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Théories Anthropologiques

Avant la constitution de l'anthropologie comme science

I. L'antiquité grecque

Contexte :
Deux questions centrales
→ Comment penser la relation entre grecs et non grecs ?
→ Comment penser la cité grecque ?

Approche philosophique/ sciences politiques


O. NAY : politiste : naissance de la pensée politique en -800. Notion de cité, de liberté, de
citoyenneté mais aussi famille, société => réflexion théorique : notions qui nous permettraient
de penser l'autre. On construit les outils mais on ne regarde pas réellement les autres en question

Hérodote : -500 avant JC


Observation et description de ce qu'on observe : ouvrage : Enquêtes ou Histoire.
Essaye de décrire les guerres médiques, chercher causes et conséquences. Recherches
« ethnographiques » : les Scythes : description de comment fonctionnent ces individus qui ne
sont pas des grecs : insère une forme d'ethnographie, s'appuie sur ce que lui-même a vu.
Commence à construire une science à partir de ce qu'on a vu. Importance du témoignage &
processus en miroir (François Hartog 1980) => Hérodote réfléchit et travaille par contrastes :
regarde égyptiens donc pense aux grecs. =>Sensibilité ethnographique

II. Le Moyen Age chrétien

IVe siècle : christianisme devient la religion officielle de l'empire romain. La religion s'étend.
Politique perd de son autonomie par rapport au religieux : se définit par rapport au religieux.
Empereur de droit divin...
=> Dans l'histoire de la pensée, se traduit par un théocentrisme : tout va passer au crible de la
religion. Religion = grille de lecture pour penser, imaginer, comprendre l'autre. A ce moment,
qui est l'autre ?
1054 : schisme : séparation des chrétiens d'orient (orthodoxie) et d'occident : deviennent Autres
les orthodoxes.
Le musulman devient une figure de l'autre. Croisades : rapport d'altérité mais le contact est
fréquent, on est sans arrêt avec cet autre : cohabitations dans la péninsule arabique. Il est souvent
appelé le Sarazin : (Sarah femme d'Abraham donne naissance au groupe qui deviendra
musulman.)
On donne un nom qui intègre dans sa propre grille de lecture, la lecture biblique.

A cette époque, réfléchir et imaginer se rapporte souvent à l'imaginaire, au mythe. L'imaginaire


va permettre aux individus de se comprendre entre eux, d'analyser son rapport à l'autre.
Le Livre des Merveilles (1299) Marco Polo : mélange de descriptions, d'observations. Se
réapproprie récits bien plus anciens. Va aussi imaginer, laisser l'imagination travailler pour
penser ces populations qu'il n'a pas vues. « Des fruits qui ne ressemblent pas aux autres ».
Hommes à têtes de chien : Marco Polo retravaille ces mythes, adapté à son imaginaire : lui
permet de penser l'autre.
A cette époque, dans beaucoup d'iconographies, impossible de république un autre non chrétien
comme un individu complet, complètement comme nous : on le dessine donc différemment :
élément qui n'appartienne pas aux caractéristiques humaines. (Tête de chien). On utilise des
couleurs différentes pour les représenter

III. Le Moyen Age Arabo-musulman

622 : l'hégire : An 1 du calendrier musulman


Expansion géographique mais aussi construction intellectuel, politique.
On est dans la construction d'un empire qui va combiner une forme d'universalisme (message
religieux) mais en même temps hétérogénéité énorme au sein de cet empire : individus de langue
diverse, de cultures diverses, habitudes, manières de faire, d'être gouverné... De ce mélange-là
vont naître plusieurs formes de réflexions sur soi et l'autre.

IXe – Xe : géographie humaine au-delà de cet empire musulman : observation, description :


avec regard très islamo-centriste. Mais observation très précise de ce qui se passe => regarder
au-delà.
=> Siècle arabe des lumières : apogée des lettres et sciences (foisonnement intellectuel),
croisement entre les savoirs. Al Andaluz : péninsule arabique ou se rencontrent les trois
religions monothéistes. Bouillonnement culturel et des savoirs.

Deuxième manière d'appréhender l'extérieur : géographie des merveilles. (A. Miquel 1967 :
121) : Manière de réfléchir les individus très lointains : processus proche du MA chrétien : on
va très largement imaginer et inventer ce que sont ces peuples lointains : description d'un voyage
(Saladin) : griffes d’animaux, on va inventer car on le doit pour penser l'altérité.

2e moitié du Xe siècle : empire musulman stabilisé, plus sur de lui. Réflexions : on a ce


sentiment de cohérence : on peut regarder cette diversité. Les « géographes » vont commencer
à se regarder, regarder leur société pour comprendre ce qui s'y passe.

XIIe : développement d'une pensée rationaliste arabe : Ibn Roshd ou Averroès. Décentrement
de l'homme par rapport à Dieu. On essaye de sortir la réflexion sur l'être humain d'une pensée
purement théologique. On pense l'homme en dehors du fait qu'il est un être crée par Dieu.

XIVe : Ibn Khaldûn : père de la sociologie ? Départements au Maghreb mettent cet homme au
programme comme un père. Quelqu'un qui va prendre travaux des historiens pour les repenser
en se disant que l'histoire est très subjective : il faut réfléchir aux causes, aux conséquences : il
faut rechercher l'origine des faits. Va construire pas mal de notions, en pensant société qui
l'entoure : sociabilité, classes sociales, pouvoir. Il veut connaître le pourquoi & le comment des
choses. Décrit ce qu'il voit au lieu de prescrire ce qui doit être. Continue à mettre l'Homme au
centre de la réflexion.

IV. Le XVIe siècle : la Renaissance.

Elargissement, géographique et intellectuel, des frontières du monde connu : monde est bien
plus large et divers qu'on le pensait.
Contexte :
1453 Prise de Constantinople par les Turcs : Les savants vont s'enfuir vers l'Italie et emportent
tous les manuscrits de l'antiquité : grecque et latine.
Années 1450 : développement de l'imprimerie par Gutenberg. Permet d'imprimer les ouvrages,
démultiplier l'accès aux textes. Plus large diffusion des savoirs
1492 Découverte de l'Amérique par CC.
Plus la fin de la reconquête espagnole
1494-1519 : guerres d'Italie. Noblesse française va découvrir les manuscrits et ouvrages de
l'antiquité : rapportent vers la France. De là que peut émerger la Renaissance en France.
1517 : début de la Réforme : scission entre catholiques et protestants (Luther et Calvin) : période
des guerres de religion

Trois courants de pensée, entre tensions et synergies


– la Scolastique : méthode de compréhension de la religion : forme de questionnement
spécifique pour mieux la comprendre. (St Thomas, St Augustin.) Textes d'Aristote : on réfléchit
sur la religion entre la philosophie d'Aristote et les pères de la religion. Démarche qui consiste
à exposer un problème puis donner un contenu précis donné aux notions données & tenir
compte de toutes les thèses sur ce problème (plusieurs angles d'approche) et ensuite construire
un argumentaire qui puisse permettre de convaincre. => dialogue surtout à la faculté de
théologie (la Sorbonne).
– L'humanisme : prône le développement d'un esprit critique, un individualisme
intellectuel, réflexion personnelle. Replonger dans ouvrages des philosophes grecs / latins.
MONTAIGNE : il vaut mieux une tête bien faite qu'une tête bien pleine : il vaut mieux être
capable de raisonner par soi-même que de savoir tout sans réfléchir.
Va essayer de combiner toute sa réflexion dans les Essais.
– La Réforme ou le protestantisme : aussi un courant de pensée. Idée qu'il ne faut pas
regarder les textes religieux comme les catholiques : esprit critique doit être mobilisé pour lire
et comprendre textes religieux (perspective de foi). Avoir son esprit critique sur les textes

Invention de la notion de sauvage et sauvagerie.


Ils sont retrouvés en tant qu'antithèses de la civilisation. Se popularisent dans les récits de
navigateurs, missionnaires, administrateurs (se multiplient).
=> Manière de penser l'autre qui ne peut pas sortir du cadre de celui qui les pense. On pense
l'autre à travers son propre prisme de regard. On doit penser les hommes comme des enfants
d'Adam et Eve. On leur cherche une place. Aztèques vont faire pareil : européens pensés comme
des divinités venues d'orient : les placent dans leur façon de penser.
Notion de sauvage, de sauvagerie donnent lieu à deux attitudes opposées :
– positive : « fascination de l'étranger » (Laplantine 2001 : 33). Textes montrent une
admiration, voir un fantasme sur ce qu'on présente comme une organisation sociale parfaite,
pacifisme, amours libres, liens privilégiés avec la nature... Toutes ces choses qu'on envie au
sauvage montrent tout ce qu’on n’aime pas dans sa propre société. Montaigne fantasme un
sauvage formidable. On n’est pas dans une description de la population en question.
– Négative : « refus de l'étranger ». Critique, peur, mépris. Description de la férocité,
bêtise, absence de vêtement, trop proche de la nature... Contentement de soi.

D'autres ouvrages permettent la création d'un nouveau savoir : travaux plus descriptifs : surtout
de la part de ceux qui essayent de comprendre ces peuples (Jean de Léris)
Conséquences très pratiques : statut que l'on donne aux individus dépend de la façon dont on
les pense → traites. Domination, esclavagisme, exploitation des ressources
Controverses de Valladolid (1550-1551) entre Sepulveda et Las Casas : comment devaient se
faire les conquêtes dans le nouveau monde : quel est le statut des amérindiens, sont-ils des êtres
humains ou non : réponse donne façon dont on va faire la guerre : faire une guerre en « justice »
Sepulveda : amérindiens doivent être soumis, commandés : droit naturel des espagnols de les
dominer.
Las Casas : ont une âme : on doit les convertir pour les sauver. Mais là aussi on doit les intégrer
à notre système de pensée : on doit leur sauver la vie en quelques sortes

Aujourd'hui : ces deux façons d'envisager l'autre, attitude positive retrouvée dans la mode pour
l'exotisme : bijoux « exotiques », musique « world ». Ecologisme naïf (être plus proche de la
nature : mythe du bon sauvage). Regret d'une fraternité originelle disparue... Cette attitude
positive a pris d'autres formes ?
Cette peur, angoisse et mépris

Le XVIIe :

Moins intéressant : moins de réflexions sur l'autre. Mais édition du code noir (1685) : droits et
devoirs du maître sur ses esclaves. Pour limiter les abus. Mais l'esclave est quand même décris
comme un meuble...

V. Le XVIIIe siècle

Lumières de la raison vont « éclairer les ténèbres » de l'obscurantisme religieux.

Mouvement européen : crises des sociétés : crise de la société française... => tentative de
réformer les mentalités. Bouillonnement intellectuel.
Découverte du Pacifique – expéditions sont multipliées, on ramène son sauvage dans son
salon...
Mouvement philosophique : il faut que les hommes fassent usage de leur raison, développement
du sens critique. Démarcation de l'homme par rapport aux théologies. Il ne faut plus qu'il y ait
un déterminisme de la religion. Il faut que l'homme prenne des initiatives, qu'il s'autonomise
par rapport à Dieu.
Recherche du bonheur, de l'épanouissement : d'une part, valorisation du progrès : espoir énorme
dans le futur (grâce aux PT, homme sera plus heureux et épanoui dans le futur). D'autre part,
apologie de la nature (Hobbes, Locke, Rousseau). : réfléchissent à ce que serait l'homme serait
si il ne vivait pas en société, dans un état de nature. Questionnement théorique.

Renforcement de ce mythe du bon sauvage.


Utilisé pour critiquer la société française : pouvoir essentiellement entre les mains de l'Etat et
du clergé. Procédé littéraire : faire parler un sauvage : Les Lettres Persanes, Montesquieu ;
L'Ingénu, Voltaire. Critique du colonialisme : Supplément au voyage de Bougainville, Diderot ;
Candide, Voltaire. => Pas encore de textes, vraiment, qui décrivent la vie d'autres peuples. Ici,
vraiment un procédé littéraire.

Bilan et transition vers l'anthropologie comme science.

– Décentrement et comparaison : Processus préfigure le travail anthropologique.


– Evolutionnisme en germe : c'est cette idée que l'être humain évolue : passe par
différentes formes humaines plus ou moins avancées. On parle moins de sauvage mais plutôt
de « primitif ».
– Développement des sciences de la nature : on réfléchit comment penser la nature hors
de la théologie. Travaux de Linné : analyser le système de la nature dans lequel l'homme est
replacé. Homme n'est plus forcément une création divine.
– Réflexions sur l'organisation sociale, plutôt philosophiques jusque-là. Fait humain est
un fait sociétal, social. Pour comprendre l'être humain, il faut le replacer dans une société
particulière. Interférence de ces trois sphères.
– Penser l'Homme systématiquement et scientifiquement : créer une histoire de l'humanité
=> Essentiel. On peut enfin prendre l'homme comme objet de réflexion dans une science. Pour
ce faire, on a besoin d'observations empirique, descriptif et non prescriptif.
– Création de la société des observateurs de l'Homme : Texte de Gérando : Considérations
sur les diverses ….
– A cette époque, travaux vont réfléchir les êtres humains comme constitués par
différentes races, différentes familles.

L'EVOLUTIONISME

1. Contexte intellectuel et historique


2. Principes
3. Auteurs et domaines
4. Bilan

I. Contexte intellectuel et historique

Pour élaborer des savoirs, on s'appuie sur le décentrement et la comparaison. Il y a à cette


époque un intérêt pour la question de l'organisation sociale.
Emergence d'un nouveau concept : l'homme peut être l'objet d'études scientifiques.
Fin XVIIIe : tentative d’institutionnalisation :
• 1794 : American Philosophical Society (Philadelphie). Etudie les populations
amérindiennes autochtones avec un but scientifique et politique (l'intégration dans l'Etat).
• Emergence d'une anthropologie d'urgence : les populations qui disparaissent doivent
être rapidement étudiées. (Fin texte Morgan + de Gérando)
On se concentre sur l'étude des populations « sauvages »

Recentrage sur certains groupes : les études ont toujours pour objet les populations lointaines.
Création des sociétés ethnologiques : 1842 Paris ; 1842 New-York ; 1843 Londres. Cela donne
une réelle autonomie intellectuelle à la discipline ethnologique. Ces sociétés se transforment en
sociétés d'anthropologie : 1859 Paris ; 1863 Londres ; 1871 Washington. Là, on se concentre
sur l'étude de l'homme en général.

C'est aussi le début des collections d'objets dits ethnographiques. Des missions précises sont
prévues pour établir ce qu'on appelle cette « culture matérielle ».
Lewis Morgan va passer du temps, prendre des notes, faire des descriptions et apprendre les
langues... L'institutionnalisation nourrit la profession de l'anthropologue.

La façon dont on va penser l'homme devient un objet d'étude. L'homme est un objet social,
acteur ou agent d'une Histoire, le fruit d'une éducation : on peut l'étudier comme n'importe quel
autre objet scientifique.
Une science de l'homme en général doit se constituer et non plus se focaliser uniquement sur
des petits groupes. L'anthropologie est une science de la synthèse, justement.
On pense l'être humain comme un agent de transformations sur le monde qui l'entoure. On sort
de plus en plus du déterminisme religieux (seul Dieu décide du destin de l'homme) pour se dire
que l'homme peut être acteur. Deux éléments favorisent cette évolution :
– La révolution française lance des remises en question : le peuple pourrait décider...
– La révolution industrielle montre que l'initiative individuelle est fructifiant. Phénomène
d'exode rural. En ville, on a une individualisation, les rôles changent. Révolution montre la
possibilité valorisante du développement de l'humanité via le progrès : cette notion est au cœur
des théories évolutionnistes en anthropologie.
On cherche à placer l'homme dans une histoire, ou du moins le replacer. C'est le but des
anthropologues évolutionnistes : faire une Histoire de l'humanité.
Des fossiles de ce qu'on nomme ajd des néanderthals sont découverts en 1856. Cela montre que
l'homme est sur terre depuis au moins 48 000 ans alors que la Bible postule que cela fait
seulement 5 000 ans. L'histoire de l'humanité est donc bien plus longue et on détache la
réflexion sur l'homme d'une réflexion religieuse. Cependant à cette époque les découvertes
commencent à peine, l'on a très peu d'informations sur les modes de vie

Darwinisme biologique & l'évolutionnisme


/!\ Darwin n'était pas un anthropologue, c'est même fort peu probable que les auteurs
évolutionnistes s'inspirent directement de Darwin : les idées de progrès, d'évolution circulaient
déjà à l'époque. On peut cependant trouver des parallèles entre sa démarche intellectuelle et les
réflexions des évolutionnistes en anthropologie.
Darwin, de 1831 à 1836, participe à une expédition en Amérique Latine où il étudie la faune et
la flore. Il se rend compte qu'une même espèce animale subit des différences selon les lieux où
il habite. Il montre l'importance des conditions naturelles dans les traits caractéristiques d'un
animal. Les espèces animales ne sont pas fixées indéfiniment ce qui pose PB par rapport au
créationnisme. Les espèces changent et semblent aller vers une plus grande complexité, voir
une amélioration : cela concerne toute la nature. Darwin s'inspire des travaux de Malthus.
Dans la sélection naturelle, seul un petit nombre survit, ceux qui s'adaptent mieux. Cela s'étend
à toute l'espèce.
1859 : The Origin of Species by means on natural selection.
4 charactéristiques :
– changement trans-générationnel
– compléxification
– amélioration
– caractère inéluctable

II. Principes

« Évolutionnisme » :
→ sens large : perspective théorique (paradigme) qui imprègne les milieux savants du XIXe
siècle
→ sens restreint : la théorie anthropologique

Cette théorie a pour projet une explication globale de l'être humain en société (par l'histoire
notamment). On a à cette époque un nombre de connaissances, d'informations énormes mais
vraiment éparses, suite aux voyages nombreux des explorateurs, administrateurs qui rapportent
des écrits descriptifs. Ces données illustrent la diversité de l'humanité.

Deux postulats centraux :


– L’unité de l'esprit humain : tous les hommes viennent d'une même source. Il n'y a pas
de différence de nature. C'est le principe de la monogénèse : une position courageuse, en débat
avec la polygénèse, qui oppose radicalement les différentes populations humaines. On se
demande pourquoi ces populations sont si diverses malgré leur nature commune : l'explication
se trouve dans le fait que chaque société est à un « degré de développement » différent.
– Le développement se fait par stades : les différences viennent du fait que certains
groupes sont en retard.
=> L. Morgan : « L'histoire de l'humanité est une, quant à la source ; une quant à l'expérience ;
une quant au progrès ».
On va vouloir comprendre, observer les différences entre les groupes. On pourra alors
reconstruire l'histoire de ses ancêtres (→ texte de Gérando).
Selon le postulat du progrès humain, on a un schéma du développement de l'humanité, avec
différents stades l'évolution :
1. Sauvagerie
2. Barbarie MATURATION : enfance → âge adulte
3. Civilisation

Le Rameau d'Or, Frazer : « longue marche, lente et pénible ascension ».

Buts de cette théorie :


– Comprendre l'évolution des institutions sociales (= forme d'organisation sociale qui a
ses normes, rôles et règles), et les étapes de la parenté. Institutions vont du plus simple au plus
compliqué.
– Rechercher les raisons du décalage d'une société à l'autre, qui s'appuie sur un travail de
comparaison. Cela est possible car on est dans une perspective universaliste : les hommes sont
de même nature car ils ont une origine commune. On envoi donc des directives d'observation
des sociétés.

III. Acteurs principaux, domaines.

1. Lewis H. Morgan : 1818 – 1881. USA.

Il commence les études de terrain avec les Iroquois, qui donne lieu à la monographie de 1851.
Il pose le cadre chronologique de l'évolution de l'être humain, par un schéma. Il découpe par
stades en analysant des travaux archéologiques : les étapes se forment selon la culture matérielle
et les moyens de subsistance, le développement des techniques.
1. sauvagerie : chasse, cueillette, pêche
→ invention poterie
2. barbarie : agriculture et élevage
→ invention écriture
3. civilisation : commerce et industrie (en plus)

Il veut montrer les liens qui existent entre les différents domaines de la vie en société :
– Système social
– Système politique Lié à la propriété, au langage, au droit...
– Système de parenté

On peut là aussi réfléchir à une organisation par stades :


Social/Parenté
1. « Promiscuité primitive » : relations sexuelles libres entre tous
2. Mariage de groupes : groupes hommes et femmes s'épousent en tant que groupes entiers
3. Monogamie
Socio-politique
1. Horde
2. Tribu
3. Société
=> les différents éléments constitutifs d'une société sont mis en relation pour constituer cette
chronologie/hiérarchie.
Morgan est un père dans l'étude de la parenté : c'est tout ce qui concerne la façon dont on nomme
ou classe son entourage. Il synthétise deux sortes de relations généalogiques
→ systèmes classificatoires : plusieurs individus qu'on met dans la même classe
→ système descriptif : nom selon la relation qui lie à ego.
Morgan observe cependant des discordances dans les trois stades
Clans + classificatoire + monogamie – certains éléments sont considérés comme des
« survivances » d'états passés, la société est en cours d'évolution.

Bibliographie:
1851: La ligue des Iroquois
1871: Systems of Consanguinity and Affinity of the Human Family

2. Edward B. Tylor : 1832 – 1917. Royaume Uni.

Il est contemporain de Morgan et partage sa vision des trois stades.


Ils s'opposent sur le rôle du progrès technique : Morgan pense que l'évolution du PT entraine
l'évolution culturelle, alors que Tylor pense l'inverse.
Il voit aussi que l'explication évolutionniste n'est pas la seule, tend aussi vers diffusionnisme.
En 1850, il part en voyage sans projet réel, préconçu, aux Etats Unis et en Amérique Centrale.
Il constate l'existence d'éléments anachroniques dans une société, avec des techniques
« antérieures » à d'autres.

Tylor travaille beaucoup sur la notion de culture. Lui dit qu'elle est « un tout complexe »
englobant l'art, la morale, le droit, les coutumes... (Primitive Culture, 1871). Travaille aussi le
religieux ou les systèmes de croyances : essaye d'élaborer une histoire naturelle de la religion :
quelle est sa définition minimale, le plus petit dénominateur commun... Pense le concept
d'animisme : « belief in spiritual beings », ou la présence de caractères surnaturels dans les
végétaux, les animaux, les hommes. (voir texte de Jean de Léri)
conçoit trois stades religieux
→ Animisme
→ Polythéisme
→ Monothéisme.

Bibliographie :
1871 : La civilisation primitive (primitive culture)
1881: Anthropology. An introduction to the Study of Man and Civilization

IV. Bilan

1. Apports

C'est la constitution de l'anthropologie comme science, la fondation de la discipline.


Certains domaines sont définis, comme la parenté, le religieux, le droit... Un vocabulaire
technique se met en place (ex animisme). On assiste à la construction d'un paradigme (modèle
d'organisation des savoirs). Aussi, première fois qu'on pense l'unité de l'homme (monogénèse).
Valeur heuristique : fait avancer la réflexion. On pense les relations entre les domaines
du social et on explique le social par le social, etc...
Organisation des connaissances : permet de construire un cadre – systématicité de la
réflexion, stimule travail de réflexion. Certains points précis, notions, concepts nourissent la
science (animisme, totémisme...)
• Stimule les travaux des anthropologues rien que pour remettre en cause les théories
évolutionnistes.

2. Limites et critiques
- fixité et unilinéarité : chaque société doit passer par les mêmes étapes : c'est trop simplificateur
et ce n'explique rien.
- le progrès humain est décalqué sur le progrès technique : absurde. Pour le PT, on peut se baser
sur l'efficacité d'une technique, d'un outil – critère objectif pour juger du progrès.
- le schéma théorique est établi a priori, et plaqué sur une société
- historicisme : l'histoire a une force explicative beaucoup trop forte.
- critères arbitraires et jugements de valeur : il n'y a pas de critère objectif qui donne de la valeur
aux différentes formes de religion par exemple. La hiérarchisation est basée sur un jugement de
valeur => forte dimension idéologique.

LE DIFFUSIONNISME, FRANZ BOAS

Bibliographie

Boas F., Race, Language and Culture, New-York, 1940


Anthropology and modern life, 1928
Kwakiutl Ethnography, 1966

Critique de l'évolutionnisme assez forte. Tous les courants se construisent, se constituent en


critiques et oppositions aux courants précédents.
Double filiation. Ethnologues mènent réflexions critiques contre l'évolutionnisme, dont :

Edward Tylor : critique l'évolutionnisme : finalement, contrairement à ce qu'ils pensaient, les


sociétés ne se développent pas de façon unilinéaire, avec la notion de progrès. Critique le
déterminisme du courant évolutionniste pour avancer une nouvelle idée : les sociétés se
développent avec des mouvements parallèles : évolution parallèle et les sociétés peuvent
évoluer différemment.
+ Les sociétés échangent entre elles – traits culturels glissent d'une société sur une autre =>
base du courant => notion de DIFFUSION. Diffusion d'un trait d'une société à une autre.
Tylor : utilise le concept d'EMPRUNT : concept fondateur.

Emprunts au courant de l'école austro-allemande → seconde branche qui donne naissance au


diffusionisme. Fait aussi beaucoup de terrain, beaucoup d'observations. Surtout en Afrique
subsaharienne. Vont collecter beaucoup de données et surtout beaucoup d'objets. PB pratique :
que faire des objets ? On va les muséographier, donc on devra les indéxer, les référencer avec
les techniques de fabrication. Répertoriés, classés. Se rendent compte d'une chose auparavant
négligé : objets se ressemblent vraiment, dessin, techniques de fabrication, utilité. Se fait
indépendamment des lieux/cultures dans lesquels on a trouvé les objets
2 remarques sont émises : les évolutionnistes n'ont pas perçu ces caractères similaires entre
deux cultures. Ils ont minoré le fait qu'il pouvait y avoir des échanges entre les cultures.
+ accordavec Tylor sur la notion d'emprunt.
Ethnologues allemands vont commencer à créer ce courant. Il faudra lui donner des.
Caractéristiques :
1. toujours ajd dans notre démarche de terrain : il existe des aires géographiques et des aires
culturelles. Ex : région sub arctique : sous cercle polaire : c'est une aire géographique. Si je
travaille sur la culture (civilisation) du phoque, de l'arc... → aires culturelles : sociétés
partagent des mêmes pratiques et mêmes sens.
2. Lien dynamique entre aire géographique et aire culturelle : notion d'échange, de diffusion,
d'emprunt.
3. Comment peut-on connaître ces emprunts ? Uniquement par la connaissance de l'histoire
culturelle d'une société : on connait le déroulement : comment les emprunts ont été faits
dans l'histoire.
4. Il faut essayer de retracer cette histoire culturelle : deux remarques : Toutes les sociétés
ont une capacité d'emprunt, qu'elles soient anciennes ou modernes. Ex alimentaire (tomate,
pomme de terre : emprunté aux populations d'amérique latine) ou technique. « algèbre,
alchimie » : racine perse. Religieux, vestimentaires... + recherche de foyers de diffusion :
sociétés qui vont rayonner. Terme de « kulturkreise » = cercle/centre culturel : traits
culturels rayonnent à partir d'un foyer – notion connaît un grand succès

Auteurs :

Léo Froebenius (1873-1938) ethnologue allemand qui étudie l'afrique subsaharienne. Un des
premiers à montrer aux ethnologues l'importance de faire du terrain pour comprendre une
société + invente le terme de kulturkreise. Finalement, dit qu'il y a au monde peu de centres
culturels : la plupart des sociétés empruntent à quelques centres culturels. Ex terrain au Nigeria,
étude des Yoruba : était un grand royaume avec une cinquantaine de villes. Particulièrement
riche, a produit de l'or & a produit des statues remarquables, qui font partie de l'art sacré.
Remarque qu'il y a des traits similaires avec la statuaire grecque. Va penser que la Grèce est
sans doute un des centres culturels qui va le plus rayonner sur le reste du monde. Ajd : pensé
comme une thèse scientiste, fantaisiste, totalement anti-scientifique : archéologues le prouvent.
On est encore dans une absence de décentrement : le centre du monde reste l'Europe : tombe
dans les mêmes pièges que l'évolutionnisme : le déterminisme & le fait que l'école allemande
fonctionne sur des postulats (affirmation non démontrée).
– on pense qu'il y a une rareté du processus d'invention dans les sociétés qui sous tend que
l'homme est naturellement et culturellement peu créatif
– la diffusion des traits culturels ne dépend pas de la distance géographique

Fritz Graebner (1877 – 1934) travaille sur les processus de diffusion et contact : ne remet pas
en cause les théories de Froebenius : totalement d'accord pour dire que les sociétés sont peu
créatives, slmt qq unes sont capables de créer. MAIS remarque qq chose de nouveau : quand
une société adopte un trait culturel d'une autre société, elle a tendance a le transformer... Les
sociétés sont capables d'innovation.

=> Cette pensée se répand à la fin du XIXe siècle et connaît un écho en Angleterre. Les Anglais
ne vont pas y adhérer directement : c'est un courant en recherche, s'autocritique, reforme des
concepts.

On y trouve alors Edward B. Tylor : critique de l'évolutionnisme : va vers le diffusionnisme


(1832-1917). Va avoir pour terrain le continent américain, sur la « méso-amérique » : Mexique,
Guatemala, Honduras... Va être fasciné par la richesse des anciennes civilisations mexicaines et
leur héritage archéologique. Lui va s'intéresser (un des premiers) au domaine immatériel : celui
des connaissances : ex mythologie. Va essayer de comprendre des emprunts et échanges entre
les différentes sociétés méxicaines au niveau des connaissances. Ex empire aztec : viennent du
nord et non du méxique. Peut être des indiens de l'Ouest, chassés, arrivent sur ce haut plateau
mexicain. Pas les autochtones du méxique : arrivent en étrangers, déjà peuplés par les maya.
Avaient religions, manifestations culturales... Pour se faire accepter, ils ont accepté le panthéon
de divinités des peuples déjà existants pour les fusionner avec leur propre panthéon.
→ Il vaut mieux comprendre l'ensemble des sociétés pour en retracer la culture. C'est un des
premiers à la définir. « La culture inclut la connaissance, l'art, la morale, le droit, et toutes les
autres facultés ou pratiques acquises par l'homme en société »
Excès théoriques de Elliot Smith : tombe dans le racisme. Reprend la notion de kulturkreise :
vision réductionniste : il y a UNE culture, égyptienne, qui est la race maitresse, qui a tout
inventé. Ex pyramides en mésoamérique. Théorie de l'hyper diffusionisme : on commence à
classer les sociétés en inférieures et supérieures par rapport à leur influence plus ou moins
importante.

En France, le courant diffusioniste est très peu marqué : on a d'autres préoccupations, autres
courants. Quelqu'un de très intéréssé par le diffusionisme : G. Montandon : excellent
observateur ! Mais lui connaitra aussi des excès théoriques : tombe vers des considérations
idéologiques : mixe théorie et raciologie (sociétés inférieures et supérieures).

Le diffusionnisme trouve un écho sur le continent américain : on peut y observer beaucoup


d'autochtones. Clark Wissler (1870-1947) : systématise la théorie diffusionniste aux USA et
va inventer entre autres deux concepts :
- aire chronologique : le recouvrement entre l'espace et le temps : « un fait limité dans
le temps et l'espace doit être considéré comme récent » (qui n'a pas eu le temps de se répandre)
+ inverse : un fait très diffusé dans le temps et l'espace est considéré comme ancien. Très vite,
les diffusionnistes américains vont abandonner ce terme, qui n'est pas valide d'un point de vue
méthodologique. Wissler travaille sur des faits assez ponctuels. En termes d'observations, en a
très peu – reproche méthodologique : on ne peut pas tirer un fait général d'un fait singulier (trop
peu d'observations). Il est aussi beaucoup trop déterministe : ne voit pas qu'il peut exister des
phénomènes de « survivance » : on l'utilise mais on ne sait pas exactement quel en est la
symbolique/le sens. On évacue aussi les faits endémiques, qui sont propres à chaque société.
Ex langue basque. On peut avoir la naissance d'un nouveau fait à partir du 'mélange' de deux
éléments : ajd, le « métissage ». A ce moment, syncrétisme.
- Courant culturaliste : phénomène pattern (= profil culturel ou patron textile).
Définition par Wissler comme « la ou les formes caractéristique(s) prise(s) par les éléments
constitutifs d'une culture permettant de la reconnaître pour originale par rapport aux autres
sociétés »

Alfred L. Kroeber (1876-1960) : travail sur indiens du grand ouest et de la Californie. Connu
du public européen et du grand public européen en partie : très lié avec un indien, Ishi : Dernier
représentant de sa tribu (les Yahi) massacrée par les blancs. A écrit bcp d'ouvrages, dont un
monument, Anthropology. Sorti en 1948 : ouvrage de référence de tous les anthropologues
américains. Reprend la notion d'emprunt qu'avait donné Tylor et dit quelque chose qui va a
l'encontre de ce qu'on pensait à l'époque : emprunt n'est pas forcément le résultat d'un besoin,
d'une nécessité. Phénomènes de résistance : souvent des phénomènes majeurs : spirituelle, ex
contemporain : résistance spirituelle des japonais au don d'organe : le mort est digne car intègre,
entier.

Franz Boas (1858 – 1948). Au niveau international, n'est pas un diffusionniste à proprement
parler mais va travailler à leur suite en utilisant un certain nombre de leurs concepts. Donnera
les fondements de l'anthropologie contemporaine sur laquelle nous sommes aujourd'hui.
Origine allemande. Formé aux mathématiques, à la physique et à la géographie. Va avoir une
mission en 1887, sur la Terre de Baffin. Il y étudie le climat et son influence sur les sociétés qui
vivent en terre de Baffin : ce sont les Inuit (appelés les Eskimo à son époque). Aujourd'hui les
Inuit, réclamé par ces populations (inuit veut dire « nous les hommes »). Le climat modifie
l'organisation des sociétés. Mais c'est vraiment les sociétés qui l'intéressent : fait de
l'anthropologie. Considère que ce qui est intéressant est l'étude de leur production historique.
Les sociétés produisent leur propre histoire, il faut les étudier.
« Chaque société représente d'une part un développement historique original qui s'est effectué
en fonction d'un milieu social et géographique et d'autre part en fonction de la manière dont la
société a utilisé le matériel culturel qui lui est venu soit de l'extérieur (emprunt), soit de sa
propre faculté de création ».
Affirme aussi que le terrain est fondamental pour un ethnologue :
Boas voudra désenclaver l'université. Veut casser l'idée que l'anthropologue reste derrière son
bureau. Concept de « field work » : travail de terrain. Il amène ses élèves sur le terrain. Il faut
une observation longue et il faut s'acclimateraux sociétés qui nous accueillent : essayer de parler
la langue, comprendre les pratiques, la gestuelle.. L'analyse des sociétés permet de construire
des théories : première fois qu'on parle de la méthode inductive en anthropologie
Terrain = matière première + observation → analyse → théories (mises en veilles sur d'autres
terrains). PAS déductif : il faut éprouver la validité des théories sur le terrain.

=> Boas amène beaucoup de réflexions théoriques : critique définitive de l'évolutionnisme. Il


n'existe pas de loi générale de développement des sociétés & il n'existe pas de modèle de
développement, seulement des processus singuliers. Chaque culture est un tout : se traduit par
la mythologie, langue, pratiques, rites – chaque culture est singulière, particulière. « Il y a des
forces internes dans l'action dans les sociétés qui sont amenées à remodeler les pattern
culturels »
Réinterprétation. Fait que Boas, contrairement au courant évolutionniste, va intégrer le
relativisme culturel. Adopte le terme culture, considéré comme le père de l'anthropologie
culturelle. Lui est le fondateur de la démarche ethnologique avec la méthode inductive, qui ne
peut se passer du terrain!

Conclusion :
Ce courant est avant tout une critique fondamentale de l'évolutionnisme. On comprend que les
sociétés ne suivent pas la même ligne d'évolution. Toutes les sociétés partagent la notion
d'emprunt, emprunt culturel. Ethnologues vont rechercher les modalités de diffusion de ces
emprunts. Ce sont les prémices, origines du terme d'acculturation. Mais ce courant a été l'objet
d'excès théoriques, de postulats idéologiques qui ont contribué à le discréditer.
C'est principalement grâce à, avec, et par Franz Boas qu'on va définitivement rendre caduc
l'idée des modèles comparatifs de société. Il ne peut donc pas y avoir de société supérieure ou
inférieure.
Ruth Benedict, élève de Franz Boas – elle traduit le fait qu'avant Boas l'ethnologie n'existait
pas vrmt : « Lorsqu'il fit son entrée en anthropologie, celle-ci était un agrégat de conjectures
hasardeuses, un joyeux terrain de chasse pour l'amateur romanesque des choses primitives;
Quand il en sortit, c'était une discipline ».

LE FONCTIONNALISME; BRONISLAW MALINOWSKI

Nait à la veille de WW1, années 20 et après.


Critique l'évolutionnisme et la construction des sociétés d'un point de vu évolutionniste.
• Évolutionnisme reconstruit l'histoire des sociétés
• Critique de la recherche historique des foyers de diffusion.
=> critique de l'histoire : car c'est un des premiers courants qui ne va pas du tout s'attacher à
l'histoire. Pour comprendre une société, il faut le faire de l'intérieur.
Cette école de pensée va avoir deux concepts, notions fondamentaux :
→ La fonction
→ La relation
Penseurs partent d'une association d'idées, d'une analogie, avec un organisme vivant,
biologique. Dans toute organisme biologique, il y a des fonctions. Elles ont des correspondances
les unes avec les autres & ces correspondances sont des relations. Par analogie la société
fonctionne de la même manière : toute société a des fonctions qui entrent en relation les unes
avec les autres – relation => forme un tout signifiant : pour le connaître il faut connaître les
fonctions et les relations

Y appartiennent des ethnologues européens. Il y a une école anglaise, très forte, encore
importante aujourd'hui.
– Bronislaw Malinowski
– (Radcliffe Brown)

Malinowski est le père fondateur du fonctionnalisme. Polonais, nait en 1884. Mort en 1942
aux Etats Unis. Nait dans une famille assez intellectuelle. Aime beaucoup l'observation,
l'analyse : fait de la physique, de les mathématiques, obtient un doctorat de maths. Quitte la
Pologne pour aller dans d'autres pays européens. Prend la nationalité austro-allemande. Va en
Angleterre en 1910. A Londres à l’ occasion de lire un ouvrage : le fait changer de route pro. Se
dirige vers l'anthropologie. Ecrit par Sir James Frazer : The Golden Bough (Le Rameau d'Or)
Maître à penser mais que Malinowski va par ailleurs assez violemment critiquer.
Frazer est un ethnologue dandy : il est aisé financièrement, ouvert d'esprit, a beaucoup d'amis
& fasciné par l'Orient. L'Orient c'est surtout l'Egypte : se passionne pour la notion d'exotisme
oriental avec l'archéologie. Cherchera l'exotisme au delà du continent européen : s'intéresse à
l'Océanie (Polynésie, Micronésie, Mélanésie), très peu d'ethnologues avant lui le feront. –
Frazer s'intéresse à la Mélanésie.
Malinowski va aussi s'y intéresser. Fait qq voyages & fait sa thèse de doctorat sur la famille
aborigène australienne. Pense que ce terrain est très précieux pour l'observation
anthropologique. Décide d'aller dans un petit archipel, Trobriand, en 1914. Par intérêt &
contrainte : veut poursuivre l'étude de Frazer en allant bien sur plus loin + contrainte : Début
ww1, on est du côté des alliés en Australie : Malinowski va être suspecté d'espionnage (origines
polonaises). On lui propose soit la prison soit l'exil : il choisit l'exil dans l'archipel Trobriand.
Y va par bâteau, tous seront réquisitionnés & ne pourra plus revenir en Australie. Y reste

pendant plus d'un an. Essentiel pour ces travaux → il faut rester longtemps sur le terrain : on
arrive a connaître la société de l'intérieur.

Petit atoll coralien où l'on trouve une population mélanésienne


Trobriandais : population sédentaire, vit dans villages. Pécheurs, agriculteurs & surtout
horticulteurs (souvent dans cette région du monde). Société assez pacifique et matrilinéaire :
transmission & filiation par les femmes. Deux institutions marquent Malinowski : arrivera a
comprendre notion de fonction de l'Urigubu, le don d'igname, ou la Kula

Malinowski amène un certain nombre de réflexions :


- Il faut toujours apprendre la langue de la société qui accueille. Passe par une langue
« véhiculaire » : qu'on parle dans bcp d'îles & archipels : pidgin : mélange de langues. Mots
malais, philipins, anglais... Langue d'échange (marchandises) entre commerçants &
navigateurs : relie ces archipels qui ont des dialectes régionaux mais ne permet pas de
conceptualiser. → durée est essentielle pour le travail de l'anthropologue.
- Critique de Frazer : sa méthode « encyclopédique » est populaire au XIXe mais
abandonnée au XXe : faire le maximum de compilations sur un objet d'étude ou sur un élément,
sur une aire géographique extensible. Il travaillait sur la mythologie : celle du roi prêtre.
Statuaire particulière. Mutilations de statues pas forcément le hasard. Doit parcourir le plus
d'îles possibles pour trouver le maximum de statuaires : analyse des correspondances et
différences.
MAIS ne va rencontrer que l'élite des groupes. Ne restera pas sur le terrain.
Pourquoi : « Moi ? Rester sur le terrain ? Dieu m'en préserve. »
Malinowski va critiquer deux traits :
1. On ne peut pas comprendre le sens d'un élément si on ne s'attache qu'au détail.
2. En pratiquant cette géographie extensive, cette méthode encyclopédique : on est
incapable de comprendre le contexte de l'objet d'étude : fonction qu'il a dans une société
&relations qu'il a avec les autres fonctions.
Va permettre à Malinowski de commencer à construire le courant fonctionnaliste & points
importants pour construire cette démarche contemporaine en anthropologie :
- il faut rompre avec l'idée de collection : il faut collecter avec slmt les éléments
pertinents. Hérité des cabinets de curiosité du XVIe jusqu'à la fin du XVIIIe. Rompre avec
« l'ethnologie d'antiquaire ».
- Difficultés de Malinowski face au terrain : lourd à supporter : voir Journal d'un
ethnographe. Ethnologue doit aussi rompre avec l'idée de l'exotisme : on ne doit pas s'attacher
à étudier dans les sociétés « le fait extraordinaire » - ethnologie est l'étude du fait ordinaire –
fait comprendre la singularité d'une société, une société vue de l'intérieur.
→ Les Argonautes du Pacifique Occidental, 1922 : critique Boas & Frazer.
Récuse la démarche de Boas : « dans un seul objet, qui peut être d'ordre matériel ou immatériel,
même si cet objet est d'apparence simple, toute la société s'y profile »

L'objet simple peut montrer une série de fonctions dans la société trobriandaise
« tout le système social se tient » => développe une vision organiciste de la société ou chaque
élément a une fonction comparable à un organe du corps, où chaque fonction répond à un
besoin, et où chaque élément culturel n'a de raison d'être que par rapport aux autres éléments :
les relations et interrelations. Cherche cela dans tout ce qu'il étudie

Kula : un échange inter tribal particulier qui a un sens profond : « un circuit d'échange inter
tribal au cours duquel circulent des objets cérémoniels sans valeur vénale et dépourvus
d'utilité ».

Souvent des colliers de coquillages rouge & bracelets blancs. « expriment le lien qui uni chaque
île dans un ensemble culturel, partageant les mêmes relations et les mêmes symboliques ».
îles : plusieurs familles de tribus différentes. Colliers rouges circulent dans le sens des aiguilles
d'une montre. Bracelets ou ensemble de bracelets prennent le cheminement inverse : sens
inverse des aiguilles d'une montre. Ces trophées ne peuvent circuler que dans des pirogues &
seuls les hommes peuvent s'échanger ces biens. (=>règles précises)
Matrilinéaire : femmes ont pouvoir domestique, économique. masculin : religieux et politique
Patrilinéaire : pouvoir religieux, économique, politique
Temps qu'il fallait pour que chaque île voit circuler sur elle ces biens : 1-10 ans. Très long. Ce
temps est codifié. Réseau d'informations nécessairement important.
Sens : n'est en rien une richesse. Très peu de valeur esthétique. Existe toujours. Communautés
démographiquement restreintes : aucun groupe ne peut prétendre être plus important qu'un
autre : on déséquilibrerait l'ensemble de la culture ou société. On essaye toujours de tendre vers
l'équilibre et la régularité.
Sens :
1. sentiment d'appartenance : on doit développer cela qui fait qu'on se reconnaît comme
frère de l'autre. Principe d'agrégation : tout le monde est agrégé : on appartient à une même
communauté parce qu'on partage les mêmes valeurs : des systèmes d'entre aide peuvent se
développer puisqu'on reconnaît l'autre comme ID à soi. On peut être exclu : quand on partage
les mêmes valeurs, ce sont surtout des valeurs idéologiques, fondées sur le mythe, culte &
respect des ancêtres. Chef de tribu qui aurait par hazard manqué de respect aux mythes,
divinités : exclu de ce grand groupe.
Dans ces toutes petites société : la survie du groupe ne tient que dans cette unité, cet équilibre.
Quelqu'un conteste les valeurs : met en danger le groupe. Exclusion du groupe : mort sociale.
2. But de la Kula : nouer des alliances, puisqu'on appartient au même groupe. Vraiment
présent : nouer alliances matrimoniales, pour la guerre, économiques, religieuses.
3. Malinowski découvre aussi le système de réciprocité : il vise à dire que si une île donne
un collier à une autre île, il va attendre en temps différé un autre bracelet. De même pour les
colliers. On va les garder près de soi jusqu'au moment où le groupe sait que c'est le moment
d'échanger.

=> Comment peut-on expliquer cette réciprocité ? Pour Malinowski, tout objet échangé appelle
en retour une contrepartie.
Finalement, il existe des kula presque partout, dans toutes les petites sociétés : Mauss appel ce
système d'échange le système du don et du contre-don.

Objectifs pour le nouvel anthropologue :


1. ne pas conjecturer sur le passé des sociétés sans écriture : Malinowski déteste les
reconstitutions historiques. Il ne s'intéresse pas au POURQUOI des sociétés. Il s'intéresse au
comment, comment fonctionnent-elles?
2. Exige un temps certain pour étudier les sociétés : minimum un an. Il faut aussi
obligatoirement apprendre la langue sinon c'est impossible de comprendre ces sociétés.
Pour lui l'informateur va vouloir faire plaisir à l'ethnologue + sera géné pour expliquer une
pratique discrète. + il ne faut jamais rétribuer l'informateur/l'information : il n'a jamais payé
une information mais il a participé à un échange de données : est rentré dans un système de
réciprocité. Avait bcp de médicaments d'opiacés : obtenu grace à l'échange de barres de sel :
accepte système d'échanges : pas trop différent d'un trobriand. Obtient donc des informations
de bien meilleure qualité.
3. => Pratique de l'observation participante. On doit participer aux activités qu'on étudie,
se plonger dans la réalité de l'autre.

=> Une fonction dans une société ne peut exister que parce qu'elle répond à un besoin.
Catégories :
1. besoins élémentaires, primaires : survie de la société. Manger, se protéger, se reproduire.
Quand ceux-ci sont satisfaits, la société peut accéder à un autre niveau de besoin qui assure la
cohésion du groupe :
2. transmission de connaissances, enseignement de codes, règles, lois.
3. Spiritualité : domaine de l'art, du sacré, de la religion : toute société a besoin de
transcendance ou de sublimation.
→ développé dans Les Jardins de Corail, 1930.
Suite à cette étude du fait ordinaire, à l'observation participante : forme la méthode propre à
l'anthropologie : la méthode inductive → le terrain est vraiment la matière première : on va
mettre en veille notre connaissance historique. On tire nos connaissances de cette matière
première → analyse → connaissances théoriques.

Conclusion critique :
Chaque auteur va avoir un éclairage particulier : le concept clé donne le titre du courant.
Ici, c'est « fonction » : provient du XVIIIe, de la physique. Réutilisé en médecine, biologie,
physiologie (Claude Bernard). Repris en anthropologie suite à cette analogie entre fonctions
organiques et fonctions sociales.

« Les anthropologues sont également redevables du courant fonctionnaliste et en particulier à


Malinowski de la règle qui dit que les éléments d'une culture, qu'ils soient objets ou institutions,
ne peuvent être étudiés isolement. Ils ne peuvent être compris eux-mêmes qu'en se référant à la
totalité, c'est à dire le contexte. Comprendre une fonction et son rapport avec les autres fonctions
permet de comprendre une société de l'intérieur. Nous lui sommes également redevables de la
notion d'observation participante et de méthodes inductives » (vision moins ethnocentriste) « et
nous lui sommes également redevables d'avoir compris que l'homme crée la société et qu'en
retour la société fait de l'individu un être social »

Critiques plus négatives


1. Malinowski a tendance à généraliser son terrain à l'ensemble des terrains ethnologiques et
nous savons qu'un fait singulier n'est pas un fait général
2. Rejet de la dimension historique
3. Va sous estimer l'importance des contacts culturels : lui parle toujours d'échanges intra
sociétés et non d'échanges inter société
4. Vision déterministe : toutes les sociétés ont des fonctions qui répondent à des fonctions : mais
la notion d'imprévu n'existe pas chez Malinowski (critique de Mauss)

Clifford Geertz « Malinowski n'a pas fondé l'anthropologie contemporaine comme beaucoup le
pensent, (…) néanmoins il en est l'un des contributeurs les plus remarquables

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