Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Philosophie
Philosophie transcendantale transcendantale
Esthétique Tsc.
(Théorie Tsc. de la Logique Tsc. RAISON
sensibilité)
Daniel MARTIN
1
Vocabulaire de la Critique de la raison pure,
des Prolégomènes et du cours Logique
1126 articles – Relecture et enrichissement en cours
Pourquoi ce vocabulaire de la Critique de la raison pure
La Critique de la raison pure de Kant [38] est difficile à étudier. Pour faciliter cette étude et
faire gagner du temps à ses lecteurs, ce vocabulaire explique en termes assez simples la
quasi-totalité du millier de termes philosophiques et de mots rares que l'auteur y utilise.
Reconnaissant que la Critique a été trop difficile à comprendre, Kant a publié 2 ans après la
première édition les Prolégomènes [56b], ouvrage qui apporte des clarifications très utiles ;
j'en recommande la lecture. Je recommande aussi son cours Logique [165], publié en 1800.
Pour pouvoir être consultée sur PC, Mac ou tablette, chaque définition de ce vocabulaire
contient des hyperliens permettant d'afficher par un clic l'explication de tel ou tel terme
philosophique ou scientifique, puis de reprendre la lecture.
Conseils d'utilisation
Les citations de ce vocabulaire se réfèrent à une traduction imprimée particulière de la
Critique de la raison pure : [24] ; ainsi, par exemple, K201 se réfère à la page 201 de cet
ouvrage. Celui-ci est disponible au prix de 9,30 €, et l'avoir sous la main simplifie les
recherches et la citation de passages.
Mais pour retrouver un passage quelconque de la Critique, l'idéal est de disposer
d'une version électronique explorable avec un logiciel comme Adobe Reader.
Exemple : celle (gratuite) en format PDF de la bibliothèque nationale Gallica [62].
On peut retrouver un passage de cette version électronique dans le livre imprimé [24]
grâce à la Table des matières de celui-ci, en annexe.
Ce vocabulaire a été construit en se référant souvent aux ouvrages cités dans la
bibliographie. Il n'a pas vocation à remplacer l'un des dictionnaires cités, dont il vaut
mieux disposer, au contraire : le dictionnaire du CNRS [13], les dictionnaires
philosophiques [9] et [19], contiennent davantage de termes et des explications qui vont
parfois au-delà de celles nécessaires ici pour la Critique.
Certains termes, comme aperception, sont décrits compte tenu des
connaissances scientifiques actuelles (voir [1], [15], [22] et [28]), pour justifier,
compléter ou (rarement) mettre à jour leur description par Kant. C'est là un parti
pris utilitaire : la philosophie de Kant doit pouvoir être la plus utile possible aux
réflexions d'aujourd'hui.
Les textes entre crochets comme [en y créant une représentation] sont des
commentaires ou des explications ajoutées par moi. Les textes entre guillemets proches
d'une référence comme K151 – "Dans la mesure où la logique…", sont des citations de
Kant parfois légèrement explicitées ou résumées.
On peut retrouver les articles éventuels traitant d'un sujet abordé à la page K… du livre
de référence [24] en tapant ce K… dans l'outil de recherche d'Adobe PDF.
Appel à contributions
Je travaille chaque jour sur ce dictionnaire. Mais tant que je n'aurai pas arrêté d'y travailler, il
y restera sans doute des problèmes d'interprétation de la pensée de Kant. Si vous m'en
signalez, je mettrai à jour ce texte et en ferai profiter tous les lecteurs. Merci d'avance.
Daniel MARTIN
2
Pour bien profiter de ce texte
La Critique de Kant nous aide à réfléchir avec rigueur aujourd'hui autant qu'il y a
deux siècles. Sans jamais la déformer, ce texte lui apporte un petit complément de
connaissances de psychologie cognitive et de physique qui l'adaptent à la pensée de
notre siècle.
Pour situer ces ajouts et en profiter au mieux en étudiant la Critique il est
recommandé de lire les articles suivants dans l'ordre ci-dessous :
Représentation
Attention
Schéma d'attention
Interprétation - Processus de la conscience
Conscience - Conscience de
Cause et causalité
Déterminisme : connaissance de la nature et prédictions d'évolution
3
Table des articles (cliquer)
Les définitions sont limitées aux sens trouvés dans la pensée de Kant.
4
Apparence transcendantale Captieux
Apparition Caractère
Appétition Cardinal
Appréhender - Synthèse de Cardinale
l'appréhension (Synthèse Cartésianisme – Cartésien
subjective du divers) Catéchèse
Arbitre (arbitrium) Catéchétique
Arborescence Catégories (concepts purs de
Archétype l'entendement)
Architectonique Catégorique
Argument cosmologique Catégorisation
Arguments montrant l'intérêt de la Catharticon
philosophie Cause et causalité
Assentiment Causalité (loi dynamique)
Assertion Causalité étendue
Assertions transcendantales Causalité par liberté et loi universelle
Assertorique (assertif) de la nécessité de la nature
Associabilité et associativité Causalité (postulat)
Association d'idées ou de Causalité – Postulat de causalité
représentations étendue
Athéisme Causalité globale
Attention Causalité réversible ou non-réversible
Attribut Cause - Pertinence des notions de
Axiologie causalité et de conceptualisation
Axiologique Cause première (commencement
Axiomatique et Système logique chronologique du monde)
Axiome Causes d'Aristote
Axiomes de l'intuition Censure de la raison
Baragouin Certitude
Base de données Chaîne de causalité – Chaîne de
Béatitude suprême conséquences
Beauté Champ de conscience
Béhaviorisme (Behaviourisme) Changement et transformation
Big Bang, la naissance de l'Univers Chimère
Bijective ou biunivoque Chose en soi
Bon sens (sens commun) Cinabre
Bonheur Clarté et obscurité psychologiques
Borne d'une grandeur continue ou de Classe (Logique symbolique)
l'espace Codivisions et subdivisions
Ça Coexistence
Canon Coextensif à …
Canon de la raison pure Cogito, ergo sum
Canon de la raison pure - De la fin Cognitio (latin)
dernière de l'usage pur de notre Cognition
raison Cognitivisme et Connexionnisme
Canon de la raison pure - Idéal du Commandement (de la raison)
souverain bien pour déterminer la Commencement du monde
fin dernière Commencement d'une chaîne de
Canon de la raison pure – De l'opinion, causalité : actif ou passif
du savoir et de la croyance Commerce
5
Communauté Concepts dont la définition est possible
Comparaison des produits de la raison Concepts du monde
avec ceux de l'entendement Conceptualisation
Compiler Conceptualisme
Complétude Concurrence, concurremment
Complexe Condition rationnelle (conditio sine qua
Composition / Connexion (synthèses non) du bonheur
mathématique ou dynamique) Conditionné
Compréhension Conditionné et conditions – Série des
Concept conditions
Concept (construction d'un) Conditionné : totalité absolue des
Concept cosmique de la connaissance conditions idée
Concept (sous un concept / dans un transcendantale
concept) Conflit de la raison avec elle-même
Concept de base Confusion
Concepts de l'entendement : empirique Congruent
(intuition) et pur (jugement) Conjecture
Concept de l'entendement Conjoindre
Concept de la raison Conjonction (produit logique de deux
Concept de la raison pure propositions)
Concepts de la raison pure : origines Connaissance
Concept de la réflexion Connaissance : Théorie de la
Concept de la suprême réalité connaissance
(possibilité des choses) Connaissance : les deux sources
Concept rationnel de la totalité (facultés) fondamentales
inconditionnée Connaissance : clarté, distinction,
Concept empirique et concept a priori confusion
Concept empirique et concept pur Connaissance en général : hiérarchie
Concept moral des degrés
Concept possible : il peut être vide Connaissance exacte et connaissance
Concept pur de l'entendement vague
Concept pur de la raison - Des Connaissance : perfections logiques
concepts de la raison pure particulières – A. Quantité
Concept rationnel issu de notions Connaissance : perfection logique
(Idée) selon la relation – B. Vérité
Concepts réciproques Connaissance : perfection logique
Concept scolastique et concept selon la qualité – C. Qualité
cosmique de la philosophie Connaissance : perfection logique
Concepts supérieurs et concepts selon la modalité – D. Modalité
inférieurs Connaissance : probabilité
Concept transcendantal de la raison Connaissances théorique, pratique ou
Concepts transcendants de la nature spéculative : les différences
Concept sensible et concept sensible Conditions de possibilité et de
pur vraisemblance d'une
Concepts-souches et concepts dérivés connaissance
Concepts de comparaison Connaissance : les trois sources
Concepts de la raison pure – Des subjectives
Idées en général Connaissance du monde
Concepts de la raison pure / Des Idées Connaissance par analogie
transcendantales
6
Connaissance philosophique et Corruption, corruptibilité, incorruptibilité
connaissance mathématique Cosmologie - Cosmologique
Connaissance procédant de principes Cosmologie - Cosmothéologie ou
Connaissance pure ontothéologie
Connaissance pure mathématique Cosmopolite
Connaissance pure philosophique Créance
Connaissances rationnelles ou Critérium
historiques, objectives ou Criticisme
subjectives Critique
Connecteur Critique de la connaissance et de la
Connexion raison : utilité de la Logique
Conscience - Conscience de Critique de la métaphysique
Conscience de soi chez Kant Critique de la raison pure
Conscience : un interpréteur à logique Critique de toute théologie issue de
universelle principes spéculatifs de la raison
Conscience des actes et des Critique transcendantale
procédures Croyance
Conscient Croyance doctrinale
Consécution Croyance morale
Conséquent Culture
Consomption Cyclope
Constitutif Data
Constitution – Constitution politique Déclarations
Construction des concepts Déduction métaphysique
Contenu dans / Contenu sous Déductions transcendantale, empirique
Contingence (adjectif) et physiologique – Exemples
Contingent (substantif) Définition
Continuité d'une variable et d'une Définition d'un concept de chose
fonction Définition génétique
Continuité de tous les changements Définitions nominales et définitions
Continuité des synthèses de tous les réelles
changements (loi) Degré
Continuum Déisme - Déiste
Contradiction - Principe de [non- Délire
]contradiction - Principe de Démonstration
déterminabilité Dépendance
Contradictio in adjecto (latin) Dérivation physiologique
Contraposition Descartes : substance pensante et
Controuver substance étendue (paralogisme)
Convenance et disconvenance Déterminabilité d'un objet par un
Convergence d'une suite ou d'une concept
série Détermination
Converse Détermination logique d'un concept
Conversion logique Déterminisme : connaissance de la
Coordonner nature et prédictions d'évolution
Copernic (doctrine copernicienne) Déterminisme et prédéterminisme de
Copule Kant
Corpus mysticum (latin) Devoir
Corrélat Devoir-être
Corrélatif
7
Dialectique et logique de l'apparence Division
(logique dialectique) Doctrine
Dialectique transcendantale Doctrine générale des éléments –
Dialectique : usage dialectique de la 1. Concepts
raison pure Doctrine générale des éléments –
Dialectique naturelle de la raison 2. Jugements
humaine : but ultime Doctrine générale des éléments –
Dialectique naturelle de la raison - 1ère 3. Raisonnements
Idée régulatrice (psychologique) Doctrine rationnelle de l'âme
Dialectique naturelle de la raison - 2ème Donné, données
Idée régulatrice (cosmologique) Dogma - Dogmata (latin)
Dialectique naturelle de la raison - 3ème Dogmatisme – Dogmatique
Idée régulatrice (théologique) Doute – Scrupule
Dialectique naturelle de la raison – Droit
Autres sources d'erreurs et Dualisme (au sens de Descartes)
conclusions Dualisme (au sens de Kant)
Diallèle Ducat
Dialogique Dyade – Dyadique
Dichotomie et polytomie Dynamique
Dieu Eclaircissement de la réunion de l'Idée
Dieu transcendantal cosmologique d'une liberté et de
Dieu n'existe pas (impossibilité d'en la nécessité universelle de la
prouver apodictiquement nature
l'existence) Economie
Dignité Ecriture
Dilemme Effectivité
Dirimante Effectuation
Discipline de la raison pure Eléates
Discipline de la raison pure dans Elément
l'usage dogmatique Empirique
Discipline de la raison pure Empirisme
dogmatique : des définitions Ens realissimum
Discipline de la raison pure Ensemble – Théorie des ensembles
dogmatique : des axiomes Entendement
Discipline de la raison pure Entendement (étapes)
dogmatique : des démonstrations Entendement pur : table des principes
Discipline de la raison pure Entendement commun
relativement à son usage Entendement en tant que pouvoir des
polémique règles
Discipline de la raison pure Entendement : pouvoirs de penser, de
relativement à son usage juger et de réguler
sceptique Enthymème
Discipline de la raison pure Entéléchie
relativement aux hypothèses Epicurisme
Discipline de la raison pure Epistémologie
relativement à ses preuves Episyllogisme
Discursif Equivalence
Disjonction – Disjonctif Erotématique
Distinction d'une connaissance Erreurs et fausseté de jugements
Divers Esotérique
8
Espace Figures des syllogismes
Espèce – Principe des espèces Fin - Fins
Esprit Fin en soi – Fin objective ou subjective
Essence – Fin relative ou absolue
Esthétique - Esthétique Finitude, infinitude
transcendantale Fins dernières - Fins suprêmes
Esthétique, organisation et information Fluente - Fluxion
Etant (Heidegger) Foi
Ethique Fonctions en Logique symbolique
Ethologie Fonctions au sens de Kant
Etiologie Fonctions logiques de l'entendement
Etre, exister : les différentes dans les jugements (Table)
significations Forme
Etre - Etre nécessaire – Etre Forme essentielle
absolument nécessaire Formel
Etre de raison – Etre de pensée Général (logique : en général)
Etre raisonnable Génétique
Etre de tous les êtres (ens entium) Genre
Etre originaire (ens originarium) Gestalt
Etre suprême (ens summum) Grandeur - Grandeur extensive
Etre suprême : sa réalité objective est Habileté
indécidable Hasard
Euclidien Histoire de la raison pure
Eudémonisme Heuristique
Ex nihilo Homogène
Exaltation Horizon d'une connaissance
Examen d'un jugement et réflexion sur Hubris
l'origine de la connaissance Humanité parfaite
Existence de Dieu Humanités
Existence de Dieu : impossibilité de Hyperbolique
prouver l'inexistence Hyperphysique
Existence du monde Hypostasier
Existentialisme Hypothèse
Exotérique Hypothétique
Expérience, expérience effective Idéal
Exponible Idéal de la raison pure
Exposant d'une règle Idéal : différences entre idéal et idée
Exposition - Exposé Idéal de l'Etre suprême
Extensif / Intensif / Protensif Idéal de la raison pure : 1ère section
Extension Idéal de la raison pure : 2ème section
Externe / Interne (sens) Idéal de la raison pure : 3ème section
Extrinsèque, intrinsèque Idéal du souverain bien
Factice Idéalisme : doctrine (idéalisme
Faculté empirique, subjectif ou
Faculté de juger transcendantal)
Falsifiable Idéalisme problématique de Descartes
Fantasmagorie Idéalisme matériel
Fantasme – Fantasmatique - Idéalisme empirique
Fantasmes originaires Idéalisme subjectif de Berkeley
Fatalisme (Immatérialisme)
9
Idéalisme de Kant - Idéalismes Ignorance
empirique, critique et Illusion
transcendantal Imagination productrice et imagination
Idéalisme formel reproductrice de Kant
Idéalisme transcendantal comme clef Imago
pour résoudre la dialectique Immanent – Principes immanents et
cosmologique principes transcendants
Idéalisme transcendantal, réalisme Immatérialisme
transcendantal et idéalisme Immatérialité - Immatériel
empirique Immédiat, immédiatement
Idéaliste (définition) Immoral
Idéaliste dogmatique, idéaliste Immortalité
sceptique Immutabilité
Idéalité - Dualisme (au sens de Kant) Impénétrabilité
Idéalité de l'espace et du temps dans Impératif - Impératif catégorique -
la doctrine de Kant Impératif technique
Idée pratique Implication
Idée selon Platon Impression
Idée selon Kant (concept rationnel issu Impressionnabilité
de notions) In abstracto (latin)
Idée simple In concreto (latin)
Idée transcendantale Inclination
Idée transcendante Inconditionné – Conditionné
Idées cosmologiques (système) Inconscient
Idées psychologiques Inconscient collectif
Idée théologique Inconscient cognitif
Idées transcendantales (système) Inconscient personnel
Idées transcendantales : extension Incroyant (moralement)
pratique du champ de la raison Indécidable
Idées transcendantales : les 4 conflits Indifférentisme
cosmologiques Indiscernable – Principe des
Idées transcendantales : 1er conflit indiscernables
Idées transcendantales : 2ème conflit Induction
Idées transcendantales : 3ème conflit Ineptie
Idées transcendantales : 4ème conflit Inétendu
Idées transcendantales : thèses Inscience
dogmatiques contre antithèses Infalsifiable
empiriques Inférence
Idées transcendantales : remarque Infini
conclusive sur la solution Inflation, la croissance explosive du
Idées transcendantales : remarque début de l'Univers
générale Information
Idées de la raison pure (usage Inhérence
régulateur des) Inhérent
Idéel, idéelle Innéisme
Identification Instances de la personnalité (systèmes
Identique – Identité psychiques) – Topiques
Idéologie Intellect
Idiosyncrasie Intellection
Ignava ratio (latin) Intellectuel
10
Intelligence Latitudinaire
Intelligence suprême (Intelligent Légal, légalement, légalité, légitime,
Design) légitimité
Intelligible Leurre
Intemporalité Liaison
Intemporel Liaison mathématique ou dynamique
Intension Liberté
Intention Liberté au sens transcendant ou au
Interaction de la sensibilité avec sens pratique
l'entendement Liberté au sens cosmologique
Interactionnisme Liberté impossible par rapport aux lois
Intérêt de la nature (le hasard n'existe
Intérieur et extérieur (concepts de la pas)
réflexion) Libre arbitre (arbitrium liberum)
Interne Licite – Illicite – Faculté d'agir
Interprétation - Processus de la Lieu logique– Lieu transcendantal
conscience Limite d'une grandeur continue ou de
Introspection l'espace
Intuition Limite du monde
Intuition sensible ou intellectuelle– Limites de la raison
Noumène au sens négatif ou Logique (philosophie)
positif Logique (chez Kant) : concept de la
Intuition (étapes) logique
Ipséité Logique (cours de Kant)
Irréductible Logique (cours de Kant) -
Isomorphe - Isomorphisme Méthodologie générale
Je Logique (cours de Kant) –
« Je pense donc je suis » = « Tout ce Compléments modernes et
qui pense existe », mais ne critique
l'implique pas Logique de l'usage de l'entendement
Je pense : ce qu'on peut déduire de la Logique générale
conscience de soi Logique symbolique et Logique
Jugement (définitions : analytique, formelle
synthétique, synthétique a priori) Logique symbolique : Table des
Jugement catégorique symboles
Jugement hypothétique Logique transcendantale : analytique
Jugement disjonctif tsc. et dialectique tsc.
Jugement universel affirmatif Logique de l'apparence (logique
Jugement analytique dialectique)
Jugement synthétique Logique : usage de l'entendement et
Jugements synthétiques a priori logique transcendantale
Jugements analytiques ou Logique pratique
synthétiques : différence Logistique
Jugements empirique, d'expérience ou Loi de la nature
de perception Loi (règle) morale
Jugements provisoires Lois pratiques pour chercher le
Jugements proprement métaphysiques bonheur (loi pragmatique et loi
Juste ou injuste - Transgression morale)
Kant (croyances de) Maïeutique
Laïcisation de la morale Majeure – Mineure
11
Manière Monisme
Matérialisme et opposition avec Monogramme
l'Idéalisme et le Réalisme Morale
Mathema - Mathemata (latin) Moralité
Mathématiques Mouvement (au sens évolution dans le
Matière et forme temps et l'espace)
Matière et forme : 7 définitions Multiplicité
Matière-énergie Mutabilité
Maximes pratiques – Maximes de la Mystique
raison Naturalisme
Mécanique quantique Nature
Médiate, médiation, immédiate, Nécessaire
immédiatement Nécessité des choses (postulat)
Méditer Nécessité de l'aperception
Mémoire de travail - Mémoire de long transcendantale
terme Négation
Métacognition Nervus probandi (latin)
Métaconscience Neurophysiologie
Métaphysique Neuropsychique
Métaphysique : les sources Neuropsychologie
Métaphysique : le mode de Neurosciences
connaissance Neurotransmetteurs
Métaphysique des mœurs Neutralité
Métaphysique de la raison spéculative Névrose
Métaphysique : est-elle possible ? Nexus (latin)
(Prolégomènes) Nihilisme
Métaphysique : préférence donnée à la Nombre
science Nombre : l'idée de nombre en Logique
Métaphysique spéciale Nombre : Théorie ordinale
Métathèse Nombres infinis
Métempsycose Nombrer
Méthode Nominal (adjectif)
Méthode scientifique Nominalisme
Méthodologie de la Logique Nommable
Méthodologie physiologique Nomothétique
Micrologie Non defensoribus istis tempus eget
Misologie (latin)
Mnésique Non liquet (latin)
Modalité d'un jugement Noologie
Mode Normatif
Modi (latin) Notion
Modus ponens - Modus tollens (latin) Noumène, objet de l'entendement pur
Moi (Je) Noumène en tant que chose en soi :
Moment un abus de l'entendement
Monade Numerica identitas
Monde Numériquement : diverses, identique
Monde donné Objectif - Subjectif
Monde intelligible Objection
Monde moral Objet – Objet des sens – Objet
Monde sensible véritable – Objet intelligible
12
Objet en général : phénomène ou Pensée
noumène Pensée empirique en général
Objet transcendantal (postulats)
Objets purs, simplement intelligibles Perception
Objet absolument parlant – Objet dans Perdurance
l'Idée Perfection
Obligation Perfection esthétique et perfection
Obscurité d'une représentation logique de la connaissance
Occasionnalisme Perfection d'une connaissance :
Occurrence objective = exacte,
Oiseuse subjective = subtile
Ontique Perfection logique d'une connaissance
Ontogenèse (ontogénie) Perfection logique d'une
Ontologie connaissance : promotion par la
Opinion définition, l'exposition et la
Opposition description des concepts
Ordinal Perfection d'une connaissance :
Ordonner promotion par la division logique
Ordre et régularité des lois de la nature des concepts
Ordre (en Logique) Permanence
Organon Permanence de l'âme (réfutation de la
Originaire démonstration de Mendelssohn)
Ostensif Permanence de la substance (principe)
Palingénésie Personnalité
Pansophie Personnification
Paradigme Pétition de principe
Parallélisme de l'esprit humain Phénomène
Paralogisme : définitions Phénomènes (ensemble des)
Paralogisme : explication par la Phénoménologie
recherche de l'inconditionné Philodoxe
Paralogisme logique - Paralogisme Philologie
transcendantal Philosophes sensualistes et
Paralogisme de la psychologie philosophes intellectualistes
rationnelle Philosophie - 3 questions
Paralogisme psychologique : fondamentales : theoria, éthique
conclusion de la solution et sagesse
Paralogisme de la substantialité (1er Philosophie de la nature
paralogisme) Philosophie pratique
Paralogisme de la simplicité (2ème Philosophie – Philosophie de la raison
paralogisme) pure
Paralogisme de la personnalité (3ème Philosophie métaphysique de l'unité
paralogisme) systématique des connaissances
Paralogisme de l'idéalité (4ème pures a priori
paralogisme) Philosophie transcendantale
Paralogismes de la raison pure : Philosophie transcendantale
apparence transcendantale et (diagramme)
classement Phoronomie
Pascal et Kant sur la science et l'âme Physicalisme
Pathologique Physiocratie – Physiocratie
Pédant transcendantale
13
Physiologie Preuves possibles de l'existence de
Physiologique Dieu (3 - preuve physico-
Physique quantique théologique)
Pierre angulaire Primaire (adjectif)
Pierre de touche Primauté
Pierre d'achoppement Primitif
Platonisme Principe de la détermination intégrale
Polysyllogisme (synthèse de tous les prédicats)
Populaire Principe de la primauté de la
Pneumatisme connaissance sur les objets
Polémique (doctrine)
Polyhistoire Principe de raison
Polymathie Principe (définition) – Différence avec
Polytomie postulat
Possession Principes a priori
Possibilité des choses (postulat) – Un Principe d'abstraction
concept peut-il être celui d'un Principes cités dans ce vocabulaire de
objet ? la Critique de la raison pure
Possibilité de l'expérience (principes a Principe de la déterminabilité d'un
priori) concept
Possibilité de la nature elle-même Principe de la simultanéité (loi de
Possibilité de penser sans cerveau, l'action réciproque ou de la
avec un interpréteur communauté)
Possibilité des évolutions de systèmes Principes de l'entendement pur
Possibilité d'un principe réel ou d'une Principes fondamentaux de
causalité connus par concepts l'entendement pur
Possibilité d'une perception Principes synthétiques de
Possibilité et réalité l'entendement pur (représentation
Postulat systématique)
Postulat de causalité Probabilité
Pouvoir de… Problématique
Pragmatique – Pragmatisme Procédure
Pratique Processus - Processeur
Précepte Progression à l'infini ou progression
Prédicable illimitée (progressus)
Prédicament Prolégomènes à toute métaphysique
Prédicat – Prédicatif – Prédication future qui pourra se présenter
Prégnant comme science
Préjugé Prolégomènes : 1ère partie de la
Prémisse question transcendantale
Présence à l'esprit – Prise de capitale : comment la
conscience mathématique pure est-elle
Preuves possibles de l'existence de possible ?
Dieu (liste des 3) Prolégomènes : 2ème partie de la
Preuves possibles de l'existence de question transcendantale
Dieu (1 - preuve ontologique) capitale : comment la science
Preuves possibles de l'existence de pure de la nature est-elle
Dieu (2 - preuve cosmologique) possible ?
Prolégomènes : 3ème partie de la
question transcendantale
14
capitale : comment la Raison pratique
métaphysique en général est-elle Raison – Raison pure – De la raison
possible ? en général
Prolégomènes : Conclusion de la Raison – De l'usage logique de la
détermination des limites de la raison
raison pure Raison – De l'usage pur de la raison
Prolégomènes : Solution de la question Raison – De l'intérêt de la raison dans
générale : comment la ce conflit avec elle-même
métaphysique est-elle possible Raison – Décision critique du conflit
comme science ? cosmologique de la raison avec
Propédeutique elle-même
Propension Raison – Des problèmes
Proposition transcendantaux de la raison
Propositions : calcul des propositions pure
Propositions : les 5 lois de calcul Raison – Représentation sceptique
Propositions : opérations sur les des questions cosmologiques à
propositions travers les quatre idées
Prosyllogisme (pro-syllogisme) transcendantales
Psychanalyse Raison paresseuse
Psyché Raison pure : principe régulateur
Psychiatrie relativement aux Idées
Psychisme cosmologiques
Psychokinèse Raison pure : de l'usage empirique du
Psychologie principe régulateur relativement
Psychologie cognitive aux Idées cosmologiques
Psychologie, cosmologie et théologie Raison pure (usages)
transcendantales Raison suffisante (principe)
Psychologie empirique Raison supérieure intégrale (raison
Psychologie rationnelle (science du suprême)
Moi) Raison : usage apodictique ou
Psychologie rationnelle et cosmologie hypothétique
(passage de la première au Raisonnement - Raisonnement
second) déductif, d'entendement ou de
Psychologie transcendantale : raison
fonctions d'acquisition de Raisonnement hypothétique
l'expérience Raisonnement par l'absurde
Psychopathologie Raisonnements de l'entendement
Psychose Raisonnements de la raison
Psychosomatique (syllogismes)
Pulsion Raisonnements de la faculté de juger
Pur Raisonnement dialectique de la raison
Qualité (catégories) pure
Qualité (propriété, en anglais : quale) Ratiocination
Qualité d'un jugement Rationalisme – Principe de raison
Quantité d'un jugement Rationnel
Quantum (pluriel : quanta) Réalisme
Quantitas Réalisme transcendantal
Radicalité Réalité et phénomènes
Raison : condition permanente des Réalité (existence) par opposition à la
actes relevant de l'arbitre négation (inexistence)
15
Réalité physique Schème, schématisme, schème
Réalité (degré de) transcendantal
Réalité d'une chose en soi : réalité Schèmes des concepts purs de
objective l'entendement
Réalité suprême Scholie (scolie)
Réceptivité Science
Réciprocable (réciproquable) - Science de la nature
Réciproque Science des règles, sc. des principes,
Réciprocité sc. de la logique générale pure
Recognition (récognition) de concept Scolastique
ou de procédure Scolie
Récupération Scrupule
Réductionnisme Sémantique
Référentiel Sémiotique
Réflexion - Réflexion transcendantale Sens commun
– Réflexion logique Sens externe et interne
Refoulement Sens psychique
Réfutation de l'idéalisme Sensation – Sensibilité - Impression
Réfutation du matérialisme (par Sensualisme
l'Idéalisme transcendantal) Sentiment
Règle de stabilité du déterminisme Série et suite
Règles évoquées par Kant Série chronologique
Regnum gratiae – Regnum naturae – Série des conditions
Regnum gloriae (latin) Seuil de conscience
Régression - Régression empirique - Simple
Régression à l'infini Situation
Régression mathématique et Soi
régression dynamique Solipsisme
Régulateur Solution de l'Idée cosmologique
Régularité portant sur la totalité de la
Réification composition des phénomènes en
Relation un univers
Relations (calcul des) Solution de l'Idée cosmologique
Religion portant sur la totalité de la
Représentation division d'un tout donné dans
Représentations et ensembles l'intuition
d'informations (diagramme) Solution des Idées cosmologiques
Reproduction – Imagination portant sur la totalité de la
reproductrice dérivation des événements du
Réseau neuronal monde à partir de leur cause
Rétention Solution de l'Idée cosmologique de la
Révélation totalité de la dépendance des
Rhapsodique phénomènes quant à leur
Rhéteur – Rhétorique existence en général
Sagesse Sophisma figurae dictionis
Salut Sophisme, sophistique
Savoir Sophrologie
Scepticisme Sorite
Schéma d'attention Souche
Souverain bien
16
Spécification - Loi et loi Synopsis
transcendantale de la Syntagme
spécification Syntaxe
Spéculatif Synthèse a priori
Sphéroïde - Géoïde Synthèse a priori (possibilité)
Sphère Synthèse chez Kant
Spiritualisme Synthèse de la reproduction dans
Spiritualité l'imagination (transcendantale)
Spirituel Synthèse de l'agrégation
Spontanéité Synthèse du divers
Stoïcien - Stoïcisme Synthèse de l'aperception
Stupidité Synthèse de l'appréhension (synthèse
Subconscient (nom et adjectif) empirique)
Subjectif Synthèse de l'appréhension (du divers
Subliminal, supraliminale de l'intuition)
Subordonner quelque chose à quelque Synthèses de l'entendement (en
chose général et pure)
Subreption Synthèse de l'homogène
Subsistance Synthèse de l'imagination productive
Substance (productrice)
Substance, matière, forme et physique Synthèse de l'intuition sensible par
moderne l'entendement
Substance pensante Synthèse de l'unité rationnelle
Substantia phaenomenon Synthèse de type composition et
Substantialité du Moi et de l'âme synthèse de type conjonction
Substantiel Synthèse des conditions
Substrat Synthèse des perceptions
Subsumer, subsomption Synthèse dynamique de la liaison
Succession chronologique suivant la causale.
loi de causalité (principe) Synthèse empirique
Sujet – Sujet pensant – Sujet Synthèse en général
transcendantal Synthèse figurée et liaison
Superficielle (compréhension fournie intellectuelle
par l'entendement) Synthèse intuitive de perceptions
Suprasensible successives
Surmoi Synthèse mathématique et synthèse
Syllogisme dynamique
Syllogismes et raisonnements Synthèse par imagination reproductrice
déductifs (psychologie)
Syllogismes et principe de déduction Synthèse pure
Syllogisme catégorique Synthèse pure de représentation par
Syllogisme affirmatif l'entendement (synthèse de
Syllogisme disjonctif l'appréhension)
Syllogisme hypothétique Synthèse régressive dans la série des
Syllogisme hypothétiquement disjonctif conditions
Syllogismes à la base d'apparences Synthèse sous un concept et synthèse
transcendantales à un concept
Syllogistique Synthèse subjective du divers
Symboles de la Logique symbolique Synthèse successive de l'imagination
Synchronique productive
17
Synthèse transcendantale de Unification de représentations et de
l'imagination concepts
Systématique Uniforme
Système Unité - Unité analytique - Unité
Système des fins synthétique - Unité de la
Système des principes (remarque conscience
générale) Unité absolue du sujet pensant
Système logique Unité cosmologique : unité de la
Système nerveux somatique synthèse inconditionnée des
Table des 12 catégories de conditions
l'entendement de Kant Unité de consécution
Table des fonctions de l'entendement Unité de l'entendement – Unité de
Table des symboles de la Logique l'intuition
symbolique Unité de justification
Table logique des jugements Unité de l'expérience
Table transcendantale des concepts Unité distributive considérée à tort
de l'entendement comme unité collective
Table physiologique pure des principes Unité d'entendement des phénomènes
universels de la science de la Unité inconditionnée des conditions
nature Unité intégrative des conditions de la
Tautologie synthèse des intuitions
Technique Unité objective de la conscience de soi
Téléologie - Téléologiste – Conséquences pour l'humanité
Temps Unité rationnelle a priori des
Termes principaux connaissances de l'entendement
Théisme – Théiste Unité rationnelle des phénomènes
Théodicée Unité synthétique de la nature
Théologie Unité synthétique de l'aperception
Théorème Unité synthétique du divers de
Théorétique l'appréhension
Théorie transcendantale de la méthode Unité systématique
Théorie transcendantale des éléments L'unité systématique des fins réunit la
Théorie transcendantale de la raison pratique et la raison
sensibilité (Esthétique spéculative
transcendantale) Unité transcendantale - Unité
Théosophie subjective de la conscience
Thermodynamique Unité transcendantale de l'aperception
Thèse Unité transcendantale de la
Thétique conscience de soi
Topique – Topique transcendantale – Univers
Topique logique Universel - Universalité
Topologie Univoque
Totalité inconditionnée Urbanité
Transcendant Usages de la raison pure
Transcendantal (chez Kant) Valeur
Transformation Validité objective, subjective, absolue
Transgression Variété
Transmigration Vérité d'une connaissance, d'une
Transposition proposition
Trichotomie - Tripartition Vérité formelle d'une connaissance
18
Vérité : les principes universels
Vérité empirique : le Rationalisme
critique
Vide
Vie future, principes de morale et
rationalité
Volonté - Vouloir
WYSIATI
Zélote
Zététique
19
Dictionnaire des idées - Vocabulaire
A parte ante – A parte post
Selon [19] ces deux locutions scolastiques latines s'appliquent à l'éternité :
L'éternité a parte ante est une durée infinie dans le passé ;
L'éternité a parte post est une durée infinie dans l'avenir.
20
Intuitions et concepts a priori à la base de toute connaissance de phénomène
Pour Kant, il existe nécessairement des intuitions et des concepts a priori parce qu'ils
forment la base de toutes les connaissances de phénomènes : définir, acquérir et
comprendre une connaissance suppose des principes et concepts de base innés,
compris sans expérience ni explication, et irréductibles. Et ces concepts de base a
priori sont universels et objectifs, on pourra s'en servir pour tous les phénomènes.
Dans ce qui précède, l'adjectif a priori est une condition logique de validité des
termes auxquels il s'applique. Il ne décrit pas une antériorité temporelle.
Pour être certaine, toute connaissance doit dériver d'au moins un principe ou postulat
(propositions absolument a priori) ; en effet, si elle ne reposait que sur des vérités
empiriques elle serait incertaine, celles-ci l'étant nécessairement (K96).
21
Les concepts des connaissances proviennent de concepts purs de la raison.
Une connaissance produite selon les principes de la raison pure comprend un
concept pur qui ne peut être produit que par raisonnement a priori, le concept
pur de la raison :
K340 – "Quoi qu'il puisse en être de la possibilité des concepts issus de la
raison pure, ce sont […] des concepts produits en conclusion d'un
raisonnement."
Ainsi la raison permet de connaître a priori certaines lois, lorsqu'on a
préalablement admis certaines autres lois. Ainsi par exemple, lorsqu'on admet la
loi de causalité « Toute situation a une cause, une même cause produisant
toujours et partout le même effet », on peut affirmer la loi « La chaleur fait fondre
certains corps pâteux » en constatant qu'un corps auparavant solide vient de
fondre :
K635 – "…nous pouvons toutefois connaître entièrement a priori, mais par
rapport à un troisième terme, à savoir une expérience possible, donc bel et bien
a priori, la loi de la liaison entre des choses diverses. Quand donc la cire, qui
auparavant était solide, se met à fondre, je peux connaître a priori que quelque
chose, nécessairement, a dû précéder (par exemple la chaleur du soleil), par
rapport à quoi cela s'est ensuivi selon une loi constante, quand bien même sans
expérience je ne pourrais certes connaître a priori et, sans l'enseignement de
l'expérience, d'une manière déterminée ni la cause à partir de l'effet ni l'effet à
partir de la cause."
22
Exemple cité par Kant : K94 - "La proposition tout changement a sa cause est
[…] a priori, mais non point pure, étant donné que le changement est un concept
qui ne peut être tiré que de l'expérience."
4 - L'intuition est une faculté de connaître par les sens, l'opposé d'une faculté
transcendantale de connaître : ces deux facultés s'excluent mutuellement.
5 – Parfois transcendantal veut dire a priori, d'autres fois il veut dire critique
En tant que condition, transcendantal implique a priori :
Les principes transcendantaux de l'entendement sont les lois de l'usage de
l'entendement en tant que règles de la connaissance.
Toute condition d'une expérience possible est transcendantale.
Est transcendantal tout ensemble de principes ou d'idées a priori qui a un
rapport nécessaire avec l'expérience : Esthétique transcendantale, Analytique
transcendantale, etc. Dans ce cas, transcendantal veut dire critique.
23
Absolu
Dictionnaire [13]
Adjectif
1. Dans le domaine de la pensée : dont l'existence, la réalisation ou la valeur est
indépendante de toute condition de temps, d'espace, de connaissance, etc.
Opposé : relatif.
2. Dans le domaine du pouvoir d'une personne ou d'un acte : le pouvoir absolu est
celui d'un chef d'État qui dicte les lois, et ne connaît d'autres limites que les
siennes propres ; un pouvoir ou une liberté sont absolus lorsqu'ils ne peuvent
subir aucune influence.
3. Dans le domaine de la valeur non mathématique : absolu signifie sans borne,
indépassable.
Chez Kant
K348 et pages suivantes - Discussion du terme "absolu".
Propriété intrinsèque
Une chose a une propriété absolue lorsque cette propriété existe du fait de la
chose elle-même, de façon intrinsèque. C'est alors une propriété de la chose en
soi.
En ce sens-là, absolument possible indique une possibilité d'existence sans
référence à des circonstances. Savoir seulement que l'existence d'une chose est
absolument possible est la connaissance minimum qu'on peut en avoir.
On rencontre souvent ce sens-là en mathématiques.
Exemple : théorème de Rolle :
« Lorsqu'une fonction d'une variable réelle f(x), continue sur un intervalle
fermé [a, b] et dérivable sur l'intervalle ouvert ]a, b[ est telle que f(a)=f(b),
il existe au moins un réel c dans l'intervalle ]a, b[ où la dérivée f'(c)=0. »
Dans l'intervalle [a, b] et quelle que soit la fonction f(x) continue et dérivable
comme précisé ci-dessus nous savons qu'il existe au moins un réel c tel que…,
mais nous n'en connaissons pas la (ou les) valeur(s).
Propriété existant en toutes circonstances
Une propriété absolue peut exister en toutes circonstances. C'est là une
indépendance par rapport aux circonstances. Exemple : un pouvoir politique
absolu.
En ce sens-là, absolument possible indique une propriété à laquelle rien ne peut
s'opposer, que rien ne peut dépasser. Absolument possible est alors la
connaissance maximum qu'on peut en avoir.
24
qui est inconditionné absolument, c'est-à-dire sous tous les rapports. Car la
raison pure s'en remet entièrement à l'entendement quand il s'agit de se
rapporter immédiatement aux objets de l'intuition ou plutôt à leur synthèse dans
l'imagination. Elle se réserve uniquement l'absolue totalité dans l'usage des
concepts de l'entendement et cherche à conduire l'unité synthétique pensée
dans la catégorie jusqu'à l'absolument inconditionné."
Absolument
Adverbe d'intensité, utilisé par Kant dans des circonstances comme les suivantes.
Connaissance absolument a priori
K110 – "La raison est le pouvoir qui fournit les principes de la connaissance a
priori. La raison pure est par conséquent celle qui contient les principes
permettant de connaître quelque chose absolument a priori."
Connaissance absolument pure
K110 Note b – "Est particulièrement nommée absolument pure une
connaissance à laquelle ne vient se mêler [aucune] expérience ou sensation, et
qui est par conséquent possible complètement a priori."
Conséquence : absolument pur est synonyme d'absolument a priori.
Connaissance absolument indépendante de toute expérience
K94 – "Nous entendrons donc par connaissances a priori, dans la suite de cet
ouvrage, non pas des connaissances qui adviennent indépendamment de telle
ou telle expérience, mais celles qui interviennent d'une manière absolument
indépendante de toute expérience. Leur sont opposées des connaissances
empiriques, autrement dit celles qui ne sont possibles qu'a posteriori, c'est-à-dire
par expérience. Mais dans les connaissances a priori, sont appelées pures
celles auxquelles absolument rien d'empirique n'est mêlé. Ainsi, par exemple, la
proposition : tout changement a sa cause est-elle une proposition a priori, mais
non point pure, étant donné que le changement est un concept qui ne peut être
tiré que de l'expérience."
Intuitions absolument pures (donc aussi a priori) : l'espace et le temps
K207 - "L'intuition sensible est, ou bien intuition pure (espace et temps) ou bien
intuition empirique de ce qui, dans l'espace et le temps, est immédiatement
représenté comme réel à travers la sensation."
Proposition absolument a priori
Une proposition qui ne peut se déduire d'aucune autre proposition, est
absolument a priori ; elle n'admet alors aucune exception, elle est
universelle.
25
Est absolument a priori aussi une proposition résultant d'une démonstration
logique à partir d'une ou plusieurs propositions absolument a priori ;
exemple : un théorème mathématique. Cette universalité a priori diffère de
l'universalité empirique (postulée par induction à partir d'expériences) d'une
affirmation à laquelle on ne connaît pas d'exception (K95).
Impossibilité et nécessité absolue
K349 – "Ce dont le contraire est intrinsèquement impossible [et] se trouve dès
lors aussi à tous égards impossible, est par conséquent soi-même absolument
nécessaire ; mais je ne peux pas conclure réciproquement que, du fait qu'une
chose est absolument nécessaire, son contraire soit intrinsèquement impossible,
c'est-à-dire que la nécessité absolue des choses soit une nécessité intrinsèque -
car cette nécessité intrinsèque est, dans certains cas, une expression totalement
vide à laquelle nous ne pouvons relier le moindre concept, alors qu'au contraire
le concept de la nécessité d'une chose sous tous les rapports (pour tout le
possible) implique des déterminations tout à fait particulières."
K526 – "Ce dont le concept contient en soi la solution de tous les pourquoi, une
raison d'être qui n'est en défaut dans aucun domaine et d'aucun point de vue, qui
apporte une condition suffisante en tout registre, semble constituer par là même l'être
qui correspond à l'absolue nécessité, puisque, par la manière dont il possède en lui-
même toutes les conditions pour tout le possible, il n'a besoin lui-même d'aucune
condition, n'est pas même susceptible d'en avoir besoin, et par conséquent satisfait
au moins dans une certaine mesure au concept de la nécessité inconditionnée - ce
que ne peut faire aussi bien que lui nul autre concept…"
K530 – "Le concept d'un être absolument nécessaire est un concept pur de la raison,
c'est-à-dire une simple Idée dont la réalité objective est encore loin de se trouver
démontrée par le fait que la raison en a besoin : une Idée qui ne fait au demeurant
que nous indiquer une certaine perfection, pourtant inaccessible, et sert proprement
plutôt à limiter notre entendement qu'à l'élargir à de nouveaux objets."
26
Cela équivaut à dire que je ne peux jamais achever la régression vers les conditions
de l'existence sans admettre un être nécessaire, mais que je ne peux jamais
commencer par lui."
(Fin de citation)
Voir aussi L'être absolument nécessaire est une croyance qui limite l'entendement.
Absolument premier
Un événement absolument premier survient sans cause déterminante et
constitue le commencement d'une chaîne de causalité
K446 – "Si maintenant (par exemple) je me lève de mon siège en toute liberté et
sans qu'intervienne l'influence, qui détermine avec nécessité, des causes
naturelles, alors, à la faveur de cet événement qu'accompagnent ses
conséquences naturelles à l'infini, commence absolument une nouvelle série,
bien que, relativement au temps, cet événement soit seulement le prolongement
d'une série antécédente. Car cette décision et cet acte ne sont nullement inscrits
dans la succession des simples effets naturels et ils n'en constituent pas un
simple prolongement ; au contraire, les causes déterminantes de la nature
cessent totalement de jouer, dans la série, en amont par rapport à cet
événement, qui certes leur succède, mais n'en résulte pas - ce pourquoi il faut le
désigner comme un commencement absolument premier d'une série de
phénomènes, non pas certes relativement au temps, mais cependant par rapport
à la causalité."
L'être absolument premier est le Créateur incréé, Dieu.
Absolument inconditionné
Voir d'abord Absolument : a priori, indépendant ou pur.
Une régression (parcours de la série de conditions d'un conditionné dans le sens qui
remonte de chaque conséquence à sa condition) a pour limite l'inconditionné, qui est
inconnaissable. Mais en tant que condition d'existence d'un conditionné, cet
inconditionné doit être absolu pour que la série de conditions commence assez tôt
dans l'histoire de l'Univers pour être complète, c'est-à-dire :
Au Commencement du Monde, si on n'admet pas la possibilité d'apparitions ;
Lors d'une apparition, si on admet le postulat de causalité étendue.
Abstraire
Selon le dictionnaire [13] : abstraire quelque chose de quelque chose c'est isoler, par
l'analyse, un ou plusieurs éléments du tout dont ils font partie, de manière à les
considérer en eux-mêmes et pour eux-mêmes.
27
On n'abstrait pas quelque chose, on abstrait de quelque chose
(Citation de [165] page 185 note 71)
"Kant revient avec insistance sur l'abus que commettent les logiciens modernes
lorsqu'ils opposent l'abstrait au concret et parlent d'abstraire quelque chose, alors
qu'ils devraient seulement parler d'abstraire de quelque chose.
[…]
Toute abstraction consiste seulement en une suppression de certaines
représentations claires à laquelle on procède ordinairement de façon telle que ce qui
reste soit d'autant plus clairement représenté.
[…]
L'effort pour devenir conscient de ses représentations consiste ou bien à porter
attention, ou bien à détourner le regard d'une représentation dont je suis conscient.
Et dans ce dernier cas, l'attention n'est pas simplement omise ou négligée (ce serait
de la distraction), c'est un acte réel du pouvoir de connaître qui consiste à maintenir
dans une conscience une représentation hors de toute liaison avec les autres.
Par conséquent, on ne dit pas abstraire (isoler) quelque chose, mais faire abstraction
de quelque chose, c'est-à-dire d'une détermination de l'objet de ma représentation ;
et du coup, cette représentation acquérant la généralité d'un concept est accueillie
dans l'entendement."
(Fin de citation)
28
Abstrus
Selon le dictionnaire [13] - Adjectif qualifiant une conception intellectuelle, une
philosophie, etc. : difficile à comprendre, à interpréter.
Absurdité
(Citation de [165] pages 62-63)
"Une erreur où l'apparence est évidente même pour le sens commun (sensus
communis) s'appelle une absurdité. Le reproche d'absurdité est toujours un grief
personnel, qu'il faut éviter, en particulier dans la réfutation des erreurs.
Car aux yeux de celui qui soutient une absurdité, l'apparence qui est à la source de
cette évidente fausseté n'est pas manifeste. Il faut commencer par lui rendre cette
apparence manifeste. S'il persiste alors dans son erreur, assurément il est absurde,
mais en ce cas on ne peut plus rien faire pour lui.
Acception
Selon le dictionnaire [13] : nuance sémantique d'un mot suivant ses conditions
d'emploi ou d'interprétation.
La notion de mode d'existence d'une substance est liée à la manière dont nous nous
la représentons. Puisque, selon la température et la pression, l'eau est solide, liquide
ou vapeur, parler de substance permanente de l'eau n'a pas de sens puisqu'elle n'est
pas éternelle ; on décrit donc les trois modes d'existence de l'eau (ses trois états :
solide, liquide, vapeur) comme des accidents de cette existence.
29
Acousmatique
Voir Pythagore et son école.
Acroamatique
Adjectif synonyme d'ésotérique.
Voir aussi :
Acroame ;
Principes intuitifs et discursifs : axiomes et acroames ;
Méthode acroamatique ou érotématique.
Acroame
Principe discursif, par opposition au principe intuitif qu'est l'axiome.
Principe discursif, un acroame ne se laisse exprimer que par concepts.
Voir : Acroamatique et Principes intuitifs et discursifs : axiomes et acroames.
Acte
[108] page 175 - "Le terme d'acte désigne une action, dans la mesure où elle se
trouve soumise à des lois d'obligation, par conséquent aussi dans la mesure où le
sujet y est considéré du point de vue de la liberté de son arbitre. L'agent est, à
travers un tel acte, considéré comme l'auteur de l'effet qui en résulte, et cet effet, en
même temps que l'action elle-même, peuvent lui être imputés, si l'on connaît
préalablement la loi en vertu de laquelle une obligation pèse sur eux."
Action
Dictionnaire [13]
Opération d'un agent (animé ou inanimé, matériel ou immatériel) envisagée dans son
déroulement ; résultat de cette opération.
Chez Kant
L'action est un rapport de cause à effet
K500-K501 – La nature a une loi "qui veut que tout ce qui arrive possède une cause".
Cette cause a une causalité que Kant appelle action. Cette action précède dans le
temps son effet, "ce qui arrive".
Cette action est une évolution à partir de la situation de départ, c'est-à-dire quelque
chose qui arrive et n'était pas encore arrivé à partir de cette situation. En effet, une
situation physique stable (qui n'évolue pas) ne crée pas d'événement nouveau, elle
30
ne peut être cause d'aucune action. C'est là une loi générale (le déterminisme) : tout
phénomène a une cause qui le détermine, "tous les événements se trouvent
déterminés empiriquement dans un ordre de la nature".
La notion même de nature recouvre un ensemble de lois d'évolution qui régissent les
phénomènes et l'expérience que nous en avons : "c'est une loi de l'entendement par
rapport à laquelle il n'est permis sous aucun prétexte de faire un écart ni d'ériger un
quelconque phénomène en exception, parce que, si tel était le cas, on le situerait en
dehors de toute expérience possible." Et sans une telle expérience, un objet serait
"un être de raison et une chimère."
Action réciproque
La notion d'action réciproque porte sur l'interaction physique ou logique de plusieurs
objets présents simultanément dans une expérience. Voir :
D'abord la définition de la Réciprocité.
Ensuite Principe de la simultanéité (loi de l'action réciproque ou de la
communauté).
Admonition
Selon le dictionnaire [13] : Action de donner un avertissement ; manifestation
concrète de cette action.
[56b] §35 page 111 – "Mais il ne peut servir à rien de vouloir modérer ces infructueux
essais de la raison pure en multipliant les admonitions."
Advenir
Affect
Sens courant, notamment en psychologie : sentiment subjectif, vague et
inanalysable, résultant d'une émotion, d'une peur, d'un désir, d'une aversion, etc. Ce
sentiment produit automatiquement dans le sens interne des données qui en
constituent une représentation, à laquelle l'esprit peut ou non être sensible
consciemment. Dans le psychisme, toute représentation comprend un affect
décrivant son effet psychologique (sentiment) perçu [23].
K117 - "L'intuition n'intervient [en tant que moyen pour qu'une connaissance se
rapporte à un objet] que dans la mesure où l'objet nous est donné. Cela n'est
possible que parce que l'objet affecte l'esprit, ce qu'il fait par la médiation [par l'effet]
de la sensibilité."
31
K155 - "Toutes les intuitions en tant que sensibles reposent sur des affections, les
concepts [reposant par contre] sur des fonctions."
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est l'espace,
tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps."
(Tout objet des sens affecte l'esprit, produisant dans sa représentation une
information temps et, si elle a été perçue par le sens externe, une information
espace.)
K706 note 87 – Selon Kant comme selon la psychologie cognitive, le simple fait
subjectif de la présence dans son esprit d'une représentation affecte le sujet : celui-ci
a conscience de l'existence d'un objet extérieur réel mais non encore identifié, il
perçoit l'objet.
Kant ne fait pas de distinction claire entre les représentations et facultés
conscientes et celles qui sont inconscientes, distinction clarifiée notamment par
Freud [41] et que met en évidence l'article Entendement (étapes).
Dans K155 Kant oppose "affection" (associée à une intuition sensible) et "fonction"
(associée à un raisonnement) parce qu'une affection est involontaire et subie, alors
qu'une fonction est un processus conscient - même si elle a été déclenchée sans
32
intervention de la volonté, par estimation automatique des conséquences potentielles
psychologiques (favorables ou non) de la représentation d'objet présente à l'esprit.
K210 - "Le sens interne ne nous présente nous-mêmes à la conscience que tels que
nous apparaissons de façon phénoménale, et non pas tels que nous sommes en
nous-mêmes, car nous nous intuitionnons seulement comme nous sommes
intérieurement affectés." (En somme, chacun se voit comme il croit être vu de
l'extérieur.)
Citations de Kant
K187 - Le divers d'un objet est soumis à une loi d'associativité : tous les divers de
phénomènes ont des représentations structurées de manière à permettre leur
association (par le subconscient et selon certains critères).
33
Affinité empirique et affinité transcendantale
Kant attribue la propriété d'associativité du divers des phénomènes à leur affinité
empirique (définie par l'existence même de cette propriété). Mais toute
représentation du divers implique aussi le respect du principe d'unité de l'aperception
(K192), donc aussi la soumission de tous les phénomènes à une affinité
transcendantale.
K187 – "Ainsi tous les phénomènes se trouvent-ils dans une liaison complète selon
des lois nécessaires, et par conséquent soumis à une affinité transcendantale dont
l'affinité empirique est la simple conséquence."
Agnosticisme
Source : [19].
Doctrine « d'impossibilité de connaître », qui désigne :
Soit l'habitude de considérer toute métaphysique, et particulièrement toute
ontologie, comme futiles.
Soit l'ensemble des philosophies (comme le Positivisme d'Auguste Comte ;
l'Evolutionnisme de Herbert Spencer ; et le Relativisme de Hamilton) qui
admettent l'existence d'un ordre de réalité inconnaissable par nature.
Agrégat
Selon [13]
Un agrégat est une réunion d'éléments distincts en un tout de forme mal définie.
34
(La catégorie attribuée par l'entendement à un objet par une synthèse
transcendantale, et qui apparaît dans un jugement, est partagée par un
ensemble d'objets, pour lesquels elle est universelle.)
Agrégation / Coalition
Substantifs désignant deux types de synthèse :
K238 note * : La synthèse de l'homogène peut être divisée en celle de l'agrégation
(qui porte sur les grandeurs extensives) et celle de la coalition (qui porte sur les
grandeurs intensives).
Algorithme
Suite de règles de calcul ou d'instructions de programme correspondant à un
raisonnement logique décrit étape par étape. L'ordre des étapes peut varier selon
des valeurs de données. Ainsi, lorsque la valeur d'un nombre X a été trouvée et
qu'on a besoin de sa racine carrée, l'algorithme distinguera deux cas :
Si X est positif ou nul, la racine est calculable et son calcul sera effectué.
Si X est négatif, la racine n'est pas calculable et l'exécution de l'algorithme se
poursuivra à une étape prévue pour ce cas-là.
Algorithmique
Voir d'abord Algorithme.
Ame
Dans le dictionnaire [19]
Principe de la vie, de la pensée ou des deux à la fois, en tant qu'il est considéré
comme une réalité distincte du corps par lequel il manifeste son activité. Cette
réalité peut d'ailleurs être conçue soit comme matérielle, soit comme
immatérielle :
Selon Descartes :
[71] "…l’âme est véritablement jointe à tout le corps, et qu’on ne peut pas
35
proprement dire qu’elle soit en quelqu’une de ses parties à l’exclusion des
autres, à cause qu’il est un et en quelque façon indivisible, à raison de la
disposition de ses organes qui se rapportent tellement tous l’un à l’autre que,
lorsque quelqu’un d’eux est ôté, cela rend tout le corps défectueux. Et à cause
qu’elle est d’une nature qui n’a aucun rapport à l’étendue ni aux dimensions ou
autres propriétés de la matière dont le corps est composé, mais seulement à tout
l’assemblage de ses organes."
Principe d'inspiration morale. "Avoir de l'âme", expression louée par Mme de
Staël, qui ajoute : "…aimer en apprend plus sur les mystères de l'âme que la
métaphysique la plus subtile." [72]
Critique
Multiples sens du mot « âme »
Le mot âme implique toujours une dualité de nature et de fins, une opposition, au
moins provisoire, avec l'idée du corps, soit au point de vue métaphysique, soit au
point de vue empirique, soit au point de vue moral, « soit même au point de vue
esthétique, par exemple quand on dit qu'il faut avoir de l'âme pour avoir du goût ».
[…]
Il s'oppose également au Moi dans la question de savoir si notre âme « est plus
grande que notre moi », c'est-à-dire si notre existence psychique est plus riche de
contenu que ce dont nous avons conscience.
Il a même le plus souvent, chez les modernes, une nuance religieuse, par suite d'une
association très générale :
Entre l'idée d'âme et l'idée d'immortalité ;
Entre l'idée d'âme et l'idée de Dieu, considéré comme l'origine et le lien des
âmes selon le christianisme.
Chez Kant
Kant emploie âme pour désigner :
Tantôt le ressenti du phénomène du Moi par le sens interne de l'homme ;
Tantôt une fonction donnant accès au temps (succession des événements) et à
la conscience de soi ;
Tantôt le Moi pensant :
K371 – "Le Moi pensant, l'âme (nom dont on se sert pour désigner l'objet
transcendantal du sens interne), est simple…"
36
Tantôt la pensée (réflexion, raisonnement) ou le sentiment ;
Tantôt la personnalité, supposée stable, inaltérable, immuable :
(Citation de K373)
"L'identité de la conscience que j'ai de moi-même en différents temps n'est donc
qu'une condition formelle de mes pensées et de leur cohésion, mais elle ne
prouve nullement l'identité numérique de mon sujet, où, indépendamment de
l'identité logique du Moi, peut cependant être survenu un changement […]
Nous ne pouvons pas nous-mêmes, à partir de notre conscience, juger si, en
tant qu'âmes, nous sommes permanents ou non, parce que nous ne mettons au
compte de notre Moi identique que ce dont nous sommes conscients, et qu'ainsi
assurément nous sommes nécessairement forcés de juger que nous demeurons
les mêmes…"
(Fin de citation)
Voir Paralogisme de la personnalité (3ème paralogisme).
K129 – "…le temps est une condition a priori de tout phénomène en général, et plus
précisément la condition immédiate des phénomènes intérieurs (de notre âme), et
par là même aussi, de façon médiate, celle des phénomènes extérieurs."
Voir aussi :
Doctrine rationnelle de l'âme ;
Topique de la doctrine rationnelle (psychologie rationnelle) de l'âme (Je).
37
Complète, c'est-à-dire décrivant tout ce qu'elle est (par tous ses prédicats :
pureté, éternité, etc.) et toutes ses interactions avec son sujet ;
Univoque, c'est-à-dire sans ambiguïté, comme un objet dans l'Idée ;
Objective, c'est-à-dire existant en soi et partageable à l'identique par tous les
êtres humains.
Ce concept d'âme est donc un concept subjectif de la raison pure, c'est-à-dire une
idée transcendantale.
Le concept de pensée d'une âme (d'un esprit) est celui d'un ensemble de fonctions
psychiques.
Personnification de l'âme
En tant qu'esprit avec sa personnalité, l'âme éprouve des sentiments tant que son
corps vit. Ainsi, par exemple, le sujet a des désirs et des ambitions auxquels il refuse
de renoncer. Ce refus devient un refus de réalité lorsqu'il s'agit de la mort : l'homme
a beaucoup de mal à imaginer sa non-existence et à accepter de renoncer, à sa
mort, à tout ce qu'il désire ; et ce refus s'accompagne d'angoisse.
L'esprit humain réagit toujours aux angoisses en cherchant des solutions, pour éviter
une souffrance. Dans le cas de la mort, l'homme a toujours imaginé une vie de
l'esprit après la mort du corps : les anciens égyptiens avaient un culte des morts, des
peuples actuels ont un culte des ancêtres, les chrétiens croient l'âme immortelle, etc.
C'est pourquoi les philosophes et les religieux ont de tout temps réfléchi au problème
de l'immortalité, en proposant des métaphysiques, des théologies et des doctrines,
imaginant pour leurs contemporains des solutions intellectuelles plus ambitieuses ou
des religions « prêtes à l'emploi ».
38
Compléments
Conclusion sur la permanence de l'âme ;
Remarques sur l'âme et sa substance ;
Immortalité de l'âme.
[Un objet externe a une substance stable, alors que le ressenti de l'âme varie sans
cesse]
L'explication en est la suivante. Bien que tous deux soient des phénomènes, celui qui
se présente au sens externe possède pourtant quelque chose de stable ou de
permanent, qui fournit un substrat servant de fondement aux déterminations
changeantes et par conséquent un concept synthétique, savoir celui de l'espace et
d'un phénomène dans l'espace ; au contraire, le temps, qui est l'unique forme de
notre intuition interne, n'a rien qui soit permanent, et par conséquent il ne nous
donne à connaître que le changement des déterminations, mais non pas l'objet
déterminable. (Voir Ordre des phénomènes perçus dans le temps (ordre de la série
chronologique.)
Car, dans ce que nous appelons l'âme, tout se trouve dans un flux [changement]
continuel et il n'y a rien qui soit permanent, si ce n'est éventuellement […] le Moi,
lequel possède une telle simplicité précisément parce que cette représentation n'a
pas de contenu, donc pas de divers…"
(Fin de citation)
39
[Remarques : puisque l'âme n'a rien de permanent, elle ne peut par définition
être une substance ; et de son côté, le Moi n'en est pas une non, non plus.]
La psychologie rationnelle a quand même une utilité importante, bien que négative
Kant constate que l'étude de la doctrine de l'âme ne peut servir qu'à définir une limite
de la connaissance, celle que définit l'Idéalisme transcendantal. Il écrit donc, à la
suite du paragraphe précédent :
K384 – "…bien que cette discipline ne soit d'aucune utilité pour l'accroissement de la
connaissance […] on ne peut […] lui dénier une importante utilité négative."
Autre utilité d'une doctrine de l'âme : protéger le Moi pensant contre le matérialisme
Kant avait adopté la doctrine de l'Idéalisme transcendantal et il était croyant. A ce
titre, il a argumenté contre le matérialisme, qui refusait la notion même d'âme et
considérait comme superstition sa prétendue immortalité (la permanence de sa
substance).
40
mon sujet, en savoir davantage, pour refuser la possibilité de mes espérances,
que je n'en sais moi-même pour m'y maintenir attaché."
(Citation de K385)
"Sur cette apparence transcendantale de nos concepts psychologiques se fondent
encore trois questions dialectiques, qui définissent le but spécifique de la
psychologie rationnelle et ne peuvent être tranchées autrement que par les analyses
précédentes, à savoir les questions :
1. De la possibilité de l'union de l'âme avec un corps organique, c'est-à-dire de
l'animalité et de l'état de l'âme dans la vie de l'être humain ;
[Dans cette phrase et la suite de cet article le mot âme désigne pour un sujet
aussi bien le Moi pensant, la pensée et la personnalité immuable.]
2. Du début de cette union, c'est-à-dire de l'âme lors de la naissance et avant la
naissance de l'être humain ;
3. De la fin de cette union, c'est-à-dire de l'âme lors de la mort et après la mort de
l'être humain (question de l'immortalité).
(Fin de citation)
Voir aussi Penser l'âme comme simple ou comme une substance simple ?
41
Les buts de la doctrine pure de l'âme : Psychologie rationnelle (science du Moi).
(Citation de K385-K386)
[Dans l'esprit d'un sujet la matière n'est qu'un concept empirique]
"En fait, la matière, dont l'union avec l'âme soulève tant de réflexions délicates, n'est
qu'une simple forme ou une certaine manière de se représenter un objet inconnu par
l'intermédiaire de l'intuition qu'on appelle le sens externe."
[Kant refuse de spéculer sur la nature physique de la matière et applique son
principe d'Idéalisme transcendantal : tout objet réel n'existe pour l'homme que
sous forme de représentation de phénomène :]
42
elles peuvent se lier entre elles selon des lois constantes en s'enchaînant
ensemble dans une expérience."
Conclusion
Kant fait ci-dessus le procès du Réalisme, de l'habitude de considérer les
phénomènes qu'on perçoit comme réels, et leurs représentations subjectives comme
des représentations de la réalité objective.
43
La solution scientifique pour trouver la vérité empirique : le Rationalisme critique
Désirant prévoir les dates des événements célestes remarquables, comme les
éclipses et les conjonctions (alignements de planètes), l'astronome Ptolémée a fait
des relevés de positions et publié des tables vers l'an 150 après J.-C. [99]. Ses
réflexions et calculs étaient assez remarquables : leur précision a satisfait les
astronomes jusque vers 1576, année où Tycho Brahe construisit un observatoire
d'une précision encore jamais atteinte pour pouvoir faire des relevés et prédictions
encore plus précis [100].
Une conclusion s'impose ici : une connaissance suffisamment précise d'un état
d'objet (valeurs des variables qui le décrivent, formes géométriques, etc.) ou d'une loi
physique d'évolution exige toujours un raisonnement. Celui-ci permet des
descriptions et prédictions qui font l'objet de vérifications. Tout cela est empirique,
certes, mais les scientifiques admettent aujourd'hui comme vraie toute description ou
loi physique dont on ne peut démontrer l'erreur, par des déductions ou des
expériences ; et une telle vérité est toujours provisoire, jusqu'à découverte d'une plus
précise ou plus générale.
La « vérité-consensus »
Bien avant Popper, Kant a préconisé de reconnaître la validité d'une proposition
scientifique au consentement universel des spécialistes compétents :
[56b] §4 pages 43-44 – "La mathématique pure et la science pure de la nature […]
contiennent des propositions qui sont universellement reconnues, les unes
apodictiquement, certaines par la seule raison, les autres par le consentement
universel que fait naître l'expérience et comme néanmoins indépendantes de
l'expérience."
[La vérité par consensus, notamment celle des lois de la nature, est aujourd'hui
universellement reconnue, même si elle doit être provisoire.]
Complément : voir le chapitre Le Rationalisme critique de Karl Popper [90] dans [12].
Voir aussi :
La vérité d'un jugement résulte d'un consensus sur l'absence de défauts ;
Matérialisme et opposition avec l'Idéalisme et le Réalisme.
44
Confusion des objets de l'intuition sensible avec des objets réels hors de nous
K388 – Notre sujet pensant considère les choses situées hors de nous comme de
vrais objets, subreption qui "est le soubassement de toutes les théories sur l'union de
l'âme et du corps. […] La question n'est jamais posée de savoir si cette réalité
objective des phénomènes est aussi parfaitement exacte qu'elle en a l'air, mais on la
présuppose au contraire comme accordée et on se borne à proposer des
raisonnements subtils pour montrer comment il faut l'expliquer et la concevoir."
Voici pourquoi ces arguments couvrent tout le champ des possibilités d'explication
causale d'une union de l'âme et du corps. Qu'elle aboutisse à la conclusion que
l'union est possible ou non, une argumentation peut être basée sur les lois de la
nature, comme l'explication 1 ci-dessus. Si elle ne l'est pas, elle ne peut être que
surnaturelle, et alors ou elle fait partie de la volonté initiale du Créateur
(déterminisme divin) ou elle est due à une action spécifique de Sa part.
Après avoir remarqué que les arguments 2 et 3 ci-dessus ont été invoqués contre
l'argument 1 pour affirmer l'union de l'âme et du corps, Kant les évacue :
K388 –"De telles objections ne peuvent pas attacher à ce qu'elles entendent par
l'objet des sens extérieurs le concept d'une matière qui n'est rien qu'un
phénomène, et est par conséquent déjà en soi-même une simple représentation
produite par des objets extérieurs quelconques ; car si elles le faisaient, elles
diraient que les représentations des objets extérieurs (les phénomènes) ne
peuvent être causes extérieures des représentations dans notre esprit - ce qui
45
est une objection totalement vide de sens, puisqu'il ne viendrait à l'idée de
personne de tenir pour une cause extérieure ce qu'il a d'ores et déjà reconnu
comme une simple représentation."
Réponse de Kant :
Aucun être humain ne peut le savoir, cela restera une lacune de notre
connaissance ;
Mais il y a deux façons d'utiliser les représentations des phénomènes issues de
l'intuition du sens externe :
Soit les considérer comme "des objets en soi, sans nous préoccuper du
fondement premier de leur possibilité (comme phénomènes)" :
c'est la doctrine réaliste ;
Soit assigner (arbitrairement) les phénomènes extérieurs à un objet
transcendantal cause de cette sorte de représentations, objet que nous ne
pouvons connaître et dont nous ne pourrions former aucun concept.
Suite du texte de Kant K391 : Ame – Questions 2 et 3 : âme avant la vie et après la
mort.
K391 – "De ces rappels sur l'union de l'être pensant et de l'être étendu, la résolution
de toutes les controverses ou objections concernant l'état de la nature pensante
46
avant cette union (avant la vie) ou après sa dissolution (dans la mort) est une
conséquence immédiate."
La question d'une pensée avant la vie ou après la mort paraît absurde. Mais
l'informatique en réseau offre de puissantes possibilités de mémorisation, recherche
et extraction d'informations - même anciennes, ainsi que de simulation de
raisonnements correspondant à des situations complexes (exemple : formation du
système solaire à partir de gaz et de poussières interstellaires sur quelques millions
d'années) ; ces possibilités correspondent à une pensée artificielle. Nous sommes en
train de réussir par « intelligence artificielle » l'apprentissage automatique de règles
de reconnaissance d'images, de structures de données et de processus à étapes,
permettant une programmation automatique dans des cas de plus en plus nombreux.
47
règles d'une pensée rationnelle est de plus en plus d'actualité, et des nouveautés
comme la pensée par interprétation d'états psychiques captés électroniquement ne
font qu'en enrichir les découvertes.
Articles généraux dont la lecture est nécessaire pour comprendre beaucoup d'autres
Représentation
Définition moderne de ce concept, qui ajoute à celui de Kant les connaissances
actuelles de psychologie cognitive dues aux enregistreurs d'activité cérébrale.
Conscience - Conscience de
Descriptions modernes de la conscience en tant que faculté, de la conscience
d'un objet et de la conscience de soi qui complètent les connaissances de Kant.
Interprétation - Processus de la conscience
Description moderne de la conscience en tant qu'état des neurones et de leurs
interconnexions. Définition de la pensée en tant qu'interprétations successives
de son état par le cerveau.
Externe / Interne (sens)
Définitions des sens externe et interne ; relations avec l'intuition.
Relations entre sens interne et phénomène, conscience de soi et âme.
48
Paralogisme logique - Paralogisme transcendantal
Définition. Exemple des deux substances de Descartes et critique.
Psychologie rationnelle (science du Moi)
Définition et buts de la psychologie rationnelle – Réfutation du matérialisme.
Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense. Le Moi est simple. Je (objet) n'est pas
une substance. Paralogisme de la psychologie rationnelle.
L'âme en tant que substance.
Permanence de l'âme (réfutation de la démonstration de Mendelssohn).
Paralogisme psychologique : conclusion de la solution.
Paralogisme de la substantialité (1er paralogisme).
Paralogisme de la simplicité (2ème paralogisme).
Paralogisme de la personnalité (3ème paralogisme).
Paralogisme de l'idéalité (4ème paralogisme).
Ame - Considération sur la doctrine pure de l'âme suite aux paralogismes.
Ame – Question 1 : union de l'âme avec un corps organique.
Ame – Questions 2 et 3 : âme avant la vie et après la mort.
Paralogismes de la raison pure : apparence transcendantale et classement.
Pascal et Kant sur la science et l'âme.
Amoral
Adjectif de philosophie – Selon [13]
(En général, en parlant d'une entité abstraite) : qui est étranger à la morale.
(En parlant d'une personne) : qui est naturellement indifférent aux idées de bien
et de mal.
Amour en Dieu
On peut aimer une personne par espoir d'y gagner quelque chose (du plaisir, de
l'affection, de l'intérêt…) et c'est l'amour au sens courant, ou l'aimer parce qu'aimant
Dieu on respecte son commandement « Aimez-vous les uns les autres ».
49
K309 – Appendice du Livre II Analytique des principes :
Le titre de ce texte n'est accompagné d'aucun détail dans la table des matières du
livre imprimé [24]. Il commence par l'importante discussion : Réflexion - Réflexion
transcendantale - Réflexion logique. Cette discussion aborde notamment le risque
d'amphibologie transcendantale (raisonnement avec une conclusion à double sens) :
Pour remonter de concepts comparés à leurs objets, il faut une réflexion
transcendantale pour en retrouver l'origine, entendement pur ou sensibilité :
K315 – "Sans cette réflexion, je fais un usage très mal assuré de ces concepts,
et il en résulte de prétendus principes synthétiques que la raison critique ne peut
reconnaître et qui se fondent exclusivement sur une amphibologie
transcendantale, c'est-à-dire sur une confusion de l'objet pur de l'entendement
avec le phénomène."
Analogie (isomorphisme)
En mathématiques
Selon le dictionnaire [13] une analogie est un rapport de ressemblance, d'identité
partielle entre des réalités différentes préalablement soumises à comparaison,
réalités qui ont un ou plusieurs traits communs.
Exemple :
A est l'ensemble des nombres entiers positifs {1, 2, 3…} muni de la relation
d'ordre « plus grand que (>) » permettant d'affirmer que xi > xj comme 5 > 3 ;
B est l'ensemble des fractions inverses d'un nombre entier positif muni de la
relation d'ordre « plus petit que (<) » permettant d'affirmer que yi < yj comme
1/5 < 1/3.
Chez Kant
Kant rejette la définition d'une analogie en tant que rapport de ressemblance parce
qu'elle est trop vague et subjective :
(Citation de [165] page 196 note 86)
"L'analogie ne signifie pas, comme on l'entend d'ordinaire une ressemblance
imparfaite entre deux choses, mais une ressemblance parfaite de deux rapports
entre des choses tout à fait dissemblables."
(Fin de citation)
50
Kant définit l'analogie d'une manière précise et objective, permettant à plusieurs
personnes d'être d'accord sur une analogie donnée. Kant définit l'analogie comme
une extension philosophique de l'isomorphisme ci-dessus.
Grâce à une telle analogie je peux donc donner un concept de relation entre des
choses qui me sont absolument inconnues.
51
Application de ce principe
Les analogies de l'expérience sont des principes de l'entendement pur où Kant voit
des analogies avec des principes de la physique newtonienne qu'il connaît.
K236-K237 - "…c'est sans distinction que toutes les lois de la nature sont
soumises à des principes supérieurs de l'entendement, puisqu'elles se bornent à
les appliquer à des cas particuliers du phénomène. […] Ces principes fournissent
[…] le concept qui contient la condition […] d'une règle en général, alors que
l'expérience fournit le cas qui est soumis à la règle."
52
(Fin des citations)
Voir aussi Les trois modes (rapports temporels) du temps (positionnement relatif
dans le temps) et Accident.
Kant voit des analogies entre les 3 rapports au temps de l'expérience et le rapport de
deux nombres, analogies assez vagues et inutiles pour la compréhension.
53
définie que par rapport à un autre supposé connu : égale, supérieure, inférieure ou
infinie (un phénomène de durée nulle n'existant pas).
K253 – "Tous les phénomènes sont dans le temps, et c'est en lui seul, comme
substrat (comme forme permanente de l'intuition interne), qu'aussi bien la
simultanéité que la succession se peuvent représenter."
K249 - "…le temps lui-même ne peut pas être perçu, la détermination de l'existence
des objets dans le temps ne peut s'accomplir que par leur liaison dans le temps en
général, par conséquent uniquement par l'intermédiaire de concepts qui effectuent la
liaison a priori."
La représentation d'un phénomène perçu comprend nécessairement un
positionnement relatif dans le temps, sans lequel elle n'existerait pas, car
"L'existence des phénomènes ne peut être connue a priori" et "toutes les
déterminations temporelles empiriques doivent être soumises aux règles de la
détermination générale du temps ;" (K250)
54
Mais en philosophie, lorsqu'on connaît deux rapports ayant chacun deux termes et
que ces rapports sont de même nature (analogues), on ne peut, "à partir de trois
termes donnés, connaître et indiquer a priori que le rapport à un quatrième, mais non
pas ce quatrième terme lui-même" (K251). Exemple évident :
Si {A succède à B, C succède à D, et A succède à C}, alors {A succède aussi à
D}, mais on ne sait pas qui de B ou D succède à l'autre ou s'ils sont simultanés.
D'où la définition :
K251 – "Une analogie de l'expérience sera donc seulement une règle d'après
laquelle, à partir de perceptions, doit se produire l'unité de l'expérience (non pas
comme perception même, [mais] en tant qu'intuition empirique en général), et elle
vaudra comme principe des objets (des phénomènes) de manière non pas
constitutive, mais simplement régulatrice."
Exemple d'analogie : le principe de permanence de la substance, principe de
l'usage empirique de l'entendement par opposition à son usage transcendantal
générateur de concepts (K252).
Analogon – Analogue
Substantif
Chez Kant
(Citation de K573)
"Bien que l'on ne puisse découvrir dans l'intuition, pour l'unité systématique intégrale
de tous les concepts de l'entendement, aucun schème, un analogon d'un tel schème
55
peut et doit cependant être fourni. [Cet analogon] consiste dans l'Idée du maximum
de la division et de la liaison de la connaissance d'entendement dans un seul et
même principe.
Donc, l'Idée de la raison est un analogon d'un schème de la sensibilité, mais avec
cette différence que l'application des concepts de l'entendement au schème de la
raison n'est pas une connaissance de l'objet lui-même (comme c'est le cas pour
l'application des catégories à leurs schèmes sensibles), mais seulement une règle ou
un principe de l'unité systématique de tout usage de l'entendement.
Or, dans la mesure où tout principe qui garantit a priori à l'entendement l'unité
intégrale de son usage vaut également, bien que ce soit seulement de manière
indirecte, pour l'objet de l'expérience, les principes de la raison pure posséderont une
réalité objective, même relativement à ce dernier :
non pas certes pour y déterminer quelque chose, mais simplement pour indiquer la
démarche selon laquelle l'usage empirique et déterminé de l'entendement peut être
mis intégralement en accord avec lui-même, à travers la manière dont il se trouve
articulé, autant qu'il est possible, au principe de l'unité intégrale et dérivé de lui."
(Fin de citation)
Analyse
Substantif
Une analyse commence par la décomposition d'une chose en ses éléments, d'un
tout en ses parties.
Ensuite l'analyse met en évidence les relations entre les éléments, c'est-à-dire la
structure (hiérarchie, réseau). Chaque lien de relation a :
Une signification (se compose de ; utilise ; a pour conséquences ; etc.) ;
Un sens unique (de… vers…) ou double (de A vers B et de B vers A) ;
Une multiplicité (de 1 vers N ; de N vers P ; ou un pourcentage).
Pour qu'une chose puisse être analysée il faut nécessairement que l'entendement la
conçoive composée de parties liées par une ou des relations, c'est-à-dire qu'elle soit
une synthèse.
56
au premier sens, est une régression qui remonte de la conséquence au
principe ;
au second sens, elle va du tout à ses parties possibles, ou médiates,
entendons aux parties de ses parties : elle n'est donc pas la division, mais la
subdivision d'un composé donné. C'est seulement au second sens de ces
mots que nous prenons ici la synthèse et l'analyse."
(Fin de citation)
Analytique
Adjectif
Qui est relatif à l'analyse.
Dans un jugement analytique l'attribut du sujet du jugement (le prédicat) est contenu
dans cet objet ; ce type de jugement explicite donc la connaissance sans l'étendre.
Voir aussi logique analytique.
Substantif
Aristote [43] appelait science analytique les règles de la démonstration (c'est-à-dire
du syllogisme). Voici un extrait du début de ses Derniers analytiques :
Toute connaissance rationnelle, soit enseignée soit acquise, dérive toujours de
notions antérieures.
L'observation démontre que ceci est vrai de toutes les sciences ; car c'est le
procédé des sciences mathématiques, et de tous les autres arts sans exception.
C'est encore le procédé de tous les raisonnements de la dialectique, aussi bien
de ceux qui sont formés par syllogisme que de ceux qui sont formés par
induction. Les uns et les autres, en effet, tirent toujours l'instruction qu'ils
donnent de notions antérieures ; les premiers, en supposant ces notions
comprises et accordées ; les autres, en démontrant l'universel par l'évidence
même du particulier. C'est également par cette méthode que les raisonnements
de rhétorique produisent la persuasion ; car ils y arrivent, soit par des exemples,
ce qui n'est que l'induction ; soit par des enthymèmes, ce qui n'est que le
syllogisme.
Chez Kant
Théories de l'intuition et de l'entendement
L'intuition sensible d'un phénomène est suivie de son entendement.
La théorie de l'intuition est l'Esthétique ;
La théorie de l'entendement est l'Analytique.
L'Analytique découvre par analyse tous les actes de la raison dans la pensée en
général
(Citation de [165] page 15)
"Elle est donc une analytique de la forme de l'entendement et de la raison,
57
[L'Analytique est la logique de la vérité]
et c'est à bon droit qu'elle est également nommée logique de la vérité puisqu'elle
renferme les règles nécessaires de toute vérité (formelle),
règles sans lesquelles notre connaissance, indépendamment de ses objets, est
en elle-même non-vraie.
Elle n'est donc également rien d'autre qu'un canon permettant l'appréciation (de
la rectitude formelle de notre connaissance).
[K220 - "Car il est évident que l'usage transcendantal de la raison n'a
aucune valeur objective, et qu'il n'appartient pas, par conséquent, à la
logique de la vérité, c'est-à-dire à l'analytique, mais que, comme logique de
l'apparence, il requiert, sous le nom de Dialectique transcendantale, une
partie spécifique de l'édifice scolastique."]
[Le risque de la dialectique]
Si l'on voulait se servir de cette doctrine simplement théorique et générale
comme d'un art pratique, c'est-à-dire comme d'un organon, elle deviendrait
Dialectique. [Ce serait une] Logique de l'apparence, dans la mesure où, par la
simple forme logique, est suscitée l'apparence d'une vraie connaissance [qui
devrait] au contraire être tirée de l'accord avec l'objet, donc du contenu."
(Fin de citation)
L'Analytique est la première partie de la logique générale :
K148 – Dans la Critique, la deuxième partie « Logique transcendantale » a dans
son « Introduction » le paragraphe III, dont le titre est « De la division de la
logique générale en analytique et dialectique ».
K149 – "La logique générale résout [décompose] toute l'activité formelle
[indépendante du contenu sémantique] de l'entendement et de la raison en ses
éléments, et les présente comme principes de toute appréciation logique
[appréciation de non-contradiction, de possibilité logique] de notre connaissance.
Cette partie de la logique peut par conséquent se nommer analytique…"
K220 – "Cette doctrine [la logique générale] traite donc, dans son analytique, des
concepts, des jugements et des raisonnements…"
Dans la Critique, l'analytique est l'étude des formes de l'entendement. Elle
comprend l'Analytique transcendantale (Analytique des concepts et Analytique
des principes).
58
les cherchant dans l'entendement seul […] et en analysant l'usage pur en général de
celui-ci ; car telle est la tâche spécifique d'une philosophie transcendantale".
L'analytique des concepts est donc une doctrine des concepts purs de
l'entendement.
Voir :
Diagramme de la philosophie transcendantale ;
Diagramme Logique de l'usage de l'entendement ;
Objet en général : phénomène ou noumène.
Texte de Kant
« L'analytique transcendantale » (1ère partie de la « Logique transcendantale ») est la
partie de la Critique de la raison pure qui décrit les formes a priori de l'entendement
pur et les conditions d'une pensée juste.
Définition
Voir d'abord les définitions séparées Analytique et Transcendantal.
K150-K151 – "La partie de la logique transcendantale […] qui expose les éléments
de la connaissance pure de l'entendement et les principes sans lesquels pas le
moindre objet ne peut être pensé est l'analytique transcendantale, et elle constitue
en même temps une logique de la vérité. Aucune connaissance ne peut en effet la
contredire sans perdre en même temps tout contenu, c'est-à-dire toute relation à un
quelconque objet, par conséquent toute vérité."
59
K153 - [L'analytique transcendantale] "est la décomposition de toute notre
connaissance a priori [en] éléments de la connaissance pure de l'entendement [c'est-
à-dire en concepts purs…]. Veiller aux points suivants :
Que les concepts [produits par la décomposition] soient purs et non empiriques.
Qu'ils appartiennent, non à l'intuition et à la sensibilité, mais à la pensée et à
l'entendement.
Qu'ils soient des concepts élémentaires et qu'ils soient bien distingués des
concepts dérivés ou de ceux qui en sont composés.
Que leur table soit complète, et qu'ils épuisent complètement tout le champ de
l'entendement pur. Une telle complétude n'est possible qu'au moyen d'une Idée
de la totalité que constitue la connaissance a priori de l'entendement et par la
division ainsi opérée avec précision des concepts qui la composent, par
conséquent uniquement à travers leur connexion en un système."
60
sensibilité, à l'intérieur desquelles seulement des objets nous sont donnés.
L'entendement ne s'applique donc pas aux choses en soi.
Animalité
Ensemble des caractères qui font qu'un animal a un comportement opposé à
l'homme :
suprématie de l'intelligence sur les penchants et de la sympathie sur l'indifférence.
Antécédent et conséquent
Voir Définitions : relation, antécédent, conséquent et logique de relation.
Anthropologie
Chez Kant
Connaissance du monde
(Citation de A041 [3])
[Connaître l'homme,] "conformément à son espèce, comme être terrestre doué de
raison, mérite tout particulièrement d'être désigné comme connaissance du monde,
quand bien même l'homme ne constitue simplement qu'une partie des créatures
terrestres.
61
Anthropomorphisme
Chez Kant
K558 – "La théologie transcendantale [est donc très utile en tant que] censure de
notre raison, quand cette dernière n'a affaire qu'à des Idées pures qui, justement
pour cela, n'admettent nul autre critère d'appréciation qu'un critère transcendantal.
Car si jamais, sous un autre rapport, peut-être sous l'angle pratique, la supposition
d'un être suprême et intégralement suffisant comme consistant en une intelligence
suprême affirmait sa validité sans rencontrer de contradiction, il serait de la plus
grande importance de déterminer avec exactitude ce concept, dans sa dimension
transcendantale, comme le concept d'un être nécessaire et suprêmement réel, ainsi
que d'en écarter ce qui est incompatible avec la suprême réalité, ce qui relève du
simple phénomène (de l'anthropomorphisme au sens le plus large), et en même
temps de déblayer le terrain de toutes les assertions contraires, qu'elles soient
athées, déistes ou anthropomorphiques : opération qui est très aisée dans le cadre
d'un tel examen critique, dans la mesure où les mêmes raisons qui découvrent
l'impuissance de la raison humaine relativement à l'affirmation de l'existence d'un tel
être suffisent nécessairement aussi pour démontrer l'inefficacité de toute assertion
contraire."
Principe
"Dans tous les phénomènes, le réel, qui est un objet de la sensation, possède une
grandeur intensive, c'est-à-dire un degré." (La sensation que nous percevons d'un
phénomène est intensive.)
Preuve
K242 - La perception, conscience empirique d'un phénomène, produit chez le sujet :
Une intuition pure simplement formelle : espace et temps ;
Une sensation qui l'affecte : « il existe une réalité extérieure à moi-même, je la
perçois mais je ne peux pas encore l'identifier ».
62
Complément : Principe de la continuité des sensations des phénomènes.
K243 - Ce qu'on peut appeler anticipations, ce sont les déterminations pures inscrites
dans l'espace et le temps, avec leurs figures [aspects] et leurs grandeurs. En effet,
ces déterminations représentent a priori ce qui sera toujours donné a posteriori dans
l'expérience. - Détails : voir phénomène.
63
La perception n'interprète pas les représentations qu'elle fournit, elle ne crée pas de
concept, donc pas de connaissance. Mais dès qu'une représentation est disponible –
et même si elle résulte d'une anticipation - l'intuition se déclenche spontanément et
commence à l'interpréter.
L'esprit humain peut mal interpréter a priori un phénomène perçu par son sens
externe, en comparant dans le subconscient sa représentation à de mauvais
modèles ; il peut aussi la compléter par intuition, produisant ainsi une interprétation
correcte ou incorrecte. - Détails : voir Phénomène.
Philosophie [13]
Opposition de deux propositions, concepts, phénomènes ou raisonnements,
paraissant tous deux vrais ou démontrables, et qui n'admet pas de solution.
Chez Kant
Définition : une antinomie de la raison pure est une contradiction entre deux
propositions dans laquelle la raison se perd lorsqu'elle entreprend la synthèse d'un
conditionné en tentant d'atteindre l'exhaustivité de l'inconditionné :
K426 – "Quand nous n'appliquons plus seulement notre raison, dans l'utilisation
que nous faisons des principes de l'entendement, à des objets de l'expérience,
mais que nous prenons le risque de l'étendre au-delà des limites de celle-ci, il en
naît des thèses sophistiques qui n'ont ni à espérer trouver dans l'expérience une
confirmation, ni à en redouter une réfutation, et dont chacune est non seulement
dépourvue de contradiction interne, mais trouve même dans la nature de la
raison des conditions de sa nécessité - à cette seule réserve près que
malheureusement la proposition opposée possède de son côté des raisons tout
aussi valides et nécessaires de se voir soutenue."
Voir :
Problématique : Les trois cas d'usage dialectique de la raison pure ;
Description succincte : Les trois classes de raisonnements dialectiques.
64
Les trois sortes de syllogismes à la base d'apparences transcendantales
Le 1er type d'antinomie est le paralogisme transcendantal :
K417 – "La première sorte de ces syllogismes sophistiques tendait à l'unité
inconditionnée des conditions subjectives de toutes les représentations en
général (du sujet ou de l'âme), par correspondance avec les raisonnements
catégoriques dont la majeure énonce, comme principe, la relation d'un prédicat à
un sujet."
Le paralogisme transcendantal consiste, pour un sujet, à imaginer des
informations sur les objets du monde qui ne peuvent provenir que d'une
expérience à partir du concept pur de l'entendement issu de l'aperception
transcendantale, qui n'a pas de rapport direct avec son expérience.
Le 2ème type d'antinomie est analogue aux raisonnements hypothétiques :
K417 - "La deuxième sorte d'argument dialectique adoptera donc pour contenu,
par analogie avec les raisonnements hypothétiques, l'unité inconditionnée des
conditions objectives dans le phénomène."
Ce sujet est traité ci-dessous, dans cet article, puis dans l'article Idées
cosmologiques (système).
Le 3ème type d'antinomie a pour thème l'unité inconditionnée des conditions
objectives de la possibilité des objets donnés en général.
K359 – "Je conclus, à partir de choses que je ne connais pas d'après leur simple
concept transcendantal, à un être de tous les êtres, que je connais encore moins
à travers un concept transcendant, et de la nécessité inconditionnée duquel je
ne peux me forger aucun concept. Ce raisonnement dialectique, je le nommerai
l'idéal de la raison pure." [Voir l'article Idéal de la raison pure].
Remarque : ce 3ème type concerne l'unité des conditions objectives en général
(et non dans le phénomène ou dans l'esprit du le sujet).
Exemples d'antinomies :
La proposition « Le monde doit nécessairement posséder un commencement
chronologique » paraît à tort une évidence. L'erreur logique de cette proposition
réside dans le fait de croire nécessaire (c'est-à-dire déterminé par la nature des
choses) le postulat de causalité, qui résulte d'une généralisation par induction
65
d'enchaînements de situations de la vie courante - et n'est pas démontré ; on
confond ainsi ce postulat avec un principe : ce n'est pas parce que toutes les
situations dont nous connaissons la cause en ont une, que toutes les situations
en ont toujours eu une !
Par deux raisonnements différents, la raison pure peut conclure à la fois que
l'Univers a une dimension finie et un âge fini, et que sa dimension et son âge
sont tous deux infinis ; pourtant ces deux possibilités s'excluent mutuellement.
L'existence de nombreuses antinomies dans le domaine de la physique (dont la
cosmologie fait partie) prouve que nos principes de pensée sont parfois
contredits par la réalité expérimentale. Ainsi, la possibilité d'action instantanée à
une distance immense résultant d'expériences avec des particules intriquées
(groupes d'électrons, ou de photons, etc. qui ont ensemble une énergie donnée
non divisible) prouve que notre notion a priori de lieux distincts est inadaptée à
certaines circonstances où l'espace a la propriété de non-séparabilité [12].
Résumé sur les antinomies : la raison pure peut être en conflit avec elle-même
La citation suivante provient du paragraphe de la Critique : Discipline de la raison
pure relativement à son usage polémique.
(Citation de K620)
"Il se trouve quelque chose de préoccupant et d'humiliant dans le fait qu'il doive y
avoir en général une antithétique de la raison pure, et que cette raison pure, qui
représente pourtant, vis-à-vis de tous les litiges, le tribunal suprême, doive entrer en
conflit avec elle-même. Certes, nous avons eu plus haut, devant nous, une telle
antithétique apparente de la raison ; mais il s'est révélé qu'elle reposait sur un
malentendu consistant à prendre, conformément au préjugé commun, des
phénomènes pour des choses en soi, et à revendiquer ensuite, d'une façon ou d'une
autre (au demeurant tout aussi impossibles l'une que l'autre), une absolue
complétude de leur synthèse, ce que l'on ne peut toutefois aucunement attendre de
phénomènes.
Il n'y avait donc alors aucune contradiction effective de la raison avec elle-même
dans ces propositions :
la série des phénomènes donnés en soi a un commencement absolument
premier, et :
cette série est absolument et en soi dépourvue de tout commencement ;
car les deux propositions coexistent parfaitement bien, puisque des phénomènes,
dans leur existence (en tant que phénomènes [c'est-à-dire de situations dont
l'homme prend conscience]), ne sont absolument rien d'en soi, ce qui veut dire qu'ils
[les phénomènes en tant que concept] sont quelque chose de contradictoire, et que
par conséquent leur supposition doit tout naturellement entraîner avec elle des
conséquences contradictoires."
(Fin de citation)
66
"Cela dit, il est remarquable que le paralogisme transcendantal mette en œuvre une
apparence seulement unilatérale [dogmatique] concernant l'Idée du sujet de notre
pensée, et que pour l'affirmation du contraire ne se puisse trouver la moindre
apparence procédant de concepts de la raison. L'avantage est entièrement du côté
du pneumatisme, bien que celui-ci ne puisse nier le défaut héréditaire qui consiste en
ce que, malgré toute l'apparence qui lui est favorable, il s'en va en fumée dès lors
que la critique le soumet à l'épreuve du feu."
(Fin de citation)
(« Mette en œuvre une apparence seulement unilatérale » signifie que le
paralogisme transcendantal effectue dogmatiquement une synthèse vers
l'inconditionné de représentations présentes à l'esprit, sans se préoccuper de
leur sémantique (donc sans critique) ; cette synthèse est donc douteuse.
« L'avantage au pneumatisme » signifie que l'esprit croit aboutir à une
connaissance rigoureuse de son objet parce qu'elle vient d'une synthèse
formellement correcte ; mais un raisonnement prenant en compte la signification
des représentations détecte l'erreur.)
67
Deux perspectives qui correspondent l'une comme l'autre à la mort d'une saine
philosophie, même si la première peut au demeurant être appelée aussi
l'euthanasie de la raison pure." (K416-K417)
(Fin de citation)
Une antinomie apparue ne subsiste que si le sujet adopte une attitude dogmatique,
c'est-à-dire s'il n'entreprend pas la réflexion critique qui lui permettrait de reconnaître
que l'inconditionné idéal ne peut être atteint dans le cadre d'une expérience possible.
Il devrait, au contraire, multiplier les expériences autant que possible en suivant les
enchaînements de causalité, tout en construisant ses connaissances avec un esprit
critique.
Objet de l'antinomie de la raison pure : exposer les principes d'une cosmologie pure
K418 – "Tout comme les paralogismes constituaient le soubassement d'une
psychologie dialectique, l'antinomie de la raison pure exposera les principes
transcendantaux d'une prétendue cosmologie pure (rationnelle), non pas pour la
trouver valide et se l'approprier, mais, ainsi que l'indique déjà la dénomination qui
désigne ici un conflit de la raison, pour la présenter dans son apparence
éblouissante, mais fausse, comme une Idée qui ne se peut accorder avec des
phénomènes."
Antithèse
Selon [19]
Opposition de sens entre deux termes ou deux propositions.
Chez Kant
Dans la logique transcendantale de Kant, une antithèse s'oppose à une thèse.
Dans les antinomies de Kant, les antithèses affirment, chacune pour la question
qu'elle concerne, qu'il n'existe pas de terme absolument premier :
Point de commencement du temps : voir Régression à l'infini ;
Point d'éléments simples ;
Point d'acte libre ;
Point d'être nécessaire,
68
et que, par suite, la recherche des antécédents, des composants, des causes
déterminantes ou des existences dépendant l'une de l'autre, ne peut que se
poursuivre indéfiniment.
Il n'y a pas d'antithétique de la raison pure, qui reste le juge suprême des arguments
K622 – "Ainsi n'y a-t-il pas proprement d'antithétique de la raison pure. Car le seul
terrain où elle pourrait trouver à se battre devrait être cherché dans le domaine de la
théologie et de la psychologie pures ; mais ce terrain n'est pas assez solide pour
supporter un quelconque combattant avec tout son attirail et des armes qu'il y ait lieu
de craindre. Il ne peut y paraître qu'en recourant à des railleries et à des
rodomontades dont on peut se moquer comme d'un jeu d'enfant. C'est là une
remarque consolante, qui redonne du courage à la raison ; car entre quelles mains
pourrait-elle remettre son sort si, elle qui est la seule à avoir vocation d'écarter toutes
les erreurs, elle était en elle-même bouleversée au point de ne pouvoir espérer ni la
paix ni la tranquillité de ses possessions ?"
69
Voir d'abord les définitions de l'article Antithétique – Antithétique transcendantale.
70
Une telle proposition de synthèse est donc nécessairement antinomique :
K427 – "Puisqu'il faut que les conditions de cette unité s'accordent d'abord, en
tant qu'il s'agit d'une synthèse effectuée selon des règles, avec l'entendement et
pourtant en même temps, puisque cette synthèse se définit par une unité
absolue, avec la raison, de telles conditions seront, si l'unité atteinte est
adéquate à celle de la raison, trop vastes pour l'entendement, et, si l'unité est
appropriée à l'entendement, trop étroites pour la raison ; il ne peut donc en
résulter qu'un conflit qui ne saurait être évité, de quelque manière que l'on
entende procéder."
Stratégie des débats : c'est le dernier qui a choisi un sujet et parlé qui a raison.
Dans le conflit entre deux possibilités logiques, si un sujet affirme l'une des
possibilités, un contradicteur ne peut lui prouver que l'autre est la seule logiquement
vraie :
K427 – "C'est toujours le parti auquel il est permis de prendre l'offensive qui a le
dessus et où est certain de se soumettre celui qui est contraint d'adopter une
démarche simplement défensive."
Une telle situation est fréquente dans un conflit entre deux opinons politiques :
celui qui affirme le premier une des positions logiques possibles ne peut être
démenti par l'autre, dont la position est toute aussi logique mais ne constitue pas
une réfutation. Kant en déduit donc une stratégie de débat :
K427 – "Pour la dernière [confrontation d'opinions d'un débat], [celle] qui décide
de l'affaire, le soin a toujours été pris que le défenseur de la bonne cause restât
seul maître du jeu en interdisant à son adversaire de reprendre les armes."
Elle est tout à fait distincte du scepticisme, principe d'une ignorance délibérée et
scientifique qui sape les fondements de toute connaissance pour ne lui laisser
disposer nulle part, autant qu'il est possible, d'aucune sécurité ni d'aucune
assurance.
L'antinomie qui se manifeste dans l'application des lois constitue, dans les limites de
notre sagesse, la meilleure mise à l'épreuve de la nomothétique pour rendre la
raison, qui ne s'aperçoit pas facilement, dans la spéculation abstraite, des faux pas
qu'elle commet.
71
Reste que cette méthode sceptique n'est essentiellement propre qu'à la philosophie
transcendantale et qu'en tout cas on peut s'en passer dans tout autre domaine, sauf
dans celui-là."
(Fin de citation)
Assertions transcendantales
Voir d'abord :
Dialectique et logique de l'apparence (logique dialectique) ;
Dialectique transcendantale.
Apagogie – Apagogique
Selon [13]
Apagogie : raisonnement par lequel on démontre la vérité d'une proposition en
prouvant l'impossibilité ou l'absurdité de la proposition contraire.
Apagogique : par l'absurde.
Définitions
L'aperception est une conscience de soi, tantôt une faculté, tantôt un état psychique.
72
(Citation de A061 [3] note *)
"Si nous nous représentons avec conscience les deux actes constitués par l'action
intérieure (spontanéité) grâce à laquelle un concept (une pensée) devient possible, à
savoir
la réflexion,
et l'impressionnabilité (réceptivité) par quoi une perception, c'est-à-dire une
intuition empirique, est possible [lors de] l'appréhension,
73
(Je pense à R) ; voir La conscience de soi nécessite une représentation de
représentation.
Ne peut être accompagnée d'aucune autre représentation (quand l'homme a
formé la représentation S et tant qu'il l'a présente à l'esprit, il ne peut rien se
représenter d'autre) ;
Est une et identique dans toute conscience.
K199 - Kant appelle l'unité de cette représentation S l'unité transcendantale de la
conscience de soi, pour désigner la possibilité de la connaissance a priori qui en
procède. Les diverses représentations d'une certaine intuition étant mes
représentations, appartiennent toutes à ma conscience de soi : elles doivent
donc nécessairement pouvoir se réunir en une conscience générale de soi.
A l'état d'éveil, ma conscience est continue, ininterrompue, d'où mon impression
d'unité, d'identité. Cette conscience fait en permanence une synthèse des
représentations que j'ai présentes à l'esprit et la tient à jour quand le temps
passe. Mes processus de synthèse des représentations successives et
d'aperception ont une logique générale, valable pour toutes les circonstances,
qui rend immuable ma faculté de représentation permanente.
L'aperception originaire est donc une fonction spontanée de la conscience. Elle est
associée à toute représentation et à son concept de la même façon que ces notions
sont associées entre elles. Une représentation ne peut rester présente à l'esprit
qu'accompagnée de son aperception originaire et réciproquement, et ce tant que la
conscience est à l'état d'éveil et qu'elle demeure donc identique à elle-même.
74
nécessairement elle-même une représentation, S, la représentation de la
représentation R.
Cette interprétation du fonctionnement cognitif (faculté de se représenter la
représentation d'un objet) est conforme à la connaissance scientifique actuelle
décrite dans [23]. - Voir les exemples de représentation de représentation.
75
(La conscience de soi est un état psychique, ensemble d'informations
représentant des neurones et leurs interconnexions. Le sens interne et
l'aperception empirique sont des facultés, distinctes mais indissociables.)
K201 - "La première connaissance pure de l'entendement, sur laquelle se fonde tout
le reste de son usage, et qui est aussi, en même temps, totalement indépendante de
toutes les conditions de l'intuition sensible, est donc le [résulte donc du] principe de
l'unité synthétique originaire de l'aperception [et de son mécanisme]."
K205 - "Un divers contenu dans mon intuition est représenté par la synthèse de
l'entendement comme appartenant à l'unité nécessaire [automatique] de la
conscience de soi, et cela se produit grâce à la catégorie. (La représentation de
l'unité de l'intuition d'un objet inclut toujours une synthèse de son divers et la relation
du divers à une unité de l'aperception - Voir identité)."
Voir :
Unification de représentations et de concepts ;
Jugements empirique, d'expérience ou de perception.
Définition
L'aperception transcendantale est une aperception (conscience de soi) pure,
formelle, objective et originaire, par laquelle le sujet a conscience d'exister tant qu'il
est à l'état d'éveil parce qu'il a conscience de penser.
76
C'est aussi la fonction de synthèse qui unifie les représentations pour en rendre
l'expérience possible.
C'est une faculté spontanée, dont le processus est lancé chaque fois qu'une
représentation est interprétée pour créer un concept. La logique de ce processus est
indépendante du contenu et de la signification de la représentation et du concept :
c'est une synthèse transcendantale. En somme, l'unité de l'aperception est celle de
la conscience dont l'entendement a fait une synthèse du phénomène.
K203 – "L'unité transcendantale de l'aperception est celle par laquelle tout le divers
donné dans une intuition est réuni en un concept de l'objet. C'est pourquoi elle
s'appelle objective et doit être distinguée de l'unité subjective de la conscience, qui
est une détermination du sens interne, par quoi ce divers de l'intuition est donné
empiriquement en vue d'une telle liaison."
(L'unité transcendantale de l'aperception est l'unité de la conscience résultant de
la synthèse de la représentation du divers de l'intuition en une représentation de
représentation interprétée comme un jugement à divers points de vue autour
d'un concept de l'objet ; voir Exemple de jugement et analyse par titres et
moments. C'est l'unité originaire du Je me pense en tant que sujet.)
K203 – "La forme pure de l'intuition dans le temps, simplement comme intuition en
général contenant un divers donné, n'est soumise à l'unité originaire de la
conscience qu'à travers la relation nécessaire du divers de l'intuition au seul et
unique : je pense, donc à travers la pure synthèse de l'entendement, laquelle sert a
priori de fondement à la synthèse empirique. Cette unité a seule une validité
objective ;"
L'intuition a un mécanisme (algorithme) qui fonctionne de la même façon pour
toutes les perceptions et l'entendement, et qui garantit l'unité de la conscience.
Ce mécanisme est le même pour tous les êtres humains, comme le mécanisme
de la logique générale l'est de son côté.
L'entendement des phénomènes et le raisonnement logique sont donc objectifs :
ils sont valables pour tous les phénomènes et partagés par tous les hommes,
sous réserve d'un langage commun pour les exprimer. Les hommes peuvent
donc partager une science commune et des valeurs morales communes.
Les choses extérieures existent tout aussi bien que moi-même j'existe
K377 – "Les choses extérieures existent tout aussi bien que moi-même j'existe, et
cela, dans les deux cas, sur le témoignage immédiat de la conscience que j'ai de
moi-même, avec cette simple différence que la représentation de moi-même comme
77
sujet pensant est rapportée uniquement au sens interne, alors que les
représentations qui font signe vers des êtres étendus sont rapportées aussi au sens
externe." : voir Paralogisme de l'idéalité (4ème paralogisme).
En outre, les déductions sont soit des inférences, soit des syllogismes.
(Les raisonnements basés sur une induction ou une probabilité ne font pas partie des
raisonnements déductifs, leur conclusion n'est jamais certaine).
C'est pourquoi, par exemple, les hommes ont pu se mettre d'accord sur l'existence
de lois universelles et déterministes de la nature, et sur leurs énoncés [12]. C'est
pourquoi ils sont d'accord sur la liste des catégories de l'entendement, comme sur
les autres principes a priori de la connaissance.
78
l'unité de la conscience dans la synthèse du divers de toutes nos intuitions, donc
aussi des concepts des objets en général, par conséquent encore de tous les objets
de l'expérience, sans quoi il serait impossible de penser pour nos intuitions un
quelconque objet : car cet objet n'est rien de plus que le quelque chose à propos
duquel le concept exprime une telle nécessité de la synthèse. Cette condition
originaire et transcendantale n'est autre que l'aperception transcendantale."
Citations
K184 – Une représentation d'objet n'est possible que grâce à l'unité de la
conscience. Cette faculté existe dès la naissance, précède donc toutes les données
de l'intuition et permet les connaissances, leur synthèse et leur unité. Cette
conscience pure, originaire, immuable est une faculté appelée aperception
transcendantale ; c'est évidemment une aperception empirique (avec sa
représentation de représentation) et elle implique une recognition.
Voir aussi :
Unification de représentations et de concepts ;
Jugements empirique, d'expérience ou de perception.
Aphoristique – Aphorisme
Selon le dictionnaire [13] :
Aphorisme
(Didactique) Proposition résumant à l'aide de mots peu nombreux, mais significatifs
et faciles à mémoriser, l'essentiel d'une théorie, d'une doctrine, d'une question
scientifique.
Aphoristique
(Littérature) Qui tient de l'aphorisme, par le fond ou la forme.
Exemple : Remarque [sur la présentation de connaissances scientifiques].
Apodictique
Adjectif. Convaincant car nécessaire, démontré. Exemple : affirmation apodictique.
K103 - "…les raisonnements des mathématiciens procédaient tous conformément au
principe de [non-]contradiction (ce que requiert la nature de toute certitude
apodictique)"
79
Voir aussi : Discursif.
Apophtegme
Chez Kant
[165] page 86 – (Parmi Les incitations à imiter plutôt qu'à penser par soi-même)
"Les apophtegmes, c'est-à-dire des propositions qui se recommandent et
maintiennent souvent leur autorité à travers les siècles comme produits d'un
jugement mûr à cause de l'énergie des pensées qu'ils renferment."
Apparence dialectique
K329 – La dialectique transcendantale / Introduction / De l'apparence
transcendantale
Dictionnaire [13]
L'apparence de quelque chose est son aspect sensible, par opposition à sa
substance. Cet aspect, manifestement subjectif, pourrait être à tort jugé comme
objectif.
Dans ce texte
Le substantif apparence est utilisé par Kant dans deux sens :
L'apparence peut être une interprétation trompeuse d'une connaissance :
K354 – "…il y a des raisonnements qui ne contiennent pas de prémisses
empiriques et par l'intermédiaire desquels, de quelque chose que nous
connaissons, nous concluons à autre chose dont nous n'avons pourtant aucun
concept et à quoi nous donnons toutefois, par une inévitable apparence, de la
réalité objective."
[56b] page 199 - Le principe qui régit et détermine de part en part mon idéalisme
est au contraire le suivant : « Toute connaissance des choses qui provient
uniquement de l'entendement pur ou de la raison pure est simple apparence et il
n'est de vérité que dans l'expérience ».
Quand cette apparence est trompeuse et résulte de la raison pure, Kant la
qualifie de dialectique.
L'apparence peut être un contenu de la représentation brute d'un objet ou
phénomène perçu, telle qu'elle est prise en compte initialement par la
conscience (donc telle qu'elle résulte de la perception après synthèse empirique
et transformation sous l'influence de la réceptivité) : voir Intuition (étapes) :
K392 – "On peut dire que toute apparence consiste en ce que l'on prend la
condition subjective de la pensée [c'est-à-dire sa représentation] pour la
connaissance de l'objet [c'est-à-dire sa chose en soi]."
Lire à ce sujet :
Relation entre ce qui nous apparaît et la réalité ;
Réalité et phénomènes ;
80
Rapport des phénomènes à l'expérience en général.
Ce ne sont pas ses sens qui trompent l'homme, c'est son jugement
K335 – "…ainsi que cela arrive dans ce qu'on appelle les illusions des sens, nous
tenons souvent pour immédiatement perçu quelque chose à quoi nous a pourtant
seulement conduits la conclusion d'un raisonnement."
A076 [3] – "§ 11. (146) Les sens ne sont pas trompeurs […] parce qu'en fait ils ne
jugent aucunement, - ce pourquoi l'erreur n'incombe jamais qu'à l'entendement.
Pourtant, l'apparence sensible contribue, sinon à justifier l'entendement, en tout cas
à l'excuser : en suivant celle-ci, l'homme en vient souvent à tenir pour objectif ce qu'il
y a de subjectif dans son mode de représentation (à considérer comme ronde la tour
éloignée à laquelle il ne voit pas d'angles, pour plus haute que le rivage la mer dont
les lointains atteignent son regard par des rayons lumineux plus élevés […] et ainsi
est-il conduit à prendre le phénomène pour l'expérience, ce qui le fait tomber dans
une erreur qu'il faut concevoir comme une faute de l'entendement, non pas comme
celle des sens."
Kant ne s'intéresse pas, dans nos sources d'erreurs, aux limites de nos sens (comme
l'impossibilité de voir dans l'obscurité totale). Il considère aussi comme hors sujet les
illusions d'optique dues aux interprétations erronées par notre cerveau des
représentations reçues des sens (apparences empiriques).
Compléments :
La logique de l'apparence (logique dialectique) critiquée par Kant ;
Vérité : les principes universels.
81
Quelle est la cause qui rend inévitable d'admettre parmi les choses existantes
quelque chose comme étant en soi [absolument] nécessaire, et pourtant nous
fait en même temps reculer d'effroi devant l'existence d'un tel être comme devant
un abîme ;
et comment se peut-il que la raison arrive à se comprendre elle-même en cette
matière et à échapper au balancement qui est la marque d'un assentiment timide
et toujours repris, pour atteindre à une clarté où elle trouve le repos ?"
(Fin de citation)
Si nous supposons l'existence de quelque chose, il y a une autre existence qui nous
paraît nécessaire
(Citation de K543-K544)
"Il est extrêmement remarquable que, si l'on suppose que quelque chose existe, on
ne puisse éviter cette conséquence que quelque chose aussi existe de manière
nécessaire. C'est sur cette conclusion tout à fait naturelle (bien que n'étant pas
encore pour autant certaine) que reposait l'argument cosmologique.
[Lorsque notre raison suppose l'existence d'une chose, elle croit aussi à
l'existence de sa chaîne de causalité, qui doit se terminer par une chose
absolument nécessaire : voir Régression à l'infini.]
[Je peux penser l'inexistence d'une chose, pas son absolue nécessité]
En revanche, je peux bien admettre d'une chose le concept que je veux : je trouve
que je ne peux jamais me représenter son existence comme absolument nécessaire,
[l'esprit ne peut se représenter une nécessité absolue, inconditionnée]
et que rien ne m'empêche, de quelque existence qu'il puisse s'agir, d'en penser le
non-être ;
[Quelle soit la définition d'un concept, je ne peux le penser absolument
nécessaire, mais je peux le penser inexistant.]
Cela équivaut à dire que je ne peux jamais achever la régression vers les conditions
de l'existence sans admettre un être nécessaire, mais que je ne peux jamais
commencer par lui."
(Fin de citation)
82
il en résulte inévitablement que la nécessité et la contingence ne doivent pas
concerner et toucher les choses elles-mêmes, puisque, sinon, surgirait une
contradiction ;
[Nécessité et contingence n'ont un sens précis que par rapport à des données
de l'expérience : une proposition est nécessaire si elle est inconditionnellement
applicable aux données, sinon elle est contingente. Un concept n'est en soi ni
nécessaire ni contingent, il ne devient l'un ou l'autre que dans son rapport avec
d'autres concepts ou lois.]
donc, qu'aucun de ces deux principes n'est objectif, mais qu'ils ne peuvent jamais
être que des principes subjectifs de la raison, lui imposant
d'une part de rechercher, pour tout ce qui est donné comme existant, quelque
chose qui soit nécessaire, c'est-à-dire de ne s'arrêter jamais ailleurs que là où
elle rencontre une explication achevée a priori,
mais aussi d'autre part de ne jamais espérer cet achèvement, c'est-à-dire de ne
jamais admettre comme inconditionné rien d'empirique en se dispensant par là
d'en produire une déduction plus poussée."
(Fin de citation)
83
que la seconde règle vous prescrit de considérer toujours comme déduites toutes les
causes empiriques de l'unité."
(Fin de citation)
Mais même si c'est un principe constitutif, ce n'est pas une condition d'existence
K546 – "Quand je considère cet être suprême, qui était absolument
(inconditionnellement) nécessaire relativement au monde, comme une chose en soi,
cette nécessité n'est susceptible d'aucun concept et ne saurait donc se trouver dans
ma raison que comme condition formelle de la pensée, mais non point comme
condition matérielle et hypostasiée de l'existence."
WYSIATI
Les problèmes de jugement basé sur des informations insuffisantes s'aggravent
lorsque notre raison se base sur l'apparence du phénomène, fausse ou surtout
incomplète, pour en juger les informations et conclure.
Les erreurs de ce genre sont si fréquentes et leurs conséquences si regrettables
que le psychologue Daniel Kahneman a reçu un prix Nobel d'économie pour
avoir approfondi ce problème (qu'il énonce sous la forme What You See Is All
There Is) et proposé des solutions [35].
En France, Jean Tirole, prix Nobel d'économie lui aussi, a publié en 2016 un
ouvrage remarquable qui aborde ce sujet, dont on trouvera un extrait dans [114].
84
Voir aussi :
Je ne peux pas voir tout ce qui est possible ;
Conditions logiques d'une détermination : non-contradiction et exhaustivité ;
Modus ponens – Modus tollens (latin).
Voir :
Dialectique et logique de l'apparence (logique dialectique) ;
Les trois types d'erreur de l'entendement due aux apparences.
85
Voici comment Kant explique cela.
86
Apparence empirique due à l'imagination, et apparence transcendantale :
"K330 - Nous n'avons pas ici pour objet de traiter de l'apparence empirique (par
exemple de l'illusion d'optique) qui se produit à l'occasion de l'usage empirique
des règles, au demeurant justes, de l'entendement et à travers laquelle la faculté
de juger est égarée par l'influence de l'imagination ; nous n'avons affaire en
réalité qu'à l'apparence transcendantale, telle qu'elle exerce son influence sur
des principes dont l'usage n'est jamais appliqué à l'expérience…"
K332 – "La dialectique logique, dans la résolution des paralogismes, n'a affaire qu'à
une faute dans l'observation des principes, ou à une apparence artificielle dans leur
imitation."
Apparence transcendantale
Définition
Kant explique la survenance de l'illusion de l'apparence transcendantale comme suit.
L'utilisation de la raison pour connaître un objet met en jeu des règles fondamentales
qu'elle possède. Ce sont des règles subjectives de liaison des concepts, faites pour
le bon fonctionnement de l'entendement et réservées à l'expérience. Hélas, elles
nous apparaissent à tort comme des principes objectifs qui s'imposent pour la
détermination des choses en soi ; en les utilisant, nous étendons à tort la portée des
règles de l'entendement au-delà de l'expérience pour laquelle elles sont faites.
Voir aussi :
Les trois sortes de syllogismes à la base d'apparences transcendantales ;
Paralogismes de la raison pure : apparence transcendantale et classement ;
Cause première (commencement chronologique du monde).
K331 – "L'apparence transcendantale […] ne cesse pas, quand bien même on l'a
découverte et que la critique transcendantale en a fait voir clairement le néant (par
exemple, l'apparence qui se trouve contenue dans la proposition : le monde doit
nécessairement posséder un commencement chronologique [discussion])."
(La proposition « Le monde doit nécessairement posséder un commencement
chronologique » paraît à tort une évidence. L'erreur logique de cette proposition
réside dans le fait de croire nécessaire (c'est-à-dire déterminé par la nature des
87
choses) le postulat de causalité, qui résulte d'une généralisation par induction
d'enchaînements de situations de la vie courante - et n'est pas démontré ; on
confond ainsi ce postulat avec un principe : ce n'est pas parce que toutes les
situations dont nous connaissons la cause en ont une, que toutes les situations
en ont toujours eu une !)
Apparition
Kant : Les sens ne perçoivent pas une apparition, ils ne perçoivent qu'un
changement
K260-K261 – "Que quelque chose survienne, c'est-à-dire que se produise quelque
chose ou un état qui n'était pas auparavant, cela ne peut être empiriquement perçu
là où n'advient pas antérieurement un phénomène ne contenant pas en lui cet état ;
car une réalité qui succède à un temps vide, par conséquent une naissance qui n'est
précédée par aucun état des choses, ne peut pas davantage être appréhendée que
le temps vide lui-même. Toute appréhension d'un événement est en ce sens une
perception qui succède à une autre perception."
Nous examinons dans le reste de cet article une restriction possible des exigences
du postulat de causalité basée sur une possibilité d'apparition.
Mais nous n'avons nullement postulé que la loi L doit exister avant la première
survenance de la situation S. Si elle existait avant, cette loi était, au moins
provisoirement, sans objet. Pour l'homme, une loi physique est une abstraction
destinée à décrire un phénomène ou son évolution, ou à calculer un résultat. Si
l'homme imagine une loi s'appliquant à des situations qui ne se sont jamais
produites, comme il peut toujours le faire, cette loi restera pure spéculation jusqu'à ce
que ses conditions d'application soient réunies, ce qui arrivera ou non. Donc :
Nous limiterons la période d'application d'une loi d'évolution et de la règle de
stabilité au temps qui suit l'apparition de la première situation où elle s'applique.
Une loi d'évolution d'une situation qui ne s'est jamais produite, et dont la
survenance n'est pas certaine, est pure spéculation car elle est sans objet.
88
Pour nous, il n'y a pas de différence empirique entre une situation qui ne s'est
jamais produite et une situation qui n'a jamais été observée : jusqu'à preuve du
contraire, nous pouvons raisonner comme si ce qui n'a jamais été observé n'a
jamais existé.
Rien n'interdit que l'Univers ait toujours existé, si toutes ses lois d'évolution sont
restées stables après leur première application. Rien n'oblige une loi d'évolution
physique à avoir existé avant la première fois où apparait une situation à laquelle elle
doit s'appliquer : la physique a intérêt à se passer au maximum de spéculations
invérifiables.
89
nouvelle ou être une évolution de loi préexistante applicable universellement
désormais.
Remarques
Affirmer qu'une situation est une apparition parce que nous n'en connaissons
aucune cause et qu'elle n'a pas d'équivalent peut, évidemment, résulter d'une
ignorance de notre part, et se trouver démenti ultérieurement ; qualifier une
survenance d'apparition n'est donc qu'une conjecture, conséquence d'une
restriction du postulat de causalité.
Le fait qu'une situation-apparition soit découverte aujourd'hui n'entraîne pas
qu'elle n'existait pas auparavant : une telle affirmation ne peut résulter que d'une
étude expérimentale ou théorique ; avant d'être prouvée elle n'est qu'une
conjecture.
Toute situation évolue instantanément selon les lois physiques qui s'appliquent.
90
Un raisonnement philosophique, basé sur le postulat de causalité classique avec ses
lois immuables et universelles, affirme qu'une situation qui n'a pas déjà évolué
n'évoluera jamais ; mais désormais nous envisagerons aussi la causalité étendue.
91
environ Δt secondes après par fusion de cette particule avec l'antiparticule, en
respectant la limite ΔE.Δt ≥ ½ä. C'est donc une apparition.
Certaines théories [68] permettent d'imaginer d'autres univers dont les lois et
constantes physiques seraient différentes des nôtres. Elles n'impacteraient pas
l'existence et les lois de notre propre Univers, mais permettraient des passages entre
univers conformes aux lois relativistes [125] ; mais aucune vérification de ces
théories n'est possible…
Nos lois de la physique sont définies dans des conditions précises, alors que nous
ne connaissons jamais toutes les circonstances d'une mesure de phénomène : il
existe peut-être des variables qui révéleront leur importance dans d'autres
92
conditions. En toute rigueur, il y a des conditions de déterminabilité de l'énoncé d'une
loi (notamment l'exhaustivité) comme il y en a pour un concept d'objet : chaque loi de
la nature peut, en principe, dépendre de toutes les autres lois, certaines continues et
d'autres discontinues voire quantifiées.
Appétition
Substantif utilisé par Leibniz [37] pour désigner l'action du principe interne (dans la
monade) qui fait le changement ou le passage d'une perception à une autre. ([19])
Notions voisines : volonté de puissance [34] de Nietzsche [48], déterminisme.
Définition
L'appréhension est l'opération par laquelle la conscience s'approprie un objet de la
perception, en rendant sa représentation présente à l'esprit en vue d'un début de
compréhension par l'entendement. C'est une opération de l'intuition qui fait appel à
l'entendement qui lui succèdera.
Cette synthèse est conforme aux formes de l'intuition que sont le temps et l'espace.
K179 – "Toute intuition [empirique] contient en soi un divers qui ne serait pourtant
pas représenté comme tel si l'esprit ne distinguait pas le temps dans la série des
impressions qui se succèdent : car, en tant que contenue dans un instant unique,
toute représentation ne peut jamais être autre chose qu'une unité absolue. Or, pour
qu'à partir de ce divers advienne l'unité de l'intuition (comme c'est le cas dans la
représentation de l'espace), il faut tout d'abord que soit parcourue la diversité, et
93
ensuite que ce divers soit rassemblé : acte que j'appelle la Synthèse de
l'appréhension, parce qu'il s'applique directement à l'intuition." (Cette synthèse de
l'appréhension est une composition du divers d'une intuition empirique).
Voir aussi :
Mécanisme de synthèse de l'appréhension, catégories et possibilité de
l'expérience ;
Jugements empirique, d'expérience ou de perception.
94
L'intuition comprend une troisième sorte de synthèse, occasionnelle et due à
l'imagination ; la voici.
95
Mécanisme de synthèse de l'appréhension, catégories et possibilité de l'expérience
L'unité synthétique du divers de l'appréhension est nécessairement gérée par un
mécanisme natif de l'esprit, l'intuition en général, le même pour toutes les intuitions
empiriques, tous leurs phénomènes :
K215 – "Mais cette unité synthétique ne peut être autre que celle de la liaison du
divers appartenant à une intuition donnée en général dans une conscience
originaire, conformément aux catégories, avec une simple application à notre
intuition sensible. En conséquence, toute synthèse par laquelle la perception
elle-même devient possible est soumise aux catégories ; et dans la mesure où
l'expérience est une connaissance s'accomplissant par l'intermédiaire de
perceptions liées entre elles, les catégories sont les conditions de la possibilité
de l'expérience et elles valent donc aussi a priori pour tous les objets de
l'expérience."
Toute appréhension d'un objet des sens met en œuvre le sens interne du temps :
quand l'homme perçoit quelque chose, son inconscient l'associe toujours à un
souvenir récent, permettant ainsi d'en reconstituer la date et une durée. Plus
généralement, tout ce qui affecte l'homme en ayant un sens psychique, peut être
rattaché à une date (et à une durée s'il est aussi rattaché à une seconde date) –
mais il ne possède pas nécessairement un espace (dimension ou position).
En outre, les facultés d'affinité et d'association permettent une synthèse continue
des représentations successives du divers des perceptions, avec unification dans le
temps de suites de représentations pour former (par imagination) une représentation
synthétique. Celle-ci est alors appréhendée (voir identité) lorsque le subconscient
juge son intérêt psychologique suffisant et lui fait franchir le seuil de conscience.
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est l'espace,
tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps."
Voir :
Réceptivité ;
Axiomes de l'intuition ;
Remarques sur l'espace et le temps, et leur caractère relatif ou absolu ;
Affect ;
Affection au sens de Kant ;
Unité transcendantale - Unité subjective ;
Changement et transformation ;
Loi fondamentale de la continuité des synthèses de tous les changements.
96
K261 – "Toute appréhension d'un événement est […] une perception qui succède à
une autre perception."
Nous appréhendons l'évolution d'un phénomène sous forme d'une suite d'états
perçus, chacun avec sa représentation, comme les photos successives d'un film. Et
comme le temps d'exposition d'une photo, chacun des phénomènes a une durée
pendant laquelle il existe et après laquelle il disparaît ; cette durée est donc sa
substance [substance au sens philosophique de ce qui est permanent].
Nous prenons conscience du changement parce que notre sens interne du
temps est continu, permanent, et parce qu'il mémorise les états-phénomènes
successifs pour les comparer et en déduire leurs différences, qui constituent
l'évolution. Ces comparaisons déterminent les rapports d'états successifs sous forme
de succession ou de simultanéité, seules formes possibles. Voir :
Unité transcendantale - Unité subjective ;
Loi fondamentale de la continuité des synthèses de tous les changements.
97
en général."
(Fin de citation) - Voir aussi :
Existence d'une suite de phénomènes dans le temps : série chronologique.
Le principe de raison suffisante (origine du déterminisme, fondement de toute
expérience possible)
« Tout ce qui existe (objet), tout ce qui se produit (événement) ou toute
assertion doit avoir une cause (due à une loi de la nature) ou une inférence
(raison logique). »
K266 – "Le principe de raison suffisante [autre nom du déterminisme] est le
fondement de toute expérience possible, c'est-à-dire de la connaissance
objective des phénomènes relativement à la façon dont ils se rapportent les
uns aux autres dans la succession du temps." – Voir [29].
K645-K646 – L'esprit peut à tort se laisser convaincre par un raisonnement
basé sur une association subjective prise pour une affinité. C'est pourquoi
"toutes les tentatives entreprises pour prouver le principe de raison
suffisante ont été vaines, de l'aveu même des connaisseurs ;"
Arbitre (arbitrium)
Chez Kant
L'arbitre est le pouvoir de l'homme de décider.
Au sens pratique, ce pouvoir peut être soumis à des contraintes psychologiques.
Arborescence
Structure reliant des nœuds par des relations telle qu'un nœud n'ait qu'un seul
supérieur dont il découle (le « père »), mais telle qu'un nœud père peut avoir
plusieurs nœuds « fils » découlant de lui. Toutes les relations (liens logiques)
descendantes vont d'un père vers un fils, jamais en sens inverse ou entre deux pères
ou deux fils. C'est donc une structure « d'arbre vu à l'envers, racine (père sans père)
en haut ».
98
Exemple : Logique : usage de l'entendement et logique transcendantale
(diagramme).
Archétype
Philosophie : Idée dont divers concepts peuvent dériver, car c'est un modèle
originaire.
K342 – "Les Idées sont, chez Platon [49], des archétypes des modèles originaux
des choses elles-mêmes, et non pas simplement des clefs pour des expériences
possibles, comme le sont les catégories. Selon son opinion, elles découlaient de
la raison suprême, à partir de quoi elles étaient devenues partie intégrante de la
raison humaine…"
Psychologie et philosophie empiriste : concept primitif servant de point de départ
(de type) à la construction psychologique d'une image plus détaillée.
Chez Jung [42]
Symbole primitif et universel appartenant à l'inconscient collectif de l'humanité et
se concrétisant dans les contes, les mythes, le folklore et les rites des peuples
les plus divers. Par extension : type, modèle de comportement.
Exemple : archétype de la mère.
Architectonique
K674 - Théorie transcendantale de la méthode / Architectonique de la raison pure
Dictionnaire [13]
Adjectif : qui a la structure rigoureuse d'une œuvre d'architecture et son caractère
systématique.
Chez Kant
Substantif
1er sens : art des systèmes
(Citation de K674)
"J'entends par architectonique l'art des systèmes. Puisque l'unité systématique est ce
qui, simplement, transforme une connaissance commune en science, c'est-à-dire ce
qui, d'un simple agrégat, fait un système, l'architectonique est donc la doctrine de ce
qu'il y a de scientifique dans notre connaissance en général, et elle appartient ainsi,
nécessairement, à la méthodologie."
(Fin de citation)
99
entier du pouvoir supérieur de connaître, et […] oppose donc le rationnel à
l'empirique."
[Les relations logiques entre les informations d'un système protègent sa complétude
et sa non-redondance]
L'unité du but auquel toutes les parties se rapportent et dans l'Idée duquel elles se
rapportent aussi les unes aux autres, fait que l'absence de chaque partie peut être
repérée à partir de la connaissance des autres,
[Les informations d'un système sont donc structurées de manière organisées, et pas
juxtaposées au hasard]
Le tout est donc articulé (articulatio), et non pas produit par accumulation
(coacervatio) ;")
(Fin de citation)
K337 – "…il est […] une loi subjective de la gestion des ressources de notre
entendement, consistant, par comparaison des concepts de celui-ci, à en ramener
l'usage général au plus petit nombre possible…"
100
C'est ainsi que Kant justifie l'existence d'une fonction d'unité systématique de la
raison, la nécessité d'un être originaire du monde, les nombreux principes constitutifs
ou régulateurs, etc.
K461 – "La raison humaine est, par sa nature, architectonique, ce qui veut dire
qu'elle considère toutes les connaissances comme appartenant à un système
possible et qu'elle n'admet comme principes que ceux qui pour le moins n'interdisent
pas à une connaissance que l'on vise de s'intégrer avec d'autres dans un
quelconque système."
101
cachées, encore à l'état fortement enveloppé et d'une manière à peine discernable
par l'observation microscopique."
(Fin de citation)
102
Lire ici :
Philosophie métaphysique de l'unité systématique des connaissances pures a
priori avec son paragraphe Système entier de la métaphysique ;
Possibilité d'une connaissance a priori procédant d'objets donnés et d'une
physiologie rationnelle procédant de principes a priori ;
La métaphysique, indispensable à la rigueur de la raison, n'est pas le fondement
de la religion, mais elle la justifie ;
Conclusions sur le rôle et l'intérêt de la métaphysique.
Argument cosmologique
Voir L'existence du monde est conditionnée par une série complète de changements.
Assentiment
Chez Kant
Vérité et assentiment
(Citation de [165] page 73)
"La vérité est [une] propriété objective de la connaissance ; le jugement par lequel
quelque chose est représenté comme vrai (le rapport à un entendement et par
conséquent à un sujet particulier) est subjectif, c'est l'assentiment.
103
soit objectivement insuffisante, mais subjectivement suffisante
[c'est alors une croyance]."
(Fin de citation)
De la même manière, celui qui, dans la simple réflexion sur la forme d'un objet,
éprouve du plaisir, sans songer à un concept, prétend légitimement à l'assentiment
de chacun, quand bien même ce jugement est empirique et particulier ;"
(Fin de citation)
Voir aussi :
Canon de la raison pure – De l'opinion, du savoir et de la croyance ;
Créance.
Assertion
Proposition, de forme affirmative ou négative, qui énonce un jugement et que l'on
soutient comme vraie absolument. Attention à la différence avec assertorique.
Voir aussi :
Antithétique de la raison pure, puis Assertions transcendantales ;
Etre, exister : les différentes significations.
Assertions transcendantales
Voir d'abord Antithétique de la raison pure.
104
K429 – "Les assertions transcendantales, qui prétendent à des observations
s'étendant au-delà même du champ de toutes les expériences possibles, ne sont ni
telles que la synthèse abstraite qu'elles contiennent pourrait être donnée dans
quelque intuition a priori, ni de nature à ce que le point de désaccord puisse être
découvert par l'intermédiaire d'une quelconque expérience."
Assertorique (assertif)
Chez Kant : un jugement est assertorique (ou assertif) quand il est émis sans idée de
nécessité, d'impossibilité ou de possibilité. Attention à la différence avec assertion.
Associabilité et associativité
Ces deux termes ont des sens voisins :
L'adjectif associabilité désigne une propriété de ce qui peut être associé :
objets, phénomènes, qualités, idées…
L'adjectif associativité désigne :
En mathématiques, la propriété (ou la loi) d'une opération ou relation R qui
permet l'équivalence formelle (aRb)Rc = aR(bRc).
Exemple avec l'addition : (3+1)+5 = 3+(1+5)
En psychologie cognitive, la possibilité d'associer des idées en une idée de
synthèse.
K187 – "Ce qui fonde la possibilité de l'association du divers, en tant que celui-ci
réside dans l'objet, s'appelle l'affinité du divers." (Voir exemple dans Affinité.)
En psychologie
Les idées ou représentations s'associent automatiquement, dans la conscience ou
l'inconscient, selon des règles formulées par le philosophe Hume [40] et le
psychologue Freud [41], et confirmée par des travaux récents. Une association
d'objets est favorisée :
Soit par la proximité d'une ou plusieurs propriétés de leurs représentations
(présence de mots, couleurs, sens psychologiques, etc. qui se ressemblent) ;
Soit par une proximité temporelle, les objets ayant été pris en compte dans un
même intervalle de temps considéré comme un tout (seconde, minute, jour,
saison, événement comme un match sportif, etc.)
105
L'association d'objets suit alors une règle de proximité. Il existe d'autres critères
d'association, dont celui d'intérêt : parmi toutes les associations d'objets possibles à
un moment donné, l'esprit choisit celle qui présente le plus d'intérêt psychologique,
en étant la plus proche possible du sujet d'attention du moment.
L'association des représentations est possible parce qu'elles respectent toutes des
règles universelles de liaison complète (associativité) que Kant appelle propriété
d'affinité.
106
Kant : De la faculté d'invention sensible dans sa dimension associative
A116 [3] – "La loi de l'association est la suivante : des représentations empiriques qui
se sont souvent succédé suscitent dans l'esprit une habitude consistant à faire surgir
la seconde dès que la première a été produite. Il est vain d'exiger une explication
physiologique de cette loi ;"
Athéisme
Selon le dictionnaire [13] :
Doctrine ou attitude fondée sur la négation d'un Dieu personnel et vivant.
Refus des croyances religieuses, par cécité de l'intelligence relativement à
l'existence de Dieu.
Négation explicite de l'existence de Dieu, avec généralement instauration d'un
humanisme sans religion.
Attention
Ce substantif a deux significations.
K213 – "Je ne vois pas comment on peut trouver tant de difficultés dans le fait que le
sens interne soit affecté par nous-mêmes. Chaque acte d'attention peut nous en
fournir un exemple."
(Chaque acte d'attention à quelque chose déclenche la formation d'une
représentation R dont le sujet a conscience en l'interprétant ensuite sous forme
de concept empirique. Cette conscience déclenche à son tour la conscience de
soi, par laquelle l'entendement forme une représentation C de la représentation
R, avec un concept de catégorie associé.)
107
K372 – "Si je veux connaître par expérience l'identité numérique d'un objet extérieur,
je vais être attentif à ce qui est permanent dans ce phénomène, et à quoi, comme
sujet, tout le reste se rapporte, comme détermination ; ainsi vais-je remarquer
l'identité de ce sujet dans le temps, où tout le reste change."
Compléments :
Schéma d'attention ;
Perception ;
Présence à l'esprit – Prise de conscience ;
Abstraire.
Attribut
Langage courant : propriété, qualité, caractéristique de quelque chose.
En métaphysique : propriété essentielle d'une substance.
Chez Kant (selon [57]) : caractère nécessaire de l'essence d'une chose comme
conséquence d'autres caractères. Exemple : dans le concept de triangle, les
trois angles sont des attributs conséquences de la donnée des trois côtés.
Axiologie
Science des valeurs philosophiques, esthétiques ou morales visant à expliquer et à
classer les valeurs.
Axiologique
Qui concerne ou qui constitue l'axiologie, ou les valeurs en général.
L'ordonnance des moyens par rapport aux fins constitue le type même de la
hiérarchie axiologique. Exemple ([13]) :
(Genèse 1, 3-5) - « Dieu dit : que la lumière soit et la lumière fut. Dieu vit que la
lumière était bonne et sépara la lumière d'avec les ténèbres. Dieu appela la
lumière jour et il appela les ténèbres nuit... ».
Définition
Une axiomatique est une organisation formelle et syntaxique (un système) d'un
ensemble d'énoncés en vue de raisonnements déductifs.
108
sont là des sciences où il n'est aucunement permis d'alléguer une inévitable
ignorance, mais où la solution peut au contraire être exigée."
Une présentation axiomatique d'une science permet de savoir, pour tout énoncé :
S'il est formellement possible (syntaxiquement correct) ou impossible (incorrect);
Et lorsqu'il est possible, s'il est vrai (juste) ou faux (non juste, écrit injuste).
109
L'opérateur unaire (portant sur une seule proposition) "NON" est noté ¬ ;
Les paires de parenthèses ou de crochets "(" et ")" et "[" et "]" entourant une
proposition à considérer comme un tout, avec une priorité d'autant plus grande
que la paire est intérieure à une autre ;
Les valeurs logiques sont 1 (vrai) ou 0 (faux) ;
Le symbole = désigne un résultat de calcul logique.
Le symbole signifie "Quel que soit"
Axiome
Dans un texte scientifique, un axiome est un énoncé :
Evident ;
Non démontrable ;
Universel, c'est-à-dire applicable à toutes les significations que l'on peut
raisonnablement attribuer à l'énoncé. Exemple : l'axiome de logique « Rien ne
peut à la fois exister et ne pas exister à un même point de vue » est universel
parce qu'il s'applique à tout objet susceptible d'exister.
Dans une science axiomatique, les théorèmes se démontrent à partir des axiomes en
utilisant des règles de déduction. Mais ces démonstrations sont formelles, elles ne
préjugent pas de la véracité des théorèmes démontrés.
Dans un texte philosophique, un axiome est une des propositions de base admise a
priori d'un système hypothético-déductif (aussi appelé axiomatique).
110
Compléments
Principes intuitifs et discursifs : axiomes et acroames ;
Discipline de la raison pure dogmatique : des axiomes.
Axiomes de l'intuition
Source : K239 à K242
Voir d'abord la définition d'un axiome. Les axiomes de l'intuition font partie des
principes de l'entendement pur appelés principes mathématiques.
Tout phénomène est perçu passivement sous forme d'une intuition dont la
représentation contient des informations d'espace et de temps – et seulement sous
cette forme :
K179 – "Toute intuition contient en soi un divers qui ne serait pourtant pas
représenté comme tel si l'esprit ne distinguait pas le temps dans la série des
impressions qui se succèdent : car, en tant que contenue dans un instant
unique, toute représentation ne peut jamais être autre chose qu'une unité
absolue. Or, pour qu'à partir de ce divers advienne l'unité de l'intuition (comme
c'est le cas dans la représentation de l'espace), il faut tout d'abord que soit
parcourue la diversité, et ensuite que ce divers soit rassemblé : acte que
j'appelle la synthèse de l'appréhension.
111
intervient dans la création des figures, que se fonde la mathématique de
l'étendue (géométrie), avec ses axiomes exprimant les conditions de l'intuition
sensible a priori sous lesquelles seulement le schème d'un concept pur du
phénomène extérieur peut se mettre en place : par exemple, entre deux points,
une seule ligne droite est possible ; deux lignes droites n'enferment aucun
espace, etc. Ce sont là les axiomes, qui ne concernent proprement que des
grandeurs (quanta) en tant que telles [et pas leurs valeurs numériques]."
Discussion
Pour créer une ligne droite - et une seule - à partir de deux points donnés, on
imagine une règle appuyée sur les deux points (on postule l'axiome euclidien qu'il n'y
a qu'une seule position de règle possible). Puis on considère un à un les points de la
ligne tracée en s'appuyant sur la règle et leur synthèse progressive : une composition
à l'infini produit alors la ligne droite unique passant par les deux points.
On peut donc représenter un phénomène extérieur (exemple : une route en ligne
droite) par une ligne droite sur une carte, concept géométrique : les deux sont des
grandeurs extensives définies par synthèses successives à partir de deux points.
Baragouin
Selon le dictionnaire [13] : (Généralement péjoratif) - Langage difficilement
compréhensible du fait de son incorrection, ou d'un excès de recherche, de
technicité, etc.
[56b] Préface page 25 – "Aborder une science nouvelle [la Critique] qui est
complètement à part et seule de son espèce avec le préjugé que les prétendues
connaissances déjà acquises permettraient de l'apprécier, alors que ce sont
précisément celles dont la réalité doit être mise en doute, cela ne peut conduire à
autre chose qu'à croire qu'on voit partout du déjà connu, à raison de quelque
ressemblance littérale ; à ceci près que tout doit se présenter comme manifestement
défiguré, absurde et baragouiné, puisque ce n'est pas sur les pensées de l'auteur
qu'on fait fond, mais toujours uniquement sur sa propre façon de penser, dont une
longue habitude a fait une nature."
Base de données
Voir définition [139].
112
Béatitude suprême
Selon le dictionnaire [13] : Félicité éternelle que goûte l'homme jouissant de la vision
de Dieu. « La conséquence de la perfection, c'est la béatitude. Dieu est infiniment
heureux, parce qu'il est infiniment parfait. Ayant donc appelé le monde à jouir de sa
perfection, il a dû l'appeler aussi à jouir de sa béatitude. » (Lacordaire [142])
Beauté
Voir La beauté, source de satisfaction universelle.
Béhaviorisme (Behaviourisme)
Doctrine qui assigne à la psychologie l'étude du comportement des individus à
l'exclusion de l'introspection.
On pensait que le Big Bang avait été suivi, une fraction de seconde après, par une
très courte période d'expansion explosive des milliards de fois plus rapide, l'inflation,
elle-même suivie par l'expansion actuelle, bien plus lente. Nous savons depuis peu
qu'il n'en est rien : l'inflation a précédé le Big Bang. Dans ce texte et par respect des
habitudes, l'expression Big Bang désigne toujours le début de l'expansion actuelle il y
a 13.8 milliards d'années, car la véritable naissance de l'Univers, avant l'inflation, n'a
pas de nom particulier et la durée entre cette naissance et le Big Bang est
extrêmement courte.
L'expression Big Bang est tellement connue - et la phase d'inflation si peu connue et
si courte - que beaucoup d'auteurs ont l'habitude de considérer le Big Bang comme
le début de l'Univers et ne parlent donc que de lui.
Pour avoir une idée de quelques ordres de grandeur de l'Univers physique un très
court instant après le Big Bang au temps de Planck voir [117].
Bijective ou biunivoque
Adjectif (mathématiques) : se dit d'une correspondance qui d'un élément x d'un
premier ensemble E fait passer à un seul élément x' d'un second E', et
réciproquement.
Bonheur
K659 - "Le bonheur est la satisfaction de toutes nos inclinations [désirs, pulsions,
instincts] (aussi bien extensive, à l'égard de leur variété, qu'intensive, quant à leur
degré, et même protensive, du point de vue de leur durée)."
113
Le bonheur que chacun peut espérer dépend de la dignité de sa conduite
K660 – "Je dis donc que, tout comme les principes moraux sont nécessaires, selon
la raison, dans son usage pratique, il est nécessaire aussi d'admettre, selon la raison
dans son usage théorique, que chacun a des motifs d'espérer le bonheur au même
degré où, dans sa conduite, il s'en est rendu digne, et qu'en ce sens le système de la
moralité est inséparablement lié à celui du bonheur, mais uniquement dans l'Idée de
la raison pure."
Reste que la moralité et, avec elle, le simple fait d'être digne du bonheur ne
constituent pas encore non plus à eux seuls, et de loin, le bien complet. Pour faire
accéder celui-ci à la complétude, celui qui s'est conduit de façon à ne pas être
indigne du bonheur doit pouvoir espérer y avoir part."
(Fin de citation)
Voir aussi Par nature, les êtres raisonnables ont pour fin le bonheur.
Ça
Voir Ça.
Canon
Règle directrice d'une discipline intellectuelle. Exemple : canons de l'architecture.
114
Définition d'un canon
(Citation de K659)
"J'entends par canon l'ensemble des principes a priori de l'usage légitime de certains
pouvoirs de connaître en général.
[Exemples]
Ainsi la logique générale constitue-t-elle, dans sa partie analytique, un canon
pour l'entendement et pour la raison en général, mais uniquement quant à la
forme, puisqu'elle fait abstraction de tout contenu.
Ainsi l'Analytique transcendantale était-elle le canon de l'entendement pur ; car
celui-ci seul est capable de véritables connaissances synthétiques a priori.
Mais là où aucun usage légitime d'une faculté de connaître n'est possible, il n'y a pas
de canon.
Donc, il n'y a nul canon de l'usage spéculatif de la raison […], mais toute logique
transcendantale n'est à cet égard rien d'autre qu'une discipline.
Par conséquent, s'il y a quelque part un usage légitime de la raison pure, auquel cas
il y en a aussi, nécessairement, un canon, celui-ci ne concernera pas l'usage
spéculatif, mais l'usage pratique de la raison…"
(Fin de citation)
Citations
K151 - Dans la mesure où la logique ne devrait être qu'un canon pour apprécier
l'usage empirique [de l'entendement], on en fait usage abusif si on en fait l'organon
d'un usage universel et sans limites, et si l'on s'aventure, avec le seul entendement
pur, à juger, affirmer ou décider synthétiquement sur des objets en général.
[165] page 86 – "Les canons […] sont des maximes générales qui servent de
fondement aux sciences et qui signifient quelque chose de sublime et de médité. On
peut encore les exprimer de manière sentencieuse, pour qu'ils plaisent davantage."
Voir aussi
Organon ;
Raison, fins et lois pour parvenir au bonheur.
115
Canon de la raison pure
K652 - Théorie transcendantale de la méthode / Le canon de la raison pure
Voir d'abord : Canon.
(Citation de K653)
"La raison est poussée par une propension de sa nature à aller au-delà de son usage
empirique, à s'aventurer, en un usage pur et par l'intermédiaire de simples Idées,
jusqu'aux plus extrêmes limites de toute connaissance, et à ne trouver de repos que
si elle a achevé de parcourir sa sphère, sous la forme d'un tout systématique
possédant par lui-même sa consistance.
[L'explication psychologique de cette propension est :
D'abord l'inquiétude instinctive de l'homme face à quelque chose d'inconnu
ou d'incompris, qui pourrait receler une menace ;
Ensuite la peur de manquer une opportunité de plaisir ou de progrès.]
Or cette tendance est-elle fondée simplement sur son intérêt spéculatif, ou ne l'est-
elle pas plutôt, uniquement, sur son intérêt pratique ?"
(Fin de citation)
116
autres phénomènes de la nature, c'est-à-dire d'après des lois immuables de
celle-ci.
[Quelles que soient les pensées (rationnelles ou irréfléchies) de l'homme,
leurs résultats sont des abstractions (représentations et leurs concepts).
Les actions de l'homme, au contraire, font partie de la réalité physique régie
par les lois de la nature. Pour Kant, il y a une barrière infranchissable entre
les domaines de l'abstraction et de la réalité physique, les causalités qui les
régissent étant indépendantes : on ne peut donc expliquer les actions de
l'homme par sa pensée.
Nous savons aujourd'hui que ce modèle de l'homme être pensant est faux :
le psychisme humain n'est que la perception par le cerveau de son état et de
l'évolution de celui-ci : voir Interprétation - Processus de la conscience.
Le cerveau peut donc commander à ses muscles comme à sa pensée, par
les mêmes mécanismes, comme nous le constatons sur les enregistreurs.]
[L'immortalité de l'âme ne peut expliquer la réalité ou son évolution]
Quand bien même, deuxièmement, la nature spirituelle de l'âme (et avec elle son
immortalité) pourrait être aperçue, on ne saurait pourtant prendre cela en compte
ni comme principe d'explication vis-à-vis des phénomènes de cette vie, ni
relativement à la nature particulière de l'état futur [impossibilité de prévoir
l'évolution des phénomènes], parce que notre concept d'une nature incorporelle
est seulement négatif et qu'il n'élargit pas le moins du monde notre
connaissance ni ne fournit quelque matière disponible pour en tirer d'autres
conséquences que celles qui ne peuvent avoir qu'une valeur de fictions, mais
que la philosophie ne peut accorder.
[L'existence de Dieu ne peut expliquer la réalité ou son évolution]
Quand bien même, troisièmement, l'existence d'une suprême intelligence serait
prouvée, nous rendrions certes ainsi compréhensible ce qu'il y a de finalisé dans
l'aménagement et dans l'ordre du monde en général, mais nous ne serions
aucunement autorisés à en dériver une quelconque disposition et un quelconque
ordre particuliers, ni non plus, là où nous ne les percevons pas, à avoir l'audace
de conclure à leur présence : c'est en effet une règle nécessaire de l'usage
spéculatif de la raison que de ne pas laisser de côté les causes naturelles et de
ne pas renoncer à ce que peut nous enseigner l'expérience, pour dériver
quelque chose que nous connaissons de ce qui dépasse entièrement toute notre
connaissance.
117
"Si donc ces trois propositions cardinales ne nous sont nullement nécessaires pour le
savoir, et si pourtant elles nous sont recommandées avec insistance par notre raison,
leur importance ne pourra concerner proprement que la dimension pratique."
[Pour Kant comme pour Descartes la raison définit les valeurs morales, c'est-à-
dire ce qui est bien ou mal ; elle a un but. De nos jours, par contre, la raison n'est
qu'un outil au service de désirs, pulsions et instincts, un simple outil.]
La raison ne peut fournir comme moyens que des lois pragmatiques de liberté
laquelle ne peut fournir à cette destination que des lois pragmatiques de la libre
conduite, en vue d'atteindre les fins qui nous sont recommandées par les sens,
Ces lois doivent convenir aux fins recommandées par nos sens, et non pas être a
priori
et non pas, par conséquent, des lois pures, déterminées complètement a priori.
Seules des lois pratiques a priori de la raison pure, définissant des fins absolues,
autorisent un canon
En revanche, des lois pratiques pures, dont la fin qu'elles énoncent serait donnée
complètement a priori par la raison, et qui ne commanderaient pas de manière
empiriquement conditionnée, mais absolument, seraient des produits de la raison
pure. Or de ce type sont les lois morales ; par conséquent, elles seules relèvent de
l'usage pratique de la raison pure et autorisent un canon."
(Fin de citation)
Ces trois objets de la philosophie pure servent à savoir déterminer ce qu'il faut faire
K655 – "Tout l'appareillage que met en place la raison dans le travail qu'on peut
appeler philosophie pure n'est donc en fait dirigé que vers les trois problèmes
mentionnés. Mais ceux-ci répondent eux-mêmes, à leur tour, à un objectif plus
118
éloigné, à savoir déterminer ce qu'il faut faire si la volonté est libre, s'il existe un Dieu
et un monde futur. Or, dans la mesure où il s'agit ici de notre conduite relativement à
la fin suprême, l'intention ultime de la nature, dans le sage souci qu'elle a de notre
sort en disposant notre raison, n'est orientée que vers la dimension morale."
[La force de la foi téléologique de Kant apparaît dans « l'intention ultime de la
nature », son « sage souci de notre sort » et son « orientation morale ».]
Le sens de la vie
(Citation de K658, à la suite de la précédente)
"Tout intérêt de ma raison (aussi bien spéculatif que pratique) se rassemble dans les
trois questions suivantes :
1. Que puis-je savoir ? [Si j'ai bien compris la Critique de la raison pure]
2. Que dois-je faire ? [Quel est mon devoir moral vis-à-vis d'autrui et de la société ?]
3. Que m'est-il permis d'espérer ? [Si je fais mon devoir ?]
La première question est simplement spéculative. [Voir Les trois objets du but final
de la spéculation dans l'usage transcendantal de la raison]
La deuxième question est simplement pratique. Elle peut, comme telle, appartenir
certes à la raison pure ; elle n'est cependant pas pour autant transcendantale, mais
morale : par conséquent, elle ne peut en elle-même préoccuper notre critique.
La troisième question, à savoir : si je fais ce que je dois, que m'est-il alors permis
d'espérer ? est pratique et théorique en même temps, en telle façon que le pratique
ne conduit que comme un fil conducteur à la solution de la question théorique et,
quand celle-ci s'élève, à celle de la question spéculative.
Car tout espoir vise le bonheur, et il est, relativement au pratique et à la loi
morale, ce que le savoir et la loi de la nature sont par rapport à la connaissance
théorique des choses.
L'espoir aboutit en définitive à la conclusion que quelque chose est (qui
détermine la dernière fin possible), parce que quelque chose doit arriver ;
[L'espoir naturel de l'homme lui fait croire en un résultat final (ou une vie future)
conformes à la loi juste qui prédit le bonheur à ceux qui le méritent.]
119
et le savoir, [aboutit] à cette conclusion que quelque chose est (qui agit comme
cause suprême), parce que quelque chose arrive."
[D'après le principe de causalité, pour un croyant toute situation ayant une
cause, le présent a une cause suprême, initiale. Mais pour qu'il y ait une cause
suprême (donc absolument nécessaire) il faut renier les lois déterministes de la
nature pour admettre une cause transcendante.]
(Fin de citation)
Voir aussi Domaine de la philosophie au sens cosmopolite : les 4 questions
fondamentales.
[Loi pragmatique : ce qu'il faut faire pour satisfaire mes désirs physiologiques]
La loi pratique qui prend pour mobile le bonheur, je l'appelle pragmatique (règle de
prudence) ;
[Cette première loi] indique ce qu'il nous faut faire si nous voulons prendre part
au bonheur ;
[Cette loi] se fonde sur des principes empiriques ; car je n'ai pas d'autre moyen
que l'expérience ni de savoir quelles sont les inclinations qui veulent être
satisfaites, ni quelles sont les causes naturelles qui peuvent produire leur
satisfaction.
120
j'admets aussi que ces lois commandent de manière absolue (et non pas simplement
de façon hypothétique, sous la supposition d'autres lois empiriques) et donc qu'elles
sont nécessaires à tous égards.
Proposition que je peux supposer à juste titre, non seulement en me réclamant des
preuves des moralistes les plus éclairés, mais aussi du jugement moral de tout
homme dès lors qu'il veut se représenter clairement une loi de ce type."
(Fin de citation)
La loi morale est absolue, mais elle ne récompense la conduite morale que si son
fondement est une suprême raison
(Citation de K661)
[La loi morale de chacun s'impose même si d'autres ne la respectent pas]
Mais, dans la mesure où l'obligation résultant de la loi morale continue de valoir pour
tout usage particulier de la liberté quand bien même d'autres ne se conduiraient pas
conformément à cette loi,
121
[Le bonheur ne dépend ni des lois de la nature, ni de la moralité du comportement]
ni la nature des choses du monde ni la causalité des actions elles-mêmes et leur
rapport à la moralité ne déterminent ce qu'il en est de leurs conséquences par
rapport au bonheur ;
[Le lien entre comportement et espoir de bonheur ne s'explique qu'avec une Foi]
au contraire n'est-il permis d'espérer un tel lien que si une suprême raison qui
commande selon des lois morales se trouve en même temps, comme cause de la
nature, prise pour fondement."
[C'est-à-dire si on postule l'existence d'un Créateur qui a créé le monde selon
des lois morales, comme expliqué dans Monde moral.]
(Fin de citation)
[Le souverain Bien, lien originaire indispensable entre Loi Pragmatique et Loi Morale]
Donc la raison pure ne peut trouver que dans l'idéal du souverain Bien originaire le
fondement du lien pratiquement nécessaire entre les deux éléments du souverain
bien dérivé [la Loi Pragmatique et la Loi morale] qui correspond à un monde
intelligible, autrement dit moral.
[Nous devons postuler le monde moral car nous appartenons au monde sensible]
Or, puisque nous devons nécessairement nous représenter nous-mêmes par la
raison comme appartenant à un tel monde, bien que les sens ne nous présentent
rien d'autre qu'un monde de phénomènes, force nous sera aussi d'admettre ce
monde intelligible comme une conséquence de notre conduite dans le monde
sensible
122
(Citation de K662)
[Maximes pratiques : des principes subjectifs des actions]
"Des lois pratiques, en tant qu'elles sont en même temps des raisons subjectives
fondant les actions, c'est-à-dire des principes subjectifs, s'appellent des maximes.
L'appréciation de la moralité, dans sa pureté et ses conséquences, s'opère d'après
des Idées ; l'obéissance à ses lois, d'après des maximes.
[Pour agir un homme a besoin d'un espoir correspondant à ses fins suprêmes]
II est nécessaire que toute la conduite de notre vie soit subordonnée à des maximes
morales ; mais il est en même temps impossible que cela se produise si la raison ne
relie pas à la loi morale, qui est une simple Idée, une cause efficiente qui détermine
pour notre conduite d'après cette loi une issue, que ce soit dans cette vie ou dans
une autre, correspondant exactement à nos fins suprêmes.
Or cela n'est possible que dans le monde intelligible, tel qu'il est soumis à la sagesse
de celui qui en est l'auteur et qui le gouverne. La raison se voit donc contrainte
d'admettre un tel auteur, en même temps que la vie dans un monde qu'il nous faut
considérer comme un monde futur, sauf à considérer les lois morales comme de
vaines chimères, puisque ce qui résulte nécessairement de ces lois, et que la même
raison y relie, ne pourrait que disparaître sans cette présupposition.
De là vient aussi que chacun considère les lois morales comme des
commandements, ce qu'elles ne pourraient être en revanche si elles ne reliaient a
priori aux règles qu'elles énoncent des conséquences proportionnées et donc si elles
ne véhiculaient avec elles des promesses et des menaces.
Ce que toutefois elles ne pourraient faire non plus si elles ne se trouvaient dans un
être nécessaire constituant le souverain bien, lequel seul peut rendre possible une
telle unité finalisée."
(Fin de citation)
123
Voir ici :
Bonheur ;
Jugement de Kant sur sa théologie morale : c'est la seule possible ;
L'unité systématique des fins réunit la raison pratique et la raison spéculative.
124
peut être considéré comme vrai provisoirement, jusqu'à ce qu'on découvre un
cas où il est faux.
Cette méthode de jugement de vérité « par consensus » est universellement
adoptée de nos jours par les scientifiques, notamment après les travaux de Karl
Popper [90].
Voir :
Vérité d'une connaissance, d'une proposition ;
La solution scientifique pour trouver la vérité empirique : le Rationalisme critique.
Remarque
K667 – "La persuasion ne peut donc en vérité être distinguée subjectivement de la
conviction, si le sujet considère la créance simplement comme un phénomène de
son esprit propre ;"
Voir ici :
Les définitions relatives à Créance ;
Toute opinion doit être fondée, que le jugement procède de la raison pure, de
l'usage transcendantal de la raison ou de son usage pratique ;
Croyance.
On ne peut démontrer par un raisonnement de logique pure que Dieu n'existe pas
K673 – "La certitude qu'il ne se trouve aucun Dieu ni aucune vie future [exige],
puisque ces deux points ne devraient être prouvés que par la simple raison, par
conséquent de manière apodictique, [qu'on puisse] démontrer l'impossibilité de l'un
et de l'autre - ce qu'assurément nul homme raisonnable ne peut entreprendre."
Sur l'inexistence d'une preuve de l'existence de Dieu par la raison pure, voir :
Sur le principe d'une preuve logique de l'existence d'un être absolument
nécessaire
Sur l'inexistence d'une vie future (c'est-à-dire sur l'immortalité de l'âme), voir :
Conclusion sur la permanence de l'âme.
Captieux
Selon [13] : qui tend à tromper, qui séduit par de belles, de fausses apparences.
Exemples : argument, raisonnements captieux ; questions captieuses.
125
Caractère
Définition
[165] page 64 – "Un caractère est ce qui dans une chose constitue une part de la
connaissance de cette chose ; ou, ce qui revient au même, une représentation
partielle dans la mesure où elle est considérée comme principe de la connaissance
de la représentation entière."
(En gros, c'est une des informations de la connaissance de la chose,
une partie de cette connaissance.)
Cardinal
Voir Les deux formes de nombre.
Cardinale
126
Chez Kant
K621 – "Je ne partage certes pas l'opinion si souvent exprimée par des hommes
remarquables et réfléchis […] qui sentaient la faiblesse des preuves [d'existence de
Dieu] utilisées jusqu'alors - savoir que l'on pourrait espérer encore trouver un jour
des démonstrations évidentes de ces deux propositions cardinales de la raison pure :
il y a un Dieu, il y a une vie future. Bien davantage suis-je certain que cela n'arrivera
jamais."
Kant considère comme cardinales d'un point de vue pratique la liberté de la volonté,
l'immortalité de l'âme et l'existence de Dieu :
K655 – "Si donc ces trois propositions cardinales ne nous sont nullement
nécessaires pour le savoir, et si pourtant elles nous sont recommandées avec
insistance par notre raison, leur importance ne pourra concerner proprement que
la dimension pratique."
Cartésianisme – Cartésien
Le cartésianisme est la philosophie de Descartes [20] prise dans son ensemble
ou dans ses options fondamentales.
L'adjectif cartésien qualifie une doctrine ou un courant de pensée qui a pour
auteur ou origine Descartes ou qui partage ses idées. En parlant d'une
personne, cartésien qualifie une manière de penser ou de raisonner qui présente
les caractères rationnels, rigoureux et méthodiques propres à la démarche
intellectuelle et spirituelle de Descartes.
Catéchèse
Selon le dictionnaire [13] : (Religion) Enseignement du mystère chrétien donné de
vive voix, par demandes et par réponses. Voir Catéchétique.
127
Catéchétique
Selon le dictionnaire [13] :
(Adjectif) Qui se rapporte à la catéchèse.
(Substantif féminin) Enseignement des éléments de la foi et de la morale
chrétiennes.
K162-K163 – Les catégories sont les prédicats les plus généraux qui peuvent être
affirmés dans des jugements, quelle que soit leur nature. La table des catégories
couvre toutes les fonctions logiques de l'entendement et des raisonnements
discursifs.
Mise en œuvre des fonctions logiques de l'entendement qui génèrent des catégories
Exemple de jugement et analyse par titres et moments
128
K206 - "La catégorie n'a pas d'autre usage pour la connaissance que son
application à des objets de l'expérience."
Voir aussi Mécanisme de synthèse de l'appréhension, catégories et possibilité
de l'expérience.
K141 : "Ces jugements [synthétiques a priori] ne peuvent jamais porter plus loin
que sur les objets des sens et ne peuvent valoir que pour les objets d'une
expérience possible."
La modalité permet des jugements de jugements par leur auteur, sans ajouter
quelque information que ce soit au jugement d'objet lui-même. Les jugements
d'objets et les catégories sont évidemment à usage empirique ; un usage
transcendantal étant apodictique ne peut être ensuite jugé quant à sa modalité :
K278 – "…des restrictions limitent toutes les catégories à l'usage simplement
empirique, sans que se trouve permis ou admis l'usage transcendantal."
Toutefois, l'entendement n'est que la partie initiale de l'intelligence, partie qui :
identifie automatiquement et rapidement les phénomènes par leurs rapports
au temps et à l'espace, puis comparaison aux catégories ;
évalue les jugements des phénomènes ainsi identifiés aux sens relation et
modalité (voir catégories de jugements 3. et 4. ci-dessous).
Si nécessaire après l'entendement, le sujet fait appel à sa raison pour
approfondir et évaluer les connaissances résultantes.
Voir aussi :
Possibilité de l'expérience (principes a priori).
Conditions de possibilité et de vraisemblance d'une connaissance.
Schème transcendantal.
Les catégories de l'entendement ne peuvent connaître ce qui ne relève pas de
l'intuition et de ses phénomènes (Exemple : une chose en soi). On ne peut donc
pas décrire au moyen des catégories de Kant des objets abstraits comme une
organisation d'entreprise ou une démonstration mathématique : la connaissance
de tels objets relève de la compréhension, non de l'entendement :
K364 – "Les catégories pures ([dont] celle de substance) n'ont en elles-
mêmes absolument aucune signification objective, [si] on ne leur subsume
pas une intuition au divers de laquelle elles puissent être appliquées comme
fonctions de l'unité synthétique ; sans quoi elles ne sont que des fonctions
d'un jugement dépourvu de contenu."
Un concept pur de l'entendement n'a de sens que comme propriété d'un
phénomène.
K327 – "Les catégories sont les seuls concepts qui se rapportent à des objets en
général." (Elles se rapportent à tout objet de l'expérience, quelle qu'elle soit.)
K700, note 61 : la Table des catégories est aussi une histoire des sciences.
129
K297 – [Pour les catégories et les principes formés à partir d'elles] "nous ne
pouvons donner d'une seule de ces catégories une définition réelle, c'est-à-dire
rendre compréhensible la possibilité de son objet, sans redescendre aussitôt aux
conditions de la sensibilité, par conséquent à la forme des phénomènes…"
(Une catégorie résultant de l'interprétation d'une représentation de
représentation lors de l'aperception, on ne peut à partir d'elle remonter au
phénomène initial, il faut revenir à la sensibilité.)
Comme la seule raison d'être d'une catégorie est de préciser la forme d'un
phénomène, et qu'il n'y a pas d'autre moyen de fournir cette précision-là, elle doit
être considérée comme une notion originaire, que chacun comprend sans autre
explication.
130
1.
De la quantité
Unité
Pluralité
Totalité
2. 3.
De la qualité De la relation
Réalité Inhérence et subsistance
Négation (substantia et accidens)
Limitation Causalité et dépendance
(cause et effet)
Communauté
(action réciproque entre
l'agent et le patient)
4.
De la modalité
Possibilité – Impossibilité
Existence – Non-existence
Nécessité - Contingence
Voir aussi :
Table transcendantale des concepts de l'entendement ;
Du système des catégories.
131
La pluralité rend possible un jugement particulier, permettant des exceptions
La totalité rend possible un jugement singulier (ni universel, ni particulier).
Quantité Catégorie de
Exemples de jugements
(fonction logique) l'entendement
Tous les ours ont une queue Universel Unité
Certains ours sont bruns Particulier Pluralité
C'est un ours Singulier Totalité
Jugements de quantité
Qualité Catégorie de
Exemples de jugements
(fonction logique) l'entendement
Cet ours est brun Affirmatif Réalité
Cet ours n'est pas brun Négatif Négation
Cet ours est d'une couleur Tout (ou
Limitation
autre que brun tous) / sauf
Jugements de qualité
132
Relation
Catégorie de
Exemples de jugements (fonction
l'entendement
logique)
Cet ours dort Catégorique Inhérence / Subsistance
Cet ours dort car il est fatigué Hypothétique Causalité / Dépendance
Cet ours est endormi ou éveillé Disjonctif Communauté / Réciprocité
Jugements de relation
Modalité Catégorie de
Exemples de jugements
(fonction logique) l'entendement
Possibilité /
Cet ours peut être dangereux Problématique
Impossibilité
Existence /
Cet ours est dangereux Assertorique
Non-existence
Nécessité /
Cet ours est forcément dangereux Apodictique
Contingence
Jugements de modalité
133
Schème d'un concept pur de l'entendement (catégorie)
K227 - Le schème d'un concept pur de l'entendement (quantité, qualité, relation ou
modalité) ne peut être ramené à aucune image, car c'est une synthèse pure
accomplie selon la règle de l'unité, un produit transcendantal de l'imagination.
Voir aussi :
Schèmes de la sensibilité et catégories ;
Schèmes des concepts purs de l'entendement.
Catégorique
Adjectif qualifiant un jugement.
Langage usuel : qui est conforme à la rigueur ou à la discipline ; péremptoire ;
n'admettant ni l'incertitude ni la contradiction.
Opposés : hypothétique, modal.
Philosophie : qui est relatif à un ensemble de catégories.
Chez Kant : en plus de la signification usuelle
(K157 : un jugement catégorique est un jugement affirmé sans nuance, ce
qui n'est possible qu'à cause d'une inhérence du prédicat au sujet ou de sa
subsistance – Exemple de proposition catégorique : « A est B »),
Kant a défini un Impératif catégorique.
Catégorisation
Substantif : repérage de ce qui est identique malgré les différences.
Catharticon
Substantif : synonyme de remède.
K145 - La logique appliquée "n'est ni un canon de l'entendement en général ni un
organon de sciences particulières, mais simplement un catharticon [remède] de
l'entendement commun."
Cause et causalité
Voir d'abord Les 4 causes d'Aristote.
Cause
Définition : la cause est ce qui produit un effet, une conséquence.
Lorsque je constate qu'une situation S1 a été plusieurs fois précédé(e) d'une situation
S0, je généralise par induction et je postule que S0 est toujours la cause de S1 : toute
situation future identique à S0 produira S1.
Principe : la même cause produira le même effet, partout et toujours.
Causalité
Définition courante : une causalité est une relation de cause à effet, c'est-à-dire
entre une cause et sa conséquence.
134
Définition philosophique : la causalité est une règle transcendantale permettant
une synthèse entre deux représentations de phénomène, la cause et l'effet ;
cette synthèse de l'entendement crée une catégorie de connexion causale.
Voir aussi :
Le postulat de causalité ;
Quelle est la cause d'un phénomène ? ;
Causalité globale.
Postulat de causalité
Le postulat de causalité est une condition nécessaire et suffisante :
Condition nécessaire : toute situation (et toute évolution) a nécessairement une
cause qui l'a précédée et dont elle résulte ;
donc rien ne peut exister sans avoir été créé auparavant.
Condition suffisante : il suffit que la cause existe pour que la conséquence ait
lieu immédiatement (c'est une certitude).
Exemple : je tiens une pierre dans ma main ;
Pour qu'elle tombe je dois la lâcher, condition nécessaire ;
Si je la lâche elle tombe, condition suffisante.
Un postulat créé pour comprendre et prévoir
Dans certains cas favorables, le postulat de causalité répond aux besoins de la
pensée rationnelle de comprendre et de prévoir :
La condition nécessaire permet d'expliquer au moins en partie une
constatation (évolution ou situation), en remontant le temps jusqu'à sa
cause ;
La condition suffisante permet de prévoir une conséquence, en suivant le
temps vers l'avenir depuis sa cause : l'évolution est déclenchée à coup sûr.
Pour Kant comme pour la science actuelle, la condition suffisante de
déclenchement est une loi de la nature.
135
Conséquence d'une cause
La conséquence physique de la cause est une évolution continue qui suit une loi de
la nature aussi longtemps qu'elle s'applique, pas une situation finale à un ou
plusieurs instants arbitraires distincts.
(Kant le confirme dans Continuité de tous les changements.)
Voir aussi :
Caractère ;
Quelle est la cause d'un phénomène ?
Progression à l'infini ou progression illimitée : définitions
Régression - Régression empirique - Régression à l'infini
Causalité globale.
136
il n'est pas valable dans le champ spéculatif, où il n'a même pas de signification :
(Citation de K556°
"Je soutiens dès lors que toutes les tentatives d'un usage purement spéculatif de
la raison en rapport à la théologie sont entièrement stériles, et que, du fait de
leur nature intrinsèque, ils sont nuls et non avenus, mais que les principes de
son usage naturel ne conduisent rigoureusement à aucune théologie ;
que, par voie de conséquence, si l'on ne prend pas pour fondement ou n'utilise
pas comme fil conducteur les lois morales, il ne saurait y avoir aucune théologie
de la raison. Car tous les principes synthétiques de l'entendement sont d'usage
immanent, alors que, pour la connaissance d'un être suprême, se trouve requis
un usage transcendant de ces principes à quoi notre entendement n'est
nullement préparé.
Compléments :
Existence de Dieu ;
Résumé de la démonstration de Hume concernant la métaphysique et la
causalité ;
Validité du principe de causalité – Impossibilité d'une preuve de l'existence de
Dieu ;
La possibilité et l'impossibilité d'un Dieu transcendantal sont indémontrables.
137
Car, dans la mesure où il ne pourrait en tout cas le démontrer que par l'intermédiaire
de la raison pure, il faudrait qu'il entreprît de prouver qu'un être suprême est
impossible, ou qu'est impossible le sujet pensant en nous, comme pure intelligence.
Mais où va-t-il aller chercher les connaissances qui l'autoriseraient à prononcer ainsi
des jugements synthétiques à propos de choses dépassant toute expérience
possible ?
[Voir Jugements synthétiques par concepts de la raison pure.]
Nous n'avons donc aucun souci à nous faire à cet égard : personne ne prouvera
jamais le contraire…"
[On peut démontrer l'impossibilité d'existence d'un Dieu créateur de l'Univers à
partir de son caractère nécessairement transcendant : pour créer l'Univers il
devait être extérieur et exister avant. Mais ces deux conditions sont impossibles
à remplir si on admet le postulat de causalité et les lois de la nature qui
l'accompagnent, c'est-à-dire le déterminisme : voir Existence de Dieu.
Or ces conditions sont celles de l'expérience, pas celles de la raison pure
indispensable pour la détermination d'un être absolument nécessaire.
Remarque
Beaucoup de gens pensent que « Kant ayant prouvé qu'on ne pouvait démontrer
qu'un Dieu créateur n'existe pas, ils pouvaient croire en son existence sans
crainte d'être démentis ». En fait, pour croire en ce Dieu-là il faut refuser le
déterminisme sous prétexte que ce n'est qu'un postulat, malgré les preuves
concrètes quotidiennes de sa validité. Kant lui-même refuse de s'opposer ainsi
aux lois de la nature et propose de croire en un Dieu transcendantal : voir
Dialectique naturelle de la raison humaine : but ultime.]
(Fin de citation)
Causalité étendue
Certains philosophes comme Aristote [43] appellent la causalité ci-dessus cause
efficace ou cause efficiente ; Schopenhauer [29] l'appelle Principe de raison
suffisante du devenir. Mais parce qu'elle définit la conséquence d'une situation-cause
comme une évolution vers toutes les situations permises par le domaine d'application
de la loi (au lieu d'une seule situation-conséquence) nous l'appellerons causalité
étendue.
Voir Définition du postulat de causalité étendue, prenant en compte les apparitions.
138
Causalité et déterminisme
Le principe de causalité est conforme au principe du déterminisme, qui suppose la
stabilité des lois de la nature en plus de la causalité.
Voir aussi Causalité globale.
Contraintes d'action d'une cause efficiente : rester dans les limites de l'Univers
L'action d'une cause efficiente est régie par les lois de la physique. Elle se déroule et
s'achève dans l'espace de l'Univers et le temps de l'Univers, aucun franchissement
des frontières de l'espace-temps (transcendance) n'étant possible car il contient par
définition tout ce qui existe, a existé et existera.
C'est parce que ce principe est utilisé si spontanément qu'on fait parfois l'erreur de
considérer la (loi de) causalité comme un principe de la raison en général (voir Idées
de la raison pure (usage régulateur des) ).
Or il n'y a de causalité que pour les phénomènes (cause efficace, appelée aussi
efficiente ou suffisante), les causes matérielle, finale et formelle n'étant pas soumises
à une loi naturelle.
139
K285 – Toute situation (état d'un système) résulte nécessairement d'un
phénomène (cause physique, perceptible) suivant les lois de causalité de la
nature. Le seul critère de nécessité est la possibilité d'une expérience.
K285 – "Tout ce qui arrive est déterminé a priori, phénoménalement, par sa
cause." C'est une affirmation sans exception du déterminisme des évolutions
physiques et un rejet du hasard.
Décrit en détail dans [12], le hasard auquel certains croient est le plus
souvent un effet de leur ignorance, de la complexité d'une situation ou du
caractère non calculable d'une loi d'évolution : Kant a raison de dire que le
hasard n'existe pas dans les lois physiques de la nature. Même les lois
d'évolution de la Mécanique quantique (notamment l'équation fondamentale
d'évolution de Schrödinger [64]) sont parfaitement déterministes, malgré
l'interprétation probabiliste des superpositions d'états.
Régression jusqu'à la cause première
En remontant d'une situation à sa cause, puis à la cause de cette cause, etc.
à l'infini, si on arrive à une cause première sans cause (exemple : Dieu) on
contredit le principe de causalité. Mais de tout temps des philosophes et des
croyants ont admis cette autre dérogation que constitue la cause première.
Ce problème est discuté dans :
Commencement du monde ;
Idées transcendantales : 3ème conflit ;
L'ouvrage [12].
Règle de stabilité du déterminisme
La relation (loi) de cause à effet est stable par rapport au temps, à l'espace et
aux circonstances : une même cause (même situation) produit, a produit et
produira le même effet partout et toujours.
Détails :
2 – Liberté d'échapper aux lois de la nature, hasard et prédictibilité.
Chaîne de causalité – Chaîne de conséquences ;
Idées transcendantales : 4ème conflit.
Voir aussi :
Causalité (loi dynamique) ;
Cause - Pertinence des notions de causalité et de conceptualisation ;
Causalité réversible ou non-réversible.
140
Catégorie de l'entendement
La causalité est aussi une catégorie de jugement de relation (voir Table des 12
catégories de l'entendement).
[Principe de fatalisme]
"Tout ce qui arrive est hypothétiquement nécessaire [devait arriver] : c'est là un
principe fondamental qui soumet dans le monde le changement à une loi, c'est-à-dire
à une règle s'appliquant à l'existence nécessaire, sans laquelle règle il n'y aurait pas
même de nature.
[Soit S une situation (phénomène constaté) d'un objet précédée d'une situation
P, qui en est la cause d'après une loi de la nature. S et P ont nécessairement la
même situation de contingence : toutes deux contingentes ou toutes deux non-
contingentes. Donc puisque la situation S est un phénomène donné, constaté, la
situation P dont elle résulte est elle-même certaine et a nécessairement entraîné
S. Donc S devait arriver.]
Par conséquent, le principe : « rien n'arrive par un hasard aveugle » est une loi a
priori de la nature ; de même : aucune nécessité intervenant dans la nature n'est une
nécessité aveugle, mais c'est toujours une nécessité conditionnée, par conséquent
intelligible".
(Fin de citation)
Il n'y a donc pas de phénomène sans cause ou d'objet qui existe sans avoir été créé.
Voir aussi :
Cause et causalité ;
Cause - Pertinence des notions de causalité et de conceptualisation ;
Déterminisme ;
Succession chronologique suivant la loi de causalité (principe) ;
Existence d'une suite de phénomènes dans le temps : série chronologique ;
Cause première (commencement chronologique du monde) ;
141
Nécessité de postuler le déterminisme pour rendre possible la représentation
d'objets.
Causalité étendue
Voir :
Définition ;
Définition du postulat de causalité étendu, prenant en compte les apparitions.
Définition
La liberté au sens causal s'oppose au déterminisme. C'est le pouvoir d'agir sans
autre cause que l'existence de ce pouvoir lui-même, c'est-à-dire sans aucune raison
relative à l'acte accompli.
Pouvoir d'un homme d'agir sans se préoccuper de l'aspect moral de l'acte ;
Pouvoir d'échapper aux lois de la nature : déclenchement spontané, effet au
hasard : voir Liberté au sens cosmologique.
Kant postule le déterminisme absolu de la nature, excluant donc le hasard.
Voir Les deux causes de l'action des êtres raisonnables : loi naturelle et liberté.
Causalité (postulat)
Voir Le postulat de causalité.
142
Causalité globale
Causalité globale
Mais l'homme a aussi défini une causalité naturelle de bout en bout, régissant
l'évolution d'un système depuis un point origine A jusqu'à un point destination B,
c'est-à-dire une loi globale définie par une fonction mathématique.
D'un point de vue philosophique, toute se passe comme si, entre A et B, la nature
choisissait pour ses rayons lumineux les trajectoires demandant le minimum de
temps. C'est là une causalité globale, fondamentalement distincte de la causalité de
proche en proche habituelle.
sin i1 n2
sin i2 n1
C'est là un exemple du fait que c'est l'homme qui introduit l'ordre et la régularité dans
les lois de la nature ; pour un même phénomène il peut formuler des lois
d'expression différente, dans la mesure où elles donnent exactement le même
résultat.
t2
AC L(q1 , q2 , q3 ; q1, q2 , q3 ; t )dt
t1
143
où :
q1, q2, q3 sont les coordonnées généralisées du point, fonctions du temps t ;
q'1, q'2, q'3 sont les vitesses généralisées du point, dérivées de q1, q2, q3 par
rapport au temps t ;
L(q1, q2, q3 ; q'1, q'2, q'3 ; t) est le lagrangien du point matériel, différence fonction
du temps entre son énergie cinétique et son énergie potentielle.
Exemple 3 : quasi-cristaux
Dernier exemple de déterminisme global (ou plus exactement « à grande
distance ») : la structure atomique des quasi-cristaux, dont la découverte par Daniel
Schechtman a été récompensée par le Prix Nobel de chimie 2011. Dans un cristal
« normal » la construction (cristallisation) se fait par ajout d'atomes un par un, à des
emplacements compatibles avec les atomes voisins, pour respecter des motifs
simples comme les symétries de rotation d'ordre 2, 3, 4 ou 6, les seules permises par
la théorie traditionnelle. Dans un quasi-cristal (forme de matière découverte
fortuitement en 1984 et dont on connaît aujourd'hui plus de 100 variétés) la structure
des atomes est déterministe (non aléatoire), fortement ordonnée à grande distance
(et non pas par rapport aux seuls atomes voisins) et avec des symétries de rotation
interdites par la théorie des cristaux normaux. On trouve ainsi, par exemple, des
symétries de rotation en icosaèdre, solide régulier dont les 20 faces sont des
triangles équilatéraux !
144
Icosaèdre vu sous trois angles différents
Tout se passe dans la construction d'un quasi-cristal comme s'il existait des
phénomènes de Mécanique quantique à grande distance caractéristiques d'un
nouvel état de la matière. Nous n'entrerons pas dans le détail du phénomène
complexe et insuffisamment connu des quasi-cristaux, car ce qui nous intéresse du
point de vue déterminisme apparaît suffisamment dans ce qui précède : il existe des
phénomènes dont le déterminisme est global et prend en compte des éléments
beaucoup plus nombreux ou plus éloignés que ceux auxquels on s'attend d'après le
déterminisme classique local. En outre, la Mécanique quantique s'applique aussi à
des phénomènes à une échelle bien plus grande que l'échelle atomique.
Conclusion
La causalité de proche en proche, la seule considérée par Kant pour les 3 sortes de
causalité, n'est pas la seule possible. Il est parfois plus pratique de considérer une
causalité globale, associée à une fonction dont on peut déterminer la valeur en un
point (de l'espace ou du temps) ou les limites éventuelles vers le passé ou l'avenir.
Compte tenu de leurs dates de publication, Kant aurait pu connaître les principes
de Fermat et de Maupertuis bien avant de publier la Critique. Peut-être aurait-il alors
pensé, pour ses régressions, à d'autres raisonnements que de proche en proche.
Nous avons là un exemple de la nécessité d'une collaboration entre philosophes de
culture littéraire et scientifiques.
145
produit toujours et partout le même effet »). Notre causalité est nécessairement a
priori.
On trouvera dans [12] un paragraphe intitulé Restriction du postulat de causalité
qui étudie des conséquences d'une restriction de l'exigence de stabilité des lois
d'évolution de la nature, la possibilité d'apparition de situations sans cause et la
possibilité d'un Univers sans commencement. Autre discussion : voir la Critique.
Par contre, il est certain que notre sensibilité existe, traduit les phénomènes en
intuitions et lance des processus d'entendement qui les conceptualisent.
Voir aussi :
Cause et causalité ;
Causalité (loi dynamique) ;
Cause première (commencement chronologique du monde) ;
Nécessité de postuler le déterminisme pour rendre possible la représentation
d'objets.
Voir aussi :
Régression à l'infini ;
Commencement du monde ;
Premier problème cosmologique (1er conflit des Idées transcendantales).
146
Critique
Une situation donnée S pouvant souvent résulter de plusieurs causes C 1, C2,
C3…, agissant séparément ou ensemble, on ne peut être certain que si elle se
reproduit elle est due à la même cause : ce n'est là qu'une possibilité. On peut
supposer seulement qu'il y a eu une cause, même différente ; la cause est la
même seulement si une loi de causalité stable s'est appliquée.
Exemple : des statistiques montrent que la longévité diminue quand la
consommation d'alcool augmente. On ne peut pourtant attribuer la longévité à la
seule consommation d'alcool, puisqu'elle est aussi affectée par des pathologies
comme le cancer, la consommation de tabac, etc.
L'application illimitée de ce postulat entraîne une régression à l'infini (voir cet article).
Mais la création d'un objet A (son apparition pour nous) peut aussi résulter de la
transformation d'un objet préexistant B : la logique l'affirme et la physique l'exige (lois
de conservation de l'énergie, de la charge électrique, etc.). Dieu aurait pu créer le
monde à partir de lui-même, être préexistant car absolument nécessaire. L'existence
actuelle peut vraiment résulter d'une transformation, au vu de l'évolution de l'Univers
qui se poursuit (son expansion accélérée, par exemple) et de la possibilité qu'il ait
toujours existé.
Une création ex nihilo du monde que nous connaissons n'est donc pas une nécessité
logique.
147
Enfin, les théories les plus avancées de l'infiniment petit envisagent un temps et
un espace discontinus, quantifiés, avec des évolutions physiques probabilistes…
[30].
Causes d'Aristote
Voir Les 4 causes d'Aristote.
Censure de la raison
Chez Kant
(Citation de K632)
"On peut appeler censure de la raison un procédé de ce genre, consistant à
soumettre les faits de la raison à l'examen et, le cas échéant, au blâme.
Il est indubitable que cette censure conduit inévitablement au doute à l'égard de tout
usage transcendant des principes. Simplement n'est-ce là que le deuxième pas, qui
ne met pas encore un terme, et de loin, à l'ouvrage entrepris.
148
d'en saisir les limites déterminées, ni seulement d'en appréhender l'ignorance
sur un point ou sur un autre, mais de l'établir relativement à toutes les questions
possibles d'un certain type, et cela non pas simplement de manière conjecturale,
mais par une démonstration tirée de principes."
[Voir aussi Usages de la raison pure]
(Fin de citation)
Certitude
Certitude d'une connaissance par l'absurde
(Citation de [169] pages 235-236)
"On est certain dans la mesure où l'on reconnaît qu'il est impossible qu'une
connaissance soit fausse.
Le degré de cette certitude, lorsqu'il est pris objectivement, dépend de ce qu'il y
a de suffisant dans les caractères de la nécessité d'une vérité
[c'est-à-dire de la rigueur de sa démonstration].
Mais dans la mesure où il est considéré subjectivement, ce degré est d'autant
plus élevé que la connaissance de cette nécessité est plus intuitive
[c'est-à-dire de la spontanéité de l'impression d'évidence].
A ce double point de vue, la certitude mathématique est d'une autre nature que la
certitude philosophique."
(Fin de citation)
Définitions
Une situation à l'instant t : St, a été causée par une situation à l'instant t-1 : St-1, elle-
même résultant de la situation St-2, etc. La conséquence de St à l'instant t+1 est St+1,
la conséquence à l'instant t+n (n=…-2, -1, 0, +1, +2, …) est St+n.
La suite des situations St+n où n<0 est appelée chaîne de causalité de la situation St :
ses éléments précèdent St. La suite des situations St+n où n>0 est appelée chaîne de
conséquences de la situation St : ses éléments suivent St.
149
Voir Régression - Régression empirique - Régression à l'infini.
Champ de conscience
Ensemble des objets psychiques dont une personne a conscience à un instant
donné.
Changement et transformation
K257 – "C'est sur cette permanence que se fonde aussi ce qui vient légitimer le
concept de changement. Naître et périr ne sont pas des changements de ce qui naît
et périt. Le changement est un mode d'existence qui succède à un autre mode
d'existence du même objet. En ce sens, tout ce qui change se trouve demeurer, et
seul son état connaît une transformation. Dans la mesure où, cela étant, ce
changement ne concerne que les déterminations qui peuvent cesser ou encore faire
leur apparition, nous pouvons dire, en une expression qui a en apparence quelque
chose d'un paradoxe : seul le permanent (la substance) connaît le changement, ce
qui peut varier ne subit pas de changement, mais seulement une transformation, en
tant que certaines déterminations cessent et d'autres font leur apparition. Le
changement ne peut donc être perçu qu'à l'égard de substances…"
Chimère
Objet, animal ou être imaginaire, qui ne peut exister.
Chose en soi
Lire d'abord Réalité d'une chose en soi : réalité objective.
En parlant de chose en soi, un idéaliste comme Kant parle d'un objet qu'il considère
comme réel : il faut en être conscient. Autrement dit :
L'objet d'une chose en soi est elle-même, d'où le qualificatif en soi ;
La chose en soi d'un objet des sens est inconnaissable, les sens ne nous en
rapportant à travers le phénomène qu'une connaissance partielle,
éventuellement sujette à une apparence.
Le caractère inaccessible de la chose en soi, donc de l'être (existence), confère
à la philosophie kantienne un caractère quelque peu nihiliste.
150
La chose en soi est une Idée pure
Cette liste d'informations est absolue : indépendante du temps, de l'espace et des
circonstances, c'est une Idée pure. Elle ne peut donc être ni cause efficace, ni
conséquence de quelque chose : elle n'a pas de réalité physique.
La liste des informations d'une chose en soi ne peut contenir l'existence de cette
chose, car une même liste pourrait correspondre à zéro, une ou plusieurs choses.
Ainsi, par exemple, quelle que soit la définition de Dieu elle ne peut contenir son
existence. De toute manière, l'existence n'est pas un prédicat d'objet : le fait d'être
s'oppose à la nature de l'être.
Une chose en soi est inconnaissable, elle est seulement intelligible. On ne peut donc
pas rapporter le divers d'un phénomène ou d'une intuition directement à une chose
en soi, il faut passer par l'entendement et éventuellement la raison. Par définition,
une chose en soi aurait une représentation qui en serait l'image parfaite si (étant
omniscient) on pouvait en connaître toutes les informations, mais on ne le peut pas.
La chose en soi du phénomène correspondant à un objet des sens peut aussi être
interprétée comme le contenu (le concept) d'une connaissance omnisciente de l'objet
du phénomène.
Une chose en soi peut être pure imagination ; et si elle ne correspond pas à une
possibilité d'expérience tout en étant intelligible, elle peut être un noumène (au sens
positif).
151
Choses en soi et phénomènes
K319 – "…quand bien même nous pourrions, par l'entendement pur, dire
synthétiquement quelque chose à propos des choses en soi (ce qui est pourtant
impossible), cela ne pourrait en tout cas s'appliquer aucunement aux phénomènes,
qui ne représentent pas des choses en soi. […] L'espace et le temps ne seront pas
des déterminations des choses en soi, mais des phénomènes : ce que les choses
peuvent bien être en soi, je ne le sais pas et n'ai pas non plus besoin de le savoir,
étant donné qu'en tout cas une chose ne peut jamais se présenter à moi autrement
que dans le phénomène."
Remarque
Le concept de chose en soi est un concept spéculatif destiné exclusivement à des
raisonnements théoriques : on en affirme l'existence et on se réfère à son contenu
comme ensemble limite maximum pour un objet réel donné.
Voir aussi :
Essence ;
Idée selon Platon ;
Idée selon Kant (concept rationnel issu de notions) ;
Noumène en tant que chose en soi : un abus de l'entendement ;
L'être suprêmement réel, ensemble ou fondement de toutes les réalités.
Cinabre
Sulfure de mercure de couleur rouge, utilisé notamment pour la fabrication du
vermillon.
[56b] §13 remarque II page 67 – "La sensation du rouge offre une ressemblance
avec la propriété du cinabre qui suscite en moi cette sensation."
152
Clarté et obscurité psychologiques
A061-A062 [3] - Des représentations que nous avons sans en être conscients
K406-K407 note * "La clarté n'est pas […] la conscience d'une représentation ; car un
certain degré de conscience, mais insuffisant pour qu'il y ait souvenir, ne peut que se
rencontrer même dans bien des représentations obscures. […] En fait, est claire une
représentation où la [prise de] conscience est suffisante pour être conscience de la
différence qui la distingue d'autres représentations."
153
A066 [3] – "A la représentation distincte, on ne peut opposer la représentation
confuse, mais il faut simplement lui opposer la représentation indistincte. Ce qui est
confus ne peut être que composé ; car, dans le simple, il n'y a ni ordre, ni confusion.
Cette dernière est donc la cause de l'indistinction, mais elle n'en constitue pas la
définition."
Codivisions et subdivisions
Voir Codivisions et subdivisions.
Coexistence
Voir Principe de la simultanéité.
Coextensif à …
Qui est défini sur le même ensemble que... - Exemples :
La somme de deux nombres entiers est coextensive à ces nombres :
elle est définie sur le même ensemble que ces deux nombres, l'ensemble des
nombres entiers.
Kant croyait que la connaissance d'un objet est soit coextensive à l'intelligence,
soit plus étroite qu'elle car les fonctions de l'entendement sont un sous-ensemble
de celles de l'intelligence : voir compréhension.
Bergson [44] disait que la conscience est coextensive à la vie.
Cognitio (latin)
Connaissance : toute connaissance provient subjectivement de faits ou de
raisonnements.
Cognition
Substantif - Ensemble des facultés mentales d'acquisition, de gestion et d'utilisation
des connaissances, notamment les fonctions entendement et mémoire. Elle traduit
des représentations d'objets réels en symboles conceptuels et effectue des calculs
sur ces symboles, par exemple par l'approche connexionniste.
154
Cognitivisme et Connexionnisme
Cognitivisme
Approche de l’étude de l’acquisition des connaissances et du traitement de
l’information orientée vers la résolution des problèmes.
La recherche prouve que le système nerveux central ne fonctionne pas tout à fait
comme un ordinateur, mais plutôt comme un réseau d’automates connexionnistes.
Connexionnisme
Doctrine de modélisation et de simulation des systèmes cognitifs (processus
psychiques, opérations mnésiques, etc.). Le connexionnisme considère qu’on peut
modéliser le système cognitif par un réseau neuronal d’automates à deux états
simulant des neurones du cerveau, l’état de l’un d’eux étant calculable à partir des
messages activateurs ou inhibiteurs des autres.
Commencement du monde
Voir :
Inconditionné – Conditionné ;
Cause première (commencement chronologique du monde) ;
Les divers types de début de la série de conditions d'un inconditionné ;
Preuve de la thèse : raisonnement sur la finitude de l'âge et de l'étendue du
monde ;
Big Bang, la naissance de l'Univers ;
Idées transcendantales : 3ème conflit.
Positions parfois contradictoires de l'Eglise catholique sur la création divine du
monde et l'évolutionnisme darwinien [113].
Commerce
Dictionnaire [13] :
Relations sociales, amicales ou affectives entre plusieurs personnes.
Exemples : Etre en commerce avec, entretenir un commerce avec, lier
commerce d'amitié avec ;
Fréquentation de personnes ;
155
Echange d'idées ;
Relation avec :
K400 – "Le rapport [de l'âme] aux objets dans l'espace donne le commerce avec
le corps ;"
Communauté
La communauté est la relation entre des choses que l'on peut associer selon un
critère quelconque, parce qu'elles ont quelque chose en commun.
Des choses en communauté font donc partie d'un tout réel ([56b] §28 page 101).
Compiler
Rassembler en un seul ouvrage des extraits provenant de sources différentes ;
(Informatique) Traduire un programme d'un langage de haut niveau en langage
d'un niveau inférieur, éventuellement exécutable.
[56b] §41 page 128 – (A défaut de distinguer les Idées (concepts purs de la raison)
des catégories (concepts purs de l'entendement) la métaphysique est absolument
impossible ; "c'est tout au plus alors une tentative d'apprenti faite sans règles pour
compiler un château de cartes, sans connaître les matériaux auxquels on a affaire ni
leur convenance à tel ou tel emploi."
Complétude
Complétude fonctionnelle
La complétude fonctionnelle est un système de connecteurs de propositions assez
riche pour permettre d'exprimer toutes les fonctions de vérité.
Exemple 1 : Kant parle de complétude au sens fonctionnel dans K155 pour
affirmer que l'ensemble des catégories (concepts primitifs de l'entendement pur)
est complet : il permet de formuler tous les jugements formels concernant des
phénomènes dont l'esprit peut avoir besoin.
156
Exemple 2 : Complétude des connecteurs des syllogismes catégoriques
Considérons les 4 connecteurs A, E, I, O des syllogismes catégoriques.
Ces connecteurs constituent un système capable d'exprimer tous les cas de
vérité formelle des jugements d'un syllogisme catégorique : on dit que c'est un
système de connecteurs fonctionnellement complet.
Complétude sémantique
La complétude sémantique est la propriété d'une axiomatique où :
Toute proposition formellement valable (syntaxiquement correcte) est
démontrable à l'aide des seuls axiomes et théorèmes déjà connus ;
[Attention aux théorèmes d'incomplétude de Gödel.]
Réciproquement, toute proposition démontrable est syntaxiquement correcte.
Complexe
En langage courant
Trouble de caractère, particulièrement inquiétude ou timidité.
Goût, attirance plus ou moins maladifs pour quelque chose.
Composition
Définition : une composition d'éléments les regroupe en un ensemble.
Exemple : une composition de tous les nombres pairs est l'ensemble des
nombres pairs.
157
Composition en tant que synthèse d'un divers
K238 note *- [Une composition est] "la synthèse d'un divers dont les éléments ne
s'appartiennent pas nécessairement les uns aux autres, comme c'est le cas par
exemple de deux triangles que produit la division d'un carré par la diagonale : par
eux-mêmes, ils n'appartiennent pas nécessairement l'un à l'autre ;"
(Des éléments qui « s'appartiennent les uns aux autres » sont des éléments qui
« ont quelque chose en commun » : il existe une relation entre eux.
Donc des éléments qui « ne s'appartiennent pas nécessairement les uns aux
autres » ont (ou n'ont pas) de relation entre eux : ils sont (ou ne sont pas)
disjoints.)
Exemple de composition : "la synthèse de l'homogène, dans tout ce qui peut être
soumis à un examen mathématique (synthèse qui à son tour peut être divisée en
celle de l'agrégation et celle de la coalition)."
Connexion
Définition : une connexion de choses est une mise en relation de ces choses selon
une propriété qu'elles partagent.
K238 note * - [Une connexion est] la synthèse d'un divers qui fait apparaître entre
ses éléments une relation d'appartenance réciproque nécessaire, comme c'est le cas
par exemple de l'accident dans son rapport à une quelconque substance, ou de
l'effet par rapport à la cause. Même si les éléments de ce divers sont hétérogènes, ils
sont liés a priori : cette liaison, parce qu'elle n'est pas arbitraire, je la nomme
dynamique.
(Entre des objets il existe une relation d'appartenance réciproque si et seulement
si ils ont quelque chose en commun, par exemple le fait d'appartenir à un même
ensemble défini par ailleurs : voir Communauté.
Une synthèse d'éléments basée sur la propriété commune constitue alors une
connexion de ces éléments, une mise en relation par synthèse.)
158
Exemple de connexions non définies, ni par la raison ni par l'expérience
(Citation de [56b] §28 pages 100-101)
"Je n'ai pas le moindre concept d'une […] connexion des choses en elles-mêmes,
telles qu'elles existent comme substances ou qu'elles agissent comme causes ou
qu'elles peuvent se trouver en communauté avec d'autres (comme parties d'un tout
réel) ;
[Partager le fait d'être substance ou cause, ou d'appartenir à une même
communauté (définie arbitrairement), ne constitue pas une relation entre des
choses en soi.]
[Pas de telles connexions, non plus, entre des phénomènes en tant que tels]
et que je suis encore moins capable de penser de telles propriétés en les attribuant
aux phénomènes en tant que phénomènes (car ces concepts ne contiennent rien qui
réside dans les phénomènes, mais ils contiennent ce que seul l'entendement doit
penser).
Compréhension
Compréhension a deux sens :
Sens 1 : L'action de comprendre (entendre, assimiler), décrite ci-dessous ;
exemple : « J'ai compris le théorème de Pythagore ! »
Sens 2 : L'inclusion de quelque chose dans un ensemble plus vaste, décrite plus
bas ; exemple : « Les Etats-Unis comprennent 50 états ».
159
Sens 1
En plus de la différence entre la pensée d'un objet et sa connaissance, il y a une
différence entre la connaissance (par intuition et entendement), et la compréhension
décrite ici.
En plus, il faut tenir compte du fait que les représentations de l'esprit humain
contiennent surtout des significations d'objets avec leur dimension psychologique, les
noms de ces objets n'en étant qu'une propriété. Or pour comprendre une signification
nouvelle il faut la rattacher à une ou plusieurs significations connues, qui serviront
d'exemples, donc des exemples dont la compréhension est acquise.
Enfin, il est prudent de vérifier qu'on a compris quelque chose en citant des
exemples de choses semblables et de choses différentes.
160
Etapes de la compréhension d'un objet X, concret ou abstrait
Décrire ses rapports avec des objets connus A, B, C… Exemples :
Je décris un objet physique comme le prescrit Kant : je construis sa
représentation et y ajoute des jugements basés sur des concepts purs de
l'entendement, les catégories (voir détermination).
Je décris une abstraction comme un objet géométrique (par exemple un
triangle) comme le recommande Kant, par synthèses pures à partir d'objets
géométriques primitifs comme le point, la ligne droite et le cercle.
Je décris l'organisation hiérarchique d'une entreprise en décrivant les
niveaux successifs de responsabilité. Exemple :
Niveau 1 : Président, qui a sous ses ordres 3 directions ;
Niveau 2 : Direction de la fabrication ; direction commerciale ; direction
administrative, etc.
J'ajoute à la description textuelle un organigramme graphique arborescent.
Décrire la manière d'en construire une représentation mentale, c'est-à-dire les
étapes apodictiques, économiques ou historiques permettant de passer d'objets
connus à l'objet X. Exemples :
Je décris la démonstration d'un théorème en énonçant ses hypothèses et en
décrivant la suite des déductions logiques (calculs, raisonnements par
syllogismes, etc.) qui aboutissent à l'énoncé du théorème. En général, il y
aura des cas : « si H appartient à l'ensemble R, alors ceci, sinon cela… »
J'explique comment il se fait qu'une politique économique de l'offre (qui
subventionne les entreprises ou diminue leurs charges) ne peut produire
une baisse rapide du chômage, alors qu'une politique de la demande
(augmentation des salaires ou des dépenses budgétaires, baisse des
impôts) le peut. J'explique pour cela l'effet des lois de l'économie dans le
contexte du moment, et j'utilise un modèle mathématique de l'effet des
subventions et impôts sur l'économie [26].
J'explique comment les événements qui ont suivi la crise économique de
1929 et l'hyperinflation en Allemagne ont amené Hitler au pouvoir, puis la
deuxième guerre mondiale. Comprendre la survenance de cette guerre
résulte de la connaissance de l'enchaînement de faits historiques.
Sens 2
En ce sens-là, la compréhension d'un concept est l'ensemble de ses caractères,
c'est-à-dire des informations qu'il contient (comprend).
Cet ensemble peut être commun à une classe de connaissances, dont il
constitue une partie commune appelée extension du concept ; le concept est alors
un attribut de chacune des connaissances de la classe.
161
Concept
Un concept représente une collection (une classe, un ensemble) d'objets nommables
ayant des propriétés communes, c'est-à-dire dont la description partage certaines
informations.
Exemple : concept de « chien », représentant tous les chiens par des propriétés
communes : quadrupède, mammifère descendant du loup, etc.
Noter le « tous » : un concept a un caractère d'universalité ; il représente tous les
objets qui ont toutes ses propriétés - et en plus, éventuellement, d'autres
propriétés.
Compléments :
Définition d'un concept de chose ;
Les concepts pensés arbitrairement ne doivent pas être définis, mais déclarés ;
Doctrine générale des éléments – 1. Concepts ;
Concept le plus abstrait.
Chez Kant
Un concept est une synthèse d'informations, créée à partir d'une ou plusieurs
représentations, par les processus de l'intuition, de l'entendement, de la raison ou de
l'imagination : voir ces articles, et leur déroulement dans : Intuition (étapes) et
Entendement (étapes).
162
L'intuition empirique est complétée par l'imagination productive pour créer une
représentation enrichie d'un phénomène, que l'esprit interprète comme concept
empirique qui devient présent à l'esprit.
163
l'objet : sa représentation C est une représentation de la représentation initiale R.
(K155)
Un jugement utilisant ce concept exprime donc la connaissance médiate de
l'objet par une représentation de représentation (K156).
K155 - Les concepts de l'entendement se fondent sur la spontanéité : ils sont
produits automatiquement et sans effort conscient (voir synthèse et recognition).
K127 - Un concept (une classe) ne peut donc représenter un objet particulier, qui
a des caractéristiques propres ; on parle pour cela de connaissance.
Concept empirique et concept pur
Le concept empirique (déduit de l'expérience) :
K515 - "Le concept empirique […] n'est rien d'autre qu'un concept de
l'entendement in concreto."
[165] page 102 – Les concepts donnés empiriquement (a posteriori)
s'appellent concepts d'expérience ; les concepts donnés a priori s'appellent
notions.
Le concept pur (produit spontanément par l'entendement ou existant a priori
dans l'entendement comme l'espace, le temps et les catégories – (K170).
Concept souche, concept dérivé et concept composé
Un concept pur peut lui-même être :
Souche, appelé aussi source, primitif ou élémentaire
(concept a priori, irréductible) ;
Dérivé (K166 - construit par synthèse à partir d'un ou plusieurs
concepts-souches) ;
Composé (construit par incorporation d'informations de plusieurs
concepts-souches).
Voir aussi Origines de concepts de la raison pure que l'on peut songer à définir.
Plus généralement, les trois origines de concepts non-transcendantaux sont :
Une expérience (sensibilité et entendement), les deux souches citées par
Kant ;
Une spéculation transcendante, comme l'action de Dieu ;
Une spéculation métaphysique.
Voir la présentation des concepts transcendantaux.
164
Réalité d'une chose en soi : réalité objective.
Voir aussi :
Détermination logique d'un concept ;
Trois origines possibles d'un concept ;
Représentation (Diagramme) ;
Concept sensible et concept sensible pur ;
Concept subordonné ;
Compréhension et extension (contenu dans et contenu sous) ;
Conceptualisme ;
Concept pur ayant sa source dans le seul entendement : Notion ;
Concept pur de la raison ou Idée transcendantale ;
Possibilité des choses (postulat) – Un concept peut-il être celui d'un objet ?
Problème de la vérité d'une connaissance - Théorie de la connaissance.
165
Un concept définissant un ensemble d'objets, il a une extension égale au
nombre d'éléments de l'ensemble, appelé cardinal si c'est un ensemble fini.
Inversement, à tout ensemble d'objets définis par leurs caractéristiques
communes correspond un concept.
Du point de vue psychique, toute représentation est un état des neurones et de leurs
interconnexions ; un concept est l'interprétation par nos mécanismes psychiques de
cet état [23] - [28]. Mais du point de vue des abstractions que notre esprit manipule,
une représentation est un ensemble d'informations représentant, à un instant donné,
le monde extérieur perçu par notre sens externe et notre « monde intérieur » perçu
par notre sens interne.
166
Un concept est donc toujours associé à une représentation ou plusieurs en mémoire
de travail ; ses informations en constituent une représentation virtuelle, que l'esprit
peut éventuellement mémoriser à long terme ou utiliser immédiatement dans divers
raisonnements. Un concept n'est donc pas une représentation à proprement parler,
c'est une interprétation de représentation(s).
Réciproquement, l'esprit peut construire une représentation à partir d'un concept, par
exemple pour la mémoriser ou l'associer à d'autres représentations (par composition
ou connexion) dans le cadre de l'entendement ou d'un raisonnement.
Concept de base
C'est un concept a priori compris intuitivement (donc une intuition), comme le point
ou le temps : on ne peut le définir à partir de concepts plus simples, il est irréductible.
Synonymes
Notion première (voir Définition d'une notion en Logique) ;
Notion indéfinissable (voir Théorie ordinale).
Remarque
Un homme comprend un concept de base de manière innée, mais se le représente
comme un de ses cas particuliers physiques donné dans l'espace et le temps : je ne
peux me représenter une ligne droite que comme l'image à cet instant d'une ligne
droite dessinée ; je ne me représente un nombre entier que comme une suite de
chiffres, etc.
167
Concept de l'entendement
La Critique contient plusieurs fois l'expression concept de l'entendement, mais n'en
contient pas de définition formelle. On en distingue deux significations, selon qu'il
s'agit :
de l'entendement empirique, synthèse des données de l'intuition qui précède
l'expérience et en est la cause,
([165] page 102 – Les concepts donnés empiriquement (a posteriori)
s'appellent concepts d'expérience ; les concepts donnés a priori s'appellent
notions.)
ou de l'entendement pur, indépendant de l'expérience, qu'il suit et qui résulte de
sa prise en compte.
Mais les 12 catégories ne décrivent pas toutes les informations intervenant dans la
compréhension d'une perception, et Kant y a donc ajouté les concepts de
l'entendement non purs (donc empiriques), sans jamais approfondir cette notion.
Nous savons aujourd’hui, grâce aux enregistreurs, qu’une représentation qui
s’est formée ne peut être prise en compte par la conscience que par formation d’un
concept. Dans la notion de connaissance précédente, la représentation de la partie
intuition donnée est donc prise en compte sous forme de concept empirique de
l'entendement. Voyons donc ces deux types de concepts de l'entendement.
168
qu'une simple comparaison suffirait, comme on le croit d'ordinaire, à lier dans un
jugement ; il trouve qu'ils seraient impossibles si, aux concepts tirés de l'intuition
[les voilà, nos concepts empiriques de l'entendement !], ne venait encore
s'ajouter un pur concept d'entendement [la catégorie], sous lequel ces concepts
ont été subsumés et de ce fait liés de manière primordiale en un jugement
objectivement valable."
K515 - "Le concept empirique […] n'est rien d'autre qu'un concept de l'entendement
in concreto." C'est du phénomène que le concept de l'entendement obtient la matière
qui en fait un concept empirique.
K349 – "La raison pure s'en remet entièrement à l'entendement quand il s'agit de se
rapporter immédiatement aux objets de l'intuition ou plutôt à leur synthèse dans
l'imagination. Elle se réserve uniquement l'absolue totalité dans l'usage des concepts
de l'entendement et cherche à conduire l'unité synthétique pensée dans la catégorie
jusqu'à l'absolument inconditionné.
Génération du concept
Un concept pur de l'entendement est généré par la fonction de base de
l'entendement, dans sa faculté de compréhension de l'expérience en général. Ce
n'est pas un concept inné, mais un concept abstrait pensé après la naissance par
réflexion sur les types de jugement de l'entendement.
169
Citations
K155 - Les concepts de l'entendement [empiriques ou purs] se fondent sur la
spontanéité : ils sont produits automatiquement et sans effort conscient (voir
synthèse et recognition).
K340-K341 :
Entendement + assemblage de propositions-conditions Concept de la raison
"Les concepts de la raison servent à l'opération de rassembler [des propositions pour
leur donner une unité rationnelle], comme les concepts de l'entendement servent à
celle de comprendre (des perceptions)."
K396 – "…l'aperception traverse toutes les classes des catégories, mais [elle] ne
s'accomplit que vis-à-vis des concepts de l'entendement qui, dans chaque classe,
servent pour les autres à fonder l'unité inscrite dans une perception possible, soit :
subsistance, réalité, unité (non-pluralité) et existence ;"
Concept de la raison
Voir Définition d'un concept de la raison.
Concept de la réflexion
Voir Comparaisons de la réflexion transcendantale : les 8 concepts de la réflexion.
170
Concept empirique et concept pur
Voir Concept empirique et concept pur.
Concept moral
Voir Concepts moraux.
171
usage empirique, mais qui ne constitue jamais un élément de la synthèse
empirique.
172
Par elle-même et contrairement à l'entendement, la raison n'engendre aucun concept
K418 – "La raison n'engendre proprement aucun concept, […] elle se borne à
affranchir le concept d'entendement des limitations inévitables d'une expérience
possible et cherche donc à l'étendre au-delà des limites de l'empirique, même si c'est
pourtant en maintenant une liaison avec celui-ci."
Concepts réciproques
Voir Concept plus large et plus étroit. Concepts réciproques.
« Mais il y a encore un concept cosmique (conceptus cosmicus) qui n'a jamais cessé
de motiver cette dénomination de Philosophie, surtout quand on le personnifiait pour
ainsi dire, et quand on se le représentait comme archétype dans l'idéal du
Philosophe.
173
La philosophie est également la science des fins dernières de la raison
Selon sa notion cosmique, [la philosophie] est la science des fins dernières de la
raison humaine. Cette conception élevée confère à la philosophie dignité, c'est-à-dire
valeur absolue. Et, effectivement, elle est même la seule à ne posséder de valeur
qu'intrinsèque et à conférer originellement une valeur aux autres connaissances.
174
Au fond, on pourrait tout ramener à l'anthropologie, puisque les trois premières
questions se rapportent à la dernière.
(Les trois premières questions ci-dessus sont abordées dans Canon de la raison
pure - Idéal du souverain bien pour déterminer la fin dernière.)
Lorsqu'il a besoin d'un exemple concret pour penser un concept sensible pur plus
général comme CSP, notre esprit part toujours d'un concept sensible particulier
comme K. La représentation très générale associée à CSP n'est pas une
représentation d'objet sensible comme celle de K, c'est un schème, représentation
issue d'une représentation, c'est-à-dire une pensée pure ; c'est un ensemble de
propriétés, ici : « être un polygone » et « avoir 3 côtés ».
K226 - "En fait, nos concepts sensibles purs ne reposent pas sur des images des
objets, mais sur des schèmes."
175
même, une intuition purement intellectuelle ne peut exister, voir Sens négatif ou
positif du concept de noumène.
Concepts de comparaison
Voir Les 4 points de vue de comparaison ou distinction de la réflexion
transcendantale.
K342 – "Platon [49] se servait du terme d'Idée de manière telle qu'on voit bien qu'il a
compris par là quelque chose qui, non seulement n'est jamais emprunté aux sens,
mais va même largement au-delà des concepts de l'entendement dont se servait
Aristote [43], dans la mesure où jamais rien qui y corresponde ne se rencontre dans
l'expérience. Les Idées sont, chez Platon, des archétypes des modèles originaux des
choses elles-mêmes, et non pas simplement des clefs pour des expériences
possibles, comme le sont les catégories. Selon son opinion, elles découlaient de la
raison suprême, à partir de quoi elles étaient devenues partie intégrante de la raison
humaine…"
K343 note * - "[Platon] étendait aussi, assurément, son concept [d'Idée] à des
connaissances spéculatives, dès lors simplement qu'elles étaient pures et données
entièrement a priori, et même à la mathématique, bien que celle-ci n'ait son objet
nulle part ailleurs que dans l'expérience possible [justification : voir mathématiques].
En ce domaine, je ne peux alors le suivre, pas davantage que je ne peux le suivre
dans la déduction mystique de ces Idées ou dans les conceptions excessives par
lesquelles, pour ainsi dire, il les hypostasiait ;"
Kant résume l'objectif suivant de son Livre I : Des concepts de la raison pure ainsi :
K345 – "L'usage transcendantal de la raison pure, ses principes et ses Idées : tel est
donc ce qu'il nous incombe à présent de connaître avec précision, pour pouvoir
déterminer et apprécier comme il convient l'influence et la valeur de la raison pure."
K530 – "Le concept d'un être absolument nécessaire est un concept pur de la raison,
c'est-à-dire une simple Idée dont la réalité objective est encore loin de se trouver
démontrée par le fait que la raison en a besoin : une Idée qui ne fait au demeurant
176
que nous indiquer une certaine perfection, pourtant inaccessible, et sert proprement
plutôt à limiter notre entendement qu'à l'élargir à de nouveaux objets."
Résumé : les Idées transcendantales sont des concepts de synthèse créés par la
raison pure lors de toute exposition de phénomène ; aucune expérience ne peut les
illustrer.
177
Ne pas confondre Totalité des conditions et Totalité des choses en général
K423 – "L'Idée de la totalité absolue [des conditions] ne concerne rien d'autre que
l'exposition des phénomènes, […] elle ne concerne pas le concept pur de
l'entendement qui porte sur une totalité des choses en général."
Conclusion
Les Idées transcendantales sont issues des catégories de relation d'une
représentation de phénomène, dont on parcourt la chaîne des causes vers
l'inconditionné successivement selon les 3 types de relation de causalité
(voir Complétude des facultés d'entendement) :
(Psychologique) par rapport au sujet absolu : inhérence ou substance ;
178
(Cosmologique) par rapport aux lois de la nature qui régissent les phénomènes
du monde sensible, en supposant l'omniscience : causalité ou dépendance ;
(Théologique) par rapport à la synthèse des deux relations précédentes :
communauté ou réciprocité.
179
Exemple de raisonnement : syllogisme avec conditionné et inconditionné
« Un chien est un animal ; Médor est un chien ; donc Médor est un animal. »
Proposition majeure Proposition mineure Conclusion
(sujet : chien) (sujet : Médor)
K347 – La conclusion d'un raisonnement par syllogisme doit respecter une condition
a priori : l'universalité de sa proposition majeure dans le cadre de son extension.
Cette condition est représentée par un concept a priori de quantité : la totalité des
conditions pour l'expérience considérée dans son entier et un conditionné donné ; ce
concept a priori de totalité s'appelle concept transcendantal de la raison, et il est
inconditionné.
180
Le concept de l'inconditionné définit un concept pur de la raison
K347 - A ce concept transcendantal de la raison correspond en général le concept
de l'inconditionné, contenant par définition le fondement pour la synthèse du
conditionné de l'expérience ; ce concept pur s'appelle concept pur de la raison :
K347 – "Un concept pur de la raison peut être défini en général par le concept de
l'inconditionné, en tant qu'il contient un fondement pour la synthèse du
conditionné."
(Citation de K347-K348)
"Autant il y a de sortes de rapports [jugements de relation] que l'entendement se
représente par l'intermédiaire des catégories, autant il y aura aussi de sortes de
concepts purs de la raison ; et il faudra donc chercher un inconditionné,
Premièrement, de la synthèse catégorique dans un sujet,
[recherche des conditions qui déterminent un sujet de manière certaine
(catégorique) et en font ce qu'il est]
Deuxièmement, de la synthèse hypothétique des membres d'une série,
[recherche des conditions successives d'une régression dans la chaîne de
causalité du phénomène, conditions hypothétiques dans la mesure où la
réalisation de chacune a été nécessaire à celle de la suivante]
Troisièmement, de la synthèse disjonctive des parties dans un système.
[recherche des conditions successives de chacune des chaînes de causalité
possibles de parties du monde sensible relativement au phénomène considéré]
Tel est en effet le nombre de sortes de raisonnements, dont chacune tend, à travers
des prosyllogismes, vers l'inconditionné :
181
La première [sorte], vers un sujet qui lui-même ne soit plus prédicat,
[donc qui serait connu absolument] ;
La deuxième [sorte], vers une supposition qui ne suppose rien de plus
[c'est-à-dire une connaissance totale du monde sensible] ;
La troisième [sorte], vers un agrégat des membres de la division qui n'exige rien
de plus pour achever la division d'un concept."
[Ce point de vue regrouperait les deux points de vue précédents.]
(Fin de citation)
K350 – "… l'usage objectif des concepts purs de la raison est toujours transcendant,
cependant que celui des concepts purs de l'entendement ne peut jamais, d'après sa
nature, être qu'immanent, étant donné qu'il se limite simplement à l'expérience
possible."
182
Voir aussi Idée selon Kant (concept rationnel issu de notions).
Concepts du monde
Voir :
Concepts du monde et Concepts du monde et concepts transcendants de la nature.
Conceptualisation
Voir d'abord Concept et Construction des concepts.
183
Voir aussi :
Intuition (étapes) ;
Construction des concepts ;
Représentations et réalité des phénomènes extérieurs ;
Problème de la vérité d'une connaissance - Théorie de la connaissance.
Conceptualisme
Substantif de philosophie classique : doctrine d'après laquelle le concept est une
abstraction qui exprime la nature essentielle de la pensée. Cette définition du
concept, distincte des notions de signe ou de mot (et s'opposant en ce sens au
nominalisme), est aussi distincte du concept résultant de la perception des objets
singuliers, qui est celle du Réalisme.
Concurrence, concurremment
K355 – "On voit aisément que la raison pure n'a pas d'autre but que l'absolue totalité
de la synthèse du côté des conditions (que ce soit d'inhérence, de dépendance ou de
concurrence) et qu'elle n'a pas à se préoccuper de la complétude absolue du côté du
conditionné."
Conditionné
Adjectif – (Substantif entre parenthèses)
(Ce) qui est soumis à une condition ;
(Ce) dont l'existence dépend de quelque chose.
184
Le conditionné de cette connaissance est la représentation (le concept) :
De l'ensemble des informations des formes de cette intuition (espace et
temps),
Des concepts de l'entendement (concept empirique de l'entendement,
concept pur de l'entendement),
Des concepts de la raison (concept de la raison et Idée transcendantale).
Le conditionné est donc le concept du phénomène formé après déroulement de
l'intuition, de l'entendement et de la raison, celui de l'unique connaissance du
phénomène accessible alors à l'esprit.
Exemples d'emploi
De l'adjectif conditionné : l'entendement d'un phénomène est le pouvoir de lui
imposer des règles, conditions que respecte sa connaissance : le phénomène
doit pouvoir être jugé selon les catégories de l'entendement.
Du substantif conditionné : Concept transcendantal de la raison – Condition
représentée par un concept.
185
l'intermédiaire de ces prédicats de façon affirmative ou négative."
Voir aussi Possibilité et réalité.
L'ensemble des prédicats effectivement attribués à un objet par sa connaissance
dans un contexte donné est son conditionné, l'ensemble des prédicats possibles
étant son inconditionné. Le conditionné peut provenir de l'intuition, de
l'entendement et de la raison.
La raison synthétise la série totale des conditions reprise ensuite par l'entendement
Voir d'abord Série des conditions.
(Citation de K355)
"On voit aisément que la raison pure n'a pas d'autre but que l'absolue totalité de la
synthèse du côté des conditions (que ce soit d'inhérence, de dépendance ou de
concurrence)
186
La logique de fonctionnement de la raison est indépendante des phénomènes
K507 – "… la raison n'est pas elle-même un phénomène et n'est soumise à aucune
des conditions de la sensibilité, il ne se trouve en elle-même, concernant sa
causalité, nulle succession chronologique, et la loi dynamique de la nature, qui
détermine la succession chronologique selon des règles, ne peut donc lui être
appliquée."
187
série des conditions associés au conditionné donné, série qui exige une régression
qui n'a pas encore eu lieu, qu'il faut donc faire.
Confusion
Voir Représentations distincte, confuse et indistincte - Simplicité.
Congruent
Opposés
Non-congruent ou incongruent. Exemple : considérons deux triangles sphériques
ayant une base commune sur l'équateur et symétriques par rapport au plan de
l'équateur : ils ne sont pas superposables ; ils sont donc incongruents.
Kant fait remarquer dans [56b] §13 pages 61-62 que deux objets peuvent avoir les
mêmes propriétés intrinsèques tout en différant par une ou plusieurs propriétés
extrinsèques, ce qui les rend incongruents.
Conjecture
Selon [13] :
Idée non vérifiée, fondée soit sur une probabilité, soit sur l'apparence ;
Construction de l'esprit au sujet du passé, du présent ou de l'avenir ;
Explication anticipée qui attend sa vérification, soit de l'expérience, soit du
raisonnement.
188
Conjoindre
Selon le dictionnaire [13] : (Terme vieux et littéraire) Joindre ensemble, réunir.
[165] page 200 note 93 - "Si à un concept l'intuition correspondante peut être
conjointe a priori, on dit que le concept est construit ; si l'intuition n'est qu'empirique,
on dit alors qu'il y a seulement un exemple du concept ; l'action d'adjoindre l'intuition
au concept s'appelle dans les deux cas : présentation de l'objet."
Connaissance
Dictionnaire
Le substantif connaissance au singulier a plusieurs sens. Le seul qui nous intéresse
ici est : savoir ce qu'un objet est (par sa représentation et son concept associé)
indépendamment de l'origine de cette connaissance (intuition, entendement ou
raisonnement).
Chez Kant
Introduction de la notion de connaissance dans la Critique
Kant aborde l'étude de la connaissance dans l'Introduction de la Critique :
K110 – VII. Idée et division d'une science particulière portant le nom de critique de la
raison pure.
(Citation de K143)
[Les deux sources fondamentales de la connaissance : intuitive et discursive]
"Notre connaissance procède de deux sources fondamentales de l'esprit, […]
la première [l'intuition] est le pouvoir de recevoir les représentations (la
réceptivité des impressions),
[cette source nous donne un objet : elle est intuitive.]
la seconde [l'entendement, est] le pouvoir de connaître par l'intermédiaire de ces
représentations un objet (spontanéité des concepts) ;
[cette source pense l'objet en relation avec cette représentation (comme simple
détermination de l'esprit) : elle est discursive. Le concept d'une représentation se
forme spontanément lorsque la conscience la prend en compte.]
[La connaissance fournie par l'entendement est discursive
[165] page 64 – "De la part de l'entendement, la connaissance humaine est
discursive c'est-à-dire qu'elle se produit par des représentations qui fondent la
connaissance sur ce qui est commun à plusieurs choses, par conséquent au
moyen de caractères, comme tels. Donc nous ne connaissons les choses qu'au
moyen de caractères et cela s'appelle précisément reconnaître, qui vient de
connaître." ]
[…]
189
[Une connaissance exige à la fois intuition et concepts]
Intuition et concepts constituent donc les éléments de toute notre connaissance, si
bien que ni des concepts, sans une intuition leur correspondant de quelque manière,
ni une intuition sans concepts ne peuvent fournir une connaissance.
Connaissance et expérience
K93 – "D'un point de vue chronologique, nulle connaissance ne précède en nous
l'expérience, et c'est avec celle-ci que toute connaissance commence."
K287 – "L'expérience […] constitue l'unique connaissance où nous sont donnés
des objets." - Voir :
Sensation – Sensibilité – Impression ;
Chose en soi et connaissance.
190
Spontanéité de la connaissance
La connaissance d'un phénomène se forme spontanément en présence de son
intuition (dont la représentation fournit un concept empirique) et de son concept pur
de l'entendement (catégorie) : voir Concept de l'entendement.
191
comme ceux des intuitions d'espace et de temps ; tous ces processus sont des
interprétations de représentations, les conceptualisations.
C'est donc par souci de simplification qu'on se représente les concepts (de base et
autres) comme des représentations statiques : ils résultent dynamiquement d'une
interprétation. Notre cerveau-ordinateur ne les a pas en mémoire mais sous forme de
programme, il les recrée à la demande :
Après la formation en mémoire, spontanée et passive, d'une représentation de
phénomène, l'intuition, l'entendement et la raison mettent en œuvre des
conceptualisations.
192
Connaissance pure
Une connaissance pure doit être basée sur une intuition pure ou un concept pur.
Exemples : les concepts mathématiques comme le nombre entier et la ligne droite,
qui donnent des connaissances absolument pures.
K147 – "…il ne faut pas appeler transcendantale (en faisant par là référence à la
possibilité de la connaissance ou à son usage a priori) toute connaissance a priori,
mais uniquement celle par laquelle nous parvenons à connaître que et comment
certaines représentations (intuitions ou concepts) sont appliquées ou sont possibles
exclusivement a priori."
Connaissance et intuition
Dans une connaissance, intuition et entendement peuvent être purs (si sa
représentation ne provient pas d'une expérience) ou empiriques ; la sensation
éventuelle est la matière de la connaissance.
En mémoire (de travail ou de long terme) une connaissance est une représentation,
interprétée avec toutes ses informations, qu'elles proviennent de l'intuition ou de
l'entendement. Il n'y a pas de différence de contenu en informations entre une
représentation et un concept : leur différence n'existe que dans notre esprit, et
seulement pour faciliter leur compréhension en tant que notions. Il y a pourtant une
193
différence sémantique entre la connaissance d'un phénomène, objet particulier, et un
concept, classe d'objets ; lors de l'interprétation de la représentation, notre
conscience fait la différence par entendement et réflexion.
Le mode de connaissance
Voir Mode.
194
Et au fondement de la conscience empirique, [il y a] l'aperception pure, c'est-à-
dire l'identité complète de soi-même à travers toutes les représentations
possibles."
(Fin de citation)
195
Ensuite une relation au sujet, qui se rapporte à la conscience, condition
universelle de toute connaissance en général - (A proprement parler, la cons-
cience c'est une représentation qu'une autre représentation est en moi).
196
[Voir aussi Clarté et obscurité psychologiques.]
(Fin de citation)
197
Connaissance en général : hiérarchie des degrés
(Citation de [165] pages 72-73)
"Au point de vue de la valeur objective de notre connaissance en général, on peut la
hiérarchiser selon les degrés que voici :
Le premier degré de la connaissance c'est : se représenter quelque chose.
Le deuxième : se représenter consciemment quelque chose ou percevoir.
Le troisième : savoir quelque chose, c'est-à-dire se représenter quelque chose
en la comparant à d'autres choses aussi bien au point de vue de l'identité que de
la différence. [Savoir c'est appréhender une chose et la reconnaître.]
Le quatrième : savoir quelque chose avec conscience, c'est-à-dire connaître. Les
animaux aussi savent les objets, mais ils ne les connaissent pas.
[ - Savoir sans connaître c'est avoir conscience de l'appréhension ;
- Savoir en connaissant c'est avoir en plus conscience de soi.
(voir Aperception (conscience de soi), pure ou empirique). ]
Le cinquième : entendre quelque chose, c'est-à-dire la connaître par
l'entendement au moyen de concepts ou la concevoir.
Ce qui est très différent de comprendre. Il y a beaucoup de choses que l'on peut
concevoir, bien qu'on ne puisse les comprendre, par exemple un perpetuum
mobile [mouvement perpétuel], dont l'impossibilité est démontrée en mécanique.
Le sixième : connaître ou discerner quelque chose par la raison. Nous n'y
atteignons qu'en peu de choses, et plus nous voulons perfectionner nos
connaissances en valeur, plus le nombre en devient faible.
Enfin le septième : comprendre quelque chose c'est-à-dire la connaître par la
raison ou a priori dans la mesure qui convient à notre propos.
Car toute notre compréhension n'est que relative, c'est-à-dire suffisante pour une
fin déterminée, il n'est rien que nous comprenions absolument. Rien ne peut être
plus complètement compris que ce que le mathématicien démontre […]. Aussi le
domaine de l'intellection ou de l'entendement est-il de façon générale beaucoup
plus étendu que le domaine de la compréhension ou de la raison."
(Fin de citation)
198
Grandeur intensive – Qualifie la portée de la connaissance (sa valeur, son
importance) :
Fertilité en tant qu'importance logique ;
Fécondité en tant qu'elle est considérée comme le fondement de
conséquences nombreuses et importantes.
Définition de Kant
Limites de l'extension d'une connaissance en tant qu'adéquation :
au besoin d'un sujet de savoir ;
à sa capacité de connaître.
[165] page 43 – "Dans l'extension de nos connaissances ou son
perfectionnement selon sa grandeur extensive, il est bon de procéder à une
estimation de la mesure dans laquelle une connaissance s'accorde avec nos fins
et nos capacités. Cet examen concerne la détermination de l'horizon de nos
connaissances, par où il faut entendre la juste proportion de la grandeur de nos
connaissances dans leur ensemble avec les capacités et les fins du sujet."
199
Détermination de l'horizon d'une connaissance ([165] pages 43-44)
Selon ce que l'homme est capable de savoir :
Détermination logique, d'après le pouvoir ou les facultés de connaître dans leur
rapport avec l'intérêt de l'entendement. De ce point de vue, il nous faut évaluer :
jusqu'à quel point nous pouvons pénétrer dans nos connaissances,
jusqu'à quel point nous devons y avancer,
et dans quelle mesure certaines connaissances sont utiles au point de vue
logique comme moyens en vue de telle ou telle connaissance capitale consi-
dérée comme notre fin ;
Selon ce qu'il est permis à l'homme de savoir :
Détermination esthétique, d'après le goût dans son rapport à l'intérêt du
sentiment. Celui qui détermine esthétiquement son horizon cherche à présenter
la science selon le goût du public, c'est-à-dire à la rendre populaire ou, de façon
générale, à n'acquérir que des connaissances auxquelles tous peuvent avoir part
et auxquelles même les gens sans instruction trouvent agrément et intérêt ;
Selon ce que l'homme doit savoir :
Détermination pratique, d'après l'utilité dans son rapport à l'intérêt de la volonté.
L'horizon pratique, dans la mesure où il est déterminé en fonction de l'influence
qu'une connaissance exerce sur notre moralité est pragmatique et de la plus
haute importance.
C'est par conséquent une objection aussi mal avisée qu'injuste que les esprits
superficiels adressent aux grands hommes qui consacrent aux sciences des soins
laborieux lorsqu'ils viennent demander : à quoi cela sert-il ? On ne doit en aucun cas
poser une telle question quand on prétend s'occuper de science.
200
A supposer qu'une science ne puisse apporter d'explication que sur un quelconque
objet possible, de ce seul fait son utilité serait déjà suffisante. Toute connaissance
logiquement parfaite a toujours quelque utilité possible : même si elle nous échappe
jusqu'à présent, il se peut que la postérité la découvre.
201
Il faut également chercher :
5. à déterminer, par avance, l'horizon absolu de l'espèce humaine tout entière (aussi
bien pour le passé que pour l'avenir), et en particulier également :
6. à déterminer la place que notre science occupe dans l'horizon de la connaissance
totale. C'est à quoi sert l'Encyclopédie universelle, mappemonde des sciences
[170] ;
7. dans la détermination de son horizon particulier, que chacun s'examine
soigneusement :
pour quel domaine de la connaissance présente-t-il le plus d'aptitude et
éprouve-t-il le plus d'inclination ;
ce qui est plus ou moins nécessaire en considération de certains devoirs ;
ce qui est incompatible avec les devoirs nécessaires ;
8. enfin, il faut chercher à toujours élargir son horizon plutôt qu'à le restreindre.
Pour cela ce qui nous sert de guide, c'est l'architectonique des sciences qui est un
système selon les idées, dans lequel les sciences sont considérées au point de vue
de leur affinité et de leur liaison systématique en un tout de la connaissance
intéressant l'humanité."
Voir Unité systématique.
202
connaissance doit donc s'accorder avec l'objet pour avoir valeur de vérité. Or le seul
moyen que j'ai de comparer l'objet avec ma connaissance c'est que je le connaisse.
Ainsi ma connaissance doit se confirmer elle-même ; mais c'est bien loin de suffire à
la vérité. Car puisque l'objet est hors de moi et que la connaissance est en moi, tout
ce que je puis apprécier c'est si ma connaissance de l'objet s'accorde avec ma
connaissance de l'objet. Les anciens appelaient diallèle un tel cercle dans la
définition. Et effectivement c'est cette faute que les sceptiques n'ont cessé de
reprocher aux logiciens ;
[…]
En fait la question qui se pose ici est de savoir si, et dans quelle mesure il y a un
critère de la vérité certain, universel et pratiquement applicable. Car tel est le sens de
la question : qu'est-ce que la vérité ?
Pour être à même de trancher cette importante question, il nous faut
soigneusement distinguer dans notre connaissance ce qui appartient à sa matière et
se rapporte à l'objet, de ce qui concerne la simple forme comme la condition sans
laquelle une connaissance ne serait, de façon générale, pas une connaissance.
203
L'incompatibilité du jugement des autres avec le nôtre doit donc être considérée
comme un signe extérieur de l'erreur et une invitation à rechercher comment nous
avons procédé pour aboutir à notre jugement, sans qu'il soit question par là de le
rejeter tout aussitôt. Car il est possible qu'on ait raison sur le fond et qu'on ait tort
seulement dans la forme, c'est-à-dire dans la présentation."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Vérité formelle d'une connaissance ;
Vérité : les principes universels ;
Erreurs et fausseté de jugements.
Donc nous ne connaissons les choses qu'au moyen de caractères et cela s'appelle
précisément reconnaître, qui vient de connaître.
Un caractère est
ce qui dans une chose constitue une part de la connaissance de cette chose ;
ou, ce qui revient au même, une représentation partielle dans la mesure où elle
est considérée comme principe de la connaissance de la représentation entière.
204
Tous les caractères, considérés comme principes de connaissance ont un
double usage, soit interne, soit externe.
L'usage interne consiste en la dérivation qui vise à connaître la chose elle-
même au moyen de caractères, principes de sa connaissance.
L'usage externe consiste en la comparaison, les caractères nous permettant
de comparer une chose avec une autre selon les règles de l'identité ou de la
diversité.
(Fin de citation)
205
a parte post au contraire ou du côté des conséquences elle est infinie,
puisque nous avons bien un genus suprême, mais pas de species dernière.
La distinction intensive ou approfondie s'accroît avec la poursuite de l'analyse du
concept dans la série des caractères subordonnés. Cette dernière sorte de
distinction conférant nécessairement à la connaissance profondeur et cohérence
est de ce fait la principale affaire de la philosophie, et en particulier elle est
poussée au plus haut point dans les recherches métaphysiques.
Les caractères négatifs servent à nous préserver d'erreurs. Aussi n'ont-ils aucune
nécessité là où il est impossible de tomber dans l'erreur ; ils n'ont de nécessité et
d'importance que dans les cas où ils nous préservent d'une erreur importante où
nous pourrions tomber aisément. C'est ainsi par exemple que s'agissant du concept
d'un être comme Dieu, les caractères négatifs sont très nécessaires et importants.
Par les caractères affirmatifs nous nous proposons donc de comprendre quelque
chose ; par les caractères négatifs - forme sous laquelle tous les caractères peuvent
être exprimés - nous nous contenterons de ne pas nous méprendre ou de ne pas
tomber dans l'erreur sur une chose, [bien] que nous ne pourrions par là rien en
apprendre.
Les caractères nécessaires sont en fin de compte ceux que l'on doit toujours
rencontrer dans la chose représentée. De tels caractères s'appellent aussi
essentiels, et sont opposés aux caractères extra-essentiels et contingents, qui
peuvent être séparés du concept de la chose.
206
L'essentiel et l'extra-essentiel
(Citation de [165] page 172 note 42)
"Un prédicat attribué à un sujet par une proposition a priori est affirmé par là
comme appartenant nécessairement à celui-ci (comme indissociable du concept
de ce sujet).
[Différence entre caractères essentiel et extra-essentiel d'un prédicat]
On dit également de ces prédicats qu'ils font partie de l'essence, de la possibilité
interne du concept ; toutes les propositions ayant une valeur a priori doivent en
contenir de semblables. Les autres [prédicats], c'est-à-dire ceux qui sont
séparables du concept (sans préjudice pour ce dernier) s'appellent caractères
extra-essentiels.
[Les prédicats essentiels appartiennent à l'essence du concept ou en découlent]
Les premiers appartiennent donc à l'essence du concept soit comme parties
constitutives, soit comme y ayant leur raison suffisante et en découlant.
[L'essence logique d'un concept est l'ensemble de ses parties essentielles]
Les premiers sont appelés : parties essentielles, qui, par suite, ne renferment
pas de prédicats susceptibles d'être dérivés d'autres prédicats contenus dans le
même concept, et c'est leur ensemble qui constitue l'essence logique ;
[Les caractères extra-essentiels sont des propriétés séparables du concept]
les seconds sont appelés : propriétés. Les caractères extra-essentiels sont, soit
internes, soit caractères relationnels et ne peuvent servir de prédicats dans des
propositions a priori, parce qu'ils sont séparables du concept du sujet, et qu'ils ne
lui sont donc pas liés nécessairement."
(Fin de citation)
Ainsi par exemple l'érudition est un caractère qui désigne une détermination interne
de l'homme - être maître ou esclave n'en représente qu'une relation externe.
207
Différence entre essence logique et essence réelle
L'ensemble de tous les éléments essentiels d'une chose ou la suffisance de ses
caractères quant à la coordination ou la subordination est l'essence.
Il n'est question ici que de l'essence logique des choses, pas de leur essence réelle
ou naturelle. L'essence logique est facile de la discerner : cela n'exige que la
connaissance de tous les prédicats au point de vue desquels un objet est déterminé
au moyen de son concept ; au lieu que pour l'essence réelle de la chose serait
requise la connaissance des prédicats dont dépend, comme principes de
détermination, tout ce qui appartient à son être. […] Car l'essence logique n'est elle-
même rien d'autre que le premier concept fondamental de tous les caractères
nécessaires d'une chose.
(Fin de citation)
[La lucidité]
La distinction objective est souvent cause d'obscurité subjective et inversement.
C'est en la conjonction des deux, la distinction esthétique ou populaire et la
distinction scolastique ou logique, que consiste la lucidité. Car ce qu'on nomme esprit
lucide c'est le talent de présentation lumineuse, adaptée à la faculté de
compréhension de l'entendement commun, de connaissances abstraites et
profondes.
La distinction logique
(Suite de la citation Degrés de perfection d'une connaissance : clarté et distinction)
208
Une distinction logique est dite complète si tous les caractères qui, pris ensemble,
constituent le concept total sont parvenus à la clarté.
[La profondeur]
La totale clarté des caractères subordonnés constitue la distinction complète de
façon intensive : la profondeur.
[La précision]
La grandeur extensive de la distinction, si elle n'est pas excessive, se nomme
précision.
[L'adéquation]
Complétude et précision conjointes constituent l'adéquation ;
209
Cette sorte de distinction que ne procure pas l'analyse, mais bien la synthèse des
caractères, est la distinction synthétique. La différence est donc essentielle entre ces
deux propositions : former un concept distinct et : rendre un concept distinct.
210
(Fin de citation)
Exemple
"Notre assentiment à l'immortalité serait :
simplement problématique [si] nous agissons seulement comme si nous étions
immortels ;
mais il serait assertorique, dans la mesure où nous croyons que nous sommes
immortels ;
enfin il serait apodictique dans la mesure où nous saurions tous qu'il y a une
autre vie après celle-ci."
211
Une croyance n'est pas contredite par des faits
bien plus, nous ne pouvons même pas alléguer la probabilité à leur propos, nous
pouvons simplement être certains qu'il n'est pas contradictoire de penser de tels
objets tels que nous les pensons.
Une croyance nous apparaît comme moralement nécessaire
Reste un libre assentiment, qui est seulement nécessaire à un point de vue
pratique a priori donné ; donc un assentiment que j'assume pour des raisons
morales et à propos de quelque chose dont je suis certain que le contraire ne
saurait être prouvé.
(L'exemple de la croyance religieuse s'impose ici :
c'est une croyance a priori,
justifiée par des raisons morales,
qui suppose des raisons subjectives indémontrables telles que
l'existence de Dieu, la vie après la mort, la récompense de la vertu et la
punition du vide, etc.)
Une croyance n'est pas une source de connaissance, mais un motif d'action
C'est une sorte d'assentiment dont on a conscience qu'il est imparfait, et, si on la
considère comme restreinte à une sorte particulière d'objets (qui ressortissent à
la seule croyance [comme Dieu]), elle diffère de l'opinion non par le degré, mais
par la relation qu'elle entretient, en tant que connaissance, avec l'action.
Les règles morales sont des certitudes intériorisées basées sur la liberté
Nous avons des connaissances théoriques (du sensible) dans lesquelles nous
pouvons atteindre à la certitude, et la chose doit être possible concernant tout ce
que nous pouvons appeler connaissance humaine. C'est précisément une telle
connaissance certaine et même tout à fait a priori que nous avons dans les lois
pratiques ; mais elles se fondent sur un principe suprasensible (la liberté) et cela,
en nous-mêmes, comme principe de la raison pratique.
La raison pratique incite à rechercher le souverain Bien
Mais cette raison pratique est une causalité relative à un objet également
suprasensible, le souverain Bien que notre faculté ne rend pas possible dans le
monde des sens.
Il faut agir selon la raison pratique pour aller vers le souverain Bien
Néanmoins la nature comme objet de notre raison théorique [la raison de la
causalité des phénomènes] doit s'y accorder, car la conséquence ou l'effet de
cette Idée doit pouvoir se trouver dans le monde sensible. Nous devons par
conséquent agir pour rendre cette fin réelle.
I - Les choses qui font l'objet d'une croyance ne sont pas des objets des sens
Les matières de croyance ne sont pas des objets de la connaissance empirique.
Une croyance historique est autant un savoir qu'une expérience personnelle
Ce qu'on appelle la croyance historique ne peut donc être proprement nommée
croyance, ni, en tant que telle, opposée au savoir puisqu'elle peut être elle-
même un savoir. L'assentiment à un témoignage n'est distinct ni en degré ni en
espèce de l'assentiment auquel on parvient par l'expérience personnelle.
212
II - Les choses qui font l'objet d'une croyance ne sont pas non plus des objets de
connaissance rationnelle (connaissance a priori)
C'est le cas que leur connaissance soit théorique, comme en mathématique et
en métaphysique, ou pratique, en morale.
Les vérités rationnelles d'ordre philosophique ne peuvent être objets de
croyance ;
Elles ne peuvent être qu'objets de savoir, car la philosophie ne tolère en elle
aucune simple persuasion.
[165] page 21 – "La connaissance philosophique fait partie des
connaissances rationnelles."
Droits et devoirs moraux ne peuvent être des croyances, mais être légitimes
Les objets de la connaissance rationnelle pratique en morale (droits et devoirs)
ils peuvent tous aussi peu donner lieu à une simple croyance. On doit être tout à
fait certain si une chose est légitime ou non, conforme ou non au devoir, permise
ou interdite. On ne peut rien hasarder dans l'incertitude en matière de morale,
rien décider qui risque de contrevenir à la loi.
Ainsi par exemple il ne suffit pas que le juge croie simplement que celui qui
est accusé d'un crime l'a réellement commis. Il doit le savoir (juridiquement)
[en avoir une certitude juridiquement valable], ou alors il agit sans
conscience."
III – Les seules croyances possibles sont celles qui relèvent de la liberté
Ce sont seulement les croyances dont l'assentiment n'est pas déterminé par des
fondements de vérité objectifs, indépendants de la nature et de l'intérêt du sujet.
Il y a des choses qu'il est impossible de savoir, mais moralement nécessaire de
supposer
Celui qui n'admet pas de telles choses est moralement incroyant. Cette sorte
d'incroyance est toujours fondée sur un manque d'intérêt moral. Plus la
disposition morale d'un homme est affirmée, plus sa croyance est également
ferme et vive en tout ce qu'il se sent contraint d'admettre et de supposer par
intérêt moral dans une nécessaire intention pratique.
Cette distinction se rapporte donc aux deux sources d'où provient l'ensemble de
notre connaissance : l'expérience et la raison.
213
Certitude rationnelle : philosophique ou mathématique
La certitude rationnelle à son tour est
soit certitude philosophique, discursive,
soit certitude mathématique, intuitive.
La certitude mathématique s'appelle aussi évidence, parce qu'une connaissance
intuitive est plus claire qu'une connaissance discursive.
Donc bien que la connaissance rationnelle, qu'elle soit mathématique ou
philosophique, soit en elle-même également certaine, l'espèce de la certitude est
différente dans les deux cas.
214
Pour être probante, l'opposition de deux propositions doit être contradictoire
Mais pour que cette dernière soit valable, il faut que les propositions soient opposées
de façon contradictoire. Car deux propositions qui sont simplement contraires l'une
de l'autre peuvent être fausses l'une et l'autre.
Une preuve qui est le fondement d'une certitude mathématique est appelée
démonstration et celle qui fonde une certitude philosophique s'appelle acroamatique.
Conclusion générale : toute notre conviction est soit logique soit pratique
Source : [165] page 81
[Conviction logique]
"Quand nous savons que nous sommes affranchis de toute raison subjective et que
cependant l'assentiment est suffisant, alors nous sommes convaincus et notre
conviction est logique ou fondée sur des raisons objectives (l'objet est certain).
Dans le cas du savoir on écoute encore des raisons contraires ; non dans le cas de
la croyance, car dans ce dernier cas il ne s'agit pas de raisons objectives, mais de
l'intérêt moral du sujet.
215
(esthétique) de l'assentiment (simple apparence) [une raison subjective de
donner son accord], mais qu'il possède une validité objective et soit un
fondement logique de la connaissance ; car, sinon, l'entendement est séduit,
mais il n'est pas convaincu."
216
[La volonté a le mérite d'inciter à examiner ou non une vérité]
Cependant dans la mesure où la volonté presse l'assentiment d'examiner une vérité
ou l'en détourne, il faut lui accorder une influence sur l'usage de l'entendement et par
conséquent aussi une influence médiate sur la conviction puisque celle-ci dépend si
fort de l'usage de l'entendement.
Suspendre un jugement
Citation de [165] pages 83-84
"Réserver ou suspendre un jugement consiste à décider de ne pas permettre à un
jugement provisoire de devenir définitif.
De façon générale, réserver son approbation est une chose très difficile, en partie en
raison de l'avidité que manifeste notre entendement à s'étendre par des jugements et
s'enrichir de connaissances, en partie parce que notre inclination penche toujours
davantage vers certaines choses que vers d'autres.
[Kant est ici indulgent : en général, les gens jugent selon une première
impression, sans réfléchir ni au sujet ni aux conséquences de leur jugement.
Exemples : les élections…]
Mais l'homme qui a dû souvent revenir sur son approbation et qui est devenu de ce
fait prudent et circonspect ne l'accordera pas si vite, de crainte de devoir par la suite
revenir sur son jugement. Cette rétractation est toujours vexante et source de
méfiance à l'égard de toutes les autres connaissances.
(Fin de citation)
217
On peut donc comprendre dans les jugements provisoires les maximes de
recherche. On pourrait aussi les nommer anticipations, puisqu'on juge par
anticipation avant de juger définitivement. Ainsi de tels jugements ont leur utilité et on
peut même donner des règles pour juger provisoirement d'un objet.
Tout préjugé doit être considéré comme un principe de jugements erronés, et les
préjugés produisent non pas des préjugés, mais des jugements erronés. Nous
devons donc distinguer du préjugé lui-même la fausse connaissance qui prend sa
source dans le préjugé.
[…]
[Il faut toujours réfléchir avant de juger, sinon gare aux préjugés !]
Parfois les préjugés sont des vrais jugements provisoires ; c'est seulement le fait
qu'ils prennent valeur de principes ou de jugements définitifs qui est illégitime. La
cause de cette illusion est à chercher dans le fait que des raisons subjectives sont à
tort considérées comme objectives, faute de la réflexion qui doit précéder tous les
jugements. Car même si nous pouvons admettre maintes connaissances, par
exemple les propositions immédiatement certaines, sans les examiner c'est-à-dire
sans vérifier les conditions de leur vérité, nous n'en pouvons et nous n'en devons pas
moins ne porter aucun jugement sans réfléchir, c'est-à-dire sans comparer la
connaissance avec la faculté de connaître qui doit la produire (sensibilité ou
entendement).
218
[Penser par soi-même (Lumières [25])]
Mais très nombreux sont ceux que la paresse conduit à préférer suivre la trace
d'autrui plutôt que de fatiguer leurs propres facultés mentales. De tels gens ne
sauraient jamais être que des copies d'autrui, et si tous étaient de cette sorte,
aucun changement ne se serait jamais produit dans le monde. D'où la nécessité
et l'importance de ne pas confiner la jeunesse, comme on le fait d'habitude, dans
la simple imitation.
(Fin de citation)
Connaissance : probabilité
Source : [165] pages 91 et suivantes - Probabilité
Voir d'abord Perfection esthétique et perfection logique de la connaissance.
219
La doctrine de la connaissance du probable, qu'il faut considérer comme une
approximation de certitude, appartient également à la doctrine de la certitude de
notre connaissance.
Définition de la probabilité
Par probabilité il faut entendre un assentiment fondé sur des raisons insuffisantes,
mais qui ont un plus grand rapport avec les raisons suffisantes que les raisons du
contraire.
[Remarque
en matière de causalité, une raison suffisante détermine l'évolution d'un
système ;
en matière de connaissance :
un fondement d'assentiment objectivement valable détermine une
probabilité, approximation de la certitude de cette connaissance ;
un fondement subjectivement valable détermine une vraisemblance,
simple force de persuasion. ]
[…]
(Citation de [165] page 92)
[Par définition, la probabilité s'évalue par rapport à la certitude]
Dans le cas de la probabilité il doit toujours y avoir un étalon qui permet de l'évaluer.
Cet étalon est la certitude. Car puisque je dois comparer les raisons insuffisantes
avec les raisons suffisantes, il faut que je sache ce qui est requis pour la certitude.
Mais un tel étalon fait défaut dans le cas de la simple vraisemblance puisque dans ce
cas je ne compare pas les raisons insuffisantes avec celles qui sont suffisantes, mais
avec les raisons du contraire.
220
S'ils sont homogènes, comme dans les connaissances mathématiques, ils
doivent être nombrés ;
S'ils sont hétérogènes, comme dans les connaissances philosophiques, ils
doivent être pesés, c'est-à-dire évalués d'après leur effet ; ce dernier devant à
son tour être évalué d'après l'emprise sur les obstacles rencontrés dans l'esprit.
[Homogénéité et certitude]
Les moments hétérogènes ne donnent pas de rapport à la certitude, ils n'en donnent
que d'une vraisemblance [de connaissance] à une autre. De là suit que c'est
seulement le mathématicien qui peut déterminer le rapport de raisons insuffisantes
aux raisons suffisantes ; le philosophe doit se contenter de la vraisemblance,
assentiment suffisant de façon simplement subjective et pratique.
Car dans les connaissances philosophiques, à cause de l'hétérogénéité des
raisons, la probabilité ne peut être évaluée ; ici les poids ne sont pas tous, pourrait-
on dire, estampillés. C'est donc seulement de la probabilité mathématique que l'on
peut dire proprement qu'elle est plus que demie certitude [c'est-à-dire plus certitude
qu'incertitude]."
(Fin de citation)
Définitions
Source [165] pages 183-184 note 63
Connaissance théorique
C'est la connaissance par laquelle je connais ce qui est.
Dans la connaissance de la nature, les principes de ce qui arrive (par exemple le
principe de l'égalité de l'action et de la réaction dans la communication du
mouvement) sont en même temps les lois de la nature ; car l'usage de la raison
y est théorique et déterminé par la constitution de l'objet.
Connaissance pratique
C'est la connaissance par laquelle je me représente ce qui doit être
[doit au sens d'un devoir moral].
Dans la connaissance pratique,
c'est-à-dire celle qui a simplement affaire à des principes déterminants de la
volonté,
les principes que l'on se fait ne sont pas encore de ce seul fait des lois
auxquelles on est inévitablement soumis,
car dans la connaissance pratique la raison a affaire au sujet, c'est-à-dire à la
faculté de désirer, à la constitution particulière de laquelle la règle peut
s'accommoder en diverses manières.
Connaissance spéculative
C'est une connaissance qui porte sur un objet (ou un concept d'objet) tel qu'on
n'y peut atteindre dans aucune expérience.
221
Elle s'oppose à la connaissance de la nature qui porte exclusivement sur un
objet ou prédicat qui peuvent être donnés dans une expérience possible.
222
respecter les trois critères de possibilité (logique en même temps que matérielle)
suivants :
L'unité du concept, que l'on peut nommer unité qualitative en tant que, sous ce
concept, n'est pensée que l'unité permettant le rassemblement du divers des
connaissances, à peu près au sens de l'unité du thème dans un drame.
L'unité doit permettre la connexion d'éléments cognitifs même hétérogènes par
l'intermédiaire de la qualité d'une connaissance prise comme principe ; c'est un
critère d'intelligibilité.
La vérité quant aux conséquences (accord entre elles et avec l'expérience).
"Plus il y a de conséquences vraies résultant d'un concept donné, plus il y a de
signes de sa réalité objective. C'est là ce que l'on pourrait appeler la pluralité
qualitative des caractéristiques qui appartiennent à un concept comme à un
fondement commun (qui ne sont pas pensées en lui comme quantité)."
La perfection, qui consiste en ce que, en sens inverse, cette pluralité est
ramenée globalement à l'unité du concept, et qu'elle s'accorde complètement
avec lui et avec nul autre - ce que l'on peut appeler la complétude qualitative
(totalité).
K171 – L'unique mode possible de déduction d'une connaissance pure a priori est le
mode transcendantal.
Voir aussi :
Vérité formelle d'une connaissance ;
Vérité : les principes universels ;
Erreurs et fausseté de jugements.
223
Connaissance procédant d'un principe
K333 – "J'appellerai […] connaissance procédant de principes celle où je connais le
particulier dans l'universel par concepts. [Un concept étant une classe regroupe tous
les éléments ayant la même définition.] Ainsi tout raisonnement est-il donc une forme
de l'opération consistant à dériver une connaissance à partir d'un principe [c'est-à-
dire un syllogisme]. Car la majeure fournit à chaque fois un concept qui fait alors que
tout ce qui est subsumé sous la condition de ce concept est connu à partir de lui
d'après un principe."
Bien qu'elle dispose, par rapport à chacun de ces trois éléments, de sources de
connaissance a priori qui, au premier abord, semblent dédaigner les limites de toute
expérience, une critique complètement achevée nous persuade pourtant que toute
raison, dans son usage spéculatif, ne saurait jamais avec ces éléments dépasser le
champ de l'expérience possible,
mais jamais pour franchir ses limites, hors lesquelles, pour nous, [en dehors des
phénomènes du monde sensible] il n'est rien que de l'espace vide."
(Fin de citation)
224
Connaissance du monde
Voir Connaissance du monde.
Connaissance pure
Voir Connaissance pure dans Connaissance.
Définitions
(Source : [165] pages 21-22)
"Les connaissances rationnelles sont opposées aux connaissances historiques.
Les connaissances rationnelles proviennent de principes (ex principiis),
Les connaissances historiques proviennent de données (ex datis).
225
Connaissances empiriques.
Voir aussi Limite entre l'usage commun de l'entendement et son usage spéculatif.
Savoir historique
(Citation de [165] page 49)
"De façon générale, les logiciens sont historiquement ignorants.
[Les spécialistes de la logique sont surtout des théoriciens, peu au fait des
applications pratiques de leur science.]
[Polyhistoire]
Le savoir historique sans limites déterminées, c'est la polyhistoire ; elle enfle de
vanité.
[Polymathie]
S'il s'agit de la connaissance rationnelle, c'est le terme de polymathie qui convient.
[Selon le dictionnaire [13] Polymathie : savoir encyclopédique]
[Pansophie]
L'un et l'autre, savoir historique aussi bien que rationnel, étendus sans limites
déterminées peuvent être nommés pansophie.
[Philologie]
Au savoir historique appartient la science des instruments de l'érudition, la philologie
qui englobe une connaissance critique des livres et des langues (littérature et
linguistique).
[Selon le dictionnaire [13] Philologie :
Etude, tant en ce qui concerne le contenu que l'expression, de documents,
surtout écrits, utilisant telle ou telle langue.
226
(Sous l'influence du concept allemand de Realphilologie) étude des mots,
des documents (écrits ou autres) et de tous les contenus de civilisation
impliqués.
Etude scientifique d'une langue quant à son matériel formel et son
économie.]
Les humanités
(Citation de [165] pages 49-50)
"Une partie de la philologie est constituée par les humanités (Humaniora) ; on entend
par là la connaissance des Anciens qui favorise l'union de la science et du goût,
dégrossit et favorise les échanges intellectuels ainsi que l'urbanité qui définissent
l'humanité.
[(Citation de [165] page 170 note 32)]
"Humanité signifie d'une part le sentiment universel de sympathie, d'autre part la
faculté de pouvoir se communiquer intimement et universellement, qualités qui
lorsqu'elles sont réunies constituent la sociabilité propre à l'humanité et lui
permettent de se distinguer de la limitation animale.
L'érudit-cyclope, « c'est l'égoïste de la science et il lui faut encore l'œil qui lui
permette de considérer également son objet au point de vue des autres
hommes. C'est là-dessus que se fonde l'humanité des sciences, c'est-à-dire leur
aptitude à procurer au jugement l'urbanité qui fait qu'on le soumet à celui des
autres ».
(Fin de citation)
227
[Le philologue doit être à la fois cultivé et civilisé]
Le polyhistorien doit être, comme philologue, linguiste et lettré, comme humaniste, un
classique et un interprète des classiques. En tant que philologue, il est cultivé, en
tant qu'humaniste, civilisé."
(Fin de citation)
Connecteur
En linguistique, le mot connecteur désigne un opérateur de liaison L entre deux
phrases A et B permettant d'en constituer une seule. Ainsi, l'ensemble de phrases
connectées A L B doit être interprété comme une seule phrase, C.
Exemple : avec le connecteur ET associé aux phrases « Je suis venu » et « J'ai
mangé » on peut constituer deux phrases C1 et C2 de significations différentes
du point de vue de l'ordre implicite des actions :
C1 = « Je suis venu ET j'ai mangé » ou C2 = « J'ai mangé ET je suis venu ».
Synonyme : Copule.
Connexion
Voir Connexion.
Conscience - Conscience de
Source : [23].
228
Le mot français « conscience » a trois significations :
Conscience morale, conscience de, et conscience tout court.
Conscience morale
On parle de conscience morale pour désigner la fonction psychique permettant à
l'homme d'apprécier la différence entre le bien et le mal, donc d'exercer son libre
arbitre. Ce sens n'apparaîtra pas dans ce texte.
Conscience de
On parle de conscience de… ou d'aperception pour désigner les mécanismes
psychiques par lesquels l'homme prend connaissance d'un objet. On en parle avec
les verbes avoir et être :
Quand j'ai conscience d'un objet, il est présent à mon esprit, je peux en parler.
Quand je suis conscient d'une situation, elle est présente à mon esprit.
229
déplaçant, en se transformant…) son état change, et certaines des variables qui
le décrivent changent de valeur.
Or la conscience de est un état psychique à un instant donné, résultat pour un
individu de l'état de certains de ses neurones et des excitations (signaux
transportant des informations) qu'ils se sont transmis. A un instant donné, la
conscience de est donc décrite par un ensemble de données : l'ensemble qui
décrit l'état des neurones correspondants et des excitations émises et reçues
jusqu'à cet instant-là.
Il y a donc un « code conscient », propre à chaque individu, qui décrit la
représentation dont il a conscience à un instant donné. Selon [15] page 205 :
« La distribution des cellules actives et inactives compose un code interne
qui reflète fidèlement le contenu de la perception subjective. Ce code
conscient est stable et reproductible : ce sont toujours les mêmes neurones
qui déchargent dès que le patient pense à Bill Clinton. Il suffit, pour les
activer, d'imaginer le visage du président : la plupart des neurones du cortex
temporal antérieur répondent avec la même sélectivité aux images réelles et
aux images mentales. La mémoire suffit également à les réactiver. »
2ème raison : lorsque je suis conscient de quelque chose (et seulement si j'en
suis conscient, ce qui implique que j'y fais attention), je peux en parler. Or les
muscles qui agissent pour parler (ceux de la bouche, etc.) sont commandés par
des neurones moteurs. Comme tous les neurones, ceux-ci sont activés par des
signaux d'excitation et seulement de cette manière-là ; ils sont donc activés par
des données, celles des signaux reçus, elles-mêmes provenant d'autres
neurones, etc., l'origine de la chaîne de neurones étant la conscience de.
Pour activer une chaîne de neurones se terminant par les neurones moteurs
de la parole, la conscience de ne peut donc être qu'un ensemble de données. Si
l'origine des signaux activant la parole était une fonction autonome et
inconsciente du psychisme elle ne pourrait pas émettre des signaux aboutissant
à des paroles cohérentes, fonction du seul contenu de la conscience de.
Voir aussi :
Aperception (conscience de soi), pure ou empirique ;
Conscience claire et conscience obscure : définitions ;
Conscience des actes et des procédures.
230
Conscience (tout court)
La conscience (tout court) est l'ensemble des processus psychiques permettant la
connaissance du monde et de soi-même à l'état d'éveil : attention, conscience des
autres et de soi, fonctions psychiques, représentations et affects. Les fonctions
psychiques manipulent des données abstraites (les représentations) pour les
mémoriser, raisonner sur elles et commander des actions musculaires. Du point de
vue physiologique les fonctions résultent d'états et d'excitations de neurones.
Justification : "il nous faut nécessairement attribuer aux choses, a priori, toutes les
propriétés qui constituent les conditions sous lesquelles seulement nous les
pensons.
[Nous devons attribuer aux objets réels les propriétés et les fonctions que nous
en rapporte leur conceptualisation]
Or je ne peux avoir la moindre représentation d'un être pensant par une quelconque
expérience externe,
[Nous n'avons aucune perception phénoménale de la pensée d'autrui
- Kant ne croit évidemment pas à la possibilité d'une transmission de pensée]
231
[Chacun ne peut qu'attribuer à autrui les mêmes mécanismes mentaux qu'à lui-
même]
Donc, de tels objets ne sont rien d'autre que le transfert de cette conscience de moi-
même à d'autres choses qui ne peuvent être représentées comme des êtres
pensants qu'à la faveur de cette opération."
Pour Kant, la conscience de soi est un état de l'esprit, photographie instantanée des
neurones et de leurs interconnexions, donc un ensemble de données, une
représentation : voir Conscience de. En toute rigueur ce n'est pas une
représentation, mais l'interprétation par la conscience d'une représentation de
représentation : « je sais que je pense à… ». - Voir aperception.
Chez l'être humain, cette conscience requiert une perception interne du divers qui est
intuitive, spontanée et fait partie de la sensibilité. Par conscience de soi, l'homme se
voit en tant que phénomène, d'une façon biaisée par sa personnalité et non tel qu'il
serait vu par d'autres personnes, chacune avec ses propres biais.
K213 note * - Lors d'une conscience de soi, le sens interne de chacun est affecté par
lui-même, à l'occasion d'un acte d'attention. L'entendement détermine alors le sens
interne en synthétisant une liaison du divers.
232
Détails supplémentaires sur la conscience de soi
K213 - Dans la conscience de moi-même, l'unité synthétique originaire de
l'aperception ne produit qu'une chose : la conscience du fait que j'existe (et rien
concernant mon aspect externe en tant que phénomène ou mon sens interne) ; et
cette conscience d'exister est une pensée, non une intuition. (K213 note ** - "Le :
« Je pense » exprime l'acte consistant à déterminer mon existence.")
K284 – "La conscience que j'ai de moi-même dans la représentation Je n'est
nullement une intuition, mais c'est une représentation simplement intellectuelle
de la spontanéité d'un sujet pensant."
K189 note * : "La proposition synthétique selon laquelle, dans ce qu'elle a de divers,
toute conscience empirique doit être liée en une seule conscience de soi-même
constitue le principe absolument premier et synthétique de notre pensée en général."
("doit" : cette synthèse unificatrice est systématique.)
K402 – "Je ne connais pas un objet du simple fait que je pense, mais c'est
uniquement dans la mesure où je détermine une intuition donnée du point de vue de
l'unité de la conscience — en quoi consiste toute pensée — que je peux connaître un
quelconque objet. Donc, je ne me connais pas moi-même par la conscience que j'ai
de moi comme être pensant, mais si je suis conscient de l'intuition que j'ai de moi-
même comme se trouvant déterminée relativement à la fonction de la pensée."
Moi (Je) est toujours sujet, mais en tant qu'objet je ne suis pas une substance
K402-K403 – Le Moi, le Je pense, doit toujours dans la pensée avoir valeur de sujet,
[c'est-à-dire] de quelque chose qui ne puisse être simplement considéré comme un
prédicat venant s'attacher à la pensée : c'est là une proposition apodictique et même
identique ; toutefois, elle ne signifie pas que je sois, comme objet, un être subsistant
par moi-même, autrement dit une substance.
Cette certitude contredit l'opinion de Descartes selon laquelle l'homme est une
substance pensante et étendue.
233
Voir aussi :
Doctrine rationnelle de l'âme ;
Principes suprêmes de la possibilité d'intuition pour la sensibilité et
l'entendement ;
Moi ;
Conscience des actes et des procédures ;
Paralogisme psychologique : conclusion de la solution.
L'homme qui a conscience de ses actes et de ses pensées s'en souvient et peut les
reproduire. Il peut y réfléchir et en induire des méthodes valables pour tous les cas
semblables ; exemples : la méthode pour additionner deux fractions, la méthode de
dérivation d'une fonction trigonométrique. Enfin, il peut reconnaître dans une suite
d'actions ou de pensées un cas particulier d'une procédure plus générale.
Conscient
Substantif : un des trois systèmes de l'appareil psychique, situé entre le
préconscient et l'inconscient : voir 1ère topique.
Adjectif : un sujet conscient est à l'état d'éveil et peut s'exprimer.
Consécution
K335 – "Dans tout raisonnement [logique], il y a une proposition qui sert de principe
et une autre, à savoir la conclusion, qui en est tirée, et enfin la déduction rationnelle
(consécution) d'après laquelle la vérité de la dernière est reliée indissolublement à la
vérité de la première."
Cette liaison confère au raisonnement une unité d'enchaînement nécessaire.
Conséquent
Selon le dictionnaire [13] : (Logique – Substantif masculin) Second terme d'un
rapport, dont le premier est l'antécédent.
Exemple : voir Jugements hypothétiques.
234
Consomption
Anéantissement, destruction.
Constitutif
Adjectif – Qualité qui constitue la base, le fondement d'une chose, avec laquelle on
peut l'imaginer (ou se la représenter) et sans laquelle elle est impossible.
K562 - "L'usage hypothétique de la raison, qui se fonde sur des Idées admises en
tant que concepts problématiques, n'est pas, à proprement parler, constitutif, ce qui
veut dire qu'il n'est pas tel qu'à juger en toute rigueur, en résulte la vérité de la règle
générale adoptée comme hypothèse ; car comment veut-on connaître toutes les
conséquences possibles qui, en découlant du même principe que l'on a admis,
prouvent son universalité ? En fait, cet usage n'intervient que de façon régulatrice,
pour introduire ainsi, aussi largement qu'il est possible, de l'unité dans les
connaissances particulières et par là rapprocher la règle de l'universalité."
Chez Kant
(Citation de K344)
"Une constitution qui recherche la plus grande liberté humaine selon des lois faisant
en sorte que la liberté de chacun puisse coexister avec celle des autres (sans qu'elle
cherche le plus grand bonheur, car celui-ci s'ensuivra de lui-même), est en tout cas
pour le moins une Idée nécessaire, que l'on doit prendre pour fondement, non
seulement dans l'esquisse des premiers contours d'une constitution politique, mais
aussi à l'occasion de toutes les lois, et où il faut faire dès l'abord abstraction de tous
les obstacles présents, qui proviennent peut-être non pas tant, inévitablement, de la
nature humaine que bien davantage du mépris dans lequel on tient les Idées
véritables en matière de législation. […]
Plus la législation et le gouvernement seraient en accord avec une telle Idée,
plus rares seraient de leur côté les peines, et dès lors il est, de fait, entièrement
raisonnable d'envisager (comme Platon [49] l'affirme) qu'à la faveur d'une
organisation parfaite de cette législation et de ce gouvernement absolument aucune
d'entre elles ne serait plus nécessaire. Or, bien que cette situation ne puisse jamais
se réaliser, l'Idée est pourtant entièrement juste qui établit ce maximum comme le
modèle nécessaire pour rapprocher toujours davantage, par référence à lui, la
constitution légale des hommes de la plus grande perfection possible."
235
(Fin de citation)
Nous voyons que par là, la mathématique a un avantage sur la philosophie en ceci
que ses connaissances sont intuitives, alors que les autres sont au contraire
discursives seulement.
[Les quantités sont intuitives, alors que les qualités sont discursives)
Mais la raison pour laquelle c'est en mathématiques surtout que sont considérées les
quantités, c'est que les quantités peuvent être construites a priori, alors que les
qualités au contraire ne se laissent pas présenter dans l'intuition."
(Fin de citation)
236
Voir aussi :
Connaissance pure mathématique ;
Possibilité des mathématiques pures (conséquence de la nécessité de construire
ses connaissances) ;
Concepts donnés et factices a priori et a posteriori ;
Définitions synthétiques par exposition ou par construction ;
Origine logique des concepts ;
Conceptualisation.
Voir :
Un concept possible peut être vide :
Dogmata et mathemata ;
Problème de la vérité d'une connaissance - Théorie de la connaissance.
Contingence (adjectif)
(Philosophie) : qui peut être ou ne pas être, se produire ou non, s'être produit ou non.
Manière d'être d'un objet, réel ou abstrait, qui peut exister ou non.
Manière d'être d'une situation ou d'une évolution qui peut se produire ou non,
s'être produite ou non.
237
Exemple : une des démonstrations de l'existence de Dieu (hélas fausse) est basée
sur la contingence de l'Univers « qui existe mais aurait pu ne pas exister » :
« Puisqu'il existe c'est qu'il a été créé, donc qu'il y a un Créateur, Dieu ». Mais
l'hypothèse de contingence d'un objet qui existe, a existé ou existera est absurde, car
contraire au principe d'identité [32].
Exemple : un jugement empirique est contingent dans la mesure (et seulement dans
la mesure) où il dépend de circonstances psychiques au moins en partie
inconscientes.
Voir aussi Accident.
Contingence et hasard
Le hasard fait qu'une chose peut se produire ou non, donc être contingente : c'est ce
que croient la plupart des gens. Mais il n'y a pas de hasard dans les phénomènes
naturels, parce que l'homme en a défini chaque loi sans exception (voir Hasard).
Contingence et probabilité
La notion binaire (oui/non) de contingence peut souvent être remplacée par celle de
probabilité d'occurrence, plus précise.
238
Différence entre l'adjectif contingent et le substantif contingent
K525 – "Le contingent [substantif] n'existe que sous la condition d'autre chose qui
constitue sa cause, et à partir de celle-ci le raisonnement [régressif] continue de
s'appliquer avec la même validité jusqu'à une cause qui n'existe plus de façon
contingente [adjectif] et qui par conséquent existe sans condition et avec nécessité.
Tel est l'argument sur lequel la raison fonde sa progression vers l'être originaire."
(Cet argument est contestable : rien ne prouve qu'une chaîne de causalité doit
avoir une cause première sans cause.)
Contingent (substantif)
(Philosophie) : ce qui peut être ou ne pas être, se produire ou ne pas se produire.
Voir aussi Contingence (adjectif).
239
Voir Compléments sur l'espace et le temps.
Du point de vue physique, affirmer que tout espace à une, deux ou trois dimensions
est nécessairement continu est faux : voir Continuum.
Fluence et fluxion
K245 - Kant qualifie de fluentes des grandeurs continues, parce que la synthèse de
l'imagination productive qui intervient dans leur production est une progression
continue dans le temps parfois appelée fluxion (écoulement).
K270 – "Tout changement n'est […] possible que par une action continue de la
causalité, laquelle, en tant qu'elle est uniforme, s'appelle un moment. Le changement
n'est pas constitué par ces moments, mais il est produit par eux comme leur effet."
Cette affirmation est fausse dans le cas d'une impulsion fournie par une particule
comme un photon, ou par un choc : le système qui reçoit l'impulsion peut
changer. Elle est aussi fausse dans le cas de la décomposition radioactive
240
spontanée d'un atome, dans le cas d'une fluctuation quantique, etc., mais Kant
ne pouvait le savoir.
Kant affirme que dans l'esprit humain les processus cognitifs de synthèse qui gèrent
le changement (l'évolution d'une représentation en mémoire de travail) sont continus,
aux sens décrits ci-dessus pour une variable et pour une fonction :
K270 – "Telle est donc la loi de la continuité de tous les changements, dont le
principe est le suivant : ni le temps, ni non plus le phénomène inscrit dans le
temps, ne sont constitués de parties qui soient le plus petites possible [c'est-à-
dire de quanta, au sens physique de minimum absolu non nul], et cependant
l'état de la chose, lors de son changement, passe par toutes ces parties, pour
parvenir à ce qu'il est sous sa deuxième forme, comme par autant d'éléments.
Au sein de ce qu'il y a de réel dans le phénomène, il n'y a aucune différence,
comme il n'y en a aucune dans la grandeur des temps, qui soit la plus petite ; et
ainsi le nouvel état de la réalité se développe-t-il à partir du premier, où il n'était
pas présent, en traversant tous les degrés infinis de cette même réalité, entre
lesquels les différences sont toutes plus petites qu'entre 0 et A."
Kant utilise ici la notion de valeur infiniment petite mais non nulle d'une variable. Il
veut dire que la perception des changements est continue, passant de zéro (aucun
changement n'est perçu) à A (le changement est terminé et pris en compte par
l'esprit).
Seuils minimum et maximum d'une perception
Il déduit cette opinion du fait que toute perception de changement demande un
temps non nul, ce que les enregistreurs cérébraux modernes confirment.
Mais la perception des événements extérieurs par la conscience humaine n'est
pas continue : les enregistrements de l'activité du cerveau montrent que la prise
de conscience d'un événement est soumise à un seuil, qu'elle passe
brusquement de non perçu à perçu. Ce n'est qu'au-delà de ce seuil qu'elle est
continue, et encore jusqu'à une limite traduisant la saturation de l'organe des
sens concerné, saturation associée à une douleur (éblouissement,
assourdissement, etc.).
K270 – Dans cette page des Analogies de l'expérience, on peut interpréter le texte
de Kant de deux façons.
Soit comme l'affirmation de l'existence d'une "grandeur de la réalité (B-A)", ce
qui est inexact : un système existe ou n'existe pas, une évolution de système se
produit ou ne se produit pas : en matière de réalité physique le principe d'identité
[32] règne sans partage : voir Subliminal et Continuum.
Ce qui est vrai cependant, c'est qu'en physique quantique la valeur de certaines
grandeurs est probabiliste ; par exemple, la position d'un électron en mouvement
peut être définie, à un instant précis et dans un volume d'espace donné, avec
une certaine probabilité de présence, la somme de toutes ces probabilités de
présence de l'électron dans l'espace infini valant 1. Mais les équations de la
Mécanique quantique régissant les évolutions des systèmes à l'échelle atomique
sont parfaitement déterministes : il n'existe jamais de réalité variable ou
progressive.
241
Soit comme l'affirmation que l'intensité perçue d'un phénomène qui a une
certaine grandeur est continue, ce qui est vrai entre les deux limites ci-dessus.
K287 – "Tous [ces principes ont] pour unique point commun qu'ils n'admettent rien,
dans la synthèse empirique, qui puisse faire tort ou porter atteinte à l'entendement et
à l'enchaînement continu de tous les phénomènes, c'est-à-dire à l'unité de ses
concepts. Car c'est seulement en lui que devient possible l'unité de l'expérience, où
toutes les perceptions doivent nécessairement avoir leur place."
242
Il existe en effet des perceptions sensorielles subliminales, que le système
nerveux transmet au cerveau, mais qui ne durent pas assez longtemps pour être
perçues consciemment. Kant a donc raison d'affirmer que le vide (ce qui n'existe
pas dans l'espace ou le temps) ne peut être perçu par nos sens.
Continuum
Substantif - Un continuum est un espace d'un seul tenant (sans trou ou interruption).
Toute variable y est continue. Exemples : l'espace de l'Univers newtonien et
l'espace-temps de la Relativité générale d'Einstein [85] (continuum à 4 dimensions).
K245 - "…puisque, pour tout nombre, il faut en tout cas qu'une unité serve de base,
le phénomène qui constitue une unité est un quantum et, comme tel, toujours un
continuum." Donc tout phénomène est un continuum (déduction hélas fausse).
Principe de déterminabilité
K518 – "Tout concept, vis-à-vis de ce qui n'est pas contenu en lui, est indéterminé et
se trouve soumis au principe de déterminabilité qui veut que, de deux prédicats
contradictoirement opposés, un seul puisse lui revenir - principe qui repose lui-même
243
sur le principe de contradiction et est par conséquent un principe purement logique
qui fait abstraction de tout contenu de la connaissance et ne prend en considération
que la forme logique."
Contraposition
Voir Raisonnements de l'entendement [par contraposition] (au point de vue de la
modalité des jugements).
Controuver
Selon le dictionnaire [13] : affirmer des faits entièrement erronés (souvent avec une
intention malfaisante).
[56b] §27 page 100 – "Je suis bien éloigné de considérer que ces concepts sont
simplement empruntés à l'expérience et que la nécessité qui s'y trouve représentée
est une simple apparence controuvée dont nous leurre une longue habitude ;"
Convenance et disconvenance
Convenance
Selon le dictionnaire [13] : Fait de convenir à (d'être approprié à) quelque chose.
K312 – "Quand la réalité ne nous est représentée que par l'entendement pur (realitas
noumenon), ne se peut penser entre les réalités nulle disconvenance [conflit], c'est-
à-dire nul rapport tel que, réunies dans un sujet, elles annuleraient réciproquement
leurs conséquences, au sens où 3 – 3 = 0. Au contraire, le réel phénoménal (realitas
phaenomenon) peut sans aucun doute contenir entre ses éléments une relation de
disconvenance et, réuni dans le même sujet, anéantir en totalité ou en partie, dans
l'un de ses éléments, la conséquence de l'autre, comme c'est le cas de deux forces
motrices opérant sur une même ligne droite qui attirent ou poussent un point dans
des directions opposées…"
Disconvenance
Opposé de convenance.
244
tend vers l'infini. « Tend vers » signifie que quel que soit petit et positif il existe
un rang r au-delà duquel la différence (en valeur absolue) entre xn et L est
inférieure à : si n>r alors |xn – L|<.
Exemple : lorsque n tend vers l'infini, la suite xn=2+1/n tend vers 2.
Si =0.001 il faut prendre n>1000 pour avoir (1/n)<0.001 donc |xn-2|<0.001.
Une série de sommes Sn des n premiers nombres d'une suite x1, x2…xn…
(Sn = x1+x2+…+xn) est dite convergente lorsque son élément Sn tend vers une
valeur finie (appelée limite ou valeur de convergence) lorsque n tend vers l'infini.
Exemple : la série correspondant à la suite xn=1/2n : {x1=½, x2=1/22=1/4,
x3=1/23=1/8…} tend vers 1 lorsque n tend vers l'infini. (Démonstration : [65])
Conclusion : la somme d'un nombre infini de termes qui décroissent peut tendre
vers un nombre fini, ici 1. Contrairement à ce que croyaient certains Grecs, une
telle somme ne tend pas nécessairement vers l'infini.
Converse
(Adjectif et substantif utilisés en Logique à propos d'une relation)
Substantif : relation telle que, si une relation aRb est vraie, la relation bcRa est
vraie aussi. La converse de implique … est impliqué par …
Adjectif : la relation converse de est .
Conversion logique
[165] page 128 - "Les raisonnements immédiats par conversion concernent la
relation des jugements et consistent dans la transposition du sujet et du prédicat
dans les deux jugements, en sorte que le sujet d'un jugement devienne le prédicat de
l'autre et réciproquement."
(Etant donné un jugement : {sujet S ; relation R ; prédicat P}, la conversion le
transforme en un jugement : {sujet P ; relation R ; prédicat S} :
la "transposition" intervertit le sujet et le prédicat.)
Compléments :
Conversion pure [simple] et conversion altérée [par accident] ;
Règles générales de la conversion.
245
Coordonner
Selon [13] : Relier par des connecteurs logiques (ET, OU, SAUF) des propositions ou
des conditions. Exemple : « J'épouserai quelqu'un de riche ET beau ! »
Voir différence avec subordonner.
Copule
Voir Connecteur (synonyme) et jugement.
Corrélat
Substantif : Considérons les deux termes, x ou y, d'une relation de la forme x R y.
Chacun de ces termes est dit corrélé à l'autre, qui est son corrélat. Exemples :
Jean (x) est père de (R) Marie (y).
K166 - Les catégories de l'entendement des deux premières classes (Quantité et
Qualité) n'ont pas de corrélat, alors que celles de la seconde classe (Relation et
Modalité) en ont un : ainsi, le terme Impossibilité est corrélé avec Possibilité et
Contingence avec Nécessité.
Corrélatif
Chez Kant
[93] – D.1770, p. 642 :
Exemples de concepts acquis par l'entendement : "la possibilité, l'existence, la
nécessité, la substance, la cause, etc., avec leurs opposés et leurs corrélatifs."
246
Incorruptibilité : caractère de ce qui est incorruptible, inaltérable.
Cosmologie - Cosmologique
Selon [13]
Science des grandes lois qui gouvernent l'univers physique.
Philosophie : Partie de la métaphysique qui traite du monde physique.
Synonyme : philosophie de la nature.
Chez Kant
K354 – "Le sujet est l'objet de la psychologie ; l'ensemble qui inclut tous les
phénomènes (le monde sensible), l'objet de la cosmologie".
247
Cosmologie - Cosmothéologie ou ontothéologie
Voir Cosmothéologie ou ontothéologie.
Cosmopolite
Selon le dictionnaire [13], cet adjectif s'applique à une collectivité humaine ou une
chose créée par l'homme : est cosmopolite ce qui rassemble des personnes ou des
éléments de plusieurs pays du monde.
Créance
Substantif
Selon le dictionnaire [13] : action de considérer quelque chose comme vrai.
Conviction et certitude
La suffisance subjective s'appelle conviction (pour moi-même), la suffisance
objective s'appelle certitude (pour chacun)."
(Fin de citation)
Critérium
Selon le dictionnaire [13] : vieux terme qui n'est plus utilisé, synonyme de critère.
Criticisme
Doctrine de Kant : Examen critique des fondements rationnels de la connaissance,
tel qu'il est exposé dans ses ouvrages Critique de la raison pure et Critique de la
raison pratique [132].
248
synthétiques a priori" s'imposant d'apprendre à pénétrer "le fondement universel de
leur possibilité et les conditions essentielles de notre faculté de connaître".
Selon le criticisme :
L'esprit construit ses connaissances à partir de formes ou de catégories à lui ;
Il ne peut construire des connaissances vraies (conformes à la réalité) qu'à partir
de l'expérience.
Voir :
Idéalisme de Kant ;
Philosophie transcendantale ;
Conditions de possibilité et de vraisemblance d'une connaissance ;
Différence de primauté entre la métaphysique classique et le criticisme de Kant.
Critique
Kant, auteur du célèbre texte Qu’est-ce que les Lumières ? [25], refuse les vérités
imposées depuis des millénaires par la religion (révélations) ou l'autorité des princes
et despotes (lois édictées). Il milite pour que l'homme pense par lui-même, parce qu'il
est doué de raison, et pour que soient admises comme vérités les affirmations que
tous les hommes peuvent accepter librement et d'un commun accord ; c'est une foi
en la science, la liberté d'expression et la démocratie.
K619 – "La raison doit, dans toutes ses entreprises, se soumettre à la critique, et elle
ne peut par aucun interdit attenter à la liberté de cette dernière sans se nuire à elle-
même et sans attirer sur elle un soupçon qui lui est dommageable. De fait n'y a-t-il
rien de si important, quant à l'utilité, ni rien de si sacré qui puisse se dérober à cet
examen qui contrôle et inspecte tout, sans faire exception de personne. C'est sur
cette liberté que repose même l'existence de la raison, laquelle n'a pas d'autorité
dictatoriale, mais ne fait jamais reposer sa décision que sur l'accord de libres
249
citoyens, dont chacun doit pouvoir exprimer ses objections, voire son veto, sans
retenue aucune.
Cela étant, si la raison ne peut certes jamais se refuser à la critique, elle n'a
pourtant pas toujours de motifs de la redouter."
Pour comprendre le problème, voir d'abord Moi (Je), puis, Descartes : pensée, âme
et corps puis Permanence de l'âme (réfutation de la démonstration de Mendelssohn).
Voir aussi :
Dans Objection la différence entre objections dogmatique, critique et sceptique ;
Différence entre doctrine et critique ;
Criticisme.
250
Autres exemples de critique au sens de Kant
Réalité et phénomènes ;
Circonstances dans lesquelles ces conflits de la raison pure surgissent.
ou bien pour juger la raison commune aussi bien que spéculative, non pas afin de
l'instruire, mais pour la rendre correcte et cohérente avec elle-même.
Car le principe logique de la vérité est l'accord de l'entendement avec ses propres
lois universelles.
Critique de la métaphysique
Lire d'abord Critique, Critique de la raison pure et Métaphysique.
Compléments :
La solution scientifique pour trouver la vérité empirique : le Rationalisme critique
251
Question : peut-on construire une science métaphysique ?
Voir :
Pour quelles connaissances la métaphysique est-elle nécessaire ?
Quelle connaissance est accessible à la métaphysique ?
Philosophie - 3 questions fondamentales : theoria, éthique et sagesse.
Voir Conditions à satisfaire par une critique de la raison pour que la métaphysique
soit une science.
252
Exemple de critique révolutionnaire à l'époque de Kant : la croyance en Dieu
Pour Kant et les philosophes des Lumières [25], l'entendement et la raison de
l'homme lui permettent d'espérer connaître toute réalité : il peut remettre en question
n'importe quelle thèse, doctrine ou foi, y compris l'existence de Dieu, et les soumettre
à son « tribunal de la raison » (K477). Son appréhension de la réalité se base sur sa
seule certitude : j'existe, d'où il peut déduire l'interprétation de tous les phénomènes.
Et après avoir admis qu'un Dieu réel serait nécessairement transcendant, donc
physiquement impossible, Kant recommande de croire en un Dieu transcendantal,
simple Idée mais concept suprême cohérent à la fois avec le monde sensible et le
monde moral de son Idéalisme transcendantal.
253
malgré l'indépendance de nos concepts et de nos principes purs de
l'entendement à l'égard de l'expérience, bien plus, malgré l'extension
apparemment plus grande de leur usage,
ils ne permettent cependant de rien penser du tout hors du champ de
l'expérience, parce qu'ils ne peuvent rien faire d'autre que de déterminer la
simple forme logique du jugement relativement à des intuitions données ;
or, comme il n'y a absolument aucune intuition en dehors du champ de la
sensibilité, ces concepts purs restent dépourvus absolument de toute
signification, faute de tout moyen de les présenter in concreto ;
[voir Réalité et phénomènes]
il s'ensuit que tous ces noumena, ainsi que l'ensemble qu'ils forment : celui d'un
monde intelligible, ne sont rien d'autre que les représentations d'un problème,
dont l'objet est bien possible en lui-même,
[c'est le problème insoluble de la détermination de l'objet réel d'une intuition]
mais dont la solution est tout à fait impossible vu la nature de notre
entendement, puisque notre entendement n'est pas une faculté de l'intuition,
mais simplement de la connexion d'intuitions données en une expérience; il faut
donc que cette expérience contienne tous les objets pour nos concepts, alors
qu'en dehors d'elle tous les concepts, seront dépourvus de signification,
puisqu'aucune intuition ne peut leur être soumise."
(Fin de citation)
254
mais aussi de […] connaître a priori, […] par principes, la complétude dans :
l'énumération,
la classification
et la spécification [description complète et précise]
des concepts.
Faute de quoi, en métaphysique tout n'est que rhapsodie où l'on ne sait jamais si ce
que l'on possède est suffisant ou bien s'il se peut qu'il manque encore quelque chose
et en quel endroit."
(Fin de citation)
[plus précisément] dans cette action de la raison qui constitue, en tant qu'elle ne
concerne que la forme, l'élément logique des raisonnements, mais qui, en tant qu'elle
représente les jugements de l'entendement comme déterminés relativement à telle
ou telle forme a priori, constitue des concepts transcendantaux de la raison pure.
255
Présentation de l'ouvrage, par son traducteur, Alain Renaut
K9 - "La faculté qui écrit la Critique de la raison pure est moins la raison, comme
pouvoir d'enchaîner déductivement les énoncés, que la réflexion comme activité par
laquelle le sujet procède, à partir d'une diversité d'objets, à une opération de
classement au sein d'un genre commun (au sein d'un « universel ») qu'il ne possède
pas encore - autrement dit : qui ne précède pas l'activité réfléchissante, mais en
émane."
La Critique cherche "à faire surgir, à partir de la diversité des représentations, une
certaine dimension d'unité - ce, par leur regroupement sous trois facultés (sensibilité,
entendement, raison) qui constituent donc, vis-à-vis de cette diversité, comme des
principes de classement."
(Citation de K98)
"Or, il semble certes naturel, dès qu'on a quitté le sol de l'expérience [pour des
spéculations métaphysiques], avec des connaissances qu'on possède sans savoir
d'où elles proviennent, et sur le crédit de principes fondamentaux dont on ne connaît
pas l'origine, de ne pas immédiatement ériger un édifice sans s'être auparavant
assuré de la fondation de celui-ci par des recherches scrupuleuses, et sans par
conséquent avoir bien plutôt soulevé depuis longtemps la question de savoir
comment l'entendement peut parvenir à toutes ces connaissances a priori et quelle
extension, quelle validité et quelle valeur elles peuvent bien posséder.
[Kant aborde sa Critique de bas en haut : il commence par étudier les fonctions
et facultés psychiques (comme les représentations, les intuitions, l'imagination,
l'entendement et la raison), avec leurs possibilités et leurs limites, pour ensuite
seulement utiliser ce savoir pour étudier les limites des réflexions
métaphysiques.]
256
K99 - "C'est ainsi justement que Platon quitta le monde sensible, parce que
celui-ci impose à l'entendement de si étroites limites, et qu'il s'aventura au-delà
de celui-ci, sur les ailes des Idées, dans l'espace vide de l'entendement pur."]
(Fin de citation)
K110 - "De tout cela [c'est-à-dire de la volonté de trouver les principes d'une science
métaphysique] résulte donc l'idée d'une science particulière qui peut se nommer
Critique de la raison pure. Car la raison est le pouvoir qui fournit les principes de la
connaissance a priori. La raison pure est par conséquent celle qui contient les
principes permettant de connaître quelque chose absolument a priori."
Exemple de critique
Seule la raison pure peut détecter les erreurs dialectiques dues aux Idées.
ce qu'elle [la raison] nous apprend, c'est non quelque chose qu'il [l'objet de
l'expérience] est en lui-même mais en relation avec le propre usage de la raison
dans sa plénitude et dirigé vers les plus hautes fins dans le champ de l'expérience
possible.
257
Arguments pour la raison pure
(Citation de K626-K627)
[La critique de la raison pure est le juge suprême des désaccords et des polémiques]
"On peut considérer la critique de la raison pure comme le véritable tribunal pour
tous les différends dans lesquels celle-ci est impliquée ;
[La raison pure n'intervient pas sur le fond des arguments, mais sur leur forme]
car elle n'est pas impliquée dans les différends qui portent immédiatement sur des
objets, mais elle est instaurée pour déterminer et juger les droits de la raison en
général d'après les principes qui avaient présidé à son institution initiale.
[La critique permet d'apprécier les arguments selon les règles universelles de la
raison pure, par le débat au lieu de la passion]
La critique, en revanche, qui tire toutes ses décisions des règles fondamentales de
sa propre instauration, dont personne ne peut mettre en doute l'autorité, nous
procure le calme d'un état légal où nous ne devons régler notre différend d'aucune
autre manière qu'en recourant à une procédure.
Ce qui met un terme aux affaires dans le premier cas, c'est une victoire dont les deux
partis se vantent, à laquelle ne succède dans la plupart des cas qu'une paix
incertaine, établie par l'intervention des pouvoirs publics venant s'interposer entre les
adversaires ;
[La sentence de la raison pure, juste par définition, apaise les désaccords]
tandis que, dans le second cas, c'est la sentence qui, parce qu'elle touche ici à la
source même des différends, doit garantir une paix perpétuelle.
Aussi les différends infinis d'une raison purement dogmatique nous contraignent-ils à
chercher enfin le calme dans quelque critique de cette raison même et dans une
législation qui trouve là ses fondations.
Comme l'affirme Hobbes [81] : l'état de nature est un état de non-droit et de violence,
et force est de l'abandonner pour se soumettre à la contrainte légale qui limite notre
liberté uniquement pour qu'elle puisse coexister avec la liberté de tout autre et par là
même avec le bien commun.
A cette liberté appartient donc aussi celle d'exposer publiquement au jugement ses
pensées et les doutes que l'on ne peut réduire soi-même, sans être pour autant
décrié comme un citoyen agité et dangereux.
[Tous les hommes sont doués de raison, et en raison pure jugent de la même façon]
C'est là un point qui se trouve déjà compris dans le droit originaire de la raison
humaine, laquelle ne connaît pas d'autre juge qu'à nouveau l'universelle raison
humaine, où chacun a sa voix ;
258
[Tous les hommes ont le droit inaliénable d'avoir une opinion et de l'exprimer]
et dans la mesure où c'est de cette dernière que doivent provenir toutes les
améliorations dont notre état est susceptible, un tel droit est sacré et il ne peut y être
attenté."
(Fin de citation)
qui le premier donna l'exemple (et c'est par cet exemple qu'il devint en Allemagne le
fondateur de cet esprit de profondeur qui ne s'est pas encore éteint jusqu'ici) de la
manière dont il faut,
en établissant comme il se doit les principes,
en déterminant clairement les concepts,
en recherchant des preuves rigoureuses,
en évitant les sauts téméraires dans les conséquences,
prendre la voie sûre d'une science
ce pourquoi il eût été éminemment apte à y conduire une science telle que la
métaphysique, si l'idée lui était venue à l'esprit qu'il fallait préalablement préparer le
terrain par la Critique de l'instrument, c'est-à-dire de la raison pure elle-même :
il y eut là une lacune qui ne doit pas tant être imputée à lui que, bien davantage, au
mode de penser dogmatique de son temps, et à cet égard les philosophes de son
époque aussi bien que de toutes les époques antérieures n'ont rien à se reprocher
les uns aux autres.
259
Cela ne correspond plus à la censure, mais à la critique de la raison, grâce à quoi il
ne s'agit plus uniquement de déterminer des bornes de la raison, mais d'en saisir les
limites déterminées, ni seulement d'en appréhender l'ignorance sur un point ou sur
un autre, mais de l'établir relativement à toutes les questions possibles d'un certain
type, et cela non pas simplement de manière conjecturale, mais par une
démonstration tirée de principes."
(Fin de citation)
Abréviation
Dans ce texte, chaque fois que le mot Critique apparaît seul en caractères italiques il
s'agit de la Critique de la raison pure.
260
Kant : « La Critique de la raison pure est aride, obscure, révolutionnaire et longue »
(Citation de [56b] Préface pages 23, 24, 25)
"J'ai bien peur que la solution du problème de Hume [40] en sa plus grande
extension possible (je veux parler de la Critique de la raison pure) ne connaisse
exactement le même sort que le problème lui-même lors de sa première formulation
[par Hume]. On ne l'appréciera pas correctement faute de la comprendre ; on ne la
comprendra pas, parce que, si l'on consent bien à feuilleter le livre, on n'a pas envie
d'approfondir sa lecture ; et on ne voudra pas lui consacrer cet effort, parce que
l'œuvre est aride, parce qu'elle est obscure, parce qu'elle va à l'encontre de toutes
les conceptions reçues et que de surcroît, elle est longue. […]
[L'obscurité de la Critique] tient pour une part à l'étendue du plan qui ne permet pas
de bien dominer les points principaux qui importent en cette recherche ; et c'est à
cela que je vais remédier par les présents Prolégomènes.
L'œuvre qui présente le pur pouvoir de la raison dans toute son étendue et ses
limites demeure fondamentale ; les Prolégomènes s'y rapportent à titre d'exercices
préliminaires uniquement. Car cette Critique doit, en tant que science, exister de
façon systématique et exhaustive jusqu'en ses moindres parties avant même qu'on
puisse songer à faire paraître une métaphysique ou même à en nourrir la lointaine
espérance. […]
Ces Prolégomènes [feront bien voir aux lecteurs de la Critique] que c'est une
science [de la raison pure] entièrement nouvelle ; personne n'y avait même pensé
auparavant, sa seule idée était elle-même inconnue et rien de ce qui était donné
jusqu'alors n'était utilisable, à la seule exception de l'indication que pouvait fournir le
doute de Hume ;"
(Fin de citation)
Voir :
Raison ;
Philosophie transcendantale ;
Métaphysique ;
Criticisme.
261
Ou issue de la révélation (revelata).
K554 – "Le déiste croit en un Dieu, mais […] le théiste croit en un Dieu vivant."
262
Ou une certaine condition déterminée peut être absolument nécessaire,
Ou elle peut simplement être présupposée comme éventuelle et contingente.
Dans le premier cas, la condition est postulée (per thesin) ; dans le second, elle est
supposée (per hypothesin).
Conséquence pour les lois morales : leur force obligatoire suppose une existence
K554 – Si les lois morales (absolument nécessaires) présupposent nécessairement
quelque existence comme la condition de possibilité de leur force obligatoire, cette
existence doit être postulée, puisque le conditionné d'où part le raisonnement pour
arriver à cette condition déterminée [précise] est lui-même connu a priori comme
absolument nécessaire.
Critique transcendantale
Voir Critique transcendantale.
Croyance
Selon le dictionnaire [13] :
Certitude plus ou moins grande par laquelle l'esprit admet la vérité ou la réalité
de quelque chose.
Adhésion de l'esprit qui, sans être entièrement rationnelle, exclut le doute et
comporte une part de conviction personnelle, de persuasion intime.
Assentiment que donne l'esprit, sans réflexion personnelle et sans examen
approfondi.
Opinion qui, sans être religieuse, a le caractère d'une conviction intime et qui
exclut le doute.
Chez Kant
Définition
[165] page 176 note 46 – La croyance est "l'adhésion donnée à un jugement
d'existence irréfutable, mais incapable de preuve (jugement qui ne contient pas de
contradiction interne)."
Détails : La croyance, jugement assertorique.
bien que ce fait même de l'admettre soit du ressort de la raison théorique, au regard
de laquelle seule il peut, considéré comme fondement de l'explication, être appelé
une hypothèse,
263
[Croyance et croyance rationnelle]
alors que relativement à l'intelligibilité d'un objet qui nous est assurément imposé
comme tâche par la loi morale (le souverain Bien), partant, d'un besoin dans une
intention pratique, [le souverain Bien] peut être appelé une croyance et, plus
précisément, une pure croyance rationnelle, parce que la raison pure seule (aussi
bien suivant son usage théorique que suivant son usage pratique) est la source d'où
il jaillit."
(Fin de citation)
K669 – Lorsqu'une croyance d'un sujet est, "même dans son propre jugement,
simplement contingente", Kant l'appelle croyance pragmatique. Bien que
contingente, une telle croyance sert de fondement à l'utilisation effective des moyens
pour certaines actions.
Exemple : le Principe de précaution [145] de la Constitution française, a été
interprété de façon abusive par un tribunal. Celui-ci a fait démonter une antenne
publique de téléphonie portable sans autre raison que « des voisins avaient peur
de ses ondes ». Ces voisins, qui étaient tous utilisateurs de téléphones
portables, voulaient que l'antenne qu'ils utilisaient soit ailleurs, près d'autres
utilisateurs…
K670 – "La croyance pragmatique possède […] un degré, qui, selon la différence des
intérêts qui s'y trouvent en jeu (notamment en cas de pari, comme ci-dessous) peut
être grand ou petit."
Compléments :
Les 3 modes d'assentiment : l'opinion, la croyance et le savoir ;
La croyance, jugement assertorique.
264
Croyance doctrinale
Voir d'abord Croyance.
[Mais je crois si fort dans l'explication d'une unité du monde par des fins divines…]
l'unité finalisée est cependant une si grande condition de l'application de la raison à
la nature que je ne peux pas du tout la laisser de côté, dans la mesure, au
demeurant, où l'expérience m'en fournit à profusion des exemples.
[Je ne trouve pas d'autre explication que Dieu Créateur pour l'unité que je vois]
Or, pour ce qui est de cette unité, je ne connais pas d'autre condition qui pût en faire
pour moi un fil conducteur de l'exploration de la nature que de supposer qu'une
suprême intelligence a tout ordonné ainsi d'après les fins les plus sages.
265
subjectif la solidité de la confiance. [Ce terme] s'applique seulement à la façon dont
une Idée me fournit un principe directeur, et à l'influence subjective qu'elle exerce sur
le développement des actes de ma raison, qui renforce mon adhésion à cette Idée,
bien que je ne sois pas en état d'en rendre compte du point de vue spéculatif.
Pour un résumé des croyances de Kant, voir Les Idées sont les causes efficientes de
la nature – Les croyances de Kant.
Croyance morale
Voir d'abord, si nécessaire Croyance et Croyance doctrinale.
La fin est ici incontournablement fixée, et il n'y a, selon tout ce que je sais, qu'une
seule condition possible sous laquelle cette fin parvient à former avec toutes les
autres fins un ensemble cohérent et possède dès lors une valeur pratique, à savoir
qu'il y ait un Dieu et un monde futur ;
je sais aussi de façon tout à fait certaine que personne ne connaît d'autres conditions
conduisant à la même unité des fins sous la loi morale.
266
Culture
Au niveau d'un groupe humain, c'est l'ensemble des valeurs, croyances et
coutumes partagées par les membres d'un groupe (peuple, fidèles d'une religion,
etc.) depuis suffisamment longtemps pour que chacun les ait incorporées à son
inconscient (ces valeurs, croyances et coutumes leur paraissent inconsciemment
naturelles et indiscutables). Ce partage résulte :
De l'histoire commune ;
De l'environnement géographique et climatique où le groupe vit depuis des
générations ;
De la (ou des) religion(s) les plus répandues dans le groupe ;
Des lois morales ;
Des coutumes sociales, etc.
De l'éducation transmise aux enfants par les parents ou l'enseignement ;
Des informations diffusées par les médias ;
Des formes d'art dominantes depuis des décennies (littérature, peinture,
sculpture, danse, architecture, cinéma, cuisine, etc.) ;
Une culture comprend, par exemple :
Des habitudes et préférences dans des domaines comme la manière
d'élever des enfants, la nourriture et la cuisine, les expressions et gestes
utilisés pour exprimer son opinion, les relations avec les autres dans la vie
familiale ou au travail, et la discipline que chacun s'impose – par exemple
pour faire des efforts ou aborder un problème complexe ;
Des valeurs comme les canons de beauté et les critères d'honnêteté ;
Des croyances en matière de médecine, de cosmologie, de religion et de vie
après la mort ;
Des idéologies et une éthique en matière d'économie ou de politique, etc.
La culture d'un groupe humain est en rapport avec l'ethnie, définie par son
héritage génétique et socioculturel (en particulier la langue), l'espace
géographique et la conscience de ses membres d'appartenir à un même groupe.
Au niveau d'une personne, la culture (l'acquis) résulte de celle de son groupe,
qui lui a transmis ses valeurs, croyances et coutumes, ainsi que des
connaissances et expériences issues de sa propre vie.
Mais la culture d'une personne est sans rapport avec sa couleur de peau ou
d'autres caractéristiques provenant de sa naissance : c'est une caractéristique
transmise par la vie en société.
Une civilisation est définie par une culture, une société (institutions, législation,
modèle économique, etc.) et des réalisations (infrastructures, sciences et
techniques, architecture et autres arts, etc.).
Cyclope
Voir Critique des cyclopes qui considèrent la philosophie comme superflue.
Data
Nom collectif : informations, données.
267
K520 – "Les réalités contiennent les data et, pour ainsi dire, la matière ou le contenu
transcendantal de la possibilité et de la détermination intégrale de toutes choses."
Déclarations
Voir Déclarations.
Déduction métaphysique
C'est le nom donné par Kant au 1er chapitre de l'Analytique des concepts (K154) :
Du fil conducteur permettant de découvrir tous les concepts purs de l'entendement.
Déduction transcendantale
C'est une justification de l'application de concepts a priori à des objets de
l'expérience.
K170 - "J'appelle […] l'explication de la manière dont des concepts peuvent se
rapporter a priori à des objets leur déduction transcendantale, et je la distingue de la
déduction empirique, laquelle montre de quelle façon un concept est acquis par
expérience et par réflexion sur celle-ci, et ne concerne donc pas la légitimité de ce
concept, mais le fait d'où procède sa possession." C'est par déduction
transcendantale que les concepts d'espace, temps, et catégories se rapportent a
priori aux objets.
268
la représentation (indépendante de la forme du divers de l'intuition) résulte d'une
synthèse de l'appréhension, c'est-à-dire de la manière même dont l'esprit fonctionne.
Dans cette première synthèse, en faisant abstraction de la forme (le temps) dans le
phénomène du gel, il reste une condition a priori : la cause du passage de l'eau de
l'état liquide à l'état solide ; mon esprit fait donc une synthèse transcendantale en
générant un concept pur de catégorie de relation, la causalité. Cette seconde
synthèse est une synthèse de l'aperception, qui présuppose la synthèse de l'intuition
précédente.
Définition
Voir Discipline de la raison pure dogmatique : des définitions.
Définition génétique
Voir Définition génétique.
Degré
Chez Kant le degré d'une sensation est son intensité perçue, toute perception étant
accompagnée d'une sensation :
K242 – "La perception est la conscience empirique, c'est-à-dire une conscience
dans laquelle intervient en même temps une sensation."
269
Kant associe le degré de la sensation d'un objet à une réalité :
A un degré zéro correspond une absence de réalité, une inexistence :
ce qui ne se perçoit pas n'existe pas ;
A un degré non-nul correspond une existence perçue plus ou moins
intensément.
Le degré est indépendant de la grandeur associée à une dimension d'espace ou
de temps, car la sensation n'est pas une intuition (qui a une durée de temps, et
souvent aussi une étendue d'espace, grandeurs non-nulles). C'est pourquoi le
degré est mesuré par une intensité, pas par une durée ou une étendue.
Voir :
K242 - "Dans tous les phénomènes, le réel, qui est un objet de la sensation,
possède une grandeur intensive, c'est-à-dire un degré."
K251 – "Ainsi pourrai-je […] avec à peu près deux cent mille fois la clarté de la
Lune composer et déterminer a priori, c'est-à-dire construire, le degré des
sensations suscitées par la lumière du Soleil."
K242-K243 – "…de la conscience empirique à la conscience pure, un
changement s'accomplissant par degrés est possible en tant que le réel de la
première disparaît totalement, et qu'il ne reste qu'une conscience simplement
formelle (a priori) du divers dans l'espace et le temps..."
Cette affirmation est, hélas, fausse : voir Continuité de tous les changements et
Continuum.
Déisme - Déiste
Voir Définitions : déiste, théiste (K553).
Délire
Substantif (psychologie) : altération profonde du psychisme et de la personnalité,
parfois avec abolition de la conscience, caractérisée par de fausses interprétations
ou de fausses perceptions.
Dans l'intuition : le sujet admet comme réelle et vraie une idée fausse, sans
vérification ;
Dans l'imagination : le sujet construit un monde d'événements et de situations
erronées ;
Dans l'interprétation : le sujet donne une fausse signification à un fait réel.
Démonstration
Voir Discipline de la raison pure dogmatique : des démonstrations.
Dépendance
270
Avec l'idée dominante de causalité : fait d'être conditionné, d'être déterminé par
quelque chose.
K355 – "On voit aisément que la raison pure n'a pas d'autre but que l'absolue totalité
de la synthèse du côté des conditions (que ce soit d'inhérence, de dépendance ou de
concurrence) et qu'elle n'a pas à se préoccuper de la complétude absolue du côté du
conditionné."
Dérivation physiologique
Voir Déductions transcendantale, empirique et physiologique.
Définition
La déterminabilité du concept d'un objet est sa possibilité de détermination.
271
Conditionné et inconditionné d'un objet déterminé
L'ensemble des prédicats effectivement attribués à un objet par sa connaissance
dans un contexte donné est son conditionné, l'ensemble des prédicats possibles
étant son inconditionné. Le conditionné peut provenir de l'intuition, de l'entendement
et de la raison.
Détermination
Substantif – 2 significations :
1. Définition ou loi établissant une existence ; cette définition contient au moins une
condition d'existence de l'objet. Exemples :
K255 - "…dans tous les phénomènes [qui évoluent], il y a quelque chose de
permanent [la substance] par rapport auquel ce qui change n'est rien d'autre
qu'une détermination de son existence."
Détermination dans le temps
Un phénomène ayant un commencement et une fin, il n'existe qu'entre ces deux
instants : son existence est alors déterminée (définie) par ce qui a changé entre
« avant le commencement » et « après la fin ».
K255 – "…si ce que l'on veut, dans le phénomène, nommer substance doit être le
substrat véritable de toute détermination temporelle, il faut que toute existence,
aussi bien dans le passé que dans le futur, ne puisse trouver que là et
uniquement là ses déterminations.
Détermination et expérience d'un phénomène : état à un instant donné
L'expérience effective d'un phénomène attribue à une intuition un caractère
déterminé qui en fait une connaissance empirique ; la faculté mise en œuvre est
la synthèse de l'entendement. Cette détermination est la première étape d'une
éventuelle compréhension plus complète.
Une détermination d'un phénomène est son état à un instant donné ; chacun des
prédicats (informations) qui le décrivent a alors une valeur précise. La
représentation mentale du phénomène à cet instant-là est un certain état du
cerveau (neurones et leurs interconnexions).
Voir :
Prédicats d'une détermination : informations, conditionné, inconditionné :
Déterminabilité d'un objet par un concept ;
Risque d'erreur : Je ne peux pas voir tout ce qui est possible ;
L'impossible détermination de l'objet réel d'où provient une expérience.
272
2. L'un des 3 rapports de présence dans le temps (permanence, succession et
simultanéité). Ce rapport constitue une détermination de l'objet, détermination
dont le caractère contingent la fait qualifier d'accident.
K256 – "Les déterminations d'une substance qui ne sont que des modes
particuliers de son existence s'appellent accidents. Elles sont toujours réelles,
puisqu'elles concernent l'existence de la substance…"
273
Exemple : je tiens une pierre dans ma main ;
- Pour qu'elle tombe je dois la lâcher, condition nécessaire ;
- Si je la lâche elle tombe, condition suffisante.
Dans certains cas favorables, le postulat de causalité répond aux besoins de
la pensée rationnelle de comprendre et de prévoir :
- La condition nécessaire permet d'expliquer au moins en partie une
constatation (évolution ou situation), en remontant le temps jusqu'à sa
cause ;
- La condition suffisante permet de prévoir une conséquence, en suivant
le temps vers l'avenir depuis sa cause : l'évolution est déclenchée à
coup sûr.
Le postulat de causalité fait partie des principes de l'entendement :
K647 – "Si ce sont des principes de l'entendement (par exemple, celui de la
causalité)…"
Ce postulat est utilisé si spontanément qu'on fait parfois l'erreur de
considérer la (loi de) causalité comme un principe de la raison en général
(voir Idées de la raison pure (usage régulateur des) ).
Or il n'y a de causalité que pour les phénomènes (cause efficace, appelée
aussi efficiente ou suffisante), les causes matérielle, finale et formelle n'étant
pas soumises à une loi naturelle.
K632 – Comme Kant, le philosophe écossais David Hume [40] a constaté
que le principe de causalité n'est pas un principe d'usage général de la
raison : il ne peut donc aller au-delà de l'empirique (il ne s'applique qu'aux
objets de l'expérience).
Voir ici :
Validité du principe de causalité – Impossibilité d'une preuve de
l'existence de Dieu ;
Le principe régulateur de la raison qu'est l'Idéal de l'être suprême.
La conséquence physique de la cause est une évolution continue qui suit
une loi de la nature aussi longtemps qu'elle s'applique, pas une situation
finale à un ou plusieurs instants arbitraires distincts.
La règle de stabilité : les mêmes causes produisent toujours les mêmes
effets (reproductibilité : dans la nature les évolutions obéissent à des lois).
Les lois physiques dont l'application est déclenchée par une cause donnée
sont stables, elles sont les mêmes en tous lieux et à tout instant.
Autre nom du déterminisme scientifique, donné par Kant comme par
Schopenhauer [29] : Principe de raison suffisante. Voir : Nécessité de postuler le
déterminisme pour rendre possible la représentation d'objets.
Le déterminisme statistique (Daniel Martin [12]), affirmant que dans certains cas
l'état à un instant t d'un système qui évolue est un élément d'un ensemble
prévisible choisi selon une probabilité statistique calculable. Exemples :
Le résultat d'un lancer de dé est un nombre choisi avec une probabilité de
1/6 dans l'ensemble {1, 2, 3, 4, 5, 6}.
En Mécanique quantique, l'état d'un système (position, vitesse…) est un
élément d'un ensemble, fini ou infini, de solutions de l'équation d'évolution
de Schrödinger [64].
274
Le déterminisme étendu (Daniel Martin) regroupant le déterminisme scientifique
et le déterminisme statistique pour régir toutes les lois d'évolution de la physique.
Ont utilisé une notion voisine : Schopenhauer (la volonté de vivre) [36], et Nietzsche
[48] (la volonté de puissance) [34] ; ces notions sont des formes de déterminisme.
Causalité étendue
Certains philosophes appellent la causalité ci-dessus cause efficace ou cause
efficiente ; Schopenhauer l'appelle Principe de raison suffisante du devenir. Mais
parce qu'elle définit la conséquence d'une situation-cause comme une évolution (au
lieu d'une situation-conséquence) nous l'appellerons causalité étendue.
Une évolution prévisible est régie par une loi de causalité : elle est donc déterministe.
Mais réciproquement, une loi d'évolution déterministe n'entraîne pas nécessairement
la prévisibilité des évolutions ; par exemple :
En mécanique des fluides elle peut entraîner des raisonnements trop complexes,
ou sans solution mathématique calculable ;
En astronomie les orbites des astéroïdes ne peuvent être prédites trop
longtemps à l'avance, faute de données initiales de précision infinie ;
Des calculs de nombres comme et racine de 2, faisables avec une précision
arbitraire, sont donc déterministes ; pourtant, connaissant leurs N premières
décimales, on ne sait en déduire la N+1ème pour aucun N.
Bien qu'il y ait des phénomènes physiques à évolution non calculable par
l'homme, la nature n'hésite jamais : tout état non figé d'un système entraîne
automatiquement et immédiatement son évolution naturelle. La nature, elle,
« sait ce qu'elle doit faire ».
Pour plus de détails, voir [12] et 2 – Liberté d'échapper aux lois de la nature, hasard
et prédictibilité.
K194 - "L'ordre et la régularité [qualité de ce qui est conforme à une loi, à une règle],
c'est donc nous-mêmes qui les introduisons dans les phénomènes que nous
appelons nature, et nous ne pourrions les y trouver si nous ou la nature de notre
esprit ne les y avaient mis originairement." Voir Principe de la primauté de la
connaissance sur les objets (doctrine).
275
Kant rappelle là que les lois de la nature sont en fait des modèles de comportement,
introduits par l'homme pour comprendre les phénomènes dont nous sommes
conscients et prévoir leur évolution, régie par le déterminisme.
"L'ordre" dont Kant parle signifie absence de hasard, tout phénomène étant
déterministe, c'est-à-dire régi par des lois : la nature ne fait jamais n'importe quoi.
La "régularité" est la stabilité des lois de la nature, le fait qu'elles ne changent
pas avec le temps qui passe, d'un lieu à un autre, ou d'un concours de circonstances
à un autre de son domaine d'application.
K285 – Toute situation (état d'un système) résulte nécessairement d'un phénomène
(cause physique et perceptible) suivant les lois de causalité de la nature. Le seul
critère de nécessité d'un état particulier est la possibilité d'une expérience.
Voir aussi Une chose en général ne peut être une cause, concept réservé à
l'expérience.
Kant : tous les phénomènes de la nature sont déterministes, même ceux du vivant
Pour Kant, non seulement les phénomènes naturels sont déterministes, sans hasard,
mais même la pensée de l'homme et ses sens (fonctionnant exclusivement avec des
mécanismes physiologiques, donc soumis aux lois de la physique) ne commettent
pas d'erreur :
(Citation de K329)
"Aucune force de la nature ne peut par elle-même s'écarter de ses propres lois.
Raison pour laquelle ni l'entendement par lui-même (sans subir une influence
venue d'une autre cause) ni les sens par eux-mêmes ne commettent d'erreur.
L'entendement ne le peut pas parce que, s'il agit simplement conformément
à ses lois, l'effet (le jugement) doit nécessairement s'accorder avec ces lois.
276
Or, c'est dans l'accord avec les lois de l'entendement que consiste la
dimension formelle de la vérité.
Dans l'intuition des sens il n'y a absolument aucun jugement, ni un jugement
vrai, ni un jugement faux."
(Fin de citation)
277
C'est l'imagination qui perturbe la synthèse de l'entendement
C'est là une accusation de la sensibilité qui n'explique pas comment elle perturbe la
synthèse de l'entendement. Or cette perturbation ne peut résulter que d'un
détournement de la conscience de soi, dont l'unité assure le fonctionnement correct
de la synthèse. Ce détournement ne peut provenir que d'une seule fonction,
l'imagination :
K330 – "…l'apparence empirique (par exemple de l'illusion d'optique) qui se
produit à l'occasion de l'usage empirique des règles, au demeurant justes, de
l'entendement et à travers laquelle la faculté de juger est égarée par l'influence
de l'imagination ;"
Voir :
Apparence – Apparence empirique - De l'apparence transcendantale.
Cause et causalité ;
Nécessité des choses (postulat) ;
Règles.
Kant postule là que les lois d'évolution de la nature relèvent du déterminisme et que
l'homme peut les connaître, donc prévoir les évolutions ; il n'y a donc ni hasard ni
intervention de cause surnaturelle. Le présent est déterminé par le passé et
détermine l'avenir. C'est la vision de l'Univers partagée par Newton [46] et Laplace
[47], qui ne sera remise en cause que par la Physique quantique et la Relativité.
278
Principe de conservation de l'information d'un système fermé
Le paradigme de la causalité étendue du déterminisme étendu est conforme au
principe de la conservation de l'information d'un système fermé, qui exige ce qui suit.
Etat d'un système fermé à un instant donné
A un instant donné, l'état (la situation) d'un système fermé est complètement
décrit par des variables de composition (ensemble des éléments qui le
constituent), de forme, de position, de mouvement, d'interaction, de masse, de
charge électrique, d'impulsion, de spin, etc. Les variables externes décrivent la
relation du système à son environnement ; exemples : sa masse et sa charge
électrique. D'autres variables sont internes, comme les forces de liaison entre
ses divers composants. Certaines variables sont de type numérique, d'autres de
type vectoriel, d'autres encore de type booléen (vrai/faux, on dit aussi logique),
etc.
Information descriptive d'un système à un instant donné
Une certaine information est contenue dans les variables de son état, données
nécessaires pour le reconstruire théoriquement si on disposait de l'énergie
nécessaire : on connaîtrait chaque atome avec les valeurs de ses variables
d'énergie, de position et de déplacement, les champs de force et rayonnements
en chaque point du système, etc.
L'équation universelle d'évolution de Schrödinger
Or l'évolution dans le temps et l'espace de l'état physique de tout système, petit
ou grand, est régie par l'équation de Schrödinger [64], équation fondamentale de
la Mécanique quantique. Cette équation déterministe est symétrique par rapport
au temps : lorsqu'à partir d'un état B d'un système à l'instant t2 on inverse le sens
d'écoulement du temps (comme si on « passait le film des événements à
l'envers »), on retrouve à un instant t1 qui précède t2 l'état A qu'il avait.
Cela ne veut pas dire qu'on peut changer le sens de l'écoulement du temps dans
l'Univers physique (notamment parce que la thermodynamique [119] l'interdit),
mais seulement qu'on peut reconstituer théoriquement l'information qui décrit un
état quelconque du passé d'un système fermé. C'est une conséquence de
l'existence d'une loi d'évolution de la nature, postulée réversible et stable dans le
temps par le déterminisme.
Conservation de l'information d'un système fermé
Cet état reconstitué avec l'équation de Schrödinger est unique : il n'y a eu, à
l'instant t1<t2 qu'un seul état, A, qui est devenu B ; la chaîne de causalité de
l'évolution passée du système est unique, conformément au postulat de
causalité. Donc la loi prédit que tout se passe comme si la nature conservait
l'information de tous ses états passés : c'est une conséquence de la réversibilité
temporelle de l'équation universelle d'évolution de Schrödinger.
La conservation de l'information est une propriété assez générale
Conséquence : toutes les équations des lois physiques de la mécanique
macroscopique (comme les lois de Newton [115]), de la mécanique quantique,
de l'électromagnétisme, de la force nucléaire (interaction forte) et de la relativité
(gravitation) sont réversibles par rapport au temps - à de rarissimes exceptions
près non encore expliquées :
279
Lorsqu'un corps céleste disparaît dans un trou noir, l'information qui le
décrivait disparaît peut-être (si elle est conservée, on n'est pas encore sûr
de l'endroit, peut-être à la surface de l'horizon du trou noir) ;
La décomposition d'un méson K0 (force faible) en mésons + et - est
irréversible, mais on ne sait pas pourquoi ;
L'expansion de l'Univers, également irréversible et en plus accélérée, est
due à un champ de force encore inconnu.
L'Univers a un nombre fini d'états
Ayant (à un instant donné) un nombre immense, mais fini, d'atomes et de
particules des forces électromagnétique, nucléaire et faible, l'Univers a un
nombre fini d'états d'énergie possibles, chacun décrit par une certaine quantité
totale finie d'information.
Le passage du temps n'altère pas cette quantité totale. Mais cette information
préservée peut être altérée par certaines évolutions physiques d'un système
(comme l'absorption d'une étoile par un trou noir) d'une manière telle qu'on ne
sache plus où elle est stockée, même si elle existe toujours.
Un système peut théoriquement revenir à un état antérieur, si la
thermodynamique [119] le lui permet
Il existe une probabilité non nulle qu'un état donné de tous les atomes d'un
système se reconstitue spontanément, mais les calculs montrent que cela se
produirait pour la première fois au bout d'un temps qui se compte en milliers de
milliards de siècles : quand je renverse du café de ma tasse, la probabilité pour
qu'il y remonte tout seul est vraiment faible, même si on lui restitue l'énergie
thermique dispersée par le renversement !
280
interférence qui n'est pas régie par une loi physique particulière mais dépend de
chaque concours de circonstances. C'est pourquoi l'état unique final observé ne
peut être prévu : on sait seulement qu'il correspond à une des valeurs propres
de l'ensemble des états superposés.
Dans le sens présent vers passé, la chaîne de causalité reste unique parce que
chaque superposition d'états quantiques n'a qu'un seul prédécesseur.
Chacun peut s'en convaincre en se demandant s'il "a conscience, d'une façon sûre et
immédiate, d'avoir une faculté qui permette de surmonter par le ferme propos tous
les mobiles, quelque grands qu'ils soient, incitant à la transgression. Chacun devra
avouer qu'il ne sait pas si, tel cas se présentant, il ne faiblirait pas dans sa résolution.
Et pourtant le devoir commande inconditionnellement : tu demeureras fidèle à la loi ;
et l'homme a raison d'en conclure qu'il doit pouvoir agir ainsi et que par conséquent
sa volonté est libre."
[L'homme a le pouvoir d'agir dans le respect de la loi morale, donc sa volonté de
le faire est libre.]
"Ceux qui prétendent faussement que cette propriété impénétrable est tout à fait
compréhensible forgent une illusion avec le mot déterminisme (en ce qui regarde la
thèse de la détermination de la volonté par des raisons internes suffisantes), comme
si la difficulté consistait à concilier le déterminisme et la liberté, ce à quoi personne
ne pense ;
[La liberté de la volonté est un pouvoir que l'homme ne peut s'expliquer. S'il
prétend le contraire en attribuant la détermination de la volonté à une faculté de
son esprit, il se trompe : le problème n'est pas de concilier déterminisme des
fonctions de l'esprit (logique de leur fonctionnement, notamment dans
l'aperception) et liberté (par rapport aux lois de la nature).
Kant définit ici le déterminisme comme une cause suffisante, une logique de
fonctionnement de l'esprit qu'on croirait à tort capable de régir sa volonté, alors
que celle-ci est régie par une loi morale supérieure à toute logique de
fonctionnement.]
281
[Kant introduit ici une étape préliminaire du déterminisme, le prédéterminisme,
cause efficiente nécessaire antérieure à l'action déterministe, pour souligner
l'antinomie de cette étape avec la liberté. Il propose la solution suivante basée
sur un pouvoir divin :]
"(Il n'y a aucune difficulté à concilier le concept de la liberté avec l'idée de Dieu en
tant qu'Etre nécessaire, parce que la liberté ne consiste pas dans la contingence de
l'action (en vertu de laquelle cette action n'est pas déterminée par des motifs), c'est-
à-dire dans l'indéterminisme (en vertu duquel il faudrait que Dieu pût également
accomplir le bien ou le mal pour que son action dût être appelée libre), mais bien
dans la spontanéité absolue qui seule est en péril avec le prédéterminisme où la
raison déterminante de l'action est dans le temps passé, si bien par suite
qu'actuellement l'action n'est plus en mon pouvoir, mais dans la main de la nature, et
que je suis irrésistiblement déterminé : or, comme en Dieu on ne peut concevoir
aucune succession de temps, cette difficulté tombe alors d'elle-même.)"
(Fin de citation)
Point de vue opposé sur ce libre arbitre humain : [123] - Les 3 déterminants des
valeurs selon le matérialisme.
Devoir
Chez Kant
Quand Kant écrit « doit » il veut parfois dire « devrait » :
K504 – "Nous ne pouvons pas davantage demander ce qui doit arriver dans la
nature [ce que la nature a le devoir moral de faire] que demander quelles
propriétés un cercle doit avoir [les propriétés qu'un cercle a le devoir moral
d'avoir] ; mais ce que nous pouvons demander, c'est uniquement ce qui arrive
dans la nature ou quelles propriétés possède le cercle."
K504 – Le "devoir exprime ainsi une action possible, dont le fondement n'est rien
d'autre qu'un simple concept, alors qu'au contraire le fondement d'une simple action
naturelle ne peut jamais être qu'un phénomène."
282
Le devoir en tant qu'impératif catégorique
La nature raisonnable existe comme fin en soi : d'où un impératif catégorique
(Citation de [108] page 108)
"S'il doit donc y avoir un principe pratique suprême et, vis-à-vis de la volonté
humaine un impératif catégorique, il faut que ce soit quelque chose de tel qu'à partir
de la représentation de ce qui est nécessairement une fin pour chacun (parce que
c'est une fin en soi), il définisse un principe objectif de la volonté, que par conséquent
il puisse servir de loi pratique universelle.
Le fondement de ce principe est […] : la nature raisonnable existe comme fin en soi.
[108] page 108 - "L'impératif pratique sera donc le suivant : agis de façon telle que tu
traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre,
toujours en même temps comme fin, jamais simplement comme moyen."
Voir Exemples.
283
Le devoir exprime une sorte de nécessité et de liaison avec des fondements qui ne
se présente nulle part ailleurs dans la nature. [Evident]
L'entendement ne peut connaître de cette dernière [de la nature] que ce qui est
existant, l'a été ou le sera. [Evident]
Il est impossible que quelque chose, en elle [dans la nature], doive être autrement
qu'il n'est effectivement dans tous ces rapports de temps ;
[« Doive être » indique une obligation morale, un devoir sans rapport avec une
nécessité naturelle, la nature n'ayant pas d'obligation morale]
il faut même dire que le devoir-être, quand on a simplement devant les yeux le cours
de la nature, n'a absolument pas la moindre signification. [Evident]
Nous ne pouvons pas davantage demander ce qui doit arriver dans la nature [ce que
la nature a le devoir moral de faire] que demander quelles propriétés un cercle doit
avoir [les propriétés qu'un cercle a le devoir moral d'avoir] ; mais ce que nous
pouvons demander, c'est uniquement ce qui arrive dans la nature ou quelles
propriétés possède le cercle.
Ce devoir exprime ainsi une action possible [contingente], dont le fondement n'est
rien d'autre qu'un simple concept, alors qu'au contraire le fondement d'une simple
action naturelle ne peut jamais être qu'un phénomène."
[Par définition des concepts d'action, de devoir et de phénomène]
(Fin de citation)
Voir aussi : « Doit » : différence entre usage théorique de la raison et usage moral.
Devoir-être
Le devoir-être est une obligation morale d'avoir une certaine qualité.
[133] §76 page 399 – "S'il est nécessaire que les lois morales soient représentées
comme des commandements (et les actions qui s'y conforment comme des devoirs),
et si la raison exprime cette nécessité, non par un être (avoir lieu), mais par un
devoir-être, cela procède uniquement de la constitution subjective de notre pouvoir
pratique."
Interprétation : les lois morales devant exister dans l'esprit sous forme de
commandements, la raison exprime cette obligation par un devoir-être (avoir une
certaine qualité) parce que notre pouvoir pratique détermine ainsi notre volonté.
284
Art d'argumenter en dialoguant, notamment à partir des opinions de
l'interlocuteur ou d'opinions admises (Socrate [50], Platon [49], Aristote [43]).
Caractère d'une philosophie qui fait du dynamisme, du mouvement par
contradiction ou opposition, le principe d'évolution du monde et de la pensée
humaine ; exemple : matérialisme dialectique de Karl Marx [52].
Chez Kant
Adjectif : dialectique qualifie une erreur
Il y a des concepts et des principes a priori dont l'usage est réservé à l'expérience
interprétée par l'intuition. Lorsque l'entendement en crée pour définir des choses en
soi (représentant donc une classe d'objets qui n'est donnée par aucune intuition), il
fait une erreur dialectique.
Kant utilise l'adjectif dialectique dans le même sens : une apparence dialectique est
une apparence trompeuse, un raisonnement dialectique est un raisonnement faux.
Substantif
(Citation de [165] page 29)
"La dialectique signifie d'abord l'art de l'usage pur de l'entendement appliqué aux
concepts abstraits, séparés de tout sensible. De là, les nombreuses louanges de
cet art chez les Anciens.
Dans la suite, comme ces philosophes qui rejetaient complètement le
témoignage des sens furent nécessairement conduits par cette affirmation à
tomber dans maintes subtilités, la dialectique se dégrada en art de soutenir et de
combattre toute proposition. Et elle devint ainsi un simple exercice à l'usage des
Sophistes qui prétendaient raisonner sur tout et s'appliquaient à donner à
l'apparence le semblant du vrai et à rendre noir le blanc."
(Fin de citation)
Raisonnement illusoire, logique de l'apparence ;
Etude et critique de cette illusion :
K353 – [La dialectique logique] "fait abstraction de tout contenu de la
connaissance et se borne exclusivement à dévoiler la fausse apparence inscrite
dans la forme des raisonnements…"
285
[Un raisonnement sur de pures abstractions ne peut créer que des abstractions,
car la seule manière d'obtenir des connaissances d'objets ou phénomènes
physiques est l'expérience.]
286
Dans la mesure, en effet, où elle ne nous apporte aucun enseignement sur le
contenu de la connaissance, mais nous enseigne seulement les conditions formelles
de l'accord avec l'entendement,
lesquelles sont au reste, vis-à-vis des objets, totalement indifférentes,
K221 - "La raison, dans ses tentatives pour établir quelque chose a priori sur des
objets et élargir la connaissance au-delà des limites d'une expérience possible, est
entièrement et pleinement dialectique, et ses affirmations [sont] illusoires…"
Dialectique transcendantale
Dans la Critique de la raison pure, la 2ème division de la Logique transcendantale est
la Dialectique transcendantale (pages K329 et suivantes).
287
ou le phénomène a toujours existé (et n'a donc pas été créé),
ou l'écoulement du temps a commencé avec ce phénomène, comme
l'Univers avec le Big Bang.
(La cause absolue au début d'une chaîne de causalité est aussi appelée cause
première, cause initiale ou cause ultime.)
Voir Régression à l'infini.)
K480 – "La Dialectique transcendantale vient donc à l'appui, non pas du tout du
scepticisme, mais bien de la méthode sceptique, laquelle peut y montrer un exemple
de sa grande utilité si l'on laisse les arguments de la raison, dans leur plus grande
liberté, se formuler les uns contre les autres : bien qu'ils ne fournissent finalement
pas ce que l'on cherchait [une conclusion claire], ils nous procureront toujours
quelque chose d'utile et d'exploitable pour la rectification de nos jugements."
[Lorsque à partir d'un même concept (exemple : la chose en soi « Le monde en
tant qu'ensemble de tous les phénomènes ») on peut faire deux raisonnements
antinomiques (exemple : « Il est fini dans le temps et dans l'espace » ou « Il est
infini dans le temps et dans l'espace »), au lieu de les rejeter il faut conclure que
le concept commun n'existe pas.]
288
La Critique utilise en réalité deux types de preuves de ce qu'elle avance quand elle
soutient que « les concepts sans intuitions sont vides » :
Le premier type de preuve fait simplement appel à la conscience d'impossibilité.
Pour fonder l'objectivité des propositions scientifiques, il est impossible de ne
pas poser :
Les deux intuitions [temps et espace] ;
Les douze catégories ;
La schématisation des concepts, etc.,
qui en sont les conditions de possibilité - ce sans quoi le fait même de
l'objectivité ne peut être pensé. C'est là, aux yeux de Kant, la preuve la plus
naturelle de ce qu'il avance, même si c'est en soi la preuve la moins
contraignante.
Un second type de preuve, dont les postkantiens (à l'exception de Fichte [122])
n'ont pas perçu la fécondité, vient toutefois renforcer le premier, de façon pour
ainsi dire « expérimentale » : si la raison nie la finitude et se figure pouvoir
utiliser les concepts sans intuitions (comme le fait la métaphysique dogmatique),
le discours produit est purement dialectique et se perd notamment dans les
antinomies ;
en ce sens, les antinomies, donnant le spectacle de l'impuissance de la raison
quand elle croit pouvoir penser par purs concepts, sont la vérification de la
théorie de l'intuition pure.
Il s'agit là, certes, d'une preuve indirecte (apagogique), non déductive, mais elle
est à la fois plus fidèle au contenu du criticisme que la démarche déductive (elle
n'implique pas le projet de clore le système) et plus contraignante que le simple
appel à la conscience d'impossibilité."
(Fin de citation)
289
K575 – "On ne peut se servir avec sûreté d'un concept a priori sans avoir mis en
œuvre sa déduction transcendantale. Les Idées de la raison pure n'autorisent, il est
vrai, nulle déduction du type de celle des catégories ; si elles doivent toutefois avoir
au moins quelque validité objective, même de caractère indéterminé, et ne pas
représenter simplement de vains êtres de raison (entia rationis ratiocinantis), une
déduction doit absolument en être possible…"
290
[Admettre provisoirement ces Idées comme réalités objectives, êtres de raison]
Or il n'y a pas le moindre obstacle qui nous empêche d'admettre aussi ces Idées
comme objectives et hypostasiées, sauf pour l'Idée cosmologique, où la raison se
heurte à une antinomie quand elle veut la mettre en œuvre (l'Idée psychologique et
l'idée théologique ne contiennent rien de tel).
[…]
[La réalité de ces êtres] doit avoir seulement la valeur d'un schème du principe
régulateur de l'unité systématique de toute connaissance naturelle : par conséquent,
c'est uniquement comme des analogues de choses réelles, et non pas comme de
telles choses réelles en soi, qu'ils doivent être pris pour fondement.
[En admettant] donc de tels êtres idéaux, nous n'étendons pas à proprement parler
notre connaissance au-delà des objets de l'expérience possible, mais seulement
l'unité empirique de cette dernière à travers l'unité systématique dont l'Idée nous
procure le schème.
[…]
[Concept résultant : Dieu transcendantal, origine de l'unité de toute réalité empirique]
[K577] Ainsi le concept transcendantal, le seul qui soit déterminé, que la raison
simplement spéculative nous donne de Dieu est-il, au sens le plus précis du terme,
un concept déiste. Autrement dit : la raison ne nous procure jamais la validité
objective d'un tel concept, mais seulement l'Idée de quelque chose sur quoi toute
réalité empirique fonde sa suprême et nécessaire unité, et que nous ne pouvons
penser autrement que selon l'analogie avec une substance effectivement réelle qui
serait, selon des lois rationnelles, la cause de toutes choses, pour autant que nous
entreprenions de le penser sans réserve comme un objet particulier et que nous ne
préférions pas, en nous contentant de la simple Idée du principe régulateur de la
raison, laisser de côté, comme dépassant l'entendement humain, l'achèvement de
toutes les conditions de la pensée."
(Fin de citation)
Luc Ferry résume cela dans [158] page 37 : "La thèse de Kant est au fond la
suivante : l'idée de Dieu n'a, d'un point de vue théorique, aucune objectivité, comme
le montre suffisamment la critique de l'argument ontologique. Sa seule signification
véritable est de nous inviter, en tant que scientifiques (et non plus en tant que
métaphysiciens), à regarder l'univers comme si, créé par un auteur intelligent, il
formait un tout cohérent et systématique."
Compléments :
Justification du concept transcendantal d'un Créateur ;
Arguments de Kant pour une théologie basée sur un Dieu transcendantal.
291
Commentaires philosophiques sur ce Dieu transcendantal
(Citation de K579)
"Si j'admets un être divin, je ne possède certes pas le moindre concept de la
possibilité interne de sa suprême perfection ni de la nécessité de son existence,
mais […] je peux satisfaire à toutes les autres questions qui concernent le contingent
et procurer à la raison la plus parfaite satisfaction concernant la plus grande unité
qu'elle puisse rechercher dans son usage empirique, mais non pas relativement à
cette supposition elle-même ;
ce qui prouve que c'est son intérêt spéculatif, et non pas sa capacité de pénétration
[révélation de la réalité], qui l'autorise à partir d'un point échappant si largement à sa
sphère [le sens interne], pour considérer de là ses objets comme appartenant à un
tout intégral [le monde, création divine]."
(Fin de citation)
[Un tel modèle convient pour des objets dans l'Univers, pas pour l'Univers lui-même]
Les concepts de la réalité, de la substance, de la causalité, même ceux de la
nécessité dans l'existence, n'ont, en dehors de l'usage où ils rendent possible la
connaissance empirique d'un objet, absolument aucune signification qui pût
déterminer un quelconque objet. Ils peuvent donc certes être utilisés pour expliquer
la possibilité des choses dans le monde sensible, mais non pas la possibilité d'un
tout cosmologique lui-même, puisque ce principe d'explication devrait se situer en
dehors du monde et n'être nullement, par conséquent, l'objet d'une expérience
possible.
[J'attribue l'existence du monde à Dieu par souci d'unité de tous les phénomènes]
Cela dit, je peux néanmoins admettre un tel être incompréhensible, non pas certes
[comme existant physiquement] en soi, mais comme l'objet d'une simple Idée,
relativement au monde sensible."
(Fin de citation)
292
possède tout cela au degré le plus extrême de perfection, et comme cette Idée
repose uniquement sur ma raison, je pourrai penser cet être comme une raison
indépendante, cause de l'Univers au moyen des Idées de la plus grande harmonie et
de la plus grande unité possibles…"
La raison pure n'est en fait occupée que d'elle-même et ne peut même avoir d'autre
fonction, puisque ce ne sont pas les objets qui lui sont donnés en vue d'atteindre
l'unité du concept issu de l'expérience, mais les connaissances de l'entendement en
vue d'atteindre l'unité du concept issu de la raison, c'est-à-dire le rassemblement en
un seul principe.
L'unité rationnelle est l'unité du système, et cette unité systématique ne sert pas
objectivement à la raison de principe lui permettant de s'étendre à des objets, mais
elle lui sert subjectivement de maxime lui permettant de s'étendre à toute
connaissance empirique possible des objets.
[…]
L'assemblage systématique que la raison peut procurer à l'usage empirique de
l'entendement ne se borne pas à en favoriser l'extension, mais il en garantit aussi la
justesse ;
[…]
[L'unité systématique ne peut être pensée que si son Idée a un objet inaccessible à
l'expérience]
La raison ne peut toutefois penser cette unité systématique autrement qu'en donnant
en même temps à son Idée un objet, tel toutefois qu'il ne puisse être procuré par
aucune expérience ; car l'expérience ne donne jamais un exemple d'une unité
systématique parfaite.
[L'être objet de l'Idée est une pure abstraction, construite pour se voir attribuer tout le
contenu du monde]
Or, cet être de raison (ens rationis ratiocinatae) n'est assurément qu'une simple Idée
et il n'est donc pas admis absolument et en soi comme quelque chose
d'effectivement réel, mais c'est uniquement de façon problématique qu'il est pris pour
fondement (puisque nous ne pouvons l'atteindre par aucun concept de
l'entendement), afin d'envisager toute liaison entre les choses du monde sensible
comme si elles avaient leur fondement dans cet être de raison.
[Cet être n'est même pas supposé être le fondement du monde, qui reste inconnu]
On méconnaît la signification de cette Idée dès lors qu'on la tient pour l'affirmation ou
même simplement pour la supposition d'une chose effectivement réelle à laquelle on
voudrait assigner la fondation de la constitution systématique du monde ; bien plutôt
laisse-t-on entièrement non décidée, en fait, la question de savoir quelle est en soi la
nature de ce fondement qui se dérobe à nos concepts, et une Idée se trouve
simplement posée à titre de point de vue à partir duquel l'on peut élargir cette unité si
essentielle à la raison et si salutaire à l'entendement. Bref, cette chose
293
transcendantale est seulement le schème de ce principe régulateur par lequel la
raison, autant qu'elle le peut, étend l'unité systématique à toute expérience."
(Fin de citation)
(Citation de K582-K583)
"Je suis moi-même, considéré simplement comme nature pensante (âme), le premier
objet d'une telle Idée. Si je veux chercher les attributs avec lesquels un être pensant
existe en soi, il me faut interroger l'expérience, et je ne peux même pas appliquer, à
cet objet une quelconque des catégories si le schème ne m'en est pas donné dans
l'intuition sensible.
Reste que par là je ne parviens jamais à une unité systématique de tous les
phénomènes du sens interne. A la place, par conséquent, du concept issu de
l'expérience (à la place du concept de ce que l'âme est effectivement), qui ne peut
nous mener bien loin, la raison utilise le concept de l'unité empirique de tout penser,
et en concevant cette unité comme inconditionnée et comme originaire, elle fait de ce
concept un concept rationnel (Idée) d'une substance simple qui, en soi immuable
(personnellement identique), se trouve en relation de communauté avec d'autres
choses réelles extérieures à elle ; en un mot : elle en fait l'Idée d'une intelligence
simple subsistant par elle-même.
Mais, ce faisant, elle ne vise rien d'autre que des principes de l'unité systématique
dans l'explication des phénomènes de l'âme, permettant de considérer toutes les
déterminations comme inscrites dans un sujet unique, toutes les facultés, autant que
possible, comme dérivées d'une unique faculté fondamentale, tout changement
comme appartenant aux états par lesquels passe un seul et même être permanent,
et de représenter tous les phénomènes se produisant dans l'espace comme
entièrement distincts des opérations de la pensée. Cette simplicité de la substance,
etc., ne devrait être que le schème de ce principe régulateur, et il n'est nullement
supposé qu'elle constitue le fondement effectif des attributs de l'âme."
[…]
[Le sens interne n'a pas de rapport avec les lois de la nature]
Aucune des lois empiriques régissant les phénomènes corporels, qui sont d'une tout
autre espèce, ne viennent se mêler aux explications de ce qui appartient seulement
au sens interne ; on n'accorde plus de crédit à aucune des vaines hypothèses
portant sur la génération, la corruption et la palingénésie des âmes, etc. ; la
considération de cet objet du sens interne est donc entièrement pure et sans aucun
mélange d'attributs hétérogènes ;
[…]
[« La nature de l'âme est-elle spirituelle ? » est une question absurde]
A supposer en effet que je veuille aussi demander simplement si l'âme n'est pas en
soi de nature spirituelle, cette question n'aurait absolument aucun sens. Car, à
travers un tel concept, je ne mets pas simplement de côté la nature corporelle, mais
294
toute nature en général, c'est-à-dire tous les prédicats d'une quelconque expérience
possible, par conséquent toutes les conditions permettant de penser un objet pour un
tel concept, soit : ce qui seul pourtant autorise à dire que ce concept a un sens.
[La raison pure n'a donc à expliciter que la nature en général, avec toutes les
conditions applicables]
En ce sens, il ne nous reste rien d'autre pour la raison pure que la nature en général
et l'intégralité des conditions qui s'y déploient d'après quelque principe.
[L'objectif de totalité de la série des conditions de la régression des causes
naturelles doit être poursuivi sous forme de parcours illimité]
[Conclusion]
Les Idées cosmologiques ne sont rien que des principes régulateurs et sont loin de
poser, pour ainsi dire de façon constitutive, une totalité effectivement réelle de telles
séries."
295
(Fin de citation)
[Penser le concept d'un être ne donne pas le droit de croire qu'il existe]
L'objet de cette Idée, nous n'avons pas la moindre raison de l'admettre de façon
absolue (de le supposer en soi) ; qu'est-ce donc qui pourrait nous donner le pouvoir,
ou même simplement nous fournir le droit, de croire ou d'affirmer, simplement à partir
du concept que nous en avons, l'existence en soi d'un être possédant une perfection
suprême et absolument nécessaire dans sa nature, s'il n'y avait le monde par rapport
auquel seulement cette supposition peut être nécessaire ?
[Le besoin psychologique d'unité formelle incite à croire en une Intelligence suprême]
La suprême unité formelle, qui repose simplement sur des concepts de la raison, est
l'unité finalisée des choses, et l'intérêt spéculatif de la raison rend nécessaire de
considérer toute organisation dans le monde comme si elle était issue de l'intention
d'une raison suprême. Un tel principe, de fait, ouvre à notre raison, quand elle
s'applique au champ des expériences, des perspectives tout à fait nouvelles en vue
de relier les choses du monde selon des lois téléologiques et de parvenir ainsi à leur
plus grande unité systématique. La supposition d'une intelligence suprême conçue
comme la cause unique de l'univers, mais ne se trouvant en vérité que dans l'Idée,
peut donc toujours être utile à la raison et ne saurait en tout cas jamais lui nuire."
(Fin de citation)
L'unité formelle téléologique est une supposition qui peut être utile mais pas nuisible
(Citation de K585-K586)
"Si, à propos de la configuration de la Terre (ronde, mais cependant légèrement
aplatie), des montagnes et des mers, etc., nous admettons par avance l'existence
296
d'intentions parfaitement sages d'un auteur suprême, nous pouvons en suivant cette
voie faire une foule de découvertes.
Remarque
En comparant une cause efficiente avec une cause finale on compare une nécessité
inéluctable avec une volonté humaine essentiellement libre. L'esprit humain peut
associer n'importe quoi avec n'importe quoi, d'après des critères qui peuvent même
être fantaisistes, se créant alors des désirs, des craintes et des finalités
imprévisibles. C'est pourquoi parcourir une telle finalité dans les deux sens est
souvent possible, alors que le parcours d'une chaîne de causalité efficiente ne peut
être que descendant.
297
Kant énonce cela en limitant les raisonnements rationnels à l'enrichissement de
l'expérience et l'Idée à des usages régulateurs :
K586-K587 : "Si en revanche nous omettons de restreindre l'Idée à l'usage
simplement régulateur, la raison est conduite à s'égarer de multiples manières,
dans la mesure où elle abandonne le sol de l'expérience, qui doit pourtant
contenir les indications jalonnant son parcours, et s'aventure au-delà de ce sol
dans l'incompréhensible et dans l'impénétrable, sur des hauteurs où elle est
nécessairement en proie au vertige dès lors qu'elle s'aperçoit, en adoptant ce
point de vue, totalement coupée de tout usage susceptible de s'accorder avec
l'expérience."
1er exemple de défaillance de la raison qui ignore ces limites : la raison paresseuse
La raison paresseuse
(Citation de K587)
"La première défaillance résultant du fait que l'on utilise l'Idée d'un être suprême, non
pas de façon simplement régulatrice, mais (ce qui est contraire à la nature d'une
Idée) de manière constitutive, correspond à la raison paresseuse (ignava ratio).
C'est pourquoi même l'Idée psychologique, quand elle est utilisée comme un principe
constitutif pour l'explication des phénomènes de notre âme, et ensuite pour élargir
notre connaissance de ce sujet encore au-delà de toute expérience (quant à son état
après la mort), est assurément d'une grande commodité pour la raison, mais en
même temps elle corrompt et ruine de fond en comble tout usage naturel de celle-ci
selon la directive fournie par les expériences.
ou l'intérêt que nous portons aux choses qui doivent se produire seulement après
notre mort, à partir de la conscience de la nature immatérielle de notre sujet pensant,
etc.
[Beaucoup de gens sont dans le déni de réalité en refusant d'accepter qu'après
sa mort une personne n'existe plus, que ses désirs n'ont plus de sens, etc. Ils
imaginent alors une vie après la vie…]
298
souveraine d'une raison transcendante, les sources de connaissance immanentes
résidant dans l'expérience, cela par commodité, mais au préjudice de toute
compréhension."
(Fin de citation)
[Recherche d'une explication scientifique remplacée par une fin d'être suprême]
Car alors toutes les fins qui se manifestent dans la nature, souvent forgées
uniquement par nous-mêmes, servent à nous mettre fort à l'aise dans l'exploration
des causes, en ceci qu'au lieu de les rechercher dans les lois universelles du
mécanisme de la matière, nous faisons appel directement au décret insondable de
suprême sagesse et nous considérons achevé l'effort de la raison parce que nous
nous dispensons de son usage - lequel ne trouve pourtant de fil conducteur que là où
c'est l'ordre de la nature et la série de ses changements selon ses lois intrinsèques et
universelles qui nous le fournit."
[Solution proposée par Kant : imputer toute la nature à un être suprême pour
bénéficier d'une unité systématique et des lois scientifiques associées.]
(Fin de citation)
2eme exemple de défaillance de la raison qui ignore ces limites : la raison renversée
La raison renversée
(Citation de K588-K589)
"La deuxième défaillance qui procède de la fausse interprétation du principe de
l'unité systématique est celui de la raison renversée (perversa ratio) […].
299
[Exemple : l'Eglise catholique refusant le modèle héliocentrique du système
solaire, brûlant Giordano Bruno [135] et faisant un procès à Galilée [136].]
mais qu'en outre la raison manque elle-même son but, à savoir prouver à partir de la
nature l'existence d'une telle cause suprême intelligente.
[La finalité téléologique est supposée a priori d'après l'harmonie de la nature pour en
déduire la nécessité absolue d'un Créateur, Intelligence suprême]
L'exploration de la nature suit son chemin en se bornant à parcourir simplement la
chaîne des causes naturelles conformément aux lois universelles de cette nature,
certes d'après l'Idée d'un auteur originaire, non pas cependant pour dériver de lui la
finalité qu'elle poursuit dans toutes les directions, mais au contraire pour connaître
l'existence de celui-ci à partir de cette finalité recherchée dans l'essence des choses
naturelles et même, autant qu'il est possible, dans l'essence de toutes les choses en
général, par conséquent pour connaître cette existence comme absolument
nécessaire."
(Fin de citation)
Si nous ne la trouvons pas dans l'essence des choses qui constituent tout l'objet de
l'expérience, c'est-à-dire de toute notre connaissance pourvue de valeur objective,
par conséquent dans les lois universelles et nécessaires de la nature, comment
prétendons-nous en conclure directement à l'Idée de la perfection suprême et
absolument nécessaire d'un être originaire qui soit l'origine de toute causalité ?
La plus grande unité systématique, par conséquent aussi l'unité finale, est ce qui
éduque la raison humaine à son plus grand usage et même fondamentalement la
rend possible.
L'Idée d'une telle unité est donc inséparablement liée à l'essence de notre raison.
300
de laquelle toute unité systématique de la nature doive être dérivée comme de l'objet
de notre raison."
(Fin de citation)
[Question 1]
[Existe-t-il] "quelque chose de distinct du monde qui pût contenir le fondement de
l'ordre du monde et de son assemblage selon des lois universelles ?
La réponse est : sans nul doute. Car le monde est une somme de phénomènes : il
faut donc qu'il y ait un quelconque fondement transcendantal de ces phénomènes,
c'est-à-dire un fondement qui ne soit susceptible d'être pensé que par l'entendement
pur.
[Question 2]
[Cette chose, ce fondement, cet être est-il une substance, est-il réel, est-il
nécessaire, etc.]
Je réponds que cette question n'a pas de sens. Car toutes les catégories à travers
lesquelles je cherche à me faire un concept d'un tel objet n'ont d'autre usage que
l'usage empirique, et elles n'ont aucun sens quand elles ne sont pas appliquées à
des objets d'expérience possible, c'est-à-dire au monde sensible. En dehors de ce
champ, elles ne sont que des intitulés pour des concepts que l'on peut admettre,
mais par quoi on ne peut non plus rien comprendre.
[Question 3]
[Pouvons-nous] du moins penser cet être distinct du monde selon une analogie avec
les objets de l'expérience ?
La réponse est : sans doute, mais uniquement comme objet dans l'Idée et non pas
dans la réalité, c'est-à-dire uniquement en tant qu'il constitue un substrat, pour nous
inconnu, de l'unité systématique, de l'ordre et de ce qu'il y a de finalisé dans la
constitution du monde, dont la raison doit se faire un principe régulateur pour son
exploration de la nature.
Bien plus, nous pouvons dans cette Idée admettre, sans hésitation et sans nous
attirer de reproches, certains anthropomorphismes qui sont requis pour le principe
régulateur dont il est question. Car il n'est jamais qu'une Idée, qui n'est nullement
rapportée de façon directe à un être distinct du monde, mais au principe régulateur
de l'unité systématique du monde, cela uniquement par l'intermédiaire d'un schème
de cette unité, c'est-à-dire d'une suprême intelligence qui en soit la cause originaire
d'après de sages desseins.
Ce qu'il s'agit de penser par là, ce n'est pas ce qu'est en soi ce fondement originaire
de l'unité du monde, mais comment nous devons l'utiliser, ou plutôt utiliser son Idée,
relativement à l'usage systématique de la raison en ce qui concerne les choses du
monde.
301
[Question 4 : jusqu'où pouvons-nous imaginer l'anthropomorphisme du Dieu
transcendantal ?]
Pouvons-nous […] admettre un auteur du monde qui soit unique, sage et tout-
puissant ?
Sans aucun doute, et non seulement nous pouvons supposer un tel être, mais nous
devons nécessairement le faire.
Mais, dans ce cas, étendons-nous pour autant notre connaissance au-delà du champ
de l'expérience possible ?
Nullement. Car nous avons supposé uniquement un quelque chose dont nous
n'avons pas le moindre concept concernant ce qu'il est en soi (un objet purement et
simplement transcendantal) ; mais, par rapport à l'ordre systématique et finalisé de la
construction du monde, qu'il nous faut supposer quand nous étudions la nature, nous
n'avons pensé cet être inconnu de nous que selon l'analogie avec une intelligence
(un concept empirique), c'est-à-dire que, relativement aux fins et à la perfection qui
reposent sur lui, nous l'avons justement doté des attributs qui, d'après les conditions
de notre raison, peuvent contenir le fondement d'une telle unité systématique. Cette
Idée est en ce sens tout à fait fondée eu égard à l'usage que nous faisons de notre
raison dans le monde.
[L'être suprême est une abstraction imaginée à des fins d'unité systématique,
sans rapport avec le monde réel : nous pouvons donc lui attribuer les qualités
dont nous avons envie et en faire un idéal.]
Mais […] en procédant ainsi, puis-je en tout cas faire usage du concept et de la
supposition d'un être suprême dans la considération rationnelle du monde ?
Oui, et c'était même proprement pour cela que cette Idée a été érigée en principe par
la raison.
Néanmoins, puis-je alors considérer comme des intentions des agencements qui
évoquent des fins, en les dérivant de la volonté divine, bien que ce soit, certes, par
l'intermédiaire de dispositions particulières instaurées à cet effet dans le monde ?
302
Conclusions sur la connaissance et ses limites
Critique de la connaissance issue de l'intuition et de l'entendement
(Citation de K594-K595)
"Ainsi toute connaissance humaine commence-t-elle donc par des intuitions, va de là
à des concepts [de l'entendement] et s'achève par des Idées.
Bien qu'elle dispose, par rapport à chacun de ces trois éléments, de sources de
connaissance a priori qui, au premier abord, semblent dédaigner les limites de toute
expérience, une critique complètement achevée nous persuade pourtant que toute
raison, dans son usage spéculatif, ne saurait jamais avec ces éléments dépasser le
champ de l'expérience possible,
Diallèle
Raisonnement qui forme un cercle vicieux, car il cherche à prouver une proposition à
partir d'elle-même.
Dialogique
En forme de dialogue. - Synonyme : socratique.
Exemple : Méthode acroamatique ou érotématique.
Dichotomie et polytomie
Voir Dichotomie et polytomie.
Dieu
303
Dieu est l'origine du souverain bien et le créateur du monde
L'Idée de Dieu comprend également un aspect moral : sa volonté a défini le
souverain Bien et la raison de sa création du monde sensible (avec ses lois de la
nature) et du monde moral (avec ses lois morales).
La volonté des actions d'un être raisonnable résulte de sa prise en compte de lois
(Citation de [132] page 250)
"Un être qui est capable d'actions d'après la représentation de lois [l'idée qu'il se fait
de lois] est une intelligence (un être raisonnable), et la causalité d'un tel être d'après
cette représentation des lois est sa volonté.
[Un être raisonnable ne veut agir que conformément aux lois.]
[Au nom du souverain Bien, Dieu est défini comme la cause (l'auteur) de la nature]
Donc la cause suprême de la nature, en tant qu'il faut la supposer pour le souverain
Bien, est un être qui, par l'entendement et la volonté, est la cause (par conséquent
l'auteur) de la nature, c'est-à-dire Dieu."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Existence de Dieu ;
La possibilité et l'impossibilité d'un Dieu transcendantal sont indémontrables ;
Justification du concept transcendantal d'un Créateur ;
Preuves possibles de l'existence de Dieu (liste des 3) ;
Idée transcendante (origine de la recherche d'un être absolument nécessaire) ;
Idée théologique ;
Concept résultant : Dieu transcendantal, origine de l'unité de toute réalité
empirique ;
Laïcisation de la morale ;
Validité du principe de causalité – Impossibilité d'une preuve de l'existence de
Dieu ;
Croyance doctrinale ;
Dialectique naturelle de la raison humaine : but ultime.
304
Croire en Dieu est affaire de sentiment moral personnel, pas de raison
K672 – "La conviction [que Dieu existe] n'est pas une certitude logique, mais morale,
et comme elle repose sur des fondements subjectifs (la disposition morale), je ne
dois pas même dire : il est moralement certain qu'il y a un Dieu, etc., mais : je suis
moralement certain, etc. Autrement dit : la croyance en un Dieu et en un autre monde
est à ce point liée à ma disposition morale que, tout aussi peu suis-je exposé à
perdre cette disposition, tout aussi peu ai-je à craindre de pouvoir jamais me voir
ravir cette croyance."
Dieu transcendantal
Voir Concept résultant : Dieu transcendantal, origine de l'unité de toute réalité
empirique.
Voir :
Impossibilité de prouver apodictiquement que Dieu n'existe pas ;
La possibilité et l'impossibilité d'un Dieu transcendantal sont indémontrables ;
Arguments de Kant pour une théologie basée sur un Dieu transcendantal ;
Intelligence suprême (Intelligent Design).
Dignité
Chez Kant
Source : dictionnaire [9].
Kant oppose ce qui a un prix, donc une valeur relative, à ce qui a une valeur
intrinsèque, la dignité :
305
"Dans le règne des fins tout à un PRIX ou une DIGNITÉ. Ce qui a un prix peut
être aussi bien remplacé par quelque chose d’autre, à titre d’équivalent ; au
contraire, ce qui est supérieur à tout prix, ce qui par suite n’admet pas
d’équivalent, c’est ce qui a une dignité.
Ce qui rapporte aux inclinations et aux besoins généraux de l’homme, cela a un
prix marchand ; ce qui, même sans supposer de besoin, correspond à un certain
goût, c’est-à-dire à la satisfaction que nous procure un simple jeu sans but de
nos facultés mentales, cela a un prix de sentiment ; mais ce qui constitue la
condition, qui seule peut faire que quelque chose est une fin en soi, cela n’a pas
seulement une valeur relative, c’est-à-dire un prix, mais une valeur intrinsèque,
c’est-à-dire une dignité."
(Fin de citation)
[107] page 45 - La dignité est réservée à ce qui, ayant une valeur intrinsèque, est
une fin en soi.
[107] page 45 - La dignité d’un être raisonnable consiste à vouloir pour les autres la
même loi que pour lui-même.
Dilemme
Selon le dictionnaire [13] : (Logique) Raisonnement dans lequel deux prémisses
contraires, dont l'une est fausse si l'autre est juste, conduisent toutes deux à une
même solution.
Chez Kant
Voir Dilemmes.
Dirimante
Selon le dictionnaire [13] : dont la force contraignante ne laisse aucune possibilité de
recours. Exemples : objection dirimante, pouvoir dirimant.
[56b] §2 pages 36-37 – "Sur ce point, [Hume [40] ] se trompa complètement et cette
erreur eut des conséquences dirimantes pour toute sa conception."
306
La raison pure n'a pas besoin d'une critique dans son usage empirique
K602 – "Il n'y a nul besoin d'une critique de la raison dans son usage empirique,
puisque ses principes, confrontés à la pierre de touche de l'expérience, se trouvent
soumis à une épreuve continuelle ;"
Aux erreurs particulières on peut remédier par la censure, et à leurs causes par la
critique. Mais là où l'on rencontre, comme dans la raison pure, tout un système
d'illusions et de fantasmagories fortement liées entre elles et réunies sous des
principes communs, c'est toute une législation spécifique, même si elle est certes
négative, qui semble requise pour instituer sous le nom de discipline, à partir de la
nature de la raison et des objets de son usage pur, une sorte de précaution et
d'examen de soi-même systématiques, face à quoi aucune fausse apparence
sophistique ne saurait subsister, mais ne peut que se trahir immédiatement, en dépit
de toutes les justifications grâce auxquelles elle peut se maquiller.
[…]
Je ne fais pas porter la discipline de la raison pure sur le contenu, mais seulement
sur la méthode de la connaissance par la raison pure. Le premier objectif [la critique
du contenu] a déjà été atteint dans la théorie des éléments."
(Fin de citation)
Rappel sur l'utilisation des concepts a priori : vérifier leur déduction transcendantale
K575 – "On ne peut se servir avec sûreté d'un concept a priori sans avoir mis en
œuvre sa déduction transcendantale. Les Idées de la raison pure n'autorisent, il est
vrai, nulle déduction du type de celle des catégories ; si elles doivent toutefois avoir
au moins quelque validité objective, même de caractère indéterminé, et ne pas
représenter simplement de vains êtres de raison (entia rationis ratiocinantis), une
déduction doit absolument en être possible…" - Voir Objet absolument parlant –
Objet dans l'Idée.
307
Les concepts de la connaissance sont-ils les mêmes en philosophie et en
mathématiques ?
K603-K604 – "La mathématique fournit l'exemple le plus brillant d'une raison
s'étendant d'elle-même avec bonheur, sans l'aide de l'expérience. [La méthode
mathématique] utilisée pour parvenir à la certitude apodictique [se confond-elle] avec
celle qui sert à la recherche de la même certitude en philosophie et que dans ce
domaine on devrait appeler dogmatique ?"
308
La connaissance mathématique par des concepts issus d'intuitions a priori.
[Conséquences]
La connaissance mathématique […] "peut porter exclusivement sur des quanta",
car seul le concept de grandeur peut se construire, c'est-à-dire se présenter a
priori dans l'intuition.
[Objection : une connaissance mathématique issue d'une intuition a priori
peut aussi être impossible à associer à une grandeur, donc être
non-mesurable, comme celles de la topologie, mais à son époque Kant ne
pouvait le savoir.]
La connaissance philosophique ne peut porter que sur des qualités, et celles-ci
ne se peuvent présenter dans aucune autre intuition que l'intuition empirique.
Ce pourquoi une connaissance rationnelle n'en est possible que par
l'intermédiaire de concepts. Ainsi personne ne peut-il tirer d'ailleurs que de
l'expérience une intuition qui corresponde au concept de la réalité, mais nul ne
peut jamais y accéder a priori à partir de [la conscience de] soi-même et
antérieurement à la conscience empirique qu'il peut en avoir.
[Exemples]
"De la forme conique, on pourra faire un objet d'intuition sans aucune aide
empirique, uniquement d'après le concept, mais la couleur de ce cône devra
d'abord être donnée dans telle ou telle expérience.
Le concept d'une cause en général, je ne peux le présenter dans l'intuition
autrement que dans un exemple que me fournit l'expérience, etc."
(Fin de citation)
309
Détails des connaissances rationnelles philosophique et mathématique
(Citation de K610)
[Connaissance rationnelle philosophique]
"Examiner tout ce qui se présente (une chose dans l'espace ou dans le temps) pour
savoir
si et jusqu'à quel point il s'agit ou non d'un quantum,
en quoi une existence ou une privation [d'existence] doit y être représentée,
dans quelle mesure ce quelque chose (qui remplit de l'espace ou du temps) est
un substrat premier ou une simple détermination,
si un rapport s'établit entre son existence et quelque chose d'autre comme cause
ou comme effet,
et enfin s'il est, du point de vue de l'existence, isolé ou en relation de
dépendance réciproque avec d'autres choses,
examiner la possibilité de cette existence, sa réalité et sa nécessité, ou leurs
contraires,
(Citation de K611-K612)
"La géométrie et la philosophie sont deux choses tout à fait différentes, quand bien
même elles se prêtent mutuellement la main en physique, et que par conséquent les
démarches de l'une ne sauraient jamais être imitées par l'autre.
310
La solidité des mathématiques repose sur des définitions, des axiomes, des
démonstrations.
Je me contenterai de montrer
qu'aucun de ces éléments ne peut être ni procuré ni imité par la philosophie, au
sens où le mathématicien les prend ;
que le géomètre, en suivant sa méthode, n'édifierait en philosophie que des
châteaux de cartes ;
que le philosophe, en suivant la sienne dans le secteur de la mathématique, ne
pourrait produire que du verbiage et ce, alors même que la philosophie, sur ce
terrain, consiste à en connaître les limites, et que le mathématicien lui-même,
quand son talent n'est pas déjà limité par la nature et borné à son domaine, ne
puisse écarter les avertissements de la philosophie ni se placer au-dessus
d'eux."
(Fin de citation)
311
Compléments sur la notion de définition
Source : [165] pages 199-200 note 92
En d'autres termes, définir c'est exposer de façon originaire le concept explicite d'une
chose à l'intérieur de ses limites.
Explicite implique la clarté et la suffisance des caractères.
Originaire veut dire que cette détermination de limites n'est pas dérivée d'ailleurs
et n'exige donc pas une preuve supplémentaire, ce qui interdirait à la prétendue
définition de venir en tête de tous les jugements sur un objet.
Voir aussi :
Choix entre définition et exposition dans Exposition – Exposé ;
Définitions nominales et définitions réelles ;
Définition analytique et synthétique ;
Construction des concepts ;
Identité des individus.
Origines de concepts de la raison pure que l'on peut songer à définir (K612-K613)
Concepts a priori (qu'on n'a pas besoin de définir, chacun les connaissant) :
Le temps et l'espace ;
Les catégories de l'entendement ;
Les concepts de l'entendement pur : la possibilité, l'existence, la nécessité,
la substance, la cause, le droit, l'équité, etc.
Concepts empiriques (qui ne représentent pas une classe d'objets et ne sont pas
produits par la raison pure) ;
Un concept empirique ne peut être défini ; il ne peut être qu'expliqué.
Le mot associé au concept, avec le peu de caractères qui s'y attache, ne
constituera qu'une désignation et non un concept de la chose [une chose en soi],
et la prétendue définition n'est donc rien d'autre qu'une détermination de mot.
(Citation de K612)
"Selon une telle exigence, un concept empirique ne peut nullement être défini :
il peut seulement être explicité.
Dans la mesure, en effet, où nous ne possédons avec lui que quelques marques
distinctives d'une certaine espèce d'objets des sens, il n'est jamais sûr que, sous
le mot qui désigne le même objet, l'on ne pense pas tantôt plus, tantôt moins de
caractéristiques de cet objet.
Ainsi, dans le concept de l'or, tel peut, outre le poids, la couleur, la dureté,
penser encore à cette propriété que possède l'or de ne pas se rouiller, alors
que tel autre n'en sait peut-être rien.
On ne se sert de certaines caractéristiques que pour autant qu'elles soient
suffisantes en vue de distinguer l'objet ;"
(Fin de citation)
Voir aussi Concept empirique et concept pur.
312
Concepts pensés arbitrairement, dans la mesure où ils représentent un véritable
objet, c'est-à-dire un objet de l'intuition dont les informations sont exactement les
mêmes que celles du concept : les concepts mathématiques.
Les concepts pensés arbitrairement ne doivent pas être définis, mais déclarés
(Citation de K613)
"Dans la mesure, donc, où ni les concepts empiriques ni les concepts donnés a priori
ne peuvent être définis, il ne reste que ceux qui sont pensés de façon arbitraire sur
lesquels cette manière de procéder puisse être tentée.
Je peux toujours, dans un tel cas, définir mon concept ; car il faut pourtant bien que
je sache ce que j'ai voulu penser, puisque j'ai moi-même forgé ce concept
délibérément, et qu'il ne m'a été donné ni par la nature de l'entendement ni par
l'expérience ;
313
Différences entre définitions philosophiques et mathématiques (K614-K615)
Les définitions philosophiques :
Ne sont instituées que comme des expositions de concepts donnés ;
Sont formées analytiquement à la faveur d'une décomposition (dont la
complétude n'est jamais apodictiquement certaine) ;
Ne font qu'expliquer le concept.
"Les définitions analytiques peuvent […] de multiples manières être fausses, soit
en introduisant en elles des marques caractéristiques qui n'étaient pas
comprises effectivement dans le concept, soit en n'atteignant pas à cette
dimension détaillée qui constitue l'essentiel d'une définition, parce que l'on ne
peut jamais être complètement certain de la complétude de son analyse. Ce
pourquoi la méthode de la mathématique quant aux définitions ne se peut imiter
en philosophie."
Les définitions mathématiques :
Sont des constructions de concepts formés originairement ;
Sont formées synthétiquement et de telle manière qu'elles constituent donc
le concept même.
K614 - "En mathématique, nous ne disposons d'absolument aucun concept
avant la définition, dans la mesure où c'est à travers celle-ci seulement que le
concept est donné."
Des définitions mathématiques ne peuvent jamais être fausses. Puisqu'en effet
le concept est donné en premier lieu par la définition, il contient tout juste ce à
quoi la définition veut qu'il soit pensé par ce concept. Mais bien qu'il ne puisse
s'y trouver rien de faux quant au contenu, il peut pourtant parfois […] y avoir des
défauts dans la forme (dans la façon de les présenter), c'est-à-dire relativement
à la précision.
Remarques : voir Axiomatique et Système logique.
314
parler des définitions, mais sont au demeurant vrais et fournissent par conséquent
des approximations de définitions."
Les premiers exigent toujours en outre une déduction, dont les derniers peuvent
totalement se dispenser ;
315
(Fin de citation)
Voir aussi Principes intuitifs et discursifs : axiomes et acroames.
Conclusion : la philosophie n'a pas d'axiomes ; elle doit même justifier leur emploi
K616 – "La philosophie n'a donc pas d'axiomes, et il ne lui est jamais accordé
d'imposer de manière aussi absolue ses principes a priori : bien plutôt lui faut-il se
prêter à légitimer par une déduction solidement étayée le droit qu'elle a d'y recourir."
Remarques
Tous les hommes sains d'esprit partagent les principes de logique et les règles
de déduction rationnelle.
Donc une proposition n'est considérée comme prouvée que si elle est objective,
c'est-à-dire qu'elle peut être partagée par tous les hommes (donc sans qu'aucun
puisse la réfuter) : elle a donc un caractère d'universalité.
[Une proposition déduite d'aprioris personnels n'est pas une certitude objective]
Mais à partir de concepts a priori (dans la connaissance discursive) ne peut jamais
naître une certitude intuitive, c'est-à-dire une évidence, si apodictiquement certain
que puisse bien être par ailleurs le jugement.
316
[L'exigence de rigueur d'une démonstration en réserve la pratique aux
mathématiques]
Seule la mathématique contient donc des démonstrations, parce qu'elle dérive sa
connaissance non de concepts, mais de la construction de ceux-ci, c'est-à-dire de
l'intuition [par imagination productive] qui peut être donnée a priori comme
correspondant aux concepts."
(Fin de citation)
puisqu'il lui faut toujours considérer l'universel in abstracto (par concepts), cependant
que la mathématique peut examiner l'universel in concreto (dans l'intuition singulière)
et […] a priori à travers une représentation pure, à la faveur de quoi toute démarche
erronée devient visible. Ce pourquoi je donnerais plus volontiers aux preuves
philosophiques le nom de preuves acroamatiques (discursives) que celui de
démonstrations, parce qu'elles ne peuvent s'opérer qu'à travers de simples mots (en
évoquant l'objet en pensée), tandis que les démonstrations, comme l'expression déjà
l'indique, se développent dans l'intuition de l'objet."
(Fin de citation)
Dogmata et mathemata
K617 – "Je divise toutes les propositions apodictiques (cela, qu'elles soient
démontrables ou immédiatement certaines) en dogmata et mathemata. Une
proposition directement synthétique par concepts est un dogma ; en revanche, une
proposition synthétique obtenue par construction de concepts est un mathema."
(Les deux sortes de propositions apodictiques sont synthétiques a priori).
Ils ne peuvent donc pas être pertinemment appelés des dogmes (terme que l'on
pourrait peut-être transcrire par préceptes doctrinaux).
Cet usage confirme donc l'explication que nous avons donnée en disant que seuls
des jugements par concepts, et non pas ceux qui procèdent par la construction des
concepts, peuvent être appelés dogmatiques."
317
(Fin de citation)
Car par le moyen des Idées, comme nous l'avons montré, elle n'est capable de
porter absolument aucun jugement synthétique susceptible d'avoir une valeur
objective,
alors qu'en se servant des concepts de l'entendement elle établit assurément des
principes certains, non pas toutefois directement par concepts, mais toujours
simplement de façon indirecte à travers la relation de ces concepts à quelque chose
de tout à fait contingent, à savoir l'expérience possible ;
de fait, quand cette dernière […] est présupposée, il est vrai que ces jugements
peuvent être apodictiquement certains, même si, en eux-mêmes (directement), ils ne
peuvent jamais être connus a priori.
[Exemple :] Ainsi personne ne peut-il percer jusqu'en son fond, simplement à
partir des concepts qui lui sont donnés, cette proposition : tout ce qui arrive
possède sa cause.
Donc, ce n'est pas un dogme, bien que d'un autre point de vue, à savoir […] dans
l'expérience, elle puisse fort bien être prouvée, et cela de manière apodictique.
Il s'agit toutefois d'un principe et non pas d'un théorème, même si cette proposition
doit être démontrée, parce qu'elle a cette propriété particulière qu'elle rend elle-
même possible, et elle seule, le fondement même de sa preuve, à savoir
l'expérience, et qu'elle doit toujours s'y trouver présupposée."
(Fin de citation)
318
Voir aussi La raison a une fonction d'unité systématique des connaissances
d'entendement.
Bien qu'elle dispose, par rapport à chacun de ces trois éléments, de sources de
connaissance a priori qui, au premier abord, semblent dédaigner les limites de toute
expérience, une critique complètement achevée nous persuade pourtant que toute
raison, dans son usage spéculatif, ne saurait jamais avec ces éléments dépasser le
champ de l'expérience possible,
mais jamais pour franchir ses limites, hors lesquelles, pour nous, [en dehors des
phénomènes du monde sensible] il n'est rien que de l'espace vide."
(Fin de citation)
La raison doit se soumette à la critique, car elle n'a pas d'autorité dictatoriale
K619 – "La raison doit, dans toutes ses entreprises, se soumettre à la critique, et elle
ne peut par aucun interdit attenter à la liberté de cette dernière sans se nuire à elle-
même et sans attirer sur elle un soupçon qui lui est dommageable. De fait n'y a-t-il
rien de si important, quant à l'utilité, ni rien de si sacré qui puisse se dérober à cet
examen qui contrôle et inspecte tout, sans faire exception de personne. C'est sur
cette liberté que repose même l'existence de la raison, laquelle n'a pas d'autorité
dictatoriale, mais ne fait jamais reposer sa décision que sur l'accord de libres
citoyens, dont chacun doit pouvoir exprimer ses objections, voire son veto, sans
retenue aucune.
Cela étant, si la raison ne peut certes jamais se refuser à la critique, elle n'a
pourtant pas toujours de motifs de la redouter."
(Point important : toute décision de la raison doit être critiquable par tous les
citoyens, dont chacun doit être libre d'exprimer son veto.)
319
Une critique doit être acceptée dans un esprit d'ouverture, à l'opposé du dogmatisme
L'homme a une tendance naturelle à penser qu'un raisonnement logique donne
automatiquement raison à celui qui le formule. Or à partir d'une même situation,
plusieurs points de vue différents permettent d'aboutir à des conclusions logiques
différentes, parmi lesquelles seule une raison supérieure – si elle est admise comme
telle – pourra choisir.
[Il s'agit seulement de savoir s'il existe une preuve d'une affirmation opposée]
Il ne s'agit donc pas ici de savoir si ses affirmations ne pourraient pas aussi,
éventuellement, se trouver fausses, mais seulement du fait que personne ne peut
prétendre le contraire avec une certitude apodictique (ni même avec vraisemblance).
(Fin de citation)
Rappel sur les antinomies : la raison pure peut être en conflit avec elle-même
(Citation de K620)
"Il se trouve quelque chose de préoccupant et d'humiliant dans le fait qu'il doive y
avoir en général une antithétique de la raison pure, et que cette raison pure, qui
représente pourtant, vis-à-vis de tous les litiges, le tribunal suprême, doive entrer en
conflit avec elle-même. Certes, nous avons eu plus haut, devant nous, une telle
antithétique apparente de la raison ; mais il s'est révélé qu'elle reposait sur un
malentendu consistant à prendre, conformément au préjugé commun, des
phénomènes pour des choses en soi, et à revendiquer ensuite, d'une façon ou d'une
autre (au demeurant tout aussi impossibles l'une que l'autre), une absolue
complétude de leur synthèse, ce que l'on ne peut toutefois aucunement attendre de
phénomènes.
Il n'y avait donc alors aucune contradiction effective de la raison avec elle-même
dans ces propositions :
la série des phénomènes donnés en soi a un commencement absolument
premier, et :
cette série est absolument et en soi dépourvue de tout commencement ;
car les deux propositions coexistent parfaitement bien, puisque des phénomènes,
dans leur existence (en tant que phénomènes [c'est-à-dire de situations dont
l'homme prend conscience]), ne sont absolument rien d'en soi, ce qui veut dire qu'ils
320
[les phénomènes en tant que concept] sont quelque chose de contradictoire, et que
par conséquent leur supposition doit tout naturellement entraîner avec elle des
conséquences contradictoires.
Lire ici (source K621) : Validité du principe de causalité – Impossibilité d'une preuve
de l'existence de Dieu.
Il n'y a pas d'antithétique de la raison pure, qui reste le juge suprême des arguments
K622 – "Ainsi n'y a-t-il pas proprement d'antithétique de la raison pure. Car le seul
terrain où elle pourrait trouver à se battre devrait être cherché dans le domaine de la
théologie et de la psychologie pures ; mais ce terrain n'est pas assez solide pour
supporter un quelconque combattant avec tout son attirail et des armes qu'il y ait lieu
de craindre. Il ne peut y paraître qu'en recourant à des railleries et à des
rodomontades dont on peut se moquer comme d'un jeu d'enfant. C'est là une
remarque consolante, qui redonne du courage à la raison ; car entre quelles mains
pourrait-elle remettre son sort si, elle qui est la seule à avoir vocation d'écarter toutes
les erreurs, elle était en elle-même bouleversée au point de ne pouvoir espérer ni la
paix ni la tranquillité de ses possessions ?"
321
Considérations sur l'ignorance
(Citation de K630-K631)
"La conscience de mon ignorance (si celle-ci n'est pas en même temps reconnue
comme nécessaire),
[Exemple d'ignorance inévitable : l'existence ou l'inexistence de Dieu en tant que
certitudes démontrées par usage de la raison pure.]
au lieu de mettre fin à mes recherches, est bien plutôt la véritable cause qui les
provoque.
[L'homme a un besoin inné de savoir, car il redoute que ce qu'il ignore cache des
dangers ou des opportunités.]
Mais que mon ignorance soit absolument nécessaire et qu'elle me libère par
conséquent de toute recherche ultérieure, cela ne se peut établir empiriquement, à
partir de l'observation, mais uniquement de façon critique, par exploration
approfondie des sources premières de notre connaissance.
[Une ignorance absolument nécessaire, donc inévitable, me dispense
évidemment de recherches, puisque celles-ci seraient infructueuses. Mais ce
n'est pas en cherchant (empiriquement) que je peux m'en apercevoir (car une
recherche matérielle infructueuse ne prouve pas que ce qu'on cherche n'existe
pas), c'est en réfléchissant aux sources de la connaissance.]
322
(Exemples dans l'Univers : nature de la matière sombre représentant
environ 5 fois plus de masse que la matière visible astronomique, et raison
de l'absence d'antimatière)
nous restons, au moins provisoirement, dans l'ignorance – parfois parce que
nous ne pouvons même pas définir précisément ce que nous cherchons.]
[On ne comprend pas assez l'anticipation d'expérience pour connaître son origine]
Or, si quelqu'un ne peut s'en rendre aucunement compréhensible la possibilité,
[Mais cette ignorance ne permet pas d'affirmer que cette faculté est impossible à
comprendre et qu'elle n'intervient pas dans la raison]
mais il ne peut pour autant décréter la connaissance de ces principes impossible par
les simples forces de l'entendement et déclarer nuls et non avenus tous les pas que
la raison fait sous leur directive.
Tout ce qu'il peut dire, c'est ceci : si nous apercevions l'origine et l'authenticité de tels
principes, nous pourrions déterminer l'étendue et les limites de notre raison,
[Faute de comprendre cette faculté, toute affirmation à son sujet est pure conjecture]
et avant que cela se soit produit, toutes les assertions avancées par elle sont
aventurées de façon aveugle.
[De même, toute philosophie dogmatique sans critique de la raison est suspecte]
Et ainsi un doute complet serait-il pleinement fondé à l'égard de toute philosophie
dogmatique effectuant son parcours sans critique de la raison elle-même ;
323
[Malgré ce manque de certitude, on ne doit pas refuser toute réflexion philosophique
reposant sur des bases sérieuses]
simplement ne pourrait-on pour autant refuser totalement à la raison une telle
progression, pourvu que celle-ci soit préparée et assurée par une meilleure
fondation.
Car tous les concepts et même toutes les questions que la raison pure nous propose
ne sont pas en quelque sorte contenus dans l'expérience, mais uniquement, à leur
tour, dans la raison,
[Il y a, par exemple, des idées transcendantales, concepts de la raison pure]
et c'est pourquoi on doit pouvoir les résoudre, ainsi que comprendre leur validité ou
leur nullité.
Nous n'avons pas non plus le droit d'écarter ces problèmes comme si leur solution
résidait effectivement dans la nature des choses, mais en recourant au prétexte que
fournirait notre impuissance, et de nous refuser à poursuivre à leur propos toute
recherche : c'est en effet la raison qui seule, en son sein, a elle-même produit ces
Idées, sur la validité ou sur l'apparence dialectique desquelles elle est donc tenue de
rendre des comptes."
(Fin de citation)
Cela, nous tentons de le faire soit par l'entendement pur, vis-à-vis de ce qui peut du
moins être un objet de l'expérience, soit même par la raison pure, vis-à-vis de
propriétés des choses, voire de l'existence d'objets qui ne peuvent jamais intervenir
dans l'expérience.
[…]
324
Bien que nous ne puissions jamais aller immédiatement au-delà du contenu du
concept qui nous est donné, nous pouvons toutefois connaître entièrement a priori,
mais par rapport à un troisième terme, à savoir une expérience possible, donc bel et
bien a priori, la loi de la liaison entre des choses diverses."
(Fin de citation)
325
peut nullement, en toute indépendance par rapport à ces conditions, pour ainsi dire
se créer elle-même des choses, puisque de tels concepts, bien que sans
contradiction, seraient cependant aussi sans objet."
Ils sont pensés seulement de façon problématique, pour fonder, par rapport [aux
objets de l'expérience] (comme fictions heuristiques), des principes régulateurs de
l'usage systématique de l'entendement dans le champ de l'expérience.
Si l'on va au-delà, ce ne sont plus que des êtres de raison, dont la possibilité n'est
pas démontrable, et qui par conséquent ne peuvent pas non plus, à la faveur d'une
hypothèse, être placés au fondement de l'explication de phénomènes effectivement
réels."
(Fin de citation)
en vue de donner pour principe, d'après cette Idée, à notre appréciation de ses
phénomènes intérieurs une unité complète et nécessaire de toutes les forces de
l'esprit, bien qu'on ne puisse l'apercevoir in concreto.
En revanche, admettre que l'âme est une substance simple (ce qui correspond à un
concept transcendant), ce serait une proposition non seulement indémontrable
(comme c'est le cas d'un certain nombre d'hypothèses physiques), mais aussi
totalement arbitraire et risquée à l'aveuglette, parce que le simple ne peut se
présenter dans absolument aucune expérience et que, si l'on entend ici par
substance l'objet permanent de l'intuition sensible, la possibilité d'un phénomène
simple ne peut nullement être aperçue."
(Fin de citation)
Un phénomène donné nouveau ne doit être expliqué qu'à partir de lois connues
K639 – "Pour expliquer des phénomènes donnés, on ne peut alléguer d'autres
choses et d'autres principes d'explication que ceux qui ont été posés en liaison avec
ceux et celles qui étaient déjà donnés, selon des lois déjà connues des phénomènes.
Une hypothèse transcendantale où l'on se servirait d'une simple Idée de la raison
pour expliquer les choses naturelles ne serait donc nullement une explication, parce
que ce que l'on ne comprend pas suffisamment à partir de principes empiriques
connus serait alors expliqué par quelque chose dont on ne comprend rien."
326
(Toute explication, tout énoncé de loi nouvelle doit reposer sur des
connaissances existantes, elles-mêmes fondées à partir de la naissance sur des
aprioris. Toute affirmation fondée sur des faits ou lois incertains est sans valeur.
Ces maximes inattaquables sont suivies, dans la citation suivante située
immédiatement après la précédente, par une affirmation par Kant de sa doctrine
téléologique, reposant sur une intention prêtée à l'être originaire, Dieu, dont Kant
a montré avant l'impossibilité par viol des lois naturelles !)
Pour un résumé des croyances de Kant, voir Les Idées sont les causes efficientes de
la nature – Les croyances de Kant.
327
(L'hypothèse considérée doit expliquer a priori le phénomène constaté, sans
recourir à des connaissances ou hypothèses supplémentaires : son adéquation
doit être évidente, comme l'avait déjà remarqué Descartes et comme Husserl
[87] l'a précisé par la suite.)
328
Conditions de validité d'une preuve synthétique
Validité d'une preuve synthétique : nécessité d'une médiation
K645 – "Si je dois sortir a priori du concept d'un objet, c'est impossible sans un fil
conducteur particulier se trouvant en dehors de ce concept."
329
S'il doit s'agir de principes issus de la raison pure, toute peine est à nouveau
dépensée vainement. Car la raison possède certes de tels principes, mais, en tant
que principes objectifs, ils sont tous dialectiques et ne peuvent en tout état de cause
avoir de valeur que comme principes régulateurs de l'usage systématiquement
structuré de l'expérience.
Deuxième règle concernant les preuves transcendantales : une seule par proposition
(Citation de K648)
"La deuxième caractéristique propre aux preuves transcendantales est que, pour
chaque proposition transcendantale, on ne peut trouver qu'une seule preuve.
[Si la preuve transcendantale doit partir d'une intuition :]
Si ce n'est pas à partir de concepts que je dois conclure, mais à partir de
l'intuition correspondant à un concept,
qu'il s'agisse d'une intuition pure, comme dans la mathématique,
ou d'une intuition empirique, comme en physique,
l'intuition adoptée comme fondement me fournit une matière diverse pour des
propositions synthétiques que je peux relier entre elles de plus d'une façon :
dans ce cas, puisque je peux partir de plus d'un point, c'est par divers chemins
que je puis parvenir à la même proposition.
[Si la preuve transcendantale doit partir d'un seul concept :]
En revanche, toute proposition transcendantale part uniquement d'un seul
concept et exprime la condition synthétique de la possibilité de l'objet d'après ce
concept.
Il ne peut donc y avoir qu'un unique argument, parce qu'en dehors de ce concept
il n'y a plus rien par quoi l'objet puisse être déterminé et que la preuve ne peut
donc contenir rien de plus que la détermination d'un objet en général d'après ce
concept, qui est lui aussi unique."
(Fin de citation)
330
Autre formulation de cette règle
K649 – "Là où la raison accomplit son opération avec de simples concepts, une
unique preuve est possible, si du moins il peut y en avoir une qui le soit."
Troisième règle concernant les preuves transcendantales : une preuve doit toujours
être ostensive, jamais apagogique
Or, au lieu de parcourir dans une preuve ostensive toute la série des principes qui
peut conduire à la vérité d'une connaissance par l'intermédiaire d'une vision
complète de sa possibilité, si l'on peut trouver une unique conséquence fausse parmi
celles qui découlent du contraire de cette connaissance, ce contraire est faux lui
aussi, et par conséquent la connaissance que l'on avait à prouver est vraie."
(Fin de citation)
Si la conclusion « un basset est un animal » était fausse, l'une au moins des deux
prémisses serait fausse, ce qui est contraire à leur vérité supposée.
Donc la conclusion est juste.
331
ou bien que les deux propositions ne se contredisent l'une l'autre que sous une
condition subjective faussement tenue pour objective, et que, puisque la condition
est fausse, toutes les deux puissent être fausses sans que, de la fausseté de l'une, il
soit possible de conclure à la vérité de l'autre.
Ainsi, par exemple, si l'on suppose que le monde sensible est en soi donné selon sa
totalité, il est faux qu'il doit être ou bien infini dans l'espace, ou bien fini et limité,
parce que les deux énoncés sont faux.
Car des phénomènes (en tant que simples représentations) qui seraient pourtant
donnés en soi (en tant qu'objets) sont quelque chose d'impossible, et l'infinité de ce
tout imaginé serait certes inconditionnée, mais contredirait (puisque tout, dans les
phénomènes, est conditionné) la détermination inconditionnée de la quantité qui est
pourtant supposée dans le concept."
332
[Voir Idées transcendantales : 1er conflit.]
(Fin de citation)
Discursif
Adjectif : issu d'un raisonnement logique, donc démontrable et universel.
Exemples : connaissance discursive, jugement discursif (dynamique).
Voir aussi :
Apodictique ;
Comparaison des méthodes rationnelles des mathématiques et de la philosophie
pure.
Disjonction – Disjonctif
Les dictionnaires [13] et [19] admettent pour l'adjectif disjonctif les deux types de
relation : OU exclusif (alternative) et OU non-exclusif .
Chez Kant
Disjonctif
Adjectif : qui réalise une disjonction.
Exemples
K166 : Le contenu d'un jugement disjonctif (l'ensemble de ses concepts) est divisé
en parties (sous-ensembles) appelées "concepts subordonnés", qui s'excluent
mutuellement (le choix de l'un excluant tous les autres).
K497 – "…c'est une proposition exactement disjonctive que celle selon laquelle tout
effet survenant dans le monde doit procéder ou bien de la nature [causalité], ou bien
de la liberté."
333
un seul des éléments logiques reliés est vrai (ou choisi) : pour Kant, disjonctif (sans
précision) veut dire alternatif ; voir Matière et forme des jugements disjonctifs.
[56b] §43 page 130 note 1 – Dans un jugement disjonctif, c'est l'ensemble de tous les
possibles qui est divisé relativement à un certain concept :
"L'action de la raison dans les raisonnements disjonctifs est, quant à la forme,
identique avec ceux au moyen desquels elle produit l'Idée d'un ensemble de la
réalité, qui contient en soi ce qu'il y a de positif dans tous les prédicats mutuellement
opposés."
(La disjonction définit une partition d'un ensemble en un sous-ensemble et son
complément, les éléments du sous-ensemble satisfaisant une condition donnée.
Un élément donné de l'ensemble n'a que deux possibilités :
il satisfait OU il ne satisfait pas la condition disjonctive.)
La causalité théologique […] définit une relation disjonctive dans le système de tous
les possibles accessible au seul entendement divin.
Disjonction exclusive de deux propositions (sens par défaut de disjonction chez Kant)
s = (p . ¬q) (¬p . q)
La disjonction exclusive de deux propositions p et q est une proposition s notée
p q, vraie si l'une seulement des deux propositions p et q est vraie.
Cette disjonction est donc un OU exclusif, défini par s = (p . ¬q) (¬p . q).
Divers
Le divers est l'ensemble des informations de la forme permettant de distinguer deux
objets ou phénomènes dont la matière ou la substance peuvent être semblables.
Le divers d'une perception (qui a subi une synthèse par association) est transformé
en représentation consciente en mémoire de travail : voir Intuition (étapes) ; il
contient l'ensemble des informations de la représentation.
334
K161 - "La logique transcendantale a devant elle un divers de la sensibilité a priori
que l'Esthétique transcendantale lui offre pour donner une matière aux concepts purs
de l'entendement [pour constituer la représentation intuitive dont l'aperception fera la
synthèse]."
K205 - "Un divers contenu dans mon intuition est représenté par la synthèse de
l'entendement comme appartenant à l'unité nécessaire [inévitable] de la conscience
de soi, et cela se produit grâce à la catégorie. (La représentation de l'unité de
l'intuition d'un objet inclut toujours une synthèse de son divers et la relation du divers
à une unité de l'aperception)"
Division
Opération de logique qui partage l'extension d'un concept (appelé genre) en classes
(appelées espèces) qui sont, elles-mêmes, les extensions de concepts composants
du premier.
Voir aussi Concept de division logique [notions de la Division logique].
Divisibilité
K490 – "Tout espace intuitionné à l'intérieur de ses limites est une totalité dont les
parties, lors de toute décomposition [à l'infini ou illimitée], sont toujours à leur tour
des espaces, et par conséquent il est divisible à l'infini."
K490-K491 – [La divisibilité d'un] "phénomène extérieur enfermé dans ses limites
(corps) se fonde sur la divisibilité de l'espace [qu'il occupe. Il] est donc divisible à
l'infini, sans qu'il se compose pour autant d'un nombre infini de parties."
Au sens du volume d'espace qu'il occupe, un corps est (comme cet espace)
divisible à l'infini, car tout sous-espace est lui-même un espace divisible, et
335
aucune division ne peut aboutir à un espace simple (indivisible). (Tout cela en
ignorant le concept d'atome).
Mais au sens de la substance du corps et contrairement à son espace occupé,
sa matière peut être simple.
Ainsi, un corps peut être fait d'un seul élément chimique (corps simple comme le
cuivre), ou d'une seule molécule (corps composé comme l'eau), ou d'un nombre
fini de corps simples ou composés. Il peut en principe être fait d'un nombre infini
de corps composés, parce qu'il y a 92 corps simples naturels dans la
classification de Mendeleev, à partir desquels le nombre de composés
constructibles (molécules) est infini.
Division d'un tout donné dans l'intuition, c'est-à-dire d'une représentation d'objet
Voir d'abord Progression à l'infini (in infinitum) ou progression illimitée (in
indefinitum) : définitions
Il faut distinguer éventuellement les divers modes de division d'un objet donné par sa
représentation, comme le volume (divisé en espaces) et la matière (divisée en
parties). Un élément de la division (espace ou partie, par exemple) peut être
subdivisé à son tour jusqu'à ce que ses éléments soient simples, ou à l'infini si pour
le mode de division l'objet est continu (comme un volume).
(Citation de K490)
"Quand je divise un tout qui est donné dans l'intuition, je vais d'un terme conditionné
aux conditions de sa possibilité.
[L'existence du tout est conditionnée par l'existence de tous ses éléments.]
La division des parties (subdivisio ou decompositio) est une régression dans la série
de ces conditions. La totalité absolue de cette série ne serait alors donnée que si la
régression pouvait arriver à des parties simples.
[Comme dans l'exemple de la statue ci-dessus, la totalité absolue de la série des
métaux composants en comprend deux, le cuivre et l'étain.]
Mais si, dans une subdivision se poursuivant sans discontinuer toute partie est
toujours à son tour divisible, la subdivision, c'est-à-dire la régression, va du
conditionné à ses conditions [à l'infini] in infinitum, puisque les conditions (les parties)
sont contenues dans le conditionné lui-même et que, comme celui-ci est donné tout
entier dans une intuition enfermée dans ses limites, elles sont elles aussi données
toutes ensemble avec lui.
[Exemple : la subdivision en volume peut être poursuivie à l'infini, en négligeant
l'existence des atomes.]
La régression ne doit donc pas être appelée simplement une régression [illimitée] in
indefinitum, sur le modèle de cela seul que permettait la précédente Idée
cosmologique, dans la mesure où je devais aller du conditionné à ses conditions qui
étaient en dehors de lui [parce que la chose en soi de l'intuition n'existait pas encore]
336
et par conséquent n'étaient pas données en même temps que lui, mais
n'intervenaient que dans la régression empirique.
[Un objet divisible à l'infini n'a pas nécessairement un nombre infini de parties]
Pour autant, il n'est nullement permis de dire, à propos d'un tel tout qui est divisible à
l'infini, qu'il se compose de parties infiniment nombreuses. Car, bien que toutes les
parties soient contenues dans l'intuition du tout, ne s'y trouve pourtant pas contenue
la division tout entière, qui ne consiste que dans la poursuite de la décomposition,
autrement dit dans la régression elle-même, qui seule rend effective la série. Or,
puisque cette régression est infinie, tous les membres (les parties) auxquels elle
parvient sont certes contenus comme agrégats dans le tout donné, mais non point la
série tout entière de la division, laquelle est infinie de façon successive, mais ne l'est
jamais de façon entière, et par conséquent ne peut présenter une multitude infinie ni
une synthèse de celle-ci en un tout."
[Nous avons vu dans l'exemple ci-dessus de la statue, que s'il y a plusieurs
modes de division envisagés, les types de résultat (division à l'infini, illimitée ou
en parties simples) peuvent être différents.]
(Fin de citation)
Doctrine
Substantif - Ensemble de principes et/ou d'énoncés, formant ou non un système,
traduisant une certaine conception de l'Univers, de l'existence humaine, de la
société, etc., accompagnés souvent, pour le domaine envisagé, de la formulation de
modèles de pensée, de règles de conduite. Exemples :
337
K383 – "Si nous comparons la doctrine de l'âme, comme physiologie du sens
interne, avec la doctrine du corps, comme physiologie des objets des sens
externes…"
[132] page 256 - "Il ne faut jamais que la morale en elle-même soit traitée
comme une doctrine du bonheur, c'est-à-dire comme un enseignement
concernant la manière d'avoir part au bonheur, car sa seule affaire est la
condition rationnelle (conditio sine qua non) de ce dernier, non le moyen de
l'acquérir."
[165] page 149 – "La doctrine des éléments en logique a pour contenu les éléments
et les conditions de la perfection d'une connaissance."
Remarques
1. Le concept empirique provient des sens par comparaison des objets de
l'expérience et ne reçoit de l'entendement que la forme de la généralité.
La réalité de ces concepts repose sur l'expérience réelle dont ils procèdent quant au
contenu. - La question de savoir si de purs concepts d'entendement, qui, en tant que
tels, proviennent uniquement de l'entendement, indépendamment de toute
expérience, c'est à la métaphysique d'en traiter.
338
2. Les concepts rationnels ou Idées ne peuvent pas conduire à des objets réels,
puisque tous ces derniers doivent être contenus dans une expérience possible. Mais
ils servent à la raison à guider l'entendement dans sa relation à l'expérience et dans
l'usage le plus parfait de ses règles, ou également à montrer que toutes les choses
possibles ne sont pas des objets de l'expérience et que les principes de la possibilité
de cette dernière ne valent pas pour les choses en soi, ni même pour les objets de
l'expérience considérés comme choses en soi.
339
se trouve dans la réflexion et dans l'abstraction [qu'on fait] de la différence entre les
choses désignées par une certaine représentation. Par suite, ici se pose la question
suivante : quelles opérations de l'entendement forment un concept ou ce qui revient
au même, permettent la production du concept à partir de représentations données.
La logique générale n'a donc pas à chercher les sources des concepts, comment les
concepts naissent comme représentations, mais simplement Comment des
représentations données deviennent des concepts dans la pensée ;
au reste, ces concepts peuvent contenir quelque chose qui est tiré de l'expérience,
ou encore quelque chose d'imaginé, ou d'emprunté à la nature de l'entendement.
Cette origine logique des concepts - origine quant à leur simple forme - consiste dans
la réflexion qui fait naître une représentation commune à plusieurs objets comme la
forme que requiert la faculté de juger. Donc on ne considère en logique que la simple
différence de la réflexion dans les concepts.
[Etapes de la conceptualisation]
Pour faire des concepts à partir de représentations, il faut donc comparer, réfléchir et
abstraire, car ces trois opérations logiques de l'entendement sont les conditions
générales et essentielles de production de tout concept en général.
340
Par exemple, je vois un pin, un saule et un tilleul. En comparant tout d'abord ces
objets entre eux, je remarque qu'ils diffèrent les uns des autres au point de vue du
tronc, des branches, des feuilles, etc... ; mais si ensuite je réfléchis uniquement à ce
qu'ils ont de commun entre eux, le tronc, les branches et les feuilles-mêmes et si je
fais abstraction de leur taille, de leur configuration, etc... j'obtiens un concept
d'arbre."
(Fin de citation)
Tout concept :
Comme concept partiel, est contenu dans la représentation des choses ;
à ce point de vue-là, le concept a une compréhension : il comprend un ensemble
de caractères.
Comme principe de connaissance (c'est-à-dire comme caractère) ces choses
sont contenues sous lui ; à ce point de vue-là, le concept a une extension : c'est
un attribut d'une classe de connaissances, dont chacune le comprend.
Remarque. L'universalité (la valeur universelle) du concept repose non pas sur le
fait que le concept est concept partiel mais sur le fait qu'il est un principe de
connaissance.
[Remarque]
De même qu'on dit d'un principe en général qu'il contient sous lui les conséquences,
de même on peut également dire du concept, qu'en tant que principe de
connaissance il contient sous lui toutes les choses dont il a été abstrait. Par exemple,
le concept de métal renferme l'or, l'argent, le cuivre, etc...
Car puisque tout concept en tant que représentation possédant une valeur de
généralité contient ce qui est commun à plusieurs représentations de choses
341
différentes, toutes ces choses, du fait qu'elles sont contenues sous lui, peuvent être
représentées par lui. Et c'est même ce qui constitue l'utilité d'un concept.
Plus est considérable le nombre des choses qui peuvent être représentées par un
concept, plus grande est la sphère de celui-ci. Ainsi par exemple le concept de corps
a une extension plus grande que le concept de métal."
(Fin de citation)
nous pouvons toujours obtenir des genres supérieurs, car chaque espèce doit
toujours être considérée en même temps comme genre relativement à son concept
inférieur, […] jusqu'à ce que nous parvenions enfin à un genre qui ne puisse pas être
espèce à son tour.
Et nous devons pouvoir parvenir finalement à un tel genre, car il doit y avoir à la fin
un concept suprême dont, en tant que tel, rien ne se laisse plus abstraire sans que
tout le concept disparaisse.
[C'est le concept de Tout ou de Monde.]
342
contenue, car un tel concept est impossible à déterminer. Car bien que nous ayons
en fait un concept que nous appliquons immédiatement aux individus) il peut encore
y avoir relativement à ce concept des différences spécifiques, que nous ne
remarquons pas ou dont nous ne tenons pas compte. C'est seulement de façon
comparative et pour l'usage qu'il y a des concepts derniers qui ne prennent cette
signification que pour ainsi dire par convention, dans la mesure où on s'accorde pour
ne pas descendre plus bas.
[Voir aussi Loi logique de la spécification]
En outre un concept n'est pas plus large qu'un autre parce qu'il contient davantage
sous lui - car on ne peut pas le savoir - mais dans la mesure où il contient sous lui
non seulement l'autre concept mais outre ce dernier davantage encore."
Remarque
Puisque ce en quoi les choses conviennent entre elles provient de leurs propriétés
universelles et que ce en quoi elles diffèrent entre elles provient de leurs propriétés
particulières, on ne peut pas conclure que ce qui convient ou contredit à un concept
inférieur, convient également ou contredit à d'autres concepts inférieurs qui
appartiennent avec le premier à un concept supérieur."
(Fin de citation)
343
§15. Conditions de formation des concepts supérieurs et inférieurs ; abstraction
logique et détermination logique
(Citation de [165] pages 108-109)
"En poursuivant l'abstraction logique on forme des concepts toujours plus élevés ; en
poursuivant la détermination logique on forme des concepts toujours plus inférieurs. -
La plus grande abstraction possible donne le concept le plus élevé ou le plus
abstrait, - celui dont aucune détermination ne se laisse plus abstraire.
Remarque
Comme il n'y a que les choses singulières ou individus qui sont totalement
déterminés, il ne peut y avoir de connaissances totalement déterminées que comme
intuitions, et non comme concepts ; car en ce qui concerne ces derniers la
détermination logique ne peut jamais être considérée comme parfaite."
(Fin de citation)
Voir Concept de base.
Remarque
Les expressions d'abstrait et de concret ne se rapportent pas tant aux concepts en
eux-mêmes - car tout concept est abstrait - que bien plutôt à leur usage seulement.
Et cet usage à son tour peut comporter différents degrés - selon qu'on traite un
concept tantôt plus tantôt moins comme abstrait ou concret, c'est-à-dire qu'on en
écarte ou qu'on y retient plus ou moins de déterminations.
Par l'usage abstrait un concept se rapproche du genre suprême, par l'usage concret
il se rapproche de l'individu."
(Fin de citation)
Compléments
Abstraire ;
Entendement ;
Entendement (étapes) ;
Concept de l'entendement.
344
Doctrine générale des éléments – 2. Jugements
Source : [165] pages 110 et suivantes – I – Doctrine générale des éléments –
Chapitre 2 – Des jugements - Cet article fait suite au Chapitre 1.
345
§21. Quantité des jugements : universels, particuliers, singuliers
(Citation de [165] pages 111-112)
"Selon la quantité, les jugements sont universels, particuliers ou singuliers, suivant
que le sujet dans le jugement est
soit entièrement impliqué dans - ou exclu de - la notion du prédicat,
soit partiellement impliqué dans - ou exclu de - celle-ci.
[Ce qui suit vient de : Compréhension et extension (contenu dans et contenu sous)]
Dans le jugement universel, la sphère d'un concept est entièrement enfermée à
l'intérieur de la sphère d'un autre ;
[Exemple : « tous les ours ont une queue »]
dans un jugement particulier, une partie du premier est sous la sphère de l'autre ;
[Exemple : « certains ours sont bruns »]
et dans le jugement singulier enfin, un concept qui n'a pas du tout de sphère est, de
ce fait, compris simplement comme partie sous la sphère d'un autre."
[Exemple : « c'est un ours »]
(Fin de citation)
346
§24. Jugements catégoriques
Définition : par opposition à un jugement hypothétique ou un jugement disjonctif, un
jugement catégorique est une assertion qui ne contient ni condition ni alternative.
K157 : un jugement catégorique est un jugement affirmé sans nuance, ce qui
n'est possible qu'à cause d'une inhérence du prédicat au sujet ou de sa
subsistance – Exemple de proposition catégorique : « A est B ».
Remarque
Les jugements catégoriques constituent, il est vrai, la matière des autres sortes de
jugements ; mais il ne faut cependant pas croire […] que les jugements
hypothétiques aussi bien que les disjonctifs ne sont que diverses formes de
jugements catégoriques et que par suite ils s'y laissent tous ramener. Ces trois
espèces de jugements reposent sur des fonctions logiques de l'entendement
essentiellement différentes et doivent en conséquence être examinées selon leur
différence spécifique.
L'un de ces jugements est l'antécédent, l'autre qui se rapporte à lui comme une
conséquence est le conséquent.
La représentation de cette sorte de liaison des deux jugements entre eux pour l'unité
de la conscience est appelée la conséquence ; elle constitue la forme des jugements
hypothétiques.
§26. Mode de liaison dans les jugements hypothétiques : modus ponens et modus
tollens
(Citation de [165] page 116)
"La forme de la liaison dans les jugements hypothétiques est double :
l'une pose (modus ponens), l'autre enlève (modus tollens).
Si le principe est vrai, la conséquence qu'il détermine est également vraie :
tel est le modus ponens.
Si la conséquence est fausse, le principe est également faux :
tel est le modus tollens."
(Fin de citation)
347
§28. Matière et forme des jugements disjonctifs
(Citation de [165] page 116)
"La pluralité des jugements donnés dont l'articulation constitue le jugement disjonctif,
forment la matière de ce jugement et sont appelés les membres de la disjonction ou
de l'opposition.
Il s'ensuit que la vérité doit être contenue dans l'un des jugements problématiques,
ou, ce qui revient au même, que l'un d'eux doit avoir valeur assertorique.
[…]
Il n'est possible ni qu'il y ait en dehors un autre jugement qui soit vrai, ni qu'il y en ait
plus d'un parmi eux."
348
[La modalité ne concerne pas le contenu du jugement]
"La modalité des jugements en est une fonction tout à fait à part, dont le caractère
distinctif est de ne contribuer en rien au contenu du jugement (car en dehors de la
quantité, de la qualité, et de la relation, il n'y a plus rien qui constitue le contenu d'un
jugement)."
Une proposition problématique est une contradictio in adjecto [contradiction dans les
termes].
Avant d'avoir une proposition, il me faut assurément d'abord juger ; et je juge en
bien des cas, sans rien arrêter, chose que je dois faire cependant pour
déterminer un jugement comme proposition.
Du reste il est bon de commencer par juger de façon problématique, avant d'accepter
le jugement comme assertorique, pour pouvoir ainsi le mettre à l'épreuve.
En outre il n'est pas toujours indispensable à notre propos que nous ayons des
jugements assertoriques."
(Fin de citation)
Remarque
Dans le jugement exponible, par exemple : peu d'hommes sont savants, il y a :
1) de façon cachée, le jugement négatif : beaucoup d'hommes ne sont pas savants ;
349
2) le jugement affirmatif : quelques hommes sont savants.
§34. Principes
Voir Principe.
Les [principes intuitifs] peuvent être exposés dans l'intuition et se nomment : axiomes
(axiomata) ;
les [principes discursifs] ne se laissent exprimer que par concepts et peuvent être
appelés acroames (acroamata)."
(Fin de citation)
Les propositions dont la vérité ne se fonde pas sur l'identité des concepts, doivent
être nommées synthétiques ;
350
[Les caractères analytique et synthétique sont complémentaires. Une proposition
synthétique construit une information nouvelle à partir de son sujet et de son ou
ses prédicat(s).]
[…]
Les principes analytiques ne sont pas des axiomes, car ils sont discursifs. Et les
principes synthétiques ne sont également des axiomes que lorsqu'ils sont intuitifs."
(Fin de citation)
Remarques
Les propositions tautologiques sont vides ou sans conséquences, car elles sont
sans utilité et sans usage.
Les propositions implicitement identiques, au contraire, ne sont pas sans
conséquences et infécondes, car par l'explicitation elles rendent clair le prédicat
qui demeurait implicite dans le concept du sujet."
(Fin de citation)
351
[Le souci de prouver le résultat est louable, mais les travaux modernes montrent
que c'est parfois impossible (théorèmes de Gödel, théorie du chaos, etc.) et
souvent difficile.]
Remarque
Les moments essentiels et généraux d'un théorème sont la thèse et la
démonstration. On peut du reste marquer également la différence entre théorèmes et
corollaires de la façon suivante : ces derniers sont conclus de façon immédiate, les
premiers au contraire sont déduits par une série de conséquences de propositions
immédiatement certaines."
(Fin de citation)
352
§43. Raisonnements de l'entendement, raisonnements de la raison et raisonnements
de la faculté de juger
[165] page 125 – "Les raisonnements immédiats s'appellent aussi raisonnements de
l'entendement ; tous les raisonnements médiats par contre sont ou des
raisonnements de la raison ou des raisonnements de la faculté de juger."
Voir successivement les articles :
Raisonnements de l'entendement ;
Raisonnements de la raison (syllogismes) ;
Raisonnements de la faculté de juger.
Donné, données
Donné (adjectif et participe passé) : qui est imposé, qui provient directement de
l'expérience, qui est un fait constaté sur lequel l'esprit n'a pas encore raisonné.
Données (substantif) : résultat intuitif de cette expérience, une ou plusieurs
représentations.
K117 "L'intuition n'intervient [en tant que moyen pour qu'une connaissance se
rapporte à un objet] que dans la mesure où l'objet nous est donné. Cela n'est
possible que parce que l'objet affecte l'esprit [en y créant une représentation], ce qu'il
fait par la médiation [par l'effet] de la sensibilité." - Voir aussi Réceptivité et Divers.
Voir :
Principes suprêmes de la possibilité d'intuition ;
Connaissance infinie par opposition à la connaissance de l'entendement.
Dogmatisme – Dogmatique
Dogmatisme
Doctrine philosophique qui affirme la possibilité d'avoir des certitudes, contrairement
au scepticisme. C'est aussi l'attitude d'une personne qui affirme de façon
péremptoire, sans admettre la discussion. Exemple : Idéalisme subjectif de Berkeley.
Kant a combattu vigoureusement cette attitude dans le célèbre texte Qu'est-ce
que les Lumières ? [25].
353
Dogmatique
Kant emploie l'adjectif dogmatique dans le sens de assuré, démontrable :
[140] page 516 - "La méthode spécifique de l'enseignement en philosophie est
zététique, comme l'ont nommée quelques Anciens, c'est-à-dire qu'elle est une
méthode de recherche et elle ne devient en certains domaines dogmatique,
c'est-à-dire assurée, que pour une raison déjà exercée."
Doute – Scrupule
Le doute
(Citation de [165] page 93)
Le doute est une raison contraire ou un simple obstacle à l'assentiment qui peut être
considéré soit subjectivement, soit objectivement.
Subjectivement, le doute est parfois considéré comme l'état d'un esprit indécis ;
et objectivement comme la connaissance de l'insuffisance des raisons de
l'assentiment.
A ce dernier point de vue [le doute] se nomme : objection, c'est-à-dire une raison
objective de tenir pour fausse une connaissance tenue pour vraie.
Scepticisme et dogmatisme
Lire d'abord Scepticisme.
354
(Citation de [165] pages 94-95)
"Il y a un principe du doute consistant dans la maxime de traiter les connaissances
de façon à les rendre incertaines et à montrer l'impossibilité d'atteindre à la certitude.
Cette méthode de philosophie est la façon de penser sceptique ou le scepticisme.
Elle est opposée à la façon de penser dogmatique ou au dogmatisme, qui est une
confiance aveugle dans le pouvoir qu'a la raison a priori par simples concepts sans
critique, simplement en considération de son succès apparent.
Droit
Adjectif : est conforme au droit ce qui est conforme à la loi, notamment ce qu'on peut
exiger en vertu des lois en vigueur ou des droits de l'homme (ou de l'enfant, etc.)
[53].
Substantif : le droit est l'ensemble des règles de la vie en en société ; il s'agit plutôt
de règles écrites, car il y a aussi des règles non écrites : les coutumes.
Pour Kant, les règles du droit font partie des règles de la morale :
K134 – "…le droit ne peut aucunement apparaître de façon phénoménale, mais son
concept réside dans l'entendement et représente une propriété (la propriété morale)
des actions qui leur appartient en elles-mêmes."
355
corps autant que sur la pensée (doctrine appelée interactionnisme). Mais il n'a
pas résolu le problème de savoir comment une action de l'âme sur le corps
matériel est possible…
Voir aussi Descartes : pensée, âme et corps.
L'interactionnisme de Descartes est à l'origine d'une doctrine un peu différente,
l'occasionnalisme. Celle-ci postulait que toutes les actions de l'Univers suivent le
modèle de l'interaction entre l'âme et le corps de l'homme : les causes
paraissant naturelles ne sont en réalité qu'occasionnelles, la cause véritable de
toute action étant toujours la volonté de Dieu.
Une autre doctrine, le parallélisme psychophysique, postule aussi une différence
de nature entre le cerveau et l'esprit, mais nie toute interaction causale entre
eux.
Enfin, Leibniz [37] croyait en une coordination d'origine divine qui synchronise le
corps et l'esprit, par ailleurs distincts…
Pour expliquer l'origine des objets physiques, le matérialisme s'oppose à
l'idéalisme.
En matière de valeurs morales, le Bien s'oppose au Mal.
Autre sens de dualisme, donné par Kant : voir Idéalité - Dualisme (au sens de Kant).
Ducat
Selon le dictionnaire [13] : Monnaie d'or fin (plus rarement d'argent) de valeur
variable selon les pays et les époques.
Dyade – Dyadique
Dyade : réunion de deux principes qui se complètent.
Dyadique : qui se rapporte à une dyade. Synonyme : binaire.
Exemple : relation dyadique.
Dynamique
Voir :
Remarques : principes mathématiques et principes dynamiques ;
Exemples de différence entre principe mathématique et principe dynamique.
Economie
Selon le dictionnaire [13] : distribution des éléments d'un ensemble complexe.
356
Exemple : « Ce n'est pas assez d'avoir de grandes facultés, il faut en avoir
l'économie : et remarquez qu'économie ne veut dire là qu'ordonnance, distribution,
bon emploi et non épargne. » (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis).
Ecriture
Avec une majuscule, dans le langage chrétien et l'art : ensemble des textes de
l'Ancien et du Nouveau Testament ; la Bible.
Effectivité
Selon [13] : qui existe réellement ; dont on peut vérifier la réalité ; dont la réalité est
effective, incontestable.
Effectuation
Action par laquelle une chose parvient à la réalité ;
Mise à exécution.
Eléates
Selon le dictionnaire [13] : philosophes grecs, disciples de Zénon d'Élée [154] qui
professaient aux VIème et Vème siècles avant Jésus-Christ les principes de l'école
éléatique. La doctrine de cette école niait la réalité du changement (appelé
mouvement) : voir Achille et la tortue [103].
Elément
Source : [19] : élément.
Une des parties plus simples dont est fait un composé.
(Logique) – Un élément d'une classe (ou ensemble) est un individu appartenant
à cette classe.
(Epistémologie) – Les éléments de connaissance sont les concepts et les
jugements. Pour les éléments d'une science voir Axiomatique.
Empirique
Adjectif : fondé sur (provenant de) l'expérience sensible, donc subjectif.
Opposés : transcendantal, a priori, discursif (démontrable), objectif ou pur.
Voir aussi :
Empirisme ;
357
Différence entre le transcendantal et l'empirique ;
Pensée empirique en général (postulats).
Empirisme
Définition du substantif
Philosophie : l'empirisme est la doctrine selon laquelle l'expérience est la donnée
première et la source de la connaissance : c'est celle de Locke [39] et de Hume [40].
Les faits d'une expérience s'expliquent par d'autres faits d'expérience, sans recourir
aux explications idéalistes, téléologiques ou, plus généralement, métaphysiques.
Opposés
Dogmatisme, scepticisme, innéisme de Descartes [20], idéalisme, rationalisme.
Empirisme de Hume
La doctrine empiriste de Hume [40] ne tenant pour vrai que ce qui résulte de
l'expérience, une loi de la nature ne pourrait résulter que d'une induction basée sur
plusieurs expériences. Elle ne pourrait donc être certaine, c'est-à-dire garantir la
stabilité (la même cause produisant la même conséquence). Hume croit donc toute
science impossible, toute loi induite de l'expérience n'étant qu'une croyance !
Kant s'est donc fermement opposé à Hume, reprochant à sa doctrine de conduire au
scepticisme.
Exemple d'empirisme de Hume dénoncé par Kant, pour qui des principes a priori
sont indispensables pour que l'expérience soit possible
(Citation de K95-K96)
"Le concept d'une cause contient lui-même si manifestement le concept d'une
nécessité de la liaison avec un effet et d'une rigoureuse universalité de la règle qu'il
serait totalement anéanti si on voulait le déduire, comme Hume [40] le fit, d'une
association fréquente de ce qui se produit avec ce qui précède, et d'une habitude qui
en résulte (nécessité par conséquent simplement subjective) de lier des
représentations.
[La liaison causale qui traduit une loi de la nature ne résulte pas d'une nécessité
logique ; il faut donc la postuler et l'admettre comme loi jusqu'à preuve du
contraire : voir Principe de la primauté de la connaissance sur les objets
(doctrine).]
358
Pour Kant, Hume prétend à tort que la métaphysique est illusoire
K107 - "…en en restant uniquement à la proposition synthétique de la liaison de
l'effet avec ses causes (Principium causalitatis), [David Hume] crut pouvoir en retirer
qu'un tel principe a priori est tout à fait impossible, et, à suivre ses raisonnements,
tout ce que nous nommons métaphysique aboutirait à une simple illusion d'une
prétendue intelligence rationnelle de ce qui, en fait, est seulement emprunté à
l'expérience et a pris, par habitude, l'apparence de la nécessité…"
[Hume a bien vu que la causalité n'est pas une nécessité a priori de la raison]
Il prouva irréfutablement qu'il est tout à fait impossible que la raison pense a priori et
à partir de concepts une telle liaison, car celle-ci implique nécessité ;
359
par l'expérience, a mis certaines représentations sous la loi de l'association, et a fait
passer la nécessité subjective qui en est issue, c'est-à-dire l'habitude, pour une
nécessité objective résultant d'une connaissance.
Voir aussi :
Objectif – Subjectif ;
Une chose en général ne peut être une cause, concept réservé à l'expérience ;
Pensée empirique en général (postulats) ;
Avantages de l'empirisme ;
Sensualisme ;
Histoire de la raison pure.
Ens realissimum
Voir [130] et L'être suprêmement réel, ensemble ou fondement de toutes les réalités.
C'est le regroupement de ces objets par l'esprit qui crée l'ensemble, groupe toujours
abstrait qui n'existe qu'accompagné d'une règle de groupement : ces objets sont, par
exemple, l'ensemble des Français, l'ensemble des nombres entiers, l'ensemble des
couleurs de l'arc-en-ciel, l'ensemble des objets correspondant à un concept, etc.
360
Les différents objets regroupés dans un ensemble constituent ses éléments.
Un même ensemble, E, peut désigner un nombre fini ou infini d'éléments.
E = {Sylvie, Laurent, François} est l'ensemble de mes trois enfants ;
N = {0, 1, 2, 3…} est l'ensemble infini des nombres entiers naturels ;
D = {E, N} est l'ensemble des deux ensembles précédents : la notion d'ensemble
d'ensembles a un sens.
De même, la notion d'ensemble P des parties d'un ensemble de n éléments a un
sens, et P comprenant 2n éléments on dit que son cardinal est 2n.
Obligation de non-redondance
Par définition, tous les éléments d'un ensemble doivent être distincts.
Ensemble vide
Un ensemble vide est un ensemble qui ne contient aucun élément. Il n'existe qu'un
seul ensemble vide et on le note 0 ou .
Ensemble singulier
C'est un ensemble qui ne contient qu'un seul élément.
Attention : Ne pas confondre ensemble à 1 élément et ensemble d'éléments.
361
Complémentaire C d'un ensemble E inclus dans un ensemble F
L'ensemble C comprend tous les éléments x de F n'appartenant pas à E :
C = {x | (x F) . (x E)} où le symbole | se lit tel que.
Intersection
Soient deux ensembles E et F. On appelle intersection de ces ensembles
l'opération qui produit l'ensemble J des éléments appartenant à la fois à E et à F :
J = {x | (x E) . (x F)}
Complément
Ne pas confondre ensemble à 1 élément et ensemble d'éléments.
Entendement
362
L'entendement pense une intuition donnée en la rapportant à son sujet avec deux
concepts successifs
Faculté de la connaissance, l'entendement détermine conceptuellement le contenu
d'un objet en générant :
Une représentation synthétique de l'objet interprétée par l'intuition comme un
concept empirique de l'entendement de cet objet ;
Des jugements qui le décrivent à l'aide de concepts purs appelés catégories :
par l'entendement l'objet est pensé, alors que par la réceptivité des impressions
seule une représentation du divers en est donnée.
[56b] §21 page 88 – [Les] "concepts purs de l'entendement, […] ne sont rien de
plus que des concepts d'intuitions en général, en tant que ces intuitions sont en
elles-mêmes, par conséquent de façon nécessaire et universelle, déterminées
en jugements relativement à tel ou tel de ces moments [de l'entendement]."
K155 - Discursifs, les concepts reposent sur des fonctions de l'entendement, alors
que les intuitions, étant sensibles, reposent sur des affections :
K155 – "J'entends par fonction l'unité de l'action consistant à ordonner des
représentations diverses sous une représentation commune. Les concepts se
fondent donc sur la spontanéité de la pensée, tout comme les intuitions
sensibles se fondent sur la réceptivité des impressions."
363
(Citation de A066 [3]) - "On voit bien que, si la faculté de connaissance en
général doit s'appeler entendement (dans la signification la plus universelle du
terme), celui-ci doit contenir :
La faculté d'appréhender des représentations données pour produire une
intuition ;
La faculté de détacher ce qui est commun à plusieurs représentations pour
produire un concept, [abstraction]
Et la faculté de réfléchir [raison] pour produire une connaissance de l'objet."
(Fin de citation)
L'esprit humain a une faculté d'entendement ; c'est aujourd'hui une certitude vérifiée
par des enregistrements d'ondes cérébrales [23] [28], en plus de la certitude
philosophique qu'en avait Kant et qui est toujours d'actualité.
(Citation K194)
"Nous avons défini l'entendement […] :
Par une spontanéité de la connaissance ;
Par un pouvoir de penser (entendre, analyser et généraliser par induction) ;
Par un pouvoir de concepts ;
Par un pouvoir de jugements,
Les règles, en tant qu'elles sont objectives […] s'appellent des lois. […] Ces lois ne
sont cependant que des déterminations particulières de lois encore supérieures, dont
les plus élevées (sous lesquelles s'inscrivent toutes les autres) proviennent a priori
de l'entendement lui-même et ne sont pas empruntées à l'expérience.
364
Tous les phénomènes [ce que nous en percevons] résident donc, comme
expériences possibles, a priori dans l'entendement […] toutes les lois empiriques ne
sont que des déterminations particulières des lois pures de l'entendement […]
L'entendement pur est donc, à travers les catégories, la loi de l'unité synthétique de
tous les phénomènes basée sur l'aperception transcendantale, et ainsi est-il ce qui,
le premier et originairement, rend possible l'expérience quant à sa forme."
(Fin de citation)
Conclusion : l'entendement soumet à ses règles les représentations issues des
sens ; il est la source des principes qui imposent ces règles. (K236)
Les règles de l'entendement d'une intuition donnée lient celui-ci en une unité
synthétique selon des lois, unité à la base de l'expérience.
K237 – "…toutes les lois de la nature sont soumises à des principes supérieurs de
l'entendement, puisqu'elles se bornent à les appliquer à des cas particuliers du
phénomène."
Le fonctionnement inné de l'entendement reflète les lois de la nature ;
c'est pourquoi nous pouvons la connaître par l'expérience. (Justification :
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).)
Dans ces deux citations Kant explique que la faculté d'entendement permet la
connaissance des phénomènes (leur traduction en concepts issus de l'intuition
sensible) parce qu'elle est régie par des règles déterministes et stables ; par
entendement un même phénomène peut toujours être compris, et l'être de la même
façon. Kant ajoute (K236) : "Ces principes possèdent a priori et avant toute
expérience leur validité". Ce sont des principes généraux, applicables à toutes les
fonctions de l'entendement.
Les fonctions de l'entendement sont basées sur des processus innés du cerveau
d'un adulte, fonctions décrites par Schopenhauer dans [29] sous le nom de
Raison suffisante de l'être. Elles permettent la représentation dans l'esprit de
réalités matérielles (phénomènes) ou d'êtres abstraits comme en
mathématiques, ainsi que l'interprétation et certaines manipulations de
représentations (mémorisation, recherche, assemblage/désassemblage).
365
Voir aussi : Entendement pur : table des principes.
Voir aussi :
Limites de l'entendement résultant de l'Analytique transcendantale (K300) ;
Noumène, objet de l'entendement pur ;
Noumène en tant que chose en soi : un abus de l'entendement.
366
Pour Kant, l'entendement est la fonction mentale spontanée qui ordonne les
intuitions présentes à l'esprit du sujet selon des systèmes cohérents et des
catégories générales, pour qu'il puisse les interpréter et raisonner sur elles.
(Dit plus simplement : identifier un objet O, c'est décrire les relations de son
concept C avec des concepts a priori connus.)
Comme tout concept, le concept pur C généré par l'entendement en tant que
prédicat descriptif de l'objet O, est l'interprétation d'une représentation S en mémoire
de travail. Celle-ci résulte, à son tour, de l'aperception transcendantale d'une
représentation synthétique R du divers de O générée par l'intuition de l'objet O :
S est une représentation de représentation de l'objet O, et son concept C est
nécessairement une catégorie de l'entendement.
Le concept final C a donc été généré par l'entendement en deux étapes successives.
367
La prise de conscience d'un objet se fait en deux temps
La prise de conscience d'un objet se fait donc en deux étapes successives qui
s'enchaînent automatiquement :
La première étape (intuition) crée une synthèse du divers utilisant l'imagination
productrice ;
(Une intervention de l'entendement est lancée par le cerveau automatiquement
et immédiatement, dès la disponibilité de la représentation qu'elle doit interpréter
[23]. Cette représentation vient d'être créée par l'intuition, dont le traitement se
poursuit en utilisant la fonction transcendantale de l'imagination, fonction de
l'entendement.)
La seconde étape (entendement) crée une synthèse a priori basée sur la
représentation issue de la première.
368
L'entendement peut être perturbé par la sensibilité
Voir Le sentiment, effet de la représentation sur le sujet, appartient à la sensibilité.
Néanmoins, bien que l'on ne puisse découvrir dans l'intuition, pour l'unité
systématique intégrale de tous les concepts de l'entendement, aucun schème, un
analogon d'un tel schème peut et doit cependant être fourni, qui consiste dans l'Idée
du maximum de la division et de la liaison de la connaissance d'entendement dans
un seul et même principe."
(Fin de citation)
369
Résumé du déroulement de l'entendement
Voir Entendement (étapes).
Remarques
K156 - Toutes les actions de l'entendement permettant des jugements,
l'entendement est un pouvoir de juger. (Voir Médiate)
K161 - La logique transcendantale reçoit de l'Esthétique transcendantale un
divers de la sensibilité a priori qui lui fournit l'information pour synthétiser les
indispensables concepts purs de l'entendement, les catégories. L'entendement
d'un phénomène perçu est indispensable à l'intuition, qui se poursuit.
K162 – L'interprétation spontanée du divers d'une perception produit une unité :
D'abord analytique, avec une forme logique d'unité analytique,
(synthèse de logique générale sous un même concept, simple effet de
l'imagination) ;
Puis déductive, avec une forme logique d'unité synthétique
(synthèse pure de logique transcendantale à un même concept).
L'entendement systématise les apparences données par la sensibilité, en les
soumettant à des règles de classement en catégories.
Entendement (étapes)
Etapes en général
Quel que soit le phénomène à entendre, l'entendement d'un ensemble de
représentations en mémoire de travail considéré comme un tout passe par 3 étapes :
Reconnaissance de chaque représentation par comparaison à d'autres
représentations, qu'il faut éventuellement aller chercher en mémoire de long
terme et amener en mémoire de travail.
Cette reconnaissance bénéficie de fonctions puissantes : reconnaissance de
contenu complet ou partiel d'une représentation, d'une structure comme un ordre
d'événements ou un visage, comparaison exacte ou approchée, etc.
370
Réflexion pour trouver la relation entre les représentations reconnues (au fur et à
mesure de leur reconnaissance).
Cette réflexion utilise toutes les fonctions de l'imagination et de l'intelligence ; elle
peut, au besoin, chercher des informations supplémentaires en mémoire ou par
les sens externe et interne.
Abstraction pour éliminer les informations inutiles et ne conserver que celles du
concept à générer : concept empirique de l'entendement et catégorie.
Etapes (détails)
Pendant les étapes de l'intuition, l'entendement a fourni sa fonction
transcendantale de l'imagination ;
Enchaînement automatique : perception intuition entendement :
K193 – "Nous possédons donc une imagination pure, constituant un pouvoir
fondamental de l'âme humaine, qui sert a priori de fondement à toute
connaissance. Par l'intermédiaire de celle-ci, nous mettons le divers de l'intuition,
d'un côté, en liaison avec, de l'autre, la condition de l'unité nécessaire de
l'aperception pure. Les deux termes extrêmes, à savoir la sensibilité et
l'entendement, doivent nécessairement s'agencer l'un à l'autre par l'intermédiaire
de cette fonction transcendantale de l'imagination…"
Prise en compte de la représentation reçue de l'intuition :
il y a recognition de son concept et subsomption sous des concepts nouveaux :
concept de l'intuition et catégorie (création synthétique qui suppose une
aperception transcendantale) ;
Résultats de cette synthèse :
Les concepts de l'intuition et de l'entendement ;
L'expérience que le sujet a de sa perception, du fait de l'aperception qui a
généré le concept pur de l'entendement.
Par expérience, le phénomène initial est connu après entendement par son intuition
et sa catégorie (ses catégories si on tient compte de la génération par l'entendement
de multiples catégories). Il fait l'objet d'une connaissance ; celle-ci sera alors souvent
approfondie par la raison.
Voir aussi :
Jugements empirique, d'expérience ou de perception ;
Connaissance en général : hiérarchie des degrés.
371
devant permettre à l'entendement de créer des concepts conformes aux 12
catégories, leur liste s'en déduit :
K238 - "La table des catégories nous sert tout naturellement de guide pour la
table des principes, puisque ceux-ci ne sont […] que des règles pour l'usage
objectif des catégories."
Kant classe ces principes sous 4 titres : axiomes, anticipations, analogies, postulats,
figurant dans la table suivante.
1.
Axiomes de l'intuition
2. 3.
Anticipations de la perception Analogies de l'expérience
4.
Postulats de la pensée empirique en général
372
Exemples de différences entre principe mathématique et principe dynamique
1 - En matière de régression
K445 – La régression dans la chaîne de causalité d'un phénomène qui précède
l'instant présent : la cause de la cause de la cause… remonte-t-elle à l'infini dans
le passé, ou a-t-elle un commencement sans cause ?
Kant distingue deux sortes de régressions, soumises à une même condition de
possibilité :
La régression intuitive dans le temps (où les phénomènes d'une série
chronologique se succèdent pendant que le temps passe), qu'il qualifie de
mathématique ;
La régression discursive due à la causalité, où la cause d'un phénomène
précède sa conséquence, qu'il qualifie de dynamique.
K445 – "Si vous n'admettez pas dans le monde de terme qui soit
mathématiquement premier dans l'ordre du temps, vous n'avez pas non plus
besoin de rechercher un terme qui soit dynamiquement premier dans l'ordre de
la causalité."
Détails :
Axiomes de l'intuition ;
Anticipations de la perception et de l'expérience ;
Analogies de l'expérience ;
Postulats de la pensée empirique en général.
Entendement commun
Voir d'abord Entendement.
373
et […] qu'un tel sens ne possède pas la moindre aptitude à édicter des règles
universelles,
mais qu'au contraire nulle représentation de ce genre concernant la vérité, la
convenance, la beauté ou la justice ne pourrait jamais nous venir à l'esprit si
nous n'étions pas capables de nous élever au-dessus des sens jusqu'aux
pouvoirs supérieurs de connaissance.
[Le sens commun est censé juger « comme tout le monde », mais sans émotion]
En fait, sous l'expression de sensus communis, il faut entendre l'Idée d'un sens
commun à tous, c'est-à-dire un pouvoir de juger qui, dans sa réflexion, tient compte
en pensée (a priori) du mode de représentation de tout autre [individu], pour en
quelque sorte comparer son jugement [personnel] à la raison humaine tout entière
[sans les] conditions subjectives particulières [qui exerceraient] une influence néfaste
sur le jugement."
(Fin de citation)
Enthymème
Forme de raisonnement dans laquelle le syllogisme est réduit à deux termes,
l'antécédent et le conséquent. Exemple : « Je pense, donc je suis ».
374
Voir aussi : Syllogisme ; Episyllogisme ; Polysyllogisme ; Prosyllogisme ; Sorite ;
Syllogismes formels et syllogismes cachés.
Entéléchie
Tradition aristotélicienne, une entéléchie est un principe créateur de l'être, par lequel
il trouve sa perfection en passant de la puissance [l'aptitude à être] à l'acte [l'être
dans sa plénitude]. Pour Aristote [43], l'âme est l'entéléchie et la forme d'un corps
naturel possédant la vie en puissance ; c'est son principe d'organisation.
Epicurisme
Source : dictionnaire [9].
Courant philosophique des disciples d'Epicure [80], c'est d'abord une éthique qui
considère le plaisir comme le principe et la fin d'une vie heureuse ; c'est ensuite un
eudémonisme.
Epicure est matérialiste et l'épicurisme est athée. Sa philosophie est basée sur la
sensation (dont toute connaissance dérive) et se méfie des définitions générales (à
part quelques indispensables concepts a priori) et des raisonnements spéculatifs. Sa
représentation de la matière, du corps et même de l'âme, faits d'atomes simples et
de vide, est empruntée à Démocrite [79] ; elle exclut toute téléologie : la
compréhension physique de la nature et de son origine n'a pas besoin d'un Dieu
créateur.
Que l'on doive, dans l'explication des phénomènes, se mettre à l'ouvrage comme si
le champ de la recherche n'était découpé par l'existence d'aucune limite ni
commencement du monde ;
[Il faut interpréter les phénomènes sans se laisser arrêter par des objections
philosophiques comme la nécessité de commencer une chaîne de causalité par
un élément sans cause]
qu'il faille admettre la matière du monde telle qu'elle doit l'être si nous voulons en
être instruits par l'expérience ;
375
[Il faut admettre la réalité des représentations que nous formons des
phénomènes pour pouvoir confronter avec elle ce que nous en comprenons]
que l'on ne doive recourir à aucune autre génération de ce qui a lieu que celle qui est
déterminée par des lois immuables de la nature,
[On ne doit expliquer aucun état ou évolution d'un objet physique autrement qu'à
l'aide des lois immuables de la nature]
ce sont là, encore maintenant, des principes très justes, bien que peu observés, pour
élargir la philosophie spéculative et en même temps aussi pour découvrir les
principes de la morale indépendamment de tout secours étranger, sans que celui qui
désire ignorer ces principes dogmatiques aussi longtemps que nous avons affaire à
la simple spéculation puisse être accusé pour autant de vouloir les nier."
[Ces principes très justes permettent d'enrichir la philosophie spéculative et la
morale par apport de vérités d'expérience, tout en permettant à un philosophe
qui veut les ignorer dans des spéculations de le faire sans être accusé de les
rejeter.]
(Fin de citation)
Epistémologie
Partie de la philosophie qui a pour objet l'étude critique des postulats, conclusions et
méthodes d'une science particulière, considérée du point de vue de son évolution,
afin d'en déterminer l'origine logique, la valeur et la portée scientifique et
philosophique.
Episyllogisme
Dans un polysyllogisme (raisonnement comprenant plusieurs syllogismes
successifs), un épisyllogisme est un syllogisme dont la prémisse est la conclusion du
syllogisme précédent, le prosyllogisme.
Equivalence
Equivalence de propositions
En Logique symbolique la relation d'équivalence « si et seulement si » relie deux
propositions p et q qui ont même valeur de vérité : toutes deux fausses ou toutes
deux vraies. L'équivalence est parfois appelée bi-implication.
Notation : p q.
376
Erotématique
Voir Méthode acroamatique ou érotématique.
Mais comment est possible l'erreur au sens formel du terme, c'est-à-dire comment
est possible la forme de la pensée contraire à l'entendement ?
Voilà qui est difficile à comprendre, de même que de façon générale on ne comprend
pas comment une faculté quelconque peut s'écarter de ses propres lois essentielles.
[…]
Si nous n'avions d'autre faculté de connaître que l'entendement, nous ne serions
jamais dans l'erreur.
[La sensibilité, autre source de connaissance, ne peut pas non plus être en cause]
Mais outre l'entendement nous avons encore une autre source de connaissance qui
est indispensable. C'est la sensibilité, qui fournit la matière à notre pensée et
fonctionne en outre selon d'autres lois que l'entendement. Mais de la sensibilité
considérée en elle-même ne saurait non plus naître l'erreur, car les sens ne jugent
pas du tout.
Il résulte en effet de cette influence que dans nos jugements nous prenons pour
objectives des raisons simplement subjectives et par suite nous confondons la simple
apparence de la vérité avec la vérité elle-même. Car c'est précisément en cela que
consiste la nature de l'apparence, qui, de ce fait, doit être considérée comme une
raison de prendre pour vraie une connaissance fausse.
Ainsi ce qui rend l'erreur possible, c'est l'apparence qui dans les jugements nous fait
confondre ce qui est simplement subjectif avec ce qui est objectif."
(Fin de citation)
377
Conclusion sur l'origine des erreurs de jugement affectant la connaissance
(Citation de [165] pages 59-60)
[Erreurs dues à l'inattention à l'influence de la sensibilité sur l'entendement]
"On peut bien aussi rendre l'entendement responsable de l'erreur dans la mesure où,
faute de prêter l'attention requise à cette influence de la sensibilité, il se laisse égarer
par l'apparence qui en résulte en tenant pour objectifs des principes déterminants
simplement subjectifs du jugement ou en faisant valoir pour vrai selon ses propres
lois ce qui n'est vrai que selon les lois de la sensibilité.
[C'est notre propension à juger et décider sur des bases subjectives qui est
responsable de nos erreurs]
Par conséquent c'est seulement de l'ignorance que les bornes de l'entendement sont
responsables ; c'est à nous-mêmes que nous devons imputer la responsabilité de
l'erreur. La nature […] n'est pas cause de l'erreur. Ce qui nous y conduit c'est notre
propre penchant à juger et décider là-même où la limitation de notre capacité de
juger et de décider ne nous donne pas le pouvoir de le faire."
(Fin de citation)
Ineptie
Selon le dictionnaire [13]
(En parlant de quelque chose d'inanimé) : Une ineptie témoigne de l'incompétence
ou de la sottise de son auteur ; elle est sans valeur, dépourvue de sens.
Chez Kant
Source [165] page 63
L'erreur qui n'a même pas l'excuse de l'apparence est inepte.
Une erreur grossière est celle qui révèle une ignorance dans la connaissance
commune ou une faute contre l'observation commune.
L'erreur dans les principes est plus grave que l'erreur dans l'application.
378
Connaissance exacte et connaissance vague
(Citation de [165] pages 60-61)
"Une connaissance
est exacte quand elle est conforme à son objet ou quand, relativement à son
objet, elle ne donne pas lieu à la moindre erreur, [sinon elle est inexacte]
elle est vague quand elle peut comporter des erreurs, mais qui ne nuisent pas à
son propos. [Des erreurs nuisant à son propos la rendraient inexacte.]
Il est parfois nécessaire de commencer par donner une détermination large à une
connaissance (late determinare), spécialement dans les choses historiques. Mais
dans les connaissances rationnelles tout doit être déterminé exactement (stricte).
Quand la détermination est large, on dit qu'une connaissance est déterminée praeter,
propter.
La première maxime peut être dite la façon de penser éclairée, la seconde la façon
de penser élargie, la troisième la façon de penser conséquente ou cohérente."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Perfection d'une connaissance : objective = exacte, subjective = subtile ;
Connaissance : perfection logique selon la relation – B. Vérité ;
Sens commun ;
Concernant l'invocation du bon sens.
379
Esotérique
Adjectif
Enseignement de la philosophie : qui est réservé aux seuls initiés.
Par extension dans le langage courant, en parlant d'un comportement, d'une
œuvre ou d'un auteur : accessible à un cercle restreint d'auditeurs ; d'accès
difficile.
Synonyme : acroamatique
Espace
K120 - K121 - "L'espace est une représentation nécessaire, a priori, qui intervient à
la base de toutes les intuitions externes, [notamment des phénomènes K128]".
C'est un principe de connaissance des objets extérieurs, forme pure des intuitions
externes, un archétype inné. C'est un concept a priori de l'intuition, une forme du
sens externe en général. L'espace est un et infini, en philosophie comme en
sciences [30].
Voir Principe suprême de la possibilité d'intuition relativement à la sensibilité.
(Citation de K129)
[Tout phénomène occupe un volume d'espace situé à une certaine position]
"Si je peux dire a priori : tous les phénomènes extérieurs sont dans l'espace et sont
déterminés a priori selon des rapports spatiaux,
[Un objet extérieur (un phénomène) a nécessairement une existence dans
l'espace, où il occupe un certain volume. Des objets distincts ont des positions
relatives par rapport à l'espace (dans un système de coordonnées), dont on peut
déduire la position de chacun par rapport à un autre.
Explication du caractère a priori de ces connaissances : voir Ce qu'un sujet peut
déduire du Je pense, selon Kant.]
380
Description approfondie de l'espace, abstraction absolument a priori, intuition pure
(Citation de K431 note *)
"L'espace est simplement la forme [une information] de l'intuition extérieure (intuition
formelle), mais non pas un objet réel qui puisse être intuitionné extérieurement.
L'espace, avant toutes les choses qui le déterminent (qui le remplissent ou le
limitent), ou qui, bien plutôt, donnent une intuition empirique structurée
conformément à la forme de l'espace, n'est, sous le nom d'espace absolu, rien
d'autre que la simple possibilité de phénomènes extérieurs, en tant qu'ils peuvent soit
exister en eux-mêmes, soit venir s'ajouter à des phénomènes donnés.
[L'espace est donc une abstraction permettant de concevoir l'existence d'objets
physiques qui en occupent une partie, et leur position par rapport à d'autres
objets ou un référentiel. L'espace lui-même est, par définition, unique, continu,
vide, invisible et impossible à percevoir. C'est une abstraction absolument a
priori, une intuition pure, un concept de base.]
Si l'on veut poser un de ces deux éléments en dehors de l'autre (l'espace en dehors
de tous les phénomènes), il en naît toutes sortes de déterminations vides de
l'intuition externe, qui ne sont pourtant pas des perceptions possibles : par exemple,
le mouvement ou le repos du monde dans l'espace vide infini, ce qui constitue une
détermination de la relation intervenant entre les deux termes qui ne peut jamais être
perçue et qui est donc aussi le prédicat [la propriété] d'un simple être de raison."
(Fin de citation)
K202 - "La simple forme de l'intuition sensible externe, l'espace, n'est [pas] une
connaissance ; l'espace fournit seulement le divers de l'intuition a priori pour une
connaissance possible."
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est l'espace,
tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps."
(Voir appréhension)
Comme l'espace lui-même, le volume d'un objet perçu est divisible à l'infini :
K245 – "Tous les phénomènes en général sont des grandeurs continues, aussi
bien selon leur intuition, comme grandeurs extensives, que selon la simple
perception (sensation et par conséquent réalité) comme grandeurs intensives."
K437 – "L'espace n'est pas constitué de parties simples, mais d'espaces."
381
priori, qui sont inscrites en nous comme formes de notre intuition sensible avant
même qu'un objet réel ait déterminé, à travers la sensation, notre sens à le
représenter sous ces rapports sensibles."
et il n'est pas un corrélat des phénomènes, mais la forme des phénomènes eux-
mêmes.
L'espace ne peut donc intervenir en premier et absolument (par lui seul), dans
l'existence des choses, comme une instance déterminante, puisqu'il n'est
nullement un objet, mais seulement la forme d'objets possibles."
(Fin de citation)
C'est l'entendement qui organise le divers de l'intuition pour obtenir une
connaissance utilisant l'espace et le temps, intuitions pures pour Kant.
Celui-ci ne retient pas les concepts newtoniens d'espace et de temps absolus de
l'Univers : dans les résultats d'interprétation d'un phénomène par l'entendement,
il ne reconnaît qu'un espace et un temps relatifs au sujet ;
pour lui, l'entendement ne situe pas le phénomène en un lieu particulier absolu
et à un instant particulier (date absolue), il interprète la perception spatio-
temporelle d'un homme comme exclusivement relative à lui-même :
382
K123 - "Nous ne pouvons […] parler de l'espace, d'êtres étendus, etc., que
du point de vue d'un être humain. […] Ce prédicat [l'espace] n'est attaché
aux choses que dans la mesure où elles nous apparaissent, c'est-à-dire en
tant qu'elles sont des objets de la sensibilité…"
Les notions absolues de lieu géographique et de date (jour + heure) ne sont pas
données pour Kant, car elles ne sont pas physiques, pas perceptibles. Elles sont
également absurdes pour la physique relativiste moderne : tout événement (lieu,
heure) est un point du continuum espace-temps à 4 dimensions de l'Univers,
toujours défini par rapport à un repère arbitraire ; l'espace et le temps absolus de
Newton [46] sont des notions simplistes (détails : [12]). En pratique, donc, ces
notions absolues sont des abstractions que nous imaginons après contact
extérieur, par exemple en regardant une carte et une montre.
383
C'est pourquoi, puisque, de façon générale, rien ne peut être donné aux sens,
sinon en conformité avec les axiomes primitifs de l'espace, et à ce qui résulte de
la nature de l'espace (selon les les préceptes de la géométrie),
quoique le principe de ces axiomes et de ces conséquences soit seulement
subjectif, il sera nécessairement d'accord avec les choses sensibles car, dans
cette mesure, il sera d'accord avec soi ;
[il s'agira des mêmes intuitions, pour la construction des concepts
mathématiques et pour l'appréhension des phénomènes]
et les lois de la connaissance sensible seront les lois de la nature en tant qu'elle
peut tomber sous les sens.
La nature respecte les principes de la géométrie
Voilà pourquoi la nature est rigoureusement soumise aux principes de la
géométrie : en cette science, toutes les modalités de l'espace sont démontrées
selon une hypothèse qui n'est pas arbitrairement forgée, mais intuitivement
donnée, comme la condition subjective de tous les phénomènes par lesquels la
nature puisse jamais être révélée aux sens."
[Les lois que l'homme conçoit pour la nature (ensemble des phénomènes)
sont les mêmes qu'il conçoit pour la géométrie, elles sont basées sur les
mêmes intuitions.]
(Fin de citation)
Différence entre limite et borne
Dans le domaine de variation d'une variable, celle-ci peut tendre vers une limite :
elle peut s'en approcher aussi près que l'on veut (voir Convergence).
Indépendamment d'une limite (qui peut exister ou non) il peut exister une valeur
appelée borne qu'une variable ne peut dépasser : la variable est alors dite
bornée et une variable numérique peut avoir des bornes supérieure et inférieure.
Cette borne peut être ou ne pas être une limite : la variable ne peut pas
nécessairement s'en approcher aussi près que l'on voudra.
Exemple. Considérons la suite des nombres de la forme xn = 2+1/n, où n est un
entier positif : 1, 2, 3… On a alors x1=3 ; x2=2.5 ; etc.
Lorsque n tend vers l'infini, la suite tend vers 2. Mais quel que soit n, la suite ne
peut dépasser 3, elle est bornée par 3.
384
Chez Kant
Lire d'abord :
Concept ;
Compréhension et extension (contenu dans et contenu sous).
K566 – "Les différentes espèces de terres (qui constituent la matière des pierres et
même des métaux), on a peu à peu cherché à les ramener à trois, et finalement à
deux ; non encore satisfait toutefois de ce résultat, on ne peut se déprendre de l'idée
qu'il faille présumer pourtant encore derrière ces variétés l'existence d'un genre
unique, voire d'un principe commun aux terres et aux sels."
Esprit
385
Psychisme, ensemble des processus mentaux ;
Principe de la pensée et de l'activité réfléchie de l'homme.
Kant
K691 note 13 – Esprit désigne l'ensemble des facultés.
Voir aussi : âme.
Essence
Substantif de philosophie - D'après les dictionnaires [9], [19] et [13]
Sens métaphysique
Par opposition à accident : ce qui est considéré comme la réalité fondamentale
d'un être, par opposition aux attributs secondaires et aux modifications qui ne
l'atteignent que superficiellement ou temporairement.
Par opposition à existence : la nature d'un être, par opposition au fait d'exister.
Sens logique
Au sens conceptualiste : ensemble des déterminations qui définissent un objet
de pensée. L'essence s'oppose alors à l'existence comme le rationnel aux
données de l'expérience, ou comme le possible à l'actuel.
Principe premier et interne de ce qui appartient à la possibilité des choses
Kant [73] – "L'essence est le principe premier et interne [défini dans l'absolu,
indépendamment de tout autre objet, de toute circonstance] de tout ce qui
appartient à la possibilité des choses."
Au sens nominaliste il n'y a pas d'essence, mais ce que les réalistes et les
conceptualistes ont appelé essence n'est que l'ensemble des caractères
connotés par un mot. Exemple : la glace qui, pilée, garde son essence, mais qui
la perd une fois fondue.
Chez Kant
Kant distingue :
Une essence idéelle, logique, connaissable par analyse du concept décomposé
en ses éléments ;
Une essence réelle (celle du phénomène, de l'objet physique) inconnaissable :
c'est le principe premier interne de tout ce qui appartient nécessairement à une
chose donnée (ci-dessus).
L'homme, limité par son entendement et le donné de son intuition, peut accéder
au phénomène (et au concept de sa représentation), mais pas à la chose en soi
dont les informations ne sont pas accessibles par expérience.
Voir :
Chose en soi ;
386
Idée ;
Noumène ;
L'essentiel et l'extra-essentiel ;
Différence entre essence logique et essence réelle.
Définitions
K144 - L'esthétique est la science des règles de la sensibilité en général, la logique
générale étant la science des règles de l'entendement en général.
K207 – "Toute intuition possible pour nous est sensible (Esthétique) : donc la pensée
d'un objet en général ne peut en nous devenir connaissance, par l'intermédiaire d'un
concept pur de l'entendement, que si ce concept est mis en rapport avec des objets
des sens" : voir catégories.
Donc l'intuition purement intellectuelle est impossible.
387
La perception ne construit une représentation d'objet que si celui-ci affecte
l'esprit ;
L'objet affecte l'esprit par la médiation [l'intermédiaire] de la sensibilité ;
La sensibilité n'agit que parce que l'esprit a la capacité de percevoir des objets,
capacité appelée réceptivité ;
Il vous faut donc, convaincu par la nécessité avec laquelle ce concept s'impose à
vous, convenir qu'il possède sa place dans votre pouvoir de connaître a priori."
(Fin de citation)
Il supprime ensuite tout ce qui résulte de la sensation du phénomène.
388
par les modèles préexistants du subconscient ; c'est là le sujet de l'esthétique
transcendantale.
Voir aussi :
Chose en soi ;
Philosophie transcendantale ;
Esthétique, organisation et information ;
Différence entre Logique et Esthétique.
Nous savons aujourd'hui que la force mécanique n'est qu'un effet de l'une ou de
plusieurs des 4 forces fondamentales. Nous avons constaté à quel point la
complexité des systèmes réels, ceux du vivant comme ceux de nos ordinateurs ou
de notre société, rend impossible la définition de leurs lois d'évolution déterministes à
partir des lois basées sur les forces fondamentales :
389
on ne peut déduire directement les lois de la biologie moléculaire de l'équation
de Schrödinger [64] qui régit la formation des liens moléculaires ;
connaissant les lois de biologie moléculaire on ne peut en déduire celles de la
transmission de signaux entre neurones, et encore moins celles de la pensée…
390
Je peux décrire un PC par ses composants et leurs liaisons filaires. Mais pour
distinguer entre un PC utile, exécutant un logiciel de comptabilité, et un PC
identique sans logiciel de ce type, donc inutile, un comptable a besoin de décrire
le logiciel : gestion des comptes du plan comptable, calcul et édition des
comptes d'exploitation et déclarations fiscales, etc.
Certaines lois naturelles sont décrites par une logique algorithmique, basée par
exemple sur des systèmes d'équations différentielles susceptibles de fournir des
solutions multiples entre lesquelles il faut choisir.
(Le déterminisme et ses problèmes sont décrits de manière approfondie dans [12].)
Etant (Heidegger)
Pour Heidegger [127], un étant est un objet qui existe réellement dans le temps (à un
instant particulier) et dans l'espace (où il occupe un certain volume).
Voir aussi : Etre, exister : les différentes significations.
Ethique
391
Selon le dictionnaire [19]
Science ayant pour objet le jugement d'appréciation en tant qu'il s'applique à la
distinction du bien et du mal.
Le mot éthique a été appliqué à la morale sous toutes ses formes, soit comme
science, soit comme art de diriger sa conduite ; mais depuis la fin du XVIIIe siècle, on
a précisé :
La morale en général est un commandement qui s'adresse à l'individu ;
L'éthique définit un commandement qui suppose aussi une société d'êtres
moraux.
Chez Kant
[109] page 220 – L'éthique peut […] être définie comme le système des fins de la
raison pure pratique.
Ethologie
Etude des mœurs (humaines ou animales) en tant que faits sociaux.
Etiologie
Discipline qui a pour objet la recherche des causes.
392
« 8 est pair » (8 appartient à l'ensemble des nombres pairs).
L'inclusion d'une classe dans une autre : « Les hommes sont mortels »,
parfois écrit « L'homme est mortel ».
Chez Kant
Kant ne définissant pas ce qu'il entend par le substantif « être », chaque lecteur doit
en construire sa propre définition…
Un être est nécessaire si son existence est (ou peut être) prouvée, inévitable.
Un être est absolument nécessaire si son existence est indépendante des
circonstances, c'est-à-dire absolument inconditionnée ; son inexistence est alors
impossible.
L'être absolument premier est le Créateur incréé, Dieu.
Exemples
K448 (Idées transcendantales : 4ème conflit) – "Thèse : Au monde appartient
quelque chose qui, comme sa partie ou comme sa cause, est un être absolument
nécessaire."
K450 - "Pour prouver l'existence d'un être nécessaire, je suis tenu ici de ne me servir
que de l'argument cosmologique, tel qu'il s'élève du conditionné dans le phénomène
à l'inconditionné dans le concept [d'être absolument nécessaire], en considérant cet
inconditionné comme la condition nécessaire de la totalité absolue de la série [des
conditions]."
K450 - "La pure preuve cosmologique ne peut démontrer l'existence d'un être
nécessaire qu'en laissant indécidée la question de savoir si cet être est le monde lui-
même ou une chose distincte de lui."
K510 – "…une existence qui puisse être la condition suprême de tout ce qui change,
c'est-à-dire à l'être nécessaire."
Voir aussi :
Idée transcendante (origine de la recherche d'un être absolument nécessaire) ;
Etre - Etre nécessaire – Etre absolument nécessaire ;
Etre raisonnable ;
Etre de tous les êtres.
393
Etre de raison – Etre de pensée
Kant appelle ainsi une chose en soi ou une idée ;
ne pas confondre avec être raisonnable.
Etre raisonnable
Ne pas confondre avec être de raison.
Exemple : l'homme.
Dans la mesure où, pour dériver les actions à partir de lois, la raison est requise, la
volonté n'est rien d'autre qu'une raison pratique.
[2ème cas : la volonté est aussi déterminée par des conditions subjectives]
"Mais si la raison ne détermine pas suffisamment, par elle seule, la volonté, si celle-ci
reste soumise à des conditions subjectives (à divers mobiles) ne s'accordant pas
toujours avec les conditions objectives, - bref : si la volonté n'est pas encore en soi
entièrement conforme à la raison […], les actions qui sont reconnues objectivement
comme nécessaires sont subjectivement contingentes, et la détermination d'une telle
volonté conformément à des lois objectives est une contrainte."
394
[Si l'homme a des désirs non conformes à la raison objective, agir selon celle-ci
est une contrainte et demande d'aller contre ces désirs.]
(Fin de citation)
[Tous les impératifs énoncent un devoir, relation d'une loi objective de la raison à une
volonté qui demeure libre.] Ils disent que faire ceci ou cela, ou bien s'en abstenir,
serait bon, mais ils le disent à une volonté qui ne fait pas toujours ce qu'elle fait parce
qu'il lui est représenté que la chose est bonne à faire.
Mais ce qui est pratiquement bon, c'est ce qui détermine la volonté par l'intermédiaire
de représentations de la raison, par conséquent non pas à partir de causes
subjectives, mais de manière objective, c'est-à-dire selon des principes qui valent
pour tout être raisonnable comme tel."
(Fin de citation)
Définition vague
Voir Conclusion sur la possibilité des choses – Concept de la suprême réalité.
395
En conclure que l'idée d'un ensemble de toutes les possibilités est l'idée d'un
tout de la réalité.
Euclidien
Adjectif (géométrie) : fondé sur le premier postulat mathématique d'Euclide [54] :
« Par deux points on peut faire passer une ligne droite et une seule. »
La géométrie euclidienne postule qu'il y a une droite - et une seule - passant par
deux points donnés. Il y a d'autres géométries possibles : dans une géométrie
sphérique (où l'espace est la surface d'une sphère comme la Terre) et où la « ligne
droite » est définie comme « le plus court chemin entre deux points », ce plus court
chemin est le plus petit des deux arcs de grand cercle (centrés au centre de la Terre)
passant par les deux points : ce n'est pas une ligne droite, il n'y en a pas sur une
surface sphérique.
Il y a des géométries hyperboliques, où par exemple deux droites parallèles
convergent d'un côté et divergent de l'autre et où, par un point extérieur à une droite,
passent au moins deux droites parallèles à la première.
En géométrie riemannienne il n'y a pas de droite parallèle à une droite donnée
passant par un point extérieur à cette droite…
396
Eudémonisme
Doctrine philosophique qui fait du bonheur le bien suprême, donc le but de toute
action, et selon laquelle le bonheur véritable est :
Intellectuel, non le résultat d'un plaisir des sens ;
Durable et non passager ;
Rationnel et non émotionnel.
Ex nihilo
Voir 2 – Si une chose existe, elle a nécessairement été créée ex nihilo
Exaltation
Substantif
En général : action de donner beaucoup d'importance, de valeur à quelque
chose, de lui accorder de l'admiration, des éloges ; résultat de cette action.
Chez Kant : l'exaltation de l'esprit est une forme de délire :
K294 – "[L'entendement] est le pays de la vérité (nom fascinant), entouré par un
océan vaste et agité de tempêtes, siège propre de l'illusion, où maints bancs de
brouillard et maints blocs de glace bientôt fondus font croire de façon trompeuse
à des terres nouvelles et, abusant sans cesse par de vaines espérances le
navigateur exalté à la perspective de nouvelles découvertes, l'empêtrent dans
des aventures auxquelles il ne peut jamais renoncer, mais qu'il ne peut pourtant
jamais non plus conduire à leur terme."
Existence de Dieu
Voir d'abord Dieu.
397
D'après la définition de l'Univers il n'y a pas et il n'y a jamais eu d'extérieur de
l'Univers : la notion de Dieu extérieur est donc contradictoire.
Nous avons la certitude scientifique que notre Univers est né d'une explosion
colossale, le Big Bang, il y a 13.8 milliards d'années [30]. Nous ne savons pas s'il
a existé quelque chose (espace-temps ou matière-énergie) avant ce Big Bang,
nous n'avons à ce sujet que des conjectures. Nous ne savons même pas si
l'espace-temps n'est pas apparu en même temps que la matière-énergie de
l'Univers lors du Big Bang.
La Relativité générale d'Einstein nous apprend que le temps est une dimension
nécessaire de l'espace-temps quadridimensionnel de l'Univers, dont on ne peut
concevoir un espace réel sans temps ou un temps réel sans espace.
D'après la définition de l'Univers il n'y a pas et il n'y a jamais eu d'avant
l'Univers : la notion de Dieu existant avant l'Univers est donc contradictoire.
Nous n'avons pas la certitude qu'il n'y a pas et qu'il n'y a jamais eu d'espace-
temps extérieur et antérieur à notre Univers. Nous savons seulement qu'un tel
espace-temps sera toujours hors de portée de nos instruments, et qu'aucune
théorie sur ses limites spatio-temporelles ne pourra être confirmée par
l'expérience.
C'est pourquoi nous pouvons faire comme si l'Univers est, et a toujours été, tout
ce qui existe en tant que matière-énergie, que temps et qu'espace.
398
La Relativité générale exclut la possibilité d'une interaction transcendante
La Relativité générale exclut la possibilité d'un déplacement de matière-énergie plus
vite que la lumière. C'est pourquoi, par exemple, un voyage vers l'étoile la plus
proche, Proxima Centauri, située à 4.2 années-lumière du Soleil, prendra toujours
plus de 4.2 années, quels que soient les progrès scientifiques futurs.
399
Voir aussi :
Intelligence suprême (Intelligent Design) ;
[Concept résultant : Dieu transcendantal, origine de l'unité de toute réalité
empirique] ;
Laïcisation de la morale ;
Le prétendu fossé infranchissable séparant la pensée et les actions de l'homme ;
Croyance doctrinale.
Détails : [113].
400
mais elle n'en a même pas besoin pour ses explications physiques ;
[voir C'est l'homme qui introduit l'ordre et la régularité dans les lois de la
nature]
bien plus, si un tel principe [d'intervention transcendante] lui était d'autre part
proposé (par exemple, une influence d'êtres immatériels), elle se doit de l'exclure
et de se garder de l'introduire dans la suite de ses explications, qu'elle doit
toujours fonder uniquement sur ce qui peut, à titre d'objet des sens, relever de
l'expérience et être mis, selon les lois de l'expérience, en connexion avec nos
perceptions réelles."
Voir aussi :
Impossibilité de prouver apodictiquement que Dieu n'existe pas ;
La possibilité et l'impossibilité d'un Dieu transcendantal sont indémontrables.
Existence du monde
Voir Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant.
Existentialisme
Philosophie qui affirme le primat (prééminence, suprématie) de l'existence vécue,
individuelle, irréductible à un concept, une définition, une essence. [13]
Exotérique
En parlant d'enseignements donnés aux non-initiés : qui peut être divulgué, enseigné
publiquement.
Opposé : ésotérique.
[Exotériques, ésotériques]
Parmi ces doctrines, les unes étaient exotériques, qu'il communiquait au peuple
entier ; les autres étaient secrètes et ésotériques, destinées uniquement aux
membres de sa société, parmi lesquels il fit entrer quelques-uns dans son amitié la
plus confiante et les sépara entièrement des autres."
(Fin de citation)
401
Expérience, expérience effective
Chez Kant expérience est utilisé dans le sens de prendre conscience de, connaître :
c'est un sens psychologique :
K249 – "L'expérience est une connaissance empirique […] qui détermine un objet par
des perceptions. Elle est donc une synthèse des perceptions qui ne se trouve pas
elle-même contenue dans la perception, mais contient l'unité synthétique du divers
de ces perceptions dans une conscience, laquelle unité [est représentée par un
concept pur de l'entendement, qui] constitue l'essentiel d'une connaissance des
objets des sens, c'est-à-dire de l'expérience (et non pas seulement de l'intuition ou
de la sensation des sens)."
Voir :
Intuition (étapes) ;
Entendement (étapes) ;
Jugements et synthèses.
402
l'unité formelle de l'expérience et, avec elle, toute validité objective (vérité) de la
connaissance empirique. Or ces principes de la recognition du divers, en tant
qu'ils concernent simplement la forme d'une expérience en général, sont les
catégories.
K195 - "L'entendement pur est donc, à travers les catégories, la loi de l'unité
synthétique de tous les phénomènes, et ainsi est-il ce qui, le premier et
originairement, rend possible l'expérience quant à sa forme."
K287 – "L'expérience […] constitue l'unique connaissance où nous sont donnés des
objets."
(L'expérience est donc un fondement dont la connaissance d'un objet matériel ou
d'un phénomène ne peut se passer, mais pas l'unique fondement : chaque esprit
y ajoute synthétiquement des aprioris à lui, issus de sa sensibilité et de son
entendement (voir Intuition étapes) ; en tant que fonction l'expérience effectue
une unification objective a priori du donné.)
Unité de l'expérience
Les perceptions successives par la conscience du divers d'un phénomène ont lieu
sans impression de coupure. Le phénomène reste constamment présent à l'esprit,
403
l'expérience qu'il en a présente une unité, le phénomène fait un tout à la fois dans le
temps et dans l'espace : à un instant donné, l'esprit a conscience d'une intuition.
K251 – "…à partir de perceptions, doit se produire l'unité de l'expérience (non pas
comme perception même, [mais] en tant qu'intuition empirique en général)…"
Voir Principe de l'unité synthétique du divers de toute intuition possible.
Pourtant la représentation brute d'un objet reçue de la perception ne décrit pas celui-
ci complètement (ce n'est pas une connaissance, car il manque les synthèses), pas
plus que ne le décrit une chose en soi (concept spéculatif inapplicable à
l'expérience).
Exponible
Selon le dictionnaire [19] : (Logique) On appelle ainsi des propositions composées
où la composition n'est pas visible dans la forme, et qu'il faut donc « expliquer » ou
« exposer » pour les analyser logiquement. Ce sont les propositions :
exclusives (propositions affirmant qu'un prédicat n'appartient qu'à des sujets
d'une classe donnée),
exceptives (propositions composées qui affirment un prédicat d'un sujet général,
en exceptant de cette affirmation un ou plusieurs individus ou espèces),
404
comparatives (propositions affirmant qu'un sujet possède tel ou tel caractère à
un plus haut ou à un moindre degré qu'un autre sujet),
inceptives (propositions qui énoncent qu'une chose a commencé d'être),
désitives (opposé d'inceptives, elles énoncent qu'une chose a cessé d'être).
Exposition - Exposé
Exposition transcendantale
K122 - "J'entends par exposition transcendantale l'explication d'un concept comme
constituant un principe à partir duquel la possibilité d'autres connaissances
synthétiques a priori peut être aperçue."
Exposé de la logique
Selon le dictionnaire [13] : Exposé de désigne un discours oral ou écrit, où sont
présentés selon un ordre déterminé par les règles d'une discipline ou la situation
d'énonciation, des données de fait, le contenu d'une discipline, d'une doctrine ou
d'une œuvre, les termes d'un problème dans le but d'informer ou de fournir la matière
d'une discussion.
405
Dans l'exposé populaire, au contraire, les règles doivent être présentées dans le
particulier ou in concreto.
L'exposé scolastique est le fondement de l'exposé populaire ; car seul peut exposer
quelque chose de façon populaire, celui qui pourrait également l'exposer à fond.
(Fin de citation)
Extensif
Au sens mesurable :
Est extensif un objet dont la dimension est mesurable, qui relève donc d'une
quantité. Exemple : l'espace est extensif (il a une étendue).
Pour Kant, une grandeur est extensive lorsque la représentation de toutes ses
parties rend possible la représentation du tout - et donc la précède (K240).
Exemple : Axiomes de l'intuition.
Au sens extension (contenu logique) : voir Extension :
K103 - "Or, c'est sur des principes synthétiques, c'est-à-dire extensifs, que
repose dans son intégralité la visée finale de notre connaissance spéculative a
priori ;"
Intensif
Opposé d'extensif : intensif, qui a une intensité mais n'est pas mesurable parce qu'il
relève d'une qualité. Un phénomène intensif forme un tout indécomposable (un
continuum), mais dont la sensation perçue permet néanmoins des appréciations de
degré (d'intensité) telles que plus ou moins.
K243 – "…une grandeur intensive, c'est-à-dire un degré d'influence sur les sens, doit
être attribuée à tous les objets de la perception, en tant que cette perception contient
de la sensation."
K251 – "Ainsi pourrai-je […] avec à peu près deux cent mille fois la clarté de la
Lune composer et déterminer a priori, c'est-à-dire construire, le degré des
sensations suscitées par la lumière du Soleil."
406
Degré de réalité
Kant introduit une notion de degré de réalité qui varie de 0 (n'existe pas, n'est pas
réel) à 1 (existe, est réel). Cette notion remplace la notion binaire de réalité comme la
notion de probabilité allant de 0 (impossible) à 1 (certain) remplace la contingence
(qui peut se produire ou non). Une perception peut ainsi être plus ou moins intense
en produisant une sensation variant de 0 (insensible, phénomène non perçu) à
1 (perçu sans ambiguïté). Le degré de réalité est donc un degré de conscience d'une
perception. Kant écrit ainsi :
K242-K243 – "…de la conscience empirique à la conscience pure, un
changement s'accomplissant par degrés est possible en tant que le réel de la
première disparaît totalement, et qu'il ne reste qu'une conscience simplement
formelle (a priori) du divers dans l'espace et le temps..."
Aujourd'hui cette affirmation est, hélas, fausse : voir Continuité de tous les
changements et Continuum.
Complément : Critique de la notion de degré de réalité.
K245 - "…puisque, pour tout nombre, il faut en tout cas qu'une unité serve de base,
le phénomène qui constitue une unité est un quantum et, comme tel, toujours un
continuum."
En apparence tout phénomène (réalité perçue) est un continuum : l'homme ne
perçoit que des phénomènes continus, la discontinuité étant un modèle abstrait
indispensable en physique mais non perceptible par ses sens. Mais en réalité la
physique comme la conscience humaine connaissent des phénomènes à seuil.
407
subjective : Kant fait comme si le degré de réalité (c'est-à-dire d'intensité perçue) des
sensations existait aussi objectivement pour tout phénomène physique.
Malgré tout, sa notion de degré de réalité est proche de notions probabilistes de
Mécanique quantique comme la densité de probabilité de présence [12].
Protensif
Qui définit une durée. Est protensif un objet dont la durée est plus ou moins grande.
Exemple : K659 - "Le bonheur est la satisfaction de toutes nos inclinations (aussi
bien extensive, à l'égard de leur variété, qu'intensive, quant à leur degré, et
même protensive, du point de vue de leur durée)."
Extension
Substantif
(Philosophie) : propriété des corps d'être situés dans l'espace et d'en occuper
une partie. Synonyme : étendue.
(Linguistique) : fait de donner à un mot (par généralisation et abstraction) outre
son sens premier (original et spécifique) un sens secondaire plus général.
Exemple : Sphère.
(Logique) : ensemble des objets (concrets ou abstraits) auxquels s'applique un
élément de connaissance :
Pour un concept : ensemble des objets qu'il peut désigner (dont il est
prédicat) ;
Pour une proposition : ensemble des cas où elle est vraie ;
Pour une relation : ensemble des systèmes de valeurs qui la vérifient.
Classe des objets auxquels s'applique un prédicat. Exemples :
L'extension d'un jugement est sa propriété d'être universel, particulier ou
singulier (voir Table des fonctions logiques de jugement de
l'entendement).
K158 - "…j'ai réellement énoncé une affirmation en posant l'âme dans
l'extension illimitée des êtres qui ne meurent pas."
K103 - Ajout à la connaissance : "Or, c'est sur des principes
synthétiques, c'est-à-dire extensifs, que repose dans son intégralité la
visée finale de notre connaissance spéculative a priori ;"
Opposé de extension en logique : intension (sens).
En mathématiques : domaine de définition, domaine d'existence d'une
variable, d'une fonction…
Extension et intension d'un concept
Un concept définissant un ensemble d'objets, il a une extension égale au
nombre d'éléments de l'ensemble, appelé cardinal.
Inversement, à tout ensemble d'objets définis par leurs caractéristiques
communes correspond un concept.
Le concept a aussi un sens défini par son intension.
Voir aussi :
Compréhension et extension (contenu dans et contenu sous) ;
408
Grandeur de l'extension des concepts.
Toutes les représentations affectent le sens interne et ont une information temps
Principe du sens interne
K179 – "D'où que viennent nos représentations, qu'elles soient produites par
l'influence de choses extérieures ou par des causes internes, qu'elles se constituent
a priori ou de façon empirique, comme phénomènes, elles appartiennent néanmoins,
en tant que modifications de l'esprit, au sens interne, et comme telles toutes nos
connaissances sont en tout cas soumises finalement à la condition formelle du sens
interne, à savoir le temps, dans la mesure où elles doivent toutes y être ordonnées,
connectées et mises en rapport."
(Dès sa formation, une représentation contient une information temps et un
historique des étapes de sa formation : voir représentation. De son côté, une
connaissance figurant en mémoire de travail sous forme de représentation,
contient aussi une information temps qui prend en compte l'historique des étapes
de sa construction.)
K210 - "Le sens interne ne nous présente nous-mêmes à la conscience que tels que
nous apparaissons de façon phénoménale, et non pas tels que nous sommes en
nous-mêmes, car nous nous intuitionnons seulement comme nous sommes
intérieurement affectés."
409
K213 note * - "…je n'ai […] nulle connaissance de moi tel que je suis, mais
seulement tel que je m'apparais à moi-même. La conscience de soi-même n'est donc
pas encore, tant s'en faut, une connaissance de soi…"
Ce qui détermine le sens interne est l'entendement et son pouvoir originaire de relier
le divers de l'intuition, c'est-à-dire de l'inscrire sous une aperception".
K211 - Le sens interne contient la simple forme de l'intuition, mais sans que s'y
accomplisse nulle liaison du divers ; il ne contient donc aucune intuition déterminée
(c'est-à-dire imposée). Toutefois (K213 note *), l'entendement détermine le sens
interne résultant d'un acte d'attention en synthétisant une liaison du divers.
410
succession, de simultanéité et de permanence. Précédant les connaissances
spatiales, celle du temps est intuitive a priori.
Ce n'est pas parce que j'ai à l'esprit une représentation de phénomène qu'il existe
K285 – "Du fait que l'existence d'objets extérieurs est requise pour la possibilité d'une
conscience déterminée de nous-mêmes, il ne s'ensuit pas que toute représentation
intuitive de choses extérieures en contienne en même temps l'existence, car une
telle représentation peut parfaitement être le simple effet de l'imagination."
Voir :
Réfutation de l'idéalisme ;
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).
Extrinsèque, intrinsèque
Selon le dictionnaire [13] :
Qui est extérieur à l'objet que l'on considère; qui ne lui appartient pas mais
dépend des circonstances, de faits accessoires.
Qui n'appartient pas à l'essence même du sujet mais se rapporte aux
circonstances. Exemple : argument extrinsèque.
Factice
Selon le dictionnaire [13] - (Philosophie) adjectif s'appliquant aux idées qui résultent
du travail de l'intelligence.
(Un concept de la raison pure est factice.)
[165] page 102 - Tous les concepts sont, quant à la matière [l'objet], soit donnés
[issus de l'expérience], soit factices [issus de la raison pure ou a priori].
Faculté
Psychologie
Ensemble des fonctions psychiques (mentales) et science qui les étudie ;
Ensemble des sensations, des sentiments, des motivations qui accompagnent,
qui caractérisent un acte, un événement, un phénomène.
Philosophie
Une faculté est un pouvoir (capacité, aptitude), notamment chez l'homme, de faire
une certaine action, notamment d'avoir une intuition, de comprendre ou de penser.
Mais c'est un pouvoir qui ne s'est pas encore traduit dans les faits, une simple
possibilité ; c'est donc aussi le pouvoir de ne pas faire…
411
Kant utilise souvent le mot pouvoir dans le sens de faculté. Exemple :
K110 - "La raison est le pouvoir qui fournit les principes de la connaissance a priori."
Une faculté mentale agit par l'intermédiaire d'au moins une fonction psychique.
Exemples de facultés :
[132] page 243 – "La raison, comme faculté des principes, détermine l'intérêt de
toutes les forces de l'esprit, mais le sien se détermine lui-même."
[107] page 159 – "La faculté de désirer est la faculté d'être, par ses
représentations, cause des objets de ces représentations."
[107] page 159 – "La faculté que possède un être d'agir conformément à ses
représentations s'appelle la vie."
[108] page 87 note * - "La dépendance de la faculté de désirer vis-à-vis des
sensations s'appelle inclination, et cette dernière manifeste donc toujours un
besoin."
412
Les trois sources subjectives de connaissance
(Citation de K188) - "Il y a trois sources subjectives de connaissance sur lesquelles
repose la possibilité d'une expérience en général et d'une connaissance des objets
de celle-ci : les sens, l'imagination et l'aperception ; chacune d'elles peut être
considérée comme empirique, à savoir dans l'application à des phénomènes donnés,
mais toutes sont aussi des éléments ou des fondements a priori qui eux-mêmes
rendent possible cet usage empirique.
Les sens représentent les phénomènes empiriquement dans la perception ;
L'imagination les représente dans l'association (et la reproduction) ;
L'aperception les représente dans la conscience empirique de l'identité de ces
représentations reproductives avec les phénomènes par lesquels elles étaient
données, par conséquent dans la recognition." (Fin de citation)
413
Kant en conclut aussi que la continuité de la conscience de soi lie les
représentations successives entre elles. Il écrit :
K189 note * : "La proposition synthétique selon laquelle, dans ce qu'elle a de
divers, toute conscience empirique doit être liée en une seule conscience de
soi-même constitue le principe absolument premier et synthétique de notre
pensée en général." ("doit" : cette synthèse unificatrice est systématique.)
Kant appelle cette liaison persistante des représentations :
"principe transcendantal de l'unité de tout le divers des représentations"
et constate que ce principe s'applique aussi au divers de l'intuition.
Et comme l'unité du divers est synthétique, "l'aperception pure fournit un principe
[et une faculté] de l'unité synthétique du divers de toute intuition possible."
K190 - "La synthèse pure de l'imagination est une condition a priori de la
possibilité de toute composition du divers en une connaissance. Or la synthèse
productive de l'imagination ne peut intervenir qu'a priori, car la synthèse
reproductive repose sur des conditions de l'expérience. Donc, le principe de
l'unité nécessaire de la synthèse pure (productive) de l'imagination constitue,
avant l'aperception, le fondement de la possibilité de toute connaissance, en
particulier de l'expérience. […]
Remarque : du point de vue ordre de déroulement des opérations, la
synthèse par imagination productive doit avoir lieu avant la synthèse a priori,
pour fournir une représentation initiale à cette dernière (voir liaison, puis
représentation de représentation et exemples).
Conclusion : l'unité transcendantale de la synthèse de l'imagination est la forme
pure de toute connaissance possible ; c'est à travers cette unité que tous les
objets de l'expérience possible doivent être représentés a priori."
Voir aussi :
Interaction de la sensibilité avec l'entendement (faculté / réceptivité) ;
Du système des catégories.
414
Faculté de juger
K221 - "Si l'entendement en général est défini comme le pouvoir des règles, la
faculté de juger est le pouvoir de subsumer sous des règles, c'est-à-dire de
distinguer si quelque chose s'inscrit ou non sous une règle donnée."
Il s'agit par exemple de juger si une proposition est formellement possible ou
nécessairement fausse.
K222 note * - "Le manque de faculté de juger s'appelle stupidité, et à une telle
infirmité il n'y a pas de remède."
K222 - "L'unique et grande utilité des exemples : ils aiguisent la faculté de juger."
Kant affirme là qu'un exemple ne prouve rien, il ne peut qu'aider à comprendre ou à
vérifier.
415
existe dans tout objet des sens ; il est associé à un nombre entier lorsque celui-ci
est construit par une suite de synthèses additives. Et de son côté, la quantité (au
sens grandeur mesurable) peut aussi être associée à un nombre. Le nombre est
une solution de schème entre le phénomène considéré et la quantité. (K227-
K228)
Voir aussi :
Raisonnements de la faculté de juger ;
Schème, schématisme, schème transcendantal.
Falsifiable
Une affirmation, une hypothèse ou une théorie est dite falsifiable si on peut imaginer
(ou mieux, créer expérimentalement) une situation où elle est prise en défaut, même
si on ne peut pas imaginer de situation où elle se réalise - notamment parce qu'elle
est indécidable ou spéculative. Exemples :
La loi d'Ohm « L'intensité de courant électrique à travers une résistance est
proportionnelle à la différence de potentiel entre ses bornes » est falsifiable ;
L'affirmation « Ce feu de forêt a pour origine la volonté de Dieu » est infalsifiable.
Fantasmagorie
Selon [13]
Péjoratif : Représentation de l'esprit erronée et ne reposant sur rien de réel, de
sérieux.
Fantasmatique
Qui relève du fantasme.
Fantasmes originaires
Fantasmes qui transcendent le vécu individuel et ont un certain caractère
d'universalité. En ce sens, ils sont à rapprocher des mythes collectifs. Ils « mettent
en scène » ce qui aurait pu dans la préhistoire de l'humanité participer à la réalité de
fait et à ce titre ils entrent dans le cadre de la réalité psychique.
Fatalisme
Selon le dictionnaire [13] : doctrine suivant laquelle le cours des événements
échappe à l'intelligence et à la volonté humaine, de sorte que la destinée de chacun
de nous serait fixée à l'avance par une puissance unique et surnaturelle.
416
Figures des syllogismes
Voir Les quatre figures des syllogismes.
Fin - Fins
Définition
(Citation de [109] pages 224-225)
"Une fin est un objet du libre arbitre dont la représentation [présence à l'esprit]
détermine celui-ci à une action (par laquelle cet objet est produit).
[Conséquences]
Toute action a donc sa fin, et dans la mesure où personne ne peut avoir une fin sans
se faire soi-même de l'objet de son arbitre une fin, c'est un acte de la liberté du sujet
agissant, et non pas un effet de la nature, que d'avoir pour ses actions une
quelconque fin.
[102] page 88 – [La fin de toute la religion rationnelle est l'amélioration de l'homme]
"Donc, bien qu'un écrit soit admis comme révélation divine, le critère suprême qui le
fait juger tel est que « tout écrit, qui nous vient de Dieu, est utile pour nous instruire,
nous corriger, nous améliorer », etc. ; et, comme l'amélioration morale de l'homme
constitue la fin propre de toute la religion rationnelle, c'est aussi cette religion qui
contiendra le principe suprême de toute l'interprétation de l'Ecriture."
Fins
[109] page 220 – L'éthique peut […] être définie comme le système des fins de la
raison pure pratique.
Kant pensait que les lois de la nature qui régissent le monde ont été créées selon
des fins de l'être originaire :
K412 – "… l'ordre des fins, qui est cependant en même temps un ordre de la
nature…"
417
Intérêt d'une recherche métaphysique des fins de la nature
K455 – "Si […] il y a une cause suprême du monde, ou si les choses de la nature et
leur ordre constituent l'objet dernier auquel nous sommes tenus de nous arrêter dans
toutes nos considérations : ce sont là des questions pour la solution desquelles le
mathématicien donnerait bien volontiers toute sa science ; car celle-ci, en tout état de
cause, ne peut lui procurer aucune satisfaction vis-à-vis des fins de l'humanité qui
sont les plus élevées et qui lui tiennent le plus à cœur."
Par conséquent, elles sont ou la fin finale, ou des fins subalternes qui se rattachent
nécessairement à celle-ci à titre de moyens.
La première fin [la fin finale] n'est autre que la destination complète de l'être humain,
et la philosophie portant sur cette destination s'appelle morale."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Fins dernières – Fins suprêmes ;
Principaux arguments de cette preuve en faveur d'une doctrine téléologique.
418
Chez Kant
Une fin en soi est objective, nécessaire, par opposition aux fins subjectives ou
individuelles qu'une volonté peut se proposer à elle-même.
C'est une fin absolue, inconditionnelle, par opposition aux fins relatives qui ont
un caractère intermédiaire parce qu'elles sont des moyens d'une autre fin, plus
élevée.
Une fin objective repose sur des motifs valables pour tout être rationnel : elle est
donc universelle et peut inspirer une loi.
Une fin subjective repose sur des mobiles liés au désir : elle n'est donc pas
universelle.
Le fondement de ce principe est […] : la nature raisonnable existe comme fin en soi.
[108] page 108 - "L'impératif pratique sera donc le suivant : agis de façon telle que tu
traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre,
toujours en même temps comme fin, jamais simplement comme moyen."
Exemples
1. (Citation de [108] pages 108-109 : sur le suicide)
"D'après le concept du devoir nécessaire envers soi-même, celui qui songe au
suicide se demandera si son action peut être compatible avec l'idée de l'humanité
comme fin en soi. Si, pour fuir une situation pénible, il se détruit lui-même, il se
sert d'une personne simplement comme d'un moyen en vue de préserver une
situation supportable jusqu'à la fin de la vie. Mais l'homme n'est pas une chose,
par conséquent pas quelque chose qui peut être traité simplement comme moyen
: au contraire faut-il que, dans toutes ses actions, il soit toujours considéré
419
comme une fin en soi. Je ne puis disposer en rien de l'homme en ma personne,
pour le mutiler, le corrompre ou le tuer."
(Fin de citation)
2. (Citation de [108] page 109 : sur une promesse mensongère)
"En ce qui concerne le devoir nécessaire ou obligé envers d'autres hommes, celui
qui a en tête de faire à d'autres une promesse mensongère apercevra aussitôt
qu'il veut se servir d'un autre être humain simplement comme d'un moyen, sans
que ce moyen contienne en même temps en lui la fin. Car celui que, par une telle
promesse, je veux utiliser en le mettant au service de mes desseins ne peut
aucunement être d'accord avec ma façon de procéder envers lui et contenir ainsi
lui-même la fin de cette action."
(Fin de citation)
[107] page 45 – "La moralité est la condition qui seule peut faire qu’un être raisonnable
est une fin en soi."
Finitude, infinitude
Selon [13] : Fait d'être fini, d'avoir des limites. Opposé : infinitude.
K430 – Thèse sur la finitude du monde : "Le monde [la totalité de ce qui existe] a
un commencement dans le temps et il est aussi, relativement à l'espace,
contenu dans certaines limites."
K431 – Antithèse (infinitude) : "Le monde n'a ni commencement ni limites
spatiales, mais il est infini aussi bien relativement à l'espace que par rapport au
temps."
K715 note 132 - "La radicalité de la finitude inhérente à nos pouvoirs de
connaître a certes été fondée par l'Esthétique transcendantale - c'est-à-dire par
la mise en évidence que « les concepts sans intuition sont vides » et qu'il n'est
pour nous de connaissance qu'à partir d'un moment d'ouverture à une donation
de matière correspondant à l'apport de la sensibilité. […] Les antinomies
confirment la stérilité d'une connaissance qui, « oubliant » la sensibilité, croit
pouvoir dépasser la finitude."
Chez Kant
Voir d'abord Fin – Fins.
Kant utilise tantôt « fins dernières », tantôt « fin suprême », tantôt « fin finale ».
420
La réflexion philosophique doit nous permettre de découvrir les réponses aux
questions fondamentales que l'homme se pose
(Citation de K454-K455)
"La philosophie qui abandonne le champ des expériences [les pensées liées à la vie
terrestre] et se hausse peu à peu jusqu'à ces Idées sublimes […] promet de quoi
fonder nos plus grandes espérances et de nous découvrir les fins dernières vers
lesquelles tous les efforts de la raison doivent en définitive converger."
Savoir si le monde possède un commencement et une quelconque limite à son
extension dans l'espace ; [voir Idées transcendantales : 1er conflit].
S'il y a quelque part, et peut-être dans mon Moi pensant [l'âme], une indivisible
et indestructible unité, ou s'il n'y a rien que le divisible et le transitoire ;
[voir Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant].
Si je suis libre dans mes actions ou si, comme d'autres êtres, je suis conduit par
le fil de la nature et du destin ; [voir Libre arbitre].
Si, enfin, il y a une cause suprême du monde, ou si les choses de la nature et
leur ordre constituent l'objet dernier auquel nous sommes tenus de nous arrêter
dans toutes nos considérations [voir Conclusion sur la possibilité des choses –
Concept de la suprême réalité] :
K655 – "Les fins suprêmes sont celles de la moralité, et seule la raison pure peut
nous les faire connaître."
421
Par conséquent, elles sont ou la fin finale, ou des fins subalternes qui se rattachent
nécessairement à celle-ci à titre de moyens.
La première fin [la fin finale] n'est autre que la destination complète de l'être humain,
et la philosophie portant sur cette destination s'appelle morale."
(Fin de citation)
Fluente - Fluxion
K245 - Kant qualifie de fluentes des grandeurs continues, parce que la synthèse (de
l'imagination productive) qui intervient dans leur production est une progression
continue dans le temps parfois appelée fluxion (écoulement).
Foi
Selon le dictionnaire [13] : croyance aux dogmes de la religion, donc en Dieu.
Fonction logique
Une fonction logique est une fonction qui ne peut prendre que deux valeurs :
vrai (notée aussi 1) ou faux (notée aussi 0).
Fonction propositionnelle x
[177] page 17 - Une fonction propositionnelle est une fonction logique qui, pour toute
valeur attribuée à la variable (ou aux variables), devient une proposition.
Une fonction propositionnelle n'est pas par elle-même une proposition, car elle n'est
ni vraie ni fausse, elle est indéterminée. Elle ne devient une proposition vraie ou
fausse que lorsqu'on en détermine le sens en substituant à chaque variable une
valeur particulière.
422
Exemple : la pesanteur terrestre impose à une masse m une force f appelée
"poids" donnée par f = m g, où g est une accélération de 9.81 m/s².
L'implication correspondant à cette loi de la pesanteur peut s'écrire :
« Une masse m (proposition p) subit une force f = m g (proposition q) : p q. »
p est vraie si la masse existe ;
q est vraie si la force f existe parce que les variables m et g sont données ;
la fonction propositionnelle (m, g) fait passer du couple de variables (m, g) à la
proposition q = « la masse m a un poids mg ».
Classe x | x
[177] page 17 - Soit x une fonction propositionnelle d'une variable x. Cette fonction
est vraie (produit une proposition vraie) pour certaines des valeurs de x, et fausse
pour les autres. Elle détermine ainsi une classe : l'ensemble des valeurs de x pour
lesquelles la fonction et sa proposition sont vraies. Cette classe sera désignée par le
symbole x | x qui peut se lire : « l'ensemble des x qui vérifient x ».
Dans l'exemple de la pesanteur, la classe des couples (m, g) qui vérifient (m, g)
est l'ensemble des couples où m et g sont strictement positifs.
Terminologie
Synonyme de classe dans la partie de ce texte relative à la Logique : ensemble.
Cette synonymie provient du sens donné à classe en 1905 par l'auteur de [177] ;
pour cet auteur, les membres d'une classe (les éléments de l'ensemble) sont des
individus.
Conséquence de l'axiome selon lequel une proposition fausse implique toute autre
proposition, la classe nulle est contenue dans toute autre classe (l'ensemble vide est
un élément de tout autre ensemble).
Classe singulière
[177] page 26 – Par définition, une classe qui ne contient qu'un seul élément
(individu) est dite singulière. On la décrira en écrivant d'abord qu'elle n'est pas nulle,
puis que si deux éléments lui appartiennent, ils sont identiques :
L'existence de la classe a est notée : a 0 ou a ;
L'identité de deux de ses éléments est notée : x a . y a x,y x y.
Affirmation d'existence
Pour dire qu'une classe c (ou plus généralement un être mathématique c) existe,
c'est-à-dire qu'on peut en trouver au moins 1, on écrit : c.
423
Opérateur « tel que » | faisant passer d'une fonction x à une classe x | x
[177] page 17 - Le signe | est donc un symbole de relation qui fait correspondre une
classe à une proposition, symbole signifiant « qui vérifie » ou « tel que ».
Il donne lieu à un axiome qui se formule comme suit :
(x = x) ((x | x) (x | x))
« Si les deux fonctions propositionnelles x et x sont équivalentes [ont même
valeur pour tout x], les classes correspondantes sont égales (identiques) ».
En termes mathématiques, cela veut dire que la correspondance des classes aux
fonctions propositionnelles est uniforme. »
424
En opérant sur les deux membres de cette égalité par (x ), c'est-à-dire en
l'interprétant au sens des éléments x appartenant aux classes :
x (a b) (x a) . x b)
Pour les divers sens du verbe être, voir Etre, exister : les différentes significations.
L'inclusion (classe) est transitive, alors que l'appartenance (élément) ne l'est pas
[177] page 21 – Soient les classes a, b et c. Notons l'inclusion
425
Si a b et b c, alors a c, et :
l'inclusion est transitive : (a b) . (b c) (a c)
un élément x a appartient à c : (a b) . (b c) . (x a) (x c)
Si x a et a b on ne peut pas conclure que x b, car l'inclusion a b est
entre classes, alors que l'appartenance x a est entre un élément et une classe.
x (élément de classe) ne peut appartenir à b (ensemble de classes comme a),
car x n'est pas une classe. x diffère même de la classe singulière x comprenant
le seul élément x (démonstration ci-dessous).
Pour Kant
L'esprit est un ensemble complexe de facultés (possibilités cognitives) résultant de
fonctions (activités ou résultats d'activités) conscientes (actives seulement à l'état
d'éveil) :
K155 – "Toutes les intuitions en tant que sensibles reposent sur des affections,
les concepts, par conséquent, sur des fonctions. Or, j'entends par fonction l'unité
de l'action consistant à ordonner des représentations diverses sous une
représentation commune. Les concepts se fondent donc sur la spontanéité de la
pensée, tout comme les intuitions sensibles se fondent sur la réceptivité des
impressions."
Kant déduit les fonctions cognitives qui existent des facultés mentales humaines
observables. Il recourt le plus souvent possible à une méthode transcendantale, dont
l'indépendance par rapport à l'expérience lui apporte rigueur et universalité.
426
K155 - Une fonction logique de l'entendement est un processus conscient de l'esprit
agissant sur une ou plusieurs représentations initiales, l'ensemble désigné ci-
dessous par A. La fonction peut être lancée :
Spontanément (sans intervention de la volonté) pour traiter le donné d'une
intuition : c'est le cas des fonctions de l'entendement ;
Ou délibérément pour traiter une ou plusieurs représentations de concepts
présents à l'esprit : c'est le cas d'un raisonnement (fonctions de l'intelligence).
Déroulement
L'action produit un jugement :
K155-K156 - "De ces concepts, l'entendement ne peut […] faire aucun autre usage
que celui qui consiste à juger par leur moyen. […] Le jugement est donc la
connaissance médiate d'un objet, par conséquent la représentation d'une
représentation de celui-ci. Dans tout jugement il y a un concept qui vaut pour
plusieurs [donc qui en est la synthèse sous lui-même ou à lui-même] et qui, parmi
cette pluralité de concepts, comprend aussi une représentation donnée [qui
correspond à l'objet]."
Retenons que tout concept est le résultat de l'interprétation par l'esprit de sa
représentation associée (elle-même un état du cerveau). Un concept n'est
jamais "enregistré" en mémoire de travail ou en mémoire de long terme, il est
"recréé" par interprétation chaque fois que sa représentation est présente à
l'esprit, en mémoire de travail : c'est une vue sémantique de sa représentation.
427
représentation) par synthèse à partir de divers concepts (représentations) ; ce
concept synthétique résultant étant unique, Kant parle "d'unité de l'action".
Une fonction peut être considérée soit comme une transformation de concepts
initiaux en un concept final, soit comme une transformation de représentations
initiales en une représentation finale, car un concept n'est que l'interprétation d'une
représentation.
Voir Possibilité de l'expérience (principes a priori).
Puisqu'un concept définit une classe d'objets dont les représentations peuvent être
contenues sous lui, il est le prédicat d'un jugement possible qui s'applique à tous les
objets de la classe.
Pour trouver toutes les fonctions de l'entendement, il suffit donc de trouver tous les
concepts-prédicats de jugements synthétiques unifiant des représentations d'objets.
Ces concepts devant s'appliquer au contenu de phénomènes en général, ils ne
pourront résulter que d'une synthèse pure de logique générale : ce sera la synthèse
de l'aperception.
(Kant exclut donc de l'entendement les concepts de synthèse empirique de
l'appréhension, fonction qu'il attribue à l'intuition bien qu'elle fasse appel à
l'imagination productive. Voir Concept de l'entendement et Jugements de
perception et jugements d'expérience.)
En réfléchissant à la forme des jugements, comme Aristote [43] avant lui mais de
façon moins intuitive et plus systématique, Kant trouva qu'un jugement a 4 types
(titres) de prédicats possibles, chaque titre ayant sous lui 3 moments ; voici le détail.
428
Table des fonctions de l'entendement
K156-K157 - L'entendement a 12 fonctions logiques de jugement, classées en 4
titres de 3 moments chacun :
1.
Quantité des jugements
Universels
Particuliers
Singuliers
2. 3.
Qualité des jugements Relation des jugements
Affirmatifs Catégoriques
Négatifs Hypothétiques
Infinis (indéfinis) Disjonctifs
4.
Modalité des jugements
Problématiques
Assertoriques
Apodictiques
Kant appelle jugement infini (ou indéfini) un jugement affirmatif dont l'affirmation est
suivie d'une négation ; c'est une affirmation de type « Tout (tous) / sauf »
429
ou infini (« la couleur de cet ours est tout sauf brun »).
Relation : chaque jugement de l'objet doit nécessairement être :
catégorique,
hypothétique
ou disjonctif,
il n'y a pas d'autre possibilité logique.
Kant s'est aperçu qu'un homme a, par sa conscience de soi, la "certitude
logique" de ses jugements spontanés : quand je décris ce que je vois, je sais
que ma description est :
Une certitude, et que le prédicat est dû à une propriété de l'objet qui est soit
inhérente, soit subsistante ;
Ou une hypothèse, et que le prédicat exprime une causalité ou une
dépendance ;
Ou un choix entre plusieurs possibilités, et que le prédicat exprime une
communauté ou une réciprocité.
Modalité : Autre faculté humaine remarquée par Kant, la conscience du degré de
certitude personnelle de l'auteur d'un jugement : quand j'énonce un jugement, je
sais :
s'il est possible mais pas certain,
ou certain car démontrable,
ou si je ne peux rien affirmer sur sa véracité.
L'auteur d'un jugement a une opinion personnelle (donc subjective) sur la
véracité de chaque jugement. Il peut le qualifier de :
Douteux (problématique, c'est-à-dire possible mais pas certain), et le
prédicat correspondant énonce une possibilité ou une impossibilité ;
Ou nécessaire (apodictique, c'est-à-dire logiquement certain, démontrable),
et le prédicat correspondant énonce une nécessité ou une contingence ;
Ou être sans opinion sur sa véracité (jugement assertorique), et le prédicat
correspondant énonce une existence ou une inexistence.
430
Résultat de l'entendement
K162 - A partir de l'intuition du phénomène, chacune des 12 fonctions logiques
produit un concept prédicat de jugement. Ce jugement superficiel doit souvent être
complété par la raison.
Si, lorsque je formule le jugement précédent, j'estime que c'est une possibilité,
la modalité de mon jugement est problématique.
Forme
Ensemble des propriétés (informations) qui font qu'une chose est reconnaissable, qui
la distinguent d'un point de vue intellectuel (Idée) ou d'un point de vue sensible
(apparence, acte).
431
Forme d'un phénomène
La forme d'un phénomène est l'ensemble d'informations (le divers) qui permettent
d'en créer une représentation :
L'intuition pure ordonne a priori cette représentation selon l'espace et le temps ;
L'intuition empirique ajoute ensuite (a posteriori) à la représentation sa matière,
contenu de la sensation.
Exemple 1
Matière : le bronze ; forme (espace) : aspect de statue ; objet visible faisant sens
(reconnaissable et appréciable psychologiquement) : le composé des deux, la statue.
Exemple 2
[56b] §29 page 102 – [Concernant] "le concept de cause, ce qui m'est d'abord donné
a priori par la Logique c'est la forme [c'est-à-dire l'ensemble des éléments] d'un
jugement conditionnel en général, c'est-à-dire une connaissance donnée à utiliser
comme principe, et l'autre comme conséquence."
(En logique, une cause est une connaissance (sous forme de jugement) prise
comme hypothèse, qui entraîne une conséquence.)
432
Voir :
Contenu d'un phénomène : forme et matière ;
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine) ;
Appréhension ;
Matière et forme d'un phénomène ;
Substance, matière, forme et physique moderne.
Forme essentielle
Voir Matière et forme.
Formel
Adjectif : qui concerne la forme logique (la liste des informations et les relations entre
elles) par opposition au contenu (la signification, le fond).
Exemple 2 : [56b] §36 page 112 – "La nature au sens formel [est l'ensemble] des
règles auxquelles doivent être soumis tous les phénomènes pour pouvoir être
pensés comme liés en une expérience."
L'usage formel d'une faculté (appelé usage en général ou usage général) est
indépendant de son contenu sémantique, il est le même quel que soit ce contenu.
Exemples :
Détermination logique d'un concept ;
Axiomatique et Système logique.
433
Une règle formelle prescrit le respect de la logique, de la liste des informations ou de
la forme syntaxique d'un énoncé, quelle que soit sa sémantique. Il faut donc
l'interpréter de manière prescriptive (comme règle à suivre) et non descriptive.
K332 – "Il y a [de la raison], comme de l'entendement, un usage simplement
formel, c'est-à-dire logique, lorsque la raison fait abstraction de tout contenu de
la connaissance…"
Exemples
Une grammaire formelle est un ensemble de règles d'écriture qui ne tient pas
compte de la signification des éléments.
La structure formelle d'un jugement prédicatif est : « A est (n'est pas, est tout
sauf) B », qui veut dire « le concept A a (n'a pas, a tout sauf) la propriété B ».
Cette structure est ainsi quels que soient les contenus sémantiques
(significations) de A et B, elle est formelle.
Un tel jugement est une proposition dont la valeur logique ne peut être que vrai 1
ou faux 0.
En France, un numéro de Sécurité Sociale est un nombre de 13 chiffres. Affirmer
cela, c'est en décrire une propriété formelle. Tout nombre de moins de 13
chiffres ou de plus de 13 chiffres ne peut être un numéro de Sécurité Sociale
français ; toute chaîne de 13 caractères qui ne sont pas tous des chiffres non
plus.
Autre propriété formelle : le premier des 13 chiffres d'un numéro de Sécurité
Sociale français doit être 1 (pour un homme) ou 2 (pour une femme). Donc un
nombre de 13 chiffres commençant par un 5 ne peut être un numéro de Sécurité
Sociale français, c'est une impossibilité formelle.
Mais le fait d'avoir un nombre de 13 chiffres commençant par 1 ou 2 ne garantit
pas qu'il y a un homme ou une femme à qui ce nombre a été attribué comme
numéro de Sécurité Sociale, ou que cette personne est toujours en vie : un
nombre (ou plus généralement un texte) formellement correct ne garantit pas
l'existence ou la véracité de son objet ; le respect de la forme est une condition
d'existence nécessaire, mais pas suffisante.
434
Attention : bien distinguer forme et formel.
Voir :
Vérité ;
Logique (chez Kant) : concept de la logique ;
Implication formelle dans Implication.
Logique de l'apparence
Kant résume la limitation du pouvoir critique de la logique analytique à une
appréciation négative en qualifiant cette logique de canon illusoire d'objectivité, et en
dénonçant ses usages abusifs en tant qu'organon. (K149 et Dialectique). Voir
Apparence.
435
Génétique
Chez Kant
[56b] §13 Remarque III page 68 – "Nous avons prouvé que ce n'est pas dans cette
différence de caractère logique entre la clarté et l'obscurité, mais bien dans la
distinction génétique concernant l'origine de la connaissance elle-même que consiste
la sensibilité…"
Genre
Philosophie : Idée générale ou classe d'êtres ou d'objets qui possèdent un ou
plusieurs caractères communs. C'est le sens utilisé par Kant.
Biologie animale et végétale : Niveau de la classification des êtres vivants, placé
sous la famille au-dessus des espèces ; par extension : classe, espèce.
Kant appelle genre une classe d'êtres dont le divers, dans une expérience,
présente une certaine homogénéité des propriétés que l'entendement peut
identifier : en l'absence de propriété commune à plusieurs êtres, ceux-ci ne
peuvent être du même genre et ne peuvent être associés à un même concept
empirique.
En plus du sens philosophique ci-dessus du mot genre, Kant utilise aussi son
sens biologique : voir Subsumer.
436
et même aucun concept de genre ou aucun concept général n'auraient lieu d'être,
aucun entendement non plus, puisque l'entendement n'a affaire purement et
simplement qu'à de tels concepts.
Le principe logique des genres suppose donc un principe transcendantal, s'il doit être
appliqué à la nature (par quoi j'entends ici uniquement les objets qui nous sont
donnés). D'après ce principe, dans le divers d'une expérience possible, une
dimension d'homogénéité est nécessairement présupposée (bien que nous n'en
puissions déterminer a priori le degré), parce que, sans elle, il n'y aurait pas de
concepts empiriques et par conséquent pas d'expérience qui fût possible."
[Le principe logique des genres postule donc une homogénéité dans laquelle
Kant voit ci-dessous une identité.]
(Fin de citation)
Gestalt
Ensemble structuré ou structure formant un tout qui influence les perceptions
plus que ses éléments constitutifs. Exemple : une mélodie est identifiable quelle
que soit la clé si les rapports de hauteur entre notes sont respectés.
La Gestalttheorie (gestalt-theorie) est une doctrine affirmant que les « formes »
sont les données premières de la psychologie. Synonyme : théorie de la forme.
Ces formes sont des propriétés de régularité, de symétrie, de simplicité qui
rendent un ensemble reconnaissable et prégnant. Exemple de trait prégnant :
Un seul trait suffit pour changer notre impression globale sur autrui, s'il a un
poids suffisant ou s'il apparaît en premier dans l'ensemble des qualités perçues.
437
chose. Simplement, ce « combien de fois » se fonde sur la répétition successive, par
conséquent sur le temps et sur la synthèse (de l'homogène) dans le temps. (K298)
Une grandeur est extensive lorsqu'elle est un ensemble d'éléments distincts dont on
peut mesurer une propriété au moins : nombre d'éléments, somme des longueurs
unitaires donnant une longueur totale, etc. ; c'est donc une grandeur mesurable.
Par extension, la mesure peut être remplacée par une synthèse selon une certaine
règle, ou selon une propriété commune aux éléments de l'ensemble et à l'ensemble
tout entier.
Habileté
Chez Kant
L'habileté est un savoir-faire.
Ces impératifs peuvent donc être désignés en général comme des impératifs de
l'habileté.
438
La question n'est pas du tout ici de savoir si la fin est raisonnable et bonne, mais
simplement de déterminer ce qu'il faudrait faire pour l'atteindre."
(Fin de citation)
Hasard
Disons-le tout net, comme Kant : un tel phénomène n'existe pas dans la nature, dont
les lois n'ont pas d'exception.
Le besoin de rigueur
Affirmer qu'une situation, l'état d'un système ou une évolution sont dus au hasard
demande autant de rigueur qu'affirmer qu'ils sont régis par des lois de la physique.
Comme son opposé le déterminisme, le hasard doit être postulé explicitement.
Aucun ensemble de phénomènes constatés ne prouve qu'ils sont régis par le hasard
Quelles que soient les remarques faites sur ces phénomènes, quel que soit
l'étonnement qu'ils nous suggèrent, il est impossible d'en déduire une preuve
d'absence de loi qui les régit ; et le fait de ne pas avoir découvert de loi ne prouve
pas qu'il n'y en a aucune.
439
souvent dans un sens que dans l'autre, sans que nous puissions en imposer un en
particulier.
Choix d'un état final unique par décohérence
Une telle transformation, appelée décohérence, est due à l'interférence entre des
forces de l'échelle macroscopique et le système superposé à l'échelle atomique,
interférence qui n'est pas régie par une loi physique particulière mais dépend de
chaque concours de circonstances. C'est pourquoi l'état unique final observé ne
peut être prévu : on sait seulement qu'il correspond à une des valeurs propres
de l'ensemble des états superposés.
De même, les équations qui décrivent l'évolution d'un système dans le temps et/ou
l'espace peuvent avoir des solutions multiples, parfois même une infinité, là aussi en
superposition.
Ces lois physiques statistiques nous conduisent à admettre une forme statistique du
déterminisme décrite dans [12]. Mais la présence de distributions statistiques de
valeurs dans une situation ou une évolution doit être interprétée comme
l'impossibilité de prédire un résultat unique, un refus de la nature de nous laisser le
faire, pas comme le fait qu'elle « fait n'importe quoi », car la probabilité de chaque
résultat est prédictible.
Conclusion
Donc, puisque toutes les attributions au hasard que l'on constate sont dues à
l'ignorance, il est bon de rappeler la position de Kant ci-dessous et des précisions là.
Chez Kant
Voir d'abord le principe de fatalisme.
K286 – "Le principe : rien n'arrive par un hasard aveugle est une loi a priori de la
nature ; de même : aucune nécessité intervenant dans la nature n'est une nécessité
aveugle, mais c'est toujours une nécessité conditionnée, par conséquent intelligible" :
Le hasard n'existe pas dans une évolution physique, toujours déterministe. Donc
toute évolution naturelle a une cause et est soumise à des lois que l'homme doit
pouvoir découvrir ; Kant a foi dans l'aptitude de l'humanité à découvrir la nature
par la science, conformément à la doctrine des Lumières [25].
Pour Kant comme pour les scientifiques modernes, la nature « ne fait jamais
n'importe quoi », elle est régie par des lois sans exception : le hasard n'existe pas.
440
Hélas, le problème d'une croyance en la possibilité d'une intervention divine dans
l'Univers est qu'elle est à la fois :
Physiquement impossible car transcendante (voir Existence de Dieu) ;
indémontrable car contraire aux lois naturelles que nous postulons, infalsifiable,
inexplicable et impossible à distinguer du hasard lorsqu'on croit la constater…
Voir aussi :
Cause et causalité ;
Déterminisme ;
Nécessité des choses (postulat) ;
Compléments sur le hasard : [12].
Les hommes ont commencé par spéculer sur Dieu et l'espérance d'un autre monde
K685-K686 – Les êtres humains, dans l'enfance "de la philosophie, [ont] pris pour
point de départ la connaissance de Dieu et l'espérance ou même la nature d'un autre
monde."
(Citation de K686-K687)
"Si grossiers que fussent les concepts religieux introduits par les anciennes pratiques
subsistant encore de l'état sauvage des peuples, cela n'empêcha cependant pas la
fraction la plus éclairée de se consacrer à de libres recherches [spéculations] sur cet
objet,
[Kant justifie une conduite sociale morale par la foi en un Etre suprême et la
promesse d'un bonheur au moins posthume]
et l'on s'aperçut aisément qu'il ne saurait y avoir de manière plus radicale et plus
fiable de plaire à la puissance invisible gouvernant le monde, afin d'être heureux du
moins dans un autre monde, que de bien conduire sa vie.
441
consacra ensuite de tout temps. Ce fut cependant proprement la première qui
poussa peu à peu la raison simplement spéculative vers une entreprise qui est
ultérieurement devenue célèbre sous le nom de métaphysique."
(Fin de citation)
Aristote [43] peut être considéré comme le chef des empiristes, tandis que Platon
[49] est le chef des noologistes. […]
[Dans les raisonnements de son système sensualiste, Epicure [80] n'allait jamais au-
delà des limites de l'expérience.]
La voie critique seule est encore ouverte. À supposer que le lecteur ait eu
l'obligeance et la patience de la parcourir en ma compagnie, il lui est loisible
maintenant de juger si, au cas où il lui plairait d'apporter sa contribution personnelle à
la transformation de ce sentier en voie royale, ce que tant de siècles ne purent
effectuer risque encore de s'accomplir avant la fin de celui-ci : satisfaire entièrement
442
la raison humaine dans ce qui a de tout temps occupé sa curiosité, mais jusqu'ici en
toute vanité."
(Fin de citation)
Heuristique
Selon [19]
Adjectif : qui sert à la découverte. Exemple : une hypothèse adoptée
provisoirement pendant une recherche de faits.
Substantif : Partie de la science qui a pour objet la découverte des faits.
Homogène
Adjectif : qualité d'un ensemble ou d'un objet dont tous les éléments sont de même
nature et/ou présentent des similitudes de signification, de fonction ou de structure.
Opposé : hétérogène. Exemples :
Un objet en cuivre est homogène s'il ne contient que du cuivre. Sa substance
n'est faite que d'une matière, un corps pur, le cuivre.
En physique : sont homogènes deux grandeurs de même nature, comme un
travail et une énergie, tous deux mesurés en joules.
Voir Subsumer.
Synthèse de l'homogène
Kant utilise aussi homogène comme substantif désignant l'ensemble des
informations de même nature dans des représentations dont on fait la synthèse :
443
Synthèses parallèles et indépendantes de l'homogène et de l'hétérogène
K494 – C'est une synthèse de l'homogène qui est supposée pour toute grandeur,
aussi bien dans sa composition que dans sa division. Mais c'est une synthèse de
l'hétérogène que l'on peut admettre dans la synthèse dynamique de la liaison
causale, aussi bien que dans celle du nécessaire avec le contingent.
"De là procède la manière dont, dans la liaison mathématique des séries de
phénomènes, nulle autre condition ne peut intervenir qu'une condition sensible, c'est-
à-dire une condition qui soit elle-même une partie de la série, alors qu'en revanche la
série dynamique des conditions sensibles autorise […] une condition hétérogène, qui
n'est pas une partie de la série, mais qui, en tant que condition purement intelligible,
se situe en dehors de la série."
Exemple : Conclusion : nos représentations sont libres par rapport à nos perceptions
en même temps qu'elles sont déterminées par les lois de la nature.
Hubris
Chez les Grecs, tout ce qui, dans la conduite de l'homme, est considéré par les dieux
comme démesure, orgueil et devant appeler leur vengeance.
Humanité parfaite
Voir L'idéal de l'humanité parfaite.
Humanités
Voir Les humanités.
Hyperbolique
Selon le dictionnaire [13] :
Caractérisé par l'hyperbole, l'exagération ;
Qui a un caractère excessif.
[56b] §45 page 133 – Considérées en elles-mêmes, les catégories "ne peuvent
donner aucun objet déterminé d'aucune chose. Or de tels objets hyperboliques sont
ceux que l'on appelle des Noumènes, ou encore de purs êtres d'entendement (mieux
de purs êtres de pensée), par exemple : la substance, mais pensée sans
permanence dans le temps, ou une cause, mais qui n'agirait pas dans le temps, etc."
Hyperphysique
Qualifie une hypothèse ou une explication au-delà des lois de la nature, donc
purement spéculative ou imaginaire.
K639 – "L'ordre et la finalité présents dans la nature doivent être expliqués à leur tour
par des raisons d'être naturelles et d'après des lois de la nature, et ici même les
hypothèses les plus grossières, du moment qu'elles sont de nature physique, sont
plus supportables qu'une hypothèse hyperphysique, c'est-à-dire que l'appel à un
auteur divin que l'on présuppose à cette fin."
Voir Un phénomène donné nouveau ne doit être expliqué qu'à partir de lois connues.
444
K682 – "L'usage de la raison, dans cette considération rationnelle de la nature, est
soit physique, soit hyperphysique, ou mieux : soit immanent, soit transcendant. Le
premier porte sur la nature, en tant que sa connaissance peut être appliquée dans
l'expérience (in concreto), le second sur cette liaison des objets de l'expérience qui
dépasse toute expérience."
Hypostasier
Considérer abusivement une pure abstraction comme une réalité.
K385 – "…on hypostasie ce qui n'existe que dans la pensée et on l'admet hors du
sujet pensant en lui reconnaissant la qualité qui serait celle d'un objet réel — ce qui
veut dire que l'on tient l'étendue, qui n'est rien qu'un phénomène, pour une propriété
des choses extérieures, subsistant même indépendamment de notre sensibilité, et
que l'on tient le mouvement [le changement, l'évolution] pour leur effet se produisant
lui aussi réellement, en soi, en dehors de nos sens."
Hypothèse
Chez Kant
Une hypothèse ne peut concerner qu'un objet possible et doit avoir un fondement
certain car basé sur l'expérience
K637 – Pour que l'imagination puisse "inventer sous la stricte surveillance de la
raison, il faut toujours que quelque chose, auparavant, soit pleinement certain, et ne
constitue pas une invention ou une simple opinion : cet élément correspond à la
possibilité de l'objet même. Dans ce cas, il est bien permis de recourir à l'opinion
pour ce qui concerne la réalité effective de cet objet : reste que cette opinion, pour ne
pas être sans fondement, doit être reliée, comme principe d'explication, à ce qui est
effectivement donné et qui est par conséquent certain, et elle s'appelle alors une
hypothèse."
445
3. L'unité. - Il est essentiellement exigé d'une hypothèse qu'elle soit unique et
qu'aucune hypothèse auxiliaire ne soit requise pour l'étayer. […]
(Fin de citation)
Hypothétique
Langage usuel : qui n'est pas certain ; dont l'existence ou la réalisation est
douteuse.
Philosophie et Logique : qui repose sur une hypothèse ; qui n'existe qu'à l'état
d'hypothèse, qui suppose une condition.
Exemple de proposition hypothétique : « Si A alors B ».
Idéal
Adjectif ou substantif
Selon [13]
Sens courant (adjectif) : qui a toutes les qualités propres à son type, à son
modèle et correspond à l'idée que l'on se fait de la perfection ; qui présente le
caractère élevé de la perfection.
Par opposition à réel : qui n'a qu'une existence intellectuelle, sans être ou sans
pouvoir être perçu par les sens ; en particulier qui a les caractères de l'idée.
Chez Kant
1er sens : substantif
D'après [19] : un idéal est un concept réduit aux notions indispensables.
D'après [13] : un idéal est un être individuel aux caractères déterminés par
l'Idée, modèle suprême dont la perfection ne peut être égalée.
Définition de Kant d'un idéal
K516 – [J'appelle idéal] "l'Idée, non pas seulement in concreto, mais in individuo,
c'est-à-dire en tant que chose singulière qui n'est déterminable ou tout à fait
déterminée que par l'Idée."
446
Idéal de l'être suprême : voir
Idéal de l'être suprême : un principe régulateur de la raison.
447
par la limitation du maximum ; mais Dieu, de même que, en tant qu'idéal de
perfection, il est le principe de la connaissance, est aussi, en tant qu'il existe
réellement, le principe de la réalisation de toute perfection dans l'Univers."
[Concepts moraux]
Les concepts moraux ne sont pas tout à fait des concepts purs de l'entendement,
dans la mesure où il se trouve à leur racine quelque chose d'empirique (le plaisir ou
le déplaisir).
Cependant, si on les envisage du point de vue du principe par lequel la raison établit
des limites à la liberté qui, par elle-même, est dépourvue de lois (donc, si on les
448
considère uniquement quant à leur forme [indépendamment de leur contenu]), ils [les
concepts moraux] peuvent fort bien servir d'exemple de concepts purs de la raison
[idées transcendantales]."
(Fin de citation)
K520 – "Si donc la détermination intégrale a pour fondement dans notre raison un
substratum transcendantal qui contient pour ainsi dire toute la réserve de matière
[contenu] d'où peuvent être tirés tous les prédicats possibles des choses, ce
substratum n'est rien d'autre que l'Idée d'un tout constitué par la réalité (omnitudo
realitatis). Toutes les vraies négations ne sont dès lors rien que des bornes -
dénomination que l'on ne pourrait leur donner si c'était l'illimité (le tout) qui se trouvait
pris pour fondement."
449
possibles, un seul, à savoir celui qui appartient absolument à l'être, se trouve
compris dans sa détermination.
[L'abstraction ens realissimum désigne un être « ensemble ou fondement de
toutes les réalités ». A l'évidence, si un tel être est déterminable (si !), sa
description contient le prédicat « appartient à l'être en tant que tel,
inconditionnellement » et c'est un idéal transcendantal. Et si cet être est
possible, le prédicat de cette possibilité appartient à l'ensemble des prédicats
d'existence possible des choses.]
(Citation de K521)
"La détermination logique d'un concept par la raison repose uniquement sur un
raisonnement disjonctif dans lequel :
La majeure contient une division logique (la division de la sphère d'un concept
universel) ;
La mineure limite cette sphère à une partie ;
Et la conclusion détermine le concept par cette partie.
Le concept universel d'une réalité en général ne peut pas être divisé a priori, puisque
sans expérience on ne connaît pas d'espèces déterminées de réalité qui soient
contenues sous ce genre.
450
[La détermination d'une chose repose sur la limitation de ce tout constitué par la
réalité]
et la détermination intégrale de chaque chose repose sur la limitation de ce tout
constitué par la réalité, dans la mesure où une dimension de cette réalité est
attribuée à la chose, tandis que le reste en est exclu - ce qui s'accorde avec le « ou
bien..., ou bien... » de la majeure disjonctive et avec la détermination de l'objet par un
des membres de cette division dans la mineure."
(Fin de citation)
Car toutes les négations (qui sont pourtant les seuls prédicats par lesquels tout ce
qui est autre que l'être le plus réel de tous s'en peut distinguer) sont de simples
limitations d'une réalité supérieure et finalement de la réalité suprême : par
conséquent, elles la présupposent et sont simplement dérivées d'elle quant à leur
contenu.
[La diversité des choses limite le concept de la suprême réalité dont elles font partie]
Toute la diversité des choses est seulement une manière tout aussi diverse de limiter
le concept de la suprême réalité, qui est leur substratum commun, de même que
toutes les figures ne sont possibles que comme des manières diverses de limiter
l'espace infini.
451
Voir aussi : Conclusion sur l'être suprême : sa réalité objective ne peut être ni
démontrée ni réfutée.
car si tel était le cas, l'être originaire ne serait plus considéré que comme un simple
agrégat d'êtres dérivés, ce qui, d'après ce que l'on vient de voir, est impossible, bien
que nous en ayons initialement, dans une première esquisse grossière, donné cette
représentation.
[La suprême réalité est au fondement de toutes choses, qui en sont des extensions]
Bien davantage la suprême réalité résiderait-elle au principe de la possibilité de
toutes choses comme un fondement et non pas comme un ensemble, et la diversité
des choses ne reposerait pas sur la limitation de l'être originaire lui-même, mais sur
le déploiement complet de ce qui en découle, à quoi appartiendrait donc aussi toute
notre sensibilité [expérience interne], avec la réalité comprise dans le phénomène,
qui ne peut appartenir comme un ingrédient à l'Idée de l'être suprême [abstraction
qui ne peut être une réalité].
[Voir aussi : Idéal de l'être suprême : un principe régulateur de la raison.]
[La notion d'être originaire peut être hypostasiée en une Idée transcendantale de
Dieu]
Si nous nous attachons davantage à cette Idée en l'hypostasiant, nous pourrons
déterminer l'être originaire, par le seul concept de la suprême réalité, comme un être
unique, simple, autosuffisant, éternel, etc., bref : nous pourrons le déterminer dans
sa complétude inconditionnée par tous les prédicaments. Le concept d'un tel être est
celui de Dieu entendu au sens transcendantal [et pas aux sens métaphysique ou
transcendant] ; et ainsi l'idéal de la raison pure est-il l'objet d'une théologie
transcendantale."
[Dieu ainsi défini est l'idéal de la raison pure de toute réalité.]
(Fin de citation)
K526 – "Ce dont le concept contient en soi la solution de tous les pourquoi, une
raison d'être qui n'est en défaut dans aucun domaine et d'aucun point de vue, qui
apporte une condition suffisante en tout registre, semble constituer par là même l'être
qui correspond à l'absolue nécessité, puisque, par la manière dont il possède en lui-
même toutes les conditions pour tout le possible, il n'a besoin lui-même d'aucune
condition, n'est pas même susceptible d'en avoir besoin, et par conséquent satisfait
452
au moins dans une certaine mesure au concept de la nécessité inconditionnée - ce
que ne peut faire aussi bien que lui nul autre concept…"
Voir aussi :
Trois déductions problématiques ;
Dialectique naturelle de la raison humaine : but ultime.
Car c'était uniquement comme le concept de toute réalité que la raison la mettait au
fondement de la détermination intégrale des choses en général, sans exiger que
toute cette réalité soit donnée objectivement et constitue elle-même une chose.
Cette dernière est une simple fiction à travers laquelle nous rassemblons et réalisons
dans un idéal, sous la forme d'un être particulier, le divers compris dans notre Idée,
sans que nous en ayons le droit, ni même sans que nous ayons celui d'admettre
sans plus de détours la possibilité d'une telle hypothèse.
La même observation s'applique aussi à toutes les conséquences découlant d'un tel
idéal [un être unique, simple, autosuffisant, éternel, etc.], qui ne concernent en rien la
détermination intégrale des choses en général (pour laquelle l'Idée seule était
nécessaire) et qui n'ont pas sur elle la moindre influence.
[…]
Ce pourquoi je demande comment la raison parvient à considérer toute possibilité
des choses comme dérivée d'une unique possibilité qui en constitue le fondement, et
à supposer ensuite celle-ci comme contenue dans un être originaire particulier."
(Fin de citation)
Or, un objet des sens ne peut être intégralement déterminé que s'il est comparé avec
tous les prédicats du phénomène et s'il est représenté par l'intermédiaire de ces
prédicats de façon affirmative ou négative. [Voir Compréhension]"
(Fin de citation)
453
Ne pas considérer un principe du donné comme principe des choses en général
(Citation de K524 et note *)
"Selon une illusion naturelle, nous voyons alors en cela un principe qui devrait valoir
pour toutes les choses en général, alors qu'il ne vaut à proprement parler que pour
celles qui sont données comme objets de nos sens. Par voie de conséquence, le
principe empirique de nos concepts de la possibilité des choses en tant que
phénomènes devient, à travers la mise entre parenthèses de cette restriction, un
principe transcendantal de la possibilité des choses en général.
et qu'à travers ce tout du phénomène nous nous forgeons la pensée d'une chose
singulière qui contient en soi toute réalité empirique [l'être originaire] et qui alors, par
l'intermédiaire de la subreption transcendantale déjà évoquée, est confondue avec le
concept d'une chose qui se situe au sommet de la possibilité de toutes les choses
[l'être suprême], pour la détermination complète desquelles c'est cette chose unique
qui fournit les conditions réelles.
[Note *]
Cet idéal de l'être le plus réel de tous est en ce sens, quand bien même il ne s'agit
que d'une simple représentation, d'abord réalisé, c'est-à-dire transformé en objet,
ensuite hypostasié et enfin, à la faveur d'une progression naturelle de la raison vers
l'achèvement de l'unité, personnifié, comme nous l'indiquerons bientôt. L'explication
en est que l'unité régulatrice de l'expérience repose, non sur les phénomènes eux-
mêmes (sur la sensibilité seule), mais sur l'enchaînement de la diversité qu'ils
contiennent par l'entendement (dans une aperception), et que par conséquent l'unité
de la réalité suprême et la déterminabilité intégrale (possibilité) de toutes choses
semblent résider dans un entendement suprême, donc dans une intelligence [celle
de l'être suprême]."
(Fin de citation)
454
La raison a besoin d'un fondement pour la détermination intégrale de ses concepts
L'être humain a besoin de comprendre le monde et le fonctionnement de sa propre
pensée, faute de quoi il manque de repères et en souffre. Il a donc imaginé un
concept d'être à l'origine du monde permettant d'en expliquer les phénomènes.
(Citation de K525)
"En dépit de ce besoin pressant qu'éprouve la raison de supposer quelque chose qui
puisse servir complètement de fondement à l'entendement pour la détermination
intégrale de ses concepts [du monde], elle remarque pourtant beaucoup trop
facilement ce qu'a d'idéal et de purement fictif une telle supposition pour pouvoir être
persuadée par cela seul d'admettre d'emblée comme un être effectivement réel une
simple créature engendrée spontanément par sa pensée,
[Kant attribue le concept d'être originaire à l'imagination humaine, et en reconnaît
le caractère hypothétique et fictif]
si elle n'était pas poussée par un autre biais à rechercher quelque part un point où se
reposer dans la régression allant du conditionné, qui est donné, vers l'inconditionné,
lequel, certes, n'est pas en soi et d'après son simple concept donné comme
effectivement réel, mais peut seul achever la série des conditions rapportées à leurs
fondements.
[L'homme a un besoin psychologique d'expliquer l'origine de l'Univers à partir de
ses constatations actuelles, donc de lois naturelles d'évolution.]
Or, c'est là le cours naturel que suit toute raison humaine […]. Elle ne part pas des
concepts, mais de l'expérience commune, et elle prend donc pour fondement
quelque chose d'existant. Mais le sol qu'elle s'est ainsi donné s'effondre s'il ne
repose pas sur le roc immuable de l'absolument nécessaire [régi par des lois de la
nature]."
(Fin de citation)
Les lois de la nature n'expliquent pas l'origine du monde et la raison de son existence
K525, à la suite de la citation précédente – "Mais [ce roc immuable], à son tour, flotte
sans point d'appui s'il y a encore un espace vide en dehors et au-dessous de lui, s'il
ne remplit pas lui-même tout et ne laisse ainsi aucune place disponible pour le
pourquoi, c'est-à-dire s'il n'est pas infini quant à sa réalité."
455
concepts de choses possibles un concept] qui pût légitimement prétendre [être
absolument inconditionné]".
Mais si nous préférons "laisser toute cette affaire en suspens jusqu'à ce nous soyons
contraints à donner notre adhésion par le seul poids des arguments, c'est-à-dire s'il
s'agit uniquement de porter une appréciation sur ce que nous savons à propos de ce
problème et sur ce que nous nous flattons seulement de savoir, le raisonnement pré-
cédent n'apparaît plus alors […] dans une perspective si avantageuse et il a besoin
que la faveur vienne remplacer les titres de légitimité qui lui manquent."
Suite de cette section : Preuves possibles de l'existence de Dieu (liste des 3).
456
Idéalisme : doctrine (idéalisme empirique, subjectif ou transcendantal)
Idéalisme de Platon
Platon [49] déplore la difficulté de raisonner correctement sur les objets et
phénomènes du monde physique, parce qu'ils changent sans cesse avec le temps
qui passe ou l'observateur, rendant ainsi aléatoire la connaissance de la vérité.
S'inspirant de Pythagore [74], dont les nombres n'ont pas ce défaut d'instabilité,
Platon a décidé de raisonner le plus possible sur des Idées (une idée étant une
abstraction, une essence, une chose en soi absolue, immuable et éternelle). Dans sa
doctrine idéaliste, une réalité physique n'est qu'une manifestation particulière d'une
idée dans des circonstances données.
457
(Citation de [56b] §49 page 140)
"L'idéalisme cartésien ne fait que distinguer
l'expérience externe du rêve,
et la légalité comme critère de la vérité de cette expérience de l'absence de
règles et de la fausse apparence du rêve.
Or il est facile de lever ici ce doute et nous ne cessons de le faire dans la vie
courante en nous enquérant de la liaison des phénomènes selon les lois générales
de l'expérience : si la représentation des choses extérieures s'y conforme
entièrement, nous ne pouvons douter que ces choses doivent constituer une
expérience véritable."
[La bonne compréhension des phénomènes traduits en représentations permet,
par induction, de formuler des lois d'évolution de prévoyant les phénomènes
futurs ; si ces prévisions s'avèrent exactes, nous postulons que notre
compréhension et nos lois sont correctes.]
(Fin de citation)
Idéalisme matériel
Kant qualifie la doctrine de Descartes d'Idéalisme problématique (K282) et l'appelle
aussi Idéalisme matériel.
[56b] §49 page 141 - L'idéalisme formel (que je nomme encore idéalisme
transcendantal) supprime réellement l'idéalisme matériel ou cartésien. Car, si
l'espace n'est rien qu'une forme de ma sensibilité, en tant que représentation en moi,
il est tout aussi réel que moi-même, et il ne s'agit plus dès lors que de la vérité
empirique des phénomènes dans cet espace. S'il n'en est pas ainsi, mais si l'espace
ainsi que les phénomènes dans l'espace sont quelque chose qui existe hors de nous,
alors tous les critères de l'expérience en dehors de notre perception ne peuvent
jamais prouver la réalité de ces objets hors de nous."
Idéalisme empirique
Voir Définition de l'idéalisme empirique.
Evêque anglican, Berkeley [75] nie l'existence de toute réalité physique, donc de
toute matière. Il considère l'idée (la représentation mentale humaine) comme la seule
réalité, et affirme que son origine ultime est Dieu. Il considère l'espace comme une
abstraction humaine, une propriété de l'essence d'un objet ou phénomène, sans
458
existence physique. Sa doctrine, dogmatique, porte les noms d'Immatérialisme,
Idéalisme subjectif ou Idéalisme dogmatique. Elle affirme que « être, c'est être
perçu », les objets matériels n'étant en réalité que des perceptions humaines. Voir
Idéaliste dogmatique, idéaliste sceptique.
L'immatérialisme de Berkeley, adopté par exemple par Nietzsche [34] suite aux
théories fantaisistes de Boscovich [76], a abouti à des absurdités physiques
contredisant, par exemple, les lois de Newton [115] et l'existence des atomes.
L'idéalisme de Berkeley est mystique
Mais il y a plus grave : attribuer tout ce qu'on voit et tout ce qu'on ne comprend
pas à Dieu dispense de chercher une explication scientifique ou simplement
rationnelle. C'est une négation de la science, donc aussi de la connaissance
scientifique qui permet à l'homme d'agir sur la nature pour lutter contre la
maladie, la famine, le froid, etc. C'est une apologie de la passivité et de
l'ignorance, une soumission à un dogmatisme contraire à la dignité de l'homme.
Nietzsche [48] adhérait à cette doctrine parce qu'il refusait toute science et toute
rationalité [34].
Kant a dénoncé cette doctrine parce qu'elle fait des objets d'une réalité externe
de simples représentations. Rappelons-nous qu'il est l'auteur d'un des textes les
plus célèbres de tous les temps contre l'ignorance et l'absence de réflexion [25].
Pour Kant, l'idéalisme est la doctrine du doute sur l'existence des objets externes
(Citation de [56b] §13 Remarque II pages 66-67)
[Les seuls êtres qui existent sont les êtres pensants]
"L'idéalisme consiste à soutenir qu'il n'y a pas d'autres êtres que les êtres pensants ;
les autres choses, que nous croyons percevoir dans l'intuition, ne seraient que des
représentations dans les êtres pensants ;
[Noter le dans, qui veut dire dans l'esprit]
[L'idéalisme nie tout lien entre ces représentations et des objets extérieurs réels]
à ces représentations ne correspondrait aucun objet ayant une existence à l'extérieur
de ces représentations.
[Voir aussi le cas particulier de l'Idéalisme immatérialiste de Berkeley]
459
Les objets extérieurs existent, mais perceptibles seulement par des représentations
En conséquence j'accorde sans contredit qu'il y a en dehors de nous des corps,
c'est-à-dire des choses, dont, tout en ne connaissant absolument pas ce qu'elles
peuvent être en elles-mêmes, nous prenons connaissance grâce aux représentations
que nous procure leur influence sur notre sensibilité ; et c'est à ces choses que nous
donnons le nom de « corps »."
(Fin de citation)
Le principe qui régit et détermine de part en part mon idéalisme est au contraire le
suivant :
« Toute connaissance des choses qui provient uniquement de l'entendement pur
ou de la raison pure est simple apparence et il n'est de vérité que dans
l'expérience ».
[- La prise de conscience du sujet vient de l'aperception, pas de l'intuition ;
- l'expérience n'est pas apparence, elle est objective ;
- enfin, c'est le jugement ultérieur qui peut être trompeur.]
comment en suis-je donc venu à me servir de ce terme dans une intention toute
opposée, et comment le critique en est-il venu à le voir partout ? La solution de cette
difficulté repose sur quelque chose que l'on aurait pu aisément, si on l'avait voulu,
dégager de l'ensemble de l'œuvre [La Critique].
Mais eux, et c'est le cas de Berkeley en particulier, ils considéraient l'espace comme
une représentation simplement empirique qui, [comme] les phénomènes qu'il
contient, ne nous est connu, avec toutes ses déterminations, que grâce à
l'expérience ou perception ;
460
déterminations, peut être connu de nous a priori, parce qu'il nous est présent, ainsi
que le temps, à titre de forme pure de notre sensibilité avant toute perception ou
expérience [l'espace et le temps sont des concepts a priori de l'entendement] et qu'ils
rendent possible toute intuition de cette sensibilité, par suite également tous les
phénomènes.
En conséquence, comme la vérité repose sur des lois universelles et nécessaires qui
en sont les critères, l'expérience chez Berkeley ne peut avoir de critères de vérité
puisqu'il n'a assigné aux phénomènes de cette expérience rien d'a priori comme
principe ; il s'ensuit qu'ils ne sont qu'apparence, alors que pour nous, au contraire,
espace et temps (en conjonction avec les purs concepts d'entendement) prescrivent
a priori à toute expérience possible sa loi, qui procure en même temps le sûr critère
qui permet de distinguer en elle la vérité de l' apparence.
[L'idéalisme de Berkeley est idéologique, celui de Kant est utilitaire]
L'idéalisme proprement dit [celui des idéalistes « véritables »] a toujours eu une
intention visionnaire, et il ne peut même en avoir d'autre ;
Mon idéalisme [critique] est donc d'une espèce tout à fait particulière : il ruine
l'idéalisme habituel, il est le premier à procurer à toute connaissance a priori, même
celle de la géométrie, une réalité objective que même les réalistes les plus fervents
ne pourraient nullement soutenir à défaut de la démonstration que j'ai donnée de
l'idéalité de l'espace et du temps.
Les choses en étant là, je souhaiterais, afin de prévenir tout malentendu, trouver
pour ma conception une autre dénomination; mais il ne paraît guère praticable d'en
changer entièrement. Qu'il me soit donc permis de l'appeler dorénavant, comme je
l'ai déjà fait ci-dessus, idéalisme formel, ou mieux encore idéalisme critique, pour le
distinguer de l'idéalisme dogmatique de Berkeley et de l'idéalisme sceptique de
Descartes."
(Fin de citation)
En fait, sachant que cet idéalisme est la doctrine avec laquelle il a développé sa
philosophie transcendantale, on peut aussi l'appeler idéalisme transcendantal :
K110 - "Je nomme transcendantale toute connaissance qui s'occupe en général
moins d'objets que de notre mode de connaissance des objets, en tant que celui-
461
ci doit être possible a priori. Un système de tels concepts s'appellerait
philosophie transcendantale."
462
« alors il faut aussi que tous les corps ainsi que l'espace dans lequel ils se trouvent,
nous les réduisions à de simples représentations en nous
et il faut qu'ils n'existent nulle part ailleurs que dans notre seule pensée ». N'est-ce
pas là manifestement l'idéalisme?
[Position de l'idéalisme de Kant : un monde extérieur existe, mais nous n'en voyons
que nos représentations]
Tout au contraire, moi, je dis : des choses nous sont données comme objets de nos
sens et existant hors de nous ; mais nous ne sommes informés que de leurs
apparitions, c'est-à-dire des représentations qu'elles produisent en nous en affectant
nos sens.
et c'est à ces choses que nous donnons le nom de « corps », mot qui signifie par
conséquent simplement l'apparition de cet objet qui nous est inconnu, mais qui pour
autant n'en est pas moins réel. Est-on fondé à qualifier ceci d'idéalisme ? C'en est
même tout juste le contraire. […]
Idéalisme formel
Voir Idéalisme formel.
463
Définition de l'Idéalisme transcendantal
K376 – "J'entends […] par idéalisme transcendantal de tous les phénomènes la
position doctrinale selon laquelle nous les regardons tous, globalement, comme de
simples représentations, et non pas comme des choses en soi, et conformément à
laquelle espace et temps ne sont que des formes sensibles de notre intuition, mais
non pas des déterminations données pour elles-mêmes ou des conditions des objets
en tant que choses en soi."
Idéalisme formel
[56b] §49 page 141 - Kant appelle aussi l'Idéalisme transcendantal Idéalisme formel :
"L'idéalisme formel (que je nomme encore idéalisme transcendantal) supprime
réellement l'idéalisme matériel ou cartésien. Car, si l'espace n'est rien qu'une
forme de ma sensibilité, en tant que représentation en moi, il est tout aussi réel
que moi-même, et il ne s'agit plus dès lors que de la vérité empirique des
phénomènes dans cet espace. S'il n'en est pas ainsi, mais si l'espace ainsi que
les phénomènes dans l'espace sont quelque chose qui existe hors de nous,
alors tous les critères de l'expérience en dehors de notre perception ne peuvent
jamais prouver la réalité de ces objets hors de nous."
Réalisme empirique
K377 – "L'idéaliste transcendantal peut […] être un réaliste empirique, par
conséquent, comme on l'appelle, un dualiste, c'est-à-dire admettre l'existence de la
matière sans sortir de la simple conscience de soi, ni accepter quelque chose de plus
que la certitude des représentations en moi, par conséquent que le cogito, ergo sum
[latin : je pense, donc j'existe]".
En effet, parce qu'il ne donne à cette matière et même à sa possibilité
intrinsèque que la valeur d'un phénomène qui, séparé de notre sensibilité, n'est rien,
elle ne constitue chez lui qu'une espèce de représentations (intuition) que l'on
appelle « extérieures », non pas au sens où elles se rapporteraient à des objets
extérieurs en soi, mais en tant qu'elles rapportent des perceptions à l'espace dont
tous les éléments existent les uns en dehors des autres, alors que l'espace lui-même
est en nous."
464
La seule certitude pour l'homme est celle résumée par « Je pense, donc
j'existe » de Descartes : l'homme est certain de sa pensée, il en est conscient.
C'est un effet de l'unité objective de la conscience de soi.
Cette pensée lui donne accès à son sens interne, qui lui fournit la notion de
temps qui s'écoule indépendamment de lui.
(Détails dans la discussion de la Psychologie rationnelle (science du Moi) )
L'indépendance de l'écoulement du temps par rapport à l'homme prouve à celui-
ci (par raisonnement) qu'il existe un monde extérieur à lui.
L'homme a un sens externe qui lui fournit la notion d'espace. Les objets de cet
espace externe sont inconnaissables, mais ils affectent l'homme en produisant
dans son esprit des représentations dont il est conscient.
Expérience et réalité
(Citation de K471-K472)
[Postulat : les objets de notre expérience existent réellement]
"Notre idéalisme transcendantal [admet] que les objets de l'intuition extérieure
existent aussi effectivement tels qu'ils sont intuitionnés dans l'espace, et tous les
changements dans le temps tels que le sens interne les représente. […]
Puisque sans objets dans l'espace il n'y aurait absolument aucune
représentation empirique, nous pouvons et devons y admettre comme
effectivement réels des êtres étendus ; et il en va de même aussi du temps.
[Malgré l'existence physique d'objets externes nos représentations ne sont que
des abstractions]
Reste que cet espace lui-même, ainsi que ce temps et, avec eux, tous les
phénomènes ne sont pourtant pas, en eux-mêmes, des choses, mais qu'ils ne
sont rien que des représentations et ne peuvent aucunement exister en dehors
de notre esprit ;
[Ma conscience de soi n'est pas ma personnalité (inaccessible), c'est une
interprétation d'une représentation de moi-même dans mon esprit]
et même l'intuition interne et sensible de notre esprit (intuitionné comme objet de
la conscience), dont la détermination est représentée par la succession de divers
états dans le temps, n'est pas non plus le véritable Moi, tel qu'il existe en soi, ni
le sujet transcendantal, mais seulement un phénomène qui se trouve donné à la
sensibilité de cet être inconnu de nous.
[Ma représentation de moi-même n'existe pas en tant que chose en soi, car elle
n'existe que pendant que j'en suis conscient, alors qu'une chose en soi est
conçue indépendamment du temps]
L'existence de ce phénomène interne comme chose qui existerait ainsi en soi ne
peut pas être accordée, puisque la condition en est le temps, lequel ne peut être
une détermination d'une quelconque chose en soi.
[Contrairement à ma conscience de soi, liée à mon sens interne, l'existence des
phénomènes perçus par mon sens externe est certaine du fait de leur cohérence
dans l'espace et le temps et de leur conformité à des lois empiriques]
Mais dans l'espace et dans le temps la vérité empirique des phénomènes est
assez garantie et elle se trouve suffisamment distinguée de ce qui pourrait
l'apparenter au rêve, dès lors que, dans les deux registres [espace et temps], ils
465
[les phénomènes] s'enchaînent exactement et complètement, en se conformant
à des lois empiriques, au sein d'une expérience.
[Conclusion : la réalité physique n'existe qu'à travers notre expérience]
Les objets de l'expérience ne sont par conséquent jamais donnés en eux-
mêmes, mais seulement dans l'expérience, et ils n'existent aucunement en
dehors de celle-ci."
(Fin de citation)
[Mais le postulat d'existence des objets extérieurs ne vaut pas certitude]
Il est impossible à l'homme de prouver la réalité de ses représentations du
monde externe, car elles pourraient être imaginées et/ou déformées par sa
pensée. En outre, étant subjectives, elles ne permettent pas le raisonnement et
la communication avec d'autres hommes comme des connaissances objectives.
[Ce qui échappe à l'expérience peut être considéré comme n'existant pas]
Ce que l'homme ne peut connaître par expérience étant manifestement
inconnaissable, nous pouvons l'ignorer comme s'il n'existait pas, car nous ne
pouvons raisonner dessus. Même s'il est impossible de démontrer l'existence ou
l'inexistence d'une réalité externe indépendante des représentations de
phénomène, en pratique on peut ne prendre en compte que ces représentations,
constituant pour nous la réalité (K260).
L'homme se contente donc de connaissances basées sur une seule certitude :
« J'existe en tant qu'être pensant », et des représentations de phénomènes
externes fournies par son sens externe et sujettes à erreurs.
Voir aussi : Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant ; Réalité.
Pour compléter sa connaissance du monde issue de ses représentations,
l'homme s'en construit des modèles sous forme de lois de la physique, qui
décrivent les objets des phénomènes [voir objet des sens], leurs relations et
leurs évolutions : chaque loi infère une cause à partir d'un effet, conformément
au déterminisme.
Ces lois sont basées sur le principe de la primauté des connaissances sur les
objets : l'homme postule que ses lois de la nature sont ce qu'elles paraissent être
du fait des représentations des phénomènes.
Comme une telle loi n'est qu'une généralisation par induction de constatations de
phénomènes, elle n'est pas certaine, c'est un postulat.
Cette loi postulée peut à tout moment être remise en cause si une description
qu'elle fournit ou une évolution qu'elle prédit s'avère fausse ou insuffisamment
précise. Cette approche est la base de la méthode scientifique moderne : voir le
chapitre Le Rationalisme critique de Karl Popper [90] dans [12].
Voir aussi : Les Idées sont les causes efficientes de la nature – Les croyances de
Kant.
466
(Citation de [19] pages 880-881 note Sur le sens kantien de Raison) :
"Nul objet sensible n'est [n'existe réellement], car :
1. Nul n'occupe une place déterminée dans le temps et dans l'espace, faute de
commencement et de bornes à partir desquelles on puisse compter ;
2. Nul n'est constitué par une quantité de matière déterminée, car il n'y a pas
d'éléments derniers, d'unités de matière, dont il puisse être dit composé ;
3. Nul n'est complètement expliqué dans son devenir, car la régression dans les
séries causales va à l'infini ;
4. Nul n'est complètement expliqué dans son existence, car il n'y a pas de premier
être qui existe par lui-même et fasse exister tous les autres."
(Fin de citation)
La cause non sensible de ces représentations nous est totalement inconnue, et c'est
pourquoi nous ne pouvons l'intuitionner comme objet ; car il faudrait qu'un tel objet ne
soit représenté ni dans l'espace ni dans le temps (en tant que ces derniers sont
simplement conditions de la représentation sensible) - conditions sans lesquelles
nous sommes incapables de penser la moindre intuition.
467
Cet Idéalisme transcendantal s'oppose au Réalisme transcendantal, qui affirme que
l'espace, le temps et les objets matériels qu'ils contiennent sont des choses en soi ;
cette doctrine est à l'origine de l'Idéalisme empirique.
L'Idéalisme transcendantal de Kant s'oppose à l'Idéalisme empirique : il permet
un Réalisme empirique, dualisme accordant autant de réalité à l'homme être pensant
qu'à la matière.
Voir aussi :
Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant ;
Matérialisme et opposition avec l'Idéalisme et le Réalisme ;
Les Idées sont les causes efficientes de la nature – Les croyances de Kant ;
Réfutation de l'idéalisme.
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine) ;
Réalisme ;
Conceptualisme.
Idéaliste (définition)
Voir Définition d'un idéaliste.
(Citation de K381-K382)
"L'idéaliste dogmatique serait celui qui nie l'existence de la matière, l'idéaliste
sceptique, celui qui la met en doute, parce qu'il la tient pour indémontrable.
Le premier peut faire sienne cette position simplement parce qu'il croit trouver
des contradictions dans la possibilité d'une matière en général […]
[Voir Idéalisme subjectif de Berkeley (Immatérialisme)]
L'idéaliste sceptique, qui vise simplement le fondement de notre affirmation et
déclare insuffisante la façon dont nous nous sommes persuadés de l'existence
de la matière, que nous croyons fonder sur la perception immédiate […] nous
contraint à bien ouvrir les yeux, même pour ce qui touche au plus petit pas de
l'expérience commune, et à ne pas accepter immédiatement […] ce que nous ne
faisons peut-être qu'obtenir par subreption.
[Ces objections] nous poussent puissamment, si nous ne voulons pas nous empêtrer
dans nos affirmations les plus communes, à considérer toutes nos perceptions, qu'on
les appelle intérieures ou extérieures, simplement comme une conscience de ce qui
se rattache à notre sensibilité, et les objets extérieurs de ces perceptions, non
comme des choses en soi, mais seulement comme des représentations dont nous
pouvons avoir immédiatement conscience, comme de toute autre représentation,
mais qui sont dites extérieures parce qu'elles se rattachent à ce sens que nous
nommons le sens externe, dont l'intuition est l'espace, lequel n'est cependant lui-
468
même autre chose qu'un mode intérieur de représentation où certaines perceptions
établissent entre elles des liens."
(Fin de citation)
La réalité extérieure à notre esprit n'est accessible qu'en tant que représentations
(Citation de K376)
"Je ne peux […] proprement percevoir des choses extérieures, mais seulement, à
partir de ma perception interne, conclure à leur existence, en regardant cette
perception interne comme l'effet dont quelque chose d'extérieur à moi est la cause la
plus prochaine. [Détails]
Kant considère donc, comme Platon [49], que la réalité extérieure n'est accessible à
notre esprit qu'en tant que représentation, donc en tant qu'Idée. Or notre esprit étant
sujet à toutes sortes d'erreurs, la réalité correspondant à une représentation
extérieure que nous avons est douteuse : elle peut exister, ne pas exister ou être
différente.
469
Cette incertitude ne concerne que la réalité de ce qui est seulement dans l'esprit ou
qui ne peut être connu qu'en tant que phénomène de l'esprit, comme la réalité du
phénomène extérieur correspondant à une représentation.
Conclusions :
L'idéalisme est la doctrine du doute sur l'existence des objets externes.
Le dualisme d'existence (existe/n'existe pas) est l'opposé de l'idéalité.
470
extérieurs en soi, mais en tant qu'elles rapportent des perceptions à l'espace dont
tous les éléments existent les uns en dehors des autres, alors que l'espace lui-même
est en nous."
K382 – "Dans l'ensemble de l'expérience, la matière est réellement donnée au
sens externe comme substance dans le phénomène, tout comme le Moi
pensant, également comme substance dans le phénomène, est donné au sens
interne ;"
K124 - "Les explications que nous donnons enseignent par conséquent la réalité
(c'est-à-dire la validité objective) de l'espace à l'égard de tout ce qui peut s'offrir à
nous extérieurement comme objet, mais en même temps l'idéalité de l'espace à
l'égard des choses, dès lors qu'elles sont appréciées par la raison en elles-mêmes
[en tant que Idées], c'est-à-dire sans que soit prise en compte la constitution de notre
sensibilité.
Nous affirmons en ce sens la réalité empirique de l'espace (à l'égard de toute
expérience externe possible), tout en affirmant son idéalité transcendantale, c'est-à-
dire qu'il n'est rien dès que nous omettons la condition de la possibilité de toute
expérience. […] Nous admettons [l'espace] comme quelque chose qui est au
fondement des choses en elles-mêmes."
K132 : note 50 page 698 - L'espace et le temps ont tous deux à la fois une réalité
empirique et une idéalité transcendantale.
Pour l'Idéalisme transcendantal : les objets des sens ne sont que des phénomène
K138 - L'idéalité des sens externe et interne fait des objets des sens de simples
phénomènes.
Sens externe et intuition d'espace. Toutes nos connaissances d'origine intuitive
ne sont que de simples relations dans l'espace entre des lieux, des mouvements
et des forces d'évolution. Or à travers ces relations on ne peut connaître ni
chose en soi, ni réalité intrinsèque appartenant à un objet physique.
Sens interne et intuition de temps. Le temps où nous situons les représentations
spatiales précède la conscience que nous en avons et en est la condition
formelle pour les situer. La connaissance du temps contient des relations de
succession, de simultanéité et de permanence. Précédant les connaissances
spatiales, celle du temps est donc intuitive a priori.
471
Objection faite à Kant sur son idéalité de l'espace et du temps
Enoncé de l'objection
L'idéalité de l'espace et du temps transforme le monde sensible tout entier en pure
apparence.
Réponse de Kant
(Citation de [56b] §13 Remarque III page 68)
"La connaissance sensible ne représente pas du tout les choses telles qu'elles sont,
mais seulement la manière dont elles affectent nos sens,
[La formation sensible des représentations des phénomènes est un automatisme
qui exclut tout entendement, donc tout jugement de ces phénomènes.]
[donc] ce qu'elle donne à la réflexion de l'entendement, ce n'est pas les choses elles-
mêmes, mais simplement les phénomènes."
[La sensibilité est donc seulement l'origine de l'entendement, qui seul pense les
phénomènes. Et ce sont les phénomènes qu'il pense, pas les choses elles-
mêmes.]
(Fin de citation)
Conséquences
(Citation de [56b] §13 Remarque III pages 68-69)
"Lorsque le phénomène nous est donné, nous restons entièrement libre de la
manière dont nous allons former notre jugement à partir de ce phénomène.
Mais ce qui introduit la différence entre la vérité et le rêve, ce n'est pas la nature des
représentations qui sont rapportées à l'objet, puisque dans les deux cas elles sont
identiques, c'est leur connexion selon les règles qui déterminent la cohérence des
représentations dans le concept d'un objet [c'est-à-dire leur conformité], et la mesure
dans laquelle elles peuvent ou non coexister dans une expérience [c'est-à-dire
l'absence de contradictions entre ces représentations]."
(Fin de citation)
Conclusion
Notre sensibilité nous donne une représentation du monde dont nous tirons des lois
déterministes qui expliquent chaque phénomène à partir du passé et prédisent son
évolution à partir du présent.
472
d'action. Nous ne connaissons pas la réalité (qui est et demeurera inconnaissable),
mais nous pouvons faire comme si ce que nous en voyons en est une image fidèle.
Idée pratique
Voir L'Idée et le noumène sont indispensables dans le domaine de la raison pratique.
Sens de Idée donné par les Grecs (Platon, etc. : I majuscule dans ce texte)
Pour les Grecs l'Idée est ce que Kant appelle une Idée transcendantale, concept de
la raison pure. C'est une réalité d'un domaine supérieur (parfaite), intemporelle,
indépendante du monde physique et de l'homme. Kant confirme que, pour les Grecs,
c'est dans l'Idée que réside l'absolue nécessité, la matière n'étant que le substrat des
phénomènes :
K545 – [C'est dans la pensée de l'Idée] "que résidait aussi, pour eux, l'absolue
nécessité."
(L'existence d'une Idée ne reposant sur aucun préalable, aucune cause
naturelle, est donc une nécessité absolue : elle a toujours existé
indépendamment d'un homme qui la conçoit, et existera toujours :
une Idée est une chose en soi.)
L'Idée serait un concept si celui-ci pouvait contenir toutes les informations d'une
description exhaustive parfaite d'un objet réel, ce qui est impossible. C'est parce
qu'ils croyaient une telle description possible pour le Dieu créateur (et lui seul) que
certains penseurs ont cru à tort que Celui qu'ils imaginaient existait réellement : voir
Preuve ontologique et Idéal.
473
Une Idée peut avoir un sens spirituel
Intelligible, l'Idée peut avoir un sens spirituel (comprenant des valeurs morales) et
être nommée.
K342 – "Platon [49] se servait du terme d'Idée de manière telle qu'on voit bien qu'il a
compris par là quelque chose qui, non seulement n'est jamais emprunté aux sens,
mais va même largement au-delà des concepts de l'entendement dont se servait
Aristote [43], dans la mesure où jamais rien qui y corresponde ne se rencontre dans
l'expérience. Les Idées sont, chez Platon, des archétypes des modèles originaux des
choses elles-mêmes, et non pas simplement des clefs pour des expériences
possibles, comme le sont les catégories. Selon son opinion, elles découlaient de la
raison suprême, à partir de quoi elles étaient devenues partie intégrante de la raison
humaine…"
K342-K343 – "Platon trouvait ses Idées principalement dans tout ce qui est d'ordre
pratique, c'est-à-dire dans ce qui repose sur la liberté."
Voir :
Représentation (diagramme) ;
Chose en soi ;
Noumène ;
Transcendantal ;
Idée selon Kant ;
Philosophes sensualistes et philosophes intellectualistes.
Définitions
Idée de la raison
(Citation de K350)
"J'entends par Idée un concept nécessaire de la raison auquel aucun objet qui lui
corresponde ne peut être donné dans les sens [c'est-à-dire une chose en soi].
[Pourquoi les idées sont indispensables la connaissance
K342 – "Platon [49] remarquait très bien que notre faculté de connaître ressent
un besoin beaucoup plus élevé que celui d'épeler [nommer] simplement des
phénomènes en fonction d'une unité synthétique, pour pouvoir les lire comme
474
une expérience, et que notre raison s'élève tout naturellement à des
connaissances allant beaucoup trop loin pour qu'un quelconque objet
susceptible d'être fourni par l'expérience puisse jamais leur correspondre - mais
des connaissances possédant néanmoins leur réalité et ne se réduisant
nullement à de simples chimères."]
[Les idées sont représentées par des concepts purs de la raison, appelés de ce fait
« idées transcendantales »]
Ainsi nos concepts purs de la raison, à l'examen desquels nous procédons
actuellement, sont-ils des Idées transcendantales.
Ce sont là des concepts de la raison pure, dans la mesure où ils considèrent toute
connaissance empirique comme déterminée par une totalité absolue des conditions.
Ils ne sont pas arbitrairement forgés, mais nous sont fournis par la nature même de
la raison et se rapportent par conséquent de façon nécessaire à tout l'usage de
l'entendement.
Enfin, ils sont transcendants et dépassent les limites de toute expérience, dans
laquelle ne peut donc jamais intervenir un objet qui soit adéquat à l'Idée
transcendantale."
(Fin de citation)
K346 - Kant appelle aussi l'Idée concept rationnel issu de notions ou être de raison.
475
K516 – "Il ne se peut trouver aucun phénomène par rapport auquel [les Idées] se
laissent représenter in concreto. Elles contiennent une certaine complétude à
laquelle ne parvient aucune connaissance empirique possible, et la raison ne
considère en elles qu'une unité systématique dont elle cherche à rapprocher
l'unité qui est empiriquement possible, sans jamais l'atteindre pleinement.
Voir chose en soi.
La totalité absolue de tous les phénomènes n'est pas elle-même une expérience
(Citation de [56] §40)
"Toute expérience particulière en effet n'est qu'une partie de la sphère totale de son
domaine, or la totalité absolue de toute expérience possible n'est pas elle-même une
expérience ;"
(Fin de citation)
Le concept de totalité absolue de toute expérience possible est donc une simple
Idée, une abstraction.
Sa mise en œuvre est toujours limitée et défectueuse, mais à l'intérieur de limites qui
ne sont pas déterminables : elle est donc toujours soumise à l'influence du concept
d'une perfection absolument complète.
En vertu de quoi l'Idée pratique est toujours extrêmement féconde et, vis-à-vis des
actions effectives, incontournablement nécessaire. En elle, la raison pure possède
même la causalité qui lui permet de produire effectivement ce que son concept
contient ;
476
La sagesse est l'Idée de l'unité nécessaire de toutes les fins possibles
de là vient que l'on ne peut dire de la sagesse, de façon en quelque sorte
dédaigneuse, qu'elle est simplement une Idée ; au contraire, précisément par là
même qu'elle est l'Idée de l'unité nécessaire de toutes les fins possibles, elle doit
servir de règle pour tout ce qui est d'ordre pratique, en tant que condition originaire
ou du moins limitative."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Différence entre l'Idée de Platon et celle de Kant ;
Idées cosmologiques (système) ;
Chose en soi ;
Essence ;
Noumène.
Les Idées sont les causes efficientes de la nature – Les croyances de Kant
Définition d'une Idée : voir Idée selon Kant (concept rationnel issu de notions).
Définition d'une cause efficiente : voir d'abord Les 4 causes d'Aristote.
(Citation de K344-K345, délimitée par des [numéro.] pour l'interprétation qui suit)
[1.] "Toutefois, ce n'est pas seulement dans le registre où la raison humaine montre
une véritable causalité
[2.] et où les Idées deviennent des causes efficientes (des actions comme de leurs
objets), c'est-à-dire dans le registre moral,
[3.] mais c'est aussi vis-à-vis de la nature elle-même que Platon [49] aperçoit à bon
droit des preuves transparentes de la manière dont l'origine s'en trouve dans des
Idées. Une plante, un animal, l'organisation régulière de l'Univers [conformément au
déterminisme] (vraisemblablement aussi, par conséquent, tout l'ordre de la nature)
montrent clairement qu'ils ne sont possibles que d'après des Idées ;
[4.] qu'à vrai dire nulle créature individuelle, sous les conditions particulières de son
existence, ne correspond à l'Idée de ce qu'il y a de plus parfait dans son espèce (pas
davantage que l'homme ne correspond à l'Idée de l'humanité, qu'il porte pourtant lui-
même en son âme comme modèle de ses actions) ;
[5.] que cependant ces Idées sont déterminées pour chacune d'elles dans
l'entendement suprême, immuablement et complètement, qu'elles sont les causes
originaires de choses
[6.] et que seul l'ensemble constitué par leur liaison dans l'univers est pleinement
adéquat à l'Idée que nous en avons. […]
477
[7.] l'élan de l'esprit par lequel le philosophe s'élève de la considération de la copie
que constitue, dans sa dimension physique, l'ordre du monde jusqu'à la liaison
architectonique de cet ordre d'après des fins, c'est-à-dire d'après des Idées,
[8.] est un effort qui mérite d'être respecté et imité.
[9.] Mais à l'égard de ce qui a trait aux principes de la morale, de la législation et de
la religion, où c'est à partir des Idées que l'expérience elle-même (celle du bien)
devient possible, quand bien même elles ne peuvent jamais s'y trouver entièrement
exprimées, cet effort a un mérite tout particulier…"
(Fin de citation)
Dans ce court passage, Kant expose ses croyances à partir du concept d'Idée :
1. La raison humaine a une faculté de causalité, aptitude à imaginer par induction
les causes des phénomènes naturels à partir d'expériences, et des pensées
humaines à partir d'observations de raisonnements.
2. Les causes efficientes des actions des hommes et de leurs valeurs sont des
abstractions : les Idées.
3. Selon Kant, Platon a raison de croire que l'existence du monde et ses lois
physiques d'évolution ont aussi pour origines des Idées. Il trouve des preuves
évidentes de cette doctrine dans l'harmonieuse organisation des plantes,
animaux et objets de la Terre et de l'Univers, organisation qui ne peut être due
qu'à l'existence d'Idées directrices. Comme Platon, Kant affirme là une doctrine
téléologique du monde.
4. Aucune créature ne correspond parfaitement à l'idéal de son espèce. L'homme
lui-même ne correspond pas au modèle idéal de l'humanité qu'il porte en son
cœur.
5. Les Idées, causes originaires des choses, ont pour origine la volonté de l'Etre
suprême et elle seule. Voir aussi :
Matérialisme et opposition avec l'Idéalisme et le Réalisme ;
Positions parfois contradictoires de l'Eglise catholique sur la création divine
du monde et l'évolutionnisme darwinien [113].
6. Nous pouvons comprendre l'Univers, mais seulement à l'aide d'un modèle basé
sur les Idées et leurs relations.
7. Le monde physique, ses objets et ses lois sont des copies de leurs Idées
d'origine, elles-mêmes définies par l'Etre suprême selon ses objectifs.
8. Un philosophe doit élever sa pensée du monde terrestre au monde des Idées, et
chaque homme devrait le respecter et l'imiter.
9. L'expérience du bien n'est possible qu'en postulant des Idées bonnes, même si
leur réalisation parfaite est impossible : c'est là un effort particulièrement méritant.
Kant pouvait croire tout cela par cohérence avec son Principe de la primauté de la
connaissance sur les objets (doctrine), principe applicable aussi aux connaissances
du "majestueux édifice de la morale" (K345).
Voir aussi Arguments de Kant pour une théologie basée sur un Dieu transcendantal.
478
Idéalisme transcendantal de Kant : définition et doctrine
Voir :
Définition de l'Idéalisme transcendantal ;
Doctrine de l'Idéalisme transcendantal ;
Idéalisme de Kant - Idéalismes empirique, critique et transcendantal ;
Kant professe la doctrine de l'Idéalisme transcendantal.
Voir aussi :
Principaux arguments de cette preuve en faveur d'une doctrine téléologique ;
Concept résultant : Dieu transcendantal, origine de l'unité de toute réalité
empirique.
Morale : s'il n'y a ni Dieu créateur ni libre arbitre, les règles morales ne s'imposent
pas (K457)
Voir aussi :
Kant et le problème de choix de la primauté entre les connaissances et les
objets ;
Autre utilité d'une doctrine de l'âme : protéger le Moi pensant contre le
matérialisme ;
Idée simple
Voir La connaissance incomplète d'un phénomène est "simplement une Idée".
479
Idée transcendantale
Idée transcendante
K514 et pages suivantes - Dialectique transcendantale / Des raisonnements
dialectiques de la raison pure / Remarque conclusive sur toute l'antinomie de la
raison pure
(Citation de K514)
[Idées transcendantales et cosmologiques]
"Aussi longtemps que nous n'avons pour objets, à travers nos concepts de la raison,
que la totalité des conditions présentes dans le monde sensible et ce qui, par rapport
à celles-ci, peut servir la raison, nos Idées sont certes transcendantales, mais
néanmoins cosmologiques.
[Si l'inconditionné est hors du monde sensible, les Idées sont transcendantes]
En revanche, dès que nous situons l'inconditionné (dont pourtant il s'agit à
proprement parler) dans ce qui est tout à fait en dehors du monde sensible, par
conséquent en dehors de toute expérience possible, les Idées deviennent
transcendantes :
480
distinct de tous les phénomènes, qui soit par conséquent un objet intelligible à
travers lequel cette contingence cesse.
[…]
Puisque nous n'apprenons à connaître le contingent que par l'intermédiaire de
l'expérience, mais qu'il est ici question de choses qui ne doivent absolument pas être
des objets de l'expérience, nous serons forcés d'en dériver la connaissance à partir
de ce qui est en soi nécessaire, à partir de concepts purs des choses en général.
[Nous chercherons donc un être absolument nécessaire], ainsi qu'à dériver des
concepts de cet être les concepts de toutes les choses en tant qu'elles sont
purement intelligibles;"
(Fin de citation)
Objet de l'antinomie de la raison pure : exposer les principes d'une cosmologie pure
K418 – "Tout comme les paralogismes constituaient le soubassement d'une
psychologie dialectique, l'antinomie de la raison pure exposera les principes
transcendantaux d'une prétendue cosmologie pure (rationnelle), non pas pour la
trouver valide et se l'approprier, mais, ainsi que l'indique déjà la dénomination qui
désigne ici un conflit de la raison, pour la présenter dans son apparence
éblouissante, mais fausse, comme une Idée qui ne se peut accorder avec des
phénomènes."
dans cette mesure elle est donc immanente et non transcendante, par suite, jusque
là ce n'est pas encore une Idée ;
alors qu'au contraire penser l'âme comme une substance simple revient déjà à
penser un objet (le simple) tel qu'il ne peut être représenté aux sens.
481
(Fin de citation)
482
Conséquence : les Idées transcendantales ne sont que des catégories étendues
jusqu'à l'inconditionné
(Citation de K419 - Suite de la citation K419 précédente)
"Ainsi,
Premièrement, les Idées transcendantales ne seront-elles proprement rien
d'autre que des catégories étendues jusqu'à l'inconditionné, et elles se laisseront
réduire à un tableau ordonné d'après les titres de ces dernières.
Cependant, deuxièmement, il faut ajouter que toutes les catégories ne se
prêteront pas à cela, mais uniquement celles où la synthèse constitue une série,
et plus précisément une série où les conditions, par rapport à un conditionné, se
trouvent subordonnées les unes aux autres (et non pas coordonnées entre
elles).
[Des conditions coordonnées correspondent à plusieurs cas particuliers,
demandant des synthèses subordonnées séparées.]
L'absolue totalité n'est exigée par la raison que dans la mesure où elle concerne
la série ascendante [du présent vers le passé] des conditions se rapportant à un
conditionné donné, et non pas par conséquent quand il est question de la ligne
descendante des conséquences [du présent vers l'avenir], ni même de l'agrégat
de conditions coordonnées relativement à ces conséquences.
Car, par rapport à un conditionné qui est donné, des conditions sont déjà
présupposées, telles qu'il faut les considérer comme données elles aussi avec
lui […] Ainsi se représente-t-on nécessairement un temps qui s'est
complètement écoulé jusqu'à l'instant donné comme étant lui aussi donné (bien
qu'il nous reste indéterminable)."
(Fin de citation)
483
[Les Idées cosmologiques s'occupent de toute la synthèse régressive des conditions]
Les Idées cosmologiques s'occupent donc de la totalité de la synthèse régressive et
procèdent par antécédents, non par conséquences."
(Fin de citation)
Le temps est en soi une série (et la condition formelle de toutes les séries), et il y a
donc lieu d'y distinguer a priori, relativement à un présent donné, le passé comme
conditions [de ce présent dont il est la conséquence]. Par conséquent, l'Idée
transcendantale de la totalité absolue de la série des conditions, vis-à-vis d'un
conditionné donné, porte seulement sur l'ensemble du temps passé."
(Fin de citation)
Raisonnement sur les mesures d'un objet dans le temps et l'espace : la quantité
(Citation de K420-K421 - Remarque 1)
1. "D'après l'Idée de la raison, tout le temps écoulé, en tant que condition du
moment donné, est nécessairement pensé comme donné.
2. En revanche, pour ce qui concerne l'espace, il n'y a en lui, considéré
intrinsèquement, nulle distinction possible entre progression et régression, parce
qu'il constitue un agrégat, et non une série, dans la mesure où ses parties sont
[présentes] toutes ensemble en même temps.
[Le raisonnement qui suit considère un objet dans l'espace comme un agrégat de
parties, chacune associée à la condition d'exister en tant que partie distincte de
l'objet sans espace commun avec une autre partie.]
3. Le moment présent, je saurais, par rapport au temps passé, le considérer comme
conditionné, mais jamais comme condition de celui-ci […]
4. Mais, étant donné que les parties de l'espace sont non pas subordonnées les
unes aux autres, mais coordonnées entre elles, une partie n'est pas la condition
de possibilité de l'autre, et [l'espace] ne constitue pas en lui-même, comme c'est
le cas du temps, une série.
5. Simplement, la synthèse des diverses parties de l'espace, à travers laquelle nous
l'appréhendons, est tout de même successive, donc elle se produit dans le temps
et contient une série [chronologique].
[Un objet dans l'espace extérieur est en général appréhendé en plusieurs
perceptions successives dont l'esprit fait spontanément la synthèse.]
6. Et puisque, dans cette série des espaces agrégés (par exemple, celle des pieds
dans une perche), telle qu'elle part d'un espace donné,…
484
[Kant prend, comme exemple d'une suite ordonnée d'espaces vus
successivement, les parties de longueur 1 pied d'une perche de saut en hauteur
délimitées par des traits de couleur.]
7. …ceux qu'on y ajoute par la pensée sont toujours la condition de la limite des
précédents, la mesure d'un espace doit aussi être considérée comme une
synthèse d'une série de conditions relativement à un conditionné donné ;
[La mesure d'une longueur d'objet, nombre de fois qu'elle contient la longueur
prise pour unité, implique une synthèse d'ajouts successifs d'un élément adjacent
à l'élément unitaire initial, synthèse dont le résultat mesure l'objet.
Dans la suite de son raisonnement, Kant considère qu'une mesure est le résultat
d'une suite de synthèses qui ajoutent à la mesure initiale, égale à 1 unité, une
unité supplémentaire ; la mesure globale est alors une condition synthétisant
toutes les conditions élémentaires exigeant l'ajout d'une unité.]
8. simplement, le côté des conditions n'est pas intrinsèquement distinct du côté où
se trouve le conditionné, et par conséquent régression et progression semblent,
dans l'espace, se confondre.
[La longueur trouvée par la synthèse (en fait simple dénombrement) ne dépend
pas de l'ordre de ce dénombrement : du haut de la perche vers le bas, ou
l'inverse.]
9. Par rapport à la délimitation, la progression est donc aussi, dans l'espace, une
régression, et l'Idée transcendantale de la totalité absolue de la synthèse dans la
série des conditions concerne aussi l'espace : je peux m'interroger aussi bien sur
la totalité absolue du phénomène dans l'espace que sur sa totalité dans le temps
écoulé."
[Par rapport à un objet entier, la mesure de sa longueur (dans l'espace ou dans le
temps écoulé du début de la perception de l'objet à sa fin) peut s'effectuer en
divisant par la pensée l'objet en parties successives de longueur unité, chacune
munie de sa condition d'ajout aux autres ; en passant ainsi de la totalité de l'objet
à ses parties, on effectue une régression.]
(Fin de citation)
485
matière, avec toutes ses conditions, la décomposition de la matière devant aller
jusqu'aux éléments simples pour une compréhension complète de l'objet.
Cette analyse de la matière d'un objet, orientée vers sa compréhension,
comprend donc, un ensemble de conditions et une progression vers
l'inconditionné (le simple).]
Car des accidents (en tant qu'ils sont inhérents à une substance unique) sont
coordonnés les uns aux autres et ne forment pas une série. Mais pour ce qui est de
leur rapport à la substance, ils ne lui sont pas proprement subordonnés : ils sont en
fait la manière que la substance même a d'exister.
Ne reste donc disponible que la catégorie de causalité, qui fournit pour un effet
donné une série de causes où l'on peut remonter de cet effet (en tant qu'il constitue
le conditionné) à ses causes comme conditions et répondre à la question de la
raison."
(Fin de citation)
486
mêmes : Possibilité / Impossibilité ; Existence / Non-existence ;
Nécessité / Contingence.]
K454 – "Ces affirmations sophistiques sont autant d'essais pour résoudre quatre
problèmes naturels et inévitables de la raison : au reste ne peut-il y en avoir que ce
nombre, ni plus ni moins, puisqu'il n'y a pas plus de séries de suppositions
synthétiques qui délimitent a priori la synthèse empirique."
[Ces 4 Idées cosmologiques sont : la totalité, la réalité, la causalité et la
nécessité inconditionnée.]
Ces quatre Idées cosmologiques sont résumées dans K423 par quatre complétudes
absolues de la totalité donnée :
La totalité dans 1 - composition ;
La réalité (matière) dans 2 – division ;
La causalité dans 3 – genèse ;
La nécessité inconditionnée dans 4 - dépendance de l'existence.
1.
L'absolue complétude de la
composition
de la totalité donnée de tous les phénomènes
2.
3.
L'absolue complétude de la
L'absolue complétude de la
division
genèse
d'une totalité donnée dans le
d'un phénomène en général
phénomène
4.
L'absolue complétude de la
dépendance de l'existence
de ce qu'il y a de changeant dans le phénomène
487
Des phénomènes se trouvent donc ici considérés comme donnés, et la raison exige
la complétude [fonctionnelle] absolue des conditions de leur possibilité, en tant que
ces conditions constituent une série [régressive] : elle exige dès lors une synthèse
absolument complète (complète à tous égards) à la faveur de laquelle le phénomène
puisse être exposé d'après les lois de l'entendement."
(Fin de citation)
Or, cet inconditionné est toujours contenu dans la totalité absolue de la série, quand
on se la représente dans l'imagination.
Seulement, cette synthèse absolument achevée n'est pour sa part qu'une Idée : on
ne peut en effet savoir […] à l'avance si une telle synthèse est possible aussi du côté
des phénomènes.
Or, déterminer si cette complétude est possible dans le registre sensible, cela
demeure un problème.
[L'esprit ne peut savoir si la représentation de synthèse qu'il a formée en
mémoire de travail est ou non complète par rapport à la réalité inaccessible.]
Reste que l'idée de cette complétude est cependant inscrite dans la raison,
indépendamment de la possibilité ou de l'impossibilité d'y rattacher adéquatement
des concepts empiriques.
488
[Soit c'est une série entière de phénomènes donnée, et la régression est infinie]
Ou bien on le pense comme consistant uniquement dans la série tout entière,
dont par conséquent tous les membres sans exception seraient conditionnés et
dont seule la totalité qu'ils forment serait inconditionnée - et dans ce cas la
régression est dite infinie ;
La série est [alors] sans limites (sans commencement), c'est-à-dire infinie, et
cependant entièrement donnée, mais la régression n'y est jamais complètement
achevée et ce n'est que de manière potentielle qu'elle peut être dite infinie.
[Soit c'est une régression à faire pas à pas à partir du présent]
Ou bien l'absolu inconditionné est seulement une partie de la série [dont] les
autres membres […] sont subordonnés, mais qui elle-même n'est soumise à
aucune autre condition.
[Les divers types de début de la série de conditions d'un inconditionné]
Il y a [alors] un premier terme de la série, qui :
Par rapport au temps écoulé, s'appelle le commencement du monde ;
Par rapport à l'espace, la limite du monde ;
Par rapport aux parties d'une totalité donnée dans ses limites, le simple ;
Par rapport aux causes, l'absolue spontanéité (la liberté [le hasard]) ;
Par rapport à l'existence de choses soumises au changement, l'absolue
nécessité de la nature."
(Fin de citation)
Voir Régression à l'infini.
Monde et nature
A ce point de son exposé sur le système des Idées cosmologiques, Kant précise ce
qu'il entend par monde et nature.
Rappel de définitions
K448 - Le monde sensible est la totalité des phénomènes dont la perception est
possible (à l'instant présent).
K513 – "Le monde sensible ne contient rien d'autre que des phénomènes, mais
ceux-ci sont de simples représentations qui, à leur tour, sont toujours conditionnées
de façon sensible ;"
489
Différences entre Monde et Nature définis tous deux comme totalité des
phénomènes
(Citations de K425)
[Monde : totalité mathématique pour une synthèse par composition ou division]
[Monde] "signifie la totalité mathématique de tous les phénomènes et la totalité
de leur synthèse, en grand aussi bien qu'en petit, c'est-à-dire dans
l'accomplissement progressif de cette synthèse aussi bien par composition que
par division."
"Par monde, se trouve compris l'ensemble global de tous les phénomènes".
"Nos Idées [cosmologiques] ne visent […] l'inconditionné que parmi les
phénomènes, en partie aussi parce que :
le terme de monde, au sens transcendantal, signifie l'absolue totalité de
l'ensemble global des choses existantes
et que nous visons seulement la complétude de la synthèse (même si
c'est uniquement, à proprement parler, en régressant vers les
conditions)."
Remarque : "Le Tout absolu de toute expérience possible n'est pas lui-même
une expérience" ([56b] §40 pages 126-127)
[Nature : totalité dynamique pour l'unité dans l'existence des phénomènes]
"Ce même monde reçoit le nom de nature en tant qu'il est considéré comme une
totalité dynamique et que l'on a en vue, non pas l'agrégation dans l'espace ou
dans le temps [du sens mathématique] pour la mettre en œuvre comme une
grandeur, mais l'unité dans l'existence des phénomènes."
Nature a deux sens :
Adjectivement (formaliter) : un sens déterministe indiquant la succession des
déterminations d'une chose due aux évolutions physiques, toujours
conformes au principe de causalité.
Substantivement (materialiter) : un sens d'ensemble global des phénomènes
"en tant qu'ils forment un ensemble systématique complet en vertu d'un
principe interne de la causalité."
[Interne veut dire régissant la nature en tant que telle.]
[K501 - "Cette loi par laquelle seulement des phénomènes peuvent
constituer une nature et fournir les objets d'une expérience, c'est une loi de
l'entendement par rapport à laquelle il n'est permis sous aucun prétexte de
faire un écart ni d'ériger un quelconque phénomène en exception."
La nature est l'ensemble de tous les phénomènes du monde, ensemble
formant un système complet régi par une causalité interne.]
(Fin des citations)
Autre définition de nature, employée par Kant à propos du Principe logique des
genres
K566 – "La nature (par quoi j'entends ici uniquement les objets qui nous sont
donnés)".
490
Régression mathématique et régression dynamique
Voir d'abord : Régression - Régression empirique - Régression à l'infini.
Voir aussi : Conclusion sur le monde (totalité des phénomènes) : ce concept n'est
pas possible.
491
Le conditionné, dans l'existence en général, se nomme contingent, et
l'inconditionné nécessaire.
[Lorsqu'on admet qu'un objet est soumis à des conditions d'existence, il pourrait
exister ou non : il est alors contingent ; l'ensemble des conditions du phénomène
(l'inconditionné) est évidemment nécessaire, car il n'existe pas de condition qui
n'en fasse pas partie.
Toutefois, la réalité physique est toujours soumise au principe d'identité [32].]
La nécessité inconditionnée des phénomènes peut être appelée nécessité
naturelle."
(Fin de citation)
Idées psychologiques
Source : [56b] §46 pages 135 et suivantes
[56b] §46 page 135 - "On a remarqué qu'en toutes substances le sujet proprement
dit, c'est-à-dire ce qui reste une fois tous les accidents mis à part (comme prédicats),
par conséquent le substantiel lui-même, nous est inconnu, et ces bornes de la
pénétration [de notre entendement] ont été maintes fois déplorées."
Attribuer un sujet à tout prédicat, puis considérer ce sujet à son tour comme prédicat
(Citation de [56b] §46 pages 135-136)
"La raison pure exige que nous cherchions pour chaque prédicat d'une chose le sujet
qui lui revient, puis pour ce dernier qui, nécessairement, n'est à son tour que
prédicat, son sujet, et ainsi de suite à l'infini (ou du moins aussi loin que nous
parvenons).
492
Tout sujet ainsi atteint en remontant la chaîne explicative ne peut être ultime
Mais il s'ensuit que nous ne devons tenir pour sujet ultime rien que nous puissions
atteindre et que si profonde soit la pénétration de notre entendement, même si toute
la nature lui était découverte, il n'est jamais capable de penser le substantiel lui-
même ;
car tous les prédicats du sens interne se rapportent au Moi comme sujet et ce Moi ne
peut plus être encore pensé comme prédicat de quelque autre sujet [car c'est un
concept de base, a priori par définition].
Ainsi il semble qu'ici soit donnée dans l'expérience l'intégralité dans la relation à un
sujet des concepts donnés comme prédicats, sujet qui n'est pas simple Idée, mais
bien l'objet, c'est-à-dire le sujet absolu lui-même.
Mais cette attente est déçue. Car le Moi n'a rien d'un concept, c'est uniquement la
désignation de l'objet du sens interne, en tant que nous ne pouvons le connaître au
moyen d'aucun prédicat ;
en conséquence, il est vrai qu'en lui-même il ne peut être le prédicat d'une autre
chose, mais il ne peut pas davantage non plus être un concept déterminé d'un sujet
absolu ;
comme dans les autres cas, il est seulement la relation des phénomènes internes au
sujet inconnu.
Néanmoins cette Idée (fort utilisable comme principe régulateur pour réduire à néant
toutes les explications matérialistes des phénomènes internes de notre âme) donne
lieu, par un malentendu tout à fait naturel, à un argument très spécieux permettant
de conclure de cette prétendue connaissance du substantiel de notre être pensant à
sa nature, en tant que la connaissance de cette nature tombe tout à fait en dehors de
l'ensemble de l'expérience."
493
[En prenant en compte dans son raisonnement le concept imprécis d'âme, et en
supposant que l'esprit humain et sa conscience ne peuvent s'expliquer à partir
de considérations matérialistes, Kant se trompe ; voir les articles :
Interprétation - Processus de la conscience
Conscience - Conscience de
Kant a cependant raison de rejeter la déduction de la psychologie cognitive
(nature humaine) du substantiel.]
(Fin de citation)
Idée théologique
mais elle effectue une rupture complète et à partir des simples concepts de ce qui
constituerait l'intégralité absolue d'une chose en général,
par conséquent grâce à l'Idée d'un Etre originaire suprêmement parfait,
[être créateur du monde, purement imaginaire]
L'homme a imaginé cet être originaire pour expliquer l'existence et l'ordre du monde
(Citation de [56b] §55 page 157, à la suite de la citation précédente)
"Cela étant, la simple supposition d'un Etre qui, bien qu'il ne soit pas pensé dans la
série de l'expérience, est néanmoins pensé en vue de l'expérience pour permettre
d'en concevoir la connexion, l'ordre et l'unité, supposition en quoi consiste l'Idée,
494
Pour finir la 4ème partie des Prolégomènes, lire :
Les Idées transcendantales régulent l'usage de l'entendement.
Mais cette intégralité ne peut être qu'une intégralité des principes, et non pas celle
des intuitions et des objets.
(Voir Logique (chez Kant) : concept de la logique.)
495
Problématique de la Dialectique transcendantale
K354 - La raison qui se trompe par dialectique transcendantale, "s'élève en partant
de la synthèse conditionnée [de l'appréhension] à laquelle l'entendement demeure
toujours attaché, jusqu'à une synthèse inconditionnée qu'il ne peut jamais atteindre."
Voir :
Problématique du conditionné et de l'inconditionné ;
Concepts de la raison pure / Des Idées transcendantales ;
Paralogismes de la raison pure : apparence transcendantale et classement.
Pour trouver ces trois sortes de raisonnements, Kant considère les mécanismes de
synthèse de connaissances d'un sujet qui produisent des représentations dans son
esprit. Il ne peut y avoir que les 3 mécanismes suivants :
la synthèse du sens interne ;
la synthèse du sens externe ;
la synthèse de la raison pure.
Voir aussi :
Paralogismes de la raison pure : apparence transcendantale et classement ;
Les 3 sortes de causalités et les concepts purs de la raison correspondants.
496
Les 3 classes d'Idées transcendantales, correspondant aux 3 formes de ces Idées
Kant déduit de l'existence des 3 classes de rapports précédentes les concepts de
synthèse correspondants qui constituent les Idées transcendantales :
497
empirique : en fait, une telle esquisse est exclusivement un pur et authentique
produit de la raison pure, autrement dit un problème relevant de celle-ci."
(Fin de citation)
La déduction objective est possible pour les catégories, pas pour des Idées
transcendantales
K355 – "De ces Idées transcendantales n'est possible à proprement parler nulle
déduction objective du type de celle que nous avons pu fournir à propos des
catégories. Car elles n'ont en fait aucune relation à un quelconque objet qui puisse
être donné de manière à leur correspondre, précisément parce qu'elles ne sont que
des Idées. En revanche, [est possible] leur dérivation subjective à partir de la nature
de notre raison ;"
K355 – "Ainsi les Idées transcendantales ne servent-elles qu'à s'élever dans la série
des conditions jusqu'à l'inconditionné, c'est-à-dire aux principes."
(Lorsque la raison effectue sa synthèse d'unité rationnelle, elle prend en compte
toutes les conditions, créant ainsi une connaissance la plus complète possible,
c'est-à-dire la plus proche de l'inconditionné ; cette connaissance relève alors
des seuls principes de la raison pure.)
Mais elles ont en revanche un usage régulateur […] nécessaire, à savoir celui
d'orienter l'entendement vers un certain but en vue duquel les lignes directrices de
toutes ses règles convergent en un point qui, bien qu'il soit certes simplement une
Idée (locus imaginarius),
c'est-à-dire un point d'où les concepts de l'entendement ne partent pas
effectivement, dans la mesure où il est situé totalement en dehors des limites de
l'expérience possible,
498
sert pourtant à leur procurer, outre la plus grande extension, la plus grande unité."
(Fin de citation)
Concepts du monde
Les concepts du monde sont des Idées cosmologiques.
K425 – "Eu égard au fait qu'en outre ces Idées [cosmologiques] sont toutes
transcendantes et que, bien qu'elles ne dépassent pas l'objet, c'est-à-dire les
phénomènes, quant à l'espèce, mais aient exclusivement affaire au monde sensible
(et non pas aux noumènes), elles poussent néanmoins la synthèse jusqu'à un degré
qui dépasse toute expérience possible, on peut toutes les appeler, à mon avis de
façon parfaitement appropriée, des concepts du monde."
K459 – Un philosophe empiriste sait qu'à travers les idées transcendantales "on ne
peut rien connaître, sauf que l'on ne sait rien".
499
En divisant les connaissances accessibles à un sujet en 3 classes (soi-même, le
monde qu'il perçoit, et l'Univers avec son Etre suprême créateur) on s'aperçoit
que la raison lui permet de décrire de façon rationnelle, en utilisant ses facultés
de perception, d'intuition, d'entendement et de raison, tout ce que sa science lui
aura permis de découvrir de la nature.]
Tout ce dont cette science se préoccupe par ailleurs lui sert uniquement de moyen
pour parvenir à ces Idées et à leur réalité. Elle n'en a pas besoin en vue de la
connaissance de la nature, mais pour aller au-delà de la nature. Les pénétrer ferait
que la théologie, la morale et, à travers leur mise en liaison, la religion, par
conséquent les fins les plus élevées de notre existence, dépendraient simplement du
pouvoir spéculatif de la raison, et de rien d'autre. Dans une représentation
systématique de ces Idées, l'ordre que l'on a indiqué, en tant que synthétique, serait
le plus approprié ; mais dans l'effort d'élaboration qui doit nécessairement précéder
la représentation systématique, l'ordre analytique, qui inverse l'ordre systématique,
est plus adéquat au but visé, qui consiste à accomplir notre vaste plan en allant de
ce que l'expérience nous fournit immédiatement, la psychologie, à la cosmologie et,
à partir de là, jusqu'à la connaissance de Dieu."
(Fin de la note)
[Kant affirme là que la métaphysique, effort pour dépasser la science, doit
préciser les Idées à la base des fins les plus élevées de l'homme : Dieu, la
liberté et l'immortalité. La raison de l'homme doit lui permettre d'y parvenir, et ce
sans recourir à des dogmes, comme Kant l'écrit dans Qu’est-ce que les
Lumières ? [25]. Sa recherche peut partir de l'expérience accessible en étudiant
la psychologie et la cosmologie, pour aller vers la connaissance de Dieu.
Personnellement, je ne vois pas comment une telle démarche rationnelle peut
fournir une connaissance de Dieu, concept à mon avis éminemment subjectif et
indéfinissable avec assez de précision pour une appréhension autrement que
par le sentiment individuel…]
(Fin de citation)
500
moins être acceptés comme possibles, principes qui, s'ils ne trouvaient pas devant
eux un tel espace [l'espace des objets de l'entendement pur] pour l'attente et
l'espérance qui leur sont nécessaires, ne sauraient accéder à cette universalité dont
la raison a absolument besoin pour sa fin morale."
et elle conduit au concept d'une cause par liberté, donc d'une intelligence suprême.
501
(Citation de [56b] §60 page 181)
"L'utilité pratique que peut avoir une science simplement spéculative se situe en
dehors des limites de cette science ; elle ne peut donc être considérée que comme
un scolie, et pas plus qu'aucun scolie, elle ne fait partie de la science elle-même.
[Ces Idées ne concernent que la complétude des conditions d'un conditionné donné]
mais dans chacune de celles-ci, elles ne concernent que la complétude absolue de
la série des conditions pour un conditionné donné.
Cette antinomie qui, loin d'être controuvée, se fonde dans la nature de la raison
humaine, et qui, de ce fait, est inévitable et n'a jamais de fin, comporte les quatre
thèses suivantes avec leurs antithèses :
502
1 [voir aussi Idées transcendantales : 1er conflit]
Thèse :
Selon le temps et l'espace, le monde a un commencement (une limite).
Antithèse :
Selon le temps et l'espace, le monde est infini.
503
(Citation de [56b] §52 pages 144-145)
[1ère condition]
"Si, comme il arrive d'ordinaire, nous pensons les phénomènes du monde sensible
comme s'ils étaient les choses en elles-mêmes,
[2ème condition]
si,
ce qui n'est pas moins habituel et ce qui est même inévitable en l'absence de
notre critique,
nous admettons que les principes de leur liaison [par des lois de causalité de la
nature] valent de façon générale pour les choses considérées en elles-mêmes et non
pas simplement pour l'expérience,
puisque thèse et antithèse peuvent l'une et l'autre être établies par des preuves
également lumineuses et irrésistibles…"
(Fin de citation)
Or tel est effectivement le cas ici où il s'agit de quatre Idées naturelles de la raison,
d'où naissent d'une part quatre assertions et d'autre part autant d'assertions
opposées, chacune étant correctement conclue de principes universellement
reconnus."
[Complément : voir dans Objection la différence entre objections dogmatique,
critique et sceptique.]
504
(Fin de citation)
[56b] §52b page 146 – "Deux propositions qui se contredisent ne peuvent être toutes
deux fausses, sauf si le concept qui les fonde toutes deux est lui-même
contradictoire ;"
Exemples :
Démonstration de l'indécidabilité de la question de l'infinité du monde ;
Démonstration de l'indécidabilité de la question de la division en parties simples ;
505
L'espace et le temps, abstractions pures, sont infinis ;
L'espace est continu, d'un seul tenant, et présent partout, dans et entre
les objets ;
Le temps est continu, d'un seul tenant et infini vers le passé comme
vers l'avenir ;
Un objet réel a une position dans l'espace où il occupe un certain
volume qui a une certaine forme, et sa réalité est définie à une certaine
date-heure du temps.
Un état des choses est une situation à un instant donné. Le temps étant
continu, il peut y avoir une infinité d'états successifs dans tout intervalle de
temps, infini ou fini : c'est une propriété mathématique des espaces continus
(voir Division).]
2. "Or l'infinité d'une série consiste précisément en ce qu'elle ne peut jamais être
achevée par une synthèse successive.
[En effet, la synthèse successive du début jusqu'à un élément particulier
n'est pas complète : il reste toujours d'autres éléments non pris en compte,
car dans une infinité il y a toujours des éléments non inclus dans un sous-
ensemble donné. Kant en conclut – à tort, par manque de connaissances
mathématiques - qu'une série infinie de situations du monde qui se serait
écoulée est impossible :]
par conséquent, un commencement du monde est une condition nécessaire de
son existence, c.q.f.d."
[conclusion non prouvée, la démonstration comportant une erreur]
(Fin de citation)
Selon Kant, une synthèse d'un nombre infini d'états n'aboutit pas
D'après Kant, une synthèse successive est une méthode de composition qui ne peut
s'achever dans un ensemble infini : on peut considérer des instants successifs à
partir du passé vers le présent, et faire la synthèse de leurs états sans jamais trouver
la fin de la série, donc sans jamais pouvoir s'arrêter.
Kant en conclut – à tort - qu'une telle synthèse est impossible. Or, puisque le monde
réel existe certainement (il est "donné de manière simultanée"), sa synthèse d'états
est possible car l'homme en a conscience. Donc l'hypothèse initiale d'absence de
commencement du monde est absurde.
Critique de ce raisonnement
Hélas, le non-achèvement de la synthèse d'une série qu'affirme Kant est fausse :
voir : [65] ; Convergence d'une suite ou d'une série ; Achille et la tortue [103].
Le modèle d'évolution du monde par succession d'états choisi par Kant n'est pas le
seul possible : il y a aussi l'évolution continue, modèle où la nature prend à chaque
instant et instantanément les « décisions » déterministes d'évolution selon la loi
naturelle qui s'applique ; la synthèse du passé (par la nature) est alors continue et la
causalité a des conséquences instantanées.
En fait, l'évolution par états successifs est une abstraction humaine, un modèle
que la nature n'utilise que dans des cas précis comme la physique quantique : voir le
modèle alternatif expliqué dans l'article Apparition.
506
Les évolutions de la physique macroscopique, conformes à des lois régissant des
forces et des énergies dans le temps, suivent des équations différentielles, leur
continuité est intrinsèque sauf en de rares points singuliers de certaines lois.
Kant aurait pu envisager un modèle continu, comme il l'a fait par ailleurs, car les
principales équations différentielles d'évolution physique d'un système étaient déjà
connues à son époque. Un raisonnement basé sur une fonction continue du temps
permet d'étudier sa limite lorsque le temps tend vers l'infiniment passé (-∞), en
cherchant si aucune impossibilité physique n'apparaît : c'est l'approche moderne, qui
a conduit à limiter l'applicabilité de nos lois physiques dans le passé à l'époque du
Big Bang, il y a 13.8 milliards d'années ; aucun raisonnement philosophique
n'apporte une solution correcte au problème du commencement du monde s'il ne
tient pas compte des lois de la physique.
507
basés sur un choix malheureux : celui d'une suite d'instants distincts, l'état lors
de chacun étant conséquence de l'état lors du précédent. S'il avait choisi un
modèle d'évolution basé sur une loi continue, il aurait substitué à son
raisonnement par non-convergence un raisonnement par limite de fonction.
Kant ne connaissait pas, a fortiori, les théories mathématiques de la mesure
[103] (adaptée à des espaces continus ou non), et des transfinis (adaptée à des
espaces ayant infiniment plus de points qu'un espace dénombrable). Il ne
connaissait pas, enfin, les théories cosmologiques modernes permettant
l'existence d'une infinité croissante d'espaces infiniment grands [30].
Avec de telles connaissances, un temps et un espace tous deux infinis sont
possibles à la fois scientifiquement et philosophiquement.
508
temps. Un monde, par conséquent, n'est pas infini relativement à l'espace, mais il
est contenu dans les limites qui sont les siennes, c.q.f.d."
(Fin de citation)
509
3. Donc, dans le monde, maintes séries de choses peuvent fort bien, certes,
commencer d'être, mais le monde lui-même ne peut avoir aucun commencement,
et il est par conséquent, par rapport au temps passé, infini."
(Fin de citation)
510
Kant commence par dénoncer une définition fausse de l'adjectif infini :
K432 – "Infinie est une grandeur telle qu'il ne peut s'en trouver de plus grande (c'est-
à-dire une grandeur qui dépasse toujours la multitude de fois où s'y trouve contenue
une unité donnée)."
[Critique : une grandeur ou le nombre qui la mesure ne peuvent être infinis, car
l'infini est une limite, pas un nombre. Une variable ne peut être infinie, elle ne
peut que tendre vers l'infini. On peut additionner ou soustraire des nombres, pas
des infinis ; on ne peut ni ajouter ni soustraire un nombre à l'infini, ni multiplier ou
diviser celui-ci par un nombre : la (non-)limite reste la même.]
511
à celle d'un ballon gonflable sur lequel on a représenté une carte du monde : si
on gonfle le ballon, les distances et les pays grandissent.]
Conclusion sur le monde (totalité des phénomènes) : ce concept n'est pas possible
Puisque la thèse et l'antithèse sont toutes deux fausses, l'hypothèse initiale « Le
monde existe en tant que chose en soi » est absurde. Donc le concept de « monde
en tant que totalité des phénomènes » n'existe pas en tant que chose en soi : c'est
un exemple de produit de l'imagination qui ne correspond à rien de possible
physiquement.
Voir Démonstration de l'indécidabilité de la question de l'infinité du monde.
(Citation de K436)
"Supposons en effet que les substances composées ne fussent pas constituées de
parties simples :
[Un exemple d'objet composé qui n'est pas constitué de parties simples est la
ligne droite : on peut la décomposer en segments, puis décomposer chaque
segment en segments plus petits, etc. à l'infini : jamais on ne trouvera de partie
simple (c'est-à-dire indécomposable) comme le point. Le problème vient de ce
qu'un segment est un ensemble continu qui a une longueur non-nulle, alors
qu'un point a une longueur nulle, et on ne peut décomposer un nombre non nul
en somme de zéros.
512
Considérons, pour la suite de ce raisonnement, la substance de l'uranium
naturel, composée de deux isotopes : l'uranium 238 noté 238U et l'uranium 235
noté 235U ; dans notre expérience chacun de ces isotopes est simple,
indécomposable. Dans un échantillon d'uranium, comme on ne peut séparer à
l'œil nu ces isotopes, on utilise un appareil bien connu, le spectromètre de
masse. Plus précisément, on suppose disposer d'un spectromètre spécialisé
dans la séparation des deux isotopes de l'uranium, opération nécessaire pour
analyser le degré de richesse d'un échantillon en 235U, l'isotope fissile dont
l'industrie a besoin.
Pour une masse d'uranium donnée, le spectromètre ne peut qu'afficher les
pourcentages de masse respectifs des deux isotopes, X% et Y%.]
Dans ce cas,
Si se trouvait supprimée en pensée toute composition, aucune partie composée
ne subsisterait, ni non plus aucune partie simple (puisqu'il n'y a pas de parties
simples) ; par conséquent, il ne restera absolument plus rien, et donc aucune
substance ne sera donnée.
Ou bien, donc, il est impossible de parvenir à supprimer en pensée toute
composition,
[Dans quelles conditions notre spectromètre refuserait-il d'indiquer les
pourcentages des deux isotopes ? Cela n'arriverait que si l'échantillon qu'il
analyse ne contenait pas d'uranium, ou en contenait si peu qu'il ne pourrait
détecter de pourcentage.]
Ou bien il faut qu'après sa suppression, quelque chose [une masse
analysable] demeure subsistant en dehors de toute composition, c'est-à-dire
le simple.
[Dans un échantillon d'uranium non-composé le spectromètre détecterait
évidemment un seul isotope, soit 238U, soit 235U.]
Mais, dans le premier cas [celui où le spectromètre n'indique rien], le composé,
pour sa part, ne serait pas constitué de substances [d'uranium] (puisque la
composition n'y est alors qu'une relation contingente des substances,
indépendamment de laquelle elles doivent subsister comme des êtres persistant
par eux-mêmes dans l'existence).
[Dans notre exemple, la persistance de la substance dont parle Kant est la
masse d'un isotope détectée par notre spectromètre : persistance et masse sont
des conditions nécessaires et suffisantes d'existence.]
Étant donné toutefois que la [dernière] supposition contredit ce que l'on a
supposé [au départ], seul le deuxième cas demeure envisageable, à savoir que
le composé substantiel, dans le monde, soit constitué de parties simples."
[Si le spectromètre analyse bien un échantillon d'uranium, il ne peut donner
qu'un résultat de la forme : 238U = X% + 235U = Y%, avec X + Y = 100.
Pour un isotope pur (simple), l'appareil peut donner :
X = 0 et Y = 100,
ou Y = 0 et X = 100.
c.q.f.d.]
513
(Fin de citation)
Dans la mesure où toute relation extérieure [relation d'un objet avec l'espace
extérieur à lui, abstraction absolument a priori], par conséquent aussi toute
composition de substances, ne sont possibles que dans l'espace, nécessairement,
autant il y a de parties dont le composé est constitué, autant il doit aussi y avoir de
parties dont soit constitué l'espace qu'il occupe.
Or l'espace n'est pas constitué de parties simples, mais d'espaces [il est
décomposable en sous-espaces eux-mêmes décomposables, à l'infini]. Donc,
chaque partie du composé doit occuper un espace.
Donc, le simple occupe un espace. Mais dans la mesure où tout [objet] réel, qui
occupe un espace, contient en lui une diversité d'éléments qui se trouvent les uns en
dehors des autres, par conséquent est composé, et cela comme un composé réel,
fait non pas d'accidents (car ceux-ci, sans substance, ne peuvent pas être extérieurs
les uns aux autres) mais de substances, le simple serait un composé substantiel ; ce
qui est contradictoire."
(Fin de citation)
Preuve de l'antithèse : "Il n'existe nulle part rien qui soit simple dans ce monde"
L'absolument simple est une idée a priori, un postulat indémontrable
K427 - "L'existence de l'absolument simple ne peut être démontrée par aucune
expérience ou perception, ni extérieure ni intérieure, et […] l'absolument simple est
ainsi une pure idée dont la réalité objective ne peut jamais être démontrée dans
aucune expérience possible et est par conséquent, dans l'exposition des
phénomènes, dépourvue de toute application comme de tout objet."
(Citation de K437-K439)
"Car admettons qu'il se puisse trouver, pour cette idée transcendantale, un objet de
l'expérience : il faudrait pour cela que l'intuition empirique d'un quelconque objet
puisse être reconnue comme ne contenant absolument aucune diversité d'éléments
extérieurs les uns aux autres et reliés d'une manière qui les réunit.
[Par définition, pour qu'une intuition concerne un objet simple, son divers doit ne
contenir aucune liaison entre deux de ses éléments.]
514
Or, puisque, du fait que nous n'avons pas conscience d'un tel divers, nous ne
sommes pas en droit de conclure à son entière impossibilité dans une quelconque
intuition d'un objet,
[Notre intuition formant en mémoire de travail une synthèse du divers perçu,
nous n'avons pas conscience d'éventuels éléments et relations entre eux.]
mais que cette dernière perspective est totalement nécessaire pour qu'il y ait
simplicité absolue, il en résulte que cette simplicité ne saurait être conclue de nulle
perception, quelle qu'elle soit.
[Puisque nous ne pouvons éviter la synthèse empirique qu'il faudrait pour une
certitude d'absence de relation, nous ne pouvons obtenir cette certitude par
l'expérience.]
Puisque donc rien ne peut jamais être donné dans une quelconque expérience
possible qui apparaisse comme un objet absolument simple, et puisque le monde
sensible doit cependant être considéré comme l'ensemble global de toutes les
expériences possibles, il n'y a donc nulle part en lui rien de simple qui soit donné."
[Conclusion : aucune expérience ne produit de représentation du concept
d'absolument simple. Celui-ci est une abstraction invérifiable en pratique.]
(Fin de citation)
515
K442 – "Thèse : La causalité qui s'exerce d'après les lois de la nature n'est pas
la seule d'où puissent être dérivés les phénomènes du monde considérés dans
leur totalité. II est encore nécessaire d'admettre en vue de leur explication une
causalité par liberté."
[Liberté veut dire ici « qui échappe à la causalité des lois naturelles ».]
K443 – "Antithèse : Il n'y a pas de liberté, mais tout dans le monde arrive unique-
ment d'après les lois de la nature."
Donc il faut qu'une cause suffisante initiale sans cause ait existé, cause suffisante
qui est une "liberté transcendantale" par rapport à la causalité de la nature, une
évolution qui ne respecte pas ses lois. En d'autres termes, le Monde a
nécessairement eu un commencement malgré le déterminisme et il faut compléter le
postulat de causalité. Voir aussi Régression à l'infini.
516
Conclusions (Citation de K443-K445)
"Ce n'est donc nulle part ailleurs que dans la nature qu'il nous faut rechercher
l'enchaînement et l'ordre des événements du monde.
[Toutes les évolutions physiques sont régies par les lois de la nature :
le déterminisme s'applique toujours et partout.]
La liberté (indépendance) à l'égard des lois de la nature est certes une libération vis-
à-vis de la contrainte, mais aussi vis-à-vis du fil conducteur de toutes les règles
[c'est-à-dire du déterminisme]. Car on ne peut pas dire qu'au lieu des lois de la
nature ce sont des lois de la liberté qui interviennent dans la causalité du cours du
monde, dans la mesure où, si elle se trouvait déterminée suivant des lois, elle serait
non pas liberté, mais elle-même purement et simplement nature.
[Si des évolutions naturelles étaient régies par le hasard, celui-ci serait une loi
d'évolution de la nature, une autre sorte de déterminisme. C'est ainsi qu'en
physique quantique les évolutions sont régies par une loi déterministe, l'équation
de Schrödinger [64], dont les résultats s'interprètent avec des valeurs de
variables statistiques (position, vitesse…).]
517
l'expérience. Mais Kant va plus loin : puisqu'on a admis, pour le Monde, qu'il a eu un
commencement, il faut admettre que d'autres chaînes de causalité ont pu et peuvent
encore commencer spontanément après le Big Bang :
K446 - "Mais, puisque par là le pouvoir de commencer tout à fait par soi-même
une série dans le temps a été prouvé une fois (quand bien même il n'a pas
donné lieu à une saisie claire), il nous est désormais permis de faire commencer
par elles-mêmes diverses séries, du point de vue de la causalité, au milieu du
cours du monde et d'attribuer à leurs substances un pouvoir d'agir par liberté."
Voir à ce propos : Hasard.
518
Kant admet ci-dessus une extension nécessaire du déterminisme à des
commencements (causes sans cause au début d'une chaîne de causalité) se
produisant après le début de l'Univers. On pourrait aussi admettre une évolutivité des
lois de la nature à partir de chaque commencement : l'apparition d'une situation
nouvelle serait accompagnée d'un énoncé nouveau ou modifié de certaines lois
physiques que le déterminisme postule identiques partout et toujours.
Mais une loi physique de la nature pourrait changer pour deux raisons :
Un changement réel, comme la variation de vitesse d'expansion de l'Univers
[30] :
Très peu de temps après le Big Bang, l'expansion a été extraordinairement
rapide, des milliards de fois plus rapide que la vitesse de la lumière : ce fut la
phase d'inflation ;
Puis elle a ralenti très fort, passant par un minimum il y a quelques milliards
d'années ;
Enfin, elle a recommencé à croître et croît encore de nos jours.
Un changement perçu : d'après le Principe de la primauté de la connaissance
sur les objets, nous postulons que ce que nous ne percevons pas n'existe pas,
en ignorant ce qui existe (situations et lois de la nature) dont nous ne pouvons ni
nous rendre compte, ni prévoir l'existence. Une loi de la nature peut alors
apparaître lorsque nous la découvrons, par l'expérience ou la déduction. Nous
devons alors vérifier l'énoncé des autres lois existantes.
Exemple : lorsque les paramètres de l'orbite de Mercure ont pu être mesurées
avec une précision suffisante, une anomalie de 43 secondes par siècle par
rapport aux prévisions des lois de Kepler est apparue. Cette anomalie, qui
mettait en cause les lois de Newton [115] et de Kepler, n'a pu être expliquée que
par la Relativité générale, apparue en 1915. Ces lois ont alors été
« rétrogradées » en « lois de première approximation », la loi de mouvement
précise tenant compte de la déformation d'espace-temps due à la masse du
Soleil prévue par la Relativité générale.
519
Voir les généralités sur le hasard et le déterminisme, qui n'entraîne pas la
prédictibilité.
Mais Kant n'aborde pas la prise de liberté avec les lois physiques sous deux
aspects :
Cette liberté est-elle due au hasard, c'est-à-dire à la possibilité pour un système
matériel d'avoir une structure (géométrie, contraintes internes, etc.) non régie par
des lois stables, et/ou d'évoluer en ne respectant pas les lois de la nature ?
En somme, le système peut-il « être ou faire n'importe quoi » ?
Le hasard (approfondi dans [12]) a plusieurs définitions, qu'on peut résumer
comme suit : est au hasard toute structure, tout comportement dont on peut
démontrer l'impossibilité d'une description complète à partir d'une de ses parties
et du contexte, faute de lois de déduction et calcul applicables.
Cette liberté est-elle un faux hasard, une imprédictibilité due :
A la nature statistique de l'objet. Exemple : une loi physique déterministe,
l'équation de Schrödinger [64], fait qu'à un instant donné la position et la
vitesse d'une particule en mouvement dans un champ de potentiel ont des
valeurs possibles régies par une loi statistique ;
A la complexité : un système soumis à des lois déterministes peut avoir une
évolution précise exigeant des calculs trop complexes ou trop prolongés
pour être réalisables. Exemple : prévoir quelle boule va « sortir » d'une
sphère de tirage de loto connaissant les paramètres initiaux ;
A l'ignorance : il y a de nombreux systèmes dans la société dont l'évolution
est difficile à prévoir, ou à prévoir avec la précision désirée, parce qu'on ne
peut pas connaître tous les paramètres nécessaires. Exemple : des cours de
bourse soumis à des anticipations, optimistes ou non, d'investisseurs [106] ;
L'homme a une tendance naturelle à attribuer au hasard ce qu'il ne peut
expliquer ou prévoir. C'est là une affirmation sans preuve, aussi injustifiée
que l'attribution à Dieu.
A l'instabilité : les fluctuations quantiques d'énergie sont dues à une
instabilité intrinsèque, une impossibilité de définir une énergie à un instant
donné à un endroit donné, car elle varie constamment et sans cause ;
A une loi de chaos mathématique, où une prédiction précise de l'évolution
exige une impossible connaissance de ses paramètres avec une précision
infinie. Exemple : trajectoire d'un astéroïde du système solaire, soumise aux
perturbations de l'énorme Jupiter et des autres planètes ; Henri Poincaré l'a
démontré sous le nom de « Problème des trois corps » [101].
520
[Si on n'admet pas la nécessité d'un commencement pour une suite (série) infinie]
Si vous n'admettez pas dans le monde de terme qui soit mathématiquement premier
dans l'ordre du temps, vous n'avez pas non plus besoin de rechercher un terme qui
soit dynamiquement premier dans l'ordre de la causalité.
[Qu'une suite d'événements ait un début n'est pas une nécessité logique]
Qui vous a ordonné d'imaginer un état absolument premier du monde, et par
conséquent un commencement absolu de la série au cours de laquelle se succèdent
les phénomènes et, pour que vous puissiez procurer à votre imagination un point où
elle se repose, d'imposer des limites à la nature sans bornes ?
[Une chaîne de causalité peut avoir toujours existé, sans avoir de commencement]
Etant donné que les substances ont de tout temps été dans le monde, ou du moins
que l'unité de l'expérience rend nécessaire une telle supposition, il n'y a pas de
difficulté à admettre aussi que le changement de leurs états, c'est-à-dire une série de
leurs changements [une chaîne de causalité de leurs états successifs], aurait existé
de tout temps, et par conséquent que nul premier commencement n'aurait besoin
d'être recherché, ni du point de vue mathématique ni du point de vue dynamique.
[L'unité de l'expérience d'un objet au cours d'un intervalle de temps exige qu'il
existe du début à la fin, existence inséparable de celle de sa substance.]
Intellectuellement, on remplacerait ainsi une difficulté logique par une autre, avec
l'inconvénient que ce nouveau postulat permettrait d'expliquer n'importe quoi, sans
rigueur scientifique :
"Car au regard d'un tel pouvoir de liberté, n'obéissant à aucune loi, on ne peut plus
guère penser une nature, puisque les lois de cette dernière sont continuellement
transformées par les influences qu'exercerait cette liberté et que le jeu des
521
phénomènes, régulier et uniforme selon la simple nature, est ainsi rendu confus et
incohérent."
K448 - Le monde sensible est la totalité des phénomènes dont la perception est
possible (à l'instant présent).
K513 – "Le monde sensible ne contient rien d'autre que des phénomènes, mais
ceux-ci sont de simples représentations qui, à leur tour, sont toujours conditionnées
de façon sensible ;"
Remarque : "Le Tout absolu de toute expérience possible n'est pas lui-même
une expérience" ([56b] §40 pages 126-127)
522
suppose, relativement à son existence, une série complète de conditions, jusqu'à
l'absolument inconditionné [ici : la synthèse de l'ensemble des situations de la chaîne
de causalité du monde], lequel seul est absolument nécessaire [c'est-à-dire sans
cause]."
(L'argument qui passe du conditionné du phénomène à l'inconditionné du
concept est appelé argument cosmologique. En somme, puisque le monde
existe certainement il a été créé ex nihilo.)
Qui dit « changement », dit « cause » dans le temps du phénomène qui change
Il existe donc certainement, et ce dans le monde sensible, quelque chose (un être)
qui est la cause absolument nécessaire du monde actuel qui a évolué. En outre,
puisque cette cause existe dans le temps, elle appartient au phénomène, qui
appartient au monde sensible. Ce dernier contient donc un être absolument
nécessaire, "que ce soit alors la série tout entière du monde ou une partie de cette
série", c.q.f.d.
(D'après le postulat de causalité, puisque le monde a subi une série de
changements et que ceux-ci supposent le passage du temps et une cause dans
le monde, celle-ci est absolument nécessaire, qu'il s'agisse de tout ou partie de
la série.)
Une conséquence de cette thèse est la nécessité de l'existence d'un objet initial
incréé du monde, qu'on l'appelle Cause première, Créateur, Dieu, Etre suprême…
523
Si le temps a commencé à une certaine date du passé (hypothèse retenue
par la théorie du Big Bang : il y a 13.8 milliards d'années) le monde existe
alors aussi depuis cette date-là.
Dans les deux cas :
La logique et la physique moderne (continuum espace-temps de la Relativité
générale) exigent que le monde ne soit pas concevable sans le déroulement
du temps, et réciproquement que le temps ne soit pas concevable sans un
Univers auquel il s'applique ;
Un Créateur ne peut pas avoir existé avant le début du temps pour créer
l'Univers ; et bien entendu, il ne peut pas avoir été dans l'Univers où il se
serait créé lui-même.
A l'extérieur du monde.
Dans ce cas, on aurait une cause extérieure au monde agissant dans le monde,
car sa causalité appartiendrait au temps, donc aux phénomènes du monde.
Cette hypothèse contredit la loi de causalité, qui exige qu'une action dans le
monde soit le fait d'une cause appartenant elle-même au monde.
Quant à rechercher la preuve à partir de la simple Idée d'un être suprême par rapport
à tous les êtres en général, cela relève d'un autre principe de la raison, et une telle
preuve devra donc se voir consacrer un exposé particulier. […]
524
[Le concept d'un être absolument nécessaire, c'est-à-dire nécessaire
indépendamment de toute condition, est un concept d'être contingent en général.
Sa déduction à partir d'un concept issu de l'expérience comme l'inconditionné
est transcendante, donc logiquement impossible.
La preuve cosmologique est donc fausse parce qu'elle déduit un concept de
logique pure, la nécessité absolue, d'un concept issu de l'expérience,
généralisation impossible. Le problème est le même que pour une induction : à
partir d'un nombre d'exemples, même élevé, on ne peut déduire une loi sans
exception.
Ce raisonnement est général : un jugement d'existence d'un ensemble ne peut
être déduit de ses propriétés sans appliquer au moins une règle de
raisonnement impossible à définir dans l'ensemble. Exemple : quelle que soit la
description de Dieu, elle pourrait s'appliquer telle quelle à un Dieu, plusieurs
dieux ou zéro dieu : l'existence d'un ensemble ne fait pas partie de ses
propriétés et ne peut s'en déduire.]
(Fin de citation)
Sur le principe d'une preuve logique de l'existence d'un être absolument nécessaire
K451 – Une telle preuve, ontologique, est impossible car il n'y a pas de liaison
causale entre un être inconditionné (absolument nécessaire) et la série
chronologique (chaîne de causalité) d'états qui a abouti au monde sensible actuel.
525
L'antithèse déduit de la contingence de chaque état successif la nécessité de
respecter une condition à l'état précédent, lui-même conditionné. La remontée
d'une chaîne de causalité ne s'arrêtant jamais, il n'y a plus d'état inconditionné,
donc plus d'être absolument nécessaire.
A cet égard, toutes les représentations dialectiques de la totalité dans la série des
conditions, par rapport à un conditionné donné, étaient donc aussi, de part en part,
du même type. Il s'agissait toujours d'une série où la condition était liée au
conditionné de façon à constituer tous deux des membres de cette série, et où par
conséquent ils étaient du même type, puisque la régression ne devait en effet jamais
être pensée comme achevée, ou qu'alors, si cela devait se produire, il fallait qu'un
membre en soi conditionné fût considéré faussement comme un membre premier, et
donc comme inconditionné.
[Voir Division d'un tout donné dans l'intuition, c'est-à-dire d'une représentation
d'objet.]
Ainsi n'était-ce à vrai dire nulle part l'objet, c'est-à-dire le conditionné, que nous
soumettions à notre examen, mais bel et bien la série des conditions présidant à
celui-ci, uniquement quant à sa grandeur, et la difficulté qui ne pouvait être dépassée
par aucun compromis, mais uniquement en tranchant le nœud du débat, consistait
en ce que la raison rendait la chose ou trop longue ou trop courte pour
l'entendement, tant et si bien que ce dernier ne parvenait jamais à égaler l'idée
qu'ainsi elle forgeait."
(Fin de citation)
526
Accord des concepts de l'entendement avec l'Idée de la raison
K493 - Dans le tableau des quatre Idées cosmologiques, il y a "une distinction
essentielle […] parmi les objets, c'est-à-dire parmi les concepts de l'entendement que
la raison s'applique à élever au rang d'Idée" : deux d'entre elles désignent une
synthèse mathématique des phénomènes, tandis que les deux autres désignent une
synthèse dynamique." (Voir Remarques : principes mathématiques et principes
dynamiques.)
527
par exemple : d'où vient que les matières [masses] s'attirent entre elles?"
car dans ce cas ce n'est plus à la nature ou de façon générale à des objets donnés
que nous avons affaire, mais uniquement à des concepts qui ne tirent leur origine
que de notre raison et uniquement à des êtres de pensée relativement auxquels tous
les problèmes que fait naître leur concept doivent pouvoir être résolus ;
car sans contredit la raison peut et doit rendre intégralement compte de son propre
procédé."
[Dans la mesure où sa pensée est rationnelle, sans aprioris, intuitions,
imaginations et émotions, un sujet qui pense sait à quoi il pense et par quel
chemin il est arrivé à sa pensée actuelle.]
(Fin de citation)
528
[Les Idées transcendantales visent l'unité systématique de l'usage de l'entendement]
"Ce sont des principes destinés à amener l'usage de notre entendement à complète
harmonisation, perfection et unité synthétique, [donc à une unité systématique.]
[…]
A défaut d'une telle unité, notre connaissance demeure décousue et elle ne peut
servir à la fin suprême (qui n'est jamais que le système de toutes les fins) ; or je
n'entends pas ici uniquement la fin pratique, mais également la fin suprême de
l'usage spéculatif de la raison.
[…]
[Cette unité du mode de connaissance n'est pas constitutive, mais régulatrice]
Mais si on traite cette unité du mode de connaissance comme si elle était attachée à
l'objet de la connaissance, [donc] si on la tient pour constitutive alors qu'elle n'est
proprement que régulatrice,
529
Voir :
Usages de la raison pure ;
La raison ne crée pas de concepts d'objets, elle les ordonne et les unifie ;
Usage régulateur nécessaire des idées transcendantales ;
Unité systématique ;
Principe logique des genres ;
Espèce – Principe des espèces ;
Spécification - Loi et loi transcendantale de la spécification ;
Principes de la raison délimitant le champ de l'entendement avec unité
systématique ;
Structure transcendantale des concepts ;
Démarche d'unité systématique de l'expérience à l'entendement, puis à la
raison ;
La raison unifie les actes de l'entendement ;
Maximes pratiques – Maximes de la raison.
Idéel, idéelle
Adjectif (philosophie) : qui se rapporte à l'Idée ou qui n'existe que dans l'Idée.
Synonymes : idéal, théorique, conceptuel.
Identification
Identifier quelque chose c'est reconnaître :
Son unicité ou sa ressemblance à une chose connue ;
Et/ou son appartenance à une classe ou une catégorie ;
Et/ou l'équivalence entre certaines de ses propriétés et des propriétés d'objets
connus.
530
Identique – Identité
K199 - "Ce n'est que dans la mesure où je puis lier dans une conscience un divers
de représentations [successives] données qu'il m'est possible de me représenter
l'identité de la conscience dans ces représentations mêmes - ce qui veut dire que
l'unité analytique de l'aperception n'est possible que sous la supposition de quelque
unité synthétique."
Kant explique là que pour analyser (de manière déductive) ce qu'on a perçu d'un
phénomène, on a besoin d'avoir préalablement perçu quelque chose, ce qu'on n'a pu
faire que par une synthèse unifiant des représentations de phénomènes successifs ;
synthèse et analyse ont été déclenchées spontanément par l'inconscient.
Voir aussi : Aperception, Entendement et principe d'identité [32].
Identité numérique
K311 – "Unité et diversité. Quand un objet se présente à nous à plusieurs reprises,
mais à chaque fois avec les mêmes déterminations intérieures (qualité et quantité)
[voir catégories mathématiques], il est, si on le fait valoir comme objet de
531
l'entendement pur, le même, toujours le même, non pas une pluralité de choses,
mais une seule chose (numerica identitas) ;"
L'état physique d'un objet à un instant donné est décrit par l'ensemble des
informations qui le caractérisent, c'est-à-dire son divers ; on l'appelle aussi
détermination.
Divers objets de l'entendement qui se présentent à nous avec des
déterminations identiques ont alors une identité numérique : ils ne diffèrent que
par la position dans l'espace ou la persistance dans le temps.
Exemple : les divers électrons d'un même atome.
Unité et diversité sont les deux premiers concepts de la réflexion.
K312 – "Ainsi peut-on dans deux gouttes d'eau faire complètement abstraction de
toute diversité intérieure (de qualité et de quantité), et il suffit qu'elles soient
intuitionnées en même temps dans des lieux différents pour qu'on les considère
comme numériquement diverses."
(Numériquement diverses signifie : que l'on peut distinguer dans un
dénombrement, c'est-à-dire distinctes.)
K312 - "…la pluralité [numérique] et la diversité numérique sont déjà fournies par
l'espace même comme condition des phénomènes extérieurs."
K400 – "A travers les divers temps où elle existe, [l'âme est] numériquement
identique, c'est-à-dire unité (non-pluralité) :"
(L'âme reste identique à elle-même et unique tant que l'homme vit.)
K372 – "Si je veux connaître par expérience l'identité numérique d'un objet extérieur,
je vais être attentif à ce qui est permanent dans ce phénomène, et à quoi, comme
sujet, tout le reste se rapporte, comme détermination ; ainsi vais-je remarquer
l'identité de ce sujet dans le temps, où tout le reste change."
Il importe de remarquer que l'identité des individus [éléments d'un ensemble] est
logiquement distincte de l'égalité des classes, de même que les individus k et l sont
distincts des classes singulières à élément unique construites sur k et l. C'est
pourquoi nous employons un signe particulier pour désigner cette relation."
Idéologie
Selon le dictionnaire [13] :
Ensemble plus ou moins cohérent des idées, des croyances et des doctrines
philosophiques, religieuses, politiques, économiques, sociales, propre à une époque,
une société, une classe et qui oriente l'action.
532
Ce terme est souvent employé dans un sens péjoratif de doctrine vague et
nébuleuse, portant sur des idées creuses et abstraites, sans rapport avec les faits
réels. Exemples : idéologie réactionnaire, idéologie néolibérale ou ultralibérale.
Idiosyncrasie
Médecine : Prédisposition particulière de l'organisme qui fait qu'un individu réagit
d'une manière personnelle à l'influence des agents extérieurs.
Psychologie : Personnalité psychique propre à chaque individu.
Cicéron [171] dit que cette façon de raisonner tire son nom de ce que, si on la suit, il
ne subsiste plus aucun usage de la raison dans la vie. C'est pourquoi je désigne par
le même nom l'argument sophistique de la raison pure." [Voir La raison paresseuse.]
(Fin de citation)
Ignorance
Citation de [165] pages 47-48
"A la perfection logique de la connaissance au point de vue de son extension
s'oppose l'ignorance. [C'est une] imperfection négative ou imperfection du manque,
qui, en raison des limites de notre intelligence, demeure inséparable de notre
connaissance.
Nous pouvons considérer l'ignorance d'un point de vue objectif et d'un point de vue
subjectif.
1. Considérée objectivement, l'ignorance est soit matérielle soit formelle.
La première est un défaut de connaissance historique,
la seconde [est] un défaut de connaissance rationnelle.
On ne doit être tout à fait ignorant en aucun domaine, mais on peut fort bien
limiter la connaissance historique pour s'attacher davantage à la connaissance
rationnelle ou inversement.
2. Dans sa signification subjective, l'ignorance peut être ou bien savante,
scientifique ou bien vulgaire.
[Ignorance technique ou savante]
Celui qui voit distinctement les limites de la connaissance, par conséquent le
champ de l'ignorance, à partir d'où il commence à s'étendre, - par exemple
le philosophe qui aperçoit et montre à quoi se limite notre capacité de savoir
relatif à la structure de l'or, faute des données requises à cet effet, est
ignorant de façon technique ou savante.
[Ignorance non savante]
Au contraire, celui qui est ignorant sans apercevoir les raisons des limites de
l'ignorance et sans s'en inquiéter, est ignorant de façon non savante. Un tel
533
homme ne sait même pas qu'il ne sait rien. Car il est impossible d'avoir la
représentation de son ignorance autrement que par la science ; tout comme
un aveugle ne peut se représenter l'obscurité avant d'avoir recouvré la vue.
Illusion
Dictionnaire [13]
Comme principe d'erreur dans le domaine sensoriel : perception erronée dans la
mesure où elle ne correspond pas à la réalité considérée comme objective, et
qui peut être normale ou anormale, naturelle ou artificielle.
Illusion optique : erreur d'interprétation des données visuelles, due aux lois de
l'optique ou à leur interprétation par le cerveau.
Comme principe d'erreur dans le domaine intellectuel et affectif : croyance ou
conception erronée procédant d'un jugement ou d'un raisonnement faux (dû à
l'ignorance ou à l'imagination).
Caractère trompeur d'une chose.
Acte de l'esprit qui s'abuse ou se laisse abuser par des idées fausses, des
conceptions chimériques et séduisantes ; état qui en résulte.
K335 – "…ainsi que cela arrive dans ce qu'on appelle les illusions des sens, nous
tenons souvent pour immédiatement perçu quelque chose à quoi nous a pourtant
seulement conduits la conclusion d'un raisonnement."
534
A076 [3] – "§ 11. (146) Les sens ne sont pas trompeurs […] parce qu'en fait ils ne
jugent aucunement, - ce pourquoi l'erreur n'incombe jamais qu'à l'entendement.
Pourtant, l'apparence sensible contribue, sinon à justifier l'entendement, en tout cas
à l'excuser : en suivant celle-ci, l'homme en vient souvent à tenir pour objectif ce qu'il
y a de subjectif dans son mode de représentation (à considérer comme ronde la tour
éloignée à laquelle il ne voit pas d'angles, pour plus haute que le rivage la mer dont
les lointains atteignent son regard par des rayons lumineux plus élevés […] et ainsi
est-il conduit à prendre le phénomène pour l'expérience, ce qui le fait tomber dans
une erreur qu'il faut concevoir comme une faute de l'entendement, non pas comme
celle des sens."
535
Voir aussi mouvement.
Voir aussi :
Schèmes des concepts purs de l'entendement ;
Synthèse transcendantale de l'imagination ;
Kant : association des représentations par imagination productrice.
Imago
Selon [13]
Psychanalyse : Image inconsciente d'une personne, schème imaginaire à travers
lequel le sujet vise autrui (en particulier image du père, de la mère pour l'enfant) et
qui oriente ses relations avec autrui.
536
L'expérience possible est régie par des principes immanents, alors que l'imagination
permet des situations et actes transcendants.
K350 – "L'usage objectif des concepts purs de la raison est toujours transcendant,
cependant que celui des concepts purs de l'entendement ne peut jamais, d'après sa
nature, être qu'immanent, étant donné qu'il se limite simplement à l'expérience
possible."
(Citation de K331)
"Le transcendantal et le transcendant ne sont pas la même chose.
Les principes de l'entendement pur […] doivent être simplement d'un usage
empirique, et non pas d'un usage transcendantal, c'est-à-dire tel qu'il s'étende au-
delà des limites de l'expérience.
Immatérialisme
Voir Idéalisme subjectif de Berkeley (Immatérialisme).
Immatérialité - Immatériel
Dictionnaire [13]
Immatériel
Usage courant : qui n'est pas formé de matière ;
Philosophie : qui est opposé à la matière et n'a de rapport ni avec les sens ni
avec la chair. Exemples : amour, être, ordre, principe immatériel,
abstraction, âme, existence, force, pensée.
Immatérialité
Qualité, caractère de ce qui est immatériel, comme l'amour ou l'esprit.
537
Chez Kant
K400 – "Cette substance [l'âme], simplement comme objet du sens interne, fournit le
concept de l'immatérialité."
Immédiat, immédiatement
Voir Médiate, médiation, immédiate, immédiatement.
Immoral
Adjectif - Selon [13]
(En parlant d'une personne) : qui a une conduite contraire aux principes de la
morale, dont les œuvres sont contraires à la morale.
(En parlant d'un objet inanimé) : qui est contraire à la morale ou aux bonnes
mœurs (dans sa forme ou dans son contenu).
Immortalité
Chez Kant
Définition de l'immortalité – On ne peut en démontrer ni la possibilité, ni la cessation
après la mort
Lire d'abord :
Ame ;
Ame – Question 1 : union de l'âme avec un corps organique ;
Ame – Questions 2 et 3 : âme avant la vie et après la mort.
(Citation de K391)
[L'immortalité de l'âme consiste à ce qu'elle continue à penser après la mort
physique]
"L'opinion qui veut que l'âme [l'esprit], après dissolution de tout lien avec le monde
corporel, puisse encore continuer à penser s'énoncerait alors sous cette forme :
538
et il serait parfaitement possible que ces mêmes objets inconnus continuent d'être
connus par le sujet pensant, bien que ce ne soit sans doute plus en qualité de corps
[mais en tant que choses en soi illusions d'objets réels].
Or, à vrai dire, personne ne peut à partir de principes spéculatifs alléguer la moindre
raison d'adhérer à une telle affirmation ni même en établir la possibilité : tout au plus
peut-on en faire la supposition ;
[L'existence ou l'inexistence d'objets réels représentés par des phénomènes ne
peut se démontrer avec des spéculations]
mais tout aussi peu est-il envisageable, pour qui que ce soit, de faire valoir là contre
une quelconque objection dogmatique possédant une validité. Car nul, de qui qu'il
puisse s'agir, n'en sait davantage que moi ou que n'importe quel autre sur la cause
absolue et intrinsèque des phénomènes extérieurs et corporels.
[En effet, un éventuel esprit pensant indépendant du corps serait un phénomène
extérieur réel au sujet duquel nous ne savons rien.]
[Personne ne peut savoir quoi que ce soit sur la réalité des phénomènes extérieurs,
donc aussi sur la cessation des intuitions extérieures après la mort]
Personne ne peut donc avec une quelconque légitimité prétendre savoir sur quoi
repose, dans l'état qui est actuellement le nôtre (dans la vie), la réalité des
phénomènes extérieurs, ni non plus par conséquent affirmer que la condition de
toute intuition extérieure, ou même que le sujet pensant comme tel, doit cesser une
fois atteinte la fin de cet état (dans la mort)."
(Fin de citation)
Compléments :
Personnification de l'âme ;
Travaux de Jung sur l'âme et sa personnification [6].
De son côté, l'âme-chose en soi [l'esprit] ne pense pas : elle n'a aucune faculté, c'est
un objet dans l'Idée. Elle n'a pas de rapport de causalité, ni avec quelque
phénomène que ce soit, ni avec un concept accessible à la spéculation : comme le
concept de Dieu, elle repose sur des fondements subjectifs ; et son immortalité étant
postulée arbitrairement, la démontrer ou en démontrer l'impossibilité est impossible.
539
Pourquoi l'homme a envie de croire en une âme immortelle
La psychologie suggère une raison simple à la croyance en une âme éternelle :
l'homme refusant très souvent l'idée de sa mort, et avec elle la fin de ce qu'il aimait,
imagine une âme éternelle où sa pensée et sa personnalité survivraient.
Voir Personnification de l'âme.
Ce n'est pas Dieu qui a créé les lois de la nature, c'est l'homme
L'homme a créé les lois de la nature, et il croit qu'elles lui permettent d'expliquer les
phénomènes et de prévoir leur évolution (déterminisme). Ces lois impliquent
l'impossibilité de la transcendance, donc de l'existence de Dieu. Un homme cohérent
doit donc, s'il accepte l'existence de ces lois, refuser la possibilité que Dieu existe.
Immutabilité
Adjectif d'emploi rare : caractère de ce qui ne peut changer dans le temps, qui est
immuable, notamment dans sa nature.
Synonymes : permanence, pérennité, inaltérabilité, stabilité.
Impénétrabilité
Selon [13]
Physique
propriété selon laquelle deux corps ne peuvent occuper à la fois le même lieu dans
l'espace.
"Les atomistes, tels que Gassendi, en joignant à l'étendue l'impénétrabilité, mettent
dans les corps un principe de résistance." ([98] Monadologie page 56).
Chez Kant
K683 - "…le simple concept de matière (étendue, impénétrable et sans vie)".
540
K545 – "L'étendue et l'impénétrabilité (telles qu'elles forment ensemble le concept de
matière) correspondent aussi au principe empirique suprême de l'unité des
phénomènes, et ce principe, en tant qu'il est empiriquement inconditionné, possède
en soi une propriété du principe régulateur. Cependant, puisque toute détermination
de la matière qui en constitue la dimension de réalité, par conséquent aussi
l'impénétrabilité, est un effet (un acte) qui doit avoir sa cause et qui par conséquent
n'est jamais encore que dérivé…"
Remarque
Pour être compatible avec les phases gazeuse, liquide et solide de la matière,
l'impénétrabilité doit être comprise comme « résistance à la pénétration », résultant
d'une loi physique tenant compte de variables comme la viscosité et la dureté ; mais
la compatibilité avec les connaissances modernes de physique quantique et de
relativité reste dans ce cas hors de propos de la philosophie kantienne.
Définitions
[Tous les impératifs énoncent un devoir, relation d'une loi objective de la raison à une
volonté qui demeure libre.] Ils disent que faire ceci ou cela, ou bien s'en abstenir,
serait bon, mais ils le disent à une volonté qui ne fait pas toujours ce qu'elle fait parce
qu'il lui est représenté que la chose est bonne à faire.
Mais ce qui est pratiquement bon, c'est ce qui détermine la volonté par l'intermédiaire
de représentations de la raison, par conséquent non pas à partir de causes
subjectives, mais de manière objective, c'est-à-dire selon des principes qui valent
pour tout être raisonnable comme tel."
541
[Une règle morale est bonne lorsque la raison de toute personne raisonnable
dicte à sa volonté d'agir selon cette règle]
(Fin de citation)
Importance de l'intention
Pour Kant, le caractère catégorique régit la moralité de l'intention d'une action
[108] page 91 – [Un impératif catégorique] "concerne, non pas la matière [l'objet] de
l'action ni ce qui doit en résulter, mais la forme et le principe dont elle procède elle-
même, et ce qui est essentiellement bon dans une telle action consiste dans
l'intention, quelle qu'en puisse être l'issue. Cet impératif peut être appelé celui de la
moralité."
(Remarque : Kant reprend ici un critère fondamental de jugement d'une action du
christianisme : l'intention de cette action et sa conformité à la loi divine, qui
comptent plus que son résultat et que la loi des hommes. Voir exemple extrait de
la Bible [147].)
Impératif catégorique : ton action doit pouvoir être érigée en loi universelle
(Citation de [108] page 177)
"L'impératif catégorique, qui énonce simplement d'une manière générale ce qui est
obligation, est celui-ci :
Agis d'après une maxime qui puisse valoir en même temps comme une loi
universelle !
Tu dois donc commencer par considérer tes actions d'après leur principe subjectif ;
mais pour ce qui est de savoir si ce principe a aussi une valeur objective, tu ne peux
le savoir que d'après la manière dont, quand ta raison le soumet à l'épreuve qui
consiste à te penser toi-même, à travers un tel principe, comme légiférant
universellement, il se qualifie pour une telle législation universelle."
(Fin de citation)
542
[Les lois morales sont basées sur la liberté (le libre arbitre)]
C'est sur ce concept positif (du point de vue pratique) de la liberté que se fondent
des lois pratiques inconditionnées [notez INCONDITIONNEES] qui sont désignées
comme morales,
[Influencé par nos sentiments, notre pouvoir de décision ne nous obéit pas toujours]
[lois qui], vis-à-vis de nous dont l'arbitre est affecté de façon sensible et ne se
conforme donc pas par lui-même à la volonté pure, mais au contraire entre souvent
en contradiction avec elle,
L'impératif est donc une règle dont la représentation rend nécessaire l'action
subjectivement contingente, et qui représente par conséquent le sujet en tant que tel
comme devant être forcé (nécessité) à s'accorder avec cette règle.
543
[Quand un impératif d'action devient présent à l'esprit d'un sujet, celui-ci se
représente comme nécessaire l'objectif qu'il pourrait atteindre par l'action]
L'impératif catégorique (inconditionné) est celui qui pense et rend nécessaire l'action
[…] à travers la simple représentation de cette action elle-même (de sa forme), donc
de manière immédiate, comme objectivement nécessaire ;
[Le sujet se représente l'action et ses détails comme nécessaires : il ne se pose
pas de questions, il n'a pas le choix, il n'a pas de libre arbitre]
nulle autre doctrine pratique que celle qui prescrit l'obligation (la doctrine des mœurs)
ne peut fournir des exemples de tels impératifs. Tous les autres impératifs sont
techniques et, dans leur totalité, ils sont conditionnés."
(Fin de citation)
Implication
Selon le dictionnaire [13] :
(Logique) Relation logique entre deux phénomènes telle que la vérité ou la
réalité de l'un fait connaître avec certitude la vérité ou la réalité de l'autre.
(Linguistique) Relation entre deux propositions p et q telle que, p étant vraie, q
est nécessairement vraie.
Notation en Logique symbolique : p q qui se prononce « p implique q ».
Implication matérielle
Voir d'abord dans Proposition en tant qu'implication, la lecture 4. de p q :
« ou p est fausse, ou q est vraie », notée ¬p q.
Peu importe que les propositions p et q aient entre elles un rapport logique
(conséquence logique) ou empirique (causalité physique) quelconque : l'implication
est vérifiée :
dès que p est vraie, q est vraie ;
dès que p est fausse :
l'implication donnée ne s'applique pas ;
q n'est pas affectée par l'implication, q peut être vraie ou fausse.
dès que q est vraie :
si la proposition p a un sens, elle ne peut que satisfaire p q ;
si p n'a pas de sens, q vraie a une autre cause.
Remarque
L'existence de l'implication p q ne prouve pas qu'il n'existe pas une autre cause de
q, proposition x telle que x q.
544
Exemple d'application
Une pierre est au bord de la table ; si je la pousse (proposition p), elle tombe
(proposition q).
Si je ne la pousse pas (p est fausse) :
elle pourrait tomber si je la poussais, vérité virtuelle ;
la pierre ne subit pas de poussée de ma part, elle reste sur la table, mais
elle pourrait tomber si mon frère la poussait (intervention d'une autre cause).
Si la pierre tombe (q est vraie) :
si je l'ai poussée, je l'ai fait tomber ;
si je n'ai rien fait, la chute de la pierre est due à une autre cause.
Implication formelle
Source : [177] pages 21 et suivantes
Dans l'implication « Socrate est un homme, donc Socrate est mortel » il y a
implicitement l'affirmation « Tout homme est mortel » c'est-à-dire « Tout élément de
la classe des hommes est mortel ».
On peut donc convertir l'implication « Socrate est un homme, donc Socrate est
mortel » en implication « x est un homme, donc x est mortel », où x est une variable
susceptible de prendre de nombreuses valeurs.
545
Exemple : la propriété de commutativité de la multiplication (notée X) de deux
nombres entiers a et b (nombres appartenant à l'ensemble N = {0, 1, 2, 3…})
s'écrit : a, b N a X b = b X a.
Impression
Voir Sensation – Sensibilité - Impression.
Impressionnabilité
Synonyme de réceptivité. Voir Aperception.
In abstracto (latin)
Expression latine.
Opposé : In concreto.
Chez Kant
Qualifie la représentation d'un concept formée par raisonnement.
In concreto (latin)
Expression latine.
Opposé : in abstracto.
Chez Kant
1er cas : caractère concret dû à une origine empirique
Qualifie la représentation d'un concept formée à partir d'un exemple empirique, c'est-
à-dire d'un concept empirique. C'est un exemple concret.
K515 – "Nous avons vu plus haut qu'à travers les concepts purs de l'entendement,
sans toutes les conditions de la sensibilité, absolument aucun objet ne peut nous
546
être représenté, puisque les conditions de la réalité objective de ces concepts leur
font défaut et que l'on n'y trouve rien d'autre que la simple forme de la pensée.
Cependant, ils peuvent être présentés in concreto, si on les applique à des
phénomènes ; car c'est en eux qu'ils obtiennent proprement la matière que requiert le
concept empirique, lequel n'est rien d'autre qu'un concept de l'entendement in
concreto."
2ème cas : caractère concret par construction synthétique à partir de concepts a priori
Pour l'esprit, un concept a priori paraît aussi concret qu'un concept empirique lorsque
tous deux proviennent d'une intuition. Donc :
Un concept mathématique, construit intuitivement par synthèse pure à partir de
concepts a priori, a un caractère concret ; exemple : le nombre entier.
Un concept pur est construit intuitivement par une synthèse pure au moyen du
même mécanisme mental qu'un concept empirique par une synthèse empirique,
et il paraît aussi concret.
[56b] §7 page 55 – Un jugement synthétique sera a priori certain et apodictique,
alors qu'un jugement basé sur une intuition empirique sera a posteriori et
contingent.
Voir aussi :
Il y a, par contre deux intuitions a priori, absolument pures : l'espace et le temps ;
Connaissance pure mathématique ;
Discipline de la raison pure dans l'usage dogmatique ;
Usage in abstracto et in concreto des concepts.
Inclination
Chez Kant
[108] page 87 note * - "La dépendance de la faculté de désirer vis-à-vis des
sensations s'appelle inclination, et cette dernière manifeste donc toujours un besoin."
547
Inconditionné – Conditionné
Philosophie
L'inconditionné est un concept métaphysique unique, à laquelle tout ce qui
correspond à une certaine Idée peut se rapporter en tant que condition d'existence,
alors que cette Idée est par définition indépendante de toute condition d'existence.
Exemple 1 : en tant qu'Idée, l'Univers (tout ce qui existe physiquement) à un
instant donné est un concept dont toute partie (exemple : la France) est une
condition d'existence : sans cette partie, l'Univers ne serait pas tel qu'il est.
Et puisqu'il ne peut être autre que ce qu'il est d'après le principe d'identité [32],
cette partie est une condition d'existence de l'être. L'Univers est l'inconditionné
de la chose en soi « Tout ce qui existe » de cet instant-là.
Exemple 2 : un phénomène dont nous avons conscience est issu d'une réalité.
L'ensemble des concepts de cette réalité est sa chose en soi. La forme de la
chose en soi donnée par le phénomène ne comprend, dans sa représentation,
qu'une partie de ses informations : le conditionné. L'ensemble des concepts de
la chose en soi est l'inconditionné, sur-ensemble du conditionné.
Exemple 3 : voir Syllogisme.
Chez Kant
Voir d'abord la définition de Conditionné, puis Conditionné et conditions – Série des
conditions.
Kant emploie plusieurs fois dans la Critique les mots inconditionné et conditionné
sans les avoir définis explicitement ; sa première utilisation est celle de l'exemple de
la préface de la 2ème édition K79-K80 ci-dessous.
548
La connaissance complète d'un phénomène vise l'inconditionné
Une connaissance complète d'un phénomène a donc besoin, au-delà de l'intuition
initiale et des concepts de l'entendement et de la raison qui l'accompagnent (c'est-à-
dire du conditionné), de comprendre le phénomène en prenant en compte toutes ses
conditions d'existence, en visant son inconditionné parce qu'il représente sa cause
ultime, absolue.
Remarque
Bien que l'Univers (et le monde sensible que nous pouvons en voir) ne soient
pas, à proprement parler, des phénomènes, nous pouvons désirer les connaître
aussi le mieux possible. Il nous faut alors entreprendre une recherche
scientifique et/ou métaphysique du commencement du monde, c'est-à-dire de
son inconditionné.
549
Pour l'explication du fonctionnement de la raison qui cherche à étendre tout
syllogisme jusqu'à l'inconditionné, voir Paralogisme : explication par la recherche de
l'inconditionné.
Voir aussi :
Chose en soi et connaissance ;
Unité inconditionnée des conditions ;
Unité rationnelle – Unité d'entendement ;
Les divers types de début de la série de conditions d'un inconditionné.
Inconscient
Substantif
Ensemble des phénomènes et processus neuropsychiques inaccessibles à la
conscience du sujet, qu'il soit éveillé ou non. L’inconscient a aussi une activité
permanente de réorganisation des contenus de la mémoire de long terme. Enfin, il
coopère avec le conscient dans des processus de compensation psychologique
(manière dont se développent ou se renforcent automatiquement des
comportements, des sentiments, des désirs ou des croyances pour compenser un
déséquilibre source de déplaisir).
Adjectif
Sont inconscientes :
Certaines activités du Moi (exemple : les mécanismes de défense) ;
Certaines activités du Surmoi (exemple : jugements, prescriptions) ;
Des représentations, sensations et affects qui n'ont pas atteint la valeur,
l'intensité qui leur permettraient de franchir le seuil de conscience.
Exemple : perceptions sensorielles subliminales.
550
Inconscient collectif
Partie de l’inconscient commune à tous les humains, donc innée. C'est sa partie la
plus ancienne et la plus profonde (archaïque), la base de l’inconscient personnel.
Contenu : fantasmes, imagos, catégories héritées, archétypes.
Exemple d'archétype : l'image de Dieu héritée du passé de l'humanité [6].
Inconscient cognitif
Synonyme du subconscient, siège des opérations subliminales.
Inconscient personnel
Partie de l’inconscient qui contient l'acquis de l'individu, représentations qui
pourraient être conscientes et passer dans la conscience. Cet acquis fait partie de la
personnalité.
Incroyant (moralement)
Voir Les seules croyances possibles sont celles qui relèvent de la liberté.
Indécidable
Une affirmation (proposition) qui ne peut être que toujours vraie ou toujours fausse
est dite indécidable s'il n'existe pas de démonstration prouvant qu'elle est vraie, et s'il
n'existe pas, non plus, de démonstration prouvant qu'elle est fausse.
Exemple : étant donné un programme exécutable dans un ordinateur et
l'affirmation « Ce programme s'arrêtera », il n'existe pas, en général, de
démonstration prouvant que l'exécution s'arrêtera au bout d'un certain temps, ni
de démonstration prouvant qu'il ne s'arrêtera jamais. La seule façon certaine de
savoir s'il s'arrêtera est de lancer l'exécution et d'attendre…
Indifférentisme
Indifférence érigée en doctrine.
Voir L'indifférentisme à la métaphysique, pourtant philosophie par excellence.
Indiscernable
Deux objets de pensée sont indiscernables quand ils ne se distinguent l'un de l'autre
par aucun caractère intrinsèque.
551
En outre, le Principe d'exclusion de Pauli [181] affirme que deux particules
distinctes de type fermion (comme des électrons ou des protons) ne peuvent être
dans le même état quantique, décrit par la même fonction d'onde, alors que deux
particules de type boson le peuvent. Cela veut dire, par exemple, que deux
électrons (tous deux fermions) ne peuvent être au même endroit en même temps
s'ils ne diffèrent pas par une autre variable d'état, par exemple le spin.
Par contre, un nombre quelconque de particules de type boson (comme le
photon ou un noyau d'atome d'hélium) peuvent être en même temps dans le
même état quantique : un nombre quelconque de telles particules peuvent être
au même endroit en même temps, propriété surprenante ! – Détails : [12])
Induction
Mode de raisonnement consistant à généraliser (ériger en loi) le résultat d'un
ensemble de faits qui ne sont que des cas particuliers.
L'induction ne produit pas de certitude : il faudrait pour cela prouver qu'il n'existe
aucun cas où sa conclusion est fausse, et ce ne serait plus, alors, une induction.
Voir :
Empirisme ;
Prolégomènes à toute métaphysique future qui pourra se présenter comme
science.
Ineptie
Voir Ineptie.
Inétendu
Sans étendue, comme un point géométrique. Voir Simple.
Inscience
Selon le dictionnaire [13] : absence de connaissances.
Synonyme : ignorance.
[165] page 48 – "Ainsi la connaissance de notre ignorance suppose que nous ayons
la science et du même coup nous rend modeste, alors qu'au contraire s'imaginer
savoir gonfle la vanité. Ainsi l'inscience de Socrate était une ignorance digne
d'éloge ; de son propre aveu, une science de son inscience."
Infalsifiable
Adjectif qui qualifie une affirmation dont on ne peut prouver la fausseté éventuelle.
C'est le contraire de falsifiable. Une hypothèse (ou une conjecture, ou une théorie)
est dite falsifiable si on peut imaginer (ou mieux, créer expérimentalement) une
situation où elle est prise en défaut, même si on ne peut pas imaginer de situation où
elle se réalise - notamment parce qu'elle est indécidable ou spéculative. Exemples :
La loi d'Ohm "L'intensité de courant électrique à travers une résistance est
proportionnelle à la différence de potentiel entre ses bornes" est falsifiable ;
L'affirmation "Ce feu de forêt a pour origine la volonté de Dieu" est infalsifiable.
552
Lorsqu'un phénomène prévu ne se produit pas, son absence ne suffit pas pour
réfuter la théorie car des circonstances perturbatrices inattendues peuvent être
intervenues, et on ne peut raisonner sur quelque chose qui ne s'est pas produit.
Les prédictions testées doivent être strictement déductives (par un l'algorithme
de calcul des prédicats ou de calcul mathématique) ; on ne peut tester aucune
prédiction utilisant une induction, ni utiliser une induction pour réfuter une
prédiction de la théorie.
Inférence
Logique : opération qui consiste à admettre une proposition en raison de son lien
avec une proposition préalable (prémisse) tenue pour vraie. (Lorsqu'une conclusion
se déduit de plusieurs prémisses, la logique utilise un syllogisme.)
Infini
Adjectif
Sans bornes, illimité (dans l'espace et/ou dans le temps et/ou en nombre
d'éléments).
Philosophie : qui n'a pas de borne,
soit en ce sens qu'il est actuellement plus grand que toute quantité donnée
de même nature (infini actuel) ;
soit en ce sens qu'il peut devenir tel (infini potentiel).
Mathématiques :
Qui est plus grand, dont le nombre d'éléments est plus grand que tout
nombre choisi ;
Un ensemble formé d'unités distinctes est dit infini s'il est « équivalent à lui-
même », c'est-à-dire s'il existe une correspondance biunivoque entre toute
unité qui le compose et les unités qui composent une de ses parties.
Exemple : correspondance entre la suite des nombres entiers naturels et la
suite des nombres premiers (qui en fait partie).
553
Substantif
Mathématiques :
Ce qui est plus grand que toute quantité imaginable, de même nature,
positivement ou négativement ; représenté par le signe ∞ .
L'infini n'est pas un nombre, c'est une « limite inatteignable » :
on dit qu'une variable X qui grandit indéfiniment « tend vers l'infini »,
et on écrit X → ∞.
Grandeur infinie
(Citation de K432)
"Infinie est une grandeur telle qu'il ne peut s'en trouver de plus grande (c'est-à-dire
une grandeur qui dépasse toujours la multitude de fois où s'y trouve contenue une
unité donnée).
Or, aucune multitude n'est la plus grande possible, puisqu'une ou plusieurs unités
peuvent toujours lui être encore ajoutées.
554
dénombrable. Nous connaissons une infinité de classes d'infinis, chacune plus
« grande » que les précédentes :
La plus « petite » est celle de l'ensemble des nombres entiers, de « taille »
désignée par א0 (aleph zéro) ;
La suivante est celle de l'ensemble (indénombrable) des nombres réels (le
continu), de « taille » désignée par א1 (aleph un) ;
etc.]
Une synthèse de durée infinie d'états successifs n'a pu avoir lieu pour le monde
(Citation de K434 faisant suite à la précédente)
"D'où il résulte de façon tout à fait certaine qu'une éternité d'états réels succédant les
uns aux autres jusqu'à un moment donné (le présent) ne peut s'être écoulée, donc
que le monde doit nécessairement avoir un commencement."
[Kant raisonne comme ceci : puisque je vois le monde extérieur à moi-même
d'un seul tenant à un instant donné, j'en vois une synthèse. Donc celle-ci existe.
Et comme une synthèse infinie n'aurait pu s'achever, il n'y a pas eu de synthèse
infinie. Donc le monde a eu un commencement à une date particulière du passé.
Ce raisonnement est faux, car une suite infinie peut converger (avoir une limite
finie) si chacun de ses éléments est assez proche du suivant.]
(Fin de citation)
Compléments critiques
Nombres infinis ;
Les deux sortes de régression à l'infini de Russell.
555
quantifiés. Il y a eu, avant le Big Bang, un très court moment (de l'ordre de
10-35 seconde) appelé inflation, pendant lequel la dimension de l'Univers a augmenté
infiniment plus vite que la vitesse de la lumière c = 2.99792458 108 m/s, son
diamètre étant multiplié par un facteur colossal de l'ordre de 1078 !
Sa taille croissant après le Big Bang l'Univers s'est refroidi, tout simplement parce
que sa densité d'énergie a diminué. La longueur d'onde des photons lumineux
porteurs d'énergie en train de se déplacer a augmenté du fait de la dilatation de
l'espace (ils se sont « dilatés »).
Information
Nom collectif :
ensemble de connaissances réunies sur un sujet déterminé ;
ne pas confondre avec une base de données.
Nom (définition du Bulletin officiel de l'Education nationale) :
élément de connaissance susceptible d'être représenté (écrit, parlé, dessiné…) à
l'aide de conventions pour être conservé, traité ou communiqué.
Toute information définie avec précision peut être écrite et manipulée dans un
ordinateur sous forme de bits, caractères, lettres et chiffres.
556
Voir aussi Principe de conservation de l'information d'un système fermé.
Inhérence
Voir d'abord Inhérent
K355 – "On voit aisément que la raison pure n'a pas d'autre but que l'absolue totalité
de la synthèse du côté des conditions (que ce soit d'inhérence, de dépendance ou de
concurrence) et qu'elle n'a pas à se préoccuper de la complétude absolue du côté du
conditionné."
Inhérent
Inhérent est un adjectif qui signifie :
Qui, de par sa nature, est lié d'une manière inséparable et nécessaire à une
personne ou à une chose. Exemple : Les droits inhérents à l'espèce humaine
appartiennent à tous les hommes.
Qui n'existe que par rapport à un sujet, à une manière d'être qui lui est
intrinsèque. Exemple : La dignité est inhérente à la qualité d'homme.
557
Innéisme
Deux exemples
[33] – Méditations métaphysiques – Abrégé des Six Méditations Suivantes :
"Toutes les choses que nous concevons clairement et distinctement sont vraies."
"La pensée est un attribut qui m'appartient : elle seule ne peut être détachée de
moi. Je suis, j'existe : cela est certain ; mais combien de temps ? A savoir, autant
de temps que je pense."
[Je suis certain d'exister parce que je pense.]
[Inversement :] "L'esprit, qui, usant de sa propre liberté, suppose que toutes les
choses ne sont point, de l'existence desquelles il a le moindre doute, reconnaît
qu'il est absolument impossible que cependant il n'existe pas lui-même."
"Les choses que l'on conçoit clairement et distinctement être des substances
différentes, comme l'on conçoit l'esprit et le corps, sont en effet des substances
diverses, et réellement distinctes les unes d'avec les autres."
558
lois de la nature doivent en être déduites par induction à partir d'expériences
multiples.
Voir critique de l'empirisme par Kant dans Empirisme.
Remarque
L'innéisme de Descartes est dualiste.
Voir :
Critique de l'innéisme par Kant : Descartes : pensée, âme et corps ;
Réalité et phénomènes ;
Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant.
559
Moi : construit progressivement à partir du Ça, inconscient qui coopère avec la
couche consciente du Moi.
Surmoi : issu d'une division du Moi, qu'il juge et censure. Communique avec le
Ça par ses parties archaïques. Comprend deux parties :
L'idéal du moi : représentations idéalisées des parents et personnes
admirées ; projets ou activités valorisés.
Instance critique d'interdiction de prise de conscience et d'accomplissement
des désirs.
Instance corrélative au déclin du complexe d'Œdipe : identification aux parents,
refoulements intériorisant leurs interdits, adoption des représentations des
parents et de l'entourage. En outre, adaptation aux exigences sociales et
culturelles.
Intellect
Selon le dictionnaire [13] : Faculté supérieure de la connaissance abstraite et
logique, faculté d'engendrer et d'utiliser des idées générales, de penser par
concepts.
Synonyme : entendement.
Intellection
Selon le dictionnaire [13] : (Philosophie) Opération de l'intellect (l'entendement) ; en
particulier, opération par laquelle l'intellect, par opposition à l'imagination, comprend
ou conçoit par des processus abstraits et logiques tels que la formation d'un concept.
[93] – D.1770, p. 643 - "Il n'y a pas (pour l'homme) d'intuition des choses
intellectuelles, mais seulement, en ce domaine, une connaissance symbolique, et
l'intellection par concepts universels ne nous est permise que dans l'abstrait, et non
par une perception singulière dans le concret.
Intellectuel
Selon [13]
Adjectif : qui concerne l'intelligence, l'intellect, l'entendement ; qui est pur esprit, pure
intelligence.
560
[(a priori)] des choses : mais nous n'avons pas la moindre idée d'une telle
intelligence, ni par suite des êtres intelligibles, objets de cette intelligence."
(Fin de citation)
Intelligence
Fonction mentale d'organisation du réel en pensées.
Elle interprète des représentations présentes en mémoire de travail,
D'abord par l'entendement spontané, qui les identifie et les juge
superficiellement ;
Puis si nécessaire par raisonnement délibéré.
Ces processus créent de nouvelles représentations.
Elle transmet des représentations entre la mémoire de travail et la mémoire
de long terme, où elle sait les retrouver.
L'intelligence permet à l'homme d'acquérir et d'approfondir des connaissances,
de créer des abstractions et des modèles. Cela lui permet de s'adapter à son
milieu, d'adapter sa conduite aux circonstances et de poursuivre des buts
conformes à ses valeurs (en l'absence de tels critères de jugement, l'intelligence
n'a pas de sens).
Chez Kant
Etre raisonnable :
La volonté de ses actions résulte de sa prise en compte de lois.
[132] page 250 – "Un être qui est capable d'actions d'après la représentation de lois
est une intelligence (un être raisonnable), et la causalité d'un tel être d'après cette
représentation des lois est sa volonté."
Un être raisonnable peut agir conformément aux lois morales, car il est libre : voir
Monde moral.
561
Intelligence suprême (Intelligent Design)
L'intelligence suprême est celle du Créateur de l'Univers, Dieu, considéré par les
croyants comme seul capable d'y avoir apporté autant d'ordre, d'harmonie et de
beauté. Cette croyance téléologique est d'ailleurs appelée par les Américains
Intelligent Design.
Concept d'une suprême intelligence : simple Idée, exemple d'objet dans l'Idée
(Citation de K576)
Le concept d'une suprême intelligence est une simple Idée,
c'est-à-dire que sa réalité objective ne doit pas consister en ce qu'il se rapporte
directement à un objet [des sens] (car, pris dans ce sens, nous ne saurions en
justifier la validité objective [voir Existence de Dieu]) :
et qui ne sert qu'à maintenir la plus grande unité systématique dans l'usage
empirique de la raison, en faisant que l'on dérive l'objet de l'expérience pour ainsi
dire de l'objet imaginaire de cette Idée comme de son fondement ou de sa cause.
Voir :
Doctrine de la théologie naturelle ;
Conclusion sur la possibilité des choses – Concept de la suprême réalité ;
Principaux arguments de cette preuve en faveur d'une doctrine téléologique ;
Dialectique naturelle de la raison - 3ème Idée régulatrice (théologique) ;
Idéal du souverain bien ;
Dogmatisme possible de la foi en une Intelligence suprême et de la physico-
théologie ;
Croyance doctrinale.
562
bien que ce fait même de l'admettre soit du ressort de la raison théorique, au regard
de laquelle seule il peut, considéré comme fondement de l'explication, être appelé
une hypothèse,
Intelligible
Philosophie
Qui est identifié et compris par l'intelligence ;
Qui, après analyse, est organisé en discours cohérent et présenté comme
nécessaire par l'intelligence ; qui est l'objet ou le résultat de ce travail de
l'intelligence. (En somme : une chose intelligible est une chose que l'intelligence
peut comprendre logiquement en tant que conséquence de certitudes admises).
563
autorisation de la raison qui soit fondée, quand bien même (parce que l'on ne
dispose d'aucun concept de leur possibilité ou de leur impossibilité) aucune manière
de voir présumée meilleure ne permet d'en nier dogmatiquement l'existence."
Intemporalité
Selon [13] : Caractère de ce qui est étranger à la variabilité du temps, qui reste
immuable.
Voir Définition de la raison pure pratique (ou raison pratique) chez Kant.
Intemporel
Qui est étranger au temps et n'a pas non plus de durée.
Voir Substance, Idée, Chose en soi.
Intension
Ne pas confondre avec intention (t au lieu de s).
Plus l'intension d'un terme (le nombre de détails qui le décrivent) est grande, plus
l'extension (la classe des objets qu'il désigne) est restreinte.
564
Intention
Ne pas confondre avec intension (s au lieu de t).
Voir Importance de l'intention.
"Pour ce qui concerne l'état des représentations, ou bien mon esprit est actif et
témoigne d'une faculté, ou bien il est passif et consiste en une réceptivité. Une
connaissance contient, réunies en elle, les deux dimensions, et la possibilité de
disposer d'une telle connaissance porte le nom de faculté de connaître par référence
à la partie qui en est la plus noble, à savoir l'activité de l'esprit qui consiste à relier
des représentations ou à les distinguer les unes des autres."
(Lorsque l'esprit prend conscience d'une représentation il y a deux cas
psychologiques :
Ou il se sent concerné et apprécie les conséquences de l'objet de la
représentation comme favorables ou défavorables ; il est alors affecté, il a
une attitude passive de réceptivité.
Ou il ne se sent pas concerné ; son esprit est alors en mesure de juger
rationnellement, sans émotion, avec une ou plusieurs des autres facultés.)
Interactionnisme
Doctrine dualiste de Descartes selon laquelle le corps et l'esprit interagissent, bien
qu'étant des substances distinctes. Selon cette doctrine, un événement mental peut
565
causer une action physique : la volonté d'avancer le pied droit fait qu'il avance.
Inversement, un événement physique peut causer une pensée : si mon pied heurte
une pierre, j'ai mal.
Cette doctrine a été combattue par les philosophes qui rejetaient la possibilité
d'interactions entre la pensée abstraite et la physique. Nous savons aujourd'hui que
cette interaction existe parce que le cerveau se comporte comme un logiciel
interpréteur et que Kant le devinait : voir Le prétendu fossé infranchissable séparant
la pensée et les actions de l'homme.
Intérêt
[132] page 243 - On peut attribuer à chaque faculté de l'esprit un intérêt, c'est-à-dire
un principe qui contient la condition sous laquelle seule cette faculté se trouve
sollicitée. La raison, comme faculté des principes, détermine l'intérêt de toutes les
forces de l'esprit, mais le sien se détermine lui-même."
[108] page 150 note * - "L'intérêt logique de la raison (favoriser le développement des
connaissances) n'est jamais immédiat, mais il présuppose des fins auxquelles son
usage se trouve lié."
Intérêt moral
[108] page 71 note – "Tout intérêt moral […] consiste exclusivement dans le respect
porté à la loi."
[165] page 81 – "Dans le cas du savoir on écoute encore des raisons contraires ; non
dans le cas de la croyance, car dans ce dernier cas il ne s'agit pas de raisons
objectives, mais de l'intérêt moral du sujet."
Interne
Voir externe/interne
Les pensées ne sont que des interprétations de l'état du cerveau par lui-même
Notre psychisme (activité cérébrale) est incapable de manipuler des objets
physiques. Il ne manipule que des abstractions qui les représentent, et nos facultés
n'ont que deux origines possibles : celles dont nous avons hérité de nos ancêtres en
566
naissant, par notre génome, et celles que nous nous sommes construit depuis -
notamment en nous représentant mentalement le monde que nous percevons.
Dans mon esprit, c'est une abstraction appelée représentation qui tient lieu
d'objet réel. Mon esprit ne peut pas voir ma maison physique, il "voit" sa
représentation abstraite (un phénomène) et la considère comme réelle. Et c'est
sur le concept associé à cette représentation, sur ce qu'il en voit comme sur ce
qu'il en imagine, qu'il raisonne si nécessaire ; c'est son seul accès à la réalité,
c'est ce qui en tient lieu pour l'esprit.
Voir Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).
Processus de la conscience
Des processus du cerveau interprètent continuellement l'état de ses neurones, ainsi
que les signaux qu'ils se transmettent à travers leurs interconnexions. Quand je vois
ma maison, en fait je construis puis j'interprète inconsciemment sa représentation
sous forme de concept ; à la fin de cette interprétation ma maison est présente à
mon esprit, j'en ai conscience.
Voilà donc le lien que certains philosophes ignorent lorsqu'ils croient qu'aucune
cause matérielle ne peut expliquer la pensée : ils font comme s'il devait exister une
transformation physique de matière ou énergie en pensée ; ils oublient que notre
pensée (et tout ce dont nous avons conscience) est une perception du
fonctionnement physique de notre cerveau : l'interprétation continue et instantanée
de son propre état par lui-même. Il n'y a là ni transcendance, ni spiritualité.
Du point de vue des facultés, il faut comprendre qu'elles ne sont que des aspects
différents de l'activité globale incessante du cerveau : la perception utilise l'intuition
qui utilise l'imagination et l'entendement, etc., et toutes échangent les informations de
représentations et les modifient, toutes interagissent.
567
Interprétation des représentations
Sitôt formée ou modifiée, une représentation est interprétée spontanément : selon
son origine (constatée par l'information qu'elle contient), l'esprit lance un certain
processus. Exemples :
L'arrivée d'une représentation en mémoire de travail en provenance du système
nerveux lance une perception ; dès son début, celle-ci produira une sensation et
lancera une anticipation de perception.
A un certain stade de la perception (constaté dans le contenu de la
représentation) le processus d'intuition démarre pour appréhender le
phénomène.
A un certain stade de l'appréhension, l'esprit fait appel à la fonction
transcendantale de l'imagination, qui fait partie de l'entendement.
Etc.
Introspection
Opération de la conscience lorsqu'elle s'observe elle-même.
Exemple : quand je pense à mon frère, je suis conscient de penser à mon frère.
Intuition
568
Le résultat de l'action de cette faculté : une représentation en mémoire de travail,
avec son concept correspondant, formé spontanément.
K133 - "Toute notre intuition n'est rien que la représentation du phénomène".
La faculté d'intuition
La faculté d'intuition crée ou complète des représentations de deux façons :
par intuition sensible et par imagination.
Intuition sensible (intuition des sens)
Une intuition résulte toujours de la faculté de sensibilité. Il y a deux sortes
d'intuitions sensibles : l'intuition empirique et l'intuition pure.
L'intuition empirique est une faculté par laquelle la conscience prend en
compte la perception d'un objet physique en un lieu donné et à un instant
donné.
Elle commence à le connaître sous forme d'espace et de temps : c’est
l'intuition sensible, ainsi nommée parce qu’elle complète une représentation
des informations des sens externe et interne créée par une suite de
perceptions, puis enrichie par une synthèse successive de l'imagination
productive.
Cette représentation est prise en compte par l'esprit sous forme d'un
concept qu'on pourrait attribuer à l'entendement plutôt qu'à l'intuition, du fait
de son enrichissement par l'imagination ; Kant ne lui donnant pas de nom
particulier, je l'ai appelé concept empirique de l'entendement.
Lorsque ce concept est utilisé dans un jugement, Kant parle de jugement de
perception.
Voir dans Conceptualisation le fait qu'une intuition empirique est une
synthèse toute faite d'une perception donnée, synthèse qui génère un
concept empirique de l'entendement.
L'intuition pure : espace et temps, formes absolument a priori de l'intuition.
K207 - "L'intuition sensible est, ou bien intuition pure (espace et temps) ou
bien intuition empirique de ce qui, dans l'espace et le temps, est
immédiatement représenté comme réel à travers la sensation."
Kant n'admet que deux informations pour l'intuition sensible (intuition des objets
matériels et des phénomènes) : l'espace et le temps ; les objets abstraits comme
Dieu sont suggérés par raisonnement, ils ne sont pas intuitifs.
Voir Principe suprême de la possibilité d'intuition relativement à la sensibilité.
Intuition par imagination à partir de représentations données
L’intuition peut aussi créer une représentation par imagination productrice et par
imagination reproductrice ; comme toutes les représentations, celle-ci est
aussitôt prise en compte sous forme de concept.
569
K198 – "La représentation qui peut être donnée avant toute pensée s'appelle
intuition."
Intuition en général
Mécanisme natif de l'esprit, le même pour toutes les intuitions empiriques, quel que
soit le phénomène. Voir Mécanisme de synthèse de l'appréhension, catégories et
possibilité de l'expérience.
570
la construction de la figure, qui est un phénomène présent aux sens bien que
produit a priori."
571
Ainsi, par exemple, le concept de nombre entier est construit par additions
(synthèses intuitives) successives dans le temps d'une unité à un nombre entier dont
la valeur initiale est cette même unité.
Compléments de définition
L'intuition est passive, elle ne se produit que quand quelque chose affecte nos sens :
K117 "L'intuition n'intervient [en tant que moyen pour qu'une connaissance se
rapporte à un objet physique] que dans la mesure où l'objet nous est donné.
Cela n'est possible que parce que l'objet affecte l'esprit, ce qu'il fait par la
médiation [par l'intermédiaire] de la sensibilité."
K239 - La forme de tout phénomène extérieur contient une intuition dans l'espace et
dans le temps qui lui sert de fondement a priori. L'intuition pure ne concerne que la
forme des phénomènes.
K472 – "Le pouvoir sensible d'intuition n'est à proprement parler qu'une réceptivité,
qui consiste à être affecté d'une certaine manière par des représentations dont le
rapport qu'elles entretiennent les unes avec les autres est une intuition pure de
l'espace et du temps (simples formes de notre sensibilité), et qui se trouvent
désignées comme des objets en tant qu'elles sont dans ce rapport (l'espace et le
temps) reliées et déterminables d'après des lois réglant l'unité de l'expérience."
572
Voir :
Contenu d'un phénomène : forme et matière ;
Expérience, expérience effective ;
Jugements empirique, d'expérience ou de perception.
Intuition (étapes) ;
Entendement (étapes).
573
intuitions pures et concepts a priori que sont l'espace et le temps, et leurs
schèmes de grandeurs extensives.)
K314 – "L'espace et le temps précèdent tous les phénomènes, ainsi que toutes
les données de l'expérience, et ils ne font […] que les rendre possibles."
Possibilité d'intuition relativement à l'entendement
"Le principe suprême de la possibilité d'intuition relativement à l'entendement
consiste en ce que tout le divers de l'intuition se trouve soumis aux conditions de
l'unité originairement synthétique de l'aperception."
(Raison : toutes les composantes du divers doivent être liées du fait de l'unité
nécessaire de la conscience de soi.)
Autrement dit (K205) : "Le divers d'une intuition sensible s'inscrit nécessairement
sous l'unité synthétique originaire de l'aperception, puisque c'est uniquement par
son intermédiaire que l'unité de l'intuition est possible."
Cette synthèse transcendantale d'un concept pur fait nécessairement suite à une
synthèse empirique : elles vont toujours ensemble.
Voir : Principe de l'unité synthétique du divers de toute intuition possible.
K122 - Une connaissance a priori peut se déduire par synthèse d'une intuition a
priori ; à partir d'un concept on ne peut déduire a priori qu'un autre concept.
K128 - "Le temps n'est rien que la condition subjective sous laquelle toutes les
intuitions peuvent avoir lieu en nous. […] C'est la forme de l'intuition que nous avons
de nous-mêmes et de notre état intérieur."
K135 - "Nous distinguons fort bien, parmi les phénomènes ce qui s'attache par
essence à leur intuition […] de ce qui ne vient s'y joindre que de manière
contingente. […] la première connaissance se représente l'objet en soi, la seconde le
phénomène de cet objet." Conclusion : dans une connaissance d'origine intuitive, il
faut distinguer l'essence (stable) du phénomène (contingent).
K143 - Une intuition pure (voir K119) contient exclusivement la forme de l'objet
intuitionné (sans matière), alors qu'un concept pur contient uniquement la forme d'un
objet pensé en général ; tous deux sont possibles a priori.
K231 - Les principes mathématiques sont des jugements synthétiques a priori issus
de la seule intuition, pas d'un concept pur de l'entendement.
Voir aussi :
Le sentiment, effet de la représentation sur le sujet, appartient à la sensibilité ;
Temps ;
Unité transcendantale - Unité subjective ;
Comment l'intuition en général est-elle possible ? ;
574
Axiomes de l'intuition : les intuitions sont des grandeurs extensives ;
Anticipations de la perception et de l'expérience.
Intuition (étapes)
Perception initiale
Le sujet étant doué de sensibilité perçoit un objet des sens (un phénomène) : la
réceptivité de sa capacité de représentation fait que l'objet affecte son esprit.
Cette perception génère des représentations brutes dans sa mémoire de travail.
Intuition
L'affinité des phénomènes permet l'association de ces représentations.
Une synthèse successive de l'imagination productive (première synthèse,
effectuée par l'appréhension : la synthèse intuitive) produit une représentation
synthétique du divers.
L'intuition pure ordonne cette représentation selon l'espace et le temps, concepts
connus a priori.
L'entendement de cette représentation commence pendant l'intuition, dès la
formation de la représentation synthétique ordonnée par rapport à l’espace et au
temps. L'esprit prend en compte cette représentation en construisant un concept
empirique de l'entendement.
Cette représentation synthétique produit chez le sujet un début d'expérience, de
connaissance empirique, état de l'esprit résultant des représentations en
mémoire de travail : l'esprit prend conscience de la présence du phénomène
dans le temps et l'espace.
La connaissance empirique peut aussi provenir d'une anticipation de la
perception.
Entendement
La matière du phénomène produit une sensation due à sa grandeur intensive :
l'information « matière » complète la représentation synthétique du divers.
C'est cette sensation de matière qui rend possible et mesure l'expérience de
l'intuition sensible.
Deuxième synthèse, par l'aperception : la représentation précédente subit une
synthèse pure a priori par la fonction transcendantale de l'imagination
productrice de l'entendement : la représentation synthétique résultante décrit
l'objet donné dans son intégralité. Le concept pur de l'entendement associé à
cette représentation est dit déduit de l'objet par déduction transcendantale.
Enchaînement automatique : perception intuition entendement :
K193 – "Nous possédons donc une imagination pure, constituant un pouvoir
fondamental de l'âme humaine [l'esprit humain], qui sert a priori de fondement à
toute connaissance. Par l'intermédiaire de celle-ci, nous mettons le divers de
575
l'intuition, d'un côté, en liaison avec, de l'autre, la condition de l'unité nécessaire
de l'aperception pure. Les deux termes extrêmes, à savoir la sensibilité et
l'entendement, doivent nécessairement s'agencer l'un à l'autre par l'intermédiaire
de cette fonction transcendantale de l'imagination…"
L'entendement, qui a généré des catégories, coopère avec la raison, qui peut
construire des concepts qui le dépassent.
Voir aussi :
Etapes de la recherche par analyse de la possibilité d'une science pure de la
nature ;
Jugements empirique, d'expérience ou de perception ;
Connaissance en général : hiérarchie des degrés.
Ipséité
Substantif : ce qui fait qu'une personne, par des caractères strictement individuels,
est non réductible à une autre. Exemples : « Il n'est pas d'être sans ipséité » ;
« Parce qu'il n'a pas d'ipséité, un électron est identique à un autre. »
Irréductible
Adjectif : impossible à définir à partir d'une ou plusieurs notions plus simples.
Un concept irréductible est un concept de base.
Exemple : le nombre entier 1, représentant la notion d'unité.
Isomorphe - Isomorphisme
Isomorphe
Adjectif (mathématiques) – définition du dictionnaire de l'Académie [13] :
Se dit de deux ensembles en correspondance biunivoque, munis chacun d'une loi de
composition interne, de telle façon que ces lois appliquées à des éléments
correspondants donnent pour produit des éléments correspondants.
Isomorphisme
Substantif – En mathématiques, la relation entre deux ensembles isomorphes est
appelée isomorphisme. Explication :
Soient deux ensembles E et E' où à tout élément a appartenant à E (noté : aE)
correspond un élément bE (correspondance biunivoque) tel que a et b soient
liés par la relation R (on écrit aRb) ; de même, à tout élément a'E' correspond
un élément b'E' tel que a' et b' soient liés par la relation R' (on écrit a'R'b'). Il y a
isomorphisme entre les ensembles E et E' si et seulement si il existe une relation
S qui associe chaque élément aE à un élément a'E' (on écrit : aSa') et qui
associe aussi leurs correspondants b et b', c'est-à-dire bSb'.
576
En somme, si on considère les relations R et R' comme des transformations
internes aux ensembles E et E' respectivement, et que l'on considère
l'association S faisant passer de tout élément aE à son correspondant
biunivoque a'E', l'isomorphisme signifie que les transformations associées R et
R' respectent l'association S.
Je
Voir Moi (Je).
« Je pense donc je suis » = « Tout ce qui pense existe », mais ne l'implique pas
Dialectique transcendantale / Livre II : des raisonnements dialectiques de la raison
pure / Chapitre 1er : Des paralogismes de la raison pure / Réfutation de la
démonstration par Mendelssohn de la permanence de l'âme : K411 note *
K360 – "Je suis, en tant que pensant, un objet du sens interne et porte le nom d'âme.
Ce qui est un objet des sens externes porte le nom de corps. En vertu de quoi le
terme : Je, en tant qu'être pensant, désigne déjà l'objet de la psychologie, qui peut
être appelée la doctrine rationnelle de l'âme lorsque je ne désire rien savoir de plus,
sur l'âme, que ce qui, indépendamment de toute expérience (qui me détermine plus
précisément et concrètement), peut être conclu à partir de ce concept Je, en tant qu'il
survient dans toute pensée."
Voir aussi :
Aperception (conscience de soi), pure ou empirique ;
Etre, exister : les différentes significations.
577
pas non plus être considérée comme déduite, ainsi que Descartes l'a cru, de la
proposition : « Je pense » (parce que, sinon, il faudrait qu'elle fût précédée par la
majeure : « Tout ce qui pense existe »), mais elle lui est identique."
Kant nie la possibilité de dire « Tout ce qui pense existe », puisque penser implique
par définition l'existence d'un cerveau vivant capable de penser et possédant un sens
interne qui constate sa pensée, ce qui garantit « J'existe ». Pour que l'acte de penser
puisse avoir lieu sans un tel cerveau il faut imaginer un être pensant immatériel ou
artificiel :
K400 – "Cette substance [l'âme], simplement comme objet du sens interne,
fournit le concept de l'immatérialité."
Un tel être pensant est pure imagination, nous n'en avons nulle expérience. Sur un
tel être nous ne pouvons donc raisonner mais seulement spéculer. Il s'agit par
exemple d'une âme sans corps, d'un dieu… ou d'un ordinateur, si nous admettons
qu'un ordinateur pense :
K411 – [Avec la psychologie rationnelle] "disparaît donc une connaissance que
l'on recherchait au-delà des limites d'une expérience possible et qui se rapporte
pourtant à l'intérêt suprême de l'humanité : elle se résout, si on la demande à la
philosophie spéculative, en une espérance abusée par l'illusion."
Ce sujet est paraît-il d'une difficulté telle qu'il a donné lieu à plusieurs interprétations,
que le philosophe Alain RENAUT aborde dans [3] pages 11 à 29.
Le sujet et le prédicat sont les termes du jugement, qui est une relation entre eux.
578
[Objet jugé et jugement]
Dans tout jugement, on peut appeler les concepts donnés [sujet et prédicat] la
matière logique (soumise au jugement), et le rapport entre ces concepts (par
l'intermédiaire de la copule) la forme de ce jugement."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Métaphysique : le mode de connaissance ;
Jugements empirique, d'expérience ou de perception ;
Doctrine générale des éléments – 2. Jugements ;
Etre, exister : les différentes significations ;
Table de ce qui appartient au jugement en général (table logique des jugements)
579
K102 - Dans l'exemple « Tout ce qui arrive a une cause », « a une cause » est un
prédicat extérieur au sujet « Tout ce qui arrive », on ne peut l'en déduire. « Tout ce
qui arrive a une cause » est donc un jugement synthétique ; et comme on peut le
formuler sans faire appel à l'expérience, il est synthétique a priori.
K103 - "Dans toutes les sciences théoriques de la raison sont contenus des
jugements synthétiques a priori faisant fonction de principes"
Voir Axiomatique et Système logique.
Parce qu'un tel jugement d'objet décrit une grandeur, Kant l'appelle mathématique.
Ces jugements reposent sur la faculté de logique pure dont chaque esprit rationnel
dispose a priori. Ils sont synthétiques parce que le prédicat du sujet ne peut en être
déduit, contrairement au cas des propositions analytiques.
580
2 - La physique contient des jugements synthétiques a priori (lois de la nature)
K105 - "La science de la nature (physica) contient en elle des jugements
synthétiques a priori, intervenant comme des principes."
(Ce sont des lois de la nature, toujours postulées).
et c'est pourquoi il ne s'agit pas du tout pour elle de simplement décomposer des
concepts que nous nous faisons a priori de certaines choses et par là de les
expliciter analytiquement :
en fait, nous voulons élargir a priori notre connaissance, ce en vue de quoi il nous
faut nous servir de propositions fondamentales qui, par-delà le concept donné,
ajoutent quelque chose qui n'était pas contenu en lui,
et par des jugements synthétiques a priori nous avancer vraiment si loin que
l'expérience elle-même ne peut nous suivre jusque-là, par exemple dans la
proposition : « Le monde doit avoir un premier commencement, etc. » ;
(Fin de citation)
Conclusion
Les exemples 1, 2 et 3 précédents montrent qu'un système de connaissances est
toujours basé sur un ensemble de connaissances et de principes a priori, admis
comme axiomes ou postulats de faits, et comme règles de déduction de propositions.
Faculté de jugement
K310 - Un jugement qui n'est ni précédé ni suivi d'une réflexion critique (sur sa
validité) est effectué par l'entendement pur.
581
Jugement catégorique
Voir Jugements catégoriques.
Jugement hypothétique
Voir Jugements hypothétiques.
Jugement disjonctif
Voir Jugements disjonctifs.
Voir :
Raisonnement d'entendement (immédiat) et raisonnement de raison (médiat) ;
Syllogisme affirmatif ;
Raisonnements [immédiats par conversion] de l'entendement (au point de vue
de la relation des jugements).
Jugement analytique
K231 – Du principe suprême de tous les jugements analytiques.
Voir les définitions : types de jugements et analytique.
Voir ensuite Jugement (définitions : analytique, synthétique, synthétique a priori).
K232 - Un jugement sans contradiction interne peut être faux ou sans fondement.
K232 – Une chose qui a la propriété à valeur logique A (A=vrai ou A=faux) ne peut
pas avoir en même temps la propriété à valeur opposée non-A, mais elle peut être A
et non-A à des instants différents : il faut bien comprendre le principe de non-
contradiction !
582
jaune et que c'est un métal, je n'ai besoin d'aucune expérience supplémentaire, car
c'est précisément cela qui constituait mon concept, et il me suffisait de l'analyser."
Jugement synthétique
K233 – Du principe suprême de tous les jugements synthétiques.
Voir les définitions des types de jugements et de synthèse.
Voir ensuite Jugement (définitions : analytique, synthétique, synthétique a priori).
K155-K156 - Un jugement étant une connaissance médiate d'un objet, il est associé
à la représentation d'une représentation de cet objet.
583
Voir aussi Les jugements synthétiques requièrent un autre principe que le principe de
contradiction.
K109 - "On peut donc et on doit considérer comme non avenues toutes les tentatives
[…] pour édifier dogmatiquement une métaphysique" : les contradictions sont
inévitables dans une telle approche.
consiste dans l'unité objective de l'aperception des concepts qui s'y trouvent
contenus."
Exemple : le jugement « Tous les corps sont pesants » énonce un rapport
objectif (affirmation valable en soi, partageable par tous les individus) et non pas
subjectif (impression personnelle).
C'est de cette façon que des jugements synthétiques a priori sont possibles, quand
nous rapportons les conditions formelles de l'intuition a priori (la synthèse de
584
l'imagination et l'unité nécessaire de celle-ci dans une aperception transcendantale)
à une connaissance expérimentale possible, et que nous disons : les conditions de la
possibilité de l'expérience en général sont en même temps conditions de la
possibilité des objets de l'expérience, et elles ont pour cette raison une validité
objective dans un jugement synthétique a priori."
(Fin de citation)
Conséquences (K236)
L'expérience, en tant que synthèse empirique, est l'unique mode de
connaissance qui permet d'atteindre la vérité (connaissance exacte d'un
phénomène physique).
Une connaissance a priori ne peut être vraie (conforme à son objet) que si elle
contient le même ensemble d'informations que celles nécessaires à l'unité
synthétique d'une expérience qui la produirait.
(En gros : une connaissance ne peut être vraie que si on peut concevoir une
expérience susceptible de reproduire son déroulement et ses informations –
toutes ses informations et seulement celles-là.)
D'où le principe suprême : tout objet perçu fournit une représentation qui respecte les
conditions nécessaires de l'unité synthétique du divers de l'intuition dans une
expérience.
Voir :
Principe de l'unité synthétique du divers de toute intuition possible
Unité synthétique de l'aperception
L'aspect jugement de l'entendement
Jugements synthétiques par concepts de la raison pure
Jugements synthétiques étendant un concept : nécessité d'un troisième terme
[56] §18 page 91 - Tous les jugements d'expérience sont empiriques, puisqu'ils ont
"leur fondement dans une perception immédiate des sens."
585
Jugements empiriques
Mais réciproquement, tous les jugements empiriques ne sont pas des jugements
d'expérience : à l'élément empirique, et en général aux données de l'intuition
sensible, doivent s'ajouter des concepts particuliers, qui ont leur origine
complètement a priori dans l'entendement pur, et sous lesquels toute perception doit
être avant tout subsumée pour être ensuite, par leur intermédiaire, convertie en
expérience et faire l'objet d'un jugement empirique.
Définitions
(Citation de [56] §18 page 91)
"Quand les jugements empiriques ont une valeur objective, ils sont des jugements
d'expérience ; tant qu'ils n'ont qu'une valeur subjective, je les appelle de simples
jugements de perception.
[Un jugement d'expérience de phénomène est le même pour tous les sujets]
Si en effet un jugement s'accorde avec un objet, tous les jugements sur le même
objet s'accorderont nécessairement entre eux. Ainsi la valeur objective du jugement
d'expérience n'est autre chose que la nécessité et l'universalité.
586
simplement une relation de la perception au sujet, mais une propriété constitutive de
l'objet; car il n'y aurait pas de raison pour que les jugements d'autrui dussent
nécessairement s'accorder avec le mien, n'était l'unité [l'unicité] de l'objet auquel tous
se rapportent et avec lequel ils s'accordent, ce qui les met dans la nécessité de
s'accorder aussi entre eux."
[Conclusion : si je vois un phénomène tel qu'il est, il peut être vu de la même
façon par tous les hommes : nous pouvons être d'accord sur une même
représentation et l'attribuer à des propriétés réelles de l'objet du phénomène.
Cette affirmation exige seulement :
Que phénomène soit unique (absence de solipsisme) ;
Et que sa compréhension par tous les hommes soit dénuée d'erreurs et
objective, c'est-à-dire non déformée par des sentiments.]
(Fin de citation)
J'avoue que ces exemples ne sont pas des jugements de perception tels qu'ils
puissent jamais devenir jugements d'expérience, quand même on y ajouterait un
concept [pur] de l'entendement ; car ils se rapportent uniquement à l'affection
sensible que chacun reconnaît comme purement subjective, et qui ne peut être
jamais attribuée à l'objet ; par suite ils ne peuvent jamais non plus devenir objectifs.
J'ai voulu seulement présenter un exemple d'un jugement dont la valeur est
587
purement subjective, qui ne contient en lui rien qui puisse rendre raison d'une
universalité nécessaire et d'un rapport à l'objet.
Je ne prétends pas que je doive sentir toujours de même, ni les autres comme moi ;
ces jugements n'expriment qu'une relation de trois sensations au même sujet, c'est-
à-dire à moi-même, et cela seulement dans l'état actuel de ma perception ; ils ne
doivent donc pas avoir de valeur pour l'objet : ce sont ces jugements que j'appelle
jugements de perception."
(Fin de citation)
J'énonce donc tous les jugements de cette espèce comme objectifs : par exemple,
quand je dis : l'air est élastique, ce jugement n'est en premier lieu qu'un jugement de
perception, c'est-à-dire que j'établis dans mes sens un rapport entre deux
sensations.
Pour pouvoir l'appeler un jugement d'expérience, j'exige que celte liaison soit
soumise à une condition qui la rende universelle. Je demande par conséquent que
moi-même en tout temps et que chacun comme moi unisse nécessairement la même
perception dans les mêmes circonstances."
(Fin de citation)
Ce dont le sujet a conscience (ce qui est présent à son esprit) c'est une
représentation créée spontanément par ses sens. La fonction psychique qui crée la
prise de conscience est l'intuition.
La perception d'un phénomène du sens externe (ou d'un sentiment du sens interne)
est le plus souvent un ensemble de perceptions successives dont l'esprit fait
spontanément la synthèse : du début à la fin, l'esprit n'a conscience que d'un seul et
même phénomène tant que la suite des phénomènes successifs perçus ne traduit
pas une évolution dans le temps.
588
empirique de l'entendement (construction que Kant ne signale pas, mais que les
expériences de psychologie cognitive moderne décrivent).
Cette construction est une synthèse qui fait intervenir l'imagination productive ; le
concept de l'entendement qui s’en déduit (image consciente de la représentation de
synthèse précédente) précède le concept pur de l'entendement (la catégorie) créé à
partir de lui par une synthèse de l'entendement basée sur l'aperception ; la
représentation de ce second concept est une représentation de représentation.
Un jugement universel est créé par l'entendement dans une seconde étape, à partir
de la représentation de synthèse résultant de l'étape précédente.
Jugements provisoires
Voir Les jugements provisoires sont indispensables.
Une transgression non préméditée qui peut cependant être imputée s'appelle une
simple faute (culpa).
589
Ce qui est conforme aux lois extérieures reçoit le nom de juste (justum) ; ce qui n'y
est point conforme, celui d'injuste (injustum)."
(Fin de citation)
Laïcisation de la morale
Voir Laïcisation de la morale.
Latitudinaire
En anglais : latitudinarian.
Chez Kant
Voir Connaissance exacte et connaissance vague.
Kant utilise ces termes dans le sens « conforme à la loi de la raison » ; « conforme
au principe de l'unité synthétique de l'aperception » ; « qui respecte une nécessité ».
Leurre
Dictionnaire [13]
Un leurre est un artifice spécieux dont l'apparence séduisante est destinée à
tromper.
Synonymes : duperie, tromperie, mystification.
Kant : le leurre tendu à l'entendement par les sens est illusion ou tromperie
(Citation de A081-A082 [3] ) –"Du jeu artificiel avec l'apparence sensible
§13. Le leurre qui est tendu à l'entendement par les représentations des sens peut
être naturel ou artificiel, et il est ou bien illusion, ou bien tromperie. Le leurre à cause
duquel on se trouve contraint de tenir quelque chose pour vrai sur le témoignage des
yeux, alors que le même sujet le déclare impossible par son entendement, c'est ce
que nous appelons illusion d'optique.
590
Est illusion le leurre dont les effets persistent, bien que l'on sache que l'objet
présumé n'existe pas réellement. […]
Mais il y a tromperie des sens, quand, dès que l'on sait comment l'objet est fait,
l'apparence cesse aussitôt." (Fin de citation)
Liaison
Concept de Kant signifiant synthèse, notamment celle du divers de l'intuition et de
son unité ; la liaison est alors la représentation de l'unité synthétique du divers des
phénomènes perçus à l'état d'éveil.
Définition de Kant
K238 note * : "Toute liaison est une composition ou une connexion."
Compléments de la définition
K95 : "dans l'exemple « Tout changement doit avoir une cause » le concept
d'une cause contient lui-même […] le concept d'une nécessité de la liaison."
K197 - "Toute liaison n'en est pas moins un acte de l'entendement, que nous
voudrions désigner par la dénomination générale de synthèse, afin de faire
remarquer en même temps par là que nous ne pouvons rien nous représenter
comme lié dans l'objet sans auparavant y avoir nous-mêmes produit en lui cette
liaison, et que, de toutes les représentations, la liaison est la seule qui ne peut
être donnée par des objets, mais ne peut être accomplie que par le sujet lui-
même, parce qu'elle est un acte de sa spontanéité [à l'état d'éveil]."
K198 - "…le concept de liaison contient en lui, outre le concept du divers [de
l'intuition] et de sa synthèse, aussi celui de l'unité de ce divers. La liaison est la
représentation de l'unité synthétique du divers. […] Cette unité, qui précède a
priori tous les concepts de la liaison, ne saurait être la catégorie de l'unité ci-
dessus mentionnée ;"
(Dans cette remarque, l'expression « le concept de liaison » désigne la notion de
liaison, pas un concept appartenant à la liaison ou la représentant.)
Il y a donc deux sortes de synthèse du divers résultant de l'entendement :
K198 - La synthèse en général, simple effet de l'imagination (K161),
reposant sur l'unité synthétique du divers, la liaison ;
K162 - La synthèse pure reposant sur l'unité synthétique a priori, qui produit
le concept pur de l'entendement, concept transcendantal se rapportant a
priori à des objets. Voir Unité synthétique de l'aperception.
Voir aussi :
Synthèse de l'homogène ;
Principes suprêmes de la possibilité d'intuition pour la sensibilité et
l'entendement ;
Continuité de tous les changements.
591
Liaison mathématique ou dynamique
Une liaison mathématique est intuitive a priori, alors qu'une liaison dynamique est
discursive : voir Remarques : principes mathématiques et principes dynamiques.
Voir aussi :
Synthèse de l'homogène ;
Composition / Connexion (synthèses mathématique ou dynamique).
Liberté
Source : [19].
592
A041 [3] – "La connaissance physiologique de l'homme vise l'exploration de ce que
la nature fait de l'homme, la connaissance pragmatique celle de ce que l'homme,
comme être agissant par liberté, fait ou peut et doit faire de lui-même."
[Les lois morales sont basées sur la liberté (le libre arbitre)]
C'est sur ce concept positif (du point de vue pratique) de la liberté que se fondent
des lois pratiques inconditionnées [absolues] qui sont désignées comme morales…"
(Fin de citation)
(Citation de K496)
"La liberté entendue au sens pratique est l'indépendance de l'arbitre vis-à-vis de la
contrainte exercée par les penchants de la sensibilité.
Car un arbitre est sensible dans la mesure où il est affecté pathologiquement
(par les mobiles de la sensibilité [arbitrium sensitivum]) ;
[L'homme est affecté par ce qui peut le faire souffrir ou lui être agréable.]
il est dit animal (arbitrium brutum) quand il peut être pathologiquement nécessité.
[Quand une pulsion est plus forte que la valeur dominante présente à sa
raison, l'homme fait ce qu'elle lui dicte]
593
L'arbitre humain est à vrai dire […] non point brutum, mais liberum, parce que la
sensibilité ne rend pas son action nécessaire, mais que réside dans l'homme un
pouvoir de se déterminer par lui-même indépendamment de la contrainte
exercée par des penchants sensibles."
[Kant pense, comme Descartes, que la raison peut toujours l'emporter sur la
passion, pouvoir d'être raisonnable dont Freud [41] et Jung [42] ont montré
le caractère illusoire.
Voir aussi Remarques sur la liberté au sens pratique et le pouvoir de
surmonter les désirs.]
(Fin de citation)
(Citation de K656-K657)
[Le concept de liberté au sens transcendantal] "ne peut pas être supposé
empiriquement comme un principe d'explication des phénomènes, mais constitue lui-
même un problème pour la raison.
Un arbitre, en effet, est simplement animal (arbitrium brutum) s'il ne peut être
déterminé autrement que par des impulsions sensibles, c'est-à-dire
pathologiquement. En revanche, celui qui peut être déterminé indépendamment des
impulsions sensibles, par conséquent par des mobiles que seule la raison peut se
représenter, s'appelle le libre arbitre (arbitrium liberum), et tout ce qui s'y relie, que ce
soit comme principe ou comme conséquence, est appelé pratique.
Celle-ci fournit donc aussi des lois qui sont des impératifs, c'est-à-dire des lois
objectives de la liberté, et qui disent ce qui doit arriver, bien que peut-être cela
n'arrive jamais, et se distinguent en cela des lois de la nature, qui ne traitent que de
ce qui arrive, ce pourquoi elles sont aussi appelées des lois pratiques."
(Fin de citation)
594
conclure à quelque chose qui ne doit pas du tout être pensé d'après des lois de
l'expérience."
et qu'en tant que telle elle semble être contraire à la loi de la nature, par conséquent
à toute expérience possible, et donc demeure un problème.
[Avec l'affirmation de Kant de l'existence d'un fossé infranchissable séparant la
pensée et les actions de l'homme, la liberté transcendantale ne semble pas être
contraire à la loi de la nature, elle lui est contraire : aucune interaction
transcendante n'est possible entre le psychisme humain et le monde matériel.
Mais comme cette affirmation est erronée, cette liberté transcendantale est
possible au sens de l'imprédictibilité de la pensée due à l'inconscient, au
subconscient, aux émotions du moment et aux automatismes mentaux
spontanés divers : toute pensée a bien une cause physique, mais il ne peut
exister d'algorithme permettant de la déduire de circonstances données (le
déterminisme n'entraîne pas toujours la prédictibilité bien qu'il exclue le hasard) ;
hélas, la psychologie n'est pas une science exacte.]
595
Voir en complément :
Causalité due à la nature ou due à la liberté ;
Possibilité d'une conciliation entre la causalité par liberté et la loi universelle de
la nécessité de la nature ;
Constitution – Constitution politique.
Définition
(Citation de K495)
"J'entends par liberté, au sens cosmologique du terme, le pouvoir d'inaugurer par
soi-même un état - une liberté dont la causalité n'est donc pas à son tour soumise,
selon la loi de la nature, à une autre cause qui la déterminerait suivant le temps.
[« Inaugurer par soi-même un état » signifie créer une situation sans cause ;
voir Régression à l'infini et Apparition.]
Mais dans la mesure où, sur ce mode, on ne peut obtenir dans la relation causale
aucune totalité absolue des conditions,
[parce que sa chaîne de causalité à régression illimitée ne satisfait pas la
condition de complétude, la régression restant à penser pas à pas]
596
préalablement pour la déterminer à son tour à l'action suivant la loi de
l'enchaînement causal."
[La raison commande de compléter le postulat de causalité par une possibilité de
cause première : voir Apparition et Régression à l'infini.]
(Fin de citation)
Liberté impossible par rapport aux lois de la nature (le hasard n'existe pas)
Voir Hasard et Idées transcendantales : 3ème conflit.
597
Le libre arbitre suppose qu'un homme ait une volonté qui échappe aux instincts ou
pulsions issus de son corps ; le matérialisme nie l'existence d'un tel libre arbitre
[110].
Voir :
arbitre ;
liberté ;
Chez Kant : liberté au sens transcendant ou au sens pratique ;
Déterminisme et prédéterminisme de Kant ;
[123] - Les 3 déterminants des valeurs selon le matérialisme.
Limite du monde
Voir Les divers types de début de la série de conditions d'un inconditionné.
Limites de la raison
Voir Considérations sur les limites.
Logique (philosophie)
Substantif - La Logique est la science des processus de la pensée rationnelle et de
la déduction discursive des vérités. Elle régit les jugements d'appréciation qui
distinguent le vrai du faux. Elle s'intéresse donc à la validité des opérations
intellectuelles visant la connaissance, sur le plan normatif comme sur le plan
régulateur. On distingue :
La Logique générale : détermine, parmi les opérations discursives de l'esprit,
lesquelles conduisent à la vérité par leur nature (comme la non-contradiction) ou
598
leur enchaînement (comme le syllogisme). Elle traite, par exemple, des
inférences, des hypothèses et des inductions.
K148 (Titre) – "De la division de la logique générale en analytique et dialectique"
La Logique formelle : science des concepts, jugements et raisonnements
considérés abstraitement et indépendamment des objets qu'ils désignent.
Il existe des logiciels exécutant des recherches de démonstrations ou preuves
formelles de propositions logiques.
La Logique scolastique : logique dérivée de la philosophie d'Aristote [43] et
enseignée au Moyen-Age.
La Logique classique : science des discours à déductions rigoureuses, des
démonstrations.
La Logique symbolique : science des notations purement formelles assignées
aux concepts et visant à établir un système de relations symboliques exprimant
l'inclusion, la disjonction, l'implication et la transformation d'ensembles.
Mais précisément pour cette même raison qu'elle fait complètement abstraction de
tout objet, elle ne peut être un organon des sciences.
599
3 - La Logique est un canon de l'usage de l'entendement et de la raison
(Source : [165] pages 12-13)
La Logique est la science des lois nécessaires de l'usage de l'entendement et de la
raison, lois qui doivent toutes être a priori, sans apport de l'expérience ou d'autres
sciences.
600
Or nous demandons : la Logique est-elle une doctrine ou une critique ? Puisqu'elle
doit être une pierre de touche et qu'elle doit précéder notre entendement, c'est une
doctrine. L'appréciation critique suppose toujours une doctrine.
La Logique n'est donc pas une critique. Mais elle est à son service ».
On remarquera que la Critique de la raison pure comporte une Logique
(transcendantale) qui procure une Doctrine (transcendantale de la faculté de juger)."
Fin de citation)
L'esthétique contient en effet les règles de l'accord de la connaissance avec les lois
de la sensibilité ; la logique, au contraire, les règles de l'accord de la connaissance
avec les lois de l'entendement et de la raison.
L'Esthétique n'a que des principes empiriques et ne peut donc être science ou
doctrine si on entend par doctrine un enseignement dogmatique tiré de principes a
priori, où l'on discerne tout par l'entendement sans information tirée d'autre part de
l'expérience, et qui nous fournit des règles dont l'observation conduit à la perfection
voulue.
[…]
[La Logique est un canon pour la critique]
Ainsi la Logique est plus qu'une simple critique ; elle est un canon qui sert ensuite à
la critique, c'est-à-dire qui sert de principe permettant de juger de tout usage de
l'entendement en général, de sa rectitude au point de vue de sa simple forme, il est
vrai, puisqu'elle n'est pas plus un organon que la Grammaire générale.
601
mais de façon objective, c'est-à-dire selon des principes a priori : comment il
doit penser."
(Fin de citation)
602
Comparaison des termes manière et méthode
(Citation de [165] pages 198-199 note 91)
"Il y a de façon générale, deux façons d'agencer l'exposé de ses pensées, dont l'une
s'appelle une manière [et relève de l'esthétique] et l'autre une méthode [et relève des
principes de la logique] ;
elles se distinguent l'une de l'autre en ceci que la première n'a d'autre étalon que le
sentiment de l'unité dans la présentation, tandis que l'autre y suit des principes
déterminés ; ainsi seule la première vaut pour les beaux-arts.
S'il arrive qu'on dise d'une œuvre d'art qu'elle est maniérée, c'est seulement dans le
cas où l'exposé de son Idée vise à la singularité au lieu de s'approprier à l'Idée... Etre
maniéré est une espèce de singerie : de façon générale, uniquement se singulariser
(faire l'original), pour prendre le plus possible ses distances à l'égard des imitateurs,
sans posséder pour autant le talent qui permettrait du même coup d'être exemplaire."
(Fin de citation)
[132] page 281 - La connaissance populaire a besoin d'une manière, mais la science
a besoin d'une méthode, c'est-à-dire d'un procédé selon les principes de la raison,
car c'est seulement ainsi que le divers d'une connaissance peut devenir système.
603
La conscience distincte du contenu des concepts s'obtiendra par leur exposition et
par leur définition ; tandis que la conscience claire de leur extension s'obtiendra par
leur division logique."
(Fin de citation)
604
D- Méthodologie de la Logique
B - Théorie ordinale
C - Nombres infinis
Elle possède donc des principes empiriques, bien qu'elle soit en vérité générale en
tant qu'elle porte sur l'usage de l'entendement sans distinction des objets. Ce
pourquoi elle n'est ni un canon de l'entendement en général, ni un organon de
sciences particulières.
Logique générale
Lorsque Kant écrit : "selon la logique en général" l'expression en général désigne la
logique générale, souvent à propos d'existence ou de possibilité d'exister. Exemple :
605
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est
l'espace, tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps."
(Voir Réceptivité et Appréhension)
606
La Logique générale a si bien réussi parce qu'elle a su se limiter au cas général
K74 – "Si la Logique a si bien réussi, il lui faut être redevable de cet avantage
uniquement à sa délimitation, laquelle la légitime et même l'oblige à faire abstraction
de tous les objets de la connaissance et de leur différence, de telle façon qu'en elle
l'entendement n'a donc affaire à rien d'autre qu'à lui-même et à sa forme."
1 - Analytique
(Citation de K149)
"La logique générale résout [décompose] toute l'activité formelle [indépendante du
contenu sémantique] de l'entendement et de la raison en ses éléments, et les
présente comme principes de toute appréciation logique [appréciation de non-
contradiction, de possibilité logique] de notre connaissance. Cette partie de la
logique peut par conséquent se nommer analytique…
[…]
[La décomposition analytique ne suffit pas pour établir la connaissance d'objets]
Mais, étant donné que la simple forme de la connaissance, si fortement qu'elle
puisse s'accorder avec les lois logiques, est encore loin de suffire à établir pour la
connaissance une vérité matérielle (objective),
[En tout cas, ne pas utiliser la logique analytique comme organon de jugements]
[On est pourtant tenté d'utiliser cette logique universelle] "comme un organon en vue
de la production effective, du moins de façon illusoire, d'assertions objectives et que
l'on en arrive ainsi, en fait, à un usage abusif.
[K151 - Dans la mesure où la Logique ne devrait être qu'un canon pour apprécier
l'usage empirique, on en fait usage abusif si on en fait l'organon d'un usage
universel et si l'on s'aventure, avec le seul entendement pur, à juger, affirmer ou
décider synthétiquement sur des objets en général.]
607
Or la logique générale, utilisée comme prétendu organon, s'appelle dialectique."
(Fin de citation)
2 – Dialectique
[165] page 15 – [La dialectique est une] "Logique de l'apparence, dans la mesure où,
par la simple forme logique, est suscitée l'apparence d'une vraie connaissance [qui
devrait] au contraire être tirée de l'accord avec l'objet, donc du contenu."
608
K220 - La Logique transcendantale est donc restreinte aux connaissances pures
a priori.
609
Logique : usage de l'entendement et logique transcendantale
Logique transcendantale
Logique de l'usage
(connaissances pures
de l'entendement
à priori)
Logique des
Logique générale Analytique Dialectique
cas particuliers
(pure ou appliquée) transcendantale transcendantale
(organons de sciences)
Analytique Analytique
Logique analytique Logique dialectique
des concepts des principes
Logique pratique
Voir dans la définition de la théorie transcendantale de la méthode.
Logistique
Loi de la nature
Une loi prévoir donc la conséquence (phénomène) d'une cause physique (autre
phénomène).
Voir aussi, dans Définition de la nature par ses lois, une critique de la définition
restrictive de Kant.
610
Origine et stabilité d'une loi de la nature
Voir dans l'ordre :
Cause et causalité ;
La loi de causalité exclut la transcendance ;
Contingence et chaîne de causalité.
Caractère
Règle de stabilité ;
Déterminisme.
Le principe de déterminisme suppose la stabilité des lois de la nature en plus de
la causalité, ce que résume la formule :
C'est l'homme qui introduit l'ordre et la régularité dans les lois de la nature
K194 – "L'ordre et la régularité, c'est donc nous-mêmes qui les introduisons dans les
phénomènes que nous appelons nature, et nous ne pourrions les y trouver si nous
ou la nature de notre esprit ne les y avaient mis originairement. Car cette unité de la
nature doit être une unité nécessaire, c'est-à-dire certaine a priori, de la liaison des
phénomènes. Or, comment pourrions-nous instaurer a priori une unité synthétique,
si, dans les sources originaires de connaissance de notre esprit, ne se trouvaient
contenus a priori des principes subjectifs d'une telle unité, et si ces conditions
subjectives ne possédaient en même temps une validité objective, dans la mesure où
elles sont les principes de la possibilité de connaître un quelconque objet dans
l'expérience ?"
Complément : Comment nos facultés de sensibilité et d'entendement sont-elles
possibles ?
611
La causalité naturelle agit donc sans cesse, de manière continue. La notion de
situation d'un objet à l'instant t est une abstraction humaine.
L'enchaînement de situations distinctes, souvent utilisé par Kant sous forme de
série des conditions, est un paradigme contraire à la continuité des évolutions
naturelles et produisant des problèmes logiques de convergence.
Chez Kant
Voir :
Définition de l'Idéalisme transcendantal ;
Doctrine de l'Idéalisme transcendantal ;
Principe de fatalisme.
K194 – "Les règles, en tant qu'elles sont objectives […] s'appellent des lois. […] Ces
lois ne sont cependant que des déterminations particulières de lois encore
supérieures, dont les plus élevées (sous lesquelles s'inscrivent toutes les autres)
proviennent a priori de l'entendement lui-même et ne sont pas empruntées à
l'expérience."
Voir L'entendement est le pouvoir des règles.
Tant qu'une loi ainsi postulée n'est pas contredite par des constatations empiriques,
elle est réputée vraie. Au moindre défaut de vérité ou cas particulier imprévu, la loi
doit être remise en cause. C'est le principe de l'attitude scientifique moderne.
Tout effet constaté dans le monde est régi par une loi de la nature ou par la liberté
Proposition exactement disjonctive (alternative, c'est-à-dire OU exclusif)
K497 – "…c'est une proposition exactement disjonctive que celle selon laquelle tout
effet survenant dans le monde doit procéder ou bien de la nature, ou bien de la
liberté."
Pour constituer une nature, les phénomènes doivent respecter une loi universelle
K501 - "Cette loi par laquelle seulement des phénomènes peuvent constituer une
nature et fournir les objets d'une expérience, c'est une loi de l'entendement par
612
rapport à laquelle il n'est permis sous aucun prétexte de faire un écart ni d'ériger un
quelconque phénomène en exception."
Une loi morale (cas particulier de loi pratique), au contraire, définit une évolution
souhaitable, c'est-à-dire ce qui devrait arriver (Kant dit : doit arriver).
Lois morales pures a priori, prescrivant ce qu'il faut ou ne faut pas faire
K655 – "Des lois pratiques pures, dont la fin qu'elles énoncent serait donnée
complètement a priori par la raison, et qui ne commanderaient pas de manière
empiriquement conditionnée, mais absolument, seraient des produits de la raison
pure. Or de ce type sont les lois morales ; par conséquent, elles seules relèvent de
l'usage pratique de la raison pure et autorisent un canon."
(Citation de K659)
"J'admets qu'il y a effectivement des lois morales pures qui déterminent
complètement a priori (sans prendre en considération les mobiles empiriques, c'est-
à-dire le bonheur) ce qu'il faut faire et ce qu'il ne faut pas faire, c'est-à-dire l'usage de
la liberté d'un être raisonnable en général ;
j'admets aussi que ces lois commandent de manière absolue (et non pas simplement
de façon hypothétique, sous la supposition d'autres lois empiriques) et donc qu'elles
sont nécessaires à tous égards.
Proposition que je peux supposer à juste titre, non seulement en me réclamant des
preuves des moralistes les plus éclairés, mais aussi du jugement moral de tout
homme dès lors qu'il veut se représenter clairement une loi de ce type."
(Fin de citation)
613
donc un concept […] qui ne peut valoir aucunement comme principe constitutif, mais
exclusivement comme principe régulateur - et, à vrai dire, uniquement négatif - de la
raison spéculative ;
[Les lois morales sont basées sur la liberté (le libre arbitre)]
C'est sur ce concept positif (du point de vue pratique) de la liberté que se fondent
des lois pratiques inconditionnées [notez INCONDITIONNEES] qui sont désignées
comme morales,
[Influencé par nos sentiments, notre pouvoir de décision ne nous obéit pas toujours]
[lois qui], vis-à-vis de nous dont l'arbitre est affecté de façon sensible et ne se
conforme donc pas par lui-même à la volonté pure, mais au contraire entre souvent
en contradiction avec elle,
614
[Imputer une action à une personne étrangère (l'en déclarer responsable et lui en
attribuer le mérite, ou la faute si elle va à l'encontre d'une loi morale) n'est
possible que si :
la personne était consciente de son action en la commettant,
et si elle pouvait s'empêcher de la commettre ou s'y obliger.
Mais comment savoir si une personne était consciente de quelque chose dans
des circonstances données, et plus généralement comment savoir ce qu'elle
pense ? Sans le savoir on ne peut juger sa responsabilité, on ne peut juger que
l'acte lui-même, et peut-être ses conséquences.
De même, lorsqu'il s'agit de la moralité de mes propres actions, je ne puis juger
avec confiance si elles m'ont été dictées par des circonstances matérielles ou
par ma raison pure agissant librement.]
Jusqu'à quel point cependant est-ce là le pur effet de la liberté, jusqu'à quel point
c'est à la simple nature et à ce que peut avoir de vicié, hors de toute responsabilité,
le tempérament ou aux heureuses dispositions de celui-ci (merito fortunae), qu'il faut
attribuer cet effet, personne ne peut l'élucider jusqu'en son fond, ni par conséquent
porter un jugement avec une pleine justice."
(Fin de citation)
Maïeutique
Méthode socratique [50] reposant sur l'interrogation pour amener un interlocuteur à
prendre conscience de ce qu'il sait implicitement, à l'exprimer et à le juger.
Majeure – Mineure
Voir Syllogisme.
Manière
Voir Méthode et manière.
Postulat matérialiste : les évolutions sont régies par les lois déterministes de la
physique, qui doivent suffire pour expliquer tout phénomène constaté. En rejetant
l'explication de l'existence des choses et lois physiques (donc de l'Univers) par un
postulat spirituel, l'âme ou l'Idée, cette doctrine prône l'athéisme : il n'y a ni Dieu ni
615
Etre suprême. Bien entendu, le matérialisme rejette aussi toute idée d'âme pouvant
exister avant, dans, ou après le corps, tout spiritualisme et toute transmigration.
Le débat opposant ces deux doctrines porte donc, pour l'essentiel, sur l'existence de
Dieu et la Création du monde (nous n'abordons pas ici les questions de morale).
Kant apporte à ce débat une doctrine de la connaissance rationnelle, l'Idéalisme
transcendantal, basée sur la seule certitude d'existence disponible pour un homme :
celle qui résulte de la conscience de soi (prise en compte de la célèbre phrase « Je
pense, donc j'existe (je suis) ». Pour cette doctrine, toute connaissance issue du
sens externe est celle (subjective) d'un phénomène, ce n'est pas une représentation
de la réalité : Kant combat donc le matérialisme pour défendre sa foi en un Etre
suprême ; et il combat le Réalisme pour faire triompher son Idéalisme transcendantal
en tant que seule doctrine philosophique de la connaissance vraie.
K457 - Morale : s'il n'y a ni Dieu créateur ni libre arbitre, les règles morales ne
s'imposent pas
Voir aussi :
[110] - Luc FERRY - De la vraie nature du matérialisme et de la séduction
légitime qu'il exerce ;
Idéalisme de Kant - Idéalismes empirique, critique et transcendantal ;
Réfutation du matérialisme (but de sa critique invoqué par Kant) ;
Autre utilité d'une doctrine de l'âme : protéger le Moi pensant contre le
matérialisme ;
La solution scientifique pour trouver la vérité empirique : le Rationalisme
critique ;
Naturalisme ;
Les Idées sont les causes efficientes de la nature – Les croyances de Kant.
616
Mathématiques
Dictionnaire [19]
Substantif : Nom générique des sciences qui ont pour objet le nombre, l'ordre
(de classement) ou l'étendue : algèbre, analyse, arithmétique, géométrie, etc.
Adjectif : qui appartient aux mathématiques, qui les utilise, qui en a la rigueur.
Chez Kant
Les mathématiques sont une science aux objets a priori et purs :
K74-K75 – "Mathématique et physique sont les deux connaissances théoriques
de la raison qui doivent déterminer leurs objets a priori, la première de façon
entièrement pure, la seconde du moins en partie, mais aussi selon d'autres
sources de connaissance que celles de la raison."
Les objets mathématiques sont des produits de l'imagination humaine,
exactement comme les connaissances qui constituent le modèle humain de
l'inaccessible réalité.
Un objet mathématique a priori ne contient que ce que l'homme a imaginé :
K75 – "… le premier qui démontra le triangle isocèle […] trouva qu'il ne devait
pas suivre ce qu'il voyait sur la figure, ni même le simple concept de celle-ci, […]
mais qu'il lui fallait produire cette figure par l'intermédiaire de ce qu'il y pensait et
présentait lui-même a priori d'après des concepts (par construction), et que, pour
savoir avec sûreté quelque chose a priori, il fallait n'attribuer à la chose rien
d'autre que ce qui résultait nécessairement de ce qu'il y avait mis lui-même
conformément à son concept."
Les concepts mathématiques sont pensés arbitrairement. Ils représentent un
véritable objet, c'est-à-dire un objet de l'intuition dont les informations sont
exactement les mêmes que celles du concept.
Les seuls concepts définissables sont ceux des mathématiques
K613 (à la suite de la citation précédente) – "Donc, il ne reste pas d'autres
concepts qui soient à même d'être définis que ceux qui contiennent une
synthèse arbitraire pouvant être construite a priori : par conséquent, seule la
mathématique possède des définitions. Car l'objet qu'elle pense, elle le présente
aussi a priori dans l'intuition, et cet objet ne peut certainement contenir ni plus ni
moins de choses que le concept, puisque c'est par l'explication qu'on en a fourni
que le concept de l'objet a été donné originairement, c'est-à-dire sans en dériver
de nulle part ailleurs l'explication."
Les définitions mathématiques :
Sont des constructions de concepts formés originairement ;
Sont formées synthétiquement et de telle manière qu'elles constituent donc
le concept même.
Voir Dogmata et mathemata.
K614 - "En mathématique, nous ne disposons d'absolument aucun concept
avant la définition, dans la mesure où c'est à travers celle-ci seulement que le
concept est donné."
617
Des définitions mathématiques ne peuvent jamais être fausses. Puisqu'en effet
le concept est donné en premier lieu par la définition, il contient tout juste ce à
quoi la définition veut qu'il soit pensé par ce concept. Mais bien qu'il ne puisse
s'y trouver rien de faux quant au contenu, il peut pourtant parfois […] y avoir des
défauts dans la forme (dans la façon de les présenter), c'est-à-dire relativement
à la précision.
Remarques : voir Axiomatique et Système logique.
Connaissance pure mathématique
[56b] §1 page 36 – "Le caractère essentiel de la connaissance pure
mathématique et celui qui la distingue de toutes les autres connaissances a
priori, c'est qu'elle doit procéder non pas […] à partir de concepts, mais toujours
uniquement par la construction des concepts. Donc puisque dans ses
propositions il faut qu'elle dépasse le concept pour atteindre ce qui contient
l'intuition correspondant à ce concept, en aucun cas ses propositions ne peuvent
ni ne doivent prendre naissance au moyen d'une analyse du concept ; c'est-à-
dire qu'elles ne sont pas analytiques, mais sont toutes synthétiques." Voir :
Différence entre preuves philosophiques et preuves mathématiques ;
Dogmata et mathemata ;
In concreto.
Possibilité des mathématiques pures (conséquence de la nécessité de construire
ses connaissances)
Voir d'abord Prolégomènes : 1ère partie de la question transcendantale capitale :
comment la mathématique pure est-elle possible ?
(Citation de [56b] §11 page 58)
[La mathématique pure est basée sur des objets des sens : espace et temps]
"La mathématique pure n'est possible comme connaissance synthétique a priori
que parce qu'elle s'attache exclusivement aux objets des sens dont l'intuition
empirique se fonde sur une intuition pure (de l'espace et du temps) et d'ailleurs a
priori et donc comme pouvant se fonder sur elle,
puisque celle-ci n'est autre que la simple forme de la sensibilité,
forme qui précède l'apparition réelle des objets en la rendant en fait
primordialement possible.
[Un objet physique n'existe que lorsqu'il apparaît dans le temps, il ne peut
être perçu avant.]
[L'intuition a priori n'est pas possible pour la matière des phénomènes]
Cependant ce pouvoir d'intuitionner a priori ne concerne pas la matière de
l'apparition, c'est-à-dire ce qui en cette dernière est sensation, car c'est là ce qui
constitue l'empirique, mais uniquement la forme de cette apparition, l'espace et
le temps."
(Fin de citation)
Identité et nature des lois des phénomènes externes et de la géométrie
(Citation de [56b] §13 pages 63, 64 et 65)
[Réalité de la mathématique pure et de la géométrie pure]
[Nous venons de voir que] "la mathématique pure et notamment la géométrie
618
pure, ne peut avoir de réalité objective qu'à la seule condition de concerner
uniquement les objets des sens ;
[Nos représentations des choses ne sont que leur apparence]
mais on [démontre] que notre représentation sensible n'est aucunement une
représentation des choses en elles-mêmes, mais seulement de la manière dont
celles-ci nous apparaissent.
[Mais l'apparence des objets de la géométrie correspond à leur réalité]
Il s'ensuit que les propositions de la géométrie ne sauraient être les
déterminations d'une simple création de notre fantaisie poétique qui, à ce titre,
ne sauraient être rapportées avec certitude à des objets réels ;
[Ce sont des objets de l'espace, le même espace que celui des phénomènes]
tout au contraire, il s'ensuit que c'est de façon nécessaire qu'elles valent pour
l'espace et du même coup pour tout ce que l'on peut rencontrer dans l'espace,
puisque l'espace n'est rien d'autre que la forme de tous les phénomènes
externes et que c'est seulement sous cette forme que les objets des sens
peuvent nous être donnés.
[Les concepts des phénomènes externes sont ceux de la géométrie]
La sensibilité, dont la forme [notamment l'espace] fonde la géométrie, est ce sur
quoi repose la possibilité des phénomènes externes ; donc ces phénomènes ne
contiennent jamais rien d'autre que ce que la géométrie leur prescrit. […]
[Les lois spatiales des phénomènes externes sont celles de la géométrie]
Tous les objets extérieurs de notre monde sensible s'accordent nécessairement
en toute exactitude avec les propositions de la géométrie, puisque c'est la
sensibilité elle-même qui rend primordialement possibles ces objets comme
simples phénomènes grâce à sa forme d'intuition externe (l'espace) dont
s'occupe le géomètre. […]
[En résumé]
Cet espace en pensée rend possible l'espace physique, c'est-à-dire l'extension
de la matière elle-même ; […]
Cet espace en pensée n'est aucunement la propriété des choses en elles-
mêmes, [c']est seulement une forme de notre faculté de représentation sensible ;
[…]
Tous les objets dans l'espace sont de simples phénomènes, c'est-à-dire non pas
les choses en elles-mêmes, mais les représentations de notre intuition sensible
[…]
Comme l'espace tel que le géomètre en forme la pensée est très précisément la
forme de l'intuition sensible que nous trouvons a priori en nous et qui contient le
principe de la possibilité de tous les phénomènes externes (selon leur forme), il
faut bien que ceux-ci concordent de manière nécessaire et parfaitement exacte
avec les propositions du géomètre…"
(Fin de citation)
Suite du texte des Prolégomènes : Comparaison de la doctrine idéaliste de Kant
et de la doctrine traditionnelle.
K103 - "Les jugements mathématiques sont tous synthétiques"
Kant qualifie de mathématique un jugement qui décrit la quantité (nombre
619
d'éléments par rapport à l'ensemble entier : unité, pluralité ou totalité) et la
qualité (choix entre réalité, négation ou limitation).
voir Table des 12 catégories de l'entendement pur de Kant.
Parce qu'un tel jugement d'objet décrit une grandeur, Kant l'appelle
mathématique.
Ces jugements reposent sur la faculté de logique pure dont chaque esprit
rationnel dispose a priori. Ils sont synthétiques parce que le prédicat du sujet ne
peut en être déduit, contrairement au cas des propositions analytiques.
K104 – "…des propositions proprement mathématiques sont toujours des
jugements a priori et ne sont pas empiriques, parce qu'elles apportent avec elles
une nécessité qui ne peut être tirée de l'expérience."
Exemples de jugements synthétiques
K102 – Dans le jugement "Tout ce qui arrive a une cause", le prédicat "a une
cause" est extérieur au phénomène de "Tout ce qui arrive", on ne peut l'en
déduire. "Tout ce qui arrive a une cause" est donc un jugement synthétique ;
et comme on peut le formuler sans faire appel à l'expérience, il est
synthétique a priori.
K105 – "Tout aussi peu analytique est un axiome quelconque de la
géométrie pure. Que la ligne droite soit, entre deux points, la plus courte,
c'est une proposition synthétique. Car mon concept de ce qui est droit ne
contient aucune détermination de grandeur, mais seulement une qualité. Le
concept de ce qui est le plus court est donc entièrement surajouté et ne peut
être par aucune analyse tiré du concept de la ligne droite. Il faut donc s'aider
ici de l'intuition, par l'intermédiaire de laquelle seulement la synthèse est
possible."
Voir aussi :
Remarques : principes mathématiques et principes dynamiques ;
Exemples de différence entre principe mathématique et principe dynamique ;
Dogmata et mathemata ;
Discipline de la raison pure dans l'usage dogmatique.
Matière et forme
En philosophie, l'information qui décrit un objet ou phénomène est traditionnellement
divisée en deux parties disjointes (complètement séparées, sans élément commun) :
La forme, ensemble d'informations permettant d'identifier l'objet ou le
phénomène (de le distinguer d'un autre objet ou phénomène qui pourrait avoir la
même matière) et d'en connaître les caractéristiques.
La forme est donc une abstraction qui regroupe un ensemble d'abstractions :
les informations descriptives de l'objet ou du phénomène.
620
La matière, qui correspond à la réalité physique, est l'origine (la cause) des
sensations que procure la perception de l'objet ou du phénomène :
K683 - "…le simple concept de matière (étendue, impénétrable et sans vie)"
Etendue veut dire : qui occupe un volume d'espace.
(Voir la différence avec la substance).
K239 - La forme de tout phénomène contient une intuition dans l'espace et dans le
temps qui lui sert de fondement a priori.
(Citation de K313)
"Matière et forme. Ce sont deux concepts qui sont au fondement de toute autre
réflexion, tant ils sont inséparablement liés à tout usage de l'entendement.
[Cause et conséquence]
Le premier [matière] signifie le déterminable (le donné, la cause) en général, le
second [forme] sa détermination [sa conséquence] (l'un et l'autre dans le sens
transcendantal), dans la mesure où l'on fait abstraction de toute différence au
sein de ce qui est donné et de la manière dont il est déterminé.
[Démonstration, en tant que cas particulier de causalité]
[165] page 80 - Les éléments essentiels de toute preuve en général sont sa
matière et sa forme ou l'argument et la conséquence.
[Ensemble et éléments]
Les logiciens nommaient autrefois le général matière, et la différence spécifique
forme.
[Objet jugé et jugement]
Dans tout jugement, on peut appeler les concepts donnés [sujet et prédicat] la
matière logique (soumise au jugement), et le rapport entre ces concepts (par
l'intermédiaire de la copule) la forme de ce jugement.
[Eléments d'un ensemble et relations entre eux]
Dans tout être, les éléments qui en sont constitutifs (essentialia) correspondent à
la matière ; la façon dont ces éléments sont reliés en une chose est la forme
essentielle.
[Ce qui est possible et ce qui ne l'est pas]
En outre, vis-à-vis des choses en général, la réalité illimitée était considérée
comme la matière de toute possibilité, tandis que la limitation de cette réalité
(négation) était considérée comme la forme par laquelle une chose se distingue
d'une autre d'après des concepts transcendantaux.
Un objet doit être défini et nommé pour qu'on puisse en décrire les détails
Il se trouve en effet que l'entendement exige d'abord que quelque chose soit
621
donné (du moins dans le concept) pour pouvoir le déterminer d'une certaine
manière."
(Fin de citation)
K608 – "La matière des phénomènes, à travers [lesquels] des choses nous sont
données dans l'espace et le temps, ne peut être représentée que dans la perception,
par conséquent a posteriori. Le seul concept qui représente a priori ce contenu
empirique des phénomènes, c'est le concept de la chose en général, et la
connaissance synthétique que nous en avons a priori ne peut rien fournir de plus a
priori que la simple règle de la synthèse de ce que la perception peut donner a
posteriori, mais jamais l'intuition de l'objet réel, puisque celle-ci doit être
nécessairement empirique."
K314 – "L'espace et le temps précèdent tous les phénomènes, ainsi que toutes les
données de l'expérience, et ils ne font […] que les rendre possibles."
Voir :
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine) ;
Criticisme ;
Matière et forme (K313) : 7ème et 8ème concepts de la réflexion ;
622
Substance, notamment Substance, matière, forme et physique moderne.
Matière-énergie
La Relativité restreinte d'Einstein (1905) enseigne que la matière et l'énergie sont
deux formes d'une même réalité physique, la matière-énergie, souvent désignée
simplement par le mot énergie compris au sens large.
L'équivalence entre une masse de matière m (en kg), supposée immobile, et son
énergie E (en joules) est donnée par la célèbre formule d'Einstein :
𝐸 = 𝑚𝑐 2
où c est la vitesse de la lumière dans le vide, c = 299 792 458 mètres/seconde
Selon [13]
Précepte, principe de conduite, règle morale.
Définitions de Kant
Maximes pratiques : des principes subjectifs des actions
(Citation de K662)
"Des lois pratiques, en tant qu'elles sont en même temps des raisons subjectives
fondant les actions, c'est-à-dire des principes subjectifs, s'appellent des
maximes. L'appréciation de la moralité, dans sa pureté et ses conséquences,
s'opère d'après des Idées ; l'obéissance à ses lois, d'après des maximes.
[Pour agir un homme a besoin d'un espoir correspondant à ses fins suprêmes]
II est nécessaire que toute la conduite de notre vie soit subordonnée à des
maximes morales ; mais il est en même temps impossible que cela se produise
si la raison ne relie pas à la loi morale, qui est une simple Idée, une cause
efficiente qui détermine pour notre conduite d'après cette loi une issue, que ce
soit dans cette vie ou dans une autre, correspondant exactement à nos fins
suprêmes.
[L'espoir ne peut provenir que de la foi en Dieu et en un bonheur posthume]
Par conséquent, sans un Dieu et sans un monde [futur] qui n'est pas
actuellement visible pour nous, mais dans lequel nous plaçons notre espoir, les
grandioses Idées de la moralité sont certes objets d'approbation et d'admiration,
mais non point des mobiles de l'intention et de l'effectuation, parce qu'elles ne
remplissent pas entièrement la fin qui est assignée à tout être raisonnable de
façon naturelle et a priori précisément par cette même raison pure."
(Fin de citation)
Maxime de la raison : des principes de connaissance rigoureuse
K573 – "J'appelle maximes de la raison tous les principes subjectifs qui ne sont
pas tirés de la nature de l'objet, mais de l'intérêt de la raison pour une certaine
perfection possible de la connaissance de cet objet. Ainsi y a-t-il des maximes de
623
la raison spéculative, qui reposent uniquement sur l'intérêt spéculatif de cette
raison, quand bien même elles ont l'apparence d'être des principes objectifs."
Mécanique quantique
Source : [12].
La Mécanique quantique est un ensemble d'outils mathématiques destinés à la
physique de l'infiniment petit, au niveau atomique, c'est-à-dire à une échelle de
dimension et de distance de l'ordre de taille d'un atome : 1 angström (Å) = 10-10 m.
Ces outils permettent le calcul et la modélisation des systèmes physiques en
évolution ou stables ; ils ne constituent pas une science expérimentale de l'infiniment
petit, rôle que tient la physique quantique.
624
Non seulement la Mécanique quantique modélise bien la réalité physique au niveau
atomique, mais c'est notre seule façon de "voir", de comprendre et de prévoir ce qui
se passe à cette échelle-là. En somme, nous ne pouvons voir ce monde minuscule
qu'à travers des équations et des fonctions, qui décrivent et prédisent le
comportement de ses particules avec une fidélité parfaite, compte tenu des
inévitables contraintes expérimentales ; on a même démontré qu'il n'existait pas de
variables cachées [84] : voir Principe de la primauté de la connaissance sur les
objets (doctrine).
Médiate qualifie une connaissance ou un jugement qui repose sur une autre
connaissance ou un autre jugement. Exemple (K156) : « Tous les corps sont
divisibles » est un jugement des corps où (« sont ») repose sur un autre jugement, la
divisibilité en molécules ou atomes. On dit que le concept de « corps » est
représenté médiatement par celui de « divisibilité ».
Si le jugement conclu est déjà compris dans la première proposition, de telle manière
qu'il puisse en être déduit sans la médiation d'une troisième représentation, le
raisonnement est dit immédiat : plus volontiers parlerais-je alors de raisonnement
d'entendement.
Mais si, outre la connaissance qui est prise pour principe, se trouve encore être
nécessaire un autre jugement pour opérer la déduction, le raisonnement s'appelle
raisonnement de raison."
625
Un concept ayant d'autres concepts sous lui peut être prédicat de jugements.
Exemple : le concept de « corps » ayant d'autres concepts sous lui (comme
« métal »), le jugement « Tout métal est un corps » peut qualifier de « corps » des
objets en métal.
Méditer
Voir Méditer.
Métacognition
Pensée sur sa propre pensée, permettant de l'analyser, de la comprendre et de la
contrôler.
Métaconscience
Conscience d'avoir conscience de quelque chose.
Métaphysique
Autre nom selon Kant : Philosophie de la raison pure.
626
Adjectif
Qui dépasse le domaine des phénomènes, pour atteindre la chose en soi.
Qui dépasse les bornes de l'entendement, de la raison.
Substantif
La métaphysique est la partie fondamentale de la philosophie qui cherche les causes
et les principes. Elle cherche notamment à aller au-delà de la science, de manière
spéculative :
K79 – La métaphysique a pour objectif le plus essentiel d'aller au-delà des
limites de l'expérience possible.
627
Voir Conclusion de Kant sur le système des Idées transcendantales.
Kant croit :
en Dieu (un dieu transcendantal conçu par l'homme pour des raisons de
cohérence de son système de connaissances et son monde moral),
que l'homme jouit d'un libre arbitre,
et que l'âme est immortelle (voir Les Idées sont les causes efficientes de la
nature – Les croyances de Kant).
K97-K98 - La métaphysique "est initialement dogmatique - ce qui veut dire que, sans
examen préalable du pouvoir de la raison, ou de son manque de pouvoir, vis-à-vis
d'une si grande entreprise, elle en entreprend avec confiance la réalisation."
dès lors toute cette analyse n'a abouti à rien, n'a rien produit ni amélioré et, après
tant de tumulte et de tapage, la science en est toujours où elle en était du temps
d'Aristote [43].
[Aucune proposition synthétique appartenant à la métaphysique ne peut être
démontrée a priori par la méthode dogmatique.]
[Conclusion]
La métaphysique comme science n'a pas encore existé jusqu'à ce jour."
628
(Fin de citation)
Car qu'est-ce que le bon sens ? C'est le sens commun, en tant qu'il juge
correctement.
Ainsi, c'est à peine si le sens commun entendra la règle : « tout ce qui arrive est
déterminé par sa cause », et il ne la comprendra jamais sous cette forme générale.
629
Ainsi exige-t-il un exemple tiré de l'expérience et quand il apprend que cela ne
signifie pas autre chose que ce qu'il a toujours conçu lorsqu'on lui a cassé une vitre
ou qu'un de ses meubles a disparu, alors il comprend le principe et il l'admet.
L'emploi du sens commun ne va donc pas plus loin que le point où il peut voir ses
règles confirmées dans l'expérience (règles qui cependant résident en lui a priori) ;
discerner ces règles a priori et indépendamment de l'expérience relève par
conséquent de l'entendement spéculatif et c'est tout à fait au-delà de l'horizon du
sens commun. Or c'est uniquement de cette dernière espèce de connaissance que la
métaphysique s'occupe."
[Complément : Sens commun.]
(Fin de citation)
[La métaphysique est indispensable pour étudier les règles et les limites de la
réflexion]
Ce pourquoi la raison humaine, depuis qu'elle s'est mise à penser, ou plutôt à
réfléchir, n'a jamais pu se dispenser d'une métaphysique, même si elle n'a jamais été
capable de la présenter en l'épurant suffisamment de tout élément étranger.
L'Idée d'une telle science est tout aussi ancienne que la raison spéculative de l'être
humain ; et quelle raison ne spécule pas, que ce soit à la manière scolastique ou à la
façon populaire ?"
(Fin de citation)
630
Voir Conditions à satisfaire par une critique de la raison pour que la métaphysique
soit une science.
631
les former et que par conséquent elle se situe hors du système de la métaphysique,
dans l'Anthropologie.
(Fin de citation)
Voir aussi En métaphysique une affirmation ne peut être contredite par l'expérience.
Une science est définie par son objet, ses sources de connaissance et leur mode
(Citation de [56b] §1 pages 29-30)
"Si l'on veut présenter une connaissance comme science, il faut tout d'abord pouvoir
déterminer exactement son caractère distinctif, ce qu'elle n'a de commun avec
aucune autre science, et du même coup ce qui lui appartient en propre ; faute de
quoi, les limites de toutes les sciences se confondent et on ne peut en traiter aucune
à fond selon sa nature.
632
La métaphysique est plus que la science des premiers principes de la connaissance
K680 – "Quand on disait : la métaphysique est la science des premiers principes de
la connaissance humaine, on ne mettait pas en relief par là une espèce tout à fait
particulière, mais seulement un rang dans l'ordre de l'universalité, par quoi elle ne
pouvait donc être distinguée nettement de l'empirique ;"
Lire ici :
Métaphysique de la nature,
Système entier de la métaphysique,
Conditions à satisfaire par une critique de la raison pour que la métaphysique
soit une science
[2ème question]
Et comment est-il possible de connaître la nature des choses d'après des principes a
priori, et de parvenir à une physiologie rationnelle ?
[2ème question]
Psychologie empirique (qui doit être bannie de la métaphysique)
En second lieu : quel lieu demeure donc pour la psychologie empirique, qui a depuis
toujours revendiqué sa place dans la métaphysique, et de laquelle on a attendu à
633
notre époque de si grandes choses pour la clarification de celle-ci, après avoir perdu
l'espoir de parvenir a priori à aucun résultat exploitable ?
Je réponds : elle vient là où doit être placée la doctrine de la nature proprement dite
(empirique), c'est-à-dire du côté de la philosophie appliquée, en vue de laquelle la
philosophie pure contient les principes a priori, devant ainsi entretenir un lien, certes,
avec la philosophie appliquée, mais sans être confondue avec elle. La psychologie
empirique doit donc être totalement bannie de la métaphysique, et elle s'en trouve
déjà entièrement exclue par l'idée de cette science.
(Fin de citation)
Qu'elle serve davantage, comme simple spéculation, à écarter les erreurs qu'à élargir
la connaissance, cela ne porte pas atteinte à sa valeur, mais au contraire lui donne
bien plutôt de la dignité et du prestige, en ce sens qu'elle remplit une fonction de
censure qui assure l'ordre et l'entente générale, voire la prospérité de la république
634
scientifique, et qui retient ses travaux audacieux et féconds de s'éloigner de leur fin
principale : le bonheur universel."
(Fin de citation)
Voir aussi :
En métaphysique une affirmation ne peut être contredite par l'expérience ;
Prolégomènes à toute métaphysique future qui pourra se présenter comme
science ;
Système entier de la métaphysique ;
Critique de la métaphysique ;
Philosophie métaphysique de l'unité systématique des connaissances pures a
priori.
Car puisque le prédicat d'un jugement analytique affirmatif est déjà antérieurement
pensé dans le concept du sujet, il ne peut être nié de celui-ci sans contradiction ; de
même dans un jugement analytique, mais négatif, son contraire serait
nécessairement nié du sujet, également en vertu du principe de contradiction."
(Fin de citation)
635
Toutefois les uns et les autres s'accordent en ce que le principe de l'analyse, c'est-à-
dire le principe de contradiction, ne suffit en aucune façon à leur donner naissance ;
ils exigent en outre un tout autre principe, bien que de ce principe, quel qu'il soit, ils
doivent être toujours dérivés en conformité avec le principe de contradiction ; car il
n'est rien qui doive contrevenir à ce principe, lors même que tout n'en peut être
dérivé."
(Fin de citation)
Un jugement d'addition comprend donc les intuitions a priori des deux nombres et le
nombre de synthèses additives nécessaires pour ajouter 1 au premier nombre. Le
principe de contradiction intervient dans le comptage de ce nombre de synthèses
additives nécessaires pour ajouter exactement le second nombre : il est
indispensable à la synthèse globale 7+5=12.
[56b] §2 page 34 – "Un principe quelconque de géométrie pure n'est pas davantage
analytique. Que la ligne droite entre deux points soit la plus courte, c'est une
proposition synthétique. Car mon concept de « droit » ne contient nullement la
grandeur, mais uniquement une qualité. Le concept de « ce qui est le plus court » est
donc entièrement ajouté, et aucune analyse ne peut le tirer du concept de ligne
droite. Il faut donc ici recourir à l'intuition qui, seule, rend possible la synthèse."
636
Conclusions sur les propositions métaphysiques
(Citation de [56b] §2 pages 38-39)
[La métaphysique a pour seul but la production de propositions synthétiques a priori]
"La métaphysique a proprement affaire à des propositions synthétiques a priori, et ce
sont uniquement de telles propositions qui constituent sa fin ;
Voir aussi : En métaphysique une affirmation ne peut être contredite par l'expérience.
637
vous y trouverez, démontrée à partir des principes de la raison pure, la principale fin
de cette science : la connaissance d'un Etre suprême et d'un monde futur."
Il n'y a pas, non plus, de propositions synthétiques, même non démontrées, qui
conviennent
(Citation de [56b] §4 page 41)
"Vous pouvez bien exhiber aussi des propositions synthétiques (par exemple, le
principe de raison suffisante), dont vous n'avez jamais donné la démonstration à
partir de la seule raison, donc a priori, comme c'était cependant votre devoir de le
faire, et que, malgré cela, on vous accorde volontiers :
[Le principe de raison suffisante (le déterminisme) est indémontrable en logique
pure, il doit être postulé.]
quand vous voulez les mettre au service de votre fin principale, vous aboutissez
cependant à des affirmations à ce point irrecevables et incertaines que de tout temps
une métaphysique a contredit l'autre, soit qu'elle en conteste les thèses elles-mêmes,
soit qu'elle conteste leurs preuves, et elle a par là même annulé sa prétention à être
approuvée de façon durable.
638
[Démarche « de bas en haut » de la Critique : trouver les processus de la raison pure
pour en déduire par synthèse les lois de son usage pur]
Dans la Critique de la raison pure, pour traiter cette question, j'ai procédé
synthétiquement, c'est-à-dire que j'ai cherché dans la raison pure elle-même et c'est
à cette source même que j'ai tâché de déterminer, selon des principes, aussi bien les
éléments que les lois de son usage pur.
Nous avons donc à tout le moins quelques connaissances synthétiques a priori qui
ne sont pas contestées, et nous n'avons pas à nous demander si elles sont possibles
(puisqu'elles sont réelles), mais uniquement comment elles sont possibles, pour être
à même, à partir du principe de la possibilité de celles qui sont données, de dériver
également la possibilité de toutes les autres."
[L'être humain a quelques connaissances d'origine génétique à sa naissance et il
construit toutes les autres par apprentissage, au fur et à mesure de sa vie.]
(Fin de citation)
Voir aussi En métaphysique une affirmation ne peut être contredite par l'expérience.
La métaphysique est ainsi une activité normale d'un sujet chaque fois qu'une
question sur un objet ou une loi de la nature n'a pas de réponse scientifique qu'il
connaît. Sa spéculation peut avoir l'avantage d'introduire une exigence de rigueur
639
théorique dans la réflexion sur le sujet, mais elle risque aussi d'y introduire des
aprioris.
C'est pourquoi, dans ce dictionnaire des idées de la Critique, chaque fois que nous
disposerons de connaissances scientifiques sur un sujet que Kant a abordé de
manière métaphysique il y a plus de deux siècles, nous le signalerons pour
remplacer ou compléter des spéculations par des faits aujourd'hui établis.
Le but est de rendre la pensée de Kant la plus féconde possible pour les lecteurs
d'aujourd'hui, de les faire profiter au maximum de l'extraordinaire rigueur et de
l'honnêteté absolue de cet immense philosophe.
Exemples d'ajouts :
Limitation de lois de la nature par celles de la thermodynamique [119] ;
Limitation des possibilités de prédiction d'évolution par la Mécanique quantique,
la Relativité et le principe de conservation de la quantité d'information ;
Limitation des régressions infinies à la naissance de l'Univers lors du Big Bang ;
Suggestion d'une causalité étendue, à base de relations
situation-cause loi d'évolution-conséquence en remplacement des relations
situation-cause situation-conséquence de la Critique ;
Suggestion du déterminisme étendu prenant en compte les lois statistiques, etc.
Métaphysique spéciale
Source : [158] page 291
La Métaphysique spéciale concerne l'ensemble des démonstrations dogmatiques qui
prétendent fonder a priori par concepts la connaissance de l'âme, du monde et de
Dieu.
Métathèse
Selon le dictionnaire [13] : (Logique kantienne) Transposition des termes d'un
jugement qui sert à en déduire un autre par voie de raisonnement immédiat [par
l'entendement : voir Raisonnement d'entendement (immédiat) et raisonnement de
raison (médiat).
Métempsycose
Philosophie : Passage d'une âme d'un corps dans un autre.
Synonyme : transmigration.
640
Méthode
Voir Choix entre exposé et méthode.
Méthode scientifique
Voir : La raison recommande une base axiomatique des connaissances et des
déductions (Conséquences pour la Méthode scientifique).
Méthodologie de la Logique
Source : [177] pages 34 et suivantes.
Méthode logique
Source : [177] pages 35 et suivantes.
Démonstration
Démontrer une proposition, c'est la déduire de certaines autres, admises ou données
comme vraies,
au moyen des seuls principes de la Logique,
ou, au point de vue formel, par des transformations permises par les règles du
Calcul logique.
Presque tous les principes formels de la Logique peuvent servir de règle ou de type
à un mode de raisonnement. Tels sont […] :
le principe du syllogisme,
le principe de simplification,
le principe de composition,
le principe de contraposition,
le principe d'importation et d'exportation
641
et les formules du raisonnement hypothétique (modus ponens, modus tollens)
qui en dérivent.
Il n'y a pas d'autre mode de démonstration valable en Mathématique que ceux qui
sont valables en Logique. Tout autre procédé de raisonnement est aujourd'hui
considéré comme illégitime, au moins comme moyen de démonstration.
Au point de vue formel, une définition consiste dans une égalité logique établie entre
un terme simple (le défini) et un terme complexe (le définissant).
Cette égalité n'est pas affirmée comme proposition, elle n'est ni vraie ni fausse ; elle
est posée comme convention d'écriture et de langage. Et comme le défini n'a, par
hypothèse, pas d'autre sens que le définissant, il peut être considéré comme un
simple nom donné au définissant pour en abréger l'énoncé.
C'est en ce sens qu'on peut dire que toute définition mathématique est nominale ;
cela signifie, non pas que les concepts mathématiques se réduisent à des noms (ce
qui est la thèse nominaliste), mais qu'ils peuvent tous se définir d'une manière
logique et explicite « en fonction » de quelques notions premières, et par suite être
considérés comme des noms imposés à telles et telles combinaisons de ces notions.
Tel est le fondement de cette grande règle de la méthode mathématique, qu'on peut
et qu'on doit substituer le définissant au défini, et réciproquement."
(Fin de citation)
642
démonstrations ; dans un autre système ou dans un autre ordre, les mêmes notions
pourront être définies et les mêmes propositions pourront être démontrées.
Il ne faut donc pas non plus attribuer un sens absolu (épistémologique) aux
expressions équivalentes de « notion première » et de « proposition première ».
Au point de vue formel, comme les notions premières ne sont pas définies, leur sens
n'est pas déterminé, et n'intervient nullement dans l'enchaînement déductif des
propositions, car celui-ci dépend uniquement des propositions premières et des
définitions explicitement formulées.
On peut donc considérer les notions premières comme de purs symboles, dont le
sens est indéterminé et indifférent, et qui sont seulement assujettis à vérifier les
propositions premières.
On conçoit donc qu'une même théorie déductive formelle puisse recevoir plusieurs
applications matériellement différentes, si l'on peut trouver pour l'ensemble des
symboles non définis plusieurs interprétations qui vérifient également l'ensemble des
propositions non démontrées."
(Fin de citation)
Donc, si l'on peut montrer que la négative d'une proposition première est compatible
avec toutes les autres, on aura établi que cette proposition est indépendante des
autres. Ainsi se justifie la règle suivante pour vérifier l'irréductibilité d'un système de
propositions :
Pour qu'un système de propositions soit irréductible, il faut et il suffit que, pour
chacune d'elles, on puisse trouver une interprétation des symboles non définis
qui vérifie toutes les autres, mais non celle-là.
C'est par cette méthode que les mathématiciens vérifient l'irréductibilité d'un système
d'axiomes ou de postulats ;"
(Fin de citation)
Comment vérifier que l'ensemble des symboles non définis est irréductible
(Citation de [177] pages 38-39)
"L'ensemble des symboles non définis [doit être], lui aussi, irréductible, c'est-à-dire
qu'aucun d'eux ne puisse se définir au moyen des autres.
643
Or, si l'un d'eux pouvait se définir au moyen des autres, son sens serait déterminé
dès qu'on aurait fixé le sens de tous les autres, et par suite on ne pourrait le changer
qu'en changeant l'interprétation de ceux-ci.
Donc, réciproquement, si l'on peut changer le sens d'un seul symbole sans changer
l'interprétation des autres, ce symbole sera indépendant des autres. Ainsi se justifie
la règle suivante pour vérifier l'irréductibilité d'un ensemble de symboles non définis :
Pour qu'un système de symboles non définis soit irréductible (par rapport à un
système de propositions premières), il faut et il suffit que, pour chaque symbole
non défini, on puisse trouver une interprétation du système qui vérifie le système
des propositions premières, et qui continue à le vérifier quand on y change le
sens du seul symbole considéré."
(Fin de citation)
Toute définition doit être accompagnée d'un théorème ou d'un postulat d'existence
(Citation de [177] page 39)
"Toute définition s'effectue au moyen de termes généraux, au moins virtuellement et
en principe, de sorte que le défini est toujours un terme général, une classe [un
ensemble].
Or, pour pouvoir ensuite raisonner sur cette classe et en invoquer les propriétés, il
faut pouvoir affirmer qu'il existe des individus de cette classe, c'est-à-dire que cette
classe n'est pas nulle (que les conditions qui la définissent ne sont pas absurdes,
c'est-à-dire logiquement incompatibles).
C'est pourquoi toute définition doit être accompagnée d'un théorème d'existence (ou
d'un postulat d'existence) qui affirme l'existence de l'objet défini.
D'autre part, il arrive souvent que ce qu'on veut définir n'est pas une classe, mais un
individu [un élément de l'ensemble]. Pour pouvoir parler plus tard de cet individu (en
mettant l'article défini devant le concept en question), il faut préalablement avoir
démontré que la classe définie, non seulement existe, mais est singulière (ne
confient qu'un individu) ; c'est ce qu'on fait, généralement, en prouvant que, si deux
individus vérifient la définition, ils sont identiques. On dit alors qu'on a établi
l'existence et l'unicité de l'objet défini."
(Fin de citation)
644
Méthodologie physiologique
Voir Rapport des phénomènes à l'expérience en général.
Micrologie
Selon le dictionnaire [13] : étude d'un événement, d'un phénomène dans ses plus
petits détails, avec minutie.
[165] page 51 – "Le pédantisme [est] le souci du raffinement et l'inutile précision dans
les formules (micrologie)."
Misologie
Selon le dictionnaire [13] : (philosophie) aversion pour le raisonnement, pour la
discussion, pour l'argumentation logique.
Exemple : voir Naturalisme.
Mnésique
Adjectif : qui a trait à la mémoire. Qualifie trois processus : la mémorisation, la
rétention et la récupération. La mémorisation conserve en mémoire la trace des
processus mis en œuvre par le sujet (le schéma d'attention).
Voir aussi : cognition.
Compléments :
Modalité des jugements : problématiques, assertoriques, apodictiques ;
Pensée empirique en général (postulats) ;
Table des catégories de l'entendement.
645
Mode
Forme particulière sous laquelle se présente un fait, un objet, un phénomène.
Synonymes : forme, genre, attribut, qualité, caractère.
En logique : forme que présente un syllogisme, dans les diverses figures, selon
que les propositions qui le composent varient en qualité et en quantité.
Voir aussi Prédicat – Prédicatif – Prédication : on appelle prédication l'attribution
de propriétés à des êtres ou à des objets au moyen d'une phrase prédicative
(que Kant appelle jugement). Les différents modes de prédication représentent
les différents modes d'être des objets et des êtres animés (Selon [13])
Chez Kant
Modes de connaissance
(Citation de [56b] §43 page 129)
"Mon principal objectif dans la Critique a toujours été de […]
distinguer avec soin les modes de connaissance […],
[
On distingue les modes suivants :
la connaissance par expérience ;
la connaissance par raison pure, notamment métaphysique :
[56b] §2 page 30 (Titre) – "Du mode de connaissance qui seul peut être
qualifié de métaphysique – a) De la distinction entre les jugements
synthétiques et les jugements analytiques en général."
la connaissance transcendantale :
K110 - "Je nomme transcendantale toute connaissance qui s'occupe en
général moins d'objets que de notre mode de connaissance des objets, en
tant que celui-ci doit être possible a priori.
Voir Connaissance dans Représentations et ensembles d'informations
(diagramme)
]
dériver de leur source commune tous les concepts qui relèvent de chacun d'eux,
afin d'être capable
non seulement de déterminer à coup sûr leur usage grâce à mon information
sur leur origine,
mais aussi de […] connaître a priori, […] par principes, la complétude dans :
l'énumération,
la classification
et la spécification [description complète et précise]
des concepts.
Faute de quoi, en métaphysique tout n'est que rhapsodie où l'on ne sait jamais si ce
que l'on possède est suffisant ou bien s'il se peut qu'il manque encore quelque chose
et en quel endroit."
(Fin de citation)
646
Exemples dans les articles suivants :
Les trois modes (rapports temporels) du temps (positionnement relatif dans le
temps) ;
Accident – Inhérence ou subsistance ;
Analogies de l'expérience (principe).
Modi (latin)
Latin : types, espèces, formes, modes (K164)
En logique
Modus ponens (raisonnement hypothétique)
Opération logique consistant, à partir :
d'une inférence entre deux propositions p et q :
« Si p est vrai, alors q est vrai » (q est la conséquence de p, notée p q)
et de l'hypothèse « p est vrai » (notée p), d'en conclure « alors q est vrai »,
notée q.
((p q) . p) q
Modus tollens
Règle d'inférence entre deux propositions logiques p et q, dont les opposées sont
respectivement non-p (notée ¬p) et non-q (notée ¬q) :
« Si p entraîne q » (notée p q), alors « non-q entraîne non-p » (notée ¬q ¬p).
(p q) (¬q ¬p)
Chez Kant
K649 – Si une connaissance (en fait une situation) S a pour conséquences (au sens
logique ou au sens des lois de la nature) des situations A, B, C, etc., on ne peut
déduire de la donnée des situations A, B, C, etc. que la situation S a existé que si
cette donnée concerne toutes les conséquences de S : il suffit d'une seule
conséquence de S qui n'est pas donnée pour que S n'ait pas eu lieu (les situations
constatées A, B, C, etc. étant en fait dues à une situation initiale S' différente de S).
Donc déduire d'un ensemble de situations la cause S qu'elles partagent est une
démarche dangereuse :
On risque d'oublier des conséquences possibles de S, comme dans WYSIATI ;
647
En outre, il peut y avoir des causes autres que S de cet ensemble de situations
que la déduction ne révélerait pas.
Compléments :
Mode de liaison dans les jugements hypothétiques : modus ponens et modus
tollens ;
Preuve apagogique d'un raisonnement syllogistique (preuve par l'absurde).
Moi (Je)
En psychologie
Complexe de représentations corporelles et d'affects constituant le champ de la
conscience de soi. La faculté de les créer et de les manipuler se forme tout au long
d'une vie pour s'adapter aux circonstances. L'adaptation utilise des fonctions
psychiques : pensée ou affect, intuition, sensation, etc.
Le Moi est un centre de décisions, notamment pour les choix éthiques du sujet, et un
centre de connaissances, notamment pour distinguer le sujet de son environnement.
Le Moi ignore l’inconscient, qui fait partie du Soi défini comme « le sujet dans la
totalité de sa psyché ». Mais certaines activités du Moi sont inconscientes ; exemple :
les mécanismes de défense.
Chez Kant
Selon les traductions, le même mot allemand est traduit tantôt par Moi, tantôt par Je.
Je est d'abord un objet du sens interne, dont l'homme est conscient sans
perception ou expérience externe et sans en être affecté. C'est un noumène.
Je est ensuite une abstraction pure avec laquelle l'homme se pense en tant que
sujet. Ce n'est pas un phénomène, car Je n'a ni forme ni matière, et ce n'est pas
une chose en soi ; c'est un concept rationnel.
K362-K363 – "Je […] qui est une simple conscience accompagnant tous les
concepts."
648
K364 – "Or, étant donné que la proposition : Je pense (prise en un sens
problématique) contient la forme de tout jugement de l'entendement en général et
qu'elle accompagne toutes les catégories en constituant comme leur véhicule, il est
clair que les conclusions susceptibles d'en être tirées ne sauraient contenir qu'un
usage transcendantal de l'entendement qui exclut tout ajout venant s'y mêler à partir
de l'expérience…"
K371 – "Le Moi pensant, l'âme (nom dont on se sert pour désigner l'objet
transcendantal du sens interne), est simple…"
K384 – "Ce Moi est aussi peu une intuition qu'un concept d'un quelconque objet,
mais il est la simple forme de la conscience, telle qu'elle peut accompagner les deux
sortes de représentations et les élever ainsi au rang de connaissance, dès lors qu'est
en outre donné dans l'intuition quelque chose d'autre qui offre une matière pour se
représenter un objet."
K584 – "Le concept psychologique fondamental (Moi) […] contient a priori une
certaine forme de la pensée, à savoir l'unité de celle-ci."
K360 – "Je suis, en tant que pensant, un objet du sens interne et porte le nom d'âme.
Ce qui est un objet des sens externes porte le nom de corps. En vertu de quoi le
terme : Je, en tant qu'être pensant, désigne déjà l'objet de la psychologie, qui peut
être appelée la doctrine rationnelle de l'âme lorsque je ne désire rien savoir de plus,
sur l'âme, que ce qui, indépendamment de toute expérience (qui me détermine plus
précisément et concrètement), peut être conclu à partir de ce concept Je, en tant qu'il
survient dans toute pensée." Voir Aperception (conscience de soi), pure ou
empirique.
649
tenir compte du fait que l'interprétation de la représentation vide du sens interne
par le psychisme est spontanée.
Kant admet l'existence des concepts a priori d'espace et de temps, dues aux
sens externe et interne et disponibles dès la naissance. Mais pour lui la notion
de Je est d'une nature différente : en pensant Je l'homme pense à lui-même, il
prend conscience de l'objet auquel il pense à cet instant-là, de la représentation
R (du concept C) qu'il a à l'esprit, il se représente cette représentation-là : « je
suis en train de me représenter R, je pense à C ».
Je est donc une conscience, abstraction d'une autre nature que le phénomène ou la
chose en soi : c'est un noumène au sens négatif, avec une représentation qui lui est
propre et qui accompagne spontanément toute représentation de concept. Cette
conscience est à l'origine de l'unité logique transcendantale de toute connaissance,
de toute représentation, de tout concept. Elle conditionne formellement l'aperception
et la raison.
Kant explique que la doctrine rationnelle de l'âme n'est pas fondée sur une
perception empirique, qu'elle est donc bien pure :
K361 – "…cette perception interne n'est rien de plus que la simple aperception :
Je pense, laquelle justement rend possibles tous les concepts transcendantaux
où l'on dit : je pense la substance, la cause, etc."
650
doit nécessairement se regarder soi-même comme la substance [substance sans
permanence, car elle appartient au sens interne], mais regarder l'activité de pensée
comme de simples accidents de son existence et comme des déterminations de son
état."
Le Moi est si simple parce que cette représentation n'a pas de contenu
K384 – "…le Moi […] possède une telle simplicité précisément parce que cette
représentation n'a pas de contenu, donc pas de divers, ce pourquoi elle semble aussi
représenter ou, pour mieux dire, désigner un objet simple.
K403 - Le Je de l'aperception est dans toute pensée un terme singulier qui ne peut
se résoudre en une pluralité de sujets. Donc il désigne un sujet logiquement simple
[dont le concept indécomposable a un nom : Je, mais ne contient pas d'information],
par définition du concept même de pensée dont il se déduit analytiquement.
Moi (Je) est toujours sujet, mais en tant qu'objet je ne suis pas une substance
K402-K403 – Le Moi, le Je pense, doit toujours dans la pensée avoir valeur de sujet,
de quelque chose qui ne puisse être simplement considéré comme un prédicat
venant s'attacher à la pensée : c'est là une proposition apodictique et même
identique ; toutefois, elle ne signifie pas que je sois, comme objet, un être subsistant
par moi-même, autrement dit une substance.
Cette certitude contredit l'opinion de Descartes selon laquelle l'homme est une
substance pensante et étendue.
Moment
Les moments sont les parties, les phases ou les étapes d'une activité ou d'un
raisonnement ; ce sont aussi parfois des éléments d'un ensemble ou des valeurs
d'objets nombrés.
K157 – "…la fonction de la pensée dans ce jugement peut être placée sous
quatre titres dont chacun contient sous lui trois moments".
Table des fonctions de l'entendement.
Comparaison des perfections esthétique et logique selon les 4 moments.
K165 - "…des indications pour tous les moments d'une science spéculative…".
K500 – "…nous allons analyser les moments à travers lesquels il parvient à sa
décision".
K549 – "Les principaux moments de la preuve physico-théologique que l'on a
évoquée sont les suivants : 1. Dans le monde […]. 2. Cette mise en ordre…"
[165] page 92 – "Les moments de la probabilité [valeurs associées à la
probabilité] peuvent être soit homogènes, soit hétérogènes.
651
S'ils sont homogènes, comme dans les connaissances mathématiques, ils
doivent être nombrés ;
S'ils sont hétérogènes, comme dans les connaissances philosophiques, ils
doivent être pesés, c'est-à-dire évalués d'après leur effet ; ce dernier devant
à son tour être évalué d'après l'emprise sur les obstacles rencontrés dans
l'esprit."
[165] page 154 – "Les exigences essentielles et universelles requises pour la
perfection d'une définition en général peuvent être traitées sous les quatre
moments principaux de la quantité, de la qualité, de la relation et de la modalité."
K270 – "Tout changement n'est donc possible que par une action continue de la
causalité, laquelle, en tant qu'elle est uniforme, s'appelle un moment. Le changement
n'est pas constitué par ces moments, mais il est produit par eux comme leur effet."
Monade
Substantif utilisé par Leibniz [37] pour désigner une substance sans étendue, sans
parties, imperméable à toute action du dehors, mais subissant des changements
internes obéissant aux principes d'appétition et de perception, et qui constitue
l'élément dernier, le plus simple, des êtres et des choses. Les monades entrent dans
tous les composés, ce sont les véritables atomes de la nature.
Monde
Voir :
(Phénomènes et lois de la nature) :
Monde et nature ;
Monde sensible.
(Noumènes) : Monde intelligible ;
(Lois morales) : Monde moral ;
(Anthropologie) : Connaissance du monde.
Monde donné
Voir Définition du monde donné.
Monde intelligible
Voir d'abord :
Phénomène, perçu par intuition et sensation, élément de base du monde des
sens ;
Noumène, chose en soi du phénomène, déduite de lui par l'entendement,
élément de base du monde intelligible ;
Définition approfondie d'un noumène, justifiant la division du monde en un
monde des sens et un monde de l'entendement (le monde intelligible) ;
Noumène en tant que chose en soi : un abus de l'entendement ;
652
Monde des sens (monde sensible), totalité des phénomènes (tout ce qui existe
sous forme perceptible) ;
Monde moral, sous-ensemble du monde intelligible.
L'homme est un noumène, en tant que phénomène d'un monde lui-même considéré
comme phénomène ; mais l'homme appartient aussi au monde moral, donc au
monde intelligible. Donc le monde intelligible est une Idée qui a des conséquences
pratiques.
Le monde intelligible et l'homme qui en fait partie ont été conçus par la volonté de
l'Etre suprême, conformément à des fins.
On trouve ensuite dans [93] : §16 Du principe formel du monde intelligible une
« démonstration » de la nécessaire unicité d'un Créateur du monde due à l'harmonie
de celui-ci, mais pas quelque chose concernant le monde intelligible du titre.
Monde moral
Selon la doctrine téléologique de Kant, l'Etre suprême a créé le monde et ses êtres
raisonnables en le dotant de lois morales en plus des lois de la nature.
(Citation de K660)
"Le monde, en tant qu'il serait conforme à toutes les lois morales (tel qu'il peut donc
être d'après la liberté des êtres raisonnables, et tel qu'il doit être d'après les lois
nécessaires de la moralité), je l'appelle un monde moral.
Sous ce rapport, il est simplement pensé comme monde intelligible, puisqu'il y est fait
abstraction de toutes les conditions (des fins) de la moralité et même de tous les
obstacles auxquels elle se heurte dans ce monde (faiblesse ou impureté de la nature
humaine).
653
Il est donc en ce sens une simple Idée, mais cependant une Idée pratique qui peut et
doit exercer effectivement son influence sur le monde sensible, pour le rendre autant
que possible conforme à cette Idée.
Complément : [141].
Voir aussi :
Principaux arguments de cette preuve en faveur d'une doctrine téléologique ;
Croyance doctrinale ;
La nature raisonnable existe comme fin en soi.
Monde sensible
K448 - Le monde sensible (celui que perçoit notre sens externe à l'instant présent)
est défini comme la totalité des phénomènes (tout ce qui existe sous forme
perceptible).
K513 – "Le monde sensible ne contient rien d'autre que des phénomènes, mais
ceux-ci sont de simples représentations qui, à leur tour, sont toujours conditionnées
de façon sensible ;"
[Le monde sensible et ses lois d'évolution ne sont que des abstractions humaines]
(Citation de [56b] §57 page 166)
"Le monde sensible n'est qu'une chaîne de phénomènes liés selon les lois
universelles, il n'a pas de consistance en lui-même, il n'est pas proprement la chose
en elle-même ;
654
[Kant postule une explication complète téléologique du monde]
aussi se rapporte-t-il nécessairement à ce qui contient le principe [l'origine] de ces
phénomènes, à des êtres qui peuvent être connus non pas simplement comme des
phénomènes, mais comme des choses en elles-mêmes [la Réalité suprême]. Seule
la connaissance de ces êtres [le postulat d'un Dieu transcendantal] peut donner à la
raison de voir un jour satisfaite son aspiration à l'intégralité dans sa progression du
conditionné à ses conditions.
[Il y a une relation entre le monde sensible et les noumènes qui l'expliquent.]"
(Fin de citation)
Voir :
Définition du monde sensible ;
Monde et nature ;
Réalité et phénomènes.
Monisme
Doctrine philosophique dogmatique qui considère l’ensemble des êtres, soit comme
réductibles à une même substance, soit comme relevant pour leur existence et leurs
propriétés d’un même principe ou ensemble de lois.
Monogramme
Selon le dictionnaire [13] :
Chiffre formé généralement de la combinaison des lettres initiales d'un nom ;
exemple : le monogramme du Christ est J.-C.
Marque ou signature stylisée qu'un artiste appose sur ses œuvres.
Morale
655
C'est aussi l'effort pour se conformer à ces prescriptions et l'exhortation à les suivre.
Chez Kant
K146 – "La morale pure […] contient seulement les lois morales nécessaires d'un
libre vouloir en général."
Voir :
Bonheur et lois pratiques ;
La morale n'est que la condition rationnelle du bonheur ;
Moralité ;
Ethique ;
Laïcisation de la morale.
Moralité
656
[C'est la conformité à la raison pratique qui fait la volonté moralement bonne]
Ce qui fait la volonté bonne, ce n'est pas le but que poursuit l'action, mais sa forme
elle-même. La volonté moralement bonne est la volonté conduite par la raison
pratique pure, ou encore, elle est, en tant que principe, identique à cette raison, dont
les actes de volonté sont l'émanation quand ils sont moraux.
[Vouloir quelque chose de moral est donc vouloir l'application stricte de la raison
pure : nous allons voir que, pour Kant, les lois morales sont donc les mêmes
pour tous les hommes, quelle que soit leur culture et l'époque.]
[La morale, issue de la raison a priori, régit la volonté dans son libre arbitre]
Dans cette raison, ce qui est moral est fondé a priori, il prend sa source dans la
législation originairement propre à la conscience douée de volonté rationnelle, dans
son autonomie.
[Tout homme (exactement : tout homme en tant que phénomène) a donc
intériorisé les critères de Bien et de Mal, qui s'imposent spontanément à lui.]
La raison pure, moralement législatrice, est en tant que telle — en tant que source de
normes à validité intemporelle — quelque chose de suprasensible, d'intelligible, un
« noumène » qui prescrit à l'homme en tant que son phénomène un devoir-être, un
commandement, un devoir.
[Le respect des normes éthiques de la loi morale est un impératif catégorique]
Ce commandement inspire à l'homme du respect. La loi morale - le principe des
normes éthiques particulières, leur présupposé et leur fondement - se formule
comme impératif catégorique, comme principe a priori synthétique-pratique, valant de
façon inconditionnée pour toute expérience morale.
[Selon l'universalité que veut Kant, tous les hommes doivent avoir, et avoir
toujours eu, les mêmes impératifs éthiques. Qu'en pensent les ethnologues et
les fidèles des diverses religions ? Pour Nietzsche et les athées, ce n'est pas
réaliste.]
[Tous les hommes doivent chercher à partager les mêmes lois morales]
La volonté morale est une volonté qui a pour objectif l'unité idéale du vouloir des
hommes.
657
[Le système politique idéal prend en compte la volonté de tous les citoyens : c'est
donc une démocratie où chaque citoyen respecte les droits des autres]
La législation idéale, dont la maxime de notre volonté doit pouvoir s'exhiber comme
son principe, est telle qu'en elle se trouve également prise en considération la
volonté du prochain,
[Impératif pratique : traite tout homme et l'humanité comme des fins, pas des
moyens]
A ce titre, ils ne sont pas de simples moyens pour une fin, mais des fins en eux-
mêmes, d'où résulte donc la forme de l'impératif catégorique : ne pas traiter
simplement comme moyen l'humanité qui est en chacun.
Dans la volonté morale, nous nous situons en une communauté idéale avec les
autres êtres raisonnables, en un « règne des fins », dans un « monde intelligible » ;
la volonté morale se rapporte donc d'emblée à une communauté, elle fonde du
communautaire (mais sans qu'on ait à la dériver par des voies historico-
sociologiques).
La moralité est l'unique légalité des actes qu'on peut dériver a priori de principes
K679-K680 – "La moralité est l'unique légalité des actes qui puisse être dérivée
entièrement a priori de principes. Ce pourquoi la métaphysique des mœurs est
proprement la morale pure, où nulle anthropologie (nulle condition empirique) ne se
trouve prise pour fondement."
658
Impossibilité de penser en même temps un objet et une évolution (un "mouvement")
K211 - Nous ne pouvons penser un objet extérieur sans passer par une "image" qui
le rend familier. Kant écrit : "Nous ne pouvons penser une ligne sans la tracer en
pensée, un cercle sans le décrire, nous ne pouvons nous représenter les trois
dimensions de l'espace sans poser, à partir d'un même point, trois lignes
perpendiculaires entre elles…"
Nous ne pouvons nous représenter l'évolution d'un objet dans le temps (que Kant
appelle son mouvement) que comme la synthèse d'une succession de sens internes
analogue à la succession d'images qui constituent un film à raison d'environ 25 par
seconde ; une telle synthèse est produite par l'imagination productrice.
Multiplicité
Substantif - Caractère de ce qui est formé de plusieurs parties ou éléments, de ce qui
présente des propriétés diverses.
Mutabilité
Substantif - Caractère ou état de ce qui est sujet au changement.
Synonyme : évolutivité. Opposé : immutabilité ou immuabilité.
Mystique
Selon le dictionnaire [13] :
Adjectif : dans les domaines de la religion, de la philosophie : relatif au mystère,
à une croyance surnaturelle, sans support rationnel.
Substantif féminin :
Etude, connaissance du mysticisme, de la spiritualité mystique ;
Ensemble des mouvements spirituels par lesquels l'âme accède à la
présence divine.
Par analogie : croyances, doctrines, thèses, idéologies, etc. qui suscitent une
adhésion de caractère passionné. Exemples : mystique démocratique,
hitlérienne, scientifique.
659
Naturalisme
Doctrine philosophique selon laquelle :
Tous les êtres et événements de l'Univers ont une origine naturelle ;
Leur connaissance est possible par la méthode scientifique ;
L'Univers est régi par des lois ;
Aucune réalité n’est surnaturelle ;
La nature ne subit aucune influence transcendante.
C'est là une simple misologie, érigée en principe, et, ce qui est le plus absurde, le
renoncement à tous les moyens techniques, célébré comme une véritable méthode
pour élargir sa connaissance. Car, en ce qui concerne ceux qui sont naturalistes par
défaut d'une conception plus vaste, on n'est en rien justifié à mettre quoi que ce soit
à leur charge. Ils suivent la raison commune sans se vanter de leur ignorance
comme d'une méthode qui devrait contenir le secret permettant de tirer la vérité du
puits profond de Démocrite [79]. Les vers de Perse [149] :
[« Je sais assez de choses, car je n'ai pas besoin d'être comme Arcesilas ou
comme un des malheureux Solons »]
constituent leur devise, avec laquelle ils peuvent vivre contents et mériter les
applaudissements sans se soucier de la science ni en perturber les opérations."
(Fin de citation)
Nature
660
Mais "Le Tout absolu de toute expérience possible n'est pas lui-même une
expérience" ([56b] §40 pages 126-127)
K566 – "La nature (par quoi j'entends ici uniquement les objets qui nous sont
donnés)".
Ces objets nous sont donnés en tant que phénomènes, dont l'ensemble constitue le
monde sensible :
[56b] §36 page 111 – "La nature, prise au sens matériel, c'est-à-dire selon
l'intuition, [est] l'ensemble des phénomènes."
661
Les lois de la nature sont postulées par l'homme ; elles sont toujours provisoires
et supprimées, complétées ou modifiées au fur et à mesure des progrès
scientifiques.
Nécessaire
Adjectif (philosophie et logique) – Substantif correspondant : nécessité.
Qui est imposé, rigoureusement déterminé par la nature des choses ou par un
état de fait. Exemple : une loi de la physique comme « l'attraction universelle ».
Qui est inévitable, qui ne peut manquer de se produire, qui échappe à la volonté
humaine.
Dont le contraire est impossible. Exemple : respect du principe de contradiction.
Voir aussi :
Nécessité des choses (postulat) ;
Nécessité et contingence ne peuvent être que des principes subjectifs de la
raison. (Conditions de l'opposition entre nécessité et contingence).
Absolument nécessaire
Synonyme de sans cause (inconditionné), car ne dépendant de rien.
Voir Absolument : a priori, indépendant ou pur.
662
K285 – "Aucune existence des objets des sens ne peut être connue entièrement a
priori, mais elle peut l'être […] relativement à une autre existence déjà donnée."
Je ne suis sûr de l'existence physique d'un objet que je vois que s'il a un rapport
(exemple : de proximité) avec un autre objet que j'ai perçu.
K286 – "La nécessité ne concerne […] que les rapports entre les phénomènes,
d'après la loi dynamique de la causalité. Elle concerne aussi la possibilité, qui se
fonde sur cette loi, de conclure a priori, à partir d'une cause, à l'effet."
K286 – "Tout ce qui arrive est hypothétiquement nécessaire [devait arriver] : c'est là
un principe fondamental qui soumet dans le monde le changement à une loi, c'est-à-
dire à une règle s'appliquant à l'existence nécessaire, sans laquelle règle il n'y aurait
pas même de nature." (Voir Principe de fatalisme)
Hypothétiquement : Kant rappelle là que le déterminisme des lois est postulé par
l'homme : constatant que « les mêmes causes produisent toujours les mêmes
effets », l'homme généralise par induction ce comportement. Le déterminisme n'est
pas démontrable : dans [12] on montre même la possibilité de situations sans cause.
K425 – "La nécessité inconditionnée des phénomènes peut être appelée nécessité
naturelle."
Négation
K519
La négation logique (le mot « non ») ne correspond jamais à un concept, "mais
uniquement au rapport de ce concept avec un autre dans le jugement, et elle ne
peut donc suffire […] pour caractériser un concept relativement à son contenu.
En Logique symbolique, l'opérateur de négation NON (noté ¬) appliqué à une
proposition p produit une proposition q de valeur logique opposée à p : q = ¬p.
¬p se prononce « non-p ». Bien entendu, ¬¬p = p.
663
La négative de la classe a (ensemble des x qui ne sont pas des a) est notée ¬a.
La relation R' qui nie R est notée ¬R. Voir exemple.
Une négation transcendantale indique une non-origine en soi, c'est-à-dire une
inexistence. Elle s'oppose ainsi à quelque chose qui a une origine, un être, une
réalité.
K520 – "Or, personne ne peut penser une négation de façon déterminée sans
disposer comme fondement de l'affirmation opposée. […] L'ignorant n'a aucune
notion de son ignorance, parce qu'il n'en a aucune de la science. C'est sur ce mode
que tous les concepts des négations sont également dérivés, et les réalités
contiennent les data et, pour ainsi dire, la matière ou le contenu transcendantal de la
possibilité et de la détermination intégrale de toutes choses."
En Logique symbolique, le faux implique tout et le vrai est impliqué par tout
Soit x une proposition quelconque. Puisque écrire x c'est affirmer x = vrai :
faux x : le faux implique toute proposition, vraie ou fausse ;
c'est une conséquence de l'implication « matérielle » p q, qui implique à son
tour : ou p = faux, ou q = vrai. (Voir Implication matérielle dans Implication.)
x vrai : le vrai est impliqué par toute proposition.
Neurophysiologie
Etude de la structure et des fonctions du système nerveux ; fait partie des
neurosciences.
Neuropsychique
Adjectif qualifiant un rapport avec la neuropsychologie.
Neuropsychologie
Science qui analyse le rapport entre le cerveau et les activités mentales
(intellectuelles et émotives, conscientes ou non). Repose sur la neuroanatomie, la
neurophysiologie, la psychologie expérimentale, la linguistique et l'analyse
comportementale.
Neurosciences
Ensemble des sciences qui étudient la structure, le fonctionnement et les fonctions
du système nerveux. A l'heure actuelle, les sciences cognitives se développent en
utilisant des modèles informatiques d'intelligence artificielle.
Neurotransmetteurs
Les neurones communiquent grâce aux neurotransmetteurs, molécules qu'ils
sécrètent pour activer ou inhiber un autre neurone.
664
Neutralité
Principe de la neutralité de la raison dans tous les différends qu'elle rencontre :
voir Discipline de la raison pure relativement à son usage sceptique.
Névrose
En psychiatrie : affection psychique caractérisée par l'absence de lésion ou de
trouble organique et ayant ses racines dans l'inconscient du sujet. Celui-ci présente
des troubles mineurs du comportement et conserve la conscience du caractère
morbide de ses troubles (contrairement à la psychose).
Nexus (latin)
Lien, liaison. - Exemple : liaison de causalité (voir Les 4 causes d'Aristote)
Nexus effectivus : cause efficiente ou efficace ;
Nexus finalis : cause finale.
Voir [134].
Nihilisme
Nombre
Chez Kant
Lorsqu'il écrit nombre, Kant pense le plus souvent à un nombre entier. Il y pense en
tant que mesure d'une quantité ou d'une grandeur par comparaison avec une autre
de même espèce prise pour unité.
Dans cette fonction de mesure, un nombre est un schème transcendantal
permettant de comparer des objets très différents (voir exemple des pommes et des
poires dans schème), c'est le schème de la grandeur. Kant l'écrit ci-dessous,
rappelant ensuite qu'un nombre se conçoit comme résultat synthétique d'une addition
d'unités (l'unité étant un concept irréductible).
665
La représentation d'un nombre embrasse l'addition successive de l'unité à l'unité
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est l'espace,
tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps. Mais le schème
pur de la grandeur, envisagée comme concept de l'entendement, est le nombre,
lequel est une représentation qui embrasse l'addition successive de l'unité à l'unité
(homogène). Donc, le nombre n'est autre que l'unité de la synthèse du divers
compris dans une intuition homogène en général, rendue possible par le fait que je
produis le temps lui-même dans l'appréhension de l'intuition."
Kant affirme là que la synthèse par identité d'intuitions homogènes (comme celle de
représentations successives d'un phénomène - voir association) produit une
représentation unifiée qui comprend nécessairement une évaluation quantitative de
type nombre. En somme, « quand je vois une chose, je sais si elle contient un ou
plusieurs objets visibles ». L'intuition d'une pluralité d'objets résulte d'une suite de
perceptions d'un seul objet séparées par un court instant, et de la faculté de
synthèse de l'esprit qui sait qu'il en a unifié plusieurs.
666
On appelle cardinal d'un ensemble le nombre (fini ou infini) de ses éléments.
Ainsi, le cardinal de l'ensemble des mois de l'année est 12, et le cardinal de
l'ensemble N = {0, 1, 2, 3…} des nombres entiers est infini.
Mais cela suppose, d'abord, la notion de nombre cardinal, ensuite, l'ordre assigné à
la « suite naturelle des nombres ». Ainsi tout essai de définition de ce genre implique
la notion à définir, et, qui plus est, la complique inutilement en lui associant une idée
d'ordre.
A plus forte raison sont vaines toutes les théories psychologiques qui invoquent de
vagues « synthèses » mentales, et qui consistent en définitive à dire, par exemple,
que la notion de dix est engendrée par dix actes d'attention successifs : le cercle
vicieux est encore plus flagrant."
(Fin de citation)
Pourquoi il ne faut pas faire dépendre l'idée de nombre d'un acte de dénombrement
Un dénombrement présuppose l'idée de nombre, d'où un cercle vicieux ;
Un dénombrement suppose qu'un ensemble peut être « bien ordonné », ce qui
n'est peut-être pas vrai de tout ensemble ;
Un dénombrement ne donne un résultat que pour les ensembles finis, alors qu'il
y a des ensembles infinis, et par suite des nombres cardinaux infinis.
667
Deux classes ont le même nombre [cardinal] lorsqu'on peut établir entre leurs
éléments une correspondance biunivoque, ou, comme nous dirons pour abréger,
lorsqu'elles sont équivalentes.
Cette définition est, comme on voit, purement logique. Il ne faut pas croire qu'elle
implique l'idée du nombre un : en effet, la relation biunivoque se définit uniquement
au moyen de la relation d'identité entre individus.
Remarque ([177] page 48) : une relation d'équivalence est symétrique et
transitive.
Cette définition équivaut à la précédente, si les classes ne sont pas nulles ; et si elles
sont nulles, chacune d'elles est contenue dans le domaine (et dans le codomaine)
d'une relation biunivoque quelconque, de sorte qu'elles sont corrélatives.
« Zéro est la classe qui comprend la seule classe nulle », ou en toute rigueur :
« Zéro est le cardinal de la classe qui comprend la seule classe nulle ».
[177] page 48 - Un nombre cardinal est donc défini comme propriété commune à des
classes équivalentes.
668
Propriété commune à tous les éléments d'une même classe
[177] pages 49-50
Lire d'abord la définition du principe d'abstraction dans Théorèmes sur les opérations
portant sur des relations.
Chaque nombre cardinal est commun à un ensemble de classes qui ont ce cardinal-
là. Exemple : 12 est le cardinal commun de l'ensemble des mois de l'année (janvier,
février, mars…) et de l'ensemble des signes du zodiaque (Bélier, Taureau,
Gémeaux...). Cette définition distingue les divers nombres cardinaux, chacun étant
par définition différent des autres. Le nombre cardinal est donc un schème
transcendantal au sens de Kant.
Cette définition s'étend sans difficulté au cas d'un nombre quelconque de classes
disjointes, lors même que ce nombre serait infini."
(Fin de citation)
Multiplication arithmétique
Considérons 2 classes :
a, la classe des mois de l'année : janvier, février… : son cardinal est 12 ;
b, la classe des vendeurs : Arlette, Bernard, Camille, Zoé : son cardinal est 4.
669
Définition de tous les nombres entiers finis par récurrence
Source : [177] page 59
« Une classe a le nombre n + 1, quand cette classe, diminuée de l'élément x qu'elle
contient, a le nombre n. »
Cela équivaut à la définition progressive de (n + 1) comme somme arithmétique de n
et de 1.
Cela est prouvé par la Logistique dans le mémoire de M. WHITEHEAD [186], où l'on
trouve la démonstration absolument générale de la loi associative pour l'addition et la
multiplication, et de la loi distributive de la multiplication par rapport à l'addition.
Tout cela est obtenu au moyen de la Logique des relations, qui apparaît décidément
comme le véritable organon des Mathématiques pures. Grâce à elle, MM. RUSSELL
et WHITEHEAD ont pu démontrer formellement, en partant de principes purement
logiques, toutes les propositions de la théorie des ensembles découvertes par Georg
CANTOR [174], confirmer ainsi la validité logique de cette théorie, et la purger de
tout postulat et de tout appel à l'intuition."
(Fin de citation)
1 - Notions indéfinissables
On prend trois notions indéfinissables, représentées par les symboles 0 (zéro),
N (nombre entier) et « seq » (le suivant de). Ces trois notions sont hétérogènes : 0
est un individu (élément d'une classe), N est une classe, et « seq » est une fonction.
2 - Axiomes (postulats)
Principe d'induction
On pose en outre les 5 axiomes ou postulats indépendants suivants :
I. 0 N (Zéro est un nombre entier) ;
II. a N seq a 0 (Zéro n'est le suivant d'aucun entier) ;
III. a N seq a N (Le suivant d'un entier est un entier) ;
670
IV. (a, b N) . (seq a = seq b) a = b
(Deux nombres entiers sont égaux si leurs suivants le sont) ;
V. ((s Cls) . (0 s)) . (((x N) s) x ((seq x) s)) (N s)
(Si s est une classe contenant zéro, et si, l'entier x appartenant à s, le suivant de
x appartient aussi à s, alors s contient tous les nombres entiers.)
Ce dernier axiome, appelé principe d'induction complète, s'énonce ainsi :
« Si le nombre 0 possède une certaine propriété [appartient à une certaine
classe], et si, dès qu'un nombre entier la possède, le suivant la possède aussi,
tous les nombres entiers la possèdent », ou
« Si une proposition est vraie pour zéro, et si, dès qu'elle est vraie pour n elle est
encore vraie pour n + 1, alors elle est vraie pour tous les nombres entiers ».
Le principe d'induction n'ayant pas de limite, la suite naturelle de nombres
entiers qu'il définit est infinie.
Mais, il importe de le remarquer, cette subordination réfute ipso facto les théories
suivant lesquelles le nombre ordinal serait antérieur au nombre cardinal : les
nombres seraient définis tout d'abord par leur rang, comme de simples numéros
d'ordre, et n'acquerraient leur signification cardinale que par leur application au
dénombrement des classes concrètes."
(Fin de citation)
Nombres infinis
Source : [177] pages 61 et suivantes
671
Les nombres ordinaux ne sont qu'une partie des nombres cardinaux
(Citation de [177] page 62)
"Par cela même que la définition ordinale est subordonnée à la définition cardinale,
elle ne définit qu'une partie des nombres cardinaux, à savoir ceux qu'on peut obtenir
en partant de 0 par l'addition répétée de 1.
Rien ne permet d'affirmer qu'on obtient ainsi tous les nombres cardinaux ; on se
borne à en ranger quelques-uns en une suite linéaire, et à distinguer les éléments de
cette suite dans l'ensemble des nombres cardinaux.
[Conséquences]
Tous les arguments dirigés contre les nombres infinis consistent à. supposer qu'ils
font partie de cette « suite naturelle des nombres », et qu'ils peuvent être obtenus
par l'addition répétée de 1 ; c'est-à-dire à imposer à tous les nombres cardinaux les
conditions qui définissent seulement les nombres finis, et à confondre les deux
définitions du nombre que nous venons d'exposer."
[Chez Kant, cette limitation rend l'infini inaccessible en exigeant une infinité de
synthèses successives : voir L'infini chez Kant.]
(Fin de citation)
enfin le principe d'induction n'est pas un jugement synthétique, puisqu'il fait partie de
la définition des nombres finis, et en exprime une propriété essentielle et
caractéristique."
(Fin de citation)
672
Cette définition cardinale du nombre entier infini étant distincte de la définition
ordinale, il faut soit démontrer l'équivalence de ces deux définitions, soit que l'une se
déduit de l'autre, soit en adopter une et postuler l'autre.
Cela posé, on définit le nombre 0, comme le nombre cardinal [de l'ensemble] des
nombres finis ; on démontre alors que 0 est un nombre infini, et que toute classe
infinie contient une partie qui a pour nombre 0 (d'où il résulte que 0 est le premier
ou le plus petit des nombres infinis).
De là on déduit qu'aucune classe finie n'est équivalente à une partie intégrante d'elle-
même, et que toute classe infinie est équivalente à une partie intégrante d'elle-
même, d'où il résulte que cette propriété est caractéristique des classes infinies.
L'équivalence des deux définitions se trouve ainsi établie."
(Fin de citation)
Pour que deux nombres infinis (correspondant à deux classes a et b) soient inégaux,
il ne suffit pas que la classe a soit équivalente à une partie intégrante de la classe b :
car elle pourrait en même temps (étant infinie) être équivalente à la classe b tout
entière. Le nombre cardinal de a est plus petit que celui de b si a est équivalente à
une partie intégrante de b, et si b n'est équivalente à aucune partie intégrante de a.
673
On a prouvé d'ailleurs que, si l'on a à la fois a équivalente à une partie intégrante de
b et b équivalente à une partie intégrante de a, les deux classes a et b sont
équivalentes, et par suite leurs nombres cardinaux sont égaux (ou plutôt identiques).
Nombrer
Verbe transitif signifiant « associer à un nombre » :
Soit par un dénombrement, en comptant des éléments distincts ;
Soit par mesure, en évaluant le rapport à une quantité prise pour unité.
Adjectif signifiant « qui est associé à un nombre ».
Chez Kant
Différence entre nombrer et peser
[165] page 92 – "Les moments de la probabilité [valeurs associées à la probabilité]
peuvent être soit homogènes, soit hétérogènes.
S'ils sont homogènes, comme dans les connaissances mathématiques, ils
doivent être nombrés ;
S'ils sont hétérogènes, comme dans les connaissances philosophiques, ils
doivent être pesés, c'est-à-dire évalués d'après leur effet ; ce dernier devant à
son tour être évalué d'après l'emprise sur les obstacles rencontrés dans l'esprit."
Nominal (adjectif)
Chez Kant
Définitions nominales et définitions réelles
[165] page 154 – "Les objets d'expérience permettent de simples définitions
nominales. Les définitions nominales logiques de concepts d'entendement donnés
sont tirées d'un attribut ; au contraire les définitions réelles sont tirées de l'essence
de la chose, du premier principe de la possibilité. Ces dernières contiennent donc ce
qui convient toujours à la chose, son essence réelle."
Nominalisme
Substantif de philosophie classique : doctrine d'après laquelle les idées générales ou
les concepts n'ont d'existence que dans les mots servant à les exprimer.
674
Nommable
Adjectif - Que l'on peut nommer ; à qui l'on peut attribuer un nom.
« Un objet, écrit Lebesgue [67], est défini ou donné quand on a prononcé un nombre
fini de mots s'appliquant à cet objet et à celui-là seulement ; c'est-à-dire quand on a
nommé une propriété caractéristique de l'objet. »
Nomothétique
Selon [13] : Science ou discipline dont l'objet et la méthode permettent d'établir des
lois générales ou universelles, représentées par des relations constantes entre les
phénomènes observés.
Noologie
Selon le dictionnaire [13] : science qui étudie le monde de l'esprit, de la pensée.
Synonyme vieilli de psychologie.
Normatif
Qui fixe, prescrit une norme, émet des jugements de valeur.
Ainsi, la logique prescrit des normes de vérité d'une affirmation.
Une science normative comme la morale permet de juger si une action vise le
bien ou le mal, l'esthétique permet de juger si quelque chose est beau ou laid.
Notion
K346 – "…le concept pur, en tant qu'il a sa source exclusivement dans l'entendement
(et non pas dans une image pure de la sensibilité), s'appelle notion.
Un concept issu de notions, dépassant la possibilité de l'expérience, est l'Idée,
autrement dit : le concept rationnel."
675
on peut donc l'utiliser pour préciser des informations éventuellement imaginées par
l'entendement et qui ne proviennent pas du phénomène objectif.
Le noumène est la chose en soi du phénomène tel qu'il est dans sa réalité objective
inconnaissable, pas tel qu'il nous apparaît.
Exemple : Je est un objet du sens interne dont l'homme est conscient sans
perception, sans expérience et sans en être affecté ; c'est un noumène.
Lire ici :
Exemple : L'impossible détermination de l'objet réel d'où provient une expérience
Noumène en tant que chose en soi : un abus de l'entendement.
K306 – "Le concept d'un noumène, c'est-à-dire d'une chose qui doit être pensée, non
pas du tout comme objet des sens, mais comme une chose en soi (uniquement par
un entendement pur), n'est nullement contradictoire ; car on ne peut en tout état de
cause affirmer de la sensibilité qu'elle soit le seul mode d'intuition possible. En outre,
ce concept est nécessaire pour éviter d'étendre l'intuition sensible jusqu'aux choses
en soi elles-mêmes, et donc pour limiter la validité objective de la connaissance
sensible (car le reste, à quoi cette dernière n'a pas accès, s'appelle précisément
noumènes pour indiquer ainsi que ces connaissances ne peuvent étendre leur objet
à tout ce que pense l'entendement)."
676
Sens négatif ou positif du concept de noumène
K304 – "Si nous entendons par noumène une chose en tant qu'elle n'est pas objet de
notre intuition sensible, […] c'est alors un noumène pris dans le sens négatif. Si en
revanche nous entendons par là un objet d'une intuition non sensible, nous
admettons un mode particulier d'intuition, à savoir l'intuition intellectuelle, laquelle
toutefois n'est pas la nôtre, et dont nous ne pouvons même pas envisager la
possibilité, et il s'agirait alors du noumène pris dans le sens positif."
Critique
K306 – Kant admet que l'existence réelle de noumènes (en tant que
représentations) n'est pas évidente :
"…la possibilité de tels noumènes ne se peut nullement apercevoir…"
K306 – Nous ne voyons du monde physique que les phénomènes. Mais notre
entendement génère, au-delà de leur contenu sensible, des concepts et
prédicats qui sont problématiques, alors que nous n'avons pas les intuitions
nécessaires pour qu'il juge – même assertoriquement – de leur réalité.
Voir Apparence.
K307 – [Notre entendement] "n'est pas borné par la sensibilité, mais borne bien
plutôt celle-ci, du fait qu'il appelle noumènes les choses en soi (quand elles ne
sont pas considérées comme phénomènes)."
Voir aussi :
Réalité et phénomènes ;
Noumène en tant que chose en soi : un abus de l'entendement.
677
ne sous-entendent] aucun phénomène des sens et […] du coup, ils paraissent
concerner les choses en elles-mêmes (noumena) ;"
(Tout se passe, dans cet exemple, comme si l'entendement disposait d'une
faculté d'intelligence capable de produire une chose en soi sans objet
d'expérience correspondant. Compte tenu de l'intégration poussée des facultés
du cerveau, c'est en fait la distinction entre entendement et intelligence qui est
arbitraire et utile seulement pour préciser occasionnellement la pensée.)
Dans notre esprit, un concept qui paraît intellectuellement très clair (incontestable) ou
psychologiquement très désirable nous paraît souvent correspondre à un objet réel,
imaginé de façon transcendante. C'est pourquoi il m'est arrivé de personnifier une
voiture qui refusait de démarrer en l'injuriant ; certains croient en Dieu parce qu'ils ont
besoin de quelque chose venant de lui (expliquer l'existence du monde, offrir la
rédemption), etc.
Numerica identitas
Voir Numériquement : diverses, identique.
Objectif - Subjectif
Objectif (philosophie)
Adjectif avec 2 sens :
Qui existe en soi, indépendamment du sujet pensant, donc que plusieurs
personnes peuvent partager. L'objet d'une chose en soi est donc objectif.
Exemple : la réalité objective.
Les conditions de possibilité de l'objectivité (pour pouvoir la penser) sont :
Les intuitions de l'Esthétique transcendantale : le temps et l'espace ;
Les 12 catégories de l'entendement ;
La schématisation des concepts ;
Les intuitions mathématiques : nombre entier ; point ; droite, etc.
678
Qui :
Relève de la réalité externe indépendante des consciences (et pas d'une
chose en soi) ;
Est susceptible d'être perçu comme phénomène.
Dans ce sens, la subjectivité d'un concept de phénomène perçu ne l'empêche
pas d'être objectif, car il est pensé avec une portée universelle.
Exemple
K523 – "C'était uniquement comme le concept de toute réalité que la raison […]
mettait [l'idée transcendantale de Dieu] au fondement de la détermination
intégrale des choses en général, sans exiger que toute cette réalité soit donnée
objectivement et constitue elle-même une chose."
Voir :
Réalité et phénomènes ;
Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant.
679
Objectivité théorique et objectivité pratique
K716 note 133 :
"Définition de l'objectivité théorique : dans la nature tout phénomène qui survient
est soumis à la règle du déterminisme ;
Définition de l'objectivité pratique : ce qui est objectivement pratique, à savoir
une fin morale, n'est concevable que par référence à cet inconditionné qui définit
la liberté."
Conditions d'objectivité d'une proposition scientifique
Pour qu'une proposition soit scientifique, c'est-à-dire que son sujet soit un concept
partageable d'objet réel, il faut que ses propriétés ontologiques soient satisfaites.
Celles-ci comprennent :
Les deux intuitions [temps et espace] ;
Les douze catégories ;
La schématisation des concepts ;
etc.
Trouver et préciser tous les critères ontologiques d'un objet est un des objectifs les
plus importants de la philosophie, pour le penser avec précision et de manière
partageable.
Subjectif
Adjectif signifiant :
En philosophie :
Qui est propre à un individu déterminé et ne vaut que pour lui seul ;
Qui se fonde sur des critères personnels ;
Au sens psychologique : qui dépend de la conscience du sujet, comme la
sensation et le sentiment (source : [57]) ;
Au sens critique transcendantale : qui dépend des fonctions du sujet
connaissant en général (source : [57]).
En psychologie :
Qui ne correspond pas à une réalité, à un objet extérieur au sujet, mais à
une disposition particulière du sujet qui perçoit.
Qui relève de l'expérience interne, qui ne concerne que le seul sujet
pensant.
K330 – "L'erreur [de jugement] ne peut être produite que par l'influence
inaperçue de la sensibilité sur l'entendement, sous l'effet de quoi il arrive que les
principes subjectifs du jugement viennent se confondre avec les principes
objectifs et les font dévier de leur destination…"
Compléments
Unité objective de la conscience de soi – Conséquences pour l'humanité ;
Unité transcendantale - Unité subjective ;
680
Apparence – Apparence empirique - De l'apparence transcendantale.
Objection
Une objection est un argument opposé à une affirmation pour la réfuter.
Kant analyse ce procédé comme suit.
(Citation de K387-K388)
"Toutes les objections peuvent se répartir en dogmatiques, critiques et sceptiques.
L'objection dogmatique est celle qui est dirigée contre une proposition ;
[Elle] requiert une compréhension pénétrante de la nature propre de l'objet, pour
pouvoir affirmer le contraire de ce que la proposition avance à propos de cet
objet ; elle est par conséquent elle-même dogmatique et prétend connaître cette
nature de l'objet mieux que ne le fait la position à laquelle elle s'oppose.
L'objection critique [est] celle qui est dirigée contre la preuve d'une proposition.
Dans la mesure où elle n'aborde pas la proposition du point de vue de sa validité
ou de son absence de validité et ne vise que la preuve, [elle] n'a nullement
besoin de mieux connaître l'objet ou de prétendre en avoir une meilleure
connaissance ; elle montre seulement que ce qu'on affirme est dépourvu de
fondement, et non pas que l'affirmation est inexacte.
L'objection sceptique oppose mutuellement la proposition et la proposition
contraire comme constituant, l'une vis-à-vis de l'autre, des objections de
pertinence égale […] ; ainsi cette objection est-elle en apparence dogmatique
des deux côtés opposés, pour réduire intégralement à néant tout jugement sur
l'objet. […]
Or, nous sommes dogmatiques vis-à-vis des concepts ordinaires de notre raison qui
concernent la relation que notre sujet pensant entretient avec les choses situées
hors de nous, et nous considérons ces dernières comme de vrais objets, subsistant
indépendamment de nous…"
(Fin de citation)
Chez Kant
Objet véritable représenté par un concept
K613 – Un concept pensé représente un objet véritable si (et seulement si) il a
exactement les mêmes informations que cet objet. Voir aussi :
Discipline de la raison pure dogmatique : des définitions ;
Conditions formelles d'existence d'un objet ;
Réalité (existence) par opposition à la négation (inexistence).
681
Objet intelligible et objet des sens
(Citation de K498)
"J'appelle intelligible ce qui, dans un objet des sens n'est pas lui-même phénomène.
[Donc « objet des sens » = « phénomène » + « concepts intelligibles »]
Nous nous ferions donc, quant au pouvoir d'un [objet des sens], un concept
empirique et en même temps aussi un concept intellectuel de sa causalité, lesquels
interviennent conjointement à propos d'un seul et même effet.
Objet du sentiment
K656 – "Tous les concepts pratiques portent sur des objets de satisfaction ou de
désagrément, c'est-à-dire de plaisir et de déplaisir, par conséquent, au moins indi-
rectement, sur des objets de notre sentiment."
682
"Ce pourquoi l'on exige aussi de rendre sensible un concept abstrait, c'est-à-dire
de présenter dans l'intuition un objet qui lui corresponde, parce que, sinon, ce
concept resterait (comme l'on dit) vide de sens, c'est-à-dire dépourvu de
signification. [Ainsi, par exemple,] la mathématique remplit cette exigence par la
construction de la figure, qui est un phénomène présent aux sens bien que
produit a priori."
683
Cause
Concernant cette notion on trouve dans K298 quelques idées simples, et une
discussion de la notion de contingence commençant par :
"Le prétendu principe qui veut que tout élément contingent ait une cause…".
On peut résumer cette discussion en remarquant que si l'on admet comme Kant
le déterminisme, il n'y a dans la nature aucun cas de contingence. On ne trouve
la contingence que dans l'esprit de l'homme qui imagine des situations :
"…je peux fort bien supprimer en pensée toute substance existante sans me
contredire, mais je ne peux en tirer aucune conclusion quant à la
contingence objective de ces substances dans leur existence, c'est-à-dire
quant à la possibilité de leur non-existence en soi."
Communauté
K299 – "Comme les catégories pures de la substance aussi bien que de la
causalité n'autorisent aucune définition déterminant l'objet, la causalité
réciproque dans la relation qu'entretiennent entre elles les substances en est
tout aussi peu susceptible." Communauté est donc une notion originaire.
Possibilité, existence et nécessité
K299 – "…personne n'a encore pu les définir autrement que par une flagrante
tautologie..." : ce sont là aussi des notions originaires.
Objets purs, simplement intelligibles : Voir ci-dessous.
Noumènes : Voir Noumènes.
Exemples :
L'objet transcendantal, cause sensible inconnue de nos représentations ;
L'impossible détermination de l'objet réel d'où provient une expérience.
Voir aussi, pour les objets des sens : Doctrine de l'idéalisme transcendantal.
Objet transcendantal
Voir L'objet transcendantal, cause sensible inconnue de nos représentations.
684
[Concept d'une suprême intelligence : simple Idée, exemple d'objet dans l'Idée]
Le concept d'une suprême intelligence est une simple Idée,
c'est-à-dire que sa réalité objective ne doit pas consister en ce qu'il se rapporte
directement à un objet [des sens] (car, pris dans ce sens, nous ne saurions en
justifier la validité objective [voir Existence de Dieu]) :
et qui ne sert qu'à maintenir la plus grande unité systématique dans l'usage
empirique de la raison, en faisant que l'on dérive l'objet de l'expérience pour ainsi
dire de l'objet imaginaire de cette Idée comme de son fondement ou de sa cause.
Obligation
[108] page 173 – "Nécessité d'une action libre accomplie par soumission à un
impératif catégorique de la raison."
685
Occasionnalisme
Substantif (philosophie) - Chez les cartésiens et principalement chez
Malebranche [86] : théorie selon laquelle Dieu est la seule cause, les créatures
n'étant que les antécédents constants de son intervention.
Voir aussi Dualisme.
Occurrence
Elément particulier d'un ensemble (classe) d'éléments possibles (événements,
circonstances, objets d'une collection de choses, etc.).
Exemple : une description d'un concept particulier peut correspondre à zéro, une
ou plusieurs de ses occurrences (déterminations) tout en restant la même.
Circonstance particulière :
K459 note * - "…il a fait preuve en l'occurrence d'un esprit plus authentiquement
philosophique qu'aucun des sages de l'Antiquité."
Oiseuse
Selon le dictionnaire [13] : qui ne sert à rien ; qui est vain, inutile.
[56b] §4 pages 40-41 – "…en ce cas la question que nous venons de formuler serait
oiseuse…"
Ontique
Selon le dictionnaire [13] l'adjectif ontique s'oppose à ontologique, particulièrement
chez Heidegger [127]. Il désigne des êtres concrets, perçus ou déterminés.
Ontogenèse (ontogénie)
En biologie, c'est l'ensemble des processus d'évolution d'un être vivant de sa
cellule œuf à l'adulte reproducteur.
En psychologie, c'est l'évolution psychologique individuelle.
Ontologie
Substantif utilisé en philosophie. Significations :
Partie de la philosophie qui a pour objet l'étude des propriétés les plus générales
de l'être, telles que l'existence, la possibilité, la durée, le devenir.
Synonyme : philosophie première.
Etude ou connaissance de ce que sont les choses en elles-mêmes en tant que
substances par opposition à l'étude de leurs apparences ou de leurs attributs.
Par extension : théorie sur l'être ; ensemble de vérités fondamentales de l'être.
Chez Kant : science qui prétend connaître Dieu par déductions (analyse) à partir
de son concept, sans passer par l'expérience, et qui tombe sous le coup de la
critique de la preuve ontologique :
K536 - "…la malheureuse preuve ontologique, qui ne véhicule avec elle rien
qui pût satisfaire ni l'entendement naturel et sain ni l'examen méthodique."
686
Exemples de conditions ontologiques d'existence d'un objet
Objet réel
La définition de tout objet réel (« étant » de Heidegger) satisfait au moins les
conditions suivantes :
Conditions dues au principe d'identité [32] :
Une certaine permanence (existence pendant un certain temps) à un instant
particulier ;
L'occupation d'un certain volume d'espace à une position particulière.
Conditions dues au principe de raison :
Satisfaire le principe de causalité ;
Satisfaire toutes les lois de la nature.
Il est remarquable que ces conditions ontologiques d'existence d'un objet réel soient
partagées par toute l'humanité ; elles sont un des fondements de la science
traditionnelle et une raison de la possibilité d'en partager les méthodes et les
résultats.
Toutefois, ces conditions s'énoncent différemment de nos jours compte tenu de
nos connaissances de physique quantique et de cosmologie ; nous n'irons pas plus
loin dans ce dictionnaire philosophique.
Concept vide
Tout concept d'objet ayant une des propriétés ci-dessus avec une valeur négative
(c'est-à-dire contredisant cette propriété) est vide : il correspond à un objet qui
n'existe pas. Ainsi, un objet dont la définition contredit une loi de la nature ne peut
exister ; exemple : une particule dont la charge électrique serait la moitié de celle
d'un électron.
[56b] §57 page 170 – "Par le simple concept d'un Etre originaire, auquel nous
attribuons des prédicats uniquement ontologiques [Dieu] (éternité, omniprésence,
omnipotence), en réalité nous ne pensons absolument rien de déterminé ;"
Opinion
687
Jugement personnel que l'on porte sur une question, qui n'implique pas que ce
jugement soit obligatoirement juste ;
Point de vue, position précise que l'on a dans un domaine particulier : social,
religieux, politique, intellectuel.
Voir d'abord :
Canon de la raison pure – De l'opinion, du savoir et de la croyance ;
Définitions : opinion, croyance, savoir dans Assentiment.
La loi régissant un telle liaison doit en outre être certaine. Car si, vis-à-vis de cette loi,
je n'ai également rien qu'une opinion, tout n'est plus qu'un jeu de l'imagination, sans
la moindre relation à la vérité.
Ce pourquoi il est absurde de former des opinions dans la mathématique pure : il faut
savoir ou s'abstenir de tout jugement. De même en est-il avec les principes de la
moralité, où l'on n'a pas le droit de risquer une action sur la simple opinion que
quelque chose est permis, mais où il faut savoir que c'est le cas.
688
(Fin de citation)
Opposition
Ordinal
Voir Les deux formes de nombre.
689
Ordonner
Kant appelle ordonner l'opération de l'entendement consistant à classer un objet
sous un concept ou dans une catégorie. Le critère de classement de l'objet est
dans le divers de sa forme.
Il appelle aussi ordonner le fait d'organiser les éléments d'un ensemble dans un
certain ordre ou selon une certaine structure :
K392 – "Les paralogismes de la raison pure [peuvent être] ordonnés selon une
structure systématique et parallèle à la table des catégories."
Voir aussi :
Déduction transcendantale ou déduction empirique ;
Subsumer ;
Recognition.
En Logique, les idées (concepts) de nombre et d'ordre ont pour matière des classes
(ensembles). Mais tandis qu'une classe, dès qu'elle est donnée et déterminée, a un
nombre [cardinal], elle n'a un ordre que moyennant certaines relations établies entre
ses éléments. L'idée d'ordre est donc moins primitive et moins simple que l'idée de
nombre. Pour la définir, il convient de rechercher quelles espèces de relations
établissent ou constituent un ordre entre les éléments d'une même classe.
Organon
Ensemble de méthodes et directives permettant d'arriver à des connaissances
certaines, par la logique comme par l'expérience. Pour Kant (qui considère que la
logique générale est un canon), la philosophie de la raison pure n'est pas un organon
permettant d'étendre les connaissances, mais une discipline servant à en déterminer
les limites. Par contre l'esthétique transcendantale doit servir d'organon.
Voir La logique de l'apparence (logique dialectique) critiquée par Kant.
K110 – "La raison est le pouvoir qui fournit les principes de la connaissance a priori.
La raison pure est par conséquent celle qui contient les principes permettant de
connaître quelque chose absolument a priori. Un organon de la raison pure serait un
ensemble réunissant les principes d'après lesquels toutes les connaissances pures a
priori peuvent être acquises et effectivement établies. L'application détaillée d'un tel
organon procurerait un système de la raison pure."
690
(Citation de [165] pages 11-12)
"Un organon des sciences n'est […] pas une simple logique puisqu'il présuppose la
connaissance précise des sciences, de leurs objets et de leurs sources. C'est ainsi,
par exemple, que la mathématique est un excellent organon, car elle est une science
qui contient le principe de l'extension de notre connaissance en fonction d'un certain
usage de la raison.
Originaire
Adjectif : que l'esprit comprend sans autre explication possible ; c'est un concept
irréductible comme le point géométrique ou le nombre entier. Exemples :
K122 - "Il faut [que la représentation de l'espace] soit originairement une
intuition."
K127 - "Il faut que la représentation originaire du temps soit donnée comme
illimitée.
K163 – [La table des catégories] "contient tous les concepts originairement purs
de la synthèse que l'entendement contient a priori […] C'est uniquement par leur
moyen qu'il peut comprendre quelque chose dans le divers de l'intuition, c'est-à-
dire penser un objet de celle-ci."
Ostensif
Selon le dictionnaire [13] (En logique : s'agissant d'une proposition, d'une
démonstration) : qui fait voir ce qu'elle énonce, qui en présente directement la
preuve.
En mathématiques, un raisonnement ostensif est celui qui conduit au résultat
avec la conscience claire de tous les intermédiaires qui le rendent possible.
Une preuve ostensive s'oppose à une preuve simplement logique, formelle, dite
preuve apagogique : la preuve apagogique peut démontrer, elle ne peut
persuader ; la preuve ostensive démontre et persuade.
Palingénésie
Substantif féminin. Significations selon le dictionnaire [13] :
Retour à la vie, renaissance qui est en même temps une régénération.
691
(Philosophie, sociologie) - Doctrine selon laquelle l'histoire des peuples est la
reproduction d'une même suite de révolutions dont la succession tend à réaliser
une fin générale et providentielle de l'humanité.
K583 – "On n'accorde plus de crédit à aucune des vaines hypothèses portant sur la
génération, la corruption et la palingénésie des âmes, etc. ;"
Pansophie
Voir Pansophie.
Paradigme
Selon [13] : (Epistémologie) - Conception théorique dominante ayant cours à une
certaine époque dans une communauté scientifique donnée, qui fonde les types
d'explication envisageables, et les types de faits à découvrir dans une science
donnée.
Exemple : paradigme de la causalité étendue.
Paralogisme : définitions
Voir Paralogisme logique - Paralogisme transcendantal.
692
soi, vis-à-vis de tout ce qui est conditionné, en exigeant ainsi que la série des
conditions soit close [entièrement prise en compte]."
Or l'inconditionné que la raison vise spontanément est plus qu'une cause ultime,
c'est une nécessité absolue, la cause la plus générale possible, la seule qui
satisfasse complètement le besoin de justification logique de l'esprit, car une
nécessité absolue est inévitable.
Une chaîne de causes commence toujours par une cause absolument nécessaire
L'application répétée à l'infini du principe de raison ne peut donc conduire qu'à l'une
des conclusions suivantes :
Ou la chaîne des causes se termine par une cause absolument nécessaire ;
Ou la chaîne des causes ne se termine pas, car elle n'a jamais commencé ; elle
a existé depuis que le temps existe et passe, c'est-à-dire :
Depuis toujours, si le temps a toujours existé et n'a pas de commencement ;
Ou depuis que le temps existe, c'est-à-dire le Big Bang selon notre science.
693
Ces raisonnements basés sur une recherche spontanée de l'inconditionné et une
attribution de signification incorrecte conduisent à des paralogismes.
Une telle incertitude est psychologiquement pénible pour l'homme, à qui elle inspire
de la crainte – la crainte de l'inconnu. L'homme combat cette incertitude en imaginant
son opposé, la certitude concernant tout phénomène, certitude qui suppose
l'omniscience. L'homme se persuade, par imagination qui extrapole le pouvoir de sa
raison, qu'il est possible de tout savoir sur les phénomènes, donc sur le monde, et
que le Dieu créateur imaginé pour le besoin psychologique d'omnipotence est aussi
omniscient.
Critique
D'abord la contingence d'un phénomène constaté (perçu et faisant l'objet d'une
expérience) est une hypothèse absurde, car elle contredit le principe d'identité
[32].
Ensuite, ce n'est pas parce que l'homme désire, donc imagine, la possibilité
d'une connaissance totale du monde et des lois naturelles, c'est-à-dire d'un
monde totalement intelligible, qu'un tel monde est possible. Nous savons :
Que l'existence de processus mentaux inconscients et subconscients rend la
description et la prévision de la pensée humaine si difficiles qu'elles sont
impossibles ;
Que malgré la rigueur d'une description axiomatique des lois de la nature, il
restera toujours des évolutions déterministes imprévisibles [12].
Omniscient, Dieu n'aurait pas à se poser de questions, ni sur ce qui est, ni sur ce qui
peut être ; pour Lui, intuition, concept et pensée seraient synonymes. Voir :
Dialectique naturelle de la raison humaine : but ultime ;
694
Théorie transcendantale de la méthode.
Définition générale
Un paralogisme est une faute de raisonnement due à des prémisses fausses ;
énoncé de bonne foi, c'est un « sophisme sans intention de tromper ».
Chez Kant
Selon le dictionnaire [13] : chez Kant, les paralogismes de la raison pure et les
paralogismes transcendantaux sont des raisonnements par lesquels on passe
subrepticement d'un usage empirique d'un concept à un usage transcendant, et qui
sont à la base des démonstrations de la psychologie rationnelle.
(Citation de K360)
"Le paralogisme logique consiste dans la fausseté formelle d'un raisonnement,
quel qu'en puisse être par ailleurs le contenu.
Un paralogisme transcendantal, en revanche, possède un fondement
transcendantal qui incite à produire des conclusions formellement fausses.
En sorte qu'un raisonnement fautif de ce type aura son fondement dans la nature
de la raison humaine et induira une illusion inévitable, bien qu'il ne soit pas
impossible de la résoudre en ses éléments."
Voir Antinomie (définition) – Antinomie de la raison pure.
(Fin de citation)
Exemple de paralogisme
Les paralogismes transcendantaux de la raison pure sont des raisonnements de
psychologie rationnelle faux, tels que celui de Descartes dans la citation suivante.
695
substance intelligente, puisque, dans leur concept clair et distinct, il y a bien
quelque sorte d'extension qui se trouve contenue, mais point du tout
d'intelligence. […]"
[Si une proposition est claire, elle doit être vraie car Dieu qui l'inspire ne peut
vouloir me tromper]
"L'âme humaine […] est pure substance".
[Mais ce qu'est au juste la substance, Descartes ne le précise pas]
(Fin de citation)
La troisième erreur a été de déduire d'une certitude d'existence (la conscience de soi
du « Je pense ») une vérité physique (« le monde doit être fait de deux sortes de
substance : la substance pensante et la substance étendue ») : voir Innéisme. Cette
erreur associe deux domaines de contenus différents, celui de la conscience de soi
et celui du monde (physique et conceptuel), et on ne peut (pour faire des déductions)
subsumer le second sous le premier à tous les points de vue possibles.
Dans un syllogisme, cette erreur correspond à une proposition mineure qu'on ne
peut subsumer sous la majeure, et Kant l'appelle sophisma figurae dictionis (K476).
696
Remarques sur les paralogismes
K392 – "Les paralogismes de la raison pure [peuvent être] ordonnés selon une
structure systématique et parallèle à la table des catégories."
Voir en complément :
Le Moi pensant ne peut être une substance simple,
Conditionné,
Conditionné et conditions – Série des conditions.
K413 – "Je me pense moi-même par rapport à une expérience possible, en faisant
abstraction aujourd'hui de toute expérience réelle, et j'en conclus que je pourrais
avoir conscience de mon existence même en dehors de l'expérience et de ses
697
conditions empiriques. Par conséquent, je confonds l'abstraction possible de mon
existence empiriquement déterminée avec la prétendue conscience d'une existence
séparée possible de mon Moi pensant, et je crois connaître dans le sujet
transcendantal ce qu'il y a de substantiel en moi, alors que je n'ai dans la pensée que
l'unité de la conscience qui réside au fondement de toute activité de détermination…"
K414 – "La pensée, prise en elle-même, est seulement la fonction logique, par
conséquent la pure spontanéité de la liaison du divers d'une intuition simplement
possible, et elle ne présente nullement le sujet de la conscience comme phénomène,
simplement pour cette raison qu'elle ne prend nullement en compte l'espèce de l'in-
tuition et ne se demande pas si elle est sensible ou intellectuelle."
K413 – [La psychologie est] "transcendante, bien qu'elle s'occupe d'un objet de
l'expérience [mon âme], mais uniquement en tant qu'il cesse d'être un objet de
l'expérience."
698
Donc, en tant qu'être pensant (âme), je suis substance." (Fin de citation)
699
L'âme en tant que substance
K365-K366 – "Cependant, on peut parfaitement conserver une validité à la
proposition : l'âme est substance, dès lors simplement que l'on se résout à admettre
que le concept dont nous disposons ainsi ne nous conduit pas plus loin, ni ne peut
non plus nous apporter un enseignement vis-à-vis de l'une quelconque des
conclusions habituelles de la doctrine ratiocinante de l'âme, comme par exemple la
persistance éternelle de l'âme à travers tous ses changements, et même après la
mort de l'être humain - bref : dès lors que nous admettons qu'il désigne donc
seulement une substance dans l'idée, mais non point dans la réalité.
700
de l'être pensant." Le raisonnement philosophique qu'il propose à l'appui de cette
opinion est complexe.
Nous avons aujourd'hui l'avantage sur Kant d'avoir l'habitude des algorithmes
calculables dans un ordinateur. Nous savons qu'un résultat qui forme un tout, qu'il
soit numérique, alphabétique, photographique, ou autre, ne peut constituer que
l'étape ultime d'un algorithme unique. Le calcul de cet algorithme peut être réparti
entre plusieurs processeurs interconnectés, ses données peuvent être réparties
dans plusieurs mémoires, mais le comportement d'ensemble doit fournir le
résultat unique conforme au raisonnement de l'algorithme. Tout doit se passer
comme si un seul calculateur, machine ou homme, calculait le résultat.
Kant le dit comme ceci :
K367 – "Nous n'exigeons l'absolue unité du sujet pour une pensée que dans
la mesure où, si tel n'était pas le cas, nous ne pourrions dire : je pense (le
divers inscrit dans une représentation). En effet, bien que le tout constitué
par la pensée puisse être partagé et divisé entre plusieurs sujets, le Moi
subjectif ne peut en revanche être partagé et divisé, et ce Moi, nous le
supposons cependant à propos de toute pensée."
Kant n'envisage que le cas d'une pensée à un instant donné, avec sa
représentation. Nous savons aujourd'hui résoudre les problèmes de cohérence
d'un système comprenant plusieurs processeurs, indépendants mais
interconnectés, systèmes soumis à des événements externes multiples,
indépendants, simultanés ou non.
Exemple : une automobile haut de gamme comprend une dizaine de tels
processeurs, interconnectés par fibre optique, gérant le freinage, l'amortissement,
l'adhérence en virage et en accélération, l'assiette horizontale, l'alimentation du
moteur, etc. Tous ces processeurs doivent avoir un comportement d'ensemble
répondant à des critères de sécurité, d'économie de carburant et de pollution,
quels que soient les événements rencontrés sur un parcours.
5. Conclusion (dans l'hypothèse d'une pensée globale de Kant) : il faut donc
postuler ceci : un résultat défini, quelle que soit sa forme, ne peut résulter que
d'une logique d'obtention (algorithme) unique, quelles que soient ses étapes
d'exécution effective.
6. K368 – "La simplicité de moi-même (en tant qu'âme) n'est pas non plus une
conclusion qui se déduirait effectivement de la proposition : Je pense, mais elle
est au contraire déjà inscrite en toute pensée. La proposition : Je suis simple doit
être considérée comme une expression immédiate de l'aperception, tout comme
le prétendu raisonnement de Descartes : cogito, ergo sum [je pense, donc
j'existe], est en fait tautologique, dans la mesure où le cogito (sum cogitans)
énonce immédiatement l'effectivité. Or, Je suis simple n'a pas d'autre signification
que de dire que cette représentation : Je, ne contient pas en elle la moindre
diversité et qu'elle est une unité absolue (bien que purement logique)."
7. K368 – "Le sujet de l'inhérence n'est indiqué, par le Je attaché à la pensée, que
de manière transcendantale, sans qu'en soit remarquée la moindre propriété, ou
sans que quoi que ce soit en donne lieu à une connaissance ou à un savoir. Il
signifie un quelque chose en général (sujet transcendantal) dont la représentation
doit être absolument simple précisément parce que l'on n'y détermine rigoureu-
sement rien, puisque, de fait, rien ne peut assurément être représenté avec
davantage de simplicité qu'à travers le concept d'un pur quelque chose. Mais la
701
représentation de la simplicité d'un sujet n'est pas pour autant une connaissance
de la simplicité du sujet lui-même, car abstraction se trouve totalement faite de
ses propriétés quand il est désigné exclusivement par l'expression entièrement
vide de contenu : Je (que je peux appliquer à tout sujet pensant).
8. K368-K369 - "Aussi est-il certain que je pense toujours, à travers le Je, une unité
absolue, bien que purement logique, du sujet (simplicité), mais non point que
j'acquiers par là même une connaissance de la simplicité réelle de mon sujet."
9. De même que la proposition : Je suis une substance ne signifiait rien de plus que
la catégorie pure, dont je ne peux in concreto faire aucun usage (empirique), de
même il m'est aussi permis de dire : Je suis une substance simple, c'est-à-dire
une substance dont la représentation ne contient jamais une synthèse du divers ;
mais ce concept, voire cette proposition, ne nous apporte pas le moindre
enseignement vis-à-vis de moi-même comme objet de l'expérience…"
702
mieux, comme objet transcendantal)", peut-être ce quelque chose est-il "en
même temps le sujet des pensées".
(C'est concevable, bien que le sens externe ne nous donne "aucune intuition
de représentations, de volontés, etc., mais seulement des intuitions de
l'espace et de ses déterminations.")
Quoi qu'il en soit, "ce quelque chose n'est ni étendu, ni impénétrable, ni composé,
puisque tous ces prédicats ne concernent que la sensibilité et son intuition, dans
la mesure où nous sommes affectés par de tels objets (au reste, inconnus de
nous)."
(Ce quelque chose ne peut être de la matière au sens physique habituel.)
Nous n'avons aucune information permettant de connaître de quel type d'objet il
s'agit, mais uniquement que les prédicats des phénomènes extérieurs ne peuvent
lui être attribués. Nous avons seulement la certitude que les prédicats du sens
interne, représentations et pensées, n'entrent pas en contradiction avec lui (car il
coexiste avec le sens interne et l'âme).
6. La simplicité de l'âme humaine est reconnue. Mais d'après ce qui précède, l'âme
envisagée simplement comme phénomène "ne se trouve en rien suffisamment
distinguée de la matière quant à son substrat."
7. K370-K371 - "Si la matière était une chose en soi, elle se distinguerait pleinement
[…], en tant [qu'] être composé, de l'âme comme être simple. Mais il se trouve
qu'elle est simplement un phénomène extérieur, dont le substrat n'est connu par
absolument aucun prédicat que l'on puisse indiquer ; aussi puis-je parfaitement
admettre [que le phénomène en soi est] simple, même s'il produit en affectant nos
sens, l'intuition de l'étendu et donc du composé, et donc même si, dans la
substance dont notre sens externe voit l'extension, il y a aussi, en soi, des
pensées susceptibles d'être représentées avec conscience par le sens interne"
[de cette substance].
(Kant admet ici la possibilité d'une substance externe à la fois étendue et
pensante, et munie d'un sens interne.)
8. K371 – "Ainsi, le même être qui, sous un certain rapport, est dit corporel serait en
même temps, sous un autre rapport, un être pensant ; [ses] pensées ne peuvent
certes être intuitionnées dans le phénomène, mais […] en tout cas les signes de
ses pensées peuvent l'être. Par là disparaîtrait cette façon de s'exprimer selon
laquelle seules pensent des âmes (entendues comme espèces particulières de
substances) ;"
Cette hypothèse paraissant pour le moins hardie, Kant abandonne son hypothèse
et revient à un modèle classique de l'âme :
9. K371 – "Mieux vaudrait dire, comme on en a l'habitude, que les êtres humains
pensent, c'est-à-dire que le même être qui, comme phénomène extérieur, est
étendu est intérieurement (en soi-même) un sujet qui n'est pas composé, mais au
contraire est simple et pense."
Une question non pertinente : l'âme est-elle de même espèce que la matière ?
K371 – "Si j'entends par âme un être pensant en soi, la question de savoir si l'âme
est ou n'est pas de même espèce que la matière (laquelle n'est aucunement une
chose en soi, mais correspond seulement, en nous, à une sorte de représentation)
703
manque de pertinence : il est évident qu'une chose en soi est d'une tout autre nature
que les déterminations simplement constitutives de son état."
Une question sans réponse : le Moi pensant est-il de même espèce que l'instance
intelligible au fondement de la matière ?
K371 – "Si nous comparons le Moi pensant [l'âme], non pas avec la matière, mais
avec l'instance intelligible qui est au fondement du phénomène extérieur que nous
appelons matière, nous ne pouvons pas non plus, dans la mesure où nous ne
savons absolument rien de cette instance intelligible, dire que l'âme s'en distingue
intrinsèquement en quoi que ce soit."
K371 – "Le Moi pensant, l'âme (nom dont on se sert pour désigner l'objet
transcendantal du sens interne), est simple…"
704
aucune garantie de conserver une identité numérique quand le temps passe,
c'est-à-dire de rester aux yeux d'un autre observateur un phénomène identique.
4. Conclusion : si j'ai l'impression que mon âme (c'est-à-dire ma personnalité)
conserve une identité numérique, je me trompe :
(Citation de K373) – "L'identité de la conscience que j'ai de moi-même en
différents temps n'est donc qu'une condition formelle de mes pensées et de
leur cohésion, mais elle ne prouve nullement l'identité numérique de mon
sujet, où, indépendamment de l'identité logique du Moi, peut cependant être
survenu un changement […]
Nous ne pouvons pas nous-mêmes, à partir de notre conscience, juger si,
en tant qu'âmes, nous sommes permanents ou non, parce que nous ne
mettons au compte de notre Moi identique que ce dont nous sommes
conscients, et qu'ainsi assurément nous sommes nécessairement forcés de
juger que nous demeurons les mêmes…" (Fin de citation)
(Citation de K375)
"Ce à l'existence de quoi il ne peut être conclu que comme à celle d'une cause
intervenant pour des perceptions données possède une existence seulement
douteuse.
Or, tous les phénomènes extérieurs [à l'homme] sont de telle sorte que leur
existence ne peut être perçue [par lui] immédiatement, mais qu'il ne peut qu'y
être conclu comme à la cause de perceptions données.
705
Donc, l'existence de tous les objets des sens externes est douteuse. Cette
incertitude, je la nomme l'idéalité des phénomènes extérieurs, et la doctrine de
cette idéalité s'appelle l'idéalisme, par opposition comparative auquel
l'affirmation d'une possible certitude concernant les objets des sens extérieurs
est appelée le dualisme."
(Fin de citation)
706
Idéalisme transcendantal, réalisme transcendantal et idéalisme empirique
Cet article fait suite à Paralogisme de l'idéalité (4ème paralogisme).
K376 – "Par idéaliste, il faut donc entendre non pas celui qui nie l'existence
d'objets extérieurs des sens, mais celui qui, simplement, n'admet pas qu'elle
soit connue par perception immédiate, et qui en conclut que nous ne
pouvons jamais acquérir, par aucune expérience possible, l'entière certitude
de leur réalité."
K376 – "Avant que j'expose notre paralogisme dans ce que son apparence a
de trompeur, il me faut d'abord remarquer que l'on doit nécessairement
distinguer un double idéalisme, l'idéalisme transcendantal et l'idéalisme
empirique."
K376 – "J'entends alors par idéalisme transcendantal de tous les
phénomènes la position doctrinale selon laquelle nous les regardons tous,
globalement, comme de simples représentations, et non pas comme des
choses en soi, et conformément à laquelle espace et temps ne sont que des
formes sensibles de notre intuition, mais non pas des déterminations
données pour elles-mêmes ou des conditions des objets en tant que choses
en soi."
[Définition du Réalisme transcendantal]
(Citation de K376-K377-K378)
"A cet idéalisme [transcendantal] est opposé un Réalisme transcendantal qui
considère l'espace et le temps comme quelque chose de donné en soi
(indépendamment de notre sensibilité). Le réaliste transcendantal se
représente donc les phénomènes extérieurs (si l'on admet leur réalité)
comme des choses en soi qui existent indépendamment de nous et de notre
sensibilité, et qui donc, correspondant à des concepts purs de
l'entendement, seraient aussi en dehors de nous.
C'est proprement ce réaliste transcendantal qui, ensuite, joue le rôle de
l'idéaliste empirique et, après avoir faussement supposé, à propos des
objets des sens, qu'ils devaient, pour être extérieurs [pour exister et ne pas
être une illusion du sens interne], posséder aussi leur existence en eux-
mêmes, sans intervention des sens, trouve, en se plaçant de ce point de
vue, toutes nos représentations sensibles insuffisantes pour en rendre
certaine la réalité.
L'idéaliste transcendantal peut au contraire être un réaliste empirique, par
conséquent, comme on l'appelle, un dualiste, c'est-à-dire admettre
l'existence de la matière sans sortir de la simple conscience de soi, ni
accepter quelque chose de plus que la certitude des représentations en moi,
par conséquent que le cogito, ergo sum [latin : je pense, donc j'existe].
En effet, parce qu'il ne donne à cette matière et même à sa possibilité
intrinsèque que la valeur d'un phénomène qui, séparé de notre sensibilité,
n'est rien, elle ne constitue chez lui qu'une espèce de représentations
(intuition) que l'on appelle « extérieures », non pas au sens où elles se
rapporteraient à des objets extérieurs en soi, mais en tant qu'elles rapportent
des perceptions à l'espace dont tous les éléments existent les uns en dehors
des autres, alors que l'espace lui-même est en nous.
C'est en faveur de cet idéalisme transcendantal que nous nous sommes
déclarés dès le début. Par conséquent, à la faveur de notre doctrine,
707
disparaît toute difficulté à admettre, sur le témoignage de notre simple
conscience de nous-mêmes, et à déclarer par là démontrée l'existence de la
matière tout aussi bien que l'existence de moi-même comme être pensant.
Car j'ai en tout état de cause conscience de mes représentations ; donc,
elles existent et moi aussi, qui ai ces représentations. Or, les objets
extérieurs (les corps) ne sont que des phénomènes : par conséquent, ils ne
sont rien d'autre qu'une espèce de mes représentations, dont les objets ne
sont quelque chose qu'à travers ces représentations, mais ne sont rien [ne
sont pas à prendre en compte] abstraction faite de celles-ci.
[Voir Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant]
Donc, les choses extérieures existent tout aussi bien que moi-même j'existe,
et cela, dans les deux cas, sur le témoignage immédiat de la conscience
que j'ai de moi-même, avec cette simple différence que la représentation de
moi-même comme sujet pensant est rapportée uniquement au sens interne,
alors que les représentations qui font signe vers des êtres étendus sont
rapportées aussi au sens externe.
[K377-K378 -] Il ne m'est pas davantage nécessaire de procéder à un
raisonnement déductif en ce qui concerne la réalité des objets extérieurs
que je n'en ai besoin pour ce qui touche à la réalité de mon sens interne (de
mes pensées) ; car, des deux côtés, il ne s'agit de rien d'autre que de
représentations, dont la perception immédiate (la conscience) est en même
temps une preuve suffisante de la réalité qui est la leur."
[K378 -] Donc, l'idéaliste transcendantal est [aussi] un réaliste empirique, et
il accorde à la matière, en tant que phénomène, une réalité qui n'a pas
besoin d'être déduite, mais qui est au contraire immédiatement perçue. Par
opposition, le réaliste transcendantal tombe nécessairement dans l'embarras
et se voit contraint de ménager une place à l'idéalisme empirique, parce qu'il
regarde les objets des sens extérieurs pour quelque chose de distinct des
sens eux-mêmes et considère de simples phénomènes comme des êtres
indépendants qui se trouvent en dehors de nous…"
(Fin de citation)
Résumé
Voir d'abord Réfutation du matérialisme (but de sa critique invoqué par Kant).
Kant démontre là qu'il est plus rigoureux, du point de vue logique doctrinale, de
postuler l'idéalisme transcendantal qu'il défend que le matérialisme ou le Réalisme
transcendantal. Sa démonstration n'est pas critiquable, mais il faut noter que les
scientifiques actuels postulent le Réalisme ; ils sont souvent matérialistes et non
idéalistes, et leur position sur la vérité est le Rationalisme critique [90].
708
Paralogismes de la raison pure : apparence transcendantale et classement
K392 – "Nous ne nous sommes pas encore acquittés jusqu'ici d'une explication claire
et générale de l'apparence transcendantale et cependant naturelle qui intervient dans
les paralogismes de la raison pure, en même temps que d'une justification de la
manière dont ils ont été ordonnés selon une structure systématique et parallèle à la
table des catégories."
[…] C'est sur cette division que se fonde aussi la triple apparence transcendantale
qui donne lieu aux trois sections de la Dialectique et fournit l'idée d'autant de
sciences apparentes déduites de la raison pure, la psychologie, la cosmologie et la
théologie transcendantales. Nous n'avons affaire ici qu'à la première."
(Fin de citation)
La synthèse des conditions d'une pensée en général n'est pas du tout objective
K393 – "Parce que, dans la pensée en général, nous faisons abstraction de toute
relation de la pensée à un quelconque objet [des sens ou de l'entendement pur], la
synthèse des conditions d'une pensée en général (n° 1) n'est pas du tout objective :
elle constitue simplement une synthèse [des représentations présentes à l'esprit] du
sujet, mais une synthèse qui est tenue faussement pour une représentation
synthétique d'un objet."
(Les processus psychiques en eux-mêmes, indépendamment de l'objet de leur
pensée, ne sont pas objectifs parce qu'ils ne tiennent pas compte de la
signification de cet objet.)
709
La conscience de soi d'un sujet ne lui permet pas de se connaître
K393 – "L'unique condition qui accompagne toute pensée est" la conscience de soi
et elle "est elle-même inconditionnée. Elle est seulement la condition formelle, c'est-
à-dire l'unité logique de toute pensée où je fais abstraction de tout objet, et elle est
cependant représentée comme un objet que je pense, à savoir le Moi lui-même et
son unité inconditionnée."
1ère question sans réponse : de quelle nature est une chose qui pense ?
K393 – "Si quelqu'un [me demandait] : de quelle nature est une chose qui pense ?, je
ne dispose pas à cet égard du moindre savoir a priori permettant de répondre, parce
que la réponse doit être synthétique [et] pour toute solution synthétique se trouve
requise l'intuition, laquelle est totalement écartée dans un problème aussi général."
2ème question sans réponse : quelle doit être la nature d'une chose qui est mobile ?
K393-K394 – "Personne ne peut répondre, au niveau de généralité qui est le sien, à
la question de savoir quelle doit être la nature d'une chose qui est mobile. Car
l'étendue impénétrable (la matière) n'est alors pas donnée."
Savoir qu'une chose est mobile ne permet pas d'en déduire ce qu'elle est. La
question concerne la nature et les règles générales de la pensée, et savoir par
expérience que le Moi est le premier sujet et qu'il est simple n'apporte pas de règle
universelle énonçant en général et a priori les conditions de possibilité de la pensée.
Donc juger de la nature d'un être pensant par purs concepts (par déduction pure) est
sans espoir.
K395 – "Ce concept de la substance ne m'apprend pas en effet que l'âme, en elle-
même, continue d'être, ni qu'elle est une partie des intuitions extérieures qui ne peut
plus elle-même être divisée, et qui ne peut donc naître ou périr sous l'effet d'aucun
changement de la nature : seules propriétés susceptibles de me faire connaître l'âme
au sein de ce qui constitue l'expérience comme ensemble structuré et me donner un
aperçu de son origine et de son état futur."
710
Par conséquent, la conscience de soi en général est la représentation de ce qui
est la condition de toute unité et est cependant soi-même inconditionné.
On peut donc dire du Moi pensant (de l'âme),
qui se représente lui-même comme substance,
comme simple,
comme numériquement identique en tout temps
et comme le corrélat de toute existence,
à partir duquel toute autre existence doit être déduite,
non pas tant qu'il se connaît lui-même à travers les catégories, mais qu'il
connaît les catégories, et par elles tous les objets, dans l'unité absolue de
l'aperception, par conséquent à travers lui-même.
En fait, assurément est-il très évident que ce qu'il me faut présupposer pour
connaître en général un objet, je ne saurais le connaître lui-même comme objet,
et que le Moi déterminant (la pensée) est distinct du Moi déterminable (le sujet
pensant), comme la connaissance est distincte de l'objet.
Cependant, rien n'est plus naturel et plus égarant que l'apparence qui conduit à
tenir l'unité, dans la synthèse des pensées, pour une unité perçue dans le sujet
de ces pensées. On pourrait l'appeler la subreption de la conscience
hypostasiée.
711
qu'elle ne s'accomplit que vis-à-vis des concepts de l'entendement qui, dans
chaque classe, servent pour les autres à fonder l'unité inscrite dans une
perception possible, soit : subsistance, réalité, unité (non-pluralité) et existence ;"
1.
L'unité inconditionnée de la relation,
c'est-à-dire elle-même,
non comme inhérente, mais comme subsistante.
3.
2. L'unité inconditionnée
L'unité inconditionnée de la qualité, dans la pluralité du temps,
c'est-à-dire non comme un tout réel c'est-à-dire non pas numériquement
mais comme simple. diverse selon les temps différents,
mais comme un seul et même sujet.
4.
L'unité inconditionnée de l'existence dans l'espace,
c'est-à-dire non pas comme la conscience
de plusieurs choses en dehors d'elle,
mais seulement de l'existence d'elle-même,
et des autres choses simplement comme
de ses représentations.
712
Aussi s'attendrait-on à ce que ces affirmations se fondent sur des principes et
des concepts universels de natures pensantes en général.
Au lieu de quoi il se trouve que c'est la représentation singulière : « Je suis » qui
les régit toutes, laquelle, parce qu'elle exprime (de manière indéterminée) la
formule pure de toute mon expérience, s'annonce comme une proposition
universelle valant pour tous les êtres pensants et,
alors que pourtant elle est individuelle à tous égards, véhicule avec elle
l'apparence d'une unité absolue des conditions de la pensée en général et par là
s'étend au-delà du domaine où peut aller l'expérience possible."
(Fin de citation)
K397 - Fin du texte de Kant sur les paralogismes dans la 1ère édition de la Critique.
Pensée 206
"Le silence éternel de ces espaces infinis .m'effraie".
Commentaires
Ce cri pénétrant est d'un savant et d'un chrétien. Pour le géomètre l'univers offre
l'image de l'infinité et de l'éternité ; il semble participer ainsi aux attributs de la
divinité. Mais le Dieu du chrétien est un être moral, il est« sensible au cœur ». Or cet
univers infini est « muet », il est destitué de toute vie morale, il ne parle pas au cœur
et il ne témoigne pas de Dieu. Ce monde qui emplit l'esprit du savant est comme un
désert pour celui qui cherche Dieu.
Ces deux choses, je n'ai pas à les chercher, comme si elles étaient enveloppées de
ténèbres, ou situées dans une région transcendante, au-delà de mon horizon, et je
713
n'ai pas à les conjecturer seulement ; je les vois devant moi, et je les rattache
immédiatement à la conscience de mon existence.
Le premier spectacle d'une multitude innombrable de mondes anéantit pour ainsi dire
mon importance, en tant que je suis une créature animale qui doit de nouveau rendre
à la planète (à un simple point dans l'univers), après avoir été pour un court laps de
temps douée de force vitale, la matière dont elle fut formée.
Pathologique
Adjectif : ce qui est pathologique repose sur un affect subi, dû à la sensibilité, et
s'oppose à :
Ce qui dépend de la raison ;
Ce qui est pratique ;
Citations
Citation de l'article arbitre (arbitrium)
L'arbitre est le pouvoir de l'homme de décider.
Au sens pratique, ce pouvoir peut être soumis à des contraintes psychologiques.
K496 - "La liberté entendue au sens pratique est l'indépendance de l'arbitre vis-
à-vis de la contrainte exercée par les penchants de la sensibilité.
Car un arbitre est sensible dans la mesure où il est affecté pathologiquement
(par les mobiles de la sensibilité [arbitrium sensitivum]) ; il est dit animal
(arbitrium brutum) quand il peut être pathologiquement nécessité."
(Fin de citation)
714
(Citation de [108] page 87 note *)
"La volonté humaine peut concevoir un intérêt pour quelque chose sans pour autant
agir par intérêt.
[Il s'agit ici de l'intérêt pathologique que l'on éprouve pour l'objet de l'action. La
volonté dans ce cas dépend de principes de cette même raison se mettant au
service de l'inclination, et le sujet s'intéresse à l'objet de l'action (en tant qu'il lui
est agréable).]
(Fin de citation)
Pédant
Selon le dictionnaire [13] :
Personne qui fait avec insistance étalage d'un savoir, d'une culture, d'une
érudition, d'une spécialisation souvent superficiels, fraîchement acquis ou
exclusifs.
Personne qui se mêle de faire la leçon à tout le monde, qui prend un ton
doctoral.
Qui fait lourdement étalage de son savoir, de sa culture, de son érudition.
Pensée
Substantif
715
pas d'autre usage que transcendantal - à savoir celui d'assurer l'unité de la
pensée d'un divers en général."
Penser : unification de représentations en une conscience, donc jugement
(Citation de [56b] §22 page 91)
"Penser, c'est unifier des représentations en une conscience. Cette unification se
produit :
Ou bien relativement au sujet simplement, auquel cas elle est contingente et
subjective,
Ou bien elle a lieu absolument, et elle est alors nécessaire ou objective.
L'unification des représentations en une conscience, c'est le jugement. Donc
penser équivaut à juger ou à rapporter des représentations à des jugements en
général [jugements qui produisent des concepts purs de l'entendement]."
(Fin de citation)
Penser, fonction de la raison
Penser est ensuite une fonction active de la raison produisant une connaissance
qui perfectionne celle de l'entendement : voir La raison doit contribuer à la
perfection de l'entendement sans la perturber.
Les enregistreurs modernes montrent que la séparation entre entendement et
raison n'existe pas au niveau des processus cognitifs ; au contraire, les deux
fonctions sont intégrées, utilisent des logiques de connexion neuronale
communes et accèdent aux mêmes représentations en mémoire de travail.
716
Modalité 3 : Nécessaire, ce qui lui confère une valeur apodictique : le sujet
estime que son jugement peut être confirmé par une démonstration ou un fait
expérimental.
Voir Nécessité des choses (postulat).
K289 – "Les principes de la modalité n'énoncent donc rien d'autre, à propos d'un
concept, que l'action du pouvoir de connaître par lequel il est produit."
K289 - Les prédicats de ces postulats (possibilité, réalité, nécessité) n'ajoutent rien
au concept auquel on les applique (à sa représentation) : ces postulats ne sont donc
pas objectivement synthétiques, ils sont subjectivement synthétiques en ajoutant une
explication fournie par son auteur relativement au pouvoir de connaître.
Ces postulats de modalité d'un jugement sont-ils des postulats ou des principes ?
K288-K289 – "J'ai nommé justement postulats les principes de la modalité."
Kant justifie le changement d'appellation de ces jugements synthétiques a priori en
remarquant que ce caractère ne justifie pas, à lui seul, une adhésion sans condition ;
ils ne sont pas démontrables et ne doivent pas être considérés comme des principes.
Perception
Le substantif perception a deux sens :
Faculté, opération par laquelle l'esprit (la conscience à l'état d'éveil attentif)
construit en mémoire de travail une représentation du divers du phénomène
perçu (de l'objet des sens).
Cette représentation étant accompagnée d'une sensation, la perception est le
début d'une conscience empirique du phénomène.
Cette faculté utilise l'intuition pure du temps, celle du sens interne :
K188 – "…au fondement de la perception prise globalement, il y a a priori
717
l'intuition pure (laquelle, vis-à-vis de la perception comme représentation, est la
forme de l'intuition interne, le temps) ;"
K207 - "Des choses ne sont données, dans l'espace et dans le temps, que dans
la mesure où elles sont des perceptions (des représentations accompagnées de
sensation)."
Voir aussi Réceptivité et Affecter et affection au sens de Kant.
Résultats de l'opération précédente (K242) :
Une intuition pure simplement formelle : espace et temps ;
Cette affirmation est importante : la perception comprend l'intuition.
Une représentation brute du phénomène, formée en mémoire de travail
passivement, avec une forme non encore interprétée ;
Une sensation : la matière de la perception ;
La certitude que le phénomène existe :
La perception d'un phénomène apporte, dans la représentation qu'elle en
construit, une information par laquelle le sujet prend conscience qu'il perçoit
quelque chose qui est réel, c'est-à-dire qui existe dans le temps et l'espace :
K242 – [Les phénomènes] "contiennent donc, outre l'intuition, les matériaux
nécessaires pour quelque objet en général (par quoi se trouve représenté
quelque chose d'existant dans l'espace ou dans le temps), c'est-à-dire le
réel de la sensation, en tant que celle-ci constitue une représentation
simplement subjective par laquelle on peut seulement prendre conscience
que le sujet est affecté et que l'on rapporte à un objet en général, en soi."
Grâce à une perception l'esprit sait que ses sens sont affectés par
quelque chose, par exemple qu'il voit quelque chose dans le temps (et
souvent aussi dans l'espace), mais il ne sait pas encore quoi, il doit
attendre la fin de l'intuition et surtout l'entendement : voir Concept de
l'entendement.
Voir aussi Conscience claire et conscience obscure : définitions.
Le plaisir ou le déplaisir :
K361 – "Le moindre objet de la perception (par exemple, le plaisir ou le
déplaisir)…"
Selon les connaissances scientifiques actuelles [23], la représentation du
phénomène comprend aussi :
Son sens psychique (le sentiment qu'il inspire) ;
L'historique des étapes d'attention qui ont permis de construire le
phénomène (le schéma d'attention) ;
Une anticipation de la perception (détails importants).
Voir comment Kant se représente la perception d'un phénomène.
Voir aussi Représentations et ensembles d'informations (diagramme).
718
constituant des « images » successives. L'appréhension doit d'abord assembler ces
images en une représentation de synthèse grâce à l'imagination productrice.
K379 – "L'objet empirique […] s'appelle un objet extérieur dès lors qu'il est
représenté dans l'espace et un objet intérieur quand il est représenté exclusivement
dans le rapport temporel ; l'espace et le temps, quant à eux, ne peuvent tous deux
être trouvés qu'en nous. […] L'espace et le temps sont certes des représentations a
priori, qui sont inscrites en nous comme formes de notre intuition sensible avant
même qu'un objet réel ait déterminé, à travers la sensation, notre sens à le
représenter sous ces rapports sensibles."
719
K383-K384 – "…le phénomène qui se présente au sens externe possède […]
quelque chose de stable ou de permanent, qui fournit un substrat servant de
fondement aux déterminations changeantes et par conséquent un concept
synthétique, savoir celui de l'espace et d'un phénomène dans l'espace ; au contraire,
le temps, qui est l'unique forme de notre intuition interne, n'a rien qui soit permanent,
et par conséquent il ne nous donne à connaître que le changement des
déterminations, mais non pas l'objet déterminable."
Il explique aussi, dans K381-K382, pourquoi l'intuition ne peut se former que si l'objet
existe et est perçu, et réciproquement que l'existence de l'objet et sa perception
entraînent l'intuition, relation de cause à effet :
K379 – [L'objet empirique] "qui doit être intuitionné dans l'espace, présuppose
nécessairement une perception et ne peut, indépendamment de cette perception
qui indique la réalité de quelque chose dans l'espace, être ni inventé ni produit
par aucune imagination. La sensation [indique] une réalité dans l'espace et dans
le temps, selon qu'elle est rapportée à l'une ou à l'autre espèce de l'intuition
sensible [sens externe ou interne]."
K380 – "Toute perception extérieure est donc immédiatement la preuve de
quelque chose de réel dans l'espace, ou plutôt elle est le réel même…"
A076 [3] – "§ 11. (146) Les sens ne sont pas trompeurs […] parce qu'en fait ils
ne jugent aucunement, - ce pourquoi l'erreur n'incombe jamais qu'à
l'entendement."
720
K335 – "…ainsi que cela arrive dans ce qu'on appelle les illusions des sens,
nous tenons souvent pour immédiatement perçu quelque chose à quoi nous a
pourtant seulement conduits la conclusion d'un raisonnement."
Voir aussi :
Réalité et phénomènes ;
Rapport des phénomènes à l'expérience en général.
et [à considérer] les objets extérieurs de ces perceptions, non comme des choses en
soi, mais seulement comme des représentations dont nous pouvons avoir
immédiatement conscience, comme de toute autre représentation,
[Les objets extérieurs de ces perceptions ne sont que des représentations de la
réalité inaccessible (mythe de la caverne de Platon)]
mais qui sont dites extérieures parce qu'elles se rattachent à ce sens que nous
nommons le sens externe, dont l'intuition est l'espace, lequel n'est cependant lui-
même autre chose qu'un mode intérieur de représentation où certaines perceptions
établissent entre elles des liens."
(Fin de citation)
721
compte de la situation de connaissance à un instant donné, et l'esprit choisit
inconsciemment celle qui lui paraît psychiquement la plus importante, à laquelle il fait
donc attention.
Voir aussi à propos d'un phénomène : Extensif / Intensif / Protensif.
Détails du fonctionnement de l'entendement : voir Entendement et Sensation.
Perdurance
Selon [13] : Caractère de ce qui dure longtemps, de ce qui se perpétue.
Perfection
Et comme Dieu est la plus haute réalité, ce concept concorderait avec celui qui a fait
dire qu'une chose est parfaite dans la mesure où elle est en accord avec les attributs
divins."
[Vu la définition de Dieu, l'affirmation « Dieu est la plus haute réalité » est une
fantaisie qui n'a pas sa place dans une philosophie rationnelle. Dieu absolument
parfait aurait un total infini et tout objet non-divin serait « infiniment plus petit »
ou « infiniment moins réel »…]
(Fin de citation)
722
Il n'y a qu'une seule réalité absolument parfaite
Raisonnement de Kant digne des philosophes dogmatiques du Moyen-Age
(Citation de [168] pages 169-170)
"Qu'on me permette d'abord de faire résider l'absolue perfection, quand on la
considère sans intention particulière, pour elle-même, dans son degré de réalité.
[Ou Dieu a une infinité de qualités et il est infiniment réel, et par rapport à lui
toute chose finie est infiniment peu réelle ; ou Dieu n'a qu'un nombre fini de
qualités et il ne peut être Dieu…
La notion de degré de qualité n'a pas de sens pour un nombre infini de
qualités ; l'infini n'est pas un nombre, et aucun nombre ne peut lui être comparé
sinon comme « infiniment plus petit ».]
J'ai pour moi, dans cette hypothèse, l'assentiment de la plupart des philosophes et il
me serait très facile de justifier ce concept.
[Kant utilise ici un argument d'autorité, comme « Aristotele dixit » (« Aristote
dit ») au Moyen-Age, argument sans valeur…]
Or, j'affirme qu'une réalité et une autre ne peuvent jamais, en tant que telles, être
différentes.
[La réalité est un concept logique dont les valeurs possible sont Vrai et Faux.
Deux objets réels sont donc égaux au point de vue réalité.]
[Démonstration de la nécessaire égalité d'objets réels au sens existence]
Car si des objets diffèrent entre eux, c'est parce que ce qui est en l'un n'est pas
en l'autre. Mais quand ce sont des réalités en tant que telles que l'on considère,
chaque marque distinctive en elles est positive ; or, si elles devaient différer
entre elles en tant que réalités, il faudrait qu'il y eût dans l'une quelque chose de
positif qui manquerait dans l'autre. On concevrait donc dans l'une quelque chose
de négatif, par quoi elle se distinguerait de l'autre, c'est-à-dire qu'on ne les
comparerait pas entre elles en tant que réalités, ce qui était pourtant le postulat.
Ainsi donc rien ne distingue une réalité d'une autre sinon les négations, absences,
limites, c'est-à-dire non ce qui regarde leur nature (qualitate) [en tant que réalité],
mais leur degré (gradu).
Si donc des objets sont différents l'un de l'autre, ils ne diffèrent jamais que par leur
degré de réalité et des objets différents ne peuvent jamais avoir un même degré de
réalité."
(Fin de citation)
Il est impossible qu'il existe deux mondes également bons, également parfaits
Ce sujet est développé à la suite du précédent, page 170. Il ne sera pas commenté
ici, tant l'idée de mesurer la bonté et la perfection de mondes et d'évaluer leur réalité
paraît aujourd'hui fantaisiste.
723
Perfection.
Ces deux sortes de perfection, esthétique et logique, sont donc distinctes […].
La perfection logique de la connaissance repose sur son accord avec l'objet,
donc sur des lois qui ont validité universelle, et elle peut par conséquent être
également estimée d'après des normes a priori.
[Il s'agit donc de connaissance parfaite d'un phénomène.]
La perfection esthétique consiste dans l'accord avec le sujet, et elle repose sur la
sensibilité particulière de l'homme. Aussi dans la perfection esthétique, il n'y a
pas de place pour des lois ayant validité objective universelle.
[La beauté, source de satisfaction universelle]
Néanmoins comme il y a également des lois universelles de la sensibilité qui, à
défaut de valoir objectivement pour tout être pensant, ont tout de même une
validité objective pour l'humanité entière,
[Ces lois sont celles des facultés de la perception (réceptivité, etc.), les
mêmes chez tous les humains]
on peut concevoir également une perfection esthétique, qui renferme le principe
d'une satisfaction subjectivement universelle.
[Cette perfection esthétique] est la beauté : ce qui plaît aux sens dans l'intuition
et précisément pour cette raison peut être l'objet d'une satisfaction universelle,
puisque les lois de l'intuition sont des lois universelles de la sensibilité.
Cet accord avec les lois universelles de la sensibilité distingue spécifiquement
le beau en ce qu'il a de propre et d'indépendant, dont l'essence consiste
dans la simple forme,
de l'agréable qui plaît uniquement dans la sensation par l'attrait ou l'émotion
et qui pour cette raison ne peut fonder qu'une satisfaction simplement
individuelle.
[Il faudrait ici des exemples pour comprendre, ou au moins apprécier…]
C'est aussi cette perfection essentiellement esthétique, qui s'accorde entre
toutes avec la perfection logique, et se lie le mieux avec elle.
[Cette affirmation, dont la signification n'est pas évidente (accorde ?; lie ?)
n'est pas démontrée, ni même expliquée]
Considérée de ce point de vue, la perfection esthétique, eu égard à ce beau
essentiel, peut donc être avantageuse à la perfection logique. Mais d'un autre
point de vue, elle lui est également préjudiciable, dans la mesure où dans la
724
perfection esthétique nous ne voyons que le beau inessentiel, l'attrayant ou
l'émouvant, ce qui plaît aux sens dans la simple sensation et qui ne se rapporte
pas à la simple forme, mais à la matière de la sensibilité. Car l'attrait et l'émotion
sont au plus haut point capables de gâter la perfection logique dans nos
connaissances et nos jugements."
(Fin de citation)
Dans cet effort pour lier la perfection esthétique à la perfection logique dans nos
connaissances, nous ne devons pas perdre de vue les règles suivantes :
725
le sujet, ce qui ne manque pas d'exercer une influence visiblement très fâcheuse
sur la perfection logique de la connaissance."
(Fin de citation)
[Perfections esthétiques]
A ces perfections logiques correspondent les perfections esthétiques suivantes, au
point de vue de ces quatre moments principaux :
1. L'universalité esthétique - Elle consiste en l'applicabilité d'une connaissance à
une multitude d'objets, qui servent d'exemples, auxquels l'application en peut être
faite et grâce à quoi elle devient utilisable dans un but de vulgarisation.
2. La distinction esthétique - C'est la distinction dans l'intuition, où, au moyen
d'exemples, un concept pensé abstraitement est exposé et expliqué in concreto.
3. La vérité esthétique - Une vérité simplement subjective, qui consiste uniquement
dans l'accord de la connaissance avec le sujet et les lois de l'apparence sensible,
et qui par suite n'est rien de plus qu'une apparence universelle.
4. La certitude esthétique - Elle se fonde sur ce qui est nécessaire d'après le
témoignage des sens, c'est-à-dire ce qui est validé par la sensation et
l'expérience."
(Fin de citation)
La simple multiplicité sans unité ne peut nous satisfaire. Et c'est pourquoi, entre
toutes, la vérité est la perfection principale, parce qu'elle est le fondement de l'unité,
grâce au rapport de notre connaissance à l'objet. Même dans la perfection
esthétique, la vérité demeure toujours la conditio sine qua non, la plus importante
condition négative, sans laquelle rien ne peut plaire universellement au goût.
Aussi personne ne peut espérer progresser dans les belles-sciences s'il n'a pas mis
la perfection logique au fondement de sa connaissance. C'est en combinant le plus
possible de façon générale la perfection logique et la perfection esthétique
726
concernant de telles connaissances, perfections qui, à elles deux, doivent instruire et
intéresser, que se manifestent effectivement le caractère et l'art du génie."
(Fin de citation)
§99. Définition
Lire avant : Définition d'un concept de chose.
Remarque
La définition ne doit être considérée que comme un concept logiquement parfait ;
car on y trouve réunies les deux perfections les plus essentielles d'un concept :
la distinction,
la perfection et précision dans la distinction (quantité de la distinction)."
727
[La quantité de la distinction philosophique définie ici par Kant a un équivalent en
optique : le pouvoir séparateur d'un instrument, angle minimum des directions de
deux points qu'il peut voir séparément [176].
(Fin de citation)
Remarque
Toutes les définitions des concepts mathématiques et même des concepts
d'expérience […] doivent donc être formées synthétiquement.
Car même dans les concepts de cette dernière espèce, tels que les concepts
empiriques d'eau, de feu, d'air etc... je ne dois pas décomposer ce qu'ils
contiennent, mais je dois savoir apprendre par expérience ce qui leur appartient
[c'est-à-dire les informations qui les définissent].
Donc tous les concepts empiriques doivent être considérés comme des concepts
factices dont la synthèse n'est pas arbitraire, mais empirique.
Remarque
[Déclarations]
Il n'y a donc que les concepts arbitraires qui peuvent être définis synthétiquement.
De telles définitions de concepts arbitraires qui sont non seulement toujours
possibles, mais même nécessaires et qui doivent précéder tout ce qu'on dira grâce à
728
un concept arbitraire, on pourrait aussi les nommer : déclarations, dans la mesure où
on s'en sert pour déclarer ses pensées ou rendre compte de ce qu'on entend par un
mot. Tel est le cas chez les mathématiciens."
(Fin de citation)
Car on ne peut rendre distincts des concepts donnés qu'en rendant successivement
clairs leurs caractères. Si tous les caractères d'un concept donné sont rendus clairs,
le concept sera tout à fait distinct ; si de plus elle ne contient pas trop de caractères,
elle est en même temps précise et il en sort une définition du concept.
Remarque
Comme on ne peut être certain par aucune preuve d'avoir épuisé par une analyse
complète tous les caractères d'un concept donné, il faut tenir pour incertaines toutes
les définitions analytiques."
(Fin de citation)
Remarques
1. Nous pouvons exposer soit un concept, soit l'expérience. Dans le premier cas par
analyse, dans le second par synthèse.
2. L'exposition ne convient donc qu'aux concepts donnés ; elle permet de les rendre
distincts ; elle se distingue par là de la déclaration qui est une représentation
distincte de concepts factices.
Comme il n'est pas toujours possible de rendre l'analyse complète, et comme en
général une décomposition est nécessairement incomplète avant d'être complète,
une exposition même incomplète est, à titre de partie d'une définition, une
présentation vraie et utile d'un concept.
La définition demeure toujours en ce cas uniquement l'Idée d'une perfection
logique, que nous devons chercher à atteindre.
729
3. La description ne convient qu'aux concepts empiriques donnés. Elle n'a pas de
règles déterminées et ne contient que les matériaux pour la définition.
(Fin de citation)
Remarques
1. Si un concept est intrinsèquement suffisant pour distinguer la chose il l'est aussi à
coup sûr extrinsèquement ; mais s'il n'est pas suffisant intrinsèquement, il peut
néanmoins, simplement d'un certain point de vue être extrinsèquement suffisant,
à savoir dans la comparaison du défini avec autre chose. Mais la suffisance
extrinsèque sans restriction n'est pas possible sans la suffisance intrinsèque.
2. [Définitions nominales et définitions réelles]
Les objets d'expérience permettent de simples définitions nominales. Les
définitions nominales logiques de concepts d'entendement donnés sont tirées
d'un attribut ; au contraire les définitions réelles sont tirées de l'essence de la
chose, du premier principe de la possibilité. Ces dernières contiennent donc ce
qui convient toujours à la chose, son essence réelle.
Des définitions simplement négatives ne peuvent […] s'appeler définitions réelles,
car si des caractères négatifs peuvent servir à distinguer une chose d'une autre
tout aussi bien que des caractères affirmatifs, ils ne peuvent cependant servir à la
connaissance de la chose selon sa possibilité interne. […]
Il y a des définitions réelles en mathématiques, car la définition d'un concept
arbitraire est toujours réelle.
3. [Définition génétique]
Une définition est génétique si elle donne un concept grâce auquel l'objet peut
être exposé a priori in concreto ; telles sont toutes les définitions mathématiques."
(Fin de citation)
730
2. selon la qualité, la définition doit être un concept détaillé et en même temps
précis ;
3. selon la relation, elle ne doit pas être tautologique, c'est-à-dire que les caractères
du défini doivent être différents de lui-même, puisqu'ils sont les principes de sa
connaissance ;
4. enfin selon la modalité, les caractères doivent être nécessaires et par conséquent
ne pas être du genre de ceux que procure l'expérience.
Remarque
La condition que le concept de genre et le concept de différence spécifique doivent
constituer la définition ne vaut qu'en ce qui concerne les définitions nominales dans
la comparaison ; mais elle ne vaut pas pour les définitions réelles dans la dérivation."
(Fin de citation)
Remarques
1. Ces règles valent […] uniquement pour les définitions analytiques. - Or comme on
ne peut jamais être certain que l'analyse a été complète, on ne doit poser la
définition qu'à titre d'essai et n'en user que comme si elle n'était pas une
définition. Sous cette réserve, on peut s'en servir comme d'un concept distinct et
731
vrai et tirer les corollaires de ses caractères. Ainsi je pourrai dire : à ce à quoi le
concept du défini convient, la définition convient aussi ; mais assurément la
réciproque n'est pas vraie puisque la définition n'épuise pas le défini."
2. Se servir du concept du défini dans l'explication ou donner à la définition le défini
pour fondement, cela s'appelle : créer une définition circulaire.
La détermination d'une notion par rapport à tout le possible qui est contenu sous elle,
en tant que ce possible est divers [en tant qu'il est constitué d'éléments tous
différents], s'appelle division logique de la notion.
La notion supérieure s'appelle notion divisée, et les notions inférieures, les membres
de la division.
Remarques
1. [Contenu en / contenu sous : ne pas confondre division logique et partage]
Partager un concept et le diviser sont donc deux choses différentes.
En partageant le concept je découvre ce qui est contenu en lui (par analyse) ;
en le divisant je considère ce qui est compris sous lui ; en ce cas je divise la
sphère du concept, non le concept lui-même.
Il s'en faut donc de beaucoup que la division soit un partage du concept ;
ainsi les membres de la division contiennent au contraire plus en eux que le
concept divisé.
2. La division permet d'aller des notions inférieures aux notions supérieures,
puis de redescendre des notions supérieures aux notions inférieures.
Remarque
Les membres de la division doivent être séparés les uns des autres par opposition
contradictoire [exclusion mutuelle], et non par une simple contrariété [différence]."
732
§112. Codivisions et subdivisions
(Citation de [165] pages 157-158)
Différentes divisions d'une notion, faites de points de vue divers, s'appellent
codivisions [co-divisions] ou divisions collatérales ; et la division des membres de la
division s'appelle subdivision.
Remarques
1. La subdivision peut être indéfiniment poursuivie ; mais finalement elle peut être
comparativement finie. La codivision également va à l'infini, spécialement dans
les concepts d'expérience, car qui peut épuiser toutes les relations des
concepts ?
2. On peut aussi appeler la codivision une division selon la différence des concepts
des mêmes objets (points de vue) et la subdivision une division des points de vue
eux-mêmes.
(Fin de citation)
Remarques
1. Toute polytomie est empirique ; la dichotomie est la seule division à partir de
principes a priori, donc la seule division primitive. Car les membres de la division
[logique] doivent être opposés entre eux [s'exclure mutuellement] et tout A n'a pas
d'autre contraire que non-A.
La polytomie ne peut être enseignée en logique, car la connaissance de l'objet en fait
partie. Mais la dichotomie n'exige que le principe de contradiction, sans qu'il soit
besoin de connaître quant au contenu le concept qu'on veut diviser.
La polytomie requiert l'intuition,
soit a priori, comme en mathématiques (par exemple la division des sections
coniques),
soit empirique, comme dans la description de la nature.
Pourtant la division à partir du principe de la synthèse a priori comporte
trichotomie, à savoir :
1) le concept, comme condition,
2) le conditionné,
3) la dérivation du conditionné à partir de la condition".
(Fin de citation)
733
plusieurs espèces principales que nous pouvons indiquer ici selon la division que
voici :"
Remarque
Ces deux méthodes se distinguent donc en espèce et non simplement d'après la
présentation ; et par suite la popularité dans la méthode est autre chose que la
popularité dans la présentation.
Quand on a pensé selon une méthode, qu'ensuite cette méthode s'est également
exprimée dans la présentation, et que le passage d'une proposition à l'autre est
distinctement indiqué, alors on a traité une connaissance systématiquement.
Remarque
La méthode analytique est encore appelée méthode de l'invention. La méthode
analytique est plus appropriée à une fin de popularité, mais la méthode synthétique
convient mieux à l'élaboration scientifique et systématique de la connaissance."
(Fin de citation)
734
§118. 4. Méthode syllogistique - Méthode tabulaire
[165] page 160 – "La méthode syllogistique est celle qui consiste à présenter une
science sous forme d'une chaîne de raisonnements.
On appelle tabulaire la méthode qui consiste à présenter un édifice scientifique déjà
constitué dans toute sa construction d'ensemble."
Remarque
On ne peut enseigner selon la méthode érotématique que par le dialogue socratique,
où les deux interlocuteurs doivent s'interroger et se répondre mutuellement, en sorte
qu'il semble que le disciple aussi soit lui-même maître.
Par suite alors que la méthode catéchétique ne vaut que pour les connaissances
empiriques et historiques, la méthode dialogique vaut uniquement pour les
connaissances rationnelles."
(Fin de citation)
§120. Méditer
[165] page 161 – "Par méditer, il faut entendre réfléchir ou penser méthodiquement.
La méditation doit accompagner toute lecture et toute instruction ; cela exige qu'on
commence par des recherches préliminaires et qu'on poursuive en conduisant par
ordre ses pensées, ou en les liant suivant une méthode."
Permanence
Selon [13]
Caractère de ce qui demeure ou de ce qui fonctionne sans interruption pendant
une période de temps longue et indéterminée.
Principes de permanence : principes qui énoncent le caractère invariable d'une
grandeur à travers des transformations observables : principes de conservation
de la masse, de l'énergie, etc.
Chez Kant
Voir Première analogie de l'expérience - Principe de la permanence de la substance)
K253 – "Tous les phénomènes sont dans le temps, et c'est en lui seul, comme
substrat (comme forme permanente de l'intuition interne), qu'aussi bien la
simultanéité que la succession se peuvent représenter. Le temps donc, où doit être
pensé tout changement des phénomènes, demeure et ne change pas, parce qu'il est
735
ce en quoi la successivité ou la simultanéité ne peuvent être représentés que comme
en constituant des déterminations."
Kant précise que "ce degré peut décroître en passant par tous les degrés moindres,
qui sont en nombre infini, et ainsi la prétendue substance (la chose dont la
permanence n'est, au demeurant, pas déjà garantie) peut être réduite à néant, sinon
par décomposition en ses parties, du moins par diminution progressive de ses forces
(donc par consomption, s'il m'est permis d'utiliser cette expression). Car même la
conscience a toujours un degré, qui sans cesse peut encore être diminué, [comme]
le pouvoir d'être conscient de soi-même, comme de tous les autres pouvoirs." (K406-
K407)
En somme, Kant affirme que l'influence éventuelle de l'âme étant continue,
(comme la conscience de soi et les autres pouvoirs humains) peut décroître
progressivement jusqu'à zéro. Voir les remarques Continuité de tous les
changements et Continuum.
736
des sens externes, soit par elle-même claire…" [et la démonstration de Mendelssohn
[95] de l'existence éternelle de l'âme est réfutée.]
ce concept n'en demeure pas moins tout à fait vide et sans conséquence, si l'on ne
peut pas en prouver la permanence, car c'est là ce qui rend fécond dans l'expérience
le concept des substances.
[… que si on peut prouver sa permanence, condition d'intérêt de l'expérience]
737
En tant que ressenti par le sens interne de la conscience de soi, l'âme est un état du
cerveau : neurones et leurs interconnexions. Cet état n'est pas un objet physique,
c'est une description, un état (ensemble de valeurs de variables).
Donc :
La substance que certains philosophes font correspondre à l'âme n'est pas, non
plus, de la matière : c'est une abstraction décrivant un comportement ou un état
psychique.
En tant qu'abstraction, elle n'a ni grandeur extensive ni grandeur intensive. On
peut seulement supposer qu'un état du cerveau à l'instant t influence ses
réflexions ultérieures, mais celles-ci cesseront à la mort du cerveau.
On peut considérer l'âme comme associée au corps, qui a une substance
matérielle, mais cette association ne peut que cesser lorsque le corps meurt
([56b] §48 page 138).
L'affirmation « il ne se trouverait aucun temps entre un instant, où il est, et l'autre
instant, où il ne serait plus - ce qui est impossible » n'est possible que pour un
corps physique, en tant qu'exigence de la thermodynamique [119] ; pour une
abstraction, elle est évidemment fausse. Mendelssohn raisonnait comme si la
substance de l'âme était matérielle, hypothèse absurde. Il est surprenant que
Kant n'ait pas relevé cette absurdité en raisonnant lui-même sur une grandeur
intensive de l'âme.
Pour un matérialiste, toute cette discussion sur l'âme, sa substance et son
éternité est du niveau du « sexe des anges », c'est-à-dire une perte de temps.
Mais elle a eu lieu sérieusement au XVIIIe siècle (K713-K714).
738
Un argument basé sur la seule imagination, sans la moindre probabilité d'existence
ou de survenance, n'est pas recevable, il n'a aucune valeur. Face à une crainte, on
ne peut prendre une décision rationnelle que si on connaît :
Les conséquences redoutables possibles, et la probabilité au moins
approximative de chacune dans les jours, mois et années à venir ;
Le coût estimé de chacune de ces conséquences (vies humaines, argent,
environnement…), qui est aussi le coût de l'inaction fasse à sa cause ;
Le coût estimé d'une protection contre chacune de ces conséquences.
Une décision prise sans ces connaissances sera une décision politique…
La seule décision raisonnable face à une crainte est d'en étudier les risques, ainsi
que les coûts et délais des diverses actions de protection, en vérifiant constamment
que les coûts et délais de l'étude elle-même sont raisonnables face aux enjeux
supposés.
Voir Principe de précaution [145].
A partir du Je pense issu de son sens interne, qui prouve l'existence du sujet pensant
(voir Descartes : pensée, âme et corps) ;
De l'existence évidente de choses non pensantes ;
De l'évidence de l'attachement d'une substance corporelle ou étendue aux
facultés non pensantes de l'homme ;
739
Enfin du fait que l'âme humaine est pure substance (pensante) et substance
permanente (c'est-à-dire éternelle, Descartes étant croyant),
Kant juge que ce système (cette doctrine) relève de l'idéaliste problématique, parce
qu'il repose sur des évidences indémontrables :
K408 – "Mais il [résulte de ce système rationaliste] que […] l'idéalisme est
inévitable, du moins l'idéalisme problématique, et que si l'existence des choses
extérieures n'est pas du tout requise pour déterminer notre propre existence
dans le temps, c'est seulement sans la moindre raison qu'elle sera admise, dans
des conditions telles que l'on n'en pourra jamais fournir une preuve."
1.
Je pense
2. 3.
comme sujet, comme sujet simple,
4.
comme sujet identique,
dans tout état de ma pensée."
(Fin de citation)
740
Dans la proposition 2 : « comme sujet, » l'être pensant en général n'est déterminé
que s'il peut être pensé à la fois comme sujet et comme prédicat d'un autre sujet.
Donc
"Le concept d'un sujet est pris ici selon une acception uniquement logique, et reste
indéterminée la question de savoir si l'on doit ou non entendre par là une substance."
Ce monde extérieur est perçu par le sens externe de l'espace. Cet espace contenant
des points (le concept de point est a priori) de grandeur nulle est donc non-simple :
ses objets réels, de grandeur non-nulle, sont aussi non-simples. Or il est impossible
de décrire quelque chose de non simple (un objet de l'espace) avec seulement
l'information de quelque chose de simple (le temps et un ensemble de points), la
seule dont le sujet dispose, la grandeur d'un ensemble de points n'étant pas définie,
même si l'espace occupé par un objet réel est bien un ensemble infini de points.
741
"Il n'y a donc pas de psychologie rationnelle comme doctrine qui soit capable de
nous procurer quelque chose à ajouter à la connaissance que nous avons de
nous-mêmes, mais il n'en existe une que comme discipline qui instaure des
limites infranchissables, dans ce domaine, à la raison spéculative, d'un côté pour
qu'elle ne se précipite pas dans le sein du matérialisme sans âme, de l'autre côté
pour qu'elle ne se perde pas avec exaltation dans le spiritualisme, dépourvu pour
nous de tout fondement dans la vie. […]
On voit à partir de tout cela que c'est un simple malentendu qui est à l'origine de
la psychologie rationnelle. L'unité de la conscience, qui est au fondement des
catégories, est ici prise pour une intuition du sujet en tant qu'objet, à quoi la
catégorie de substance se trouve appliquée. […]
Le sujet des catégories ne peut donc pas recevoir, du simple fait qu'il les pense,
un concept de lui-même comme s'il constituait un objet de ces catégories ;"
(Fin de citation)
742
rationnelle], comme par exemple la persistance éternelle de l'âme à travers tous ses
changements, et même après la mort de l'être humain - bref : dès lors que nous
admettons qu'il désigne donc seulement une substance dans l'idée, mais non point
dans la réalité.
Enoncés du principe
1ère édition de la Critique : "Principe de la permanence - Tous les phénomènes
contiennent quelque chose de permanent (substance), constituant l'objet même,
et quelque chose de changeant, correspondant à une simple détermination de
cet objet, c'est-à-dire à un mode de son existence."
2ème édition de la Critique : "Principe de la permanence de la substance - Dans
tout changement connu par les phénomènes, la substance persiste, et son
quantum ne se trouve dans la nature ni augmenté ni diminué."
C'est ce que Lavoisier [63] a écrit : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se
transforme ». Pour Kant, l'expérience (humaine) d'un phénomène respecte
nécessairement cette loi de la nature.
Preuve
1ère édition : "Tous les phénomènes sont dans le temps. Celui-ci peut déterminer
de deux façons le rapport intervenant dans leur existence, selon qu'ils sont
successifs ou simultanés. Du premier point de vue, le temps est considéré
comme série chronologique ; du second, il est considéré comme étendue
temporelle."
2ème édition : "Tous les phénomènes sont dans le temps, et c'est en lui seul,
comme substrat (comme forme permanente de l'intuition interne), qu'aussi bien
la simultanéité que la succession se peuvent représenter…"
Dans cette seconde édition, ce premier paragraphe est plus long ;
l'argumentation de la preuve est résumée dans Substance.
K298 – "Si je laisse de côté la permanence (qui est une existence en tout temps), il
ne me reste, pour le concept de substance, que la représentation logique du sujet,
laquelle je pense réaliser en me représentant quelque chose qui peut avoir lieu
simplement comme sujet (sans être prédicat de quoi que ce soit)."
743
rationnelle], comme par exemple la persistance éternelle de l'âme à travers tous ses
changements, et même après la mort de l'être humain - bref : dès lors que nous
admettons qu'il désigne donc seulement une substance dans l'idée, mais non point
dans la réalité.
Personnalité
Psychologie
Ensemble de conduites stable, considéré sous un angle qui fait son unité.
Chez Kant
K374 – "Il est remarquable que la personnalité et ce qu'elle présuppose, la
permanence, par conséquent la substantialité de l'âme, doivent maintenant
commencer par être démontrées." (Démonstration impossible)
Personnification
Attribution d'une représentation de personne à une abstraction, « vision » de cette
abstraction comme un être humain qui l'incarne.
Les peuples primitifs voient parfois l'âme (l'esprit) d'une personne décédée comme
un être humain vivant dans un monde parallèle, où cette âme est plus ou moins
capable d'intervenir dans notre monde. (Jung [6])
Pétition de principe
Une pétition de principe est une faute logique consistant à démontrer une
proposition :
Soit en s'appuyant sur une proposition équivalente énoncée sous une forme un
peu différente ; exemple : « La Bible dit que Dieu existe ; or elle a été dictée par
Dieu, donc Dieu existe ».
Soit en s'appuyant sur une proposition considérée comme générale alors qu'elle
ne l'est pas dans tous les cas. C'est là un sophisme que Kant dénonce sous le
nom de Dialectique en général, logique de l'apparence.
[165] page 147 – "Par pétition de principe on entend l'admission d'une proposition
comme principe de preuve à titre de proposition immédiatement certaine, bien qu'elle
ait encore besoin d'une preuve."
Phénomène
Substantif
1er sens (scientifique) : fait objectif, observé, susceptible de se reproduire.
C'est une réalité extérieure perçue par l'homme.
Un type de phénomènes est un concept, classe de notions dont les membres
partagent les propriétés.
Exemple : phénomènes de propagation de la lumière, d'attraction universelle.
Les phénomènes physiques sont régis par des lois déterministes ; exemple :
la chute d'une pierre est un phénomène de la classe des effets de la pesanteur.
744
2ème sens (philosophique) : une situation dont on prend conscience, qui peut se
reproduire, acquérir une valeur objective et faire l'objet d'une connaissance.
Danger
On a facilement tendance à confondre le phénomène du monde réel et sa
représentation dans l'esprit, parce que l'homme a l'habitude de considérer que ce
qu'il perçoit est la réalité.
En fait, le phénomène du monde réel (défini par sa chose en soi) est
inaccessible : si on prend sa représentation (formée spontanément en mémoire de
travail) pour celle de cette chose en soi, on peut créer un conflit de la raison dénoncé
par Kant.
Voir :
Contenu d'un phénomène : forme et matière ;
Matière et forme d'un phénomène ;
Chose en soi.
745
K245 - "Tous les phénomènes en général sont donc des grandeurs continues, aussi
bien selon leur intuition, comme grandeurs extensives, que selon la simple
perception (sensation et par conséquent réalité), comme grandeurs intensives."
K242 - "Dans tous les phénomènes, le réel, qui est un objet de la sensation, possède
une grandeur intensive, c'est-à-dire un degré." (Voir Anticipations)
Un phénomène est perçu avec l'information nécessaire pour savoir qu'il existe
La perception d'un phénomène apporte, dans la représentation qu'elle en construit,
une information par laquelle le sujet prend conscience qu'il perçoit quelque chose qui
est réel, c'est-à-dire qui existe dans le temps et l'espace.
K242 – "[Les phénomènes] contiennent donc, outre l'intuition, les matériaux
nécessaires pour quelque objet en général (par quoi se trouve représenté quelque
chose d'existant dans l'espace et/ou dans le temps), c'est-à-dire le réel de la
sensation, en tant que celle-ci constitue une représentation simplement subjective
par laquelle on peut seulement prendre conscience que le sujet est affecté et que
l'on rapporte à un objet en général, en soi."
Voir aussi :
Réalité et phénomènes ;
Représentations et réalité des phénomènes extérieurs ;
Quelle est la cause d'un phénomène ?
746
Origine du concept de phénomène
K498 - Un phénomène a pour origine un objet transcendantal qui le détermine en
tant que simple représentation.
K499 – "…il nous faut en pensée donner en général pour fondement aux
phénomènes un objet transcendantal, quand bien même nous ne savons rien de ce
qu'il est en soi."
Phénoménologie
En philosophie et langage des sciences : observation et description des
phénomènes et de leurs modes d'apparition, indépendamment de tout jugement
de valeur.
Chez Husserl [87] :
Méthode de description et d'analyse des phénomènes avec une rigueur
scientifique. C'est un pont entre l'empirisme (qui met l'accent sur
l'observation) et le rationalisme (qui met l'accent sur la raison).
La phénoménologie propose un retour aux choses mêmes, à leur
signification, en s'en tenant non aux mots, mais aux actes où se dévoile leur
présence.
C'est une philosophie de l'intention créatrice. La vision intellectuelle crée
réellement son objet, non pas le simulacre, la copie, l'image de l'objet, mais
l'objet lui-même. C'est l'évidence, cette forme achevée de l'intentionnalité,
qui est constituante.
Phénoménologie pure ou transcendantale : doctrine selon laquelle, au terme
de réductions successives (éidétiques, phénoménologiques), l'esprit se
trouve en face de la conscience pure, du Moi transcendantal, dans les
conditions ultimes d'intelligibilité de tout ce qui peut être connu.
La phénoménologie explique l'essence d'un phénomène à partir des
variations dont est susceptible son appréhension lors des descriptions
eidétiques.
La phénoménologie transcendantale ouvre l'accès aux connaissances
absolues. Elle décrit les phénomènes et objets d'expérience dans leur
nécessité d'essence, et détermine leurs limites et leur communicabilité.
Pour décrire leur essence, la phénoménologie étudie ses objets :
du point de vue des actes donnant accès à l'évidence phénoménale ;
selon leurs structures propres, les formes constitutives et les normes
régulatrices.
En sciences humaines (psychologie, sociologie, histoire...) : étude des faits de
l'expérience vécue, indépendamment des principes ou des théories (étude des
rapports du sujet humain avec le monde, de la signification de la réalité
sociale...).
Philodoxe
Un philodoxe est un « artiste de la raison » :
747
(Citation de [165] page 24)
"L'artiste de la raison, ou comme Socrate [166] le nomme, le philodoxe, vise
simplement la connaissance spéculative sans se demander dans quelle mesure le
savoir contribue à la fin dernière de la raison humaine : il donne des règles pour
mettre la raison au service de toutes sortes de fins.
Philologie
Voir Philologie.
K686 – Par rapport à l'objet de toutes les connaissances rationnelles, Kant distingue
les philosophes sensualistes et les philosophes intellectualistes. "Cette différence
des écoles, si subtile qu'elle soit, avait cependant déjà commencé dans les temps les
plus primitifs, et elle s'est maintenue longtemps de manière ininterrompue."
Philosophes sensualistes
Le plus notable : Epicure [80].
"Les tenants de [cette] école affirmaient qu'il n'est de réalité effective que dans
les objets des sens, que tout le reste est imaginaire ;"
Les sensualistes "ne déniaient cependant pas toute réalité aux concepts de
l'entendement, mais cette réalité n'était à leurs yeux que logique, alors que pour
les autres elle était mystique."
Ils "désiraient que les vrais objets fussent simplement intelligibles, et affirmaient
la possibilité d'une intuition produite par l'entendement pur que n'assisterait
aucun des sens, lesquels, selon leur opinion, ne feraient que perturber
l'entendement."
Philosophes intellectualistes
Le plus notable : Platon [49].
Les tenants de [cette autre école] disaient au contraire que dans les sens il n'est
rien qu'apparence, que seul l'entendement connaît le vrai." Voir Idée.
Ils "admettaient des concepts intellectuels, mais n'acceptaient que des objets
sensibles."
748
Voir aussi :
Empirisme ;
Avantages de l'empirisme ;
Danger d'un empirisme devenu dogmatique ;
749
physiques ne sont ni bonnes ni méchantes, ni belles ni laides : elles n'ont plus de
dimension spirituelle, et certains déplorent le caractère sans âme du
déterminisme scientifique.
On entend souvent dire que l'harmonie des lois divines a été remplacée par le
hasard glacial, alors rappelons ici que les lois de la nature ne laissent aucune
place au hasard, qui n'existe pas (comme Kant le savait déjà) ; seule existe
l'impossibilité de prévoir les évolutions de certains systèmes naturels, dans des
cas précis tous sans surprise.
Le monde n'offre plus à l'homme les repères moraux des Grecs, basés sur
une harmonie d'origine divine. L'homme doit compter sur lui-même, être l'auteur
des lois de la nature ; et s'il éprouve le besoin (comme Kant) d'un Etre suprême
unifiant les lois du monde perçu et celles du monde moral, il doit l'imaginer sous
forme de Dieu transcendantal.
L'éthique (mot synonyme de morale) apporte des règles de comportement social
applicables au contexte décrit par la theoria : comment être utile aux autres,
juste, etc. Il s'agit ici de vivre en harmonie avec la société.
La sagesse apporte des règles de pensée et de comportement destinées à
permettre d'atteindre le salut et le bonheur, de vaincre ses peurs, de maîtriser
ses désirs.
Il n'y a pas une mais des philosophies : plusieurs explications du monde et méthodes
pour les trouver, plusieurs éthiques et plusieurs sagesses. Chacun doit choisir sa
philosophie, la construire par l'étude des œuvres philosophiques et la réflexion
personnelle, en général en adoptant des idées et des approches appartenant à
plusieurs des grands systèmes de pensée.
Philosophie de la nature
Voir Philosophie de la nature.
750
Philosophie pratique
Voir La valeur pratique d'une connaissance résulte de son usage possible.
751
K678 note * - "Le concept cosmique s'entend ici au sens de celui qui concerne ce qui
intéresse nécessairement chacun [le monde des phénomènes] ; par conséquent, je
détermine l'objectif d'une science d'après des concepts scolastiques quand je ne la
considère que comme l'une des compétences requises en vue de certains objectifs
arbitrairement déterminés."
Ce que la philosophie prescrit du point de vue des fins pour l'unité systématique
DES fins essentielles ne sont pas LA fin suprême
(Citation de K678-K679)
"Des fins essentielles ne sont pas encore pour autant les fins suprêmes, desquelles il
faut dire qu'il ne saurait y en avoir qu'une seule (résidant en une unité systématique
parfaite de la raison).
Par conséquent, elles sont ou la fin finale, ou des fins subalternes qui se rattachent
nécessairement à celle-ci à titre de moyens.
La première fin [la fin finale] n'est autre que la destination complète de l'être humain,
et la philosophie portant sur cette destination s'appelle morale."
(Fin de citation)
(Citation de K679)
[La philosophie de la raison pure peut être d'abord une critique de la raison pure]
"La philosophie de la raison pure ou bien est une propédeutique (un exercice
préliminaire) qui examine le pouvoir de la raison relativement à toute connaissance
pure a priori, et elle s'appelle critique ;
752
pure, selon un agencement systématique de l'ensemble, et elle s'appelle
métaphysique
- bien que ce nom puisse aussi être donné à la philosophie pure tout entière, en y
incluant la critique, pour réunir
[Recherche de ce qui peut être connu a priori]
aussi bien la recherche de tout ce qui peut jamais être connu a priori
[Présentation du contenu d'un système de connaissances pures]
que la présentation de ce qui constitue un système de connaissances
philosophiques pures de ce genre, mais se distingue de tout usage empirique de
la raison, en même temps que de son usage mathématique."
(Fin de citation)
[Métaphysique de la nature
Métaphysique au sens restreint (partie spéculative de la philosophie ci-dessus).
Cette métaphysique "examine tout en tant qu'il est (et non pas ce qui doit être) à
partir de concepts a priori" (K682)]
Ce qu'on appelle la métaphysique au sens restreint du terme se compose de la
philosophie transcendantale et de la physiologie de la raison pure.
[La philosophie transcendantale] considère seulement l'entendement et la raison
eux-mêmes, dans un système de tous les concepts et principes qui se rapportent
à des objets en général, sans admettre des objets qui seraient donnés (ontologia
[ontologie]) ;
[La physiologie de la raison pure] considère la nature, c'est-à-dire l'ensemble des
objets donnés (qu'ils soient donnés aux sens ou, si l'on veut, à une autre sorte
d'intuition), et elle est donc une physiologie (bien que seulement rationalis
[rationnelle]). Cela étant, l'usage de la raison, dans cette considération
rationnelle de la nature, est soit physique, soit hyperphysique, ou mieux : soit
immanent, soit transcendant.
[Usage immanent de la raison (usage physique) – Physiologie immanente :]
Le premier porte sur la nature, en tant que sa connaissance peut être
appliquée dans l'expérience (in concreto),
La physiologie immanente considère […] la nature comme l'ensemble qui
inclut tous les objets des sens, par conséquent telle qu'elle nous est donnée,
mais selon des conditions a priori sous lesquelles elle peut nous être
donnée en général. Mais Il n'y a que deux sortes d'objets des sens :
753
[Physique (rationnelle) :]
1. Les objets des sens externes, par conséquent l'ensemble de ces
objets, la nature corporelle ; la métaphysique de la nature corporelle se
nomme physique, mais, puisqu'elle doit contenir seulement les principes
de la connaissance a priori de la nature corporelle, physique rationnelle.
[Psychologie (connaissance rationnelle de l'âme) :]
2. L'objet du sens interne, l'âme, et, d'après les concepts fondamentaux
de l'âme en général, la nature pensante. La métaphysique de la nature
pensante se nomme psychologie, et, pour la même raison que l'on vient
d'indiquer, il n'y a lieu d'entendre ici que la connaissance rationnelle de
l'âme.
[Usage transcendant de la raison (usage hyperphysique) - Physiologie
transcendante :]
Le second [porte] sur cette liaison des objets de l'expérience qui dépasse
toute expérience. Cette physiologie transcendante a donc pour objet soit
une liaison interne, soit une liaison externe, mais qui vont toutes deux au-
delà de l'expérience possible :
[Physiologie de la nature dans sa globalité (liaison interne) :]
Dans le premier cas, elle est la physiologie de la nature dans sa
globalité, c'est-à-dire la connaissance transcendantale du monde, […]
[Connaissance transcendantale de Dieu (liaison externe) :]
Dans le deuxième cas, elle est celle de la relation qui unit la nature dans
sa globalité à un être situé au-dessus d'elle, c'est-à-dire la connaissance
transcendantale de Dieu."
(Fin de citation)
1. L'ontologie ;
754
[Kant fait sans doute là référence à la doctrine de l'Univers de Newton
[97], qu'il connaissait, et qui est basée sur des principes réalistes a priori
un siècle avant la Critique. Certains de ces principes entrent en conflit
avec l'idéalisme transcendantal de Kant : l'Univers est fait d'une infinité
de particules, points matériels infiniment petits mais pesants ; les objets
de volume fini sont des assemblages de particules, leur comportement
déterministe se déduisant de celui de ces particules et ne laissant
aucune place à la volonté, le libre arbitre et la responsabilité ; la réalité
(espace, temps, masse…) est indépendante de l'observateur, etc.]
La psychologia rationalis [psychologie rationnelle].
3. La cosmologie rationnelle ;
4. La théologie rationnelle.
L'idée originaire d'une philosophie de la raison pure prescrit cette division elle-
même ; elle est donc architectonique, conforme aux fins essentielles de celle-ci, et
non pas simplement technique, établie d'après des affinités perçues de manière
contingente et pour ainsi dire au petit bonheur, et c'est bien pourquoi elle est
également immuable et a valeur de législation."
(Fin de citation)
Philosophie transcendantale
Voir d'abord la définition de transcendantal.
K112 – "La philosophie transcendantale est l'Idée d'une science dont la critique de la
raison pure doit tracer tout le plan de façon architectonique, c'est-à-dire en partant de
principes, et en procurant la garantie pleine et entière que sont complètes et sûres
toutes les pièces qui constituent cet édifice. Elle est le système de tous les principes
de la raison pure."
K327 – "Le concept suprême, par lequel on commence en général une philosophie
transcendantale, est communément la division en possible et impossible. Dans la
mesure cependant où toute division suppose un concept qui soit divisé, un concept
supérieur doit encore être indiqué, à savoir le concept d'un objet en général (pris de
façon problématique et sans qu'il soit considéré s'il est quelque chose ou rien).
Puisque les catégories sont les seuls concepts qui se rapportent à des objets en
général, la démarche visant à distinguer si un objet est quelque chose ou rien suivra
l'ordre et l'indication des catégories."
755
L'esprit humain peut, à tout moment, construire des représentations dont les
concepts associés ne peuvent exister, car ils n'ont pas de sens ou sont
contradictoires : ce sont des concepts impossibles. L'esprit peut aussi construire
des représentations de concepts possibles, mais qui ne sont associés à aucun
objet d'expérience – au moins à l'instant considéré : ils sont alors possibles, mais
pas réels.
Lorsqu'on définit deux concepts comme sous-ensembles d'un concept divisé,
c'est qu'on suppose que ce concept global existe.
Pour s'assurer qu'un concept présent à l'esprit est possible, il suffit donc de
vérifier qu'on peut lui attribuer une ou plusieurs catégories.
Comme la connaissance d'un objet comprend, outre les concepts pensés, des
représentations données par la sensibilité, la philosophie transcendantale comprend
aussi une théorie transcendantale de la sensibilité.
Principe 2 : Pour la connaissance d'un phénomène, les concepts donnés de la
philosophie transcendantale, d'origine empirique, sont aussi produits
spontanément par l'entendement - et même nécessairement avant les concepts
pensés (K114).
Voir aussi :
Idéalisme de Kant - Idéalismes empirique, critique et transcendantal ;
Comment des propositions synthétiques a priori sont-elles possibles ?
756
Une théorie transcendantale de la méthode de la raison pure (K113).
K599 - Cette théorie est la détermination des conditions formelles [contraintes
d'existence] d'un système complet de la raison pure.
Réponse 2 de Kant : il faut donc chercher les conditions de validité de ces intuitions
Entre une attitude dogmatique : « Mes intuitions se passent de justification, acceptez-
les sans discuter » et une attitude sceptique « Toute intuition est douteuse », Kant
choisit une position (en fait : une doctrine) intermédiaire : le criticisme. La Critique de
la raison pure décrit les conditions nécessaires d'une connaissance vraie.
Voir aussi :
Criticisme ;
Faculté de juger ;
L'Esthétique transcendantale ;
Aperception.
757
Philosophie transcendantale (diagramme)
Philosophie
Philosophie transcendantale transcendantale
Esthétique Tsc.
(Théorie Tsc. de la Logique Tsc. RAISON
sensibilité)
Phoronomie
Dictionnaire Littré : science des lois de l'équilibre et du mouvement des corps ; mot
qu'on a proposé pour remplacer mécanique.
Physicalisme
Philosophie : Théorie épistémologique empiriste tendant à faire de la langue de la
physique une langue universelle, convenant à toutes les sciences y compris les
sciences humaines.
Selon [13]
La physiocratie est une doctrine professée par certains économistes du XVIIIème
siècle, qui repose sur l'idée que toute richesse vient de la terre, que la seule classe
productive est celle des agriculteurs et qu'il existe des lois naturelles basées sur la
liberté et la propriété privée qu'il suffit de respecter pour maintenir un ordre parfait.
758
Chez Kant
Par analogie avec l'économie, Kant appelle physiocratie transcendantale la doctrine
d'une toute-puissance de la nature, dont les lois s'imposent en toutes circonstances,
excluant donc le hasard que Kant appelle liberté (de désobéir à ces lois).
Physiologie
Substantif
Dictionnaire [13]
La physiologie générale est l'étude des phénomènes généraux de la vie
indépendamment d'une application à une espèce particulière.
Etymologie : physiologie vient d'un mot grec signifiant « recherche ou dissertation sur
les choses de la nature ».
Philosophie
Par opposition à psychologie, physiologie désigne tout ce qui, dans l'homme,
appartient au corps et non à l'esprit ; dans ce cas, physiologie peut même devenir
synonyme de physique. Voir :
Métaphysique de la nature (La physiologie de la raison pure)
K383 – "Si nous comparons la doctrine de l'âme, comme physiologie du sens interne,
avec la doctrine du corps, comme physiologie des objets des sens externes" …
Physiologique
Adjectif
Qui concerne le fonctionnement d'un organisme vivant, d'un organe, d'un
système organique ou tissulaire particulier.
Qui concerne l'action d'une substance, d'un médicament, d'une technique
thérapeutique ou d'un agent physique sur l'organisme, sur un tissu ou un organe.
Par opposition à psychique ou psychologique, physiologique veut dire :
qui concerne la vie de l'organisme, l'état, les besoins physiques du corps.
Physique quantique
Voir Mécanique quantique.
Pierre angulaire
Selon [13] : élément fondamental d'une entreprise importante. – Exemple.
759
Pierre de touche
Selon [13] : Ce qui sert à faire connaître la qualité ou la valeur de quelqu'un ou de
quelque chose. Une pierre de touche est un critère ou une valeur de comparaison.
K602 – "Il n'y a nul besoin d'une critique de la raison dans son usage empirique,
puisque ses principes, confrontés à la pierre de touche de l'expérience, se trouvent
soumis à une épreuve continuelle ;"
K111 – [La] "critique transcendantale […] a pour projet, non d'élargir les
connaissances elles-mêmes, mais simplement de les rectifier. […] Elle doit fournir la
pierre de touche de la valeur ou de l'absence de valeur de toutes les connaissances
a priori."
Pierre d'achoppement
Obstacle, embarras, difficulté, occasion de faillir, écueil grave.
Platonisme
Voir Idéalisme : doctrine (idéalisme empirique, subjectif ou transcendantal).
Polysyllogisme
Argument composé de deux syllogismes, tels que la conclusion du premier devient la
majeure du second. On peut faire aussi un prosyllogisme composé de plusieurs
syllogismes, tels que la conclusion de chacun d'eux devienne la majeure du suivant.
Populaire
Voir Exposé de la logique.
Pneumatisme
Selon [13] : Connaissance spéculative des choses spirituelles ; spiritualisme.
K417 – "Il est remarquable que le paralogisme transcendantal mette en œuvre une
apparence seulement unilatérale concernant l'Idée du sujet de notre pensée, et que
pour l'affirmation du contraire ne se puisse trouver la moindre apparence procédant
de concepts de la raison. L'avantage est entièrement du côté du pneumatisme, bien
que celui-ci ne puisse nier le défaut héréditaire qui consiste en ce que, malgré toute
l'apparence qui lui est favorable, il s'en va en fumée dès lors que la critique le soumet
à l'épreuve du feu."
Polémique
760
Chez Kant
Définition de l'usage polémique de la raison pure
(Citation de K620)
"Par usage polémique de la raison pure, j'entends […] la défense de ses énoncés
contre [les] négations dogmatiques.
[Il s'agit seulement de savoir s'il existe une preuve d'une affirmation opposée]
Il ne s'agit donc pas ici de savoir si ses affirmations ne pourraient pas aussi,
éventuellement, se trouver fausses, mais seulement du fait que personne ne peut
prétendre le contraire avec une certitude apodictique (ni même avec vraisemblance).
(Fin de citation)
Polyhistoire
Voir Polyhistoire.
Polymathie
Voir Polymathie.
Polytomie
Voir Dichotomie et polytomie.
Possession
K170-K171 - Kant utilise le mot possession pour désigner une connaissance pure
obtenue par déduction empirique à partir d'objets. En fait, Kant précise que ce n'est
pas une déduction, mais une dérivation physiologique.
Voir Déductions transcendantale, empirique et physiologique – Exemples.
Possibilité des choses (postulat) – Un concept peut-il être celui d'un objet ?
C'est un postulat de la pensée empirique en général.
Enoncé du postulat
K278 – Un objet physique décrit par un concept peut exister (Kant dit que « son
concept est possible ») s'il satisfait les conditions formelles d'une expérience en
général, c'est-à-dire s'il contient toute synthèse nécessaire à la connaissance d'un
objet. Or pour une telle synthèse il y a 3 cas :
Soit la synthèse ne se rapporte à aucune expérience, et le concept est vide : il
ne se rapporte à aucun objet qui existe ou peut exister ; il est pure abstraction.
Soit la synthèse se rapporte à une expérience réelle ou possible, et le concept
est dit empirique ;
Soit la synthèse est une condition a priori de l'expérience en général, et le
concept est dit pur : son objet ne peut être trouvé que dans l'expérience. C'est le
cas des catégories, concepts purs de l'entendement.
761
Son concept ne doit contenir aucune synthèse qui n'appartient pas à l'expérience
réelle possible. Or cette appartenance peut avoir lieu de deux façons :
La synthèse porte sur l'expérience donnée : le concept est empirique ;
La synthèse porte sur l'expérience en général : le concept est pur.
En résumé (K279) : "Si l'on voulait, cela étant, se forger des concepts vraiment
nouveaux de substances, de forces, d'actions réciproques à partir de la matière que
la perception nous offre, sans emprunter à l'expérience elle-même l'exemple de leur
liaison, on se perdrait dans de pures chimères, dont la possibilité ne bénéficie pas du
moindre signe en sa faveur, dans la mesure où l'on ne prend pas à leur égard
l'expérience pour maîtresse et qu'on ne lui emprunte pas ces concepts.
762
De tels concepts imaginaires ne peuvent recevoir a priori, à la manière des
catégories, le caractère de leur possibilité, comme des conditions dont toute
l'expérience dépend, mais seulement a posteriori, comme des termes qui sont
donnés par l'expérience elle-même, et leur possibilité doit être connue a posteriori et
empiriquement, ou bien elle ne peut pas être connue du tout."
[56b] §36 page 113 – "La possibilité de l'expérience en général est […] en même
temps la loi universelle de la nature, et les principes de la première sont les lois
mêmes de la seconde."
763
L'entendement a pour but la création de concepts à partir de l'expérience ; cette
création doit respecter le principe suivant : créer, pour chaque phénomène, des
concepts permettant les jugements qui le décrivent complètement (qui le
déterminent), selon des règles générales applicables à tous les phénomènes
possibles. Ces règles doivent donc aboutir à des concepts communs à tous les
phénomènes, chacun associé à une catégorie de jugements.
Voir Détermination et Déterminabilité d'un objet par un concept.
K293 – "Tous les principes de l'entendement pur ne sont que des principes a priori
de la possibilité de l'expérience ; […] c'est à celle-ci [l'expérience] uniquement que se
rapportent aussi toutes les propositions synthétiques a priori, leur possibilité reposant
elle-même totalement sur cette relation.
Remarque : "le Tout absolu de toute expérience possible n'est pas lui-même une
expérience" ([56b] §40 pages 126-127)
Un concept pur de l'entendement n'est que l'un des deux concepts de l'entendement.
Un concept pur de l'entendement n'a de sens que comme propriété d'un phénomène.
764
K235 - "La possibilité de l'expérience est donc ce qui donne de la réalité objective à
toutes nos connaissances a priori. Or, l'expérience repose sur l'unité synthétique des
phénomènes, c'est-à-dire sur une synthèse, opérée d'après des concepts de l'objet,
des phénomènes en général…"
Aux conditions de possibilité de l'expérience énoncées par Kant, il faut donc ajouter
les conséquences prévisibles d'une loi physique ; dans le cas du déplacement d'un
électron dans un champ électrique, par exemple, elles sont décrites par l'équation de
Schrödinger [64].
Le déterminisme statistique
En outre, les résultats de cette équation ou de cet algorithme ne sont pas tenus
d'être exacts : ils peuvent être probabilistes comme dans l'équation de Schrödinger.
C'est pourquoi j'ai proposé dans [12] une forme correspondante du déterminisme, le
déterminisme statistique. Celui-ci postule qu'un résultat (état à l'instant t ou évolution
d'un système) peut être décrit par :
Un résultat xi appartenant à un ensemble prévisible de résultats exacts
E{x1, x2,…, xn}, chacun assorti d'une probabilité calculable ; l'ensemble E peut
avoir un nombre fini ou infini d'éléments, la probabilité totale étant égale à 1.
Voir l'exemple de la molécule d'ammoniac.
Ou un résultat combinaison linéaire de résultats du type précédent (l'ammoniac,
encore).
765
Dans un phénomène soumis au déterminisme statistique la nature a plusieurs
évolutions possibles en même temps, même si cela choque notre intuition ! Elle
n'agit pas au hasard alors, elle nous impose un résultat imprévisible ; il y a du reste
des systèmes matériels dont une variable évolue d'une façon non calculable en un
temps raisonnable, ou calculable avec une précision toujours insuffisante…
Possibilité et réalité
K523 – "La possibilité des objets des sens est un rapport de ces objets à notre
pensée où quelque chose (savoir la forme empirique) peut être pensé a priori, mais
où ce qui constitue la matière, la réalité dans le phénomène (ce qui correspond à la
sensation), doit nécessairement être donné - faute de quoi il ne pourrait même pas
du tout être pensé et par conséquent sa possibilité ne pourrait pas être représentée.
Or, un objet des sens ne peut être intégralement déterminé que s'il est comparé avec
tous les prédicats du phénomène et s'il est représenté par l'intermédiaire de ces
prédicats de façon affirmative ou négative." (Voir Détermination)
Appartenance nécessaire d'un objet des sens au concept global de toute réalité
empirique
K524 – "…il n'y a […] pas d'autres objets qui puissent nous être donnés que les
objets des sens, et d'aucune autre manière que dans le contexte d'une expérience
possible : par conséquent, rien n'est pour nous un objet s'il ne présuppose pas le
concept global de toute réalité empirique comme condition de sa possibilité."
(Le « concept global de toute réalité empirique » est l'ensemble des réalités que
nous pourrions percevoir sous forme de phénomènes. En effet, tout objet a des
propriétés à un instant donné qui peuvent éventuellement dépendre d'autres
objets, ce qui rend certaines configurations d'objets impossibles : par exemple, si
je suis à Paris aujourd'hui à 8h12mn je ne peux pas être à Londres ; je peux
donc à 8h12 être photographié à Paris, mais pas à Londres et le phénomène
« moi à Londres » est alors impossible.)
766
tant que phénomènes devient, à travers la mise entre parenthèses de cette
restriction, un principe transcendantal de la possibilité des choses en général."
D'où le principe suivant (voir Déterminabilité d'un objet par un concept) :
Possibilité et imagination
Kant rappelle que notre esprit imagine un ensemble beaucoup plus grand de choses
que celui des choses possibles, et que celles-ci à leur tour sont plus nombreuses que
l'ensemble de celles qui existent en réalité (délimité par l'expérience) :
K290 note * – "La chose ne peut jamais contenir dans la réalité plus que ce qui
était contenu dans sa possibilité complète."
K288 – "La pauvreté est frappante de nos raisonnements habituels par lesquels
nous produisons un vaste empire de la possibilité, dont tout élément de la réalité
(tout objet de l'expérience) n'est qu'une petite partie. Tout réel est possible ; de
là résulte naturellement, suivant les règles logiques de la conversion, la
proposition simplement particulière : « Quelque [une partie du] possible est
réel » - ce qui semble avoir la même signification que : « Il y a beaucoup de
possible qui n'est pas réel »."
En plus des possibilités évidentes ci-dessus, Kant rappelle la réalité de choses qu'on
ne perçoit pas, mais qui ont un rapport physique certain avec une perception :
K288 – "Pour mon entendement, une seule chose peut venir s'ajouter à l'accord
avec les conditions formelles de l'expérience - savoir la liaison avec quelque
perception ; mais ce qui est lié avec celle-ci d'après des lois empiriques est réel,
bien qu'il ne soit pas immédiatement perçu."
Cette habitude de croire que « Ce que je vois est tout ce qu'il y a » est si fréquente,
et a des conséquences pratiques si importantes, que le Prix Nobel d'économie 2011
a été attribué au psychologue Daniel Kahneman pour l'avoir étudiée en détail [35] :
K288 - "Qu'en revanche, dans l'enchaînement global avec ce qui m'est donné
dans la perception, soit possible une autre série de phénomènes, par
conséquent davantage qu'une expérience unique comprenant tout en elle, cela
ne se peut conclure à partir de ce qui est donné, et bien moins encore sans que
quelque chose soit donné, puisque sans matière rien, nulle part, ne se peut
penser. Ce qui est possible uniquement sous des conditions qui sont elles-
mêmes simplement possibles ne l'est pas à tous les points de vue. Du moins
est-ce de cette façon que l'on prend la question quand on veut savoir si la
possibilité des choses s'étend au-delà de l'expérience."
767
Conclusion : la réalité dont je peux être certain est délimitée par la condition d'une
expérience unique comprenant tout en elle.
Postulat
Substantif
(Philosophie) : proposition qui n'est pas évidente par elle-même, mais qu'on est
conduit à recevoir parce qu'on ne voit pas d'autre principe auquel on puisse rattacher
soit une vérité qu'on ne saurait mettre en doute, soit une opération ou un acte dont la
légitimité n'est pas contestée. Exemple : postulat du déterminisme.
Par extension : Règle qui est admise de façon implicite et sur laquelle se fonde un
système de pensée.
Chez Kant
Kant conteste la définition précédente.
(Citation de [165] pages 192-193 note 81)
"Je me refuse à prendre ici [postulat] dans le sens que quelques auteurs
philosophiques modernes lui ont donné, contrairement au sens que lui accordent les
mathématiciens auxquels il appartient en propre, en prétendant que postuler revient
à avancer une proposition comme immédiatement certaine, sans justification ni
preuve.
[…]
Or en mathématique on appelle postulat la proposition pratique qui ne contient rien
d'autre que la synthèse par laquelle nous commençons par nous donner un objet et
en produisons le concept […].
[Voir Construction des concepts.]
Une proposition de ce genre ne peut être démontrée puisque le procédé qu'elle exige
est précisément celui qui nous permet de commencer par produire le concept d'une
telle figure."
(Fin de citation)
768
pure, qui implique la certitude apodictique. Ces derniers postulent la possibilité d'une
action dont on a préalablement reconnu a priori de façon théorique avec une entière
certitude que son objet est possible.
Alors que [le postulat] de la raison pratique postule la possibilité d'un objet (Dieu et
l'immortalité de l'âme) à partir de lois pratiques apodictiques, donc uniquement au
profit d'une raison pratique ;
en effet, cette certitude de la possibilité postulée n'est nullement théorique ; par suite
elle n'est pas non plus apodictique, c'est-à-dire que ce n'est pas une certitude
connue au point de vue de l'objet ; c'est une supposition nécessaire au point de vue
du sujet, qui lui permet d'observer ses lois objectives, mais pratiques ; c'est donc
simplement une hypothèse nécessaire.
Dans le premier cas, la condition est postulée (per thesin) ; dans le second, elle est
supposée (per hypothesin).
Postulat de causalité
Voir Le postulat de causalité.
Pouvoir de…
Kant utilise souvent le mot pouvoir dans le sens de :
Faculté ou fonction
Exemple : K110 - "La raison est le pouvoir qui fournit les principes de la
connaissance a priori."
Causalité – Exemple (extrait de K498) : la causalité d'un objet des sens, en tant
que cause de phénomènes, peut être considérée sous deux angles :
Comme intelligible, d'après son action en tant que chose en soi ;
Comme sensible, d'après les effets de cette action considérée comme un
phénomène dans le monde sensible.
Une telle double manière de penser le pouvoir d'un objet des sens ne contredit
aucun des concepts que nous avons à nous forger des phénomènes et d'une
expérience possible.
769
Pouvoirs supérieurs de connaissance par concepts
Voir Logique générale et pouvoirs supérieurs de connaissance.
770
K562 – "La raison est un pouvoir de dériver le particulier à partir du général".
Bien qu'elle dispose, par rapport à chacun de ces trois éléments, de sources de
connaissance a priori qui, au premier abord, semblent dédaigner les limites de toute
expérience, une critique complètement achevée nous persuade pourtant que toute
raison, dans son usage spéculatif, ne saurait jamais avec ces éléments dépasser le
champ de l'expérience possible,
mais jamais pour franchir ses limites, hors lesquelles, pour nous, [en dehors des
phénomènes du monde sensible] il n'est rien que de l'espace vide."
(Fin de citation)
771
Pouvoir de subsumer une représentation sous un concept : la recognition
Voir Recognition.
Pragmatique – Pragmatisme
Chez Kant
A041 [3] – "Une doctrine de la connaissance de l'homme, formulée de manière
systématique (anthropologie), peut s'accomplir d'un point de vue physiologique ou
d'un point de vue pragmatique. La connaissance physiologique de l'homme vise
l'exploration de ce que la nature fait de l'homme, la connaissance pragmatique celle
de ce que l'homme, comme être agissant par liberté, fait ou peut et doit faire de lui-
même."
772
Raison, fins et lois pour parvenir au bonheur
(Citation de K655)
La raison n'a qu'un but : définir les conditions du bonheur et moyens d'y parvenir
"Dans la doctrine de la prudence, la réunion de toutes les fins qui nous sont
proposées par nos inclinations en une fin unique : le bonheur et la combinaison des
moyens pour y parvenir constituent tout l'ouvrage de la raison,
La raison ne peut fournir comme moyens que des lois pragmatiques de liberté
laquelle ne peut fournir à cette destination que des lois pragmatiques de la libre
conduite, en vue d'atteindre les fins qui nous sont recommandées par les sens,
Ces lois doivent convenir aux fins recommandées par nos sens, et non pas être a
priori
et non pas, par conséquent, des lois pures, déterminées complètement a priori.
Seules des lois pratiques a priori de la raison pure, définissant des fins absolues,
autorisent un canon
En revanche, des lois pratiques pures, dont la fin qu'elles énoncent serait donnée
complètement a priori par la raison, et qui ne commanderaient pas de manière
empiriquement conditionnée, mais absolument, seraient des produits de la raison
pure. Or de ce type sont les lois morales ; par conséquent, elles seules relèvent de
l'usage pratique de la raison pure et autorisent un canon."
(Fin de citation)
Pratique
K656 – "Tous les concepts pratiques portent sur des objets de satisfaction ou de
désagrément, c'est-à-dire de plaisir et de déplaisir, par conséquent, au moins indi-
rectement, sur des objets de notre sentiment."
773
[108] page 87 – "Ce qui est pratiquement bon, c'est ce qui détermine la volonté par
l'intermédiaire de représentations de la raison, par conséquent non pas à partir de
causes subjectives, mais de manière objective, c'est-à-dire selon des principes qui
valent pour tout être raisonnable comme tel."
Voir Impératif - Impératif catégorique - Impératif technique.
K554 – "Il y a des lois pratiques qui sont absolument nécessaires (les lois morales)"
Précepte
Chez Kant
(Citation de [102] - La Religion dans les limites de la Raison page 46, note 1)
La conscience de la loi morale précède en nous la liberté de la volonté, et la
détermine car la loi morale est un précepte inconditionné.
[La loi morale est un principe absolu qui détermine la volonté de l'homme. La
liberté de vouloir de celui-ci n'ira pas contre cette loi.]
K222-K223 - La logique générale ne peut fournir de précepte à la faculté de
juger, la logique transcendantale si : elle peut corriger la faculté de juger et lui
fixer des règles d'usage de l'entendement pur.
René DESCARTES - "Discours de la méthode pour bien conduire sa raison et
chercher la vérité dans les sciences" (1637) - Extrait dit des « quatre
préceptes » :
"Le premier était de ne recevoir jamais aucune chose pour vraie que je ne la
connusse évidemment être telle ;"
774
Préceptes doctrinaux : voir Dogmata et mathemata.
Prédicable
En langage courant : adjectif. Une qualité est prédicable si elle peut être affirmée
à propos d'un sujet.
Chez Kant : substantif. Un prédicable est un concept a priori dérivé d'une
catégorie. Exemple : concept de force, dérivé du concept-souche de la causalité.
Voir aussi Prédicables de l'entendement.
Prédicament
Synonyme de catégorie.
Compléments :
Etre, exister : les différentes significations ;
L'essentiel et l'extra-essentiel.
Prégnant
Adjectif : qui s'impose avec une grande force.
Préjugé
Voir Cas particulier de jugement provisoire : le préjugé.
Prémisse
Selon [13], une prémisse (ou proposition première) est :
Soit une proposition, affirmation entrant dans une démonstration dont on tire une
conclusion ;
Soit l'une des deux propositions, majeure et mineure, d'un syllogisme.
775
Domaine d'attention
Un objet présent à l'esprit du sujet fait l'objet de son attention. Celle-ci peut concerner
plusieurs objets à la fois, par exemple pour comparaison ou pour synthèse. Un sujet
qui distingue plusieurs objets ne peut en citer qu'un à la fois, mais celui-ci peut
résulter d'une comparaison ou d'une synthèse.
"Il n'y a, procédant de la raison spéculative, que trois types de preuves possibles de
l'existence de Dieu"
(Citation de K529)
"Toutes les voies que l'on peut tenter de suivre dans ce but partent
[Preuve physico-théologique]
ou bien de l'expérience déterminée et de la nature particulière de notre monde
sensible, telle que cette expérience nous la fait connaître, et elles s'élèvent à
partir de celle-ci, en suivant les lois de la causalité, jusqu'à la cause suprême
située en dehors du monde ;
[Preuve cosmologique]
ou bien elles ne prennent empiriquement pour fondement qu'une expérience
indéterminée, c'est-à-dire une existence quelconque ;
[Preuve ontologique]
ou bien enfin elles font abstraction de toute expérience et concluent entièrement
a priori, à partir de simples concepts, à l'existence d'une cause suprême.
Je démontrerai que la raison parvient à tout aussi peu de résultats sur l'une de ces
voies (la voie empirique) que sur l'autre (la voie transcendantale), et que c'est en vain
qu'elle déploie ses ailes pour s'élever au-delà du monde sensible par la seule force
de la spéculation."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Validité du principe de causalité – Impossibilité d'une preuve spéculative de
l'existence de Dieu ;
Existence de Dieu.
776
Preuves possibles de l'existence de Dieu (1 - preuve ontologique)
K530 - Dialectique transcendantale / Livre II : des raisonnements dialectiques de la
raison pure / Chapitre 3 : L'idéal de la raison pure / 4ème section / De l'impossibilité
d'une preuve ontologique de l'existence de Dieu
777
Notre science actuelle permet cette possibilité d'Univers infiniment âgé si on
postule l'existence de multivers [30].
Soit n'avoir pas de limite, par exemple en oscillant de manière périodique :
quand on recule dans le temps on retrouve une situation précédente au bout
d'un certain temps (l'Eternel retour de Nietzsche [48]…)
Cette dernière hypothèse est toutefois limitée par des lois physiques, comme la
thermodynamique [119] qui impose une dégradation continue de l'énergie. Nous
n'avons pas d'expérience de ce type d'évolution, qui n'est évoquée ici que par
souci de rigueur, et ne poursuivrons pas l'exposé dans cette voie.
Dans les deux premiers cas (limite fixe et limite infinie), il y aurait nécessairement eu
une situation-cause initiale de tous les événements et situations ultérieurs. Cette
cause initiale ne suppose aucune condition préalable, car elle a été définie à partir de
la causalité d'événements postérieurs (et toujours du postulat de causalité) ; elle est
donc absolument nécessaire.
Ils admettaient donc l'existence d'un Etre originaire, Idée synthèse d'une substance
matérielle, d'une âme et d'une morale, principe spirituel répondant à la fois aux
besoins d'expliquer causalement la création du monde physique avec ses lois
causales, et des valeurs et lois divines.
L'homme conçoit Dieu comme un être parfait, un absolu inégalable - donc unique ; il
conçoit son Idée. La preuve ontologique consiste à déduire de cette Idée d'un Dieu
parfait qu'Il existe en tant qu'être absolument nécessaire, hypostasie non évidente :
ce n'est pas parce que l'homme imagine une chose qu'elle existe.
778
Une existence réelle ne peut être prouvée que par une expérience, et il ne peut y
avoir d'expérience d'un être absolument nécessaire, c'est-à-dire existant
indépendamment des circonstances d'une expérience.
Voir Je peux penser l'inexistence d'une chose, pas son absolue nécessité.
Objection : l'Idée d'un Dieu parfait ne permet pas d'en déduire quoi que ce soit
L'Idée de Dieu ne décrit son objet qu'avec des jugements : parfait, éternel,
omniprésent, etc. Or un jugement n'est pas un objet d'expérience, on ne peut le
percevoir pour en vérifier la réalité : l'Idée de Dieu est pure imagination, et on ne peut
en déduire quoi que ce soit, ni par cause efficiente ni par déduction logique :
K531 – "Tous les exemples avancés [pour montrer l'existence d'un tel être] sont,
sans exception, tirés uniquement de jugements, et non pas de choses et de leur
existence. Mais la nécessité inconditionnée des jugements n'est pas une
nécessité absolue des choses. Car la nécessité absolue du jugement est
seulement une nécessité conditionnée de la chose ou du prédicat présent dans
le jugement."
[Le raisonnement qui conduit à un être absolument nécessaire paraît à tort rigoureux]
Or […] le raisonnement qui conduit d'une existence donnée en général à quelque
existence absolument nécessaire semble être contraignant et rigoureux, [malgré le
non-respect] de toutes les conditions qu'impose l'entendement pour se forger un
concept d'une telle nécessité."
(Fin de citation)
779
Le contenu d'un concept (ses informations) ne peut comprendre son existence
K533 – "La détermination est un prédicat qui s'ajoute au concept du sujet et l'accroît.
Il faut donc qu'elle ne s'y trouve point déjà contenue."
Compléments d'explication
(Citation de K533-K534)
"Etre n'est à l'évidence pas un prédicat réel, c'est-à-dire un concept de quelque
chose qui puisse s'ajouter au concept d'une chose. C'est simplement la position
[réalité] d'une chose ou de certaines déterminations en soi.
Dans l'usage logique, [est] est purement et simplement la copule d'un jugement. La
proposition : Dieu est tout-puissant contient deux concepts qui possèdent leurs
objets : Dieu et toute-puissance ; le petit mot : est n'est pas un prédicat de plus, mais
c'est seulement ce qui pose [met] le prédicat en relation avec le sujet.
Or, si je prends le sujet (Dieu) avec tous ses prédicats (auxquels appartient aussi la
toute-puissance), et que je dis : Dieu est, ou : il est un Dieu, je ne pose pas un
nouveau prédicat venant s'ajouter au concept de Dieu, mais seulement le sujet en
lui-même avec tous ses prédicats, et du même coup, certes, l'objet se rapportant à
mon concept. Tous deux ne peuvent qu'avoir exactement le même contenu. […]
[Le concept d'un objet possible a les mêmes informations que celui de l'objet réel]
Cent thalers [pièces de monnaie] réels ne contiennent pas le moindre élément de
plus que cent thalers possibles. Car dans la mesure où ces derniers signifient le
concept, tandis que les premiers signifient l'objet en lui-même et sa position [réalité],
mon concept, au cas où cent thalers réels contiendraient plus que cent thalers
possibles, n'exprimerait pas l'objet tout entier, et par conséquent il n'en serait pas
non plus le concept adéquat. Mais quand il s'agit de l'état de ma fortune, il y a plus
avec cent thalers réels qu'avec leur simple concept (c'est-à-dire leur possibilité). Car
s'il appartient à la réalité effective, l'objet n'est pas simplement contenu de manière
analytique dans mon concept, mais il s'ajoute synthétiquement à mon concept (qui
est une détermination de mon état), sans qu'à la faveur de cette existence en dehors
de mon concept, ces cent thalers dont j'avais la pensée soient le moins du monde
augmentés.
780
Quand je pense donc une chose, quels que soient les prédicats au moyen
desquels je la pense et si nombreux qu'ils soient (même dans la détermination
complète), du fait que j'ajoute encore que cette chose existe, je n'ajoute pas le
moindre élément à la chose."
[Conclusion : l'existence d'un ensemble ou d'un concept ne peut faire partie des
informations qui les définissent, c'est une information supplémentaire.]
(Fin de citation)
K536 – "…nul être humain ne saurait davantage devenir plus riche de connaissances
à partir de simples Idées qu'un marchand ne le deviendrait en argent si, pour
améliorer l'état de sa fortune, il voulait ajouter quelques zéros à son relevé de
caisse."
Voir aussi :
Validité du principe de causalité – Impossibilité d'une preuve spéculative de
l'existence de Dieu ;
Existence de Dieu.
781
De la preuve ontologique à la preuve cosmologique (a contingentia mundi)
K537 – "La preuve cosmologique […] conserve l'union de la nécessité absolue avec
la réalité suprême, mais au lieu de conclure, comme la précédente, de la réalité
suprême à la nécessité dans l'existence, elle conclut bien plutôt de la nécessité
inconditionnée, préalablement donnée, de quelque être à la réalité illimitée de celui-
ci"
[Proposition majeure]
Si quelque chose existe, il faut aussi qu'existe un être absolument nécessaire.
[Toute chose qui existe a une cause de son existence, qui a elle-même une
cause, etc. Pour empêcher cette régression de causalité de remonter à l'infini, il
faut une cause sans cause, c'est-à-dire un être absolument nécessaire.]
[Proposition mineure]
Or, j'existe au moins moi-même ;
[Voir Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant.]
Conclusion
donc, existe un être absolument nécessaire."
[Critique de ce raisonnement :
1 - Ma propre existence (phénomène Je pense) prouve qu'il existe un
phénomène à l'origine de cette existence, mais rien ne prouve qu'il soit causé
par un être créateur. La chaîne de causalité de mon existence pourrait remonter
à l'infini, avoir toujours existé.
2 - L'existence éventuelle d'un phénomène initial qui a causé mon existence ne
prouve pas celle d'un créateur du monde entier (objet de toute expérience
possible), créateur qui devrait, en outre, avoir agi de manière transcendante,
contraire à la loi de causalité de la nature.]
(Fin de citation)
782
Du point de vue philosophique, l'hypothèse de contingence de l'Univers contredit
le postulat de causalité que nous considérons comme un postulat de la
nécessité des choses, et dont résulte le principe de fatalisme. Kant écrit :
(Citation de la page 286 de la Critique de la raison pure)
"La nécessité ne concerne […] que les rapports entre les phénomènes, d'après
la loi dynamique de la causalité. [Cette loi permet] de conclure a priori, à partir
d'une quelconque existence donnée (à partir d'une cause) à une autre existence
(à l'effet).
[Principe de fatalisme : ce qui arrive devait arriver]
Tout ce qui arrive est hypothétiquement nécessaire [devait arriver] : c'est là un
principe fondamental qui soumet dans le monde le changement à une loi, c'est-
à-dire à une règle s'appliquant à l'existence nécessaire, sans laquelle règle il n'y
aurait pas même de nature. [Preuve : [32] ]
Par conséquent, le principe : rien n'arrive par un hasard aveugle est une loi a
priori de la nature ; de même : aucune nécessité intervenant dans la nature n'est
une nécessité aveugle, mais c'est toujours une nécessité conditionnée, par
conséquent intelligible".
(Fin de citation)
Du point de vue logique (en ignorant le Big Bang), notre Univers a peut-être
toujours existé, sans avoir été créé. Mais du point de vue scientifique, sa
création a peut-être eu lieu dans un autre Univers : nous avons des théories
possibles mais non prouvées (les théories des multivers [30]) qui le supposent.
(Citation de K540)
"Se trouvent donc ici, par exemple :
1. Le principe transcendantal qui consiste à conclure du contingent à une cause,
lequel principe n'a de signification que dans le monde sensible, mais en dehors
de lui n'a plus du tout de sens. Car le concept purement intellectuel du contingent
ne peut produire aucune proposition synthétique telle que celle de causalité, et le
principe de cette dernière n'a aucune signification ni aucun critère réglant son
usage, si ce n'est uniquement dans le monde sensible ; or, ici, il devrait servir
précisément à sortir du monde sensible et à le dépasser.
2. Le principe qui conduit à conclure de l'impossibilité d'une série infinie de causes
données s'étageant les unes au-dessus des autres dans le monde sensible à une
cause première - conclusion à laquelle les principes de l'usage de la raison,
même dans l'expérience, ne nous autorisent pas, bien loin donc qu'ils nous
donnent la capacité d'étendre ce principe au-delà de l'expérience (où cette chaîne
ne peut pas du tout être prolongée).
3. La fausse autosatisfaction qu'éprouve la raison relativement à l'achèvement de
cette série, du fait que l'on écarte enfin toute condition, sans laquelle pourtant nul
concept d'une nécessité ne peut se présenter, et que, dans la mesure où l'on ne
783
peut alors rien comprendre de plus, on tient cela pour un achèvement de son
concept.
4. La confusion entre la possibilité logique d'un concept de la réunion de toute
réalité (qui ne donne lieu à nulle contradiction interne) et la possibilité
transcendantale, laquelle requiert un principe de l'effectuabilité d'une telle
synthèse, mais un principe qui à son tour ne peut concerner que le champ des
expériences possibles, etc."
(Fin de citation)
784
L'Idée transcendantale d'un être originaire qui soit nécessaire et totalement suffisant
est si démesurément grande, elle dépasse de si haut tout ce qui est empirique et se
trouve toujours conditionné, que
d'une part on ne peut jamais dégager de l'expérience assez de matière pour
remplir un tel concept,
et que d'autre part on tâtonne toujours au milieu du conditionné en ne cessant de
chercher en vain l'inconditionné, dont aucune loi de quelque synthèse empirique
que ce soit ne nous fournit un exemple ou ne procure le moindre indice."
(Fin de citation)
S'il ne fait pas partie de la chaîne, son action sur l'expérience donnée a dû être
transcendante, ce qui est contraire aux lois de la nature que nous postulons.
785
dans une substance unique toute la perfection possible : ce concept, qui favorise
l'exigence de notre raison quant à l'économie des principes, n'est alors en lui-même
soumis à aucune contradiction, et il est même profitable pour étendre l'usage de la
raison au sein de l'expérience, grâce à la façon dont une telle Idée peut nous
conduire vers l'ordre et la finalité, et cela sans qu'il entre jamais décisivement en
contradiction avec une expérience."
Kant finit par croire par son cœur à son Etre suprême transcendantal
K548 – [Ces connaissances] "accentuent notre croyance en un auteur suprême, au
point d'en faire une irrésistible conviction."
Voir Idéal de l'être suprême : un principe régulateur de la raison.
K548-K549 – "Ce serait par conséquent, non seulement une perte inconsolable, mais
aussi un geste totalement inutile, que de vouloir retirer à cette preuve une dimension
de son autorité. La raison, sans cesse rehaussée par des arguments si puissants et
qui se multiplient toujours en sous-main, bien qu'ils soient simplement empiriques, ne
peut pas être à ce point rabaissée par un doute né d'une spéculation subtile et
abstraite qu'il ne lui faille pas être arrachée à toute irrésolution morose, en quelque
sorte comme à un songe, par un regard jeté sur les merveilles de la nature et sur
l'agencement majestueux du monde, pour s'élever de grandeur en grandeur jusqu'à
la grandeur suprême, du conditionné à sa condition, jusqu'à l'auteur ultime et
inconditionné.
(Citation de K549-K550)
"Les principaux moments de la preuve physico-théologique que l'on a évoquée sont
les suivants :
1. Dans le monde se découvrent partout des signes transparents d'une mise en
ordre conforme à une intention déterminée, opérée avec une grande sagesse et
constituant un tout aussi indescriptible dans la diversité de son contenu qu'il peut
être illimité quant à la grandeur de son étendue.
2. Cette mise en ordre finalisée est totalement étrangère aux choses du monde, et
elle ne leur est attachée que de façon contingente — autrement dit : la nature de
cette diversité de choses n'aurait pas pu d'elle-même, par des moyens
convergents de tant de sortes, s'accorder à des intentions finales, si ces moyens
n'avaient été choisis tout exprès pour cela et disposés à cette fin par un principe
786
organisateur doué de raison prenant pour fondement des Idées et intervenant
d'après elles.
3. Il existe donc une (ou plusieurs) cause sublime et sage qui doit être la cause du
monde, non pas simplement par fécondité, comme une nature toute-puissante
agissant de manière aveugle, mais par liberté, comme une intelligence.
4. On peut conclure à l'unité de cette cause à partir de l'unité de la relation
réciproque des parties du monde considérées comme les éléments d'une
construction, cela avec certitude pour ce que notre observation atteint, mais pour
le reste avec vraisemblance, en suivant tous les principes de l'analogie."
(Fin de citation)
Voir aussi Kant croit en une finalité voulue par le Créateur, Etre suprême.
Primaire (adjectif)
Psychologie : qualifie certains types de processus, de mécanismes de défense,
d’identification, etc. que l’on rencontre dans le Ça. Qualifie aussi des modes
d’organisation : hystérie primaire, analité primaire, etc. Synonymes : précoce,
profond.
Selon Freud [41], les processus primaires ont pour but l'adéquation de la pensée
inconsciente au principe de plaisir.
En psychanalyse primaire désigne aussi l’irreprésentable, ce dont on ne peut se
souvenir mais qu’il faut reconstruire. C’est aussi le premier stade du développement
psychique, où ce qui est primaire existe à la naissance, alors que ce qui est
secondaire est acquis ultérieurement et en dérive.
Primauté
Voir Définition de la primauté.
Primitif
Voir types de concepts.
787
[Principe de la détermination intégrale (détermination complète) d'une chose
Parmi tous les prédicats de possibilité d'une chose, il y en a un et un seul qui
s'applique à l'une d'elles. – Ce principe concerne le contenu du concept de cette
chose, alors que le principe de la déterminabilité concerne sa forme logique]
[Corrélat commun de la possibilité totale de choses
Tous les prédicats de possibilité d'une chose ont en commun de s'appliquer à un
objet abstrait commun : la possibilité totale de choses. Dans cet ensemble de
prédicats, il existe donc une affinité entre éléments due à l'identité de leur valeur
(= Vrai) pour l'objet possibilité totale (que Kant appelle détermination intégrale ou
détermination complète) : la possibilité totale n'existe que si et seulement si
toutes ses composantes « possibilité d'une chose » existent, et réciproquement.]
[La détermination intégrale exige les valeurs logiques de tous les prédicats possibles]
La proposition : toute chose existante est intégralement déterminée signifie que, non
seulement de chaque couple de prédicats opposés donnés, mais aussi de tous les
prédicats possibles, il y en a toujours un qui lui convient ; ce ne sont pas simplement,
par cette proposition, des prédicats qui se trouvent logiquement comparés les uns
aux autres, mais c'est la chose elle-même que l'on compare transcendantalement à
l'ensemble global de tous les prédicats possibles.
Cette Idée est celle d'un "ensemble de tous les prédicats possibles en général". Elle
s'épure jusqu'à former un concept déterminé intégralement a priori, en devenant ainsi
le concept d'un objet singulier intégralement déterminé par la seule Idée et qu'il faut
appeler par conséquent un idéal de la raison pure.
788
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine)
Définition de la primauté
Substantif – La primauté est la situation de ce qui est au premier rang, qui est
prééminent, qui est plus important qu'une autre chose ou qui en est cause.
Kant propose donc de faire comme Copernic, d'inverser le point de vue : d'admettre
que la réalité est ce que nous en voyons par nos représentations (car nous ne
pourrons jamais la voir autrement) et d'imaginer des lois qui la décrivent et prédisent
son évolution – quitte à revenir ultérieurement sur ces lois si nécessaire :
K77-K78 – "Que l'on fasse donc une fois l'essai de voir si nous ne réussirions
pas mieux, dans les problèmes de métaphysique, dès lors que nous admettrions
que les objets [réels] doivent se régler d'après notre connaissance…"
K78 – "Si l'intuition devait se régler sur la nature des objets, je ne vois pas
comment on pourrait en savoir a priori quelque chose ; en revanche, si l'objet
(comme objet des sens) se règle sur la nature de notre pouvoir d'intuition [est
défini par ce que nous en voyons], je peux tout à fait bien me représenter cette
possibilité."
K79 – "Nous ne connaissons a priori des choses que ce que nous y mettons
nous-mêmes." (Toute connaissance nouvelle est construite à partir de (avec des
789
liaisons à des) connaissances existantes, issues d'intuitions des sens ou a priori
et précisées par l'entendement et la raison.)
Cette idée est révolutionnaire. Elle consiste à considérer comme réels les objets et
phénomènes physiques donnés et présents à l'esprit par leurs représentations : la
réalité suit le modèle que l'homme en conçoit. Tout homme fait donc confiance à ce
qu'il perçoit parce que c'est la seule réalité accessible. Mais cette confiance est
provisoire, elle peut être mise en cause dès qu'une contradiction apparaît avec une
autre réalité constatée, et il faut alors changer quelque chose dans le modèle.
Pour constituer une nature, les phénomènes doivent respecter une loi universelle
K501 - "Cette loi par laquelle seulement des phénomènes peuvent constituer une
nature et fournir les objets d'une expérience, c'est une loi de l'entendement par
rapport à laquelle il n'est permis sous aucun prétexte de faire un écart ni d'ériger un
quelconque phénomène en exception."
Voir aussi :
C'est l'homme qui introduit l'ordre et la régularité dans les lois de la nature ;
790
Comment la nature elle-même est-elle possible ?
Comment nos facultés de sensibilité et d'entendement sont-elles possibles ?
Or, s'il se trouve que, quand on considère les choses de ce double point de vue, il se
produit un accord avec le principe de la raison pure, alors qu'à se placer d'un unique
point de vue on voit surgir un inévitable conflit de la raison avec elle-même,
l'expérimentation tranche en faveur de la justesse de cette distinction." (Fin de
citation)
791
connaissance qui ne contredit aucun aspect de la réalité (voir citation ci-dessus) est
de définir cette réalité comme ce qui nous est donné par l'expérience, et de vérifier a
posteriori sa non-contradiction.
K319 – [Les phénomènes] "ne représentent pas des choses en soi. […] L'espace et
le temps ne seront pas des déterminations des choses en soi, mais des
phénomènes : ce que les choses peuvent bien être en soi, je ne le sais pas et n'ai
pas non plus besoin de le savoir, étant donné qu'en tout cas une chose ne peut
jamais se présenter à moi autrement que dans le phénomène."
Voir aussi : Non-existence d'un objet sensible.
Connaître la nature c'est décrire ses objets et aussi ses lois d'évolution
En plus des phénomènes que l'on perçoit, la connaissance désirée de la nature
concerne aussi les lois d'évolution, pour prévoir une situation future connaissant la
situation actuelle et l'évolution qui y a abouti. L'approche de Kant dans ce domaine
consiste à postuler que toute loi d'évolution constatée dans le passé est stable,
qu'elle est valable partout et toujours - c'est-à-dire le déterminisme.
Conclusion
La seule manière possible pour l'homme de connaître le monde qui l'entoure est d'en
construire des représentations par expérience, à partir de l'ensemble des concepts et
lois d'évolution disponibles dans sa mémoire, a priori ou acquis, ensemble qu'il
enrichit depuis sa naissance.
En postulant que le monde réel, inaccessible, est tel qu'il le voit, l'homme risque de
se tromper : la certitude des connaissances ainsi acquises est provisoire, elle peut et
doit être remise en question chaque fois qu'une connaissance en contredit une autre.
Cette approche est la base de la méthode scientifique moderne : voir le chapitre Le
Rationalisme critique de Karl Popper [90] dans [12].
Voir aussi :
Expérience, expérience effective ;
Possibilité de l'expérience (principes a priori) ;
Une chose en général ne peut être une cause, concept réservé à l'expérience ;
Détermination ;
Différence de primauté entre la métaphysique classique et le criticisme de Kant.
792
enveloppante quelconque à 2 dimensions. Seule restriction : dans ce système la
force de gravitation doit être négligeable par rapport aux 3 autres forces :
électromagnétique, faible et nucléaire.
Principe de raison
Voir Rationalisme – Principe de raison.
Chez Kant
Première définition d'un principe : connaissance synthétique par concept
(Exemple de connaissance synthétique par concept : « Tout ce qui arrive a une
cause ». L'existence d'un phénomène-conséquence en général ne peut se
déduire de celle d'un phénomène-cause par quelque opération logique, il faut
une synthèse (fournie dans ce cas par une induction ou par le principe de
raison).
793
« Les chiens aboient » est une proposition universelle, principe relatif dont on
peut déduire des connaissances particulières par syllogisme, comme lorsque l'on
dit « Médor est un chien » et qu'on en déduit que « Médor aboie ».
794
éléments] d'un jugement conditionnel en général, c'est-à-dire une connaissance
donnée à utiliser comme principe, et l'autre comme conséquence."
(En logique, une cause est une connaissance (sous forme de jugement) prise
comme hypothèse, cause qui entraîne une conséquence.)
Principes a priori
K230-K231 - Un principe a priori est le fondement d'autres jugements. En outre, il
n'est pas lui-même fondé dans des connaissances plus élevées et plus générales.
Voir aussi Tous les principes synthétiques a priori ne sont rien de plus que les
principes de l'expérience possible.
Principe d'abstraction
Voir Théorèmes sur les opérations portant sur des relations.
795
Principe de l'indiscernable (Leibniz)
Principe de la continuité de tous les changements
Principe de l'absence de sauts dans l'espace ou le temps
Principe de l'absence de lacune ou hiatus dans l'espace ou le temps
Principe de l'absence de hasard dans les changements du monde physique
Principe d'intelligibilité des lois de la nature.
Principe de la continuité des formes
Principe de la continuité des sensations des phénomènes
Principe de la déterminabilité d'un concept
Principe de la détermination intégrale (synthèse de tous les prédicats)
Principe de la distinction des objets en général en phénomènes et noumènes
Principe de la division transcendantale illimitée d'un phénomène en général
Principe de la neutralité de la raison dans tous les différends qu'elle rencontre
Principe de la permanence de la substance
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine)
Principe de la raison suffisante
Principe de la simultanéité suivant la loi de l'action réciproque ou de la
communauté
Principe de la succession chronologique suivant la loi de causalité
(Principe de la production)
Principe de la variété de l'homogène sous des espèces inférieures
Principe de la vie dans la matière (psychologie rationnelle) : substance pensante
Principe de l'homogénéité du divers sous des genres supérieurs
Principe de précaution de la Constitution française
Principe de l'application des mathématiques à l'expérience
Principe de l'unité synthétique du divers de toute intuition possible
Principe de raison
Principe de rationalité ou de nécessité
Principe de simplification
Principe de substitution
Principes d'unité systématique
Principe de [non-]contradiction - Principe de déterminabilité
Principe des analogies de l'expérience
Principe des espèces
796
Principe des indiscernables
Principe du pouvoir des règles de l'entendement
Principe du milieu exclu (ou principe du tiers exclu)
Principe du sens interne
Principe du syllogisme
Principe d'abstraction
Principe d'exclusion de Pauli
Principe d'exhaustivité de la détermination d'un objet
Principe d'identité
Principe d'importation
Principe d'incertitude de Heisenberg
Principe empirique suprême de l'unité des phénomènes
Principe fondamental Tout changement est soumis à une loi
Principe imposé par la raison à l'entendement : la cohérence avec lui-même
Principe logique des genres
Principe logique de l'unité systématique de l'entendement
Principe pratique suprême et impératif catégorique de la volonté humaine
Principe qui conduit à conclure de l'impossibilité d'une série infinie de causes
données s'étageant les unes au-dessus des autres dans le monde sensible à
une cause première
Principe Rien n'arrive par un hasard aveugle (Nécessité des choses)
Principe régulateur de la raison sur la condition empirique des phénomènes
(principe de la contingence intégrale)
Principe régulateur de la raison : l'Idéal de l'être suprême
Principe régulateur de la totalité des conditions
Principe suprême de la raison pure
Principe suprême de la connaissance humaine : l'unité synthétique de
l'aperception
Principe suprême de la possibilité d'intuition relativement à l'entendement
Principe suprême de la possibilité d'intuition relativement à la sensibilité
Principe suprême de tous les jugements analytiques : la non-contradiction
Principe suprême de tous les jugements synthétiques
Principe transcendantal de la possibilité de toutes les connaissances en général
Principe transcendantal qui consiste à conclure du contingent à une cause
797
Principe transcendantal de la possibilité des choses en général
Principe transcendantal de la raison pure pour la connaissance synthétique
Principe transcendantal de l'unité de tout le divers des représentations
Principe transcendantal : la raison rend peut-être l'unité systématique des
connaissances objectivement nécessaire
Principes a priori de la possibilité de l'expérience
Principes de la connaissance a priori (fournis par la raison)
Principes de la physique générale
Principes de la raison pure (Philosophie transcendantale)
Principes de la thermodynamique
Principes des concepts pensés et donnés de la philosophie transcendantale
Principes immanents et principes transcendants
Principes mathématiques et principes dynamiques
Principes physiologiques de l'expérience :
Principe de l'application des mathématiques à l'expérience ;
Principe de la continuité des sensations des phénomènes.
Principes pratiques, comme lois d'une causalité de la raison pure
Principes purs de la raison procédant de simples concepts
(à l'exclusion de la mathématique) (métaphysique de la nature)
Principes qui déterminent a priori et rendent nécessaires le faire et le ne pas
faire (métaphysique des mœurs)
Principes subjectifs (maximes)
Principes transcendantaux de l'usage de l'entendement pur (tables)
Axiomes de l'intuition ;
Anticipations de la perception et de l'expérience ;
Analogies de l'expérience ;
Postulats de la pensée empirique en général.
Principes universels des mœurs.
Enoncé du principe
La déterminabilité de tout concept est soumise à l'universalité (universalitas) du
principe qui exclut tout terme intermédiaire entre deux prédicats opposés.
798
De tous les prédicats (qualités) qui s'appliquent à un concept, chacun a une
valeur précise et une seule : vrai ou faux.
Enoncés
1ère édition : "Principe de la communauté - Toutes les substances, en tant
qu'elles sont simultanées, s'inscrivent en une communauté universelle (c'est-à-
dire dans une relation d'action réciproque)."
2ème édition : "Principe de la simultanéité suivant la loi de l'action réciproque ou
de la communauté - Toutes les substances, en tant qu'elles peuvent être
perçues dans l'espace comme simultanées, entretiennent une relation d'action
réciproque universelle."
Traduction du principe
Deux objets physiques sont perçus en même temps si et seulement si la certitude de
la présence de l'un entraîne celle de l'autre, leur ordre de présence à l'esprit étant
indifférent.
K277 – "L'unité de l'univers, dans lequel tous les phénomènes doivent être liés, est
visiblement une simple conséquence du principe implicitement admis de la commu-
nauté de toutes les substances qui sont simultanées."
Cette unité est un postulat, admis pour rendre possible la connaissance empirique de
l'existence simultanée d'objets dont l'existence séparée des substances (appelée
coexistence par Kant) est contingente (n'est pas déjà certaine ou nécessaire).
Kant postule que la simultanéité perçue est réelle, c'est-à-dire que les objets
simultanés sont liés par une relation nécessaire de réciprocité : à cet instant-là, si l'un
existe, alors l'autre existe aussi ; on ne peut envisager l'un sans envisager l'autre que
par la raison pure, hors de toute expérience ; ils ne sont possibles qu'ensemble.
799
Preuve du principe
L'existence simultanée de deux objets dans une perception implique une relation
nécessaire : la certitude qu'à l'instant de la perception si l'un existe, l'autre existe
aussi. Cette certitude implique une relation de réciprocité :
K273 – "La coexistence simultanée des substances dans l'espace ne peut être
connue dans l'expérience autrement qu'à travers la supposition d'une action
réciproque intervenant entre elles ; cette supposition est donc aussi la condition
de la possibilité des choses elles-mêmes comme objets de l'expérience."
Principe d'égalité de l'action et de la réaction
L'action réciproque (dans laquelle les objets ne peuvent se concevoir
qu'ensemble) évoquée là par Kant a une analogie avec la 3ème loi de Newton
[46], le principe d'égalité de l'action et de la réaction :
Quand deux corps interagissent, la force de vecteur F12 exercée par le
premier sur le second est l'opposé de celle du second sur le premier, F21 :
F12 = -F21
En fait Kant utilise dans sa preuve le postulat newtonien d'un espace absolu,
indépendant d'un déplacement de l'observateur, avec un temps unique (même heure
et même vitesse de passage du temps partout), postulat qui n'est qu'une première
approximation depuis la Relativité. Pour Kant, deux choses que nous voyons en
même temps sont simultanées (existent en même temps), même si nous en avons
pris conscience successivement, parce que notre entendement a une « faculté de
datation » qui leur attribue le même instant. Cette faculté est basée sur l'unité
synthétique de l'aperception et la correspondance des fonctions de l'entendement
avec les catégories.
800
Jugement synthétique ;
Jugements synthétiques a priori.
K293 – "Tous les principes de l'entendement pur ne sont que des principes a priori
de la possibilité de l'expérience ; […] c'est à celle-ci [l'expérience] uniquement que se
rapportent aussi toutes les propositions synthétiques a priori, leur possibilité reposant
elle-même totalement sur cette relation.
Notre entendement a une logique de fonctionnement, dans la génération de ses
concepts (donc des jugements correspondants), convenant parfaitement à la
compréhension des situations de la nature et la prédiction de leurs évolutions,
compréhension et prédictions conformes aux déterminisme des lois de la nature.
Voir aussi :
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).
Aperception transcendantale, pure.
Enfin, nos facultés de réflexion et de raisonnement complètent l'entendement
pour satisfaire nos besoins de connaissance et de prise de décision.
Voir aussi Tous les principes synthétiques a priori ne sont rien de plus que les
principes de l'expérience possible.
Probabilité
801
Chez Kant
Voir Définition de la probabilité.
Problématique
Adjectif - Chez Kant un jugement problématique est un jugement dont l'auteur admet
l'affirmation ou la négation comme simplement possibles.
A un instant donné, la valeur logique du jugement ne peut être que vrai ou faux,
l'une excluant l'autre (non-contradiction).
Procédure
Ensemble d'actions ou d'étapes de raisonnement pour réaliser une opération
complexe ou un programme d'ordinateur.
Ensemble des actes accomplis pour parvenir à une solution juridictionnelle
particulière, c'est-à-dire à un jugement par un tribunal.
Manière de conduire une analyse philosophique, un raisonnement.
Série de formalités administratives.
Processus - Processeur
Un processus est l'action d'un mécanisme mental (processeur) mis en œuvre par un
sujet, enchaînement d'opérations mentales exécutant des fonctions psychiques :
Elaboration de concepts (conceptualisation) ;
Fonctions cognitives ;
Jugements d'une affirmation (jugements vrai/faux et jugements de valeur) ;
Raisonnements (déduire une affirmation d'autres, tenues pour vraies) ;
Organisation par l'entendement et la raison de connaissances présentes à
l'esprit :
Classification : affirmer qu'un objet fait partie d'un ensemble (exemple : le
fromage est un aliment), ou qu'un objet a une certaine propriété.
Exemple de classes : les catégories de l'entendement.
Voir aussi Recognition (récognition) de concept ou de procédure.
Comparaison : comparaison d'éléments (plus petit, plus grand, égal,
différent), proportionnalité, schème.
Sériation : trier des éléments selon un ordre croissant ou décroissant.
Dénombrement : compter des objets quel que soit leur ordre.
Opérations formelles : raisonner sur des propositions logiques et des
hypothèses, et faire des déductions logiques.
Etc.
802
Un processus peut être totalement ou partiellement conscient, subconscient ou
inconscient.
803
Les Prolégomènes contiennent un plan de la Critique
[56b] Préface page 27 – On trouve dans les Prolégomènes un plan de la Critique
postérieur à l'ouvrage ; c'est un prélude à toute métaphysique.
[De nombreuses personnes (les littéraires, par exemple) ont un talent pour les
connaissances basées sur l'intuition, alors qu'ils manipulent mal l'abstraction]
il ne manque pas de talents qui réussissent fort bien dans des sciences solides et
mêmes profondes qui se rapprochent davantage de l'intuition, alors qu'ils échouent
dans les recherches qui procèdent par concepts purement abstraits ;
[Que ces intuitifs appliquent leurs talents à autre chose que la métaphysique]
en ce cas, qu'ils appliquent leurs dons intellectuels à un autre objet ;
De la mathématique
"Nous voici en présence d'une connaissance vaste et avérée : elle a dès maintenant
atteint une extension admirable et elle promet pour l'avenir un développement
illimité ; elle comporte de part en part une certitude apodictique, c'est-à-dire une
nécessité absolue ; ainsi elle ne repose sur aucun principe [aucune hypothèse]
d'expérience et c'est un pur produit de la raison, au surplus entièrement synthétique.
« Comment est-il donc possible que la raison humaine parvienne à constituer
complètement a priori une telle connaissance ? »"
804
Une connaissance mathématique doit apparaître dans l'intuition a priori
(Citation de [56b] §7 page 54)
"Toute connaissance mathématique présente ceci comme particularité qui lui est
propre : il faut qu'elle commence par présenter son concept dans l'intuition et même
a priori, donc dans une intuition qui n'est pas empirique, mais pure ;
faute de ce moyen, elle est incapable de faire un pas ; aussi ses jugements sont-ils
toujours intuitifs, au lieu que la philosophie doit se contenter de jugements discursifs,
à partir de simples concepts : elle peut bien se servir de l'intuition pour illustrer ses
thèses apodictiques, mais elle ne saurait dériver celles-ci de l'intuition."
[Voir Connaissance pure mathématique ; Discipline de la raison pure dans
l'usage dogmatique]
(Fin de citation)
Condition première de la mathématique : son fondement doit être une intuition pure
[56b] §7 page 54 - Conséquence de la nécessité d'un concept d'apparaître dans
l'intuition pure : il doit y être construit par synthèse à partir de concepts a priori,
construction qui lui confère un caractère concret, aussi concret pour l'esprit que s'il
provenait d'intuitions empiriques : voir In concreto.
Le problème posé est donc résolu, mais sous une condition : la construction a priori
des intuitions doit se faire à partir de concepts déjà connus.
forme qui précède l'apparition réelle des objets en la rendant en fait primordialement
possible.
[Un objet physique n'existe que lorsqu'il apparaît dans le temps, il ne peut être
perçu avant.]
805
[L'intuition a priori n'est pas possible pour la matière des phénomènes]
Cependant ce pouvoir d'intuitionner a priori ne concerne pas la matière de
l'apparition, c'est-à-dire ce qui en cette dernière est sensation, car c'est là ce qui
constitue l'empirique, mais uniquement la forme de cette apparition, l'espace et le
temps."
(Fin de citation)
Connaissance de phénomènes
La solution précédente concerne plus que les mathématiques : pour les phénomènes
et l'intuition des objets des sens, la condition précédente impose que leur divers soit
connu par des concepts construits a priori à partir des concepts a priori intuitifs
d'espace et temps.
Elle ne peut donc concerner que la forme d'éventuels objets physiques, leur
description dans l'espace et le temps. La matière de ces objets ne provient que de la
sensation que nous en éprouvons, elle ne peut être connue qu'après l'intuition de la
forme.
806
synthèse], et ce qui permet à la chose d'être déterminée dans son existence en
dehors de mon concept."
[…]
[On ne peut pas, non plus, le connaître par entendement]
Mon entendement […] ne prescrit aucune règle aux choses en elles-mêmes ; ce
n'est pas elles qui se règlent sur mon entendement, c'est mon entendement qui
devrait se régler sur elles ; il faudrait donc qu'elles me soient préalablement données
pour que j'en puisse tirer ces déterminations ; mais en ce cas, on ne les connaîtrait
pas a priori."
[…]
[On ne peut pas déduire des lois générales a posteriori d'un nombre fini
d'expériences]
Si c'est l'expérience qui doit m'enseigner les lois auxquelles est soumise l'existence
des choses [et leur évolution], il faudrait que ces lois, pour concerner les choses en
elles-mêmes, leur reviennent de façon nécessaire même en dehors de mon
expérience. Or l'expérience m'apprend bien ce qui existe et comment cela existe,
mais elle ne m'apprend jamais qu'il faut que cela existe nécessairement ainsi et pas
autrement."
(Fin de citation)
1ère conclusion sur la connaissance des lois de la nature : l'homme doit les imaginer
On ne peut connaître les lois générales de la nature, décrivant toutes les situations et
leur évolution, ni a priori, ni en les déduisant a posteriori de l'observation de
phénomènes. L'homme doit donc les imaginer, puis en vérifier chaque énoncé en
comparant ce qu'il comprend et prévoit aux phénomènes qu'il constate, pour rectifier,
compléter ou annuler cet énoncé si nécessaire :
voir Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).
Il est vrai qu'on y trouve également beaucoup de choses qui ne sont pas pures et
indépendantes des sources de l'expérience : telles le concept du mouvement, de
807
l'impénétrabilité (sur laquelle repose le concept empirique de matière), de l'inertie,
etc., qui s'opposent à ce qu'on la qualifie de science de la nature tout à fait pure ;
ajoutons qu'elle ne concerne que les objets des sens externes, et par conséquent
qu'elle n'est pas l'exemple d'une science de la nature générale au sens strict,
puisque c'est la nature en général, qu'elle concerne l'objet du sens externe ou du
sens interne (l'objet de la physique ou celui de la psychologie), que celle-ci doit
soumettre à des lois universelles.
808
lie dans une conscience en général la conscience empirique de cette
intuition et procure ainsi la validité universelle au jugement empirique ;
Si ce dernier concept est le concept de cause, il détermine l'intuition qui est
subsumée sous lui, par exemple lorsque je dis « Le soleil échauffe la pierre ».
Si je dis seulement « Lorsque le soleil éclaire la pierre, celle-ci devient chaude »,
je n'ai formulé qu'un jugement de perception, en affirmant une hypothèse, pas
une nécessité.]
(Fin de citation)
Les jugements synthétiques sont objectifs par leur concept pur de l'entendement
[56b] §20 pages 86-87 : "Quiconque analyse tous ses jugements synthétiques, en
tant qu'ils ont une valeur objective, découvre qu'ils ne consistent jamais en simples
intuitions qu'une simple comparaison suffirait, comme on le croit d'ordinaire, à lier
dans un jugement ; il trouve qu'ils seraient impossibles si, aux concepts tirés de
l'intuition [les concepts empiriques de l'entendement], ne venait encore s'ajouter un
pur concept d'entendement [la catégorie], sous lequel ces concepts ont été
subsumés et de ce fait liés de manière primordiale en un jugement objectivement
valable."
Un jugement est une proposition à propos d'un sujet. En tant que processus mental
en général (dont le déroulement est indépendant du sujet – le même pour tous les
jugements sur tous les sujets) il contient toujours deux types d'informations :
Les informations intuitives sur le sujet, qui en sont constitutives :
La quantité, où 3 cas sont possibles :
Si le jugement est universel, il concerne tous les objets de la classe du
sujet : « Tous les… » ;
Si le jugement est particulier, il concerne certains objets de la classe du
sujet : « Certains… » ;
Si le jugement est singulier, il concerne un seul objet de la classe du
sujet : « Un des… »
Ces trois attributs (moments) de quantité sont les seuls possibles, et l'un
d'entre eux existe dans tout jugement.
La qualité, où 3 cas sont possibles :
Si le jugement est affirmatif, énonçant une vérité sans nuance :
c'est une assertion. Exemple : « Un nombre premier n'est divisible que
par lui-même et l'unité. »
Si le jugement est négatif : il exclut complètement, s'oppose sans
nuance. Exemple : « A part 2, un nombre premier n'est jamais pair. »
Si le jugement est infini : il affirme à une négation près, comme « Tout
sauf ». Exemple : « Un couple de nombres entiers A et B pris dans cet
ordre définit toujours une fraction notée A/B, sauf lorsque B = 0. »
809
Ici aussi ces trois moments sont les seuls possibles et l'un d'entre eux existe
dans tout jugement.
Les informations discursives sur le sujet, qui décrivent un jugement sur le
jugement :
La relation, où 3 cas sont possibles :
Le jugement est catégorique, c'est une certitude.
Le jugement est hypothétique, il est soumis à des conditions.
Le jugement est disjonctif, il énonce une alternative (deux possibilités
mutuellement exclusives).
Ici aussi ces trois moments sont les seuls possibles et l'un d'entre eux existe
dans tout jugement.
La modalité, où 3 cas sont possibles :
Le jugement est jugé problématique par son auteur :
c'est une possibilité.
Le jugement est jugé assertorique par son auteur :
il ne se prononce pas sur sa vérité, c'est une simple éventualité.
Le jugement est jugé apodictique par son auteur :
il le croit démontrable, c'est une nécessité.
Ici aussi ces trois moments sont les seuls possibles et l'un d'entre eux existe
dans tout jugement.
810
1.
Selon la quantité
Universels
Particuliers
Singuliers
2. 3.
Selon la qualité Selon la relation
Affirmatifs Catégoriques
Négatifs Hypothétiques
Infinis Disjonctifs
4.
Selon la modalité
Problématiques
Assertoriques
Apodictiques
Jugements et synthèses
Voir Unification de représentations et de concepts (important).
Des jugements aux règles, puis aux règles a priori, aux principes et enfin aux lois
(Citation de [56b] §23 page 92)
"Des jugements, en tant qu'on les considère simplement comme la condition de
l'unification dans une conscience de représentations données, sont des règles.
811
Ces règles, en tant qu'elles représentent l'unification comme nécessaire, sont des
règles a priori et, dans la mesure où il n'y en a pas de supérieures, dont elles soient
elles-mêmes dérivées, ce sont des principes."
(Fin de citation)
"Or les principes de l'expérience possible sont en même temps les lois universelles
de la nature, qui peuvent être connues a priori."
[Critique : la définition de la nature par ses lois de Kant est très restrictive, c'est
une loi de l'entendement et seulement de l'entendement. De nos jours, les lois
de la nature ont deux objectifs : décrire pour expliquer, et prédire une évolution
pour décider (voir Déterminisme) ; imaginer, mettre au point et vérifier une loi
demande plus que de l'entendement.]
(Fin de citation)
Car ici on donne entière satisfaction à ce que la forme [la liste des informations et de
leurs relations] d'une science exige de systématique, puisque, au-dessus des
conditions formelles citées de tous les jugements en général, donc de toutes les
règles en général que présente la Logique, il n'y en a plus de possibles.
812
(Fin de citation)
de là vient qu'aucune perception n'est possible qui démontre un manque absolu [une
inexistence], […] et il en va de même dans tous les cas de la sensation ;
voilà pourquoi même les sensations qui constituent la qualité propre des
représentations empiriques (phénomènes) peuvent être anticipées par l'entendement
grâce au principe suivant : toutes les sensations dans leur ensemble, par conséquent
le réel de tout phénomène, ont des degrés ; et telle est la seconde application de la
mathématique (mathesis intensorum) à la science de la nature."
Seuil de perception
Kant affirme que toute sensation non-nulle, si faible soit son intensité, est
ressentie et procure l'impression d'existence d'un phénomène ; cette affirmation
est erronée : nous savons aujourd'hui, grâce à des mesures, qu'en dessous d'un
certain seuil, le cerveau ne perçoit rien.
813
1781 dans K243 que « la sensation est proprement ce qui ne peut aucunement
être anticipé. »]
(Fin de citation)
1.
Selon la quantité
Unité (la mesure)
Pluralité (la grandeur)
Totalité (le tout)
2. 3.
Selon la qualité Selon la relation
Réalité Substance
Négation Cause
Limitation Communauté
4.
Selon la modalité
Possibilité
Existence [réalité]
Nécessité
Catégories de relation
Dans une relation entre un sujet et un prédicat, celui-ci peut :
Résulter d'une propriété intrinsèque du sujet comme sa substance ;
Résulter d'une cause physique, avec sa chaîne de causalité dans le temps ;
Résulter de la logique pure, comme (à un instant donné) l'appartenance d'un
élément à un ensemble ou l'interaction entre deux éléments (voir Communauté).
814
Voir aussi :
Relation des jugements : catégoriques, hypothétiques, disjonctifs ;
Fonctions logiques de l'entendement dans les jugements (Table).
Catégories de la modalité
Ces catégories ne décrivent pas l'objet, mais ce que son concepteur en connaît :
L'objet peut exister (possibilité) ;
L'existence de l'objet est concevable, mais son concepteur ne se prononce pas
sur son existence ou son inexistence ;
L'existence de l'objet est certaine, nécessaire, démontrable.
Il faut donc [voir Catégories de relation] que [ces phénomènes] soient subsumés :
sous le concept de substance qui fonde toute détermination de l'existence à titre
de concept de la chose elle-même ;
ou bien sous le concept d'un effet par rapport à une cause, s'il se trouve une
succession entre les phénomènes, c'est-à-dire un événement ;
ou encore sous le concept de communauté (action réciproque) pour que la
simultanéité soit connue objectivement, c'est-à-dire par un jugement
d'expérience ;
et c'est ainsi que des principes a priori fondent des jugements objectivement valables
tout en étant empiriques ; c'est-à-dire qu'ils fondent la possibilité de l'expérience,
dans la mesure où celle-ci doit lier dans la nature des objets quant à leur existence.
Ces principes sont proprement les lois de la nature que l'on peut qualifier de
dynamiques."
(Fin de citation)
815
soit l'accord des phénomènes avec les conditions formelles que l'entendement
connaît [c'est-à-dire la possibilité],
soit leur corrélation avec ce que les sens et la perception comportent de matériel
[c'est-à-dire la réalité],
soit cet accord et cette corrélation [c'est-à-dire la nécessité] ;
par suite cet accord contient Possibilité, Réalité et Nécessité selon des lois
universelles de la nature ;
[Méthodologie physiologique]
ce qui constituerait la méthodologie physiologique [des jugements d'expérience]
(distinction
de la vérité et des hypothèses
et des limites de la légitimité de ces hypothèses)."
(Fin de citation)
Voir aussi :
Possibilité de l'expérience (principes a priori) ;
Relation entre ce qui nous apparaît et la réalité ;
Réalité et phénomènes.
Définition de la science de la nature (proposée par Daniel MARTIN, car Kant n'en
donne pas)
La science de la nature est un ensemble de connaissances et de lois d'évolution a
priori inspirées à l'homme par des expériences issues de ses perceptions. Les
scientifiques vérifient par consensus [90] la non-contradiction de ces connaissances
et lois avec de nouveaux faits d'expérience au fur et à mesure qu'ils surviennent.
816
1.
Axiomes
de l'intuition
2. 3.
Anticipations Analogies
de la perception de l'expérience
4.
Postulats de la pensée
empirique en général
Elle n'a pas été tirée des choses elles-mêmes, selon la méthode dogmatique :
"c'est que dans cette table tous les principes synthétiques a priori ont été établis de
façon exhaustive et selon un principe : le pouvoir de juger en général, qui constitue
l'essence de l'expérience au regard de l'entendement ; de la sorte, on peut être sûr
qu'il n'existe plus aucun autre principe semblable (c'est une satisfaction que la
méthode dogmatique ne peut jamais procurer) ;"
817
donc à des propositions synthétiques valables objectivement et universellement,
[Ces principes régissent l'existence dans le temps de cette synthèse selon des lois]
ils ne sauraient donc consister en rien d'autre qu'en détermination de l'existence
dans le temps selon des lois nécessaires, auxquelles il est indispensable qu'elle soit
soumise pour être objectivement valable et par conséquent expérience ;
[Les états successifs d'un même objet perçu résultent nécessairement d'une
causalité qui fait passer de chaque état à son successeur]
et même des perceptions non pas relativement à leur contenu, mais relativement à la
détermination du temps et au rapport de l'existence dans le temps selon des lois
universelles.
818
[Ainsi, une loi de la nature doit être valable à n'importe quelle époque et pendant
n'importe quelle durée.]
Une chose en général ne peut être une cause, concept réservé à l'expérience
Voir d'abord :
Principe (définition) – Différence avec postulat ;
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).
ce qui veut dire que l'expérience ne peut être qu'une connaissance objectivement
valable des phénomènes et de leur succession, en tant que l'antécédent peut être
rattaché au conséquent selon la règle des jugements hypothétiques."
[En tant qu'empiriste, Hume [40] croit que les situations qu'il perçoit sont des
choses en soi (des réalités) auxquelles la nature applique ses lois d'évolution.
Kant, au contraire, postule que les situations décrivent des phénomènes dont les
lois d'évolution postulées par l'homme prédisent l'évolution.]
(Fin de citation)
Un concept pur de l'entendement n'a de sens que comme propriété d'un phénomène
(Citation de [56b] §30 pages 103-104 suite de la précédente)
"C'est également la raison pour laquelle les concepts purs de l'entendement sont
absolument dépourvus de signification dès qu'on prétend les détacher des objets de
l'expérience pour les rapporter aux choses en elles-mêmes (Noumena).
Ils ne servent en quelque sorte qu'à épeler [préciser] les phénomènes pour pouvoir
les lire [interpréter] comme expérience ;
819
les principes, qui proviennent de ce qu'on [met en relation ces concepts purs] avec le
monde sensible, ont pour seul usage l'emploi que notre entendement en fait en vue
de l'expérience ;
au-delà, ce ne sont que des connexions arbitraires sans réalité objective, dont on ne
peut ni connaître a priori la possibilité, ni confirmer ou même seulement rendre
compréhensible par le recours à quelque exemple la relation aux objets, puisque
tous les exemples ne peuvent être empruntés qu'à une quelconque expérience
possible, et que par conséquent ce n'est également que dans une expérience
possible que l'on peut trouver les objets de ces concepts.
[…]
[On ne dérive pas les concepts purs de l'entendement de l'expérience, c'est au
contraire elle qui en est dérivée.]"
(Fin de citation)
Tous les principes synthétiques a priori ne sont rien de plus que les principes de
l'expérience possible
(Citation de [56b] §30 page 104)
"« Tous les principes synthétiques a priori ne sont rien de plus que les principes de
l'expérience possible », et ce n'est jamais aux choses en elles-mêmes, mais
uniquement aux phénomènes comme objets de l'expérience qu'on peut les rapporter.
Compléments :
Réalité et phénomènes ;
L'impossible détermination de l'objet réel d'où provient une expérience.
Premièrement :
comment est possible en général la nature, prise au sens matériel, c'est-à-dire
selon l'intuition, comme l'ensemble des phénomènes ;
comment sont possibles en général l'espace, le temps et ce qui les remplit tous
deux : l'objet de la sensation ?
820
[Par définition, un objet des sens qui existe occupe un volume d'espace et un
intervalle de temps.]
Voici la réponse :
grâce à [sa constitution,] notre sensibilité [est] affectée par des objets qui en eux-
mêmes lui sont inconnus et qui sont entièrement distincts de ces phénomènes. Dans
l'ouvrage lui-même, cette réponse a été donnée dans l'Esthétique transcendantale,
alors qu'ici, dans les Prolégomènes, elle a été donnée par la solution de la première
question capitale.
Deuxièmement :
comment est possible la nature au sens formel, comme ensemble des règles
auxquelles doivent être soumis tous les phénomènes pour pouvoir être pensés
comme liés en une expérience ?
[Comment le monde sensible peut-il être soumis à un ensemble de lois décrivant
des situations et des évolutions causales, c'est-à-dire au déterminisme ?]
ce qui rend primordialement possible notre manière propre de penser : je veux dire,
au moyen des règles
[L'existence de telles synthèses nous permet de postuler des lois par induction]
821
cerveau qui interprète son propre état des neurones. Mais si on nous demande
d'expliquer ces mécanismes-là, il y aura deux ordres distincts de difficulté :
L'analyse devra se terminer tôt ou tard par des concepts de base a priori ;
L'analyse devra décrire les structures relationnelles (statiques) et les
algorithmes (dynamiques) qui rendent compte des facultés qui nous
intéressent ; ces structures et algorithmes ne pourront être détaillées au-delà
des opérations logiques de base, elles-mêmes principes a priori.]
Car la seule notion que nous ayons de la nature, c'est celle de l'ensemble des
phénomènes, c'est-à-dire des représentations en nous, et par conséquent nous ne
pouvons tirer la loi de leur connexion d'ailleurs que des principes de leur connexion
en nous, c'est-à-dire des conditions de l'union nécessaire en une conscience, union
qui constitue la possibilité de l'expérience.
Une telle concordance, et qui plus est nécessaire, entre les principes de l'expérience
possible et les lois de la possibilité de la nature ne peut résulter que de deux
causes :
ou bien ces lois sont empruntées à la nature au moyen de l'expérience,
ou bien, à l'inverse, c'est la nature qui est dérivée des lois de la possibilité de
l'expérience en général et elle est tout à fait identique à la simple légalité
universelle de l'expérience.
822
La première hypothèse se contredit elle-même, car les lois universelles de la nature
peuvent et doivent être connues a priori (c'est-à-dire indépendamment de toute
expérience) et [régir] tout usage empirique de l'entendement ;
[56b] §39 page 120 – Kant a alors utilisé "le travail des logiciens qui me mettait à
même de présenter une table complète des fonctions de l'entendement, fonctions
pures tout en étant indéterminées relativement à tout objet."
[56b] §39 page 120 – Enfin, Kant a rapporté ces fonctions de jugement "à la
condition qui permet de déterminer des jugements comme objectivement valables, et
il en résulta des concepts purs de l'entendement [catégories dont la table est là].
823
Complétude de cet ensemble de 12 qualificatifs de la connaissance des choses par
entendement pur
[56b] §39 page 120 – "Je ne pouvais douter que c'était précisément ces concepts
purs-là, rien que ceux-là, pas un de plus ni de moins, qui sont capables de constituer
toute notre connaissance des choses par entendement pur. […] Je les appelai de
leur ancien nom de catégories."
Considérons un ensemble E d'éléments distincts (ils doivent être distincts pour que
les notions d'unité, pluralité et totalité aient un sens précis).
Supposons que les éléments x1, x2, x3… de E sont munis d'une loi d'associativité
permettant de définir des sous-ensembles S d'éléments x de E, notés S E (S est
inclus dans E et peut éventuellement être vide ou contenir E tout entier) : tout
élément x de E n'appartenant pas à un S donné peut lui être incorporé (ajouté).
Avec les deux jugements ci-dessus : Unité (pour définir et isoler un élément x de E)
et Ajout (pour incorporer un élément x absent d'un sous-ensemble S donné dans ce
sous-ensemble, on peut créer un S contenant tous les éléments de E. En effet, si un
élément x de E absent de S ne pouvait y être ajouté, cela contredirait la loi
d'associativité. Donc le jugement Totalité est superflu, on peut en reconstituer la
définition à partir de l'Unité et de l'Ajout.
Donc :
Tout sous-ensemble S non vide fait l'objet d'un jugement de Pluralité ;
L'ensemble complet E est un ensemble S construit à partir d'un S vide avec un
nombre suffisant d'ajouts d'un élément x, même s'il en faut une infinité.
824
1.b - Jugements dynamiques
La catégorie de Limitation correspond à une notion « sauf ». Elle peut être obtenue
en désignant explicitement, pour un objet jugé, le ou les cas opposés qui font
exception à la « catégorie principale » Réalité ou Négation.
Exemple : tous les nombres entiers sont impairs, sauf ceux qui sont divisibles
par 2.
Jugements de relation
Avec un esprit large, on peut considérer les jugements disjonctifs comme des
combinaisons de jugements catégoriques et hypothétiques, mais l'intérêt de cette
constatation est contestable.
Jugements de modalité
De même, on peut considérer les jugements assertoriques comme des combinaisons
de jugements apodictiques et problématiques, mais là aussi quel intérêt ?
et ainsi c'est pour elle-même que cette science a besoin d'une [déduction comme
celle utilisée pour les catégories]."
(Fin de citation)
Conséquences
La définition de Dieu par ses qualités ne permet pas de s'en construire une
image perceptible ; elle n'est pas schématisable.
825
La métaphysique ne produit pas de concept associable à un objet des sens, elle
n'est pas non plus schématisable.
mais le Tout absolu de toute expérience possible n'est pas lui-même une expérience
Ceux-ci [les Idées] se trouvent tout autant dans la nature de la raison que ceux-là [les
catégories] se trouvent dans la nature de l'entendement, et si les Idées comportent
une apparence qui peut aisément séduire, cette apparence est inévitable.
[…]
[Les Idées comportent une apparence qui peut induire en erreur]
Comme toute apparence consiste en ce que le principe subjectif du jugement est
tenu pour objectif, une connaissance que la raison aura d'elle-même dans son usage
transcendant (exalté) sera l'unique moyen pour elle de se préserver des égarements
où elle se fourvoie lorsqu'elle se méprend sur sa destination et rapporte de manière
transcendante à l'objet en lui-même ce qui ne concerne que son propre sujet."
826
[L'erreur consiste à prendre nos représentations pour leurs objets réels, alors
qu'elles se rapportent à des phénomènes.]
(Fin de citation)
Seule la raison pure peut détecter les erreurs dialectiques dues aux Idées
(Citation de [56b] §42 pages 128-129)
"Le propre de toutes les connaissances pures de l'entendement, c'est que leurs
concepts se rapportent à l'expérience et que leurs principes peuvent être confirmés
par l'expérience ;
aussi l'erreur qui peut s'y glisser ne peut être détectée que par la seule raison pure,
chose très difficile parce que ses Idées rendent cette raison naturellement
dialectique, et que ce n'est pas un examen objectif et dogmatique des choses, mais
uniquement l'examen subjectif de la raison elle-même, en tant que source des Idées,
qui peut imposer des bornes à cette apparence inévitable."
(Fin de citation)
Compléments :
Principal objectif de la Critique : distinguer les modes de connaissance et leurs
concepts ;
Idées transcendantales : les 4 conflits cosmologiques qui se termine par le sujet
suivant :
[Les deux premières antinomies s'expliquent par une contradiction comme celle-là]
[56b] §52c page 147 – "C'est un concept contradictoire de ce genre qui est au
principe des deux premières antinomies, que je nomme « mathématiques » parce
qu'elles s'occupent de l'addition ou de la division de l'homogène ; et à partir de là
827
j'explique comment il se fait que dans ces deux antinomies la thèse aussi bien que
l'antithèse sont fausses."
[Mes concepts issus de l'expérience ne peuvent connaître la grandeur d'un objet réel]
Or si je me demande quelle est, selon l'espace et le temps [considérés séparément],
la grandeur du monde, tous mes concepts sont tout aussi incapables de me dire qu'il
est infini ou qu'il est fini.
828
L'esprit peut effectuer une division d'un phénomène en parties, chacune ayant sa
représentation et devenant présente à l'esprit : l'esprit en a alors une expérience.
Mais cette expérience n'est pas celle d'une partie de l'objet réel du phénomène, qui
nous est inaccessible ; elle ne nous permet même pas d'affirmer que l'objet réel est
décomposable.
La décomposition est une action de notre esprit sur une représentation présente
dans sa mémoire, et seulement cela. Elle ne peut produire une partie simple (c'est-à-
dire indécomposable) que si notre esprit l'a pensée, et ce sans rapport avec la
composition de l'objet réel inaccessible considéré en lui-même, indépendamment du
sujet qui l'observe.
Origine de l'erreur dans ce deuxième exemple, selon [56b] §53 page 149
Comme dans l'exemple précédent, l'erreur de raisonnement vient de ce qu'on a pris
le phénomène (représentation mentale) pour la chose en soi associée à l'objet réel.
829
[Par sens du devoir-être, l'homme cherche à agir conformément à l'image qu'il veut
avoir de lui-même]
tout au contraire, l'attribut en question est […] le devoir-être, qui [bien que] jamais
encore advenu, en détermine l'activité et peut être cause d'actions dont l'effet est
phénomène dans le monde sensible.
Les deux causes de l'action des êtres raisonnables : loi naturelle et liberté
(Citation de [56b] §53 pages 153-154, conséquence de la précédente)
"Toutes les actions d'êtres raisonnables pour autant que ce sont des phénomènes
(qu'on peut les trouver dans quelque expérience) se soumettent à la nécessité
naturelle, alors que les mêmes actions, au seul point de vue du sujet raisonnable et
de son pouvoir d'agir uniquement par la raison, sont libres.
[La nature exige seulement que tout événement du monde sensible soit régi par des
lois constantes, c'est-à-dire par le déterminisme], par conséquent une relation à la
cause dans le phénomène, à côté de quoi la chose considérée en elle-même, qui en
est le principe, ainsi que sa causalité demeurent inconnues.
[Le déterminisme qui régit les lois de la nature s'applique aux phénomènes, pas
à leur objet qui demeure inconnu]²
[Qu'une évolution ait été déclenchée par l'homme ou une situation naturelle, la loi
naturelle s'applique toujours aux phénomènes que nous percevons]
Or je prétends : la loi naturelle demeure, que l'être raisonnable soit cause des effets
du monde sensible par raison, donc par liberté, ou qu'il ne les détermine pas par
principes rationnels. […] Dans les deux cas, l'interdépendance des effets est régie
par des lois constantes ;
[…]
[La raison est indépendante de la sensibilité (sa logique est absolue par définition)]
quant à la raison, elle n'en est pas elle-même pour autant déterminée par la
sensibilité (c'est impossible) et par conséquent […] elle est libre [elle laisse l'homme
libre].
830
[La loi naturelle est indépendante de la liberté, donc de l'usage pratique de la raison]
Donc la liberté ne fait pas obstacle à la loi naturelle des phénomènes, pas plus que
cette loi ne porte atteinte à la liberté de l'usage pratique de la raison, usage qui est
en connexion avec les choses en elles-mêmes à titre de principes déterminants.
Critique
Ce raisonnement suppose l'existence indépendante d'un libre arbitre de l'homme
malgré le déterminisme de la nature ; on peut donc aussi l'interpréter comme un
argumentaire antimatérialiste.
Nous savons aujourd'hui que ce que l'homme veut (désire) à un instant donné ne
dépend pas de sa raison, car celle-ci n'est qu'un outil au service de désirs non
raisonnés. Ce qu'il veut dépend de son état psychique, lui-même dépendant de son
héritage génétique, de ses connaissances et des circonstances ; ces conditions
définissent l'état des neurones et de leurs interconnexions, état que la conscience
interprète. Nous ne savons pas déduire le détail des volontés humaines d'états
psychiques, mais ce n'est pas une raison pour croire à l'existence d'une volonté
indépendante, notion aussi infondée que celles d'âme et de Dieu créateur.
831
[déterminer sa chose en soi d'après les éléments qui composent l'objet et leur
structure de relations]
car comment veut-on parvenir à cette détermination, alors que le temps, l'espace et
tous les concepts d'entendement, bien plus : tous les concepts tirés du monde
sensible par l'intuition empirique ou perception, n'ont et ne peuvent avoir d'autre
usage que de rendre l'expérience possible
et alors que même les concepts purs de l'entendement dès qu'ils sont affranchis de
cette condition ne déterminent aucun objet et sont dépourvus de toute signification ?"
(Fin de citation)
Mais il y a d'autres modes de connaissance que celles qui sont conformes aux
possibilités de l'expérience
(Citation de [56b] §57 page 162)
"Mais il y aurait une absurdité plus grande encore à ne concéder à aucune chose
d'exister en elle-même [sans pouvoir faire l'objet d'une expérience]
[Remarque]
La toute première origine du scepticisme, c'est la métaphysique et sa dialectique non
policée.
[…]
C'est vrai : nous ne pouvons donner, au-delà de toute expérience possible, aucun
concept déterminé de ce que peuvent être les choses en elles-mêmes.
832
et nous laisse toujours insatisfaits quand il s'agit d'explication complète, comme
chacun peut s'en apercevoir suffisamment par la dialectique de la raison pure, qui
précisément de ce fait est subjectivement bien fondée.
et sans admettre à cette seule fin, si aucun concept d'expérience n'y suffit, à tout le
moins un concept de la raison (celui d'un être immatériel simple), lors même que
nous ne pouvons pas du tout démontrer sa réalité objective ?
[Quand une réponse factuelle n'est pas conforme à nos envies, nous pouvons en
imaginer une, même irréelle. Kant prépare là le terrain pour son Dieu
transcendantal.]
833
bornes n'exigent rien de tel : ce sont seulement des négations affectant une grandeur
pour autant qu'elle n'a pas une intégralité absolue.
Limites de la raison
Or notre raison voit [conçoit], si l'on peut dire, autour d'elle un espace pour la
connaissance des choses en elles-mêmes, bien qu'elle ne puisse jamais en avoir de
concepts déterminés et qu'elle soit restreinte aux phénomènes."
(Fin de citation)
[56b] §57 page 165 - Le pouvoir de l'homme d'imaginer des concepts à partir des
phénomènes ou a priori n'est pas borné par la raison (bien que la psychologie
montre qu'il y a des concepts que l'homme se refuse à construire ou même à
considérer, du fait de barrières inconscientes ou subconscientes comme le déni de
réalité et le conflit cognitif).
834
[Le monde sensible et ses lois d'évolution ne sont que des abstractions humaines]
Le monde sensible n'est qu'une chaîne de phénomènes liés selon les lois
universelles, il n'a pas de consistance en lui-même, il n'est pas proprement la chose
en elle-même ;
dès lors qu'il est de fait que les phénomènes supposent toujours une chose en elle-
même."
[Il y a toujours une réalité inconnaissable qui fonde chaque phénomène]
(Fin de citation)
835
On ne peut déterminer l'Etre suprême par des concepts comme celui de faculté
d'entendement, parce qu'on n'en a que des intuitions subjectives dont le concept est
dans le phénomène, et qu'on veut ici dépasser le phénomène.
[56b] §57 page 169 - "Si d'autre part je coupe l'entendement de la sensibilité pour
avoir un entendement pur, alors il ne me reste que la seule forme de la pensée sans
intuition, qui ne me permet de ne rien connaître de déterminé, donc aucun objet. A
cette fin, il me faudrait penser un entendement autre qui aurait l'intuition des objets ;
mais je n'en ai pas le moindre concept, puisque celui de l'homme est discursif et ne
peut connaître que par concepts généraux."
La raison peut aller jusqu'à la limite entre le champ de l'expérience et les concepts
transcendants : les Idées transcendantales
(Citation de [56b] §57 pages 170-171)
"Si nous associons au mot d'ordre d'éviter tous les jugements transcendants de la
raison pure, le mot d'ordre opposé en apparence de pousser jusqu'aux concepts qui
se situent hors du champ de son usage immanent (empirique), nous nous
apercevons que tous deux peuvent fort bien coexister, mais uniquement à la limite
précise de tout usage légitime de la raison ; car cette limite appartient tout aussi bien
au champ de l'expérience qu'à celui des êtres de pensée [les Idées
transcendantales],
836
Justification du concept transcendantal d'un Créateur
(Citation de [56b] §57-58 pages 171 à 175, à la suite de la citation précédente)
"Or nous nous tenons sur cette limite si nous restreignons notre jugement au seul
rapport que le monde peut avoir à un Etre dont le concept même se trouve extérieur
à toute connaissance que nous sommes capables d'avoir à l'intérieur du monde.
[Le concept (Idée transcendantale) de l'Etre suprême, créateur de notre monde
sensible et des lois de la nature (abstractions humaines), mais qui n'est pas
censé avoir créé le monde physique lui-même, n'a rien de choquant ; il permet
une synthèse des concepts du monde sensible et du monde moral, plus
satisfaisante pour l'esprit que leur indépendance.]
Car alors nous n'attribuons à l'Etre suprême aucune des propriétés en elles-mêmes
qui nous permettent de penser les objets de l'expérience, et de ce fait, nous évitons
l'anthropomorphisme dogmatique ; mais nous attribuons cependant ces propriétés au
rapport de l'Etre suprême au monde [sensible] et nous nous permettons un
anthropomorphisme symbolique qui concerne en fait uniquement le langage et non
l'objet lui-même.
Une connaissance de cette espèce, c'est la connaissance par analogie, mot qui ne
veut pas dire, comme on l'entend communément, une ressemblance imparfaite entre
deux choses, mais bien la ressemblance parfaite de deux rapports entre des choses
tout à fait dissemblables [pour Kant une analogie est un isomorphisme].
(Fin de citation)
837
(Fin de citation)
Donc vouloir y puiser les principes et suivre en s'en servant l'apparence qui, pour
être naturelle, n'en est pas moins fausse, cela ne peut produire qu'un vain art
dialectique, jamais une science ;"
(Fin de citation)
Conditions à satisfaire par une critique de la raison pour que la métaphysique soit
une science
(Citation de [56b] pages 185-186)
"Or pour [que la métaphysique] puisse prétendre, à titre de science, non pas
simplement à une persuasion trompeuse, mais à la compréhension et à la conviction,
il faut qu'une critique de la raison elle-même expose :
Le fond des concepts a priori,
leur division selon leurs différentes sources : la sensibilité, l'entendement et
la raison,
en outre, leur tableau complet [leur liste exhaustive]
et l'analyse de tous ces concepts [la définition détaillée de chacun] avec
toutes les conséquences qui peuvent s'ensuivre,
Ensuite et surtout la possibilité de la connaissance synthétique a priori, grâce à
la déduction de ces concepts, les principes de leur emploi, enfin les limites de
cet emploi ;
Et il faut qu'elle expose tout cela dans un système complet.
838
Propédeutique
Éléments de connaissance constituant une préparation nécessaire à l'étude plus
approfondie d'une science.
Exemple : la Critique de la raison pure en tant qu'introduction au raisonnement.
Propension
Selon le dictionnaire [13] : Force intérieure, innée, naturelle, qui oriente
spontanément ou volontairement vers un agir, un comportement.
Synonymes : disposition, inclination, penchant.
K653 – "La raison est poussée par une propension de sa nature à aller au-delà de
son usage empirique, à s'aventurer, en un usage pur et par l'intermédiaire de simples
Idées, jusqu'aux plus extrêmes limites de toute connaissance, et à ne trouver de
repos que si elle a achevé de parcourir sa sphère, sous la forme d'un tout
systématique possédant par lui-même sa consistance.
Proposition
Une proposition logique est une proposition qui ne peut être que vraie (toujours vraie,
sans cas particulier ou exception) ou fausse (parce qu'il existe au moins un cas où sa
signification contredit une certitude) ; elle a donc deux valeurs logiques possibles :
vrai et faux, qui s'excluent mutuellement pour une proposition donnée.
Exemple : Disjonction.
Il existe aussi des informations isolées à valeur logique. En informatique, une telle
information peut être représentée par un bit qui vaut 0=faux ou 1=vrai.
les propositions pratiques sont celles qui énoncent l'action qui rend un objet possible
et se présente comme la condition nécessaire de ce dernier.
Remarque
La logique ne doit traiter des propositions pratiques que dans leur forme, dans la
mesure où elles sont opposées aux propositions théoriques. Dans leur contenu et
dans la mesure où elles se distinguent des propositions spéculatives, les
propositions pratiques relèvent de la morale."
(Fin de citation)
839
Voir aussi Propositions particulières vrai et faux.
En Logique symbolique une proposition est désignée par une lettre comme p ou q.
Il y a deux propositions particulières, opposées : vrai et faux.
Cette table regroupe les symboles utilisés dans ce texte. Une table beaucoup plus
complète figure pages 409-412 de [182].
840
Opérateur logique Symbole
Egal / différent par définition =/
Equivalence logique
Implication
Inclusion d'ensemble
Il existe au moins un
Conjonction ET (comme p q ET r s) .
Fonction propositionelle de x x
841
p = faux pour affirmer que p a la valeur logique faux, ou plus simplement ¬p
(prononcé « non-p ») ; si p = faux, alors ¬p = vrai. Voir Négation.
Symbole d'équivalence
L'équivalence est une relation « si et seulement si » entre deux êtres mathématiques
ou logiques : fonctions, ensembles, matrices, propositions, etc.
Ne pas confondre l'équivalence et l'égalité par définition = ci-dessus.
Symbole d'implication
Lire d'abord Implication.
Le symbole relie ce qui implique (à gauche) à ce qui est impliqué (à droite),
« p implique q » s'écrit p q.
Principe d'assertion
Le principe d'assertion permet de réduire une implication à une alternative, par
l'équivalence : (p q) (¬p q) (voir 4. dans Proposition en tant qu'implication).
Principe de substitution
Source : [177] page 12
Le principe de substitution s'énonce : « Dans une formule générale [de Logique
symbolique ou de mathématiques], à un terme général ou indéterminé on peut
substituer un terme particulier ou individuel. »
(C'est évident, puisqu'une formule générale n'a de valeur et même de sens qu'en
tant qu'elle peut s'appliquer à des termes particuliers.)
[177] page 9 : On peut définir une proposition comme « Ce qui s'implique soi-
même ». On prend alors pour définition de la notion de proposition le principe
842
d'identité [32]. Pour dire que p et q sont des propositions, on écrit (avec un symbole
d'implication ) : p p, q q. [Dans un texte de logique, p p se lira « soit la
proposition p »].
Toutes ces assertions équivalentes (mais dérivées) ne peuvent servir qu'à expliquer
l'implication p q, mais non à la définir.
Complément
Fonctions en Logique symbolique.
Compléments
Propositions analytiques et synthétiques ;
Propositions tautologiques ;
Syllogismes et principe de déduction.
1. Loi commutative
p.q=q.p
2. Loi associative
p . (q . r) = (p . q) . r
3. Principe de simplification
p.qp
L'affirmation simultanée de p et de q implique l'affirmation de p.
843
4. Principe de composition (conjonction, ET)
(p q) . (p r) (p (q . r))
Si p implique q, ET si p implique r, p implique q . r : (vérité simultanée de q et r).
Prosyllogisme (pro-syllogisme)
Conclusion d'une série polysyllogistique qui sert de prémisse d'un raisonnement situé
après.
Psychanalyse
Procédé d'investigation des phénomènes inconscients ;
Méthode thérapeutique des troubles névrotiques ;
Partie de la psychologie.
Psyché
Psychologie : Ensemble des comportements individuels conscients et inconscients,
par opposition à ce qui est purement organique. C'est un assemblage de complexes
contradictoires.
Le conscient est la frange adaptative de la psyché. Au conscient incombe
l'adaptation au monde, ses soucis, ses difficultés, ses tensions. Le reste de la psyché
est déroulement végétatif, voire végétal de la vie. [6] (page 207 - Note du Traducteur)
Selon Jung [42], la psyché est un système autorégulateur : si le conscient est dans
une position trop unilatérale, l’inconscient tend spontanément à en rétablir l'équilibre
en créant un symbole.
Psychiatrie
Partie de la médecine qui étudie et traite les maladies mentales et les troubles du
psychisme.
Psychisme
Ensemble, conscient ou inconscient, considéré dans sa totalité ou partiellement, des
phénomènes et processus relevant de l'esprit, de l'intelligence et de l'affectivité, et
constituant la vie psychique. Cet ensemble comprend les phénomènes conscients,
relevant de l'état d'éveil, et les phénomènes non conscients présents que le sujet soit
éveillé ou non.
Voir aussi : sens psychique.
844
Psychokinèse
Capacité à influencer mentalement un objet, un processus ou un système sans
l’utilisation de mécanismes ou d’énergies connues.
(La notion d'utilisation d'une énergie inconnue ou d'un mécanisme inconnu est
elle-même scientifiquement absurde. La science peut éventuellement chercher
des formes d'énergie encore inconnues ou de nouveaux mécanismes, mais
l'utilisation de quelque chose d'inconnu n'est pas scientifique.)
Psychologie
A l'origine branche de la philosophie qui étudiait l'âme, aujourd'hui discipline
scientifique qui étudie le psychisme. Comprend une dizaine de branches :
psychanalyse, psychologie clinique, psychologie expérimentale, psychopathologie,
psychologie du développement, psychologie de l'éducation, psychologie cognitive,
neuropsychologie, psychologie sociale, psychologie du travail et des organisations…
Psychologie cognitive
Science de la cognition.
Psychologie empirique
Voir Psychologie empirique.
845
Buts de la psychologie rationnelle
1. Recherche de substance et de permanence au-delà des phénomènes :
Cette « science » utilise l'aperception (voir Conscience de soi chez Kant) pour
découvrir, au-delà des phénomènes, une réalité substantielle et permanente dont
ces phénomènes ne sont que la détermination, l'expérience effective.
Hélas, une telle découverte est impossible : elle hypostasie une abstraction en la
prenant pour un objet réel (K385) : dans les domaines de l'âme et de l'Idée il n'y a
ni substance, ni permanence.
2. Réfutation du matérialisme (but de sa critique invoqué par Kant) :
Voici pourquoi cette réfutation n'est possible que par l'Idéalisme transcendantal :
(Citation de K384-K385)
"En quoi une doctrine de l'âme fondée sur de purs principes rationnels pourrait-
elle nous être nécessaire ? Sans aucun doute, avant tout dans le but de garantir
notre Moi pensant contre le danger du matérialisme. Mais de cet objectif
s'acquitte le concept rationnel que nous avons donné de notre Moi pensant.
[Objection : mais si on supprime la matière, notamment le cerveau, la pensée
disparaît et avec elle la possibilité d'un être pensant ! Voici la réponse de Kant :]
Bien loin, en effet, qu'à l'aide de ce concept il demeure une quelconque crainte
que, si l'on supprime la matière, se trouve abolie en même temps toute pensée et
même l'existence d'êtres pensants, bien plutôt est-il clairement démontré que, si
je supprime le sujet pensant, c'est tout le monde des corps qui doit disparaître, en
tant qu'il n'est rien que le phénomène inscrit dans la sensibilité de notre sujet et
qu'il correspond à un type de représentations de celui-ci."
[L'objection ci-dessus relevait du matérialisme et/ou du Réalisme, doctrines que
Kant rejette au profit de son Idéalisme transcendantal. Pour lui, la seule réalité
prouvée, la seule sur laquelle une connaissance rationnelle du monde peut se
baser, est celle du sujet qui existe parce qu'il sait qu'il pense, celle du « Je pense,
donc j'existe » c'est-à-dire du Moi(Je) ; et cette certitude-là permet au sujet d'avoir
aussi la certitude de l'existence du monde extérieur. Donc l'Idée (le concept
rationnel) est bien le fondement sur lequel les phénomènes « images » du monde
matériel doivent être basés.]
(Fin de citation)
3. Instauration de limites à la raison spéculative (raison d'être affirmée par Kant) :
K410 - "Il n'y a donc pas de psychologie rationnelle comme doctrine qui soit
capable de nous procurer quelque chose à ajouter à la connaissance que nous
avons de nous-mêmes, mais il n'en existe une que comme discipline qui instaure
des limites infranchissables, dans ce domaine, à la raison spéculative, d'un côté
pour qu'elle ne se précipite pas dans le sein du matérialisme sans âme, de l'autre
côté pour qu'elle ne se perde pas avec exaltation dans le spiritualisme, dépourvu
pour nous de tout fondement dans la vie."
846
"Le jugement : Je pense […] est le véhicule de tous les concepts en général, et
par conséquent aussi des concepts transcendantaux.
[Je pense] "sert uniquement à faire apparaître toute pensée comme appartenant
à la conscience. […] Il sert pourtant à différencier deux sortes d'objets à partir de
la nature de notre faculté de représentation :
Je suis, en tant que pensant, un objet du sens interne et porte le nom d'âme.
Ce qui est un objet des sens externes porte le nom de corps."
"En vertu de quoi le terme : Je, en tant qu'être pensant, désigne déjà l'objet de la
psychologie, qui peut être appelée la doctrine rationnelle de l'âme lorsque je ne
désire rien savoir de plus, sur l'âme, que ce qui, indépendamment de toute
expérience (qui me détermine plus précisément et in concreto), peut être conclu
à partir de ce concept Je, en tant qu'il survient dans toute pensée."
(Fin des citations)
847
transcendantal. Et si c'est le cas, il ne sait pas, non plus, si cet éventuel
substrat a une existence propre, indépendante de son esprit, ou si c'est une
création de cet esprit, une imagination.]
…ni même l'indépendance de son existence vis-à-vis de l'éventuel substrat
transcendantal des phénomènes extérieurs ; car celui-ci m'est tout aussi
inconnu que celui-là."
(Fin de citation)
5. Je est le sujet absolu de sa pensée : il ne peut être prédicat de quoi que ce soit
d'autre.
6. Le sujet a une unité absolue
La conscience de soi d'un sujet ne dépend d'aucun phénomène externe : elle est
absolue.
Elle comprend une conscience ininterrompue du temps qui passe.
Cette conscience confère au sujet une unité absolue : toutes ses pensées
contiennent une conscience de soi.
K367 – "Le Moi subjectif ne peut […] être partagé et divisé, et ce Moi, nous le
supposons cependant à propos de toute pensée."
K371 – "Le Moi pensant, l'âme (nom dont on se sert pour désigner l'objet
transcendantal du sens interne), est simple."
Donc la psychologie rationnelle qui voudrait déduire des concepts internes de l'âme
et du Moi d'un sujet des propriétés externes de substance et de permanence à leur
attribuer est illusoire. Kant l'explique comme suit.
848
prédicats transcendantaux de cet objet, puisque le moindre prédicat empirique
viendrait corrompre la pureté rationnelle et l'indépendance de cette science à l'égard
de toute expérience."
L'acte originaire de penser à soi-même de la psychologie rationnelle ne peut
donc comporter que des prédicats transcendantaux. Si jamais le sujet en
déduisait un prédicat empirique, sa déduction serait fausse.
K384 - "Ce Moi est aussi peu une intuition qu'un concept d'un quelconque objet, mais
il est la simple forme de la conscience, telle qu'elle peut accompagner les deux
sortes de représentations [externe et interne] et les élever ainsi au rang de
connaissance, dès lors qu'est en outre donné dans l'intuition quelque chose d'autre
qui offre une matière pour se représenter un objet. Donc, toute la psychologie
rationnelle s'effondre comme une science dépassant toutes les forces de la raison
humaine, et il ne nous reste qu'à étudier notre âme à partir du fil conducteur de
l'expérience et à nous maintenir dans les limites des questions qui ne vont pas au-
delà du domaine où l'expérience intérieure possible est à même de leur conférer un
contenu."
Le Moi est si simple parce que cette représentation n'a pas de contenu
K384 – "…le Moi […] possède une telle simplicité précisément parce que cette
représentation n'a pas de contenu, donc pas de divers, ce pourquoi elle semble aussi
représenter ou, pour mieux dire, désigner un objet simple."
Moi (Je) est toujours sujet, mais en tant qu'objet Je n'est pas une substance
K402-K403 – Le Moi, le Je pense, doit toujours dans la pensée avoir valeur de sujet,
de quelque chose qui ne puisse être simplement considéré comme un prédicat
venant s'attacher à la pensée : c'est là une proposition apodictique et même
identique ; toutefois, elle ne signifie pas que je sois, comme objet, un être subsistant
par moi-même, autrement dit une substance.
Quand un sujet pense à lui-même en train de penser, donc en tant qu'objet, sa
représentation de lui-même est vide, ce n'est qu'une certitude d'exister pendant
que le temps extérieur passe. Cette impression d'exister par rapport au monde
extérieur indépendamment du temps qui passe fait qu'il est tenté de s'attribuer –
sans preuve - une substance permanente. La certitude d'existence d'un temps
extérieur à moi-même me prouve seulement qu'il existe un monde extérieur
pendant que j'en sens passer le temps ; elle ne prouve pas que j'en sois un
homme physique capable d'intuition de substance (jugement synthétique comme
le remarque Kant).
Cette affirmation de Kant contredit l'opinion de Descartes selon laquelle l'homme est
une substance à la fois pensante et étendue.
849
Topique de la doctrine rationnelle (psychologie rationnelle) de l'âme (Je)
Kant analyse la psychologie rationnelle à partir des considérations précédentes en
formulant des jugements sur l'âme qu'il présente comme il l'a fait pour des catégories
de l'entendement.
1.
L'âme est [existe comme] substance [permanente]
3.
A travers les divers temps où elle
2.
existe, [l'âme est] numériquement
[L'âme est] qualitativement simple
identique, c'est-à-dire unité
(non-pluralité)
4.
[L'âme est] en rapport avec des objets possibles dans l'espace
850
A travers les divers temps où elle existe, [l'âme est] numériquement identique,
c'est-à-dire unité (non-pluralité) (jugement de quantité : unité - voir catégories
mathématiques)
L'âme reste identique à elle-même et unique tant que l'homme vit, ou même
éternellement pour les croyants.
L'âme est en rapport avec des objets possibles dans l'espace (Jugement de
modalité)
Un sujet ne peut concevoir son âme que si sa conscience de soi existe, c'est-à-
dire à l'état d'éveil ; sa sensation du temps qui passe lui confère une certitude
d'existence d'un espace extérieur à lui-même, espace qui par définition peut
contenir des objets. Voir :
Possibilité des choses (postulat) – Un concept peut-il être celui d'un objet ?
Possibilité de l'expérience (principes a priori).
(Citation de K400)
"De ces principes élémentaires proviennent tous les concepts de la doctrine pure de
l'âme, uniquement par combinaison, sans qu'il y ait à connaître le moins du monde
un autre principe.
Cette substance […] fournit le concept de l'immatérialité ;
[L'âme est immatérielle par définition.]
Comme substance simple, celui de l'incorruptibilité ;
[L'âme est incorruptible par définition.]
Son identité, en tant que substance intellectuelle [permanente], donne la
personnalité ;
Les trois éléments pris ensemble fournissent la spiritualité ;
[par définition de la spiritualité.]
851
Le Moi pensant ne peut être une substance simple
K403 - Le Je de l'aperception est dans toute pensée un terme singulier qui ne peut
se résoudre en une pluralité de sujets. Donc il désigne un sujet logiquement simple
[dont le concept indécomposable a un nom : Je, mais ne contient pas d'information],
par définition du concept même de pensée dont il se déduit analytiquement.
Mais cela ne signifie pas que le Moi pensant soit une substance simple, ce qui serait
une proposition synthétique car la substance ne fait pas partie des propriétés d'un
sujet. Le concept de la substance se rapporte toujours à des intuitions, lesquelles, en
moi, ne peuvent être que sensibles : par conséquent, elles se trouvent tout à fait en
dehors du champ de l'entendement et de sa pensée, dont cependant il s'agit ici
proprement et exclusivement quand on dit que le Moi, dans la pensée, est simple.
Voir aussi :
Le prétendu fossé infranchissable séparant la pensée et les actions de l'homme.
Donc "L'explicitation logique de la pensée en général est prise faussement pour une
détermination métaphysique de l'objet" : une telle explicitation est un paralogisme.
Proposition : "Tout être pensant est, en tant que tel, une substance simple" (critique)
K404 – Descartes énonce là une proposition synthétique a priori, car :
Elle va au-delà du concept Moi (Je) dont elle serait déduite, concept vide
d'informations défini par son seul nom car la conscience de soi ne « sent »
aucun détail ;
852
Elle ajoute à ce concept une modalité d'existence en tant que substance, ce qui
est absurde car ce concept de pensée en général (de logique générale) est a
priori et ne peut avoir de prédicat ;
Elle ajoute aussi à ce concept le prédicat de simplicité, qui ne peut être donné
dans aucune expérience.
853
une proposition identique [une évidence] qui ne me découvre absolument rien
sur la modalité de mon existence."
Ces deux pensées étant distinctes (l'une provenant de l'intuition et l'autre de
l'aperception), le syllogisme est impossible et la conclusion est trompeuse.
(Citation de K405) – "Le concept d'une chose qui peut exister en soi comme sujet
[une Idée , un concept de la raison ou une chose en soi], et non pas simplement
comme prédicat, ne contient encore en lui aucune réalité objective - ce qui veut dire
que l'on ne peut pas savoir s'il pourrait se trouver quelque part un objet qui lui
corresponde, étant donné que l'on n'aperçoit pas la possibilité d'un tel mode
d'existence, et que par conséquent un tel concept ne fournit absolument aucune
connaissance."
[Un tel concept pourrait être une abstraction, un produit de l'imagination ne
contenant aucune intuition.]
"Si ce concept doit donc indiquer, sous le nom de substance, un objet susceptible
d'être donné, s'il doit devenir une connaissance, il faut qu'il y ait, à sa base, une
intuition permanente, condition indispensable de la réalité objective d'un concept,
constituant ce par quoi seulement l'objet est donné.
Or, nous n'avons, dans l'intuition intérieure, absolument rien qui soit permanent,
puisque, de fait, le moi n'est que la conscience de ma pensée ; donc, si nous nous
en tenons simplement à la pensée, il nous manque même la condition nécessaire
pour nous appliquer à nous-mêmes, comme êtres pensants, le concept de la
substance, c'est-à-dire le concept d'un sujet subsistant pour soi…" (Fin de citation)
K414 – "La pensée, prise en elle-même, est seulement la fonction logique, par
conséquent la pure spontanéité de la liaison du divers d'une intuition simplement
possible, et elle ne présente nullement le sujet de la conscience comme phénomène,
simplement pour cette raison qu'elle ne prend nullement en compte l'espèce de l'in-
tuition et ne se demande pas si elle est sensible ou intellectuelle. En conséquence, je
ne me représente à moi-même ni tel que je suis, ni tel que je m'apparais, mais je me
854
pense seulement comme n'importe quel objet en général, vis-à-vis duquel je fais
abstraction du mode selon lequel il est intuitionné."
Voir Erreur due à l'apparence dialectique.
Ces considérations ne doivent pas nous faire oublier qu'il y a toujours
interprétation de l'état du cerveau par lui-même.
Psychopathologie
Science des maladies et des troubles psychiques.
Psychose
Affection psychique grave, dont le malade n'a pas conscience, caractérisée par une
désintégration de la personnalité accompagnée de troubles de la perception, du
jugement et du raisonnement.
Psychosomatique
Adjectif : qui se rapporte à l'influence du psychisme sur l'organisme.
Pulsion
Selon [13] - Psychanalyse : souvent au pluriel. Force biopsychique inconsciente
créant dans l'organisme un état de tension propre à orienter sa vie fantasmatique et
sa vie de relation vers des objets, et suscitant des besoins dont la satisfaction est
nécessaire pour que la tension tombe.
Exemples : Pulsion sexuelle ; pulsion d'auto-conservation.
Pur
Si nécessaire voir d'abord Expérience.
Sens général
Qui ne contient rien d'étranger. Exemple : un corps chimique pur.
Sens de Kant
Qui ne dépend pas de l'expérience, qui n'a pas de rapport avec elle. Exemples :
K94 – "…dans les connaissances a priori, sont appelées pures celles auxquelles
absolument rien d'empirique n'est mêlé. Ainsi, par exemple, la proposition : tout
changement a sa cause est-elle une proposition a priori, mais non point pure,
étant donné que le changement est un concept qui ne peut être tiré que de
l'expérience."
Connaissance absolument pure :
K110 Note b – "Est particulièrement nommée absolument pure une
connaissance à laquelle ne vient se mêler [aucune] expérience ou sensation, et
qui est par conséquent possible complètement a priori."
K118 – "Je nomme pures (au sens transcendantal) toutes les représentations
dans lesquelles ne se rencontre rien qui appartienne à la sensation."
Intuition pure de l'espace et du temps ; concepts purs de l'entendement.
855
Les principes purs se rapportent à l'expérience mais sont certains parce qu'ils ne
s'appuient sur aucune donnée d'expérience.
K110 – "La raison est le pouvoir qui fournit les principes de la connaissance a priori.
La raison pure est par conséquent celle qui contient les principes permettant de
connaître quelque chose absolument a priori. Un organon de la raison pure serait un
ensemble réunissant les principes d'après lesquels toutes les connaissances pures a
priori peuvent être acquises et effectivement établies. L'application détaillée d'un tel
organon procurerait un système de la raison pure."
K143 - Une intuition pure contient exclusivement la forme de l'objet intuitionné, sans
matière ; elle est donc indépendante de toute sensation. Un concept pur contient
uniquement la forme d'un objet pensé en général ; tous deux sont possibles a priori.
K278 – Un concept pur appartient pourtant à l'expérience lorsque son objet ne peut
être trouvé qu'en elle.
Qualité (catégories)
Dans la Table des 12 catégories de l'entendement pur de Kant les catégories de la
qualité sont la réalité, la négation et la limitation.
La qualité est une appréciation subjective basée sur l'affection de l'esprit qui prend
conscience d'un message de ses sens.
856
K245 - "…puisque, pour tout nombre, il faut en tout cas qu'une unité serve de
base, le phénomène qui constitue une unité est un quantum et, comme tel,
toujours un continuum." Donc tout phénomène est un continuum.
(Citation de K430 note *)
"Nous pouvons intuitionner un quantum indéterminé comme un tout, quand il est
contenu dans des limites, sans avoir besoin d'en construire la totalité en le
mesurant, c'est-à-dire par la synthèse successive de ses parties. Car les limites
déterminent déjà la complétude, puisqu'elles excluent toute autre quantité.
[Mais lorsqu'un quantum n'est pas donné avec des limites, notre intuition ne peut
l'imaginer] qu'à travers la synthèse des parties, [et nous ne pouvons en imaginer
la totalité] qu'à travers la synthèse achevée ou l'addition répétée de l'unité à elle-
même."
(Fin de citation)
Chez Kant
Quantum discretum (quantum discret) : partie d'un ensemble qui en comprend
un multiple entier. Exemples :
Tout volume d'eau pure comprend un nombre entier de molécules d'eau :
le quantum d'eau est N molécules.
Tout échange d'énergie lumineuse comprend un nombre entier de photons,
chacun avec sa fréquence : le quantum d'énergie est un multiple de h, où
h est la constante de Planck h = 6.6261 .10-34 joule.seconde.
K490 – "La multitude des parties qui sont déjà, d'une certaine manière, séparées
dans le tout donné et qui constituent en ce sens un quantum discretum."
Quantum continuum (partie d'un objet divisible à l'infini). Exemple : segment de
ligne droite, divisible à l'infini en sous-segments eux-mêmes divisibles.
K492 – "Quand il s'agit d'un corps organique articulé à l'infini, le tout [du
phénomène] est déjà représenté, à travers ce concept [de multitude], comme
divisé, et il s'y rencontre, avant toute régression accomplissant la division, une
multitude de parties déterminée en soi, mais infinie - ce à la faveur de quoi l'on
se contredit soi-même, dans la mesure où ce développement infini est considéré
comme une série qui n'est jamais susceptible d'être achevée (infinie) et se
trouve aussi cependant, puisqu'on l'appréhende synthétiquement, considéré
comme achevé. La division infinie ne caractérise le phénomène que comme
quantum continuum et elle ne peut être séparée du remplissement de l'espace,
puisque c'est précisément dans ce remplissement que réside le fondement de la
divisibilité infinie."
Quantitas
K606 – "La mathématique ne construit pas simplement des grandeurs (quanta),
comme c'est le cas en géométrie, mais construit aussi la pure grandeur (quantitas),
comme en algèbre, où elle fait totalement abstraction de la nature de l'objet qui doit
être pensé d'après un tel concept de grandeur."
(La pure grandeur de Kant est une variable régie par des règles de définition et
de manipulation.)
857
Radicalité
Raison pratique
Voir Définition de la raison pure pratique (ou raison pratique) chez Kant.
858
Dans son usage réel, la raison contient elle-même la source de certains
concepts et principes qu'elle n'emprunte ni aux sens ni à l'entendement :
la raison exerce là son pouvoir logique transcendantal.
La raison pure est la faculté qui unifie les règles de l'entendement sous des principes
de nécessité et d'universalité, principes purs a priori.
K355 – "La raison pure ne se rapporte jamais directement à des objets, mais aux
concepts que l'entendement s'en forge."
K355 – "On voit aisément que la raison pure n'a pas d'autre but que l'absolue totalité
de la synthèse du côté des conditions (que ce soit d'inhérence, de dépendance ou de
concurrence) et qu'elle n'a pas à se préoccuper de la complétude absolue du côté du
conditionné."
La raison pure est fortement structurée : toutes ses parties sont interdépendantes
(Citation de [56b] Préface pages 26-27)
"La raison pure est une sphère tellement isolée et tout s'y tient à l'intérieur à ce point
que l'on ne peut en toucher une partie sans atteindre toutes les autres, ni parvenir à
rien sans avoir préalablement fixé la place de chacune ainsi que son influence sur
les autres ;
car comme il n'existe rien à l'extérieur de cette sphère qui permette de rectifier notre
jugement à l'intérieur, la validité et l'usage de chaque partie dépend du rapport en
lequel elle se trouve avec les autres dans la raison même ;
et il en va ici comme dans la structure d'un corps organisé : la fin de chaque membre
ne peut être déduite que de la notion complète du tout.
859
Aussi peut-on dire d'une telle Critique qu'elle n'est jamais sûre si elle n'est pas
achevée entièrement jusque dans les moindres éléments de la raison pure et que, de
la sphère de cette faculté, c'est tout ou rien qu'il faut déterminer ou décider."
(Fin de citation)
La raison ne crée pas de concepts d'objets, elle les ordonne et les unifie
(Citation de K560)
"La raison ne se rapporte jamais directement à un objet, mais uniquement à
l'entendement et, par l'intermédiaire de celui-ci, à son propre usage empirique : elle
ne crée donc pas de concepts (pas de concepts d'objets), mais simplement elle les
ordonne et leur confère l'unité qu'ils peuvent avoir dans leur plus grande extension
possible, c'est-à-dire par rapport à la totalité des séries,
que pour sa part l'entendement n'a pas du tout en vue, puisqu'il vise seulement la
liaison à la faveur de laquelle des séries de conditions sont partout établies d'après
des concepts.
La raison n'a donc proprement pour objet que l'entendement et son fonctionnement
finalisé ;
Exemples
K106 – "Dans la solution du problème ci-dessus énoncé est comprise aussi, en
même temps, la possibilité de l'usage pur de la raison en vue de la fondation et de la
mise en œuvre de toutes les sciences contenant une connaissance théorique a priori
d'objets, c'est-à-dire la réponse aux questions :
Comment une mathématique pure est-elle possible ?
Comment une physique pure est-elle possible ?
Raison de cette possibilité invoquée par Kant (K107) : « c'est démontré par leur
réalité effective », c'est-à-dire « ces sciences (et leur rationalité) sont possibles parce
que nous les pratiquons », raison dogmatique s'il en est. Constatant qu'on ne peut
que postuler la possibilité et la rationalité de jugements synthétiques a priori, Kant en
déduit le besoin d'en trouver les limites (quels types de raisonnements sont
possibles, quels sont les risques d'erreur, etc.), donc de faire une critique de la raison
pure. Complément : Scepticisme.
860
Besoin d'une critique transcendantale
K111 – "[La recherche] pour apercevoir dans toute leur étendue les principes de la
synthèse a priori […] nous pouvons [la] nommer, non pas doctrine, mais seulement
critique transcendantale, parce qu'elle a pour projet, non d'élargir les connaissances
elles-mêmes, mais simplement de les rectifier et qu'elle doit fournir la pierre de
touche de la valeur ou de l'absence de valeur de toutes les connaissances a priori…"
Voir :
Usages de la raison pure ;
Censure de la raison ;
La raison a une fonction d'unité systématique des connaissances
d'entendement ;
Différence et interactions entre entendement et raisonnement ;
La raison peut aller jusqu'à la limite entre le champ de l'expérience et les
concepts transcendants : les Idées transcendantales ;
Conflits d'opinion dus à l'application de maximes différentes.
Pouvoir de la raison : déduire une connaissance d'un principe (pouvoir des principes)
K333 – "Nous avons défini l'entendement […] comme le pouvoir des règles ; ici, nous
distinguons la raison de l'entendement en la nommant le pouvoir des principes."
(Le pouvoir des principes est celui de déduire par raisonnement une
connaissance d'un principe, car : K333 - "Tout raisonnement est […] une forme
de l'opération consistant à dériver une connaissance à partir d'un principe.")
861
de l'opération consistant à dériver une connaissance à partir d'un principe [c'est-à-
dire un syllogisme]. Car la majeure fournit à chaque fois un concept qui fait alors que
tout ce qui est subsumé sous la condition de ce concept est connu à partir de lui
d'après un principe."
Dans cette mesure, elle a une « causalité » propre, une efficacité qui n'est pas
simplement phénoménale, mais aussi « intelligible », suprasensible, pour autant que
la raison procure des principes à l'action en ne recourant qu'à ses idées.
[La morale a des lois et des impératifs qui échappent à la raison pure d'usage
général. En cela elle est comme le cœur : Pascal écrivait dans sa pensée 277 :
« Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point » [116].]
[Kant distingue deux sortes de raison pratique, selon leur domaine d'application :]
[Définition de la raison pratico-technique]
La raison pratico-technique est à la base de toute action et figure extra-morale ;
elle donne des normes relatives, des règles de l'habileté ou de la prudence.
[Définition de la raison pratico-morale]
Mais la raison pratico-morale est la source des normes absolues, du devoir
862
absolu ; la définition de son but, son impératif, ses principes valent absolument,
inconditionnellement. Cette raison vise une unité inconditionnée, la légalité et la
validité universelle de la volonté, l'accord de celle-ci avec elle-même, bref, une
unité pratique systématique."
(Fin de citation)
K666 – "…la raison pratique a atteint ce point culminant, j'entends : le concept d'un
être originaire unique comme constituant le souverain Bien…"
Laïcisation de la morale
Kant a renversé l'ordre des conséquences entre la réalité physique et sa
représentation phénoménale : comme l'homme n'a pas accès à la réalité, Kant la
définit comme étant la représentation qu'il s'en fait [141], quitte à changer celle-ci au
vu d'une erreur.
Dans la citation suivante, on voit que Kant a aussi interverti l'ordre entre les
commandements de Dieu et les raisons intériorisées de l'homme issues de ses
instincts et pulsions, sa culture ou son ressenti à propos de circonstances :
(Citation de K666)
"Aussi loin que la raison pratique ait le droit de nous conduire, nous ne tiendrons
pas nos actions pour obligatoires parce qu'elles sont des commandements de
Dieu, mais les considérerons comme des commandements divins parce que
nous y sommes intérieurement obligés.
Voici ce qu'en dit le traducteur de notre version de la Critique [24], Alain Renaut :
K719 note 164 – "Extraordinaire renversement, qui marque l'un des enjeux de la
révolution kantienne, à savoir une fantastique laïcisation de la morale : de même
que, dans l'ordre théorique, ce n'est plus la finitude humaine qui est relativisée
par rapport à l'Absolu divin, mais l'Absolu divin qui, n'étant plus qu'une exigence
ou un horizon de sens pour le sujet fini, devient relatif à celui-ci, de même, dans
le registre pratique, ce n'est plus la référence à l'Absolu divin, dispensateur des
lois morales, qui fait de celles-ci des commandements, mais c'est l'expérience de
ces commandements par le sujet pratique qui impose une référence à l'idée d'un
Absolu."
863
Citations
Kant a cité la raison pratique principalement dans :
Critique de la raison pure en 1781 (1ère édition) et 1787 (2ème édition) ;
Fondements de la métaphysique des mœurs en 1785 ;
Critique de la raison pratique [132] en 1788 ;
Critique de la faculté de juger en 1790 ;
Métaphysique des mœurs en 1979.
Raison supérieure intégrale (raison suprême), pour penser l'âme, le monde et Dieu
La faculté de raison présentée jusqu'à ce point dans cet article exclut l'expérience et
l'entendement. Kant a donc aussi défini une raison supérieure intégrale, qui les
comprend aussi. Cette raison supérieure permet de penser les Idées de l'âme, du
monde et de Dieu :
K084-K085 – "Une même démonstration de ce qu'il y a de positivement utile
dans des propositions fondamentales de la raison pure possédant une
dimension critique [est possible pour] le concept de Dieu et celui de la nature
simple de notre âme, ce que toutefois je laisse de côté par souci de brièveté. Je
ne peux donc pas même admettre Dieu, la liberté et l'immortalité, [pour l'usage]
pratique de ma raison, si je n'ampute pas en même temps la raison spéculative
de sa prétention à des vues débordant toute appréhension, parce qu'il lui faut,
pour les atteindre, se servir de propositions fondamentales qui, ne s'étendant en
fait qu'à des objets d'une expérience possible, sont cependant appliquées à ce
qui ne peut être un objet de l'expérience, transforment effectivement, à chaque
fois, cet objet en phénomène et ainsi déclarent impossible toute extension
pratique de la raison pure. Il me fallait donc mettre de côté le savoir afin d'obtenir
de la place pour la croyance…"
Exemple : Locke croyait possible de prouver l'existence de Dieu et l'immortalité
de l'âme.
Dans ce texte, on appellera raison (tout court) la faculté qui exclut l'expérience et
l'entendement, et raison suprême la faculté qui les inclut.
864
K332 – "Toute notre connaissance débute avec les sens, passe de là à
l'entendement et se termine par la raison, à laquelle rien en nous ne se peut
trouver qui soit supérieur pour élaborer la matière de l'intuition et la ramener
sous l'unité la plus élevée de la pensée."
(Unité de la pensée signifie que la raison peut prendre en compte tous les
éléments d'une situation :
Toutes les perceptions d'un phénomène avec tous les détails de leurs
divers ;
Tous les concepts, quelle que soit leur origine, en appliquant toutes les
méthodes de raisonnement nécessaires pour comprendre la situation [après
entendement] par analyse et synthèse, et prévoir son évolution et ses
conséquences.
Cette prise en compte est synthétique, utilisant au maximum les associations et
l'entendement lui-même pour unifier et simplifier la description de la situation
présente à l'esprit.
La raison peut aussi examiner les intuitions d'une façon critique, les approfondir
et en faire la synthèse. Elle peut enfin former des principes qui guideront les
raisonnements futurs.)
K355 – "…la raison pure ne se rapporte jamais directement à des objets, mais aux
concepts que l'entendement s'en forge."
865
que deux sortes possibles d'enchaînement déductif : ceux qui déduisent la
conclusion directement d'une seule prémisse appelés inférences, et ceux qui la
déduisent de plusieurs prémisses (que l'on peut décomposer en étapes à deux
prémisses seulement, appelés syllogismes).
K333 – "Toute proposition universelle, quand bien même elle serait tirée de
l'expérience (par induction), peut servir de majeure dans un raisonnement ; toutefois,
elle n'est pas elle-même pour autant un principe."
866
unité a priori se peut appeler unité rationnelle et est d'une tout autre sorte que celle
qui peut être produite par l'entendement."
Unité rationnelle = unité de consécution + unité de justification
La raison, appliquée lors d'un raisonnement à des connaissances sous forme
d'une suite d'inférences et syllogismes, confère à cette suite (donc aux
connaissances elles-mêmes) une unité de consécution (d'enchaînement
nécessaire) ; en outre, ces connaissances acquièrent une unité de justification
car elles dérivent de toutes les prémisses du raisonnement.
Rappelons ici qu'un même phénomène est le plus souvent traduit par l'entendement
en plusieurs concepts, dans un même jugement, car un seul ne suffit que rarement à
le décrire : voir Exemple de jugement et analyse par titres et moments.
La raison fait ensuite la synthèse (l'unité rationnelle) de tous ces jugements.
Cette totalité, on peut donc la nommer l'unité rationnelle des phénomènes, tout
comme celle qu'exprime la catégorie se peut nommer unité d'entendement.
afin de lui prescrire de s'orienter vers une certaine unité dont l'entendement ne
possède aucun concept [l'unité rationnelle] et qui tend à rassembler tous les actes de
l'entendement, vis-à-vis de chaque objet, [c'est-à-dire tous les concepts de tous les
jugements] en un tout absolu [le tout de l'inconditionné].
La liberté de la raison
Voir La raison se crée un ordre de prise en compte des concepts qui lui est propre.
867
sans effort, spontanément, mais qui pourtant existe ; il explique que tout se passe,
alors, comme si on avait une illusion des sens.
K337 – "La diversité des règles et l'unité des principes constituent une exigence de la
raison pour mettre l'entendement en complet accord avec lui-même, tout comme
l'entendement soumet le divers de l'intuition à des concepts et procède ainsi à sa
liaison. […] Bref, la question est de savoir si la raison en elle-même, c'est-à-dire la
raison pure, contient a priori des principes et des règles synthétiques, et en quoi ces
principes peuvent bien consister."
(La diversité des règles est ce qui permet la connaissance d'un phénomène par
autant de catégories de l'entendement qu'il faut pour le décrire complètement.
L'unité des principes est ce qui permet à l'entendement de rester cohérent dans
l'ensemble des catégories qu'il génère pour un phénomène donné.)
(Citation de K337) :
"Premièrement, le raisonnement ne s'applique pas à des intuitions, pour les ramener
sous des règles (comme le fait l'entendement avec ses catégories), mais à des
concepts et à des jugements.
868
Si donc la raison pure porte aussi sur des objets, elle n'a cependant nulle
relation immédiate à ceux-ci et à leur intuition, mais ne se rapporte qu'à
l'entendement et à ses jugements, lesquels s'appliquent immédiatement aux sens et
à leur intuition, pour déterminer leur objet. L'unité rationnelle n'est donc pas l'unité
d'une expérience possible, mais au contraire elle est distincte par essence de celle-ci
comme de l'unité d'entendement.
Le principe selon lequel tout ce qui arrive a une cause [principe de causalité, voir
si nécessaire Le principe de causalité n'est qu'un postulat] n'est nullement un
principe connu et prescrit par la raison. Il rend possible l'unité de l'expérience et
n'emprunte rien à la raison, qui n'aurait pu à partir de simples concepts, sans cette
relation à une expérience possible, imposer une telle unité synthétique."
[Conclusion : le fondement cherché n'est pas la causalité.]
K338 – "…si le conditionné est donné, c'est aussi la série entière des conditions
subordonnées les unes aux autres qui est donnée (c'est-à-dire contenue dans l'objet
et sa liaison), laquelle série est par conséquent elle-même inconditionnée."
La chaîne de déductions logiques d'un raisonnement général ne supprime ni
n'ajoute aucune condition, donc aucune connaissance, au conditionné de l'objet :
cette chaîne est donc inconditionnée ; le raisonnement a pris en compte toutes
les connaissances disponibles pour sa synthèse d'unité rationnelle.
Du point de vue de l'information traitée par un raisonnement sur une
connaissance de l'entendement, quelles que soient les conditions introduites par
ses diverses étapes, l'information disponible dans la conclusion ne peut être que
celle de l'information initiale : un tel raisonnement ne crée ou ne détruit jamais
d'information, il ne peut qu'en faire différentes synthèses pures à priori.
869
K338 - "Un tel principe de la raison pure est manifestement synthétique ;"
Voir aussi :
Raisonnement ;
Rationnel ;
Logique.
(Citation de K454)
"Désormais, nous disposons de tout le jeu dialectique des Idées cosmologiques,
[Il y a exactement 4 Idées cosmologiques : la totalité, la réalité, la causalité et la
nécessité inconditionnée.]
telles qu'elles ne permettent aucunement que leur soit donné dans une quelconque
expérience possible un objet qui leur soit congruent, ni même que la raison s'en
forge une pensée s'accordant avec les lois universelles de l'expérience,
[K423 – "L'Idée de la totalité absolue [des conditions] ne concerne rien d'autre
que l'exposition des phénomènes, […] elle ne concerne pas le concept pur de
l'entendement qui porte sur une totalité des choses en général."]
870
alors que pourtant elles ne sont pas inventées arbitrairement, mais que la raison se
trouve conduite à elles avec nécessité dans le progrès continuel de la synthèse
empirique quand elle veut affranchir de toute condition et appréhender dans sa
totalité inconditionnée ce qui ne peut jamais être déterminé selon les règles de
l'expérience que comme conditionné.
[Voir Complétude de l'inconditionné, seul objectif de cette synthèse de la raison]
Ces affirmations sophistiques sont autant d'essais pour résoudre quatre problèmes
naturels et inévitables de la raison : au reste ne peut-il y en avoir que ce nombre, ni
plus ni moins, puisqu'il n'y a pas plus de séries de suppositions synthétiques qui
délimitent a priori la synthèse empirique."
(Fin de citation)
Ces antinomies résultent de raisonnements qui créent par synthèse des Idées
cosmologiques à partir de données de l'expérience :
K454 – [Ce sont de] "brillantes prétentions de la raison, quand elle étend son
domaine au-delà des limites de l'expérience."
Argument de sagesse
K454 – "La philosophie qui abandonne le champ des expériences [les pensées liées
à la vie terrestre] et se hausse peu à peu jusqu'à ces Idées sublimes […] promet de
quoi fonder nos plus grandes espérances et de nous découvrir les fins dernières vers
lesquelles tous les efforts de la raison doivent en définitive converger."
[La réflexion philosophique doit nous permettre de découvrir les règles à suivre
de notre vivant pour espérer le bonheur de l'âme dans sa vie future.]
871
ce sont là des questions pour la solution desquelles le mathématicien donnerait bien
volontiers toute sa science ; car celle-ci, en tout état de cause, ne peut lui procurer
aucune satisfaction vis-à-vis des fins de l'humanité qui sont les plus élevées et qui lui
tiennent le plus à cœur."
[La connaissance scientifique satisfait l'intelligence et le goût de l'esthétique
mathématique, mais elle ne répond pas au besoin de spiritualité que la
philosophie métaphysique tente de satisfaire.]
(Fin de citation)
(Citation de K456)
[L'antithèse applique une maxime d'empirisme]
"On remarque, dans les affirmations de l'antithèse, une parfaite uniformité du mode
de pensée et une complète unité de la maxime, à savoir un principe qui est celui du
pur empirisme, non seulement pour l'explication des phénomènes se produisant
dans le monde, mais aussi pour la solution des Idées transcendantales concernant
l'univers lui-même.
(Citation de K456)
"Que le monde ait un commencement,
que mon Moi soit simple et par conséquent de nature incorruptible,
qu'il soit en même temps, dans les actions dont il est l'arbitre, libre et supérieur à
la contrainte exercée par la nature,
et qu'enfin l'ordre tout entier des choses qui constituent le monde dérive d'un
être originaire auquel tout emprunte son unité et la manière dont il se trouve lié
par des rapports de finalité,
ce sont là autant de pierres angulaires de la morale et de la religion. L'antithèse
nous dérobe tous ces points d'appui ou, du moins, semble nous les dérober."
872
(Fin de citation)
ce que ne permet pas l'antithèse, qui donne d'elle-même une représentation très
dommageable en se révélant incapable de fournir à la question des conditions de sa
synthèse une réponse permettant de ne pas questionner sans fin toujours plus
avant."
(Fin de citation)
Avantages de l'empirisme
Voir définition de l'empirisme.
[Matérialisme : s'il n'y a ni Dieu créateur ni libre arbitre, les règles morales ne
s'imposent pas (K457)]
S'il n'y a pas un être originaire qui soit distinct du monde,
[S'il n'y a pas de Dieu créateur]
873
[si le fonctionnement de notre esprit, donc sa volonté, sont pures conséquences
de lois physiques]
dans ce cas, les Idées morales et leurs principes perdent eux aussi toute validité et
s'effondrent en même temps que les Idées transcendantales qui constituaient leur
soubassement théorique."
(Fin de citation)
874
(Fin de citation)
de même, à partir des objets de la nature qu'il peut décomposer par l'observation et
la mathématique et déterminer synthétiquement dans l'intuition, ne saurait-il
permettre de passer (à partir de ce qui est étendu) à des objets que ni le sens ni
l'imagination ne peuvent jamais présenter in concreto (au simple) ;
[A partir de la représentation d'un objet de la nature, qui occupe nécessairement
un espace, on ne peut passer à des objets simples, car de tels objets ne sont
pas accessibles aux sens :
K437 – "L'espace n'est pas constitué de parties simples, mais d'espaces."]
il n'admettra pas non plus que l'on prenne pour fondement, même dans la nature, un
pouvoir d'agir indépendamment des lois de la nature (liberté), et que l'on rabaisse
ainsi l'affaire de l'entendement, qui consiste, en suivant le fil conducteur de règles
nécessaires, à rechercher l'origine des phénomènes ;
[Un empiriste n'admet pas d'exception aux lois de la nature, sans lesquelles
l'entendement est impossible]
enfin ne tolérera-t-il pas davantage que, vis-à-vis de quoi que ce soit, l'on en cherche
hors de la nature la cause (être premier), puisque, dans la mesure où la nature est le
seul élément nous fournissant des objets et susceptible de nous informer de leurs
lois, nous ne connaissons rien d'autre qu'elle."
[Un empiriste n'admet pas la téléologie, ni aucun dogmatisme]
(Fin de citation)
875
[Si nous adhérions à l'empirisme] "les présuppositions intellectuelles de nos intérêts
pratiques [comme l'existence d'un Etre suprême et le libre arbitre] et la croyance [en
Sa création du monde] qu'ils exigent ne nous seraient pas retirées :
[Nous pourrions continuer à croire, à condition de séparer cette foi et la
connaissance scientifique, à laquelle la foi ne peut rien apporter]
il tombe lui-même dans le défaut de l'immodestie, qui est ici d'autant plus
répréhensible qu'un irréparable dommage se trouve ainsi occasionné à l'intérêt
pratique de la raison.
[L'intérêt pratique de la raison est sa justification des règles de recherche de la
vérité, notamment par la connaissance des lois de la nature.]
876
en toute partie toujours d'autres encore, elles-mêmes à leur tour divisibles,
[Le volume d'un objet perçu est divisible à l'infini :
K245 – "Tous les phénomènes en général sont des grandeurs continues,
aussi bien selon leur intuition, comme grandeurs extensives, que selon la
simple perception (sensation et par conséquent réalité) comme grandeurs
intensives."
K437 – "L'espace n'est pas constitué de parties simples, mais d'espaces."]
avant tout événement un autre qui, à son tour, s'est trouvé produit tout aussi bien
par d'autres voies,
[Tout événement a été causé par un événement précédant, lui-même causé par
un troisième, et ainsi de suite autant que nécessaire – ce qui est certain en vertu
du principe d'identité [32] ]
et, dans l'existence en général, tout n'est jamais que conditionné, sans que
puisse être reconnue une quelconque existence inconditionnée et première."
[La seule certitude d'existence est la certitude empirique : on ne doit invoquer
aucune existence théorique ou a priori, aucune cause première.]
(Fin de citation)
877
Soleil : une ellipse dont le Soleil occupe un foyer, parcourue selon la « loi des
aires ».
On détermine ensuite, par des relevés astronomiques de position, les valeurs
des paramètres d'orbite qui vérifient la loi théorique de mouvement.
Avec ces paramètres on prédit des positions futures de la planète et on calcule
des positions anciennes, pour vérifier la bonne adéquation de la loi.
Si, au lieu de partir d'une orbite théorique (approche dogmatique), on s'était contenté
de mesures de position et on avait imaginé diverses orbites qui conviennent à ces
mesures (approche empirique utilisée par Kepler, qui a mis ainsi des années à
trouver les paramètres de l'orbite de Mars par essais successifs) on aurait eu une
pseudo-loi correcte dans les cas particuliers des positions mesurées, mais pas une
loi générale. C'est pourquoi Newton, partant de lois générales de la mécanique, a
démontré les équations des orbites des planètes, établissant ainsi des lois valables
dans tous les cas [115], notamment ceux que Kepler avait utilisés pour Mars.
K474 – "Toute l'antinomie de la raison pure repose sur cet argument dialectique :
Quand le conditionné est donné, la série entière de toutes ses conditions est elle
aussi donnée ; or les objets des sens nous sont donnés comme conditionnés ; donc,
etc."
878
par l'entendement et conduire aussi loin qu'il est possible cette liaison d'un concept
avec ses conditions qui est déjà inscrite dans le concept lui-même."
[Une connaissance complète d'un phénomène dont le conditionné est donné
exige la réponse à toutes les questions « Pourquoi cette condition ? » :
K475 – "Postulat logique de la raison : poursuivre par l'entendement et conduire
aussi loin qu'il est possible cette liaison d'un concept avec ses conditions."]
1er cas : le conditionné et la condition précédents sont des choses en soi, (l'esprit
ayant déjà eu le temps de les former)
Nous connaissons alors la signification du conditionné et de la condition.
K475 – Dans ce cas, la série complète des conditions, donc aussi l'inconditionné, se
trouvent donnés simultanément et l'entendement les représente telles qu'elles sont.
La régression impliquée par la complétude de la série a déjà été prise en compte.
K479 - "La série des conditions ne se peut rencontrer que dans la synthèse
régressive elle-même, mais non pas en soi dans le phénomène comme dans une
chose possédant son existence propre, donnée avant toute régression."
K479 - "La multiplicité des parties, dans un phénomène donné, n'est en soi ni finie ni
infinie, puisque le phénomène n'est rien d'existant en soi-même et que les parties ne
sont données que par la régression qu'opère la synthèse procédant à sa
décomposition et dans cette même régression, laquelle n'est jamais donnée
absolument tout entière, ni comme finie ni comme infinie.
La même observation vaut pour la série des causes subordonnées les unes aux
autres, ou pour celle qui va de l'existence conditionnée jusqu'à l'existence
879
inconditionnellement [absolument] nécessaire, qui ne peut jamais être considérée ni
comme finie en soi relativement à la totalité qu'elle constitue, ni comme infinie."
Une telle science peut, par exemple, être structurée sous forme axiomatique :
voir l'article Axiomatique et Système logique. Mais dans ce chapitre Kant pense à la
morale de la raison pratique, comme le montre la citation suivante.
K462 – "Ce qui, dans tous les cas possibles, est juste ou injuste [voir cet article pour
comprendre le reste de la phrase], [il] faut qu'on puisse le savoir d'après la règle,
puisque la question concerne notre obligation et que, vis-à-vis de ce que nous ne
pouvons pas savoir, nous n'avons non plus aucune obligation."
[Kant adopte ici le raisonnement moral chrétien : l'obligation morale (donc la
transgression éventuelle) est liée à la connaissance des faits ; je ne peux être
responsable de faits dont je n'avais pas connaissance, que je n'avais pas
prévus, sur lesquels je n'avais pas prise.]
880
Y a-t-il des questions sur la nature des objets de la raison pure insolubles pour la
philosophie transcendantale ?
K462-K463 – "Il y a donc lieu de se demander si, dans la philosophie
transcendantale, il existe une quelconque question concernant un objet proposé à la
raison qui soit insoluble précisément par cette raison pure, et si on a le droit de se
refuser à y apporter une réponse décisive en mettant la chose, parce que
absolument incertaine (à partir de tout ce que nous pouvons connaître), au nombre
de celles dont nous avons certes un concept suffisant pour soulever une question,
sans disposer toutefois aucunement des moyens et du pouvoir de jamais y apporter
une réponse."
Réponse : NON
K463 – "J'affirme que la philosophie transcendantale a ceci de particulier, parmi
toutes les connaissances spéculatives, que pas la moindre question concernant un
objet donné à la raison pure n'est insoluble pour cette même raison humaine, et que
l'on ne saurait jamais alléguer une quelconque ignorance inévitable, ni l'insondable
profondeur du problème, pour se libérer de l'obligation d'y répondre de manière
radicale et complète ; le même concept qui nous met en mesure de soulever la
question doit en effet nous rendre absolument capables de répondre à cette
question, puisque l'objet (comme pour le juste et l'injuste) ne se trouve pas en dehors
du concept."
Les seules questions possibles sur la nature d'un objet portent sur des Idées
cosmologiques, car l'objet doit être empiriquement donné, et la question porte
uniquement sur sa conformité à une Idée.
(Citation de K463-K464)
"Si l'objet est transcendantal et se trouve donc lui-même inconnu […] nous devons
alors, pour notre Idée, rechercher un objet dont nous puissions convenir qu'il nous
est inconnu, mais que pour autant il n'est pas impossible.
Les Idées cosmologiques ont seules cette propriété de pouvoir présupposer comme
donnés leur objet et la synthèse empirique requise par le concept de celui-ci ; et la
question qu'elles soulèvent ne concerne que le processus de cette synthèse, en tant
qu'il doit englober une totalité absolue, laquelle n'est alors plus rien d'empirique,
puisqu'elle ne peut être donnée dans aucune expérience.
Or, dans la mesure où il n'est ici question d'une chose que comme objet d'une
expérience possible, et non pas comme une chose en soi, la réponse à la question
cosmologique transcendante ne peut se trouver nulle part en dehors de l'Idée, vu
qu'elle ne concerne aucun objet en soi ;
car cette Idée est une pure et simple création de la raison, laquelle ne peut donc se
dispenser d'apporter une réponse ni se défausser de cette charge sur l'objet
inconnu."
881
(Fin de citation)
Conclusion sur ce qu'on peut ou ne peut pas savoir des lois de la nature
K465-K466-K467 - Notre esprit peut imaginer de nombreuses questions qui ne
correspondent pas à des expériences possibles, pour lesquelles nous ne pourrons
donc apporter une réponse certaine. Il peut aussi désirer des niveaux de précision
incompatibles avec la réalité naturelle, par exemple en Mécanique quantique pour la
position et la vitesse d'une particule. Il peut désirer l'existence d'une causalité dans
des phénomènes comme les fluctuations d'énergie ou la décomposition radioactive,
où l'instabilité naturelle déclenche spontanément des générations de couples de
particules. Mais tout ce que l'homme voudrait savoir ou désire est ignoré par la
nature.
Kant aborde ce problème des questions possibles dans la section suivante (K467).
882
Plus l'homme connaît les lois de la nature, plus il mesure son ignorance
K467 – "Nous abandonnerions volontiers l'exigence de voir nos questions obtenir
une réponse dogmatique [fondée en théorie], si nous concevions déjà à l'avance
que, de quelque teneur que pût être la réponse, elle se bornerait à accroître encore
notre ignorance et à nous plonger d'une incompréhensibilité dans une autre, d'une
obscurité dans une obscurité encore plus grande et peut-être même dans des
contradictions."
Une question limitée à la véracité ou la fausseté d'un texte peut déjà être utile
K467 – "Si notre question est posée uniquement en vue d'une réponse affirmative ou
négative, c'est procéder avec prudence que de laisser provisoirement en suspens ce
que l'on pourrait présumer être de nature à fonder la réponse, et de commencer par
apprécier ce que l'on gagnerait si l'on répondait dans une direction, et de même si la
réponse allait dans la direction opposée."
[Nous pouvons limiter notre désir de comprendre un phénomène à une
recherche de la vérité ou de la fausseté d'une conjecture, sans essayer de
comprendre vraiment le phénomène.]
Si une telle question binaire s'avère vide de sens nous devons en faire la critique
(Citation de K467)
"Or, s'il se produit que dans les deux cas le résultat est purement et simplement vide
de sens (non-sens), nous sommes alors invités […] à examiner notre question elle-
même d'un point de vue critique et à voir si elle ne reposerait pas sur une
présupposition sans fondement.
C'est là la grande utilité que possède la manière sceptique de traiter les questions
que la raison pure pose à la raison pure, et l'on peut ainsi à peu de frais être
débarrassé d'un grand fatras dogmatique pour instaurer à sa place une critique
pondérée qui, tel un véritable catharticon, écartera avec bonheur l'aveuglement
délirant, en même temps que le goût, qui l'accompagne, d'une multiplication effrénée
du savoir."
(Fin de citation)
883
il n'est pas encore inconditionné, et la loi de l'usage empirique de l'entendement vous
prescrit de vous interroger encore sur une condition de temps supérieure : le monde
est par conséquent, à l'évidence, trop petit pour cette loi."
Raison paresseuse
Voir La raison paresseuse.
Maximum de la série des conditions dans un monde sensible considéré comme une
chose en soi
(Citation de K480-K481)
"Alors que ne se trouve donné par le principe régulateur de la totalité aucun
maximum s'appliquant à la série des conditions dans un monde sensible considéré
884
comme une chose en soi, mais qu'un tel maximum peut seulement être proposé
comme une tâche dans la régression au sein de cette série,
[Dans un conditionné perçu dont l'esprit se représente la chose en soi, la série
de conditions n'est pas complète : la perception et l'entendement ont créé une
représentation qui ne parcourt pas toute la régression ; c'est à la raison pure,
aidée par l'entendement, d'assurer cette tâche.]
885
Signification de cette règle de la raison pure
(Citation de K480-K481)
[Cette règle] " ne saurait dire ce qu'est l'objet, mais comment il faut opérer la
régression empirique pour parvenir au concept complet de l'objet.
[Si la règle disait ce qu'est l'objet] elle serait un principe constitutif, ce qui n'est jamais
possible à partir de la raison pure. On ne peut donc aucunement songer à dire par là
que la série des conditions pour un conditionné donné est en soi finie ou infinie ; […]
886
Mais si c'est seulement un membre de la série qui se trouve donné [c'est-à-dire
une représentation que l'esprit n'a pas encore eu le temps d'interpréter sous
forme de chose en soi], dont la régression doit commencer par partir pour aller à
la totalité absolue, il ne se produit alors qu'une régression d'une ampleur
indéterminée (in indefinitum) [, régression qui va du conditionné à des conditions
qui, étant en dehors de lui, n'ont pu être données avec lui.]
(Fin de citation)
K485 - "La totalité absolue de la série des conditions dans le monde sensible
s'appuie uniquement sur un usage transcendantal de la raison, laquelle exige cette
complétude inconditionnée de ce qu'elle présuppose comme chose en soi, tandis
que le monde sensible ne contient rien de tel"
(Citation de K486)
[La proposition précédente revient] "à dire que, dans la régression empirique, je ne
parviens toujours qu'à une condition qui doit elle-même à son tour, nécessairement,
être considérée comme empiriquement conditionnée." [Il y a une] "règle stipulant
que, si loin que je puisse en être arrivé ainsi dans la série ascendante, je dois sans
887
cesse me poser la question d'un membre plus élevé de la série, que celui-ci puisse
ou non m'être connu par expérience.
[Lire ici Progression à l'infini (in infinitum) ou progression illimitée (in
indefinitum) : définitions.]
Je ne dirai pas non plus que la régression conduisant d'une perception donnée à tout
ce qui la limite dans une série, aussi bien dans l'espace que dans le temps, va à
l'infini : cela suppose, en effet, la grandeur infinie du monde ;
888
ni non plus qu'elle est finie : car la limite absolue est tout aussi impossible
empiriquement.
En vertu de quoi je ne pourrai donc rien dire de tout l'objet de l'expérience (du monde
sensible), mais uniquement de la règle d'après laquelle l'expérience doit être
organisée et poursuivie d'une manière qui soit conforme à son objet.
Une limite absolue du monde est impossible empiriquement, par conséquent aussi
absolument impossible.
(Fin des citations)
Autres remarques
Sur la grandeur du monde
(Citation de K489)
"Tout commencement est dans le temps [par définition] et toute limite de ce qui
possède une étendue est dans l'espace [par définition]. Mais l'espace et le temps ne
sont que dans le monde sensible [ce sont des intuitions a priori du monde sensible].
Par conséquent, des phénomènes, dans le monde, ne sont limités que d'une
manière conditionnée, mais le monde lui-même n'est limité ni d'une manière
conditionnée ni d'une manière inconditionnée.
(Fin de citation)
Sur la régression
(Citation de K489)
"Le concept de la grandeur du monde n'est donné qu'à travers la régression, et non
pas, antérieurement à cette régression, dans une intuition collective.
889
Mais la régression ne consiste jamais que dans l'acte de déterminer la grandeur et
elle ne donne donc pas un concept déterminé, ni non plus un concept d'une grandeur
qui serait infinie par rapport à une certaine mesure :
par conséquent, elle ne va pas à l'infini (comme s'il était donné), mais à une distance
indéterminée, pour donner (à l'expérience) une grandeur qui ne commence à devenir
effective qu'à travers cette régression."
(Fin de citation)
(Citation de K562)
"Si la raison est un pouvoir de dériver le particulier à partir du général,
Ou bien le général est déjà en soi certain et donné, et par suite il ne requiert que
la faculté de juger pour procéder à la subsomption, et le particulier se trouve par
là même nécessairement déterminé. C'est là ce que je nommerai l'usage
apodictique de la raison.
[Usage hypothétique de la raison]
Ou bien le général n'est admis que de façon problématique, et il est une simple
Idée ; le particulier est certain, mais l'universalité de la règle conduisant à cette
conséquence est encore un problème : ainsi plusieurs cas particuliers, qui, tous,
sont certains, sont-ils rapportés à la règle pour savoir s'ils en découlent ; et dans
ce cas, s'il apparaît que tous les cas particuliers que l'on peut indiquer
s'ensuivent de celle-ci, on conclut à l'universalité de la règle, puis de celle-ci à
tous les cas, y compris ceux qui ne sont pas en eux-mêmes donnés. C'est là ce
que je nommerai l'usage hypothétique de la raison."
(Fin de citation)
890
adoptée comme hypothèse ; car comment veut-on connaître toutes les
conséquences possibles qui, en découlant du même principe que l'on a admis,
prouvent son universalité ? En fait, cet usage n'intervient que de façon régulatrice,
pour introduire ainsi, aussi largement qu'il est possible, de l'unité dans les
connaissances particulières et par là rapprocher la règle de l'universalité.
Inversement, l'unité systématique (en tant que simple Idée) est purement et
simplement une unité projetée, que l'on doit considérer en soi, non pas comme
donnée, mais seulement comme constituant un problème : cette unité sert alors à
trouver un principe pour l'usage divers et particulier de l'entendement, et à guider
aussi par là cet usage vers les cas qui ne sont pas donnés et à le rendre cohérent."
(Fin de citation)
Chez Kant
Définition : voir Raisonnements de la raison (syllogismes).
891
(consécution) d'après laquelle la vérité de la dernière est reliée indissolublement à la
vérité de la première."
Cette liaison confère au raisonnement une unité d'enchaînement nécessaire.
D'où les définitions suivantes.
K335 – "Si le jugement conclu est déjà compris dans la première proposition, de telle
manière qu'il puisse en être déduit sans la médiation d'une troisième représentation,
le raisonnement est dit immédiat : plus volontiers parlerais-je alors de raisonnement
d'entendement. Mais si, outre la connaissance qui est prise pour principe, se trouve
encore être nécessaire un autre jugement pour opérer la déduction, le raisonnement
s'appelle raisonnement de raison."
Voir aussi :
Raison - Usage hypothétique de la raison ;
Conscience des actes et des procédures.
892
Raisonnement par induction ou probabiliste ;
Raisonnement hypothético-déductif ;
Raisonnement a priori ou a posteriori.
Nous savons aussi que, chaque fois qu'il le peut, l'esprit enregistre une connaissance
nouvelle N en mémoire de long terme en réutilisant au maximum des connaissances
anciennes A, B, C… qu'il a déjà. Il représente N en utilisant des liens de relation avec
ces connaissances tels que l'information nouvelle de N à partir d'elles soit la plus
simple possible. Il pourra ultérieurement reconstituer N à partir des connaissances A,
B, C… en parcourant ces liens (qui aboutissent à des représentations), en faisant la
synthèse des représentations ainsi trouvées, et en interprétant la représentation de
synthèse sous forme de connaissance.
La réutilisation est aussi préférée en tant que méthode mentale : chaque fois qu'il le
peut, l'esprit résoudra un problème nouveau en réutilisant des raisonnements qu'il
connaît plutôt que de construire un raisonnement nouveau adapté au problème posé.
893
Exemple : J'utilise depuis l'adolescence une méthode de calcul du carré d'un
nombre terminé par 5 : multiplier son nombre de dizaines d par son successeur
d+1 et ajouter 25 au bout, à droite. Ainsi le carré de 65 s'obtient par 6x(6+1)=42,
et en ajoutant 25 à droite de 42 on trouve 4225 : 652 = 4225.
J'utilise aussi l'identité remarquable (a+b)(a-b)=a2-b2.
Ainsi 63x67=(65-2)(65+2)=4225-4=4221.
J'ai tellement l'habitude, depuis des années, d'utiliser ces méthodes que j'y
recours sans me poser de question, sans me demander chaque fois s'il n'y a pas
une méthode plus élégante, sans prendre le temps d'en chercher une.
Gestion d'historiques
La conscience de soi va au-delà de celle de savoir qu'on a une représentation
présente à l'esprit, elle a le pouvoir de mémoriser et retrouver des historiques (suites
d'actions ou de pensées consécutives), et ce par la même fonction de gestion de la
mémoire que celle qui enregistre le schéma d'attention d'une représentation.
Exemple : tout adulte sait additionner deux nombres entiers en se souvenant de
la méthode : les écrire alignés l'un sous l'autre, additionner les chiffres
superposés en partant de la droite et en ajoutant les retenues éventuelles…
Raisonnement hypothétique
Voir Modus ponens - Modus tollens (latin).
894
Raisonnement par l'absurde
Voir Modus ponens - Modus tollens (latin).
Raisonnements de l'entendement
Source : [165] pages 125 et suivantes : - I - Raisonnements de l'entendement.
Lire d'abord :
Entendement ;
Raisonnement - Raisonnement déductif, d'entendement ou de raison.
Remarques
[Un raisonnement médiat basé sur un jugement en change la matière]
1. [Dans les raisonnements médiats] les jugements sont différenciés par la matière,
puisqu'en ce cas doit s'ajouter un nouveau concept comme jugement
intermédiaire ou comme moyen terme pour dériver un jugement d'un autre.
Si par exemple je conclus : tous les hommes sont mortels, donc Caïus aussi est
mortel, il ne s'agit pas là d'un raisonnement immédiat. Car pour conclure, j'ai
encore besoin du jugement intermédiaire : Caïus est un homme, et par ce
nouveau concept la matière des jugements est changée.
895
du jugement universel selon le principe : de l'universel au particulier la conséquence
est bonne."
(Fin de citation)
896
Remarque
Dans les jugements subcontraires, l'opposition n'est pas pure, stricte, car ce n'est
pas des mêmes objets que l'une nie ou affirme ce que l'autre affirme ou nie. Par
exemple dans ce raisonnement : quelques hommes sont savants, donc quelques
hommes ne sont pas savants, ce n'est pas des mêmes hommes que le premier
jugement affirme ce que nie le second."
(Fin de citation)
Remarques
1. Dans les jugements universellement affirmatifs le sujet est considéré comme
contenu dans le prédicat, puisqu'il est contenu dans la sphère de ce dernier.
Je puis donc conclure seulement par exemple : « Tous les hommes sont mortels,
donc quelques-uns des êtres qui sont contenus dans le concept mortel sont des
hommes ».
897
Mais les jugements universellement négatifs se convertissent simplement parce
que deux concepts universellement contradictoires entre eux se contredisent
dans une égale extension.
2. Plusieurs jugements affirmatifs universels sont aussi convertibles simplement,
non du fait de leur forme, mais du fait de leur matière.
Exemple : les deux jugements : « Tout ce qui est immuable est nécessaire » et :
« Tout ce qui est nécessaire est immuable »."
(Fin de citation)
Remarques
1) La métathèse des jugements par conversion et la métathèse [des jugements] par
contraposition sont donc opposées entre elles, en ce sens que [la contraposition]
change simplement la qualité, [la conversion changeant] la quantité.
2) Les raisonnements immédiats dont il a été question se rapportent simplement aux
jugements catégoriques."
(Fin de citation)
898
§56. Définition d'un raisonnement de la raison en général
[165] pages 130-131 – "Un raisonnement de la raison est la [déduction] de la
nécessité d'une proposition par la subsomption de sa condition sous une règle
générale donnée."
Remarque
Le syllogisme énonce d'abord une règle générale et une subsomption sous la
condition de cette règle. Donc sa conclusion n'est pas contenue a priori dans le
singulier mais dans l'universel, et elle est nécessaire sous une certaine condition.
Le fait que tout est soumis à l'universel et déterminable par une règle générale
constitue le principe de rationalité ou de nécessité."
(Fin de citation)
La connaissance que la condition a lieu (de quelque manière que ce soit) est la
subsomption.
899
§59. Matière et forme des syllogismes
(Citation de [165] page 132)
"Les propositions premières ou prémisses constituent la matière [des syllogismes.]
La conclusion, dans la mesure où elle renferme la conséquence, constitue la forme
des syllogismes.
Remarques
1. Dans tout syllogisme, il faut donc d'abord s'assurer de la vérité des prémisses et
ensuite de la légitimité de la conséquence.
Quand on rejette un syllogisme il ne faut jamais commencer par rejeter la
conclusion, mais toujours en premier lieu soit les prémisses, soit la conséquence.
2. Dans tout syllogisme, la conclusion est donnée aussitôt que les prémisses et la
conséquence sont données.
(Fin de citation)
900
ni enfin selon la modalité, — car la conclusion est toujours accompagnée de la
conscience de la nécessité [le sujet sujet est certain de sa nécessité] et, par
suite, a la dignité d'une proposition apodictique.
Il ne reste donc que la relation comme unique principe possible de la division des
syllogismes."
(Fin de citation)
Remarque
Cette différence dans les termes ne se trouve que dans les syllogismes
catégoriques, parce qu'ils sont les seuls à conclure à l'aide d'un moyen terme ; les
autres ne concluent que par la subsomption d'une proposition représentée comme
problématique dans la majeure et assertorique dans la mineure."
(Fin de citation)
Remarque
Du principe qu'on vient d'exposer se déduit aisément le principe :
[
« Toute propriété d'un ensemble d'objets E est propriété d'un sous-ensemble
d'objets de E ». Exemple : tout ce qui est vrai pour tous les mammifères est vrai
pour les mammifères particuliers que sont les chiens.
901
« Tout ce qui est faux pour un ensemble d'objets E est faux pour un sous-
ensemble de E ».
Il est évident que l'ajout d'une propriété à un concept restreint la classe d'objets
correspondants. Tout ce qui appartient à la catégorie immeuble appartient à la
catégorie bâtiment, car un immeuble est un type de bâtiment.
]"
(Fin de citation)
902
§67. Les quatre figures des syllogismes
[165] page 136 – "On entend par figures [des syllogismes] ces quatre façons de
conclure, dont la différence est déterminée par la place particulière des prémisses et
de leurs concepts."
La distinction des quatre figures est déterminée par ces quatre cas.
Appelons S le sujet de la conclusion, P son prédicat et M le moyen terme ;
on peut présenter le schéma des quatre figures dans le tableau suivant :
N° de figure 1 2 3 4
Sujet Prédicat S P S P S P S P
Majeure M P P M M P P M
Mineure S M S M M S M S
"
(Fin de citation)
903
toutes, pour être valables, doivent pouvoir s'y ramener par la conversion des
prémisses.
Remarque
La première figure peut avoir une conclusion de toute quantité et de toute qualité
[pour couvrir tous les cas]. Dans les autres figures, il n'y a de conclusion que d'une
certaine espèce ; quelques-uns de leurs modes en sont exclus. Ce qui montre déjà
que ces figures ne sont pas parfaites mais qu'on rencontre certaines limitations qui
empêchent que la conclusion se fasse dans tous les modes comme dans la première
figure."
(Fin de citation)
Remarque
La règle de la deuxième figure est : ce à quoi un caractère d'une chose répugne,
répugne à la chose elle-même. — Ici je dois donc d'abord convertir et dire : ce à quoi
un caractère répugne, répugne à ce caractère ; — ou bien je dois convertir la
conclusion : ce à quoi un caractère d'une chose répugne, à cela répugne la chose
elle-même ; par conséquent il répugne à la chose."
(Fin de citation)
Remarque
La règle de la troisième figure est : ce qui convient ou répugne à un caractère,
convient ou répugne aussi à quelques-unes de ces choses sous lesquelles ce carac-
tère est contenu. — Ici je dois d'abord dire : il convient ou répugne à tout ce qui est
contenu sous ce caractère."
(Fin de citation)
904
§73. Règle de la quatrième figure
(Citation de [165] page 139)
"Si dans la quatrième figure la majeure est universellement négative, elle peut être
convertie simplement ; de même la mineure comme particulière ; donc la conclusion
est négative.
Si la conclusion ne doit pas être convertie (P S changé en S P), il faut qu'ait lieu pour
les deux prémisses une transposition ou une conversion."
[Exemple : « Nul triangle n'est formé de 4 lignes ; or tout espace délimité par 4
lignes est une figure : donc quelques figures ne sont pas des triangles. »]
Remarque
Dans la quatrième figure on conclut :
le prédicat dépend du moyen terme,
le moyen terme dépend du sujet (de la conclusion),
donc le sujet dépend du prédicat ;
905
Remarques
1) Les syllogismes hypothétiques n'ont donc pas de moyen terme, mais on y indique
seulement les conséquences d'une proposition découlant d'une autre. — La majeure
de ce raisonnement exprime donc la conséquence qui lie deux propositions l'une à
l'autre, proposition dont la première est une prémisse, la seconde une conclusion. La
mineure est un changement de la condition problématique en une proposition
catégorique.
Tout syllogisme doit être une preuve. Or le syllogisme hypothétique ne comporte que
le principe de la preuve. Ainsi il est également clair de cette façon qu'il ne peut être
un raisonnement de la raison."
(Fin de citation)
On y conclut :
1. soit de la vérité d'un membre de la disjonction à la fausseté des autres,
2. soit de la fausseté de tous les membres sauf un, à la vérité de celui-ci.
Le premier cas se produit grâce au modus ponens ; le second grâce au modus
tollens.
Remarques
1. Tous les membres de la disjonction pris ensemble, sauf un, forment l'opposition
contradictoire avec ce membre unique. Il y a donc ici une dichotomie selon
laquelle si l'un des deux est vrai, l'autre doit être faux et réciproquement.
2. Tous les raisonnements disjonctifs qui ont plus de deux membres de disjonction
sont donc proprement polysyllogistiques. Car toute vraie disjonction ne peut avoir
que deux membres et la division logique a également deux membres ; mais les
membres subdivisants sont placés, pour faire bref, sous les membres divisants."
(Fin de citation)
906
§78. Principe des syllogismes disjonctifs
[165] page 141 – Le principe des syllogismes disjonctifs est le principe du tiers
exclu :
« Il n'y a que deux cas de valeur logique. Une proposition p ne peut être que :
Vraie, et alors la proposition contraire non-p (¬p) est fausse ;
Ou fausse, et alors la proposition contraire non-p (¬p) est vraie.
§79. Dilemmes
(Citation de [165] pages 141-142)
"Un dilemme est un syllogisme hypothétiquement disjonctif ou un raisonnement
hypothétique dont le conséquent est un jugement disjonctif.
[Syllogismes cachés]
Aux syllogismes formels s'opposent les syllogismes cachés, au nombre desquels on
peut compter :
ceux dont les prémisses sont transposées,
[ceux] dont l'une des prémisses est omise [car sous-entendue, qui s'appellent
syllogismes tronqués ou enthymèmes]
[ceux] enfin dont seul le moyen terme est lié à la conclusion
[et qui s'appellent syllogismes contractés]."
(Fin de citation)
907
la seconde [faculté de juger va] du particulier à l'universel. Elle n'a qu'une validité
subjective ; car l'universel auquel elle s'achemine en partant du particulier, n'est
qu'une universalité empirique, un simple analogue de l'universalité logique."
(Fin de citation)
Remarque
Les raisonnements de la faculté de juger étant fondés sur un tel principe, ne peuvent
de ce fait être tenus pour des raisonnements immédiats.
Remarques
[1 - Principes de généralisation et de spécification]
L'induction conclut du particulier à l'universel selon le principe de généralisation :
ce qui convient à plusieurs choses convient aussi aux autres choses du même
genre.
L'induction étend le donné empirique du particulier au général relativement à
plusieurs objets ; un en plusieurs, donc en tous : induction ;
L'analogie conclut de la ressemblance particulière entre deux choses à la
ressemblance totale, selon le principe de spécification : des choses d'un genre
entre lesquelles nous connaissons beaucoup de points d'accord, s'accordent
aussi sur les autres points que nous connaissons chez quelques individus de ce
genre, mais que nous ne percevons pas chez les autres.
L'analogie étend les propriétés données d'une chose à un plus grand nombre de
propriétés de cette même chose ; plusieurs en un (qui sont également en un
autre), donc également le reste dans le même : analogie.
908
2 - Tout raisonnement de la raison doit produire la nécessité.
Aussi l'induction et l'analogie ne sont-ils pas des raisonnements de la raison, mais
seulement des présomptions logiques ou encore des raisonnements empiriques ; et
par l'induction on parvient à des suppositions qui sont bien générales, mais pas
universelles.
909
§91. Saut dans le raisonnement
(Citation de [165] pages 146-147)
"Un saut dans le raisonnement où la preuve consiste à lier une prémisse avec la
conclusion en omettant l'autre prémisse est légitime si chacun peut suppléer
aisément la prémisse qui manque ; mais illégitime si la subsomption n'est pas claire."
(Fin de citation)
Remarque
Le raisonnement circulaire est souvent malaisé à découvrir ; et d'ordinaire justement
cette faute est le plus fréquemment commise lorsque les preuves sont difficiles."
(Fin de citation)
910
"Les déductions de ce genre méritent en ce sens, à voir leurs résultats, d'être
appelées plutôt des ratiocinations que des raisonnements…" (Fin de citation)
Kant rejette ces raisonnements, tout en admettant qu'ils sont issus "de la nature de la
raison" :
K359 - "Ce sont des sophistications, non pas de l'être humain, mais de la raison
pure elle-même, à l'égard desquelles même le plus sage de tous les hommes ne
peut se libérer…"
Ratiocination
Raisonnement abusif, hors de propos, argument subtil et vain (K151).
911
Selon le principe de raison, toute réalité s'explique par une expérience, ce qui la rend
intelligible.
D'après cette doctrine, la raison, en tant que système de principes organisateurs des
données empiriques, fonde la possibilité de l'expérience.
Voir Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).
Le principe de raison peut être appliqué pour tirer une conséquence d'un fait ou
d'une hypothèse ; exemple : Syllogisme hypothétique.
Rationnel
Adjectif
Qui relève de la raison, de la logique, d'un raisonnement juste, apodictique.
Par opposition à sensible, esthétique (artistique), révélé (religion) ou surnaturel
(magique) : ce qui est rationnel relève de la logique sans émotion ni préjugé.
Compléments :
De la cause absolument nécessaire à l'existence de Dieu omniscient ;
Connaissances rationnelles ou historiques, objectives ou subjectives ;
Limite entre l'usage commun de l'entendement et son usage spéculatif.
912
Réalisme
Substantif de philosophie : doctrine qui affirme qu'il existe une réalité extérieure
indépendante de l'homme, distincte de sa pensée. Opposé : Idéalisme.
Chez Kant : doctrine suivant laquelle le monde extérieur est connu tel qu'il
apparaît à travers les phénomènes, et non tel qu'il est en soi.
Opposé : Conceptualisme.
Remarque : Kant professait aussi un idéalisme critique.
Mais Kant n'explique pas comment nos connaissances intuitives naissent à partir des
objets extérieurs, et comment nous viennent les synthèses a priori dont nous faisons
des lois a priori de la nature.
Il sait que l'explication théologique n'explique rien, qu'elle remplace l'explication
par des affirmations dogmatiques, et que son seul avantage est d'ordre
esthétique : l'impression de système rationnel et cohérent.
913
En effet, selon [158] page 193, il y a une antinomie de la chose en soi chez Kant,
soulignée par Jacobi [164] :
En adoptant l'idéalisme de Kant, l'intuition de la chose en soi est inexplicable :
comment prouver l'effet sensation d'un objet extérieur (de son inaccessible
chose en soi objective) sur nos sens ? - (Voir Chose en soi et connaissance).
(Le caractère inaccessible de la chose en soi, donc de l'être (existence), confère
à la philosophie kantienne un caractère quelque peu nihiliste.)
En adoptant le réalisme on peut justifier la perception, mais il faut abandonner la
doctrine idéaliste kantienne et sa théorie des lois de la nature « C'est l'homme
qui introduit l'ordre et la régularité dans les lois de la nature ».
Selon [158] page 196, Jacobi a défini la doctrine idéaliste comme suit :
"Tout idéalisme se fonde sur l'argument suivant : la matière de nos représentations
ne peut être que sensation, c'est-à-dire modification de nous-mêmes, car il est tout à
fait impossible que des objets existants en soi et hors de nous [c'est-à-dire des
choses en soi externes] emménagent dans l'âme [l'esprit], comme des meubles dans
une pièce, par l'œil, l'oreille ou la main qui palpe…"
(Cette définition pèche par le caractère vague du mot âme (ou du mot esprit) :
pourquoi une chose en soi ne pourrait-elle pas « pénétrer » dans une âme
immatérielle ?
Mais Kant est d'accord avec le fait que la matière étendue, qui correspond à la
réalité physique, est l'origine (la cause) des sensations que procure la perception
de l'objet ou du phénomène.)
Voir aussi :
Idéalisme transcendantal, réalisme transcendantal et idéalisme empirique ;
Idéalisme critique ;
Réfutation du matérialisme (but de sa critique invoqué par Kant) ;
Principe de la primauté de la connaissance sur les objets (doctrine).
Réalisme transcendantal
Voir Définition du Réalisme transcendantal.
Réalité et phénomènes
Lire d'abord :
Relation entre ce qui nous apparaît et la réalité ;
914
Rapport des phénomènes à l'expérience en général.
[Ce monde extérieur est celui que j'intuitionne et dont j'ai conscience]
et comme cet espace ainsi que tous les phénomènes qu'il contient relève des
représentations [liées par la fonction de liaison du sens interne], j'ai conscience de la
réalité des corps comme phénomènes extérieurs dans l'espace,
[Les représentations de l'espace avec ses phénomènes extérieurs sont des
vérités objectives parce qu'elles sont liées par les lois de l'expérience.]
[Mais je ne peux rien connaître sur mon âme à part son existence]
âme que je ne peux connaître [même seulement comme objet du sens interne] au
moyen de phénomènes qui constituent un état intérieur, alors que son essence
considérée en elle-même, qui est [l'origine] de ces phénomènes me demeure
inconnue."
(Fin de citation)
[Nous ne pouvons rien savoir de cette chose en soi, sinon qu'elle d'affecte nos sens]
bien que nous ne sachions pas comment elle est constituée en elle-même, et que
nous ne soyons informés que de son phénomène, c'est-à-dire de la manière dont
nos sens sont affectés par ce quelque chose d'inconnu.
[Notre entendement admet donc que ces choses en soi inconnaissables existent]
Donc l'entendement, du fait même qu'il admet les phénomènes, reconnaît également
l'existence des choses en elles-mêmes,
915
[Cette représentation est celle d'êtres de l'entendement pur, les noumènes.]
Réalité physique
La réalité d'un objet est postulée d'après l'intuition de son phénomène, qui comprend
une forme (le temps et, pour les phénomènes du sens externe, l'espace).
K298 – "On ne peut […] définir la réalité par opposition à la négation que si l'on se
forge la pensée d'un temps (comme ensemble où tout ce qui est se trouve englobé),
[temps] qui, soit est rempli de cette réalité, soit est vide."
916
Relation entre ce qui nous apparaît et la réalité
[56b] §12 page 60 – "Tout ce qui peut être donné à nos sens (au sens externe dans
l'espace, au sens interne dans le temps) n'est intuitionné par nous que comme il
nous apparaît, et non comme il est en lui-même."
K235 - "La possibilité de l'expérience est […] ce qui donne de la réalité objective à
toutes nos connaissances a priori. Or, l'expérience repose sur l'unité synthétique des
phénomènes, c'est-à-dire sur une synthèse, opérée d'après des concepts de l'objet,
des phénomènes en général…"
Cette réalité est objective car sa signification (ses informations) étant indépendante
de l'homme et des circonstances peut être partagée à l'identique par tous les
humains.
C'est là un point de vue idéaliste, qui considère l'Idée et sa chose en soi comme les
seules véritables réalités, éternelles et indépendantes de l'homme ; pour eux, un
objet physique n'est qu'une copie particulière d'Idée, jugée inférieure car non
éternelle. [L'infériorité est un prédicat flou, mal défini même par rapport à la notion de
bien ou mal ; donc tout jugement qui repose sur cette appréciation est douteux.]
Voir aussi :
Chose en soi
Idée
Data
Négation
Idéalisme transcendantal comme clef pour résoudre la dialectique cosmologique
Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant
Non-existence d'un objet sensible
Voir aussi Possibilité de l'expérience au XXIème siècle
Réalité suprême
Voir Conclusion sur la possibilité des choses – Concept de la suprême réalité.
917
Réceptivité
K117 – "La capacité de recevoir (réceptivité) [passivement] des représentations par
la manière dont nous sommes affectés par des objets s'appelle sensibilité. C'est
donc par la médiation de la sensibilité que des objets nous sont donnés, et c'est elle
seule qui nous fournit des intuitions ; mais c'est par l'entendement qu'ils sont pensés,
et c'est de lui que procèdent des concepts."
K472 – "Le pouvoir sensible d'intuition n'est à proprement parler qu'une réceptivité,
qui consiste à être affecté d'une certaine manière par des représentations dont le
rapport qu'elles entretiennent les unes avec les autres est une intuition pure de
l'espace et du temps (simples formes de notre sensibilité), et qui se trouvent
désignées comme des objets en tant qu'elles sont dans ce rapport (l'espace et le
temps) reliées et déterminables d'après des lois réglant l'unité de l'expérience."
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est l'espace,
tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps."
En s'exprimant comme un mathématicien, la représentation fournie à la
conscience pour prise en compte par appréhension est une fonction de deux
variables, le temps et l'espace. L'expression de la fonction (« la formule à
calculer ») est une description du phénomène, la représentation fournie par la
synthèse empirique : voir Intuition (étapes).
Réciprocable
Adjectif : se dit d'une proposition ou d'une thèse dont la réciproque existe.
Réciproque
Adjectif ou substantif.
Selon le dictionnaire [13] : (philosophie, logique) - Deux propositions hypothétiques
sont réciproques quand l'hypothèse de l'une est la conséquence de l'autre, et quand
la conséquence de la première est l'hypothèse de la seconde.
918
Exemple : si une figure est un triangle, c'est un polygone de trois côtés ; si une
figure est un polygone de trois côtés, c'est un triangle.
On dit qu'une relation entre deux termes est réciproque quand un terme présuppose
l'autre et vice versa.
Réciprocité
Relation entre deux objets abstraits qui agissent chacun sur l'autre
Exemple : « En économie, le prix d'un article et la demande de cet article
interagissent : quand l'un augmente l'autre baisse, et réciproquement. »
919
Recognition (récognition) de concept ou de procédure
Dictionnaire [13]
Action de reconnaître en identifiant.
Chez Kant
La recognition est l'acte de l'esprit par lequel une représentation est subsumée sous
un concept, ce qui exige de reconnaître ce concept comme ensemble d'informations
présentes dans la représentation.
Recognition de procédure
L'esprit humain a une faculté de recognition de procédure (suite d'étapes de la
pensée) permettant de reconnaître une procédure P, adaptée à un problème du
moment, en tant que détail ou variante d'une procédure plus générale G enregistrée
dans sa mémoire de long terme. Exemples :
L'esprit sait additionner 142857 et 50834 en reconnaissant dans ce problème un
cas particulier d'une méthode générale d'addition apprise dans l'enfance.
920
L'esprit sait calculer la primitive de la fonction cos(3x+0.12) en y reconnaissant
un cas particulier de la primitive de cos x…
L'esprit sait reconnaître des situations et évolutions politiques, de jeu d'échecs…
L'esprit sait reconnaître des directions d'évolution : mouvement d'un ballon, coup
porté par un adversaire, brouillard qui s'épaissit…
Modèles et archétypes
Le subconscient joue un rôle important dans les fonctions mentales comme
l'association, l'appréhension, l'intuition, l'imagination, la synthèse et la recognition.
L'entendement lui-même, lorsqu'il ne fait pas appel à la raison, se déroule dans le
subconscient.
Récupération
Fait de retrouver une information en mémoire. Opposé : oubli.
Réductionnisme
On appelle réductionnisme un principe d'explication d'un phénomène complexe par
une seule de ses composantes, censée suffire à rendre compte des autres. Cette
définition s'applique notamment au vivant, lorsque les phénomènes de niveau
supérieur sont expliqués à partir du niveau inférieur : le psychisme est expliqué à
partir de la seule biologie, et celle-ci à partir de la chimie et de la physique. Le
921
réductionnisme est donc une méthode d'explication par simplification et abstraction,
approche scientifique nécessairement analytique.
Avec une approche réductionniste, les propriétés d'un tout doivent se déduire de
celles d'une de ses parties.
Référentiel
Système de coordonnées, trois spatiales et une temporelle, auxquelles sont
rapportées les positions et déplacements des objets physiques.
922
Définition d'une réflexion transcendantale
Kant appelle l'acte par lequel cette recherche de lieu transcendantal s'effectue
réflexion transcendantale :
K9 (ou K310) - « L'acte par lequel je rapproche la comparaison des
représentations en général de la faculté de connaissance où elle trouve sa
place, et par lequel je distingue si c'est comme appartenant à l'entendement pur
ou à l'intuition sensible qu'elles sont comparées les unes aux autres, je l'appelle
la réflexion transcendantale ».
Rapports selon lesquels les concepts peuvent se relier les uns aux autres
K310 - 4 points de vue auxquels des comparaisons de concepts sont possibles :
1. Identité (unité) ou diversité : il s'agit de l'éventuelle identité de représentations
multiples sous un même concept, nécessaire pour des jugements universels,
ou de leur diversité quand il s'agit de produire des jugements particuliers ;
2. Convenance : c'est le point de vue des jugements affirmatifs, les jugements
négatifs relevant de la disconvenance ;
3. Intérieur ou extérieur : c'est le point de vue de l'appartenance (intérieur) ou non-
appartenance (extérieur) à un ensemble qui est un objet de l'entendement pur ;
4. Déterminable ou détermination : c'est la distinction entre matière et forme :
voir Différences entre matière et forme à divers points de vue.
K310 – La réflexion est l'activité psychique qui cherche la relation entre des
représentations données en mémoire (l'objet de la réflexion) et diverses sources de
connaissances. Elle est déclenchée lorsque l'esprit est dans un certain état (Kant
parle dans K309-K310 d'état de l'esprit), c'est-à-dire lorsqu'il a conscience de la
présence de représentations de l'objet dans sa mémoire de travail.
Réflexion logique
K311 – "La réflexion logique est une simple comparaison, puisque l'on y fait
abstraction totalement de la faculté de connaissance à laquelle les représentations
données appartiennent, et qu'elles sont donc dans cette mesure, quant à leur siège
dans l'esprit, à traiter comme si elles étaient homogènes ;"
923
(Citation de K321)
[Limite des comparaisons de concepts d'une réflexion logique]
"Quand nous procédons de façon seulement logique à une réflexion, nous
comparons uniquement nos concepts entre eux dans l'entendement pour savoir :
si deux concepts contiennent la même chose,
s'ils se contredisent ou non,
si quelque chose est contenu intérieurement dans le concept ou s'il vient s'y
ajouter,
et lequel de deux concepts est donné, lequel, en revanche, n'a de valeur que
comme une manière de penser le concept donné.
[Ces points de vue] "se différencient des catégories en ceci qu'ils présentent, non
l'objet d'après ce qui constitue son concept (grandeur, réalité), mais seulement la
comparaison des représentations précédant le concept des choses, et cela dans
toute leur diversité.
924
[Mais pour le lieu de leurs objets il faut une réflexion transcendantale]
Mais si, avec ces concepts, nous voulons accéder aux objets, une réflexion
transcendantale préalable est nécessaire afin de déterminer pour quelle faculté de
connaissance ils doivent être objets, si c'est pour l'entendement ou pour la
sensibilité.
Sans cette réflexion, je fais un usage très mal assuré de ces concepts, et il en résulte
de prétendus principes synthétiques que la raison critique ne peut reconnaître et qui
se fondent exclusivement sur une amphibologie transcendantale, c'est-à-dire sur une
confusion de l'objet pur de l'entendement avec le phénomène."
(Fin de citation)
Il est important de déterminer celui des points de vue ci-dessus sous lequel la faculté
de connaître [entendement ou intuition] relie subjectivement les représentations :
K310 – "Car la différence entre ces facultés produit une grande différence dans la
façon dont on doit penser les rapports entre les concepts."
Exemples d'erreurs dénoncées par Kant à propos de l'amphibologie :
K322 – "On peut certes dire que ce qui, en général, convient ou répugne à un
concept convient ou répugne aussi à tout le particulier qui est subsumé sous ce
concept (dictum de omni et nullo) ; pour autant, il serait absurde de transformer
ce principe logique en vue de lui faire dire que ce qui n'est pas contenu dans un
concept général n'est pas contenu non plus dans les concepts particuliers qu'il
subsume ; car ceux-ci sont des concepts particuliers précisément parce qu'ils
925
contiennent davantage en eux que ce qui est pensé dans le concept général. Or
c'est pourtant bel et bien sur ce dernier principe qu'est construit tout le système
intellectuel de Leibniz ; il s'effondre donc en même temps que ce principe, avec
toute l'ambiguïté qui en résulte dans l'usage de l'entendement."
K322 – "Le principe de l'indiscernable [de Leibniz [37]] se fondait proprement sur
la présupposition que, si une certaine distinction ne se rencontre pas dans le
concept d'une chose en général, elle ne se peut trouver non plus dans les
choses elles-mêmes ; et que, par conséquent, toutes les choses sont
parfaitement identiques (numero eadem) qui ne se distinguent pas déjà les unes
des autres dans leur concept (quant à la qualité ou quant à la quantité). Mais
puisque, quand il s'agit du simple concept d'une chose quelconque, abstraction
est déjà faite de maintes conditions nécessaires d'une intuition, on est porté à
prendre, par une étrange précipitation, ce dont on a fait abstraction pour quelque
chose qui ne se peut rencontrer nulle part, et l'on n'accorde à la chose que ce
qui est contenu dans son concept."
Kant ne justifie pas le choix de ces méthodes de comparaison. Il les cite en critiquant
la métaphysique de Leibniz [37], hors sujet dans ce vocabulaire.
"Une réflexion transcendantale, en revanche, qui porte sur les objets eux-mêmes,
contient le principe de la possibilité de la comparaison objective des représentations
entre elles et est donc vraiment très différente [de la réflexion logique], puisque la
faculté de connaissance dont elles relèvent n'est pas la même."
Kant utilise le terme concept de la réflexion dans la Critique sans l'avoir explicitement
défini. En étudiant son texte on trouve qu'il désigne les points de vue 1., 2., 3., et 4.
suivants, utilisés pour comparer les concepts de comparaison par réflexion
transcendantale.
926
Le concept 56Fe est universel, il représente tous les atomes de cet élément, où
qu'ils se trouvent, parce que leurs substances sont identiques, et il contient les
mêmes informations que sa chose en soi.
Plus généralement, on peut comparer deux concepts A et B par subsomption
sous l'ensemble C de leurs informations communes - s'il y en a.
Diversité numérique
On ne peut distinguer deux atomes 56Fe que s'ils sont en même temps à des
endroits différents. Kant définit donc la diversité numérique comme la propriété
permettant de distinguer deux objets physiques identiques vus au même instant
par l'intuition en des lieux distincts, distinction qui relève du phénomène. Ces
deux objets auront donc des concepts identiques à une information près : la
position dans l'espace ; on en comparera donc les représentations en tant
qu'intuitions de phénomènes.
K322 – "Le concept d'un pied cube d'espace, où et si souvent que je veuille le
penser, est en soi parfaitement identique [unique]. Reste que deux pieds cubes
sont pourtant, dans l'espace, distingués simplement par les lieux qu'ils occupent
(numero diversa) ; ces lieux sont les conditions de l'intuition dans laquelle l'objet
de ce concept est donné, lesquelles conditions n'appartiennent pas au concept,
mais cependant à toute la sensibilité."
Conclusion : lorsqu'il y a en mémoire, au même instant, deux représentations
totalement identiques, elles ne correspondent qu'à un seul et même objet, et
leurs représentations appartiennent à l'entendement. Deux objets identiques,
situés à un instant donné en deux endroits différents, auront au moins une
différence entre leurs représentations : leurs positions dans l'espace, et ces
représentations appartiendront à l'intuition sensible.
Voir Numériquement : diverses, identique.
927
Exemple 2 : compatibilité d'un ensemble avec une relation pour obtenir un
résultat
Considérons :
L'ensemble E des nombres entiers positifs, négatifs ou nul ;
Une relation R entre deux éléments a et b de l'ensemble E produisant un
élément c = a R b appartenant aussi à E (exemple : l'addition, qui produit un
élément c = a + b) ;
L'élément zéro (0) de E défini comme neutre, tel qu'étant donné un élément
a appartenant à E (noté aE) : a R 0 = a, c'est-à-dire (a + 0 = a).
Pour tout aE il existe alors un élément bE tel que a R b = 0
(a + b = 0, donc b = -a) : la mise en relation R (l'addition) de a et b annule a.
Donc si on a choisi (défini) un ensemble E muni d'une relation R à élément
neutre 0, on peut annuler (neutraliser) n'importe quel élément de E : on dit qu'un
tel choix {E, R, 0} convient pour une possibilité d'annuler tout élément de E ;
Kant dirait qu'il introduit une relation de convenance.
Considérons à présent l'ensemble F des nombres entiers positifs ou nul (déduit
de E par suppression des entiers négatifs) et choisissons la même relation R que
précédemment, avec son élément neutre 0.
Alors, quel que soit l'élément aF autre que 0, il n'existe pas d'élément b dont la
mise en relation R (l'addition) avec a annule a : l'addition de deux nombres
positifs dont l'un au moins est non-nul donne toujours un nombre non-nul : le
choix {F, R, 0} ne convient pas pour une possibilité d'annuler un élément non-nul
de F ; Kant dirait qu'il introduit une relation de disconvenance.
Par analogie avec cet exemple, on peut associer deux représentations d'un même
objet au sens de l'existence d'une certaine relation entre eux, existence appelée
alors convenance ou disconvenance ; voici comment.
Si les deux représentations sont issues de l'entendement pur, elles sont
identiques et aucune association ne pourra produire un résultat neutre : l'une ne
pourra annuler l'autre et on parlera entre eux d'une relation de convenance.
Au contraire, si les deux représentations sont issues de l'intuition, elles pourront
différer par au moins une information X. Leur association pourra produire un résultat
neutre si l'information X a des valeurs opposées, et on parlera entre eux d'une
relation de disconvenance.
928
ce qui n'entretient absolument aucune relation (quant à l'existence) avec quoi
que ce soit de différent de lui.
[Autrement dit : n'est défini comme intérieur à l'objet-chose en soi que ce qui
n'a pas de rapport avec une autre information ; une telle définition est
absolue. Le mot intérieur qualifie donc l'appartenance à l'ensemble des
informations du noumène, celles créées par l'entendement lorsqu'il pense la
chose en soi de l'objet par réflexion sur sa représentation.
Ainsi, d'un point de vue formel, l'intérieur d'un objet est l'ensemble des
parties de cet objet ; l'extérieur est un ensemble qui comprend au moins un
élément qui ne fait pas partie de l'objet, ou à qui il manque au moins un
élément de l'objet. L'intérieur d'un objet est donc la détermination logique de
sa chose en soi.
Notons que le caractère intérieur ou extérieur ne concerne que la liste des
informations de l'objet. Il ne concerne ni le contenu de chacune, ni les
éventuelles relations entre elles.]
[Objet de l'intuition sensible]
En revanche, la détermination intérieure d'une substantia phaenomenon dans
l'espace n'existe que comme des rapports [elle n'est pas absolue comme la
définition d'une chose-en-soi], et elle n'est elle-même totalement et pleinement
qu'un ensemble de pures relations.
La substance dans l'espace, nous ne la connaissons que par des forces qui
agissent en lui, soit pour y attirer d'autres forces (attraction), soit pour les
empêcher de pénétrer en lui (répulsion et impénétrabilité) ; nous ne connaissons
pas d'autres propriétés constitutives du concept de la substance qui apparaît
phénoménalement dans l'espace et que nous appelons matière."
[La substance d'un phénomène est homogène au sens de l'appartenance à
l'objet en tant qu'information de la chose en soi de cet objet tout entier.
Kant ne conçoit la connaissance de la substance que par des manifestations
mécaniques ; elle n'est possible pour l'homme qu'à travers l'effet de forces
agissant sur de la matière.]
Comme objet de l'entendement pur, toute substance doit au contraire posséder
des déterminations et des forces internes qui se rapportent à la réalité intérieure.
Simplement, que puis-je penser, à titre d'accidents intérieurs, sinon ceux que me
fournit mon sens interne, c'est-à-dire ce qui est soi-même une pensée…"
(Fin de citation)
Kant, qui a rédigé ce paragraphe pour critiquer Leibniz [37] et ses monades, définit
une substance d'une manière qui omet les liquides, les gaz (et bien entendu des
notions plus modernes faisant intervenir l'énergie comme les plasmas, les champs
électriques et les espaces quantiques) ; il exclut aussi toute connaissance de
substance d'objet autre que par des forces d'attraction, répulsion et dureté
(résistance à la pénétration). Nous ne commenterons pas cette physique, aujourd'hui
dépassée. Voir Substance, matière, forme et physique moderne.
929
(Citation de K319-K320)
"La matière est substantia phaenomenon. Ce qui lui appartient intérieurement, je
le cherche dans toutes les parties de l'espace qu'elle occupe, ainsi que dans
tous les effets qu'elle produit, et qui assurément ne peuvent jamais être que des
phénomènes des sens externes.
[« Appartient intérieurement » veut dire ici « qui appartient à la liste de ses
informations et des relations entre elles ». Ce contenu formel ne peut être un
phénomène de son sens externe.]
Je n'ai donc à vrai dire rien qui soit absolument intérieur,
[Mon sens interne ne contient aucune représentation qui soit absolue, c'est-
à-dire issue de l'entendement et définie a priori]
mais il n'est pour moi d'intériorité que comparative,
[je ne peux concevoir l'appartenance d'une représentation à mon sens
interne que par comparaison à son appartenance au sens externe, avec des
événements dans un temps autre que mon temps subjectif]
laquelle ne se constitue elle-même, à son tour, que de rapports extérieurs.
Mais ce qui, selon l'entendement pur, correspondrait à la dimension absolument
interne de la matière est aussi une simple chimère ; car la matière n'est nulle
part un objet pour l'entendement pur,
[Le concept d'appartenance à la matière en tant qu'ensemble de concepts
est vide de sens, car la matière est (philosophiquement) un concept de base
simple.]
alors que l'objet transcendantal, qui peut être le fondement de ce phénomène
que nous appelons matière, est un simple quelque chose dont nous ne
parviendrions jamais à comprendre ce qu'il est, même si quelqu'un nous le disait.
Car nous ne pouvons comprendre que ce qui implique dans l'intuition quelque
chose qui corresponde aux mots que nous utilisons."
(Fin de citation)
(Citation de K314)
"L'espace et le temps précèdent tous les phénomènes, ainsi que toutes les données
de l'expérience, et ils ne font […] que les rendre possibles.
[…]
Comme l'intuition sensible est une condition subjective tout à fait particulière qui est a
priori au fondement de toute perception, et dont la forme est originaire, la forme est
donnée seule par elle-même et, bien loin que la matière (ou les choses mêmes qui
apparaissent phénoménalement) doive intervenir comme fondement (ainsi qu'on
serait forcé d'en juger d'après de simples concepts), la possibilité en suppose plutôt
que soit donnée une intuition formelle (espace et temps).
(Fin de citation)
(La perception suppose l'intuition, qui comprend la forme du phénomène.)
930
K315 – "Les concepts peuvent être comparés logiquement sans que l'on se
soucie de savoir à quoi se rattachent leurs objets, si, comme noumènes, ils
relèvent de l'entendement ou, comme phénomènes, de la sensibilité."
Refoulement
Mécanisme de défense par lequel le sujet repousse ou maintient dans l'inconscient
des pensées, images ou souvenirs en conflit avec une valeur consciente.
Réfutation de l'idéalisme
Voir d'abord :
Idéalisme : doctrine (empirique, subjectif, transcendantal) ;
Idéalité - Dualisme (au sens de Kant).
K282-K283 – Kant admet, comme Descartes [20], que le sens interne de l'homme lui
donne une certitude d'exister au moins en tant qu'être doué d'imagination, être qui a
donc une conscience et une expérience interne. Il en déduit le théorème suivant :
Théorème
La simple conscience, mais empiriquement déterminée, de ma propre existence
prouve l'existence des objets dans l'espace hors de moi.
Signification : Mon sens interne me rend conscient du temps, information externe
à mon corps et mon esprit. Donc j'ai conscience d'objets externes.
Preuve
K283 – Kant écrit, en substance : J'ai conscience de mon existence comme
déterminée dans le temps du fait de mon sens interne (« Je pense, donc je suis » et
[33]). Or, toute détermination de temps suppose quelque chose de permanent dans
la perception. Mais cet élément permanent ne peut pas être quelque chose en moi,
puisque la permanence de mon existence ne peut être appréciée que par rapport à
quelque chose d'extérieur à moi, mon sens interne ne fournissant ni date ni durée
absolues par rapport à l'Univers : il doit donc exister des choses externes que ma
conscience perçoit hors de moi de manière spontanée : j'ai donc à la fois un sens
interne et un sens externe …à moins que la perception de ma conscience ne soit
pure imagination.
931
réalité psychique : je ne peux pas savoir que j'existe (parce que je pense) sans avoir
aussi un sens externe correspondant à la réalité, et sans ressentir une impression
« favorable », « défavorable » ou « neutre » qui est son sens psychique.
Dans sa Remarque 2 (K284-K285), Kant rappelle que l'évolution d'un objet observé
(son « mouvement »), n'a de sens que lorsqu'un sujet a simultanément conscience
du temps et de l'espace. Il peut alors distinguer sa substance (permanente,
inchangée) de ce qui change, grâce à des repères extérieurs qu'il se donne
arbitrairement et qu'il définit comme permanents.
Ce n'est pas parce que j'ai à l'esprit une représentation de phénomène qu'il existe
K285 – "Du fait que l'existence d'objets extérieurs est requise pour la possibilité d'une
conscience déterminée de nous-mêmes, il ne s'ensuit pas que toute représentation
intuitive de choses extérieures en contienne en même temps l'existence, car une
telle représentation peut parfaitement être le simple effet de l'imagination."
Par cette prise de position, Kant s'oppose clairement à l'innéisme de Descartes.
Conclusions
Kant a contesté l'idéalisme dogmatique de Berkeley dans l'Esthétique
transcendantale en postulant que l'espace est une représentation a priori, nécessaire
à toute intuition externe, que c'est une intuition pure (K120-K121).
Par définition, l'Univers étant tout ce qui existe il n'y a pas d'extérieur à l'Univers.
Même si on postulait l'existence d'un tel extérieur, aucune action à travers la frontière
de l'Univers (action qui serait donc transcendante) n'est possible d'après nos lois de
la nature ; il en résulte l'impossibilité de l'existence d'un Dieu qui aurait créé l'Univers
– nécessairement de l'extérieur de celui-ci.
Kant a admis qu'on ne pouvait ni démontrer l'existence d'un espace externe
(faute de repère absolu extérieur à l'Univers), ni son inexistence, d'où son postulat de
l'espace représentation a priori, justifié par son utilité en tant que concept de base
pour former les connaissances.
L'immatérialisme de Berkeley, adopté par exemple par Nietzsche [48] suite à des
théories fantaisistes de Boscovich (1763), a abouti à des absurdités physiques
contredisant, par exemple, les lois de Newton [46] et l'existence des atomes.
932
[Kant affirme là le déterminisme : postulat de causalité et règle de stabilité.]
[…]
Toute la nature en général n'est strictement rien d'autre qu'une interdépendance des
phénomènes selon des règles ; et il n'y a nulle part aucune absence de règles. Si
nous croyons constater une telle absence, nous pouvons seulement dire en ce cas
que les règles nous sont inconnues."
[Et nous ne devons pas, non plus, attribuer les phénomènes, leur survenue ou
leurs interdépendances, au hasard, qui n'existe pas dans la nature.]
(Fin de citation)
Comme toutes nos facultés, l'entendement est régi par des règles
[165] page 9
"Même l'exercice de nos facultés s'effectue selon certaines règles. […] l'entendement
en particulier a ses actes régis par des règles"
Toutes les règles selon lesquelles l'entendement procède sont ou bien nécessaires
ou bien contingentes.
Les [règles nécessaires] sont celles sans lesquelles tout usage de l'entendement
serait impossible ; […]
Ces règles peuvent être discernées même a priori, c'est-à-dire indépendamment
de toute expérience, puisque, sans tenir compte de la distinction entre les objets,
elles renferment simplement les conditions de l'usage de l'entendement en
général, que cet usage soit pur ou empirique.
Et de là vient aussi que les règles universelles et nécessaires de la pensée en
général ne peuvent concerner que sa seule forme et aucunement sa matière.
Par conséquent la science qui contient ces règles universelles et nécessaires est
simplement une science de la forme de notre connaissance intellectuelle ou de
la pensée.
[Définition de la science de la Logique]
Cette science des lois nécessaires de l'entendement et de la raison en général
ou, ce qui est la même chose, de la simple forme de la pensée en général, nous
la nommons : Logique.
Les [règles contingentes] sont celles sans lesquelles un certain usage déterminé
de l'entendement ne pourrait avoir lieu."
(Fin de citation)
933
Les règles objectives sont des lois
K194 – "Les règles, en tant qu'elles sont objectives […] s'appellent des lois".
(Voir Kant affirme le déterminisme des lois de la nature.)
K337 – "La diversité des règles et l'unité des principes constituent une exigence de la
raison pour mettre l'entendement en complet accord avec lui-même, tout comme
l'entendement soumet le divers de l'intuition à des concepts et procède ainsi à sa
liaison. […] Bref, la question est de savoir si la raison en elle-même, c'est-à-dire la
raison pure, contient a priori des principes et des règles synthétiques, et en quoi ces
principes peuvent bien consister."
(La diversité des règles est ce qui permet la connaissance d'un phénomène par
autant de catégories de l'entendement qu'il faut pour le décrire complètement.
L'unité des principes est ce qui permet à l'entendement de rester cohérent dans
l'ensemble des catégories qu'il génère pour un phénomène donné.)
Voir aussi :
Les règles de l'entendement proviennent de ses propres principes ;
Cause et causalité ;
Entendement pur : table des principes ;
934
Principes suprêmes de la possibilité d'intuition pour la sensibilité et
l'entendement ;
Voir aussi Possibilité de l'expérience au XXIème siècle.
Régression empirique
Lorsqu'un objet ou phénomène est donné, à un instant particulier, la régression
empirique consiste à remonter de cet objet à sa cause, puis éventuellement à la
cause de cette cause, etc. L'esprit manipule les représentations et concepts
correspondants en utilisant à la fois l'entendement et la raison.
Une régression empirique ne peut atteindre le début absolument inconditionné
d'une chaîne de causalité
K486 – "Le fondement du principe régulateur de la raison est la proposition selon
laquelle, dans la régression empirique, ne se peut rencontrer aucune expérience
d'une limite absolue, par conséquent aucune expérience d'une condition qui, en
tant que telle, soit absolument inconditionnée de manière empirique. La raison
en est que, dans une telle expérience, les phénomènes ne devraient être limités
par rien, ou par le vide, sur lequel buterait, par l'intermédiaire d'une perception, la
poursuite de la régression, ce qui est impossible."
Régression à l'infini
Lorsque des philosophes considèrent la « cause de la cause », puis la « cause de la
cause de la cause... », etc., ils parlent d'une suite de situations (série infinie)
constituant une chaîne de causalité unique. Celle-ci doit compter, d'après le principe
de raison, autant de chaînons qu'il y a d'instants choisis arbitrairement avant le
présent auxquels on considère la situation.
935
Une chaîne de causalité remontée vers le passé est infiniment longue
Si cette chaîne avait une situation initiale S0, le postulat de causalité affirme que
cette situation aurait, elle aussi, une cause. La situation S 0 ne serait donc pas la
première, ce qui contredit l'hypothèse qu'elle l'est. Donc quel que soit le nombre
initial N de chaînons considéré, il en existe N+1.
Donc le nombre de chaînons est infini : si le postulat de causalité est toujours
vrai, toute chaîne de causalité est infiniment longue (on parle de régression à l'infini)
et il n'y a pas de cause première ; sinon le postulat de causalité est faux.
Autres solutions
1. Une chaîne infinie peut ne pas dépasser une date précise
Un nombre infini de chaînons n'entraîne pas nécessairement une chaîne qui
remonte infiniment loin : si l'intervalle de temps entre les instants arbitraires de la
chaîne est suffisamment réduit ou décroît suffisamment vite, la chaîne peut
parfaitement tendre vers une date précise D : on dit qu'elle converge vers D [65].
2. L'âge de l'Univers n'est pas nécessairement infini
En toute logique, la chaîne de causalité de l'Univers lui-même peut converger à
une date infiniment lointaine ou non. L'hypothèse d'un Univers ayant toujours
existé n'a rien d'aberrant ou d'impossible dans l'état actuel de nos connaissances
cosmiques, mais elle exclut toute cause première, toute création initiale, divine ou
non… et on ne peut en vérifier expérimentalement ni la vérité, ni la fausseté : elle
est infalsifiable.
Rappelons ici que l'existence prouvée du Big Bang (« commencement de
l'Univers par un début d'expansion de l'espace ») il y a 13.8 milliards d'années ne
prouve pas que rien n'existait avant, c'est seulement la limite de toute visibilité
possible depuis la Terre par un moyen physique, limite due à la vitesse de la
lumière c = 2.99792458 108 m/s et à la vitesse d'expansion de l'Univers [30].
Nous savons aussi que nos lois physiques cessent d'être valables au voisinage
du Big Bang : nous ne pourrions pas raisonner avec, par exemple parce qu'il se
pourrait que le temps et l'espace soient alors discontinus et quantifiés.
3. Il peut y avoir eu une date de début du Temps
En définissant arbitrairement le début de l'Univers lors du Big Bang (hypothèse
936
scientifique la plus courante, car infalsifiable), l'écoulement du temps a
commencé à ce moment-là ; rien n'existait avant, ni espace ni temps, et le
postulat de causalité était sans objet.
4. Le postulat de causalité n'apporte aucune certitude
Ce n'est pas parce qu'on a constaté la même causalité dans 1000 cas particuliers
qu'on a la certitude qu'elle s'applique aussi au 1001ème ; la raison elle-même
n'apporte de certitude logique ni pour ni contre la nécessité d'un commencement
du monde.
5. Restriction du postulat de causalité
Voir Apparition et Liberté au sens cosmologique.
Voir :
Preuve de la thèse : raisonnement sur la finitude de l'âge et de l'étendue du
monde ;
Antithèse ;
Chaîne de causalité – Chaîne de conséquences ;
Idées transcendantales : 4ème conflit.
937
l'autre illégitime, qui ferait dépendre le sens d'une proposition d'une infinité
d'éléments, et qui exigerait, par suite, que l'on pensât simultanément une infinité
d'idées ; cet infini est relatif à la compréhension.
Régulateur
Adjectif – Axiome, principe ou postulat qui gouverne l'énoncé de règles.
Kant oppose régulateur à constitutif (K251-K252).
938
Principes régulateurs de l'action et de la conduite
En philosophie, l'éthique est la science qui traite des principes régulateurs de l'action
et de la conduite morale.
Régularité
Voir déterminisme.
Réification
(Philosophie) Transformation d'une abstraction en objet concret, en chose.
Synonyme : chosification.
Relation
Chez Kant
Chez Kant la relation de la pensée est une des fonctions logiques qui décrivent tous
les jugements possibles de correspondance entre deux termes. Dans le paragraphe
K158-K159 il décrit les relations suivantes :
Du prédicat au sujet : jugement catégorique ;
Du principe (ou de la cause) à sa conséquence : jugement hypothétique ;
De la connaissance divisée et de tous les membres de la division les uns vis-à-
vis des autres : jugement disjonctif."
Voir aussi :
Liaison ;
Exemple de connexions non définies, ni par la raison ni par l'expérience ;
Catégories de la relation ;
Table transcendantale des concepts de l'entendement.
939
Définitions : relation, antécédent, conséquent et logique de relation
Une relation xRy est définie par :
Son antécédent, x ; (en anglais : referent)
Son conséquent, y ; (en anglais : relatum)
Sa logique de mise en rapport de x avec y, R, logique appelée relation
(proprement dite).
Relation universelle
Source : [183] volume 1 page 228
La relation universelle, notée est la relation existant entre deux termes
quelconques, quels que soient leurs types ayant un sens.
Relation nulle
Source : [183] volume 1 page 228
La relation nulle, notée est la relation qui n'est vérifiée entre les termes d'aucun
couple, quels que soient leurs types ayant un sens.
« Si R est une relation, xRy est une proposition définie pour toutes les valeurs de x et
y. » Elle peut être vraie pour certains couples de valeurs et fausse pour d'autres.
A toute relation est associée une proposition formelle avec les mêmes variables.
« Etant donné un couple quelconque de variables (x, y) d'une relation xRy donnée
(antécédent x, conséquent y) :
940
Il existe une relation converse ycRx entre l'antécédent y (même y que dans xRy)
et le conséquent x (même x que dans xRy) ;
Il y a donc une implication notée x,y entre une relation xRy et sa converse ycRx.
A tout couple (x, y) relié par une même relation xRy, est associé un couple (y, x)
relié par la même converse ycRx.
"Les relations sont susceptibles d'une combinaison spéciale qu'on appelle le produit
relatif. Soient deux relations quelconques R et S ; si l'on a entre les individus x, y, z
les relations xRy et ySz, on a entre les individus x et z une relation complexe qu'on
représente par R * S et qu'on nomme le produit relatif de R et de S.
Cela implique un axiome, qu'on formule comme suit :
« Le produit relatif de deux relations est une relation. »
941
"Une relation R est dite symétrique, si xRy entraîne toujours et nécessairement yRx,
c'est-à-dire si elle est identique à sa converse (car xRy entraîne formellement ycRx).
Elle est dite non-symétrique dans le cas contraire, et asymétrique si jamais (quels
que soient x et y) on n'a à la fois xRy et yRx."
Elle est dite non-transitive dans le cas contraire, et intransitive si xRy et yRz excluent
xRz (c'est-à-dire si ces trois relations ne coexistent jamais)."
Exemples
Source : [177] page 31
L'égalité (mathématique ou logique) est une relation symétrique et transitive ;
Les relations plus grand que et plus petit que sont asymétriques et transitives ;
La relation d'implication est non-symétrique et transitive, en vertu du principe
du syllogisme : (a b . b c) (a c) ;
La relation d'appartenance à une classe () est asymétrique et non transitive.
Enfin elle est doublement uniforme (biuniforme), quand elle est uniforme ainsi que sa
converse.
Ces trois cas sont désignés en anglais par les épithètes claires et commodes :
one-to-one, relation entre un antécédent et un conséquent ;
one-to-many, relation entre un antécédent et plusieurs conséquents ;
many-to-one, relation entre plusieurs antécédents et un conséquent.
Il importe de citer la formule qui traduit la première de ces définitions, parce qu'elle
montre que celles-ci n'impliquent pas l'idée du nombre 1, mais seulement la relation
d'identité entre individus :
Relation uniforme = (Relation R) | (xRy . xRz y z)
942
(« Une relation uniforme est une relation R telle que [la vérité simultanée quel que
soit x de] xRy et xRz implique que y est identique à z. »)
Analogie des relations et opérations des relations avec celles des propositions et des
classes
Source : [177] page 32
Les relations sont susceptibles de relations et d'opérations analogues à celles du
Calcul des propositions et des classes.
Dire que R1 est contenue dans R2 c'est dire que R1 implique R2 (entraîne son
existence, exactement comme pour les propositions, et contrairement au préjugé
courant qui considère la conséquence comme contenue dans sa prémisse).
Bien entendu, il faut se garder de confondre le produit logique de deux relations avec
leur produit relatif.
943
Somme logique et produit logique de toutes les relations d'une classe
[177] page 33
Ces opérations se définissent comme celles portant sur deux relations. Elles portent
alors sur des classes finies ou infinies.
Cet axiome est évident au point de vue de l'extension, puisque le couple considéré
suffit, à ce point de vue, à définir une relation distincte de toutes les autres.
Cet axiome est pour ainsi dire le principe des indiscernables appliqué aux relations.
Conséquences
Etant données deux classes a et b non nulles, il y a une relation R qui existe
entre chaque élément de a et chaque élément de b, mais qui n'existe entre
aucun autre couple d'éléments.
(Exemple : les éléments d'une classe étant tous distincts, on peut les ranger
par ordre croissant et considérer le rang de chacun : 1, 2, 3… Il y a alors
une correspondance évidente entre des éléments de même rang de
chacune des classes. Si une des classes a moins d'éléments que l'autre, il
faut ajouter à cette dernière des éléments virtuels.)
Etant donnée une classe a, il y a une relation a qui consiste à appartenir à la
classe a (c'est la relation [d'appartenance] restreinte au domaine a).
944
On peut toujours trouver une relation dont le domaine soit une partie du domaine
d'une autre relation, et qui soit équivalente à celle-ci dans ce domaine partiel
(soit R la relation donnée, a une classe contenue dans le domaine de R : il existe
une relation Ra qui coïncide avec R pour tous les éléments de a, et pour eux
seulement.)
Religion
Représentation
Source : [1] - Le mot « représentation » a deux significations :
1 - Acte par lequel l'esprit du sujet se représente une chose (son objet, par exemple
un phénomène) tel qu'elle est à un instant donné
C'est une mise en relation de l'objet avec l'ensemble de données mentales qui le
représentent dans l'esprit du sujet. L'objet peut être externe (empirique) ou interne (a
priori) (K179). L'objet qu'un sujet se représente est présent à son esprit.
945
Dans le cerveau, une représentation est un état de certains neurones et de leurs
interconnexions [1] ; [23] ; [28]. Cet ensemble (état cérébral interprété par les
fonctions psychiques) décrit l'objet d'une manière synthétique, schématique, en ne
retenant de ses propriétés que celles des types suivants, jugées utiles par
l'inconscient :
Celles qui décrivent l'objet le plus objectivement possible, sa photographie en
quelque sorte : forme géométrique, couleur, taille, matière, etc. Ces données
sont classées par Kant de deux façons différentes :
Soit en distinguant le contenu : forme et matière / sensation ;
Soit en distinguant l'origine : sensibilité ou entendement.
Ces deux modèles mentaux philosophiques des représentations sont
incomplets : les connaissances actuelles, basées sur des enregistrements
d'activité cérébrale, montrent qu'une représentation comprend aussi, toujours et
en même temps, les informations psychologiques et historiques suivantes.
Celles qui décrivent la signification psychologique de la
représentation-photographie de l'objet dans toute sa richesse, le sentiment (sens
psychique) qu'il lui inspire : une porte est "vue" avec ce qu'elle permet ou
empêche, un passage ; une personne aimée est reconnue et vue avec l'émotion
d'amour qu'elle suscite.
Il n'y a aucune représentation présente à l'esprit (c'est-à-dire en mémoire de
travail) qui ne soit accompagnée d'un sens psychique, avec ce qu'il implique
d'émotion. Mais il n'est pas certain que le sens psychique soit représenté en
mémoire dans une représentation d'objet ; peut-être est-il réinterprété chaque
fois que la conscience fait attention à cette représentation en la
conceptualisant…
L'historique des étapes d'attention qui ont permis de construire la représentation
de l'objet (le schéma d'attention). Ces étapes permettent de reconstruire la
représentation initiale complète de l'objet à partir des représentations de
certaines de celles de ces étapes.
(Exemple : je cherche à me souvenir d'une personne, dont je me rappelle
seulement qu'elle portait un foulard rouge. A partir de l'attention à ce
souvenir, je retrouve d'autres détails sur la personne, le lieu de notre
rencontre, et finalement son nom.)
Le temps et l'espace. Ensemble de données mentales, une représentation a
nécessairement une date (celle de la formation en mémoire de l'historique des
étapes), son contenu est "à un instant donné".
Si un objet représenté évolue (exemple : un footballeur voit le ballon qui
arrive) sa représentation évolue automatiquement, comme les photos
successives d'un film. Et si l'objet est externe, sa représentation contient
nécessairement des données spatiales : lieu, formes et dimensions.
L'esprit a une faculté de synthèse et comparaison de représentations
successives permettant d'avoir conscience du passage du temps.
Voir aussi appréhension.
946
L'esprit de l'homme ne peut accéder à un objet physique lui-même, il n'accède qu'à
la représentation qu'il en a construit, dont la signification (description matérielle et
sens psychologique) devient celle de l'objet, de l'objet entier et seulement de cet
objet. Pour l'esprit, la représentation (et elle seule) EST l'objet réel :
K260 – "…nous n'avons affaire, en tout état de cause, qu'à nos représentations ;
ce qu'il peut en être de choses en soi (sans égard aux représentations par
lesquelles elles nous affectent), cela tombe entièrement en dehors de notre
sphère de connaissance."
Nous savons aujourd'hui que cette perception résulte d'une opération d'attention à
l'objet [1] ; [23] ; [28]. La perception, avec son anticipation de la perception, produit
des informations simplifiées constituant une ébauche de représentation de l'objet,
ébauche qui sera complétée par l'intuition, l'entendement, etc. La construction de la
représentation se déroule dans le subconscient, où elle est déclenchée
automatiquement par l'attention.
947
Il y a représentation si et seulement si son objet extérieur existe
La formation en mémoire de travail de la représentation d'un objet perçu est un
processus spontané et subconscient, sur lequel la conscience ne peut intervenir :
c'est pourquoi Kant la qualifie d'immédiate. Il explique aussi, dans K381-K382,
pourquoi la représentation ne peut se former que si l'objet existe et est perçu, et
réciproquement que l'existence de l'objet et sa perception entraînent la formation de
la représentation, relation de cause à effet :
K379 – [L'objet empirique] "qui doit être intuitionné dans l'espace, présuppose
nécessairement une perception et ne peut, indépendamment de cette perception
qui indique la réalité de quelque chose dans l'espace, être ni inventé ni produit
par aucune imagination. La sensation [indique] une réalité dans l'espace et dans
le temps, selon qu'elle est rapportée à l'une ou à l'autre espèce [sens internet ou
externe] de l'intuition sensible."
K380 – "Toute perception extérieure est donc immédiatement la preuve de
quelque chose de réel dans l'espace, ou plutôt elle est le réel même…"
A076 [3] – "§ 11. (146) Les sens ne sont pas trompeurs […] parce qu'en fait ils
ne jugent aucunement, - ce pourquoi l'erreur n'incombe jamais qu'à
l'entendement."
K335 – "…ainsi que cela arrive dans ce qu'on appelle les illusions des sens,
nous tenons souvent pour immédiatement perçu quelque chose à quoi nous a
pourtant seulement conduits la conclusion d'un raisonnement."
Voir aussi :
Règle psychique de réutilisation maximum des représentations et des méthodes
Le sentiment, effet de la représentation sur le sujet, appartient à la sensibilité ;
Sensibilité ;
Perception ;
Affection au sens de Kant ;
Appréhension ;
Aperception transcendantale ;
Nécessité de postuler le déterminisme pour rendre possible la représentation
d'objets.
948
Utilisation d'une représentation d'objet - Mémoire de travail et mémoire de long terme
L'attention crée la représentation d'un objet dans la mémoire de travail, ou se porte
sur elle si elle y est déjà. Elle y demeure le temps que l'esprit réagisse à son arrivée
par l'intuition, qui à son tour lance l'entendement qui la pense sous forme de
catégories.
A tout moment, une représentation peut être stockée en mémoire de long terme, où
elle peut rester pendant des années. Elle peut ultérieurement y être retrouvée :
l'esprit dispose alors non seulement de la description de phénomène qu'elle contient,
mais aussi des étapes de sa construction (attentions successives) et de sa
signification psychologique. C'est parce qu'une représentation contient aussi une
telle signification que l'homme éprouve automatiquement une émotion lorsqu'il se
souvient de certaines choses ou qu'il pense à elles (en fait aux concepts associés à
leurs représentations).
Compléments : [23].
Voir aussi :
Représentation (Diagramme) ;
Information ;
Principe de l'unité synthétique du divers de toute intuition possible ;
Passage d'une représentation à un concept ou d'un concept à une
représentation.
(Citation de K346) :
"Le genre est la représentation en général (repraesentatio).
En dessous d'elle, il y a la représentation avec conscience (perceptio).
Une perception qui se rapporte exclusivement au sujet, en constituant une
modification de son état, est sensation (sensatio) ;
une perception objective est connaissance (cognitio). Celle-ci est
ou bien intuition
ou bien concept (intuitus vel conceptus).
La première se rapporte immédiatement à l'objet et est singulière, le second
médiatement, par l'intermédiaire d'un caractère qui peut être commun à plusieurs
choses. Le concept est
ou bien un concept empirique
ou bien un concept pur,
et le concept pur, en tant qu'il a sa source exclusivement dans
l'entendement (et non pas dans une image pure de la sensibilité), s'appelle
notion.
Un concept issu de notions, dépassant la possibilité de l'expérience, est
l'Idée, autrement dit : le concept rationnel.
949
Qui s'est jamais habitué à cette façon de distinguer les représentations ne peut que
trouver insupportable d'entendre nommer « Idée » la représentation de la couleur
rouge. Elle ne doit pas même être nommée notion (concept de l'entendement)."
(Fin de citation)
950
Phénomène
Perception
Monde sensible
Représentation brute
Appréhension
Aperception
Représentation synthétique Noumène
Intuition Conceptualisation
Entendement
Conditions
Condition
Concept transcendantal
Conditions 8 concepts de comparaison
de la raison (quantité,
(concepts de la réflexion)
qualité, relation, modalité)
Idéal
Idée transcendante
951
Reproduction – Imagination reproductrice
Voir Imagination reproductrice (reproduction).
Réseau neuronal
Ensemble de neurones interconnectés, c'est l'organisation fondamentale du tissu
nerveux. Chaque neurone communique, par signaux d'excitation et d'inhibition, avec
d'autres neurones.
Par extension, c'est un ensemble d'ordinateurs interconnectés exécutant une
application d'intelligence artificielle (exemples : reconnaissance d'images ou de
billets de banque faux ; simulation de réseau de neurones cérébraux).
Rétention
Maintien en mémoire de long terme d'une information présente à l'esprit.
Révélation
Substantif relatif à la religion.
952
nous est donnée, c'est-à-dire lui trouver d'un bout à l'autre un sens qui
s'accommode aux règles pratiques universelles d'une religion rationnelle pure.
La fin de toute la religion rationnelle est l'amélioration de l'homme
Page 88 : Donc, bien qu'un écrit soit admis comme révélation divine, le critère
suprême qui le fait juger tel est que « tout écrit, qui nous vient de Dieu, est utile
pour nous instruire, nous corriger, nous améliorer », etc. ; et, comme
l'amélioration morale de l'homme constitue la fin propre de toute la religion
rationnelle, c'est aussi cette religion qui contiendra le principe suprême de toute
l'interprétation de l'Ecriture.
Un peuple a besoin d'une révélation divine pour adopter une religion rationnelle
Page 89 : "L'autorité de l'Ecriture, qui est l'instrument le plus digne et le seul
aujourd'hui, dans le monde civilisé, réunissant tous les hommes dans une Eglise,
constitue la foi ecclésiastique, qui, en tant que foi populaire, ne saurait être
négligée, parce qu'une doctrine fondée sur la simple raison ne semble pas au
peuple capable d'être une règle immuable et qu'il faut à ce peuple une révélation
divine, par conséquent aussi une confirmation historique qui en établisse
l'autorité par la déduction de son origine."
La foi historique est basée sur la révélation
Page 90 : "La marque de l'Eglise véritable est son universalité ; et ce caractère se
reconnaît à sa nécessité et à son incapacité d'avoir un autre mode de
détermination. Or, la foi historique (basée sur la révélation, c'est-à-dire sur
l'expérience), n'a pas de portée générale et ne peut atteindre que ceux auxquels
est parvenue l'histoire sur laquelle elle s'appuie ;"
Rhapsodique
Adjectif : qui est décousu, désordonné.
K163 - "Cette division [de la synthèse en concepts purs de l'entendement] est
produite systématiquement à partir d'un principe commun, à savoir le pouvoir de
juger […] ; elle ne procède pas rhapsodiquement d'une recherche, entreprise au petit
bonheur, de concepts purs que l'on ne peut jamais être certain d'avoir complètement
dénombrés."
[56] §39 page 141 – Kant reproche à Aristote [43] d'avoir imaginé les catégories de
manière rhapsodique, sous forme de dix concepts élémentaires purs auxquels il a
ajouté plus tard cinq autres déjà en partie contenus dans les premiers.
Rhéteur – Rhétorique
Rhétorique : technique du discours ; ensemble de règles et de procédés
constituant l'art de bien parler, de l'éloquence.
Rhéteur : dans l'antiquité un rhéteur était une personne qui enseignait
l'éloquence, un maître de rhétorique.
953
Sagesse
Chez Kant
[132] page 257 – "Comme la sagesse, considérée théoriquement, signifie la
connaissance du souverain Bien, et, considérée pratiquement, la conformité de la
volonté au souverain Bien, on ne peut donc attribuer, à une sagesse indépendante
souveraine, une fin qui serait fondée uniquement sur la bonté."
Doctrine de la sagesse
[132] page 228 – Déterminer pratiquement l'idée du souverain Bien (en tant que
totalité inconditionnée de l'objet de la raison pratique pure) "c'est-à-dire de façon
suffisante pour la maxime de notre conduite raisonnable, c'est l'affaire de la doctrine
de la sagesse, et celle-ci à son tour, en tant que science, est la philosophie, dans la
signification que ce mot avait pour les Anciens, pour lesquels elle enseignait dans
quel concept il convient de placer le souverain Bien et la conduite à suivre pour
l'acquérir. Il serait bon de laisser à ce mot son ancienne signification, celle d'une
doctrine du souverain Bien, pour autant que la raison s'efforce, dans cette doctrine,
de parvenir à la science."
K351 – La sagesse, Idée pratique, "est l'Idée de l'unité nécessaire de toutes les fins
possibles. Elle doit servir de règle pour tout ce qui est d'ordre pratique, en tant que
condition originaire ou du moins limitative."
[108] page 299 – La sagesse consiste dans l'accord de la volonté d'un être avec sa
fin ultime. Elle exige avant tout de la part de l'individu qu'il écarte les obstacles
intérieurs (ceux qui sont constitués par une mauvaise volonté inscrite en lui) et
qu'ensuite il développe les dispositions originaires d'une bonne volonté, telles
qu'elles ne peuvent jamais être perdues (seule la descente aux enfers que constitue
la connaissance de soi ouvre la voie de l'apothéose).
Salut
Voir La finitude humaine et la question du salut.
Savoir
Voir Assentiment.
Scepticisme
Doctrine philosophique qui nie la possibilité de connaître la vérité ; elle préconise
donc de s'abstenir le plus longtemps possible de juger et de prendre parti, et de
douter de toute affirmation.
954
K109 - "La critique de la raison conduit donc nécessairement […] à la science ;
l'usage dogmatique de la raison, sans critique, conduit au contraire à des affirmations
sans fondement, auxquelles on peut opposer d'autres affirmations tout aussi
spécieuses, par conséquent au scepticisme."
(Il y a un affrontement entre dogmatiques et sceptiques. Kant redoute que trop
de scepticisme conduise à l'ignorance ou à l'indécision.)
Compléments :
Scepticisme et dogmatisme ;
Lire aussi dans Objection la différence entre objections dogmatique, critique et
sceptique.
Schéma d'attention
Source : [23]
Des expériences de neuropsychologie ont montré que l'acte d'attention à un
phénomène est mémorisé automatiquement avec sa représentation.
Spontanément, mon inconscient mémorise le contexte de l'action (lieu, date…),
mon état d'esprit lors de son déclenchement (ce à quoi je voulais faire attention…), la
suite des ordres à donner aux nerfs qui commandent des muscles nécessaires à la
vision, et d'autres renseignements analogues sur l'attention.
Schème
Philosophie : Type, principe ou catégorie dont relève quelque chose ;
principe général d'organisation.
Psychologie : forme générale ayant une organisation interne ainsi qu'une action
organisatrice et structurante. Exemples : schème de pensée, schème perceptif.
955
Schème transcendantal de Kant : représentation intermédiaire
Voir d'abord le paragraphe Besoin d'une doctrine transcendantale de la faculté de
juger.
Exemples
Exemple 1 : comparaison d'un sac de pommes avec un cageot de poires
On peut comparer un sac de pommes et un cageot de poires par l'intermédiaire
d'une propriété commune comme le poids ou le nombre de fruits. Une
représentation d'une telle propriété commune est un schème transcendantal des
représentations de ces ensembles, intermédiaire entre une perception et la
catégorie correspondante.
Exemple 2 : la détermination transcendantale du temps est un schème des
concepts de l'entendement.
K224-K225 - "…il est clair qu'il doit y avoir un troisième terme contenant une
relation d'homogénéité d'un côté avec la catégorie, de l'autre avec le
phénomène, terme qui rend possible l'application d'une catégorie à un
phénomène". Cette relation médiatisante qui doit être pure (sans élément
empirique) et à la fois intellectuelle et sensible, c'est le schème transcendantal.
K225 - "Le temps, comme condition formelle [d'existence] du divers du sens
interne, donc de la liaison de toutes les représentations, contient un divers a
priori dans l'intuition pure. Or, une détermination transcendantale du temps est
homogène à la catégorie qui en constitue l'unité, en ce qu'elle est universelle et
repose sur une règle a priori. Mais elle est, d'un autre côté, homogène au
phénomène, en ceci que le temps se trouve contenu dans toute représentation
empirique du divers. Par conséquent, une application de la catégorie à des
phénomènes sera possible par l'intermédiaire de la détermination
transcendantale du temps qui, comme schème des concepts de l'entendement,
médiatise la subsomption des phénomènes sous la catégorie."
D'une part, le temps est homogène à un phénomène sensible, parce que
tout phénomène sensible est perçu par le sens interne de temps, « il est à
un instant donné » et/ou « il dure un certain temps ». On peut subsumer la
représentation du phénomène sous le concept général de temps, au sens
instant comme au sens durée.
D'autre part, le temps est le concept unificateur de la synthèse pour
appréhension puis intuition du divers de phénomènes successifs par les
fonctions de l'entendement que sont l'association, l'appréhension et la
recognition (voir Entendement (étapes) et identité). Or "une détermination
transcendantale du temps est homogène à la catégorie qui en constitue
l'unité, car elle est universelle et repose sur une règle a priori" : tous les
phénomènes liés par la synthèse étant de ce fait dans le même instant, il y a
unité de temps, ils sont dans la même catégorie temps.
956
Le temps est donc un concept médiateur permettant de subsumer tout
phénomène (ou tout ensemble de phénomènes) sous une catégorie, concept pur
de l'entendement. Une représentation du temps est donc un schème
transcendantal entre représentations de phénomènes et catégories : voilà
pourquoi on peut toujours affirmer qu'un phénomène relève d'une catégorie.
Par extension, un schème est un outil de médiation tel qu'un concept ou une
méthode.
Exemple : schème de passage de la cause à l'effet, c'est-à-dire de la causalité
K228 - "Le schème de la cause et de la causalité d'une chose en général est le
réel auquel, une fois qu'il est posé arbitrairement, quelque chose d'autre succède
toujours. Il consiste donc dans la succession du divers, en tant qu'elle est
soumise à une règle."
K226 - Compléter la représentation d'un objet par un nombre est une méthode
générale pour définir la multiplicité d'un objet (ou pour définir une propriété
mesurable, un rang ou une position dans une suite ordonnée).
Le concept de nombre peut donc faire partie d'une méthode de représentation d'un
objet ou d'un phénomène, méthode générale à la disposition de l'imagination. La
représentation mentale de cette méthode générale est appelée schème
correspondant à ce concept : c'est la représentation d'une méthode d'enrichissement
d'une représentation d'objet. La méthode d'enrichissement pratiquée par
l'entendement avec de tels schèmes est appelée schématisme de l'entendement pur.
(Citation de K226-K227)
"Ce schématisme de notre entendement relativement aux phénomènes et à leur
simple forme est un art caché dans les profondeurs de l'âme humaine, dont nous
arracherons toujours difficilement les vrais mécanismes à la nature pour les mettre à
découvert devant nos yeux.
[La schématisation des concepts par réduction et abstraction, est effectuée par
l'entendement d'une façon subconsciente.]
957
[Schème des concepts sensibles]
Au mieux pouvons-nous dire que l'image est un produit du pouvoir empirique de
l'imagination productive, que le schème des concepts sensibles (comme figures dans
l'espace) est un produit […] de l'imagination pure a priori à l'aide duquel et d'après
lequel seulement les images deviennent possibles, mais de telle manière que celles-
ci doivent toujours être attachées au concept uniquement par l'intermédiaire du
schème vers lequel elles font signe, et cela sans être en elles-mêmes entièrement
congruentes avec celui-ci.
[Un concept des sens est donc schématisable]
958
Source : K227 à K230
Schème de la grandeur : Nombre. Le nombre est l'unité de la synthèse du divers
compris dans une intuition homogène en général, rendue possible par le fait que
je produis le temps lui-même dans l'appréhension de l'intuition.
Schème de la réalité : La sensation résultant d'une existence dans un temps
donné. Voir Réalité et existence dans le temps du sens interne. (K228)
Schème de la substance : voir Schème de la substance par repérage de
phénomènes concomitants ou successifs.
Schème de passage de la cause à l'effet, c'est-à-dire de la causalité :
K228 - "Le schème de la cause et de la causalité d'une chose en général est le
réel auquel, une fois qu'il est posé arbitrairement, quelque chose d'autre succède
toujours. Il consiste donc dans la succession du divers, en tant qu'elle est
soumise à une règle.
Schème de la communauté ou de la causalité (action réciproque) :
K228 - "Le schème de la communauté (action réciproque), ou de la causalité
réciproque des substances relativement à leurs accidents, est la simultanéité des
déterminations de l'une avec celles de l'autre d'après une règle générale."
(Qu'il s'agisse de communauté ou de réciprocité, l'information commune à ces
relations est la simultanéité.)
Schème de la possibilité : K228 - L'auteur d'un jugement lui attribue, à l'instant
où il le formule, une valeur logique vrai ou faux, l'autre étant exclue : il estime
alors le jugement possible, il n'est ni affirmatif ni négatif.
Schème de la nécessité : K228 - C'est l'existence d'un objet en tout temps.
Scholie (scolie)
Selon le dictionnaire [13], scolie est un substantif masculin signifiant : remarque
complémentaire suivant un théorème, une proposition ; note d'un commentateur.
959
Chez Kant
[165] page 123 – "Les scholies […] sont de simples propositions explicatives, qui par
conséquent ne constituent pas des membres appartenant au tout du système."
Science
Chez Kant
Voir d'abord Une science est définie par son objet, ses sources de connaissance et
leur mode.
Celui qui hait la science mais qui aime d'autant plus la sagesse s'appelle un
misologue. La misologie naît ordinairement d'un manque de connaissance
scientifique à laquelle se mêle une certaine sorte de vanité. Il arrive cependant
parfois que certains tombent dans l'erreur de la misologie, qui ont commencé par
pratiquer la science avec beaucoup d'ardeur et de succès mais qui n'ont finalement
trouvé dans leur savoir aucun contentement.
La philosophie est l'unique science qui sache nous procurer cette satisfaction intime,
car elle referme, pour ainsi dire, le cercle scientifique et procure enfin aux sciences
ordre et organisation."
960
(Fin de citation)
Complément : Aucune connaissance n'est absolument inutile.
Voir aussi :
Définition de la science de la nature ;
Définition d'une science générale de la nature, propédeutique à une théorie ;
Conditions à satisfaire par une critique de la raison pour que la métaphysique
soit une science.
Déterminisme ;
Kant et le problème de choix de la primauté entre les connaissances et les
objets ;
La solution scientifique pour trouver la vérité empirique : le Rationalisme
critique ;
Système ;
Unité systématique ;
Architectonique.
Science de la nature
Voir Définition de la science de la nature.
Science des règles, sc. des principes, sc. de la logique générale pure
K144 - L'esthétique est la science des règles de la sensibilité en général, la logique
étant la science des règles de l'entendement en général.
K145 - La logique générale pure est une science qui se présente comme une
doctrine élémentaire de l'entendement. Elle n'a affaire qu'à des principes a priori et
elle est un canon de l'entendement et de la raison, mais uniquement du point de vue
de leur usage formel, quel que puisse être le contenu (empirique ou transcendantal).
961
Scolastique
Substantif
Théologie, philosophie et logique enseignées au Moyen-Age dans les universités
et les écoles ; elles tentaient d'accorder la raison et la révélation en s'appuyant
sur les méthodes d'argumentation aristotélicienne ;
Philosophe ou théologien adepte de la scolastique au Moyen-Age ;
Péjoratif : homme à l'esprit scolastique, dogmatique.
Adjectif qualifiant une philosophie, une théologie ou une logique abstraite, déductive
et figée
Péjoratif : qui concerne ou rappelle la scolastique du Moyen-Age :
dans sa recherche d'un accord entre la révélation et la raison ;
dans ce qu'elle a de plus dogmatique ;
dans une argumentation syllogistique, souvent basée sur une lecture d'Aristote
et abusant de la dialectique et de l'abstraction.
Chez Kant
Une métaphysique solide nécessite une approche scolastique
K88 - "La Critique est plutôt la préparation nécessaire au développement d'une
métaphysique solide possédant la valeur d'une science, laquelle doit être
nécessairement traitée d'une manière dogmatique et strictement systématique, donc
sous une forme scolastique (et non populaire)."
[165] pages 51-52 – "Nous devons avant tout veiller à la perfection scolastique de
notre connaissance - la forme scolastique de la solidité. C'est seulement ensuite qu'il
convient de se demander comment on rendra cette connaissance méthodiquement
apprise à l'école vraiment populaire, c'est-à-dire accessible à autrui et
universellement communicable, sans que la popularité nuise à la solidité. Car il ne
faut pas, pour l'amour de la perfection populaire, pour plaire au public, sacrifier la
perfection scolastique sans laquelle toute science ne serait plus qu'un jouet et une
futilité."
Scolie
Selon le dictionnaire [13] – Substantif masculin : remarque complémentaire suivant
un théorème ou une proposition.
[56b] §60 page 181 – "L'utilité pratique que peut avoir une science simplement
spéculative se situe en dehors des limites de cette science ; elle ne peut donc être
considérée que comme un scolie, et pas plus qu'aucun scolie, elle ne fait partie de la
science elle-même."
Scrupule
Voir Doute – Scrupule.
962
Sémantique
Dans ce texte, c'est un mot savant pour signification. Un texte peut être
syntaxiquement correct (on dit bien formé) tout en n'ayant pas de signification ou en
étant absurde. Exemple : la proposition « Le cheval déploya ses ailes et s'envola »
est « du bon français » mais elle est absurde. Voir Logique (philosophie).
Sémiotique
Adjectif de linguistique : qui a trait aux signes dans toutes leurs formes et dans toutes
leurs manifestations ; théorie générale des représentations, des systèmes signifiants.
Ce qui est sémiotique (le signe : objet perceptible qui représente un autre objet
quelconque) doit être RECONNU ; ce qui est sémantique (le discours) doit être
COMPRIS.
Sens commun
Chez Kant
(Citation de [165] page 63)
Le sens commun (sensus communis) est également en lui-même une pierre de
touche pour découvrir les défaillances dans l'usage technique de l'entendement.
User de l'entendement commun pour mettre à l'épreuve l'entendement spéculatif en
vue d'en apprécier la rectitude, cela s'appelle : s'orienter dans la pensée, autrement
dit dans l'usage de l'entendement spéculatif au moyen de l'entendement commun."
[Kant désapprouve l'usage de l'entendement commun pour juger des concepts
de l'entendement spéculatif en métaphysique : l'entendement spéculatif ne doit
subir aucun biais, il doit être régi par la logique pure.]
963
Sens psychique
Effet affectif d'une pensée ou d'une perception, sentiment qu'elle inspire. Exemples :
Pour un optimiste, la vie a un sens et mérite des efforts ; pour un nihiliste elle
n'en a pas, et il peut se laisser aller à l'abattement comme à la révolte violente.
Le nihilisme est une doctrine de désespoir pour qui aucune valeur n'a de réalité.
Le nihiliste nie les valeurs morales, religieuses et sociales, car elles n'ont pas, à
ses yeux, de sens psychique. Pour lui, aucun espoir n'est permis, aucun effort
n'est justifié, aucune autorité n'est supportée.
Complément : [78].
Voir :
C'est la sensation qui rend possible et mesure l'expérience de l'intuition sensible
Principe suprême de la possibilité d'intuition relativement à la sensibilité ;
Perception ;
Entendement ;
et (pour expliquer les erreurs de jugement) : Objectif - Subjectif - Objectivité
subjective.
964
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est l'espace,
tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps."
[La réalité de quelque chose nous est indiquée que par sa perception]
Simplement, cet élément matériel ou cette dimension de réalité, ce quelque chose
qui doit être intuitionné dans l'espace, présuppose nécessairement une perception et
ne peut, indépendamment de cette perception qui indique la réalité de quelque chose
dans l'espace, être ni inventé ni produit par aucune imagination.
Tout phénomène (associé à une réalité physique) occupe un espace et a une durée
K383-K384 – "…le phénomène qui se présente au sens externe possède […]
quelque chose de stable ou de permanent, qui fournit un substrat servant de
fondement aux déterminations changeantes et par conséquent un concept
synthétique, savoir celui de l'espace et d'un phénomène dans l'espace ; au contraire,
le temps, qui est l'unique forme de notre intuition interne, n'a rien qui soit permanent,
et par conséquent il ne nous donne à connaître que le changement des
déterminations, mais non pas l'objet déterminable."
965
dans le premier cas on l'appelle intuition pure, dans le second sensation) ; et alors la
sensibilité, comme capacité d'avoir des représentations pensées, est le sens.
Ou bien le subjectif des représentations ne peut constituer aucun élément de la
connaissance, parce qu'il ne renferme que le simple rapport au sujet, sans rien
contenir qui puisse servir à la connaissance de l'objet ; et dans ce cas la capacité
représentative s'appelle sentiment. Le sentiment comprend l'effet de la
représentation (sensible ou intellectuelle) sur le sujet, et appartient à la sensibilité,
quoique la représentation même ne puisse appartenir qu'à l'entendement ou à la
raison."
(Fin de citation)
Retenons que le sentiment qu'inspire une représentation (et le concept, le
jugement ou la connaissance que son interprétation en déduit) peut perturber
l'entendement ainsi que la raison. Kant le dit ainsi :
C'est là une accusation de la sensibilité qui n'explique pas comment elle perturbe la
synthèse de l'entendement. Or cette perturbation ne peut résulter que d'un
détournement de la conscience de soi, dont l'unité assure le fonctionnement correct
de la synthèse. Ce détournement ne peut provenir que d'une seule fonction :
l'imagination qui assure la liaison entre intuition et entendement.
Voir aussi :
Principes suprêmes de la possibilité d'intuition pour la sensibilité et
l'entendement.
Affection au sens de Kant
Connaissance
L'Esthétique transcendantale
La sensibilité fait spontanément appel à l'imagination
Sensualisme
Selon le dictionnaire [19] : (philosophie) doctrine philosophique d'après laquelle toute
connaissance provient des sensations et d'elles seules. C'est une des formes de
l'empirisme.
966
Sentiment
Dictionnaire [13]
Un sentiment est :
Une appréciation psychologique de la valeur de quelque chose, appréciation qui
lui confère un sens psychologique (sens psychique) ;
Un état affectif complexe, assez stable et durable, composé d'éléments
intellectuels, émotifs ou moraux, et qui concerne soit le « moi » (orgueil,
jalousie...) soit autrui (amour, envie, haine...).
Chez Kant
[107] pages 159-160 – "si on appelle sentiment la capacité d'éprouver du plaisir ou
du déplaisir à l'occasion d'une représentation, c'est que l'un et l'autre contiennent,
dans ce qui touche à notre représentation, l'élément purement subjectif, et non point
du tout une relation à un objet en vue de la possible connaissance de celui-ci (ni non
plus en vue de la connaissance de notre état) ; au reste en effet, même des
sensations […] entretiennent pourtant aussi, comme ingrédients d'une connaissance,
un rapport à un objet, alors que le plaisir ou le déplaisir […] n'expriment absolument
rien de l'objet, mais purement et simplement une relation au sujet."
Le sentiment est une interprétation par le sujet de l'état de son sens interne ;
ce n'est pas une connaissance, mais sa présence peut fausser l'entendement :
voir Le sentiment, effet interne de la représentation, appartient à la sensibilité.
Série et suite
Kant utilise le mot série dans plusieurs sens, pour lesquels le français a les termes
distincts suite et série.
La suite, ensemble dont les éléments sont rangés dans un certain ordre de
consécution : voir [65]. Exemples :
La suite des nombres premiers (1 ; 2 ; 3 ; 5 ; 7 ; 11…) ;
La suite des mois de l'année : janvier, février…
Dans ce sens-là, Kant n'utilise pas le terme suite, il le remplace par série.
La série chronologique est une suite d'éléments consécutifs dans le temps,
comme des représentations de perceptions successives d'un même phénomène
ou les chiffres d'affaires mensuels d'un artisan. Kant utilise ce sens-là :
K420 – "Le temps est en soi une série (et la condition formelle de toutes les
séries)"
La série, suite de sommes des termes d'une suite de nombres : voir [65].
Kant n'utilise pas cette notion de série mathématique.
Série chronologique
Voir Existence d'une suite de phénomènes dans le temps : série chronologique.
967
Série des conditions
Voir :
Existence d'une suite de phénomènes dans le temps : série chronologique ;
La raison synthétise la série totale des conditions reprise ensuite par
l'entendement.
K79-K80 – "Car ce qui, avec nécessité, nous pousse à aller au-delà des limites de
l'expérience et de tous les phénomènes, c'est l'inconditionné que la raison réclame
nécessairement et de façon entièrement légitime dans les choses en soi, vis-à-vis de
tout ce qui est conditionné, en exigeant ainsi que la série des conditions soit close
[entièrement prise en compte]."
(Pour comprendre complètement un phénomène dont on a l'expérience – avec
tous les concepts nécessaires - il faut trouver ce qui l'explique, c'est-à-dire tous
les éléments des choses en soi de sa chaîne de causalité, suite qui tend vers
l'inaccessible inconditionné. Il y a plusieurs types d'explications :
voir Les divers types de début de la série de conditions d'un inconditionné.
En pratique, toutes les chaînes de causalité physique de l'Univers tendent vers
son commencement, le Big Bang.)
Seuil de conscience
Selon les expériences de [15] pages 185 et 196-197, la conscience de quelque
chose possède un seuil, un point de non-retour. Ce seuil a deux dimensions : une
intensité minimum et une durée minimum.
Ainsi, un stimulus trop bref reste subliminal, tandis qu'un autre à peine plus long est
pleinement perceptible. La prise de conscience a un fonctionnement tout-ou-rien : en
dessous du seuil n'y a pas conscience de…, au-dessus il y a conscience de... L'état
de certains neurones représentant la conscience change, preuve supplémentaire
que la conscience de… est un état, pas une action ; c'est la transmission du stimulus
qui est une action. Une prise de conscience excite des neurones dans l'ensemble du
cerveau, pas dans une petite partie comme le fait un stimulus resté subliminal.
Un stimulus qui a franchi le seuil est pris en compte sous forme de représentation et
de sensation. La représentation et la sensation constituent l'« image » du stimulus,
968
en tant que phénomène perçu. L'intuition et l'entendement permettent une
conceptualisation du phénomène, dont il résultera une conséquence psychologique
(sentiment qu'il inspire). Toute nouvelle représentation perçue est ainsi
automatiquement et tout de suite interprétée par l'entendement, pour que l'esprit en
comprenne la nature, puis éventuellement par l'intelligence si un raisonnement
conscient s'impose vu son importance.
Voir aussi :
Anticipations de la perception et de l'expérience ;
Principe de la continuité des sensations des phénomènes.
Simple
Dictionnaire [13]
Qui n'est pas composé, qu'il est impossible de diviser ou d'analyser, qui n'est pas
multiple. Pour les anciens Grecs, la matière était faite d'atomes, eux-mêmes
indécomposables donc simples.
Opposé : composé.
Chez Kant
Ce qui est simple :
N'est pas décomposable, c'est un concept de base ;
N'a pas d'étendue, ni dans le temps ni dans l'espace, où il est ponctuel ;
N'a pas de complément, d'attribut ou de propriété autre que l'information
inhérente à sa définition.
[93] – D.1770, §1 page 629 – "En ce qui concerne un composé substantiel, l'analyse
ne prend fin que si elle atteint une partie qui ne soit plus un tout, c'est-à-dire le
SIMPLE ; de même, la synthèse ne peut être achevée qu'en parvenant à un tout qui
ne soit plus une partie, c'est-à-dire au MONDE."
969
En somme, le simple est une partie indécomposable, et le monde est tout ce qui
existe, c'est-à-dire l'Univers.
[93] – D.1770, §1 page 630 – "Un composé substantiel étant donné, on parvient
aisément à l'idée d'éléments simples : il suffit pour cela de supprimer la notion
intellectuelle de composition en général ; en effet, toute idée d'assemblage une fois
écartée, ce qui reste, ce sont les simples."
[93] D.1770 §15 De l'espace – D note * - "L'espace doit nécessairement être conçu
comme une grandeur continue ; […] Il en résulte que le simple, dans l'espace, n'est
pas une partie, mais une limite."
Voir Compléments sur l'espace et le temps.
970
Simple Idée
Voir La connaissance incomplète d'un phénomène est "simplement une Idée".
Situation
Voir Définition d'une situation.
Soi
Définit la personne dans son unité et son individualité. Le Soi est le siège de
l'ensemble de l'activité psychique, « sujet dans la totalité de sa psyché ». C'est
l'ensemble de la personnalité englobant le conscient et l’inconscient. L'influence du
Soi se manifeste dans la nature particulière des éléments de l'inconscient qui
viennent compenser et contrebalancer la situation consciente [6].
Solipsisme
Selon le dictionnaire [13] :
Attitude du sujet pensant pour qui sa conscience propre est l'unique réalité, les
autres consciences, le monde extérieur n'étant que des représentations.
Doctrine du philosophe qui pose la subjectivité comme fait primitif et qui pratique
le scepticisme radical face à tout jugement sur la réalité objective.
971
"Définition de l'objectivité théorique : dans la nature tout phénomène qui survient
est soumis à la règle du déterminisme ;
Définition de l'objectivité pratique : ce qui est objectivement pratique, à savoir
une fin morale, n'est concevable que par référence à cet inconditionné qui définit
la liberté."
(Citation de K495)
"On ne peut penser, à propos de ce qui arrive, que deux sortes de causalité, soit
selon la nature, soit par liberté.
972
« Aussi loin qu'il peut s'étendre » désigne la totalité des phénomènes
possibles dans le monde, pris en compte ensemble en tant que phénomène
unique.]
Mais dans la mesure où, sur ce mode, on ne peut obtenir dans la relation causale
aucune totalité absolue des conditions,
[parce que sa chaîne de causalité à régression illimitée ne satisfait pas la
condition de complétude, la régression restant à concevoir pas à pas]
Pour Kant, la liberté pratique d'un sujet lui permet d'échapper aux lois naturelles et
de commencer une série d'événements sans cause efficiente. C'est une croyance en
la possibilité d'une transcendance (K496).
973
Le libre arbitre de l'homme est illusoire
Sans liberté pratique, l'homme n'a pas de libre arbitre ; plus exactement, son
libre arbitre est illusoire : l'homme peut faire ce qu'il veut, mais ce qu'il veut lui
est dicté par des circonstances factuelles [123] dont il ne peut, souvent, se
rendre compte.
974
Mais une telle cause intelligible n'est pas déterminée, relativement à sa causalité, par
des phénomènes, bien que ses effets se manifestent phénoménalement et qu'ils
puissent être déterminés par d'autres phénomènes. Elle est donc, en même temps
que sa causalité, en dehors de la série, alors même que ses effets se rencontrent
dans la série des conditions empiriques."
[Nos représentations résultant de notre faculté de perception, indépendante des
phénomènes perçus, leur cause ne fait pas partie de la série des conditions de
notre intuition, bien qu'elle en génère des représentations.]
(Fin de citation)
Conclusion : nos représentations sont libres par rapport à nos perceptions en même
temps qu'elles sont déterminées par les lois de la nature
K498 – "L'effet peut donc être considéré, relativement à sa cause intelligible, comme
libre et en même temps, relativement aux phénomènes, comme une conséquence
qui en résulte suivant la nécessité de la nature."
[Les représentations que nous percevons sont à la fois indépendantes des
phénomènes externes par leur perception, et régies par les lois de la nature
appliquées à ces phénomènes.
Nous avons là un exemple de deux propositions antinomiques (indépendance et
dépendance par rapport aux phénomènes) vraies simultanément car résultant de
synthèses différentes (voir Synthèses parallèles et indépendantes de
l'homogène et de l'hétérogène).
975
[En tant qu'empirique, un objet des sens est soumis aux lois déterministes]
"Selon son caractère empirique, ce sujet serait donc, en tant que phénomène,
soumis à toutes les lois de la détermination qui s'effectue d'après la liaison
causale ; et en tant que tel il ne serait rien qu'une partie du monde sensible, dont
les effets, comme c'est le cas pour tout autre phénomène, découleraient
inévitablement de la nature."
[En tant qu'intelligible, un objet des sens échappe aux lois déterministes]
"Selon son caractère intelligible (quand bien même nous ne pouvons en
posséder que le concept général),
le même sujet devrait pourtant, en revanche, être dit libre de toute influence
de la sensibilité et de toute détermination par des phénomènes ;
et puisque rien ne se produit en lui, en tant qu'il est noumène, et qu'il ne s'y
rencontre aucun changement, […], cet être agissant serait comme tel, dans
ses actes, indépendant et libre vis-à-vis de toute nécessité de la nature, en
tant que nécessité qui, seule, se rencontre dans le monde sensible.
On dirait de lui, en toute exactitude, qu'il inaugure de lui-même ses effets
dans le monde sensible sans que l'action s'inaugure en lui-même, et cette
manière de dire serait valide sans que les effets dussent pour autant
s'inaugurer d'eux-mêmes dans le monde sensible…"
[Conclusion : un objet des sens peut être à la fois régi par les lois de la nature et
libre par rapport à elles au sens intelligibilité]
"En ce sens, donc, liberté et nature, chacune dans sa signification pleine et
entière, se rencontreraient en même temps et sans aucune contradiction dans
les mêmes actions, selon qu'on les réfère à leur cause intelligible ou à leur cause
sensible."
(Fin de citation)
Remarque sur la possibilité d'un d'objet des sens d'être connu de plusieurs façons
Le raisonnement précédent montre que, pour un objet des sens, un concept d'objet
intelligible peut être pensé indépendamment du concept d'objet physique : il y a deux
processus de compréhension distincts.
L'exposé de cette intéressante possibilité logique est une occasion de rappeler que,
même au sens des lois de la nature, un objet peut être pensé à plusieurs points de
vue ; c'est même un devoir pour qui réfléchit sérieusement, que d'envisager tous les
problèmes importants à autant de points de vue qu'il faut pour décider en
connaissance de cause. Voir WYSIATI.
976
Loi de causalité de la nature : tout ce qui arrive possède une cause.
Une cause est caractérisée par l'état d'un système physique (sa situation).
La situation d'un système résulte d'une action (c'est-à-dire d'une évolution
préalable d'un système) et produit une action qui fait nécessairement évoluer le
système vers une nouvelle situation.
K501 - Une cause "ne peut pas elle-même avoir toujours existé, mais doit au
contraire, nécessairement, être advenue."
Pour comprendre, plus bas, la notion de « nature », lire les articles :
Monde et nature ;
Terminologie pour la nature : cause, liberté, cause naturelle, contingence,
nécessité.
Pour constituer une nature, les phénomènes doivent respecter une loi universelle
K501 - "Cette loi par laquelle seulement des phénomènes peuvent constituer une
nature et fournir les objets d'une expérience, c'est une loi de l'entendement par
rapport à laquelle il n'est permis sous aucun prétexte de faire un écart ni d'ériger un
quelconque phénomène en exception."
(L'homme n'a pas accès à la réalité, mais à des phénomènes qu'il perçoit,
intuitionne, et entend : voir Principe de la primauté de la connaissance sur les
objets (doctrine). C'est à ces phénomènes qu'il applique les lois du déterminisme
pour expliquer leur structure présente et leur évolution future :
Ce qu'il constate (la situation) à un instant donné ;
L'évolution qu'il prévoit de constater sous forme de phénomène représentant
l'état du système à un instant futur, évolution régie par une loi de la nature.
Ces lois n'admettent pas d'exception.)
C'est l'homme qui introduit l'ordre et la régularité dans les lois de la nature.
977
transcendante (indépendance par rapport aux lois de la nature) est impossible à
prouver par l'expérience.]
Cette logique, basée sur l'aperception de l'homme (la conscience d'avoir conscience
des phénomènes), fait que pour lui-même il "constitue un objet simplement
intelligible", basant alors sa connaissance sur sa raison ; or celle-ci possède une
causalité propre, indépendante de celle des phénomènes, donc libre par rapport à
eux :
Le devoir exprime une sorte de nécessité et de liaison avec des fondements qui ne
se présente nulle part ailleurs dans la nature. [Evident]
L'entendement ne peut connaître de cette dernière [de la nature] que ce qui est
existant, l'a été ou le sera. [Evident]
Il est impossible que quelque chose, en elle [dans la nature], doive être autrement
qu'il n'est effectivement dans tous ces rapports de temps ;
[« Doive être » indique une obligation morale, un devoir sans rapport avec une
nécessité naturelle, la nature n'ayant pas d'obligation morale]
il faut même dire que le devoir-être, quand on a simplement devant les yeux le cours
de la nature, n'a absolument pas la moindre signification. [Evident]
Nous ne pouvons pas davantage demander ce qui doit arriver dans la nature [ce que
la nature a le devoir moral de faire] que demander quelles propriétés un cercle doit
978
avoir [les propriétés qu'un cercle a le devoir moral d'avoir] ; mais ce que nous
pouvons demander, c'est uniquement ce qui arrive dans la nature ou quelles
propriétés possède le cercle.
Ce devoir exprime ainsi une action possible [contingente], dont le fondement n'est
rien d'autre qu'un simple concept, alors qu'au contraire le fondement d'une simple
action naturelle ne peut jamais être qu'un phénomène."
[Par définition des concepts d'action, de devoir et de phénomène]
(Fin de citation)
La raison se crée un ordre de prise en compte des concepts qui lui est propre
K504 –"Que ce soit un objet de la simple sensibilité (l'agréable) ou même de la
raison pure (le bien), la raison ne se rend pas au principe qui est empiriquement
donné et elle ne suit pas l'ordre des choses telles qu'elles se présentent dans le
phénomène ;" au contraire se crée-t-elle avec une parfaite spontanéité un ordre qui
lui est propre en suivant des Idées auxquelles elle fait correspondre les conditions
empiriques et d'après lesquelles elle déclare nécessaires même des actions qui,
pourtant, ne se sont pas produites et peut-être ne se produiront pas, mais en
supposant à l'égard de toutes que la raison peut exercer une causalité à leur endroit
- vu que, sinon, elle n'attendrait pas de ses Idées des effets dans l'expérience."
(La raison, en tant que faculté, est parfaitement libre par rapport aux faits, à la
logique et à la cohérence. Elle peut associer des concepts selon des critères
fantaisistes et imaginer des événements impossibles. Mais elle n'a pas de
volonté propre, ce n'est qu'un outil au service des instincts, pulsions et désirs du
sujet.)
979
Caractère empirique de la raison, relativement auquel il n'y a pas de liberté
(Citation de K504-K505)
Admettons que la raison possède effectivement de la causalité relativement aux
phénomènes : il faut alors qu'elle ait un caractère empirique (une loi d'évolution), car
toute cause suppose une règle à effets stables. Un tel caractère (l'énoncé de la loi)
est constant tout en produisant des effets qui varient selon les circonstances (une
même loi produit des effets qui varient selon les valeurs de ses variables et
paramètres) :
"Ainsi tout homme a-t-il un caractère empirique de sa volonté, qui n'est autre qu'une
certaine causalité de sa raison, en tant que celle-ci fait apparaître, à travers ses
effets dans le phénomène, une règle d'après laquelle on peut en inférer les motifs
rationnels qui la fondent et la façon dont ils agissent quant à leur espèce et à leurs
degrés, et apprécier les principes subjectifs de son arbitre.
[Le déterminisme philosophique a été défini par Kant 13 ans avant Laplace [47] ]
et si nous pouvions explorer jusqu'en leur fond tous les phénomènes de son arbitre
[l'arbitre de l'homme], il n'y aurait pas une seule action de l'être humain que nous ne
pourrions prédire avec certitude et reconnaître comme nécessaire à partir de ses
conditions antécédentes.
La raison est déterminée par les circonstances physiologiques, qui comprennent les
concepts intelligibles présents à l'esprit. Mais la pensée nous demeure inconnue, en
ne permettant que l'accès aux représentations qui relèvent des sens, ce qui nous
empêche de formuler des jugements moraux.
Or une action due à la pensée pure ne résulte que du phénomène du sens interne.
"La raison pure, en tant que pouvoir simplement intelligible, n'est pas soumise à la
980
forme du temps, ni non plus, par conséquent, aux conditions de la succession
chronologique. La causalité de la raison dans le caractère intelligible ne naît pas ou
ne commence pas en un certain temps à produire un effet." Donc la raison a le
pouvoir de lancer des actions indépendamment de toute condition sensible : par
rapport à ces conditions, elle est libre de le faire :
"Dans la mesure, en effet, où la raison n'est pas elle-même un phénomène et
n'est soumise à aucune des conditions de la sensibilité, il ne se trouve en elle-
même, concernant sa causalité, nulle succession chronologique, et la loi
dynamique de la nature, qui détermine la succession chronologique selon des
règles, ne peut donc lui être appliquée."
(Fin des citations)
laquelle, par conséquent, agit librement, sans être déterminée dans la chaîne des
causes naturelles par des principes qui, externes ou internes, la précéderaient dans
le temps ;
et cette liberté qui est sienne, on ne peut pas l'envisager uniquement de manière
négative, comme indépendance vis-à-vis de conditions empiriques (car dans ce cas
le pouvoir de la raison cesserait d'être une cause des phénomènes), mais il faut
aussi la désigner de façon positive, comme un pouvoir de commencer par soi-même
une série d'événements,
de telle façon qu'en elle-même rien ne commence, mais que, comme condition
inconditionnée de tout acte procédant de l'arbitre, elle n'admette au-delà d'elle
aucune des conditions chronologiquement antérieures, et cela quand bien même
pourtant son effet commence dans la série des phénomènes sans toutefois pouvoir
jamais y constituer un commencement absolument premier."
(Fin de citation)
981
Solution de l'Idée cosmologique de la totalité de la dépendance des
phénomènes quant à leur existence en général
K510 - Dialectique transcendantale / Livre II : des raisonnements dialectiques de la
raison pure / Chapitre 2 : l'antinomie de la raison pure / 9ème section / IV. Solution de
l'Idée cosmologique de la totalité de la dépendance des phénomènes quant à leur
existence en général
"Ces deux thèses peuvent être vraies en même temps sous des rapports différents,
tant et si bien que toutes les choses du monde sensible soient intégralement
contingentes, par conséquent n'aient également qu'une existence empiriquement
conditionnée, et qu'intervienne cependant aussi, à l'égard de la série entière, une
condition non empirique, c'est-à-dire un être inconditionnellement nécessaire. Car
celui-ci, en tant que condition intelligible, n'appartiendrait aucunement à la série de
manière à en constituer un membre (pas même le membre le plus élevé), et il ne
rendrait non plus nul membre de la série empiriquement inconditionné, mais
982
laisserait le monde sensible dans sa totalité à son existence empiriquement
conditionnée, telle qu'elle traverse tous ses membres."
et qu'il n'y a nulle part en lui, vis-à-vis de quelque propriété que ce soit, une nécessité
inconditionnée ;
[Rien dans le monde n'a une existence absolument nécessaire, quelle que soit la
propriété selon laquelle on l'envisage]
qu'il ne se trouve aucun membre de la série des conditions dont on ne doive attendre
et, aussi loin qu'on le peut, rechercher toujours la condition empirique dans une
expérience possible,
[Un phénomène ne peut exister que s'il fait l'objet ou résulte d'une expérience
possible]
et que rien ne nous autorise à dériver une quelconque existence d'une condition
située en dehors de la série empirique,
[La causalité des lois de la nature limite l'existence possible aux objets de
l'expérience ou de la série empirique]
- ce qui ne met toutefois pas en doute que la série tout entière puisse être fondée
dans quelque être intelligible (qui est dès lors libre de toute condition empirique et
contient bien plutôt le fondement de la possibilité de tous ces phénomènes).
[Mais ces règles n'excluent pas la possibilité d'un être transcendant intelligible]
(Fin de citation)
983
K512 – "…nous limitons la raison de telle façon qu'elle n'abandonne pas le fil des
conditions empiriques et ne se perde pas dans des principes d'explication
transcendants et qui ne seraient susceptibles d'aucune présentation in concreto"
et ne déclare pas impossible l'intelligible, quand bien même nous ne pouvons pas
l'utiliser pour expliquer les phénomènes."
[Kant ajoute là au Premier précepte de Descartes [128] un complément négatif :
« Ne pas tenir pour impossible un objet issu de la raison pure (comme un
noumène) parce qu'on n'en connaît pas d'exemple concret » : l'impossibilité doit
être prouvée autant que la possibilité, on en a un exemple avec l'utilisation d'un
alibi en justice pénale.]
(Fin de citation)
K513 – "… se forger la pensée d'un fondement intelligible des phénomènes, c'est-à-
dire du monde sensible, et le penser comme affranchi de la contingence de ce
dernier, cela ne va à l'encontre ni de la régression empirique illimitée dans la série
des phénomènes ni de la contingence intégrale de ceux-ci. C'est même là en fait la
seule chose que nous ayons à faire pour lever l'antinomie apparente, et cela ne
pouvait se faire que sur ce mode."
[On peut imaginer que notre monde sensible des phénomènes est l'œuvre
transcendante d'un être absolument nécessaire, concept intelligible affranchi des
lois de la nature et de la contingence du monde sensible. Une telle conjecture ne
va à l'encontre ni de la régression empirique illimitée dans la série des
phénomènes ni de la contingence intégrale de ceux-ci.]
984
Les deux logiques cosmologiques distinctes et leurs conséquences
D'après le raisonnement précédent de Kant, on peut croire en un Créateur incréé à
condition d'admettre la transcendance de son action malgré les lois de la nature,
c'est-à-dire la possibilité simultanée de deux logiques cosmologiques distinctes.
K515 – "Dans la mesure où, une fois que nous nous sommes autorisés à admettre,
en dehors du champ de la sensibilité dans son ensemble, une réalité effective
possédant par elle-même sa consistance [cohérence], les phénomènes ne sont plus
à considérer que comme des modes contingents de représentation d'objets
intelligibles par des êtres [humains] qui sont eux-mêmes des intelligences, il ne nous
reste dès lors rien d'autre que l'analogie d'après laquelle nous utilisons les concepts
de l'expérience pour nous forger cependant quelque concept que ce soit de choses
intelligibles dont nous n'avons pas en soi la moindre connaissance."
(Le concept de Créateur incréé est une pure imagination basée sur une analogie
avec les concepts de l'expérience. Kant était croyant, mais sans confondre
réalité et conjecture.)
(Citation de K396)
Si l'on veut donner un intitulé logique au paralogisme compris dans les
raisonnements dialectiques de la doctrine rationnelle de l'âme, en tant qu'ils ont
malgré tout des prémisses justes, on peut l'apprécier comme un sophisma figurae
dictionis, où la majeure fait de la catégorie, par rapport à ses conditions, un usage
purement transcendantal, alors que la mineure et la conclusion font de la même
catégorie, relativement à l'âme qui est subsumée sous cette condition, un usage
empirique.
K476 – [Si] "la majeure du raisonnement […] prend le conditionné dans le sens
transcendantal d'une catégorie pure, alors que la mineure le prend dans le sens
empirique d'un concept [empirique] de l'entendement appliqué à de simples
phénomènes […] on rencontre ici cette tromperie dialectique que l'on appelle
sophisma figurae dictionis."
Exemple de sophisma figurae dictionis
[165] page 198 note 89 – « Un philosophe est une espèce d'érudit, Leibniz est
un philosophe, donc il est une espèce d'érudit » ; le moyen terme philosophe est
pris ici dans deux sens différents.
985
Sophisme, sophistique
Sophisme
En logique, le substantif sophisme désigne un argument ou un raisonnement :
Qui, partant de prémisses vraies, ou considérées comme telles, et obéissant aux
règles de la logique, aboutit à une conclusion inadmissible.
Ayant l'apparence de la validité, de la vérité, mais en réalité faux et non
concluant, avancé généralement avec mauvaise foi, pour tromper ou faire
illusion.
Voir :
Raisonnement trompeur – Paralogisme – Sophisme ;
Logique de l'apparence (logique dialectique) ;
Exemples de l'Encyclopédie : [175].
Sophistique
En tant qu'adjectif, sophistique signifie :
Qui est de la nature du sophisme ; qui relève du sophisme ;
Relatif aux sophistes grecs, à la sophistique.
En tant que substantif, la sophistique est :
Une argumentation fondée sur des sophismes ;
Une attitude intellectuelle, un mouvement philosophique représenté par les
sophistes grecs.
Sophrologie
Médecine : Partie de la médecine psychosomatique qui étudie les effets sur
l'organisme de certains états de conscience provoqués par suggestion, par
relaxation, par autoconcentration, etc.
Sorite
Substantif masculin.
En logique selon [13] : polysyllogisme dans lequel l'attribut de la première proposition
devient le sujet d'une seconde proposition et ainsi de suite jusqu'à une conclusion qui
unit le sujet de la première proposition à l'attribut de la dernière. Exemple :
Ce qui fait du bruit remue ;
Ce qui remue n'est pas gelé ;
Ce qui n'est pas gelé est liquide ;
Ce qui est liquide plie sous le faix ;
Donc cette rivière qui fait du bruit pliera sous le faix. (Source : [61] Lecture 45.)
Souche
Voir types de concepts.
986
Souverain bien
987
Selon Kant
Que spécifie-t-on ?
Spécifier c'est détailler et préciser les caractères d'un phénomène interprété par
l'entendement, c'est-à-dire sa forme, du point de vue logique [liste des caractères]
comme du point de vue signification.
Car à partir de la sphère du concept, qui désigne un genre, il est tout aussi peu aisé
d'apercevoir jusqu'où la division en peut aller que ce n'est le cas à partir de l'espace
qu'une matière peut occuper.
Enoncé : dans une subdivision, nulle espèce ne doit être considérée comme dernière
Ce pourquoi tout genre exige diverses espèces, lesquelles exigent pour leur part
diverses sous-espèces, et, dans la mesure où aucune de ces dernières ne peut
intervenir sans avoir toujours à son tour une sphère qui lui corresponde (une
extension, en tant que conceptus communis), la raison exige, dans toute son
étendue, que nulle espèce ne soit considérée en elle-même comme la dernière,
puisque, comme elle est en tout cas toujours un concept ne contenant en lui que ce
qui est commun à des choses diverses, ce concept ne saurait être intégralement
déterminé et donc pas non plus rapporté immédiatement à un individu - ce pourquoi il
lui faut toujours contenir en lui d'autres concepts, c'est-à-dire des sous-espèces.
Cette loi de la spécification pourrait s'exprimer ainsi : entium varietates non temere
esse minuendas [il ne faut pas diminuer inconsidérément la variété des êtres].
[Voir aussi Genre suprême et espèce dernière.]
(Fin de citation)
Cette loi logique de la spécification repose sur la loi transcendantale suivante, car
elle ne peut être tirée de l'expérience.
988
connaissance par simple intuition, mais toujours à nouveau par des concepts
inférieurs. La connaissance des phénomènes dans leur détermination complète
(laquelle n'est possible que par l'entendement) requiert une spécification sans cesse
poursuivie de ses concepts et une progression vers des variétés qui demeurent
encore et toujours présentes, mais dont il a été fait abstraction dans le concept de
l'espèce, et plus encore dans celui du genre."
(Fin de citation)
Spéculatif
Adjectif : qui porte sur des recherches abstraites, théoriques, qui leur est consacré.
Synonymes : abstrait, intellectuel, théorique. Opposés : concret, positif, pratique.
Philosophie spéculative : métaphysique.
K555 – "Une connaissance théorique est spéculative quand elle porte sur un objet ou
sur des concepts d'un objet que l'on ne peut atteindre dans aucune expérience. Elle
s'oppose à la connaissance de la nature, qui ne porte pas sur d'autres objets ou
d'autres prédicats de ces objets que ceux qui peuvent être donnés dans une
expérience possible."
989
Conclusions sur la connaissance et ses limites
(Citation de K594-K595)
"Ainsi toute connaissance humaine commence-t-elle donc par des intuitions, va de là
à des concepts et s'achève par des Idées.
Bien qu'elle dispose, par rapport à chacun de ces trois éléments, de sources de
connaissance a priori qui, au premier abord, semblent dédaigner les limites de toute
expérience, une critique complètement achevée nous persuade pourtant que toute
raison, dans son usage spéculatif, ne saurait jamais avec ces éléments dépasser le
champ de l'expérience possible,
Voir L'usage spéculatif de la raison pure ne recourt pas aux méthodes dogmatiques.
Sphéroïde - Géoïde
990
Chez Kant
K585 note * - "L'avantage créé par la configuration sphérique de la Terre est assez
bien connu ; mais peu de gens savent que son aplatissement, qui lui donne une
forme de sphéroïde, est le seul obstacle qui empêche que le surgissement des
continents, ou même de montagnes d'ampleur plus modeste que peut soulever un
tremblement de terre, ne déplace continuellement et de manière considérable en peu
de temps l'axe de la Terre — ce qui arriverait si le renflement de la Terre sous la
ligne équatoriale n'était pas une montagne assez puissante pour que l'irruption de
toute autre montagne ne pût modifier notablement sa position par rapport à l'axe. Et
pourtant on n'hésite pas à expliquer cette sage disposition par l'équilibre de la masse
terrestre autrefois fluide."
(C'est la fluidité de la jeune masse terrestre, due à la chaleur dégagée par
l'agglomération des particules qui l'ont formée en perdant leur énergie cinétique
de chute gravitationnelle, qui explique l'aplatissement du sphéroïde et son
renflement équatorial. Kant le savait, mais préférait attribuer cette forme à la
sage volonté de l'Intelligence suprême qu'il postulait de stabiliser l'axe terrestre
pour favoriser l'apparition de la vie…)
Sphère
K167 - "…dans tous les jugements disjonctifs, la sphère (l'ensemble de ce qui est
contenu dans le jugement) est représentée comme un tout divisé en parties (les
concepts subordonnés)" : sphère désigne l'ensemble des éléments d'un tout.
Ici, "ce qui est contenu dans le jugement" désigne tous les concepts du jugement.
Spiritualisme
En tant que doctrine, le spiritualisme affirme :
La spiritualité (immatérialité) de l'âme, distincte et indépendante du corps ;
La possibilité d'une action de l'esprit sur la matière, l'esprit étant supérieur à la
matière bien que son activité puisse en être dépendante. (Ne pas chercher le
sens précis de « supérieur », il relève d'intuitions fumeuses…)
Au sens moral, la primauté de l'esprit sur la matière fait que c'est l'esprit qui crée
spontanément les valeurs morales, sans intervention de la nature ou de l'homme.
Ces valeurs sont absolues et régissent l'activité de l'homme.
991
Critique
On appréciera le caractère vague des notions d'esprit et d'âme, ainsi que le
caractère dogmatique des croyances en une supériorité (?) de l'esprit et l'existence
de valeurs morales absolues, indépendantes des circonstances historiques et
culturelles.
Spiritualité
Selon le dictionnaire [13] : qualité de :
Ce qui est de l'ordre de l'esprit (considéré comme l'âme en tant que principe
indépendant) ;
Ce qui concerne l'esprit ou l'âme ;
Ce dont l'origine n'est pas matérielle, mais relève du ressenti.
Spirituel
Adjectif ou substantif. - Selon le dictionnaire [13] :
(Ce) qui est de l'ordre de l'esprit ou de l'âme, qui concerne sa vie, ses
manifestations, qui est du domaine des valeurs morales et intellectuelles.
Qui est de l'ordre de l'esprit (considéré comme un principe indépendant), qui
concerne l'esprit ; dont l'origine n'est pas matérielle.
Qui se rapporte au domaine de l'esprit, de la pensée, de l'activité intellectuelle.
Qui se situe au niveau de l'âme, de l'esprit, de la vie psychique, sans rien de
sensuel ; qui a rapport à la vie intérieure de l'âme dégagée des sens, aux
fonctions supérieures de l'esprit.
Qui n'appartient pas au monde physique mais au monde de l'esprit, de l'âme, à
la vie religieuse, au domaine moral distinct des réalités du monde sensible et de
la vie pratique.
Rempli, pénétré de spiritualité.
Spontanéité
L'adjectif spontané qualifie une action :
Qui se déclenche automatiquement, involontairement.
Exemple de l'aperception : à partir d'une représentation d'objet R reçue
passivement de l'intuition, l'entendement génère spontanément une
représentation S de la représentation R ; le concept C associé à S permet alors
la connaissance de l'objet initial par un jugement.
L'entendement est donc un processus de spontanéité de la connaissance.
Que l'on fait de soi-même, de sa propre initiative, notamment sans avoir réfléchi.
La spontanéité des concepts est le pouvoir d'interpréter (sans action volontaire) une
représentation en formant un concept ; c'est une fonction de l'entendement.
K143 – "Notre connaissance procède de deux sources fondamentales de l'esprit,
dont la première est le pouvoir de recevoir les représentations (la réceptivité des
impressions), la seconde le pouvoir de connaître par l'intermédiaire de ces
992
représentations un objet (spontanéité des concepts) ; par la première nous est
donné un objet, par la seconde celui-ci est pensé en relation avec cette
représentation (comme simple détermination de l'esprit)."
Stoïcien - Stoïcisme
Selon le dictionnaire [13] :
Un stoïcien est un disciple de Zénon de Cition, philosophe professant le
stoïcisme.
Le stoïcisme est une attitude morale caractérisée par une grande fermeté d'âme
dans la douleur ou le malheur.
Stupidité
K221 - "La faculté de juger est un talent particulier, qui ne se peut nullement
apprendre, mais seulement exercer" [contrairement à l'entendement, qui peut
apprendre et s'armer de règles].
K222 note * - "Le manque de faculté de juger s'appelle stupidité, et à une telle
infirmité il n'y a pas de remède. [C'est un défaut] dont on ne peut jamais venir à
bout."
Subjectif
Voir Objectif-Subjectif
993
Subliminal, supraliminale
[En parlant d'un stimulus] Qui n'atteint pas un seuil de conscience suffisant pour
provoquer une excitation sensorielle. Ainsi, une même image est subliminale
(invisible car non perçue) lorsqu'elle apparaît moins de 40 ms (millisecondes) et
supraliminale (visible car perçue) lorsqu'elle apparaît plus de 60 ms.
Subreption
Selon [13] - Logique : sophisme qui consiste à introduire dans le raisonnement un
changement de sens ou un postulat dissimulé.
Exemple : « Le langage de la syllogistique (...) permettrait de glisser dans le
discours sans que la subreption se décelât d'elle-même, des relations de cause à
effet nullement réduites à quelque chose comme des relations de principe à
conséquence. »
Subsistance
K256 - L'existence de la substance sans précision de durée est sa subsistance.
Selon [19], la subsistance est le rapport de la substance à l'accident et de
l'accident à la substance. Voir Table des 12 catégories de l'entendement pur de
Kant : catégories de relation.
994
je vais même jusqu'à ajouter que nous ne pouvons nous faire aucun concept de la
possibilité d'une telle chose (encore que nous soyons capables de désigner dans
l'expérience des exemples de son emploi) ;
[…]
[Autre concept de base : la communauté]
cette inconcevabilité concerne également la communauté des choses ; car on
n'aperçoit pas du tout comment de l'état d'une chose on pourrait conclure à l'état de
choses tout autres qui lui sont extérieures et réciproquement, ni comment des
substances, dont chacune a cependant bien sa propre existence à part, doivent
dépendre les unes des autres, et même de façon nécessaire."
Substance
Chez Kant
Matière qui persiste pendant le changement (l'évolution d'un objet perçue sous forme
de phénomènes) et en rend l'existence permanente. C'est une des catégories de la
relation : substantia (substance). Mais, attention : le concept de substance ne
s'applique qu'à un objet de l'expérience.
K364 – "De chaque chose en général, je peux dire qu'elle est substance, en tant que
je la distingue de simples prédicats et déterminations des choses."
Voir :
Matière et forme ;
Catégories de l'entendement : inhérence / subsistance ;
K399 – Une chose est représentée en elle-même par la catégorie de substance.
Temps.
La substance d'un objet est éternelle : elle existe, a toujours existé et existera
toujours
995
K253 – "…le substrat de tout le réel, c'est-à-dire de tout ce qui appartient à
l'existence des choses, est la substance, dans laquelle tout ce qui appartient à
l'existence ne peut être pensé que comme détermination" :
C'est donc une condition a priori de la connaissance empirique, permettant
d'apprécier un objet dans sa totalité comme constitué de la substance. Connaître
la substance d'un objet ne provient donc pas de l'intuition sensible (qui ne
permet jamais d'apprécier la totalité d'un objet), mais de l'expérience.
K445-K447 – "Etant donné que les substances ont de tout temps été dans le monde,
ou du moins que l'unité de l'expérience rend nécessaire une telle supposition, il n'y a
pas de difficulté à admettre aussi que le changement de leurs états, c'est-à-dire une
série de leurs changements [une chaîne de causalité de leurs états successifs],
aurait existé de tout temps, et par conséquent que nul premier commencement
n'aurait besoin d'être recherché, ni du point de vue mathématique ni du point de vue
dynamique."
[L'unité de l'expérience d'un objet au cours d'un intervalle de temps exige qu'il
existe du début à la fin, existence inséparable de celle de sa substance.]
K298 – "Si je laisse de côté la permanence (qui est une existence en tout temps), il
ne me reste, pour le concept de substance, que la représentation logique du sujet,
laquelle je pense réaliser en me représentant quelque chose qui peut avoir lieu
simplement comme sujet (sans être prédicat de quoi que ce soit)."
La substance n'est attribut d'aucun sujet, n'est inhérente à aucun sujet.
Tout ce qui existe de manière permanente s'explique par la substance (on dirait
aujourd'hui la matière ou la masse-énergie, bien que la physique connaisse
d'autres invariants, comme la charge électrique) ;
L'existence physique d'un objet nécessite l'existence de sa substance en tant
que cause matérielle au sens d'Aristote : le concept d'objet physique n'a de sens
que s'il a une cause matérielle.
Lorsqu'un système isolé évolue, ni son concept ni sa matière ne cessent
d'exister. Ce qui existe physiquement du début à la fin d'une évolution est, par
définition, sa substance :
sa substance (matière) est permanente, pour Kant comme pour Lavoisier
[63] qui a écrit : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme »
(dans une réaction chimique, les atomes sont les mêmes du début à la fin :
mêmes atomes d'éléments chimiques, même nombre de chaque atome) ;
"son quantum dans la nature ne peut ni augmenter ni diminuer"
(sa masse-énergie, sa charge électrique, etc. sont constantes).
K268 – "Tout effet consistant dans ce qui arrive, par conséquent dans quelque
chose qui est susceptible de changer et que le temps caractérise à travers la
succession, le sujet ultime en est le permanent, comme substrat de tout ce qui
change, c'est-à-dire la substance."
(Décrire l'évolution d'un système suppose deux choses : décrire le système
en tant que matière qui ne change pas, et décrire le changement subi par
cette matière.)
996
K253 – "L'élément permanent, en relation avec lequel seulement tous les
rapports temporels des phénomènes peuvent être déterminés, est la substance
dans le phénomène, c'est-à-dire le réel présent en lui, qui, comme substrat de
tout changement, demeure toujours le même."
Conséquence : Principe de la permanence de la substance.
Le concept de substance d'un objet fait partie de son expérience possible, pas
de sa chose en soi. Il a besoin du schème de la permanence fourni par l'intuition.
Le sens interne de l'homme ressent l'âme (voir Moi (Je) ) et le passage du
temps, mais pas la permanence. L'homme ne se perçoit donc pas en tant que
substance, il n'est pour lui-même que sujet, jamais prédicat.
Moi (Je) est toujours sujet, mais en tant qu'objet je ne suis pas une substance :
K402-K403 – Le Moi, le Je pense, doit toujours dans la pensée avoir valeur de
sujet, de quelque chose qui ne puisse être simplement considéré comme un
prédicat venant s'attacher à la pensée : c'est là une proposition apodictique et
même identique ; toutefois, elle ne signifie pas que je sois, comme objet, un être
subsistant par moi-même, autrement dit une substance.
Cette certitude contredit l'opinion de Descartes selon laquelle l'homme est une
substance pensante et étendue.
K312-K313 – "La substance dans l'espace, nous ne la connaissons que par des
forces qui agissent en lui, soit pour y attirer d'autres forces (attraction), soit pour les
empêcher de pénétrer en lui (répulsion et impénétrabilité) ; nous ne connaissons pas
d'autres propriétés constitutives du concept de la substance qui apparaît
phénoménalement dans l'espace et que nous appelons matière."
Discussion : voir L'intérieur et l'extérieur.
Voir aussi :
Substantiel ;
Remarques sur l'âme et sa substance.
Voir aussi :
Appréhension d'un phénomène ;
Principe de la permanence de la substance ;
997
Nécessité de postuler le déterminisme pour rendre possible la représentation
d'objets ;
Substance pensante : principe de la vie dans la matière.
Substance pensante
Voir Substance pensante : principe de la vie dans la matière.
Substantia phaenomenon
Latin : ce qui est substance (c'est-à-dire permanent) dans le phénomène.
998
Voir aussi :
Substance pensante : principe de la vie dans la matière.
Remarques sur l'âme et sa substance.
Substantiel
Adjectif selon [13]
(Par opposition à accidentel) : qui est de la même nature que la substance, ou qui
appartient à la substance.
Substantif
[56b] §46 page 135 - "On a remarqué qu'en toutes substances le sujet proprement
dit, c'est-à-dire ce qui reste une fois tous les accidents mis à part (comme prédicats),
par conséquent le substantiel lui-même, nous est inconnu, et ces bornes à la
pénétration [de notre entendement] ont été maintes fois déplorées."
Substrat
Chez Kant
K253 – "Tous les phénomènes sont dans le temps, et c'est en lui seul, comme
substrat (comme forme permanente de l'intuition interne), qu'aussi bien la
simultanéité que la succession se peuvent représenter."
Subsumer, subsomption
Subsumer c'est penser un cas particulier sous un concept (classe générale) : un
individu sous une espèce, une espèce sous un genre ; c'est aussi considérer un fait
(une expérience) comme régi(e) par une loi. Un jugement est une subsomption.
999
Exemple : Faculté de juger
K221 - "Si l'entendement en général est défini comme le pouvoir des règles, la
faculté de juger est le pouvoir de subsumer sous des règles, c'est-à-dire de
distinguer si quelque chose s'inscrit ou non sous une règle donnée."
Il s'agit par exemple de juger si une déduction est formellement possible ou
nécessairement fausse.
Condition d'homogénéité
K224 - "Dans toutes les subsomptions d'un objet sous un concept, la représentation
du premier doit être homogène à la seconde : le concept doit contenir ce qui est
représenté dans l'objet à subsumer sous lui - car tel est ce que signifie précisément
l'expression : un objet est contenu sous un concept. Ainsi le concept empirique d'une
assiette a-t-il une dimension d'homogénéité avec le concept géométrique pur d'un
cercle, en tant que la forme ronde qui est pensée dans le premier se peut intuitionner
dans la seconde représentation."
Noter que lorsqu'un concept A a une représentation et qu'il est subsumé sous un
concept B de représentation β, l'homogénéité de avec β implique que toutes les
informations {β1, β2,…βn} de β sont des éléments de l'ensemble des informations
{1, 2,…p} de , où p ≥ n : il y a au moins autant d'informations dans que dans β,
et toute information de β (donc de B) existe dans (donc dans A).
Si on considère les représentations comme des ensembles d'informations
= {1, 2,…p} et β = {β1, β2,…βn} avec p ≥ n, alors β : l'ensemble β est
inclus dans l'ensemble .
Par contre, si on considère les représentations comme des ensembles de
conditions ou de contraintes d'existence d'un objet, avec = {1, 2,…p} et
β = {β1, β2,…βn} avec p ≥ n, alors β : l'ensemble β comprend l'ensemble :
plus il y a de contraintes, plus l'ensemble des objets qui peut les satisfaire est
réduit.
Pour Kant, subsumer c'est clarifier les intuitions par traduction en concepts purs de
l'entendement. Exemples :
K144 : [Il est nécessaire] "de se rendre intelligibles ses intuitions (c'est-à-dire de
les subsumer sous des concepts)."
K221 - La faculté de juger est le pouvoir de subsumer sous une règle, c'est-à-
dire de distinguer si elle s'applique ou non [dans un contexte donné].
1000
Succession chronologique suivant la loi de causalité (principe)
Problématique : voir Analogies de l'expérience (principe).
Preuve
L'homme postule le déterminisme par induction : il a remarqué qu'une situation
donnée évoluait toujours de la même façon et il postule (par pouvoir synthétique de
l'imagination) que cette évolution est stable, c'est-à-dire que :
La situation d'un système est la cause de l'évolution qui la suit ;
Il n'y a ni situation ni évolution sans cause ;
Toute loi d'évolution est stable : les mêmes causes produisent les mêmes effets,
toujours et partout.
Kant attribue à l'imagination la synthèse qui associe deux états successifs (d'un
même système) dans le temps. Il attribue ensuite à l'entendement (qui élabore un
concept pur, le rapport de la cause à l'effet) la décision de leur ordre : le premier, qui
devient la cause, et le second, conséquence nécessaire du précédent.
Les parties d'un phénomène sont perçues successivement, son objet l'est
progressivement
L'esprit n'identifie les diverses parties d'un phénomène que l'une après l'autre :
K259-K260 – "L'appréhension du divers phénoménal est toujours successive. Les
représentations des parties se succèdent les unes aux autres. […] Ainsi, par
exemple, l'appréhension du divers contenu dans le phénomène d'une maison qui est
présente devant moi est successive."
Ce n'est qu'après avoir identifié diverses parties d'un objet que l'esprit (entendement,
intelligence) en fait la synthèse en un objet global :
K259 – "Pour ce qui est de savoir si elles se succèdent aussi dans l'objet, c'est là
un deuxième point de la réflexion, qui n'est pas contenu dans le premier. […]
cela relève d'une recherche plus profonde."
1001
K260 – "…dès que je fais progresser mes concepts d'un objet jusqu'à la
signification transcendantale, la maison n'est nullement une chose en soi, mais
seulement un phénomène, c'est-à-dire une représentation dont l'objet
transcendantal est inconnu ;"
Dictionnaire [13]
Etre ou principe actif susceptible de posséder des qualités ou d'effectuer des
actes. Le sujet est alors ce dont il s'agit. Compléments :
Jugement (définitions : analytique, synthétique, synthétique a priori) ;
Sujet d'une proposition, d'un syllogisme.
On peut distinguer le sujet dont il s'agit et ce que l'on en pense.
Sujet de la connaissance : être qui connaît, considéré, non dans ses
particularités individuelles, mais en tant que condition nécessaire à l'unité
d'éléments représentatifs divers (c'est-à-dire à leur synthèse), unité en vertu de
laquelle ces représentations apparaissent comme constituant un objet.
Chez Kant
Le sujet pensant (l'homme) se perçoit lui-même en tant qu'objet (phénomène)
par son sens interne, sensible au seul temps ; mais sa conscience de soi (Moi)
ne lui donne pas de détails autres que la certitude d'exister.
Sujet transcendantal : faculté a priori qui en tant que telle agit sur le réel et
détermine les conditions de l'expérience :
K362-K363 – "…la représentation simple et par elle-même totalement vide de
contenu : Je, dont on ne peut pas même dire qu'elle soit un concept, mais qui est
une simple conscience accompagnant [et présupposant] tous les concepts.
A travers ce Je, cet Il ou ce Ça (la chose) qui pense, rien de plus ne se trouve
alors représenté qu'un sujet transcendantal des pensées = x, lequel n'est connu
que par les pensées, qui sont ses prédicats, et dont, pris abstraction faite de
celles-ci, nous ne pouvons jamais avoir le moindre concept…"
Voir aussi :
Unité du sujet pensant ;
Ce qu'un sujet peut déduire du Je pense, selon Kant.
1002
K161 - "Assurément la synthèse d'un divers (qu'il soit donné empiriquement ou a
priori) produit-elle d'abord une connaissance qui sans doute, initialement, peut
être grossière et confuse, et a donc besoin d'analyse ;"
Suprasensible
Selon [13] : Qui n'est pas accessible aux sens ; qui est au-delà de la réalité sensible.
Synonymes : surnaturel, supranaturel, extrasensible.
Voir aussi Définition de la raison pure pratique (ou raison pratique) chez Kant.
Surmoi
Voir Surmoi.
Syllogisme
La définition suivante est un simple résumé de la notion de syllogisme, dont on
trouvera des compléments dans Raisonnements de la raison (syllogismes) et [61].
Il y a un concept commun M (appelé moyen terme) aux deux prémisses, chien dans
l'exemple précédent, qui est sujet dans la majeure et prédicat dans la mineure. La
présence de ce moyen terme M permet au sujet X de la mineure (basset) d'être
subsumé sous le prédicat Y de la majeure (animal), c'est-à-dire une synthèse entre
ces deux prémisses qui entraîne nécessairement la conclusion.
1003
prémisses, en tant qu'elle est dite la partie la plus faible du syllogisme
catégorique.
Donc si l'une des prémisses est une proposition négative, la conclusion doit
être également négative.
Si une prémisse est une proposition particulière, la conclusion doit être
également particulière.
Dans tout syllogisme catégorique la majeure doit être une proposition
universelle, la mineure une proposition affirmative ;
donc la conclusion doit se régler quant à la qualité sur la majeure, quant à la
quantité sur la mineure."
(Fin de citation)]
Les 3 types des propositions successives d'un syllogisme constituent son mode.
Ainsi, l'exemple ci-dessus (chien, animal, basset) est du mode AAA.
1004
Différences entre inférence et syllogisme
Lorsqu'une conclusion se déduit d'une seule prémisse, la logique utilise une
inférence. L'inférence est une déduction immédiate, alors que le syllogisme est une
déduction médiate.
et en passant alors seulement de cette dernière à une troisième qui relie à son tour la
connaissance éloignée (changeant) à la connaissance présente : donc « les corps
sont changeants »,
Voir aussi :
1005
Connaissance procédant d'un principe et Concepts purs de la raison ou Idées
transcendantales.
Enthymème ; Episyllogisme ; Polysyllogisme ; Prosyllogisme ; Sorite.
Compléments
Dans le cours Logique : Raisonnements de la raison (syllogismes) ;
Syllogismes et principe de déduction.
Principe de déduction
Le principe supérieur précédent est donc indispensable et fondamental en Logique :
c'est le nerf de toute déduction, puisque seul il permet de passer des prémisses à la
conclusion : de remplacer celles-là par celle-ci, et par suite d'avancer par étapes
dans un raisonnement. Pour cette raison, nous l'appellerons désormais le principe de
déduction.
Syllogisme catégorique
Définition : un syllogisme est catégorique s'il a une proposition majeure catégorique.
1006
Structure d'un syllogisme catégorique
Dans un syllogisme catégorique (exemple ci-dessous) :
« Un chien est un animal ; Médor est un chien ; donc Médor est un animal. »
Proposition majeure Proposition mineure Conclusion
(sujet : chien) (sujet : Médor)
Syllogisme affirmatif
C'est un syllogisme dont les deux prémisses sont de type A (affirmatif) :
sa conclusion ne peut alors être qu'affirmative.
Syllogisme disjonctif
C'est un syllogisme (deux prémisses entraînant une conclusion) dont la majeure est
disjonctive au sens OU exclusif.
1er cas
(Majeure) « Ou A est vrai ou B est vrai » (ou exclusif : un seul des deux est vrai)
(Mineure) « A n'est pas vrai »
(Conclusion) « B est vrai ».
2ème cas
(Majeure) « Ou A est vrai ou B est vrai » (ou exclusif : un seul des deux est vrai)
(Mineure) « A est vrai »
(Conclusion) « B est faux ».
Syllogisme hypothétique
C'est un syllogisme (deux prémisses entraînant une conclusion) dont la proposition
majeure est soit hypothétique, soit problématique.
1007
Exemple : soient 3 propositions {p = (A est B)} ; {q = (C est D)} ; {r = (E est F)} ;
chacune des propositions p, q et r a une valeur logique : vrai ou faux.
Notations
"A est B" signifie "A a la propriété B" ;
Le symbole d'implication est ;
Si la proposition p est vraie, on la note p, sinon on la note ¬p (non-p).
Syllogistique
Selon [13] - Logique : qui appartient au syllogisme, relève du syllogisme, procède par
syllogisme, constitue un syllogisme.
Synchronique
Qui étudie ou présente des événements, des éléments, des objets d'analyse en tant
qu'ils sont contemporains, en dehors de leur évolution. Opposé : diachronique
Synopsis
Résumé qui donne par sa disposition une vue générale d'un texte comprenant
plusieurs parties, que l'on peut ainsi embrasser d'un seul coup d'œil.
Syntagme
Combinaison de mots qui se suivent et produisent un sens acceptable. Le syntagme
se compose donc toujours de deux ou plusieurs mots consécutifs.
Syntaxe
Logique, dans un langage formalisé : La syntaxe décrit l'alphabet utilisé, les règles
de construction des expressions bien formées, ainsi que les règles de déduction
opérant à partir des axiomes. Connaître la syntaxe d'un langage permet d'écrire un
texte correctement, pas d'en connaître le sens, qui relève de la sémantique.
1008
Voir Axiomatique.
Synthèse a priori
Voir Synthèse a priori.
Mais il y a une seconde raison : c'est qu'une réponse satisfaisante à cette seule
question exige une réflexion bien plus soutenue, profonde et pénible que n'en
imposa jamais le plus volumineux ouvrage de métaphysique promettant l'immortalité
à son auteur dès sa parution."
(Fin de citation)
1009
Car ce qui en porte le nom est proprement une partie de la métaphysique, alors que
la science dont nous parlons doit tout d'abord en établir la possibilité et par
conséquent précéder toute métaphysique."
(Fin de citation)
1010
parties de ses parties : elle n'est donc pas la division, mais la subdivision d'un
composé donné. C'est seulement au second sens de ces mots que nous prenons ici
la synthèse et l'analyse."
Synthèse en général
K161-K162 - "La synthèse en général est […] le simple effet de l'imagination, fonction
aveugle mais indispensable de l'âme, sans laquelle nous n'aurions jamais aucune
connaissance, mais dont nous ne sommes que très rarement conscients."
Kant explique là qu'une synthèse est spontanée quel que soit son objet, son
concept résultant se formant dans l'esprit (sous forme, comme toujours, d'une
représentation interprétée) comme toute autre imagination non consciente.
K162 - Une synthèse de représentations est donc aussi une synthèse de concepts.
K162 - "La même fonction [de synthèse] qui fournit de l'unité aux diverses
représentations dans un jugement donne aussi à la simple synthèse de diverses
représentations dans une intuition une unité qui, exprimée de façon générale,
s'appelle le concept pur de l'entendement ; cette fonction est l'unité synthétique
originaire de l'aperception.
K205 - "Un divers contenu dans mon intuition est représenté par la synthèse de
l'entendement comme appartenant à l'unité nécessaire [inévitable] de la conscience
de soi, et cela se produit grâce à une catégorie. (La représentation de l'unité de
l'intuition d'un objet inclut toujours une synthèse de son divers et la relation du divers
à une unité de l'aperception)"
Synthèse du divers
K239 - "Tous les phénomènes contiennent, quant à leur forme, une intuition dans
l'espace et dans le temps, qui leur sert à eux tous de fondement a priori. Ils ne
peuvent donc être appréhendés, c'est-à-dire intégrés dans la conscience empirique,
autrement qu'à travers la synthèse du divers [par l'imagination productive] par
laquelle sont produites les représentations d'un espace ou d'un temps déterminés,
c'est-à-dire à travers la composition de l'homogène et la conscience de l'unité
synthétique de ce divers (de cette diversité homogène)."
K198 - "Le concept de liaison contient en lui, outre le concept du divers [de l'intuition]
et de sa synthèse, aussi celui de l'unité de ce divers. La liaison est la représentation
de l'unité synthétique du divers. […] Cette unité, qui précède a priori tous les
concepts de la liaison, ne saurait être la catégorie de l'unité ;"
1011
K162 - La synthèse pure reposant sur l'unité synthétique a priori, qui produit la
catégorie (concept pur de l'entendement), concept transcendantal se rapportant
a priori à des objets.
Voir Unité synthétique de l'aperception et Synthèse de l'appréhension.
Voir :
Les exemples illustrant ces deux sortes de synthèses.
Différence entre jugements analytiques et jugements synthétiques (K100).
Liaison, Axiomes de l'intuition et Nombre.
Synthèse a priori
Dans l'exemple "Tout ce qui arrive a une cause" (K102), "a une cause" est un
prédicat extérieur au phénomène de "Tout ce qui arrive", on ne peut l'en déduire.
"Tout ce qui arrive a une cause" est donc un jugement synthétique ; et comme on
peut le formuler sans faire appel à l'expérience, il est synthétique a priori.
K293 – "Tous les principes de l'entendement pur ne sont que des principes a priori
de la possibilité de l'expérience ; […] c'est à celle-ci [l'expérience] uniquement que se
rapportent aussi toutes les propositions synthétiques a priori, leur possibilité reposant
elle-même totalement sur cette relation.
Voir :
Exemples de synthèse.
Principe de l'unité synthétique du divers de toute intuition possible.
Principe suprême de tous les jugements synthétiques.
Comment des propositions synthétiques a priori sont-elles possibles ?
Tous les principes synthétiques a priori ne sont rien de plus que les principes de
l'expérience possible.
Synthèse pure
K162 - La synthèse pure donne un concept pur de l'entendement. Elle est basée
sur la fonction mentale appelée unité synthétique a priori. Ainsi, compter est une
synthèse pure selon des concepts ; exemple : le concept de dizaine unifie 10
concepts "élément singulier".
Il y a un second cas de synthèse pure : celui des concepts mathématiques,
construits intuitivement à partir de concepts a priori ; voir :
In concreto ;
Connaissance pure mathématique ;
Discipline de la raison pure dans l'usage dogmatique.
1012
Ainsi, pour former la connaissance a priori de tout objet, il faut 3 éléments :
Le divers de l'intuition pure ;
La synthèse de ce divers par l'imagination ;
Les concepts qui donnent de l'unité à cette synthèse pure sous forme de
catégories de l'entendement.
Synthèse de l'agrégation
Voir Agrégation / Coalition.
Synthèse du divers
Voir Synthèse du divers.
Synthèse de l'aperception
Voir Unité synthétique de l'aperception principe suprême de la connaissance
humaine.
1013
Synthèse de l'appréhension (du divers de l'intuition)
Voir Appréhension et Unité transcendantale - Unité subjective.
Synthèse de l'homogène
Voir Synthèse de l'homogène - Synthèse dynamique de la liaison causale (de
l'hétérogène).
Synthèse empirique
Voir Synthèse de l'appréhension (synthèse empirique).
Synthèse en général
Voir Synthèse en général.
1014
Synthèse pure
Voir Synthèse pure.
Systématique
Voir Unité systématique
Système
Construction de l'esprit
Ensemble de propositions, de principes et de conclusions, qui forment un corps
de doctrine ;
Construction théorique cohérente, structurée, qui rend compte d'un ensemble de
phénomènes.
Cette définition est souvent utilisée pour désigner un objet physique, plus ou
moins complexe, avec ou sans des liaisons internes entre ses parties.
Exemples
Mathématiques : système d'équations que les valeurs des variables doivent
satisfaire toutes simultanément.
Physique : un pendule, masse oscillant autour d'un axe sous l'action de la
pesanteur ou d'un ressort.
Astronomie : le système solaire est un ensemble de satellites du soleil (planètes,
astéroïdes, comètes) dont les orbites et mouvements sont régis par les trois lois
de Kepler [45] et la Relativité générale.
1015
Logique : un système formel est composé d'un vocabulaire, d'un ensemble
d'axiomes et d'un ensemble de règles de déduction. C'est un langage permettant
d'écrire et de déduire des propositions logiques.
Axiomatique et Système logique.
K290 – "Remarque générale sur le système des principes".
K599 – Système complet de la raison pure.
Chez Kant
Définition et structure d'un système
(Citation de K674)
"J'entends par système l'unité des diverses connaissances sous une Idée.
Cette dernière [(l'Idée)] est le concept rationnel de la forme d'un tout, en tant que, à
travers ce concept, la sphère du divers [(les informations des connaissances)] aussi
bien que la position des parties les unes par rapport aux autres [(les relations entre
les connaissances)] sont déterminées a priori.
Le tout est donc articulé (articulatio) [structuré], et non pas produit par accumulation
(coacervatio) ;"
(Fin de citation)
Système logique
Voir Axiomatique et Système logique.
1016
Système des fins
Voir dans l'ordre :
Fin – Fins ;
Loi (règle) morale ;
Monde moral ;
Système ;
Unité systématique ;
L'unité systématique des fins réunit la raison pratique et la raison spéculative ;
Les Idées transcendantales régulent l'usage de l'entendement.
La catégorie d'une proposition ne suffit pas pour apprécier la possibilité de son objet
K290 - L'esprit humain ne peut apprécier la possibilité d'aucun objet d'après la
catégorie d'une proposition où il apparaît : il a toujours besoin d'un exemple sous
forme d'intuition pour se faire une idée de la réalité objective d'une catégorie.
Exemple : pour apprécier si l'objet d'une affirmation peut être une substance,
l'esprit a besoin d'un exemple de substance d'un objet analogue ;
pour apprécier si un objet peut être cause d'un phénomène, l'esprit a besoin d'un
exemple où un objet analogue est cause de quelque chose, etc.
Conséquences :
K290 – [Les catégories] "ne sont pour elles-mêmes jamais des connaissances,
mais de simples formes de pensée en vue de produire des connaissances à
partir d'intuitions données."
K290-K291 – A partir de simples catégories, on ne peut élaborer aucune
proposition synthétique, on ne peut enrichir un concept donné. Exemple de
proposition dont on ne peut enrichir le concept : Toute chose est un quantum ;
K291 – Un jugement qui est une proposition synthétique dont le prédicat est une
catégorie, est indémontrable. Exemple : Tout ce qui existe de façon contingente
a une cause.
1017
Causalité : L'entendement pur ne peut comprendre une possibilité physique. Or il
faut, pour qu'un objet change, que quelque chose se déplace dans l'espace.
Pour comprendre un tel déplacement l'esprit a besoin de se le représenter
physiquement, comme quelque chose de permanent dont les positions varient
dans le temps, ce qui exige une intuition externe.
Communauté : K292-K293 – "La catégorie de la communauté, quant à sa
possibilité, n'est pas du tout à comprendre par la simple raison, et donc il n'est
pas possible d'apercevoir la réalité objective de ce concept sans une intuition
[…] externe dans l'espace."
Les objets d'une communauté, dont les substances sont distinctes par définition,
nous apparaissent séparés dans une intuition externe – et seulement dans une
telle intuition.
Système logique
Voir Axiomatique et Système logique.
Tautologie
Proposition évidente (donc n'apportant rien de neuf), car son sujet et son prédicat ont
même signification, qu'ils soient ou non exprimés par un même mot.
Complément : Propositions tautologiques.
1018
Technique
Selon [19]
Relatif à des procédés (artistiques, scientifiques ou industriels) ;
Par opposition à la connaissance théorique dont on considère les applications.
Téléologie - Téléologiste
Philosophie : doctrine qui considère que dans le monde tout être (vivant ou non) a
été créé dans un but précis par la volonté d'un Etre suprême (Dieu). Cette doctrine
conçoit le monde comme un système de relations, de rapports entre des moyens et
des fins. Synonyme : finalisme. – Opposé : mécanisme.
Les téléologistes (ceux qui professent la téléologie, par exemple les chrétiens)
justifient leur doctrine par le refus de croire que l'ordre et l'harmonie qu'ils constatent
dans le monde puissent être dus à un hasard aveugle. C'est là une justification
psychologique : « Je crois cela parce que je serais choqué qu'il en fut autrement » ;
elle n'a aucune valeur rationnelle, mais elle rassure les esprits que le froid
déterminisme effraie : voir Pascal et Kant sur la science et l'âme et [113] sur
l'affirmation par le pape Benoît XVI en 2007 de la création divine de l'Univers.
K412 - "A en juger d'après l'analogie avec la nature des êtres vivants dans ce
monde, concernant lesquels la raison doit nécessairement adopter comme principe
qu'il ne se peut trouver aucun organe, aucun pouvoir, aucun penchant, rien, donc,
qui fût superflu ou dépourvu de tout rapport avec son usage, donc sans finalité, mais
qu'au contraire tout est exactement adéquat à la destination qui est la sienne dans la
vie…"
1019
"Lorsque certaines propriétés plus générales, immanentes à la matière - compte tenu
de l'avantage qu'elles procurent, et pour lequel on peut croire qu'elles ont été
disposées -,
[« On peut croire que… » prête une intention suite à une simple constatation
d'analogies, suite à un étonnement, c'est donc un argument esthétique, que Kant
sait dénué de valeur probante]
lorsqu'une loi simple, que chacun trouverait déjà nécessaire pour se procurer un
certain bien déterminé,
[Deuxième prêt d'intention]
on doit dire que c'est manifestement dans l'essence même des choses que se
trouvent des correspondances naturelles qui tendent à l'unité et à l'accord, et qu'une
harmonie universelle se déploie dans le royaume même de la possibilité.
[Unité, accord, harmonie et universalité sont des appréciations favorables
esthétiques, donc indémontrables]
Elles révèlent une unité dans les possibilités mêmes et une dépendance commune
de l'essence de toutes les choses à l'égard d'un seul grand fondement."
[Pourquoi un seul ? Où est-ce prouvé ? En réalité, le postulat d'unité de finalité et
de conception du monde n'apporte qu'une satisfaction psychologique : la
simplicité !]
(Fin de citation)
1020
Philosophie de la nature
Maxime : ne pas tenter d'expliquer les lois de la nature voulues par l'être suprême
[56b] §44 pages 131-132 – "Selon une juste maxime de la philosophie de la nature,
nous devons nous abstenir de toute explication de l'organisation naturelle qui a été
tirée de la volonté d'un être suprême, parce que ce n'est plus de la philosophie de la
nature, mais un aveu que nous sommes par là au bout de notre rouleau."
Car comment entendrions-nous trouver entre diverses volontés une unité parfaite
des fins ?
1021
Cette volonté doit nécessairement être
toute-puissante, pour que la nature entière et sa relation à la moralité dans le
monde lui soient soumises ;
omnisciente, afin qu'elle connaisse ce qu'il y a de plus intime dans les
dispositions et leur valeur morale ;
omniprésente, pour être immédiatement disponible vis-à-vis de tout besoin que
fait surgir le souverain bien ;
éternelle, pour que cet accord de la nature et de la liberté ne vienne à faire
défaut en aucun temps, etc."
(Fin de citation)
Voir :
Impossibilité de prouver apodictiquement que Dieu n'existe pas ;
La possibilité et l'impossibilité d'un Dieu transcendantal sont indémontrables ;
Conclusion sur la possibilité des choses – Concept de la suprême réalité ;
Principaux arguments de cette preuve en faveur d'une doctrine téléologique ;
Les Idées sont les causes efficientes de la nature – Les croyances de Kant ;
Croyance doctrinale ;
Un phénomène donné nouveau ne doit être expliqué qu'à partir de lois connues
(Kant en contradiction avec ses propres maximes) ;
Positions parfois contradictoires de l'Eglise catholique sur la création divine du
monde et l'évolutionnisme darwinien [113].
Temps
K126 - Le temps est une représentation nécessaire qui joue le rôle de fondement
pour toutes les intuitions ; il est donc donné a priori. C'est un principe de
connaissance des objets intérieurs, car toute intuition comprend dans le sens interne
une intuition de temps, à la fois par une durée et par une position relative dans
l'historique des événements psychiques ressentis par le sujet.
Le temps n'est pas un concept discursif (universel), mais une forme pure de
l'intuition sensible.
K128 – "Le temps n'est rien d'autre que la forme du sens interne, c'est-à-dire de
l'intuition que nous avons de nous-mêmes et de notre état intérieur."
K249 - "…le temps lui-même ne peut pas être perçu, la détermination de l'existence
des objets dans le temps ne peut s'accomplir que par leur liaison dans le temps en
général, par conséquent uniquement par l'intermédiaire de concepts qui effectuent la
liaison a priori."
En effet, le temps étant intuitionné par le sens interne, savoir qu'un objet existe
dans le temps n'est possible qu'en reliant a priori sa perception à celle d'au
moins un autre objet (antérieur ou simultané) dont on connait l'existence.
1022
Comme l'espace, le temps est une abstraction permettant de concevoir l'existence
d'objets physiques présents à l'esprit (perçus par le sens interne) à un instant donné.
Il est unique, continu et vide. C'est une abstraction absolument a priori.
Voir :
Toutes les représentations affectent le sens interne et ont une information
temps ;
Principe suprême de la possibilité d'intuition relativement à la sensibilité.
Le sens interne ne perçoit pas le temps, mais le passage du temps, représenté par
l'ordre d'événements (phénomènes) que le sujet perçoit sans pouvoir connaître la
durée qui les sépare : ce n'est pas un temps absolu, il n'est pas ressenti comme une
grandeur. (K265). Voir ci-dessous Ordre des phénomènes perçus dans le temps
(ordre de la série chronologique).
K129 - "Tous les phénomènes extérieurs sont dans l'espace et sont déterminés a
priori selon des rapports spatiaux. […] Tous les phénomènes en général, c'est-à-dire
tous les objets des sens, sont dans le temps et nécessairement soumis à des
rapports temporels."
Un phénomène comme une émotion est ressenti par le seul sens interne, et pas
le sens externe : il existe donc dans le temps (où il est situé par rapport à un
phénomène précédent) mais pas dans l'espace.
K201 note - "L'espace et le temps, ainsi que toutes les parties de ceux-ci, sont des
intuitions, par conséquent des représentations singulières, avec le divers qu'elles
contiennent en elles […] ; ce ne sont donc pas de simples concepts à travers
lesquels la même conscience est trouvée contenue dans de nombreuses
représentations : au contraire, de nombreuses représentations se trouvent-elles ici
contenues en une seule et dans la conscience que nous en avons, par conséquent
liées les unes aux autres - ce qui fait que l'unité de la conscience ainsi trouvée est
synthétique, mais pourtant originaire."
K225 - "Le temps [est une] condition formelle du divers du sens interne, donc de la
liaison de toutes les représentations."
K227 - "L'image pure qui présente toutes les grandeurs au sens externe est l'espace,
tandis que celle de tous les objets des sens en général est le temps." (Voir
appréhension et nombre)
1023
qui s'introduit dans le même temps, selon qu'il s'agit d'un temps rempli ou d'un temps
vide."
Kant considère ici le concept pur de l'entendement en général, en tant que classe de
concepts. Dans ce concept, la matière (par opposition à la forme) est la sensation
dont l'entendement a déduit le concept pur de l'entendement. Kant définit la réalité
d'un phénomène par le fait que sa perception affecte l'individu, et que toute sensation
(tout ce qui affecte) ayant une durée et une position relative dans la suite des
sensations a donc une dimension temps.
1024
au détriment d'autres perceptions concomitantes (présentes à l'esprit en même
temps). Cette proportion croît jusqu'à ce que le phénomène accapare l'attention et
provoque l'aperception et ses deux synthèses successives (voir aussi Entendement
(étapes) ), puis décroît jusqu'à ce que le phénomène ne soit plus présent à l'esprit :
K227 - "Or, chaque sensation possède un degré ou une grandeur, par laquelle
elle peut plus ou moins remplir le même temps, c'est-à-dire le sens interne,
relativement à la même représentation d'un objet, jusqu'à ce qu'elle cesse en se
réduisant à rien. Ainsi y a-t-il […] un passage de la réalité à la négation, lequel
fait que toute réalité est susceptible d'être représentée comme un quantum ;"
Kant affirme là que toute perception de réalité est associée à une intensité d'activité
cérébrale en proportion croissante puis décroissante, ce que les recherches
modernes confirment, enregistrements à l'appui [28].
1025
Temps vide : nulle naissance d'une quelconque chose n'y est possible
K431 – "Dans un temps vide, nulle naissance d'une quelconque chose n'est possible,
parce qu'aucune partie de ce temps plutôt qu'une autre ne possède en soi une
condition distinctive de l'existence plutôt que de la non-existence (et cela, aussi bien
dans l'hypothèse où le monde naît de lui-même [ou a toujours existé] que dans celle
où il naît sous l'effet d'une autre cause."
[Dans un temps vide il n'y a pas de cause efficiente de naissance, évolution ou
disparition de quelque chose ; et par définition, l'existence d'un objet physique
s'entend à un instant donné. Le concept de temps vide n'ayant pas de
correspondance physique est pure abstraction.]
Les trois modes (rapports temporels) du temps (positionnement relatif dans le temps)
K250 – "Les trois modes du temps sont la permanence, la succession et la
simultanéité." Ce sont des modes d'existence de phénomènes (voir ci-dessous).
Cette affirmation est évidente pour des intervalles de temps distincts. En effet : ou il y
a un seul intervalle de temps, ou il y en a plusieurs (s'il n'y en a aucun, en qualifier le
mode n'a pas de sens).
S'il y a un seul intervalle de temps, ou sa durée est illimitée (il est permanent) ou
elle est limitée.
S'il y a deux intervalles de temps, ou ils sont successifs ou ils sont simultanés au
moins en partie ; et s'il y a plus de deux intervalles de temps, on peut les grouper
par deux et se ramener par ajouts successifs au cas de deux intervalles.
K253 - Du point de vue existence des phénomènes pendant un temps non nul, deux
phénomènes sont soit successifs, soit simultanés au moins en partie ; une suite de
phénomènes successifs est alors appelée série chronologique, tandis que pour un
ou plusieurs phénomènes simultanés on parle d'étendue temporelle. Voir
appréhension.
K254 - Un intervalle de temps est mesuré par une grandeur, sa durée. L'existence
d'un phénomène ou d'une série chronologique de phénomènes est donc associée à
un nombre non nul, sa durée, que le sens interne ne peut apprécier (voir Temps).
1026
Ce qui suit ou arrive succède selon une règle universelle [par exemple la causalité], à
ce qui était contenu dans l'état précédent ; par là se constitue une série de
phénomènes, laquelle, par l'intermédiaire de l'entendement, produit et rend
nécessaire le même ordre, le même enchaînement continu, dans la série des
perceptions possibles, que celui qui se trouve a priori dans la forme de l'intuition
interne (le temps) où toutes les perceptions devraient obtenir leur place."
(Fin de citation)
Termes principaux
Les 3 termes principaux : majeur, petit et moyen. Voir 1. Syllogismes catégoriques.
Théisme – Théiste
Voir Définitions : déiste, théiste (K553).
Théodicée
Selon le dictionnaire [13] : Partie de la métaphysique qui traite, d'après les seules
lumières de l'expérience et de la raison, de l'existence et de la nature de Dieu.
Synonyme : théologie rationnelle.
Théologie
1027
Chez Kant
Théologie morale
Science qui démontre l'existence de Dieu par les fins morales de l'homme.
K666-K667 – "La théologie morale est donc simplement d'un usage immanent, à
savoir celui qui nous permet d'accomplir notre destination ici-bas, dans le monde, en
prenant notre place dans le système de toutes les fins, et non pas d'abandonner, en
proie à une exaltation de l'esprit […] le fil conducteur d'une raison moralement
législatrice dans la bonne conduite de notre vie, afin de le relier immédiatement à
l'Idée de l'être suprême - ce qui constituerait un usage transcendant, mais qui, tout
comme celui de la simple spéculation, ne peut que renverser et faire échouer les fins
dernières de la raison."
Voir :
[Concept résultant : Dieu transcendantal, origine de l'unité de toute réalité
empirique] ;
Jugement de Kant sur sa théologie morale : c'est la seule possible.
Théologie transcendantale
K553 - La théologie est la connaissance de l'être originaire :
Issue de la simple raison (theologia rationalis), qui conçoit son objet :
Simplement "par la raison pure, par l'intermédiaire de concepts purement
transcendantaux (ens originarium, realissimum, ens entium), et elle s'appelle
la théologie transcendantale ;"
"A l'aide d'un concept qu'elle tire de la nature (de notre âme), en y voyant la
suprême intelligence, et elle devrait alors s'appeler la théologie naturelle."
Voir Doctrine de la théologie naturelle.
La théologie transcendantale est une théologie spéculative.
Ou issue de la révélation (revelata).
Cosmothéologie ou ontothéologie
K553 – "La théologie transcendantale, ou bien pense dériver l'existence de l'être
originaire à partir d'une expérience en général (sans déterminer quoi que ce soit de
plus précis sur le monde auquel elle appartient), et elle s'appelle cosmothéologie ; ou
bien elle croit connaître son existence par simples concepts, sans l'aide
complémentaire de la moindre expérience, et elle s'appelle ontothéologie."
K558 – "La théologie transcendantale [est donc très utile en tant que] censure de
notre raison, quand cette dernière n'a affaire qu'à des Idées pures qui, justement
pour cela, n'admettent nul autre critère d'appréciation qu'un critère transcendantal.
Car si jamais, sous un autre rapport, peut-être sous l'angle pratique, la supposition
d'un être suprême et intégralement suffisant comme consistant en une intelligence
suprême affirmait sa validité sans rencontrer de contradiction, il serait de la plus
grande importance de déterminer avec exactitude ce concept, dans sa dimension
transcendantale, comme le concept d'un être nécessaire et suprêmement réel, ainsi
1028
que d'en écarter ce qui est incompatible avec la suprême réalité, ce qui relève du
simple phénomène (de l'anthropomorphisme au sens le plus large), et en même
temps de déblayer le terrain de toutes les assertions contraires, qu'elles soient
athées, déistes ou anthropomorphiques : opération qui est très aisée dans le cadre
d'un tel examen critique, dans la mesure où les mêmes raisons qui découvrent
l'impuissance de la raison humaine relativement à l'affirmation de l'existence d'un tel
être suffisent nécessairement aussi pour démontrer l'inefficacité de toute assertion
contraire."
Voir aussi :
Dogmatisme possible de la foi en une Intelligence suprême et de la physico-
théologie ;
Doctrine de la théologie naturelle.
Théorème
Selon le dictionnaire [13] :
(Logique et mathématiques, par opposition à axiome et postulat) :
proposition qui peut être démontrée par un raisonnement logique à partir de faits
donnés ou d'hypothèses justifiables.
(Par extension) : énoncé reposant sur une démonstration rigoureuse.
Chez Kant
Voir Théorèmes, corollaires, lemmes et scholies.
Théorétique
Dictionnaire [13]
Adjectif : qui a pour objet la connaissance, qui vise à la connaissance. Dans la
classification aristotélicienne des sciences, la mathématique, la physique, la
théologie sont des sciences théorétiques par opposition aux sciences poétiques et
pratiques.
1029
Chez Kant
Kant distingue deux ordres de sciences : les sciences purement empiriques, et les
sciences théorétiques qui sont à ses yeux les véritables sciences parce qu'elles sont
basées sur des postulats ou principes explicites.
[93] – D.1770, p. 643 note * - "Nous considérons une chose théorétiquement dans la
mesure où nous sommes attentifs à ce qui concerne son être ; nous la considérons
pratiquement si nous examinons ce qui devrait lui appartenir par le moyen de la
liberté.
[Un point de vue théorétique est apodictique (nécessaire), alors qu'un point de
vue pratique prend en compte l'arbitre.]
Définition
Théorie des conditions formelles d'un système complet de la raison pure
K599 – "J'entends donc par théorie transcendantale de la méthode la détermination
des conditions formelles d'un système complet de la raison pure. Dans ce but, nous
aurons à nous préoccuper d'une discipline, d'un canon, d'une architectonique et enfin
d'une histoire de la raison pure, et nous mettrons en œuvre dans une perspective
transcendantale ce que l'on cherche à faire dans les écoles sous le nom de logique
pratique relativement à l'usage de l'entendement en général…"
La logique générale, considérée comme pratique, ne peut donc être rien de plus
qu'une technique du savoir en général ; - un organon de la méthode scolastique."
(Fin de citation)
1030
Elle décrit les conditions sous lesquelles les objets de la connaissance sont donnés.
C'est en fait l'Esthétique transcendantale.
Théosophie
Philosophie, religion :
Théosophie traditionnelle : Description des mystères de la vie cachée de Dieu
dans sa relation avec celle de l'homme et de la création tout entière ;
Théosophie moderne : Doctrine métaphysique et morale fondée en 1875, qui a
des liens secrets avec le bouddhisme et le lamaïsme, et qui a fait de très
nombreux adeptes, en particulier aux États-Unis.
Thermodynamique
Voir [119].
Thèse
Selon [13] : proposition ou théorie que l'on tient pour vraie et que l'on soutient par
une argumentation pour la défendre contre d'éventuelles objections. - Opposé :
antithèse.
Voir aussi :
Idées transcendantales : thèses dogmatiques contre antithèses empiriques.
Thétique
Selon [13]
Adjectif : qui concerne une affirmation théorique ; qui pose un contenu de pensée
comme thèse.
Chez Kant
Substantif
K426 – "Tout ensemble réunissant des doctrines dogmatiques est une thétique".
Freud
Freud [41] a défini deux topiques, points de vue particuliers du psychisme :
1ère topique : inconscient, préconscient et conscience [23].
2ème topique : Ça, Moi et Surmoi [23].
1031
K314 - Pour tout concept, le lieu transcendantal et les règles pour le trouver
constituent la topique transcendantale, doctrine qui apporte une protection radicale
contre ce par quoi l'entendement pur peut se laisser capter subrepticement, et contre
les illusions qui en résultent.
K315 – "La topique transcendantale ne contient que les 4 titres [rapports] (évoqués
dans la Réflexion transcendantale) de toute comparaison et de toute distinction.
[Ces rapports] se différencient des catégories en ceci qu'ils présentent, non
l'objet d'après ce qui constitue son concept (grandeur, réalité), mais seulement la
comparaison des représentations précédant le concept des choses, et cela dans
toute leur diversité.
Cette comparaison, toutefois, a d'abord besoin d'une réflexion, c'est-à-dire d'une
détermination du lieu auquel appartiennent les représentations des choses qui sont
comparées, pour savoir si c'est l'entendement pur qui les pense ou la sensibilité qui
les donne dans le phénomène."
K315 – "Sans cette réflexion [transcendantale], je fais un usage très mal assuré de
ces concepts, et il en résulte de prétendus principes synthétiques que la raison
critique ne peut reconnaître et qui se fondent exclusivement sur une amphibologie
transcendantale, c'est-à-dire sur une confusion de l'objet pur de l'entendement avec
le phénomène."
Topologie
Selon le dictionnaire [13] : Partie de la géométrie qui considère uniquement les
relations de position.
Totalité inconditionnée
Voir Concept rationnel de la totalité inconditionnée.
Transcendant
Adjectif (philosophie) : qui se situe au-delà de toute expérience physique, qui est
externe à l'Univers. Exemples : sont transcendants Dieu créateur du monde et l'âme
humaine.
Existence de Dieu
Voir Les preuves logiques de l'existence de Dieu (synthèse).
1032
Ne pas confondre avec transcendantal (voir Immanent – Principe immanent et
principe transcendant).
Quant à la notion d'esprit humain, c'est aussi une abstraction, synthèse de facultés
construite par l'homme à partir d'autres abstractions, et sans rapport avec une
propriété physique. Ce n'est pas parce que l'homme peut imaginer des objets ou des
causes externes à l'Univers (transcendantes) qu'elles peuvent exister dans l'Univers
ou y exercer une influence ; inversement, aucune situation ou action physique dans
l'Univers ne peut résulter d'une cause extérieure à l'Univers ou avoir un effet
extérieur à l'Univers. Ces deux impossibilités résultent de limitations,
scientifiquement établies, des possibilités de transmission d'énergie. Seule la pensée
humaine peut franchir les frontières de l'Univers, parce qu'elle ne manipule pas
d'énergie.
1033
Ces exemples montrent que l'adjectif transcendantal s'applique au moins à des
connaissances (notion dont la définition comprend au moins un concept) pour ce qui
est de leur origine ou des possibilités de leur existence.
Orthographe
Transcendantal est parfois écrit avec un "e" : transcendental. Le dictionnaire de
l'Académie [13] écrit transcendantal, orthographe reprise dans ce texte.
1034
détermination de cette spontanéité elle-même à produire la série, c'est-à-dire la
causalité, en sorte que rien ne précède par quoi l'action qui intervient ainsi soit
déterminée selon des lois constantes."
Exemple 3 :
Une condition a priori de la forme de l'expérience est transcendantale.
Ainsi, la justification d'une validité a priori d'un concept pour décrire un objet des sens
est transcendantale, car elle n'est ni empirique, ni transcendante, ni métaphysique.
Il y a nécessairement un domaine transcendantal de la pensée d'où découlent
des règles d'usage de l'entendement et de la raison.
1035
L'aperception transcendantale, en raison de la nécessité de principe qui
exige, en face de la multiplicité des sensations et des sentiments, un sujet
un et identique auquel ils soient rapportés : il faut donc une règle de
synthèse de l'aperception valable pour tous les contenus de divers.
K170 - "J'appelle […] l'explication de la manière dont des concepts peuvent se
rapporter a priori à des objets leur déduction transcendantale, et je la distingue de
la déduction empirique, laquelle montre de quelle façon un concept est acquis par
expérience et par réflexion sur celle-ci, et ne concerne donc pas la légitimité de
ce concept, mais le fait d'où procède sa possession."
C'est par déduction transcendantale que les concepts d'espace, temps, et
catégories se rapportent a priori aux objets.
K575 – "On ne peut se servir avec sûreté d'un concept a priori sans avoir mis en
œuvre sa déduction transcendantale. Les Idées de la raison pure n'autorisent, il
est vrai, nulle déduction du type de celle des catégories ; si elles doivent toutefois
avoir au moins quelque validité objective, même de caractère indéterminé, et ne
pas représenter simplement de vains êtres de raison (entia rationis ratiocinantis),
une déduction doit absolument en être possible…"
Voir Objet absolument parlant – Objet dans l'Idée.
K171 – L'unique mode possible de déduction d'une connaissance pure a priori est
le mode transcendantal.
Savoir que l'expérience a priori d'un phénomène est possible est transcendantal,
comme sont transcendantales toutes les conditions de possibilité de l'expérience.
Savoir qu'une expérience peut être conforme à son objet est aussi
transcendantal.
K175 note a – "Or il y a trois sources originaires [facultés] qui contiennent les
conditions de la possibilité de toute expérience [c'est-à-dire d'une perception avec
ce qu'elle donne ou qui en est abstrait] et ne peuvent elles-mêmes être dérivées
d'aucun pouvoir de l'esprit : sens, imagination et aperception."
Ces pouvoirs possèdent, outre leur usage empirique, un usage transcendantal,
qui concerne exclusivement la forme et est possible a priori.
Critique transcendantale :
K111 – [La] "critique transcendantale […] a pour projet, non d'élargir les
connaissances elles-mêmes, mais simplement de les rectifier. […] Elle doit fournir
la pierre de touche de la valeur ou de l'absence de valeur de toutes les
connaissances a priori […]. Une telle critique est par conséquent une préparation,
dans la mesure du possible, à un organon, et, si celui-ci devait échouer, du moins
à un canon de ces connaissances."
K540 – "Dans cet argument cosmologique, se [tient] dissimulée toute une nichée
de prétentions dialectiques que la critique transcendantale peut découvrir et
détruire."
2. Toute étude ou philosophie qui a pour objet les formes, principes, ou idées a
priori dans leur rapport nécessaire avec l'expérience est transcendantale :
Esthétique transcendantale et Logique transcendantale ;
Analytique transcendantale et Dialectique transcendantale ;
Déduction transcendantale, etc.
1036
Transcendantal, en ce sens, est synonyme de critique : la Logique
transcendantale est opposée à la logique commune ou générale en ce que celle-
ci n'envisage la forme logique que dans les rapports des connaissances entre
elles, tandis que la première recherche l'origine de nos connaissances relatives à
des objets.
En ce sens-là, l'opposé de transcendantal est général : La logique
transcendantale (critique) s'oppose à la logique générale.
Différences entre usages transcendantal et empirique
K147 - L'usage de l'espace à propos d'objets en général [c'est-à-dire qui existent
ou non, indépendamment de leur description et de leur signification] est lui aussi
transcendantal ; en revanche, s'il est limité exclusivement à des objets des sens,
il est empirique. La différence entre les usages transcendantal et empirique
appartient donc uniquement à la critique des connaissances, et elle ne concerne
pas la relation de celles-ci à leur objet.
K296 – "L'usage transcendantal d'un concept, dans un quelconque principe, est
celui qui consiste à le rapporter à des choses en général et [à des choses] en soi,
tandis que l'usage empirique intervient quand il se rapporte seulement à des
phénomènes, c'est-à-dire à des objets d'une expérience possible." Or seul l'usage
empirique est valable, l'usage transcendantal ne l'étant pas.
K331 – "Les principes de l'entendement pur […] doivent être simplement d'un
usage empirique, et non pas d'un usage transcendantal, c'est-à-dire tel qu'il
s'étende au-delà des limites de l'expérience."
1037
Psychologie transcendantale : fonctions d'acquisition de l'expérience
Les fonctions permettant l'acquisition de l'expérience, que ce soit par les sens
(externe et interne), l'imagination ou l'aperception, sont appelées fonctions de la
psychologie transcendantale.
Transformation
Voir Changement et transformation.
Transgression
Voir Juste ou injuste – Transgression.
Transmigration
Philosophie : Passage d'une âme d'un corps dans un autre.
Synonyme : métempsycose (métempsychose).
Transposition
Définition
Etant donné un jugement : {sujet S ; relation R ; prédicat P}, une transposition
intervertit le sujet et le prédicat, transformant le jugement en : {sujet P ; relation R ;
prédicat S}.
Exemples : Conversion logique ; Métathèse ; Règles générales de la conversion.
Trichotomie - Tripartition
Une trichotomie est une division en trois parties, comme la dichotomie est une
division en deux parties.
1038
Unification de représentations et de concepts
(Citation de [56b] §22 pages 91-92)
[Penser consiste à faire des synthèses]
"Penser, c'est unifier des représentations en une conscience.
[Lors d'une aperception le sujet prend conscience de ce à quoi il est en train de
penser : des représentations en mémoire de travail, avec leurs concepts
associés. Cette aperception est une fonction de son entendement lorsqu'il pense
un concept pur qui synthétise ces représentations, c'est-à-dire qui les unifie sous
une même catégorie.]
Cette unification en une conscience est ou bien analytique, par l'identité [du sujet], ou
bien synthétique par la composition ou l'addition de représentations distinctes les
unes avec les autres.
1039
connexion est nécessaire [parce que c'est l'aperception qui crée la prise de
conscience qu'est l'expérience].
[La prise de conscience des phénomènes est celle du concept pur de l'entendement]
Ainsi les concepts purs de l'entendement sont ceux sous lesquels toutes les
perceptions doivent au préalable être subsumées avant de pouvoir servir aux
jugements d'expérience, dans lesquels l'unité synthétique des perceptions est
représentée comme nécessaire et universellement valable."
(Fin de citation)
Uniforme
Adjectif – Qui est toujours le même, qui ne varie pas. Exemples :
Un mouvement rectiligne uniforme conserve la même vitesse (le même vecteur
vitesse) en direction, sens et grandeur.
K270 – "Tout changement n'est donc possible que par une action continue de la
causalité, laquelle, en tant qu'elle est uniforme, s'appelle un moment. Le
changement n'est pas constitué par ces moments, mais il est produit par eux
comme leur effet."
(Par définition une cause uniforme pendant un certain temps ne change ni de
nature ni d'intensité ; elle est donc continue pendant ce temps-là et son effet est
également uniforme).
La fonction unité analytique est une synthèse par la logique générale de l'imagination
de représentations du divers de l'intuition.
Unité de la conscience
K201 - "L'unité de la conscience est cela seul qui constitue [synthétise] la relation des
représentations à un objet, donc leur validité objective : c'est ainsi qu'elles
deviennent des connaissances et c'est donc sur elle que repose la possibilité même
de l'entendement. Voir Principe de l'unité synthétique du divers de toute intuition
possible.
K205 - "Un divers contenu dans mon intuition est représenté par la synthèse de
l'entendement comme appartenant à l'unité nécessaire [inévitable] de la conscience
de soi, et cela se produit grâce à la catégorie. (La représentation de l'unité de
1040
l'intuition d'un objet inclut toujours une synthèse de son divers et la relation du divers
à une unité de l'aperception)."
Unité de consécution
Voir Unité rationnelle a priori des connaissances de l'entendement.
Unité de justification
Voir Unité rationnelle a priori des connaissances de l'entendement.
Unité de l'expérience
Voir Unité de l'expérience.
1041
Les trois sortes de syllogismes à la base d'apparences transcendantales.
Unité systématique
Définition
K674 – "L'unité systématique [autrement dit rationnelle (K563)] est ce qui,
simplement, transforme une connaissance commune en science, c'est-à-dire ce qui,
d'un simple agrégat, fait un système."
K516 – "Il ne se peut trouver aucun phénomène par rapport auquel [les Idées] se
laissent représenter in concreto. Elles contiennent une certaine complétude à
laquelle ne parvient aucune connaissance empirique possible, et la raison ne
considère en elles qu'une unité systématique dont elle cherche à rapprocher l'unité
qui est empiriquement possible, sans jamais l'atteindre pleinement.
Voir :
Philosophie métaphysique de l'unité systématique des connaissances pures a
priori. (K681-K682)
Nécessité et contingence en tant que principes heuristiques et régulateurs ;
(K544-K545)
Idéal de l'être suprême : un principe régulateur de la raison ; (K545-K546)
1042
La raison a une fonction d'unité systématique des connaissances d'entendement
(Citation de K561)
[Fonction de la raison : unité systématique des connaissances]
"Si nous parcourons du regard nos connaissances d'entendement dans toute leur
étendue, nous trouvons que ce qui s'y trouve à la charge propre de la raison […]
c'est la dimension systématique de la connaissance, c'est-à-dire son articulation à
partir d'un principe.
[L'unité des concepts du système est régie par une Idée régulatrice de
l'entendement]
On ne peut pas dire à proprement parler que cette Idée soit un concept de l'objet,
mais bien plutôt celui de la complète unité de ces concepts, dans la mesure où une
telle unité sert de règle à l'entendement. De tels concepts de la raison ne sont pas
tirés de la nature, mais bien davantage interrogeons-nous la nature d'après ces
Idées et tenons-nous notre connaissance pour défectueuse aussi longtemps qu'elle
ne leur est pas adéquate."
(Fin de citation)
1043
(Citation de K562-K563, suite de Raison : usage apodictique ou usage hypothétique)
[L'usage hypothétique de la raison n'est pas probant]
"L'usage hypothétique de la raison, qui se fonde sur des Idées admises en tant que
concepts problématiques, n'est pas, à proprement parler, constitutif, ce qui veut dire
qu'il n'est pas tel qu'à juger en toute rigueur, en résulte la vérité de la règle générale
adoptée comme hypothèse ; car comment veut-on connaître toutes les
conséquences possibles qui, en découlant du même principe que l'on a admis,
prouvent son universalité ? En fait, cet usage n'intervient que de façon régulatrice,
pour introduire ainsi, aussi largement qu'il est possible, de l'unité dans les
connaissances particulières et par là rapprocher la règle de l'universalité.
Inversement, l'unité systématique (en tant que simple Idée) est purement et
simplement une unité projetée, que l'on doit considérer en soi, non pas comme
donnée, mais seulement comme constituant un problème : cette unité sert alors à
trouver un principe pour l'usage divers et particulier de l'entendement, et à guider
aussi par là cet usage vers les cas qui ne sont pas donnés et à le rendre cohérent."
(Fin de citation)
K565 – "Mais que dans la nature aussi se trouve une telle concorde, c'est ce que
présupposent les philosophes dans la règle d'école bien connue, selon laquelle il ne
faut pas multiplier les principes sans nécessité (entia praeter necessitatem non esse
multiplicanda). Ce que l'on dit par là, c'est que la nature des choses elles-mêmes
offre matière à l'unité de la raison, et que la diversité apparemment infinie ne doit
1044
nous retenir de présumer derrière elle une unité des propriétés fondamentales d'où la
diversité ne peut être dérivée que par l'intermédiaire d'une pluralité de
déterminations."
1045
diverses ramifications, dans la mesure où elles sont toutes ensemble issues d'un
même tronc."
(Fin de citation)
"En procédant ainsi, il n'y a rien, dans toute la sphère des concepts possibles, qui
reste vide, et […] en dehors de cette sphère rien ne se peut rencontrer, ce qu'on
énonce sous la forme "non datur vacuum formarum, c'est-à-dire qu'il n'y a pas divers
genres originaires et premiers qui soient pour ainsi dire isolés et séparés les uns des
autres (par un espace vide intermédiaire), et que tous les genres divers sont
seulement des divisions d'un genre unique, suprême et universel."
(La structure est une arborescence unique, ayant par définition un seul sommet.)
Conséquence : les transitions ne sont possibles que d'un père à un de ses fils ou
d'un fils à son père : « montées et descentes, pas de sauts »
K569-K570 – "datur continuum formarum [la continuité des formes est donnée], c'est-
à-dire que toutes les différences correspondant aux espèces se limitent
réciproquement et n'autorisent, pour passer de l'une à l'autre, aucun saut, mais
imposent que ce soit en traversant tous les degrés inférieurs de la différence que l'on
réussisse à aller de l'une à l'autre ; en un mot, il n'y a pas d'espèces et de sous-
espèces qui (dans le concept de la raison) soient les plus proches les unes des
autres, mais des espèces intermédiaires sont encore et toujours possibles dont la
différence avec les précédentes soit plus restreinte que ne l'était entre celles-ci leur
propre différence."
1046
que dans la mesure où nous prenons pour fondement des propriétés générales des
choses sous lesquelles se laissent ranger les propriétés particulières."
Voir aussi L'unité systématique des fins réunit la raison pratique et la raison
spéculative
1047
[et qui] peut recevoir, en tant qu'il constitue un système de la liberté,
le nom de monde intelligible, c'est-à-dire moral (regnum gratiae),
[cette unité des fins] conduit immanquablement aussi, pour toutes les choses
composant ce grand tout [du monde moral], à une unité finalisée d'après des lois
universelles de la nature,
[Kant affirme ici que le Créateur a eu une vision unifiée du monde qu'il créait,
comprenant à la fois le monde physique (dont les phénomènes sont régis par les
lois universelles de la nature définies par l'homme) et le monde intelligible régi
par les lois morales. C'est pourquoi une même raison unit les domaines
d'application pratique et spéculatif.]
tout comme la première unité s'établit d'après des lois morales universelles et
nécessaires : elle réunit ainsi la raison pratique à la raison spéculative.
Il faut se représenter le monde comme provenant d'une Idée, [la vision unifiée qu'en
a eu le Créateur] s'il doit s'accorder avec l'usage de la raison sans lequel nous nous
conduirions nous-mêmes d'une façon indigne de la raison, à savoir l'usage moral,
dans la mesure où ce dernier repose absolument sur l'Idée du souverain Bien.
[Les fondements de la nature sont des aprioris d'une théologie transcendantale dont
l'être originaire est unique]
Mais celle-ci, dans la mesure en tout cas où elle a pris son point de départ dans
l'ordre moral, comme unité qui se trouve fondée dans l'essence de la liberté et qui
n'est pas établie de façon contingente par des commandements extérieurs, rapporte
la finalité de la nature à des fondements qui ne peuvent qu'être inséparablement liés
a priori à la possibilité interne des choses, et ainsi à une théologie transcendantale
qui fait de l'idéal de la perfection ontologique suprême un principe d'unité
systématique qui relie toutes choses d'après des lois universelles et nécessaires de
la nature, puisqu'elles possèdent toutes leur origine dans l'absolue nécessité d'un
être originaire unique."
(Fin de citation)
1048
(Une détermination du sens interne est une représentation de ce que ressent le
sens interne après synthèse associative des représentations successives
perçues.)
K203 – "L'unité transcendantale de l'aperception est celle par laquelle tout le divers
donné dans une intuition est réuni en un concept de l'objet. C'est pourquoi elle
s'appelle objective et doit être distinguée de l'unité subjective de la conscience, qui
est une détermination du sens interne, par quoi ce divers de l'intuition est donné
empiriquement en vue d'une telle liaison."
(L'unité transcendantale de l'aperception est l'unité de la conscience résultant de
la synthèse de la représentation du divers de l'intuition en une représentation de
représentation interprétée comme un jugement à divers points de vue autour
d'un concept de l'objet ; voir Exemple de jugement et analyse par titres et
moments. C'est l'unité originaire du Je me pense en tant que sujet.)
Voir aussi :
Nécessité de l'aperception transcendantale ;
Jugements empirique, d'expérience ou de perception.
Univers
1049
Données actuelles
Naissance : notre Univers est né d'une explosion colossale, le Big Bang, il y a
13.8 milliards d'années (voir Big Bang).
Nous ne savons pas s'il a existé quelque chose (espace-temps ou matière-
énergie) avant ce Big Bang, nous n'avons à ce sujet que des conjectures. Nous
ne savons même pas si l'espace-temps n'est pas apparu en même temps que la
matière-énergie de l'Univers lors du Big Bang.
Structure : La Relativité générale d'Einstein nous apprend que l'Univers est un
continuum (espace continu) quadridimensionnel : 3 dimensions d'espace + 1
dimension de temps, le tout formant l'espace-temps. Le temps est une
dimension nécessaire de cet espace-temps, dont on ne peut concevoir un
espace réel sans temps ou un temps réel sans espace.
Dimension : l'Univers observable depuis la Terre est une sphère de la surface de
laquelle la lumière a mis 13.8 milliards d'années pour nous parvenir depuis le Big
Bang : son rayon est défini par un temps de parcours, pas par une distance.
Expansion : l'Univers est en expansion depuis le Big Bang : les galaxies
lointaines s'éloignent de nous d'autant plus vite qu'elles sont loin [105]. La
vitesse d'expansion de l'Univers a varié depuis le Big Bang, décroissant pendant
les 8 à 9 premiers milliards d'années, puis croissant depuis.
Du fait de cette vitesse d'expansion variable, les galaxies les plus lointaines
jamais créées depuis le Big Bang sont à une distance de 47 milliards d'années-
lumière, à la surface d'une sphère appelée Univers physique actuel. Cet Univers
contient environ 1011 galaxies, 1023 étoiles.
On appelle Volume de Hubble [137] l'intérieur de la sphère à la surface de
laquelle les galaxies s'éloignent de nous à la vitesse de la lumière. Les galaxies
situées au-delà émettent une lumière qui ne nous atteindra jamais, car elle se
propage moins vite que l'Univers ne se dilate.
La surface de l'Univers observable s'éloigne de nous environ 6 fois plus vite que
la vitesse de la lumière c = 299 792 458 m/s (un peu moins de 300 000 km/s).
Une telle vitesse ne contredit pas la Relativité Générale, car celle-ci ne limite à c
que les vitesses de ce qui est matière ou rayonnement, pas celle de l'expansion.
Compléments
[30] Inflation, Big Bang et Multivers - L'Univers selon nos connaissances début
2014 ;
Hubble Volume [137].
Universel - Universalité
Adjectif de quantité (au sens des catégories de l'entendement).
Qui s'étend à tout ou à tous ; qui se rapporte, s'applique à l'ensemble des
hommes, à la totalité des phénomènes. Exemple : savoir universel.
C'est une universalité concrète, comme la souhaite Hegel [51].
Qui est commun à tous les hommes, à toutes les sociétés humaines.
Exemples : croyance, déclaration universelle des droits de l'homme.
(Universalité concrète).
1050
Qui vaut pour tout, pour tous les éléments de la classe que constitue un concept.
Exemples : explication universelle ; valeur, vérité universelle. C'est une
universalité en extension, comme la veut Kant.
En philosophie : qui est exprimé par un terme si général qu'il peut être prédicat
de tous les jugements relatifs aux phénomènes. Exemple : les catégories de
l'entendement. (Universalité en extension).
Jugements d'universalité
Un jugement d'universalité exprime (d'un point de vue transcendantal) une nécessité
ou un apriori.
(Citation de K95)
[Quel que soit leur nombre, des expériences ne garantissent pas l'existence d'une loi]
"L'expérience ne donne jamais à ses jugements une universalité véritable ou
rigoureuse, mais seulement une universalité supposée et comparative (par
induction),
tant et si bien que ce qu'il faut entendre proprement par une telle universalité, c'est
que, si nombreuses qu'aient été jusqu'ici nos perceptions, il ne se trouve vis-à-vis de
telle ou telle règle aucune exception.
Nécessité et rigoureuse universalité sont donc des critères sûrs d'une connaissance
a priori et renvoient en outre, inséparablement, l'une à l'autre."
(Fin de citation)
[165] page 105 - L'universalité (la valeur universelle) d'un concept repose non pas
sur le fait que le concept est concept partiel d'une représentation d'objet, mais sur le
fait qu'il est un principe de connaissance.
Voir Compréhension et extension (contenu dans et contenu sous).
Univoque
Adjectif : qui n'est susceptible que d'une seule interprétation, même pour plusieurs
choses différentes.
1051
Ainsi, un objet dans l'Idée est un schème permettant de représenter plusieurs
objets avec une signification univoque.
Urbanité
Selon le dictionnaire [13] : politesse fine et délicate, manières dans lesquelles entrent
beaucoup d'affabilité naturelle et d'usage du monde.
Synonymes : civilité, courtoisie, politesse.
Usage empirique
La raison ne crée pas de concepts d'objets, elle les ordonne et les unifie
(Citation de K560)
"La raison ne se rapporte jamais directement à un objet, mais uniquement à
l'entendement et, par l'intermédiaire de celui-ci, à son propre usage empirique : elle
ne crée donc pas de concepts (pas de concepts d'objets), mais simplement elle les
ordonne et leur confère l'unité qu'ils peuvent avoir dans leur plus grande extension
possible, c'est-à-dire par rapport à la totalité des séries,
que pour sa part l'entendement n'a pas du tout en vue, puisqu'il vise seulement la
liaison à la faveur de laquelle des séries de conditions sont partout établies d'après
des concepts.
La raison n'a donc proprement pour objet que l'entendement et son fonctionnement
finalisé ;
Usage transcendantal
Voir d'abord Idées de la raison pure (usage régulateur des). Conséquence :
K559 - Bien que naturel et spontané, l'usage transcendantal de la raison pure peut
produire des concepts (qui sont des idées transcendantales), mais ceux-ci ne
peuvent pas appartenir à des connaissances.
Complément : Comparaison des usages des concepts purs de la raison et de
l'entendement
1052
Usage transcendantal spéculatif
K642 – "La raison spéculative dans son usage transcendantal est en soi dialectique."
Voir aussi ci-dessous Usage spéculatif.
Ces trois objets de la philosophie pure servent à savoir déterminer ce qu'il faut faire
K655 – "Tout l'appareillage que met en place la raison dans le travail qu'on peut
appeler philosophie pure n'est donc en fait dirigé que vers les trois problèmes
mentionnés. Mais ceux-ci répondent eux-mêmes, à leur tour, à un objectif plus
éloigné, à savoir déterminer ce qu'il faut faire si la volonté est libre, s'il existe un Dieu
et un monde futur. Or, dans la mesure où il s'agit ici de notre conduite relativement à
la fin suprême, l'intention ultime de la nature, dans le sage souci qu'elle a de notre
sort en disposant notre raison, n'est orientée que vers la dimension morale."
[La force de la foi téléologique de Kant apparaît dans « l'intention ultime de la
nature », son « sage souci de notre sort » et son « orientation morale ».]
Voir aussi : Limites des usages légitimes de la raison : les Idées transcendantales.
Usage pratique
K666 – "…la raison pratique a atteint ce point culminant, j'entends : le concept d'un
être originaire unique comme constituant le souverain Bien…"
Voir La liberté pratique existe, alors que la liberté transcendantale est impossible.
Usage moral
L'usage moral de la raison est un cas particulier d'usage pratique :
(Citation de K659-K660)
"La raison pure contient donc, non pas certes dans son usage spéculatif, mais
pourtant dans un certain usage pratique, à savoir l'usage moral, des principes de la
possibilité de l'expérience, c'est-à-dire d'actions qui, conformément aux prescriptions
morales, pourraient être trouvées dans l'histoire de l'être humain.
[Une unité morale est nécessaire à la possibilité d'actions conformes aux principes
moraux]
Car, étant donné qu'elle commande que de telles actions doivent se produire
[obligation morale], il est nécessaire aussi qu'elles puissent se produire, et il faut
donc que soit possible une sorte particulière d'unité systématique, à savoir l'unité
morale,
alors que l'unité systématique de la nature ne pouvait être prouvée d'après des
principes spéculatifs de la raison, parce que la raison possède certes une causalité
vis-à-vis de la liberté en général, mais non point à l'égard de la nature dans son
ensemble,
[car la causalité de la nature est un postulat, pas un principe de la raison]
1053
et que les principes moraux peuvent certes produire des actions libres, mais non pas
les lois de la nature.
En conséquence, les principes de la raison pure dans son usage pratique, c'est-à-
dire dans l'usage moral, ont une réalité objective."
[Complément : Monde moral.]
(Fin de citation)
L'usage transcendant de la raison est contraire aux lois de la nature : il ne peut donc
fournir aucune connaissance. On ne peut connaître ce qui est extérieur à l'Univers,
car la notion même d'extérieur à l'Univers n'a pas de sens.
Conséquence : un dieu créateur de l'Univers étant nécessairement extérieur,
donc transcendant, son existence réelle est contraire aux lois de la nature, son
concept n'appartient pas à une connaissance, il est pure imagination.
Donc croire à la fois en un tel dieu et que la nature est toujours régie par des lois
est contradictoire. Voir Existence de Dieu.
K350 – "L'usage objectif des concepts purs de la raison est toujours transcendant,
cependant que celui des concepts purs de l'entendement ne peut jamais, d'après sa
nature, être qu'immanent, étant donné qu'il se limite simplement à l'expérience
possible."
Voir aussi : Limites des usages légitimes de la raison : les Idées transcendantales.
1054
Usage apodictique ou usage hypothétique
Dans une inférence ou un syllogisme la raison déduit une proposition (cas particulier)
d'une prémisse qui est un cas général.
La proposition déduite (conclusion) est certaine si et seulement si sa prémisse
l'est ; l'usage de la raison est alors apodictique.
Si la prémisse est hypothétique, la conclusion l'est aussi.
Cela dit, ou bien un concept a priori (un concept non empirique) contient déjà en soi
une intuition pure, et dans ce cas il peut être construit ;
ou bien il ne contient rien que la synthèse d'intuitions possibles qui ne sont pas
données a priori, et alors on peut sans doute grâce à lui juger de manière
synthétique et a priori, mais seulement sur le mode discursif, d'après des concepts,
et jamais de façon intuitive, à travers la construction du concept.
Mais la matière des phénomènes, à travers quoi des choses nous sont données
dans l'espace et le temps, ne peut être représentée que dans la perception, par
conséquent a posteriori. Le seul concept qui représente a priori ce contenu
empirique des phénomènes, c'est le concept de la chose en général, et la
connaissance synthétique que nous en avons a priori ne peut rien fournir de plus a
priori que la simple règle de la synthèse de ce que la perception peut donner a
posteriori, mais jamais l'intuition de l'objet réel, puisque celle-ci doit être
nécessairement empirique."
[L'esprit a conscience de la présence de quelque chose dans le phénomène,
c'est-à-dire d'une existence, mais sans disposer des détails que seule donnera
l'intuition.]
1055
(Fin de citation)
Conclusion
(Citation de K609-K610)
"Il y a donc deux usages de la raison qui, bien qu'ayant en commun l'universalité de
la connaissance et l'engendrement de celle-ci a priori, sont pourtant très différents
dans leur processus,
et cela parce que dans le phénomène, en tant qu'il constitue ce à travers quoi tous
les objets nous sont donnés, il y a deux éléments :
la forme de l'intuition (espace et temps), qui peut être connue et déterminée
complètement a priori,
et la matière (la dimension physique) ou le contenu, désignant un quelque chose
qui se trouve dans l'espace et dans le temps, et qui par conséquent contient une
existence et correspond à la sensation.
[Voir Contenu d'un phénomène : forme et matière.]
Relativement au dernier élément [la matière], qui ne peut jamais être donné d'une
autre manière qu'empiriquement, nous ne pouvons avoir a priori rien d'autre que des
concepts indéterminés de la synthèse de sensations possibles, en tant qu'elles
appartiennent à l'unité de l'aperception (dans une expérience possible)."
(Fin de citation)
Usage mathématique
Voir mathématiques.
Usage spéculatif
Conclusions sur la connaissance et ses limites
(Citation de K594-K595)
"Ainsi toute connaissance humaine commence-t-elle donc par des intuitions, va de là
à des concepts et s'achève par des Idées.
Bien qu'elle dispose, par rapport à chacun de ces trois éléments, de sources de
connaissance a priori qui, au premier abord, semblent dédaigner les limites de toute
expérience, une critique complètement achevée nous persuade pourtant que toute
raison, dans son usage spéculatif, ne saurait jamais avec ces éléments dépasser le
champ de l'expérience possible,
1056
Voir aussi Métaphysique.
Usage polémique
Définition de l'usage polémique de la raison
(Citation de K620)
"Par usage polémique de la raison pure, j'entends […] la défense de ses énoncés
contre [les] négations dogmatiques.
[Il s'agit seulement de savoir s'il existe une preuve d'une affirmation opposée]
Il ne s'agit donc pas ici de savoir si ses affirmations ne pourraient pas aussi,
éventuellement, se trouver fausses, mais seulement du fait que personne ne peut
prétendre le contraire avec une certitude apodictique (ni même avec vraisemblance).
(Fin de citation)
Voir L'usage spéculatif de la raison pure ne recourt pas aux méthodes dogmatiques.
Compléments
La raison a une fonction d'unité systématique des connaissances
d'entendement ;
Raison – De l'usage logique de la raison ;
Raison – De l'usage pur de la raison ;
Comparaison des usages des concepts purs de la raison et de l'entendement ;
Censure de la raison ;
Critique de la raison pure.
1057
Valeur
C'est la qualité de ce qui est désiré ou estimé, ou au contraire rejeté, redouté.
Exemples de valeurs : vérité, justice, amour, beauté, etc.
Toute valeur est en même temps objet d'un désir et objet d'un jugement : le désir est
la cause, le jugement, l'arbitre ; si l'un de ces deux facteurs disparaît, il n'y a plus de
valeur. Dans l'esprit humain, chaque valeur est automatiquement associée à un ou
plusieurs affects sur lesquels le jugement peut se baser.
En plus des valeurs positives précédentes, il y a bien entendu des valeurs négatives
correspondant à ce qui est détesté, craint, etc. Les valeurs d'une personne qui
s'appliquent à une situation donnée sont ordonnées ; en cas de choix entre deux
valeurs, le jugement se base toujours sur la plus forte.
Une valeur « secondaire » peut être créée par une réflexion ou une interprétation de
situation, si elle ne s'oppose pas à une valeur plus forte.
Les valeurs d'une personne sont toujours accompagnées d'aprioris issus de son
génome, de sa culture ou de son expérience, et agissant dans son subconscient. En
France, par exemple, beaucoup de gens craignent les OGM et les retombées de la
science ou de la mondialisation.
Chez Kant
La validité objective d'une connaissance est sa vérité formelle.
K124 – "Les explications que nous donnons enseignent par conséquent la réalité
(c'est-à-dire la validité objective) de l'espace à l'égard de tout ce qui peut s'offrir
à nous extérieurement comme objet, mais en même temps l'idéalité de l'espace
à l'égard des choses, dès lors qu'elles sont appréciées par la raison en elles-
mêmes, c'est-à-dire sans que soit prise en compte la constitution de notre
sensibilité."
K235 – "Même l'espace et le temps, si purs que soient ces concepts de tout
élément empirique, et si forte que soit la certitude qu'ils sont représentés
pleinement a priori dans l'esprit, seraient pourtant dépourvus de toute validité
objective, comme de tout sens et de toute signification, si n'était démontré ce
que leur usage a de nécessaire pour les objets de l'expérience ;"
L'intuition d'un objet en crée une représentation fidèle, qui ne le déforme pas
(voir Ce ne sont pas ses sens qui trompent l'homme, c'est son jugement dans
Apparence dialectique) ; deux personnes distinctes formeront la même
représentation d'un même objet. La connaissance issue de cette représentation a
une validité objective.
1058
Différence entre validité objective et validité subjective
Une validité objective d'une connaissance ou d'une proposition :
Est absolue, c'est-à-dire formelle, indépendante des circonstances de sa
formation ;
Est appréciée de la même manière par tous les sujets, alors qu'une validité
subjective ne s'entend que pour l'un d'eux.
Variété
Selon le dictionnaire [13] : subdivision de l'espèce, groupe d'individus qui diffèrent
des autres individus de la population par un ou plusieurs caractères héréditaires.
Exemple : voir Loi transcendantale de la spécification.
1059
que moi ? Mais si, ne connaissant pas la vérité sur l'objet, je lis le texte pour
l'apprendre de son auteur, je n'ai aucun moyen de savoir s'il dit vrai ; je peux tout au
plus chercher dans le texte des contradictions avec des certitudes que j'ai par
ailleurs, ou des erreurs formelles, problème que j'aborde au paragraphe suivant.
J'arrête ici cette discussion, car elle sort du cadre de la Critique de la raison pure.
La logique pure n'a pas les moyens de découvrir, dans une proposition, une
éventuelle erreur sur le contenu, mais seulement une erreur formelle.
1060
Vérité positive, vérité négative
Les discussions précédentes montrent qu'on ne peut démontrer, pour une
proposition, ni la véracité sémantique, ni la véracité formelle, véracités qui définissent
une vérité positive.
Par contre, on peut parfois montrer sa fausseté sémantique (lorsqu'elle-même
ou une de ses conséquences contredit une vérité certaine), ou la fausseté formelle
(lorsqu'elle ne respecte pas une règle logique de l'entendement ou de la raison, ou
une règle de structure d'un jugement - voir formel) : on a alors établi, pour la
proposition, une vérité négative. Une telle vérité, qui ajoute de la connaissance à
l'énoncé auquel elle s'applique, a donc de la valeur en limitant le champ des énoncés
possibles.
Par contre, un phénomène qui apparaîtrait en dehors de toute action naturelle est
imaginaire : la nature régit tous les phénomènes, le déterminisme n'a pas
d'exception. Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des lois et des circonstances
inconnues.
Pour penser la vérité objective, Kant ajoute aux lois universelles de la nature des lois
universelles de la pensée rationnelle, celles de la logique transcendantale.
Vérité subjective
Du fait de ma sensibilité, un phénomène que je perçois est transformé par mon
entendement en connaissance. Celle-ci a une représentation qui me paraît vraie,
c'est ma vérité, une vérité subjective que d'autres ne partagent pas nécessairement.
Voir aussi :
Problème de la vérité d'une connaissance - Théorie de la connaissance ;
Canon de la raison pure – De l'opinion, du savoir et de la croyance ;
La vérité d'un jugement résulte d'un consensus sur l'absence de défauts ;
Erreurs et fausseté de jugements ;
Intérêt du débat d'idées dans la recherche de la vérité.
1061
Et par conséquent les critères formels universels de la vérité ne sont rien d'autre
que les caractères logiques universels de l'accord de la connaissance avec elle-
même, ou ce qui est la même chose - avec les lois universelles de l'entendement et
de la raison.
Ces critères formels universels ne sont assurément pas suffisants pour la vérité
objective, mais ils doivent cependant être considérés comme sa condition sine qua
non [la satisfaction de tous ces critères est une condition nécessaire d'existence].
Car avant de se demander si la connaissance s'accorde avec l'objet, il faut
d'abord se demander si la connaissance s'accorde avec elle-même (selon la forme).
Et telle est l'affaire de la logique.
1062
Conséquence importante :
Il suffit de tirer une seule conséquence fausse d'une connaissance pour
faire la preuve de sa fausseté.
1063
Principe d'identité ]
2. Le principe de raison suffisante (principium rationis sufficientis) sur lequel repose
la réalité (logique) d'une connaissance ; - le fait qu'elle soit fondée comme
matière pour des jugements assertoriques ; [voir Le principe de raison suffisante
(le déterminisme, fondement de toute expérience possible)]
3. Le principe du tiers exclu (principium exclusi medii inter duo contradictoria) sur
lequel se fonde la nécessité (logique) d'une connaissance ; - le fait qu'il soit
nécessaire que nous jugions ainsi et non autrement, c'est-à-dire que le contraire
soit faux — principe pour des jugements apodictiques.
[voir Principe du milieu exclu (ou principe du tiers exclu)]"
(Fin de citation)
Vide
Voir Continuité de tous les changements.
Vie
[107] page 159 – "La faculté de désirer est la faculté d'être, par ses représentations,
cause des objets de ces représentations. La faculté que possède un être d'agir
conformément à ses représentations s'appelle la vie."
Après avoir défini et critiqué la psychologie rationnelle, et conclu comme décrit dans
Fin de l'espoir de la psychologie rationnelle de dépasser les limites de l'expérience,
Kant revendique le droit et l'intérêt de spéculations philosophiques :
1064
loi elle-même lui apprend à estimer plus que tout la simple conscience de la rectitude
d'esprit, fût-ce en dépit de tous les avantages, jusques et y compris de cette pure
ombre qu'est la gloire, et qu'il se sent intérieurement appelé à se rendre par sa
conduite dans ce monde, en renonçant à bien des avantages, capable d'être le
citoyen d'un monde meilleur dont il a l'idée."
Les lois morales doivent être respectées dans cette vie sur Terre sans chercher
d'avantages ou fuir des inconvénients. Le devoir (valeur suprême qui définit la
rectitude d'esprit) dicte à l'homme de se comporter comme s'il vivait dans le
monde idéal qu'il imagine.
Voir aussi Les Idées sont les causes efficientes de la nature – Les croyances de
Kant.
Volonté - Vouloir
La volonté (ou vouloir) est la faculté d'un sujet :
De choisir ses fins, dont il se forme une représentation,
Ou de suivre une loi morale (Kant l'appelle pratique).
Cette faculté n'existe que chez les êtres doués de raison. Chez de tels êtres, les
désirs sont transformés en concepts que la raison évalue et guide.
(Chez Nietzsche [48], au contraire, tout être vivant est et doit être dominé par sa
volonté de puissance, indépendante et souvent opposée à la raison [78].)
La volonté des actions d'un être raisonnable résulte de sa prise en compte de lois
Un être raisonnable ne veut agir que conformément aux lois : il ne fait pas n'importe
quoi.
[132] page 250 – "Un être qui est capable d'actions d'après la représentation de lois
est une intelligence (un être raisonnable), et la causalité d'un tel être d'après cette
représentation des lois est sa volonté."
Lorsqu'un être n'agit que selon la raison, il ne veut que ce qui est objectivement bien
[108] page 86 – "Dans la mesure où, pour dériver les actions à partir de lois, la raison
est requise, la volonté n'est rien d'autre qu'une raison pratique. Quand la raison
détermine infailliblement la volonté, les actions d'un tel être qui sont reconnues
comme objectivement nécessaires sont aussi reconnues comme subjectivement
nécessaires, - en d'autres termes : la volonté est une faculté de choisir cela seul que
la raison, indépendamment de l'inclination, reconnaît comme pratiquement
nécessaire, c'est-à-dire comme bon."
Lorsque la volonté est plus faible que les désirs, les actions objectivement
nécessaires paraissent contingentes.
1065
Définitions d'un commandement et d'un impératif
[108] page 86 – "La représentation d'un principe objectif, en tant qu'il est contraignant
pour une volonté, se nomme un commandement (de la raison), et la formule
[l'énoncé] du commandement se nomme un impératif."
Le fondement de ce principe est […] : la nature raisonnable existe comme fin en soi.
[108] page 108 - "L'impératif pratique sera donc le suivant : agis de façon telle que tu
traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre,
toujours en même temps comme fin, jamais simplement comme moyen."
Voir Exemples.
Volonté du Créateur
Voir Idéal du souverain bien.
1066
Volonté suprême
Voir Jugement de Kant sur sa théologie morale : c'est la seule possible.
WYSIATI
Voir WYSIATI.
Zélote
Selon le dictionnaire [13] : Celui ou celle qui fait preuve d'un zèle excessif dans ses
activités ou ses idées.
Zététique
Selon le dictionnaire [13] (histoire de la philosophie) : l'adjectif zététique signifie qui
cherche, qui examine. La zététique est une méthode scientifique d'investigation des
phénomènes prétendus paranormaux.
L'« école des philosophes zététiques » est celle de Pyrrhon [153] et des sceptiques
grecs.
1067
Bibliographie et notes
Pour écrire ce texte j'ai consulté les ouvrages ci-dessous.
Pour les références à la Critique de la raison pure de Kant voir [24].
[1] Michael S. A. Graziano - Consciousness and the Social Brain - Oxford University
Press, 2013 (268 pages)
Compte-rendu de recherches récentes en matière de conscience, cet ouvrage
présente une théorie nouvelle sur sa nature et son fonctionnement, ainsi que sur le
fonctionnement de la « conscience de l'autre » et de la « conscience de soi ».
̘Directeur d'un laboratoire de psychologie à Princeton University
( http://www.princeton.edu/~graziano/ ), le professeur Graziano nous offre là un texte
de neuroscience cognitive extrêmement clair. Je recommande vivement cet ouvrage,
car dans ce texte-ci je n'ai fait que résumer en français sa théorie de la conscience.
[3] Emmanuel Kant - Anthropologie du point de vue pragmatique (1798, 350 pages)
Flammarion 1993 – Les références à cet ouvrage désignent une page sous la forme :
Annn [3]. Exemple : A061 [3] pour la page 61.
[5] Elisabeth Roudinesco - Sigmund Freud en son temps et dans le nôtre - Seuil,
2014 (577 pages).
1068
que telle, ne le cédait en rien au monde matériel. […] Il semble également qu'à peu
près tous les primitifs sont plus ou moins familiarisés avec l'existence d'esprits.
[Ainsi, les anciens Egyptiens personnifiaient les âmes des défunts. De nos jours,
certaines religions ont un culte des ancêtres. Et pour les chrétiens, l'âme est
immortelle.]
Conclusion
L'esprit humain a un mécanisme inconscient de personnification créant des
« esprits » que l'imagination et les croyances enrichissent. Les sujets de ces illusions
sont tellement persuadés de leur réalité qu'il leur faut une pression psychologique
importante et prolongée pour qu'ils puissent, parfois, s'en libérer.
[9] Michel Blay - Dictionnaire des concepts philosophiques - CNRS éditions, 2006
(880 pages)
[10] Psychologie - Commencez avec les meilleurs professeurs - Eyrolles, 2007 (279
pages)
1069
http://www.cnrtl.fr/definition/compréhension .
1070
Cet opuscule ne contient que 60 définitions de termes pour toute la philosophie de
Kant, définitions en général superficielles.
[22] Steven Pinker - How the Mind Works (Penguin books - 2015, 660 pages)
L'auteur est professeur de psychologie à Harvard et chercheur en psychologie
cognitive. Il a enseigné au MIT et à Stanford.
[27] Nagel, Newman, Hofstader - Gödel's Proof - Revised edition- NYU Press, 2008
[30] Daniel Martin - Inflation, Big Bang et Multivers - L'Univers selon nos
connaissances début 2014. http://www.danielmartin.eu/Physique/Inflation.pdf
1071
[32] Principe d'identité
Le principe logique d'identité s'énonce : « Ce qui est, est ; ce qui n'est pas, n'est
pas. » Une chose (objet, situation, événement) est (existe, a lieu ou a eu lieu) ou
n'est pas (n'existe pas, n'a pas lieu ou n'a pas eu lieu).
L'existence a pour conditions :
Une certaine permanence (existence pendant un temps non nul) à un instant
particulier ;
L'occupation d'un volume d'espace non nul à une position particulière.
Si la chose est, elle est identique à elle-même, pas à autre chose : c'est la seule
réalité (voir Proposition en tant qu'implication). On peut toujours imaginer un monde
différent, ou des conditions dans lesquelles un objet qui existe n'existerait pas, mais
ce serait pure imagination.
Aucun phénomène naturel passé ou futur ne peut avoir été ou être contingent.
La contingence n'est possible que pour un phénomène échappant aux lois naturelles
La contingence est donc réservée aux objets ne relevant pas d'une loi de
conséquences prévisibles. C'est le cas par exemple de la pensée humaine, dans la
mesure où celle-ci met en œuvre des processus inconscients ou subconscients ; le
fonctionnement physique des neurones a beau être soumis à la causalité prédictible
des lois de la nature, le fonctionnement des pensées est trop complexe et
inconscient pour que nous puissions imaginer des lois scientifiques qui le décrivent.
1072
esprit. Qu'est-ce donc qui pourra être estimé véritable ? Peut-être rien autre
chose, sinon qu'il n'y a rien au monde de certain. »
« …après y avoir bien pensé, et avoir soigneusement examiné toutes choses,
enfin il faut conclure, et tenir pour constant que cette proposition : Je suis,
j'existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce, ou que je la
conçois en mon esprit. »
« …je trouve ici que la pensée est un attribut qui m'appartient : elle seule ne
peut être détachée de moi. Je suis, j'existe : cela est certain ; »
[35] Daniel Kahneman - Prix Nobel d'économie 2011 - Thinking, Fast and Slow
Penguin Press, 10 mai 2012
[38] Emmanuel Kant (1724-1804) – Philosophe allemand célèbre pour ses travaux
sur la connaissance, la raison, la morale et les Lumières :
La Critique de la raison pure a été publiée en deux versions, en 1781 et 1787.
Qu’est-ce que les Lumières ? [25] a été publiée en 1784.
1073
[41] Sigmund Freud (1856-1939) – Médecin neurologue autrichien, fondateur de la
psychanalyse.
[45] Johannes Kepler (1571-1630) – Astronome allemand, auteur des trois lois de
mouvement des planètes qui portent son nom, publiées en 1609 et 1618 :
1ère loi : une planète décrit une ellipse dont le soleil est un foyer ; (1609)
2ème les aires parcourues par le rayon vecteur reliant la planète au soleil sont
proportionnelles aux temps mis pour les parcourir ; (1609)
3ème loi : les carrés des durées de révolution (« durées de l'année planétaire »)
sont proportionnelles aux cubes des grands axes des ellipses. (1618)
1074
Qu'il existe, pour la situation présente, une chaîne de causalité unique
commençant infiniment loin dans le passé et se poursuivant infiniment loin dans
l'avenir.
[54] Euclide (né vers 300 avant J.-C.) à Alexandrie (Egypte) – Le plus grand
mathématicien de l'Antiquité, auteur d'un traité axiomatique de géométrie, Eléments.
[55] Principe du milieu exclu, aussi appelé principe du tiers exclu (exclusi tertii) :
Il n'y a que deux cas de valeur logique. Une proposition p ne peut être que :
Vraie, et alors la proposition contraire non-p (¬p) est fausse ;
Ou fausse, et alors la proposition contraire non-p (¬p) est vraie.
En Logique symbolique : p ¬p = vrai.
Il n'y a pas de troisième cas. C'est sur ce principe que reposent les démonstrations
par l'absurde.
Application : Principe de la déterminabilité d'un concept.
1075
Prolégomènes à toute métaphysique future qui pourra se présenter comme
science.
[62] Critique de la raison pure / par Emmanuel Kant ; nouvelle traduction française,
avec notes, par A. Tremesaygues et B. Pacaud (1905), téléchargeable gratis de la
Bibliothèque nationale de France (BnF) - http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5443790t
1076
Cette équation décrit l'évolution dans le temps du vecteur d'état (ket |(t)> en
notation de Dirac [151]) d'un objet quantique en fonction de l'observable H(t),
opérateur hamiltonien associé à l'énergie totale du système
𝑑
𝑖ä |(t)> = H(t)|(t)>
𝑑𝑡
Equation de Schrödinger (notation de Dirac)
Une série est une suite de sommes des termes d'une suite. Ainsi, la série
Sn=x1+x2+x3+…+xn construite à partir de la suite xn précédente a pour termes : S1=2,
S2=(2+4=6), S3=(6+6=12)…
[66] Sophocle (495-406 avant J.-C.) - auteur grec de tragédies, dont Œdipe Roi (vers
430 avant J.-C.)
[71] René Descartes Les Passions de l'âme (1649) - Première partie – Des passions
en général, Article XXX. - http://dacjosvale.free.fr/biblio/30g.htm
1077
nd+plus+sur+les+myst%C3%A8res+de+l%27%C3%A2me&hl=fr&sa=X&redir_esc=y
#v=onepage&q=aimer%20en%20apprend%20plus%20sur%20les%20myst%C3%A8
res%20de%20l%27%C3%A2me&f=false
[74] Pythagore (né vers 580 avant J.-C., mort vers 500 avant J.-C.) – mathématicien.
Voir Pythagore et son école.
Questions
Kant Nietzsche
fondamentales
Je voudrais comprendre le monde,
en situant les faits les uns par
Je ne comprends pas le
rapport aux autres (les choses
monde, il n'a pas de sens.
Que puis-je sont-elles comme elles devraient
savoir ? être, y a-t-il une harmonie ?) La science n'existe pas,
chercher la connaissance
Qu'est-ce qui explique l'existence
est une erreur.
de l'Homme, de l'Univers et des
difficultés que j'y subis ?
Qu'est-ce qui est bien, qu'est-ce Les valeurs traditionnelles
qui est mal ? Où est mon devoir ? n'ont plus cours : Dieu est
Que dois-je Si je suis croyant, la religion me le mort.
faire ? dit.
Si je suis athée, je peux faire ce Je dois vivre selon ma
que je veux et gagner ou perdre. volonté de puissance.
1078
La notion de sens de la vie est chargée d'émotion. Y interviennent :
La qualité de la réponse au « Que puis-je savoir ? » : je voudrais comprendre le
monde et ses lois physiques et morales, en situant les choses les unes par
rapport aux autres.
Le problème du devoir (« Que dois-je faire »), compte tenu de ma religion ou de
mon athéisme.
Le problème des espoirs pour l'avenir : que puis-je espérer qui justifie mes
efforts, et même de rester en vie ?
Le monde est un chaos, sans structure définie reliant les objets. Les évolutions
résultent d'un contexte par nécessité (causalité), mais sont imprévisibles car régies
par le hasard. On ne peut donc se permettre d'énoncer des lois représentant la
réalité physique ou son évolution, et il faut aborder chaque situation avec un œil neuf
car c'est un cas particulier.
(Cette représentation du monde avec ses évolutions au hasard est contredite par
la physique et son déterminisme ; Nietzsche l'affirme sans preuve.)
Il n'y a pas de morale ; tu n'as de devoir qu'envers toi-même, tu peux choisir ton
attitude envers les autres. Tu peux ignorer les gens d'une classe ("race") inférieure à
la tienne, mais il est d'usage de respecter les gens de ta classe.
Il n'y a pas de Dieu et pas de justice ; donc il ne faut craindre aucun châtiment (« pas
vu, pas pris ») et il ne faut espérer aucune récompense. L'altruisme, la pitié, la
générosité, la compassion et la solidarité sont à proscrire en tant que marques de
faiblesse.
1079
souffrance ; si tu aimes ce monde et ton destin parce qu'ils sont régis par la vie-
volonté de puissance qui permet la satisfaction des désirs ; enfin, si tu t'es donné
pour mission d'essayer de convaincre les autres de se comporter comme toi, alors tu
seras heureux mon fils ! Tu pourras jouir de la vie sans retenue, en artiste, et être
créatif !
Conclusion de Nietzsche :
En général, rien ne justifie un effort, ta vie n'a pas de sens, tu ne peux être que
nihiliste !
Et selon ton énergie, tu seras un nihiliste héroïque ou un nihiliste réactif… si tu restes
en vie.
[79] Démocrite (~460 avant J.-C. ~370 avant J.-C.), philosophe Grec qui a proposé
que le monde est fait d'atomes.
[80] Epicure (341 avant J.-C.-270 avant J.-C.), philosophe Grec qui a proposé que le
monde est fait d'atomes. Voir épicurisme.
1080
Ce débat est né en effet dès les débuts de la mécanique quantique. Il est dû au
caractère probabiliste des prédictions de la mécanique quantique et au principe
d'indétermination de Heisenberg [120] lié à la dualité onde-corpuscule. Certains
physiciens se sont difficilement résolus à accepter une théorie qui ne permettait plus
les prédictions rigoureuses auxquelles les équations de la mécanique classique les
avaient habitués ; et ils ont établi une distinction entre la réalité précise du système
physique et les informations partiellement indéterminées que nous avons sur lui.
Albert Einstein [85] lui-même jugeait la mécanique quantique incomplète ainsi qu'il
l'exprimait en 1935 dans l'énoncé du paradoxe E.P.R. (Einstein, Podolsky et Rosen)
qui est resté au centre de ce débat. D'autres, comme Louis de Broglie, allant plus
loin, ont essayé de compléter la mécanique quantique en introduisant des variables
cachées, inaccessibles à la mesure, mais qui sont censées cependant caractériser
l'état réel du système physique. Jusqu'en 1964 toutes les prédictions expérimentales
faites à partir des théories à variables cachées étaient identiques aux prédictions
faites à partir de la mécanique quantique de Copenhague ; et rien ne permettait donc
de trancher définitivement entre les deux types de théories. Disons seulement que la
très grande majorité des physiciens estimait plus sage d'éviter la complication inutile
des variables cachées. C'est cette situation que l'inégalité de Bell est venue modifier
radicalement.
[85] Albert Einstein (1879-1955), physicien né en Allemagne, prix Nobel 1921 pour
l'explication de l'effet photoélectrique, découvreur de la Relativité restreinte (1905) et
de la Relativité générale (1915).
[90] Karl Popper (1902-1994), philosophe qui rejetait l'induction en tant que méthode
scientifique valable pour trouver la vérité empirique. Il a proposé d'accepter comme
vérité provisoire tout texte dont aucun spécialiste ne peut prouver le caractère
erroné, par déduction théorique ou contre-exemple expérimental.
Cette approche est aujourd'hui universellement acceptée par les scientifiques.
Voir chapitre Le Rationalisme critique de Karl Popper dans [12].
[91] Sadi Carnot (1796-1832), ingénieur qui a décrit le cycle thermodynamique des
machines à vapeur et énoncé le "Principe de Carnot", devenu depuis "Deuxième
principe de la thermodynamique" [119]. Sa théorie a été reprise et précisée
ultérieurement par Rudolf Clausius [155] et William Thomson (Lord Kelvin) [156].
1081
[93] Emmanuel KANT – Œuvres philosophiques – Tome 1 (1747-1781), Gallimard
(La Pléiade), 1980 - D.1770 – De la forme et des principes du monde sensible et du
monde intelligible (1770)
[96] Héraclite (540 avant J.-C. – 480 avant J.-C.) – Philosophe grec, auteur de la
phrase : « On ne se baigne jamais deux fois dans la même eau du même fleuve ».
Il entendait par là que le monde change sans cesse et que la vie se poursuit
(persiste) et conserve son unité malgré les changements. Platon en a déduit que tout
change, indépendamment de ce que l'homme perçoit.
[97] Sir Isaac Newton fut un des plus grands savants de tous les temps. Son principal
ouvrage, Principia (exactement : "Philosophiæ Naturalis Principia Mathematica",
"Principes mathématiques de la philosophie naturelle"), publié en 1687, est à la base
de la physique classique (théories de l'espace et du temps, forces, lois
fondamentales du mouvement, gravitation, optique…) et une contribution essentielle
aux mathématiques (calcul infinitésimal, géométrie analytique).
[98] Kant – La Monadologie : avec notice sur la vie, les écrits et la philosophie de
Leibnitz / par M. E. Segond,...
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54944039/f4.item.r=imp%C3%A9n%C3%A9trabili
t%C3%A9
[100] Tycho Brahe (1546-1601), astronome danois, le premier homme qui ait
jamais fait des mesures précises de position d'astres (angles azimut et hauteur,
heure). Ses observations de l'orbite de Mars ont été utilisées par Kepler, son élève et
assistant, pour établir ses trois célèbres lois de mouvement des planètes [45].
1082
Au Ve siècle avant J.-C. le philosophe grec Zénon [154] "démontrait" que le
mouvement n'existe pas objectivement en disant ceci :
« Le rapide Achille ne peut rattraper une tortue partie avant lui parce que, tandis
qu'il parcourt la distance qui le sépare de la tortue, celle-ci avance et franchit un
nouvel intervalle qu'Achille doit franchir à son tour, etc. Le nombre d'étapes de
rattrapage d'Achille est donc infini, et il ne peut rattraper la tortue. »
[106] Daniel Martin – Economie : rationalité des décisions et validité des théories
traditionnelles - http://www.danielmartin.eu/Economie/RatDecEco.pdf .
1083
(Citation)
"De la vraie nature du matérialisme et de la séduction légitime qu'il exerce
[…] on doit entendre par matérialisme la position qui consiste à postuler que la
vie de l'esprit est tout à la fois produite et déterminée par la matière, en quelque
acception qu'on la prenne. En clair : les idées philosophiques ou religieuses,
mais aussi les valeurs morales, juridiques et politiques, ainsi que les grands
symboles esthétiques et culturels n'ont ni vérité ni signification absolues, mais
sont au contraire relatifs à certains états de fait matériels qui les conditionnent de
part en part, fût-ce de façon complexe et multiforme. Par rapport à la matière,
donc, il n'est pas d'autonomie véritable, absolue, du monde de l'esprit ou, si l'on
veut, pas de transcendance réelle, mais seulement une illusion d'autonomie.
Constance du discours matérialiste : la critique de la religion, bien sûr, mais
aussi de toute philosophie qui postule une transcendance réelle de la vérité des
idées ou des valeurs morales et culturelles.
En ce sens précis, les grandes « philosophies du soupçon » qui ont tant marqué
les années soixante, celles de Marx [52], Nietzsche [48] et Freud [41], sont des
illustrations du matérialisme contemporain : on y réduit les idées et les valeurs
en les rapportant à ce qui les engendre « en dernière instance » : l'infrastructure
économique, la Vie des instincts et des pulsions, la libido et l'inconscient. Même
s'il prend en compte la complexité des facteurs qui entrent en jeu dans la
production des idées et des valeurs, le matérialisme doit donc assumer ses deux
traits caractéristiques fondamentaux : le réductionnisme et le déterminisme.
- Tout matérialisme est, en effet, à un moment ou à un autre, un
« réductionnisme » […] : « Si l'on entend par réductionnisme la soumission du
spécifique au général et la négation de toute autonomie absolue des
phénomènes humains, le matérialisme ne saurait, sans cesser d'être
matérialiste, s'en passer » […]
- Tout matérialisme est aussi un déterminisme en ce sens qu'il prétend montrer
comment les idées et les valeurs dont nous croyons pouvoir disposer librement,
comme si nous pouvions sinon les créer, du moins les choisir, s'imposent en
vérité à nous selon des mécanismes inconscients que le travail de l'intellectuel
consiste justement à mettre au jour.
De là, me semble-t-il, la réelle séduction qu'il exerce.
- D'une part, son travail se développe, presque par définition, dans l'ordre du
soupçon, de la démystification : le matérialiste prétend par nature « en savoir
plus » que le vulgaire, puisqu'il se livre à une véritable généalogie de ce qui
apparaît dès lors comme nos naïvetés. La psychanalyse, par exemple,
appartient au registre de la psychologie « des profondeurs », elle est censée
décrypter au plus profond, là où le commun des mortels n'ose guère s'aventurer ;
elle va au-delà des apparences, des symptômes, et se prête ainsi volontiers à
une lecture matérialiste. Même chose, bien sûr, chez Nietzsche ou chez Marx.
- D'autre part, le matérialisme offre, plus que toute autre option philosophique, la
particularité non seulement de ne pas prendre les idées pour argent comptant,
mais de « partir des faits », de s'intéresser enfin, si je puis dire, aux « vraies
réalités », c'est-à-dire à celles qui sont réellement déterminantes : Freud nous
parle de sexe, Nietzsche des instincts, Marx de l'histoire économique et sociale.
Bref, ils nous parlent de ce qui importe vraiment et que l'on cache si volontiers, là
1084
où la philosophie idéaliste se tourne vers les abstractions. Or le plus souvent,
c'est vrai, le réel est plus intéressant que les brumes philosophiques."
(Fin de citation)
[112] Ilya PRIGOGINE (1907-2003), prix Nobel de chimie 1977, livre La fin des
certitudes publié chez Odile Jacob en 1996.
Le cardinal Schönborn a été contredit par le pape Benoît XVI, qui a dit en juillet 2007
accepter l'évolution, tout en confirmant que l'Eglise catholique attribue la création de
l'Univers à Dieu :
Extrait de la réponse de Benoît XVI à une question posée le 24/07/2007 :
"Je vois actuellement en Allemagne, mais aussi aux Etats-Unis, un débat assez
vif entre ce qu'on appelle le créationnisme et l'évolutionnisme, présentés comme
s'ils étaient des alternatives qui s'excluent : celui qui croit dans le Créateur ne
pourrait pas penser à l'évolution et celui qui en revanche affirme l'évolution
devrait exclure Dieu. Cette opposition est une absurdité parce que, d'un côté, il
existe de nombreuses preuves scientifiques en faveur d'une évolution qui
1085
apparaît comme une réalité que nous devons voir et qui enrichit notre
connaissance de la vie et de l'être comme tel. Mais la doctrine de l'évolution ne
répond pas à toutes les questions et surtout, elle ne répond pas à la grande
question philosophique : d'où vient toute chose ? et comment le tout s'engage-t-il
sur un chemin qui arrive finalement à l'homme ? Il me semble très important et
c'est également cela que je voulais dire à Ratisbonne dans ma Conférence, que
la raison s'ouvre davantage, qu'elle considère bien sûr ces éléments, mais
qu'elle voit également qu'ils ne sont pas suffisants pour expliquer toute la réalité.
Cela n'est pas suffisant, notre raison est plus ample et on peut voir également
que notre raison n'est pas en fin de compte quelque chose d'irrationnel, un
produit de l'irrationalité, mais que la raison précède toute chose, la raison
créatrice, et que nous sommes réellement le reflet de la raison créatrice. Nous
sommes pensés et voulus et, donc, il existe une idée qui me précède, un sens
qui me précède et que je dois découvrir, suivre et qui donne en fin de compte un
sens à ma vie."
La position du pape, qui admet l'évolution darwinienne, contredit sur ce point celle du
cardinal Schönborn.
[114] Jean TIROLE, prix Nobel d'économie 2014 – Economie du bien commun
(mai 2016) - Editions PUF
Nous croyons souvent ce que nous voulons croire, pas ce que l'évidence nous conduirait
à croire. Comme l'ont souligné des penseurs aussi divers que Platon, Adam Smith ou le
grand psychologue américain du XIXe siècle William James, la formation et la révision de
nos croyances servent aussi à conforter l'image que nous voulons avoir de nous-même ou
du monde qui nous entoure. Et ces croyances, agrégées au niveau d'un pays, déterminent
les politiques économiques, sociales, scientifiques ou géopolitiques.
Non seulement nous subissons des biais cognitifs, mais qui plus est, il arrive assez
fréquemment que nous les recherchions. Nous interprétons les faits au prisme de nos
croyances, nous lisons les journaux et recherchons la compagnie de personnes qui nous
confortent dans nos croyances, et donc nous nous entêtons dans ces croyances, justes ou
erronées. Confrontant des individus à des preuves scientifiques du facteur anthropique
(c'est-à-dire lié à l'influence de l'homme) dans le réchauffement climatique, Dan Kahan,
professeur de droit à l'université de Yale, observa que les Américains qui votent démocrate
ressortent encore plus convaincus de la nécessité d'agir contre le réchauffement climatique,
tandis que, confrontés aux mêmes données, de nombreux républicains se voyaient confortés
dans leur posture climatosceptique1. Plus étonnant encore, ce n'est pas une question
d'instruction ou d'intelligence : statistiquement, le refus de faire face à l'évidence est au
moins aussi ancré chez les républicains disposant d'une éducation supérieure que chez les
républicains moins instruits ! Personne n'est donc à l'abri de ce phénomène.
1086
Dans son article « Ideology, Motivated Reasoning, and Cognitive Reflection », Judgment and
Decision Making, 2013, n° 8, p. 407-424. Plus précisément, Kahan montre que les capacités de
calcul et d'analyse réflexive n'augmentent pas la qualité de la révision des croyances sur le
facteur anthropique. Rappelons qu'en 2010 seulement 38 % des républicains acceptaient l'idée
d'un réchauffement climatique depuis l'ère préindustrielle et seulement 18 % y voyaient un facteur
anthropique (c'est-à-dire une cause humaine).
(Fin de citation)
F = Ma = dp/dt
F12 = -F21
MM '
F G
d2
1087
celui de masse M' avec une force représentée par le vecteur F, le point de masse M'
attire celui de masse M avec une force -F, conformément à la 3e loi.
𝐺
𝑙𝑝 = √ = 1.6 .10-35 m
𝑐3
Au début de l'Univers, après le Big Bang, il y a aussi eu une très courte durée
pendant laquelle la densité d'énergie permettait à toutes les particules de fusionner
en s'approchant à une distance inférieure à lP. Pendant cette durée, les quatre forces
fondamentales (force forte, force faible, force électromagnétique et gravitation) n'en
faisaient qu'une et nos lois physiques actuelles ne s'appliquaient pas. Cette durée est
le « temps de Planck » tP mis par la lumière pour parcourir la distance de Planck lP. Il
vaut lP/c :
1088
ℏ𝐺 ℎ
𝑡𝑝 = √ = 0.5391 .10-43 s où ℏ =
𝑐5 2
𝑐5
𝐷𝑝 = = 5.1 .1096 kg/m3
ℏG²
ℏc
mp = √ = 2.177 .10-8 kg
G
En 1918, Emmy Noether [157] a démontré que l'invariance d'une théorie physique
par rapport à une transformation continue se traduit toujours par l'existence d'une loi
de conservation d'une quantité. Voici des exemples d'invariance.
1089
uniforme l'un par rapport à l'autre. Elle implique notamment le « principe
d'additivité des vitesses » ;
L'invariance relativiste traduit le fait que la vitesse de la lumière
c = 2.99792458 108 m/s est constante dans toutes les directions de l'espace,
c'est une constante de l'Univers ;
La symétrie relativiste contracte ou dilate l'espace et le temps selon les vitesses
relatives de deux observateurs.
1090
dans les équations t en -t
Charge électrique
Inconnue
d'un système isolé
Charge baryonique
Inconnue
d'un système isolé
Charge leptonique
Inconnue
d'un système isolé
Etrangeté (propriété de
Inconnue
certaines particules)
Origine physique des lois de conservation
[119] Thermodynamique
1091
transfert de chaleur. Lorsque l'échange de chaleur du système se fait de manière
réversible, on définit la variation d'entropie ΔS du système par la somme des
rapports :
ΔS Q1/T1 + Q2/T2 + …
Entropie
Cette inégalité, due au physicien Clausius [155], fournit d'autres formulations du
2ème principe de la thermodynamique ; exemples :
- l'entropie d'un système isolé qui subit des transformations est toujours
croissante ;
- l'énergie disponible pour une conversion en travail utile dans un système fermé
comme dans l'Univers entier s'épuise peu à peu.
L'entropie ne peut être constante que pour un système en état d'équilibre
thermodynamique, à partir duquel toute petite transformation est réversible.
La croissance de l'entropie d'un système mesure sa désorganisation
L'entropie d'un système est une mesure de son état d'organisation :
- plus l'entropie est faible, plus le système est organisé, structuré ;
- plus elle est forte, moins il est organisé.
Exemple : quand de l'eau liquide gèle, elle s'organise en cristaux de glace et son
entropie diminue ; quand elle s'évapore, ses molécules sont moins liées par une
force de viscosité s'opposant à toute déformation, elle se désorganise et son
entropie augmente.
La désorganisation d'un système s'interprète aussi comme un manque
d'information descriptive. Le 2ème principe affirme qu'un système isolé tend
toujours vers la désorganisation (et l'entropie) maximum. Il y a là une
irréversibilité, obligeant le temps à avoir un sens d'écoulement, une « flèche »,
du présent vers l'avenir.
3ème principe : aucun système ne peut être porté à une température égale au
zéro absolu en degrés Kelvin (environ -273.15 degrés C), température à laquelle
son entropie serait nulle. Ce principe permet de définir une échelle absolue de
l'entropie, c'est-à-dire de la désorganisation d'un système.
h
2
1092
h est une constante universelle appelée "constante de Planck" ou "quantum d'action"
valant h = 6.6261 .10-34 joule.seconde ; donc ä = 1.05 .10-34 joule.seconde et
½ä = 0.527 .10-34 joule.seconde.
Δx . Δp ½ä (a)
Lorsque la particule mesurée n'a pas de masse, comme c'est le cas pour un photon,
il n'y a pas d'incertitude sur sa vitesse - toujours égale à la vitesse de la lumière dans
le vide c = 2.99792458 108 m/s - mais il y a incertitude sur sa position du fait de sa
longueur d'onde.
ΔE . Δt ½ä (b)
L'inégalité (b) peut être interprétée comme une instabilité de l'énergie, une non-
reproductibilité d'expériences mesurant une énergie répétées trop peu de temps l'une
après l'autre : si on fait l'expérience "2" longtemps après l'expérience "1", Δt est
grand et ΔE peut être très petit, la reproductibilité peut être excellente ; mais plus tôt
on réalise l'expérience "2" après l'expérience "1", plus ΔE pourra être grand, ce qui
dégradera la reproductibilité. Le manque de reproductibilité est dû à une instabilité
naturelle, des fluctuations traduisant un refus de précision et de stabilité de la nature.
L'inégalité (b) peut aussi être interprétée comme l'impossibilité de mesurer avec
précision l'énergie d'un phénomène extrêmement bref, ou l'impossibilité de dater
avec précision l'échange d'une très faible quantité d'énergie. Exemple : lorsqu'un
atome perd une énergie ΔE par l'émission d'un photon, la durée de cette transition et
de l'émission du photon ne peut être déterminée avec une imprécision meilleure que
ä/2ΔE.
Cette imprécision est un phénomène naturel incontournable, qui nous oblige donc à
revoir notre conception du déterminisme : une évolution ne peut toujours être prévue
avec une précision infinie.
1093
Exemple : l'énergie potentielle en un point quelconque de l'espace (d'un atome, d'une
galaxie…) peut fluctuer autour d'une valeur moyenne par « emprunts de courte
durée » d'énergie potentielle à l'espace environnant…
Problématique
Kant croit que l'homme a le pouvoir de déterminer librement ses actes, c'est-à-dire
d'imposer à son corps d'agir selon des lois morales : voir Déterminisme et
prédéterminisme de Kant. Voici le point de vue moderne qui, contrairement à celui de
Kant, n'a pas besoin d'invoquer Dieu pour expliquer l'inexistence d'un libre arbitre.
Toute pensée a pour cause une émotion, se poursuit et s'achève avec de l'émotion
La pensée de l'homme n'est qu'un outil au service de ses pulsions et désirs du
moment : chaque fois qu'il réfléchit, l'homme cherche une solution pour satisfaire un
désir ; il n'existe pas de réflexion sans but affectif, et un tel but est caractérisé par
une valeur qui domine toutes les autres pour cette réflexion. C'est là un principe de
causalité de la réflexion humaine, une partie du déterminisme humain. La
psychologie enseigne que la rationalité, la logique et la cohérence ne sont pas des
valeurs [12].
1094
Un futur imaginé ; ce dernier représente le sens de la vie [78] ou de l'action
(pourquoi me donner du mal, quel espoir ai-je, que peut-il m'arriver…).
Ainsi, un homme jugera une même tâche insupportable, désagréable ou très
supportable selon l'avenir qu'il imagine s'il l'accomplit :
Insupportable s'il est obligé de l'accomplir pendant très longtemps sans
profit personnel identifiable, comme un condamné aux travaux forcés ;
Désagréable si en l'accomplissant il gagne de quoi vivre, ce qui justifie
de supporter le désagrément ;
Très supportable si en l'accomplissant il participe à une œuvre
admirable qui lui vaudra le respect de son entourage.
L'interprétation du contexte et de l'acquis par le subconscient, qui produit
des jugements de valeur non exprimés par des mots, mais influents.
L'inné ne change que très peu pendant la vie d'un individu, car l'adaptation de son
génome et des mécanismes par lesquels il s'exprime à ses conditions de vie est
modeste et lente. L'acquis s'enrichit chaque fois que nous apprenons quelque chose
et s'appauvrit à chaque oubli ou déformation des informations mémorisées. Les
circonstances changent évidemment tout le temps.
Conclusion
L'homme agit exclusivement en réponse au désir dominant du moment, qui résulte
de la valeur qui domine son ressenti ; en ce sens-là, il n'a pas de liberté. Si un
prisonnier militaire préfère subir la torture au lieu de révéler un secret, c'est que son
patriotisme domine sa douleur.
L'imprévisibilité de l'homme
Les mécanismes génétiques et psychiques peuvent créer des comportements
humains imprévisibles du fait de leur complexité, de l'influence du subconscient, d'un
acquis variant sans cesse et de contextes toujours différents. Nous avons vu que
cela n'a pas de rapport avec le déterminisme et n'entraîne pas l'existence du hasard.
1095
[…] Les protéines produites par l'interprétation des gènes n'agissent pas de
manière isolée ; elles participent à la formation de réseaux et structures
complexes intégrés à leur tour dans une organisation hiérarchique. De plus,
dans le cadre des caractéristiques multifactorielles de l'individu (qui expliquent la
grande majorité des comportements intéressants) il y a des interactions avec
l'environnement qui peuvent mettre en jeu des corrélations gène-environnement,
des influences génétiques sur la sensibilité à l'environnement, et des effets de
l'environnement sur l'expression des gènes."
Page 83
"…l'influence de ses gènes peut rendre une personne plus ou moins émotive
dans son comportement, plus ou moins impulsive dans ses réactions, plus ou
moins sociable et extravertie, d'humeur plus ou moins stable ou labile (sujet à
changer ou à se transformer), et plus ou moins assurée ou agressive dans ses
rapports avec autrui. Tous ces traits de caractère sont quantitatifs plutôt que
présents ou absents. Autrement dit, la population ne se subdivise pas en
individus agressifs et individus que ne le sont pas ; mais d'une personne à une
autre, la probabilité qu'elle soit agressive varie."
Page 222
"Le fonctionnement de l'esprit est nécessairement basé sur celui du cerveau,
dont la structure et le développement sont façonnés à la fois par les gènes et
l'environnement, comme ceux de tout organe. Nous devons à tout prix nous
débarrasser de l'idée que certains comportements résultent de causes externes
au corps, idée sans fondement biologique. Les effets des gènes sont
omniprésents – ce qui n'implique pas, bien entendu, qu'ils prennent le pas sur
ceux de l'environnement."
(Fin des citations)
[125] Wormholes
Drs. Eric Christian and Louis Barbier (NASA - Space Physics: Wormholes, Time
Travel, and Faster-Than-Speed-of-Light Theories -
http://helios.gsfc.nasa.gov/qa_sp_sl.html
Nola Taylor Redd - What is a Wormhole?
http://www.space.com/20881-wormholes.html
1096
2. Extrait de la Quatrième partie « Les idées claires de l'homme viennent de Dieu :
elles sont donc nécessairement vraies »
"…cela même que j’ai tantôt pris pour une règle, à savoir que les choses que
nous concevons très clairement et très distinctement sont toutes vraies, n’est
assuré qu’à cause que Dieu est ou existe, et qu’il est un être parfait, et que tout
ce qui est en nous vient de lui : d’où il suit que nos idées ou notions, étant des
choses réelles et qui viennent de Dieu, en tout ce en quoi elles sont claires et
distinctes, ne peuvent en cela être que vraies."
3. Début de la Première partie :
"Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ; car chacun pense en
être si bien pourvu que ceux même qui sont les plus difficiles à contenter en toute
autre chose n’ont point coutume d’en désirer plus qu’ils en ont."
Le concept d'ens realissimum est celui d'un être suprêmement réel, ensemble ou
fondement de toutes les réalités. C'est le concept que forge la raison non assujettie à
la critique quand elle détermine complètement toute chose en général.
1097
[136] Galileo Galilei (Galilée) (1564-1642) – physicien et astronome italien. Il fut
un des premiers à utiliser une méthode scientifique d'expérimentation pour
déterminer les lois de la nature (notamment celles de la dynamique), au lieu de croire
l'enseignement dogmatique d'Aristote [43] soutenu par l'Eglise. Il découvrit à la
lunette astronomique les 4 premiers satellites de Jupiter. Son approbation de la
théorie héliocentrique de Copernic lui valut un procès à Rome pour hérésie : il fut
condamné et forcé à abjurer.
Mais au XXIe siècle, l'Eglise a reconnu son erreur et réhabilité Galilée : voir
http://www.dici.org/archives/dici/html/year-2009/le-vatican-a-decide-de-rehabiliter-
galilee/ .
[138] Daniel MARTIN – Philosophie : tout ce que vous avez toujours voulu savoir
sans jamais oser le demander - Hommage au livre de Luc Ferry paru chez Plon :
Apprendre à vivre - Traité de philosophie à l'usage des jeunes générations
http://www.danielmartin.eu/Religion/Philosophie.htm
C'est en partie grâce aux SGBD relationnels que Internet apporte la plupart des
informations structurées de domaines comme la gestion d'entreprises, les ressources
humaines et l'économie.
1098
[140] Emmanuel KANT – Œuvres philosophiques – Tome 1 (1747-1781),
Gallimard (La Pléiade), 1980 - Annonce de M. Emmanuel KANT sur le programme
de ses leçons pour le semestre d'hiver 1765-1766
Le monde moral est l'ensemble des phénomènes du monde du point de vue moral,
avec un idéal vers lequel les comportements des êtres raisonnables doivent tendre,
profitant de leur libre arbitre.
Compte tenu de la doctrine téléologique de Kant, le monde moral a été conçu par le
Créateur avec un souci de cohérence :
Les libres arbitres des divers êtres raisonnables doivent être compatibles les uns
avec les autres (« ma liberté s'arrête là où commence celle de l'autre ») ;
Les lois morales (dans le cadre pratique du libre arbitre) doivent aussi être
compatibles les unes avec les autres ;
Lois morales et libres arbitres doivent avoir une unité systématique pour que le
monde puisse évoluer vers le souverain Bien.
1099
[144] Emmanuel KANT – L'unique fondement possible d'une démonstration de
l'existence de Dieu (1763), dans [93].
[146] Virgile (Publius Vergilius Maro) (70 avant J.-C. – 19 après J.C.) – Poète latin
1100
[149] PERSE (Aulus Persius Flaccus né en l'an 34, mort en l'an 62) – poète latin
stoïque auteur de satires.
[152] Daniel MARTIN - Hasard, chaos et déterminisme : les limites des prédictions
http://www.danielmartin.eu/Philo/Resume.pdf
[153] Pyrrhon (~360 avant J.-C.-~270 avant J.-C.) philosophe sceptique grec,
indifférent à l'égard des événements et des opinions : pour l'homme, « aucune chose
n'est plus ceci que cela », c'est-à-dire que l'homme ne peut pas faire de différences
entre les choses, ni du point de vue de la valeur ni du point de vue de la vérité.
[154] Zénon d'Elée - Philosophe grec du Vème siècle avant J.-C. dont les
disciples sont les éléates. Voir aussi Achille et la tortue [103].
[158] Luc Ferry – Kant – Une lecture des trois « critiques » - Grasset (2006)
Excellent ouvrage qui m'a permis d'approfondir plusieurs sujets. J'y ai aussi trouvé
des synthèses auxquelles je n'avais pas pensé. J'en recommande vivement la
lecture.
[160] Daniel MARTIN - Philosophie : tout ce que vous avez toujours voulu savoir
sans jamais oser le demander - Hommage au livre de Luc Ferry paru chez Plon :
« Apprendre à vivre - Traité de philosophie à l'usage des jeunes générations »
http://www.danielmartin.eu/Religion/Philosophie.htm
1101
Son célèbre « dernier théorème », démontré seulement en 1998 par Andrew Wiles,
concerne des équations dites diophantiennes : xn + yn = zn où x, y, z et n sont des
nombres entiers n'a pas de solution pour n>2.
[166] Socrate (~470 - 399 avant J.-C.) – Philosophe grec dont la vie et la pensée
ont profondément influencé toute la philosophie occidentale depuis Platon [49].
1102
mérite-t-il bien de l'histoire, le génie qui la résume en idées capables de demeurer à
jamais."
[171] Cicéron (Marcus Tullius Cicero, né en 106 av. J.-C. – mort en 43 av. J.-C.)
Homme d'état, avocat et écrivain latin, défenseur de la République romaine.
1103
commentaires chocs. Et l’on voit apparaître de plus en plus d’infotainment, qui
mêle information et divertissement.
Ce monde saturé d’informations est anxiogène pour ceux qui ne parviennent plus à les
hiérarchiser, ni même à les filtrer. Cela les pousse à se tourner vers des univers
familiers où ils ne trouveront que des avis proches des leurs.
C’est précisément ce que leur proposent les algorithmes de Facebook ou de
Twitter. Mais aussi le moteur de recherche Google qui, pour mieux vendre ses
pubs, trie ses réponses en fonction de la navigation passée de l’internaute. Ainsi
ces algorithmes sont-ils des boîtes noires qui enferment les citoyens dans leurs
convictions et privilégient des contenus viraux, qui s’adressent à l’affect et
circulent rapidement. Les ingrédients de la viralité ne sont clairement pas ceux
d’une argumentation rationnelle, qui demande le temps de la démonstration et
de la délibération.
Les consultants politiques savent qu'il est plus efficace de parler au cœur des
citoyens qu’à leur cerveau, car les arguments rationnels ne fonctionnent qu’avec des
personnes très éduquées.
Une rumeur, c’est une information possible mais avancée sans preuves et diffusée sans
vérification qui prospère sur un terreau d’inquiétude. Celui qui lance la rumeur maîtrise
l’agenda politique, en forçant son adversaire à y répondre tout en l’empêchant de
prendre l’initiative. Cette stratégie de blocage bien rodée a clairement été celle de
Donald Trump.
[175] Sophisme – L'Encyclopédie, 1re édition (1751) Tome 15 pages 363 à 365
http://portail.atilf.fr/cgi-
bin/getobject_?a.115:30./var/artfla/encyclopedie/textdata/IMAGE/
https://archive.org/download/lesprincipesdes02coutgoog/lesprincipesdes02coutgoog.
pdf (Gratuit)
1104
[180] L'Algèbre de Boole, par Gaston Casanova, Que sais-je 1246, 3ème édition
(1972) – Voir Algèbre de Boole – Algèbre des parties d'un ensemble.
[183] Principia Mathematica by Alfred North Whitehead [185] and Bertrand Russell
[184]
Volume 1, second edition, Cambridge University Press (1963)
https://archive.org/details/PrincipiaMathematicaVolumeI
Volume 2, second edition, Cambridge University Press (1927)
https://archive.org/details/PrincipiaMathematicaVol2
Volume 3, second edition, Cambridge University Press (1963)
https://archive.org/details/PrincipiaMathematicaVolumeIii
1105
Table des matières de la
Critique de la raison pure
INTRODUCTION 93
I. De la différence entre la connaissance pure et la connaissance empirique 93
II. Nous sommes en possession de certaines connaissances a priori, et même
l'entendement commun n'est jamais sans posséder de telles connaissances
94
III La philosophie requiert une science qui détermine la possibilité, les principes et
l'étendue de toutes les connaissances a priori 97
IV. De la différence des jugements analytiques et des jugements synthétiques
100
V. Dans toutes les sciences théoriques de la raison sont contenus des jugements
synthétiques a priori faisant fonction de principes 103
VI. Problème général de la raison pure 106
VII. Idée et division d'une science particulière portant le nom de Critique de la raison
pure 110
§1. 117
Première section de l'esthétique transcendantale : De l'espace 119
§2. Exposition métaphysique de ce concept 119
§3. Exposition transcendantale du concept de l'espace 122
Conséquences résultant des concepts précédents 123
1106
DEUXIÈME PARTIE : LA LOGIQUE TRANSCENDANTALE
1107
Deuxième section (deuxième édition): Déduction transcendantale des concepts purs
de l'entendement 197
§ 15. De la possibilité d'une synthèse en général 197
§ 16. De l'unité originairement synthétique de l'aperception 198
§ 17. Le principe de l'unité synthétique de l'aperception est le principe suprême de
tout l'usage de l'entendement 201
§ 18. Ce qu'est l'unité objective de la conscience de soi 203
§ 19. La forme logique de tous les jugements consiste dans l'unité objective de
l'aperception des concepts qui s'y trouvent contenus 203
§ 20. Toutes les intuitions sensibles sont soumises aux catégories comme
constituant les conditions qui seules permettent d'en rassembler le divers dans
une conscience 205
§ 21. Remarque 205
§ 22. La catégorie n'a pas d'autre usage pour la connaissance des choses que son
application à des objets de l'expérience 206
§ 23. 207
§ 24. De l'application des catégories à des objets des sens en général 209
§ 25. 213
§ 26. Déduction transcendantale de l'usage expérimental que l'on peut faire en
général des concepts purs de l'entendement 214
§ 27. Résultat de cette déduction des concepts de l'entendement 218
Bilan rapide de cette déduction 219
1108
B. Deuxième analogie. Principe de la succession chronologique suivant la loi de
causalité 258
C. Troisième analogie : Principe de la simultanéité suivant la loi de l'action
réciproque ou de la communauté 272
4. Les postulats de la pensée empirique en général 277
Réfutation de l'idéalisme 282
Remarque générale sur le système des principes 290
INTRODUCTION 329
I. De l'apparence transcendantale 329
II. De la raison pure comme siège de l'apparence transcendantale 332
A. De la raison en général 332
B. De l'usage logique de la raison 335
C. De l'usage pur de la raison 336
1109
CHAPITRE PREMIER (deuxième édition) : Des paralogismes de la raison pure
398
Réfutation de la démonstration par Mendelssohn de la permanence de l'âme 406
Conclusion de la solution du paralogisme psychologique 413
Remarque générale concernant le passage de la psychologie rationnelle à la
cosmologie 414
1110
Possibilité d'une conciliation entre la causalité par liberté et la loi universelle de la
nécessité
de la nature 498
Éclaircissement de la réunion de l'Idée cosmologique d'une liberté et de la
nécessité
universelle de la nature 500
IV - Solution de l'Idée cosmologique de la totalité de la dépendance des phénomènes
quant à
leur existence en général 510
Remarque conclusive sur toute l'antinomie de la raison pure 514
1111
Troisième section : La discipline de la raison pure relativement aux hypothèses
637
1112