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Liebherr Mobile Crane 160 Ton LTM1160-5.1 Electric Hydraulic & Pneumatic
Wiring Diagram Size: 12.7 mb Language: FR_French Format: PDF Model:
LTM1160-5.1 Capacity: 160 Ton LTM1160-5.1 Wiring_diagram_Electric
LTM1160-5.1 Wiring_diagram_Hydraulic LTM1160-5.1
Wiring_diagram_Pneumatic
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CONSPIRATION DE GEORGES.
Opinion que se
C'était la guerre ainsi faite que MM. Windham et
faisaient les Grenville, et le faible ministère qu'ils traînaient à leur
Anglais de la suite, croyaient avoir attirée sur leur patrie. Ils avaient
flottille réunie à
Boulogne.
entendu parler, sous le Directoire, de bateaux plats, mais
si souvent et avec si peu d'effet, qu'ils finissaient par n'y
plus croire. Sir Sidney Smith, plus expérimenté sous ce rapport que ses
compatriotes, car il avait vu, tour à tour, les Français, les Turcs, les
Anglais débarquer en Égypte, tantôt malgré de redoutables croisières,
tantôt malgré de vigoureux soldats postés sur le rivage, sir Sidney
Smith avait dit à la tribune du Parlement, qu'on pourrait à la rigueur
réunir soixante ou quatre-vingts chaloupes canonnières dans la
Manche, cent si l'on voulait tout exagérer, mais qu'on n'en réunirait
jamais davantage, et que vingt-cinq ou trente mille hommes étaient la
limite extrême des forces qu'il était possible de transporter en
Angleterre. Suivant cet officier, le plus grave danger qu'on pût prévoir
après celui-là, c'était la descente d'une armée française en Irlande,
double ou triple de celle qui avait été jetée autrefois dans cette île,
armée qui, après avoir plus ou moins agité et ravagé le pays, finirait,
comme la précédente, par succomber et par mettre bas les armes. Il
restait d'ailleurs les inimitiés toujours sourdement existantes en Europe
contre la France, inimitiés qui, bientôt réveillées, rappelleraient vers le
continent les forces du Premier Consul. On avait donc tout au plus à
craindre la guerre des premiers temps de la Révolution, signalée de
nouveau par quelques victoires du général Bonaparte sur l'Autriche,
mais avec toutes les chances ordinaires de bouleversement dans un
pays mobile comme la France, qui depuis quinze années n'avait pas
supporté trois ans de suite le même gouvernement, et avec l'avantage
permanent pour l'Angleterre de nouvelles conquêtes maritimes. Ces
prévisions se sont réalisées, grâce à beaucoup de malheurs et de
fautes; mais on va voir que, pendant plusieurs années, des dangers
infiniment graves menacèrent l'existence même de la Grande-Bretagne.
aves inquiétudes
La confiance des Anglais s'évanouit bientôt à l'aspect
conçues en des préparatifs qui se faisaient sur la côte de Boulogne.
ngleterre, lorsqueOn entendit parler de mille à douze cents bateaux plats
s préparatifs faits
à Boulogne
(on ignorait qu'ils passeraient deux mille); on fut surpris;
ommencèrent à néanmoins on se rassura, en doutant de leur réunion, en
re mieux connus. doutant surtout de la possibilité de les abriter dans les
ports de la Manche. Mais la concentration de ces bateaux
plats dans le détroit de Calais, opérée malgré les nombreuses croisières
anglaises, leur bonne tenue à la mer et au feu, la construction de
vastes bassins pour les recevoir, l'établissement de batteries
formidables pour les protéger au mouillage, la réunion de cent
cinquante mille hommes prêts à s'y embarquer, faisaient tomber, une à
une, les illusions d'une sécurité présomptueuse. On voyait bien que de
tels préparatifs ne pouvaient être une feinte, et qu'on avait provoqué
trop légèrement le plus audacieux, le plus habile des hommes. Il y
avait, il est vrai, de vieux Anglais, confiants dans l'inviolabilité de leur
île, qui ne croyaient point au péril dont on les menaçait; mais le
gouvernement et les chefs de parti ne pensaient pas que, dans le
doute, on pût livrer au hasard la sûreté du sol britannique. Vingt, trente
mille Français, quelque braves, quelque bien commandés qu'ils fussent,
ne les auraient pas effrayés: mais cent cinquante mille hommes, ayant
à leur tête le général Bonaparte, causaient un frisson de terreur dans
toutes les classes de la nation. Et ce n'était pas là une preuve de
manque de courage, car le plus brave peuple du monde aurait bien pu
être inquiet en présence d'une armée qui avait accompli de si grandes
choses, et qui allait en accomplir de si grandes encore.
Discussion au
La composition d'une armée était donc, en ce moment,
Parlement sur la le sujet de toutes les discussions de la Chambre des
composition de Communes. Et comme c'est au milieu des plus grands
l'armée.
périls que l'esprit de parti se montre toujours le plus
ardent, c'était au sujet de cette question de la guerre, et de la manière
de la soutenir, que se rencontraient, et se combattaient les principaux
personnages du Parlement.
Le cabinet
Comment pourvoir à une telle insuffisance? Le
ddington propose ministère, entouré des militaires les plus instruits,
a création d'une imagina la création d'une armée dite de réserve, forte de
mée de réserve.
50 mille hommes, formée d'Anglais, par tirage au sort, et
M. Windham ne pouvant être employée que dans l'étendue du
demande une Royaume-Uni. On suppléait ainsi à l'armée de ligne, et on
vée en masse, et lui ménageait un renfort de 50 mille hommes. Le
a création d'une
rmée formée sur remplacement était permis, mais il devait, vu les
es principes de circonstances, se faire à un prix très-élevé. C'était peu de
armée française. chose, et pourtant c'était tout ce qu'on pouvait
entreprendre dans le moment. M. Windham, se plaçant
au point de vue du parti de la guerre, attaqua la proposition comme
insuffisante. Il demanda la création d'une grande armée de ligne, qui,
composée d'après les mêmes principes que l'armée française, c'est-à-
dire par la conscription, serait aux ordres absolus du gouvernement, et
pourrait être portée en tout lieu. Il dit que ce qu'avait imaginé le
ministère n'était qu'une extension des milices, ne vaudrait pas mieux,
surtout en face des bandes éprouvées qu'on avait à combattre, nuirait
au recrutement de l'armée par la faculté de remplacement introduite
dans la nouvelle loi, car les individus disposés à servir trouveraient plus
d'avantage à se faire remplaçants dans l'armée de réserve, qu'à
s'enrôler dans l'armée de ligne; qu'une armée régulière formée de la
population nationale, transportable partout où l'on ferait la guerre,
ayant par conséquent le moyen de s'aguerrir, était la seule institution à
opposer aux troupes du général Bonaparte.—Il faut, dit M. Windham, le
diamant pour couper le diamant.—
M. Pitt rentré au
L'Angleterre, qui avait déjà une marine, voulait avoir
rlement, combat aussi une armée de terre, ambition bien naturelle, car il
l'opinion de M. est rare qu'une nation qui a l'une des deux grandeurs ne
Windham.
veuille aussi avoir l'autre. Mais M. Pitt fit à ces
propositions la réponse d'un esprit froid et positif. Toutes les idées de
M. Windham, selon lui, étaient fort bonnes; mais comment créer une
armée en quelques jours? comment l'aguerrir? comment lui composer
des cadres, lui trouver des officiers? Une telle institution ne saurait être
l'œuvre d'un moment. Ce qu'on venait d'imaginer était la seule chose
actuellement praticable. Il serait déjà bien assez difficile d'organiser les
50 mille hommes demandés, de les instruire, de les pourvoir d'officiers
de tout grade. M. Pitt conjura donc son ami M. Windham de renoncer à
ses idées, pour le présent du moins, et d'adhérer avec lui au plan du
gouvernement.
Adoption d'une
Cependant le danger croissant d'heure en heure, et
surtout la coopération du continent étant chaque jour
rtie des idées de
M. Windham, et moins probable, on eut recours à la proposition du parti
création des
volontaires.
le plus ardent, et on aboutit à l'idée d'une levée en
masse. Le ministère demanda et obtint la faculté
d'appeler aux armes tous les Anglais depuis 17 jusqu'à 55 ans. On
devait prendre les volontaires, et, à défaut, les hommes désignés par la
loi, les former en bataillons, les instruire, pendant un certain nombre
d'heures par semaine. Il devait leur être alloué une paye, pour les
dédommager de la perte de leur temps; mais cette disposition ne
concernait que les volontaires qui appartenaient aux classes ouvrières.
Revues de
M. Windham, obligé cette fois de reconnaître qu'on
olontaires, tant àprenait ses idées, se plaignit qu'on les prenait trop tard
ondres que dans et mal, et critiqua plusieurs détails de la mesure. Mais
es grandes villes
d'Angleterre.
elle fut votée, et, en peu de temps, on vit dans les villes
et les comtés d'Angleterre la population, appelée aux
Fortifications armes, s'exercer tous les matins en uniforme de
tour de Londres, volontaires. Cet uniforme fut porté par toutes les classes.
et sur les points
principaux des Le respectable M. Addington se rendit au Parlement dans
côtes. ce costume, qui allait si peu à ses mœurs, et encourut
même quelque ridicule, par une manifestation de ce
Système de
signaux.
genre. Le vieux roi, son fils, le prince de Galles,
passèrent à Londres des revues, auxquelles les princes
Chariots pour français exilés eurent l'impardonnable tort d'assister. On
orter les troupes vit jusqu'à vingt mille de ces volontaires à Londres, ce
en poste.
qui n'était pas fort considérable, il est vrai, pour une si
vaste population. Du reste, le nombre en était assez grand dans
l'étendue de l'Angleterre, pour fournir une force imposante, si elle avait
été organisée. Mais on n'improvise pas des soldats, et moins encore
des officiers. Si en France on avait douté de la valeur des bateaux
plats, en Angleterre on doutait bien davantage de la valeur de ces
volontaires, et, sinon de leur courage, au moins de leur habitude de la
guerre. À ces mesures on ajouta le projet de fortifications de campagne
autour de Londres, sur les routes qui aboutissent à cette capitale, et
sur les points les plus menacés des côtes. Une partie des forces actives
fut disposée depuis l'île de Wight jusqu'à l'embouchure de la Tamise.
Un système de signaux fut établi pour donner l'alarme, au moyen de
feux allumés le long des côtes, à la première apparition des Français.
Des chariots d'une forme particulière furent construits, afin de porter
les troupes en poste sur les points menacés. En un mot, de ce côté du
détroit comme de l'autre, on fit des efforts d'invention extraordinaires,
pour imaginer des moyens nouveaux de défense et d'attaque, pour
vaincre les éléments et les associer à sa cause. Les deux nations,
comme attirées sur ce double rivage, y donnaient en ce moment un
bien grand spectacle au monde: l'une, troublée quand elle songeait à
son inexpérience des armes, était rassurée quand elle considérait cet
Océan qui lui servait de ceinture; l'autre, pleine de confiance dans sa
bravoure, dans son habitude de la guerre, dans le génie de son chef,
mesurait des yeux le bras de mer qui arrêtait son ardeur, s'accoutumait
tous les jours à le mépriser, et se regardait comme certaine de le
franchir bientôt, à la suite du vainqueur de Marengo et des Pyramides.
Aucune des deux ne supposait d'autres moyens que ceux qui étaient
préparés sous ses yeux. Les Anglais, croyant Brest et Toulon
exactement bloqués, n'imaginaient pas qu'une escadre pût paraître
dans la Manche. Les Français, s'exerçant tous les jours à naviguer sur
leurs chaloupes canonnières, n'imaginaient pas qu'il existât une autre
manière de franchir le détroit. Personne ne soupçonnait la principale
combinaison du Premier Consul. Cependant les uns craignaient, les
autres espéraient quelque subite invention de son génie: c'était la
cause du trouble qui régnait d'un côté de la Manche, et de la confiance
qui régnait de l'autre.
e gouvernement
Le gouvernement britannique, dans son anxiété, eut
britannique a recours à tous les moyens, même à ceux que la morale
ecours au moyen avouait le moins, pour conjurer le coup dont il était
accoutumé, de
usciter en France
menacé. Pendant la première guerre, il avait fomenté des
des troubles insurrections contre les pouvoirs de toutes formes qui
intérieurs. s'étaient succédé en France. Depuis, quoique ces
insurrections fussent peu présumables sous la forte
Caractère moral
des moyens administration du Premier Consul, il avait gardé à
employés par le Londres, et soldé même pendant la paix, tous les états-
gouvernement majors de la Vendée et de l'émigration. Cette persistance
britannique.
à conserver sous sa main les coupables instruments
eorges Cadoudal d'une guerre peu généreuse, avait beaucoup contribué,
à Londres. comme on l'a vu, à brouiller de nouveau les deux pays.
Les diversions sont, sans doute, l'une des ressources
ordinaires de la guerre, et l'insurrection d'une province est l'une des
diversions qu'on regarde comme les plus utiles, et qu'on se fait le
moins de scrupule d'employer. Que les Anglais eussent essayé de
soulever la Vendée, le Premier Consul le leur rendait en essayant
d'insurger l'Irlande. Le moyen était réciproque et fort usité. Mais dans
le moment une insurrection dans la Vendée était hors de toute
probabilité. L'emploi des chouans et de leur chef, Georges Cadoudal, ne
pouvait avoir qu'un effet, celui de tenter quelque coup abominable,
comme la machine infernale, ou tel autre pareil. Pousser le moyen de
l'insurrection jusqu'au renversement d'un gouvernement, c'est recourir
à des pratiques d'une légitimité fort contestable; mais poursuivre ce
renversement par l'attaque aux personnes qui gouvernent, c'est
dépasser toutes les limites du droit des gens admis entre les nations.
On jugera, du reste, par les faits eux-mêmes, du degré de complicité
des ministres britanniques dans les projets criminels, médités de
nouveau par l'émigration française, réfugiée à Londres. On se souvient
de ce redoutable chef des chouans du Morbihan, Georges Cadoudal,
qui seul entre les Vendéens présentés au Premier Consul, avait résisté
à son ascendant, s'était retiré d'abord en Bretagne, et puis en
Angleterre. Il vivait à Londres, au sein d'une véritable opulence,
distribuant aux réfugiés français les sommes que leur accordait le
gouvernement britannique, et passant son temps dans la société des
princes émigrés, particulièrement des deux plus actifs, le comte d'Artois
et le duc de Berry. Que ces princes voulussent rentrer en France, rien
n'était plus naturel; qu'ils le voulussent par la guerre civile, rien n'était
plus ordinaire, sinon légitime: mais, malheureusement pour leur
honneur, ils ne pouvaient plus compter sur une guerre civile; ils ne
pouvaient compter que sur des complots.
orrespondances
La paix avait désespéré tous les exilés, princes et
et menées des autres; la guerre leur rendait leurs espérances, non-
émigrés. seulement parce qu'elle leur assurait le concours d'une
partie de l'Europe, mais parce qu'elle devait, suivant eux,
ruiner la popularité du Premier Consul. Ils correspondaient avec la
Vendée par Georges, avec Paris par les émigrés rentrés. Ce qu'ils
rêvaient en Angleterre, leurs partisans le rêvaient en France, et les
moindres circonstances qui venaient concorder avec leurs illusions,
changeaient tout de suite à leurs yeux ces illusions en réalité. Ils se
disaient donc les uns aux autres dans ces déplorables correspondances,
que la guerre allait porter un coup funeste au Premier Consul; que son
pouvoir, illégitime pour les Français restés fidèles au sang des
Bourbons, tyrannique pour les Français restés fidèles à la Révolution,
n'avait pour se faire supporter que deux titres, le rétablissement de la
paix, et le rétablissement de l'ordre; que l'un de ces titres disparaissait
complétement depuis la rupture avec l'Angleterre, que l'autre était fort
compromis, car il était douteux que l'ordre pût se maintenir au milieu
des anxiétés de la guerre. Le gouvernement du Premier Consul allait
donc être dépopularisé, comme tous les gouvernements qui l'avaient
précédé. La masse tranquille devait lui en vouloir de cette reprise
d'hostilités avec l'Europe; elle devait moins croire à son étoile, depuis
que les difficultés ne semblaient plus s'aplanir sous ses pas. Il avait, en
outre, des ennemis de différentes espèces, dont on pouvait se servir
très-utilement: les révolutionnaires d'abord, et puis les hommes jaloux
de sa gloire, qui fourmillaient dans l'armée. On disait les jacobins
exaspérés; on disait les généraux fort peu satisfaits d'avoir contribué à
faire d'un égal un maître. Il fallait de ces mécontents si divers créer un
seul parti, pour renverser le Premier Consul. Tout ce qu'on mandait de
France et tout ce qu'on répondait de Londres aboutissait toujours à ce
plan: réunir les royalistes, les jacobins, les mécontents de l'armée en
un parti unique, pour accabler l'usurpateur Bonaparte.
Vaste plan de
Telles étaient les idées dont se nourrissaient à Londres
onspiration tramé les princes français, et dont ceux-ci entretenaient le
à Londres, par cabinet britannique, en lui demandant des fonds, qu'il
Georges et les
princes français.
prodiguait, sachant, d'une manière au moins générale, ce
qu'on en voulait faire.
e comte d'Artois,
Les princes français les plus mêlés à ces projets
duc de Berry, leétaient le comte d'Artois, et son second fils, le duc de
uc d'Angoulême, Berry. Le duc d'Angoulême résidait alors à Varsovie,
les Condés.
auprès de Louis XVIII. Les princes de Condé vivaient à
Londres, mais sans intimité avec les princes de la branche aînée, et
toujours à part de leurs projets. On les traitait comme des soldats,
constamment disposés à prendre les armes, et uniquement propres à
ce rôle. Tandis que le grand-père et le père des Condés étaient à
Londres, le petit-fils, le duc d'Enghien, était dans le pays de Baden,
livré au plaisir de la chasse, et à la vive affection qu'il éprouvait pour
une princesse de Rohan. Tous trois au service de la Grande-Bretagne,
ils avaient reçu ordre de se tenir prêts à recommencer la guerre, et ils
avaient obéi comme des soldats obéissent au gouvernement qui les
paye: triste rôle sans doute pour des Condés, moins triste cependant
que celui de tramer des complots!
Plan et but de la
Voici quel fut le plan de la nouvelle conjuration.
conspiration. Insurger la Vendée ne présentait plus guère de chance:
au contraire, attaquer directement, au milieu de Paris, le
gouvernement du Premier Consul, paraissait un moyen prompt et sûr
d'arriver au but. Le gouvernement consulaire renversé, il n'y avait plus
rien de possible, suivant les auteurs du projet, plus rien que les
Bourbons. Or, comme le gouvernement consulaire consistait tout entier
dans la personne du général Bonaparte, il fallait détruire celui-ci. La
conclusion était forcée. Mais il fallait le détruire d'une manière certaine.
Un coup de poignard, une machine infernale, tout cela était d'un succès
douteux; car tout cela dépendait de la sûreté de main d'un assassin, ou
des hasards d'une explosion. Il restait un moyen jusqu'ici non essayé, à
ce titre non discrédité encore: c'était de réunir une centaine d'hommes
déterminés, l'intrépide Georges en tête; d'assaillir sur la route de Saint-
Cloud ou de la Malmaison, la voiture du Premier Consul; d'attaquer sa
garde, forte tout au plus de dix à douze cavaliers, de la disperser, et de
le tuer ainsi dans une espèce de combat. De cette manière, on était
certain de ne pas le manquer. Georges, qui était brave, qui avait des
prétentions militaires, et ne voulait pas passer pour un assassin,
exigeait qu'il y eût deux princes, un au moins, placés à ses côtés, et
regagnant ainsi l'épée à la main la couronne de leurs ancêtres. Le
croirait-on? Ces esprits, pervertis par l'émigration, s'imaginaient qu'en
attaquant ainsi le Premier Consul entouré de ses gardes, ils livraient
une sorte de bataille, et qu'ils n'étaient pas des assassins!
Apparemment qu'ils étaient les égaux du noble archiduc Charles,
combattant le général Bonaparte au Tagliamento ou à Wagram, et ne
lui étaient inférieurs que par le nombre des soldats! Déplorables
sophismes, auxquels ne pouvaient croire qu'à moitié ceux qui les
faisaient, et qui prouvent chez ces malheureux princes de Bourbon, non
pas une perversité naturelle, mais une perversité acquise dans la
guerre civile et dans l'exil! Un seul entre tous ces hommes était bien
dans son rôle: c'était Georges. Il était maître dans cet art des surprises;
il s'y était formé au milieu des forêts de la Bretagne; et cette fois, en
exerçant son art aux portes de Paris, il ne craignait pas d'être relégué
au rang de ces instruments, dont on se sert pour les répudier ensuite;
car il espérait avoir des princes pour complices. Il s'assurait ainsi toute
la dignité compatible avec le rôle qu'il allait jouer, et par son attitude
audacieuse devant la justice, il prouva bientôt que ce n'était pas lui qui
s'était abaissé en cette funeste conjoncture.
ombinaisons des
Ce n'est pas tout, il fallait après le combat recueillir le
nspirateurs pourfruit de la victoire. Il fallait tout préparer pour que la
associer à leur France se jetât dans les bras des Bourbons. Les partis
omplot les partis
qui divisent la
s'étaient entre-détruits les uns les autres, et il n'en
France. restait aucun de véritablement puissant. Les
révolutionnaires violents étaient odieux. Les
révolutionnaires modérés, réfugiés auprès du général Bonaparte,
étaient sans force. Il ne restait debout que l'armée. C'est elle qu'il
importait de conquérir. Mais elle était dévouée à la Révolution, pour
laquelle elle avait versé son sang, et elle éprouvait une sorte d'horreur
pour ces émigrés, qu'elle avait vus tant de fois sous des uniformes
anglais ou autrichiens. C'est ici que la jalousie, éternelle et perverse
passion du cœur humain, offrait aux conspirateurs royalistes d'utiles et
précieux secours.
âcheuse conduite
Il n'était bruit que de la brouille du général Moreau
e Moreau; motifs avec le général Bonaparte. Nous avons déjà dit ailleurs
que le général de l'armée du Rhin, sage, réfléchi, ferme
e sa brouille avec
Premier Consul.
à la guerre, était, dans la vie privée, nonchalant et faible,
gouverné par ses entours; que, sous cette funeste influence, il n'avait
pas échappé au vice du second rang, qui est l'envie; que, comblé des
égards du Premier Consul, il s'était laissé aller à lui en vouloir, sans
autre raison, sinon que lui général Moreau était le second dans l'État,
et que le général Bonaparte était le premier; qu'ainsi disposé, Moreau
avait manqué de convenance en refusant de suivre le Premier Consul à
une revue, et que celui-ci, toujours prompt à rendre une offense, s'était
abstenu d'inviter Moreau au festin qu'on donnait annuellement pour la
fondation de la République; que Moreau avait commis la faute d'aller,
ce même jour, dîner, en costume de ville, avec des officiers mécontents,
dans un de ces lieux publics, où l'on est vu de tout le monde, au grand
déplaisir des gens sages, à la grande joie des ennemis de la chose
publique. Nous avons raconté ces misères de la vanité, qui
commencent entre les femmes par de vulgaires démêlés, et vont finir
entre les hommes par des scènes tragiques. Si une brouille entre
personnages élevés est difficile à prévenir, elle est plus difficile encore à
arrêter, lorsqu'elle est déclarée. Depuis ce jour Moreau n'avait cessé de
se montrer de plus en plus hostile au gouvernement consulaire. Quand
on avait conclu le Concordat, il avait crié à la domination des prêtres;
quand on avait institué la Légion-d'Honneur, il avait crié au
rétablissement de l'aristocratie, et enfin il avait crié au rétablissement
de la royauté quand on avait constitué le Consulat à vie. Il avait fini par
ne plus se montrer chez le chef du gouvernement, et même chez
aucun des Consuls. Le renouvellement de la guerre eût été pour lui une
occasion honorable de reparaître aux Tuileries, pour offrir ses services,
non pas au général Bonaparte, mais à la France. Moreau, peu à peu
entraîné dans ces voies du mal, où les pas sont si rapides, avait
considéré, dans cette rupture de la paix, beaucoup moins le malheur du
pays, qu'un échec pour un rival détesté, et s'était mis à part, pour voir
comment sortirait d'embarras cet ennemi qu'il s'était fait lui-même. Il
vivait donc à Grosbois, au milieu d'une aisance, juste prix de ses
services, comme aurait pu faire un grand citoyen, victime de
l'ingratitude du prince.
Moyens imaginés
Les conspirateurs de Londres avaient, dans ces
malheureuses divisions, des facilités pour ourdir la
ar les royalistes
ur se rapprocherseconde moitié de leur projet. C'était Moreau qu'il fallait
de Moreau.
gagner, par Moreau, l'armée; et alors, le Premier Consul
chegru employé tué sur la route de la Malmaison, Moreau gagné
à cet usage. viendrait, à la tête de l'armée, réconcilier cette
redoutable partie de la nation avec les Bourbons, qui
auraient eu le courage de reconquérir leur trône l'épée à la main. Mais
comment aborder Moreau, qui était à Paris entouré d'une société toute
républicaine, tandis qu'on était à Londres au milieu de l'élite des
chouans? Il fallait un intermédiaire. Du fond des déserts de l'Amérique,
il en était arrivé un, bien illustre, bien déchu par sa faute de sa
première illustration, mais doué de grandes qualités, et tenant à la fois
aux royalistes et aux républicains: c'était Pichegru, le vainqueur de la
Hollande, déporté par le Directoire à Sinnamari. Il s'était échappé du
lieu de sa déportation, et il était venu à Londres, où il vivait avec le
secret désir de ne pas s'arrêter là, et de rentrer en France, en profitant
de la politique qui rappelait sans distinction les coupables ou les
victimes de tous les partis. Mais la guerre, suspendue un instant, avait
recommencé bientôt, et avec elle les illusions et les folies des émigrés,
auxquels Pichegru avait aliéné sa liberté, en leur aliénant son honneur.
On l'avait compris, presque malgré lui, dans la conspiration; on l'avait
chargé d'être auprès de Moreau l'intermédiaire dont on avait besoin
pour amener ce dernier à la cause des Bourbons, et pour fondre
ensemble, dans un seul parti, les républicains et les royalistes de toute
nuance.