ωωp2
— Dans le deuxième cas où = −1, la relation de dispersion donne :
k 2c 2ωc
ωp ω i i
k = ±i = ± . La solution physique est k = − si le plasma occupe le demi-
c ωc δ δ
espace x ≥ 0 . L’onde, purement stationnaire, ne se propage pas, et est atténuée spa-
c ωc
tialement sur une distance caractéristique δ = .
ωp ω
La relation entre Ey et Ez est Ez = iE y .

746
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 747

x x
− −
Si E y = E0e δ cos( ωt ) , alors E z = −E0e δ sin( ωt ) : l’onde est polarisée circu-
lairement à droite, mais ce n’est plus une onde progressive.

Considérons maintenant une onde polarisée rectilignement lorsqu’elle pénètre


G G
dans l’ionosphère : E = E0ei ωt ey en x = 0 . On peut la décomposer en la somme d’une
G 1 G G
onde polarisée circulairement à gauche : E + = E0e i ωt ey − iez  , et d’une onde pola-
2
G 1 G G
risée circulairement à droite : E − = E0e i ωt ey + iez  . La première va se propager
2
sans atténuation, la seconde est atténuée. Au bout d’un parcours de longueur >> δ ,
l’onde résultante est une O.P.P.H.P.C.G.

Les premières ondes de type hélicon que l’on a pu


observer étaient des « siffleurs » atmosphériques produits
par les éclairs, et se propageant dans l’ionosphère le long
des lignes de champ magnétique terrestre. Au cours de leur
propagation, ces ondes se polarisent circulairement à
gauche, et se dispersent. La vitesse de phase étant une
fonction croissante de la fréquence, les hautes fréquences
arrivent avant les basses dans une antenne.
Si on convertit les signaux électriques captés en signaux audio à l’aide d’un
amplificateur et d’un haut-parleur, on peut entendre ces signaux, qui peuvent durer
plusieurs secondes, dans une tonalité descendante.

3. O.P.P.H ÉLECTROMAGNÉTIQUE DANS UN


CONDUCTEUR
3.1 Modèle microscopique
Considérons un conducteur métallique, constitué d’un réseau de cations et
d’électrons libres de densité volumique n0 , de charge −e , de masse m et de vitesse
G
v e par rapport au référentiel d’étude galiléen R dans lequel le conducteur est fixe. Les
cations, beaucoup plus lourds que les électrons, sont considérés comme fixes. Les
courants électriques dans le conducteur sont donc uniquement dus aux électrons.
G G
Le vecteur densité volumique de courants s’écrit J (M, t ) = n0 ( −e )v (M, t ) , la vi-
tesse des électrons étant de nouveau décrite par un champ eulérien. Cette vitesse
G
v (M , t ) , moyennée dans un volume mésoscopique, est différente de la vitesse indivi-
G
duelle v e (t ) d’un électron de ce volume car elle fait disparaître l’agitation thermique.
Les électrons de conduction formant un gaz, le conducteur peut être vu comme un

747
748 Partie VII.  Physique des ondes

plasma, mais différent de celui étudié précédemment, car très dense : on ne peut pas
négliger les chocs entre les électrons et les défauts du réseau cristallin. Adoptons le
modèle de Drude vu dans le chapitre sur le transport de charges, dans lequel la prise
en compte des chocs subis par les électrons libres se fait par l’intermédiaire de la force
� �
−mv / τ . On supposera qu’on peut déterminer v (M , t ) en appliquant le P.F.D à un
� �
électron « moyen » de vitesse v (M , t ) , et non pas v e (t ) .
Finalement, leur poids étant négligeable devant les forces électromagnétiques,

les électrons sont donc uniquement soumis à −mv / τ et à la force de Lorentz
� � � � � �
F = −e(E + v ∧ B ) , où E et B ne sont pas indépendants, puisqu’ils forment le champ
électromagnétique qui se propage dans le conducteur. Dans le vide, nous avons vu
� � �
que la force magnétique qv ∧ B était négligeable devant la force électrique qE pour
des particules non relativistes. Nous supposerons que c’est aussi le cas dans le con-
ducteur, et nous vérifierons cette hypothèse (H1) a posteriori.
Sous l’effet de l’onde, de longueur d’onde λ et de période T, les oscillations d’un
électron ont une amplitude dont l’ordre de grandeur, noté a, est supposé très inférieur
� �
à la longueur caractéristique des variations du champ ( E , B ) (hypothèse H2). On peut
en conséquence considérer que l’électron reste en un point M0 fixe pour calculer sa
� �
� � � � dv ∂v
vitesse : v = vLAG (t ) = v EUL (M (t ), t ) ≃ v EUL (M0 , t ) . On a donc ≃ .
dt ∂t
� �
Ces hypothèses rendent le problème linéaire (les termes non linéaires −ev ∧ B
� → �
et (v ⋅ grad)v , accélération convective, étant négligés), ce qui autorise la notation com-
plexe pour un régime sinusoïdal de pulsation ω.
Sous toutes ces hypothèses, on obtient par application du P.F.D dans R à un
� � � � �
∂v v � v � e/m �
électron : m = −eE − m ⇔ imωv = −eE − m , soit v = − E . La constante
∂t τ τ 1/ τ + i ω
de temps τ est très petite (de l’ordre de 10−14 s pour du cuivre), donc pour des fré-
quences f << 1014 Hz , largement inférieures aux fréquences optiques, on a ω << 1/ τ
� eτ �
et on peut faire l’approximation v = − E .
m

Pour f << 1014 Hz , la densité volumique de courants dans le conducteur vaut


� � n e2 τ
J = γE , avec γ = 0 ∈ R , conductivité électrique du métal.
m

Au contraire, ω >> 1/ τ pour des fréquences optiques ou supérieures. On a


� e �
alors v = − E . Le métal se comporte comme un plasma, de fréquence plasma :
imω
e n0
fp = ≃ 2 ⋅ 1015 Hz , car n0 ≃ 1029 m-3 pour Cu. Les métaux propagent sans
2 π ε0 m

748
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 749

atténuation des ondes transversales de fréquence f > fp . Ce phénomène s’appelle


transparence ultra-violette des métaux.
→ G G
L’équation de M.A s’écrit alors dans le conducteur rot B = µ0 [ γ + i ε0 ω] E . Pour
→ G G
tout bon conducteur, on a ε0 ω << γ si f << 1014 Hz , d’où rot B = µ0 γ E .
G
En prenant la divergence de cette relation, on obtient div E = 0 , ce qui entraîne
d’après M.G que le conducteur est neutre à l’échelle mésoscopique.

Pour f << 1014 Hz , la densité volumique de charges est nulle : ρ = 0 , et l’équa-


→ G G
tion de M.A s’écrit rot B = µ0 γ E .

3.2 Dispersion
Nous recherchons des solutions d’O.P.P.H.P.R dans un conducteur métallique :
G G
E ( x, t ) = E0ei ( ωt − kx ) G G G 3
G G i ( ωt − kx ) , avec k (ω) = [ k ′(ω) + ik ′′(ω)] ex , et E0 ∈ R . Les équations de
B( x, t ) = B0e
G G
−ik ⋅ B = 0 (M.T)
 G G G
−ik ∧ E = −i ωB (M.F)

Maxwell dans le conducteur s’écrivent alors :  G G ρ .
−ik ⋅ E = ε = 0 (M.G)
 G G 0 G
−ik ∧ B = µ γ E (M.A)
 0
L’onde étudiée est donc T.E.M (transverse électromagnétique). Pour découpler
G G G
ce système, on forme k ∧ (k ∧ E ) :
G G G G G G G G G G
k ∧( k ∧ E ) = k( k ⋅ E ) − k 2 E ⇔ ω k ∧ B = −k 2 E . On en déduit :
G G
ωB (M.F) 0 (M.G) i µ0 γ E (M.A)

k 2 = −i µ0 γω , relation de dispersion dans le conducteur.

On peut également déterminer l’équation d’onde pour une onde quelconque :


G
divB = 0 (M.T)
 G
→ G
  ∂B
 rot E = − ∂t (M.F)
 G
divE = 0 (M.G)

→ G G
 
 rot B = µ0 γ E (M.A)

749
750 Partie VII.  Physique des ondes

  → G G
→  →
 G  →  G G G ∂ rot B ∂E
rot   rot E  = grad  div
N E  − ∆E , soit ∆E = = µ0 γ .
 G  0 (M.G)  ∂t (M.A) ∂t
∂B
 − (M.F) 
 ∂t 
G
G ∂E G
Cette équation d’onde, ∆E = µ0 γ (on peut vérifier que B est régi par la
∂t
même équation) n’est plus l’équation de d’Alembert mais une équation de diffusion (de
Kelvin). Elle reste linéaire, mais n’est pas invariante par changement t → −t : la pro-
pagation dans le conducteur est irréversible, ce qui est à relier à l’introduction de « frot-
tements » dans le modèle microscopique (phénomènes dissipatifs).
G G
En injectant E ( x, t ) = E0ei ( ωt − kx ) dans l’équation d’onde, on retrouve la relation

de dispersion k 2 = −i µ0 γω = µ0 γωe −i π /2 , dont les solutions sont :


π
−i
4
µ0 γω 1− i 2
k = ± µ0 γωe = ±(1 − i ) =± , où δ = est l’épaisseur de peau du
2 δ µ0 γω
conducteur.
 x  x
G G − x i  ωt − δ  G x i  ωt + δ 
Le champ électrique s’écrit donc E ( x, t ) = E0e δ e   + E′ e δ e   . Le
 0
1− i 1− i
k= k =−
δ δ
premier terme correspond à une onde se propageant dans le sens des x croissants
avec absorption, le second à une onde se propageant dans le sens des x décroissants,
également avec absorption.
Prenons le cas d’un conducteur occupant le demi-espace x > 0 : la solution
x i ωt −  x
G −  δ  G G
physique est E ( x, t ) = E0e δ e  ey , en prenant une onde polarisée selon ey . On
x i  ωt − x 
 δ  G
− π x  x
K δe 
1− i G E0 e ey −i
4
E0 − δ i  ωt − δ  G
en déduit B( x, t ) = ex ∧ = 2e e e ez , soit :
δ
G ω ωδ
k
x  x π
K E0 − δ i  ωt − δ − 4  G
B ( x, t ) = 2 e e ez . En notation réelle :
ωδ
G x
x G
E ( x, t ) = E0e δ cos  ωt −  ey

  δ
 .
x x
G 2 −δ  x π G µ0 γ − δ  x π G
B( x, t ) = E0 e cos  ωt − −  ez = E0 e cos  ωt − −  ez
 ωδ  δ 4 ω  δ 4

À une profondeur dans le conducteur égale à la pseudo-période spatiale des


oscillations ∆x = 2πδ , l’amplitude des champs est déjà très faible devant celle qu’ils
ont en x = 0 .

750
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 751

On retrouve les résultats vus dans le chapitre sur l’électromagnétisme dans


l’A.R.Q.S (les équations de Maxwell dans le conducteur et la géométrie sont les
mêmes, seule la technique de résolution, ici par recherche de solutions O.P.P.H, dif-
fère).

Le champ est absorbé, et se propage avec dispersion. La vitesse de phase vaut


ω 1 2ω
vϕ = , avec k ′ = : v ϕ = ωδ = .
k′ δ µ0 γ
Il reste à vérifier les hypothèses H1 et H2.
Ces hypothèses sont liées car pour pouvoir négliger la force magnétique devant
la force électrique, il faut que la vitesse des électrons vérifie v << E / B = O(ωδ) , et pour
que l’électron oscille avec une amplitude a = O(v / ω) très inférieure à δ, il faut aussi
2ω 4πf
v << v ϕ = ωδ = = .
µ0 γ µ0 γ

Numériquement, pour du cuivre ( γ = 5,9 ⋅ 107 S ⋅ m-1 ), il faut v << 0,41 f , ce qui
reste vérifié même à de très basses fréquences, puisque la vitesse de conduction est
très faible (inférieure au mm par seconde).

3.3 Aspect énergétique


Les électrons libres du conducteur reçoivent une puissance volumique :
2x
3 G G
d p δ cos2  ωt − x  > 0 . Sa valeur moyenne vaut :

2 2
= J ⋅ E = γE = γE e  δ 
0
d3V 
2x
d3 p 1 −
= γE02e δ . Il y a dissipation d’énergie : l’énergie reçue par les charges de
d3V 2
la part de l’onde est transformée en énergie thermique.
Un conducteur est un milieu absorbant.

751
752 Partie VII.  Physique des ondes

3.4 Conducteur parfait

Prenons de nouveau l’exemple du cuivre pour lequel γ = 5,9 ⋅ 107 S ⋅ m-1 .


L’épaisseur de peau s’exprime numériquement en fonction de la fréquence en Hz se-
lon l’expression δ = 0,066 / f (m) . Elle vaut par exemple 9,3 mm ≃ 1 cm à 50 Hz, et
2,1 µm à 1 GHz.
Les champs variables ne pénètrent donc dans les conducteurs que sur une fine
couche, appelée peau, d’autant plus mince que la fréquence est grande. C’est la raison
pour laquelle il est inutile d’utiliser des conducteurs pleins de grande section pour
transporter des ondes de haute fréquence.

D’autre part, comme la section du conducteur dans laquelle la densité volu-


� �
mique de courants J = γE est non négligeable diminue avec la fréquence, la résis-
tance des conducteurs augmente avec la fréquence.

Par définition, un conducteur est parfait si γ → ∞  δ → 0 . L’onde ne pénètre


� �
pas du tout dans un conducteur parfait. Les courants J = γE n’y pénètrent pas non
d3 p
plus (l’exponentielle l’emporte quand γ → ∞ ). De même →0.
d3V

Dans un conducteur parfait ( γ → ∞ ), le champ électromagnétique, les charges


et les courants sont nuls. Il peut en revanche exister des charges et des courants de

densités σ et J S à la surface du conducteur.
Une onde incidente sur le métal est alors totalement réfléchie car aucune puis-
d3 p
sance n’est absorbée : = 0.
d3V

4. AUTRES EXEMPLES CLASSIQUES DE LA


DISPERSION D’ONDES PLANES 
4.1 Chaîne d’oscillateurs mécaniques 
Le système a été décrit dans le chapitre sur les phénomènes ondulatoires non
dispersifs.
Une infinité de points matériels de masse m sont liés par des ressorts de raideur
K. La chaîne est portée par l’axe Ox. À l’équilibre, les masses occupent les positions
xn = na , avec n ∈ Z , où a est la longueur à vide des ressorts.
Lors d’une petite perturbation de longueur d’onde λ, les masses se déplacent
légèrement. La nième masse se déplace de ξn par rapport à sa position d’équilibre.

752
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 753

En appliquant le P.F.D à la masse « n » dans le référentiel du laboratoire sup-


posé galiléen, on obtient l’équation couplant ξn à ξn −1 et ξn +1 :

d2ξn
m = Tn −1/ n + Tn +1/ n = −K (2ξn − ξn −1 − ξn +1) ∀n ∈ ℤ.
dt 2
On linéarise cette relation pour une petite perturbation : puisque ξn << λ et
ξn << a , tout se passe comme si la masse « n » restait en x = xn = na , et on peut
d ∂
écrire ≃ .
dt ∂t
K
En introduisant la pulsation ω0 = , l’équation de couplage devient :
m
∂ 2ξ n
2
= −ω02 (2ξn − ξn −1 − ξn +1) (∗) ∀n ∈ Z .
∂t
Cherchons des solutions de ce système d’équations sous la forme d’O.P.P.H :
ξn = Ae i ( ωt − kxn ) = Ae i ( ωt − kna ) ∀n ∈ Z , avec ω ∈ R + .

On obtient −ω2e −ikna = −ω02 2e −ikna − e −ik ( n −1)a − e −ik ( n +1)a  , en injectant dans
 

(∗) . La relation de dispersion des ondes étudiées est ω2 = ω0 2  2 − e ika − e −ika  .


 

— Supposons tout d’abord que k est réel. La relation de dispersion s’écrit :


 ka   ka 
ω2 = 2ω02 [1 − cos(ka )] = 4ω02 sin2    ω = 2ω0 sin   .
 2  2 
L’hypothèse k réel, donc qu’il y a propagation sans atténuation, n’est vérifiée
que si ω < 2ω0 = ωc . Le système est passe-bas, de fréquence de coupure ωc = 2ω0 .
 ka  2π
La fonction k ֏ sin   étant -périodique, on peut restreindre l’étude à
 2 a
 π π  π
l’intervalle  − ,  , et même à 0,  , en se limitant aux O.P.P.H se propageant dans
 a a  a
le sens des x croissants (une translation de 2π / a sur k ne change pas les solutions
physiques).

753
754 Partie VII.  Physique des ondes

2π π
Lorsque k = << , soit a << λ (on a alors ω << 2ω0 ), on est dans l’approxi-
λ a
mation des milieux continus. On peut linéariser la relation de dispersion :
ω
ω ≃ ω0 ka  k = . On retrouve que les ondes telles que a << λ ne sont pas disper-
aω0
K
sées, et qu’elles se propagent à la célérité c = aω0 = a . Deux masses voisines
m
vibrent quasiment en phase, puisque ξn +1 = ξn e − ika avec ka << π .
π
En revanche, lorsque ω se rapproche de 2ω0 , k tend vers , donc deux
a
masses voisines vibrent en opposition de phase. La dispersion est importante dans
cette zone.
— Supposons maintenant que k soit complexe : k = k ′ + ik ′′ , (k ′, k ′′) ∈ R 2 . La relation

de dispersion s’écrit ω2 = ω02 2 − e −k ′′ae ik ′a − e k ′′a e −ik ′a  . En prenant la partie réelle, on


 

obtient ω2 = ω02 2 − ek ′′a + e −k ′′a cos(k ′a ) , soit ω2 = 2ω02 [1 − ch(k ′′a )cos(k ′a )] ( ∗ ∗) .
( )
 
La partie imaginaire fournit 0 = ω02  ek ′′a − e −k ′′a sin(k ′a ) , soit sh(k ′′a )sin(k ′a ) = 0 .
( )
 
Le cas où k ′′ = 0 (k réel), correspondant à ω < 2ω0 = ωc , a déjà été étudié.
Si k ′′ ≠ 0 alors sin(k ′a ) = 0 ⇔ k ′a = pπ . Si p est pair, cos(k ′a ) = 1 et d’après

( ∗ ∗) : ω2 = 2ω02 [1 − ch( k ′′a )] ≤ 0 ce qui ne correspond pas aux solutions recherchées.


En conséquence p est impair donc cos(k ′a ) = −1, et on peut se limiter à k ′a = π .
ω2
On a alors ω2 = 2ω02 [1 + ch(k ′′a )] ⇔ ch(k ′′a ) = − 1 d’après ( ∗ ∗) . Comme
2ω02

ch(k ′′a ) ≥ 1, ce cas correspond bien à ω2 ≥ 4ω02 ⇔ ω ≥ 2ω0 .

754
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 755

π i  ω2  π i
En conséquence, k = ± argch  − 1 = ± , avec :
 2ω 2 
a a  0  a δ
a
δ= .
 ω2 
argch  − 1
 2ω 2 
 0 

Prenons l’exemple où la chaîne est semi-infinie (elle contient les points maté-
riels n = 0 , n = 1, n = 2 …), et qu’on impose une vibration sinusoïdale de faible ampli-
tude ( << a ) et de pulsation ω au premier de ces points ( n = 0 ).
— Si ω < 2ω0 , la vibration se propage sans atténuation mais avec dispersion.
π i
— Si ω > 2ω0 , la solution physique pour k est k = − . La vibration est atténuée spa-
a δ
a

− ika −i π
tialement car ξn +1 = ξn e = ξn e e δ . L’onde est stationnaire, et deux points maté-
riels voisins vibrent en opposition de phase.

4.2 Câble coaxial avec pertes 


Pour le mode de propagation T.E.M sans pertes, un élément de câble de lon-
gueur dx est équivalent à une cellule LC.
Les pertes sont prises en compte en ajoutant des éléments résistifs. Le premier,
de résistance dR = rdx , est en série avec la bobine, et le second, de conductance
dG = gdx , est en parallèle avec le condensateur. Les grandeurs r et g sont donc res-
pectivement des résistance et conductance linéiques, nulles pour un câble parfait.

Écrivons la loi des nœuds et la loi des mailles pour le circuit équivalent à une
longueur dx de câble.

— Loi des nœuds :


∂u ∂i ∂u
i ( x, t ) = i ( x + d x, t ) + Γ dx ( x + d x, t ) + g d x ⋅ u ( x + d x, t )  = −Γ − gu .
 
∂i  ∂t gdxu ( x,t ) à l'ordre 1 en dx
∂x ∂t
i ( x,t ) + dx ∂u
∂x Γdx ( x ,t ) à l'ordre 1 en dx
∂t

755
756 Partie VII.  Physique des ondes

∂i ∂u ∂i
— Loi des mailles : u( x, t ) = u( x + dx, t ) + rdx ⋅ i ( x, t ) + Λdx ( x, t )  = −ri − Λ .
����� ∂t ∂x ∂t
∂u
u ( x ,t ) + dx
∂x

 ∂i ∂u
 ∂x = −Γ ∂t − gu (1)
Les deux relations de couplage sont  .
 ∂u = −ri − Λ ∂i (2)
 ∂x ∂t
∂(2) ∂(1)
Pour les découpler, on peut effectuer −Λ :
∂x ∂t
∂ 2u ∂ 2i ∂i ∂ 2i ∂ 2u ∂u
2
−Λ = −r −Λ + ΛΓ 2 + Λg . Il vient :
∂x ∂x ∂t ∂x ∂x ∂t ∂t ∂t
∂ 2u ∂u ∂ 2u ∂u ∂ 2u ∂ 2u ∂u
= rΓ + rgu + ΛΓ 2 + Λg , soit − ΛΓ − ( r Γ + Λg ) − rgu = 0 .
∂x 2 ∂t ∂t ∂t ∂x 2
∂t 2 ∂t
∂(1) ∂(2)
Avec la combinaison −Γ :
∂x ∂t
∂ 2i ∂ 2u ∂ 2u ∂u ∂i ∂ 2i
−Γ = −Γ −g + r Γ + ΛΓ 2 . Il vient :
∂x 2 ∂x ∂t ∂x ∂t ∂x ∂t ∂t
∂ 2i ∂i ∂i ∂ 2i ∂ 2i ∂ 2i ∂i
2
= rgi + Λg + r Γ + ΛΓ 2 , soit 2
− ΛΓ 2 − (r Γ + Λg ) − rgi = 0 .
∂x ∂t ∂t ∂t ∂x ∂t ∂t

s( x, t ) = u( x, t ) , ou i ( x, t ) , vérifie pour le mode de propagation étudié l’équation


∂ 2s ∂ 2s ∂s
d’onde 2
− ΛΓ 2
− ( r Γ + Λg ) − rgs = 0 , appelée équation du télégraphiste.
∂x ∂t ∂t

On cherche des solutions de cette équation sous la forme s( x, t ) = s0e j ( ωt − kx ) ,


ce qui entraîne −k 2 + ΛΓω2 − j (r Γ + Λg )ω − rg = 0 ⇔ k 2 = −(r + j Λω)(g + j Γω) .
On écrit k = ±(k ′ + jk ′′) avec k ′ > 0 . k ′ et k ′′ sont deux réels.
On obtient :
k ′2 − k ′′2 = ΛΓω2 − rg
k ′2 − k ′′2 + 2 jk ′k ′′ = ΛΓω2 − rg − j (r Γ + Λg )ω ⇔ 
2k ′k ′′ = −(r Γ + Λg )ω < 0
1
On a donc k ′′ = − < 0 . La forme générale des solutions de l’équation de pro-
δ
x x

pagation est s( x, t ) = s0 +e δ e j ( ωt − k ′x ) + s0 −e δ e j ( ωt + k ′x ) .
������� �������
O.P.P.H x ր atténuée O.P.P.H x ց atténuée

Du fait de la prise en compte de phénomènes dissipatifs, l’onde est atténuée


spatialement, quel que soit son sens de propagation.

756
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 757

Pour une O.P.P.H x ր , on a k = k ′ + jk ′′ , et les relations de couplage fournis-


 u jk
− jki = − j Γωu − gu ⇔ i = g + j Γω (1)

sent : 
− jku = −r i − j Λωi ⇔ u = r + j Λω (2)
 i jk
Si on fait le rapport de ces deux équations, on retrouve l’équation de dispersion
qui, si elle est vérifiée, assure leur compatibilité. En faisant le produit, on obtient
2
u  r + j Λω
Zc 2 =   = , ce qui permet de calculer l’impédance caractéristique complexe
i  g + j Γω
1/2
u  r + j Λω 
Zc = = , définie comme le rapport de la tension sur le courant au cours
i  g + j Γω 
de la propagation dans le sens des x croissants.

Nous allons désormais nous placer dans le cas où les pertes sont faibles : la
tension aux bornes du conducteur ohmique de résistance r dx est faible devant celle
aux bornes de la bobine, et le courant dans le conducteur ohmique de conductance
g dx est faible devant le courant dans le condensateur :
 r dxi << Λ dxj ωi , soit r << Λω
 .
 g dxu << Γdxj ωu , soit g << Γω
On peut effectuer un développement limité de la relation de dispersion à l’ordre
r g
2 en << 1 et << 1.
Λω Γω
X X2
Avec (1 + X )1/2 = 1 + − à l’ordre 2, on trouve :
2 8
1/2
 j r g rg   j r g rg 
k 2 = ΛΓω2 1 −  +  − 2   k = ω ΛΓ 1 −  +  − 2
 ω  Λ Γ  ΛΓω   ω  Λ Γ  ΛΓω 
 j r g rg 1 r g 
2
k = ω ΛΓ 1 −  + − +  +  
 2ω  Λ Γ  2ΛΓω2 8ω2  Λ Γ  
 j r g 1 r g 
2
k = ω ΛΓ 1 −  +  +  −  .
 2ω  Λ Γ  8ω2  Λ Γ  
 1 r g 
2
ΛΓ  r g 
On en déduit k ′ = ω ΛΓ 1 + 2  −   et k ′′ = − + .
  2  Λ Γ 
 8 
ω Λ Γ
r g
La dispersion est faible puisqu’elle n’intervient qu’à l’ordre 2 enet .
Λω Γω
On peut même théoriquement annuler le terme d’ordre 2 en choisissant les pa-
ramètres géométriques du câble, le diélectrique, et les métaux constituant l’âme et la

757
758 Partie VII.  Physique des ondes

r g ω 1
tresse, de façon à avoir = . On a alors k ′ = , avec c = , comme pour un
Λ Γ c ΛΓ
1 r g 1
câble parfait, et k ′′ = −  +  , soit k ′′ = − δ . L’onde est spatialement atténuée sur
2c  Λ Γ 
une longueur caractéristique δ indépendante de la pulsation.
En réalité, r et g dépendent de la fréquence comme on l’a vu au 3.4 : le coeffi-
cient de réflexion sur les conducteurs diminue avec f, ce qui correspond à des pertes
plus grandes.
La dispersion des modes T.E.M est effectivement très faible, même sur des
longueurs de plusieurs km.
En revanche, l’atténuation n’est pas négligeable : il faut placer des répétiteurs
le long de la ligne pour garder un bon rapport signal sur bruit en sortie du câble. Si la
largeur d’une impulsion n’augmente pas lors de la propagation, l’impulsion se déforme,
ses différentes composantes sinusoïdales ne subissant pas la même atténuation.

4.3 Pavillon acoustique exponentiel 


Nous allons étudier la dispersion des ondes acoustiques dans un pavillon de
x
révolution autour de l’axe Ox, dont la section varie selon la loi S ( x ) = S0e d , rempli
d’air de masse volumique ρ0 .

758
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 759

Si la longueur L du pavillon est suffisamment petite, le rayon du pavillon


x
r = r0e 2d varie peu. Par exemple, si L < 0,4d , on a r (L ) < 1,22r0 . Le rayon r varie au
maximum de ∆r = 0,22r0 .
La vitesse eulérienne de l’écoulement d’air peut alors être prise de la forme
� �
v ≃ v x ( x, t )ex (l’onde est quasi-plane). On note c la célérité du son dans l’air et on se
place dans l’approximation acoustique.

Équation d’onde
On établit les équations de couplage comme cela a été vu dans le chapitre sur
les ondes acoustiques.
— Le principe fondamental, appliqué à une particule fluide dans le référentiel terrestre,
� →
∂v ∂v ∂p
fournit après linéarisation ρ0 = − grad p1 , soit ρ0 x = − 1 (1) en projection sur
∂t ∂t ∂x
Ox.
— La relation linéarisée entre ρ et p à entropie constante est ρ1 = ρ0 χS p1 (3) .
∂ρ1 �
— En revanche, l’équation de continuité linéarisée + ρ0divv = 0 n’est pas appli-
∂t
� �
cable avec v = v x ( x, t )ex puisqu’il existe une faible composante radiale v r de la vi-
tesse, mais qui peut varier autant avec r que v x varie avec x. On ne peut pas négliger
1 ∂
[rv r ] devant ∂xx dans l’équation 1 ∂ρ1 + 1 ∂ [ rv r ] + ∂v x = 0 .
∂v
r ∂r ρ0 ∂t r ∂r ∂x
On effectue alors un bilan de masse entre t et t + dt à la tranche de fluide com-
prise entre x et x + dx . Entre t et t + dt , sa masse varie de :
∂ρ1
d2m = [ρ0 + ρ1( x, t + dt )] S ( x )dx − [ρ0 + ρ1( x, t )] S (x )dx , soit d2m =
S ( x )dxdt .
∂t
Cette variation est due à la différence entre la masse qui rentre pendant dt :
δmx = [ρ0 + ρ1( x, t )] v x ( x, t ) S ( x )dt = ρ0v x ( x, t ) S ( x )dt , et la masse qui sort pendant dt :
δmx + dx = [ρ0 + ρ1( x + dx, t )] v x ( x + dx, t ) S ( x + dx )dt = ρ0v x ( x + dx, t ) S ( x + dx )dt .
Les calculs sont en effet menés à l’ordre 1 en la perturbation, or le terme ρ1v x
est d’ordre 2.
∂( S v x )
La différence δ2m = δmx − δmx + dx vaut δ2m = −ρ0 dxdt , et on déduit
∂x
du bilan de masse d2m = δ2m la dernière équation de couplage :
x
∂ρ1 ∂( S v x ) ∂ρ ∂v dS
S ( x ) = −ρ0 ⇔ 1 S ( x ) = −ρS ( x ) x − ρ0v x , avec S ( x ) = S0e d .
∂t ∂x ∂t ∂x dx
∂ρ ∂v ρ
On aboutit finalement à 1 + ρ0 x = − 0 v x (2) .
∂t ∂x d

759
760 Partie VII.  Physique des ondes

On obtient l’équation d’onde régissant v x ( x, t ) en éliminant ρ1 entre (2) et (3) :


∂p1 ∂v x 1 ∂(4) ∂(1)
χS + = − v x (4) , puis en effectuant − χS :
∂t ∂x d ∂x ∂t
∂ 2v x ∂ 2v x 1 ∂v x ∂ 2v x 1 ∂ 2v x 1 ∂v x
− ρ0χS =− , soit − =− en introduisant la célérité
∂x 2 ∂t 2 d ∂x ∂x 2 c 2 ∂t 2 d ∂x
1
c= du son dans l’air.
ρ0 χS

Dispersion / atténuation

On cherche des solutions O.P.P.H de cette équation : v x ( x, t ) = v 0e i ( ωt − kx ) . On

i ω2
obtient alors la relation de dispersion k 2 + k − 2 = 0 , équation du second degré
d c
1 ω2 4 c
dont le discriminant est ∆ = − 2
+4 2
= 2
(ω2 − ωc 2 ) , avec ωc = .
d c c 2d

i i i  ω2 
— Si ω ≤ ωc , k = − ± ωc 2 − ω2 = − 1 ∓ 1 −  . Les solutions sont donc :
2d c 2d 
������ ωc 2 

>0
x  ω2  x  ω2 
− 1− 1− 2  − 1+ 1− 2 
2d  ωc  i ωt 2d  ωc  i ωt
v x ( x, t ) = v 0 e e + v 0′ e e .
C’est une somme de deux ondes stationnaires qui s’atténuent dans le sens des
x croissants. Il n’y a donc pas de propagation possible si ω ≤ ωc . Le pavillon est un
passe-haut : seules les ondes de fréquences f > fc peuvent se propager.

i 1 2 i 1 ω2 i
— Si ω > ωc , k = − ± ω − ωc 2 = − ± 2
− 1 = ±k ′ − .
2d c 2d 2d ωc 2d
x x
− −
Les solutions sont donc v x ( x, t ) = v 0e 2d ei ( ωt − k ′x ) + v 0′ e 2d e i ( ωt + k ′x ) .
������� �������
O.P.P.H x ր, atténuée O.P.P.H x ց, amplifiée

Bien que le milieu soit non absorbant, l’onde est atténuée si elle se propage
dans le sens des x croissants, et amplifiée si elle se propage dans le sens des x dé-
croissants.
Ceci est dû au fait que l’onde n’est qu’approximativement plane : la surface sur
laquelle se répartit la puissance de l’onde sonore augmente dans le sens des x crois-
sants. L’intensité, et donc l’amplitude des signaux diminue. C’est l’inverse quand l’onde
se propage dans le sens des x décroissants.
ω2 − ωc 2
La relation de dispersion k′(ω) est k ′2 = (équation de Klein-Gordon).
c2

760
Chapitre 4.  Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 761

ω c
On en déduit la vitesse de phase v ϕ = = , et la vitesse de groupe
k′ 2
ω 
1−  c 
 ω
2
dω ω 
vg = = c 1−  c  .
dk ′  ω 
L’air est un milieu non dispersif pour les ondes sonores, mais ici l’onde étudiée
n’est qu’approximativement plane et il y a dispersion du fait des conditions aux limites
(section divergente).

Un milieu non dispersif illimité ne disperse pas les ondes planes. Lorsqu’on im-
pose des conditions aux limites, des ondes non rigoureusement planes peuvent se
propager dans un milieu non dispersif, et être alors dispersées.

Bilan énergétique
Plaçons-nous dans le cas où ω > ωc , et où l’onde se propage dans le sens des
x

x croissants : v x = v 0e 2d e i ( ωt − k ′x ) .

Pour effectuer un bilan énergétique, on calcule également la surpression grâce


∂v x ∂ p1 ω i
à ρ0 =− (1)  p1 = ρ0 v x , avec k = k ′ − = k ei θ . On en déduit :
∂t ∂x k 2d
x
ω −
p1 = ρ0 v 0e 2d e i ( ωt − k ′x −θ ) .
k
 −
x
v x = v 0e 2d cos(ωt − k ′x )

En notation réelle,  x .

 p = ρ ω v e 2d cos(ωt − k ′x − θ)
 1 0
k 0

— L’énergie acoustique volumique moyenne vaut :
x x
1 1 1 − 1 ω2 −
uac = ρ0 v 2 + χS p12 = ρ0v 0 2e d + χS ρ02 2 v 02e d . Or :
2 2 4 4 k
x x
2 1 ω2 − ωc 2 1 ω2 1 − 1 −
k = k ′2 + = + =  uac = ρ0v 02e d + χS ρ02c 2 v 02e d .
4d 2 c2 4d 2 c2 4 4 
ρ0
x
1 −
ρ0v 02e d .
Il y a équipartition de l’énergie moyenne, et uac =
2
— Le vecteur densité volumique de courants d’énergie acoustique moyen vaut :
x
G G 1 ω − G Re(k ) k ′
Jac = p1v x ex = ρ0 v 02e d cos θ ex , or cos θ = = . On a donc :
2 k k k

761
762 Partie VII.  Physique des ondes

x x x
G 1 k′ − G 1 k′ − G 1 c2 2 − d G
Jac = ρ0ω 2 v 02e d ex = ρ0c 2 v 02e d ex = ρ0 v 0 e ex .
2 k 2 ω 2 vϕ
x
1 − G
= ρ0v 02e d v gex .
2
G
G Jac G
On en déduit la vitesse cU = = v gex de propagation de l’énergie acous-
uac
tique. C’est, comme il se doit quand le milieu n’est pas absorbant, la vitesse de groupe.

762
763

[PHYSIQUE DES ONDES 5]

INTERFACES ENTRE DEUX


MILIEUX
1. RÉFLEXION ET TRANSMISSION D’UNE ONDE
MÉCANIQUE À LA JONCTION ENTRE DEUX
CORDES 
Deux cordes de masses linéiques µ1 et µ 2 ,
tendues à la tension T0 , sont attachées en un point
M d’abscisse x = 0 .
T0
Une O.P.P se propage à la célérité c1 =
µ1
dans le sens des x croissants et donne naissance en M à une O.P.P réfléchie se pro-
pageant à c1 dans le sens des x décroissants, et à une O.P.P transmise se propageant
T0
à c2 = dans le sens des x croissants.
µ2
On a vu dans le chapitre sur les phénomènes de propagation non dispersifs
(sous-section 6.1) que pour une O.P.P se propageant dans le sens des x croissants,
la projection transversale Ty de la tension de la corde est reliée à la vitesse transver-
sale à la même abscisse par Ty = −µcv = −Zcv .
L’onde sur la corde (1) du côté x < 0 est la somme de l’onde incidente :
v i ( t − x / c1 )
 , où Z1 = µ1c1 = µ1T0 est l’impédance de la corde (1), et de
Ty i (x,t ) = −Z1v i ( t − x / c1 )

v r ( t + x / c1 )
l’onde réfléchie  .
Ty r (x,t ) = +Z1v r ( t + x / c1 )
L’onde sur la corde (2) du côté x > 0 est l’onde transmise :
v t ( t − x / c2 )
 , où Z2 = µ2c2 = µ2T0 est l’impédance de la corde (2).
Ty t (x,t ) = −Z2v t ( t − x / c2 )
Les conditions aux limites se déduisent de la continuité de v et Ty en x = 0 . La
première est due au fait qu’il y a continuité du déplacement transversal de la corde :
ψ1(0− , t ) = ψ 2 (0+ , t ) = ψ(t ) , qui donne v1(0− , t ) = v 2 (0+ , t ) = v (t ) en dérivant par rapport
G
au temps. La deuxième s’obtient en appliquant le P.F.D à M, en projection sur ey :

763
764 Partie VII.  Physique des ondes

dv
m = Ty 2 (0 + , t ) − Ty 1(0− , t ) , or la masse m de M est nulle (la répartition de masse est
dt
linéique, et on n’a pas attaché de masse ponctuelle en ce point).
v (t ) + v r (t ) = v t (t ) Z2 −Z1
On en déduit les relations suivantes :  i .
 −Z1v i (t ) + Z1v r (t ) = −Z2v t (t ) 1 1

À l’aide des deux combinaisons linéaires indiquées, on aboutit à l’expression


 v r (t ) Z1 − Z2
 r = v (t ) = Z + Z
 i 1 2
des coefficients de réflexion et de transmission en vitesse :  .
v
τ = t = ( t ) 2 Z 1
 v i (t ) Z1 + Z2

Pour une O.P.P se propageant dans le sens des x croissants, la puissance


transportée est p( x, t ) = − Ty ( x, t ) v ( x, t ) = +Zcv 2 ≥ 0 : cette puissance se propage dans

− Zcv ( x,t )

le même sens. On a au contraire p( x, t ) = − Ty ( x, t ) v ( x, t ) = −Zcv 2 ≤ 0 si l’onde se dé-



+ Zcv ( x,t )

place dans le sens des x décroissants, ce qui montre que la puissance se propage
aussi dans le sens des x décroissants. On compte désormais positivement les puis-
sances incidente, réfléchie et transmise, qui sont donc respectivement :
pi = Z1vi2 , pr = Z1v r 2 = Z1r 2vi2 et pt = Z2v t 2 = Z2 τ2v i2 . On en déduit les coefficients de
réflexion R et de transmission T en puissance :

2
pr  Z − Z2  Z12 − 2Z1Z2 + Z22
— R= = r2 =  1  = .
pi  Z1 + Z2  ( Z1 + Z2 )2
pt Z2 2 4Z1Z2
—T = = τ = .
pi Z1 (Z1 + Z2 )2

On a donc R + T = 1 , relation qui traduit la conservation de l’énergie (l’énergie


incidente est soit réfléchie, soit transmise puisqu’aucune énergie n’est absorbée en
x = 0 ).

2. RÉFLEXION ET TRANSMISSION D’UNE ONDE


ACOUSTIQUE À L’INTERFACE ENTRE DEUX
MILIEUX
2.1 Onde en incidence normale sur l’interface entre deux fluides
Lorsqu’une O.P.P, se propageant dans le sens des x croissants dans un tuyau
de section S , rencontre une interface entre deux fluides différents, elle donne

764
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 765

naissance à une onde réfléchie et une onde transmise. L’interface entre les deux mi-
lieux a pour équation x = 0 . Le milieu (1), correspondant aux abscisses x < 0 , est ca-
ractérisé par ρ0(1) , χS(1) , Zac(1) = Z1 , et une célérité c1 . Le milieu (2), correspondant

aux abscisses x > 0 , est caractérisé par ρ0(2) , χS (2) , Zac (2) = Z2 , et une célérité c2 .

v (1) (x,t )


L’onde  dans le milieu (1) est la somme de l’onde incidente :
(1)
 p1 (x,t )

v i ( t − x / c1 ) v r ( t + x / c1 )
 , et de l’onde réfléchie  . L’onde
 p1i (x,t ) = Z1v i ( t − x / c1 )  p1r (x,t ) = −Z1v r ( t + x / c1 )
v (2) (x,t ) = v t ( t − x / c2 )
dans le milieu (2) est l’onde transmise  .
(2)
 p1 (x,t ) = p1t (x,t ) = Z2v t ( t − x / c2 )
— L’interface, située au repos en x = 0 , est imperméable. Sous l’effet de la perturba-

tion, elle se déplace de ξ(t ) à la vitesse u(t ) = = v (1) (x = ξ(t )− ,t ) = v (2) (x = ξ(t )+ ,t ) ,
dt
mais à l’ordre 1 : v (1) (x = ξ(t )− ,t ) = v (1) (x = 0 − ,t ) , et v (2) (x = ξ(t )+ ,t ) = v (2) (x = 0 + ,t ) . On
a donc v (1) (x = 0 − ,t ) = v (2) (x = 0 + ,t ) : il y a continuité de la vitesse.
— L’interface possède une masse m nulle. En lui appliquant le P.F.D, on obtient :
0 =  p0 + p1(1) (x = 0− ,t ) S −  p0 + p1(2) (x = 0 + ,t ) S  p1(1) (x = 0− ,t ) = p1(2) (x = 0+ ,t ) , il
   
y a continuité de la surpression.
v (t ) + v r (t ) = v t (t ) −Z2 Z1
On en déduit les relations suivantes :  i .
Z1v i (t ) − Z1v r (t ) = Z2v t (t ) 1 1

À l’aide des deux combinaisons linéaires indiquées, on aboutit à l’expression


 v r (t ) Z1 − Z2
 r = v (t ) = Z + Z
 i 1 2
des coefficients de réflexion et de transmission en vitesse :  .
v
τ = t = ( t ) 2 Z 1
 v i (t ) Z1 + Z2

Les intensités incidente, réfléchie et transmise sont :


(i)
Iac = Z1 v i2 , Iac(r) = Z1 v r 2 = Z1r 2 v i2 et Iac(t) = Z2 v t 2 = Z2 τ2 v i2 .

On en déduit les coefficients de réflexion R et de transmission T en puissance :

765
766 Partie VII.  Physique des ondes

2
Iac(r )  Z − Z2 
2 Z12 − 2Z1Z2 + Z22
— R= =r = 1  = .
Iac(i)  Z1 + Z2  ( Z1 + Z2 )2

Iac(t) Z2 2 4Z1Z2
—T = = τ = .
Iac (i) Z1 (Z1 + Z2 )2

On a donc R + T = 1 , relation qui traduit la conservation de l’énergie (l’énergie


incidente est soit réfléchie, soit transmise puisque l’interface n’absorbe aucune éner-
gie).
Si les impédances acoustiques sont très différentes : Z1 << Z2 ou Z1 >> Z2 , on
2
 Z − Z2 
a R= 1  ≃ 1 , donc T ≃ 0 . C’est le cas à l’interface entre l’air (1) et l’eau (2).
 Z1 + Z2 
Pour l’air, on a Z1 = ρ0(1)c1 = 1,19 × 343 ≃ 410 kg ⋅ m-2 ⋅ s-1 , alors que pour l’eau :

Z2 = ρ0(2)c1 = 1,0 ⋅ 103 × 1,4 ⋅ 103 ≃ 1,4 ⋅ 106 kg ⋅ m-2 ⋅ s-1 .


La réflexion est donc quasi-totale. Lorsqu’on a
la tête sous l’eau, l’intensité des sons provenant de l’air
est très faible.
Cette propriété est mise à profit pour réaliser
des images médicales par échographie : des ondes ul-
trasonores (de fréquences comprises entre 0,5 MHz et
50 MHz) se réfléchissent plus ou moins sur les or-
ganes suivant leur composition.

2.2 Une application : la couche anti-reflet 


Les impédances acoustiques des tissus musculaires et de l’air sont très diffé-
rentes : Zm = 1,7 ⋅ 106 kg ⋅ m-2 ⋅ s-1 et Za = 4,1⋅ 102 kg ⋅ m-2 ⋅ s-1 . Le coefficient de trans-
4Zm Za
mission en puissance à l’interface air / muscle T = ≃ 9 ⋅ 10−4 est donc très
( Zm + Za )2
faible. L’onde provenant de l’air est presque entièrement réfléchie sur le muscle.
Dans le but de réaliser une échographie cardiaque avec des ultrasons de fré-
quence 3,5 MHz, il faudrait d’énormes puissances pour que le signal transmis, puis
réfléchi par le cœur, soit détectable par la sonde. On choisit plutôt de supprimer l’onde
réfléchie à l’aide d’une couche anti-reflet faite d’un gel dont l’épaisseur e et l’impédance
Zg doivent être bien choisies.
Notons ca , cg et cm les célérités des ondes acoustiques dans les trois milieux
(l’air correspond aux abscisses x ≤ 0 , le gel à 0 ≤ x ≤ e , et le muscle, supposé de
profondeur infinie, à x ≥ e ). On note ka = ω / ca , kg = ω / cg et km = ω / cm les pulsa-
tions spatiales dans chaque milieu.

766
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 767

Si on suppose qu’il n’y a pas d’onde réfléchie dans l’air, le champ de vitesse en
notation complexe prend la forme suivante dans les trois milieux :
v a = Aae i ( ωt − ka x ) pour x ≤ 0

 i ( ωt − k g x ) i ( ωt + k g x )
v g = Age + Bge pour 0 ≤ x ≤ e

v m = Amei ( ωt − km x ) pour x ≥ e

En effet, l’onde dans le gel est la superposition d’une O.P.P.H dans le sens des
x croissants (somme de l’onde provenant de l’air et de toutes les ondes réfléchies par
l’interface gel / air) et d’une O.P.P.H dans le sens des x décroissants (somme de toutes
les ondes réfléchies par l’interface gel / muscle). Le coefficient Aa est réel et connu (il
dépend de la puissance de la sonde), les coefficients Ag , Bg et Am peuvent être com-
plexes. Les surpressions dans les trois milieux se déduisent des vitesses :
 p1a = Za Aaei ( ωt − ka x ) pour x ≤ 0

 i ( ωt − k g x ) i ( ωt + kg x )
 p1g = Zg Age − ZgBge pour 0 ≤ x ≤ e

 p1m = Zm Ame i ( ωt − km x ) pour x ≥ e

— Il y a continuité de la vitesse et de la pression en x = 0 , ce qui entraîne :
 Aa = Ag + Bg
 . Ce système linéaire, à 2 équations et 2 inconnues Ag et Bg , a
Za Aa = Zg Ag − ZgBg
 Zg + Za
 Ag = Aa
 2 Zg
pour solution  .
B = Zg − Za A
 g 2 Zg
a

— Il y a continuité de la vitesse et de la pression en x = e , ce qui entraîne :
 A e −ikge + B e ikge = A e −ikme (1)
 g g m
 . Ce système est linéaire, à 2 équations et une
− ikge ik ge
Zg Age − ZgBge = Zm Ame − ikme (2)
seule inconnue Am . Pour que l’hypothèse d’absence d’onde réfléchie dans l’air soit
vérifiée, il faut et il suffit que les deux équations soient compatibles, c’est-à-dire que la
relation obtenue en effectuant le rapport (2) / (1) soit vérifiée :
− ikge ik ge 2ik ge
Zg Age − ZgBge Zg Ag − ZgBge
Zm = − ikge ik ge
= 2ikge
. En reportant les valeurs de Ag et Bg
Age + Bge Ag + Bge

767
768 Partie VII.  Physique des ondes

trouvées précédemment, cette relation devient :


2ikge
Zg (Zg + Za ) − Zg (Zg − Za )e (Zg − Zm )(Zg + Za ) 2ik ge
Zm = 2ik ge
⇔ =e . Ceci implique :
(Zg + Za ) + (Zg − Za )e (Zg + Zm )(Zg − Za )

(Zg − Zm )(Zg + Za ) (Zg − Zm )(Zg + Za )


= 1 , soit = ±1 puisque les impédances acous-
(Zg + Zm )(Zg − Za ) (Zg + Zm )(Zg − Za )
tiques sont des nombres réels.
(Zg − Zm )(Zg + Za )
Si = 1, on a (Zg − Zm )(Zg + Za ) = (Zg + Zm )(Zg − Za ) , soit :
(Zg + Zm )(Zg − Za )
(Zg − Zm )(Zg + Za )
ZgZa = ZmZg ⇔ Za = Zm , ce qui n’est pas vérifié. Si = −1 , on a
(Zg + Zm )(Zg − Za )

(Zg − Zm )(Zg + Za ) = −(Zg + Zm )(Zg − Za ) , soit Zg2 = ZaZm ⇔ Zg = ZaZm . Pour qu’il
n’y ait pas d’onde réfléchie dans l’air, il faut que l’impédance acoustique du gel soit
2ik ge
égale à Za Zm , mais aussi que e = −1 . Il faut donc que 2kge = (2n + 1)π , soit
e = en = (2n + 1)λ g / 4 , où λg = 2π / kg est la longueur d’onde dans le gel.
On peut remarquer que pour ces valeurs de e, le déphasage ϕ entre l’onde (1)
réfléchie directement à l’interface air / gel, et l’onde (2) réfléchie par l’interface gel /
muscle, puis transmise à l’air, vaut kg ⋅ (2e) , puisque (2) a parcouru une longueur sup-
plémentaire 2e par rapport à (1), soit ϕ = (2n + 1)π . Ces deux ondes sont en opposition
de phase.

En ne prenant en compte que ces deux ondes, on comprend comment il est


possible de ne pas avoir d’onde réfléchie dans l’air : les deux ondes (1) et (2) s’annu-
lent par interférences destructives si elles ont même amplitude (ce qui est approxima-
tivement le cas si Zg = Za Zm ), et sont en opposition de phase. En réalité, il y a une
infinité d’ondes constituant l’onde réfléchie dans l’air, dont la somme est rigoureuse-
ment nulle si Zg = Za Zm et e = en = (2n + 1)λ g / 4 . La sonde est conçue de façon à
ce qu’en l’appuyant sur la peau du patient, l’épaisseur de gel soit proche de λ g / 4 . La
couche de gel permet de réaliser une adaptation d’impédance : si elle possède les
bonnes caractéristiques, toute la puissance provenant de l’air est transmise à l’en-
semble {gel, muscle}.

768
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 769

2.3 Isolation phonique 


Pour rendre compte de la transmis-
sion des ondes sonores à travers une paroi
séparant deux pièces, on considère un so-
lide d’épaisseur e, de masse volumique ρ,
parfaitement rigide, placé dans un tuyau so-
nore rempli d’air d’impédance acoustique
Zac = ρ0c , d’axe Ox et de section S . Au re-
pos, le solide se trouve entre les abscisses x = 0 et x = e . Sous l’effet d’une O.P.P.H
incidente se propageant dans le sens des x croissants, il se déplace en translation de
ξ(t ) . Lorsqu’une O.P.P se propageant dans le sens des x croissants rencontre la paroi,
elle donne naissance à une onde réfléchie et une onde transmise. Comme le déplace-
ment des particules fluides, ξ(t ) << λ , est considéré comme un infiniment petit du pre-
v (1)

mier ordre, les C.A.L s’écrivent en x = 0 et x = e . L’onde  (1) dans le milieu (1) (
 p1
v i = v 0e i ( ωt − kx )

x < 0 ) est la somme de l’onde incidente :  , et de l’onde réfléchie
i ( ωt − kx )
 p1i = Zacv 0e
v r = r v 0e i ( ωt + kx )

 , où r est le coefficient de réflexion en vitesse. L’onde dans le
i ( ωt + kx )
 p1r = −Zac r v 0e
v (2) = v = τ v e i ( ωt − kx )
 t 0
milieu (2) ( x > e ) est l’onde transmise  , où τ est le coeffi-
(2)
 p1 = p1t = Zac τ v 0ei (ωt − kx )
cient de transmission en vitesse.
— La paroi, rigide, se déplace en bloc et est imperméable, ce qui fournit la première

C.A.L : v (1) (x = 0,t ) = v (2) (x = e,t ) = u(t ) =  1 + r = τe − ike .
dt
— La deuxième C.A.L est obtenue en appliquant le P.F.D à la paroi :
du 
ρe S = p0 + p1(1) (x = 0,t ) S −  p0 + p1(2) (x = e,t ) S , avec u(t ) = τ v 0ei ( ωt − ke ) . On
dt    
en déduit ρeτ i ωe −ike = Zac (1 − r − τe−ike ) = ρ0c(1 − τe −ike + 1 − τe −ike ) . Le coefficient de
e −ike
transmission en vitesse vaut donc τ = = τ ei ϕ .
ρe
1+ iω
2ρ0c

Les intensités incidente et transmise sont Iac (i) = Zac vi2 et Iac (t) = Zac v t 2 ,

769
770 Partie VII.  Physique des ondes

Iac(t) 2 1
avec v i = v 0 cos(ωt − kx ) et v t = τ v 0 cos(ωt − kx + ϕ) : T = (i)
= τ = .
Iac 1 + f / fc 2
2

ρ0c
On reconnaît un filtrage passe-bas de fréquence de coupure fc = . Calculons
πρe
l’épaisseur d’une paroi en béton cellulaire de masse volumique ρ = 400 kg ⋅ m-3 per-
mettant d’obtenir une atténuation d’au moins 40 dB au-dessus de f = 200 Hz :
f2 f 100ρ0c
TdB = 10log(T ) ≤ 40 ⇔ T ≤ 10 −4 ⇔ 1 + 2
≥ 104 ⇔ fc ≤ , soit e ≥ = 16 cm ,
fc 100 πρf
valeur très inférieure à λ = c / f ≃ 1,7 m . Néanmoins, pour des fréquences plus
grandes, le modèle d’une paroi rigide en translation n’est plus adapté : les ondes se
propagent dans la paroi dont les différents points ne vibrent pas en phase. Le caractère
passe-bas du filtrage réalisé est cependant bien vérifié : il est beaucoup plus facile
d’atténuer les sons aigus que les sons graves. Pour ces derniers, une réduction active
obtenue en générant des sons annulant le bruit selon le principe des interférences
destructives peut être très efficace.

3. RÉFLEXION ET TRANSMISSION D’UNE ONDE


ÉLECTROMAGNÉTIQUE À L’INTERFACE ENTRE
DEUX MILIEUX
3.1 Onde en incidence normale sur l’interface entre deux milieux linéaires
d’indices complexes
Considérons une interface
plane entre deux milieux (1) et (2)
d’indices de réfraction complexes
n1 et n2 , les indices étant définis
� � ω�
par kℓ = kℓ ex = nℓ ex , ℓ ∈ {1,2}
c
pour une O.P.P.H se propageant

selon ex .
Dans le cas où nℓ est réel,
kℓ l’est aussi : il n’y a pas d’atté-
nuation lors de la propagation, et
on reconnait l’expression :
ω c
v ϕℓ = = de la vitesse de
k ℓ nℓ
phase dans un milieu transparent.

770
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 771

De tels milieux sont appelés des milieux diélectriques linéaires homogènes et


isotropes (D.L.H.I), mais l’étude s’appliquera aussi au cas où les milieux sont le vide,
un plasma ou un conducteur ohmique, milieux pour lesquels on peut aussi écrire kℓ
ω
sous la forme kℓ = nℓ .
c
On s’intéresse ici à la réflexion et à la transmission d’une O.P.P.H polarisée

rectilignement selon ey , provenant du milieu (1), en incidence normale sur l’interface,
ou dioptre, située dans le plan x = 0 . Cette onde incidente de vecteur d’onde
� �
Ei = E0ie i ( ωt − k1x )ey
� ω� �  � �
ki = n1 ex = k1ex s’écrit :  � .
c ki ∧ Ei E �
B i = = n1 0i e i ( ωt − k1x )ez
 ω c
� ω� �
L’onde réfléchie a pour vecteur d’onde kr = −n1 ex = −k1ex et s’écrit :
c
� �
Er = E0r ei ( ωt + k1x )ey
 � �
� .
kr ∧ Er E �
B r = = −n1 0r e i ( ωt + k1x )ez
 ω c
� ω� �
L’onde transmise a pour vecteur d’onde k t = n2 ex = k2ex et s’écrit :
c
� �
E t = E0t e i ( ωt − k2 x )ey
 � �
� .
k t ∧ Et E �
B t = = n2 0t e i ( ωt − k2 x )ez
 ω c

Coefficients de réflexion et de transmission pour le champ électrique


Nous admettrons qu’il y a, dans le cas de l’incidence normale, continuité du
champ électromagnétique à l’interface entre les deux milieux :
� � � � �
E1 = E2  Ei + Er = E t

� � � � � , en x = 0 à tout instant.
B1 = B2  B i + B r = B t

E0i + E0r = E0t


On a donc  .
n1E0i − n1E0r = n2E0t
E0r E
On en déduit les coefficients de réflexion r = et de transmission τ = 0t
E0i E0i
 n1 − n2
r = n + n
1 + r = τ  1 2
pour le champ électrique :    .
n1(1 − r ) = n2 τ τ = 2n 1
 n1 + n2

771
772 Partie VII.  Physique des ondes

Bilan de puissance
Écrivons les indices de réfraction et les coefficients de réflexion et de transmis-
sion sous forme trigonométrique : n1 = n1 ei θ1 , n2 = n2 ei θ2 , r = r ei α et t = t e i β . Les
G G
Ei = E0i cos(ωt )ey

champs réels en x = 0 sont  G E G et :
B i = n1 0i cos(ωt + θ1)ez
 c
G G G G
Er = r E0i cos(ωt + α )ey Et = t E0i cos(ωt + β)ey
 
G E0i G et  G E G .
B r = − n1 r cos(ωt + α + θ1)ez B t = n2 t 0i cos(ωt + β + θ2 )ez
 c  c
Le vecteur de Poynting dans le milieu (1) vaut à l’interface :
G G G G G G
G E1 ∧ B1 (Ei + Er ) ∧ (Bi + Br ) G G G G G G
SP1 = = . Comme E1 = E2 et B1 = B2 , on a SP1 = SP2 . La
µ0 µ0
conservation de l’énergie dans le cas le plus général consiste à écrire que la puissance
surfacique est la même du côté (1) que du côté (2) de l’interface. En effet, cette inter-
face immatérielle n’absorbe aucune énergie.
En revanche, comme on l’a déjà remarqué, la puissance surfacique dans le
milieu (1) n’est pas nécessairement égale à la somme des puissances surfaciques
incidente et réfléchie, car le vecteur de Poynting n’est pas une fonction linéaire du
champ électromagnétique :
G G G G G G G G G G
G E1 ∧ B1 Ei ∧ Bi Er ∧ B r Ei ∧ Br + Er ∧ Bi
SP1 = = + + .
µ0 µ0 µ0 µ0
G G 
SPi SPr terme d'interférences

Explicitons le terme d’interférences :


G G G G
Ei ∧ Br + Er ∧ Bi n1 r E0i2 G
µ0
=
µ 0c
[ cos(ωt + α )cos(ωt + θ1) − cos(ωt )cos(ωt + α + θ1)] ex .

On constate que le terme d’interférence est non nul, sauf si θ1 = 0 ou π, c’est-


à-dire sauf si le milieu (1) est transparent (non absorbant) : n1 est réel, ou si α = 0 ,
donc dans le cas très particulier où le rapport n2 / n1 est réel.
G G G
Si le milieu (1) est non absorbant, alors SPi + SPr = SPt . En valeur moyenne :
G G G G G G
SPi + SPr = SPt , soit Iiex − Ir ex = It ex puisque les intensités sont positives et que
G
la puissance réfléchie se déplace selon −ex .

En pratique, on ne peut écrire Ii = Ir + It ⇔ R + T = 1 que si le milieu (1) d’où pro-


vient l’onde est non absorbant.

C’est le cas dans tous les exemples traités dans cet ouvrage.
Pour une onde provenant d’un milieu diélectrique non absorbant (1), on a, à

772
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 773

l’interface avec un autre milieu diélectrique non absorbant (2) :


2
G nE 2 G G G n r 2E0i2 G G n −n 
SPi = 1 0i ex = Iiex et SPr = − 1 ex = −Ir ex , d’où R = r 2 =  1 2  .
2µ0c 2µ0c  n1 + n2 

Dans le cas de la réflexion normale de l’air ( n1 = 1) vers le verre ( n2 = 1), ou


2
n −n 
l’inverse, on a R =  1 2  = 4% , donc 96% de la puissance est transmise.
 n1 + n2 

3.2 Onde en incidence normale sur l’interface entre le vide et un plasma


Les ondes incidente et transmise se propagent dans le sens des x croissants.
Pour le vide, milieu (1), n1 = 1. Pour le plasma, milieu (2) étudié dans le chapitre pré-
cédent, n2 dépend de la pulsation ω :

ω2 − ωp2
— Si ω > ωp , k2 =  n2 = 1 − (ωp / ω)2 est réel et inférieur à 1.
c
 1 − n2
r = 1 + n > 0
 2
On a donc  .
τ = 2
>0
 1 + n2
On repasse en réel pour effectuer un bilan de puissance à l’aide des vecteurs
de Poynting :
G E 2 G G G E 2 G G G E 2 G G
SPi = 0i ex = Iiex , SPr = −r 2 0i ex = −Ir ex et SPt = n2 τ2 0i ex = It ex .
2µ0c 2µ0c 2µ0c
On a donc pour les coefficients de réflexion et de transmission en puissance :
2
Ir  1 − n2  It 4n2
R= = r2 =  2
 et T = = n2 τ = . On vérifie que R + T = 1 puisque le
Ii  1 + n2  Ii (1 + n2 )2
milieu (1) est non absorbant.
2
 1 − 1 − (ω / ω)2 
Le coefficient de réflexion R =   dépend de la pulsation, il est
p
 
1 + 1 − (ωp / ω)2 
 
égal à 1 pour ω = ωp , et tend vers 0 quand ω → ∞ (le plasma se comportant alors
comme du vide, l’onde est entièrement transmise).
ωp2 − ω2
— Si ω ≤ ωp , k2 = −i .
c
On en déduit n2 = −i (ωp / ω)2 − 1 = −i n2 , imaginaire pur.

773
774 Partie VII.  Physique des ondes

 1 + i n2
r = = ei α
 1 − i n2
On a donc  . Le coefficient de réflexion est de module 1.
τ = 2
= τ eiβ
 1 − i n2

Les champs réfléchis et transmis s’écrivent donc ainsi :
G G G G
Er = E0iei ( ωt + k1x +α )ey Et = τ E0iei ( ωt − k2 x +β )ey
 
G E i ( ωt + k1x +α ) G et  G E i ( ωt − k2 x +β−π /2) G .
B r = − 0i e ez B t = n2 τ 0i e ez
 c  c
On repasse en réel et on obtient :
G E 2 G G G E 2 G G G G
SPi = 0i ex = Iiex , SPr = − 0i ex = −Ir ex et SPt = 0  I t = 0 car B z t et E y t
2µ0c 2µ0c
sont en quadrature de phase.

On a R = 1 et T = 0 dans le domaine ω ≤ ωp , appelé domaine réactif du


plasma. La puissance incidente est totalement réfléchie.

Nous avons vu que cette propriété est utilisée pour communiquer sur Terre à
grande distance en utilisant la réflexion totale sur l’ionosphère pour des ondes de
basse fréquence.

3.3 Onde en incidence normale sur l’interface entre le vide et un conducteur


réel / Pression de radiation
Les ondes incidente et transmise se propagent dans le sens des x croissants.
Pour le vide, milieu (1), n1 = 1. Pour le conducteur, milieu (2) étudié dans le
chapitre précédent, n2 dépend de la pulsation ω :
1− i c 2
k2 =  n2 = (1 − i ) , où δ = est l’épaisseur de peau du conducteur.
δ ωδ µ0 γω
π
ωδ 1− i 2 −i 4
Posons X = : n2 = = e .
c X X

774
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 775

 1 − n2  X − 1+ i iα
r = 1 + n r = X + 1 − i = r e
 2
On en déduit   .
τ = 2 τ = 2 X = τ e i β
 1 + n2  X + 1− i
Les champs réfléchis et transmis s’écrivent donc ainsi :
� �
� � E t = τ E0ie i ( ωt − k2 x +β)ey
Er = r E0ie i ( ωt + k1x +α )
ey 
 � E0i i ( ωt − k2 x +β−π / 4) �
� r E0i i ( ωt + k1x +α ) � et B t = n2 τ c e ez .
B r = − e ez 
 c  E 2 i ( ωt − k2 x +β−π / 4) �
 = τ 0i e ez
 cX
On repasse en réel pour effectuer un bilan de puissance à l’interface en x = 0
à l’aide des vecteurs de Poynting :
� E 2 � �
SPi = 0i ex = Iiex .
2µ0c
2 2 2
� r E0i2 � � r E0i2 � r E0i2
SPr = − cos2 ( ωt + k1x + α ) ex  SPr = − ex  Ir = .
µ0c 2µ0c 2µ0c
2 2x
� τ E0i2 2 − δ   2x π  π  �
SPt =
2µ0 cX
e cos  2ωt − δ + 2β − 2  + cos  4   ex
    
2 2x 2
� τ E0i2 1 − δ � τ E0i2 1
 SPt = e ex  I t = en x = 0 .
2µ0c X 2µ0c X
Les coefficients de réflexion et transmission en puissance valent :
2
2 ( X − 1)2 + 1 τ 4X
R= r = et T = = .
2
( X + 1) + 1 X ( X + 1)2 + 1
On vérifie qu’on a bien R + T = 1 puisque le milieu (1) est non absorbant.
1 2ω
On a X = ≃ 1,4 ⋅ 10−9 f pour le cuivre.
c µ0 γ
L’étude de la fonction R(X) montre qu’elle tend vers 1 pour X → 0 et X → ∞ ,
et qu’elle passe par un minimum Rmin = 3 − 2 2 ≃ 0,17 pour X = 2 . Pour cette va-
leur, f ≃ 1018 Hz . Pour f = 1012 Hz , on a pour du cuivre X ≃ 1,4 ⋅ 10 −3 : R vaut encore
0,997.
À de plus hautes fréquences, la conductivité devient complexe :

Pour des fréquences optiques et supérieures, on a vu que le métal se comporte


comme un plasma de pulsation de coupure fp ≃ 1016 Hz . On se trouve donc dans le
domaine réactif ( f < fp ) de ce plasma où l’onde est entièrement réfléchie : R = 1. Une
très fine couche métallique bien polie suffit pour obtenir un miroir.

775
776 Partie VII.  Physique des ondes

Lorsque la bande de valence et la bande de conduction des métaux sont sépa-


rées par une faible énergie, des transitions électroniques sont possibles par absorption
de longueurs d’ondes visibles. C’est le cas pour le cuivre, ce qui lui permet d’absorber
les longueurs d’onde inférieures à 590 nm (il est donc rouge), et pour l’or, qui absorbe
les longueurs d’onde inférieures à 500 nm (il est donc jaune). Ces métaux restent ex-
trêmement réfléchissants, mais apparaissent colorés sous lumière blanche.
L’absorption n’est donc pas due dans ce cas aux électrons libres, et ne s’inter-
prète pas dans le cadre de la théorie de Drude.

Pression de radiation (ou pression de rayonnement)


Le conducteur étant neutre, les actions électromagnétiques qu’il subit se résu-
ment aux actions de Laplace dont l’expression volumique est :
G
d3FL G K 1 → K K 1 ∂Bt G G 1 ∂Bt 2 G
= J t ∧ B t = rot ( B t ) ∧ B t = − ey ∧ B e
t z = − ex d’après M.A, et
d3V µ0 µ0 ∂x 2µ0 ∂x
K G
en utilisant Bt = Bt ( x, t )ez .
Calculons la force qui s’exerce sur un cylindre de section S et de génératrice
G S

∂Bt 2 G B 2 ( x = 0, t ) G
parallèle à Ox : FL (t ) = −
2µ0  ∂x
dxex = t
2µ0
S ex . Le champ magnétique
x =0

2  π
transmis à l’interface est Bt ( x = 0, t ) = τ E0 cos  ωt + β −  en notant E0i = E0 .
cX  4 
2
G τ E02 G G E0 2 4 G
On a donc FL = 2 2
S e x soit FL = 2 2
S ex .
2µ0c X 2µ0c ( X + 1) + 1
G E 2 G
Pour un conducteur parfait, γ → ∞  δ → 0  X → 0 , et FL = 0 2 S ex .
µ0c
G G
La pression de radiation p est définie par FL = p S ex . On a donc ici :

E0 2
p = 2
= ε 0 E0 2 .
µ0c
On retrouve ainsi l’expression de la pression moyenne de radiation dans le cas
de la réflexion normale d’une onde électromagnétique sur un conducteur parfait, obte-
nue dans le chapitre sur les ondes électromagnétiques dans le vide à l’aide d’un bilan
photonique.

3.4 Onde en incidence oblique sur l’interface entre deux milieux linéaires
d’indices réels / Lois de Snell-Descartes 
On s’intéresse ici à la réflexion et la transmission d’une O.P.P.H provenant du
milieu (1), en incidence oblique sous l’angle θi ∈ [0, π / 2] sur l’interface entre le milieu
(1) et le milieu (2). L’interface est située dans le plan x = 0 .

776
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 777

Le plan d’incidence de l’onde


est le plan vectoriel contenant le vec-
G
teur d’onde ki de l’onde incidente et
G
la normale ex au dioptre. On choisit
de prendre kz i = 0 : le plan d’inci-
G G
dence est le plan ( ex , ey ). On a donc
G G G
ki = k1 cos θiex + sin θiey  , et l’onde
incidente s’écrit :
G G G G
E = E ei ( ωt − ki ⋅r )
 i G0i G
G G G .
k ∧ Ei ki ∧ E0i i ( ωt − kG ⋅rG )
B i = i = e i

 ω ω
G
L’onde réfléchie a pour vecteur d’onde kr et s’écrit :
G G G G
E = E ei ( ωt − kr ⋅r )
 r G
0r
G
G G G .
kr ∧ Er kr ∧ E0r i ( ωt − kG ⋅rG )
B r = = e r

 ω ω
G
L’onde transmise a pour vecteur d’onde kt et s’écrit :
G G G G
E = E ei ( ωt − k t ⋅r )
 t 0t
G G G G .
G k t ∧ E t k t ∧ E0t i ( ωt − kG ⋅rG )
B t = = e t

 ω ω
Supposons qu’il y ait continuité du champ électromagnétique à l’interface entre
les deux milieux :
G G G G G
E1 = E2  Ei + Er = Et

G G G G G , en x = 0 à tout instant, ∀y , ∀z .
B1 = B2  B i + B r = B t
G G G
Les projections selon ex , ey ou ez de ces relations sont toutes de la même
G G G G G G
G → G G
forme : αie −iki ⋅r + αr e − ikr ⋅r = α te −ikt ⋅r , avec r = OM = yey + zez , soit :
−i ( k y iy + kz iz ) −i ( k y r y + kz r z ) −i ( k y t y + kz t z )
αie + αr e = α te ∀y , ∀z .
Elles ne peuvent être vérifiées pour toute valeur de z que si :
kz t = k zr = k zi = 0 : l’onde réfléchie et l’onde transmise se trouvent dans le plan d’inci-
dence. C’est la première loi de Snell-Descartes.
Elles ne peuvent être vérifiées pour toute valeur de y que si :
k1 sin θi = k1 sin θr k1 = n1ω / c
ky t = ky r = ky i   , avec  .
k1 sin θi = k2 sin θt k2 = n2ω / c

777
778 Partie VII.  Physique des ondes

G G G
Les vecteurs d’onde ki , kr et kt ont donc en définitive les mêmes composantes
tangentielles au dioptre.

L’angle de réflexion θr appartient à [ π / 2, π] donc θr = π − θi . C’est la deuxième


loi de Snell-Descartes pour la réflexion.
L’angle de réfraction θt appartient à [0, π / 2] , et n1 sin θi = n2 sin θt . C’est la
deuxième loi de Snell-Descartes pour la réfraction.

Les lois de Snell-Descartes proviennent donc de l’existence de conditions aux


G G G G G G
limites de la forme αie −iki ⋅r + αr e − ikr ⋅r = α te −ikt ⋅r à l’interface entre les deux milieux li-
néaires. Seule la linéarité des milieux intervient, et pas la continuité ou non des com-
posantes des grandeurs ondulatoires ; elles sont d’une grande généralité et s’appli-
quent aux ondes acoustiques et électromagnétiques.

Dans le cas de milieux diélectriques transparents d’indice réels n1 et n2 , la


composante normale du champ électrique n’est pas continue : on n’a pas E1x = E2x .
C’est dû au fait que de tels milieux se polarisent sous l’action d’un champ électrique
extérieur (les atomes ou les molécules acquièrent un moment dipolaire). Les charges
intervenant sont des charges liées à ces atomes ou molécules ; elles créent un champ
électrique qui se superpose au champ extérieur. Lorsqu’une onde rencontre l’interface
entre deux milieux diélectriques, des charges surfaciques liées apparaissent à l’inter-
face, et on montre que n12E1x = n22E2x .
On peut alors déterminer les coefficients de réflexion et de transmission pour le
champ électrique dans les deux cas suivants. Les calculs ne sont pas détaillés.
— Onde incidente polarisée orthogonalement au plan d’incidence :
n cos θi − n2 cos θt 2n1 cos θi
r⊥ = 1 , et τ⊥ = .
n1 cos θi + n2 cos θt n1 cos θi + n2 cos θt
— Onde incidente polarisée dans le plan d’incidence :
n cos θt − n2 cos θi 2n1 cos θi
r/ / = 1 , et τ/ / = .
n1 cos θt + n2 cos θi n1 cos θt + n2 cos θi
Dans le cas de l’incidence normale ( θi = 0  θt = 0 ), tous les plans contenant
G
ki sont des plans d’incidence et il n’y a plus lieu de distinguer polarisation orthogonale
au plan d’incidence ou dans le plan d’incidence. On retrouve dans les deux cas les
n −n 2n1
expressions r = 1 2 et τ = .
n1 + n2 n1 + n2
Les angles θt et θi étant reliés par n1 sin θi = n2 sin θt , on peut tracer tous les
coefficients de réflexion et de transmission en fonction de θi .
n 
Dans le cas où n1 < n2 , il existe une solution θt = arcsin  1 sin θi  pour tout
n
 2 

778
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 779

angle d’incidence θi . Pour θi = π / 2 , τ⊥ = τ / / = 0 , r⊥ = −1 et r/ / = +1 .


n 
Dans le cas où n1 > n2 , il n’existe une solution θt = arcsin  1 sin θi  que pour
 n2 
θi ≤ θlim = arcsin [ n2 / n1] .
n1
Pour cet angle θlim , θt = π / 2 , donc τ⊥ = 2 , τ/ / = 2 , r⊥ = 1 et r/ / = −1 .
n2

Les coefficients de réflexion r⊥ et r/ / sont susceptibles de s’annuler.


— r⊥ = 0 ⇔ n1 cos θi = n2 cos θt (1) , or n1 sin θi = n2 sin θt (2) . La somme des relations

(1) et (2) mises au carré donne n12 = n22 . Les milieux ayant des indices de réfraction
différents, r⊥ ne s’annule pas.
— r/ / = 0 ⇔ n1 cos θt = n2 cos θi (1) , or n1 sin θi = n2 sin θt (2) . Le rapport (2)/(1) fournit
sin θi cos θi = sin θt cos θt ⇔ sin(2θi ) = sin(2θt ) . La solution θi = θt ne vérifie pas la loi
π
de Snell-Descartes n1 sin θi = n2 sin θt . L’autre solution est 2θt = π − 2θi ⇔ θt = − θi ,
2
qui donne n1 sin θi = n2 cos θi , en reportant dans n1 sin θi = n2 sin θt .

779
780 Partie VII.  Physique des ondes

n 
r/ / s’annule pour l’incidence de Brewster θi = θB = arctan  2  . Il n’y a pas
 n1 
d’onde réfléchie pour cette incidence quand l’onde incidente est polarisée dans le plan
d’incidence.
Une onde incidente polarisée de façon quelconque donnera sous l’incidence de
Brewster une onde réfléchie polarisée rectilignement dans une direction orthogonale
au plan d’incidence. L’onde transmise l’est sous l’angle θt = π / 2 − θi .

On retrouve le résultat établi dans le chapitre sur les ondes électromagnétiques


dans le vide en raisonnant sur le champ
électromagnétique rayonné par les molé-
cules du milieu (2).
La polarisation rectiligne obtenue
ainsi s’appelle polarisation par réflexion vi-
treuse. Cette polarisation se produit par
exemple par réflexion sur une vitre ou sur
un glacier. Dans le cas de la réflexion de
l’air ( n1 = 1) vers le verre ( n2 = 1,5 ), la va-
leur numérique de l’angle de Brewster est :
θB = 56,3° .

3.5 Réflexion interne totale frustrée 


On s’intéresse à une O.P.P.H provenant du
verre, milieu (1) d’indice de réfraction n1 = 1,50 , en
incidence oblique sous l’angle θi ∈ [ 0, π / 2] sur l’in-
terface entre le verre et l’air, milieu (2) d’indice de
réfraction n2 = 1,00 . Le dioptre est situé dans le plan
x = 0 . L’onde se réfléchit dans le verre (on parle de
réflexion interne), et est éventuellement en partie
transmise dans l’air.
Le champ électrique de l’onde incidente est :
G G i ( ωt − kG ⋅rG )
Ei = E0ie i
, celui de l’onde transmise est :
G G G G
E t = E0t e i ( ωt − kt ⋅r ) .
G G
Pour vérifier les C.A.L sur le champ électromagnétique en x = 0 , ki et k t doi-
vent avoir les mêmes composantes tangentielles au dioptre : k y t = k y i . On obtient
donc la deuxième loi de Snell-Descartes de la réfraction n1 sin θi = n2 sin θt . Il n’y a pas
de solution réelle pour θt si θi > θlim = arcsin [ n2 / n1 ] = arcsin [1/ n1] = 41,8° . Nous
nous placerons dans ce cas par la suite.

780
Chapitre 5.  Interfaces entre deux milieux 781

� ω2 ω2
La relation de dispersion dans l’air est k t 2 = 2 , soit k xt 2 + k yt 2 = 2 , avec :
c c
ω ω2
sin θi . On a donc k xt 2 = 2 1 − n12 sin2 θi  < 0 car n1 sin θi > 1.
k y t = k y i = n1
c c  
ω
La composante k xt est donc imaginaire pure, k xt = ±i n12 sin2 θi − 1 . L’onde
c
dans l’air s’éloignant du dioptre, la solution physique (onde évanescente : d’amplitude
ω
décroissante) correspond à k xt = −i n12 sin2 θi − 1 :
c
� � i ( ωt − k ⋅ x − k ⋅ y ) � − ω x ω
n12 sin2 θi −1 i ( ωt − n1 y sin θi ) � − x i ( ωt − n1 ω y sin θi )
Et = E0t e xt yt
= E0t e c e c = E0t e δ e c .

L’onde dans l’air se propage selon ey , donc tangentiellement au dioptre. Elle
λ
n’est pas nulle mais décroit sur une distance caractéristique δ = , où
2π n12 sin2 θi −1
λ = 2πc / ω est la longueur d’onde dans le vide. δ est infinie pour θi = θlim (une onde
λ λ
est alors transmise), puis décroît jusqu’à δmin = ≃ pour θi = π / 2 .
2π n12 −1 7

L’amplitude de l’onde transmise dans l’air est négligeable pour des objets éloi-
gnés du dioptre d’une distance très supérieure à δ, et la solution trouvée reste valable.
Si en revanche on rapproche un objet du dioptre à une distance de l’ordre de δ, l’am-
plitude de l’onde transmise est suffisante pour que l’objet réfléchisse, diffuse ou trans-
mette selon les cas. La réflexion interne est alors frustrée. Le coefficient de réflexion
énergétique n’est plus égal à 1.

Ce phénomène est analogue à l’effet tunnel que nous étudierons dans le cha-
pitre sur l’approche ondulatoire de la mécanique quantique. Cet effet se produit dans
le cas où une particule « classique » ne pourrait pas franchir une barrière de potentiel

781
782 Partie VII.  Physique des ondes

car elle n’a pas l’énergie nécessaire. Si l’épaisseur de la barrière devient suffisamment
faible, la probabilité pour la particule « quantique » de franchir la barrière n’est plus
nulle.
On a, grâce à la réflexion totale frustrée, possibilité de réaliser des images très
contrastées d’objets placés dans l’air au voisinage du dioptre. C’est une technique de
microscopie.
On l’utilise de la même façon pour la détection d’empreintes digitales. Pour cela,
un faisceau laser de longueur d’onde λ = 632,8 nm illumine un prisme dans les con-
ditions de réflexion totale : θi , voisin de 45°, est supérieur à θlim = 41,8° . Dans ces
λ
conditions, δ = = 285 nm .
2π n12 sin2 θi −1
Si on ne pose pas l’index sur le prisme, une caméra numérique située en sortie
de l’appareil visualise une zone d’éclairement uniforme. En présence de l’index, la ca-
méra fait apparaître les empreintes digitales. En effet, la réflexion totale n’est frustrée
qu’au niveau des crêtes de la peau de l’index. Celles-ci diffusent la lumière qu’elles
reçoivent et une partie de la lumière diffusée est captée par la caméra. La profondeur
des creux est trop importante pour que la lumière les atteigne, et la réflexion reste
totale au niveau des creux, d’où une image très contrastée.

782
783

[PHYSIQUE DES ONDES 6]

INTRODUCTION À LA PHYSIQUE
DU LASER
1. PRINCIPE DU LASER : ÉMISSION STIMULÉE
1.1 Coefficients d’Einstein
Considérons un système fermé constitué de N atomes identiques indépendants.
Nous supposons que les atomes ne peuvent exister que dans deux états (1) et (2)
d’énergies respectives E1 et E2 > E1.
On note N1 et N2 le nombre d’atomes, ou « population », du système étudié,
respectivement dans les états d’énergie E1 et E2 .
Étudions les transitions entre ces deux niveaux d’énergie atomique.
Il peut arriver que la transition soit non radiative : sans émission ou absorption
de lumière. Dans ce cas, l’énergie E2 − E1 est transformée en énergie cinétique lors
d’un choc pour la désexcitation, ou bien au contraire un choc fournit l’énergie E2 − E1
nécessaire pour l’excitation. Dans le cas de l’émission de la lumière par un laser, les
transitions entre les deux niveaux d’énergie E1 et E2 sont essentiellement radiatives :
la désexcitation, ou l’excitation, s’accompagne de l’émission, ou de l’absorption, d’un
photon d’énergie hν0 = E2 − E1 .

Émission spontanée

Ce phénomène est aléatoire. La probabilité de désexcitation d’un atome entre t


et t + dt est proportionnelle à dt : dP = f (t )dt (la probabilité de désexcitation est par
exemple doublée si l’intervalle de temps infinitésimal dt est multiplié par deux), mais f
est une constante : si l’atome se trouve au niveau d’énergie E2 depuis la date t = 0 ,
la probabilité de désexcitation pendant dt ne dépend pas de la durée t passée dans

783
784 Partie VII.  Physique des ondes

dt
cet état. On a donc dP = , avec τ = Cte , homogène à une durée.
τ
Les ondes électromagnétiques associées aux différents photons émis lors de
telles désexcitations spontanées possèdent des directions et des polarisations aléa-
toires.
Pour une grande population N2 , on aurait donc, si seul ce phénomène de dé-
dt
sexcitation spontanée intervenait, un nombre de désexcitations N2 pendant dt,
τ
d N2 N 1
d’où = − 2 = − A21 N2 . On introduit ici le coefficient d’Einstein A21 = ( s-1 ).
dt τ τ
La décroissance de la population serait alors exponentielle :
t

N2 (t ) = N2 (t = 0) e τ = N2 (t = 0) e − A21⋅t , de constante de temps τ.
En réalité, du fait des relations de Heisenberg, le spectre d’émission ou d’ab-
sorption de l’atome à deux niveaux est une raie de largeur finie (non nulle) : la fré-
E − E1
quence des photons émis est répartie continûment autour de ν0 = 2 , et on de-
h
vrait écrire que, pendant dt, la probabilité de désexcitation spontanée avec émission
 dν dν 
d’un photon dans l’intervalle spectral ν − ,ν + est d2 P = A21
′ (ν )dt dν , avec
 2 2 
′ une fonction qui présente un pic pour ν = ν0 .
A21

Émission stimulée
Un photon incident d’énergie hν 0 = E2 − E1 (photon résonant) peut provoquer
la désexcitation de l’atome de l’état d’énergie E2 vers l’état d’énergie E1 < E2 , avec
émission d’un second photon d’énergie hν 0 = E2 − E1 , « clone » du photon incident
(ces deux photons ont mêmes direction et sens, leurs ondes électromagnétiques as-
sociées sont en phase et sont dans le même état de polarisation).

784
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 785

Là encore, le phénomène est aléatoire, mais sa probabilité augmente avec le


nombre de photons de fréquence ν 0 , donc avec la densité volumique spectrale d’éner-
gie électromagnétique uν (ν0 ) à la fréquence ν 0 . Cette fonction ν ֏ uν est telle que
la densité volumique d’énergie électromagnétique dans l’intervalle spectral :
 dν dν  -3 -3
ν − 2 , ν + 2  s’écrive du = uν (ν )dν . u est en J ⋅ m et uν en J ⋅ m ⋅ s . Le nombre
 
de photons émis par stimulation est proportionnel à uν (ν0 ) . La probabilité de désexci-
tation stimulée pendant dt est donc de la forme dP = B21 uν (ν0 )dt , où le coefficient
d’Einstein B21 est une constante en J-1 ⋅ m3 ⋅ s-2 .
Dans le cas où seule interviendrait l’émission stimulée, la population N2 serait
dN 2
régie par l’équation = −B21 uν (ν0 )N2 .
dt
En réalité, des photons peuvent être résonants même si leur fréquence est lé-
gèrement différente de ν 0 , et on devrait écrire que la probabilité d’émission stimulée
 dν dν 
dans l’intervalle spectral ν − ,ν + est d2 P = B21
′ (ν )uν (ν )dt dν , avec B21
′ une
 2 2 
fonction qui présente un pic pour ν = ν0 . On passe donc d’une distribution fréquentielle
discrète à une distribution continue autour de ν 0 en remplaçant B21 par B21
′ (ν 0 )dν .

Absorption

Comme pour l’émission stimulée, la probabilité de l’absorption augmente avec


uν (ν0 ) : dP = B12 uν (ν 0 )dt , avec B12 coefficient d’Einstein en J-1 ⋅ m3 ⋅ s-2 . Dans le
cas où seule interviendrait l’émission stimulée, la population N1 serait régie par l’équa-
dN1
tion = −B12 uν (ν0 )N1 .
dt
En réalité, des photons peuvent être absorbés même si leur fréquence est lé-
gèrement différente de ν 0 , et on devrait écrire que la probabilité d’absorption dans
 dν dν 
l’intervalle spectral ν − ,ν + est d2 P = B12
′ (ν )uν (ν )dt dν , avec B12
′ une fonc-
 2 2 
tion qui présente un pic pour ν = ν0 .

785
786 Partie VII.  Physique des ondes

1.2 Relations entre les coefficients d’Einstein


Pour le système étudié, les populations N1 et N2 varient du fait des transitions,
supposées uniquement radiatives. Le nombre total d’atome N = N1 + N2 se conserve,
et on a, pour les trois types de transitions étudiées au 1.1 :
 dN 2   dN 
 dt  = − 1  . On en déduit le système régissant l’évolution de N2 :
 transition  dt transition
dN 2  dN 2   dN   dN 
=  + 2  + 2  = − A21 N2 − B21 uν (ν0 )N2 + B12 uν (ν0 )N1 .
dt  dt ém.sp.  dt ém.st.  dt abs.
Pour déterminer les relations entre les coefficients d’Einstein, on se place dans
dN 2
le cas particulier du régime stationnaire : = 0 , le système étant thermostaté à une
dt
température T quelconque et baignant dans le rayonnement d’équilibre à cette tempé-
Ei

kBT
rature. Les populations sont donc régies par la loi de Boltzmann : Ni ∝ e , ce qui
E2 − E1 hν 0
N1 N1 1
entraîne =e kBT
= e kBT , ou = eβ(E2 − E1 ) = eβhν0 , en posant β = .
N2 N2 kBT
La loi du rayonnement d’équilibre étudiée dans le chapitre sur le rayonnement
8πhν 03 1
thermique fournit uν (ν0 ) = 3 β hν 0
.
c e −1
dN 2
On a donc = 0 = N2  − A21 − B21uν (ν0 ) + B12 uν (ν0 )eβhν0  , soit :
dt  

8πhν03  8πhν03 
A21 − B21 + eβhν0 B12 − A21  = 0 ∀T , donc ∀β .
c3  c 3

B12 = B21
8πhν 03 8πhν 03 
On en déduit A21 = B12 = B21 :  8πhν03 .
c3 c3  A21 = B21
 c3

1.3 Bilan de puissance pour un système à deux niveaux soumis à une onde
électromagnétique plane
On se place en régime stationnaire. L’onde se propage dans le sens des z crois-
sants et traverse un milieu homogène à deux états d’énergie E1 et E2 peuplés avec

des densités atomiques uniformes n1∗ et n2∗ (nombre d’atomes par unité de volume).
Dans le modèle discret utilisé, l’onde n’interagit avec le milieu que si sa fré-
quence est ν = ν0 . On se place dans ce cas et on note I ( z ) son intensité (c’est la va-
leur moyenne de la norme du vecteur de Poynting). Le milieu est un cylindre d’axe Oz,
de longueur L et de section S .

786
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 787

Contrairement à l’émission stimulée


pour laquelle l’onde émise a la même direc-
tion que l’onde incidente, l’émission sponta-
née est isotrope : aucun photon émis n’a ri-
goureusement une direction selon Oz et donc
presque tous les photons émis dans Σ finis-
sent par sortir du cylindre à travers sa surface
latérale si sa longueur est suffisamment
grande ( L >> S ). Nous nous placerons dans ce cas par la suite, et nous négligerons
l’énergie qui sort de la section droite en x = L , due aux photons émis spontanément.
On applique un bilan d’énergie élec-
tromagnétique entre t et t + dt au système Σ
constitué d’une portion du cylindre situé
entre les plans de côtes z et z + dz :
d2UΣ = δN
2 r 2 p
U + δNU = 0 en régime stationnaire. L’énergie reçue par Σ pendant dt vaut
reçue produite

dI
δ2U r = I ( z ) S dt − I ( z + dz ) S dt = −
S dt dz .
dz
L’énergie produite (algébrique) est due à l’émission stimulée (comptée positi-
vement car elle produit des photons d’énergie hν0 , et à l’absorption (comptée négati-
vement : les photons d’énergie hν0 sont absorbés). D’après l’étude du 1.2, en valeur
absolue, ces énergies valent respectivement :
— hν 0 B21 uν (ν0 , z )dN2dt , avec dN2 = n2∗ S dz .
— hν0 B12 uν (ν0 , z )dN1dt , avec dN1 = n1∗ S dz .
dI
Comme B12 = B21 , on a − + hν0 B21 uν (ν0 , z ) ⋅ (n2∗ − n1∗ ) = 0 .
dz
L’intensité I ( z ) de l’onde de fréquence ν 0 est liée à la densité volumique
d’énergie spectrale uν (ν0 , z ) . Cependant, comme la première correspond à une distri-
bution discrète en fréquence, et la seconde à une description continue, on doit, pour
faire le lien, raisonner sur l’intensité spectrale Iν (ν0 , z )
définie par dI = Iν ( ν, z )dν , où dI est l’intensité de
 dν dν 
l’onde pour l’intervalle spectral ν − ,ν + . Dans
 2 2 
cet intervalle, l’énergie δ2U = S Iν (ν, z ) ⋅ dt dν qui traverse pendant dt une portion de
surface S d’un plan z = Cte se trouve dans un cylindre de section S et de longueur
cU (ν )dt , où cU (ν ) est la vitesse de propagation de l’énergie dans le milieu, à la fré-

quence ν : elle vaut δ2U = uν (ν, z ) S cU (ν )dt dν , donc Iν (ν0 , z ) = cU (ν0 ) uν (ν 0 , z ) .


D’autre part, dans le modèle continu, on doit remplacer B21 par B21
′ (ν 0 )dν .

787
788 Partie VII.  Physique des ondes

L’équation différentielle qui régit Iν s’écrit alors :


dIν hν0 B21
′ ( ν0 ) ∗
= (n2 − n1∗ ) Iν = K (n2∗ − n1∗ ) Iν , avec K constante positive.
dz cU (ν0 )
— Dans le cas où n2∗ < n1∗ , l’intensité décroît exponentiellement avec z lors de la

propagation de l’onde : Iν (ν0 , z ) = Iν (ν0 , z = 0) e −K ( n1 − n2 )z


∗ ∗
(∗) . Ce cas est par exemple
celui de l’équilibre thermodynamique du système thermostaté, puisqu’alors la loi de
n1∗
= eβhν0 > 1  n∗ = n1∗ + n2∗ = n2∗ 1 + e 0  . On a donc :
β hν
Boltzmann s’applique :
n2∗  

 eβhν0 − 1
n1∗ − n2∗ = n2∗ eβhν0 − 1 = n∗  β hν 0 
. En prenant le logarithme décimal de (∗) , on
 
 1 + e 
 I (ν , z = 0) 
obtient A = log  ν 0 ∗
 = ε(ν0 ,T ) ⋅ n ℓ . On reconnaît la loi de Beer-Lambert ré-
I (
 ν 0 ν , z = ℓ ) 
gissant l’absorbance A d’une longueur ℓ d’une solution de l’espèce absorbante de den-

sité n∗ . Le coefficient d’absorption (ou d’extinction) ε(ν 0 ,T ) de cette espèce, atome


ou molécule, dépend de la fréquence du rayonnement et de la température.

Dans le cas où n2∗ > n1∗ , l’intensité croît exponentiellement avec z lors de la

propagation de l’onde : Iν (ν0 , z ) = Iν (ν0 , z = 0) eK ( n2 − n1∗ ) z



. Le milieu est alors amplifica-
teur et ne peut pas être en équilibre thermique puisque la loi de Boltzmann n’est pas
vérifiée. On parle d’inversion de population (par rapport à l’équilibre thermique) pour
décrire ce cas où le niveau d’énergie le plus élevé est le plus peuplé.

1.4 Milieu amplificateur et pompage


Le laser (acronyme pour Light Amplification by Stimulated Emission of Radia-
tion) est basé sur l’émission stimulée d’un photon par un atome.
Le laser nécessite un milieu amplificateur, qui doit posséder un état excité mé-
tastable (2) d’énergie E2 (dont la durée de vie peut être de l’ordre de la ms). Si on
arrive à amener suffisamment d’atomes dans cet état, on pourra alors désexciter
quasi-simultanément ces atomes en cascade vers un état (1) plus stable, d’énergie
E1 < E2 , grâce à un photon résonant.
Il faut pour cela qu’il y ait plus d’atomes dans l’état (2) que dans l’état (1). En
effet, comme on l’a vu au 1.2, B12 = B21 : sous l’action d’un photon d’énergie E2 − E1 ,
la probabilité de l’excitation de (1) vers (2) est la même que celle de la désexcitation
stimulée de (2) vers (1). Sans inversion de population, c’est l’absorption qui l’emporte,
et non l’amplification. Il faut donc amener de l’énergie au milieu amplificateur.
Cette inversion de population est obtenue par pompage : de l’énergie est

788
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 789

apportée au système (soit par un flash lumineux, soit par une décharge électrique sous
quelques kV) afin d’amener un grand nombre d’atomes dans l’état (2). Le milieu am-
plificateur est actif (il est alimenté en énergie, comme un circuit électronique actif).
En réalité, un pompage direct de (1) vers (2) permet au maximum d’obtenir la
même population d’atomes dans les deux états. Un troisième état (3) excité est néces-
saire…
Par exemple, pour le laser à gaz Hélium-Néon, l’émission dans le visible, à la
longueur d’onde λ0 = 632,8 nm , fait intervenir l’état fondamental (0) et un état métas-
table (3) de l’Hélium. Le pompage de (0) à (3) est réalisé grâce à des décharges élec-
triques. Les atomes d’Hélium cèdent de l’énergie par chocs aux atomes de Néon, ce
qui permet à ces derniers de passer de leur état fondamental à l’état métastable (2)
car la différence d’énergie entre ces deux états est très proche de E3 − E0 , pendant
que les atomes d’Hélium se désexcitent et reviennent dans leur état fondamental, sans
émettre de photon.

L’inversion de population entre les états (1) et (2) du Néon est alors réalisée.
L’émission stimulée fait finalement passer les atomes de Néon de (2) vers (1). La dé-
sexcitation de l’état (1) vers l’état fondamental se fait alors rapidement.

1.5 Obtention d’un oscillateur


Si on injectait une onde électromagnétique de
fréquence ν et d’intensité Ie dans le milieu amplifica-
teur alimenté, ce dernier amplifierait l’intensité lumi-
neuse lorsque ν se trouve dans une petite bande au-
tour de ν0 .
Is
La courbe de gain µ(ν ) = est une courbe en
Ie
cloche centrée ν0 . La bande passante est celle de la courbe d’émission pour la tran-
sition de (2) vers (1), sa largeur étant principalement due à l’effet Doppler.

789
790 Partie VII.  Physique des ondes

Résonateur optique
Le milieu actif est placé dans un résonateur optique, ou cavité optique, constitué
d’un miroir M1 et d’un miroir semi-réfléchissant M2 .
Les réflexions multiples des photons sur les miroirs M1 et M2 permettent d’ob-
tenir les désexcitations stimulées en cascade. L’onde est amplifiée, ce qui permet de
compenser l’énergie qui sort du laser par M2 , une fois le régime stationnaire atteint.
Le faisceau sortant est rectiligne (onde quasi-plane), quasi-monochromatique,
intense et cohérent (les photons émis sont en phase avec les photons résonants).

La cavité sélectionne les longueurs d’ondes telles


que 2L = nλ , avec n ∈ N∗ , qui correspondent à des in-
terférences constructives de l’onde électromagnétique
après un aller et retour dans la cavité, soit des fré-
nc
quences ν = ν n = , où c est la célérité de la lumière
2L
dans le milieu. La cavité est de type Fabry-Pérot. La lar-
geur des pics autour des fréquences νn dépend du coef-
ficient de réflexion énergétique sur le miroir semi-réfléchissant. Leur hauteur dépend
de la fraction de rayonnement émis, qui correspond à des pertes énergétiques.

Le gain µβ est donc constitué des raies de fré-


nc
quences νn = , régulièrement espacées, à l’inté-
2L
rieur de l’enveloppe correspondant à la transition de
(2) vers (1). Le régime stationnaire est obtenu pour :
µ(ν )β(ν ) = 1 .

On peut faire l’analogie avec un oscillateur électronique quasi-sinusoïdal


comme l’oscillateur à pont de Wien. La chaîne d’action est le milieu amplificateur ali-
menté énergétiquement grâce au pompage, au lieu d’un amplificateur non inverseur
alimenté avec une source de tension continue. La chaîne de retour est la cavité optique
qui joue le rôle du pont de Wien. Elle laisse passer les fréquences νn . Le bouclage se
fait par réflexion sur les miroirs.

790
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 791

Le système produit une onde électromagnétique


sans avoir besoin d’en injecter une entrée, tout comme
un signal apparaît spontanément dans l’oscillateur élec-
tronique sans nécessité d’utiliser un G.B.F.
Seuls les modes pour lesquels µ(ν )β(ν ) ≥ 1 peu-
vent naître dans la cavité.
Comme pour un oscillateur électronique quasi-si-
nusoïdal, ce sont en réalité les non-linéarités qui permet-
tent d’obtenir un régime stationnaire : lorsque l’intensité augmente, des phénomènes
de saturation font diminuer le gain µ. Elles autorisent en fait tous les modes propres
tels que µ(ν )β(ν ) ≥ 1.

Une telle cavité peut être multimodale, les différents modes étant déclenchées
aléatoirement par l’émission d’un photon résonant. On peut, pour des applications né-
cessitant une très grande cohérence temporelle, ne sélectionner qu’un mode en rédui-
c
sant la taille de la cavité (l’écart νn +1 − ν n = augmente) ; ou en diminuant le coeffi-
2L
cient de réflexion sur M2 (on peut alors n’avoir qu’un seul mode tel que µ(ν )β(ν ) ≥ 1).
Cependant, ces deux solutions se font au détriment de la puissance délivrée. On pré-
fère souvent introduire un filtre interférentiel très sélectif dans la cavité.
Pour les lasers Hélium-Néon souvent utilisés en T.P, la bande de fréquences
telles que µ(ν )β(ν ) ≥ 1 est du même ordre de grandeur que la largeur ∆ν à mi-hauteur
de la raie d’émission de longueur d’onde λ0 = 632,8 nm (lumière rouge), soit quelques
GHz. On peut retrouver ce résultat en ordre de grandeur sachant que l’élargissement
de la raie d’émission est principalement dû à l’effet Doppler. Les atomes de néon, de
masse molaire M = 20,2 g ⋅ mol-1 , qui émettent à la fréquence ν0 dans leur référentiel
RT
propre, ont une vitesse thermique v th = . S’ils se dirigent vers l’observateur, ce-
M
lui-ci reçoit un rayonnement de fréquence ν0 (1 + v th / c ) ; s’ils s’en éloignent, c’est la
fréquence ν0 (1 − v th / c ) qui est perçue. On a donc :
v th 2 RT
∆ν ≃ 2ν 0 = = 1,1 GHz à T = 300 K .
c λ0 M
Comme la célérité c de la lumière dans le milieu gazeux est proche de celle du
c
vide, on a, pour une cavité de longueur L = 15 cm , un écart = 1 GHz entre deux
2L
fréquences propres : ces lasers sont multimodes, mais il y a très peu de modes propres
stables.
La largeur spectrale, qui est donc de l’ordre de ∆ν = 1 GHz , correspond à
∆ν c
≃ 2 ⋅ 10 −6 , soit une longueur de cohérence ℓ c = ≃ 30 cm .
ν0 ∆ν

791
792 Partie VII.  Physique des ondes

Pour un laser monomode, la largeur spectrale est celle d’un pic, qui peut être
très faible, par exemple de l’ordre du 10 MHz. La longueur de cohérence est alors de
30 m…
Il existe de nombreux types de lasers utilisant divers milieux amplificateurs (gaz,
solides comme le laser à rubis, liquides comme les lasers à colorants, semi-conduc-
teurs…), et diverses techniques de pompage (décharges électriques, flashs optiques,
réactions chimiques, utilisation d’un autre laser…).
Les lasers peuvent émettre continûment. Ils sont alors utilisés pour leurs pro-
priétés de cohérence temporelle, comme le laser He-Ne des laboratoires de lycées. Ils
ont de nombreuses applications en optique (mesures très précises de distances, de
vitesses, lecture optique de CD et DVD, de codes-barres, holographie…).
Les lasers peuvent aussi émettre des impulsions. On recherche alors de
grandes puissances crêtes permettant la découpe d’objets, la chirurgie laser de l’œil,
la fusion par confinement inertiel (laser mégajoule…).

2. PROPRIÉTÉS OPTIQUES D’UN FAISCEAU


SPATIALEMENT LIMITÉ
2.1 Faisceau gaussien
Le faisceau laser dans le milieu amplificateur homogène de la cavité optique,
ou à l’extérieur, est une onde électromagnétique vérifiant l’équation d’onde de d’Alem-
bert.
Si on utilise des coordonnées cylindriques (r , θ, z ) pour repérer un point M, l’axe
Oz étant l’axe focal de la cavité, on peut obtenir une solution approchée de cette équa-
tion en cherchant les composantes du champ électrique sous la forme f (r , z )ei ( ωt − kz ) ,
l’amplitude f ( r , z ) variant sur des distances axiale ou radiale grandes devant la lon-
gueur d’onde λ.
Une telle forme correspond à une onde non plane se propageant selon Oz,
possédant la symétrie de révolution autour de Oz, et telle que les rayons lumineux
associés sont peu inclinés par rapport à Oz : on parle d’approximation paraxiale, ce
qui est bien le cas des faisceaux laser qu’on obtient en pratique.

Le calcul est délicat et on se contentera de donner son résultat pour l’intensité


de l’onde :

792
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 793

2r 2 2

w 2(z)  z 
I ( r , z ) = I0 ( z ) e , où w ( z ) = w 0 1 +   . w 0 est appelé le waist (mot anglais
 zR 
πw 02
pour « col ») du faisceau, et zR = la longueur de Rayleigh du faisceau.
λ

Pour appréhender ces paramètres géométriques du faisceau, on peut commen-


cer par tracer la courbe donnant I(r) à z fixé supposé positif.

La courbe qu’on a représentée pour des distances r à l’axe Oz algébriques, est


une gaussienne, d’où le nom du faisceau. w(z) correspond à la valeur de r pour laquelle
I (r , z ) = I0 ( z ) e −2 , et caractérise la dimension transversale, ou taille du faisceau, à la
cote z. Plus z est grand, plus w(z) est grand, et plus le faisceau est étendu perpendi-
culairement à sa direction de propagation.
I étant une puissance surfacique, la puissance P(z) traversant le plan de cote z

2r 2  2r  2
∞ ∞ − w 2 (z)  − w 2 (z ) 
 I (r , z)2πr dr = 2πI0 (z) 
w 2(z)
vaut P ( z ) = re dr = 2πI0 ( z ) −e , soit :
4  
r =0 r =0   r = 0

πI0 ( z )w 2 ( z )
P (z ) = . Cette puissance se conserve lors de la propagation du faisceau :
2
P ( z ) = Cte , donc I0 ( z )w 2 ( z ) = I0 ( z = 0) w 02 .
� ��� �
Imax

L’intensité est maximale pour z = 0 , c'est-à-dire au niveau du waist :


w ( z = 0) = w 0 . Si on note Imax cette valeur, on a à la cote z :

2
 w 
I0 ( z ) = Imax  0  , relation qui traduit la conservation de la puissance du faisceau.
 w (z) 
z ֏ I0 ( z ) est, comme z ֏ w ( z ) , paire.

793
794 Partie VII.  Physique des ondes

2 2
w   z 
La taille w(z) du faisceau obéit à   −  = 1 qui est l’équation d’une hy-
 w 0   zR 
w0z
perbole d’asymptotes w = ± .
zR
La longueur de Rayleigh correspond donc à l’abscisse du point d’ordonnée w 0
w0z
sur l’asymptote w = .
zR

— Pour z >> zR le faisceau est conique : il diverge à partir du point O avec un petit
w0
angle θ ≃ tan θ = . L’onde est pratiquement une onde sphérique divergente, mais
zR
dont la puissance est presque entièrement contenue dans le cône de sommet O et de
demi-angle au sommet θ.

πw 02 λ
Comme zR = on a θ ≃ : c’est le même ordre de grandeur que celui
λ πw 0
de l’angle de diffraction d’une onde plane de longueur d’onde λ par une ouverture
circulaire de rayon w 0 : plus le col est étroit, plus le faisceau est diffracté.

— Pour z << zR , le faisceau est cylindrique de section circulaire dont le rayon vaut le
waist w 0 . L’onde est pratiquement une onde plane, mais d’extension limitée.
Donnons des ordres de grandeur pour le laser He-Ne pour lequel la longueur
d’onde est λ = λ 0 = 632,8 nm : le waist est typiquement de l’ordre de 0,5 mm, donc la

πw 02
longueur de Rayleigh vaut zR = ≃ 1,2 m .
λ
w
Un tel laser diverge peu puisque θ ≃ 0 = 4 ⋅ 10−4 rad : pour z = 10 m la taille
zR
w du faisceau n’est encore que de 4 mm.

794
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 795

— Dans la zone de Rayleigh z ≃ zR , l’onde n’est ni plane ni sphérique. On a :


Imax
w ( zR ) = w 0 2 , et donc I0 ( zR ) = .
2

2.2 Transformation d’un faisceau gaussien par une lentille convergente


Un faisceau incident gaussien, dont le waist vaut w 0 , reste gaussien après tra-
versée d’une lentille L de distance focale f ′ . Le waist du faisceau émergent vaut w 0′ .
Nous allons nous intéresser au cas où L et son foyer objet F se trouvent dans
la zone où l’onde est plane : on a f ′ << zR , et la taille du faisceau est proche de w 0 au
niveau de L.

Dans le cadre de l’optique géométrique, le faisceau émergent serait focalisé au


foyer image F ′ de L. C’est bien là que sa taille est minimale, mais son waist w 0′ n’est
pas nul. Pour le déterminer, on calcule, en utilisant le triangle rectangle F ′OW , le petit
λ
angle θ′ ≃ du cône issu de F ′ que forme le faisceau émergent à grande distance
πw 0′
w0 λf ′
de F ′ : θ′ ≃ , ce qui permet d’accéder au waist w 0′ ≃ du faisceau émergent.
f′ πw 0
πw 0′ 2 λf ′2 f ′2
La longueur de Rayleigh de ce faisceau vaut donc zR′ = = = .
λ πw 02 zR
zR′ f′
Comme f ′ << zR , on a = << 1 ⇔ f ′ >> zR′ , et on vérifie que le faisceau est bien
f ′ zR
conique lorsqu’il émerge de L.

795
796 Partie VII.  Physique des ondes

λ λ
θ′ ≃ est du même ordre de grandeur que l’angle θ′ ≃ caractéristique
πw 0′ 2R
de la diffraction d’une onde plane par un trou circulaire de rayon R. La diffraction est
une propriété inhérente aux ondes et intervient dès qu’elles sont limitées spatialement.

Ici c’est le cas parce que le faisceau incident n’est pas homogène mais gaus-
sien, donc que son énergie est essentiellement concentrée dans un cylindre de rayon
w 0 inférieur au rayon R de la lentille. Si au contraire R était inférieur à w 0 , c’est la
lentille qui serait la cause de la limitation spatiale du faisceau, et la tache de diffraction
λf ′
aurait dans le plan focal un rayon θ′f ′ ≃ .
2R

Dans tous les cas, l’ordre de grandeur de la taille minimale du faisceau émer-
λf ′
gent est où D = 2R est le diamètre d’ouverture de la lentille. On pourrait penser
D
améliorer la focalisation en augmentant D mais alors ce sont les aberrations géomé-
triques de la lentille qui deviennent limitantes (on parle d’aberration transversale : les
rayons émergents qui sont passés près du bord de la lentille coupent l’axe focal en un
point située avant F ′ ). D ne peut pas être beaucoup plus grand que f ′ (la valeur mi-
f′
nimale du nombre d’ouverture de la lentille, défini par N = , est de l’ordre de 1).
D

On en conclut que la taille minimale du faisceau émergent est de l’ordre de


grandeur de la longueur d’onde λ.

En conséquence, la quantité d’information numérique qu’on peut stocker sur la


S
surface S d’un support optique est limitée ; elle est de l’ordre de .
λ2
Par exemple pour un CD, un DVD ou un Blu-ray, on utilise une diode laser de
longueur d’onde λ dont l’information est gravée sur une même surface S . Bien que
d’autres facteurs interviennent (ouverture des lentilles, indice optique du support), c’est
surtout en diminuant la longueur d’onde qu’on est arrivé à augmenter la capacité de
stockage du support, comme le montre le tableau suivant :

796
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 797

type de support CD DVD Blu-ray


λ (nm) 780 635 405
rayon du spot (nm) 520 320 140
capacité 650 Mo 4,7 Go 25 Go

Donnons à titre documentaire les relations de conjugaison des waists incident


et émergent par une lentille L convergente. Le waist du faisceau incident est centré
sur un point A de l’axe optique Oz de L ; le waist du faisceau émergent est centré en
un point A′ de Oz. On note p = OA et p′ = OA′ les abscisses algébriques des waists.
 f ′( p + f ′)  w 0f ′
On peut montrer que p′ = f ′ 1 − 2 2
et w 0′ = .
 ( p + f ′) + zR  ( p + f ′)2 + zR2
Ainsi, si le waist du faisceau incident se trouve au foyer objet ( p = −f ′ ), le waist
du faisceau émergent image se trouve au foyer image de L ( p′ = f ′ ), bien que A ≡ F
et A′ ≡ F ′ ne soient pas deux points conjugués par la lentille. On retrouve dans ce cas
w f ′ λf ′
w 0′ = 0 = .
zR πw 0

2.3 Élargisseur de faisceau


Lorsqu’on veut, comme précédemment, obtenir un spot de petite taille à partir
d’un faisceau gaussien dont le waist w 0 est trop grand, on focalise ce dernier grâce à
λf ′
une lentille très convergente ( f ′ petit), et on obtient un petit waist w 0′ = .
πw 0
Si au contraire on souhaite disposer d’un faisceau émergent qui diverge peu, il
faut que son waist soit le plus grand possible. On peut utiliser pour cela un élargisseur
de faisceau, c’est-à-dire l’association afocale de deux lentilles convergentes : L1 , de
distance focale f1′ , et L 2 , de distance focale f2′ . Comme précédemment, le waist du
faisceau incident est placé au voisinage du foyer objet de L1 , et sa longueur de Ray-
leigh vérifie f1′ << zR : le faisceau incident est quasiment parallèle à l’axe optique ∆ des
lentilles. Il est focalisé par L1 autour de son foyer image F1′ , confondu avec le foyer
objet F2 de L 2 . Si f2′ >> zR′ (c’est le cas car f2′ et f1′ sont du même ordre de grandeur),
le retour inverse de la lumière nous assure que le faisceau est conique à son arrivée
sur L 2 et qu’il en émerge quasiment parallèlement à ∆.
En utilisant les triangles rectangles F1′O1W et F2O2W ′′ , on obtient le rapport des
w 0 w 0′′ w ′′ f ′ f′
waists de sortie et d’entrée du montage : θ′ ≃ ≃  0 = 2 . Si 2 = γ > 1 , on a
f1′ f2′ w 0 f1′ f1′
bien un élargisseur de faisceau qui permet d’avoir un waist de sortie γ fois plus grand
que celui d’entrée, donc un angle de divergence γ fois plus petit.

797
798 Partie VII.  Physique des ondes

2.4 Mesure de la distance Terre-Lune 


La faible divergence d’un faisceau laser est utilisée en télémétrie pour mesurer
la distance entre l’émetteur laser et un objet éloigné.
Un exemple parlant est celui de la distance Terre-Lune.
Des cubes rétro-réflecteurs ont été déposés sur 5 sites à la surface de la Lune
par les missions américaines Apollo et russes Luna afin de renvoyer un faisceau laser
vers la Terre.

Si on utilisait un miroir plan, le moindre écart du rayon incident avec la normale


au miroir ferait que le rayon réfléchi ne rencontrerait pas la Terre. Avec un coin de
cube, la lumière est renvoyée dans la direction incidente.
Considérons pour le montrer un repère cartésien tel que le coin du cube réflec-
teur en soit l’origine O, et que le rayon lumineux se réfléchisse d’abord sur la face se
trouvant dans le plan z = 0 , puis sur celle se trouvant dans le plan x = 0 , et enfin sur
celle se trouvant dans le plan y = 0 .
D’après les lois de Descartes, un rayon est réfléchi par un miroir plan dans une
direction symétrique de la direction incidente par rapport au miroir. Soit le vecteur

798
Chapitre 6.  Introduction à la physique du laser 799

� � �
unitaire ei (u,v ,w ) du rayon incident ; le vecteur e′(u,v , −w ) symétrique de ei par rap-
port au plan z = 0 est donc le vecteur unitaire du rayon réfléchi par la première face.

De même e′′( −u,v , −w ) est le vecteur unitaire du rayon réfléchi par la deuxième face
� �
(symétrique de e′ par rapport au plan x = 0 ), et er ( −u, −v , −w ) le vecteur unitaire du
rayon qui ressort du réflecteur après la réflexion sur la troisième face (symétrique de

e′′ par rapport au plan y = 0 ).
Le rayon ressort donc bien du cube réflecteur avec une direction opposée à la
direction incidente.
Le laser de l’observatoire de la côte
d’azur envoie des impulsions de 400 ps,
d’énergie E = 300 mJ à la longueur
d’onde 532 nm (couleur verte).
Pour diminuer l’angle de diver-
gence, on utilise un élargisseur de fais-
ceau qui permet d’obtenir un waist de 7 cm
donc un angle de divergence :
532 ⋅ 10−9
≃ 2,4 ⋅ 10−6 rad ≃ 0,5'' .
π × 7 ⋅ 10 −2
Malheureusement, les inhomogé-
néités de l’atmosphère dues à la turbu-
lence augmentent cet angle, qui varie avec les conditions météorologiques. Un bon
ordre de grandeur est θ ≃ 2,5'' , soit 5 fois la divergence en sortie du télescope.
La tache de ce faisceau laser sur surface de la Lune, située à 384 000 km de
celle de la Terre, a donc pour rayon 5 × 2,4 ⋅ 10 −6 × 3,84 ⋅ 108 ≃ 4,6 km .
Le nombre de photons envoyés par impulsion vaut :
E λ 300 ⋅ 10−3 × 532 ⋅ 10−9
N= = ≃ 8 ⋅ 1017 . La fraction de ces photons qui tombent sur
hc 6,63 ⋅ 10−34 × 3 ⋅ 108
les cubes correspond au rapport de la surface sous laquelle sont vus les rétro-réflec-
teurs (panneau de 300 réflecteurs de diamètre d = 3,8 cm soit 0,34 m2 ) et de la sur-
face du spot laser sur la Lune, en supposant bien sûr qu’on vise bien l’un des 5 sites,
N′ 0,34
et que la tache est homogène : = ≃ 5 ⋅ 10 −9 .
N π × (4,6 ⋅ 103 )2
En réalité, les réflecteurs diffractent le faisceau incident d’un angle dont l’ordre
λ
de grandeur est θ′ ≃ ≃ 1,4 ⋅ 10−5 rad ≃ 2,9'' , ce qui donne une tache sur la Terre de
d
rayon 1,4 ⋅ 10 −5 × 3,84 ⋅ 108 ≃ 5,4 km .
Le télescope, de rayon 75 cm , ne récupère qu’une fraction :
2
N ′′  0,75  −8
=  ≃ 2 ⋅ 10 de ces photons.
N ′  5,4 ⋅ 103 

799
800 Partie VII.  Physique des ondes

Finalement, le nombre de photons qu’on peut recueillir sur le télescope est :


N ′′ ≃ 8 ⋅ 1017 × 5 ⋅ 10−9 × 2 ⋅ 10−8 ≃ 80 par impulsion.
On n’a pas tenu compte ici de de l’absorption par l’atmosphère terrestre, de
l’efficacité des rétro-réflecteurs (un photon qui n’a pas subi trois réflexions ne sera pas
renvoyé vers la Terre), du filtrage spectral (il ne faut garder que les photons de lon-
gueur d’onde 532 nm pour éliminer la lumière parasite) et du rendement de la détection
quantique. On ne détecte en réalité qu’un photon sur une centaine d’impulsions, mais
c’est suffisant pour pouvoir exploiter le signal.
La mesure du temps mis par le rayon pour effectuer un aller-retour Terre-Lune
(environ 2,5 s) permet d’atteindre avec grande précision la distance entre les deux
astres. On a pu ainsi vérifier que la Lune s’éloigne en moyenne de la Terre de 3,8 cm
par an. On peut également mesurer grâce aux réflecteurs la vitesse de rotation de
notre satellite et détecter des balancements de notre satellite, appelés librations. Cer-
taines de ces librations sont liées à la structure de la Lune (elles donnent par exemple
des informations sur son noyau) et d’autres ne sont explicables que dans le cadre de
la mécanique relativiste, ce qui permet actuellement de vérifier certains éléments de
la théorie d’Einstein.

800
801

[PHYSIQUE DES ONDES 7]

RÉVISIONS ET COMPLÉMENTS :
INTRODUCTION À LA
MÉCANIQUE QUANTIQUE
1. LA NAISSANCE DE LA MÉCANIQUE QUANTIQUE
1.1 Les insuffisances des théories classiques
À la fin du xixe siècle, les succès de la mécanique newtonienne, de la thermo-
dynamique et de l’électromagnétisme étaient si éclatants que certains physiciens pen-
saient que toutes les grandes théories de la Physique avaient été élaborées. Pourtant,
Lord Kelvin, qui faisait le bilan des découvertes du xixe siècle lors d’une conférence à
la Royal Institution le 27 avril 1900, compara l’état des connaissances en Physique à
un ciel dans lequel subsistaient deux nuages.
L’un de ces nuages était l’expérience de Michelson et Morley, dont les résultats
étaient incompatibles avec le changement de référentiel galiléen classique (tout
comme les équations de Maxwell). Einstein introduira en 1905 une nouvelle théorie,
celle de la relativité restreinte, qui rendra compte des résultats de cette expérience.
Le deuxième nuage concernait le théorème d’équipartition de l’énergie. Ce
théorème, appliqué au corps noir dans le cadre de la théorie classique du rayonne-
2πckBT
ment, donnait la loi de Rayleigh-Jeans : F (λ,T ) = pour le flux surfacique spec-
λ4
tral d’équilibre. Cette expression était vérifiée expérimentalement pour les grandes lon-
gueurs d’onde, mais pas pour les petites où elle tend vers l’infini (« catastrophe ultra-
violette »), ce qui implique que le corps noir rayonne une puissance infinie ! D’autres
phénomènes observés à l’époque, comme l’effet photoélectrique ou les spectres de
raies émis par les atomes venaient grossir ce deuxième nuage.
Les deux nuages décrits par Lord Kelvin se transformèrent en deux tempêtes,
l’une relativiste et l’autre quantique.

1.2 La théorie de Planck du rayonnement du corps noir


Cette théorie, publiée dans un article le 14 décembre 1900, introduit l’idée selon
laquelle les échanges d’énergie entre la matière et le rayonnement de fréquence ν
sont quantifiés : ce sont des multiples de hν . La constante h, maintenant appelée
constante de Planck, était pour Planck une « grandeur d’aide » (Hilfsgröße), et Planck
rejetait l’idée que le champ électromagnétique soit lui-même quantifié.

801
802 Partie VII.  Physique des ondes

À l’aide de cette hypothèse, il obtint pour


le flux surfacique spectral d’équilibre l’expression
2πhc 2 1
F (λ,T ) = 5 hc
, qui, cette fois-ci, ren-
λ
λkBT
e −1
dait parfaitement compte des mesures. Pour
hc 2πckBT
λ >> , on retrouve la loi « classique » F (λ,T ) = de Rayleigh-Jeans, dans
kBT λ4
laquelle la constante de Planck a disparu, ainsi que les effets de la quantification.

1.3 Effet photoélectrique / Effet Compton et les quanta d’Einstein


Effet photoélectrique
Cet effet était connu depuis 1839 : un métal éclairé à l’aide d’une source lumi-
neuse de fréquence ν émet des électrons, à condition que ν soit supérieure à une
fréquence limite νlim . Pour ν < νlim il n’y a aucune émission, quelle que soit la puis-
sance du rayonnement.

Les théories classiques n’expliquant pas cet effet, Einstein alla plus loin que
Planck en supposant en 1905 que c’est la lumière elle-même (plus généralement les
ondes électromagnétiques) qui est quantifiée : elle est constituée de quanta (que l’on
appellera photons plus tard) d’énergie E = hν (relation de Planck-Einstein). Il expliqua
ainsi l’effet photoélectrique.

Millikan vérifia en 1914 la théorie


d’Einstein, et en tira une mesure de la cons-
tante de Planck, grâce à l’expérience dont on
donne le principe ci-contre. On éclaire à la fré-
quence ν une électrode métallique (cathode)
reliée à la masse du circuit. Une anode portée
au potentiel U peut recueillir les électrons
émis. Un courant I positif traverse alors le cir-
cuit ; il est mesuré à l’aide d’un ampèremètre.
On note V(M) le potentiel en un point M entre
les électrodes.
Un électron de conduction du métal peut être extrait si on lui fournit une énergie
supérieure au travail de sortie (ou d’extraction) W. Cette énergie est ici fournie par un
W
seul photon d’énergie E = hν : on extrait des électrons si E ≥ W ⇔ ν ≥ νlim = .
h
Ainsi, si ν < νlim , quelle que soit la puissance du rayonnement incident et la valeur de
la tension U, aucun courant n’est détecté. L’effet est bien expliqué.
Plaçons-nous maintenant dans le cas où ν ≥ νlim . L’énergie apportée par le

802
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 803

photon est supérieure à W et le surplus est l’énergie cinétique avec laquelle l’électron
1
est émis à la cathode : Ecc = mv c 2 = hν − W = h( ν − νlim ) . L’énergie mécanique des
2
électrons se conserve entre la cathode et l’anode, et comme la seule force s’exerçant
sur un électron de masse m est la force électrique qui dérive de l’énergie potentielle
1 1
−eV , on a, si les électrons atteignent l’anode : mv a2 − eU = mv c 2 = h( ν − νlim ) .
2 2
Dans ce cas, l’énergie h( ν − νlim ) + eU est positive. Puisque ν ≥ νlim , c’est le cas si
U ≥ 0.
En revanche, si on impose une tension U < 0 , on ne détecte un courant, pour ν
h
fixée, que si h( ν − νlim ) + eU ≥ 0 ⇔ U ≥ U0 = − ( ν − νlim ) . Plus la fréquence est éle-
e
vée, plus il faut une tension négative
pour empêcher les électrons de par-
venir à l’anode. En traçant la courbe
représentant −U0 en fonction de ν,
Millikan a bien obtenu une droite de
h
pente = 4,12 ⋅ 10 −15 V ⋅ s , qui lui
e
donna pour valeur de la constante
de Planck : h = 6,56 ⋅ 10 −34 J ⋅ s .

Effet Compton
Dans la théorie de la relativité restreinte qu’a élaborée Einstein en 1905, la vi-
tesse de la lumière c est indépendante du référentiel. Einstein a montré qu’une parti-
cule libre (isolée) de masse m, animée d’une vitesse de norme v par rapport au réfé-
rentiel du laboratoire R , possède une énergie E = γmc 2 et une quantité de mouve-

G G v2 c
ment p = γmv dans ce même référentiel, où γ = 1/ 1 − 2 = .
c c −v2 2

Pour une particule non relativiste (v << c ), on trouve, à l’aide d’un développe-
v v2 1 � �
ment limité en 0 à l’ordre 2 en : γ = 1 + 2 , d’où E ≃ mc 2 + mv 2 et p ≃ mv . Ce
c 2c 2
sont les expressions classiques, sauf que l’énergie n’est égale à l’énergie cinétique
qu’à une constante près, le terme E0 = mc 2 appelée énergie au repos de la particule.
Cette fameuse relation montre qu’il y a équivalence masse-énergie : au niveau des
particules élémentaires, la masse peut ne pas se conserver et se transformer en éner-
gie, et vice-versa.
Dans le cas général, E 2 − p2c 2 = γ 2m2c 2 c 2 − v 2  = m 2c 4 . Le terme E 2 − p 2c 2
 
est donc indépendant du référentiel.

803
804 Partie VII.  Physique des ondes

E hν
Dans le cas des photons, de masse nulle, la relation devient p = = , et si
c c
c h
on introduit la longueur d’onde λ = , on a la relation λ = .
ν p
Considérons maintenant le choc élastique d’un photon sur un électron immobile
dans R , le système étant isolé (cas où l’électron est faiblement lié à un noyau ato-
mique). On a alors conservation de la quantité de mouvement du système puisqu’il est
G
isolé, et de son énergie (choc élastique). En notant pe la quantité de mouvement de
G G
l’électron après choc, p et p′ celles du photon avant et après choc, ν et ν′ les fré-
quences du photon avant et après choc, m la masse de l’électron, et enfin E son éner-
G G G
gie après choc, on a p = p′ + pe et hν + mc 2 = hν′ + E (1) . On en déduit :
G G G G G h2
pe = p − p′  pe2 = p 2 + p2 − 2 p ⋅ p′ = 2 ν 2 + ν′2 − 2νν′ cos θ (2) , θ étant l’angle de
c  
G G
diffusion du photon, angle entre p′ et p .
De (1) on tire E 2 = (hν − hν′ + mc 2 )2 = pe2c 2 + m2c 4 , soit :
aussi

(hν − hν′) + 2(hν − hν′)mc = pe c . On peut éliminer pe2 à l’aide de (2) :


2 2 2 2

h2 (ν − ν′)2 + 2h(ν − ν′)mc 2 = h2 ν 2 + ν′2 − 2νν′ cos θ . En développant :


 
mc 2 mc 2
−2νν′ + 2(ν − ν′) = −2νν′ cos θ ⇔ (ν − ν′) = νν′(1 − cos θ) . En introduisant les
h h
longueurs d’onde du photon λ et λ′ avant et après choc, on obtient :
1 1 h 1
− = (1 − cos θ) .
λ λ′ mc λλ′
Finalement, la diffusion du photon par l’électron s’accompagne d’un change-
h
ment de longueur d’onde λ′ − λ = (1 − cos θ) . Un tel décalage ne peut pas s’expli-
mc
quer avec l’aspect ondulatoire de la lumière.

Compton effectua ces


calculs et les vérifia expérimen-
talement en 1922 en mesurant
le décalage entre les longueurs
d’onde pour différents angles
de diffusion. Il publia ses résul-
tats en 1923, et la plus grande
partie de la communauté scien-
tifique fut convaincue de l’as-
pect corpusculaire de la lu-
mière.

804
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 805

1.4 Le spectre d’émission et d’absorption de l’atome d’hydrogène / Modèle


de Bohr
L’expérience de J.J Thomson (1897) avait montré l’existence de l’électron de
charge −e , puis celle de Rutherford (1911), que le noyau atomique était constitué de
protons de charge + e (il faudra attendre Chadwick en 1932 pour prouver l’existence
des neutrons).
Bohr proposa en 1913 un modèle de l’atome d’hydrogène (constitué d’un seul
proton et d’un seul électron) permettant d’expliquer son spectre d’émission discontinu.
Il prit comme point de départ le modèle classique « planétaire » dans lequel l’électron
décrit une trajectoire circulaire autour du proton. Le système étant isolé, son centre
d’inertie G est en mouvement rectiligne et uniforme par rapport au référentiel du labo-
ratoire R supposé galiléen. Le référentiel barycentrique R ∗ , qui est par définition en
translation par rapport à R , et tel que G soit fixe, est donc ici en translation rectiligne
uniforme par rapport à R , ce qui en fait un référentiel galiléen dans lequel on mène
l’étude de l’atome H. Le proton ayant une masse très grande devant celle de l’électron,
on peut l’assimiler à G et donc le considérer fixe.
Le proton se trouve au point fixe O ≡ G ,
l’électron au point M, repéré par ses coordon-
nées polaires (r,θ) de centre O. L’électron est
soumis uniquement à la force électrique :
G e2 G k G
F =− er = − 2 er (force de Coulomb)
4πε0r 2 r
de la part du proton. Si on note m sa masse, on
obtient en lui appliquant le P.F.D dans R ∗ :
G G k �
ma = F , soit −mr θɺ 2 = − 2 en projetant sur er . Le mouvement de l’électron est uni-
r
k
forme et la norme de sa vitesse est v = r θɺ = . On en déduit son énergie cinétique
mr
1 1k k
Ec = mv 2 = . L’énergie potentielle électrique vaut, quant à elle, Ep = − , d’où
2 2r r
1k
l’énergie mécanique de l’électron Em = Ec + Ep = − .
2r
Ce modèle planétaire présente un grave inconvénient : la théorie classique
montre que toute charge accélérée rayonne un champ électromagnétique. C’est le cas
� �
de l’électron dont l’accélération a = F / m n’est pas nulle. Ce rayonnement emporte
1k
avec lui de l’énergie, donc E = Em = − décroît progressivement, tout comme r. Un
2r
tel modèle classique n’explique en rien le spectre d’émission de H ; pire, il implique
que l’électron décrit une spirale avant de « s’écraser » sur le proton en une durée de
l’ordre de 10 −11 s : l’atome d’hydrogène n’est pas stable !

805
806 Partie VII.  Physique des ondes

Bohr proposa un modèle selon lequel :


— (1) Il existe des orbites circulaires stables pour lesquelles l’électron ne rayonne pas.
� → �
— (2) Pour ces trajectoires, le moment cinétique LO = OM ∧ mv de l’électron vaut en
� h
norme LO = n = n ℏ , où ℏ est la constate de Planck réduite, et n ∈ N∗ . Il y a donc

� h
quantification du moment cinétique. Comme LO = mrv = kmr = n , on en déduit

que le rayon des orbites et l’énergie de l’atome sont également quantifiés.
h2 ε0 h 2
Le rayon ne peut prendre que les valeurs r = rn = n 2 2
= n2 2
= n 2a0 .
4π km πme
Le plus petit rayon a0 correspond à n = 1 et s’appelle rayon de Bohr. Numériquement,
a0 = 52,9 pm . L’énergie ne peut prendre que les va-
1k me 4 E
leurs E = En = − =− 2 2 2
= − 21 . Numérique-
2 rn 8ε0 h n n
ment, E1 = −13,6 eV . C’est l’énergie la plus basse que
peut posséder l’atome d’hydrogène. Elle correspond au
niveau fondamental n = 1 . L’énergie la plus haute
E = 0 est obtenue pour n → ∞ et correspond au cas
où le proton et l’électron ne sont plus liés ( r → ∞ ).
L’atome est alors ionisé, et par définition son énergie
d’ionisation est l’énergie qu’on doit lui fournir pour l’io-
niser à partir de son niveau fondamental. Elle vaut donc
13,6 eV pour H.
— (3) L’atome peut émettre ou absorber un quantum
de rayonnement électromagnétique (un photon)
lorsqu’il change d’orbite. Il absorbe un photon d’énergie
hν = Em − En lorsqu’il passe d’une orbite à une orbite
plus haute ( n → m > n ) et émet un photon d’énergie
hν = En − Em dans le cas contraire ( n → m < n ). Les fréquences émises vérifient :
 1 1 c
hν = E1  2 − 2  , et les longueurs d’onde λ = émises vérifient :
m n  ν
1 E1  1 1  1 1 me 4
= − = R − . La constante de Rydberg R = est égale
λ hc  m 2 n 2 
H 2  H
m n2  8ε0 2 h 3 c
à 1,097 ⋅ 107 m-1 .
Les seules raies dans le domaine du visible appartiennent à la série de Balmer
(transitions de n > 2 vers m = 2 ). Les valeurs numériques théoriques λ 6 → 2 = 410 nm
(violet), λ5 → 2 = 434 nm (bleu), λ 4 → 2 = 486 nm (bleu), et λ3 → 2 = 656 nm (rouge),
sont en accord avec les résultats expérimentaux.

806
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 807

Néanmoins, le modèle de Bohr n’explique pas la structure fine de l’atome d’hy-


drogène, ne s’applique qu’aux atomes hydrogénoïdes (à un seul électron), c’est-à-dire
à H, aux ions He+ , Li2 + … et ne constitue pas une théorie générale permettant d’étu-
dier d’autres systèmes.

1.5 L’hypothèse de de Broglie : dualité onde-corpuscule


Dans le modèle de Bohr, le moment cinétique de l’atome d’hydrogène est quan-
� h h
tifié : LO = mrv = n . Cette relation s’écrit sous la forme suivante : ℓ = 2πr = n ,
2π mv
h h
soit ℓ = nλ où λ = = et ℓ est la longueur de la trajectoire électronique.
mv p
Sous cette forme, on reconnaît la condition pour qu’une
onde de longueur d’onde λ qui se propage le long d’un cercle
de rayon r centré sur le proton ne se détruise pas à cause
d’interférences destructives. Supposons en effet que l’on gé-
nère une onde en un point du cercle, cette onde se propage
et se superpose au bout d’un tour à l’onde générée. Si, au
bout d’un tour, la différence de marche δ = ℓ entre ces deux
ondes n’est pas un multiple de la longueur d’onde, l’amplitude
ψ de l’onde résultante, superposition d’une infinité d’ondes ayant parcouru un nombre
entier de tours dans les deux sens, est nulle en chaque point (comme pour un réseau
optique constitué d’une infinité de fentes : l’amplitude de l’onde diffractée dans une
direction telle que le déphasage entre deux ondes consécutives n’est pas un multiple
de 2π est nulle).

De Broglie (prononcer « de Breuil ») émis dans sa thèse publiée en 1924 l’hy-


pothèse selon laquelle, tout comme une onde électromagnétique possède un aspect
corpusculaire (les photons), les particules matérielles possèdent un aspect ondula-
toire. C’est la dualité onde-particule. L’onde de matière associée possède une lon-
gueur d’onde λ (longueur d’onde de de Broglie) liée à la quantité de mouvement de la
h h
particule, ou impulsion p = mv , par la relation de de Broglie λ = = , et une fré-
mv p
E
quence liée à l’énergie de la particule par la relation de Planck-Einstein ν = .
h

De Broglie a ainsi généralisé aux particules matérielles les relations λ = h / p et


ν = E / h valables pour les photons.

Le calcul de la longueur d’onde de de Broglie λ = h / p permet de distinguer les


problèmes où une approche classique est suffisante ( λ << a , où a est la longueur ca-
ractéristique du système étudié) de ceux qui sont du ressort de la mécanique quan-
tique.

807
808 Partie VII.  Physique des ondes

La mécanique classique apparaît comme la limite λ / a → 0 de la mécanique


quantique, tout comme l’optique géométrique est la limite λ / a → 0 de l’optique ondu-
latoire.
Prenons l’exemple d’un gaz monoatomique à l’équilibre thermique à la tempé-
3kBT
rature T. La vitesse quadratique moyenne des atomes de masse m est u =
m
h
donc la longueur d’onde de de Broglie caractéristique est λ = . À température
3mkBT

ambiante (T ≃ 300 K ), pour de l’hélium de masse molaire M = 4 g ⋅ mol-1 , λ ≃ 70 pm


est très inférieure au libre parcours moyen (de l’ordre de 100 nm pour un gaz sous
1 bar et 300 K). L’étude de ce gaz ne relève pas de la mécanique quantique.
En revanche, si on envoie sur un cristal de nickel des électrons accélérés sous
1
une différence de potentiel U = 54,0 V , d’énergie cinétique Ec = mv 2 = 54 eV , la vi-
2
2Ec 2 × 54,0 × 1,60 ⋅ 10−19
tesse des électrons est v = = −31
= 4,36 ⋅ 106 m ⋅ s-1 , et la lon-
m 9,11⋅ 10
h 6,63 ⋅ 10−34
gueur d’onde de de Broglie λ = = = 1,67 ⋅ 10−10 m . Elle est
mv 9,11⋅ 10−31 × 4,36 ⋅ 106
du même ordre de grandeur que la distance entre les atomes de nickel. L’aspect on-
dulatoire des électrons intervient ici : ils sont diffractés par le cristal.

Cette expérience a
été réalisée en 1927 par
Davisson et Germer. La
distance d entre deux
plans réticulaires (plans
définis par trois nœuds du
réseau cristallin et qui
contiennent en consé-
quence un grand nombre
d’atomes) avait été déter-
minée en étudiant la dif-
fraction de rayons X par
un cristal de nickel :
d = 91,0 pm .
Les plans réticulaires ayant des dimensions très grandes devant λ, ils diffractent
les électrons dans une direction très proche de celle prévue par les lois de Descartes
de la réflexion. On note θ l’angle (non orienté) entre le faisceau incident d’électrons et
les plans réticulaires (l’angle d’incidence avec la normale aux plans est donc
i = π / 2 − θ ). D’un plan réticulaire au suivant, les ondes réfléchies sont déphasées. On

808
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 809

obtient δ = 2d cos i = 2d sin θ pour la différence de marche en utilisant le théorème de


Malus. De même que pour les réseaux de N >> 1 fentes, l’intensité diffractée par les
nombreux plans réticulaires parallèles entre eux présente un pic très fin autour des
directions telles que δ = nλ , avec n ∈ N , soit 2d sin θ = nλ (loi de Bragg).
En faisant tourner le cristal autour d’un axe, Davisson et Germer ont obtenu
pour U = 54,0 V un pic d’intensité dans la direction α = 2i = 50,0° . Ils en ont déduit la
valeur 2d cos i = 165 pm , ce qui correspond, pour n = 1, à un rayonnement de lon-
gueur d’onde 165 pm , en accord avec la longueur d’onde de de Broglie d’un électron
accéléré sous 54,0 V : λ = 167 pm .

Cette expérience a donc montré que le faisceau d’électrons se comportait


comme une onde lumineuse. L’hypothèse de de Broglie d’un comportement ondula-
toire de la matière était vérifiée.
On remarque que les effets quantiques sont plus prononcés quand la longueur
d’onde de de Broglie est grande, donc pour des particules de faible masse, et lentes.
Une applica-
tion très importante
de l’aspect ondula-
toire d’un faisceau
électronique est la
microscopie électro-
nique. Le pouvoir de
résolution d’un microscope est limité par la diffraction, donc par la longueur d’onde
utilisée (en utilisant le critère de Rayleigh, on montre qu’on ne peut distinguer deux
1,22λ
points objets que si leur distance est supérieure à d = , où n est l’indice du
2n sin u
milieu où se trouve l’objet et u l’angle maximal que font les rayons incidents avec l’axe
optique du système). En microscopie optique, l’ouverture numérique O.N = n sin u est
de l’ordre de 1, λmin = 400 nm et donc d ≃ 200 nm . En microscopie électronique,
avec un faisceau d’électrons accélérés sous 100 kV, on obtient une longueur d’onde
de de Broglie de l’ordre de 4 pm. L’ouverture numérique est de l’ordre de 0,01 ( n = 1
mais le faisceau incident diverge peu) : on a une résolution théorique de 250 pm !

809
810 Partie VII.  Physique des ondes

2. FONCTION D’ONDE ET INÉGALITÉS DE


HEISENBERG
2.1 La fonction d’onde et son interprétation probabiliste
Après la publication de la thèse de de Broglie, Schrödinger conçut en 1925 une
équation d’onde pour une particule. Nous aborderons cette équation dans le prochain
chapitre, mais signalons dès maintenant une de ses propriétés fondamentales : l’équa-
tion de Schrödinger est linéaire.
G
Schrödinger introduisit un champ scalaire ψ(r , t ) ∈ C , appelé fonction d’onde,
G →
décrivant l’état à l’instant t d’une particule repérée par son vecteur position r = OM
dans le référentiel d’étude.
Born donna dès 1926 une interprétation probabiliste de la fonction d’onde :

La probabilité de trouver à l’instant t la particule dans un volume élémentaire d3V


G G G 2
autour de M est d3 P = ψ(r , t ) ⋅ ψ∗ (r , t )d3V = ψ(r , t ) d3V .

Il y a une rupture avec le déterminisme classique. Par exemple, dans l’expé-


rience de Compton, il est impossible de savoir dans quelle direction un photon donné
va être diffusé par un électron, même si tous les paramètres expérimentaux sont par-
faitement connus. La mécanique quantique est fondamentalement probabiliste.
En mécanique classique, il arrive qu’on fasse appel à des lois de probabilités,
comme pour la théorie cinétique des gaz, mais c’est parce qu’il est difficile de connaître
la position et la vitesse d’un très grand nombre de particules. La détermination de la
position d’une particule dans un champ de force donné est théoriquement possible à
tout instant si les conditions initiales (vecteur position, vecteur vitesse) sont connues.
Une telle approche heurta à l’époque certains physiciens comme Einstein
(« Dieu ne joue pas aux dés ») et Schrödinger.
G 2
L’interprétation probabiliste entraîne que 
ψ(r , t ) d3V = 1 puisqu’on est
espace

sûr de trouver la particule dans tout l’espace. On dit que la fonction d’onde, également
appelée amplitude de probabilité, doit être normée.
G G 2
À trois dimensions, ρ(r , t ) = ψ(r , t ) , appelée densité (volumique) de probabi-
G
lité, est homogène à l’inverse d’une longueur au cube, donc  ψ(r , t )  = L−3/2 .

2
À une dimension, ψ( x, t ) dx est la probabilité de trouver la particule entre
+∞
2
l’abscisse x et l’abscisse x + dx , et  ψ( x, t ) dx = 1. On a  ψ( x, t )  = L−1/2 .
x =−∞

810
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 811

2.2 Inégalités de Heisenberg


Relation position - impulsion
Heisenberg énonça son « principe d’indétermination » en 1927. Bien que par-
faitement démontrable, les propriétés en question restent souvent appelées « principe
d’indétermination », ou « principe d’incertitude ». On peut les appeler plus justement
« relations d’incertitude de Heisenberg » ou encore « inégalités de Heisenberg ».
On peut, à l’aide de la fonction d’onde ψ( x, t ) , calculer les valeurs moyennes
+∞ +∞
2 2
x =  x ψ( x, t ) dx de la position de la particule et x 2 =  x 2 ψ( x, t ) dx de
x =−∞ x =−∞

2 2
son carré, puis l’écart-type sur la position ∆x = x − x .

On peut aussi, comme on le verra, calculer à l’aide de ψ( x, t ) l’amplitude de



probabilité ψɶ ( px , t ) : la probabilité que l’impulsion selon ex se trouve entre px et
2
ɶ ( px , t ) dpx .
px + dpx est ψ
+∞
2
On peut alors calculer les valeurs moyennes px =  px ψɶ ( px , t ) dpx et
px =−∞
+∞
2 2
px 2 =  px 2 ψɶ ( px , t ) dpx , puis l’écart-type sur l’impulsion ∆px = p x 2 − px .
px =−∞

On montre (voir le chapitre « Analyse de Fourier ») que le produit de ces deux



écarts-types est lié par l’inégalité ∆x ⋅ ∆px ≥ (inégalité de Heisenberg).
2
ℏ ℏ
On a bien sûr ∆y ⋅ ∆py ≥
et ∆z ⋅ ∆pz ≥ sur les deux autres axes d’un sys-
2 2
tème d’axes orthogonaux. Les grandeurs x et px sont des grandeurs conjuguées,
ainsi que y et py , et que z et pz .
En revanche, x et py , par exemple, ne sont pas des grandeurs conjuguées et
aucune inégalité ne relie leurs écarts-types.

Pour un mouvement sur un seul axe Ox, on peut noter p = px pour simplifier.
Pour comprendre la signification physique de cette inégalité, supposons qu’à
2 2
ɶ ( p, t ) . Pour cela, un grand nombre
l’instant t on étudie les distributions ψ( x, t ) et ψ
de particules identiques sont préparées dans le même état. On mesure à la date t la
position pour la moitié de ces particules, l’impulsion pour l’autre moitié. Pour une par-
ticule classique, il existe des incertitudes de mesure, et on observe une variabilité de
la mesure qui donne par exemple pour la position un résultat x0 avec un écart-type

811
812 Partie VII.  Physique des ondes

u( x ) dû au capteur, au protocole expérimental… Pour une particule quantique, même


en imaginant une mesure idéale pour laquelle u( x ) → 0 , les mesures de x pour les
différentes particules donnent à la date t un résultat différent car la position de la par-
ticule est une variable aléatoire d’écart-type ∆x (t ) indépendant des incertitudes de
mesure. Ces résultats se répartissent autour d’une valeur moyenne x (t ) .
Supposons u( x ) << ∆x (t ) et u( p ) << ∆p(t ) , on obtient des densités de probabi-
lité en position et impulsion comme ci-dessous :

Le produit des écarts-types ∆x (t ) ⋅ ∆p(t ) étant borné inférieurement, un faible


écart-type sur la position entraîne un grand écart-type sur l’impulsion et vice versa.
∆x ⋅ ∆p ≥ ℏ / 2 est une propriété intrinsèque au système : les distributions de position
et de quantité de mouvement présentent cette dispersion en dehors de toute mesure.
Relation temps - énergie
� 2
Lorsque ψ(r , t ) varie effectivement dans le temps, la particule n’est pas dans
un état stationnaire, et sa probabilité de présence en un point varie avec une durée
caractéristique τ. Cette durée peut faire l’objet d’une définition précise à l’aide d’un
écart-type (cf. « Analyse de Fourier »), ainsi que l’écart-type ∆ω sur la pulsation de la
fonction d’onde en un point, et on montre que τ ⋅ ∆ω ≥ 1/ 2 . L’énergie E = ℏω de la par-
ticule n’est pas alors parfaitement définie ; ses fluctuations statistiques sont caractéri-
sées par l’écart-type ∆E tel que :


τ ⋅ ∆E ≥ , inégalité de Heisenberg reliant la durée caractéristique de l’évolution de la
2
particule et l’écart-type sur son énergie.

Ordres de grandeur
Les écarts-types ∆x , ∆px , ∆E et τ sont définis rigoureusement, mais souvent
on ne s’intéresse qu’à des ordres de grandeur d’une durée caractéristique, de l’indé-
termination sur une position, une quantité de mouvement, une énergie… Si on connaît
l’ordre de grandeur d’une de ses quantités, on peut en déduire celui de la quantité
conjuguée en utilisant des égalités au lieu d’inégalités de Heisenberg, et en prenant

812
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 813

par exemple la constante de Planck h dans le membre de droite au lieu de ℏ / 2 .


∆px h 1 λ
Ainsi, on peut écrire ∆x ⋅ ∆px ≃ h  ≃ = . Un problème sera du
px px ∆x ∆x
∆px
ressort de la mécanique classique si << 1, donc si la longueur d’onde de de Bro-
px
h
glie λ = est très inférieure à l’indétermination ∆x sur la position de la particule.
px
∆E h 1 T
On peut également écrire τ ⋅ ∆E ≃ h  ≃ = . Un problème sera du res-
E Eτ τ
∆E 1 h
sort de la mécanique classique si << 1 donc si la période T = = est très infé-
E ν E
rieure à la durée caractéristique de l’évolution de la particule.
Dans le cas où ces inégalités fortes ne sont pas vérifiées, il est nécessaire de
faire appel à la mécanique quantique.

On peut aussi calculer une action A (produit temps × énergie ou produit lon-
gueur × impulsion) caractéristique de la particule. Si A >> h , la particule est clas-
sique, et sinon elle est quantique.

Par exemple, pour un dispositif qui génère une onde électromagnétique de puis-
sance P à la fréquence ν, l’énergie caractéristique est E = P ⋅ T = P / ν , délivrée pen-
dant la période T = 1/ ν , et le temps caractéristique, cette période T. L’action caracté-
A
ristique est A = E ⋅ T = E / ν . Le problème relève de la Physique classique si >> 1,
h
E
donc si N = >> 1 , or N est le nombre de photons émis par période. Le comporte-

ment quantique n’intervient dans l’expérience des fentes d’Young éclairées par une
lumière monochromatique que si on envoie les photons « un par un ».

2.3 Expérience fondamentale des fentes d’Young


L’expérience des fentes d’Young a été décrite dans le cours d’optique ondula-
toire. Elle s’interprète parfaitement en invoquant l’aspect ondulatoire de la lumière.
En 1961, Jönsson l’a réalisée
avec un faisceau d’électrons : on re-
trouve bien la même figure de diffrac-
tion à l’infini que pour une onde lumi-
neuse dans le cas d’une fente simple,
et les mêmes franges d’interférences
dans le cas d’une fente double. Les caractéristiques de ces figures (largeur de la tache
centrale de diffraction, interfrange) sont celles prédites par la théorie en utilisant la
longueur d’onde de de Broglie. La dualité onde-corpuscule de de Broglie est bien vé-
rifiée.

813
814 Partie VII.  Physique des ondes

Mais que se passe-t-il si l’on envoie les particules une par une sur une double
fente ? Cette expérience est longtemps restée une expérience de pensée, mais elle a
été réalisée en 1976 par Merli et al. puis en 1989 par Tonomura et al. (avec des élec-
trons et un biprisme électrostatique), en 2007 par Vincent Jacques (avec des photons
et un biprisme de Fresnel au lieu d’une double fente), puis en 2013 par Bach et al.
(avec des électrons et une double fente).
Décrivons l’expérience de Bach et al. Des électrons sont émis par un filament
de tungstène chauffé, accélérés sous une différence de potentiel U = 600 V , puis fo-
calisés à l’aide de lentilles électrostatiques afin d’obtenir un faisceau parallèle qui
passe à travers une large fente utilisée comme source du dispositif. Un système de
deux fentes parallèles à la fente source est placé à 30,5 cm de cette dernière. Un
détecteur dont l’ouverture est constituée par une fente de 5 µm de largeur est placé à
une distance D = 240 mm de la double fente. Il peut être déplacé orthogonalement
aux fentes afin de scanner la figure de diffraction selon l’axe Ox.

Un masque placé derrière la double fente peut être positionné afin d’occulter la
fente F1 , la fente F2 , ou les deux.
Les résultats sont con-
formes aux prédictions de la
mécanique quantique : en pré-
sence des deux fentes, l’inten-
sité sur l’axe Ox varie de façon
périodique. L’interfrange expé-
rimental ∆x = 44 µm corres-
λD
pond à la valeur théorique
a
obtenue dans le cours d’op-
tique, où λ est la longueur
d’onde de de Broglie.

814
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 815

Comme les électrons sont accélérés sous une tension U, ils acquièrent une
p2 h2 h
énergie cinétique Ec = = = eU  λ = = 50 pm . On obtient bien
2m 2mλ 2 2meU
∆x = 44 µm .
Si l’une des fentes est occultée, les interférences disparaissent ; on n’observe
que la figure de diffraction. Le faisceau d’électrons se comporte donc comme un fais-
ceau lumineux et possède bien un aspect ondulatoire.
Cette expérience permet également d’envoyer les électrons un par un et d’ob-
server leur impact sur un écran phosphorescent. En présence des deux fentes, on
vérifie bien que les impacts se font de manière aléatoire, mais que peu à peu se forme
la figure d’interférences : les électrons possèdent également un aspect corpusculaire.

On arrive maintenant à faire interférer non seulement des pho-


tons, des électrons, mais aussi des particules de plus en plus mas-
sives : fullerènes C60 , molécules organiques encore plus lourdes…
Les résultats des expériences sont toujours les mêmes :
— On a bien des impacts sur l’écran (aspect corpusculaire) mais ces
impacts sont aléatoires.
— Si on place un détecteur au niveau de la fente F1 , qui est alors occultée, on constate
que 50% des particules sont détectées, donc 50% des particules passent par F1 et
50% par F2 . Cependant, dans ce cas, il n’y a plus de franges d’interférences (les par-
ticules arrivent en tout point de la tache centrale, alors qu’elles n’arrivaient plus au
niveau des franges noires lorsque les deux fentes étaient ouvertes). La particule qui
passe par une fente se comporte différemment selon que l’autre fente est ouverte ou
non. D’autres expériences ont montré que c’était toujours le cas, même si on ne fermait
plus une fente, mais que l’on cherchait juste à savoir quelle fente la particule emprunte
(par exemple, dans le cas de particules massives, en les éclairant de façon à ce
qu’elles diffusent des photons vers un détecteur) : à chaque fois les franges d’interfé-
rences disparaissent.
Comment interpréter ces expériences ?
— Les particules quantiques ont un comportement aléatoire. Préparées dans les
mêmes conditions, les particules heurtent l’écran en des points différents. On ne peut
pas prédire la position du point d’impact. Contrairement à la mécanique classique qui
est déterministe, la mécanique quantique est probabiliste, et on doit renoncer à la no-
tion de trajectoire.

815
816 Partie VII.  Physique des ondes

— On peut en revanche calculer la probabilité que l’impact se fasse sur une surface
2
d2 S = dxdy autour du point M ( x, y ) : d2 P ∝ ψ( x, t ) d2 S . La probabilité ne dépend
ici que de x car la fente source et les fentes diffractantes sont très étirées selon la
G
direction ey . Lorsqu’on a envoyé un grand nombre N de particules, l’intensité sur
2
l’écran (énergie reçue par unité de surface) d2I ( x, t ) ∝ N ⋅ ψ( x, t ) d2 S est proportion-
nelle au nombre d’impact autour de M. Comme ψ( x, t ) est calculable en résolvant
l’équation de Schrödinger, on peut prévoir le comportement moyen d’un grand nombre
de particules (c’est-à-dire calculer l’intensité sur l’écran).
— Si on note ψ1( x, t ) la fonction d’onde quand seule la fente F1 est ouverte, ψ 2 ( x, t )
quand seule F2 est ouverte, la fonction d’onde lorsque les deux fentes sont ouvertes
s’écrit ψ( x, t ) = C [ ψ1( x, t ) + ψ 2 ( x, t )] , en vertu de la linéarité de l’équation de Schrödin-
ger (la constante C permet de normaliser la fonction d’onde ψ).
La densité de probabilité de présence de la particule autour du point M est donc
2 2
proportionnelle à ψ ⋅ ψ∗ ∝ (ψ1 + ψ 2 ) ⋅ (ψ1∗ + ψ 2∗ ) ∝ ψ1 + ψ 2 + ψ1ψ 2∗ + ψ 2 ⋅ ψ1∗ si les

terme d'interférences
deux fentes sont ouvertes. Ce n’est donc pas la somme des densités de probabilité de
trouver la particule en M quand seule F1 est ouverte et quand seule F2 est ouverte.
Par exemple, pour une seule fente, la probabilité de présence d’une particule est non
nulle en tout point de la tache centrale de diffraction, alors qu’elle s’annule au niveau
des franges noires lorsque les deux fentes sont ouvertes.

Le système se comporte donc comme une onde qui traverse les deux fentes à
la fois (le système est dans la superposition de deux états : « la particule passe par
F1 » et « la particule passe par F2 »), mais comme une particule lorsqu’on cherche à
la détecter lors de son passage par une fente (le système n’est alors plus que dans un
seul des états précédents), ou sur un écran. C’est la dualité onde-particule, ou onde-
corpuscule.

816
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 817

2.4 Conséquences des inégalités de Heisenberg


Diffraction par une seule fente
Considérons l’expérience de diffraction de particules par une fente dont la lar-
geur a est grande devant la longueur d’onde de de Broglie λ. Les particules qui arrivent
sur l’écran sont passées par la fente, ce qui permet de connaître leur abscisse au
moment de leur passage par le plan contenant la fente. Cette « mesure » (présence
de la fente) modifie la fonction d’onde, et désormais la densité de probabilité de trouver
 a a
la particule est nulle si x ∉  − ,  : l’écart-type sur la position de la particule
 2 2
lorsqu’elle traverse la fente est ∆x ≃ a .
Quelle est l’impulsion de la particule à cet instant ?
h
Elle vaut en norme p = mais le petit angle α qu’elle fait
λ
avec la normale au plan de la fente est aléatoire, ainsi que
la composante px = p ⋅ sin α ≃ pα de l’impulsion.
h
En ordre de grandeur, ∆x ⋅ ∆px ≃ h , d’où a ⋅ ∆α ≃ h . La répartition angulaire
λ
λ
des particules diffractées est caractérisée par ∆α = . On retrouve en ordre de gran-
a
λ
deur la demi-largeur angulaire θ = de la tache centrale de diffraction où l’on trouve
a
la plus grande partie des particules diffractées.
Les relations de Heisenberg rendent donc compte du phénomène de diffraction.
Plus on ouvre la fente, plus l’écart-type sur x est grand, plus le faisceau diffracté se
contracte angulairement et donc plus l’écart-type sur px devient faible.

817
818 Partie VII.  Physique des ondes

Diffraction par deux fentes


Einstein n’acceptait pas l’idée que l’on ne pouvait pas savoir par quelle fente
passe une particule sans détruire la figure d’interférence. Il proposa donc une expé-
rience de pensée où l’on détectait la fente traversée sans occulter une des fentes.
Pour cela, l’écran est mobile sans frottement selon l’axe OX et les particules sont en-
voyées une par une (ce qui ne sera réalisé expérimentalement qu’après la mort d’Eins-
tein).
La conservation de la quantité de mouvement du système {particule, écran}
isolé implique que lorsqu’une particule heurte l’écran en un point M, la quantité de
mouvement de l’écran passe de px à p′x1 = px + px1 après absorption d’une particule
qui est passée par F1 , ou de px à p′x 2 = px + px 2 après absorption d’une particule qui
est passée par F2 .
On pourra connaître la fente traversée en mesurant l’impulsion de l’écran avec
un écart-type ∆px sur px inférieur à l’écart δpx = p′x 2 − p′x1 = px 2 − px1 .

Les centres des deux fentes sont distants de a ; l’abscisse de F1 est a / 2 , celle
de F2 est −a / 2 , et celle de M est X. Si on note D la distance entre les fentes et l’écran,
où D >> X et D >> a (interférences à l’infini), on peut aisément calculer les angles
α1 et α 2 que font avec la normale au plan des fentes les vecteurs impulsion des par-
ticules respectivement passées par F1 et F2 :
a a
X− X+
α1 ≃ tan α1 = 2 et α ≃ tan α = 2 . On en déduit :
2 2
D D
pa
δpx = px 2 − px1 ≃ p( α 2 − α1) = .
D
pa
La mesure de cette différence avec un écart-type ∆px < δpx = implique
D
d’après l’inégalité de Heisenberg que l’écart-type ∆X sur la position de l’écran est su-
h hD λD
périeur à une longueur de l’ordre de = = .
δpx pa a

818
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 819

λD
Comme l’interfrange est égal à , tout se passe comme si on prenait une
a
photographie floue des franges en les déplaçant d’une distance de l’ordre de l’inter-
frange pendant la pose : les franges sont brouillées.
L’expérience proposée par Einstein conforte la vision quantique : le phénomène
d’interférences disparaît quand on cherche à savoir quelle fente a été traversée.

Énergie minimale d’un oscillateur harmonique


En mécanique classique, un oscillateur harmonique à une dimension peut par
exemple être réalisé à l’aide d’un ressort horizontal de raideur K et de longueur à vide
ℓ 0 attaché en son extrémité O à un support fixe, et à son autre extrémité à un mobile
de masse m qui se déplace sans frottement sur l’axe Ox.

� �
Le ressort exerce sur le mobile la force de rappel F = −Kxex où ℓ est la longueur
du ressort et x = ℓ − ℓ 0 son élongation algébrique du ressort. Le poids du mobile étant
compensé par la réaction normale du support, le P.F.D appliqué au mobile dans le
référentiel du support supposé galiléen fournit xɺɺ + ω02 x = 0 dont les solutions sont de
la forme x = x0 cos(ω0t + ϕ)  px = mxɺ = −mω0 x0 sin(ω0t + ϕ) .
K
La pulsation de cet oscillateur harmonique est ω0 = et sa fréquence est
m
1 K
ν= .
2π m
On peut calculer les valeurs moyennes temporelles pour un oscillateur donné :
x0 2 m2ω02 x02 mKx02
x = 0 , x2 = , px = 0 et px 2 = = = mK x 2 .
2 2 2
Du point de vue énergétique, la seule force qui travaille est la force conservative
� → 1
  1 1
F = − grad  Kx 2  , donc l’énergie du mobile E = mv 2 + Kx 2 est constante, ce que
2  2 2

px 2 1 2 px 2 1
l’on peut écrire E = + Kx = Cte . En moyenne E = E = + K x 2 , or on
2m 2 2m 2
px 2 1 E
a = K x2 = (l’énergie moyenne est équirépartie entre énergie cinétique et
2m 2 2

819
820 Partie VII.  Physique des ondes

potentielle). L’énergie de l’oscillateur harmonique classique peut ainsi prendre n’im-


porte quelle valeur E ≥ 0 . On peut notamment envisager l’état d’équilibre ( x = 0 ,
px = 0 ) d’énergie nulle.
Conservons ce modèle classique mais en introduisant l’inégalité de Heisenberg.
Si on effectue en grand nombre de mesures sur des particules d’énergie E, on peut
admettre que les grandeurs moyennes observées sont les mêmes que les grandeurs
moyennes temporelles pour une particule donnée.
On a donc :
2 E 2
∆x = x2 − x = et ∆px = px 2 − px = mE .
� K �
0 0

h h K hν
L’inégalité de Heisenberg ∆x ⋅ ∆px ≥ implique E ≥ = = Emin . Une
4π 4π m 2
énergie nulle n’est plus possible : l’oscillateur ne peut pas être au repos.
Ce modèle semi-classique est bien sûr insuffisant, mais il permet de montrer
que l’oscillateur harmonique quantique de fréquence ν possède une énergie minimale
de l’ordre de hν . En résolvant l’équation de Schrödinger, on prouve que l’énergie est
 1
quantifiée : elle prend les valeurs discrètes En =  n +  hν avec n ∈ N . En l’occur-
 2

rence, la valeur minimale trouvée Emin = est, de façon fortuite, correcte !
2

Énergie minimale de l’atome d’hydrogène


Reprenons la même démarche pour l’atome d’hydrogène dans le modèle clas-
sique où l’électron d’énergie E décrit un mouvement circulaire uniforme de rayon r et
de vitesse angulaire ω0 autour du proton placé en O.

L’étude effectuée au 1.4 donne :


k 1k 1k e2
ω0 = , et E = − ≤0⇔r =− , avec k = .
mr 3 2r 2E 4πε0
On obtient x = r cos(ω0t + ϕ)  px = mxɺ = −mω0 r sin(ω0t + ϕ) en projetant sur
l’axe Ox du plan de la trajectoire, d’où :
r2 k2 2 m2ω02r 2 mk
x = 0 , x2 = = , p x = 0 et px = = = −mE .
2 8E 2 2 2r

820
Chapitre 7.  Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique 821

k2
On obtient finalement x 2 = ( ∆x )2 = et px 2 = ( ∆px )2 = −mE .
8E 2
En introduisant l’inégalité de Heisenberg sur ce modèle classique, et en suppo-
sant que les grandeurs moyennes observées sur un grand nombre de particules
d’énergie E sont les mêmes que les grandeurs moyennes temporelles pour une parti-
h h2 mk 2 h2
cule donnée, on a ∆x ⋅ ∆px ≥ ⇔ ( ∆x )2 ⋅ ( ∆px )2 ≥ ⇔ − ≥ .
4π 16π2 8E 16π2
2π2mk 2 me 4
Comme E ≤ 0 , on en déduit E ≥ − 2
=− = Emin .
h 8ε0 2 h 2
Alors que dans la théorie classique, l’électron, en rayonnant, perd de l’énergie
et vient s’écraser sur le proton ( r → 0  E → −∞ ), l’inégalité de Heisenberg donne
une borne inférieure à l’énergie et explique la stabilité des atomes !
La résolution de l’équation de Schrödinger montre qu’il y a quantification de
me 4
l’énergie : E = En = − avec n ∈ N∗ . Le modèle semi-classique donne ici, de
8 ε0 2 h 2 n 2
me 4
façon fortuite, la bonne valeur Emin = E1 = − !
8ε02h2

Énergie minimale d’une particule dans un puits de potentiel infini


En mécanique classique, une particule de masse
m en mouvement selon Ox dans un puits de potentiel
infini de largeur a, centré en x = 0 , subit uniquement
des forces (infinies) lors des chocs élastiques en
a
x = ± , et possède donc un mouvement rectiligne uni-
2
G
forme de vitesse v 0 , le vecteur vitesse ± v 0ex étant in-
versé entre deux chocs.
px 2
Son énergie E = Ec = se conserve et peut prendre n’importe quelle valeur
2m
E ≥ 0 . On peut notamment envisager l’état de repos ( x = Cte , px = 0 ) d’énergie nulle.
En introduisant de nouveau l’inégalité de Heisenberg dans ce modèle classique,
on obtient :
a2
x = 0 , x2 = (on a une densité de probabilité uniforme de trouver la particule
12
a a a
entre − et ), px = 0 et px 2 = 2mE . On a donc ∆x = et ∆px = 2mE .
2 2 2 3
h h2
L’inégalité de Heisenberg ∆x ⋅ ∆px ≥ ⇔ ( ∆x )2 ⋅ ( ∆px )2 ≥ implique :
4π 16π2

821
822 Partie VII.  Physique des ondes

3h 2
E≥ = Emin . Une énergie nulle n’est plus possible : la particule ne peut pas
8π2ma 2
être au repos.
La résolution de l’équation de Schrödinger sera effectuée dans le prochain cha-
h2
pitre et donne les valeurs exactes que peut prendre l’énergie : En = n 2 , avec
8ma 2
n ∈ N∗ . La valeur minimale trouvée par le modèle classique diffère cette fois-ci de la
 h2 
valeur exacte, mais donne le bon ordre de grandeur : Emin = O  .
 ma 2 
 
On constate que si l’on veut confiner une particule, c’est-à-dire la maintenir dans
une petite zone de l’espace, c’est-à-dire que l’écart-type sur la position, ∆x = O(a ) , soit
petit, cela implique un grand écart-type ∆px sur l’impulsion, donc une grande énergie
( Emin , appelée énergie de confinement, varie en 1/ a2 ).

822
823

[PHYSIQUE DES ONDES 8]

APPROCHE ONDULATOIRE DE
LA MÉCANIQUE QUANTIQUE
1. L’ÉQUATION DE SCHRÖDINGER / PAQUET
D’ONDES
1.1 L’équation de Schrödinger
Schrödinger recherchait l’équation régissant la fonction d’onde ψ( x, t ) associée
à la particule en mouvement sur l’axe Ox. Elle devait aboutir aux relations postulées
h h h 2π
par de Broglie : p = = k = ℏk et E = hν = ω = ℏω , où k = et ω = 2πν sont
λ 2π 2π λ
respectivement le nombre d’onde et la pulsation de l’onde.
Pour une particule libre (qui n’est soumise à aucune interaction), non relativiste,
1 p2
l’énergie totale est l’énergie cinétique : E = Ec = mv 2 , avec p = mv , soit E = ,
2 2m
( ℏk )2
relation qui peut s’écrire ℏω = .
2m
On reconnaît une relation de dispersion entre k et ω, pour une O.P.P.H écrite
sous la forme ψ( x, t ) = ψ0e i ( ωt − kx ) (une telle onde s’appelle « onde de de Broglie »).
Le terme en ℏω correspond à une dérivée première par rapport au temps, le terme en
(ℏk )2
à une dérivée seconde par rapport à la variable d’espace x. Plus exactement,
2m
∂ψ ∂2 ψ ( ℏk )2
= i ωψ et = −k 2 ψ , si bien que ℏω = est la relation de dispersion asso-
∂t ∂x 2 2m
2
∂ψ ℏ2 ∂ψ ℏ2 ∂ ψ
ciée à l’équation d’onde −i ℏ = k2 ψ , soit i ℏ = .
∂t 2m ∂t 2m ∂x 2
∂ψ ∂2 ψ
Cette équation d’onde ressemble à l’équation de diffusion , mais =a
∂x 2 ∂t
possède une particularité étonnante : elle fait intervenir le nombre complexe « i ».
∂ψ ∂ 2ψ
Alors que le passage en complexe de l’équation de diffusion = a 2 qui
∂t ∂x
régit la grandeur réelle ψ = Re( ψ ) est simplement une technique mathématique

823
824 Partie VII.  Physique des ondes

2
∂ψ ℏ2 ∂ ψ
permettant d’alléger les calculs, l’équation i ℏ = ne possède pas de ver-
∂t 2m ∂x 2
sion réelle.
La grandeur ψ( x, t ) = ψ0e i ( ωt − kx ) est intrinsèquement complexe, et on la note

sans la barre : ψ( x, t ) = ψ0ei ( ωt − kx ) .


L’équation d’onde est en conséquent modifiée selon que l’on choisisse d’écrire
ψ( x, t ) = ψ0ei ( ωt − kx ) , ou ψ( x, t ) = ψ0e −i (ωt − kx ) , ce qui ne serait pas le cas si elle régis-
sait une grandeur réelle ψ( x, t ) = ψ 0 cos(ωt − kx ) = ψ 0 cos( kx − ωt ) .

Schrödinger a fait le choix (que nous adopterons par la suite) d’écrire la fonction
d’onde d’une O.P.P.H associée à la particule sous la forme ψ( x, t ) = ψ0ei ( kx −ωt ) .

Cela modifie le signe de la dérivée première temporelle, et l’équation d’onde


∂ψ ℏ2 ∂ 2 ψ
pour une particule libre s’écrit alors sous la forme i ℏ =− .
∂t 2m ∂x 2
Plus généralement, lorsqu’une particule est soumise à des interactions conser-
vatives, son énergie totale est la somme de l’énergie cinétique et de l’énergie poten-

tielle, simplement appelée « potentiel », et notée V (r ) .

À trois dimensions, l’équation régissant ψ(r , t ) postulée par Schrödinger s’écrit
∂ψ ℏ2 �
iℏ =− ∆ψ + V (r ) ⋅ ψ .
∂t 2m
� �
Dans le cas d’une onde plane ψ( x, t ) = ψ0ei ( k ⋅r −ωt ) , elle aboutit bien à la relation

E = Ec + V ( r , t ) .

Le programme limite l’étude au cas où la particule se déplace sur un axe dans


un champ d’énergie potentielle V ( x ) , simplement appelée « potentiel » V ( x ) .
La fonction d’onde ψ( x, t ) est une grandeur complexe régie par l’équation de
∂ψ ℏ2 ∂ 2 ψ
Schrödinger i ℏ =− + V ( x ) ⋅ ψ , établie en 1925.
∂t 2m ∂x 2
L’équation de Schrödinger est linéaire.
Une O.P.P.H ψ = ψ0ei ( kx −ωt ) est solution de l’équation de Schrödinger, et la re-
lation entre k, ω et V(x) s’écrit E = Ec + V ( x ) : elle traduit la partition de l’énergie totale
de la particule en son énergie cinétique et son énergie potentielle V.

∂ 2ψ
L’équation de Schrödinger fait intervenir le laplacien de ψ ( ∆ψ =à une di-
∂x 2
mension), soit des dérivées secondes par rapport aux variables. Par conséquent :

824
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 825

— x ֏ ψ( x, t ) est toujours une fonction continue.


∂ψ
— x֏ ( x, t ) est également une fonction continue, sauf pour des valeurs de x telles
∂x
que le potentiel V soit infini.

Les mécanismes de propagation d’ondes rencontrés jusque-là faisaient interve-


nir deux grandeurs réelles couplées (par exemple p1 et v pour une onde acoustique).

Si on écrit la fonction d’onde sous la forme ψ( x, t ) = κ( x, t ) + i ξ( x, t ) avec ( κ, ξ) ∈ R 2 , on


obtient en prenant la partie réelle et la partie imaginaire de l’équation de Schrödinger :
∂ξ( x, t ) ℏ2 ∂ 2 κ( x, t ) ∂κ( x, t ) ℏ2 ∂ 2ξ( x, t )
−ℏ =− + V ( x ) ⋅ κ( x , t ) et ℏ = − + V ( x ) ⋅ ξ( x, t ) .
∂t 2m ∂x 2 ∂t 2m ∂x 2
Les deux grandeurs couplées sont ici la partie réelle et la partie imaginaire de la fonc-
tion d’onde.

1.2 Paquet d’ondes libre / Évolution temporelle


O.P.P.H solution de l’équation de Schrödinger
Pour une particule qui n’est soumise à aucune interaction, on peut prendre
∂ψ ℏ2 ∂ 2 ψ
V ( x ) = 0 . L’équation de Schrödinger s’écrit i ℏ =− , et on en connaît une
∂t 2m ∂x 2
p E 
i x− t 
solution : l’O.P.P.H ψ( x, t ) = ψ0e i ( kx −ωt )
= ψ0 e  ℏ ℏ , où l’impulsion p et l’énergie E
p2
sont parfaitement déterminées, et liées par la relation E = :
2m
p p2 
i x− t
i ( kx −ωt )  ℏ 2mℏ 
ψ( x, t ) = ψ 0e = ψ0 e .
2 2
Pour une telle solution, ψ = ψ0 est indépendante de x : la probabilité de
trouver la particule est la même tout le long de l’axe des x, ce qui est cohérent avec

l’inégalité de Heisenberg ∆x ⋅ ∆p ≥ . En effet, l’impulsion étant parfaitement détermi-
2
née, son écart-type est nul (pas « d’indétermination »), et donc l’écart-type de la posi-
tion est infini : la particule est complètement délocalisée.
+∞
2
La condition de normalisation  ψ( x, t ) dx = 1 ne peut pas être vérifiée car
x =−∞
l’intégrale ne converge pas (on dit que la fonction ψ n’est pas de carré sommable).
Cette solution de l’équation de Schrödinger n’est pas une grandeur physiquement ré-
alisable. Nous avions déjà remarqué cela en physique des ondes : une O.P.P.H n’a ni
début ni fin, et l’énergie qu’elle contient est infinie.

825
826 Partie VII.  Physique des ondes

Paquet d’ondes
La linéarité de l’équation de Schrödinger permet d’en chercher une solution
p p2 
i  j x − j t 
aj
ℏ 2 mℏ 
sous la forme d’une somme d’ondes planes : e est solution de l’équa-
j

tion de Schrödinger. Cette fois-ci, il n’y a pas qu’une seule valeur d’impulsion pour la
particule, mais un ensemble discret p j . { }
Une solution plus physique de l’équation de Schrödinger s’écrit sous la forme
d’une somme d’O.P.P.H dont le spectre en impulsion est continu :
+∞ p p2 
i x−
mℏ 
t
1 ℏ 2
ψ( x, t ) =
2πℏ  a( p )e  dp .
p =−∞
+∞ i
1 px
Initialement ψ( x, t = 0) =
2πℏ  a( p )e ℏ dp , donc a( p ) est la transformée
p =−∞
+∞ i
1 − px
ɶ ( p, t = 0) =
de Fourier (T.F) de ψ( x, t = 0) : a( p ) = ψ
2πℏ  ψ( x, t = 0)e ℏ dx . Le
x =−∞
1
choix du facteur dans la définition de la T.F permet d’obtenir des expressions
2πℏ
« symétriques » de la T.F et de la T.F inverse et présente peu d’importance.

+∞ p p2 
i x−
ℏ 2mℏ 
t
1
On parle pour ψ( x, t ) =
2πℏ  a( p )e  dp de paquet d’ondes libre
p =−∞
(constitué d’un continuum d’impulsions p). Contrairement à une O.P.P.H, le paquet
d’ondes peut être de carré sommable et constituer une solution physique de l’équation
de Schrödinger.
+∞ i
1 − px
ɶ ( p, t ) =
On montre que ψ
2πℏ  ψ( x, t )e ℏ dx , transformée de Fourier de
x =−∞
ψ( x, t ) , est l’amplitude de probabilité de trouver à la date t l’impulsion entre p et
2
ɶ ( p, t ) dp .
p + dp : cette probabilité vaut ψ

Évolution temporelle d’un paquet d’ondes libre / dispersion


+∞ ip 2 ip +∞ ip
1 − t x 1 x
Comme ψ( x, t ) =
2πℏ  a( p )e 2m ℏ e ℏ dp =
aussi 2πℏ  ψɶ ( p, t )e ℏ dp , on
p =−∞ p =−∞
p2 iEt
−i t 2 2 −
ɶ ( p, t ) = ψɶ ( p, t = 0)e 2mℏ = ψɶ ( p, t = 0)e ℏ  ψɶ ( p, t ) = ψɶ ( p, t = 0) :
en déduit que ψ

826
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 827

Pour une particule libre, la densité de probabilité pour l’impulsion est indépendante du
temps, et donc également l’écart-type ∆p . C’est la version quantique de la conserva-
tion de l’impulsion (quantité de mouvement) d’une particule isolée.

p2 ℏk 2
La relation de dispersion ω = , qui provient de E =
pour une particule
2m 2m
libre, est non-linéaire, ce qui traduit un phénomène de dispersion. L’O.P.P.H :
p p2  p p  p
i x−
mℏ  ( x −v ϕt )
t  i x− t
ℏ 2 2m  i
a( p )e  = a( p)e ℏ  = a( p)e ℏ se propage avec la vitesse de
ω ℏk p
phase v ϕ = = = qui dépend du nombre d’onde (ou de l’impulsion p = ℏk ).
k 2m 2m

La vitesse de phase ne possède pas plus de sens physique qu’une O.P.P.H.


En revanche, un paquet d’ondes étroit (de largeur spectrale dp autour de p) est réali-
dω ℏk p
sable, et se propage à la vitesse de groupe v g = = = =v .
dk m m

La vitesse de groupe d’un paquet d’ondes libre est égale à la vitesse « clas-
sique » d’une particule.

On retrouve bien les résultats de la mécanique classique lorsqu’à la fois l’écart-


type de l’impulsion (paquet d’ondes étroit) et celui de la position sont négligeables
devant les incertitudes de mesure.
D’autre part, la dispersion est responsable de l’étalement d’un paquet d’ondes
libre. Si p2 > p1 > 0 , v ϕ ( p2 ) > v ϕ ( p1) > 0 : les composantes de plus grande impulsion
se propagent plus vite.

Cas du paquet d’ondes gaussien


Nous allons ici nous contenter de donner les résultats concernant l’évolution
d’un paquet d’ondes gaussien dans le vide (particule libre) : les calculs de T.F, assez
lourds, ne sont pas détaillés ici, et les constantes de normalisation ne sont pas expli-
citées.
À t = 0 , le spectre d’impulsion est gaussien, centré sur une valeur p0 = mv 0 :
( p − p0 )2 ( p − p0 )2
− −
4( ∆p )2 2 2 2( ∆p )2
ɶ ( p, t = 0) = Ae
ψ ɶ ( p, t = 0) = A e
, on a alors ψ , où ∆p est l’écart-type
de l’impulsion, qui est, comme on l’a vu, indépendant du temps.
L’amplitude de probabilité de position supposée centrée en x = 0 est initiale-
+∞ ip ( ∆ p )2 x 2 ip0 x
1 x −
ment : ψ( x, t = 0) =
2πℏ  ψɶ ( p, t = 0)e ℏ dp = Be ℏ2 e ℏ (la transformée de
p =−∞
Fourier d’une gaussienne est également une gaussienne).

827
828 Partie VII.  Physique des ondes

x2
2( ∆p )2 x 2 −
2 2

ℏ 2 2 2[ ∆x ( t = 0)]
2

Comme ψ( x, t = 0) = B e = B e , on a ∆x(t = 0) ⋅ ∆p = :
aussi2
l’inégalité de Heisenberg devient une égalité pour une fonction d’onde gaussienne.
On peut maintenant exprimer la fonction d’onde à l’instant t :
+∞ p p2  +∞ ( p − p0 )2  p p2 
i x−
ℏ 2mℏ 
i x−
ℏ 2mℏ 
t t
1 A −
 
 4( ∆p )2 
ψ( x, t ) = ψɶ ( p, t = 0)e dp = e e dp .
2πℏ p =−∞
2πℏ p =−∞
( p − p0 )2 ip2
− − t
4( ∆p )2
ɶ ( p, t ) = Ae
La fonction d’onde ψ ⋅ e 2mℏ n’est plus une gaussienne, donc

ψ( x, t ) non plus, et la relation de Heisenberg devient une inégalité ∆x(t ≠ 0) ⋅ ∆p > .
2
En revanche, les densités restent gaussiennes, et le calcul donne :
2
 p 
2( ∆p )2  x − 0 t   p0 
2

−  m  x− m t 
( ∆p )4 2 −  
ℏ +4 2 t ℏ 4( ∆p )4
2 2
2 2[ ∆x (t )]
ψ( x, t ) ∝ e m = e  ∆x (t ) ⋅ ∆p = 1+ 2 2
t 2 . L’écart-type
aussi 2 ℏm
4
4( ∆p )
sur la position ∆x(t ) = ∆x(t = 0) ⋅ 1 + t 2 augmente : la particule tend à se délo-
ℏ2m 2
caliser (elle l’est totalement pour
t → ∞ car alors ∆x → ∞ ).
∆p est une constante. Plus
∆p est grand, plus la particule est lo-
calisée initialement, mais plus le pa-
quet d’onde va s’étaler rapidement.
D’autre part, comme l’impul-
sion moyenne p0 est non nulle, le
paquet d’onde est centré sur la va-
p
leur moyenne x (t ) = 0 t = v 0t , et
m
se déplace comme une particule
libre à vitesse constante v 0 , tout en
s’étalant.
p2
L’énergie d’une O.P.P.H vaut E = . Celle du paquet d’onde n’est pas parfai-
2m

p02 + ( ∆p )2 p2 p
2
+ ( ∆p )2
tement définie ; sa valeur moyenne est E = . = =
2m 2m 2m
Si on regarde maintenant le comportement du paquet d’onde depuis t → −∞ ,
on constate qu’il se contracte d’abord avant de s’étaler : sa « largeur » ∆x (t ) est mini-
male à l’instant t = 0 . Le phénomène est analogue à la contraction d’un faisceau laser

828
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 829

gaussien paraxial qui se déplace selon l’axe Oz. Si I (r , z ) est l’intensité de l’onde en
2r 2

w 2(z)
un point à une distance r de Oz, le waist w(z), défini par I (r , z ) = I0 ( z ) e , passe
2
par un minimum en z = 0 lors de la propagation : w ( z ) = w 0 1 + ( z / zR ) . Les parti-
cules libres sont ici des photons.

1.3 Complément : paquet d’ondes dans un potentiel V(x) quelconque


Amplitude de probabilité pour l’impulsion
On peut toujours décomposer une fonction d’onde ψ( x, t ) solution de l’équation
+∞ i
1 px
de Schrödinger sous la forme ψ( x, t ) =
2πℏ  ψɶ ( p, t )e ℏ dp , où l’amplitude de pro-
p =−∞
+∞ i
1 − px
ɶ ( p, t ) =
babilité ψ
2πℏ  ψ( x, t )e ℏ dx est la transformée de Fourier de ψ( x, t ) .
x =−∞
Le théorème de Parseval-Plancherel (hors-programme, cf. Analyse de Fourier,
2.4) établit que si ψɶ ( p ) est la transformée de Fourier de ψ( x ) , on a :
+∞ +∞
2 2
 ψ( x ) dx =  ψɶ ( p) dp . La fonction d’onde ψ( x, t ) étant normée à chaque ins-
x =−∞ p =−∞
+∞ +∞
2 2
tant, c’est donc aussi le cas de ψɶ ( p, t ) :  ψ( x, t ) dx =  ψɶ ( p, t ) dp = 1 à
x =−∞ p =−∞
chaque instant. ψɶ ( p, t ) est donc normée.
C’est une des propriétés qui permettent d’établir que ψɶ ( p, t ) est l’amplitude de
probabilité que la particule possède une impulsion comprise entre p et p + dp .

Retour sur les relations d’indétermination de Heisenberg


On peut donc, à l’aide de la fonction d’onde ψ( x, t ) et de sa transformée de
+∞
2
Fourier ψɶ ( p, t ) , calculer les valeurs moyennes de la position x =  x ψ ( x, t ) d x
x =−∞
+∞
2
de la position de la particule, p =  p ψɶ ( p, t ) dp de son impulsion, ainsi que les
p =−∞

2 2
écarts-types ∆x = x2 − x et ∆p = p2 − p .


L’inégalité de Heisenberg ∆x ⋅ ∆p ≥découle simplement d’une propriété gé-
2
nérale des transformées de Fourier (hors-programme, cf. Analyse de Fourier, 2.4).

829
830 Partie VII.  Physique des ondes

1.4 Courant de probabilité


2
Notons ρ = ψ( x, t ) = ψ( x, t ) ⋅ ψ∗ ( x, t ) la densité de probabilité de présence de la
particule à l’abscisse x et à l’instant t.
∂ψ ℏ2 ∂ 2 ψ
L’équation de Schrödinger s’écrit i ℏ =− + V ( x ) ⋅ ψ (1) , et on obtient
∂t 2m ∂x 2
∂ψ∗ ℏ2 ∂ 2ψ ∗
en prenant son conjugué : −i ℏ =− + V ( x ) ⋅ ψ∗ (2) .
∂t 2m ∂x 2
En effectuant ψ∗ (1) − ψ(2) on obtient :
 ∂ψ∗ ∂ψ  ℏ 2  ∗ ∂ 2ψ ∂ 2 ψ∗ 
i ℏ ψ ⋅ + ψ∗ ⋅ =− ψ ⋅ 2 − ψ ⋅  . On peut écrire cette relation sous la
 ∂t ∂t  2m  ∂x ∂x 2 

∂( ψ ⋅ ψ ∗ ) i ℏ  ∗ ∂ 2 ψ ∂ 2 ψ∗  ∗ ∂ψ ∂ψ∗
forme +  −ψ ⋅ 2 + ψ ⋅  = 0 . Posons Ψ = −ψ ⋅ + ψ ⋅ . On a
∂t 2m  ∂x ∂x 2  ∂x ∂x

∂Ψ ∂ 2ψ ∂ψ∗ ∂ψ ∂ψ ∂ψ∗ ∂ 2 ψ∗
= −ψ∗ ⋅ 2 − ⋅ + ⋅ +ψ⋅ .
∂x ∂x ∂�
∂x ���� ∂x ∂�
x����� x ∂x 2
0
∂ρ i ℏ ∂Ψ
La relation s’écrit finalement + = 0.
∂t 2m ∂x

∂ρ ∂J x
L’équation de Schrödinger implique + = 0 . On reconnaît le bilan à une
∂t ∂x
dimension d’une grandeur extensive conservative (on a alors [ρ] = L−1 et donc

iℏ  ∂ψ∗ ∂ψ 
[ J x ] = T −1 ). On a J x = 2m ψ ⋅ − ψ∗ ⋅  (cette expression, hors-programme, n’a
 ∂x ∂x 
pas à être mémorisée).

La grandeur est ici la probabilité de présence de la particule. Cette grandeur est


x2
conservative. Si la probabilité P [ x , x ] (t ) =
1 2  ρ( x,t )dx de trouver la particule entre x1 et
x1

x2 est plus faible à t + dt qu’à t, c’est qu’elle est plus grande sur les autres intervalles
de positions possibles. Il y a donc des transferts de probabilité que l’on calcule à l’aide
� �
du vecteur courant de probabilité J = J x ( x, t )ex :

δP = J x ( x, t )dt est le transfert de probabilité à l’abscisse x entre t et t + dt .

ψ( x, t ) = ψ0ei ( kx −ωt )


Dans le cas particulier d’une O.P.P.H,  , et on a :
∗ ∗ − i ( kx −ωt )
ψ ( x, t ) = ψ0 e

830
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 831

iℏ ℏk 2 p 2 2 p
J x = −2ik ψ 0 ⋅ ψ 0∗ = ψ0 = ψ0 = ψ .
2m m m m

Pour une onde de de Broglie d’impulsion p parfaitement définie, le vecteur cou-


� �
2 p
rant de probabilité prend la forme J = ψ .
m
� 2 � � �
Dans ce cas, on a aussi J = ψ v = ρv , où v est la vitesse de la particule. On
peut faire l’analogie avec l’équation locale de conservation de la charge, ou de la
∂ρ ∂(ρv )
masse, qui prennent toutes deux, à une dimension, la forme + = 0.
∂t ∂x

2. SOLUTIONS STATIONNAIRES DE L’ÉQUATION


DE SCHRÖDINGER
2.1 États stationnaires à une dimension
Recherchons des solutions ψ( x, t ) de l’équation de Schrödinger sous la forme
ψ( x, t ) = ϕ( x ) ⋅ g (t ) , les trois fonctions ψ , ϕ et g étant complexes.
∂ψ ℏ2 ∂ 2 ψ
En injectant dans i ℏ =− + V ( x ) ⋅ ψ , on obtient :
∂t 2m ∂x 2
ℏ2 ′′
i ℏϕ( x ) ⋅ g ′(t ) = − ϕ ( x ) ⋅ g (t ) + V ( x ) ⋅ ϕ( x ) ⋅ g (t ) .
2m
g ′(t ) ℏ2 ϕ′′( x )
En divisant par ϕ( x ) ⋅ g (t ) , l’équation devient i ℏ =− + V ( x ) , ce qui
g (t ) 2m ϕ( x )
���� � �������� �
G( t ) F(x)

g ′(t )
implique i ℏ = Cte = a + ib , avec (a, b ) ∈ R 2 , la constante étant a priori complexe.
g (t )
i b
− at t
On en déduit g (t ) = g0e ℏ ⋅eℏ .
2
— Si b > 0 , g (t ) → ∞ donc la densité de probabilité ψ( x, t ) → ∞ sur tout intervalle
t →∞ t →∞
où ϕ( x ) ≠ 0 , ce qui ne constitue pas une solution physique.
2
— Si b < 0 , g (t ) → 0 donc la densité de probabilité ψ( x, t ) → 0 ∀x , ce qui ne
t →∞ t →∞
constitue pas non plus une solution physique.
i
− at
En conclusion : b = 0 et ψ( x, t ) = ϕ( x )e ℏ = ϕ( x )e − i ωt avec ω ∈ R (on peut in-
tégrer la constante g0 dans ϕ( x ) , la fonction ϕ restant à déterminer).
La solution cherchée correspond à une pulsation ω parfaitement déterminée,

831
832 Partie VII.  Physique des ondes

donc à une énergie E = a = ℏω parfaitement déterminée.


p E 
 i x− t 
Remarquons que l’O.P.P.H ψ( x, t ) = ψ0e i ( kx −ωt ) = ψ 0e  ℏ ℏ  est un cas parti-
culier d’onde stationnaire.

Les solutions stationnaires ψ( x, t ) = ϕ( x ) ⋅ g (t ) de l’équation de Schrödinger à


E
−i t
une dimension s’écrivent ψ( x, t ) = ϕ( x ) e ℏ , et correspondent à une énergie E parfai-
tement déterminée. ϕ( x ) est la partie spatiale de la fonction d’onde.
2 2
Comme ψ( x, t ) = ϕ( x ) , la densité de probabilité de présence de la particule
E
−i t
est indépendante du temps et c’est en cela que les solutions ψ( x, t ) = ϕ( x ) e ℏ cor-
respondent à un état stationnaire de la particule.

Il ne s’agit pas pour autant forcément d’une d’onde stationnaire. Pour une telle
onde, s( x, t ) = f ( x ) ⋅ g (t ) où la grandeur s est réelle, ce qui n’est pas le cas de ψ.
Comme la constante a s’identifie à l’énergie de la particule, la partie spatiale de
ℏ2 ϕ′′( x )
la fonction d’onde est régie par − + V (x) = E .
2m ϕ( x )

2m
ϕ( x ) est régie par ϕ′′( x ) + [E − V ( x )] ϕ( x ) = 0 (qu’on appelle équation de
ℏ2
Schrödinger indépendante du temps). Comme ϕ( x ) est la partie spatiale de la fonction
d’onde, ce doit être une fonction continue de x.

Remarquons que l’énergie étant parfaitement définie dans un état stationnaire,



on a ∆E = 0 , donc d’après l’inégalité de Heisenberg τ ⋅ ∆E ≥ , on retrouve τ → ∞ :
2
le système n’évolue pas dans le temps.

2.2 Combinaison linéaire de solutions stationnaires

La forme la plus générale des solutions de l’équation de Schrödinger (linéaire)


∞ En
−i

t
est une combinaison linéaire de solutions stationnaires : ψ( x, t ) = α n ϕn ( x ) e ℏ ,
n =1
avec α n ∈ C . Une telle combinaison n’est pas stationnaire : la densité de probabilité
évolue dans le temps.
En E n′
−i t −i t
Vérifions-le dans le cas où ψ( x, t ) = α n ϕn ( x ) e ℏ + α n ′ ϕn ′ ( x ) e ℏ , c’est-à-
dire le cas où ψ( x, t ) est une combinaison de deux états stationnaires. On a alors :

832
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 833

 − i n n′ t 
(E −E )
2 2 2 2 2
ψ( x, t ) = α n ϕ n ( x ) + α n′ ϕn′ ( x ) + 2Re α n α n′∗ ϕn ( x ) ϕn′∗ ( x ) e ℏ .
 ��������� 
 f (t ) 
h
La densité de probabilité évolue dans le temps avec une période T = ,
E n − E n′
en supposant En > En′ . Cette durée caractéristique est liée à l’indétermination de
l’énergie dont l’ordre de grandeur est donné par T ⋅ ∆E ≃ h  ∆E ≃ En − En′ .
On montre en effet qu’une mesure de l’énergie de la particule ne peut donner
que l’une ou l’autre des valeurs En ou En′ , avec une probabilité liée aux coefficients
α n et α n′ .

2.3 Orbitales atomiques


Les succès de l’équation de Schrödinger furent immédiats. Dès janvier 1926,
Schrödinger publie ses résultats concernant la résolution de son équation dans le cas
E
� � −i t
de l’atome d’hydrogène. Les fonctions d’onde ψ(r , t ) = ϕ(r )e ℏ de l’électron de
l’atome H dans un état stationnaire vérifient l’équation de Schrödinger à 3D :
∂ψ ℏ2 � � e2
iℏ =− ∆ψ + V (r ) ⋅ ψ , où V (r ) = − est le potentiel coulombien créé par le
∂t 2m 4πε0 r
proton.

La partie spatiale ϕ(r ) de la fonction d’onde est donc régie par :
ℏ2 e2
− ∆ϕ − ⋅ ϕ = E ⋅ ϕ . Elle est appelée orbitale atomique (O.A).
2m 4πε0r
Les solutions font intervenir trois nombres quantiques :
— n ∈ N∗ (nombre quantique principal) ;
— ℓ ∈ �0, n − 1� (nombre quantique secondaire ou azimutal) ;
— m ∈ � −ℓ, +ℓ � (nombre quantique magnétique).
Elles s’écrivent, à l’aide de coordonnées sphériques centrées sur le proton,
sous la forme ϕn,ℓ,m ( r , θ, ϕ) = Rn,ℓ ( r )Yℓ,m ( θ, ϕ) .
L’énergie de l’atome H ne dépend que de n et prend les valeurs trouvées par
me 4 E1
Bohr : En = − 2 2 2
=− avec E1 = −13,6 eV . Une couche électronique est ca-
8ε 0 h n n2
ractérisée par une valeur de n, et donc d’énergie donnée.
À chaque valeur du nombre quantique ℓ on fait correspondre une lettre : s pour

ℓ = 0 , p pour ℓ = 1 , d pour ℓ = 2 , f pour ℓ = 3 , g pour ℓ = 4 ,… Un couple (n,ℓ) définit


une sous-couche. Il y a n sous-couches dans la couche de nombre quantique n.

833
834 Partie VII.  Physique des ondes

Un triplet (n,ℓ,m) définit donc une orbitale atomique. Il y a 2ℓ + 1 O.A dans une

sous-couche de nombre quantique ℓ.


Enfin, on trouve dans une couche de nombre quantique n un nombre d’O.A :
n −1 n −1 n −1
 (2ℓ + 1) = 2  ℓ + 
1 = n2 .
ℓ =0 ℓ�
=0 ℓ�
=0
n ( n −1)/2 n

Donnons quelques O.A :


 − 
r
2 1
— 1s = ϕ1,0,0 =  e a0  , où a0 est le rayon de Bohr.
 a3  4π
 0 
 r 
1  r  − 2a0  1
— 2s = ϕ2,0,0 =   2 −  e .
 2a 3  a0   4π
 0 
 r 
 1 r − 2a0  3
— 2p z = ϕ2,1,0 = e cos θ .
 2 6a 3 a0  4π
 0 
Les fonctions d’onde ϕ2,1,−1 et ϕ2,1,+1 étant complexes, on préfère les remplacer
par des combinaisons linéaires réelles a ϕ2,1,−1 + b ϕ2,1,+1 (également solutions de
l’équation de Schrödinger, puisque cette dernière est linéaire, et associées à la même
valeur de l’énergie). Ces orbitales atomiques sont notées 2p x et 2p y ; elles ne sont
plus directement associées à une valeur de m :
 r   r 
 1 r − 2a0  3  1 r − 2a0  3
2p x = e sin θ cos ϕ 2p y = e sin θ sin ϕ .
 2 6a 3 a0  4π  2 6a 3 a0  4π
 0   0 
On a représenté ci-dessous des surfaces d’iso-densité de probabilité de pré-
sence de l’électron de quelques O.A, ainsi que le signe de ϕ(r , θ, ϕ) qui joue un rôle
important pour construire des orbitales moléculaires à partir de combinaisons linéaires
d’orbitales atomiques, ces orbitales décrivant cette fois le comportement d’un électron
dans une molécule.

834
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 835

3. ÉTATS STATIONNAIRES DANS UN POTENTIEL


UNIFORME PAR MORCEAUX
3.1 Propriétés des solutions stationnaires pour une particule dans un poten-
tiel uniforme par morceaux

Solutions sur un intervalle où V(x) = V0.


2m
La partie spatiale de la fonction d’onde vérifie ϕ′′( x ) + [E − V0 ] ϕ( x ) = 0 . Deux
ℏ2
cas présentent :
2m
— E > V0 , alors on pose K = 2 [E − V0 ] , et les solutions de ϕ′′( x ) + K 2ϕ( x ) = 0 sont

de la forme ϕ( x ) = A cos(Kx ) + B sin(Kx ) , ou ϕ( x ) = A′e iKx + B′e −iKx .
2m
— E < V0 , alors on pose k = [V0 − E ] , et les solutions de ϕ′′( x ) − k 2ϕ( x ) = 0 sont
ℏ2
de la forme ϕ( x ) = A ch(kx ) + B sh(kx ) , ou ϕ( x ) = A′e kx + B′e − kx .

Étude de la continuité de ϕ′
Nous savons que ϕ est une fonction continue de x. Posons-nous la question de
la continuité de sa dérivée en x = x0 . Nous prendrons x0 = 0 sans nuire à la généra-
lité de la démarche.
— Supposons d’abord que le
potentiel subisse une disconti-
nuité finie en x = 0 . Intégrons
2m
ϕ′′( x ) + 2 [E − V ( x )] ϕ( x ) = 0

entre x = −ε et x = +ε :
ε
2m
ϕ′(ε ) − ϕ′( −ε ) +
ℏ2  [E − V ( x )] ϕ( x ) = 0 , or ϕ est finie, ainsi que le potentiel, par hypo-
−ε
ε
thèse. On a donc lim
ε→0  [E − V ( x )] ϕ( x ) = 0 , ce qui assure la continuité de ϕ′ en x = 0 :
−ε

ϕ′(0+ ) = ϕ′(0 − ) .

Dans le cas d’une discontinuité finie du potentiel en x = 0 , on a continuité en ce


point de la dérivée de la partie spatiale de la fonction d’onde : ϕ′(0+ ) = ϕ′(0− ) = ϕ′(0) .

— En revanche, dans le cas d’une discontinuité infinie de potentiel en x = 0 , il n’y a


plus continuité de ϕ′ en ce point. C’est le cas représenté sur la figure précédente où

835
836 Partie VII.  Physique des ondes

V ( x ) = V0 → +∞ pour x > 0 . On a nécessairement E < V0 dans le domaine x > 0 , et


2m
donc ϕ( x ) = A′e kx + B′e − kx , avec k = [V0 − E ] → +∞ . La solution A′e kx , infinie
ℏ2
pour x > 0 , est à écarter, et, comme k → +∞ , la fonction restante B′e −kx s’annule
pour tout x > 0 , donc ϕ( x ) = 0 pour x > 0 .
Comme ϕ est continue, on en déduit ϕ(0 − ) = ϕ(0 + ) = ϕ(0) = 0 .

Dans le cas d’une barrière infinie du potentiel en x = 0 , on n’a plus continuité


en ce point de ϕ′ . En revanche, ϕ(0) = 0 (la densité de probabilité de présence est
nulle en x = 0 ).

Cas où V est une fonction paire


2m
Si ϕ1 est solution de ϕ′′( x ) + [E − V ( x )] ϕ( x ) = 0 , on obtient alors, en chan-
ℏ2
2m
geant x en − x , et puisque V ( − x ) = V ( x ) : ϕ1′′( − x ) + [E − V ( x )] ϕ1( − x ) = 0 .
ℏ2
Soit ϕ2 telle que ϕ2 ( x ) = ϕ1( − x ) ∀x , on a ϕ′2 ( x ) = −ϕ1′ ( − x ) et ϕ′′2 ( x ) = ϕ1′′( − x ) ,
donc ϕ2 vérifie également l’équation de Schrödinger indépendante du temps. Cette
équation admet donc des solutions « symétriques » (paires) :
ϕ ( x ) + ϕ1( − x )
x ֏ ϕs ( x ) = 1 , et des solutions « antisymétriques » (impaires) :
2
ϕ ( x ) − ϕ1( − x )
x ֏ ϕa ( x ) = 1 , et une solution quelconque s’écrit ϕ1( x ) = ϕs ( x ) + ϕa ( x ) .
2

Dans le cas d’un potentiel pair, on peut rechercher des solutions symétriques
ϕs et antisymétriques ϕa de l’équation de Schrödinger indépendante du temps. Une
solution quelconque s’exprime sous la forme d’une combinaison linéaire de solutions
symétriques et antisymétriques.

3.2 Marche de potentiel


Pour x < 0 , V ( x ) = 0 , et pour x > 0 ,
V ( x ) = V0 > 0 .

Cas où 0 < E < V0


Nous nous limitons ici au cas d’une
particule provenant de x = −∞ avec une
énergie 0 < E < V0 , cas pour lequel la méca-
nique classique interdit à la particule de pé-
nétrer dans la zone x > 0 .

836
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 837

Les solutions sont alors de la forme :


2m
— ϕ1( x ) = A1eiKx + B1e −iKx pour x < 0 (zone 1), avec K = E.
ℏ2
2m
— ϕ2 ( x ) = A2 ekx + B2e − kx pour x > 0 (zone 2), avec k = (V0 − E ) ( A2 doit être
� ℏ2
0
nul pour que la solution ne diverge pas pour x → +∞ ).
E E
i (Kx − t ) i ( −Kx − t)
ψ1i ( x, t ) = A1 e ℏ correspond à l’O.P.P.H incidente, ψ1r ( x, t ) = B1 e ℏ

à l’O.P.P.H réfléchie en x = 0 .
iE
− t
Du côté x > 0 , la fonction d’onde s’écrit ψ 2t ( x, t ) = B2 e − kx e ℏ , et ne corres-
pond pas à une O.P.P.H.
Les conditions aux limites (continuité de ϕ et ϕ′ en 0) impliquent :
 B1 k + iK
 A1 + B1 = B2  =
k iK  A1 iK − k
  .
 1
iKA − iKB1 = − kB2 1 1  B2 = 2iK
 A1 iK − k
Nous avons montré que, pour une O.P.P.H, le vecteur densité de courant de
� �
2 p p2
probabilité prend la forme J = ψ . Comme l’énergie E = associée aux ondes
m 2m
incidente et réfléchie dans la zone 1 est la même, ces deux O.P.P.H ont même impul-
� 2
2
Jr ψ B
sion p1 = 2mE en norme. Le rapport R = � = 1r 2 = 1 = 1 est le coefficient de
Ji ψ A1
1i

réflexion de probabilité. Ce coefficient est égal à un : toutes les particules incidentes


sont réfléchies, mais après avoir pénétré dans la zone 2 puisque la densité de proba-
2
bilité ψ 2t ( x, t ) = B2 2e −2kx n’y est pas nulle. Ce résultat est bien sûr différent du ré-
sultat classique.
Remarquons que l’expression (hors-programme) du vecteur courant de proba-
bilité pour une fonction d’onde quelconque permet de montrer qu’il est bien nul dans
2
� iℏ  ∂ψ ∗ ∗ ∂ψ
� i ℏ B2 e −2kx � �
la zone 2 : J t = ψ 2t ⋅ 2t − ψ 2t ⋅ 2t  ex = [ − k + k ] ex = 0 .
2m  ∂x ∂x  2m
Bien que la partie réelle de la fonction d’onde ne corresponde pas à une gran-
deur physique, on peut la représenter (voir la figure suivante) à différents instants, par
analogie avec les phénomènes vibratoires classiques (corde vibrante, onde acous-
tique…). Dans la zone 2, l’onde est stationnaire (au sens classique), et analogue à
l’onde évanescente dans un plasma quand ω < ωp (on retrouve d’ailleurs la même pro-
priété : l’onde incidente est totalement réfléchie). Dans la zone 1, il y a deux ondes de
même amplitude qui se propagent dans les deux directions opposées, et l’onde

837
838 Partie VII.  Physique des ondes

résultante est stationnaire (au sens classique : on trouve des nœuds où la densité de
probabilité, également représentée, est nulle, et des ventres où elle est maximale).

Cas où E > V0
Pour une particule provenant de x = −∞ avec une énergie E > V0 , la méca-
nique classique prévoit un passage dans la zone x > 0 avec une diminution de l’éner-
gie cinétique. Qu’en est-il de la mécanique quantique ?
Les solutions sont alors de la forme :
2m
— ϕ1( x ) = A1eiKx + B1e −iKx pour x < 0 (zone 1), avec K = E.
ℏ2
2m
— ϕ2 ( x ) = A2eikx + B2 e −ikx pour x > 0 (zone 2), avec k = (E − V0 ) . B2 est nul
� ℏ2
0
E
i ( − kx − t)
car la solution B2 e ℏ correspond à une O.P.P.H se propageant dans le sens
des x décroissants, or une fois transmise dans la zone x > 0 , la particule n’est plus
réfléchie.
E E
i (Kx − t ) i ( −Kx − t)
ψ1i ( x, t ) = A1 e ℏ correspond à l’O.P.P.H incidente, ψ1r ( x, t ) = B1 e ℏ

E
i ( kx − t )
à l’O.P.P.H réfléchie en x = 0 , et ψ 2t ( x, t ) = A2 e ℏ à l’O.P.P.H transmise en
x = 0.
Les conditions aux limites (continuité de ϕ et ϕ′ en 0) impliquent :

838
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 839

 B1 K − k
 =
 A1 + B1 = A2 ik iK  A1 K + k
  .
iKA1 − iKB1 = ikA2 −1 1  A2 = 2K
 A1 K + k

p2
L’énergie E = + V ( x ) associée aux ondes incidente et transmise est la
2m
même, mais pas l’impulsion, qui est p1 = 2mE = h / λ1 en norme dans la zone 1 et
p2 = 2m(E − V0 ) = h / λ 2 < p1 dans la zone 2.
G
2 2
Jr ψ K −k 
Le coefficient de réflexion de probabilité est R = G = 1r 2 =   , celui
Ji ψ1i K +k 
G 2
Jt 2 2
ψ p  2K  p2  2K  k 4Kk
de transmission est T = G = 2t 2 2 =   =   = 2
.
Ji ψ1i p1  K + k  p1  K + k  K (K + k )
On a bien sûr R + T = 1 : la particule est soit réfléchie, soit transmise. En utili-
4 E (E − V0 )
sant les expressions de k et K, on obtient T = .
2 E (E − V0 ) + 2E − V0
Contrairement au cas classique, le
coefficient de transmission T n’est pas
égal à 1. Il augmente de T = 0 pour
E = V0 à T = 1 pour E >> V0 . On l’a repré-
E
senté ci-contre en fonction de dans
V0
les cas classique et quantique.
La partie réelle de la fonction
d’onde est représentée à différents ins-
tants sur la figure précédente, ainsi que la
densité de probabilité.
Dans la zone 2, l’onde est une O.P.P.H de longueur d’onde λ 2 car cette zone
est semi-infinie. L’enveloppe de cette onde est constituée de deux droites horizontales
et la densité de probabilité est uniforme. Comme on l’a déjà remarqué, cette dernière
n’est alors pas de carré sommable, et il faudrait construire un paquet d’ondes pour
obtenir une solution physique.
Dans la zone 1, il y a deux ondes de longueur d’onde λ1 < λ 2 d’amplitudes dif-
férentes qui se propagent dans les deux directions opposées et interfèrent. L’onde
résultante n’est ni stationnaire (au sens classique), ni progressive (l’enveloppe de ces
ondes présente des maximums : « ventres » où la densité de probabilité est maximale,
et des minimums non nuls que l’on peut appeler « nœuds » et où elle est minimale).

839
840 Partie VII.  Physique des ondes

3.3 Puits de potentiel infini

 a a
Pour x ∈/  − ,  , V ( x ) = V0 → +∞ (la fonction
 2 2
d’onde est donc nulle dans ce domaine). Pour
 a a
x ∈  − ,  , V ( x ) = 0 : la particule est confinée dans
 2 2
cet intervalle dans lequel ϕ( x ) vérifie :
2mE
ϕ′′( x ) + ϕ( x ) = 0 .
ℏ2
Les solutions sont de la forme :
2mE
ϕ( x ) = A cos(Kx ) + B sin(Kx ) avec K = . Puisqu’il y a deux barrières infinies, les
ℏ2
 a
conditions aux limites ne portent que sur ϕ et pas sur sa dérivée, et sont ϕ  ±  = 0 .
 2
On peut distinguer deux types de solutions :
— Les solutions symétriques (paires : B = 0 ). La C.A.L impose alors :
a  Ka  Ka π π
ϕ   = A cos   =0 = (2q + 1) ⇔ K = (2q + 1) , q ∈ N .
2  2  2 2 a
— Les solutions antisymétriques (impaires : A = 0 ). La C.A.L impose alors :
a  Ka  Ka π
ϕ   = B sin   =0 = ℓπ ⇔ K = 2ℓ , ℓ ∈ N∗ .
2  2  2 a
π
Finalement, K peut prendre toutes les valeurs K = n , n ∈ N∗ , avec n impair
a
pour les solutions symétrique et n pair pour les solutions antisymétriques. L’énergie
2mE π π2 ℏ2 2 h
2
est donc quantifiée : K = =n  E = n2 = n .
ℏ2 a 2ma 2 8ma2
p2
Puisque l’énergie E = Ec + V0 = est parfaitement déterminée dans un état
� 2m
0

stationnaire, la quantité de mouvement p = ± 2mE l’est également, au signe près.


Les solutions trouvées ici sont des combinaisons linéaires de deux O.P.P.H se propa-
2mE E 2mE E
� � i

x −i t −i x −i t
geant selon ex et −ex : ψ( x, t ) = αe e ℏ + βe ℏ e ℏ . En écrivant les
conditions aux limites sur ψ, on retrouve bien sûr les solutions précédentes.
La remarque précédente permet de retrouver, sans résoudre l’équation de
Schrödinger, les valeurs permises de l’énergie : la quantité de mouvement ne prend
h h
que deux valeurs p = ± 2mE = ± où λ = est la longueur d’onde de de Bro-
λ 2mE
glie. La partie spatiale de la fonction d’onde est une fonction λ-périodique de x, or elle

840
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 841

a a
s’annule en ± . Il y a donc, comme pour la corde de Melde attachée en ± , un
2 2
λ λ h
nombre entier de entre ces deux valeurs : a = n = n . On retrouve bien :
2 2 2 2mE
h2
E = En = n 2 . Cette énergie varie en n 2 donc les écarts entre niveaux d’énergie
8ma2
ne sont pas constants.
Comme on l’a vu au chapitre précédent en utilisant l’inégalité de Heisenberg,
h2
l’énergie minimale Emin = E1 = n’est pas nulle. Elle varie en 1/ a2 , donc plus on
8ma 2
cherche à confiner la particule, plus il faut lui fournir d’énergie. Comme elle varie en
1/ m , on se rapproche des résultats de la mécanique classique (niveaux d’énergie
h
continus, énergie minimale nulle) pour les grandes valeurs de m, soit si λ = << a .
mv

Dans un puits infini de longueur a, les états stationnaires sont des états liés (la
particule ne peut pas quitter le puits) caractérisés par un nombre quantique n ∈ N∗ .
h2 π2 ℏ 2
Leur énergie est quantifiée : E = En = n 2 2
= n2 2
, avec n ∈ N∗ .
8ma 2ma

Les constantes intervenant dans les fonctions d’onde s’obtiennent en normali-


a/2
sant : pour ϕ( x ) = A cos(Kx ) ou ϕ( x ) = B sin(Kx ) , on doit avoir  ϕ2 ( x )dx = 1 or,
−a /2
π π a
comme K = n , la période de ϕ2 est = , donc l’intégrale porte sur un nombre
a K n

841
842 Partie VII.  Physique des ondes

a /2 a/2
a 2
entier de périodes. On a  cos2 (Kx )dx =  sin2 (Kx )dx =
2
, d’où A = B =
a
.
−a /2 −a /2

Les états stationnaires symétriques s’écrivent :


En En
2  nπ  −i t −i t
ψs ( x, t ) = cos  x e ℏ = ϕs ( x ) e ℏ , avec n = 2q + 1, q ∈ N (n impair).
a  a 
Les états stationnaires antisymétriques s’écrivent :
En En
2  nπ  − i t −i t
ψa ( x, t ) = sin  x e ℏ = ϕa ( x ) e ℏ , avec n = 2ℓ, ℓ ∈ N∗ (n pair).
a  a 

3.4 Puits de potentiel fini

 a a
Pour x ∈
/  − ,  , V ( x ) = V0 > 0 , et pour
 2 2
 a a
x ∈ − ,  , V (x) = 0 .
 2 2

Cas où 0 < E < V0 : états liés


Les solutions sont de la forme :
−Kx a
— ϕ( x ) = A′eKx + B
�′ e pour x < − ( B ′ doit être nul pour que la solution ne diverge
0 2
2m
pas pour x → −∞ ), avec K = [V0 − E ] .
ℏ2
2mE  a a
— ϕ( x ) = A cos(kx ) + B sin(kx ) avec k = 2
pour x ∈  − ,  .
ℏ  2 2
a
A′ eKx + B′e −Kx
— ϕ( x ) = � pour x > ( A′ doit être nul pour que la solution ne diverge
0 2
pas pour x → +∞ ).
a
Les conditions aux limites sont (continuité de ϕ et ϕ′ en ± ):
2
a a
−K
2  a  a −K  a  a
— A′e = A cos  k  − B sin  k  et A′Ke 2 = Ak sin  k  + Bk cos  k  .
 2  2  2  2
a a
−K
2  a  a −K  a  a
— B′e = A cos  k  + B sin  k  et −B′Ke 2 = − Ak sin  k  + Bk cos  k  .
 2  2  2  2
Comme pour le puits infini, on peut rechercher des solutions symétriques
(paires) pour lesquelles B ′ = A′ et B = 0 , et des solutions antisymétriques (impaires)
pour lesquelles on a B ′ = − A′ et A = 0 .

842
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 843

On obtient pour les solutions symétriques :


a a
−K  a −K  a  a
A′e 2 = A cos  k  , et A′Ke 2 = Ak sin  k  , ce qui entraîne k tan  k  = K .
 2  2  2
On obtient pour les solutions antisymétriques :
a a
−K
2  a −K  a  a
A′e = A cos  k  , et A′Ke 2 = Bk cos  k  , ce qui entraîne k / tan  k  = −K .
 2   2   2
2mE 2m 2mV0
D’autre part, K et k sont liés par k 2 + K 2 = 2 + 2 [V0 − E ] = 2
= Cte .
ℏ ℏ ℏ
a a
Ainsi, si on se place dans le plan d’abscisse X = k et d’ordonnée Y = K , cette
2 2
2mV0a 2
dernière relation s’écrit X 2 + Y 2 = = R 2 et correspond, puisque k et K sont
4 ℏ2
a mV0
positifs, à un quart de cercle C de centre ( X = 0,Y = 0) et de rayon R = .
ℏ 2

On obtient les valeurs de k correspondant à des solutions symétriques en cher-


a a  a
chant les intersections de C avec la courbe d’équation K = k tan  k  , c’est-à-
2 2  2
dire Y = X tan X . L’étude de la fonction X → X tan X montre qu’elle est croissante
pour X ≥ 0 , possède les mêmes zéros non nuls X = ℓπ (avec ℓ ∈ N∗ ), et est infinie
π
pour les mêmes valeurs X = (2q + 1) , q ∈ N que la fonction X → tan X .
2
On obtient les valeurs de k correspond à des solutions antisymétriques en cher-
a a  a
chant les intersections de C avec la courbe d’équation K = −k / tan  k  , c’est-à-
2 2  2

843
844 Partie VII.  Physique des ondes

dire Y = − X / tan X . L’étude de la fonction X ֏ − X / tan X montre qu’elle est crois-


π
sante pour X ≥ 0 , possède les mêmes zéros X = (2q + 1) (avec q ∈ N ), et est infinie
2
pour les mêmes valeurs X = ℓπ, ℓ ∈ N ∗ que la fonction X ֏ 1/ tan X .
Les solutions symétriques et antisymétriques s’alternent. On a une solution
π
X n , n ∈ �1, N � par intervalle de longueur ∆X = . Il y a au moins une solution (qui est
2
 2R 
alors symétrique), et le nombre total N de solutions est N = 1 +   . Ce nombre est
 π 
fini (il y a 3 états symétriques et 3 états antisymétriques dans le cas de la figure ci-
avant), et augmente avec R, donc avec V0 .

Si V0 → +∞ , on a une infinité de solutions et les intersections ont pour abscisses


a π a
X q = kq = (2q + 1) , q ∈ N pour les solutions symétriques, et X ℓ = kℓ = ℓπ, ℓ ∈ N∗
2 2 2
pour les solutions antisymétriques.
On retrouve bien sûr le cas du puits de potentiel infini :
π 2mE π2 ℏ 2
— kq = (2q + 1) =  Eq∞ = (2q + 1)2 pour les solutions symétriques.
a ℏ2 2ma2
π 2mE π2 ℏ 2
— kℓ = 2ℓ = 2
 Eℓ∞ = (2ℓ )2 pour les solutions antisymétriques.
a ℏ 2ma 2
Si le puits n’est pas infini, la valeur maximale kN de k correspond à :

π π π 2mEN R 2mV0 π
(N − 1) < X n ≤ R < N ⇔ (N − 1) < kN = ≤2 = <N .
2 2 a ℏ a ℏ a
On peut donc encadrer EN :
π2 ℏ 2 π2 ℏ 2
(N − 1)2 < EN ≤ V0 < N 2 ⇔ E( N −1)∞ < EN ≤ V0 < EN ∞ .
2ma 2 2ma 2
On a donc EN < EN ∞ . En particulier, l’énergie minimale, qui est celle d’un état
π2 ℏ 2 h2
symétrique, est Emin = E1 < E1∞ = = .
2ma2 8ma2

Emin est donc inférieure à l’énergie minimale du puits infini. En effet, la particule
est moins localisée que dans le puits infini, car la fonction d’onde n’est pas nulle dans
les zones x > a / 2 classiquement interdites à la particule.

2 2
Par exemple ϕ( x ) = B′e −Kx pour x > a / 2 , soit ψ( x, t ) = ϕ( x ) = B′2e −2Kx . La
densité de probabilité décroît exponentiellement lorsqu’on s’écarte du puits (elle est
évanescente) mais n’est pas nulle si x > a / 2 .

844
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 845

Cas où E > V0 : états de diffusion


Les solutions sont de la forme :
a 2m 2π
— ϕ1( x ) = A1eiKx + B1e −iKx pour x < − (zone 1), avec K = 2 [E − V0 ] = λ .
2 ℏ 0

2mE 2π  a a
— ϕ2 ( x ) = A2eikx + B2e −ikx avec k = 2
= pour x ∈  − ,  (zone 2).
ℏ λ  2 2
a
— ϕ3 ( x ) = A3eiKx + B3e −iKx pour x > (zone 3).
2
a
On ne peut plus simplifier les fonctions pour x >car x ֏ e ± iKx est bornée.
2
On peut en revanche considérer le cas d’une particule provenant de x = −∞ .
E
i ( Kx − t) a
L’onde incidente s’écrit ψ1i ( x, t ) = A1 e ℏ et l’onde réfléchie en x = − s’écrit
2
E E E
i ( − Kx − t) i ( kx − t) i ( − kx − t)
ψ1r ( x, t ) = B1 e ℏ . Dans la zone 2, ψ 2 ( x, t ) = A2 e ℏ + B2 e ℏ est la
somme de deux ondes se propageant en sens inverse. Dans la zone 3, il n’y a qu’une
E
i ( Kx − t)
onde transmise ψ 3 ( x, t ) = ψ 3t ( x, t ) = A3 e ℏ , car la particule n’est plus réfléchie.
a
Les conditions aux limites sont (continuité de ϕ et ϕ′ en ± ):
2
 − iK
a
iK
a
− ik
a
ik
a  ik
a
− ik
a
iK
a
 A1e 2 + B1e 2 = A2e 2 + B2e 2  A2e 2 + B2e 2 = A3e 2
 , et  .
a a a a a a a
 − iK iK − ik ik  ik − ik iK
KA1e 2 − KB1e 2 = kA2e 2 − kB2e 2 kA2e 2 − kB2e 2 = KA3e 2

Le deuxième système permet d’exprimer A2 et B2 en fonction de A3 :

845
846 Partie VII.  Physique des ondes

 k + K i (K −k ) 2
a
 A2 = e A3
 2k
 . On peut alors résoudre le premier système afin d’exprimer A1
a
 k − K i (K + k ) 2
B2 = e A3
 2k
et B1 en fonction de A3 .
 − iK
a
iK
a
iK
a
kA1e 2 + kB1e 2 = A3e 2 [ k cos(ka ) − iK sin(ka )]
Ce système devient :  ,
a a a
 − iK iK iK
KA1e 2 − KB1e 2 = A3e 2 [K cos(ka ) − ik sin(ka )]
 − iK
a
 A1′ = A1e 2

kA1′ + kB1′ = A3′ [ k cos(ka ) − iK sin(ka )]  iK
a
soit :  , en posant B1′ = B1e 2 .
KA1′ − KB1′ = A3′ [K cos(ka ) − ik sin(ka )]  a
 iK
2
 A′
3 = A3 e

Pour le résoudre, on effectue les combinaisons linéaires suivantes :
kA1′ + kB1′ = A3′ [ k cos(ka ) − iK sin(ka )] −K cos(ka ) + ik sin(ka ) K
 . On obtient :
KA1′ − KB1′ = A3′ [K cos(ka ) − ik sin(ka )] k cos(ka ) − iK sin(ka ) k
B1′ i (k 2 − K 2 )sin(ka ) A′ 2kK
= 2 2
et 3 = .
A1′ 2kK cos(ka ) − i (k + K )sin(ka ) A1′ 2kK cos(ka ) − i (k 2 + K 2 )sin(ka )
 B1
2
B1′
2
(k 2 − K 2 )2 sin2 (ka )
R = = =
 A1 A1′ 4k 2K 2 + (k 2 − K 2 )2 sin2 (ka )
On en déduit  .
2 2
 A3 A′ 4 k 2K 2
T = = 3 =
 A1 A1′ 4k 2K 2 + (k 2 − K 2 )2 sin2 (ka )
p2
Comme l’énergie E = + V ( x ) associée à toutes les O.P.P.H considérées est
2m
la même, elles ont également la même impulsion en norme dans la zone 1 et dans la
G 2
2
Jr ψ B
zone 3, donc le rapport R = G = 1r 2 = 1 est le coefficient de transmission de
Ji ψ1i A1
G 2 2
Jt ψ A
probabilité, et T = G = 3t 2 = 3 le coefficient de transmission de probabilité à
Ji ψ A1
1i

travers le puits de potentiel. On vérifie bien que R + T = 1 .


On constate que l’on n’a pas forcément T = 1 : contrairement à une particule
classique qui passerait à coup sûr de la zone 1 à la zone 3 puisque E > V0 , la proba-
bilité de réflexion n’est pas nulle pour une particule quantique.

846
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 847

On a T = 1 si sin2 (ka ) = 0 donc bien sûr pour a = 0 , mais aussi si ka = nπ , soit


λ
a=n , avec n ∈ N , où λ est la longueur d’onde de de Broglie dans le puits. C’est
2
l’aspect ondulatoire qui intervient : pour ces tailles de puits, l’onde réfléchie est totale-
ment détruite par interférences destructives.
λ λ
Au contraire T est minimal pour sin2 ( ka ) = 1 , soit a = m + , m ∈ N , valeurs
2 4
pour lesquelles c’est l’onde transmise qui est partiellement détruite par interférences
destructives.
1 (k 2 − K 2 )2
On a Tmin = avec M = soit, en utilisant les expressions de k et
1+ M 4k 2K 2
V02
K: M= . On se rapproche du résultat classique Tmin = 1 quand M << 1, soit
4E (E − V0 )
E >> V0 . On peut au contraire avoir une probabilité de réflexion importante si M >> 1 ,
soit pour E très proche de V0 .
1 I 1
L’expression T = 2
est analogue à = , intensité
1 + M sin (ka ) I0 1 + m sin2 (ka )
transmise par un interféromètre de Fabry-Pérot d’épaisseur a dans la direction i = 0 ,
les deux phénomènes ondulatoires faisant intervenir la même différence de marche
δ = 2a entre deux ondes transmises après un aller et retour dans le puits / cavité.

On constate qu’il n’y a pas de quantification de l’énergie pour les états de diffu-
sion. C’est une propriété générale.

Sur la figure suivante on a représenté la partie réelle de la fonction d’onde à


différents instants ainsi que la densité de probabilité.
Dans la zone 3, semi-infinie, l’onde est une O.P.P.H, car il n’y a plus de réflexion
pour l’onde transmise dans cette zone.
Dans la zone 2, il y a deux ondes de longueur d’onde λ . Cette longueur d’onde
est plus petite que la longueur d’onde λ0 dans les zones 1 et 3 puisque l’énergie ci-
nétique, et donc l’impulsion en norme, sont plus grandes dans la zone 2 qu’à l’extérieur
de cette zone. Les deux ondes se propagent dans les deux directions opposées, et
possèdent des amplitudes différentes. L’onde résultante n’est ni stationnaire (au sens
classique), ni progressive (la densité de probabilité présente des « nœuds » : mini-
mums non nuls, et des « ventres » où elle est maximale).
Il en va de même dans la zone 1, sauf lorsque l’onde est entièrement transmise :
on a alors une O.P.P.H.
λ λ
Enfin, si a = m + , avec m ∈ N , et E est très proche de V0 on peut avoir
2 4
T ≃ 0 : l’onde dans la zone 1 est purement stationnaire (la probabilité de présence est
nulle aux nœuds de vibration).

847
848 Partie VII.  Physique des ondes

4. EFFET TUNNEL, COUPLAGE TUNNEL ENTRE


DEUX PUITS ET APPLICATIONS
4.1 Barrière de potentiel / Effet tunnel
Coefficient de transmission de probabilité
 a a
Pour x ∈  − ,  , V ( x ) = V0 > 0 ,
 2 2
 a a
et pour x ∉  − ,  , V ( x ) = 0 .
 2 2

On ne s’intéresse ici qu’au cas


d’une particule provenant de x = −∞ avec
une énergie E telle que 0 < E < V0 (pour
une énergie E > V0 , les calculs montrent que, contrairement au cas classique, la par-
ticule a une probabilité non nulle d’être réfléchie par la barrière, d’autant plus grande
que E est proche de V0 ).

848
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 849

Les solutions recherchées sont de la forme :


′ ′ a 2m
— ϕ1( x ) = A1eiK x + B1e −iK x pour x < − (zone 1), avec K ′ = E.
2 ℏ2
′ ′ 2m 1  a a
— ϕ2 ( x ) = A2ek x + B2e −k x avec k ′ = 2
(V0 − E ) = pour x ∈  − ,  (zone 2).
ℏ δ  2 2
′ a
— ϕ3 ( x ) = A3eiK x pour x > (zone 3).
2
a
Les conditions aux limites sont dues à la continuité de ϕ et ϕ′ en ± . Il est
2
inutile de refaire le calcul des amplitudes B1 et A3 si l’on remarque que, par rapport
2m 2mE
au puits de potentiel, il suffit de changer K = (E − V0 ) en K ′ = , ainsi que
ℏ2 ℏ2
2mE 2m
k= 2
en −ik ′ = −i (V0 − E ) . On obtient alors :
ℏ ℏ2
 B1
2
( −k ′2 − K ′2 )2 sin2 ( −ik ′a )
R = =
 A1 −4k ′2K ′2 + ( −k ′2 − K ′2 )2 sin2 ( −ik ′a )
 2 2
 A3 A3′ −4k ′2K ′2
T = = =
 A1 A1′ −4k ′ K ′ + ( −k ′2 − K ′2 )2 sin2 ( −ik ′a )
2 2

ei ( −ik ′a ) − e −i ( −ik ′a ) ek ′a − e −k ′a
Comme sin( −ik ′a ) = = = −i ⋅ sh(k ′a ) , on obtient :
2i 2i
 B1
2
(k ′2 + K ′2 )2 sh2 (k ′a )
R = =
 A1 4k ′2K ′2 + (k ′2 + K ′2 )2 sh2 (k ′a )
 .
2 2
 A3 A′ 4k ′2K ′2
T = = 3 =
 A1 A1′ 4k ′ K ′ + (k ′2 + K ′2 )2 sh2 (k ′a )
2 2

On a toujours, bien sûr, R + T = 1 .


Le coefficient de transmission de probabilité à travers la barrière s’écrit :
1 (k ′2 + K ′2 )2 V02
T= 2
, avec M = 2 2
, soit M = .
1 + M sh (k ′a ) 4k ′ K ′ 4E (V0 − E )
Contrairement au cas classique où T = 0 quand 0 < E < V0 , on donc T > 0 .
Comme 0 < E < V0 , l’étude de M montre que ce coefficient est supérieur à 1
(valeur atteinte pour E = V0 / 2 ).
1 ℏ
L’épaisseur δ = = est caractéristique de la décroissance de la
k′ 2m(V0 − E )
probabilité de présence dans la barrière. On a T ≃ 1 lorsque a << δ , soit k ′a << 1.
Au contraire, T ≃ 0 lorsque a >> δ , soit k ′a >> 1 (on parle de barrière épaisse),
et alors sh2 (k ′a ) ≃ e 2k ′a / 4 >> 1, ce qui entraîne M sh2 (k ′a ) >> 1. Ainsi :

849
850 Partie VII.  Physique des ondes

16E (V0 − E )
e −2k ′a : la fonction d’onde transmise est proportionnelle à e − k a . On

T ≃ 2
V0
trouve k ′a = 1,6 pour un électron d’énergie E = 1 eV et une barrière d’épaisseur
a = 0,5 nm et de hauteur V0 = 1,1 eV , ce qui suffit pour que l’approximation de la bar-
rière épaisse soit bonne, car on trouve T = 5,2% au lieu de 5,3% sans approximation.

Paquet d’onde gaussien


Comme on l’a déjà remarqué, les solutions trouvées ne sont pas de carré som-
mable. En revanche, un paquet d’onde incident très étroit centré sur l’impulsion p et
p2
donc sur l’énergie E = est une solution physique du problème, dont l’énergie n’est
2m
plus parfaitement déterminée.
Sur la figure ci-dessous, on montre l’évolution d’un paquet d’onde gaussien
(physiquement réalisable) obtenue par résolution numérique :

850
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 851

Application au microscope à effet tunnel


Si on approche à une distance a inférieure au nm une pointe métallique très fine
(elle se réduit à un atome à son extrémité) d’un substrat conducteur ou semi-conduc-
teur, des électrons peuvent passer d’un matériau à l’autre, à travers le vide, par effet
tunnel.
Notons Ws le travail d’extraction d’un électron du substrat et Wp le travail d’ex-
traction d’un électron de la pointe et intéressons-nous à la possibilité de faire passer
un électron du substrat vers la pointe. Si on pose eU0 = Ws − Wp , l’effet tunnel n’est
possible que si l’énergie E de l’électron (prise nulle pour un électron libre du substrat)
est supérieure à la différence d’énergie eU0 entre état initial et état final. C’est donc
possible sans apport d’énergie ( E = 0 ) si Ws < Wp , mais pas si Ws > Wp (l’effet tunnel
pourrait en revanche faire passer les électrons de la pointe vers le substrat).
Lorsqu’on applique une différence de potentiel U = Vp − Vs > 0 entre la pointe et
le substrat, un courant stationnaire très faible (du pA au nA) peut circuler. L’énergie
potentielle d’un électron inclut ici l’énergie potentielle électrostatique −eV qui décroît
de eU entre le substrat et la pointe. L’effet tunnel devient possible si l’énergie des
électrons est supérieure à e(U0 − U ) , donc si U > U0 puisque E = 0 .

On peut modéliser le problème à l’aide d’une bar-


rière rectangulaire symétrique d’épaisseur a et de hauteur
Ws + Wp
V0 = , les électrons disposant d’une énergie E
2
telle que 0 ≤ E = e(U − U0 ) << V0 . On peut faire l’approxi-
16E (V0 − E ) 16E −2k ′a
mation T ≃ e −2k ′a ≃ e ∝ (U − U0 )e −2k ′a . L’intensité du courant
V02 V0
« tunnel » à travers le vide est proportionnelle au nombre d’électrons franchissant la
2mV0
barrière par unité de temps, donc à T : It = κ(U − U0 ) ⋅ e−2k a , avec k′ =

.
ℏ2
Le coefficient de proportionnalité κ dépend des densités électroniques de la
pointe et de la zone du substrat en regard de la pointe.

851
852 Partie VII.  Physique des ondes

On en déduit qu’à U fixé le courant augmente quand on rapproche la pointe du


substrat. Si on déplace la pointe parallèlement au plan qui supporte le substrat, les
variations d’intensité It permettent donc de déterminer la hauteur z( x, y ) du substrat.
On peut également ajuster à tout instant la hauteur de la pointe, toujours à U fixé, de
façon à ce que l’intensité tunnel reste constante lorsque la pointe se déplace. Ce sont
alors les déplacements verticaux de la pointe qui permettent d’accéder à la hauteur
z( x, y ) du substrat. Cette méthode est plus lente que la précédente mais évite que la
pointe ne soit détériorée en heurtant le substrat. Dans les deux cas on réalise une
topographie de la densité électronique.

On a δ / 2 = 1/ (2k ′) ≃ 4,4 ⋅ 10 −11 m avec un travail d’extraction W de 5 eV, ce qui


entraîne que It est divisée par 10 quand la pointe s’écarte de 10−10 m ! L’intensité
varie donc fortement à l’échelle atomique, et on atteint une résolution de 1 pm selon z
et de 10 pm selon x et y (dans ce cas la finesse de la pointe est limitante). Ceci est
possible en contrôlant le déplacement de la pointe avec une précision de 1 pm à l’aide
de cristaux piézo-électriques. On distingue alors les atomes (plus exactement la den-
sité électronique) sur l’image obtenue en scannant le substrat. Rohrer et Binnig ont
obtenu en 1986 le prix Nobel de Physique pour leur réalisation du microscope à effet
tunnel.
On peut également, sans déplacer la pointe, faire varier U. La dérivée de la
fonction U ֏ It donne accès à la densité électronique du substrat, et le microscope
est alors utilisé en mode spectroscopique.
On peut enfin déplacer des atomes à l’aide de la pointe en imposant une tension
adéquate, et réaliser des nano-constructions, comme
l’enclos de 48 atomes de fer déposés sur du cuivre de
la figure ci-contre, qui montre la densité électronique
obtenue à l’aide d’un microscope à effet tunnel. Le
cercle de 7 nm de rayon formé par les atomes de fer
est un puits de potentiel à deux dimensions dans lequel
sont confinés des électrons du cuivre. On observe un
état stationnaire : la densité de probabilité de présence
des électrons présente des maximums et des minimums circulaires. On peut donc ici
observer sur une image, générée à partir de mesures, la nature quantique de la ma-
tière !

852
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 853

Application à la radioactivité α
La particule α est un noyau d’Hélium 42He (contenant deux protons et deux neu-
A A A−4
trons) et peut être émise par désintégration d’un noyau lourd ZX : Z X → Z − 2Y + α .
238 234
Par exemple : 92 U → 90Th + α .
A
La probabilité de désintégration de ZX entre t et t + dt est dP = dt / τ . Pour un
grand nombre N(t ) de noyaux, il y a δN (t ) = N (t ) ⋅ dP = N (t ) ⋅ dt / τ désintégrations
entre t et t + dt , donc dN = N (t + dt ) − N (t ) = −N (t ) ⋅ dt / τ , équation différentielle qui
t

s’intègre en N (t ) = N0e τ , où N0 est le nombre initial de noyaux. Le temps T1/2 de
demi-réaction (demi-vie) est défini par N (T1/2 ) = N0 / 2 . On a donc T1/2 = τ ⋅ ln 2 .
Geiger et Nuttall (1911) ont
établi expérimentalement la loi sui-
vante : si E est l’énergie de la parti-
B
cule α émise, lnT1/2 = A + .
E
Gamow a établi en 1928 une
théorie rendant compte de ces me-
sures. Dans cette théorie, la parti-
cule α préexiste dans le noyau X
avant son émission. Elle est libre,
mais confinée dans une zone de
quelques fm (l’ordre de grandeur du
rayon R du noyau) par l’interaction
forte. Hors de cette zone, l’interac-
tion forte disparaît et seule subsiste
2(Z − 2)e2 Γ
la force répulsive entre les protons (potentiel coulombien V (r ) = = ).
4πε0r r
La particule α possède une énergie infé-
rieure à la valeur E ∗ qui lui permettrait classi-
quement d’échapper à l’interaction forte. Elle
peut cependant y arriver grâce à l’effet tunnel. Le
calcul du coefficient de transmission T est plus
délicat que pour la barrière rectangulaire. Il fait
intervenir la distance RE = Γ / E , et donne le ré-

sultat suivant : T ∝ ea − b / E . Les coefficients a et


b dépendent du nombre de protons Z du noyau lourd.
Si f0 = 1/ T0 est la fréquence avec laquelle la particule α parvient en r = R , la
probabilité qu’elle ne soit pas émise pendant une durée nT0 , avec n ∈ N
est :

853
854 Partie VII.  Physique des ondes

(1 − T )n ≃ 1 − nT , puisque T << 1 , donc la probabilité qu’elle soit émise pendant cette


même durée est égale à nT.
dP nT 1
On en déduit la probabilité = = f0 ⋅ T = d’émission par unité de temps.
dt nT0 τ

On a donc T1/2 = ln2 / (f0 ⋅ T ) = Keb / E −a


. K dépend de E mais l’exponentielle impose
B
la dépendance de T1/2 en E et on a bien lnT1/2 = A + .
E
A et B dépendent de Z : pour des désintégrations de différents isotopes du
même élément, la théorie de Gamow justifie bien que les points ( 1/ E , lnT1/2 ) sont
reliés par une droite.
210
L’énergie influe énormément : T1/2 = 138,4 j pour 84 Po ( E = 5,41 MeV ) et
214
T1/ 2 = 164,3 µs pour 84 Po ( E = 7,83 MeV ) !

4.2 Couplage tunnel entre deux puits de potentiel symétriques


Solutions générales
Le profil de potentiel est décrit sur la fi-
gure ci-contre. On se place dans le cas où
l’énergie E de la particule est inférieure à V0 .
La largeur de la barrière entre les puits
est a, celle des puits est L.
Comme le potentiel est infini dans les
/ [ −b, b ] , elles sont interdites à la parti-
zones x ∈
cule (la fonction d’onde est nulle dans ces zones).
En revanche, V0 > 0 est fini donc, contrairement à la particule classique, la par-
ticule quantique peut passer d’un puits à l’autre par effet tunnel.
En tenant compte des C.A.L ϕ( ± b ) = 0 , les solutions sont de la forme :
 a 2mE
— ϕ( x ) = A sin [ k ( x + b )] pour x ∈  −b, −  , avec k = .
 2 ℏ2
 a a 2m
— ϕ( x ) = A′ch(Kx ) + B′sh(Kx ) pour x ∈  − ,  , avec K = [V0 − E ] .
 2 2 ℏ2
a 
— ϕ( x ) = A′′ sin [ k ( x − b )] pour x ∈  , b  .
2 
Comme pour le puits infini, on peut rechercher des solutions symétriques
(paires) pour lesquelles B′ = 0 et A′′ = − A , et des solutions antisymétriques (impaires)
pour lesquelles A′ = 0 et A′′ = A .
Les autres C.A.L sont imposées par la continuité de ϕ et ϕ′ en ± a / 2 .
On obtient pour les solutions symétriques :

854
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 855

 a  a  a  a
A′ch  K  = A sin  kb − k  et − A′Ksh  K  = Ak cos  kb − k  , ce qui entraîne :
 2   2   2   2
 a
k / tan ( kL ) = −K ⋅ th  K  .
 2
On obtient pour les solutions antisymétriques :
 a  a  a  a
−B′sh  K  = A sin  kb − k  et B′Kch  K  = Ak cos  kb − k  , ce qui entraîne :
 2   2   2   2
 a
K tan ( kL ) = −k ⋅ th  K  .
 2
2mE 2m 2mV0
D’autre part, K et k sont liés par k 2 + K 2 = + [V0 − E ] = = Cte .
ℏ2 ℏ2 ℏ2
Les états sont quantifiés, comme le sont les états liés du puits fini, et on peut
déterminer graphiquement les valeurs k n , avec n ∈ N∗ .

Cas du faible couplage


Nous allons par la suite nous limiter au cas du faible couplage, c’est-à-dire le
2m
cas où E << V0 : on a alors K ≃ V0 .
ℏ2
D’autre part, la barrière de potentiel entre les deux puits, vue par les particules
dont l’énergie est très inférieure à V0 , est épaisse :
 a  a
Ka >> 1 , ce qui permet d’écrire th  K  ≃ 1 − 2e −Ka et 1/th  K  ≃ 1 + 2e −Ka .
 2  2
1 + 2e −Ka
On doit donc résoudre tan ( kL ) = −kL = −Λ s ⋅ kL pour les solutions sy-
KL
1 − 2e −Ka
métriques, et tan(kL ) = −kL = −Λa ⋅ kL pour les solutions antisymétriques,
KL
avec Λ s > Λ a .
On pose X = kL et on trace donc, pour une résolution graphique, la courbe re-
présentative de X ֏ tan X et les deux droites Y = −Λ s ⋅ X et Y = −Λ a ⋅ X .

855
856 Partie VII.  Physique des ondes

Les approximations faites n’en sont plus quand V0 → +∞ . On a alors K → +∞


et donc Λ s → 0 et Λa → 0 , ce qui donne les valeurs quantifiées X = X n = k n L = nπ

nπ n 2 π2ℏ2
avec n ∈ N∗ , soit k = kn = et E = En = .
L 2mL2
On retrouve le cas du puits de potentiel infini de largeur L. La probabilité pour
la particule de traverser la barrière entre les puits étant nulle, elle se trouve dans l’un
ou l’autre des puits (celui où elle était initialement) mais pas les deux à la fois.

Le graphique précédent montre que dans le cas étudié de couplage entre les
puits, on trouve maintenant deux solutions (l’une, symétrique, correspondant à X sn ,
l’autre, antisymétrique, correspondant à X an ) pour chaque solution unique du puits
 1
infini correspondant à X n = nπ , et que  n −  π < X sn < X an < X n = nπ .
 2
Les énergies de la particule sont différentes et plus basses qu’en l’absence de
2
 1  π2 ℏ 2 2 2
2 π ℏ
couplage :  n −  < E s n < E an < E n = n . Ceci s’interprète de la façon
 2  2mL2 2mL2
suivante : la particule étant moins confinée, puisqu’elle peut se trouver dans les deux
puits, son énergie est plus faible.
Chaque niveau d’énergie se sépare en deux du fait du couplage.

Solutions de plus basse énergie / oscillations


Étudions maintenant l’état fondamental n = 1.
Sans couplage : X1 = π . Si L et a sont du même
ordre de grandeur, on a KL >> 1  Λ s << 1 et Λ a << 1 ,
donc on a en première approximation X sn ≃ X an ≃ π .
Comme les droites d’équations :
Y = −Λ s ⋅ X et Y = −Λ a ⋅ X sont peu inclinées par rap-
port à OX, on peut approximer tan X par X − π au voisinage de π afin de trouver les
intersections.
π π
On trouve alors X s1 = ≃ π(1 − Λ s ) et X a1 = ≃ π(1 − Λa ) , et les éner-
1 + Λs 1 + Λa
gies Es1 = E1(1 − 2Λ s ) et Ea1 = E1(1 − 2Λa ) au premier ordre en Λ s et Λ a .
e −Ka
L’écart entre ces deux énergies ∆E = Ea1 − Es1 = 2E1( Λ s − Λ a ) = 8E1 est
KL
proportionnel à e −Ka , tout comme la fonction d’onde transmise à travers la barrière
épaisse.
On peut représenter les fonctions d’onde symétriques et antisymétriques pour
n =1 :

856
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 857

On a deux états stationnaires de plus basse énergie :


— Un état symétrique, noté S, de fonction d’onde normée :
Es1 b
−i t 2
ψ s1( x, t ) = ϕs1( x )e ℏ (on a  ψ s1( x, t ) dx = 1 car la probabilité de trouver la par-
x =− b
ticule dans l’état S entre − b et b vaut 1).
— Un état antisymétrique, noté A, de fonction d’onde normée :
Ea1
−i t
ψ a1( x, t ) = ϕa1( x )e ℏ .
On peut trouver d’autres solutions par combinaison linéaire.
Prenons ψg1( x, t ) = α [ ψs1( x, t ) + ψa1( x, t )] , et ψ d1( x, t ) = α [ ψ s1( x, t ) − ψ a1( x, t )] ,
où α est une constante de normalisation, a priori complexe. Elle se calcule en écrivant
que la probabilité de trouver la particule dans l’état de fonction d’onde ψ g1 , (ou, de
même, dans l’état de fonction d’onde ψ d1 ) vaut 1 dans l’intervalle [ −b, b ] :
b b b
2 2 2 2 2
 ψ g1( x, t ) dx = α  ψ s1( x, t ) dx + α  ψ a1( x, t ) dx
���
x =− b �����
� ���
x =− b �����
� ���
x =− b �����

1 1 1
b b
2 2
+α  ψ s1( x, t )ψ∗a1( x, t )dx + α  ψ∗s1( x, t )ψa1( x, t )dx
�����
x =− b ������ �����
x =− b ������
0 0
Les deux premières intégrales sont égales à 1 car ψ s1 et ψ a1 sont normées, et
les deux dernières intégrales sont nulles car les fonctions intégrées sur un intervalle

857
858 Partie VII.  Physique des ondes

symétrique par rapport à 0 sont des fonctions impaires de x (produit d’une fonction
2
paire et d’une fonction impaire). On a donc 2 α = 1 : on peut prendre α = 1/ 2 .
x ֏ ψ g1( x, t = 0) est proportionnelle à x ֏ ϕs1( x ) + ϕa1( x ) dont on peut cons-
tater sur la figure précédente qu’elle est quasiment nulle dans le puits de droite et
correspond donc à une particule initialement localisée dans le puits de gauche.
x ֏ ψ d1( x, t = 0) est proportionnelle à x ֏ ϕs1( x ) − ϕa1( x ) et correspond à une
particule initialement localisée dans le puits de droite.
−i
E s1
t  −i
∆E 
t
À un instant quelconque, ψ g1( x, t ) = αe ℏ ϕs1( x ) + ϕa1( x )e ℏ  , d’où :
 
 
2 2 2 2  ∆E  
ψ g1( x, t ) = α  ϕs1( x ) + ϕa1( x ) + 2ϕs1( x )ϕa1( x )cos  t  .
  ℏ 
La densité de probabilité oscille
h
donc avec un période T0 = .
∆E
Au bout d’une demi-période,
∆E T0
−i
e ℏ 2 = e − i π = −1 .
ψ g1( x, t ) est alors proportionnelle
à ϕs1( x ) − ϕa1( x ) : la particule qui était
initialement localisée dans le puits de
gauche se retrouve alors localisée dans
le puits de droite.

Application à la molécule d’ammoniac


Dans la molécule d’ammoniac NH3 , les trois atomes d’hydrogène forment un
triangle équilatéral de centre O. L’atome d’azote se déplace sur l’axe Ox orthogonal
au plan contenant les atomes d’hydrogène.
Classiquement, l’azote possède deux positions d’équilibre stable x = ± xéq sy-

métriques par rapport au plan x = 0 des atomes H. Pour x > xéq , la liaison chimique

ramène N vers O alors que pour x < xéq , N est repoussé par les atomes H. La position
d’équilibre x = 0 est donc instable.
L’énergie potentielle présente la forme ci-après : la molécule d’ammoniac se
prête bien à la modélisation précédente où les puits et la barrière sont rectangulaires.
L’écart ∆E = 9,85 ⋅ 10 −5 eV entre les énergies des deux premiers états donne une fré-
quence d’inversion f0 = ∆E / h = 23,8 GHz . La molécule se « retourne » avec cette fré-
quence caractéristique, N passe d’un puits à l’autre par effet tunnel. En effet, numéri-
quement, xéq = 38,7 pm et V0 = 0,25 eV : cette énergie est trop grande pour que N

858
Chapitre 8.  Approche ondulatoire de la mécanique quantique 859

passe d’un puits à l’autre grâce à l’agitation thermique, dont l’énergie caractéristique à
température ambiante est kBT = 0,026 eV .

Pour d’autres molécules de même géométrie, comme AsH3 , V0 et l’épaisseur


a, qui est de l’ordre de xéq , sont bien plus grands : xéq ≃ 200 pm et V0 ≃ 1,9 eV . Le

2m
produit Ka ≃ a 2
V0 est bien plus grand que pour NH3 , et l’écart ∆E ≃ 3 ⋅ 10 −22 eV

entre les deux premiers niveaux énergétiques est très faible. La période d’oscillation
est de l’ordre de l’année, ce qui rend bien sûr ces oscillations inobservables.

Maser à ammoniac
Dans un jet de molécules de NH3 , les deux états de plus basses énergies sont :
— Un état antisymétrique A, de fonction d’onde ψ a1 .
— Un état symétrique S, de fonction d’onde ψ s1 .
L’écart ∆E = 9,85 ⋅ 10 −5 eV entre les énergies de ces deux états est trop petit
pour que les populations Ns , dans l’état symétrique, et Na , dans l’état antisymétrique
∆E
kBT
soient différentes. D’après la loi de Boltzmann, Ns / Na = e , avec kBT = 0,026 eV
à température ambiante.
L’azote étant plus électronégatif que l’hydrogène, la molécule NH3 est polaire.
� �
Son moment dipolaire est p = pex , avec p > 0 quand N est à gauche du plan des
atomes d’hydrogène, et p < 0 quand il est à droite (cf. le schéma précédent).
Si l’atome d’azote n’oscillait pas de part et d’autre du plan des atomes d’hydro-
gène, on aurait deux états de même énergie E1 : l’état « gauche » correspondant à

859
860 Partie VII.  Physique des ondes

� �
x = − xéq et p = p0ex avec p0 > 0 , et l’état « droit » correspondant à x = + xéq et
� � � �
p = − p0ex . En présence d’un champ électrique extérieur ε = εex (noté ainsi afin de ne
pas le confondre avec une énergie), il faudrait tenir compte de l’énergie potentielle
� �
− p ⋅ ε que possède un dipôle rigide placé dans un champ extérieur. L’énergie de la
molécule serait E1 ± p0 ε .
Cependant, une molécule initialement dans l’état où N est à gauche (ou à droite)
ne reste pas dans cet état qui n’est pas stationnaire. En revanche, elle reste dans l’état
� �
stationnaire noté A + de fonction d’onde ψ + (qui s’identifie à ψ a1 si ε = 0 ), ou dans
� �
l’état stationnaire noté S − de fonction d’onde ψ − (qui s’identifie à ψ s1 si ε = 0 ), si elle
s’y trouve initialement. On montre que, dans ces deux états, il existe un moment dipo-
� � � �
laire induit : p+ = −βεex , avec β > 0 , pour l’état A + , et p− = βεex pour l’état S − . Le
calcul permet d’établir que les énergies de ces deux états stationnaires dépendent du
champ électrique : E+ = Ea1 + βε2 , et E− = Es1 − βε2 .
Si le jet passe dans un
champ électrique stationnaire
transversal non uniforme (zone
grisée), les molécules subissent
une force :
�  → →
F± = − grad E± = ∓β grad ε2 .
Cette force est orthogo-
nale au jet incident, et dévie les
molécules dans l’état A + et
celles dans l'état S − dans des
sens opposés, ce qui permet de les filtrer.
Une fois séparées, elles traversent une zone sans champ électrique appliqué :
elles repassent respectivement dans l’état A et S, et retrouvent un mouvement recti-
ligne uniforme. Le traitement du jet de NH3 relève en effet de la mécanique classique
dans les conditions de l’expérience.
On n’envoie que les molécules de plus grande énergie (dans l’état A) dans une
∆E
cavité traversée par une onde électromagnétique de fréquence f0 = = 23,8 GHz .
h
On a réalisé une inversion de population : les molécules dans la cavité sont
toutes dans l’état de plus haute énergie, et sous l’effet du champ électrique résonant
de l’onde, vont se désexciter en émettant une onde électromagnétique de même fré-
quence, direction et phase que l’onde incidente : c’est l’émission stimulée.
Le maser (acronyme de Microwave Amplification by Stimulated Emision of Ra-
diation), et le laser, qu’il a précédé, fonctionnent sur le même principe. Le maser à
ammoniac est la référence des horloges atomiques.

860
861

[ANNEXE 1. CLASSIFICATION PÉRIODIQUE DES ÉLÉMENTS]

861
862 Annexes

[ANNEXE 2. FORMULAIRE : LES OPÉRATEURS DIFFÉRENTIELS]


Gradient
→ →
 dV = gradV ⋅ d OM (définition intrinsèque)

 Expression dans les différents systèmes de coordonnées

coord. cartésiennes coord. cylindriques coord. sphériques


 ∂V   ∂V   ∂V 
     
 ∂x   ∂r   ∂r 
→  ∂V   1 ∂V   1 ∂V 
gradV =      
 ∂y   r ∂θ   r ∂θ 
 ∂V   ∂V   1 ∂V 
   ∂z   
 ∂z     r sin θ ∂ϕ 
G G G G G G G G G
base (ex , ey , ez ) base (er , eθ , ez ) base (er , eθ , eϕ )

Rotationnel
G → → G G
 Th. de Stokes :  A ⋅ d OM =  rot A ⋅ d2 S (définition intrinsèque)
γ S (γ)

 Expression dans les différents systèmes de coordonnées

coordonnées cartésiennes coordonnées cylindriques coordonnées sphériques

 ∂   A   ∂Az − ∂Ay   1 ∂Az ∂Aθ   1 ∂ ∂A  


   x  −   
 r sin θ  ∂θ
[ ]
Aϕ sin θ − θ  
∂ϕ  
 ∂x     ∂y ∂z   r ∂θ ∂z 
→ G  ∂     ∂Ax ∂Az   ∂A   
∂A  1 ∂A 1 ∂ 
rot A =   ∧  Ay  =  −   r − z  r
 r sin θ ∂ϕ r ∂r
− [ ]
rAϕ

 ∂y     ∂z ∂x   ∂z ∂r 
 ∂     ∂Ay ∂Ax   
1 ∂ ∂A   1  ∂ ∂A  
   Az      [rAθ ] − r    r  ∂r [rAθ ] − ∂θ 
− r
 ∂z   ∂x ∂y   r  ∂r ∂θ  

Divergence
G G G
 A ⋅ d S  divA d V
2 3
 Th. de Green-Ostrogradski : = (définition intrinsèque)
S V (S )

 Expression dans les différents systèmes de coordonnées

coord. cartésiennes coord. cylindriques coord. sphériques


 ∂  A 
   x
 ∂x   
G  ∂   
divA =   ⋅  Ay 
1 ∂ 2 1 ∂
[Aθ sin θ] + 1
1 ∂ ∂Aϕ
 ∂y   
 ∂    [rAr ] + 1 ∂Aθ + ∂Az 2 ∂r
[ ]
r Ar +
r ∂r r ∂θ ∂z r r sin θ ∂θ r sin θ ∂ϕ
   Az 
 ∂z 
∂Ax ∂Ay ∂Az
= + +
∂x ∂y ∂z

862
Annexes 863

Laplacien scalaire
 → 
 ∆V = div gradV  (définition intrinsèque)
 

 Expression dans les différents systèmes de coordonnées.


coord. cartésiennes coord. cylindriques coord. sphériques
1 ∂  2 ∂V 
r 
r2 ∂r  ∂r 
1 ∂  ∂V  1 ∂ 2V ∂ 2V = 1 ∂  ∂V 
r + + 2 ∂V ∂ 2V
+ 2 sin θ ∂θ 
∂ 2V ∂ 2V ∂ 2V r ∂r  ∂r  r 2 ∂θ 2 ∂z 2 + 2
r sin θ ∂θ  
∆V = 2
+ 2
+ r ∂r
 ∂r 1 ∂ 2V
∂x ∂y ∂z 2 1 ∂V ∂ 2V 1 ∂ 2V ∂ 2V + 2
ou + 2 + 2 + = r sin 2 θ ∂ϕ 2
r ∂r ∂r r ∂θ 2 ∂z 2 1 ∂2
[rV ]
r ∂r 2

Laplacien vectoriel

G → G →  → G 


[ ]
 ∆A = grad divA − rot  rot A  (définition intrinsèque)
 

 ∂ 2 Ax ∂ 2 Ax ∂ 2 Ax 
 + + 
 ∂x 2 ∂y 2 ∂z 2 
 ∆A   2 
G  x 2
 ∂ Ay ∂ Ay ∂ Ay 
2
 Coordonnées cartésiennes : ∆A =  ∆Ay  = 2
+ + 
   ∂x ∂y 2 ∂z 2 
 ∆Az   ∂2A ∂ 2 Az ∂ 2 Az 
 z
+ + 
 ∂x 2 ∂y 2 ∂z 2 

 ∆A   ∆A 
G  r G G G G  r
 Cylindriques et sphériques : Attention ! ∆A ≠  ∆Aθ  sur la base (er , eθ , ez ) et ∆A ≠  ∆Aθ  sur la
 ∆A   
 z  ∆Aϕ 
G G G
base (er , eθ , eϕ ) .

Formules utiles
→  →  G
 rot gradV  = 0
 
 → G 
 div  rot A = 0
 
G G → G
 div(VA) = VdivA + gradV ⋅ A
→ G → G → G
 rot (VA) = V rot A + gradV ∧ A
G G G → G G → G
 div( A ∧ B ) = B ⋅ rot A − A ⋅ rot B
→  → G  → G G
 rot  rot A = grad divA − ∆A [ ]
 

863
864 Annexes

[ANNEXE 3. LES CONSTANTES PHYSIQUES]

Constantes universelles
 G ≃ 6,67 ⋅ 10−11 N ⋅ m2 ⋅ kg-2 constante de gravitation universelle
1
c= ≃ 3,00 ⋅ 108 m ⋅ s-1 célérité de la lumière dans le vide
ε0 µ0
 h ≃ 6,63 ⋅ 10−34 J ⋅ s constante de Planck
−12 -1
 ε0 ≃ 8,85 ⋅ 10 F⋅m constante électrique
−6 -1
 µ0 ≃ 1,26 ⋅ 10 H⋅m constante magnétique

Constantes physico-chimiques

 e ≃ 1,60 ⋅ 10 −19 C charge élémentaire


−31
 me ≃ 9,11⋅ 10 kg masse de l’électron
−27
 mp ≃ mn ≃ 1,67 ⋅ 10 kg masse d’un nucléon (proton, neutron)

 N A ≃ 6,02 ⋅ 1023 mol-1 constante d’Avogadro


4 -1
 F = 9,65 ⋅ 10 C ⋅ mol constante de Faraday

 R ≃ 8,31 J ⋅ mol-1 ⋅ K -1 constante molaire des gaz parfaits


R
 kB ≃ = 1,38 ⋅ 10−23 J ⋅ K -1 constante de Boltzmann
NA
 σ ≃ 5,67 ⋅ 10−8 W ⋅ m-2K -4 constante de Stefan

864
865

INDEX
Pour les entrées figurant dans le titre d’un
chapitre, d’une section ou d’une sous-section, se
C
C.O.P 550
référer à la table des matières.
Calorie 525
Calorifugé 509
A Caméra thermique 613
A.R.Q.S thermique 586 Candela (unité) 58
Accélération absolue 349 Cannelures 194
Accélération de Coriolis 352 Capacité de stockage d'un support 796
Accélération d'entraînement 349 Capacité d'un condensateur plan 245
Accélération relative 349 Capacité thermique à pression constante 515
Action caractéristique d'une particule 813 Capacité thermique à volume constant 514
Adaptation d'impédance 643, 768 Caractéristique de transfert d'un A.L.I 74
Adiabatique 509 Carburation 555
Aileron 442 Carte RFID 321
Aimant droit 274 Catastrophe ultraviolette 801
Aimantation 277 Cavitation 494
Airbus A380 440 Cavité multimodale 791
Airy (Fonction de) 187 Célérité de la lumière dans le vide 212
Airy (Tache de) 135 Célérité du son dans un gaz, dans un liquide 662,
Albédo 614 663
Allée de rouleaux de Karman 438 Célérité du son dans un solide 648
Amplificateur inverseur 77 Centimètre de mercure (unité) 390
Amplificateur non inverseur 78 Centre de poussée 395
Amplification différentielle 74 Chaîne d'action 81
Analyseur / Polariseur 696 Chaîne de retour 81
Andrews (Isothermes de) 525 Champ électrique disruptif 216, 735
Anémométrie à fil chaud 415 Champ électromoteur 301
Angle d'attaque 439 Champ géomagnétique 260
Angles d'Euler 531 Chevalet 634
Anticyclone / Dépression 368 Cinéma 3D 701
Aplatissement de la Terre 375 Circulation élémentaire 36
Approximation acoustique 659 Clapeyron (Diagramme de) 517, 526
Approximation paraxiale 792 Coefficient d'absorption (ou d'extinction) 788
APU (Auxiliary Power Unit) 486 Coefficient de compressibilité isentropique 660
Armatures d'un condensateur 244 Coefficient de compressibilité isotherme 514
Arrhénius (Loi de) 557 Coefficient de contraction 463
Aston (Courbe de) 240 Coefficient de diffusion de particules (diffusivité) 557
Atmosphère (unité) 390 Coefficient de dilatation isobare 514
Atmosphère isotherme 391, 566 Coefficient de perte de charge linéique 452
Autocollimation 161 Coefficient de Poisson 648
Autodiffusion 556 Coefficient de portance 431
Avion ZERO G 360 Coefficient de traînée 431
Axe rapide, Axe lent 697 Coefficient de transfert thermique de surface 580
Azimut 15 Coïncidence / Anti-coïncidence 190
B Colatitude 15
Bach (Expérience de) 814 Colebrook (Formule de) 452
Balance de Kibble (Balance de Watt) 59 Collimateur 177
Balle de golf 437 Comparateur à hystérésis 79
Balmer (Série de) 806 Comparateur simple 78
Bande de valence, de conduction, interdite 219 Compensatrice 160
Bandes latérales 98 Condition de Kutta 473
Barkhausen (Critère de) 86 Conducteur, isolant, semi-conducteur 216, 219
Beer-Lambert (Loi de) 788 Conductivité électrique 216
Bessel (Equation de) 657 Conductivité électrique complexe 219
Bessel (Fonction de) 657 Conductivité thermique 577
Biot et Savart (Loi de) 260 Cône de Mach 680
Blanc d'ordre supérieur 193 Constante de Boltzmann 529
Boltzmann (Constante de) 529 Constante de Hubble 682
Boltzmann (Facteur de) 529 Constante de Rydberg 806
Bord d'attaque 439 Constante de Stefan 611
Bord de fuite 439 Constante de torsion 338
Bragg (Loi de) 809 Constante électrique 212
Bras de levier 330 Constante magnétique 212
Brewster (Incidence, angle) 695, 779 Contact optique 170
Contraste (Visibilité) 129

865
866 Index

Convection naturelle / forcée 579 Dipôle rigide 250, 275


Copernic (Référentiel de) 347 Direction de polarisation 696
Corde 439 Distribution de charges localisée 232
Corde frappée 635 Distribution de Fermi-Dirac 219
Corde pincée 632 Distribution de Maxwell-Boltzmann 531
Coriolis (Accélération de) 352 Division d'amplitude 124
Corps convexe 608 Division du front d'onde 124
Corps opaque 607 Domaine d'élasticité / plasticité 505
Couche électronique 833 Domaine réactif d'un plasma 774
Couche limite thermique 579 Double produit vectoriel 36
Couette (Ecoulement de) 417 Doublet de charges opposées 235
Couleur des métaux 776 E
Couleur du ciel 696 Ebullition 525
Coulomb (Loi de) 232 Ecoulement de Couette 417
Couplage électromécanique 312 Ecoulement laminaire 432
Couplage magnétique parfait 287 Ecoulement rampant 432
Couple de torsion 338 Ecoulement subsonique / supersonique 480
Courant de déplacement 214 Ecoulement turbulent 435
Courants de Foucault 295 Effet Joule 222, 510, 599
Courbe d'Aston 240 Effet Zeeman 196
Courbe de rosée 527 Effets de bord 244, 246
Courbe d'ébullition 527 Efficacité d'une machine thermique 545
Courbes iso-sensibilité de l'oreille 666 Electrons de conduction / de valence 219
Crève-tonneau de Pascal 390 Electrons libres 217
Crise de traînée 437 Electron-volt 237
Critère de Barkhausen 86 Eléments hypersustentateurs 442
Critère de Rayleigh 139, 198 Emission stimulée 118, 784
Cubes rétro-réflecteurs 798 Emissivité 613
Cycle de Rankine-Hirn 554 Enantiomères 700
Cycle d'hystérésis 80 Energie au repos 803
Cycle moteur / résistant 518 Energie de confinement 822
D Energie de liaison 240
D'Alembert (Paradoxe de) 468 Energie interne / mécanique / totale 507, 508
Davisson et Germer (Expérience de) 808 Energie potentielle d'entraînement 355
De Broglie (Longueur d'onde de) 807 Enoncé de Kelvin du second principe 543
De Broglie (Onde de) 823 Enthalpie 508
De Broglie (Relation de) 807 Entrée inverseuse / non inverseuse 73
Débitmètre Venturi 459 Entropie 511
Debye (Longueur de) 737 Envergure d'une aile d'avion 439
Debye (unité) 252 Epaisseur de peau 296, 307
Décalage vers le rouge 682 Equation de Bessel 657
Décollement de couche limite 435 Equation de continuité 407
Décrochage 440 Equation de Kelvin 308, 583
Densité volumique de charges mobiles 209 Equation de Maxwell-Ampère 211
Densité volumique de courants d'énergie acoustique Equation de Maxwell-Faraday 211
664 Equation de Maxwell-Gauss 211
Densité volumique d'énergie acoustique 664 Equation de Maxwell-Thomson 211
Densité volumique d'énergie électromagnétique 228 Equation de Poisson 229
Densité volumique, surfacique, de courants 209, 210 Equation de Stokes 427
Densité volumique, surfacique, linéique, de charges Equation d'état 501
207, 208 Equation d'état calorimétrique 515
Déplacement élémentaire 11 Equation d'état de Van Der Waals 386
Dépression / Anticyclone 368 Equation d'état thermoélastique 513
Dérivateur 77 Equation d'Euler 427
Dérivée particulaire / locale / convective 399 Equation du télégraphiste 756
Détente de Joule-Gay-Lussac 512, 518 Equation polaire 9
Détente de Joule-Thomson 519 Equilibrage statique 333
Diagramme de Clapeyron 517, 526 Equilibre diphasique (diphasé) 521
Diagramme de Mollier 527 Equilibre radiatif 615
Diagramme de Raveau 544 Equilibre thermodynamique local (E.T.L) 502
Diagramme enthalpique 527 Equinoxe 380
Diagramme entropique 545, 553 Equipartition de l'énergie ondulatoire 651, 652, 671,
Diathermane 503 686, 761
Diélectrique 245, 251 Equivalence masse-énergie 803
Différence de marche 123 Etalement d'un paquet d'ondes 733
Diffraction de Fraunhofer 135 Etat fondamental / Etat excité 116
Diffusivité thermique 582 Etat métastable 788
Dipôle induit 251 Etat ordonné / désordonné 381

866
Index 867

Etat plasma 735 Goudsmit et Uhlenbeck 279


Euler (Angles de) 531 Gouverne de direction 442
Euler (Equation de) 427 Gouverne de profondeur 442
Euler (Nombre de) 67 Green-Ostrogradski (Théorème de) 43
Euler (Schéma de) 105 Guide d'onde 639, 712, 716
Expérience de Bach 814 H
Expérience de Davisson et Germer 808 Hall (Tension) 225
Expérience de Ingen-Housz 601 Harmonique / Fondamental 18
Expérience de Jean Perrin 568 Hautes symétries 237, 265
Expérience de Jönsson 813 Hauteur d'un son 633
Expérience de Millikan 802 Haut-parleurs boomer / woofer / medium / twitter 317
Expérience de Wiener 714 Heisenberg (Principe d'indétermination de) 811
Extinction d'une onde 697 Hooke (Loi de) 647
Extrados 439 Hubble (Constante de) 682
F Hubble (Loi de) 682
Facteur de Boltzmann 529 Hugoniot (Formule de) 480
Facteur de Landé 280 Hydrostatique 389
Faraday (Loi de) 303 I
Fenêtrage 92 Identité thermodynamique 513
Fenêtre de Hanning / Flattop 93 Igloo 590
Filtre interférentiel 201 Impédance caractéristique d'une corde 650
Filtre polarisant 695 Incidence de Brewster (angle) 695, 779
Fission nucléaire 241 Incompressibilité 388
Fluide caloporteur 542 Indice de réfraction 110, 728, 770
Fluide newtonien 418 Ingen-Housz (Expérience de) 601
Fluide parfait 418 Injecteur 493
Fluide rhéofluidifiant, rhéoépaississant, thixotrope Instabilité de Rayleigh-Bénard 579
418 Instruments à vent 673
Flûte / Clarinette 672 Intégrateur 77
Flux élémentaire 36 Intensité d'une onde électromagnétique 690
Flux magnétique propre 282 Intensité lumineuse
Fonction d'Airy 187 Interaction de Van Der Waals (Keesom, Debye,
Fonction de Bessel 657 London) 253, 530
Fonction de transfert 82 Interaction dipôle-dipôle 253
Fonction d'état 502 Interaction forte 240
Fonction gaussienne 29 Interaction ion-molécule (ion-dipôle) 252
Fondamental / Harmonique 18 Interférogramme 203
Forçage radiatif 618 Intrados 439
Force centrifuge / axifuge 355 Inversion de population 788
Force de Magnus 471 Inversion des franges 147
Force de Stokes 433 Ionosphère 742
Force nucléaire 240 Irisations 193
Formule de Borda 338 Isenthalpique 519
Formule de Colebrook 453 Isentropique 512
Formule de dérivation vectorielle 346 Isochore 519
Formule de Fresnel 122 Iso-énergétique 518
Formule de Hugoniot 480 Isothermes d'Andrews 525
Formule des réseaux 179
Franges d'égale épaisseur (franges de Fizeau) 164 J
Franges d'égale inclinaison (franges de Haidinger) Jean Perrin (Expérience de) 568
169 Jönsson (Expérience de) 813
Fraunhofer (Diffraction de) 135 Joule (Lois de) 516
Fraunhofer (Montage de) 137 Joule-Gay-Lussac (Détente de) 512, 518
Frein (vérin) hydraulique 390 Joule-Thomson (Détente de) 519
Freinage électromagnétique 304 Karman (Allée de rouleaux de) 438
Fréquence de Nyquist 88 Kelvin (Equation de) 308, 583
Fresnel (formule de) 122 Klein-Gordon (Relation de) 742
Frettes 634 Kutta (Condition de) 473
Froude (Nombre de) 67, 463 Kutta-Joukowski (Théorème de) 472
Fusée Ariane 481 L
Fusible 599 Lacet 442
Fusion nucléaire 241 Lagrange (Théorème de) 456
G Lame à retard 697
G.I Taylor 62 Lame demi-onde 697
Gamme tempérée 634 Lame quart d'onde 697
Gamow (Théorie de) 853 Lampe spectrale à basse pression 117
Goniomètre 177 Laplace (Lois de) 516
Laser monomode 792

867
868 Index

Latitude 15 Moment d'inertie 329


Laval (Tuyère de) 480 Monobare 519
Lenz (Loi de) 304 Monochromateur 198
Libre parcours moyen 220, 382, 558 Monochromatique 119
Lift et coupé au tennis 472 Monopôle électrique 247
Ligne de courant 397 Monotherme 520
Loi d'Arrhénius 557 Montage de Fraunhofer 137
Loi de Beer-Lambert 788 Moteurs Vulcain 481
Loi de Biot et Savart 260 Mouvement brownien 533
Loi de Bragg 809 N
Loi de Coulomb 232 Nano-constructions 852
Loi de déplacement de Wien 610 Newton (Loi de, thermique) 580
Loi de Faraday 303 Niveau de Fermi 219
Loi de Hooke 647 Nombre de complexions 512, 536
Loi de Hubble 682 Nombre de Froude 67, 463
Loi de Lenz 304 Nombre de spin 279
Loi de l'hydrostatique 389 Nombre de Strouhal 67
Loi de Malus 696 Nombre d'Euler 67
Loi de Newton (thermique) 580 Nombre d'ouverture 138
Loi de Planck 610 Nyquist (Fréquence de) 88
Loi de Rayleigh-Jeans 801
Loi de Stefan 611 O
Loi des nœuds 215 Octave 634
Loi d'Ohm locale 216 Oculaire 177
Loi phénoménologique 577 Ohm (Loi de, locale) 216
Lois de Descartes de la réflexion 713 Onde de de Broglie 823
Lois de Joule 516 Onde localement plane 675, 717
Lois de Laplace 516 Onde longitudinale 647, 668
Longueur de Debye 737 Onde transversale 625, 689
Longueur de Rayleigh 793 Ondes cohérentes / incohérentes 121
Longueur d'onde 626 Optique adaptative 138
Longueur d'onde de de Broglie 807 Ordres de grandeur numériques / littéraux 68, 69
Lunette de visée 177 Oscillations de la molécule d'ammoniac 858
Ouverture numérique 809
M
Mach (Cône de) 680 P
Machine monotherme / ditherme 543 Paquet d'ondes 730
Magnétohydrodynamique 387 Paquet d'ondes gaussien 827
Magnus (Force de) 471 Paradoxe de d'Alembert 468
Maître-couple 430 Paramètre plasma 736
Malus (Loi de) 696 Paramètres d'état extensifs / intensifs 501
Manomètre à colonne de liquide 389 Particules diffusantes / support 556
Marconi (Transmissions transatlantiques) 743 Pascal (Crève-tonneau de) 390
Marnage 378 Perméabilité du vide 212
Mascaret 466 Permittivité du vide 212
Maser 859 Permittivité relative 245
Matériaux biréfringents 705 Perte de charge 446, 541
Matrice déformation 403 Perte de charge régulière / singulière 451
Maxwell-Ampère (Equation de) 211 Phase d'une onde 109, 727
Maxwell-Boltzmann (Distribution de) 531 Phase fluide ou supercritique 523
Maxwell-Faraday (Equation de) 211 Phénomène de Gibbs 20
Maxwell-Gauss (Equation de) 211 Phone (unité) 666
Maxwell-Thomson (Equation de) 211 Phonon 576
Méthode de perturbation 365 Photoélasticimétrie 706
Micro-état / Macro-état 501 Photorécepteur 120
Microscope à effet tunnel 851 Planck (Loi de) 610
Milieu absorbant 734 Plank-Einstein (Relation de) 802, 807
Milieu actif 734, 789 Point amphidromique 379
Milieu transparent 110, 728 Point coïncidant 349
Milieux L.H.I 215 Point critique 523, 526
Millikan (Expérience de) 802 Point d'arrêt dans un écoulement 462
Minimum de déviation 181 Point triple 522
Mode propre fondamental / harmonique 631 Poisson (Coefficient de) 648
Modèle de Thomson 251 Poisson (Equation de) 229
Modulation d'amplitude / de fréquence / de phase 96 Polarisabilité 251
Module d'Young 648 Polarisation par diffusion et réflexion 694
Molécules chirales 700 Polarisation rectiligne, elliptique, circulaire 692, 693
Molécules chromophores 196 Polariseur / Analyseur 696
Mollier (Diagramme de) 527 Pont thermique 589

868
Index 869

Porteuse 97 Seiches 686


Potentiel des vitesses 404 Séparatrice 124, 159
Pourcentage de liaison ionique 252 Série de Balmer 806
Pouvoir de résolution 197, 200 Seuil d'intensité acoustique de douleur 665
Poynting (Vecteur de) 228 Seuil d'intensité acoustique détectée 665
Premier principe "industriel" 539 Siffleur atmosphérique 747
Pression cinétique / moléculaire 385 Signal modulant 97
Pression de vapeur saturante 525 Sillage 428
Pression statique, dynamique, totale 462 Similitude 64
Principe d'indétermination de Heisenberg 811 Slew-rate 75
Produit mixte 36 Solide cristallin / amorphe 381, 382
Profondeur de pénétration thermique 595 Solution racémique 700
Propagation non dispersive 625 Source de lumière blanche 118
Propergols / carburant / comburant 480 Sous-couche électronique 833
Puissance instantanée 10 Sous-détente / Sur-détente 482
Puissance thermique 539 Sous-refroidissement 548
Puissance utile 539 Spectre cannelé 194
Pulsation cyclotron 745 Spectre d'une fonction 18
Pulsation plasma 739 Spectre sonore audible 665
Pulsation spatiale 626 Spin 277
Q Spin électronique 279
Quantification des pulsations 630 Stefan (Constante de) 611
Quantum de tension 91 Stefan (Loi de) 611
Stéréoscopie 701
R Stokes (Equation de) 427
Radar routier 677 Stokes (Force de) 433
Radioactivité alpha 853 Stokes (Théorème de) 40
Rapport de compression 479 Strouhal (Nombre de) 67
Rapport de forme 440 Suiveur 76
Rapport gyromagnétique 276 Surchauffe 548
Raveau (Diagramme de) 544 Surface alaire 439
Rayleigh (Critère de) 139 Surface de localisation 134
Rayleigh (Longueur de) 793 Surface équiphase (surface d'onde) 113
Rayleigh-Bénard (Instabilité de) 579 Surface équipotentielle 50
Rayleigh-Jeans (Loi de) 801 Surface libre 389
Rayonnement d'un dipôle oscillant 694 Surfaces d'interférence 130
Référentiel de Copernic 347 Surfaces isobares 389
Référentiel géocentrique 347 Surmodulation 97
Référentiel héliocentrique 347 Surpression 659
Référentiel terrestre 350 Symétrie / Antisymétrie 233, 262
Régime torrentiel / fluvial 464 Système ouvert / fermé / isolé 501
Règle des moments 527
Relation de de Broglie 807 T
Relation de dispersion 723 Tache d'Airy 135
Relation de Klein-Gordon 742 Tangage 442
Relation de Planck-Einstein 802, 807 Taux de modulation 97
Relations de passage du champ électromagnétique Teinte plate 194
707 Teintes de Newton 193
Relativité de Galilée et d'Einstein 354 Télescope à miroir liquide 393
Rendement électro-acoustique d'un haut-parleur 316 Température ionique / électronique 736
Rendement thermodynamique 546 Temps de cohérence 117
Résistance d'entrée 75 Temps de vidange 463
Résistance d'un conducteur filiforme 221 Temps moyen de vol 382
Résistance hydraulique 448 Tension de saturation 74
Résolution fréquentielle 92 Tension Hall 225
Ressaut hydraulique 466 Théorème de Green-Ostrogradski 43
Reynolds (Théorème de) 477 Théorème de Kutta-Joukowski 472
Rosée 525 Théorème de Lagrange 456
Rouleaux de convection 579 Théorème de Reynolds 477
Roulis 442 Théorème de Schwarz 3
Rugosité 437, 451 Théorème de Stokes 40
Rugosité relative 452 Théorème de Vaschy-Buckingham 60
Rydberg (Constante de) 806 Théorème d'équipartition de l'énergie 531
Théorie de Gamow 853
S Théorie du Big Bang 618
Schéma d'Euler 105 Thermographie infra-rouge 613
Schwarz (Théorème de) 3 Thomson (Modèle de) 251
Section efficace de choc 382 Timbre d'un son 633
Sédimentation 567 Titre massique en vapeur 525

869
870 Partie VII.  Index

Tourbillon de démarrage 473 Vecteur de Poynting 228


Tours aéroréfrigérantes 551 Vecteur d'onde 626
Transfert conducto-convectif 580 Vecteur tourbillon 403, 404
Transformation élémentaire (infinitésimale) 6 Vélocimétrie laser 155, 416
Transformation isochore, monobare, monotherme, Vélocimétrie par image de particules 416
adiabatique 519, 520 Venturi (Débitmètre) 459
Transformations quasi-statiques 504 Verres anti-reflet 187
Transformée de Fourier inverse 23 Viscosité cinématique 425
Transparence d'une pupille 140 Viscosité dynamique 418
Transparence ultra-violette des métaux 749 Visibilité (Contraste) 129
Travail / Chaleur 509 Vitesse absolue 348
Travail de sortie ou d'extraction 802, 851 Vitesse de balayage limite 75
Travail de transvasement 538 Vitesse de décollage 440
Travail élémentaire (infinitésimal) 6 Vitesse de phase 109, 727
Travail utile 538 Vitesse débitante 423
Trompe à eau 460 Vitesse d'entraînement 348
Tsunamis 685 Vitesse relative 348
Tube de champ élémentaire 52 Vol plané 443
Tube piézométrique 459 W
Tunnel hydrodynamique 432 Waist 793
Tuyère adaptée 482 Wien (Loi de déplacement de) 610
Tuyère de Laval 480 Wiener (Expérience de) 714
V Y
Valeur pleine échelle 91 Young (Module de) 648
Valeurs efficaces 92
Van Der Waals (Equation d'état de) 386 Z
Van Der Waals (Interactions) 530 Zeeman (Effet) 196
Variance 521 Zone de rayonnement 675
Vaschy-Buckingham (Théorème de) 60 Zone de recirculation 435

870
CAHIER COULEUR
1. BATTEMENTS OPTIQUES page 189

2. INTERFÉRENCES AVEC UNE SOURCE DE


LUMIÈRE BLANCHE page 192

Interféromètre de Michelson en coin d’air

i
ii
Spectre cannelé

Mesure de l’épaisseur d’une lame de verre

iii
3. SPECTROSCOPIE / POUVOIR DE RÉSOLUTION
3. SPECTROSCOPIE / POUVOIR DE RÉSOLUTION
page 195
Spectroscopie avec un réseau de fentes
Spectroscopie avec un réseau de fentes

Spectroscopie avec un interféromètre de Fabry-Pérot


Spectroscopie avec un interféromètre de Fabry-Pérot

iv
iv
4. POLARISATION PAR RÉFLEXION VITREUSE ET
PAR DIFFUSION page 694

Polarisation par réflexion vitreuse / angle de Brewster

v
Polarisation par diffusion

5. INTERFÉRENCES ET POLARISATION page 703

vi
vii
6. RAYONNEMENT THERMIQUE /
THERMOGRAPHIE page 613

viii
871

TABLE DES MATIÈRES

Partie I. BOÎTE À OUTILS

Différentielles et formes différentielles ....................................................................................... 3


Les systèmes de coordonnées ................................................................................................... 11
Analyse de Fourier ...................................................................................................................... 17
Champs et opérateurs différentiels ............................................................................................ 33
Grandeurs physiques : dimensions et unités ............................................................................. 57

Partie II. ÉLECTRONIQUE

Production, acquisition et traitement d’un signal électrique ...................................................... 73

Partie III. OPTIQUE

Modèle scalaire des ondes lumineuses ..................................................................................... 109


Interférences lumineuses ........................................................................................................... 121
Interférences par division du front d’onde .................................................................................. 135
Interférences par division d’amplitude : interféromètre de Michelson ....................................... 159
Interférences à N ondes ............................................................................................................. 173
Interférences en lumière polychromatique ................................................................................. 189

Partie IV. ÉLECTROMAGNÉTISME

Les équations de Maxwell .......................................................................................................... 207


Électrostatique ............................................................................................................................ 229
Magnétostatique ......................................................................................................................... 259
Électromagnétisme dans l’A.R.Q.S ............................................................................................ 291

Partie V. MÉCANIQUE

Révisions et compléments : mouvement d’un solide ................................................................. 325


Dynamique dans un référentiel non galiléen .............................................................................. 345
Statique des fluides .................................................................................................................... 381
Description d’un fluide en mouvement ....................................................................................... 397
Dynamique des fluides ............................................................................................................... 417
Écoulements parfaits .................................................................................................................. 455
Bilans macroscopiques .............................................................................................................. 475
872 Table des matières

Partie VI. THERMODYNAMIQUE

Révisions et compléments : les principes de la thermodynamique .......................................... 501


Systèmes ouverts en régime stationnaire .................................................................................. 537
Diffusion de particules ................................................................................................................ 555
Diffusion thermique ..................................................................................................................... 575
Rayonnement thermique ............................................................................................................ 607

Partie VII. PHYSIQUE DES ONDES

Phénomènes de propagation non dispersifs : équation de d’Alembert ..................................... 621


Ondes acoustiques dans les fluides ........................................................................................... 659
Ondes électromagnétiques dans le vide .................................................................................... 687
Dispersion et atténuation / O.P.P.H électromagnétiques dans les plasmas et les conducteurs 721
Interfaces entre deux milieux ..................................................................................................... 763
Introduction à la physique du laser ............................................................................................ 783
Révisions et compléments : introduction à la mécanique quantique ........................................ 801
Approche ondulatoire de la mécanique quantique .................................................................... 823

CAHIER COULEUR

Battement optique
Interférences avec une source de lumière blanche
Spectroscopie / pouvoir de résolution
Polarisation par réflexion vitreuse et par diffusion
Interférences et polarisation
Rayonnement thermique / thermographie
Cet ouvrage aborde l’ensemble du cours de Physique de la classe de
CPGE PC / PC*. Il reprend de nombreux points du programme de PCSI.

Il contient :
ͥ  n cours très complet, dont la rédaction est particulièrement soignée
u
et s’appuie sur de nombreuses illustrations ;
ͥ l es points délicats détaillés, afin que les étudiants trouvent des ré-
ponses à la plus grande partie de leurs questions ;
ͥ de très nombreuses applications classiques qui ont été choisies pour
leur intérêt, l’éclairage qu’elles apportent au cours, la diversité des
techniques de résolution qu’elles font intervenir, et qui font l’objet de
nombreux sujets d’écrits et d’oraux ;
ͥ l es outils mathématiques (différentielles, champs de vecteurs et de
scalaires, analyse de Fourier, analyse dimensionnelle) ;
ͥ  uelques compléments hors-programmes pour leur intérêt culturel
q
et leur utilisation fréquente dans les T.I.P.E. Ils sont clairement identifiés
afin d’être éventuellement réservés à une deuxième lecture plus ap-
profondie.

Cet outil de travail complet, utile et agréable par la clarté du cours, la


rigueur du contenu, la variété et la richesse des applications proposées,
est écrit spécialement pour les étudiants qui préparent les concours
d’entrée aux E.N.S. et aux plus grandes écoles d’ingénieurs, les étudiants
en Master et les candidats aux concours d’enseignement (CAPES, Agré-
gation).

Pascal OLIVE, ancien élève de l’E.N.S. Lyon, est professeur de chaire supérieure. Il enseigne
la Physique et la Chimie dans la classe de PSI* du Lycée Montaigne de Bordeaux depuis 2007.

Du même auteur :

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