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ISBN : 978-2-200-62022-6
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Introduction
1. Les origines
1. La prospective
3. Les zonages
2.1 Une planification par mode de transport, des années 1960 aux
années 1990
3. Le développement local
Conclusion
Bibliographie
Objectifs
• Distinguer aménagement du territoire, urbanisme et architecture.
• Appréhender l’aménagement du territoire comme une action sur l’espace et
le temps.
• Comprendre les conditions historiques de l’apparition des politiques
d’aménagement du territoire.
1. Les origines
Quand l’aménagement du territoire commence-t-il ? Quelles sont les
premières étapes de son histoire ? La volonté de contrôler le territoire est
très ancienne. N’a-t-on pas créé des bastides, forme de ville nouvelle au
cours des xiiie et xive siècles dans l’actuel sud-ouest de la France ? Plus loin
encore, les fameuses routes romaines ne sont-elles pas le signe d’une
volonté d’unifier culturellement et économiquement l’Empire romain ?
Certes, ces actions avaient une dimension territoriale évidente. Toutefois, à
la différence des politiques contemporaines d’aménagement du territoire,
elles ne reposent pas explicitement sur une vision globale et prospective du
territoire ni sur un appareillage administratif, technique et fiscal pour
contrôler ou orienter l’installation des populations et des activités.
Synthèse
• L’aménagement du territoire est rendu possible par l’histoire longue de la
constitution des États modernes et de l’élaboration de savoirs sur l’espace
et la société.
• L’aménagement du territoire s’épanouit dans un cadre national après la
Seconde Guerre mondiale, comme volet spatial de l’État-providence.
• Après 1975, l’échelle nationale perd sa centralité. L’aménagement du
territoire se réinvente, avec un poids renforcé des collectivités locales.
Étude de cas :
L’évolution des discours
sur l’aménagement du territoire
Document 1 : Eugène Claudius-Petit, Pour un plan national d’aménagement
du territoire, ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme (1950)
Cette communication d’E. Claudius-Petit, ministre de la Reconstruction
et de l’Urbanisme de 1948 à 1952, a été faite en conseil des Ministres,
puis publiée sous la forme d’une brochure.
« L’Aménagement du Territoire ne doit pas être confondu avec les
problèmes auxquels cependant, il n’est pas étranger. Ce n’est pas un plan
de production et d’équipement, comme l’est par exemple le Plan Monnet,
tendant à prévoir le total des grands produits qui peuvent être fournis par
les entreprises nationales. C’est également autre chose et plus que
l’Urbanisme au sens déjà traditionnel du mot ; c’est-à-dire autre chose
qu’une collection, qu’une série de plans détaillés d’aménagement et
d’extension des agglomérations, avec l’indication des rues, des squares,
des espaces libres, des quartiers résidentiels ou industriels, etc. […]
En gros, l’Aménagement du Territoire, c’est la recherche dans le cadre
géographique de la France, d’une meilleure répartition des hommes, en
fonction des ressources naturelles et des activités économiques. Cette
recherche est faite dans la constante préoccupation de donner aux
hommes de meilleures conditions d’habitat, de travail, de plus grandes
facilités de loisir et de culture. Cette recherche n’est donc pas faite à des
fins strictement économiques, mais bien davantage pour le bien-être et
l’épanouissement de la population. […]
La création d’équipements de vastes dimensions entraîne de véritables
transferts de population, et, par suite, des modifications profondes dans la
répartition de l’habitat. C’est Renault ou Citroën attirant à Paris et dans
sa banlieue des dizaines de milliers de familles, ce qui implique, en
contrepartie, la désertion d’ateliers et de fermes dans de lointaines
provinces : c’est Michelin retenant à Clermont-Ferrand le quart, peut-
être, de la population de cette ville […]. »
Commentaire
• Trois points communs apparaissent à la lecture de ces deux textes :
– Dans les deux textes, l’aménagement du territoire s’enracine dans
un projet politique, le projet d’une République qui assure à chacun
de ses membres, une égalité des droits.
– Les deux ministres s’opposent au fonctionnement « spontané » du
marché, qui conduit à de trop fortes concentrations urbaines ou à
une désertification de certaines parties du territoire national.
Implicitement, Eugène Claudius-Petit exprime la crainte que la
poursuite d’objectifs uniquement économiques par le Plan ne
renforce les inégalités territoriales.
– Enfin, l’aménagement du territoire apparaît comme un outil pour
rendre plus efficientes les politiques publiques. Eugène Claudius-
Petit appelle de ses vœux une action territoriale permettant de
mieux satisfaire le bien-être des populations. Cécile Duflot voit dans
l’aménagement du territoire, le complément indispensable des
investissements réalisés dans les services publics.
• Pour autant, à plus de six décennies d’intervalle, les changements sont
majeurs et très visibles :
– Eugène Claudius-Petit appelle à un aménagement du territoire qui
soit capable d’orienter la localisation des investissements
industriels. Rien de tel dans le discours de Cécile Duflot : il s’agit
maintenant de concentrer les moyens d’intervention de l’État vers
les territoires « fragiles » afin de les mettre en capacité d’attirer les
entreprises. L’aménagement du territoire est passé d’une politique
d’orientation des stratégies territoriales des entreprises à une
politique de création de cadres « accueillants » pour les entreprises
dans les territoires qu’elles délaissent.
– Les préoccupations environnementales ne sont pas absentes dans
le discours d’Eugène Claudius-Petit (qui évoque les ressources
naturelles). Elles sont plus fortement affirmées dans le discours de
Cécile Duflot.
– Eugène Claudius-Petit affirme le rôle de l’État, dont il attend qu’il soit
capable d’encadrer les actions des collectivités locales en matière
d’urbanisme grâce à un plan national (qui ne verra jamais le jour tel
qu’il est proposé ici). Le discours de Cécile Duflot définit une
fonction uniquement correctrice de l’État dans une décentralisation
qu’elle souhaite approfondir.
Chapitre 2
Instruments et méthodes
de l’aménagement du territoire
Objectifs
• Distinguer quatre types d’instrument : la prospective, le droit, la
territorialisation des investissements, notamment à travers les zonages, et
l’organisation des acteurs.
• Comprendre comment ces instruments peuvent se combiner.
1. La prospective
L’aménagement du territoire ne peut pas se concevoir sans un discours sur
le futur. La prospective est un de ces types de discours.
3. Les zonages
Le zonage est l’un des instruments privilégiés de l’aménagement du
territoire. Il consiste à déterminer des dispositions particulières pour un
espace donné. Ces dispositions particulières peuvent concerner la fiscalité
(taxes supplémentaires ou au contraire allégées) ou, plus souvent, les
dépenses. Des zonages existent pour les aides au logement (plus fortes dans
les villes où le logement est cher), pour les services de l’Éducation
nationale (avec des zones d’éducation prioritaire aux règles particulières et
un encadrement pédagogique renforcé), pour la police (des zones de
sécurité prioritaire), pour les aides aux entreprises (avec les zones de
revitalisation rurale, par exemple). La liste des zonages est extrêmement
longue. Présentons un exemple : le découpage des « quartiers » de la
politique de la ville, avant de présenter les éléments de débat sur cet outil.
Synthèse
• Les politiques d’aménagement du territoire doivent combiner au mieux ces
quatre « familles » d’instrument de l’action publique. Toutefois, cette
combinaison n’est pas toujours évidente.
• L’organisation administrative, le droit des sols ou encore les zonages
n’obéissent pas uniquement à des logiques d’aménagement du territoire,
Ils obéissent également des objectifs économiques ou politiques, parfois
discordants avec les objectifs d’aménagement du territoire ;
• La décentralisation a renforcé les capacités d’action des pouvoirs locaux.
L’ajustement des ambitions respectives des différents pouvoirs locaux et
de l’État est ainsi devenu un enjeu central.
Étude de cas :
Quels enjeux d’aménagement du territoire
le développement intercommunal révèle-t-
il ?
Document 1 : Les groupements intercommunaux en Normandie (1er janvier 2017)
Commentaire
• La France se singularise, parmi les pays européens, par le nombre élevé de
ses communes. L’attachement à la commune est fort.
• La montée en puissance de l’intercommunalité a été très importante depuis
la fin des années 1990 et la loi dite « Chevènement » de 1999. En 2015, la
loi pour une Nouvelle organisation territoriale de la République, après
d’autres, a augmenté le seuil minimal de population des établissements
publics de coopération intercommunale à 15 000 habitants, sauf
exceptions. Cela a entraîné un vaste mouvement de fusion des
groupements intercommunaux.
• Le législateur a souhaité doter les territoires de structures administratives
différentes selon la taille des villes. Les groupements intercommunaux aux
compétences les plus larges sont pour les plus grandes villes.
• En 1982, la compétence d’élaboration des documents d’urbanisme a été
transférée de l’État aux communes. La faible coordination des politiques
communales d’urbanisme a entraîné une urbanisation non coordonnée aux
axes de transport collectifs, des concurrences pour le développement de
zones d’activités et de commerces. C’est pourquoi tous les types de
groupements intercommunaux doivent, au minimum, partager les
compétences de développement économique et d’aménagement de
l’espace.
• L’émiettement communal est supposé renforcer les mécanismes
ségrégatifs. Les édiles « choisissent » le profil social de leurs habitants par
le biais de leur politique d’urbanisme et de logement. Aussi, le législateur
impose-t-il l’équilibre social de l’habitat comme compétence obligatoire
pour les intercommunalités urbaines.
• La superposition de trois collectivités locales (département, région,
communes) entraîne des frictions ou des redondances. Les limites
étanches entre les « blocs de compétence » relèvent de l’illusion et chaque
collectivité tend à s’occuper un peu de tout. Le législateur en prend acte
d’une certaine manière en permettant aux métropoles de se doter de
certaines compétences départementales et régionales.
Chapitre 3
Réseaux de transports
et de communications et aménagement
du territoire
Objectifs
• Comprendre les rôles économiques et politiques des transports
et des communications dans l’aménagement du territoire.
• Connaître les débats contemporains sur les vertus mais aussi les limites
des « grands travaux ».
• Selon l’état de développement des réseaux, appréhender le passage des
objectifs de « désenclavement » et de « maillage » aux enjeux de gestion
et d’entretien des infrastructures existantes.
avec son étoile autour de la capitale tout autant que par l’école. Au
xx
e siècle, le transsibérien symbolise l’unité russe qui résistera à la
Révolution bolchevique de 1917. Au xxie siècle, c’est par une voie ferrée
vers Lhassa que la Chine réaffirme son ambition d’arrimer le Tibet à son
territoire national.
Une entité supranationale telle que l’Union européenne cherche aussi à
affermir son projet d’une union plus étroite entre les États qui la composent
par les transports. Le traité de Maastricht, signé en 1992, donne à l’UE la
possibilité de financer des axes de transport. Si elle ne finance jamais
totalement les projets, elle apporte en revanche un concours financier,
pouvant atteindre jusqu’à 40 %, à des projets soutenus par les États.
L’Union a élaboré une doctrine pour définir ceux qu’elle souhaite
subventionner. Le document actuellement en vigueur a été adopté en 2011.
Il définit 11 corridors internationaux. L’Union souhaite financer les
« maillons manquants », c’est-à-dire les liaisons entre États, souvent
délaissés parce que moins urgents ou moins politiquement porteurs que les
projets internes aux États. On lit aisément à travers ce projet l’ambition
politique sous-jacente qui est de privilégier les axes qui permettent d’unir
plus fortement les économies et les sociétés de part et d’autre des frontières
nationales.
À l’échelle internationale également, les projets de transport sont des
instruments d’affirmation géopolitique. Prenons l’exemple des oléoducs. La
Russie est un État très dépendant de ses ressources en hydrocarbure. En
valeur, les ressources fossiles constituent 70 % des exportations de la
Russie en 2012. Sur ce volume, le pétrole brut représente 34 %, le pétrole
raffiné 20 %, le gaz naturel 12 %. L’exportation du gaz est principalement à
destination de l’Europe. Pour ne pas être dépendante des pays de son
voisinage immédiat, notamment l’Ukraine et la Pologne, pour l’exportation
de son pétrole, la Russie a cherché à créer deux oléoducs contournant ces
pays par le Nord, via la mer Baltique, et vers le Sud, via la mer Noire.
Ainsi, la Russie a-t-elle soutenu les projets d’oléoduc « NordStream » et
« SouthStream ». Si le second n’a pas vu le jour, le premier a été inauguré
en 2012. En 2014, l’Ukraine ne voit plus transiter sur son territoire que
40 % des exportations gazières de Russie sur son territoire. La Russie a
réussi par ce moyen à réduire sa dépendance à l’Ukraine en diminuant sa
capacité de négociation…
À l’échelle interne des États ou des Unions supranationales comme dans
les relations internationales, les choix en matière d’infrastructures ont très
souvent une forte dimension géopolitique, qui peut rentrer en concurrence
plus ou moins forte avec les logiques économiques. Se pose alors la
question des priorités à effectuer en matière d’investissement dans les
infrastructures de transport et de communication.
2. Comment hiérarchiser
les investissements ?
Comment choisir les infrastructures à réaliser en priorité ? Tel est l’enjeu
central de la planification des transports. Pendant longtemps se sont succédé
en France les grands schémas par type d’infrastructures ou modes de
transport.
2.1 Une planification par mode
de transport, des années 1960 aux années
1990
L’aménagement des infrastructures en France est d’abord marqué par la
mise en place des grands schémas dits sectoriels, pilotés par le ministère de
l’Équipement et les services associés. Les schémas routiers (plan directeur
d’aménagement du réseau routier ou « plan directeur routier » en 1960,
schéma directeur des grandes liaisons routières en 1971, schéma directeur
routier national en 1988) accompagnent ainsi la densification progressive
d’un réseau routier considéré pendant trente ans comme un instrument
majeur d’aménagement du territoire. Le premier plan directeur routier
prévoit ainsi près de 35 560 km d’autoroutes dont 1 933 à réaliser avant
1975, prévision révisée à la hausse dès 1971. Entre 1970 et 1980, un
triplement du réseau est ainsi effectué (4 100 km d’autoroutes de liaisons et
1 150 d’autoroutes urbaines), prolongé dans les décennies suivantes pour
parvenir à un réseau autoroutier de près de 11 500 km en 2015.
Pour l’aménagement ferroviaire, de tels schémas sont également
élaborés. En 1992 est établi un schéma directeur national des liaisons
ferroviaires à grande vitesse. Ce dernier vise à généraliser le réseau à
grande vitesse en prévoyant notamment des lignes vers la Normandie et le
Massif central. La mise en place de la ligne à grande vitesse Paris-Lyon
(1981), puis des lignes à grande vitesse Atlantique (1989), Nord (1994),
Méditerranée (2001) et Est (2007), structure un réseau métropolitain étoilé
centré sur Paris mais progressivement complété de liaisons interrégionales
via des points de connexion en banlieue parisienne (Roissy, Massy, Marne-
la-Vallée). Le réseau n’atteindra probablement jamais pas la densité prévue
en 1992.
La mise en œuvre des schémas routiers et ferroviaires montre de relatives
similitudes. Dans les deux cas, il s’agit de réaliser d’abord les liaisons entre
les villes principales (Paris et les grandes villes de province) ainsi qu’entre
différents lieux importants pour l’économie (les ports, les zones
touristiques, tant montagnardes que littorales). Dans un second temps,
l’objectif est de développer le réseau pour réduire les écarts régionaux
d’accessibilité à ce réseau. En 1995, la loi d’orientation pour
l’aménagement et le développement du territoire, dite loi Pasqua, fixe un
objectif quantitatif à cette ambition : aucune partie du territoire
métropolitain continental ne doit être éloignée de plus de 50 km ou de
45 mn en automobile d’une autoroute ou d’une gare TGV. Cet objectif est
quasiment atteint pour le réseau autoroutier mais non pour le réseau de
lignes ferroviaires à grande vitesse.
Synthèse
• Les réseaux de transport et de communication jouent un rôle majeur dans
l’aménagement des territoires.
• Le fort développement des réseaux, la montée des préoccupations
environnementales et une critique des éléments de justification des projets
d’infrastructure ont mis à mal le « mythe des grands travaux » dans les
pays développés.
• Toutefois, le niveau d’investissement dans les infrastructures reste élevé,
notamment pour maintenir à niveau leur efficacité. Par ailleurs, pour les
réseaux neufs, tels que la fibre optique, la question de leur déploiement
dans les territoires peu denses grâce à l’aide publique, se pose dans les
termes classiques de l’action aménageuse au service de la réduction des
différentiels d’accessibilité.
Étude de cas :
L’aménagement numérique du territoire
Document 1 : Extrait du site « Plan Très Haut Débit »
« Le déploiement de réseaux de communications électroniques à très haut
débit jusqu’à l’abonné représente pour notre pays un enjeu majeur de
développement, tant sur le plan économique que social. La volonté du
gouvernement de déployer, sur l’intégralité du territoire, des réseaux
optiques destinés à remplacer à terme les actuels réseaux en cuivre
s’appuie sur la création en décembre 2012 d’une Mission Très Haut
Débit. […] Pendant les 10 prochaines années ce Plan mobilisera
20 milliards d’euros, dont 3 milliards en subventions pour soutenir les
projets des collectivités territoriales.
Les opérateurs privés, naturellement inscrits dans une logique de retour
rapide sur investissement, déploient leurs réseaux optiques dans les zones
les plus peuplées, où résident environ 60 % de la population
française […]. Équiper le reste du pays, et particulièrement les territoires
les plus ruraux, nécessite l’intervention des pouvoirs publics et
particulièrement celle des collectivités territoriales. Faute de cet
engagement, certains territoires pourraient ne pas être desservis, générant
ainsi une fracture numérique et d’importants déséquilibres économiques
mais aussi sociaux.
[…] Le saut technologique vers les réseaux de desserte de deuxième
génération en fibre optique est donc aujourd’hui incontournable. (Par la
fibre, on peut télécharger 100 photos de 300 méga-octets de données en
24 secondes contre 4 minutes avec l’ADSL.)
L’État subventionne les projets de réseaux à très haut débit portés par les
collectivités territoriales en dehors des zones très denses et des zones
conventionnées, où les opérateurs privés déploieront leurs réseaux.
Une enveloppe de 3 milliards d’euros en subventions est dédiée au
soutien des projets de réseaux d’initiative publique au cours des 10 ans à
venir.
[…] L’État [prend] en charge en moyenne la moitié du besoin en
subvention des déploiements éligibles. Les taux de subvention sont
désormais compris entre 33 et 61,6 %. »
Source : www.ant.developpement-durable.gouv.fr/le-point-
sur-le-plan-france-tres-haut-debit-a667.html
Commentaire
• L’équipement numérique du territoire est un projet majeur de l’État en
termes d’aménagement du territoire.
• Le déploiement de la fibre optique est rentable pour les opérateurs dans les
zones les plus denses : les acteurs publics ne subventionnent donc pas les
opérateurs qui y déploient leur réseau.
• Pour les zones rurales, le dispositif est le suivant : l’État laisse le soin aux
collectivités territoriales d’élaborer leur priorité, puis participe au
financement public du déploiement du réseau de fibre optique. Le taux
d’aide varie en fonction du degré de ruralité.
• Dans le cas du réseau public de téléphone, l’État finançait l’ensemble du
réseau et appliquait ainsi une « péréquation » cachée entre
investissements rentables dans les zones denses et investissements
déficitaires dans les zones plus rurales. Maintenant que les opérateurs
sont privés, le financement public des réseaux dans les zones peu denses
est clairement affiché.
• Pour le réseau de fibre optique, réseau encore « jeune », on retrouve les
objectifs autrefois promus pour les réseaux routiers et ferroviaires :
maillage du territoire et réduction des différentiels territoriaux
d’accessibilité.
Chapitre 4
Aménagement du territoire
et développement économique
Objectifs
• Appréhender le passage d’une orientation active des activités économiques
à une politique de construction d’un cadre territorial propice au
développement des entreprises.
• Comprendre les possibilités actuelles d’action publique en matière de
développement économique territorial.
• Distinguer quatre leviers actuels : l’action réparatrice, le développement
local, le soutien à l’économie résidentielle par la redistribution financière, le
soutien à l’innovation.
3. Le développement local
4. L’aménagement au service
de l’économie résidentielle
Les analyses dominantes du développement territorial postulent que ce sont
les réussites du système productif, qui, à l’heure de la mondialisation,
garantissent aux territoires leur développement. Pourtant, ces analyses ne
permettent pas de comprendre pourquoi les territoires les mieux insérés
dans la globalisation économique peuvent également connaître de graves
difficultés sociales. L’Île-de-France est typique de cette situation. Très
productive, la région parisienne connaît de nombreux quartiers très pauvres
et une très vive question sociale.
Figure 4.1 : Part des revenus résidentiels par zone d’emploi en 2010
5. L’aménagement au service
de l’innovation ?
Synthèse
• L’intervention directe de l’État pour l’orientation territoriale des activités
économiques s’est considérablement réduite depuis les années 1980.
• Les pouvoirs publics restent néanmoins très présents, à travers les
mécanismes financiers de redistribution qu’ils mettent en œuvre. Par
ailleurs, ils cherchent à créer des conditions favorables au développement :
ils visent à attirer les ménages et les entreprises, à favoriser
l’innovation, etc.
• Dans ce contexte, faire « participer » habitants et entreprises à la définition
des projets locaux de développement n’est pas seulement un impératif
démocratique : c’est la condition même de leur succès.
Étude de cas :
Les zones d’activités économiques
Document : Zone d’activités économiques à Ruillé-sur-Loir dans la Sarthe
Photo : Xavier Desjardins.
Commentaire
• La zone d’activités est une figure majeure des paysages français
contemporains. La volonté de réduire les nuisances pour les habitants, les
besoins d’espace des entreprises et les facilités pour l’accès des camions
expliquent son succès pour les activités commerciales, logistiques,
industrielles ou artisanales.
• Les intercommunalités se sont souvent d’abord développées autour de la
compétence « développement économique ». Ici, la zone d’activités est
réalisée par la Communauté de communes du Val de Loir. Avec le partage
intercommunal de la fiscalité qui porte sur les entreprises, les communes
se sont mises d’accord pour réaliser ces zones dans les lieux les plus
propices, notamment le long des grands axes routiers.
• Pour beaucoup, le « développement » se matérialise d’abord par la
réalisation de zones d’activités. C’est bien sûr une illusion car beaucoup
d’emplois sont créés hors de ces espaces. Surtout, cela engendre une
forme de course en avant dans la réalisation de telles zones… En 2010,
les services statistiques du ministère du Développement durable estiment
le nombre de zones d’activités entre 24 et 32 000, soit environ
450 000 hectares. L’offre est pléthorique et diffuse, ce qui contribue
fortement à l’expansion de l’urbanisation sur les espaces naturels ou
agricoles.
Chapitre 5
Objectifs
• Distinguer les débats sur la taille et les fonctions des villes.
• Comprendre l’évolution du débat sur la place des villes et le passage de
préoccupations liées à l’armature urbaine à des politiques sur les liens
entre les métropoles et leurs « arrière-pays ».
• Percevoir les dimensions nationales des projets pour le Grand Paris.
Synthèse
• La politique d’aménagement du territoire vise à renforcer les métropoles. Le
projet du Grand Paris est emblématique de cet intérêt national pour le
développement des métropoles.
• Les autres grandes villes françaises restent « petites » au regard des villes
européennes. À partir des années 1960 avec la politique des métropoles
d’équilibre, l’État a cherché à renforcer l’attractivité des métropoles de
province.
• La politique de soutien aux métropoles est passée progressivement du
renforcement de l’armature urbaine (en confiant de nouvelles « fonctions »
aux grandes villes) à la recherche de complémentarité entre les métropoles
et les territoires environnants (en créant des instruments de coopération
« horizontale »).
Étude de cas :
Les petites villes, maillons faibles
de l’aménagement du territoire ?
Document 1 : Évolution de la population des petites villes de 1990 à 2013
Source : INSEE.
Nous ne comptons que les petites villes dont l’unité urbaine est la plus importante de
leur bassin de vie. Nous excluons ainsi les petites villes qui sont situées dans l’orbite
immédiate d’une grande agglomération. Ces petites villes et leurs bassins de vie
représentent un peu plus de 15 millions d’habitants et plus de 5 millions d’emplois.
Source : INSEE.
N.B. : Une unité urbaine est constituée par une ville-centre et un ensemble de
communes urbanisées de manière contiguë, la banlieue.
Commentaire
• Les petites villes françaises sont affectées par des dynamiques
démographiques très contrastées. Globalement, on ne peut pas parler d’un
« déclin » des petites villes. Les petites villes situées à proximité des
grandes agglomérations ou des grandes vallées (Garonne, Rhin, Rhône,
Seine et Loire) ont souvent une croissance démographique assez vive.
A contrario, les petites villes du nord et de l’est de la France ainsi que
celles des bordures du Massif central sont souvent marquées par une
baisse de leur population. Il y a donc moins un effet « taille » des villes
qu’une différence de trajectoire démographique en fonction des
dynamiques économiques régionales.
• Les petites villes ont une faible attractivité résidentielle. Elles ne captent
plus que 15 % de la croissance démographique de leur bassin de vie entre
2008 et 2013. Leur parc immobilier est souvent moins attirant. De plus, de
nombreux ménages souhaitent « s’installer au vert », à quelques minutes
en voiture de la petite ville. Ceci s’accompagne d’un développement des
commerces et des services à la périphérie des petites villes. La diminution
du commerce dans les centres de ces villes rend moins avantageux
le fait de résider dans une « ville-centre » pour l’accès aux services.
• Quelle implication pour l’aménagement du territoire ?
– À l’échelle nationale, certaines petites villes perdent des habitants, et
souvent de nombreux emplois. Cette situation a pu être renforcée
par des décisions récentes de réduction du nombre d’emplois
publics (justice, police, armées) dans ces villes. Toutefois, elle
trouve également ses racines dans des évolutions économiques
régionales peu favorables que l’aménagement du territoire peine à
infléchir.
– À l’échelle locale, les petites villes ont perdu de la vitalité en raison
de l’important développement des grandes surfaces périphériques
et d’un développement résidentiel important dans les communes
rurales qui les environnent.
• La conjonction de ces deux dynamiques conduit à une baisse de la vitalité
des centres des petites villes, particulièrement visible et criante quand la
population diminue dans l’ensemble du bassin de vie. La petite ville n’est
pas un « problème » d’aménagement du territoire en soi : elle est surtout le
« miroir déformant » de dynamiques qui affectent tout le territoire national.
Chapitre 6
Objectifs
• Comprendre les enjeux de la distribution territoriale des services publics.
• Connaître les exemples de la politique universitaire et sanitaire.
• Appréhender les contradictions éventuelles entre les enjeux territoriaux et
les logiques propres à certains services publics.
2. L’aménagement universitaire
du territoire
L’enseignement supérieur est un élément majeur de l’animation des grandes
villes et un outil indispensable à l’amélioration des compétences et
connaissances de la population.
Synthèse
• Le territoire français est marqué par des contrastes importants, tant en
matière de santé que d’accès à l’enseignement supérieur, entre les régions
françaises, notamment entre les régions du Nord et de l’Est et le reste du
territoire national.
• Le pilotage de ces secteurs échappe aux spécialistes ou administrations en
charge de l’aménagement du territoire : ce sont les logiques propres aux
mondes universitaires ou sanitaires ainsi que les exigences financières qui
priment assez largement.
• Les « habitants » ou « usagers » recherchent le service de meilleure qualité
ainsi que la proximité dans l’accès à ce service. En matière de santé
comme d’université, l’exigence de qualité, ainsi que la spécialisation des
pratiques, conduit quelquefois à concentrer l’offre.
• Pour les territoires, c’est moins au « recul des services publics » (assez
largement fantasmé à l’heure où ces lignes sont écrites) que l’on doit faire
face, qu’à la simultanéité de changements dont les effets conjugués
peuvent, dans certaines localités, être douloureusement ressentis. Une
politique d’aménagement du territoire pourrait permettre de mieux prendre
en compte la dimension territoriale de l’adaptation de certains services
publics.
Étude de cas :
L’aménagement du plateau de Saclay
Document 1 : Entretien avec Pierre Veltz, président directeur général
de l’Établissement public d’aménagement du plateau de Saclay
« JGP : Comment se déroule le projet Paris-Saclay ?
Pierre Veltz : Contrairement à ce que certains pensent, Saclay n’est pas
un projet ex nihilo. […] Le commissariat à l’énergie atomique (CEA) s’y
est installé à la fin des années 1940, suivi de la faculté des sciences
d’Orsay, du CNRS à Gif-sur-Yvette. En réalité, Irène et Frédéric Joliot-
Curie, à l’origine de ces trois implantations sont les vrais fondateurs de
Saclay. HEC, Polytechnique, Supélec sont ensuite arrivées, de même
qu’un grand nombre d’entreprises technologiques, à Saint-Quentin-en-
Yvelines, Vélizy ou Courtabœuf […]. Paris-Saclay, c’est 15 % de la
recherche publique française, c’est aussi 15 % de la recherche et
développement privée nationale.
Nombreux sont également les entreprises et les établissements
d’enseignement qui vont y arriver prochainement…
Absolument. Le chantier de l’École Centrale de Paris, qui est aujourd’hui
à Châtenay-Malabry, vient de démarrer à Saclay. L’ENS, un peu isolée
aujourd’hui à Cachan, va également s’y implanter, de même que
AgroParisTech, qui regroupe aujourd’hui deux implantations parisiennes,
le pôle de Grignon, et l’école de l’industrie agroalimentaire de Massy.
L’école des Telecom, ainsi que l’Ensae, l’école de l’Insee, dont le
chantier a également démarré, figurent aussi parmi les prochaines
implantations. De même, un gros projet est en cours dans le domaine de
la pharmacie, de la biologie et de la chimie, incluant le déménagement de
la faculté de pharmacie de l’université Paris Sud, aujourd’hui installée à
Chatenay-Malabry. […] L’investissement public immobilier pour
l’enseignement supérieur et la recherche représente environ 2 milliards
d’euros.
[…] Vous souhaitez rapprocher également les entreprises et le monde
académique ?
En effet, nous voulons créer davantage de synergie entre les entreprises,
et entre ces dernières et le monde académique, qui se sont eux aussi
joyeusement ignorés jusque-là.
Le volet transport est également essentiel ?
…[Je compte] surtout sur le projet de la ligne 18 du Grand Paris Express
[…] Ce premier tronçon, d’Orly à Massy puis jusqu’à Saclay, sera donc
achevé en 2024 […]
Que répondez-vous à ceux qui estiment que seul Paris est réellement
attractif, et que vous en êtes trop éloigné ?
[…] Je dis souvent que l’Île-de-France représente la première région
universitaire du monde. Mais personne ne le sait, à cause de son extrême
fragmentation.
Vous allez également bâtir des logements ?
Nous sommes très attachés, je le répète, à faire en sorte que ce pôle soit
vivant. C’est pourquoi l’aménagement constitue un sujet majeur. »
Source : Journal du Grand Paris (JPG) du 2 mai 2015
(disponible sur : www.lejournaldugrandparis.fr/pierre-veltz-
a-lheure-de-linnovation-ouverte-saclay-est-recherche-pour-
la-richesse-de-son-ecosysteme/).
Figure 6.3 : Le plateau de Saclay
Commentaire
• L’aménagement du plateau de Saclay est un des sites majeurs
d’aménagement du Grand Paris.
• Le premier objectif est une meilleure coopération entre les différentes
universités et écoles. Actuellement dispersées sur le plateau et à ces
abords, ces écoles, jalouses de leurs histoires et de leurs spécificités, ont
peu de collaboration.
• Le deuxième objectif est de construire un « campus urbain » pour relier ces
écoles entre elles et les insérer dans une véritable ville. Il convient alors de
convaincre de la nécessité d’un tel projet les différentes communes du
plateau et d’ouvrir les sites d’enseignement, actuellement relativement
fermés.
• Le troisième enjeu est de mieux relier ce secteur, actuellement très mal
desservi par les transports en commun, à l’ensemble de la région urbaine
de Paris.
• Il s’agit de faire de ce secteur un moteur du développement économique de
l’Île-de-France, à l’image de la Silicon Valley qui tire le développement de
la région de San Francisco. Au-delà de la coopération historique entre
certaines grandes écoles et les industries présentes dans le sud-ouest de
l’Île-de-France, notamment le complexe militaro-industriel et l’industrie
automobile, il s’agit de favoriser un tissu dynamique de petites entreprises
innovantes.• Le projet du plateau de Saclay est assez typique d’une forme
d’aménagement urbain classique, avec un fort pilotage par l’État, fortement
dépendant d’investissements en infrastructures. Mais, il se distingue de ce
modèle classique par les vertus qu’il attend de la « diversité urbaine »
autour du campus.
Chapitre 7
Objectifs
• Connaître des traditions différentes d’aménagement du territoire.
• Comprendre les possibilités et les limites de l’aménagement du territoire
pour réduire les inégalités entre régions.
• Appréhender les enjeux géopolitiques de l’aménagement du territoire.
La réduction des écarts de développement entre les régions d’un même pays
est au fondement des politiques d’aménagement du territoire de nombreux
États européens. Depuis le début des années 2000, l’Europe est marquée par
un nouveau type de séparatisme régional. Au cours des années 1970, un
régionalisme culturel avait fait un retour, par exemple en Corse ou au Pays
basque, pour affirmer une langue et des pratiques spécifiques. Le nouveau
séparatisme est principalement fiscal. De nombreuses régions riches
d’Europe sont marquées par des velléités d’indépendance, ou tout au moins
de moindre solidarité fiscale et sociale avec les régions pauvres de leur
État : la Flandre en Belgique, la Plaine du Pô en Italie, l’Écosse en Grande-
Bretagne ou encore la Catalogne en Espagne. La question des inégalités
régionales de développement prend donc une nouvelle actualité politique en
Europe.
Les États européens sont tous marqués par de puissants systèmes publics
de redistribution territoriale des richesses à travers les systèmes de retraite,
la socialisation d’une partie des systèmes de santé, les aides sociales ou
encore les traitements des agents publics. Ces mécanismes réduisent les
écarts de revenu entre les régions, mais ne suffisent pas à combler les écarts
de développement. Nous présentons la trajectoire de trois pays européens
qui ont mené des politiques volontaristes pour développer leurs régions
pauvres : l’Italie, le Royaume-Uni et l’Allemagne.
Source : d’après Rivière D., 2004, L’Italie. Des Régions à l’Europe, Paris,
Armand Colin, coll. « U ».
Le déclin des villes de l’Est a atteint une telle ampleur en 2000 qu’il y
avait plus d’un million de logements vacants, soit 13 % du parc immobilier.
Le gouvernement a mis en place un programme de soutien aux communes
pour les aider à restructurer les quartiers particulièrement affectés par le
déclin démographique. Ce programme appelé Stadtumbau Ost a concerné
269 villes, pour lesquelles des crédits de 2,7 milliards d’euros ont permis
entre 2002 et 2009 de transformer le cadre urbain. Avec ce programme, il
s’agit d’une part, de consolider les centres urbains et les quartiers
historiques de grande valeur architecturale en les réhabilitant, d’autre part,
de stabiliser le marché immobilier en procédant à la démolition de
400 000 logements environ. 90 % des démolitions ont concerné de grands
ensembles d’habitat collectif construits pendant la période soviétique.
Des investissements massifs ont également été menés dans les
infrastructures. Les quarante ans de division de l’Allemagne ont entraîné la
coupure de la plupart des routes et voies ferrées est-ouest et la
réorganisation du réseau ouest-allemand selon des axes nord-sud. Après la
réunification, le gouvernement allemand a mis en place en 1991 un
programme de nouvelles infrastructures destinées à rétablir les connexions
entre les deux parties du pays. Ce programme de près de 40 milliards
d’euros, appelé unité allemande (Deutsche Einheit), est constitué de
17 projets dont 9 de modernisation ou de construction de voies ferrés, 7 de
projets autoroutiers et 1 pour la modernisation du Mittellandkanal. Ces
projets ont permis d’améliorer la rapidité et la fiabilité des relations entre
Berlin et les villes ouest-allemandes. La liaison ferroviaire entre Hambourg
et Berlin en ICE, mise en service en 2004, a permis de réduire à une heure
trente, un voyage qui durait quatre heures en 1990. Les projets autoroutiers
ont permis d’améliorer les relations internes aux nouveaux Länder. C’est le
cas de l’autoroute de la Baltique, de Lübeck à Stettin.
Étude de cas :
Le projet Northern Powerhouse
pour le nord de l’Angleterre
Document 1 : Northern Powerhouse
Source : http://northernpowerhouse.gov.uk
Commentaire
• Le discours de George Osborne, chancelier de l’Échiquier, illustre les
mutations de l’aménagement du territoire en Grande-Bretagne. Ce
nouveau plan pour le Nord se situe dans la continuité de la stratégie
présentée en 2004 par le gouvernement travailliste sous le nom de
Northern Way.
• Le développement du nord du pays n’est pas attendu par un surcroît de
redistribution publique, ni par une orientation territoriale par la puissance
publique des investissements privés. Le développement est attendu de
meilleures infrastructures de transport, d’une plus forte incarnation politique
des métropoles avec des maires élus au suffrage universel direct, enfin,
par une meilleure coordination des stratégies des universités et des
centres de recherche.
• Concernant les exécutifs métropolitains, ils avaient été supprimés en 1986
par le gouvernement de Margaret Thatcher parce que la plupart d’entre
eux, notamment celui de Londres, étaient dirigés par des travaillistes. Le
Grand Londres a été rétabli en 2000. Le gouvernement conservateur
actuel souhaite la généralisation de ce type de gouvernement métropolitain
pour responsabiliser l’échelon local.
• Concernant les transports, G. Osborne annonce des investissements pour
améliorer les relations entre les grandes villes du Nord. Toutefois, dans le
même discours, il rappelle le projet d’une deuxième ligne à grande vitesse
en Grande-Bretagne pour relier Londres au Nord, après la première qui
relie Londres au tunnel sous la Manche. Au regard du poids
démographique et économique de Londres, les investissements
ferroviaires vont d’abord mieux relier les villes du Nord à la capitale que les
villes du Nord entre elles…
• Cela peut rendre assez dubitatif sur la capacité des villes du Nord,
relativement distantes les unes des autres, à former ensemble une
métropole polycentrique, à la manière de la région de Francfort et de la
confluence du Rhin et du Main, ou de l’ensemble formé par Amsterdam,
Rotterdam, La Haye, Utrecht et Delft au sein de la Randstad hollandaise.
Chapitre 8
Objectifs
• Comprendre la genèse des politiques européennes de cohésion territoriale.
• Connaître les principales caractéristiques des politiques territoriales menées
par l’Union européenne.
• Comprendre les effets de ces politiques, notamment pour les régions les
plus pauvres.
3. Un schéma de développement
de l’espace communautaire
Synthèse
• La politique d’aménagement du territoire menée à l’échelle de
l’Union européenne est une expérience très singulière et originale. Elle est
l’illustration d’une volonté d’accroître la solidarité entre les États. Toutefois,
elle est relativement ambiguë. Elle repose sur des fondements intellectuels
et politiques assez mal établis.
• Par ailleurs, cette solidarité territoriale est contredite par des concurrences
fiscales et sociales entre pays qui en ruinent le principe. Comment justifier
une redistribution massive d’argents publics entre États quand certains
pratiquent un taux officiel d’imposition sur les sociétés (10 % en Lituanie,
12,5 % en Irlande), voire un taux implicite par des accords ad hoc,
manifestement incompatible avec la volonté d’un équilibre territorial du
développement ? En effet, le taux d’impôt sur les sociétés est de plus de
30 % en Allemagne, en France ou en Belgique.
• Les limites des politiques d’aménagement du territoire menées par
l’Union européenne sont le reflet du caractère inabouti de la construction
européenne. D’une certaine manière, le statu quo est intenable et on ne
peut sereinement envisager qu’une dilution progressive ou une intégration
beaucoup plus poussée. Il est difficile de rester au milieu du gué sans être
un jour emporté par les flots.
Étude de cas :
Les effets des politiques de cohésion pour
les « nouveaux » membres de l’Union
européenne
Document 1 : Évolution du PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat
des pays de l’UE (2004-2015)
Bulgarie 35 45 46
République tchèque 79 81 85
Estonie 55 68 74
Grèce 96 94 71
Croatie 57 63 58
Chypre 97 105 81
Lettonie 47 60 64
Lituanie 50 63 74
Hongrie 62 63 68
Malte 80 80 89
Pologne 49 54 69
Portugal 76 79 77
Roumanie 34 48 57
Slovénie 85 89 83
Slovaquie 56 71 77
Source : Eurostat.
Commentaire
• Hormis Chypre (pour des raisons d’éclatement du secteur bancaire) et la
Slovénie (qui avait déjà une situation plutôt favorable parmi les nouveaux
entrants), les pays membres de l’Union européenne depuis 2004
connaissent une amélioration sensible de leur produit intérieur brut en
parité de pouvoir d’achat depuis leur adhésion. Indéniablement, ces pays
se rapprochent, certes progressivement, de la moyenne européenne.
• Les situations sont toutefois contrastées entre un groupe de pays dont le
PIB s’accroît de plus d’un tiers depuis 2004 (les trois pays baltes, la
Pologne, la Slovaquie) et les autres pays. Par ailleurs, à l’intérieur même
des pays, les disparités entre les Régions urbaines, notamment autour des
capitales, et le reste du territoire national sont vives (doc. 2 : les régions
capitales de Varsovie, Budapest et Bucarest se détachent nettement).
• Avec le doc. 3, il convient de noter le contraste entre les nouveaux pays
« de l’Est » et les pays méditerranéens, notamment l’Espagne, le Portugal
et la Grèce. Depuis 2008, ces pays méditerranéens connaissent une
trajectoire économique peu favorable. Ayant profité de l’euro pour un
endettement peu coûteux, et parfois utilisé de manière peu pertinente les
fonds européens, ces pays ont été violemment secoués par la remontée
des taux d’intérêts sur leur dette souveraine.
• Il est bien sûr trop tôt pour faire un bilan de l’efficacité des politiques de
cohésion en direction des nouveaux entrants et de la robustesse des
investissements réalisés. Toutefois, on peut noter deux choses :
l’amélioration réelle des conditions de vie, une mutation sociale rapide
dans ces pays et une augmentation des inégalités qui contribue,
de manière paradoxale, à une montée de la défiance envers l’Europe dans
certains pays.
Chapitre 9
Objectifs
• Comprendre les notions de milieu, de résilience, de développement durable
et d’anthropocène.
• Différencier la « protection d’espaces naturels » et la recherche d’un
fonctionnement plus écologique des territoires.
• Connaître quelques exemples d’aménagement écologique du territoire.
1. De la « protection de la nature »
à l’anthropocène
Synthèse
• L’aménagement du territoire doit prendre en compte trois éléments :
protéger la société vis-à-vis des risques ; protéger les milieux vis-à-vis des
démarches prédatrices des sociétés ; repenser un nouveau rapport entre
environnement et société
• De nouveaux concepts sont créés pour penser ces nouveaux objectifs :
résilience, développement durable et anthropocène.
• Le ménagement des milieux repose deux questions centrales pour
l’aménagement du territoire, celui du partage de l’espace et celui de la
conciliation des temps : court terme de la finance et des modes, moyen
terme de l’économie et des valeurs, temps long des territoires.
Étude de cas :
Les projets énergétiques locaux
Document 1 : Qu’est-ce qu’un territoire à énergie positive ?
Le réseau des territoires à énergie positive (TEPOS) a été initié en 2011
afin de donner une visibilité aux démarches menées en milieu rural pour
la transition énergétique. Lancé par une organisation non
gouvernementale, le CLER, le réseau regroupe des associations, des
collectivités locales et des centres d’expertise sur l’énergie. Il est soutenu
par la Caisse des dépôts et Consignations, l’agence de l’environnement
et de la maîtrise de l’énergie, le Commissariat général à l’égalité des
territoires et de l’Union européenne.
« Un territoire à énergie positive vise l’objectif de réduire ses besoins
d’énergie au maximum, par la sobriété et l’efficacité énergétiques, et de
les couvrir par les énergies renouvelables locales (“100 % renouvelables
et plus”).
L’accomplissement de la transition énergétique représente la fin première
du territoire à énergie positive : elle répond aux enjeux fondamentaux du
changement climatique, de l’épuisement des ressources fossiles et de la
réduction des risques industriels majeurs à l’échelle du territoire.
[…] Le concept de “territoire à énergie positive” n’est pas que théorique :
plusieurs territoires européens (Güssing, Mureck, Prato-allo-Stelvio,
Dobbiaco, Wildpoldsried, Jühnde, Samsoe…) ont déjà atteint l’objectif.
En France, de nombreuses collectivités, territoires et acteurs se mettent
aussi en mouvement : ils se sont constitués en réseau pour accélérer et
renforcer leur démarche. »
Source : www.territoires-energie-
positive.fr/bul/presentation/qu-est-ce-qu-un-territoire-a-
energie-positive
Commentaire
• Les enjeux énergétiques peuvent trouver leur place dans les démarches de
développement économique et social des collectivités locales : ils peuvent
contribuer à résoudre des problèmes sociaux (coût de l’énergie pour le
chauffage, création d’emplois), faciltier la résolution de problèmes
environnementaux (épandage des lisiers par exemple), et contribuer à la
consolidation de filières agricoles et industrielles.
• Ces démarches renouvellent les démarches de développement local (voir
chapitre 4).
• Ces dynamiques locales peuvent rencontrer des difficultés, notamment face
aux logiques de gestion centralisée des réseaux, comme le réseau
électrique.
Chapitre 10
Objectifs
• Comprendre les raisons d’échecs de l’aménagement du territoire.
• Savoir déceler les principaux « ingrédients » de ces échecs pour en tirer
des leçons.
2. La place de l’automobile
dans l’aménagement du territoire français
Il est aujourd’hui de bon ton de ne pas se prononcer sur les limites de
l’usage de l’automobile en France. On craint, en évoquant les limites de
l’automobile, de passer pour un écologiste ringard, à la mode des années
1970. Maintenant, néanmoins, que l’on est conscient des problèmes causés
à la planète par la banalisation de l’automobile, l’air du temps est davantage
à la promotion des usages « nouveaux » de l’automobile. On vante le
partage de l’automobile, notamment grâce à la mise en relation que
permettent les téléphones numériques. Toutefois, il semble bon de
s’interroger sur l’héritage particulièrement « lourd » et difficile à gérer en
matière d’aménagement du territoire que constitue la dépendance
automobile.
Synthèse
• Immobilier espagnol, automobiles en France et un aéroport : les exemples
ici développés sont très divers, ils n’ont ni les mêmes « objets », ni les
mêmes temporalités, ni les mêmes acteurs.
• Pour autant, risquons-nous à une lecture transversale :
– La difficile remise en cause des certitudes. Ce qui à un moment et
en un lieu peut être une solution, ne l’est pas forcément plus tard ou
ailleurs. Pour l’automobile, l’erreur n’est pas totale : il s’agit d’un
problème de dosage de son usage. Alors qu’il était encore temps de
mieux canaliser son développement, au début des années 1970, les
réponses ont été trop timides. Pour l’aéroport de Nantes, ce qui a
semblé à une époque une solution apparaît aujourd’hui comme un
problème. En matière d’immobilier espagnol, les acteurs ont refusé
de reconsidérer leurs positions alors même que les abus du secteur
de la construction étaient manifestes…
– L’arbitrage entre temps court et temps long. C’est évident qu’il a été
rendu en faveur du court terme dans le cas de l’immobilier espagnol,
la chose est plus diffuse dans le cas de l’automobile ou de l’aéroport
en France. Néanmoins, il ne faut pas être naïf et bien voir que les
décideurs (et plus largement les habitants) prennent en compte
l’intérêt immédiat d’acteurs économiques, fût-ce parfois au détriment
de l’intérêt économique global et à long terme.
– Une évolution et une confrontation des valeurs. La notion de
développement durable a pu faire croire qu’il était possible de
concilier « économique », « social » et « environnemental ». Certes
ils peuvent être conciliables, mais selon des configurations très
diverses et des priorités différentes…
Étude de cas :
Les autoroutes urbaines à Lyon
Document 1 : Le réseau autoroutier lyonnais et sa transformation
Source : http://cpdp.debatpublic.fr/cpdp-anneau-
top/site/DEBATPUBLIC_ANNEAU_TOP_ORG/DOCS/DOCUMENTS_MAIT
RE_OUVRAGE/SYNTHESE_DOSSIER_MO_ADS_TOP_121.PDF
Commentaire
• Depuis une trentaine d’années, de nombreux citadins demandent une
réduction de la place accordée à l’automobile en ville afin de développer
davantage d’espaces publics pour la promenade et réduire le bruit routier.
De nombreuses villes cherchent à réduire la place accordée à l’automobile.
Certaines autoroutes ont été transformées (réduction de leur largeur,
destruction d’ouvrages aériens, etc.). Le viaduc Jean-Mermoz dans l’Est
lyonnais est un des exemples de cette politique. Ce viaduc, construit en
1973, constituait la partie terminale de l’autoroute A43.
• La métropole de Lyon envisage de requalifier les tronçons de l’A6 et de l’A7
qui passent au cœur de l’agglomération, notamment le long du Rhône. Les
vitesses seront réduites et l’aménagement de la voirie repensé afin de
transformer l’autoroute en boulevard.
• Ces décisions réduisent localement la place dévolue à l’automobile mais ne
contribuent pas, à l’échelle des agglomérations, à réduire de manière
significative les avantages d’accessibilité que procure l’automobile. Alors
que la place de l’automobile est réduite au centre de l’agglomération, un
projet de contournement routier est promu pour la périphérie à l’Ouest de
la métropole. Celui-ci est très débattu : faut-il limiter les nuisances
automobiles ou viser une transformation plus radicale des conditions de
mobilité ?
Conclusion
Le scénario de l’inacceptable
Les groupements intercommunaux en Normandie (1er janvier 2017)
Le schéma « Mobilité 21 »
Part des revenus résidentiels par zone d’emploi en 2010
Les pôles de compétitivité
Le réseau de métro du Grand Paris
Évolution de la population des petites villes de 1990 à 2013
Périodes de création des universités françaises
Les trois Italie
Les Albert Dock, Liverpool
Des évolutions démographiques constrastées en Allemagne
Northern Powerhouse
Zonage des aides de l’Union européenne
PIB par région en Europe en 2015
Évolution du PIB des régions européennes entre 2008 et 2014
Un quartier à l’arrêt à Saragosse
Notre-Dame-des-Landes
Le réseau autoroutier lyonnais et sa transformation
1. Nora P. (dir), 1997, Les lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 3 tomes, 1652 p.
2. Parmi ces ouvrages, on peut citer 50 ans d’aménagement du territoire d’Ariette Delamarre, Claude
Lacour et Muriel Thoin dont la 2e édition a paru en 2015 ou encore celui que j’ai dirigé avec ma
collègue Isabelle Geneau de Lamarlière, L’aménagement du territoire en France, paru en 2016, chez
le même éditeur, La Documentation française.
1. La ville et ses territoires, Paris, Gallimard, coll. « Essai », 1990, p. 20.
1. Vanier M., 2015, « 28 scénarios de prospective territoriale pour la France : relecture
transversale », L’Information géographique, vol. 79, no 2, p. 79-81.
1. Cantarelli C. C., Flyvbjerg B., 2015, « Decision Making and Major Transport Infrastructure
Projects : The Role of Project Ownership », in Hickman R. et alii, Handbook on Transport and
Development, Cheltenham, Edward Elgar, p. 380-393.
2. Offner J.-M., 1993, « Les effets structurants du transport : mythe politique, mystification
scientifique », L’Espace géographique, vol. 22, no 3, p. 233-242.
3. Bretagnolle A., 2014, « Les effets structurants des transports : une question d’échelle ? »,
L’Espace géographique, vol. 1, p. 63-65.
1. Pecqueur B., 2000, Le développement local, Paris, Syros-Alternatives économiques, 2e éd., p. 15.
2. Glon A., Pecqueur B., 2016, Au cœur des territoires créatifs. Proximités et ressources
territoriales, Rennes, Presses universitaires de Rennes.
3. Pecqueur B., op. cit., p. 15.
4. Talandier M., 2008, « Richesse et développement des territoires », Pour, 4, no 199, p. 53-59.
1. Rican S., Jougla E., Vaillant Z., Salem G., 2013, « Les inégalités territoriales de santé »,
in Laurent E. (dir.), Vers l’égalité des territoires. Dynamiques, mesures, politiques, Paris, La
Documentation française, p. 106-122.
2. Jousseaume V., 2002, « Diffusion et recomposition de l’offre médicale : l’exemple des Pays de la
Loire (1967-2000) », in Fleuret S., Séchet R. (dir.), La Santé, les soins, les territoires. Penser le
bien-être, Rennes, PUR, coll. « Espace et territoires », p. 33-49.
3. Baron M., 2004, « La formation supérieure en régions (France) », Cybergéo, Espace, société,
territoire, article 279, mis en ligne le 23 juin.
1. Demangeot J., 2009, Les milieux « naturels » du globe, Paris, Armand Colin, 10e éd.
2. Chakrabarty D., 2010, « Le climat de l’histoire : quatre thèses », La Revue internationale des
livres et des idées, no 15, janvier, p. 201.
1. Dupuy G., 1999, La dépendance automobile, Paris, Anthropos.