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COMMUNICATION 11/12

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Les facteurs déterminants de l’efficience des
institutions de microfinance en Afrique

ZINEELABIDINE Maroua
PHD en Sciences de Gestion à la FSJES-Agdal, Université Mohammed V de
Rabat
Maroua.zineelabidinee@gmail.com

HASSAINATE Mohammed
PES à la FSJES-Agdal, Université Mohammed V de Rabat
hassainate@gmail.com

RESUME
La présente recherche consiste à étudier l’efficience des IMFs, en se penchant sur l’analyse
des données de deux dimensions de l’efficience à savoir, la viabilité financière et la viabilité
sociale de 96 institutions de microfinance appartenant à 12 pays Africains sur une période de
11 ans, allant de 2006 à 2016. Pour se faire, ce travail adoptera une approche non
paramétrique, via la méthode (Data Envelopment Analysis) afin d’estimer les scores
d’efficiences prenant plusieurs formes (financière, sociale et globale). Ensuite, cette efficience
sera régressée sur un ensemble de variables explicatives prenant en considération les
spécificités des IMFs ainsi que leur environnement socio- économique. L’ensemble des
données de cette étude proviennent de la base de données « MIX Market ».

Mots clés : Microfinance, Efficience, Performance financière, Performance sociale, Data


Envelopment Analysis, Regression.

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1. Mesure des critères de performance des IMF :

1.1. Les objectifs stratégiques poursuivis par les IMF :

Selon Boyé et al. (2006), toute IMF suit trois grands objectifs stratégiques, à savoir : la
viabilité pour qu’elle soit capable à continuer durablement son activité, la portée ayant pour
objectif d’offrir des services financiers adaptés aux besoins des populations délaissées par le
système financier conventionnel, donc l’IMF doit être en mesure d’atteindre un grand nombre
de clients «l’étendue de la portée », notamment ceux qui sont les plus pauvres « le degré de la
portée ». Ainsi que, l’impact qui est considéré comme le pouvoir de satisfaire chaque client
en lui apportant un service qui correspond à ses attentes. Néanmoins, les objectifs de la portée
et de l’impact sont identifiés par Boyé et al. (2006) en un seul objectif qui est la performance
sociale et l’objectif de la viabilité financière qui est la performance financière. Les IMFs sont
généralement caractérisées par la poursuite de deux objectifs :

o En tant qu’institution financière, elles ont un objectif économique (la viabilité) ;


o En tant qu’institution de développement, elles ont un objectif social (la portée).

1.1.1. Viabilité financière :

La viabilité financière d’une institution de microfinance est définie comme étant la capacité
de couvrir toutes les charges supportées par les produits générés sans tenir compte des
différentes subventions dont bénéficient généralement les IMF. Selon Boyé et al. (2006), le
concept de la viabilité est composé de trois aspects :

o « La viabilité organisationnelle » qui consiste pour une IMF à maîtriser les opérations
sur le terrain et à avoir la capacité de structurer l’organisation en mettant en place les
compétences et les systèmes qui permettent de fonctionner d’une manière efficace.

o « La viabilité institutionnelle » celle-ci fait référence à la mise en place d’une


gouvernance qui permet à l’IMF, d’une part, de définir sa stratégie et de contrôler son
application et, d’autre part, de lui garantir une bonne insertion dans son
environnement.

Enfin, « la viabilité financière » qui veut dire la capacité d’une IMF d’atteindre son équilibre
financier et l’aptitude à financer sa croissance. La viabilité d’une IMF implique la capacité
d’assurer chacune des fonctions suivantes : la définition des objectifs spécifiques à l’IMF, la
prise en considération des décisions stratégiques et opérationnelles, la mise en œuvre des
actions en découlant, la génération des ressources financières nécessaires et le contrôle des

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objectifs s’ils sont atteints ou pas ainsi que leur redéfinition en cas de besoin. Ainsi, la figure
de Boyé et al. (2006) nous montre les connexions existantes entre ces différentes fonctions.
Par ailleurs, c’est l’aspect financier de la viabilité qui nous intéresse dans le cadre de notre
recherche et qui représente l’une des performances que cherche toute IMF. Ledgerwood
(1999) définit la viabilité financière d’une IMF comme étant la capacité de couvrir toutes les
charges supportées par les produits générés. L’auteure précise que pour être financièrement
viable, l’institution ne doit pas tenir compte des subventions reçues. Donc la viabilité
financière est la capacité de répondre aux besoins des clients sans avoir recours à l’aide
extérieure. Par ailleurs, la viabilité financière est représentée sous forme de deux dimensions :

o L’autosuffisance opérationnelle : la capacité de couvrir toutes les charges liées à


l’exploitation de l’activité en utilisant les revenus dégagés par cette activité.
o L’autosuffisance financière : Une IMF atteint son autosuffisance financière
lorsqu’elle arrive à couvrir toutes ses charges même après avoir tenu compte de
l’inflation et corrigé ses revenus pour tenir compte des différentes subventions reçues.

1.1.1.1. Portée des activités des IMF :

L’objectif des institutions de microfinance en tant qu’organisation de développement est de


fournir des services financiers aux populations marginalisées ou mal-desservies par les
systèmes financiers conventionnels (tels que les femmes, les pauvres, les populations
indigènes, les populations rurales, etc.) afin d’améliorer leurs conditions de vie. Une IMF
performante est celle qui est en mesure de mettre sur le marché des produits financiers de
qualité accessibles à un grand nombre de clients au sein de la clientèle ciblée, notamment les
clients les plus pauvres. Cet objectif est connu dans le secteur de la microfinance comme la
portée des IMF. Ainsi, la portée se définit comme l’offre des services financiers aux groupes
de population qui en ont besoin (Christen et al., 1995 ; Ledgerwood, 1999 ; Boyé et al. 2006 ;
Yaron et al., 1997 ; etc.).

En effet, la dualité d’objectifs des institutions de microfinance est expliquée par sa double
casquette à devenir simultanément une organisation de développement (améliorer la situation
des personnes en précarité) et une institution financière (offrir des services financiers). Selon
Crompton, (2007), la plupart des IMF poursuivent un double objectif de résultat : la viabilité
financière et la portée sociale qui sont considérées par Yaron et al. (1997) comme deux
critères principaux pour l’évaluation de la performance des IMF.

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 L’évaluation traditionnelle de l’efficacité des IMF :

Après avoir défini les notions de performance, d’efficacité et d’efficience puisqu’elles


constituent le point central de notre analyse. L’objectif de cette section est de présenter une
brève analyse des outils traditionnels de mesure de la performance des IMFs pour ensuite
passer en revue les différentes approches de la frontière à savoir : l’approche paramétrique et
l’approche non paramétrique.

 Les indicateurs de mesure de la portée :

La portée est caractérisée par son hybridité à évaluer à la fois la mesure dans laquelle une
institution a réussi à atteindre sa clientèle cible et le degré dans lequel elle répond aux besoins
de cette clientèle en leur offrant des services financiers adéquats. Selon Yaron et al. (1997),
les indicateurs de la portée sont à la fois qualitatifs « le degré de la portée » et quantitatifs
« l’étendue de la portée ». Cependant, il est très important de noter que l’étendue de la portée
est souvent évaluée par le nombre total des clients servis par une IMF avec ses différents
instruments et que le degré de l’étendue est mesurée par le type de clients servis par une IMF
et leur niveau de pauvreté.

En outre, le degré de la portée peut être évalué par la taille moyenne des prêts ou la taille
moyenne des prêts en pourcentage du PIB par habitant. Ces deux mesures sont très utilisées,
mais parfois elles peuvent être des indicateurs non fiables. En effet, les prêts n’ont pas tous le
même terme et leur utilisation diffère d’un client à un autre. Ils peuvent donc ne pas refléter le
niveau de revenu des clients (Ledgerwood, 1999).

 Les indicateurs de mesure de la viabilité financière :

Yaron et al. (1997) notent que pendant plusieurs années il n’existe pas un accord sur les
critères d’évaluation de la viabilité financière des institutions financières rurales. Leur
performance est évaluée souvent en utilisant l’analyse par les ratios financiers standards (les
ratios mesurant la rentabilité comme le ratio de la rentabilité économique ou le ratio de la
rentabilité financière), qui sont adaptés aux entreprises à but lucratifs. Néanmoins, ces ratios
ne sont pas adaptés pour mesurer l’efficacité financière (l’autosuffisance) des institutions qui
ne cherchent pas la maximisation du profit et qui bénéficient dans la plupart des cas des
subventions. Cette façon de faire ne tient pas compte les différents types de subventions
accordées aux institutions et de leurs objectifs particuliers.

Toutefois, pour tenir compte de l’effet des subventions sur l’autosuffisance financière d’une
institution financière, les auteurs proposent d’utiliser l’indice de recours aux subventions

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« Subsidy Dependence Index : (SDI) ». Cet indice donne une mesure appropriée pour
l’évaluation de la performance de ce type d’institution. L’indice de recours aux subventions
est exprimé sous forme d’un ratio qui indique le pourcentage par lequel il faut augmenter le
taux d’intérêt appliqué aux prêts pour éliminer complètement toutes les subventions reçues au
cours d’un exercice. Le SDI ne peut pas être inférieur à 100%. Par contre, il peut dépasser
largement 100%, il n’a pas de limite supérieure. Cet indice est l’inverse de la viabilité
financière, plus le SDI est élevé, plus l’institution est loin de son autosuffisance financière.
Ainsi :

 Un SDI égal à 0% indique que l’institution a atteint son autosuffisance financière


totale ;

 Un SDI égal à 100% indique que l’institution a besoin de doubler le taux d’intérêt
appliqué aux prêts pour éliminer les subventions et atteindre son autosuffisance
financière ;

 Un SDI négatif indique que l’institution a atteint l’autosuffisance et que ses profits
annuels sont supérieurs à la valeur totale de toutes les subventions reçues au cours de
l’année. Une telle institution peut diminuer le taux appliqué aux prêts et éliminer
toutes les subventions tout en restant autosuffisante.

Par ailleurs, les deux critères de l’autosuffisance et de la portée sont considérés comme les
piliers de l’évaluation de la performance des IMF. Au cours des années 1990, plusieurs
méthodes d’évaluation des IMF ont été développées sur la base de ces deux critères. Enfin,
nous allons voir dans ce qui suit l’approche d’évaluation des IMF proposée par Ledgerwood
(1999), d’une part, et certaines méthodologies de rating utilisées pour l’évaluation de la
performance des IMF, d’autre part.

 Approche d’évaluation des IMF proposée par Ledgerwood :

Selon Ledgerwood (1999), les bailleurs de fonds, les praticiens et les consultants peuvent
évaluer l’efficience, la viabilité et la portée d’une IMF en calculant un ensemble d’indicateurs
de performance, qui sont généralement sous forme de ratios. Les indicateurs proposés par
l’auteure sont organisés en six groupes :

a. La qualité du portefeuille ;

b. La productivité et l’efficience ;

c. La viabilité financière ;

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d. La profitabilité ;

e. L’effet de levier et l’adéquation des fonds propres ;

f. L’étendue, la portée et la croissance.

Limites des indicateurs de ratios financiers et le passage à la mesure de


l’efficience pour l’évaluation de la performance des IMFs :

Dans le domaine de la gestion, la performance occupe une place capitale. Elle est une notion
très complexe qui peut être à la fois synonyme de rentabilité, de productivité et même de
compétitivité. Pour le cas des institutions de microfinance, la performance peut être analysée
à travers deux principales dimensions : la viabilité financière et la portée sociale. En effet, la
viabilité renvoie à l’autosuffisance financière de l’IMF, autrement dit à la capacité de
l’institution à générer des revenus financiers grâce à son activité de prêt ainsi que la portée qui
correspond à la capacité du programme à servir le maximum d’emprunteurs.

En raison de sa mission sociale, la durabilité des IMF ne se limite pas nécessairement à la


rentabilité mais à la capacité à fonctionner à long terme sans être menacer par la faillite
(Nanayakkara, 2012, p. 94). C’est pour cela, les indicateurs financiers traditionnels basés sur
la rentabilité ne suffisent pas à évaluer la performance de la microfinance (Battilana et Dorado
2010). En d’autres termes, les caractéristiques spécifiques des IMF, telles que leur mission
sociale ou leur structure à but non lucratif, impliquent que de nombreuses mesures de
performance couramment utilisées ne permettent pas à évaluer la performance globale des
IMF.

De ce fait, une méthodologie d'évaluation de la performance tenant simultanément compte de


plusieurs critères d'efficacité est nécessaire pour évaluer le degré d'efficacité des IMF sur le
plan social et financier tout en prenant en considération les ressources mises en places pour
atteindre les résultats envisagés (Bloy et al. 2011).

2. L’évaluation de l’efficience des IMF par des méthodes des frontières :

L’évaluation de la performance des IMF sur la seule base des ratios financiers, même ajustés,
fournit peu d’aide tant aux parties prenantes internes des IMF (gestionnaires, clients,
sociétaires) qu’aux parties prenantes externes (financeurs publics, donateurs privés, bailleurs
de fonds, régulateurs). En revanche, l’examen de l’efficience des IMF offre des conclusions
plus prometteuses à la fois sur le plan managérial et en termes de politique publique
(Balkenhol 2007 ; Hudon et Balkenhol 2011 ; Mersland et Strom 2010). De plus, les

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techniques de mesure de l’efficience, notamment les méthodes non paramétriques, présentent
l’avantage de prendre en compte l’orientation duale des IMF et l’hétérogénéité de leurs
outputs (Gutiérrez et al. 2009).

Par ailleurs, l’efficience implique que les ressources d’une entreprise soient utilisées au mieux
en fonction de ses objectifs. Pour l’IMF, il s’agit d’obtenir un résultat financier et social sans
gaspillage des micro-financements accordés. En effet, l’efficience dans le champ de la
microfinance est divisée en deux composantes principales afin de refléter sa double mission :
l’efficience financière et l’efficience sociale (Nieto et al, 2009). En premier lieu, les premiers
travaux mesurant l’efficience des IMF (par ex. Gutiérrez Nieto et al. 2007) se sont concentrés
sur les aspects financiers, en adaptant au contexte de la microfinance la recherche abondante
qui portait sur l’efficience de la firme bancaire. Par la suite, des études plus rares se sont
attachées à examiner l’efficience sociale, qui consiste à produire un output social (par ex.
proportion de femmes dans le portefeuille) à partir d’un panier d’inputs (Gutiérrez et al. 2009
; Wijesiri et al. 2015).

Ensuite, certaines études ont également cherché à évaluer l’efficience globale en incluant un
output financier et un output social (Gueyie et al. 2010 ; Serrano Cinca et al. 2011) et comme
le préconisent Hudon et Balkenhol (2011), la mesure de l’efficience ne doit pas être
monolithique et doit être appréhendée de diverses manières. De ce fait, lors de ce travail de
recherche nous avons systématiquement envisagé trois formes d’efficiences à savoir :
financière, sociale et globale. Par conséquent, les efforts des IMF à atteindre ses objectifs
peuvent être perçus comme un problème d’efficience, c’est-à-dire est-ce que l’IMF arrive-t-
elle à transformer ses ressources (intrants) pour atteindre ce double objectif (sortants) par
rapport à ses homologues qui adoptent les meilleures pratiques (Gutiérrez-Nieto et al., 2009),
c’est ce que nous allons bien voir lors de ce travail de recherche en utilisant la méthode DEA
permettant de mesurer à la fois les trois types d’efficience.

L’efficience est donc proposée dans notre étude comme critère de mesure de la performance
des IMF en raison de sa capacité à couvrir les deux aspects de la microfinance et à être
appliquée à la fois aux IMF commerciales et non lucratives (Balkenhol, 2007). De même, il
est nécessaire d’adopter une approche moderne en matière d’efficience pouvant être appliquée
à des intrants et à des sortants multiples à tous les types d’IMF. D’ailleurs, une de ces
méthodes est l’analyse d’enveloppement de données (DEA), décrite de manière détaillée dans
le chapitre suivant. D’autre part, l’exploration documentaire a permis de mettre en œuvre les

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points importants relatifs à la mesure de l'efficience dans le secteur bancaire de manière
générale et le secteur de la microfinance en particulier.

Donc, la mesure du niveau d'efficience productive d'une unité nécessite l’exploitation de sa


technologie de production qui permet de relier tous les points en indiquant la quantité
maximale qui peut être produite à partir d'un volume de facteurs disponibles, ou inversement.
Ainsi, les méthodes d’efficience proviennent de la théorie de la production et permettent de
caractériser la performance d’entreprises (Kopp et Diewert, 1982 ; Kumbhakar, 1988). Les
entreprises sont considérées techniquement efficientes quand elles parviennent à fournir leurs
produits à partir du minimum de ressources sans changer leur combinaison de facteurs
(Atkinson et Cornwell, 1994).

Par ailleurs, l'efficience technique en microfinance fait référence à la capacité avec laquelle
les IMF utilisent les ressources dans le processus de production (Widiarto et Emrouznejad,
2015). Il exprime la capacité des unités de prise de décision (UDM) à produire le nombre
maximal de produits avec une quantité donnée d’intrants ou, au contraire, à mobiliser le
minimum d’intrants pour un niveau donné de produits. Lorsqu'une IMF est incapable
d'augmenter proportionnellement sa production sans augmenter également ses entrées, elle est
dite techniquement efficace.

Toutefois, comme l'a souligné Farell (1957), l'efficience technique n'est qu'un aspect de
l'efficience. Une autre composante est rajoutée c’est celle de « l'efficience allocative ». En
microfinance, il s’agit de la combinaison efficiente des intrants et des sortants qui prend en
compte les prix des intrants et leur productivité. Dans cette perspective, une IMF est dite
efficiente si elle parvient à minimiser ses coûts de production ou à maximiser ses revenus. En
effet, l’efficience économique d’une unité de décision (IMF) n’est que la somme de
l'efficience technique et de l'efficience allocative. Or, ce travail de recherche se concentre
uniquement sur l'efficience technique, non seulement parce qu'il est le plus étudié dans la
littérature, mais également plus facile à estimer. Le calcul de l'efficience allocative nécessite
en effet des informations sur les prix des intrants et des produits, ce qui est très difficile à
obtenir en microfinance.

De plus, les travaux microéconomiques sur la production ont permis de développer toute une
panoplie de méthodes d’estimation de l’efficience, telles que les frontières de coûts, de
revenus ou encore de production (Debreu 1951 ; Koopmans 1951). En effet, des approches
avancées basées sur une estimation économétrique de la frontière d’efficience ont récemment
vu le jour et sont largement utilisées par différents spécialistes dans différents domaines pour
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mesurer l’efficience des unités économiques. Ces approches sont subdivisées en deux
groupes essentiels : l’approche paramétrique1 (l'approche de la frontière stochastique SFA,
l’approche de Free Distribution DFA et l'approche Thick Frontier TFA) et l’approche non
paramétrique (la Data Envelopment Analysis DEA et le Free Disposal Hull FDH).

Ainsi, deux méthodes peuvent être utilisées pour calculer des scores d’efficience (Berger et
Humphrey, 1997) ; les méthodes paramétriques spécifient les relations structurelles entre les
variables à l’aide d’une fonction qui caractérise la frontière de production et recourent à
l’économétrie pour l’estimer. Et les méthodes non paramétriques qui ne posent pas
d’hypothèses à priori sur les relations existant entre les variables mais qui construisent
directement une frontière à partir des observations grâce à la programmation linéaire.

Selon Hassan (2014), l'augmentation de l'efficience technique des IMF est cruciale pour la
maximisation de la richesse sociale. L’analyse stochastique des frontières (SFA) qui permet
un test paramétrique et l’analyse de l’enveloppement des données (DEA) qui permet un test
non paramétrique sont deux méthodes largement utilisées aux frontières pour changements de
productivité des IMF (Wijesiri et Meoli, 2015).

Dans le travail entrepris, nous avons retenu l’approche non paramétrique (DEA) car elle
permet de « révéler » l’information recherchée « l’efficience » à partir des données observées
en spécifiant très peu d’hypothèses sur la structure de la frontière d’efficience. Par ailleurs, la
mesure de l’efficience est obtenue en comparant les résultats d’une unité productive à celles
qui adoptent les meilleures pratiques et qui se localisent sur la frontière d’efficience2.
L’efficience de cette unité est exprimée au moyen sous forme d’un score en calculant la
distance qui la sépare de la frontière. Après avoir présenté dans le chapitre précédent les
outils traditionnels de mesure de la performance, nous passons en revue les deux grandes
familles de méthodes utilisées pour formaliser les frontières d'efficience, notamment : les
méthodes non paramétriques et les méthodes paramétriques. Cette section porte ainsi sur les
fondements théoriques et sur la méthodologie de ces deux types d’approches en présentant
quelques applications dans le secteur financier et bien particulièrement celui du secteur de la
microfinance.

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Une approche basé sur une estimation économétrique de la frontière d’efficacité et se subdivise en deux
groupes : les approches paramétriques déterministes et les approches stochastiques. La spécificité des méthodes
déterministes est qu'elles tiennent compte de tout écart par rapport à la frontière en raison d'une inefficacité. Ils
risquent donc d’être biaisés, en particulier lorsque les données sont entachées d’erreurs de mesure.

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Les frontières non paramétriques sont de type déterministe alors que celles des méthodes paramétriques
peuvent être de type déterministe ou stochastique.

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 Différentes méthodes paramétriques d'analyse de l'efficience :

La technique paramétrique peut être divisée en trois approches distinctes, toutes ces approches
nécessitent la spécification d’une forme fonctionnelle particulière pour la frontière des coûts
ou des bénéfices. Il s’agit de « Stochastic Frontier Approach » (SFA), de « Thick Frontier
Approach » (TFA) et de « Distribution-Free Approach » (DFA) dont la frontière d'efficience
est construite sur la base d'une modélisation économétrique, généralement sous la forme d'une
fonction de production de Cobb-Douglas (log-linéaire) (Arshinova T, 2007).

 Stochastic Frontier Approach (SFA) :

La première méthode est (Stochastic Frontier Approach) l'approche des frontières


stochastiques (SFA) ou parfois appelée approche des frontières économétriques. Cette
approche spécifie une forme fonctionnelle pour le rapport coût ou bénéfice entre les intrants,
les extrants et les facteurs environnementaux (Coelli et al, 1998). Il s'agit habituellement d'une
fonction translog (Bezat A, 2009 ; Iršová Z et Havránek T, 2010). Elle définit la meilleure
combinaison d'entrées pouvant être utilisée pour produire une sortie. Elle est estimée à l'aide
de la méthode du maximum de vraisemblance, qui intègre un terme d'erreur composé.
Contrairement aux deux approches non-paramétriques, la méthode SFA permet la présence
d'erreurs aléatoires. Ainsi, on pose l'hypothèse que les observations non efficientes suivent
habituellement une distribution asymétrique semi-normale, alors que les erreurs suivent
habituellement une distribution symétrique cadrée par une loi normale standard. Le
raisonnement derrière ces hypothèses est que les observations non efficientes doivent avoir
une distribution tronquée puisqu'elles ne peuvent être négatives. On pose également
l'hypothèse que les observations non efficientes de même que les erreurs sont orthogonales
aux intrants, aux extrants et aux variables environnementales, c'est-à-dire qu'il y a une
indépendance entre ces variables et les erreurs.

Par ailleurs, l’approche SFA se distingue par le fait que le terme erreur se décompose en un
composant à double face : un terme erreur aléatoire normalement distribué qui prend en
compte des facteurs exogènes indépendants de la volonté de l’entreprise, et une erreur à terme
représentant l’inefficacité technique de l’entreprise. (Iršová Z et Havránek T, 2010). Cette ventilation
explique pourquoi cette méthode donne généralement des résultats inférieurs à ceux de la
méthode DEA. En outre, la modèle SFA peut être utilisés pour estimer les erreurs et tester les
hypothèses (Odeck et Brathen, 2012). Introduite pour la première fois par Aigner, Lovell et
Schmidt (1977), cette approche a été largement utilisée pour évaluer l'efficience bancaire et,
plus récemment, en microfinance. Certaines études empiriques ont utilisé l'approche SFA
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pour estimer l'efficience de la microfinance (Hermes et al. 2009; Oteng-Abayie et al., 2011;
Masood et Ahmad, 2010; Servin et al., 2012; Desrochers et Lamberte, 2003; Quayes et
Khalyli , 2014; Riaz et Gopal, 2015; Bos et Millone, 2015; Mor, 2016). Parmi eux, certains
ont estimé une fonction de coût (Riaz et Gopal, 2015 ; Billi et Thi, 2012), d'autres une
fonction de production (Bos et Millone, 2015 ; Hermes et al., 2011).

 Thick Frontier Approach (TFA) :

La deuxième approche est appelée Distribution-Free Approach (DFA), utilisé dans les
données de panel, assouplit le terme d'erreur composite des hypothèses de distribution. Les
observations inefficientes peuvent suivre n'importe quelle distribution et elles sont calculées
comme étant la différence entre les résidus moyens de la frontière. Par ailleurs, L'inefficience
fondamentale est distinguée de l'erreur aléatoire par l'hypothèse de son inefficience persistante
dans le temps, tandis que les erreurs aléatoires tentent vers zéro en moyenne. Le problème
potentiel avec l'approche TFA est que, si on note une variation de l'efficience due à un
changement technologique ou à une réforme réglementaire ou autre, les résultats décrivent la
déviation moyenne de chaque firme par rapport à la moyenne des meilleures pratiques plutôt
que l'efficience à tout point dans le temps.

 Distribution-Free Approach (DFA) :

La dernière approche de ce groupe est appelée Thick Frontier Approach (TFA), elle n'impose
pas non plus de restrictions de distribution sur le terme d'erreur composite, mais suppose que
le terme d'inefficience est différent dans le quartile d'efficience le plus élevé (frontière
épaisse) et le plus faible des unités de prise de décision observées et que l'erreur aléatoire est
présente dans ces quartiles (Iršová Z et Havránek T, 2010). L'approche TFA ne donne pas
d'estimation exacte de l'efficience de chaque unité d’analyse mais donne plutôt une estimation
du niveau général d'efficience (Wang M et Wang MH, 2002 ; Iršová Z et Havránek T, 2010).
Par ailleurs, la méthode DFA est préférable lorsque certaines hypothèses classiques sont
satisfaites en ce qui concerne les termes d'erreur composites, y compris les contributions de la
distribution de l'inefficience et les erreurs de mesure (Oh SC et Hildreth AJ, 2016). En outre,
cette méthode d'analyse de l'efficience est utile pour mesurer quantitativement d'autres
facteurs exogènes tels que les prix du marché, indépendamment de l'effet, en exploitant une
méthode économétrique ou de programmation pour contrôler les effets (Wang M et Wang
MH, 2002).

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 Les avantages des méthodes paramétriques :

Les méthodes paramétriques d'analyse de l'efficience présentent des avantages significatifs en


offrant la possibilité d'utiliser les données de panel (Heshmati ,1994) et Cornwell et Schmidt.,
1995), de distinguer le bruit aléatoire de l'inefficience (Kuosmanen T et al., 2014) et de
calculer l'erreur type des résultats de mesure de l'efficience (Arshinova .T, 2007). Par ailleurs,
l’avantage principal des méthodes paramétriques (SFA, DFA et TFA) réside dans leur
capacité à intégrer l'erreur aléatoire dans l'estimation de l'efficience (Wang M et Wang MH, 2002). De
plus, cette approche est une technique flexible de mesure de la fonction des frontières de
production, qui fournit une estimation significative de l’erreur de mesure (Gempesaw. CM,
1992). Ajibefun IA, (2008) a également rapporté que l'analyse paramétrique des frontières
permet de tester l'hypothèse concernant la qualité de l'ajustement du modèle ; cela permet
également de tester formellement des statistiques sur ces hypothèses et de construire des
intervalles de confiance. En outre, l'un des principaux attraits de ce type de modèle est la
possibilité qu'il offre pour une spécification plus riche, en particulier dans le cas des données
de panel. Enfin, les fonctions frontières paramétriques nécessitent la définition d'une forme
fonctionnelle spécifique pour la technologie et pour le terme d'erreur d'inefficience (Murillo
Zamorano et Vega Cervera, 2001).

 Les inconvénients des méthodes paramétriques :

L'inconvénient majeur de ces méthodes d'analyse d'efficience est qu'elles nécessitent une
spécification de la technologie, qui peut être restrictive dans la plupart des cas (Ajibefun IA,
2008). En outre, les approches paramétriques ne permettent pas de distinguer de manière
appropriée le bruit aléatoire de l'efficience réelle, car aucune d'entre elles n'est observable
(Wang M et Wang MH, 2002). L'exigence de la fonction de production pose des problèmes
de spécification et d'estimation (Murillo Zamorano et Vega Cervera, 2001). La méthode
paramétrique d’analyse d’efficience n’impose pas de propriétés axiomatiques dans
l’estimation de la frontière (Kuosmanen T et al., 2014), ce qui peut erroné la fonction de
production et donc influencer les résultats. De plus, le maximum de vraisemblance ne permet
pas d'évaluer la fiabilité des inférences pour les petits échantillons. De ce fait, l’approche
nécessite l’utilisation d’un grand nombre de DMU (Bezat A, 2009). Enfin, l'inconvénient des
méthodes paramétriques en microfinance réside dans la difficulté de spécifier une fonction de
production typique, car il existe de nombreuses situations dans le secteur de la microfinance.

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3. Différentes méthodes non paramétriques d'analyse de l'efficience :

Dans les méthodes d’efficience non paramétriques, il existe deux approches : méthode
appelée Data Envelopment Analysis (DEA) et une autre appelée Free Disposant Hull (FDH) :

3.1. Data Envelopment Analysis (DEA) :

La première méthode de ce groupe est une technique de programmation linéaire. Il s’agissait


d’un isoquant convexe linéaire par morceaux, appelé également technique de programmation
mathématique. Le modèle DEA est le résultat du travail de Farrell (1957) et développée par la
suite par Charnes, Coopes & Rodes (1978), Banker, Charnes & Cooper (1984) et d’autres.
Cette méthode consiste en une estimation non paramétrique d'une frontière d'efficience
englobant l'ensemble des individus et permettant d'identifier les meilleures pratiques, celles
localisées à la frontière. Par ailleurs, la méthode DEA n'utilise pas de formes fonctionnelles
spécifiques pour estimer l'efficience des entreprises (Drake & Hall, 2003). Il construit plutôt
une fonction de production conforme aux meilleures pratiques uniquement sur la base des
données observées, d'où l'absence de possibilité d'erreur dans la spécification de la fonction de
production (Jemric & Vujcic, 2002).

Contrairement à la SFA, la DEA est une méthode déterministe qui présente également de
nombreux avantages. Elle est souple et bien adaptée à l’industrie multi-produite telle que la
microfinance. De plus, elle a la capacité de gérer un rendement d'échelle variable sans prendre
en considération les exigences de prix aux multiples variables d'entrée et de sortie (Ruggiero,
2005). Indépendamment de ses faiblesses dans la mesure de l’efficience, telles que l’absence
de mesure des facteurs d’erreur, la sensibilité aux valeurs aberrantes, l’impossibilité de
mesurer l’efficience absolue et l’ignorance des informations sur les prix (Fiorentino et al,
2006 ; Berger & Mester, 1997), la méthode DEA a continué d’être une mesure importante et
efficace (Jemric et Vujcic, 2002), elle est devenue un outil de plus en plus utilisé pour évaluer
l’efficience (Zhu, 2003).

Par ailleurs, la méthode DEA a été largement utilisée dans l'analyse de l'efficience des
institutions financières, notamment les études de Portela et Thanassoulis (2007), Akhtar
(2002), Sathye (2001) et Aikaeli (2008), qui l’utilisaient pour mesurer différents aspects de
l'efficience du secteur bancaire. De même, cette méthode a été déployée pour l'analyse de
l'efficience technique dans le secteur public, lorsque les informations sur les prix ne sont ni
disponibles ni fiables (Porcelli F, 2009). En effet, Kuosmanen et al. (2014) ont fait valoir que les
fournisseurs publics ont des objectifs et des contraintes différentes de ceux des fournisseurs

15
privés et que, par conséquent, le seul terrain commun permettant de comparer leurs
performances repose sur leur efficience technique.

Au cours des dernières années, cette méthode a été développée pour mesurer la performance
de diverses organisations à but non lucratif, telles que les établissements d’enseignement, les
établissements financiers et les établissements médicaux, qui sont très résistantes aux
techniques traditionnelles de mesure de la performance en raison de leur complexité, de leur
caractère hybride et de la multiplicité de ses intrants et sortants (Roman M et Gotiu L, 2017). Pour la
microfinance, plusieurs études ont été utilisées, telles que Bassem (2008), Qayyum et Ahmad
(2006), Nieto et al (2009) et Nghiem et al (2006), qui utilisaient cette méthode pour mesurer
l'efficience des institutions de microfinance.

3.2. Free Disposal Hull (FDH) :

La seconde méthode de ce groupe est appelée Free Disposant Hull (FDH). Elle représente un
cas particulier de la méthode DEA, elle tend à produire des estimations moyennes d'efficience
plus élevées. En d’autre terme, le FDH est une variante de la DEA qui présente le même
inconvénient que cette dernière par rapport à l'omission des erreurs aléatoires. En effet, moins
il y’a des hypothèses qui sont imposées à la frontière de production, plus important est le
nombre d'unités qui sont déclarées efficientes.

Cependant, la différence essentielle entre les deux méthodes concerne la formulation de


l'hypothèse du rendement d'échelle ; la méthode DEA est appliquée avec une hypothèse de
rendement d'échelle constant ou rendement d'échelle variant et les résultats obtenus dans les
deux cas sont différents ; alors que le FDH n'exige pas de définir une telle contrainte. C’est
ainsi que l'application du FDH, pour qu'elle soit fiable nécessite un grand échantillon. La
seule hypothèse du FDH est la libre distribution qui veut dire que l’ajout des ressources à une
unité ne réduira pas la quantité maximale qu'elle peut produire. Ainsi, l'inférence non
paramétrique est déficiente dans le sens qu'elle n'utilise pas toutes les informations de
l'échantillon et sera donc moins efficace que l'inférence paramétrique (Gempesaw CM, 1992). Dans
ce contexte, seuls des tests statistiques peuvent permettre de détecter ce problème et d'en
mesurer son ampleur. En effet, la méthode du bootstrapping3 a été appliquée pour simuler cet
effet aléatoire.

3
En statistiques, les techniques de bootstrap sont des méthodes d'inférence statistique basées sur la réplication
multiple des données à partir du jeu de données étudié, selon les techniques de rééchantillonnage. On calculait
depuis près d'un siècle des estimations : mesures de dispersion (variance, écart-type), intervalles de confiance,
tables de décision pour des tests d'hypothèse, etc., à partir des expressions mathématiques des lois de probabilité,

16
Malgré cela, l'inférence non paramétrique a gagné en popularité pour plusieurs raisons : les
calculs sont faciles à estimer, les données ne doivent pas être mesurées quantitativement, mais
pourraient être dans un format qualitatif, les données pourraient également figurer dans un
classement ordinal et n'a pas autant d'hypothèses restrictives que l'inférence statistique
paramétrique (Arshinova T, 2007). Par ailleurs, dans la recherche en microfinance, la méthode DEA
est la prédominante, l’avantage principal de cette méthode réside dans sa capacité à prendre
en compte la multiplicité d’intrants et de sortants ainsi que la prise en compte des rendements
d’échelle dans le calcul de l’efficience.

3.3. Les avantages des méthodes non paramétriques :

Les méthodes non paramétriques permet de mesurer l'efficience de tous les DMU sans exiger
les pondérations préalables pour les entrées et les sorties. Elles appliquent une programmation
linéaire pour déterminer l'efficience maximale de la DMU en cours d'évaluation (Aldamak A,
Zolfaghari S, 2017). En d’autre terme, ces méthodes ne nécessitent aucune spécification de la
forme fonctionnelle. Ils sont basés sur l'estimation mathématique d'une fonction de
programmation linéaire qui relie les entrées et les sorties (Porcelli F, 2009).

En raison de leurs nombreux avantages, en particulier, sa capacité à prendre l’hétérogénéité


des outputs et des inputs, les méthodes non paramétriques ont été constamment appliquées au
secteur de la microfinance vu leur caractère hybride (Toma P et al., 2017 ; Hudon et
Balkenhol, 2011). En conséquence, elles ont attiré l'attention d'un certain nombre de
chercheurs en raison de sa capacité unique à mesurer l'efficience des DMU à entrées et sorties
multiples sans attribuer une pondération préalable à l'entrée et à la sortie (Aldamak A,
Zolfaghari S, 2017).

Ceci dit, l'approche non paramétrique a l'avantage de n'imposer aucune restriction


paramétrique a priori à la technologie sous-jacente (Ahmed MH, 2015). Dans ce contexte, la
méthode DEA estime efficace puisqu’elle permet d’évaluer l'efficience relative des unités de
prise de décision, qui ne nécessite pas la forme fonctionnelle exacte entre les entrées et les
sorties (Ajibefun IA, 2008 ; Murillo Zamorano et Vega Cervera, 2001). En effet, la méthode

ainsi que d'approximations de celles-ci quand le calcul n'était pas réalisable. Désormais, l'approche par calcul
stochastique sur technologie numérique, permet de multiplier ces évaluations, et surtout de quantifier
la sensibilité de ces évaluations aux particularités de l'échantillon originel, i.e. le jeu de données étudié, grâce à
l'analyse statistique des sous-échantillons possibles. Cette méthode est basée sur des simulations stochastiques,
comme les méthodes de Monte-Carlo, les méthodes numériques bayésiennes (échantillonneur de Gibbs,
l'algorithme de Metropolis-Hastings), à la différence près que le bootstrap ne nécessite pas d'autre information
que celle disponible sur les individus de l'échantillon originel.

17
d'efficience non-paramétrique a le potentiel d'imposer des propriétés axiomatiques et
d'estimer la frontière de manière non paramétrique (Kuosmanen et al. 2014).

3.4. Les inconvénients des méthodes non paramétriques :

Outre leurs avantages, les méthodes non paramétriques d'analyse de l'efficience présentent
également certains inconvénients. Le premier est que ces méthodes ne reposent pas sur une
base statistique solide mais elles sont sensibles aux valeurs aberrantes (Ahmed MH, 2015).
Par ailleurs, l’efficience non paramétrique, représentée par les scores d’efficience est
influencée par les prix des intrants et des produits, ainsi que par la taille des entreprises et
d’autres facteurs exogènes qui ne sont pas prisent en considération dans la mesure de
l’efficience et qui empêchent les scores d’atteindre des estimations plus précises de la
performance réelle (Wang M et Wang MH, 2002 ; Kuosmanen et al. 2014). Une étude de Toma P et al.
(2017) ont également signalé que les méthodes non paramétriques d'analyse de l'efficience ne
tenaient pas compte l'incertitude caractérisant le monde réel (dite erreur stochastique). De
plus, l’inconvénient majeur de la méthode DEA est qu'elle suppose qu'il n'y a pas de variable
d’erreur de mesure lors de la construction de la frontière, ni d’intervalles de confiance et ni de
choc exogène dans la production (Toma P et al., 2017), de sorte qu'elle manque d'inférence
statistique. Ainsi, l’absence d’erreur de mesure peut influer la forme et la position de la
frontière (Bezat A, 2009). Par conséquent, les résultats obtenus peuvent ne pas représenter les
vrais niveaux d'efficience, ce qui peut entrainer une certaine illusion par rapport au niveau de
production.

Une étude de Kuosmanen et al. (2014) et Murillo Zamorano & Vega Cervera (2001) a affirmé
que ce type de modèle reposent sur l’hypothèse de l’absence de bruit (c.-à-d. Vi = 0 pour
toutes les entreprises i). Ainsi, tout écart par rapport à la frontière est forcément imputé à
l'inefficience (Wang et Wang, 2002). Comme ce type de modèle ne font pas la distinction
entre l’inefficience et les effets statistiques du bruit (Murillo Zamorano et Vega Cervera,
2001), toute la distance d’une marque à la frontière de l’efficience est interprétée comme
inefficiente. Par ailleurs, le modèle non paramétrique étant non stochastique, le bruit est
signalé comme inefficient, d'où l’efficience technique est moyennement inférieure
(Gempesaw. CM, 1992).

Ceci dit, l'inférence non paramétrique est déficiente au ce sens qu'elle n'utilise pas toutes les
informations de l'échantillon ce qui la rend moins efficace que l'inférence paramétrique
(Gempesaw. CM, 1992). En effet, cette inefficacité provient de l'incapacité du gestionnaire à
gérer adéquatement l'entreprise, alors qu'il existe des facteurs que le gestionnaire ne contrôle
18
pas et qui peuvent influencer le niveau de production. (Ferrier et Lovell, 1990 ; Aigner, Lovell
et Schmidt, 1977 ; et Meeusen et van den Broek, 1977).

4. Le choix entre les méthodes paramétriques et non paramétriques :

Il n’existe actuellement aucune méthode communément acceptée pour l’analyse de


l’efficience, mais le champ est divisé principalement en deux approches : l’analyse de
l’enveloppement des données (DEA) et l’analyse stochastique des frontières (SFA)
(Kuosmanen et al. 2014). La méthode DEA et celle SFA sont deux approches alternatives, les
plus importantes à cet égard et ont été largement étudiées en tant que méthodologies à part
entière et appliquées de façon omniprésente à une gamme éclectique de contextes industriels
et organisationnels. Le choix de la méthode d’estimation a fait l’objet de débats, certains
chercheurs privilégiant la méthode paramétrique et d’autres préférant l’approche non
paramétrique (Murillo Zamorano LR, 2004 ; Ahmed MH, 2015).

En effet, le choix entre différentes approches doit être basé sur un compromis concernant
l'objet de l'étude, le type de données et les caractéristiques de la technologie, etc. En effet,
puisque ces deux techniques ont leurs propres mérites, le choix d’une approche au détriment
d'une autre est une tâche difficile car il n'y a pas de recettes claires dans la littérature. De plus,
le choix de la méthodologie semble impacter les résultats (Wang M et Wang MH, 2002). Par
conséquent, il est de la plus haute importance de vérifier la fiabilité des résultats en utilisant
les différentes approches d’estimation de l’efficience. En règle générale, la technique
paramétrique sera probablement plus attrayante que la DEA dans le cas où les données
présentent de graves erreurs de mesure, des événements aléatoires et des difficultés
d'identification des entrées et des sorties. D'autre part, la DEA peut constituer un meilleur
choix lorsque les perturbations aléatoires posent moins de problèmes et que les informations
sur les prix ne sont pas disponibles (Wang M et Wang MH, 2002). De plus, la méthode DEA
permet d’effectuer plusieurs comparaisons entre un ensemble d’unités homogènes (Berger &
Humphrey, 1997).

5. Cohérence entre les mesures paramétriques et non paramétriques :

Une étude de Wang W, (2002) révèle que le choix entre les différentes méthodes de frontière
n’a pas d’effet important sur les scores d’efficience estimés. Ces preuves suggèrent que les
deux modèles tendent à se classer de manière relativement cohérente une fois que la véritable
structure de mise en commun des données est omise. De plus, Toma P et al. (2017) a signalé
que les deux approches de mesures d'efficience (méthodes paramétrique et non paramétrique)

19
permettent d'obtenir des résultats hautement corrélés dans la plupart des cas. En effet, des
études sur les mesures d'efficience indiquent qu'un chercheur peut choisir n'importe quelle
méthode en toute sécurité, car il n'y a pas de différence significative entre les résultats estimés
(Oh SC et Hildreth AJ, 2016). Étant donné que les techniques paramétriques et non
paramétriques ont leurs avantages et leurs inconvénients, le choix d’une méthode d’estimation
appropriée a été assez controversé et reste encore flou. Par conséquent, ces deux types de
méthodes ne sont pas en concurrence directe, mais plutôt en situation de complémentarité
dont le compromis entre la méthode DEA et SFA est quelque chose à sacrifier et non pas à
négocier. Par ailleurs, l’utilisation conjointe de techniques de mesure de l’efficacité
paramétriques et non paramétriques est un problème nouveau dans la littérature empirique
récente (Servin, Lensink et van den Berg, 2012).

L’efficience est un critère de mesure très important pour tout type d’organisation, surtout pour
le cas des IMF puisqu’elle apporte une contribution particulière à ce domaine d’activité, la
mesure de l’efficience facilite les décisions des décideurs politiques et des parties prenantes
(Rosenberg, 1994) car elle fournit des informations sur la performance des IMF, en particulier
sur l'utilisation des ressources et la réduction au maximum des déchets. Il aide également les
IMF à bien définir leurs objectifs en matière de surveillance des activités grâce à une
meilleure gestion de leurs goulots d'étranglement et de leurs obstacles entravant la
performance. En effet, la mesure de l’efficience permet le suivi et l'amélioration des résultats
ce qui accroît la performance globale des IMF (Reynolds & Thompson, 2002).

L’efficience des institutions de microfinance est divisée en deux composantes principales afin
de refléter leur double mission, à savoir l’efficience financière et l’efficience sociale (Nieto et
al, 2009). Par ailleurs, l'efficience financière des IMF est basée sur l'efficience technique qui
est fondée sur l'hypothèse suivante : plus les IMF sont productives, plus elles sont efficientes
(Sanchez 1997). En effet, l’efficience financière des IMF peut être perçue par deux approches,
une approche par la production ou bien une approche par l’intermédiation, selon le choix des
variables d’intrants et de production (sortants). D’autre part, l’efficience sociale indique la
capacité des IMF à gérer leurs ressources telles que leurs actifs et leurs personnels (Von
Stauffenberg et al, 2003). Elle est liée à la politique de protection sociale car elle évalue
l’efficience avec laquelle l’utilisation des ressources par les IMF a un impact sur la société, en
particulier sur les femmes et le niveau de la pauvreté. Autrement dit, il est lié à la bonne
pratique en termes de gestion des ressources (la bonne gestion des ressources).

20
Les études sur l'efficience de la microfinance ont essentiellement adopté deux principales
méthodes d'estimation : l'analyse d'enveloppement de données (DEA), une approche non
paramétrique de l'enveloppement de données, et l'analyse stochastique de frontière (SFA).
Néanmoins, nous ne présentons ci-après que les études ayant utilisées la méthode DEA pour
l’évaluation de l’efficience des IMF puisque c’est cette dernière qu’on va exploiter nous aussi
dans notre propre étude. Des études empiriques sur l'efficience des IMF à travers le monde
ont montré des résultats différents, la plupart d'entre elles indiquent que ces institutions ne
sont pas encore efficientes dans l'utilisation de ses ressources (intrants) pour produire des
résultats (sortants).

Parmi les récentes découvertes sur l'efficience des IMF à travers le monde, figure l'étude de
Haq et al. (2010) qui examinait la rentabilité des IMF en Afrique, en Asie et en Amérique
latine sous deux hypothèses, les institutions de microfinance en tant que productrices de prêts
à leurs clients (efficience de la production) et les institutions de microfinance en tant
qu'intermédiaires (efficience de l'intermédiation). Les résultats ont indiqué que les IMF non
gouvernementales étaient plus efficientes, en particulier en termes d’approche de la
production. Les résultats étaient cohérents avec le double objectif des institutions de
microfinance visant à lutter contre la pauvreté et à assurer la viabilité financière. Les résultats
ont également indiqué que les banques offrant des services de microfinance surpassent les
institutions de microfinance non bancaires en termes d’efficience en appliquant l’approche de
l'intermédiation et qu'il n'y avait aucun compromis entre l’efficience et la portée.

De même, l’étude de Hassan & Sanchez (2009) a examiné l’efficience technique des IMF
dans trois régions, les pays d’Amérique latine du Moyen-Orient, d’Afrique du Sud et d’Asie
du Sud, en comparant l’efficience des différents types d’IMF. L'étude a révélé que l'efficience
technique était plus élevée pour les IMF formelles que pour les IMF informelles et que la
source des inefficiences était purement technique (gaspillage des ressources) plutôt que
environnementale, ce qui a impacté les résultats. De plus, l'étude de Bassen (2008) sur
l'efficience des IMF dans la zone méditerranéenne a révélé que seules 8 IMF étaient
relativement efficientes et que la taille des IMF affectait leur efficience, tandis qu'Ahmad
(2011) évaluait l'efficience des IMF du Pakistan, il a découvert que seules trois IMF sur douze
étaient efficientes et que leurs efficiences diminuaient par rapport aux années précédentes.

En Afrique, les preuves d'efficience des IMF indiquent que la plupart d'entre elles sont
toujours inefficientes par rapport aux autres IMF de différent contexte. L’étude de Abayie et
al. (2011) examine l’efficience économique de 135 institutions de microfinance au Ghana, les

21
résultats montrent que l’efficience économique globale est en moyenne de 56,29%, ce qui
indique une grande inefficience dans le comportement économique des IMF étudiées. L'étude
recommandait l'amélioration des programmes de formation technique, l'exploitation de
produits d'épargne diversifiés afin d'améliorer la qualité du portefeuille et d'assurer la
durabilité, ainsi que le renforcement de l'engagement social du personnel et des clients afin
d'améliorer l'efficience sociale. Par ailleurs, l’étude de Lafourcade et al. (2005) sur
l’efficience a révélé que les IMF formelles étaient plus efficientes que les semi-formelles et
que les coopératives sont moins efficientes que d’autres types d’institutions de microfinance.
En outre, l’étude a révélé que l’Afrique était la région des IMF la plus productive sur la base
du coût par emprunteur et du coût par épargnant par rapport aux autres régions.

De même, l’étude de Baumann (2005) a comparé les performances de certaines IMF


(microcrédit et ONG) ayant pour objectif la réduction de la pauvreté dans le Sud d’Afrique et
a découvert que la plupart des IMF du pays n’étaient pas efficientes par rapport aux autres
IMF du monde. Le but de l'étude était d'évaluer l'efficience des IMF opérant de cinq pays
d'Afrique de l'Est (Tanzanie, Kenya, Ouganda, Rwanda, Burundi) en utilisant une approche
non paramétrique (analyse de l'enveloppement des données, DEA). L'hypothèse axée sur les
intrants a été utilisée pour estimer l'efficience relative de 35 IMF, dont 5 banques, 17 IFNB, 9
ONG et 4 coopératives. L'étude utilisait l'approche de la production avec trois variables
d'entrée (Actif total, Personnel, Frais d'exploitation) et deux variables de sortie (Portefeuille
de prêts bruts, produits financiers) à la fois en rendement constant et en rendement variable.
De plus, Olasupo et Afolami (2013) examinent l'efficience des IMF dans le sud-ouest du
Nigéria sur une période de cinq ans, de 2006 à 2010, en utilisant à la fois les approches
d’entrées et de sorties de la DEA. Les auteurs constatent une moyenne annuelle plus élevée
des scores d'efficience technique pour les variables intrants par rapport aux variables sortants.

Néanmoins, les IMF de l’Afrique de l’Est ont obtenu des scores d’efficience plus élevés, à la
fois pour les rendements variables et les rendements constants. Les scores moyens d'efficience
technique étaient de 0,706 (2009), 0,798 (2010) et 0,852 en rendement constant et de 0,823,
0,892 et 0,891 en rendement variable pendant trois ans, respectivement. La tendance moyenne
en matière d’efficience s’est révélée positive, avec de faibles scores d’efficience en 2009 et
des scores élevés en 2011. Le nombre d’IMF situées sur une ligne frontière efficiente était
respectivement de 5, 8 et 11 sous SIR et de 12, 16 et 17 sous VRS. Les résultats montrent
également qu'en moyenne, les banques et les institutions financières non bancaires étaient
plus relativement efficientes que les ONG et les coopératives, tandis que les moyennes

22
d'efficience par pays montrent que le Kenya et le Rwanda ont obtenu des scores d'efficience
plus élevés pendant trois ans avec un rendement constant. Néanmoins, l'Ouganda affiche des
scores d'efficience plus élevés avec un rendement d'échelle variable.

D'après les conclusions ci-dessus, il est recommandé que les IMF de cette région améliorent
leur efficience en utilisant mieux les ressources et en réduisant la quantité de déchets. Bien
que les résultats moyens indiquent une efficience élevée, le nombre d'IMF sur la ligne
frontière était faible, ce qui indique que la plupart d'entre elles ont encore une chance
d'amélioration pour atteindre la ligne frontière d'efficience. La majeure partie de l'inefficience
observée était essentiellement de nature technique, ce qui a nécessité une meilleure allocation
des ressources et une réduction des ressources gaspillées en intrants. La plupart des IMF
efficientes étaient des banques et des IFNB. C’est une alerte pour les ONG et les coopératives
qui étaient traditionnellement les seuls fournisseurs de services de microfinance à prendre en
compte l’évolution des structures et de la technologie du marché et la concurrence accrue des
banques commerciales et des IFNB en offrant des services moyennement rentables et
efficients s’ils veulent continuer leurs activités dans le temps.

Tahir et Tahrim (2013), de leur côté, ont étudié l’efficience des IMF de cinq pays de
l’ANASE, notamment le Cambodge, les Philippines, l’Indonésie, le Laos et le Vietnam, de
2008 à 2011. Le total des actifs et des charges d’exploitation est utilisé comme variable et le
nombre d'emprunteurs actifs sont utilisés comme variables de sortie dans leur étude. Selon les
chercheurs, des progrès notables ont été observés dans l'efficience globale des IMF au cours
de la période de l'étude : 69,7%, 75% et 75,4% entre 2008 et 2009, 2009 à 2010 et 2010 à
2011, respectivement. Les auteurs indiquent que les IMF vietnamiennes sont plus efficientes
sur le plan de la gestion que d'autres pays, car elles ont enregistré un score d'efficience en
moyenne le plus élevé (86,7%), alors que le Laos a enregistré en moyenne le score le plus
faible (43,8%), indiquant que les IMF laotiennes sont les moins performantes par rapport aux
IMF d’autres pays.

De plus, Hassan et al. (2012) ont examiné l'efficience technique des IMF du Moyen-Orient et
de l'Afrique du Nord (MENA) dans le but de rechercher les sources d'inefficience des IMF
sélectionnées pour une période de cinq ans de 2000 à 2005. Les auteurs utilisent à la fois des
approches de production et d’intermédiation de la DEA. Il a été observé que les IMF
sélectionnées présentaient une faible efficience technique pour les deux approches. Selon ces
auteurs, les IMF gaspillent beaucoup de ressources en intrants ce qui impacte les résultats
(sortants).

23
Ahmad (2011) étudie également l'efficience des IMF au Pakistan en utilisant à la fois les
entrées et les sorties orientées de la DEA. Cette étude comprend 12 IMF en 2003 et 19 IMF en
2009. Le portefeuille de prêts brut et le nombre d'emprunteurs actifs sont utilisés comme
variables de sortie, et l'actif total et le nombre d'employés sont utilisés comme variables
d'entrée. Il a été constaté que trois IMF étaient efficientes avec un rendement constant, alors
que quatre autres étaient efficientes avec un rendement variable en 2003. Néanmoins, quatre
IMF sont efficientes à la fois en rendement d'échelle constant et en rendement d'échelle
variable en 2009. Ahmad affirme que l'efficience des IMF au Pakistan a diminué en 2009 ; il
montre également que deux IMF jugées efficientes en 2003 sont inefficientes en 2009.
L'auteur conclut donc que les IMF de ce pays devraient fournir des services sur une base
durable en étant financièrement viable et sans recourir à des subventions ou d’autres
ressources externes.

D’autre part, Ferdousi (2013) estime l'efficience et ses déterminants pour trois pays
(Bangladesh, Chine et Inde) en utilisant le nombre d'employés et les charges d'exploitation en
tant que variables d'entrée, ainsi que le portefeuille de prêts bruts et le nombre d'emprunteurs
actifs en tant que variables de sortie. Les résultats suggèrent que les IMF bangladaises
bénéficient d'économies d'échelle supérieures et ont plus de chances d'être efficaces avec un
rendement d'échelle variable, tandis que les IMF chinoises et indiennes seront probablement
plus efficaces avec un rendement d'échelle constant.

De même, Qayyum & Ahmad (2006) ont estimé l'efficience des institutions de microfinance
opérant de trois pays : le Pakistan, l'Inde et le Bangladesh en Asie du Sud. Les conclusions de
l'étude révèlent que la plupart des IMF inefficientes étaient principalement de nature
technique et que trois IMF seulement étaient efficientes au Bangladesh et que deux seulement
étaient efficientes en Inde. L’étude suggère que les IMF du Sud L'Asie devraient améliorer
l'expertise managériale et la technologie utilisée dans l'offre de services afin d'améliorer
l'efficience dans telles institutions.

Selon Ahmed, (2009) ; Helms, (2006) ; Patten, Rosengard et Johnston, (2001), l’Asie, le
Bangladesh et l'Indonésie sont des pays géants et prospères du point de vue des IMF. Cela
s'explique par leur grand succès dans la fourniture des services financiers aux pauvres et aux
personnes à faible revenu. Depuis cette affirmation, Ahmed et d'autres chercheurs n'ont
remarqué aucune étude combinant les IMF de ces pays dans le but d'examiner leur efficience.
Cette étude comble cette lacune en analysant l'efficience technique des IMF du Bangladesh et
d'Indonésie. Ces auteurs ont évalué l'efficience technique des IMF du Bangladesh et

24
d'Indonésie pour une période de cinq ans allant de 2007 à 2011. En effet, cette étude a choisi
pour plusieurs raisons d’appliquer l’approche de Malmquist basée sur l’analyse
d’enveloppement des données (DEA) aux IMF du Bangladesh et d’Indonésie.

Islam et al. (2011) ont également fourni des éléments probants provenant du Bangladesh, dans
lesquels ils avaient examiné l'efficience technique, économique et allocative des institutions
de microfinance en utilisant les données du sondage. L’étude a révélé que l’efficience
technique, allocative et économique étaient respectivement de 72%, 66% et 47% donc une
différence significative avait été observée entre les scores d’efficience des IMF examinés.
L'importance d'étudier l'efficience des IMF asiatiques pourrait être justifiée par le fait que les
IMF ayant la plus grande taille d'actifs sont situées en Asie et qu'elles complètent les services
offerts par les institutions financières traditionnelles. En plus, les IMF les plus efficientes se
trouvent également en Asie en raison de sa forte densité de population et de ses salaires plus
bas (Haq, Skully et Pathan, 2010).

Par ailleurs, Haq et al. (2013) utilisent la méthode DEA pour étudier la rentabilité de 39 IMF
de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique latine. Ils ont utilisé des approches de production et
d’intermédiation dans le but de comparer et d’identifier les IMF les plus performantes. Les
résultats de cette étude montrent que les organisations non gouvernementales (ONG) sont plus
efficaces dans l'approche de la production et que les banques-IMF sont plus efficaces dans
l'approche de l'intermédiation. Comme Kyereboah-Coleman (2007) l'a indiqué, la principale
préoccupation des parties prenantes des IMF (clients, employés, gouvernement, donateurs,
créanciers et propriétaires) est de savoir dans quelle mesure les IMF, malgré les problèmes
liés à leur durabilité améliore leur efficience opérationnelle. Cet auteur montre également la
grande incidence de l'efficience opérationnelle des IMF sur la portée, la durabilité et l'impact
social.

6. Limites et Discussions :

La définition de la performance est un exercice très ardu. En plus d’être subjective et


dépendante des référents choisis, la performance est aussi multidimensionnelle, à l’image des
objectifs organisationnels qui sont de nature variée. Ainsi, la performance est un concept très
vague qui peut faire référence à l’efficacité, à l’efficience, à la performance organisationnelle,
à la performance globale, à la performance individuelle, etc. En traitant la performance des
institutions de microfinance, nous trouvons que la définition de la performance dépend de ce
qui devrait être les objectifs poursuivis par ces institutions. Bien que l’objectif principal de
toutes les IMF soit de mettre à la disposition des personnes pauvres un ensemble de services
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financiers afin d’améliorer leur condition de vie, deux visions s’opposent dans le champ de la
microfinance : l’approche institutionnaliste et l’approche welfariste (bien-être social).

Alors que ces deux courants de pensée partagent le même objectif qui consiste à réduire la
pauvreté à travers la fourniture de services financiers, leur divergence se matérialise au niveau
de ce que devraient être les rôles et les priorités des IMF pour permettre aux populations à
faible revenu d’avoir accès aux services financiers dans les meilleures conditions. Est-ce en
mettant l’accent principalement sur l’autosuffisance financière et la viabilité institutionnelle
de l’IMF, en acceptant le risque d’exclure les plus pauvres des pauvres (l’approche
institutionnaliste) ? Ou, au contraire, en mettant l’accent sur le financement de ces derniers,
avec le risque de se retrouver avec des IMF vulnérables qui dépendent des financements
externes sous forme de subventions (L’approche welfariste) ?

Selon l’approche institutionnaliste, toute IMF doit être en mesure d’atteindre sa viabilité
financière (autosuffisance ou capacité de couvrir les charges par ses propres revenus sans faire
appel aux subventions), c’est-à-dire la capacité de réaliser des profits. Ainsi, l’IMF aura la
capacité de faire appel à des fonds privés afin d’accroître son activité principale qui est le
financement des besoins de la population pauvre. La performance dans ce cas sera la viabilité
financière des IMF. Certains auteurs ayant adopté l’approche institutionnaliste, sont intéressés
par la mesure de la performance financière. Les ratios utilisés donc sont des ratios comme : le
ratio de l’autosuffisance opérationnelle, le ratio de l’autosuffisance financière, le ratio de
remboursement des crédits, le ROA (Return On Assets), etc.

Selon l’approche welfariste, la recherche de la rentabilité financière par une IMF peut être un
obstacle devant l’objectif social de la microfinance. Comme les pourvoyeurs de fonds des
IMFs ne sont pas motivés par la réalisation des profits financiers, ils accepteront des
performances financières faibles en contrepartie de retombées positives en termes de
réduction de la pauvreté. La performance dans ce cas sera définie en termes de la capacité des
IMF à financer les pauvres et spécialement les plus pauvres des pauvres. Pour évaluer cette
performance, les auteurs qui adoptent l’approche welfariste utilisent certains ratios comme le
niveau de crédit octroyé, le pourcentage des femmes qui empruntent auprès de l’IMF, la
variété des produits et service de l’institution, etc.

Mis à part ce débat, différents intervenants du secteur de la microfinance ont proposé


différents critères pour évaluer la performance des institutions de la microfinance. Plusieurs
études ont retenue l’approche proposée par Ledgerwood (1999) et les approches utilisées par
les agences de notation des IMF, notamment : CAMEL, PEARLS, GIRAFE, la méthodologie
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utilisée par MicroRate et enfin celle utilisée par M-CRIL. La notation ou le rating consiste en
l’attribution d’une note à une IMF sur la base de ses principales caractéristiques mesurées par
différents ratios qui peuvent être quantitatifs, qualitatifs ou les deux à la fois. Par conséquent,
l’évaluation de la performance des IMF sur la seule base des ratios financiers, même ajustés,
fournit peu d’aide tant aux parties prenantes internes des IMF (gestionnaires, clients,
sociétaires) qu’aux parties prenantes externes (financeurs publics, donateurs privés, bailleurs
de fonds, régulateurs).

En revanche, l’examen de l’efficience des IMF offre des conclusions plus prometteuses à la
fois sur le plan managérial et en termes de politique publique. Pour mesurer l’efficience des
IMF, il existe deux grandes familles de méthodes utilisées pour formaliser les frontières
d’efficience, notamment : les méthodes non paramétriques et les méthodes paramétriques. La
méthode retenue dans le travail entrepris est la méthode d’analyse d’enveloppement de
données (DEA). L’une des méthodes non paramétrique (mathématique) qui présentent
l’avantage de prendre en compte l’orientation duale des IMF et l’hétérogénéité de leurs
outputs.

Lors de ce chapitre, nous avons découvert le champ de la performance dans le contexte des
institutions financières et en particulier les institutions de microfinance. La performance est
un concept vague qui touche plusieurs secteurs d’activités. Dans le domaine de la gestion, la
performance occupe une place capitale. Elle est une notion très complexe qui peut être à la
fois synonyme d'efficacité, de rentabilité, de productivité et de compétitivité. Par la suite, la
performance est composée essentiellement de deux composantes essentielles : l’efficience et
l’efficacité.

Une entreprise performante doit être à la fois efficace et efficiente, elle est efficace lorsqu'elle
atteint les objectifs qu'elle s'est fixés et elle est efficiente lorsqu'elle minimise les moyens mis
en œuvre pour atteindre les objectifs qu'elle s'est fixés. Par ailleurs, la performance se mesure
avec des critères (ou indicateurs) qualitatifs ou quantitatifs de résultat. Pour mesurer
l'efficacité, on utilise un critère qui exprime un rapport entre le résultat obtenu et l'objectif
visé. Et pour mesurer l'efficience, on utilise un critère qui exprime un rapport entre le résultat
obtenu et les moyens mis en œuvre. Les méthodes d’efficience permettent de distinguer
plusieurs types d’efficiences notamment l’efficience allocative, technique et productive.

Conclusion :

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Lors de ce travail entreprit, nous allons se focaliser bien particulièrement sur l’efficience
technique des IMF qui détermine la manière dont elles allouent ses ressources dans le but de
fournir la meilleure performance. Autrement dit, il s’agit d’obtenir un résultat financier et
social sans gaspillage des micro-financements accordés. Ainsi, l’efficience implique que les
ressources d’une entreprise soient utilisées au mieux en fonction de ses objectifs. Selon Weill
(2006), l’efficience technique permet de renvoyer à la frontière de production, en d’autres
termes une entreprise est techniquement efficiente si ses activités la situent exactement sur la
frontière. Cette efficience renvoie à la capacité d’éviter des pertes en produisant autant
d’output que le permet l’utilisation des inputs ou en utilisant le moins possible d’inputs telle
que le permet la production d’outputs (Harold, Lovell, et Schmidt 1993).

Pour se faire, ce travail adoptera une approche non paramétrique, via la méthode (Data
Envelopment Analysis) afin d’estimer les scores d’efficiences prenant plusieurs formes
(financière, sociale et globale). Ensuite, cette efficience sera régressée sur un ensemble de
variables explicatives prenant en considération les spécificités des IMFs ainsi que leur
environnement socio- économique. Le chapitre suivant permet de mettre en évidence les
déterminants de l’efficience des IMF les plus évoqués au niveau de la littérature.

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