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Soliloque

TENDANCES
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PANORAMA
es fins d’année ne me réussissent d’hui encore. Cette nouvelle année va-t- À mon petit niveau, cette année qui
guère. Je n’aime pas trop les change- elle me ramener dans ses guêtres la béa- vient de prendre son ballot, m’a complè-
L ments. Je me sens en sécurité dans
mes habitudes. Une habitude est pertur-
titude que je cherche depuis bon nombre
d’années ? Je ne le pense pas. Je cultive
tement tourné le dos, comme une aman-
te insatisfaite. Aussi, je n’espère pas
bée, et je m’affole. Au fond de moi, je cette peur irraisonnée de voir le vide grand-chose de celle qui pointe le bout
sais que l’année à venir n’amènera rien prendre une proportion incontrôlable. Ce de son pied. Je prends les choses au
de nouveau ; du moins, pour moi. Je n’est franchement pas du pessimisme ; jour le jour ; si ce jour est heureux, je le
suis au creux de la vague depuis déjà c’est juste une lucidité assumée. «Souris serai également ; s’il est malheureux, je
quelques jours. La couleur noire prédo- à la vie, elle te sourira», disent certains le serai tout autant. Je ne soupèse rien
mine dans mes projections. À part le optimistes indécrottables ; ceux-ci sont de ce que me procurent les jours. Je n’ai
changement du 3 par le 4, quels change- imperturbables ! Ils arrondissent les vraiment pas envie de savoir le poids
ments pourrons-nous attendre ? Bof, à angles pour mieux passer les impondé- des événements. Je demeure en alerte,
rien du tout ! Je vois déjà, à deux jours rables. vigilant jusqu’à l’obsession. La compa-
de la fin décembre, une certaine fièvre Sincèrement, le sourire pèse très gnie des écrivains/poètes me tient chaud
toucher certains ; ceux-ci se préparent à lourd sur mes épaules. Je ne suis plus à au cœur. Je lis leurs cauchemars jusqu’à
festoyer la nuit du 31, pour accueillir le un sourire près qui, subitement, se épuisement. Je vis avec eux. Dans ma
premier jour de la nouvelle année. Ne transforme en rictus. J’ai annoncé la librairie habituelle, je les entends mur-
faut-il pas d’abord tirer le bilan des couleur ; je suis au creux de la vague, murer entre eux, se partageant ainsi leur
douze mois passés ? Je pense que si. Y surtout en ce moment où je tente ce soli- monde dans un échange titanesque. Là,
a-t-il eu un rêve de concrétisé ? Un visa- loque. Je ne m’adresse à personne, en je me sens à l’aise. Aussi, une année
ge aimé retrouvé ? Une richesse accom- particulier. Des amis me feront la leçon, peut s’en aller en dandinant du popotin,
j’en suis certain. Qu’ils le fassent ! Je ne je reste totalement indifférent ; je regar-
plie ? Une santé récupérée ? Je reste
peux pas les en empêcher. Fort de leur derai la nouvelle s’installer sans plus ;
dubitatif, néanmoins. Une fois le bilan
amitié, ils ont l’autorisation de (se) me elle annoncera qu’il y a une année de Youcef Merahi
fait, le quitus en main, on pourra se faire
poser des questions. Je n’ai pas à y plus dans l’escarcelle ; au fait, une merahi.youcef@gmail.com
tous les gueuletons du monde, se soûler
répondre ; les réponses sont dans le année de plus, ou de moins ? Voilà, sans
à fond la bouteille, danser jusqu’à épui-
texte, comme dit ce professeur un brin m’en rendre compte, je reviens au dilem- Abderrahmane Yefsah, constant et
sement, et accueillir cette satanée nou-
philosophe. Il se peut que l’âge interfère me de la bouteille à moitié pleine ou à vaillant face à sa terrible maladie, a choi-
velle année.
dans ce genre de situation ; c’est pos- moitié vide. si de quitter ce monde aux lendemains
Autrement, je préfère rester dans mon
sible. Au fait, où finit la jeunesse, où Le cœur n’est pas à la fête. Ni pour le funestes, juste le jour où nous lui avons
coin, à voir passer les jours, sans trop
commence la vieillesse ? J’ai été «ving- réveillon ni pour autre chose. L’intérêt rendu visite à l’hôpital, ne sachant quoi
de bougeotte, avec cet espoir chevillé au tenaire» (pardon pour les puristes de la dans la fête est d’être totalement en dire ni où mettre les yeux ; la larme aux
corps de vivre la nouvelle année sans langue), je suis septuagénaire. Mais où phase avec l’événement ; s’agissant yeux, Mustapha, Omar, Saïd et moi
trop de casse. Ni de bobos. Ni d’irrémé- sont donc les frontières ? Je ne les dis- d’une année (on est déjà le 1er janvier avons été obligés de respecter la fin de
diable. Fichtre, je me dis que j’ai le droit tingue pas du tout. C’est un peu l’histoire 2024 !) qui remplace une autre, il n’y a la visite ; une visite qui s’apparente à un
de voir la bouteille à moitié vide. En tout du clin d’œil ! Je n’ai pas ressenti mes vraiment pas de quoi fouetter un chat de adieu. Je n’ai pas fini de sécher la larme
état de cause, à moitié pleine ou à moitié vingt ans, comme je ressens ce jour le gouttière. Le compteur vient de défal- que l’ami Denis m’annonce le décès
vide, c’est la même quantité d’eau que poids de mes âges. quer au temps une journée. Déjà ! Aussi, d’Améziane Ferhani, un homme exquis
contient la bouteille. Depuis quelques Jetons un coup d’œil sur le monde. Y il faut certainement préparer le viatique au sourire permanent, compagnon de
années, je consomme le vide qui s’élar- a-t-il réellement un événement qui procu- pour la route, qui ne cesse de s’étaler plume depuis L’Unité. Comment dès lors
git autour de moi. J’ai vu des amis partir. re à l’humanité une once de bonheur ? devant des pas lourds par la marche for- accueillir cette nouvelle année avec les
Des amis proches pour lesquels j’avais La planète est assise sur des stocks cée. On n’a pas le choix ; on ne doit pas bras grands ouverts ? Kamel Bencheikh,
une véritable affection. Je me suis senti d’armes nucléaires à même de la détruire s’arrêter ; sinon on restera à jamais sur un revenant des confins des exils, écrit :
diablement seul ; je me sens seul aujour- en totalité. Il se trouverait certainement le bord de la route. Même si le cœur «Chaque jour est une morsure/Sur les
un dirigeant, malade de sa puissance, n’est pas à la fête, il faut néanmoins bords des dunes qui
pour appuyer sur le bouton fatidique. reprendre, comme un automate, la comé- s’estompent/Asphalte déroulé dans le
Les Américains ont bien rasé Hiroshima die du quotidien. Il faut insérer notre cercle des cailloux/Les jours sont une
Le Soir sur internet :

et Nagasaki, non ? Ce n’est pas un men- temps dans celui de la masse ; alors que souricière/Dans l’étendue glabre des
http:www.lesoirdalgerie.dz

songe historique que je sache. La peur – encore une fois – le cœur empile colère courbes/La mélancolie bat des pau-
e-mail : info@lesoirdalgerie.com

est toujours là ; elle sert de levier de et impuissance. Le tout est de pouvoir pières/Lacéré/Fané/Le poète gonfles
Le soir d’algérie domination. Une troisième guerre mon- mettre un pas devant l’autre pour mar- pages tourmentées/Le vent crée des
diale est une simple limite. Les spécia- quer, vaille que vaille, le chemin d’une catastrophes impatientes dans le cœur.»
listes en ont parlé lors de la guerre entre route impersonnelle. (In Là où tu me désaltères, Éd. Frantz

Violée du premier regard !


la Russie et l’Ukraine. C’est juste une Comment accueillir cette nouvelle Fanon, 2023).
simple limite, me semble-t-il. année avec aise et confiance quand l’ami Y. M.

POUSSE AVEC EUX !


ma peur panique à vous zieuter ? Manquerait plus que je
sois accusé de viol par chronique regardée à l’insu de votre
- Tu sors ?
Par Hakim Laâlam
plein gré consentant. Mais en attendant, et même avec mes
- Oui ! Je vais en ville faire des courses, prendre un pot, déambu-
hlaalam@gmail.com
yeux baissés, je me dois de faire quelque chose pour cette
ler un peu, et peut-être chiner chez deux ou trois brocanteurs. Je

gamine qui a manqué se faire violer par tout Ghaza. Mia, ma


serai rentré dans trois ou quatre heures. A temps pour voir la

chérie, d’abord, essaie de te calmer, visiblement tu es tout


page que je viens de lancer sur mon moteur de recherche s’affi-

excitée, limite hystérique. En même temps, je te comprends.


cher !

Je le serais à moins si je me retrouvais un jour perdu, dans


- Trois ou quatre heures ? Ça me semble un peu juste !

un village d’amazones sans pitié pour les mâles randon-


- ???

Je n’ose plus vous regarder dans les yeux ! Ah mais ! neurs. Une fois calmée, je t’informe des mesures urgentes
C’est que ça devient dangereux de regarder quelqu’un, en suivantes, prises rien que pour toi, fi khatrek, bark : distribu-
face. En un rien de temps, ta vie peut basculer. Qui me dit tion géante dans Ghaza et dans toute la Palestine occupée
que vous n’allez pas m’accuser de vous avoir violé ? de lunettes solaires indice 1 000, les plus opaques du mar-
Comment ça, je déraille ? Mais non ! Je ne déraille pas et je ché avec obligation pour la population locale, du moins ce
n’invente rien. Le concept est nouveau, tout juste mis sur le
qu’il en reste, de porter ces lunettes afin de dissimuler leurs
marché par Mia Shem, l’ex-otage israélienne de Hamas. Ne
yeux de dangereux pervers. Même les nourrissons morts en
me dites pas que vous avez raté ses interviews ? Elle en a
couveuse après les bombardements israéliens seront enter-
donné à tous les journaux, radios et télés du monde. On l’a
rés avec ces solaires. Idem pour toutes les autres victimes
même vue en prime time et duplexe sur les chaînes
palestiniennes assassinées par ton armée et enterrées au
Comédies et Animaux. Impossible de la rater ! Moi, j’suis
tombé dessus sur MTV. Et la petite Mia y disait et répétait ce Poclain, dans des fosses communes. On leur plaque sur
qu’elle débitait sur tous les autres médias : «Dans Ghaza, leurs yeux vitreux des lunettes noires, des fois qu’il leur
toute la population sans exception est terroriste. Ils m’ont viendrait à l’idée de se réveiller de nuit, de gratter la terre et
violée !» J’ai tout de suite vu qu’en face, la journaliste qui de remonter à la surface violer tout ce qui bouge. Non mais !
l’interviewait avait tressailli, sentant bien qu’elle tenait là le T’as raison Mia ! On ne va tout de même pas se laisser faire
scoop de sa carrière, celui après lequel elle court depuis et tripoter par ces sauvages, hein ? Allez ! C’est l’heure Mia.
qu’elle interviewe à la chaîne des boys et girls bands Les pilules roses d’abord. Oui 6 d’un coup, il s’agit d’un trai-
coréens. La voix un peu tremblante, elle relance alors Mia : tement… d’attaque. Ensuite, les bleues. Trois, pour te redon-
«Ils vous ont violée pendant votre captivité ? C’est cela que ner des forces et du tonus. Et pour finir, avant de ne surtout
vous nous dites aujourd’hui, en exclusivité pour le public de pas compter les moutons pour t’endormir, des fois que les
MTV ?» Sans se démonter — si j’ose dire — l’ex-otage moutons veuillent à leur tour te… sauter dessus et te violer
répond : « Oui ! Du regard. Ils m’ont violée du regard. Je de leur regard de biches ratées, tu peux fumer du thé pour
sentais dans leurs yeux qu’ils n’avaient qu’une envie, me rester éveillée à ton cauchemar qui continue.
violer !» Vous comprenez maintenant lorsque j’évoque ici H. L.

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