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INTRODUCTION AUX EUROCODES.

Rédigée à l’intention des élèves ingénieurs en génie civil par


Dr Kocouvi Agapi HOUANOU
Enseignant-Chercheur au Département du Génie Civil
École Polytechnique d’Abomey-Calavi.

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Chapitre 5 : Norme EN 1990- EUROCODE : Base de calcul des structures.
5.1. Généralités
5.1.1. Rôles des Eurocodes
• Les Eurocodes sont les normes européennes relatives à la conception et au calcul des
bâtiments et des ouvrages de génie civil.
• Ils permettent de s’assurer de la stabilité des ouvrages conformément aux exigences de
la Directive Produits de Construction (D.P.C. - 89/106/CEE). Ils prennent en compte
la résistance aux incendies et aux séismes.

Les Eurocodes n’imposent pas totalement et rigoureusement toutes les modalités de calcul des
structures. Il s’agit de textes permettant :
• certains choix au niveau national (annexe nationale)
• certains autres choix au niveau de chaque projet

La dérogation à une règle fixée par les Eurocodes est très difficile puisque ces règles
garantissent la conformité aux exigences de la Directive Produits de Construction. A défaut de
précisions dans l’annexe nationale, les « valeurs recommandées » indiquées dans les
Eurocodes peuvent être retenues dans le marché, ou définies dans le projet. Pour certains
produits, un niveau ou une classe de performance pourront être spécifiés. La vérification de la
conformité des produits aux spécifications constitue une tâche importante de la maîtrise
d’œuvre et relève de la responsabilité du maître d’ouvrage.

5.1.2. Développement des Eurocodes.


L’encadré ci-dessous donne un aperçu du développement des Eurocodes.

Quelques détails de du développement des Eurocodes sont exposés dans le tableau 5.1 ci-
après.

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Tableau 5.1 : Rappel des dates clés du développement des Eurocodes.
1971-1976 Première Directive européenne relative aux marchés publics de travaux
(1971) ; mise à l’étude d’un projet de référentiel technique européen pour le
jugement des appels d’offres.
1976-1990 Rédaction d’un premier ensemble de textes, sous l’égide directe de la
Commission, pour harmoniser les méthodes et les règles de calcul des
structures de génie-civil (Eurocodes)
• Enquêtes internationales (1980)
• Directive Produits de Construction (1989)
• Transfert au Comité Européen de Normalisation (CEN).
1990 - 1998 Travaux de mise sous forme normative des premiers Eurocodes (normes
provisoires ENV – ENV 1992-1 parue en 1992).
1998 - 2007 Transformation des Eurocodes provisoires (ENV) en normes EN (beaucoup
de changements pour l’Eurocode 2) puis en France sous l’appellation NF
EN (avec une annexe nationale)
2008- …. Maintenance et évolution des Eurocodes

5.1.3. Les différents Eurocodes et leurs applications.


Les Eurocodes constituent la base technique des marchés publics d’études de travaux
(directive 2004/18/CE). Ils sont publiés par le CEN sous forme de normes européennes EN
élaborées par le CEN/TC 250.

Ils sont au nombre de dix.


• Un Eurocode (NF EN 1990) traite des exigences fondamentales pour les constructions
et fournit les règles de formation des combinaisons d’actions pour diverses catégories
d’ouvrages (bâtiments, ponts, etc.) dans le cadre de la méthode des états-limites basée
sur l’emploi de coefficients partiels.
• Un Eurocode (NF EN 1991) traite de la détermination des valeurs représentatives des
actions applicables aux constructions à l’exception des actions géotechniques (traitées
dans la norme NF EN 1997) et des actions sismiques (traitées dans la norme NF EN
1998).
• Six Eurocodes (NF EN 1992 à NF EN 1996 et NF EN 1999) explicitent les règles de
calcul et les dispositions constructives des structures pour différents matériaux (béton,
acier,…) y compris les règles de vérification de la résistance aux incendies.
• Deux Eurocodes « transversaux » traitent des aspects complémentaires : calcul
géotechnique (NF EN 1997) et vérification de la résistance aux séismes (NF EN
1998).

Les 10 Eurocodes sont cités ci-dessous :


• Eurocode 0 (EN 1990) Bases de calcul des structures
• Eurocode 1 (EN 1991) Action sur les structures (remplace différentes normes, NV65,
N84, . . .)
• Eurocode 2 (EN 1992) Calcul des structures en béton (remplace le BAEL91 et le
BPEL91 en France)
• Eurocode 3 (EN 1993) Calcul des structures en acier (remplace le CM66 en France)
• Eurocode 4 (EN 1994) Calcul des structures mixtes acier-béton
• Eurocode 5 (EN 1995) Calcul des structures en bois (remplace le CB71 en France)
• Eurocode 6 (EN 1996) Calcul des structures en maçonnerie
• Eurocode 7 (EN 1997) Calcul géotechnique

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• Eurocode 8 (EN 1998) Calcul des structures pour leur résistance aux séismes
(remplace le PS92 en France)
• Eurocode 9 (EN 1999) Calcul des structures en aluminium

5.1.4. La structure des Eurocodes.


• Chaque Eurocode (sauf l’Eurocode 0) est divisé en plusieurs parties.
• Les dix Eurocodes constituent un ensemble de 59 normes (soit environ 5 000 pages).

5.1.4.1. Lien entre les Eurocodes.

Figure 5.1 : Lien entre les Eurocodes.

5.1.4.2. Les objectifs des Eurocodes.


Les États Membres de l’Union Européenne et de l’AELE reconnaissent les EUROCODES
comme documents de référence :
• pour prouver la conformité des ouvrages de bâtiment et de génie civil aux exigences
essentielles de la Directive de la Commission « Produits de construction »
(89/106/EEC), en particulier l’exigence essentielle n° 1 – résistance mécanique et
stabilité – et, en partie, l’exigence essentielle n° 2 – sécurité en cas d’incendie ;
• pour l’établissement des contrats pour les constructions et les services d’ingénierie ;
• pour l’établissement de spécifications techniques harmonisées relatives à des produits
de construction (Euro-Normes et Agréments Techniques Européens) AELE :
Association européenne de libre-échange – Islande, Norvège, Liechtenstein, Suisse

5.2. Exigences pour les constructions


Les différents articles des normes « Eurocode » se décomposent en deux principales
catégories.

Les Principes (P) sont des énoncés d’ordre général et des définitions ou des prescriptions qui
ne comportent pas d’alternative et qui sont des bases pour garantir les niveaux de
performances structurales. Ils sont à appliquer obligatoirement quelque soit le pays.

Les Règles dʼapplication sont conformes aux principes. Il est possible d’utiliser d’autres
règles sous réserve de démontrer leur conformité aux principes.

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Les Règles d'application qui peuvent être modifiées par l'Annexe Nationale. En général,
l'Eurocode propose une valeur recommandée qui peut être éventuellement modifiée dans
l'Annexe Nationale. Les Annexes Nationales pourront aussi contenir des compléments
d'information, des commentaires ou des méthodes de calcul dans la limite où les Principes de
l'Eurocode ne sont pas transgressés.

Les Eurocodes définissent des exigences fondamentales pour atteindre des niveaux de
performance appropriés en matière de fiabilité des constructions dont les quatre
composantes sont :
• la sécurité structurale pour les personnes et les animaux domestiques ;
• l’aptitude au service, fonctionnement, confort…
• la robustesse en cas de situations accidentelles ;
• la durabilité, compte tenu des conditions environnementales.

Le Tableau 5.2 propose à titre indicatif des catégories. Les valeurs données dans le Tableau
5.2 peuvent être également utilisées pour déterminer les performances en fonction du temps
(par exemple, calculs vis-à-vis de la fatigue).

Tableau 5.2 : Durée indicative d’utilisation des ouvrages.


Catégorie de durée Durée indicative d'utilisation
Exemples
d'utilisation de projet de projet (années)
a)
1 10 Structures provisoires
Éléments structuraux remplaçables, par exemple
2 10 à 25 poutres de roulement, appareils d’appui
3 15 à 30 Structures agricoles et similaires
4 50 Structures de bâtiments et autres structures courantes
Structures monumentales de bâtiments, ponts, et autres
5 100 ouvrages de génie civil
a) Les structures ou parties de structures qui peuvent être démontées dans un but de réutilisation ne doivent normalement
pas être considérées comme provisoires.

5.3. Introduction à la méthode des coefficients partiels


Dans la méthode des coefficients partiels, on donne aux variables de base (actions, résistances
et propriétés géométriques) des valeurs de calcul en utilisant des coefficients partiels et des
coefficients ψ, et une vérification est effectuée pour s’assurer qu'aucun état-limite concerné
n'a été dépassé.

Il existe en principe deux façons de déterminer les valeurs numériques des coefficients
partiels et des coefficients ψ :
a) La première consiste à calibrer les coefficients par rapport à une longue expérience
acquise dans la construction traditionnelle.
NOTE C'est le principe qui sous-tend la plupart des coefficients partiels et des coefficients ψ
proposés dans les Eurocodes actuellement disponibles.
b) La deuxième est fondée sur l'évaluation statistique de données recueillies en laboratoire ou
sur le terrain. Il convient alors d'opérer dans le cadre d'une théorie probabiliste de la
fiabilité.
c) Lorsqu’on utilise la méthode b), directement ou en combinaison avec la méthode a), il
convient de calibrer les coefficients partiels des états-limites ultimes pour différents
matériaux et actions de manière que les niveaux de fiabilité pour des structures
représentatives soient aussi proches que possible de l'indice cible de fiabilité.

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5.4. Variables de base
Les variables de base sont de trois ordres à savoir les actions, les résistances et les propriétés
géométriques.

5.4.1. Actions
(i) En principe, les actions doivent être classées de la manière suivante en fonction de leur
variation dans le temps :
• les actions permanentes (G), par exemple poids propre des structures, équipements
fixes et revêtements de chaussée, et actions indirectes provoquées par un retrait et des
tassements différentiels ;
• les actions variables (Q), par exemple les charges d’exploitation sur planchers, poutres
et toits des bâtiments, les actions du vent ou les charges de la neige ;
• les actions accidentelles (A), par exemple les explosions ou les chocs de véhicules.
NOTE Les actions indirectes dues à des déformations imposées peuvent être permanentes ou
variables.

(ii) Certaines actions, telles que les actions sismiques et les charges de la neige, peuvent être
considérées comme accidentelles et/ou variables, en fonction du lieu (voir les EN 1991 et
EN 1998).

(iii) Les actions dues à l'eau peuvent être considérées comme permanentes et/ou variables,
selon la variation de leur grandeur dans le temps.

(iv) Par principe, les actions doivent également être classées :


• selon leur origine, comme directes ou indirectes ;
• selon leur variation spatiale, comme fixes ou libres ; ou
• selon leur nature et/ou la réponse structurale, comme statiques ou dynamiques.

(iv) Il convient de décrire une action par un modèle, sa grandeur étant représentée dans les cas
les plus courants par un scalaire qui peut avoir plusieurs valeurs représentatives.
NOTE Pour certaines actions et vérifications, une représentation plus complexe des grandeurs
de certaines actions peut être nécessaire.

Par principe, la valeur caractéristique Fk d'une action est sa principale valeur représentative, et
doit être spécifiée :
• comme valeur moyenne, valeur inférieure ou supérieure, ou valeur nominale (ne
faisant pas référence à une distribution statistique connue) (voir l’EN 1991) ;
• au niveau du projet, pourvu que ce soit fait de façon cohérente avec les méthodes
décrites dans l'EN 1991.

5.4.2. Propriétés des matériaux et des produits


(i) Il convient de représenter les propriétés des matériaux (y compris le sol et la roche) ou des
produits par des valeurs caractéristiques.

(ii) Lorsqu'une vérification d'état-limite est sensible à la variabilité d'une propriété de


matériau, il convient de prendre en compte des valeurs caractéristiques supérieures et
inférieures de cette propriété.
Sauf indication contraire dans les EN 1992 à EN 1999 :
• si une valeur basse d’une propriété d’un matériau ou d’un produit est défavorable, il
convient de définir la valeur caractéristique comme étant le fractile 5 % ;

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• si une valeur haute d’une propriété d’un matériau ou d’un produit est défavorable, il
convient de définir la valeur caractéristique comme étant le fractile 95 %.

(iii) Par principe, les valeurs des propriétés des matériaux doivent être déterminées à partir
d'essais normalisés réalisés dans des conditions spécifiées. Un facteur de conversion doit
être appliqué lorsqu'il est nécessaire de convertir les résultats d'essais en valeurs supposées
représenter le comportement du matériau ou du produit dans la structure ou dans le sol.

(iv) Si l'on manque de données statistiques pour établir les valeurs caractéristiques d’une
propriété d'un matériau ou d'un produit, des valeurs nominales peuvent être prises comme
telles, ou des valeurs de calcul de la propriété peuvent être établies directement. Lorsque
des valeurs de calcul inférieures ou supérieures d'une propriété de matériau ou de produit
sont établies directement (par exemple coefficients de frottement, taux d'amortissement),
il convient de les choisir telles que des valeurs plus défavorables influent sur la probabilité
d'apparition de l'état limite considéré à un degré similaire à d'autres valeurs de calcul.

(v) Lorsqu'une estimation de la valeur supérieure de la résistance du matériau est nécessaire


(par exemple, pour des mesures de calcul en capacité et pour la résistance à la traction du
béton afin de calculer les effets des actions indirectes), il convient de prendre en compte
une valeur caractéristique supérieure de la résistance.

(vi) Les réductions de la résistance du matériau ou du produit à considérer, résultant des effets
d'actions répétées, sont définies dans les EN 1992 à EN 1999, et peuvent conduire à une
réduction de la résistance structurale avec le temps, par suite de la fatigue.

(vii) Il convient de représenter par une valeur moyenne les paramètres de rigidité
structurale (par exemple, modules d'élasticité, coefficients de fluage) et les coefficients de
dilatation thermique. Différentes valeurs seront utilisées pour tenir compte de la durée de
la charge.
NOTE Dans certains cas, une valeur inférieure ou supérieure à la moyenne du module
d'élasticité peut devoir être prise en compte (par exemple en cas d'instabilité).

(viii) Des valeurs des propriétés de matériaux ou de produits sont données dans les EN 1992
à EN 1999, ainsi que dans des spécifications techniques européennes harmonisées ou
d’autres documents. Si des valeurs sont tirées des normes de produits sans que
l'interprétation soit guidée dans les EN 1992 à EN 1999, il convient d’utiliser les valeurs
les plus défavorables.

(ix) En principe, si un coefficient partiel pour des matériaux ou des produits est nécessaire,
une valeur conservative vi) doit être utilisée, à moins que des informations statistiques
appropriées n'existent pour évaluer la fiabilité de la valeur choisie.

NOTE On pourra tenir compte, le cas échéant, du caractère non courant de l’utilisation ou des
matériaux ou produits employés.

5.4.3. Données géométriques


Par principe, les données géométriques doivent être représentées par leurs valeurs
caractéristiques ou (par exemple dans le cas d'imperfections) directement par leurs valeurs de
calcul. Les dimensions spécifiées dans le projet peuvent être prises comme valeurs
caractéristiques. Si leur distribution statistique est suffisamment connue, on peut donner aux

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grandeurs géométriques des valeurs correspondant à un fractile prescrit de la distribution
statistique. Les imperfections qu’il convient de prendre en compte pour le dimensionnement
des éléments structuraux sont données dans les EN 1992 à EN 1999.

De même, par principe les tolérances pour les pièces à assembler constituées de différents
matériaux doivent être compatibles entre elles.

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