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Mme Azaïs Terminales générales

LA NATURE

L’homme est-il un être à part dans la nature ?

Introduction
I. La naturalité de l’homme, qui le rend semblable aux autres espèces
1. L'homme est un être naturel
“Parmi les êtres en effet, les uns existent par nature, les autres par d’autres
causes ; par nature, les animaux et leurs parties, les plantes et les corps simples,
comme terre, feu, eau, air ; de ces choses en effet, et des autres de même sorte, on dit
qu’elles sont par nature. Or, toutes les choses dont nous venons de parler diffèrent
manifestement de celles qui n’existent pas par nature ; chaque être naturel, en effet, a
en soi-même un principe de mouvement et de fixité, les uns quant au lieu, les autres
quant à l’accroissement et au décroissement, d’autres quant à l’altération. Au contraire,
un lit, un manteau ou tout autre objet de ce genre, en tant que chacun a droit à ce nom,
c’est-à-dire dans la mesure où il est un produit de l’art, ne possèdent aucune tendance
naturelle au changement, mais seulement en tant qu’ils ont cet accident d’être en pierre
ou en bois ou en quelque mixte, et sous ce rapport ; car la nature est un principe et une
cause de mouvement et de repos pour la chose en laquelle elle réside immédiatement,
par essence et non par accident.
ARISTOTE, Physique, Livre 2 (4e s. av. J-C)
2. Son corps, n’échappe pas au mécanisme
« Je ne reconnais aucune différence entre les machines que font les artisans et les
divers corps que la nature seule compose, sinon que les effets des machines ne
dépendent que de l’agencement de certains tuyaux, ou ressorts, ou autres instruments,
qui, devant avoir quelque proportion avec les mains de ceux qui les font, sont toujours
si grands que leurs figures et mouvements se peuvent voir, au lieu que les tuyaux ou
ressorts qui causent les effets des corps naturels sont ordinairement trop petits pour être
aperçus de nos sens. Et il est certain que toutes les règles des mécaniques appartiennent
à la physique, en sorte que toutes les choses qui sont artificielles, sont avec cela
naturelles. Car, par exemple, lorsqu’une montre marque les heures par le moyen de
roues dont elle est faite, cela ne lui est pas moins naturel qu’il est à un arbre de
produire des fruits. »
R. DESCARTES, Traité de l’Homme (1648)
Transition I/II

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I. La pensée et la liberté : deux spécificités humaines
1. L’homme est capable de penser et de se penser
“L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature, mais c’est un roseau pensant.
Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser ; une vapeur, une goutte d’eau
suffit pour le tuer. Mais quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble
que ce qui le tue, puisqu’il sait qu’il meurt et l’avantage que l’univers a sur lui.
L’univers n’en sait rien.
Ce n’est point de l’espace que je dois chercher ma dignité, mais c’est du règlement de
ma pensée. Je n’aurai point d’avantage en possédant des terres. Par l’espace l’univers
me comprend et m’engloutit comme un point, par la pensée je le comprends. ”
Blaise PASCAL, Pensées
(1670)
2. Il est capable de s’autodéterminer
“Je ne vois dans tout animal qu'une machine ingénieuse, à qui la nature a donné
des sens pour se remonter elle-même, et pour se garantir, jusqu'à un certain point, de
tout ce qui tend à la détruire, ou à la déranger. J'aperçois précisément les mêmes
choses dans la machine humaine, avec cette différence que la nature seule fait tout
dans les opérations de la bête, au lieu que l'homme concourt aux siennes, en qualité
d'agent libre. L'un choisit ou rejette par instinct, et l'autre par un acte de liberté ; ce qui
fait que la bête ne peut s'écarter de la règle qui lui est prescrite, même quand il lui
serait avantageux de le faire, et que l'homme s'en écarte souvent à son préjudice. C'est
ainsi qu'un pigeon mourrait de faim près d'un bassin rempli des meilleures viandes, et
un chat sur des tas de fruits, ou de grain, quoique l'un et l'autre pût très bien se nourrir
de l'aliment qu'il dédaigne, s'il s'était avisé d'en essayer. C'est ainsi que les hommes
dissolus se livrent à des excès, qui leur causent la fièvre et la mort ; parce que l'esprit
déprave les sens, et que la volonté parle encore, quand la nature se tait.”
J-J. ROUSSEAU, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité
entre les hommes (1755)
Transition II/III
II. Des capacités qui ne peuvent s’actualiser que dans une culture
1. Le langage, son premier apprentissage, est nécessaire à la pensée
“C’est dans les mots que nous pensons. Nous n’avons conscience de nos pensées
déterminées et réelles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les
différencions de notre intériorité et par suite nous les marquons d’une forme externe,
mais d’une forme qui contient aussi le caractère de l’activité interne la plus haute.
C’est le son articulé, le mot, qui seul nous offre une existence où l’externe et l’interne
sont si intimement unis. Par conséquent, vouloir penser sans les mots, c’est une
tentative insensée. Et il est également absurde de considérer comme un désavantage et
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comme un défaut de la pensée cette nécessité qui lie celle-ci au mot. On croit
ordinairement, il est vrai, que ce qu’il y a de plus haut, c’est l’ineffable. Mais c’est là
une opinion superficielle et sans fondement ; car, en réalité, l’ineffable, c’est la pensée
obscure, la pensée à l’état de fermentation, et qui ne devient claire que lorsqu’elle
trouve le mot. Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus
vraie.”

G. F. W. HEGEL, Philosophie de l’esprit (1817)

2. Tous ses apprentissages sont le fruit de la socialisation


“Jeté sur ce globe sans forces physiques et sans idées innées, hors d'état d'obéir par
lui-même aux lois constitutionnelles de son organisation, qui l'appellent au premier
rang du système des êtres, l'homme ne peut trouver qu'au sein de la société la place
éminente qui lui fut marquée dans la nature, et serait, sans la civilisation, un des plus
faibles et des moins intelligents des animaux : vérité, sans doute bien rebattue, mais
qu'on n'a point encore rigoureusement démontrée... Les philosophes qui l'ont émise les
premiers, ceux qui l'ont ensuite soutenue et propagée, en ont donné pour preuve l'état
physique et moral de quelques peuplades errantes qu'ils ont regardées comme non
civilisées parce qu'elles ne l'étaient point à notre manière, et chez lesquelles ils ont été
puiser les traits de l'homme dans le pur état de nature. Non, quoi qu'on en dise, ce n'est
point là encore qu'il faut le chercher et l'étudier. Dans la horde sauvage la plus
vagabonde comme dans la nation d'Europe la plus civilisée, l'homme n'est que ce qu'on
le fait être ; nécessairement élevé par ses semblables, il en a contracté les habitudes et
les besoins ; ses idées ne sont plus à lui ; il a joui de la plus belle prérogative de son
espèce, la susceptibilité de développer son entendement par la force de l'imitation et
l'influence de la société.”
Jean ITARD, Mémoire et rapport sur Victor de l'Aveyron (1801-1806)
Conclusion

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