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Démonstration Tout à fait similaire à celle effectuée pour les applications linéaires, sauf en ce qui concerne (v)⇒(i)

(car il n’y a plus l’intermédiaire (vi)). Mais on a, si (a1 , a2 ) ∈ E1 × E2

u(x1 , x2 ) − u(a1 , a2 ) = u(a1 − x1 , a2 − x2 ) + u(x1 − a1 , a2 )


+u(a1 , x2 − a2 )

(facile) et donc, si (v) est vérifiée

u(x1 , x2 ) − u(a1 , a2 ) ≤ ka1 − x1  a2 − x2 


+ kx1 − a1  a2  + ka1  x2 − a2 

ce qui montre clairement la continuité (non uniforme) de u au point (a1 , a2 ).

Exemple 5.2.1 La formule v ◦ u ≤ v u montre que l’application bilinéaire de composition est continue sur les
espaces d’applications linéaires continues adéquats.

5.3 Espaces vectoriels normés de dimensions finies


5.3.1 Equivalence des normes
Lemme 5.3.1 Toutes les normes sur Rn sont équivalentes.

Démonstration Posons x = max |xi | et montrons que toute autre norme N est équivalente à cette norme. Soit
(e1 , . . . en ) la base canonique de R et x ∈ R . On a N (x) = N (
n n
xi ei ) ≤ |xi |N (ei ) ≤ max |xi | N (ei ) = βx.
i
On en déduit que |N (x) − N (y)| ≤ N (x − y) ≤ βx − y ce qui démontre que l’application N : (Rn , .) → R est
continue. Soit S = {x ∈ Rn | x = 1} ; S est une partie compacte de (Rn , .) (fermée bornée), donc l’application
N y atteint sa borne inférieure. Soit α = inf N (x) = N (x0 ). On a x0 = 0 (car x0 ∈ S) donc α > 0. Alors, si x ∈ Rn ,
x∈S
x x
x = 0, on a ∈ S soit N ( ) ≥ α soit encore N (x) ≥ αx. On a donc trouvé α et β strictement positifs tels que
x x
∀x ∈ R , αx ≤ N (x) ≤ βx, ce qu’il fallait démontrer.
n

Théorème 5.3.2 Sur un K-espace vectoriel normé de dimension finie toutes les normes sont équivalentes.

Démonstration Tout C-espace vectoriel normé étant aussi un R-espace vectoriel normé, il suffit de le montrer
lorsque le corps de base est R. Soit N1 et N2 deux normes sur E ; soit E = (e1 , . . . , en ) une base de E et
u : Rn → E définie par u(x1 , . . . , xn ) = xi ei (u est un isomorphisme d’espaces vectoriels). Alors N1 ◦ u et
N2 ◦ u sont deux normes sur R (facile), elles sont donc équivalentes, et donc il existe α et β strictement positifs
n

tels que ∀x ∈ Rn , αN1 (u(x)) ≤ N2 (u(x)) ≤ βN1 (u(x)). Mais tout élément de E s’écrivant sous la forme u(x), on a,
∀y ∈ E, αN1 (y) ≤ N2 (y) ≤ βN1 (y), ce qu’il fallait démontrer.

5.3.2 Propriétés topologiques et métriques des espaces vectoriels normés de dimen-


sion finie
Remarque 5.3.1 Tout C-espace vectoriel normé étant aussi un R-espace vectoriel normé, il suffit de considérer le
cas où le corps de base est R. Soit (E, .) un espace vectoriel
 normé de dimension finie, soit E = (e1 , . . . , en ) une
base de E et u : R → E définie par u(x1 , . . . , xn ) =
n
xi ei (u est un isomorphisme d’espaces vectoriels). Alors
N : x → u(x) est une norme sur Rn qui est équivalente à la norme .∞ ; de plus l’application u : (Rn , N ) → (E, .)
est une isométrie ; on en déduit que (E, .) a, en tant qu’espace vectoriel normé, les mêmes propriétés que (Rn , .∞ )
c’est-à-dire

Théorème 5.3.3 Tout espace vectoriel normé de dimension finie est complet ; les parties compactes en sont les fermés
bornés.

Corollaire 5.3.4 Tout sous-espace vectoriel de dimension finie d’un espace vectoriel normé est fermé.

Démonstration Muni de la restriction de la norme, il est complet, donc fermé.


5.3.3 Continuité des applications linéaires
Théorème 5.3.5 Soit E et F deux espaces vectoriels normés, E étant supposé de dimension finie. Alors toute
application linéaire de E dans F est continue.
Démonstration Soit E = (e1 , . . . , en ) une basede E ; comme toute les normes sur E sont équivalentes, on peut
prendre la norme définie par x = sup |xi | si x = xi ei . On a alors
 
u(x) =  xi u(ei ) ≤ |xi | u(ei )

≤ x u(ei ) = Kx

Ceci montre la continuité de l’application linéaire u.

Remarque 5.3.2 Ce résultat s’étend sans difficulté aux applications bilinéaires de E1 × E2 dans F à condition que
E1 et E2 soient de dimensions finies ; de même pour des applications p-linéaires.

5.4 Compléments : le théorème de Baire et ses conséquences


5.4.1 Le théorème de Baire
Théorème
 5.4.1 (Baire). Soit E un espace métrique complet et (Un )n∈N une suite d’ouverts denses dans E. Alors
Un est encore dense dans E.
n∈N

Démonstration Rappelons qu’une partie est dense si et seulement si elle rencontre tout ouvert non vide. Soit
donc U un tel ouvert de E, soit x0 ∈ U ∩ U0 (qui est non vide par densité de U0 et ouvert comme intersection de
deux ouverts). Soit r0 > 0 tel que B  (x0 , r0 ) ⊂ U ∩ U0 . Supposons xn et rn construits et voyons comment nous allons
construire xn+1 et rn+1 . Comme Un+1 est dense et B(xn , rn ) est un ouvert, Un+1 ∩ B(xn , rn ) est ouvert et non vide ; soit
rn
donc xn+1 ∈ Un+1 ∩ B(xn , rn ) et rn+1 < tel que B  (xn+1 , rn+1 ) ⊂ Un+1 ∩ B(xn , rn ) . On construit ainsi une suite de
2
r0
boules fermées B  (xn , rn ) telles que B  (xn+1 , rn+1 ) ⊂ B  (xn , rn ) avec rn < n . Le théorème des fermés emboı̂tés nous
 2
garantit que B  (xn , rn ) = ∅ (car δ(B  (xn , rn )) < 2rn tend vers 0). Mais on a B  (x0 , r0 ) ⊂ U ∩ U0 et pour n ≥ 1,
n∈N 

B (xn , rn ) ⊂ Un . On en déduit que U ∩ Un = ∅, ce qui achève la démonstration.
n∈N

En passant au complémentaire, on obtient une version équivalente

Théorème
 5.4.2 (Baire). Soit E un espace métrique complet et (Fn )n∈N une suite de fermés d’intérieurs vides de E.
Alors Fn est encore d’intérieur vide dans E.
n∈N

Exemple 5.4.1 On montre facilement qu’un sous-espace vectoriel de E distinct de E est d’intérieur vide (exercice).
On en déduit que, si E, espace vectoriel normé de dimension infinie, est complet, E (qui n’est pas d’intérieur vide)
ne peut pas être réunion dénombrable de sous-espaces vectoriels de dimension finie (dont on sait qu’ils sont fermés).
En particulier E ne peut pas admettre de base dénombrable. C’est ainsi que R[X] (qui admet une base dénombrable)
n’est complet pour aucune norme.

5.4.2 Les grands théorèmes


Nous en citerons trois qui concernent tous des applications linéaires dans des espaces vectoriels normés complets.

Théorème 5.4.3 (Banach-Steinhaus). Soit E un espace vectoriel normé complet et F un espace vectoriel normé. Soit
H un ensemble d’applications linéaires continues telles que

∀x ∈ E, ∃Kx ≥ 0, ∀u ∈ H, u(x) ≤ Kx

Alors il existe K ≥ 0 tel que ∀u ∈ H, u ≤ K.


Démonstration Posons pour x ∈ E, p(x) = sup u(x)(≤ Kx ) et considérons En = {x ∈ E | p(x) ≤ n}.
u∈H
Remarquons tout d’abord que En est fermé : en effet si (xq ) est une suite d’éléments de En qui converge vers x ∈ E,
on a pour tout u dans H, ∀q ∈ N, u(xq ) ≤ n ; en faisant tendre q vers +∞ et en utilisant la continuité de u, on
a encore u(x) ≤ n et donc x ∈ En . Maintenant notre hypothèse implique que chaque x de E appartient à l’un des
En (par exemple pour n = E(Kx ) + 1). Donc E qui est d’intérieur évidemment non vide est réunion d’une famille de
fermés. Le théorème de Baire implique que l’un des En est d’intérieur non vide : soit donc N ∈ N, x0 ∈ E et r > 0 tel
que B  (x0 , r) ⊂ EN . Prenons alors x ∈ B  (0, 1) et u ∈ H. Alors x0 + rx ∈ B  (x0 , r) et donc u(x0 + rx) ≤ N . Mais
1 1
alors u(x) = u(x0 + rx) − u(x0 ) ≤ (N + u(x0 ) = K. On a donc ∀u ∈ H, u ≤ K.
r r

Remarque 5.4.1 Sous les mêmes hypothèses, on montre alors facilement qu’une limite simple d’applications linéaires
continues est encore continue (attention à l’hypothèse E complet) ; en effet le théorème de Banach Steinhaus implique
que la suite est équicontinue (le module de continuité en x0 , η(ε, x0 ), ne dépend pas de n) et on montre simplement
qu’une limite simple d’une suite équicontinue est continue.

Théorème 5.4.4 (théorème de Banach). Soit E et F deux espaces vectoriels normés complets, et u : E → F linéaire,
continue, bijective. Alors u−1 est encore continue.

Démonstration On va montrer que u(B  (0, 1)) ⊂ F contient une boule de centre 0 dans F , B  (0, r1 ). On aura alors
r1
B  (0, r1 ) ⊂ u(B  (0, 1)), soit u−1 (B  (0, r1 )) ⊂ B  (0, 1) et donc si y ∈ F avec y ≤ 1, on aura u−1 ( y) ∈ B  (0, 1) soit
2
−1 2 −1
encore u (y) ≤ ce qui montrera que u est continue.
r1   
Soit r > 0. On a E = nB  (0, r), on en déduit que F = u(E) = nu(B  (0, r)) et a fortiori F = nu(B  (0, r)).
n∈N n∈N n∈N
L’espace vectoriel normé complet F qui est son propre intérieur est réunion d’une famille dénombrable de fermés ; donc
l’un d’entre eux (Baire) est d’intérieur non vide. Mais si nu(B  (0, r)) est d’intérieur non vide, il en est de même de
u(B  (0, r)). Soit donc y0 ∈ F et ρ > 0 tel que B  (y0 , ρ) ⊂ u(B  (0, r)). On a aussi (puisque l’application x → −x laisse
invariante B  (0, r)), B  (−y0 , ρ) ⊂ u(B  (0, r)), et alors, si y ∈ B  (0, ρ),

2y = (y − y0 ) + (y + y0 ) ∈ B  (−y0 , ρ) + B(y0 , ρ0 )

or
B  (−y0 , ρ) + B(y0 , ρ0 ) ⊂ u(B  (0, r)) + u(B  (0, r)) ⊂ u(B  (0, 2r))
(facile) et donc y ∈ u(B  (0, r)). On a donc trouvé, pour tout r > 0 un ρ > 0 tel que B  (0, ρ) ⊂ u(B  (0, r)). Les
translations étant des homéomorphismes, on a évidemment pour tout x ∈ E, B  (u(x), ρ) ⊂ u(B  (x, r)).
Montrons alors que sous ces hypothèses B  (0, ρ) ⊂ u(B  (0, 2r)). Soit en effet y ∈ B  (0, ρ). Soit ρn le réel associé à
r
par la propriété ci dessus. Quitte à remplacer les ρn par des réels plus petits, on peut supposer que ρn tend vers 0.
2n
r
On va construire un élément xn de E par récurrence de manière à vérifier xn+1 − xn  ≤ n et y − u(xn ) ≤ ρn . On
2
r
pose x0 = 0 ; supposons xn construit. On a donc y ∈ B  (u(xn ), ρn ) ⊂ u(B  (xn , n )) et donc on peut trouver un point
2
r
xn+1 ∈ B  (xn , n ) tel que y −u(xn+1 ) ≤ ρn+1 , soit y ∈ B  (u(xn+1 ), ρn+1 ), ce qui achève la construction par récurrence.
2
r r r r r
On a donc pour tout n, xn+1 − xn  ≤ n et y − u(xn ) ≤ ρn . On a xn+p − xn  ≤ n + n+1 + . . . + n+p−1 ≤ n−1 ,
2 2 2 2 2
ce qui montre que la suite (xn ) est une suite de Cauchy. Comme E est complet, elle converge. Soit x sa limite. On a
x − x0  ≤ 2r d’après l’inégalité ci dessus pour n = 0 et p tendant vers +∞. D’autre part l’inégalité y − u(xn ) ≤ ρn
et la continuité de u nous montrent que y = u(x), donc y appartient à u(B  (0, 2r)).
ρ
On a alors aussi B  (0, ) ⊂ u(B  (0, 1)), ce qui montre comme on l’a remarqué, que u−1 est continue.
2r

Théorème 5.4.5 (théorème du graphe fermé). Soit E et F deux espaces vectoriels normés complets, et u : E → F
linéaire. Alors u est continue si et seulement si son graphe est fermé dans E × F .

Démonstration Supposons tout d’abord que u est continue et soit (xn , u(xn )) une suite du graphe qui converge
vers (x, y) ∈ E × F . Alors lim xn = x et par continuité de u, lim u(xn ) = u(x) ; mais alors l’unicité de la limite
nécessite y = u(x), donc (x, y) est encore dans le graphe de u, ce qui montre bien que le graphe est fermé (il s’agit
là d’une propriété tout à fait générale des espaces métriques, mais la réciproque est fausse en général). Supposons
maintenant que u est linéaire de graphe Γ fermé. Alors Γ est un sous-espace vectoriel fermé de E × F , donc il est
complet. L’application Γ → E, (x, u(x)) → x est linéaire continue et bijective. D’après le théorème de Banach, sa
réciproque x → (x, u(x)) est continue et donc x → u(x) aussi.

Remarque 5.4.2 Il s’agit d’une technique importante ; il est en effet considérablement plus facile de montrer qu’un
graphe est fermé plutôt qu’une continuité ; si (xn ) est une suite de limite x, il s’agit de montrer non plus que la suite
u(xn ) converge vers u(x) mais plutôt que la suite u(xn ) ne peut pas avoir d’autre limite que u(x) ; un exemple typique
d’application linéaire de graphe fermé est la dérivation pour la topologie de la convergence uniforme : le théorème de
dérivation des suites uniformément convergentes ne fait que traduire la fermeture du graphe (si la suite des dérivées
converge uniformément, alors c’est vers la dérivée de la limite) ; attention cependant que la dérivation n’est pas
continue pour la topologie de la convergence uniforme (le théorème du graphe fermé ne s’applique pas car l’espace
des applications C 1 n’est pas complet).

5.5 Compléments : convexité dans les espaces vectoriels normés


5.5.1 Jauge d’un convexe
Soit E un espace vectoriel normé réel et K un convexe borné qui contient 0 dans son intérieur. On définit alors
une application jK de E dans R+ par
x
jK (x) = inf{λ > 0 | ∈ K}
λ
x x
Cette définition a bien un sens, car si B(0, r) ⊂ K, on a ∈ B(0, r) ∈ K dès que λ > .
λ r

Définition 5.5.1 La fonction jK est appelée la jauge du convexe K.

Proposition 5.5.1 Soit E un espace vectoriel normé réel et K un convexe borné qui contient 0 dans son intérieur.
Alors l’application jK vérifie
– (i) jK (x) = 0 ⇐⇒ x = 0
– (ii) jK (µx) = µjK (x) si µ ≥ 0
– (iii) jK (x + y) ≤ jK (x) + jK (y)
Si de plus K = −K, alors jK est une norme.

Démonstration ((i)) Puisque K est borné, soit M ≥ 0 tel que ∀y ∈ K, y ≤ M . Si jK (x) = 0, il existe une suite
x
λn tendant vers 0 telle que ∈ K, soit x ≤ M λn . On a donc x = 0. La réciproque est évidente.
λn
x µx
((ii)) est évident puisque ∈ K ⇐⇒ ∈K
λ µλ
x y 1 x y
((iii)) Supposons que et appartiennent à K. Comme K est convexe, λ et µ positifs, on a aussi (λ +µ ) ∈
λ µ λ+µ λ µ
x+y
K soit encore ∈ K. On a donc
λ+µ
x y x+y
{λ > 0 | ∈ K} + {µ > 0 | ∈ K} ⊂ {ν > 0 | ∈ K}
λ µ ν

En prenant les bornes inférieures on a donc jK (x + y) ≤ jK (x) + jK (y).


Si de plus, K = −K, on a jK (−x) = jK (x) et donc ∀µ ∈ R, jK (µx) = |µ|jK (x) qui était la seule propriété des
normes qui manquait.

Remarque 5.5.1 On a évidemment, x ∈ K ⇒ jK (x) ≤ 1 et jK (x) < 1 ⇒ x ∈ K, autrement dit BjK (0, 1) ⊂ K ⊂
Bj K (0, 1) ; si on suppose de plus que K est fermé, on a facilement K = Bj K (0, 1) ; autrement dit un convexe, fermé,
borné et équilibré (K = −K) est une boule fermée pour une certaine norme ; la réciproque étant évidente.

5.5.2 Projection sur un convexe fermé


Théorème 5.5.2 Soit E un espace euclidien et K une partie non vide, convexe fermée de E ; pour tout x de E, il
existe un unique élément pK (x) de K tel que d(x, pK (x)) = d(x, K). Pour y ∈ K, on a

y = pK (x) ⇐⇒ ∀z ∈ K, (x − y | z − y) ≤ 0

Démonstration Nous allons donner une démonstration de ce résultat qui ne fera pas appel à la dimension finie de
1
E, mais uniquement au fait qu’il est complet. Soit (yn ) une suite de K qui vérifie x − yn 2 ≤ d(x, K)2 + . L’égalité
n
de la médiane nous donne alors

yp − yq 2
= (yp − x) − (yq − x)2
= 2yp − x2 + 2yq − x2 − (yp − x) + (yq − x)2
yp + yq
= 2yp − x2 + 2yq − x2 − 4 − x)2
2
1 1 yp + yq
avec x − yp 2 ≤ d(x, K)2 + et x − yq 2 ≤ d(x, K)2 + . Mais comme K est convexe, ∈ K et donc
p q 2
yp + y q 1 1
 − x)2 ≥ d(x, K)2 . On a donc yp − yq 2 ≤ 2( + ). La suite (yn ) est une suite de Cauchy dans E, donc elle
2 p q
converge. Soit y sa limite dans E. Comme K est fermé, on a y ∈ K et on a évidemment en passant à la limite à partir
1
de d(x, K)2 ≤ x − yn 2 ≤ d(x, K)2 + , l’égalité d(x, K) = d(x, y).
n
Soit y ainsi trouvé et soit z ∈ K. Pour tout t ∈ [0, 1], (1 − t)y + tz ∈ K et donc x − (1 − t)y − tz2 ≥ x − y2 .
En développant, on obtient t2 y − z2 − 2t(x − y | z − y) ≥ 0. Pour t ∈]0, 1] on a donc ty − z2 − 2(x − y | z − y) ≥ 0
et en faisant tendre t vers 0, on obtient (x − y | z − y) ≤ 0.
Inversement supposons que ∀z ∈ K, (x − y | z − y) ≤ 0. Alors

x − z2 = (x − y) − (z − y)2


= x − y2 + z − y2 − 2(x − y | z − y)
≥ x − y2

avec égalité si et seulement si z = y. Ceci montre à la fois que d(x, y) = d(x, K) et que y est unique.

x
y
Remarque 5.5.2 La condition (x − y | z − y) ≤ 0 angle

→ yz)
correspond géométriquement à : l’angle (yx, −
→ est obtus
obtus. z

5.5.3 Hahn-Banach (version géométrique)


Remarque 5.5.3 Il existe plusieurs théorèmes à la Hahn Banach. Certains sont de type analytique et concernent des
propriétés de prolongement de formes linéaires ou de semi-normes d’un sous-espace vectoriel à l’espace tout entier.
D’autres sont de type géométrique et concernent des propriétés de séparation d’un convexe et d’un point ou de deux
convexes. Nous avons choisi ici d’en présenter une version géométrique simple.

Théorème 5.5.3 Soit E un espace vectoriel normé de dimension finie, K un convexe fermé non vide et x ∈ / K. Alors
il existe un hyperplan affine qui sépare strictement x et K, c’est-à-dire que x et K sont dans les deux demi-espaces
ouverts définis par l’hyperplan.

Démonstration Puisque toutes les normes sont x


équivalentes, on peut supposer que E est muni d’une y
norme euclidienne. Soit alors y la projection de x angle
sur le convexe K. L’hyperplan médiateur du segment obtus
[x, y] convient évidemment.
z

Remarque 5.5.4 Une autre façon de formuler le théorème est de dire que si K est un convexe fermé et x ∈
/ K, il
existe une forme linéaire f sur E telle que f (x) < inf f (y).
y∈K

Corollaire 5.5.4 Soit E un espace vectoriel normé de dimension finie, K1 un convexe compact non vide et K2 un
convexe fermé non vide tels que K1 ∩ K2 = ∅. Alors
(i) il existe un hyperplan H qui sépare strictement K1 et K2
(ii) il existe une forme linéaire f telle que sup f (x) < inf f (x)
x∈K1 x∈K2

Démonstration La fonction x → d(x, K2 ) est continue sur le compact K1 , donc atteint sa borne inférieure en x0 .
Il suffit alors d’appliquer la méthode précédente à x0 et à K2 .
5.5.4 L’enveloppe convexe : Carathéodory et Krein Millman
Définition 5.5.2 Soit E un R-espace vectoriel et A une partie de E. L’ensemble des convexes contenant A admet un
plus petit élément appelé l’enveloppe convexe de A : c’est encore l’ensemble des barycentres à coefficients positifs de
points de A.

Démonstration L’intersection de tous les convexes contenant A est encore un convexe contenant A et c’est le plus
petit. L’ensemble des barycentres à coefficients positifs de points de A est un convexe (les barycentres à coefficients
positifs de barycentres à coefficients positifs sont encore des barycentres à coefficients positifs) contenant A donc il
contient l’enveloppe convexe ; mais comme celle-ci est stable par barycentrage à coefficients positifs, elle doit contenir
tout barycentre à coefficients positifs de points de A, d’où l’égalité.

Théorème 5.5.5 (Carathéodory). Soit n = dim E. Alors l’enveloppe convexe de A est encore l’ensemble des barycen-
tres à coefficients positifs de n + 1 points de A.

Démonstration Il suffit évidemment de démontrer que si x est barycentre à coefficients positifs de p ≥ n + 2 points
 p
de A, c’est encore un barycentre à coefficients positifs de p − 1 points de A. Soit donc x = λi xi avec λi ≥ 0 et
 i=1
λi = 1. La famille (xi − xp )1≤i≤p−1 de E est une famille de p − 1 ≥ n + 1 éléments dans E de dimension n, donc

p−1
elle est liée. On peut trouver α1 , . . . , αp−1 non tous nuls tels que αi (xi − xp ) = 0. Posons αp = −(α1 + . . . + αp−1 ).
i=1

p 
p 
p 
p
On a donc αi xi = 0 avec αi = 0. Soit t ∈ R . On a alors x =
+
(λi − tαi )xi avec (λi − tαi ) = 1. Il
i=1 i=1 i=1 i=1
suffit alors de choisir t de telle sorte que ∀i, λi − tαi ≥ 0 avec pour un certain i0 , λi0 − tαi0 = 0 pour aboutir au
résultat souhaité. Or, si αi ≤ 0, on a évidemment λi − tαi ≥ 0. Il suffit donc de considérer les αi > 0 et de prendre
λi λi
t = min{ | αi > 0} = 0 .
αi αi0

Corollaire 5.5.6 Soit E un R-espace vectoriel de dimension finie et A une partie compacte de E. Alors l’enveloppe
convexe de A est encore compacte.

Démonstration Soit n = dim E,



C = {(λ1 , . . . , λn+1 ) ∈ Rn+1 | ∀i, λi ≥ 0 et λi = 1}

C est une partie compacte de Rn+1 (car fermée et bornée dans un espace vectoriel normé de dimension finie) et l’en-
veloppe convexe de A est l’image de l’application continue ϕ : C ×An+1 → E définie par ϕ(λ1 , . . . , λn+1 , x1 , . . . , xn+1 ) =

n+1
λi xi . Comme C × An+1 est compacte, cette image est compacte.
i=1

Remarque 5.5.5 Soit maintenant K un convexe. On peut essayer de trouver une partie minimale de K qui engendre
K, c’est-à-dire dont K soit l’enveloppe convexe. Une telle partie doit évidemment contenir les points de K qui ne
sont pas barycentres d’autres points de K (autrement que de façon triviale). Nous allons voir que pour un convexe
compact, ces points suffisent presque à engendrer K.

Définition 5.5.3 Soit K un convexe. Un point x de K est dit un point extrémal de K si on a

∀y, z ∈ K, x ∈ [y, z] ⇒ x = y ou x = z

Un sous-ensemble S de K est dit extrémal si

∀y, z ∈ K, ]y, z[∩S = ∅ ⇒ y ∈ S et z ∈ S

Lemme 5.5.7 Soit K un convexe compact, f une forme linéaire sur E, µ = sup f (x). Alors K  = {x ∈ K | f (x) = µ}
x∈K
est un sous-ensemble compact extrémal de K.

Démonstration En effet, soit y, z ∈ K, x ∈]y, z[∩K  ; on a f (x) = µ avec x = ty + (1 − t)z et t ∈]0, 1[. Alors
µ = tf (y) + (1 − t)f (z) avec t > 0, 1 − t > 0, f (y) ≤ µ, f (z) ≤ µ ; ceci n’est possible que si f (y) = µ et f (z) = µ, soit
y ∈ K  et z ∈ K  .
Théorème 5.5.8 (Krein-Millman). Soit E un R-espace vectoriel de dimension finie et K un convexe compact de E.
Alors K est l’adhérence de l’enveloppe convexe de ses points extrémaux.

Démonstration Nous montrerons ce résultat par récurrence sur dim E (le cas de la dimension 1 est laissé au
lecteur). Soit P l’ensemble des compacts extrémaux non vides de K. Remarquons que tout intersection d’éléments de
P est soit vide, soit encore dans P. Soit S ∈ P. Montrons tout d’abord que S contient un point extrémal. Si toute
forme linéaire f est constante sur S, alors S est un singleton réduit à un point extrémal. Sinon, soit f une forme
linéaire non constante sur S, µ = sup f (x) et S  = {x ∈ S | f (x) = µ}. Alors S  est un sous ensemble convexe compact
x∈S
de l’hyperplan H d’équation f (x) = µ. En vectorialisant cet hyperplan, on obtient par récurrence que S  admet un
point extrémal x.
Montrons par l’absurde que x est un point extrémal de K. Si x ∈]y, z[ avec y, z ∈ K, on a ]y, z[∩S = ∅, donc y ∈ S
et z ∈ S. Mais comme S  est un sous-ensemble extrémal de S et ]y, z[∩S  = ∅, on a y, z ∈ S  ; ceci contredit le fait que
x soit un point extrémal de S  . On a donc montré que toute partie compacte extrémale contenait un point extrémal.
Soit donc K0 l’adhérence de l’enveloppe convexe des points extrémaux de K. On a K0 ⊂ K et puisque tout ensemble
extrémal contient un point extrémal, K0 rencontre tout ensemble extrémal. Supposons que K0 = K et soit x ∈ K \ K0 .
D’après le théorème de Hahn Banach, il existe une forme linéaire f telle que f (x) > sup f (y). Soit µ = sup f (z) et
y∈K0 z∈K
S = {z ∈ K | f (z) = µ}. S est non vide (une fonction continue sur un compact atteint sa borne supérieure), extrémal
d’après le lemme précédent et S ∩ K0 = ∅ (car si y ∈ K0 , f (y) < f (x) ≤ µ). Donc S est un sous-ensemble extrémal
qui ne contient aucun point extrémal. C’est absurde. Donc K = K0 .

Exemple 5.5.1 Un polygone et plus généralement un polyèdre est enveloppe convexe de ses sommets.

Remarque 5.5.6 En dimension finie, on peut affiner le résultat en montrant qu’en fait K est l’enveloppe convexe
de ses points extrémaux, et pas seulement l’adhérence de l’enveloppe convexe. Ceci nécessite une version plus fine de
Hahn-Banach.

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