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Emaho !
Sans dévier de l’état du dharmakāya complètement pur,
Vous tranchez l’illusion à sa racine et réalisez l’Éveil primordial :
Les pratiquants, hommes et femmes, qui souhaitent réaliser la vue authentique sans
erreur devraient permettre à leur esprit de reposer dans la clarté vive, dans un état
d’esprit inaltéré et vide. Lorsque l’esprit est tranquille, déposez-vous dans cette
tranquillité, sans essayer de l’altérer en aucune manière. Lorsqu’il ne pense pas,
déposez-vous directement dans cette absence de pensée, sans essayer de l’altérer. En
bref, n’altérez pas l’esprit, mais déposez-vous directement à l’intérieur, quoi qu’il
arrive.
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N’essayez pas d’ajuster, d’améliorer, de bloquer ou de cultiver quoi que ce soit.
Permettez à tout ce qui arrive de se déployer et déposez-vous directement en cela.
Ne repliez pas l’esprit sur lui-même. Et ne cherchez pas non plus à focaliser votre
méditation sur quelque chose d’extérieur. Déposez-vous simplement, sans altération,
dans l’esprit-même qui cherche et pense.
Vous ne trouverez pas l’esprit en le cherchant. L’esprit a toujours été vide. Nul besoin
de le chercher. C’est celui-là même qui cherche. Déposez-vous simplement, sans
distraction, directement en celui qui cherche.
Peu importe les pensées qui s’élèvent – bonnes ou mauvaises, positives ou négatives,
heureuses ou tristes – ne vous y complaisez pas, ne les rejetez pas non plus, mais
déposez-vous, sans rien altérer, dans l’esprit-même qui pense.
Lorsque l’esprit n’a que des pensées subtiles, à peine perceptibles, concentrez
pleinement votre conscience et déposez-vous dans la clarté vive. Demeurez dans cette
lucidité dynamique.
Lorsque l’esprit sombre, est morne ou somnolent, alors, sans vous attacher à la
moindre expérience de félicité ou de clarté, déposez-vous naturellement sans essayer
de corriger ou d’ajuster quoi que ce soit, et demeurez simplement.
Lorsque l’esprit se sent heureux ou triste, déposez-vous sans distraction dans celui-là
même qui ressent le bonheur ou la tristesse, et demeurez.
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Lorsque vous vous sentez surexcités ou joyeux et satisfait, ou que vous êtes honorés
et respectés, évitez d’être en proie au « démon de l’excitation » et d’être pris d’une
joie délirante. Inclinez la tête, calmez vos sentiments, et demeurez le corps et l’esprit
complètement à l’aise.
Chaque fois que vous êtes malades ou que vous souffrez, ou que vous êtes victimes
d’un vol ou d’un larcin, que vous êtes insultés, calomniés ou agressés physiquement,
ou à chaque fois que vous traversez des épreuves, que vous souffrez de la faim, ne
vous laissez pas abattre, ne soyez pas d’humeur chagrine, ne pâlissez pas et ne fondez
pas en larmes. Restez enjoués, inspirés et de bonne humeur.
Votre esprit a toujours été avec vous, depuis des temps immémoriaux. Ce n’est pas
une chose que vous pouvez perdre puis retrouver. Ce n’est pas une chose que l’on a,
puis que l’on n’a plus. L’esprit que vous avez toujours eu, est ce qui pense quand
vous pensez, et qui demeure sans pensées quand vous ne pensez pas. Peu importe ce
que l’esprit puisse penser, il suffit simplement de vous détendre directement dans ce
qui s’élève, quoi que ce soit, sans la moindre altération ou le moindre ajustement,
puis de maintenir cette expérience sans vous distraire.
Cela rend tout très simple et facile. Avoir l’impression que pratiquer le dharma est
difficile est un signe que vous avez accumulé bien des méfaits et de sérieux
obscurcissements.
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est !
Certains «grands méditants » ne regardent pas leur esprit qui pense mais regardent
constamment les objets de leurs pensées : leurs possessions, ou la terre et les pierres,
et ainsi de suite. Ce n’est pas la vue authentique ; c’est une vue dualiste. Vous devez
vous déposer dans celui-là même qui pense, et le regarder.
Certains « grands méditants » ne laissent pas leur esprit reposer dans ce qui s’élève
aussi longtemps que l’esprit peut y demeurer. Ils sont avides de bonnes méditations
et pressent et contraignent donc leur esprit, avec un regard fixe et intense. Ce n’est
pas la vue authentique ; vous altérez l’esprit. Sans altérer ou manipuler l’esprit en
aucune manière, laissez-le reposer par lui-même et se déposer dans l’expérience de ce
qui surgit, quoi que ce soit.
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Certains « grands méditants » ne permettent pas à leurs pensées de s’élever, mais
essaient de les écarter et de s’emparer de leur esprit. Ce n’est pas la vue authentique ;
vous réprimez les états mentaux. Au lieu de cela, permettez à votre esprit de reposer
dans la tranquillité chaque fois qu’il est calme, et dans le mouvement quand un
mouvement surgit. Certains « grands méditants » rendent leur esprit vide, presque
inconscient. Ce n’est pas la vue authentique ; vous planez. Reposez plutôt dans une
expérience de vacuité, avec une clarté vive.
Certains « grands méditants » pensent que l’esprit est vide, et méditent donc là-
dessus. Ce n’est pas la vue authentique ; il s’agit d’une méditation fabriquée sur la
vacuité. Reposez plutôt dans celui-là même qui pense « Ceci est vacuité ! ».
Certains « grands méditants » regardent chaque fois qu’ils se sentent à l’aise, ouverts
ou clairement focalisés, mais ne regardent plus chaque fois qu’ils se sentent agités,
mal à l’aise, vides ou manquent de concentration. Ce n’est pas la vue authentique ;
c’est de l’acceptation et du rejet. Au lieu d’accepter et de rejeter quoi que ce soit,
déposez-vous simplement dans ce qui s’élève, quoi que ce soit.
Certains « grands méditants » regardent lorsqu’ils ont des pensées positives, mais ne
regardent plus chaque fois qu’ils ont des pensées négatives ou impures. Ce n’est pas
la vue authentique ; vous favorisez le bien et rejetez le mal. Au lieu de favoriser le
bien et de rejeter le mal, demeurez sans distraction directement dans ce qui s’élève,
bon ou mauvais.
Certains « grands méditants » sont ravis chaque fois que l’esprit est à l’aise, mais
ressentent de la frustration quand des pensées agitées s’élèvent. Ce n’est pas la vue
authentique ; le défaut vient de ne pas savoir comment maintenir l’essence de tout ce
qui s’élève. Quand des pensées agitées s’élèvent, l'esprit détendu, reposez-vous
directement dans celui qui ressent l’agitation.
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Certains « grands méditants » sont incapables de méditer lorsqu'ils sont choyés,
prospères, puissants ou respectés, parce qu'ils sont alors trop satisfaits ou trop
excités. Ils sont également incapables de méditer lorsqu'ils souffrent, sont confrontés
à des difficultés, à la maladie, à la maltraitance ou à des désaccords. Leur visage
devient aussi sombre qu'un nuage d'orage, ils profèrent des obscénités et versent
même une larme ou deux. En agissant ainsi, ils ne deviendront jamais d’excellents
pratiquants du Dharma capables de réaliser la saveur égale de la joie et de la peine. Ils
resteront des individus sans Dharma, entêtés, ordinaires, gouvernés par les passions
et les peines et les huit préoccupations mondaines. Vous devez donc reconnaître le
goût égal de la joie et de la peine et les amener tous les deux sur le chemin.
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Instruction sur l'auto-libération de l'illusion, semblable à transformer le
poison en remède
Dans la vacuité, il n'y a pas d'avarice.
C’est par l’illusion que se manifeste l’avarice.
Sans illusion, regardez celui qui se sent avare.
Regardez, et maintenez cela sans distraction.
L’avarice disparaît et devient vacuité.
Demeurez sans distraction dans cette expérience de vacuité.
Ceci est la purification totale de l'avarice.
Il n'y a pas de générosité supérieure à celle-ci ;
Pour le yogi qui la réalise : émaho, c'est extraordinaire !
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Sans illusion, regardez celui qui se sent distrait.
Regardez, et maintenez cela sans distraction.
La distraction disparaît et devient vacuité.
Demeurez sans distraction dans cette expérience de vacuité.
Ceci est la purification totale de la distraction.
Il n'y a pas de concentration supérieure à celle-ci ;
Pour le yogi qui la réalise : émaho, c'est extraordinaire !
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Regardez et maintenez cela sans distraction.
Les émotions destructrices ne sont plus : elles se transforment en vacuité.
Déposez-vous dans cet état vide et clair, sans distraction :
Ceci est la purification totale des émotions destructrices.
On l'appelle le dharmakāya de la non-émergence.
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Regardez et maintenez cela sans distraction.
La confusion n'est plus : elle se transforme en vacuité.
Déposez-vous dans cet état vide et clair, sans distraction :
Ceci est la purification totale de la confusion.
On l'appelle la sagesse du dharmadhātu.
Parfois, l'esprit est parfaitement clair et à l'aise. Lorsque cela se produit, déposez
simplement l'esprit dans la clarté vive.
Parfois, l'esprit paraît brumeux ou planant, sans aucune clarté. Lorsque cela se
produit, faites ressortir la clarté de votre conscience et déposez-vous dans la vigilance
nue.
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Parfois, l'esprit est complètement déprimé. Lorsque cela se produit, reposez-vous
dans un état inspiré, joyeux et à l’aise.
Parfois, l'esprit ne peut rester au repos que quelques instants, car des pensées subtiles
sous-jacentes vont et viennent. Lorsque cela se produit, renforcez l'esprit à sa surface
et laissez-le se détendre de l'intérieur.
Parfois, l'esprit est occupé à penser à tout ce qui est imaginable, sautant d'une pensée
à l'autre et incapable de rester immobile ne serait-ce qu’un instant. Lorsque cela se
produit, détendez à la fois le corps et l'esprit et, sans vous laisser distraire, permettez
à l'esprit d’observer tous les domaines et toutes les directions.
Parfois, vous n'avez aucun désir de méditer. Vous vous sentez découragé et ne
pouvez pas continuer. Lorsque cela se produit, priez sincèrement le lama et déposez-
vous dans des ressentis clairs et vifs de bonheur et de bien-être.
Parfois, l'esprit est si heureux et clair que vous avez envie de vous lever et de danser
de joie. Lorsque cela se produit, ne laissez pas la saisie entrer dans votre esprit, mais
demeurez totalement détendu.
Ces manières dont l'esprit se révèle ne se produisent que chez les débutants qui n'ont pas
encore identifié l'état d'esprit naturel. Ils ne se manifestent pas chez ceux qui l'ont déjà
identifié, et donc maintenant je vais expliquer brièvement ce qu'il en est pour eux :
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Votre esprit est alors inséparable du bouddha,
Les kāya et les mondes purs se manifestent inséparablement.
Il n'y a pas d'espoir ni de peur, pas de saisie du soi, de joie ou de chagrin.
Il n'y a aucune acceptation ou rejet et aucune forme de doute.
Il en est ainsi lorsque la nature de l'esprit est identifiée.
Que vous marchiez, soyez assis, dormiez, ou agissiez de n’importe quelle autre
manière,
Assurez-vous de le faire depuis un état inséparable de la vacuité,
Et votre propre esprit sera inséparable du Bouddha.
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Ayez le fruit de l’inséparabilité de votre propre esprit et de celui du Bouddha.
Maintenez votre engagement de samaya libre d'attachement et d'hypocrisie.
Et défaites-vous des vains désirs envers toute chose.
Pratiquez ainsi, rien n’est plus fondamental, vous tous, bienheureux pratiquants du
dharma !
Si vous désirez une excellente armure pour vous aider dans votre méditation, pratiquez
comme suit :
Évitez d’agir comme un seigneur entouré d’une foule de domestiques et d’un large
cercle de partisans.
Évitez d’amasser de vastes richesses et des biens.
Évitez de garder trop de chevaux et de bétail.
Évitez d’être à la tête d'une large famille.
Évitez de vous montrer hostiles envers vos ennemis et attachés à vos amis.
Évitez le dur labeur, l’agriculture et l’artisanat.
Évitez de rechercher les plaisirs oisifs, le profit et la célébrité.
Et évitez de comploter pour vous élever dans la société ou accroître votre réputation.
À moins d’éviter toutes ces choses, votre esprit sera emporté par les distractions.
Il y a encore un point crucial, des conseils supplémentaires pour les grands méditants,
que je vais maintenant révéler :
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Qui manquent de compréhension et pratiquent une méditation idiote,
Qui pourchassent avec diligence ce qui est futile.
Maîtres doués pour enseigner, étudiants experts en méditation :
Ne vous glorifiez pas : demandez conseil aux érudits.
N’improvisez pas : acquérez la certitude au sein de l’esprit lui-même.
Ne vous leurrez pas : éliminez vos doutes.
| Traduit du tibétain en anglais par Adam Pearcey, 2018. Le traducteur s’est référé à des versions
anglaises antérieures de Erik Péma Kunsang, James Low et Khandro Rinpoché, mais a suivi une édition
un peu différente du texte tibétain. Traduit de l’anglais en français par l’équipe de traductrices de Rigpa,
2018.
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