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Politique des ressources 83 (2023) 103581
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Politique de ressources
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« En Guinée, il existe deux types de sociétés minières » : une analyse des
diverses approches de contenu local des sociétés minières de bauxite
en Guinée
Cindy Wilhelm
École de développement international, Université d'East Anglia, Norwich, NR4 7TJ, Royaume­Uni
1. Introduction
Des pays du monde entier, y compris les pays à faible revenu et riches en
ressources d’Afrique subsaharienne, se tournent de plus en plus vers des politiques de
contenu local (PCL) pour parvenir à un développement inclusif basé sur les ressources
(Kalyuzhnova et al., 2016 ; Ramdoo, 2015a). Les LCP sont un type de politique
industrielle qui exploite les liens (Hirschman, 1958) et les retombées (Singer, 1950) en
maximisant l’emploi direct local et les achats locaux au sein et au­delà de la chaîne de
valeur des activités minières industrielles. Selon Geipel (2017 ; page 434), «
l'approvisionnement local fait référence à l'achat de biens et de services utilisés dans le
processus minier auprès de fournisseurs du pays hôte d'exploitation ». En Guinée, un
pays à faible revenu dépendant des ressources naturelles et possédant les plus grandes
réserves de bauxite au monde avec une longue histoire d'activités minières industrielles,
les ressources naturelles n'ont pas créé de bénéfices socio­économiques visibles pour
les communautés d'accueil (Campbell, 2009 ; Knierzinger, 2014, 2018). Pour surmonter
la malédiction des ressources (Auty, 1990 ; Sachs et Warner, 2001) et l’extractivisme
enclavé (Ferguson, 2005, 2006), l’administration précédente d’Alpha Condé (2010­2021)
a lancé des PCL dirigés par l’État en tant que secteur minier. outil de réforme (Maponga
et Musa, 2021 ; Wilhelm et Maconachie, 2021). En Guinée, le Code minier révisé de
2013, les documents d'application légale et les décrets exigent des sociétés minières
qu'elles maximisent l'emploi national direct et indirect, ainsi que les achats locaux dans
leurs activités depuis l'exploration, la construction jusqu'à l'exploitation. Des objectifs
spécifiques et des exigences en matière de reporting sont définis et les sociétés
minières doivent les respecter. Par exemple, lors de l’exploration d’un projet minier en
Guinée, 10 % de toutes les sociétés sous­traitantes et fournisseurs doivent être
détenues ou contrôlées par des ressortissants guinéens. Durant la 11ème et la 15ème
année de la période d'exploitation, cette part passe à 30%.1 De même, en termes de
quotas d'emploi, les quotas évoluent au cours des phases de la phase des sociétés
minières. Durant toutes les phases, les travailleurs non qualifiés doivent être 100%
guinéens. Durant la première année de fonctionnement, 60% de tous les cadres
supérieurs doivent être de nationalité guinéenne,
Adresse e­mail : C.Wilhelm@uea.ac.uk.
1
Article 107 du Code Minier Guinéen.
2
Article 108 du Code Minier Guinéen.
https://doi.org/10.1016/j.resourpol.2023.103581 Reçu le 11
avril 2022 ; Reçu sous forme révisée le 10 avril 2023 ; Accepté le 10 avril 2023 Disponible en ligne le 6 juin
2023
0301­4207/© 2023 L'auteur. Publié par Elsevier Ltd. Il s'agit d'un article en libre accès sous la licence CC BY (http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/).
augmentant jusqu'à une part de 90% à partir de la 11ème année d'exploitation.2 Outre
ces outils directs (quotas et exigences en matière d'emploi local et d'approvisionnement),
des formations doivent être dispensées par les sociétés minières pour renforcer
davantage les capacités des employés nationaux, des entrepreneurs, et les petites et
moyennes entreprises détenues ou contrôlées par des ressortissants guinéens. Il existe
également une série d’outils indirects, tels que la participation des sociétés minières à
la Plateforme de fournisseurs et de partenariats lancée par l’État (la Bourse de Sous­
Traitance, BSTP), et des réformes plus larges visant à renforcer l’environnement des
affaires et de l’entrepreneuriat.
Le contenu local en Guinée est devenu un sujet d'un grand intérêt, en particulier au
cours de « l'année du contenu local » en 2017, lorsque la plupart des documents
d'application légaux et des décrets ont été introduits et a depuis lors été un sujet
important, en particulier lors des campagnes politiques (Wil­helm , 2022).
Avec le nombre croissant de sociétés minières internationales en Guinée, des PCL
bien mis en œuvre pourraient exploiter leur vaste potentiel.
Étant donné que les dépenses d’approvisionnement local des sociétés minières sont
plus importantes que les dépenses liées aux gouvernements, aux salaires et aux
investissements communautaires réunis (Publish What You Pay, 2021), les fournisseurs
locaux pourraient en bénéficier considérablement. En outre, les deux autres
composantes du contenu local – l’emploi direct et l’accès à la formation et au
développement des compétences pour les particuliers et les entreprises locales – sont prometteuses
La littérature a analysé en profondeur les avantages du contenu local. Il faut reconnaître
que la mise en œuvre du PACL est complexe et se heurte à divers obstacles (Calignano
et Vaaland, 2018 ; Hansen et al., 2014 ; Lebdioui, 2020 ; Macatangay, 2016 ; Tordo et
al., 2013). On peut se demander dans quelle mesure les LCP sont un outil efficace pour
parvenir à un développement inclusif basé sur les ressources en surmontant la
malédiction des ressources et l’extractivisme des enclaves. Dans de nombreuses
études de cas, notamment en Guinée, les LCP n’ont pas donné les résultats escomptés
(Hilson et Ovadia, 2020 ; Maponga et Musa, 2021 ; Wilhelm et Maconachie, 2021). Une
préoccupation majeure consiste à trouver le bon équilibre et la portée des
réglementations LCP. Les PCL, s’ils sont mis en œuvre de manière trop stricte,
peuvent être considérés comme du protectionnisme et du nationalisme des ressources. Savants
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C. Wilhelm
estiment que cela pourrait nuire à l’économie nationale et mondiale dans son ensemble,
réduire les investissements directs étrangers et créer un climat commercial défavorable
(Kalyuzhnova et al., 2016 ; Kalyuzhnova et Nygaard, 2009 ; Ramdoo, 2015a ; Tordo
et al., 2013). Par conséquent, une « alliance État­entreprise » (Kalyuzhnova et al.,
2016, page 24), dans laquelle l'État, les investisseurs et les sociétés minières
s'accordent sur les conditions et le contexte des PCL, est cruciale pour sa mise en
œuvre réussie (Macatangay, 2016). Alors que les sociétés minières ont de plus en
plus commencé à améliorer leurs pratiques sociales et environnementales
conformément à leur stratégie de responsabilité sociale des entreprises (RSE) pour
obtenir leur permis social d'exploitation (SLO) auprès des communautés d'accueil,
certaines de ces activités RSE ressemblent en fait à des LCP. (Giuliani, 2016 ; Goerg
et al., 2016 ; Logsdon et Wood, 2002 ; Mbilima, 2021 ; Rajak, 2011 ; Wilhelm et
Maconachie, 2021). Cependant, la littérature sur la LCP et la RSE n’a pas encore
abordé ces dynamiques.
Cet article vise à analyser la mise en œuvre des LCP par les sociétés minières et
à comprendre les différentes motivations qui expliquent leur réponse à ces pratiques.
Plus spécifiquement, à travers l'étude de cas du secteur de la bauxite en Guinée,
l'étude examine comment les principales sociétés minières de bauxite en Guinée
réagissent aux LCP mandatés par l'État et pourquoi leur réponse diffère. Cet article
commence par une présentation de la littérature et des concepts clés, ainsi que des
méthodes. La quatrième section examine la performance des principales sociétés
minières de bauxite en Guinée en termes de LCP. La cinquième section compare leurs
performances et leur engagement et analyse les raisons de ces différences. Les
implications de cette analyse sont discutées dans la sixième section et conclues dans
la septième section.
2. Littérature et concepts clés
Les pays riches en ressources mettent en œuvre des PCL pour accroître les
bénéfices locaux des activités extractives (Kalyuzhnova et al., 2016). Historiquement,
les pays riches en ressources naturelles ont été confrontés à
la malédiction des ressources. Ce concept stipule que les pays riches en ressources
sont plus susceptibles de connaître une croissance économique négative, des conflits,
la pauvreté et un faible développement humain (Auty, 1990 ; Nankani, 1979 ; Ross,
2019 ; Sachs et Warner, 2001 ; Stevens, 2015). Dans les pays riches en ressources
comme la Guinée, les activités extractives ont été historiquement façonnées par un
caractère d'enclave, où les activités extractives étrangères sont géographiquement
exclues, manquent de lien avec l'économie du pays dans son ensemble et sont
dominées par la simple exportation de matières premières. modifications (Bah, 2014 ;
Campbell, 1991 ; Diallo, 2019 ; Emerson, 1982 ; Ferguson, 2005, 2006). Les outils
permettant de surmonter ces impacts négatifs sont les liens et les retombées. L'idée
est d'élargir et de diversifier l'approvisionnement local des activités au sein et au­delà
de la chaîne de valeur extractive où « une chose mène à l'autre ». Par conséquent,
ces activités se propagent à d’autres industries, diversifiant et réduisant ainsi la
dépendance à l’égard des activités extractives qui sont limitées dans le temps et
façonnées par une caractéristique d’expansion et de récession (Hirschman, 1958 ;
Morris, 2012 ; Pijpers et Eriksen, 2018 ; Singer, 1950). Des institutions fortes sont un
autre outil crucial pour surmonter la malédiction des ressources. Dans de nombreux
cas, les échecs institutionnels sont à l’origine du manque de diversification et de
développement inclusif basé sur les ressources (Bebbington, 2011, 2013, 2018 ; Karl,
1999, 2007).
C’est dans ce contexte que les pays riches en ressources ont récemment lancé
des réformes visant à renforcer la gouvernance des ressources et la participation de
l’État. Cela fait suite à des décennies d’extractivisme néolibéral où
l’État avait été sélectivement absent et où l’autorité, la légitimité et les services ont été
transférés vers la gestion du secteur privé (B´eland et al., 2021 ; Campbell, 2010 ;
Szablowski et Campbell, 2019). Grâce à des initiatives régionales telles que la Vision
minière pour l'Afrique et d'autres réformes nationales, un retour au développementalisme
(l'intervention de l'État dans les institutions économiques et sociales pour réaliser le
développement et maximiser les avantages sociaux) peut être observé (North et
Grinspun, 2016). De telles réformes sont souvent qualifiées de néo­extractivisme.
Bien que les activités extractives se poursuivent, l’État facilite la redistribution des
bénéfices issus des activités extractives par le biais de dépenses sociales (Childs,
2016 ; Childs et Hearn, 2017). Les LCP correspondent à cet esprit du temps. Les
activités extractives sont
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Politique des ressources 83 (2023) 103581
considéré comme un catalyseur de diverses activités économiques locales et
d’opportunités d’emploi. Les LCP sont également un exemple de gouvernance
améliorée des ressources et d’institutions solides (IGF, 2018 ; Kragelund, 2019 ;
Ramdoo, 2015a).
Selon Bebbington (2013 ; page 25), un autre élément d’une gouvernance efficace
des ressources pour parvenir à un développement inclusif basé sur les ressources est
que l’État canalise les activités extractives. Cela se fait à travers des « canaux
d'inclusion » pour améliorer les dépenses sociales. Cela signifie que (i) l'emploi, (ii) la
gestion de la chaîne d'approvisionnement, (iii) la RSE et la transparence, (iv) la
propriété (publique), (v) la planification et la consultation, (vi) la fiscalité et les dépenses
sociales (vii) et les politiques environnementales. peut améliorer les dépenses sociales,
les politiques et la protection.
En effet, comme cela a été mentionné en introduction, les industries pétrolières,
gazières et minières ont récemment commencé à augmenter leurs dépenses sociales
dans les communautés d’accueil à travers leurs démarches RSE pour renforcer leur
SLO. Dans de nombreux cas, cela fait suite à des conflits communautaires antérieurs
(Giuliani, 2016 ; Goerg et al., 2016 ; Ho, 2009 ; Logsdon et Wood, 2002 ; Mbilima,
2021 ; Moon et al., 2005 ; Rajak, 2011 ; Vertigans et al. ., 2016).
C’est dans ce contexte que les LCP opèrent. Des réglementations imposées par
l'État, parfois sous la forme de quotas, dans le but de parvenir à un développement
inclusif basé sur les ressources, sont créées, mises en œuvre et appliquées. Ce
processus dépend du rôle de l’État et des institutions concernées, ainsi que de ceux
qui doivent mettre en œuvre ces règles – en l’occurrence les sociétés minières. En
théorie, de tels LCP, en supposant que toutes les entreprises adoptent la RSE,
devraient constituer un outil attrayant pour permettre aux entreprises d'obtenir et de
renforcer leur SLO.
Les études LCP ont été dominées par l'analyse des raisons économiques pour
lesquelles certaines entreprises hésitent ou ont des difficultés avec les LCP (Ayanoore,
2019 ; Calignano et Vaaland, 2018 ; Hansen et al., 2014 ; Lange et Kinyondo, 2016 ;
Lebdioui, 2020 ; Macatangay, 2016). ). La manière dont les sociétés minières gèrent
les LCP mandatés par l’État et leurs propres intérêts et objectifs en matière de RSE
reste inexplorée dans la littérature sur les LCP. Une exception est Wil­helm et
Maconachie (2021) qui ont exploré la réponse de trois sociétés minières basées en
Guinée aux LCP. Ils ont montré comment ces sociétés ont mis en œuvre les LCP en
raison de leurs stratégies de RSE et de SLO. Cependant, cette étude s’est limitée à
seulement trois entreprises ayant une expérience similaire en matière d’investissement
international.
Il existe en Guinée des sociétés minières ayant des antécédents d’investissement
et des pays d’origine divers (Knierzinger, 2018 ; Rey et Mazalto, 2020 ; Rey et Saint
Simon, 2016). Rey et Mazalto (2020) affirment qu'en Guinée, ce sont les investissements
asiatiques et les opérateurs chinois dans le secteur de la bauxite qui ont des normes
sociales inférieures à celles de leurs homologues.
Que le cas des LCP confirme ces observations, la réponse des différentes sociétés
minières aux réformes et réglementations sociales et leur adhésion aux conceptions
de la RSE restent une lacune. Dans les sections qui suivent, c’est précisément cette
réponse différente des entreprises aux LCP mandatés par l’État qui est examinée.
3. Méthodes
La présente étude a adopté une conception d’étude de cas qualitative. La Guinée
a été utilisée comme exemple de pays riche en ressources à faible revenu qui opte
pour les LCP comme type de réforme du secteur minier. Pour analyser les différentes
réponses des sociétés minières en Guinée aux LCP mandatés par l’État, une analyse
comparative a été adoptée. Sept sociétés minières de bauxite et leurs réponses aux
LCP ont été sélectionnées. Cette décision a été guidée par les chiffres de production
fournis par le ministère guinéen des Mines, qui présente le rendement de production
des sociétés minières de bauxite pour chaque trimestre. Les entreprises qui sont en
phase de production ainsi que les plus gros producteurs de bauxite ont été choisies.
Cela a permis d'obtenir un échantillon diversifié qui entre dans le cadre de la conception
de l'étude.
La collecte des données a été effectuée à partir de sources primaires et
secondaires. Cela comprenait un travail de terrain en Guinée en 2019 et des entretiens en ligne.
tout au long de 2020 et 2021. Au total, 67 entretiens semi­directifs avec des
représentants du gouvernement, de la société civile et des sociétés minières, ainsi que
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C. Wilhelm
ainsi que des consultants, du personnel de la Banque mondiale et d'anciens dirigeants de
sociétés minières. Les entretiens ont été réalisés en français et en anglais et traduits par
l'auteur. Pour compléter et trianguler ces données, une analyse documentaire utilisant
diverses sources a été utilisée. Les rapports des entreprises, les sites Internet, les
publications et données des réseaux sociaux, ainsi que les documents et données fournis
par le ministère guinéen des Mines ont été consultés. Au total, 436 documents ont été
utilisés, ainsi que 23 pages de réseaux sociaux, 19 sites Internet et 82 articles de journaux
pertinents.
Sur la base de ces données, le respect et les engagements des sociétés minières
sont évalués sur la base (i) d'évaluations et d'appréciations réalisées avec les données
internes des sociétés minières, et (ii) de visibilité en termes de reporting ultérieur, (social)
les références médiatiques, ainsi que les perceptions et observations des informateurs
clés.
Les données collectées incluent du contenu local au niveau micro local
(local­local) ainsi qu'au niveau national (emploi national et approvisionnement contrairement
aux sources étrangères).
Il convient de reconnaître qu'une analyse d'étude comparative présente des limites en
raison de l'indisponibilité des données. Alors que Guinea Alumina Corporation (GAC),
Alufer et Compagnie des Bauxites de Guinée (CBG) sont plus transparentes et fournissent
davantage de données accessibles au public, tout en étant ouvertes aux entretiens et aux
communications par courrier électronique, Rusal, Société Mini'ere de Bok'e (SMB), Chalco,
CDM Chine (i) n'étaient pas disposés et/ou réceptifs à participer à l'étude et (ii) leurs
données librement disponibles étaient limitées. Cependant, ces entreprises sont toujours
incluses dans les évaluations du contenu local commandées par le ministère des Mines,
ainsi que dans d'autres rapports et données officiels du gouvernement.
Malgré ces limites, les résultats généraux sont pertinents et donnent un aperçu utile
de la réponse différente aux LCP par les sociétés minières en Guinée, à la suite d'un large
éventail de réformes du LCP depuis 2013. Cette étude de cas guinéenne est utile pour
éclairer les débats sur les LCP en Afrique de l'Ouest. L’Afrique subsaharienne et d’autres
pays à faible revenu et riches en ressources naturelles optent pour des PCL ou sont en
train de les concevoir et de les mettre en œuvre.
4. Aperçu de la mise en œuvre du contenu local par les principales sociétés
minières de bauxite en Guinée
La figure 1 ci­dessous résume les entreprises étudiées et donne un aperçu
dans leur structure de propriété et d’investissement.
4.1. Alufer, GAC et CBG
L’analyse des documents et les données des entretiens montrent que les sept sociétés
minières de bauxite ont un niveau différent d’engagement LCP en Guinée. Dans l’ensemble,
aucune des entreprises n’obtient d’excellents résultats en matière de mise en œuvre des
LCP mandatés par l’État. Ils n'ont pas de stratégie de contenu local clairement définie. De
plus, ils ne fournissent pas de données complètes sur les opportunités d'emploi et de
formation directes et indirectes, bien que cela soit stipulé par la législation guinéenne sur
le contenu local.
Cependant, on peut constater que certaines entreprises obtiennent de bien meilleurs
résultats que d’autres. Les tableaux 1 et 2 résument leurs performances et leur conformité
aux LCP mandatés par l'État, ainsi que leurs indications d'engagement LCP. Les deux
tableaux prennent en compte les performances globales en matière d'approvisionnement
local et d'emploi, ainsi que ­ si disponibles ­ les performances ventilées par catégorie
applicable, telles que définies dans les quotas du code minier. Conformément à la
réglementation sur le contenu local en Guinée, le terme « local » désigne l'emploi et les
achats « nationaux ».
Les entreprises nationales sont celles enregistrées en Guinée et gérées par des Guinéens.
Certaines entreprises sont en tête de ce classement. Alufer et GAC fournissent des
informations plus détaillées et respectent dans une certaine mesure les quotas fixés par la
réglementation sur le contenu local. Alufer dépasse les quotas d'emploi direct pour les
catégories d'emploi et est connu pour ses nombreux efforts en faveur de l'approvisionnement
local et de la formation.
GAC publie publiquement des données détaillées sur les achats locaux et est connu pour
ses efforts importants en matière de contenu local. La CBG dispose d’un nombre total
d’emplois locaux élevé, même si elle manque de données détaillées. Une partie du contenu local entreprise chinoise en Guinée.
3
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les initiatives qui existaient avant les LCP officiels des États semblent prometteuses.
Dans l’ensemble, ces trois entreprises ont été perçues de manière plus positive lors des
entretiens et de l’analyse des documents. Alufer est considéré comme « une bonne
référence », un « performant » et « un exemple ». GAC a été qualifié de « l'un des très
rares champions du contenu local ». L'effort de la CBG pour être « la plus guinéenne de
toutes les sociétés minières en Guinée » est dans une certaine mesure reconnu. Cette
constatation est conforme à celle de Wilhelm et Maconachie (2021).
4.2. Les autres types de sociétés : Rusal, SMB, CDM Henan Chine et Chalco
SMB, Chalco, CDM Henan Chine et Rusal – les sociétés minières de bauxite dont les
investissements sont d’origine chinoise et russe – montrent une réponse différente au
contenu local. Ils ont obtenu de moins bons résultats dans les évaluations LCP de 2017
commandées par le ministère (voir tableaux 1 et 2).
De plus, ils ne sont pas transparents sur les pratiques du LCP et les informations
disponibles (c'est­à­dire l'adhésion au BSTP, la communication sur leurs sites Internet, les
rapports et informations des investisseurs et des sociétés mères) n'indiquent pas un
engagement significatif du LCP. Malgré le taux élevé d’emplois directs locaux (à l’exception
de Chalco, qui a obtenu de mauvais résultats), les entreprises ne fournissent pas
d’informations plus détaillées sur l’emploi ni sur les achats locaux. L'impression générale
en Guinée est que ces entreprises « chinoises » et « russes » ne sont pas connues pour
être de bons exemples de PCL. Une analyse de leurs pratiques RSE via les médias
(sociaux) révèle également qu'ils sont plutôt connus pour leurs activités RSE traditionnelles
(dons, investissements communautaires, programmes d'infrastructures, éducation, entre
autres), tandis que les LCP sont absents. La seule exception est les PME, où l'on peut
constater quelques références et engagements en matière de contenu local, mais où
l'impression globale en termes de contenu local reste insatisfaisante.
« Quand vous prenez SMB, ils [les employés et les sous­traitants] sont tous chinois. »
a déclaré un représentant d’une ONG. Une autre personne interrogée a expliqué que
« les PME, les Chinois3, ont leurs propres méthodes. Ils ne le font pas
contenu local.'
CDM Henan Chine et Chalco n'ont pas non plus montré d'engagement visible envers
les LCP. La part de Chalco dans l'emploi local est particulièrement faible (voir tableau 1).
De même, il n’y a aucun LCP visible de Rusal. Son approche du contenu local et ses
pratiques sociales globales ont été décrites comme « très fermées », « invisibles » et
globalement pas positives.
La section suivante analyse pourquoi il existe une différence entre l'approche d'Alufer,
GAC et CBG par rapport à celle de Chalco, CDM Henan Chine et des filiales Rusal, en
Guinée. Cela permettra également de comparer davantage les approches de contenu local
adoptées par les différentes entreprises.
5. « L'IFC est bénéfique pour le contenu local » : motivation derrière l'engagement
des entreprises en faveur des LCP
Cette section explore pourquoi Alufer, GAC et CBG affichent plus d'engagements
envers les LCP que leurs homologues. Les raisons présentées ici ne sont pas exclusives ;
ils font simplement écho aux thèmes les plus visibles dans les données. Des recherches
supplémentaires sont nécessaires pour identifier et explorer toute autre raison possible.
5.1. L’engagement du LCP comme réponse aux pressions et attentes sociales
Lorsqu'on leur a demandé pourquoi ils souhaitaient mettre en œuvre les activités du
LCP, GAC, CBG et Alufer ont évoqué leurs expériences passées avec leurs communautés
d'accueil. Ces communautés ont commencé à exiger une approche RSE modifiée qui
inclurait une attention particulière à l'emploi à travers les activités locales.
contenu.
Dans une interview, le responsable de la performance environnementale et sociale de
3
La SMB, malgré sa structure de propriété mixte, est considérée comme une
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Fig. 1. Aperçu des sociétés minières incluses dans cette étude Note.
Données de production extraites du rapport annuel 2020 du Bulletin de Statistiques Minières du Ministère des Mines.

Tableau
1 Aperçu des approches et performances LCP des entreprises en Guinée.
Nom de l Le contenu local ou la priorité pour L'entreprise Emploi local (par rapport Achats Possibilités Performances dans le

Entreprise l’emploi guinéen sont­ils exprimés a­t­elle une aux quotas) locaux (par de formation Adhésion au BSTP4 Contenu local 2017

dans leur site Web, leurs rapports stratégie de rapport aux Évaluation du ministère
et les exigences des contenu local ? quotas)
investisseurs ?

Alufer Oui Non Dépassé Pas de données; mais Oui Oui Très performant avec de
quelques bonnes pratiques et des
preuves d'efforts performances

médiocres
Alumine de Guinée Oui Non Pas de données Dépassé (37% local Oui Oui Deuxième meilleur

société désagrégées, total artiste aux pratiques

(AGC) 82,47% de l'effectif guinéen en achats dépensés) et performances mixtes
2020

Compagnie des Oui Non Aucune donnée ventilée, Pas de données; mais Oui Non Un mélange de pratiques
Bauxites de total 99 % quelques et de performances
Guinée (CBG) preuves d'efforts médiocres et faibles n/
Chalco Non Non Aucune donnée ventilée, Non/Inconnu Non/Inconnu Non a
total 59 %
MDP Henan Non Non Aucune donnée ventilée, Non/Inconnu Non/Inconnu Non n/A
Échine total 93 %
Société Minière Non Non Aucune donnée ventilée, Pas de données Quelques preuves Non Pauvre

de Bok'e (SMB) total 88 % d'efforts

Rusal (COBAD et Non Non Pas de données ventilées, Pas de données Non/Inconnu Non Pauvre

CBK) total 96 % et 97 %

respectivement

Créé par l'auteur, sur la base de Kaiser EDP, 2017 Évaluation du Contenu Local dans le secteur minier en Guinée, Rapport final : R´esultats et recommandations Rapport Commandé par le
Ministère des Mines ; DAI, 2017 Évaluation du Niveau de Promotion du Contenu Local et de son Potentiel de Croissance dans le secteur des Mines and Assessing Sector Capacité pour les
liens d'investissement direct étranger en Guinée : Rapport de Revue de la littérature et d'analyse des donn´ees pour le Groupe de la Banque Mondiale Rapports pour le Ministère des Mines ;
Ministère des Mines, 2021) Bulletin de Statistiques Minières n*010 Année 2020 Janvier­D´ecembre ; examen approfondi de documents, d'archives, d'entretiens, de sites Web d'entreprises et
de rapports d'investisseurs, ainsi que de publications sur les réseaux sociaux.
4
La BSTP est une plateforme de fournisseurs et de places de marché créée à l'initiative de l'État guinéen. Le document de politique nationale de contenu local de 2017 et celui de 2019
Le décret 263 sur le contenu local exige que les sociétés minières rejoignent le BSTP.

Alufer a expliqué que le contenu local était nécessaire pour gérer les « a résumé que cet engagement «contribue à éviter des troubles sociaux».
attentes sociales ». Lors d'un entretien avec un représentant d'Alufer, cela Cela aide à éviter les
a été clarifié. Par exemple, lorsque la communauté hôte a compris que le frustrations. Un représentant de GAC a fait référence au même
transport était nécessaire sur les sites, elle a demandé que celui­ci soit raisonnement lorsqu'il a expliqué que l'entreprise avait opté pour le contenu
assuré localement. Le soutien d'une entreprise locale, selon les mots d'un local en raison de problèmes antérieurs avec la population locale où les
membre de la communauté locale qui avait bénéficié d'une des activités d'Alufer, jeunes, en particulier, réclamaient du travail et ont fini par bloquer le site minier. Pour gé

4
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Tableau
2 Résultats de l'évaluation du contenu local Kaiser EDP de 2017, commandée par le ministère guinéen des Mines.

Emploi local Entraînement Achats locaux

Contenu local Qualité de Contenu local performant Qualité de Contenu local performant Qualité de Performance
Stratégie/Plan Les pratiques Stratégie/Plan Les pratiques Stratégie/Plan Les pratiques

Alufer Oui Bien Médiocre Oui Bien Être vu Oui Bien Médiocre
CBG Oui/Non Faible Médiocre Oui Bien Médiocre Non Faible Faible
GAC Oui Bien Bien Oui Médiocre Médiocre Non Médiocre Médiocre
Rusal : Non Faible Faible Oui Médiocre Médiocre Non Faible Faible
CBK
Rusal : Non Faible Être vu Non Faible Être vu Non Faible Faible
COBAD
PME Non Faible Faible Oui Faible Faible Non Médiocre Médiocre

Créé par l'auteur, extrait et traduit du français de Kaiser EDP (2017) Évaluation du Contenu Local dans le secteur minier en Guinée, Rapport final : R´esultats et recommandations, page
11 Rapport commandé par le Ministère des Mines. stratégie disponible uniquement
un
pour l'extension de la mine de CBG.

problèmes, l’entreprise a décidé de renforcer son engagement en faveur des programmes d’emploi
locaux. L'une des principales raisons pour lesquelles GAC valorise le contenu local et garantit de
bonnes relations avec les communautés était d'assurer son SLO.
CBG, comme l'a exprimé un représentant de CBG dans une interview, a également assuré la
« paix sociale » avec les communautés locales à travers des activités de contenu local. Un
document qualifie l'engagement de la CBG de soutenir l'entrepreneuriat local comme un « double
objectif » ; sa prévention des conflits avec les communautés locales a permis la promotion de son
programme de micro­entreprises (Diallo et al., 2011).
L'idée selon laquelle les sociétés minières investissent dans des activités sociales et
environnementales pour « faire le bien » en tant qu'entreprise citoyenne n'est pas nouvelle. Ils ont
réagi à l'évolution des normes mondiales en matière de RSE (Dash­wood, 2007). « L'autonomisation
économique » et le soutien à l'entrepreneuriat et à l'approvisionnement locaux (activités qui
ressemblent aux LCP dans le cadre de la RSE) sont de plus en plus utilisés par les sociétés
minières (Rajak, 2011).
Frederiksen (2018) cite spécifiquement les engagements en matière de contenu local comme
exemple d’activités RSE des sociétés minières. Hilson et Ovadia (2020) abordent brièvement la
relation entre les LCP et la RSE. Le fait qu'il existe actuellement des « frontières floues » entre les
LCP et la RSE est controversé, et les LCP devraient se distinguer clairement des programmes de
RSE afin de s'éloigner des objectifs souples et volontaires, déconnectés des réalités et des besoins
des populations locales. Les entreprises évoquées ici montrent que les PCL cohabitent avec la
RSE ; ces entreprises mettent en œuvre de manière sélective les LCP mandatés par l’État, tout en
bénéficiant des activités LCP mises en œuvre par la RSE pour renforcer leur SLO.
5.2. Rôle de l’origine de l’investissement
Ce n’est pas seulement l’attitude de chaque société minière qui détermine son engagement
en faveur d’activités sociales ou son engagement envers les normes nationales et internationales.
Le rôle de l’origine des investissements et de la structure de propriété des sociétés minières ne doit
pas être sous­estimé. Dans le cas de Guin­ea, Knierzinger (2015, 2018) a montré comment les
chaînes de commandement des entreprises transnationales, régies par la dynamique de l'industrie
minière, ont un impact sur le développement socio­économique des communautés d'accueil.
GAC pour les activités sociales et économiques, y compris le contenu local. Le programme a été
financé en partie par GAC lui­même (65 %), ainsi que par le fonds canadien (35 %). En 2021, elle
a également lancé un programme de contenu local avec GAC pour soutenir leurs LCP. De plus,
dans le cadre d'un partenariat de cinq ans, l'IFC a également été impliquée dans le programme
communautaire des petites et moyennes entreprises (PME) de la CBG, facilitant ainsi l'engagement
entre ces dernières et d'autres entreprises locales. Un représentant d'une ONG a noté une
amélioration significative des LCP de la CBG suite à leur implication. Alufer s'engage volontairement
à respecter les normes de performance de l'IFC et a été soumis à un audit de l'IFC. Pour l'IFC,
selon l'un de ses représentants locaux à Conakry, « le contenu local n'est pas négociable ». Les
normes de performance de l’IFC (niveau minimum d’exigences pour un investissement) n’incluent
directement aucune obligation en matière de contenu local.
Certaines références indirectes favorisent le contenu local. La norme de performance 2 sur le
travail et les conditions de travail exige par exemple le respect des lois nationales sur l'emploi et le
travail, qui dans le cas de la Guinée incluraient le Code minier et la réglementation du contenu local.
La norme 7 relative aux peuples autochtones souligne que les initiatives du secteur privé peuvent
offrir aux peuples autochtones la possibilité de s'engager dans des activités liées au projet et d'en
tirer profit, ce qui peut les aider à atteindre leurs objectifs de développement économique et social.
En 2011, l'IFC a publié un « Guide pour démarrer dans les achats locaux » pour aider les opérateurs
de sites de projets dans les secteurs extractifs à élaborer une politique et une stratégie d'achats
locaux. Le guide fournit le contexte et les définitions permettant au secteur privé de comprendre les
bases, ainsi que des outils tels que des outils d'auto­évaluation, l'identification et la priorisation des
opportunités commerciales locales, la conception de programmes d'achats locaux, des indicateurs
de performance clés, entre autres. L'IFC a également créé des programmes de développement
des fournisseurs pour promouvoir et soutenir les liens avec les fournisseurs et maximiser la part
des entreprises locales et appartenant à des femmes dans les chaînes d'approvisionnement. En
partenariat avec des ministères gouvernementaux et d'autres partenaires, ces programmes ont été
mis en œuvre soit au niveau national, soit par des entreprises individuelles. En 2015, la SFI a
lancé un programme d'investissement de 30 millions de dollars en Guinée pour soutenir les PME
et créer des emplois, notamment pour la formulation d'une politique nationale de contenu local et
la fourniture d'une assistance technique en matière de passation de marchés aux entreprises
minières.

La possibilité et le type d'emploi, l'accessibilité aux services de base et l'avenir des populations en
La SFI n’est pas la seule à financer et à soutenir les engagements en matière de contenu
ce qui concerne les opérations minières sont façonnés par des décisions et des facteurs externes
local des sociétés minières avec lesquelles elle s’associe. Les prêteurs et les investisseurs exigent
qui échappent à l'État et même aux hauts dirigeants des sociétés minières.
de plus en plus de normes sociales et environnementales. Cela peut être constaté dans le cas
d’entreprises comme Alufer, GAC et CBG, qui s’appuient sur divers prêteurs internationaux pour
Compte tenu de ces aspects, une question majeure qui explique l’engagement des entreprises
leurs opérations minières en Guinée. Les prêteurs, y compris la SFI et d'autres, ont des attentes et
en faveur des LCP est l’origine de l’investissement. Il a été clairement indiqué que les entreprises
des normes plus élevées en matière de contenu local et de questions sociales. Par conséquent,
qui reçoivent des financements de sources internationales garantissant des normes sociales strictes
ces entreprises doivent se conformer aux normes internationales élevées ; ces investisseurs ne
font preuve d'un plus grand engagement en faveur du contenu local. Les entretiens ont confirmé
veulent pas que leur réputation soit ternie ou associée à des problèmes sociaux dans le pays.
qu'une des principales sources d'engagement en matière de contenu local est

la SFI de la Banque mondiale. « L'IFC est bénéfique pour le contenu local. » » a déclaré un
représentant d'une ONG, laissant entendre que les entreprises issues de l'IFC ont tendance à
Les sociétés minières ont reconnu le rôle que jouent leurs prêteurs dans leur engagement en
s'engager davantage en faveur du contenu local, notamment GAC, Alufer et CBG.
matière de contenu local. Par exemple, lorsqu'on lui demande pourquoi
En 2019, la SFI a fourni un programme de conseil de 4,4 millions de dollars

5
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C. Wilhelm
GAC s'est engagé en faveur du contenu local, la réponse d'un représentant de GAC a
été :
«C'est l'avantage avec les prêteurs, nous sommes toujours sous surveillance (…)
chez GAC, nous essayons d'imiter ce que font les investisseurs et EGA.
Pour les entreprises avec des investisseurs variés comme la nôtre ou CBG par
exemple, nous avons tendance à suivre les directives de l'IFC qui nous poussent à
être de bons citoyens et [nous font] améliorer le niveau de vie partout où nous
sommes. C'est la différence que je vois dans la manière dont les entreprises abordent
le contenu local (…) Les investisseurs jouent un rôle important dans la manière dont
le contenu local se réalise.
Cette citation renforce le rôle important que jouent les prêteurs pour aider les sociétés
minières à mettre en œuvre les LCP. Le représentant du GAC cite également cela comme
une raison pour laquelle les entreprises sans cette expérience abordent différemment le
contenu local.
Cela montre que ce n’est pas seulement la pression communautaire ou le renforcement
du SLO qui convainc les sociétés minières de s’engager dans la RSE. Les pressions
politiques et réglementaires de l’État ainsi que les normes mondiales jouent également un
rôle. Alors que les États se sont souvent retirés de la gestion de l’impact social et
environnemental, Szablowski (2007) soutient que la Banque mondiale continue de mettre
l’accent sur les programmes susceptibles de réduire l’impact négatif des activités
extractives. Les marchés financiers et les institutions qui financent les opérations minières
demandent de plus en plus à ces entreprises de faire de même (Mzembe et Meaton,
2014). En fait, la pression de la communauté des investisseurs exige un engagement
considérable en faveur de la RSE et des normes sociales pour réduire divers types de
risques miniers et protéger sa réputation (y compris celle de l'entreprise) (Frederiksen,
2018). C'est ce « modèle économique de RSE » et l'engagement envers des « normes de
performance » mondiales qui expliquent cet engagement croissant en matière de RSE
(Gil­berthorpe et Banks, 2012). Kemp et coll. (2012) montrent comment l'autoréglementation
et une « culture d'audit » peuvent légitimer la réputation des sociétés minières et de leurs
investisseurs en réduisant les risques. Même ici, l’IFC est considérée comme l’une des
normes centrales pour garantir ces deux aspects. En fait, comme le soulignent Kemp et
Owen (2017, page 164), « les normes de la SFI sont devenues la référence « par défaut
» en matière de performance sociale dans le secteur minier. Estèves et coll. (2013) ont
étudié les pratiques d'approvisionnement locales de 23 entreprises et analysé les
tendances
LCP dans les industries extractives. L’un des facteurs qui a joué un rôle a été le
développement de partenariats et d’accords stratégiques, notamment avec la SFI en tant
que partenaire. Le programme Ahafo Linkages de la SFI à la mine Ahafo de Newmont
Ghana Gold Ltd et la société Esso, propriété d'ExxonMobil au Tchad, par le biais du
programme de développement des fournisseurs locaux de la SFI, sont des exemples
notables de bons LCP. En Zambie, le programme de développement des fournisseurs de
PME de la Copperbelt a été lancé par la SFI en 2007, démontrant son rôle dans la mise
en œuvre de bons LCP dans le pays (Caramento, 2019). Au Chili et au Pérou, les
programmes de fournisseurs créés en partenariat avec la SFI constituaient les principales
activités de contenu local gérées par les sociétés minières (Ramdoo, 2015b). Estèves et
coll. (2013 ; page 22) concluent que « les partenariats entre diverses parties prenantes
sont essentiels au développement du contenu local ». L'IFC est l'une des principales
agences multilatérales qui promeuvent des mesures de contenu local « douces » –
favorables aux entreprises et volontaires – en aidant les entreprises à créer des liens en
amont et une valeur ajoutée partagée, aidant ainsi les entreprises extractives à obtenir
leur SLO (Caramento, 2019 ; Ovadia, 2016). Cependant, Caramento (2019) observe que
dans ce plaidoyer en faveur des PCL, une notion technocratique et dépolitisée du contenu
local est utilisée. Dans le cas de la Zambie, le programme constituait une initiative du
secteur privé, gérée par la SFI et les sociétés minières, sans autre soutien ni réforme
législatif et réglementaire.
Même si l'autorégulation du secteur privé offre des opportunités, elle comporte des
défis considérables. La section suivante analyse ce qui se passe lorsque des entreprises
issues d’horizons différents entrent dans l’industrie minière, notamment celles sans aucun
partenariat avec des agents comme la SFI et sans engagement envers les normes
sociales et environnementales internationales.
6
Politique des ressources 83 (2023) 103581
5.3. Sociétés minières d’origine russe et chinoise : une approche différente des LCP
La section 4 a montré que les sociétés minières russes et chinoises en Guinée font
preuve d’un engagement moins visible en faveur du contenu local. La littérature sur la
présence des sociétés minières russes en Afrique subsaharienne et leurs approches en
matière de RSE et d’engagements sociaux, y compris les LCP, est limitée. Dans le cas
des entreprises chinoises, la littérature analyse leur recours limité à l’emploi et aux
fournisseurs locaux sur le continent africain.
Il est largement admis que ces entreprises offrent des opportunités d’emploi limitées, ce
qui entraîne un ressentiment anti­chinois généralisé (Wegenast et al., 2019). Cela
s’explique en partie par le fait qu’ils importent leur propre main­d’œuvre au lieu de recourir
à l’emploi et aux achats locaux (Adisu et al., 2010 ; Alden, 2005 ; Smith, 2013 ; Zhao,
2014). Rui et coll. (2017) estiment qu’environ la moitié seulement de la main­d’œuvre
employée par les entreprises multinationales chinoises est composée de locaux. Cela
inclut également les fournisseurs des projets d’infrastructures chinois en Afrique où tout –
des simples matériaux aux équipements lourds – est importé (Mohan, 2013). Cela
témoigne de leur faible volonté de former et de stimuler l’emploi local (Jackson, 2014) et
explique leur faible engagement en faveur de la formation, malgré les stipulations de la
réglementation guinéenne LCP. À travers le cas des sociétés chinoises d’extraction de
cuivre en Zambie, Fessehaie et Morris (2013) ont montré comment les opérateurs
n’établissaient aucune relation et n’offraient pas beaucoup de soutien aux fournisseurs
locaux, par rapport à leurs homologues occidentaux. Dans l’ensemble, il a été largement
noté que les sociétés minières chinoises sur le continent africain opèrent comme des
enclaves (Gadzala, 2010 ; Lee, 2009 ; Mohan, 2013). Les recherches de Tang (2010,
2016) ont en outre montré que le nombre d'employés chinois dans ces entreprises
diminue de moitié au fil des années, par rapport à l'effectif au moment de la création.
Wegenast et coll. (2019) identifient deux raisons à cela : (i) l’avantage concurrentiel de la
large disponibilité de main­d’œuvre à faible coût et (ii) les barrières linguistiques et les
aspects culturels. Cependant, ils suggèrent d’autres raisons potentielles qui restent encore
à étudier.
Une fois qu’il est devenu clair que les sociétés minières d’origine chinoise et russe
avaient un engagement et des performances moins satisfaisants en matière de contenu
local, la question s’est posée de savoir pourquoi c’était le cas. Une question centrale était
de savoir pourquoi ces entreprises étaient moins motivées à adopter les LCP dans leur
performance et leur communication RSE. Les réponses ont donné davantage
d’informations sur les intérêts et les antécédents de ces entreprises.
5.3.1. Manque d’investisseurs internationaux, d’intérêts étatiques et de l’Initiative chinoise
de la Ceinture et
de la Route La section 5.2 a expliqué comment les entreprises apparemment
fortement engagées dans les PCL sont motivées en raison de l’origine de leurs
investissements. À cet égard, il existe des preuves qui montrent que les sociétés minières
qui ont un niveau inférieur d'engagements en matière de contenu local en Guinée sont moins performan
motivés à s’engager dans les LCP en raison de leur manque d’investissements
internationaux et de leur engagement envers les normes sociales internationales. Cette
explication a été largement partagée par de nombreuses personnes interrogées. Dans
certains cas, la frustration a même été exprimée, en particulier par les dirigeants actuels
et anciens de sociétés minières, du fait que certaines sociétés sont liées par des normes
de performance strictes qui exigent un contenu local qui peut être coûteux, alors que le
concurrent n'est pas tenu aux mêmes normes. contrôle et exigences.
Un représentant d’une ONG a expliqué :
« En Guinée, il existe deux types de sociétés minières. Il y a ceux qui correspondent
aux normes auxquelles ils se sont inscrits. Par exemple, les normes de l’OCDE, de la
Banque mondiale ou de la SFI. La deuxième catégorie, ce sont ceux qui ne reçoivent
aucun financement international, ni de la Banque mondiale, ni de la SFI. Ce sont les
sociétés asiatiques, y compris les russes. Donc pas seulement les Chinois. Ils ont
leurs propres normes. Des normes invisibles. Inaccessible. Ces entreprises ont leurs
propres politiques. Ils ne font pas les mêmes efforts que les autres entreprises.
Aucune des entreprises russes et chinoises étudiées ne s’engage à respecter les
normes de la SFI et n’a aucun actionnaire connu exigeant un engagement.
Machine Translated by Google
C. Wilhelm
à ces normes. La structure de l’entreprise repose plutôt sur la participation de l’État
(voir Fig. 1).
Quant aux sociétés minières chinoises, le lien avec l’État et les intérêts de l’État
chinois a été clairement mis en évidence. Cela confirme les recherches de Li et al.
(2013) qui ont montré comment les multinationales chinoises des ressources
naturelles, tant publiques que privées, entretiennent des liens étroits avec le
gouvernement chinois. En fait, les négociations avaient généralement lieu entre le
gouvernement chinois et les gouvernements hôtes, avec peu de négociations
impliquant les entreprises multinationales chinoises du secteur des ressources.
China Hon­gqiao, société mère de Shandong Weiqiao et actionnaire de SMB,
s'engage ouvertement dans l'initiative chinoise de la Ceinture et de la Route. Le
groupe déclare sur son site Internet que « China Hongqiao aligne étroitement sa
politique d'entreprise sur l'initiative chinoise de la Ceinture et de la Route ». La même
chose peut être observée dans les déclarations des investisseurs de SMB Winning
(notamment CITIC Ltd) et de Chinalco (China Cinda Asset Management, China
Orient Asset Management Corporation, la China Development Bank publique et
China Construction Bank). La Banque de développement de Chine, dans son énoncé
de mission et de vision, montre que la priorité de la banque est de s'engager dans
des stratégies nationales qui facilitent la croissance économique et le progrès social
de la Chine. La China Construction Bank Company a également renforcé son
engagement à soutenir « fortement » la Ceinture et la Route.
construction.
L’initiative « la Ceinture et la Route » du gouvernement chinois est un projet
d’infrastructure mondial créé en 2013. Selon ce projet, les institutions financières
nouvellement créées et les projets d’infrastructure étrangers visent à faire revivre
l’ancienne Route de la Soie et à aller même au­delà.
Les chercheurs ont étudié ce projet et il existe un débat important sur les aspects
positifs de ce projet dans la promotion de la connectivité, du commerce, de la finance
et des relations entre les peuples grâce à une mondialisation inclusive et à la
réduction de la pauvreté (Zeng, 2016 ; Zhang, 2018). D’un autre côté, elle est souvent
considérée comme sinocentrique et fait l’objet de nombreuses critiques parce qu’elle
génère de la croissance économique uniquement en Chine, provoquant ainsi une
sorte de problème spatial (Sum, 2018). Le continent africain s’est impliqué dans
l’initiative « la Ceinture et la Route », notamment en recevant des investissements
chinois pour des projets d’infrastructures. Les exemples incluent les projets de
barrages impliquant la Chine au Ghana, au Soudan, en République du Congo, en
Éthiopie et au Cameroun (Brautigam et al., 2015 ; Chen et Landry, 2018 ; Han et
Webber, 2020).
Chen et Landry (2018) ont comparé une centrale hydroélectrique financée par
la Banque mondiale à une centrale financée par la Chine au Cameroun. Ils ont noté
que ces derniers ne respectaient que les réglementations sociales et
environnementales camerounaises, tandis que les premiers appliquaient des
évaluations et des pratiques plus rigoureuses. Dollar (2016 ; pages 65 à 73) a montré
que l’absence de financement de la Banque mondiale et internationale libère les
entreprises basées en Chine du même niveau de politiques environnementales et sociales détaillées.
comme l’explique un consultant :
Au lieu de cela, les projets chinois à l’étranger s’engagent à respecter les règles et
réglementations nationales. Cependant, dans les pays dotés d’institutions faibles, les
réglementations ne sont souvent ni mises en œuvre ni contrôlées. En termes de
contenu local, le projet chinois au Cameroun employait de nombreux travailleurs
locaux, mais même dans ce cas, sa construction a été réalisée par une entreprise
chinoise qui suivait les normes chinoises. Les machines et équipements de
construction, ainsi que toutes les ressources, ont été importés de Chine. Certains
transferts de compétences et d’expertise vers les populations locales ont eu lieu au
cours des deux projets (Chen et Landry, 2018). En termes de normes
environnementales, il a été noté que dans le passé, les entreprises chinoises n’étaient
pas très surveillées dans leurs investissements et leurs opérations à l’étranger. L’État
chinois s’est également montré indulgent, en publiant seulement récemment des
lignes directrices visant à réglementer les investissements miniers d’un point de vue social et
(Smith,
environnemental
Sur la base de plusieurs témoignages et d'une couverture médiatique et d'un
sentiment largement répandus, les sociétés minières chinoises en Afrique
subsaharienne ont des impacts sociaux et environnementaux plus négatifs sur les
communautés locales que leurs homologues occidentales (Armony et Velásquez,
2015 ; Geerts et al., 2014 ; Wegenast et coll., 2019). Il a été noté que la RSE n’est
pas encore profondément ancrée dans la culture d’entreprise chinoise, malgré
l’entrée en vigueur du droit chinois des sociétés, du travail et des contrats depuis 2008.
Même s'il y a une amélioration progressive, la plupart des politiques RSE
7
Politique des ressources 83 (2023) 103581
les engagements restent volontaires et manquent de surveillance et de reporting
réglementaires (Larson, 2013 ; Renwick et al., 2018).
La perception selon laquelle les projets financés par la Chine ont recours à des
achats locaux limités dans leurs opérations est largement répandue dans le cas de
la Guinée. On pense que ces sociétés ont pour instruction d'utiliser China Rail pour
le transport maritime et d'impliquer des entrepreneurs chinois dans diverses activités.
Un ancien directeur d'une société minière a expliqué que « la logique économique
est qu'ils sont en Guinée, apportant des services, des personnes et de la valeur de
Chine » où les biens et services chinois sont importés et le produit est ensuite
réexporté vers la Chine, consistant donc en un « marché fermé ». boucle » dans le
sens de « une sorte de proposition d’investissement très vertueuse ». Un consultant
a fait écho à cela en déclarant : « J'ai travaillé dans le monde entier et les Chinois
apporteront tout ce qu'ils peuvent, y compris l'équipement, les sous­traitants et le
personnel.
5.3.2. Aspect culturel
Lorsqu'on leur a demandé pourquoi les entreprises chinoises et russes s'engagent
moins en faveur du contenu local ainsi que des normes sociales et environnementales,
une explication commune a été attribuée à leur culture « différente ».
Dans de nombreux entretiens, il a été déclaré que la perception en Guinée est que
ces entreprises ont une « culture », une « mentalité », une « philosophie » et une «
vision » différentes. On pensait également que le comportement politique et la
stratégie socio­économique de leur pays d'origine façonnaient leur comportement.
La maximisation des profits pour leurs propres bénéfices, combinée à un faible
engagement en faveur des droits de l'homme et de normes sociales et
environnementales adéquates, montre une faible motivation à maintenir la paix
sociale avec les communautés locales. Un consultant a déclaré que le « modus
operandi des sociétés minières chinoises et russes ressemble beaucoup aux États
dont elles sont originaires (…) Vous savez ce que cela donne avec les Chinois, les
Russes, les Iraniens et autres ! Ils ne feront pas de contenu local. Un entrepreneur
guinéen, membre de la Local Content Association, a donné une autre explication à
cela :
«C'est l'aspect culturel. Les Britanniques, les Australiens et toutes ces sociétés
ont une certaine notion de l’humanisme, des droits de l’homme. Mais si vous
prenez les entreprises chinoises, et je ne veux pas soutenir ce cliché, je n'aime
pas ce dénigrement de la Chine, mais c'est une culture différente.
Leur approche du développement humain est différente, comme vous pouvez le
constater dans leur propre pays.
Cette citation montre la perception selon laquelle les sociétés minières «
occidentales » en Guinée sont un type différent d'entreprises citoyennes par rapport
à leurs homologues. Une explication de la manière dont les entreprises « occidentales
» se sont adaptées à leurs conflits antérieurs avec les communautés locales est
également donnée, en ce qui concerne leur adoption du contenu local. Cependant,
« Si vous êtes Chinois, Russe, Iranien ou autre, votre défense contre les conflits
communautaires ne consiste pas à employer davantage de locaux ou à acheter
davantage localement, votre défense consiste à faire appel à l'armée et à la
police, à licencier les fauteurs de troubles. Mais si vous adhérez aux normes
internationales en matière de sécurité, de droits de l'homme et ce genre de
choses, vous avez besoin d'une mesure d'atténuation différente contre les conflits
communautaires, à savoir l'amélioration de l'emploi local et des achats locaux.
Le récit d’un manque de normes sociales, notamment en matière d’emploi et de
mauvais traitements infligés aux travailleurs par les sociétés minières chinoises
opérant sur le continent africain, est répandu dans des régions comme la Zambie
2011) et le Niger
(Shinn,
(Jamasmie,
2016). 2013). En Guinée, les sociétés minières sont
régulièrement sous surveillance en raison de conflits sociaux. Actuellement, Chalco,
CDM Chine, l'actionnaire de la PME UMS et la SMB font face à des grèves et des
protestations en raison des conditions des travailleurs et de l'absence de contenu local. MDP
La Chine a même demandé une protection militaire en octobre 2021 à l’État pour
gérer le conflit.
Les entreprises chinoises et russes ont une approche différente, quoique « plus
directe », de la RSE. Au lieu de projets de transformation complexes et à long terme,
comme l'utilisation de contenus locaux pour renforcer leur
Machine Translated by Google
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SLO, ces entreprises se sont engagées à effectuer des paiements ponctuels ou de
simples interventions RSE, comme indiqué dans la section 4.2. Au lieu de cela, comme
l'explique un représentant d'une société minière, « ils effectuent de gros paiements et
laissent ensuite la communauté se développer ». Un représentant d'une ONG est allé
jusqu'à accuser les entreprises chinoises et russes de « détourner l'attention du contenu
local » en préférant de simples activités de RSE, comme la construction d'écoles et de
routes ainsi que la distribution de riz et d'argent. Il a déclaré qu'il ne s'agissait pas d'un
contenu local en réponse au fait que ces entreprises les étiquetaient comme tels, comme
dans le cas récent des programmes de riziculture.
En termes de démarches RSE collaboratives initiées par la Chambre des Mines ou
d’autres sociétés minières, les entreprises chinoises et russes ne montrent aucune
participation.
5.3.3. Traitement préférentiel, « faveurs du gouvernement » et « statut spécial »
Dans l’ensemble, dans certains entretiens, il a été exprimé que les sociétés minières
chinoises ne bénéficient pas du même niveau de traitement de la part du gouvernement
guinéen et ne sont donc pas surveillées et jugées aussi strictement. Un représentant du
GAC a exprimé sa frustration face à cette absence perçue des mêmes normes et de
règles du jeu équitables :
"Vous n'entendrez jamais une autorité dire qu'elle n'est pas à la hauteur à l'égard
des entreprises chinoises parce qu'elles ont un accès incroyable au bureau du
président, vous savez, et cela les sépare de nous." Vous savez, si nous faisons
quelque chose de mal, nous en parlerons au ministère des Mines ou à un autre
ministère. Mais je ne pense pas qu'il en soit de même pour les entreprises chinoises.
Il existe une croyance largement répandue selon laquelle le gouvernement guinéen
est moins exigeant à l’égard des entreprises chinoises et russes. Cela est même
considéré comme un traitement de faveur de la part du gouvernement. Un représentant
d'une ONG a même affirmé que « les Russes ont un statut particulier en Guinée qui
explique les avantages accordés à leurs sociétés minières », en pointant un prétendu
accord secret entre la Guinée et la Russie (Maclean, 2019).
Un représentant d'Alufer a exprimé sa frustration dans un récent e­mail :
« Avec le changement politique survenu en Guinée, les communautés sont de plus
en plus attentives aux sociétés minières, notamment chinoises. Ils estiment que les
entreprises chinoises bénéficient des faveurs du gouvernement en n'étant pas
obligées d'appliquer du contenu local et qu'elles exigent davantage d'emplois et de
responsabilités au niveau local.
Cependant, ces « faveurs » pourraient en réalité être simplement la nature des
échanges et des relations entre l’État chinois et l’État guinéen. La Guinée bénéficie de
prêts chinois adossés à des ressources naturelles, représentant 20 milliards de dollars
en 2017, soit l'équivalent de 200 % du PIB du pays. Ces prêts sont souvent opaques et
comportent des conditions inconnues, une gouvernance faible, peu ou pas de
concurrence entre les prêteurs et une information publique minimale sur les procédures
de remboursement (Mihalyi et al., 2020). De plus, dans le cas des prêts adossés à des
ressources naturelles, les conditions de crédit peuvent être moins ouvertes et moins
prévisibles, ainsi que compliquées lorsque la dette est garantie ou lorsque les prix des
matières premières fluctuent (Usman, 2021).
En revanche, les conditions de prêt de la Banque mondiale sont accessibles au public
et plus concessionnelles avec des taux d'intérêt plus bas, des échéances plus longues
et des délais de grâce prolongés (Morris et al., 2020). Les échanges économiques sino­
guinéens existent depuis des décennies grâce à une longue histoire de dons, d’accords
d’infrastructures et d’autres types de soutien au développement de la Chine (Diallo Bah,
2017). La Guinée partage également une longue histoire d’échanges économiques et
sociaux avec la Russie et, dans le passé, avec l’Union soviétique. C’est surtout au
lendemain de son indépendance que la Guinée s’est fortement appuyée sur le soutien
économique de l’Union soviétique en échange de l’accès à ses ressources naturelles
(Knierzinger, 2018 ; Posthumus, 2016).
6. Discussion
Cette étude de cas des LCP en Guinée montre une dynamique plus large en jeu. La
manière dont diverses sociétés minières réagissent à un nouvel ensemble de
8
Politique des ressources 83 (2023) 103581
politiques met en évidence l’interaction complexe des acteurs des industries extractives
mondiales. Les sociétés minières répondent non seulement aux exigences
institutionnelles des États dans lesquels elles opèrent, mais également aux normes et
standards mondiaux. Les investisseurs et les origines des investissements façonnent
les intérêts de ces entreprises et, par conséquent, leur engagement envers les normes
sociales et environnementales.
Cependant, la présente recherche montre également qu’il existe une autre réalité.
Dans le cas de la Guinée, aucune des sociétés minières de bauxite incluses dans cette
étude ne remplit pleinement ses obligations en matière de contenu local imposées par
l'État. Alufer, GAC et CBG font preuve d'efforts supplémentaires pour employer et
recruter des ressortissants guinéens, ainsi que pour offrir une formation aux PME
guinéennes. Rusal, SMB, CDM Chine et Chalco obtiennent non seulement de moins
bons résultats dans les évaluations de contenu local évaluant leur conformité aux
objectifs et pratiques en matière d'emploi et d'approvisionnement. Ces entreprises ne
montrent pas non plus d'engagement ou d'effort visible en faveur du contenu local, se
concentrant plutôt sur les activités RSE traditionnelles de développement communautaire,
à savoir les parrainages et les dons.
Un groupe d'entreprises prend des engagements sociaux (contenu local) pour
garantir la RSE et obtenir son SLO. Mais l’autre groupe ne fait pas de même. Rey et
coll. (2020 ; pages 2­3), en étudiant les études d'impact environnemental et social (EIES)
des sociétés minières en Guinée, observent « une disparité dans la qualité des
entreprises » où « les investissements en provenance d'Asie, avec la présence massive
de Les opérateurs chinois du secteur de la bauxite ont redéfini les normes de mise en
œuvre des évaluations sociales, les financiers ne se référant pas ou rarement aux
normes promulguées par les institutions financières occidentales.
Dans le cas de la Guinée, un pays qui a enduré des décennies d’extractivisme
néolibéral qui ont affaibli l’autorité et la légitimité de l’État par une absence sélective et
un retrait de l’État (B´eland et al., 2021 ; Szablowski et Campbell, 2019), une
réglementation étatique faible persiste là où l’exploitation minière les entreprises et leurs
investisseurs « autorégulent » leurs pratiques. En termes de pratiques sociales et
environnementales, la SFI est l’acteur le plus déterminant (Rey et Saint Simon, 2016).
Le contenu local ne fait pas non plus exception à cette règle.
Même lorsque les États optent pour des réformes néo­extractives, comme les LCP,
les défis sont énormes. La présente recherche a montré qu’il est impératif de disposer
d’institutions fortes, car l’autorégulation par le secteur privé et ses investisseurs ne
donne pas les mêmes résultats.
Rédiger des lois et des quotas sur le contenu local ne suffit pas si la mise en œuvre
n'est pas surveillée, évaluée et suivie d'un avertissement en cas de non­respect. Il
n’existe actuellement aucun mécanisme d’application, de conformité ou de sanctions en
cas de non­conformité (Wil­helm et Maconachie, 2021 ; Wilhelm, 2022). Même si la
réglementation guinéenne LCP s’engage à la transparence – où les données détaillées
sur l’emploi local et les marchés publics doivent être présentées dans un rapport annuel
publié par le ministère des Mines – cela ne s’est pas produit à ce jour. Cette recherche
a montré comment et pourquoi les entreprises ne publient pas du tout de telles données.
Même s’ils le font, ils le font de manière très sélective. C’est décevant, compte tenu des
années de discussions et de promesses visant à rendre l’industrie minière plus
transparente grâce à des initiatives telles que l’Initiative pour les industries extractives et
la transparence (ITIE). L'ITIE vise à améliorer la transparence des revenus dans les
industries extractives en divulguant les paiements. Dans de nombreux cas, cette
institution a joué un rôle dans l’amélioration de la gouvernance des ressources grâce à
la transparence (Sovacool, 2020 ; Sovacool et al., 2016).
Certains pays conformes à l'ITIE, comme le Sénégal, ont commencé à inclure des
données locales sur l'emploi et les marchés publics dans leurs rapports (ITIE Sénégal,
2021). La Guinée, bien qu’elle soit inscrite sur la liste des pays conformes à l’ITIE et
dispose de son propre bureau, n’a pas encore suivi cet exemple. La portée de cette
recherche pourrait être étendue pour inclure des données plus complètes si la
transparence est améliorée.
Une autre question qui émerge de cette analyse est de savoir pourquoi le
gouvernement guinéen, ainsi que d’autres gouvernements d’Afrique subsaharienne,
tolèrent les normes sociales et environnementales divergentes des entreprises d’origine
chinoise et russe. Dans le cas de la Guinée, sous le régime d'Alpha Condé, l'État était
dépendant des prêts chinois garantis par les ressources naturelles, et il existait des liens
politiques étroits qui
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C. Wilhelm
expliquer les dépendances et les déséquilibres de pouvoir. Sous le régime actuel du colonel
Doumbouya, toutes les entreprises ont fait l'objet d'une surveillance accrue pour respecter le
contenu local, mais aucune sanction n'est toujours appliquée en cas de non­respect. Des
recherches plus approfondies sont nécessaires pour analyser cette relation entre l'État en
tant que législateur et les investisseurs et entreprises étrangers afin de comprendre ce qui
motive cette apparente tolérance à l'égard du non­respect. En fin de compte, c’est peut­être
la raison qui conduit certaines sociétés minières à ne pas améliorer leurs approches de
contenu local.
La législation elle­même, dans la mesure où elle n’est pas appliquée, n’est donc pas suffisante.
7. Conclusion
Cette recherche a montré que les sociétés minières de bauxite en Guinée réagissent
différemment aux LCP mandatés par l'État. L’origine des investissements joue un rôle majeur
et les entreprises dont les investissements sont d’origine internationale, notamment dans le
cadre d’un partenariat avec la SFI, adoptent les LCP dans le cadre de leur RSE et de leur SLO.
Les entreprises n’ayant pas ce bagage ne semblent pas visiblement s’engager en faveur des
LCP.
La présente recherche est pertinente, car de nombreux pays conçoivent ou exécutent
actuellement des LCP. Dans le même temps, les activités extractives menées par diverses
entreprises issues de divers horizons d’investissement deviennent de plus en plus actives.
Leur engagement envers les normes sociales et environnementales, y compris le contenu
local, doit également être pris en compte. À cet égard, les processus internes par lesquels
les sociétés minières élaborent leurs stratégies de contenu local constituent un sujet
intéressant pour des recherches ultérieures.
Une autre question pertinente et une piste de recherche plus approfondie est de savoir
comment et à quel niveau les efforts de la SFI sont importants pour soutenir l'augmentation
de la réglementation, de la mise en œuvre et du suivi du contenu local en Guinée.
Si les entreprises continuent d’autoréguler leurs engagements sociaux, certaines ne
répondront pas aux attentes minimales.
Le cas de la Guinée a montré comment les communautés d’accueil prêtent attention aux
entreprises qui ne le font pas. Les communautés d’accueil soulèvent des griefs, les gens
élaborent des théories et des observations pour expliquer pourquoi certaines entreprises ne
se conforment pas, ce qui, en fin de compte, peut alimenter des conflits sociaux. L’État doit
établir une norme, étant donné que toutes les sociétés minières ne sont pas liées aux mêmes
normes sociales internationales et exigences d’investissement. Les LCP mandatés par
l’État en Guinée constituent le point de départ d’une norme minimale nationale. Cependant,
l’État n’est pas impliqué dans sa capacité réglementaire à exécuter et à contrôler la mise en
œuvre de sa propre réglementation.
L'État n'applique pas non plus sa propre législation et tolère en retour qu'« il existe deux
types de sociétés minières » avec des réponses divergentes en matière de contenu local.
Plus que jamais, il devient vital que les États développent des institutions solides pour
combler cette lacune et rectifier les problèmes sous­jacents. Des recherches supplémentaires
sont nécessaires pour comprendre s’il existe des dynamiques de pouvoir et des dépendances
sous­jacentes qui empêchent l’État d’appliquer les règles et de prendre des sanctions en cas
de non­conformité, ce qui pourrait conduire certaines sociétés minières à continuer de ne
pas relever leurs normes de contenu local.
Déclaration de l'auteur
Cindy Wilhelm – Conception de recherche, méthodologie, travail de terrain et données
collecte, analyse, tous brouillons, révisions et modifications.
Déclaration d’intérêts concurrents
L'auteur déclare qu'il n'a aucun intérêt financier concurrent connu ni aucune relation
personnelle qui aurait pu sembler influencer le travail rapporté dans cet article.
Disponibilité des données
Les données utilisées sont confidentielles.
9
Politique des ressources 83 (2023) 103581
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