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"ADDICTION" AU SMARTPHONE: LES "DÉTOX DIGITALES" ONT-ELLES UN INTÉRÊT?
Le 06/02/2024 à 13:23
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Limiter le temps d'écran des enfants: une mesure vraiment réaliste?


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Des établissements proposent, contre rémunération, de vous "couper" de votre smartphone,
promettant une "diète numérique". Pour les spécialistes, leur intérêt est très discutable.

C'est un terme qui est désormais entré dans le langage courant, et qui est devenu un véritable
business pour certains. La "digital détox", autrement dit une cure sans smartphone, est
proposée à ceux qui se sentent incapables de décrocher de leur mobile, ou plus spécifiquement
des réseaux sociaux.

Des usages problématiques du numérique qui existent, et qui peuvent parfois se révéler
dramatiques, alimentées par la conception des réseaux sociaux, conçus pour maximiser le
temps passé par l'utilisateur.

"Addiction": un mot galvaudé


Mais le terme "d'addiction", souvent utilisé par les vendeurs de ces cures de "détox digitale", est
largement remis en question par les spécialistes.

"Aucun consensus scientifique n'existe concernant une 'addiction' au numérique. Ce n’est pas
répertorié dans le classement international des maladies de l’OMS, par exemple, contrairement
au trouble de l’utilisation des substances. On préfère évoquer un usage problématique
d’internet" précise Séverine Erhel, maîtresse de conférences en psychologie cognitive à
l'Université Rennes 2, auprès de Tech&Co.

Une utilisation galvaudée du terme "addiction" également pointée du doigt par Vanessa Lalo,
psychologue spécialisée dans les jeux vidéo et les pratiques numériques, auprès de Tech&Co,
début 2023.

Il est "toujours tendancieux de pathologiser des activités de loisirs" regrette de son côté Vincent
Bernard, médiateur numérique, auprès de Tech&Co.
Car selon les différentes publications scientifiques, l'existence d'une véritable problématique liée
à l'utilisation des écrans reste limitée. Elle concernerait entre 3,8 et 5,4% des Français, d'après
une étude publiée en janvier 2023, selon que l'on prenne en compte l'utilisation spécifique des
réseaux sociaux ou d'internet en général.
C'est quoi une addiction aux écrans? Avec Vanessa Lalo (psychologue)
C'est quoi une addiction aux écrans? Avec Vanessa Lalo (psychologue)
32:43
Un symptôme plutôt qu'une cause
Surtout, l'ensemble des spécialistes rappellent qu'une utilisation problématique de son
smartphone est à voir comme un symptôme et non une cause des problèmes.

"On fait croire aux gens que le problème, c'est le téléphone, le numérique, en surfant sur des
discours diabolisateurs qui cassent le thermomètre au lieu de soigner la fièvre: un rapport
problématique au travail, [...] un mal-être dans sa vie personnelle et/ou sociale qui s'exprime par
un repli dans l'univers numérique" explique Anne Cordier, professeure en Sciences de
l’information et de la communication à l'Université Lorraine. Mais les spécialistes mettent
également en garde contre le terme - également galvaudé - de "détox".

"On ne va désintoxiquer personne car personne n'est intoxiqué par son smartphone" résume
ainsi Séverine Erhel.
Là encore, la spécialiste conseille de s'intéresser aux causes sous-jacentes qui pourraient
conduire à une utilisation déraisonnable de son smartphone, plutôt qu'à l'appareil en lui-même.
Elle questionne par ailleurs la notion de "sevrage", qui passe par le fait de forcer le client à se
passer de son smartphone pendant quelques jours.

"Le fait d’interdire le smartphone à quelqu’un d'un coup peut aussi être délétère, pour certaines
personnes qui sont en difficulté avec le numérique. Parfois, le numérique est en fait une
béquille. Pour ces personnes en usages problématiques, il faut une prise en charge
psychologique et à long terme pour revenir à un usage raisonné" estime-t-elle.
D'autres mesures plus réalistes
Un constat partagé par Vincent Bernard, qui considère de telles méthodes comme appartenant
au passé, y compris dans le cadre de véritables addictions, par exemple à des composants
chimiques contenus dans des drogues.

De son côté, Anne Cordier pointe le caractère irréaliste de ces méthodes, évoquant d'autres
moyens de retrouver un usage raisonnable du numérique. Par exemple en allouant des plages
horaires dédiées à la consultation de mails, mais aussi de désactiver les notifications des
réseaux sociaux.

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