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Microéconomie — Poly n° 6 52

Malgré les différences avec le consommateur, on retrouve ici quelque chose qui ressemble aux
courbes d’indifférence ; il s’agit des isoquantes.

b. Les isoquantes
Une isoquante (iso = même, quante = quantité) est le lieu géométrique des paniers d’inputs
permettant de produire une même quantité d’output.

Dans le cas d’une fonction de production à deux variables l’isoquante joignant les paniers d’inputs
(q1, q2) permettant de produire la quantité 𝑞̅ l’output a pour équation :
f(q1, q2) = 𝑞̅.

Exemple
Dans le cas d’une fonction de type Cobb-Douglas définie par :
f(q1, q2) = q1αq2β.
L’isoquante relative à la production de 𝑞̅ unités d’outputs a pour équation :
1⁄
𝑞̅ β
𝑞2 = ( α)
𝑞1
C’est donc exactement la même chose que pour les courbes d’indifférence lorsque la fonction
d’utilité est de type Cobb-Douglas. Ainsi, les isoquantes d’une telle entreprise sont continues,
décroissantes, convexes et asymptotes aux axes.

Cela dit, si les isoquantes ressemblent aux courbes d’indifférences, ici encore la ressemblance est
formelle, la substituabilité des inputs, par exemple, étant plus problématique que celle des biens
pour le consommateur.

Une condition suffisante pour que les isoquantes soient convexes est que les dérivées partielles
secondes de la fonction de production soient toutes strictement négatives.
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c. La productivité marginale des inputs


La productivité marginale d’un input mesure (approximativement)1 la production supplémentaire
résultant de l’utilisation d’une unité supplémentaire de cet input, les quantités utilisées des autres
inputs restant inchangées.

La productivité marginale est donc nulle lorsque les inputs sont complémentaires. Elle est
généralement supposée positive lorsque les inputs sont substituables (une augmentation de la
quantité d’input utilisée entraînant une augmentation de la quantité produite).

On se placera ici directement dans le cas d’une fonction de production à deux inputs
Si la fonction f(.) est dérivable, la productivité marginale de l’input i est égale à 𝑓𝑞′𝑖 (𝑞1 , 𝑞2 ).

Notons ici que, alors qu’aucune hypothèse sur l’utilité marginale n’est nécessaire dans ce modèle
(puisque l’utilité y est ordinale), on suppose généralement que les productivités marginales sont
strictement décroissantes, i.e. que, pour tout i, on a :
𝑓𝑞′′𝑖 𝑞𝑖 (𝑞1 , 𝑞2 ) < 0.

Exemple – la productivité marginale des inputs dans le cas d’une fonction de type Cobb-Douglas
β
Soit la fonction de production définie par : f(q1, q2) = 𝑞1α 𝑞2 ,  > 0 et  >0.
Dans ce cas, les productivités marginales des inputs (1) et (2) sont respectivement :
β β−1
𝑓𝑞′1 (𝑞1 , 𝑞2 ) = 𝛼𝑞1α−1 𝑞2 et 𝑓𝑞′2 (𝑞1 , 𝑞2 ) = β𝑞1α 𝑞2 .
𝑓𝑞′′2 (𝑞1 , 𝑞2 ) < 0
Elles sont donc décroissantes si et seulement si : { 1
𝑓𝑞′′2 (𝑞1 , 𝑞2 ) < 0
2

β
α(α − 1)𝑞1α−2 𝑞2 < 0
à savoir si et seulement si : { β−2
β(β − 1)𝑞1α 𝑞2 < 0
donc si et seulement si on a : α < 1 et β < 1.

Il est difficile de trouver des exemples de productivité marginale décroissante. C’est la raison pour
laquelle il faut faire très attention lorsqu’on lit un manuel de microéconomie pour débutants. La
plupart du temps, en effet, ce type de manuel explique la productivité marginale et sa décroissance
à partir d’un exemple où les inputs sont complémentaires, de sorte que les étudiant.e.s
comprennent de travers le concept de productivité marginale. J’en donne un exemple dans
l’encadré page suivante. Cette définition erronée du concept de productivité marginale rend
ensuite complètement absurde le choix du producteur (on reviendra sur cette question).

1
Pour la raison de ce « approximativement », voir cours 1, p. 8-9.
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Dans son manuel de microéconomie pour débutant, Mankiw (2015, Principles of microeconomics. 7th edition
p. 263-4) explique par exemple la productivité marginale du travail en utilisant l’exemple de la fabrique de
Cookies de Caroline. Pour produire des Cookies, Caroline utilise les ingrédients nécessaires (farine, sucre,
pépites de chocolat, etc.), des mixeurs, des fours, et du travail. Mankiw fixe alors la quantité de tous les
inputs sauf le travail afin de présenter la productivité marginale de ce dernier, ce, à partir du tableau
suivant :
Output (quantité de
Nombre de Productivité marginale
cookies produits par
travailleurs du travail
heure)
0 0
50
1 50
40
2 90
30
3 120
20
4 140
10
5 150
5
6 155

L’étudiant.e se voit alors expliquer que le premier travailleur produisant 50 cookies à l’heure et le second,
40, la productivité marginale du travail lorsque la fabrique de Caroline n’a qu’un seul travailleur est égale à
40. Et, le troisième travailleur permettant de produire 30 cookies supplémentaires par heure, la
productivité marginale du travail lorsque la fabrique de Caroline n’a que deux salariés est 30.
Partant d’un tel exemple, l’étudiant.e.s est incapable de comprendre ce que signifie « productivité
marginale » dans la théorie néoclassique. En effet, la productivité marginale d’un input est la quantité
supplémentaire d’output obtenue grâce à l’utilisation d’une unité supplémentaire de cet input, les quantités
utilisées des autres inputs restant inchangées. Or il est parfaitement clair, que, si la quantité de travail
augmente sans que la quantité utilisée de farine, de sucre, etc. n’augmente en même temps, alors la quantité
de cookies produite ne peut pas augmenter. Dans cet exemple, la productivité marginale du travail n’est pas
décroissante, mais tout simplement nulle. A partir de cet exemple, l’étudiant.e comprend au contraire que le
concept de productivité marginale s’applique lorsque les quantités utilisées tous les inputs augmentent en
même temps, ce qui devrait le laisser complètement incrédule quand on lui expliquera le choix de
l’entreprise concurrentielle.

d. Le taux marginal de substitution technique


C’est l’équivalent, pour l’entreprise, du TMS du consommateur.
Le taux marginal de substitution technique (TMST) mesure (approximativement) la quantité
d’input (2) qu’il faut substituer à une unité d’input (1) pour rester sur la même isoquante, i.e. pour
maintenir le même niveau de production.

Le taux marginal de substitution technique n’a de sens que si les inputs sont substituables.
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Si la fonction de production f(∙) est dérivable, avec des productivités marginales strictement
positives, alors le TMST entre l’input (1) et l’input (2) est donné par le rapport des productivités
marginales de ces deux inputs :
𝑓𝑞′ (𝑞1,𝑞2)
TMST2/1(q1, q2) = 𝑓′1 (𝑞
𝑞2 1 ,𝑞2 )

Graphiquement, c’est bien entendu la valeur absolue de la pente de la tangente à l’isoquante au


point (q1, q2).

Exemple – le TMST dans le cas d’une fonction de production de type Cobb-Douglas


β
Lorsque la fonction de production est de type Cobb-Douglas (donc définie par : f(q1, q2) = 𝑞1α 𝑞2 ,
 > 0 et  >0), le TMST2/1(q1 , q2) ne dépend que du rapport des quantités d’inputs, i.e. de leur part
relative dans le panier d’inputs. En effet :
β β 1−β β+1−β
𝑓𝑞′ (𝑞1,𝑞2) 𝛼𝑞1α−1 𝑞2 𝛼𝑞 𝑞 𝛼𝑞 α𝑞
TMST2/1(q1, q2) = 𝑓′1 (𝑞 = β−1 = β𝑞α2 𝑞21−α = β𝑞α+1−α
2
= β𝑞2.
𝑞2 1 ,𝑞2 ) β𝑞1α 𝑞2 1 1 1 1

e. Les rendements d’échelle


La notion de rendement d’échelle permet de dire ce qu’il se passe quand on augmente toutes les
quantités d’inputs dans les mêmes proportions (i.e. quand on multiplie toutes ces quantités par
un réel λ strictement supérieur à 1) :
• Si la quantité d’output augmente alors plus que proportionnellement aux quantités d’input, on
dit que les rendements d’échelle sont croissants.
• Si la quantité d’output augmente alors dans la même proportion que les quantités d’input, on
dit que les rendements d’échelle sont constants.
• Si la quantité d’output augmente alors moins que proportionnellement aux quantités d’input,
on dit que les rendements d’échelle sont décroissants.

Les rendements d’échelle sont donc :


• constants si, pour tout λ > 1, on a :
f(λq1, λq2) = λf(q1, q2)

Quantité d’output produite quand on λ × la quantité d’output produite


multiplie les quantités d’inputs q1 et q2 par λ. avec les quantités d’inputs q1 et q2.

• croissants si, pour tout λ > 1, on a :


f(λq1, λq2) > λf(q1, q2)
• décroissants si, pour tout λ > 1, on a :
f(λq1, λq2) < λf(q1, q2)
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La nature des rendements d’échelle est aisée à déterminer dans le cas de fonctions de production
homogènes. En effet, la fonction f(.) est homogène de degré k si et seulement si, pour tout λ > 0, on
a:
f(λq1, λq2) = λkf(q1, q2).
Les rendements d’échelle sont alors constants si k = 1, croissants si k > 1 et décroissants si k < 1.

Exemple – Rendements d’échelle dans le cas d’une fonction de production de type Cobb-Douglas
β
La fonction de production de type Cobb-Douglas (donc définie par : f(q1, q2) = 𝑞1α 𝑞2 ,  > 0 et  > 0)
est homogène de degré α + β. En effet :
β β
f(λq1, λq2) = (λ𝑞1 )α (λ𝑞2 )β = 𝜆α 𝑞1α 𝜆β 𝑞2 = 𝜆α 𝜆β 𝑞1α 𝑞2 = 𝜆α+β 𝑓(𝑞1 , 𝑞2 ).
Ainsi, dans ce cas, les rendements d’échelle sont :
• décroissants, si α + β < 1,
• constants, si α + β = 1 et
• croissants si α + β > 1.

On verra plus loin que les rendements croissants sont incompatibles avec les hypothèses de
concurrence parfaite. Or, comme le notent certains microéconomistes comme Varian et Mas-
Colell, Whinston et Green (voir encadré ci-après), dans le cadre du modèle de concurrence
parfaite, il est difficile d’expliquer pourquoi les rendements d’échelle seraient décroissants.

Varian et Mas-Colell, Whinston & Green à propos des rendements d’échelle décroissants :
“L’autre cas à considérer est celui des rendements d’échelle décroissants (…).
Ce cas est un peu particulier. Si l’output fait moins que doubler quand nous doublons la quantité
de chaque input, nous devons avoir commis une erreur. Après tout, nous pourrions simplement
reproduire ce que nous faisions auparavant !
Une situation de rendements d’échelle décroissants provient généralement du fait que nous avons
oublié de tenir compte d’un input. Si nous doublons la quantité de tous les inputs sauf un, nous ne
pouvons pas produire exactement ce que nous faisions auparavant et nous ne pouvons obtenir
automatiquement une quantité double d’output. » (Varian Hal R., 2014, Introduction à la
microéconomie, 8e édition, De Boek, 402-403, mes italiques)
« Il est important de ne pas perdre de vue le fait que l’ensemble [et la fonction] de production
décri[ven]t les possibilités techniques, sans tenir compte de la limitation des ressources. On peut
[ainsi] affirmer que, si on prend explicitement en compte tous les inputs, alors il devrait toujours
être possible de répliquer la production. Après tout, nous ne disons pas que l’on peut
effectivement doubler la quantité d’output, mais que ce serait en principe possible si la quantité
de tous les inputs était multipliée par deux. Dans ce cadre (...), des rendements décroissants ne
peuvent que résulter de la rareté d’un input caché, non pris en compte. C’est la raison pour laquelle,
certains économistes considèrent que, parmi les modèles avec un ensemble de production
convexe [ce qui est le cas du modèle de concurrence parfaite], (...) le modèle avec rendements
constants est le plus fondamental » (Mas-Colell, Whinston & Green, Microeconomic Theory, p.134,
mes italiques, les passages entre crochets sont rajoutés pour vous aider à comprendre ce dont il
s’agit).
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2. Le choix du producteur : l’approche par la fonction de production


Dans la théorie néoclassique, le producteur cherche à maximiser son profit. C’est, en effet,
uniquement à cette fin qu’il choisit les quantités d’inputs qu’il demande (ses demandes d’inputs)
et la quantité d’output qu’il offre.
Dans le cadre du modèle de concurrence parfaite, on suppose, je le rappelle, qu’il réalise ces choix
en considérant les prix comme donnés : il est « price taker ». En outre, il fait ses choix en ne se
préoccupant pas d’éventuels problèmes de débouchés pour l’output qu’il produit ou de
rationnement pour les inputs qu’il demande, puisqu’il croit qu’il n’en rencontrera pas.

a. La fonction de profit
Le profit, par définition, est donné par la différence entre les recettes et les dépenses du
producteur. Les premières sont issues de la vente de l’output, de la quantité produite, q ; c’est le
chiffre d’affaires du producteur ; les secondes couvrent l’achat du panier Q = (q1,…, qn) contenant
les quantités d’inputs nécessaires pour produire q = f(Q) ; c’est le coût de production. Soit, si l’on
désigne par p le prix de l’output et par pi, celui de l’input i (avec i = 1, …, n) :
pf(q1,…, qn) – (p1q1 + …+ pnqn) [1]
Comme le producteur est « preneur de prix », ses décisions ne portent que sur les quantités, plus
précisément sur le panier d’inputs Q = (q1,…, qn), la quantité d’output en étant ensuite déduite
puisque q = f(q1,…, qn). C’est pourquoi les variables de la fonction de profit, notée (.), sont les
quantités d’input. La fonction de profit est donc définie par :
(q1,…, qn) = pf(q1,…, qn) – (p1q1 + …+ pnqn) [2]

Dans le cas où il n’y a qu’un seul input, cela donne :


(q1) = pf(q1) – p1q1 [2’]

Dans le cas où il n’y a que deux inputs, cela donne :


(q1 , q2) = pf(q1, q2) – p1q1 – p2q2 [2’’]

b. Condition de maximisation du profit dans le cas d’une fonction à un seul input


Lorsque la production d’un bien nécessite un unique input, en quantité q1, la fonction de profit, on
vient de le dire, est définie par :
(q1) = pf(q1) – p1q1 [2’]

Or cette fonction (.) a un maximum en 𝑞1∗ si et seulement si :


• Condition du premier ordre (CPO) : π′ (𝑞1∗ ) = 0
• Condition du second ordre (CSO) : π′′ (𝑞1∗ ) < 0.
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Ici :
• Comme : π′ (𝑞1 ) = 𝑝𝑓 ′ (𝑞1 ) − 𝑝1
la CPO donne : 𝑝𝑓 ′ (𝑞1∗ ) – p1 = 0,
à savoir : 𝑓 ′ (𝑞1∗ ) = p1/p.
Ceci signifie que la productivité marginale en volume ou physique – donnée par 𝑓 ′ (𝑞1 ) –
est égale au prix réel de l’input – autrement dit au prix de l’input en output.
• Et comme : π′′ (𝑞1 ) = 𝑝𝑓 ′′ (𝑞1 ),
la CSO donne : 𝑝𝑓 ′′ (𝑞1∗ ) < 0,
à savoir : 𝑓 ′′ (𝑞1∗ ) < 0
Ceci signifie que la productivité marginale de l’input est décroissante en 𝑞1∗ .

Dans ce cas, le producteur choisit de demander la quantité 𝑞1∗ d’input, à condition que la
productivité marginale de cet input soit décroissante en ce point.
Au moyen de cette quantité d’input, il produit – et offre – la quantité d’output 𝑞∗ = 𝑓(𝑞1∗ ).

c. Condition de maximisation du profit dans le cas d’une fonction à deux inputs


Lorsque la production d’un output nécessite deux inputs, en quantités q1 et q2 respectivement, la
fonction de profit, on l’a dit, est définie par :
(q1 , q2) = pf(q1, q2) – p1q1 – p2q2 [2’’]

Le « choix » du producteur se porte alors sur le panier d’inputs Q* = (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ), et le niveau de
production q* = 𝑓 (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ) qui maximise ce profit. Il est d’usage, pour cette raison, de qualifier ce
panier d’inputs d’optimal.

Du point de vue mathématique, ce panier est le maximum de la fonction (). Il vérifie donc les
deux conditions habituelles (du premier ordre et du second ordre).

Condition du premier ordre


Si la fonction () est dérivable, i.e. si la fonction de production 𝑓() l’est, la condition nécessaire
pour que le panier d’inputs (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ) permette d’obtenir un profit maximum est qu’il annule les
dérivées partielles (premières) de la fonction () :
π′𝑞1 (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ) = 0
{ ′
π𝑞2 (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ) = 0

Ce qui donne, compte tenu de la forme de la fonction () (donné par la formule [2’’]) :
𝑝𝑓𝑞′1 (𝑞1 , 𝑞2 ) − 𝑝1 = 0
{
𝑝𝑓𝑞′2 (𝑞1 , 𝑞2 ) − 𝑝2 = 0
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ou encore :
𝑝1
𝑓𝑞′1 (𝑞1 , 𝑞2 ) = 𝑝
𝐿𝑎 𝑝𝑟𝑜𝑑𝑢𝑐𝑡𝑖𝑣𝑖𝑡é 𝑚𝑎𝑟𝑔𝑖𝑛𝑎𝑙𝑒 𝑑𝑒 𝑙′ 𝑖𝑛𝑝𝑢𝑡 (1) 𝑒𝑠𝑡 é𝑔𝑎𝑙𝑒 à 𝑠𝑜𝑛 𝑝𝑟𝑖𝑥 𝑒𝑛 𝑜𝑢𝑡𝑝𝑢𝑡
[3] { 𝑝2
𝑓𝑞′2 (𝑞1 , 𝑞2 ) = 𝑝
𝐿𝑎 𝑝𝑟𝑜𝑑𝑢𝑐𝑡𝑖𝑣𝑖𝑡é 𝑚𝑎𝑟𝑔𝑖𝑛𝑎𝑙𝑒 𝑑𝑒 𝑙′ 𝑖𝑛𝑝𝑢𝑡 (2) 𝑒𝑠𝑡 é𝑔𝑎𝑙𝑒 à 𝑠𝑜𝑛 𝑝𝑟𝑖𝑥 𝑒𝑛 𝑜𝑢𝑡𝑝𝑢𝑡

Vous ne disposez pas du bagage mathématique nécessaire pour la condition du second ordre
(vous verrez cela au second semestre). Pour l’instant, il vous suffit simplement de savoir que,
lorsque les isoquantes ont la forme hyperbolique habituelle (continues, décroissantes, convexes
et asymptotes aux axes), lorsque les rendements ne sont pas croissants et lorsque les
productivités marginales sont décroissantes, la condition du premier ordre suffit.

Du point de vue de la microéconomie, cette condition (donnée dans le système [3]) s’interprète
de la façon suivante : le producteur va demander une quantité de l’input i, quel qu’il soit, telle que
son produit marginal (physique) de cet input, i.e. la quantité d’output supplémentaire obtenue
grâce à la « dernière unité d’input i utilisée » de cet input, 𝑓𝑞′𝑖 (𝑞1 , 𝑞2 ), soit égal à son prix réel (ou
𝑝𝑖
relatif) autrement dit à son prix en output, 𝑝
(représentant le coût, en output, de cette dernière

unité d’input).

Cette interprétation de la condition [3] n’est valable que si, en (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ), d’une part les productivités
marginales des inputs sont décroissantes et, d’autre part, les rendements d’échelle ne sont pas
croissants. Il s’agit là des deux conditions nécessaires pour que, dans ce cadre théorique, le
producteur puisse obtenir un profit maximum.

En effet, si, en (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ), la productivité marginale d’un input (ou des deux) était croissante, le
producteur aurait intérêt à utiliser des quantités supplémentaires de cet input puisque cela se
traduirait par une augmentation de son profit. En effet, considérons par exemple l’input (1) : si
𝑝1 𝑝1
l’on a 𝑓𝑞′1 (𝑞∗1 , 𝑞∗2 ) = 𝑝
et 𝑓𝑞′1 (∙) est une fonction croissante de q1, alors 𝑓𝑞′1 (𝑞∗1 + Δ𝑞1 , 𝑞∗2 ) > 𝑝
. Si donc,

la productivité marginale était croissante, le profit ne serait donc pas maximal en (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ) : par
exemple, si le producteur utilisait une unité d’input (1) supplémentaire, son profit augmenterait
𝑝
de 𝑓𝑞′1 (𝑞∗1 + Δ𝑞1 , 𝑞∗2 ) − 𝑝1.

Avec un raisonnement similaire on montre que les rendements d’échelle ne doivent pas non plus
être croissants en (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ). S’ils l’étaient, ce panier d’inputs ne pourrait pas être celui qui maximise
le profit du producteur puisqu’en augmentant toutes les quantités d’inputs – et donc le coût de
production – dans la même proportion, l’augmentation de la production – et donc les recettes –
en résultant serait plus importante que celle des inputs. Par exemple si le panier d’inputs est
multiplié par 2, la quantité produite fait plus que doubler. Ainsi lorsque son coût de production
est multiplié par 2 (ce qui se passe quand on multiplie les quantités d’inputs par 2 aux prix
Microéconomie — Poly n° 6 60

donnés), ses recettes sont multipliées par un nombre strictement supérieur à 2 (puisque la
quantité produite fait plus que doubler), de sorte que son profit (égal aux recettes moins les coûts)
augmente. Celui-ci n’est donc pas maximum au panier (𝑞1∗ , 𝑞2∗ ).

Pour que le programme de maximisation du profit ait une solution (finie), il est donc nécessaire
de supposer que les productivités marginales des inputs sont décroissantes et que les rendements
d’échelle ne sont pas croissants. Sinon, croyant qu’il peut acheter ou vendre n’importe quelle
quantité aux prix donnés, le producteur demanderait toujours plus d’au moins l’un des deux
inputs et offrirait une quantité infinie d’output.

Le système [3] est un système de deux équations à deux inconnues : les quantités demandées
d’inputs (1) et (2). S’il a une solution, ces demandes dépendent des prix des inputs et du prix de
l’output. On a donc :
q1* = d1(p1 , p2 , p) et q2* = d2(p1 , p2 , p).

L’offre de l’entreprise s’obtient alors par la fonction de production. C’est la fonction, 𝑠(), définie par :
s(p1 , p2 , p) = f[d1(p1 , p2 , p) , d2(p1 , p2 , p)].

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