N°184

FEVRIER 2018

MENSUEL - BELGIQUE 9,50 € - SUISSE 13,50 FS - CANADA 14,00 $ - LUX. 10,00 €

P.04 LE SAMPLER VOIX D’EXTINCTION
P.06 COURRIER
P.09 LES DIX COMMANDEMENTS :
A force de hurler au loup, les tournées d’adieu, on a carrément fini

LIPS (ANVIL)
par ne plus y croire qu’à moitié, voire pas du tout. C’est que, quand
on y pense, Ozzy Osbourne s’est lancé dans le No More Tours (qui

P.11 LE PURGATOIRE : CELTIC FROST

devait être son ultime tournée avant la retraite) – accrochez-vous à
votre dentier – le 9 juin 1992 !!! Le Madman, pour info, jouera en

P.12 TELEX : L’actu métallique

région parisienne le 15 juin prochain… Dans le même ordre d’idée,
souvenez-vous. Dans notre numéro 92 (nous en sommes au 184),

P.17 DE + EN + NET
Rudolf Schenker et Klaus Meine nous soutenaient mordicus que la

P.18 TOUTE PREMIERE FOIS :

prochaine tournée de Scorpions allait être la dernière. Le chanteur

DR
allait jusqu’à enfoncer le clou avec une étonnante conviction :

MICHAEL SCHENKER
« Dieu bénisse tous ces artistes qui veulent faire de la scène jusqu’à ce qu’ils poussent leur dernier
soupir, mais c’est une chose de le faire lorsque tu joues du blues, c’en est une autre lorsque tu fais

P.21 I LIKE TO MOVIE, MOVIE :

partie d’un groupe de hard rock. Nous ne voulons pas devenir une caricature, mais demeurer

SEBASTIAN LEVERMANN (ORDEN OGAN)

costauds jusqu’au bout (…) Sérieusement, je suis persuadé que cette tournée sera la dernière.
Nous ne voulons pas rentrer dans ce petit jeu qui consisterait à annoncer que nous arrêtons et,

LES INTERVIEWS :
finalement, remettre le couvert tous les trois ou quatre ans ». C’était – accrochez-vous à votre
jambe en bois – en février 2010 ! Depuis, les Scorps n’ont eu de cesse de donner des

P.22 JUDAS PRIEST

concerts et, devinez quoi, se produiront, huit ans plus tard, à pas moins de sept reprises
dans l’Hexagone de mars à juin 2018 ! Un dernier exemple, pour finir (ils sont si nombreux

P.29 CRESCENT
qu’on pourrait consacrer l’intégralité de ce mag à les citer…) : celui de Judas Priest.

P.30 TURBONEGRO
Ce dernier – accrochez-vous à votre pied bot – annonçait on ne peut plus officiellement,
le 7 décembre 2010, que la tournée Epitaph, qui l’entrainerait jusqu’en 2012, serait la

P.32 MANIGANCE
dernière de sa carrière. Le combo de Birmingham, sept ans plus tard, est en une de ce
numéro 184 et assurera l’une des têtes d’affiche du Hellfest en juin prochain. Alors, forcément,

P.34 HEIDEVOLK
chat échaudé craignant l’eau froide, les tournées d’adieu, maintenant, on y croit moyen.

P.36 SAXON
Sauf que, parfois, il faut néanmoins se méfier. Ce mois-ci, c’est carrément une épidémie
d’annonces de « farewell tours » qui nous est tombée sur la tronche (Cf. news) : Slayer

P.39 LIZZARD
raccrocherait les gants après une ultime tournée, tout comme un Lynyrd Skynyrd qui
affiche plus de cinquante ans (!) de carrière. Pire, Rush a carrément évité les cases « je dis que

P.40 KOZH DALL

je fais et je fais pas » et « il a dit il a menti », son guitariste Alex Lifeson déclarant récemment :
« Nous n’avons aucun projet de tournée ou d’album. Nous en avons fini. Après 41 ans, nous

DIVISION
avons senti que nous en avions assez fait ». Voilà au moins qui a, hélas, le mérite d’être

P.42 FIVE FINGER

clair… Une triste conclusion s’impose : ceux qui ont forgé cette musique que nous aimons
tant sont désormais une espèce en voie (voix) d’extinction. Depuis plusieurs années, on

DEATH PUNCH
essayait de se faire à l’idée, mais aujourd’hui, il faut regarder la vérité dans le jaune des
yeux : profitons comme il se doit – autrement dit à fond – des dernières légendes du hard

P.44 HOMMAGE FAST

rock et du metal car, c’est mathématique, elles ne sont plus là pour longtemps. Et lorsque

EDDIE CLARKE
ces dernières peinent à raccrocher, à l’instar des exemples précités, ne soyons pas trop
cyniques (oui, oui, je parle aussi pour ma pomme). Ces gens-là, la musique et les tournées,

P.50 MELTED SPACE

c’est toute leur vie. Ils ne savent pas faire autre chose. Et c’est très bien comme ça… Ne
passez donc pas à côté.

P.52 OCEANS OF
Notre ami Christophe Servel lui aussi, la musique était toute sa vie. Chez Sony, c’était le

SLUMBER
seul mec dont le bureau ressemblait à une chambre d’ado. Posters, vinyles, vieille platine

P.54 AVATAR
disques, billets de concerts préhistoriques, photos jaunies, etc., un vrai bordel désorganisé
mais hautement sympathique… C’était un passionné, un vrai, comme on n’en croise

P.58 SUIVEZ LE GUIDE !

malheureusement pas assez dans les majors. Un gentil punk qui chérissait plus que tout la
musique qui venait du cœur, qu’elle soit l’œuvre du Clash (qu’il aimait tant), de Trust, de

OZZY OSBOURNE
Motörhead, d’AC/DC, de Midnight Oil, de La Souris Déglinguée ou de Johnny Cash. Il

P.60 MYLES KENNEDY

ne savait pas – ne voulait pas – faire autre chose. Et c’est très bien comme ça… Tu vas nous
manquer, la Rennaise, El Boyau. Nos pensées à ton fils Olav. Qu’est-ce que tu dois le faire

P.62 MINISTRY
chier, là-haut, le père Joe Strummer avec tes questions de groupie !

P.66 PHIL CAMPBELL

PHILIPPE LAGEAT

P.68 WE SELL THE DEAD

P.70 GIGS YOUR ASS !
39, rue Santos Dumont - 75015 Paris
Tél : 01.40.28.43.41 - Fax : 01.40.43.02.98

Kreator + GloryHammer
Directeur de la publication : Marc Villalonga (marc@rockhard.fr)

+ The New Roses + Five

Rédacteur en chef : Philippe Lageat (phil@rockhard.fr)

Finger Death Punch

Rédacteur en chef adjoint : Morgan Rivalin (morgan@rockhard.fr)
Rédaction : Charlélie Arnaud, Benji, François Blanc, Emmanuel Hennequin, Julien Monsenego,

+ Nothing More
Guillaume Fleury - Photographes : Marc Villalonga, Nidhal Marzouk
Directrice artistique : Vanessa Girth (vanessa.rhmag@gmail.com)

P.74 KRONIKS CDs

Publicité « musique » : Vanessa Girth / e-mail : vanessa.rhmag@gmail.com

P.82 ABONNEMENT CDS

Courrier : redaction@rockhard.fr
Rock Hard est une publication de : GRANDS MALADES EDITIONS SARL de presse au capital de 320

& DVDS
Euros (Ça en fait du pèze, ça !) RCS : Paris B 435 205 364 (2001B05771) - SIRET : 435 205 364 00019
Service abonnements (abonnement@rockhard.fr) : Rock Hard, Service abonnements - 12350

P.91 MUSÉE DE CIRE

Privezac - Tél.: 05 65 81 54 86 - mail : contact@bopress.fr
Commande anciens numéros (anciensnumeros@rockhard.fr) : Rock Hard 39, rue Santos Dumont

P.92 MERCHANDISING
- 75015 Paris - Distribution : NMPP - Imprimé : Imprimerie Aubin - Dépôt légal : à parution

P.94 AGENDA :
Commission paritaire : 0921 K 81345 - N° ISSN : 1630 - 8204
Ce numéro contient un CD qui ne peut être vendu.

Calendrier des concerts

La rédaction n’est pas responsable des textes, illustrations, dessins et photos publiés qui engagent la seule responsabilité de leurs
auteurs. Les documents reçus ne sont pas rendus et leur envoi implique l’accord de l’auteur pour leur libre publication. Les indications

P.96 ANCIENS NUMÉROS

de marques, d’adresses et de prix qui figurent dans les pages rédactionnelles sont fournies à titre informatif, sans aucun but publicitaire.
© 2018 Grands Malades Editions. Tous droits de reproduction réservés pour tous pays. Aucun élément de ce magazine ne peut

P.98 ABONNEMENT
être reproduit ni transmis d’aucune manière que ce soit, ni par quelque moyen que ce soit, y compris mécanique et électro-
nique, on-line ou off-line, sans l’autorisation écrite de Grands Malades Editions.

CONCERTS
• Si vous voulez recevoir notre newsletter mensuelle (qui vous permet de connaître nos sommaires
avant la parution en kiosques et, ponctuellement, de rafler des places de concerts), envoyez nous un
mail à : newsletter@rockhard.fr
• Vous ne savez pas où trouver Rock Hard près de chez vous ? Jetez un œil sur :
www.trouverlapresse.com qui vous indiquera l’adresse des revendeurs les plus proches.
 Sur chaque sampler figure un morceau extrait de la démo d’un groupe francophone non signé.
Espérons que ce petit « coup de pouce » attire l’attention des labels et autres maisons de disques
et débouche sur des signatures. Jeunes combos, n’hésitez donc pas à nous envoyer vos démos
(CDs uniquement) agrémentées d’une bio complète et d’une photo à l’adresse suivante :
Rock Hard/Strass - Démos Sampler - 60, rue Brancion - 75015 Paris. Bonne chance !
1 - MINISTRY
« Antifa »
Po-si-ti-vez ! La présence de Donald Trump à la Maison
Blanche n’a pas que des inconvénients : elle relance
Ministry pour quelques tours de piste ! Le 09/03, Al
Jourgensen et ses amis du pionnier du metal indus
publieront le successeur de From Beer To Eternity
2 - ANGRA
(2013), un AmeriKKKant pas piqué des vers.
« Travelers Of Time »
C’est la fin d’une époque : sur Ømni, Kiko Loureiro ne
se charge « que » d’un solo… Angra est toutefois loin
de baisser les bras, ainsi que le prouve ce 9ème album
des Brésiliens produit par Jens Bogren (DragonForce,
Paradise Lost) sur lequel vous retrouverez notamment
3 - AURI
Alissa White-Gluz (Arch Enemy).
« Night 13 »
Avec son joli nom de voiture hybride, Auri vous
transportera là où même le plus robuste 4x4 ne va pas.
Sur ce premier album aux relents celtiques et atmo-
sphériques, Tuomas Holopainen (Nightwish) a travaillé
avec sa femme, Johanna Kurkela, mais aussi avec le
4 - TURBONEGRO
fidèle Troy Donockley. Sortie le 23/03.
« Fist City »
20 ans après le début de sa « Trilogie de
l’Apocalypse », Turbonegro appuie à nouveau sur la
pédale d’accélérateur avec Rock’n’Roll Machine : bel
hommage au hard rock bien incarné par ce « Fist City »
qui met les « poings » sur les « i ». En juin, le Hellfest ET
5 - THE CROWN
le Download accueilleront les Norvégiens. Be there !
« Iron Crown »
Pour son retour au death metal des familles, The Crown
a passé un coup de fil à une vieille connaissance : le
producteur suédois Fredrik Nordström (In Flames,
Dark Tranquillity, etc.), l’artisan du son de Göteborg.
Attention à vos couronnes : c’est la mâchoire que vise
6 - WE SELL THE DEAD
Cobra Speed Venom ! Sortie le 16/03.
« Turn It Over »
Si cet extrait mélodique se rapproche de Firewind,
l’ancien groupe du chanteur Apollo Papathanasio
(Spiritual Beggars), We Sell The Dead, dans lequel on
trouve aussi Niclas Engelin (In Flames), lorgne clairement
du côté d’un heavy doomy. Heaven Doesn’t Want You
7 - TAX THE HEAT
And Hell Is Full débarquera le 23/02.
« Money In The Bank »
« Ces gars de Bristol sont la réponse anglaise à Rival
Sons », a dit Chris Goss (Masters Of Reality, Kyuss) au
sujet de Tax The Heat : des gentlemen so british qui
arborent des costumes de dandy tranchant avec le
puissant classic/hard rock bluesy sorti de leurs amplis.
8 - MELTED SPACE
Change Your Position arrive le 09/03.
« Trust In Me » (Feat. Jeff Scott Soto)
L’opéra metal Darkening Light de Melted Space voit
une nouvelle fois Pierre Le Pape s’octroyer les services
d’un orchestre philharmonique et d’invités de haut vol,
à l’instar de Mikael Stanne (Dark Tranquillity) ou encore
de Jeff Scott Soto (Talisman, Sons Of Apollo), sur ce
morceau. Sortie le 16/02.
4
9 - STONE BROKEN
« Worth Fighting For »
Il n’y a pas que Nickelback qui fasse d’une pierre deux
coups avec son rock taillé pour les ondes des radios et
pour les stades. Les Britanniques de Stone Broken comptent
bien se faire un nom avec l’efficace Ain’t Always Easy
(sortie le 02/03). A voir en live avec Jared James Nichols
10 - LEGEND OF THE SEAGULLMEN
le 16/03 à Vauréal (95).
« The Fogger » (Edit)
Derrière les masques d’hommes-mouettes des membres
de Legend Of The Seagullmen se cachent des musiciens
comme Danny Carey (Tool) ou encore Brent Hinds
(Mastodon). Alors que leur premier album vient de sortir,
disons leur « bon vent » en leur souhaitant que ce projet
11 - KING WITCH
parallèle ne batte pas de l’aile. Ouarf !
« Carnal Sacrifice »
Inspirés par Black Sabbath, Led Zeppelin, Mastodon ou
encore High On Fire, les Ecossais de King Witch font rimer
« mélodique » avec « monolithique ». Cet extrait de leur
premier album studio, Under The Mountain, est un hommage
aux films de la Hammer, et surtout à Une Fille… Pour Le
12 - KOZH DALL DIVISION
Diable (1976). Brrrr !
« Fight Or Die » (Feat. Phil Guadagnino & Olivier Del Valle)
Laurent Plainchamp a grave la « Dall » ! Moins d’un an
après la sortie du premier opus de Kozh Dall Division, le
maître d’œuvre du projet nîmois est déjà de retour avec
II : Memories : un double album de 27 titres (!) regroupant
des musiciens de Blasphème, Crusher, Agressor,
13 - HEIDEVOLK
Mercyless, etc. Bon appétit !
« Ontwaakt »
Avec Vuur Van Verzet (« Le Feu de la Résistance »), les
Néerlandais de Heidevolk (re)montrent leur amour de la
mythologie germanique et d’un folk/viking metal taillé
pour la scène. Nous ne manquerons pas de les y (re)voir.
Une question pratique, au passage : ça passe au lave-
14 - EARTHLESS
vaisselle, une corne à boire ?
« Gifted By The Wind » (Edit)
Connu pour ses albums instrumentaux aux sonorités psyché,
Earthless a concocté un Black Heaven (sortie le 16/03)
majoritairement chanté et plus groovy que jamais. Le trio
originaire de San Diego reviendra prendre la température
de l’eau le 07/04 à Paris, au Petit Bain. N’oubliez pas votre
DECOUVERTE DU MOIS : 15 - PSYCHOID
maillot !
« Out Of Control »
Big Mac ? Big Bang ? Big Bazar ? Bigoudi… ? Ah oui : Big 4 ! C’est leur amour
pour le Big 4 du thrash, constitué – faut-il le rappeler ? – de Metallica,
Megadeth, Slayer et Anthrax, qui a motivé Thomas, Amaury, Kiko et Rémi à
fonder Psychoïd en Seine et Marne. Après l’EP Thrash Test en 2016, les
prochains mois verront l’arrivée du premier album du gang de Melun :
Thrash Impact (le suivant s’appellera sans doute Thrash Ta Valda).
Extrait de l’album Thrash Impact
Web : facebook.com/pg/Psychoïd-Thrash-metal
Mail : valentin@music-records.fr
éro de
Le prochain num mars 2018
du 8
ue aux alentours
sera en kiosq

Bonjour à tous,
Ces quelques mots pour, dans un premier
temps, vous remercier. Je viens de recevoir
le premier numéro de mon abonnement
qui me permettra également et surtout
(j’achetais de toute façon Rock Hard en
kiosque depuis le N°1) d’assister à mon
dixième Hellfest. Je me suis en effet
retrouvé le 15 octobre devant une page
web indiquant « Hellfest sold out » et je me
voyais mal vivre mon dixième Hellfest
devant Arte Live ! C’est donc avec une
grande joie et un grand soulagement que
j’ai reçu votre courrier de confirmation
stipulant que je recevrai mon pass 3 jours
début juin (n’oubliez pas, hein !!!). Je me
refusais à renoncer à ma récréation et à
mon lâcher prise annuel. Ne pas profiter de
l’ambiance (car c’est bien de cela dont il est
d’abord question, le festival étant sold-out
avant que le moindre groupe ne soit annoncé)
et ne pas revoir les amis que je me suis faits
au fil de mes neuf premières participations :
inenvisageable ! Alors, pour cela, merci
encore ! La suite de mon courrier concerne
le DVD Day Of The Gusano de Slipknot et le
traitement que vous lui avez réservé, ou
plutôt que vous ne lui avez pas réservé. En
effet, Slipknot devait originellement faire la
couverture de votre N°182, mais l’annonce
tragique du décès de Malcolm Young changea
vos plans initiaux. Néanmoins, vous consacrez
cinq pages d’interview (excellente et évitant
effectivement les pièges de l’interview
promo) au Clown durant laquelle seule la
première question traite de l’album live. Je
consulte alors la rubrique Kroniks : pas de
Slipknot. Je me dis alors : « Pas grave, ils
n’ont pas eu d’advance CD. Le mois prochain
sûrement ». Mais le mois suivant, nada.
Etant fan de Slipknot de la première heure,
je n’attendais pas après la chronique pour
me le procurer, mais j’en viens à m’interroger
sur l’absence de critique de cet album.
Maiden a bien eu sa chronique pour le Live
Chapter, alors pourquoi pas Slipknot ?
Serait-ce parce que vous ne voulez pas
être « méchants » avec eux ? Qui aime bien
châtie bien, vous êtes les premiers à le dire.
Serait-ce parce que le son est indigne d’un
groupe de ce statut et que vous ne vouliez
pas en dire du mal de peur de perdre les
encarts publicitaires de Eagle Vision ou
autre ? Je n’ose l’imaginer. Alors, pourquoi
ne pas chroniquer l’album d’un groupe
devenu majeur ? Honnêtement, la setlist est
bonne, piochant goulument dans le Grey
Chapter (2014) et mélangeant raretés et
hits incontournables, ne faisant pas double
emploi avec les live précédents, mais le son,
LE SON… Ça sature dans tous les sens dès
« Sarcastrophe » et ça ne s’arrange pas
durant l’ensemble du set pour atteindre des
sommets durant « Surfacing » et son refrain.
On entend bien qu’il y avait de la pyrotechnie,
mais là, trop c’est trop. Le live du Download
2009 qui accompagnait le best of Antennas
To Hell (2012), possédait un son bien meilleur
alors qu’il avait été capté dans le cadre d’un
festival. Je veux bien entendre qu’ils voulaient
absolument enregistrer un live au Mexique,
que cette occasion était la bonne et qu’ils
n’ont pas voulu retoucher les prises par
souci d’honnêteté, mais merde, ils savaient
que c’était LE soir, c’était LEUR festival,
LEUR matériel. Ils avaient tout pour obtenir
un album live référentiel et ils accouchent
de cette bouillie. C’est vraiment naze. J’ai
assisté à de nombreux concerts de Slipknot
et j’ai toujours été agréablement surpris par
6
Faites couiner vos souris en nous e-mailant directement
vos messages à : redaction@rockhard.fr
la clarté du son (sauf au Parc Des Princes),
malgré le volume et le fait qu’ils soient
neuf. Ma déception n’en est que plus
grande d’entendre le piètre résultat de cet
enregistrement professionnel. Dernier point
de mon courrier, toutes mes félicitations
pour la rubrique Class Of. Je fais partie de
la génération qui a acheté Kill ‘Em All
(1983) avec le sticker « élu album de l’année
par Enfer Magazine » et Ride The Lightning
(1984) avec la pochette imprimée par erreur
en vert, qui a vu Metallica avec Cliff Burton
puis au Zénith, Megadeth au New Morning,
qui a découvert la vague thrash en direct
live mais qui s’est aussi pris Appetite For
Destruction (1987) en pleine gueule
quelque temps après, qui a « failli » voir les
Guns en première partie de Mötley (à cause
d’une overdose de Mr Sixx), qui allait aux
concerts avec une petite appréhension car,
à l’époque, ça craignait bien, tant dans le
public que dans les services de « sécurité » qui
se défoulaient sur les slammers (remember
l’Espace Balard, puis les premières années
du Zénith), qui a vu Rage Against The
Machine en première partie de Suicidal
Tendencies ou encore Pantera, Maiden ou
Metallica à l’Elysée Montmartre et Pearl
Jam et Extreme à la Loco. Alors, pouvoir
redécouvrir chronologiquement les pépites
qui ont jalonné mes années glorieuses me
fait grand bien et me fait dire, au risque de
passer pour un vieux con, qu’on a peu de
chances de pouvoir revivre une période
aussi riche en nouveautés devenues des
classiques que celle couvrant 1980 à 1995.
Néanmoins, je ne suis pas resté scotché à
ces années magiques (mais bien pauvres en
festivals et en tournées françaises). Je suis
toujours à l’affut de nouveautés et du prochain
monstre que, j’en suis certain, Rock Hard ne
manquera pas de me faire découvrir. Voilà,
c’est tout pour cette fois. En espérant vous
croiser lors du Hellfest que je ne remercierai
jamais assez d’exister, moi qui ai connu toutes
ces années de « disettes festivalistiques ».
Fred Lenfant.
Cher Fred,
En ce qui concerne le Hellfest, nous partageons
bien entendu ton enthousiasme. Nous non
plus ne raterions cette grand’messe du
metal sous aucun prétexte ! En revanche,
pour ce qui est du Day Of The Gusano de
Slipknot, nous t’invitons à observer de plus
près la rubrique Musée De Cire de notre
numéro 181. Peut-être espérais-tu obtenir
quelque chose de plus détaillé, mais cette
sortie a bel et bien été chroniquée dans nos
pages ! De nos jours, les labels ont tendance
à multiplier les supports, notamment
lorsqu’il s’agit de vendre des albums live :
CD, LP, DVD, Blu-Ray, coffrets Deluxe… Ou
tout ça à la fois. Une fois n’est pas coutume,
nous avons choisi de privilégier la version
3LPS/DVD, parfaite pour inaugurer notre
nouvelle rubrique consacrée aux pressages
vinyles. Rien à voir, donc, avec une quel-
conque pression des labels, même s’il est
vrai que nous nous sommes plus focalisés
sur l’objet (très chouette) que sur son son
(qui, par ailleurs, ne nous a pas choqués
plus que ça). Grâce à ton courrier, les fans
de Slipknot qui hésitaient encore à acquérir
ce DVD peuvent désormais lire un avis plus
détaillé et tranché que le nôtre. Un grand
merci à toi !
Hello RH !
Cool que vous conserviez le référendum de
la rédac’ : numéros et nouveautés s’enchaînent
tellement vite, ça donne envie d’écouter les
albums sur lesquels j’ai fait l’impasse. J’ai
été surpris que personne ne cite Lykaia de
Soen !? Album de l’année pour moi.
Magistral ! Un an après sa sortie, je ne me
lasse toujours pas de déguster une telle
musique. N’ayant pu me rendre à la Boule
Noire au mois d’octobre (y étiez-vous ?), je
rêvais de les voir arriver enfin au Hellfest
cette année, mais il faudra patienter...
Incroyable qu’un groupe d’une telle classe
se produise toujours dans des bars après
trois albums incontournables à mon sens
pour tout amateur de grande musique
(c’est là que Djul doit se dire « mince, j’ai
oublié Soen dans mon Top 10 !!! » - Cf.
chronique RH172). Pour mon DVD de l’année,
ce sera Let’s Play Two de Pearl Jam. Whaouh,
la claque ! Si vous l’avez manqué au ciné, ne
le ratez pas ! Quelle énergie, quelle émotion,
grandiose (Là aussi, PJ snobe la France en
2018... mais que s’est il passé ?!). Meilleurs
vœux à toute l’équipe, continuez comme ça,
on a de la chance de vous avoir.
Faab (73)
Cher Faab,
Nous sommes d’accord avec toi : même
s’il s’agit souvent d’un véritable casse-
tête à préparer, la concoction de notre
référendum annuel nous donne, à nous
aussi, l’occasion de nous poser et de faire le
point sur les grands moments musicaux
ayant marqué notre année. Pour ce qui est
de Soen, nous avons directement posé la
question à Djul, qui pensait effectivement
que l’album était sorti en 2016… Mais qui
nous a aussi confié que, même s’il y avait
pensé, Lykaia ne serait pas forcément
apparu dans son Top 10, l’année 2017 ayant
été très riche en nouveautés de qualité
(notamment pour nos amis fans de pro-
gressif). Désolé !
Salut à tous,
Lecteur de longue date (depuis le début, je
pense), je n’avais encore jamais pris le
temps de vous envoyer un petit message,
mais votre référendum 2017 m’a apporté la
petite étincelle nécessaire. Je ne suis pas
vraiment un amateur de metal, mais plutôt
de rock progressif. Si cela ne m’empêche
pas d’acheter Rock Hard tous les mois, c’est
parce qu’il y a quand même, dans mes
goûts, des évidences dans le genre (les
classiques AC/DC, Deep Purple, Iron
Maiden…), tout ou partie de la mouvance
metal progressif et symphonique, et des
découvertes faites grâce à vous (The Dead
Daisies, Blues Pills, Purson, Witchcraft, etc).
Mais surtout, j’aime lire la passion pour la
musique qui se dégage de votre magazine
(en plus de vos partis pris, mauvaise foi et
humour ravageur) ! C’est si rare aujourd’hui
de trouver des gens aussi enthousiastes et
soucieux de le partager. Pour en revenir au
référendum, j’étais vraiment surpris (même
s’il figure toujours en bonne place dans le
mag…) que Steven Wilson truste la première
place avec son album le plus… enfin le
moins…, bref cet album surprenant mais
que j’adore tout comme vous au final. Et je
me suis rappelé (bon, je n’avais pas oublié,
mais je n’y pense pas tous les jours non
plus) qu’il y a bientôt vingt ans (putain
vingt ans déjà), j’organisais, avec ma petite
association Prog La Vie, le tout premier
concert de Porcupine Tree en France (c’était
en avril dans le petit Théâtre Dunois de
Paris). Que de chemin parcouru par cet
artiste hors normes ! Et que de souvenirs
pour moi (cette même année, les premiers
concerts de Spock’s Beard et The Flower
Kings – peut-être certains de vos chroni-
queurs s’en souviennent-ils ?). Arrghh,
comme le temps passe vite… Meilleurs
vœux à tous, merci pour votre passion et ne
changez rien.
Christian
Cher Christian,
Nous sommes heureux de savoir notre
démarche comprise, goûtée… Et partagée !
Quant aux souvenirs que tu évoques, nous
sommes certains que Stéphane Auzilleau
s’en rappelle également. Si l’occasion se
présente, passe donc lui rendre visite sur
notre stand, au Hellfest. Assurément, vous
aurez des choses à vous dire !
Salut à toute l’équipe,
Merci pour votre mag’ dont je suis fidèle
lecteur depuis le premier numéro, et
même que je suis abonné depuis trois ans
maintenant. Mais le but de cette p’tite
bafouille n’est pas là. J’ai acheté la
Metalthèque Vol. 2, que je dévore comme
le Vol. 1 avec passion. Cela me permet soit
de réécouter certains vieux albums que
j’avais oubliés, soit de découvrir certains
groupes qui ne m’avaient pas forcément plu
à l’époque (ouais, je dis « à l’époque » parce
que j’ai 46 ans, et que j’écoute du metal
depuis l’âge de dix ans). Bref. Une petite
anomalie s’est glissée dans le chapitre Live
Mythiques des 80s’. En effet, à la dernière
page du dit chapitre, il y a l’album de
W.A.S.P Inside The Electric Circus (1986).
Or, il ne s’agit pas d’un album live, mais de
l’album studio qui précède Live…In The
Raw sorti, lui, en 1987 et qui renferme
quelques-uns des meilleurs titres du groupe
comme « The Manimal », « Harder Faster »
ou encore le titre bonus en studio « Scream
Until You Like It » composé pour la B.O du
film Ghoulies II, chansons qui, soit dit en
passant, ne figurent sur aucun album studio
du groupe. Alors, oui, une réédition récente
de Inside The Electric Circus comporte le
Live… In The Raw (avec des titres en plus
par rapport à la version de 1987), mais
ils sont bien sortis de façon séparée et
distincte. Encore bravo pour votre mag’ qui
est top et continuez comme ça ! Et encore
un p’tit truc : après plus de 300 concerts, je
vais enfin découvrir le Hellfest autrement
que par vos hors-série et le magnifique livre
sorti pour les dix ans du festival… Car oui,
je vais au Hellfest 2018 ! Youhouhouhou…
Je suis telle une pucelle le soir de son
premier bal. Putain, ça va être bon ! Sur ce,
salutations à toute l’équipe et peut-être à
bientôt.
David
Cher David,
Bien vu, l’artiste ! Il s’agit bel et bien d’une
erreur d’inattention de la part d’un des
membres de cette rédaction (qui, rouge de
honte, a préféré garder l’anonymat). Sois
certain qu’il sera cloué au pilori en place
publique où les passants se feront un plaisir
de lui cracher leur mépris au visage. Le
reste de l’équipe, bien plus serein, te
remercie pour ta vigilance ! Et bien sûr,
comme pour la « pucelle le soir de son
premier bal », nous te souhaitons un
Hellfest bon comme un dépucelage : riche
en découvertes et en plaisirs crus !

Propos recueillis : Benji
Photo : DR
Entretien téléphonique réalisé le 11 janvier 2018
Chaque mois, un musicien évoque
les dix albums qui ont changé sa
vie, ses « Dix Commandements ».
Lips, le chanteur/guitariste d’Anvil,
armé d’un nouvel album, Pounding
The Pavement, nous livre sa bande-
son idéale à la veille de ses concerts
à Paris (Trabendo/25.02.18) et à
Colmar (Grillen/27.02.18).
1. THE ROLLING STONES –
December’s Children (And
Everybody’s) (1965)
Lips : Ce fut vraiment ma
première confrontation avec le
rock dur. Si j’ai bon souvenir, ce
disque a été offert à ma sœur
pour ses seize ans. Grâce à elle,
toute la famille a été impactée par les Rolling
Stones ! (rires) Cela correspond plus ou moins
à la période où j’ai commencé à jouer de la
guitare, vers l’âge de dix ans. Ce disque fut
en quelque sorte la première pierre de mon
éducation musicale, à tous les niveaux. C’est
en l’écoutant que j’ai appris les rudiments, les
bases de la composition rock, des progressions
d’accords... A ce titre, il s’agit d’un album
extrêmement important dans ma propre
évolution.
2. THE BEATLES – Sgt.
Pepper’s Lonely Hearts Club
Band (1967)
J’ai beaucoup écouté ce disque,
évidemment, mais à quel point
m’a-t-il influencé ? Je ne saurais
le dire. Cela ne m’empêche pas
d’apprécier à sa juste valeur à quel point
ce groupe était incroyable et la profondeur
de sa musique, en particulier sur cet album
révolutionnaire.
3. THE JIMI HENDRIX
EXPERIENCE – Are You
Experienced (1967)
Encore un opus révolutionnaire !
Il a changé les perspectives des
guitaristes du monde entier.
C’était la découverte ultime de
ce qu’une distorsion pouvait créer couplée
avec une guitare. Les soli de Jimi Hendrix
ont entraîné la musique rock dans une voie
encore inconnue. Et quel son !
4. CREAM – Disraeli Gears (1967)
Pratiquement à la même époque,
j’ai un merveilleux souvenir de
ce deuxième album de Cream, et
de son hit, « Sunshine Of Your
Love ». Lorsque je pense à Cream,
je pense à Hendrix partant
encore dans une autre direction.
5. LED ZEPPELIN – I (1969)
Je n’ai pas grand-chose à dire de
plus que tout ce qui a été dit et
répété à propos de ce disque fabu-
leux : les guitares géniales de
Jimmy Page, le chant bluffant de
Robert Plant, et cette rythmique…
Tout simplement mythique !
6. BLACK SABBATH – Master Of Reality (1971)
Bien sûr, j’aurais aussi pu citer le premier album du
groupe, mais vraiment, je place Master Of Reality
encore un cran au-dessus. Tony
Iommi est le maître du riff : celui qui
a su synthétiser les influences de ses
prédécesseurs et en faire son propre
style, traçant ainsi le futur du heavy
metal. Chaque texture, chaque note,
nous rappelle à quel point Iommi a
défini les codes de cette musique.
7. DEEP PURPLE – In Rock (1970)
Des maîtres dans l’art de marier
le rhythm’n’blues et la musique
classique ! Le choc entre ces deux
extrêmes a donné naissance à quelque
chose d’absolument magique. Il est
difficile pour moi de choisir un disque
de Purple, mais néanmoins, ma
préférence va vers In Rock. Je trouve
qu’ils étaient déjà au sommet avec ce premier « vrai »
disque enregistré par la formation classique du
groupe (Ndlr : Concerto For Group And Orchestra,
sorti en 1969 et enregistré avec le Royal Philharmonic
Orchestra de Londres, fut le premier disque gravé par
le line-up Blackmore/Gillan/Lord/Glover/Paice, mais a
toujours été considéré comme un album « à part » dans
la discographie du combo).
8. RAINBOW – Rising (1976)
Cozy Powell à la batterie, Jimmy Bain
à la basse et, bien sûr, Ritchie
Blackmore et Ronnie James Dio…
Qu’est-ce que j’ai pu écouter cet
album ! Je l’aime autant, si ce n’est
plus, que In Rock. C’est dire ! Pour
moi, il s’agit définitivement de la
meilleure formation du groupe (Ndlr : à laquelle il
faut ajouter le claviériste Tony Carey).
9. JUDAS PRIEST – Stained Class (1978)
Là encore, voici un groupe pour lequel j’ai le plus
grand mal à ne citer qu’un seul album, mais je
jetterais mon dévolu sur Stained Class. Je dirais que
Priest, à cette époque, était vraiment
« pur » et avait une identité unique.
Après, il n’est pas impossible que ce
choix soit aussi lié à la période à
laquelle il est sorti, qui correspond à
un moment génial de ma vie. J’ai
peut-être tendance à « romancer »
l’histoire, mais néanmoins, en y
repensant, il y a de sacrés bons titres sur ce disque.
« Exciter », « Beyond The Realms Of Death »… Rien
que pour ces deux morceaux, c’est un classique !
10. APRIL WINE – The Nature Of
The Beast (1981)
Je m’en voudrais de ne pas citer April
Wine. Ce n’est que très récemment
que nous sommes devenus très amis
avec le chanteur/guitariste Myles
Goodwin, et cette amitié me rend
vraiment très heureux car j’ai
beaucoup de respect pour ce mec... April Wine est
en quelque sorte le héros méconnu du Canada. C’est
un groupe que les USA et l’Europe n’ont jamais
vraiment soutenu, mais au Canada, c’est une légende.
Ça m’a toujours attristé qu’il ne soit pas reconnu à
sa juste valeur, parce que, dans les 70’s, il était
vraiment très bon et novateur. Ce groupe m’a
beaucoup influencé. Si j’ai choisi The Nature Of The
Beast, c’est sûrement parce qu’il s’agit de son
disque le plus heavy, même si je ne suis pas sûr qu’il
en ait vraiment conscience ! (rires) Y
9
Ponctuellement, nous revenons sur un
album « décrié », un peu à part dans la
discographie d’un groupe. Un « mal aimé »,
en quelque sorte. Par certains critiques,
certains fans, et, parfois, par ses
géniteurs eux-mêmes. Un album qui,
pourtant, vaut le détour et mérite
qu’on le réhabilite sans plus attendre.
L’autopsie d’un « échec » qui n’en est
pas vraiment un, l’idée étant de faire
parler les musiciens « à froid »,
plusieurs années après la sortie de ce
disque, afin de mieux comprendre ce
qui, à l’époque, n’a pas collé. Pourquoi
les étoiles n’étaient pas alignées. Ce
mois-ci, Charlélie Arnaud revient sur
Vanity/Nemesis de Celtic Frost paru en
1990.
L’année 1988 voit Celtic Frost changer drastiquement
de style et quitter ses accointances sataniques
pour tenter une percée sur le marché américain
avec un Cold Lake franchement bancal : les riffs
se font certes plus enjoués, mais la voix de Tom
G. Warrior est ce qu’elle est, et nous sommes
toujours très loin de Poison (même si les
membres du groupe tentent le look hair metal
avec un certain ridicule, convenons-en). Machine
arrière, donc, deux ans plus tard, avec un
Vanity/Nemesis qui développe bon an mal an
des ambiances plus sombres. Hélas, le groupe
revient de si loin que l’album en question va
difficilement trouver ses marques entre le
visage originel du combo – résolument noir –
et le plus récent (maquillé comme une Béhème
série 5 sur un parking de La Courneuve).
Clairement pas au niveau des chefs d’œuvre du
groupe, Vanity/Nemesis est pourtant un disque
riche en riffs de qualité, mais qui peine à
trouver sa place. Un éléphant dans un magasin
de porcelaine. Tom Gabriel Fischer (Warrior, à
l’époque), n’a strictement aucune nostalgie de
cette période.
Tom Gabriel Fischer : Cold Lake a été un fiasco
d’une force terrible, à tous les niveaux, et pas
uniquement à sa sortie. C’est durant le mixage
au Conny Plank Studio, près de Cologne, que j’ai
commencé à réaliser vraiment quelle abomination
nous avions créée. Le résultat final a réussi à rendre
le noyau du groupe d’humeur bien plus sombre.
Lorsque nous avons écrit Vanity/Nemesis, nous nous
sommes donc mis au travail avec davantage de
sérieux et de concentration. D’un côté, nous étions
soulagés d’avoir réussi à remettre le groupe sur des
rails musicaux bien plus appropriés, mais à cause
du gigantesque ratage de l’album précédent, nous
avons décidé d’aborder ce disque de façon bien
plus conservatrice, et de ne surtout plus tenter la
moindre expérimentation. Cela a engendré un disque
générique, sans âme, contrairement aux autres albums
de Celtic Frost qui témoignaient d’un groupe se
réinventant constamment. Dès le début, j’ai donc été
déçu par le produit final qui ne m’a jamais vraiment
enthousiasmé.
Warrior, à l’époque quitté par ses lieutenants de
toujours Martin E. Ain (basse) et Reed St Mark
(batterie), voit le premier, son principal acolyte,
revenir au bercail en toute fin de processus. Celui-ci
n’a malheureusement que très peu d’impact sur
l’album musicalement parlant, mais ses textes inspirés
renouent avec les métaphores riches et les ambiances
raffinées.
Tom Gabriel Fischer : Bien que Martin m’ait avoué
qu’il aimait certaines choses sur Cold Lake, il était
hésitant à rejoindre le groupe lorsque nous avons
attaqué le travail sur Vanity/Nemesis. Après son
départ de Celtic Frost, il avait entamé une toute
nouvelle vie très différente et avait de nouvelles
activités dans notre ville de Zurich. Il ne voulait donc
pas abandonner son nouveau business pour
s’enfermer en studio ou partir en tournée avec un
groupe. Nous avons eu de nombreuses discussions à
propos de son possible retour, attendu que le groupe
ne pouvait être « réellement » Celtic Frost qu’à
condition que nous en soyons membres tous les deux.
Il est néanmoins venu nous voir en studio à Berlin et a
fait quelques backing vocals. La majeure partie de
l’album était déjà en boîte. Martin a été très
impressionné et a spontanément décidé de rejoindre
le groupe le soir même. Hélas, il ne restait plus grand
chose à enregistrer, exception faite d’une ligne de
basse et de quelques chœurs – ce dont il s’est
acquitté. Mais il est resté avec nous en studio jusqu’à
la fin de l’enregistrement et s’est fortement investi
dans le mixage, la pochette et la conception du clip
« Wine In My Hand (Third From The Sun) ».
Autre épine dans le pied de cet album de transition, la
production totalement hors propos de Roli Musimann
(pourtant pas un perdreau de l’année) contribue à
amenuiser l’impact de titres pourtant costauds (« Wine
In My Hand », « Wings Of Solitude », le très véloce « A
Kiss Or A Whisper », typique de l’esprit originel du
groupe, et la doublette finale « Vanity »/« Nemesis »).
Tom Gabriel Fischer : Roli Musimann était quelqu’un
avec qui Martin et moi rêvions de travailler depuis
longtemps. Nous aimions le fait qu’il n’ait aucune
limite artistique. Il avait produit les Young Gods et The
The, entre autres, deux groupes que nous adorions, et
particulièrement les albums sur lesquels il avait
travaillé. Mais il y a deux raisons qui ont rendu la
collaboration Mosimann/Celtic Frost infructueuse :
tout d’abord, il n’avait pas la moindre expérience de
production en matière de heavy metal, et ensuite, son
absence totale de direction artistique précise s’est
heurtée à notre approche très conservatrice de cet
album, comme je l’expliquais auparavant.
Parmi les quelques audaces réelles qui émaillent V/N,
les deux covers décrochent sans conteste la queue du
Mickey. « This Island Earth » de Bryan Ferry n’est pas
une réussite, mais le « Heroes » de David Bowie (titre
bonus sur la version CD), chef d’œuvre s’il en est, se
retrouve ici un peu « malmené ». S’il est évident que
Tom ne s’en vante pas, nous persistons à trouver sa
relecture pertinente (à l’exception des voix féminines
en français qui caressent le grotesque).
Tom Gabriel Fischer : C’était une tentative
ambitieuse : la version originale est on ne peut plus
iconique, et y toucher était presque un sacrilège. Nous
avons toujours considéré qu’il était ennuyeux et
contraire à l’art de reprendre un titre à l’identique :
c’est de toute façon peine perdue puisqu’il est
impossible de surpasser la version originale, et que
tenter d’en faire une copie conforme va à l’inverse de
l’idée de la musique en tant que force de création.
C’est pourquoi nous avons chamboulé le « Mexican
Radio » de Wall Of Voodoo en 1987, par exemple
(Ndlr : sur Into The Pandemonium). Nous avons de
nouveau tenté l’expérience avec le « Heroes » de
Bowie, mais ça n’a pas fonctionné. C’est du gâchis.
Je ne peux pas l’écouter.
En 2017, Noise décide de rééditer l’album dans
de luxueuses versions CD et vinyle, en le faisant
passer pour un « classique » du groupe (ce qu’il
n’est pas, on ne va pas se mentir). Evidemment,
ce sont les lois marketing qui dictent cette
opération dont le leader du groupe n’est pas
maître.
Tom Gabriel Fischer : Nous n’avons aucun droit
sur l’exploitation de nos premiers albums. Nous
avons signé des contrats bien peu avantageux
en 1984, qui donnaient au label les pleins
pouvoirs sur les cinq premiers albums de Celtic
Frost. Ils seront toujours applicables bien après
le décès de chacun des membres du groupe.
Le fait que je n’apprécie pas cet album n’a
donc aucune influence sur la décision d’une
éventuelle réédition. BMG, qui est l’actuel
propriétaire des droits, m’a très gentiment
invité à collaborer à ces nouvelles versions pour
des liner notes, et j’ai été ravi de cette
opportunité – du moins, au début. Mais
légalement, je n’ai aucun pouvoir décisionnaire,
pas plus que ne l’avait Martin d’ailleurs, qui
était toujours en vie à l’époque.
Malgré toutes ses imperfections, Vanity/Nemesis nous
inspire une certaine bienveillance. Il restera comme
l’album qui a réussi à sortir Celtic Frost du bien vilain
merdier dans lequel il s’était fourré, même si le
groupe n’a que peu de temps survécu à sa sortie. Un
an plus tard, à peine, rideau ! Il faudra attendre près
de quinze années pour que les génies reviennent avec
le gigantesque Monotheist (2006). Y
Track-listing de l’album original :
1/ The Heart Beneath – 2/ Wine In My Hand (Third From
The Sun) – 3/ Wings Of Solitude – 4/ The Name Of My
Bride – 5/ This Island Earth (Bryan Ferry) – 6/ The
Restless Seas – 7/ Phallic Tantrum – 8/ A Kiss Or A
Whisper – 9/ Vanity – 10/ Nemesis (+ sur CD Bonus : 11/
Heroes (David Bowie) – 12/ A Descent To Babylon
(Babylon Asleep))
Producteur :
Roli Mosimann (The The, The Young Gods, Faith No
More, Marilyn Manson...)
Line-up d’époque :
Tom G. Warrior (guitare, chant) – Curt Victor Bryant (basse)
– Martin Eric Ain (basse) – Steve Priestly (batterie)
11
 Le Monde… du Metal
LE CHIFFRE ROCK IN PEACE, CHRIS TSANGARIDES !
17ème ANNÉE - N°184 100% INDÉPENDANT PHOTOS : M.VILLALONGA

12
En projet depuis plus de douze
ans, le serpent de mer qu’est
l’adaptation cinématographique
de The Dirt (2001), l’autobiogra-
phie de Mötley Crüe, semble se
concrétiser enfin. Le casting, qui
serait finalisé, rassemblerait les
acteurs Iwan Rheon (Ramsay
Bolton dans Game Of Thrones) et
Daniel Webber (The Punisher),
mais aussi le rappeur Machine
Gun Kelly. C’est Jeff Tremaine
(Jackass) qui se trouvera derrière
la caméra de ce long-métrage dont
le tournage serait imminent et
dont la distribution sera assurée
par la plateforme de vidéo à la
demande Netflix.

LA PHRASE DU MOIS
• « Comment avons-nous réglé
ça ? En ne nous adressant pas Le 6 janvier dernier, le producteur anglais Chris Black Sabbath (The Eternal Idol/1987, premier album du

la parole ! »
(Neal Schon, guitariste/fondateur
de Journey interrogé par la
radio US Q103 au sujet de
ses différends avec plusieurs
membres du groupe, dont le
claviers Jonathan Cain, bien
trop proche de Donald Trump
à son goût. La femme de ce
dernier est la « conseillère
spirituelle » du président U.S.).
Tsangarides nous a quittés, terrassé par une pneumonie et
des problèmes cardiaques. Il n’avait que 61 ans. Un vrai
choc car Chris, actif jusqu’au dernier jour, avait produit
ou mixé plusieurs albums en 2017. Sa carrière a de quoi
filer des complexes à bien des producteurs, comme en
atteste le court résumé suivant : Chris se fait la main en
tant qu’ingénieur du son dès 1975 (il n’a alors que 19
ans !) et travaille notamment sur Sad Wings Of Destiny
(1976), premier classique de Judas Priest. Mais le kid
apprend vite et, en 1978, le premier album dont il prend
les rênes en tant que producteur n’est rien moins que
Back On The Streets de Gary Moore, qui renferme
notamment le hit « Parisienne Walkways » chanté par
Phil Lynott. Son destin est en marche ! S’ensuivent de
très nombreuses collaborations, dont nous retiendrons
plus particulièrement celles avec Tygers Of Pan Tang
(Wild Cat/1980, Spellbound/1981 et Ambush/2012), Thin
Lizzy (Renegade/1981 et Thunder And Lightning/1983,
ultime album studio de la légende irlandaise), Anvil
(Metal On Metal/1982, Forged In Fire/1983 et This Is
Thirteen/2007), Y&T (Mean Streak/1983), Barón Rojo
(Barón Al Rojo Vivo/1984), Mama’s Boys (Power And
Passion/1985), Sinner (Comin’ Out Fighting/1986),
DR
groupe avec Tony Martin au chant), Bruce Dickinson
(Tattooed Millionaire/1990, le premier disque solo du
chanteur d’Iron Maiden), Judas Priest (Painkiller/1990),
Ian Gillan (Toolbox/1991), Helloween (Pink Bubbles
Go Ape/1991), Exodus (Force Of Habit/1992), Yngwie
Malmsteen (Magnum Opus/1995 et Facing The Animal/
1997, l’un des derniers albums sur lequel figure le batteur
Cozy Powell) ou encore Angra (Fireworks/1998). Mais
même s’il a largement basé sa carrière sur le hard rock et
le metal, il ne faut pas oublier que Chris a également
bossé avec quelques grands noms du rock et dérivés, tels
que The Lords Of The New Church, Japan, Depeche
Mode, New Model Army, Killing Joke, Jan Hammer,
The Human League, Joan Armatrading, Concrete
Blonde, The Tragically Hip ou… Samantha Fox !
L’annonce de son décès a généré de très nombreuses
réactions, tous les musiciens ayant eu le plaisir de
travailler avec lui saluant à la fois son professionnalisme,
mais aussi son grand sens de l’humour et sa décontraction
qui faisaient que chaque session se déroulait dans une
bonne humeur permanente. Nous présentons toutes nos
condoléances à sa famille et à ses proches. Rock In
Peace, Chris !

NOUVELLES DU FRONT
La fin janvier a réservé une
épidémie de fins de carrières,
et pas des moindres. Slayer
a annoncé qu’il raccrochera
les gants après une dernière
tournée mondiale. Les pre-
mières dates révélées sont
programmées aux USA en
mai et juin. Lamb Of God, Anthrax,
Behemoth et Testament seront de la partie.
Rush, qui n’a plus donné de concerts depuis
2015, a également annoncé avoir mis fin à sa
carrière. « Nous n’avons
aucun projet d’album ou de
tournée. Après 41 ans, nous
pensons que ça suffit », a
déclaré le guitariste Alex
Lifeson. Et enfin, Lynyrd
Skynyrd a lui aussi annoncé
se lancer dans une tournée
d’adieu d’une trentaine de
dates, programmées de mai à
septembre aux USA… 6 Def
Leppard et Journey tourneront
ensemble cet été aux States.
58 dates sont au programme.
Au passage, précisons que le
Léopard Sourd, jusqu’alors réfractaire au
numérique, a enfin autorisé que sa disco-
graphie soit disponible sur les sites de
téléchargements légaux et
de streaming. 6 At The
Gates peaufine son sixième
album, un To Drink From The
Night Itself attendu le 18
mai chez Century Media. Le
successeur de At War With
Reality (2014) a été produit
par Russ Russell (Napalm Death, The
Haunted). 6 Décès de Mikio « Ko-Gami »
Fujioka, l’un des guitaristes du groupe
japonais Babymetal. Passionné d’astronomie,
il a fait une mauvaise chute dans un observa-
toire. Il était âgé de 36 ans. R.I.P. 6 Kamelot
publiera The Shadow Theory le 6 avril chez
Napalm Records. Sascha
Paeth (Epica, Avantasia) s’est
une nouvelle fois chargé de
la production. 6 C’est le 30
mars que les Irlandais de
Primordial sortiront Exile
Amongst The Ruins chez
Metal Blade. 6 Accusés de
viol en réunion et d’enlèvement après un
concert américain, les membres de
Decapitated, emprisonnés depuis le mois de
septembre dans l’attente d’un procès prévu

12
R.I.P. DAVE HOLLAND…
DISPARITION

Le 16 janvier dernier, le
batteur Dave Holland s’est
éteint à l’hôpital de Lugo
en Galice/Espagne, près de
Fonsagrada où il résidait
depuis plusieurs années. Il
n’avait que 69 ans. A
l’heure où nous mettons
sous presse, les causes de
son décès n’ont pas été
révélées. Holland a fait
ses premières armes avec
Trapeze, aux côtés de
Glenn Hughes et Mel
Galley avec lesquels il a
gravé six albums entre 1970 et 1978 (notamment Medusa/1970 et You Are
DR

The Music… We’re Just The Band/1972). Il a également joué sur Play Me
Out, album solo de Glenn Hughes paru en 1977. Mais sa carrière n’a vérita-
blement décollé qu’avec son intégration au sein de Judas Priest en 1979.
Avec ce dernier, il enregistrera British Steel (1980), Point Of Entry (81),
Screaming For Vengeance (82), Defenders Of The Faith (84), Turbo (86),
Priest… Live (87) et Ram It Down (88/quand bien même des rumeurs
persistantes prétendent qu’il ne joue pas sur ce dernier, mais qu’il ne s’agit
que de batteries programmées). Ces immenses succès ont permis au Priest
d’accéder pour l’éternité à la première division du metal. Remplacé par Scott
Travis en 1989, Dave a ensuite fait profil bas avant d’être rattrapé par des
problèmes judiciaires sur lesquels nous ne nous étendrons pas ici. Batteur à
la technique extrêmement dépouillée, mais d’une solidité à toute épreuve, il
laisse, quoiqu’en disent ses détracteurs, une trace indélébile dans le monde
du heavy metal.

DIMMU BORGIR LA NEUVIEME PORTE

BLACK METAL

Le 20 janvier dernier, Rock Hard

s’est rendu dans les locaux de
Nuclear Blast pour y découvrir en
avant-première Eonian, le neuvième
opus de Dimmu Borgir (dixième si
l’on prend en compte le réenregis-
trement de Stormblast paru en
2005). La sortie de l’album, prévue
pour le 4 mai, mettra un terme à
une absence discographie de huit
longues années ! Afin de faire
patienter les fans, le trio publiera le
single « Interdimensional Summit »
le 23 février. Les monstres du
metal norvégien, qui ont d’ores et
déjà annoncé leur participation à
plusieurs festivals estivaux (dont le Hellfest), débuteront leur tournée à la
rentrée. En attendant de découvrir nos premières impressions sur Eonian
(« Eternel ») dans notre prochain numéro, voici déjà le track-listing de ce
mastodonte, plus dense et symphonique que jamais : 1. The Unveiling - 2.
Interdimensional Summit - 3. Aetheric - 4. Counsil Of Wolves And Snakes -
5. The Empyrian Phoenix - 6. Lightbringer - 7. I Am Sovereign - 8. Archaic
Correspondence - 9. Alpha Aeon Omega - 10. Rite Of Passage.

à la mi-janvier, ont vu les charges pesant sur
eux être levées. Cette décision, qui n’est
pas un acquittement, est motivée par « le
bien-être de la victime » et les musiciens
pourraient être à nouveau
poursuivis à l’avenir. 6
Les Suédois de Bullet
publieront Dust To Gold le
20 avril chez SPV. 6 Suite
au départ du batteur Sal
Abruscato (ex-Type O
Negative), Life Of Agony a
recruté la musicienne Veronica Bellino. 6 Il
n’y aura pas de Fall Of Summer en 2018.
Malgré une fréquentation en hausse, la
météo plus que capricieuse de l’édition
2017 a notamment engendré de lourds frais
de réparation du site du festival. Cette
décision s’explique aussi par « la fatigue
accumulée de quatre années de dur labeur »
ressentie par les organisateurs qui, « plutôt
que de foncer tête baissée », disent préférer
« travailler à offrir plus tard
un événement bien pensé
et de qualité ». A suivre,
donc. 6 Sacred Reich rejoint
Metal Blade. Le groupe
thrash US publiera, courant
2019, son premier album
studio depuis Heal sorti en
 LA PLAYLIST DES PROS
BIFF BYFORD (SAXON)
1. AC/DC – Highway To Hell
2. VAN HALEN – Van Halen
ROCK HARD IL Y A 10 ANS...
Les 9 et 10 janvier 2008, Cavalera Conspiracy,
(par Philippe Lageat)
« Nous croyions que les membres de Venom
qui s’apprête à publier son premier album pensaient vraiment ce qu’ils chantaient, nous
3. LED ZEPPELIN – I

Inflikted, tourne le clip de « Sanctuary » au confie alors Tom, qu’ils ne feintaient pas.
4. WISHBONE ASH – Argus

Studio Carnot de… Montreuil ! Ce groupe est Mais plus tard, ces derniers ont ouvertement
5. METALLICA – The Black Album

le fruit des retrouvailles de Max et Igor admis jouer un rôle afin de vendre plus. Tu
Cavalera qui n’avaient plus bossé ensemble imagines le choc ! Il nous a été très difficile
PIERRE LE PAPE

depuis l’implosion de Sepultura en 1996. Nous

(MELTED SPACE)
d’admettre qu’une partie de ce groupe que nous
1. SARAH SCHACHNER – Assassin’s Creed Origins (B.O.)

profitons de la venue des frangins en France vénérions tant était un numéro de cabaret ! ».
2. EVERGREY – The Storm Within

pour les interroger, ainsi que Joe Duplantier Il y a pourtant plus naïf, ainsi qu’en atteste
3. DARK TRANQUILLITY – Atoma

(Gojira), immense fan des Seps qui tient la Burton C. Bell, qui délaisse un temps Fear
4. RAMMSTEIN – Paris

basse au sein du projet. De nombreuses autres Factory pour donner enfin naissance au
5. DEADMAU5 – At Play

interviews sont au programme : StoneRider, projet Ascension Of The Watchers, en

Pagan’s Mind, Testament, Rotten Sound, Fair déclarant à notre micro et sérieux comme un
MARIO GOOSSENS

To Midland, Hate Eternal, Eluveitie, Prong, pape : « Je me suis lancé dans un voyage afin
(TRIGGERFINGER)
1. THE WYTCHES – All Your Happy Life

Isole, The Mars Volta, The Solution, Hate, de comprendre le véritable sens de la vie ».
2. BAD BREEDING – Whip Hand

Dark Age et To-Mera. Notre équipe a également Aux dernière nouvelles, le chanteur n’aurait
3. DEPECHE MODE – Spirit

interrogé Markus Grosskopf (Helloween) qui, toujours pas atterri…

4. SLAYER – Reign In Blood

au sein de Bassinvaders, joue aux côtés de

5. NAPALM DEATH – Scum

compatriotes bassistes aussi emblématiques Top Albums de la Rédaction RH74 :

que Peavy Wagner (Rage), Tom Angelripper • BETWEEN THE BURIED AND ME –
NICLAS ENGELIN

(Sodom) et Schmier (Destruction). Ein schönes Colors (M. Rivalin)

(WE SELL THE DEAD)

Familienfoto, Herr General ! Nos envoyés • BYZANTINE – Oblivion Beckons (B. Bages)
1. MAGNUM – On A Storyteller's Night
2. MERCYFUL FATE – Don't Break The Oath

spéciaux se sont enfermés en studio avec In • DANKO JONES – Never Too Loud
3. BLACK SABBATH – Heaven And Hell

Flames à Göteborg et Opeth à Stockholm afin Galactic Cowboys, 30 Seconds To Mars ou (S. Kowalik)
4. CANDLEMASS – Nightfall

de découvrir les albums A Sense Of Purpose encore Carnival In Coal. Autre moment « à • DEATH ANGEL – Killing Season
5. METALLICA – Ride The Lightning

et Watershed en avant-première. Comme aime part » de ce RH74, l’interview d’un Tom (P. Lageat)
à dire la presse anglo-saxonne, remember Gabriel Fischer (alias Satanic Slaughter) qui • ELUVEITIE – Slania (I. Le Maguet)
FRANCOIS MERLE

where you read it first ! La Metaltheque revient en détail sur la carrière d’un • KINGDOM OF SORROW – Kingdom
(MANIGANCE)

Idéale est cette fois-ci consacrée aux Hellhammer incompris en son temps, mais Of Sorrow (L. Reymond)
1. IN FLAMES – Battles
2. DEF LEPPARD – Def Leppard

« Inclassables Pt.2 », autrement dit à des ovnis depuis devenu culte auprès de toute une • ANDRE MATOS – Time To Be Free (Benji)
3. ADX – Non Serviam

comme LID, Dredg, Psychotic Waltz, The génération de groupes et de musiciens • THE TANGENT – Not As Good As The
4. NIGHTMARE – Dead Sun

Mars Volta, The Dillinger Escape Plan, (Napalm Death, Sepultura, Phil Anselmo…) : Book (S. Auzilleau)
5. FIREWIND – immortals

LES INSOLITES DU WEB

LAURENT PLAINCHAMP
(KOZH DALL DIVISION)
1. METALLICA – Kill ‘Em All INTERNET
2. QUEENSRŸCHE – Rage For Order

Envoyez-nous vos liens à l’adresse insolites@rockhard.fr !

3. JUDAS PREIST – Screaming For Vengeance
4. KING DIAMOND – Abigail

• Des motos rutilantes transformées en kits de batterie ambulants ? C’est le lien unissant les
5. KING DIAMOND – Them

membres des Heartbeat Riders Of America. Voici une vidéo de l’un d’eux, immortalisé au
THE DUKE OF NOTHING

feu rouge en plein solo. Pas sûr du tout que l’homologation d’un tel véhicule soit envisageable
(TURBONEGRO)

chez nous… Dommage ! http://bit.ly/motodrums

1. NO WARNING – Torture Culture

• Popularisée récemment, cette interview de 2012 filmée

2. ARBORIST – Home Burial
3. BURN – From The Ashes EP

sur une date mexicaine de Kiss montre le groupe

4. LEE MORGAN – The Last Session

maquillé demander à l’interviewer de retourner son t-

5. LEEWAY – Desperate Measures

shirt Iron Maiden, puis de le remplacer par un t-shirt aux

WILL KNOX (LIZZARD)

couleurs de Kiss. Une simple question de « respect »,

1. TALK TALK – Laughing Stock

disent-ils… Vraiment ?! http://bit.ly/kissshirt

2. PUSCIFER – Money Shot

• En apprenant la disparition programmée du

3. STEVE REICH – Music For 18 Musicians
4. GILAD HEKSELMAN – Homes

CAC Georges Brassens, centre d’action culturelle de la ville de Mantes-la-Jolie

5. PJ HARVEY – Let England Shake

condamné suite à la décision de la mairie de lui couper sa subvention, Reuno de

Lofofora a tenu à lui témoigner son soutien en adressant un clin d’œil au célèbre
ISMAEEL ATTALLAH
(CRESCENT)

« Auvergnat ». http://bit.ly/cacreuno
1. DISSECTION – Storm Of The Light’s Bane

• Quand Joe Perry fête la sortie de son

2. WATAIN – Trident Wolf Eclipse

album solo à Los Angeles, le guitariste

3. EMPYRIUM – Tout
4. AT THE GATES – At War With Reality

d’Aerosmith est accompagné par des potes

5. TRIBULATION – Children Of The Night

de passage dans le coin : les frangins DeLeo

(Stone Temple Pilots), Chris Robinson (The
MAT MCNERNEY
(GRAVE PLEASURES)

Black Crowes) Robin Zander (Cheap Trick),

1. HENRIK PALM – Many Days

Gary Cherone (Extreme), Slash… Oui, rien

2. ALDOUS HARDING – Party

que ça ! http://bit.ly/perryroxy
3. CHELSEA WOLFE – Hiss Spun
4. MAGGOT HEART – City Girls

• Les présentations d’amplis ne sont généralement pas très captivantes… Mais ça,
5. GODFLESH – Post-Self

ça ne concerne bien évidemment pas l’inénarrable Brent Hinds de Mastodon et

son nouvel ampli Brent Hinds Terror. Il est si complet qu’il possède un « clean channel », un « dirty channel » et
ERIK DANIELSSON (WATAIN)
1. RAM – Rod

même un « Playboy Channel » ! http://bit.ly/brentampli

2. DEGIAL – Predator Reign
3. DREADFUL FATE – The Sin Of Sodom
4. PERVERTED CEREMONY – Sabbat Of Behezaël
5. PROCESSION – Doom Decimation

1996. 6 Le 30 mars, Napalm Death publiera
une collection de raretés, enregistrées entre
2004 et 2016, intitulée
Coded Smears And More
Uncommon Slurs. Un nouvel
album studio sortira égale-
ment cette année. 6 No
One Is Innocent publiera
Frankenstein le 30 mars
chez Verycords. 6 Mindfucker
est le titre du nouveau Monster Magnet
attendu le 23 mars chez Napalm Records. 6
« Album du mois » de notre camarade Stéphane
Auzilleau dans le Rock Hard de décembre
2017, From The Fires de Greta Van Fleet,
déjà disponible en numérique, sortira enfin
dans les bacs français le 2 mars prochain. Le
jeune groupe très influencé par Led Zeppelin
sera le 28 mars aux Etoiles, à Paris (concert
complet), et le 18 juin au Download Paris aux
côtés de Guns N’Roses ou
encore de Volbeat. 6 En hom-
mage à leur camarade Warrel
Dane disparu en décembre
dernier (Cf. RH183), les membres
de Sanctuary maintiennent leur
participation à la tournée américaine d’Iced
Earth prévue entre février et mars. C’est
Joseph Michael (Witherfall) qui tiendra le
micro. 6 Skindred publiera
Big Things le 27 avril. Phil
Campbell (ex-Motörhead)
apparaît sur le titre « Ma-
chine » déjà entendu dans
le générique de l’émission
de télé de Brian Johnson
(ex-AC/DC), Cars That Rock.
6 Nous sommes encore en hiver, mais
Sodom a d’ores et déjà fait son ménage de
printemps. Tom Angelripper (chant, basse) a
remercié Bernd « Bernemann » Kost (guitare)
et Markus « Makka » Freiwald (batterie),
membres du groupe depuis 1996 et 2010, et
transforme le trio teuton en quatuor. Ses
nouveaux musiciens sont les
guitaristes Yorck Segatz et
Frank « Blackfire » Gosdzik,
déjà membre de Sodom de
1986 à 89, et le batteur
Stefan « Husky » Hüskens.
Allez, un voyage de presse
pour fêter ça ? 6

14
 L’OEIL DE VERRE
Wattie Buchan (The Exploited), Paris,
le 6 février 1996.
Wattie a vraiment une « gueule ». A mes yeux,
cette photo résume le personnage : un regard
profond, un brin « défoncé », mais qui laisse
entrevoir une pile électrique et quelqu’un qui
ne se laisse pas marcher sur les pieds… Wattie,
pourtant, est un homme vraiment adorable
avec qui j’ai toujours plaisir à faire des photos.

Tous les mois, une photo « plein pot » extraite des archives de Marc Villalonga et commentée par le photographe himself…
 La rubrique qui ne part pas à vau l'eau, par Charlélie Arnaud.
De plus en plus, sur la scène underground, les combos n'hésitent pas à utiliser à tout va le terme de « projet »
pour se définir. Et pour cause : difficile de parler de « groupe » dans le cas d'un one-man band, d'un duo,
et plus encore lorsqu'un ensemble est composé de membres issus de divers autres formations plus établies.
Il est d'ailleurs amusant de voir certaines villes françaises (je pense notamment à Poitiers ou à Amiens) • Sam Guillerand et Jérémie Grima se sont déjà
fourmiller de groupes dans lesquels on retrouve toujours la même dizaine de musiciens, mais agencée tous deux illustrés dans de précédents ouvrages,
différemment. Et puis, dans le mot « projet », il y a aussi cette jolie notion d'envie, et l'idée d'un plan tiré musicaux comme littéraires. Ensemble, ils ont
décidé de rendre hommage aux racines d’un
sur l'avenir. Les projets ont bien dépoussiéré la scène en osant souvent aller voir un peu plus loin que les genre, et c’est ainsi qu’est né ENJOY THE
accords de base, et ont renvoyé à leurs calendes les « groupes » des années 80. Alors, vivons avec notre VIOLENCE : Une Histoire Orale des Origines de
temps : faisons des projets ! Cette rubrique est là pour les soutenir. Support the underground ! la Scène Thrash/Death en France. Retraçant les faits
d’armes de nos compatriotes les plus teigneux,
ment (quelle scène plus que le HxC ne plus emocore qui rappellent parfois ce pavé de 450 pages au format A4 sur papier
glacé a vu les deux auteurs s’entretenir avec près
manque jamais une occasion de rendre Emery ou encore UnderOath (« Rough
de 70 acteurs de la scène française des origines
hommage à ses pères fondateurs ?), Diamond »). Bref, en douze titres pour (notamment des musiciens, mais aussi les activistes
mais pioche également sans vergogne vingt-sept minutes, Stinky prouve avec underground du fanzinat, et bien d’autres). Un
dans le meilleur des années 2000, panache qu’il n’a de leçon à recevoir de menu rudement appétissant, pour un ouvrage
Comeback Kid en que vous pouvez dès à présent précommander à
tête (« Sliders », cette adresse : www.enjoytheviolence.fr
« Unanswered »,
etc.), ou encore les
derniers Ignite

STINKY
Clisson
Hardcore
Plus de 270 concerts dans 14 pays, 4
tournées européennes… Stinky est certes
toujours underground, mais bon, nous
sommes tout de même assez loin du
combo qui ne sort pas de sa cave humide.
Et à l’écoute de l’album From Dead-End
Street, il est évident que ces années sur la
route ont été formatrices : tout ici est
réglé comme du papier à musique, tu
appuies sur « Play », et ça rigole tout
seul. Le hardcore du combo de Clisson
emprunte aux « grands anciens », évidem-
(« Otherside »). La
grande surprise
vient du chant de
Claire, toujours dans
le cri, qui nous
évite avec bonheur
le bon vieux poncif
éculé « couplets
braillés/refrains
chantés ». Rien que
pour cela, merci !
Grosso modo, nous
tenons ici notre
Candace Kucsulain (Walls Of Jericho)
made in France, pas moins. La demoiselle
peut enrhumer bien des mâles en deux
gueulantes. Certains brûlots bien en
dessous des deux minutes sont de
sacrées mandales (« Storm Surge »),
même si, à l’occasion, les guitaristes vont
également piocher dans quelques tonalités
l’ai dit. Cette référence est si pointue
qu’il faut toujours marcher sur des œufs
lorsqu’on ose l’utiliser. Cela faisait bien
longtemps que nous n’étions pas vrai-
ment allés voir ce qui se passait chez nos
voisins afin de nous concentrer sur la
scène française, mais la découverte de
PeroPero nous a tellement assis qu’un
article s’imposait tout naturellement. Ce
duo (!) autrichien relocalisé à Berlin est
formé de deux musiciens tout-à-fait
personne, mais qu’il est prêt à en donner.
A noter la présence de Vincent (AqME,
The Butcher’s Rodeo) sur « No Recovery »
et de Kevin (Insanity Alert) sur « Golem ».
Il n’y aura aucune dérogation : From
Dead-End Street est définitivement obli-
gatoire à tout coreux qui se respecte.
http://stinkyhc.bandcamp.com
Bien malin qui pourra résister au groove
monstrueux de « Ehm », l’un des deux
singles de l’album, dont le clip absolu-
ment fascinant vous tend les bras sur
YouTube. Sans mentir, il est même plus
qu’étonnant qu’une major ne soit pas
encore venue faire des courbettes au
combo qui pourrait sans démériter se
frotter au gratin de la scène prog alterna-
tive, Tool en tête. « Tongue », « Molting
Day », « The Royal Banquet Hall », etc.,
• Le doom n’est pas à proprement parler une
spécialité hexagonale, mais quel plaisir de
découvrir que ce savoir-faire existe bel et bien en
notre contrée : CONVICTION, avec sa démo 2
Titres Outworn nous délivre plus d’un quart
d’heure de litanies désespérées et écrasantes. A
la barre du navire, Olivier Verron (Temple Of
Baal) prouve avec panache qu’il a su intégrer tous
les codes du style et les restituer avec une
sensibilité toute personnelle (mention spéciale
au chant). Son projet devrait d’ailleurs prendre
prochainement de l’ampleur pour devenir un
groupe à part entière. Si vous aviez craqué en
son temps pour l’album As The Shadows Fall de
Godsend (1993), nul doute que cette démo est
taillée pour vous faire passer une fin d’hiver gloomy
comme pas deux. A télécharger sur
http://convictiondoom.bandcamp.com

PEROPERO
exceptionnels : Julian Pajzs (chant, guitare, sont autant de titres qui vous décollent la
synthés) et Valentin Schuster (batterie). tête dès la première écoute, mais à bien y
réfléchir, tous seraient à
citer. Lizards semble bien
flirter avec le sans faute,
et nous n’hésiterons pas à
clamer sans exagération
Berlin (Allemagne) que PeroPero est très
Metal fusion progressif probablement l’un des tout
Auziiii ! Djuuuul ! Venez voir ! meilleurs groupes que
On a sonné à la porte et je nous ayons découverts
crois que c’est pour vous. ces dernières années.
Rush qui aurait mangé Reprenez par le menu
Nomeansno et Primus, c’est toutes les références sus-
de la came pour progueux, ça, mentionnées, et courez
non ? Et le résumé est bien immédiatement la bave
trop vite fait car, à l’écoute de aux lèvres découvrir ce
l’album Lizards, d’autres idées binôme extraordinaire...
viennent facilement à l’esprit. http://peropero.band-
Comme Faith No More. Ou camp.com/album/lizards
King Crimson. Ouf, ça y est, je
• Nous avions déjà évoqué TENTATION à la
sortie de son album éponyme, mais une piqûre
de rappel ne fait jamais de mal tant ce groupe
originaire des Pyrénées-Orientales fera chaud au
cœur des plus traditionnels d’entre vous : nous
parlons bien ici de heavy metal « à la française »
tel que le pratiquaient, dans les années 80, des
groupes comme H-Bomb et autres Attentat Rock.
Le combo sort ce mois-ci un 45 Tours (hé oui !)
comprenant « Bruixes », issu de son album, et
l’inédit « Shaman » pour lequel un clip vient
d’être tourné. Deux titres qu’on se plaît à écouter
avec un large sourire de nostalgie et de satisfaction
tant il nous ramène à une époque bénie et lointaine,
aussi bien en termes de musique que de production
(bravo à qui y décèlera la moindre trace de
2018 !). Faites donc un saut dans le temps, ça fait
du bien.
http://www.inferno-records.net

17
 Propos recueillis par Morgan Rivalin
Photos : Marc Villalonga
Interview réalisée le 04 décembre 2017 à Paris

A l'occasion de la sortie, le
02 mars prochain, de l'album
événement du Michael Schenker
Fest, un Resurrection
rassemblant rien moins que
les chanteurs Gary Barden,
Graham Bonnet, Robin
McAuley et Doogie White
(interview dans notre
prochain numéro !), nous
avons soumis une version
« grand format » de notre
questionnaire Toute Première
Fois au légendaire guitariste
teuton. Michael, c'est à toi !

Rock Hard : Qui fut ton premier héros

musical ?
Michael Schenker : Jeff Beck. Enfin, avant
de jeter mon dévolu sur lui, j’ai quand
même beaucoup écouté les Beatles et les
Rolling Stones. J’avais neuf ans environ
(Ndlr : Michael Schenker est né en 1955 dans
les environs d’Hanovre, en ex-Allemagne de
l’Ouest). C’est à cet âge que j’ai commencé
à jouer de la guitare, en apprenant les
morceaux du Hit Parade qui passaient en
boucle à la radio. On n’y entendait que les
Beatles, Elvis Presley, etc. C’est à l’âge de
14 ans, en 1969, que mes goûts ont évolué
à mesure que les groupes rock ajoutaient
de la distorsion dans leur son. Black
Sabbath, Led Zeppelin et Deep Purple sont
arrivés et ma vie n’a plus jamais été la
même ! J’ai alors décidé de devenir le
meilleur guitariste possible. Jeff Beck (The
Yardbirds), Eric Clapton (The Yardbirds,
Cream), Jimmy Page (The Yardbirds, Led
Zeppelin) ou encore Leslie West (Mountain)
étaient mes héros. C’est à cette période que
j’ai rencontré Klaus Meine et que nous
avons commencé à jouer dans un groupe
basé à Hanovre nommé Copernicus.

Ton premier album rock ou hard rock ?

Sans doute Led Zeppelin (1969), mais j’ai
vraiment découvert tout un tas de groupes
en même temps. Il se trouve que la plupart
sont devenus mythiques ! Tous ces disques
m’ont énormément inspiré. Je m’en suis
imprégné jusqu’à l’âge de 17 ans, autour de
1971/72. Ensuite, je n’ai quasiment plus
rien écouté. Ce fut un vrai tournant dans
ma carrière. Je ne voulais pas continuer
de copier : je voulais tracer ma propre
voie. Je voulais créer, être un initiateur de
tendances, pas un suiveur. J’ai tout de suite
senti qu’il y avait là un danger. Pour moi,
un guitariste soliste doit dire ce qu’il a sur

18
le cœur et s’exprimer sans limites.
C’est impossible à faire si tu es
encombré par la musique des autres.
Cette façon de procéder est la seule
qui permet d’exprimer des choses
personnelles, et donc uniques.
Quel est le premier album que tu as
acheté avec ton argent de poche ?
In Rock (1970) de Deep Purple. En
fait, je l’ai acheté avec mon argent de
poche ET celui d’un copain. Nous nous
sommes cotisés pour pouvoir nous
l’offrir. Nous avions flashé sur la voix
aiguë de Ian Gillan à la radio. Elle
nous avait beaucoup intrigués !
Ton premier instrument de musique ?
Mes cordes vocales ! J’ai toujours
chanté. Très jeune, j’adorais déjà
chanter des harmonies, ce qui voulait
dire que j’avais besoin de m’exprimer
en musique. Dès que je voyais quelque
chose qui permettait de faire du bruit,
comme une casserole qui traînait dans
un coin, je tapais dessus. J’ai toujours
aimé la batterie. A la maison, il y avait
plusieurs instruments de musique
auxquels je m’essayais régulièrement :
le piano de ma mère, le violon de
mon père, etc., mais la guitare est le
premier instrument dont j’ai joué
sérieusement. J’en suis tombé follement
amoureux à l’âge de 16 ans...
(Réalisant son lapsus) Euh non, 16 ans,
c’est l’âge auquel mon frère Rudolf
s’est mis à la guitare. Moi, c’était à 9
ans. J’ai tout de suite été fasciné par
l’art du solo. Pour moi, c’était comme
un jeu d’apprentissage : « Joue, cherche,
découvre ». Je n’ai jamais eu l’impression
de travailler : ce n’était qu’un jeu,
comme une chasse au trésor. On dit
« jouer de la musique »… Je m’y
retrouve complètement. Qu’on soit un
enfant ou un adulte, on peut toujours
aborder la musique comme un jeu.
C’est une question d’état d’esprit. Pour
en revenir à ma première guitare, il
s’agissait de l’ancienne gratte de
Rudolf : une Framus reçue pour ses
16 ans (Ndlr : Framus était une firme
allemande de lutherie qui a cessé ses
activités à la fin des 70’s avant d’être
relancée par une autre société allemande,
Warwick). Quand tu es le petit frère,
tu portes les fringues de l’aîné. Même
à ma confirmation, je me suis retrouvé
avec des habits usés qui n’étaient plus
dans le coup depuis sept ans… Mais
c’est comme ça ! C’est normal. Et
puis, finalement, ce n’est pas si mal :
ça t’entraîne à faire avec ce qu’on te
donne. Qu’il s’agisse de fringues, de
vélos ou de guitares, j’ai toujours été
la voiture-balai ramassant ce que mon
frère n’utilisait plus. Et j’ai toujours
fait de mon mieux avec ce qu’on m’a
donné ! (sourire)
Ton premier groupe ?
Enervates, dans lequel je chantais.
J’avais 11 ans. Avec trois camarades
d’école, nous reprenions principalement
les Beatles. Ensuite il y a eu Cry (Ndlr :
rebaptisé Cry Express), puis Copernicus,
avec Klaus Meine au chant. Nous
reprenions du Rory Gallagher, du
Deep Purple, du Led Zeppelin, etc. A
cette époque, The Scorpions (Ndlr :
formé en 1965 par Rudolf Schenker) en
était encore à reprendre des morceaux
du Hit Parade. Nous, nous rockions
déjà ! (sourire) Et en 1969, Klaus et
moi avons rejoint Scorpions en même
temps. J’avais 14 ans.
Le premier concert que tu as vu ?
Je crois bien que le premier concert
Black Sabbath, Led Zeppelin et
Deep Purple sont arrivés et ma vie
n’a plus jamais été la même !
(Michael Schenker)
que j’ai vu est également un concert
que j’ai donné ! (rires) A l’âge de 11
ans, j’ai donné mon tout premier show
avec Enervates. Mon père nous avait
emmenés à la salle avec notre matériel
et ma mère s’occupait de la billetterie,
à l’entrée. Mais je suis également allé
voir Scorpions à la même période, en
1965. Je me trouvais dans le public, puis
je suis monté sur scène pour jammer
avec le groupe, le temps de quelques
instrumentaux. Honnêtement, je ne
sais plus si, à ce moment précis,
j’avais déjà formé Enervates… Très
franchement, tout ça s’est quasiment
déroulé en même temps. Avec
Enervates et Cry, j’ai donné pas mal
de concerts, tous organisés dans les
environs d’Hanovre. Et à la fin des
années 60, autour de l’âge de 17 ans,
j’ai assisté à beaucoup de festivals.
J’avais constamment envie de décou-
vrir de nouveaux guitaristes. Il y avait
toujours de nouveaux festivals et je
savais que je pouvais tomber sur la
perle rare à chaque instant : des
Johnny Winter, Rory Gallagher et autres
Leslie West en puissance...
Ta première composition ?
« In Search Of Peace Of Mind » (Ndlr :
un titre de Lonesome Crow, premier
album de Scorpions publié en 1972. Son
titre exact est « In Search Of The Peace
Of Mind », mais le « The » n’avait pas
vraiment lieu d’être). Je me suis chargé
de la musique et Klaus – si mes souve-
nirs sont exacts – a écrit les paroles.
C’était ma musique à 100 %, mais le
morceau a été crédité à « Scorpions »
dans son ensemble. J’ai écrit la plupart
des morceaux de Lonesome Crow, mais
tout le monde en a bénéficié. J’avais
sept ans de moins. Sept ans ! Ce n’est
pas rien. On a profité de ma jeunesse
pour m’arnaquer. « Michael n’est qu’un
gamin : nous n’avons qu’à partager ses
crédits ! Croquons toutes ces choses
géniales qu’il a à nous offrir ! ». Pfff…
Je ne m’en suis rendu compte que des
années après. En réalité, ça fait très
peu de temps que j’ai compris à quel
point je m’étais fait avoir si tôt dans
ma carrière de musicien, alors que je
n’étais qu’un gamin.
Ton premier enregistrement studio ?
Je pense que c’était avec Scorpions,
sans doute peu avant l’enregistrement
de Lonesome Crow. C’était comme un
test grandeur nature, et c’était la
toute première fois que nous mettions
les pieds dans ce lieu qui nous faisait
fantasmer : un studio d’enregistrement.
Mais nous n’avions pas vraiment
passé un très bon moment. Je crois
que le gars qui gérait le lieu ne
savait pas trop ce qu’il était censé
faire avec tous ces boutons ! (rires)
Heureusement, nous avons vite déniché
Conny Plank, un producteur qui avait
déjà fait ses preuves (Ndlr : à l’époque,
il venait notamment de travailler avec le
pionner de la musique électronique
Kraftwerk). Nous sommes allés le
retrouver au Star Studio d’Hambourg
où il officiait, et là-bas, tout s’est très
bien passé. C’est là que j’ai enregistré
« In Search Of Peace Of Mind », ma
première compo qui est aussi le mor-
ceau doté du solo que je préfère. J’ai
réécouté cette chanson il y a peu de
temps et je n’ai rien trouvé à y redire.
C’est dingue : c’est mon tout premier
morceau, composé dans la cuisine
de ma mère, et le solo a jailli, juste
« comme ça » ! Son côté spontané et
évident me fait penser à ce que je
ressens quand j’écoute le « Theme
From An Imaginary Western » de Leslie
West. Je ne suis pas aussi tendre avec
beaucoup d’autres choses que j’ai
composées et jouées à l’époque... Par
exemple, le solo de « I’m Goin’ Mad »
est clairement immature. En tout cas,
cette expérience de studio avec Conny
Plank reste un excellent souvenir.
Ta première cuite ?
A 11 ans, avec trois camarades. Le
père d’un d’eux, qui était boulanger,
achetait pas mal de liqueurs pour
ses pâtisseries. Nous avons tapé dans
son stock et avons picolé de l’eau de
vie. A 11 ans, ça fait des ravages ! Je
me suis carrément réveillé à l’hosto…
Mauvais souvenir.
La première fois que tu as entendu
l’un de tes morceaux à la radio ?
Ce fut un grand moment ! C’était dans
l’émission de radio qui m’avait fait
découvrir tant de groupes et tant de
19
 chansons géniales. En 1970, c’est de
cette façon que j’ai découvert le
« Immigrant Song » de Led Zeppelin.
Un sacré choc ! Et deux ans plus
tard, la même émission a diffusé un
extrait de Lonesome Crow. J’étais
dans mon lit quand le morceau a
débuté... (Son regard s’illumine) Je ne
peux même pas décrire ce que j’ai
ressenti !
La première fois que tu as vu l’un
de tes disques dans les bacs ?
Je ne m’en souviens plus vraiment,
sans doute parce que je n’ai jamais
vraiment traîné dans les magasins de
disques. J’écoutais beaucoup la radio
et Rudolf enregistrait tant de choses
que j’avais toujours beaucoup de
musique à découvrir. En revanche, je
me souviens d’une anecdote savoureuse
en lien avec le tout premier exemplaire
de Lonesome Crow que nous avons
20
tenu entre nos mains. A peine le vinyle
reçu dans la boîte aux lettres, nous
étions partis quelque part dans le Sud
de l’Allemagne pour assurer une
journée de promotion. Nous avions bien
évidemment emmené notre exemplaire
du disque qu’un de nous avait posé
sur la plage arrière de la voiture. Or,
il faisait très beau ce jour-là... Vous
avez compris : il a fondu ! (rires)
Ta première tournée ?
Pour Lonesome Crow. Durant un an,
nous avons donné de nombreux
concerts. J’étais heureux de monter
sur scène, mais plus encore de
pouvoir passer du temps avec mon
grand frère. Puisque sept ans nous
séparaient, nous ne traînions jamais
ensemble. Nous n’avions pas les
mêmes amis et j’étais encore à l’école
quand Rudolf a commencé à travailler.
Cette année passée sur les routes
avec mon frère fut une très belle
année. Et puis, j’ai rejoint UFO.
J’avais toujours été clair avec les
Scorpions, je les avais prévenus :
« Si, un jour, un groupe anglais me
contacte, je partirai ». Je ne parlais
pas bien anglais, mais je sentais que
c’était là-bas, en Angleterre, que ma
musique serait vraiment comprise.
J’ai prévenu mes camarades et leur ai
enlevé une sacrée épine du pied en
trouvant Uli Roth, mon remplaçant.
Ils n’avaient pas de raison d’être
tristes ! (rires)
Ton premier Disque d’Or ?
Sincèrement, je n’ai jamais suivi ça
de très près... Et je le regrette souvent !
Je sais que certains albums de UFO
ont très bien marché (Ndlr : le groupe,
ou plutôt ses labels, ont parfois revendiqué
un total de 10 millions d’albums écoulés
dans le monde), mais je ne saurais
dire si nous avons décroché un
Disque d’Or à un moment ou un autre.
Je sais seulement que Lovedrive
(1979) de Scorpions a été certifié Or
(Ndlr : Michael Schenker, qui avait
quitté Scorpions depuis 1973, est
revenu jouer des soli sur Lovedrive,
mais son retour dans le groupe a tourné
court), au Japon et aux USA, si mes
J'ai toujours été la voiture-balai
ramassant ce que mon frère
n'utilisait plus. Et j'ai toujours
fait de mon mieux avec ce qu'on
m'a donné ! (Michael Schenker)
souvenirs sont exacts... mais ça ne
m’a jamais vraiment intéressé. Je
ne fais pas de la musique pour
décrocher des Disques d’Or. Au-delà
des ventes, ça me suffit de savoir
que, pour beaucoup, Strangers In The
Night (1979) de UFO est l’un des
meilleurs live de tous les temps. En
revanche, j’ai toujours été très
honoré qu’on me remette des prix de
guitariste de l’année, par exemple.
Ça, ça me touche.
Ta première baston ?
Je me suis battu à l’école, comme
tous les gamins, mais je me souviens
surtout d’une baston évitée de jus-
tesse. C’était en Allemagne, avec
UFO. Puisque nous nous trouvions en
Allemagne, j’étais le seul à avoir le
droit d’acheter de la bière pour
l’ensemble du groupe. A peine sorti
de l’hôtel, je suis tombé sur un défilé
militaire. Histoire de planter le
décor, je précise que j’avais de longs
cheveux blonds, un énorme manteau
de fourrure et des platform boots qui
n’étaient pas vraiment au goût de ces
messieurs. Le plus petit de la troupe
– les plus petits sont toujours les
plus nerveux ! – s’est dirigé vers moi
et m’a décoché une droite. Il a raté
mon visage, mais a atteint mon
oreille. Plutôt que de me battre,
j’ai couru le plus vite possible !
Heureusement, à quelques centaines
de mètres de là se trouvait un poste
de police. Sans ça, il m’aurait sans
doute démoli ! Il était évident qu’il
détestait vraiment tout ce que je
symbolisais... J’aurais également pu
parler de Phil Mogg – tiens, encore
un homme de petite taille accro à la
bagarre ! – quand il m’a asséné un
grand coup de poing dans le bide...
C’est pour ça que je suis parti après
Strangers In The Night. Mais c’est une
autre histoire ! (sourire)
La première fois que tu t’es senti
idiot sur scène ?
Ça m’embarrasse de parler de ça,
mais c’est la meilleure anecdote que
j’ai ! (rires) Il y a longtemps, dans
UFO, j’avais pour habitude de porter
de très longues bottes en concert.
Les lacer de bas en haut me prenait
des plombes ! J’avais dû manger un
truc pas très frais car un soir, en
plein concert, a surgi une diarrhée
aiguë comme je n’en avais encore
jamais connue. Et j’avais ces foutues
cuissardes !!! (rires) Ce fut... horrible.
Un vrai carnage ! J’ai tenté de faire
bonne figure et ai attendu la fin du
concert pour ENFIN enlever ces
foutues bottes et sauter dans la
douche. Les bottes, qui étaient com-
plètement foutues, ont directement
atterri dans la poubelle la plus
proche ! (rires)
Ta première groupie ?
Oh, je n’ai jamais été un grand adepte
des groupies. C’est même le moins
que l’on puisse dire ! En fait, je n’ai
jamais été à l’aise quand j’ai vu que
des fans semblaient obsédés par ce
que je faisais, hommes et femmes
confondus. Ce fut particulièrement le
cas en 1977, au moment de la sortie
de Lights Out. A l’époque, des fans de
UFO me suivaient partout en perma-
nence en criant « Michael Schenker est
Dieu !!! Michael Schenker est Dieu !!! ».
Partout où j’allais, j’entendais ça en
boucle. Ça m’a tellement agacé que
je me suis enfui pendant quelques
mois, histoire de faire le point. J’ai
toujours eu du mal à gérer la célé-
brité. Ce n’est vraiment pas pour ça
que j’ai signé. Moi, tout ce que j’ai
toujours voulu, c’est jouer de la
musique. Point. Y
Propos recueillis par François Blanc de cordes très bien pensés.
Interview réalisée le 15 janvier 2018 J’apprécie aussi beaucoup le
travail de John Williams, autre
Chaque mois, un musicien revient sur les maître absolu du genre qui
films de sa vie, ses grands moments sur a su conférer une véritable
grand (et petit) écran. Cette fois-ci, c’est le magie à de nombreux block-
busters hollywoodiens.
sympathique chanteur et guitariste Seeb
qui s’y colle. Car après tout, « he likes to Ton
movie, movie »… réalisateur préféré ?
Je ne m’étais jamais posé la question Ton film d’animation préféré ?
Rock Hard : Quels sont tes cinq films jusqu’ici, mais j’avoue avoir un faible Je n’en visionne presque
préférés ? pour Steven Spielberg. Il a tant de jamais, mais j’aime beaucoup
Sebastian « Seeb » Levermann : bons films à son actif ! Même si les Taram Et Le Chaudron
Le Cercle (2002). La version originale scénarios ne sont pas de lui, il est Magique (1985). Il n’est
japonaise de 1998 est ennuyeuse, très doué pour exploiter les bonnes pas très connu, mais c’est
mais ce remake américain est tout idées qu’on lui soumet. Son style de sûrement le dessin animé le
simplement bluffant. Il s’agit du S. Spielberg réalisation s’avère souvent d’une plus sombre jamais réalisé
meilleur film d’horreur jamais réalisé, remarquable efficacité. par Disney. On y voit s’y
point barre ! Le concept, l’histoire lever l’armée des morts
et l’atmosphère sont absolument Ton affiche de film préférée ? menée par le terrifiant
dantesques. Mon conseil : allez-vous Celle de Les Dents De La Mer Seigneur des Ténèbres, dont
coucher, mettez un réveil et visionnez (1975) compte parmi les meilleu- les interventions dans la
le film seul, à trois heures du matin, au fond de votre lit res jamais réalisées. Cet énorme version allemande sont tout
avec un bon casque pour ne rater aucun détail. requin est si saisissant ! On se simplement excellentes ! Le script pourrait très bien être
L’expérience est franchement intense ! sent véritablement mal à l’aise utilisé pour concevoir un véritable film d’horreur.
Les Aventuriers De L’Arche Perdue en regardant ce poster. De
(1981). Indiana Jones est un excellent plus, quel autre visuel peut se Le dernier film que tu as vu ?
personnage et Harrison Ford un acteur targuer de réussir à résumer à Star Wars : Les Derniers Jedi (2017). Je l’ai détesté !
formidable. Je trouve le script très bien lui seul l’intégralité d’un film ? L’humour tombe complètement
pensé et la bande-originale excellente. C’est un véritable coup de à plat, le film est rempli d’incohé-
Certains leitmotivs mélodiques sont génie ! rences et est globalement très
attachés à des images précises, ce qui mal écrit. J’ai eu l’impression
renforce encore l’immersion. J’ai vu Ton acteur préféré ? que les scénaristes cherchaient
beaucoup de films d’aventure et, selon Sir Patrick Stewart. Il excelle notamment dans le rôle de sans cesse à surprendre les
moi, le premier et troisième volet de la Jean-Luc Picard dans la série Star spectateurs en prenant le contre-
saga Indiana Jones demeurent en haut du podium. Trek : La Nouvelle Génération. Les pied de ce qu’ils attendaient,
Monty Python : Sacré Graal ! (1975). réalisateurs ont longuement hésité mais le résultat est très maladroit.
Sans doute ma comédie préférée. J’ai avant de confier le rôle du capitaine Cela ne fonctionne tout simplement
commencé par la version allemande à un homme chauve et relativement pas ! Mark Hamill (Ndlr : interprète
étant gamin, et j’ai adoré redécouvrir le âgé, mais Stewart se l’est accaparé de Luke Skywalker) n’a pas du
film en version originale. Cela fait deux à la perfection. Il incarne un héros tout aimé ce que les scénaristes
fois plus de gags ! Les blagues sont très plein de dignité, une figure paternelle ont fait de son personnage et, franchement, je partage
différentes d’une version à l’autre, capable de guider et soutenir son entièrement son point de vue.
P. Stewart
mais tout aussi drôles. Ce film colle à équipe, bien que torturé par ses
la perfection à mon type d’humour. propres démons. Son accent britannique est également Ton documentaire préféré ?
Event Horizon, Le Vaisseau De savoureux et inimitable ! M’autorisez-vous à citer This Is Spinal
L’Au-Delà (1997). Ce long-métrage se Tap (1984) ? J’espère que oui, car
situe à la croisée de la science-fiction Ton actrice préférée ? aucun autre documentaire ne me
et de l’horreur. Je trouve l’idée de base La magnifique Markéta Stroblová, vient à l’esprit ! (rires) Je suis sûr
excellente : un vaisseau qu’on croyait bien sûr. Si vous ne la connaissez que tout ce qui est montré dans ce
perdu à jamais réapparaît soudainement, pas, je vous conseille de taper son film s’est réellement produit. Voilà,
et nous suivons le parcours de la mission nom sur internet. Je préfère ne pas c’est tout ce que j’ai à dire sur ce
de sauvetage qui cherche à comprendre donner davantage de détails… sujet !
les raisons de ce phénomène. L’histoire Disons simplement qu’elle est
est très sombre et très intense ! très à l’aise dans son domaine de Ton « méchant de cinéma » préféré ?
HellRaiser 2 : Les Ecorchés (1988). J’ai prédilection ! (rires) Je trouve Joffrey Baratheon et Ramsay Bolton de Game
M. Stroblova
beau être grand fan de films d’horreur, Of Thrones excellents. On ne peut faire autrement que de
je me suis rapidement lassé des slashers Ta série préférée ? les détester, ce qui prouve que les réalisateurs ont bien
(Ndlr : sous-genre de films mettant C’est une réponse facile, mais sincère : Game Of Thrones. réussi leur coup ! En dehors de cette série, j’opterais sans
généralement en scène un groupe Les personnages sont extrême- hésiter pour Jason Voorhees de Vendredi 13 (1980). On
d’adolescents décimé par un tueur en ment bien campés et d’une grande le découvre alors qu’il n’est qu’un petit garçon, mais il
série). Je préfère largement les histoires crédibilité, ce qui est très impor- devient de plus en plus dangereux au fil des années et
qui présentent une dimension fantastique. tant pour moi. C’est un régal que finit par devenir une
HellRaiser est très imaginatif et évite l’écueil d’essayer de cerner leur psycholo- véritable machine à
du ridicule, ce qui est suffisamment rare gie et comprendre leurs motiva- tuer qu’on ne peut
pour être souligné. Il a un peu vieilli, tions. De plus, les premières sai- mettre hors d’état
mais a dû mettre une sacrée claque aux sons ont un caractère imprévisi- de nuire. Il revient
spectateurs qui l’ont découvert à sa sortie ! ble : on ne sait jamais quel tournant toujours de l’au-delà
va prendre l’action et qui a une pour commettre de
Ta Bande Originale de film préférée ? chance de rester en vie. J’adore la nouveaux meurtres !
La Neuvième Porte, de Wojciech Kilar (Ndlr : Dracula, Le fantasy, surtout lorsqu’elle emprun- Quelqu’un a compilé
Pianiste, Le Roi Et L’Oiseau, etc.). Le compositeur joue te à d’autres genres, notamment tous les crimes perpé-
énormément sur des demi-tons qui ne cessent de monter au domaine de l’horreur. Cette trés par Jason dans
et descendre. Rien de mieux pour instaurer une ambiance série est sale, sérieuse, très intelligente et franchement Vendredi 13 et a publié la vidéo sur YouTube. Rien de
angoissante ! Les mélodies sont sublimes et les arrangements géniale à regarder ! mieux pour s’aérer l’esprit ! (rires) Y

21
De g. à d. : Scott Travis, Ian Hill, Rob Halford,
Richie Faulkner & Glenn Tipton
DR

Qu’elle semble déjà loin cette année 2011, lorsqu’un Judas Priest qu’on pensait fragilisé par le départ de KK Downing
(remplacé par le quasi inconnu Richie Faulkner) annonçait sa tournée d’adieu ! Comme beaucoup avant lui, et n’en doutons
pas, de nombreux à venir, le coup de « la tournée d’adieu » n’a pas duré bien longtemps, et l’on ne peut que s’en réjouir tant
l’institution anglaise semble en grande forme. En témoigne son remarquable nouvel album, Firepower (Cf. chronique dans le
prochain numéro), à propos duquel Richie Faulkner et Rob Halford nous donnent tous les détails.
RICHIE FAULKNER
Rock Hard : Lors de notre dernière
rencontre à Londres en mai 2014
(Cf. RH145), nous n’avions pas eu
l’opportunité de parler avec toi de ton
parcours avant que tu ne rejoignes
Judas Priest. Pouvons-nous l’évoquer
ensemble ?
Richie Faulkner : Avec plaisir.
Tu es né le 1er janvier 1980 : on
peut dire que tu es un pur produit
des années 80 !
Je suis l’un des premiers produits des
80’s dans le monde ! (rires) Je suis né
quelques mois après la sortie de
Unleashed in The East, au moment où
Judas Priest enregistrait British Steel
dans l’ancienne maison de John
Lennon (Ndlr : et ensuite de Ringo
Starr). Alors oui, c’est juste à cette
période que ma pauvre mère m’a
donné naissance ! (rires)
Le premier groupe avec lequel tu as
enregistré fut Deeds (précédemment
nommé Dirty Deeds) en 2002. Mais
avant cela, avais-tu fait partie
d’autres formations ?
Deeds a en effet été le premier groupe
dont j’ai fait partie qui avait un
contrat discographique, un manage-
ment, une structure. Il avait publié
deux disques avant mon arrivée, sous
le nom de Dirty Deeds ainsi que tu
l’as précisé. C’est grâce à mon inves-
tissement dans ce groupe que j’ai
connu Steve Harris d’Iron Maiden,
qui allait être important pour la suite
des événements... Mais oui, j’ai fait
partie d’autres formations avant
cela : lorsque j’habitais en Suède, je
jouais dans un groupe avec lequel
nous faisions nos propres morceaux,
mais je faisais également partie d’un
groupe de reprises… C’était une
période d’apprentissage, comme pour
tout musicien, durant laquelle je me
battais pour tenter de rencontrer le
succès dans cette industrie de la
musique. En tout cas, j’ai chopé le
virus de la musique très jeune, et je
n’ai pour ainsi dire fait que ça dans
ma vie.
Avec Deeds, tu as enregistré l’album
Blown (2002), puis tu as rejoint
Voodoo Six, avec Tony Newton à la
basse et Dave Cavill à la batterie :
deux musiciens avec lesquels tu
jouais déjà au sein de Deeds.
L’histoire de ma rencontre avec Tony,
le leader de Deeds puis de Voodoo
Six, est amusante. Lorsque j’habitais
encore à Stockholm, je suis allé voir
Iron Maiden, avec Dirty Deeds et
Helloween en première partie (Ndlr :
le 25.09.1998). Trois ans plus tard
environ, Tony et le guitariste Barry
Fitzgibbon ont débarqué dans un pub
londonien dans lequel je jouais. Je les
ai abordés en leur disant que je les
24
Propos recueillis par Benji - Entretiens téléphoniques réalisés le 15 janvier 2018
avais vus quelque temps auparavant
en Suède. J’ai bien accroché avec
appelé : je n’étais qu’un guitariste
inconnu, mais je connaissais les règles
laissé le temps de bien réfléchir
avant d’annoncer son départ. Mais
Tony qui m’a confié vouloir monter de la route, l’effet que ça faisait de lorsqu’il s’est avéré que KK ne
un projet parallèle à Dirty Deeds. jouer devant 50.000 personnes. Ils reviendrait pas sur sa décision, ils
Finalement, Barry a quitté le groupe savaient donc que je n’allais pas ont commencé à lui chercher un
et, du coup, nous avons juste légère- flipper à l’idée de monter sur scène remplaçant par le biais de personnes
ment changé de nom en optant pour devant une grande foule. Dans le de confiance officiant dans l’ombre.
Deeds, et un peu plus tard, nous même temps, ça leur plaisait que je A l’époque, je jouais régulièrement
sommes revenus à l’idée initiale de sois quasi inconnu car je n’avais pas avec un groupe de reprises à Londres
faire quelque chose de vraiment fait partie de grands groupes. Mon (Ndlr : Metalworks, qui se produit
différent. Ainsi est né Voodoo Six. expérience avec Lauren a donc été toujours dans un pub de Camden, le
Ces deux entités étaient assez diffé- déterminante pour mon avenir avec Monarch). Nous jouions tous les
rentes, au niveau du son notamment. Priest. dimanches, de 15 à 23h00, des
Avec le chanteur Henry Rundell et le morceaux d’Iron Maiden, Judas Priest,
guitariste Matt Pearce, nous avons Durant cette tournée en première Black Sabbath, Deep Purple… Pete
enregistré Feed My Soul en 2006. Tony partie de Maiden (qui, comme tu l’as Friesen, l’ancien guitariste d’Alice
et moi écrivions tous les morceaux, dit, fut éprouvante physiquement Cooper, jouait régulièrement avec
Tony s’occupant également de tout et mentalement), t’es-tu posé la nous. Ce dernier a aussi fait partie de
l’aspect business du groupe. J’ai question de savoir si c’était vraiment The Almighty, avec Ricky Warwick,
ensuite rejoint Lauren Harris (Ndlr : la vie dont tu avais envie. As-tu eu et certains membres de l’équipe de
la fille de Steve Harris). Voodoo Six des doutes ? Priest le connaissaient via ce groupe.
tourne encore aujourd’hui, avec un Aucun. Lorsque je suis rentré chez Ils l’ont donc contacté avec l’intention
line-up très différent. Ils s’en sortent moi après cette tournée, je ne tenais de lui proposer le poste dans Priest,
plutôt bien d’après ce que je sais : pas en place, il me manquait quelque qu’il a poliment refusé car il pensait
tant mieux pour eux, je leur souhaite chose, alors que, quand j’étais sur ne pas être fait pour cette musique.
le meilleur. la route, je me sentais totalement à Pete, dans le fond, est surtout un fan
l’aise. C’était fait pour moi. Jouer de de blues, et il n’avait pas envie de
Tu as en effet rejoint le groupe de la musique devant des gens dans le « faire semblant ». Néanmoins, ils
Lauren Harris en 2008, enregistré monde entier, c’est mon plus grand lui ont demandé si, par hasard, il
avec elle l’album Calm Before The plaisir. J’écris beaucoup également, connaissait quelqu’un pour le job,
et Pete m’a alors recommandé.
Il y a du feu dans cette production ! Pourtant, je ne l’avais pas vu depuis
au moins six ans ! Mais il s’est
(Richie Faulkner) souvenu de moi et pensait que je
ferais l’affaire. Lorsque j’ai finalement
Storm la même année, puis réalisé que ce soit sur la route ou chez reçu l’appel du management de
une tournée à ses côtés, en première moi. Contrairement à beaucoup de Priest, j’ai été véritablement choqué
partie d’Iron Maiden dans le monde musiciens, je n’ai aucun problème de car je ne m’y attendais pas du tout,
entier, dans de très grosses salles, concentration pour écrire en tournée. c’est le moins que l’on puisse dire !
des festivals, voire des stades. Je ne pourrais pas me contenter d’être
Quels souvenirs gardes-tu de cette un musicien de studio, c’est sûr. Ma théorie tombe alors à l’eau :
première tournée d’envergure ? ayant fait partie de Deeds, Voodoo
Nous ne savions pas à quoi nous Tu as enregistré l’album Vicious Six et du groupe de Lauren Harris,
attendre. Notre musique était assez Circle avec Ace Mafia en 2009, tu connaissais bien Steve Harris,
différente de celle de Maiden et nous ainsi que Dead People avec qui est managé par Rod Smallwood,
ne pensions pas du tout prendre part Parramon en 2010, avant de qui lui-même avait managé Rob
à sa tournée. Mais cela s’est finalement rejoindre officiellement Judas Halford durant de sa carrière
confirmé car c’était une opportunité Priest le 20 avril 2011. Nous solo. J’ai toujours pensé que la
que nous ne pouvions pas refuser. Je savons que ton prédécesseur, KK connexion venait de Rod…
n’avais bien sûr jamais goûté à ce Downing, avait annoncé au groupe Non, mais ça a du sens ! Ceci dit, tu
genre de tournée auparavant, à un son intention de partir depuis as partiellement raison car il y a tout
tel niveau : ce fut donc une vraie plusieurs mois déjà. Judas lui a de même une petite connexion directe
découverte de ce qu’était la vie sur donc cherché un potentiel rempla- avec Iron Maiden. Lorsque Pete a
la route, les grandes scènes, la pro- çant dans le plus grand secret. donné mon numéro de téléphone aux
duction, mais aussi le challenge Comment as-tu eu vent de ces mecs de Priest, il s’agissait d’un vieux
physique et mental que représente recherches ? numéro car, comme je le disais, ça
une telle tournée. Rester loin de chez Tu as raison quant au fait que KK faisait un bail que je ne l’avais pas
soi durant de longs mois, passer des avait déjà annoncé son désir de revu. Heureusement, ils ont été
heures dans un bus… J’ai beaucoup quitter le Priest quelques mois persistants et ont contacté des
appris. Je sais que cela a joué un rôle auparavant, mais le groupe n’a pas membres de l’équipe technique d’Iron
dans le fait que Priest m’ait ensuite voulu brusquer les choses et lui a Maiden, qui bossent aussi parfois
. Metal Works ’73-’93 (best of – 1993)
GENRE ALBUMS . Jugulator (1997)
. Heavy metal . Rocka Rolla (1974) . ’98 Meltdown (live – 1998)
. Sad Wings Of Destiny (1976) . Demolition (2001)
LE GROUPE . Sin After Sin (1977) . Live In London (live – 2003)
. . Angel Of Retribution (2005)
. Rob Halford (chant) Stained Class (1978)
. Nostradamus (2008)
. Killing Machine (1978)
. Glenn Tipton (guitare) . Unleashed In The East (live – 1979) . A Touch Of Evil : Live (live – 2009)
. British Steel (1980) . Redeemer Of Souls (2014)
. Richie Faulkner (guitare) . . Battle Cry (live – 2016)
Point Of Entry (1981)
. . . Firepower (2018)
Ian Hill (basse) .
Screaming For Vengeance (1982)
+ divers best of & rééditions
Defenders Of The Faith (1984)
. Scott Travis (batterie) . Turbo (1986)
. Priest…Live ! (live – 1987) ARTICLES RH
SITE INTERNET . Ram It Down (1988)
. RH N°2, 8, 15, 41, 79, 80, 86, 91,
Painkiller (1990) 110, 145, 175 & 184
judaspriest.com
avec Priest, pour savoir s’ils avaient
mon contact actuel. C’était le cas !
Passons d’un revers de main les
sept années qui ont suivi, qui font
désormais partie de l’Histoire, et
venons-en à Firepower. Commençons
par le côté technique des choses :
Tom Allom, le producteur de
nombreux classiques du groupe, et
Andy Sneap ont fait équipe pour
produire cet album aux côtés de
l’ingénieur du son Mike Exeter, qui
avait déjà travaillé sur Redeemer
Of Souls (2014). Qui a eu cette
idée pouvant paraître curieuse
d’associer deux producteurs de
renom ?
Je ne me souviens pas vraiment qui a
lancé l’idée… Nous savions dès le
départ que Mike ferait encore partie
du processus, mais nous voulions
changer les choses au niveau de la
production. Quelques noms ont été
suggérés, dont celui de Tom. Il s’était
reconnecté avec Priest depuis
quelques années, en bossant sur la
production de nos albums live (Ndlr :
A Touch Of Evil/2009, Epitaph/2013
et Battle Cry/2016). Alors, même s’il
n’avait plus travaillé avec eux en
studio depuis longtemps, il savait
parfaitement où en était le groupe.
Andy fut aussi évoqué : il représente
un côté plus « moderne » de la
production que Tom, alors que ce
dernier a l’histoire du groupe qui
parle pour lui, une confiance absolue
étant instaurée de part et d’autre.
Nous hésitions entre eux deux, et en
y repensant, il me semble que c’est
Glenn qui nous a dit : « Et si nous
proposions aux deux de travailler
ensemble ? » Il nous a semblé que ça
pouvait être une super idée. Une
sorte d’harmonie parfaite entre une
production classique et l’autre plus
moderne. Cela aurait pu tourner à la
catastrophe ! Une bataille d’égos
n’était pas à exclure, mais ce fut
tout le contraire. Tom et Andy se sont
parfaitement entendus : ils s’échan-
geaient des plans sur des techniques
anciennes ou récentes, chacun
apprenait de l’autre… Ils étaient
toujours au studio avant que nous
n’arrivions, pour discuter, peaufiner,
améliorer les choses. L’atmosphère
était géniale et je crois que ça se
ressent à l’écoute de l’album : il y a
du feu dans cette production !
« Rising From Ruins » est un titre
remarquable : la voix de Rob est
très pure, il ne pousse quasiment
jamais son chant, si ce n’est sur le
refrain, et pourtant, ce morceau est
probablement le plus épique de
l’album. C’est un contraste intéres-
sant. Comment ressens-tu ce titre ?
Tout d’abord, je suis content que tu
aies remarqué ces choses-là et je
pense que ton analyse est très
pertinente. Comme tu le dis, c’est
épique, mais à la fois pur, très « propre »
durant les couplets, alors que le
refrain est plus majestueux. L’idée
découle de cette introduction,
« Guardians », une idée que j’avais
avec cette mélodie de piano… Je ne
savais pas trop si ça conviendrait au
groupe, ou même à l’ambiance de
l’album, mais j’aimais bien le feeling
qu’elle dégageait, tant et si bien que
nous l’avons conservée et que cette
mélodie revient même plus tard dans
« Rising From Ruins ». Même sans les
paroles, ce morceau sonnait déjà
épique, alors il nous fallait un texte
qui colle à cette ambiance. Quel
thème pouvions-nous aborder ? Cette
idée de se battre pour ce en quoi tu
crois, d’affronter les problèmes et de
« s’élever à travers des ruines » a
toujours collé à Judas Priest, à son
idéal. Et nous tenions un morceau
finalisé. C’est toujours un sentiment
bizarre : à partir de là, tu sais qu’il va
être écouté de la sorte, que ce soit
dans un stade, dans une chambre ou
dans une voiture : des gens vont
l’entendre sous cette forme, alors
que nous l’avons vu grandir petit à
petit. Je trouve ça fascinant !
« Spectre » possède un riff assez
génial, avec un côté distordu
comme on aime…
C’est une chanson dont le refrain
date des sessions de Redeemer Of
Souls (2014), mais nous n’avions pas
réussi à trouver la bonne combinaison
qui conviendrait à ce riff de Glenn.
Lorsque nous avons débuté le travail
de composition pour Firepower, je me
suis souvenu de ce bout de musique,
C’est Rob Halford : pas seulement
un grand chanteur, mais aussi un
grand parolier (Richie Faulkner)
que j’ai repris et travaillé en l’accom-
pagnant d’un autre riff pour les
couplets. Ça sonne, à mon sens, comme
du « vieux » Priest : ce groove, ce mid-
tempo, ce son très « Birmingham ».
Le passage au milieu du morceau
est encore différent… C’est cette
ambiance un peu terrifiante qui a
donné l’idée à Rob d’écrire à propos
d’un spectre, ou plutôt d’une sorte
d’assassin…
Le dernier morceau de l’album
s’intitule « Sea Of Red » : il débute
comme une ballade, avec encore
une fois un chant très pur, avant de
devenir un peu plus heavy pour
aboutir à une sorte de power
ballad. C’est un morceau assez
inhabituel pour le groupe…
Il arrive que Rob m’envoie des sortes
de « mémos » vocaux. Des mélodies
qu’il chante sans la moindre musique
et que je découvre parfois sur mon
répondeur téléphonique ! Le refrain
de « Sea Of Red » fait partie de ces
petits passages qu’il m’a envoyés
durant la période de composition. J’ai
adoré et immédiatement commencé à
travailler autour de ça. La musique
est ainsi née, mais je dois dire que je
suis particulièrement bluffé par les
paroles de ce titre. Je les trouve
superbes, c’est un beau message, et
la façon dont Rob le chante est
spectaculaire. Sa tonalité est en
totale connexion avec le sujet de la
chanson. C’est Rob Halford : pas
seulement un grand chanteur, mais
aussi un grand parolier. Sa façon
de communiquer ses idées, ses
sentiments, est fantastique. Je me
souviens de la première fois où il m’a
chanté ce titre alors que toutes les
paroles étaient finalisées : ça m’a
foutu la chair de poule.
Vous serez très bientôt en tournée
en Amérique du Nord avec Saxon et
Black Star Riders, puis vous serez
de retour en Europe de début juin à
mi-août. Pour l’instant, l’unique
date française confirmée est celle
du Hellfest. Tu t’es déjà produit
deux fois à ce festival, en 2011 et
2015. Lors de ces tournées estivales
européennes, vous jouez dans de
très nombreux festivals, et il peut
s’avérer ardu de garder des
souvenirs précis de chacun d’entre
eux. En gardes-tu du Hellfest ?
Sincèrement, c’est l’un des festivals
dont je me souviens particulièrement
bien. Il n’y en a pas tant que ça dont
je garde des souvenirs précis, c’est
vrai, mais le Hellfest en fait partie. Je
me souviens regarder cette foule depuis
la scène et les flammes jaillissant
parfois derrière le public, ces struc-
tures de metal partout sur le site.
J’avais l’impression d’être dans un Mad
Max ! (rires) Un autre monde, vraiment
incroyable ! Je faisais en sorte de
rester concentré sur mon jeu, mais
en même temps, je voulais vraiment
profiter du spectacle qui m’était
offert depuis la scène. J’ai adoré ! La
façon dont est bâti ce festival est assez
unique : tu as vraiment l’impression
d’être « ailleurs » ! (rires) Il possède
une vraie personnalité qui fait qu’on
s’en souvient plus que d’un autre
événement plus classique. De plus,
l’affiche est fantastique.
ROB HALFORD
Rock Hard : Salut Rob, où es-tu au
moment où je te parle ?
Rob Halford : Chez moi, à Phoenix,
en Arizona : il fait super beau, il y a des
cactus partout autour de la maison,
des serpents, des scorpions, des animaux
heavy metal qui se baladent dans le
jardin… (rires)
Tu as de la chance, car ici, dans
bien des régions françaises, il ne
fait que pleuvoir sans arrêt depuis
un bon mois !
Oh, je vais devoir me réhabituer à ça
d’ici peu car je pars bientôt pour
l’Angleterre où vont débuter les répé-
titions de notre prochaine tournée
mondiale, et je ne doute pas un seul
instant qu’il doit aussi y pleuvoir !
Mais je pars équipé, j’ai déjà préparé
mon parapluie heavy metal ! (rires)
Firepower a été produit par un
duo, Tom Allom et Andy Sneap, ce
qui n’est pas très courant. Tout le
monde sait que Tom fut le producteur
de tous vos albums d’Unleashed In
The East (1979) à Ram It Down
(1988). Mais ce que les gens n’ont
pas forcément noté, c’est qu’il s’est
impliqué plus récemment dans la
production de vos trois derniers
CDs ou DVDs live : A Touch Of Evil
(2009), Epitaph (2013) et Battle
Cry (2016). Nous avions été surpris
de son retour à vos côtés en 2009 car
il semblait s’être totalement éloigné
du monde de la musique. C’est
pourquoi son implication sur
Firepower nous étonne plus encore…
Pour nous, cela fait sens. Je me
souviens que lorsque nous étions en
train d’avancer sur les sessions
d’écriture de l’album, nous essayions
de penser à l’avenir de ces titres :
quel était leur « potentiel », comment
ils sonnaient… Vu comment ils étaient
construits, certaines saveurs nous
faisaient penser à du Priest classique,
aux « grands moments » du groupe,
période Screaming For Vengeance (1982)
ou Defenders Of The Faith (1984). Ce
type d’attitude, d’atmosphère… Richie,
Glenn et moi nous sommes alors dit
que ça valait le coup de parler à Tom
afin de voir s’il était intéressé pour
travailler sur ce nouvel album aux
côtés d’un autre producteur. En
l’occurrence, Andy Sneap. Tout cela,
en conservant l’ingénieur du son qui
avait bossé sur Redeemer Of Souls
(2014), Mike Exeter. Nous avons eu
une discussion très ouverte sur la
possibilité de faire cohabiter un
producteur classique de heavy metal
et un autre aux aspirations plus
modernes : qu’est-ce qui pourrait se
passer dans ce cas de figure ?
Certaines productions d’Andy Sneap
nous semblaient vraiment intéressantes,
mais comment ce son allait-il évoluer
si Tom Allom laissait trainer ses
doigts sur la console ? Le bon point
de départ, c’est qu’Andy est un grand
fan de Tom et qu’il était très excité à
l’idée de le rencontrer et de pouvoir
parler technique avec lui. Nous avons
tenté le coup, sans trop savoir où
cela allait nous mener, mais par
chance, tout a fonctionné comme
nous l’espérions. Au final, tu as la
clarté et le punch du traitement
sonore d’Andy, couplé aux tonalités
classiques de Tom, spécialement au
niveau de mon chant.
Ton chant sur « Rising From
Ruins » est très intéressant : tu
vocalises de façon très pure sur les
couplets, sans forcer, même si tu
pousses un peu plus sur le refrain.
Pourtant, il s’agit d’un titre vraiment
épique. Qu’en penses-tu ?
J’aime le message de cette chanson,
qui a toujours été celui prôné par
Priest : faire face aux difficultés, avoir
confiance en soi, ne pas se laisser
faire par ceux qui t’agressent… C’est
un message applicable en tout temps.
A mon sens, la structure de ce titre
s’apparente à celle de morceaux
comme « Rock Hard, Ride Free »,
« The Sentinel », « Blood Red Skies »
ou « Sinner ». C’était le moment où
nous pouvions laisser s’exprimer de
grosses guitares expressives car ce
titre permet de visualiser des images
fortes. C’est une super chanson.
27
 Enfin, autant que je m’en souvienne,
car je t’avoue que ça fait déjà
quelques mois que je ne l’ai plus
écoutée ! (rires) Tu sais comment je
suis : lorsque je viens de finir un
album de Priest, je ne peux plus
l’écouter car je suis trop critique
envers lui. Alors, autant laisser
passer du temps. En tout cas, je me
souviens que, même dans sa forme
initiale, sans le gros son et les arran-
gements, il était déjà grandiose,
épique. C’est aussi à double tran-
chant : il faut être prudent avec ce
genre de morceau car il peut vite te
dépasser et devenir un peu « hysté-
rique », exagéré. Ce fut un titre
difficile à contrôler. Tu sais quoi ? Je
vais le réécouter dès que nous aurons
fini cette interview !
Le refrain de « Evil Never Dies » est
on ne peut plus simple, mais
lorsque tu le chantes, tu as vraiment
l’air « evil » !
Oui, c’était comme crier cette décla-
ration : le mal ne meurt jamais ! Je
pensais à cette idée qui veut que le
diable nous entoure, qu’il ait quitté la
Géorgie et toutes ces histoires à
propos du diable et du blues… Le
diable peut prendre des formes très
diverses, dans la politique, ta propre
famille, à l’école, durant les conflits
armés…
Certaines productions d’Andy Sneap nous semblaient vraiment
intéressantes, mais comment ce son allait-il évoluer si Tom Allom
laissait trainer ses doigts sur la console ? (Rob Halford)
La religion…
Bien sûr. Tous ces différents éléments
s’imbriquent dans cette chanson.
Nous avions écrit le riff du refrain
il y a un bout de temps. J’adore le
groove de la séquence d’ouverture,
c’est du Priest classique. Et à mon
sens, ce refrain me rappelle, par
certains aspects, des choses que
nous avons pu produire sur Stained
Class (1978). Après, chacun aura
sûrement sa propre opinion… Mais
c’est un bon titre, oui.
« Spectre » est un autre morceau
qui nous plaît beaucoup : son riff
est vraiment vicieux et son refrain
assez addictif. Pourrais-tu nous en
dire plus quant aux paroles de ce
morceau ?
Il parle de ce type d’expérience
étrange qui arrive à tout le monde,
lorsque tu as la sensation que
quelqu’un ou quelque chose se
cache près de toi… Ce n’est pas être
paranoïaque, mais plutôt conscient
qu’il peut y avoir des « spectres »
autour de soi, des choses immatérielles
ou matérielles… J’utilise des images
pour représenter ce type de créatures
sombres et malveillantes qui vivent
dans le monde réel sous d’autres
formes. Le riff est phénoménal, je
l’adore ! C’est juste un autre exemple
de Priest essayant de ne pas proposer
le même type de morceaux tout au
long d’un album. Nous avons bossé
dur pour proposer une sorte de
vitrine de tout ce que peut produire
28
Priest dans son propre champ
d’action : le heavy metal.
Deux autres exemples tendent à
donner du sens à ce que tu viens
de dire : « Sea Of Red », qui clôt
l’album, est vraiment spécial. Il
commence comme une ballade
acoustique avant de prendre de
l’épaisseur et de se muer en power
ballad. Tu as également recours
à une voix très claire sur ce
titre. Qu’en est-il du thème de ce
morceau ?
On y trouve de nombreuses références
à l’importance de la reconnaissance,
du souvenir lié à la Première Guerre
Mondiale. Il y a là une connexion
avec la France, bien sûr, puisque
cela évoque la Flandre. En France,
vous avez cette date anniversaire qui
commémore ces années (Ndlr : le 11
novembre, bien sûr). C’est aussi le cas
en Angleterre. Dans le cas de ce
morceau, comme très souvent avec
nous, la musique est venue d’abord,
les paroles ensuite. Richie, Glenn et
moi étions en studio, et l’instrumen-
tation commençait à prendre forme.
Nous essayons toujours de trouver
rapidement un point d’ancrage au
morceau. J’avais avec moi des tas de
feuilles sur lesquelles j’avais noté
des titres, des phrases, des idées
de thématiques, et je ne sais pas
pourquoi, mais cette musique m’a
évoqué une « mer rouge ». Cela
parle d’amour, du fait de transférer
ton amour envers une enveloppe
charnelle vers celle spirituelle d’un
être que tu as perdu. L’amour ne
meurt jamais en quelque sorte. C’est
amusant, je te dis que « love never
dies », alors que nous venons de
parler de « evil never dies » ! (rires)
Je voulais saisir l’opportunité de
présenter avec des mots la sensation
de solitude que tu peux connaître
dans un quelconque lieu du souvenir.
Tu peux connaître un sentiment de
solitude dans des lieux ou conditions
très divers, mais ici, je fais référence
à ces lieux sacrés où tu ne peux que
penser à ce qui a pu s’y passer il y a
une centaine d’années, et exprimer
tes remerciements et ta gratitude à
tous ces hommes. J’ai aimé mettre
ces mots sur cette superbe musique.
Du début de la chanson jusqu’aux
dernières notes, c’est un vrai voyage :
tu passes de cette délicate intro-
duction à un final incroyablement
puissant. Nous avons voulu placer
cette ballade à la fin de l’album, ce
qui n’est pas très courant dans
les disques du metal. Elles sont en
général positionnées en milieu d’album
afin de clore les hostilités avec un
titre plus brutal. Mais nous avons
tenté ce pari et préféré faire passer
ce beau message après les treize
autres passages bien plus soniques le
précédant. Je pense que ça fonctionne
bien ainsi.
Il est vrai que « Lone Wolf », qui
précède « Sea Of Red », est bien
différent. Au départ, son ambiance
nous a fait penser à vos amis de
Black Sabbath, mais après
quelques écoutes, il nous a aussi
rappelé « I Am Alive », ce titre
de ton groupe Fight qui ouvrait
l’album A Small Deadly Space
(1995). Cela te paraît-il incongru ?
Non, pas du tout, cette référence me
semble aussi tout à fait valable. Le
riff de départ est signé Richie, et ce
simple riff avait déjà une sorte de
groove bien à lui, sans même que
nous ayons envisagé la moindre ryth-
mique à ce stade. Plutôt inhabituel...
Mais oui, c’est un riff estampillé
« Birmingham » et la comparaison
avec Black Sabbath ne me pose
aucun problème. Car Priest est aussi
l’un de ces produits issus des
Midlands, où le heavy metal a été
inventé.
Nous avons évoqué Tom Allom
tout à l’heure, mais nous aimerions
que tu nous parles d’un autre
producteur qui a compté dans
votre carrière : Chris Tsangarides,
qui nous a malheureusement
quittés le 6 janvier dernier. Il
fut votre ingénieur du son sur
Sad Wings Of Destiny en 1976,
puis le producteur de Painkiller en
1990. Quels souvenirs gardes-tu de
lui ?
C’était un gars adorable, très
professionnel et sûr de lui. Il savait
vraiment comment s’y prendre pour
faire que toutes les données d’un
enregistrement en studio s’imbriquent
parfaitement à la fin du processus.
Son héritage est incroyable. Il y a
une grande connexion entre nous,
Chris et la France car c’est aux
Studios Miraval (Ndlr : à Le Val, dans
le Var) que nous avons enregistré
Painkiller. J’ai des souvenirs très vifs
de ces sessions. Chris avait une
vision pour cet album. Il savait qu’il
s’agirait d’un opus très important
dans notre carrière, et l’histoire lui a
donné raison. Je reste connecté à ces
moments passés avec lui dans ces
lieux. Nous avons été choqués
d’apprendre son décès car il était
encore jeune (Ndlr : 61 ans). La vie
est bien cruelle parfois… Mais la
mémoire de Chris restera présente
pour l’éternité à travers ses pro-
ductions, et en particulier celle de
Painkiller.
Vous étiez nominés, cette année
et pour la première fois, au
Rock’n’Roll Hall Of Fame, cette
« institution » américaine. Or,
vous n’avez pas été retenus pour y
être intronisés. Qu’est-ce que cela
t’évoque ?
Cela met en évidence qu’un groupe
de metal comme Judas Priest se doit
d’apporter une sorte d’équilibre à ce
RNRHOF car il n’y a pas beaucoup
de groupes de metal qui y ont été
intronisés, n’est-ce pas ? Il devrait y
en avoir plus, et je ne parle pas que
de Priest. Alors, certes, le RNRHOF
est une institution américaine, mais
néanmoins, elle résonne dans le
monde entier. Les réactions à ce
sujet ont été incroyables : nous avons
reçu énormément de messages
d’amis, de médias ou de de fans,
mécontents et se demandant ce qui
s’était passé, disant que nous
devions définitivement en être. Que
ce devait être une erreur ! En tant
que groupe, nous connaissons les
« mécanismes » du RNRHOF, comment
ça se passe de l’intérieur… Pour être
franc, j’ai été un peu déçu, mais pas
vraiment surpris. Mais mon sentiment,
c’est qu’à terme, nous finirons par
être intronisés. Je ne sais pas quand.
J’espère simplement que nous serons
encore tous en vie pour en profiter
car il n’est pas rare que certains
groupes soient célébrés alors que
plusieurs de leurs membres sont
morts ! (rires) Ça ne me ferait pas
super plaisir d’être intronisé lorsque
je serai mort. Je préfèrerais monter
sur scène et profiter du moment !
Même lorsque tu ne tournes pas
avec Priest, tu aimes monter sur
scène avec d’autres musiciens,
ainsi que tu l’as fait récemment
avec Alice Cooper et ses invités
(Slash, Dave Ellefson), mais aussi
avec In This Moment aux Loudwire
Awards (« White Wedding » de Billy
Idol), ou encore avec Babymetal
aux Alternative Press Awards
pour des reprises de « Painkiller »
et « Breaking The Law » ! Au moins,
tu t’amuses !
Totalement ! C’est toujours un honneur
d’être invité par de jeunes groupes à
partager leur scène, quelle que soit
l’occasion. Je ne suis pas en demande,
mais on me le propose souvent, alors
j’y vais si mon planning me le permet !
Ça me rend heureux, tout simplement.
Tu sais, je me fiche de ce que les gens
peuvent en dire ! (rires) J’ai suffisamment
vécu et prouvé depuis assez longtemps
que mon cœur battait pour le metal,
mais cela ne doit pas signifier que
je dois me restreindre. Certains
peuvent dire de groupes avec lesquels
j’ai jammé : « Oh, ils ne sont pas assez
metal, ce ne sont que des gimmicks ! »,
mais je m’en fous. Si j’aime bien la
musique et la personnalité des
groupes en question, j’y vais sans
hésiter. Les Babymetal sont dingues
de Judas Priest ! Idem avec Five
Finger Death Punch et In This
Moment, ou même Metallica avec qui
j’ai jammé sur « Rapid Fire »… C’est
aussi une façon de montrer à quel
point le metal a traversé les
décennies, et de créer une sorte de
connexion entre la vieille garde et la
nouvelle génération. Y
De g. à d. : Youssef Saleh, Ismaeel Attalah,
Moanis Salem & Amr Mokhtar

Propos recueillis par Guillaume Fleury - Entretien téléphonique réalisé le 22 janvier 2018
Crescent, mené par le chanteur/guitariste Ismaeel Attalah et le batteur Amr Mokhtar depuis 1998, a définitivement lancé sa
carrière il y a quatre ans avec son premier album, Pyramid Slaves, devenant par la même occasion le premier groupe de metal
égyptien à tourner en Europe. C’est fort d’une belle réputation et d’une signature sur le label Listenable que le groupe passe
aujourd’hui la seconde avec le très réussi The Order Of Amenti. Entretien avec le chaleureux leader Ismaeel.
Rock Hard : Le heavy metal est-il conceptuel malgré une certaine cohé- chose de magique. Sans oublier le parcimonie et nuance. Ainsi, le résultat
actuellement populaire en Egypte ? rence, puisque chaque titre est dédié concept très primitif de parler de l’après- est davantage ritualiste que dansant !
Ismaeel Attallah : Il l’a été dans les à un ancien dieu égyptien… Il y a vie. C’est vraiment l’une des plus (rires)
années 90. A cette époque, les concerts beaucoup de groupes fascinés par anciennes civilisations à aborder ce
pouvaient remplir les deux tiers d’un l’ancienne Egypte, sa mythologie et genre de sujet en profondeur. Nous As-tu déjà envisagé de chanter un
stade de foot. Malheureusement, le son Histoire. Je n’ai pas senti de devoir avons étudié l’Histoire égyptienne à album complet dans ta langue
gouvernement a vu ces distractions de ma part, mais nous essayons de l’école. Celle-ci est toujours sous nos natale ?
de masse d’un mauvais œil et les rendre hommage à l’héritage de notre yeux, mais c’est une civilisation qui Il faut utiliser cette langue avec
metalheads et musiciens ont été mal pays. C’est la raison pour laquelle appartient au monde entier, pas prudence car l’égyptien dialectal est
jugés. Se vêtir de noir ou jouer de la nous avons choisi d’orienter tous nos seulement aux Egyptiens, même si différent des autres langues arabes.
guitare te menait à être accusé de textes sur ce sujet. Mais les paroles j’en suis fier ! J’ai eu recours à quatre mots d’arabe
vénérer le démon. Cela a presque reflètent d’autres thématiques. dans un morceau, mais il faut faire
complètement tué la scène, qui était Lorsque nous parlons d’Horus, nous Tu n’es donc pas ennuyé par le fait attention au choix des mots afin que
pourtant florissante. A l’époque, c’est abordons l’idée de la vengeance. que nombre d’artefacts soient cela sonne aussi épique que la
surtout le thrash qui rencontrait du Lorsqu’il s’agit d’Anubis, nous évoquons conservés à Paris ? (rires) musique. Nous n’avons jamais envisagé
succès, la scène extrême n’a pas évolué la justice ultime qui semble manquer (Rires) Non ! Il s’agit de cadeaux de de ne chanter qu’en égyptien car cela
avant l’an 2000... cruellement à notre monde ! (rires) l’Egypte à la France, et cela permet à atténuerait notre exposition interna-
Nous traitons des dieux anciens mais des gens qui n’auraient peut-être tionale, mais nous en mettons un peu
Les titres de l’album et de ses aussi, parallèlement, de sujets qui jamais pu venir jusqu’ici de les voir. de ci de là afin de servir l’ambiance.
morceaux évoquent un concept sur peuvent toucher n’importe qui… Une sculpture de Toutankhamon est Ce que nous avons fait, cette fois, c’est
le voyage des âmes des défunts dans selon moi comparable à un tableau de recourir à de véritables hiéroglyphes
la mythologie égyptienne… Selon toi, pourquoi la mythologie Dali ou de Michel-Ange, et ces œuvres parlés sur l’intro de l’album. Je ne
En réalité, ce concept ne concerne égyptienne fascine autant ? voyagent à travers le monde au gré savais pas qu’une telle chose était
que les trois derniers titres. Il aborde Il est vrai que notre mythologie et d’expositions. Cela donne l’opportunité possible, mais j’ai pu mettre la main
le voyage de l’après-vie, la manière notre histoire ont fasciné Napoléon à davantage de monde de voir œuvres sur une méthode permettant de traduire
dont les morts vont voir leur destinée lorsque celui-ci a envahi l’Egypte, de ces magnifiques. Je n’aime pas voir phonétiquement ces symboles. Puis
révélée et connaitre leur jugement. Mais même que les Anglais, tout cela de les choses sous un mauvais angle ! l’un de mes amis, qui est égyptologue,
le reste de l’album n’est pas vraiment manière mystique car ça a quelque m’a confirmé que cette phonétique
Vous avez recours à quelques était utilisée dans certaines universités
GENRE SITE INTERNET instruments traditionnels… de notre pays. J’étais vraiment bluffé !
. Death metal Oui ! Des percussions utilisées dans la Une fois les textes écrits, cet ami m’a
www.crescentband.com
musique orientale et égyptienne. Nous montré tous les symboles, m’a appris
LE GROUPE ALBUMS ne voulions pas sonner comme l’un de à les prononcer, et j’ai choisi ceux que
. Ismaeel Attallah
(chant, guitare) . Pyramid Slaves (2014) ces groupes de metal « danse du je pourrais utiliser. Le résultat est
. The Order Of Amenti (2018) ventre », nous détestons ça ! Il est très primitif et, ironiquement, rappelle
. Youssef Saleh (guitare)
très délicat de se servir de ce genre un peu la langue égyptienne dialectale !
. Amr Mokhtar (batterie) ARTICLE RH d’instruments car il est facile de Je pense que nous sommes le premier
. Moanis Salem (basse) RH N°184 sonner de façon sirupeuse, alors nous groupe de metal à avoir eu recours à
avons essayé de ne les utiliser qu’avec cette technique ! (rires) Y

29

GENRE
. Punk hard rock
LE GROUPE
. The Duke Of Nothing (chant)
. Rune Rebellion (guitare)
. Euroboy (guitare)
. . Ass Cobra (1996)
Happy-Tom (basse)
. Crown Prince Haakon-Marius
(claviers)
. Tommy Manboy (batterie)
30
. Sexual Harrasment (2012)
SITE INTERNET . Rock'n'Roll Machine (2017)
http://turbonegro.com
ARTICLES RH
ALBUMS RH N°23, 67 & 184
. Hot Cars And Spent Contraceptives
(1992)
. Helta Skelta (1993)
. Never Is Forever (1994)
. Apocalypse Dudes (1998)
. Darkness Forever ! (live – 1999)
. Scandinavian Leather (2003) De g. à d. : Euroboy, Happy-Tom, Tommy Manboy,
. Party Animals (2005) Crown Prince Haakon-Marius & Rune Rebellion.
. Retox (2007)
Au centre : The Duke Of Nothing

Pour leur dixième album studio, les tarés de Turbonegro se sont payé le luxe de rendre un hommage appuyé au hard rock, l’un
de leurs styles de prédilection qui est souvent resté en filigrane de leurs compositions majoritairement punk. Le résultat :
un Rock'n'Roll Machine absolument irrésistible qui a fait guincher votre serviteur durant tout le mois de janvier. Coincer
l’un des membres du groupe pour en disserter relevait donc du besoin impérieux, et c'est The Duke Of Nothing (aka Tony Sylvester
à la ville), le chanteur anglais du groupe norvégien, qui a répondu à nos questions avec son délicieux accent so british.
Rock Hard : Je suis étonné de t’appeler
en Angleterre. Je te savais anglais mais
je te pensais habiter en Norvège.
The Duke Of Nothing : Oh non, je n’ai
jamais emménagé là-bas, j’habite toujours
à Londres ! Nous avons la chance de
vivre dans un monde où la proximité
géographique n’est plus une condition
sine qua non pour mener à bien des
projets musicaux conjoints. La distance
est devenue une notion plus abstraite,
et il faut reconnaître que bosser de
cette façon fonctionne plutôt pas mal.
Je répète les titres de mon côté, nous
nous envoyons des fichiers, et sommes
en contact permanent pour discuter de
tout ce qui concerne le groupe.
Comment donc t’es-tu retrouvé propulsé
chanteur de Turbonegro en 2011 ?
Je suis ami avec le groupe depuis long-
temps ; cela date de sa reformation en
2002. Je ne les avais jamais rencontrés
dans leur première incarnation, même
si j’étais déjà fan. Lorsqu’ils sont
venus jouer à Londres en 2002, un ami
commun a voulu me les présenter en
me disant : « Tu vas voir, je suis certain
que vous allez bien vous entendre ! ». Et il
n’avait pas tort ! Ça a immédiatement
« matché » entre nous, comme si nous
nous connaissions depuis toujours.
Ensuite, je leur ai donné un coup de
main pour la promo anglaise de l’album
Party Animals (2005). Je suis allé les
voir à Oslo où j’ai longuement parlé
avec Happy-Tom (basse) et nous sommes
vraiment devenus amis. Après Retox
(2007), le groupe n’a pas réellement
splitté, mais s’est mis en pause pour
une période indéterminée, ce qui a fini
par déboucher sur le départ de Hank
Van Helvete (Ndlr : l’ex-chanteur). Tom
m’a alors dit qu’ils allaient probablement
faire quelques concerts d’adieu avant
de passer à autre chose pour de bon. Je
lui ai suggéré de prendre quatre ou cinq
chanteurs différents qui interprèteraient
chacun plusieurs titres par date, mais
l’idée n’avait pas l’air de l’emballer et
il a fini par me dire : « Et pourquoi tu ne
chanterais pas avec nous pour l’occasion ? »
Je dois avouer que, sur l’instant, ma
première réaction a été d’exploser de
rire ! (rires). Mais nous avons convenu
de répéter, de donner un concert pour
voir comment ça se passait, et d’en
faire quelques autres si toutefois cela
fonctionnait. Mais il n’était pas du tout
question de partir en tournée et encore
moins d’enregistrer à nouveau. Et puis,
ça s’est vite transformé en « Ok, faisons
une autre date », « Ok, allons faire un tour
aux Etats-Unis », et finalement en « Ok,
faisons un disque ! ». Et voilà où nous en
sommes six ans plus tard…
A-t-il été difficile pour toi d’embrasser
cette carrière déjà bien chargée ?
Avais-tu des périodes ou des albums
favoris ?
J’adorais tout depuis Apocalypse Dudes
(1998) et particulièrement le dernier
en date, Retox. Ce qui, finalement, n’a
rien d’étonnant puisqu’en discutant
avec Tom qui a à peu près le même âge
Propos recueillis par Charlélie Arnaud - Entretien téléphonique réalisé le 19 janvier 2018
que moi, nous nous sommes rendus
compte que nous avions grandi en
écoutant les mêmes choses : du rock
des années 70 tout d’abord, puis du
punk et du hardcore. Je ne me suis
jamais arraché les cheveux en me
disant « oh mon Dieu, je suis chanteur
dans Turbonegro, vais-je être à la hau-
teur ? » parce que, depuis mon arrivée,
nous prenons les choses avec une
certaine légèreté. Nous faisons tout en
espérant que ça marche, bien sûr, mais
surtout en nous disant que si ça ne
plaît pas aux gens, nous continuerons
juste pour nous et quelques fans, pour
le fun. Il n’y a donc pas de pression. Et
en plus, les gens ont l’air d’être
contents… Le plus dur aujourd’hui est
de caser des titres récents dans nos
setlists car nous disposons de tant de
classiques que les fans veulent à tout
prix entendre sous peine de nous
lyncher que c’est un vrai casse-tête
(rires). Quand tu joues en tête d’affiche,
tu peux toujours déborder d’une demi-
heure, voire plus – nous avons déjà
débordé d’une heure – mais quand tu
as 35 ou 40 minutes chrono en festival,
c’est l’horreur ! Nous allons devoir
bosser des medleys avec un couplet de
Nous ne sommes pas du tout dans
la parodie. Notre album est un
salut respectueux à des artistes
qui nous ont beaucoup marqués
(The Duke Of Nothing)
chaque tube, comme le fait Bloc Party,
hahaha !
Ce nouvel album est truffé de réfé-
rences au hard rock, qu’il s’agisse de
Van Halen, d’Ozzy Osbourne, ou
encore de Scorpions à travers ce
nouveau logo. Que représente le hard
rock pour vous ?
C’est une influence majeure pour tous
les membres du groupe à différents
degrés. Je vais te raconter quelle fût
ma première rencontre avec le style :
lorsque j’étais gamin, en 1977 je crois,
je suis allé en voyage aux Etats-Unis,
en Californie. Comme tous les gosses,
je passais beaucoup de temps dans les
luna parks, à jouer aux jeux d’arcade,
et dans l’un de ceux-ci trônait un
gigantesque poster de Kiss. Tu sais,
ces posters à mettre sur une porte, qui
en font la taille exacte (Ndlr : on appelle
ça des « pantalons »). Je devais avoir
cinq ans et ce poster me fascinait.
J’ignorais s’il s’agissait d’un groupe,
d’une affiche de film ou de personnages
de dessin animé, mais je bloquais
devant à tous les coups. Puis un
« grand » m’a fait écouter et j’ai trouvé
ça fabuleux, ça me parlait ! C’est exac-
tement ce que nous avons essayé de
recréer avec Rock’n’Roll Machine : un
disque que tu puisses kiffer même si tu
n’y connais rien en musique et que tu
n’as pas les outils critiques pour savoir
de quel style il s’agit : un disque que tu
puisses appréhender à cinq ans comme
à cinquante, qui envoie des bonnes
vibes et te donne envie de bouger ton
boule. Un album immédiat et direct, qui
aurait justement pu être la bande son
de mes après-midis à jouer aux jeux
vidéo dans les années 70 ou 80… Une
sorte de « radio hard rock ». Une grande
chance pour nous a été de rencontrer
notre nouveau claviériste Haakon-Marius,
qui est une véritable encyclopédie du
hard rock. Il nous a scotchés quand il
nous a sorti son son de synthés à la
1984 de Van Halen : c’était vraiment
comme l’original ! Nous nous sommes
donc dit : « Chic ! On peut le faire ! », et
progressivement, l’idée de faire tourner
tout l’album autour de cet esprit s’est
imposée, avec aussi le clin d’œil au
« Shot In The Dark » d’Ozzy, etc. Mais
tout cela vient du cœur, c’est une
démarche très honnête. Il n’y a rien
d’ironique là-dedans, nous ne sommes
pas du tout dans la parodie. C’est un
salut respectueux à des artistes qui
nous ont beaucoup marqués.
Effectivement, Haakon-Marius est
mis très en avant sur cet album.
Oui, et même en live. Depuis qu’il
nous a rejoints, il y a deux ans, nous
avons considérablement réarrangé les
morceaux afin d’y intégrer ses claviers.
Il joue des interludes entre les titres,
et nous avons opté pour quelques
nouvelles reprises comme le « Won’t
Get Fooled Again » des Who, où les
claviers sont prépondérants.
Votre fan-club, la Turbojugend (Ndt :
« La jeunesse Turbo », en français),
est l’un des plus gros fan-clubs de
groupe de musique au monde. Je
crois qu’à la base, tu faisais partie de
la division londonienne ?
Oui, j’ai même été président du London
Chapter (Ndlr : le fan-club est divisé en
« Chapters » qui regroupent dans le
monde entier les fans d’une même ville et
de ses environs. Il en existe une dizaine en
France – et même un à Monaco !). C’était
durant les années d’inactivité du
groupe, au début des années 2000, et
il s’agissait surtout pour moi de
garder un esprit vivant, de fédérer une
communauté. La Turbojugend n’est pas
une secte, c’est surtout un rassemble-
ment de personnes qui partagent un
même état d’esprit, qui aiment le rock
et faire la fête. La fin des années 90
était très déprimante musicalement :
il y avait eu le grunge, on bouffait
partout du post-rock ou du Radiohead,
et je voulais entretenir la flamme du
vrai rock partagé dans un esprit
hédoniste, en réaction au rock sérieux
et sombre qui envahissait la planète.
Typiquement dans l’esprit qui anime
notre nouvel album, justement.
Sais-tu combien de fans sont affiliés
à la Turbojugend ?
C’est impossible à dire. Au dernier
recensement, il existait environ 3.000
Chapters comptant chacun entre dix et
plusieurs centaines de membres, pour
les plus grosses villes. Pour nous, cela
signifie que, partout où nous allons,
nous sommes certains d’avoir du
monde à nos concerts et d’y voir des
vestes du club (Ndlr : tous les membres
possèdent une veste en jeans brodée au
nom du fan-club ainsi que de leur « pseudo
de fan »). Ce que j’adore avec les
membres de la Turbojugend, c’est
que nous ne sommes pas du tout dans
l’adoration aveugle. Nous ne sommes
pas dans l’esprit de la Kiss Army ou de
la Slaytanic Wehrmacht (Ndlr : fan club
de Slayer). Je vois plus cela comme un
« club des amis de Turbonegro ».
Lorsque nous rencontrons des fans de
tous pays, nous avons une vraie relation
d’égal à égal, nous nous parlons
comme des potes. Et Turbonegro n’est
pas le genre de groupe à vendre une «
expérience VIP exceptionnelle » à ses
fans pour la modique somme de 1500€,
si tu vois ce que je veux dire...
Vous avez tous des métiers à côté du
groupe, parfois assez surprenants
d’ailleurs (Ndlr : un présentateur
de talk-show à la télévision norvé-
gienne, un cadre d’Universal
Norvège, un sociologue réputé, etc.)
Turbonegro est-il une bonne façon de
vivre sa schizophrénie ?
(Rires) Oui, probablement. Je crois que
cela vient aussi d’une réaction à cette
période de la fin des années 90, et
également de la scène hardcore, où tu
étais censé être sur scène ce que tu
étais à la ville, monter sur scène
avec tes fringues de tous les jours et
raconter tes problèmes du quotidien –
ce qui a tourné peu à peu à la vaste
blague parce que tout le monde
s’inventait des vies misérables et que
ça a fini par se voir ou se savoir ! (rires)
Personnellement, quand je paye un
billet de spectacle, j’ai envie de voir
des costumes, une grosse production,
du divertissement, et surtout de me
sortir la tête des ennuis domestiques.
En tant que chanteur, il est aussi
bien plus excitant pour moi d’être un
performer et de jouer un rôle. Nous
passons beaucoup de temps et dépen-
sons beaucoup d’argent pour que les
gens puissent assister à un vrai spec-
tacle car c’est comme cela que nous
concevons le rock. Ce n’est pas monter
sur scène avec un jeans et un tee-shirt,
cacher tes yeux derrière des cheveux
gras, et foutre le bourdon à tout le
monde en chantant qu’on t’a coupé
l’électricité. Y
31
 Propos recueillis par Benji - Entretien téléphonique réalisé le 17 janvier 2018
A l’aube de la sortie de Machine Nation, un nouvel album studio s’inscrivant dans la lignée des meilleures réalisations
de Manigance, nous nous réjouissions de la participation du groupe béarnais à la tournée européenne de Myrath, une sorte
de couronnement après tant d’années d’efforts. Nous étions donc loin de nous attendre à cette nouvelle qui va faire l’effet
d’un coup de tonnerre dans le Landerneau des fans : le départ – volontaire – de Didier Delsaux, son vocaliste
emblématique, et son remplacement par Carine Pinto, chanteuse à ce jour inconnue que nous découvrons en pointillés sur
un titre du nouvel opus. François Merle nous révèle les raisons de ce changement majeur.
Rock Hard : En mai 2016, vous avez originel, Daniel Pouylau, a quitté le à la page et apprenne notre répertoire, finalisées, sans forcément attendre
accueilli un nouveau batteur, Patrick groupe, je lui avais déjà proposé le mais ça n’a pas pris bien longtemps. qu’elles soient disponibles sur album.
Soria. Tu as déjà joué avec ce dernier poste, mais il venait justement de monter Ne voulant pas jouer les cachotiers,
au sein de Killers, puisque vous avez Roxene. Ce n’était pas le bon moment. Depuis la mi-2016, vous avait fait nous avons donc proposé ces morceaux
enregistré ensemble l’album Cités Le jour où l’on s’est séparé de tourner deux titres de Machine au public. Cela permettait aussi de les
Interdites en 1992. Patrick a ensuite Guillaume Rodriguez, qui a joué sur Nation lors de vos concerts : situer par rapport à nos titres plus
poursuivi sa route avec Killers jus- Volte-Face (2014), je lui ai de nouveau « Machination » et « La Donne Doit anciens. En revanche, cela ne nous a
qu’en 1998, mais depuis, il a disparu proposé le poste et, cette fois-ci, il m’a Changer ». Etait-ce pour le simple pas amenés à modifier les titres.
des radars, à l’exception d’un groupe répondu : « Je ne dirai pas non deux fois ! ». plaisir de les faire découvrir en
de reprises nommé Roxene. Comment L’idée, c’est qu’il faut qu’il y ait une avant-première à votre public ou pour Le titre de l’album est décliné en
se fait-il qu’il soit de retour à tes bonne entente au sein du groupe. Nous les tester et faire éventuellement des deux écritures : Machine Nation et
côtés après tant d’années ? fonctionnons « à l’ancienne » et j’ai une ajustements ? « Machination ». Pourquoi ce jeu de
François Merle : Nous n’avions jamais entière confiance en Patrick. Je savais Dans un premier temps, nous voulions mots ?
rompu le contact, même si cela restait que ça se passerait bien avec les revenir dans un processus de « groupe Il s’agit d’une trouvaille de notre
principalement extra-musical. En autres membres de Manigance. Alors, normal », qui débute, écrit des chan- manager, Christian Pinto. Il m’a soumis
septembre 2012, lorsque notre batteur bien sûr, il a fallu qu’il se mette un peu sons et les joue une fois qu’elles sont ce mot, « machination » : j’ai trouvé ça

32
 revenant à plusieurs reprises sur l’album,
comme sur « Machination » et « La
Donne Doit Changer », des choses
d’actualités, ce titre nous a donc
semblé justifié. De plus, il est aussi
compréhensible en anglais, ce qui est
important à la veille de la sortie de
l’album à l’échelon mondial via le
label Mighty Music, même si nous
restons sur Verycords en France.
Sur « Face Contre Terre », Didier
Delsaux, votre chanteur, fait un duo
avec Carine Pinto. Qui est-elle et
quelle est son parcours ?
Il s’agit de la femme de notre manager :
elle connaît donc très bien Manigance !
C’est une chanteuse plutôt pop-rock,
voire de variétés, qui n’a pas d’expé-
rience de groupe. Maintenant, je dois
te confier quelque chose qui risque de
bouleverser la tournure de cette
interview : Carine sera notre chanteu-
se sur la tournée à venir. Didier ayant
connu quelques problèmes vocaux lors
de certains concerts l’année dernière,
il a préféré ne pas s’engager sur une
tournée de 18 dates avec quasiment
aucun jour de repos. Il craint un pépin en
milieu de tournée, ce qui nous porterait
préjudice, et préfère donc passer la
main. Nous avons bien réfléchi : nous
Je pense que Didier restera dans le cercle du groupe,
qu’il participera à l’écriture, ce genre de choses. Mais
demain, la nouvelle voix de Manigance sera celle de
Carine (François Merle)
ne voulions pas stopper les activités
du groupe pour autant, alors nous avons
jugé intéressant de trouver quelqu’un
pour le remplacer tout en amenant
quelque chose de différent. Un peu
comme l’a fait Nightmare, il y a peu de
temps. Voulant embaucher une personne
proche de notre cercle, comme toujours,
nous avons fait des essais avec
Carine : nous voulions tester une voix
de fille, tout de même assez rock, et
De g. à d. : Jean Lahargue, François Merle, nous avons été séduits. Alors, nous
Patrick Soria, Stéphane Lacoude, allons partir là-dessus…
Bruno Ramos & Didier Delsaux (accroupi)
Il est vrai que sa voix se marie parti-
culièrement bien avec celle de Didier
intéressant, mais je me suis dit que ça sur « Face Contre Terre », au point
ferait double-sens avec le nom du que, parfois, il est difficile de faire le
groupe : Manigance/machination, ça distinguo… Est-ce que cela a joué
me paraissait trop semblable. J’ai alors dans votre choix ?
proposé de dissocier les deux mots, Bien sûr. Nous sommes « accrochés » à
« machine » et « nation », pour jouer sur notre histoire, et au point de vue de
les changements politiques que nous l’identité musicale, nous tenions à
avons pu connaître en France ces der- continuer à chanter en français, Didier
niers mois, ces partis éclatés… Ça vient étant en quelque sorte la marque de
aussi de la manipulation que pratiquent fabrique du groupe. Nous avons bien
les médias avec les informations. conscience que, pour nos fans, ça va
« Face Contre Terre », le premier titre être un gros changement, et c’est pour
de l’album, parle de ça : cette sorte de ça que nous tenions à ce que la voix de
« business de la peur ». Ces thèmes son remplaçant ne soit pas trop éloignée
GENRE SITE INTERNET ARTICLES RH
. Metal mélodique
www.facebook.com/Manigance RH N°10, 29, 41, 56, 107,
146 & 184
LE GROUPE
ALBUMS
. Didier Delsaux (chant album)
. Signe De Vie (EP – 1997)
. Carine Pinto (chant live) . Ange Ou Démon (2002)
. D'un Autre Sang (2004)
. François Merle (guitare) . Mémoires… Live (live – 2005)
. Bruno Ramos (guitare) . L'Ombre Et La Lumière (2006)
. Récidive (2011)
. Stéphane Lacoude (basse) . Volte-Face (2014)
. Si l’on parle purement de l’enregis-
. Machine Nation (2018)
Patrick Soria (batterie)
. Jean Lahargue (claviers)
de la sienne. Même si Carine peut
aussi évoluer dans d’autres registres,
sa voix – c’est vrai – s’avère aussi
assez proche de celle de Didier. Nous
étions loin de penser à ça lorsque nous
avons enregistré ce duo, mais après la
décision de Didier, c’est devenu un
choix évident. Elle fera donc la tournée
avec nous. Après, avec Didier, nous
verrons…
Je sens dans ta voix qu’un avenir
avec Didier semble peu probable…
Comment te dire… Je pense que Didier
restera dans le cercle du groupe, qu’il
participera à l’écriture, ce genre de
choses. Mais demain, la nouvelle voix
de Manigance sera Carine.
Tu évoquais les problèmes de voix de
Didier. Vous avez annulé un concert
au Festival de Vouziers en 2016,
mais à ma connaissance, c’est la
seule fois où cela vous est arrivé ;
nous sommes presque dans le
domaine de l’anecdotique. Pourquoi
penses-tu qu’il ait développé cette
sorte « d’angoisse » par rapport à ses
capacités vocales ?
Je pense que l’âge a dû jouer. Il n’est
peut-être plus aussi enthousiaste à
l’idée de partir sur la route, et cela
n’aide pas dans l’envie de se surpasser.
C’est un choix qui lui appartient, nous
l’avons beaucoup encouragé à revenir
sur sa décision, nous lui avons laissé
le temps de réfléchir… Il est évident
que nous ne lui en avons pas voulu
après « l’épisode Vouziers ». Il était
hors de question de lui jeter la pierre.
Mais de notre côté, nous devions
avancer. C’est un sacré challenge, bien
sûr. Pour les fans, ce sera probablement
un peu compliqué, même s’ils auront
eu connaissance de la nouvelle avant
les concerts…
Tâchons de poursuivre après cette
surprenante nouvelle ! « Méandres »
est une ballade acoustique, avec du
clavier, quelques violons et un solo
électrique furtif en fin de course…
Pratiquement sur tous nos albums, on
trouve une ballade. Cette fois-ci, nous
avons laissé s’exprimer Didier et Jean
Lahargue, notre claviériste, et ils nous
ont proposé ce titre assez unique, avec
une mélodie de piano très différente de
ce qu’on peut proposer d’habitude.
Nous l’avons laissé un peu mûrir pour
y revenir un peu plus tard. Le reste du
groupe a simplement influé sur la fin
du morceau, avec effectivement ce
solo de guitare plus metal, mais le
gros du titre est à mettre au crédit de
Didier et Jean.
Il y a comme toujours un gros travail
de guitares sur cet album : comment
se passe la répartition des parties de
six cordes entre Bruno Ramos et
toi ?
trement, je m’occupe de toutes les
rythmiques, et Bruno de tous les soli.
Je dirais que c’est une façon d’optimiser
le boulot, sachant que je ne suis pas
capable de jouer les soli de Bruno,
mais que, par contre, lui peut jouer
toutes mes rythmiques ! (rires) Après,
les riffs viennent de lui ou moi, et je
suis chargé d’arranger des suites
d’accords qui peuvent coller à la tessi-
ture vocale de Didier. Nous travaillons
ensuite à trois sur les couplets/
refrains, et lorsque les bases sont là,
que ça « chante », ça devient plus facile
de tout dérouler, en particulier les
arrangements et les soli.
Vous avez tourné un clip pour
« Machination », avec de beaux
plans en plein air dans une vallée
montagneuse et un château. Où avez-
vous filmé ça ?
Au fort du Pourtalet, dans les
Pyrénées-Atlantiques, qui, durant la
Seconde Guerre Mondiale, a servi de
prison politique. C’était l’idée de
Patrick, qui a géré le côté administratif
de la chose. Ce fut une belle aventure
car il s’agit d’un lieu isolé, à flanc de
montagne. Il nous a donc fallu monter
à la main tous les amplis, les groupes
électrogènes… Ça a duré deux jours !
Il y a eu des prises extérieures sur la
terrasse du fort, filmées avec un
drone, ce qui donne de très belles
vues, mais aussi à l’intérieur du fort.
Ça change un peu des clips live ou dans
des hangars.
La grosse échéance à venir, c’est
cette tournée européenne avec
Myrath que nous avons évoquée tout
à l’heure. Dix-huit dates dans huit
pays, dont six dans lesquels vous ne
vous êtes encore jamais produits.
Qu’attends-tu de cette tournée ?
Qu’enfin, et cela va de pair avec la sortie
mondiale de l’album, nous parvenions
à montrer ailleurs ce qu’on peut faire
avec du metal chanté en français.
C’est très compliqué d’arriver à dégoter
des places dans des festivals à l’étranger,
et je pense que la barrière de la langue
y est pour beaucoup. Néanmoins, je
pense que nous avons une carte à
jouer et que nous devons réussir à
faire découvrir ce qu’on fait au-delà
des frontières françaises. Il y a bien
sûr de très bons groupes français qui
chantent en anglais, mais je suis sûr
que nous pouvons parvenir à convaincre
le public d’ailleurs qu’il n’y a pas que
ça. Cette tournée avec Myrath, qui
véhicule aussi un concept très particu-
lier et personnel, un metal à l’orientale,
nous permettra, je pense, de nous
produire devant un public très ouvert
d’esprit et de gagner de nouveaux
fans. Et puis, nous serons le premier
groupe de metal chantant en français
avec une chanteuse : les choses un peu
inédites dans le metal sont toujours
bienvenues. Je pense que cela peut vrai-
ment nous apporter, si nous parvenons
à passer les premiers caps. Y
33
 GENRE
. Folk/pagan metal
LE GROUPE
. Jacco De Wijs (chant)
. Lars NachtBraecker (chant)
. Kevin Storm (guitare)
. Koen Romeijn (guitare)
. Rowan Roodbaert (basse)
. Joost Den Vellenknotscher
(batterie)
SITE INTERNET
www.heidevolk.nl
ALBUMS
. De Strijdlust Is Geboren (2005)
. Wodan Heerst (EP – 2007)
. Walhalla Wacht (2008)
. Uit Oude Grond (2010)
. Batavi (2012)
. Velua (2015)
. Vuur Van Verzet (2018)

ARTICLE RH
RH N°184

De g. à d. : Rowan Roodbaert, Kevin Storm, Lars NachtBraecker,

Jacco de Wijs, Koen Romeijn & Joost Vellenknotscher

34

2018 s’annonce particulièrement remplie pour Heidevolk : tournée européenne en compagnie de Korpiklaani et Arkona
(Cf. Agenda), publication d’un DVD et, bien sûr, sortie de Vuur Van Verzet (« Le Feu De La Résistance »), sixième opus
de très bonne tenue. Si le sextet n’est pas encore pleinement parvenu à capturer sur bandes l’énergie de ses prestations
live, reconnaissons qu’il n’en a jamais été aussi proche… Nous sommes donc prêts à parier que ces onze nouveaux titres
mettront littéralement le feu lors des concerts à venir ! Entretien avec le bassiste et compositeur Rowan Roodbaert.
Rock Hard : Dans la mesure où il s’agit
de votre première interview dans nos
pages, il semble judicieux de revenir
sur vos origines, qui remontent à
2002. Est-il vrai que Heidevolk est né
de la rencontre entre une formation
metal et un chœur viking ?
Rowan Roodbaert : Oui, tout à fait.
Joris Boghtdrincker (chant) m’a recruté,
ainsi que deux de nos amis, dans le
but de monter un chœur viking qui
interpréterait des airs traditionnels
entièrement a cappella. De leur côté, le
batteur Joost Den Vellenknotscher et le
guitariste Sebas Bloeddorst souhaitaient
lancer un groupe de folk metal dans la
veine de Thyrfing. Un jour, Joost et Joris
sont tombés l’un sur l’autre dans un
pub et ont commencé à parler de leurs
projets respectifs. Joost a immédiatement
pensé qu’une association entre le groupe
et le chœur pourrait s’avérer bénéfique,
et de cette fusion est né Heidevolk.
Que signifie ce nom ?
Outre le fait que « heiden » signifie
« païen » en néerlandais, le mot « heide »
désigne spécifiquement la bruyère,
petite plante violette qui abonde dans
nos plaines et nos campagnes. Le mot
« volk », comme le « folk » anglais, fait
référence au peuple. Dans la mesure où
nos chansons parlent de l’Histoire et
des nombreuses légendes du Veluwe,
notre région natale, « le peuple des
bruyères » nous semblait être un
patronyme parfaitement approprié.
Vous chantez exclusivement (ou
presque) en néerlandais. Comment ce
choix s’est-il imposé à vous ?
Nous tenions à doter notre musique
d’un caractère authentique. Or, la
meilleure façon d’honorer les mythes
de nos contrées est de conserver les
mots originellement choisis pour les
raconter. Cela me paraît plus naturel et
sincère que de chanter en anglais ! De
plus, lorsque nous avons démarré
Heidevolk, nous ne connaissions aucun
autre groupe folk ou folk metal s’exprimant
en néerlandais. Cela avait – et a toujours
– quelque chose d’unique, de spécial.
De nos jours, je pourrais te citer
quelques combos metal qui chantent dans
cette langue, mais ceux-ci s’exportent
peu et s’adressent avant tout à un
public local. Et puis, le fait qu’ils aient
majoritairement recours au chant saturé
n’aide pas vraiment à saisir le sens de
leurs textes ! (rires)
Très vite, le groupe est parvenu à
générer une certaine attention…
Il nous a rapidement fallu mettre de
côté les formations dont nous faisions
partie car Heidevolk a tout de suite
marché. Notre deuxième show, qui s’est
déroulé dans un pub, a très vite affiché
sold-out. Sur les 180 personnes présentes
dans le bar, 110 ont acheté un t-shirt.
Tout notre stock y est passé, ce qui est
absolument dingue ! Notre formation
n’existait que depuis deux ans, mais
grâce au bouche-à-oreille, nos concerts
marchaient du feu de Dieu. Nous nous
sommes alors dit qu’il était temps de
faire un disque afin que plus de gens
puissent nous découvrir et écouter
notre musique chez eux. Nous avons
d’abord enregistré un premier single,
« Het Gelders Volkslied », puis nous
sommes attelés à la création d’un
album. A l’époque, je n’étais que l’un
des quatre chanteurs du groupe, je
n’assurais pas la basse.
Même si tu étais là dès le début, tu
n’as officiellement intégré Heidevolk
qu’en 2006. A quel moment es-tu
devenu l’unique compositeur du
groupe ?
Mon implication dans le processus
d’écriture est allée en s’amplifiant. Je
n’ai apporté que quelques suggestions au
premier opus et ai commencé à composer
des chansons pour Walhalla Wacht
(2008) en collaboration avec Sebas et
Reamon Bomenbreker (guitare). Puis j’ai
écrit un bon tiers de Batavi (2012), au
moins les trois-quarts de Velua (2015) et,
enfin, l’intégralité de notre nouvel
album.
Heidevolk a connu de très nombreux
changements de line-up. A quoi tient
cette instabilité ?
Le problème qui se pose à nous est assez
banal : il est très difficile de concilier la
C’est malheureusement une
vérité universelle : l’Humanité
n’apprend pas de ses erreurs
(Rowan Roodbaert)
vie d’un groupe qui tourne beaucoup et
une activité professionnelle régulière.
Reamon, par exemple, est professeur et
ne pouvait assurer que quelques
concerts de temps à autre. Après des
années de frustration, il a fini par jeter
l’éponge. Kevin est père de trois
enfants, Mark a choisi de privilégier
son boulot, qu’il adore… Ça craint, bien
sûr, mais ce sont des raisons légitimes,
parfaitement compréhensibles.
Outre le fait que vos textes soient
écrits en néerlandais, vous avez une
autre spécificité : la combinaison de
deux voix claires masculines qui
chantent généralement simultanément.
Pourquoi ce choix ? Est-ce une carac-
téristique de la musique ancienne des
Pays-Bas ?
Non, je ne crois pas que cela relève
d’une tradition… Mais c’est un élément
constitutif de notre identité, c’est vrai.
Dès nos origines, nous avons constaté
que le fait d’avoir plusieurs chanteurs
dans nos rangs nous ouvrait un large
éventail de possibilités. Même si nous ne
mettons désormais que deux chanteurs
en avant, nous continuons à travailler
comme si nous disposions d’un véritable
chœur. La plupart des groupes se
contentent de demander à leur vocaliste
de doubler ses lignes de chant en studio,
mais sont obligés de « tricher » en live.
De notre côté, nous avons deux chanteurs
Propos recueillis par François Blanc - Entretien téléphonique réalisé le 16 janvier 2018
principaux, aussi importants l’un que
l’autre, qui jouent tous deux avec la
foule et chantent ensemble, d’une seule
voix. Cela donne un surplus de puissance
et d’énergie à nos prestations et nous
adorons ça ! En studio, une voix est
mixée plus à droite et l’autre à gauche,
pour que l’auditeur ait l’impression que
les deux vocalistes lui déboulent dessus
de chaque côté.
Parlons de Vuur Van Verzet. S’agit-il
d’un concept album ?
Ce disque traite de la résistance aux
usurpateurs, de la nécessité de tenir
tête à tous ceux qui essaient de te
dominer, de porter atteinte à ta liberté.
Nous parlons plus spécifiquement du
déclin de l’empire romain et de la lutte
menée par les tribus germaniques pour
reprendre possession de leurs terres
ancestrales. Pour une fois, nous sortons
de notre Veluwe natal pour nous aven-
turer à l’étranger, puisque nous parlons
aussi des grandes migrations des peuples
qui, pour fuir l’oppresseur ou la famine,
ont traversé terres et mers, jusqu’à
s’implanter en Turquie ou en Grèce.
L’interlude « Yngwaz Zonen », par
exemple, met en scène des hommes sur
un bateau qui cherchent un nouveau
lieu où s’implanter et chantent à propos
de ce qu’ils ont vécu. Je trouve ce
chapitre de l’Histoire particulièrement
intéressant.
Peut-on y voir une métaphore de ce
qui se passe de nos jours ? Beaucoup
de migrants fuient leur pays et partent
en quête de nouvelles terres d’accueil…
Oui, tout à fait. Lorsque je me documentais
afin d’écrire les textes de l’album, je
songeais constamment à notre époque
contemporaine. Quand je me suis rendu
au Forum Romain, en Italie, j’ai réalisé que
je me tenais là dans l’un des premiers
bastions de la démocratie… Tout du
moins, jusqu’à l’arrivée de Jules César
et des Empereurs romains qui allaient
conserver l’exercice du pouvoir durant
de longues décennies. Quand on s’intéresse
à la rébellion des tribus germaniques et
aux grandes migrations survenues
avant et après la naissance du Christ,
on réalise que les choses n’ont pas
changé. Les démocraties continuent
d’échouer et les tyrans à prendre le
pouvoir. Les populations luttent contre
les dirigeants qui les ignorent ou les
exploitent. Ce n’est pas de l’Histoire
ancienne, ça se passe en ce moment !
C’est malheureusement une vérité
universelle et atemporelle : l’Humanité
n’apprend pas de ses erreurs. Nous les
répétons et sommes perpétuellement
coincés dans un cycle, un combat entre
ordre et chaos.
Voilà un constat bien amer !
Oui, mais le fait de le réaliser est une
chance : voir les choses telles qu’elles
sont permet d’essayer d’agir, de s’en sortir.
Nous sommes nous-mêmes prisonniers
d’un cycle qui nous dépasse. Plus nous
sommes informés et plus nous avons de
chance d’y mettre fin. Il faut incarner le
changement qu’on souhaite observer
dans le monde !
Tu as puisé dans certains mythes
pour écrire tes paroles…
Oui, les titres « Britannia » et « The
Alliance », notamment, racontent la
légende de Hengist et Horsa, deux
frères danois qui auraient réussi à unir
les Saxons, les Angles et d’autres tribus
contre les Pictes, qui souhaitaient
profiter du retrait des armées romaines
pour piller la Grande-Bretagne, alors
dirigée par un seigneur de guerre
nommé Vortigern. Les deux frères ne
souhaitaient pas être récompensés avec
de l’or, mais avec des terres, ce qui
engendra de nouveaux conflits. On sait
ce qui s’est passé ensuite : les Angles,
qui débarquaient du Danemark, et les
Saxons qui venaient d’Allemagne ont
conquis l’Angleterre et repoussé les
Britanniques, qui ont majoritairement
fuit au Pays de Galles. Je ne sais pas si
c’est vrai, mais il paraît que « Wales »
signifie justement « étrangers » car les
Britanniques étaient des étrangers
dans leur propre pays. Alan
Nemtheanga de Primordial chante sur
« The Alliance » et incarne la colère des
Britanniques, qui étaient heureux de
voir les Saxons arriver et se sont sentis
hautement trahis lorsqu’ils se sont
implantés à leur place. Les derniers
mots d’Alan sont significatifs : « Vous
avez fait de nous des étrangers, vous vous
êtes approprié nos terres ». En écrivant les
paroles, je ne pouvais pas m’empêcher
d’imaginer sa voix. J’étais un peu nerveux
avant de lui demander de participer et
ai été très soulagé de recevoir une
réponse positive !
Il semblerait que vous planchiez
également sur un DVD ?
Oui, nous publierons cette année l’enre-
gistrement du concert que nous avons
donné en juin 2016 afin de célébrer le
quinzième anniversaire de Heidevolk.
Ce DVD contiendra d’autres surprises,
mais je préfère ne pas en dire plus pour
l’instant !
Durant des années, Heidevolk s’est
fait rare en France. Heureusement, vous
avez rattrapé cela en 2016 et 2017 !
Oui… Si ma mémoire est bonne, nous
ne sommes venus qu’une ou deux fois
chez vous entre 2010 et 2016 ! Le
problème, c’est que les festivals iti-
nérants comme le Heidenfest et le
Paganfest ont cessé de faire étape en
France. Mais nous adorons jouer ici, le
public nous accueille toujours avec un
enthousiasme dingue ! Désormais, nous
comptons venir vous voir tous les ans
ou tous les deux ans maximum. Je suis
sûr que vous manquez de touristes
hollandais ! (rires) Y
35
 Propos recueillis par Benji - Photo Benji - Entretien téléphonique réalisé le 11 janvier 2018
Il n’est que 10h45 lorsque nous joignons Biff Byford par téléphone : est-ce parce qu’il ne s’agit pas d’un horaire très rock’n’roll
que le vocaliste de Saxon, plutôt bavard en temps normal, se montre moins disert que d’habitude ? Allez savoir… Mais comme le
dirait Joe Perry, « Let The Music Do The Talking », et de ce côté-là, Thunderbolt, le 22ème album studio de l’increvable formation
anglaise, ne déçoit pas. Cette constance dans la qualité fait que nous laissons la parole à Biff afin qu’il nous donne quelques
informations à propos de ce nouvel opus et qu’il revienne un instant sur la relation toute particulière qui a lié Saxon à Motörhead
durant plus de 35 ans.
Rock Hard : Le titre éponyme de votre posséder une sorte de côté gothique. « Roadie’s Song » est bien évidemment signés, nous étions nos propres roadies
nouvel album, « Thunderbolt », t’a été C’est pour ça que j’ai pensé que ce un titre dédié à votre road crew. car, évidemment, nous n’avions pas les
inspiré par la mythologie grecque, et morceau devait sonner plus « gros » Souvent, les groupes ayant traversé moyens de payer des gens pour s’occuper
en particulier par le Roi des Dieux, que nos chansons habituelles, plus les époques, comme Saxon, sont de notre matériel !
Zeus. Comment t’es venue cette idée ? cinématique en quelque sorte. entourés de roadies très fidèles qui
Biff Byford : C’est un sujet qui me restent dévoués durant des années à Tu fais un duo avec Johan Hegg, le
semblait parfait pour une chanson de Est-il vrai, justement, que ce titre fut la même formation. Est-ce le cas au chanteur d’Amon Amarth, sur le titre
rock ou de metal... originellement composé pour figurer sein de l’équipe qui accompagne « Predator ». Comment est-ce arrivé ?
sur une bande originale de film ? Saxon sur la route ? Sur les démos de ce titre, je chantais à
Les symboles généralement associés C’est exact, son inspiration vient du Oui, absolument. Certains sont avec la fois les parties graves et celles avec
à Zeus étaient aussi parfaits pour fait qu’il était destiné à une bande nous depuis très, très longtemps. Bon, ma tessiture habituelle. Mais plus le
l’imagerie de Saxon : l’éclair qu’il originale. D’ailleurs, il n’est pas ils ne travaillaient pas avec nous dans morceau prenait forme, plus j’ai
tient dans la main, l’aigle qu’on voit impossible qu’il soit finalement retenu les années 80, mais certains sont là commencé à penser que Johan serait
apposé sur son épaule… On dirait pour le film en question, mais tu depuis les années 90. Ceci dit, il nous parfait pour chanter ces passages
presque que tout vous associe ! sais, dans le milieu du cinéma, tout arrive encore de croiser certains graves. Nous lui avons demandé s’il
C’est vrai ! Ça cadre parfaitement bien prend plus de temps qu’ailleurs ! Nous roadies qui bossaient pour nous dans était intéressé, et il a dit oui immédia-
avec nous. La musique de ce titre est verrons… les Eighties ! Mais je dois préciser que tement. C’est un fan de Saxon, et
arrivée en premier, et c’est en écoutant nous sommes fans d’Amon Amarth.
ces riffs qu’ils m’ont inspiré des paroles Malheureusement, il n’a pas pu nous
de ce style. Après, je ne saurais pas il ne fait aucun doute que ces rejoindre en studio pour enregistrer
vraiment expliquer la raison qui fait ses parties, qu’il a donc gravées dans
que j’ai pensé à ce thème. Mais je trouve dates de 1979 avec Motörhead son propre home-studio, en Suède.
que ça fonctionne parfaitement, et
c’est pour ça que nous avons placé ce ont joué un grand rôle dans le Bien sûr, un autre titre très important
morceau en tout début de l’album. de ce nouveau disque est « They Played
D’ailleurs, j’avais déjà ce mot en tête développement de notre début de Rock’n’Roll », écrit en hommage à
depuis plusieurs mois, et avant même Lemmy et Motörhead. Tu l’as dit à
d’avoir écrit le morceau correspondant,
je savais que ce serait le titre de cet
carrière (Biff Byford) maintes reprises, Motörhead est le
groupe qui vous a permis de décoller
album. Nosferatu, qui n’est en fait Dracula notre équipe technique, à l’exception vraiment en Grande-Bretagne puisqu’il
avec un nom différent, a donné de deux personnes, n’est pas la même vous a offert sa première partie sur
« Nosferatu (The Vampires Waltz) » est naissance à deux films : Nosferatu selon que nous tournons aux USA ou la tournée Bomber en novembre et
un titre assez massif avec beaucoup Le Vampire en 1922, un film muet en Europe. Quant à la chanson, je dois décembre 1979. Quels souvenirs
d’orchestrations qui, dans l’esprit, de Friedrich Wilhelm Murnau, avouer qu’au départ, je ne pensais pas précis gardes-tu de ta première
rappelle « Battalions Of Steel » (Into puis Nosferatu Fantôme De La l’inclure à l’album. Je pensais l’utiliser rencontre avec Lemmy, qui a dû avoir
The Labyrinth/2009). Avais-tu dès Nuit en 1979, réalisé par Werner sur un autre support, mais tout le lieu à Bracknell le 10 novembre
le départ le sentiment que ce titre se Herzog, avec Klaus Kinski et Isabelle monde a semblé aimer ce morceau. 1979 ?
prêtait à ce type d’orchestrations ? Adjani. As-tu vu ou revu ces films Alors, finalement, on la retrouve sur J’étais un peu nerveux pour être franc,
En fait, on peut trouver deux versions avant de te lancer dans l’écriture de Thunderbolt. car Motörhead était déjà un groupe avec
de ce titre sur l’album : la première, ce texte ? un gros following, et nous n’avions jamais
avec l’orchestration dont tu parles, et Non. Je me suis contenté de relire le Penses-tu que tu aurais pu être un tourné avec eux. Mais franchement,
la seconde, placée en fin de disque, qui Dracula de Bram Stoker. Mais je me roadie si tu n’étais pas devenu Lemmy et les autres ont été vraiment
se veut plus « crue », plus directe. souviens avoir vu, il y a bien long- musicien ? sympas avec nous, toujours prêts à
J’avais en tête que, dans le cadre d’une temps, la première version muette de Probablement. Après, je n’ai jamais nous donner un coup de main si néces-
chanson traitant de Dracula ou ce film, celle de Murnau, en noir et fait ce métier en tant que tel, même si, saire. Il n’était pas rare, durant cette
Nosferatu, la musique se devait de blanc. à nos débuts, avant que nous ne soyons tournée, que Lemmy monte sur scène
en disant : « Saxon est un groupe fantas-
. The Eagle Has Landed - Part II tique, achetez leur album ! » Cela nous
GENRE ALBUMS ARTICLES RH
(live - 1996)
. Heavy metal/Hard rock . . Unleash The Beast (1997) donnait une vraie crédibilité.
Saxon (1979)
. Metalhead (1999) RH N°4, 35, 52, 64, 84, 110, 121, 127,
. Wheels Of Steel (1980) 159 & 184
LE GROUPE . Strong Arm Of The Law (1980) . Killing Ground (2001)
. . Lionheart (2004) Il faut se souvenir qu’à cette époque,
. Biff Byford (chant) Denim And Leather (1981)
. The Eagle Has Landed (live - 1982) . The Eagle Has Landed - Part III Motörhead, c’était Lemmy, mais
. Paul Quinn (guitare) . Power & The Glory (1983) (live - 2006) aussi Fast Eddie Clarke et Phil
. Crusader (1984) . The Inner Sanctum (2007)
. Doug Scarratt (guitare) . . Into The Labyrinth (2009) Taylor, deux personnages également
Innocence Is No Excuse (1985)
. . Rock The Nations (1986) . Call To Arms (2011) hauts en couleur. Quels rapports
Nibbs Carter (basse) . . Sacrifice (2013)
Destiny (1988) entretenais-tu avec eux ?
. Nigel Glockler (batterie) . Rock’n’Roll Gypsies (live - 1989) . St. George’s Day Sacrifice (live - 2014)
. Solid Ball Of Rock (1991) . Battering Ram (2015) Ils étaient très bons, nous nous enten-
. Forever Free (1992) . Thunderbolt (2018) dions aussi parfaitement avec eux.
SITE INTERNET . Dogs Of War (1995) Vraiment, je garde un merveilleux
www.saxon747.com
souvenir de cette première tournée en

36
 leur compagnie. Et nous n’avons pas
cessé de tourner ensemble durant les
35 années qui ont suivi, avec les
différentes formations du groupe !
(Ndlr : à ce moment précis, nous ne
savions pas encore que Fast Eddie Clarke
était décédé, nous allions l’apprendre
quelques minutes à peine après cette
interview. Il semblerait par contre que Biff
était déjà au courant depuis le début de
matinée…)
Cette tournée de 1979 comprenait
pas moins de trente dates à travers
l’Angleterre, le Pays de Galles et
l’Ecosse, et vous a permis de jouer
dans tous les City Hall, Apollo ou
Odeon du pays, quasiment sans un
De g. à d. : Paul Quinn, Doug Scarratt, Nigel Glockler,
Biff Byford, Nibbs Carter
DR
L’Hammersmith Odeon était une sorte de cathédrale
dans laquelle tous les groupes voulaient jouer
(Biff Byford)
seul jour de repos ! Vous aviez déjà
pas mal tourné avant cela, mais il
s’agissait de votre véritable baptême
du feu…
C’est clair ! De plus, quasiment toutes
les dates affichaient complet, alors oui,
on peut appeler ça notre baptême du
feu. Cette tournée fut une formidable
introduction à l’album Wheels Of Steel,
qui allait sortir à peine quelques mois
après (Ndlr : le 5 mai 1980). Or, c’est
grâce à ce disque que nous sommes
devenus importants à l’échelon mondial.
Il ne fait donc aucun doute que ces
dates avec Motörhead ont joué un
grand rôle dans le développement de
notre début de carrière.
Dans les paroles de « They Played Rock’
n’Roll », tu mentionnes l’Hammersmith
Odeon, la salle londonienne où vous
38
avez joué à trois reprises lors de
cette fameuse tournée. Etais-tu nerveux
avant de donner votre premier
concert dans cette salle mythique ?
Nous étions sûrement nerveux avant
tous les concerts avec eux ! (rires)
Mais tu as raison, l’Hammersmith Odeon
était l’une des plus grandes salles de
la tournée, une sorte de cathédrale
dans laquelle tous les groupes vou-
laient jouer. Alors oui, nous étions
nerveux avant de monter sur scène,
mais pas flippés pour autant. Il nous
tardait juste d’en découdre ! C’était
fantastique.
On peut, au milieu du morceau,
entendre la voix de Lemmy prononcer
son habituelle introduction en
concert : « We are Motörhead, and
we play rock’n’roll ! ». Vous étiez
amis depuis toujours, certes, mais a
t’il été simple d’obtenir les droits
d’utiliser sa voix sur ce titre ?
Extrêmement simple. Nous avons
demandé au management si nous
pouvions le faire et ce dernier nous a
donné son accord. Ce fut aussi simple
que ça.
La section rythmique de ce titre
évoque vraiment Motörhead, mais
les riffs ont plutôt une couleur
Saxon. C’était le but, créer une
sorte de croisement entre vos deux
styles ?
Je pense que le premier riff est plutôt
motörheadien, mais par la suite, tu as
raison, ça devient davantage un mix
entre nos deux styles. Et je trouve que
l’ambiance de ce titre est très 80’s.
Thunderbolt est le troisième album
que vous enregistrez avec Andy
Sneap. C’est assez inhabituel dans
la carrière de Saxon car vous avez
souvent changé de producteur, voire
produit plusieurs albums vous-
mêmes. Pourquoi penses-tu que votre
collaboration se passe aussi bien ?
J’aime beaucoup bosser avec lui. Il a
une super oreille pour les guitares.
Je trouve qu’il est vraiment très bon
dans ce domaine. De plus, je pense
qu’il a su trouver le bon dosage pour
faire cohabiter le son typique des 80’s
et des sonorités plus modernes. Je
dirais que ce disque a un côté très
anglais, et c’est exactement ce que je
souhaitais. Andy est fort pour faire en
sorte que des groupes comme Accept,
Judas Priest et Saxon sonnent proches
de leurs racines tout ayant un son
moderne.
C’est sûrement parce qu’il connaît
par cœur tous ces groupes, ayant
grandi en les écoutant…
C’est vrai, c’est un grand fan du metal
des années 80.
Que ce soit en concert ou en studio,
ta voix a vraiment bien vieilli. Tu es
capable de chanter quasiment les
classiques de la première moitié
des années 80 dans la même tonalité
qu’à l’époque. Es-tu conscient d’être
particulièrement chanceux en cela ?
Oh, je ne pense pas vraiment à ça, je fais
juste mon job du mieux possible. Après,
la voix est une chose si aléatoire…
J’imagine que si tu y fais un peu
attention, tu peux espérer la préserver
aussi longtemps que possible…
Justement, ne penses-tu pas que le
fait que tu n’aies jamais été un gros
buveur, et qu’à priori, tu n’aies pas
vraiment touché à la drogue, t’ait aidé
à conserver cet organe quasi intact ?
En effet, je n’ai jamais été ni un gros
buveur, ni un amateur de drogue dans
ma jeunesse. Et cela a dû m’aider à
conserver un certain niveau.
Nous avons vu paraître un paquet de
coffret estampillés Saxon ces derniers
mois, parmi lesquels au moins trois
plutôt imposants : The Decade Of
The Eagle (4 LPs), The Solid Book
Of Rock (11 CDs + 3 DVDs) et
Eagles And Dragons (9 LPs)…
Oui, c’est vrai, ça doit vouloir dire
que nous redevenons populaires ! (petit
rire) Lorsque ta cote de popularité
progresse, le nombre de produits
dérivés qui t’est consacré suit. Cela a
une certaine logique.
Mais tu ne penses pas sincèrement
que c’est trop en si peu de temps,
même pour collectionneurs les plus
férus du groupe ?
Si, tout à fait. Mais ce sont des sorties
qui nous « échappent » car, généralement,
nous ne sommes pas les instigateurs
de ces coffrets ou rééditions. Alors,
d’une certaine façon, il n’y a rien que
nous puissions faire contre ça. Si les
gens ne veulent pas les acheter, hé
bien, qu’il en soit ainsi ! (rires)
Vous allez tourner de mi-mars à
début mai aux USA, au Canada et en
Amérique Centrale avec Judas Priest
et Black Star Riders. Si Motörhead
fut le groupe qui vous a offert votre
première tournée au Royaume-Uni,
c’est en première partie de Judas
Priest que vous avez réalisé votre
première tournée européenne au
début 1981…
C’est vrai ! Nous avons aussi une
longue histoire de tournées avec
Judas Priest et je suis ravi de repartir
sur les routes avec eux. Cela va nous
permettre de jouer dans de grandes
salles aux USA et je suis persuadé que
les fans vont adorer cette affiche.
J’aimerais vraiment pouvoir repartir en
tournée avec eux à travers l’Europe,
qui sait ?
L’année prochaine, cela fera quarante
ans que votre premier album éponyme
sera sorti ! Vous prévoyez quelque
chose afin de fêter ça dignement ?
En effet, nous allons partir du principe
qu’il s’agit de nos quarante ans de
carrière et célébrer ça en donnant
des concerts spéciaux dans le cadre
de festivals durant l’été 2019. Nous
travaillons déjà sur ce projet.
Il y a dix ans, tu as sorti une autobio-
graphie intitulée Never Surrender
qui, bien sûr, parlait beaucoup de
Saxon. Mais à ce jour, il n’y a toujours
pas de biographie uniquement dédiée
au groupe. C’est en projet ?
J’essaye de motiver tout le monde à ce
sujet ! (rires) Il y a donc aussi du travail
qui est fait en ce sens, même si c’est un
peu difficile parfois… Y
 De g. à d. : Mathieu Ricou, Katy Elwell & William Knox
Propos recueillis par Emmanuel Hennequin - Entretien téléphonique réalisé le 21 janvier 2018
Troisième album : celui d’une identité en pleine affirmation. Le combo metal/prog rock international LizZard, basé en Centre-
France et un temps produit par Rhys Fulber (Paradise Lost), tournait avec O_R_k début 2018, au moment de cette entrevue, et
aborde un tournant avec Shift : un disque produit en compagnie de Peter Junge et dans lequel le groupe déploie ambiances et
mélodicité plus complexes.
Rock Hard : Par rapport à certains important que pour la plupart des d’excellentes idées d’arrangements chance de faire des tournées avec
de vos enregistrements précédents, morceaux de Majestic. Après, on y et de post-prod qui servent la musique Terry Bozzio, Carmine Appice,
Shift présente des morceaux moins trouve des choses plus spontanées d’une façon « commerciale »… Et Adrian Belew et aujourd’hui Pat
évidents et relativement sophistiqués. comme « Passing By ». Quant à puis, Rhys aime réellement apporter Mastelotto. Leur musique est en
Y avait-il, dans ce travail, un enjeu « Shift », né assez rapidement, il sa patte sur un disque, il veut qu’on nous depuis notre prime jeunesse…
de personnalité ? représente bien notre évolution en sente qu’il est aux manettes. Peter, C’est enrichissant et un vrai privilège
Mathieu Ricou : Le seul enjeu, s’il termes d’inspiration et de créativité. lui, est bien plus ancré dans les 90’s, que de partager ces scènes avec
devait y en avoir un, serait celui roots et transparent. Sur Shift, il n’a eux.
d’une satisfaction personnelle avant Les textes contiennent nombre pas trop voulu bousculer le travail
tout, comme à chaque fois. Cet album d’interrogations. Shift est-il un peu produit sur nos démos, qu’il trouvait « Cloudless sky/The change has
s’est inspiré du fait que beaucoup de votre essai « existentialiste » ? abouties. En studio, sur les choix de now begun »… Quel est ce « chan-
choses changent énormément au Mathieu Ricou : Le qualifier ainsi son ou de micros, il a toujours donné gement » qui se profile à la fin de
quotidien, et c’est tant mieux d’ailleurs. serait un peu fort. Notre seul souhait : son avis, mais tenait à ce que le nôtre « Passing By » ?
Alors, si l’auditeur perçoit un chan- évoquer cette phase de changement l’emporte. Rhys et lui opèrent donc Mathieu Ricou : « Passing By »
gement, une évolution, c’est plutôt à laquelle chacun doit faire face. dans des registres opposés. Au évoque bien cette évolution et met
normal et rassurant à mes yeux. Pour le meilleur ou le pire, d’où ces niveau mix, enfin, Peter travaille l’accent sur le fait que le change-
Will Knox : Pour ce qui est de la interrogations. bien plus la batterie et la basse que ment implique de quitter un état.
recherche d’ambiance, nous sommes Rhys. Il recherche davantage la Pour ce titre, nous avons imaginé
plutôt revenus vers la période de Qu’avez-vous retenu de cette expé- perfection du son global, alors que une transformation après la dispa-
l’EP Vénus (2008). Vu le côté brut de rience studio avec Peter Junge ? Qu’est- Rhys va à l’essentiel. rition de la race humaine. Un chan-
Majestic (2014), il y avait peut-être ce qui différencie sa production de gement drastique qu’on ne peut
chez nous le besoin de morceaux plus celle de Rhys Fulber ? Le fait de tourner en compagnie exclure, malheureusement… C’est
travaillés, oui. Le temps passé sur la Will Knox : Pour moi, Rhys a une de musiciens comme O_R_k occa- un thème assez déprimant et triste,
composition de certains titres comme approche très « années 2000 » : il aime sionne-t-il un apprentissage pour mais également un thème de renouveau
« Singularity », « Leaving The Dream » travailler les guitares et plus encore vous ? Qu’est-ce qui vous a marqués et de beauté : une nature qui reprend
et « Open View » a été bien plus les voix façon indus/metal/pop. Il a dans leur manière de faire ? son rythme, se retrouvant au cœur de
Nous assistons à leurs concerts tous toute chose.
les soirs… et ils assistent aux nôtres ! Katy Elwell : « Passing By » est la
GENRE SITE INTERNET
. Metal/prog rock Mais je pense que nous apprenons suite de « Tear Down The Sky », qui
www.lizzard.fr peut-être plus en dehors des shows, racontait l’apocalypse et la fin du
LE GROUPE ALBUMS en discutant entre eux. Katy et Pat règne de l’être humain sur la pla-
. Mathieu Ricou Mastelotto échangent idées de tech- nète. Maintenant, c’est le renouveau.
. Out Of Reach (2012)
(guitare, chant) . Majestic (2014) nique, astuces et révélations sur leur Et malgré notre envie de venir
. William Knox (basse, chant) . Shift (2018) instrument. Ces musiciens qui font repeupler cette planète redevenue
. Katy Elwell (batterie) ARTICLES RH ça depuis trente, voire quarante ans magnifique, la nature nous refuse
ont tant d’histoires à raconter, que toute réapparition. Cette fois, elle se
RH N°125, 148 & 184
ce soit sur la vie en tournée, le stu- reconstruira hors de notre influence
dio, les concerts… Nous avons eu la néfaste. Y

39
 GENRE
. Heavy thrash death
LE GROUPE
. Laurent Plainchamp
(chant, guitare, programmation)
. Vince Desca (chant, textes)
. Chris Grazed (basse – sur l'album)
+ une pléthore d'invités
SITE INTERNET
www.kozhdall.com
ALBUMS
. Kozh Dall Division (2017)
. II : Memories (2018)

ARTICLES RH
RH N°173 & 184

Laurent Plainchamp

40

Certains combos semblent entretenir une démarche qui va à l'encontre totale des règles marketing les plus élémentaires. Car
voici : de nos jours, bien des groupes aiment se créer une image forte, passent en studio une fois tous les deux ou trois ans
(au mieux), et cherchent à tout prix à bouffer de la scène. Kozh Dall Division fait tout le contraire. Le projet nîmois semble
n'avoir cure de ces us et coutumes : moins d'un an après la sortie de son premier album éponyme, il revient avec un double
CD 27 titres (!) bourré d'invités (membres de Blasphème, Agressor, Mercyless, Crusher, etc.) intitulé II : Memories. Une façon
de faire pour le moins unique, qui a évidemment attisé notre curiosité et nous a amenés à questionner son leader, Laurent
Plainchamp (guitariste, chanteur, compositeur, programmateur et producteur du projet), sur ses méthodes peu communes.
Rock Hard : Vous venez de sortir un
sacré pavé ! Il faut avoir la dalle pour
s’y attaquer ! (Ndlr : Le jeu de mots
est pour une fois involontaire)
Laurent Plainchamp : Oui, c’est long, hein ?
(rires) Je conviens qu’il n’est peut-être pas
évident de se taper les deux CDs d’un coup.
Après, la grande diversité de l’album joue
en notre faveur. Et puis, comme les deux
disques balayent plusieurs styles différents,
tous les titres ne seront peut-être pas au
goût d’une même personne dès la première
écoute : tu peux donc zapper entre les
morceaux comme bon te semble, et peut-
être revenir par la suite sur ceux sur
lesquels tu n’avais pas « tilté » dès le
départ… Finalement, je me dis que c’est
peut-être un album qui tiendra le coup
plus longtemps dans la discothèque des
gens qui l’auront acheté, sur la durée,
car il est impossible de le découvrir
entièrement en deux ou trois écoutes.
Sortir un double album moins d’un
an après un premier disque déjà
bien rempli semble complètement
loufoque ! Les fans du premier ont à
peine eu le temps de le digérer !
Je sais bien, mais je ne fonctionne qu’à
la spontanéité. Pendant trois à cinq mois,
je ne vais pas toucher à ma guitare, et le
jour où l’envie de composer va me venir,
je vais pondre quatre titres en un week-
end. Il n’y a aucun calcul, je ne suis pas
du tout là-dedans. Et encore moins de
calcul commercial, ça c’est sûr. En fait,
ça vient comme ça vient. Comme une
envie de chier, j’ai envie de dire…
Mais en sortant deux disques aussi
rapprochés, tu n’as même pas le temps
de « créer le besoin » chez les fans du
précédent album ?
Pfff… Créer le besoin, à notre niveau…
Non, vraiment, ce sont des considérations
que je ne prends pas en compte. En revan-
che, je ne vais pas en ressortir un nouveau
dans les douze mois qui viennent parce que,
mine de rien, c’est beaucoup de travail !
La musique, ça prend le temps que ça
prend, ce n’est pas le problème. C’est tout
ce qui est à côté qui me gave un peu.
Précise. Qu’est-ce qui te gave ?
Tout ce qu’il y a à côté de la musique.
Faire réaliser la pochette, et puis gérer
ce nombre considérable d’intervenants
(Ndlr : on dénombre plus de vingt invités
sur cet album, majoritairement au chant, mais
pas que). Toujours s’assurer auprès de tout
le monde que tout est ok, que ça leur
convient, et les trucs du genre « oui, mais
là t’as fait une faute sur le nom de ma copine
et gnagnagna »… C’est ça qui est usant
et un peu lourdaud, même si, évidemment,
c’est normal. Mais au final, ça prend
quasiment autant de temps que le seul
aspect qui m’intéresse vraiment : la musique.
Pour revenir à ta méthode de composi-
tion, tu ne fais donc aucun tri parmi
tout ce que tu composes ? Tout sert,
et tout sort ?
Oui : généralement, lorsque je vais jusqu’à
enregistrer une idée de compo, c’est
qu’intérieurement, elle est déjà validée.
Propos recueillis par Guillaume Fleury - Entretien téléphonique réalisé le 12 janvier 2018
Tu n’as jamais peur qu’un morceau
n’ait pas assez mûri avant de le sortir,
ou bien de te rendre compte un ou
deux ans plus tard que tu aurais
mieux fait de t’abstenir ?
(Il réfléchit) Oui et non… Plutôt non
(rires). En fait, c’est très représentatif
de mon caractère. Je suis vraiment dans
l’immédiateté, je n’aime pas trop réfléchir,
une fois encore il faut que ce soit spontané.
La technique, le gros son, le monostyle
et la chasse au poil de cul qui dépasse,
ça me gonfle. Ensuite, effectivement, je
vais réécouter tout ce qui a été enregistré
et je vais me focaliser sur deux ou trois
titres en boucle pendant des semaines
parce qu’ils me semblent réussis, mais
ensuite, je vais en réécouter deux autres
qui seront à nouveau mes préférés pour
les deux semaines suivantes, etc. Je suis
bien conscient que c’est une façon de
faire plutôt curieuse, et peut-être même
un défaut, mais je suis comme ça. Quand
il faut que ça sorte, ça sort. Musicalement,
comme dans ma vie quotidienne, je suis
incapable de me retenir de dire ce que
j’ai à dire. Mais bon, peut-être qu’il y a
du déchet… Pour être honnête, je ne me
La technique, le gros son,
le monostyle et la chasse au poil
de cul qui dépasse, ça me gonfle
(Laurent Plainchamp)
rends pas bien compte car je n’ai pas
suffisamment de recul.
Honnêtement, sur 27 titres, le
contraire me paraît impossible.
C’est sûr, mais le déchet des uns n’est
pas le déchet des autres et nous l’avons
bien remarqué depuis le début. Les
fameux « morceaux préférés » ne sont
jamais les mêmes d’une personne à l’autre.
II : Memories ratisse tellement large
stylistiquement, et fait intervenir tant
de gens – notamment au chant – qui
donnent des couleurs différentes aux
morceaux que je me pose cette ques-
tion : faut-il écouter ce double album
comme celui d’un projet « unique » ou
de la même façon qu’on écouterait une
compilation ?
C’est un peu un entre-deux. Bien sûr, on
ne peut pas considérer ça comme un
groupe. Et ce n’est pas une compilation
non plus, puisque même si les styles
sont variés, la même personne est toujours
responsable de la musique à 95 %. Ce
sont principalement les voix très variées
qui donnent leur personnalité aux
morceaux et amènent cette impression
d’écouter des artistes différents. Ceci
dit, si j’avais dû enregistrer une dizaine
de titres en étant seul au chant, le
résultat n’aurait pas été foncièrement
opposé car j’aurais probablement tapé
dans quatre ou cinq styles également.
Sur l’album, on trouve du hard rock
français traditionnel aussi bien que du
grindcore, et je comprends que cela
puisse surprendre, mais je l’assume
pleinement. Je m’ennuierais beaucoup si
je devais composer un disque linéaire
avec quinze morceaux du même calibre
et du même style. Je préfèrerais enregis-
trer dix albums où tous les styles se
mélangent plutôt qu’enregistrer dix
albums « classés par genre ». Donc, pour
revenir à la question, ce n’est ni un
groupe, ni une compile : c’est un projet
studio et une réunion de talents.
Il n’y a donc pas un(e) seul(e) de tes
invité(e)s dont tu t’es dit : « Waow !
Avec celui (ou celle)-là, j’ai vraiment
envie d’aller plus loin et de faire un
disque complet » ?
Non, pas vraiment, parce que cela
supposerait d’écrire dix titres cohérents,
tous de la même « couleur », et je doute
vraiment en être capable.
Pourtant, en prenant quelques titres
du premier album et quelques-uns du
second, il y a moyen de réunir une
dizaine de chansons dont les styles
sont assez similaires.
Oui, ce n’est pas faux. Mais il faudrait
trouver un chanteur qui colle à mon
rythme. Comme je te le disais, je peux
ne rien foutre pendant des mois, mais le
jour où je m’y mets, il faut qu’on me
suive immédiatement, sinon ça me
stresse. Je suis un « tout mou » qui se
transforme en boule de nerfs.
Il est impossible de citer tous les
invités ayant participé à II :
Memories car ils sont trop nombreux.
Tu en as contacté certains, d’autres
t’ont proposé leurs services. A voir la
guestlist, on a un peu l’impression que
tu acceptes tous les gens qui viennent
à toi pour chanter sur ton disque.
Oui, c’est tout à fait ça, je l’assume
totalement, et c’est pour moi un vrai
challenge ! A moins de tomber sur un
type con comme un balai, je n’ai pas
envie de dire « non » à quelqu’un qui a
envie de participer à KDD, peu importe
qu’il soit connu ou pas, et peu importe
son niveau de technique. Le défi est de
sortir quelque chose de correct avec
chacun, et si quelqu’un n’est pas aussi
affuté qu’un autre, ça ne veut pas dire
qu’il a moins de talent : il a peut-être
simplement moins d’expérience. Donc,
cela ajoute un peu de piment dans le
travail et c’est quelque chose que j’aime
vraiment. Bien sûr, il y a sur l’album des
gens de niveaux très différents, mais je
l’assume à 100 %. Il y a des défauts ;
certains viennent de moi, certains
d’autres personnes, mais j’ai envie que
chacun puisse profiter de sa fierté
d’avoir participé à cette aventure, et s’il
faut pour cela prendre tout sur mes
épaules, je le fais avec grand plaisir.
Les invités sont si nombreux qu’effective-
ment personne ne peut avoir le même
niveau, mais les petits défauts me vont
très bien et ça ne me dérange pas du
tout. Je dirais même, au contraire,
qu’il est très enrichissant d’avoir sur
les deux disques une telle palette de per-
sonnalités aussi différentes.
Pour pouvoir rester crédible en termes
de composition sur un panel aussi
étendu de hard rock/heavy metal (et
leurs dérivés), cela suppose une culture
et une connaissance de la scène plutôt
balèzes…
Bah, pas vraiment en fait… Ça fait long-
temps que je n’écoute plus ce qui sort.
J’ai en tête tout ce qui s’est fait dans les
années 80, 90 et au début des années
2000, mais finalement, la base de ce
que j’écris est toujours heavy ou thrash.
Tu t’en tires tout de même très bien en
grindcore, notamment sur « Welcome
To Death Land ».
Disons que, sans être un gros fan de
grind récent, je sais un peu comment
cela doit sonner et je n’ai pas eu trop
de mal à m’adapter. C’est Sébastien
(Mockers/ex-Inhumate et chanteur sur
ce titre) qui voulait que je lui fasse
quelque chose d’extrême…
Avec le peu de recul que tu as sur
l’album tout fraîchement sorti, si tu
devais ne garder que 50 minutes de
musique de ces 27 titres pour sortir un
CD simple que tu jugerais « parfait »,
y parviendrais-tu ?
Oui, je pense que ce serait assez simple.
J’ai mes préférences, bien sûr. De toute
façon, ce double album était un peu un
plaisir partagé avec tous mes invités,
mais je ne me lancerai plus là-dedans,
c’est trop prenant. Il y aura très proba-
blement davantage de sélection sur le
prochain disque, c’est même une certitude,
mais je la ferai à la base. Je ferai du tri
dans mes propres idées. Il est complète-
ment inconcevable pour moi de faire
participer quinze personnes à des
chansons pour dire à cinq d’entre
elles au final : « On ne va pas garder ton
morceau parce qu’il est moins bon ». Ça, je
ne pourrai jamais le faire, ça me paraît
inhumain.
Ton chant est lui-même très varié et
s’adapte facilement à des ambiances
différentes. Comme tu es multi-instru-
mentiste, la question d’un album solo
sur lequel tu serais seul maître
d’œuvre vient tout naturellement…
Oh oui, je pense que cela arrivera. Je
commence à percevoir dans quels styles
je me sens le plus à l’aise et je suis
sûr qu’un jour ou l’autre, je passerai à
l’acte.
A quoi doit-on s’attendre ?
Je me sens plus à l’aise dans les choses
brutales. Je me vois bien sortir quelque
chose qui serait à mi-chemin entre
Napalm Death et Killing Joke… Y
41
 GENRE
. Heavy/groove metal
LE GROUPE
. Ivan Moody (chant)
. Zoltan Bathory (guitare)
. Jason Hook (guitare)
. The Righteous Side Of Hell,
Chris Kael (basse)
. Jeremy Spencer (batterie)
42
SITE INTERNET
www.fivefingerdeathpunch.com
ALBUMS
. The Way Of The Fist (2007)
. War Is The Answer (2009)
. American Capitalist (2011)
. The Wrong Side Of Heaven And
Volume 1 (2013)
. The Wrong Side Of Heaven And
The Righteous Side Of Hell,
Volume 2 (2013)
. Got Your Six (2015)
. A Decade Of Destruction
(compilation - 2017)
ARTICLES RH
RH N°115, 133, 134, 137,
158 & 184

A l'occasion de la sortie du florilège A Decade Of Destruction et du récent passage de Five Finger Death Punch à
l'Olympia (Cf. Gigs), son fondateur/guitariste Zoltan Bathory est revenu pour nous sur les dix ans de success story de ce groupe
américain collectionnant les Disques d'Or et de Platine. Sans plus attendre, actionnons la machine à remonter le temps.
• Création du groupe & The
Way Of The Fist (2007)
Rock Hard : En créant Five
Finger Death Punch en
2005, qu’avais-tu en tête ?
Zoltan Bathory : Je n’étais pas
satisfait par l’offre musicale
de l’époque. Ayant grandi en
Europe (Ndlr : Zoltan Bathory
est né en Hongrie) et vivant aux USA
depuis des années, j’avais envie de brasser
mes influences. J’aimais bien Killswitch
Engage, mais j’avais également envie
de guitares harmonisées et de groove
metal à la Pantera. De même, même si
je n’aimais pas vraiment les groupes de
néo metal, j’adorais leur son et leur
accordage grave. J’ai mélangé tout ça et
Five Finger Death Punch est né ! Jeremy
(Spencer/batterie) est le premier musicien
que j’ai recruté. J’avais déjà écrit l’inté-
gralité de ce qui allait devenir notre
premier album, The Way Of The Fist,
produit par Jeremy et moi-même. Par
exemple, « The Bleeding » a été composé
en 2000. Je savais que j’en ferai quelque
chose, un jour ! « Ashes » et « The Way
Of The Fist » étaient assez anciens
également. Les membres du groupe ont
été recrutés au fur et à mesure et le
premier album a été enregistré en 2006,
de façon autoproduite. Nous ne voulions pas
signer sur un label qui nous aurait forcés
à faire des compromis : nous voulions
aller au bout de notre vision, enregistrer
le meilleur album possible et l’utiliser
comme carte de visite. J’aime encore
beaucoup cet album aujourd’hui. Nous
jouons d’ailleurs toujours « The Bleeding »
et « Never Enough » (Ndlr : ce dernier est
un bonus de la réédition de 2008). Même
si l’album a été mixé par Logan Mader
(ex-Machine Head, ex-Soulfly), il n’a
pas été enregistré en studio, mais dans
ma chambre à coucher. Le matin, je sortais
du lit, buvais un café et, deux minutes
plus tard, j’enregistrais les guitares. A
chaque fois que j’écoute l’album, je me
revois en slibard !!! (rires)
Vous êtes partis en tournée avec Korn,
avez pris part au Mayhem Festival, et
il semble que The Way Of The Fist ait
tout de suite trouvé son public...
Oui. Personne ne nous connaissait et
nous ne jouions que trente minutes,
mais c’est suffisant pour faire des
dégâts ! Nous avions faim et avions de
l’énergie à revendre. Il faut dire que,
dans ce groupe, nous avons quasiment
tous en commun d’avoir fait partie de
formations qui, à un moment, ont été à
deux doigts de décrocher la timbale
(Ndlr : Ivan Moody était le chanteur de
Motograter, groupe en lequel la major
Warner fondait de grands espoirs). Ça peut
te décourager, mais dans notre cas, ça nous
a soudés autour d’un objectif commun.
Nous avons vite été récompensés : nos
disques ont tout de suite trouvé preneurs,
mais nous vendions encore plus de t-shirts.
Ça, pour moi, c’est vraiment
la récompense ultime !
• War Is The Answer (2009)
C’est le déménagement du
groupe de Los Angeles à Las
Vegas...
Exact. A la base, c’était pour
Propos recueillis par Morgan Rivalin - Photo Marc Villalonga - Interview réalisée le 04 décembre 2017 à Paris
une histoire d’impôts car le
Nevada est très avantageux
dans ce domaine. Quand tu
passes quasiment toute
l’année dans un tour-bus, tu
te dis qu’il est malin d’éviter
de raquer pour des choses
dont tu ne profites que trois
semaines dans l’année !
Mais l’arrivée du groupe à
Las Vegas correspond surtout avec
notre rencontre avec Kevin Churko
(Ozzy Osbourne, In This Moment), le
producteur avec lequel nous bossons
toujours aujourd’hui. Nous l’avions
engagé comme ingé-son, mais avons
vite compris qu’il méritait d’être aux
manettes. Aujourd’hui, nous le considé-
rons comme un membre de la famille.
War Is The Answer coïncide aussi avec
l’arrivée de Jason (Hook) à la guitare
lead, ce que j’espérais déjà depuis des
années. C’est un vieil ami de Jeremy.
Nous nous entendions très bien, mais
Jason était occupé avec Alice Cooper. Son
arrivée et sa participation instantanée à
l’écriture a apporté des influences
hard rock mélangées au heavy metal
européen que j’affectionne. Je pense que
ça s’entend bien sur « Hard To See ».
Jason a apporté le côté « arena rock » qui
nous a fait passer la vitesse supérieure.
Il apporte des compos taillées pour
les stades et moi, je les enlaidis !
(rires) Beaucoup pensaient que nous
n’étions qu’un feu de paille, mais War Is
The Answer a eu encore plus de succès
que le premier album : il est entré à la
septième place des charts US et a été
certifié Platine !
• American Capitalist
(2011)
Un titre intéressant de
la part de quelqu’un qui
a grandi dans un pays
communiste !
(Rires) C’est sûr ! 2011
coïncide avec la popula-
rité croissante de théma-
tiques socialistes aux USA. De plus en
plus, on entend des gens conspuer le
fric et cracher sur la réussite : deux
piliers de l’Amérique ! Pour moi, ça
n’a aucun sens. En mettant de belles
bagnoles sur la pochette et en intitulant
le disque ainsi, j’ai appuyé là où ça
faisait mal, pour faire réagir. Ça a très
bien fonctionné ! (sourire) American
Capitalist a été enregistré dans une
période assez turbulente durant laquelle
nous avons remercié Matt Snell (basse)
et avons recruté Chris Kael. Jeremy et
Jason essayaient de devenir sobres et
les « frasques » de Matt pourrissaient
l’ambiance... Ce sont d’ailleurs plus
ou moins les mêmes raisons pour
lesquelles nous nous étions séparés de
notre premier guitariste (Ndlr : Darrell
Roberts). Des conflits sont nés et nous
avons pris conscience qu’il ne fallait
pas tout foirer... Tant de
groupes ont vu leurs liens
se désintégrer avec le suc-
cès. Le navire a commencé
à tanguer, mais nous avons
joué à quitte ou double :
nous avons parié sur notre
amitié et sur la réussite
du groupe. Nous sommes
partis en tournée en mettant toutes nos
économies dans la production scénique
afin de marquer les esprits comme
jamais. Que nous jouions dans un club
ou dans une salle de plusieurs milliers
de personnes, nous proposions une prod’
encore jamais vue dans les lieux. L’idée
était que le spectateur se dise toujours
que le groupe est bien plus
gros que la salle dans
laquelle il le voit. Nous
avons investi dans des
écrans, de la pyro, etc. et
le bouche à oreilles a été
décuplé. Aux USA, ça a
vraiment achevé d’imposer
le groupe. Tout le monde
nous demandait : « Mais
comment payez-vous tout ça ??? ». Nous
avons eu recours à des sponsors, dont
une célèbre boisson énergétique, mais
nous avons surtout tapé dans nos écono-
mies. Le pari a payé ! Si ce
n’est pas la preuve que le
capitalisme fonctionne, je
ne sais pas ce que c’est !!!
(rires)
• The Wrong Side Of
Heaven And The
Righteous Side Of Hell,
Volume 1 & Volume 2
(2013)
C’est le débarquement de
Five Finger Death Punch
en Europe...
Oui. C’est un moment
charnière de l’histoire du
groupe. Nos trois albums
précédents avaient ren-
contré beaucoup
de succès et nous savions que
le suivant serait attendu au
tournant. C’est casse-gueule : tu
risques sérieusement de te
répéter, mais si tu changes trop
ton son et ton style, tu vas aussi
décevoir ceux qui te suivent !
Nous avons beaucoup composé,
au point de vite envisager de
sortir un double album composé de 24
morceaux. Nous pensions que ça suffirait
à démarquer ce disque et à marquer le
coup, notamment parce que rassembler
autant de titres nous permettait d’en
placer d’assez « expérimentaux ». Notre
label n’était pas convaincu (« Personne
n’a fait ça depuis Guns N’Roses ! ») et le
compromis fut de scinder l’album en
deux sorties espacées de quelques mois.
Notre label n’y croyait toujours pas, et
pourtant, ça a marché : le premier est
Platine et le second est Or !
A l’évidence, la présence
de Rob Halford et d’autres
invités a aidé...
Oui, nous devons beaucoup
à Rob Halford, ça ne fait
aucun doute ! En écoutant
« Lift Me Up » en studio
avec Jeremy, je me sou-
viens lui avoir dit : « Ce
titre fait vraiment Ozzy,
limite Judas Priest... ». Il se trouve que
Rob Halford venait de dire dans la
presse qu’il aimait notre groupe. Sans
trop y croire – c’est le Metal God, tout
de même ! – nous lui avons passé un coup
de fil pour savoir s’il serait intéressé par
un duo, et il a tout de suite dit « oui ». Ça
s’est SI bien passé que nous avons
pensé à d’autres amis qui seraient
parfaits pour telle ou telle chanson :
Jamey Jasta (Hatebreed), Max Cavalera
(Soulfly, ex-Sepultura), etc. Mais nous
devons beaucoup à Rob Halford, c’est
clair !
• Got Your Six (2015), le
présent & le futur
Que penses-tu de Got Your
Six aujourd’hui ?
A chaque fois qu’on me
demande quel album de
FFDP écouter en premier,
j’indique toujours celui-ci. Je
trouve qu’il résume très bien notre
parcours, un peu comme un best of. Et
il a très bien marché aussi ! Il est entré
à la deuxième place des charts US,
mais en fait, il aurait dû être
numéro 1... A l’époque, ils ont
comptabilisé les écoutes d’un
rappeur sur les YouTube et Cie
et la première place nous est
passée sous le nez, mais en
ventes pures, nous étions
devant... Bref.
La tournée a été mouve-
mentée : Ivan Moody a été
absent sur certains concerts,
au dernier Hellfest notam-
ment...
L’immense majorité des concerts
s’est extrêmement bien dérou-
lée, mais à un moment, nous
avons effectivement dû mettre
le holà... Parce qu’Ivan est
notre frangin, sa santé et sa
vie personnelle passent avant tout le
reste. On a perdu tant d’artistes cabos-
sés par la vie. On l’a encore vu avec
Chris Cornell et Chester Bennington...
Nous ne pouvions pas laisser Ivan se
détruire. Nos amis Phil Labonte de
All That Remains et Tommy Vext de
Bad Wolves ont donc dépanné le groupe
sur certains concerts, pendant qu’Ivan
était en désintox. Il allait mieux, était
revenu dans le groupe et tout se passait
parfaitement bien, mais en Europe, il a
rechuté. Ça arrive. Encore une fois,
Ivan est notre frangin. C’est par amour
pour lui que nous lui avons parfois
dit de prendre ses distances. Nous
n’avons aucunement l’intention de le
remplacer. Il est notre chanteur, point.
Et sur cette tournée (Cf. Gigs), tout se
passe parfaitement bien. Il nous tanne
pour rallonger nos concerts. C’est bon
signe !
Quid de votre prochain
album ?
Il est terminé. Ce n’est pas
un secret : nous avons eu pas
mal de problèmes avec notre
label. Le best of nous semblait
sortir trop tôt, mais nous
avons trouvé un accord en
ajoutant deux inédits à cette
compilation, dont une reprise
de The Offspring, le groupe préféré
d’Ivan. Notre prochain album sortira
sans doute au mois de mai. Je suis
très heureux que ce nouvel opus arrive
bientôt : nous préférons battre le fer
tant qu’il est chaud ! Y
43

Le guitariste (et chanteur) Fast Eddie Clarke a succombé à une pneumonie le 10 janvier 2018. Il avait 67 ans et était l’ultime
survivant du line-up « classique » de Motörhead puisque ses compagnons d’infortune, Phil « Philthy Animal » Taylor et Lemmy
Kilmister, avaient eu la mauvaise idée de s’en aller avant lui les 11 novembre et 28 décembre 2015. Ces derniers n’auront pas
attendu bien longtemps celui qui permit notamment à Motörhead d’écrire les plus belles pages de son histoire et signa quelques
très bons albums de hard rock avec Fastway. C’est sur le parcours et la discographie (Ndlr : les « notes » indiquées en rouge le
sont sur 10) de ce musicien trop souvent sous-estimé que nous vous proposons de revenir aujourd’hui.
Au lendemain du décès d’Eddie, voilà
le communiqué que publiait Official
Motörhead sur sa page Facebook :
« Nous sommes dévastés de transmettre
cette nouvelle que nous n’avons apprise
que plus tôt dans la soirée… Edward
Allan Clarke – ou plutôt Fast Eddie
Clarke ainsi que nous le connaissions et
l’aimions tous – s’en est allé paisiblement
hier. Ted Carroll (le fondateur de
Chiswick Records) a annoncé la triste
nouvelle sur sa page Facebook après
que Doug Smith lui ait confié qu’Eddie
était mort paisiblement à l’hôpital où il
était traité pour une pneumonie… Phil
Campbell : « Je viens d’apprendre la
triste nouvelle, quel choc ! On se
souviendra de lui pour ses riffs ico-
niques, c’était un vrai rock’n’roller.
R.I.P. Eddie ». Mikkey Dee a lui aussi
commenté : « Oh, mon Dieu ! Quelle
terrible nouvelle ! Le dernier des
« Three Amigos » ! J’ai croisé Eddie
il n’y a pas si longtemps et il était en
grande forme. Eddie et moi nous
sommes toujours bien entendus.
J’étais impatient de le revoir en
Angleterre cet été où je serai en
tournée avec Scorpions… Désormais,
Lem et Philthy peuvent de nouveau
jammer avec Eddie. Si vous tendez
l’oreille, je suis sûr que vous pourrez
les entendre, alors faites attention !!!
Mes pensées vont à la famille
d’Eddie et à ses proches ».
On peut légitimement se demander
qui se cache aujourd’hui sous la
dénomination « Official Motörhead »
alors que Fast Eddie, Philthy et
Lemmy (sans oublier Würzel) ne sont
plus là, et tandis que les « survivants »
Phil Campbell (avec The Bastards
Sons) et Mikkey Dee (avec Scorpions)
ont – bien malgré eux – tourné la
page. Mais c’est là un autre débat. Ce
qui est certain, c’est que, même si
Motörhead a toujours publié de la
bonne musique, Fast Eddie Clarke a
signé – ou cosigné – la plupart de ses
hits, ceux qui ont plus que largement
contribué à forger la légende. Un
chiffre pour s’en assurer : lors de ce
qui restera son ultime concert (Ndlr :
le 11 décembre 2015 à Berlin),
Motörhead a joué quinze titres. Plus
de la moitié d’entre eux dataient de la
période « Taylor/Kilmister/Clarke ».
Un pourcentage qui, sur certaines
tournées, a été bien plus important…
C’est dire la magie qui émanait de ce
trio de pistoleros aujourd’hui disparu
44
et dont Fast Eddie était l’un des plus
importants compositeurs.
Edward Allan Clarke naît le 5 octobre
1950 à Twickenham dans une
modeste famille ouvrière. C’est sa
grande sœur qui l’initie au rock en
lui faisant découvrir Cliff Richard,
Hank Marvin et The Shadows. Sous
le charme, le jeune homme, alors âgé
de 12/13 ans, apprend les bases de la
guitare acoustique, avant que son
père, qui vient de gagner un peu
d’argent aux courses, ne lui achète,
deux ans plus tard, sa première
électrique : une Watkins Rapier noire
à 15£ qui va lui servir durant
quelques années. A quinze ans,
l’apprenti guitariste quitte l’école
pour bosser chez un réparateur télé
afin d’apprendre comment réparer
son ampli ! De 1965 à 1972, il fait ses
gammes en s’inspirant de ses albums
préférés, parmi lesquels Five Live
Yardbirds (1965) de The Yardbirds,
The Bluesbreakers With Eric Clapton
(1966) de John Mayall And The
Bluesbreakers, Are You Experienced
(1967) de Jimi Hendrix Experience,
Fresh Cream (1967) de Cream (Eric
Clapton, encore et toujours, dont
Eddie dit qu’il l’aurait, à l’époque,
« suivi au bout du monde »), Truth
(1968) du Jeff Beck Group et Rockin’
The Fillmore (1971) de Humble Pie,
l’une de ses plus grandes influences.
Led Zeppelin, Deep Purple, Santana,
Joe Walsh et ZZ Top trustent également
sa platine. Première « vraie » guitare
(une Gibson Les Paul de 1971),
premiers groupes (The Bitter End,
Umble Blues), premiers concerts,
etc., le jeune Clarke fait ses classes.
Mais c’est en rejoignant le Zeus de
Curtis Knight, un musicien de blues/
soul un brin égocentrique, qu’il fait
ses premiers pas en studio, le 25 août
1973, aux Olympic de Londres, afin
de mettre en boîte l’album The
Second Coming (1974). Un deuxième
opus de Zeus, Sea Of Time, paraît la
même année avant qu’Eddie ne forme
Blue Goose avec son ami guitariste
Allan Callan et deux potes de Zeus,
le claviériste Nicky Hogarth et le
batteur Chris Perry. Un contrat est
signé avec Anchor Records, mais une
dispute avec Callan précipite le
départ de Clarke qui, de nouveau
sollicité quelques jours plus tard,
refuse de réintégrer le groupe. Il est
néanmoins crédité sur l’instrumental
« Over The Top » qui échoue en 1975
sur l’album éponyme du combo. Dans
la foulée, Eddie tente de monter ce
qui n’est autre qu’un projet solo aux
colorations prog rock, Continuous
Performance. Hélas, les démos qu’il
enregistre avec le bassiste Charlie
Tumahai, la chanteuse Ann McCluskie
et le batteur Jim Thompson ne
convainquent aucun label, poussant
le groupe au split en 1975.
Dégoûté, Clarke délaisse le milieu
musical pour travailler sur un chantier
fluvial à Battersea, au sud-ouest de
Londres. C’est là qu’il fait la connais-
sance de Phil Taylor, un batteur
frappadingue en compagnie duquel
Nicky Hogarth et lui tentent de répé-
ter, sans lendemain. Taylor disparaît
soudain, sans laisser de traces,
jusqu’à un beau jour de février 1976
où il recroise le chemin d’Eddie et lui
apprend qu’il est désormais batteur
de Motörhead, aux côtés de Lemmy
Kilmister (ex-Hawkwind/chant & basse)
et de Larry Wallis (Pink Fairies/guitare).
Le groupe, dit-il, cherche un guitariste
rythmique. Eddie, après avoir croisé
Lemmy, est auditionné par ce dernier
et Phil dans un entrepôt de Chelsea
où il a déjà répété avec Curtis Knight :
The Furniture Cave. Larry Wallis étant
très en retard, les trois compères
jamment sans lui et deviennent
immédiatement complices. Lorsque
Wallis déboule enfin, il plombe
l’atmosphère. Une semaine plus tard,
Taylor et Kilmister débarquent chez
Eddie qui leur ouvre… en slip. Ils
lui tendent un perf en cuir et une
cartouchière, ce qui signifie évidem-
ment qu’il est embauché ! Cerise sur
le gâteau, Wallis étant viré, Clarke
devient l’unique guitariste du groupe.
Le premier concert de ce qui va
devenir le line-up « classique » de
Motörhead a lieu au Lyceum de
Londres, en première partie de Stray,
le 13 août 1976. Cinq jours plus tard,
le trio ouvre pour AC/DC au Pavilion de
Bath, puis, durant l’hiver, enregistre,
à la demande du label Stiff, le single
« Leaving Here », une reprise avec,
pour face B, la première collaboration
Eddie/Lemmy intitulée « White Line
Fever ». Ce 45 Tours voit le jour en
mars 1977, mais le groupe fait du
surplace et, le mois suivant, Taylor
et Clarke font part à Kilmister de leur
envie d’arrêter. Ce dernier souhaite que
Chiswick enregistre ce qui s’annonce
Un hommage de Phil « Animal » Lageat
comme l’ultime concert du groupe,
au Marquee. Finalement, le label opte
pour la captation de deux titres au
studio Escape, mais Motörhead, dans
le temps qui lui est imparti (deux
jours !), en met onze en boîte, dont
trois reprises soumises par Eddie :
« Beer Drinkers And Hell Raisers » de
ZZ Top, « Train Kept A Rolllin’ » façon
Yardbirds et « I’m A Witchdoctor » de
John Mayall And The Bluesbreakers,
cette dernière étant chantée par
Clarke lui-même. De ces sessions
naît un album éponyme en septembre
1977. Quelques jours plus tôt, le 5
août, lors d’un show à l’Electric Circus
de Manchester, Lemmy a présenté Phil
et Eddie au public sous les surnoms
respectifs de « Philthy Animal » et
« Fast Eddie ». « Je n’étais pas très
fan au départ, confie Eddie plus tard,
mais dès lors, ce surnom m’a collé à la
peau ! ».
En 1978, en recrutant le manager
Douglas Smith qui le fait signer sur
le label Bronze Records (Uriah Heep,
Manfred Mann’s Earth Band),
Motörhead fait un bond de géant.
L’année suivante est l’une des plus
extraordinaires de sa carrière puisqu’il
publie coup sur coup Overkill (10) et
Bomber (8,5) (qui se classent respec-
tivement 24ème et 12ème des charts
anglais, devenant instantanément
des classiques qu’on ne vous fera pas
l’insulte de vous présenter). Il est à
noter que, sur le second, Clarke
chante le bluesy « Step Down » et que
sur la version Deluxe de Bomber
parue en 2005, il est au micro sur
une convaincante version alternative
de « Stone Dead Forever ». Le 8
novembre 1980, l’infernal trio poursuit
sur sa lancée en sortant Ace Of
Spades (10), nouvel incontournable
qui finit de le hisser dans le peloton
de tête des héros d’airain du moment
et truste la 4ème place des ventes de
disques au Royaume-Uni. L’apogée
est atteinte l’année suivante lorsque
sort No Sleep ‘Til Hammersmith (10),
© George Bodnar /IconicPix - Dalle
un album live majoritairement capté
à Leeds et Newcastle fin mars 1981
qui décroche le graal : la première
place des charts anglais. Autant dire
la consécration pour nos trois
gaillards qui, après des années de
vaches maigres, peinent à croire
qu’ils sont enfin reconnus à leur
juste valeur dans leur propre pays.
Hélas, la médaille a toujours un
De g. à d. : Phil « Philthy Animal » Taylor,
Fast Eddie Clarke, Joe Camel & Lemmy
Kilmister
Le line-up « classique » circa 1980
 revers : probablement blasé par son
nouveau statut, le trio ne met pas la
même conviction dans les compositions
qu’il écrit par la suite. Pire, Lemmy
et Philthy ne semblent que peu
concernés au moment d’entrer en
studio en janvier 1982 pour donner
naissance à un nouvel album. Fast
Eddie, qui vient de produire le premier
album de Tank, Filth Hounds Of
Hades (un très bon disque aux relents
punk et motörheadiens) avec l’ingé-son
Will Reid Dick, se voit donc contraint
et forcé de prendre les choses en
main en passant, pour la première
fois avec Motörhead et à son corps
défendant, derrière les manettes.
Iron Fist (7,5), qui voit le jour en
avril 1982, s’en ressent. Certes, il
décroche la 6ème place des charts
anglais, mais à l’écoute, on sent bien
que le cœur n’y est pas vraiment. Les
tensions entre Clarke d’un côté et
Kilmister et Taylor de l’autre se font
plus vives. Elles culminent lorsque,
début mai 1982, au Eastern Sound de
Toronto (Canada), Lemmy et Phil
invitent Wendy O. Williams, la chan-
teuse des Plasmatics, à enregistrer
une reprise du standard country de
Tammy Wynette, « Stand By Your
Man », ainsi que « No Class » et
« Masterplan » pour un futur EP.
Fast Eddie, une nouvelle fois promu
producteur, craint que la notoriété de
Motörhead pâtisse de cette collabo-
ration, Wendy peinant à enregistrer
ses pistes de chant. Remonté, il en
fait part à ses deux compagnons
d’armes qui lui tiennent tête et vont
au bout du projet. « Si cet EP sort, je
quitte le groupe ! Laissons tomber ces
sessions et profitons du temps de studio
dont nous disposons pour enregistrer
quelques reprises tous les trois ! », tente
Clarke, pensant que l’amitié qui le lie
à Lemmy et Philthy est plus forte que
tout. Mauvaise pioche puisque ces
derniers lui tournent le dos, de même
que l’ensemble de l’équipe technique.
Quelques jours plus tard, l’ambiance
est donc exécrable lorsque, le 12 mai
1982, Motörhead débute sa tournée
nord-américaine au C.N.E. Coliseum
de Toronto (Ndlr : ce show est filmé et
sortira en VHS). Deux jours plus tard,
le 14, Fast Eddie donne au Palladium
de New York son dernier show avec
le groupe, avant de se faire indiquer
la porte de sortie. Choqué, il rentre
en Angleterre sans le sou et sans son
matériel, avant d’être remplacé par
l’ex-Thin Lizzy Brian Robertson.
Pour lui, l’aventure s’arrête là : plus
jamais il ne réintégrera Motörhead.
C’est d’autant plus triste que, durant
son passage au sein du combo, il en a
signé ou cosigné les plus belles
heures : « Overkill », « Stay Clean »,
« Capricorn », « No Class »,
« Metropolis », « Damage Case »,
« Bomber », « Stone Dead Forever »,
© Adrian Boot-Urbanimage / Dalle
« Dead Men Tell No Tales », « Ace Of
Spades », « The Chase Is Better Than
The Catch », « Love Me Like A
Reptile », « Jailbait », « Iron Fist »,
etc. etc. Il vous en faut encore ?
Depuis 1982, Motörhead a enregistré
de très bons, d’excellents albums,
des plus faibles aussi, mais il serait
malvenu (mensonger) de prétendre que
ce n’est pas le line-up dit classique,
« Taylor/Kilmister/Clarke », qui a
composé la très grande majorité des
titres intemporels du groupe. Tout ça
avec une Fender Stratocaster et une Les
Paul blonde désormais orphelines…
De retour en Angleterre, Eddie tente
de se reconstruire. Durant l’été
1982, il décoche un solo sur « Tear It
Loose », un extrait du Under The
Blade de Twisted Sister, le premier
album du groupe coproduit par le
bassiste Pete Way (UFO). Le 29 août,
ce dernier et Fast Eddie, montés sur
scène à Reading pour jammer avec
Twisted Sister sur le « It’s Only
Rock’n’Roll (But I Like It) » des
Rolling Stones, sont surpris de voir
Lemmy les rejoindre. Un début de
réconciliation a lieu ce jour-là, backs-
tage… En 1982 toujours, Pete Way,
qui vient de se faire congédier d’UFO,
propose à Fast Eddie de monter un
projet commun judicieusement nommé
Fastway. Le duo jamme avec Topper
Headon, l’ex-batteur de The Clash,
mais porte finalement son dévolu sur
Jerry Shirley, ex-Humble Pie que
Clarke vénère, et Dave King, un
chanteur irlandais inconnu du grand
public. Contacté, le label Chrysalis ne
daigne pas se déplacer pour écouter
les compos de ce nouveau « super-
groupe ». C’est donc CBS qui décroche
la timbale. Pete Way, toujours sous
contrat avec Chrysalis et en proie à
de sérieux problèmes de came, prend
peur et s’évanouit soudain dans la
nature, plantant Eddie et le groupe
sans juger bon de leur donner la
moindre explication. Ces derniers le
remplacent par Mickey Feat
(Streetwalkers), mais entrent dans
une rage folle quand ils apprennent
que Pete a rejoint Ozzy Osbourne sur
le Speak Of The Devil Tour anglais de
décembre 1982. Ils trouvent la pilule
plus dure encore à avaler lorsqu’après
sept dates, camé jusqu’aux paupières,
Pete se fait remercier par Sharon
Osbourne. « J’ignore pourquoi elle a agi
ainsi alors qu’elle savait pertinemment
que Pete et moi bossions ensemble sur
un nouveau projet, commentera plus
tard un Eddie amer. J’étais pourtant
bon pote avec Ozzy, mais je pense qu’il
est possible que Sharon m’en ait voulu
d’avoir quitté Motörhead. Il est vrai
qu’elle adore mettre son nez dans le
linge sale des autres. Ils ont viré Pete
après trois concerts (Ndlr : sept), ce qui
était horrible de leur part et a ruiné sa
carrière tout en affectant la mienne… ».
Fast Eddie, pourtant, ne lâche pas
l’affaire, et Fastway, secondé par le
producteur Eddie Kramer (Kiss,
Hendrix, Zeppelin), publie un premier
album éponyme en avril 1983.
Fastway (8,5), le disque, s’avère très
convaincant. Donnant dans un hard
rock bluesy influencé par Led
Zeppelin (« Easy Livin’ ») et Humble
Pie (« Feel Me, Touch Me »), il sait
également se faire menaçant (« Heft! »),
et, aidé par la chaîne musicale MTV,
séduit le marché américain ou il se
classe 31ème. Un résultat inattendu
qui doit faire grincer des dents
Lemmy… Le bassiste Charlie
McCracken (Taste) rejoint le groupe
pour tourner en ouverture d’Iron
Maiden aux USA (de juin à septembre
1983), puis d’AC/DC sur le Flick Of
The Switch Tour, en fin d’année.
Début 1984, pressé par un Eddie
Kramer sollicité par ailleurs et qui
veut faire vite, Fastway enregistre
son deuxième album à Londres. Avec
le recul, Eddie juge le travail un peu
bâclé. Pourtant, All Fired Up (8,5),
paru en juillet, s’avère excellent,
plus bluesy et plus mélodique encore
que son prédécesseur, ainsi qu’en
témoignent les très bons titres que
sont, pour ne citer qu’eux, « All Fired
Up », « Misunderstood », « Steal The
Show » et « Non-Stop Love ». Ce
hard rock de belle facture permet
notamment à Fastway d’accompagner
Rush sur le Grace Under Pressure Tour
en septembre et octobre 1984. Cette
belle campagne s’achève néanmoins
sur une fausse note, Shirley et
McCracken, lessivés, quittant le
navire à la fin de l’année. Fastway,
en dépit de belles fulgurances, a du
plomb dans l’aile…
Le 26 juin 1985, Fast Eddie monte
sur scène avec Motörhead pour les
dix ans du groupe à l’Hammersmith
Odeon de Londres, le temps d’inter-
préter le titre « Motörhead » aux
côtés d’autres invités prestigieux
comme Phil Lynott, Brian Robertson
et Philthy (qui a lui aussi quitté
Lemmy). Durant le second semestre
de l’année, Dave King et trois amis
d’enfance aident un Eddie désabusé
et en proie à de sérieux problèmes
d’alcool à mettre en boîte le troisième
Fastway. Enregistré aux mythiques
Abbey Road Studios de Londres,
Waiting For The Roar (7) sort en
février 1986 et, globalement, déçoit
les fans de la première heure. Il
faut dire que le producteur Terry
Manning, notamment ingé-son sur le
Eliminator (1983) de ZZ Top, a bardé
ce nouvel opus de synthés et de
séquenceurs (un orchestre classique
est également de la partie), dénaturant
le son originel du groupe comme il
l’avait déjà fait en 1984 avec Molly
Hatchet et The Deed Is Done.
Autrement dit, Waiting For The Roar,
sur lequel Eddie n’a coécrit aucun
titre, donne dans l’AOR et la FM en
proposant des titres sympathiques
mais hyper calibrés (« Kill Me With
Your Heart », « The World Waits For
You », « Tired Of Your Love »), les
morceaux plus rock au sein desquels
surnage Clarke se faisant rares
(« Little By Little », « Waiting For
The Roar », « Back Door Man »). Il y
a du tube ici, mais l’ensemble est
trop pop, ce qui n’empêche pas le
groupe, en janvier et février 1986,
d’ouvrir pour AC/DC en Europe. En
novembre de cette même année,
Fastway remet un instant les pen-
dules à l’heure en publiant la B.O. du
film d’horreur Trick Or Treat (8).
Toujours composé, outre Fast Eddie
et Dave King, de Shane Carroll (guitare),
Paul Reid (basse) et Alan Connor
(batterie), le groupe y dégaine un hard
rock mélodique, certes, mais gavé
de testostérone, à la croisée des
chemins entre Ratt et le Fly On The
Wall (1985) d’AC/DC. Pour autant,
ce regain de forme ne suffit pas à
redresser totalement la barre et
Fastway splitte début 1987 suite au
départ de King et au fait que CBS ne
renouvelle pas son contrat.
La suite du chemin, pour Fast Eddie,
est une longue succession de désillu-
sions. En 1988, le très pop On Target
(5,5), nouvel opus d’un Fastway
réactivé par le chanteur/guitariste
Lea Hart (et enregistré en compagnie
de Don Airey/Rainbow et Neil Murray/
Whitesnake), finit de dégoûter les
fans et un Fast Eddie dépossédé de
son groupe. Ce dernier, au fond du
trou, fâche même ses ex-compères de
Motörhead en se faisant quelques
deniers faciles en vendant, au label
Receiver Records, de vieilles bandes
live du groupe de 1977 et 78 (Lock
Up Your Daughters, Blitzkreig On
Birmingham ’77) et des chutes de
studio de l’album Ace Of Spades
(Dirty Love). Fin 1989, le guitariste
touche le fond quand son estomac
explose et qu’il se voit longuement
hospitalisé et forcé d’entamer une
cure de désintoxication à l’alcool. En
1990, Lea Hart remet le couvert avec
Fastway via l’album Bad Bad Girls (6,5)
sur lequel apparaissent également
Kim McAuliffe et Cris Bonacci de
Girlschool (elles ne sont pas créditées
pour des raisons contractuelles). La
pochette est naze, mais quelques
titres corrects (« I’ve Had Enough »,
« Bad Bad Girls », « All Shook Up »)
surnagent dans un océan de mélodies
pop ultra calibrées (« Body Rock »,
« No Repair »). Pas si mauvais toutefois,
même si l’on évolue là à des années-
lumière des deux premiers albums de
Fastway et de Trick Or Treat. C’est
néanmoins un doux euphémisme
de dire que Clarke s’implique peu.
Plusieurs années lui sont nécessaires
pour se remettre sur pied, et en
1994, vingt ans après l’infructueuse
tentative Continuous Performance, il
retente l’aventure en solitaire sur It
Ain’t Over Till It’s Over (7,5) qui sort
sous son nom et sur lequel il chante.
On trouve, sur ce disque de rock
bluesy, de très belles parties de gui-
tare (« No Satisfaction », l’instrumental
« Make My Day », « Snakebite »,
« Lyin’ Ain’t Right », « Back On The
Road »), mais aussi un duo historique
avec Lemmy sur l’enthousiasmant
« Laugh At The Devil ». L’un dans
l’autre, voilà un disque sympa aux
allures de retour aux sources, même
s’il est moins inspiré que les premiers
Fastway. Déçu par un certain
manque de reconnaissance, Eddie se
renferme alors sur lui et ne sort de
son silence radio qu’en 1997 pour
proposer une version réactualisée et
un tantinet plus rock du On Target de
Fastway : On Target Reworked (6,5).
Le 22 octobre 2000, à l’occasion
des 25 ans de carrière de Motörhead,
il accompagne Lemmy sur deux
morceaux (« The Chase Is Better
Than The Catch » et « Overkill ») à la
Brixton Academy de Londres. Des
traces de ces retrouvailles scéniques
sont publiées sur le DVD 25 & Alive
Boneshaker en 2001 et en format CD,
sous le titre Live At Brixton Academy,
en 2003. En 2001, afin de célébrer le
vingtième anniversaire de No Sleep
47
 ‘Til Hammersmith, Sanctuary en publie
une 2 CD - Complete Edition (10)
comprenant pas moins de 18 titres
bonus enregistrés à Leeds et
Newcastle les 28, 29 et 30 mars 1981
dont le mixage a été supervisé par
Eddie. Trois ans plus tard, en 2004,
Eagle Vision consacre un DVD de
sa collection « Classic Albums » à
l’album Ace Of Spades de Motörhead.
Ce documentaire a pour principal
intérêt de montrer Philthy, Lemmy et
Fast Eddie décochant des instrumen-
taux de « The Chase Is Better Than
The Catch » et « We Are
The Road Crew ». Hélas,
la joie des fans est de
courte durée puisque, si
Taylor et Kilmister ont
bien joué ensemble pour
les besoins du DVD, les
images de Clarke ont été
filmées à part et incrustées
au montage. Interrogé à
ce propos en 2016, Eddie
déclare : « Lorsque je suis
arrivé sur place pour enre-
gistrer mes parties de gui-
tare, on m’a appris que les
deux autres avaient déjà
été filmés ensemble à Los
Angeles (…) Pour être franc,
ça m’a vraiment dégoûté car
j’ai découvert, sans qu’on
m’ait consulté à ce propos,
que mes images allaient
être superposées aux leurs.
Probablement la faute de
cet avocat de Lemmy qui
adorait se mettre entre
nous… ». En 2007 sort le
double CD Fast Eddie
Clarke Anthology (8,5) qui,
comme son titre l’indique,
propose un résumé assez
complet – et donc passion-
nant – de la carrière du
musicien en s’en allant
piocher dans les discogra-
phies de Curtis Knight Zeus,
Continuous Performance,
Motörhead, Fastway (dont
trois démos historiques
avec Pete Way à la
basse !), Fast Eddie Clarke
en solo et Black Electric
(la perle « 21st Century »,
avec Eddie à la gratte
sèche !). Un must pour les
fans du guitariste ! En mai
2007, une nouvelle incar-
nation de Fastway voit le
jour, au sein de laquelle
Steve Strange (batterie),
Toby Jepson (chant/Little
Angels) et John McManus
(basse/Mama’s Boys) épau-
lent Clarke. Cette année-
là, le groupe se produit à
l’affiche de plusieurs fes-
tivals prestigieux (à com-
DR
mencer par le Sweden
Rock où, le 9 juin, Eddie jamme
avec Motörhead sur « Bomber »,
« Ace Of Spades » et « Overkill »). En
2008, Fastway remet ça, séduisant
notamment le public du Graspop en
Belgique. Les concerts sont si
convaincants qu’il est un temps
question qu’Eddie et Jepson compo-
sent du nouveau matériel, mais l’idée
s’évanouit lorsque le chanteur décide
48
de rejoindre GUN à plein temps. Deux
ans plus tard toutefois, Jepson, pour
le moins volatile, revient dans le
giron de Fastway qui, dès octobre
2010, s’attaque à un nouvel album
avec Toby au chant à et à la basse,
Eddie à la guitare et Matt Eldridge à
la batterie. Le 14 novembre 2011
sort Eat Dog Eat (7,5) que l’ami
Benji hisse au rang convoité d’Album
du Mois dans cette revue. « Peu de
moments creux, écrit-il alors, au sein
de ce Eat Dog Eat qui signe avec classe
et dignité le retour d’un Jepson qui ne
fait que confirmer ses grandes qualités
de vocaliste, mais aussi et surtout celui
de Clarke, dont nous nous félicitons de
retrouver la personnalité bien trempée ».
De bons concerts, un bon album, un
line-up solide, tout est réuni pour que
Fastway opère enfin un retour
gagnant, mais le groupe ne tourne
pas, l’instable Jepson reformant
Little Angels à la grande colère et
frustration d’Eddie : « J’adorais notre
nouvel album, déclare alors ce dernier,
et je voulais absolument jouer ces
nouveaux titres sur scène. Ça m’a vrai-
ment foutu en rogne ! ». Décidément,
quand ça veut pas…
Le 14 avril 2014, Clarke publie enfin
Make My Day – Back To The Blues
(7), un disque de puriste initié en
2008/2009 avec le pianiste Bill Sharpe
(Shakatak) qui voit le guitariste
revenir à ses premières amours
bluesy et ses influences claptoniennes,
Fastway 2011 très, très nombreux souvenirs
De g. à d. : Fast Eddie Clarke, géniaux des moments que
Matt Eldridge & Toby Jepson nous avons passés ensemble.
même si quelques titres plus lourds
(« Heavy Load ») et boogie sont
également au menu. L’homme se
fait plaisir, et cela s’entend. Le 6
novembre 2014, à la National Indoor
Arena de Birmingham, il monte une
nouvelle fois sur scène avec
Motörhead, cette fois-ci pour jouer
« Ace Of Spades ». Phil Taylor,
présenté avant le morceau, est
également sur place, mais ne joue
pas à cause de ses problèmes de
santé. Un an et quelques jours plus
tard, le 11 novembre 2015, le batteur
succombe à 61 ans d’une insuffisance
hépatique. « Mon très cher ami et frère
est mort la nuit dernière, écrit Clarke
sur sa page Facebook. Il était malade
depuis un certain temps, mais ça ne
rend pas les choses plus faciles lorsque
l’échéance survient. J’ai connu Phil
alors qu’il était âgé de 21 ans, c’était
un sacré personnage. Par chance, nous
avons fait ensemble de la musique
fantastique et je garde de
Repose en paix, Phil ! ». Le
sort, décidément, s’acharne
sur Motörhead, puisque,
quelques semaines plus
tard, le 28 décembre, c’est
au tour de Lemmy de casser
sa pipe victime d’un cancer
foudroyant. Il avait 70 ans.
Fast Eddie est d’autant
plus dévasté qu’il ne peut
assister aux funérailles à
Los Angeles à cause de
problèmes de visa…
Il est désormais l’ultime
survivant… Cette prise de
conscience le pousse à
vouloir profiter dès que
possible de cette scène qui
est toute sa vie. En octobre
et novembre 2016, Fastway
(avec Clarke, Strange,
Jepson et McManus) se
lance dans une série de dix
dates au Royaume Uni en
première partie des amis de
toujours que sont Saxon et
Girlschool. Il ne le sait pas
encore, mais il donne son
dernier concert le 9 novem-
bre 2016 au Rock City de
Nottingham. Son ultime
apparition sur album (de
son vivant, tout du moins)
est un solo sur le titre
« Misanthropy » du War Fare
qu’Evo, leader du groupe
punk Warfare que Lemmy
avait produit dans les
années 80, publie en 2017.
« Lorsque j’ai débuté, je n’avais
pas d’idées préconçues sur le
music business. Ce dernier
est identique à tous les autres
business, un truc dirigé par
des gens cupides dont la
plupart portent des costards.
A vrai dire, peu de choses
pour réchauffer le cœur. Tout
ça finit par vous broyer… Les
coups de poignard dans le
dos, les arnaques. Les mana-
gers, eux aussi, ne sont pas
des saints. Je pense qu’ils fonctionnent
ainsi : « Tu auras la célébrité et
moi ta fortune ! ». Je continue de
penser que la meilleure chose dans ce
merdier, ce sont les fans et leur soutien
inconditionnel à la cause. Sans eux,
aucun d’entre nous ne serait là. Ce sont
eux qui font qu’au bout du compte, tout
ça vaut le coup »
(Fast Eddie Clarke) Y
© Marc Villalonga

Avec Fastway, Graspop 2008

 GENRE
. Metal symphonique
LE GROUPE
. Pierre Le Pape
(claviers, chant)
. Brice Guillon (basse)
. Adrien Martinot (guitare)
. Michael Saccoman (batterie)
. Guillaume Bideau (chant)
. Black Messiah (chant)
. Clémentine Delaunay
(chant)
. Lucie Blatrier (chant)
. Aylin Gimenez (chant)
+ une multitude d'invités
SITE INTERNET
www.facebook.com/meltedspace
ALBUMS
. There’s A Place… (2009)
. From The Past (2012)
. The Great Lie (2015)
. Darkening Light (2018)

ARTICLES RH
RH N°120, 159 & 184

Pierre Le Pape
50

Un peu plus de deux ans après l’excellent The Great Lie, le projet pharaonique de Pierre Le Pape est de retour, de
nouvelles pointures vocales (notamment Jeff Scott Soto et la mezzo-soprano Catherine Trotmann) venant y seconder
les « habitués » (Mikael Stanne de Dark Tranquillity ou encore notre Guillaume Bideau national) sur une musique toujours
plus maîtrisée et grandiose. Entretien aux origines de la mythologie « Le Papienne » !
Rock Hard : Qu’est-ce qui t’as donné
envie de te lancer pour la première
fois dans l’exercice du chant avec
Melted Space ?
Pierre Le Pape : (Rires) Il faut savoir
que c’est d’abord parti de discussions sur
le ton de la plaisanterie. Sur scène, je
double assez souvent Guillaume Bideau
au chant, et le remplace même lorsqu’il
n’est pas là. Ainsi, alors que je faisais
les démos, je me suis dit : « Pourquoi ne
pas tenter le coup ? ». J’ai toujours aimé
chanter, dans le sens où j’enregistre
les voix témoins de mes démos. Nous
avons décidé de faire un test et, comme
je n’étais pas sûr de moi, j’ai planifié
ma session un mois avant les autres,
au cas où ça ne le ferait pas du tout.
J’avais une grosse appréhension, moi
qui n’avais chanté que dans un groupe
au lycée et dans mon studio, sur mes
démos. Je trouvais hyper prétentieux
de me dire, du jour au lendemain, que
j’allais me placer au milieu de tous ces
chanteurs extraordinaires aux carrières
monstrueuses ! (rires) Mais nous avons
essayé et c’est bien passé, notamment
car j’ai la chance de bosser avec un
producteur qui sait mettre en confiance
et a une grosse expérience des chanteurs.
Reste que je m’étais gardé jusqu’au
dernier moment l’option de ne pas
conserver ces lignes si elles ne plaisaient
pas aux autres. Je ne veux pas être
mégalo au point d’imposer ce genre de
choix ! Si ça n’avait pas collé, pas
grave. Au moins aurions-nous essayé
avant de prendre quelqu’un d’autre...
Quel rôle t’es-tu attribué dans ce
concept ?
Celui de l’Espace, en toute simplicité !
(rires) L’album traite de la création du
monde par les dimensions qui créent
les éléments. C’est un concept de début
et de fin, de vie et de mort, les choses
qui créent l’Homme. C’est une vision
relativement pessimiste car l’Homme
prend le dessus et réalise qu’il peut
vivre sans avoir besoin des divinités
qui l’ont créé. Il les repousse et ces
dernières, pour survivre, créent leur
propre monde, le Melted Space dont il
est question dans tous les albums
précédents. Dans un souci vocal de
disposer de quatre chanteurs en perma-
nence, il me fallait une voix masculine,
une voix saturée et deux voix féminines.
Les quatre éléments étant déjà inter-
prétés par les chanteurs permanents
du groupe, il me restait donc le rôle de
l’Espace. Cela peut sonner pompeux,
mais je l’ai davantage pris par défaut
qu’autre chose. Ce n’est pas là une envie
mégalomane car la voix représentant
le Temps devait selon moi être plus
marquée et saturée afin de donner
quelque chose de plus imposant et
monolithique. L’Espace étant vaste, il
correspondait davantage à ma voix
claire...
As-tu déjà écrit un long pitch global
sur ton univers ou écris-tu au fur et
à mesure ?
Je fais tout au fur et à mesure. Il n’y
a pas de grand plan ! Lorsque j’ai
Propos recueillis par Guillaume Fleury - Entretien téléphonique réalisé le 19 janvier 2018
commencé, il y a quelques années, je
voulais décrire un univers qui me
permette d’intégrer tout ce que je
voulais. J’essaie, à chaque album,
d’apporter quelque chose dans ce même
univers. Je suis passé des divinités
grecques aux romaines, puis suis parti
sur autre chose. Cette fois, l’idée était
d’expliquer le pourquoi de tout cet univers.
Il n’est pas exclu que je me réfère à
nouveau à une mythologie particulière
un jour prochain, mais je voulais cette
fois expliquer le pourquoi du comment.
Les trois disques précédents ont installé
une continuité, et ce n’est pas pour rien
que les dernières notes de Darkening
Light reprennent les premières notes
de From The Past (2012). Cela vient de
mon esprit cinéphile : j’adore, dans
tout ce qui est films de super-héros,
lorsqu’une scène post-générique vient
lier ce qu’on vient de voir à univers
élargi. C’était l’occasion, après avoir
expliqué cette espèce de commencement,
de montrer qu’une fois tout cela créé,
nous pouvons enchaîner sur autre
chose qui existe déjà.
Lorsque tu crées ton concept, laisses-
tu totalement vagabonder ton imagi-
nation ou puises-tu dans des influences
très précises, voire ta vie privée ?
Dans mon histoire, les personnages
veulent tous créer un monde
idéal, et c’est peut-être parce
qu’il y a une part d’utopie chez
moi (Pierre Le Pape)
Je commence par un gros travail de
bibliothèque, c’est à dire que j’écris une
sorte de légende inspirée de plusieurs
légendes liées à la création du monde.
J’ai passé deux à trois semaines, tous
les jours, à la bibliothèque, à lire des
bouquins de légendes tirées de différentes
cultures, ou des livres de physique sur
la création du monde, comme ceux de
Stephen Hawking. J’ai également lu
l’ouvrage Le Héros Aux Mille Et Un
Visages, qui est une référence pour les
scénaristes américains et explique
l’utilisation d’archétypes de personnages
afin de créer un héros. C’est une chose
qui m’a énormément intéressé car je
voulais un personnage central, l’Homme,
puis voir comment le mettre en scène,
tandis qu’au-dessus de lui plusieurs
étages expliquent sa création. J’ai ainsi
écrit ma propre légende, que j’ai ensuite
fait valider par des connaissances qui
sont diplômées en Histoire et en
Archéologie, afin de m’assurer que je
respectais tous les codes d’une cosmo-
logie générale. A partir de là, j’ai séparé
neuf épisodes – dix avec l’intro – et j’ai
pu écrire l’histoire pour la mettre en
musique. J’insuffle également du personnel
dans tout cela. Déjà, sur The Great Lie,
l’idée de la recherche des parents est
un sujet qui me touche beaucoup car
j’ai moi-même été adopté. Il y a une
espèce de transposition de ma part sur
le héros interprété par Guillaume. Ce
n’est d’ailleurs pas pour rien que je lui
ai confié ce rôle : c’est un très bon ami
et nous avons pu beaucoup discuter afin
qu’il interprète son personnage au mieux.
Cette fois, l’histoire est moins person-
nelle, mais j’ai mis beaucoup de moi-même
dans la musique. L’album a été créé durant
une période assez difficile pour moi et je
pense que cela s’entend dans la mesure
où ses titres sont peut-être plus agres-
sifs, directs, et que certaines harmonies
sont vraiment très dramatiques...
Comment expliques-tu cette fascination
pour le thème de l’origine du monde ?
Bonne question ! C’est toujours mon
côté cinéphile et fan de jeux vidéo qui
parle. Ce thème est présent dans toutes
les sagas qui m’influencent, comme
Gods Of War ou Castlevania. Dans ces
aventures, il y a toujours un moment
où l’on explique pourquoi le méchant
est méchant, d’où vient le héros. Lors
de mes lectures, j’ai découvert tout un
tas de légendes bien moins connues
que la Genèse ou que les principales
légendes occidentales. Il est vrai que je
parle depuis plusieurs années de héros,
de dieux, mais je voulais aussi apporter
une certaine cohérence à tout cela plutôt
que d’embrayer, par exemple, sur la
mythologie égyptienne. C’est une façon
de sortir de la routine, en partant de
rien, de Dieux qui n’existent pas, comme
le Temps et l’Espace. Ces éléments sont
personnalisés dans toutes les mytholo-
gies, mais ils n’ont pas forcément un
rôle de premier ordre. Les quatre
éléments sont attribués à tel ou tel
dieu, mais on n’entend pas l’Air ou
l’Eau parler directement. Dans mon
histoire, les personnages veulent tous
créer un monde idéal, et c’est peut-être
parce qu’il y a une part d’utopie chez
moi, vouloir un monde parfait. Je ne
sais pas comment nommer cela, mais
ce peut être la retranscription d’un
intérêt pour les choses qui ne vont pas
dans ma vie, celle des autres, ou dans
le monde qui m’entoure. J’ai toujours
voulu présenter Melted Space comme
une sorte de divertissement où l’audi-
teur plonge dans un univers différent
pendant la durée du disque. Une sorte
d’évasion dans une utopie...
L’une de toutes ces mythologies a-t-
elle ta préférence ?
Mon côté geek et fan de manga me
pousse à citer la mythologie grecque,
en raison de mon goût prononcé pour
Les Chevaliers Du Zodiaque. Mais la
mythologie égyptienne me fascine, et je
m’en rends d’autant plus compte que
je joue actuellement au jeu vidéo
Assassin’s Creed Origins ! (rires) Ce jeu
est mortel, l’un des meilleurs de la
série, clairement, avec un héros très
attachant ! Les développeurs ont pris
le temps de travailler le personnage,
ainsi qu’un univers gigantesque.
L’espace est considérable : j’en suis à
20 ou 25 heures de jeu et n’ai accompli
que 8 % du total ! (rires) C’est simple,
l’Egypte entière est reconstituée. Et
puis, ce jeu est techniquement superbe
et sa musique splendide. Je me repasse
la Bande Originale deux à trois fois par
semaine.
Trouves-tu l’inspiration en jouant ?
Cela me sert surtout à me vider la tête
maintenant que l’album est terminé.
Je recharge des batteries qui étaient
complètement épuisées en termes
d’imagination et d’inspiration. Ce jeu
me fait du bien car il me permet de
m’évader vraiment. J’y retrouve ce que
je cherche dans un film, et que j’essaie
de faire moi-même avec Melted Space :
une évasion complète. Lorsque tu es
dans le jeu, tu ne penses à rien d’autre
qu’à ta mission. Cela faisait longtemps
que je ne m’étais pas senti emmené
aussi loin, depuis le jeu Uncharted 4 qui
était un chef d’œuvre !
Puisque tu es un grand geek, passons
alors à la question qui fâche :
qu’as-tu pensé de Star Wars
Episode VIII ?
(Grand rire) C’est un très bon film, un
bon Star Wars, même si pas le meilleur.
Il y a là des choses très réussies et
d’autres plus discutables. Je ne veux
pas te faire de réponse de politicien,
mais il y a des choses que j’ai aimées
et d’autres que j’ai trouvé ratées.
Certains passages sont magnifiques en
termes de sound-design ou de narration,
d’autres moins ! Evidemment, nous savons
tous qu’il faut vendre des peluches !
(rires) J’ai trouvé la fin très réussie, là
où l’apprentissage de l’héroïne, Rey,
qui semble durer dix minutes ne m’a
pas convaincu. Les profs se plaignent
de la baisse du niveau scolaire, mais
visiblement, le problème touche aussi
les Jedi puisqu’on peut devenir Jedi en
dix minutes ! (rires) Pour moi, Rogue
One, sorti l’an dernier, est l’un des
meilleurs Star Wars car il propose des
choses que nous n’avions encore
jamais vues, notamment concernant
Dark Vador. L’histoire est de plus
très bien traitée. Il est quelque part
dommage que ce film n’ait pas été
intégré à une trilogie car il présente
vraiment un lien clair avec la saga
originale. En revanche, sa musique est
nulle, là où l’on retrouve un grand John
Williams dans le VIII. Cette musique
m’a en tout cas bien plus plu que le
travail complètement raté de Danny
Elfman pour Justice League ! (rires)
Superman avec une moustache, Ben
Affleck plus épais dans certaines scènes
retournées lorsque le film a changé
de réalisateur, cette musique… C’est
vraiment très mauvais... Y
51
 GENRE SITE INTERNET
. Metal progressif www.oceansofslumber.com
LE GROUPE ALBUMS
. Cammie Gilbert (chant) . Aetherial (2013)
. Anthony Contreras (guitare) . Winter (2016)
. The Banished Heart (2018)
. Sean Gary (guitare)
Cammie Gilbert . Keegan Kelly (basse) ARTICLES RH
. Dobber Beverly (batterie) RH N°163 & 184

52

Le très bon Winter, paru en 2016, avait tellement transformé la musique d’Oceans Of Slumber qu’il paraissait plus
constituer un premier qu’un deuxième album. C’est donc fort logiquement que ce troisième opus, The Banished Heart,
est celui de la confirmation, comme aurait dû l’être un second ! Ce nouvel essai est majoritairement l’œuvre du batteur Dobber
Beverly et de la chanteuse Cammie Gilbert, pris dans la tourmente de leurs déboires personnels. Et visiblement, il n’est pas le
seul fruit de leur rapprochement au cours de cette période difficile, « mais cela ne nous regarde pas… » comme diraient
les Inconnus ! Même si nous n’avons pas pu nous empêcher de poser la question tant ces deux âmes semblent désormais
sœurs, sur disque comme dans la vie ! Une union qui a enfanté du meilleur pour leur groupe, sans aucun doute possible.
Rock Hard : Avec Winter, vous avez
connu une première notoriété, les pre-
mières tournées (avec Enslaved notam-
ment), ainsi que vos premiers pas avec
Cammie au poste de chanteuse. Comment
as-tu vécu cette période d’intense
mutation pour Oceans Of Slumber ?
Dobber Beverly : Très bien, et elle a
été à la hauteur de nos attentes ! Nous
sommes encore très fiers de Winter,
bien entendu, et ce d’autant que nous
sommes conscients que nous proposons
une musique très différente et que
nous ne sommes pas un groupe facile à
placer sur une tournée. Alors, le fait
d’avoir la confiance d’un grand label
comme Century Media, ou encore de
partager la scène avec My Dying Bride,
Enslaved et nos amis de Ne Obliviscaris
sont des chances uniques pour nous. Je
retiens en particulier le fait d’avoir pu
amener le groupe en Europe, le continent
qui nous a vraiment le mieux accueillis,
comme je m’y attendais d’ailleurs : nous
avons rencontré et pu nous confronter
avec notre public pour la première fois,
tout en prenant conscience que nous
n’étions qu’au pied de la montagne !
The Banished Heart est né d’une
période tourmentée au plan personnel,
avec une séparation avec ta femme à
la clé, et d’un rapprochement avec
Cammie, qui a inspiré ce disque. Tu
peux nous en dire plus ?
C’est bien entendu très personnel… et
je dois laisser une part de secret ou
d’interprétation autour de tout cela.
Mais en effet, dans les jours qui ont
suivi notre retour au Texas après la
tournée européenne avec Enslaved, et
alors que nous entrions en studio pour
enregistrer de nouvelles démos, je me
suis séparé de ma femme, avec laquelle
je venais d’avoir une petite fille. Nous
étions dans une relation qui n’était pas
saine pour nous depuis sa naissance, et
j’ai réalisé avec ma fille ce que cela
signifiait d’aimer vraiment quelqu’un.
J’éprouvais donc un grand vide affectif.
Je connaissais Cammie de longue date
et je me suis aperçu que j’étais plus
proche d’elle qu’aucun autre adulte au
monde. J’ai vécu ce que nous connaissons
tous au moins une fois dans notre vie :
un tournant. Et pour transposer cela à
The Banished Heart, son morceau-titre a
été le déclencheur : je l’ai intégralement
composé sur les deux ou trois dernières
années, et lorsqu’il a fallu écrire ses
paroles, j’ai puisé dans ce drame personnel.
Une nuit, je me suis écrit une longue lettre
introspective que j’ai ensuite partagée
avec Cammie. Elle a commencé à écrire
des paroles sur cette base-là. C’est aussi
la raison pour laquelle « The Banished
Heart » est au cœur du disque, et que
celui-ci décrit une forme de chemin
vers la rédemption, en débutant par
une tragédie, pour se terminer par une
sorte de retour d’exil…
Ce qui explique la noirceur qui ressort
du disque…
Je ne te le fais pas dire. Et je vais te
faire une confidence : Century Media est
un peu tombé de sa chaise en recevant
l’album. Leur premier retour a été qu’ils
ne s’attendaient pas à un disque aussi
sombre de notre part et que ça les
dérangeait un peu. Mais il était bien
entendu hors de question de changer
quoi que ce soit, pas une seconde : ce
disque est notre chair. Même si la logique
aurait été de nous tourner vers une
musique plus accessible, et même si je
reconnais que notre art est aussi un busi-
ness, aucun compromis n’était possible.
Tu te considères comme le « directeur
artistique », tandis que Cammie écrit
toutes les paroles au sein d’Oceans
Of Slumber. Est-ce une répartition
permanente des rôles dans le futur,
faisant du groupe le véhicule de vos
idées, et des vôtres uniquement ?
Je n’irais pas aussi loin, même s’il est
vrai que nous avons, dans les faits, ces
rôles au sein du groupe, et ce depuis
Winter (2016). Je suis en charge de la
direction musicale que doit prendre
nos albums et je gère le management
du groupe, qui n’est pas une partie de
ma vie : c’est MA vie, surtout maintenant
Nous ne sommes pas un groupe
jetable tout juste bon à mettre
Cammie en valeur (Dobber Beverly)
que je suis avec Cammie. Il va juste falloir
tracer des lignes entre ce qui relève du
personnel et ce qui relève du groupe.
Mais je pense que nous restons un
groupe, et la meilleure preuve, c’est
qu’exception faite du morceau-titre,
c’est la première fois que nous partions
d’une page blanche pour un album.
Tout a débuté autour d’une table, tous
ensemble. Nos deux guitaristes, Anthony
Contreras et Sean Gary, composent
beaucoup et avaient énormément d’idées
pour ce disque : nous avons travaillé sur
les apports des uns et des autres pour
aboutir à ce résultat en deux mois, ce
qui est extrêmement rapide. Mais tout
du long, le seul qui arrivait à avoir une
vision du produit fini, c’était moi, et c’est
donc en ce sens que j’ai cette étiquette
de « directeur artistique » : j’amène le
groupe à réaliser nos objectifs communs,
rien de plus. Tu en conclus aussi que
ce disque aurait dû sortir bien plus tôt :
mais avec toutes ces turbulences
personnelles et l’ouragan Irma qui a
dévasté nos maisons et notre studio à
Houston durant l’été dernier, nous
avons perdu six mois... Mais ce fut un
mal pour un bien car nous avons pu
peaufiner tous les détails de l’album.
Les membres du groupe sont les
mêmes, à l’exception d’Uaeb Yelsaeb
qui tenait les claviers : qui s’est chargé
de cet instrument, encore très présent
sur l’album ?
Propos recueillis par Djul - Entretien téléphonique réalisé le 19 janvier 2018
Nos guitaristes et moi savons jouer du
piano et des claviers. En studio, c’est
moi qui ai tout joué et composé. C’était
déjà en grande partie le cas sur Winter
car Uaeb ne nous avait rejoints qu’en
cours d’enregistrement de ce disque.
En concert, nous allons partager ce
rôle entre nous trois : je peux jouer du
clavier au pied, comme Roger Waters
le faisait du temps de Pink Floyd, et
nos guitaristes peuvent enchainer
leurs parties de guitares avec celles de
piano, sur des petits synthés.
Le recours à des parties de batterie
« extrême » constitue-t-il pour toi un
moyen de t’exprimer artistiquement,
même en n’étant « qu’un batteur » ?
Et aussi un moyen de différencier le
groupe des autres formations de
metal « à chanteuse » ?
Absolument. Pour moi, il n’y a aucun
doute ou aucune gêne à avoir : l’influence
première de notre groupe est le metal
extrême, de Morbid Angel à Vader, en
passant par Deicide. J’ai grandi avec
ces formations et je suis devenu
batteur grâce à elles. Mais une fois
qu’on a dit cela, il est aussi clair que
nous sommes de grands fans de rock
progressif des années 70 et de classic
rock. Un mélange de brutalité et de
romantisme en somme ! (rires) Nous ne
sommes pas un groupe jetable tout
juste bon à mettre Cammie en valeur.
Elle est bien entendu notre premier
atout et le point d’attention majeur
pour nos fans. Mais je ne jouerai pas
pour autant machinalement ou sans
originalité de ma batterie, j’ai trop de
respect pour notre musique et pour le
groupe pour cela, et cela vaut pour
chacun de nous. Je veux orchestrer
mes musiciens derrière mes fûts, je veux
être à 110% tout le temps, et j’attends
la même chose de mes collègues, la
même intensité. N’attendez pas de
nous d’être le prochain groupe de
metal symphonique. Nous ne sommes
pas en vacances et Oceans Of Slumber
n’est pas un hobby…
Parle-nous de « No Color, No Light »,
ce magnifique duo avec Tom Englund
d’Evergrey, avec sa cadence majes-
tueuse et doom qui tranche avec le
reste du disque…
Tom est un ami de longue date. Je l’ai
rencontré quand il est passé à Houston
en tournée, lors de l’album Glorious
Collision (2011) : nous avons passé une
super soirée ensemble et sommes
restés en contact depuis lors. Il a fait
des études de psychanalyse. C’est
quelqu’un de très sage qui sait parler
aux gens, à commencer par ses fans.
J’ai une liste d’artistes pour lesquels je
ferai tout pour collaborer avec eux, et
Tom était tout en haut car c’est l’un
des plus grands chanteurs de metal
depuis des années. La musique de « No
Color, No Light » est l’une des dernières
à avoir été finalisée car nous voulions
quelque chose de marquant, d’aussi
pesant et émotionnel que possible.
Lorsque Cammie y a ajouté ses parties
de chant au cours de l’été, en écoutant
le premier couplet, j’ai immédiatement
pensé à transformer le titre en un duo
avec Tom. Je le lui ai proposé, en
précisant qu’il s’agissait d’une compo-
sition comptant énormément pour moi,
et il a immédiatement accepté, profitant
d’une tournée d’Evergrey pour enregis-
trer chez moi. J’en suis sorti totalement
retourné, mais aussi fier que le résultat
soit si parfait et si heureux d’entendre
Tom dans un registre différent de ce
qu’on connaît de lui. Peut-être un jour
sortirons-nous la version initiale
intégralement chantée par Cammie,
qui est superbe elle aussi, mais c’est en
duo qu’elle se devait de figurer sur
l’album.
On vous a connus adeptes de reprises
de formations très différentes (Led
Zeppelin, Candlemass, The Moody
Blues…). Avez-vous l’intention de
réitérer cela dans un avenir proche,
ou avez-vous peur de tomber dans le
cliché ?
Nous n’avons pas peur de cela : nous
sommes des musiciens, et comme tous
les autres, nous avons nos influences
et nous les revendiquons, comme un
écrivain avec des citations de ses
pairs ! Nous devons tout à Dead Can
Dance, Type O Negative et
Incantation ! Alors, pour répondre à ta
question, même si tu es le premier à
qui je le dis, nous allons publier en
cours d’année un EP renfermant des
titres inédits (y compris un morceau
qui ne collait pas au concept de The
Banished Heart et « Prometheus », un
autre inédit assez extrême et technique)
et des reprises. Parmi ces dernières,
il y aura du Stevie Wonder et
« Summoning Of The Muse » de Dead
Can Dance…
Tu plaisantes ? C’est probablement le
titre le plus difficile à imaginer
repris par un autre de tout leur
répertoire !
C’est justement le défi que nous nous
sommes lancés ! (rires) C’est vrai qu’il
n’y a ni rythmique, ni paroles sur ce
titre, qui est tellement en avance sur
son temps… Peut-être même hors du
temps. Mais il y a une espèce de
mantra mélodique derrière qui permet
d’y insérer une partie de batterie et
de dresser une trame presque doom
ou black metal. Nous avons déjà enre-
gistré une première tentative il y a
quelques années, mais nous voulons
ajouter un orchestre de chambre et des
chœurs ! Y
53
 Propos recueillis par François Blanc - Photos Marc Villalonga - Interview réalisée le 11 décembre 2017 à Paris

Avatar, formation polymorphe connue pour son extravagance scénique et sa variété musicale, opte cette année pour un concept
particulièrement barré : Avatar Country, septième galette du quintet suédois, révèle en effet l’appartenance du combo à une
glorieuse nation heavy metal, le « Pays Avatar ». Ce curieux pays dont nous ignorions jusqu’ici l’existence serait gouverné par un
monarque pour le moins unique : Jonas « Kungen » Jarlsby, le guitariste du groupe ! Pour lever le voile sur la conception du
disque en question et les lois qui régissent cette « terra incognita » riche en exportation de metal de qualité, nous avons interrogé
le « clown », frontman et ambassadeur Johannes Eckerström.

aux Etats-Unis sont généralement

De g. à d. : Tim Öhrström, Jonas « Kungen » assez rudimentaires. Il y a quelques
Jarlsby (haut) Johannes Eckerström (centre), années, les membres de Sabaton
Henrik Sandelin (bas) & John Alfredsson nous confiaient que, dans certaines
salles, ils n’avaient droit qu’à un
bidon d’eau pour se doucher et à
cinq dollars par personne pour
s’acheter à manger !
C’est exact, nous sommes passés par
là nous aussi. Mais maintenant que
notre popularité a augmenté, nous
sommes bien mieux lotis : nous
recevons deux bidons pour nous
laver et dix dollars par personne pour
couvrir nos défraiements ! (rires)
Cependant, notre prochaine tournée
devrait se dérouler dans des conditions
comparables à ce que nous connais-
sons en Europe, ce qui est une perspec-
tive réjouissante. Chaque pays a ses
avantages et ses inconvénients. Les
Etats-Unis ressemblent souvent à un
gigantesque parking. C’est bien plus
facile de loger son bus à proximité
d’une salle qu’en plein cœur de
Paris ! (rires) Nos villes anciennes sont
plus belles, mais moins carrossables.
Et comme leur société de consommation
est plus extrême que la nôtre, il est
bien plus facile de trouver à manger
au beau milieu de nulle part et à
DR

3h00 du matin que chez nous, ce qui

est franchement pratique en tournée !
Lorsque nous traversons certains
Il est temps d’ouvrir les portes du « Pays Avatar » pays scandinaves, il faut bien nous
assurer d’avoir mangé en quittant la
et de proclamer haut et fort le message de notre maison car, durant les six heures
suivantes, nous ne verrons rien
Roi ! (Johannes Eckerström) d’autre que la nature sauvage…

Rock Hard : Le 16 juin 2017, Avatar
s’est produit au Hellfest pour la
première fois. Quels souvenirs
conserves-tu de ce bref passage à
Clisson ?
Johannes Eckerström : « Bref » est
malheureusement le mot juste : nous
avions un programme de malades ce
week-end là et n’avons passé que
quelques heures en France. Nous
arrivions d’Autriche et devions donner
un autre concert le lendemain, en
Belgique ! Nous avons d’ailleurs
quitté le Hellfest dans la précipitation
et sommes arrivés au Graspop Metal
Meeting à la toute dernière minute.
Pas le temps d’aller jusqu’aux loges :
il nous a fallu revêtir nos costumes
derrière la scène et nous maquiller
avec, pour seul miroir, les vitres
d’une voiture ! A peine notre batterie
installée que nous montions sur les
planches pour débuter le show. Si
nous n’avions pas une équipe, des
musiciens et un Roi aussi performants
et bien organisés, tout cela n’aurait
sûrement pas été possible. Je regrette
seulement que nous n’ayons guère
pu profiter du Hellfest, d’autant que
j’ai pris un pied magistral lors de
notre prestation. En plus de nos
milliers d’amis français qui étaient là
pour faire la fête avec nous, j’ai eu le
temps de saluer nos potes d’Evergrey
et de Sabaton qui jouaient aussi ce
jour-là. Le temps a filé en un éclair :
j’ai donné quelques courtes interviews,
participé à une séance de dédicaces,
chopé un peu de bouffe au catering
et ai couru derrière la navette pour
qu’elle ne parte pas sans moi ! (rires) En parlant de nature, peux-tu nous
Du peu que j’ai pu voir, l’ambiance et dire quelques mots sur le concert
l’atmosphère m’ont semblé excellentes. qu’Avatar a donné en décembre 2016
Même si les choses s’améliorent d’année en Suède pour clôturer sa tournée
en année, les Etats-Unis ont encore européenne ? J’ai cru comprendre
du chemin à parcourir pour atteindre qu’il s’agissait d’une performance
la qualité de nos festivals européens ! pour le moins spéciale…
Nous avons réuni les fans à Göteborg
D’après le témoignage de nombreux et affrété un bus pour les emmener
groupes, les conditions de tournées sur les lieux du concert, dont ils
GENRE SITE INTERNET ARTICLES RH
. Metal varié www.avatarmetal.com RH N°143, 165 & 183
LE GROUPE
ALBUMS
. Johannes Eckerström (chant)
. Thoughts Of No Tomorrow (2006)
. Jonas « Kungen » Jarlsby . Schlacht (2007)
(guitare) . Avatar (2009)
. Black Waltz (2012)
. Tim Öhrström (guitare) . Hail The Apocalypse (2014)
. Henrik Sandelin (basse) . Feathers & Flesh (2016)
. Avatar Country (2018)
. John Alfredsson (batterie)

54
 ignoraient tout. Au préalable, nous
leur avions demandé de se déguiser,
de porter des masques et de ne pas
emporter leurs téléphones ou appareils
photo avec eux. Lorsque le bus a
commencé à s’enfoncer dans la forêt,
l’ambiance est devenue électrique :
ils ne savaient pas du tout où nous
les transportions et espéraient que nous
ne les couperions pas en morceaux !
(rires) Le point d’arrivée était une
vieille grange dans laquelle nous avons
donné un concert qui a été entièrement
filmé dans l’éventualité d’un futur
DVD. Un moment mémorable !
Parlons de Avatar Country. Au
moment de présenter Feathers &
Flesh (2016), tu disais que bosser
sur un concept-album pouvait s’avérer
particulièrement ardu. Qu’est-ce
qui vous a poussés à réitérer l’expé-
rience aussi rapidement ?
A vrai dire, les choses étaient très
différentes cette fois. Afin de concevoir
Feathers & Flesh, il nous a fallu
apprendre comment créer un concept-
album, ce que cela signifiait vraiment
et ce que cela impliquait. Nous en
écoutons depuis toujours, mais nous
n’en avions jamais faits auparavant !
C’était un défi pour nous. Désormais,
nous savons mieux comment nous y
prendre. De plus, il ne s’agit pas
cette fois-ci de fiction, mais de
réalité. Nous avons mûri, tant sur
le plan conceptuel que musical et
estimons être prêts à révéler la
vérité à nos fidèles : il est temps
d’ouvrir les portes du « Pays
Avatar » et de proclamer haut et
fort le message de notre Roi ! Une
fois que nous avons décidé d’écrire
un album sur ce sujet, les choses
sont devenues bien plus claires.
Nous connaissons très bien notre
nation et notre souverain, il nous
est donc facile d’en parler. Il y a
deux ans, nous avions pris six
semaines pour achever l’enregis-
trement de Feathers & Flesh. Mes
prises de chant s’étaient déroulées
en Finlande, la capture des soli en
Alemagne… C’était dingue ! Cette
fois-ci, la totalité de l’album a été
enregistrée en Suède en deux
semaines. Le chemin à explorer
était clairement balisé dès le
départ, ce qui nous a permis de
bosser beaucoup plus vite.
Jay Ruston (Anthrax, Stone Sour,
Steel Panther) avait déjà mixé
certains de vos albums, mais
c’est la première fois que vous
l’embauchiez comme producteur
à part entière…
Cela fait des années qu’on nous
conseille de bosser en plus étroite
collaboration avec lui mais, pour
être honnête, ce sont nos préjugés
qui ont retardé l’échéance. Nous
étions tout simplement nerveux à
l’idée de faire un album avec un
producteur vivant à Los Angeles.
Nous redoutions d’avoir affaire à
quelqu’un qui serait inévitablement
« trop mainstream » ou « trop
américain »… Et puis, lorsque
Avatar a donné un concert à Houston,
il est venu à notre rencontre. C’est
là que nous avons réalisé que,
56
premièrement, il était canadien et,
deuxièmement, capable de descendre
des bières à une vitesse impression-
nante ! (rires) Lorsque nous lui avons
expliqué que nous voulions rendre
hommage au « Pays Avatar », cette
grande nation heavy metal, et ce que
nous avions en tête en matière de
musique, nous nous sommes tout
simplement compris. Pour décrire ce
que nous voulions faire, j’ai employé
une expression bien particulière :
« Foot on monitor music ». « Le pied sur
le retour », comme on peut le voir dans
les clips live des années 80, dans
lesquels les musiciens jouent dans
cette position, avec la basse ou la
guitare tournée vers le public comme
s’il s’agissait d’une mitraillette ! Jay
a instantanément pigé ce que je
voulais dire. Finalement, je ne pense
pas que nous aurions pu travailler
aussi vite et aussi bien avec quelqu’un
d’autre. Sa façon d’enregistrer est un
peu particulière. Plutôt que d’enre-
gistrer toutes les prises de batterie
de l’album, puis les basses, les guitares,
Vous pouvez tous devenir citoyens
du « Pays Avatar » : Le Roi compte
sur vous ! (Johannes Eckerström)
et les voix et arrangements – méthode
dont nous nous étions déjà graduel-
lement éloignés avec le temps en
effectuant certaines prises en live –
Jay préfère enregistrer les chansons
les unes après les autres.
L’enregistrement d’un titre débute le
matin avec la batterie, et le soir ou le
lendemain, j’effectue mes prises de
chant. C’est une façon de procéder
peu orthodoxe, mais rapide et rafraî-
chissante, qui offre une nouvelle
perspective. Les musiciens n’ont pas
besoin de fournir un très gros effort
d’un coup : tout le monde marque de
petites pauses et s’organise pour
passer en studio quand on a besoin
de lui. Cela fonctionne d’autant
mieux que nos chansons sont très
variées. C’est agréable de pouvoir
traiter chacune d’entre elles de façon
individuelle.
Que peux-tu nous dire du concept
qui sous-tend l’album ?
Eh bien, cela fait des années que cela
couvait et que nous voulions le faire.
Voilà déjà plusieurs tournées que nous
présentons notre drapeau national
sur scène, ainsi que notre écusson
noir, or et rouge. On l’aperçoit
d’ailleurs plus distinctement dans
nos nouveaux clips. Les fans les plus
attentifs auront aussi remarqué que,
depuis déjà pas mal de temps, une
mention spéciale revient toujours
dans la section « remerciements » de
nos livrets : « Kungen », ce qui signifie
« Roi » en suédois. Nous avons réalisé
comme une évidence qu’il était
temps d’explorer notre Histoire en
profondeur et de révéler au public
toute la vérité à propos du Pays
Avatar. Donner à tout le monde – y
compris à toi et à chacun de tes
lecteurs – la possibilité de devenir
un citoyen de notre nation. Il était
temps pour nous d’y aller à fond ! La
tournée de 2018 sera bien plus
qu’une simple tournée : il s’agira de
visites d’états, de voyages diploma-
tiques. Notre royauté se déplacera de
pays en pays et espère au passage
rencontrer des héros mythiques d’un
niveau comparable au sien. Pour ce
qui est de la France, nous attendons
toujours des nouvelles d’Astérix et
Obélix, par exemple. Il faut dire
que, aussi étrange que cela puisse
paraître, j’ai du mal à localiser
leur village… Et outre ces visites
officielles, le spectacle vivant que
nous présenterons s’apparentera à
une sorte d’exposition universelle,
comme cela se faisait au début du
14ème siècle. Quand vous pénétrerez
dans la salle de concerts où jouent le
Roi et Avatar, son orchestre d’élite,
nous voulons que vous puissiez
découvrir pleinement la culture du
« Pays Avatar ». Cela va plus loin que
la musique et la performance ! Pour
une nuit, le lieu dans lequel vous
vous trouvez deviendra le Pays
Avatar. Par conséquent, les groupes
qui tournent avec nous n’ont pas été
choisis au hasard. Plutôt que de
recruter deux combos qui feraient la
même chose que nous – du metal qui
déchire –, nous avons opté pour une
autre approche. Nous aurons avec
nous Hellzapoppin, formation barrée
et tarée, attraction digne d’une
foire de monstres, et Old Kerry
Mckee, un homme-orchestre qui nous
aidera à montrer aux gens toutes les
dimensions du Pays Avatar, dont ces
derniers sont bien entendu déjà
citoyens.
Comment peut-on acquérir cette
citoyenneté ?
Nous travaillons actuellement sur
cette question. Les choses sont
allées si vite ces derniers temps
que nous nous retrouvons en plein
cauchemar bureaucratique ! Vous
connaissez les lenteurs de l’adminis-
tration… Le département des admis-
sions est en cours de restructuration,
mais la page web devrait être mise
en ligne rapidement. Les gens
pourront déposer leur demande et
pourrons gratuitement devenir citoyens
du Pays Avatar. Le Roi compte sur
vous et veut vous recruter ! Contre
une modique somme, vous pourrez
également obtenir un passeport
physique.
Et quelles seraient nos « motivations »
pour devenir citoyens du Pays
Avatar ?
Pour commencer, vous feriez partie
de la seule nation du monde qui n’a
pas de sang sur les mains – à l’excep-
tion de quelques gouttes versées lors
de moshpits. En termes de moralité, il
s’agit d’un lieu « pur ». Et puis, vous
auriez la chance d’avoir le Roi à la
tête de votre état ! Les gens sont
parfois inquiets à l’idée que notre
gouvernement soit une monarchie,
ce qui se fait rare à notre époque.
Mais il fait bien garder à l’esprit
qu’organiser une élection serait une
pure perte de temps : le Roi est
pleinement apprécié par tous ses
sujets ! Nous savons, avec une absolue
DR
Tant que nous sommes parfaitement sincères avec
nous-mêmes, nous continuerons très précisément à
sonner comme du Avatar (Johannes Eckerström)
certitude, que le peuple l’approuve à
100%. C’est un cas absolument
unique ! Je doute qu’Emmanuel
Macron, par exemple, puisse en dire
autant… Même si nous étions en
démocratie, le Roi serait élu président
à l’unanimité. Voilà qui devrait vous
rassurer quant à ses incroyables
qualités de leader. Il est paré à toute
éventualité et capable de relever tous
les défis qui pourraient se présenter
à notre nation. Personne n’est mieux
préparé que lui ! De plus, en choisissant
le Roi, vous choisissez la stabilité :
les historiens de notre nation essaient
depuis longtemps d’estimer la date
de début de son règne, mais se heurtent
à un nombre étonnant de difficultés.
Par exemple, la majorité des gens
sur notre planète considèrent que
nous sommes actuellement en 2018.
L’année du chien en Chine, l’année
du Roi au Pays Avatar. Tout cela est
très bien, mais 2017 était déjà l’année
du Roi chez nous, et 2016 aussi,
etc. ! Cela complique drastiquement
les choses ! Nos documents historiques
qui rappellent des hauts-faits du Roi
débutent toujours de la même façon :
« Le matin du 2 avril de l’année du Roi,
le Roi en personne, notre grand seigneur
et maître, s’est levé pour faire face aux
ennemis, etc. » Comment établir une
chronologie nette si l’on ne sait
même pas si ce fameux 2 avril s’est
déroulé il y a un an ou cent ? Aussi
loin que remontent les souvenirs de
chacun d’entre nous, cela a toujours
été l’année du Roi, il en a toujours
été ainsi. Ce thème est d’ailleurs
exploré sur certains titres de notre
album. Le morceau « King After
King », par exemple, traite de la
nature complexe de la relation du Roi
avec la mortalité. Nous y racontons
l’histoire du Roi qui, à ce qu’on
prétend, serait mort sur un champ de
bataille. Et, comme il l’avait exigé de
son vivant, il aurait été enterré aux
côtés de ses hommes, et son cheval
relâché dans la nature. Le soir, on
aurait vu ce cheval disparaître dans
les montagnes et revenir le lendemain
matin à l’aube, avec le Roi sur son
dos. Cela soulève beaucoup de
questions : le Roi serait-il immortel ?
Y aurait-il un clone du roi ? Est-ce un
soap opera ? Est-ce une résurrection ?
Est-il assez âgé pour avoir inspiré
l’idée même de la résurrection à la
chrétienté et, auparavant, à la mytho-
logie égyptienne ou babylonienne ?
Aurait-il 5.000 ans ? Quoiqu’il en
soit, il est très compliqué de savoir
s’il est réellement mort ou non.
Toujours est-il que notre gouverne-
ment est le plus stable au monde. La
tête de l’Etat est et sera toujours là,
et tout le monde l’approuve ! Et puis,
nous sommes riches en ressources,
notamment en metal, article que
nous exportons massivement. Nos
mines de metal sont très fortes et
tout à fait uniques. Bien sûr, il y a
d’autres sources fantastiques de
metal, comme l’acier britannique
(Ndlr : « British Steel » dans le texte, en
référence à l’album du même nom de
Judas Priest), dont je continue à me
servir au quotidien avec le plus grand
plaisir. Vous cherchez de nouvelles
sources de metal de qualité, à mélan-
ger avec votre acier britannique ?
Avatar peut vous fournir cela ! Nous
avons toujours plus de metal à offrir
au monde en général, et notamment
aux citoyens du Pays Avatar.
N’est-il pas difficile d’avoir un Roi
au sein du groupe ? Quelle pression
sur vos épaules !
Le Roi m’aime. Le Roi t’aime. Le Roi
croit en toi. Faire partie de son
orchestre d’élite est, bien sûr, le
plus grand honneur qu’on puisse
recevoir. Nous sommes un pays
créatif et le Roi encourage grande-
ment la créativité. Je ne suis qu’un
humble serviteur de la nation,
chargé de conter le récit de notre
histoire à l’aide de mélodies et de
riffs. Je bénéficie de la bénédiction du
Roi, qui approuve fermement cette
démarche ! Le côté gratifiant de
notre mission éclipse toute forme de
stress. La pression passe au second
plan.
En tant que frontman du groupe,
n’aurait-il pas été plus naturel que
tu assumes la charge de leader ?
Beaucoup de gens pensaient que le
Roi, c’était toi...
Le fait d’être l’unique chanteur et
le porte-parole d’Avatar me place
naturellement sous le feu des
projecteurs, c’est vrai. Cependant,
n’oublions pas qu’il s’agit d’une
nation metal. Au centre de tout, à la
base de toute chanson, on retrouve
une « arme de choix » : la guitare
électrique. Il n’est donc pas si sur-
prenant que ça de découvrir que
l’homme incroyable qui assure sept
soli rien que sur la pièce d’ouverture
de notre nouvel album soit en réalité
le Roi ! Je peux comprendre la
confusion, mais je ne suis qu’un
membre de la cour. J’ai simplement
la chance de jouer un rôle central ! Si
je devais oser une comparaison, je
dirais que beaucoup de gens ne
connaissent pas le nom du Président
en Allemagne, mais connaissent le
nom de la Chancelière. Moi-même, je
l’oublie toujours… Pourtant, ses
tâches sont très importantes et
même primordiales. C’est lui qui est
au sommet de la pyramide et qui
prend les décisions ! Et chez nous,
c’est le Roi. Gloire à lui !
Avatar est connu pour explorer
toutes sortes de sous-genres de
metal. Cela peut s’avérer assez
déroutant… D’après toi, à quoi
correspond la signature sonore
d’Avatar ? Qu’est-ce qui, sur le plan
strictement musical, caractérise
vos chansons ?
Les deux plus grandes influences
du Roi et de son orchestre sont
Black Sabbath et les Beatles. Notre
relation avec Black Sabbath est
évidente car nous poursuivons
exactement le même but : créer du
metal qui botte les culs en créant
les meilleurs riffs possibles et en
cherchant la plus belle manière de
les exploiter. Cela implique de trouver
le bon rythme de batterie, le bon
groove, la bonne façon de jouer en
tant que groupe, qui doit apparaître
comme une entité unie et unique.
Une fois toute cette méthodologie
appliquée, il peut ressortir quelque
chose d’aussi trivial et génial que
« Paranoid » ou de progressif et
élaboré que « Wheels Of Confusion ».
En ce qui concerne les Beatles, nous
avons remarqué qu’à partir de la fin
de l’année 1964, aucune de leur
chanson ne ressemble à une autre.
Et pourtant, qu’il s’agisse de
« Blackbird », « Come Together » ou
« Please Please Me », trois titres
radicalement différents, on retrouve
toujours la marque des Beatles !
Tant qu’elle est jouée par John, Paul,
George et Ringo, une chanson porte
l’empreinte unique du groupe. Au
sein d’Avatar, c’est la même chose.
C’est comme avec Queen : nous
pouvons faire tout ce que nous voulons.
Tant que nous sommes parfaitement
sincères avec nous-mêmes et
demeurons les seuls compositeurs
et interprètes du groupe, nous
continuerons à sonner comme du
Avatar, très précisément. Y
57

Chaque mois, l’un de nos journalistes, classiques. Sur les neufs morceaux qui composent
pétri de bonnes intentions mais flanqué cette première carte de visite, rien n’est à jeter. Et
d’une incroyable mauvaise foi, extrait surtout pas « I Don’t Know », « Crazy Train » (dont la
la substantifique moelle de la carrière mélodie lumineuse sera ensuite reprise par le crooner
d’un groupe afin de proposer un « guide Pat Boone !), la ballade « Goodbye To Romance » et le
délicat instrumental « Dee » dédié à Dolores Rhoads,
d’achat » qui n’est, bien évidemment, que
la mère de Randy. On succombe également au
le reflet de ses goûts douteux. Dans ce
controversé « Suicide Solution » (un titre sur les
numéro, c’est Ozzy Osbourne (en solo) qui méfaits de l’alcool inspiré par le décès de Bon Scott
est passé au crible par Philippe Lageat. en février 1980, et non une apologie du suicide) et sa
rythmique hypnotique, mais aussi à « Mr. Crowley »
avec son intro de claviers menaçante et son incroyable
LES INCONTOURNABLES solo. Probablement l’un des plus beaux du jeune
Randy qui, avec cet album imparable, se hisse
d’entrée au niveau des plus grands. Enfin, n’oublions
BLIZZARD OF OZZ pas le rock’n’roll « No Bone Movies », l’écolo
(Jet, 1980) « Revelation (Mother Earth) » et « Steal Away (The
Premier album d’Ozzy Night) », encore transpercé d’éclairs de génie du
Osbourne « en solo » prodige. Quelle entrée en matière !
après son éviction de Black
Sabbath en avril 1979,
Blizzard Of Ozz demeure DIARY OF A MADMAN
son meilleur opus à ce (Jet, 1981)
jour. Epaulé par Randy Encore produit par Max
Rhoads, guitariste de 23 Norman, le deuxième
ans (ex-Quiet Riot qui lui a album d’Ozzy est
été recommandé par Dana quasiment aussi bon,
Strum de Slaughter), le batteur Lee Kerslake (Uriah même s’il renferme un
Heep) et le bassiste Bob Daisley (Rainbow), le tantinet moins de hits.
chanteur parvient à coécrire une ribambelle de futurs Crédités sur le vinyle
58
original, le bassiste Rudy Sarzo et le
batteur Tommy Aldridge n’y
apparaissent pourtant pas. Avant
d’être remerciés à leur grande
surprise, Bob Daisley et Lee Kerslake
ont en effet enregistré ce disque à
l’écriture duquel ils ont largement pris
part. Dommage car, plus jamais par la
suite, le Madman n’atteindra le niveau
de ces deux premiers opus. Les
incontournables sont une fois de plus
légion. Parmi eux, la chevauchée
fantastique « Over The Mountain »
avec ses descentes de toms et son riff
imparable, le pesant « Believer »,
l’entraînant « S.A.T.O. », le gothique
« Diary Of A Madman » et un « Flying
High Again » doté d’un extraordinaire
solo néo-classique. C’est, hélas,
l’ultime album de Rhoads qui périra
dans un accident d’avion quatre mois
après la sortie de cet enthousiasmant
Diary Of A Madman.
BARK AT THE MOON
(Epic/CBS, 1983)
Avec Bark At The Moon, Osbourne
réalise le coup du chapeau. Pour ce
faire – et quand bien même les
crédits de ce troisième album
prétendent le contraire – le chanteur
a rappelé le bassiste Bob Daisley à la
rescousse. Pour ses talents de
© Marc Villalonga
bassiste, peut-être, mais avant tout
pour sa capacité à écrire musique et
paroles. Jake E. Lee (Mickey Ratt,
Rough Cutt), le guitariste qui a la
lourde tâche de se glisser dans les
pompes de Rhoads et a décroché la
place à la barbe d’un
George Lynch déjà
« battu » par Randy en
1979, prend également
part à la composition et
brille ici de mille feux. En
atteste notamment son
délirant solo sur le génial
« Bark At The Moon ». Un
poil plus « commercial »
(l’entraînant et néanmoins
tranchant « Now You See It (Now You Don’t) », la
ballade « So Tired », l’über mélodique « You’re No
Different » introduit aux claviers par Don Airey), Bark
At The Moon, le seul album d’Ozzy sur lequel apparaît
réellement le batteur Tommy Aldridge, renferme
également, outre son morceau-titre, des pièces de
choix comme le chaloupé « Spiders », le burné
« Rock’n’Roll Rebel » et le speedé « Forever ».
EGALEMENT RECOMMANDÉS
THE ULTIMATE SIN
(Epic/CBS, 1986)
Souvent boudé par les fans des trois premiers albums,
ce quatrième opus a pourtant bien des qualités. Un
peu suproduit par Ron Nevison (Thin Lizzy, UFO, MSG),
il s’avère probablement l’un des plus commerciaux de
la carrière du Madman qui, à l’époque, cherche à
séduire le marché US en marchant sur les platebandes
des cadors du hair metal. Son look permanenté et
celui des musiciens qui l’accompagnent – le guitariste
Jake E. Lee, le bassiste Phil Soussan (Bob Daisley,
qui s’est chargé des textes, a quitté le groupe avant
l’enregistrement), le batteur
Randy Castillo (Jimmy
DeGrasso apparaissait
pourtant sur les démos) –
laissent en effet à penser
qu’Ozzy a vendu son âme
au diable. Début 1990, on
peut toutefois dire de même
de nombreux groupes,
Judas Priest en tête, et si
l’on fait fi de l’accoutrement et des clips ridicules du
Ozzy Band pour ne se concentrer que sur sa musique,
il n’y a pas grand-chose à redire au regard de la
diversité et de la qualité des morceaux proposés.
A y regarder de plus près, c’est même à se demander
si The Ultimate Sin ne renferme pas plus de grandes
chansons que son prédécesseur. Difficile, en effet, de
ne pas succomber au lourdingue « Killer Of Giants », à
« Never » (sur lequel Lee fait du Rhoads), à l’entêtant
« Thank God For The Bomb » avec son amusant
« Nuke ! Nuke ! », ou encore à des « Shot In The
Dark », « Secret Loser », « Lightning Strikes »,
« Never Know Why » et « The Ultimate Sin » qui ont
tout de classiques. A réhabiliter d’urgence !
NO MORE TEARS
(Epic, 1991)
Après le bon No Rest For
The Wicked (1988), premier
album avec le guitariste
Zakk Wylde, Ozzy prend
les mêmes et recommence :
Wylde, donc, mais aussi le
batteur Randy Castillo, le
claviériste John Sinclair et
l’incontournable bassiste
Bob Daisley, même si, une
fois n’est pas coutume, ce dernier ne prend pas part
à l’écriture à en croire les crédits officiels. Il sera
remplacé par Mike Inez (Alice In Chains) – qui ne joue
pas sur le disque, mais cosigne néanmoins l’irrésistible
tube « No More Tears » que Wylde se fait un plaisir
de tronçonner – sur la tournée de promotion du
disque. Fort du succès critique de 1916 paru en début
d’année 1991, Lemmy Kilmister de Motörhead cosigne
ici pas moins de quatre titres, dont le plus que sympa-
thique « Hellraiser » qu’il se réappropriera l’année
suivante sur March Ör Die, tout comme il reprendra
l’excellent « Desire » en 2006 avec Ritchie Kotzen
pour un tribute à… Ozzy ! La très belle production de
Duane Baron (Wasp, Mötley Crüe) & John Purdell
(Quiet Riot) flatte cet album réussi qui résiste aux affres
du temps. Si « Mr. Tinkertrain » est une sorte de
« Miracle Man » (du précédent opus) en plus passe-
partout, le morceau-titre (avec break de piano !), « I
Don’t Want To Change The World » (sur lequel Zakk
abat un boulot phénoménal) et les power ballades
« Mama, I’m Coming Home » et « Road To Nowhere »
achèvent de faire de ce No More Tears hyper calibré,
mais qui tourne à plein régime, un mètre-étalon de la
carrière d’Osbourne.
DÉCONSEILLÉ
UNDER COVER
(Epic, 2005)
Au fil de sa carrière, Ozzy Osbourne, comme la
plupart de ses pairs, a publié de l’excellent, du
sympathique et du moins bon. Ses albums studio ont
néanmoins – et c’est une constante – toujours proposé
aux fans quelque chose à
se mettre sous la dent.
Autrement dit, le chanteur
n’a jamais publié de
« grosse daube », ses opus
recelant systématiquement
quelques bonnes
surprises, y compris les
plus récents Black Rain
(2007) et Scream (2010,
avec le guitariste Gus G). C’est donc cet Under Cover
que nous avons décidé de clouer au pilori. Il est
originellement paru dans le coffret Prince Of Darkness
que nous mentionnons également en ces pages,
même si cette version simple CD renferme quatre
covers supplémentaires (« Rocky Mountain Way » de
Joe Walsh, « Sunshine Of Your Love » de Cream,
« Woman » de John Lennon et « Go Now » de Bessie
Banks). Au menu donc, 14 reprises qui n’ont
quasiment pour unique intérêt que d’être un reflet
assez fidèle des influences d’Osbourne : The Beatles
(« In My Life »), « Fire » (Arthur Brown), John Lennon
(« Working Class Hero »), Mountain (« Mississippi
Queen »), King Crimson (« 21st Century Schizoid
Man »), etc. Le résultat n’est pas foncièrement nul,
mais varie grandement en qualité selon les morceaux
et n’apporte rien de bien nouveau sous le soleil de
Satan. Dispensable et anecdotique.
LE LIVE
TRIBUTE
(Epic/CBS, 1987)
Cinq ans jour pour jour
après l’accident d’avion
qui a coûté la vie à Randy
Rhoads (le 19 mars 1982),
Ozzy Osbourne rend un
vibrant hommage à son
regretté guitariste en
publiant ce disque live
dont les fans rêvaient,
mais qu’ils n’espéraient
plus. Capté sur diverses dates de 1980 (Southampton/
UK) et 1981 (Cleveland/USA et probablement
Montréal/Canada), Tribute est, et de loin, celui
des nombreux live publiés par Ozzy qu’il vous faut
absolument posséder. Déjà, il puise pour l’essentiel
sa source dans les deux premiers albums solo
d’Osbourne, les excellents Blizzard Of Ozz (1980)
et Diary Of A Madman (81) que nous hissons en ces
pages au rang mérité d’incontournables et dont il
propose un somptueux florilège : « I Don’t Know »,
« Mr. Crowley », « Crazy Train », « Flying High
Again », « Suicide Solution », « Revelation (Mother
Earth) », etc. Accompagné de Rudy Sarzo (basse)
et Tommy Aldridge (batterie) sur la plupart des titres
(Bob Daisley et Lee Kerslake jouent uniquement sur
« Goodbye To Romance » et « No Bone Movies »),
le couple Ozzy/Randy en profite également pour
dépoussiérer trois classiques de Black Sabbath
(« Iron Man », « Children Of The Grave » et
« Paranoid »), mais c’est sur le matériel solo du
chanteur que le guitariste californien montre toute
l’étendue de sa classe. A ce titre, Tribute porte bien
son nom, car si Ozzy module plutôt bien, ce
témoignage live se veut avant tout être un sublime
écrin destiné à honorer le talent et la mémoire de cet
extraordinaire jeune homme hélas parti dans la fleur
de l’âge alors qu’il avait encore tant de choses à
accomplir. Depuis 2011, nous pouvons également
recommander chaudement aux fans l’album Ozzy Live
(bonus de l’édition Deluxe 30ème anniversaire de
l’album Diary Of A Madman) qui renferme un concert
américain du Blizzard Of Ozz US Tour 1981
d’excellente facture.
LA COMPILATION
THE ESSENTIAL OZZY OSBOURNE
(Epic/Legacy, 2003)
Des best of d’Ozzy, il y
en existe un paquet :
Best Of Ozz (1989), Ten
Commandments (89), The
Ozzman Cometh (97),
Memoirs Of A Madman
(2014), etc. On en passe
des pires et des plus rares.
Leur problème ? Ils sont
parus il y a si longtemps
qu’ils ne sont pas un reflet fidèle de la féconde
discographie du chanteur, ou, pire, sont plus récents
mais constitués d’une maigre poignée de titres
largement insuffisante. On se rabattra donc sur The
Essential Ozzy Osbourne, sorti en 2003 et qui a le mérite
de compiler pas moins de 30 morceaux sur deux CDs.
Bien qu’elle fasse l’impasse sur The Ultimate Sin (1986) –
où est passé « Shot In The Dark », par exemple ? – et que
Black Rain (2007) et Scream (2010) en soient absents
puisque parus plus tard, cette anthologie porte bien son
nom et s’avère une bonne porte d’entrée pour les novices.
LE COFFRET
PRINCE OF DARKNESS
(Epic, 2005)
Faute de combattants (si l’on fait
exception du Blizzard Of Ozz/Diary
Of A Madman 30th Anniversary
Deluxe Box Set, remarquable mais
onéreux et focalisé sur les deux
premiers albums d’Ozzy), ce Prince
Of Darkness s’impose comme le
coffret à posséder. Cette long box
renferme en effet un livret de 60
pages et 4 CDs. Les deux premiers
retracent la carrière du chanteur anglais en l’espace de
29 titres emblématiques (remastérisés), parmi lesquels
dix morceaux live et sept démos (celle de « See You On
The Other Side » est inédite, de même que le bonus
« Bang Bang (You’re Dead) », démo de « Facing Hell »
inconnue jusqu’ici). Le CD3 est gavé de duos enregistrés
au fil des ans (avec Type O Negative, Therapy?, Gary
Moore, etc., et même Miss Piggy du Muppet Show !),
tandis que le quatrième, dont nous parlons plus haut,
voit le Madman s’attaquer à pas moins de dix reprises.
Pas le coffret définitif, mais du lourd néanmoins.
LE DVD
MEMOIRS OF A MADMAN
(Epic/Legacy, 2014)
Ici, le choix s’avère plus
difficile, le passionnant
documentaire God Bless Ozzy
Osbourne (2011) et Speak Of
The Devil (un superbe concert
avec Brad Gillis capté à Irvine
Meadows le 12 juin 1982)
méritant eux aussi le détour. Pour autant, ce Memoirs
Of A Madman décroche notre vote puisque, pour
moins de 25€, il propose un beau packaging et deux
DVDs. Le premier contient les 26 clips du loup-garou
de Birmingham et des « making of », le second de
nombreuses séquences live filmées entre 1981 et
2010, ainsi que des extraits d’interviews, de sessions-
photos et de séances d’enregistrement. Un rapport
qualité/quantité/prix imbattable ! Y
59
 GENRE SITE INTERNET
. Americana/blues www.myleskennedy.com
LE GROUPE ALBUM
. Myles Kennedy (chant,
. Year Of The Tiger (2018)
guitare, banjo, mandoline,
lap steel guitar, basse, etc.)
. Tim Tournier (basse) ARTICLE RH
. Zia Uddin (batterie) RH N° 184

60

Attendez-vous à l'inattendu ! Les fans d'Alter Bridge ou encore de Slash et ses Conspirators sont prévenus : le premier
album solo du chanteur Myles Kennedy s'éloigne très nettement du hard rock qui a fait sa renommée. Year Of The Tiger
(sortie le 09 mars) voit en effet le frontman se focaliser sur des compos teintées de sonorités bluesy et qui sentent bon
l'americana, ce mélange de folk, country, rhythm and blues et de rock'n'roll qui est en vogue aux USA. Mais au-delà de la
forme, le fond interpelle lui aussi, Myles Kennedy livrant un album conceptuel ô combien personnel, puisque centré sur
un traumatisme d'enfance : le décès de son père.
Rock Hard : Tu travaillais sur un album
solo depuis près de sept ans, que tu as
pourtant fini par jeter à la corbeille au
profit de Year Of The Tiger. Que s’est-
il passé ?
Myles Kennedy : Plusieurs choses
expliquent cela. Puisqu’il s’agissait de
mon premier album solo, j’avais à cœur
de publier un disque qui me corresponde
vraiment. Je travaillais effectivement sur
un autre album depuis des années, qui
était en bonne voie, mais j’ai préféré
emprunter une autre direction, aussi
bien sur le plan de sa musique que de sa
thématique. Et puis, sans doute parce
que je travaillais sur ces chansons
depuis déjà plus de sept années, je m’en
suis lassé. Je ne me sentais plus vraiment
proche d’elles : elles faisaient partie du
décor, mais ne me faisaient plus autant
vibrer qu’au début. Peut-être est-ce parce
que trop de temps s’était écoulé. J’ai eu
comme l’impression qu’elles avaient
atteint leur date de péremption. J’ai donc
choisi de repartir d’une page blanche,
comme ça, pour voir, et les morceaux
de Year Of The Tiger sont arrivés très
rapidement.
Jeter cet album n’a pas dû être une
décision facile...
Non, c’est sûr ! J’avais énormément travaillé
sur ces chansons qui, pour la plupart,
étaient presque finalisées (Ndlr : Slash
avait enregistré un solo sur l’une d’elles, il
y a quelques années). Rien que d’un strict
point de vue financier, tout envoyer valser
donnait l’impression d’être une hérésie.
Mais je ne regrette vraiment pas ma
décision. J’ai tout de même conservé
une chose : le chant de la démo de
« Love Can Only Heal », un titre qu’on
retrouve sur Year Of The Tiger et dont la
musique a été entièrement réécrite.
Mais sur les douze titres de l’album, il
s’agit du seul passage rescapé de cet
album solo qui était en chantier.
Dirais-tu que Year Of The Tiger est
ton album le plus personnel, aussi bien
dans le fond comme dans la forme ?
Oui, même si les disques que j’ai publiés
avec The Mayfield Four à la fin des 90’s
et au début des années 2000 étaient
très personnels eux aussi (Ndlr : The
Mayfield Four, formation rock signée chez
la major Epic active de 1996 à 2002, a
sorti deux albums et un EP). Year Of The
Tiger est différent dans la mesure où il
est conceptuel et qu’il ne s’intéresse
qu’à un seul sujet central, à savoir le
décès de mon père en 1974 (Ndlr : Myles
Kennedy avait quatre ans). A l’époque, mes
parents étaient de fervents adeptes de
la Science chrétienne (Ndlr : une pseudo
religion historiquement très implantée dans
la région d’origine de Myles Kennedy, le
Massachusetts). Ceux qui adhèrent aux
préceptes de la Science chrétienne
pensent que la maladie n’est qu’une
illusion que la foi peut effacer.
Malheureusement, mon père y croyait dur
comme fer. Quand il est tombé malade, il
a refusé de voir un docteur. En quelques
semaines seulement, son état de santé
s’est énormément dégradé et il est décédé
(Ndlr : dans une autre interview accordée à
l’animateur américain Eddie Trunk, Myles
Kennedy a précisé qu’au départ, son père ne
souffrait visiblement que d’une appendicite.
Malheureusement, faute de traitement adapté,
cette inflammation s’est rapidement dégradée
et a dégénéré).
Dirais-tu qu’après toutes ces années,
écrire cet album si personnel t’a aidé ?
Je pense que ce fut cathartique, même si
ça a aussi fait remonter pas mal de
questions. J’en parlais justement avec
mon frère il y a quelques jours. Il a trois
ans de moins que moi et était âgé d’un
an seulement quand notre père est décédé.
Il m’a dit qu’en tant qu’auteur/composi-
teur de chansons, j’avais de la chance
d’avoir cet exutoire à ma disposition,
parce que tout le monde n’a pas cette
opportunité. Je n’y avais jamais vraiment
pensé en ces termes, mais c’est vrai.
Tant mieux si ça peut m’épargner des
années de thérapie qui m’auraient coûté
un max ! (rires)
Comme son titre l’indique, « Mother »
s’adresse à ta mère. Il semble que
cette dernière a également été impliquée
dans ce disque, n’est-ce pas ?
Oui, c’est vrai. J’ai voulu la mettre au
Ceux qui adhèrent aux préceptes de
la Science chrétienne pensent que
la maladie n'est qu'une illusion que
la foi peut effacer. Malheureu-
sement, mon père y croyait dur
comme fer (Myles Kennedy)
courant le plus tôt possible. J’étais assez
nerveux... Je ne savais pas du tout comment
elle allait réagir. Mais elle a compris à
quel point ce projet était important pour
moi et, ensemble, nous avons longuement
parlé de cette période. Je ne savais pas
tout, loin de là. J’avais déjà écrit la
majorité des textes, mais après ces
discussions, je les ai parfois modifiés
pour qu’ils collent au plus près à nos
deux ressentis.
N’as-tu pas hésité à aborder ce sujet
qui relève de la sphère privée ? Car
ta mère et ton frère ne sont pas des
personnes publiques...
Tu as raison. J’y ai pensé, mais... après !
(sourire téléphonique) Quand tu bosses sur
un disque, tu ne réfléchis pas vraiment
aux éventuelles répercussions : tu es
avant tout dans l’instant présent. Tu te
dis simplement : « J’aimerais bien finir
cette chanson cette après-midi ». Ça ne va
pas beaucoup plus loin que ça. Mais je
me considère comme quelqu’un d’assez
protecteur de ma famille et il est vrai que
j’y pense de plus en plus aujourd’hui. Il
était important en tout cas d’avoir la
bénédiction de mes proches. A présent,
ce qui m’importe le plus est que l’origine
et le concept de cet album ne soient pas
mal compris ou interprétés de travers.
Je m’adapterai à la situation, selon ce
Propos recueillis par Morgan Rivalin - Entretien téléphonique réalisé le 22 janvier 2018
qu’on me dira et/ou ce que je lirai une
fois qu’il sera sorti... Je vais naviguer à
vue.
Year Of The Tiger fait référence à 1974,
année du décès de ton père et année
du tigre dans l’astrologie chinoise. Le
tigre revêt-il une signification particu-
lière pour toi ?
Non, c’est juste une façon d’évoquer
cette année différemment, sans nommer
l’album 1974, par exemple. Mais je
pense à une chose importante à l’instant :
ce disque n’est pas seulement centré
sur le décès de mon père et il ne parle
pas uniquement de la perte d’un être
cher. C’est aussi un hommage à la force
de caractère de ma mère. Pour le bien
de ses deux petits garçons, elle a fait
preuve d’une grande persévérance et
d’un incroyable courage. Je crois bien
qu’à l’origine, ce disque conceptuel a
surtout été motivé par une profonde
envie de lui rendre un vibrant hommage.
En plus d’être le chanteur qu’on
connaît, tu es un guitariste accompli.
Mais avec cet album solo, on te découvre
en véritable homme-orchestre...
Disons que c’était l’occasion ou jamais.
J’ai toujours aimé jouer de la guitare
acoustique, du banjo, de la mandoline,
de la basse ou encore de la lap steel guitar,
même si, dans le cas de cet instrument
précis, ça faisait une paye que je n’y
avais plus touché. Mais je ne suis pas le
seul à apparaître sur Year Of The Tiger :
mon manager Tim Tournier, qui est
aussi celui d’Alter Bridge, y joue pas
mal de basse et mon vieil ami Zia
(Uddin) de The Mayfield Four se trouve
à la batterie.
Es-tu d’accord pour dire que cet
album a un côté americana ?
Oui, c’est sans doute le cas.
« Americana » est le premier mot qui est
sorti de la bouche de mon manager en
découvrant les démos de l’album.
Pourtant, ce n’était absolument pas
un objectif et ce n’était vraiment pas
conscient. Après, il faut aussi définir ce
que « americana » veut dire. En grand
amateur de delta blues, je ne suis pas
étonné qu’on étiquette ces chansons
« americana », un mot qui évoque direc-
tement les racines musicales de la
musique américaine. En ce moment,
tous les journalistes ou presque me
demandent si j’aime la country, mais
pour moi, ça ne définit pas bien Year Of
The Tiger. Je n’ai jamais vraiment écouté
de country. En revanche, j’adore certains
musiciens qui ont inspiré la country.
Mississippi John Hurt, par exemple. Mes
influences remontent au début du 20ème
siècle et je n’écoute absolument pas une
note de la country actuelle qui, aux
USA, truste les ondes des radios.
« The Great Beyond » et « Love Can
Only Heal » sont les morceaux les plus
épiques de l’album. As-tu eu recours à
un orchestre sur ces titres ?
Pas sur « Love Can Only Heal », mais sur
« The Great Beyond », oui. La version
originale de ce dernier ne comportait
pas de cordes, mais je trouve qu’elles
apportent un énorme plus au morceau.
Globalement, mon producteur Elvis
(Ndlr : Michael « Elvis » Baskette, producteur
qui a collaboré avec Alter Bridge, Trivium,
Slash, etc.) et moi avons voulu un son
assez dépouillé qui mette en valeur le
chant et les textes, mais « The Great
Beyond » avait besoin de quelque chose
en plus. J’ai donc contacté le Parallax
Orchestra : des musiciens londoniens
avec qui Alter Bridge a notamment joué
au Royal Albert Hall il y a quelques mois.
Ils ont eu la gentillesse de participer à
ce morceau et je les en remercie sincè-
rement. Ils y apportent une jolie touche
de magie !
Cette production plutôt dépouillée
peut te permettre de jouer ces titres
en acoustique. Est-ce ce que tu feras
en mars, sur ta tournée britannique, ou
seras-tu entouré d’autres musiciens ?
J’aimerais jouer ces morceaux en
groupe, et je sais que je le ferai un jour,
mais pour le moment, je serai seul sur
scène avec ma guitare. Mon manager
Tim viendra sans doute me dépanner
sur quelques titres, mais c’est tout.
Même s’il m’arrive souvent de m’accom-
pagner en acoustique lors de showcases
ou pour des prestations radio, donner
un concert entier en acoustique sera
un nouvel exercice pour moi. Bien évi-
demment, je jouerai des titres issus
de Year Of The Tiger, mais aussi des
morceaux de The Mayfield Four, de
Slash & The Conspirators et d’Alter
Bridge.
A propos d’Alter Bridge, avez-vous
déjà de nouveaux morceaux en vue
d’un futur album ?
Nous avons toujours des titres dans nos
cartons, mais nous allons continuer d’en
accumuler tout au long de cette année.
Pour le moment, je me concentre sur
Year Of The Tiger, tandis que Mark
(Tremonti) se focalise sur Tremonti.
L’idée est de se retrouver courant 2019
pour sortir un nouvel album.
Et pouvons-nous espérer un jour un
nouvel opus de Slash Feat. Myles
Kennedy & The Conspirators ?
Je suis régulièrement en contact avec
Slash, mais rien de concret n’est prévu.
Il a été et va de nouveau être extrême-
ment occupé avec Guns N’Roses cette
année. Comme chacun sait, la tournée
de GN’R se déroule extraordinairement
bien. Je n’en ai jamais douté, et j’en suis
sincèrement ravi pour lui ! Y
61
 Propos recueillis par Emmanuel Hennequin - Entretien téléphonique réalisé le 17 janvier 2018
Donald Trump est Président des Etats-Unis, et Ministry a décidé de rechausser les gants. Uppercut certes, mais pas directement
contre la personne : Donald, après tout, n’est que le produit du système Mickey ; et c’est ce système qui, assez lourdement, fait
s’interroger Al Jourgensen en 2018 sur AmeriKKKant. Lui-même n’aurait jamais imaginé que survienne un jour l’avènement de
« Mister You’re fired ! », et il fallait peut-être un épisode de cette importance pour qu’il se décide à retourner en studio avec
Ministry après le décès de l’ami et guitariste historique Mike Scaccia survenu un peu avant la finalisation de From Beer To Eternity
(2013). Aujourd’hui, le groupe inclut trois guitares : celles de Jourgensen, Sin Quirin et Cesar Soto, remplaçant de Scaccia. Ministry,
dont la dernière période de création concentrait les pouvoirs entre les mains de Mike et Al, redevient aujourd’hui une entité collaborative.
Juste avant de partir en tournée avec Chelsea Wolfe, Jourgensen nous a parlé société et a évoqué un son de la persévérance.
Rock Hard : La dernière fois que grand nombre de personnes s’est après la disparition de Mike. Le ressentent de la peur, et tout cela est
nous avons discuté, tu m’as dit, en investi en studio aux côtés de moment voulait que je me consacre à le terreau d’un nouveau fascisme.
substance et dans un éclat de rire : Ministry cette année : DJ Swamp, ça, mais bref, il a malgré tout fallu
« Trump ne sera jamais élu Burton C. Bell de Fear Factory, remettre Ministry sur pied pour le Crois-tu que l’élection et la gouver-
Président des États-Unis ! » Le Arabian Prince et Lord Of The Cello. live, et j’ai dû trouver de nouveaux nance de Trump aient plongé
jour où l’invraisemblable s’est Le groupe baignait dans un climat partenaires pour le faire, et de nou- l’Amérique dans plus de confusion
produit, le 8 novembre 2016, quelle de confiance, une vraie ambiance velles idées. A la fin de la tournée ou, au contraire, peuvent-elles
a été ta première réaction ? collaborative : les gens allaient dans européenne, le contexte était que amener l’opinion à débattre des
Al Jourgensen : Oui, j’avais dit ce le même sens. Certains me disent nous avions enclenché quelque chose valeurs de la prochaine société
que tu rapportes, absolument. que, dans la manière de faire, ça leur ensemble. Alors, on s’est dit : américaine ?
Personne alentour ne l’avait vu venir, rappelle l’état d’esprit de nos années « Pourquoi ne pas aller en studio et Le système en place, incarné par la
c’était surréel. Lorsque je me suis 1990. Cette dimension collective de tester les idées qui traînent entre nous, classe dirigeante, se fonde sur le
levé le matin du 9 novembre, je me Ministry est à l’image de la réaction histoire de voir ? ». Et là, en une principe de division : faire en sorte
suis senti malade. La nuit d’avant de mon cercle de proches à l’élection petite semaine, rien qu’en jammant, que les gens ne s’entendent pas, ne
avait été éprouvante. Je me suis de Trump. Ensemble, nous voulons nous nous sommes retrouvés avec s’écoutent plus, pour ensuite conquérir
retourné vers ma petite amie et je lui maintenir quelque chose en vie, une 70% de l’album prêt. Le gros de son et maintenir le pouvoir. Internet et
ai dit : « Là, je crois que l’heure est utopie peut-être. squelette. les réseaux sociaux ont été utilisés
venue de faire un nouvel album ! » pour ça. Une fois cette division opérée,
Dirais-tu que la dimension collective Quelle est la trame de fond la propagation des peurs a lieu, et tu
Sin Quirin (guitare) et toi vous êtes de Ministry avait fini par te manquer d’AmeriKKKant ? te retrouves à espionner le monde
un peu exprimés sur la conception depuis ta petite lucarne, ce voisin que
du nouvel opus avant que ne débute tu considères avec méfiance, voire
réellement ta campagne de presse Après l’élection de Trump, comme ton ennemi… Le média social,
pour AmeriKKKant. Il semble que notre compagnon au quotidien, est
le travail a été plus intuitif et une question m’a taraudé : utilisé comme moyen de désinformation,
collectif que sur les précédents voire de désarmement d’une pensée
disques de Ministry. Tu sembles pourquoi en sommes-nous là ? alternative à celle de la classe diri-
avoir relâché le contrôle. Es-tu geante. Tous ces facteurs combinés à
d’accord avec ça ? (Al Jourgensen) un encadrement du système éducatif
Oui, et cette comparaison vaut aussi peuvent amener une classe ouvrière
entre AmeriKKKant et l’album de ou alors, à l’heure de From Beer To La dimension organique du disque et une population à ne considérer leur
Surgical Meth Machine (Ndlr : projet Eternity, la question ne se posait- est un signe des temps. Avec cet vie qu’à travers l’idée de subsistance :
impliquant Sammy D’Ambruoso et elle pas ? C’était une autre époque, album, je me suis senti presque payer ses factures et, au final, créer
l’invité Jello Biafra, dont le premier après tout… plus photographe que musicien. Je une richesse qui n’ira que dans les
disque est sorti en 2016). Ce travail A ce moment précis, je ne ressentais regardais le monde. Après l’élection poches des dominants. Face à cela,
m’associait à mon ingénieur-son, pas ce besoin de collectiviser. Pire, de Trump, une question m’a taraudé : une résistance peut naître et je peux
tandis que j’avais aussi opté pour les temps qui ont suivi le décès de pourquoi ce type, pourquoi en sommes- la voir émerger dans la rue, mais
un personnel réduit sur les travaux Mikey m’ont fait prendre une certaine nous là ? La question du pourquoi j’espère qu’il ne s’agit pas d’une
antérieurs de Ministry : From Beer To distance. Franchement, je n’avais m’apparaissait bien plus importante mode ou d’un feu de paille.
Eternity (Ndlr : dernier vrai opus de plus envie de Ministry, je ne voulais que le personnage de Trump lui- L’insatisfaction qui s’exprime ne peut
Ministry paru en 2013) était le fruit plus rien faire avec ça… Mais dans même, dont nous connaissons les pas se cantonner à être « anti- » : anti-
d’un travail resté entre mes mains et la période qui avait précédé, mon excès, évoqués des milliards de fois. Bush, anti-Trump, etc., etc. Une
celle de Mike Scaccia. AmeriKKKant, ancien manager avait signé des Ces excès dans le langage ou les capacité de proposition est nécessaire.
lui, est un disque très organique. Je engagements pour des concerts. Et il idées se manifestent de par le monde Trump s’adresse à une population
peux même dire que c’est la première fallait les assurer dans un contexte entier : en Europe, chez vous avec qui, pour partie, n’est pas éduquée :
fois que je me retrouve en studio avec où, pourtant, j’avais Surgical Meth Marine Le Pen, en Pologne aussi, en une fraction de cette population ne lit
Ministry avec un tel esprit de groupe Machine sur le feu. J’avais précisément Turquie, en Autriche… Les gens pas, ne s’informe pas, et à celle-ci,
depuis l’époque Filth Pig (1996). Un monté ce projet pour me retrouver sont dans la confusion et la colère. Ils Trump affirme détenir les réponses à
tous les problèmes. Mais si tu analyses
. Houses Of The Molé (2004)
GENRE SITE INTERNET . Rio Grande Blood(2006) un peu, difficile de ne pas voir la
. Metal indus . The Last Sucker (2007) dimension affairiste de l’homme.
www.ministryband.com . Relapse (2012)
LE GROUPE . From Beer To Eternity (2013) Honnêtement, personne ne s’attendait
ALBUMS . AmeriKKKant (2018) à le voir gagner – même pas lui,
. Al Jourgensen (guitare, chant) . With Sympathy (1983) + d’innombrables live & compilations d’ailleurs ! C’est un type qui fonde
. John Bechdel (claviers) . Twitch (1986)
. The Land Of Rape & Honey (1988) essentiellement sa pensée sur l’idée
. Sin Quirin (guitare) . The Mind Is A Terrible Thing To Taste ARTICLES RH de business, et sa candidature n’avait
. Tony Campos (basse) (1989) RH N°11, 19, 34, 54, 69, 119, 135 initialement vocation qu’à servir ses
. Psalm 69 : The Way To Succeed And
. Cesar Soto (guitare) The Way to Suck Eggs (1992) & 184 affaires. Or, notre société a permis à
. Filth Pig (1996) quelqu’un ayant ces valeurs-là de la
. Derek Abrams (batterie) . Dark Side Of The Spoon (1999)
. DJ Swamp (platines) . Animositisomina (2003) diriger. C’est donc notre système qu’il
faut remettre en question.

62
Al Jourgensen
D’Europe, nous avons parfois l’im-
pression que Trump appréhende
l’Amérique de manière isolationniste
et qu’il ne connaît pas très bien
le monde extérieur. Sa parole
publique peut être un casse-tête
pour la diplomatie américaine,
non ?
Notre diplomatie se maintiendra
comme elle peut, mais son chef est un
entertainer. Le corps diplomatique, je
pense, relativise la portée des
déclarations d’un Président sur
Twitter. Elle sait qu’une gouvernance
s’inscrit dans le court terme et qu’elle
ne peut outrepasser des grands
principes fondateurs de l’Amérique.
Je ne serais pas étonné, d’ailleurs,
que certaines personnalités aujourd’-
hui dominantes finissent un jour en
prison. Mais revenons aux qualités du
dirigeant. Tu peux avoir fait les plus
hautes écoles, ça ne veut pas dire
grand-chose si tu y as passé plus de
temps à causer argent et à importuner
les nénettes qu’à y travailler pour de
vrai. Et je suis choqué de constater,
chez certains hommes de pouvoir, ce
côté négligé, paresseux. Il faudrait
interroger les capacités des candidats
aux élections américaines, et ma
question porte autant sur les capacités
de Trump que de Bush ou, plus loin
dans le temps, Reagan. Un vieil
acteur a-t-il vocation à régner sur le
monde ? George W. Bush, lui, s’est
fait payer ses études par son papa et
sait à peine ce qu’un service militaire
veut dire (Ndlr : référence indirecte à
l’influence supposée de son père George
Bush Sr, ex-Président, sur le déroulement
du service du fiston, soupçonné d’avoir
bénéficié de faveurs et d’avoir été placé).
Tu ne trouves pas ça incroyable ? Et
après, c’est le même qui décrète
l’existence d’un danger pour le
monde et déclenche une guerre en
Irak. On croit rêver ! Mais une
présidence américaine n’est pas de
l’entertainment ! C’est dingue : plus les
candidats sont nuls, plus tu as de
gens pour croire en le Sauveur. Ceux
qui développent cette croyance sont
les mêmes que ceux qui croient que
vivre se résume à dépenser de l’argent,
et cette mentalité est perpétuée par
un ensemble de médias : ces mêmes
gens qui veulent te faire consommer
encore et encore, qui t’abrutissent de
rêve et de court terme en te faisant
oublier, par exemple, qu’un talent
est quelque chose de rare et long à
cultiver, et que rien ne remplace le
travail. La facilité règne un peu trop
dans ce discours, répété inlassable-
ment. Et le résultat, c’est que les
gens croient en la facilité, n’ont plus
d’ambition pour eux-mêmes et ne
trouvent au bout que frustration. Ainsi,
toute une société se « déséduque ».
C’est un système déliquescent.
Effrayant, je trouve.
La personnalité et la pensée de
Trump se structurent sur la notion
d’affaires plus que sur le politique.
Qu’est-ce qu’elles révèlent de
l’Amérique ?
Dans les années 1990, il y a eu ce
film, Wall Street, qui décrivait la
domination de la valeur argent sur le
système. Ceci n’est pas un privilège
culturel américain : l’argent joue un
rôle chez vous aussi, en France, mais
aussi en Allemagne, etc. La parole
protestataire n’en a que plus de
valeur et elle ne doit pas se limiter à
comptabiliser les stupidités verbales
de Trump, son racisme, etc. Ceci n’est
que la surface des choses ! Regarde
l’incapacité des dirigeants « du haut »
à conceptualiser un modèle qui s’ac-
corde avec des impératifs mondiaux
et écologistes. L’Etat Fédéral américain
n’y arrive pas, mais voilà : la cons-
cience écologique se manifeste à une
échelle inférieure. Les grandes villes
américaines n’attendent plus le
niveau fédéral pour agir sur l’environ-
nement. Et dans le secteur privé,
ceux qui comprennent qu’ils peuvent
tirer parti économiquement d’un
changement de modèle sont déjà sur
les rangs : ExxonMobil investit dans
l’éolien plus que jamais depuis qu’il a
compris qu’il pourrait, à terme, en tirer
parti. Certaines compagnies d’alcool
misent quant à elles davantage sur la
légalisation de la marijuana qu’elles
ne travaillent sur de nouvelles
variétés de plantes ou de mixtures.
Tous ces gens réalisent que nous
sommes à un tournant et veulent
trouver une parade pour passer le cap
du changement, y survivre, voire en
profiter.
Suite à l’affaire Weinstein, tu t’es
exprimé sur le phénomène du
Une tournée ne vise pas seulement
à vendre du merchandising, il
s’agit d’offrir des nuits en forme
d’échappatoires (Al Jourgensen)
harcèlement sexuel. Des femmes de
ton entourage t’ont-elles dit avoir
subi de telles choses ? Comment
analyses-tu le phénomène ?
D’abord, rappelons que nous ne pouvons
pas parler des femmes comme d’un
bloc uniforme et général. Chaque
histoire est unique. J’écoute chacune
d’entre elles et j’essaie de comprendre
la réalité du phénomène, dans sa
diversité. Une première grande violence
peut être vue dans cette oppression
sexuelle qu’on tient d’un pouvoir.
Cette violence diffère dans son
expression de celle du viol dans sa
forme primaire, très grave. Elle est
aussi différente du comportement de
l’abruti qui importune les filles et
leur tâte les fesses lors d’une soirée.
C’est une autre violence, réelle et
complètement idiote, mais elle n’est
pas identique, et j’ai bien peur que
nous nous soyons un peu trop habitués
à assister à cette dernière sans trouver
à y redire.
Revenons à ce qui se passe
aujourd’hui dans Ministry. Mike
n’est malheureusement plus là, mais
les guitares continuent à jouer les
premiers rôles. Sont-elles aujourd’-
hui le fruit d’une vision commune
entre Sin Quirin et toi, ou Cesar a-
t-il pris part au travail depuis
2015 ?
Cesar a été recruté comme remplaçant
de Mike, et mon sentiment est qu’il
est lui-même entré dans une collabo-
ration avec Ministry. En même temps,
avec AmeriKKKant, j’éprouvais un
besoin de retourner aux racines, de
retrouver mon instrument, et j’ai posé
plus de guitares que jamais depuis,
peut-être, The Land Of Rape And
Honey (1988) ou The Mind Is A
Terrible Thing To Taste (89). Pour te
répondre, donc, je dirais que, sur ce
disque, il y a beaucoup de Sin,
beaucoup de moi, et qu’entre nous
deux, Cesar a creusé son sillon. Il n’y
avait pas de suite plus respectueuse
et intelligente à donner à la mort de
Mike que cette qualité de collaboration.
Tu insistes beaucoup sur cette
dimension collective retrouvée. Dis-
tu en creux que Surgical Meth
Machine est mis de côté ?
A court terme, le prochain projet
d’enregistrement concerne de nou-
veaux titres de Revolting Cocks. Six
morceaux, pour un album. Sin et
moi avons travaillé là-dessus, mais je
ne renonce pas à Surgical Meth
Machine. Cela dit, maintenant que
nous avons un collectif qui fonctionne
avec Ministry, nous pouvons envisager
d’autres choses, et j’en suis heureux.
Ministry est un espace qui évolue au
gré du contexte. Par exemple, Roy
Mayorga (batterie) ne peut plus
apparaître sur scène avec nous
aujourd’hui. C’est un problème d’agen-
da : il est pris par Stone Sour. Le
remplacement de Roy pourrait
impliquer que Joey Jordison de
Slipknot assure la tournée américaine,
nous verrons. Quant aux shows à
venir en Europe, pour l’heure, je ne
suis sûr de rien. Cela dit, Roy n’est
jamais loin et nous verrons ce que
réserve le futur. La stabilité est un
luxe et nous devons jouer avec les
agendas de chacun. C’est le jeu.
Cette prochaine tournée avec Chelsea
Wolfe, tu peux en dire davantage ?
Pourquoi cette dernière ?
Nous voulions offrir quelque chose de
spécial au public, une expérience.
Chelsea et Ministry développent deux
mondes différents, mais qui fonction-
nent bien ensemble. Son groupe tue !
Elle nous accompagnera jusqu’en
Europe, notamment sur des dates
anglaises et françaises. J’éprouve un
grand respect pour ce qu’elle dit, ce
qu’elle fait, et la façon dont elle le fait.
Une tournée ne vise pas seulement à
vendre du merchandising, il s’agit d’offrir
des nuits en forme d’échappatoires.
Ces dernières années, d’importants
changements se sont produits pour
Ministry, ainsi que dans ta vie
personnelle (Ndlr : dissolution
notamment du couple qu’Al formait
avec Angelina, avec laquelle il
pilotait l’aventure Ministry et le
label 13th Planet Records). Quelles
conséquences ont-ils eu sur ton
approche de la vie et du business ?
Effectivement, cette dimension per-
sonnelle et intime existe et influence
ton action. Ces changements te font
réfléchir à ce que tu fais, pourquoi tu
le fais. Je ne crois pas que les choses
se produisent par hasard. Il y a toujours
une raison, j’en suis persuadé. Regarde
ma vie : pourquoi suis-je mort trois
fois ? Pourquoi ai-je divorcé trois
fois ? Pourquoi l’amour revient-il ? Il
y a toujours une raison et tu te retrouves
plus tard à essayer de comprendre
laquelle. Mais, pour moi, la question
fondamentale demeure toujours la
même : qui suis-je aujourd’hui ? J’essaie
de le savoir, et ce que j’en comprends
me rend heureux. J’ai décidé d’accepter
le réel, de m’en accommoder au mieux,
et d’en tirer tout ce que je peux de
positif. Et ce, du mieux possible.
Tout fan développe sa petite mytho-
logie sur le rock et projette sur les
artistes. Te concernant, on imagine
cette vie remplie d’excès et d’over-
drive. Y’a-t-il eu, dans ta vie une
tendance à rechercher un équilibre
personnel ?
Ma quête intérieure est celle des
vérités universelles, et pas simplement
des vérités en vigueur sur Terre.
L’une des raisons pour lesquelles je
me suis retrouvé accro à la came – et
je ne suis pas en train de me chercher
une excuse, mais de m’expliquer –
était la frustration : j’étais frustré de
ne pas obtenir les réponses, et je n’ai
trouvé que cette façon de compenser :
m’échapper. Mais il ne faut rien
regretter. S’il ne m’était pas arrivé
tout cela, je n’en serais pas là où j’en
suis aujourd’hui. Et je suis heureux d’en
être là. Ça a été un voyage sacrément
intéressant.
Ce temps qui passe, crois-tu qu’il
t’ait éclairé au final ?
La société ne nous donne pas toutes
les armes pour éclairer l’esprit, et
c’est peut-être ce qui fait germer
l’amertume en certains, au fur et à
mesure de la progression de l’âge.
Mais je crois en ce repère que consti-
tuent nos aînés. Ils sont une ressource,
nous devons les écouter. Certaines
cultures l’ont compris, comme la
culture indienne. Je suis un survivant
et je ressens personnellement cette
force que me donne l’âge.
Y a-t-il des choses que tu n’aurais
pas pardonnées avant que tu par-
donnerais aujourd’hui ?
Je ne crois pas. En tout cas, je n’ai
pas de regrets et je n’éprouve plus
aucune hostilité vis-à-vis de qui-
conque. Sans douleur, il n’y a pas
de mouvement – et actuellement,
Trump est notre douleur (rires). Il
reste une vérité universelle, je crois :
ton futur est déterminé par tes
actions passées. Pour chaque acte, tu
es susceptible de rendre des comptes.
Et ça vaut pour les autres comme
pour moi-même.
Merci Grand Sage. God bless
America ! (rires)
Fuck that sh*t, mate ! (rires) Y
65
 GENRE
. Hard rock
LE GROUPE
. Neil Starr (chant)
. Phil Campbell (guitare)
. Todd Campbell (guitare)
. Tyla Campbell (basse)
. Dane Campbell (batterie)
SITE INTERNET
www.philcampbell.net
ALBUM
. The Age Of Absurdity (2018)

ARTICLES RH
RH N°149 & 184

Phil Campbell
66

Initialement présenté en tant que groupe de reprises, le Phil Campbell’s All Starr Band a changé de dénomination et
s’apprête à lever le voile sur ses propres compositions. The Age Of Absurdity, premier opus du « clan Campbell »
(rappelons que Phil y partage l’affiche avec ses trois fils et le chanteur Neil Starr), ne brille pas par son originalité, mais
s’avère riche en bonnes mélodies et en rythmiques bien senties qui-font-taper-du-pied. Ayant reçu comme stricte consigne
de ne poser aucune question sur Lemmy Kilmister, nous avons majoritairement passé au crible ce nouvel album et profité
de l’occasion pour interroger l’ex-gratteux du regretté Motörhead, toujours aussi pince-sans-rire, sur ses autres projets.
Rock Hard : Vous avez débuté votre
carrière en 2013 sous le nom de Phil
Campbell’s All Starr Band. Aujourd’hui,
vous êtes Phil Campbell And The Bastard
Sons. Pourquoi ce changement ?
Neil Starr : Nous avons pris cette décision
lorsque nous avons commencé à inter-
préter nos propres compositions. Ce n’est
que lorsque la carrière de Motörhead
s’est interrompue – pour les tristes
raisons que vous savez – que notre
formation est devenue un groupe à part
entière. Le fait d’interpréter des classiques
de Black Sabbath, Motörhead ou Led
Zeppelin sur scène aux côtés de Phil ne
nous dérangeait pas le moins du monde,
mais cela ne pouvait pas durer éternel-
lement… Nous avions aussi à cœur de
créer du matériel inédit. Ce changement
de nom illustre ce nouveau départ.
Vous vous êtes produits lors de l’édition
2017 du Hellfest. Conservez-vous un
bon souvenir du festival ?
Phil Campbell : Oui, j’ai beaucoup
apprécié la journée que nous avons
passée sur place. La découverte de la
statue de Lemmy a été un moment fort
en émotions et j’ai trouvé notre concert
génial. Le public était fantastique, comme
toujours ! Nous espérons bien être invités
de nouveau, n’est-ce pas Neil ?
Neil Starr : Oh oui ! C’est là que, pour
la première fois, j’ai rencontré Whitfield
Crane, le chanteur d’Ugly Kid Joe, groupe
dont je suis fan depuis ma plus tendre
enfance. Il est même venu chanter
« Born To Raise Hell » de Motörhead
avec nous sur scène ! C’était un véritable
rêve. Ce concert figure parmi mes
meilleurs souvenirs à vie ! Je regrette
seulement que Phil et moi ayons dû
rentrer au Royaume-Uni sitôt notre
performance achevée. Le reste du
groupe, lui, a eu la chance de passer le
week-end sur place… J’espère pouvoir
profiter davantage la prochaine fois !
Phil Campbell : Whitfield assiste actuel-
lement à l’Open d’Australie (Ndlr : tournoi
de tennis) et fête aujourd’hui ses cinquante
ans. Je viens de lui envoyer un message
sur Twitter : « Joyeux soixantième anniver-
saire » ! (rires)
The Age Of Absurdity est votre premier
album studio. Comment s’est déroulé
le processus d’écriture ?
Tout le travail a été effectué de façon
collective, chacun a ajouté sa pierre à
l’édifice. Nous avons commencé à écrire
au printemps 2017. Chaque semaine,
nous nous retrouvions et présentions
nos nouvelles idées, que nous mettions
en forme par la suite. Il est parfois
arrivé qu’un riff écrit pour une chanson
précise trouve sa place définitive dans
une autre… Au sein de ce groupe, il n’y
a pas de règles. Cela me convient fort
bien car je n’ai pas à tout gérer !
J’amène ce que je peux, et tout le monde
fait de même. Cette méthode s’est avérée
efficace car j’estime que nous avons
accouché de chansons fantastiques. Il
n’y a pas sur cet opus de vieux titre qui
aurait dormi pendant des années avant
d’être retravaillé. Tout a été composé
après la sortie de notre EP. Ces chansons
sont fraîches comme une brise d’été !
Et elles sont toutes bonnes ! Tous les
groupes ne peuvent pas en dire autant ;
la plupart font du remplissage pour
essayer de masquer le fait que leurs
disques ne contiennent en réalité que
deux ou trois bons morceaux…
Neil, tu as pris en charge l’intégralité
des textes. Quels sont les thèmes
abordés ?
Neil Starr : Certains, comme « Dark
Days », évoquent l’époque troublée dans
laquelle nous vivons. « Droping The
Needle » traite de ma passion profonde
pour la musique, et notamment pour les
vinyles. Je ne peux m’empêcher d’en
acheter, c’est une véritable addiction !
Le morceau « Freakshow » s’inspire de
la nuit que nous avons passée juste
après avoir donné le dernier concert de
notre tournée. Le propriétaire de la salle
nous a proposé de rester et de profiter
du bar gratuitement. Il n’a pas eu
besoin de nous le dire deux fois ! (rires)
Nous avons décompressé en buvant
autant d’alcool que possible. Ce fut une
soirée super fun ! Comme tu peux le
constater, les sujets sont plutôt variés…
Phil Campbell (l’interrompant) : Personne
J’ai toujours eu un sens de l’humour
à la limite de l’absurde. En général,
les trucs que je trouve hilarants
ne font pas rire grand monde !
(Phil Campbell)
ne m’a parlé de cette soirée ! (Me prenant
à partie) : tu te rends compte, ils m’ont
caché ça ! Ce soir-là, je suis allé me
coucher dès le concert fini… Quelle
bande de petits cons ! (rires)
Qu’est-ce, selon vous, que « l’âge de
l’absurdité » ? Pourquoi avoir choisi
de nommer l’album ainsi ?
J’ai toujours eu un sens de l’humour à la
limite de l’absurde. En général, les
trucs que je trouve hilarants ne font pas
rire grand monde !
Neil Starr : Lorsque Phil a suggéré ce
titre, nous l’avons aussitôt adopté. Cela
renvoie aussi bien à la situation actuelle
du monde qu’à quelque chose de plus
léger. Todd (guitare) a eu l’idée d’opter
pour un visuel qui évoquerait les années
30, une sorte d’invitation à pénétrer
dans un cirque monstrueux. Si vous
achetez l’album, vous verrez que chaque
chanson a fait l’objet d’une illustration
individuelle en rapport avec son texte.
Vous n’imaginez même pas à quel point
j’ai hâte de découvrir la version vinyle !
The Age Of Absurdity brasse de
nombreuses influences musicales. Un
morceau comme « Gypsy Kiss » a
même un côté punk !
Oui ! Selon moi, le plus bel atout de
l’album est justement sa diversité : il y
a du rock, du punk, du hard, des chansons
qui envoient, des passages plus lourds…
Propos recueillis par François Blanc - Entretien téléphonique réalisé le 19 janvier 2018
Les titres rapides sont généralement les
plus cool à jouer en live car ils génèrent
instantanément des réactions dans le
public. Nous tenions donc à en intégrer
plusieurs sur l’album.
Phil Campbell : Nous avons tous été
surpris par la tournure qu’ont pris certains
titres. Neil était un peu sceptique à la
première écoute de la démo de « Dark
Days », alors qu’il s’agit désormais de
ma chanson préférée ! Elle a un côté
embrumé et bluesy, et le chant de Neil
m’évoque Paul Rodgers (Bad Company).
A d’autres moments, nous faisons du
hard rock pur et dur, ou du punk… Nous
exploitons différentes directions et
espérons que le public rentre dans le
« trip » et ne s’ennuie pas. De toute
façon, que vous aimiez ou non l’album
ne change rien car nous n’avons pas
l’intention de changer. Le suivant sera
exactement pareil !
Phil, tu as fait partie d’un trio pendant
trente ans. Jouer dans un quintet doit
être assez différent !
Oui, les gains sont partagés en cinq
plutôt qu’en trois ! Plus sérieusement,
chaque membre de ce groupe est un
musicien et un compositeur accompli, ce
qui fait qu’il y a plus d’idées qui surgissent
lorsque nous bossons sur de nouvelles
chansons. Cela nous permet aussi
d’obtenir plus de variété car chacun à
ses propres influences. C’est une très
bonne combinaison !
Le fait que tu sois le père de trois des
membres du groupe et que tu incarnes
une figure d’autorité complique-t-il les
choses ?
Non, pas le moins du monde. Lorsque le
groupe se réunit, il n’y a plus de père ou de
fils, mais seulement une bande de musi-
ciens qui font du rock ensemble. C’est bien
plus facile qu’on ne pourrait l’imaginer !
Neil Starr : Si je ne connaissais pas les
liens qui unissent Phil aux autres membres
du groupe, je ne me poserais jamais la
question. En revanche, l’avantage, c’est
que les trois frangins se connaissent très
bien, tant sur le plan humain que musical,
et sont très à l’aise lorsqu’ils collaborent.
Il arrive parfois que les esprits s’échauf-
fent car ils n’hésitent pas à se balancer
leurs quatre vérités sans prendre de
gants, mais cela ne dure jamais.
Phil, quelles sont les nouvelles de ton
album solo ?
Phil Campbell : Les choses avancent bien,
mais il me manque encore trois ou quatre
titres à finir. Ensuite, il ne restera plus
qu’à achever le mixage et à superviser
la production, et le tour sera joué. La
pochette et le titre sont prêts, mais sont
encore confidentiels. Musicalement, ce
sera sûrement différent de ce que les gens
attendent. L’album est très varié, on m’y
entend même jouer du piano sur quelques
passages. J’ai suivi mes envies, en toute
liberté. J’espère le publier cette année.
Si je n’y parviens pas, ce sera pour le
printemps 2019 ! La liste des invités qui
y participe est assez conséquente : outre
Neil et mes « Bastard Sons » qui jouent
sur un morceau, j’ai déjà reçu les contri-
butions de Joe Satriani, Whitfield Crane,
Chris Fehn (Slipknot), Mick Mars (Mötley
Crüe), Benji Webbe (Skindred), Matt
Sorum (ex-Guns N’ Roses), et bien
d’autres (Ndlr : les noms de Dee Snider et
Rob Halford ont aussi été avancés par Phil
lors d’interviews antérieures).
Tu as évoqué à plusieurs reprises la
publication d’un livre qui compilerait
de nombreuses histoires de ta vie de
musicien. Ce projet est-il toujours
d’actualité ?
J’ai demandé à Leif Eriksson et Martin
Svensson, mes co-auteurs et assistants
dans ce projet, d’interrompre le travail
pour le moment. Je dois actuellement
me concentrer sur la musique. Il y a tant
de choses à faire... Je pense vraiment
prendre le temps d’achever ce livre un
jour, mais il ne faut jurer de rien. Le but
de ce projet est de recueillir une série
d’anecdotes drôles ou intéressantes qui
me sont arrivées et de faire marrer les
lecteurs, rien de plus. L’idée n’est pas
de raconter ma vie : je suis quelqu’un
d’assez secret qui ne tient pas à étaler
son existence en public. Ces histoires,
en revanche, méritent d’être partagées,
même si personne ne va y croire ! Il
m’est arrivé tant de choses incroyables
que mon livre sera sûrement classé au
rayon « fiction » ! (rires)
Edward Allan Clarke, alias « Fast
Eddie », ton prédécesseur au sein de
Motörhead, est décédé d’une pneumonie
le 10 janvier dernier. Que t’évoque sa
disparition ?
Je n’ai pas grand-chose à dire, si ce n’est
qu’Eddie était un type fantastique doublé
d’un grand guitariste qui a écrit des
riffs incroyablement géniaux. Encore un
grand musicien qui nous quitte bien trop
jeune, qui part beaucoup trop tôt ! Je
crois qu’il ne buvait plus d’alcool depuis
une bonne vingtaine d’années. Ça fait
un drôle d’effet de penser que c’est une
pneumonie qui a eu raison de lui… A
l’évidence, Eddie sera amèrement
regretté. Repose en paix, Eddie Clarke.
Y-a-t-il un souvenir précis que tu
aimerais partager avec nos lecteurs à
son sujet ?
Malheureusement, nous ne nous
connaissions pas très bien et n’avons
jamais été proches. Nous avons traîné
ensemble à plusieurs reprises et nous
sommes parfois bien marrés. Il est venu
jammer avec nous lors de certains
concerts de Motörhead, mais ce n’est
jamais allé plus loin. Cependant, chacun
d’entre nous éprouvait un grand respect
pour l’autre. Y
67
 GENRE SITE INTERNET
. Heavy/doom
www.wesellthedead.com
LE GROUPE ALBUMS
. Apollo Papathanasio (chant) . Heaven Doesn't Want You And
. Niclas Engelin (guitare) Hell Is Full (2018)
De g. à d. : Jonas Slättung. Dan Lindh, Niclas . Jonas Slättung (basse) ARTICLE RH
Engelin, Apollo Papathanasio & Gas Lipstick . Gas Lipstick (batterie) RH N°184

68

We Sell The Dead : derrière ce nom étrange et ces employés de pompes funèbres peu ordinaires se cachent Apollo
Papathanasio (Spiritual Beggars), Gas Lipstick (ex-H.I.M.) ou encore Niclas Engelin (In Flames). C'est à ce dernier,
guitariste, compositeur et croque-mort en chef de ce nouveau groupe que nous avons passé un coup de fil afin de tout
savoir sur Heaven Doesn't Want You And Hell Is Full.
Rock Hard : Quelle est l’origine de We
Sell The Dead ?
Niclas Engelin : Ce groupe vient tout
droit de mon sous-sol : ma tanière !
(rires) Dès que j’ai du temps libre, j’y
joue de la guitare et j’y écoute mes
vinyles. Je suis un grand fan de
Candlemass – Nightfall (1987) est un
chef d’œuvre – mais c’est un album
récent qui m’a replongé dans le doom :
Foundations Of Burden (2014) des
Américains de Pallbearer. Quel disque
extraordinaire ! C’est une montagne de
doom rehaussée de vocaux splendides.
Quand j’ai découvert ce disque, les
mots me manquaient pour décrire ce
que j’étais en train de ressentir. C’était
durant un long vol entre la Suède et les
USA : je n’ai fait qu’écouter cet album
en boucle ! De retour à la maison, dans
le sous-sol que je viens d’évoquer, j’ai
essayé d’écrire des morceaux bourrés
d’atmosphères, plus longs mais pas
ennuyeux. C’était un vrai challenge car
je n’avais encore jamais écrit de titres
de ce genre, à la « Echoes Of An Ugly
Past ». J’ai fait écouter mes premiers
titres à mon vieil ami Jonas (Slättung/
basse) qui a tout de suite adoré. Nous
avons rencontré Dan Lindh qui travaille
dans le domaine de l’animation 3D et
qui, lui aussi, a été très inspiré par ces
démos. A l’époque, nous ne savions pas
trop où nous allions. La rencontre avec
Dan a rendu le projet très cinématogra-
phique : Jonas et lui ont écrit un véritable
storyboard de film. Chaque chanson est un
morceau de scénario, une pièce du puzzle.
De même, les clips que nous sortons
peuvent être mis bout à bout pour former
un film. C’était vraiment totalement
nouveau pour moi et j’ai adoré ça ! Le
line-up a été complété par notre copain
chanteur Apollo Papathanasio (ex-
Firewind, Spiritual Beggars) qui, lui aussi,
a flashé sur ces morceaux. Il nous a dit :
« J’y entends du Ronnie James Dio. C’est bon
pour moi ! » (rires) Et c’est Gas Lipstick
qui est à la batterie. Nous avons discuté
quand il a contacté In Flames suite à la
dissolution de H.I.M. Il avait appris que
notre batteur (Ndlr : Daniel Svensson)
était parti et a pris l’initiative de nous
faire parvenir quatre ou cinq morceaux
d’In Flames joués par ses soins. Il assu-
rait à fond, mais il ne savait pas que
nous avions déjà enregistré notre album
avec celui qui est devenu notre nouveau
batteur, l’excellent Joe Rickard. Gas et
moi sommes restés en contact et nous
avons bien sympathisé. J’ai toujours aimé
son jeu dans H.I.M. Je lui ai envoyé mes
démos et tout s’est fait le plus simplement
du monde. Nous nous sommes éclatés à
faire cet album qui s’apprête à voir le jour
chez Edel/earMUSIC, un label de grande
qualité. Je pouvais difficilement rêver
mieux !
Est-ce Dan qui a insufflé cette
ambiance victorienne et ces références
à Jack l’Eventreur ?
On doit tout ça à Dan et à Jonas qui ont
travaillé main dans la main. Jonas est un
pro de la narration (Ndlr : il est animateur
radio) et Dan est un fin connaisseur de
la période victorienne. Ses animations
3D nous plongent dans Göteborg à cette
époque. Je ne sais pas comment, mais
Dan a mis la main sur des plans de la
ville à l’époque. Dans cette histoire, nous,
les membres de We Sell The Dead, sommes
de drôles de croque-morts dérobant des
cadavres pour les refourguer à des
prêtres diaboliques et des scientifiques
tordus. Une désastreuse histoire d’amour
est également contenue là-dedans, avec
un départ forcé dans un asile... En
même temps, tu vas rarement à l’asile
de ton plein gré ! (rires)
Quand on découvre le nom du groupe
(Ndt : « Nous vendons les morts »),
on se dit forcément qu’il est assez
étrange. Mais dans ce contexte,
« étrange » est un joli compliment !
Absolument ! C’était le but. Former un
nouveau groupe avec ses potes est toujours
sympa, mais l’idée a toujours été de
proposer « un truc en plus » : quelque
chose de décalé et de singulier.
Sur le plan de la musique, l’album a-
t-il été inspiré par certains films,
voire par des B.O. de films ?
Pas vraiment par des B.O., non, mais je
suis assez friand de films d’horreur. Ça
m’a forcément inspiré d’une façon ou d’une
autre. J’ai vu Ça (2017) et j’ai vraiment
Former un nouveau groupe avec ses
potes est toujours sympa, mais l'idée
a toujours été de proposer « un truc
en plus » : quelque chose de décalé
et de singulier (Niclas Engelin)
flippé ! J’ai adoré ce film. Mais bon, à la
maison, j’ai du mal à réussir à me mettre
devant la télé : j’ai deux enfants de quatre
et sept ans qui squattent le canapé ! (rires)
Depuis quand connais-tu Jonas
Slättung ?
Oh, depuis que nous sommes tous
gamins. Il a un an de plus que moi et je
devais avoir sept ans quand nous nous
sommes rencontrés. Ça fait une paye !
Nous avons formé plusieurs groupes
ensemble. Le premier d’entre eux se
nommait Rising, en référence à l’album
mythique de Rainbow. Avec le recul, les
titres de nos morceaux étaient plutôt
drôles : « Mad Man », « Electric Spider »
et même un splendide « Heavy Metal
Christmas » ! Celui-là, c’était notre hit !
(rires) J’étais à la guitare et Jonas à la
batterie. Nous nous sommes bien
marrés ! Nous avons partagé énormément
de choses ensemble.
Ces dernières années vous avez
également joué ensemble dans un
groupe nommé Drömriket qui a publié
son premier album éponyme en 2014.
Il n’est malheureusement pas distribué
en dehors de Suède alors qu’on trouve,
dans ce supergroup, Ralf Gyllenhammar
de Mustasch et Adde, le batteur de
Hardcore Superstar. Peux-tu nous en
dire plus à ce sujet ?
Propos recueillis par Morgan Rivalin - Entretien téléphonique réalisé le 18 janvier 2018
Notre label ne l’a effectivement pas
distribué ailleurs, ce que je trouve
vraiment dommage. J’essaierai de
débloquer cette situation, un jour. Mais
bon, je le comprends : c’est un album
très « suédo-suédois ». Il est chanté en
suédois et parle de sujets assez politiques
qui s’adressent avant tout à nos compa-
triotes. Jonas a écrit tous les textes de
Drömriket, qui signifie « Royaume du
Rêve ». L’album parle des banlieues où
nous avons grandi dans les 80’s. A
l’époque, c’était des lieux où soufflait
un vent d’insouciance et où régnait une
vraie liberté. C’est là que mes camarades
et moi avons formé nos premiers groupes.
Mais voilà, faute de moyens et de volonté
politique, ces banlieues sont méconnais-
sables aujourd’hui. Elles sont devenues
des ghettos fermés sur eux-mêmes où
règne la violence. Ça nous rend extrê-
mement tristes et ça nous met même en
colère ! C’est un album très suédois,
mais on y entend quand même des
influences Black Sabbath/Blue Öyster Cult
qui pourraient sans doute intéresser du
monde en dehors de nos frontières.
Black Sabbath ressort également
comme une influence majeure sur ce
premier album de We Sell The Dead...
Bien sûr ! Je suis un immense fan de
Tony Iommi et j’aime toutes les incar-
nations de Black Sabbath, sans exception.
Dans le cas de We Sell The Dead, je me
suis clairement focalisé sur The Eternal
Idol (1987) et Headless Cross (1989) :
deux albums chantés par Tony Martin.
J’adore cette période du groupe ! Tony
Martin chante tellement bien. Tout
était vraiment parfait. Je pense aussi
qu’on y entend que j’aime Magnum et
Blue Öyster Cult, mais ce sont de bonnes
influences, n’est-ce pas ?
Est-ce Jonas Slättung qui chante au
début de « Too Cold To Touch » ?
Affirmatif. La voix grave de Jonas nous
semblait parfaite pour ce passage, mais
Apollo chante sur 95% de l’album. Quel
chanteur ! J’adore ce qu’il fait avec
Spiritual Beggars et je le connais
depuis... longtemps ! (rires) C’était
avant qu’il ne rencontre Gus G. (ex-
Ozzy Osbourne, ex-Nightrage) et qu’il
rejoigne Firewind. Apollo a des origines
grecques, mais il est né en Suède. Je
l’ai rencontré quand j’étais vendeur
dans un magasin de disques, à
Göteborg. Nous avons commencé à
parler – de Dio, sans doute ! (rires) – et
nous sommes instantanément devenus
amis. Il y a des gens que tu rencontres
et que tu as l’impression d’avoir connus
toute ta vie. Apollo en fait partie. C’est
comme ça qu’il s’est retrouvé à faire
partie de Gardenian (Ndlr : groupe death
mélodique né à Göteborg en 1996) durant
près d’un an, entre 2003 et 2004.
Gardenian s’est reformé en 2012
pour quelques concerts. As-tu des
choses de prévues pour le groupe ?
J’aimerais beaucoup sortir un coffret
vinyle regroupant Two Feet Stand
(1997), Soulburner (1999) et Sindustries
(2000). Ce serait hyper cool car ils ne
sont jamais parus dans ce format. J’y
pense depuis un bout de temps et je
vais m’en occuper. Notre dernier
concert remonte à 2013 et je ne suis
pas opposé à en donner d’autres, mais
je dois avouer être assez lassé d’être le
capitaine qui doit gérer toute la logis-
tique, etc. In Flames ne me laisse pas
beaucoup de temps... J’adorerais faire
un nouvel album de Gardenian, mais il
faudrait vraiment que les autres membres
s’impliquent.
Ton ami Hakan Skoger, le bassiste de
Gardenian, a tourné avec In Flames
en mars dernier. Avez-vous envisagé
qu’il rejoigne le groupe pour de bon ?
Nous lui avons proposé le poste, mais il
a refusé ! Il a de bonnes raisons : ses
enfants sont jeunes et il ne veut pas
les quitter durant de trop longues
périodes. Je respecte ça au plus haut
point, bien entendu. Björn (Gelotte),
Anders (Friden) et moi avons tous des
femmes et des enfants. Etre régulière-
ment éloigné d’eux pendant de longues
semaines est la chose la plus compliquée
qu’implique notre métier. Nous faisons
du Skype ou du Facetime tous les soirs
avant nos concerts. Nous, nous sommes
en pleine forme, mais à cette heure-là, nos
enfants sont crevés de leur journée ! Et
puis, en décembre, nous avons tourné
jusqu’au 21, quelques jours seulement
avant Noël... Ça te fait passer à côté
d’une bonne partie de cette période de
l’année si importante pour les enfants.
Mais c’est comme ça… C’est le prix à
payer.
Un nouvel album d’Engel est-il en
préparation ?
Mieux que ça : il arrivera au printemps !
Nous venons de terminer de filmer trois
clips qui sont vraiment intéressants.
L’album s’intitulera Abandon All Hope
(Ndtraduction : « Abandonnez tout espoir »).
Optimiste, n’est-ce pas ? (rires)
Entre ce titre et celui de l’album de
We Sell The Dead, tu passerais pour
un triste sire si tu n’étais pas aussi
jovial !
C’est vrai ! (rires) J’ai toujours été comme
ça : je ris tout le temps et j’adore
blaguer, mais les choses qui m’attirent
sont extrêmement sombres. Début
décembre, nous avons eu une journée
de repos à Paris. J’ai tenu à aller voir
les catacombes car j’en rêvais depuis des
années. J’ai adoré ça ! J’y étais vraiment
bien ! (rires) J’ai acheté plusieurs livres
sur le sujet que je parcours tous les
jours en ce moment. Qui sait, il y a
peut-être de quoi inspirer un prochain
album de We Sell The Dead ! Y
69
 KREATOR – VADER – DAGOBA
LE 14 JANVIER 2018 A BORDEAUX (ROCHER DE PALMER)
Après une première série de dates en février 2017,
puis quelques apparitions en festivals, Kreator
revient fouler plusieurs scènes françaises dans le
cadre de sa tournée en support de l’album Gods
Of Violence. Dagoba, qui décroche enfin une
nouvelle opportunité de se produire à l’échelon
européen, nous présente (furtivement) son nouvel
album Black Nova (2017), dont il n’interprète ce
soir qu’un titre, « Inner Sun » avec son refrain en
voix claire plutôt réussi et maîtrisé par Shawter, le
vocaliste du quartet, toujours aussi énergique. La
formation qui a encore évolué depuis la fin de
l’année dernière, puisque Richard De Mello
remplace J.L. Ducroiset, un guitariste qui ne sera
au final resté qu’un an et demi au sein du groupe.
Le lancement de Richard dans « le grand bain » se
passe néanmoins sans encombre, le six-cordiste se
montrant franchement à l’aise sur « I, Reptile »,
« The Man You’re Not » ou encore le fort brutal
« The Sunset Curse », prétexte à l’un des premiers
circle-pits de la soirée dans un Rocher de Palmer
non complet, mais copieusement garni. Et lorsque
Shawter réclame un wall of death ou un nouveau
circle-pit sur « When Winter… », dernier titre d’un
set court mais efficace, le public s’exécute sans se
faire prier, générant une ambiance bien meilleure
que celle qui avait accueilli les Marseillais le 4
décembre 2014 en ces mêmes lieux, alors qu’ils
ouvraient pour Epica.
Les Polonais de Vader proposent quant à eux un
voyage dans le temps, puisqu’ils interprètent
l’intégralité de leur premier album, The Ultimate
Incantation (1992), qui fête (à peu de choses près)
ses 25 ans. De la formation d’époque, seul Piotr
Wiwczarek (guitare/chant) fait encore acte de pré-
sence (Doc, le premier batteur du combo, étant
tristement décédé en août 2005), Kreator
mais il reste fort bien entouré, le
groupe qui l’accompagne depuis cPhantom Antichrist
2010/2011 étant particulièrement cHail To The Hordes
compétent. Evoluant dans des lu- cEnemy Of God
mières sombres et unicolores pour cSatan Is Real
chaque titre (vertes, bleues ou rouges), cCivilization Collapse
Vader ne perd pas de temps en cPeople Of The Lie
beaux discours et balance ce pavé cFlag Of Hate
death metal d’une traite, ou quasi- cPhobia
cGods Of Violence
ment, et hormis un « Testomony »
cTotal Death
un poil plus lent, le reste du pro- cFrom Flood Into Fire
gramme s’avère d’une violence inouïe. cHordes Of Chaos
Le public, sonné, se montre moins (A Necrologue For
mobile que durant le set de Dagoba, The Elite)
mais semble néanmoins apprécier cViolent Revolution
l’intense « Chaos », la lourde intro cTotalitarian Terror
suivie d’un « Demon’s Wind » ultra Rappel :
speed ou « Breath of Centuries » et cFallen Brother
son final slayerien. cBetrayer
Rusé, Kreator ! Mille Petrozza et ses cPleasure To Kill
sbires ne se foulent pas trop pour
rafraîchir leur setlist par rapport à leur tournée de
2017 (largement documentée dans nos pages), mais
histoire de faire illusion, l’articulent de façon très
différente : comment faire du neuf avec du vieux,
en somme ! Car à l’exception de « World War Now »
et « Extreme Agressions », remplacés par « Totali-
tarian Terror » et « Betrayer », rien de bien nouveau,
si ce n’est l’ordre des morceaux et l’absence de
flammes et de confettis (quand bien même le décor
de scène reste superbe). Mais vous savez quoi ?
Encore une fois, nous avons quand même passé
une putain de bonne soirée ! Une valeur sûre.
BENJI
Photo : Benji

GLORYHAMMER – DENDERA LE 17 JANVIER 2018 A PARIS (PETIT BAIN)

La grippe contractée par le chanteur Kelly
« Sundown » Carpenter (Adagio, ex-Beyond
Twilight) force malheureusement Civil War,
quintet formé suite à la scission
Gloryhammer de Sabaton en 2012, à annuler
ce qui aurait dû être son premier
cInfernus Ad Astra concert parisien. Le claviériste
(intro) Daniel Myhr promet cependant
cRise Of The Chaos de revenir une fois le prochain
Wizards
opus du groupe dans les bacs
cLegend Of The
(sortie espérée pour la fin de
Astral Hammer
cGoblin King Of The
l’année). Nous nous consolons
Darkstorm Galaxy avec Dendera, formation anglaise
cThe Hollywood née en 2008 ayant déjà deux EPs
Hootsman et deux albums à son actif. Au
cVictorious Eagle programme, un heavy metal
Warfare agressif et moderne qui évoque
cQuestlords Of Inver- un peu Iced Earth et le défunt
ness, Ride To The Symphorce. La qualité du son
Galactic Fortress! permet de profiter des atouts
cUniverse On Fire des musiciens qui reçoivent un
cHeroes (Of Dundee) bon accueil et dont les morceaux
cApocalypse 1992 récents (« Age Of Agony »,
Rappel : « Blood Red Sky ») laissent
cThe Unicorn Invasion entrevoir des lendemains qui
Of Dundee chantent. Même si Space 1992:
cQuest For The
Rise Of The Chaos Wizard,
Hammer Of Glory
deuxième et dernier opus en
cMagic Dragon
cAngus McFife
date de GloryHammer, est une
réussite incontestable, nous ne
nous attendions pas à le découvrir
sur scène en intégralité deux ans à peine
après sa sortie ! Le Petit Bain affiche cependant
complet, ce qui prouve que, même en l’absence
du fondateur Christopher Bowes d’Alestorm (un
certain Michael Barber se cache derrière les
claviers et sous la capuche du maléfique sorcier
Zargothrax), un public se passionne pour ce
Rhapsody nouvelle génération particulièrement
déjanté. Rappelons que chaque membre de la
formation incarne un personnage précis (à la
manière d’un jeu de rôle grandeur nature) et
dispose de chansons à sa gloire. Bien entendu,
tous les regards sont tournés vers le prince
galactique Angus McFife (alias Thomas Winkler),
sa flamboyante armure verte et son gigantesque
marteau astral, toujours brandi au bon moment.
La fosse s’échauffe dès les premiers titres et se
fait un plaisir d’entonner les refrains (« Legend
Of The Astral Hammer »). Servis par un son
satisfaisant, les musiciens livrent une prestation
très solide et bon enfant. Après avoir fait imiter
au public le son d’un marteau qui s’abat dans
l’espace, triomphé d’un terrible gobelin qui
tentait de l’attaquer et fourni au bassiste et
cyborg Hoots sa dose quotidienne de bières
(sacrée descente !), l’infatigable chanteur
proclame une chanson à sa gloire et achève la
soirée en couronnant publiquement Hoots « roi
barbare de Californie ». Au-delà de l’aspect
parodique revendiqué, reconnaissons que
GloryHammer n’a pas son pareil pour accoucher de
mélodies entêtantes et fédératrices (« Universe
On Fire »). Après cette divertissante soirée,
nous attendons la suite des aventures de héros
de Dundee avec encore plus d’impatience !
FRANÇOIS BLANC
Photo : François Blanc

70
 En dépit de son caractère résolument hétéroclite, voici certai-

ARCH ENEMY
nement le plus beau plateau metal de ce mois de janvier. Le

– WINTERSUN – TRIBULATION – JINJER Bataclan affiche d’ailleurs complet depuis plusieurs semaines !
Les Ukrainiens de Jinjer montent sur scène dès 18h et assurent
leur set devant un parterre correctement rempli. Musicalement,
LE 23 JANVIER 2018 A PARIS (BATACLAN) le quatuor officie dans un metalcore groovy et progressif,
parfois déstabilisant mais techniquement substantiel : basse
Arch Enemy slappée sur le bourrin « Sit Stay Roll Over », alternances vocales
cSet Flame To The imprévisibles sur l’étrange « I Speak Astronomy », influences
Night (intro) reggae sur le passage conclusif de « Who Is Gonna Be The
cThe World Is Yours One »… Visiblement réceptif, le public répond volontiers aux
cRavenous sollicitations de la chanteuse Tatiana Shmailyuk, qui alterne
cStolen Life chant clair et borborygmes d’une puissance saisissante. Un
cThe Race bon moment !
cWar Eternal De façon étonnante, c’est « La Vie En Rose » d’Edith Piaf qui
cMy Apocalypse annonce l’arrivée de Tribulation. Eclairé par une inquiétante
cBlood In The Water lumière verte, Oscar Leander, batteur récemment recruté,
cYou Will Know My précède ses comparses. Comme de coutume, le frêle soliste
Name Jonathan Hultén attire à lui tous les regards : maquillé de blanc
cBloodstained Cross et vêtu d’oripeaux flottants comme des ailes de chauve-souris,
cThe Eagle Flies Alone le fantôme androgyne et magnétique se meut continuellement
cAs The Pages Burn
sur la pointe des pieds avec une grâce étonnante. Hélas, les
cIntermezzo Liberté
deux premiers titres souffrent d’une mise en son peu adaptée
cDead Bury Their
Dead
qui flatte exagérément le chant extrême du bassiste Johannes
cWe Will Rise Andersson au détriment des mélodies de guitares. D’abord
Rappel : circonspecte, l’audience semble finalement adhérer au parfum
cAvalanche gothique de l’accrocheur « Nightbound » et aux longs démêlés
cSnow Bound de guitares de « The Motherhood Of God ». Quarante minutes
cNemesis qui passent trop vite à notre goût !
Il est temps de faire place à Wintersun qui a prodigieusement
changé depuis son concert au Hellfest 2013 : le compositeur
et leader Jari Mäenpää a cessé d’assurer la guitare sur scène
en 2017 et se consacre exclusivement au chant, le batteur
Kai Hahto (Nightwish) blessé à la main en juin dernier est
remplacé par le jeune prodige Rolf Pilve (Stratovarius), le bassiste
Jukka Koskinen est malade (claviers et basse sont donc joués
par des bandes), et nous rencontrons pour la première fois
le guitariste pakistanais Asim Searah qui soutient également
Mäenpää au chant avec brio. Une caisse claire excessivement
forte et claquante ruine le long et dense « Awaken From The
Dark Slumber » (la guitare du prodigieux soliste Teemu Män-
tysaari est inaudible !), mais dès le deuxième titre, le son
s’équilibre et le public rentre dans l’ambiance. Les deux extraits
consécutifs de l’album éponyme (2004) engendrent des
pogos, mais, sans surprise, ce sont les morceaux tirés du
majestueux Time I (2012) qui sont les plus plébiscités. Si le
chanteur est loin d’être un grand frontman, sa performance
(rappelons que le Finlandais a perdu un quart de ses poumons
lors d’une opération de la tuberculose voici vingt ans) mérite
tous les éloges. Certains mauvais esprits ont même cru qu’il
s’agissait de playback ! Seul bémol à ce beau concert, la
présence sur scène d’un caméraman trop zélé serrant de
près les musiciens à de trop nombreuses reprises…
Tribulation La veille, à Toulouse, Arch Enemy a dû raccourcir son set pour
ne pas épuiser sa chanteuse, apparemment victime d’une
cLady Death
bonne grippe de saison. Il n’en est pas fait mention ce soir,
cMelancholia
mais nous remarquons tout de même qu’après un début de
cThe Motherhood
Of God
concert débordant d’énergie (avec sauts depuis l’estrade de
cSuspiria De Profundis batterie et harangue acharnée du public), la charmante Alissa
cNightbound White-Gluz profite de chaque solo et passage instrumental
cStrange Gateways pour s’éclipser en coulisse. Les problèmes techniques n’ar-
Beckon rangent rien : nous avons droit à une version quasi ins-
trumentale du sombre et accrocheur « My Apocalypse », la
Canadienne aux cheveux bleus étant trop occupée à gérer
ses problèmes de retour avec des techniciens pour chanter !
Heureusement, pour le reste, et en dépit de la relative
brièveté du show (1h15 au total), impossible de reprocher
quoi que ce soit à Arch Enemy, professionnel jusqu’au bout
des ongles. Son d’une puissance redoutable, performance de
haute volée (Jeff Loomis, comme dans un fauteuil, assure
généralement les soli les plus techniques), lumières très
étudiées, décor soignés, tout est en place pour un formidable
moment de metal. L’accent canadien de la vocaliste donne
du charme à ses interventions francophones (« Est-ce que
vous êtes prêts à avoir un peu de fun avec nous ? »), et le
public lui mange dans la main : l’enchaînement « The
World Is Yours »/« Ravenous » et la doublette « We Will Rise »
(sur lequel la foule saute en rythme)/« Nemesis » s’avère
absolument imparable. Même fatigué, le quintet suédois a
donc délivré une véritable leçon d’efficacité et de maîtrise.
Chapeau !
FRANÇOIS BLANC
Photos : Nidhal Marzouk (Arch Enemy)
Marc Villalonga (Tribulation)

71
 FIVE FINGER DEATH PUNCH
LE 04 DÉCEMBRE 2017 A PARIS (OLYMPIA)
– IN FLAMES – OF MICE & MEN
Ce n’était pas très clair, mais ce concert est un co-
headlining de Five Finger Death Punch et In Flames :
deux groupes qui ont le même manager et bénéficient
d’une heure de jeu chacun. Occupé à réaliser l’inter-
view de FFDP en ces pages, votre serviteur rate 98 %
du set « matinal » de Of Mice & Men, uniquement
composé de cinq morceaux. Anders Fridén, le
chanteur d’In Flames, ne manque pas de déplorer
ce set riquiqui (« La prochaine fois, qu’on les laisse
jouer trois heures ! Ils le méritent »). Bougon, comme
souvent (il tape sur les doigts du batteur Joe Rickard
en lui disant de moins filmer avec son iPhone et de
se concentrer sur son jeu), le frontman s’anime
particulièrement sur les plus vieux titres de ce set,
« Moonshied » et « The Jester’s
Dance ». Etonnant car ces ex-
traits de The Jester Race (1996)
tranchent avec le répertoire
actuel du combo suédois qui a
tant changé, puisque, depuis
2016, il a changé de batteur et
bassiste et se produit désormais
avec un claviers (très mal sono-
risé). Reconnaissons que le public
du soir, qui a droit à de belles
projections vidéo, adore les ex-
traits de Battles (2016). « The
Truth » agite plus la fosse que
l’énorme « Trigger », et de loin !
Absent au Hellfest pour cause
de « rechute » (Cf. interview),
Ivan Moody veut prendre sa
revanche. « J’ai une info pour
vous : ce n’est pas ma dernière
danse ! », lance-t-il dans un sou-
rire (« Ain’t My Last Dance »).
Muni de son éternel pantacourt,
NOTHING MORE – IN SEARCH OF SUN – PSYCHO VILLAGE
LE 05 DECEMBRE 2017 A PARIS (ETOILES)
« Ce morceau est pour les opprimés », annonce
Daniel Kremsner de Psycho Village avant « Half
Caste Symphony ». Voilà qui part d’une bonne
intention, mais personnellement, entendre
chanter aussi faux m’opprime tout autant ! A sa
décharge, le chanteur/guitariste du groupe post-
grunge autrichien ne s’entend visiblement pas
très bien. Les conditions techniques sont « parti-
culières » : l’imposant matos des trois groupes du
jour s’entasse dans un coin de la salle et, telles
des fourmis, les musiciens doivent l’apporter sur
scène en le faisant passer au-dessus des têtes des
spectateurs ! Nouvel indice que les retours sont
défaillants : la prestation vocale d’Adam Leader,
si impressionnante sur Virgin Funk Mother (2017),
n’est également pas vraiment à la hauteur. Après
un « Idle Crown » rappelant le récent passé
metalcore d’In Search Of Sun (The World Is
Yours/2014), son frontman s’en sort mieux sur
l’excellent « Bad Girl », lors duquel il fait asseoir
le public. Un gimmick qui fait toujours son petit
effet. Si vous ne le connaissez pas, vous seriez
bien inspirés d’écouter le dernier album de ce
groupe britannique évoquant Incubus, Coheed &
Cambria ou encore... Megadeth (« Mega Pi-
ranha »). Belle découverte ! On s’en doutait un
peu : les quatre membres de Nothing More et
leur attirail scénique (le petit dernier de la famille
est l’improbable Scorpion Tail, un monstre de
métal de 180 kilos fait de pièces détachées de
bagnole et de moto, permettant de manipuler le
chant et les effets) sont à l’étroit sur la scène
exiguë des Etoiles. Pas facile d’entrapercevoir le
72
Five Finger
le frontman de Five Finger Death Punch
In Flames Death Punch ne ménage pas
cLift Me Up
cDrained ses efforts (sa doublure, Tommy cNever Enough
cBefore I Fall Vext, présente sur la tournée, cWash It All Away
cTake This Life n’aura pas à intervenir) et est cGot Your Six
cTrigger régulièrement acclamé par son cAin't My Last Dance
cDead Alone public. L’ambiance est (très) cBad Company (Bad
cMoonshield chaude et cet Olympia archi Company)
cThe Jester's Dance blindé aurait sans doute pu être cJekyll and Hyde
cSave Me troqué contre un Zénith de cWrong Side Of
cAlias capacité intermédiaire, mais avec Heaven (acoustique)
cHere Until Forever une production scénique plus cRemember Every-
cThe Truth imposante que celle-ci, trop thing (acoustique)
cThe Mirror's Truth
sommaire. Sur les deux titres cUnder And Over It
cThe Quiet Place
acoustiques du set, Ivan cThe Bleeding
cThe End
« Jacques Martin » Moody fait
monter trois jeunes fans, logiquement
paralysés par le trac et submergés par
l’émotion, puis lance une batte de
base-ball à un garçon du balcon lors
du toujours très efficace « Under And
Over It ». « Sortez les briquets ! Je sais
que vous en avez : ça sent la beuh
jusqu’ici ! » est la dernière drôle de
sortie du chanteur (ça ne fume pas du
tout dans la salle !), avant un « The
Bleeding » achevant ce set d’une heure,
mais uniquement doté de onze titres
(plus des temps morts, de longs
speeches, etc.). L’opération séduction
de « l’artiste Moody » se poursuit (dra-
peau tricolore exhibé, dédicaces en bord
de scène, etc.), mais tout ça donne
tout de même envie de citer Cyrano :
« C’est un peu court, jeune homme »...
MORGAN RIVALIN
Photos : Marc Villalonga
Nothing More
batteur Ben Anderson, relégué « là-
bas, au fond à gauche ». Mais comme cChrist Copyright
toujours, l’enthousiasme débordant du cLet 'Em Burn
groupe de San Antonio place le cMr. MTV
concert sur de bons rails. Torse nu, cDon’t Stop
comme d’habitude (NdMR : moi c(Solo de basse)
aussi, je ne m’embêterais plus à cRipping Me Apart
laver un t-shirt si j’étais gaulé comme cGo To War
lui...), le chanteur Jonny Hawkins cJust Say When
(acoustique)
brille de mille feux sur les impeccables
cDo You Really Want
« Let ‘Em Burn » et « Go To War », le
It ?
superbe single de The Stories We Tell cI'll Be OK/Here’s To
Ourselves (2017) qui a aidé le combo The Heartache
rock/metal à décrocher rien moins cJenny
que trois nominations aux prochains cOcean Floor
Grammy Awards. Un début de ventre cThis Is The Time
mou (un comble pour Hawkins) guette (Ballast)
ce set aux alentours de « I’ll Be OK » cFirst Of The Year
et « Here’s To The Heartache », mais (Equinox) (Skrillex)
l’incontournable « This Is The Time cSalem (Burn The
(Ballast) », agrémenté de belles lumières, Witch)
relance la machine à baffes à point
nommé. « First Of The Year (Equinox) », reprise
de Skrillex, confirme la direction plus électro-
nique empruntée par Nothing More avant
« Salem (Burn The Witch) », dernière cartouche
de ce groupe qui ne fait pas de rappel, mais
« donne tout, jusqu’au bout ». Les musiciens
s’échangent leurs instruments lors de ce final
particulièrement fun. Prochaine étape : le
Download Paris, au mois de juin.
MORGAN RIVALIN
Photos : Morgan Rivalin

THE NEW LEROSES
Audrey Horne
cThis Is War
cAudrevolution
cOut Of The City
cThis Ends Here
c(Solo de guitare)
cYoungblood
cMidnight Man
cBlackout
cThe King Is Dead
cNaysayer
cPretty Little Sunshine
cStraight Into Your Grave
cRedemption Blues
cWaiting For The Night
cBlaze Of Ashes
Audrey Horne en première partie de... The New Roses ?! Non,
– AUDREY HORNE
m’sieurs dames : c’est un co-headlining. Comprendre : « Peu
importe l’ordre de passage puisque les deux formations
bénéficient du même temps de jeu ». OK, soit. Il y a tout de
même de quoi être surpris, notamment parce que c’est la
20 JANVIER 2018 A PARIS (PETIT BAIN) photo d’Audrey Horne qui figure sur l’affiche du concert… et
le voilà programmé en premier, à 19h30 ! C’est étonnant parce
que : 1) Audrey Horne est en pleine tournée européenne en
tête d’affiche, pas avec The New Roses, venu spécialement
d’Allemagne pour cette date, mais avec Magick Touch et Dead
City Ruins. Les deux formations, qui ont quartier libre aujourd’hui,
regardent le concert dans le public ! 2) Le groupe norvégien,
dont la carrière est plus longue, est incontestablement mieux
établi en France que The New Roses. 3) Le répertoire d’Audrey
Horne est bien plus énergique que celui du groupe allemand.
Pour monter en puissance, il semble logique de commencer
avec The New Roses... Bref. Tout ça semble chercher à optimiser
« deux concerts en un », mais l’essentiel est bien d’avoir droit
à un plateau de qualité, ce qui est indéniablement le cas.
Initialement prévu à 19h30, le set d’Audrey Horne débute
quinze minutes plus tard pour permettre aux nombreux fans
du groupe qui font la queue de rentrer au Petit Bain, une barge
amarrée aux quais de Seine. Malheureusement, une partie
d’entre eux, qui a déboursé 35 euros pour voir ses héros, attend
encore dehors tandis que résonne le générique du Muppet
Show, puis les premières notes de « This Is War »… Vraiment
frustrant, d’autant que ce premier extrait du très récent Blackout
(2018) est explosif. Les « oh-oh » très maidenesques chantés
par le public impressionnent visiblement Torkjell « Toschie »
Rod, chanteur tout sourire. Le très direct et plus rock « Audre-
volution » passe également le test de la scène avec brio avant
l’arrivée tonitruante d’une ribambelle de tubes repris à gorges
déployées… « C’est cool de vous retrouver sur un bateau ! Mettons
les voiles : je vous emmène loin de la ville ! », lance Toschie en
prélude au très Thin Lizzy « Out Of The City ». « Youngblood »
fait sautiller la fosse, « Blackout » et ses guitares délicieusement
harmonisées est accueilli à bras ouverts, et les fans se pourlèchent
les babines au son d’un « The King Is Dead » plus entendu
depuis la tournée Youngblood de 2013. « Naysayer » voit la
fosse devenir plus virile, puis exploser à l’arrivée de l’imparable
« Pretty Little Sunshine ». Il reste encore rien moins que
« Straight Into Your Grave », « Redemption Blues », mais aussi
« Waiting For The Night » dont le refrain est scandé avant
même que le morceau ne soit lancé ! Petit Bain oblige, Toschie
n’oublie pas de plonger dans la fosse en délire. Ses camarades
guitaristes Arve « Ice Dale » Isdal (Enslaved) et Thomas Tofthagen
(quel tandem de feu !) lui emboîtent le pas sur « Blaze Of
Ashes » et ce set d’1h05 prend fin. Les fans en reprendraient
bien une louchée, mais précisons que le groupe ne joue pas
plus longtemps sur les autres dates de sa tournée.
A ce moment précis, rivaliser avec le tourbillon norvégien
semble relever de Mission : Impossible. Et effectivement, The
New Roses ne bénéficie pas d’un accueil comparable. Heureu-
sement pour Tim Opitz, alias Timmy Rough (chant, guitare), et
ses amis, des fans du groupe teuton donnent de la voix sur
« Forever Never Comes » : un titre à rapprocher de la facette
radio friendly d’un Black Stone Cherry. Témoin du gros carton
réalisé par Audrey Horne juste avant, le frontman n’attend pas
pour rendre hommage à ses collègues de label (Napalm Records),
juste avant le très Aerosmith « Dancing On A Razorblade ».
Digne d’un Michael Angelo Batio, le solo en tapping de Norman
Bites voit le gratteux se prendre trop au sérieux. Ce déluge de
notes semble encore plus incongru qu’il introduit une ballade
100% pur jus : « For A While », impeccablement chantée par
un Timmy Rough tout en maîtrise. Le frontman allemand, qui
s’y connaît en matière de communication avec le public, empoigne
une bière française qu’il juge bien trop petite avant un titre
évoquant les ravages d’un autre breuvage (« Whiskey Night-
mare »). « Il est Américain ? », demande un spectateur à côté.
A en juger à son accent anglais impeccable, mais aussi à ce
The New Roses discours typiquement US lors duquel il place que The New
cEvery Wildheart Roses a joué en Afghanistan « pour les troupes », difficile, en
cForever Never Comes effet, de croire qu’il vient du pays de la choucroute ! « Gimme
cDancing On A Razorblade Your Love » ou encore « Devil’s Toys » ont beau être un peu
c(Solo de guitare) plus agités, la fosse reste plutôt tranquille. Ça « ronronne »
cFor A While même vraiment trop en cette fin de set, achevé avec « One
cIt’s A Long Way More For The Road » après 1h05 de concert (promesse
cWhiskey Nightmare d’équité tenue !). Même si nous aurions aimé une prestation de
cLife Ain’t Easy (For A Boy The New Roses plus musclée, c’est à une belle soirée à laquelle
With Long Hair) nous avons eu droit. Une soirée inédite dont Audrey Horne sort
cGimme Your Love incontestablement grand vainqueur. Un autre concert, et vite !
cDevil’s Toys MORGAN RIVALIN
cThirsty Photos : Morgan Rivalin
cMy Own Worst Enemy
cOne More For The Road
73
 PLAYLISTS
CHARLELIE ARNAUD
1. TURBONEGRO – III : Rock'n'Roll Machine
2. NAPALM DEATH – Coded Smears And More
Uncommon Slurs (advance CD)
3. PEROPERO – Lizards
4. LETZTE INSTANZ – Morgenland
5. ABRIAL'S – La Fille Du Boucher
STEPHANE AUZILLEAU
1. GRETA VAN FLEET – From The Fires
2. MICHAEL SCHENKER FEST – Resurrection
3. TAX THE HEAT – Change Your Position
4. DELTA DEEP – East Coast Live
5. ALCATRAZZ – Disturbing The Peace
BENJI
1. JUDAS PRIEST – Firepower (advance CD)
2. MICHAEL SCHENKER FEST – Resurrection
3. SAXON – Thunderbolt
4. MANIGANCE – Machine Nation
5. THRESHOLD – Legends Of The Shires
FRANCOIS BLANC
1. ANGRA – ØMNI
2. PRIMORDIAL – Exile Among The Ruins
(advance CD)
3. ORDEN OGAN – Easton Hope
4. PHIL CAMPBELL AND THE BASTARD SONS
– The Age Of Absurdity
5. DESIRE – Infinity… A Timeless Journey
Through An Emotional Dream
DJUL
1. OCEANS OF SLUMBER – The Banished
Heart
2. GLEB KOLYADIN – Gleb Kolyadin
3. MACHINE HEAD – Catharsis
4. FRANCE GALL – Evidemment
5. LONG DISTANCE CALLING – Boundless
GUILLAUME FLEURY
1. CRESCENT – The Order Of Amenti
2. NECROPHOBIC – Mark Of The Necrogram
3. VOODOO CIRCLE – Raised On Rock
4. MELTED SPACE – Darkening Light (advance CD)
5. PRIMORDIAL – Exile Amongst The Ruins
(advance CD)
VANESSA GIRTH
1. MINISTRY – AmeriKKKant
2. AUDREY HORNE – Blackout
3. PHIL CAMPBELL AND THE BASTARD SONS
– The Age Of Absurdity
4. TURBONEGRO – III : Rock'n'Roll Machine
5. MYLES KENNEDY – Year Of The Tiger
EMMANUEL HENNEQUIN
1. MINISTRY – AmeriKKKant
2. ERYN NON DAE. – Abandon Of The Self
3. LIZZARD – Shift
4. DEATH CULT – Ghost Dance
5. USURPRESS – Interregnum
PHILIPPE LAGEAT
1. MICHAEL SCHENKER FEST – Resurrection
2. TURBONEGRO – III : Rock'n'Roll Machine
3. MINISTRY – AmeriKKKant
4. SATAN JOKERS – Symphönïk Kömmandöh
5. TRIBULATION – Down Below
MORGAN RIVALIN
1. POP EVIL – Pop Evil
2. MINISTRY – AmeriKKKant
3. MICHAEL SCHENKER FEST – Resurrection
4. MYLES KENNEDY – Year Of The Tiger
5. TAX THE HEAT – Change Your Position
MARC VILLALONGA
1. TRIBULATION – Down Below
2. LIFE OF AGONY – A Place Where There’s
No More Pain
3. BLUES PILLS – Lady in Gold - Live In Paris
4. MINISTRY – AmeriKKKant
5. MICHAEL SCHENKER FEST – Resurrection
74
DEATHWHITE
For A Black Tomorrow
(Season Of Mist)
Spleen metal
Sortie : 23.02.2018
Si Deathwhite mérite un succès avec
ce premier album écrit courant
2016, c’est au moins celui de l’es-
time. Certes, son metal mélanco-
lique et relativement acéré n’a pas
forcément ce supplément de per-
sonnalité qui nous ferait dire que
nous tenons là « la nouvelle sensa-
tion spleen ». Mais il a cette petite
âme qui interpelle et qui justifie
aussi un référentiel ouvertement
assumé par le groupe (Katatonia et
Paradise Lost sont ses références
phares). « Petite âme » n’est pas un
propos désobligeant. Le groupe a
cette manière à lui de fondre son
énergie dans une forme élégante, ce
qui a au moins une vertu : celle d’ac-
coucher de chansons bonnes et tou-
chantes. Le combo a, il faut le dire
aussi, sa délicatesse (la guitare
acoustique est un argument – Cf.
« Prison Of Thought »). Du point de
vue de l’optique, sensible, il est pos-
sible de rapprocher Deathwhite
d’une formation tout aussi estima-
ble : à savoir ce Ghost Brigade
auquel on le comparera inévitable-
ment, du moins pour ce qui est de
l’intention. Mais Deathwhite cultive
plus de mystère. Les membres du
groupe, eux, font en sorte de ne pas
vraiment exister : c’est l’anonymat
complet (visages cachés sur les pho-
tographies et dans les clips, aucune
identité déclinée – alors… trouve-
rez-vous ?). Voilà une attitude révé-
latrice d’un primat donné à l’art, en
même temps qu’elle crée le désir.
Bande de petits malins ! Mais la
démarche se tient correctement :
leurs clips sont sobres et soignés
(« Dreaming The Inverse », très bon
titre par ailleurs, sur l’impossibilité
du pardon et ses conséquences
lorsque la situation se retourne) et
leurs chansons coulent parfois de
source (« Eden »). Même si l’on
trouve au disque quelques petites
1 - 3 = naze / 4 - 6 = moyen / 7 - 8 = bon / 9 - 10 = génial !
MON ALBUM DU MOIS par FRANÇOIS BLANC
ANGRA
ØMNI
(EarMusic/Wagram)
Metal progressif
Sortie : 16.02.2018
Les auditeurs qui ont vécu la fin des
années 90 et l’apogée d’Angra
tomberont probablement d’accord
avec les aficionados de « l’ère
Falaschi » : être fan d’Angra en
2018 n’a rien d’une sinécure ! Après
avoir perdu deux de ses chanteurs
et recruté l’ex-Rhapsody Fabio
Lione, dont il semble avoir du mal à
assumer pleinement la présence
(seul rescapé du line-up originel, le
guitariste Rafael Bittencourt mono-
polise de plus en plus fréquemment
le micro), voilà qu’Angra perd l’un
de ses plus anciens et précieux
atouts, le guitariste Kiko Loureiro
recruté en 2015 par le géant
Megadeth. Difficile de ne pas avoir
le cœur serré en songeant à toutes
les merveilles que nous a offertes le
quintet brésilien, que son talent
pour les mélodies recherchées et
les arrangements classieux élève
généralement bien au-dessus de la
concurrence… D’autant que les
premières écoutes d’ØMNI, neuvième
opus très varié mais malheureuse-
ment inégal, se sont avérées fort
déstabilisantes ! Heureusement,
longueurs, les chansons intéressent
et ont leur petit truc héroïque, sans
jamais en faire trop. Et l’on s’attache
petit à petit. For A Black Tomorrow
se conclut sur un ton à la fois acéré
et grave, faisant l’effet d’une grande
larme (« For A Black Tomorrow »). Sans
être immense pour l’heure, Deathwhite
EMMANUEL HENNEQUIN . . . . . . . .6,5
est donc un groupe à suivre.
GLEB KOLYADIN
Gleb Kolyadin
(K-Scope/Wagram)
Rock atmosphérique et progressif
Sortie : 23.02.2018
Angra, insolemment pétri de talent,
n’a pas perdu son don pour
accoucher de chansons d’une
remarquable créativité. Oubliez
cette vilaine tentative de coller à
l’air du temps, caractérisée par
l’usage de saccades rythmiques
épaisses qui viennent desservir le
tribal « Caveman », l’épique
« Travelers In Time » et le sombre
« Black Widow’s Web » (nous
n’avons rien contre Alissa de Arch
Enemy, mais force est de constater
que son chant death gras est
totalement hors de propos sur un
morceau d’Angra). Concentrez-vous
plutôt sur les extraordinaires soli de
« War Horns » (seule participation
de Kiko à l’album), la majesté de la
ballade « Always More » et le pas-
sionnant et virevoltant « The Bottom
Of My Soul » chanté par Rafael et
qu’on croirait tout droit sorti de
Fireworks (1998), le rapide et puis-
sant « Light Of Transcendence » qui
évoque l’époque dorée de Rebirth
(2001), ou encore l’intelligente
conclusion instrumentale qui reprend,
à la manière du « Gate XIII » de
Temple Of Shadows (2004), l’ensemble
des thèmes de l’album en version
instrumentale et symphonique…
ØMNI n’est certes pas Holy Land
(1996), mais il s’agit une fois encore
d’un superbe voyage, dépaysant,
inspiré et totalement imprévisible,
qui s’apprivoise très progressive-
ment, révèle de nouvelles subtilités
à chaque écoute et ne dévoile sa
beauté qu’au compte-goutte.
Symphonique, progressif, influencé
par la musique traditionnelle brési-
lienne, ØMNI s’avère au final un
très beau disque, sursaut d’orgueil
inattendu de la part d’une forma-
tion audacieuse qu’on aurait grand
FRANÇOIS BLANC . . . . . . . . . . . . . . . . .8
tort de vouloir enterrer trop vite.
Iamthemorning constitue l’une des
bonnes surprises du rock progressif
continental de ces dernières années.
Tout d’abord par ses origines, la
Russie, ce qui permet enfin de regar-
der plus à l’Est de l’Allemagne com-
ment ce genre est abordé et repris.
Ensuite, par ce duo masculin/fémi-
nin, voix/piano, qui a su jouer de son
originalité pour convaincre le label
K-Scope, mais aussi un public et des
festivals comme le Be Prog avec sa
formule intimiste et émouvante. En
point d’orgue de cette reconnais-
sance, un superbe Lighthouse
(2016), honoré de la récompense de
« meilleur album » aux Prog Awards
la même année. Ainsi adoubé, le
groupe semble promis à un bel ave-
nir mais cela n’empêche pas ses
deux membres de tenter des expé-
riences en solitaire. On a ainsi vu la
chanteuse Marjana Semkina s’es-
sayer à l’art de la reprise de titres
de Porcupine Tree à la guitare
acoustique ou encore en tournée,
tout récemment, avec Alithia en
première partie de Leprous. Son
acolyte Gleb Kolyadin se permet
donc lui aussi une incartade avec ce
premier album solo, sans chanteuse
toutefois, histoire de réserver cette
alchimie à son groupe principal. Le
disque, du nom de son auteur, est à
l’image de sa musique au sein
d’Iamthemorning : très écrite, très
structurée, presque académique,
mais qui évite le trop plein de froi-
deur grâce à ses invités.
Commençons par l’impressionnante
section rythmique qui l’accom-
pagne, avec rien de moins que le
batteur Gavin Harrison (King
Crimson, Porcupine Tree, The
Pineapple Thief), Nick Beggs
(Steven Wilson, Steve Hackett) à la
basse, mais aussi Theo Travis
(Robert Fripp, Porcupine Tree,
Steven Wilson) aux instruments à
vent. Bref, tous les usual suspects
de K-Scope et de la « bande à
Wilson » sont là, ou presque. Et cela
fait bien entendu la différence, évi-
tant à certains morceaux, certes
impressionnants techniquement
(comme ces passages instrumentaux
sur lesquels le Russe se charge
autant de la rythmique que de la
mélodie à deux mains) de pêcher
par trop de rigorisme. On est ainsi
rassurés dès l’introductif « Insight »,
et ce d’autant que les claviers
relaient la mélodie de piano sur
cette composition qui virevolte par
moments comme du jazz retraité
par Weather Report. Le côté « rock
de chambre » à la Univers Zero est
également bien présent, à l’instar
du très démonstratif « Penrose
Stairs » porté par le saxophone de
Travis et les montées et descentes
de gammes à plusieurs instruments.
Une écriture très « classe », presque
perturbée par les éruptions ultra-
saturées et démonstratives de
Jordan Rudess (Dream Theater) le
long de « Storyteller ». Nous avions
dit « pas de chanteuse », mais Gleb
ne s’est pas privé d’inviter quelques
chanteurs, à commencer par Mick
Moss (Antimatter) sur le déprimant
« Astral Architecture » que ce dernier
sublime de sa voix pleine de gravité
et d’intimité. Steve Hogarth est lui
aussi du voyage, que ce soit en mode
spoken words (« Confluence »), un
exercice qu’il affectionne en solo ou
plus rarement avec Marillion, même
si on le préfère lorsqu’il hausse le
ton sur la conclusion « The Best Of
Days », titre rêveur qui sied parfai-
tement à H qu’on croirait perdu
dans un univers parallèle à la Brave
(1994). Avec ce disque en forme de
CV mis en musique, qui n’a rien
d’une simple récréation, Gleb
Kolyadin éclabousse de son talent
de compositeur, tout en se faisant
clairement plaisir. A nous aussi avec
DJUL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
par la même occasion.
HARMS WAY
Posthuman
(Metal Blade/Sony Music)
Metalcore
Sortie : 09.02.2018
Un changement de line-up peut être
assez casse-gueule. Juste avant
d’attaquer la conception de
Posthuman, album relativisant l’im-
portance d’une vie humaine sur
terre (combinaison avancée par
Harms Way de critères environne-
mentalistes et démographiques), le
groupe, originellement side-project
des hardcoreux de Few And The
Proud, a intégré deux compé-
tences : un nouveau bassiste, Casey
Soyk, et un second guitariste, Nick
Gauthier. Et la tonalité de ce nou-
veau speech est un peu l’inverse de
celle du discours d’au revoir de
Valéry Briscard Destin, le 19 mai
1981 : sur Posthuman, Harms Way
reste sacrément énergique (Valéry
prend son metalcore dans sa face)
et garde un sens de l’initiative bien-
venu. Pas d’accordéon certes, mais
la création d’ambiances, lorsqu’elle
a lieu, dessine des univers qui
piquent la curiosité (écoutez
« Temptation » et osez dire que
vous ne seriez pas curieux de voir la
formation de progresser dans ce
genre de choses, osez !). Et puis,
lorsque le groupe recourt aux
machines, il le fait certes avec parci-
MON ALBUM DU MOIS par GUILLAUME FLEURY
CRESCENT
The Order Of Amenti
(Listenable/PIAS)
Death metal
Sortie : déjà disponible
Si Crescent est prophète en son
pays, blindant régulièrement des
clubs de 1.500 personnes lorsqu’il
se produit dans sa ville d’origine du
Caire, il aura fallu attendre seize ans
avant de voir la formation percer en
Europe, celle-ci se produisant
notamment au Wacken et au Fall Of
Summer. Et sa popularité ne devrait
certainement pas diminuer avec un
effort de la trempe de ce The Order
Of Amenti ! Celui-ci vient en effet
enfoncer le clou, quatre ans après
Pyramid Slaves. Le quartet mené
par le guitariste/chanteur Ismaeel
Attalah s’attache à développer un
death metal qu’on peut qualifier
« de tradition » car les codes
posés par le style à son origine sont
respectés, tout en incorporant des
sonorités typiques de son Egypte
natale à l’aide d’instruments tradi-
tionnels utilisés avec parcimonie et
subtilité afin de renforcer l’aspect
mystique de l’ensemble (le très bel
instrumental « The Twelfth Gate »).
Si l’ouverture « Reciting Spells To
Mutilate Apophis » et ses chœurs
peuvent renvoyer aux ambiances
développées par un Behemoth ou
un Septicflesh, Crescent parvient
rapidement à tirer son épingle du jeu
et à dévoiler un univers personnel
entièrement consacré aux divinités
égyptiennes. La composition, prise en
monie, mais grand soin. C’est, par
exemple, le cas de l’introduction
industrieuse de « Call My Name »,
plus académique par la suite mais ô
combien efficace dans le découpage
des riffs, surtout sur la fin de la
structure. Harms Way pousse le
bouchon plus loin dans son machi-
nisme avec l’avant-dernier titre,
l’hypnotique « The Gift », où il
dévoile une facette singulière de sa
nouvelle personnalité : un son tout
main par un leader qui sait précisément
où il veut aller, met ici l’accent sur
une vraie science du riff. Nous
avons droit à un véritable festival
de plans de guitare plus puissants
les uns que les autres, qui s’enchaî-
nent sans coup férir une heure
durant en recherchant toujours l’ef-
ficacité et le headbanging, malgré
une complexité évidente des signa-
tures rythmiques (la batterie d’Amr
Mokthar, l’autre membre fondateur
aux côtés d’Attalah, est sacrément
solide) et une lourdeur omnipré-
sente. Afin d’éviter de sombrer
dans le martelage stérile, la mélo-
die est permanente, offrant ainsi un
subtil équilibre entre atmosphère
et violence, et renforçant l’aspect
mystique du périple. En témoigne
notamment l’excellent « Beyond
The Path Of Amenti » (la triplette
conclusive de l’album, portant un
concept sur la destinée des morts
selon les croyances de l’ancienne
Egypte, constitue probablement la
meilleure partie de l’album). Un
titre comme « Through The Scars Of
Horus » rappelle quant à lui que la
bande sait y faire lorsqu’il s’agit
d’incorporer un groove épais à son
propos, porté par une basse bien
mise en avant et précédant par ail-
leurs un bon solo mélodique, la gui-
tare n’étant pas avare d’envolées
« orientales ». Ce travail de fourmi
est par ailleurs mis en valeur par un
excellent mix/master effectué au
sein du studio français Vamacara
(Otargos, The Order Of Apollyon,
etc.) qui se taille une réputation
toujours plus flatteuse au fil des
ans. The Order Of Amenti est une
véritable leçon de death metal, tra-
hissant l’amour de ses géniteurs
pour la scène historique des années
90 (le groupe a débuté en propo-
sant des reprises de Dissection et
est immense fan d’At The Gates),
mais pas que ! Une pyramide de
riffs tous plus affûtés les uns que les
autres et un voyage fascinant
GUILLAUME FLEURY . . . . . . . . . . . . . . .8
jusqu’à la pesée des âmes !
en hypnose, au feeling dubstep.
C’est assez court (2’27), mais un brin
oppressant et, dans le genre, très
bien fait. Produit par Putney, le
reste porte lui aussi esprit et éner-
gie, provoquant parfois des sensa-
tions de flottement (« Become A
Machine »). Au final, ce quatrième
album concentre un jus que le
groupe voudrait que nous ratta-
chions à l’époque Rust. Vous reste-
rez seul juge, mais ce qui est sûr,
c’est que Posthuman, assez inspiré,
EMMANUEL HENNEQUIN . . . . . . . . . . .7
concentre un feu. Au revoir.
KING WITCH
Under The Mountain
(Listenable/PIAS)
Heavy/doom metal
Sortie : 09.02.2018
Formé en 2015, année durant
laquelle il sort son premier EP auto-
produit, Shoulders Of Giants, King
Witch passe aujourd’hui la vitesse
supérieure en nous proposant un
album en bonne et due forme, inti-
tulé Under The Mountain. Le quar-
tet vient d’Edimbourg, la sympa-
thique capitale écossaise, une ville
et même une contrée tombant rare-
ment sous nos radars. Alliant l’inten-
sité du heavy metal à la lourdeur du
doom dans un ensemble néanmoins
bien plus axé sur des tempi rapides
que des rythmes pachydermiques,
King Witch bénéficie d’un atout de
poids en la personne de Laura
Donnely. La blonde vocaliste dis-
pose en effet d’une voix étourdis-
sante amplifiée par pas mal d’écho
et d’un vibrato dont elle use à bon
escient, sans jamais tomber dans la
démonstration gratuite et en gar-
dant toujours en tête que nous par-
lons ici de metal et non de pop
sucrée camouflée derrière de
grosses guitares et des pantalons en
cuir. Côté pur metal, le furieux
« Carnal Sacrifice », avec son refrain
entêtant, « Under The Mountain »,
sur lequel Laura pousse fort dans les
aigus, « Black Dog Blues » qui n’a de
blues que le nom, « Hunger » et plus
encore « Possession », à la limite du
thrash, contenteront les headban-
gers. On ne risque donc pas de s’en-
dormir, ni de s’ennuyer à l’écoute
de cet album distillant des styles
assez variés sans que, pour autant,
on ait la désagréable sensation de
ne pas savoir sur quel pied danser
puisque tous ces titres s’imbriquent
de façon harmonieuse et logique.
Les aspirations doomy du gang se
font particulièrement marquées sur
« Beneath The Waves », succulent
premier titre aux saveurs candlema-
siennes, mais aussi et surtout sur
« Approchaching The End », incanta-
tions que n’aurait pas reniées un
certain monsieur Osbourne dans les
70’s, voire le titre fleuve aux
ambiances spatiales qu’est
« Solitary ». L’occasion de signaler le
jeu expressif du guitariste Jamie
Gilchrist, varié et inspiré. Enfin,
« Ancients » s’engage même dans
une veine bluesy très 70’s et
dégage une vibe vraiment agréable
tout autant qu’il offre une pause
émotionnelle bienvenue. King
BENJI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
Witch : à suivre ! Cela va sans dire !
KOZH DALL DIVISION
II-Memories
(Mystyk Prod/Send The Wood/Season Of
Mist)
Heavy thrash death metal
Sortie : déjà disponible
Kozh Dall Division n’a pas froid aux
yeux. Le projet de Laurent
Plainchamp, Vince Desca et Chris
Grazed (ce dernier ayant quitté le
navire juste après cette seconde sor-
tie) souffle à peine la bougie d’anni-
versaire de son premier album que,
bim !, un second est déjà en bacs. Et
pas n’importe quel second… Un
double CD de 27 titres ! Sachant
que le combo invite sur presque
chaque morceau un chanteur ou un
musicien différent (voire parfois plu-
sieurs membres d’un même
groupe), imaginez la guestlist : on
n’est pas loin des fêtes blanches
d’Eddie Barclay dans les années 80.
 Comme de bien entendu avec une
telle profusion d’invités et une telle
débauche de compositions, l’ensem-
ble a du mal à être d’un niveau
constant. Tout d’abord parce que le
maître de cérémonie essaie toujours
de coller au plus près du style « de
base » de son hôte et se trouve bien
plus à l’aise dans certains registres
extrêmes que dans d’autres plus
tempérés. Ensuite, parce que tout le
monde n’est pas égal devant un
micro et que certains intervenants
se montrent bien plus à l’aise que
d’autres face à ce type d’exercice.
Au chapitre des bonnes surprises et
des titres franchement réussis, souli-
gnons l’étonnante performance à
contre-emploi de Michael « Crass »
Da Siva (Crusher) qui illumine littéra-
lement un « Read In Me » mélodique
et rampant, le duo Eric Forrest (E-
Force)/Tanguy Bourgeois (T H I N K)
sur « Living Parasite », l’ex-Inhumate
Sébastien Mockers qui fout le feu
sur deux brûlots extrêmes
(« Welcome To Death Land » et
« Born In A Massgrave »), Alex
Colin-Tocquaine (Agressor) sur
« Time Shadows », Moreno Grosso
et son camarade japonais Warzy de
Hate Beyond sur le frondeur « We
Are Kozh Dall Division » ou encore
Jean-François Rey (ex-D.A.B. et
Gurkkhas) sur un « Imperial March »
qui porte bien son titre. Voilà pour
ce qui sort réellement du lot. Loin
de nous l’idée de distribuer des
notes comme à l’Ecole Des Fans,
mais force est de reconnaître que
non, cette fois, tout le monde n’a
pas gagné. 1h43 de musique, c’est
très long. Plainchamp ne peut pas
être touché par la grâce divine 27
fois en moins d’un an. Ses invités ne
peuvent pas immédiatement se fon-
dre dans le moule par magie, et cer-
tains semblent même bien mal à
l’aise. Mais en toute honnêteté, le
gros des meubles est sauvé, ce qui
tient déjà du miracle. Il y a peu de
titres que nous jugeons réellement
ratés (il y en a… deux ou trois), mais
c’est finalement assez mince en
regard de la masse d’informations
que contiennent ces deux disques.
En revanche, nous conseillerons
expressément au tandem
Plainchamp/Desca d’être bien plus
drastique dans ses choix à l’avenir et
de savoir opérer un vrai tri, sous
peine de voir KDD se transformer
en session de recrutement de The
Voice (avec tout ce que cela peut
supposer de candidats malchan-
ceux). II-Memories aurait pu –
comme son prédécesseur – être un
album simple plus cohérent et sur-
tout plus égal dans son niveau de
performance. Reste le concept,
78
certes séduisant, et cette bouillon-
nante créativité qui, sur un laps de
temps aussi court, relève presque
GUILLAUME FLEURY . . . . . . . . . . . .6,5
du record.
LIZZARD
Shift
(Metal Ville/La Baleine)
Prog rock/metal
Sortie : 23.02.2018
Se faire produire sur ses premiers
NOTRE ALBUM DU MOIS par STEPHANE AUZILLEAU, BENJI & PHILIPPE LAGEAT
MICHAEL SCHENKER FEST
Resurrection
(Nuclear Blast/PIAS)
Hard rock
Sortie : 02.03.2018
C’est un fait : depuis maintenant
une bonne dizaine d’années,
Michael Schenker, qu’on a connu
moribond et trainant toute la
misère du monde sur ses épaules
(en particulier durant la première
partie des années 2000), revient
dans une forme dont nous n’aurions
osé rêver après ces périodes d’er-
rances. La métamorphose s’est
matérialisée par une série d’albums
de bonne, voire de très bonne fac-
ture (en particulier avec Temple Of
Rock, le nom de son précédent pro-
jet au sein duquel Francis Buchholz
et Herman Rarebell, ses anciens
comparses dans Scorpions à
l’époque de Lovedrive, s’étaient
également investis). Mais aussi et
surtout via des concerts lors des-
quels, jamais depuis le début des
années 80 et les premiers albums
du MSG, nous n’avions vu le guita-
riste aussi investi, souriant et géné-
reux en live. Mais le virtuose alle-
mand n’aime pas le traintrain quoti-
dien et nous revient avec une nou-
velle combinaison de musiciens iné-
dite à ce jour. Du côté des instru-
mentistes, nous assistons, avec une
joie non dissimulée, aux retours du
bassiste Chris Glen (que nous
avions revu à quelques reprises
avec le maestro en concert ces der-
nières années) et du batteur Ted
enregistrements par Rhys Fulber
(Frontline Assembly, Paradise Lost),
alors qu’on n’est à l’époque qu’une
formation confidentielle, il y a forcé-
ment un petit quelque chose qui se
passe. Mais LizZard ne s’est pas
arrêté à ces spectaculaires pre-
mières collaborations : le groupe
basé en Centre-France a poursuivi
son bonhomme de chemin, progres-
sant en continu et gagnant maturité
de couleur et de travail rythmique.
Aujourd’hui, l’état de l’art lui per-
McKenna, tous deux présents sur
Assault Attack (1982), Built To
Destroy (1983) et Rock Will Never
Die (1984) de MSG, ainsi que celui
du claviériste/guitariste Steve
Mann qui, lui, opérait sur Perfect
Timing (1987) et Save Yourself
(1989) du McAuley Schenker
Group. Plutôt que de se contenter
d’un seul vocaliste, Michael a aussi
décidé de la jouer rassembleur, en
rameutant pas moins de quatre de
ses plus emblématiques chanteurs :
Gary Barden, Graham Bonnet,
Robin McAuley et Doogie White !
Rien que ça ! Qu’allait donc donner
cette réunion « d’anciens combat-
tants » ? L’un des meilleurs opus
réalisés depuis bien longtemps par
le blond guitariste, tout simple-
ment. Jamais ennuyeux, car alter-
nant intelligemment et harmonieu-
sement titres chantés à l’unisson,
en solo, et même un instrumental,
Resurrection regorge de très bons
moments. A commencer par un
« Heart And Soul » franc et direct,
superbement chanté par McAuley
et sur lequel le Mad Axeman se
frotte à l’un de ses plus illustres
admirateurs devenu l’un de ses
pairs, Kirk Hammett (Metallica),
pour un duel fratricide de toute
beauté. « Time Knows When Its
Time » est le deuxième titre sur
lequel Robin vocalise avec classe,
l’Irlandais n’ayant pas perdu grand-
chose de ses capacités. « Warrior »
et « The Last Supper » voient tous
ces vocalistes se prêter à l’exercice
du morceau commun : comme cela
semble facile, sur le papier, de faire
cohabiter ces quatre talents sans
qu’ils ne se marchent sur les pieds !
Le premier, un hymne qui carton-
nera sûrement en concert, est plai-
sant, là où « The Last Supper », qui
conclut l’opus, est brillant. Et si les
quatre compères marient leurs voix
avec bonheur, il nous faut signaler
un Graham Bonnet particulière-
ment à son aise lors d’un pré-refrain
lumineux. Un Bonnet qu’on
retrouve sur le sympathique « Night
met d’envisager autre chose que la
sempiternelle comparaison à Tool
qui, tout de même, le réduit un peu.
Le groupe a son univers et, sur Shift,
ses mélodies élaborées et
ambiances plus typiques créent un
bloc de son personnel et plus aven-
tureux. Dynamique et aérien, le son
de LizZard a trouvé un équilibre
naturel (l’instrumentation du dernier
tiers de « Shift » est proprement fas-
cinante). « Min(E)d », qui suit
« Shift », est aussi un grand moment
Moods » et le plus accrocheur
« Everest », titre rapide (notons le
jeu en double de Ted McKenna,
absolument bluffant de précision :
et dire que le bougre va bientôt
fêter ses 68 ans !) sur lequel
Graham fait merveille. Si, en
concert – et cela nous fait mal de le
dire car nous avons une vraie ten-
dresse pour l’Anglais – Gary Barden
est aujourd’hui un peu à la traine
par rapport à ses trois autres col-
lègues, en studio, il donne encore
le change sur le boogie sautillant
qu’est « Messin’ Around », ainsi que
sur le mid-tempo mélodique « Livin’
A Life Worth Livin’ ». Quant à
Doogie White, que votre serviteur
ne s’est pas privé d’égratigner à
plusieurs reprises, il nous faut bien
avouer qu’il s’en sort avec la men-
tion « très bien » sur « The Girl With
The Stars In Her Eyes », « Anchors
Away » et surtout « Take Me To The
Church », définitivement l’un des
meilleurs moments de cet album
avec ses orchestrations de cathé-
drale et son refrain immédiat. Enfin,
« Salvation », s’il démontre tout le
savoir-faire de Michael et s’avère
parfaitement écoutable, ne nous
semble pas aussi essentiel que cer-
tains autres instrumentaux qui ont
marqué sa carrière. Alors, quid de
Michael sur l’ensemble de ce
disque ? Rassurez-vous, s’il sait lais-
ser tout l’espace nécessaire pour
que s’expriment ses comparses
vocalistes, il n’en oublie pas que le
maître de cérémonie, c’est bien lui
et distille, sur tous les titres, des
soli éblouissants dont il a le secret.
Il brille donc de mille feux sur l’en-
semble de cet album et élève son
niveau à la hauteur de ce que repré-
sente ce Resurrection charnière
pour la poursuite de sa déjà très
longue carrière. Et c’est là l’une des
meilleures nouvelles de ce début
d’année ! Vivement la tournée…
(PS. : interview de Michael
Schenker dans notre prochain
BENJI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8,5
numéro)

du disque. La force de ce diptyque
est l’un des temps les plus mar-
quants, poumon de l’ensemble.
Quant au reste, LizZard étale un
savoir-faire qui dépasse la forme.
C’est plus que la simple envie d’être
bon. Le groupe est dans son élé-
ment, et les tourneries instrumen-
tales de « Min(E)d » assomment. La
plupart des morceaux de Shift ont
enfin pour eux un potentiel live, et il
est à espérer que le trio saura jon-
gler sur scène entre les spécificités
de cette collection (harmonisation
resserrée pour « Singularity », pas le
titre le plus direct et choix de pre-
mier single osé) et la force mélo-
dique des précédents essais. Un cap
EMMANUEL HENNEQUIN . . . . . . . . . .8
est franchi.
LONG DISTANCE CALLING
Boundless
(Inside Out/Sony Music)
Post rock instrumental et progressif
Sortie : déjà disponible
Nous l’avions quitté alors qu’il était
devenu un « groupe comme les
autres », nous le retrouvons « for-
mation instrumentale » ! Alors que
Long Distance Calling s’était fait
connaître sous cette dernière
forme avec trois premiers albums
sans chanteur attitré (mais
quelques invités vocalistes), il avait
fini par « rentrer dans le rang » en
en embauchant un à mi-temps à
compter de The Flood Inside
(2013). Mais chassez le naturel, il
revient au galop, et c’est donc sans
personne au micro que les
Allemands nous reviennent, sous la
forme « la plus pure » nous disent-
ils ! Martin Fischer et l’excellent
Petter Carlsen, qui occupaient la
place à tour de rôle, apprécieront,
même si on ne sait pas si l’histoire
a tourné au vinaigre ou si LDC a
juste voulu revenir aux sources.
Pour bien marquer ce changement,
Boundless débute en fanfare au
son de l’excellent « Out There »,
évoquant une scène d’ouverture de
film avec son riff accrocheur et son
rythme haletant nous amenant à sa
seconde partie dotée d’une mélo-
die à la guitare slide mémorable
qui rappelle sans surprise les
Suisses de Monkey3. « Like A
River » sonne comme la bande ori-
ginale modernisée et plombée d’un
western, avec l’apport de violons
et cuivres, en hommage à Ennio
Morricone. « The Far Side »
convainc tout autant en assénant
son final lourd comme un parpaing,
à la Mastodon. Même s’ils emprun-
tent parfois au stoner ou au post
rock, c’est aussi aux derniers
Porcupine Tree et Tool que ces riffs
touffus et au son aussi épais que
travaillé que les compositions nous
font penser (« Ascending » ou
encore « Skydivers »). Le travail des
deux guitaristes David Jordan et
Florian Füntmann est ainsi mis à
l’honneur, sans jamais tomber dans
la démonstration stérile, les soli
étant même très rares sur
Boundless. Globalement, même si
le spectre sonore reste large (le
planant et très indie « On The
Verge »), on sent une nette ten-
dance au durcissement, ce qui n’est
pas pour nous déplaire. Mais LDC
(à ne pas confondre avec « Ligue
des Champions » !) le dit lui-même,
il ne veut pas être cantonné à la
très étroite case « post-prog-rock
instrumental ». On comprend bien
pourquoi, tant artistiquement que
commercialement, mais c’est là une
ornière bien difficile à éviter en se
passant de chanteur, sans concept
novateur appliqué à son album et
sans nouvelles influences musicales
à proposer. Malgré la qualité et les
dynamiques de son propos, cet
objectif-là n’est donc pas encore
DJUL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .6,5
atteint.
MANIGANCE
Machine Nation
(Verycords/Warner)
Metal mélodique
Sortie : déjà disponible
Après une période relativement
calme suivant la sortie de Récidive
en 2011, Volte-Face a remis
Manigance en selle en 2014, lui per-
mettant de retrouver les routes
françaises pour une série de
concerts donnés un peu partout
dans l’Hexagone. Il était donc
temps de donner naissance à ce
sixième album studio nommé
Machine Nation, un jeu de mots
dont le guitariste François Merle
vous explique les origines dans l’in-
terview à découvrir dans ce numéro.
Le groupe, qui accueille en ses rangs
un nouveau batteur, Patrick Soria
(dont les premiers pas sont traça-
bles avec Killers entre 1991 et 1998,
avec notamment l’enregistrement
d’un album nommé Cités Interdites
en 1992, sur lequel joue aussi un
certain… François Merle), ne révolu-
tionne pas son style avec cet opus
qui s’inscrit dans la droite lignée de
ses prédécesseurs, mais, et c’est
bien le plus important, se hisse au
même niveau de qualité, tant dans
l’interprétation et l’inspiration que
l’enrobage sonore (produit par le
groupe dans ses propres studios, il a
été masterisé « chez nous » par
Brett Caldas-Lima, dont le CV ne
cesse de s’étoffer). Petite surprise
d’entrée de jeu, après cette courte
introduction instrumentale, le sur-
volté « Face Contre Terre » propose
un duo inédit entre Didier Delsaux,
le remarquable vocaliste du groupe,
et Carine Pinto, chanteuse proche
de la formation… Un titre qui,
aujourd’hui, nous procure une drôle
de sensation, puisque, comme vous
le savez à présent, Carine va avoir la
lourde tâche de succéder à Didier,
ce dernier ayant décidé de se retirer
du jeu pour des raisons que François
détaille également dans l’interview
qu’il nous a accordée. Il va sans dire
que l’écoute de ce Machine Nation
prend une toute autre saveur à la
suite de ces révélations, puisqu’il
s’agit vraisemblablement du dernier
opus sur lequel Didier pose sa voix.
Il nous faut donc apprécier une
ultime fois, et à sa juste valeur, le
phrasé impeccable et la puissance
dégagée par ce vocaliste, ardent
défenseur des textes en français,
qui font ici merveille sur
« Machination », très bon mid-
tempo, « Indifférent » et son splen-
dide solo signé Bruno Ramos (un
foutu soliste qui se bonifie avec le
temps), mais aussi les véloces
« Ennemi », « Avec Des Si » et
« Exutoire » (sur lequel se font
entendre quelques growls distillés
par Jean Lahargue, claviériste du
groupe et sûrement, dans une autre
vie, hurleur death metal).
« Méandres », ballade dépouillée
basée sur les claviers de Lahargue,
la voix de Didier et de discrètes gui-
tares acoustiques (ainsi qu’un déli-
cat solo électrique en fin de course),
est une sorte d’expérimentation
que nous qualifierons de « coura-
geuse » car elle ne sera pas forcé-
ment du goût de tous les fans. « La
Donne Doit Changer », au remar-
quable refrain, ainsi que le très beau
final que nous offre « Une Nouvelle
Ere », long titre travaillé et remar-
quablement construit, sont quant à
eux particulièrement réussis.
Troublant, une nouvelle fois, à quel
point ces morceaux sonnent d’ac-
tualité dans la carrière de
Manigance… Quoiqu’il en soit, voici
une nouvelle offrande dont le
groupe palois a de quoi être fier.
Pour finir, souhaitons le meilleur et
un bon vent au très sympathique
Didier Delsaux, ainsi que la bienve-
nue à Carine Pinto que vous pourrez
découvrir lors des dates imminentes
BENJI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
de Manigance aux côtés de Myrath.
NECROPHOBIC
Mark Of The Necrogram
(Century Media/Sony Music)
Black death metal
Sortie : 23.02.2018
Cinq ans d’attente, c’est long ! Si
Necrophobic est aujourd’hui une
formation culte considérée par
beaucoup comme légitime héritière
directe d’un Dissection aux côtés de
groupes comme Sacramentum, cela
faisait un moment que nous n’avions
plus la moindre nouvelle du quintet
suédois mené par le batteur Joakim
Sterner. Il faut dire que celui-ci a
connu pas mal de turpitudes,
jusqu’à réintégrer en 2016 sa paire
de guitaristes constituée de
Sebastian Ramstedt et Johan
Bergebäck, qui l’avaient quitté trois
ans auparavant. Autre retour des
limbes, celui du vocaliste Anders
Strokirk, qui officiait entre 1992 et
1994 (notamment sur le référentiel
The Nocturnal Silence de 1993) et
vient remplacer un Tobias Sidegard
poussé vers la sortie en 2013 suite à
une sordide affaire de violence fami-
liale. Si le line-up a connu de nom-
breux chamboulements, la musique
de Necrophobic n’a quant à elle pas
changé d’un iota : il s’agit bel et
bien ici de proposer un black death
metal fortement teinté de mélodies,
tranchant et froid comme l’hiver. Et
autant dire que les gaillards ont suf-
fisamment de bouteille pour s’ac-
quitter de cette tâche avec brio.
C’est bien simple, les brûlots effi-
caces s’enchaînent comme à la
parade, déployant des riffs vicieuse-
ment groovy, comme celui de l’ex-
cellent « Requiem For A Dying
Sun », tourbillonnants et enivrants
(« From The Great Above To The
Great Below »), le tout porté par
une production à la fois précise et
puissante, équilibrant admirable-
ment mélodie et hargne. L’un des
gros points forts de Necrophobic,
c’est sa propension à proposer des
riffs briseurs de nuques, ultra accro-
cheurs, tout en les enveloppant
d’une épaisse atmosphère bru-
meuse et en les parsemant de nom-
breux breaks, parfois surprenants
mais toujours très bien amenés. Un
vrai travail d’orfèvre en somme,
pour un huitième album hautement
recommandable, parmi les meilleurs
efforts de la formation. Et qu’im-
porte si l’originalité est ici totale-
ment absente. Difficile d’attendre
une quelconque forme d’évolution
de la part d’un groupe formé en
1989 et entièrement dédié à la
recette initiée à l’époque ou autre
chose qu’un respect absolu de ces
codes qu’il a lui-même participé à
ériger. Et puis, comme toujours,
lorsque l’inspiration est là, les
choses fonctionnent, tout simple-
MON ALBUM DU MOIS par EMMANUEL HENNEQUIN
MINISTRY
AmeriKKKant
(Nuclear Blast/PIAS)
Metal indus
Sortie : 09.03.2018
Ces dernières années, les brico-
lages de Ministry n’ont pas tous
impressionné de la même manière.
Al Jourgensen s’amusait sans doute
– espérons-le – mais tous ses disques
ne nous ont pas laissé cette impres-
sion de bouillonnement inventif.
Galvanisante, elle avait largement
dominé jusqu’à Animositisomina
(même si certains disques étaient
un peu durs, à l’instar de Dark Side
Of The Spoon). Ça avait continué,
mais à un moindre degré, peut-être
parce que le son de Ministry don-
nait le sentiment de se vulgariser,
se répéter, sur la trilogie de la
période 2004/2007. Relapse, lui, fit
l’effet d’un faux pas (2012), mais
son successeur, From Beer To
Eternity, a offert en 2013 un
Ministry plutôt assuré, contrôlé par
Jourgensen et son regretté copain
de jeu Mike Scaccia. Sortie honora-
ble… Car oui, honnêtement, on crut
un moment à la sortie. Al avait
perdu son pote, sa femme n’était
plus là, et le projet Surgical Meth
Machine le faisait se replier sur ses
propres moyens, sans dessiner de
ligne très claire. En 2017,
Jourgensen a dépassé toute incerti-
tude : il lui fallait revenir au moment
où Donald Trump prenait les pre-
miers rôles. Entre nous, difficile
d’imaginer une Amérique électrice
de Trump sans son Jourgensen. La
mèche chic et floue, les dreads cra-
doques : il y a deux USA. Mais si
Trump en a pris pour son grade
depuis son élection (prêterait-il le
flanc, le bougre ?), nous aurions été
déçus de voir Jourgensen enfoncer
aujourd’hui les portes ouvertes – et
ce n’est pas spécialement ce qu’il fait,
heureusement, avec AmeriKKKant.
Alors, bien sûr, cette Amérique qui
refoule un peu de l’intérieur,
Jourgensen irait bien lui faire ren-
dre boyau (le tord-boyau, il en a
connu un rayon). Mais aujourd’hui,
le frontman de Ministry est moins
dans l’idée de rire d’un personnage
que de poser une question socié-
tale, ce qui a tout de même plus de
profondeur. Il focalise moins sur la
personnalité – décriée – d’un
homme Président que sur ce qui l’a
amené là : le « système », comme il
l’appelle lui-même. Procédant de la
sorte et personnalisant moins le
propos, Al joue moins la carte de la
facilité qu’à l’époque de The Last
Sucker. L’initiative méritait d’être
soutenue. Scaccia n’est plus là, mais
d’autres camarades de jeu, familiers
pour certains, se sont regroupés
autour du leader pour donner un
nouvel élan créatif à Ministry.
AmeriKKKant est le fruit de la
famille recomposée après la mort
de Mike. Surgical Meth Machine fai-
sait part d’un bricolage, et si
AmeriKKKant a quelque chose de
plus typé, nous en sommes toujours
là : ce line-up de Ministry aime bri-
coler, Jourgensen ne le freine pas
et cela se ressent particulièrement
sur la première partie de l’album.
Elle fait large place à des réso-
nances lentes, voire discrètement
dub (on sait l’amour de Jourgensen
pour le genre), des tempi mid/low
et des orchestrations fournies à un
niveau qui surprend. Cette mixture
expérimentale, mais typée, consti-
tue certainement la plus grosse sur-
prise du disque. Pour autant, elle
ne contient pas les morceaux qui
marquent le plus. Le pouvoir phy-
sique de Ministry réside davantage
dans ce qui suit. Avec « Antifa » ou
le très killing-jokien « Wargasm »
(ah, ce refrain, jouissif, les copains !),
Ministry accouche de plusieurs nou-
veaux tubes et se donne un à-pro-
pos nouveau. Le groupe renaît ainsi
après la mort de Scaccia, ce qui
peut être considéré comme un
hommage. A mi-chemin entre appé-
tits expérimentaux et désir de
maintenir une certaine trademark,
le propos de Ministry s’avère rassé-
rénant et inventif, tout en conser-
vant certains principes : rigueur et
martialité de la rythmique, domina-
tion des guitares. C’est un Ministry
identitaire et réfléchi, pensif plus
que revanchard. Une route se rou-
vre. Reste simplement à trouver
quelqu’un qui fasse de vraies belles
pochettes. Mais pour le reste, fran-
EMMANUEL HENNEQUIN . . . . . . . . . .8
chement, merci !
 ABONNEMENT 1 an = 71,50 €
11 numéros + 11 CDs

ABONNEMENT 2 ans = 138 €

1 cd ou dvd au choix

22 numéros + 22 CDs
2 cds ou dvds au choix
ABONNEMENT 1 an = 55 €
ABONNEMENT 2 ans = 100 €
Offre sans cd / sans dvd
CD IRON MAIDEN BLU-RAY BLACK SABBATH BLU-RAY JEFF BECK
The Book Of Souls : Live Chapter The End Live At The Hollywood Bowl
Offert par WARNER Offert par EAGLE VISION Offert par EAGLE VISION

CD TRUST
Live Hellfest 2017

BLU-RAY SLIPKNOT CD ARCH ENEMY CD TRIVIUM

Offert par VERYCORDS
Toutes ces offres sont valables dans la limite des stocks disponibles

Day Of The Gusano Will To Power The Sin And The Sentence
Offert par EAGLE VISION Offert par CENTURY MEDIA Offert par WARNER/ROADRUNNER

CD ALICE COOPER CD DEEP PURPLE CD STONE SOUR CD MACHINE HEAD

Paranormal Infinite Hydrograd Catharsis
Offert par EAR/EDEL Offert par EAR/EDEL Offert par WARNER/ROADRUNNER Offert par NUCLEAR BLAST

Bulletin ou photocopie à retourner à ROCK HARD ABONNEMENT - Service Clients - 12350 Privezac - Tél.: 05 65 81 54 86 - Fax : 05 65 81 55 07 - contact@bopress.fr

OUI, je m’abonne à Rock Hard pour 71,50 € pour 1 an (Union Européenne 104,50 € - DOM 85 € - TOM 120 €)
Headcharger
Cd ou dvd (dans l’ordre de préférence) : choix n°1 : choix n°2 :

OUI, je m’abonne à Rock Hard pour 138 € pour 2 ans (Union Européenne 204 € - DOM 165 € - TOM 235 €)
RH184

Cds ou dvds souhaités :

OUI, je m’abonne à Rock Hard sans CD / sans DVD pour 55 € pour 1 an (Union Européenne 90 € - DOM 75 € - TOM 100 €)

OUI, je m’abonne à Rock Hard sans CD / sans DVD pour 100 € pour 2 ans (Union Européenne 170 € - DOM 145 € - TOM 195 €)
Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .E-mail : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Code postal : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Ville : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél. (indispensable) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Mon abonnement débutera avec le magazine n° :

Cocher cette case s’il s’agit d’un réabonnement

je joins mon réglement par chèque à l’ordre de Grands Malades Editions

je règle par carte bancaire N° de carte : cryptogramme :

Date de fin de validité : / Signature indispensable :
ment ! Un retour tonitruant qui ne
pourra que ravir les amateurs d’un
genre dont les formations suédoises
semblent seules détentrices du secret
ultime. Histoire de bien faire les choses,
la bande a en plus eu la bonne idée
de rappeler l’artiste Christian
Wahlin (Necrolord) au pinceau.
GUILLAUME FLEURY . . . . . . . . . . . . . . .8
Quand les pentacles sont alignés !
PHIL CAMPBELL AND
THE BASTARD SONS
The Age Of Absurdity
(Nuclear Blast/PIAS)
Hard rock
Sortie : déjà disponible
Si la mort de l’icône Lemmy
Kilmister induisait logiquement la
mise en bière définitive de
Motörhead, nous espérions bien
que les deux survivants de la der-
nière mouture du trio le plus
bruyant du monde poursuivraient,
individuellement ou ensemble, leur
carrière musicale. Si le batteur sué-
dois Mikkey Dee est parti rejoindre
Scorpions, le guitariste Phil
Campbell n’a pas eu à chercher bien
loin pour se constituer un nouveau
groupe : depuis 2013 déjà, le célè-
bre six-cordiste gallois donne, pour
le « fun », des concerts de reprises
en compagnie de ses fils Todd (gui-
tare), Tyla (basse) et Dane (batterie)
et de leur ami chanteur Neil Starr
(ex-Attack! Attack!). Après la publi-
cation d’un EP exclusivement consti-
tué de covers, Phil et ses bâtards de
fils se sont décidés à franchir une
étape : passer à la composition et
accoucher d’un authentique mani-
feste de rock‘n’roll à la fois très tra-
ditionnel dans la forme et d’une
grande variété sur le fond. Produit
de main de maître par Romesh
Dodangoda (Motörhead, Bullet For
My Valentine, Funeral For A Friend),
The Age Of Absurdity mélange allè-
grement différentes influences
allant du blues rock (le lent et
typique « Dark Days », ponctué de
soli d’harmonica du plus bel effet)
au punk (le bref et efficace
« Dropping The Needle », assuré
pied au plancher) en passant par le
heavy metal, le hard rock moderne
et le grunge (« Skin And Bones »,
l’air de rien, ramène à l’âge d’or de
la scène de Seattle). L’ombre impo-
sante de Motörhead s’impose par-
fois sur le recueil, et notamment sur
le titre « Gypsy Kiss » qui n’aurait
pas dépareillé sur Aftershock (2013)
ou Bad Magic (2015). Avec ce vrom-
bissement de basse en ouverture,
on s’attend même à entendre l’ini-
mitable voix de Lemmy démarrer
MON ALBUM DU MOIS par DJUL
OCEANS OF SLUMBER
The Banished Heart
(Century Media/Sony Music)
Metal progressif
Sortie : 02.03.2018
Combien de disques doivent leur
réussite artistique à un échec per-
sonnel de son (ou de ses) auteur(s) ?
Beaucoup, sans doute, et The
Banished Heart fait incontestable-
ment partie d’entre eux. Alors que
son prédécesseur, Winter (2016),
avait ouvert la voie d’une certaine
notoriété aux Américains, leur très
affable batteur et leader Dobber
Beverly s’est retrouvé en pleine
séparation au retour de la tournée
accompagnant ce disque. C’est
« naturellement » que l’écriture de
ce nouvel opus est marquée de
cette épreuve. La chanteuse
Cammy Gilbert l’a accompagné sur
ce chemin de croix, et c’est donc à
un véritable voyage vers la rédemp-
tion que nous convie ce disque. Si
l’on aura rarement vu un groupe
livrer l’origine d’un disque de
manière aussi crue dans sa biogra-
phie, ce dernier a surtout su en
faire quelque chose musicalement.
Car c’est l’essentiel : là où Winter
sonnait trop souvent comme un
patchwork d’influences très bigar-
rées sur lequel les grands écarts
stylistiques pouvaient laisser dire à
certains (pas nous !) qu’on nageait
en plein mauvais goût, il devient
sur le couplet ! Le vocaliste Neil
Starr livre une performance très
honnête, quoique manquant parfois
d’un brin de mordant et de variété.
C’est d’ailleurs là que le bât blesse :
si les compositions revendiquent
des influences différentes, la pro-
duction, très propre, tend à aplanir
le tout, à gommer toute aspérité.
On songe davantage à Black Stone
Cherry ou à Alterbridge qu’au hard
rock des années 70 ou 80. De
même, nous doutons que les com-
positions, si bien exécutées soient-
elles, aient le potentiel pour s’extraire
difficile de porter un tel jugement
sur The Banished Heart. Et la raison
tient dans la qualité des quelques
pièces maitresses qui forment les
étapes marquantes de l’album. Du
très construit et agressif « The
Decay Of Disregard », gorgé de
blast beats et de riffs de guitares
nerveux qui tutoient le death et le
black metal, celui-ci bascule ensuite
vers des horizons plus mélodiques,
à l’image du morceau-titre qui
flirte avec Nightwish et Within
Temptation (le final), par ses ambi-
tions symphoniques et des parties
de piano très présentes. On note
vite la similitude avec The Great
Discord dans l’approche, à savoir
une formation hybride avec, à sa
tête, une chanteuse qui, plutôt que
d’opérer dans le « metal sympho-
nique à robes en satin », propose
un discours plus original et
moderne. Mélodiquement, les
Texans ont aussi franchi un cap, à
l’image du très dynamique « A Path
To Broken Stars », dont la seconde
partie est portée par un refrain qui
semble écrit pour incarner le mot
« épique ». Il en va de même sur le
sublime exercice doom aussi abs-
trait qu’habité que constitue « No
Color, No Light », sur lequel Cammy
échange magnifiquement avec Tom
Englund d’Evergrey, et qui consti-
tue aussi un très intelligent contre-
point stylistique et rythmique au
reste du disque. Quelques inter-
ludes permettent de souffler entre
ces très longues compositions
(« Her In The Distance » au piano,
« The Watcher » aux claviers analo-
giques, ou encore le folk americana
en mode déglingué de « Wayfaring
Stranger »). C’est bien dans sa
capacité à faire naître l’émotion que
Oceans Of Slumber n’est plus le
même, transfiguré pour le meilleur
sur ce qui s’apparente à une lente
DJUL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8
rémission personnelle et musicale.
de la masse des sorties contempo-
raines et laisser une impression dura-
ble aux auditeurs. Bon disque néan-
moins, qui sent l’amour du rock,
s’écoute confortablement et devrait
ravir les fans du jeu de Mister
Campbell (visiblement très en
forme), mais ne dégage pas une per-
FRANÇOIS BLANC . . . . . . . . . . . . . .6,5
sonnalité renversante pour autant.
SATAN JOKERS
Symphönïk Kömmandöh
(Brennus Music/Socadisc)
Metal à la sauce classique
Sortie : déjà disponible
Dans notre numéro 180, nous publi-
ions le courrier d’un certain Florent
Gauthier. Ce dernier nous disait
avoir grandi en étant nourri à deux
mamelles : la musique classique, via
sa mère, au conservatoire, et le
heavy metal, avec ses potes de
bahut. « Aujourd’hui, poursuivait-il,
je suis devenu compositeur. Les
cours de Pierre Boulez au Collège de
France pendant deux ans, le
Conservatoire National Supérieur de
Musique de Paris (CNSMDP), et me
voilà à écrire de la musique contem-
poraine et à en vivre (éditer, jouer,
enregistrer...). Et puis, en janvier
2016, Satan Jokers fait un concert à
Luynes (à côté d’Aix en Provence) et
ma jeunesse réapparaît soudainement
tandis que je fredonne « Les Fils du
Metal », « Pas Fréquentables », etc.
Je décide donc de ne pas rater l’oc-
casion de rajeunir (j’ai bientôt 48
ans) et ma rencontre avec Renaud
Hantson va déclencher ce que vous
aurez entre les mains dans quelques
mois : un Best Of symphonique
de Satan Jokers dont je suis l’arran-
geur, le chef d’orchestre ». Ce disque,
intitulé Symphönïk Kömmandöh, est
aujourd’hui entre nos mains. Déjà, il
s’agit bien d’un Best Of à peine
déguisé (même si manquent à l’appel
quelques incontournables comme
« Derrière Les Portes Closes » et
« En Partance Pour l’Enfer », qui se
prêtaient peut-être moins à l’exer-
cice de la relecture) car il pioche, au
fil de ses seize titres, à la source de
tous les albums du groupe, de Les
Fils du Metal (1983) à Sex Opera
(2014), en passant par Trop Fou Pour
Toi (1984), SJ 2009 (2009), Fetish X
(2009), Addictions (2011) et
Psychiatric (2013), sans oublier l’EP
III (1985). Ceci est une très bonne
chose car cette sélection permet de
jauger l’évolution – très sensible –
qui a été celle des Jokers depuis la
reformation du groupe. Un groupe
actuel, composé de Renaud Hantson
(chant), Michael Zurita (guitare),
Pascal Mulot (basse) et Aurel
Ouzoulias (batterie), qui distille, en
2018, un metal plus que pertinent
ayant gagné en dimension à la grâce
de thématiques intéressantes (addic-
MON ALBUM DU MOIS par MORGAN RIVALIN
POP EVIL
Pop Evil
(eOne/SPV/Season Of Mist)
Rock/metal
Sortie : 16.02.2018
Découvert par beaucoup en 2014,
lors de son premier concert français
(c’était en première partie de Five
Finger Death Punch au Bataclan),
Pop Evil est connu depuis bien plus
longtemps aux USA. Le combo du
Michigan formé en 2008 s’apprête
en effet à sortir son cinquième
album studio, un disque qu’il a
sobrement choisi d’intituler Pop
Evil. Il est tentant d’imaginer que ce
choix fait écho à son large brassage
d’influences qui, au bout du
compte, nous offre un album multi-
facettes fidèle aux « fonds de jeux »
respectifs de chaque membre de la
formation. Si les vocaux rappés
n’avaient jamais vraiment été à la
fête au sein de Pop Evil, son chan-
teur/fondateur Leigh Kakaty n’a
jamais caché son amour du hip hop.
Les fans du combo ne seront donc
pas surpris outre mesure d’enten-
dre le frontman rapper sur les
furieux « Colors Bleed » et « Art Of
War ». La comparaison avec le flow
hargneux de Zack de la Rocha
(RATM) vient forcément à l’esprit et
l’hommage est totalement assumé
tions, fétichisme, troubles psychia-
triques, sex opera, etc.). On saluera
également ce line-up aux allures de
« supergroup » qui commence à épa-
ter par sa stabilité car c’est là une
qualité de plus en plus rare. Mais
vous l’aurez deviné, l’intérêt premier
de ce nouvel album est qu’il propose
des relectures symphoniques de
titres aussi divers et variés que
« Quand Les Héros Se Meurent »,
« Fetish X », « Sorcier », « Phobies »
et « Pas Fréquentables ». Alors, le
résultat ? SJ ne bénéficiant pas des
finances d’un Kiss, d’un Metallica ou
d’un Deep Purple, il a fait avec « les
moyens du bord » : à savoir, beau-
coup de curiosité, d’envie, et un
enthousiasme débordant. L’aventure,
par Kakaty. Globalement, Pop Evil
muscle très sensiblement son jeu
sur ce nouvel opus propulsé par
« Waking Lions », superbe single
doté d’un riff et d’un break
maousse costauds et d’un refrain
ultra accrocheur. Du travail de
pros ! Avec ses sonorités indus-
trielles très à propos, « Ex
Machina » tape également en plein
dans le mille. 99 % des groupes
mondiaux ne peuvent que rêver de
sortir des compos aussi bien fice-
lées, mais sur chacun de ses
disques, Pop Evil parvient encore et
toujours à les aligner. Respect. Ceci
étant dit, l’aspect « multi-facettes »
précédemment évoqué peut égale-
ment désarçonner. Les premières
mesures de « Nothing But Thieves »
ne dépareilleraient pas sur un
album de Nine Inch Nails,
« Rewind » a un air de Red Hot Chili
Peppers et « God’s Dam » sonne
comme la rencontre de Pearl Jam et
d’Incubus. Au passage, ce dernier
abrite un clin d’œil, lui aussi
assumé, au célèbre « Rosanna » de
Toto. On le doit à la musicienne
Hayley Cramer (batterie), dernière
recrue de Pop Evil arrivée courant
2016. Au rayon « surprises du
chef », le côté très pop/radio
friendly de « A Crime To
Remember » ou encore de « When
We Were Young » aura certaine-
ment raison de plus d’un métalleux
ayant la fâcheuse impression
d’avoir atterri sur les ondes d’une
radio mainstream. Tout ça peut dés-
arçonner, oui, mais pour peu que
les (nombreux) groupes évoqués
dans cette chronique vous parlent,
il vous sera bien difficile de bouder
votre plaisir à l’écoute de Pop Evil :
beau voyage musical doublé d’un
MORGAN RIVALIN . . . . . . . . . . . . . . . .8
arsenal de hits.
en effet, valait d’être tentée, le
répertoire du groupe français étant
suffisamment varié (du plus heavy
des titres à la saveur plus mélo-
dique, voire plus pop, d’autre de
ses chansons) pour que l’expérience
se justifie. Sous la direction de
Florent Gauthier, un orchestre pho-
céen s’est donc livré à l’exercice, et
le résultat est souvent étonnant,
mais paradoxalement pas détonant.
Ça fonctionne à plein, par exemple,
sur des titres comme « VIP HIV »
(avec Steph Buriez de Loudblast en
guest), « U.S.A. (Union Sacrée des
Assassins) », « Ma Vie Sans », « Club
6 Sex 6 » et « Obsession ». Violons,
violoncelles, contrebasse, sections
de bois et de cuivres, mais aussi per-
cussions apportent une richesse et
une puissance supplémentaires à un
répertoire dont on se dit, à l’écoute,
qu’il a toujours eu pour lui – et c’est
probablement là sa qualité première
– ce sens du refrain qui fait mouche
(« Phobies » avec son excellente
intro rehaussée d’un piano et son
solo de guitare d’une impeccable
fluidité, « Appétit Pour
l’Autodestruction », « Substance
Récompense », etc.). On prend donc
grand plaisir à redécouvrir ces chan-
sons ainsi remaniées, même si – et
c’est probablement la seule « faute
de goût » de cet album (nous
aurions mieux « noté » sans cela) – le
mixage met probablement trop en
avant la rythmique au détriment des
orchestrations, qui en deviennent
parfois un peu timides. Pour le
reste, voilà un plaisir coupable (est-
ce une première en France pour un
groupe de metal ?) qui comblera
avant tout les fans du groupe et qui
prouve, une fois de plus,
qu’Hantson ne s’interdit aucun che-
PHILIPPE LAGEAT . . . . . . . . . . . . . . .7,5
min de traverse. Très intéressant.
SAXON
Thunderbolt
(Militia Guard/Silver Lining/Warner)
Heavy metal
Sortie : déjà disponible
On le sait depuis longtemps, on
peut même dire quasiment depuis
le début de sa carrière : à quelques
très rares exceptions, jamais Saxon
ne nous a foncièrement déçus. Un
exploit lorsque l’on sort son 22ème
album en pratiquement 40 ans de
carrière ! Et pourtant, c’est un fait :
sans jamais avoir retourné sa veste
(hormis, peut-être, avec Destiny en
1988, certainement son album le
plus chahuté), sans non plus cher-
cher à évoluer de façon drastique, le
gang anglais a toujours réussi à
contenter ses fans les plus fidèles.
Ils savent que chaque nouvelle livrai-
son va contenir son quota de perles.
Mais aussi de très bons titres qui ne
sortiront jamais du lot car laissés de
côté sur scène, et également
quelques passages plus dispensa-
bles dont même les amateurs les
plus fondus auront du mal, d’ici
quelques années, à se rappeler
l’existence. Il n’empêche que la
constance de Saxon se doit d’être
louée, cette valeur sûre sur laquelle
on peut se reposer ayant quelque
chose de rassurant. Thunderbolt
s’inscrit donc, vous l’aurez deviné,
dans une excellente moyenne. Au
rayon des « potentiels classiques en
devenir », « Nosferatu (The Vampire
Waltz) », sombre, dramatique et
bénéficiant d’une grosse orchestra-
tion, se pose comme l’un des plus
sérieux concurrents au trône. Du
coup, la version « épurée » propo-
sée en fin d’album n’a que peu d’in-
térêt. Le superbe hommage au trio
classique de Motörhead, « They
Played Rock’n’Roll », sorte d’hy-
bride parfait entre le style débridé
des huns du metal et celui plus léché
de Saxon, prend un sens encore plus
profond depuis le récent décès de
Fast Eddie Clarke qui s’en est allé
rejoindre Lemmy et Phil Taylor pour
aller foutre un beau bordel là-haut.
« The Secret Of Flight », aux gui-
tares travaillées et avec la voix de
Biff doublée durant les couplets,
prend aussi aux tripes. Les très
agressifs « Sniper », avec un riff qui
prend d’entrée à la gorge, « A
Wizard’s Tale » et « Speed
Merchants » (une ode aux cinglés de
vitesse sur route) s’inscrivent aussi
dans une excellente moyenne. Mais
l’une des vraies surprises de
Thunderbolt s’intitule « Predator » :
il s’agit d’un duo entre Biff et Johan
Hegg, le hurleur d’Amon Amarth,
qui use ici de son organe le plus gut-
tural et fait contrepoids avec les
vocalises plus mélodiques de Byford
sur un mid-tempo de bonne facture,
mais pas génial pour autant.
« Thunderbolt », transpercé d’excel-
lents soli (une constante sur cet
album, chapeau bas à Paul Quinn et
Doug Scarratt !), ouvre l’album avec
efficacité, mais peut-être avec
moins de fureur et d’originalité que
la plupart des titres éponymes ayant
émaillé la carrière des Anglais,
presque tous devenus des clas-
siques incontournables. Enfin, au
rayon des morceaux corrects mais
pas des plus marquants, « Sons Of
Odin » et la grosse basse de Nibbs
Carter, et « Roadie’s Song », au mes-
sage éminemment respectable mais
au contenu un peu téléphoné, nous
semblent un poil moins accrocheur
dans cet ensemble par ailleurs fort
solide. Saxon, malgré un compteur
affichant quatre décennies de com-
bat (Biff a tout de même soufflé pas
moins de 67 bougies en ce début
d’année !), semble donc bien loin
d’être mûr pour la casse. C’est que
ce genre de roc, on n’a pas envie de
le voir partir, même s’il faudra bien,
un jour, se faire une raison… Un mot
tout de même sur la pochette :
autant Paul Gregory, l’artiste en
charge de la quasi-totalité des
visuels ayant orné les albums de
Saxon depuis Crusader (1984), nous
a rarement déçus, mais cette nou-
velle peinture, limite bâclée, fait un
peu tâche dans la discographie du
combo. Une faute de goût qui ne
doit en aucun cas vous priver du
BENJI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7,5
plaisir de savourer Thunderbolt.
SHINING
X-Varg Utan Flock
(Season Of Mist)
Depressive black metal
Sortie : déjà disponible
Depuis la sortie de V–Halmstad
(2007), un chef d’oeuvre comme il
en sort peu, Shining a toujours
bénéficié de notre bienveillance.
Les albums qui ont suivi ont été
inégaux, mais jamais mauvais.
Redefining Darkness (2012) nous
avait même franchement épatés. A
cela s’ajoute le plaisir toujours
renouvelé de discuter épisodique-
ment avec le chanteur Niklas
Kvarforth, éternel provocateur qui
voudrait se faire passer pour une
sale épave mais ne parvient jamais à
masquer son intelligence et son
humour corrosif. Hélas, trois fois
hélas, X-Varg Utan Flock ne pourra
pas jouir de la même tolérance que
ses prédécesseurs. En cause : trop
de recyclage, trop d’idées déjà
creusées à moult reprises, et surtout
une forme d’auto-caricature qui
commence sérieusement à se voir
comme le nez au milieu de la figure.
Ce dixième album des Suédois
serait-il mauvais ? Bien sûr que non !
Du Shining moyennement inspiré
restera toujours bien plus intéres-
sant que vingt prétendants au trône
de fond de tiroir. Il n’empêche que,
sur ce coup, et après deux ans et
demi d’attente consécutifs à un
avant-dernier album en demi-teinte,
nous espérions beaucoup de cet
opus annoncé comme une vraie
pierre angulaire dans la carrière du
MON ALBUM DU MOIS par CHARLELIE ARNAUD
TURBONEGRO
III : Rock’n’Roll Machine
(Universal)
Glam punk hard rock
Sortie : déjà disponible
Nom de Dieu ! Si je m’attendais !
Turbonegro a toujours fait partie de
ces groupes dont les albums s’écou-
tent avec plaisir, de la party music
plutôt punky qui ne va pas chercher
bien loin mais qui, à coups de
refrains fédérateurs, finit par s’im-
primer durablement dans le cortex.
Le Party Animals de 2005 en est
probablement le meilleur exemple.
Ainsi, lorsque cette Rock’n’Roll
Machine est tombée sur nos télé-
scripteurs, ma réaction immédiate a
été : « Oh chouette ! Ça va mettre
un peu de bonne humeur dans
cette journée d’hiver maussade. »
Jamais je n’aurais imaginé être tant
en-deçà de la vérité car il me faut
bien vous le dire (et puis, c’est mon
métier) : ce disque est une putain
de BOMBE ! L’album de hard rock
inattendu, celui qu’on n’espérait
plus, celui qui vous fait faire des
petits bonds partout chez vous en
l’écoutant, celui qui, à pas loin de
50 balais, vous fait faire du play-
back devant la glace comme quand
vous en aviez 15, celui qui vous
donne envie d’inviter le soir même
douze potes pour faire une soirée
headbanging, et celui (devenu raris-
sime) dont vous connaîtrez les
textes par cœur pour la mi-avril.
Une vraie espèce en voie de dispa-
rition. Rien que l’intro « Chrome
Ozone Creation » et son hommage
à peine voilé au 1984 de Van Halen
mettent direct dans l’ambiance,
groupe, de la trempe d’Halmstad
justement. Il faudra donc encore
attendre. Dommage, car lorsque
Kvarforth chante de sa belle voix
grave et claire comme sur le break
de « Jag Ar Din Fiende », l’état de
grâce revient aussi sec, parfaitement
mis en valeur par la production 4
étoiles d’Andy LaRocque. Mais noyée
dans d’innombrables gueulantes
avant que ne déboule un « Well
Hello » digne du titre le plus carton
que Danko Jones aurait écrit depuis
dix ans. L’hymne éponyme de l’al-
bum qui vient ensuite porte si bien
son nom que même son vocoder sur
le refrain passe tout seul, tout
comme les « Oi ! » scandés qui nous
ramènent tout droit au « T.N.T. »
d’AC/DC (encore un énorme clin
d’œil, évidemment). A ce stade,
déjà, vous ne vous déplacez plus
dans votre salon qu’en duckwalk
avec une guitare fictive dans les
mains. Et tout l’album se déroule
sur le même mode : « Skinhead
Rock’n’Roll » et son riff de synthé à
la « Jump ! » qui commence sur les
mêmes paroles que le « Shot In The
Dark » d’Ozzy Osbourne, le tellu-
rique « Hot For Nietzsche » (ses riffs
à la AC/DC et son calembour hila-
rant avec « Hot For Teacher » de
Van Halen), et ainsi de suite jusqu’à
la toute dernière minute de ce
disque jouissif (nous vous laissons
tout de même volontairement
quelques surprises à découvrir par
vous-mêmes). Comme l’explique
The Duke Of Nothing (chant) dans
notre interview de ce mois,
Turbonegro a eu à cœur de remet-
tre du fun et de l’hédonisme dans le
rock’n’roll, le vrai, celui qui braille
fort, se marre, fait la fête et parle
de cul (« Let The Punishment Fit The
Behind »). Et putain, que ça fait du
bien ! Rock’n’Roll Machine est un
hymne à la joie qui se consomme
sans modération, l’une de ces
bulles de plaisir de vivre trop rares
qu’on savoure avec un immense
sourire lorsqu’elles se présentent.
Fun et subversif sans jamais être
relou, Turbonegro est un groupe d’une
intelligence rare qui a tout compris
au rock’n’roll. Si vous me croisez au
Hellfest ou ailleurs cette année, il
n’est pas exclu que je porte une
veste en toile de blue jeans estam-
pillée Turbojugend (et un boa
autour du cou, parce qu’il faut ce
qu’il faut). En attendant, ce disque
ne suscite qu’un seul conseil : Go
and fuckin’ get it !!! (Ndt : « Fichtre,
CHARLELIE ARNAUD . . . . . . . . . . . . . .9
cours te le procurer dare-dare ! »)
maintenant connues par coeur, et
surtout dans une alternance systé-
matique « black metal frondeur en
mid tempo suivi d’arpèges acous-
tiques », la musique du combo com-
mence sérieusement à tourner en
rond et à devenir par trop prévisi-
ble. Encore faut-il admettre qu’il est
impossible de confondre ce groupe
avec aucun autre : il a créé son style,
est le seul à le pratiquer, et se
reconnaît dans la seconde. Mais ce
sera trop peu à mettre au crédit de
X-Varg Utan Flock, qui restera pour
nous « un album parmi d’autres », et
donc une semi-déception lorsqu’on
sait à quel point le bonhomme peut
être touché par le génie à inter-
valles réguliers. Sans rancune
CHARLELIE ARNAUD . . . . . . . . . . . . . . .7
Niklas ! On se revoit dans deux ans ?
STONE BROKEN
Ain’t Always Easy
(Spinefarm/Universal)
Rock/metal
Sortie : 02.03.2018
Tout comme il existe des films de
genre, il y a des albums tout aussi
codifiés : du reggae, du heavy, du
thrash ou encore… du Nickelback.
L’ombre du groupe canadien tant
aimé et tant détesté plane claire-
ment au-dessus de Ain’t Always Easy,
deuxième opus d’un Stone Broken
qui revendique plus volontiers l’in-
fluence de Shinedown, Black Stone
Cherry, Halestorm et Alter Bridge. Le
groupe britannique, fondé en 2013
dans les environs de Birmingham,
sait comment s’y prendre pour façon-
ner des titres efficaces. En écoute sur
le sampler de ce mois, « Worth
Fighting For » est un bon exemple
de tube en puissance, mais dans le
genre, « Heartbreak Away » n’est pas
mauvais non plus. On le sait, en stu-
dio, il est possible de « tout faire »,
mais le chanteur/guitariste Rich Moss
a la clairvoyance de ne pas parer sa
voix de trop « d’effets de manche ».
Stone Broken propose des compos
qui ne succombent pas aux sirènes
de la surproduction et qui, normale-
ment, devraient passer le test de la
scène avec brio. Pourtant, tout n’est
pas rose au tableau. Après un démar-
rage pied au plancher, Ain’t Always
Easy offre quelques compos déjà
beaucoup entendues et très conve-
nues (la ballade « Home », la chanson
de lover « Anyone », etc.). Il prend
également fin sur un titre assez anec-
dotique : « The Only Thing I Need »,
ou quand Stone Broken ne casse pas
des briques ! Heureusement, une
simple écoute de « Let Me See It
All » suffit à redonner la banane tant
ce titre semble être un véritable
hymne en puissance pour tout bon
club de striptease. En bons journa-
listes de terrain, nous irons le vérifier
MORGAN RIVALIN . . . . . . . . . . . . . .6,5
dès que possible !
TAX THE HEAT
Change Your Position
(Nuclear Blast/PIAS)
Rock
Sortie : déjà disponible
Il peut paraître étonnant de retrouver
un groupe comme Tax The Heat sur
Nuclear Blast… En effet, les collègues
de label de ce quatuor oeuvrent
généralement dans un style plus dur,
si ce n’est plus extrême, alors que Tax
The Heat est un combo qui donne
dans le rock pur, celui qui dérive
directement du blues. Mais ce n’est
surtout pas nous qui allons nous en
plaindre, dans la mesure où la qualité
est au rendez-vous et qu’il aurait
donc été dommage que ces composi-
tions ne parviennent pas jusqu’à nos
cages à miel. Le deuxième album de
ces Anglais, après un remarqué Fed
To The Lions paru en 2016, s’inscrit
dans l’héritage des groupes comme
Cream ou Montrose, mais aussi
Aerosmith (pour sa capacité à accou-
cher de morceaux directs, à l’instar
du titre éponyme), accordant une
part importante à la guitare, en ryth-
mique comme en solo. En ce sens,
Tax The Heat fait irrémédiablement
penser à Rival Sons (écoutez donc
« Playing With Fire » ou encore « The
Symphony Has Begun », magnifique
conclusion de cette galette), sans pour
autant atteindre l’intensité émotion-
nelle – exceptionnelle il faut dire – de
ces derniers sur toute la longueur.
Mais le groupe de Bristol a plus d’une
corde à son arc, explorant aussi des
terrains plus « modernes » et évo-
quant alors l’œuvre de groupes
comme le Maroon 5 des débuts (« All
That Medecine » avec sa rythmique
saccadée et un placement du chant
typique à la Adam Levine, que le tim-
bre d’Alex Veale évoque d’ailleurs par-
fois, ou encore « Wearing A
Disguise »), Jack White (à l’instar du
groovy « Taking The Hit »), voire
Queens Of The Stone Age. Et ce
mélange d’influences diverses, dans
une mise en son assez brute et très
efficace, donne au final un album varié
qui peut séduire un public assez large,
notamment en raison de l’indéniable
talent de composition des protago-
nistes. Change Your Position transpire
l’intégrité et l’amour du rock originel,
et il est exécuté avec beaucoup de
conviction. On se prend alors à écou-
ter ce disque encore et encore, avec
un plaisir intact. Une vraie belle sur-
prise donc, qui laisse espérer un troi-
sième album qui pourrait être totale-
ment dévastateur si Tax The Heat par-
vient à focaliser un peu son propos et
à développer totalement sa personna-
STEPHANE AUZILLEAU . . . . . . . . . . .7,5
lité.
VISIONS OF ATLANTIS
The Deep & The Dark
(Napalm Records/Season Of Mist)
Metal symphonique
Sortie : 16.02.2018
En 2013, l’écoute de Ethera, cin-
quième opus des Autrichiens de
Visions Of Atlantis, nous avait tout
simplement consternés. A l’évidence,
le quintet, confus et à bout de souffle,
traversait une sévère crise identitaire
et n’avait aucune idée quant à la
direction musicale qu’il convenait
d’emprunter. Il n’a donc guère été
surprenant de voir Thomas Caser, bat-
teur et seul survivant de la première
mouture du combo, mettre tout le
monde à la porte et renouer avec
d’anciens et précieux collaborateurs :
le claviériste Chris Kamper, le guita-
riste Werner Fiedler et le bassiste
Mike Koren. Même si les trois acolytes
susnommés n’ont pas fait long feu et
sont déjà repartis (faut suivre !), nul
doute que ce retour aux sources a fait
le plus grand bien à Visions Of
Atlantis qui, fort d’une nouvelle
équipe enthousiaste et motivée, nous
offre enfin l’album que nous atten-
dions de lui : un pur manifeste de
metal symphonique à chant féminin,
dans la droite lignée de ce qui se fai-
sait à l’aube du nouveau millénaire.
The Deep & The Dark ravira à coup
sûr les nostalgiques des premiers
opus d’Edenbridge, Xandria et
Amberian Dawn. Sans prétention, le
groupe nous renvoie à l’époque bénie
où le metal symphonique avait le vent
en poupe (« The Silent Mutiny ») et où
les clones de Nightwish trustaient
massivement les bacs des disquaires.
Sa durée appropriée (quarante
minutes) et son recours exclusif à des
formats courts font de cet album un
recueil plaisant à écouter de bout en
bout, qui ne brille pas le moins du
monde par son originalité (en dépit
de la touche folk/celtique de « Ritual
Night » et de l’usage d’une gamme
orientale sur « Book Of Nature »),
mais qui donne à découvrir une for-
mation épanouie mettant tout son
cœur à l’ouvrage. Cerise sur le
gâteau, le duo vocal formé par notre
compatriote Clémentine Delauney
(Exit Eden, ex-Serenity) et Siegfried
Samer (Dragony) fonctionne très bien,
certains refrains étant particulière-
ment réussis (« Return To Lemuria »,
l’épique et enlevé « Words Of War »).
En dépit d’une production somme
toute modeste (les voix auraient
gagné à être mieux traitées), The
Deep & The Dark, dont le but avoué
est de renouer avec la passion et l’in-
nocence qui émanaient des trois pre-
miers disques de l’incontournable
Nightwish, nous présente un metal
symphonique suranné et doucereux,
mais pas désagréable du tout. Les
nostalgiques y trouveront certaine-
FRANÇOIS BLANC . . . . . . . . . . . . . . . . .7
ment leur compte !
VOODOO CIRCLE
Raised On Rock
(AFM/Season Of Mist)
Hard rock
Sortie : déjà disponible
L’infatigable Alex Beyrodt (Primal
Fear, Silent Force, Rock Meets
Classics) est de retour. Il faut dire que
le guitariste prodige ne reste jamais
longtemps les deux pieds dans la
même santiag ! Mais si la productivité
du bonhomme ne faiblit pas, il y a eu
un peu de mouvement du côté de son
Voodoo Circle puisque le vocaliste
David Readman est aujourd’hui rem-
placé par Herbie Langans (les deux
chanteurs sont d’ailleurs associés au
sein d’Almanac). En bref, Beyrodt a un
bon carnet d’adresses et sait s’entou-
rer, puisque Langans assure carré-
ment sur ces titres de pur hard rock
accrocheur. Un hard qui lorgne cette
fois-ci peut-être un peu plus du côté
des années 80 qu’auparavant (« Just
Take My Heart »), même si la patte de
Led Zeppelin (le riffing de « You
Promised Me Heaven » semble tout
droit sorti d’un ampli de Jimmy Page
période IV) et Whitesnake est tou-
jours clairement présente dans le tra-
vail des Allemands. Côté production,
la technique de Jacob Hansen
(Volbeat, U.D.O) est rodée depuis si
longtemps qu’il n’est pas surprenant
de retrouver ici un son très propre et
précis, faisant la part belle aux lignes
vocales ainsi qu’aux envolées de gui-
tare. Il y a quelques années, Beyrodt
nous confiait qu’il se sentait particu-
lièrement à l’aise en écrivant des mor-
ceaux typés hard rock, ceux-ci ne lui
demandant que peu d’efforts en com-
paraison de titres plus heavy metal. Il
est permis de le croire tant l’ensemble
coule de source ici, avec une maîtrise
technique au diapason. Difficile, donc,
d’imaginer un passionné des albums
précédents perdre son enthousiasme
à l’écoute de ce cinquième effort ! Du
côté des moments les plus mémora-
bles, l’épique « Dreamchaser », qui
oscille durant plus de 6’30 entre des
guitares « Ritchie Blackmoriennes » et
un chant évoquant Dio, décrocherait
sûrement la palme. Composé en 2008
pour le premier effort du groupe, ce
titre a longtemps attendu avant d’ar-
river à maturation et glisse immédia-
tement l’auditeur dans un pantalon à
pattes d’eph. De quoi mesurer toute
l’étendue de la maîtrise technique
insolente du guitariste. Un peu à part,
« Unknown Stranger » sonne très
Accept/Judas Priest, mais s’imbrique
parfaitement à l’ensemble (en même
temps, ce n’est pas comme si l’in-
fluence était Morbid Angel). En bref,
peu de choses à ajouter aux chro-
niques des albums précédents : le
groupe poursuit son bonhomme de
chemin, ajoutant ci et là quelques
petites nouveautés (comme l’utilisa-
tion d’une talk box sur « Higher
Love ») et propose, comme toujours,
GUILLAUME FLEURY . . . . . . . . . . . . .7,5
du très bel ouvrage !
WE SELL THE DEAD
Heaven Doesn’t Want You And Hell
Is Full
(earMUSIC/Verycords/Warner Music)
Heavy doomy
Sortie : 23.02.2018
« Et si nous montions un projet heavy/
doom dans lequel nous implique-
rions un animateur 3D/scénariste ? Il
 pourrait nous concocter des clips
mettant en scène les membres du
groupe comme les personnages d’une
histoire se déroulant à l’époque
victorienne… Tiens, nous pourrions
être des croque-morts véreux déro-
bant des cadavres pour les vendre à
la découpe ! Le groupe pourrait
s’appeler ‘Nous vendons les morts’
et l’album s’intitulerait ‘Le paradis
ne te veut pas et l’enfer est déjà
plein’ ! Vous en pensez quoi les
gars ? Ça tient grave la route, non ?
Les gars, vous êtes là ??? » En toute
honnêteté, le pitch de départ de We
Sell The Dead fait penser à ces idées
géniales qui surgissent dans les rêves
et qui, une fois réveillé, semblent
déjà l’être un tout petit peu moins.
Mais faisons abstraction de « l’em-
ballage » et concentrons-nous sur
l’essentiel : la musique. Ainsi que le
guitariste suédois Niclas Engelin (In
Flames, Engel, Gardenian) le dit
dans l’interview en ces pages, c’est
une grosse envie de doom qui est le
point de départ de We Sell The
Dead. Ça s’entend dès le très bon
« Echoes Of An Ugly Past », titre de
plus de six minutes ouvrant Heaven
Doesn’t Want You… et qui évoque
particulièrement le Black Sabbath
période Headless Cross (1989). Ce
côté doomy s’estompe toutefois au
fil de l’album. « Leave Me Alone »
lorgne du côté de Alice In Chains et
sur le single plutôt enjoué qu’est
« Turn It Over » (en écoute sur le
sampler de ce mois), le chanteur
Apollo Papathanasio (Spiritual
Beggars) se rapproche sensiblement
de ce qu’il faisait avec Firewind. La
voix enfumée du chanteur, très bon
(comme d’habitude), l’orgue et ces
ambiances à couper au couteau (on
parle de dépeceurs de cadavres, ne
l’oublions pas !) réussissent à instaurer
une atmosphère qui colle bien au
concept. Certaines fulgurances
sortent du lot, comme ce « Too Cold
To Touch » à la « Soldier Of Fortune »
(Deep Purple). Pas étonnant de la
part d’un guitariste fan de Ritchie
Blackmore (Engelin) et d’un chanteur
souvent comparé à David Coverdale
90
(Papathanasio) ! Il en faudrait cepen-
dant un peu plus pour marquer
durablement l’auditeur qui aura ten-
dance à revenir surtout à « Echoes
Of An Ugly Past ». Accessoirement,
le concept ambitieux de We Sell The
DVD
Dead mérite qu’on lui décerne un
prix d’originalité. Voilà qui doit lui
faire une belle jambe… à vendre en
MORGAN RIVALIN . . . . . . . . . . . . . .6,5
pièces détachées !
WHITESNAKE
The Purple Tour
(Rhino)
En 2015, David Coverdale, frustré
de ne pas avoir mené à bien une
tournée envisagée avec Ritchie
Blackmore et ayant déjà retravaillé
plusieurs titres de sa carrière au sein
de Deep Purple dans l’éventualité
de nouveaux concerts avec l’impré-
visible Homme en Noir, décide de se
réapproprier ce répertoire. Il réen-
registre ainsi pas moins de quinze
titres issus de ses trois albums avec
le Pourpre Profond, à savoir Burn
(1974), Stormbringer (1974) et Come
Taste The Band (1975), afin de publier
The Purple Album. La tournée qui
suit se base pour moitié sur ce
répertoire, pour l’autre sur quelques
grands classiques de Whitesnake.
C’est encore le cas lors des dix
dates effectuées au Royaume-Uni en
première partie de Def Leppard (et
avec Black Star Riders). Le concert
de Birmingham, à la Genting Arena
LE BOOK QUI TUE
Chaque mois, un musicien vous recommande
son livre de chevet. Puisse cette rubrique vous
donner envie, amis lecteurs, de vous plonger
(ou vous replonger) dans un bon bouquin au
son d’un chouette disque. Un plaisir rare. Dans
ce numéro, c’est James LaBrie, chanteur de
Dream Theater, qui s’y colle.
Aminata (de Lawrence Hill)
Je lis énormément, et certaines œuvres m’ont
beaucoup touché et inspiré, mais je crois que si
je dois retenir un livre qui m’émeut toujours
autant lorsque je le relis, c’est Aminata (Ndlr :
son titre original est The Book Of Negroes) de
Lawrence Hill, un auteur canadien. Il raconte
l’histoire d’une femme incroyable, Aminata
Diallo, qui est capturée dans un village
d’Afrique de l’Ouest pour servir d’esclave aux
Etats-Unis. Dans un premier temps, elle doit
marcher des semaines entières afin atteindre
son point d’embarquement pour la Caroline
du Nord et vivre une dramatique révolte sur
le bateau qui la transporte. Arrivée aux USA,
elle travaille dans une plantation, où elle apprend à lire et à
écrire l’anglais grâce à certains de ses compagnons d’infortune.
ble est heureusement atténué par
la qualité de l’image, excellente, et
un montage sobre, loin de l’hystérie
propre à certaines prestations
récentes captées sur DVD. La version
de « Soldier Of Fortune », avec Joel
Hoekstra (ex-Nightranger, Trans-
Siberian Orchestra) à la guitare
acoustique et David pour une belle
(ex-N.E.C., là même où Black performance vocale, tout en feeling,
Sabbath a filmé The End, son DVD reste le moment le plus pur de cette
« d’adieu ») le 12 décembre 2015, prestation « à l’américaine » qui
est immortalisé en audio et en s’éloigne toujours plus des aspirations
vidéo, et sort aujourd’hui sous le titre hard/blues des débuts du combo.
ô combien original de The Purple Une époque où « Ain’t No Love In
Tour. Nous l’avons constaté depuis The Heart Of The City », la reprise de
sa reformation en 2003, David Bobby Bland, faisait vraiment passer
Coverdale n’hésite pas à se faire le frisson, ce qui n’est plus vraiment
grandement aider par tous ses col- le cas dans cette configuration boostée
lègues musiciens sur ses parties de aux stéroïdes et perdant ainsi une
chant, que ce soit lors des couplets grande partie de son charme.
ou des refrains, qu’il laisse d’ailleurs « Mistreated » échappe cependant à
de plus en plus souvent au public le ce jugement, notamment grâce au
soin d’entonner, se contentant de lui beau solo de Reb Beach, plus sobre
tendre le micro. Lorsqu’on assiste à qu’un Hoekstra poseur au possible.
un show dans la moiteur d’une salle Du côté des titres de Whitesnake,
ou l’ambiance d’un festival (et croyez- RAS, aucune rareté n’étant proposée.
nous, nous en avons vu un paquet), Notons tout de même quatre titres
ça passe plutôt bien, même si parfois, audio supplémentaires proposés en
on ne peut s’empêcher de grimacer. bonus, dont « Keep On Moving »,
Mais ici, plus que sur tout autre DVD seul rescapé de Come Taste The
édité depuis ce retour, de nombreuses Band, et « Lostanotes », un solo de
parties de chant paraissent vraiment guitares aussi long qu’inutile. Bref,
suspectes. Et comme dirait l’autre, si vous voulez écouter ces classiques
quand il y a un doute, il n’y a pas de de Purple chanté par l’un des mem-
doute… Ça sent à plein nez les bres originaux qui participait gran-
« arrangements » en studio (ceci dement aux chœurs aux côté d’un
expliquant probablement en partie Coverdale alors intouchable, allez
le long délai entre l’enregistrement donc voir Glenn Hughes au festival
et la commercialisation du DVD), et Rock’Aisne de Chauny le 7 avril pro-
l’on se demande un peu trop souvent chain : promis, là-bas, pas besoin
ce qui a réellement été chanté/joué d’un quelconque stratagème…
ce soir-là… Ce sentiment désagréa- BENJI
Elle se marie à un autre esclave, dont elle a un fils,
mais est ensuite séparée de ce dernier et vendue à
une autre personne, Solomon Lindo. Je vous laisse
découvrir la suite, palpitante. Ce roman a été
inspiré par un document réel, Le Livre des Nègres,
qui, en 1783, a recensé 3.000 esclaves ou anciens
esclaves ayant servi le Roi d’Angleterre pendant la
Guerre d’Indépendance, et qui, en récompense,
ont pu passer des Etats-Unis vers le Canada. C’est
une épopée trépidante et je vous garantis que
quiconque lit ce bouquin sera très ému par
l’histoire d’Aminata. Sur mon dernier album solo,
Impermanent Resonance (2013), je m’en suis
inspiré pour écrire le titre « Destined To Burn ».
Ses paroles reprennent le synopsis du livre et
traitent des actes parfois inconcevables que
certaines personnes peuvent être amenées à
commettre au nom des questions de races :
traitements dégradants, atrocités, négation de la
dignité et de la moralité des êtres, etc. Sans
compter le fait de voler aux gens leurs biens, mais
aussi ce qu’ils ont de plus cher : leur famille et leurs
enfants. En outre, ce livre nous invite à changer
notre perspective sur la vie en nous encourageant à
apprécier ce que nous avons et à ne pas être
perpétuellement obsédé par ce qui nous manque.
J’espère vous avoir donné envie de le lire car il fait partie de ces
œuvres qui font de vous une autre personne.

Ces dernières années, le vinyle revient en force,
ce qui n’est pas pour nous déplaire. Chaque mois,
dorénavant, nous vous proposons donc une sélection des
plus chouettes nouveautés. C’est parti, mon kiki !
Dans le Rock Hard 182, nous vous parlions
de la réédition de First Album, le premier
opus de ZZ Top paru en 1971, en vinyle
noir 180 grammes. Depuis le 26 janvier
2018, les deux albums suivants, Rio
Grande Mud (1972) et Tres Hombres
(1973), sont également disponibles chez
Warner Bros en format LP soigné. Le
premier, sublime avec sa ribambelle de
classiques (« Francine », « Just Got Paid »,
« Chevrolet »), bénéficie d’un tirage
limité en vinyle de couleur « marron
boue » qui s’accorde parfaitement à sa
pochette, tandis que le second, plus
culte encore (on parle tout de même de
standards comme « Waitin’ For The
Bus », « Jesus Just Left Chicago », « La
Grange », « Beer Drinkers & Hell
Raisers », « Precious And Grace », etc.), a
droit à une pochette ouvrante (comme
son pressage original) et un vinyle de
couleur verte, façon « Jalapeno »
(comme précisé sur l’étiquette qui orne
son visuel), variété mexicaine de
piment… vert. Très, très sympa que ces
Android (liens ci-dessous). Cette version dématérialisée est enrichie à l'aide de liens cliquables
Une rubrique de Philippe Lageat
clins d’œil par rapport au choix des
couleurs de ces rééditions ! Dans le
même ordre d’idée, Atlantic/Warner
poursuit son travail de relooking avec
Alice Cooper et le Alice Cooper Band.
Les vinyles colorés de Pretties For You
(1969), Love It To Death (1971) et Special
Forces (1981) avaient déjà eu les honneurs
de cette rubrique. Ils sont aujourd’hui
suivis d’éditions limitées d’Easy Action
(1970 – avec pochette ouvrante et vinyle
doré), mais aussi de l’indispensable Killer
(1971 – avec pochette calendrier et
vinyle rouge et noir) et du légendaire
Retrouvez également ROCK HARD tous les mois sur vos smartphones et tablettes Apple et
que vous pourrez ouvrir sans quitter l'application. Bonne lecture !
Apple / AppStore :
http://bit.ly/appleRH
Welcome To My Nightmare (1975 – avec
pochette intérieure comprenant les
paroles et vinyle violet), ce dernier nous
permettant de réécouter avec délice
des classiques vénéneux comme « The
Black Widow », « Only Women Bleed »,
« Department Of Youth » et « Cold
Ethyl ». Il est toutefois à noter que ces
trois disques sont ici présentés en vinyle
140 grammes et non 180. Toujours
friand de proposer un maximum de
collectors, Nuclear Blast a pris pour
habitude de publier ses nouveautés en
formats LPs divers et variés, dont certains
sont exclusifs à son site nuclearblast.de.
Le bon exemple du mois est assurément
le récent Catharsis de Machine Head
qui, probablement parce qu’il s‘agit du
premier album du groupe ricain sur le
label allemand, se voit décliné, avec
pochette ouvrante et insert 4 pages, en
une multitude de supports vinyles.
Jetez plutôt un œil sur la liste qui suit :
Double LP picture-disc, double LP vinyle
noir, double LP vinyle bleu foncé (300
copies), double LP vinyle rouge/blanc
(500 copies) et même édition Deluxe
comprenant un Digipak avec CD de
l’album, DVD, double LP vinyle trans-
parent, double LP live vinyle transparent
(également fourni en CD) et poster ! Ce
sont les collectionneurs du combo de
Robb Flynn qui vont manger des pâtes !
Enfin, toujours chez Nuclear Blast,
n’omettons pas The Age Of Absurdity,
le premier album de Phil Campbell
And The Bastard Sons. Doté d’une
pochette ouvrante et d’un livret 12
pages, ce disque est bien sûr disponible
en simple vinyle noir, mais aussi en vinyle
transparent (300 copies) et bicolore
rouge/blanc (500 copies). Encore de
belles pièces de collection pour débuter
2018 en fanfare ! Y
Android / Google Play :
http://bit.ly/androidRH
1 2

Tailles
Tailles
S/M/L/XL/XXL
S/M/L

3
4

Tailles
Tailles
S/M/L/XL/XXL
S/M/L/XL/XXL

5
6

Tailles
7/8 ans ou
Tailles 9/11 ans
S/M/L/XL/XXL
 7 8
9
Tailles
Taille unique
S/M/L
ajustable
Tailles
S/M/L

10

Tailles : 3/4 ANS

ou 5/6 ANS 11 12 13 14
Bulletin ou photocopie à retourner à ROCK HARD T-SHIRT 12350 Privezac - Tél.: 05.65.81.54.86
PRIX DES T-SHIRTS HOMME & DES GIRLY : 20 € (ENVOI SIMPLE) OU 24 € (ENVOI RECOMMANDÉ)

Pour commander plus de t-shirts, photocopiez ce bon ou recopiez le.

T-SHIRTS KIDS & JUNIOR : 14 € (ENVOI SIMPLE) OU 18 € (RECOMMANDÉ) - CASQUETTE : 18 € (ENVOI SIMPLE) OU 24 € (RECOMMANDÉ)
RH184

N° MODÈLE CHOISI : TAILLE : NOMBRE : SOUS TOTAL : .............

N° MODÈLE CHOISI : TAILLE : NOMBRE : SOUS TOTAL : .............

TOTAL :
N° MODÈLE CHOISI : TAILLE : NOMBRE : SOUS TOTAL : .............
€
N° MODÈLE CHOISI : TAILLE : NOMBRE : SOUS TOTAL : .............
Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .E-mail : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Code postal : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Ville : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél. (indispensable) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

je joins mon réglement par chèque à l’ordre de Grands Malades Editions

je règle par carte bancaire N° de carte : cryptogramme :

Date de fin de validité : / Signature indispensable :

 Partenaire favori des plus grands tourneurs français !

& & RADICAL & GERARD DROUOT

& PRODUCTIONS

CRADLE OF FILTH
+ MOONSPELL
ANVIL + TRANCE
25/02 - Paris, Trabendo
14/02 - St Etienne, Le Fil AT THE DRIVE IN
CANNIBAL CORPSE
+ DEATH FROM ABOVE
POEM + DAMNATIONS DAY 28/02 - Paris, Olympia
28/02 - Paris, Boule Noire + THE BLACK DAHLIA MURDER
07/03 - St Etienne, Fil
DARK TRANQUILLITY + EQUILIBRIUM
BUTCHER BABIES 30/03 - Metz, Gueulard Plus
18/03 - Paris, Basckstage O Sullivans ANGRA + OPERATION MINDCRIME 08/04 - Lyon, CCO STEVEN WILSON
+ HALCYON WAY + AVELION 09/04 - Bordeaux, Rockschool Barbey 06/02 - Lyon, Transbordeur
PERSEFONE 24/03 - Vauréal, Forum 15/04 - Marseille, Moulin 12/03 - Paris, Olympia (complet !) Indisponible
24/03 - Lyon, Ninkasi Kao 16/04 - Colmar, Grillen en abonnement
31/03 - Paris, Petit Bain ANNIHILATOR 13/03 - Lille, Théâtre Sébastopol
28/10 - Paris, Petit Bain THE DEAD DAISIES 07/07 - Paris, Olympia. Indisponible en
MISANTHROPE 30/10 - Grenoble, Illyade 06/05 - Paris, Trabendo + THE NEW ROSES abonnement
MELTED SPACE 31/10 - Toulouse, Metronum
04/04 - Paris, Boule Noire DEMONTOOL
A PERFECT CIRCLE 17/03 - Eragny, Covent Garden
PUNISH YOURSELF 26/06 - Paris, Olympia (complet !) + BOMBERHEAD + MALEMORT
+ CHRISTIAN DEATH 31/03 - Ste-Geneviève des Bois, Bières à l'Affût
+ VOLKER ARCA BLUES + FENRIR
19/04 - Paris, Boule Noire 27/04 - Annecy, Arcadium 28/04 - Dourdan, Pitchtime

AVATAR DIAMOND HEAD + BLAZING WAR

14/03 - Paris, Trianon MACHINE + YANN ARMELLINO &
EL BUTCHO + THRASH GANGSTERS
BLACK LABEL SOCIETY 31/03 - Chalons En Champagne, Contrepoint
& VERYSHOW 08/03 - Paris, Bataclan
09/03 - Toulouse, Bikini DOOL (ex-membres de THE DEVIL'S
BLACK RAIN
BLOOD) + HARAKIRI FOR THE SKY
05/03 - Nantes, Ferrailleur
EUROPE
27/09 - Paris, Trianon
02/03 - Haute-Savoie, Marnaz Metal Fest 06/03 - Paris, Backstage
03/03 - Grenoble, Ampérage 07/03 - Colmar, Grillen
06/03 - St. Jean de Védas, Secret Place
07/03 - Limoges, Espace El Doggo DOWNFALL OF GAIA + HAMFERD
08/03 - Nantes, Scène Michelet 15/02 - Colmar, Grillen
17/02 - Paris, Glaz’Art
BLOOD AGES + BLACK MARCH
+ SUPREMACY + PRAETORIAN DOWNLOAD Brétigny Sur Orge, B.A. 217
24/02 - L’Isle Bouzon, Ecole des Filles 15/06 - OZZY OSBOURNE + GHOST +
POWERWOLF + CONVERGE + ELUVEITIE,
BULLY ON ROCKS 5 etc.
25/05 - Bully Les Mines avec DAN BAIRD & 16/06 - MARILYN MANSON + THE OFFS-
WITHIN TEMPTATION
16/11 - Paris, Zénith
HOMEMADE SIN + THIRTEEN STARS +
BIGFOOT
PRING + TURBONEGRO + MESHUGGAH
+ ULTRA VOMIT, etc.
26/05 - Bully Les Mines avec LITTLE CAESAR + 17/06 - FOO FIGHTERS + THE HIVES + DEAD SCORPIONS
NITROGODS + RAGDOLL + OVERDRIVERS CROSS + SLAVES + FRANK CARTER, etc. 26/06 - Paris, AccorHotels Arena
18/06 - GUNS N’ROSES, etc.
CARPENTER BRUT + YOUTH CODE
02/03 - Poitiers, Confort Moderne EARTHLESS + COMET CONTROL G3 avec JOE SATRIANI + ULI JON
03/03 - Toulouse, Bikini 07/04 - Paris, Petit Bain ROTH + JOHN PETRUCCI
04/03 - Montpellier, Rockstore 15/04 - Lyon, Amphithéâtre Cité Internationale
13/03 - Lyon, Transbordeur EXODUS 16/04 - Boulogne-Billancourt, Seine Musicale
17/03 - Bruxelles (BE), Ancienne Belgique 05/06 - Paris, Petit Bain 17/04 - Bordeaux, Metropole Arena
20/03 - Lille, Splendid 26/06 - Pagney, Chez Paulette 18/04 - Toulouse, Zénith
24/03 - Paris, Olympia 27/06 - Lyon, CCO 19/04 - Nantes, Zénith
23/04 - Lille, Zénith
DAGOBA + PYOGENESIS EVANESCENCE (TOURNÉE 'SYNTHESIS'
23/03 - Savigny-Le-Temple, Empreinte AVEC ORCHESTRE) GRETA VAN FLEET
28/03 - Paris, Grand Rex 28/03 - Paris, Etoiles (COMPLET !)
NIGHTWISH
10/11 - Paris, AccorHotels Arena
DAN REED + DANNY VAUGHN
(TYKETTO) FU MANCHU GUNS N’ROSES
07/03 - Cergy, Pacific Rock 02/03 - Paris, Trabendo 26/06 - Bordeaux, Stade Matmut Atlantique
 ABONNEMENT
Envoyez vos dates à : redaction@rockhard.fr Si vous vous abonnez et que vous êtes
& Alternative Live intéressé par une place de concert,
outre les shows proposés en page 98,
THE FACELESS vous pouvez choisir n’importe quelle
& 10/02 - Backstage BTM, PARIS date indiquée dans un cadre doré
& 11/02 - Bordeaux, BT59 en le précisant clairement sur votre
14/02 – Lyon, Warmaudio
coupon.
PUP + ALBATROSS
20/02 - Paris, Maroquinerie
21/02 - Lyon, Warmaudio
& 106DB
AS IT IS + WSTR + COURAGE MY
LOVE
05/03 – Paris, Backstage By The Mill

DANCE GAVIN DANCE

+ VEIL OF MAYA
DROPKICK MURPHYS 10/03 – Paris, Backstage By The Mill
CRADLE OF FILTH + FLOGGING MOLLY
+ MOONSPELL + GLEN MATLOCK OF MICE & MEN
14/02 - St Etienne, Le Fil 19/04 – Paris, Trabendo
18/02 - Limoges, John Lennon 16 & 17/02/2018 - Paris, Zénith
19/02 - Paris, Machine (Indisponible en SLEEPING WITH SIRENS
abonnement) 24/05 – Paris, Machine du Moulin Rouge
20/02 - Lile / Oignies, Métaphone KORPIKLAANI + ARKONA THE CHRIS SLADE TIMELINE
21/02 - Besançon, Rodia + HEIDEVOLK + TROLLFEST ASKING ALEXANDRIA 04/03 - Differlange (Luxembourg), Aalt
20/02 - Paris, Elysée Montmartre 08/06 – Paris, Trabendo Stadhaus
CANNIBAL CORPSE 15/03 - Verviers (Belgique), Spirit Of 66
+ THE BLACK DAHLIA MURDER LES VEGAS (Soft White 23/03 - Istres, Usine
01/03 - Grenoble, Belle Electrique Underbelly/pré-B.Ö.C) PHIL CAMPBELL & THE BASTARD SONS
24/03 - Lax, Festival Lax'n'Blues
02/03 - Toulouse, Metronum 22/03 - Paris, New Morning 20/04 - Savigny le Temple, Empreinte
07/03 - St Etienne, Fil smac 19/03 - Paris, Boule Noire 21/04 - Le Mans, 24h du Mans
23/03 - Freyming Merlebach,
08/03 - Caen, Cargo! 23/03 - Vauréal, Forum 22/04 - Saint Agathon, Grande Ourse
Espace Théodore Gouvy
25/03 - Pagney Derrière Barine, Chez Paulette 11/05 - Pagney derrière Barine, Chez Paulette
PLEYMO 12/05 - Fismes, Hard Rock Legend Festival
HEAVEN SHALL BURN + AUGUST 23/03 - Paris, Trianon (complet !) 13/05 - Colmar, Grillen
LEAVES’EYES + MAYAN 09/06 - Penmarc'h, Festl God Save The Kouign
BURNS RED + WHITECHAPEL, etc. + ALMANAC 31/03 - Paris, Olympia
27/03 - Paris, Machine du Moulin Rouge PRETTY MAIDS + PINK CREAM 69 16/06 - Couvelon, Festival Musicool
18/04 - Paris, Petit Bain 22/06 - Clisson, Hellfest
20/03 - Grenoble, Ilyade
HELLFEST avec IRON MAIDEN 21/03 - Savigny-Le-Temple, Empreinte 05/07 - Embrun, Festival Trad'in
MACHINE HEAD 21/07 - Châteauneuf Les Martigues, Blue
+ JUDAS PRIEST + AVENGED 22/03 - Rouen, 106 Beach Biker Fest
SEVENFOLD + MEGADETH 24/03 - Paris, Bataclan
PRIMORDIAL + MOONSORROW
+ NIGHTWISH + HOLLYWOOD 26/03 - La Rochelle, Sirène
+ DER WEG EINER FREIHEIT GLENN HUGHES
VAMPIRES + MARILYN MANSON 27/03 - Bordeaux, Rocher de Palmer
14/04 - Paris, Trabendo
+ SKARLETT RIOT
+ LIMP BIZKIT + PARKWAY DRIVE 08/04 - Toulouse, Bikini 07/04 - Chauny, Rock Aisne Festival
+ BODY COUNT + STONE SOUR + 09/04 - Marseille, Cabaret Aléatoire
RHAPSODY (avec Luca & Fabio pour le
DEFTONES + A PERFECT CIRCLE, 15/04 - Lyon, Transbordeur
20ème anniversaire)
WISHBONE ASH
etc. 24/04 - Strasbourg, Laiterie
16/03 - Paris, Trabendo 16/03 - Compiègne, Ziquodrome
22+23+24/06 - Clisson 17/03 - Toulouse, Metronum 17/03 - Istres, l'Usine
MEGADETH 20/03 - Brest, Vauban
HYPNO5E 04/07 - Strasbourg, Laiterie
ROBERT PLANT & THE SENSATIONAL 21/03 - Ballan-Miré (Tours), Parenthèse
05/05 - Paris, Café de la Danse 05/07 - Lyon, Transbordeur
SPACE SHIFTERS 22/03 - Paris, New Morning
23/07 - Paris, Salle Pleyel 23/03 - Fleyming-Merlebach, Esp. Théodore Gouvy
IGORRR 25/03 - Pagney Derrière Barine, Chez Paulette
MODERN LIFE IS WAR + CRO-MAGS ROCK N’METAL avec DYNASTY
01/06 - Rambouillet, Usine à Chapeaux 22/06 - Paris, Petit Bain
+ LONEWOLF + MARC QUEE
IRON MAIDEN + FATHER MERRIN + GANG + THE TEMPERANCE MOVEMENT
MYRATH + MANIGANCE LAST PROPHECY + THORGEN + 01/04 - Bordeaux, Rocher de Palmer
24/06 - Clisson, Hellfest 08/03 - Paris, Trabendo
05/07 - Paris, AccorHotels Arena (complet !!!) DRAKKAR + ATRYSTOS + SPIRIT 02/04 - Nantes, Ferrailleur
24/03 - Montauban, Rio Grande
06/07 - Paris, AccorHotels Arena 05/03 - Fismes, Salle des Fêtes
25/03 - Narbonne, DB THERION + IMPERIAL AGE
30/03 - Nantes, Ferrailleur + NULL POSITIV
KING CRIMSON ROTTING CHRIST + CARACH
15-16/11 - Paris, Olympia ANGREN + SVART CROWN 16/02 - Paris, Trabendo
NICKELBACK 12/02 - Marseille, Jas'Rod
26/06 - Paris, Palais des Sports TOTO (TOURNEE « 40 ANS »)
SATYRICON 15/03 - Lille, Zénith
NINE INCH NAILS 07/03 - Paris, Machine 25/03 - Marseille, Dôme
25/06 - Paris, Olympia 26/03 - Toulouse, Zénith
SCORPIONS (TOURNEE « CRAZY WORLD ») 27/03 - Lyon, Halle Tony Garnier
OBITUARY 22/03 - Nantes, Zénith 30/03 - Paris, Seine Musicale
14/03 - Paris, Trabendo
24/03 - Clermont-Ferrand, Zénith
16/03 - Lyon, CCO Villeurbanne TRIVIUM + POWER TRIP
26/03 - Limoges, Zénith
17/03 - Mulhouse, Noumatrouff 13/04 - Paris, Bataclan + VENOM PRISON
28/03 - Toulon, Zénith
30/03 - Rouen, Zénith
ORPHANED LAND 04/04 - Bruxelles (Belgique), Forest National UGLY KID JOE
+ SUBTERRANEAN MASQUERADE 26/06 - Paris, AccorHotels Arena 05/05 - Paris, Bataclan
27/02 - Paris, Petit Bain + IN VAIN + AEVUM
28/06 - Pérouges, Printemps de Pérouges
28/02 - Nantes, Ferrailleur + IN VAIN + AEVUM ULTRA VOMIT
ROCK’N FESTIVAL avec Glenn 04/03 - Montpellier, Secret Place + IN VAIN
Hugues + Derek Forbes + + AEVUM SEPULTURA + OBSCURA + FIT 13/10 - Paris, Olympia
Skarlett Riot - Morgan Ji - Edgar 17/03 - Pagney-derrière-Barine, Chez Paulette
FOR AN AUTOPSY+ GOATWHORE
07/04 - Chauny 20/03 - Paris, Elysée Montmartre YES
+ ATLANTIS CHRONICLES 30/03 - Paris, Olympia
 N°1 - 6,50 € avec CD N°10 - 6,50 € avec CD N°11 - 6,50 € avec CD N°12 - 6,00 € sans CD N°15 - 6,50 € avec CD N°16 - 6,50 € avec CD N°17 - 6,50 € avec CD N°18 - 6,50 € avec CD N°19 - 6,50 € avec CD

SANS CD

N°20 - 6,50 € avec CD N°23 - 6,50 € avec CD N°24 - 6,50 € avec CD N°26 - 6,50 € avec CD N°27 - 6,50 € avec CD N°28 - 6,50 € avec CD N°30 - 6,50 € avec CD N°31 - 6,50 € avec CD N°32 - 6,50 € avec CD

N°35 - 6,50 € avec CD N°37 - 6,50 € avec CD N°42 - 6,50 € avec CD N°43 - 6,50 € avec CD N°45 - 6,50 € avec CD N°46 - 6,50 € avec CD N°49 - 6,50 € avec CD N°50 - 6,00 € sans CD N°51 - 6,50 € avec CD

SANS CD

N°54 - 6,00 € sans CD N°56 - 6,50 € avec CD N°57 - 6,50 € avec CD N°59 - 6,50 € avec CD N°61 - 6,50 € avec CD N°63 - 6,50 € avec CD N°66 - 6,00 € sans CD N°67 - 6,50 € avec CD N°68 - 6,50 € avec CD

SANS CD SANS CD

N°69 - 6,50 € avec CD N°70 - 6,00 € sans CD N°71 - 6,00 € sans CD N°72 - 6,50 € avec CD N°73 - 6,50 € avec CD N°74 - 6,50 € avec CD N°75 - 6,50 € avec CD N°76 - 6,50 € avec CD N°78 - 6,50 € avec CD

SANS CD SANS CD

N°79 - 6,50 € avec CD N°80 - 6,50 € avec CD N°81 - 6,50 € avec CD N°82 - 6,50 € avec CD N°83 - 6,50 € avec CD N°84 - 6,00 € sans CD N°88 - 6,50 € avec CD N°89 - 6,50 € avec CD N°90 - 6,50 € avec CD

SANS CD

N°91 - 6,50 € avec CD N°93 - 6,50 € avec CD N°94 - 6,50 € avec CD N°96 - 6,00 € sans CD N°97 - 6,50 € avec CD N°98 - 6,50 € avec CD N°100 - 7,00 € avec CD N°101 - 6,50 € avec CD N°102 - 6,50 € avec CD

SANS CD

Bulletin ou photocopie à nous retourner à Rock Hard Anciens Numéros - Service clients - 12350 Privezac - Tél.: 05 65 81 54 86
RH184

E-mail : anciensnumeros@rockhard.fr - Les prix affichés s’entendent port compris (ajouter 1,00 € par numéro pour la CEE et la suisse et 2 € pour le reste du monde)
Indiquez le ou les numéros souhaités :

Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . .E-mail : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél. (indispensable) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Code postal : . . . . . . . . . . . . . . .Ville : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

je joins mon réglement par chèque à l’ordre de Grands Malades Editions
je règle par carte bancaire (min. 20 euros) - Date de fin de validité : /
N° de carte cryptogramme Signature indispensable :
En application de l’article 27 de la loi n°78-17 du 06-01-78, les informations qui vous sont demandées sont nécessaires au traitement de votre abonnement. Vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification des données qui vous concernent. Sauf accord de votre part
au service abonnement, ces informations ne pourront être utilisées par des tiers.
N°104 - 6,50 € avec CD N°105 - 6,50 € avec CD N°106 - 6,50 € avec CD N°107 - 6,50 € avec CD N°108 - 6,50 € avec CD N°111 - 8,00 € avec CD N°115 - 6,50 € avec CD N°116 - 6,50 € avec CD N°118 - 6,50 € avec CD

N°119 - 6,50 € avec CD N°120 - 6,50 € avec CD N°121 - 6,50 € avec CD N°123 - 6,50 € avec CD N°124 - 6,50 € avec CD N°126 - 6,50 € avec CD N°127 - 6,50 € avec CD N°128 - 6,50 € avec CD N°129 - 6,50 € avec CD

N°130 - 6,50 € avec CD N°131 - 6,50 € avec CD N°132 - 6,50 € avec CD N°134 - 6,50 € avec CD N°135 - 6,50 € avec CD N°136 - 6,50 € avec CD N°137 - 6,50 € avec CD N°138 - 6,00 € sans CD N°139 - 6,50 € avec CD

SANS CD

N°140 - 6,50 € avec CD N°142 - 6,50 € avec CD N°143 - 6,50 € avec CD N°144 - 6,50 € avec CD N°145 - 6,50 € avec CD N°146 - 6,50 € avec CD N°147 - 6,50 € avec CD N°148 - 6,50 € avec CD N°149 - 6,50 € avec CD

N°150 - 6,50 € avec CD N°151 - 6,50 € avec CD N°152 - 6,00 € sans CD N°153 - 6,50 € avec CD N°154 - 6,50 € avec CD N°155 - 6,50 € avec CD N°156 - 6,50 € avec CD N°157 - 6,50 € avec CD N°158 - 6,50 € avec CD

SANS CD

N°160 - 6,50 € avec CD N°163 - 6,50 € avec CD N°164 - 6,50 € avec CD N°165 - 6,50 € avec CD N°166 - 8,50 € avec CD N°167 - 6,50 € avec CD N°168 - 6,50 € avec CD N°169 - 6,50 € avec CD N°170 - 6,50 € avec CD

N°171 - 6,50 € avec CD N°172 - 6,50 € avec CD N°173 - 6,50 € avec CD N°174 - 6,50 € avec CD N°175 - 7,00 € avec CD N°176 - 7,00 € avec CD N°177 - 7,00 € avec CD N°178 - 9,50 € avec CD N°179 - 7,00 € avec CD

N°180 - 7,00 € avec CD N°181 - 7,00 € avec CD N°182 - 7,00 € avec CD

HS METALTHEQUE - 8,50 € HS AC/DC - 7,00 € HS HELLFEST 2009 - 6,00 € HS HELLFEST 2010 - 6,00 € HS HELLFEST 2014 - 6,00 € HS HELLFEST 2015 - 6,00 € HS HELLFEST 2016 - 7,00 € HS HELLFEST 2017 - 7,50 €
 ABONNEMENT 1 an = 71,50 €
11 numéros + 11 CDs

ABONNEMENT 2 ans = 138 €

1 concert au choix

OFFRE SPÉCIALE ABONNEMENT 2 ANS

HELLFEST PASS 3 JOURS
22 numéros + 22 CDs
2 concerts au choix

22-23-24 juin / Clisson (France)

Si vous vous abonnez et que
vous êtes intéressé par une
place de concert, outre les
22 N° Rock Hard (valeur : 143 €) shows proposés sur cette page,
+ Pass Hellfest 3 jours (valeur : 199 €) vous pouvez choisir n’importe
= 342 € 300 € quelle date indiquée dans un
cadre doré en pages 94/95 en le

OFFRE SPÉCIALE ABONNEMENT 2 ANS

330 € pour l’Europe, hors France) précisant clairement sur votre
coupon. Merci !

GRASPOP PASS 4 JOURS

EUROPE
21-22-23-24 juin / Dessel (Belgique)
22 N° Rock Hard (valeur : 143 €)
+ Pass Graspop 4 jours (valeur : 205 €)
(place en Cat. 2)
= 348 € 250 € 27/09/18 - Paris, Trianon

WITHIN TEMPTATION
280 € pour l’Europe, hors France)

16/11/18 - Paris, Zénith

Toutes ces offres sont valables dans la limite des stocks disponibles

(place debout)

STEVEN WILSON SCORPIONS

ROCK’N FESTIVAL
NIGHTWISH
(place en Cat. 2)

avec Glenn Hugues + Derek Forbes

(place en Cat. 2) 26/06 - Paris, AccorHotels Arena
13/03 - Lille, Théâtre Sebastopol
+ Skarlett Riot - Morgan Ji - Edgar
Offert par GERARD
Offert par GERARD 10/11/18 - Paris, AccorHotels Arena
07/04 - Chauny DROUOT PRODUCTIONS DROUOT PRODUCTIONS
Offert par VERYSHOW

Bulletin ou photocopie à retourner à ROCK HARD ABONNEMENT - Service Clients - 12350 Privezac - Tél.: 05 65 81 54 86 - Fax : 05 65 81 55 07 - contact@bopress.fr

OUI, je m’abonne à Rock Hard OFFRE HELLFEST pour 300 € pour 2 ans (Union Européenne 330 € hors France)

OUI, je m’abonne à Rock Hard OFFRE GRASPOP pour 250 € pour 2 ans (Union Européenne 280 € hors France)
RH184

OUI, jeKingm’abonne
Headcharger
Headcharger
Of The North
à Rock Hard pour 71,50 € pour 1 an (Union Européenne 104,50 € - DOM 85 € - TOM 120 €)

Cocher cette case s’il
s’agit d’un réabonnement
Concert souhaité (dans l’ordre de préférence) : choix n°1 : choix n°2 :

OUI, je m’abonne à Rock Hard pour 138 € pour 2 ans (Union Européenne 204 € - DOM 165 € - TOM 235 €)
Mes 2 concerts choisis :
Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .E-mail : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Code postal : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Ville : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél. (indispensable) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Mon abonnement débutera avec le magazine n° :

je joins mon réglement par chèque à l’ordre de Grands Malades Editions

je règle par carte bancaire N° de carte : cryptogramme :

Date de fin de validité : / Signature indispensable :