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La

construction
de l’État
libéral
1833-1868
Problématique
COMMENT L’ANCIEN RÉGIME S’EST-IL DÉFINITIVEMENT
EFFONDRÉ EN ESPAGNE ET PAR QUELLE
ORGANISATION POLITICO-SOCIALE A-T-IL ÉTÉ
REMPLACÉ ?

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CONTEXTUALISATION (1833-1868)
Le règne d’Isabelle II (1833 – 1868)

•1833 – 1843 : Les régences. Marie-Christine (1833-40), le général Espartero (1840–43). La première
guerre carliste. La Desamortización de Mendizábal.

•1843 – 1854 : La première partie du règne d’Isabelle II. (la décennie modérée)

•1854 –1868 : La deuxième partie du règne d’Isabelle II. Le biennat progressiste (1854-56).
La Desamortización de Madoz. Gouvernements modérés et d’Union libérale.

• La Révolution de septembre 1868 : « La Gloriosa ».

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La difficile mise en place d’une
01 monarchie libérale (1833-1856)
Restauration absolutiste en Espagne

La restauration absolutiste en Espagne est la période de l'histoire d'Espagne s'étendant entre 1814 et 1833, au
cours de laquelle le pays connaît un rétablissement de la monarchie absolue des Bourbons, après la guerre
d’indépendance.

La guerre d'indépendance espagnole opposa l'Espagne des Bourbons, le Portugal et le Royaume-Uni à la


France du Premier Empire entre 1808 et 1814, dans le contexte des guerres napoléoniennes. La guerre
commença en 1808, lorsque Madrid se souleva contre l’armée française occupant la capitale espagnole.
L’insurrection se généralisa à tout le pays après que Napoléon eut obtenu l’abdication du roi d’Espagne, Charles
IV, au profit du frère de l’empereur, Joseph I Bonaparte.

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L’armée française est attaquée par une guérilla, puis par l’armée britannique venue aider le Portugal, également
occupé par les troupes de Napoléon. En 1813, les soldats de l’empereur durent refluer (couler en sens contraire)
en deçà des Pyrénées ; l’invasion de la France par les Espagnols, Britanniques et Portugais, commandés par
Wellington, devenait imminente.

Après la guerre d'indépendance contre l'occupant français, les Cortès se réunissent à Madrid en octobre 1813.
Peu après, Napoléon reconnaît Ferdinand VII (Bourbon), fils de Charles IV, comme roi d'Espagne par le traité de
Valençay. Fort du soutien de la majeure partie de la population espagnole, celui-ci rentre dans sa capitale, le 22
mars 1814, par le chemin de Valence. Il reçoit alors, de la main d'un groupe de fidèles de la monarchie, le
manifeste des Perses, une déclaration favorable à une restauration absolutiste.

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1.1 La révolution libérale (1833-1840)

En Espagne, après deux essais ratés de construction de l’État libéral (1810-12, 1820-23) on arrive définitivement
à le réussir à partir de 1833 quand la Monarchie décide de convenir avec les secteurs plus modérés des libéraux,
la noblesse, la bourgeoisie (en général agraire) et l’armée, accepter une monarchie constitutionnelle. Il s’agit de
changer le système politique de l’Ancien Régime le moins possible et d’assurer le pouvoir aux mêmes groupes
sociaux et économiques qui l’avaient antérieurement. Voilà pourquoi la Monarchie va chercher toujours l’alliance
avec les libéraux modérés. Ce manque de volonté véritable de transformations libérales a conditionné tout le
temps la qualité démocratique des structures du nouvel État.

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1.1.1 Le rôle de la première guerre carliste (1833-1840)

Ferdinand VII meurt le 29 septembre 1833 avec une seule fille : Isabel II. Le 03 octobre 1833 son testament
désigne Maria Cristina de Bourbon, son épouse, la régente d’Isabelle II (mineure en ce moment).

2 candidats à la succession :

▪ Isabel II – pour être reine, il faut abolir « la Loi salique » (une femme ne peut pas être l’héritière de la
couronne).

▪ Carlos Maria Isidro (frère de Ferdinand VII).

Nous avons deux mouvements qui soutiendront chaque candidat et qui aboutiront à la première guerre carliste.

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Deux mouvances (mouvements) opposés :

❖ CARLISTES - Devise : « Dios, Patria, Fueros y Rey »

• Carlos Maria Isidro seul roi légitime.

• Défense de l’absolutisme et de l’Ancien Régime.

• Considèrent que l’église doit être l’institution structurant de l’ordre social.

• Soutiennent la société d’ordres et los fueros (loi, statut, coutume, privilège d’un État, d’une province ou d’une
ville.)

• Secteurs sociaux qui le forment : clercs, nobles, paysans et artisans pauvres, écrasés d’impôts imposés par
les libéraux et les effets de sa réforme agraire, laquelle pouvait les expulser de leurs terres.

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❖ PARTISANS D’ISABELLE .

• Régente de Maria Cristina (mère d’Isabelle II) et son entourage.

• Objectif : défendre la succession d’Isabelle II et réaliser les changements législatifs nécessaires pour
supprimer la loi salique.

• Secteurs sociaux qui le forment : fonctionnaires réformistes, bourgeoisie et travailleurs urbains espérant une
évolution libérale.

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La première guerre Carliste

Les Carlistes s’organisent en guérillas (combat mené par des groupes clandestins et caractérisé par des actions
ponctuelles en vue de déstabiliser un régime) et se situent dans les régions de Navarre et le Pays Basque. Aussi
aux Pyrénées de Catalogne, le nord de Castelló, le bas Aragon et les cantons (comarques) de l’Ebre.

D’un point de vue international, Carlos Maria Isidro reçoit le soutien de puissances absolutistes comme la
Russie, la Prusse et l’Australie, qui lui envoient de l’argent et des armes. Tandis que, Isabelle II reçoit le soutien
de l’Angleterre, la France et le Portugal.

Cette guerre a trois étapes :

▪ 1833-1835

▪ 1835-1837

▪ 1838-1840

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Étapes du conflit :

a) 1833-1835 : La guerre se fixe au nord :

✔ La zone nord est contrôlée au début de la guerre par les Carlistes (Pays Basque, Navarre et une partie des
pré-Pyrénées catalans) :

• Navarre : Carlos Maria Isidro s’installe à Navarre où il crée un état indépendant. Il gouverne en tant que
Carles V.

✔ Plusieurs succès carlistes, mais échec devant Bilbao :

• Tolosa (Guipúzcoa)

• Durango (Vizcaya)

• Vergara (Guipúzcoa)

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b) 1835-1837 de nouveaux fronts s’ouvrent et le camp d’Isabelle se renforce :

✔ Ramón Cabrera (militaire et carliste) réunit les foyers (foco) carlistes (bas-Aragon, Maestrazgo (région
d’Aragon) et nord du pays valencien).

✔ Expédition carliste de Miguel Gómez Damas (militaire et carliste) (fin juin 1836) et de Charles V (Carlos
Maria Isidro) 1837 qui échoue à conquérir Madrid.

✔ Succès des partisans d’Isabelle, aidés par les puissances étrangères (Angleterre, France, Portugal) comme
Baldomero Espartero (chef militaire et élisabéthain) à Luchana au Pays Basque (1836).

La bataille de Luchana a lieu entre le 1 et le 25 décembre 1836 quand l’armée élisabéthaine écrase les forces
carlistes qui assiègent Bilbao depuis le 25 octobre.

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c) 1838-1840 effondrement du mouvement carliste :

✔ Tensions dans les carlistes :

• Transactionistes : ils veulent réaliser des accords avec les libéraux.

• Intransigeants : ils défendent continuer la guerre à outrance.

✔ Paix de Vergara (31/08/1839) entre Moroto et Espartero

Traité signé entre le général élisabéthain Espartero et treize représentants du général carliste Moroto pour
donner fin à la première guerre carliste. Ce traité accorde :

• Respect des fueros basques et navarrais.

• Reclassement des carlistes dans l’armée.

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✔ Charles V s’exile et Ramón Cabrera est vaincu en 1840.

Les intransigeants s’opposent au traité et bien s’exilent ou bien continuent à faire de la résistance. La répression
contre les généraux intransigeants comme Cabrera continuera jusqu’à 1840 quand il sera vaincu.

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1.1.2 Étapes de la révolution libérale (1833-1843)

Gouvernements de transition (1833-1836)

Après le testament de Ferdinand VII, Maria Cristina devient la régente, mais elle doit s’appuyer sur un Conseil
de gouvernement qui lui renseigne afin de réaliser la transition libérale.

Dans ce contexte, les élisabéthains ont besoin de support des libéraux pour que puisse régner Isabelle II. Avec
l’objectif de les convaincre, ils nomment un gouvernement de tournure absolutiste présidé par Cea Bermúdez, qui
a comme but instaurer quelques timides mesures pour faire plaisir aux libéraux.

Malheureusement, les réformes sont assez timides et les libéraux ne sont pas satisfaits. La réforme la plus
importante faite est la division en 49 provinces, division qui perdure aujourd’hui (50 provinces avec Ceuta et
Melilla).

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Sous la menace carliste et la pression populaire, la régente, Maria Cristina (mère d’Isabelle II), accepte l’alliance
avec les libéraux. Les élisabéthains donnent le pouvoir aux libéraux modérés (1834).

❖ Martinez de la Rosa (modéré) président du gouvernement.

❖ Statut Royal (1834) est mis en place, l’objectif est de convaincre aux libéraux en appliquant des réformes en
ligne avec leurs demandes :

▪ Souveraineté partagée roi vs Cortès

▪ Bicaméralisme : Chambre des députés et Parlement.

Deux chambres consultatives sont formées sans pouvoir. Les décisions prises doivent être approuvées par le roi
ou le régent.

▪ Suffrage censitaire (16.000 votants). Vote réservé aux personnes ayant payé un montant d’impôts.

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Parallèlement, dans ce gouvernement, il y a deux tendances politiques entre les libéraux :

❖ Modérés

❖ Progressistes (Mendizábal, futur président du gouvernement).

Pendant cette période, le climat révolutionnaire est vécu dans plusieurs villes :

Menace carliste provocant radicalisation.

Diffusion des idées progressistes grâce au retour de certaines libertés (presse et réunion).

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Progressistes au pouvoir (1835-1837)

La situation en Espagne est compliquée, il y a famine et les carlistes n’arrêtent pas d’attaquer les villes. Il y a
aussi des révoltes urbaines (été 1835).

La régente pour régler la situation décide de nommer un nouveau gouvernement en 1835 avec un libéral
progressiste en tête, Juan Álvarez Mendizábal.

Les objectifs de ce nouveau gouvernement pour démanteler l’Ancien Régime et créer une monarchie libérale,
constitutionnelle et parlementaire sont :

• Vaincre les carlistes

• Instaurer une monarchie parlementaire avec division de pouvoirs.

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• Transformer l’État en libéral :

❑ Les Cortès soient élues à travers des élections à partir d’une réforme du Statut Royal de 1834.

❑ Exécution d’une réforme agraire qui désamortisse (soumettre les biens à la vente publique) les terres de l’
Église, supprime les congrégations religieuses et supprime le régime seigneurial.

❑ Libéralisation économique : liberté des prix, de l’industrie et du commerce, ainsi que douanes intérieures et
dîmes (taxe) supprimées.

❑ Lois libérales :

❖ Censure supprimée

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❖ Approbation de la Constitution de 1837, elle restera en vigueur jusqu’à 1845 :

• Souveraineté nationale.

• Reconnaissance des droits des citoyens (liberté de presse, opinion, association).

• Séparation des pouvoirs : judiciaire, exécutif et législatif.

• Bicaméralisme : Chambre des députés et Parlement.

• Exécutif fort.

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Tenant compte de l’opposition de la cour et des modérés aux objectifs du nouveau gouvernement de Mendizábal,
Maria Cristina révoque le gouvernement progressiste en 1836 et place un gouvernement modéré.

L’intervention en politique de la régente dérange certains secteurs de la population et l’été de 1836 il y a une
révolte de La Granja (résidence d’été des rois). La régente est obligée à céder et à réincorporer les progressistes
au gouvernement, ainsi qu’accepter la Constitution de 1812 (première Constitution promulguée, publique
officiellement, qui reste en vigueur deux ans jusqu’à l’arrivée de Ferdinand VII au pouvoir en1814)..

Une fois les progressistes reviennent au gouvernement, Calatrava et Mendizábal seront en tête. Les réformes du
gouvernement progressiste antérieur interrompues par la régente sont rétablies.

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Gouvernement libéral modéré (1837-1840)

Après l’approbation de la Constitution de 1837, les modérés retournent aux élections. Ils gagnent les élections
du 22 septembre 1837.

L’objectif de ce nouveau gouvernement est de mettre en place certaines réformes qui paralysent les changements
radicaux de l’antérieur gouvernement progressiste.

Les mesures mises en place par ce gouvernement sont :

✔ Liberté de presse limitée.

✔ Rétablissement des dîmes (impôt sur les récoltes).

✔ Loi sur l’administration municipale (1840). Les maires sont nommés par l’état et ne sont pas choisis par le
peuple.

Cette loi n’est pas acceptée par les progressistes qui ont une grande partie des maires choisis par le peuple.
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Une vague de protestation contre Maria Cristina est provoqué à cause de ces mesures dans des grandes villes
comme Barcelone, Zaragoza et Madrid.

Maria Cristina, après son refus de retirer la loi municipale, décide de s’exiler et nomme comme régent à
Espartero en 1840 (général élisabéthain qui signe la Paix de Vergara pendant la première guerre carliste).

Régence d’Espartero (1840-1843)

Le gouvernement d’Espartero encourage des idées progressistes. Cependant, c’est un gouvernement imposé
par une vague de protestation, cela provoquera rapidement la perte de popularité.

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La première mesure qui prendra ce gouvernement est la suppression de la loi municipale, qui avait provoqué
une vague de protestation, afin de satisfaire les progressistes. Tout de suite, il convoque des élections aux Cortès
(1 février 1840) qui donnent une grande victoire aux progressistes. De cette manière, par manque de vraie
opposition au gouvernement, à cause de l’absence des modérés aux Cortès, cette opposition sera assumée par
une partie des progressistes.

Espartero décide de mettre en place une politique autoritaire qui lui provoquera sa propre chute :

• Droit de douane libre-échangiste de 1842. Accord par lequel Espagne diminue les impôts de douane aux
produits textiles des Anglais. Cet accord provoquera la ruine de la naissante industrie cotonnière catalane.
Cela provoque une révolte contre Espartero à Barcelone. Espartero en réponse décide de bombarder la ville
sans pitié.

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Lámina de 1843 donde se ilustra la sublevación de Barcelona en 1842 contra el general regente Espartero 32
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• Entourage de militaires. Espartero est accusé, par certains secteurs de l’armée et des partis modérés et
progressistes, de sa politique de nomination militaire, laquelle favorise uniquement aux membres de sa clique
(camarilla) militaire connus sur le nom des ayacuchos. Généraux qui avaient combattu dans la guerre
d’indépendance hispano-américaine avec Espartero.

Cette politique autoritaire n’est pas accepté par les modérés et elle crée un mécontentement général de la
population.

Pronunciamiento des modérés

En mai 1841, les tribunaux espagnols concèdent l'entièreté de la régence à Espartero. Le 19 mars 1841 aux
Cortès, des élections sont réalisées pour décider si la régence doit être réalisé par une seule personne
(espartistas) ou bien par trois personnes (trinitarios).

En ce moment, Marie-Christine s'installe à Paris, où elle est accueillie par le roi Louis-Philippe.
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L'ancienne régente réclame que la Régence lui soit confiée. Elle finit par annoncer la déclaration de la révolte
contre Espartero depuis Paris, avec Ramón María Narváez y Campos et Juan Prim à son côté pour les aspects
militaires et Antonio Alcalá Galiano et Andrés Borrego pour ceux politiques.

Dès septembre 1841, Espartero est mis au courant de la révolte. Les généraux favorables à Marie-Christine
sont dans l'obligation de précipiter leurs opérations, comme Léopold O'Donnel, qui lance la campagne militaire le
27 septembre à Pampelune, mais échoue à prendre la ville.

Peu de villes se rallient à la cause, comme Saragosse, Bilbao et Vergara. Le 7 octobre, deux généraux pénètrent
dans le palais royal pour objectif d'y enlever Isabelle II et sa sœur, Louise-Fernande, pour les emmener au pays
basque. Néanmoins, les deux hommes échappent et doivent fuir. Cet échec donne un terme à la tentative de
révolution. La plupart des révolutionnaires s'exilent, cependant, la condamnation à mort sont aussi nombreuses.

Pour finir, lors des élections municipales de décembre 1841, de nombreuses villes élisent pour la première fois
des conseillers républicains (Barcelone, Alicante, Séville, Cadix, Valence…,).
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Toute cette politique provoque que le 30 juillet 1843 Espartero s’exile et la majorité Isabelle II est proclamée
(âgée de 13 ans) et elle devient reine.

1.1.3 La décennie modérée (1844-1854)

Les élections de 1844 donnent la majorité aux modérés qui forment nouveau gouvernement présidé par Narváez,
qui aide Marie Cristina au pronunciamiento en 1841.

L’objectif du programme de ce nouveau gouvernement est :

✔ Fonder un État libéral

✔ Finir avec les tentations révolutionnaires, sociales ou démocratiques :

▪ Principes défendus : ordre, propriété et autorité.

▪ Libertés individuelles limitées.

▪ Souveraineté partagée : Cortès et couronne.

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Les réformes mises en place :

Création de la Guardia Civil (1844) qui remplace la Milice nationale.

Suppression de la Milice nationale (Troupe de police supplétive, formation militaire ou paramilitaire levée par
appel ou par enrôlement qui remplace ou renforce l'armée régulière).

Constitution 1845 : exécutif renforcé. Les lois sont faites aux Cortès avec le Roi (souveraineté partagée).

Réforme fiscale (loi Mon-Santillán de 1845). Cette loi établit un impopulaire impôt sur la consommation de
certains produits de première nécessité.

Loi électorale de 1846. Suffrage censitaire restreint à 1% de la population (seulement peuvent voter les
grands contribuables (qui paye les impôts) et personnalités remarquables de la culture, l’administration, l’église
et l’armée.

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Primera fotografía conocida
tomada a un Guardia Civil, en
Reinosa entre 1855 y 1857.

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Création de la loi d’administration locale 1845. Limite les compétences municipales et donne plus de pouvoir
au gouvernement.

Création du code pénal 1848. Ensemble de textes définissant les crimes, délits et contraventions ainsi que les
peines qui leur sont applicables.

Création du code civil 1850. Ouvrage réunissant l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires
relatives au droit civil.

Catholicisme, religion d’État et concordat avec la Santa Seu (1851):

• L’État maintiendra l’Église avec le budget de culte et clergé.

• L’État donne des compétences à l’Église dans le domaine de l’éducation morale et publique.

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En 1848, il y a une vague révolutionnaire qui se traduit par deux coups d’État échoués en mars et mai de la part
de certains secteurs progressistes, qui sont fatigués du gouvernement modéré et de la répression de Narváez. Ils
essayent d'inverser la situation à travers la force. L’échec est dû à la manque d'engagement de certains militaires
et à la grande capacité de réaction du gouvernement.

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Crise du système modéré

Le gouvernement modéré entre en crise. Son impopularité est grandissante à cause d’une instabilité excessive
(10 gouvernements entre 1844 et 1851) et la corruption de quelques dirigeants.

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Bravo Murillo, qui en 1851 remplace Narváez, essaye de créer une dictature technocratique (La technocratie
est une forme de gouvernement (d'entreprise, d'État) où la place des experts techniques et de leurs méthodes est
centrale dans les prises de décision), mais l’opposition parlementaire est trop forte et provoque sa chute.

À ce moment là, les modérés sont divisés en trois tendances :

▪ Conservateurs : favorables à un rapprochement avec les carlistes. (Balmes)

▪ Centristes : à l’origine de la plupart des réformes modérées. (Mon et Narváez)

▪ Puritains : opposés à l’autoritarisme et qui défendent une alliance avec les progressistes. (généraux Serrano
et O’Donnel)

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Les groupes d’opposition au régime sont :

▪ Les carlistes (minoritaires).

▪ Les progressistes (alliés aux modérés puritains).

▪ Les démocrates (l’extrême-gauche, forte et radicalisée dès 1835-1837 dans les villes comme Barcelone qui
défendent la souveraineté populaire, les libertés, la démocratie locale, les droits sociaux et la liberté de culte).

▪ Les républicains (démocrates les plus radicaux).

L’été 1854 (juin-juillet) éclate un pronunciamiento à Vicálvaro, Madrid, une révolte (la vicalvarada) déclenchée
par les progressistes, menés par le général O’Donnel, et les démocrates. Dès le 20 février 1854, des militaires
affiliés au parti démocrate tente de soulever la ville de Saragosse. Cette révolte marque le point de passage de la
Décennie modérée au Biennat progressiste.

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C’est alors que Cánovas del Castillo (historien et politique) rédige le Manifeste de Manzanares le 7 juillet 1854,
qui a pour but d'exposer la révolution d'O'Donnel et d'y rallier le plus grand nombre de personnes. Ce manifeste
demande aussi :

Parlementarisme véritable sans camarillas (personnes qui ont de l’influence de manière extra officielle dans les
affaires de l’État).

Des mesures libérales comme l’abolition de la loi électorale de 1846.

Des libertés locales.

Le rétablissement de la milice nationale (Troupe de police supplétive, formation militaire ou paramilitaire levée
par appel ou par enrôlement qui remplace ou renforce l'armée régulière).

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01 monarchie libérale (1833-1856)
Le 14 juillet 1854, les progressistes et démocrates lancent l'insurrection à Barcelone, où elle prend une ampleur
inespérée grâce à la participation des ouvriers. Ils continuent à Madrid dès le 17 juillet, où depuis la publication du
manifeste, les classes populaires sont mobilisées.

Le 17 juillet, la reine remplace le chef du gouvernement par Fernando Fernández de Córdova, pour tenter de
calmer la révolte.

Celui-ci forme un gouvernement en y intégrant des progressistes et des modérés, mais il démissionne deux jours
plus tard, en faveur d'Ángel de Saavedra. Ce dernier tente alors de réprimer le soulèvement de Madrid,
maintenant remplie de barricades, en attendant le retour de l'armée.

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1.1.4 Le biennat progressistes (1854-1856)

Avec la révolte de 1854, les progressistes accèdent au pouvoir. Espartero est le premier ministre. O’Donnel
devient ministre de la Guerre et forme le parti de l’Union libérale (1854), regroupant les puritains et l’aile droite
des progressistes.

Victorieux aux élections parlementaires et avec le soutien des démocrates, les progressistes introduisent des
réformes :

Politiques :

• Loi municipale pour que les maires soient élus et non nommés.

• Rétablissement de la milice.

• Préparation d’une constitution plus libérale, mais qui ne sera pas appliquée.

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Économiques :

• Loi de Désamortissement civil et ecclésiastique (1855). Réalisée par Pascual Madoz. Les biens de l’État, l’
Église, de l’armée, des institutions caritatives et des mairies peuvent être privatisés et mis à disposition pour la
vente.

• Investissements (rail, reforestation, infrastructures). Loi Générale des chemins de fer (1855) – construction
des lignes qui attire les entreprises de construction étrangères.

• Recherche d’investissements (sociétés par actions, avantages aux étrangers).

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La crise et chute du biennat progressiste

La situation du gouvernement du biennat est complexe. Le contexte est difficile et troublé par la question sociale :

▪ Malaise ouvrier dû aux crises et à un capitalisme sans encadrement légal. Cela provoquera :

❖ Grèves et révoltes comme en Catalogne 1855.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Gr%C3%A8ve_g%C3%A9n%C3%A9rale_de_1855_en_Espagne

❖ Revendications au droit d’association, limitation de l’horaire légal de travail.

▪ Contestation dans les campagnes fragilisées par les crises et les désamortissements (soumettre les biens à la
vente publique) :

❖ Révolte de 1857 en Andalousie.

https://es.wikipedia.org/wiki/Sucesos_de_El_Arahal

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La difficile mise en place d’une
01 monarchie libérale (1833-1856)
▪ Tentative de freiner la contestation ouvrière :

❖ Loi sur le travail : création d’associations ouvrières.

Face à cette crise, il y a une désunion des progressistes :

Aile gauche : se rapproche des démocrates.

Aile modérée : rapprochement avec l’Union libérale.

Espartero démissionne et il est remplacé par O’Donnel qui réprime les contestations avec le soutien de la reine
Isabelle II. À cause de cette répression, l’opposition augmente en contre du général. O’Donnel au lieu de
négocier, il s’impose militairement :

✔ Les Cortès sont fermées.

✔ La milice est supprimée.

✔ La liberté de presse est supprimée.

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02 La monarchie en crise (1856-1868)
2.1 Les gouvernements unionistes (1856-1863)

L’autoritarisme O’Donnel finit avec le biennat progressiste. Ce gouvernement est de tournure modérée. Dans
un premier moment sera O’Donnel qui prendra le gouvernement (14 juillet 1856), puis le général Ramon María
Narváez (12 octobre 1856), une fois O’Donnel soit destitué par ordre de la reine.
Actions politiques :
Pendant le gouvernement d’O’Donnel : rétablissement de la Constitution de 1845.
Durant le gouvernement de Narváez : Loi d’instruction publique. Loi Moyano 1857. Avec cette loi, le
gouvernement essaye d’améliorer la situation de l’éducation en Espagne qui avait un haut niveau
d’analphabétisme :
▪ Obligatoire de 6 à 9 ans.
▪ Gratuit pour les personnes qui ne peuvent pas le payer.
▪ Enseignement secondaire : on prévoit l’aperture des lycées pour réaliser le baccalauréat.
▪ Enseignement supérieur : Universités.
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En 1858, Isabelle II cesse Narváez du pouvoir et nomme O’Donnel comme chez du gouvernement à nouveau.
De cette manière commence le gouvernement unioniste d’O’Donnel qui restera jusqu’à 1863.
O’Donnel assure une relative stabilité, une politique visant à trouver un nouvel équilibre couronne/parlement :
✔ Dissolution des Cortès évitée.
✔ Retour du débat parlementaire.
✔ Acceptation de l’opposition parlementaire, même limitée par le contrôle gouvernemental sur les élections.
✔ Promotion de la Constitution de 1845.
✔ Expansion économique et d’infrastructures.
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Afin de mener une politique de prestige à l’extérieur, ce gouvernement réalisera :


Expéditions inutiles et couteuses avec l’objectif de montrer qu’Espagne est un empire puissant :
• Cochinchine (1858-1862)
• Mexique (1862)
• Saint-Domingue, Pérou (1866)
Campagne au Maroc - Affirmation territoriale et commerciale (1859-1860) :
• Victoires (Tetuán) (https://es.wikipedia.org/wiki/Batalla_de_Tetu%C3%A1n), extension de Ceuta et contrôle
d’Ifni (municipalité du Maroc).
• Véritable engagement populaire renforçant le nationalisme et le prestige des militaires (général Prim).

La cour cesse de soutenir O’Donnel qui présente sa démission en 1863.


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2.2. L’effondrement du régime sous les gouvernements modérés (1863-1868)


2.2.1. Retour de l’autoritarisme
Les modérés reviennent au pouvoir avec Narváez au gouvernement après un coup de force dicté par la reine.
Ils vont mettre en place une politique plus autoritaire qui sera répondue par une répression de toutes les
oppositions :
▪ La Noche de San Daniel le 10 avril 1865.
Révolte étudiante de l’Université Centrale de Madrid réprimée violemment par la Guardia Civil et l’armée. Les
étudiants étaient en train de faire une sérénade (serenata) à la Puerta del Sol comme soutient du doyen (rector)
de l’Université qui avait été licencié trois jours avant par ordre du gouvernement pour ne pas avoir renvoyer
certains professeurs d’université qui s’opposaient à la pédagogie établie par le gouvernement de Narváez. (9
morts et 100 blessés).
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▪ Soulèvement des sergents de San Gil.


Le soulèvement de la caserne d'artillerie de San Gil est une émeute militaire (un pronunciamiento selon
certains) ayant eu lieu le 22 juin 1866 à Madrid, dans l'espoir de renverser la reine Isabelle II. Initié par les
partis progressiste et démocratique, qui fut un échec.
En représailles, la répression envers la révolte est terrible, 66 sont fusillés près de la Porte d'Alcalá,
principalement les sergents d'artillerie, la dernière exécution ayant lieu le 7 juillet.
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2.2.2 La montée des oppositions dans un contexte de crise


La société est très mécontente à cause de l’intervention continue de la reine en politique, qui fait et défait les
gouvernements à sa volonté sans respecter les résultats des élections.
Oppositions multiples
▪ Démocrates/républicains : en clandestinité
▪ Progressistes : Juan Prim
▪ Unionistes : O’Donnel

En 1866, il y a une triple crise économique :


✔ Financière :
• Chute à la bourse des investissements ferroviaires.
• Crise des banques et gel du crédit.
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✔ Industrielle :
▪ Pénurie de coton.
▪ Hausse du prix des importations, affectant surtout le textile catalan.
✔ Agricole :
▪ Mauvaises récoltes
▪ Hausse des prix (par deux de 1865-1868)

Les conséquences de cette triple crise :


Hausse du chômage urbain.
Chute du niveau de vie.
Climat de tension sociale.
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Le 16 août 1866, à cause de la situation du pays, le pacte d’Ostende est signé à la ville belge d’Ostende entre
le parti progressiste et le parti démocrate, à l’initiative du général Juan Prim. L’objectif était finir avec la
monarchie d’Isabelle II d’Espagne qui culpabilisaient des maux de l’État.
Ils voulaient :
• Révoquer la reine et placer un autre roi.
• Convoquer des Cortès constituantes (nouveau gouvernement) au suffrage universel masculin.

En 1868 le parti Union Libéral s’ajoute à la signature de ce pacte. Ce pacte est l’origine de La Gloriosa,
révolution au mois de septembre 1868 qui finira avec la reine espagnole.
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