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Le roule de l’audit interne dans le renforcement de la transparence de la

gestion publique

L’introduction
L’évolution démographique que connais la plupart des pays actuellement a mis les décideurs
publics face à plusieurs défis liés à la disponibilité et à la qualité des services publics. En effet,
L’homogénéisation à l’échelle internationale des besoins sociaux engendrée par la
mondialisation culturelle, et l’évolution du niveau intellectuel de la population ont fait en sorte
que les concitoyens sont de plus en plus conscients de leurs droits à un service public de qualité.
Des droits qui touchent notamment l’éducation, la santé, la sécurité, etc.
Dans ce sens, la pression sur l’administration centrale est devenue importante et la capacité de
satisfaire ou d’accompagner ces exigences est devenue une condition de la stabilité politique
et sociale d’un pays. À cet égard, la qualité des prestations publiques est devenue un souci
majeur des managers publics. Une qualité qui devrait être assurée par la bonne gestion des
deniers publics. Dès lors, l’approche qualité représente la vision du management moderne
développé lors de l’apparition du courant du New Public Management (NPM). Un courant de
pensée qui introduit des pratiques managériales importées des entreprises privées permettant
aux administrations publiques d’adopter une culture basée sur les objectifs de résultat et de
rationalisation des coûts.
Au Maroc, le NPM a évolué en parallèle avec le développement du principe de la bonne
gouvernance soutenue par les donateurs internationaux (FMI, Banque Mondiale) qui exigent
aux pays membres et clients une amélioration de la gouvernance publique. Ainsi, depuis la fin
des années 90, des réformes ont été conçues successivement afin d’édifier une administration
performante et moderne. Il s’agit du pacte de la bonne gestion en 1998, le Plan de
Développement Economique et Social (2000-2004), le Programme d’Appui à la Réforme de
l’Administration Publique (PARAP) en 2003-2011, la réforme de la fonction publique
territoriale. Ces réformes visent à répondre aux objectifs de la transparence et de la bonne
gouvernance exigées aux administrations et qui devraient se traduire par l’offre d’un service
public efficace et efficient. Dans le même ordre d’idée, le pouvoir public au Maroc, conscient
des nouveaux enjeux de la gestion du service public, s’est inscrit dans un mouvement de
modernisation visant à introduire les nouveaux outils de gestion, inspirés du monde des
entreprises privées, dans le mangement public. Ainsi, le recours à l’audit, au contrôle de
gestion, et au management de la qualité, vise à introduire la logique du « service au client »
dans la culture du management public. Cette nécessité managériale est devenue ainsi une
obligation réglementaire suite au discours royal du 29 juillet 2017 qui prône la stricte
application des dispositions de l’alinéa 2 de l’Article premier de la Constitution relatif à
l’établissement d’une corrélation entre responsabilité et reddition des comptes.
De ce fait, nous visons à analyser la question du rôle des nouveaux instruments de la gestion
publique dans l’amélioration de l’efficacité du service publique. Plus particulièrement, nous
nous focalisons sur le rôle de l’audit comme un outil de gestion précieux entre les mains des
décideurs publics pour bien piloter la performance des administrations publiques.
Dans ce sillage, une problématique s'impose comme suit : Quel est le rôle de l’audit interne
dans le renforcement de la transparence de la gestion publique ?
1. État des lieux de l’audit public au Maroc
Les pratiques de contrôle et d’audit au niveau du secteur public marocain se sont développées
et se sont enrichies constamment sous l’effet combiné de la doctrine et de la pratique. Par
ailleurs, d’autres facteurs ont contribué à l’approfondissement et au perfectionnement des
techniques et des principes de contrôle et d’audit. On peut mentionner à cet égard des facteurs
d’ordre institutionnel, managérial et réglementaire.
Sur le plan institutionnel, suite aux crises économiques et financières marquées par
l’endettement et l’aggravation des tensions sociales dans les pays sous-développés, les
institutions internationales, ont pris conscience, dans le cadre de leurs interventions, de la
nécessité des fonctions de l’audit et du contrôle, sous l’égide de la gouvernance. À cet effet,
ces institutions ne cessent de recommander aux administrations publiques d’avoir en leur sein
des entités chargées de l’audit et du contrôle. À cela il faut ajouter que le Maroc, a procédé
depuis son indépendance à des aménagements institutionnels et organisationnels du contrôle et
d’audit. Dans ce sens, il a été créé en 1960 l’institution de la commission nationale des comptes
qui allait devenir en 1979 la Cour des Comptes. Cette institution, ayant été constitutionnalisée
comme étant une juridiction financière, à travers ses recommandations est à l’origine de
nombreux changements et adaptations organisationnels au niveau de l’administration publique
marocaine. En parallèle, le Maroc est membre adhérant à un ensemble à des organisations
internationales et régionales de l’audit et contrôle, en l’occurrence l’INTOSAI, l’AFROSAI et
l’ARABOSAI.
Sur le plan managérial, l’adoption des principes issus de la bonne gouvernance et du NPM
nécessite la mise en place d’un système de contrôle et d’audit interne.
D’abord, la performance et l’efficacité, dont sont redevables les responsables des
administrations publiques, sont tributaires d’un système d’audit interne efficace.
Ensuite, l’introduction de l’approche par les résultats et sa réussite dans les administrations
publiques restent dépendantes de l’efficacité et la pertinence du système d’audit interne, lequel
est garant de la qualité de l’information et de la responsabilisation des décideurs.
Plus, le processus de la régionalisation avancée dans lequel s’est engagé pleinement le Maroc,
nécessite un transfert de pouvoir et de latitude du niveau central vers le niveau déconcentré et
territorial en vue d’atteindre un niveau élevé d’autonomie sur le plan financier et administratif.
Ce processus de transfert de pouvoir nécessite des actions de contrôle et d’audit dans l’objectif
d’avoir une assurance pour les pouvoirs centraux de la bonne foi et de la bonne gestion des
décideurs territoriaux. À cela s’ajoute l’impératif de suivi de l’implémentation des orientations
stratégiques de l’État sur le plan territorial.
En revanche, il n’en demeure pas moins que cette pratique n’a pas encore atteint un niveau de
maturité suffisant. Cela s’explique non seulement par l’exigence d’un véritable effort de son
adaptation, mais également par la prise en considération des spécificités du secteur public et
les contraintes bureaucratiques et réglementaires lors de son intégration.
Sur le plan réglementaire, le discours royal du 29 juillet 2017 a dressé un jugement sévère de
l’administration marocaine en l’a qualifiant, sur un ton dur, de faible et irresponsable. Par
ailleurs, il a mis l’accent sur la nécessité d’une application stricte des dispositions de l’alinéa 2
de l’Article premier de la Constitution, alinéa qui établit une corrélation entre responsabilité et
reddition des comptes.
Par ailleurs, la reddition des comptes est un principe, tel qu’il a été constitutionnalisé, trouve
son prolongement dans le paradigme du new public management, qui est devenu aujourd’hui
le socle des principes de gestion moderne de l’administration publique. C’est un principe qui
oblige chaque responsable de rendre ses comptes aux ayants droits. Dans ce sens, vu sa
compatibilité avec la reddition des comptes et son efficacité dans le secteur privé, l’audit
interne s’avère plus que jamais indispensable pour les organisations publiques marocaines. En
vertu des dispositions de la constitution, notamment ses articles 42, 50, 85 et 132, les finances
publiques marocaines ont subi des réformes profondes incarnées dans la loi organique n°130-
13 relative à la loi de finances. Cette loi organique, considérée comme la constitution financière
du pays, est l’une des réformes phares engagées, qui vise la refonte du contrôle de la dépense
publique et la mise en place de l’audit de performance en vue de la certification des comptes
publics pour une meilleure qualité comptable. Sur le plan réglementaire, l’existence d’entités
d’audit et de contrôle, dans les structures organisationnelles des départements ministériels, est
devenue indispensable depuis l’entrée en vigueur du décret n° 2-05-1369 du 29 Chaoual 1426
(2 décembre 2005) fixant les règles d'organisation des départements ministériels et de la
déconcentration administrative , et ce, en vertu de l’article 6 dudit décret qui stipule que les
décrets portant sur l’organisation et attributions des départements ministériels devront
comporter obligatoirement les structures administratives chargées des missions d'audit et de
contrôle de gestion. Dans la même veine, le décret n°2.07.1235 du 04 novembre 2008 relatif
au contrôle des dépenses de l’État (CDE), vise l’organisation et la modulation de l’activité de
contrôle des finances publiques et ce, via l’intériorisation de contrôle à priori ou de régularité
des dépenses publiques dans les services gestionnaires des ordonnateurs, chose qui permettra
le partage de la responsabilité du contrôle entre l’ordonnateur et le comptable. En d’autres
mots, il est devenu inéluctable aux ordonnateurs de se disposer des organes de contrôle et
d’audit permettant d’assurer le contrôle de régularité dans le cadre de renforcement de la
capacité de la gestion financière et comptable de l’administration, le contrôle interne et
l’efficacité des systèmes d’information.
En fonction du classement obtenu, un niveau de contrôle est attribué pour chaque service
ordonnateur. Dès lors, la responsabilité du contrôle se trouve partagée entre les deux acteurs.
Or, pour bénéficier des avantages d’allégement de contrôle octroyé en contrepartie du niveau
de la capacité de gestion, les services de l’ordonnateur se trouvent d’ores et déjà dans
l’obligation de disposer en leur sein des entités chargées de contrôle, d’audit et de suivi au
même titre que le comptable public. En dehors des contrôles institués par les textes généraux
en matière des dépenses publiques, le décret relatif aux marchés publics n° 2-12-349 du 8
Joumada Ier 1434 (20 mars 2013) et les textes qu’il a abrogés, stipulent que les marchés et
leurs avenants sont soumis à des contrôles et audits à l’initiative du ministre concerné. Ces
contrôles et audits deviennent obligatoires pour un certain nombre de marchés. À cet effet, il
est à noter que l’article 165 dudit décret est resté muet quant aux conditions d’exercice de
l’audit : l’intervenant (audit interne ou externe), période d’intervention (en amont, en cours et
en aval).
Face à cette situation, il serait judicieux d’attribuer cette mission aux entités chargées d’audit
interne créées en vertu du décret n° 2-05-1369 cité ci-dessus. Ces entités élaborent des rapports
afférents à leurs missions et qui sont adressés selon le cas au ministre ou au directeur de
l’établissement public concerné. Celui-ci publie la synthèse desdits rapports dans le portail des
marchés publics.
2. Le rôle de l’audit interne dans le renforcement de la transparence de la gestion
publique
La façon avec laquelle l’audit est exécuté joue un Rôle crucial pour assurer un audit de qualité
et de conformité, et de révéler tout type d’irrégularité et de fraude au sein des organisations.
C’est la raison pour laquelle plusieurs auteurs ont insisté sur la qualité de l’audit et son
importance dans la production d’une information comptable et financière transparente et
crédible. La qualité d’audit est perçue en termes de sa capacité à réduire le bruit au niveau de
l’information divulguée au public.
Dans le contexte public marocain, la nouvelle constitution a renforcé le Rôle des juridictions
financières telles que les cours régionaux des comptes, et la Cour des comptes, et ce,
conformément aux dispositions de l’article 147 de la constitution permettant le contrôle
suprême des finances publiques, la surveillance de l’utilisation des fonds publics, ainsi la
consolidation des principes de transparence, de la probité, et de la reddition des comptes, ainsi
que la performance de la gestion publique. Le contrôle est exécuté par les inspections
ministérielles et celles internes aux directions telles que les contrôles opérés par l'inspection
générale des finances (IGF) ainsi par l'inspection de l'administration territoriale (IGAT) ayant
pour rôle primordial la protection aux lois et règlements en vigueur, la protection du patrimoine
et des deniers publics, la prévention et la détection d’erreurs et des fraudes ainsi la fourniture
d'informations financières fiables et pertinentes.
L e Maroc a engagé au cours de la dernière décennie de nombreuses réformes à l’effet de
moderniser la gestion de ses finances publiques. Le renforcement de la transparence
budgétaire constitue l’un des principaux chantiers que notre pays a mené dans ce sens afin
de répondre aux attentes des citoyens de plus en plus conscients de leurs droits et de
poursuivre le processus d’édification d’un Etat moderne et démocratique, notamment après
l’adoption de la Constitution de 2011.
Plusieurs mesures ont été mises en place tendant à renforcer la bonne gouvernance et à
consacrer le principe de transparence dans la gestion des deniers publics. Elles ont permis
d’améliorer la qualité de l’information à destination des parlementaires et du citoyen. Parmi
ces mesures, l’enrichissement continu de l’information budgétaire et financière à travers la
panoplie de rapports accompagnant le Projet de Loi de Finances.
L’amélioration de la lisibilité budgétaire a également été opérée via l’harmonisation de
l’architecture de la nomenclature budgétaire et l’introduction de la dimension régionale dans
la présentation budgétaire. Une communication permanente est en outre assurée tout au
long de l’année autour du budget de l’Etat dont le contenu a fait l’objet, depuis l’année 2012,
d’une vulgarisation visant à rendre accessible la matière budgétaire au simple citoyen.

Par ailleurs, et depuis l’année 2002, une importante réforme budgétaire axée sur les résultats,
la performance et la reddition des comptes a été mise en œuvre de manière progressive. Elle
a donné lieu à une restructuration des budgets autour de programmes et projets adossés à
des objectifs chiffrés à même de permettre une meilleure évaluation des politiques publiques
et de leur impact socio-économique. La réforme de la Loi Organique relative aux Loi de
Finances s’inscrit dans cette même optique du renforcement de la transparence des finances
publiques et de simplification de la lisibilité budgétaire pour plus d’efficacité, d’efficience et
de cohérence des politiques publiques. Elle consacre le principe de reddition des comptes à
travers la responsabilisation des gestionnaires et renforce le rôle du Parlement dans le débat
budgétaire.
Dans ce chantier de modernisation et d’optimisation du système de gestion des finances
publiques, la réforme de la comptabilité de l’Etat s’inscrit comme projet prioritaire qui
transcende les aspects financiers et techniques pour toucher au système de gouvernance des
finances publiques et au fonctionnement de l’appareil de l’Etat. Son intérêtse situe
doublement tant au niveau de l’amélioration de la qualité du reporting de l’Etat et de sa
capacité à mieux piloter l’action publique, qu’au niveau du renforcement de sa capacité en
matière d’appréciation des marges de manœuvre, des éléments d’arbitrage et des risques
potentiels susceptible de mettre en cause la soutenabilité budgétaire.

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