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RAMÈNE ta

S C I E N C E

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L A S C I E N C E

D A N S LES JEUX VIDÉO

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La Science prend de plus en plus de place dans les jeux-vidéos aujourd’hui ! On
vous explique tout avec Daniel Hennequin, chercheur CNRS à l’Université de Lille.
Aujourd’hui, vous nous parlez de la science dans les jeux vidéo. À l’occasion de la
scientific game jam qui va se tenir le week-end prochain dans plusieurs villes de
France, et notamment à Lille, sur le campus de la cité scientifique à Villeneuve d’Ascq,
où c’est organisé par Lilliad Learning Center Innovation.

Et c’est quoi, une scientific game


jam ? Ça se traduit comment
en français ? Et qu’est-ce que ça
a de scientifique ?
Alors à ma connaissance, ça ne se traduit pas. La jam, les amateurs
de jazz connaissent, c’est une séance d’improvisation. Une game
jam, c’est donc une séance d’improvisation autour du jeu vidéo,
un hackaton, ou si vous préférez un marathon pendant lequel
chaque équipe doit créer un jeu vidéo.
Une équipe de scientific game jam comprend, en plus des codeurs
et des graphistes, un scientifique, en l’occurrence dans notre cas
un doctorant, et l’objectif est de créer un jeu vidéo en s’inspirant
de son sujet de thèse.

Et ça donne quoi au final ?


Eh bien, dans les éditions précédentes, il y a eu par exemple Cold
Vibes, où vous êtes dans la peau d’un chercheur en glaciologie qui
est tombé dans un glacier et qui doit trouver la sortie. Ou Bob l
e photon, où vous devez quider la lumière pour qu’elle rentre dans
une fibre optique. Et croyez-moi, ce n’est pas si simple que ça
en a l’air, car les lois de la physique sont claires : la lumière ne se

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propage qu’en ligne droite, et il faut donc utiliser des miroirs
et d’autres optiques pour éviter les obstacles.

Mais vous parlez des lois


de la physique. Les créateurs
de jeux vidéo ne s’en
préoccupent pas vraiment,
le but d’un jeu vidéo n’est pas
d’être réaliste !
Alors détrompez-vous. Il y a plein de très bonnes raisons pour
mettre de la vraie science dans un jeu vidéo. Tout simplement
parce qu’il faut que l’univers du jeu colle a minima avec la réalité.
Par exemple, dans un jeu vidéo, vous pouvez tomber. Et si vous
pouvez tomber, c’est qu’il y a de la gravité. Et ce sont bien les lois
de la gravité qui sont utilisées pour simuler les chutes ou calculer
les trajectoires des objets lancés dans les jeux vidéo. Il y a parfois
des écarts à la réalité, pour rendre le jeu plus ludique, comme par
exemple le double saut de Mario dans Super Mario.

Mais on trouve au contraire des jeux qui se veulent le plus fidèle


possible aux lois de l’univers réel, comme les simulateurs de
vol, y compris les simulateurs de vols spatiaux. Et la tendance
aujourd’hui est justement de mettre de plus en plus de science,
et en particulier de physique, dans les jeux vidéo. Je suis obligé de
vous parler de David Louapre, un physicien que certains d’entre
vous connaissent peut-être à travers sa chaîne Youtube « Science
étonnante », et dont je me suis beaucoup inspiré pour la chronique
d’aujourd’hui.

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REPRODUIRE
LES VRAIES COULEURS
A V E C L A S C I E N C E

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Un phénomène expliqué par Daniel Hennequin, chercheur CNRS à l’Université de
Lille ! Des couleurs, des couleurs, des couleurs. Aujourd’hui, vous nous parlez de
photographie en couleur. C’est pas vraiment un sujet d’actualité, si

Alors je ne vais pas vous parler d’images ou de photographies en couleur. Ça,


effectivement, on en fait depuis plus d’un siècle. Non, je vais vous parler de la
photographie des couleurs, ce qu’on ne fait toujours pas.

Qu’est-ce que vous voulez dire ?

Eh bien, dans la nature, il y a une infinité de couleurs, et nous,


nous sommes capables d’en distinguer environ 2 millions. Par
contre, tous les dispositifs que nous utilisons pour enregistrer ou
reproduire les couleurs n’en différencie que 3. Par exemple, les
écrans ne génèrent que du bleu, du rouge et du vert. Et c’est pareil
pour les imprimantes, dans lesquelles on met seulement trois
encres de couleur différentes, du jaune, du cyan et du magenta

Oui, mais avec trois couleurs,


on peut reconstituer toutes
les autres couleurs ?
Eh non, justement. Avec 3 couleurs, on n’a que trois couleurs, et
on n’envoie dans les yeux que 3 couleurs, et pas les millions de
couleurs différentes qu’on a dans la nature.

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Mais tout de même, on voit plus
que 3 couleurs quand on regarde
l’écran de son smartphone.
Eh bien non, en fait, nos yeux ne voient que 3 couleurs, et c’est
notre cerveau qui, à partir de ces 3 couleurs, est capable d’en
reconstituer des centaines de milliers. C’est parce que notre œil
lui-même ne distingue que 3 gammes de couleur. Au fond de l’œil,
dans la rétine, on a des capteurs, qu’on appelle des cônes, qui sont
sensibles à la lumière sur des gammes de couleur différentes.
J’insiste, les cônes ne sont pas sensibles aux couleurs, mais
seulement à la quantité de lumière. Simplement, les cônes que
l’on appelle les cônes bleus ne voient que la lumière violette, bleue
et verte. Ils ne voient ni le jaune ni le rouge. Par contre, les cônes
rouges sont sensibles à la lumière verte jaune et rouge, mais pas
au bleu ni au violet. Du coup, si l’œil reçoit de la lumière rouge, le
cerveau reçoit un signal électrique des cônes rouges uniquement
et pas des cônes bleus, et c’est de cette façon qu’il sait que la
lumière reçue par l’œil est rouge.

Et on a trois types de cônes


différents, c’est ça ?
Oui, les bleus et les rouges, dont je viens de parler,
et on a aussi des cônes verts, qui permettent de voir des couleurs
intermédiaires. Du coup, en analysant la valeur relative des
signaux électriques envoyés par les trois types de cône, le cerveau
est capable de distinguer des couleurs naturelles différentes,
jusqu’à 2 millions de teintes différentes. Et le principe des
images en couleur, c’est d’envoyer dans l’œil trois images de trois
couleurs différentes, destinées à chacun des trois types de cône.

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L’idée est qu’en jouant sur l’inten-sité relative des 3 couleurs, on
doit pouvoir tromper le cerveau et lui faire reconstituer toutes
les couleurs naturelles. Sauf que ça ne marche pas, parce que
nos sources de lumière bleues, rouges et vertes n’ont pas les
mêmes caractéristiques que les cônes de nos yeux. Le résultat,
c’est qu’avec nos écrans, nos photographies couleur ou nos
imprimantes, on reproduit moins de la moitié des couleurs
naturelles.

Mais c’est quelles couleurs qu’on


n’arrive pas à reproduire ?
Ce sont par exemple les teintes les plus éclatantes, ce qu’on
appelle les couleurs métalliques, ou aussi les couleurs
fluorescentes. En fait pour les obtenir sur une image, il faudrait
enregistrer les vraies couleurs de la nature, pas juste trois
couleurs moyennes.

Et ça, on ne sait pas le faire ?


Si. Il existe un procédé, qu’on appelle la photographie
interférentielle, inventé il y a plus de 130 ans par un français,
Gabriel Lippmann, qui a d’ailleurs reçu le prix Nobel de Physique
pour ça. Et c’est un procédé qui a été perfectionné à la faculté
des Sciences de Lille, par un autre physicien, Auguste Ponsot.
Alors ce procédé n’a pas eu de succès commercial, mais on a
retrouvé des photographies prises par Auguste Ponsot, et elles
sont encore visibles pendant une semaine dans l’exposition qui
leur est consacré à Villeneuve d’Ascq. Ce qui est extraordinaire
quand on regarde ces photographies, c’est qu’on perçoit tout
de suite qu’elles ont un rendu des couleurs qui n’a rien à voir

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avec les photos habituelles. Si vous en avez l’occasion, allez-y,
c’est très rare de pouvoir accéder à des photos interférentielles,
tout simplement parce qu’il n’y en a pas beaucoup. Du coup, en
analysant la valeur relative des signaux électriques envoyés
par les trois types de cône, le cerveau est capable de distinguer
des couleurs naturelles différentes, jusqu’à 2 millions de teintes
différentes. Et le principe des images en couleur, c’est d’envoyer
dans l’œil trois images de trois couleurs différentes, destinées à
chacun des trois types de cône. C’est gratuit, et je vous mets toutes
les infos sur le site ramenetascience.fr.

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LES SECRETS S C I E N T I F I Q U E S

D E S O E U V R E S D ’A R T

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Aujourd’hui, vous nous parlez d’œuvres d’art

Oui, car mercredi prochain, le 8 mars donc, il y aura à Lilliad Learning Center
Innovation, sur la cité scientifique à Villeneuve d’Ascq, une conférence ouverte à tous
et gratuite du journaliste et chroniqueur Loïc Mangin, qui nous révèlera quelques
secrets scientifiques des œuvres d’art.

Et vous allez nous dévoiler avant l’heure quelques-uns de ces secrets !

Bien sûr ! Il y a par exemple celui qui concerne le christ en croix de Salvador Dali
intitulé Corpus Hypercubus. Eh bien cette toile est une véritable fenêtre sur la 4e
dimension ! Dali y a représenté la croix sous la forme d’un hypercube de dimension
4 vu depuis notre espace à trois dimensions. Oui, Dali avait quelques bonnes notions
de mathématiques ! Un autre exemple concerne le retable de l’agneau mystique des
frères Van Eyck, que l’on peut admirer dans la cathédrale de Gand. Le secret concerne
le fruit que Ève tient dans sa main.

Ce n’est pas une pomme ?


Non. Et en fait, il n’est écrit nulle part dans la bible que le fruit
défendu était une pomme. Lucas Cranach représente une pomme
dans son Adam et Ève, mais Michel Ange représente une figue
dans la chapelle Sixtine. Dans le retable des frères Van Eyck,
ce n’est clairement pas une pomme, la peau ressemble à celle
d’un agrume, et il a fallu une véritable enquête pour finalement
identifier … une pomme d’Adam. C’est le nom d’une variété de
citron que Jan Van Eyck a probablement découverte lors
d’un de ses voyages en Espagne.

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Ève qui croque dans
une pomme d’Adam ! Génial !
La science permet aussi de dater des œuvres d’art très
précisément. C’est cette fois l’astronomie et la géographie qu’on
va solliciter. La position de la lune dans le tableau Lever de lune
– Meules de foin de Vincent van Gogh permet de savoir qu’il a été
peint le 13 juillet 1889 à 21h08. Le niveau de la marée et la position
du soleil dans le tableau Impression soleil levant de Monnet
permet de le dater au mercredi 13 novembre 1872, à 7h35…
Et puis la science permet aussi de comprendre les astuces des
artistes pour réaliser leurs oeuvres et leur donner un caractère
unique. C’est par exemple la physique qui permet de comprendre
le petit miracle des couleurs de la coupe de Lycurge.

La coupe de Lycurge ?
C’est une coupe romaine en verre du 4e siècle, qui se trouve
actuellement au British Museum. Quand vous éclairez la coupe
normalement, elle est verte. Si vous mettez la source de lumière
à l’intérieur de la coupe, elle est rouge.

Elle change de couleur


en fonction de la position
de l’éclairage ?
Exactement ! Et c’est parce qu’elle est constituée d’un verre,
le rubis doré, qui contient des paillettes d’or. Ce sont des
paillettes nanométriques, donc invisibles à l’œil nu, et ce qui est
extraordinaire, c’est que ce ne sont pas des colorants
ou des pigments, ce qui donne habituellement leur couleur aux
objets.

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Mais alors d’où viennent les
couleurs ?
C’est ce qu’on appelle des couleurs structurales, parce qu’elles
proviennent de l’interaction de la lumière avec la structure même
du matériau. On trouve aussi des couleurs structurales avec les
ailes de papillon, notamment le morpho, d’un bleu très métallique
quand on le regarde par réflexion,
alors que les ailes sont transparentes si la source d’éclairage
est derrière le papillon. Pour en savoir plus, je vous encourage
à venir écouter Loïc Mangin mercredi prochain. Et si vous avez
le temps, venez un peu en avance et visitez l’exposition sur
les plaques précieuses d’Auguste Ponsot, dans le bâtiment juste
en face. Vous verrez des photographies en couleurs structurales
justement. Elles sont centenaires, et comme il n’y a pas de
pigments, elles n’ont pas pris une ride, et leurs couleurs sont bien
plus éclatantes que les photos habituelles. Je vous ai mis comme
toujours toutes les infos sur le site ramenetascience.fr.

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