N°201

SEPT. 2019

MENSUEL - BELGIQUE 7,50 € - SUISSE 11 CHF - CANADA 11,50 $ - LUX. 7,50 €

P.04 LE SAMPLER HIGHWAY TO HEAVEN

hives D.J.
P.06 COURRIER DES LECTEURS Highway To Hell souffle ses quarante bougies. Highway To Hell,

© Jim Houghton / Arc

P.08 TOUTE PREMIERE FOIS : DESTRUCTION l’album impeccable qui, en 1979 et 80, a contribué à propulser
AC/DC au sommet du monde. Highway To Hell, le disque à la
P.10 LE PURGATOIRE : SCORPIONS pochette iconique montrant un Angus Young cornu tripotant sa
queue fourchue sous le regard goguenard de Bon Scott. Highway
P.12 TELEX : L’ACTU MÉTALLIQUE To Hell, enfin, le baroud d’honneur et le chant du cygne d’un
P.16 DE + EN + NET Bon qui disparaîtra moins de sept mois après la sortie de ce
classique instantané renfermant dix morceaux pour autant de joyaux. Highway To Hell,
P.18 DIX COMMANDEMENTS : RHAPSODY disions-nous, fête ses quarante ans, ce qui ne nous rajeunit pas. Alors, forcément, on
saute sur le somptueux coffret Highway To Heaven que Sony vient de mettre en bacs, gavé
P.20 I LIKE TO MOVIE, MOVIE : BORKNAGAR jusqu’à la gueule. Jugez-en plutôt : l’album en vinyle coloré, les concerts de Towson et
Londres 1979 répartis sur deux doubles vinyles 180 grammes avec pochette ouvrante
LES INTERVIEWS : (des shows radio au son immaculé), quinze démos extraites des archives secrètes du label
australien Albert qui permettent de mieux comprendre comment « Highway To Hell »,
P.22 AC/DC « Girls Got Rhythm », « Walk All Over You », « Shot Down In Flames » et « Night
P.28 KILLSWITCH Prowler » ont vu le jour, un DVD du show (présenté pour la première fois dans sa
version intégrale !) donné à Amsterdam le 13 juillet 1979, un livre de 60 pages truffé de
ENGAGE photos et cinq reproductions d’affiches de concerts d’époque. Oui, vous avez bien lu !
De quoi faire pleurer à chaudes larmes les fans du petit écolier et des regrettés Malcolm
P.30 BLACK STAR Young et Bon Scott… Bref, un achat indispensable ! Comment ça, je déconne ??? Heu,
ben oui, faut bien amuser la galerie. Parce que AC/DC n’est pas Saxon et encore moins
RIDERS Metallica : les coffrets de cinq kilos renfermant gâteries live, chutes de studio, inédits et
gadgets, il laisse ça aux autres. Et à vrai dire, on ne devrait pas être étonnés : il l’a
P.34 EQUILIBRIUM toujours fait. TOUJOURS. Ok, il y a bien eu les exceptions Bonfire (1997), Family
P.36 KORN Jewels (2005) et Plug Me In (2007), mais au regard de ce que le groupe aurait pu
(pourrait) faire, c’est carrément peanuts. Croyez-moi sur parole : les pontes de Sony ont
P.40 SUIVEZ LE GUIDE ! dû demander à Angus Young ce qu’il était possible de faire pour les quarante ans
d’Highway To Hell et le lutin leur a simplement répondu : « Rien ! Je n’aime pas les
THE CULT anniversaires ! Moi, ce qui m’intéresse, c’est la suite ! Alors, démerdez-vous ! ». Seulement
voilà, du côté de chez AC/DC, les nouvelles tombent au compte-gouttes. Il va y avoir un
P.42 ENTOMBED album, une tournée. C’est sur les tablettes. Mais quand Angus va-t-il ENFIN l’annoncer
officiellement ? Alors, chez Sony, aux USA, on s’est creusé la tête. On a conçu un
P.44 STUDIO-REPORT nouveau logo Highway To Hell à la hâte, on a déterré quelques titres live ultra connus
ALCEST et on a balancé ça aux fans au format digital. Ah oui, le site acdc.com s’est aussi fait une
joie de proposer à la vente tout, et surtout n’importe quoi, portant le fameux logo
P.46 CULT OF LUNA réactualisé : t-shirts, magnets, miroirs et panneaux en bois (65 euros tout de même pour
ces derniers). Du lourd de lourd… AC/DC, répétons-le, n’est pas Saxon et encore moins
P.48 KLONE Metallica. C’est vrai que les collectionneurs en sont pour leurs frais, d’autant que s’ils ont
un semblant de bon goût, ils refusent d’ouvrir le portefeuille pour les « nazeries »
P.51 HERRSCHAFT évoquées plus haut. Le fan, donc, reste sur sa faim. Sauf qu’AC/DC, Malcolm Young en
tête, a toujours vu les choses autrement : un album, s’il est bon, se suffit amplement à
P.52 THE 69 EYES lui-même. Le reste n’est qu’enluminures, au mieux, bouffonneries au pire. Pour ce
P.54 OPETH groupe unique, seule la musique compte. Highway To Hell, d’où ne dépasse aucun
morceau de gras, en est probablement la preuve la plus éclatante. Après tout, n’est-ce pas
P.58 MONOLORD là l’essentiel ? Nous vous racontons la genèse de ce diable d’album dans ce numéro.

P.60 SONATA ARCTICA Bonne lecture et bonne rentrée à vous !

P.62 STUDIO-REPORT PHILIPPE LAGEAT

BLIND GUARDIAN
P.64 SLIPKNOT 39, rue Santos Dumont - 75015 Paris
P.66 ALCATRAZZ Tél : 01.40.28.43.41 - Fax : 01.40.43.02.98
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P.72 GIGS YOUR ASS ! Rédaction : Charlélie Arnaud, Stéphane Auzilleau, Benji, François Blanc, Emmanuel Hennequin,
Julien Monsenego, Guillaume Fleury - Photographes : Marc Villalonga, Nidhal Marzouk
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Publicité « musique » : Vanessa Girth (vanessa.rhmag@gmail.com)
+ Malemort + Rammstein Courrier & dates de concerts : redaction@rockhard.fr
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P.92 LE BOOK QUI TUE
Commission paritaire : 0921 K 81345 - N° ISSN : 1630 - 8204
Ce numéro contient un CD qui ne peut être vendu.

P.93 MUSEE DE CIRE

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P.98 ABONNEMENT • Vous ne savez pas où trouver Rock Hard près de chez vous ? Jetez un œil sur :
www.trouverlapresse.com qui vous indiquera l’adresse des revendeurs les plus proches.
 Sur chaque sampler figure un morceau extrait de la démo d’un groupe francophone non signé.
Espérons que ce petit « coup de pouce » attire l’attention des labels et autres maisons de disques
et débouche sur des signatures. Jeunes combos, n’hésitez donc pas à nous envoyer vos démos
(CDs uniquement) agrémentées d’une bio complète et d’une photo à l’adresse suivante :
Rock Hard/Strass - Démos Sampler - 39, rue Santos Dumont - 75015 Paris. Bonne chance !
1 - AIRBOURNE
« Boneshaker »
Dave Cobb (Rival Sons, Europe), producteur le plus
en vue de Nashville et grand spécialiste du son
analogique, a été recruté par Airbourne pour
l’enregistrement de Boneshaker, cinquième album
studio des Aussies prévu le 25/10. Surprise : le
résultat fait très AC… Euh, il fait très Airbourne !
2 - OPETH
« Svekets Prins »
Trente ans après la naissance d’Opeth, son frontman
Mikael Akerfeldt ose enfin ce qui lui trottait dans la
tête depuis quelque temps déjà : chanter en suédois.
Les traumatisés du montage de meubles Ikea
pourront aussi trouver une version anglaise de In
Cauda Venenum, attendu le 27/09 dans les bacs.
3 - TRUST
« Les Murs Finiront Par Tomber »
Comme Dans Le Même Sang (2018), le nouveau Trust
a été enregistré en conditions live. C’est une nouvelle
fois l’expert Mike Fraser (AC/DC, Metallica) qui a mixé
Fils De Lutte (sortie le 27/09), disque à écouter très
fort, histoire de rappeler Nono et Bernie Bonvoisin
aux bons souvenirs de vos voisins.
4 - ALTER BRIDGE
« Wouldn’t You Rather »
Puisque c’est le 09/12 qu’Alter Bridge, en compagnie
de Shinedown et de The Raven Age, se produira pour
la toute première fois à l’Olympia, vous aurez le
temps de connaître Walk The Sky sur le bout des
doigts. Il verra en effet le jour dès le 18/10. Interview
de Mark Tremonti dans le prochain Rock Hard !
5 - DRAGONFORCE
« Highway To Oblivion » (Edit)
Voilà un digne successeur au « Through The Fire And
Flames » qui usa un paquet de guitares en plastique...
Il est extrait de Extreme Power Metal (sortie le
27/09), dernier opus de DragonForce enregistré avec
Fred Leclercq, récemment parti du groupe dont il
était membre depuis 2006. Bon vent à lui !
6 - STATUS QUO
« Liberty Lane »
Dites « 33 »... Indéniablement, ça « sent le Rossi » sur
ce premier extrait de Backbone, le 33ème 33 Tours (!)
du légendaire Status Quo. Francis Rossi & Cie ont
retrouvé le chemin du studio pour ce nouvel opus
dont trois titres ont été cosignés en compagnie du
fameux Bob Young, membre officieux du combo.
7 - BLACK STAR RIDERS
« Another State Of Grace »
Dixit Ricky Warwick, Scott Gorham (Thin Lizzy) s’est
plus impliqué que jamais dans la gestation de Another
State Of Grace, quatrième album de Black Star Riders.
Le super groupe de hard rock compte désormais en
ses rangs le batteur Chad Szeliga (ex-BLS) et le
gratteux Christian Martucci (Stone Sour).
8 - THE 69 EYES
« Cheyenna »
Attention : une seule écoute de ce morceau vous fera
chanter « Cheeeyennaaa » toute la journée en vous
prenant pour Peter Steele, mais en sonnant comme
Joe Dassin... Vous êtes prévenus. Il est extrait de
West End, douzième album des Finlandais de The 69
Eyes, sans doute nés en 69, « année très gothique ».
4 sera en kiosqu
9 - ENTOMBED A.D.
« Torment Remains »
Ainsi que Charlélie Arnaud l’a dit à « Monsieur A.D. »
en personne, alias L-G Petrov, le troisième album
d’Entombed A.D. semble chercher à nous téléporter en
l’an de grâce 1991 (Cf. interview en ces pages). Que vous
le vouliez ou non, cet extrait de Bowels Of Earth va vous
enrôler au fan-club du death’n’roll !
10 - SINNER
« Last Exit Hell »
Le plus mexicain des groupes teutons est de retour.
Après Tequila Suicide (2017), Sinner revient le 13/09 avec
Santa Muerte, son premier opus chanté par Mat Sinner
ET l’Italienne Giorgia Colleluori. Les invités-VIP Ricky
Warwick (Black Star Riders) et Ronnie Romero (Rainbow)
complètent le tableau.
11 - KADAVAR
« The Devil’s Master »
Dans l’Allemagne du 18ème, il y avait, en matière de
poésie, le king Bürger et les autres. For The Dead Travel
Fast lui adresse un clin d’œil. Si « les morts vont vite »,
les trois potos de Kadavar sont toujours capables de
ralentir le tempo pour nous assommer avec leur cocktail
« rétro/proto ». Sortie le 11/10.
12 - SONATA ARCTICA
« A Little Less Understanding »
Le power metal finnois peut-il encore compter sur Sonata
Arctica ? Pas si sûr. Les goûts de Tony Kakko & Co. ont
évolué, ainsi que le prouve encore une fois le nouvel
opus du combo, Talviyö (Ndt : Nuit d’hiver). En voici un
extrait que Mister Kakko définit comme « une sorte de
suite » à « I Have A Right ».
13 - CULT OF LUNA
« Lay Your Head To Rest » (Edit)
C’est bon, les fans de post metal ont assez mariné.
Après l’escapade Mariner (2016) avec Julie Christmas,
Cult Of Luna sort un album sculpté sur mesure pour ses
followers, comme on dit qu’on a l’état d’esprit « 2.0 ».
Le 20/09, A Dawn To Fear prouvera que le groupe
suédois est toujours « fidèle au post ».
DÉCOUVERTE DU MOIS :
14 - MONSTERS
« Hero Of The Wreck »
S’il est trop tôt pour dire si, depuis Lens, Monsters deviendra le fer de
lance de sa scène metal régionale, le potentiel est là. Sur The Ends, premier
LP du groupe après un EP sorti en 2015, le metal alternatif de ce sextet né
en 2014, et dont les membres viennent de W.I.L.D., Dum(b)ass ou encore
de One Eye Dollar, part à la rencontre d’un concept narrant « des fins »
vécues par sept personnages différents. Mais écoutez plutôt : ça se mange
sans faim !
Extrait de l’album The Ends
Web : facebook.com/Monsterslament
Mail : monstersofficialband@gmail.com
éro de
Le prochain num octobre 2019
u7
e aux alentours d
Faites couiner vos souris en nous e-mailant directement vos messages à :
redaction@rockhard.fr
Bonjour à toi, la rédac’ de mon mag’ préféré,
Après les trois (quatre avec le Knot Fest ?)
jours de Hellfest, vous devez, en ce lundi de
reprise, être bien lessivés ! Et bah, pas moi,
puisque je n’ai eu droit qu’à la soirée du Knot
Fest cette année… Vous savez, avec
l’engouement frénétique dont bénéficie
désormais l’achat des pass Hellfest, faut être
Lucky Luke pour choper des billets. Mais au
final, je ne m’en porte pas plus mal : au moins,
il n’y avait pas trop de monde. Donc, pas de
syndrome « sardineHell » ! Il m’a même été
possible de « circuler » sans difficulté sur le
site, ce qui ne m’était plus arrivé au Hellfest
depuis un bail (trois ans, quoi). Pas non plus de
dilemme du genre « qui vais-je voir maintenant
sur quelle scène ? » : deux et seulement
deux scènes où les groupes se succèdent
alternativement, c’est juste l’idéal (enfin, pour
moi, en tous cas). Au final, un Knot Fest qui
ressemblait plus à un Alcatraz qu’à un
Hellfest… Avec, tout de même, l’inconvénient
de la durée (une seule soirée, c’est un peu
court). Mais ce n’est pas vraiment pour ça que
je vous écris ; vu la période estivale, ça
concerne bien toujours un festival, mais un
autre. Sauf erreur de ma part, vous ne vous
êtes jamais intéressés (ni couvert, ni même
annoncé !) au Ramblin’ Man Festival. J’en
ignorais moi-même l’existence jusqu’à ce que je
le découvre via votre confrère anglais Classic
Rock. Avez-vous vu cette affiche de folie ? Et
celle des années passées ? Ça fait quand même
rudement envie ! D’accord y’a pas beaucoup de
metal (Orange Goblin, The Obsessed et
Monster Magnet), mais niveau hard rock ou
rock hard (ça vous rappelle quelque chose ?),
c’est grandiose ! Et vous qui êtes aussi
beaucoup (trop à mon goût) branché prog’, il y
a aussi (un peu) ce qu’il faut. Moi qui aime aussi
le classic rock, le blues et l’Americana, je vous
l’assure : si je pouvais y aller, j’irais (mais je fais
déjà le Bloodstock en août). Vu que je ne peux
pas, vous savez ce qu’il vous reste à faire !
Donc, on est d’accord, j’attends votre report
pour le numéro de septembre ou d’octobre ?
Je compte sur vous !!!
Salut à tous et à toutes,
Pascal
Cher Pascal,
Désolé de te décevoir, mais ce n’est pas
encore cette année que tu trouveras un report
du Ramblin’ Man dans nos pages. Cela n’a rien
à voir avec la programmation du festival,
effectivement alléchante, mais avec notre
programme déjà très chargé ! La France et la
Belgique proposent une telle offre que,
n’ayant pas le don d’ubiquité, il nous faut bien
faire un choix, notre priorité étant logiquement
accordés aux festivals dont nous sommes
partenaires. Et cela représente déjà un certain
nombre d’évènements, à tel point qu’il arrive
que des lecteurs nous reprochent d’accorder
trop de place aux comptes-rendus de festivals
dans nos pages. A un moment donné, il faut
savoir trancher !
Hello la rédac’ de Rock Hard,
Tranquillement posé à la piazza du petit village
d’Itri en Italie, je lis votre dernier numéro (le
199, vivement le 200 !). Du haut de mes seize
ans, j’ai découvert votre magazine à peu près
en même temps que le monde du metal, c’est-
à-dire il y a deux ans environ. J’ai commencé
avec votre numéro 176 pour une raison tout
simple : la couverture laissait place à
Rammstein, groupe des six Teutons avec qui j’ai
découvert le metal. Alors, vous vous doutez
bien que je me suis jeté sur le numéro 198.
Votre chronique était très intéressante. Bien
sûr, comme tout le monde, j’aurais préféré une
interview, mais après tout, ils font leur promo
comme ils veulent, non ? Un lecteur reproche à
certains groupes d’être des groupes à pognon,
mais c’est un peu but du jeu ; tous les
musiciens souhaitent vivre le plus dignement
possible… J’ai donc continué à vous lire chaque
mois depuis ce fameux numéro 176 et j’ai
découvert une multitude de groupes divers et
variés (Zeal And Ardor, Mass Hysteria, Dagoba,
Gojira, Tagada Jones, et j’en passe...). Quand
on a mon âge, c’est un plaisir chaque mois
d’écouter un nouveau sampler composé par
vos soins, d’agrandir sa culture musicale. Alors,
pour tout votre travail, merci beaucoup ! Cette
musique a de moins en moins d’adeptes et se
révolutionne peu ; ça fait du bien de voir qu’il y
a encore des gens passionnés.
PS : Je sais que ça augmenterait le prix du
magazine, mais à chaque fois qu’il y a un poster
ou autre, je suis preneur ; ça m’aide à décorer
ma chambre comme il se doit ! D’ailleurs, un
petit poster de Korn n’y serait pas de trop...
Cordialement,
Un jeune metalleux qui attend avec impatience
votre prochain numéro.
Cher jeune metalleux,
Merci pour cette missive qui nous rappelle,
à nous vieux croulants perdus dans le passé,
que la relève est bel et bien là. Grâce t’en soit
rendue ! Tu n’es pas le premier à évoquer la
question du poster. A l’ère d’internet, c’est un
usage qui semble s’être un peu perdu. Qu’en
pensent nos autres lecteurs ?
Bonjour à toute l’équipe,
Allez, je me lance pour vous écrire et vous
proposer une idée de nouvelle rubrique ou
article qui consisterait à nous faire découvrir les
coulisses du magazine de l’intérieur ! Ce
pourrait être un dossier bien fourni sur un seul
magazine ou, pourquoi pas, un petit bout
chaque mois au sein d’une nouvelle rubrique
qu’on pourrait appeler Backstage, mais votre
backstage à vous. Cela permettrait de
présenter la façon dont vous travaillez
(combien de mois à l’avance on anticipe un
numéro, fonctionnement du comité de
rédaction), l’organisation, la dernière victime
du ChocoblastBeat, présentation de l’équipe
avec pleins de photos (qui fait quoi entre le
graphisme, les interviews, les chroniques, les
concerts). Chacun pourrait glisser ses
anecdotes les plus folles (son moment le plus
drôle avec un artiste, un moment émouvant,
un imprévu qui s’est transformé en superbe
opportunité, etc.) A titre personnel, cela me
plairait énormément de découvrir l’envers du
décor dont on ne voit souvent que le brillant
résultat final. Je suis sûr que même si vous
êtes tous animés par la même passion, il y a
forcément des journées plus difficiles pour
boucler un article, un numéro, des imprévus,
et je trouverais cela chouette de partager cela
avec nous, les lecteurs. Si ce sujet a déjà été
abordé par le passé, je m’en excuse, j’avoue
honteusement n’avoir découvert le magazine
qu’il y a quelques mois et regrette de ne pas
l’avoir connu bien plus tôt. Je vous souhaite
une excellente continuation, et encore merci
pour tout ce contenu de qualité que vous
œuvrez à partager et nous transmettre chaque
mois. Avec toute mon amitié,
Guillaume, récemment abonné depuis le
dernier numéro avec Dream Theater.
Cher Guillaume,
L’idée est sympathique, mais nous l’avons
déjà mise en pratique en 2011. A l’époque,
lecteur était venu partager le quotidien de la
rédaction qui préparait alors son numéro 111
et avait ensuite publié, dans nos pages, le récit
de son expérience. Soucieux d’éviter la redite,
nous n’avons pas cherché à remettre cela en
place. En revanche, ton idée de compilations
d’anecdotes des journalistes est assez
motivante. Nous te promettons de l’envisager
très sérieusement !

Propos recueillis par Benji
Photo : DR
Entretien téléphonique réalisé le 04 juin 2019
Alors que Destruction s’apprête
à défendre son dernier opus,
Born To Perish, à Toulouse
et Lyon aux côtés d’Overkill
et Flotsam And Jetsam (Cf.
agenda), son bassiste/
chanteur Schmier nous a
livré ses « Premières Fois »…
Rock Hard : Ton premier héros musical ?
Schmier : Lemmy de Motörhead. C’est le
musicien qui m’a le plus influencé. Son
style, son look, la façon dont il jouait de la
basse, son chant, qui était à l’époque le
plus rugueux que tu pouvais trouver dans le
rock… Avant même que je ne devienne
musicien, il m’impressionnait beaucoup, et
lorsque je suis moi-même devenu un
« acteur » de cette scène, j’ai continué à
admirer sa façon d’être et de jouer. J’ai
rencontré Lemmy pour la première fois
lorsque nous avons tourné avec Motörhead
en 1987 et 88 en Europe, et j’ai découvert
un type aussi sympa qu’intelligent. C’est
une légende, tout simplement.
Le premier album rock que tu as écouté ?
Status Quo Live (1977), ce disque en
concert génial enregistré au Glasgow
Apollo en 1976. Ce fut ma première intro-
duction au hard rock. Mais si l’on va plus
loin, le premier titre rock que j’ai entendu
fut « Jailhouse Rock » (1957) par Elvis
Presley. Ce disque appartenait à mon père
qui, pourtant, n’écoutait pas ce genre de
choses. Son truc, c’était plus la musique
allemande traditionnelle !
Le premier disque tu as acheté avec ton
argent de poche ?
Gamin, je n’avais que peu d’argent de
poche, alors je devais faire gaffe à chaque
Deutsche Mark gagné en bossant à la
boulangerie que tenaient mes parents. Mais
je me souviens qu’après avoir fait quelques
économies, le premier album que je me suis
payé a été Destroyer (1976) de Kiss.
Ton premier instrument ?
Une basse de marque Tokai, d’un bleu
éclatant ! Je ne disposais pas d’un budget
énorme, et cette marque proposait des ins-
truments à des prix abordables, mais de
bonne qualité. C’est avec cette basse que j’ai
enregistré la première démo de Destruction
(Ndlr : Bestial Invasion Of Hell/1984).
Lorsque j’ai commencé à travailler et à
gagner un peu d’argent, je me suis payé une
Ibanez Destroyer, qui était plus metal !
Le premier concert auquel tu as assisté ?
The Police, en 1980, à Francfort (Ndlr :
précisément à Offenbach au Stadthalle, le 16
8
septembre 1980), j’avais 14 ans. Ils étaient
déjà très populaires à l’époque. Je m’en
souviens encore très bien malgré les
années, ça m’a beaucoup marqué. Un an
plus tard, je voyais Saxon, mon premier
concert de metal.
Ton premier concert en tant que musicien ?
On ne peut pas vraiment parler d’un
concert en tant que tel, mais d’une
apparition sur scène. Dans le cadre d’une
« convention » dédiée à Venom, Sodom et
Tankard ont donné un concert à Francfort
en 1984 (Ndlr : le 23 septembre 1984, au
Bürgerhaus). Nous n’avions même pas
encore sorti notre premier EP, « Sentence
Of Death » (Ndlr : édité le 10 novembre
1984). A la fin du concert, Tom
Angelripper de Sodom a annoncé au
public : « Hé, les gars de Destruction sont ici,
ils vont venir vous jouer un morceau ! ». Nous
avons joué un titre avec le matériel de
Sodom. Historiquement, ce furent donc
mes premiers pas sur scène ! Mais notre
premier concert en tant que tel a eu lieu
quelques mois plus tard (Ndlr : le 1er décembre
1984) au Jugendhaus d’Altenessen, avec
Sodom et Iron Angel.
Ton premier tour-bus ?
Lors de notre première tournée avec
Slayer en 1985, nous n’avions pas encore
pu nous payer ce luxe, nous voyagions
dans un van pourri. Ça n’est qu’en 1986,
lors de notre tournée avec Rage et
Kreator, que nous avons eu accès à un
véritable tour-bus, que nous partagions
avec ces deux autres groupes.
La première fois où tu t’es senti idiot
sur scène ?
Le premier soir de notre tournée avec
Slayer, nous avons débuté le concert trop
tôt par rapport à l’heure prévue. Nous
n’avions pas fait exprès, c’est juste que
nous n’avions pas fait gaffe à l’horaire, et
nous étions si nerveux…. L’équipe technique
a été prise par surprise : les gars étaient
encore en train de manger en coulisses !
Le lendemain, le tour-manager est venu
nous voir dans les loges pour nous dire :
« Ok, pas de ça de soir ! »
Ta première groupie ?
A l’occasion de notre deuxième concert,
dans la région de Francfort, pendant
l’hiver. Il faisait très froid et il n’y avait
pas de chauffage dans la salle : on se cail-
lait sévère ! A la fin du show, une jolie
blonde est venue discuter avec moi, et…
Bon, tu as compris ! J’étais très surpris, je
me disais : « Ah, ça se passe vraiment comme
ça lorsque tu es musicien ?! Facile ! » Mais je
n’ai pas été le plus rapide : notre batteur
de l’époque (Tommy Sandmann) m’a
confié qu’il avait eu sa première aventure
du même genre après notre premier
concert ! Y
 Ponctuellement, nous revenons sur un
album « décrié », un peu à part dans la
discographie d’un groupe. Un « mal aimé »,
en quelque sorte. Par certains critiques,
certains fans, et, parfois, par ses
géniteurs eux-mêmes. Un album qui,
pourtant, vaut le détour et mérite qu’on
le réhabilite sans plus attendre.
L’autopsie d’un « échec » qui n’en est
pas vraiment un, l’idée étant de faire
parler les musiciens « à froid »,
plusieurs années après la sortie de ce
disque, afin de mieux comprendre ce
qui, à l’époque, n’a pas collé. Pourquoi
les étoiles n’étaient pas alignées. Ce
mois-ci, Benji revient sur Unbreakable
de Scorpions paru en 2004.
Pour bien comprendre l’importance de cet album,
il convient de remonter un peu dans le temps.
En 1996, Scorpions édite Pure Instinct, un
disque dans lequel les ballades, style avec
lequel Scorpions a maintes fois prouvé son
habileté, sont trop présentes et surtout peu
marquantes. On sent la bestiole fatiguée,
usée, et les années qui suivent ne vont en
aucun cas nous rassurer. Trois ans plus tard,
en effet, Eye To Eye, avec sa vaine tentative
de modernisation et ses grosses ficelles pop,
fait définitivement démissionner la majeure
partie des fans des Allemands, attachés au
hard rock mélodique et racé de ces derniers.
Mais le « pire » est atteint plus tard, avec
deux autres sorties consécutives qui font
plonger les aficionados originels dans une
alarmante déprime. Tout d’abord, Moment Of
Glory (2000), concert qui voit le groupe
revisiter une partie de ses classiques
(majoritairement des ballades) en version
symphonique avec l’aide du Berliner
Philharmoniker : l’effort d’expérimentation est
à saluer et la performance de l’orchestre assez
remarquable, mais bon sang, quelle liste
d’invités peu excitante (Zucchero, Ray Wilson),
et qu’est-ce qu’on s’ennuie… Et que dire
d’Acoustica (2001), live acoustique enregistré
(et filmé) lors de trois concerts à Lisbonne, au
Portugal, en février 2001 ? Encore une fois,
l’intention n’est pas à remettre en cause
(après tout, des tas d’autres l’ont fait avant eux sans
que nous ne criions au scandale), mais le résultat reste
sujet à discussion. Et surtout, le timing est peu
adéquat, cette série de projets/expériences aliénant
toujours plus la fidèle fan-base…
Sans pour autant plonger les Allemands dans
l’anonymat le plus total, ces sorties ne rencontrent
qu’un succès limité, à des années-lumière des chiffres
de vente prodigieux de « l’âge d’or ». Scorpions en
est tout à fait conscient, tel que le confie Klaus Meine
à Philippe Lageat, le 29 janvier 2004, aux Wisseloord
Studios en Hollande, dans les environs d’Amsterdam.
Klaus Meine : Ces deux expériences (Moment Of
Glory et Acoustica) nous ont permis de rencontrer
beaucoup de gens très intéressants et de continuer à
tourner sans pression. Nous savions que, lorsque nous
déciderions de nous remettre à composer en vue d’un
nouvel album studio, il nous faudrait absolument ne
pas nous défiler et relever le défi. Car nos fans purs et
durs, s’ils acceptaient ces quelques digressions et
parenthèses, n’avaient de cesse de nous demander
quand nous allions sortir un grand album de hard rock.
Nous avons considéré leur avis avec le plus grand
10
sérieux. Il est facile de dire « Donnez-nous un autre
Blackout », mais c’est une autre paire de manches
que d’y parvenir. Nous sommes conscients qu’avec
certaines choses que nous avons pu faire dans les
années 90, nous nous sommes mis à dos une partie de
notre fanbase rock et avons perdu son respect. D’un
autre côté, nous avons convaincu le « grand public ».
Après avoir un temps envisagé de retravailler avec le
producteur historique Dieter Dierks, Scorpions jette
finalement son dévolu sur le bien moins célèbre
producteur hollandais Erwin Musper, que le groupe
connait bien car il a déjà œuvré auprès des Allemands
sur Pure Instinct. Heureusement, le résultat de ces
sessions, enregistrées aux Peppermint Park Studios
d’Hanovre et mixées aux Wisseloord (où ont déjà été
enregistrés ou mixés plusieurs opus de Def Leppard,
Saxon, Iron Maiden, Rammstein, Judas Priest, The
Police…) est d’une toute autre consistance que l’opus
de 1996. L’album débute par un trio de titres aussi
remuants qu’enthousiasmants : « New Generation »,
boosté par des chœurs d’enfants lors d’un final
censé représenter cette « nouvelle génération »,
le bouillant « Love’em Or Leave’em » au riff massif
qu’on n’attendait plus de nos venimeux, et « Deep
And Dark », mid-tempo irrésistible. Unbreakable
commence donc fort et remplit parfaitement le rôle
qu’en attend le groupe : prouver au public que,
malgré ses 35 ans de carrière, Scorpions en a « encore
sous la pédale », même s’il ne dégage plus tout à fait
l’énergie brute de ses débuts et de la première partie
des années 80. Autre perle, le speedé « Blood Too
Hot » qui voit James Kottak propulser ce titre qui fait
sans aucun doute le bonheur des fans de la première
heure. « My City, My Town » semble être une « petite »
composition assez inoffensive (intégralement
composée par Meine), mais finit par émouvoir avec
son feeling à fleur de peau et son côté dépouillé et
très humain. Autre extrait sur lequel Klaus fait une
nouvelle fois vibrer notre corde sensible, « Maybe I,
Maybe You », simple piano/voix basé sur une
composition du pianiste iranien Anoushiravan Rohani
qui « s’énerve » quelque peu sur son final : pas une
ballade typique dans le répertoire riche en la matière
de Scorpions, mais assurément l’une des plus
intéressantes. Le lumineux et positif « Someday Is
Now », le nuancé « Through My Eyes », ainsi que le
joyeux et très rock’n’roll « Remember The Good
Times » (annoncé comme un « retro garage mix »,
mais qui est tout simplement un nouveau morceau
présenté dans sa version démo originale, qui se suffit
à elle-même sous cette forme) s’avèrent aussi de
belles réussites. Reste, il faut bien l’avouer, quelques
morceaux plus dispensables comme ce « Borderline »
qui se traîne, « Can You Feel It », une composition
signée Kottak au refrain correct mais trop passe-
partout, « This Time », un titre estampillé Matthias
Jabs pas vraiment passionnant, et « She Said »,
ballade à la limite du sirupeux… Néanmoins, tout bien
considéré, Unbreakable marque un véritable retour en
force et est assurément un album à redécouvrir, le
groupe l’ayant hélas quasiment rayé de ses setlist
depuis 2008 (alors qu’il en jouait pas moins de six
extraits lors de la tournée 2004/2006).
Le disque est plutôt bien accueilli par la presse, mais
on sent le public sur la défensive. Les huit années
précédentes ont fait leur œuvre, et le
combo, qui, depuis 1984, a pris la saine
habitude de jouer à Bercy lors de ses
haltes parisiennes (sauf en 1999 sur la
catastrophique tournée Eye To Eye, où il
ne parvint même pas à remplir le Zénith),
se voit contraint de se replier sur le
prestigieux, mais bien plus modeste
Olympia. Un symptôme également visible
dans d’autres villes européennes, où le
combo se produit aussi dans des salles
plus réduites. Sur les festivals, ce dernier
ne joue plus en tête d’affiche, mais plutôt
en milieu ou fin d’après-midi. Il doit
même accepter d’assurer la première
partie (depuis quand ne l’a-t-il plus fait ?)
de Judas Priest pour être en mesure
d’investir des lieux aux dimensions
conséquentes au Royaume-Uni. Bref, le
quintet serre les dents. Cette attitude sera
récompensée assez rapidement, puisqu’il
ne tardera pas à retrouver un statut digne
de son rang après la sortie de l’album
suivant : Humanity: Hour I (2007). Rudolf
Schenker, au moment de la sortie de cet
opus, reste bien conscient de l’importance
d’Unbreakable, comme il s’en confie en
avril 2007 à Philippe Lageat et Morgan
Rivalin.
Rudolf Schenker : Unbreakable était la meilleure chose
que vous puissions faire afin de montrer aux gens que
nous n’étions pas morts. Nous leur avons montré que
nous ne roupillions pas dans un coin et que nous
n’avions pas vendu nos âmes au « tout commercial »
après des disques aussi particuliers que Eye To Eye,
Moment Of Glory ou Acoustica. Y
Track-listing de l’album original :
1/ New Generation – 2/ Love 'em Or Leave 'em – 3/
Deep And Dark – 4/ Borderline – 5/ Blood Too Hot – 6/
Maybe I Maybe You – 7/ Someday Is Now – 8/ My City
My Town – 9/ Through My Eyes – 10/ Can You Feel It –
11/ This Time – 12/ She Said – 13/ Remember The Good
Times (Retro Garage Mix)
Producteur :
Erwin Musper & Scorpions
Line-up d’époque :
Klaus Meine (chant) – Rudolf Schenker (guitare) – Matthias
Jabs (guitare) – Pawel Maciwoda (basse) – James Kottak
(batterie).
 Le Monde… du Metal
19ème ANNÉE - N°201
LE CHIFFRE
88.000
D’après le site Billboard.com, en 2016 et
2017, aux Etats-Unis, pas moins de
88.000 billets de concerts de Metallica
auraient été directement placés sur des
sites de revente sans jamais passer par la
case billetterie « classique ». Réservés en
secret pour le « marché secondaire » afin
d’en tirer un maximum de profits, les
billets étaient des places de premier
choix, mais aussi des sièges bien plus
durs à écouler. Ironie de l’histoire :
10.000 de ces tickets auraient finalement
dû être bradés et vendus moins cher que
dans le réseau traditionnel ! Mis en
cause, le tourneur Live Nation a reconnu
que, parmi ses « milliers d’artistes »,
environ « une dizaine » a, par le passé,
demandé à réserver des places à écouler
directement sur les sites de revente. Aux
USA, plusieurs sénateurs et membres du
congrès plaident pour une réforme du
secteur en s’appuyant sur le cas
Metallica, mais aussi sur des soupçons
similaires entourant Bruce Springsteen.
LA PHRASE DU MOIS
• « Je le hais autant que je l’aime.
J’ai juste envie de le secouer et de
lui botter le cul afin qu’il se
réveille. Il est fantastique, et il le
sait (…) J’ai vu son dernier clip en
promotion de son album de blues,
que j’ai trouvé épouvantable, où on
le voit parader dans les rues de
Miami dans sa Ferrari. Ce n’est
pas vraiment l’idée que je me fais
du blues. C’est navrant ! Ses
disques sont merdiques depuis un
long moment maintenant, mais en
tant que guitariste, il a toujours été
génial ! Il devrait juste prendre
davantage soin de sa carrière et se
concentrer pour écrire de bons
morceaux. »
(Le chanteur/guitariste d’Opeth
Mikael Akerfeldt parlant de son
compatriote Yngwie Malmsteen au
micro de Music Radar, site internet
consacré aux musiciens)
NOUVELLES DU FRONT
6 Si, dans la foulée de
l’annonce du cancer de la
gorge dont souffre son
leader Dave Mustaine,
Megadeth a annulé tous
ses concerts (sauf celui de
la croisière Megacruise du
mois d’octobre), le chan-
teur/guitariste n’a pas arrêté de travailler sur
le prochain album du groupe. Megadeth a
également révélé qu’il participera à la
tournée européenne 2020 de Five Finger
12
100% INDÉPENDANT
TOOL MEME PAS PEUR !
Au moment où vous lisez ces lignes,
Fear Inoculum, le nouveau Tool,
vient de sortir. 4.868 jours après
10,000 Days (2006), rien que ça !
Certains d’entre vous ont sans doute
déjà craqué pour son édition CD
deluxe soft pack à trois volets
comportant un livret 36 pages, mais
aussi un écran HD diffusant une
vidéo inédite. Comme souvent, Tool
n’a pas peur de proposer du jamais
vu dans le domaine du packaging,
mais aussi en matière de prix de
vente : 80 euros le CD ! Précisons
toutefois qu’aux Etats-Unis, où
l’objet a rapidement été sold-out, il
était vendu à 45 dollars, soit deux
fois moins cher... Pour la première fois,
au-delà des formats, Tool propose
deux versions de son album. Rempli
à ras-bord, le CD comporte
sept (très gros) morceaux
pour un total de 79 minutes
de musique (la limite physique
d’un CD est 80 minutes), tandis
que la version disponible en
téléchargement et en streaming
affiche dix titres pour 86
minutes au compteur. Précisons
toutefois que ces trois plages
supplémentaires, dont l’une
est nommée « Litanie Contre
La Peur », ne sont « que » des
interludes. « Mockingbeat »,
par exemple, est concocté à base de
samples d’oiseau moqueur (Morgan
Rivalin pensait à une perruche…
Grosse erreur !!!). Réfractaire au
numérique depuis toujours, Tool
opère un virage à 180 degrés en y
proposant cette version plus complète
de son cinquième opus, mais aussi
en plaçant enfin l’intégralité de son
catalogue sur iTunes, Deezer, Spotify
et autres Qobuz. C’est la grosse
version dix-titres que Rock Hard a
découverte dans les locaux de
Gibson à Amsterdam, le 18 juin
dernier, en compagnie de quelques
Death Punch en compagnie de Bad Wolves.
L’optimisme semblerait donc être de rigueur.
L’ensemble de la rédaction lui souhaite un
prompt rétablissement. 6 C’est officiel :
Chris Adler n’est plus le batteur de Lamb Of
God, groupe qu’il a cofondé. Absent des
rangs du combo depuis près d’un an, il
est remplacé par Art Cruz, ex-
batteur de Prong notamment
vu au dernier Hellfest, en juin.
Pour le moment, Chris Adler
va notamment se consacrer au
supergroup Hail!. 6 Après
Bruce Dickinson, un autre
membre d’Iron Maiden va
PHOTOS : M.VILLALONGA
confrères de la presse
musicale européenne
dépêchés aux Pays-Bas.
L’idée était d’écouter
le disque, mieux proté-
gé que la Joconde par
le groupe, ou plutôt
par son management
qui cultive le goût du
secret comme personne (il a été
demandé aux médias de ne rien
révéler sur l’album avant le 14 août),
afin de vous proposer une interview
à la rentrée. Mais voilà, avec Tool,
rien n’est jamais facile, et nous
publier un livre. Il s’agit du
guitariste Adrian Smith dont le
bouquin, intitulé Monsters Of
River And Rock : My Life As
Iron Maiden’s Compulsive
Angler, est annoncé au mois
de mai 2020. Son titre fait
notamment référence à la pêche
sportive, grande passion du
musicien. 6 Gojira apparaît sur
un titre du prochain album du
groupe rock alternatif américain
Highly Suspect. Il s’appelle
MCID et verra le jour le 1er
novembre. 6 Comme son titre
DR
n’avons pas (pas encore ?) réussi
à mettre le grappin sur l’un de
ses membres. Nous avons pour-
tant un paquet de questions à
poser, par exemple, au batteur
Danny Carey, homme fort de
ce disque qui repousse ses
limites dans le domaine des
percussions (improbable et
incroyable « Chocolate
Chip Trip » !). Même si,
à la première écoute,
une « recette » ressort de
la plupart de ces gros
morceaux (intro, montée
en puissance, break,
point d’orgue, retour au
calme…) et que les
mélodies vocales de
l’envoûtant Maynard
James Keenan nous
semblent être un peu en retrait, il ne
s’agit que d’une seule écoute d’un
album à la production exemplaire
qui en mérite bien d’autres.
Chronique dans le prochain Rock
Hard, donc.
l’indique, Black To Blues,
Vol. 2 est le successeur de
l’EP de reprises Black To
Blues publié en 2017 par
Black Stone Cherry. Au
programme : des hommages
aux bluesmen Freddie King,
Howlin’ Wolf, Robert Johnson,
Otis Rush, Elmore James et
Son House. Sortie le 18
octobre. 6 Corey Taylor
travaille sur un album solo.
S’il a déjà recruté des musi-
ciens pour cette nouvelle
aventure, le frontman de
HEAVY METAL

MERCYFUL FATE DE RETOUR,

ET SANS MERCY… Pas vu en concert depuis 1999, année de sortie
de l’album 9, son dernier en date, Mercyful Fate
remontera sur scène en 2020. Le premier show
confirmé par le groupe danois aura lieu à
domicile, au festival Copenhell, organisé du 17
au 20 juin. Il a toutefois été précisé par le combo
que d’autres festivals seront au programme…
Suivez notre regard ! Pour ces concerts, le line-
up de Mercyful Fate sera le suivant : King
Diamond (chant), Hank Shermann (guitare),
Bjarne T. Holm (batterie), Mike Wead (guitare)
et Joey Vera, le bassiste d’Armored Saint. Si
Timi Hansen ne sera pas de la partie, c’est
malheureusement parce que le bassiste lutte
actuellement contre un cancer. Nous lui souhaitons
un très bon rétablissement. Précisons que Mercyful Fate jouera uniquement
des morceaux de son premier EP (1982), de Melissa (1983) et de Don’t Break
The Oath (1984), mais aussi de nouveaux titres écrits « dans le même style ».
Bien entendu, une nouvelle production scénique sera également de mise.
Enfin, sachez que King Diamond, le groupe, publiera son nouvel album l’an
prochain. Intitulé The Institute, son premier extrait est attendu en fin d’année,
pile à temps pour la tournée américaine du King organisée en novembre.
Préparez vos oreilles, les notes suraiguës sont en approche !

HARD ROCK

AIRBOURNE
GIVEN THE DOG A BONE …
Fans de hard rock musclé, prenez votre mal en
patience. C’est le 25 octobre prochain
qu’Airbourne donnera un successeur à Runnin’
Wild (2007), No Guts. No Glory. (2010), Black
Dog Barking (2013) et Breakin’ Outta Hell
(2016). C’est en effet à cette date que le gang
australien, respectant son traditionnel délai de
trois ans entre deux opus, publiera sa nouvelle
déflagration intitulée Boneshaker. Produite par
Dave Cobb (qui a notamment concocté un son aux
petits oignons, très organique, à Rival Sons et
Europe) au sein du Studio A du Music Row de
Nashville, cette sucrerie rock’n’roll va droit au
but avec ses dix morceaux pour trente minutes de
musique. Son track-listing s’articule comme suit :
« Boneshaker », « Burnout The Nitro », « This Is
Our City », « Sex To Go », « Backseat Boogie », « Blood In The Water »,
« She Gives Me Hell », « Switchblade Angel », « Weapon Of War »,
« Rock’n’Roll For Life ». Nous avons pu écouter la bête (découvrez-en un
extrait sur notre sampler) et, pour faire court, elle est 100%... rock’n’-
roooooll ! Le groupe sera en tournée française en octobre (le 17 à Strasbourg,
les 19 et 20 à Paris, et le 28 à Nîmes) et en interview dans les pages de notre
numéro d’octobre. Are you ready for a good time ?

Slipknot et de Stone Sour a précisé qu’il ne Lombardo (ex-Slayer). 6

fallait pas attendre ce disque avant 2021. 6 Présent dans High On Fire
Mr. Bungle, qui n’a plus joué live depuis près depuis sa création en 1998,
de vingt ans, donnera trois concerts en le batteur Des Kensel quitte
février 2020, à Los Angeles, San Francisco et le navire. Il a sobrement
New York. A cette occasion, qui verra le déclaré vouloir se focaliser
groupe culte interpréter sur « de nouvelles opportu-
le non moins fameux nités » et sur sa famille. 6
The Raging Wrath Of Ray Alder, le chanteur de
The Easter Bunny (1986), Fates Warning, sortira son
ses membres fondateurs premier album solo What
Mike Patton, Trevor The Water Wants le 18
Dunn et Trey Spruance octobre chez InsideOut
seront rejoints par Scott Music. 6 Le 13 septembre,
Ian (Anthrax) et Dave Alice Cooper publiera un
 LA PLAYLIST DES PROS
JOHANNES PERSSON
(CULT OF LUNA)
1. JOY DIVISION – Peel Sessions
2. MARK LANEGAN – Bubblegum
ROCK HARD IL Y A 10 ANS...
Accorder la une de ce RH91 à Alice In Chains
(par Philippe Lageat)
minute TripAdvisor ! Notre « Héros du Mois »
3. RADIOHEAD – Amnesiac nous fait d’autant plus plaisir qu’on croyait le s’appelle Jérémy, lecteur qui nous écrit pour
4. SIXTEEN HORSEPOXWER – Folklore groupe, privé du chanteur Layne Staley décédé nous remercier de « cette photo que vous avez
5. UNBROKEN – Life. Love. Regret le 5 avril 2002, condamné à ressasser ses vieux publiée dans votre hors-série spécial Hellfest :
hits ad vitam aeternam. Black Gives Way To Blues, les « Hellfess », c’est moi, en page 26 !
ESBEN WILLEMS son nouvel et somptueux album, prouvant défi- J’espérais bien que me montrer ainsi pendant
(MONOLORD) nitivement le contraire, c’est avec une joie non tout le festival finirait par me faire remarquer.
1. AC/DC – Powerage dissimulée que nous interviewons Jerry Pourtant, cela n’est pas sans contraintes :
2. TOM WAITS – Real Gone
Cantrell et le convaincant chanteur/guitariste crème solaire pour protéger ce qui, en général,
3. MARK LANEGAN – Blues Funeral
4. HIGH ON FIRE – Death Is This Communion
William DuVall, assistant au passage au show est blanc... comme un cul, divers tripotages, et
5. DANIEL NORGREN – The Green Stone secret que le quatuor donne à la Scala, un j’en passe... S’il vous est possible de m’envoyer
club londonien d’environ 1000 places. Que cette photo afin que je puisse l’encadrer dans
JESSE LEACH du bonheur ! Nous sommes également ravis ma chambre, j’en serais ravi ». Nous te l’en-
(KILLSWITCH ENGAGE) d’interroger Eric Martin, chanteur d’un Mr. Big voyons immédiatement Jérémy. Il est vrai que
1. SOFT KILL – Savior qui s’apprête à donner au Bataclan son premier tu y es très à ton avantage !
2. HO99O9 – United States Of Horror concert français depuis… 1994 ! Nous célébrons
3. FURY – Failed Entertainment aussi nos retrouvailles avec Rammstein en Top Albums de la Rédaction RH91 :
4. GUNSHIP – Gunship découvrant en avant-première, et sous la houlette • ALICE IN CHAINS – Black Gives Way To
5. HEALTH – Death Magic du bassiste Oliver Riedel, son premier album Blue (M. Rivalin)
studio en quatre ans : Liebe Ist Für Alle Da. • EUROPE – Last Look At Eden (Benji)
RICKY WARWICK Hé oui, il y a dix ans, R+ parlait encore à la • GUILT MACHINE – On This Perfect Day
(BLACK STAR RIDERS) presse ! Mais ça, c’était « avant »… Parmi les (Djul)
1. STIFF LITTLE FINGERS – Inflammable Material
autres entretiens présents dans ce numéro de • LAZULI – Réponse Incongrue à l’Inéluctable
2. MC5 – Kick Out The Jams
rentrée, ceux de Guilt Machine, Indukti, (S. Auzilleau)
3. THIN LIZZY – Black Rose
4. MOTÖRHEAD – No Sleep ‘Til Hammersmith
Masters Of Reality, Lynch Mob, Porcupine • MASTERS OF REALITY – Pine/Cross
5. MARVIN GAYE – What’s Going On Tree, The Muggs, Crash The System, Judas John « bouche-trou » Bush ponctuellement rappelé Dover (P. Lageat)
Priest, Gotthard, Clutch, Insomnium, Church à la rescousse. La classe internationale ! Par • MEGADETH – Endgame (M. Rivalin)
JONATHAN DAVIS (KORN) Of Misery, Sonata Arctica, Howard Leese et ailleurs, de nombreux festivals et concerts sont • OUTLOUD – We’ll Rock You To Hell And
1. DINO – 24/7 Vader. « C’est en faisant n’importe quoi qu’on chroniqués dans ce RH91 : Graspop, back Again (S. Biard)
2. DOTCOM – Gang Shit devient n’importe qui » semble penser un Sonisphere UK, Down à Dublin et Toulouse, • PORCUPINE TREE – The Incident
3. DORIS DAY – On Moonlight Bay Anthrax dont la carrière ressemble de plus en Metallica aux Arènes de Nîmes, Chickenfoot à (L. Reymond)
4. BOB WILLS AND THE TEXAS PLAYBOYS – A Living plus à un florilège des Marseillais à Cancun. l’Olympia pour sa première venue française, • PARADISE LOST – Faith Divides Us –
Legend Ses frasques du mois ? Un limogeage-surprise etc. Comme si cela ne suffit pas, Marc Death Unites Us (E. Hennequin)
5. AMIGO THE DEVIL – Everything Is Fine et inélégant du nouveau chanteur, Dan Nelson, Villalonga vous parle, dans sa rubrique « L’œil • SPIRITUS MORTIS – The God Behind The
et un coup de fil, la queue entre les jambes, à de Verre », de ses vacances en Turquie. Notre God (B. Bages)
L-G PETROV
(ENTOMBED A.D.)
1. POSSESSED – Revelations Of Oblivion INTERNET
2. MOTÖRHEAD – Another Perfect Day

LES INSOLITES DU WEB

3. SODOM – Persecution Mania
4. IRON MAIDEN – Killers
5. METALLICA – Kill 'Em All
MAX & ZOÉ H. (HERRSCHAFT)
1. NECRODANCER – Void
2. FREAK INJECTION – Nouvel album
3. WIEGEDOOD – De Doden Hebben Het Goed III
4. COMBICHRIST – One Fire
5. FEVER 333 – Fever 333
FRED ESTBY (DISMEMBER)
1. BEHEMOTH – I Loved You At Your Darkest
2. WATAIN – Trident Wolf Eclipse
3. THE NIGHT FLIGHT ORCHESTRA – Sometimes The
World Ain’t Enough
4. IMPERIAL STATE ELECTRIC – Anywhere Loud
5. EXPULSION – Nightmare Future
MEM VON STEIN (EXUMER)
1. SLEEP – The Sciences
2. JUDAS PRIEST – Firepower
3. WINDHAND – Eternal Return
4. TOMB MOLD – Manor Of Infinite Forms
5. JOHN CARPENTER – Halloween 2018 (B.O.F.)
MATTHIEU DE LA ROCHE
(BLACKRAIN)
1. ENFORCER – Zenith
2. MUSE – Simulation Theory
3. W.A.S.P. – W.A.S.P.
4. TYPE O NEGATIVE – Bloody Kisses
5. PYOGENESIS – Ignis Creatio
JARVIS LEATHERBY
(NIGHT DEMON)
1. HIGH SPIRITS – Motivator
2. ANGEL WITCH – Angel Witch
3. TESLA – Mechanical Resonance
4. VARIOUS – New Wave Of British Heavy Metal ’79
Revisited
5. SATAN – Cruel Magic
Envoyez-nous vos liens à l’adresse insolites@rockhard.fr !
• Le 29 novembre, Ozzy Osbourne sortira le coffret collector See You On The Other
Side constitué de ses albums solo en format vinyle, de posters, mais aussi d’un
certificat d’authenticité signé par le Madman himself. L’impayable Zakk Wylde en
assure la promotion dans cette pub pas piquée des vers. http://bit.ly/ozzylp
• Dans cette vidéo, Def Leppard nous promène
dans les coulisses de sa nouvelle résidence d’été
à Las Vegas : une douzaine de dates données
sur une immense scène en août dernier, et lors
desquelles le combo britannique a varié les
plaisirs en matière de setlists. Une initiative très
sympathique ! http://bit.ly/defvegas
• Quelle rockstar est capable de réunir à la fois
Ministry, Tracii Guns, Todd Rundgren, Tyler Bates ou encore Steve Stevens (Billy
Idol) sur son nouvel album solo ? David Hasselhoff, bien sûr ! L’acteur d’Alerte à
Malibu et de K2000 publiera Open Your Eyes le 27 septembre. Allez, pour le
plaisir… http://bit.ly/davidmulet
• Treize ans après son dernier album, Tool est forcé-
ment très attendu. Cette vidéo d’unboxing, comme on
en trouve beaucoup sur le Net, a dévoilé l’édition deluxe, munie d’un écran intégré, de
Fear Inoculum. Elle est l’œuvre du guitariste/responsable des artworks Adam Jones, et
de son fils. http://bit.ly/toolunbox
• Le vidéaste canadien Stevie T. va finalement jouer
temporairement de la basse dans DragonForce, à la
place d’un Fred Leclercq parti vers de nouvelles
aventures. Avant ce retournement de situation, il
s’était beaucoup entraîné à jouer du triangle afin de
relever le challenge du guitariste Herman Li…
http://bit.ly/dragonstevie

EP 6 Titres majoritairement
composé de reprises.
Intitulé Breadcrumbs
(Ndt : Miettes), il voit le
parrain du shock rock
rendre hommage à la
scène de Detroit en
compagnie de Wayne
Kramer (MC5) et Mark
Farner (ex-Grand Funk Railroad), entre
autres. 6 Le 04 octobre, Helloween publiera
deux objets immortalisant sa tournée mondiale
Pumpkins United aux allures de réunion de
famille. Disponible en CD et
vinyle, United Alive In
Madrid retracera le concert
du WiZink Center du 09
décembre 2017, agrémenté
de quelques titres bonus
tirés d’autres dates. A ne pas
confondre avec la version
DVD/Blu-ray intitulée United
Alive qui, elle, sera constituée d’images
extraites du concert madrilène, du show de
São Paulo et de la prestation du groupe
allemand au Wacken 2018. 6 Après
Vallenfyre, groupe de death
mis en sommeil en 2018,
Greg Mackintosh (Paradise
Lost) lance un groupe… de
death ! Strigoi sortira son
premier album le
22 novembre chez
Nuclear Blast. 6
Silvertomb, formation dans laquelle
on trouve le tandem Kenny Hickey/
Johnny Kelly (Type O Negative) ou
encore le guitariste Joseph James
(ex-Agnostic Front), sortira son premier
album, Edge Of Existence,
le 1er novembre chez SPV.
6 Peter Tägtgren (Hypocrisy,
Pain) l’a annoncé : le deuxiè-
me album de Lindemann,
sa collaboration
musicale avec Till
Lindemann, le chan-
teur de Rammstein, est prêt. Reste
à savoir quand le successeur de
Skills In Pills (2015) verra le jour,
Rammstein ayant pas mal de
concerts sur le feu... 6

14
 L’OEIL DE VERRE
Bard Torstensen, Zak Tell, Jocke Skog
& Erlend Ottem (Clawfinger), Paris, le
15 octobre 1993.
Une session réalisée lors de la venue
parisienne des Suédois en première partie
d’Alice in Chains, à l’Elysée Montmartre,
pour défendre leur premier album, l’excel-
lent Deaf Dumb Blind. Clawfinger, hélas,
n’a pas eu la carrière qu’il méritait au vu
de la qualité intrinsèque de ses trois premiers
albums, très agressifs, mais très mélodiques
et dotés de paroles très engagées poli-
tiquement. Ses concerts étaient toujours
d’excellents moments d’où l’on sortait
éreintés et fourbus, mais ravis.

Tous les mois, une photo « plein pot » extraite des archives de Marc Villalonga et commentée par le photographe himself…

Aujourd'hui, je dois faire un cadeau à l’un de mes amis Facebook. Je ne vous donnerai pas son nom : moi-
même, je ne le connais pas puisqu'il porte comme pseudonyme le nom d'un acteur spécialisé dans les arts
martiaux. Or, en m'attaquant avec virulence sur ma propre page pour « suspicion de copinage » avec les
450 groupes chroniqués dans cette rubrique depuis qu'elle existe, je me dis que ce garçon doit être très
malheureux. Il y a « suspicion de solitude ». Alors, voilà mon pote, ce chapeau est pour toi, je copine
avec toi aussi. J'espère que ça va mieux. Bonne rentrée à toutes et tous et support the underground !
Notre playlist « découvertes » est sur Deezer : http://bit.ly/plusenplusnet
OBTURATE
France
Death metal
One man band créé par Phobos dont nous
ne savons rien si ce n’est qu’il est français,
Obturate signe avec The Bleeding Mask Of
Dread l’un des grands albums de death
metal de l’année, rien de moins ! Pour peu
qu’on soit attaché aux racines du style,
impossible de résister au tandem
d’ouverture « Blue Marks On Her
Neck »/« Unknown Breed » qui laisse
présager du menu copieux à venir.
Majoritairement influencé par le death US
(Morbid Angel, Immolation et Cannibal
ETRANGE
Paris/Bordeaux
Metal progressif instrumental
Défini par ses deux concepteurs comme un
« sci-fi instrumental journey », ce premier
album éponyme d’Etrange est en effet un
sacré Ovni. Aux frontières du power metal,
du thrash et du metal progressif, le duo
s’en donne à cœur joie pour créer cette
musique unique et belle, dédiée à « tous
ceux qui regardent le ciel et rêvent » (sic).
Si certains sons de synthés un peu cheesy
sont parfois utilisés sans le moindre
16
La rubrique qui s'oublie dans le piano, par Charlélie Arnaud.
Corpse en tête), Obturate parvient en 36
minutes à passer en revue tout ce qu’on
aime dans cette musique, du blastbeat
échevelé jusqu’au groove le plus vicelard,
en passant par quelques rythmiques
thrashy absolument irrésistibles. Le chant
tour à tour caverneux et criard est lui aussi
totalement crédible, si bien qu’on se
demande quel genre de bonhomme est
capable de maîtriser chaque poste avec
autant de talent. Certainement pas un gars
qui en est à son coup d’essai en tout cas.
En faisant un petit détour par les sonorités
complexe, la qualité de l’écriture et des
arrangements leur permet de passer
comme une lettre à la poste. Et puis, il y
en avait aussi dans le générique de
Goldorak, je vous ferais dire. L’essentiel
(tout comme la vérité) est ailleurs : Etrange
a réussi à écrire sept pièces jamais
ennuyeuses, truffées de mélodies toutes
plus entêtantes les unes que les autres,
d’un niveau technique enviable, mais qui
ne prend jamais la main sur l’écriture
(comment résister au sublime « Reloader »
dont l’intro jazzy et inquiétante s’enchaîne
suédoises avec « Scarlett Stains Upon The
Bodies » (qui comporte probablement le
meilleur break de l’album, un casse-nuque
totalement improbable), le panorama du
genre est complet et l’hommage n’oublie
personne. Seul regret : de par sa nature-
même, le combo n’est pas destiné à faire
de la scène dans un avenir proche.
Dommage, car un tel répertoire eût
obligatoirement entraîné une sacrée
boucherie. En attendant, foncez d’ores et
déjà sur la version studio, irrésistible !
https://obturate.bandcamp.com
sur des plans dignes de Cynic ?). Volontiers
grandiloquent et emphatique lorsque les
sons de cuivres s’en mêlent (« Nebula »),
mais aussi parfois plus intimiste (le superbe
« Gateway » tout en finesse), Etrange est
dans le grand écart permanent et c’est ce
qui rend précisément le voyage qu’il
propose passionnant de A à Z. Enorme
coup de chapeau à cet album dont la
puissance évocatrice certaine a réellement
réussi à nous transporter bien au-delà des
frontières connues. Un sacré groupe est né !
http://www.etrangemusic.com
• Un petit tour vite fait en Californie pour
découvrir DEAD HEAT et son album Certain
Death dont les sonorités délicieusement
crossover et estampillées 80’s rappelleront aux
quarantenaires (et plus) les efforts de Leeway,
Ludichrist ou encore Nuclear Assault. Pas de
fioritures ici : avec des titres dont le plus long
culmine à 3’44, la recherche d’efficacité est
maximale (« To The Core » est un véritable
uppercut). Le combo ne fait d’ailleurs pas
mystère de ses influences en reprenant le
« Trapped » des Crumbsuckers. Une bonne
claque dans la tronche en provenance directe
du passé pour aborder la rentrée avec
sérénité. https://deadheatca.bandcamp.com/
• TRAPPED IN FREEDOM est un groupe de
fusion lillois qui porte bien son patronyme tant
le combo semble ne s’être fixé aucune limite
sur son second EP, Welsh Ma Gueule. Rien que
le long titre « Pink Pills » résume la démarche
à lui seul : débutant sur un groove funky feutré,
il dégénère en une orgie de cuivres à la
Fishbone qui, elle-même, s’ouvre sur une
engueulade punk/hardcore. Si la formation
assume pleinement son côté foutraque
(« Benio Borricone »), on sent que le bagage
musical du line-up est hyper costaud : ça joue
et ça chante formidablement bien. Une
excellente découverte, rafraîchissante comme
l’autre côté de l’oreiller.
https://trappedinfreedom.bandcamp.com
• Sleeping Church Records a eu l’excellente
idée de proposer à douze groupes français de
participer à DOOM OR BE DOOMED, A
French Tribute To CATHEDRAL, une double
compilation rendant hommage au géant
anglais du doom metal aujourd’hui disparu. Le
line-up a l’originalité de mélanger des combos
bien connus (Misanthrope, Monolithe, ou
encore Ataraxie) à la génération montante de
doom français (notamment Conviction et
Pillars, tous deux redoutables), et permet aussi
de faire quelques belles découvertes (parmi
lesquelles Father Merrin, très Celtic Frost dans
l’âme). Une excellente initiative pour un album
plus lourd que le plus lourd de tes potes, qui
permet à chacun des combos de s’approprier
réellement le titre choisi. Bravo !
https://sleepingchurchrecords.bandcamp.com
 Propos recueillis : Guillaume Fleury
Photo : DR
Interview réalisée le 08 mai 2019 à Paris
Chaque mois, un musicien évoque
les dix albums qui ont changé sa
vie, ses « Dix Commandements ».
Ce mois-ci, c’est Fabio Lione qui nous
dévoile ses disques – et chanteurs -
ultimes...
1. EUROPE – The Final
Countdown (1986)
Fabio Lione : Je n’écoutais pas
beaucoup de rock lorsque j’étais
ado. Je préférais Michael Jackson,
Madonna et Duran Duran. Bien que
cet album soit très commercial,
c’est Europe qui m’a ouvert à une
musique plus heavy. J’adorais la voix de Joey
Tempest. Ce n’est pas vraiment du hard rock,
mais les mélodies sont bonnes et la voix
incroyable !
2. WHITESNAKE – Slip Of The
Tongue (1989)
Mon tout premier concert metal
fut un festival de 60.000
personnes où se produisaient
Aerosmith, Whitesnake, Vixen et
Poison. Je suis rentré chez moi en
me disant : « Je ne sais pas ce que
c’est, mais c’est ce que je veux faire ! » C’est là
que j’ai commencé à acheter des disques.
Whitesnake est rapidement devenu l’un de mes
groupes favoris et David Coverdale mon
vocaliste ultime. J’aime également leurs live,
comme Starkers In Tokyo (1997) qui met en
avant la guitare acoustique et le jeu d’Adrian
Vandenberg, mon guitariste favori de tous les
temps, malgré le respect que j’éprouve pour
des musiciens comme Steve Vai.
3. SKID ROW – Slave To The
Grind (1991)
Ce fut l’une de mes premières
influences. Ses deux premiers
albums resteront dans mon cœur
ma vie entière ! Ils ont vraiment
quelque chose de spécial, là où la
suite est davantage influencée
par le grunge. Sebastian Bach est vraiment un
chanteur impressionnant. Certes, cet album est
surproduit, et les lignes vocales sont presque
impossibles à retranscrire à l’identique en
concert, mais les compositions sont parfaites,
notamment les ballades...
4. QUEENSRŸCHE– Operation :
Mindcrime (1988)
Pour moi, les premiers albums,
jusqu’à Promised Land (1994)
inclus, sont géniaux. Promised
Land est hallucinant en termes
d’arrangements, mais Operation :
Mindcrime reste mon favori avec
Empire (1990) pour son concept, ses
compositions et la performance de Geoff Tate.
C’est leur album le plus complet et le plus
unique, même si je mets les deux suivants
presque au même niveau.
5. CRIMSON GLORY – Transcendence
(1988)
Leurs textes sont vraiment poétiques et la
manière dont Midnight les chante est
18
impressionnante, et pas seulement parce
qu’il hurle et peut monter haut dans les
aigus. Son interprétation est pleine de
feeling et me rappelle un peu Freddie
Mercury (Queen), qui chantait lui aussi de
toute son âme et ses émotions. Chaque
morceau de cet album est génial !
6. QUEEN – Innuendo (1991)
J’adore, même si j’aurais aimé que le
groupe sonne un peu plus heavy ! Si je
pouvais changer une chose que j’aime un
peu moins chez lui, c’est son côté un peu
trop pop. Je préfère des titres comme
« Innuendo », « Princess Of The Universe »
et « Who Wants To Live Forever », même si
j’apprécie « Radio Ga Ga » et « Friends Will Be
Friends ».
7. FATES WARNING – A Pleasant Shade Of Gray
(1997)
Trop peu de gens parlent de ce groupe à
mon goût ! Parallels (1991), son album le
plus commercial, est génial, mais je préfère
celui-là. Il est très heavy et moins facile
d’accès. J’ai eu la chance d’ouvrir pour eux
avec l’un de mes premiers groupes, Athena,
sur la tournée de cet album, et j’ai été
impressionné de les voir reproduire ce
disque à l’identique sur scène, et ce, même lorsque
leur chanteur souffrait de maux de tête. Une vraie
leçon !
8. DREAM THEATER – Awake (1994)
Beaucoup de gens critiquent James LaBrie,
parfois à juste titre, mais soyons sérieux :
nomme-moi un autre chanteur capable de
faire mieux dans ce registre ? Sa voix est
parfaite sur les ballades. Bien sûr, le groupe
ne peut pas prétendre sortir toute sa
carrière durant des disques de la trempe de
Awake ou Images And Words (1992) car ceux-ci
viennent d’une autre dimension ! « Lifting Shadows
Off A Dream » me rappelle un peu U2 (il chantonne),
j’adore l’instrumental « A Mind Beside Itself : I.
Erotomania » et « The Mirror », sur lequel LaBrie est
convaincant en chantant de manière plus agressive,
même si ce n’est pas son meilleur côté.
9. PAIN OF SALVATION – The Perfect
Element, Part I (2000)
Je n’ose imaginer comment cet album
aurait sonné si le groupe avait bénéficié
d’un budget plus important ! Sa production
est bonne, mais le son n’est pas le meilleur
possible. C’est un travail immense de
composition, entre la musique et les lignes
vocales. Je n’entends pas beaucoup de gens parler
encore de ce groupe aujourd’hui. Pourtant, je pense
qu’il mérite un peu plus tant l’écoute de cet album m’a
impressionné !
10. CONCEPTION – Flow (1997)
Roy Khan est l’un de mes chanteurs favoris
de ces vingt dernières années ! Tu peux
percevoir que ses principales influences
sont Morten Harket, le chanteur de A-Ha,
et Geoff Tate. Tout le monde aime Parallel
Minds (1993), mais j’ai quelque chose de
personnel avec cet album, peut-être moins
commercial et heavy. Ils l’ont malheureusement sorti
à une époque où le power metal était à son sommet et
le côté plus prog et pop a dérouté les fans… J’aime le
travail de Roy Khan avec Kamelot, mais Flow est,
selon moi, plus particulier et unique. Y
 Propos recueillis par François Blanc
Interview réalisée le 06 novembre 2018
Chaque mois, un musicien revient sur les
films de sa vie, ses grands moments sur
grand (et petit) écran. Cette fois-ci, c’est
le prolixe guitariste Øystein G. Brun qui
s’y colle. Car après tout, « he likes to
movie, movie »…
Rock Hard : Quels sont tes cinq films préférés ?
Øystein G. Brun : La Guerre Des
Etoiles Episode IV : Un Nouvel Espoir
(1977), de George Lucas. Je n’étais
qu’un môme quand j’ai vu ce film et
j’ai été soufflé, ébloui ! Je ne m’étais
encore jamais autant éclaté devant
un long-métrage : tout un univers
s’ouvrait à moi ! D’une certaine façon,
cette expérience a changé ma vie. Je
suis immédiatement devenu giga-fan
de Star Wars !
Usual Suspects (1995), de Bryan
Singer. Outre l’admiration que
j’éprouve pour le jeu de Kevin Spacey,
je trouve ce film spécial et novateur à
bien des égards. La narration sort des
sentiers battus, l’intrigue est riche en
rebondissements, et la fin est
réellement surprenante.
Impressionnant de penser que
l’intégralité de son tournage n’a duré qu’un petit mois !
Il Faut Sauver Le Soldat Ryan (1998),
de Steven Spielberg. Ayant cessé de
fréquenter les cinémas pendant des
années – j’étais trop occupé à jouer
du metal – j’ai été impressionné de
découvrir à quel point les salles
s’étaient améliorées en termes de
son, de confort et de taille d’écrans.
Cela a influencé ma perception de ce
film que je trouve très beau et extrêmement bien fait
en dépit de sa brutalité. Une véritable prouesse
technique et une histoire formidablement bien racontée.
Voyage Au Bout De L’Enfer (1978), de
Michael Cimino. Etant gamin, c’est la
première fois que je voyais un
personnage se faire buter à l’écran et
cela m’a franchement impressionné. A
l’époque, je pense que je passais
complètement à côté du contexte
historique de l’intrigue, mais ce film
me subjuguait déjà. Les séquences de
roulette russe sont tout simplement cultes.
Délivrance (1972), de John
Boorman. Avant Délivrance, je
n’avais encore jamais vu de film
avec une ambiance aussi étrange,
bizarre et inquiétante. En le
regardant, j’ai eu l’impression
d’entrer dans un univers absurde
et dérangeant, à l’image de la
série Twin Peaks de David Lynch.
J’imagine que c’est pour cela que
j’ai toujours conservé une affection
particulière pour cette œuvre.
Ta Bande Originale de film préférée ?
Je suis dingue du travail de John Williams sur
l’intégralité des Star Wars. Ce mec a révolutionné le
monde de la bande originale et son œuvre a eu un
impact immense sur l’industrie du film. En tant que
compositeur, j’admire particulièrement le fait qu’il ait
20
réussi à se forger un son et une
signature bien à lui, et qu’il soit
passé maître dans l’art de
susciter de vraies émotions en
quelques notes. Il est capable
d’en dire beaucoup avec très
peu, ce qui est admirable.
Comment illustrer avec plus d’à-propos la descente des
stormtroopers de leur vaisseau qu’avec la « Marche
Impériale » ? C’est tout simplement parfait.
Ton réalisateur préféré ?
Après mûre réflexion, j’opte pour
David Lynch. Ses films ne sont pas
forcément mes préférés, mais j’ai
un immense respect pour son
œuvre dans sa globalité. Il a réussi
à imposer sa folie, sa vision bizarre
et sinistre du monde, à tel point
D. Lynch
que lorsque je me trouve devant
quelque chose d’étrange ou
d’inexplicable, je le compare immédiatement à Twin
Peaks. J’apprécie également le fait qu’il se soit
toujours impliqué dans la création de la musique qui
accompagne ses films. Je le considère comme un
authentique passionné et un véritable génie.
Ton affiche de film préférée ?
Il s’agit d’un poster bien précis qui
annonce la sortie du septième Star
Wars, Le Réveil De La Force
(2015). En tant qu’inconditionnel
de la saga, je trouve ce visuel
sobre, mais esthétique,
particulièrement efficace. Gamin,
alors que tous mes potes
voulaient incarner Dark Vador, je
préférais toujours jouer un
stormtrooper. Je trouve leur
costume et leur attitude très cools ! Je ne saurais
dire exactement pourquoi, mais ils m’ont toujours fasciné.
Ton acteur préféré ?
Kevin Spacey ! Même si je ne suis
pas fan de tous les films auxquels
il a participé, il a une telle
présence que lorsqu’il apparaît à
l’écran, on reste forcément
scotché à son canapé. Ses
performances sont toujours
excellentes ! Il a un grand
charisme, une attitude qui impose
K. Spacey immédiatement le respect. C’est
un acteur brillant !
Ton actrice préférée ?
Charlize Theron, principalement
pour son incroyable performance
dans Monster (2003), film inspiré
par la vie mouvementée de la
tueuse en série américaine Aileen
Wuornos. Theron est une très
belle femme qui correspond
parfaitement aux standards de
beauté hollywoodiens, mais qui a C. Theron
accepté de prendre beaucoup de
poids et de s’enlaidir afin d’incarner une nana droguée,
violente, nerveuse, constamment fatiguée… Une
transformation réellement spectaculaire.
Ta série préférée ?
Planète Terre (2006), le documentaire de la BBC. C’est
tellement beau et exaltant à visionner ! Je suis tout
sauf religieux, mais
découvrir ces splendides images de
la nature, de la faune et la flore
dans toute leur beauté sauvage et
leur étrangeté me donne
l’impression de communier en
profondeur avec le monde qui
m’entoure. Regarder ces épisodes
sur un très grand écran est une
expérience formidable car il y a énormément de détails
à admirer. La réalisation mérite également tous les
éloges.
Ton film d’animation préféré ?
Petit, je regardais beaucoup de
Disney, mais une fois adulte,
mon intérêt pour les dessins
animés s’est fortement
estompé. Quand je suis devenu
père, j’ai été « fortement
encouragé » à m’y remettre et,
à mon grand étonnement, j’y
ai pris beaucoup de plaisir. Je
suis très agréablement surpris
par la qualité des blockbusters contemporains qui
fourmillent de détails et de références susceptibles de
faire aussi bien rire les petits que les grands. J’ai adoré
Madagascar et L’Age De Glace, mais ma préférence va
à Moi, Moche Et Méchant (2010) qui est très drôle,
bien rythmé et dont les personnages sont vraiment
chouettes. A regarder en famille !
Le dernier film que tu as vu ?
Un peu par hasard, via Netflix, je
suis tombé sur Annihilation (2018),
avec Natalie Portman dans le rôle
principal. C’est un film original et
intéressant qui m’a fait forte
impression, ce qui arrive de plus
en plus rarement. Ne me
demande pas de te raconter
l’histoire car elle est vraiment
trop bizarre ; on a parfois
l’impression d’être sous acides en matant ce truc.
Je ne suis d’ailleurs pas sûr d’avoir pigé la fin !
Ton documentaire préféré ?
Relidicule (2008), de Larry
Charles. Je regarde énormément
de documentaires et suis
constamment à l’affût de ce qui
sort. J’aime particulièrement
celui-ci car il dénonce les
superstitions religieuses avec un
ton insolent et sarcastique que je
trouve délectable. C’est à la fois
drôle et très bien vu !
Ton « méchant de cinéma » préféré ?
Impossible, une fois
encore, de ne pas faire
référence à Star Wars…
Désolé ! (rires) J’adore
Boba Fett, chasseur de
primes à la botte de
l’Empire. Gamin, j’étais
envoûté par chacune de
ses apparitions à l’écran
et imaginais toutes sortes d’histoires à son sujet, d’où il
venait et à quoi pouvait ressembler son visage. Il faut
reconnaître que son « bleu de travail » est
particulièrement badass ! (rires) Y

Si Back In Black (1980) a permis à AC/DC de dominer le monde à l’aube des années 80, c’est son prédécesseur, Highway To
Hell (1979), qui, le premier, a séduit les radios américaines (jusqu’ici réfractaires au son brut de pomme du combo), mais aussi
européennes, installant définitivement AC/DC parmi les plus grands. Mais pour parvenir à des tels résultats, des changements
notables ont été nécessaires et la route (vers l’enfer) longue et sinueuse, certains acteurs qu’on pensaient immuables se voyant
même indiquer le bas-côté. Quarante ans plus tard, nous vous racontons la genèse improbable de cet opus aussi magique que
diabolique.
LA RÉVOLUTION
EN MARCHE
Les 15 et 16 novembre 1978, AC/DC
met un terme au If You Want Blood
Tour (en support de l’album live du
même nom paru un mois plus tôt en
Europe) en se produisant au
mythique Hammersmith Odeon de
Londres. Sur la fin de cette tournée,
le groupe glisse le titre « Hell Ain’t A
Bad Place To Be » dans sa setlist en
lieu et place de « Rock’n’Roll
Damnation ». Il faut se souvenir que
ce dernier ne figurait pas sur les
pressages originaux de son précédent
album studio, Powerage (1978), et
qu’AC/DC a dû l’enregistrer en
dernière minute à la demande du
label Atlantic qui lui réclamait à
corps et à cris une chanson plus
« commerciale » (le gros mot est
lâché) susceptible de passer en radio.
Aidé par George Young, le groupe a
fait le dos rond, glissant quelques
maracas dans ce « Damnation »
prompt à faire bouger le popotin.
Alors, quelques mois plus tard, le
naturel revenant au galop, Angus et
Malcolm Young se font un plaisir de
reprendre les commandes sur ces
dates anglaises annonciatrices de
quelques jours de vacances bien
mérités en virant ce morceau dont ils
ont accouché aux forceps, bon gré,
mal gré. C’est qu’on n’impose rien,
ou presque, à ces Ecossais et à leur
clan qui n’en ont toujours fait qu’à
leur tête. Du moins, c’est ce que
croient ces derniers…
Une quinzaine de jours plus tard
(autant dire une éternité pour ces
forçats de la route), le 2 décembre
1978, AC/DC s’enferme aux Albert
Studios de Sydney (Australie). Il faut
dire qu’il connaît les lieux par cœur
puisqu’il y a déjà enregistré ses
précédents albums : High Voltage
(1975), T.N.T (75), Dirty Deeds Done
Dirt Cheap (76), Let There Be Rock
(77) et Powerage (78). Les Young
aiment les recettes qui ont fait leurs
preuves et ne se posent donc pas de
22
questions : « On prend les mêmes et on
recommence ». Mêmes studios, donc,
mais aussi mêmes producteurs
puisque, comme toujours depuis les
débuts en 1974, les ex-Easybeats
Harry Vanda et George Young sont
aux manettes. Et pour cause, George
est le frère cadet d’Angus et
Malcolm, mieux, le mentor du
groupe, pour ne pas dire son gourou.
Durant les phases d’écriture, c’est
toujours lui qui indique la marche à
suivre, peaufine les arrangements,
parvient à extraire la substantifique
moelle de démos qu’il dégraisse pour
les transformer en diamants bruts.
Malcolm est le fondateur du groupe,
son chef incontesté, mais en
coulisses et plus encore en studio,
c’est son aîné qui a toujours tiré les
ficelles. Et en cette fin 1978, cette
méthode « clanique » est sur le point
d’être une nouvelle fois adoptée.
Dans le Studio 1 de King Street,
Angus, Malcolm et le chanteur Bon
Scott s’attellent en effet à la
composition de nouveaux titres en
compagnie de l’ingé-son Mark Opitz,
qui seconde Harry et George. En
l’absence de Cliff Williams, c’est ce
dernier – comme souvent – qui tient
la basse, tandis que Ray Arnott
(batteur fétiche de Vanda & Young
qui les accompagne au sein du projet
pop Flash & The Pan dont le premier
album vient de sortir) se charge du
kit en lieu et place de Phil Rudd.
Bref, AC/DC travaille en famille,
comme il l’a toujours fait, et tout va
bien dans le meilleur des mondes.
Du moins, en apparence, parce que
si, en Europe, le gang Young
commence à récolter les fruits de
son labeur, la branche américaine
d’Atlantic, elle, trouve le temps long
et perd patience, habituée qu’elle
est à truster l’Or et le Platine avec
Led Zeppelin, Foreigner, Yes, etc.
Certes, AC/DC ne rechigne pas à
écumer les Etats-Unis de long en
large, convertissant de nouveaux
adeptes avec ses prestations ultra
énergiques, mais cela ne se répercute
pas vraiment sur ses chiffres de
ventes, Powerage et If You Want
Blood n’ayant décroché que les 133ème
et 113ème places du Billboard. Le
bouche-à-oreille ne suffit visiblement
pas. Alors, fin 1978/début 1979,
Michael Klenfner, ponte d’Atlantic
qui adore AC/DC et a largement
contribué à ses premières victoires
aux USA, décide de prendre les
choses en main en s’envolant de
New-York. Une fois à Sydney, il
rencontre Angus, Malcolm, Bon, Ray
Arnott, George et Harry, bien sûr,
mais aussi Ted Albert (le patron du
label australien du groupe, Albert
Productions) et le manager Michael
Browning. « Une nuit, raconte
Arnott, je vais au studio pour jouer
avec eux afin de montrer à cet
Américain certaines idées sur lesquelles
ils travaillent (…) Un soir, je me
souviens que nous allons au restaurant.
L’Amerloque commande une bouteille
de vin à 80 dollars, si ma mémoire est
bonne. Bon Scott lui dit : « Ça, c’est ce
qu’on sert dans un putain de fish and
chips, mec ! » Et il commande une
bouteille à 300 dollars. Après tout, ce
sont les Ricains qui paient. Nous avons
passé une bonne soirée ! ». Une bonne
soirée, peut-être, mais c’est Klenfner
qui a le dernier mot lorsqu’il se
décide enfin à passer aux choses
sérieuses : « Je n’ai rien entendu, parmi
les ébauches des titres que vous m’avez
joués au studio, qui puisse vous faire
franchir un nouveau palier aux USA.
Vos albums sont bons, mais ne se
vendent pas car les radios FM n’en
veulent pas. Et sans l’appui de ces
dernières, qui sont extrêmement
influentes en Amérique, vous ne
décrocherez jamais le jackpot. Pour
cela, je suis désolé, mais il faut que
vous changiez vos habitudes, que vous
bossiez avec un producteur capable de
vous forger ce son plus « radio friendly »
qui vous permettra de rafler la mise ! ».
COURS DE
CHANT… AGE
George et Harry, qui comprennent
aussitôt qu’ils vont être débarqués,
Un sujet de Philippe Lageat
ont l’élégance de ne rien dire, même
s’ils fulminent de se voir ainsi mis
sur la touche. Mais pour Malcolm et
Angus, c’est un tremblement de
terre ! Comme le confiera ce dernier
au magazine Musician en avril 1991 :
« Harry et George considéraient AC/DC
comme leur bébé. Ils ont bossé avec
nous dès le départ et nous ont tout
appris ». Mais les deux guitaristes ont
beau tirer une tronche de deux pieds
de long et ruer dans les brancards,
rien n’y fait car les Américains ne
comprennent pas que George – on l’a
dit – est bien plus qu’un simple
producteur : le sixième homme du
groupe, un sage dont l’expérience
permet d’éviter les écueils, le garant
de l’intégrité et du refus des
compromis, mais aussi et avant tout
un frère. Un frère auquel Atlantic
manque cruellement de respect en
considérant comme un « amateur »
ce musicien accompli doublé d’un
producteur émérite. Et le manque
de respect, chez les Young qui
fonctionnent un peu comme les
Sopranos, on n’aime pas. Seulement
voilà, cette fois-ci, le label ne laisse
aucune alternative. C’est à prendre
ou à laisser. Comme le reconnaîtra
Malcolm plus tard : « Ils étaient prêts
à nous virer si nous ne faisions pas
comme ils voulaient… ». Alors, une
fois n’est pas coutume, AC/DC
capitule en serrant les poings, amer
quand bien même George tente
d’apaiser les esprits en dispensant la
bonne parole à ses cadets : « Ecoutez,
ces types veulent essayer quelqu’un
d’autre. C’est une bonne chose pour
vous, vous allez gagner en expérience.
Allez-y, mais ne les laissez pas changer
votre identité. Souvenez-vous en toutes
circonstances que vous êtes un groupe
de rock’n’roll ! ». Un précieux
conseil qui ne tombe pas dans
l’oreille de sourds.
Qui, maintenant, va avoir la lourde
tâche de « remplacer » Harry et
George en ayant pour mission
d’imposer AC/DC aux Etats-Unis ?
Klenfner a déjà sa petite idée, comme
l’écrit le manager Michael Browning
© Jim Houghton / Archives D.J.

De g. à d. : Malcolm Young, Cliff

Williams, Phil Rudd, Angus Young &
Bon Scott (New York, 12.1977).
De cette session naîtront les pochettes
de Powerage et Highway To Hell.
Ici, deux clichés inédits !
 Huitième date du Highway To Hell
Tour : en première partie de The Who à
Nuremberg (Allemagne), le 01.09.1979

© Robert Alford / Dalle

dans son autobiographie Dog Eat Dog
(2014) : « Eddie Kramer est le seul et
unique choix de Klenfner qui insiste
lourdement pour l’imposer (…)
Clairement, on force la main au
groupe ». N’empêche que, sur le
papier, ce choix peut faire sens. Déjà,
Kramer a été ingénieur du son de
Jimi Hendrix sur les mythiques Are
You Experienced (1967), Axis: Bold As
Love (67) et Electric Ladyland (68), ce
qui joue en sa faveur car le guitariste
prodige (mort en 1970) est l’une des
idoles de Malcolm. Il a également
travaillé pour Led Zeppelin et, plus
récemment, produit Alive! (1975),
Rock And Roll Over (76), Love Gun
(77) et Alive II (77) de Kiss. Ces
albums se sont vendus par palettes
aux USA, mais Malcolm et Angus,
qui ont tourné avec Gene Simmons
& Co. en 1977, s’en moquent, Kiss
étant très éloigné de leurs
aspirations. Bien des années plus
tard, Kramer raconte : « Je pense que
c’est le succès que je rencontre avec Kiss
qui pousse les gens d’Atlantic à me
contacter… Ils veulent que je bosse avec
AC/DC et me font parvenir une K7
vidéo que je trouve très bonne.
Brillante, même ! Alors, je me rends
dans leurs bureaux afin de les
rencontrer. Je parle de leur responsable
artistique, un certain Perry Cooper, et
d’un autre gars très bien placé : Michael
Klenfner ». Kramer, en effet, pourrait
bien être l’homme de la situation,
ainsi que semble en témoigner son
passage aux Albert Studios pour
rencontrer le groupe et poser une
oreille sur ses nouvelles démos. Dixit
Kramer : « Certaines chansons sont en
cours d’écriture et je me revois les aider
à enregistrer quelques démos basiques ».
Browning se souvient lui aussi :
« Heureusement, Eddie est un mec
raisonnable. Nous nous entendons très
bien lors de son séjour à Sydney. Et
puis, son CV parle pour lui. (…) Bien
sûr, les Boys auraient préféré que je
dise à Atlantic d’aller se faire foutre
afin qu’ils puissent se remettent au
travail avec George et Harry. Mais dans
mes tripes, je sais depuis longtemps,
probablement la sortie de Powerage,
qu’Atlantic a raison de penser que nous
avons besoin de changer de producteur ».
Avant de s’enfermer en studio avec
Kramer, AC/DC doit honorer un
engagement précédemment
contracté : sa première tournée
japonaise comprenant des haltes à
Tokyo (les 7 et 12 mars 1979) et
Osaka (le 9 mars). Le 5 mars, Angus,
Malcolm et Bon, accompagnés de
Ray Arnott à la batterie et de George
Young à la basse, donnent un concert
d’adieu impromptu à la Strata Motor
Inn, un club/restaurant de Cremorne,
dans la banlieue de Sydney. Le
photographe Philip Morris est
présent : « Ce jour-là, un technicien-son
me file un tuyau : AC/DC doit profiter
d’un show que les Ferrets donnent le
soir-même à la Cremorne Strata Inn
pour faire un concert secret ! (…)
Quand bien même personne – ou
presque – n’est au courant, la salle est
bondée. Soudain, AC/DC monte sur
scène, à la surprise générale et sans
avoir été annoncé. Le public pète les
plombs ! Le groupe joue environ une
heure durant laquelle je shoote sans
arrêt. Quelle chance d’avoir pu assister
à cet événement ! ». Il s’agira, hélas,
du dernier concert de Bon Scott sur
le sol australien… Le lendemain,
ravi de visiter enfin le pays du Soleil
Levant, AC/DC doit se raviser en
dernière minute quand il apprend que
la tournée japonaise est annulée.
Barry Taylor, le roadie de Phil Rudd,
s’en explique à une journaliste dans
une lettre : « Les Boys accusent
vraiment le coup car ils attendaient ces
dates avec impatience. Je te laisse
imaginer à quel point nous (Ndlr :
l’équipe technique) avons été choqués
d’apprendre que le groupe ne viendrait
finalement pas alors que nous venions
tout juste d’atterrir à Tokyo ! ». La
raison officielle avancée par le
management d’AC/DC est que Bon a
contracté une bronchite carabinée.
Dégoûtés, les musiciens font un
break durant quelques jours avant de
rejoindre Eddie Kramer en Floride.
KRAMER CONTRE
KRAMER
A Miami, le groupe descend au
Newport Beachside Hotel & Resort.
Il commence par répéter et
poursuivre ses séances d’écriture
dans Studio B des Musicians Studio
Rentals, au nord de la ville. Certains
titres déjà écrits sont peaufinés sur
place, voire radicalement repensés :
c’est le cas de « Get It Hot », de
« Beating Around The Bush »
(initialement nommé « Back Seat
Confidential » et qui remonte
carrément aux sessions de Dirty
Deeds Done Dirt Cheap !) et d’un
« Touch Too Much » originellement
enregistré pour figurer sur Powerage,
mais auquel il manque, selon Angus,
« un petit quelque chose » (Ndlr : des
premières versions à déguster dans le
coffret Bonfire de 1997). Les ébauches
du blues malsain « Night Prowler »
semblent elles aussi remonter à
1977. D’autres chansons naissent
dans ce studio de répétitions
crasseux : « If You Want Blood »
(même si cela reste à confirmer),
« Girls Got Rhythm », « Walk All Over
You » et le futur hymne « Highway To
Hell » dont Angus compose le riff
alors que Malcolm est à la batterie.
Sur place, à en croire le livre The
Last Highway de Jesse Fink (très
controversé par ailleurs, et à juste
titre), les AC/DC sympathisent avec
les musiciens de Critical Mass, un
groupe de punk rock local (Ndlr : qui
publiera son unique album, It’s What’s
Inside That Counts, en 1980) qu’ils
croisent très régulièrement au Tight
Squeeze, un club d’Hollywood situé à
trente minutes en voiture de Miami.
Malcolm, Cliff, Phil et Bon y traînent
leurs guêtres quasiment toutes les
nuits. Un soir, un Bon éméché rejoint
Critical Mass sur scène pour chanter
plusieurs morceaux d’AC/DC parmi
lesquels « Whole Lotta Rosie », « Let
There Be Rock », « Gimme A Bullet »,
« Sin City » et « Up To My Neck In
You ». En journée, aux MSR, Bon
passe souvent derrière la batterie
(Ndlr : le chanteur était originellement
batteur) et accepte de céder sa place
à Mike Barone, le batteur de Critical
Mass, le temps d’une jam sur
« Beating Around The Bush ». Ce
n’est que lorsqu’AC/DC investit les
Criteria Recording Studios, un studio
24 Pistes voisin, que les choses se
corsent.
Les AC/DC, à l’heure où il leur faut
commencer à bosser avec Eddie
Kramer, n’ont toujours pas digéré la
mise à l’écart de George Young et ne
s’en cachent pas vraiment.
L’ambiance est donc pour le moins
délétère, mais Kramer n’en
comprendra les raisons que bien plus
tard : « Les problèmes ont vraiment
commencé à cause de la façon dont tout
cela avait été géré. C’est seulement
après coup que j’ai compris ce qui avait
foiré. Je crois que les décideurs de New
York avaient dit aux Boys : « Il faut
que vous bossiez avec un producteur
américain ! ». Le groupe fonctionnant
comme on sait leur avait probablement
répondu « fuck you !!! », mais les gens
d’Atlantic se sont dit « faisons-le
quand même ! ». Alors, ils m’ont
rencontré… Je pense que ça explique le
fait que, lorsque j’ai travaillé avec
AC/DC, il y avait du ressentiment dans
l’air. C’était un peu tendu avec
quelqu’un comme moi qu’on leur jetait
en pâture, avec qui on les forçait
littéralement à travailler. Ça leur restait
en travers de la gorge et ces gens-là ne
sont pas du genre à prendre ce genre de
choses à la légère… » Angus et
Malcolm sont très proches, en effet,
et méfiants comme des chats
sauvages, mais à les en croire, c’est
plus encore sur le plan humain,
musical et organisationnel que les
avis divergent. Pour Eddie Kramer,
les nouvelles chansons ne sont pas
finalisées et Bon Scott est bien trop
imbibé pour écrire ses textes : « Nous
répétons, mais nous n’enregistrons
aucune démo. Je me revois me rendre
aux studios et y trouver Bon Scott ivre
mort, incapable de refaire surface. Je
suis habitué à travailler d’une certaine
manière et le groupe d’une autre ».
Evidemment, les Young Brothers ont
un point de vue divergent, ainsi
qu’Angus l’explique à Guitar World en
1995 : « Notre label nous confie aux
bons soins de ce producteur réputé, mais
tout ce que ce gars fait, c’est de débouler
au studio et de dire : « Mettez de
l’écho sur la guitare et de la réverb’
sur la batterie ! ». Et nous : « Heu,
c’est tout ? C’est ça, ta conception de
la production ? ». (…) Eddie semble
savoir ce qu’il veut du point de vue du
son, mais je pense que, niveau musical,
il ne sait pas trop quoi faire. Il a pour
habitude de montrer Bon du doigt et de
demander : « Est-ce que ce mec est
capable de chanter ? ». Parce que Bon
est Bon, quasi incapable de parler,
encore moins de marcher, blotti dans
une alcôve avec une fille qu’il a
ramassée au bord de la route le jour-
même ! Nous lui répondons : « Ne
t’inquiète pas, mec, il sait très bien
chanter ! ». Et puis, il pense que je
suis un abruti, juste là pour renforcer
l’image du groupe. Nous, nous voulons
quelqu’un qui soit plus en adéquation
avec ce que le groupe est et qui ait des
idées au niveau musical ». Malcolm
ne dit pas autre chose : « Nous
comprenons rapidement qu’Eddie est
juste un bon ingénieur du son (…) Un
jour, il nous fait écouter un titre des
Rolling Stones, puis un morceau d’un
autre artiste, et nous dit : « Mélangez
ce couplet et ce refrain, et vous
avez un hit ! ». Evidemment, nous
lui répondons d’aller se faire foutre
et ça s’arrête là. Ça ne peut pas
fonctionner ! ». L’analyse du manager
Michael Browning est intéressante :
« Le groupe est habitué à être plus
épaulé au niveau des arrangements, et
même de son jeu. George les faisait
jouer des idées de chansons potentielles
sur le piano du studio. Et si ça ne
sonnait pas bien, George le disait, et
toutes les guitares et les techniques de
production au monde n’allaient rien y
changer. Eddie Kramer est avant tout un
ingénieur du son hyper compétent, mais
il n’apporte rien d’autre au groupe ».
Dans une lettre qu’il adresse début
mars 1979 à un ex-Fraternity, son
précédent groupe, Bon résume la
situation de façon plus colorée :
« Kramer était merdique à souhait et
n’aurait pas pu produire le son d’un pet.
C’était un bon ingénieur du son avec
une grande gueule (« je peux entendre
cette note… ») et une trop grande
confiance en lui (…) Trois semaines à
Miami et nous n’avions pas écrit le
moindre truc avec lui. Alors, un jour,
nous lui avons dit que nous allions nous
prendre un jour de repos et qu’il n’avait
pas besoin de passer au studio. C’était
un samedi. Nous sommes allés en
cachette au studio où nous avons
finalisé six morceaux ». Le sort de
Kramer est scellé : « Quand j’y
repense aujourd’hui, avec le recul, je me
dis que j’étais la mauvaise personne
pour le job (…) Je me suis toujours
senti mal par rapport à ça. Durant des
années, je me suis senti très mal par
rapport à ça. Je n’aurais pas dû tenter le
coup, je n’aurais jamais dû le faire… ».
La cause est définitivement entendue
quand, peu après cette session
d’enregistrement « buissonnière »,
Malcolm appelle Browning,
totalement désespéré : « Il me dit :
« Ce mec est sans espoir, fais quelque
chose. Il essaie de nous convaincre
de reprendre ce titre du Spencer
Davis Group, « Gimme Some Loving »,
« I’m A Man », ou que sais-je…
Trouve quelqu’un d’autre. Je me fous
de qui il s’agit, fais juste en sorte de
nous sortir de ce pétrin ! » Je lui
réponds que je vais faire de mon mieux,
je raccroche et je regarde Mutt Lange
droit dans les yeux : « Il faut que tu
produises ce disque ! » ».
LANGE ET LE DIABLE
Browning, alors en plein déménagement
à New York, partage l’appartement
du promoteur Cedric Kushner, où le
producteur Robert John « Mutt »
Lange et son manager, le très
influent Clive Clader, sont également
de passage. Agé de trente ans, Lange
n’est pas encore une pointure dans le
monde de la production, mais une
valeur montante qui, quatre mois
plus tôt, a décroché son premier
numéro 1 dans les charts anglais
avec « Rat Trap » des Boomtown
Rats. Une « prouesse » que Browning
cache à Malcolm lorsqu’il le rappelle
deux ou trois jours plus tard, après
avoir obtenu un accord de principe.
« Mutt qui ??? Jamais entendu parler ! »
répond laconiquement le guitariste,
25
 pas vraiment emballé, à son manager
qui lui répond de lui faire confiance.
En quelques heures, un accord est
trouvé. Reste maintenant à convaincre
Michael Klenfner… qui n’est bien sûr
pas d’accord et le fait savoir en
termes fleuris, se montrant même
insultant à l’égard d’un Mutt qui
n’en demande pas tant. Calder, très
remonté, s’en plaint dès le lendemain
à Jerry Greenberg, président
d’Atlantic, qui vire Klenfner sur le
champ en dépit de ses bons et loyaux
services passés pour AC/DC !
Malcolm et Angus, bien qu’en
désaccord avec Klenfner sur le choix
d’Eddie Kramer, en voudront
éternellement à Browning qu’ils
jugeront responsable de ce
licenciement abusif.
C’est début mars 1979, par une
matinée pluvieuse, qu’AC/DC atterrit
à Londres pour rencontrer Mutt Lange
et lui présenter quinze nouvelles
démos. Cette fois-ci, le courant passe
plutôt bien d’entrée de jeu, le jeune
producteur (qui « a grandi dans des
quartiers difficiles » dixit Malcolm) ne
prenant pas le groupe de haut.
Angus : « Quand Mutt découvre nos
morceaux, il nous dit : « Je peux leur
rendre justice, je peux vous rendre
justice ! ». Nous décidons de travailler
avec lui parce qu’il dit précisément ce
que nous voulons entendre. Nous
cherchons quelqu’un qui a encore les
crocs et non un « Monsieur
Professionnel » qui bosse depuis si
longtemps dans le métier qu’il se
contente de brancher le pilotage
automatique ». Durant les deux
premières semaines, les musiciens
répètent et finalisent leurs morceaux
dans des conditions spartiates, leurs
blousons sur le dos car il fait un froid
de canard sur Londres et que
l’endroit n’est équipé que d’un simple
chauffage au fuel. Puis c’est aux
Roadhouse Studios de Chalk Farm
(Ndlr : propriété de Bronze, label de
Motörhead et d’Uriah Heep, dont
l’ouverture remonte à 1974) que les
Boys rejoignent Mutt Lange.
L’insatiable envie de bien faire et
l’incroyable perfectionnisme de ce
dernier les déstabilisent… dans un
premier temps. Ian Jeffery, qui fait
alors partie de l’équipe technique du
groupe, se souvient : « A plusieurs
reprises, Bon dit à Mutt : « Ok,
connard, tu penses pouvoir chanter
ça ? Alors, vas-y, fais-le ! ». Et
invariablement, Mutt le prend au mot et
le fait… en restant assis ! Car c’est un
chanteur expérimenté. Alors, Bon ferme
son clapet : « Ok, connard, je peux le
faire moi aussi ! » (rires) ». Angus, lui
aussi, résiste dans un premier temps,
avant de se ranger à l’avis du
producteur qui lui demande
d’enregistrer ses soli à ses côtés,
dans le bocal. Et ça marche ! C’est
bien simple, les résultats sont si
prometteurs que même Malcolm est
content. Il s’en confie au magazine
RAM : « Mutt comprend comment nous
fonctionnons. Il ne s’aventure pas trop
loin avec nous, ce que nous apprécions.
Il est comme Harry Vanda, un peu plus
commercial. Nous apprenons beaucoup.
Jusqu’ici, nous pouvions toujours nous
reposer sur George (Young) : nous ne
finalisions pas certaines idées car nous
26
attendions de voir ce qu’il allait nous
suggérer. Cette fois, il a fallu écrire et
arranger toutes nos compos avant que
Mutt n’y ajoute de petites choses. C’est
important d’avoir un avis extérieur.
Sans cela, on peut tous aller trop loin,
jusqu’à disparaître dans son propre
anus ! »
Soumis à un rythme de travail
éreintant durant deux mois (une
éternité pour le groupe qui n’est
jamais resté aussi longtemps en
studio avec Vanda et Young), à
raison de sessions journalières de
quinze heures, AC/DC ne quitte les
studios que pour se reposer à la
Swiss Cottage Inn où il séjourne.
Mais le travail paye, Mutt Lange se
concentrant avec un soin maniaque
sur chaque détail, à commencer par
le son de caisse claire de Phil Rudd
(purement incroyable) et le chant de
Bon Scott. « Nous bénéficions avant
tout de son travail avec Bon, explique
Angus au mensuel Musician en 1991.
Contrairement à nous, Mutt sait
précisément comment sonnent les radios
FM. Chaque semaine, il décortique les
chansons du Top 10 US, leur son. Et il
a une sacrée paire d’oreilles. Il pourrait
entendre une aiguille tomber par terre.
Je sais que Bon est très content du
résultat. Mutt lui apprend à respirer,
à sortir des sons de son estomac ».
Il poursuit, dans une interview du
journaliste Steve Gett : « Dans le
passé, ce sont toujours les parties
vocales qui étaient les plus délicates à
mettre en boîte… Et pour cause, il est
difficile de choper Bon sobre ! ». Bon,
effectivement, est incroyablement
fier des progrès accomplis et le fait
savoir à la moindre occasion : « Mutt
m’a appris à chanter au lieu d’hurler. Et
il y a même des harmonies vocales. Des
harmonies chez AC/DC !!! Le résultat
est toujours du hard rock, mais avec
davantage de mélodies et de chœurs, un
son plus peaufiné. Il est possible que la
structure des morceaux elle-même soit
plus commerciale, sans toutefois
dépasser certaines limites. Dans le passé,
ça n’a été qu’un cri total, alors cette
fois-ci, j’ai bossé un petit peu plus ».
Ces chœurs ultra calibrés sont
nouveaux pour AC/DC et apportent
une puissance et un côté
« radiophonique » à des titres comme
le dansant « Touch Too Much » ou le
menaçant « Walk All Over You ».
Excellent chanteur, Lange participe
lui aussi à ces chœurs millimétrés,
même s’il lui faut s’éloigner des
autres car sa voix est trop
reconnaissable. Ces harmonies
vocales deviendront bientôt la norme,
voire la signature, d’un Def Leppard
que Mutt entraînera néanmoins vers
des terres bien plus commerciales
qu’il ne le fait en 1979 avec AC/DC.
En cela réside le succès d’Highway
To Hell : ce juste milieu entre
mélodie maîtrisée et sauvagerie
primale. Malcolm partage cette
analyse, ainsi qu’il le confie à Metal
CD en 1991 : « Mutt s’est chargé du
côté commercial pendant que nous nous
occupions des riffs, et, quelque part,
nous nous sommes rejoints au milieu
sans que nous ayons le sentiment de
nous être vendus. En fait, il n’y avait
aucune chance que nous pliions le dos
pour quoi que ce soit ». En 1995,
Angus ajoute : « De temps en temps,
Lange devenait un peu trop poppy, alors
nous lui disions : « Fuck that, nous
n’avons pas traversé la moitié de la
planète pour devenir un groupe à
minettes ! ». (…) Nous avons toujours
fait très attention à ne pas tomber dans
ce piège ». (…) J’ai compris où Mutt
voulait en venir (…) George recherchait
l’énergie avant tout, pour surprendre son
monde. Avec Mutt, la façon de faire
était bien plus structurée, plus policée,
il ne lâchait rien tant qu’il n’était pas
parvenu à l’objectif qu’il s’était fixé. (…)
Il est arrivé que nous mettions le holà :
« Mutt, ça, ce n’est tout simplement
pas nous ! Il faut que nous sonnions
de façon plus crue, plus sale, si
nous voulons obtenir ce que nous
cherchons à fixer sur bandes ».
Il était plutôt cool avec ça. Si nous
n’étions pas contents de ce qu’il nous
faisait écouter, il se rangeait à notre
avis. Mutt n’agissait jamais en
dictateur. Mais en tant que groupe,
nous avions une idée très précise de ce
que nous voulions obtenir, et il était
hors de question que nous fassions des
compromis. Aujourd’hui encore, si
Malcolm se tient à mes côtés – car il
travaille avec moi en permanence – et
s’il me dit « c’est ok », ça compte plus
pour moi que l’avis d’un mec qui a
produit vingt albums de Platine ! ».
Il dira même plus tard : « Beaucoup
de gens disent que Mutt Lange a fait
AC/DC, et ça me blesse. Je ne lui enlève
rien et je lui accorde du crédit pour ce
qu’il a fait. Au niveau du son, il sait ce
qu’il veut et il sait ce qu’il recherche sur
le plan vocal, mais nous ne lui avons
jamais laissé la chance d’être le boss,
tout simplement parce que ce n’était pas
ce que nous souhaitions. Si nous avions
suivi tous ses conseils, nos albums
auraient sonné de façon bien plus
policée et patinée ». Dans une
interview accordée le 17 août 1979
à Record Mirror, Bon Scott résume
néanmoins l’alchimie indéniable née
de la rencontre avec Lange : « Mutt a
vraiment injecté une nouvelle vie en
nous et nous a fait sortir des choses
dont nous ne nous pensions pas
capables. (…) Nous avons vraiment
essayé de devenir acceptables pour les
radios US sans pour autant dégouliner
de guimauve comme ces stupides
groupes américains. Et ça fonctionne !
Le côté cru d’AC/DC est toujours là,
mais ça sonne bien mieux ! (…)
Nous sommes très confiants en le fait
que les Américains vont aimer. Nous
commençons enfin à avoir un impact là-
bas, même si je pense qu’il va nous
falloir en faire encore un peu plus pour
atteindre le sommet de la colline ».
En plein enregistrement, AC/DC a dû
annuler sa participation, les 7 et 8
avril 1979, au Califfornia World
Music Festival (avec Aerosmith,
Ted Nugent, Van Halen, Cheap
Trick), au Coliseum de Los Angeles,
mais le résultat est là : fin avril, le
nouvel album est en boîte ! Il a été
mixé en huit jours par Tony Platt,
un ingénieur qui sait ce qu’est le
son « fat » du british rock à la Free
(groupe qu’adorent les frères Young)
puisqu’il a bossé pour ce dernier. Le
mixage a d’ailleurs été réalisé sur la
même table que celle qui a servi pour
le « All Right Now » de Paul Rodgers
& Co., aux Basing Street Studios où
ont également été réalisés quelques
overdubs (chant de « Night Prowler »,
chœurs de « Highway To Hell »,
quelques soli de guitare, etc.). Il est
d’abord question que la pochette
de l’album montre le groupe faisant
du stop au bord d’une route,
apparaissant dans le rétroviseur
d’une bagnole conduite par le diable
en question. Une session-photos
nocturne est organisée au printemps
1979 sur la voie express West Shore,
alors en travaux, à Brooklyn State
Island, mais l’idée est finalement
abandonnée (le seul cliché connu
figure au verso de l’album).
Curieusement, c’est une photo d’une
session new-yorkaise réalisée par Jim
Houghton datant de décembre 1977 (!)
– qui a déjà servi à illustrer la
pochette de Powerage en 1978 (Ndlr :
Jim a également conçu celle de If You
Want Blood) – qui est retenue,
Atlantic se contentant d’ajouter des
cornes et une queue fourchue à
Angus. Matériel de récupération,
donc, mais qui deviendra iconique
(Ndlr : le cliché alternatif de cette
session qui figure sur notre couverture
du mois, inédit jusqu’ici, vous est révélé
pour la première fois).
Dès le 8 mai, AC/DC entame une
nouvelle tournée américaine à
Madison, dans le Wisconsin,
repartant à toute allure sur cette
« autoroute de l’enfer » qu’il connaît si
bien. Highway To Hell n’est pas
encore sorti (ce sera le cas le 27
juillet 1979 en Europe et le 2 août
aux USA), qu’AC/DC, conscient du
fait qu’il vient de franchir un
important palier, vire son manager
historique, Michael Browning
(débarqué le 22 mai 1979 à
Nashville), pour s’acoquiner avec
Peter Mensch et le tout puissant
Leber & Krebs qui se charge déjà des
affaires d’Aerosmith et Ted Nugent.
Angus, Malcolm, Cliff, Bon et Phil
viennent de pénétrer dans une
nouvelle dimension. Pour parvenir à
entrer dans ce cercle fermé, il aura
néanmoins fallu sacrifier George
Young, Harry Vanda, Eddie Kramer,
Michael Klenfner et Michael
Browning. Les excellents résultats
de Highway To Hell permettent enfin
au groupe de s’imposer à l’échelle
mondiale puisqu’il se classe 17ème
aux USA et se hisse dans le Top 10
anglais. Or aux States en octobre
1979 et en France en janvier 80, il
est certifié Platine aux USA avec un
million d’exemplaires vendus en
mars 1980. Hélas, Bon Scott, mort à
Londres le mois précédent, n’a pas
vraiment eu le temps de récolter les
fruits de son travail. « Avec un peu de
chance, il se classera numéro un aux
quatre coins du monde et nous fera
gagner des millions de dollars »
déclarait le chanteur quelques mois
plus tôt, le 27 mai 1979, à Orlando,
au micro du DJ Neil Mirsky. « Si c’est
le cas, tu prendras ta retraite ? »
plaisantait ce dernier. « Oh non,
répondit Bon avec son sourire
espiègle, j’ai encore beaucoup de dettes
à honorer ! ». L’enfer, hélas, ne lui en
aura pas laissé le temps… Y
© Joe Giron / Dalle

Bon Scott, sur le Highway To Hell Tour,

le 16.09.1979, à El Paso (Texas)
 GENRE SITE INTERNET ARTICLES RH
. Metalcore www.killswitchengage.com RH N°13, 34, 62, 90, 130,
163 & 201
LE GROUPE ALBUMS
. Jesse Leach (chant)
. Killswitch Engage (2000)
. Adam Dutkiewicz . Alive Or Just Breathing (2002)
(guitare) . The End Of Heartache (2004)
. As Daylight Dies (2006)
. Joel Stroetzel (guitare) . Killswitch Engage (2009)
. Mike D’Antonio (basse) . Disarm The Discent (2013)
. Incarnate (2016)
. Justin Foley (batterie) . Atonement (2019)

De g. à d. : Mike D'Antonio, Adam Dutkiewicz,

Joel Stroetzel, Jesse Leach & Justin Foley
28

Né il y a vingt ans, le pionnier du metalcore qu’est Killswitch Engage vient de sortir son huitième album. S’il ne
renouvelle pas le style, Atonement a plus d’une qualité et d’un mérite à son actif. Par exemple, il (re)met sur la table le
sujet des maladies mentales, problème cher au cœur du frontman/cofondateur de KSE, un Jesse Leach qui, au cours de
cet entretien, a une nouvelle fois soigneusement évité toute forme de langue de bois. Qu’il en soit remercié !
Rock Hard : Votre dernier concert
français, donné le 04 février
dernier à l’Olympia de Paris en
compagnie de Parkway Drive (Cf.
RH197), t’as vu évoquer et soutenir
les Gilets jaunes qui ont manifesté
en France durant des mois. Je ne
savais pas que le mouvement était
si connu aux Etats-Unis...
Jesse Leach : Honnêtement, je ne le
sais pas trop non plus. Personnellement,
il se trouve que je suis toujours en
veille et en recherche à propos de
tout ce qui touche à la contestation
des gouvernements et des pouvoirs
politiques. Je pense sincèrement que,
qu’il s’agisse de pays occidentaux
comme les nôtres ou de pays dits
« émergeants », tous sont corrompus.
C’est pourquoi j’ai profité des Gilets
jaunes et de ma présence en France
pour lancer ce « vive la Révolution ! »
auquel tu fais référence. Il est
directement lié à ce que signifie
notre groupe. Pour moi, et je ne parle
là qu’en mon nom, Killswitch Engage
a toujours été synonyme de « mettons
fin au système » et « stoppons la
machine ».
En avril 2018, en plein
enregistrement de votre nouvel
album, tu as été obligé de subir
une opération des cordes vocales.
Que s’est-il passé ?
J’avais déjà eu des polypes et des
nodules par le passé, mais cette
fois, c’était vraiment carabiné.
J’ai commencé à avoir la puce à
l’oreille en essayant inlassablement
d’atteindre une note lors de
l’enregistrement de mes vocaux.
Au bout d’une demi-heure, je n’y
arrivais toujours pas… Ça a alarmé
Adam (Dutkiewicz), notre guitariste,
qui est aussi le producteur de nos
disques. Il connaît très bien ma voix
et a senti que quelque chose de pas
net était en train de se produire.
Heureusement qu’il m’a conseillé
d’aller consulter car j’aurais pu
causer des dommages bien plus
sérieux à mes cordes vocales en
forçant davantage. Contrairement
à d’habitude, après une semaine
de repos et de médicaments les
polypes étaient toujours là.
L’opération semblait inévitable.
Elle a repoussé la sortie de notre
album et nous a obligés à annuler
des concerts, et même une tournée,
mais c’était indispensable. Tout
s’est très bien passé. La partie la
plus embêtante fut la rééducation
car j’ai quasiment réappris à parler
et à chanter. J’ai découvert que,
comme beaucoup de monde, je
parlais et chantais d’une voix trop
grave par rapport à ma hauteur
optimale. C’est assez fascinant,
à vrai dire ! Désormais, ma voix est
plus aiguë. Parfois, au téléphone,
mes interlocuteurs ne me
reconnaissent pas, mais pourtant,
c’est bien moi ! (rires)
Comment s’appelle la chanson sur
laquelle tu as rencontré tant de
difficultés ?
C’est « I Can’t Be The Only One »,
mais je précise que le couplet que j’ai
eu tant de mal à enregistrer n’est
vraiment pas si compliqué à chanter
que ça. Et la prise si « laborieuse »
n’apparaît pas sur le disque, bien
entendu.
Combien de morceaux avais-tu mis
en boîte au moment de l’opération ?
Sans doute six ou sept. Ces
enregistrements sont, pour la
plupart, restés sur la version finale
du disque, avec seulement quelques
retouches effectuées ci et là.
Je chante et crie un peu
différemment aujourd’hui, d’une
façon sensiblement plus « ronde »
qu’avant. A vous de voir si vous
arrivez à déceler quelles chansons
ont été enregistrées avant ou après
l’opération. Visiblement, ce n’est pas
si facile à identifier que ça…
On trouve deux duos sur Atonement :
l’un avec Chuck Billy (Testament)
et le second avec Howard Jones,
le chanteur qui officia dans KSE
PENDANT LONGTEMPS, JE N’AI
PAS TROUVÉ LES MOTS À METTRE
SUR MON MAL-ÊTRE
(JESSE LEACH)
entre 2002 et 2012. Comment s’est
passée cette collaboration avec
Chuck Billy ?
Nous avons collaboré à distance,
mais je ne pense pas que nous
aurions pu obtenir un meilleur
résultat même en nous trouvant dans
la même pièce. La prestation de
Chuck est démente ! Nous avons
pensé à lui pour « The Crownless
King » car le thème de ce morceau,
qui dénonce les gouvernements
corrompus, allait comme un gant à
quelqu’un comme lui qui a des
origines amérindiennes. Les Indiens
d’Amérique ont tant à reprocher aux
pouvoirs successifs. Il se trouve que
j’ai également des origines
amérindiennes, même si elles sont
moins présentes chez moi que chez
lui. Chanter avec Chuck était un rêve
de longue date, pour mes camarades
comme pour moi. J’ai toujours eu
beaucoup de respect et d’admiration
pour lui.
As-tu toujours su que tu avais des
ancêtres amérindiens ou, comme
énormément d’Américains, as-tu
procédé à un test ADN déterminant
tes origines ?
Je l’ai toujours su, mais mes parents
ont effectivement fait un test ADN
qui a confirmé ces traces d’ancêtres
Propos recueillis par Morgan Rivalin - Entretien téléphonique réalisé le 08 juillet 2019
amérindiens dans ma famille. C’est
assez intéressant : dans notre ADN
familial, on trouve à la fois des
origines amérindiennes, écossaises
ou encore scandinaves. Un mélange
qui évoque de sacrées scènes de
batailles !
Comme une sorte de rencontre
entre un western, un film de
vikings et Braveheart !
(Rires) Exactement ! Pas étonnant
que je sois toujours en train de crier !
(rires) Blague à part, j’ai toujours su
que j’avais des origines amérindiennes.
Je le sentais au plus profond de moi.
J’ai toujours été fasciné par la nature
et j’ai un lien très fort avec elle, mais
aussi avec les rites shamaniques.
Je réalise régulièrement des quêtes
de vision en pleine nature. Je jeûne,
mage des champignons hallucinogènes
et laisse la nature s’adresser à moi.
En général, elle finit par me parler.
Certains textes du nouvel album en
sont directement tirés.
Les fans de KSE seront heureux de
vous voir réunis, Howard Jones et
toi, sur un morceau. Son titre,
« The Signal Fire » (Ndt : « Le
signal de fumée »), peut d’ailleurs
être vu comme un clin d’œil aux
Amérindiens…
Exact ! J’ai disséminé tout un tas de
références à mes ancêtres au long du
disque, même si, dans le cas de « The
Signal Fire », je le voyais avant tout
comme un clin d’œil au groupe
d’Howard, Light The Torch. Ce
morceau sur lequel nous chantons
ensemble parle d’unité et de
solidarité. Il est né lors d’une soirée
que j’ai passée avec Howard, au
cours de laquelle nous avons discuté
à bâtons rompus, comme deux amis.
Nous ne l’avions jamais fait, sans
doute parce que certains non-dits
entre le groupe et lui devaient
d’abord être éclaircis et dissipés.
Il est venu nous voir jouer à
plusieurs occasions ces dernières
années et, un jour, mes camarades
et Howard se sont expliqués.
Désormais, les non-dits, reproches
et autres regrets sont évacués.
La soirée que j’ai passée avec
Howard m’a inspiré « The Signal
Fire ». Je lui ai transmis le morceau,
fait part de mon idée de duo et, le
lendemain, il était dans un avion en
direction du studio pour enregistrer
son chant. Ce fut vraiment un
moment très cool pour tout le monde,
quelque chose que nous attendions
depuis longtemps. Howard a tout de
même fait partie de KSE durant près
d’une décennie. Je suis le premier à
reconnaître l’importance de sa
contribution à ce groupe.
Beaucoup de formations changent
régulièrement de maison de
disques, mais dans votre cas,
Atonement est le premier album
de KSE qui ne soit pas publié chez
Roadrunner/Warner, mais chez
Metal Blade/Sony. Cela change-t-il
quelque chose, concrètement ?
Oui, tout me semble avoir été plus
fluide cette fois-ci parce que nous
étions plus facilement compris. Je
n’ai rien contre Roadrunner, à qui
nous devons beaucoup, ni contre sa
maison-mère, Warner, mais il faut
savoir qu’avec le temps, la plupart
des métalleux de Roadrunner ont été
remplacés par des employés de la
major Warner qui ne sont pas des
dingues de metal. Pour les gens de
Metal Blade, fondé par un metalhead
légendaire en la personne de Brian
Slagel, leur travail est plus qu’un
travail. C’est leur vie, leur passion.
Nous y sommes vraiment « à la
maison ».
Tu utilises le mot-dièse
#iambrokentoo (Ndlr : un
morceau de l’album se nomme
« I Am Broken Too ») sur les
réseaux sociaux pour alerter au
sujet des maladies mentales, un
sujet qui te tient à cœur…
(Coupant la question) Et surtout
qui me concerne car je ne cache
pas être malade moi-même. J’ai
commencé à utiliser #iambrokentoo
juste après avoir écrit ce morceau et
ça m’a rapproché d’associations
faisant de la prévention anti-suicide.
C’est un sujet qui me concerne de
près, quasiment depuis toujours.
Pendant longtemps, je n’ai pas
trouvé les mots à mettre sur mon
mal-être. Et puis, j’ai commencé à
m’ouvrir, à en parler, et j’ai compris
que je n’étais pas seul. Tout le
monde a des fêlures et, où qu’on se
trouve,
il y a toujours quelqu’un qui peut
nous aider. Ce morceau m’a
d’ailleurs été inspiré par une
connaissance
très chère qui a connu une grave
dépression. Je voulais l’aider et,
en faisant ça, reconnaître que, moi
aussi, j’avais besoin d’aide. Quand
on souffre de maladie mentale,
parfois, le suicide peut apparaître
comme la solution. Ça me fout les
jetons car, parfois, c’est aussi ce que
je me dis quand l’idée me traverse la
tête. Mais non, j’ai décidé de réagir,
de prendre le taureau par les cornes.
Je ne serai pas le prochain nom sur
une trop longue liste de victimes et je
ferai tout mon possible pour aider
d’autres malades. C’est une bonne
raison de vivre.Y
29
 Propos recueillis par Benji - Interview réalisée le 10 août 2019 à Courtrai (Belgique)
Et de quatre ! Le moins que l’on puisse dire, c’est que, depuis ses débuts en 2013, cette association de bienfaiteurs connue
sous le nom de Black Star Riders ne lève pas vraiment le pied, pour le bonheur des amateurs de hard rock fin et racé. Nous
avons coincé Ricky Warwick, son chanteur/guitariste, à l’occasion d’une des très rares dates de Thin Lizzy, groupe mythique
dont il est également membre, au festival belge Alcatraz (Ndlr : compte-rendu dans notre prochain numéro). Ceci afin qu’il
nous en dise plus sur Another State Of Grace, remarquable nouvel opus de Black Star Riders, et les divers changements opérés
au sein du combo ces deux dernières années.
Rock Hard : Tout d’abord, Ricky, d’être dans un groupe de rock, départ : il nous a envoyé une vidéo un excellent compositeur, il peut
parlons de ces deux changements surtout lorsque tu vieillis, que tu as sur laquelle il jouait quelques titres jouer tous les styles…
de musiciens qui ont été effectués des enfants et des loyers à payer. de BSR : incroyable ! Nous n’avons
depuis l’enregistrement de Heavy Et chacun gère sa vie privée de eu aucune hésitation. J’aime les Tu es capable d’écrire des
Fire (2017). Jimmy DeGrasso façon différente. Il faut respecter gens qui sont capables de gérer les morceaux tout seul, mais tu as
(batterie) et Damon Johnson son choix, que je comprends problèmes avec un point de vue également beaucoup collaboré
(guitare) ont été respectivement parfaitement. Il est heureux, nous le positif au lieu de se contenter de se avec Damon sur les trois premiers
remplacés par Chad Szeliga et sommes aussi, tout va bien, et puis, plaindre de la situation. Chad est albums de BSR : comment
Christian Martucci. Quelles sont à l’occasion, nous jouons ensemble comme ça : un excellent batteur décrirais-tu ta relation de travail
les raisons de ces départs, et avec Thin Lizzy, comme ce soir, car doublé d’un mec en or. Et il bosse avec Christian ?
comment avez-vous dégoté leurs Damon reste un véritable ami. Il est dur, il joue beaucoup afin de Tout d’abord, et je te remercie de
remplaçants ? clair que je n’ai pas eu le même type toujours chercher à s’améliorer. l’avoir précisé, je n’ai pas vraiment
Ricky Warwick : Jimmy est parti car de relation avec Jimmy qu’avec lui... Je suis ravi qu’il fasse partie du besoin de quelqu’un d’autre pour
il voulait jouer avec Ratt (Ndlr : Il Après le départ de Jimmy, nous groupe. Avec Christian, c’est aller au bout d’une composition.
fait une grimace ! Pour info, Jimmy a Mais j’adore aussi travailler en
quitté Ratt en juin 2018). Ça nous a binôme, partager des idées et les
embêtés, bien sûr, mais pour être DES TAS DE GOSSES MASSACRÉS, ET faire évoluer d’une façon à laquelle
parfaitement honnête, tout ne se je n’aurais pas pensé seul. Alors,
passait pas super bien avec Jimmy. PAS UN PUTAIN DE POLITICIEN QUI A quand Christian est arrivé, nous
Alors, au final, ce fut peut-être une avons échangé les bribes de
sorte de bénédiction pour les deux LES COUILLES DE METTRE UN BON morceaux que nous avions écrits
parties. Quant à Damon, il voulait chacun de notre côté, puis avons
poursuivre sa carrière solo, et, COUP DE POMPE DANS CE MERDIER ET continué à bosser sur ces riffs, ces
surtout, être en mesure de gérer son accords. J’ai écrit quatre titres seul
propre emploi du temps, ne plus D’AGIR AFIN DE MIEUX CONTRÔLER sur le nouvel album : je sentais que
avoir à se plier aux exigences du je pouvais aller au bout de ceux-là
groupe, car il souhaitait aussi LA CIRCULATION DES ARMES AUX sans aide ou idées extérieures, et le
passer plus de temps avec sa groupe les a validés en l’état. Puis
famille. Ce fut un choc et… (pause) USA ! (RICKY WARWICK) je suis allé dans l’Oregon, chez
En fait, pas vraiment (sourire). Je le Christian, et nous avons passé une
connais très bien, nous sommes avons auditionné quelques batteurs, presque la même histoire : nous semaine à écrire. Ce fut très
devenus très proches. Une année qui étaient bons, vraiment, mais avons auditionné quelques productif !
avant qu’il ne nous annonce son nous avions le sentiment qu’ils guitaristes à Los Angeles, et ils
envie de départ, je pouvais déjà le n’étaient pas ceux qui nous fallait assuraient, mais il leur manquait ce Scott est un habitué des
sentir. Mais c’est un ami, un mec pour Black Star Riders. En 2011, petit truc en plus... Jay Ruston, changements de guitaristes à ses
super, et il nous a vraiment mis Thin Lizzy avait donné quelques notre producteur, a aussi produit côtés : il a dû composer avec cela
dans les meilleures conditions concerts avec Black Label Society : Stone Sour, dans lequel joue durant toutes ses années au sein
possibles en nous promettant de notre manager nous a parlé du Christian. Or, ce dernier était libre de Thin Lizzy où il a côtoyé cinq
finir la tournée quoiqu’il arrive batteur qui jouait avec eux à de tout engagement à ce moment-là, guitaristes en studio et en live,
avant qu’on trouve la bonne l’époque, Chad, car il savait qu’il et il était fan du groupe. Il nous a puis avec la version de Lizzy
personne. Vouloir partir pour des était libre au moment où Jimmy est donc aussi envoyé une vidéo sur dans laquelle tu chantais où trois
raisons familiales, tu te dois de parti. Nous l’avons donc contacté et laquelle il jouait quelques-uns de gratteux se sont succédés.
respecter cette décision. C’est dur il s’est montré intéressé dès le nos titres, et j’ai adoré son jeu. J’ai Comment gère-t-il cela ?
immédiatement envoyé cette vidéo à Je ne saurais le dire pour ce qui est
GENRE Scott (Gorham/guitare) qui a lui aussi des années 70 et 80 car je n’étais
SITE INTERNET
. Hard rock apprécié. J’en ai aussitôt fait part à évidemment pas là… C’est dur,
www.blackstarriders.com Christian qui m’a dit : « Ok, je vais mais il faut aussi comprendre
LE GROUPE vous envoyer un ou deux autres titres ! qu’aujourd’hui, si tu veux espérer
ALBUMS
. Ricky Warwick », mais je lui ai répondu que c’était vivre de ce métier à plein temps,
. All Hell Breaks Loose (2013)
(chant, guitare) . inutile : il était notre homme. Notre tu dois souvent t’investir dans plus
The Killer Instinct (2015)
. Scott Gorham (guitare) . Heavy Fire (2017)
. Another State Of Grace (2019)
rencontre a prouvé que nous avions d’un groupe. Je ne crois pas que
. Christian Martucci (guitare) vu juste : il est super cool, a des ça choque quiconque désormais.
. Robbie Crane (basse) ARTICLES RH racines musicales assez communes Christian est toujours un membre de
. Chad Szeliga (batterie) RH N°132, 151, 172 & 201 aux miennes, plutôt punk-rock, c’est Stone Sour, mais il fait aussi partie

30
 de BSR. On peut toujours arriver à
s’arranger. Quant à Scott, il est
toujours prêt pour un nouveau
challenge. Lorsque Damon est parti,
il n’était pas question de saborder le
groupe pour autant. J’ai le sentiment
que l’entité BSR est plus forte que
les individualités qui la composent.
Nous sommes sur une pente
ascendante, Heavy Fire a très bien
marché, les concerts aussi, nous
souhaitons aller de l’avant. Scott le
premier. Et par chance, il s’entend
super bien avec Christian, tant au
niveau musical qu’humain.
Jay Ruston, comme tu l’as
mentionné plus tôt, a produit
Another State Of Grace. Il
connaît bien le groupe car c’est lui
qui avait mixé vos deux précédents
albums. Pourquoi a-t-il bénéficié
de cette « promotion » ?
Nous pensions qu’il était aussi
temps de changer à ce niveau. Nos
De g. à d. : Robbie Crane, Christian Martucci,
Ricky Warwick, Scott Gorham & Chad Szeliga
32
deux précédents disques ont été
enregistrés à Nashville par Nick
Raskulinecz (Foo Fighters, Rush,
Deftones), qui est un grand ami de
Damon. Ils sont très proches. Le fait
que Damon soit parti et que Jay ait
déjà bossé avec Christian sur un
album de Stone Sour (Hydrograd/
2017) nous ont incités à travailler
sur l’intégralité de l’album avec lui,
à Los Angeles. Et puis, Jay y tenait
beaucoup.
LES TUERIES, LA HAINE, LE RACISME,
LA QUÊTE DU POUVOIR, LES CLASSES
SOCIALES DISPARATES… CE SYSTÈME
NE FONCTIONNE PAS, MAIS POUR
AUTANT, IL NE CHANGE PAS
(RICKY WARWICK)
« Why Do You Love Your Guns ? »
est un titre aux paroles lourdes de
sens. Elles prennent d’autant plus
de poids après les deux nouveaux
massacres survenus aux USA il y a
une semaine à peine. Peux-tu
revenir sur le contenu de ce titre
et les raisons qui t’ont poussé à
écrire ce texte ?
J’ai perdu mon beau-frère à cause
des armes à feu… En décembre
2012, lorsqu’est survenue la tuerie
de l’école élémentaire de Sandy
Hook, dans le Connecticut, où plein
de gamins ont été abattus sans
raison (Ndlr : 26 personnes tuées dans
une école, dont 20 enfants de 6 à 7
ans), ma fille avait le même âge que
ces gosses. Nous habitons à Los
Angeles, ma fille y est scolarisée,
et ça l’a terrifiée. Son école était
super, un bel établissement
tranquille, mais depuis, ils ont érigé
une barrière et un imposant grillage,
tout autour de l’établissement. Il y a
des gardes, et tout le monde passe
au détecteur de métaux avant
d’entrer. C’est horrible… Ce sont
juste des gamins qui vont à l’école,
et ils doivent supporter ça.
Paradoxalement, rien n’a été fait
pour que ce genre de drame n’arrive
plus. Et toutes ces têtes de bites qui
disent : « Le second amendement me
donne le droit de posséder des armes ».
Tu leur demandes de te citer un
autre amendement de la constitution
américaine, elles en sont incapables.
Et pour cause, elles ne connaissent
que celui-là ! Cette putain de loi
barbare qui date de presque 300
ans… Je ne m’attends pas à ce que
les gens ne puissent plus acheter
d’armes, mais qu’au moins, il soit
plus difficile de le faire que ça ne
l’est actuellement. A Walmart (Ndlr :
chaîne de supermarchés américaine), tu
ne peux pas acheter d’œufs
surprises car c’est « trop
dangereux ». Par contre, tu peux te
procurer un AK47 ! Personne ne
devrait posséder d’armement
militaire, à l’exception des militaires
eux-mêmes. Tu n’as pas besoin
d’une arme de guerre pour te
défendre, non ? C’est juste du bon
sens ! Depuis Sandy Hook, RIEN n’a
changé. Des tas de gosses
massacrés, et pas un putain de
politicien qui a les couilles de
mettre un bon coup de pompe dans
ce merdier et d’AGIR afin de mieux
contrôler la circulation des armes
aux USA. Depuis 2012, les
fusillades ont continué, et la seule
chose qui intéresse Donald Trump,
c’est de construire un mur pour
empêcher les Mexicains d’entrer sur
le territoire ? Mec, ce sont de « bons
blancs » qui ont commis ces crimes !
C’est débile ! Ça me met vraiment
en rogne. N’importe qui avec un
cœur et un cerveau qui fonctionnent
devrait dire : « Ok, faisons en sorte
que les armes ne puissent plus être
achetées n’importe où et par n’importe
qui, obligeons ceux qui en achètent à
passer un entraînement basique afin
qu’ils sachent s’en servir, que les
acheteurs donnent des raisons valides à
leur besoin de posséder une arme… »
Ça se fait partout ailleurs dans le
monde, ou presque ! Regarde ce qui
s’est passé en Nouvelle-Zélande
après les deux attaques de
mosquées en mars dernier : la
semaine suivante, ils votaient une
loi bien plus stricte concernant
l’obtention d’armes et le type
d’armes autorisées. Mais la NRA
(Ndlr : National Rifle Association, une
association américaine pro-armes très
influente politiquement) et tous ces
enfoirés… Ma fille est encore
effrayée par tout ça. Bref, pour
répondre à ta question, j’ai écrit les
paroles de ce morceau le lendemain
de Sandy Hook, en état de choc, de
tristesse absolue. Je n’arrivais pas à
regarder les infos et les images qui
passaient en boucle à ce sujet… J’ai
gardé ces paroles dans mon cahier
de poésie durant des années, et
récemment, j’ai pensé que le
moment était venu d’en faire une
chanson. La simple question est :
« Pourquoi préfères-tu tes armes à tes
gosses ? »
Tu es né et tu as grandi à Belfast
durant la période dite de
« troubles ». Inconsciemment,
est-ce que cette chanson est aussi
une façon pour toi d’exprimer
certaines pensées liées à ton
enfance ?
Absolument. La violence entraîne
encore plus de violence, et l’histoire
a prouvé qu’elle ne résolvait rien.
Les tueries, la haine, le racisme,
la quête du pouvoir, les classes
sociales disparates… Ce système
ne fonctionne pas, mais pour autant,
il ne change pas. C’est de la folie !
A l’inverse, « Tonight The
Moonlight » sonne comme une
chanson « joyeuse »…
En fait, j’ai écrit ce titre à propos
de mon premier chien. Je devais
avoir huit ou neuf ans. Un super
Jack Russell Terrier : j’adorais ce
chien, il me suivait partout ! Un
jour, il est mort. C’était la première
fois, à mon jeune âge, que j’avais
affaire à une mort proche. Mon cœur
était littéralement brisé. Je me suis
rappelé ce sentiment de grande
perte, mais dans la chanson, j’ai
surtout voulu retracer les bons
moments passés avec cet animal.
C’est une façon de dire, au sujet
d’un animal mais c’est évidemment
applicable à une personne :
« J’adorerais que tu sois encore là,
je pense à toi tout le temps, tu me
manques terriblement, mais tu es
toujours présent dans mes pensées. »
Même si, au départ, le sujet
n’est pas forcément « positif »,
l’ambiance qui se dégage de cette
chanson l’est. On y trouve même
J’AIME ÉCRIRE, ENREGISTRER ET
TOURNER (…) JE N’AI PAS VRAIMENT
D’AUTRES CENTRES D’INTÉRÊT QUE
LA MUSIQUE ET MA FAMILLE
(RICKY WARWICK)
un solo de saxophone ! Qui le
joue ?
Michael Monroe ! (ex-Hanoï Rocks)
Il avait déjà, à l’occasion, joué
avec vous en concert le solo du
titre de Thin Lizzy « Dancing in
The Moonlight » ! D’ailleurs, à ce
propos, un solo de saxophone sur
un morceau avec « moonlight »
dans le titre, ça va forcément fait
« tilt » chez les fans de Lizzy…
Je sais bien, mais je t’assure que
c’est une coïncidence, rien de
prémédité. Ça sonne juste super
comme ça, mais je me doutais que
certains me diraient ça, et c’est bien
le cas ! (sourire) Nous voulions que
Michael joue du saxo sur un titre, et
c’est sur celui-ci que ça convenait le
mieux.
« Underneath The Afterglow » a
été écrit par Scott et Jesse
Siebenberg, son neveu, mais aussi
le fils de Bob Siebenberg, batteur
de Supertramp et l’un des plus
vieux amis de Scott. Jesse joue
également avec Supertramp depuis
1997. Ça a dû faire tout drôle à
Scott d’écrire avec Jesse, qu’il a
littéralement vu grandir…
Scott me rend dingue ! (rires) Il sait
que nous sommes sur le point
d’enregistrer un nouvel album, tout
est écrit et prêt à être gravé sur
bandes, et il déboule à la dernière
minute en me disant : « J’ai cette idée
que je viens d’écrire avec Jesse, tu en
penses quoi ? » Bien sûr, j’ai adoré la
musique. J’ai donc récupéré la démo
de Scott et travaillé, le soir-même,
chez moi, sur des paroles et des
arrangements. Le lendemain, nous
enregistrions le morceau !
Il se dégage de « What Will It
Take ? » un feeling très différent
comparé au reste de l’album, une
ambiance plus « américaine », un
peu dans la veine d’un Tom Petty…
C’est vrai. C’est encore une chanson
de dernière minute que j’ai composée
juste avant l’enregistrement. Je l’ai
écrite en un quart d’heure, mais je
me suis posé des questions : « Est-ce
que je dois présenter ça aux gars ? Est-
ce un titre pour BSR ? » Et puis, je
me suis dit : « Rien à foutre, on verra
bien ! » Ça a plu à tout le monde ! En
effet, il y a un peu de Rolling Stones
ou de Tom Petty là-dedans. C’est un
peu différent de ce que nous faisons
habituellement, mais là réside la
beauté de la chose.
Depuis 2013, tu as enregistré
quatre albums avec BSR et
beaucoup tourné avec le groupe.
Tu as également sorti trois
disques en solo, donné des
performances acoustiques avec
Damon, réalisé deux tournées avec
Scott dans le cadre de Rock Meets
Classic, et donné quelques
concerts avec Thin Lizzy, comme
ce soir. Quand dors-tu ?
Jamais ! (sourire) J’aime écrire,
enregistrer et tourner. Je sors
rarement de chez moi en dehors
de ça, je ne vais pas dans les bars
faire la fête : lorsque je suis à la
maison, j’y reste pour passer du
temps avec ma famille. J’écris tous
les jours, je considère ça comme un
travail : je me lève, j’emmène les
enfants à l’école, puis j’écris
pendant quatre ou cinq heures, je
vais chercher les gosses à l’école et
je fais le repas car ma femme a
aussi un job à plein temps… C’est
ainsi que je fonctionne : c’est un
travail, et j’ai de la chance car
j’adore ce que je fais ! Je n’ai pas
vraiment d’autres centres d’intérêt
que la musique et ma famille. C’est
naturel pour moi.
Vous allez donner 33 concerts en
Europe en octobre et novembre
2019. Pour autant, aucune date
française n’est annoncée. C’est
prévu pour la suite ?
Cette tournée va durer sept
semaines, ce qui fait déjà beaucoup.
Et elle ne couvre en effet ni la
France, ni l’Espagne, ni la Hollande,
ni l’Italie… Les offres de ces pays
commencent à nous parvenir. Vous
nous verrez donc définitivement
chez vous en 2020. De plus, je sais
que nous allons jouer sur pas mal de
festivals l’été prochain, alors je
serais surpris que nous ne soyons
pas à l’affiche de l’un des vôtres.
L’une des meilleures choses
avec BSR, c’est que Scott est de
nouveau créatif. C’est génial de le
voir de nouveau s’impliquer dans
de nouvelles chansons au lieu de
se contenter de jouer éternellement
les classiques de Thin Lizzy !
Je suis totalement d’accord. Scott
est vraiment dans une phase
géniale. Il joue comme un fou sur
Another State Of Grace et est très
heureux de la situation actuelle.
C’est sûrement l’album de BSR sur
lequel il s’est le plus impliqué, tant
au niveau composition que de la
performance instrumentale. Et il
s’entend à merveille avec Christian.
Non pas qu’il ne s’entendait pas
avec Damon, bien au contraire, mais
c’est une relation différente. Ça lui
permet de continuer à être vraiment
actif. Dès que tu te perds dans une
mauvaise routine, ça devient
ennuyeux, tu deviens fainéant, ta
forme physique et mentale s’en
ressent…
Quelques mots sur ces trois
concerts que Scott et toi donnez
cet été avec Thin Lizzy. L’idée
était de célébrer l’anniversaire de
l’album Black Rose (1979) qui a
40 ans cette année. Vous avez joué
ce disque en intégralité au festival
Steelhouse, au Pays de Galles…
En effet, c’était super de s’attaquer
aux quelques raretés issues de
cet album, comme « Toughest
Street In Town », « Get Out Of
Here » et « Sarah », que j’adore.
Malheureusement, disposant de
moins de temps pour les deux autres
shows, nous ne jouons que quatre
extraits de Black Rose, les
classiques : « Do Anything You Want
To », « Waiting For An Alibi », « Got
To Give It Up » et « Black Rose ». Il
s’agit de mon album préféré de Thin
Lizzy, sans le moindre doute.
Le line-up de ces quelques shows
est surprenant : Darren Wharton
est aux claviers, Damon Johnson
et Scott à la guitare, toi au chant
et à la guitare, Scott Travis (Judas
Priest) à la batterie et Troy
Sanders (Mastodon) à la basse !
Nous savions Troy fan du groupe,
mais de là à jouer avec vous…
Tu le sais sûrement, Mastodon a
repris « Emerald » au début de sa
carrière, et, en effet, Troy – tout
comme les autres membres de son
groupe – sont de gros fans de Thin
Lizzy. Avec Scott, ils forment une
section rythmique d’enfer ! Cela
donne un ensemble composé
d’excellents musiciens, ce qui rend
mon boulot très facile. Y
33
 Propos recueillis par François Blanc - Interview via Skype réalisée le 11 juin 2019

Qu’on goûte ou non la nouvelle orientation musicale d’Equilibrium, qui lorgne désormais sur le metalcore, il convient de saluer
l’intégrité du guitariste et compositeur René Berthiaume, qui trace sa route sans se soucier le moins du monde du « qu’en
dira-t-on ». En attendant de découvrir ce que valent les versions live des nouveaux morceaux (le sextet foulera les planches
du Trabendo le 21 janvier prochain), le maître à penser du combo nous a gentiment expliqué le pourquoi du comment.
Rock Hard : Renegades voit déjà bien plus moderne que n’auraient pas encore écouté metal symphonique. Le défi, avec ce
Equilibrium s’éloigner de ses Erdentempel (2014) ; même si nous l’album : en dépit de tous les sixième album, va être de réussir à
racines folk et opter pour une n’en avions pas encore conscience, nouveaux éléments qui sont apparus, établir une setlist cohérente où
musique bien plus directe et nous préparions déjà notre public à nous n’avons pas abandonné les pourront s’intercaler anciennes
moderne. En avais-tu assez du ce qui se passerait sur Renegades ! mélodies folk ou le côté symphonique chansons et nouveautés. Cela
pagan metal ? Je reconnais que cette nouvelle étape et grandiloquent qui nous s’annonce pour le moins intéressant !
René Berthiaume : (Rires) Oh, est particulièrement importante, caractérise ! (sourire) En même temps, personne
tu sais, selon moi, ça fait bien mais en amont, nous avons conservé n’a dit que cela devait être facile…
longtemps qu’Equilibrium ne joue notre méthode habituelle : exploiter Votre musique a cependant
plus de pagan metal ! Seul notre les meilleures mélodies dont nous beaucoup changé. Prends-tu Durant la préparation de
premier album, Turis Fratyr (2005), disposons sans nous demander si toujours plaisir à jouer tes Renegades, vos rangs se sont
alliait un côté folk à des textes basés elles correspondent à l’idée que les premiers morceaux sur scène ? enrichis de deux nouvelles recrues :
sur les mythes germaniques et gens se font d’Equilibrium. Le groupe Oui, car certains d’entre eux le bassiste et chanteur norvégien
scandinaves. Par la suite, notre son a trace son chemin en fonction de ses comptent parmi les favoris du public Skar (Zerozonic) et la claviériste
évolué et notre champ d’exploration envies ; c’est, à mon avis, ce que et parce qu’ils m’évoquent de très Skadi Rosehurst. Ont-ils influencé
s’est élargi aux contes, à la fantasy, chaque artiste devrait faire ! Nous bons souvenirs. Ma connexion le processus d’écriture ?
aux mythologies du monde, à la avons conscience que certains émotionnelle avec nos deux premiers Oui et non. A vrai dire, c’est en
fiction de façon générale, et même auditeurs ne nous suivront pas dans albums est avant tout liée à la avançant dans l’écriture de
à nos expériences personnelles. cette voie, et cela ne me pose pas de nostalgie que j’éprouve en me Renegades que nous avons réalisé que
J’éprouve constamment le besoin problème. Le plus important est de remémorant les conditions de leur certains de nos refrains mériteraient
d’expérimenter et de me renouveler ; rester authentique dans sa création. C’était « la bonne formule d’être chantés en voix claire.
chaque album marque une étape de démarche, d’être pleinement en au bon moment » pour Equilibrium, Jusqu’ici, c’est moi qui tenais ce rôle
notre développement. Notre musique accord avec soi-même et fier de ses mais ce n’est plus du tout ce que mais je n’ai jamais été pleinement
a évolué de façon naturelle et décisions. Ceci étant dit, je peux tout j’écrirais aujourd’hui. A la maison, je satisfait du résultat. Ma voix ne
progressive. Armageddon (2016) était de même rassurer ceux qui n’écoute d’ailleurs plus de folk ou de sonnait pas comme je l’espérais !

34

Nous avons rencontré Skar en 2014,
à l’époque où il dépannait Trollfest
en tournée. Nous n’avions pas
beaucoup échangé à l’époque, mais
nous l’avons retrouvé fortuitement
sur Facebook l’an dernier et avons
découvert du même coup l’existence
de sa chaîne YouTube, sur laquelle il
poste des reprises metal de bandes
originales de film et de jeux vidéo.
Nous ne savions même pas qu’il
chantait, mais sa voix nous a
tellement plu que nous avons décidé
de le contacter pour lui proposer
d’intervenir sur un titre. Finalement,
les choses ont rapidement évolué et
nous lui avons carrément proposé de
nous rejoindre. Skadi, de son côté,
fait depuis longtemps partie de la
« famille Equilibrium » puisque c’est
GENRE SITE INTERNET
. Metalcore symphonique
www.equilibrium-metal.net
LE GROUPE ALBUMS
. Robse (chant extrême)
. Turis Fratyr (2005)
. Skar (chant, basse) . Sagas (2008)
. Rekreatur (2010)
. René Berthiaume . Waldschrein (EP – 2013)
(guitare, claviers) . Erdentempel (2014)
. Dom (guitare) . Armageddon (2016)
. Renegades (2019)
. Skadi Rosehurst (claviers)
. Hati (batterie) ARTICLES RH
RH N°79, 144, 167 & 201
De g. à d. : Hati, Skadi,
Robse, René, Skar & Dom
elle qui prend en charge la création
de nos pochettes et de nos visuels.
De plus, dans la mesure où nous
avons vécu ensemble, elle a souvent
influencé notre musique grâce à ses
conseils et suggestions. Passer des
coulisses à la scène ne représentait
donc qu’un petit pas… Qu’elle est
désormais impatiente de franchir !
Comme nous tous, elle est
autodidacte, mais contrairement à
nous, elle n’a encore jamais joué en
groupe ou donné de concert.
Est-ce la présence de Skar qui t’a
poussé à abandonner l’allemand au
profit de l’anglais ?
Même pas ! Skar a déjà chanté en
allemand pour un autre projet et
aurait été prêt à remettre le couvert.
C’est la direction musicale empruntée
qui m’a donné envie de privilégier
l’anglais, qui colle tout simplement
mieux au côté direct des nouveaux
morceaux. C’est cool de penser qu’un
grand nombre d’auditeurs pourra
facilement comprendre de quoi nous
parlons. C’est un choix artistique
plutôt que pratique.
Pourquoi avoir choisi d’intituler
l’album Renegades ?
Mon prénom est inclus dans ce titre ;
que demander de plus ? (rires) Plus
sérieusement, ce mot fonctionne à
plusieurs niveaux. Sur le plan
musical déjà, nous avions bien
conscience que beaucoup de gens
allaient se demander ce qui nous
avait poussés à changer à ce point.
Comme chacun sait, la scène metal
est parfois très conservatrice et
Internet regorge de justiciers auto-
proclamés qui s’arrogent le droit de
décider ce qu’un artiste a « le droit »
de faire ou non… A leurs yeux, c’est
sûr, nous allons désormais faire
figure de véritables renégats ! Et de
façon plus générale, c’est une sorte
de commentaire sur la société
contemporaine. Les gens se croient
libres, mais peinent à réaliser que la
majorité des choix qu’ils croient être
les leurs sont ceux que leur dictent
LE GROUPE TRACE SON CHEMIN EN
FONCTION DE SES ENVIES ; C’EST CE
QUE CHAQUE ARTISTE DEVRAIT FAIRE !
(RENÉ BERTHIAUME)
leur entourage et les normes en
vigueur. Ils comparent leur vie à
celles des autres et font ce qu’ils
pensent qu’on attend d’eux plutôt
que d’aller puiser au fond d’eux-
mêmes pour découvrir ce qui leur
plairait vraiment ! Ils privilégient
l’instantané à la réflexion, qui
est pourtant primordiale pour
l’épanouissement de l’âme. Qu’ils se
sentent en marge ou qu’ils cherchent
à se rebeller, j’espère que nos
auditeurs se reconnaîtront dans ce
titre d’album. C’est une préoccupation
que partage un très grand nombre de
personnes.
A en croire le communiqué de
presse qui accompagne Renegades,
ce sixième opus a été composé dans
un environnement inhabituel pour
toi…
D’ordinaire, j’ai toujours des images
de paysage sous les yeux lorsque je
compose. Cela m’aide à trouver
l’inspiration. Il arrive aussi que je
prenne des idées dans des films ou
des jeux vidéo, qui me mettent
dans un état d’esprit bien
spécifique. Mais cette fois-ci, mon
home-studio était en travaux et je
ne pouvais pas l’utiliser. J’ai donc
dû transférer tout mon équipement
dans un sinistre garage sans
fenêtre ! « Merde… Comment vais-je
pouvoir créer dans un bordel pareil ? »
(rires) Mais bizarrement, cela s’est
avéré très bénéfique ; puisque je ne
pouvais pas chercher l’inspiration
dans des choses extérieures, j’ai dû
creuser profondément en moi. Un peu
comme si la musique émanait de
l’univers et arrivait directement sur
mon ordinateur en passant par mon
cerveau ! (rires) C’était très direct,
très intuitif. Il en a été de même pour
les paroles, basées sur nos souvenirs
et qui parlent d’affronter nos peurs.
Nous évoquons notamment la nécessité
d’être ouvert au changement. Si tu
acceptes les choses telles qu’elles
viennent, tout te semblera plus
facile. Il faut « suivre le courant »
de la vie ! Cette formule peut sembler
un peu ésotérique, mais ça fonctionne
vraiment… C’est notamment le sujet
qu’aborde la chanson qui clôt
l’album, « Rise Of The Phoenix ».
On peut interpréter ce titre de façon
littérale, avec le décès de quelqu’un
et son passage de l’autre côté, mais
aussi le relier aux « petites morts »
du quotidien, les bouleversements
ordinaires. Beaucoup de gens sont
réfractaires au changement et
éprouvent de grandes difficultés à
sortir de leur zone de confort ou à
essayer de nouvelles choses. On se
sent parfois prisonnier de relations
amoureuses qu’on sait mauvaises
pour nous, mais la peur de l’inconnu
et de la solitude empêche d’y mettre
un terme, alors que ce serait la
meilleure chose à faire… Et bien sûr,
cette idée d’accepter le changement
colle très bien avec notre propre
virage musical. Quand j’avais 17 ans,
je n’écoutais que du black et du
death metal. Je n’imagine même pas
la quantité d’excellente musique à
côté de laquelle je serais passé si
j’étais resté coincé sur ces deux
genres précis ! Il me semble
impératif d’être ouvert à toutes les
musiques et d’ignorer tout préjugé.
Peut-être que tout ne te plaira pas,
mais au moins, tu auras essayé…
Il y a trop de belles choses à
découvrir pour se contraindre
volontairement !
Tu parlais plus tôt de « l’autre
côté ». Crois-tu en une vie après
la mort ?
Oui, absolument. Je ne sais pas si le
terme de « vie » est approprié, mais
je crois en une forme d’existence,
même quand notre corps aura cessé
de fonctionner. En revanche, je suis
bien incapable d’imaginer la forme
que cela pourrait prendre ! Ce n’est
pas une question qui me hante car je
ne découvrirai la vérité que lorsqu’il
n’y aura plus de retour en arrière
possible. J’espère simplement que ça
n’arrivera pas trop vite : il y a encore
beaucoup de choses que j’aimerais
accomplir ici-bas ! (rires) Y
35
 Propos recueillis par Morgan Rivalin - Interview réalisée le 25 juin 2019 à Paris

Le 17 août 2018, Deven Davis, l’ex-femme de Jonathan Davis,

succombait à une overdose. Mère de deux enfants, elle était âgée de 39
ans. Dans les mois qui suivirent, le chanteur de Korn s’est jeté à corps
perdu dans la création artistique, écrivant et interprétant des textes
tous reliés les uns aux autres, puisés dans l’encre noire de son deuil.
Le résultat se nomme The Nothing. Entretien avec Jonathan Davis
croisé à Paris au mois de juin.

Rock Hard : Comment comparerais-tu
The Nothing à votre dernier album
en date, The Serenity Of Suffering
(2016) ? Vois-tu plus de points
communs ou de divergences ?
Jonathan Davis : Les deux sonnent
comme du Korn, mais The Nothing
est vraiment différent de son
prédécesseur. Il y a des morceaux de
The Serenity Of Suffering que je n’aime
vraiment pas… Mais bon, peu importe
puisque mes camarades les adorent.
Faire partie d’un groupe signifie qu’il
faut parfois savoir se ranger à l’avis
de la majorité et faire des compromis.
Je l’accepte sans sourciller. Mais The
Nothing est un disque que j’aime à
100%. Il est vraiment sombre, comme
le premier Korn (Korn/1994), voire
plus encore. Il a été directement
influencé et impacté par ce que j’ai
traversé l’an dernier. C’est un album
sur lequel plane constamment le
deuil. Mon deuil. On m’entend faire
mon deuil sur chaque morceau, dès la
première plage du disque (« The End
Begins »). Tous les morceaux parlent
de la même chose, cette entité que
j’appelle « the nothing » (Ndt : « le
vide », ou « le néant »). C’est... c’est
rien, c’est vide, mais c’est sombre,
c’est noir, comme une sorte de
matière ou d’énergie noire qui prend
le dessus sur moi. Elle a toujours
collé à mes basques. Elle m’entoure
et je la combats constamment. Elle a
pris la vie de ma femme. Elle a refilé
une putain de maladie incurable à
mon fils (Ndlr : Zeppelin, l’un des fils
de Jonathan Davis, est atteint d’un
diabète de type 1). Tout ça m’entoure
en permanence et cet album parle de
ma bataille, de mon combat, pour
venir à bout de cette merde qui me
mine et pour en guérir... Si tu le
souhaites, on peut parler de chaque
chanson de l’album, mais elles traitent
vraiment toutes de la même chose, de
ce qu’on peut appeler mon « processus
de guérison », j’imagine... Certains
GENRE
. Neo metal
LE GROUPE
.
Jonathan Davis (chant)
. James « Munky » Shaffer (guitare)
. Brian « Head » Welch (guitare)
. Reginald « Fieldy » Arvizu (basse)
. Ray Luzier (batterie)
morceaux me sont très pénibles à
écouter, d’autres un peu moins, mais
ils sont tous reliés les uns aux autres.
Je pense que les textes parlent d’eux-
mêmes. Il faut écouter l’album pour
comprendre. Le décrire n’est pas une
tâche aisée car il est né dans la
douleur. Ou, plutôt, dans une période
incroyablement douloureuse pour moi
et mes proches…
The Nothing est indéniablement
sombre, mais on y trouve tout de
même de nombreuses touches de
lumière dans les refrains, même
lorsqu’ils sont teintés de
mélancolie...
Je suis d’accord. C’est une histoire
d’équilibre. L’album est noir... et
blanc. Un noir abyssal et un blanc
aveuglant.
CERTAINS MORCEAUX DE L’ALBUM
SONT TRÈS PÉNIBLES À ÉCOUTER
POUR MOI (JONATHAN DAVIS)
A l’image de sa pochette,
radicalement différente des autres...
Exact ! Qu’as-tu pensé en la
découvrant ?
J’ai tout de suite aimé qu’elle soit
différente, sur ce fond blanc qui
m’évoque le néant...
(Me coupant) J’adore cette
interprétation ! Mais bon, tu es
Français : tu ne vois donc pas
les choses comme tout le monde.
Je suis sérieux : les Français ont une
façon de percevoir l’Art à un autre
niveau. Vous avez ça en vous.
Les Japonais aussi. A chaque fois
que je viens en France et au Japon,
je ressens cette différence de
perception. Vous percevez vraiment
l’Art d’une autre façon que les gens
« normaux ».
. MTV Unplugged (live – 2007)
SITE INTERNET . Untitled Album (2007)
. Korn III : Remember Who You Are (2010)
www.korn.com . The Path Of Totality (2011)
. The Path Of Totality Tour - Live At The
ALBUMS Hollywood Palladium (live – 2012)
. . The Paradigm Shift (2013)
Korn (1994)
. Life Is Peachy (1996) . The Serenity Of Suffering (2016)
. Follow The Leader (1998) . The Nothing (2019)
. Issues (1999)
. Untouchables (2002) ARTICLES RH
. Take A Look In The Mirror (2003)
. See You On The Other Side (2005) RH N°13, 27, 39, 50, 101, 135,
. Live & Rare (live – 2006) 170 & 201
Nous sommes donc « anormaux » ?
(rires)
Bien sûr ! Et dans ma bouche, c’est le
plus beau des compliments !!! (rires)
Tu peux me faire confiance : j’ai
voyagé dans le monde entier et je
peux te dire que, dans le domaine de
l’Art, du respect de la création et des
artistes, qu’ils soient musiciens,
architectes, peintres, etc., la France
n’est vraiment pas un pays comme les
autres. Regarde cette pièce (Ndlr :
nous nous trouvons dans les bureaux de
Warner Music, dans une pièce où de
nombreux tableaux sont accrochés aux
murs) : tu ne vois pas ça partout !
Le vinyle de The Nothing pourrait
être accroché sur ces murs. Il ne
dépareillerait pas...
Je le pense aussi. Tu sais, je suis
vraiment ravi du retour en force du
vinyle. Ça remet les artworks au
premier plan, place qu’ils n’auraient
jamais dû quitter. Mes enfants
adorent les vinyles aussi. Ils trouvent
ça fun. Bon, ils ne tiennent pas en
place et n’écoutent jamais un album
en entier (rires), mais ils aiment le
rituel qui consiste à sortir le disque,
le glisser sur la platine, etc. C’est
cool !
Et toi, que vois-tu dans la pochette
de The Nothing ?
Sincèrement, quand je la regarde, j’ai
l’impression de me voir, rongé par un
mal qui me torture. Un truc qui me
contraint à adopter la posture la plus
inconfortable au monde. Quand je
l’observe, j’ai envie de démêler ces
putains de câbles pour aider ce
pauvre gars ! (rires) En tout cas, je
trouve que cette pochette est une
vraie réussite qui vient parfaitement
illustrer l’album. Pourtant, ce n’était
pas gagné d’avance. Comment
illustrer le néant ? Pas si simple. Ma
définition de ce mot est clairement
inspirée de L’Histoire Sans Fin (Ndlr :
film germano-américain sorti en 1984
que beaucoup considèrent comme un
classique de la fantasy), de ce néant
qui ronge le monde en cherchant à
faire perdre espoir à ses habitants.
Mais je n’ai pas perdu espoir. Ce
néant est taillé dans le mal le plus
noir qui soit, mais je ne lâcherai pas.
Je suis comme un funambule sur la
corde raide, jamais très loin de se
casser sur la gueule, mais j’ai trouvé
mon équilibre. Je ne dis pas que je
suis guéri car je sais que je devrai
lutter jusqu’à mon dernier souffle,
mais je suis apaisé. J’aime à la fois
des choses très sombres et très
lumineuses, très légères. C’est
comme ça depuis toujours. J’ai
toujours mené ma vie ainsi, pris entre
deux feux. Je trouve la vie bien plus
belle quand on accepte d’aimer des
choses aussi contrastées que l’ombre
et la lumière. Il en ressort forcément
du positif.
Tu as toujours été très sincère et
direct dans ton écriture. Pas
étonnant que certains morceaux de
The Nothing soient difficiles à
écouter...
Oui, et ça commence dès « The End
Begins ». Ça donne le ton, comme
on dit ! J’ai repoussé l’enregistrement
de mes vocaux au maximum.
J’appréhendais. Et quand je me suis
enfin mis au micro et que j’ai chanté
ce titre, j’ai lâché prise et perdu pied.
C’est ce qu’on entend sur ce morceau
car j’ai gardé le passage en question.
Tu l’as bien dit : j’ai toujours été
sincère dans mon écriture, histoire
que le lien qui unit Korn à ses fans
soit le plus honnête possible. Certains
trouveront peut-être ce passage
gênant car impudique, mais pour moi,
il devait impérativement être
conservé tel quel. Puis « Cold »
débarque et tu es emporté par le
tourbillon de l’album. C’est à ce
moment qu’il débute vraiment, quand
j’ai évacué ce que je devais évacuer.
Ça s’est passé exactement comme ça.

36
De g. à d. : Ray Luzier, James « Munky » Shaffer, Jonathan Davis,
Reginald « Fieldy » Arvizu & Brian « Head » Welch
© Marc Villalonga
Tu aurais pu finir l’album avec ce
moment poignant de « The End
Begins », mais le débuter ainsi est
bien plus puissant...
Oui, je le pense aussi. The Nothing
débute dans la douleur et, à la fin,
j’accepte le fait que j’ai échoué...
(Il marque une pause) C’est vraiment
de ça dont il s’agit : une série
d’échecs à la fin si tragique... J’ai
tout essayé. J’ai tout tenté pour que
ma femme aille mieux... J’ai fait tout
ce qui était en mon pouvoir, pendant
des années, pour essayer de l’aider...
Et j’ai échoué. (Long silence) Alors,
d’un autre côté, je sais que j’ai fait
tout ce que je pouvais faire. Que
tenter d’autre ? Rien. Ça m’aide un
peu... La vie réserve vraiment
d’énormes coups durs. Parfois, j’ai
l’impression d’être un putain de
musicien de country qui baigne
constamment dans une succession
de tragédies ! (Il se ressaisit) Mais
bon, je sais que du positif finit
toujours par ressortir de ces
épreuves. Je sais aussi que j’ai déjà
fait suffisamment de bien dans ma vie
pour pouvoir me raccrocher à ça et
prendre conscience que tout n’est pas
si sombre. La souffrance est sans
doute le prix à payer pour pouvoir
créer quelque chose qui, par la suite,
aidera d’autres personnes à
surmonter leurs propres difficultés.
Et ça, ça m’aidera à supporter les
miennes à mon tour. Et ça
continuera, encore et encore…
Comme une « histoire sans fin »...
(Rires) Voilà !
J’ai l’impression que tu t’es lancé
dans Korn pour exorciser ton mal-
être et les souffrances que tu as
connues, mais faire partie de Korn
a engendré d’autres souffrances et
tragédies, te donnant ainsi
constamment de la matière. (Il
acquiesce) Au bout du compte,
vois-tu Korn plutôt comme une
bénédiction ou une malédiction ?
Il y a un peu des deux... (Il réfléchit)
Au bout du compte, je pense que tout
s’équilibre et je vois surtout Korn
comme une extension de ma
personnalité, avec ses bons et ses
mauvais côtés. Je préfère quand
même me focaliser sur le positif et
vais donc te répondre que je vois
plutôt le groupe comme une
bénédiction. Je pense même qu’il est
devenu une sorte de mouvement
culturel, un truc qui permet à tout un
tas de gens de trouver de l’aide. C’est
comme une soupape qui leur permet
d’évacuer ce qui les ronge. Ça, bien
sûr, ce sont eux qui nous le disent.
Avec le temps, à force de recevoir des
témoignages, j’ai appris à accepter
cette réalité, car c’est vraiment ça que
Korn représente pour beaucoup de
personnes. Et c’est génial, bien sûr !
Avant de venir faire cette interview,
la seule requête que j’ai reçue, et
évidemment acceptée, de la part de
ton entourage était de ne jamais
mentionner ta femme au cours de
cet entretien. Mais en parlant avec
tant de sincérité de sa disparition
et de ton deuil, tu aides
certainement du monde...
Tu as sans doute raison. En tout
cas, c’est ce que je souhaite. Je te
remercie d’avoir accepté cette
consigne. De toute façon, je ne peux
pas et ne veux pas ne pas mentionner
ma femme quand je parle, avec le
plus de sincérité possible, de cet
album entièrement basé sur ce que
j’ai traversé au cours de l’année
écoulée. J’ai perdu l’amour de ma vie.
Elle est partie à cause d’une putain
d’addiction aux drogues et à cause
de problèmes mentaux. Aujourd’hui,
je me dois de ne rien lâcher, coûte
que coûte. J’ai deux bébés à élever.
Enfin, ils seront toujours mes bébés,
mais ce sont des ados maintenant !
(rires) J’ai la chance d’avoir des
enfants géniaux et que Dieu m’ait
donné une vie incroyablement
enrichissante qui me permet de
rencontrer énormément de gens
aux quatre coins du monde. Comme
tout un chacun, je rencontre des
embûches, mais je suis conscient de
la chance que j’ai.
Comment as-tu collaboré avec tes
camarades sur la musique de The
Nothing ?
Ils ont majoritairement travaillé
séparément, à Nashville, sans que je
sois présent. Et puis, Deven est décédée
et ils sont venus me rejoindre à Los
Angeles pour que nous bossions
ensemble sur quelques titres, dont
« You’ll Never Find Me ». Nous avons
également retravaillé « Can You Hear
Me », un morceau que je voulais
JE SUIS COMME UN FUNAMBULE SUR
LA CORDE RAIDE, JAMAIS TRÈS LOIN
DE SE CASSER SUR LA GUEULE, MAIS
J’AI TROUVÉ MON ÉQUILIBRE
(JONATHAN DAVIS)
initialement sortir en face B de mon
album solo (Black Labyrinth/2018).
Nick (Raskulinecz), le producteur de
The Nothing, l’aimait tellement qu’il
m’a demandé si j’étais d’accord pour
qu’il la travaille avec mes camarades
du groupe. J’avais très hâte de voir ce
qu’ils allaient en faire. Quand j’ai
entendu le résultat final, je l’ai tant
adoré que je me suis lâché sur le chant.
Je crois qu’à un moment, j’ai empilé
19 pistes de voix harmonisées ! J’y
entends du ABBA, les Bee Gees, du
Queen... Je n’avais jamais abordé mon
chant de cette façon, en travaillant
comme le font les guitaristes : en
utilisant des micros différents pour
assembler une sorte de « mur » sonore
ultra compact. Et le résultat est si
bon, si gros ! Encore plus gros que la
musique qui est déjà très puissante.
J’ai passé énormément de temps sur
cette chanson, mais ça en valait la
peine. Je crois que je n’avais jamais
eu autant de temps à consacrer à mon
chant. Généralement, mes enfants et
les concerts ne m’en laissent pas
beaucoup. Nous devons toujours
repartir sur les routes à un moment
ou un autre, par nécessité, car ce
sont les concerts qui nous font vivre.
Cette fois, je m’occupais de mes
enfants, mais ma sœur était là aussi
pour m’aider. Ça m’a permis de
m’éclipser régulièrement dans mon
studio de Bakersfield. C’est un ancien
cinéma construit en 1938 dans lequel
je possède un appartement. J’y passe
pas mal de temps. J’y suis bien. Nous
y stockons notre matos et on y trouve
un véritable studio d’enregistrement.
C’était le studio de Buck Owens (Ndlr :
légende de la country et de ce qu’on
appela le Bakersfield Sound), et Willie
Nelson ou encore Johnny Cash y ont
enregistré. Il y règne de super
vibrations. J’ai majoritairement bossé
là-bas, mais aussi un peu aux
Paramount Studios. C’est là qu’est né
« Finally Free », un morceau sur
lequel je parle du décès de Deven
sans détour. C’était dur, mais j’adore
ce titre. J’adore l’album entier de
toute façon, y compris ses interludes
auxquels je tenais beaucoup afin de
relier les morceaux les uns aux
autres. Sans oublier l’intro de
cornemuse, bien sûr !
Comment décrirais-tu le rôle tenu
par Nick Raskulinecz (Rush, Alice
In Chains), avec qui vous aviez déjà
travaillé sur The Serenity Of
Suffering ?
En fait, il a surtout bossé avec les
autres gars du groupe cette fois-ci, et
il a incroyablement assuré. Ils n’ont
que de bonnes choses à dire à son
sujet. J’ai beaucoup enregistré de
mon côté. J’avais vraiment besoin
d’être seul. Mais je m’entends
extrêmement bien avec Nick. C’est un
mec génial ! A l’enterrement de Deven,
j’ai enlacé mes trois producteurs
préférés pendant un long moment. Il
s’agit de Nick, de Ross (Robinson) et
de Michael Beinhorn. Je les ai serrés
contre moi en leur disant : « Je vous
aime tellement. Vous m’avez toujours
fait donner le meilleur de moi-même ! ».
C’était super intense. Tout à coup, ils
étaient réunis là, devant moi, tous les
trois. Encore un coup de la Matrice !
Sérieusement, c’est le genre de
moment incroyablement parfait qui te
donne l’impression qu’on vit dans un
jeu vidéo, une simulation grandeur
nature... Mais je m’égare ! (rires)
Vous allez tourner avec Alice In
Chains aux USA en juillet/août
(Rappel : interview réalisée le 25
juin dernier), et sur certaines
dates, vous serez accompagnés par
HO99O9 et Fever 333, deux jeunes
groupes taillés pour le live qui font
des ravages sur scène. C’est tout à
votre honneur !
Oh, tu sais, nous n’avons jamais été
du genre à ne pas choisir les meilleurs
groupes au prétexte qu’ils seraient
une menace, ou à brider leur son, par
exemple. Ça se faisait beaucoup dans
les années 80/90, mais c’est de
l’histoire ancienne, je pense... Ou
plutôt, je l’espère. C’est tellement
naze ! Nous n’avons jamais résonné
ainsi. HO99O9 joue une sorte de punk
rock/rap totalement indescriptible
dont je raffole et Fever 333 est une
vraie décharge d’adrénaline sur
scène. Je suis vraiment très
enthousiaste de tourner avec eux.
Qu’ils déchirent tout et ravissent nos
fans et je serai le plus heureux des
hommes. Et si le public est déjà crevé
quand notre tour arrive, hé bien, tant
pis ! (rires) J’ai tellement l’impression
que tous les groupes prennent leur
retraite depuis quelque temps que
rien ne fait plus plaisir que de voir de
jeunes loups débarquer pour tout
casser. Qui tiendra la baraque quand
nous ne serons plus là ? Slayer
raccroche, Metallica arrêtera bien un
jour aussi... C’est flippant quand on y
pense ! Mais voilà, tout le monde
vieillit. Dans six mois, j’aurai 49
balais... 49 balais !!! Je n’arrive pas à
y croire...
Sais-tu à quel âge tu pourrais
arrêter de monter sur les planches ?
Moi ?! Jamais ! Je mourrai sur scène !
Je partirai en tournée jusqu’au bout.
C’est ce que je fais. J’ai ça dans le
sang. Et j’aime toujours autant créer
de la musique, alors... Pour le
moment, je ne vais pas ralentir la
cadence, bien au contraire.
L’alternance entre Korn et ma
carrière solo me comble. Ça me
permet de tourner un maximum et
d’emmener mes bébés aux quatre
coins du monde. C’est le style de vie
qui me convient le mieux, de toute
façon. Et pour mes enfants, quelle
meilleure éducation que de partir à la
rencontre de tant de cultures
différentes ? Je ne parlerai pas des
autres systèmes scolaires car je ne
les connais pas, mais aux Etats-Unis,
l’école transforme les enfants en
véritables esclaves. C’est une
horreur. Je veux libérer mes enfants
de ce joug. A leur âge, j’aurais
tellement adoré partir découvrir le
monde pour chercher ma propre voie.
Car au bout du compte, c’est bien ça
le plus important : trouver sa voie. Ça
me fait réaliser que j’ai beaucoup de
chance d’avoir trouvé la mienne,
d’être un artiste qui n’a de comptes à
rendre à personne…
Honnêtement, tu n’as jamais
ressenti devoir rendre des comptes,
ou devoir faire des choses que tu
n’avais pas envie de faire ?
Non, jamais. J’ai toujours gardé le
contrôle et n’ai jamais été contraint
de faire quoi que ce soit. Je dois être
chanceux ! (sourire) Encore une fois,
j’en suis conscient. Quand je serai
vieux, il ne me restera plus qu’à me
retirer dans un ranch et j’aurai
accompli tous mes rêves. J’y serai
autonome, me nourrissant du produit
de la terre. Autonome sur le plan
énergétique aussi, débranché du
réseau électrique et produisant tout à
l’aide d’énergies renouvelables :
panneaux solaires, éoliennes, etc. Ça,
c’est mon rêve ultime ! Je me lèverai
le matin pour jouer avec mes
animaux, heureux et détendu... Tout
ça, ce serait la liberté. Quand tu
cultives ta nourriture et que tu n’as
pas de factures à régler, tu es
vraiment libre. Bon, y’aura toujours
des taxes à payer, faut pas rêver !
(rires) Mais je me rapprocherais
vraiment de la liberté... J’y arriverai,
je le sais. Y
39

DR
Chaque mois, l’un de nos journalistes, rock originel (« Nirvana »). Billy Duffy, le guitariste,
pétri de bonnes intentions mais flanqué épaissit ses sonorités et use de la distorsion à bon
d’une incroyable mauvaise foi, extrait la escient, tandis que son compère Ian Astbury module
substantifique moelle de la carrière d’un beaucoup mieux sa voix, sans pour autant perdre sa
groupe afin de proposer un « guide forte identité qui constitue l’une des forces du combo.
En dix titres, tous excellents, The Cult nous éblouit par
d’achat » qui n’est, bien évidemment,
sa capacité à faire entrer dans des morceaux hyper
que le reflet de ses goûts douteux. Dans accessibles (des tubes, quoi !) une sensibilité incroyable
ce numéro, c’est The Cult qui est passé et des parties de guitare ébouriffantes (« Phoenix »).
au crible par Stéphane Auzilleau. Alors bien évidemment, le combo n’a pas renié ses
origines en l’espace d’un an, et sa fibre new wave
demeure présente (« She Sells Sanctuary »). Et tant
mieux, car c’est ce qui fait son charme et le distingue
LES INCONTOURNABLES de tous les autres groupes. Les ballades proposées
(« Brother Wolf ; Sister Moon », « Black Angel ») sont
tout simplement exceptionnelles, et illustreraient
LOVE parfaitement des films de David Lynch, tant elles
(Beggars Banquet, 1985) parviennent à combiner des mélodies pures avec des
Ce deuxième album de The sonorités étranges mais évocatrices.
Cult, qui fait suite à un
Dreamtime (1984) sorti une
année à peine après la ELECTRIC
formation du groupe à (Beggars Banquet, 1987)
Bradford (Angleterre), peut Fort de l’énorme succès de Love, qui reste encore
être considéré comme la aujourd’hui un album absolument référentiel de rock à
pierre angulaire de leur consonance gothique, The Cult décide de poursuivre sa
œuvre. Il commence en mue, en travaillant sur des compositions plus directes
effet à délaisser la et fondamentalement rock, dans un premier temps
consonance new wave de leur rock gothique pour sous la houlette de Steve Brown, producteur de leur
explorer une voie résolument plus matinée de hard précédent opus. Mais insatisfaits du résultats (ces
40
démos existent sous le titre des
Manor Sessions), le combo décide de
faire appel à Rick Rubin, un
producteur venu du hip hop qui vient
de collaborer avec succès avec Slayer
sur Reign In Blood (1986), pour
retravailler ses morceaux et en
composer d’autres. Grand bien lui en
a pris, car sur ce particulièrement
bien nommé Electric, il n’y a pas une
seule seconde à jeter, depuis
l’imparable « Fire Woman » en
ouverture jusqu’à la reprise du « Born
To Be Wild » de Steppenwolf, en
passant par le Stonien « Love
Removal Machine ». Même les
(rares) titres moins connus sont
réellement savoureux, comme
« Aphrodisiac Jacket ». Tout
est juste, parfaitement en
place, des riffs somptueux au
chant habité, dans ce pur
disque de rock. La très grande
classe !
BEYOND GOOD AND EVIL
(Atlantic, 2001)
Alors qu’on pensait le groupe
enterré, bouffé par les abus
(notamment d’alcool) des deux têtes
pensantes et miné par leurs
dissensions, et donc incapable de
renaître de ses cendres après une
interruption de carrière de 4
années, The Cult reprend du
service en 1999 et se met à
travailler sur un nouvel album
en compagnie de Mick Jones
(Foreigner). Mais ce dernier
lâchera l’affaire car -
officiellement - trop occupé
avec son propre groupe, et
c’est Bob Rock, qui connait
bien The Cult pour avoir déjà
produit Sonic Temple (1991) et The Cult (1994), qui
reprend du service pour finaliser un disque qui
s’avèrera phénoménal, Beyond Good And Evil. Cet
album est tout simplement la quintessence de The
Cult, présentant toutes les facettes musicales du
combo et interprété avec une hargne palpable à tous
les étages, dès le puissant « War (The Process) » qui
ouvre les hostilités. Billy Duffy semble n’avoir jamais
été aussi inspiré tandis que Ian Astbury chante comme
si sa vie en dépendait. Fondamentalement hard rock,
ce disque intense est une incontestable réussite
artistique qui, même s’il ne rencontre pas le succès
commercial escompté, relance la carrière du groupe et
nous file encore le frisson à chaque écoute.
EGALEMENT RECOMMANDÉS
SONIC TEMPLE
(Beggars Banquet, 1989)
Quatrième album de The Cult, Sonic Temple est un
disque de transition à bien des égards. Bien que
satisfaits du travail de Rick Rubin sur Electric, le groupe
décide de changer à nouveau de producteur, et faire
appel au canadien Bob Rock, qui n’est pas très connu à
 l’époque, n’ayant pas il y a quand même de très bonnes choses sur ce Duffy et Ian Astbury. Ces deux artistes étaient vraiment
encore produit le Black disque, en particulier dans les chansons les plus prédestinés à travailler ensemble, même si cela n’a pas
Album (1991) de Metallica. calmes, comme un « Lilies » que n’aurait pas renié toujours été facile, loin de là.
Sonic Temple est sans David Bowie (Ian Astbury chante d’ailleurs un peu à la
doute l’album le plus heavy manière de ce dernier sur ce morceau), ou encore le
de The Cult. Le sens du riff très mal nommé « Sound & Fury », magnifique en LE COFFRET
de Billy Duffy (en photo sur conclusion, tout en émotion et en retenue. Le
la mythique pochette de problème, c’est que le groupe semble avoir enclenché
cette galette, après avoir le pilotage automatique, sans chercher à se renouveler, LOVE - OMNIBUS EDITION
troqué ses cheveux courts se surpasser ou nous toucher réellement. On sort alors (Beggars Banquet, 2009)
contre une tignasse plus metal) est imparable et cet forcément un peu déçu de l’écoute de ce Hidden City, S’il existe des versions
album contient encore une palanquée de tubes, à sans pour autant pouvoir affirmer que c’est un mauvais enrichies de nombreux
l’instar de ce « Fire Woman » explosif à souhait ou de disque. albums (celle de Electric,
la magnifique ballade « Sweet Soul Sister », enjolivée intitulée Electric Peace,
par des cordes du plus bel effet. Le talent de Bob Rock vaut par exemple
saute aux oreilles, tant ce dernier parvient à enrichir et LE LIVE vraiment le détour
épaissir considérablement le son du groupe, sans également), le plus
jamais le dénaturer (« Sweet Soul Sister »). Et même intéressant des coffrets
lorsque le quatuor sort de sa zone de confort, comme LIVE CULT disponibles à ce jour est
sur « Wake Up Time For Freedom », c’est avec une (Beggars Banquet, 2000) sans conteste, tant sur le
réussite éclatante. Au final, Sonic Temple est peut-être Enregistré au Marquee fond que sur la forme,
l’album par lequel commencer sa découverte de The Club de Londres le 27 cette magnifique
Cult quand on aime le hard rock et que l’on ne connait novembre 1991, sur la réédition de leur
absolument pas le groupe. tournée Sonic Temple, ce deuxième opus. Les 4 CD
live est un véritable trésor. de cette boîte magique permettent ainsi de découvrir
Tout d’abord uniquement Love remixé, l’intégralité des singles qui en ont été
CHOICE OF WEAPON disponible en bonus de la extraits avec les versions longues et les inédits de
(Cooking Vinyl, 2012) première version de la l’époque, des démos très brutes enregistrées début
Décidément, les histoires compilation Pure Cult 1985, ainsi que 13 titres capturés live à Londres le 31
de The Cult avec leurs sortie en 1993 (avec un octobre 1985. Nous pouvons ainsi profiter de Love
producteurs auront effort à faire, car si le premier CD du show était inclus, sous toutes ses coutures, ce qui s’avère à la fois
toujours été complexes. il fallait renvoyer un coupon pour obtenir le second !), captivant et non redondant. L’ensemble est présenté
Démarré avec Chris Goss, ce mythique concert a été fort heureusement réédité 7 dans un coffret soigné, comprenant notamment un
connu pour avoir travaillé ans plus tard de manière autonome, toujours sous le livret de 48 pages reprenant en textes (dont les
avec Kyuss et Queens Of nom de Live Cult. Garanti sans aucune retouche (nous commentaires de Ian Astbury et Billy Duffy) et en
The Stone Age, Choice Of avons même droit à une séquence, « Amplification images la genèse de ce disque emblématique. Cet
Weapon sera finalement Breakdown », au cours de laquelle Ian Astbury éclairage est particulièrement intéressant pour saisir
finalisé par l’incontournable s’adresse au public pendant que Billy Duffy essaie de l’état d’esprit du groupe à ce moment charnière de
Bob Rock, qui n’avait pourtant pas collaboré avec le résoudre un problème avec son ampli guitare), Live leur carrière. Épatant.
groupe depuis Beyond Good And Evil (2001). Mais il Cult présente un combo au meilleur de sa forme,
faut croire qu’il existe une véritable alchimie entre la même si le chanteur a la voix bien éraillée, ce qui
paire Duffy/Astbury et le mythique producteur rajoute au côté brut de l’affaire. Les morceaux des LE DVD
canadien. D’autant qu’ici, ce n’est pas pour nous offrir deux premiers albums (« Rain », « Horse Nation ») sont
un album aux guitares énormes, mais au contraire pour passés à la moulinette hard rock et nous nous
aider le combo à revenir aux sources du rock, et retrouvons comme littéralement immergés dans un LIVE CULT, MUSIC WITHOUT FEAR
privilégier l’énergie brute (l’album s’ouvre sur un Marquee ce soir-là pilonné sans aucune pitié. Quel (Warner Vision, 2002)
« Honey For The Knife » aux relents de Stooges/MC5) plaisir donc de profiter d’un live qui en est réellement The Cult n’a pas une
sur la recherche du plus gros son possible. On sent The un, surtout quand on a affaire à un groupe d’un tel vidéographie particulièrement
Cult ici en toute liberté, sans schéma ou contrainte, ce calibre ! fournie, et ce concert enregistré
qui nous vaut ainsi de profiter de morceaux à Los Angeles le 4 octobre
magnifiques, comme le très émotionnel « Wilderness 2001, sur la tournée de
Now » ou « This Night In The City Of Forever », sur LA COMPILATION l’excellent Beyond Good And
lequel on sent que Ian Astbury a précédemment Evil, est même le seul qui ait été
longuement tourné avec la nouvelle incarnation des publié de manière officielle (au
Doors ! Choice Of Weapon est un album qui sue le rock PURE CULT – THE SINGLES 1984-1995 passage, on vous déconseille le
(écoutez bien les guitares sur « Until The Light Takes (Beggars Banquet, 2000) New-York City sorti en 2007,
Us ») et l’authenticité. Réédition - légèrement qui est plus un bootleg qu’autre
modifiée - de la compilation chose). Du coup, même si Billy
Pure Cult : For Rockers, Duffy est un peu statique – mais côté riffs, il envoie
DÉCONSEILLÉ Ravers, Lovers And Sinners très sévère - et que Ian Astbury a été plus en forme
(tout est dit dans le titre) niveau voix, il est bon de pouvoir profiter de ce
sortie en 1993 (avec à témoignage visuel, qui nous permet d’apprécier
HIDDEN CITY l’époque en bonus le CD également l’impact de la frappe de Matt Sorum (Guns
(Cooking Vinyl, 2016) Live Cult), cette collection N’ Roses), qui n’est clairement pas là pour faire de la
Hidden City est arrivé un des singles du groupe au figuration. Ce show enregistré dans une petite salle ne
peu sans crier gare en cours de sa période la plus dure qu’une heure trente, faisant forcément l’impasse
2016, succédant sans faste est une excellente entrée en la matière pour sur quelques classiques (dont « Nirvana »), et le bonus
tambours ni trompettes au plonger dans son univers touffu, dans la mesure où le de 25 minutes sur les coulisses n’est pas des plus
très bon Choice Of combo n’a jamais eu à se travestir et modifier quoi que indispensables, mais le melting pot rock/hard
Weapon sorti 4 ans plus ce soit dans sa façon de composer pour accoucher de rock/gothic si unique qui donne toute sa saveur au
tôt. On a malheureusement tubes énormes. Il n’y a donc que du bon sur ces 77 groupe est très bien restitué, tant par la setlist que par
le sentiment que le duo minutes, qui présentent bien les différentes facettes et la prestation, dont la qualité technique (son comme
Billy Duffy/Ian Astbury n’a périodes stylistiques du combo. Et même les versions image) du DVD nous permet de profiter pleinement. Y
pour l’occasion pas forcé edit parfois privilégiées n’amputent pas
son talent de composition. Le guitariste est par ailleurs outrageusement les morceaux originaux, qui assemblés
clairement insuffisamment présent dans l’espace ainsi permettent de prendre conscience de l’incroyable
sonore, lui qui avait pourtant l’habitude d’illuminer de richesse du répertoire de The Cult, et de l’osmose
nombreuses chansons de soli majestueux. Alors certes, existant à chaque instant entre ses deux piliers, Billy

41
 GENRE SITE INTERNET
. Death metal www.entombedad.com
LE GROUPE ALBUMS
. L-G Petrov (chant)
. Back To The Front (2014)
. Nico Elgstrand (guitare) . Dead Dawn (2016)
. Bowels Of Earth (2019)
. Guilherme Miranda
(guitare) ARTICLES RH
. Olle Dahlstedt (batterie)
RH N°145, 162 & 201
De g. à d. : Olle Dahlstedt, Nico Elgstrand,
L-G Petrov, Guilherme Miranda
42

Voici déjà cinq ans que cette division dissidente d'Entombed a vu le jour avec, à sa tête, l'emblématique chanteur
L-G Petrov. Les deux premiers albums du groupe nous avaient paru sympathiques, mais nous ne nous attendions
certainement pas à retrouver la formation dans une telle forme sur ce Bowels Of Earth récemment sorti. Nous
avons donc dégainé notre plus beau téléphone afin de nous entretenir avec le brailleur en chef, qui, comme chacun
sait, est particulièrement affable et convivial.
Rock Hard : Ce nouvel album revient
totalement aux racines du genre, à
un point tel qu’il pourrait presque
passer pour le successeur de
Clandestine (Ndlr : deuxième
album référentiel sorti par
Entombed en 1991).
L-G Petrov : Plusieurs titres de ce
disque ont déjà quelques années. Pour
une raison ou une autre, nous avions
choisi de les écarter de nos albums
car ils ne collaient pas avec nos
envies de l’époque. C’est en nous
rendant compte que tous ces titres
mis de côté avaient une unité entre
eux que nous avons décidé d’en écrire
quelques autres dans la même veine
afin d’en tirer un album complet. C’est
ainsi qu’est né Bowels Of Earth. Je
pense que son côté très direct vient
aussi du fait que nous ne fassions pas
de pré-production, de démos ou ce
genre de trucs. Nous allons
directement en studio enregistrer ce
qui restera la version finale du titre,
et, autant que faire se peut, nous
essayons de garder la première prise
qui est bien souvent la plus spontanée
et la plus énergique, à défaut d’être la
mieux jouée. Nous accordons une
grande importance à l’énergie, au côté
live des titres. En concert, si tu foires
quelques notes sur un riff, tu ne peux
pas dire : « Attendez, on va le refaire ! »
(rires). J’aime bien garder cette idée,
même en studio.
Avez-vous dû fournir un effort
particulier pour que cet album
sonne « tellement 1991 » ?
Oui et non car c’est une partition que
nous maîtrisons pour en avoir été en
partie les instigateurs... Je dirais que
c’est surtout l’état d’esprit de
l’époque qu’il a fallu retrouver et,
bien évidemment, il n’est pas toujours
facile de se remettre dans la peau de
l’individu que tu étais à vingt ans
quand tu en as quasiment trente
de plus. Retrouver la même hargne,
la même puissance et la même
insouciance est un vrai travail. Mais
ce n’est pas désagréable de marcher à
nouveau dans ses vieilles
chaussures… (rires)
Les soli sont particulièrement
travaillés, bien plus que sur la
majorité des albums de death metal.
Etait-ce inscrit au cahier des
charges ?
Pas vraiment, mais je pense que le
fait que Guilherme (Miranda/guitare)
nous rejoigne officiellement (Ndlr : il
est le guitariste live du groupe depuis
plusieurs années) a dû créer une forme
d’émulation car c’est un excellent
musicien. Nico (Elgstrand/guitare) et
lui ont beaucoup collaboré sur ce
disque et, comme tu le soulignes, il en
ressort des choses particulièrement
intéressantes, notamment au niveau
des soli. Un solo est toujours un
exercice de style, qui ne doit pas être
trop long et ne pas revenir
systématiquement au même moment
dans les chansons afin de ne pas être
trop prévisible, etc. C’est tout un art.
Je le vois comme une sorte de
respiration au sein d’un titre, qui
permet de repartir ensuite à toute
berzingue.
Comme d’habitude, la fiche promo
fournie par le label avec votre album
parle de « votre meilleur disque à
ce jour »...
Oui, tous les clichés promo habituels
(rires). J’essaie pour ma part de ne pas
avoir un discours aussi formaté
lorsque je fais des interviews. Les
laïus promotionnels appris par cœur,
ce n’est vraiment pas mon truc. Nous
faisons énormément d’interviews en
face à face lorsque nous donnons des
concerts et j’avoue que c’est beaucoup
plus simple d’avoir une vraie
conversation dans ces conditions,
dans l’ambiance live, une bière à la
main, plutôt que dans le confort
ampoulé d’une chambre d’hôtel.
Après, nous sortons un disque tous les
deux ou trois ans, alors je considère
qu’il est normal d’assurer une forme
de « service après-vente » et ça ne m’a
jamais dérangé de le faire. J’ai la
JE NE SUPPORTE PAS L'ENNUI.
IL ME FAUT TRAVAILLER SANS CESSE,
C'EST VISCÉRAL (L-G PETROV)
chance d’aimer rencontrer des gens et
discuter avec eux, alors je m’exécute
avec plaisir.
La durée de l’album est plutôt
contenue (Ndlr : 34 minutes).
Aimes-tu les disques courts ?
Je pense qu’un album de death metal
ne doit en aucun cas excéder les 45
minutes, et s’il dure 10 minutes de
moins, c’est encore mieux. Je préfère
largement un disque qui donne envie
à l’auditeur de l’écouter deux fois
d’affilée plutôt qu’un album qui semble
interminable ou te fait regarder ta
montre... Pour prendre un exemple
concret, je trouve que les titres de
Metallica les plus courts sont de loin
les plus efficaces, et qu’il n’est pas
forcément nécessaire de répéter douze
fois de suite un riff, même s’il est
excellent. De même, mettre neuf riffs
différents sur un seul titre de dix
minutes est à l’opposé total de notre
façon de fonctionner. En dix minutes,
nous avons le temps de jouer trois
chansons (rires).
Le côté « death’n’roll » que vous
avez pu développer par le passé est
aujourd’hui quelque peu mis en
veilleuse. Vous êtes-vous lassés du
genre ?
Non, pas réellement. Je pense plutôt
qu’il nous a fallu, sur les deux
premiers albums, reconstruire une
Propos recueillis par Charlélie Arnaud - Entretien téléphonique réalisé le 12 août 2019
forme d’unité, retrouver nos marques,
voir quelles cartes nous avions en main
et, surtout, quelles étaient celles que
nous avions envie de jouer. Cela est
donc passé par certains « tâtonnements »
avant de réellement trouver le son
que nous souhaitions, et même si
d’aucuns pourront trouver qu’il s’agit
d’un son hyper classique, je pense
réellement qu’il y a un petit côté
moderne dans le mix. J’en suis
d’ailleurs d’autant plus fier que nous
avons travaillé dans des conditions
spartiates, en enregistrant
uniquement la batterie dans un vrai
studio et le reste dans un local qu’on
ne peut même pas appeler un studio.
Je n’ai pas envie de reproduire
certaines erreurs que nous avions pu
faire à l’époque d’Entombed et vouloir
à tout prix expérimenter pour
finalement revenir à l’idée de départ.
Donc, aujourd’hui, c’est « tout à
fond », on fonce tête baissée. Je suis
content lorsque tu disais plus tôt que
l’album sonne « 1991 » parce que j’ai
vraiment envie que ce soit le ressenti
de l’auditeur. Si nous parvenons
toujours, après autant d’années de
pratique, à déclencher l’effet
« Wow ! », je suis un chanteur comblé.
Où en sont tes relations avec tes
ex-collègues qui ont conservé le nom
d’Entombed ?
Nous ne nous parlons pas. Jamais.
Ça ne va pas plus loin que ça. Nous
sommes de grands garçons, alors nous
ne nous écharpons pas par interviews
interposées comme certains groupes
éprouvent le besoin de le faire pour
entretenir le buzz. Nous ne nous
parlons pas. D’ailleurs, nous ne nous
parlions déjà pas beaucoup à l’époque
où nous faisions partie du même
groupe...
Est-il possible que vous cédiez un
jour, dans le futur, à la mode des
reformations ?
(Silence) Je respecte Nicke (Andersson/
batterie) et Ulf (Cederlund/guitare) en
tant que musiciens. J’ai donc envie de
dire « on ne sait jamais ». Mais pas à
l’heure actuelle, ça c’est certain, et de
toute façon, pas avec Alex Hellid
(guitare) car je ne veux plus rien avoir
à faire avec lui.
Penses-tu qu’aujourd’hui il puisse
encore exister une forme de
confusion dans l’esprit des fans
entre la version actuelle d’Entombed
et Entombed A.D. ?
Non, pas réellement... (il marque une
pause) Depuis la scission, qu’ont-ils
sorti de nouveau ? De notre côté, nous
avons publié trois albums et j’en ai
fait trois autres avec mon projet
parallèle Firespawn... Je pense que le
public metal a eu le temps de voir,
depuis 2014, qui était le plus attaché
à lui et au son traditionnel que le
groupe avait créé au début des années
90... Je ne supporte de toute façon pas
l’ennui. Il n’y a rien de pire que
d’attendre qu’il se passe quelque
chose ou de sortir un disque et de ne
pas tourner derrière pour le jouer sur
scène. Il me faut travailler sans cesse,
c’est viscéral.
Je me sens obligé de te poser la
question : as-tu écouté la version
symphonique live de l’album
Clandestine sortie par Entombed
en 2017 ? Et le cas échéant, qu’en
as-tu pensé ?
Je n’ai pas tout écouté, j’ai juste jeté
un œil à quelques titres du DVD. Je
n’ai pas vraiment d’opinion là-dessus :
certains titres sonnent plutôt bien,
d’autres non... Les deux nouveaux
membres font bien leur job, ce sont
même probablement les plus motivés
dans l’histoire. Mais comme le
laisse entendre mon enthousiasme
débordant lorsque j’en parle, je n’ai
pas spécialement envie de m’étendre
sur le sujet…
Tu as toujours eu la réputation
d’être plutôt fêtard dans l’âme, ce
n’est pas un secret. Or, tu assures
toujours autant sur scène et vous
tournez énormément. Avec les
années, n’est-ce pas plus compliqué
de combiner les deux ?
Non, je m’entretiens : je mange une
carotte. Toutes les semaines (il éclate
de rire). Plus sérieusement, ce sont les
réseaux sociaux qui renvoient une
image tronquée : à chaque fois que
quelqu’un poste des photos sur
lesquelles je figure, elles sont
toujours prises dans une situation
de fête ou bien ce sont des photos
de backstage et, c’est vrai, je l’avoue,
on m’y voit très souvent une bière à
la main, ce qui donne l’impression que
je picole en permanence, mais c’est
faux. Pas en permanence. Et puis, je
me suis pas mal calmé... On n’a plus
vingt ans.
Tu as des dizaines d’enregistrements
à ton actif avec Entombed, Entombed
A.D., Firespawn, Comecon, Nihilist,
et Morbid. Quels sont ceux dont tu
es le plus fier ?
C’est une question difficile.
Probablement « Left Hand Path »
(Entombed/1990), « Wolverine Blues »
(Entombed/1993) et les trois albums
d’Entombed A.D. Mais sans tomber
dans les réponses toutes faites, le
meilleur disque est toujours le prochain.
Cela semble idiot à dire, mais il faut
toujours garder à l’esprit que le
meilleur est à venir, sinon comment
avancer ? C’est une forme de discipline
de toujours garder cela en tête. Ça, et
une carotte par semaine ! (rires) Y
43
 Un reportage de Djul réalisé le 9 juillet 2019 à Berlin (Allemagne) directrice en tête dès le début,
un disque sombre revenant à des
Vous le savez, Rock Hard est rarement avare de son temps et de fondamentaux plus metal ».
compliments dès lors qu’il s’agit de parler d’Alcest. Nous « Nous avions un cahier des
charges avant d’entrer en studio,
pourrions être soupçonnés d’un certain chauvinisme, tant il est même si l’on peut parfois s’en
vrai que la formation s’est érigée au fil des ans comme l’un des éloigner, comme pour tout
leaders de la scène française, à tel point qu’elle semble disposer disque d’Alcest », pour
d’une notoriété plus importante en dehors de ses frontières que reprendre les termes de
dans son propre pays. Un constat qu’il faut relativiser après le Winterhalter, le batteur. Ce
succès recueilli par les prestations du groupe aux festivals dernier relève aussi la relation
Motocultor (2015) et Hellfest (2017) qui ont, de son avis même, de confiance qui s’est nouée
avec Nuclear Blast : « Pour moi,
permis de « réconcilier » ce dernier avec le public de son pays la meilleure preuve de celle-ci,
d’origine. Depuis leur dernière date parisienne, en première c’est qu’ils ont annoncé la sortie
partie d’Anathema il y a un an, nous savions que Neige et ses du nouvel album sans en avoir
troupes allaient changer de label pour quitter le « cocon » écouté une note, et donc sans
Prophecy Records et plonger dans le monde des « grosses pouvoir, ou vouloir, rectifier quoi
machines ». C’est Nuclear Blast qui a finalement signé le que ce soit ! ».
quatuor. Et qui dit « gros label » dit « plus de moyens pour la
Au sortir de l’écoute, nous avons
promotion », à commencer par cette listening-session berlinoise l’occasion d’échanger avec
à laquelle nous sommes conviés pour découvrir le prochain chaque membre du groupe et de
album : Spiritual Instinct. Un bilan carbone assez peu découvrir, par exemple, que le guitariste « Protection » (5’50)
satisfaisant, nous direz-vous, mais après tout, nous avions déjà Zero a bien connu le facétieux Peter L’ampleur de la production et les progrès
fait pire en partant à la rencontre des Parisiens à… Hong Kong Steele (Type O Negative) lors de ses réalisés par le groupe en la matière sont
en 2014 ! années new-yorkaises, ou de deviser sur flagrants sur ce titre respectueux de
les groupes vus pour la première fois par l’esprit originel d’Alcest, mais qui
Rendez-vous est donc pris à 13h00 en ce l’investissement du groupe a été Neige au Download anglais quelques magnifie le recours aux dissonances sur un
9 juillet dans la capitale allemande, dans important et l’accouchement plus difficile jours plus tôt (à savoir Tool, qui a ahurissant mur de guitares. Blackgaze ou
le bar Mein Haus Am See. Cela nous que pour tous les précédents albums du visiblement époustouflé l’ensemble du Shoemetal ? A vous de choisir !
laisse le temps de réaliser que nous groupe, à tel point que le premier précise groupe, et The Smashing Pumpkins, sur
sommes en plein quartier Mitte, à savoir qu’il est « hors de question de reproduire lequel l’avis est bien plus mitigé, ce qui ne « Sapphire » (5’01)
l’arrondissement du centre-ville. C’est le cela à l’avenir » ! « Ça a été un nous étonne qu’à moitié !). Un « bijou » que ce titre (facile !) avec sa
seul à mélanger d’anciens districts de enregistrement… difficile on va dire ! rythmique électronique à la Ava Adore
Berlin-Est et de Berlin-Ouest, et nous nous (rires) » nous confiera Neige plus tard. Chronique et interview à suivre dans notre (The Smahing Pumpkins) et ses mélodies
trouvons d’ailleurs à deux pas du « Il est arrivé que nous passions une prochain numéro, la sortie de Spiritual imparables. On sent que l’expérience
mémorial du Mur de Berlin. C’est semaine sur un seul son, ce genre de Instinct étant prévue pour le 25 octobre Shelter a servi de « brouillon » à un titre
également là que se situe l’ancien quartier délire… mais nous ne le ferons plus, c’est prochain. D’ici là, Alcest aura notamment pareil gavé d’influences « indie » mieux
juif de la ville, très largement réhabilité et certain ! ». Il est vrai que le groupe a eu l’occasion d’investir le Trianon le 25 digérées et reprises dans la musique
qui voit le musée Anne Frank cohabiter passé six mois enfermé du côté de septembre pour le Red Bull Festival avec d’Alcest. Encore un single évident, même
avec de nombreux restaurants « arty- Chateaubriand, aux studios Drudenhaus, à un set exclusif en collaboration avec… s’il fera grincer quelques dents chez les
hipster » permettant de déguster un peaufiner chaque titre avec un souci du Perturbator ! « Red Bull a engagé le duo plus métalleux des fans.
burger vegan tout en faisant du yoga en détail qui a visiblement laissé des traces Fortifem, qui s’est chargé de notre
jardin intérieur : voilà de quoi compenser chez chaque musicien. pochette, pour la programmation de son « L’Ile des Morts » (9’04)
notre mauvaise conscience écologique de festival annuel, et c’est ainsi que nous Là encore, un titre qui se fond dans la
la journée ! Arrivés au point de rendez- Ne reste plus qu’à se laisser porter nous sommes retrouvés à l’affiche, via un tradition des compositions épiques du
vous, nous avons le plaisir de constater pendant une petite quarantaine de tandem en mode « carte blanche ». Nous groupe, mais avec ce cran en plus dans la
que tout le groupe a fait le déplacement, minutes pour cette première découverte n’avons pas assez de temps pour production très « bombastique » (ces
signe de l’importance de ce petit qui induit au moins une question : allons- composer ensemble, mais nous allons guitares tonitruantes, encore !), et dans
évènement pour la formation, mais aussi nous retrouver le groupe qui avait fait le procéder par arrangements et nous avons l’ambition. Car, au fil des minutes, on se
l’occasion de faire d’une pierre deux choix aussi courageux que périlleux de déjà répété avec James de Perturbator. rend compte qu’on est présence d’un
coups. En effet, et alors même qu’Alcest diverger radicalement de ses racines pour Ça s’est très bien passé ! ». Le groupe véritable dédale aux changements
est en pleine tournée des festivals, il s’est investir un champ bien plus post-rock et précise encore que chacun va reprendre rythmiques extrêmes, allant jusqu’à un
déplacé de Lorraine pour venir ici et shoegaze avec Shelter (2014) ou celui, les morceaux de l’autre, avec peu de pont sur fond de cordes grattées et de
tourner le lendemain le clip de ce qui plus soucieux de son héritage metal, qui place à la préparation, mais une envie percussions.
sera sans doute son second single : avait composé Kodama (2016) ? A la réciproque de faire de la soirée une
« Sapphire ». Une grande première dans lecture de notre « titre à titre » en expérience unique : on a hâte ! « Le Miroir » (5’31)
l’histoire du combo (tout comme cette encadré, vous comprendrez qu’on ait Après un démarrage faussement lourd qui
session d’écoute), et dont on sent qu’elle envie de répondre « les deux, mon Remerciements à Anne Swallow (Nuclear sonnerait presque comme du Black
fait naître un peu d’appréhension à l’idée capitaine » ! Certes, le respect d’un Blast) et Valérie Reux (JMT Consulting) Sabbath, une mélodie diaphane et les
d’apparaître au grand jour devant la équilibre dans les compositions et des pour l’organisation de cette journée. claviers s’installent, donnant une touche
caméra : « Ça va être bizarre, il va falloir sonorités (encore plus) dures mais aussi fantasy à l’ensemble, comme si Alcest
bouger son corps ! » en rigole le majestueuses sont autant de pierres dans avait été commandité pour refaire la

chanteur/guitariste Neige. La plupart des
confrères présents sont allemands, à
l’instar de notre cousin teuton du même
nom, mais on dénombre aussi des
journalistes italiens ou même tchèques
venus pour l’occasion. D’imposants
fauteuils sont installés face au dispositif
audio, tout juste testé par le groupe qui
craint un peu l’écho de la pièce, haute en
volume et décorée de nombreux cadres
sur un mur volontairement laissé à nu. Une
chose est certaine : la boule à facette qui
trône derrière ne sera pas allumée pour
l’occasion ! Neige et le batteur
Winterhalter se présentent devant nous
pour introduire très brièvement l’écoute
en nous expliquant à quel point
le jardin du second. Mais les incursions
dans des sons parfois très clairement
eighties (en particulier les parutions du
label 4AD, mais également des musiques
plus commerciales de cette décennie), et
au moins deux titres plus courts et
mélodiques (« Sapphire » et « Le Miroir »)
montrent que les influences très variées
de Neige sont encore reflétées sur
Spiritual Instinct. Avec ses riffs encore
mieux dessinés et une production
gigantesque, ce nouveau disque semble
bien celui qui fera passer un cap à Alcest,
validant aussi son changement de label et
– on l’espère – de statut. Cette impression
semble partagée par Neige, qui précise
que le groupe avait « une vraie ligne
SPIRITUAL INSTINCT,
LE TRACK-LISTING
« Les Jardins De Minuit » (7’53)
Après un début au son d’une basse
ronflante que ne renierait pas The Cure et
un chant qui se passe de paroles comme
Neige en produit souvent, les guitares
déchirantes et la rythmique échevelée se
mettent en branle autour d’un riff
majestueux qui se transforme lentement
en un motif répétitif faisant écho à
l’approche du Opeth de « Deliverance »…
Pour lui aussi devenir un classique du
répertoire du groupe ?
bande-son du mythique Ladyhawke (le
film de Richard Donner), avec ces
ambiances « médiévales des années 80 »
comme Dead Can Dance savait en
concocter. Sans conteste le titre le plus
surprenant et osé du lot !
« Spiritual Instinct » (7’43)
On sait qu’Alcest sait clôre ses albums
avec des compositions épiques, et ce
morceau-titre ne fait pas exception à la
règle. Avec ses superpositions de
vocalises et sa ligne de basse envoutante,
il se veut une conclusion hypnotique et
grandiose au disque, mais aussi un
hommage émouvant à un ami disparu de
Neige. Y

44
De g. à d. : Neige & Winterhalter
 GENRE
. Post-metal
LE GROUPE
. Johannes Persson
(chant, guitare)
. Magnus Lindberg
(batterie)
. Andreas Johansson (basse)
. Fredrik Kihlberg
(guitares, chant)
46
. Kristian Karlsson (2006)
(claviers, chant) . Eternal Kingdom (2008) ARTICLES RH
. Vertikal (2013)
. Thomas Hedlund (batte- . Eternal Music (2014) RH N°80, 128, 166 & 201
rie) . Mariner
(avec Julie Christmas – 2016)
SITE INTERNET . Live At Roadburn 2013
(live – 2017)
www.cultofluna.com . Somewhere Along The Highway:
Live at Roadburn 2016
ALBUMS (live – 2017)
. Live At La Gaîté Lyrique : Paris
. Cult Of Luna (2001)
. (live – 2017)
The Beyond (2003) . Mariner Live (live – 2018)
. Salvation (2004) .
. A Dawn To Fear (2019)
Somewhere Along The Highway
 Propos recueillis par Emmanuel Hennequin - Interview via Skype réalisée le 25 juillet 2019
Deux objectifs ont marqué la récente actualité de Cult Of Luna : primo, la fixation discographique du son du
groupe en concert, avec la sortie de plusieurs enregistrements live en 2017 et 2018. Secundo, la création pure,
avec le travail sur le successeur de Mariner (2016), album spatial ayant occasionné une collaboration enflammée
avec Julie Christmas (Made Out Of Babies, Battle Of Mice). En cette rentrée 2019 sort donc A Dawn To Fear, fruit
des derniers efforts d’un des projets suédois les plus marquants du post-metal. Ce nouvel album de presque 80
minutes de musique marque un certain nombre d’évolutions : le groupe n’a en effet pas travaillé de la même
manière que sur ses albums précédents et le résultat est d’une noirceur et d’une mélodicité confondantes.
Enregistré en Norvège, c’est peut-être l’un des disques les plus passionnants et immersifs de Cult Of Luna.
Entretien à propos d’un moment-charnière avec le cerveau, compositeur et membre fondateur Johannes Persson.
Rock Hard : A l’écoute de A Dawn personnellement, je ne suis pas un aller au bout… et elle est très forte lointaine, presque impossible.
To Fear, on ressent fortement la grand adepte de l’encadrement chez toi, chez vous. D’où vient-elle ? Durant les deux dernières années,
chimie du groupe. Or, une chimie créatif. Sur le fond, finalement, il Eh bien, je sais que même si une nous sommes entrés dans une
ne se décrète pas. Les nouveaux s’agissait pour chacun de nous de chose, au final, ne doit pas atterrir sur compréhension plus profonde de
morceaux en sont-ils le fruit ou y brancher les instruments et de voir l’album parce que nous ne la jugeons chacun des autres, et ce, à un degré
a-t-il une part de travail et ce qui allait se produire. A mon avis, pas assez bonne, par exemple, je dois inédit. C’est quelque chose qui se
d’explications permanentes entre il ne faut pas limiter les musiciens. tirer sur le fil et voir où ça me mène. gagne progressivement au fil de nos
vous tous ? Forcer les décisions ou encadrer un Peut-être que la déception sera au échanges ou de nos sorties… Tous ces
Johannes Persson : Voilà une processus ne le rend pas forcément bout, mais je veux être sûr de ne pas gars, aujourd’hui, sont de proches
question à laquelle il est impossible plus intéressant ou fructueux. rater quelque chose. Pas de regrets, amis.
de répondre correctement à 100%. jamais. Or, tu ne peux en être sûr que
Il y a l’histoire d’un processus, et, Crois-tu que le groupe ait changé lorsque tu as le sentiment d’avoir tiré Parmi les nouveaux titres qui,
face à elle, tu es juge de cette chimie. sur certains points à travers ce tout le fil. Parfois, le tirer entièrement à mon avis, sont les plus
Depuis le début, avec le groupe, nous renouvellement du procédé ? te prendra vingt minutes, d’autres fois impressionnants, il y a « The Fall »,
opérions sur des thèmes prédéfinis Je n’en suis pas certain car j’ai le vingt mois. Peu importe le temps ainsi que le morceau éponyme. Ils
qui étaient plus ou moins précis et sentiment que nous n’avons pas nécessaire. sont pour moi des marqueurs de
déterminaient ce que nous allions changé fondamentalement : nous nous l’album, peut-être même de futurs
composer. Evidemment, le processus connaissons mutuellement très bien « We Feel The End », titre très classiques…
prend une tournure plus ou moins et travaillons bien ensemble. Nous ambiant, est très différent du reste. C’est drôle parce que ce ne sont
concrète à chaque fois. Salvation savons comment faire les choses... Quelle marque laisse-t-il dans ton pas les titres qui ont été les plus
(2004) a eu sa singularité, Mariner Alors, même si nous avons adopté esprit ? chronophages. Les autres musiciens,
et sa dimension futuriste aussi… une nouvelle manière d’écrire, notre C’est l’un de mes morceaux préférés. en fait, ont très bien réagi à mes idées
Pour le nouvel album, il y a eu, en dynamique de groupe et notre désir de La marque qu’il laisse est un moment. sur ces morceaux : en studio, nous
arrière-plan de l’écriture, un certain faire n’ont pas changé. Sur les phases En studio, Magnus (Lindberg/batterie) sentions les choses. Or, il est très
nombre de changements dans ma vie finales, lorsque nous en venons aux et moi écoutions ce morceau à la nuit important de ressentir cette symbiose
personnelle survenus lors des deux arrangements et à la production, c’est tombée. Tant d’émotions… Personne avec les autres, c’est elle qui permet
dernières années. C’est un élément de donner une belle forme aux idées.
d’explication. Alors, au lieu de « The Fall » est aussi l’un de mes
démarrer avec un thème, j’ai préféré
partir d’impressions… De presque
MON SENTIMENT, AUJOURD’HUI, EST morceaux préférés, pour diverses
raisons... C’est l’un de ceux auxquels
rien, en fait ! Je préférais que le
groupe y aille à l’instinct. Tu
QUE NOUS AVONS RÉUSSI À NOUS je tiens le plus, vraiment.

travailles alors et, passé un temps,

tu te retrouves avec les pièces d’un
puzzle. C’est une image partielle,
fragmentée. Tu es proche du but,
mais tu ne le réalises pas encore.
Il faut prendre le temps du recul.
Ce n’est qu’ensuite que tu réalises
de quoi il s’agit, où tu vas, et
comment le son va devoir se
présenter. L’une des choses que les
gens réaliseront à l’écoute de l’album,
j’espère, est l’unité de notre son.
Pour la première fois depuis
Somewhere Along The Highway (2006),
nous nous sommes tous retrouvés
dans la même pièce ensemble pour
enregistrer tout l’album, alors que,
pour les deux disques précédents,
nous nous étions retrouvés pour
enregistrer des bases avant de
compléter nos parties séparément.
Cette fois, nous avons tous réussi à
caler nos agendas pour entrer en
studio et nous nous sommes tous
retrouvés en Norvège. La musique,
de ce fait, respire différemment. Nous
enregistrions jour et nuit et marquons
des pauses lors de dîners fort
agréables. Une expérience de groupe
fantastique ! Cette humanité-là,
j’espère que l’auditeur la ressentira
dans le son de l’album.
Nouveau procédé, aucune angoisse ?
Non, je ne crois pas que ce changement
de procédé ait engendré d’angoisse au
sein du groupe. Nous ne travaillons
pas bien sous l’effet du stress et,
TROUVER EN TANT QUE MUSICIENS
(JOHANNES PERSSON)
là que nous nous sentons mis à
l’épreuve et où il nous faut faire le
bon choix… parce que c’est le
dernier ! Concernant A Dawn To Fear,
le choix de recourir à un orgue
véritable en est un exemple parlant.
Le morceau « Nightwalkers » semble
avoir été difficile à écrire. En quoi
l’a-t-il été ?
Dur à expliquer. Lorsque j’écris, j’ai
besoin de sentir la structure du début
à la fin. Je commence par un groove,
une pulsation, qui donne son identité
au morceau – et lorsque j’aboutis à ça,
j’éprouve une espèce de bonheur qui
me fait sentir que j’irai jusqu’au bout
et que je saurai rendre justice à l’idée
de base. Pour « Nightwalkers », il a
été plus difficile qu’à l’accoutumée
d’assembler les pièces du puzzle. J’en
ai écrit de nombreuses versions avant
d’être satisfait. La spontanéité n’est
pas un état permanent, tu sais, elle ne
se décrète pas plus que la chimie de
groupe ! Parfois les choses te parviennent
dans l’évidence, c’est très rapide…
D’autres fois, tu traverses des
moments de doute. Cela s’apparente
alors et davantage à un travail.
Mais en dépit de la difficulté, il
demeure cette conviction qu’il faut
ne disait rien, c’était comme une
évidence.
Au début de A Dawn To Fear, il n’y
avait pas de thème, mais au final,
nous nous retrouvons face à un
ensemble cohérent. Cet album conte-
t-il une histoire, selon toi ?
Non, A Dawn To Fear est autre chose.
Dans mon esprit, c’est une collection
de petites histoires.
L’ambiance interne de Cult Of Luna
est décrite comme très bonne ces
derniers temps. Certains des
anciens albums ont-ils davantage été
le fruit d’une tension interne ?
La seule période durant laquelle nous
avons pu ressentir un trouble interne,
notamment concernant l’écriture, a
été celle entourant Eternal Kingdom
(2008). Nous tentions alors de trouver
une nouvelle forme d’expression,
d’écriture. C’est un moment où nous
avons failli abandonner, mais que
nous avons réussi à dépasser. Mon
sentiment, aujourd’hui, est que nous
avons réussi à nous trouver en tant
que musiciens : nous connaissons nos
forces autant que nos faiblesses, et je
ressens cette dynamique comme très
positive. L’hypothèse d’une bataille
interne me semble désormais
Le nouvel album dure presque 80
minutes. Le groupe a expliqué ne
vouloir renoncer à rien, ne pas
vouloir écourter. Vous n’avez
vraiment rien enlevé, rien abrégé ?
Rien. Sa durée totale pourrait faire
considérer A Dawn To Fear comme un
double album, mais nous tenons à ce
qu’il soit considéré comme un simple.
C’est un ensemble, uni. Je ne crois
d’ailleurs pas que l’idée du double
album soit quelque chose qui
corresponde à Cult Of Luna. Dans mon
esprit, peu de gens écouterait du
début à la fin, sans s’arrêter, un
double album du groupe. Je préfère
sortir deux enregistrements séparés
sur un court laps de temps, quitte à
leur donner un sens commun, un lien
(Ndlr : référence implicite à l’expérience
Vertikal LP/Vertikal II EP).
Votre show du Hellfest 2019 a
exposé Cult Of Luna sous un jour
très sobre sur le plan visuel. Cette
économie annonce-t-elle ou pas
l’orientation de vos prochains
concerts ?
Les prestations en festivals sont
toujours sujettes à certaines
contraintes ou restrictions, ce qui
est normal. Et puis, nous avons joué
à Clisson avant d’avoir sorti le nouvel
album. Il n’était donc pas vraiment
question de présenter le nouveau
visage du groupe à ce moment-là,
juste un aperçu. Rendez-vous fin
2019. Y

47
 De g. à d. : Guillaume Bernard,
Yann Ligner & Aldrick Guadagnino
48

Il aura fallu attendre quatre longues années avant de pouvoir découvrir le successeur de Here Comes The Sun (2015), cinquième
opus de Klone qui, à sa sortie, avait fait chavirer les cœurs de plusieurs membres de cette auguste rédaction. Après avoir
longuement sillonné la France en configuration acoustique, le combo poitevin revient, avec Le Grand Voyage, au subtil mélange
entre metal atmosphérique épuré et rock progressif classieux qui le caractérise. Entretien avec le guitariste Guillaume Bernard,
artiste sensible et passionné.
Rock Hard : Quelles impressions
conserves-tu de votre passage au
dernier Hellfest ?
Guillaume Bernard : Ce fut un très
bon moment ! Comme notre set
débutait à 11h40, nous redoutions
que les festivaliers soient tous dans
leur tente à récupérer des excès de
la veille, mais beaucoup de gens sont
arrivés en cours de concert. Nous
avons dû quitter le site du festival
très rapidement car nous donnions
un concert à Poitiers le soir-même,
mais nous sommes revenus le
dimanche pour faire de la promo.
Là, nous avons eu de très bons
retours sur notre prestation, meilleure
et mieux mise en son que celle que
nous avions donnée lors de notre
précédent passage au Hellfest, en
2011. Il faut dire que nous avons
enquillé pas mal de dates entre
temps !
Proposer un set aussi atmosphérique
dans le cadre d’un tel festival était
un pari osé, non ?
Je ne pense pas. Notre concert fut
une juste représentation de ce que
Klone fait depuis déjà pas mal de
temps. Je ne me voyais pas piocher
dans nos premiers disques
simplement pour m’adapter au
festival ! Il y a quelques années, en
assistant aux prestations de Blues
Pills et Anathema, je me souviens
justement m’être dit que ça faisait
du bien d’entendre des morceaux
plus soft, plus « aérés ». Lors de
son passage, Steven Wilson a
volontairement choisi des titres un
peu plus rentre-dedans que ceux
qu’il joue d’habitude, avec renfort de
double grosse-caisse. Nous, on s’en
fout ! (rires) Le Hellfest est connu pour
l’éclectisme de sa programmation et
offre toujours de quoi largement
satisfaire les fans de trucs bourrins.
GENRE
. Metal atmosphérique/progressif
LE GROUPE
. Yann Ligner (chant)
. Guillaume Bernard (guitare)
. Aldrick Guadagnino (guitare)
. .
Matthieu Metzger
(studio – claviers, saxophone)
. Jean-Etienne Maillard
(studio – basse)
. Morgan Berthet (studio – batterie)
Klone était là pour réveiller les
festivaliers en douceur.
Le 02 octobre 2018, Rock Hard
avait été invité à découvrir votre
nouvel album, Le Grand Voyage,
en avant-première au Studio
Sainte Marthe de Francis Caste.
Comment se fait-il que sa sortie se
soit fait attendre si longtemps ?
Tout d’abord, nous avons pris le
temps de bien fignoler le disque.
Ensuite, en mars et avril 2019, nous
avons travaillé sur une création
musicale en compagnie d’une troupe
de théâtre pour un spectacle nommé
Inoxydables (Ndlr : pièce de Julie
Ménard donnée au Théâtre National
Populaire de Lyon) et avons donné
une vingtaine de prestations dans le
J’AI HORREUR DES GROUPES
QUI ESSAIENT DE FAIRE LA MORALE
À LEURS FANS ET LEUR DISENT
CE QU’IL FAUT PENSER
(GUILLAUME BERNARD)
cadre de ce projet, alors que nous
pensions initialement publier l’album
à ce moment-là. Enfin, nous étions
dans une situation compliquée en ce
qui concerne les labels, et six mois
ont été nécessaires pour nous sortir
de cet imbroglio. En septembre
2018, nous avons entamé les
discussions avec Robin Staps de
Pelagic Records, label auquel nous
étions encore liés contractuellement
pour un album. Il n’a pas fait le
moindre commentaire sur les
morceaux que je lui ai fait parvenir,
mais m’a dit qu’il allait encore
réduire le budget alloué à notre
SITE INTERNET
www.klonosphere.com/klone
ALBUMS
. Duplicate (2004)
. All Seeing Eye (2008)
. Black Days (2010)
. The Dreamer's Hideaway (2012)
Here Comes The Sun (2015)
.
Unplugged (live – 2017)
. Le Grand Voyage (2019)
ARTICLES RH
RH N°75, 125, 152, 173 & 201
Propos recueillis par François Blanc - Interview via Skype réalisée le 05 août 2019
promotion – alors que celui de
l’album précédent n’était déjà pas
bien important ! J’en ai donc profité
pour lui avouer que nous avions reçu
une proposition bien plus alléchante
de K-Scope, label spécialisé dans le
rock progressif, et que j’étais
profondément convaincu que notre
album devait sortir chez eux. Après
de très longues discussions, nous
avons fini par trouver un terrain
d’entente : Le Grand Voyage et son
successeur, qui s’annonce également
progressif et atmosphérique, seront
publiés par K-Scope et nous ferons
ensuite un autre album, plus metal,
pour Pelagic.
Cette dichotomie m’évoque le doublet
Deliverance/Damnation d’Opeth…
Oui, c’est un peu ce que j’ai en tête
aussi. Avoir ces deux labels à nos
côtés va nous donner l’occasion de
nous faire plaisir ; d’un côté, nous
allons accentuer la facette
progressive de Klone, et de l’autre,
nous allons revenir à nos racines
metal avec une musique plus
bourrine, plus lourde, avec une
grosse distorsion. Bizarrement, j’ai
composé beaucoup de choses plus
brutes et metal lorsque nous avons
travaillé sur la pièce de théâtre. J’ai
plein de matière de côté, mais il me
faut encore regrouper les éléments,
assembler le puzzle… Cela s’annonce
intéressant, notamment en
live, où nous pourrons
proposer des sets variés et
très dynamiques ! Nous
adorons le côté physique du
metal sur les planches et
n’avons jamais voulu perdre
ça. L’une des raisons pour
lesquelles j’aime beaucoup
Gojira est justement cette
approche physique du son.
Je ne suis pas sensible à la
démonstration technique, mais plutôt
à cette lourdeur qui, paradoxalement,
te donne envie de bouger. C’est vers
ça que je compte tendre…
Cette longue attente préalable à la
sortie de l’album n’a-t-elle pas été
frustrante pour vous ?
Non. On ne peut pas faire tout ce
qu’on veut lorsqu’on est liés par un
contrat… Et puis, ce n’est pas la
première fois que nous devons
attendre près d’un an et demi pour
voir l’un de nos albums en bacs. Cela
ne me gêne pas car nous n’arrêtons
jamais de bosser et de préparer ce
qui viendra ensuite. Je suis heureux
que nous ayons réussi à publier un
premier extrait de l’album avant le
Hellfest, soit plus de trois mois avant
sa sortie. Tant que nos publications
ne sont pas aussi espacées que
celles de Tool, tout va bien ! (rires)
Parlons du titre de l’album. A
quel(s) genre(s) de « voyage »
faites-vous référence ?
Effectivement, ce nom peut être
interprété de bien des façons. Il peut
aussi bien s’agir d’un voyage
intérieur qu’extérieur… L’idée
première est venue de notre
chanteur Yann, qui a suggéré que
nous intitulions le disque « The
Great Journey ». L’idée me plaisait
car j’aimais le sens des mots, qui
collaient très bien à notre esthétique
sonore et à la pochette que nous
avions choisie, mais la sonorité ne
me convenait pas. Et puis, un soir où
je me creusais la tête en écoutant la
musique, l’illumination m’est venue :
« Le Grand Voyage ». Cela sonne
beaucoup mieux, et c’est une façon
pour nous de valoriser nos racines.
Nous aimons la culture française, la
nourriture, les paysages, très variés
d’une région à l’autre… Alors,
pourquoi pas ? Quant au voyage en
lui-même, chaque auditeur est libre
de se faire sa propre idée. La
pochette, avec son soleil au beau
fixe entouré par deux tourbillons
nuageux, évoque une élévation,
comme s’il fallait inévitablement
traverser des phases difficiles pour
atteindre la lumière. On peut aussi y
voir une sorte de voyage astral ;
beaucoup de gens m’ont raconté
leurs propres expériences, ce qui m’a
49
 poussé à réfléchir sur ce sujet.
Le « Grand Voyage » peut aussi être
celui qui nous attend après la mort.
Notre album précédent, Here Comes
The Sun, dont la pochette ne montre
justement pas le soleil, s’achève sur
une chanson nommée « Last
Experience » et sur des sonorités
assez chaotiques. Musicalement,
le titre « Yonder », qui ouvre notre
nouvel opus, donne une idée d’au-
delà, des choses qu’on ne maîtrise
pas, les forces invisibles, qu’on
ressent sans les comprendre et que
la science est encore incapable
d’expliquer de façon rationnelle.
« Yonder » assure une continuité
avec l’album précédent, puisque son
riff principal rappelle celui de « Last
Experience » et qu’il contient aussi
un clin d’œil à « Immersion ».
Comme de coutume, vos textes sont
assez mystérieux et abstraits, mais
il semble que le thème des
relations amoureuses revienne à
plusieurs reprises…
Oui ! C’est la première fois que Yann
assume autant ce côté « chanson
d’amour ». « Indelible » en parle de
façon très claire, et c’est aussi le cas
de « The Spy », la reprise de The
Doors que nous proposons en bonus.
Il ne s’agit pas toujours de relations
de couple, mais d’amour au sens
universel du terme. Une expérience
spirituelle très large, en somme…
Yann n’a jamais aimé les choses trop
concrètes ; nous préférons laisser les
gens s’imaginer ce qu’ils veulent.
J’ai récemment reçu un message
d’un fan qui nous expliquait qu’il
s’était converti au christianisme
après avoir écouté « Nebulous » en
boucle ! Il était en pleine dépression
et envisageait sérieusement de se
50
foutre en l’air, mais ce morceau
précis lui a permis de se remettre
sur le droit chemin et l’a aidé dans
son processus de guérison. Il l’a
ressenti comme une prière… Ce
n’était probablement pas le but
premier de Yann quand il l’a écrit,
mais nous avons constaté qu’en live,
les gens réagissaient fortement à
cette chanson. Il est même arrivé
que certains auditeurs pleurent ou
aient les larmes aux yeux ! C’est très
touchant pour nous car ce n’est pas
quelque chose que nous maîtrisons.
Tout le monde n’y est pas sensible,
mais certains ressentent très
fortement ces fréquences, ces
vibrations. Les avis et impressions
de nos auditeurs m’intéressent
toujours beaucoup. Ce transfert
d’émotions est ce qu’il y a de plus
noble dans la musique !
Klone s’est, en effet, toujours tenu
éloigné de toute considération
politique ou religieuse.
Oui, et j’en suis fier. J’ai vraiment
horreur des groupes qui véhiculent
des messages très concrets,
s’approprient des pensées politiques
et essaient de faire la morale à leurs
fans, leur expliquer ce qui est bon
ou pas. Beaucoup de combos qui
chantent en français sont
malheureusement tombés dans ce
travers. Quand tu les écoutes, tu as
vraiment l’impression qu’eux ont
tout compris et que tu n’es qu’un con
si tu n’es pas d’accord ! Je trouve ça
abominablement cliché. Ces artistes
croient vraiment qu’ils vont réussir à
générer une prise de conscience
globale et arrêter la guerre grâce à
leur musique ? « Imagine » de John
Lennon, par exemple, va un peu trop
loin dans « l’égo-trip » de l’artiste, à
mon sens. En revanche, si je suis
convaincu que la musique n’est
absolument pas l’outil adapté
pour faire de la politique, je crois
sincèrement qu’elle peut susciter
des questionnements très personnels
chez les auditeurs et les aider à se
recentrer. C’est l’une des nombreuses
raisons pour lesquelles nous préférons
demeurer dans l’abstraction.
Que peux-tu nous dire de la
chanson « The Great Oblivion » ?
Son côté metal plus assumé fait
d’elle un titre un peu à part sur
l’album…
C’est vrai, à tel point que nous avons
carrément envisagé de la reléguer
au rang de bonus. C’est l’un des
premiers morceaux que j’ai écrits
pour l’album, mais lorsque les autres
compositions ont commencé à se
mettre en place, j’ai réalisé qu’elle
était un peu en décalage, avec ses
différentes « phases » et son côté
plus couillu, presque épique. Yann et
moi étions un peu réticents à l’idée
de l’inclure et pensions la garder
pour un autre album, mais nos amis
et notre label ont tellement insisté
que nous avons fini par nous rendre
à leur avis. Je pense que c’était la
bonne décision ! L’album propose
une sorte de plongeon dans quelque
chose de sombre, et ce morceau
donne l’impression qu’on peut se
relever et s’en sortir.
On a déjà dû te le dire, mais votre
nom de groupe ne colle pas très
bien à la musique qui l’accompagne.
Quel est ton avis sur la question ?
Je suis d’accord avec toi !
Spontanément, on s’attendrait
plutôt à quelque chose de moderne,
tapageur… Cela a peut-être empêché
des gens de se pencher sur notre
musique. J’ai choisi ce nom à 19 ans,
parce que sa sonorité me plaisait.
Nous aurions sûrement pu trouver
mieux, mais à l’époque, j’avais
l’impression que toutes les bonnes
idées étaient déjà prises ! D’ailleurs,
je ne vous dis pas à quel point j’ai
galéré pour trouver les noms de mes
autres projets, Polar Moon et Cloud
Cuckoo Land... Quoiqu’il en soit,
avec le temps, je me suis fait à
notre patronyme. En changer après
six albums serait une mauvaise
idée ; les labels n’apprécient pas
ce genre de démarche car on perd
inévitablement des fans au passage.
Pour l’anecdote, l’orthographe de
Klone a été choisie pour nous
distinguer de Clone, formation
nantaise qui jouait du neo metal
à la Pleymo, style qui me hérissait
les poils ! (rires) Lorsque je
démarchais les labels ou les salles
de concerts, il fallait toujours que je
me justifie et clarifie les choses…
C’était assez chiant ! Heureusement,
au bout d’un certain temps, j’ai le
sentiment que la musique finit par
prendre le dessus et que le nom qui
y est associé n’a plus du tout
d’importance. Toto n’est pas le nom
le plus fin du monde, ni même
Pantera, par exemple. Et je pense
que des groupes comme Anathema
et Paradise Lost ont parfois souffert
d’un nom qui ne collait plus
vraiment avec leur propos. Mais
une fois que les gens ont relié ses
sonorités avec la musique, ils n’y
font plus du tout attention et ne se
posent plus de questions. C’est très
bien ainsi ! Prends un groupe comme
Sepultura, par exemple ; son
patronyme lui allait très bien à
l’époque de Beneath The Remains
(1989), mais si Roots (1996) avait
été son premier album, je doute
franchement qu’il aurait choisi de
s’appeler comme ça !
Désormais, quels sont vos
projets ?
Nous avons beaucoup de choses
sur le feu, à commencer par une
vingtaine de concerts à la rentrée.
Nous avons notamment prévu de
donner un petit showcase acoustique
au magasin Gibert Disques de Paris
le lendemain de la sortie de l’album,
et allons participer à l’Euroblast,
festival allemand que nous aimons
beaucoup. Nous allons également
passer par Savigny-Le-Temple et,
de façon plus générale, jouer
partout où cela sera possible en
France. Et à partir de l’année
prochaine, nous donnons la priorité
au développement de Klone à
l’étranger. Nous allons retourner en
Australie en janvier, jouer dans
certains pays d’Europe pour la
première fois et avons de belles
opportunités en ce qui concerne la
Chine, le Japon, les Etats-Unis…
Rien n’est encore officiellement
confirmé, mais cela ne saurait
tarder. Je vous promets également
que notre prochain opus ne se fera
pas trop attendre. De toute façon, je
n’ai pas le choix ; c’est écrit dans
mon contrat ! (rires) Y
De g. à d. : MaX & Zoé H

Propos recueillis par Morgan Rivalin - Interview réalisée le 04 juillet 2019 à Paris
Qui a dit que la France n’était pas une puissance industrielle ? Six ans après Les 12 Vertiges (2013), Le Festin Du Lion est
enfin servi. Sautons dans la fosse aux lions en compagnie de MaX et Zoé H. (The CNK, Ambassador 21, etc.), désormais seuls
maîtres à bord de Herrschaft, formation parisienne de metal électronique/indus qui a effectué sa mue.
Rock Hard : Vous étiez trois. Que morceau « How Real Men Do » et laisse place à quelque chose de l’album précédent jusqu’à ce
s’est-il passé ? tous les concerts qui ont suivi ont plus... qu’elles nous satisfassent
MaX : Notre chanteur MZX est achevé de mettre tous les voyants MaX : De plus « détendu du slip », pleinement. Il y a une sorte de
parti en 2014. A suivi une période au vert. La prochaine étape était oui. (rires) C’est plus « grotesque », carton dans lequel nous plaçons les
floue : « Faisons-nous le même style donc le nouvel album, ses thèmes, plus théâtral... idées et piochons régulièrement.
de musique ? Faudrait-il changer de etc. Musicalement, je le qualifierais Zoé H. : Plus décadent, un peu Comme disait MaX récemment,
nom ? Voulons-nous recruter une de renouveau dans la continuité, moins sérieux... C’est moins nous aurions la matière pour sortir
troisième personne ? », etc. Au final, car même si le black metal s’est glacial, moins terre-à-terre, plus un album tous les deux mois, mais
nous nous sommes dit que nous nettement estompé, les compos du fun. Plus cynique, aussi. Nous ça ne nous conviendrait pas. J’ai la
aimions bosser en tandem. Nous Festin Du Lion ne sont pas éloignées assumons désormais de faire du chance d’avoir un studio dans
sommes bien. Et puisque j’avais de certains morceaux présents sur divertissement. Bon, ce n’est pas lequel nous enregistrons tout, ce
plutôt arrêté la batterie pour jouer nos précédents disques. Et, bien non plus du « rigolo metal » à la qui est à la fois une très bonne
des synthés sur scène, je suis sûr, les deux ingrédients de base Ultra Vomit, mais c’est vraiment chose et un inconvénient. Personne
devenu le chanteur du groupe. J’ai restent le metal et l’electro. Bon, plus léger qu’avant. ne nous dit quoi faire, mais puisque
pas mal travaillé, j’ai pris des cours après, les tempi ont un peu nous n’avons pas de date butoir à
de chant et ça a « mariné » pendant ralenti... Mais bon, on vieillit ! Ce Qui voit-on sur la pochette du respecter, mon studio devient une
une bonne année avant que nous ne qu’on perd un peu d’un côté, on le Festin du Lion ? sorte de laboratoire dans lequel la
décidions de nous lancer. Nous gagne en ambiances, en mélodies... MaX : Satan et son assistant. Ils distillation prend parfois un certain
avons testé ce que ça donnait et ça MaX : Personnellement, j’ai observent les humains et se disent temps...
l’a fait. Ce n’est pas pareil, et ça ne tendance à trouver que notre qu’à présent, ces derniers n’ont MaX : Il faut également se battre
sera plus jamais pareil qu’avant car musique d’aujourd’hui est plus vraiment plus besoin d’eux pour contre la vie, contre les sur-
je n’ai pas la même tessiture, mais violente que celle d’avant. Alors faire n’importe quoi. C’est une sollicitations de Zoé, ses 12.000
ça s’inscrit bien dans notre que, pourtant, j’écoute beaucoup affaire qui roule ! Cette idée est projets, etc. (rires) Nous nous
dimension metal indus. Nous avons moins de black metal à 7h00, en me devenue le fil rouge de l’album et a permettons aussi de faire beaucoup
alors recruté un nouveau groupe levant. J’ai plus de mal qu’avant... inspiré l’artwork, façon « Radeau de d’aller-retours sur les morceaux qui
live et nous sommes repartis dans Zoé H. : Il attend midi ! (rires) la Méduse ». sont en mouvement et qui ne
une nouvelle dynamique. Zoé H. : Sur la pochette, on a sortent que lorsqu’ils nous satisfont
Zoé H. : Fin 2015, le très bon Au niveau des thèmes, celui de même l’impression que l’humanité pleinement.
accueil réservé au clip du nouveau l’Apocalypse, si cher à votre cœur, implore Satan de l’aider. On en est
rendu là, carrément ! Vous êtes donc totalement
GENRE ALBUMS satisfaits à présent ?
. Metal électronique/industriel . Architects Of The Diriez-vous que vous êtes Non ! Nous allons rappeler tous les
LE GROUPE
Humanicide (EP – 2005)
. Tesla (2008)
perfectionnistes ? disques qui sont déjà dans la nature
. MaX . Les 12 Vertiges (2013) Oui, nous avons besoin de travailler et allons bientôt réenregistrer
(chant, programmation) . Time And Dust les choses à fond. Ça explique l’album ! (rires) Mais non, nous
(compilation – 2015)
. Zoé H. (guitare, basse, . Le Festin Du Lion (2019) pourquoi il a fallu attendre ce sommes vraiment contents.
programmation) nouvel opus pendant six ans. En Zoé H. : Nous n’arrêtons pas de
ARTICLE RH plus des compos créées pour Le vomir tellement nous sommes
SITE INTERNET RH N°201 Festin Du Lion, nous avons contents ! Y
www.h-noise.com retravaillé des chutes de studio de

51
 GENRE
. Goth'n'roll
LE GROUPE
. Jyrki 69 (chant)
. Bazie (guitare)
. Timo-Timo (guitare)
. Archzie (basse)
. Jussi 69 (batterie)
SITE INTERNET
http://69eyes.com
ALBUMS
. Bump 'n' Grind (1992)
. Motor City Resurrection (1994)
. Savage Garden (1995)
. Wrap Your Troubles In Dreams (1997)
. Wasting The Dawn (1999)
. Blessed Be (2000)
. Paris Kills (2002)
. Devils (2004)
. Angels (2007)
. Back In Blood (2009)
. X (2012)
. Universal Monsters (2016)
. West End (2019)
ARTICLES RH
RH N°12, 42, & 201

De g. à d. : Archzie, Jussi 69,

Timo-Timo, Bazie & Jyrki 69

52

Jyrki 69, le chanteur de The 69 Eyes, est un moulin à paroles. Il a également une fâcheuse tendance à répondre à côté
de la question lorsqu'il a décidé de parler d'autre chose, mais le bonhomme est sympathique et il est difficile de lui en vouloir
tant il semble habité par la passion lorsqu'il part dans de longs monologues. La sortie de West End, treizième album
du groupe, nous a donné l'occasion de discuter Rimmel et humour noir avec le volubile et sémillant quinquagénaire.
Rock Hard : On peut noter, sur bien
des titres de ce nouvel album, un
retour à votre style du début des
années 2000. Etait-ce une volonté
affichée ?
Jyrki 69 : Depuis nos débuts, nous
écrivons nos titres de la même façon.
Si je dois te parler de ce qui me
concerne au premier chef – à savoir
les paroles – j’avais une vingtaine
d’années lorsque nous avons débuté et
la palette de sujets que je pouvais
traiter n’était pas très vaste : je
connaissais quelques films d’horreur,
quelques comics, et pas grand-chose
aux filles… même si je savais que le
sujet allait m’intéresser (sourire). Cela
suffisait amplement car j’ai toujours
voulu avoir un style direct et
minimaliste, très rock’n’roll dans
l’esprit. Notre univers est bien moins
complexe que celui de beaucoup de
groupes de metal, je ne vais pas me
mettre demain à faire du... (il réfléchit)
Sabaton ! (rires) Il faut que cela reste
simple. Mes références sont plutôt à
chercher du côté de The Doors : des
mantras, des poèmes super évidents...
Je tiens vraiment à garder cet aspect
de notre musique. Les jeunes gens qui
ne connaissent pas l’histoire du rock
sont parfois décontenancés par cette
simplicité, d’autant qu’on nous colle
régulièrement l’étiquette d’un genre
auquel nous n’appartenons pas
vraiment. Les Cramps, les Ramones...
Voilà des groupes dont la musique ne
vieillira jamais car leur façon d’écrire
immuable reste gravée dans le marbre.
Notre producteur de longue date,
Johnny Lee Michaels, a souvent voulu
instaurer une sorte de compétition
avec nous et nous pousser à intégrer
des claviers et des machines. Il y est
parvenu en partie car, jusqu’à un certain
point, l’apport de claviers enrichit
évidemment une mélodie, mais nous
avons toujours bataillé ferme pour
ne pas devenir tributaires de la
technologie. Le rock’n’roll reste la
base, et nous avons souhaité revenir à
davantage de guitares sur West End.
Est-il toujours facile pour vous de
trouver la « juste dose » entre les
éléments issus du courant gothique
et ceux qui viennent plus
directement du rock, voire du hard
rock, ou même du glam ?
Quand bien même nous partons
parfois sur l’écriture d’un titre
franchement heavy ou plus punk,
ça se termine toujours de la même
façon : avec une guitare à la Johnny
Thunders ou un riff à la Chuck Berry.
Nos disques font le grand écart entre
différents styles de musique, ce n’est
pas une nouveauté. Si tu achètes un
disque de Slayer, tu sais que tu vas
avoir droit à du metal, uniquement du
metal, et c’est pour ça que tu l’achètes.
Si tu achètes un album de The 69
Eyes, tu vas avoir du hard rock, du
goth rock, de la pop, de l’horror
punk... En revanche, je serais bien
incapable de te dire comment nous
dosons les éléments, ni même si nous
cherchons à le faire réellement.
Même si je ne suis pas friand de la
comparaison, nous sommes
originaires de Finlande tout comme
l’était Hanoï Rocks, qui brassait
également de nombreux styles de
musique sur ses albums.
Tu veux dire que The 69 Eyes
pourrait bien être la face obscure
de Hanoï Rocks ?
Hum... Je ne sais pas trop si je peux
dire cela car je ne suis pas certain
que Michael Monroe nous apprécie
beaucoup, mais si ça reste entre nous,
oui, ça pourrait bien être ça (NdCA :
Ça ne sortira pas de Rock Hard, promis !).
Vous avez choisi comme premier
single « 27 & Done », qui fait
allusion au fameux « club » des
artistes morts à l’âge de 27 ans.
C’est un sujet qui te touche
particulièrement ?
Il faut surtout mettre ça sur le compte
de mon sens de l’humour un peu
macabre. Ici, en Finlande, nous jouons
haut sur l’affiche de très gros
festivals et le public reprend souvent
nos refrains en chœur. Nous avons
déjà joué ce titre quatre fois en live et
LES SCÈNES, DE NOS JOURS, SONT
DE PLUS EN PLUS REMPLIES DE FANS
ÉLITISTES POUR QUI TU N'ES JAMAIS
ASSEZ LÉGITIME (JYRKI 69)
j’avoue que voir une marée humaine
chanter « Let’s All Die Young !» à
l’unisson est un truc de dingue. Je
trouve même ça totalement hilarant.
Il y a une telle pression aujourd’hui
sur la jeunesse – notamment à cause
des réseaux sociaux – que les gens
ont très facilement tendance à
paniquer dès lors qu’ils ont le
sentiment de ne pas trouver leur place
dans la vie ou que leurs rêves ne se
réaliseront jamais. Alors, cette
chanson, même si elle relève d’un
humour très noir, permet de rire un
peu de tout ça et de souffler un bon
coup. Je ne suis pas directement
concerné par le texte puisque je suis
aujourd’hui une vieille baderne de
plus de cinquante balais et que ma vie
est faite en bonne partie, mais je ne
voudrais pas être jeune aujourd’hui.
Ce « Club des 27 » (Ndlr : « regroupant »
Jim Morrison, Janis Joplin, Jimi Hendrix,
Brian Jones, Kurt Cobain et Amy
Winehouse) est un truc d’autant plus
dingue qu’il n’est composé que de
gens qui ont réellement fait quelque
chose de leur vie et qui, pour certains,
ont même changé l’histoire de la
musique. De vrais génies.
Certains dans le lot ont-ils été une
véritable source d’inspiration pour
toi ?
Propos recueillis par Charlélie Arnaud - Interview réalisée via Skype le 12 août 2019
Morrison, Hendrix, Joplin, Brian
Jones, oui, c’est une évidence absolue.
J’ai grandi dans les années 70,
période où leur influence sur la
musique moderne était palpable. Mais
je pense également à d’autres « chers
disparus » qui ne font pas partie du
lot, comme Johnny Thunders pour qui
j’ai monté un show hommage à
Helsinki, Stiv Bators (Lords Of The
New Church), tous les membres des
Ramones, ou encore Lemmy. Le
monde est devenu un endroit bien
calme sans Motörhead...
Quelle place occupe selon toi un
groupe comme le vôtre aux yeux des
« vrais fans » de la scène gothique ?
Je nous vois comme une sorte de porte
vers la scène gothique, notamment
pour les plus jeunes qui découvrent le
mouvement. Tout le monde ne peut
pas tomber instantanément amoureux
de The Sisters Of Mercy, The Mission
ou encore Christian Death. Notre côté
pop fait de nous une passerelle vers
cette scène. Les Sisters ou encore The
Mission, avec qui nous avons tourné
récemment, étaient des groupes de
rock dans les années 80, il ne faut pas
l’oublier. Tout comme The Cult. Et
dans les années 90, la scène gothique
s’est alors tournée vers des choses
partant davantage vers le shoegaze,
plus électroniques, plus expérimentales
aussi. Je nous sens évidemment plus
proche des groupes originels de « rock
gothique » car, aujourd’hui, la scène
goth est devenue un truc de hipsters,
le côté rock’n’roll a complètement
disparu. Nous sommes néanmoins
toujours programmés dans certains
gros festivals gothiques, notamment
en Allemagne, et j’avoue qu’une fois
de temps en temps je tombe sur un
jeune groupe qui me plaît, mais le
côté « glam goth » que j’affectionne
est aujourd’hui réduit à peau de
chagrin. Le souci avec toutes les
scènes, c’est que, de nos jours, elles
sont de plus en plus remplies de fans
élitistes pour qui tu n’es jamais assez
légitime. Je sais très bien que, pour
beaucoup de gens, nous ne sommes
pas assez Norvégiens. Nous avons le
même problème que des groupes
comme Cradle Of Filth qui sont la
risée des fans de « true black metal »,
mais qui reste, pour toute une
génération, une super porte d’accès à
une musique plus extrême.
Puisque nous parlons de Cradle,
Dani Filth apparaît comme invité
sur le titre « Two Horns Up » qui
ouvre l’album...
Oui, c’est un très bon ami depuis 25
ans environ, tout comme Wednesday
13 qui apparaît également sur le
disque. Au milieu des années 90,
j’officiais comme DJ à Helsinki
lorsque Cradle Of Filth y a fait ses
premiers shows, et nous sommes
devenus très potes. La vie a fait que
je n’ai croisé ni Dani ni Wednesday
pendant près de dix ans, et nous nous
sommes tous vus par hasard l’an
dernier à Los Angeles. L’occasion
étant trop belle pour la laisser filer,
nous les avons tous deux invités à
apparaître sur ce futur album.
Le look a toujours eu une importance
prépondérante chez The 69 Eyes.
L’âge avançant, est-ce parfois une
dimension qui commence à être un
peu pesante ?
Des groupes comme The Lords Of The
New Church ou The Cult nous ont tant
marqués lorsque nous étions plus
jeunes que nous avons immédiatement
adopté leurs codes vestimentaires, les
fringues noires, les longs cheveux
teints, etc. Nous avons adopté un look
un peu plus « glam » au milieu des
années 90 car beaucoup de gens nous
confondaient avec les incendiaires
d’églises, et je ne voulais surtout pas
qu’il y ait d’amalgame avec cette scène
qui ne nous concernait pas. Aujourd’hui,
pour être tout à fait honnête, jamais
je ne me pose la question de savoir si
je ne suis pas un peu vieux pour
m’habiller, me coiffer ou me maquiller
comme ça. C’est un mode de vie. Je ne
cherche pas à « conserver une image »
à tout prix pour mon public ou parce
qu’un manager me l’a demandé : ce
que tu vois est réellement la personne
que je suis.
Enfin, quels sont, selon toi, les cinq
disques que tout fan de The 69 Eyes
se devrait de posséder et de chérir ?
Le premier album de The Doors, II :
Lucifuge de Danzig, Raw Power d’Iggy
Pop & The Stooges, Vision Thing de
The Sisters Of Mercy, et enfin le
dernier album de Ghost. Il y a une
vibration commune à tous ces albums
que je ne peux que conseiller à tous
nos fans. Me permettrais-tu d’aborder
un dernier sujet rapidement ?
Bien sûr, avec plaisir !
Je voudrais pousser un petit coup
de gueule. Lorsque je regarde les
statistiques de nos pages sur les
réseaux sociaux ou plus simplement
sur Spotify, je m’aperçois que
beaucoup de gens nous écoutent et
nous suivent en France. Or, nous ne
jouons jamais dans vos festivals, et
lorsque nous sommes en tournée, il
nous est impossible ou presque de
jouer ailleurs qu’à Paris. C’est
vraiment dommage et je tiens à ce
que tous nos fans français sachent
que ce n’est aucunement une volonté
du groupe. Nous allons tout faire à
l’avenir pour changer cela, c’est une
promesse ! Y
53

Rock Hard : Opeth se prépare à
publier son treizième album en
29 ans d’existence. A titre de
comparaison, Iron Maiden en
a publié 16 en 44 ans !
Mikael Åkerfeldt : Nous ne sommes
pas si loin, mais il faut préciser que
leurs tournées mondiales sont bien
plus longues que les nôtres ! (rires)
Imaginais-tu, lorsque tu as
commencé, enregistrer plus de
dix albums ?
Oui ! A cette époque, j’avais de
grands rêves, même si je pensais
probablement qu’une fois parvenu à
45 ans, mon groupe serait encore
enraciné dans le death metal. Nous
avons bien sûr changé de direction.
Mon rêve initial était de mettre en
boîte une démo au format cassette.
Bénéficier d’une vraie production
était mon Graal ! Au final, nous
n’avons jamais enregistré de démo
puisque nous avons directement
commencé avec un album, ce qui est
encore plus énorme. C’est donc un
rêve impossible qui s’est réalisé, et
je suppose que c’est la raison pour
laquelle j’ai ensuite pensé que tout
était possible. Même si ça n’a pas
duré longtemps ! (rires) Nous
sommes néanmoins toujours là…
Quelles étaient alors tes
ambitions ? Rêvais-tu de
conquérir le monde ?
Je pense avoir pris conscience de
mon potentiel avec le temps. Je
rêvais simplement d’être guitariste
de death metal, à la manière d’un
Entombed. Avant cela, je me voyais
membre de Scorpions ou Iron
Maiden. Si j’aurais été heureux de
publier simplement une démo
cassette de death, j’ai par la suite
réalisé ma propre « musicalité »,
mon amour et mon intérêt pour la
musique et son exploration. Un
GENRE
. Rock metal progressif
LE GROUPE
. Mikael Åkerfeldt (guitare, chant)
. Fredrik Åkesson (guitare)
. Martín Méndez (basse)
. .
Martin Axenrot (batterie)
. Joakim Svalberg (claviers)
54
Propos recueillis par Guillaume Fleury - Interview réalisée le 15 juillet 2019 à Paris
L’intéressé ne s’en cache pas, il n’aime pas « se vendre ». Reste que Mikael Åkerfeldt,
tête pensante, chanteur et guitariste d’Opeth, est l’un de ces interlocuteurs qu’il est toujours
plaisant de rencontrer car le bonhomme s’avère franc et sincère, sans se déparer de cet humour
pince-sans-rire qui fait merveille sur scène. S’il paraît aujourd’hui amaigri et très fatigué, le
Suédois se livre néanmoins avec une passion intacte à propos d’une œuvre dont il est très fier.
voyage différent a alors commencé. proposé une tournée en tête d’affiche ! groupe comme un business. Je n’ai
Au moment de la sortie de Blackwater Le temps de nous changer, nous jamais voulu devenir « gros ». Tout
Park, en 2001, nous étions déjà sommes immédiatement repartis… commence et termine avec la qualité
un peu établis, mais très pauvres. et nous en sommes à notre treizième de ta musique. Tout le reste n’est
Nous n’avions pas gagné le moindre album aujourd’hui. A présent, je à mon sens que de la chance. Et il
centime sur notre nom et ne pense que nous sommes même en en faut beaucoup ! Evidemment,
tournions pas vraiment. Cet album mesure de tourner aussi longuement certaines décisions sont prises par
nous a apporté la reconnaissance que Maiden car la demande est forte. rapport au business, comme le choix
après environ dix ans de carrière, ce Mais tourner est très destructif… d’une tournée, mais ce genre de
qui représente une longue période. J’ai deux enfants et je n’ai aucune choix n’est basé que sur une
Nous avions déjà publié cinq albums envie de quitter la maison pour recherche d’exposition supérieure et
sans que mes rêves ne se réalisent. plusieurs semaines. Ma plus grande n’est pas lié à la qualité musicale.
J’étais blasé et mes aspirations passion, c’est la facette créative… Sur ce point, j’ai toujours conservé
commençaient à s’effilocher. Au le contrôle et cherché à préserver
moment précis où le succès est Une fois le succès arrivé, et la l’innocence que j’avais lorsque je
arrivé, j’avais carrément perdu pression qui va avec, cela a-t-il composais à l’âge de 19 ans. Même
espoir. Blackwater Park était changé ta manière d’aborder la si, à l’époque de Blackwater Park, je
d’ailleurs notre album de la dernière composition ? ne faisais pas de démo et n’avais
chance : nous avions décidé de Un peu. Mais j’écris surtout pour même pas d’ampli, ni de local de
tenter un ultime disque pour voir ce moi-même. Tu ne peux pas contrôler répétition. J’avais dû vendre mon
que ça donnerait... Heureusement, l’auditeur. La seule chose sur ampli pour payer mon loyer ! (rires)
les choses ont bien tourné ! laquelle ma maîtrise est totale, c’est Quand je compose, je redeviens le
gamin que j’étais lorsque j’ai
BLACKWATER PARK ÉTAIT NOTRE commencé. La musique a évolué,
mais pas l’intention...
ALBUM DE LA DERNIÈRE CHANCE Même ta méthode d’écriture est
restée la même ?
(MIKAEL ÅKERFELDT) Oui ! J’écris toujours en partant de
matériel nouveau, sans jamais
Ce succès fut-il une grosse moi-même. Je suis très impulsif repiquer d’ancienne idée. (Il
surprise pour toi ? lorsque j’écris de la musique, et la réfléchit) UN riff, un seul, qui avait
Non, car, comme je le disais, il n’est seule chose que je sais, c’est si été laissé de côté à l’époque de
pas arrivé d’un coup. Il a fallu une j’aime ou pas ce que j’entends. Ghost Reveries (2005), a terminé sur
longue période avant que nous Le fait qu’un album soit apprécié Sorceress (2016), sur le titre
commencions à gagner un peu par le public n’est pas mesurable « Chrysalis », mais ce n’est arrivé
d’argent. A ce moment précis, je mathématiquement. Il n’y a pas de qu’une fois. Si je ne conserve pas
commençais à affronter la réalité : règle qui décide qu’un album est une idée en première intention, c’est
moi qui voulais consacrer tout mon bon. Il peut être génial pour que je pense qu’elle ne tient pas la
temps à mon groupe, je commençais, quelqu’un et merdique pour un route. Mais ça ne veut pas dire que
à contrecœur, à envisager de autre. Il faut beaucoup de chance et le riff dont je te parle est merdique !
prendre un autre boulot… pile au un excellent timing pour connaître (rires)
moment où le succès a commencé le succès. L’auditeur rattache ta
à se dessiner. A l’époque, nous musique à sa vie personnelle, et tu Il est vrai qu’à l’époque de
sommes partis en tournée en n’as aucun contrôle là-dessus. Tu Heritage, tu n’avais pas hésité à
support de Nevermore puis peux simplement faire au mieux, jeter à la poubelle un album quasi
d’Amorphis, durant cinq semaines. donner des interviews comme je le complet…
Ce fut un tel tourbillon qu’une fois fais en ce moment, tourner. Mais Oui, environ 35 minutes de musique.
rentrés, un promoteur nous a nous n’avons jamais abordé le Je n’ai conservé que deux parties :
un riff black metal que j’ai passé en
. The Roundhouse Tapes (live – 2008) acoustique sur l’ouverture de
SITE INTERNET . Watershed (2008)
. Heritage (2011) « Häxprocess » et un solo de basse
www.opeth.com . Pale Communion (2014) sur ce même titre. J’ai jeté tout le
. Sorceress (2016)
ALBUMS . Garden Of The Titans : Live At Red reste… J’avais présenté l’album
. Orchid (1995) Rock Amphitheatre (live – 2018) originel au bassiste Martin Méndez.
. Morningrise (1996) . In Cauda Venenum (2019)
Même s’il n’a jamais composé le
. My Arms, Your Hearse (1998)
. Still Life (1999) ARTICLES RH moindre titre pour Opeth, l’écoute
Blackwater Park (2001) de ce Watershed 2.0 lui a fait me
. RH N°16, 18, 47, 63, 74, 77, 93, 103,
Deliverance (2002) 112, 145, 169 & 201
. Damnation (2003) dire : « Je sens que ce n’est pas ce
. Ghost Reveries (2005) que tu veux faire ! ». Ce fut un
 De g. à d. : Fredrik Åkesson, Martin Axenrot,
Martin Méndez, Joakim Svalberg, Mikael Åkerfeldt

NOUS AVONS CRÉÉ NOTRE PROPRE
VERSION DU METAL EXTRÊME EN
NOUS INSPIRANT DE LA SOUL
(MIKAEL ÅKERFELDT)
soulagement car j’avais moi-même
réalisé que c’était vrai… J’étais
surtout effrayé à l’idée de briser
notre carrière. Car ce fut vraiment
un nouveau départ pour nous. Mais
c’était la meilleure chose à faire, en
tant que compositeur. Je n’écoutais
plus de musique extrême depuis
longtemps. Le dernier album
extrême que j’ai acheté et adoré
était Domination de Morbid Angel
(1995). Les fans de notre période
« classique » ne réalisent pas
toujours que je ne me suis jamais
inspiré de death metal. A l’époque
de Still Life et Blackwater Park, nous
écoutions… Stevie Wonder ! Si tu
écoutes son album Innervisions
(1973), tu peux entendre des
accords qui ont terminé sur « The
Drapery Falls ». C’est comme ça que
nous avons créé notre propre
version du metal extrême : en nous
inspirant de la soul ! (rires)
Ce qui explique probablement
pourquoi Opeth a un son si
caractéristique...
Je suppose ! Mais à l’époque de
notre virage, je n’avais pas réalisé à
quel point nous allions nous faire
ostraciser par certains fans. Ceux
qui nous adoraient ont commencé à
nous détester à cause de l’absence
de chant extrême, alors que je
n’avais pas pensé que cela pourrait
être un si vaste sujet de polémique !
Bien sûr, nous avons attiré un
nouveau public de fans de metal
prog, et il n’y a jamais eu de gros
clash, hormis sur les réseaux
sociaux. Cette décision d’effacer
tout un album afin de me plonger
dans ce qui me plaisait vraiment à
l’époque fut vraiment majeure. A
présent, je n’écoute du death metal
que lorsque je suis bourré, avec
nostalgie. Mais je ne découvre pas
de nouveaux groupes. (Il désigne
mon t-shirt At The Gates) J’aime la
demo Gardens Of Grief et le premier
album d’At The Gates, mais j’avais
arrêté avant la sortie de leur
classique Slaughter Of The Soul
(1995) car c’était trop tard pour
moi ! J’ai bien réalisé que cet album
était brillant, mais ça ne me
touchait déjà plus. J’aime également
Morbid Angel, Autopsy, Entombed,
du black comme Bathory, mais je
n’écoute jamais les groupes qui nous
citent comme influence majeure…
Même par curiosité ?
Je tombe inévitablement dessus, en
festival notamment. Mais il m’est
difficile de déceler notre influence
dans leur musique. Nous avons, par
exemple, rencontré les gars de
Periphery et Tesseract, qui disent
être grands fans de notre musique,
mais ce qu’ils font est bien plus
technique et précis qu’Opeth. Nous
sommes davantage focalisés sur le
côté émotionnel. Je trouve
Meshuggah incroyable sur un ou
deux morceaux, mais ça me fatigue
vite. J’ai néanmoins compris
l’influence les concernant. Mais je
préfère écouter une musique qui soit
capable de me faire pleurer. C’est ça
mon truc, peu importe le style !
In Cauda Venenum est le
quatrième album sans chant
extrême pour Opeth. Tu sembles
bien décidé à ne pas y revenir !
Je le fais toujours... mais en live.
J’adore jouer des titres comme
« Ghost Of Perdition », « Demon Of
The Fall » et « The Drapery Falls ».
Mais la transition n’a pas été si
importante pour moi : ce n’est pas
que je n’aimais plus chanter de
cette manière, mais simplement que
je ne pouvais plus le faire avec
crédibilité.
Il ne t’arrive plus jamais, lorsque
tu composes, de penser qu’une
ligne de chant extrême pourrait
coller à ce que tu écris ?
Techniquement, ça pourrait parfois
coller, mais si je le faisais, ce serait
avant tout pour faire plaisir aux
autres, et non à moi. J’ai écrit tous
mes albums, qu’ils contiennent du
chant extrême ou non, pour moi.
Je sais que des fans veulent savoir
si le chant extrême reviendra un
jour dans notre musique, mais je
suis désolé de leur dire que je n’en
sais rien ! Si nous revenons un jour
au chant extrême, cela impliquerait
probablement que nous proposions
quelque que chose de moins
mélodique et sortions un véritable
album de death metal. Il devrait
s’agir de quelque chose que nous
n’avons jamais fait. Je ne veux pas
combler les attentes dans le seul
but de faire plaisir à d’autres.
L’expression In Cauda Venenum
peut s’appliquer à une œuvre
légère, qui s’achève subitement sur
un ton brutal et violent. J’imagine
que certains fans vont espérer que
l’album se termine sur du chant
extrême ! Tu es taquin ! (rires)
(Rires) Ce n’est pas conscient !
Je pense aussi que certains se
demandent si je suis encore capable
de chanter de cette manière, mais
il suffit de venir nous voir live
pour constater que je sais toujours
le faire, même s’il m’arrive
évidemment de moins bien chanter
selon mon état de forme. Je ne
m’attendais pas à ce que ce soit un
élément si important pour les fans,
et, quelque part, je suis heureux que
cela les tracasse encore huit ans
après. Pour être honnête, je ne
parviens pas à trouver un autre
groupe qui ait connu une histoire
similaire. Cela signifie que nos
albums ont eu un fort impact sur
les gens et j’en suis très fier.
Revenir au chant extrême
représenterait aussi un risque.
Certains ne manqueraient pas de
t’accuser d’avoir retourné ta veste
pour renouer avec une formule qui
marche ...
Oui, il est impossible de sortir
gagnant de ce genre de situation.
Nos anciens albums sont toujours là,
de même que d’autres groupes
extrêmes, mais j’aime à penser
qu’aucune formation ne peut nous
remplacer dans notre style. Nous
serons toujours Opeth, quoiqu’il
arrive. Mais nous sommes aussi
humains, et nous aspirons à
changer. J’ai 45 ans, je suis trop
vieux pour me sentir concerné par
ce qui s’écrit sur une page
Facebook !
Et puis, si retour il y avait,
tu n’échapperais pas aux
comparaisons avec vos œuvres
classiques, qui seraient à coup
sûr jugées supérieures…
Je sais que ce serait le cas ! Il y en a
sûrement, mais je ne parviens pas à
citer un groupe, dont le retour aux
sources a fonctionné. Ils peuvent
réitérer une formule, mais ne
retrouvent pas la magie de leurs
anciens albums. De notre côté,
nous sommes en constant
développement et cherchons
à progresser. Je prends les
affirmations selon lesquelles nous
régressons car nous sonnons comme
Jethro Tull comme des compliments,
mais je pense également que ces
gens-là n’ont jamais écouté Jethro
Tull ! (rires)
Es-tu aussi perfectionniste
aujourd’hui que tu l’étais il y a
dix ans ?
Je le suis de plus en plus !
Aujourd’hui, si je pense qu’un
morceau est trop long d’une
seconde, je vais le corriger, alors
qu’à l’époque de Blackwater Park ou
Deliverance, certaines compositions
n’étaient pas parfaites, mais j’étais
trop fatigué pour les reprendre.
Je laissais donc les choses filer.
J’ai arrêté de faire ça...
Cela signifie-t-il que tu as des
regrets sur certains de tes
albums ?
Non, car c’était ce qu’il fallait à ce
moment-là. Je ne cherche pas à
enregistrer un disque parfait et je
pense même que les imperfections
peuvent parfois mener à la
perfection. Mon album favori de
Judas Priest est Sad Wings Of
Destiny (1976) et il contient
beaucoup d’erreurs techniques,
Glenn Tipton (guitare) est parfois
en retard de quelques secondes,
mais lorsque j’écoute ce disque,
ces imperfections font sens et
n’altèrent pas la qualité de l’album.
Un fan d’Opeth n’entendra pas les
imperfections de la même manière
que moi. Si je corrigeais un passage
sur lequel je chante un peu faux
ou ne joue pas de manière précise,
cela sauterait aux oreilles des
auditeurs et leur ferait ressentir
un manque !
Ce nouvel album est le premier
sur lequel tu chantes en suédois.
Etait-ce une chose qui te trottait
en tête depuis longtemps ?
Pas vraiment. C’est surtout une
chose qui m’a motivé à écrire.
J’aime avoir une idée basique de
ce que je veux faire, comme,
par exemple, la doublette
Deliverance/Damnation (Ndlr : deux
albums complémentaires parus en
2002 et 2003). Je n’ai pas toujours
pu maintenir ma vision de départ,
comme, par exemple, celle de
proposer un album de black metal
furibard car j’aboutis souvent à un
résultat très différent de ce que je
recherchais au départ. Pour le chant
en suédois, je me suis dit que les
temps avaient changé, que nous
étions un groupe établi et que nous
ne prenions pas un immense risque.
Je me demandais néanmoins si cela
fonctionnerait, si ça ne sonnerait
pas idiot. J’ai juste rencontré un
souci avec la prononciation car j’ai
un défaut qui ne s’entend pas en
anglais, mais est flagrant en
suédois : je ne parviens pas à rouler
les « r » comme il faut, ce qui fait
que je sonne comme si j’étais
retardé mentalement ! Alors, j’ai
tenté de chanter de manière plus
théâtrale, un peu comme un acteur,
mais c’était encore pire ! J’ai donc
appelé un ami, Jonas Renkse de
Katatonia, qui m’a répondu : « Ne
t’inquiète pas, c’est le « r » de
Stockholm ! Vous parlez tous comme
ça là-bas, ça sonne très vintage ! »
(rires) Cela m’a un peu rassuré !
Lorsque j’ai fait écouter l’album à
des amis Suédois, ils n’ont pas
réalisé que je chantais dans notre
langue avant plusieurs morceaux !
(rires)
Est-il plus facile d’écrire dans sa
langue natale ?
Pour obtenir la substance, oui.
En anglais, j’ai tendance à embellir
mes paroles avec des mots élégants.
Quasiment tous nos titres renferment
ce genre de termes. Le fait d’écrire
de manière moins poétique et plus
directe a en un sens changé le fond
de mes textes, qui sonnent plus
modernes et contemporains, parfois
même plus politiques, parce que je
n’ai plus ces mots fleuris pour orner
l’ensemble. Aucun mot suédois
n’est particulièrement beau à mes
oreilles. Je ne peux pas romancer
ma propre langue.
Es-tu parvenu à traduire
littéralement les textes originaux
lorsque tu es passé à la version
anglaise ?
Autant que j’ai pu ! Mais il est, par
exemple, difficile, lorsque je chante
de façon très aigue, d’utiliser la
lettre « o », ce qui fait que j’ai eu
du mal à obtenir le son qui
correspondait à la version suédoise
et qu’il m’a parfois fallu recourir à
une licence poétique afin que le
résultat sonne bien. Je pense que le
contenu de chaque morceau est
néanmoins à 75 % quasiment
identique, même si certaines lignes
sont différentes...
Pourquoi avoir également choisi de
proposer une version anglaise ?
L’insécurité ! Plusieurs personnes
m’ont déjà dit : « Mais puisque tu
déclares te foutre de ce que pensent les
gens de ton travail, pourquoi faire une
version anglaise ? ». Le fait est que je
ne voulais pas que les fans zappent
cet album car je suis très content de
la musique qu’il contient. Lorsque
j’étais jeune, je ne parvenais pas à
écouter de groupes italiens car cela
me perturbait de ne pas comprendre
ce qu’ils disaient. Ce n’est plus un
problème à présent car je suis plus
ouvert, mais je sais que certaines
personnes peuvent avoir ce même
problème. Et puis, ce n’était pas une
tâche énorme pour moi que de
réécrire et réenregistrer en anglais,
même si cela représentait bien
évidemment un certain boulot. Ma
version favorite est la suédoise et
j’espère que c’est celle que les gens
préféreront, mais au moins leur
laissons-nous la possibilité de
l’écouter en anglais si le suédois les
dérange...
A-t-il été difficile de convaincre
Nuclear Blast du bien-fondé de ce
double album, sachant que cela
représente davantage de coûts de
production ?
Non, car nous n’avons qu’un contrat
de licence avec le label et passons
toujours par notre propre structure,
Moderbolaget, pour les décisions
de ce genre. De toute manière,
personne n’a jamais rien dit sur
notre créativité, à l’exception du
boss de Music For Nations à l’époque
de Deliverance et Damnation, qui
refusait que nous sortions deux
albums de manière rapprochée. Il
trouvait cela trop cher et n’aimait
pas l’idée que nous allions aussi vite
par rapport au nombre d’albums que
nous lui devions. Je lui ai répondu :
« Ok ! Et si je te fais les deux albums
pour le prix d’un seul et que ces deux
disques comptent comme un seul par
rapport à notre contrat ? » Il a
évidemment accepté car je suis un
médiocre businessman. Mais lorsque
quelqu’un tente de me dévier de
l’idée que j’ai en tête par de la
bureaucratie ou des contrats, je
trouve toujours un moyen d’aller au
bout, même si cela implique des
décisions qui nous font perdre
beaucoup financièrement…
Pourquoi, depuis Watershed, cette
volonté de chaque fois mettre en
avant les visages ou silhouettes
des membres du groupe dans vos
visuels ?
Pour présenter le groupe de manière
plus amusante ! Je n’aime pas les
photos où nous posons en essayant
d’avoir l’air cool. Le heavy metal est
très imprégné de machisme, et c’est
une culture dont je fais aussi partie,
mais ce côté un peu idiot qui
consiste à faire le méchant (il
grimace), est vraiment dépassé…
Manowar l’a déjà fait en 1981 ! Je
me rappelle qu’une fois, pour éviter
ce genre de visuels trop ridicules,
j’ai voulu que nous fassions des
photos dans un pub, en train de
boire. Combiner travail et plaisir.
Juste des mecs dans un bar,
photographiés de manière très
naturelle. Le manager de notre label
a alors affirmé que c’était la photo
la plus merdique qu’il ait vue de sa
carrière. Nous avons tout de même
conservé le cliché. Nous, nous
buvons des coups avec les potes,
nous ne grimpons pas au sommet
des montagnes ! (rires) Y
57
 GENRE ALBUMS
. Doom stoner . Empress Rising (2014)
. Vænir (2015)
LE GROUPE . Rust (2017)
. Thomas Jäger (guitare) . No Comfort (2019)
. Mika Häkki (basse) ARTICLE RH
. Esben Willems (batterie) RH N°201
SITE INTERNET
www.monolord.com

De g. à d. : Thomas V Jäger,
Esben Willems & Mika Häkki
58

No Comfort, enregistré aux studios Let Them Wing, est le quatrième album des Suédois de Monolord, et vous ne
serez pas déçus du voyage. Cette fois, le groupe ne s’est pas autogéré : le disque a bénéficié d’une production
extérieure et vous y retrouverez ce fameux son lourd, lent, poisseux et mélodique : un doom stoner typique de
l’esprit live du trio et au sujet duquel le très sympathique batteur Esben Willems éclaire la lanterne de Rock Hard.
Plus sabbathien tu pleures, plus mastodonte tu meurs !
Rock Hard : L’une des principales
problématiques, à trois, réside dans
le fait de trouver un équilibre dans
le son. Pourrais-tu situer la
difficulté pour Monolord ?
Eben Willems : Question essentielle
pour nous. A trois, nous ne pouvons
rien cacher. En même temps, il faut
rendre la chose intéressante et il nous
faut donc faire attention à notre façon
de jouer. La feuille est vierge et la
tentation est grande de remplir
l’espace au maximum. Notre parti-pris,
en général, est de rester économes :
lenteur et mélodie. C’est le plus dur,
mais aussi le plus passionnant. Pour
y parvenir, tu dois être en pleine
possession de tes moyens, tout le temps.
En même temps, votre réussite
réside dans le fait que vous restez
sobres en tout : mélodicité,
technique. La surface est très
économe…
Que tu voies les choses ainsi est une
récompense. Faire ressentir une
richesse à travers la simplicité est la
chose la plus dure qui soit, alors que
la charge et la vitesse sont sans doute
les premières choses que tu apprends
(rires). J’ai 46 ans et je joue de la
batterie depuis l’âge de neuf ans. De
mon point de vue, jouer en tempo lent
est la chose la plus difficile qui soit.
J’admire l’économie de certains
batteurs. L’exemple le plus direct qui
me vienne à l’esprit est celui de Phil
Rudd (AC/DC). Ce qu’il fait est si pur...
Mais dans le même temps, presque
personne ne peut jouer comme lui !
Pareille aération dans le jeu est le
fruit d’une approche, c’est un travail
immense. Ce constat vaut d’ailleurs
pour n’importe quelle pratique
instrumentale, voire toute forme
d’expression, quel que soit le genre
dans lequel elles s’inscrivent. Une
très bonne musique hip hop, même si
j’écoute peu de choses de ce genre,
peut m’influencer. Les rythmiques hip
hop et la façon dont elles sont produites
peuvent être très inspirantes pour un
batteur. Mais l’influence que produit
le son dépasse la prestation de la
seule batterie. C’est davantage le groove
d’un groupe qui peut me séduire,
plus que le jeu de son batteur. Cette
globalité m’influencera. Par exemple,
j’aime beaucoup les productions de
Mark Lanegan. Ce dernier n’est pas
qu’un bon chanteur avec de bonnes
chansons. Ce qu’il fait témoigne d’un
sens de la production, du groove. Tout
le spectre de sa musique m’inspire.
La surface du son de Monolord a
beau avoir l’air « anti-technique »,
il faut avoir accumulé un certain
bagage pour parvenir à cette
économie-là, je me trompe ?
« Anti-technique » ? Merci, j’adore !
(grand rire) Eh oui, tu as raison :
nous parvenons à cette économie
grâce à l’expérience accumulée. Ce
que nous jouons n’est pas compliqué
Propos recueillis par Emmanuel Hennequin - Interview via Skype réalisée le 16 juillet 2019
techniquement, ce qui est compliqué,
c’est de le faire avec unité. Nous
pouvons mettre au point les bases
d’un morceau rapidement, mais
derrière, c’est tout le travail de
nuances qui est compliqué à achever.
Et c’est lui qui fera que le morceau
sera intéressant de A à Z.
Cette chimie passe sans doute par
un référentiel commun sur lequel
chaque musicien s’appuie pour faire
sentir à l’autre ce qu’il attend de lui
sur telle ou telle partie… Comment
cet échange se passe-t-il au sein de
Monolord ?
Exactement comme ce que tu
suggères. Lorsque nous travaillons
ensemble pour concrétiser les idées,
les uns s’adressent aux autres en
utilisant des termes qui suggèrent des
vibrations. Nous sommes dans un
désir commun : produire le son le plus
lourd possible. Ça, c’est la nature du
groupe. Lorsqu’ensuite, nous parlons
structures, couleurs, nos mots peuvent
prendre une dimension abstraite pour
faire entendre à l’autre. Ou alors, ça
devient parfois très concret, pratique,
du genre : « Bougeons les parties comme
ci, changeons la structure comme ça »,
J’ADMIRE L’ÉCONOMIE DE CERTAINS
BATTEURS. L’EXEMPLE LE PLUS DIRECT
QUI ME VIENNE À L’ESPRIT EST PHIL
RUDD (ESBEN WILLEMS)
ce genre de choses… Nous ne disons
jamais : « Tiens, là, il faudrait une
partie rock ou stoner », ce genre
d’horreurs. Nous serions dans ce cas à
la recherche d’une formule, et c’est la
chose la plus dangereuse de toutes en
musique. Quel ennui ! Alors, je suis
sûr que certains peuvent croire que
nous avons une formule, mais je peux
aussi garantir que c’est tout sauf ça.
Seuls deux critères valent pour que
nous validions un titre : qu’il nous
plaise à tous les trois et qu’il s’en
dégage un feeling Monolord. Il faut
que les choses sonnent à notre
manière, qu’elles nous représentent
avec fidélité.
Monolord, anciennement, a fait part
de la dimension instinctive de son
processus : il n’y a pas une seule
manière de faire pour le groupe. Est-
ce que, cette fois encore, pour No
Comfort, vous avez fonctionné ainsi ?
Je dirais qu’un élément fondamental
a changé : cette fois, nous avions un
producteur. Effrayant… (sourire).
Cette conscience que nous avions
d’avoir une autre personne dans la
pièce a complétement bouleversé le
processus. Pour ce qui est de
l’écriture, Thomas (Jäger/guitare) a
gardé les rênes sur les concoctions de
base, textes y compris, le groupe
prenant le relai au niveau des
arrangements ou de l’amélioration
de certains contenus textuels. Nous
discutons tout le temps, et ce que
Thomas amène est variable en
nature : ça peut être une démo
complètement achevée ou des bouts
de choses brutes à partir desquelles
il nous faut travailler. Lorsque le
producteur est arrivé, autrement dit
assez tard dans le processus, les
chansons étaient écrites et la pré-
production était déjà derrière nous.
Son rôle a donc été de nous apporter
des réponses et un regard en studio :
« Cette prise fonctionne, celle-là non »,
etc. Nous trois, dans Monolord,
sommes des êtres différents, mais ce
que nous avons en commun est
l’excitation et une forme d’agitation.
Faire les choses sempiternellement de
la même manière nous lasserait vite
et, sur ce coup, nous voulions faire
autrement. Non que nous éprouvions
des regrets face à nos anciennes
productions en autonomie, ce n’est
pas du tout ça. Par le passé, nous
enregistrions dans notre salle de
répétitions, pour parler simplement :
conditions spartiates, mais aussi
challenge. Il y a des avantages en
pareil contexte. Par exemple, tu n’as
pas à te soucier des limites de temps
que t’impose le studio : le matériel est
à toi, tu l’exploites autant que tu
veux, aussi longtemps que tu veux,
jusqu’à atteindre un résultat que tu
estimes probant. Nous l’avons fait,
et nous voulions cette fois nous
développer dans un contexte différent,
en espérant que ça pousse notre
créativité et notre jeu. En studio,
tu as une deadline à respecter et tu
dois délivrer la chose à temps, sans
quoi l’aventure se transforme en
cauchemar (rires). D’un autre côté,
tu as tout ce soutien qui te permet de
résoudre des problèmes matériel ou
techniques et qui te soulage de nombre
de lourdeurs… Entre les deux
options, il n’y a pas de meilleure
solution. Elles sont différentes,
c’est tout. Nos premiers albums ne
sonneraient pas comme ils sonnent
si nous n’avions pas recherché des
solutions par nous-mêmes. En chaque
contexte tu apprends, il n’y a rien à
regretter.
Il y a toujours, chez Monolord,
un témoignage sur la déliquescence
du monde…
Nous sommes témoins de la
dégradation de l’environnement, et
c’est un grand sujet. Par exemple,
avec le groupe, nous prenons l’avion
pour pouvoir tourner. Je hais voler,
mais je sais que nous ne pouvons
tourner sans en passer par là. Reste
que je m’y refuse totalement en
famille. Si nous devons nous déplacer,
nous le faisons par d’autres moyens :
les transports en commun, le train...
Nous essayons de développer une
responsabilité dans notre manière de
vivre, tout en ayant conscience que
nous sommes loin d’être parfaits.
Rêvons. Plus de déplacements :
l’année prochaine, tournée
hologramme américaine pour
Monolord !
(Rires) C’est parti – les négociations
sont lancées !
Le titre éponyme concluant l’album
est absolument fantastique. Est-il
né comme par enchantement ou en
avez-vous chié un peu ?
Il est composé de différentes parties
dont nous disposions et que nous
aimions, mais entre lesquelles il a
fallu créer du lien. Le principal travail
a été de créer ce lien, et ça a été dur.
Chercher, essayer, combiner,
recombiner. Il n’y a pas de formule
pour parvenir à ça.
Sur scène, tu portes parfois un
t-shirt griffé « Satanic Feminist ».
Qu’es-tu le plus ? Sataniste ou
féministe ?
(Il est mort de rire, mais se remet)
Je suis fondamentalement féministe.
Pour le reste, je suis athée ! Satan
est un symbole d’opposition à une
chrétienté établie. Je rejette la
religion, elle est un instrument
politique, un instrument de contrôle et
la cause de trop mauvaises choses
pour que j’accepte de subir son
influence. Mes deux compères
partagent cet avis. De nombreuses
personnes, plein d’hommes d’ailleurs,
sont venus me remercier de porter ce
t-shirt. Ils ne veulent pas être
assimilés à la misogynie. Ils sont là
par amour de la musique et expriment
un profond rejet du sexisme. Si jamais
il y a eu une époque où l’affichage
sexiste pouvait participer à une
intégration au monde metal, cette
époque est révolue. La musique sert à
créer du lien entre les gens. Le reste,
c’est de la connerie !
Si toi-même tu assistes à un
comportement sexiste, le sanctionnes-
tu ?
Oui, par l’opposition et le dialogue.
J’essaie d’entrer dans un échange,
de mettre en cause et de faire
comprendre. Mais le contexte ne le
permet pas toujours. Les gens sont
parfois aussi stupides que violents, et
la réponse ne te vient pas toujours de
manière aussi intelligente que tu le
voudrais. Dire à l’autre qu’il est un
trou du cul ne fera pas avancer la
cause. Y
59
 GENRE
. Heavy power metal
LE GROUPE
. Tony Kakko (chant)
. Henrik Klingenberg (claviers)
. Elias Viljanen (guitare)
. Pasi Kauppinen (basse)
. Tommy Portimo (batterie)
SITE INTERNET
www.sonataarctica.info
ALBUMS
. Ecliptica (1999)
. Silence (2001)
. Song Of Silence – Live In Tokyo
(live – 2002)
. Winterheart’s Guild (2003)
. Reckoning Night (2004)
. For The Sake Of Revenge (DVD –
2006)
. Unia (2007)
. The Days Of Grays (2009)
. Live In Finland (DVD – 2011)
. Stones Grow Her Name (2012)
. Pariah’s Child (2014)
. The Ninth Hour (2016)
. Talviyö (2019)

ARTICLES RH
RH N°02, 13, 20, 37, 56, 66, 91, 120,
121, 140, 141, 169 & 201

De g. à d. : Elias Viljanen, Henrik Klingenberg,

Tony Kakko, Tommy Portimo, Pasi Kauppinen

60

« Nous cherchions quelque chose qui colle avec la pochette, qui était déjà prête en amont. J’ai suggéré ce titre
en finnois et nous avons tous rigolé car c’est un mot très difficile à prononcer pour certaines personnes. Nous
sommes impatients d’entendre les Américains et les Italiens ! (rires) » La manière dont l’enthousiaste Tony Kakko
nous présente Talviyö (Ndt : « Nuits d’Hiver ») en dit long sur la décontraction qui anime Sonata Arctica au
moment de publier son dixième album.
Rock Hard : Ton look lors de votre
passage au Hellfest était une fois
encore très flashy. Au départ très
sobre, ton style vestimentaire est
devenu très barré à l’époque de
Reckoning Night (2004). Est-ce
un choix mûrement réfléchi ou une
chose arrivée plus ou moins par
hasard ?
Tony Kakko : C’est plutôt un choix.
Je me suis retrouvé à ne plus rien
avoir à porter et à chercher dans mes
affaires, jusqu’à trouver un lacet que
j’ai choisi d’enrouler autour de ma
jambe. Tu peux voir, dans le clip de
« Paid In Full », que je porte ce lacet
de chaussure à la main... comme un
gant ! (rires) J’improvise en fonction
de ce que j’ai à ma disposition. Pour
moi, il est important que nos concerts
soient uniques visuellement, et j’ai
choisi d’y contribuer en portant des
vêtements très colorés. C’est une
bonne chose si le public note que je
m’habille de manière étrange. Ainsi,
les gens parlent de nous et se
souviennent de notre nom ! (rires)
Je m’imaginais vous voir recourir à
une setlist axée sur vos hits lors de
ce Hellfest, mais vous avez fait un
choix plutôt risqué en proposant de
nombreux titres moins accrocheurs...
Oui, des morceaux plus « arty » !
Je suppose que nous essayons de
construire une image du groupe qui
s’inscrive davantage dans ce genre de
direction. A présent, nous ne sommes
plus nécessairement une formation à
« double pédale ». Il n’y a plus trop de
power metal sur nos albums car cette
phase de notre carrière est désormais
derrière nous. Bien sûr, cette batterie
frénétique sera toujours là, mais nous
avons grandi. Néanmoins, ce que
nous proposons aujourd’hui est plus
proche de ce que nous faisions
lorsque nous avons débuté en 1995
ou 96. Faire du power metal fut en
quelque sorte un heureux « accident »
car j’étais alors tombé amoureux de
Stratovarius et de ce style de
musique. Puis, nous avons signé un
contrat pour enregistrer trois albums
dans cette veine et sommes restés
coincés là-dedans. Nous aimions cela
car ce style nous a permis de nous
faire accepter au sein de la
communauté musicale alors que,
quelques années plus tôt, nous
n’étions qu’un groupe de démos.
Mais, au final, nous avons déjà
commencé à composer des chansons
différentes dès notre troisième album,
des choses plus proches de ce
qu’étaient nos premiers groupes,
Tricky Beans puis Tricky Means. Plus
tu vieillis, plus tu souhaites créer ton
art selon tes propres termes, faire la
musique que tu aimes vraiment. Je
détesterais que le groupe devienne
totalement bidon parce que nous
écririons des titres de power metal.
Ce serait une erreur et ça sonnerait
faux car nous le ferions pour de
mauvaises raisons. Sur ce nouvel
album, il n’y a que deux morceaux qui
rappellent nos débuts, « Message
From The Sun » et l’instrumental,
mais ce sont des choses qui me sont
venues naturellement et non de
manière forcée. C’est une part du son
de Sonata Arctica, mais le noyau du
groupe est différent...
Après t’être un peu forcé à
composer dans un style speed, Unia
(2007) a dû être une bouffée d’air
frais pour toi...
Oui, Unia a constitué une sorte de...
sur-réaction ! (rires) Le temps n’était
pas au beau fixe au sein du groupe et
j’envisageais de tout arrêter. Avec le
recul, nous aurions pu procéder de
manière très différente, mais les
choses sont ce qu’elles sont, nous ne
pouvons plus les changer. J’adore les
morceaux de cet album, mais nous
aurions peut-être pu passer davantage
de temps sur sa production, prendre
une petite pause pour avoir du
recul en nous allouant six mois
supplémentaires pour bosser dessus.
Peut-être, aussi, aurions-nous dû
recourir à un producteur car il y avait
FAIRE DU POWER METAL FUT
EN QUELQUE SORTE UN
HEUREUX « ACCIDENT »
(TONY KAKKO)
tant de choses dans ces morceaux
que certaines se sont perdues dans le
mix… Talviyö est le premier album
sur lequel nous nous sommes faits
seconder par un vrai producteur et
non un ingénieur du son/mixeur.
Nous avions besoin d’aide car nous
voulions un son plus organique,
plus proche de ce qu’est Sonata
Arctica en live. Nous sommes fiers de
nos précédents albums et du succès
qu’ils ont recueilli, mais les choses
n’ont pour ainsi dire jamais tourné
comme nous le souhaitions en matière
de production. Mikko Tegelman est
probablement la personne qui connaît
le mieux notre son de scène. Nous
avons enregistré batterie, basse et
guitares en conditions live et tu
peux entendre que l’ensemble sonne
plus dynamique, ce qui, je pense,
permettra à l’album de passer
l’épreuve du temps. Il n’y a par
ailleurs plus autant de changements
de tempi que par le passé, chose qui
nous faisait parfois perdre un peu le
fil de notre propos.
Au moment de composer, après tant
d’années de carrière, te faut-il
suivre un plan particulier afin de
respecter l’univers que tu as créé ?
La seule chose qui m’importe, c’est
Propos recueillis par Guillaume Fleury - Interview réalisée le 04 juillet 2019 à Paris
que le résultat final sonne comme du
Sonata Arctica. Après avoir un peu
dévié avec Unia et The Days Of Grays
(2009), nous avons effectué un retour
à un style plus classique à partir de
Pariah’s Child (2014), mais tous nos
albums proviennent de la même
veine, se raccrochent au même arbre.
Nous voulions proposer un disque qui
boucle cette nouvelle trilogie. Il
fallait qu’il soit un peu différent, mais
sans dériver trop loin ! (rires) Il faut
qu’on puisse reconnaître cette facette
que Sonata Arctica a eue durant
toute sa carrière, même après
l’aventure initiée par Unia. C’est le
seul objectif. Pour le reste, je laisse
les choses couler. Et lorsqu’un
morceau est trop dingue pour Sonata,
je le mets de côté pour mon projet
solo. Le titre « Who Failed The
Most », par exemple, est un emprunt
à ce fameux projet. J’avais déjà assez
de matériel de ce genre pour mon
travail solo, or c’était une
composition facilement transposable
au style de Sonata. J’ai juste accéléré
le tempo et réarrangé l’ensemble. Je
dispose à présent de plus de dix
morceaux pour mon projet parallèle,
qui sortira sûrement bientôt. Mais
avant de commencer l’enregistrement,
il me faut écrire les textes, ce qui est
toujours l’étape la plus difficile car je
suis fainéant ! La musique vient
facilement, j’adore composer, c’est le
meilleur truc au monde pour moi :
créer un truc nouveau qui te paraît
être la meilleure chose au monde,
même si ça ne l’est pas ! (rires)
Lorsque tu as la chair de poule en
composant, tu te dis que tu ne peux
pas être la seule personne sur cette
planète qui va ressentir cette
émotion...
As-tu lancé ton projet solo parce
que tu te sentais restreint par
Sonata Arctica ?
Oui ! Je voulais écrire des chansons
totalement différentes, notamment
en termes de chant. Disons que la
différence entre cet effort solo et
Sonata Arctica sera encore plus
grande que l’écart qui existe entre
Unia et le reste. Et personne ne veut
de ça dans Sonata ! (rires) Mes
morceaux solo sont en général plus
lents que ceux de mon groupe
principal, mais également plus heavy
et très mélodiques. C’est à la fois
beau et étrange, et il y a un concept
derrière. Si je porte ce projet sur les
planches, il faudra que nous ayons
des costumes ! J’ai déjà trouvé un
nom, depuis 2000 ou 2001, et dispose
déjà de quoi faire un album et demi.
Ce projet est cool dans le sens où il va
me permettre de vider mes tiroirs à
idées ! Si je trouve une bonne
mélodie, elle aura sa place dans ce
projet, peu importe ce que c’est. Je
suis totalement libre et vois ce travail
comme une thérapie. A tel point que
ce pourrait d’ailleurs être le nom du
projet, même mon idée est pour le
moment différente !
On peut sentir une touche très
finlandaise sur l’instrumental
« Ismo’s Got Good Reactors »...
C’est un morceau que j’ai écrit
comme un voyage autour du monde.
On y trouve d’ailleurs des influences
orientales. J’en ai composé la mélodie
principale quand j’avais 13 ou 14 ans.
Je me revois la jouer, gamin ! Je
n’utilise que les touches noires sur
cette idée, ce qui la rend facilement
mémorisable ! (rires) J’ai encore
quelques vieilles idées dans mes
tiroirs, mais celle-ci est la plus
ancienne dont je me souvienne !
Les problèmes écologiques prennent
une nouvelle fois une place
importante au sein de tes textes...
Oui, j’ai même écrit des paroles assez
politiques, notamment sur « Who
Failed The Most », « Storm The
Armada » et « Demon’s Cage », trois
titres qui sont connectés et traitent
du même sujet : qu’avons-nous fait à
la planète et quel monde allons-nous
léguer à nos enfants ? Sur « Who
Failed The Most », je pointe les
personnes qui se plaignent que les
hommes politiques se comportent
mal. Il est inutile de désigner ces
coupables car, au départ, qui sont
ceux qui leur ont donné le pouvoir de
détruire la planète ? La réponse est :
tout le monde ! Je crois que tu peux
très clairement deviner, en lisant les
paroles de Sonata Arctica, à quel
moment de notre carrière j’ai eu mes
enfants ! (rires) Leur arrivée dans ma
vie m’ayant fondamentalement
changé, je ne pouvais dès lors plus
aborder les mêmes thèmes car cela
m’a fait mûrir et me sentir plus
concerné. C’est une chose saine, pour
un homme de 44 ans, d’être conscient
des choses et d’en parler, de
transmettre des messages à d’autres
personnes qui sont peut-être moins
conscientes ou, au contraire, qui
partagent son point de vue. Peu
importe la dose d’égoïsme que tu
portes en toi, même si celle-ci est
infime, elle s’envole au moment où tu
as des enfants. Si je devais mourir
pour sauver l’un de mes enfants, je
me jetterais sous un train sans
réfléchir ! (rires) C’est la chose la plus
importante dans la vie, la raison pour
laquelle nous sommes là ! Y
61
 Reportage réalisé le 09 juillet 2019 à Grefrath (Allemagne).
Texte : Morgan Rivalin - Photos : Dirk Behlau (sauf précisé)

L’album symphonique promis par Blind Guardian depuis la fin du

siècle dernier ne mérite plus d’être qualifié d’Arlésienne : nous
l’avons écouté ! Si si, on vous le jure ! Plutôt que de nous dorer
la pilule sur une plage, et parce que nous ne reculons devant rien,
nous sommes allés en Allemagne EN PLEIN MOIS DE JUILLET
pour découvrir ce Legacy Of The Dark Lands hors-norme prévu
le 08 novembre. Récit.

MADE IN GERMANY
Krefeld. Ou plutôt, Grefrath. C’est ici, à
une quarantaine de minutes de route de
Düsseldorf, qu’est basé le quartier général
de Blind Guardian. Tout vrai fan de la
célèbre formation power metal allemande
laquelle on trouve les initiales « BG », elle
nous donne accès au Graal. En moins de
temps qu’il n’en faut pour le dire, le très
sympathisch Hansi Kürsch et son camarade
guitariste André Olbrich accueillent notre
petite délégation de médias européens
avec de grands sourires et nous font faire
le tour du propriétaire. Tiens, voilà une

a forcément déjà entendu parler des
Twilight Hall Studios, l’endroit où le
chanteur Hansi Kürsch et ses amis
enregistrent tout ou partie de leurs albums
depuis la fin des années 90. L’arrivée dans
la cour de cette ancienne usine qui abrite
d’autres locaux et entreprises nous fait
© M. Rivalin
bien jolie reproduction de Gollum ! Mais
quiconque connaît la passion de Blind
Guardian pour l’oeuvre de J.R.R. Tolkien ne
sera guère surpris. La pochette de Legacy
Of The Dark Lands, l’album que nous
sommes venus découvrir aujourd’hui,
s’inscrit d’ailleurs dans cette lignée fantasy.
Elle est l’oeuvre du Hongrois Gyula
Havancsák, stakhanoviste de l’illustration
métallique qui a déjà travaillé avec Accept,
Destruction, Annihilator ou encore Grave
Digger. Hansi Kürsch et André Olbrich sont
nos hôtes du jour, aucun autre membre de
Blind Guardian n’étant présent. Pourquoi ?
C’est très simple : nous sommes ici pour
Control room des Twilight Hall Studios
découvrir un album intégralement composé
par le duo. Entièrement symphonique et
dépourvu de guitare, de basse ou encore
de batterie, Legacy Of The Dark Lands ne
voit d’ailleurs pas le jour sous le nom de
Blind Guardian, mais de « Blind Guardian
Twilight Orchestra ». La nuance est
d’importance. Si Charlie Bauerfeind
(Helloween, Angra, etc.), le producteur
attitré du groupe, n’est pas présent, son
collaborateur ingénieur du son Thomas
Geiger (Avantasia, Rage, etc.) est là, affairé
derrière un ordinateur. Il peaufine quelques
détails pour que nous écoutions l’opus du
jour dans les meilleures conditions, mais il
travaille aussi sur des morceaux de Demons
& Wizards enregistrés dernièrement par
Hansi Kürsch et Jon Schaffer (Iced Earth)
entre les concerts donnés par le groupe
© M. Rivalin
aussi parce qu’il fallait une histoire
intéressante pour ficeler tous ces morceaux
accumulés durant plus d’une vingtaine
d’années. De nombreuses pistes, dont
certaines impliquaient des livres déjà
publiés, furent envisagées avant qu’Hansi
Kürsch ne se décide à contacter son auteur
préféré : l’écrivain allemand Markus Heitz
(les séries Les Nains, Ulldart : Les Temps
Sombres, etc.). La rencontre avec ce
dernier fut décisive, Hansi & André
découvrant à cette occasion que cet auteur
bien connu dans les cercles de littérature
horreur/sci-fi/fantasy était un grand fan de
Blind Guardian. Le groupe était notamment
sa musique de prédilection lorsque, plus
jeune, il enchaînait les parties de jeux de
rôle. Littéralement emballé par le projet,
Heitz, dont Kürsch loue « l’inventivité sans

aux quatre coins de l’Europe. Intéressant… limite », a immédiatement décidé de

mais revenons-en à Twilight Orchestra. concocter un roman dont l’histoire serait la
préquelle de celle narrée dans Legacy Of

LA JUNGLE DU LIVRE
The Dark Lands. Intitulé Die Dunklen Lande
tomber nez-à-nez avec la remorque d’un (La Terre Sombre), le livre en question,
autre musicien professionnel du coin : « DJ situé en 1629, met en scène Nicolas,
Diddi ». N’hésitez pas à le solliciter pour Si cet album symphonique promis depuis la mercenaire de la Guerre de Trente Ans
mettre une ambiance de folie ! Les choses fin des 90’s a mis tant de temps à voir le auréolé de mystère. Huit mois après la
© M. Rivalin

(vraiment) sérieuses commencent lorsque jour, c’est avant tout parce que les sortie du livre en mars dernier, Blind
nous franchissons une imposante porte. compères ont mis de côté des idées de Guardian Twilight Orchestra va donc livrer
Flanquée d’une plaque en cuivre sur compositions au fur et à mesure. Mais c’est une suite à cette histoire ô combien

De g. à d. : Charlie Bauerfeind, Thomas Geiger & Hansi Kürsch André Olbrich

62
 Le FILMHarmonic Orchestra Prague
épique. Voilà une affaire rondement
menée, mais il y eût fort à faire avant de
toucher au but.
PLUS D’UNE CORDE...
Qui dit « album symphonique » dit tout
d’abord… « orchestre symphonique ». Ici,
pas de vulgaires samples et autres artifices
synthétiques pour donner vie à cet album
hors-norme. Une nouvelle fois, le chef
d’orchestre Adam Klemens, déjà sollicité
par Blind Guardian sur Beyond The Red
Mirror (2015), fut l’homme de la situation.
Le FILMharmonic Orchestra Prague et ses
chorales mixtes ont été mis à contribution.
Hansi au travail aux Twilight Hall Studios (mars 2019)
Et plutôt deux fois qu’une. « J’ai parfois eu
l’impression d’enregistrer dix albums en
un ! », nous dit Thomas Geiger. « A la fin du
disque, sur « A New Beginning », nous avons
eu recours à plusieurs enregistrements
distincts de l’orchestre et de la chorale que
En studio à Prague (janvier 2019)
nous avons
superposés. Avant
cela, des mixages
stéréo de chaque
enregistrement ont
dû être effectués,
sans quoi notre
ordinateur se serait
sans doute mis à
fumer ! », « blague » l’ingénieur du son qui
estime que, sur ce final indéniablement
grandiloquent, on entend parfois pas
moins de 500 pistes simultanées (!). Des
acteurs britanniques, dirigés par Hansi
Kürsch et enregistrés à Londres, ont été
enrôlés pour les passages narratifs des
douze interludes du disque. Souci du détail
oblige, les musiciens ont achevé de donner
vie à ces interludes en les diffusant dans
différentes pièces d’un château teuton.
Afin que l’immersion soit totale,
particulièrement lors d’une écoute au
casque, un dispositif d’enregistrement
binaural a été utilisé afin de recapturer les
voix in situ en les accompagnant parfois de
bruitages ad hoc. Vous l’avez compris, si
Legacy Of The Dark Lands a pris beaucoup
de temps avant de voir le jour, c’est
notamment parce que les musiciens ne
voulaient pas transiger sur les moyens mis
en œuvre pour donner vie à ce qu’ils
nomment à l’unisson « leur plus grand rêve
créatif ». Voilà qui inspire forcément un
mot : « respect » !
RÉACTION À CHAUD
Cela ne vous surprendra sans doute pas :
Legacy Of The Dark Lands est une
expérience intense. Nous n’avons pu
l’écouter qu’une fois, ce qui est clairement
insuffisant pour domestiquer cet immense
plat de résistance épique et grandiloquent
au possible. Tout au long du disque, écouté
religieusement dans les conditions
optimales offertes par les Twilight Hall
LE TRACK-LISTING
Studios, on a constamment l’impression
d’écouter la bande originale d’un film qui,
pourtant, n’existe pas. C’est bien d’un
blockbuster métallique qu’il s’agit, au sein 01. 1618 Ouverture
duquel Hansi Kürsch brille de mille feux. 02. The Gathering
A la première écoute, voilà le véritable 03. War Feeds War
point fort qui saute aux yeux : jamais sans 04. Comets And Prophecies
doute le chant magnétique du frontman à 05. Dark Cloud’s Rising
la voix d’or n’avait été aussi bien mis en 06. The Ritual
valeur. L’absence des instruments de 07. In The Underworld
rigueur dans les sphères metal permet à 08. A Secret Society
ses vocaux et aux chœurs surpuissants de 09. The Great Ordeal
prendre une ampleur sans précédent. 10. Bez
Empli d’émotion et de rage (« War Feeds 11. In The Red Dwarf’s Tower
War »), le chant d’Hansi Kürsch confine ici 12. Into The Battle
au grand art. Ce n’est clairement pas la 13. Treason
climatisation du studio qui nous donne des
14. Between The Realms
frissons, mais ces intenses vibratos,
trémolos et autres passages délicatement
15. Point Of No Return
harmonisés. Etonnant : le travail d’orfèvre 16. The White Horseman
réalisé sur les vocaux, parfois chantés en 17. Nephilim
canons, peut évoquer l’héritage du rock 18. Trial And Coronation
progressif à la Yes (« Dark Cloud’s Rising »), 19. Harvester Of Souls
et même un certain Queen (« In The 20. Conquest Is Over
Underworld »). Quiconque a déjà assisté à 21. This Storm
un concert de musique classique mettant 22. The Great Assault
en scène un orchestre symphonique ou, 23. Beyond The Wall
mieux encore, philharmonique, sait que 24. A New Beginning
leur dynamique sans pareille offre un
résultat indéniablement « heavy ». C’est ce Formats :
qu’on retrouve ici, même si – à la première 2 CD Digipak
écoute –, la surenchère d’informations 2 LP Gatefold (différentes couleurs)
livrées en bataille semble parfois 3 CD Comic book (album « normal »,
contreproductive. Les interludes instrumental & version sans interludes)
systématiques situés entre chaque morceau 4 CD Comic book (album « normal »,
cassent également un peu le rythme, mais
instrumental, version sans interludes
une version dépourvue de ces passages
narratifs sera proposée dans certains
& audiobook)
packages (Cf. encadré). Sur ce, rendez-vous 5 LP BOX (album « normal » sur 2
très bientôt dans nos pages pour en savoir LP, instrumental sur 2 LP & audio-
encore plus en compagnie de Herr Hansi ! Y book LP)
63
 Propos recueillis par Charlélie Arnaud - Entretiens téléphoniques réalisés le 13 juin 2019
Cette interview n'est pas du tout ce que nous aurions souhaité qu'elle soit. Quinze minutes avec Mick Thomson (qui n'est
pas l'interlocuteur le plus bavard du groupe), dix minutes avec Corey Taylor, et une batterie de sujets à éviter. Pas le droit
de parler du départ de Chris Fehn, pas le droit aux questions privées (ce qui peut se comprendre), pas le droit aux
questions sur les textes du nouvel album ! Nous sommes bien loin de l'entretien de deux heures à bâtons rompus que
Clown nous avait accordé en 2017. C'est d'autant plus dommage que We Are Not Your Kind est un disque qui fera date
dans l'histoire du groupe et que nous aurions vraiment voulu « marquer le coup ». Malheureusement, quand on n'a pas ce
qu'on aime, il faut aimer ce qu'on a.
l’Europe aura son lot de dates, bien ans. Nous ne nous sommes pas enfermés que certains membres doivent être
MICK THOMSON évidemment. Disons que là, la
possibilité de faire « équipe » avec le
avec une feuille blanche pour écrire tout
d’une traite. Les chansons sont venues
davantage impliqués que d’autres
dans la composition des chansons.
Hellfest qui est un événement européen au fur et à mesure durant ce très long Y a-t-il une formule ou une « équipe
Rock Hard : Dans quelques jours, le majeur, tombait particulièrement bien, laps de temps, un peu comme si nous d’écriture » au sein de Slipknot ?
Knotfest posera ses valises à Clisson le timing était le bon. avions monté un puzzle pendant C’est très variable, il n’y a pas
(Ndlr : entretien réalisé le 13 juin) plusieurs années. Nous sommes donc vraiment de constante. Nous faisons
et il s’agit d’une exclusivité Ce nouvel album passe par des passés par des vibrations très tous nos petites démos avec Pro Tools,
européenne. Avez-vous prévu, à émotions et des couleurs musicales différentes, bien évidemment. Seuls que nous faisons ensuite parvenir aux
terme, d’amener le festival dans très diverses. Quel était l’état d’esprit quelques titres ont été écrits en studio autres. Il peut se passer de longs mois
d’autres villes du Vieux Continent ? général du groupe durant son écriture ? durant l’enregistrement de l’album, en sans qu’on ne reçoive rien de personne
Mick Thomson : Peut-être, mais pas Notre état d’esprit a lui aussi été très janvier, février et mars derniers. et, soudain, la même semaine, quatre
dans l’immédiat. Après la sortie de changeant puisque l’écriture de l’album d’entre nous vont envoyer des idées à
l’album, nous allons nous lancer dans s’est étalée sur une très longue période : Vos titres sont toujours crédités au tout le monde. C’est vraiment
une vraie tournée en tête d’affiche et certains des titres ont pas loin de deux nom du groupe, mais il est évident aléatoire, aussi aléatoire que peut

64
 De g. à d. : Haut : Jim Root, Corey Taylor, Avec le nombre d’ambiances brassé
Alessandro Venturella, Craig Jones, Mick Thomson par l’album, n’est-il pas compliqué
Bas : Sid Wilson, Jay Weinberg, Clown, de trouver une réelle cohérence en
"The New Guy" termes de son et de production, une
définition sonore qui convienne
aussi bien aux passages violents
qu’à ceux plus « étranges », pour
reprendre ton terme ?
Nous avons le gros avantage de bosser
toujours avec les mêmes personnes,
notamment Greg Fidelman. Bien se
connaître rend les choses plus faciles.
Un producteur dans le monde du
metal a un rôle très différent du rôle
d’un producteur dans la pop, qui,
généralement, écrit les titres lui-même
et les donne aux musiciens afin qu’ils
apprennent à les jouer. Greg bosse
avec nous depuis Vol.3 (2004) et,
à ce titre, il sait exactement à quoi
s’attendre de notre part. Les
différences d’ambiances dans nos
chansons ne datent pas d’hier, il sait
exactement comment le groupe doit
sonner, c’est très confortable. Ainsi,
nous n’avons pas besoin à chaque
album de nous adapter à la
personnalité d’un nouveau producteur,
qui peut influer grandement sur le
résultat final.
Vois-tu des similitudes entre cet
album et certains de vos disques
précédents ?
Pas réellement. J’aime à penser que
chacun de nos disques est différent
de celui d’avant. Les vies évoluent.
Cet album arrive cinq ans après le
précédent, et il s’en passe des choses,
en cinq ans. Nous n’aurions pas pu
écrire certaines des nouvelles
chansons il y a quelques années car
elles sont le résultat du temps et de la
vie. Néanmoins, nous parvenons
toujours à maintenir une certaine
unité dans notre œuvre, nous ne
changeons pas non plus totalement
d’orientation musicale car nos
personnalités sont toujours
fondamentalement les mêmes et
que notre musique les reflète.
Contrairement aux masques de Corey
ou de Clown, le tien évolue assez peu
au fil des années. Tiens-tu à
conserver cette identité visuelle la
plus proche possible de celle
d’origine ?
Il est vrai que lorsque nous avons
l’être l’inspiration... C’est d’ailleurs travaillé sur ces nouveaux masques,
pour cela que cet album est aussi j’ai souhaité me rapprocher de celui
versatile : certains d’entre nous ont que j’avais entre 2003 et 2013.
vécu des choses assez violentes qui J’aurais même carrément pu reprendre
ont influé sur leur écriture, d’autres le même s’il avait été en meilleur état,
ont écrit des choses plus calmes, mais il était ruiné et je n’en avais pas
parfois étranges, rampantes... d’exemplaire supplémentaire. Celui
Reproduire une formule serait une très que j’avais fait faire pour l’album
mauvaise idée puisqu’elle mènerait précédent n’avait pas été une grande
indubitablement le groupe à se répéter réussite. Je me suis rapidement aperçu
à l’infini. en tournée qu’il était très chiant à
GENRE . Alessandro Venturella (basse)
ARTICLES RH
. Neo metal . Jay Weinberg (batterie)
RH N°2, 8, 16, 30, 33, 37, 50, 61,
79, 82, 149, 182 & 201
LE GROUPE SITE INTERNET
. Corey Taylor (chant) www.slipknot1.com
. Jim Root (guitare)
. ALBUMS
Mick Thomson (guitare) . Slipknot (1999)
. Shawn « Clown » Crahan . Iowa (2001)
(percussions) . Vol.3 : (The Subliminal Verses) (2004)
. . 9.0 : Live (live – 2005)
« The New Guy » (percussions) . All Hope Is Gone (2008)
. Craig « 133 » Jones (claviers) . .5 : The Gray Chapter (2014)
. Day Of The Gusano : Live In Mexico
. Sid Wilson (platines) (live – 2017)
. We Are Not Your Kind (2019)
porter. Je suis donc revenu à la base.
Je sais que certains d’entre nous
aiment changer d’identité visuelle,
mais ce n’est pas mon cas. C’est aussi
une façon de dire : « Je suis qui je suis,
et personne ne me fera changer ! ».
COREY TAYLOR
Rock Hard : Ce nouvel album amène
des sonorités inédites dans l’histoire
du groupe.
Corey Taylor : Je suis particulièrement
fier que nous ayons réussi à innover
autant sur cet album, à nous laisser
aller à autant d’expérimentations, tout
en conservant l’agressivité qui est la
base même de Slipknot. Pour ma part,
je retrouve sur ce disque des aspects
propres à chacun de nos albums
précédents. Certains titres sont
violents comme du Iowa (2001),
certaines ambiances ou encore
l’omniprésence de la mélodie
ramènent à Vol.3 (2004). Mais
globalement, le fait que nous ayons
expérimenté autant fait que We Are
Not Your Kind est effectivement unique
au sein de notre carrière.
Ta performance vocale sur un titre
comme « Nero Forte » est tout
simplement bluffante. Penses-tu, par
Certains journalistes ou prétendus
tels n'ont aucun respect, surtout
aux Etats-Unis (Corey Taylor)
le passé, avoir manqué de confiance
en toi pour ne pas avoir tenté ce
genre de chose plus tôt ?
C’est une bonne question. Je pense
que, par le passé, nous avions surtout
tellement de colère en nous qu’il était
inenvisageable de sonner autrement
que comme nous l’avons fait. A l’époque
des deux premiers albums notamment,
proposer des choses bien plus
mélodiques était complètement exclu.
C’était pour nous une question de vie
ou de mort d’expulser cette rage et
cette colère. Pour ce nouvel album,
nous nous sommes dit : « Ça, ok, c’est
bon, on l’a déjà fait », et nous avons
cherché à intégrer de nouvelles
couleurs et à élargir notre palette. Je
ne pense pas qu’on puisse réellement
mettre ça sur le compte d’un regain de
confiance, mais plutôt sur la liberté
que nous nous sommes laissés d’être
pleinement nous-mêmes à l’instant T.
Au final, la démarche est la même
depuis le début sur chacun de nos
disques : nous n’en faisons qu’à notre
tête et les albums sont des
photographies du groupe à un
moment précis de nos vies.
As-tu écrit l’intégralité des paroles
de l’album ?
J’ai tout écrit, excepté « My Pain »
qui est le fruit d’une collaboration
entre Clown et moi.
Apportes-tu également des idées en
ce qui concerne la musique ?
Il m’arrive d’écrire de la musique de
ci-de là, mais en toute honnêteté,
sur cet album, je n’y ai absolument pas
participé. Jim (Root/guitare) et Clown
ont fait tout le boulot et ils ont sacrément
assuré. Je me suis chargé des textes,
des mélodies vocales, et j’ai également
fait beaucoup d’arrangements. La
majorité des structures des chansons
vient de moi car il est plus facile pour
un chanteur d’avoir une « vision » de la
façon dont un morceau doit s’articuler
en fonction de la matière première –
les riffs – qu’on lui fournit et des
textes qui vont se poser dessus.
J’ai déjà abordé cette question avec
Mick, mais je voudrais ton avis :
lorsqu’un disque comporte autant
d’éléments aussi divers, est-il facile
en termes de son d’en faire un tout
qui soit cohérent ?
Je pense que c’est le son des guitares
de Mick et de Jim qui est le garant de
cette cohérence, justement. Lorsque tu
écoutes les titres de ce nouvel album,
qui sont effectivement très différents les
uns des autres, tu t’aperçois que les
guitares font office de dénominateur
commun et permettent de donner une
unité à l’ensemble du disque.
Il semble y avoir eu controverse
au sein-même de votre fanbase
américaine autour de ton nouveau
masque. Peux-tu nous en dire plus ?
(Rires) Les gens ont toujours détesté
mes masques de toute façon. Si tu
veux mon avis, les gens n’ont surtout
pas de gros problèmes dans leur vie
pour passer autant de temps à
débattre de mon nouveau masque...
On ne va en plus leur demander de
comprendre de l’art conceptuel ! Très
honnêtement, je me fous de savoir si
cela plaît ou pas, puisque c’est MON
idée et que c’est ce que JE veux faire.
La liberté artistique et la créativité
sont un petit peu à la base de ce que
nous faisons, il me semble... En tout
cas, c’est ce que moi j’ai toujours
préféré dans ce groupe.
Ce n’est pas la première fois que je
me vois remettre une « liste de
recommandations » à propos des
questions que je peux ou ne peux
pas vous poser. Est-ce pour éviter
que certains journalistes focalisent
sur votre vie privée ?
Tout à fait. Si tu ne mets pas de garde-
fou, les gens vont s’intéresser à tout et
à n’importe quoi sans même, peut-être,
te poser la moindre question à propos
de ta musique. C’est le prix à payer
lorsque tu joues dans un groupe qui
rencontre un grand succès et qu’il y a
certaines... tribulations dans ta vie
personnelle. Certains journalistes ou
prétendus tels n’ont aucun respect,
surtout aux Etats-Unis. L’obscénité ne
leur fait pas peur, au contraire,
puisque ça fait de l’audience. Ce qui ne
nous fait qu’apprécier davantage le
travail des gens qui s’intéressent
réellement à la musique et pas aux
ragots de fond de poubelle. Y
65
 Propos recueillis par Stéphane Auzilleau - Interview réalisée à le 12 juillet 2019 à Saint-Julien-en-Genevois
Lorsque nous avons appris que le Michael Schenker Fest devait se produire au festival Guitare en Scène, nous avons fait des
pieds et des mains pour décrocher une interview avec Graham Bonnet, l’un des chanteurs embarqués dans cette aventure. Il faut
dire que ce grand Monsieur du hard rock, aujourd’hui âgé de près de 72 ans, est plus actif que jamais et vient de reformer son
groupe mythique, Alcatrazz, qui avait notamment, en l’espace de trois ans (entre 1983 à 1985), révélé au public metal les talents
d’Yngwie Malmsteen et de Steve Vai. Excusez du peu ! L’occasion aussi d’évoquer avec lui un moment de l’histoire de Rainbow,
puisque Graham chantait sur le Down To Earth (1979) de la bande à Blackmore sorti il y a tout juste quarante ans. Voilà donc
une interview qui a pris la forme d’un moment de partage particulièrement sympathique et agréable avec un artiste sincère.

Rock Hard : Pourquoi avoir décidé pas sur la route. Je travaille à la fois Notre claviériste était toujours en faisaient des soli de guitare, de
de reformer Alcatrazz aujourd’hui ? sur des textes et des mélodies vocales, contact avec lui, mais de mon côté, claviers, de batterie, et que, pendant
Graham Bonnet : La plupart des mais nous ne pourrons nous poser cela faisait des années que je ce temps-là, le chanteur pouvait se
gens connaissent la musique et les réellement qu’après la tournée. n’avais pas parlé à Steve. En fait, reposer. Mais ce n’est plus le cas.
morceaux d’Alacatrazz, mais ne Je dirais que nous avons quatre ou je ne reste pas vraiment en contact Nous avons enchaîné les morceaux
savent pas qui est Graham Bonnet. cinq titres finalisés. Nous allons avec les anciens membres de mes sans temps morts.
Je l’ai réalisé lorsque nous avons enregistrer les vocaux en premier, groupes, et eux ne le font pas non
publié des albums ou réalisé des et les musiciens enregistreront leurs plus (rires). Pour moi, une fois Est-ce un choix également lié au
tournées sous le nom de Graham parties respectives ensuite. Je le que tu es parti, tu es parti, tu fait que le premier album d‘Alcatrazz
Bonnet Band. Alors, avec l’accord sens bien. Joe Stump sera le comprends ? La dernière fois que reste le plus populaire du groupe,
des anciens membres d’Alcatrazz, guitariste du groupe, mais nous nous nous sommes parlés remonte en particulier au Japon ?
j’ai proposé de reformer le groupe, aurons également quelques invités au moins à dix ans. Il m’avait Oui, absolument.
histoire de nous donner à tous spéciaux, qui contribuent à envoyé quelques idées de travail,
davantage de visibilité. l’écriture des morceaux. mais nous n’avions pas réellement Et toi, as-tu un album préféré
réactivé notre collaboration. Mais d’Alcatrazz ?
Tu avais déjà fait une première Peux-tu nous révéler les noms de cette fois-ci, c’est différent, car je Pour moi, No Parole From Rock’n’Roll
tentative de reformation en 2008, ces invités ? trouvais intéressant que cette (1984) est plus une démo, un galop
non ? Oui, bien sûr. Contribuent à l’album nouvelle version d’Alcatrazz soit d’essai en quelque sorte, qu’un
Oui, et pour être honnête, cela véritable album. Je voulais à
n’avait pas marché, tout simplement
parce que le groupe que j’avais
J’AI BIENTÔT 72 ANS. JAMAIS JE l’époque un groupe qui sonne comme
Rainbow, avec des claviers, un
constitué ne sonnait pas comme
Alcatrazz ; et non parce que les
N’AURAIS PENSÉ ÊTRE ENCORE SUR guitariste hors norme et des
chansons originales. Cet album était
autres membres originaux n’en
avaient pas été informés, comme j’ai
SCÈNE AUJOURD’HUI une sorte de test, mais lorsqu’il a
été certifié Or au Japon, je me suis
pu le lire ici ou là. Aujourd’hui, les
conditions sont réunies, notamment
(GRAHAM BONNET) dit que nous allions dans la bonne
direction. Le public s’est aussi
grâce au guitariste Joe Stump. Chris Impellitteri (Ndlr : avec qui aussi alimentée par la contribution focalisé sur ce nouveau prodige de
Joe est un musicien incroyable, Graham a chanté au sein d’Impellitteri), d’anciens guitaristes avec lesquels la guitare qu’était Yngwie
capable de nous faire sonner comme Bob Kulick (Ndlr : guitariste de j’avais travaillé, y compris, d’ailleurs, Malmsteen, et je savais que ce
Alcatrazz tout en ajoutant une touche Blackthorne, autre groupe auquel a si ce n’était pas sous le nom dernier allait très rapidement nous
de modernité. Avec un tel guitariste, participé Graham), Steve Vai et Dario Alcatrazz. C’est le cas de Bob quitter pour voler de ses propres
c’est le moment de le faire ! Mollo (Ndlr : guitariste avec lequel Kulick et de Chris Impellitteri. ailes. C’était une évidence pour moi
Graham a collaboré au sein d’Ezoo). et nous l’avons vu venir. Yngwie est
Vas-tu continuer en parallèle avec Nous avons aussi travaillé avec un Alcatrazz a donné quatre concerts donc parti, et c’est l’un des
le Graham Bonnet Band ? nouveau prodige japonais de la au Japon en mai dernier. Quand membres du groupe qui a proposé
Non, je vais me concentrer sur guitare, Nozomu Wakai, qui, fin mai, on regarde les setlists de ces d’auditionner Steve Vai, qu’il avait
Alcatrazz. a joué avec nous sur scène à Tokyo shows, on est étonné de voir que vu sur scène avec Frank Zappa.
le titre « Lost In Hollywood » de vous n’avez interprété que des Steve Vai lui-même n’était pas
Dans une interview récente, tu Rainbow. Il est vraiment doué. Il est morceaux du premier album, et vraiment convaincu car il nous a dit
disais que vous travailliez déjà très jeune, mais je suis convaincu aucun des deux suivants. Pour qu’il n’était pas certain d’avoir
sur de nouveaux morceaux. Peux- que c’est une future star au Japon. quelle raison ? l’esprit rock (rires). Avant l’audition,
tu nous dire où vous en êtes Le public nippon voulait vraiment on aurait dit un poisson hors de son
exactement ? Etais-tu toujours en contact avec entendre le premier album dans son bocal. Mais lorsqu’il a commencé à
Nous composons et enregistrons ces musiciens ? Steve Vai, par intégralité. Et en additionnant jouer, nous avons été estomaqués !
pendant les moments où je ne suis exemple ? ensuite des titres de mon répertoire Il était si différent ! Il ne partait pas
solo et de mes autres dans une seule direction, mais était
GENRE SITE INTERNET ARTICLES RH groupes, comme Rainbow ou capable d’explorer de nouveaux
. Hard rock MSG, nous arrivions déjà à territoires, tout en sachant aussi
www.alcatrazzofficial.com RH N°18 & 201
LE GROUPE plus de 25 morceaux. Il n’est être direct. J’ai adoré cela car il a
ALBUMS pas raisonnable d’en jouer apporté beaucoup d’idées et de
. Graham Bonnet (chant)
. No Parole From Rock’n’Roll (1984) plus, notamment pour le fraîcheur au groupe avec son sens
. Joe Stump (guitare) . No Parole From Rock’n’Roll –Live
Sentence (live – 1985) batteur et moi. Nous y incroyable de la mélodie. Du coup,
. Jimmy Waldo (claviers) . Disturbing The Peace (1985) sommes arrivés, mais c’est Disturbing The Peace (1985),
. Beth-Ami Heavenstone (basse) . Dangerous Games (1986)
. Parole Denied – Tokyo 2017 (live – 2018) très physique. Il ne faut pas enregistré avec lui, est vraiment
. Mark Benquechea (batterie) . Live In Japan 84 – Complete Edition oublier qu’avant, les groupes mon album préféré d’Alcatrazz.
(live – 2018)

66
 De g. à d. : Graham Bonnet,
Jimmy Waldo, Beth-Ami Heavenstone,
Joe Stump, & Mark Benquechea
 Et le troisième, Dangerous
Games (1986) ?
A l’époque, on nous a demandé de
faire des reprises et de composer
des chansons simples qui pouvaient
passer en radio. On m’a aussi
imposé d’écrire des paroles pas trop
intellectuelles afin que les gens
puissent les comprendre dès la
première écoute, sans avoir à se
demander de quoi je parlais. Sauf
que cela ne me correspondait pas.
Dès l’enregistrement de l’album,
nous avons su que nous prenions
une mauvaise direction et que ce
disque sonnerait la fin du groupe.
Danny Johnson est un super
guitariste, avec une culture plus
rhythm and blues, ce qui était cool.
Mais notre manager nous a
demandé de composer des tubes.
Nous avons même fait une reprise
de mon premier single avec les
Marbles, « Only One Woman », ce
qui, pour le coup, était plaisant car
j’adore cette chanson. Et Danny
la jouait très bien. C’est un
excellent guitariste, à tel
point qu’Eddie Van Halen en
personne a fait appel à lui
pour enregistrer pour un
groupe de filles avec lequel il
travaillait. C’est dommage,
mais nous n’avons pas pu
conserver notre identité, et je
n’étais plus le maître à bord.
Peut-être que cela ne se
serait pas passé ainsi si Steve
Vai était resté avec nous ?
Mais il était impossible pour
Steve de refuser l’offre qui lui
était faite par une star comme
David Lee Roth, notamment
financièrement. Il a fait une
très belle carrière, et j’en suis
ravi. Tu peux le tourner dans
tous les sens, mais à un
moment, l’aspect financier est
important et oriente tes
choix.
Tu es sans doute le chanteur
de rock qui a joué avec le
plus grand nombre de stars de la
guitare…
Peut-être, mais celui à qui je dois
tout cela est avant tout Ritchie
Blackmore. C’est lui qui m’a donné,
en 1979, la chance de découvrir ce
milieu du rock et de me faire
connaître, ce qui a orienté le reste
de ma carrière pendant les quarante
années suivantes. Rainbow était un
gros groupe à l’époque. Ce qui s’est
passé après la tournée Down To
Earth, ou plus exactement ce qui ne
s’est justement pas passé, est assez
étrange en fait. Quelques semaines
après avoir assuré la tête d’affiche
du festival de Donington en août
1980, le groupe était censé
travailler en studio, au Danemark,
sur un nouvel album, mais l’ambiance
était étonnante. Cozy Powell
(batterie) a quitté les sessions,
et du même coup Rainbow, car il
s’ennuyait. Don Airey (claviers) a
suivi, en me disant qu’il rentrait
chez lui car il ne se passait rien et
qu’il avait l’impression que le
groupe n’allait nulle part : pas de
nouvelles chansons, un Ritchie
68
Blackmore qui venait de temps en
temps en studio, mais sans prévenir
les autres de sa présence ou de son
absence, etc. Roger Glover était là
tous les jours, et sachant son rôle
pivot, notamment du fait de sa
relation ancienne avec Ritchie
Blackmore, Don Airey lui demandait
ce qu’il devait faire. Ce à quoi Roger
répondait parfois : « Aujourd’hui, je
vous propose que nous jouions un
morceau des Beatles ». Qu’est-ce que
cela voulait dire ? (rires) Et parfois,
Ritchie se pointait, jouait avec ses
pédales d’effet, puis décidait que
c’était une belle journée pour aller
se promener et il disparaissait sans
dire quoi que ce soit d’autre. Cozy
est parti rejoindre Whitesnake, et
du coup, je suis moi aussi rentré
chez moi. Ils m’ont appelé ensuite
en me demandant où j’étais car ils
voulaient enregistrer un titre.
Jusqu’alors, je n’avais pu enregistrer
qu’un seul morceau, composé par
Russ Ballard (Ndlr : « I Surrender »,
qui figure sur Difficult To Cure avec
Joe Lynn Turner au chant). J’ai donc
répondu que je réfléchissais, mais
que j’envisageais moi aussi de
quitter le groupe. Ritchie m’a alors
fait cette proposition ahurissante de
recruter un second chanteur afin
que je puisse interpréter les titres
que je préférais pendant que le
nouveau chanteur se chargerait des
autres. J’ai décliné car cela ne
correspondait pas à l’idée que je me
faisais de mon futur dans Rainbow.
J’ai donc quitté Rainbow pour
former Alcatrazz, après un passage
au sein de MSG.
Tu regrettes cette décision d’avoir
quitté Rainbow ?
Bien sûr ! J’aurais dû rester plus
longtemps dans ce groupe. J’ai
manqué d’humilité sur ce coup-là.
Il faut dire que j’ai un égo assez
important, ce qui me joue parfois
des tours. Je pensais que je serais
capable de monter mon propre
groupe. Ce que j’ai fait, certes, mais
Alcatrazz n’a jamais atteint le
succès et la popularité de Rainbow.
Même si cela aurait pu être pire.
Down To Earth de Rainbow est
sorti il y a exactement quarante
ans, en juillet 1979. Si Ritchie
t’appelle demain pour te proposer
de participer à un concert spécial
célébrant cet anniversaire, quelle
sera ta réaction ?
Cela n’arrivera pas… Ritchie est
quelqu’un de particulier, et il n’a
gardé strictement aucun contact
avec les personnes qui ont quitté ses
groupes ; ce qui est compréhensible,
puisque, comme je l’ai indiqué, je
suis moi-même un peu comme ça.
Mais Ritchie est bien plus déterminé
que moi dans l’application de ce
principe !
Ce qui veut dire que tu n’as pas
reparlé à Ritchie depuis plus de
35 ans ?
Non, effectivement. La dernière fois
que nous nous sommes parlé, c’est
quand je lui ai dit que je quittais
Rainbow, en 1980. J’ai ensuite eu
quelques échanges avec son
management, mais uniquement pour
des questions d’argent car je n’avais
pas touché ce qui m’était dû. Cela
s’était déjà produit avec Ronnie
(Ndlr : James Dio, premier chanteur de
Rainbow), qui m’avait conseillé
d’être vigilant. Mais si Ritchie était
resté en contact avec moi, bien sûr
que j’aurais été intéressé par une
célébration de Down To Earth.
Mais il me semble que, de toute
façon, Rainbow ne donne plus de
concerts…
Si, il arrive quand même que le
groupe donne ponctuellement des
petites séries de shows…
Certes, mais pour moi, ce sont des
concerts de Ritchie Blackmore, et
non de Rainbow, car Roger Glover
n’est pas de la partie. Or, Roger est
un élément de Rainbow aussi
fondamental que Ritchie, de mon
point de vue en tout cas. Pour moi,
s’il n’y a pas les deux, ce n’est pas
Rainbow. Roger est plus qu’un
bassiste. Il y a une osmose entre les
deux, une force créatrice à l’œuvre
depuis le début de leur collaboration
au sein de Deep Purple. Je te promets
que c’est un truc étonnant, mais
palpable. Ritchie a évidemment le
droit de tourner sous le nom de
Rainbow, mais pour moi, cela reste
« Ritchie Blackmore et ses invités ».
Peut-être que si Don Airey revenait,
ou même Joe Lynn Turner, ce serait
différent. Mais en fait, le vrai
Rainbow, c’était avec Ronnie James
Dio, et lui ne reviendra
malheureusement pas…
Ou alors sous la forme d’un
hologramme ?
(Rires) Ah oui, c’est vrai, il y a cette
histoire d’hologramme ! Mais
d’après ce que je sais, ça ne se
passe pas très bien et le succès
n’est pas au rendez-vous. Je n’aime
pas le principe.
Donc pas d’hologramme de
Graham Bonnet en
perspective ? (rires)
(Rires) Non, ce n’est pas prévu.
En tout cas, pas de mon
vivant ! (rires) Mais pour
revenir à ta question, je serais
absolument estomaqué et
heureux si Ritchie m’appelait,
mais je sais que cela
n’arrivera pas.
Revenons à Alcatrazz. Quel
est le plus gros challenge de
cette reformation ?
Arriver à sonner moderne et
neuf, tout en étant fidèle à la
personnalité originale du groupe.
C’est déjà ce que nous essayons
de faire en concert, et je trouve
que nous nous en sortons
plutôt bien. Joe Stump a
beaucoup d’expérience, et il
connait très bien le répertoire
de Ritchie Blackmore et
d’Yngwie Malmsteen. Mais
surtout, il est capable de tout
jouer, absolument tout, ce que j’adore.
Steve Vai était comme ça : rien n’était
impossible pour lui. Nous voulons à
la fois séduire les fans d’Alcatrazz,
mais aussi attirer un public plus
jeune. Pour cela, il nous faut un son
plus moderne et un côté à la fois
direct et très heavy. C’est ce que
nous tentons de faire. Je crois que
les deux albums sortis par le Graham
Bonnet Band tiennent la route de ce
point de vue, mais je veux aller
encore plus loin. De surcroît, mes
textes ne traitent pas de donjons et
de dragons, mais contiennent des
messages que j’espère plus
profonds. Il faut aussi que la
musique puisse les mettre en valeur.
J’ai bientôt 72 ans et je me sens
encore en forme. Jouer avec des
musiciens que j’admire est quelque
chose de fondamental pour moi, et
lorsque, plus jeune, j’essayais de me
projeter, jamais je n’aurais pensé
être encore sur scène aujourd’hui.
C’est une grande chance pour moi,
et cette reformation d’Alcatrazz
m’apporte une vraie fraîcheur et
m’excite plus que tout. Y
 Propos recueillis par Benji - Entretien téléphonique réalisé le 18 août 2019
De son propre aveu, Michael Poulsen a changé depuis ces deux dernières années. Le chanteur/guitariste de Volbeat, désormais
père d’une petite fille de deux ans, voit certaines choses avec un regard différent. Cela n’a heureusement pas altéré son aptitude
à pondre des titres irrésistibles sur le nouvel album des Danois, Rewind, Replay, Rebound. Et ce, même si nous regrettons un
manque certain du metal qui nous fait vibrer… Michael nous a passé un petit coup de fil depuis les USA où Volbeat était en
pleine tournée avant un passage par l’Olympia de Paris le 06 octobre prochain.
Rock Hard : Vous avez édité le shows devant autant de monde. Rebound, tu comprends que, via Believe ». Je pense que cet état
DVD Let’s Boogie ! Live At Telia Du coup, la journée et le concert se certains passages musicaux, nous d’esprit se ressent aussi dans la
Parken en 2018. Il s’agissait d’un sont passés sans encombres. revenons en quelque sorte aux musique car l’enfance est une
concert en tête d’affiche filmé le Superbe souvenir ! racines de Volbeat. On y trouve période durant laquelle tu te sens
26 août 2017 dans le plus grand certains éléments typiques de notre libre à tous points de vue. Même si
stade de Copenhague devant Venons-en à Rewind, Replay, musique que nous « rejouons » nous avons aujourd’hui des tas de
48.000 personnes. Quels Rebound, votre nouvel album. Sa (« replay ») en quelque sorte responsabilités, il ne faut jamais
souvenirs gardes-tu de cette pochette et certains de ses textes aujourd’hui, en 2019, mais avec laisser s’effacer l’enfant qui
fantastique soirée ?
Michael Poulsen : Nous avions pas
mal de pression car il s’agissait d’un
authentique événement, sachant que
nous étions le premier groupe danois
à faire le plein dans ce stade avec
près de 50.000 billets vendus. Bien
sûr, ça nous a rendus très fiers car,
à nos débuts, nous étions déjà
contents de pouvoir jouer devant
cinquante personnes dans un club !
Et « tout à coup », nous nous
retrouvons à donner un show en
vedette dans un stade, dans notre
ville. Alors, bien sûr, j’y repense
avec beaucoup d’émotion. Nous
étions en pleine forme car nous
étions alors en pleine tournée et
affutés comme jamais. En fait, nous
avons commencé à travailler sur ce
concert un an auparavant, alors
nous avons eu largement le temps
de prendre soin de tous les détails,
que ce soit au niveau de la
production, de la setlist, des
invités… Bien sûr, tu as beau faire
de ton mieux, un imprévu n’est pas
à exclure. On sait, par exemple, que,
dans un stade, le son n’est pas
toujours simple à maîtriser. Mais De g. à d. : Kaspar Boye Olsen, Rob Caggiano,
notre ingénieur du son live est Michael Poulsen & Jon Larsen
génial, et ce challenge ne lui faisait
pas vraiment peur car il avait ramènent à la notion d’enfance. encore plus de force, et sur lesquels sommeille en nous, cette notion de
l’habitude de bosser avec nous sur As-tu eu une enfance heureuse ? nous « rebondissons » (« rebound »). fun qui est très importante.
des festivals dont certains plus Oui ! En effet, ce thème est assez Quant au « rembobinage » (rewind),
grands que ce stade. Le groupe était présent sur ce disque. Lorsque tu il se situe au niveau des paroles, Tu viens de rappeler que tu es à
lui aussi déjà habitué à donner des analyses son titre, Rewind, Replay, dans lesquelles je reviens sur ma présent père d’une petite fille. Tu
propre enfance. Je suis devenu père lui as d’ailleurs dédié une chanson
GENRE Parken (live – 2018) d’une petite fille il y a deux ans, sur ce nouvel album, « 7:24 », qui
ALBUMS . Rewind, Replay, Rebound (2019)
. Rock’n’roll mélodique… et . The Strength / The Sound / The alors j’ai l’opportunité de revivre est l’heure exacte de sa naissance.
plus Songs (2005) ARTICLES RH mon enfance en m’occupant d’elle. Comment cela t-a-t-il changé en
. Rock The Rebel / Metal The Devil
LE GROUPE RH N°49, 64, 81, 103, 108, 130, Cela a fait remonter plein de bons tant qu’homme ?
(2007) 166 & 201
. Michael Poulsen . Guitar Gangsters & Cadillac Blood souvenirs en moi car j’ai eu une As-tu toi-même des enfants ?
(chant, guitare) (2008) enfance très heureuse, avec
. Beyond Hell / Above Heaven
. Rob Caggiano (guitare) (2010) beaucoup de liberté pour explorer le Oui.
. Live From Beyond Hell/Above
. Kaspar Boye Olsen (basse)
Heaven (live – 2011)
monde. J’en ai notamment extrait Alors, tu sais ! Il y a quelque chose
. Jon Larsen (batterie) . Outlaw Gentlemen & Shady Ladies les textes comme de « When We de magique à cela. Tu prends très
(2013) Were Kids », « Immortal But certainement conscience de la vie,
. Seal The Deal & Let's Boogie
SITE INTERNET (2016) Destructible » et « Maybe I combien elle est courte, et de ce qui
www.volbeat.dk . Let's Boogie! Live From Telia

69
est important ou pas dans cette vie.
Cela remet ton égo à sa place : il y a
un nouveau numéro un dans la
maison ! Ton enfant restera la
priorité et tu passeras toujours
derrière. C’est génial car tu mets
ton propre égo et tes centres
d’intérêt au second plan pour te
focaliser sur une petite fille qui est
l’innocence même, et qui est juste là
pour apprendre à tes côtés. Afin
qu’elle soit prête à entrer dans le
monde avec un futur positif. C’est
bien sûr une grande responsabilité
que d’avoir un enfant, et, forcément,
ça te fait grandir en tant qu’être
humain. Je pense en effet être plus
concerné par ce qui m’entoure car
j’ai cette petite fille qui va devoir
grandir dans ce monde de dingues.
C’est un peu confus, peut-être, mais
maintenant que je sais que tu es
père toi-même, je pense que tu
comprends là où je veux en venir.
« Die To Live » est un morceau
vraiment très dynamique et un peu
« à part » sur cet album, avec son
saxophone, son piano et ce duo
vocal avec Neil Fallon de Clutch.
Comment ce dernier a-t-il été
impliqué ?
Lorsque nous avons écrit « Die To
Live », nous avions plusieurs
options. L’une d’entre elles était d’y
ajouter du piano : j’avais toujours
rêvé d’en inclure sur un titre de
Volbeat, et il se trouve que cette
chanson s’y prêtait parfaitement.
« Die To Live » possédait des
éléments rappelant le rock’n’roll des
années 50 et 60, ou, tout du moins,
tu pouvais y ajouter des éléments
qui permettent que ça sonne ainsi.
Nous avons donc contacté le JD
McPherson Band dans lequel nous
savions que jouaient un super
pianiste, Raynier Jacob Jacildo, et un
excellent saxophoniste, Doug
Corcoran : je leur ai expliqué que je
voulais un piano façon Jerry Lee
Lewis et un saxophone dans la
lignée de certains titres de Little
Richard. Ils ont tout de suite pigé
l’idée, et leur prestation est
géniale ! Mais j’ai trouvé qu’il
manquait encore quelque chose à ce
titre. Je voulais y partager le chant
avec un autre artiste. Or, j’ai
toujours aimé le style de Neil avec
Clutch. De plus, c’est un mec super.
Je l’ai contacté et il a adoré l’idée,
étant lui aussi un grand fan du JD
McPherson Band. Nous lui avons
donc envoyé le morceau et il a
enregistré ses parties dans son
propre studio, chez lui. J’ai adoré
le résultat. C’est killer !
« Sorry Sack Of Bones », est un
autre titre qui se démarque
particulièrement sur ce disque.
La tonalité des guitares fait
penser à de la surf music, même
si l’ambiance du morceau est très
macabre (Ndlr : il se marre), un
peu comme une bande-originale de
film d’horreur. Quelle était l’idée ?
J’ai enregistré toutes les guitares
sur ce morceau. Ce fut l’un des
derniers titres composés et
enregistrés pour l’album. Nous
avions pour ainsi dire tout fini et il
nous restait environ une semaine de
studio pour peaufiner les choses,
fignoler les arrangements. Mais
notre management américain, après
avoir écouté l’album, nous a dit : « Il
manque un petit quelque chose, un titre
permettant de ressentir les influences
premières du groupe et ce côté
rockabilly/punk qui vous caractérise
aussi. » En deux jours, j’ai écrit
« Sorry Sack Of Bones », « Cheapside
Sloggers » et « Pelvis On Fire ». Des
titres qui captent cette attitude old-
school de Volbeat. « Sorry Sack Of
Bones » possède certains de ces
vieux éléments, mais s’inscrit aussi
dans une démarche que nous
n’avions pas encore explorée. C’est
surtout vrai au niveau du son des
guitares, et tu as tout à fait raison
lorsque tu évoques la surf music.
Peut-être avec un petit côté The
Cramps… J’adore les premiers
albums des Cramps. Le thème et le
son de guitare durant l’intro ont
tout déterminé. Actuellement, nous
cherchons les bonnes guitares et les
bons effets pour rendre justice à
cette chanson lors de la prochaine
tournée européenne où nous allons
commencer à la jouer live. C’est un
bon challenge à relever ! Je suis sûr
que, par la suite, c’est un morceau
JE DOIS DIRE QUE JE N’AI JAMAIS
CONSIDÉRÉ VOLBEAT COMME
UN GROUPE DE PUR METAL
(MICHAEL POULSEN)
qui va rester dans nos setlists durant
un bon moment.
Tu viens de mentionner « Cheapside
Sloggers ». Il donne l’impression
d’être le fruit de deux morceaux
mixés ensemble, tant sa première
partie est différente de la seconde,
bien plus heavy. Le guitariste Gary
Holt (Exodus/Slayer) y balance
d’ailleurs un solo. Qu’en est-il de
ce titre ?
Il ne s’agit pas de deux morceaux
rafistolés pour n’en faire qu’un :
l’idée de départ était exactement de
le faire sonner ainsi. Comme tu le
sais, nous aimons mixer différents
styles sur un même album, et
parfois dans la même chanson. C’est
précisément le cas sur « Cheapside
Sloggers ». Au départ, il y a cette
sorte de signature boogie-woogie
typique de Volbeat, et il est vrai que
le titre prend ensuite une couleur
bien plus sombre, une sorte de
feeling Black Sabbath. Comme je le
disais tout à l’heure, ce fut aussi
l’un des derniers titres composés
pour ce disque. Il est plus ou moins
dédié aux Peaky Blinders (Ndlr : gang
familial de malfrats qui a œuvré à
Birmingham entre la fin des années
1800 et le début 1900. Les Cheapside
Sloggers étaient un autre gang
antérieur à cette « dynastie »
popularisée par la série Peaky
Blinders). Au moment où nous
l’avons enregistré dans les studios
de Jacob Hansen, au Danemark, Rob
(Caggiano/guitare) était déjà reparti
chez lui à New York et trop occupé à
gérer d’autres choses pour réaliser
le solo de ce morceau. Nous
cherchions quelqu’un qui puisse
nous apporter un son un peu
différent. Je connais Gary Holt
depuis longtemps maintenant, je
l’adore en tant que personne, et je
suis fan d’Exodus et Slayer. Il s’est
toujours montré sympa avec nous et
il aime ce que nous faisons. Lorsque
je lui ai proposé le plan, il a sauté
sur l’occasion. Son solo est
incroyable !
La musique de « The Awakening
Of Bonnie Parker » est signée
Rob. C’est la première fois dans
l’histoire de Volbeat que tu n’es
pas crédité ou co-crédité pour la
musique d’un de vos morceaux.
Qu’est-ce que ça signifie ?
Que Rob comprend à présent
parfaitement votre musique et
qu’il est capable d’écrire seul un
titre pour le groupe ou que tu es
plus disposé à « lâcher du lest »
et à faire en sorte que les autres
membres de Volbeat composent
sans ton aide ?
Tout le monde au sein du groupe a
toujours été invité à composer pour
Volbeat. Il faut juste que le résultat
nous corresponde. Il est déjà arrivé
que Rob me présente des chansons :
elles étaient excellentes, mais pas
pour Volbeat. Nous les avons donc
mises de côté. Encore une fois, non
parce qu’elles étaient médiocres,
mais parce qu’elles ne collaient pas
avec notre univers. Mais Rob est à
présent avec nous depuis cinq ans et
il a totalement intégré ce que sont
le son et le style Volbeat. Alors,
quand il m’a soumis ce titre, je n’ai
rien eu à dire : c’était totalement
fait pour nous, je n’avais plus qu’à
imaginer des mélodies vocales et
des textes adéquats pour que ça
devienne un titre 100% Volbeat.
Il faut une part de « magie » pour
arriver à cela et nous verrons bien
ce que Rob me proposera dans le
futur. Ce qui est sûr, c’est que je
suis tout à fait ouvert à cette idée.
L’album est très solide à tous les
points de vue, mais, pour être
parfaitement honnête avec toi,
votre côté metal nous manque
beaucoup… Car, exception faite de
« The Everlasting » et d’une partie
de « Cheapside Sloggers », le metal
est portion congrue sur ce disque.
N’étais-tu tout simplement pas
inspiré pour écrire des morceaux
plus prononcés metal cette fois-ci ?
Tout d’abord, je dois dire que je n’ai
jamais considéré Volbeat comme un
groupe de pur metal. Volbeat a
toujours été un groupe de rock avec
des influences metal, ainsi que
d’autres provenant d’une multitude
de styles. Les gens parlent
probablement de metal à notre
propos parce qu’ils savent que, dans
le passé, tous les membres de
Volbeat ont fait partie de groupes de
ce genre. Il est vrai qu’il y a
toujours eu des titres metal sur nos
albums, mais jamais une majorité.
J’adore ce genre, évidemment, tout
comme j’aime en jouer et en écrire,
mais je n’ai jamais pensé Volbeat
comme une formation de metal.
Nous avons encore cela en nous, et
qui sait si, un jour, nous ne sortirons
pas un disque de pur metal du début
à la fin. Je suis bien conscient que,
sur ce nouvel album, et même le
précédent, il y a plus de titres à
tendance rock. C’est juste que
j’avais envie de ça à ce moment
précis. Je ne vais pas passer du
temps en studio ou sur la route, loin
de ma famille, pour jouer des trucs
que je considère comme des
compromis censés satisfaire un
certain nombre d’auditeurs. Je me
dois d’écrire des choses qui me font
vibrer, qui me donnent envie de
répéter dans notre local ou de partir
sur la route pour les présenter au
public. Je trouve qu’aujourd’hui,
c’est un plus gros challenge pour
moi d’écrire un gros titre rock qu’un
morceau metal. Mais qui sait ce que
va nous réserver le futur ? Nous
disposons d’un certain nombre de
titres quasiment finalisés, des trucs
proches du thrash, très old-school,
qui n’ont jamais été édités…
Tu es en pleine tournée américaine
avec Slipknot, Behemoth et Gojira.
Fin 2009, ce dernier avait pris
part à la première partie de la
tournée américaine de Metallica,
et vous l’aviez remplacé sur la
seconde. Depuis, vos chemins se
sont croisés à de multiples
reprises et vous avez connu une
ascension plutôt similaire, étant à
présent capables de donner des
concerts importants en tête
d’affiche tant aux USA qu’en
Europe. Que penses-tu de Gojira,
musicalement et humainement ?
Nous les adorons ! C’est un groupe
formidable. J’ai plusieurs de leurs
albums à la maison. Ce sont des
gens très sympas, avec des
personnalités vraiment cool. Depuis
2009, il est vrai que nous avons
plusieurs fois partagés l’affiche. Il y
a aujourd’hui des tonnes de groupes
de metal extrême, et c’est souvent
difficile pour toutes ces formations
de sortir la tête de l’eau. Mais
Gojira a vraiment sa propre
signature, est original, et c’est une
chose rare dans le metal extrême.
Cerise sur le gâteau, il met de la
mélodie dans son metal, en
particulier sur ses derniers albums.
En cela, c’est un groupe unique qui
mixe les extrêmes et de belles
mélodies au sein de compositions
classieuses. En plus de ça, ses
musiciens ont l’attitude. Je pense
qu’ils sont là pour rester encore
longtemps. Y
71
 BILLYBIO – 589 HxC
LE 02 JUIN 2019 A BORDEAUX (BT59)
Est-ce la chaleur écrasante de ce week-end Billybio
en Gironde qui a ramolli les ardeurs des
hardcoreux et metalleux du cru ? En tout cSodality
cas, il n’y a pas foule en ce dimanche soir cVictory
au BT59. Heureusement, ça n’entame pas (Biohazard - intro)
la détermination de 589 HxC, formation cSTFU
bordelaise dont le patronyme ne laisse cGeneration Z
aucun doute quant au style pratiqué. cShades Of Grey
Bénéficiant d’un temps de jeu généreux, le (Biohazard)
quintet qui dispose d’un EP 5 Titres intitulé cNo Apologies,
Mammuth (2017) fait le job et chauffe le No Regrets
public juste ce qu’il faut avant l’arrivée de cEnemy
BillyBio. Pour ceux qui n’ont pas suivi, il cA Lot To Learn
(Biohazard)
s’agit du groupe formé l’année passée par
cFeed The Fire
Billy Graziadei, le guitariste/chanteur d’un cLove Denied
Biohazard qui est en pause pour une durée (Biohazard)
indéterminée. Billy jongle donc aujourd’hui cUntruth
avec Powerflo, sorte de supergroup cAuthority (Biohazard)
hardcore/metal/hiphop que nous avons cHow It Is (Biohazard)
découvert au Hellfest 2018, et BillyBio, à la cSick And Tired musicien toujours aussi investi dans sa « mission ». cette soirée remanié de façon bien plus rock. Et, dans ce
sensibilité purement hardcore proche de cGet Up, Stand Up Pour preuve, juste avant « Generation Z », l’un des contexte, cet hymne à la lutte sonne tout aussi bien
celle de Biohazard. Pour l’exercice live, il (Bob Marley) neuf extraits de l’enthousiasmant Feed The Fire entonné par sieur Graziadei que par le grand Bob. Mais
s’est entouré de l’énergique bassiste Dan Rappel : (2018), son premier opus sous le nom de BillyBio, il pas question de se quitter comme ça, et après quelques
Manca, du batteur Raphael Saini (ex-Iced cPunishment descend dans la fosse et exhorte le public à se secondes de répit, le gang revient asséner l’un des plus
Earth) et du discret guitariste italien Nicola (Biohazard) rapprocher de la scène, histoire que tout le monde célèbres uppercuts de Biohazard, « Punishment », qui
Olla qui, sur cette partie de tournée, remplace cFreedom's Never Free participe à la fiesta, en aussi petit comité soit-elle. secoue salement le pit, avant de l’achever par le très
Robbie Davidson (ex-The Exploited). Billy Bien sûr, le gaillard ne se prive pas pour balancer musclé « Freedom’s Never Free », premier titre de Feed
utilise un micro-casque sans fil, ce qui lui permet de quelques scuds issus du catalogue de Biohazard : ainsi, The Fire et parfaite conclusion à ce show intense. Respect
pouvoir bouger sans la contrainte de devoir rester planté « Shades Of Grey », « Love Denied » et « Authority », sur total à Billy et sa bande pour avoir joué sans le moindre
devant un pied de micro. Et le bougre en tire un bénéfice lequel le chanteur de 589 HxC, Julien, vient pousser la frein à main malgré cette affluence décevante, mais
maximum puisqu’il ne tient pas en place ! Se servant des gueulante aux côtés de Billy, font particulièrement mal aux heureusement chaleureuse.
retours de scène pour se propulser dans les airs, arpentant dents. Si tout le monde connaît « Get Up, Stand Up » de BENJI
les planches comme un maniaque, on sent l’expérimenté Bob Marley, classique absolu du géant du reggae, il est en Photo : Benji

MUSIKÖ_EYE FEST 2
LE 13 AVRIL 2019 A CROSNE (ESPACE RENÉ FALLET)
Le fanzine MusikÖ_Eye, aujourd’hui complété d’un
label du même nom, organise en ce 13 avril son
deuxième festival qui lui permet de mettre en
valeur certains des groupes de sa team (Volker,
Daturha), mais également d’autres valeurs montantes
de la scène française. L’Espace René Fallet de
Crosne (91) est un complexe superbe qui permet,
grâce à ses multiples salles, de proposer, outre les
concerts, plusieurs stands où nous retrouvons
parmi les exposants quelques vieilles connaissances,
comme l’ami Vincent Fouquet d’Above Chaos,
l’écrivain Jérémie Grima (Voici Venu Le Temps,
Enjoy The Violence), ou encore Ulrich Wegrich
(Otargos, Volker) qui y présente ses incroyables
sculptures. Malheureusement arrivés à mi-course
pour des raisons d’organisation, nous manquons
les premières prestations de la journée (Sekhmet,
Mobius, Acedia Mundi, Lynn et Daturha). Il reste
néanmoins encore cinq gros morceaux à venir.
Tout commence donc pour nous avec
Malemort Molybaron, dont le premier album
éponyme sorti voici déjà trois ans n’a de
cBall Trap cesse de tourner dans notre platine. Le
cInsoumission
combo franco-irlandais, moins metal
cMadame
que le reste de l’affiche, ne démérite
cBrûle
cJapan Airline
absolument pas musicalement. En re-
cLa Fille De Manchester vanche, faible affluence oblige (d’autant
cAtomique Diplomatie plus flagrante que la salle est de très
cDécadence belle taille), on sent que le groupe
cMon Nom n’est pas au maximum de son énergie.
cVaille Que Vaille Malkavian, fort de son thrash death
cHome Sweet Home plutôt technique, embraye ensuite devant
cFoutue Belle Jeunesse une salle toujours aussi peu garnie. Les
(La Carapace) Nantais ne se déballonnent pas pour
cMille Regards autant et font fort bonne figure, même
cCarnaval Cannibale si, comme leurs prédécesseurs, on les
cCabaret Voltaire
sent un peu blasés de jouer dans des conditions
optimales (son, lights, salle...), mais devant un
parterre aussi mince. Jen Nyx, la chanteuse de
Volker, prend le contre-pied inverse : elle semble
avoir décidé de faire le show coûte que coûte et
se démène comme si elle jouait devant un stade
blindé. Et là, en l’occurrence, le décalage est
presque too much. L’horror rock des Bordelais,
plutôt sombre sur album, mériterait une interpré-
tation un peu plus glauque et moins versée dans
l’excès. On ne va pas se mentir, le gros morceau que
nous attendons est bien évidemment Malemort,
qui joue ce soir son album Ball Trap (2016) en inté-
gralité pour la toute première fois en live. Force
est de constater que les nombreuses dates
effectuées par le groupe en ont fait une machine
de guerre au professionnalisme bluffant. Parsemant
habilement leur set de titres issus de leur premier
album French Romances (2012), les Franciliens
parviennent à déchaîner le public présent. Il faut
dire que Xavier Malemort (chant) ne ménage pas
ses efforts et va jusqu’à descendre parmi les
spectateurs pour les emmener dans son délire.
Sans nul doute l’un des meilleurs frontmen (sinon
LE meilleur) de la scène émergente française.
Difficile pour Khaos-Dei de se montrer fédérateur
après une telle tornade. Son black grinçant et
sombre déchaîne d’autant moins de passions que
certains spectateurs quittent la salle pour prendre
le dernier RER. Dommage, car le groupe est inté-
ressant et mérite d’être revu dans des conditions
plus intimes. Nous quittons les lieux avec la sen-
sation frustrante d’un festival aux petits oignons
qui aurait vraiment mérité davantage de public...
CHARLELIE ARNAUD
Photo : Pics’N’Heavy

72
 Michael Schenker
Fest Le Guitare En Scène est vraiment un merveilleux festival

DREAM THEATER - MICHAEL cDoctor, Doctor (UFO)

cInto The Arena
cArmed And Ready
pour les amateurs de musique. Ses organisateurs ont fait le
choix de consacrer systématiquement l’une des quatre soirées
à notre genre de prédilection, en proposant à cette occasion

SCHENKER FEST LESAINT-JULIEN-EN

12 JUILLET 2019 A cMessin’ Around trois à quatre concerts, dont ceux de deux belles têtes
cAttack Of The Mad d’affiche sur la scène principale, sous un grand chapiteau.
GENEVOIS Axeman
cCaptain Nemo
Dès notre arrivée sur place, on ressent la bonne humeur qui
anime cette manifestation, sans que ce soit au détriment du
(FESTIVAL GUITARE EN SCENE) cDancer
cSearching For A
professionnalisme déployé dans son organisation.
A 20 heures, le Michael Schenker Fest déboule sur scène et
Reason déploie tout de suite la grosse artillerie puisque les trois
cDesert Song chanteurs qui le composent (par ordre d’apparition chrono-
cCoast To Coast logique au sein de MSG : Gary Barden, Graham Bonnet et
(Scorpions) Robin McAuley) sont ensemble sur scène pour le célèbre
cSave Yourself « Doctor, Doctor » de UFO. Michael Schenker affiche un
cHeart And Soul large sourire, de même que les musiciens qui l’accompa-
cLove Is Not A Game gnent : les vétérans Steve Mann à la guitare et Chris Glen à
cWarrior
la basse, ainsi que le puissant batteur Bodo Schopf (qui a
cRock Bottom (UFO)
également joué au sein de MSG auparavant) en lieu et place
Rappel :
du regretté Ted McKenna, décédé en début d’année. Les
cLights Out (UFO)
concerts du blond guitariste sont impeccablement rodés, et
après l’instrumental « Into The Arena », c’est Gary Barden qui occupe
le poste de chanteur pour interpréter des morceaux des débuts de
MSG, mais aussi un titre du premier album du Michael Schenker Fest,
Resurrection. OK, le démarrage est un peu étonnant car Schenker
semble avoir oublié que c’est avec « Armed And Ready » que cette
séquence commence, mais la musique est bonne. L’instrumental
« Coast To Coast » de Scorpions, au cours duquel un Chris Glen intenable
s’affuble de jolies lunettes laser, marque la transition avec les morceaux
de Assault Attack chantés par un Graham Bonnet plutôt en forme
vocalement. Là encore, un titre de Resurrection est glissé dans la
séquence, les autres chanteurs assurant les chœurs. Comme d’habi-
tude, Robin McAuley est le plus impressionnant vocalement avec son
timbre très original qui fait merveille sur les titres du McAuley Schenker
Group. Mais le meilleur reste à venir avec l’efficace « Warrior », extrait
de Resurrection, suivi d’une version phénoménale de quasiment vingt
minutes de « Rock Bottom » (UFO) propice à de très longues envolées
en solo du guitariste. En rappel, « Lights Out » (UFO) conclut un set
de 1h30 passé à vitesse grand V. Schenker semble avoir rajeuni et ne
fait absolument pas ses 64 ans, tandis que ses camarades vocalistes
prennent leur pied à chanter, ensemble comme séparément. On ne
peut donc que vous recommander d’aller voir ce Michael Schenker
Fest dès que possible. Un nouvel album, Revelation, étant prévu pour
la rentrée, il est très probable qu’une tournée soit à nouveau programmée
à cette occasion.
La nuit est tombée lorsque Dream Theater débarque sur scène. Sa
récente prestation au Hellfest ne nous ayant pas pleinement convaincus
(notamment celle du chanteur James LaBrie, à la peine), nous étions
impatients de revoir le combo dans de meilleures conditions et avec
un temps de jeu plus adapté à son répertoire. Le son est excellent et
le groupe semble particulièrement motivé. Après « Untethered
Angel », « A Nightmare To Remember » nous permet d’apprécier le
côté plus progressif de ses compositions, délaissé dans sa setlist du
Hellfest. Comme d’habitude, le public est sage, mais attentif. Il faut
dire que la machine, sur scène, est impressionnante : Dream Theater
n’usurpe pas sa place dans un festival dédié à la guitare et John Petrucci,
dont l’anniversaire ce soir est fêté par un gros gâteau apporté sur
scène par l’équipe du festival après « Peruvian Skies », envoie du
lourd. James LaBrie en profite pour annoncer que Dream Theater sera
de retour en Europe en janvier et février 2020 pour une série de shows
au format « An Evening With » : à savoir, une première partie de
concert classique et une seconde au cours de laquelle l’album culte
Scenes From A Memory (1999) sera joué dans son intégralité. « In The
Presence Of Enemies, Part 1 » est impressionnant, notamment son solo
de guitare, avant que la vitesse d’exécution ne s’affole avec l’instru-
mental débridé qu’est « The Dance Of Eternity », toujours aussi
bluffant. Le groupe est ce soir branché en mode heavy, et ce n’est pas
Dream Theater « Lie » qui change la donne. James LaBrie semble moins à l’aise sur ce
cUntethered Angel
titre, mais effectue en conséquence les quelques changements de
cA Nightmare To mélodies vocales appropriés. Extrait du dernier album, « Pale Blue
Remember Dot » passe impeccablement le cap de la scène. Les Américains ne
cFall Into The Light sont clairement pas venus là pour beurrer des sandwichs et enchainent
cPeruvian Skies les frappes chirurgicales dévastatrices. En rappel, « As I Am » nous est
cBarstool Warrior livré dans une version pleine de conviction, notamment côté chant.
cIn The Presence Of A l’issue du concert, l’ovation incroyablement sonore du public est
Enemies, Part 1 méritée, même si elle impressionne les protagonistes eux-mêmes, qui
cThe Dance Of Eternity en ont pourtant vu d’autres.
cLie Sur la petite scène, Neal Black et Fred Chapellier nous offrent après
cPale Blue Dot cela une très bonne dose de blues, gorgée de soli de guitare (et de
Rappel : basse) du plus bel effet, qui permet de finir tranquillement la soirée
cAs I Am et d’atterrir après une heure trente de metal progressif vraiment
intense. Une excellente soirée dans un très chouette festival. Que
demander de plus ?
STEPHANE AUZILLEAU
Photos : Stéphane Auzilleau

73
 IRON MAIDEN – THE RAVEN AGE
LE 18 JUILLET 2019 A FORT LAUDERDALE (BB&T CENTER/USA)

Iron Maiden
cIntro
L’Europe en avait eu la primeur l’été dernier. (Churchill's Speech) bougre est ce soir dans une
C’est au tour des Nord et Sud-Américains de cAces High forme impériale. Qu’il semble
bénéficier de cet honneur en 2019, la tournée cWhere Eagles Dare déjà loin, ce cauchemar de
Legacy Of The Beast d’Iron Maiden traversant c2 Minutes To Midnight cancer de la langue détecté
cette année les USA, le Canada, le Mexique, cThe Clansman fin 2014 ! Autour de nous, le
le Brésil, l’Argentine et le Chili pour une série cThe Trooper public répond bien aux solli-
de 44 concerts. Pas mal pour des vétérans ! cRevelations citations du vocaliste, mais
Hasard du calendrier « vacances », nous cFor The Greater Good nous trouvant pourtant fort
sommes en Floride au moment où débute Of God près de la scène, pas une
l’évènement, alors vous pensez bien que nous cThe Wicker Man seule fois nous ne sommes
n’allons pas manquer cette opportunité ! cSign Of The Cross bousculés ou importunés par
Direction le BB&T Center de Sunrise, patelin cFlight Of Icarus des fans souvent trop occupés
accolé au très huppé Fort Lauderdale, cFear Of The Dark à filmer le concert plutôt qu’à
dans le sud de la Floride. Cette salle multi- cThe Number Of profiter à fond du moment.
The Beast
fonctionelle de 20.000 places est principalement Aux USA, ce mal moderne
cIron Maiden
utilisée par l’équipe locale de hockey sur « Aces High », un Spitfire plus vrai que nature semble faire office de sport national, bien plus qu’en
Rappel :
glace, les Panthers, mais aussi, ponctuellement, cThe Evil That Men Do survolant la scène ! Coupons court à tout suspense : France (et en Europe en général), même si, parfois, cette
pour des concerts (Kiss, The Who et Ozzy cHallowed Be Thy Name la setlist et la scénographie s’avèrent strictement pratique peut un chouia agacer chez nous aussi. Mais
Osbourne sont les prochains sur la liste). cRun To The Hills les mêmes que celles de la virée européenne de croyez-nous sur parole, ce n’est rien comparé à ce qui se
L’arena se remplit tout doucement et, sans cOutro (Always Look On 2018. En temps normal, la Vierge de Fer n’est passe par-delà l’Atlantique ! Dommage pour l’ambiance,
forcer, nous voilà postés au dixième rang de The Bright Side Of déjà pas très friande de changements, alors, avec mais ça ne risque pas gâcher notre soirée (ça change des
la fosse, face à l’estrade de batterie de Life/Monthy Python) cette série de « shows conceptuels » balayant premiers rangs pour le moins fervents de Bercy, et pour
Nicko McBrain. A nos côtés, première date trois thèmes chers à Maiden (la guerre, la religion un soir, on s’en contente !). Après un ultime « Run To The
de la tournée oblige, c’est un florilège de nationalités qui et l’enfer), impossible d’imaginer une quelconque innovation Hills » rythmé par la basse galopante d’un Steve Harris
se côtoient : Américains bien sûr, mais aussi énormément ou surprise. D’autant que la majorité des spectateurs voit toujours aussi dévoué et une ultime explosion causée
de gaillards d’origine sud-américaine (Miami, à quelques le concert pour la première fois… Seule « nouveauté », un par une manette reliée à de la « TNT » actionnée par
kilomètres de là, abrite une énorme communauté hispanique Bruce Dickinson aux cheveux plus longs (dans un premier Bruce, Nicko s’en va saluer la foule et balancer quelques
et latino-américaine), dont certains spécialement venus du temps attachés par une queue de cheval) qui, comme à baguettes et peaux de batterie. McBrain, rappelons-le,
Brésil et du Mexique, ainsi que des grappes d’Européens son habitude, tient la scène de main de maître. Que ce joue « à domicile » puisqu’il habite tout près et que son
en goguette (dont quelques Français). Passons rapidement soit avec cette épée avec laquelle il défie Eddie lors de restaurant, Rock’n’Roll Ribs BBQ, n’est situé qu’à quelques
sur le set de The Raven Age, dont on connait les raisons « The Trooper », une croix illuminée durant « The Sign Of kilomètres. L’homme, à 67 ans, excusez du peu, continue
de la présence sur de nombreuses tournées récentes The Cross », des lance-flammes rappelant le tragique de donner le tempo… Respect ! Alors, en attendant un
d’Iron Maiden. Dotées d’un son assez abominable d’où ne destin d’Icare sur « Flight Of Icarus » ou une lanterne avec hypothétique nouvel album et un retour sur le Vieux
ressort que la batterie, ces cinquante minutes de show laquelle il tente de s’éclairer pendant « Fear Of The Continent, bonne route !
paraissent très longues. Evidemment, l’ambiance monte Dark », Bruce se montre toujours aussi à l’aise, même BENJI
de dix crans lorsque résonnent les premières notes de après une pause scénique d’un an. Et vocalement, le Photos : Benji

74

RAMMSTEIN
– DUO JATEKOK
LE 29 JUIN 2019 À NANTERRE
(PARIS LA DÉFENSE ARENA)
Rammstein
cMusique pour les feux Deux ans après ses derniers concerts français, Rammstein
d’artifice royaux est de retour dans l’Hexagone pour deux shows
(Georg Friedrich
Händel – intro)
donnés à Nanterre, les 28 et 29 juin. A la différence
des autres dates de cette tournée des stades euro-
cWas Ich Liebe
cLinks 2-3-4
péens, ces escales françaises se tiennent en salle, à la
Paris La Défense Arena. Capable d’accueillir plus de
cTattoo
cSehnsucht
40.000 spectateurs (un peu plus de 35.000 ce soir à
cause des plateformes disposées dans la fosse), l’ex-
cZeig Dich
U Arena est suffisamment large et haute de plafond
cMein Herz Brennt
pour caser quasiment tout l’arsenal du groupe allemand.
cPuppe
cHeirate Mich
Comme à Nîmes en 2017, et comme sur toutes les
cDiamant dates de cette tournée, les deux pianistes françaises
cDeutschland (remix du Duo Játékok ouvrent le bal en douceur. Postées
par Richard Z. Kruspe) sur une plateforme de la fosse si imposante que, dans
cDeutschland les gradins, elle bouche copieusement la vue à des
cRadio dizaines de rangées de spectateurs (comment peut-
cMein Teil on oser vendre de telles places ?), elles interprètent
cDu Hast huit extraits de XXI – Klavier (2016), album d’adaptations
cSonne de titres de Rammstein au piano. Certains spectateurs
cOhne Dich accompagnent quelques airs (« Sonne », surtout), mais
Rappel 1 : bon nombre de fans de Rammstein circonspects
cEngel (avec Duo prennent leur mal en patience... jusqu’à la délivrance.
Játékok) Ou, plutôt, la déflagration. Lorsque, après une intro
cAusländer über grandiloquente, Christoph Schneider tape sur son
cDu Riechst So Gut kit de batterie, la scène toute entière donne l’impression
cPussy
d’imploser, la salle tremble et les spectateurs croient
Rappel 2 :
leur dernière heure arrivée ! Heureusement, « Was Ich
cRammstein
cIch Will
Liebe », premier titre et premier extrait du récent
cSonne (version piano - Rammstein (2019), est une entrée en matière tranquille
outro) qui permet de souffler... jusqu’à la bonne mise en
jambe ô combien martiale qu’est « Links 2, 3, 4 » et
un « Tattoo » qui passe bien le test des planches. « Sehnsucht » et
« Zeig Dich » (premières flammes du soir) font monter la tempéra-
ture avant un « Mein Herz Brennt » aux airs de karaoké géant.
Déception, surtout en ce deuxième soir de représentation : la
qualité du son ne s’améliore pas au fil des titres. Tout est trop
brouillon, trop fort aussi, mais c’est l’écho en provenance du fond
de cette salle aux dimensions « XXL » qui est le plus gênant. Ajoutez
à ça un Till Lindemann qu’on a déjà vu en meilleure forme vocale et,
surtout, l’absence incompréhensible d’écrans géants dignes de ce
nom (seul un « petit » écran situé tout en haut de la scène est activé
de temps en temps) et vous obtenez un « peut mieux faire ». Il faudrait
toutefois être sacrément blasé pour ne pas s’éclater au son des
pépites qui ne vont plus tarder à débouler. Fidèle à son mauvais
goût légendaire, « Puppe », le titre le plus captivant de Rammstein,
met en scène un berceau démesuré abritant un drôle de chérubin…
Suit le trop rare « Heirate Mich », un « Deutschland » introduit par
un remix trop long sur lequel le guitariste Richard Z. Kruspe joue au
DJ et qui voit de drôles de danseurs s’agiter pendant que les
musiciens font un break, ou encore le « plat signature » du chef
Lindemann, cuistot sadique d’un « Mein Teil » lors duquel le pauvre
Flake (claviers) passe une nouvelle fois à la casserole. En pleine
canicule, quoi de mieux que d’énormes rasades de flammes hautes
comme des immeubles ? C’est ce que nous offrent « Du Hast » et,
surtout, « Sonne ». Même si ces morceaux sont encore plus impres-
sionnants dans les stades où Rammstein développe encore plus de
pyrotechnie, ces versions suffisent à nous donner un teint hâlé.
Après un « Ohne Dich » manquant de subtilité (la grosse caisse
écrase tout), le premier rappel voit les musiciens fendre la foule pour
se rendre sur la plateforme aux côtés du Duo Játékok, le temps d’un
« Engel » chanté a cappella. La proximité avec le public est géniale,
mais les musiciens retournent déjà sur scène dans leurs fameux
zodiacs voguant sur la foule. En plein ego trip (ironique ?), Richard
Z. Kruspe en profite pour dédicacer et lancer à la chaîne une pile
de photos qu’il avait embarquée. Particulièrement bien ficelé, la
dernière ligne droite enchaîne « Ausländer », qui aurait vraiment
dû être le tube de l’été, l’incontournable « Du Riechst So Gut » et
l’inénarrable « Pussy », agrémenté d’un canon-zizi lanceur de
mousse new look. Il n’y a vraiment que Rammstein pour nous faire
écrire « canon-zizi », mais aussi « sac à dos-lance flammes ». C’est
avec ce dernier que le frontman débarque sur le monumental
« Rammstein », mais après un premier jet, l’effet est débranché suite
à un problème technique. Dommage : c’est indéniablement le
nouvel effet le plus réussi de cette tournée qui, globalement, se
repose avant tout sur des acquis, aussi efficaces soient-ils. Propice
à une dernière communion avec le public, « Ich Will » fait un tabac
et, après 2h10 de festivités, la messe est dite. « Paris ce soir est très
parfait ! Merci, vous êtes incroyables ! Merci vraiment ! », lance Till
Lindemann dans la langue de Molière. Pour revoir Rammstein en
France, il faudra se rendre le 09 ou le 10 juillet 2020 à Lyon, théâtre
d’un nouveau déluge de flammes et d’explosions. Avec un peu de
chance, le Groupama Stadium est bien assuré...
MORGAN RIVALIN
Photo : Marc Villalonga
75
 Kiss
Puisque The End Of The Road – tournée que le

KISS LE 11 JUILLET 2019 A LONDRES (02 ARENA/UK)

cDetroit Rock City
cShout It Out Loud quatuor maquillé présente comme la dernière de
cDeuce sa très longue carrière – n’a toujours pas, à ce jour,
cSay Yeah prévu de faire étape à Paris, nous avons décidé,
cI Love It Loud enthousiasmés par la qualité du spectacle proposé
cHeaven’s On Fire lors du dernier Hellfest, de nous rendre à Londres
cWar Machine pour applaudir Kiss une fois encore. Soucieux de
cLick It Up ne jamais rien faire comme tout le monde, le combo
cCalling Dr. Love new-yorkais, dont les shows dépassent actuellement
c100,000 Years (+ solo les deux heures, n’a pas de véritable première
batterie)
partie mais se voit précédé sur les planches par
cCold Gin (+ solo guitare)
David Garibaldi, peintre américain qui réalise en
c(solo basse)
cGod Of Thunder
moins de dix minutes, en rythme et en musique, une
cPsycho Circus toile à l’effigie du groupe le plus chaud du monde.
cLet Me Go, Rock ‘N’ Roll Cette œuvre originale, réalisée avec passion et
cLove Gun dynamisme (Garibaldi s’efforce de faire crier
cI Was Made For Lovin’ l’assistance pendant qu’il travaille), sera vendue à
You prix d’or et verra ses bénéfices reversés à différentes
cBlack Diamond associations d’aide humanitaire. Si cet apéritif ne
Rappel : semble pas passionner les spectateurs, on ne peut
cBeth cependant que saluer l’habileté et le talent de l’artiste,
cCrazy Crazy Nights qui allie vitesse, précision et qualité d’exécution.
cRock And Roll All Nite Assez calme jusqu’ici, la foule s’agite lorsque se
termine le « Rock And Roll » de Led Zeppelin qui
annonce l’arrivée des vedettes. Et dès l’entame de l’incontournable
« Detroit Rock City », Kiss nous en met plein les mirettes ! La chute
du rideau noir flanqué du célèbre logo argenté est immédiatement
suivie d’un tonnerre d’explosions, avec salves tirées tout autour
des musiciens qui descendent chacun d’une gigantesque soucoupe.
L’effet est réellement saisissant et fidèle aux promesses grandilo-
quentes du bassiste Gene Simmons qui promettait « ce que la
technologie moderne peut offrir de mieux ». Si, physiquement et
musicalement, les héros de comics assurent très bien, on ressent
tout de même çà et là quelques faiblesses vocales (les harmonies
des refrains sont loin d’être aussi précises que jadis). Tout porte
néanmoins à croire que Paul Stanley a réenregistré ses parties
avant d’entamer la tournée et est actuellement aidé de bandes,
le rendu étant infiniment meilleur qu’il ne l’avait été deux ans plus
tôt dans cette même salle. Après un « Shout It Out Loud » qui permet
de savourer des projections laser ébouriffantes, l’enfant des
étoiles tombe la veste et se lance dans un laïus à la gloire de
l’Angleterre : « C’est un grand honneur d’être à vos côtés ce soir.
Nous venons vous voir depuis 1976, et ça a toujours été génial !
Ce pays est notre terre sainte ; c’est ici que beaucoup de nos groupes
préférés ont commencé ! » Après un fantastique « Deuce » (Gene
est tellement à fond qu’il en oublie les paroles du début du
deuxième couplet !) illustré de vidéos d’archives et sur lequel Paul
place sa guitare derrière sa tête, le public est incité à reprendre
en cœur le refrain de « Say Yeah », unique titre choisi pour repré-
senter le Kiss post-années 2000 (là où « Modern Day Delilah » ou
« Hell Or Hallelujah » aurait été un meilleur candidat). L’ambiance
est bien plus chaude lorsque Gene entame « I Love It Loud » ou le
puissant « War Machine », qui donne lieu à une belle débauche de
pyrotechnie et s’achève sur un crachat de feu dans la plus belle
tradition du groupe. Au cours du spectacle, complet et bien articulé,
chaque musicien a droit à « son » moment : Paul Stanley utilise
une tyrolienne pour se rendre au cœur du public afin de chanter
« Love Gun » et « I Was Made For Lovin’ You » sur une très petite
scène, Gene Simmons, perdu dans les fumées et éclairé par
d’angoissantes lumières vertes, vomit du sang en prélude au sombre
« God Of Thunder », Eric Singer se fend d’un solo de batterie bien
construit et divertissant (ce qui n’est pas toujours le cas avec ce
genre d’exercice, loin s’en faut !) et le soliste Tommy Thayer envoie
des roquettes avec le sommet du manche de sa guitare pour
déquiller les soucoupes installées au-dessus de la scène. Si l’on
regrette que les deux leaders n’aient pas donné au successeur
d’Ace Frehley une chance de prendre le micro (« Shock Me » ou
« Rocket Ride » se serait très bien intégré au set), « l’homme-
chat », de son côté, fait merveille sur l’émouvant « Beth » qu’il
interprète sur un grand piano à queue et l’intense « Black Diamond ».
Pas toujours des plus efficaces en live (le sempiternel clin d’œil au
« Won’t Get Fooled Again » des Who durant le solo tend à casser le
rythme), « Lick It Up » est introduit par un petit discours de Stanley :
« Cette chanson date de 1983 ! Certains d’entre vous n’étaient
même pas nés, mais vous savez tous de quoi elle parle ! ». Hit majeur
du quatuor au Royaume-Uni, « Crazy Crazy Nights » fait un véritable
carton, la clôture du concert donnant lieu à des effets spectaculaires,
avec feux d’artifice, élévation de la batterie, Simmons et Thayer
passant au-dessus de la foule sur de petites plates-formes et Stanley
fracassant sa guitare avec une énergie impressionnante. « Est-ce
que vous avez eu ce que vous vouliez ? » interroge le vocaliste au
moment de quitter les planches. Assurément, la réponse ne peut
être qu’un grand « oui » !
FRANÇOIS BLANC
Photo : François Blanc
 ARCH ENEMY – ACOD
LE 01 JUILLET 2019 A BORDEAUX
(ROCHER DE PALMER)
Le nombre de t-shirts estampillés Hellfest que porte la horde de métalleux investissant
le Rocher de Palmer nous rappelle que le festival clissonais vient à peine de se terminer,
ce qui n’empêche pas la salle d’être copieusement garnie. Cette dernière petite dose
de musique live avant les « grandes vacances » débute avec Acod. Les Marseillais,
forts d’une expérience acquise en première partie d’autres formations aguerries
(Cradle Of Filth, Napalm Death, Cannibal Corpse…), maîtrisent totalement leur sujet.
Aux côtés du « trident », le socle du combo formé de Fred (chant), Jérôme (basse) et
Raph (batterie), Matthieu Hank Asselberghs (Nightmare, Sangdragon) et Florian Lochem
(Catalyst) assurent les guitares de cette formation black/death à la musique de qualité,
au look sombre et parfaitement raccord avec le style pratiqué, et à l’attitude scénique
« cérémonieuse ». Axant principalement son set sur son dernier album, The Divine Trimuph
(2018), le combo livre en pâture, à un public réceptif, cinq extraits de cet opus, dont un
long et terrassant « Sleeping Shores » en conclusion d’un show convaincant. A suivre
de près !
Arch Enemy arrive en terrain conquis, mais ne va pas pour autant se la jouer facile. Le
groupe bénéficiant de plusieurs backdrops, superbes au demeurant, d’un splendide
jeu de lumières et d’un son à décorner les bœufs, le côté visuel et sonore ne souffre
aucune critique. Mais, surtout, on sent les musiciens toujours aussi investis et motivés

Arch Enemy
cIntro (Set Flame To
The Night)
cThe World Is Yours
cRavenous
cStolen Life
cWar Eternal
cMy Apocalypse
cThe Race
cYou Will Know My à l’idée de retourner la salle en dépit d’un rythme de tournée plus
Name que soutenu et ses années de service. Balayant la carrière du groupe
cUnder Black Flags depuis 2001 avec deux extraits de Wages Of Sin, premier opus
We March enregistré avec Angela Gossow au chant, pour en arriver à Will To
cDead Eyes See
Power (2017), le deuxième album sur lequel figure Alissa White-Gluz,
No Future
la setlist omet de façon logique « l’ère Johan Liiva » (le vocaliste tournant
cThe Eagle Flies Alone
cFirst Day In Hell
depuis 2016 avec Michael et Christopher Amott sous le nom de
cIntro (Saturnine) Black Earth). Alissa, Gene Simmons féminin des années 2000, porte
cAs The Pages Burn un costume avec option « ailes de chauve-souris » et harangue la foule
cNo Gods, No Masters avec son délicieux accent québécois, un simple « France, c’est génial,
cDead Bury Their Dead merci beaucoup ! » suffisant à faire entrer le public dans la danse.
cWe Will Rise Et surtout, quelle voix impressionnante ! Quant à Michael Amott et
Rappel : Jeff Loomis, ils ne cessent de se poser comme l’un des plus beaux
cAvalanche duos de guitaristes de la scène metal du moment, notamment lors
cSnow Bound des magnifiques soli mélodiques (twin-guitars sur « Under Black
cNemesis/Fields Of Flags We March » et « My Apocalypse », tout en tapping sur « Dead
Desolation (extraits) Bury Their Dead »). Chaude soirée, dans tous les sens du terme !
cOutro (Enter the BENJI
Machine) Photo : Benji
 PLAYLISTS
CHARLELIE ARNAUD
1. SLIPKNOT – We Are Not Your Kind
2. OPETH – In Cauda Venenum
3. ETRANGE – Etrange
4. ENTOMBED A.D. – Bowels Of Earth
5. DAMIM – A Fine Game Of Nil
STEPHANE AUZILLEAU
1. SONS OF APOLLO – Live With The Plovdiv
Psychotic Symphonic
2. THE DEAD DAISIES – Locked And Loaded
3. THE CULT – Love (Omnibus Edition)
4. KXM – Circle Of Dolls
5. FLYING COLORS – Third Degree (advance CD)
BENJI
1. BLACK STAR RIDERS – Another State Of Grace
2. SAMMY HAGAR & THE SPACE – Space
Between
3. MICHAEL SCHENKER FEST – Revelation
4. THE NEW ROSES – Nothing But Wild
5. ENTOMBED A.D. – Bowels Of Earth
FRANCOIS BLANC
1. ATLANTEAN KODEX – The Course Of
Empire
2. BOLT THROWER – Honour, Value, Pride
3. KLONE – Le Grand Voyage
4. IDLE HANDS – Mana
5. BLACKRAIN – Dying Breed
DJUL
2. OPETH – In Cauda Venenum (version anglaise)
2. RISE TWAIN – Rise Twain
3. KLONE – Le Grand Voyage
4. ESSENCE OF DATUM – Spellcrying Machine
5. IAMTHEMORNING – The Bell
GUILLAUME FLEURY
1. OPETH – In Cauda Venenum
2. VEHEMENCE – Par Le Sang Versé
3. YEAR OF THE GOAT – Novis Orbis Terrarum
Ordinis
4. SONATA ARCTICA – Talviyö
5. BELENOS – Argoat (advance CD)
VANESSA GIRTH
1. KLONE – Le Grand Voyage
2. SLIPKNOT – We Are Not Your Kind
3. OPETH – In Cauda Venenum
4. KORN – The Nothing
5. VOLBEAT – Rewind, Replay, Rebound
EMMANUEL HENNEQUIN
1. CULT OF LUNA – A Dawn To Fear
2. BLUT AUS NORD – Hallucinogen
3. NEW MODEL ARMY – From Here
4. MONOLORD – No Comfort
5. KLONE – Le Grand Voyage
PHILIPPE LAGEAT
1. KLONE – Le Grand Voyage
2. DOOL – Here Now, There Then
3. OPETH – In Cauda Venenum
4. SAXON – The Eagle Has Landed 40 Live
5. MICHAEL SCHENKER FEST – Revelation
MORGAN RIVALIN
1. KORN – The Nothing
2. KLONE – Le Grand Voyage
3. AIRBOURNE – Boneshaker (advance CD)
4. OPETH – In Cauda Venenum
5. SLIPKNOT – We Are Not Your Kind
78
THE 69 EYES
West End
(Nuclear Blast/PIAS)
Goth’n’roll
Sortie : 13.09.2019
S’il est bien une constante dans la car-
rière de The 69 Eyes, c’est la propension
du groupe à écrire sur chacun de ses
albums 1) une moitié de tubes qui se
retiennent à vie dès la première écoute
et 2) une autre moitié de titres qui se res-
semblent tous et sentent le remplissage
à plein nez. West End ne déroge pas à la
règle pas en nous offrant quelques très
bons moments, mais aussi pas mal d’en-
nui. « Two Horns Up », qui ouvre l’album
sur un duo avec Dani Filth, surprend : la
voix écorchée de Filth contraste évidem-
ment avec l’organe suave de Jyrki 69,
mais la chanson est bonne et dynamique,
tout comme « The Last House On The
Left » sur laquelle la voix punk de
Wednesday 13 fait merveille. On ne
pourra pas en dire autant du single « 27
& Done », plutôt mou du genou, ni
de « Ousiders » (qui rappelle le « Lost
Boys » du combo en beaucoup moins
bien) et encore moins de « Be Here
Now » sur lequel même le groupe sem-
ble s’emmerder ferme. Finalement, ce
sont les titres lents et « d’ambiance » qui
réussissent pleinement aux Finlandais,
comme le superbe « Change » qui sem-
ble tout droit issu des années 80 et pré-
sente Jyrki dans son meilleur rôle : celui
de crooner. Faut-il proposer à The 69
Eyes de ne sortir qu’un album sur deux
en gardant l’essentiel et en jetant le
superflu ? La question mériterait d’être
posée, en présupposant que le combo
ait lui-même conscience de ses forces et
de ses faiblesses. Six bons titres sur onze
pour West End... Allez, encore un petit
effort !
CHARLELIE ARNAUD . . . . . . . . . . . .6,5
BLACKRAIN
Dying Breed
(SPV/Season Of Mist)
Hard rock/glam
Sortie : 13.09.2019
Délivrés d’un entourage pour le moins
envahissant, les quatre Savoyards de
Blackrain espéraient passer un cap et
remettre un bon coup de fouet à leur car-
rière en publiant Released (2016). Hélas,
le destin en a décidé autrement ; mal
promu et insuffisamment défendu par
une maison de disques indifférente, ce
cinquième opus bien nommé, en dépit
1 - 3 = naze / 4 - 6 = moyen / 7 - 8 = bon / 9 - 10 = génial !
MON ALBUM DU MOIS par FRANÇOIS BLANC
ATLANTEAN KODEX
The Course Of Empire
(Ván Records/Season Of Mist)
Heavy/doom metal épique
Sortie : 13.09.2019
En 2013, la découverte de The White
Goddess, deuxième effort longue durée
de l’énigmatique quintet bavarois
Atlantean Kodex, nous avait durable-
ment impressionnés. Quel plaisir de se
plonger, encore et encore, dans ces cinq
odes lentes et majestueuses, de se per-
dre dans leur parfum de mystère et d’en
sortir avec le sentiment confus d’avoir
fait un rêve épique et grandiose dont les
images s’échappent au moment où l’on
croyait les saisir ! Visiblement biberonné
aux débuts de Manowar, à Manilla Road,
Candlemass et à la période viking de
Bathory, Atlantean Kodex, caché der-
rière une production qui fleure bon les
années 80, a tout simplement publié un
grand album de heavy metal épique,
aussi bien capable de séduire les
puristes que d’attirer à sa flamme tout
novice en mal d’évasion musicale sur
fond de heavy metal. Il aura fallu six
longues années à la formation pour nous
offrir une suite, mais force est de consta-
de ses mérites, n’a guère marqué les
mémoires et est rapidement retombé
dans un certain anonymat. Dès lors,
Blackrain s’est efforcé de retrouver l’es-
prit de ses origines, la fraîcheur de
Licence To Thrill (2008), solide manifeste
de glam et grand chouchou des fans.
Pour se faire, le combo a fait des infidé-
lités au célèbre Jack Douglas (Aerosmith,
Cheap Trick) et a rappelé son ancien pro-
ducteur, Chris Laney (Crashdiet, Crazy
Lixx, Dynazty), mieux placé pour doter
Dying Breed d’un son plus brut, aux
relents d’asphalte brûlante et de whisky
ter que l’attente en valait la chandelle.
Toujours aussi authentique dans son
expression, toujours aussi riche dans son
évocation des mythes et batailles, le
combo a laissé choir un peu de sa lour-
deur doom pour se rapprocher du heavy
des origines, avec chant expressif et
empli de conviction (Markus Becker a
fait de réels progrès), chœurs et guitares
harmonisées à la tierce. Moins évident
qu’autrefois dans ses mélodies, moins
répétitif dans son approche de la com-
position, le groupe a étoffé sa section
rythmique, ses arrangements (les
chœurs synthétiques de l’étincelant
« Chariots » sont dans la droite lignée du
travail de Quorthon sur le référentiel
Hammerheart), et s’il ne perd pas sa
signature sonore, évite ainsi l’écueil de
la redite. A mille lieues des albums sur-
produits et retravaillés à l’extrême, les
Allemands proposent une prestation
authentique, non dépourvue de certains
flottements (les superbes arrangements
de guitare claire de l’interlude « The
Innermost Light » ne sont même pas
calés sur les rythmiques, c’est dire !),
mais très riche en émotions (le remar-
quable refrain de « People Of The
Moon », les mélodies de guitare à pleu-
rer de « He Who Walks Behind The
Years », le démarrage tonitruant de
« The Course Of Empire », le clavier éva-
poré de la conclusion mélancolique
« Die Welt Von Gestern », etc.). Citer
tous les grands moments de cet album
serait un exercice fastidieux, mais si
cette sublime pochette (signée Mariusz
Lewandowski) exalte déjà votre imagi-
naire, alors n’attendez plus un instant
pour aller découvrir cette perle rare qui
a déjà ému l’ensemble de la presse teu-
tonne. Atlantean Kodex est grand !
FRANÇOIS BLANC . . . . . . . . . . . . . .8,5
frelaté. Et assurément, ce choix a été le
bon ! Varié tout en restant foncièrement
(hard) rock, ce nouveau disque mélange
les plaisirs, depuis les tubes entêtants
(l’éponyme et ses « na, na, na » insolents,
le simple et efficace « Blast Me Up »
réenregistré pour l’occasion), jusqu’aux
titres plus colorés et ambitieux (« Rock
Radio » s’inspire clairement du lyrisme du
Bat Out Of Hell de Meat Loaf), en pas-
sant par des pointes d’agressivité inat-
tendues (« Nobody Can Change », sur
lequel Swan s’essaie avec succès à
quelques cris plus extrêmes), sans omet-
tre la ballade de rigueur (« All Angels
Have Gone », un peu répétitive malgré
ses harmonies bien pensées). Fort d’une
basse groovy et bien mise en avant,
Blackrain durcit le ton (« Hellfire », porté
par un riff heavy très convenu mais indé-
niablement efficace, « Public Enemy » à
la rythmique chaloupée et aux lignes de
chant plaisantes) sans transiger sur son
caractère éminemment festif et son sens
de la mélodie. Comme de coutume, nom-
bre d’influences et références s’imposent
au gré des titres, et certaines intonations
nasillardes du vocaliste et compositeur
Swan agacent de temps à autre… Mais il
en faudrait plus pour gâter notre plaisir à
l’écoute de Dying Breed, œuvre de pas-
sionnés qui casse l’image prétentieuse
injustement associée à Blackrain et
donne simplement l’impression de
découvrir quatre potes s’éclatant à jouer
la musique qu’ils aiment le plus au
monde. Cette sincérité dans la démarche
contribue finalement à faire de ce
sixième méfait un disque attachant, qui
mérite qu’on s’y intéresse.
FRANÇOIS BLANC . . . . . . . . . . . . . . .7,5
CROBOT
Motherbrain
(Mascot Records/Wagram)
Hard rock bluesy plus très funky
Sortie : déjà disponible
Lors de l’annonce de la signature de
Crobot, en novembre 2018, son nouveau
label, Mascot Records, louait le cocktail
musical si personnel du groupe américain.
Un « mélange unique de bon vieux hard
rock, de funk, de blues et d’autres
MON ALBUM DU MOIS par BENJI
BLACK STAR RIDERS
Another State Of Grace
(Nuclear Blast/PIAS)
Hard rock
Sortie : 06.09.2019
Tout comme son « père spirituel » Thin
Lizzy (dans ses années dorées, lorsque
le génial Phil Lynott en était le leader
incontesté, puis dans ses diverses ver-
sions post-Lynott), Black Star Riders a le
plus grand mal à conserver un line-up
stable. Depuis ses débuts, il a déjà
« usé » un bassiste, un guitariste et un
batteur. Après la sortie de Heavy Fire
en 2017, Jimmy DeGrasso (batterie) et
Damon Johnson (guitare) ont mis les
voiles, respectivement remplacés par
Chad Szeliga (ex-Black Label Society) et
Christian Martucci (Stone Sour). Des
musiciens dont l’expérience, l’âge et le
pedigree ne semblaient, au premier
abord, pas forcément correspondre au
classic rock classieux pensé par Ricky
Warwick (guitare/chant, ex-The
Almighty) et Scott Gorham, le guitariste
historique de Thin Lizzy. Another State
Of Grace prouve avec éclat que, bien au
contraire, cette nouvelle mouture du
quintet n’a rien à envier à la précé-
dente. Car quel excellent disque nous
tenons ici ! Restant à la fois fidèle à son
style initial, mais le saupoudrant de
petites innovations bienvenues, Black
ingrédients », ainsi que la maison de
disques l’écrivait avant de préciser que le
gang pennsylvanien travaillait sur son
prochain album. Ce quatrième opus est
là, il se nomme Motherbrain et témoigne
d’une évolution étonnante d’un Crobot
cherchant coûte que coûte à élargir ses
horizons. C’est en tout cas le signal
envoyé par les compos les plus ramassées
du disque, visiblement travaillées et
Star Riders nous tient en haleine tout au
long des 38 minutes (la durée idéale
pour ce genre de disque) de ces dix
nouveaux morceaux. Cet opus débute
par l’enjoué « Tonight The Moonlight
Let Me Down », avec son refrain qui
squatte le cerveau dans la seconde. Un
solo de saxophone signé Michael
Monroe (ex-Hanoï Rocks) illumine plus
encore ce titre parfait pour le format
single, l’association « sax et moonlight »
ne pouvant ramener qu’au célèbre
« Dancing In The Moonlight » de Lizzy,
même si l’ambiance de deux morceaux
n’ont rien à voir. Thin Lizzy, on y pense
encore très fort avec l’hymne « Another
State Of Grace » et son ambiance guer-
rière et celtique qui, dans l’esprit, rap-
pelle « Emerald ». L’énergie est omni-
présente chez « Underneath The
Afterglow » et ses arrangements subtils
(percussions et claviers discrets),
« Standing In The Line Of Fire » (avec
son gros solo de wah-wah) ou encore
« In The Shadow Of The War Machine »
(certainement le plus faible du lot). Et
cette intro de twin-guitars sur « Ain’t
The End Of The World », quel régal !
Mais Black Star Riders sait aussi se mon-
trer moins direct et plus émotionnel,
comme sur le poignant « Why Do You
Love Your Guns ? », au sujet pesant sur
lequel Ricky Warwick s’exprime avec
passion dans ce numéro. « What Will It
Take », sur lequel ce dernier fait un duo
avec Pearl Aday (fille de Meat Loaf et
épouse de Scott Ian), évoque le
regretté et merveilleux artiste qu’était
Tom Petty, alors que le mélodique
« Poisoned Heart », doté d’excellents
chœurs, possède un petit côté
pop/punk fort plaisant. Au final, voilà
un disque qu’on ne se lasse pas d’écou-
ter et qui prouve, si besoin était, que
Black Star Riders est définitivement là
pour un bon bout de temps… Nous
continuerons à le suivre avec plaisir !
BENJI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8,5
 peaufinées pour séduire les ondes de
radios jusqu’alors hermétiques aux
qualités indéniables du combo. Pas
besoin de creuser beaucoup pour que la
première intuition soit confirmée. Sur
« Low Life », le duo Chris Bishop
(guitare)/Brandon Yeagley (chant,
harmonica) a ainsi collaboré avec le
compositeur/producteur Johnny
Andrews, un « faiseur de hits » qui a déjà
(co)écrit avec ou pour Apocalyptica, Tarja
Turunen, The 69 Eyes, Halestorm ou
encore Buckcherry. Le résultat est pour le
moins accrocheur, mais ce que
l’insaisissable Crobot gagne en efficacité,
il le perd en aura et en magnétisme. Sur
scène, il ne fait aucun doute que la tête
de barjot (à prendre comme un
compliment !) de Brandon Yeagley suffira
à injecter dans tout cela une dose de folie
salutaire, mais Motherbrain pâtit quelque
peu de ce qui ressemble à des
concessions, un dégraissage, voire à de
sacrés coups de ciseau. Réduit à portion
congrue, l’harmonica semble casé sur
« Burn », coécrit avec le guitariste du
groupe alternatif 10 Years, et si les effets
de guitare « à la Tom Morello » sont
toujours présents, pour les fans du
groupe, ils auront bien du mal à
compenser la quasi absence de délices
psychédéliques. Ça n’empêche pas ce
disque qui, au moins, a le mérite de ne
pas montrer un groupe faisant du
surplace d’aligner des réussites.
« Drown », par exemple, association
étonnante et détonante de vocaux
enfumés digne d’Alice In Chains et d’un
riff ultra frontal pas si éloigné que ça du
registre d’un Rammstein (!), ou encore
« Gasoline », compo incendiaire qui
commence de façon calme à la
Shinedown avant de prendre son envol à
mesure que Yeagley nous convainc qu’il a
bel et bien été « baptisé à l’essence ».
Désormais pas très éloigné d’un Monster
Truck, Crobot, formation au potentiel
évident, gagnerait tout de même à
parvenir à un meilleur dosage
d’originalité et d’efficacité sur le prochain
volet de ses aventures. Comptez sur nous,
nous allons le guetter.
MORGAN RIVALIN . . . . . . . . . . . . . .6,5
DAMIM
A Fine Game Of Nil
(Apocalyptic Witchcraft/Season Of Mist)
Death metal progressif
Sortie : déjà disponible
Damim est un quartette londonien dont
A Fine Game Of Nil est le troisième
album. Le précédent, The Difference
80
Engine, était sorti en 2007. Entre temps,
le guitariste/chanteur/compositeur du
groupe, Nathanael Underwood, est allé
prêter main forte à ses amis d’Akercocke
en tant que bassiste lors de la reforma-
tion du groupe. C’est donc sans grande
surprise qu’on trouve, sinon des ressem-
blances, du moins une culture commune
dans ces deux formations (ainsi que dans
Voices, troisième combo de la
« famille »). Ainsi, Damim affectionne lui
aussi les pièces longues aux rythmes
variés et aux structures tortueuses, mais
se révèle néanmoins être le plus méchant
du lot avec un son plus brut et des réfé-
rences plus nettes au death metal stricto
sensu. Reste que des compos comme les
deux instrumentaux « Necrokino » (avec
sa longue intro synthétique) et
« Existential Epiphany Within A Waking
Dream » (tout en acoustique et en délica-
tesse) ne sont absolument pas conçues
pour les die-hard fans bas du front que
seule l’extrême violence musicale inté-
resse. Une certaine ouverture d’esprit
est indispensable pour profiter pleine-
ment de l’écriture raffinée des Anglais.
Moyennant deux ou trois écoutes soute-
nues, A Fine Game Of Nil – plutôt ardu
au premier abord – ouvre grand ses
portes. Le mixage parfait de Neil Kernon
(Queensrÿche, Nevermore, Yes...) aide à
profiter pleinement de cette richesse et
l’envie d’y retourner se fait très rapide-
ment quotidienne. La scène londonienne
vient une fois encore de nous amener un
bijou. Non au Brexit !
CHARLELIE ARNAUD . . . . . . . . . . . . . .8
THE DEAD DAISIES
Locked And Loaded
(Spitfire Records/Sony)
Reprises
Sortie : déjà disponible
Pour être francs, nous nous sommes
interrogés sur l’opportunité de chroni-
quer cet album, et cela, pour deux rai-
sons. D’une part, Locked and Loaded est
un disque uniquement composé de
reprises et, d’autre part, une bonne moi-
tié d’entre elles sont déjà disponibles sur
des albums ou EPs du combo. Mais cette
galette est si bonne que nous avons plu-
tôt saisi l’occasion de mettre un coup de
projecteur dessus. Pour mémoire, The
Dead Daisies a été formé en Australie en
2013 par David Lowy, un homme d’af-
faires par ailleurs guitariste amateur qui
avait envie de se faire plaisir. Après avoir
recruté Jon Stevens (Noiseworks, puis
furtivement dans INXS) au chant, il a
MON ALBUM DU MOIS par EMMANUEL HENNEQUIN
CULT OF LUNA
A Dawn To Fear
(Metal Blade/Sony Music)
Post-metal
Sortie : 20.09.2019
Depuis ses débuts, Cult Of Luna nous a-
t-il déçus ne serait-ce qu’une fois ? Se
serait-il déçu lui-même ? Si le cofonda-
teur Johannes Persson fait part de
doutes concernant la période Eternal
Kingdom (2008), le bilan est sans appel :
le groupe suédois a marqué de son
empreinte toute la mouvance post-
metal au point d’en être devenu l’un des
emblèmes. Un style affirmé, une disco-
graphie qui compte autant de pochettes
que de tentations d’y revenir. Chaque
disque, un diamant noir. Ce groupe ne
sait visiblement pas ce que le mot
« déchet » veut dire et A Dawn To Fear,
qui succède à une période extrêmement
fructueuse (sorties live, plus les vertigi-
neux ensembles studio Vertikal et
Mariner), ne déroge pas à la règle. Si
« The Silent Man », le premier extrait, ne
nous avait pas vraiment bluffés, la
embauché quelques pointures du genre
pour constituer l’ossature d’un groupe a
géométrie variable, désormais plutôt
stabilisé (depuis deux ans) autour de
John Corabi (ex-Mötley Crüe/chant),
Marco Mendoza (ex-Whitesnake/basse),
Doug Aldrich (ex-Whitesanke/guitare) et
Dean Castronovo (ex-Journey/batterie).
De la grosse pointure qui a roulé sa
bosse, donc. Au menu de ce Locked And
Loaded, on retrouve de nombreux
artistes majeurs, à commencer par les
Beatles qui ont droit à deux reprises :
l’énorme « Helter Skelter », dans une ver-
sion qui déchire avec Jon Stevens au
chant, et un « Revolution » enregistré en
2018, bien modernisé et aux accents
blues. Globalement, force est de consta-
ter que l’interprétation des dix pépites
qui figurent sur ce disque est toujours
impeccable, enflammée et inscrite dans
un esprit très rock. C’est donc un bon-
heur d’entendre « Evil » de Howlin’ Wolf,
pourtant déjà réinterprété des milliers
de fois (de Cactus à Greta Van Fleet, en
passant par Clutch, tout récemment), ou
le moins connu « Midnight Moses »
d’Alex Harvey, ici distillé dans une
incroyable version aux guitares explo-
sives et aux relents cubains (cette cover
figurait sur le deuxième album de The
Dead Daisies, Revoluçion, paru en 2015).
Excellente version également du
« Highway Star » de Deep Purple (avec
découverte de l’album est comme celle
d’une caverne d’Ali Baba. Le groupe
s’est laissé porter par la musique, l’ins-
tinct a parlé et les fruits sont miraculeux.
Le mouvement interne à l’album, sa sty-
lisation et la recherche d’ambiances
(« Nightwalkers » et ses guitares en flot-
taison, « We Feel The End » et sa pro-
gression fantomatique, « Inland Rain » et
son océan de spleen) apportent de l’eau
au même moulin. En 2019, Cult Of Luna
continue à faire tout, sauf les choses à
moitié. Enregistré en Norvège, A Dawn
To Fear a impliqué tout le groupe en stu-
dio, pour un résultat à la fois oppressant
et cosmique. A cet égard, d’ailleurs, la
dimension spatiale du son peut être com-
parée à certains moments de Mariner,
démonstration de puissance réalisée à
l’époque (2016) en compagnie de Julie
Christmas (Made Out Of Babies). Cult Of
Luna reste maître en matière de clair-obs-
cur, et le sentiment final est que le noir
prédomine le nouveau tableau. Le
groupe n’y est pas allé à l’économie, les
compositions sont sculpturales. Quatre
d’entre elles oscillent entre dix et quinze
minutes (« Lights On The Hill »,
ambiances de nuit et splendide format
maximal) et les morceaux les plus longs
sont de ceux qui impressionnent le plus
(« The Fall », futur classique ?). La fin du
disque laisse une empreinte indélébile et
l’émotion, palpable, marque au fer rouge
ces amalgames de guitares ciselées, tout
en charbon et montagnes russes. Une
âme est là : ces profondeurs, on n’a
jamais le sentiment de les avoir explorées
complètement. Epique, mystérieux et
souvent bouleversant.
EMMANUEL HENNEQUIN . . . . . . . .8,5
une deuxième guitare en guise de cla-
viers) enregistrée live à Zagreb et sur
laquelle John Corabi s’en sort comme un
chef. D’ailleurs, le chanteur est claire-
ment mis à l’honneur sur cet album car
on le découvre très performant dans des
registres dans lesquels on ne l’attendait
pas forcément. Seule « Rockin’ In The
Free World » (Neil Young), qui « bénéfi-
cie » de l’apport d’un orchestre sympho-
nique (à l’occasion d’une prestation live
en Pologne), s’avère un peu pataude.
C’est dommage car une version plus
brute aurait certainement été plus
appropriée. Cela n’empêche pas cet
album de nous faire passer un excellent
moment, taper du pied, chanter à tue-
tête et jouer de l’air guitar. Quels mor-
ceaux ! Quel groupe aussi !
STEPHANE AUZILLEAU . . . . . . . . . . . . .8
ENTOMBED A.D.
Bowels Of Earth
(Century Media/Sony Music)
Death metal
Sortie : déjà disponible
Qu’a-t-on mis dans la bouffe de ces gar-
çons ? Après deux albums « bons mais
pas top » sortis en 2014 et en 2016,
Entombed A.D. revient aux sources avec
ce Bowels Of Earth qui fleure bon les
années 90 et qu’on eût volontiers vu sor-
tir après le Clandestine d’Entombed. La
 MON ALBUM DU MOIS par PHILIPPE LAGEAT
KLONE
Le Grand Voyage
(K-Scope/Wagram)
Metal atmosphérique/progressif
Sortie : 20.09.2019
Si son précédent opus, le très convain-
cant Here Comes The Sun (2015) élu
« Album du Mois » dans notre numéro
152, date de quatre ans, Klone n’en est
pas pour autant resté inactif dans l’inter-
valle. Déjà, en 2017, il a publié l’excel-
lent Unplugged (2017), disque acous-
tique enregistré sans public en août
2016 au Théâtre de la Coupe d’Or de
Rochefort (et lui aussi « Album du Mois »
dans nos colonnes). Le combo poitevin a
également bossé, en compagnie d’une
troupe théâtrale, sur la création musi-
cale Inoxydables : une pièce de Julie
Ménard donnée au Théâtre National
Populaire de Lyon qui l’a vu se produire
à une vingtaine de reprises. Bref, Klone
n’a pas chômé, en dépit des apparences,
et si Le Grand Voyage, initialement
annoncé pour le 22 mars dernier, ne sort
qu’aujourd’hui, c’est parce que le
combo, qui a tapé dans l’œil du label K-
Scope (un gage de qualité, cette maison
aux goûts exquis accueillant également
Anathema, Blackfield, Katatonia,
Porcupine Tree- Ulver, etc., excusez du
peu !), a dû régler quelques problèmes
contractuels. Ceci étant fait, c’est le 20
septembre que sortira ce sixième album
tant attendu, et c’est tant mieux car la
qualité est encore une fois au rendez-
vous. Plus encore que d’habitude, ce qui
n’est pas une moindre prouesse, Here
Comes The Sun ayant placé la barre très
haut. « Tout comme le ferait un
Anathema au faîte de son talent, c’est à
un véritable voyage que nous voici
conviés par un groupe au top de ce qu’il
sait faire de mieux depuis toujours :
transporter l’auditeur loin, très loin de
son casque audio » écrivait Charlélie
Arnaud dans notre numéro 152. Cette
description convient mieux encore à Le
Grand Voyage car rarement un album a-
t-il aussi bien porté son nom. Débutant
au son d’une nuit d’orage là où son
récent set du Hellfest s’est arrêté –
c’est-à-dire par « Yonder » – Klone
affiche clairement ses intentions : sur-
passer Here Comes The Sun de la tête et
des épaules. Avec ce premier titre
sublime, la mission est déjà remplie : son
cristallin (œuvre de Francis Castes aux
Studios Sainte-Marthe), magnifiques
arrangements, gros travail sur les
chœurs et les harmonies vocales (une
constante sur ce disque), refrain impara-
ble sur fond de compo apaisée, section
orchestrale, nappes de piano, etc.,
comme le chante superbement l’impec-
cable Yann Ligner, « nous flottons hors
de nos enveloppes corporelles, totale-
ment détachés de notre ombre ». Le
Grand Voyage vers l’au-delà a com-
mencé, hautement spirituel, le temps de
sept minutes de beauté indicible qui ont
filé comme deux. Quelle mise en
bouche ! « Breach », qui suit et
emprunte son début au « Breathe (In
The Air) » de Pink Floyd, est lui aussi
doté d’un refrain magique et appelle à
la résistance (« Ils n’en ont rien à foutre
de toi et moi / Viens / Peu importe ce
qu’ils pensent ») avec ses guitares rap-
pelant le Anathema des années 2000.
L’album (le premier enregistré avec le
batteur de Myrath, Morgan Berthet) est
rythmé par un propos lent, atmosphé-
rique, contemplatif, et des textes bai-
gnés d’amour, à tel point qu’on pourrait
le croire conceptuel (ce qu’il est peut-
être). L’intro de « Sealed » fait penser au
« Sirius » de The Alan Parsons Project,
tandis que « Indelible », avec ses synthés
barrés/psychés et son solo de saxo
débridé mais bucolique (Matthieu
Metzger est assurément l’homme de ce
titre), aurait mérité de durer deux ou
trois minutes de plus et non de s’ache-
ver en fade-out (en concert, peut-être ?).
« Keystone » est lui aussi perforé de
saxo (on croirait entendre une flûte) et
s’achève sur des orchestrations bien
senties de Raphaël Badawi. Dans cet
ensemble cohérent qui se tient de A à Z,
seul « The Great Oblivion », au début
très inspiré par Alice In Chains, se veut
plus metal (on est loin de The Dillinger
Escape Plan pour autant !) pour dénon-
cer la destruction de la nature. Un mor-
ceau hélas d’actualité au moment-même
où se consume la forêt amazonienne…
Une seule envie en écoutant Le Grand
Voyage : quitter la terre (la Terre aussi !)
pour s’envoler par-dessus les nuages
main dans la main avec l’être aimé. Pour
cette prouesse, applaudissements nour-
ris aux guitaristes Guillaume Bernard et
Aldrick Guadagnino (au bassiste Jean-
Etienne Maillard également) et à l’in-
croyable chanteur Yann Ligner, ce der-
nier parvenant même (beau tour de
force !) à s’approprier « The Spy »,
reprise de The Doors présente en guise
de bonus. Alors, un seul conseil : embar-
quez sans plus attendre pour ce voyage
astral à découvrir au casque, à fond !
Trip de l’année garanti !
PHILIPPE LAGEAT . . . . . . . . . . . . . . . . .9
 sensation que L-G Petrov a voulu repren-
dre les choses « là où elles ont com-
mencé à partir en sucette » est pré-
gnante. Les titres sont brefs, secs, sou-
vent rapides et toujours méchants. Ça
gueule, ça invective, ça tabasse. Les riffs,
toujours vomis avec ce son inimitable dû
à la fameuse pédale HM2 de Boss, ramè-
nent à la partition de base du death
metal originel et oublient le fameux
death’n’roll qui, de toute façon, com-
mençait à tourner en rond (seul
« Bourbon Nightmare » y fait allusion de
loin). Les soli sont eux aussi particulière-
ment brillants (« Eliminate », « Fit For A
King ») et prodiguent une touche de vir-
tuosité qui tranche avec la boucherie
sonore qui leur sert de tapis de sol. Fait
amusant : « I’ll Never Get Out Of This
World Alive », qui se fond si bien au reste
de l’album et qu’on jurerait écrit par le
groupe lui-même, est en fait une reprise
d’un tube 100% country de Hank
Williams (« Back At The Funny Farm » de
Motörhead figure également en bonus
sur l’édition limitée de l’album). Si L-G
Petrov a quelques fois donné l’impres-
sion qu’il laissait sa carrière partir à vau
l’eau et manquait quelque peu d’inspira-
tion, Bowels Of Earth est là pour remet-
tre les points sur les I, les barres sur les T,
et les queues aux Q. Un album qui fait
l’effet de retrouver un vieil ami qu’on
pensait ne plus jamais revoir !
CHARLELIE ARNAUD . . . . . . . . . . . . . .8
ESSENCE OF DATUM
Spellcrying Machine
(Season Of Mist)
Metal progressif instrumental
Sortie : déjà disponible
Spellcrying Machine aurait tout aussi
bien pu s’appeler Le Petit Lexique du
Prog Metal Illustré. Car à part la voix,
dont elle est privée puisqu’Essence Of
Datum est un groupe purement instru-
mental, c’est à une véritable formation
accélérée à laquelle nous avons droit sur
ce troisième album. Tout y passe, chaque
morceau investiguant une sous-catégorie
du genre. « Synthetic Soul Extractor »
nous fait une démo en bonne et due
forme du riff syncopé à la Cynic, avec la
basse en unisson et les soli de guitare
éruptifs. « Shikari Algorithm » (rien que
le nom du titre en dit long…) flirte avec
le black metal progressif de Ne
Obliviscaris (tiens, encore un compagnon
de label, décidément !), tandis que
« Pendulum », avec sa rythmique acérée
82
et ses mélodies à la tierce, sont un bel
hommage au « parrain » Dream Theater,
et notamment à son guitariste John
Petrucci, par le six-cordiste du combo,
Dmitry Ramanouski. C’est sans trop de
surprise qu’en milieu de parcours
« Vitality » débranche les amplis et pro-
pose un exercice acoustique agréable et
rafraichissant, tantôt mélancolique, tan-
tôt flamenco-hispanisant. C’est bien
entendu pour mieux repartir au galop, à
l’image de « Spellcryer », assez majes-
tueux, ou de l’ode au thrash vieille école
que constitue « Binar » avec son
condensé de plans à vitesse variable qui
se déguste comme un plaisir coupable.
Les biélorusses s’en sortent à chaque fois
avec les honneurs, étant noté qu’on
parle en réalité d’un duo, Ramanouski
s’associant à son compatriote Pavel
Vilchytski à la batterie. Et même si leur
objectif avoué de décrire une histoire
post-apocalyptique sans aucun mot n’est
pas atteint, nos amis n’ayant pas non
plus une force évocatrice dépassant les
capacités humaines, l’ensemble se tient
fort bien. Pas facile de décrire, ni de
juger un tel album. Le « tout instru » est
toujours un pari, et il est difficile d’éviter
l’écueil de la redite ou de l’inventaire à la
Prévert. C’est le second choix qui a été
fait sur Spellcrying Machine et, soyons
francs, nous préférons celui-ci car il reste
à la fois plus risqué et requiert plus de
talent que de répéter un format, même
de la plus brillante ou technique des
manières. Et si Essence Of Datum a eu le
bon goût de faire court (quarante
minutes, pas une de plus), cela ne vaut
pas pour cette atroce pochette dessinée
dont il aurait pu aisément se passer.
DJUL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
THE GRAHAM BONNET BAND
Live In Tokyo 2017
(Frontiers/Harmonia Mundi)
Hard rock
Sortie : déjà disponible
Enregistré au Japon le 16 mars 2017
avec le Graham Bonnet Band (Conrad
Pesinato se charge de la guitare), ce
concert balaie quarante ans de réper-
toire de Graham Bonnet, à l’exception
notable d’Alcatrazz, ce qui peut paraître
de prime abord étonnant au regard de
l’importance de ce groupe dans la car-
rière du chanteur. Mais vu que, depuis, le
guitariste virtuose Joe Stump (auteur de
nombreux albums solo) a remplacé
Conrad Pesinato et que la formation
s’est muée en une nouvelle incarnation
d’Alcatrazz (Cf. interview de Graham
Bonnet dans ce numéro), on comprend
mieux l’absence de titres de ce combo
dans le menu proposé. Et puis, il y a déjà
de quoi faire en piochant dans le reste
de la carrière du chanteur, en particulier
entre sa discographie solo, Rainbow,
MON ALBUM DU MOIS par MORGAN RIVALIN
KORN
The Nothing
(Roadrunner/Warner Music)
Neo metal
Sortie : 13.09.2019
En 2016, The Serenity Of Suffering avait
confirmé que Korn voulait encore en
découdre. En confiant son successeur
aux mêmes gourous des potards, à
savoir le producteur-star Nick
Raskulinecz (Rush, Alice In Chains) et le
« mixeur » qui monte Josh Wilbur
(Gojira, Lamb Of God), le pionnier du
neo metal originaire de Bakersfield
envoyait un très bon signal aux nom-
breux fans qui ont aimé cet album très
réussi. Mais il était écrit que, pour Korn,
The Nothing devait être un opus à part
dans sa discographie… Malheureusement.
Le 17 août 2018, Deven Davis, la femme
du chanteur du groupe, Jonathan Davis,
succombe à une overdose de drogues et
de médicaments. Le couple était visible-
ment séparé depuis quelque temps,
mais le choc est incroyablement dur
pour le musicien, et pour les deux
enfants du couple. Ainsi qu’il nous le
confie dans ces pages sans détour,
Jonathan Davis se plonge alors à corps
perdu dans l’écriture des textes et dans
l’enregistrement de ce qui deviendra
The Nothing. En français, ça donne « le
vide ». « Le néant ». Pas besoin d’épilo-
guer. Une fois de plus, le musicien à
fleur de peau, qui se livrait déjà corps et
MSG, et Impellitteri. On mesure en effet,
à l’écoute de ce live, que Graham Bonnet
a contribué à graver quelques belles
pages de notre genre musical favori,
aussi bien dans le domaine du hard rock
pur et dur que sur des terrains plus FM
(« California Air »). Vocalement très en
forme ce soir-là, le patron oblige ses
camarades à donner le meilleur d’eux-
mêmes, et même s’il n’a clairement pas
un jeu aussi étincelant que celui de Joe
Stump, Conrad Pesinato s’en sort plus
qu’honorablement sur les parties de
Ritchie Blackmore et Chris Impellitteri (la
version de « Stand In Line » du groupe
de ce dernier est par exemple très réus-
sie). Quant aux morceaux les plus
récents, force est de constater qu’ils pas-
sent bien le cap de la scène, à l’instar du
très énergique « Into The Night ». Le
final désormais classique composé de
« All Night Long » et « Lost In
Hollywood » et emprunté à Rainbow
âme sur « Daddy », le dernier morceau
de son premier opus (Korn/1994), exor-
cise ses démons en se réfugiant dans le
gros son. Certainement impudiques
pour certains auditeurs, de nombreux
passages de The Nothing nous connec-
tent en prise directe avec les douleurs
qui hantent le chanteur. L’exemple le
plus parlant est l’intro « The End Begins
- BAKO » (Ndlr : « Bako » est le surnom
de la ville de Bakersfield), entamée au
son d’une cornemuse évoquant les
débuts du groupe et achevée dans les
cris et les pleurs… mais il y en a bien
d’autres. Jonathan Davis l’a dit, chacune
des treize plages de The Nothing a,
directement ou indirectement, été
influencée par son deuil. Indéniablement,
le noir et le blanc sont les seules cou-
leurs qui illustrent convenablement cet
album jouant constamment sur les
contrastes, entre cet arsenal de riffs une
nouvelle fois magnifiés par le travail du
tandem de producteurs (quel son !
Quelle basse ! Quelle section ryth-
mique !!!) et les envolées mélodiques
d’un Davis qui jamais ne dévie de sa tra-
jectoire et ne rate sa cible. En plus
d’être un indéniable exutoire, « Cold »,
titre qui place l’album sur de bons rails,
est l’illustration parfaite de l’ampleur
que prend ici la prestation du chanteur.
Vocaux schizophrènes/paranoïaques
(« The Darkness Is Revealing »), registre
quasi « dansant » (« Idiosyncrasy »,
rehaussé d’un riff à la « A New Level »
de Pantera), dark pop (« Can You Hear
Me »), beatbox (« The Ringmaster ») : la
palette de Docteur Davis et Mister
Jonathan n’a sans doute jamais été aussi
large. Ajoutez à cela des riffs au niveau
de certains classiques du groupe –
« H@r3r » ou encore « This Loss »
devraient faire des ravages sur scène –
et vous obtenez un excellent cru de la
part de ce groupe affichant déjà plus de
25 ans d’âge. A n’en pas douter, les pro-
chains concerts de Korn feront une nou-
velle fois de sacrés ravages.
MORGAN RIVALIN . . . . . . . . . . . . . .8,5
(avec des parties de claviers de Jimmy
Waldo tout à fait à la hauteur de celles
de Don Airey) clôt les hostilités avec brio
et efficacité, car même si l’on a déjà
entendu et réentendu ces classiques, la
conviction est toujours de mise. En
bonus, nous avons droit à une version
avec des paroles modifiées de la ballade
« The Crying Chair » qui figurait sur le
dernier album studio du combo :
Meanwhile, Back In The Garage. En
conclusion, cet album live, sans être tota-
lement indispensable, n’en est pas moins
de qualité et peut servir d’introduction à
la carrière, hors Alcatrazz donc, de ce
grand Monsieur qu’est Graham Bonnet.
STEPHANE AUZILLEAU . . . . . . . . . . . . .7
HERRSCHAFT
Le Festin Du Lion
(Les Noires Productions/Season Of Mist)
Metal electro/indus
Sortie : déjà disponible
Herrschaft, c’est un peu comme ces
publicités vantant les vertus d’un artisanat
français qui, pour parvenir à un résultat
de qualité, donne du temps au temps.
Herrschaft mature en cave. Mieux : il est
moulé à la louche ! Il aura ainsi fallu
attendre pas moins de six ans après Les
Douze Vertiges (2013) pour pouvoir
croquer dans Le Festin Du Lion. Entre
temps, Herrschaft a fait sa mue. Une mue
vocale, principalement, puisque son
batteur MaX, camarade de jeu du multi-
instrumentiste/producteur Zoé H. (The
CNK, Ambassador 21, etc.), est passé au
chant. Si la dimension black metal des
débuts du groupe hexagonal a pris du
plomb dans l’aile, que les puristes se
rassurent : les vocaux du frontman restent
définitivement malsains, voire
délicieusement purulents. Ouf !
Clairement électronique, le metal selon
Herrschaft est teinté de sonorités indus,
de riffs martiaux (« Stray Dog »), de
nappes de claviers planants, de chants
grégoriens, passages instrumentaux
rehaussés de spoken words (« But I
Know », mélodies entêtantes et autres
refrains über accrocheurs au service
d’ambiances décadentes (« The Great
Fire »), véhicules tout désignés pour
affoler de sombres dancefloors.
Particulièrement riche, Le Festin Du Lion
porte donc bien son nom. Au passage,
précisons que le morceau du même nom
voit MaX s’exprimer en français pour un
résultat convaincant. Son accent anglais
est (vraiment) loin d’être parfait, mais il en
ressort toutefois un charme, un côté glacé
qui colle particulièrement bien au propos.
Si Le Festin Du Lion montre le plus
souvent les crocs, saluons, aussi, la prise
de risque « Hate Me » qui voit nos
Frenchies s’aventurer sur des terres
goth/pop avec une certaine réussite.
C’est sûr, MaX et Zoé H. en ont encore
sous le coude. A suivre, donc.
MORGAN RIVALIN . . . . . . . . . . . . . .7,5
IAMTHEMORNING
The Bell
(K-Scope Records/Wagram)
Rock indépendant et progressif
Sortie : déjà disponible
Iamthemorning (qui tient son nom du
morceau du même nom des regrettés
Oceansize) nous avait ravis avec
NOTRE ALBUM DU MOIS
par CHARLELIE ARNAUD & GUILLAUME FLEURY
OPETH
In Cauda Venenum
(Nuclear Blast/PIAS)
Rock progressif
Sortie : 27.09.2019
Si la théorie selon laquelle la majorité
des groupes publient leurs œuvres les
plus intéressantes durant leurs premières
années avant de tourner en rond peut
s’avérer cohérente pour bien des forma-
tions, force est de reconnaître qu’Opeth,
du haut de ses treize albums, se pose
comme l’une des quelques magnifiques
exceptions à la règle. Alors, pourquoi In
Cauda Venenum est-il, selon nous,
appelé à devenir un classique ? Pour sa
production, d’abord, tout simplement la
meilleure dont ait bénéficié le groupe
suédois depuis sa seconde ère. Œuvre du
Park Studio de Stockholm (sur recom-
mandation d’un certain Tobias Forge), la
mise en son de Stefan Boman (Def
Leppard, Alice Cooper, The
Hellacopters) est remarquable de clarté
et de chaleur, et tranche avec le son
presque fuzzy et bien moins convaincant
de Sorceress (2016). Ses musiciens,
ensuite, s’expriment dans une alchimie
remarquable, de la batterie d’un Martin
Axenrot qui a totalement trouvé sa place
et affiné son jeu depuis son arrivée il y a
plus de dix ans, à un Martin Mendéz
dont la basse s’avère aussi indispensa-
ble, expressive et groovy qu’à l’accoutu-
mée, en passant par un Fredrik Akesson
plus présent que jamais et délivrant de
superbes soli (à l’instar d’Axenrot, le
bonhomme a totalement intégré la patte
Opeth dans son jeu) ou un Joakim
Svalberg dont les claviers servent cette
atmosphère « cosy flippante » unique.
Mais c’est Mikael Akerfeldt qui fait sen-
sation sur ce treizième album, avec une
prestation vocale tout simplement souf-
flante de variété et de maîtrise, et d’au-
tant plus délectable dans sa version sué-
doise (selon votre serviteur, la meilleure
des deux, tant on sent Mikael habité,
ainsi qu’en témoigne notamment le sub-
til « Minnets Yta / Lovelorn Crime »), le
bougre multipliant les intentions vocales
avec une réussite qui a de quoi laisser
coi. Enfin et surtout, la composition : le
groupe renoue avec une virtuosité
encore supérieure à celle de Pale
Communion (2014) – pour nous, le meil-
leur de ses albums « nouvelle ère »
jusqu’à présent – et renoue même avec
des atmosphères et une dynamique que
nous ne lui avions plus connues depuis
bien longtemps. Si beaucoup repro-
chaient à Opeth d’avoir perdu de sa per-
sonnalité en amorçant son virage rock
psychédélique, on distingue en effet ici
des plans qui renvoient directement aux
grandes heures d’un Blackwater Park
(2001) et d’un Still Life (1999), que ce
soit dans les mélodies ou dans leur mise
en son, si caractéristique. Car c’est bien
là le grand enseignement de ce disque
magistral : les Suédois ont, après avoir
expérimenté sur trois albums, atteint
leur maturité dans ce « nouveau » style
qui est le leur. Et, en digérant mieux que
jamais leurs influences plus rock, ils
signent ici le fameux équilibre idéal entre
Opeth « classique » et « nouveau » que
beaucoup leur reprochaient de ne pas
maîtriser depuis 2011. Le tout, sans
chant extrême. In Cauda Venenum est
un petit bijou qui rejoint à nos yeux les
plus grandes œuvres d’Opeth et mar-
quera sans aucun doute un tournant
dans sa carrière, se posant par ailleurs
comme son effort le plus abouti
depuis… Damnation (soit seize ans).
Ajoutez à cela une magnifique pochette
et la vie paraît si simple !
GUILLAUME FLEURY . . . . . . . . . . . . . . .9
Belighted (2014) et surtout le concept-
album Lighthouse (2016) qui lui avait
valu une belle reconnaissance critique,
notamment avec le titre d’album de l’an-
née aux Prog Awards. Le duo russe com-
posé du pianiste classique Gleb Kolyadin
et de la chanteuse Marjana Semkina est
resté soudé malgré des expériences indi-
viduelles à droite à gauche (un album
solo éponyme paru en 2018 pour le pre-
mier, quelques featuring pour la
seconde), et nous revient donc avec un
troisième essai nommé The Bell. Pensé
comme un cycle de dix titres et inspiré
par l’approche de Schubert en la matière
et l’Angleterre victorienne (terre d’asile
de la chanteuse depuis quelques mois),
ce disque se veut particulièrement réflé-
chi et travaillé en amont… En témoigne
notamment la richesse de l’instrumenta-
tion mise en avant dès « Freak Show »,
avec section rythmique, saxophone
grondant et guitares en renfort du duo.
Il en va de même avec les cordes de « Six
Feet » et sur la seconde partie hypno-
MON ALBUM DU MOIS par DJUL
RISE TWAIN
Rise Twain
(Inside Out Music/Sony Records)
Rock indépendant et progressif
Sortie : 06.09.2019
« Rise Twain ». Ce nom ne nous disait
rien, mais il a suffi que le nom de son co-
fondateur, Brett Kull, soit cité pour que
nous nous y intéressions immédiate-
ment. Il faut dire que le multi-instrumen-
tiste et producteur américain est un
sacré client en matière de composition,
comme il a pu le prouver à maintes
reprises chez Echolyn, l’une des forma-
tions les plus méconnues et mésesti-
mées du rock progressif. Un groupe qui
aurait mérité d’être placé au même rang
que Spock’s Beard : autrement dit, des
rares formations à avoir permis au genre
de survivre au milieu des années 90.
L’une des forces de l’écriture de Kull est
cet art de jouer sur les ambiances et les
sentiments doux-amers, et de trouver
des mélodies souvent immédiates, ce
qui est loin d’être commun dans le style.
Quel plaisir, donc, que de retrouver
cette « patte » après le dernier Echolyn,
I Heard You Listening paru en 2015, sur
ce nouveau projet : Rise Twain. Et ce,
d’autant qu’il s’agit d’un duo avec le
chanteur/pianiste J.D. Beck, membre de
The Scenic Route et Beck-Fields, incon-
nus au bataillon. Pas surprenant, car l’ar-
tique du très long « Salute », qui se solde
par un solo de guitare amenant une
diversité sonore bienvenue. « Sleeping
Beauty » permet à Kolyadin de se laisser
quelque peu aller au piano, et sa tech-
nique brille par endroits, à l’image de
« Lillies », sur lequel ses gammes et sa
rythmique plaquées les unes aux autres
occupent tout l’espace sonore. « Blue
Sea » et « Song of Psyche » disposent
d’un côté folk qui rappelle un peu le col-
lectif Delirium, avec ce côté à la fois apai-
sant et mystérieux. Sans surprise avec la
voix de Marjana, impossible de ne pas
penser à Kate Bush à l’écoute d’un titre
comme « Ghost Of A Story », qui joue sur
cette forme de fausse innocence propre
à la belle Anglaise, notamment sur ses
trois premiers albums. C’est le même
constat sur la conclusion, à savoir le mor-
ceau éponyme parfois juste murmuré et
sur lequel le chant se love délicatement
entre quelques arpèges et aurait sa
place sur le Never For Ever (1980) de
Bush. On regrette toutefois un propos
tiste évolue plutôt dans les sphères du
rock indépendant. Or, c’est justement
cette union qui fait tout le sel de ce
disque. Kull s’est dit impressionné par la
voix de Beck (découverte en 2007,
lorsqu’il produisait The Scenic Route) et
c’est peu dire que tout l’album semble
composé pour lui servir d’écrin. Il faut
dire que ce dernier possède un « bien
bel organe », capable par moments de
tutoyer un Jeff Buckley, et lorsqu’il est
relayé en canon par son acolyte, on s’ap-
proche du génie (le segment central de
« Into A Dream »). Le premier single,
« Everspring », est lui aussi une mer-
veille de morceau, flirtant avec classe du
côté du blues, mais également du jazz,
et sur lequel on retrouve d’emblée le
sens des refrains imparables et à tiroirs
de Kull. Ce dernier ne rechigne pas à
introduire un peu de complexité au sein
de cette formule très accessible, comme
sur « The Range », avec sa rythmique qui
se met en place au fil des secondes et ce
léger voile de mélancolie en toile de
fond, toujours très bien senti.
« Golden », son solo en wah wah et sa
structure en montagnes russes, est l’une
des rares incursions de Rise Twain dans
le progressif, et elle se fait à pas feutrés.
« Death Of Summer » et « Falling
Skies », par exemple, fleurent bon le
folk et l’americana dans ce qu’ils ont de
plus délicat, y ajoutant des arpèges et
des arrangements luxuriants, évoquant
ce que peut produire une formation
« hype » comme Foals. Plus générale-
ment, le travail sur les harmonies fait
mouche à tous les coups et fait de Rise
Twain une sacrée machine à tubes
lorsque le propos s’égaie (« Oh This
Life », « That Is Love »). Ce duo de
Philadelphie livre ici un premier album
éponyme qui réussit la prouesse, para-
doxale, d’être d’une richesse impres-
sionnante avec une économie de
moyens inversement proportionnelle.
DJUL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8
parfois un peu trop évanescent et peut-
être moins mémorable par moments que
sur les albums précédents (« Black And
Blue », tout juste passable). C’est ce qui
nous fait placer ce disque en deuxième
place seulement, derrière Lighthouse,
dans notre Top 3 personnel.
DJUL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
ISOLE
Dystopia
(Hammerheart/Season Of Mist)
Doom metal
Sortie : déjà disponible
En activité depuis 2004, Isole compte
parmi ces références du doom metal
épique qui n’intéressent malheureuse-
ment qu’un public limité, mais dont le
nom est prononcé avec respect par les
puristes, ne serait-ce que pour honorer la
longévité de leurs carrières et la qualité
de leurs sorties – qui tendent, dans le cas
du quatuor qui nous intéresse ici, à se
ressembler entre elles, il faut bien le
reconnaître. C’est la première fois,
depuis la parution du premier opus
Forevermore en 2005, qu’une période
MON AUTRE ALBUM DU MOIS
par CHARLELIE ARNAUD
SLIPKNOT
We Are Not Your Kind
(Roadrunner/Warner Music)
Neo metal
Sortie : déjà disponible.
Depuis la sortie de We Are Not Your
Kind, le 9 août dernier, les réseaux
sociaux s’enflamment et une rumeur
s’amplifie : Slipknot aurait sorti un chef
d’œuvre. Alors, qu’en est-il ?
Convenons que ça y ressemble diable-
ment. Il faut en effet remonter à l’année
2004 et au superbe Vol.3 : The
Subliminal Verses pour trouver, dans la
discographie du groupe, un disque
aussi aventureux, équilibré, certes vio-
lent mais surtout truffé de mélodies
imparables. Dès le chœur féminin qui
fait le pont entre l’intro « Insert Coin »
et « Unsainted », on sent que quelque
chose de gros se prépare. Tout d’abord,
le tandem Greg Fidelman/Joe Barresi a
donné à cet album un son absolument
dantesque. Ensuite, si les riffs de Jim
Root et de Mick Thomson sonnent tou-
jours comme autant de tronçonneuses,
le batteur Jay Weinberg a lui aussi été
gâté par les sondiers. Exit les grosses
de quatre ans espace deux disques du
quatuor ; il faut dire qu’entre temps,
Daniel Bryntse (chant, guitare) et Crister
Olsson (guitare, chant), têtes pensantes
du projet, ont franchement donné la
priorité à leur autre groupe, Ereb Altor,
qui s’inscrit dans une mouvance
black/viking et touche visiblement un
public plus large. Il est cependant possi-
ble que cette longue pause ait fait du
bien aux Suédois, Dystopia s’avérant,
dès les premières écoutes, plus prenant
que ne l’était son prédécesseur, The
caisses synthétiques et le son de mitrail-
lette instauré par Joey Jordison en son
temps. Weinberg s’est définitivement
affranchi de son prédécesseur et son
style (bien plus fin) colle à merveille aux
aspirations expérimentales de l’album.
Mais le grand vainqueur de cette nou-
velle livraison est sans aucun doute
Corey Taylor, qui a véritablement abattu
un boulot de dingue. Toujours hysté-
rique sur une majorité des couplets, le
bonhomme a en revanche franchi un
palier en termes de mélodies. Les
refrains sont travaillés comme jamais
(mention spéciale au sublime « Nero
Forte ») et, à plusieurs reprises au cours
de l’album, l’ombre d’un Faith No More
plane furtivement au-dessus des chan-
sons (Cf. le rampant « Spiders » avec ses
handclaps très bien vus). Le mi-acous-
tique mi-ultra heavy « A Liar’s Funeral »,
avec son passage en chant death, est
symptomatique de cette évolution :
Taylor, cette fois, se lâche complète-
ment et ose tout, quitte à choquer.
Point d’orgue de cette audace : l’atmo-
sphérique « My Pain », sorte de longue
litanie planante de presque sept
minutes que jamais nous n’aurions pu
imaginer de la part du combo de l’Iowa.
Pas de doute : la maturité est à son
comble. Avec 63 minutes au compteur,
dont aucune n’est superflue, We Are
Not Your Kind est véritablement un
disque qui fera date dans la carrière du
groupe. On entend souvent dire que les
derniers dinosaures du metal disparais-
sent et qu’il n’y a plus personne pour
les remplacer. N’ayez crainte : tant que
sortiront des albums de cette trempe, il
ne sera pas question de parler du style
à l’imparfait.
CHARLELIE ARNAUD . . . . . . . . . . . . . .9
 Calm Hunter. S’inscrivant toujours dans
le sillage de Solitude Aeturnus, Solstice
et Candlemass (en moins lyrique et cryp-
tique), Isole, fidèle à ses habitudes, signe
de très belles compositions, à commen-
cer par l’ouverture « Beyond The
Horizon » dont l’atmosphère, les claviers
distants et le riff évoquent, de loin, le
célèbre « She Is The Dark » de My Dying
Bride. Inhabituellement complexe dans
sa construction, ce titre captive de bout
en bout grâce à ses harmonies de gui-
tare, son ralentissement à mi-parcours,
ses rythmiques intenses et l’interpréta-
tion soignée de Bryntse, dont le beau
chant clair fonctionne toujours aussi bien
(on songe même à Mikael Akerfeldt
d’Opeth sur « Galenskapens Land »,
autre pièce de bravoure et grande réus-
site de l’album, entièrement interprétée
en suédois). Pourvoyeur obstiné d’un
doom traditionnel pesant et mélodique,
notre guide nous ramène fréquemment
dans des contrées familières, où réson-
nent des mélodies inquiétantes jouées
avec lenteur (« Written In The Sand »),
mais sait aussi ménager ses effets et
réveiller son auditoire (« You Went
Away » et « Forged By Fear », avec leurs
brèves incursions en chant death oppres-
sant). Si les deux compositeurs n’ont tou-
jours pas trouvé l’ingrédient secret qui
rendrait leurs compositions passion-
nantes et leur permettrait d’accoucher
d’hymnes intemporels, Isole signe, avec
Dystopia, l’un de ses opus les plus som-
bres et, sans se réinventer le moins du
monde, ajoute une belle pierre au vaste
et menaçant édifice que constitue sa dis-
cographie.
FRANÇOIS BLANC . . . . . . . . . . . . . . . . .7
KILLSWITCH ENGAGE
Atonement
(Columbia/Sony Music)
Metalcore
Sortie : déjà disponible
Pionnier du metalcore, Killswitch Engage
ne s’éloigne que rarement du sillon qu’il
a contribué à creuser, album après album,
année après année. « Rarement », et
même... quasiment jamais. A n’en pas
douter, les aficionados du combo
américain salivaient déjà en apprenant
l’arrivée d’un nouvel opus produit par le
duo à l’œuvre sur les meilleurs albums du
combo. Qu’il s’agisse des référentiels
Alive Or Just Breathing (2002) et The End
Of Heartache (2004), ou de l’excellent
Disarm The Discent (2013) célébrant le
retour de Jesse Leach au micro, tous ont
été produits par le guitariste Adam
Dutkiewicz et mixés par l’incontournable
Andy Sneap (Megadeth, Amon Amarth).
Ça sentait bon, comme on dit. Et
effectivement, Atonement renferme un
bon paquet de pépites enrobées dans le
béton armé. Même si sa gestation a été
compliquée par les sérieux problèmes
vocaux que Jesse Leach a rencontrés (Cf.
interview en ces pages), le huitième
album du gang du Massachusetts nous
offre quelques futurs classiques intitulés
« Unleashed », sur lequel le frontman
rugit comme le félin de la pochette, « Us
Against The World » (tiens, un riff qui
sonne plus In Flames que les récents riffs
88
d’In Flames !), ou encore « The Signal
Fire ». Ce dernier mérite qu’on s’attarde
sur son cas, puisqu’il a la qualité de nous
offrir le premier duo entre les deux
frontmen du combo. C’est un plaisir
auditif que d’écouter Jesse Leach et
Howard Jones (présent dans les rangs du
groupe entre 2002 et 2012) sur le même
morceau, doublé d’un bon signal adressé
collaboration de telles pointures) qui ne
sont pas au niveau attendu, tant du point
de vue de la composition que du jeu.
Heureusement, « Lightning », morceau
bien plus calme, propulse l’album dans
une autre dimension. L’air de rien, l’émo-
à tous ceux qui regrettaient que KSE ait
un peu donné l’impression de négliger
une part importante de son passé. La
participation du charismatique Chuck Billy
(Testament) à « The Crownless King »
donne également naissance à un morceau
« maousse costaud », et il y a fort à parier
que les pogoteurs en herbe lamineront
les parterres de tous les festivals où
résonnera ce titre, mais aussi le puissant
« Bite The Hand That Feeds ». S’il fallait
émettre un bémol, voire un regret, c’est
que l’effet de surprise est de moins en
moins présent sur les disques du quintet.
Pas de quoi se prendre trop la tête, mais
il serait tout de même souhaitable que
KSE change la donne en renversant la
table. Pour l’heure, savourons les
meilleurs titres de ce nouveau skeud et
remercions une fois encore Jesse Leach
pour sa sincérité, son engagement et son
implication de tous les instants. On a
besoin de plus de musiciens comme lui
qui osent parler de leurs failles (« I Am
Broken Too ») sans avoir peur de passer
du statut de rockstar à celui de simple
mortel. Grâce à tous les porte-paroles
munis de portevoix que sont les
chanteurs, on pourrait sans doute éviter
bien des malheurs.
MORGAN RIVALIN . . . . . . . . . . . . . .7,5
KXM
Circle Of Dolls
(Frontiers/Harmonia Mundi)
Hard rock
Sortie : 13.09.2019
KXM nous avait mis sur le cul avec son
deuxième album, Scatterbrain, sorti en
2017. Ce qui, au départ, n’était qu’une
« simple » envie de jammer de la part de
trois musiciens hyper talentueux – à
savoir Doug Pinnick (chant, basse) de
King’s X, Ray Luzier (batterie) de Korn et
George Lynch (guitare) de Dokken/Lynch
Mob – s’est donc transformée en super
groupe pérenne, conjuguant amour du
hard rock et beau jeu. Nous étions surex-
cités à l’idée de découvrir ce troisième
opus. Hélas, les choses démarrent plutôt
mal avec trois titres assez communs (par
rapport à ce qu’on pouvait espérer de la
MON ALBUM DU MOIS par STEPHANE AUZILLEAU
SONS OF APOLLO
Live With The Plovdiv Psychotic
Symphonic
(Inside Out/Wagram)
Metal progressif
Sortie : déjà disponible
Pour un groupe, publier un triple CD live
proposant près de trois heures de
musique en ayant un seul album studio à
son actif peut paraître étonnant, voire
prétentieux. Mais quand on réalise que
les cinq protagonistes de Sons Of
Apollo cumulent plus de 150 ans de car-
rière et ont joué avec des artistes
comme Alice Cooper, David Lee Roth,
Guns N’ Roses, Dream Theater, Yngwie
Malsmteen, Journey, Kiss, etc., ça
change un peu la donne. Mais surtout,
ce live enregistré en Bulgarie (à Plovdiv,
dans un magnifique théâtre antique)
avec un orchestre symphonique consé-
quent en deuxième partie de set, nous
permet de passer un excellent moment
en compagnie de Sons Of Apollo. Et si le
talent de la section rythmique compo-
sée de Billy Sheehan (basse) et Mike
Portnoy (batterie) est une évidence, de
même que celui du chanteur Jeff Scott
Soto (dont la femme est bulgare, et qui
parle un peu cette langue avec le public,
notamment dans son intermède solo), ce
Live With The Plovdiv Psychotic
Symphonic met particulièrement en
lumière les qualités de Ron Thal à la gui-
tare et de Derek Sherinian aux claviers.
Et ce, dès le démarrage du show, et
notamment cette énorme version de
« Sign Of The Times ». On comprend
tion est bien plus présente, et la guitare
de George Lynch plus inventive, tandis
que Ray Luzier se lâche, dans un esprit
plus jazz fusion que metal d’ailleurs. La
voix de Doug Pinnick est toujours aussi
originale et solide, comme si l’âge
n’avait aucune prise sur ce dernier. Moins
bestial et puissant que Scatterbrain,
Circle Of Dolls développe, souvent avec
bonheur, la fibre plus subtile du combo
(« Time Flies »), proposant une mixture
foncièrement originale, à l’image de l’ou-
verture culturelle des membres qui com-
posent le groupe. Et cela, sans que ces
derniers oublient pour autant leurs
racines hard rock, voire blues, comme sur
« The Border » qui pourrait être un titre
de Black Country Communion, la forma-
tion de Glenn Hughes et Joe Bonamassa
dont on retrouve par moments un peu
mieux que ces musiciens aient été solli-
cités par des artistes de la trempe de
Guns N’ Roses, Kiss et Black Country
Communion ! Tous les morceaux du pre-
mier album du groupe sont présents et
envoyés avec énergie et conviction,
dont deux agrémentés de l’apport de
l’orchestre, et nous avons droit en plus à
une palanquée de reprises de classiques
du rock et du hard rock, pour l’essentiel
sans lien avec la carrière des protago-
nistes. C’est, par exemple, le cas du
« Dream On » d’Aerosmith (interprété
avec conviction par Jeff Scott Soto), du
« Kashmir » de Led Zeppelin (Billy
Sheehan y est impressionnant), « Diary
Of A Madman » d’Ozzy Osbourne (avec
de nombreux chœurs) ou encore de
cette belle version du « Comfortably
Numb » de Pink Floyd sur laquelle Ron
Thal est rayonnant. Comme on pouvait
s’y attendre, c’est Mike Portnoy qui a
choisi avec minutie le menu proposé (il
s’en explique d’ailleurs dans le docu-
mentaire figurant en bonus sur la ver-
sion DVD/Blu-ray). Les deux reprises de
Dream Theater sont elles aussi assez
bien balancées, mais c’est apparemment
sur « And The Cradle With Rock » de Van
Halen (chanté dans la foule par Jeff
Scott Soto) que le groupe semble pren-
dre le plus son pied. Alors, certes, on
peut s’interroger sur la réelle nécessité
des séquences solo de basse, guitare,
claviers et chant (seul Mike Portnoy ne
se laisse pas aller à l’exercice), quand on
possède une telle équipe et un tel nom-
bre de morceaux auxquels les musiciens
ont participé… Mais le fait est que le
résultat demeure franchement enthou-
siasmant et passe à vitesse grand V. Ce
live est également disponible en vidéo
(mais amputé de deux morceaux,
« Dream On » et « Comfortably Numb »,
pour des raisons techniques), pour un
résultat plutôt probant, même si les fans
de Billy Sheehan (pourtant incroyable-
ment présent dans l’espace sonore) vont
être déçus que ce dernier soit finale-
ment assez peu filmé. Virtuosité, rock et
fun sont au final les ingrédients de cet
album rafraîchissant et jouissif.
STEPHANE AUZILLEAU . . . . . . . . . .8,5
l’état d’esprit sur Circle Dolls. Pour
autant, ce troisième opus reste en-deçà
des énormes espoirs que nous avions
placés en lui et s’avère donc une certaine
déception… Pour l’instant en tout cas,
car il est évident que ce disque mérite
qu’on y revienne dans quelque temps, en
étant peut-être mieux disposé.
STEPHANE AUZILLEAU . . . . . . . . . .6,5
LACRIMAS PROFUNDERE
Bleeding The Stars
(Steamhammer/SPV)
Spleen metal/goth metal
Sortie : déjà disponible
Misère. Est-ce bien le groupe qui, un
jour, accoucha d’une splendeur mélanco-
lique nommée Burning: A Wish (2001) ?
Non, et à vrai dire, il ne l’est plus depuis
belle lurette. A l’époque, il y avait le
chanteur originel, Christopher Schmid
(frère du membre permanent Oliver
Nikolas), mais depuis, ça a valsé dans les
rangs. La gorge actuelle est la troisième
de cette petite histoire allemande et a
succédé à Rob Vitacca, lequel ne nous
avait rien fait oublier non plus. Tout le
monde ne se réinvente pas aussi bien
qu’un Alice In Chains et le nouveau venu,
Julian Larre (Lessdmv), ne bouleverse
pas vraiment la donne : Lacrimas
Profundere a toujours compté sur les
timbres médium-graves. Rebelote en
2019, et ça sent le cahier des charges à
plein nez. Alors, si rien ne choque vrai-
ment à l’écoute de cette collection dark
metal incluant quelques tubes
(« Celestite Woman », le plus lent
« Mother Of Doom ») et un goth metal
« électronifié » et élancé (« Father Of
Fate »), c’est parce qu’au fond, nous
avons peut-être plus changé que le pro-
pos du groupe lui-même, quasiment
immuable en dépit de ses mouvements
de personnel depuis les années 2000. Un
diagnostic tout sauf rassurant. Car le
problème vient moins de Larre, intégré
en 2018, que de la tonalité générale.
L’ensemble de cette collection, même si
elle ne se termine pas trop mal, nous
apparaît terriblement codée, prévisible.
Sans doute n’y a-t-il rien de pire face à
une mélodie que de se demander à quel
point on la trouve téléphonée.
Question : qui au monde saurait faire
croire à quiconque qu’il ne change
jamais ? Etes-vous le même qu’il y a ne
serait-ce qu’un jour, une minute ? (NdPL :
vous avez quatre heures !)
EMMANUEL HENNEQUIN . . . . . . . . . .5
MICHAEL SCHENKER FEST
Revelation
(Nuclear Blast/PIAS)
Hard rock
Sortie : 20.09.2019
Compte-tenu du nombre de musiciens
investis dans ce projet et les égos de
chacun, on pouvait sincèrement douter
de la solidité du Michael Schenker Fest
sur la durée. Pourtant, un an à peine
après l’enthousiasmant Resurrection, ils
sont tous là, ou presque… En effet, qua-
tre des chanteurs « historiques » de l’his-
toire de Schenker répondent, tout
comme sur Resurrection, présent à l’ap-
pel : Gary Barden, Graham Bonnet,
Robin McAuley et Doogie White. Steve
Mann (guitare/claviers) et Chris Glen
(basse), musiciens ayant eux aussi œuvré
au sein du MSG à différentes périodes,
sont de nouveau au programme. Le seul
absent par rapport à 2018 l’est pour de
bien tristes raisons : Ted McKenna, bat-
teur de haute tenue et auteur d’une très
belle performance sur Resurrection, est
décédé tout juste avant l’enregistrement
de ce nouvel album. Un coup dur pour
tout le monde, l’Ecossais étant autant
apprécié pour son jeu que sa bonne
humeur. Heureusement, dans l’adversité,
Michael Schenker a convié auprès de lui
deux autres batteurs ayant aussi pris
part à sa carrière : le légendaire Simon
Phillips et Bodo Schopf, qui n’ont pas
hésité à s’investir afin de donner un coup
de main au Mad Axeman après ce coup
du sort. Malgré cette regrettable
absence, Revelation sonne comme la
suite logique de Resurrection. Même sa
pochette à consonance « biblique » (qui
n’a pas manqué de faire beaucoup réagir
sur les réseaux sociaux !) montrant un
Michael crucifié sur sa guitare sous le
regard désolé de ses quatre vocalistes,
utilise le même type de codes gra-
phiques que La Cène revue et corrigée
du précédent opus. L’idée musicale est
également similaire : les quatre chan-
teurs participent à trois titres communs
(contre deux seulement sur l’opus précé-
dent) et se partagent le « reste du
gâteau » de façon équitable, chacun
chantant deux morceaux en solo. Il faut
ajouter à cela « Ascension » (une bien
meilleure pièce que le « Salvation » de
Resurrection), un instrumental frénétique
et typique de Schenker qui conclut l’al-
bum de façon plus qu’énergique, mais
aussi une surprise. En effet, Ronnie
Romero, actuel chanteur de Rainbow et
ex-Lords Of Black, se fend d’une appari-
tion sur « We Are The Voice », avec la
puissance et l’aplomb qu’on connaît au
Chilien. Une bonne « distraction » ! Du
côté des vétérans, rassurez-vous, tout se
passe également à merveille. Des trois
morceaux communs à tous les vocalistes,
« Sleeping With The Light On » s’avère le
plus attractif, même si l’hymne mélo-
dique « pépère » qu’est « Rock Steady »
et un « Old Man » à la sautillante ryth-
mique s’écoutent aussi avec plaisir. Puis,
chacun dans son registre, les quatre
mousquetaires apportent leur expé-
rience et leur enthousiasme. Que ce
soient sur les rapides « Under A Blood
Red Sky », « Lead You Astray », « Silent
Again », « The Beast In The Shadows »,
« Headed For The Sun » et « Still In The
Fight » (où ils se mettent tous au diapa-
son de Schenker et enclenchent le
turbo), ou le mid-tempo « Crazy Daze »
sur lequel Barden est comme un poisson
dans l’eau, tous mouillent le maillot.
Quant à « Behind The Smile », chanté
par White, il s’avère l’un des rares titres
au sein duquel les claviers de Mann sont
mis à l’honneur : dommage car l’apport
de cet instrument apporte une vraie frai-
cheur à ce très bon morceau. Et
Schenker dans tout ça ? Il reste fidèle à
lui-même : faisant passer l’intérêt des
morceaux avant sa technique et son fee-
ling hors du commun, le blond guitariste
n’en fait jamais trop, et même si chacun
de ses soli s’avère un ravissement, rares
sont les passages où l’Allemand se met
outrageusement en avant, à l’exception
évidemment de l’instrumental. Notons
quand même le final monstrueux de
« Lead You Astray » et le solo de « Under
A Blood Red Sky » qui rappellent à quel
point Schenker, lorsqu’il se sent en
confiance, est un merveilleux six-cor-
diste. Du beau boulot !
BENJI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8
MONOLORD
No Comfort
(Relapse/Modulor)
Doom stoner
Sortie : 20.09.2019
Ne leur parlez pas des étiquettes. Anti-
art, ces vénérables Suédois les exè-
crent : ils ne sont pas là pour ça, ne pen-
sent pas leur musique comme ça. En
cette rentrée 2019, le trio Monolord
publie un quatrième album réalisé aux
studios Let Them Swing de Göteborg.
C’est vital, stylé. L’essentiel est dans ce
constat, mais les étiquettes, le groupe
n’y échappera pas, et il s’en doute.
L’adepte de musique ou le curieux
entendra difficilement que ne sorte pas
au moins une référence évidente, la plus
sabbathienne possible en l’occurrence.
Nous céderons donc à cette facilité, cou-
pables ainsi nous resterons, mais pour le
reste, ne parlons que du son : un son
lourd, lent, doom en première ligne.
C’est la poisse, des marécages de satu-
rations chargées en fréquences basses.
Le recours à une authentique production
a fini d’en peaufiner les reliefs : des
reliefs live qui reflètent l’état de
marasme du monde. Un état que les
musiciens constatent eux-mêmes, un
brin atterrés, conscients de l’insuffisance
des réponses issues du débat entre intel-
lectuels, politiques et acteurs de la
société civile. Le discours du féministe
Esben Willems, batteur du groupe,
transpire d’une conscience de l’inélucta-
ble et de la nécessaire sagesse que nous
devrions mettre en œuvre dans l’évolu-
tion de notre rapport au monde (voir
interview en ces pages). La musique de
Monolord, elle, fige dans sa puissance la
léthargie des esprits face aux enjeux des
crises sociale et environnementale. La
mélodicité de ce binaire emporte tout
sur son passage, enthousiasmant par sa
science harmonique, son économie, son
efficacité. Le plus dur reste à venir et il
n’en demeure pas moins : cette photo
sonore entraîne autant d’angoisses que
de plaisir auditif. Peu de notes, une
vibration maximale : un pragmatisme
exigeant au service de l’émotion. C’est
tout le paradoxe de cette musique en
tension qui se termine par une apo-
théose intitulée « No Comfort ». Un
embrasement, un son vintage qui
exhume les racines. C’est le premier
album de Monolord pour Relapse qui ne
doit pas regretter le voyage. Vous ne le
regretterez pas non plus.
EMMANUEL HENNEQUIN . . . . . . . . . .8
THE NEW ROSES
Nothing But Wild
(Napalm Records/Season Of Mist)
Hard rock
Sortie : déjà disponible
The New Roses publie déjà son qua-
trième opus depuis 2013. Le quartet se
montrant particulièrement actif sur les
routes, la régularité de ses sorties d’al-
bums l’honore d’autant plus. Celui que
nous avons pris pour habitude de sur-
nommer « le plus américain des groupes
allemands » poursuit donc sa route en
accumulant les premières parties de luxe
(Scorpions, Kiss), d’autres plus confiden-
tielles mais formatrices (The Dead
Daisies, Audrey Horne) et des appari-
tions en festivals. Un régime haute-ten-
sion qui paye puisque, malgré ce rythme
soutenu, la qualité de ses albums
demeure constante, ainsi qu’en
témoigne une nouvelle fois Nothing But
Wild. Mettons tout de suite les choses
au clair : The New Roses n’apporte tou-
jours rien de nouveau à la musique en
général, et au hard rock en particulier.
Tout ce que le groupe propose, ou
presque, prend sa source dans le rock et
le hard rock US des années 80, voire 70,
les influences allant de Bon Jovi à Skid
Row en passant par Aerosmith, avec des
accents southern rock et parfois même
country rock. Nous pourrions aussi, sur
notre propre continent, citer le Gotthard
des débuts et The Quireboys, avec qui le
combo partage des valeurs communes.
Ceci étant posé, il faut aussi reconnaître
à The New Roses un sens aiguisé de la
composition. En effet, difficile de résister
à des titres aussi accrocheurs et
remuants que « Soundtrack Of My Life »,
« Can’t Stop Rock’n’Roll », « Unknown
Territory », « As The Crows Flies » ou
encore le plus heavy du lot, « Give &
Take ». Voici largement de quoi complé-
ter ses prochaine setlists avec la garantie
de retourner les salles ! Très mélodique
et doté d’un splendide refrain, « Down
By The River » a tout d’un hit en devenir
et devrait lui aussi faire partie des futurs
incontournables en concert. Plus sensi-
bles, la ballade acoustique « The Bullet »,
la power ballad « The Only Thing » et le
country rock « Meet Me Half Way »
varient avec bonheur le propos de ce
disque qu’achève « Glory Road », un
hymne qui aurait pu figurer sur le New
Jersey (1988) de Bon Jovi. Une
connexion qui peut aussi s’appliquer à
« Runnin’ Out Of Hearts ». La voix de
Timmy Rough, qui jouit d’un accent amé-
ricain plus vrai que nature, est particuliè-
rement agréable, et les soli de Norman
Bites courts mais toujours à propos. Bref,
que de bonnes choses à dire à propos de
ce groupe « feelgood » qu’on prend
autant plaisir à écouter sur album qu’à
déguster sur scène.
BENJI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7,5
SONATA ARCTICA
Talviyö
(Nuclear Blast/PIAS)
Power metal
Sortie : déjà disponible
Cela fait déjà dix ans, depuis la sortie de
l’excellent The Days Of Grays, que
Sonata Arctica a cessé d’évoluer, bascu-
lant d’un univers toujours plus foisonnant
et à la mise en son ambitieuse, à une
espèce de réchauffé de ses premières
heures, sans passion, ni conviction, ni
ligne directrice claire. L’exemple même
d’un groupe en roue libre, qui semble
plus poursuivre sa carrière par obligation
que par amour de sa musique. The Ninth
Hour (2016) avait, selon nous, plutôt
relevé le niveau, davantage de soin ayant
été accordé aux arrangements et à l’en-
semble. Las, il semble que Tony Kakko
(car c’est bien lui le maître à penser de la
formation, les autres faisant plus office
d’exécutants qu’autre chose) est
aujourd’hui totalement rincé. Il suffit de
comparer l’enthousiasme avec lequel il
nous parle de son fameux projet solo –
visiblement bientôt prêt à être dévoilé –
au discours amer qui le voit aborder le
cas de son groupe principal (Cf. inter-
view en ces pages), dont le fonctionne-
ment semble davantage lui peser qu’au-
tre chose… Talviyö serait le chant du
cygne de Sonata Arctica que nous ne
serions pas étonnés, tant tout sonne ici
comme une fin de règne. Si la mise en
son n’est plus le fort des Finlandais
depuis leur superproduction de 2009
(enchaîner l’écoute dudit album avec les
suivants est d’ailleurs une expérience
assez édifiante), ce dixième opus est
peut-être le moins bien produit de sa car-
rière : l’ensemble sonne plat, sans saveur
et parfois même amateur… Le talent de
composition de Tony ne s’est évidem-
ment pas totalement évaporé et subsis-
tent ici de belles mélodies, sans oublier
une prestation vocale de très bonne
volée (le contraire serait dommage vu le
niveau du bonhomme). Hélas, tout ici
souffre de la comparaison avec les meil-
leures œuvres passées de la formation.
Et si quelques morceaux n’auraient pas
totalement dépareillé sur certains clas-
siques (« Cold », « Storm The Armada »,
« Demon’s Cage » et l’instrumental
« Ismo’s Got Good Reactors »), l’ensem-
ble sonne comme s’il n’avait pas été suf-
fisamment poli et travaillé, de nombreux
enchaînements et subites montées ou
descentes de volumes donnant même
l’impression qu’on assiste à une improvi-
sation plus ou moins heureuse.
L’ensemble se traîne péniblement, à
cause d’un déficit d’énergie qui semble
 trahir un simple manque d’envie, et les
bonnes idées ne sont pas assez nom-
breuses et suffisamment exploitées pour
le sauver. Enfin, ne nous appesantissons
pas sur la niaiserie des textes, cela
reviendrait à tirer sur l’ambulance.
Sonata Arctica, tout comme son unique
compositeur, n’aime pas vieillir, et si cet
album n’est pas un ratage intégral, il
reste bien trop moyen pour satisfaire les
fans d’un groupe qui a été capable de
tant de belles choses… Seuls les plus
acharnés s’y retrouveront encore un
peu...
GUILLAUME FLEURY . . . . . . . . . . . . . . .6
VISIONS OF ATLANTIS
Wanderers
(Napalm Records/Season Of Mist)
Metal symphonique
Sortie : déjà disponible
A l’heure où nombre de hérauts du metal
mélodique s’efforcent de moderniser
leur approche du son, n’hésitant pas à
passer leurs lignes de chant sous filtre ou
à s’acoquiner avec la musique électro-
nique, l’arrivée d’un nouvel album de
Visions Of Atlantis a quelque chose de
rassurant. Indifférent aux modes et ten-
dances, le quintet d’origine autrichienne
Même si le groupe maîtrise très bien
l’exercice), les lignes de chant de
Clémentine, qui livre par ailleurs une per-
formance agréable et nuancée, rappel-
lent beaucoup Simone Simons d’Epica.
Vous l’aurez compris, cet album
s’adresse avant tout aux nostalgiques
d’une vision bien précise du metal sym-
phonique, principalement exploitée
durant la première moitié des années
2000 (« The Silent Scream », clin d’œil
lourdement appuyé à Nightwish, tant
dans les arrangements que dans les
chants). Wanderers, absolument impec-
cable dans la forme (on regrette simple-
ment que les rythmiques ne s’avèrent
pas plus mordantes par moment), riche
en belles mélodies et en refrains enlevés,
est très agréable à l’écoute, mais repose
encore trop sur ses références pour
mériter des applaudissements plus nour-
ris. Néanmoins, si l’esprit des premiers
Nightwish et Edenbridge vous manque,
ne négligez pas cet album ; vous ne
pourriez pas mieux tomber !
FRANÇOIS BLANC . . . . . . . . . . . . . . . . .7
YEAR OF THE GOAT
Novis Orbis Terrarum Ordinis
(Napalm Records/Season Of Mist)
Rock psychédélique
Sortie : déjà disponible
Il aura fallu pas moins de quatre longues
années aux Suédois pour enfin se remet-
tre en selle. Une chose bien compréhen-
sible, tant il est difficile de surpasser une
réussite comme The Unspeakable (2015),
leur deuxième album, qui sublimait déjà
le travail proposé sur l’excellent EP The
Key And The Gate (2014) et un très bon
premier effort, Angel’s Necropolis
(2012). Comment aller plus loin ? C’est
simple : c’est impossible. Ce constat
saute rapidement aux oreilles à l’écoute
de ce Novis Orbis Terrarum Ordinis,
certes parcouru de belles mélodies, mais
dont aucune n’atteint le niveau des
pépites précédentes. Autre fait domma-
geable : une production plus directe et
fuzzy qui, bien que de qualité, manque
tout de même un peu de relief et ne sied
pas franchement au propos du sextet, lui
qui avait pourtant déjà trouvé une très
bonne formule. Year Of The Goat semble
vouloir faire évoluer son propos, et c’est
tout à son honneur. Hélas, le résultat,
aussi agréable soit-il, ne tient pas la com-
paraison avec les travaux passés en
termes de puissance évocatrice. Rien
n’est foncièrement raté ici, et les musi-
ciens pourvoient toujours de bonne
idées – même si l’ensemble est moins
finement arrangé qu’à l’accoutumée –,
néanmoins la formation marque tout de
même le pas en termes d’inspiration (il
en va de même pour cette pochette,
franchement laide, même si le groupe
n’a, il est vrai, jamais brillé dans cet exer-
cice). « Ira » en est un bon exemple, les
musiciens semblant dérouler leur recette
sans y croire eux-mêmes. Quant aux ten-
tatives de faire du neuf, comme sur un
« Superbia » qui se veut plus rentre-
dedans et rock’n’roll ou un « Gula »
truffé de pédale wah et aux accents
sudistes, le résultat est tout de même
mitigé et le doute quant au bien-fondé
de cette expérimentation permis car le
groupe y perd en termes de climat mys-
tique et de mélancolie. Ce troisième
album est un bon disque, là où le précé-
dent était exceptionnel. Reste que les
passionnés de rock psychédélique trou-
veront ici plus que leur compte, Year Of
The Goat évoluant toujours bien au-des-
sus de la (foisonnante) mêlée de combos
dits « occultes ». Cet album peut consti-
tuer une bonne porte d’entrée dans son
univers pour le novice qui se prendra
ensuite une belle mandale avec les pré-
cédents. Ce disque reste néanmoins une
déception, de par cette envie de propo-
ser une musique plus simple et directe
qui n’est guère convaincante, et, par
extension, au regard du potentiel rare
de la formation qui n’est clairement pas
exploité à plein ici.
GUILLAUME FLEURY . . . . . . . . . . . . . . .7

maintient fidèlement et fermement le

cap qu’il a choisi au début de sa traver-
sée, entamée voici bientôt vingt ans.
Ainsi, fort logiquement, Wanderers, son
septième opus, reprend exactement où
The Deep & The Dark nous avait laissés.
Le line-up a (encore !) connu quelques
bouleversements, mais à l’exception du
chant masculin, désormais assuré par
l’Italien Michele Guaitoli (Temperance,
Kaledon), aucune différence majeure
n’émerge de ce nouvel album qui semble
toutefois plus finement produit que son
prédécesseur (le traitement du chant est
très soigné) et plus riche en orchestra-
tions. Les choses démarrent très bien
avec « Release My Symphony », plus
long et ambitieux que de coutume, dont
les couplets évoquent fortement le « Bye
Bye Beautiful » de Nightwish et dont la
progression classique mais maîtrisée
débouche sur un joli refrain à deux voix.
« Heroes Of The Dawn », qui lui succède,
se base sur une mélodie de flûte accro-
cheuse qui rappelle aussi bien les débuts
d’Avantasia que l’esprit naturaliste du
fameux Mother Earth de Within
Temptation. Et sur « Nothing Lasts
Forever », troisième titre et première
ballade de cet album (qui en compte
trois au total, ce qui fait beaucoup…
LE BOOK QUI TUE
Chaque mois, un musicien vous recommande
son livre de chevet. Puisse cette rubrique
vous donner envie, amis lecteurs, de vous
plonger (ou vous replonger) dans un bon
bouquin au son d’un chouette disque ! Un
plaisir rare. Dans ce numéro, c’est Matthieu
« MattH » De La Roche, bassiste de
BlackRain, qui s’y colle.
The Dirt: Confessions Of The World’s Most
Notorious Rock Band (de Mötley Crüe & Neil
Strauss)
The Dirt est « LE » livre qui accompagne
BlackRain depuis ses débuts, ou presque.
Nous n’avons pas connu les années 80 et, à
l’époque où nous l’avons découvert, nous
n’avions pas encore foulé le Strip (Ndlr : allu-
sion au Sunset Strip, section du Sunset
Boulevard de Los Angeles où se produisait la
majorité des groupes de glam rock des
années 80), mais ce bouquin contient une
telle quantité de conneries et de « grand n’importe quoi »
qu’on en vient vraiment à se demander quand est-ce que les
zicos ont trouvé le temps de composer leurs tubes ! (rires) Cela
donne l’impression que, pour accoucher de tels hits, il fallait
absolument dépasser toutes les limites… La lecture de cette
biographie écrite par les quatre membres du groupe nous
immerge directement dans ces années folles et per-
met de confronter les points de vue de chaque musi-
cien. J’estime que l’adaptation cinématographique
ne rend pas pleinement justice au livre ; il aurait fallu
une série entière pour permettre aux spectateurs de
s’attacher aux musiciens comme le permet la version
papier ! Mötley Crüe est assurément le groupe qui
illustre le mieux ce qu’on pourrait appeler le « théo-
rème de Lemmy » : la nécessité d’être au bon
endroit au bon moment. Ce qui ne fut absolument
pas le cas pour BlackRain, d’ailleurs ! (rires) Durant
nos premières années, nous avons fait comme si cela
n’avait aucune importance et avons fait des bars de
Haute-Savoie notre Strip à nous. Au cours de nos
tournées, et notamment en Suède, nous avons ren-
contré pas mal de mecs de notre âge qui avaient lu
The Dirt et ressenti le même appel que nous. Les
fêtes étaient nombreuses et n’étaient jamais loin de
dégénérer ! A l’époque, nous vivions une sorte de
rêve ; il n’y avait certes pas l’argent, la gloire et le
décorum du Crüe, mais nous avions vraiment le senti-
ment d’être invincibles, protégés par les dieux du
rock ! Je suis triste pour les gamins qui naissent
aujourd’hui et ne verront jamais Mötley Crüe sur
scène, et ne vivrons jamais ce que ces mecs ont vécu. Mais au
moins pourront-ils lire le puissant témoignage qu’est The
Dirt… Et se dire, en écoutant du Mötley sur une plateforme de
streaming à l’aide de leur Iphone XX, avec haut-parleurs gref-
fés aux tympans et liseuse implantée dans la cornée, qu’ils sont
nés dans une époque vraiment, mais alors vraiment chiante.

92

Ces dernières années, le vinyle revient en force,
ce qui n’est pas pour nous déplaire. Chaque mois,
dorénavant, nous vous proposons donc une sélection des
plus chouettes nouveautés. C’est parti, mon kiki !
Beaucoup, beaucoup de nouveautés ce
mois-ci ! Nous vous avons déjà parlé en
long et en large de la réédition, au format
LP (vinyle coloré ou picture-disc), des dix
albums studio et live de Blind Guardian
parus entre 1988 et 2003 chez Virgin.
Nuclear Blast, l’actuel label du combo
allemand, propose aujourd’hui aux fans de
réunir les dix disques bénéficiant de ce
traitement de faveur dans un coffret
judicieusement intitulé Blind Guardian
1988-2003 (Non ??? Si !!!). Ce superbe
étui, exclusif au site du label germain, est
d’autant plus indispensable qu’il est
disponible contre la somme de 14,99
euros. Une aubaine pour compiler de la
plus belle des manières les albums
Battalions Of Fear (1988), Follow The Blind
(89), Tales From The Twilight World (90),
Somewhere Far Beyond (92), Tokyo Tales
(93), Imaginations From The Other Side
(95), The Forgotten Tales (96), Nightfall In
Middle-Earth (98), A Night At The Opera
(2002) et Live (03). Niveau rééditions,
toujours chez Nuclear Blast, notons
également celles des trois premiers albums
de Primal Fear en vinyles de couleur avec
pochettes ouvrantes : Primal Fear (1998)
en blanc/gris marbré, Jaws Of Death (1999)
en deux LPs beige marbré et le double
Nuclear Fire (2001) en orange et beige
marbré. Chez Nuclear Blast, encore, la
sortie de Talviyö, le nouveau Sonata Arctica,
en double LP avec pochette ouvrante et
insert textes. Cet opus est disponible en
quatre versions : vinyle noir, transparent
(300 copies), bleu (300) et édition deluxe
limitée (un coffret renfermant un double
vinyle bleu marbré, le CD digipak de l’album,
un puzzle 500 pièces, un poster et une
photo). Le Shaped By Fire d’As I Lay Dying
est quant à lui trouvable en simple LP noir
avec pochette ouvrante (il existe aussi un
vinyle transparent limité à 300 exemplaires).
Mêmes caractéristiques pour Human
Une rubrique de Philippe Lageat
Target de Thy Art Is Murder, sa version
colorée, blanche, étant quant à elle tirée à
500 copies. Twilight Force va plus loin avec
son Dawn Of The Dragonstar : double LP,
pochette ouvrante, insert textes, un vinyle
noir ou blanc (300 copies de ce dernier) et
quatre titres bonus en face D, à commencer
par des démos de 2007. On trouve
également un bonus, « Hellbound », sur
Born To Perish, nouveau double vinyle de
Destruction avec pochette gatefold, insert
textes et vinyle noir, argent (300 copies)
ou splatter rouge/blanc (500). Chez Nuclear
Blast, la surprise du mois nous vient
toutefois du côté d’Exodus, le maître du
thrash publiant l’étonnant 45 Tours « No
Love (Live At Day In The Dirt 1984) » : au
menu, une version live de « No Love » (un
titre qui finira sur le classique Bonded By
Blood en 1985) enregistrée à Berkeley, en
plein air, le 19 août 1984, et, en face B,
une démo de la rareté « Death Row »
provenant d’une répétition de 1983. Bref,
de l’Exodus préhistorique pour ce sept
pouces disponible en vinyle blanc ou rouge
(400 exemplaires chacun). N’hésitez pas !
Du côté de Roadrunner/Warner, tous les
projecteurs sont évidemment rivés sur
Slipknot et son nouvel opus, We Are Not
Your Kind. Le pressage vinyle, bien que
soigné, donne dans une étonnante sobriété :
double LP 180 grammes, pochette ouvrante
et simple insert. Pas de quoi fouetter un
chat, même masqué ! Les fans, pour s’amuser
un peu, devront chercher aux quatre coins
du net les différents pressages de couleur
exclusifs à certaines enseignes : tirage rose
limité à 1000 exemplaires pour EMP,
argent pour FYE (2000 copies), rouge pour
Golden Discs (3000), bleu pour Bravado,
etc. On leur souhaite d’autant plus de
plaisir qu’il existe également plusieurs
bundles de la bête, dont un avec casquette
de baseball, chargeur de téléphone en
forme de bus (?), combinaison blanche,
tapis de platine, jeu de tarot (??), etc.
Alors, à vos dollars, les Maggots !
Quelques curiosités intéressantes sont
également l’œuvre de SPV, label qui –
nous le disons et applaudissons – insère,
avec chacun de ses vinyles, le CD de
l’album correspondant. C’est d’autant plus
méritoire que les vinyles sont tous des 180
grammes et non des 140. Bravo ! Simple
LP, vinyle rouge marbré et pochette simple
pour Blackrain et son Dying Breed, le
Memoir414 de Domination Inc., mais aussi
un Locked And Loaded qui voit The Dead
Daisies s’attaquer, en studio comme en
live, à une collection alléchante de reprises
(Alex Harvey, Howlin’ Wolf, Creedance
Clearwater Revival, The Who, The Beatles,
The Rolling Stones, Grand Funk Railroad,
Neil Young, Deep Purple). C’est extra, c’est
exquis, excellent même je vous dis ! Seul
M.E.T.A.L de Freedom Call évite la cire
rouge, lui préférant le bleu marine marbré
dans sa pochette ouvrante digne d’un
autre âge renfermant deux LPs.
Pour ce qui est des coffrets, commençons
par Def Leppard et son Vinyl Collection
Volume Two que nous avons longuement
évoqué dans les pages de notre numéro
199. Après un premier boxset contenant
ses quatre premiers albums (les superbes
On Through The Night, High’n’Dry,
Pyromania et Hysteria), ainsi que le Live
L.A. Forum et un LP de raretés, le gang de
Sheffield poursuit son travail de
restauration via UMC. Bâti sur le même
modèle que son prédécesseur, ce
deuxième coffret (il devrait y en avoir
quatre en tout) renferme quatre albums
studio : Adrenalize (1992), Retro-Active
(chouette compilation parue en LP simple
en 1993 et ici présentée sur deux vinyles),
l’étonnant mais très réussi Slang (1996) et
Euphoria (1999, disponible pour la
première fois au format LP, double qui plus
est, avec pochette ouvrante !). Ces quatre
albums studio sont agrémentés de deux
doubles LPs supplémentaires : Rarities 2 et
Rarities 3 qui compilent des démos, des
versions acoustiques, des extraits de
bandes originales de films, des bonus
japonais et des titres live captés à Bonn,
Singapour, Montréal, Denver et Tokyo en
1992, 95, 96 et 99, etc. Il est fort à parier
que les collectionneurs connaissent déjà
l’essentiel de ce roboratif florilège (si ce
n’est sa totalité), mais voir ces titres ainsi
compilés pour la première fois sur vinyle
demeure intéressant. Ce coffret
renfermant ce que le Léopard Sourd a
publié dans les années 90 (du matériel bien
plus sympathique qu’on ne pourrait le
croire, même si moins foncièrement rock
que celui de la précédente décennie) est
rehaussé, comme le Volume One, d’un livre
au format LP de 40 pages gavé de photos,
de memorabilia et de notes. Bref, de quoi
rugir de plaisir !
Pour autant, c’est Saxon qui, en cette
rentrée 2019, remporte la palme du
« coffret le plus sexy » avec son The Eagle
Has Landed 40 Live paru chez Silver
Lining. Ne vous méprenez pas : en dépit
de son titre, ce boxset ne fête aucunement
l’anniversaire de The Eagle Has Landed,
album live incontournable paru en 1982. Il
serait plutôt une célébration des quarante
années passées par le groupe anglais sur
les routes depuis 1979. Au menu, cinq LP
180 grammes (un musicien différent
apparaît sur chaque pochette) regroupant
quarante titres captés en concert entre
2007 et 2018, principalement en
Allemagne, en Angleterre et aux USA. Des
classiques bien sûr (« Princess Of The
Night », « Dallas 1PM », « Power And The
Glory », « 20,000 Ft », « 747 (Strangers In
The Night) », « Crusader », etc.), mais aussi
de vieux titres rarement joués sur scène
(« This Town Rocks », « Killing Ground »,
« Conquistador », « Rock’n’Roll Gypsy »,
« Play It Loud », « Machine Gun » !!!) et –
c’est ce qui fait la beauté de la chose – de
très nombreux extraits des albums sortis
par Saxon depuis 2007 : The Inner
Sanctum (2007), Into The Labyrinth (2009),
Call To Arms (2011), Sacrifice (2013),
Battering Ram (2015), Thunderbolt (2018).
Ces derniers prouvent, au passage, que le
combo british n’a rien perdu de sa verve et
de sa fougue. Bref, quarante morceaux
pour une mixture « vieux/neuf – classiques/
raretés » hyper équilibrée. Le regretté Fast
Eddie Clarke joue les revenants sur une
version incendiaire du « Ace Of Spades »
de Motörhead, tandis que Phil Campbell
apparaît sur un « 747 (Strangers In The
Night) » débridé. Un tapis de platine, un
livre format LP de 42 pages (avec photos,
coupures de presse, memorabilia des
débuts à aujourd’hui) et un pass laminé
(avec code de téléchargement digital)
complètent cette géniale boîte
amoureusement conçue. Il est toutefois à
noter qu’une version deluxe limitée à 747
exemplaires contient en sus 23 médiators
(représentant toutes les pochette
d’albums) et une reproduction des paroles
manuscrites de « 747 (Strangers In The
Night) » signée et numérotée par le
chanteur Biff Byford en personne. Votre
serviteur a le numéro… 747. Et ne s’en
séparera pour rien au monde. Vous voilà
prévenus ! Y
93
 Partenaire favori des plus grands tourneurs français !

& L.A Factory & VERYSHOW

By Caramba ELUVEITIE + LACUNA COIL
+ INFECTED RAIN
26/11 - Bordeaux, Rocher de Palmer
29/11 - Toulouse, Bikini
30/11 - Rennes, Etage
01/12 - Paris, Elysée Montmartre

ENTOMBED A.D. + ABORTED

+ BAEST
RISING FEST avec BLAZE 13/11 - Savigny-Le-Temple, Empreinte
BAYLEY + BULLET + CRYSTAL VIPER THE DARKNESS
+ VICTORIUS + ABSOLVA etc. 25/01 - Strasbourg, Laiterie EPICA "TOURNEE 10 ANS DE
04-05/10 - Dijon, Longvic 26/01 - Paris, Cigale DESIGN YOUR UNIVERSE"
27/01 - Bordeaux, Krakatoa
03/02 - Lyon, Ninkasi Kao 06/10 - Paris, Elysée Montmartre
MARILLION with friends from THE 69 EYES
the orchestra 20/11 - Paris, Backstage By The Mill FEVER 333
09/12/2019 - Paris, Salle Pleyel CONAN 09/11 - Paris, Trabendo
10/12/2019 - Lyon, Radiant-Bellevue 15/11 - Paris, Glaz’Art
ABBATH + VLTIMAS + 1349
28/01 - Paris, Machine du Moulin Rouge FOUD’ROCK TOWER 2019 avec
CLUTCH HANGMAN’S CHAIR + TEA CUP MONS-
29/01 - Nantes, Sterolux
& 30/01 - Toulouse, Metronum
07/12 - Strasbourg, Laiterie TER + DISCONNECTED + COMPUTER
08/12 - Lyon, Transbordeur KILLS PEOPLE + FISHING WITH GUNS
02/02 - Lyon, Ninkasi Kao 15/12 - Bordeaux, Rocher de Palmer 02/11 - Voisins-le-Bretonneux, Salle de la
AIRBOURNE CONCEPTION
Tour
17/10 - Strasbourg, Laiterie (complet !) 15/05 - Paris, Maroquinerie
19/10 - Paris, Cigale (complet !) GALAAD
20/10 - Paris, Cigale (complet !) 13/09 - Décines-Charpieu (69), Warm Audio
CRO-MAGS + RED DEATH + GRIM CIRCLE + MESSALINE
28/10 - Nimes, Paloma (complet !) 30/09 - Paris, Gibus 14/09 - Barberaz (73), Brin de Zinc
ALICE COOPER + GRIM CIRCLE + MESSALINE
KING’S X CULT OF LUNA 28/09 - Paris, Gibus + THE MORGANATICS
+ BLACK STONE CHERRY 30/11 - Paris, Trianon
08/09 - Lyon, Ninkasi Kao Gerland 05/09 - Bordeaux, Arkea Arena 29/11 - Le Haillan, Salem
20/09 - Boulogne-Billancourt, Seine Musicale 30/11 - Melle (79), Metullum
D-A-D
22/11 - Cléon, CC Traverse GHOST + ALL THEM WITCHES
ANNIHILATOR 23/11 - Montbéliard, Atelier des Môles
27/10 - Paris, Petit Bain + TRIBULATION
24/11 - Paris, Petit Bain 13/12 - Strasbourg, Zénith
AQME (Tournée d'adieu) DESTINITY + BLOODY ALCHEMY
18/12 - Nantes, Zénith
05/10 - Paris, Trianon 19/12 - Toulouse, Zénith
+ THRASHBACK
23/11 - Rouen, Bifröst GLORYHAMMER + NEKROGO-
AS I LAY DYING
IN THIS MOMENT 15/10 - Paris, Bataclan DEVILDRIVER + ACOD + THINK
BLIKON + WIND ROSE
12/11 - Bordeaux, Rock School Barbey 28/01 - Paris, Trabendo
OF A NEW KIND
MASS HYSTERIA BEAST IN BLACK + MYRATH 27/09 - Lyon, CCO
29/01 - Toulouse, Metronum
23/11 - Bordeaux, Rock School Barbey 04/11 - Paris, Elysée Montmartre 01/02 - Lyon, Ninkasi Kao
28/09 - Mulhouse, Noumatrouff
06/11 - Strasbourg, Laiterie 29/09 - Metz, Gueulard Plus
SIDILARSEN GRAVEYARD FESTIVAL II avec NO
30/09 - Paris, Petit Bain RETURN + OBSCENITY + EXPELLOW +
23/11 - Paris, Maroquinerie BETWEEN THE BURIED AND ME 01/10 - Toulouse, Metronum
(« A SPECIAL EVENING WITH » / 2 SETS) DEATHAWAITS + ED BLOOM + SAT ONE
06/10 - Toulouse, Ready For Prog 31/08 - Riorges, Salle Du Grand Marais
DRAGONFORCE
07/10 - Nantes, Ferrailleur 07/02 - Charleville-Mézières, Forum
08/10 - Vauréal, Forum GRETA VAN FLEET
08/02 - Strasbourg, Laiterie 13/11 - Paris, Zénith
09/02 - Lyon, CCO
BEYOND THE BLACK 11/02 - Paris, Machine du Moulin Rouge
02/11 - Paris, Petit Bain HEILUNG
12/02 - Bordeaux, Krakatoa 20/11 - Paris, Elysée Montmartre
13/02 - Toulouse, Metronum
BLACKRAIN
HALESTORM + IN THIS + KISSIN’ DYNAMITE
14/02 - Istres, Usine HELMET (30EME ANNIVERSAIRE)
MOMENT + NEW YEAR'S DAY 17/10 - Paris, Petit Bain 01/10 - Paris, Boule Noire
13/11 - Paris, Salle Pleyel ELECTRIC MARY 02/10 - Nantes, Ferrailleur
19/10 - Nantes, Ferrailleur 02/11 - Nantes, Ferrailleur
DEVIN TOWNSEND 20/10 - Toulouse, Rex 20/11 - Marseille, Cherrydon + HIGHWAY
15/11 - Paris, Salle Pleyel 24/10 - Lyon, Rock Café HERCYNIA + NOREST
29/11 - Colmar, Grillen 20/09 - Nancy, Nautilus
25/10 - Selestat, Rock Your Brain Festival 30/11 - Paris, Backstage By The Mill

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& MOONSPELL + ROTTING CHRIST
& MUZIVOX 28/10 - Nancy, Autre Canal
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31/10 - Rennes, Etage un cadre doré en le précisant clairement
DEVILDRIVER 01/11 - Paris, Machine sur votre coupon.
28/09 - Mulhouse, Noumatrouff 02/11 - Toulouse, Metronum
29/09 - Metz, Gueulard 09/11 - Bourg En Bresse, Tannerie
30/09 - Paris, Petit Bain
01/10 - Toulouse, Metronum
OPETH + THE VINTAGE CARAVAN
SACRED REICH 11/11 - Paris, Olympia
20/11 - Lyon, Ninkasi Kao
24/11 - Limoges, CC John Lennon
26/11 - Savigny-Le-Temple, Empreinte OVERKILL + DESTRUCTION +
IAN PAICE PURPENDICULAR FLOTSAM AND JETSAM
STATIC X + WEDNESDAY 13 09/11 - Freyming Merlebach, Le Gouvy 16/09 - Lyon, CCO Villeurbanne
+ DOPE + SOIL
06/10 - Magny Le Hongre, File 7 LAURA COX PAGAN NORDMANNI FEST avec
14/09 - Raismes, Raismesfest
BELENOS + NORHVAR + VARANG

INGLORIOUS
11/10 - Leffrinckoucke, Poudrière
04/12 - Paris, Trabendo (album release) NORD + INFINITYUM + AEGIR RAISMESFEST
09/11 - Rouen, Bifröst avec GLENN HUGHES, PHIL CAMPBELL
+ PASSWORD MONKEY THE AMORETTES + KILLIT & THE BASTARD SONS, THE NIGHT
29/09 - Montalivet, Showbike Aquitaine
12/11 - Paris, Backstage By The Mill PETER ALEXANDER BAND FLIGHT ORCHESTRA, H-E-A-T, ELECTRIC
GLENN HUGHES Plays (Tribute LYNYRD SKYNYRD) BOYS, ZODIAC, DEWOLFF, LEPROUS,
JEFF SCOTT SOTO Classic Deep Purple Live : 14/09 - Bordeaux, Bouliac On The Rock BRIAN DOWNEY’S ALIVE AND DANGE-
21/09 - Marseille, Cherrydon 14/09 - Raismes, Raismesfest 15/09 - Orléans, Blue Devil ROUS, AARON BUCHANAN & THE CULT
28/09 - Ponthierry Saint Fargeau, 26 CLASSICS, TOKYO BLADE, LAURA COX
JINJER THE CHRIS SLADE TIMELINE Couleurs + THEM DIRTY ROSES BAND, MASSIVE, MOLYBARON...
05/12 - Selestat, Tanzmatten
06/12 - Paris, Maroquinerie 29/09 - Lille, Splendid + THEM DIRTY 14-15/09 - Raismes, Chateau de la Princesse
07/12 - Annemasse, Château Rouge NEW MODEL ARMY ROSES
08/12 - Toulouse, Rex 9/10 - Paris, Maroquinerie 19/10 - Noyers Le Val, Musik And Bike
2/11 - Strasbourg, Laiterie
13/12 - Toulon, Oméga Live THEM DIRTY ROSES
PHIL CAMPBELL AND THE 27/09 - Paris, Etoiles
KADAVAR MASS HYSTERIA BASTARD SONS
+ HÄLLAS 23/11 - Bordeaux, Rock School Barbey 24/09 - Nantes, Ferrailleur THRICE + REFUSED
12/11 - Lyon, CCO 06/12 - Paris, Zénith 25/09 - Bordeaux, Rockschool Barbey 08/11 - Paris, Elysée Montmartre
13/11 - Nantes, Stereolux 27/09 - Paris, Café de la Danse
14/11 - Paris, Alhambra MAYHEM + GAAHLS WYRD + TRUCKFIGHTERS
+ MARS RED SKY + HÄLLAS GOST RAMMSTEIN 16/10 - Paris, Petit Bain
15/11 - Bordeaux BT59 05/11 - Paris, Machine du Moulin Rouge 09/07 - Lyon/Décines, Groupama Stadium 17/10 - Nantes, Ferrailleur
19/11 - Strasbourg, Laiterie 06/11 - Rennes, Etage
07/11 - Lyon, CCO Villeurbanne RISE OF THE NORTHSTAR TYTAN + DREAMCATCHER
KISSIN’ DYNAMITE 08/11 - Toulouse, Metronum 15/11 - Savigny-Le-Temple, Empreinte 06/09 - Paris, Klub
+ BLACKRAIN 17/11 - Oignies, Tyrant Fest
17/10 - Paris, Petit Bain RIVAL SONS UFOMAMMUT
19/10 - Nantes, Ferrailleur MARCO MENDOZA + THE WARM 09/11 - Paris, Olympia (20EME ANNIVERSAIRE)
20/10 - Toulouse, Rex LAIR 10/11 - Bordeaux, Rocher de Palmer 27/09 - Paris, Petit Bain
24/10 - Lyon, Hard Rock Café 30/10 - Marseille, Cherrydon
25/10 - Sélestat, Rock Your Brain Fest ROSE TATTOO ULTRA VOMIT + NO ONE IS
MEGASOUND FEST 21/03 - Strasbourg, Laiterie INNOCENT + TAGADA JONES
KLONE + THE INTERSPHERE 15/11 - Murs-Erigné (Angers), C.C. Jean 24/03 - Paris, Cigale 02/11 - Paris, Zénith
+ LIZZARD Carmet avec TAGADA JONES + NO ONE 25/03 - Lyon, Ninkasi Kao
09/11 - Savigny-Le-Temple, Empreinte IS INNOCENT + RAMONEURS DE MEN- VOLBEAT + BARONESS
HIRS + NO CLASS + KICKED TO HEAVEN SKÀLD + DANKO JONES
LEPROUS + THE OCEAN + PORT 16/11 - Murs-Erigné (Angers), C.C. Jean 08/11 - Auxerre, Silex 06/10 - Paris, Olympia
NOIR Carmet avec ULTRA VOMIT + 06/12 - Savigny-Le-Temple, Empreinte
12/11 - Paris, Cabaret Sauvage BUKOWSKI + DAGOBA + BANANE 07/12 - Nantes/Rezé, Barakason WARDRUNA
13/11 - Lyon, CCO Villeurbanne METALIK + SADHAYENA 10/12 - Lyon, Ninkasi-Kao 23/11 - Paris, Olympia
14/11 - Biarritz, Atabal
MICHAEL MONROE SLIPKNOT + BEHEMOTH WITCHES + SPIRIT + KOB +
LOUDNESS 29/10 - Paris, Maroquinerie 02/02 - Lyon, Hall Tony Garnier UNTIL DEAD + IN PURULENCE
14/04 - Vauréal, Forum 15/03 - Paris, AccorHotels Arena 23/02 - Blendecques (62), Salle Aimée
MISANTHROPE Vasseur
MACHINE HEAD (Burn My Eyes 12/09 - Lyon, Rock’n’Eat SKINDRED
25th Anniversary Tour) 13/09 - Chambéry, Brin de Zinc 18/12 - Paris, Maroquinerie Y&T
23/10 - Lyon, Radiant 24/09 - Marseille, Cherrydon
29/10 - Paris, Trianon MOLYBARON TAMBOURS DU BRONX + THE BLACKSTONE CO.
14/09 - Raismes, Raismesfest 23/11 - Paris, Trabendo 25/10 - Vauréal, Forum
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