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Chemin de Vérité, chemin de Vie.

La fleur n’est jamais identique à la fleur, un printemps à un autre printemps, un M:. à


un autre M:. , et pourtant chacun entend ce que signifient les mots fleurs, printemps ou
M:., car chacun sait qu’ils impliquent un rôle et la force de ce rôle. C’est là, l’Arcane
par laquelle plusieurs font le Un, comme ces deux colonnes soutenant notre Temple,
comme ces deux colonnes soutenant la voûte christique : Jean-Baptiste et Jean
l’Evangéliste. C’est pourquoi en ce jour de célébration du solstice d’Eté, j’ai choisi de
vous parler de ces deux prophètes dans le Tracé d’Architecture intitulé :

Chemin de Vérité, chemin de Vie.


Le Baptiste initiateur était un prophète – le dernier d’Israël – qui vivait comme un
sauvage, couvert de poils de chameau et nourri de sauterelles, sur les rives désertiques
du Jourdain, en clamant qu’un Royaume de Justice était proche. Comme tout le peuple
était dans l’attente et que tous se demandaient dans leur cœur si Jean n’était pas celui
qu’ils attendaient, Jean leur dit en réponse : « Je vous baptise avec de l’eau ; mais il en
vient un plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de délier la courroie de ses
chaussures, c’est Lui qui baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. Il a en main la pelle à
vanner pour nettoyer son aire et recueillir le blé de son grenier, et Il brûlera la paille
au feu qui ne s’éteint pas ». (Luc III-I-18). Vous reconnaissez cette rude et exacte
justice de l’Equ:. qui appelle l’abattement de tout ce qui n’est pas rigoureusement
droit, sans viol de la pesanteur des lois nécessaires à la réalité, mais aussi sans
réticence ni impartialité pour Soi ou pour Autrui. Vous reconnaissez aussi cette
purification du Soi par cette antique et traditionnelle ordalie des Eléments Eau, Air et
Feu qui emporte le grossier enrobage de l’être pour le découvrir à la Lumiere. De sa
prison de Machérus, d’où seule sa tête sur un plateau sortit un jour pour prix
qu’Hérodote Antipas donnerait à l’appel lascif de sa belle-fille Salomé, il fit demander
à Jésus : « Etes-vous celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »
(Matt. VII-19). C’est assez dire combien ce Maître est demeuré soi-même, ne croyant
de soi que son esprit de justice. En fait, Jean a montré qu’il avait la maîtrise de l’avenir
en ne présentant que l’Essence éternelle des évènements pourrissants dont il avait été
le témoin et en partie l’acteur. Dès le début de son récit, il renoue les faits avec la
tradition égyptienne et grecque du Logos, du Verbe créateur : « Au commencement
était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu ; et le Verbe était Dieu ». (Jean. I-I).
Dès le début il annonce non pas des récits que la critique historique pourra grignoter à
son aise – car quoi de moins certain que l’histoire que chacun apprête à son goût –
mais la pérennité de la condition créatrice, le pouvoir attaché à l’Esprit et qui en donne
la clef, méritant pour son œuvre, la juste appellation que Clément d'Alexandrie devait
lui donner : l’Evangile spirituel. Ce qui nous intéresse est ici, le problème spirituel de
l’être posé ainsi que le Maçon doit se le poser. Le Baptiste annonce une justice
inexorable et presse chacun à la purification en vue d’un jugement imminent ; il fait
ressortir que la Foi au Verbe assure le salut. En vérité, Justice n’a de sens que pour
Dieu « qui fait lever son soleil sur les bons et les méchants, et fait pleuvoir sur les
justes et les injustes ». la connaissance dérobée par l’homme à Dieu en mangeant la
pomme de l’arbre de la Science du Bien et du Mal est insuffisante pour qu’il ait un
choix libre et responsable ; parce qu’elle vient de l’homme ; ce n’est qu’en faisant
mourir Dieu lui-même par son Fils que le Christ veut révéler la nature du Mal et c’est
là une nouvelle Initiation puissante, puisque venant de Dieu. Réfléchissons. Que
pouvait Judas ? Jésus n’avait-il pas dit : « … je sais quels ils sont, ceux que j’ai
choisis ; mais il faut que l’Ecriture s’accomplisse : celui qui mange mon pain a levé
contre moi son talon » ? (Jean. XIII-18-19). N’est-ce pas en perçant le flanc du crucifié
que le soldat eut la Lumière ? Et sur le chemin de Damas que Saint-Paul fut illuminé ?
Le voici donc le vrai sens des mots : « la Vérité vous rendra libres ». Et voilà sur quoi
se fonde l’espoir mystique de Saint-Jean l’évangéliste, « le chemin de la Vérité et de la
Vie ». le péché est humain, mais le péché n’est que peu de chose, car croire en Jésus,
avoir Foi en ses promesses, c’est être sauvé ! C’est retrouver le Verbe créateur ! Créer
son être pour l’éternité. Que nous soyons confiants en l’Arcane de Saint-Jean ou
incrédules à sa promesse, le problème de notre être se pose pour la construction du
Vrai de l’homme. Du Juste, c’est par le Beau que nous entendons arriver au souverain
Bien. Les mystiques comme Saint-Jean l’évangéliste prétendent que la vue de la
Beauté développe chez l’homme le sens de la Beauté, n’est-ce point que déjà le germe
y a été déposé dans son cœur ? N’est-ce pas qu’il est fils de quelqu’un qui connaît la
Beauté ?

Ce qui s’entend du Beau, s’entend du Bien et voilà pourquoi les deux ne sont qu’une
face de la même pièce. Quand on parle de la beauté du Diable, on énonce un non-sens
à moins de sous-entendre par Diable un Dieu que d’autres ne veulent point reconnaître
comme tel. Le Beau et le Bien sont de même nature. Le Baptiste, dans son zèle pour la
Justice, implique un Bien moral qui est celui de la pure Vertu, c’est-à-dire de ce qu’on
appelle communément le Devoir. Sans doute le rude prophète tenait-il de cette
philosophie grecque, le Stoïcisme, que Zénon de Citium avait inauguré quatre siècles
plus tôt et pour laquelle un Feu artiste était le G:. A:. de l’U:..

Pour les stoïques, l’homme est un être moral ayant conscience d’une loi pure à laquelle
il est obligé d’obéir sans aucun égard pour les conséquences. Seul un principe moral
peut décider du sens de l’action, et nul autre motif que le dictat de la Conscience ne
peut être accepté. Or ici, il est évident que l’homme se fie à la Loi de la peine, du
Travail intérieur, la solution vertueuse impliquant presque toujours la répression de la
solution passionnelle. De là découle un seul plaisir : celui que donne l’approbation
morale et qui est Justice. Etre stoïque, c’est connaître la Loi de sa Conscience, être
libre c’est la suivre ; être juste c'est l’avoir suivi. Vous sentez, mes FF:. , combien la
pensée de Jean-Baptiste est près de la nôtre et pourquoi nous l’honorons à chaque
solstice le jour de sa nativité. Le Stoïcisme serait Vérité simple et pure si l’homme ne
sentait la pression d’un autre dictat moral : être heureux. Cette aspiration découle de la
Justice qui veut que l’homme soit récompensé d’avoir suivi sa Loi. Le Bien est donc
fait de ce double dont les facteurs s'opposent : Justice et Bonheur. Si vous vous
attachez au premier : vous êtes stoïciens, si vous suivez le second, vous êtes épicuriens.
C’est pourquoi chacune de ces deux conceptions placées au cœur de l’être n’en
remplissent que la moitié. Car il ne suffit pas de dire « sois vertueux et tu seras
heureux » ou bien « sois heureux et tu seras vertueux » pour que cela soit. C’est
pourquoi l’enseignement de Jésus comporta une Parousie. « Dans la maison de mon
Père, dit-il, il y a des demeures nombreuses, s’il en est ainsi, vous aurais-je dit, que je
vais vous préparer une place ? Et quand je m’en serai allé vous préparer une place, je
reviendrai vous prendre auprès de moi, afin que là où je serai vous soyez aussi ».
(Jean.XIV.24).

Malheureusement, voilà deux mille ans que cette Parousie a été promise en
récompense à la Vertu, ce qui incline d’aucuns à la considérer « comme l’opium du
peuple ». Ou le Temps n’est rien, et l’être n’existe pas dans ses actes sur Terre ; ou le
Temps est existence d’être terrestre, et sert à construire sa conscience d’être. Et de
ceci, Saint-Jean l'évangéliste en a eu la prescience en tirant l’Essence mystique
éternelle d’un récit de faits temporel : au Devoir, à la Foi, à la Règle impérieuse, il
substitue des aspirations et des extases qui sont déjà Parousie anticipée. Or, ce
mysticisme contient une vérité ontologique ; puisque l’homme a un Devoir et un
Bonheur à accomplir pourquoi n’aurait-il pas la Liberté de mettre toute sa passion à
accomplir son Devoir ? Pourquoi serait-ce mieux de jeûner pour donner à manger à
celui qui a faim, plutôt que de doubler son plaisir à partager son repas avec lui ? « Dieu
est amour », voilà la trouvaille de Jean. Il est dans la ligne pythagoricienne et se révèle
un Maître en fraternité. Voilà pourquoi le quatrième Evangile est honoré dans nos
Loges et que nous fêtons aussi la Saint-Jean au solstice d’Hiver. Maintenant, mes TT:.
chers FF:. ., c’est à nous seuls et en toute liberté de réfléchir à tous ces concepts et de
trouver notre souverain bien conformément à notre nature. Nous n’avons pour ce faire
qu’un critère : celui qui nous permettra de croître en plénitude sans nous souiller
d’aucune manière dans notre dignité d’homme et sans jamais manquer à la Justice.
C’est à nous qu’il appartient de montrer que nous avons trouvé notre « chemin de
Vie », en étant les colonnes de notre Fraternité.

Jean-Claude von L.

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