Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Chapitre 4
Chapitre 4
1. Introduction
En gonflant un ballon en caoutchouc, l'énergie est graduellement stockée sous la forme d'une
énergie de déformation due d'une part à la compression de l'air contenu dans le ballon et
d'autre part à l'extension membranaire de sa paroi.
En appliquant une aiguille sur la ballon, celui-ci explose et toute l'énergie stockée est libérée
spontanément. La membrane du ballon rentre ainsi en ruine par propagation rapide de la
fissure initiale crée par l'aiguille et ce même si la tension qui y régnait était très inférieure à la
limite d'élasticité (déformations purement élastiques de la paroi).
Si maintenant, on applique une aiguille sur un système qui contient moins d'énergie que le
ballon précédent (ballon partiellement gonflé), la fissure créée ne se propage pas et l'on se
trouve dans un domaine stable. Si on gonfle à partir de cet état le ballon, on peut
éventuellement atteindre une pression qui fait exploser à nouveau le ballon. Cette pression
définit une pression critique qui fait spontanément exploser le ballon. Elle permet à la fissure
de se propager rapidement et constitue donc la limite entre l'état stable de la fissure et son état
instable qui entraîne la ruine.
28
Si l'on veut, dans le cas du ballon partiellement gonflé pour lequel la fissure se trouve dans un
état stable, faire augmenter la taille de la fissure, disons d'un mm, on doit exercer sur la paroi
du ballon une force de traction afin d'augmenter la surface globale de la fissure. Cette
opération consomme une quantité d'énergie qui est égale à l'énergie de tension par unité d'aire,
nécessaire pour la fissuration, multipliée par l'aire de la fissure créée. Si le travail effectué par
la pression dans le gaz plus l'énergie libérée par la membrane du ballon est inférieure à
l'énergie nécessaire pour la propagation de la fissure, le développement de la fissure ne peut
se produire. En gonflant davantage le ballon, on peut bien sûr augmenter la quantité d'énergie
stockée et atteindre éventuellement le point où l'énergie pouvant être libérée est bien plus
grande que l'énergie requise par la propagation de la fissure. Dans ce cas, la pression critique
est atteinte et on observe la rupture rapide (fracturation instantanée).
Beaucoup d'accidents dus au phénomène décrit précédemment se sont produits et continuent
de se produire. Dans tous les cas, la contrainte critique a été dépassée en prenant
complètement à contre pied le concepteur qui n'avait pas envisagé l'occurrence de ce
phénomène au moment où il avait dimensionné le projet.
Afin de mettre en équation le phénomène de rupture rapide, on peut exprimer la condition
d'équilibre énergétique qui doit satisfaite si l'on veut que la fissure progresse. Considérons
ainsi une fissure de longueur a dans un matériau d'épaisseur h qui progresse de a . Ceci ne
peut être possible que si le travail effectué par les charges extérieures est au moins égal à la
variation totale de l'énergie élastique et de l'énergie absorbée au niveau du pic de la fissure,
soit
où G c est l'énergie absorbée par unité d'aire de surface de la fissure initiale et h a est l'aire
de la nouvelle surface formée au pic de la fissure.
Le coefficient G c est une propriété du matériau qui est accessible expérimentalement. Il
représente l'énergie à fournir au matériau pour créer une surface unitaire de fissure et on
l'appelle ténacité (ou parfois énergie évacuée de déformation critique). Elle s'exprime en
J.m 2 . Une ténacité élevée signifie qu'il est difficile de faire progresser une fissure dans le
matériau comme c'est le cas par exemple du cuivre pour lequel Gc 106 J.m2 . Le verre se
29
3. Propagation d'une fracture sous déplacements imposées
La figure 4.1 montre une plaque mise sous tension par une force F et encastrée sur ses deux
bords inférieur et supérieur.
Plaque
d'épaisseur h
a a
Du fait que les bords sont fixés, les forces extérieures agissant sur la plaque ne développent
aucun travail. Le critère de progression de la fissure prend dans ce cas la forme
30
1 2
dWel h dA h dA (4.3)
2 2E
a
a
En présence d'une fissure de taille a, on peut supposer grossièrement que la région délimitée
par le cercle hachurée de rayon a s'est relaxé et a perdu toute l'énergie élastique qu'il
contenait. Cette énergie est donnée par
2 a 2 h
Wel (4.4)
2E 2
Lorsque la fissure progresse de la quantité a , on peut calculer l'énergie élastique libérée par
La condition critique de progression de la fissure (4.2) devient alors en tenant compte de (4.5)
2 a
Gc (4.6)
2E
31
analyse mathématique plus fine du problème permet de montrer en effet que l'énergie libérée
est le double de la quantité donnée par (4.4). La nouvelle quantité pouvant aussi être
légèrement affectée par la valeur de l'épaisseur de la plaque. La condition de criticité est alors
2 a
Gc (4.7)
E
soit
a K EG c K c (4.8)
K c s'expriment en MN m 3/ 2
L'analyse du critère défini par (4.8) montre que la rupture rapide se produit dans un matériau
soumis à un niveau de contrainte lorsque la fissure atteint une taille crique. De même un
matériau présentant une fissure de taille a risque de développer ce phénomène lorsque la
contrainte qui lui est appliquée atteint une intensité critique.
Les troisième et quatrième membres de la relation (4.8) ne dépendent que des propriétés du
matériau à savoir le module d'élasticité E et l'énergie requise par le matériau pour créer une
fissure d'aire élémentaire G c .
Les premiers membres de (4.8) décrivent les conditions de charge. Les derniers membres
(4.8) décrivent des propriétés matérielles intrinsèques. De ce fait la relation (4.8) est une
formule de dimensionnement à l'image de la formule y qui sert à effectuer le
dimensionnement élastique.
Le facteur de concentration de contrainte critique K c peut être déterminé expérimentalement
en produisant une fissure de taille donnée dans le matériau et en le chargeant jusqu'à observer
la rupture. G c peut alors être déduit de K c en utilisant la relation Kc EGc .
Les valeurs K c et G c sont très faibles dans le cas des matériaux peu tenaces comme les
verres, la glace ou les céramiques. Ces valeurs sont grandes dans le cas des métaux réputés
pour être très tenaces. Les polymères ont une ténacité intermédiaire, mais K c est faible à
cause du faite que pour ces matériaux E est petit. En renforçant les polymères, on fabriques
des composites qui eux ont une ténacité bien supérieure à celle des polymères vierges
32
Table 4.1: Valeurs de G c et K c à température ambiante
G c ( kJ.m2 ) K c ( MN.m3/ 2 )
Métaux pures (Cu, Al,...) 100 1000 100 350
Acier HY130 (norme BS) 150 170
Signalons que les métaux sont tenaces à la température ambiante, en les refroidissant, ils
peuvent devenir fragiles.
Remarquons enfin que la formule (4.8) a été établie sous l'hypothèse de déplacements
imposés nuls. Si l'on considère le cas d'une plaque chargée par des forces imposées, la
situation est plus compliquée car sous l'action de la fissuration la contrainte augmente.
a
local (4.9)
2r
33
local
y
ry r
a
On trouvera ainsi une position ry qui constitue la frontière entre le domaine élastique et
K2
local y ry (4.10)
22y
grande, plus la zone plastique est réduite. Les céramiques, contrairement aux métaux, voient
donc se développer une très petite zone plastique au niveau du pic de la fissure.
A l'opposée, plus la zone plastique est grande, plus de l'énergie peut être absorbée par
déformations plastiques. Ce qui signifie dans ce cas que K c et G c sont grands. C'est pour
cette raison que les matériaux ductiles sont très tenaces.
Dans le cas des céramiques qui sont fragiles, on a la relation (4.9) qui reste valable tant que la
pointe de la fissure ne s'arrondit pas. Des niveaux de contraintes élevées entraînent dans ce
cas la rupture sans qu'une zone plastique notable ne se soit développée. C'est ce qu'on appelle
de mécanisme de clivage.
Remarquons enfin, que le clivage peut aussi apparaître dans le cas des métaux admettant la
structure cfc (bcc) et hpc (hcp) car ils deviennent fragiles à faibles températures. Certains
aciers le deviennent même au voisinage de la température de 0°C. Cette remarque explique,
les ruptures par fracturation instantanée qui ont été observées de manière plus fréquente en
hiver qu'en été.
34
5. Rupture par fatigue
fatigue.
On distingue dans la pratique trois types de fatigues:
- fatigue de composants non fissurés à grands nombre de cycles 104 ;
- fatigue de composants non fissurés à petits nombre de cycles 104 ;
- fatigue de composants fissurées.
Durant un cycle de chargement, la contrainte varie entre deux limites min et max . On pose
max min
max min
m (4.11)
2
max min
a
2
Dans le cas où m 0 , les résultats expérimentaux, lorsque le nombre de cycles est grand
Nf C1 (4.12)
où pour la plupart des matériaux 1/15;1/ 8 est une constante au même titre que C1 .
35
Lorsque le nombre de cycles entraînant la fatigue est faible 104 , c'est la loi de Coffin -
Manson qui s'applique
p Nf C2 (4.13)
où pour la plupart des matériaux 0.5; 0.6 est une constante au même titre que C 2 . p
1 m (4.14)
ult
qui ne s'applique pas de manière universelle quelque soit le matériau choisi. Des essais à
différents niveaux de m sont donc souvent nécessaires.
da
(K) (4.16)
dN
af da af da
Nf
(4.17)
a0 (K) a 0 () (a) / 2
36
6. Exercices
4.1 Une épaisse plaque d'acier examinée par des radiations X ne présente aucune fissure
détectable. L'équipement utilisé peut détecter toute fissure de taille a 1 mm ou plus. L'acier a
- En supposant que la plaque contient des fissures à la limite de détectabilité, dire si la plaque
peut subir l'écoulement plastique ou bien se rompre par rupture rapide avant que l'écoulement
plastique ne se produise.
- Quelle est la contrainte avec laquelle la rupture rapide surviendrait?
4.2 Un composant est fabriqué en acier avec Kc 54 MN.m3/ 2 . Un test non destructif par
une méthode à ultrasons a montré que le composant contient des fissures atteignant la taille
a 2a 0.2 mm . Les essais de laboratoire ont montré que la vitesse de progression sous
chargement cyclique est donnée par
da
(K)4
dN
où 4 103 (MN.m 2 ) 4 .m 1 .
- Le composant est soumis à une contrainte alternative d'amplitude 180 MN.m 2 autour
37
da
(K)4
dN
pD
2e
38