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Leçon 4
Est-il injuste d’exploiter le travail d’autrui ?
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A/POURQUOI IL PEUT PARAITRE JUSTE D’EXPLOITER LE TRAVAIL
D’AUTRUI
Texte 1
Propos de Calliclès :
Dans l’ordre de la loi, on déclare injuste et laide l’ambition d’avoir plus que le commun
des hommes, et c’est ce qu’on appelle injustice. Mais je vois que la nature elle-même
proclame qu’il est juste que le meilleur ait plus que le pire et le plus puissant que le plus
faible. Elle nous montre par mille exemples qu’il en est ainsi et que non seulement dans le
monde animal, mais encore dans le genre humain, dans les cités et les races entières, on a jugé
que la justice voulait que le plus fort commandât au moins fort et fût mieux partagé que lui.
De quel droit, en effet, Xerxès porta-t-il la guerre en Grèce et son père en Scythie, sans
parler d’une infinité d’autres exemples du même genre qu’on pourrait citer ? Mais ces gens-là,
je pense, agissent selon la nature du droit et, par Zeus, selon la loi de la nature, mais non peut-
être selon la loi établie par les hommes. Nous formons les meilleurs et les plus forts d’entre
nous, que nous prenons en bas âge, comme des lionceaux, pour les asservir par des
enchantements et des prestiges, en leur disant qu’il faut respecter l’égalité et que c’est en cela
que consistent le beau et le juste.
Mais qu’il paraisse un homme d’une nature assez forte pour secouer et briser ces entraves
et s’en échapper, je suis sûr que, foulant aux pieds nos écrits, nos prestiges, nos incantations et
toutes les lois contraires à la nature, il se révoltera, et que nous verrons apparaître notre maître
dans cet homme qui était notre esclave ; et alors le droit de la nature brillera dans tout son
éclat. Il me semble que Pindare met en lumière ce que j’avance dans l’ode où il dit : La loi,
reine du monde, des mortels et des immortels. Cette loi, ajoute-t-il, justifiant les actes les plus
violents, mène tout de sa main toute-puissante. J’en juge par les actions d’Héraclès, puisque,
sans les avoir achetés...
Voici à peu près son idée, car je ne sais pas l’ode par cœur ; mais le sens est que, sans avoir
acheté ni reçu en présent les bœufs de Géryon, Héraclès les emmena, estimant que le droit
naturel était pour lui et que les bœufs et tous les biens des faibles et des petits appartiennent
au meilleur et au plus fort.
Platon, Gorgias
Consigne : Après avoir lu ces propos de Calliclès, dites pourquoi, il peut paraître juste
d’exploiter le travail d’autrui.
Texte 2
Les instruments sont soit inanimés soit animés, par exemple pour le pilote le gouvernail est un
instrument inanimé, alors que le timonier est un instrument animé (car l’exécutant dans les
différents métiers entre dans la catégorie de l’instrument) ; de même aussi un bien que l’on a
acquis est un instrument pour vivre, la propriété familiale est une masse d’instruments,
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l’esclave est un bien acquis animé et tout exécutant est un instrument antérieur aux
instruments qu’il met en œuvre.
Si donc il était possible à chaque instrument parce qu’il en aurait reçu l’ordre ou par simple
pressentiment de mener à bien son œuvre propre, comme on le dit des statues de Dédale ou
des trépieds d’Héphaïstos qui, selon le poète, entraient d’eux-mêmes dans l’assemblée des
dieux, si, de même, les navettes tissaient d’elles-mêmes et les plectres jouaient tout seuls de la
cithare, alors les ingénieurs n’auraient pas besoin d’exécutants ni les maîtres d’esclaves.
Aristote, Politiques
Consigne Après avoir lu ce texte de Marx, dites pourquoi, il peut paraître juste d’exploiter le
travail d’autrui.
Texte 3
Texte 4
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donc, en dépassant aussi le Maître qui est lié au donné qu'il laisse - ne travaillant pas - intact.
Si l'angoisse de la mort incarnée pour l'Esclave dans la personne du Maître guerrier est la
condition sine qua non du progrès historique, c'est uniquement le travail de l'Esclave qui le
réalise et le parfait.
Consigne Après avoir lu ce texte de Kojève, dites pourquoi, il peut paraître juste d’exploiter
le travail d’autrui.
Texte 1
Le travail est de prime abord un acte qui se passe entre l'homme et la nature. L'homme y
joue lui-même vis à vis de la nature le rôle d'une puissance naturelle. Les forces dont son
corps est doué, bras et jambes, tête et mains, il les met en mouvement, afin de s'assimiler des
matières en leur donnant une forme utile à sa vie. En même temps qu'il agit par ce mouvement
sur la nature extérieure et la modifie, il modifie sa propre nature, et développe les facultés qui
y sommeillent. Nous ne nous arrêterons pas à cet état primordial du travail où il n'a pas encore
dépouillé son mode purement instinctif. Notre point de départ c'est le travail sous une forme
qui appartient exclusivement à l'homme. Une araignée fait des opérations qui ressemblent à
celles du tisserand, et l'abeille confond par la structure de ses cellules de cire l'habilité de plus
d'un architecte. Mais ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais architecte de l'abeille la plus
experte, c'est qu'il a construit la cellule dans sa tête avant de la construire dans la ruche. Le
résultat auquel le travail aboutit préexiste idéalement dans l'imagination du travailleur. Ce
n'est pas qu'il opère seulement un changement de forme dans les matières naturelles ; il y
réalise du même coup son propre but dont il a conscience, qui détermine comme loi son mode
d'action, et auquel il doit subordonner sa volonté.
MARX, Le Capital
Consigne Après avoir lu ce texte de Marx, dites pourquoi, il peut paraître injuste d’exploiter
le travail d’autrui.
Texte 2
L'ouvrier devient une marchandise d'autant plus vile qu'il crée plus de marchandises. La
dépréciation du monde des hommes augmente en raison directe de la mise en valeur du
monde des choses. Le travail ne produit pas que des marchandises ; il se produit lui-même et
produit l'ouvrier en tant que marchandise, et cela dans la mesure où il produit des
marchandises en général. Ce fait n'exprime rien d'autre que ceci : l'objet que le travail produit,
son produit, l'affronte comme un être étranger, comme une puissance indépendante du
producteur. Le produit du travail est le travail qui s'est fixé, concrétisé dans un objet, il est
l'objectivation du travail. L'actualisation du travail est son objectivation. Au stade de
l'économie, cette actualisation du travail apparaît comme la perte pour l'ouvrier de sa réalité,
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l'objectivation comme la perte de l'objet ou l'asservissement à celui-ci, l'appropriation comme
l'aliénation, le dessaisissement.
La réalisation du travail se révèle être à tel point une perte de réalité que l'ouvrier perd sa
réalité jusqu'à en mourir de faim. L'objectivation se révèle à tel point être la perte de l'objet,
que l'ouvrier est spolié non seulement des objets les plus nécessaires à la vie, mais encore des
objets du travail. Oui, le travail lui-même devient un objet dont il ne peut s'emparer qu'en
faisant le plus grand effort et avec les interruptions les plus irrégulières. L'appropriation de
l'objet se révèle à tel point être une aliénation que plus l'ouvrier produit d'objets, moins il peut
posséder et plus il tombe sous la domination de son produit, le capital.
Toutes ces conséquences se trouvent dans cette détermination : l'ouvrier est à l'égard du
produit de son travail dans le même rapport qu'à l'égard d'un objet étranger.
Karl Marx, Manuscrit de 1844
Consigne Après avoir lu ce texte de Marx, dites pourquoi, il peut paraître injuste d’exploiter
le travail d’autrui.
Texte 3
L'ouvrier s'appauvrit d'autant plus qu'il produit plus de richesse, que sa production croît en
puissance et en volume. L'ouvrier devient une marchandise. Plus le monde des choses
augmente en valeur, plus le monde des hommes se dévalorise ; l'un est en raison directe de
l'autre. Le travail ne produit pas seulement des marchandises ; il se produit lui-même et
produit l'ouvrier comme une marchandise dans la mesure même où il produit des
marchandises en général.
Cela revient à dire que le produit du travail vient s'opposer au travail comme un être
étranger, comme une puissance indépendante du producteur. Le produit du travail est le
travail qui s'est fixé, matérialisé dans un objet, il est la transformation du travail en objet,
matérialisation du travail. La réalisation du travail est sa matérialisation.
Dans les conditions de l'économie politique, cette réalisation du travail apparaît comme la
déperdition de l'ouvrier, la matérialisation comme perte et servitude matérielles,
l'appropriation comme aliénation, comme dépouillement. (...) Toutes ces conséquences
découlent d'un seul fait : l'ouvrier se trouve devant le produit de son travail dans le même
rapport qu'avec un objet étranger. Cela posé, il est évident que plus l'ouvrier se dépense dans
son travail, plus le monde étranger, le monde des objets qu'il crée en face de lui devient
puissant, et que plus il s'appauvrit lui-même, plus son monde intérieur devient pauvre, moins
il possède en propre. C'est exactement comme dans la religion. Plus l'homme place en Dieu,
moins il conserve en lui-même. L'ouvrier met sa vie dans l'objet, et voilà qu'elle ne lui
appartient plus, elle est à l'objet. Plus cette activité est grande, plus l'ouvrier est sans objet. Il
n'est pas ce qu'est le produit de son travail.
Plus son produit est important, moins il est lui-même. La dépossession de l'ouvrier au profit
de son produit signifie non seulement que son travail devient un objet, une existence
extérieure, mais que son travail existe en dehors de lui, indépendamment de lui, étranger à lui,
et qu'il devient une puissance autonome face à lui. La vie qu'il a prêtée à l'objet s'oppose à lui,
hostile et étrangère.
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Consigne Après avoir lu ce texte de Marx, dites pourquoi, il peut paraître injuste d’exploiter
le travail d’autrui.