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Éditions de

la
Sorbonne
Former l’homme | Étienne Krotky

Chapitre 1. L'homme
face à Dieu et au
Monde
p. 25-44

Texte intégral

1- L'homme, image de Dieu


1 La conception de l'homme en tant qu'image de Dieu
caractérise l'œuvre de Comenius. L'homme a été fait « à
l'image de celui qui est depuis le commencement »,
affirme-t-il dès la dédicace de La grande didactique (par.
2). C'est de cette notion qu'il tire les principales
caractéristiques qui constituent l'homme dans son
humanité et les différentes directions dans lesquelles
l'éducation devra développer l'enfant.
2 Cette expression, on le sait, est tirée de la Bible :
« Faisons l'homme à notre image, comme notre
ressemblance. (…) Dieu créa l'homme à son image »1.
Claude Tresmontant nous explique comment il faut
comprendre cette affirmation : « Les théologiens qui ont
composé ce texte se sont opposés expressément aux
mythes égyptiens et assyro-babylomiens qui
enseignaient la consubstantialité de l'âme à la divinité.
L'homme n'est pas créé avec la substance de Dieu… »2.
Dans son sens positif cette expression affirme que
« l'homme n'est pas une créature comme une autre ; (…)
il n'est pas un vivant comme un autre. (…) Il est appelé à
une destination proprement surnaturelle, c'est-à-dire
qu'il est appelé (…) à devenir participant de la nature
même de Dieu »3, il a « la capacité de s'ouvrir à une
dimension surnaturelle »4. « Cette destinée proprement
surnaturelle de l'homme comporte certaines
implications et présuposés métaphysiques »5
notamment la raison et la liberté. De même la Bible de
Jérusalem précise : « Ce rapport à Dieu sépare l'Homme
des animaux. Il suppose de plus une similitude générale
de nature : intelligence, volonté, puissance »6. Pour saint
Thomas, « c'est en vertu de sa nature intellectuelle que
l'homme est dit à l'image de Dieu » ; par conséquent « le
trait par lequel la nature intellectuelle imite Dieu le plus
étroitement, c'est celui par lequel Dieu se connaît et
s'aime lui-même. L'image de Dieu dans l'homme pourra
donc se vérifier (…) d'abord en ce que l'homme a une
aptitude naturelle à connaître et à aimer Dieu »7.
3 Comenius a fait siennes ces idées et elles lui serviront de
guide dans le programme qu'il fera de l'éducation
religieuse. Parce qu'il est son image, Dieu aime l'homme
plus qu'il n'aime toute autre créature ; l'homme, dira
notre théologien, est « l'objet de la dilection de Dieu »',
pour lui cette expression est synonyme de celle d'image
de Dieu. (D.M. I.2 et IV. 2). A son tour, l'homme ne trouve
aucune créature qu'il puisse considérer comme son
égal, et il ne pourra trouver de satisfaction qu'en Dieu.
Tous ses désirs doivent donc être tournés vers Dieu
comme vers leur source (ibid. V, 18). Car Dieu est « le but
ultime de toutes choses, vers qui tend tout ce qui est
visible et invisible ; (…) il est la source vive de tout ce qu'il
y a de bon »8, « la source de vie d'où partent les autres
sources de tout ce qui nous réjouit » (Pans. prod. 34).
Comenius constate même que « si les arts extérieurs et la
science procurent à l'esprit un délassement agréable, ils
ne le rassasient pas »9. Trop peu d'hommes ont mis leur
fin en Dieu ; par contre, trop d'hommes se recherchent
eux-mêmes et ne poursuivent que leur succès et leur
propre gloire. Agissant ainsi, ils aboutissent à une
impasse. C'est pour cela que l'on voit tant d'iniquités sur
la terre (Pans. prod. 33, 34). Pour couronner le tout, Dieu
appelle l'homme à vivre avec lui durant toute l'éternité,
à partager sa vie : « Te enim mihi destinati aeternitatis
consortem » (D.M.I, 3 ; cf aussi II, 9).
4 C'est donc tout le sens de la vie de l'homme qui est
concerné par cette ressemblance avec Dieu. Les
rapports de l'homme avec Dieu en sont profondément
marqués ; non seulement ce ne sont pas des rapports de
conflit, ni même de purs rapports de serviteur à maître,
mais des rapports de confiance et d'amour. L'homme est
convié à faire briller en lui, selon sa mesure d'être fini,
les qualités que Dieu possède dans leur perfection. La
religion n'est rien d'autre que cette attitude qui consiste
à se tourner vers Dieu comme vers sa source ; de toute
façon Dieu attire l'homme parce que chacun aime ce qui
lui ressemble (D.M.V, 18 et s). « La religion est le respect
intérieur qui met en relation l'homme avec la divinité »
(ibid. IV, 6). Ce n'est pas que notre auteur soit théiste ; il
croit fermement au Christ Rédempteur, il a un credo et
il pratique un culte. Mais, pour lui, l'appartenance à
telle ou à telle église est secondaire par rapport à cette
attitude qui, elle, est fondamentale. Voici d'ailleurs
comment il définit la piété : « La piété vraie et salutaire
consiste en trois points : 1-notre cœur respecte Dieu
toujours et en tout lieu et Le recherche dans toutes ses
actions ; 2-notre cœur découvre les traces de la Divine
Providence et suit partout Dieu avec crainte, amour et
respect ; 3-partout il se souvient de Dieu, converse avec
Lui, se joint à Lui et parvient à la paix et à la
consolation »10.
5 Quels sont les traits particuliers que l'homme devra
développer pour ressembler à Dieu ?. Au début de son
œuvre, dans La grande didactique surtout, l'auteur
pense avec saint Thomas que l'homme ressemble le plus
à Dieu par sa nature intellectuelle : « Dieu, ayant créé
l'homme à son image, il l'a doté d'un esprit (MENS) »
(D.M.III, 3) ; et encore : « Il a plu à Dieu de créer des êtres
à son image c'est-à-dire raisonnables et capables de
participer à sa sagesse et à son immortalité » (Via lucis,
1.7). L'Homme doit donc chercher à acquérir beaucoup
de connaissances : « Le fait que l'homme naît capable
d'acquérir des connaissances est évident puisque, en
premier lieu, il est l'image de Dieu. Or, une image, pour
être exacte, doit nécessairement reproduire les traits du
modèle, autrement ce n'est plus une image. Et comme
parmi les autres attributs de Dieu, c'est l'omniscience qui
domine, elle doit nécessairement se refléter de quelque
façon dans l'homme » (D.M V, 4). Le pédagogue mettra
cette omniscience en relief chaque fois qu'il aura besoin
de stimuler un public à l'étude. Ainsi il écrit : « La nature
humaine a été faite de telle sorte qu'elle est devenue
l'image de l'unique Sagesse, c'est-à-dire de l'Omniscience
de Dieu. Si tu t'écartes volontairement et sciemment de
cette ressemblance, tu t'éloignes du plan de Dieu »11.
6 Mais Comenius étend aussi cette ressemblance à
d'autres traits surtout à ceux qui sont les marques
caractéristiques de la nature humaine (et que nous
analyserons dans un autre chapitre) : « L'homme
vraiment formé est celui qui, comme une véritable image
de Dieu saisit tout grâce à la Raison, exprime tout par la
parole, réalise tout grâce à son activité, du moins autant
que cela est possible à une créature limitée »12. Il écrit
encore : « Les propriétés les plus marquantes de Dieu
sont : 1°) l'omniscience, 2°) l'omnipotence, 3°) la sainteté
universelle, 4°) l'indépendance souveraine ; par
conséquent, il est sûr que l'homme, qui se distingue
nettement par la sagesse, l'habileté, la sainteté et qui
(après Dieu) est indépendant, est une véritable image de
Dieu et la véritable gloire de son Créateur »13. Parfois il
insiste, selon les besoins, sur ce dernier trait et il écrit :
« Comme le désir de l'activité libre est inséparable de la
nature humaine, image de Dieu… » (M.L.N. X, 37) ou bien
encore : « Il importe beaucoup que les hommes
apprennent à librement choisir, à leur gré, les choses
parfaitement comprises, et à en disposer librement ; de
manière que nulle part l'image de Dieu ne soit altérée
dans l'homme, et surtout pas là où cette image est la plus
ressemblante, dans la liberté du choix »14.
7 Les perfections divines sont infinies. Pour les besoins
pratiques il est normal qu'un écrivain insiste sur tel ou
tel aspect de ces perfections. On peut cependant faire
remarquer qu'un attribut fondamental n'est jamais
mentionné : « Dieu est amour » ; cette phrase de saint
Jean15 résume tout le message du christianisme. Mais
cette omission n'est pas une particularité propre à
Comenius. Les époques, comme les individus, ont des
valeurs auxquelles ils sont plus sensibles qu'à d'autres.
8 Le fait que c'est l'homme seul qui a été créé à l'image de
Dieu lui donne une place éminente parmi toutes les
autres créatures. Dieu l'a établi maître et seigneur de
toute la création (D.M IV). L'humanité est douée de
raison et elle porte en elle des germes de moralité,
« dignités qui sont des privilèges qui l'élèvent au-dessus
des animaux et le rendent semblables à Dieu »16. Quand il
exaltait la supériorité des animaux, Montaigne oubliait
cette qualité d'image de Dieu. Pas plus que d'autres,
Comenius n'ignorait les méchancetés ou les turpitudes
dont l'humanité est capable ; cependant il continuait à
répéter : « l'homme est la première de toutes les créatures
visibles parce qu'il a été créé à l'image de Dieu »17. Il est
allé jusqu'à écrire cette phrase qui doit paraître peu
orthodoxe à beaucoup, à savoir que l'homme ne doit
reconnaître comme supérieur à lui que Dieu seul :
quant aux anges, qui sont également des serviteurs de
Dieu, l'homme doit les considérer comme des égaux !
(D.M. IV, 4).
9 Les belles paroles de Comenius sur la piété ne sont pas
de simples clichés. Il semble bien avoir puisé en Dieu
une force morale qui lui a permis de supporter
beaucoup d'épreuves sans perdre ni son équilibre ni son
dynamisme. Ainsi il a perdu successivement deux
femmes ; la première est morte au cours d'une épidémie
avec ses deux enfants ; le pauvre homme faillit en
perdre la raison. Aucun raisonnement ne pouvait le
consoler, ni même les considérations (intellectuelles)
basées sur la foi. Seule une certaine union à Dieu et au
Christ souffrant lui a apporté « la consolation et la joie ».
Aussi, en parlant de Dieu après cette épreuve il dira qu'il
est le « roc de sa vie », une « tour forte ».
10 Si durs qu'aient été ses malheurs personnels, le sort
réservé à son pays l'a affecté encore davantage, selon
ses propres paroles. On sait le triste sort réservé à la
Bohême après la défaite de la Montagne Blanche,
en 1620, et les souffrances injustes qui en ont résulté18.
Le pire, pour lui, a été de craindre, un peu plus tard, que
c'en était fini de l'Eglise dont il était l'évêque. Durant
l'incendie de Leszno, en 1656, il a perdu non seulement
ses livres, mais encore ses manuscrits, dont certains
représentaient 40 années de patientes recherches… A
cette occasion il a dit qu'il « avait tout perdu excepté cet
unique qui, à lui seul, est tout »19.
11 Comme il avait des responsabilités publiques, il ne
suffisait pas qu'il surmonte sa douleur et retrouve son
calme. Il devait, en outre, avoir assez de dynamisme
pour soutenir les autres. C'est ce qu'il a fait à plusieurs
reprises. Il a même composé, à l'intention de ses ouailles
ou de ses compatriotes, des ouvrages dits de
"consolation", comme Centrum securitatis et Des affligés.
« Dans son union mystique avec l'esprit divin, il puise
une énergie qu'il tâche de communiquer aux Frères en
exil », dit de lui A. Heyberger20. Pour exprimer cette paix
que l'on trouve en Dieu, il a cette image saisissante : « Ce
monde est semblable à une roue que Dieu aurait
développée par sa toute - puissance. Il en est le centre et
ses créatures, comme des rayons, s'irradient de lui en tous
sens. Le centre reste immobile, mais la roue du monde
tourne inlassablement. Plus on se trouve près du centre,
moins les agitations sont violentes ; plus on est éloigné,
plus fortes sont les secousses »21.

2- La chute, la justification, la grâce


12 On sait que la prédestination était « un des points
névralgiques de la pensée religieuse au XVIIe siècle »22.
Mais l'Unité remontait à la Réforme tchèque, non à
Luther et elle ne se posait pas avec angoisse les
questions : « Serai-je sauvé ? Combien y aura-t-il
d'élus ? » qui obsédaient non seulement Luther, mais
aussi des hommes comme Ignace de Loyola ou le jeune
François de Sales (1567-1622) et bien d'autres encore,
puisqu'on a pu écrire que « le problème du salut éternel
était la véritable obsession du siècle classique »23. Les
positions de Comenius sur ces thèmes se ressentent de
son appartenance à une tradition différente.
13 Pour certains théologiens la chute d'Adam avait
mortellement blessé la nature humaine qui n'était plus
capable d'aucun bien ; la raison était devenue incapable
de nous guider, la volonté était fatalement inclinée vers
le mal. Comenius, par contre, semble excuser le pauvre
homme qui n'avait pas eu l'initiative de la désobéissence
à Dieu ; il s'est seulement laissé séduire. Si bien que Dieu
a été plus miséricordieux avec lui qu'avec les anges
révoltés, et la corruption de l'homme, quoique réelle,
n'est qu'« accidentelle »24. Il en ressort cette
conséquence capitale que les choses peuvent être
remises dans leur état premier qui était boa « Il est plus
naturel à l'homme et plus facile à la grâce de Dieu
d'acquérir la sagesse et de devenir vertueux et saint
plutôt que d'en être empêché par une dépravation
accidentelle, car il est facile à une chose de retrouver sa
nature première » (DM. V, 25). Or, « la nature humaine
était bonne à l'origine » et « nous devons y être ramenés
par la puissance de la Providence qui relève ce qui est
tombé »25. La phrase suivante exprime l'attitude
personnelle de Comenius à propos de la chute. « Est-ce
que Dieu n'a pas envoyé son Fils pour rétablir dans son
état primitif ce qui était tombé ? » (DM. V, 22).
14 Il illustre cette conviction par l'image suivante :
considérons, dit-il, une horloge ou un instrument de
musique qui ont été fabriqués par un artisan habile. Si
l'horloge se gâte ou si l'instrument est désaccordé, on ne
les considère pas immédiatement comme étant hors
d'usage, car on sait qu'on peut les réparer. Il en est de
même pour l'homme : même s'il a été corrompu par la
chute, il faut tenir pour certain qu'avec la puissance de
Dieu et en utilisant des moyens appropriés, on peut le
rétablir dans son harmonie primitive (DM. V, 17). Le cas
de Nabuchodonosor confirme cette vue optimiste (ibid.
V, 22). Comenius ne comprend pas la position opposée
pessimiste : « Il est honteux et impie, et en outre cela
relève de l'ingratitude, de toujours parler de notre
corruption et de passer sous silence la Rédemption !
Pourquoi toujours s'excuser sur le vieil Adam ! C'est à bon
droit que l'apôtre dit en son nom et au nom de tous ceux
qui ont été régénérés : Je puis tout en Celui qui me rend
fort, le Christ. » Philippiens, IV, 1326.
15 Comenius ne se pose pas la question de savoir à qui
Dieu réserve sa grâce ; il ne voit en Dieu que générosité :
« Ah, gardons-nous de mettre des limites à la grâce de
Dieu qu'il est prêt à répandre en nous avec sa plus grande
largesse ! » (D.M. V, 24). Quant à se demander si la grâce
est efficace ou suffisante, etc. c'est seulement soulever
des « questions inutiles ».
16 Dans un passage de La pampédie il y a quelques lignes
sur la prédestination ; mais ce n'est qu'un maigre
canevas pour un développement éventuel. (C'est dire le
peu d'intérêt que l'auteur portait à la question, alors
qu'en France les débats sur la grâce efficace faisaient
rage, non seulement parmi les théologiens, mais même
dans les salons et les collèges - jusqu'à provoquer des
bagarres ; on trouve des échos de ces débats dans les
arts et la littérature.) Malgré la brièveté de ce passage il
est clair que l'orientation générale ne va pas dans le
sens de la rigueur calviniste ou janséniste. L'auteur, par
exemple, pose la question : « Comment peux-tu espérer
tenir bon devant le tribunal de Dieu ? » et il répond :
« Grâce à l'intervention de Jésus-Christ qui plaidera pour
moi » - « Est-ce que cette défense sera efficace ? - Oui !
Premièrement il ne s'est pas arrogé lui-même cette
fonction, mais elle lui a été attribuée par le Père. Hébreux,
V, 5. (…) En troisième lieu, parce que le sacrifice que le
Christ a offert pour la réconciliation des pécheurs suffit
pour tous les péchés du monde ». Et l'auteur se réfère à la
1ère Epître de saint Jean II, 2. qui dit ceci : « Il est lui-
même expiation pour nos péchés, non seulement pour les
nôtres, mais pour ceux du monde entier »27.
17 Dans les discussions sur la grâce, la liberté tient une
place centrale. Luther, Calvin, Jansenius niaient le libre
arbitre ; l'Eglise catholique, au contraire, le posait
comme nécessaire. Comenius aussi : « Sans la liberté, la
ressemblance avec Dieu ne serait pas parfaite »28. Il la
conçoit comme totale et contrairement, notamment à
Calvin, il écrit : « Elle (la liberté) est si essentielle à la
nature humaine que personne ne peut forcer l'homme à
vouloir ce qu'il ne veut pas, pas même les anges ou les
démons et même pas Dieu lui même ». « L'homme a été
gratifié d'une telle liberté par le Créateur, qu'elle ne peut
plus lui être enlevée. Voilà pourquoi Dieu lui-même n'y
touche pas »29. Les rapports entre Dieu et l'homme ne
sont pas des rapports de conflit ou de force. Comenius
ne se demande pas comment l'homme misérable
pourrait tenir tête au Tout-puissant, ni comment celui-ci
serait obligé de renoncer devant la résistance de
l'homme. L'homme choisit Dieu qui est le but ultime de
sa vie, mais il peut se tromper sur son choix et préférer
des biens apparents à Dieu. Dieu, d'autre part, ne veut
être honoré que par des hommages libres. Il propose, il
ne force pas : « Deus invites non trahit - Dieu ne nous
attire pas malgré nous »30. Il échappe ainsi au piège
terrible dans lequel tombaient ceux qui niaient le libre
arbitre et qui se sentaient obligés de dire que les
damnés l'étaient justement quoique la grâce leur ait
manqué. Π affirme encore : « C'est une chose sûre que
l'homme ne peut rien sans Dieu, et que Dieu ne veut pas
malgré l'homme. - Certum est Hominem sine Deo non
posse ; Deum sine homine nolle »31.
18 Cette position est conforme à l'orthodoxie catholique,
même si l'auteur ne recherchait pas cette conformité. Ce
qui est le plus évident, c'est que Comenius ne creuse pas
les problèmes théologiques relatifs à la grâce. Π tient ces
discussions pour inutiles. (Ce qui est bien dans la
tradition de l'Unité.) Il se contente d'affirmer avec force
quelques vérités fondamentales : Dieu donne sa grâce
avec générosité et libéralité à tous les hommes
(s'opposant ainsi à la rigueur calviniste ou janséniste) ; il
faut croire à l'efficacité de la Rédemption opérée par le
Christ. Ces vues théoriques lui servent de fondement
pour justifier la possibilité et la nécessité de l'éducation
afin de construire l'image de Dieu dans tous les
hommes. Si on lui objecte : « Nous sommes corrompus »,
il répond : « Oui, mais aussi renouvelés par le nouvel
Adam. On nous enjoint de renouveler ce qui a été
corrompu, de labourer le champ en friche et de ne pas
semer dans les ronces (Es. IV, 3) ; c'est à cela que tend
l'éducation dans toute son étendue »32.
19 Si les détails de ces questions théoriques n'intéressent
pas notre auteur, il y a une chose qui l'intéresse au plus
haut point : c'est justement ce caractère d'universalité :
Dieu veut sauver tous les hommes, il faut assurer
l'éducation à tous, parce qu'ils sont tous faits également
à l'image de Dieu.

3- L'image de Dieu chez tous les hommes


20 L'image de Dieu est déposée en chacun des hommes.
Chaque homme jouit par conséquent de la même dignité
et est appelé à la même vocation. Comenius insiste sur
ces idées dès le début de son œuvre. « Ce ne sont pas
seulement les enfants des riches et des gens importants
qu'il faut admettre dans les écoles, mais tous les enfants,
à égalité, ceux des riches et ceux des pauvres, ceux des
nobles et ceux des roturiers, les garçons et les filles, qu'ils
habitent des villes, des villages ou des hameaux. (…) Car
c'est en tous que l'image de Dieu doit être restaurée »33.
Cette énumération n'est pas exhaustive ; nous verrons
plus loin d'autres catégories que l'auteur inclut
expressément dans ce TOUS. L'ardeur religieuse qui le
porte à faire briller en lui l'image de Dieu, le porte avec
la même force à la faire briller également en chaque
homme sans en excepter personne : « Tous les hommes
en naissant ont la même destinée : devenir vraiment
homme, c'est-à-dire un être raisonnable, le maître des
créatures et une fidèle image de son créateur (…) Si donc
nous admettons à l'éducation quelques-uns seulement en
excluant d'autres, nous commettons une injustice, non
seulement envers ceux qui participent à cette nature,
mais envers Dieu lui-même qui veut être reconnu, aimé et
loué par tous ceux en qui Il a imprimé son image » (D.M.
IX, 2).
21 Cette position révèle une exigence d'universalité
absolument extraordinaire qui n'était guère partagée
par ses contemporains. L'extension de l'éducation à tous
les enfants ne sera réalisée dans la pratique que deux ou
trois siècles après Comenius. En plein XXe siècle,
d'ailleurs des instances religieuses ou politiques ont
repris les mêmes déclarations, ce qui prouve que
l'éducation pour tous n'était pas encore une pratique
universelle. « Toute personne a droit à l'éducation », dit
la Déclaration universelle des droits de l'homme. Une
résolution du parlement européen adoptée le 14 Mars
1984 proclame : « Tous les enfants et les adolescents ont
droit à l'éducation et à l'instruction (…) sans
discrimination de sexe, de race, de convictions
philosophiques ou religieuses, de nationalité ou de
condition sociale ou économique ». Vingt ans plus tôt
Vatican II avait tenu le même langage34.
22 Passons maitenant en revue les groupes sociaux ou les
catégories de personnes qui, selon Comenius, ne doivent
pas être exclus de l'éducation.
23 Les Sujets : C'est tout d'abord le peuple des travailleurs
manuels, serfs y compris : « Pour qu'ils apprennent à
obéir intelligemment » à des maîtres qui, à leur tour,
doivent avoir appris à commander « sagement », « car
en vérité les créatures raisonnables doivent être guidées
non à grand renfort de cris, de cachots ou de coups de
bâton, mais avec des procédés raisonnables. Si on agissait
autrement, l'affront retomberait sur Dieu qui a imprimé
en eux aussi son image, et les affaires humaines seraient
pleines de violence et de troubles » (D.M. VI, 9)35.
24 Ce passage peut soulever des polémiques. Certains,
voulant ignorer le contexte historique, ont reproché à
Comenius d'ignorer la révolution sociale. C'est un fait
qu'il est d'avis que chacun reste à la place qui est la
sienne36. En fait, le problème d'une éducation pour tous
est bien plus complexe. Pour beaucoup, la culture n'est
qu'un moyen de promotion sociale. Dès qu'on a un
diplôme, on juge certains travaux, les travaux manuels
surtout, au-dessous de sa dignité. Le problème se posait
même au XVIIe siècle. Les collèges d'alors ne préparaient
guère qu'aux carrières libérales et détournaient de la
pratique des métiers. Aussi les Etats généraux de 1614 et
Richelieu s'opposaient à l'extension des collèges. On
faisait la même objection à Comenius : « Fais attention !
Tu vas être la risée de tout le monde. Tu verras la
confusion de tous les états ! Qui restera fidèle à sa
charrue ? etc. etc. »37.
25 Mais notre philosophe comprend les choses autrement.
Le travail manuel est inévitable, il le sait : on le
pratiquait dans l'Unité. Mais il n'est pas méprisable :
même les prêtres de cette Eglise y étaient astreints.
Aussi il ne veut pas que l'école enlève aux jeunes le goût
de ces travaux ; il déclare expressément qu'il ne désire
pas « que les artisans, les paysans et les femmes se
consacrent entièrement aux livres »38. Mais il désire que
ceux qui se livrent à ces travaux conservent, ce faisant,
toute leur dignité humaine. Aussi, non seulement il
exclut les mauvais traitements comme nous venons de
le lire, mais il désire encore « que chacun soit préparé à
sa profession »39, et que les jeunes soient « instruits de
tout ce qui pourra leur être utile durant toute leur vie »
(DM. XXIX, 6). Il souhaite encore « que ceux qui
s'engagent dans l'agriculture, le commerce ou les métiers
ne rencontrent rien qui soit complètement nouveau et
dont ils n'aient eu un avant-goût. (…) Ainsi chacun fera
l'expérience qu'il est apte à tout comprendre, à tout
exécuter et à tout juger le plus correctement possible »40.
26 Réussir cela, c'est transformer complètement le monde
du travail et la société tout entière. Comenius s'en rend
compte, même s'il n'envisage pas les conséquences
pratiques qui en découleraient. Quand on lui objectait
que si tout le monde se mettait à étudier, à juger les
affaires de l'état et de l'Église, cela ne ferait que
provoquer la confusion, il répondait : « Ce serait un
misérable état ou une misérable église si leur tranquillité
ne dépendait que de l'ignorance et de l'esclavage des
sujets. La vraie religion et une bonne organisation civile
(comme celle que nous souhaitons pour le monde entier)
tirent leur tranquillité de la lumière et non des
ténèbres »41. Même si notre philosophe ne prêche pas la
suppression des classes, il souhaite une certaine
mobilité sociale due au mérite : « Nous ne savons pas,
dit-il, à quoi la divine Providence a destiné celui-ci ou
celui-là ». Il arrive qu'elle appelle à de hautes fonctions
des hommes pris parmi les plus pauvres et les plus
méprisés (D.M. IX, 3). Mais cela suppose un type
d'enseignement nouveau comme celui que l'auteur
préconise pour l'école élémentaire où l'instruction est
donnée dans la langue maternelle.
27 Répandre la culture dans toutes les couches sociales,
c'est aller contre des préjugés. La culture peut-être
considérée comme une richesse immatérielle qui met
ceux qui la possèdent au-dessus des autres. Alexandre le
Grand l'a exprimé sans détour. Il écrivait à son maître
Aristote : « En quoi serons-nous supérieurs aux autres
hommes si les sciences que vous m'avez apprises
deviennent communes à tout le monde ? Quant à moi,
j'aimerais mieux encore surpasser les hommes par la
science que par la puissance »42. Cet égoïsme culturel
existe même aujourd'hui. On a pu écrire, en effet :
« Sous cette indignation (une prétendue atteinte à la
langue française) existe la crainte, réelle celle-là, de voir
toutes les couches sociales accéder à une culture et à des
modes de pensée que l'on désirait réserver à une
élite »43. Si Comenius est un exemple de la générosité
pour la diffusion de la culture dans toutes les couches
sociales, c'est à cause du respect qu'il porte à chacun des
hommes en qui est imprimée l'image de Dieu. On ne
constate pas ce respect chez Diderot ou Voltaire qui
« étaient des conservateurs sans sympathie pour la
masse populaire qui leur inspirait parfois des mots très
durs »44. Pour Voltaire, en particulier, « le gros du genre
humain a été et sera très longtemps insensé et
imbécile »45. Sur ce point, l'évolution historique semble
faire évoluer les modes de pensée et de sentir vers
l'idéal proposé par Comenius.
28 Les femmes. Il en est de même pour ce qui concerne les
femmes : « On ne peut donner aucune raison pour exclure
le sexe faible (j'attire particulièrement votre attention sur
ce point) du soin des études (en langue latine et en langue
nationale), car elles sont aussi à l'image de Dieu et ont
part également à sa grâce et au royaume éternel. En
vérité, elles sont douées d'une intelligence vive et d'une
capacité de connaissances égales ou même supérieures
aux nôtres. Dieu les appelle comme nous aux plus hautes
destinées : régner sur des peuples, conseiller les rois ou
les princes, exercer la médecine ou d'autres métiers utiles
à l'humanité, remplir la fonction de prophète et critiquer
les prêtres et les évêques. Pourquoi voudrions-nous
n'enseigner aux femmes que l'a b c pour les éloigner
ensuite des livres ?46
29 Ce texte est particulièrement étonnant pour l'époque où
il a été écrit Le lecteur français se souvient de la
manière dont Molière présente l'opinion courante sur
l'éducation des femmes. Mais, d'une manière générale,
l'infériorité de la femme passait pour une vérité
évidente. Jean Delumeau a longuement étudié cette
question dans un livre La peur en Occident (XIVe-
e 47
XVIII siècle) . Rapportons-nous à quelques passages où

les auteurs qu'il cite emploient la même référence


biblique « image de Dieu » que notre philosophe. Nous
allons trouver des affirmations diamétralement
opposées à celle de La grande didactique.
30 Résumant la pensée de saint Augustin, Delumeau écrit :
« L'homme est donc pleinement image de Dieu, mais
non la femme qui ne l'est que par son âme et dont le
corps constitue un obstacle permanent à l'exercice de sa
raison »48. Gratien, dont le fameux décret devint la
source officieuse du droit de l'Eglise jusqu'au début du
e
XX siècle a écrit : « La femme n'a pas été faite à l'image

de Dieu. » ( !) Même saint Thomas écrit que la femme a


été créée plus imparfaite que l'homme, même quant à
son âme et qu'elle doit lui obéir « parce que
naturellement chez l'homme abonde davantage le
discernement et la raison »49. Il ne faut pas croire que
cette conception soit propre au Moyen Age. Ainsi les
Instructions aux confesseurs de saint Charles Borromée
« que l'Église post-tridentine réédita inlassablement
plusieurs siècles durant » diffusent « le dogme de la
foncière inégalité de la femme »50. La grande didactique
était déjà rédigée quand Le Bret, conseiller d'état, a écrit
(en 1632) que « la nature a créé la femme imparfaite,
faible et débile, tant du corps que de l'esprit »51.
Delumeau précise que ce ne sont pas des textes de
quelques extrémistes, mais que la culture dirigeante
européenne a produit des quantités de textes
semblables « de l'Espagne à la Russie et du Moyen Age
au XIXe siècle »52.
31 Les handicapés. Comenius étend l'instruction à ceux
que nous appelons aujourd'hui des handicapés : « les
aveugles, les sourds et les déficients (ceux qui souffrent
d'une insuffisance d'organes) »53. G. Calò fait observer
que ce n'est pas un mince mérite pour Comenius d'être
« le précurseur convaincu et explicite de la nécessité, de
la possibilité et de l'utilité sociale de l'éducation des
déficients », vu que « ceux-ci ont dû attendre le
e
XIX siècle pour acquérir des droits aux yeux des savants

et pour devenir objet de recherche et d'attention


pratique »54.
32 Les barbares. Comenius retrouve l'image de Dieu dans
une autre catégorie d'êtres, ceux que l'on appelait alors
des « barbares » : « Dieu n'a pas établi de différence entre
les hommes, du moins pas dans ce qui constitue l'essence
humaine ; (…) ils participent tous à l'image de Dieu. (Gen.
I, 26) »55.
33 C'est une affirmation qui nous semble toute naturelle
aujourd'hui. Cependant, parmi les premiers
explorateurs, « certains avaient proposé d'exclure de
l'espèce humaine les sauvages américains » ; cette
proposition fut toutefois contestée, et « les querelles qui
s'en suivirent furent tranchées par la bulle Sublimis
Deus » du pape Paul III (9 juin 1537)56 dans laquelle « il
déclare que les Indiens d'Amérique sont des hommes et
doivent être traités comme tels »57. Mais une bulle du
pape ne change pas les mentalités d'un coup de baguette
magique et surtout pas celle des opposants au papisme.
On connaît celle des propriétaires d'esclaves noirs dont
Kyle Onstott se fait l'écho dans son roman Mandingo. Il
fait dire à l'un de ces propriétaires, Maxwell : « Des
négros avec des âmes ! (…) Vous croyez vraiment qu'ils
ont des âmes ? »58. Pour lui « les nègres étaient des
brutes sans âme et il fallait qu'ils le restassent »59. Mais
des philosophes « propriétaires d'esclaves, tel Jefferson
lui-même, lorsqu'ils invoquaient l'égalité naturelle des
hommes ne pensaient pas que leurs nègres fussent
concernés par cette déclaration »60.
34 Comenius, lui, est capable de faire confiance à ces
barbares : « Qui sait, écrit-il, ce que Dieu réserve aux
Africains, aux Américains et aux autres barbares s'ils
sont introduits dans la culture ? », car « nulle part dans le
monde il ne manque de tête capable, pourvu que
l'éducation ne manque pas »61. Il manifeste de l'intérêt
pour les langues des Lapons, pour les peuplades de
l'Amérique du Nord, etc62. Il a même cette réaction
curieuse pour le XVIIe siècle, mais qui nous est devenue
familière aujourd'hui, de demander que l'on donne aux
peuples (et à leurs terres) le nom qu'ils se donnent eux-
mêmes. « Pourquoi, demande-t-il, les autres devraient
m'appeler Paul alors que je m'appelle Jean ? Pourquoi
appellera-t-on Madagascar « l'Ile saint Vincent » plutôt
que Madagascar ? » De même il veut que l'on donne aux
chaînes de montagnes ou aux fleuves le nom que les
indigènes leur donnent plutôt que le nom de celui qui
les a découverts ; etc.63.
35 Sa capacité d'ouverture à tous les hommes est
remarquable : « Dieu nous aime tous également »64. -
« Européens, Asiatiques, Africains, Américains, les
habitants de n'importe quelle île que ce soit, tous sont un
seul peuple de Dieu, provenant du même sang ; tous
doivent s'aimer étant tous des ramifications d'un même
tronc généalogique »65. Cela est d'autant plus
remarquable que cette tendance universaliste semble
aller contre une tendance de « la nature humaine (qui)
incline à haïr la dissemblance raciale et idéologique »
(M.D. Knowles66). Si bien que pour d'autres auteurs
contemporains aussi, une attitude pure de tout racisme
serait une conquête de la conscience morale sur des
instincts exclusivistes que la science semble nous
expliquer.
36 Concluons avec l'auteur : « Il n'y aura aucune difficulté ni
aucun obstacle à instruire tous les hommes (car) chez
tous les peuples l'image du sage Créateur se reflète (…)
dans la raison, l'esprit, la langue, la main, etc »67.

4- S'intéresser à ce monde - ci
37 « La fin ultime de l'homme est en dehors de cette vie »,
proclame le titre du chapitre II de La grande didactique.
Le titre du chapitre suivant confirme : « Cette vie n'est
qu'une préparation à la vie éternelle. » Tout le reste de
l'œuvre de Comenius reste fidèle à ces prises de position
fondamentales. Mais la vie sur cette terre, elle ne
compte pas ? Elle n'a donc aucune valeur ? - C'est ce
qu'on a cru pouvoir conclure de ces affirmations,
d'autant plus qu'une certaine spiritualité (dite)
chrétienne déniait effectivement toute valeur positive à
ce monde dont on ne faisait qu'une « vallée de larmes ».
38 Précisons en quoi consistait cette mentalité. Rousseau
écrivait : « Le christianisme est une religion purement
spirituelle, occupée uniquement des choses du ciel ; la
patrie du chrétien n'est pas de ce monde. (…) Pourvu
qu'il n'ait rien à se reprocher, peu lui importe que tout
aille bien ou mal ici-bas »68. Le chrétien était dans ce
monde comme en « exil » ; il « suspectait tout effort des
hommes pour exercer leur liberté et transformer la
réalité sociale. » « La spiritualité était fondée sur le
détachement (…) et la résignation devant les malheurs
qui survenaient dans la vallée de larmes »69. Cette
mentalité a été longuement décrite par G. Snyders dans
son livre La pédagogie en France aux XVIIe et XVIIIe siècles.
Il y est dit par exemple que chez les Jésuites du
e
XVII siècle « aucun thème n'était plus fréquemment

repris que celui de la vertu comme mépris de la terre. »


Un théologien d'aujourd'hui, Urs von Balthasar fait
observer que le chrétien « ne peut plus se considérer
lui-même comme un « hôte » et un « étranger »
descendu d'en haut et venu en ce monde, comme les
chrétiens de jadis le faisaient volontiers encore à la suite
des platoniciens »70. Certains auteurs ont qualifié cette
mentalité de « mysticisme » ; et pour eux Comenius est
un « mystique ». Or, « pour le mystique, le monde
matériel est un leurre et les sens sont trompeurs ; la
multiplicité et les vicissitudes terrestres relèvent de
l'irréel et de l'illusion »71. Rien n'est plus opposé à la
philosophie de Comenius que ce « mysticisme »-là. Sa
piété, loin de lui rendre la terre indifférente, la lui rend
presque sacrée, car elle est l'œuvre de Dieu.
39 La position de Comenius est claire quoique complexe : il
faut toujours rechercher Dieu : mais, tant qu'on est sur
cette terre, ce n'est qu'à travers ses œuvres qu'on le
trouve. Il faut servir Dieu ; mais on ne peut le faire
qu'en vivant sa vie d'homme. Dieu, invisible en lui-
même se manifeste par ses œuvres (DM. XXIV, 18) ; il
faut donc chercher à « relever les traces de la divinité
dans toute la création » (ibid. XXIV, 3). Notre philosophe
va jusqu'à écrire que ceux qui disent que, du point de
vue de la foi, ce que l'on dit des créatures n'a aucune
importance pourvu que l'on parle correctement de Dieu,
se trompent honteusement. Qu'il soit tenu pour certain,
ajoute-t-il, que plus on connaîtra la nature avec
exactitude et plus resplendira la majesté et la grandeur
du Créateur72. De même, en choisissant sa profession,
« il faut être toujours prêt à servir les hommes et Dieu.
(…) Il ne faut pas penser seulement à soi, mais à toute la
société. Nous ne naissons pas pour nous seuls ».
Pratiquer la profession de cette manière « est une voie
royale vers le royaume ». Devant Dieu il n'y a aucun
métier vil ; il n'y en a aucun qui ne puisse nous faire
mériter la couronne du ciel73.
40 C'est avec la même complexité d'inspiration que l'auteur
parle de cette vie comme d'une « préparation » à la vie
éternelle. « Il y a trois degrés dans la préparation à la vie
éternelle : se connaître soi-même (ainsi que toutes les
autres choses) ; gérer les biens de ce monde et tendre vers
Dieu ». (C'est le titre même du chapitre IV de La grande
didactique qui suit les deux autres que nous avons cités
au début de cette section). Seul est digne de la vie
éternelle, l'homme qui a développé sa raison et acquis
des connaissances sur tout ce qui se trouve sur la terre,
l'homme qui a développé son savoir-faire et ses
habiletés techniques et enfin l'homme qui vénère Dieu.
Ceux qui meurent sans avoir développé leur humanité
sont comme des avortons pour l'autre vie. L'embryon
dans le sein maternel ne forme pas ses organes et ses
membres pour la vie qu'il mène alors ; mais il faut qu'au
moment de la naissance ils soient tous bien formés.
« Heureux celui qui s'est formé de bons membres dans le
sein de sa mère ; mille fois plus heureux celui qui quittera
cette vie avec une âme bien formée » (DM. III, 6). - « Celui-
là est vraiment instruit qui est instruit des choses de
l'éternité ; mais de telle manière qu'il sache en même
temps profiter le plus judicieusement possible de ce qui
précède, c'est-à-dire de la vie présente »74. La pensée
d'une vie future n'est invoquée que pour donner un
sens à l'étape présente ; elle ne la dévalorise pas.
41 Elle la dévalorise d'autant moins que l'homme a été
établi, par Dieu lui-même, le gérant de ce monde-ci, le
maître de toutes les créatures (DM. IV, 2 et 26). A
plusieurs reprises notre auteur rappelle la parole de
saint Paul : « Tout est à vous… » (1. Cor. III, 21-13). C'est
un devoir pour l'homme, d'une part de développer sa
raison en observant les choses de ce monde et en
apprenant à les connaître, d'autre part d'apprendre à les
utiliser au mieux de ses besoins (DM. IV, 3-4). Pour cela il
faut commencer par faire l'inventaire de toutes les
richesses que la terre contient, d'autant plus que
l'homme doit connaître son héritage. On sait que ce
programme a été réalisé depuis. Mais en son temps,
Komenský constatait que les hommes ne savaient pas
qu'ils étaient les maîtres de grandes richesses et le
souverain de la création75.
42 Avec le temps, le bon Komenský s'enhardit jusqu'à
recommander aux gens de s'enrichir ! (au lieu de se
« détacher »). « Il est désirable, écrit-il, que les hommes
soient bien à leur aise (chacun selon ses besoins) ; c'est
pourquoi il faut que tous apprennent l'art de
s'enrichir »76. D'ailleurs cela correspond, pour notre
philosophe, à une tendance naturelle : « Toute créature
humaine désire, par les instincts les plus intimes de sa
nature, (…) 7° avoir beaucoup de choses »77. Aussi
l'éducation doit travailler à développer cette tendance.
Mais comme « il ne faut pas s'attendre que les dons de
Dieu nous tombent du ciel », il est nécessaire aussi
d'apprendre aux hommes à travailler78. - Au milieu du
e
XVII siècle, ce n'était pas l'opinion générale ; aussi notre

auteur se sent obligé d'insister. « Il pourrait arriver


même aujourd'hui que, sous prétexte de piété, certains
hommes négligent les autres ornements de la vie
raisonnable ; il ne faut pas le permettre »79. Mais la
mentalité contre laquelle Komenský luttait s'est
prolongée jusqu'au XIXe siècle. Entre beaucoup d'autres,
Louis Veuillot (1813 - 1883), rédacteur en chef du très
catholique journal L'Univers, écrivait : « La misère est la
loi d'une partie de la société ; c'est la loi de Dieu à
laquelle il faut se soumettre. »( !)
43 Comenius ne craint même pas d'écrire qu'il faut savoir
profiter des saines jouissances que la vie offre, car ce
qui se trouve dans ce monde ne s'y trouve pas pour
assurer seulement nos besoins, mais aussi pour notre
jouissance (DM. III, 3). Parlant d'un jardin que « le
jardinier a travaillé avec ardeur et goût », il dit : « Plus
grande en est la variété, plus agréable en est la vue, plus
suave le plaisir de l'odorat et plus fort le soulagement du
cœur »80. (Par opposition, Bossuet aurait dit que la perte
de plus d'une âme a commencé par sentir une fleur…).
Comenius célèbre même les plaisirs esthétiques : « Il n'y
a personne qui n'éprouverait pas de plaisir à voir un
homme aux belles formes, un cheval élégamment campé,
une statue superbe et une peinture merveilleuse. (…) Je
voudrais aussi savoir qui est-ce qui reste insensible à la
musique ? (…) A qui ne plaisent les aliments bien
assaisonnés ? »81. Ces phrases, et bien d'autres (cf. D.M.
X, 10 à 13) ont dû faire frémir plus d'un lecteur du
e
XVII siècle. Ne parlons pas de l'abbé de Rancé (1626-

1700) ! Mais un religieux engagé dans le monde, le P. de


Jouvency, se croyait obligé d'enseigner à ses élèves
qu'un « saint et savant religieux » est celui à qui « la
terre semble fade »82. D'une manière générale on
répétait que « la vertu ne faisait qu'un avec le
renoncement… »83.
44 L'évêque de l'Unité a osé écrire : « Il faut enseigner aux
hommes à aimer la vie ici-bas au point de la désirer
éternelle ». Puis il s'est repris, se rendant compte que
cela n'a pas besoin d'être enseigné, tellement cela
correspond à un instinct fondamental. Cependant il a
ajouté : « Il faut qu'ils (les hommes) aiment la vie ici-
bas »84. Mais cette vie est conditionnée par la santé du
corps. Aussi le philosophe attache à la santé une grande
importance : « Il est de l'intérêt de chaque homme de bien
veiller à sa santé »85. A cette époque la mortalité était
grande et l'hygiène n'était pas encore connue. Aussi le
pédagogue ne craint pas d'écrire dans La grande
didactique tout un chapitre sur « l'art de prolonger la
vie » (chap. XV).
45 L'homme doit prolonger l'activité créatrice de Dieu en
mettant la terre en valeur. Comenius voit dans cette
activité une collaboration de l'homme avec Dieu. C'est
une idée fondamentale dans sa philosophie. Dans son
discours d'adieu prononcé à Sarospatak, par exemple, il
disait à ses auditeurs : « Je viens de vous dire que vous
devez attendre ces pleines moissons de la bonté divine et
de votre courage. Je mets ensemble ces deux choses, car
Dieu lui-même souhaite leur coopération et il veut qu'elles
aillent toujours de pair »86.
46 Il insiste sur cette collaboration surtout dans le travail
de l'éducation ; l'homme doit faire croître les germes
que Dieu a déposés en lui. Et c'est Dieu qui éveille chez
certains hommes le désir de travailler à la réforme des
écoles87. Aussi offrir pour les écoles la dîme de ses biens,
c'est travailler à la gloire de Dieu88. « Vouloir le bien (il
s'agit, ici, de chercher à répandre l'instruction), chercher
les moyens pour y arriver est la voie royale pour arriver
là où Dieu veut que nous allions »89. Pour exhorter les
autorités à développer les œuvres d'éducation, notre
auteur emploie, selon le cas, les exhortations ou les
objurgations mômes des prophètes : « Maudit soit celui
qui fait mollement le travail de Yahvé »90. Il évoque « la
vocation divine » des maîtres, car « ils ont été appelés
pour planter le ciel et asseoir solidement la terre. Isaïe,
Ll, 16. » (DM. XXXIII, 12). Répandre la vérité c'est
« glorifier Dieu », dit-il en reprenant les paroles de
Grégoire-le-Grand91.
47 Toute la vie de Comenius a été un engagement dans
l'action éducative sociale et politique. C'était donc tout le
contraire de « l'indifférence mystique ». Son action
éducative sera suffisamment mise en relief au cours de
cette étude. Nous ne parlerons pas, ici, de son
engagement religieux et politique ; disons seulement
que c'étaient ses préoccupations constantes. L'œuvre de
sa vie a été le grand ouvrage : Délibération universelle
sur la réforme des affaires humaines dont le titre seul dit
assez l'ambition qui animait notre auteur.
48 Comme on l'a constaté, des idées importantes sont
exprimées par des symboles religieux ou fondées sur
l'autorité des Ecritures. Dans une société profondément
laïcisée et parfois hostile à la religion, on est porté à leur
donner moins d'importance ou même à les rejeter
catégoriquement. C'est par exemple ce qu'a fait Piobetta
dont la traduction française ne donne de La grande
didactique qu'un texte tronqué.
49 Cependant il faudrait se rendre compte que l'expression
religieuse n'est souvent qu'un revêtement sous lequel on
trouve des intuitions profondément humaines, donc
acceptables par tout le monde. Cela ne se trouve pas
seulement chez Comenius. Emile Faguet dit, par
exemple, que les divers courants de pensée du
e
XVII siècle - jansénisme, thomisme, molinarisme, semi-

pélagianisme, quiétisme - n'étaient que « les formes que


prenaient chez ces hommes les idées fondamentales et
les sentiments profonds. (…) Leur pensée, au lieu de
devenir un système philosophique, prenait comme
forme et comme expression une des interprétations
diverses du christianisme qui existaient alors. » Ces
formes de pensée, dit encore Faguet, étaient, pour
l'homme qui les adoptait, « sa philosophie intime, son
tour d'esprit même »92. C'est pour cela que les
discussions sur la grâce ont eu un tel impact sur le
public, en France.
50 Chez notre auteur il semble évident que l'expression
religieuse est seconde par rapport à l'adhésion à des
valeurs qui étaient unanimement acceptées dans
l'Unité ; il les a intériorisées et puis il les a exprimées et
justifiées dans un langage religieux (dans certaines de
ses œuvres) puisque c'était une manière normale de
procéder pour son époque. Mais dans d'autres œuvres,
il justifie les mêmes principes (celui de l'égalité des
hommes, par exemple) par des arguments purement
rationnels. Nous suivrons ce développement en détail
dans un autre chapitre (Former l'homme - section : La
nature humaine est une et identique chez tous les
hommes). Voici en abrégé cette justification. Tous les
hommes appartiennent à la même humanité parce
qu'ils ont les mêmes notions communes, etc. Si on
retranche quelque catégorie à ce tout, on en détruit
l'intégralité. Voilà pourquoi il faut étendre l'instruction à
tous les peuples (les barbares y compris).
51 Ni les arguments religieux ni les arguments rationnels
n'ont la puissance de modifier cette adhésion intime à
des valeurs (en dépit de ce que certains croient) sinon
par une évolution très lente qui s'étend parfois sur des
siècles. C'est ainsi que, même des saints ou des
philosophes qui vivaient dans les sociétés où l'égalité
n'était pas étendue indistinctement à tous les individus
humains refusaient d'étendre le privilège d'être des
images de Dieu à ces individus-là. (cf. saint Augustin et
saint Thomas, et sur le plan purement philosophique
Jefferson).
52 Inversement, notre bon Comenius qui accorde tant
d'autorité aux Ecritures, récuse celle de l'apôtre Paul
quand celui-ci écarte les femmes de l'enseignement et
par conséquent de l'instruction. « Que personne ne
m'objecte, dit-il avec la plus grande assurance, cette
sentence de l'Apôtre : « Je ne permets pas à la femme
d'enseigner 1. Timothée II, 12 »93. Pourquoi le fait-il sinon
parce qu'il ne pouvait pas renoncer à une valeur qu'il
avait faite profondément sienne ?
53 La manière dont Comenius conçoit les rapports entre
Dieu et l'homme a des conséquences importantes. A son
époque, pour glorifier Dieu on rabaissait l'homme ; on a
signalé même une « tendance à faire de
l'anéantissement de l'homme un indispensable
hommage à la souveraineté de Dieu » ; on écrasait la
liberté de l'homme pour exalter la puissance de Dieu94.
On ne voyait pas le danger que représentait cette façon
de faire. Lorsque l'homme prendra conscience de sa
valeur propre en tant qu'être libre, lorsqu'il se rendra
compte que la condition de l'homme sur la terre n'est
pas réglée par un destin immuable, mais qu'il peut
travailler à augmenter son bonheur terrestre, il aura
l'impression qu'il ne pourra le faire qu'en se révoltant
contre Dieu. C'est ainsi que le marxisme redonnera de la
force au mythe de Prométhée, comme si le bonheur de
l'humanité ne pouvait être établi que par des héros qui
devraient l'arracher à la jalousie de Zeus. Pour d'autres
philosophes, l'homme, pour devenir pleinement maître
de sa destinée, devait d'abord proclamer la mort de
celui qui le maintenait dans la sujétion. - Pour la religion
c'était un vrai désastre.
54 La philosophie de Comenius, si elle avait été généralisée,
aurait permis de l'éviter. Sans doute dans cette
philosophie l'homme se trouve en face d'un autre Etre
dont il doit accepter la qualité de créateur. Mais il ne se
sent pas écrasé par cette présence. Au contraire,
l'homme a été créé libre ; les relations que Dieu établit
avec lui sont fondées sur l'amour, le bonheur de
l'humanité est voulu par Dieu ; quand l'homme veut
devenir le maître de l'univers, il entre dans les desseins
de Dieu. Dans une telle philosophie il n'y a pas de place
pour Prométhée. Une telle vision du monde, si elle avait
été plus répandue, aurait pu, peut-être, donner un autre
cours à l'histoire religieuse en Occident après le
e
XVIII siècle.

Notes
1. Genèse, I, 26 et 27 ; trad. Bible de Jérusalem.
2. Tresmontant C., Les origines de la philosophie chrétienne. (coll. Je
sais, je crois, no 11), p. 97.
3. Ibid., p. 98.
4. Ibid, p. 100.
5. Ibid., p. 99.
6. La sainte Bible, trad. en français, sous la direction de l'Ecole
biblique de Jérusalem ; Paris, 1961, p. 10, note a).
7. Saint Thomas, Somme théologique, Ia, q.93 art. 4 ; trad. A.
Patfoort, o. p. Ed. du Cerf, p. 96-97.
8. La pampédie, II, 23 ; trad. Unesco.
9. Ibid III, 27 ; trad. Unesco.
10. L'école de la petite enfance, IV, 5 ; trad. Prévot.
11. De utilitate accuratae Rerum…, in O.D.O. pars IIΙ, col.746.
12. La pampédie, IX ; in Cons. II, col 121.
13. Ibid., IIΙ, 14 ; trad. Unesco ; cf. aussi Panegersie, in Cons. I, col. 30.
14. Ibid., III, 20 ; trad. Unesco.
15. 1er Epître de saint Jean, IV, 8.
16. La panegersie, V, 9 ; in Cons. I, col. 37.
17. Ibid. IV, 14 ; in Cons. I, col. 30.
18. Cf Denis E., La fin de l'indépendance bohême, t. I et II, Paris, 1930.
19. Vita gyrus. in O.D.O. pars IV, p.5.
20. Heyberger A., Jean Amos Comenius, Paris, 1928, p. 217.
21. Ibid., p.215.
22. Gusdorf G., La révolution galiléenne, Paris 1969, t. Π, p. 43.
23. Hildesheimer F., Le jansénisme. L'histoire et l'héritage, Paris,
1992, p. 134.
24. Cf Cons. I, Mundus spiritualis, chap. IV, col 1071.
25. La grande didactique, chap V, sous-titres pour les paragraphes 1
et 2.
26. D.M. V, 23 ; cf. aussi Pans. prod. 15.
27. La pampédie, chap. X ; V classe (in finem).
28. Cons. I, col. 1052.
29. Ibid., col. 580 (4) et col. 978.
30. Ibid., col. 1130.
31. Ibid., col. 1130.
32. La pampédie, II, 19 ; trad. Unesco.
33. D.M. IX, 1 et sous-titres des paragraphes 1 et 2 ; cf aussi La
pampédie, I, 6 et 11.
34. Cf. Gravissimum educationis momentum §67.
35. Ce passage a été traduit très tendancieusement par Piobetta de
la façon suivante : « Pareillement il importe d'éclairer aussi les
sujets afin qu'ils sachent se tenir sagement dans leur état de sujets à
l'égard de ceux qui les gouvernent avec sagesse. » Il traduit ainsi :
« Parere prudenter » ! - (Des traducteurs d'autres langues ont une
version pareille à la nôtre).
36. Via lucis, XIV, 16,18.
37. La pampédie, II, 1 ; trad. Unesco.
38. Via lucis, XIV, 16.
39. Ibid., XIV, 16.
40. DM. XXIX, 7 ; trad. Piobetta.
41. Via lucis, XIV, 17.
42. Cité par Compayré G.
43. Simon J., Rénovation de l'enseignement du français, in La
pédagogie contemporaine, Gabaude J.-M et colt., 1972.
44. Gusdorf G., L'avènement des sciences humaines au siècle des
lumières, Paris, 1973, p. 126.
45. Cité par Gusdorf G„ Dieu, la nature, l'homme au siècle des
lumières, Paris, 1972, p. 178. Citation extraite de Voltaire, Essai sur
les mœurs - œuvres complètes, éd. Dupont, 1823, t. XV. p. 25.
46. DM. IX, 5 ; trad. Prévot.
47. Paris, 1978.
48. Idem., p. 312.
49. Idem., p. 312.
50. Idem., p. 324.
51. Idem., p. 330.
52. Idem., p. 330.
53. La pampédie, II, 30 ; trad. Unesco.
54. Calò G. trad. italienne de La grande didactique, p. 34 (n.l).
55. La pampédie, II, 11 ; trad. Unesco.
56. Gusdorf G., La révolution galiléenne, t. II, Paris 1969, p. 196.
57. Idem., L'avènement des sciences humaines au siècle des lumières,
Paris, 1973, p. 288.
58. Onstott K., Mandingo, Paris, 1964, p. 284.
59. Ibid., p. 507.
60. Gusdorf G., La conscience révolutionnaire - Les idéologues, Paris,
p. 226.
61. Pannuthesia, VII, 8, in Cons. II, col. 744.
62. Cf. par exemple : MLN.V. 43.
63. La pampédie, VI, 18 (XV).
64. Pannuthesia, VI, 7, in Cons. II, col. 733.
65. Ibid., V, 4 in Cons. II, col. 723.
66. In : Nouvelle Histoire de l'Église, t. 2. Le Moyen Âge, p. 456.
67. La pampédie, V, 4.
68. Cité par Gusdorf G., La conscience révolutionnaire. Les
idéologiques, Paris, p. 158. Rousseau : Du contrat social (1762) livre
IV, chap. VIII. Pléiade t. III, p. 465.
69. Warnier P., Marx pour un chrétien.
70. Urs von Balthasar, Dieu et l'homme aujourd'hui.
71. Clausse A., Traité des sciences pédagogiques ; t. 2. Histoire de la
pédagogie, p. 165.
72. Via lucis, XIV, 7.
73. La pampédie, ΧΙΠ ; « Du choix du mode de vie » ; in Cons. II, col.
210.
74. Pans. prod. (109).
75. Ibid., (52).
76. La pampédie, Ht, 22 ; ce conseil est répété en ΙΠ, 42 ; trad.
Unesco.
77. Ibid., IIΙ, 11 ; trad. Unesco.
78. Ibid., IIΙ, 42 ; trad. Unesco.
79. Ibid., IV, 6 ; cf aussi D.M. XXIV, 24.
80. D.M., V, 9 ; trad. Piobetta.
81. Ibid., V, 14 ; trad. Piobetta.
82. Snyders G., La pédagogie en France aux XVIIe et e
XVIII siècles, Paris,
1965, p. 81.
83. Idem, p. 76.
84. La pampédie, ΙII, 16 ; trad. Unesco.
85. Ibid., IIΙ, 17 ; trad. Unesco.
86. Lab. schol. Patakini obitorum Coronis, in O.D.O. pars ΠΙ, col.
1046 ; en italique dans le texte.
87. Dédicace de La grande didactique, (34).
88. Schola pansophica, in O.D.O. pars ΠΙ, col. 57-58.
89. Ibid., in O.D.O. pars ΠΙ, col. 56 (20).
90. Dédicace de La grande didactique, (31).
91. Cf. D.M. XXXIII, 18, 19 et Dédicace de La grande didactique (30,
31, 33).
92. Cité par Gusdorf G., Les principes de la pensée au siècle des
lumières, Paris, 1971, p. 350 (E. Faguet. XVIIe siècle, Boivin, s.d.
p. 446-447).
93. DM. IX, 7 ; trad. de la Bible de Jérusalem.
94. Schimberg A., L'éducation morale dans les Collèges de la
Compagnie de Jésus sous l ’ ancien régime (XVIe, XVIIe, XVIIIe siècles),
Paris, 1913, respectivement p. 54 et p. 56.

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Référence électronique du chapitre


KROTKY, Étienne. Chapitre 1. L'homme face à Dieu et au Monde In :
Former l’homme : L’éducation selon Comenius (1592-1670) [en ligne].
Paris : Éditions de la Sorbonne, 1996 (généré le 21 novembre 2023).
Disponible sur Internet :
<http://books.openedition.org/psorbonne/15789>. ISBN :
9791035102760. DOI :
https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.15789.

Référence électronique du livre


KROTKY, Étienne. Former l’homme : L’éducation selon Comenius
(1592-1670). Nouvelle édition [en ligne]. Paris : Éditions de la
Sorbonne, 1996 (généré le 21 novembre 2023). Disponible sur
Internet : <http://books.openedition.org/psorbonne/15744>. ISBN :
9791035102760. DOI :
https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.15744.
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Former l’homme
L’éducation selon Comenius (1592-1670)
Étienne Krotky

Ce livre est cité par


de Soria, A. Bernal Martínez. (2006) Humanismo Del
Diecisiete En La Postmodernidad Del Veintiuno. Studies in
Philosophy and Education, 25. DOI: 10.1007/s11217-006-0009-9

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