Vous êtes sur la page 1sur 7

Calcul stochastique appliqué à la finance


Volatilités stochastique, locale et implicite

Ioane Muni Toke

Draft version

Ce document rassemble de brèves notes de cours. Les résultats sont pro-


posés sans démonstration, les preuves ayant été données en amphi. Tous ces
résultats et leurs preuves peuvent être retrouvés dans les ouvrages et articles
donnés en référence.

1 La volatilité n’est pas constante

Parmi les défauts du modèle standard de Black & Scholes, on note en par-
ticulier les problèmes liés au caractère constant du paramètre de volatilité σ.
Plusieurs résultats empiriques soulignent l’inadéquation de cette hypothèse
aux données de marché :
– la distribution empirique des log-rendements d’un actif n’est pas une
gaussienne (ce phénomène a été observé dès les années 60 par exemple
par Mandelbrot (1963)) ;
– il existe un phénomène de “volatility clustering”, i.e. on observe que
de larges mouvements de prix sont souvent suivis d’autres larges mou-
vement de prix 1 ;
– la volatilité cotée sur un marché financier dépend du strike et de la
maturité d’une option (notion de “smile”/“skew” pour la surface de
volatilité implicite) ;
– ...

1. “large changes tend to be followed by large changes, of either sign, and small changes
tend to be followed by small changes” (Mandelbrot 1963)

1
ECP - Option Mathématiques Appliquées - Majeure Finance

2 Un modèle général de volatilité stochastique


On pose le modèle général de volatilité stochastique dans un espace de
probabilité (Ω, F, P) comme suit :
 p
dS(t) = µ(t)S(t) dt + v(t)S(t) dZ1 (t),
(1)
dv(t) = α(S, v, t) dt + β(S, v, t) dZ2 (t),

avec Z1 et Z2 deux mouvements browniens sous P de variation croisée


hZ1 , Z2 it = ρt. On cherche à déterminer l’équation d’évaluation d’un produit
dérivé sur le sous-jacent S, de prix V (S, v, t).
Pour pouvoir couvrir les deux sources aléatoires du modèle, on suppose
qu’il existe un produit de valeur V1 (S, v, t) échangé sur le marché. On con-
struit alors un portefeuille de valeur Π contenant le produit V , une quantité
−x du sous-jacent S et une quantité −x1 du produit V1 :

Π = V − xS − x1 V1 . (2)

Par le lemme d’Itô, on calcule dΠ. En écrivant la condition d’absence de


risque et d’absence d’opportunité d’arbitrage qui caractérisent un porte-
feuille de couverture, on montre qu’il existe une fonction f (S, v, t) telle que
la valeur V du produit soit solution de l’EDP suivante :
1 √ 1
Vt + vS 2 VSS + ρβ vSVSv + β 2 Vvv + rSVS + (α − f )Vv − rV = 0. (3)
2 2
En écrivant f = ϕβ, on montre que ϕ peut s’interpréter comme une
prime de marché du risque de volatilité. Dans la suite, on supposera toujours
que l’on travaille sous une probabilité risque-neutre P.

3 Le cas de deux processus autonomes


On suppose ici à la suite de Hull & White (1987) que les processus du
sous-jacent et de la variance sont totalement découplés :
 √
dSt = rSt dt + vt St dZ1 (t),
(4)
dvt = α(vt , t) dt + β(vt , t) dZ2 (t),

avec Z1 et Z2 deux mouvements browniens sous P indépendants. Alors on


peut montrer que la distribution terminale du sous-jacent ST est log-normale
conditionnellement à la variance totale moyenne sur la période [0, T ] :

ST  v̄T p 
ln v̄T N (r − )T ; v̄T T , (5)
S0 2
avec
T
1
Z
v̄T = vu du. (6)
T 0
Ioane Muni Toke Volatilités stochastique, locale et implicite

Notons C BS (K, T, σ) le prix du call européen dans le modèle de Black &


Scholes. Le résultat précédent permet d’écrire le prix C HW (K, T, (vt )) du
call européen dans notre modèle sous la forme :
Z
C HW (K, T, (vt )) = C BS (K, T, y)fv̄T (y)dy, (7)
R+

où fv̄T la densité inconditionnelle de la variance totale moyenne v̄T . Cette


densité est a priori inconnue, mais par un développement de Taylor de y 7→
C BS (K, T, y) autour de E[v̄T ], la formule précédente permet d’obtenir une
approximation du prix en fonction des grecques et des moments de v̄T :
1 ∂ 2 C BS
C HW (K, T, (vt )) ≈ C BS (K, T, E[v̄T ]) + Var[v̄T ] + . . . (8)
2 ∂σ 2

4 Le modèle de Heston
Le modèle de volatilité stochastique proposé par Heston (1993) peut
s’écrire comme suit sous P mesure risque-neutre :
 √
dSt = rSt dt + v S dZ (t)
√t t 1 , (9)
dvt = −λ(vt − v̄)dt + η vt dZ2 (t)
avec Z1 et Z2 deux mouvements browniens sous P de variation croisée
hZ1 , Z2 it = ρt.

4.1 Formule de Heston pour le call européen


Par des changements de variables classiques (renversement du temps
S r(T −t)
avec τ = T − t ; log-prix forward normalisé avec x = ln K e ), l’équation
d’évaluation générale (3) écrite avec les paramètres de Heston devient :
1 1 1
−uτ + vuxx + ρηvuxv + η 2 vuvv − vux − λ(v − v̄)uv = 0. (10)
2 2 2
On montre qu’en cherchant une solution à cette équation sous la forme
u(τ, x, v) = K [ex P1 (τ, x, v) − P0 (τ, x, v)] , (11)
on obtient deux EDP de solutions Pj , j = 0, 1, de conditions initiales
Pj (x, τ, v) = 1{x>0} , (12)
que l’on peut résoudre dans le domaine de Fourier (fonctions caractéristiques
des probabilités Pj ). On obtient alors la solution :
1 1 +∞
 
exp [Cj (τ, k)v̄ + Dj (τ, k)v + ikx]
Z
Pj (τ, x, v) = + Re , (13)
2 π 0 ik
avec C et D deux fonctions indépendantes de x et v.
Ceci définit donc une formule quasi-fermée pour le prix du call européen
standard dans le modèle de Heston.
ECP - Option Mathématiques Appliquées - Majeure Finance

4.2 Schémas numériques pour la simulation du modèle de


Heston
cf. amphi et cours de méthodes numériques

5 Volatilité locale
Dupire (1994) montre que pour un modèle de prix d’actif solution d’une
EDS de la forme :
dSt = µt St dt + σ(St , t)dWt , (14)
il existe une unique forme de volatilité σL (St , t) dépendant de l’état du sous-
jacent et de la date qui soit cohérente avec les prix de marchés des options
vanilles.

5.1 La formule de Dupire


Soit la dynamique pour le sous-jacent S sous la probabilité risque-neutre
P:
dS(t)
= (r(t) − q(t))dt + σL (St , t)dW (t), (15)
S(t)
avec W un brownien sous P et q le taux de dividende continu de l’actif S. On
note p(S, t; y, T ) la densité de transition conditionnelle du processus (St ).
Notons C(S, t; K, T ) le prix du call européen dans le modèle à volatilité
locale. On a alors la relation d’évaluation :
R Z
− tT ru du
C(S, t; K, T ) = e (y − K)+ p(S, t; y, T )dy. (16)

En dérivant partiellement deux fois par rapport à K la relation 16, on obtient


la relation de Breeden (Breeden & Litzenberger 1978) :
RT ∂2C
ru du
p(S, t; y, T ) = e t (S, t; y, T ). (17)
∂K 2
En dérivant partiellement par rapport à T et en utilisant l’équation de Kol-
mogorov forward vérifiée par p (cf.annexe A), on obtient :
R
Z
∂C − tT ru du ∂
= −rT C +e (y − K) (rT − qT )yp(S, t; y, T )dy
∂T y>K ∂y
(18)
1 − R T ru du ∂2 2
Z
2
+ e t σ
2 L
(y, T )y p(S, t; y, T )dy.
2 y>K ∂y

Ces intégrales peuvent se calculer par intégration par parties sous des hy-
pothèses raisonnables pour p densité de probabilité. On obtient la formule
de Dupire :
∂C ∂C
+ (rT − qT )K ∂K + qT C
σL2 (K, T ) = ∂T 1 2 ∂2C
. (19)
2 K ∂K 2
Ioane Muni Toke Volatilités stochastique, locale et implicite

On peut exprimer cette relation en fonction des dérivées partielles de la


volatilité implicite σimp plutôt que des prix en écrivant que le prix du call
européen dans le modèle à volatilité locale C L (K, T, σL ) est égal au prix du
call C BS (K, T, σimp (K, T ) calculé par la formule de Black & Scholes avec la
volatilité implicite.

5.2 Une approche formelle


Derman & Kani (1998) ont proposé une dérivation de la volatilité lo-
cale permettant de faire apparaı̂tre un lien entre un modèle de volatilité
locale et un modèle à volatilité stochastique. En reprenant formellement le
cheminement précédent (cf.amphi), on aboutit à la relation :

σL2 (K, T ) = E vT ST = K .
 
(20)

La variance locale s’interprète donc comme une moyenne de la variance


instantanée (stochastique) conditionnellement à l’état du sous-jacent.

6 Surface de volatilité implicite d’un modèle à vo-


latilité stochastique
6.1 Pricing en volatilité implicite dans un modèle à volatilité
stochastique
On considère un sous-jacent régi par un modèle de volatilité stochastique
général sous P probabilité risque-neutre :
 p
dS(t) = rS(t) dt + v(t)S(t) dZ1 (t),
(21)
dv(t) = α(S, v, t) dt + β(S, v, t) dZ2 (t),

avec Z1 et Z2 deux mouvements browniens sous P de variation croisée


hZ1 , Z2 it = ρt.
On évalue un call européen de strike K et de maturité T avec la formule
de Black & Scholes, en utilisant la volatilité instantanée déterministe vK,T (t).
En réutilisant les notations précédentes, on écrit le prix du call à la date t :

C BS (St , K, T, σ̄(t)), (22)

avec
T
1
Z
σ̄(t) = vK,T (u)du. (23)
T −t t

Notons maintenant C(S0 , 0, K, T, (v)) le prix du call européen à la date 0


dans le modèle à volatilité stochastique. On peut alors écrire (même payoff) :

C(S0 , K, T, (v)) = E e−rT C BS (ST , K, T, σ̄(T )) .


 
(24)
ECP - Option Mathématiques Appliquées - Majeure Finance

En appliquant le lemme d’Itô à (St , t) 7→ CBS et en remarquant que CBS


est solution de l’EDP de Black & Scholes pour la volatilité vK,T , on montre
que :

C(S0 , K, T, (v)) = C BS (S0 , K, T, σ̄(0))


Z T
1 −rT 2 ∂ 2 CBS

.
+E e St 2
(St , t) [vt − vK,T (t)] dt
0 2 ∂S
(25)
L’égalisation des deux prix nécessite donc que la volatilité implicite de
Black & Scholes σBS (K, T ) = σ̄(0) vérifie l’équation (implicite) suivante :
T E vt St2 ΓBS (St )
 
1
Z
2
σBS (K, T ) =  dt. (26)
E St2 ΓBS (St )

T 0

6.2 Le cas du modèle de Heston


La calibration d’un modèle de Heston conduit souvent à un smile de
volatilité implicite pour les courtes maturités moins prononcé que celui ob-
servé sur le marché. A long terme, la surface de volatilité générée par un
modèle de Heston reproduit mieux la surface de volatilité observée. Cette
observation est un argument pour l’introduction de processus à sauts pour
modéliser le cours du sous-jacent (cf.amphi suivant).

Références
Breeden, D. T. & Litzenberger, R. H. (1978), ‘Prices of State-Contingent
claims implicit in option prices’, The Journal of Business 51(4), 621–
651.
Derman, E. & Kani, I. (1998), ‘Stochastic implied trees : Arbitrage pricing
with stochastic term and strike structure of volatility’, International
Journal of Theoretical and Applied Finance 1, 61–110.
Dupire, B. (1994), ‘Pricing with a smile’, Risk 7.
Gatheral, J. (2006), The Volatility Surface : A Practitioner’s Guide, Wiley.
Heston, S. (1993), ‘A closed-form solution for options with stochastic volatil-
ity with applications to bond and currency options’, Rev. Financ. Stud.
6(2), 327–343.
Hull, J. & White, A. (1987), ‘The pricing of options on assets with stochastic
volatilities’, The Journal of Finance 42(2), 281–300.
Mandelbrot, B. (1963), ‘The variation of certain speculative prices’, The
Journal of Business 36(4), 394–419.
Wilmott, P. (2006), Paul Wilmott on Quantitative Finance, 2nd edn, Wiley.
Ioane Muni Toke Volatilités stochastique, locale et implicite

A Equation de Fokker-Planck (ou de Kolmogorov


forward)
La densité de probabilité conditionnelle p(x, t; y, T ) sous P d’un pro-
cessus stochastique X(t), 0 ≤ t ≤ T , solution de l’équation différentielle
stochastique
dX(t) = µ(Xt , t)dt + σ(Xt , t)dW (t), (27)
avec W mouvement brownien sous P, vérifie l’équation suivante :

1 ∂2 2

 ∂ ∂
p(y, T ) + (µ(y, T )p(y, T )) = (σ (y, T )p(y, T ))
∂T ∂y 2 ∂y 2 (28)
p(x, t; y, t) = δ(y − x)

Vous aimerez peut-être aussi