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ENSTA – Cours MA 102 2020–2021

Fiches Résumés – partie I


Tous les documents étant interdits au partiel et à l’examen,
ces fiches résument les résultats qu’il est demandé de connaı̂tre.

1 Topologie des espaces vectoriels normés


• Dans les espaces vectoriels normés, la convergence des suites et la continuité des applications
s’énoncent de la même manière que pour les suites réelles et les applications de R dans R : la
valeur absolue est simplement remplacée par la norme de l’espace vectoriel.
Définition (norme). Une application u 7→ kuk d’un espace vectoriel E dans [0, +∞[ est une
norme sur E si elle vérifie les trois propriétés suivantes (pour tous u, v ∈ E et λ ∈ R ou C) :

kλ uk = |λ| kuk (homogénéité),


ku + vk ≤ kuk + kvk (inégalité triangulaire),
(kuk = 0) =⇒ (u = 0) (séparation).

• Définitions (applications continues). Soient E et F deux espaces vectoriels normés munis


respectivement des normes k · kE et k · kF et soit f : E → F une application.
(i) On dit que f est continue en u0 ∈ E si et seulement si lim kf (u)−f (u0 )kF = 0, c’est-à-dire
u→u0

∀ε > 0, ∃η > 0 tel que ∀u ∈ E, ku − u0 kE ≤ η ⇒ kf (u) − f (u0 )kF ≤ ε.

(ii) f est une application continue sur E si elle est continue en tout u0 ∈ E.
• Lorsque l’application f : E → F est linéaire, on a le critère de continuité suivant.
Proposition. E et F sont deux espaces vectoriels normés munis respectivement des normes
k · kE et k · kF . Pour que l’application linéaire f : E → F soit continue sur E, il faut et il suffit
qu’il existe une constante C > 0 telle que,

kf (u)kF ≤ C kukE ∀u ∈ E.

• Définitions. (i) Soit E un espace vectoriel normé muni de la norme k · kE . Une suite (un )
d’éléments de E converge vers u ∈ E si et seulement si lim ku − un kE = 0, c’est-à-dire
n→+∞

∀ε > 0, ∃N > 0 tel que n ≥ N ⇒ ku − un kE ≤ ε.

(ii) On dit que la suite (un ) d’éléments de E est une suite de Cauchy lorsque,

∀ε > 0, ∃N > 0 tel que n ≥ N et m ≥ N ⇒ kum − un kE ≤ ε.

On montre facilement qu’une suite convergente est une suite de Cauchy. La réciproque est
vraie dans R, dans C et en fait dans n’importe quel espace vectoriel de dimension finie, mais
pas toujours dans un espace vectoriel de dimension infinie. Les espaces vectoriels normés dans
lesquels les suites de Cauchy sont convergentes sont dits complets. Un espace vectoriel normé
complet est aussi appelé un espace de Banach.

1
• Exemple. L’espace vectoriel C 0 ([a, b]) des fonctions continues sur un intervalle [a, b] ⊂ R
est complet pour la norme de la convergence uniforme kuk∞ = supx∈[a,b] |u(x)|, mais n’est pas
Rb
complet pour la norme de la convergence en moyenne kuk1 = a |u(x)| dx. Cet exemple illustre
une particularité des espaces de dimension infinie : contrairement au cas de la dimension finie,
deux normes ne sont pas nécessairement équivalentes.

2 Utilisation de l’intégrale de Lebesgue


2.1 Intégrale de Riemann et intégrale de Lebesgue
L’intégrale
R de Lebesgue prolonge la notion d’intégrale de Riemann : elle donne un sens à

u(x) dx pour une classe de fonctions beaucoup plus large. Les deux propositions suivantes
permettent d’utiliser les résultats usuels de la théorie de l’intégrale de Riemann pour évaluer des
intégrales de Lebesgue ou tester l’intégrabilité d’une fonction.
• Proposition (Riemann-intégrabilité et Lebesgue-intégrabilité). Soit [a, b] un intervalle com-
pact de R et u : [a, b] → C une fonction bornée. Si u est Riemann-intégrable sur [a, b], alors u
est Lebesgue-intégrable sur [a, b] et les deux intégrales coı̈ncident.
En revanche, il existe des fonctions intégrables au sens de Lebesgue qui ne sont pas Riemann-
intégrables. Par exemple, la fonction définie sur [0, 1] qui vaut 1 sur les nombres rationnels et 0
ailleurs est Lebesgue-intégrable et son intégrale vaut 0, mais n’est pas Riemann-intégrable.
• Proposition (intégrale de Riemann absolument convergente et intégrale de Lebesgue). Soient
]a, b[ un intervalle de R (borné ou non) et u : ]a, b[→ C une fonction localement Riemann-
intégrable (c’est-à-dire Riemann intégrable sur tout intervalle compact [c, d] ⊂ ]a, b[). L’intégrale
de Riemann généralisée de |u| sur ]a, b[ converge (autrement dit l’intégrale sur un compact [c, d]
admet une limite lorsque c → a et d → b) si et seulement si u est Lebesgue-intégrable sur ]a, b[.
Et dans ce cas, l’intégrale de Riemann généralisée de u et l’intégrale de Lebesgue de u sont
égales.
Par exemple, sur ]0, 1], 1/xα est Lebesgue-intégrable si et seulement si α < 1, et dans ce cas
Z 1
1 1
α
dx = .
0 x 1−α

• Le passage de Riemann à Lebesgue fait apparaı̂tre une nouvelle expression: “presque partout”
qui signifie “partout sauf sur un ensemble négligeable”. Un sous-ensemble A de R est dit
négligeable (ou de mesure nulle) si pour tout εS> 0, on peut Ptrouver une famille d’intervalles
]aj , bj [ ⊂ R, avec j ∈ J ⊂ N, telle que A ⊂ j∈J ]aj , bj [ et j∈J (bj − aj ) < ε. Si A est un
ensemble fini ou dénombrable de points, il est négligeable.
L’intégrale de Lebesgue ne fait pas de distinction entre deux fonctions qui diffèrent sur un
ensemble négligeable. Plus précisément, on a
Z
|u(x)| dx = 0 ⇐⇒ (u = 0 presque partout dans R).
R

2.2 Critères d’intégrabilité


• Pour Ω ⊂ Rn , on note L1 (Ω) l’ensemble des fonctions Lebesgue-intégrables sur Ω. La proposi-
tion suivante nous montre que l’intégrabilité au sens de Lebesgue n’est pas une affaire de signe.

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Proposition (i) Une fonction u : Ω → R appartient à L1 (Ω) si et seulement si
Z
|u(x)| dx < ∞.

(ii) Si |u| ≤ v presque partout dans Ω avec v ∈ L1 (Ω), alors u ∈ L1 (Ω).


• Le résultat suivant est très utile en pratique. Il permet d’intervertir une limite et une intégrale.
Théorème (convergence dominée). Soit (up ) une suite de fonctions définies sur un domaine Ω
de Rn à valeurs dans R ou C. On suppose que :
(i) La suite (up ) converge presque partout dans Ω vers une fonction u, soit

lim up (x) = u(x) pour presque tout x ∈ Ω.


p→+∞

(ii) La suite (up ) est dominée par une fonction intégrable, au sens où il existe une fonction
v ∈ L1 (Ω) telle que |up (x)| ≤ v(x) presque partout dans Ω.
Z Z
1
Alors u ∈ L (Ω) et lim up (x) dx = u(x) dx.
p→+∞ Ω Ω

2.3 L’espace fonctionnel L1


L’ensemble L1 (Ω) est un espace vectoriel pour l’addition des fonctions et la multiplication par
un scalaire. Il est naturel de le munir de la norme de la convergence en moyenne définie par
Z
kuk1 = |u(x)| dx pour u ∈ L1 (Ω).

Cependant, k · k1 ne constitue pas une norme sur L1 (Ω) car kuk1 = 0 n’implique pas que la
fonction u est nulle, mais seulement que u est nulle presque partout. Pour pallier ce défaut,
on abandonne l’espace L1 et on travaille avec l’ensemble des classes d’équivalence de L1 pour
la relation d’équivalence d’égalité presque partout. La structure d’espace vectoriel de L1 (Ω) se
transmet à l’ensemble des classes d’équivalence et on note L1 (Ω) le nouvel espace vectoriel.
• Théorème (complétude de L1 ). L’espace vectoriel L1 (Ω) muni de la norme de la convergence
en moyenne est complet.

2.4 Intégrales multiples


Soient X un domaine de Rn , Y un domaine de Rm et une fonction u : X × Y → C. Considérons
d’une part l’intégrale Z
IX×Y = u(x, y) dxdy,
X×Y
R
qui existe et est finie si u est intégrable sur X ×Y, autrement dit lorsque X×Y |u(x, y)| dxdy < ∞,
et d’autre part les deux intégrales itérées
Z Z  Z Z 
IX(Y ) = u(x, y) dy dx et IY (X) = u(x, y) dx dy.
X Y Y X

Dire que IX(Y ) existe et est finie signifie deux choses. D’une part l’intégrale “intérieure” a un
sens pour presque tout x, ce qui s’écrit

pour presque tout x ∈ X, la fonction y 7→ u(x, y) appartient à L1 (Y ).

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D’autre part l’intégrale “extérieure” a un sens, ce qui signifie que
Z
la fonction x 7→ u(x, y) dy appartient à L1 (X).
Y

Et IY (X) s’interprète de la même façon. Le théorème suivant établit quels sont les liens entre les
trois intégrales IX×Y , IX(Y ) et IY (X) .
• Théorème (Fubini). (i) Si u ≥ 0 presque partout, alors on a toujours IX×Y = IX(Y ) = IY (X) ,
au sens où si l’une elle est infinie, les autres le sont aussi, et si l’une d’elle est finie, les autres le
sont aussi et prennent la même valeur.
(ii) Si u ∈ L1 (X × Y ), les trois intégrales IX×Y , IX(Y ) et IY (X) sont finies et coı̈ncident.
Ce théorème s’utilise généralement en deux temps. On applique tout d’abord (i) à |u| pour
montrer que u ∈ L1 (X × Y ). On peut alors appliquer (ii) à u : on est en droit d’intervertir les
deux intégrales.
• Une conséquence importante de ce théorème concerne le produit de convolution dans L1 :
Proposition. On appelle produit de convolution des fonctions f et g ∈ L1 (R), la fonction notée
f ∗ g définie par Z +∞
f ∗ g(x) = f (y)g(x − y) dy.
−∞

On a f ∗ g = g ∗ f ∈ L1 (R) et kf ∗ gk1 ≤ kf k1 kgk1 .

2.5 Changement de variable


R
La formule de changement de variable permet de réexprimer une intégrale de la forme Ω u(x) dx
lorsque le domaine d’intégration Ω, ouvert de Rd , apparaı̂t comme l’image d’un autre ouvert
Ω̃ ⊂ Rd par une transformation

Φ : Ω̃ →
7 Ω
x̃ → 7 x = Φ(x̃) = (Φ1 (x̃), . . . , Φd (x̃))

Nous supposons que Φ est un C 1 -difféomorphisme, c’est-à-dire une bijection telle que Φ et Φ−1
sont toutes deux de classe C 1 . On peut alors définir le jacobien de Φ (déterminant de la matrice
jacobienne) par
∂Φ1 /∂ x̃1 (x̃) . . . ∂Φ1 /∂ x̃d (x̃)
JΦ (x̃) = .. .. .. .
. . .
∂Φd /∂ x̃1 (x̃) . . . ∂Φd /∂ x̃d (x̃)
En pratique, on utilise le critère suivant pour vérifier qu’une transformation Φ est un C 1 -
difféomorphisme: si Φ : Ω̃ → Ω est une bijection de classe C 1 telle que JΦ (x̃) 6= 0 pour tout
x̃ ∈ Ω̃, alors Φ est un C 1 -difféomorphisme.
Théorème. Soit u une fonction définie de Ω dans R. On a l’égalité
Z Z
u(x) dx = u(Φ(x̃)) |JΦ (x̃)| dx̃
Ω Ω̃

dans les deux cas suivants:


(i) u ≥ 0 presque partout (les deux intégrales pouvant être finies ou infinies);
(ii) u ∈ L1 (Ω), ce qui équivaut à dire que u ◦ Φ |JΦ | ∈ L1 (Ω̃) (dans ce cas, les deux intégrales
sont finies).

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2.6 Formule de Stokes
Cette formule, appelée aussi formule de Green-Ostrogradski ou théorème de la divergence,
généralise aux dimensions supérieures à 1 la formule fondamentale de l’intégration
Z b
u0 (x) dx = u(b) − u(a).
a

Théorème. Soit Ω un ouvert borné de Rd de classe C 1 et V : Ω 7→ Rd un champ de vecteurs


dont chaque composante Vi appartient à C 1 (Ω). On a alors
Z Z
∇ · V dx = V · n dσ,
Ω ∂Ω

où n = n(x) désigne la normale unitaire extérieure à ∂Ω et ∇ · V = ∂V1 /∂x1 + . . . + ∂Vd /∂xd la
divergence de V.

3 Propriétés des distributions


Pour un ouvert Ω de Rn , on désigne par D(Ω) l’ensemble des fonctions définies sur Ω de classe
C ∞ et dont le support est un compact inclus dans Ω.
• Définition (d’une distribution). Une forme linéaire T : D(Ω) −→ C est une distribution si
elle est continue, ce qui signifie que pour tout compact K inclus dans Ω, il existe une constante
CK > 0 et un entier mK tels que

|T (ϕ)| ≤ CK sup sup |∂ α ϕ(x)| , ∀ϕ ∈ D(Ω) avec Supp(ϕ) ⊂ K,


|α|≤mK x∈Ω

i=n
où α = (α1 , . . . , αn ) ∈ Nn désigne un multi-indice d’ordre |α| =
P
αi et on note
i=1

∂ |α|
∂α = .
∂xα1 1 . . . ∂xαnn
L’ensemble des distributions définies sur D(Ω) est noté D0 (Ω) et on utilise la notation hT, ϕi
plutôt que T (ϕ) pour désigner l’image d’une fonction ϕ par une distribution T.
• Exemples. Les distributions généralisent la notion de fonction. Plus précisément, la proposi-
tion suivante montre que les fonctions peuvent être considérées comme des distributions, si elles
sont localement intégrables sur Ω, c’est-à-dire intégrables sur tout compact inclus dans Ω.
R
Proposition. Soit f ∈ L1loc (Ω), la forme linéaire Tf : ϕ ∈ D(Ω) 7→ Ω f (x)ϕ(x) dx est une
distribution. De plus, si f et g sont deux fonctions localement intégrables sur Ω telles que
Tf = Tg , alors f et g sont égales presque partout sur Ω.
L’ensemble des distributions est bien plus vaste que celui des fonctions localement intégrables et
beaucoup de distributions courantes ne s’identifient pas à des fonctions. C’est le cas par exemple
de la masse Dirac δa définie pour a ∈ Ω par

hδa , ϕi = ϕ(a)

ou de la valeur principale de 1/x définie par


    Z
1 ϕ(x)
vp , ϕ = lim+ dx.
x ε→0 R\[−ε,+ε] x

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En général on ne peut pas multiplier deux distributions, mais pour une fonction f ∈ C ∞ (Ω) et
une distribution T ∈ D0 (Ω), on définit la distribution f T par la formule

hf T, ϕi = hT, f ϕi pour tout ϕ ∈ D(Ω).

On a par exemple : x vp(1/x) = 1.


• Dérivation au sens des distributions. La proposition suivante exprime une propriété
essentielle de D0 (Ω) : une distribution est toujours dérivable.
Proposition. Soit T ∈ D0 (Ω). La forme linéaire
 
∂T ∂ϕ
: ϕ ∈ D(Ω) 7−→ − T,
∂xi ∂xi

est une distribution que l’on appelle dérivée partielle de T par rapport à la variable xi .
0 0
Par exemple, la dérivée de δa est la distribution δa définie par hδa , ϕi = −hδa , ϕ0 i = −ϕ0 (a). La
dérivée de la fonction log |x| n’est autre que vp(1/x).
La dérivation au sens des distributions prolonge la dérivation usuelle des fonctions : si f est une
∂f ∂Tf
fonction dérivable sur Ω, la dérivée partielle s’identifie à la distribution .
∂xi ∂xi
Soit f une fonction de classe C 1 par morceaux sur R. Il existe donc n réels a1 , . . . , an tels que
f est de classe C 1 sur les intervalles ] − ∞, a1 ], [ai , ai+1 ] pour i = 1, . . . , n − 1, et [an , +∞[. La
dérivée au sens des distributions de la fonction f est donnée par la formule (dite des sauts),
n
X
0 −
f (a+

(Tf ) = T{f 0 } + i ) − f (ai ) δai ,
i=1


où {f 0 }(x) = f 0 (x) pour x ∈ R\{a1 , . . . , an }, f (a+
i ) = lim+ f (x) et f (ai ) = lim− f (x). Par
x→ai x→ai
exemple, la dérivée au sens des distributions de la fonction de Heaviside qui vaut 1 si x > 0 et
0 si x < 0 est la masse de Dirac δ0 .
• Division dans l’ensemble des distributions.

(i) Les distributions T ∈ D0 (R) solutions de l’équation (x − a)T = 0 sont de la forme T = kδa
où k est une constante réelle.

(ii) Les distributions T ∈ D0 (R) solutions de l’équation (x − a)2 T = 0 sont de la forme


T = k1 δa + k2 δa0 où k1 et k2 sont deux constantes réelles.

• Distribution à dérivée nulle. Les distributions T ∈ D0 (R) telles que T 0 = 0 sont les
distributions associées aux fonctions constantes.
• Définition (convergence dans D0 (Ω)). Une suite (Tn ) de distributions de D0 (Ω) converge vers
la distribution T ∈ D0 (Ω) si

lim hTn , ϕi = hT, ϕi, ∀ϕ ∈ D(Ω).


n→+∞

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