Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
L3 Gef Ecue1 2020 CM PDF
L3 Gef Ecue1 2020 CM PDF
Laboratoire de Génétique
01 BP V 34 Abidjan 01 22 BP 582 Abidjan 22
www.univ-cocody-ci ufrbiosciences@yahoo.fr
UE : Génétique Formelle
ECUE1 : Génétique Formelle des Haploïdes
Cours Magistraux
2
Introduction
Tous les êtres vivants, des virus à l'homme, possèdent une propriété commune qui est le pouvoir de
reproduction c'est à dire la transmission de l'information héréditaire des ascendants aux
descendants.
Chez les eucaryotes, cette information est portée par l'ADN. La quasi-totalité de l'ADN cellulaire
est localisée dans le noyau au niveau des chromosomes. Les chromosomes sont donc les supports
de l'hérédité.
Mais comment cette information qui se trouve au niveau des chromosomes est transmise des
Parents aux Descendants à travers le processus de la reproduction sexuée ?
Pour comprendre le principe de transmission, il faut savoir que chez les Eucaryotes, la sexualité
assure un brassage constant (intra et inter chromosomique) des gènes entre des individus
génétiquement différents à travers la Méiose et la Fécondation. La variabilité génétique ainsi
introduite entre individus d’une même espèce correspond à la diversité des gènes qui se traduit par
une diversité des allèles, des génotypes et des phénotypes.
Les caractères héréditaires sont gouvernés par des éléments dénommés gènes arrangés linéairement
sur un support qui est le chromosome. Chaque gène sur un chromosome occupe un emplacement
défini appelé locus. Tout gène peut être éventuellement transformé par une mutation. Ainsi chaque
gène peut exister sous deux formes : la forme sauvage et la forme mutée. Ces deux formes sont
dites allèles.
On appelle génome l'ensemble des déterminants héréditaires d'une cellule ou d'un organisme et
génotype l'expression du génome chez un individu (son patrimoine génétique propre). La
réalisation du génotype, soit l'ensemble de ses caractères apparents, constitue le phénotype. Les
gènes individuels peuvent être identifiés grâce aux modes de transmission phénotypique, mais
seulement s'il existe une certaine variation du phénotype.
L’analyse génétique ou Génétique Formelle (qui étudie le mode de transmission des caractères
héréditaires) dans le cas des Organismes Haploïdes va donc constituer l’objectif général de ce
cours. Les objectifs spécifiques sont :
- Connaitre le processus de la méiose et de ces conséquences génétiques ainsi que celui de la
fécondation pour comprendre la transmission des caractères chez les Haploïdes.
- Comprendre la transmission d’un caractère gouverné par un couple d’allèles chez les Haploïdes
- Comprendre la transmission de 2 caractères gouvernés par deux couples d’allèles indépendants.
- Comprendre la transmission de 2 caractères gouvernés par deux couples d’allèles liés
- Comprendre la transmission de 3 caractères gouvernés chacun par un couple d’allèles.
3
Chapitre I : Bases de la Génétique Formelle
Dans ce chapitre nous allons étudier successivement le cycle de reproduction, les cycles
chromosomiques, la fécondation, la méiose et les conséquences génétiques de la méiose pour
comprendre comment les chromosomes sont transmis d’une génération à la suivante à travers la
reproduction sexuée.
A- Le cycle de reproduction
Chaque espèce est caractérisée par un nombre constant de chromosomes dans chacun des noyaux de
chacune de ses cellules somatiques et germinales.
Ce nombre est de 46 pour l'espèce humaine, 20 pour le maïs, 8 pour la drosophile, 14 pour le mil,
24 pour l’aubergine, 176 pour le laurier etc… Cependant les cellules reproductrices ou gamètes
contiennent la moitié de ce nombre de chromosomes. Ces cellules reproductrices sont les ovules et
les spermatozoïdes chez l’homme et chez les animaux, les ovules et les grains de pollen chez les
végétaux.
La question qui se pose est de savoir par quels mécanismes le nombre de chromosomes se maintient
constant de génération en génération au cours de la reproduction sexuée.
La croissance de ce zygote assurée par des divisons cellulaires successives appelées mitoses va
donner un individu dont toutes les cellules somatiques et germinales seront à 46 chromosomes.
Chez cet individu qui sera mâle ou femelle, les testicules ou les ovaires renferment les cellules
germinales à 46 chromosomes à partir desquelles va se dérouler la gamétogenèse ou l’ovogenèse
qui permettra de réduire le nombre de chromosomes de moitié et de produire des spermatozoïdes ou
des ovules à 23 chromosomes. 4
Ainsi des individus adultes d’une génération produiront des gamètes mâles et femelles à 23
chromosomes dont la fusion donnera, à la génération suivante, naissance à un nouvel individu à 46
chromosomes.
Les 23 chromosomes d'un gamète sont morphologiquement différents ; ils sont représentés en 1 seul
exemplaire ; on dit que le gamète est à n chromosomes ou encore qu'il est haploïde.
Les 46 chromosomes du zygote et de toutes cellules somatiques et germinales qui en dérivent par
mitoses, sont représentés en 2 exemplaires ; on dit que le zygote et toutes les cellules somatiques et
germinales sont à 2 n chromosomes ou encore qu'elles sont diploïdes.
Dans la genèse d'un individu on peut ainsi définir deux phases : la Phase Diploïde où les cellules
contiennent 2n chromosomes et la Phase Haploïde où les cellules ne contiennent que n
chromosomes.
Au cours des générations sexuées successives, il y a un cycle d'alternance des phases diploïde et
haploïde. Cette alternance est assurée par la Méiose qui fait passer de la phase diploïde à la phase
haploïde et par la Fécondation qui fait passer de la phase haploïde à la phase diploïde. Ces deux
processus biologiques complémentaires que sont la Méiose et la Fécondation permettent de
maintenir constant le nombre de chromosomes de l'espèce humaine.
La méiose et la fécondation ne sont pas spécifiques à la seule espèce humaine, elles se déroulent
chez la quasi totalité des Eucaryotes. Mais l'importance relative des phases haploïde et diploïde
permet cependant de définir 3 principaux cycles chromosomiques : le cycle diplobiontique, le cycle
haplobiontique et le cycle haplodiplobiontique.
5
Le cycle diplophasique ou diplobiontique est caractérisé par une phase diploïde prépondérante au
cours de laquelle s'opère la multiplication cellulaire. La phase haploïde est réduite aux gamètes.
C'est le cas chez l'espèce humaine, le maïs, la drosophile, le pois, d'une façon générale chez les
plantes et les animaux supérieurs.
Exemple : Cycle de Zea mays
6
Le cycle haplophasique ou haplobiontique est caractérisé par une phase haploïde prépondérante au
cours de laquelle s'opère la multiplication cellulaire. La phase diploïde est réduite au seul zygote.
C'est le cas chez les champignons : Ascobolus, Sordaria, Neurospora.
Exemple : Cycle de Sordaria macrospora
Cycle de Neurospora
7
Le cycle haplodiplophasique ou haplodiplobiontique est caractérisé par des multiplications
cellulaires aussi bien en phase haploïde qu’en phase diploïde. Il y a ainsi alternance de deux formes,
l'une haploïde et l'autre diploïde. C'est le cas chez la levure de boulangerie (Saccharomyces
cerevisiae).
Exemple : Cycle de Saccharomyces cerevisiae (la levure de boulangerie)
8
C- La Fécondation
La fécondation est le processus qui, par la fusion de 2 gamètes haploïdes, conduit à la formation
d'une cellule diploïde ou zygote et permet ainsi le passage de la phase haploïde à la phase diploïde.
Chez la majorité des espèces, la fécondation a lieu entre des gamètes de tailles différentes : on parle
d'anisogamie. Le gamète femelle est immobile et possède un cytoplasme riche en réserves. Le
gamète mâle beaucoup plus petit est mobile et contient très peu de cytoplasme. Il existe donc une
différence au niveau de leur participation respective à la constitution du cytoplasme.
Par contre gamètes mâle et femelle ont une contribution équivalente à la fabrication du noyau du
zygote à 2n chromosomes au cours de la caryogamie. En effet les 2 gamètes qui contiennent
chacun n chromosomes apportent non seulement le même nombre de chromosomes, mais aussi les
mêmes types de chromosomes.
D- La Méiose
La méiose est le processus qui fait passer de la phase diploïde à 2n chromosomes à la phase
haploïde à n chromosomes. Elle permet d'obtenir à partir d'une cellule diploïde 4 cellules haploïdes.
La méiose est un ensemble de 2 divisions nucléaires successives. La première est précédée d'une
duplication des chromosomes et procède à la séparation des chromosomes homologues. La seconde
procède à une division des chromosomes qui aboutit à la séparation des chromatides sœurs.
Interphase : le noyau inter phasique est diffus. L’évènement majeur qu'il abrite n’est pas
optiquement visible. Il s’agit de la réplication de la molécule d'ADN de chaque chromosome.
Chaque chromosome se trouve ainsi composé de 2 molécules d'ADN filles avec pour conséquence
la duplication de chaque chromosome en 2 chromatides sœurs.
Prophase I
Elle est longue et complexe. Cette complexité a amené les cytologistes à la subdiviser en 5 stades
qui se succèdent de manière continue. Ces stades sont les suivants :
Leptotène : Les chromosomes s'individualisent et apparaissent au microscope optique sous forme
de filaments fins, très longs et enchevêtrés. Chaque chromosome qui est déjà composé de 2
molécules d'ADN n'apparaît pas encore divisé en 2 chromatides sœurs.
Zygotène : Ce stade correspond au début de l'appariement des chromosomes homologues.
Chaque chromosome tout en se raccourcissant et en devenant épais va s'apparier à son
homologue. Ce phénomène d'appariement est le plus caractéristique et le plus important de la
méiose. Le noyau contient ainsi n paires de chromosomes ou n bivalents.
9
Schéma 3 : la réplication de la molécule d’ADN et la duplication de chaque chromosome
au cours de l’interphase
Pachytène : A ce stade, l'épaississement des chromosomes est important, de sorte que chaque
chromosome apparaît nettement formé de 2 chromatides sœurs étroitement accolés et d’un
chromosome. Chaque chromatide contient une molécule d'ADN : c'est la visualisation de la
réplication de l'ADN qui s’est opérée à l’interphase. Les chromosomes homologues sont
entièrement appariés et cet appariement est strictement homologue, il se fait point par point sur
toute la longueur des chromosomes. Les chromosomes homologues appariés forment des
bivalents. Chaque bivalent compte donc à ce stade 4 chromatides avec seulement 2 centromères
et devient une tétrade.
Diplotène : L'attraction mutuelle entre les chromosomes homologues se relâche de telle sorte que
les deux paires de chromatides homologues de chaque tétrade ont tendance à se séparer comme
si elles se repoussaient mais restent associés en certains points appelés les chiasmas.
10
Diacinèse : A ce stade les chromosomes continuent à s'épaissir et atteignent leur maximum de
condensation. Les forces de répulsion éloignent progressivement les chromosomes homologues
l'un de l'autre et provoquent ainsi le glissement des chiasmas vers les extrémités des
chromosomes. C'est la terminalisation des chiasmas qui a comme effet la diminution du Le
nombre de chiasmas.
Métaphase I
Elle débute avec la disparition de l'enveloppe nucléaire et la formation du fuseau achromatique.
Les chromosomes homologues encore reliés par des chiasmas se disposent au niveau du plan
équatorial avec leurs centromères situés de part et d'autre de ce plan.
Anaphase I
La terminalisation prend fin. Les derniers chiasmas se séparent. Avec leurs centromères non
encore clivés, les chromosomes homologues formés chacun de 2 chromatides migrent vers chaque
pôle de la cellule, par l'Intermédiaire des fibres contractiles.
Télophase I
A chaque pôle de la cellule, on a n chromosomes formés chacun de 2 chromatides. Selon les cas il
y a une reconstitution d'un noyau inter phasique avec l'apparition d'une membrane nucléaire (cas
de la sauterelle) ou une amorce immédiate de la seconde division (cas du Trillium).
Le bilan de la première division de la méiose (Division I) est la réduction par deux du nombre de
chromosomes par noyau
Prophase II
Chaque cellule ne contient plus que n chromosomes dont chacun est toujours dédoublé en deux
chromatides. Ces chromosomes s’orientent vers le centre de la cellule.
En fin de prophase II, les chromosomes sont à nouveau contractés.
Métaphase II
Les chromosomes se disposent au niveau du plan équatorial avec leurs centromères situés sur ce
plan.
Anaphase II
L'anaphase II débute par le clivage du centromère de chaque chromosome et se poursuit par la
migration vers des pôles opposés des deux chromosomes fils.
Télophase II
La membrane nucléaire réapparaît. Les quatre cellules correspondant à ces quatre noyaux haploïdes
sont les quatre produits de méiose appelés gamètes.
Le bilan de la deuxième division de la méiose (Division II) est la division de chaque noyau issu de la
Division I en 2 noyaux qui lui sont identiques.
11
Le schéma ci-dessous illustre les bilans des deux divisions de la méiose.
II est nécessaire de revenir sur certains aspects de la méiose pour en voir les conséquences au
niveau génétique.
Le crossing-over se déroule en deux étapes. La première consiste en une cassure en deux points
homologues de 2 chromatides homologues. La deuxième consiste en une soudure entre des
segments de chromatides homologues donc en un échange physique réciproque de segments de
chromatides homologues.
Chacun des chromosomes homologues qui a subi le crossing-over est formé d’une chromatide
parentale et d’une chromatide remaniée.
Il s'est ainsi produit une recombinaison qui touche la structure physique des chromosomes, on parle
de recombinaison intra-chromosomique.
12
Schéma 6 : Le crossing-over et ses conséquences cytologique et génétique
Le noyau qui subi la méiose contient 1 paire de chromosomes homologues portant les couples
d’allèles A/a et B/b
Nous allons considérer les deux événements qui peuvent se produire dans l’intervalle qui sépare les
deux couples d’allèles A/a et B/b :
- si aucun crossing-over n'a lieu dans l'intervalle qui sépare les deux couples d’allèles A/a et
B/b, on aura 4 gamètes dont 2 gamètes Ab et 2 gamètes aB. Les gamètes Ab et aB sont
des gamètes de type parental.
- si un crossing-over a lieu dans l'intervalle qui sépare les deux couples d’allèles A/a et B/b
on aura 4 gamètes : Ab et aB sont des gamètes de type parental et AB et ab qui sont des
gamètes de type recombiné.
14
Ces deux événements n’ont pas la même probabilité car le crossing-over est un événement rare,
aussi :
- Si on considère un grand nombre de méioses, la fréquence de méioses ayant subies un crossing-
over sera faible. Cela se traduira par le fait que la fréquence des gamètes de type recombiné sera
inférieure à la fréquence des gamètes de type parental.
- Si inversement on considère 1000 gamètes et que l'on trouve 450 Ab, 450 aB, 50 AB et 50 ab, on
pourra conclure que :
- Ab et aB sont les gamètes de type parental ;
- AB et ab sont les gamètes de type recombiné ;
Les 2 couples A/a et B/b sont liés et donc qu'ils sont portés par la même paire de chromosomes
Le pourcentage de recombinaison est de : [(50 + 50)/ 1000] x100 = 10%
Ce pourcentage qui est lié au pourcentage de crossing-over permettra d'estimer la distance
génétique qui sépare les 2 couples d’allèles A/a et B/b.
Cette distance dans cet exemple est de 10 UR. En général cette distance d = % Recombinés
15
La première disposition (I) permettra d’obtenir à la fin de la méiose 4 gamètes qui contiendront
chacun 2 chromosomes de la même origine parentale ;
La seconde disposition (II) permettra d’obtenir 4 gamètes qui contiendront chacun 2 chromosomes
d’origines parentales différentes.
Ainsi on aura en plus des gamètes de type parental, des gamètes de type recombiné. Il s'est produit
une recombinaison entre les chromosomes non homologues, on parle de recombinaison inter-
chromosomique.
La distinction entre les gamètes de type parental et les gamètes de type recombiné peut se faire en
utilisant deux couples d’allèles Aa et B/b portés par deux paires de chromosomes différents.
Supposons que :
- la 1ère paire d'homologues porte le couple d’allèles A/a avec A sur le chromosome d'origine
paternel et a sur le chromosome d'origine maternelle
- la 2ème paire porte le couple d’allèles B/b avec B sur le chromosome d'origine paternelle et
b sur le chromosome d'origine maternelle.
Le noyau qui subit la méiose contient 2 paires de chromosomes homologues portant respectivement
les couples d’allèles A/a et B/b
En métaphase I les centromères de ces chromosomes peuvent se placer de manière aléatoire
de part et d’autre du plan équatorial selon 2 dispositions.
16
La première disposition (I) permettra d’obtenir 4 gamètes dont 2 AB et 2 ab. Ces gamètes sont des
gamètes de type parental.
La seconde disposition (II) permettra d’obtenir 4 gamètes dont 2 Ab et 2 aB. Ces gamètes sont des
gamètes de type recombiné.
Ces 2 dispositions ont la même probabilité, aussi,
- si on considère un grand nombre de méiose, la moitié de ces méioses donnera des gamètes
de type parental et l'autre moitié donnera des gamètes de type recombiné. On aura donc fr
P= fr R ; on aura donc comme gamètes 1/4 AB ; 1/4 ab ; 1/4 Ab et 1/4 aB
- si, inversement, on observe 1000 gamètes et que l'on trouve 250 AB ; 250 ab ; 250 Ab et
250 aB, on pourra conclure que les 2 couples d’allèles sont indépendants et donc qu'ils sont
portés par des chromosomes différents.
Ce que nous venons de voir avec 2 paires de chromosomes peut s'étendre à tous les chromosomes
d'un même organisme.
Dans le cas de 2 paires de chromosomes il y a 4 types de gamètes, soit 2².
Cette probabilité est encore plus infime si l'on tient compte du brassage intra chromosomique. On
comprend ainsi que chaque homme est de par son génotype unique sur la terre (hormis les vrais
jumeaux).
D3- CONCLUSION
D'un point de vue générale, il apparaît que la sexualité c'est à dire le jeu alterné de la fécondation et
de la méiose :
- assure la continuité biologique par le maintien de la stabilité du nombre de chromosome et
de la quantité d'ADN par cellule
- crée la diversité biologique qui constitue un atout considérable pour la survie d'une espèce.
Il est clair que plus les individus d'une population sont divers, plus grande est l'adaptabilité de celle-
ci aux changements des conditions d'existence.
17
Chapitre II - Analyse génétique chez les champignons Ascomycètes
Par le jeu de mitoses synchrones au niveau de chaque hyphe ascogène, une série de crochets
donnera naissance à un bouquet d’asques provenant d’un seul couple de noyaux.
Pendant ce temps l'ascogone s'est développé, son enveloppe s'est épaissie et pigmentée, il est
devenu un périthèce qui peut contenir plus de cent asques
La phase diploïde est réduite au noyau diploïde. Le cycle dure environ dix jours.
18
Schéma 12 : Le cycle de reproduction de Neurospora crassa
19
A2-2 Analyse de spores en vrac
L’analyse porte sur un échantillon de produits de méiose (spores). Dans ce cas, les 4 produits d’une
même méiose ne sont pas identifiés.
On cultive séparément les deux souches à croiser dans des boites de pétri. Par exemple souche à
spores blanches A et souche à spores noires B. Pour réaliser l’hybridation, on utilise une autre boite
contenant un milieu de culture vierge. Dans un coin de celle-ci on dépose une petite portion de
milieu qui contient A. Dans un coin opposé de la même boite, on dépose une autre portion de milieu
contenant B. Cette boite d’hybridation est ensuite placée dans une enceinte réglée à la température
de 25°C et éclairée à la lumière blanche avec une intensité d’environ 1500 lux. Après une
incubation d’une dizaine de jours, les filaments mycéliens des deux souches parents se développent
et se rejoignent. Dans la zone de contact se produisent des fécondations entre filaments mycéliens
d’origine différente et on a formation de nombreux périthèces hybrides dans lesquels chaque asque
contient à la fois des spores blanches et des spores noires.
20
B- Ségrégation d’un couple d’allèles
Le croisement entre une souche sauvage à spores noires et une souche mutante à spores blanches a
donné une descendance composée comme suit :
La Classe 1 : regroupe 2 types d’asques dont les demi-asques contiennent soit exclusivement des
spores noires soit exclusivement des spores blanches. Ces asques sont à demi-asques homogènes.
21
Schéma 15 : Formation des asques pré-réduits
En suivant le devenir du couple d’allèles b+/b au cours de la méiose, il apparaît qu'à la fin de la 1ère
division un noyau fils contenait 1 chromosome avec les 2 chromatides portant le même allèle b +,
l'autre noyau fils contenait 1 chromosome avec les 2 chromatides portant le même allèle b.
Les 2 allèles du couple b+/b se sont donc séparés à la 1ère division de méiose avant la réduction du
nombre de chromosomes. Les asques à demi-asques homogènes sont dits asques pré-réduits.
L'apparition des 2 types d’asques pré-réduits dépend de la position aléatoire des centromères de
part et d’autre du plan équatorial à la métaphase I. Les 2 dispositions possibles sont équiprobables.
Les 2 types d’asques qui en résultent auront donc des fréquences ou des effectifs statistiquement
équivalents.
La Classe II : regroupe 4 types d’asques dont les demi-asques contiennent à la fois des spores
noires et des spores blanches. Ces asques sont à demi-asques hétérogènes.
Notion de distance
A l'origine d'un asque post-réduit, nous savons maintenant qu'il se produit un crossing-over entre le
locus du gène considéré et son centromère. Si l'on postule que les crossing-over sont distribués de
manière uniforme tout au long du chromosome, la fréquence des crossing-over sera plus ou moins
grande selon que le locus du gène considéré est plus ou moins loin de son centromère.
Cela revient donc à dire que la fréquence de crossing-over est fonction de la distance qui sépare le
locus d'un gène de son centromère.
Cette fréquence nous donne donc un moyen de mesurer les distances qui séparent les gènes de leurs
centromères.
La distance génétique est exprimée en centimorgan CM (de Morgan qui a découvert le crossing-
over) ou en unité de recombinaison UR
dg = x 100 (UR)
Dans chaque asque, il y avait à l'origine, dans le noyau qui a subi la méiose, 2 chromosomes
homologues dupliqués, donc 4 chromatides.
Dans chaque asque pré-réduit il n'y a pas eu de crossing-over entre le locus du gène et le
centromère, il n'y a donc pas eu de remaniement chromatidique.
Dans chaque asque post réduit il y a eu 1 crossing-over entre le locus du gène et le centromère. Le
crossing-over se faisant entre 2 chromatides sur les quatre en présence, ces 2 chromatides sont
remaniées ; il y a donc eu 2 remaniements chromatidiques. L'expression de la distance devient
donc
La relation dg-c = 1/2 % Post Réduction n'est donc correcte que si le segment gène-centromère est
suffisamment petit pour que les crossing-over multiples soient négligeables. S'ils ne le sont plus, le
calcul de la distance entre le gène et le centromère sur la base de la relation dg-c = 1/2 % Post
Réduction, donnera une sous évaluation de cette distance.
La limite inférieure de la post-réduction est égale à zéro. Dans ce cas la distance gène-centromère
est nulle. Le locus du gène considéré est très près de son centromère, le gène est donc toujours pré-
réduit.
Si on considère un gène très éloigné de son centromère, de telle manière que de nombreux crossing-
over puissent avoir lieu dans le segment gène-centromère, on peut admettre que les allèles du gène
ne gardent aucun souvenir du centromère auquel ils étaient primitivement rattachés. Leur
ségrégation se fera indépendamment de celle du centromère de sorte qu'aucune contrainte ne sera
plus exercée sur le moment de leur disjonction.
Dans ce cas les 6 types de tétrades obtenus ont la même fréquence qui est égale à 1/6. Les tétrades
pré-réduites ont une fréquence de 2/6 et les tétrades post-réduites ont une 4/6. La fréquence de post
réduction est donc de 4/6 ou 2/3. La limite supérieure du % de post réduction est donc égale à
2/3 soit 66%.
24
B4- Exercices d’application
Exercice 1 : Chez le champignon Sordaria, la souche sauvage à spores noires est croisée avec une souche
mutante à spores blanches. La descendance est la suivante :
O O O O O O O spore blanche
O O O O O O O spore noire
O O O O O O
O O O O O O
63 69 15 18 19 16
Interprétez ces résultats.
Solution Exercice 1
- Le caractère étudié est la coloration des spores qui s’exprime sous 2 phénotypes : spore noire (+) et spore
blanche (m)
- La descendance est composée de tétrades ordonnées.
1) - On observe dans chaque asque, 2 spores blanches et 2 spores noires soit une ségrégation de type 1-1. Le
caractère coloration des spores est donc gouverné par un couple d’allèles.
- Soit b+/b ce couple d’allèles avec [b+] pour spores noires et[b] pour spores blanches.
- Génotype du croisement : spore noire x spore blanche
b+ x b
2) - La descendance en asques ordonnés donne des asques pré-réduits et des asques post-réduits
Nombre d’asques pré-réduits = 63 + 69 = 132
Nombre d’asques post-réduits = 15 + 18 + 19 + 16 =68
- Distance entre b+/b et son centromère d = ½% post-réduction = 0.5 x 68/200 x 100 = 17%
Exercice 2 : Chez le champignon Ascobolus immersus on a réalisé le croisement entre une souche mutante à
spores rondes et la souche sauvage à spores ovales. La descendance est composée de 1745 asques contenant
4 spores ovales et 4 spores rondes.
1) Quel est le déterminisme génétique du caractère forme des spores.
2) Donner la composition de la descendance sur 3000 spores.
Solution Exercice 2
- Le caractère étudié est la forme des spores qui s’exprime avec 2 phénotypes : spore ovale (+) et spore
ronde (m)
- La descendance est composée d’asques.
1) - Dans chaque asque, on observe 4 spores rondes et 4 spores ovales soit une ségrégation de type 1-1 qui
indique que le caractère forme des spores est gouverné par un couple d’allèles.
Soit r+/r ce couple d’allèles avec [r] pour spores rondes et [r+] pour spores ovales.
- Génotype du croisement : spore ronde x spore ovale
r x r+
2) Le caractère forme des spores étant gouverné par un couple d’allèles on aura une ségrégation mendélienne
(type 1-1) soit 50% de spores rondes et 50% spores ovales. Ce qui donne sur 3000 spores 1500 spores ovales
et 1500 spores rondes.
Remarque sur le choix des symboles : Par convention le phénotype mutant est représenté par sa lettre
initiale en minuscule. Ex spore ronde [r]. Cette lettre affectée du signe + en exposant représente le phénotype
sauvage. Ex spore ovale [r+].
25
C- Ségrégation de deux couples d’allèles localisés sur deux paires de
chromosomes différents
Pour le comprendre faisons abstraction des asques et intéressons nous uniquement aux spores. En
totalisant toutes les spores présentant le même phénotype sans tenir compte du type d'asque
d'origine, ce qui revient à procéder à une analyse en vrac, on obtient les résultats suivants :
En considérant le croisement de départ : [blanche ovale] x [noire ronde] ; il apparait que la
descendance est composée des spores de type parental (associations parentales) br+ et b+r et des
spores de type recombiné (associations recombinées) b+r+ et br.
26
Compte tenu des fluctuations aléatoires, on peut dire que les fréquences observées ne sont pas
significativement différentes de 1/4. Chacun des 4 génotypes est également présent.
Cela revient à dire qu'un allèle donné d'un couple d'allèles a autant de chance de s'associer à
chacun des allèles de l'autre couple. Schématisons ces associations qui se font de manière aléatoire
Les ségrégations des 2 couples d'allèles sont donc indépendantes. Cette indépendance se traduit
aussi par l'existence dans la descendance d'autant de produits parentaux que de produits recombinés
(P = R). Elle se traduit encore par le fait que le pourcentage de recombinaison
x 100 = 50 %
27
Schéma 19 : Formation de TT résultant de l’absence de crossing-over entre l’un des 2 couples d’allèles
et son centromère associée l’existence d’ un crossing-over entre l’autre couple d’ allèles et son
centromère
Schéma 19 bis : Formation de TT résultant de l’absence de crossing-over entre l’un des 2 couples
d’allèles et son centromère associée l’existence d’ un crossing-over entre l’autre couple d’ allèles et son
centromère
- un crossing-over se produit aussi bien entre r+/r et son centromère que entre b+/b et son
centromère : on a une post-réduction des 2 couples d'allèles. Dans ce cas les 2 noyaux issus de la
1ère division de méiose sont identiques du point de vue des associations d'allèles qu'ils
renferment. A l'anaphase II après le clivage des centromères du fait des ségrégations
indépendantes des chromosomes on aura 2 situations équiprobables pour chaque noyau qui
aboutissent à deux demi asques ayant la même fréquence. Comme les devenirs des 2 noyaux
issus de la 1ère division de méiose sont indépendants on aboutit à 4 combinaisons équiprobables
qui donnent : 1/4 de DP, 1/4 de DR et 1/2de TT.
28
- Schéma 20 : Formation de DP, DR et TT résultant de l’existence d’ un crossing-over entre les deux
couples d’allèles et leurs centromères
2e cas : x = 0 ou y = 0
Dans ce cas un des 2 couples d'allèles est très proche de son centromère, il est donc toujours pré-
réduit. On a fr DP = fr DR de plus si x = 0, frTT = y et si y = 0, frTT = x
29
Dans ce cas la fréquence de TT est équivalente à la fréquence de post-réduction du couple d'allèles
distant de son centromère.
La distance de ce couple d'allèles à son centromère sera donc : dg-c = 1/2 % TT
Chez les champignons à tétrades non ordonnées cette situation est intéressante car elle permet
de calculer la distance qui sépare un couple d'allèles de son centromère sans détecter d'asques
post réduits.
3e cas : x= 2/3 et / ou y =2/3 dans ce cas au moins un couple d'allèles est très éloigné de son
centromère. On a fr DP = fr DR avec fr DP = 1/6; fr DR = 1/6; fr TT = 2/3
D'une façon générale il apparaît donc que dans le cas de l'indépendance on a:
- fr DP = fr DR
- 1/6 < fr DP < 1/2 ;
- 1/6 < fr DP < 1/2 ;
- 0 < fr TT < 2/3
Imaginons 2 couples d'allèles a+/a et b+/b localisés sur 2 paires de chromosomes différents et à une
certaine distance de leurs centromères respectifs.
Soit un croisement entre deux souches P1 et P2 de génotypes respectifs ab+ et a+b.
a DR DP TT TT TT TT
+ + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + +
a ab +
ab ab ab ab
+ + + ab + + + + + +
a ab +
ab ab ab ab
+ + ab
+ + + + + +
ab +
ab ab ab ab
Pré ab
réduction +
+ a DP DR TT TT TT TT
de a /a + + + + + + + + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + + + + + + + +
a ab ab ab ab ab a b
+ + +
a ab ab ab ab ab ab
+ +
+ ab ab ab ab ab
ab
a TT TT DR DP TT TT
+ + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + + + + + + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + +
a ab ab ab +
ab a b
+ + ab
+ + + + + +
ab ab ab +
ab ab
ab
+
a TT TT DP DR TT TT
+ + + + + + + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + + + + + + + +
a ab a b ab a b ab ab
+ +
ab ab + ab ab ab
Post ab
réduction +
+ a TT TT TT TT DR DP
de a /a + + + + + + + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + +
a ab ab ab ab ab +
+ + ab
+ + + + + +
a b ab ab ab ab +
ab
a TT TT TT TT DP DR
+ + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + + + + + + + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ + + + + + + + +
a ab ab ab ab ab ab
+ +
ab ab ab ab + ab
ab
II ressort que fr DP = fr DR quelles que soient les fréquences de post réduction x et y des 2 couples
d'allèles. La fr TT dépend essentiellement des post-réductions respectives des 2 couples d'allèles.
Ainsi, lorsque les ségrégations de 2 couples d'allèles sont indépendantes, les fréquences des DP
et DR sont équivalentes et réciproquement.
31
Etude de quelques cas particuliers
Ces cas sont les mêmes que ceux décrits pour les tétrades non ordonnées. Les conclusions dégagées
sont également les mêmes. Avec le tableau à 36 cases on arrive à mieux visualiser les situations
décrites précédemment.
Si on réalise un croisement ab+ x a+b en analysant des tétrades on aurait eu des DP, DR et TT.
Les DP contiennent 4 spores ab+ et 4 spores a+b
Les DR contiennent 4 spores ab et 4 spores a+b+
Les TT contiennent 2 spores ab+; 2 spores a+b ; 2 spores ab ; 2 spores a+b+
Les spores de type parental étant ab+ et a+b et les spores de type recombiné étant ab et a+b+ du fait
de l'égalité DP = DR et de la composition des TT, il apparaît que la fréquence des spores parentales
est équivalente à celle des spores recombinées.
La seule difficulté au niveau de l'analyse de spores en vrac réside parfois dans le fait que les 4
génotypes attendus dans le cas de 2 couples d'allèles indépendants ne conduisent pas à 4 phénotypes
différents. Les exemples ci-après illustrent ces cas particuliers
Si on effectue un croisement entre une souche à spores granuleuses et une souche à spores blanches
(b+g x bg+) on obtient : 1/4 de spores granuleuses b+g ; 1/4 de spores noires b+g+ et 1/2 de spore
blanche bg+, bg
32
L’explication réside dans le fait qu’en présence de l’allèle bl le pigment n’est pas synthétisé,
l’expression de l’allèle gr est masquée et les spores de génotype blgr sont blanches.
4- Exercices d’application
Exercice 3 : Chez Ascobolus le croisement entre une souche mutante à spore blanche et une souche autre souche
mutante à spores rondes a donné une descendance composée de :
189 asques à 4 spores blanches et ovales, 4 spores noires et rondes
192 asques à 4 spores noires et ovales, 4 spores blanches et rondes
103 asques à 2 spores blanches et ovales, 2 spores noires et rondes
2 spores noires et ovales, 2 spores blanches et rondes
La souche sauvage a des spores noires et ovales. Interpréter ces résultats.
Solution de l’exercice 3
Caractères étudiés : coloration des spores (blanche ou noire) et Forme des spores (ronde ou ovale)
Le croisement fait intervenir 2 caractères.
La descendance est donnée en asques
Solution de l’exercice 4
- Caractères étudiés : Arginine (ne pousse pas sur mm (Arg-) ou pousse sur mm (Arg+))
Thiamine (ne pousse pas sur mm (Thi-) ou pousse sur mm (Thi+))
Le croisement fait intervenir 2 caractères.
- La descendance est composée d’asque
34
D- Ségrégation de deux couples d'allèles localises sur la même paire de
chromosomes (2 couples d’allèles liés)
D1- Cas des organismes à tétrades non ordonnés
Analyse des résultats d'un croisement chez Ascobolus entre un mutant à spores rondes et un mutant
à spores granuleuses
Schéma 22 : Descendance composée de DP, DR et TT dans le cas de deux couples d’allèles localisés sur la même
paire de chromosomes
Pour le caractère forme, dans chaque asque on a 4 spores rondes et 4 spores ovales, c'est à dire une
ségrégation 1-1 qui permet de conclure que le caractère est sous la dépendance d'un couple
d'allèles r+ /r.
Pour le caractère coloration, dans chaque asque on a 4 spores noires et 4 spores granuleuses, c'est à
dire une ségrégation 1-1 qui permet de conclure que le caractère est sous la dépendance d'un
couple d'allèles g+/g.
Si les 2 couples d'allèles étaient indépendants on aurait dans la descendance autant de DP que de DR.
Ce n'est pas le cas, DP est supérieur à DR. Comment expliquer cette nouvelle situation?
Faisons abstraction des asques et intéressons nous uniquement aux spores. En totalisant toutes les
spores présentant le même phénotype sans tenir compte du type d'asque d'origine, ce qui revient à
procéder à une analyse en vrac, on obtient les résultats suivants :
3174 spores rondes noires rg+
3174 spores ovales granuleuses r+g
842 spores rondes granuleuses rg
842 spores ovales noires r+g+
Les spores de type parental ont un effectif supérieur à celui des spores de type recombiné.
Tout se passe comme s'il existait une force contraignant les allèles à conserver préférentiellement
les associations qu'ils avaient dans les souches parentales. On dit que les 2 couples d'allèles sont
liés. Par opposition à l'état d'indépendance, on parle de liaison (en anglais linkage).
35
La liaison de 2 caractères a été observée par les anglais Bateson et Punnett, dès 1906, dans des
expériences sur les pois de senteur.
C'est Morgan qui en 1910 a postulé à partir d’expériences chez la drosophile que les couples
d'allèles qui n’ont pas une ségrégation indépendante sont physiquement liées du fait de leur
localisation sur la même paire de chromosomes. Il a imaginé aussi que les produits recombinés
pouvaient cependant apparaître grâce aux crossing-over se produisant dans l'intervalle qui sépare
les 2 couples d'allèles considérés.
Du fait de la faible fréquence de crossing-over dans une population de méioses, les types
recombinés auront une fréquence inférieure à celle des types parentaux.
On se souvient que dans l'analyse des spores en vrac dans le cas d'une indépendance P = R de sorte
que le % de recombinaison est égale à 50 %. Dans le cas de la liaison on voit que le %
recombinaison sera inférieur à 50 % .Dans notre exemple le calcul de ce pourcentage de
recombinaison est le suivant :
% recombinaison = x 100 =20,9%
La distance entre r+/r et g+/g est donc de 20,9 UR.
Maintenant que nous savons que les 2 couples d'allèles r+/r et g+/g sont portés par la même paire
de chromosomes, déterminons l'origine des différents types d'asques et calculons la distance qui
sépare r+/r de g+/g.
Schéma 23 : Formation de DP résultant de l’abscence de crossing-over entre les deux couples d’allèles
- Schéma 24 : Formation de TT résultant de l’existence d’un crossing-over entre les deux couples
d’allèles
36
- deux crossing-over se produisent entre r+/r et g+/g
Lorsque 1 crossing-over se produit, le second peut se produire de manière aléatoire selon 4
modalités. On aboutit donc à 4 situations équiprobables.
- Schéma 24 : Formation de DP résultant de l’existence de 2 crossing-over entre les deux couples d’allèles
- Schéma 24 bis : Formation de DR résultant de l’existence de 2 crossing-over entre les deux couples
d’allèles
- les 2 crossing-over touchent 3 chromatides, il existe 2 cas. Dans chacun des cas les 4
remaniements chromatidiques aboutissent à 4 produits différents : 2 produits parentaux
rg+ et r+g et 2 produits recombinés r+g+ et rg. Les asques sont des TT.
- Schéma 24 ter : Formation de TT résultant de l’existence de 2 crossing-over entre les deux couples
d’allèles
37
Ainsi lorsqu'il se produit 2 crossing-over entre r+/r et g+/g on aboutit à :
1/4 de DP, 1/4 de DR et 1/2 TT
Pour une population de méioses, lorsqu'on considère les 3 événements 0, 1, 2 crossing-over compte
tenu de la fréquence faible de 1 crossing-over, à fortiori de 2 CO, il est clair que :
fr DP > fr DR.
Ainsi, lorsque 2 couples d'allèles sont liés, la fréquence des DP est supérieure à celle des DR.
dg = x 100 (UR)
dg = 1/2 %TT + 3 % DR
38
D2- Cas des organismes à tétrades ordonnées
Tout ce qui vient d'être dit à propos de 2 couples d'allèles liés chez Ascobolus immersus s'applique
chez les autres champignons ascomycètes tels que Neurospora et Sordaria chez lesquels on
distingue également des DP DR et TT. Chez ces champignons l'ordre des spores dans les asques
permettra de préciser les relations gène-centromère.
Lorsque les 2 couples d'allèles sont liés physiquement et indépendants génétiquement il apparait
que la fr DP = fr DR = 1/6 et fréquence TT = 4/6 (voir ce calcul au niveau du tableau à 36 cases
relatif à 2couples d’allèles indépendants)
D4-Exercice d’application
Exercice 5
On croise une souche à spores blanches et une souche à spores rugueuses. Dans la descendance, on obtient
90% d’asques contenant 4 spores blanches lisses et 4 spores noires et rugueuses 10% d’asques contenant 2
spores noires rugueuses, 2 spores noires lisses, 2 spores blanches rugueuses et 2 spores blanches lisses
Interpréter ce résultat. La souche sauvage a des spores noires et lisses.
Solution de l’exercice 5
- Caractères étudiés : Coloration des spores (blanche ou noire +) et Aspect des spores (rugueuse ou lisse +)
- La descendance est donnée en asques
39
E - Ségrégation de trois couples d’allèles
Soit 3 couples d’allèles a+/a, b+/b et c+/c impliqués dans un croisement. L’étude de la relation
génétique qui existe entre les 3 couples peut donner lieu à 4 situations possibles.
- 1ère situation : les 3 couples d’allèles sont situés sur des chromosomes différents donc
indépendants.
Schéma
- 2ème situation : 2 couples d’allèles sont liés génétiquement et indépendants du 3ème.
Schéma
- 3ème situation : Les 3 couples d’allèles sont liés physiquement et génétiquement.
Schéma
- 4ème situation : Les 3 couples d’allèles sont liés physiquement mais avec une indépendance
génétique entre les 2 couples en position extrême.
Schéma
Si la descendance est donnée en tétrades (ou asques), après l’étude caractère par caractère, la suite
de l’analyse se fait en considérant les couples d’allèles pris 2 à 2. Ce qui ramène au chapitre sur la
ségrégation de 2 couples d’allèles (indépendants ou liés).
40
- Si aucun CO ne se produit entre a+/a – b+/b et entre b+/b – c+/c ; on obtient 2 gamètes de type
parental abc et a+b+c+ ;
- Si 1 CO se produit entre a+/a – b+/b et aucun CO ne se produit entre b+/b – c+/c ; on obtient 2
gamètes de type recombiné ab+c+ et a+bc
- Si aucun CO ne se produit entre a+/a – b+/b et 1 CO se produit entre b+/b – c+/c, on obtient 2
gamètes de type recombiné abc+ et a+b+c
- Si 1 CO se produit entre a+/a – b+/b et 1 CO se produit entre b+/b – c+/c on obtient 2 gamètes de
type recombiné ab+c et a+bc+
La descendance du croisement abc x a+b+c+ sera ainsi composée de 4 classes de produits. Les
résultats obtenus dans chaque cas sont présentés dans le tableau ci-dessous.
Evènement de Fréquence de Produits de Fréquence de Classe des
méiose l’évènement méiose obtenus chaque produit produits
a+b+c+ (1-x)(1-y)/2
1er évènement (1-x)(1-y) Parentale
a b c (1-x)(1-y)/2 (Classe I)
a+ b c x(1-y)/2 Simples
2ème évènement x(1-y) recombinés I
a b+c+ x(1-y)/2 (Classe II)
a+b+c y(1-x)/2 Simples
ème
3 évènement y(1-x) recombinés II
a b c+ y(1-x)/2 (Classe III)
a+b c+ xy/2 Doubles
4è évènement xy recombinés
a b+ c xy/2 (Classe IV)
On observe :
- huit phénotypes répartis en quatre classes
- dans chaque classe les phénotypes sont complémentaires et de même fréquence
- une classe est majoritaire (car résultant de 0 crossing over) c’est la classe parentale et une classe
est minoritaire (car résultant de 2 crossing over) c’est la classe des doubles recombinés.
Si ces trois points sont observés dans la descendance d’un croisement trifactoriel, alors les
trois couples d’allèles sont liés.
Pour quantifier le degré d’interférence (I), on définit un autre paramètre appelé coefficient de
coïncidence (C). Le coefficient de coïncidence est le rapport entre la fréquence des doubles
crossing over observés et la fréquence des doubles crossing over théoriques.
Coincidence = fréq doubles crossing-over observes / fréq doubles crossing-over théoriques.
Interférence (I) + coïncidence (C) = 1
Si par exemple la probabilité de simple CO entre a et b est de 15% et la probabilité de simple CO
entre b et c est de 5%, la probabilité de double CO théorique sera 0.15 X 0.05 = 0.0075.
C = fréquence doubles CO observés / 0.0075
L’interférence est dite absolue ou totale si le coefficient de coïncidence C = 0 (I = 1). Dans ce cas,
on ne peut pas observer les doubles recombinés.
L’interférence est nulle si le coefficient de coïncidence C = 1 (I = 0). Dans ce cas, on observe
toujours les doubles recombinés.
L'existence de l'interférence ne modifie pas les distances génétiques puisque les loci des gènes sont
fixes. Par contre les fréquences des simples recombinés dûs à un crossing-over seront augmentées
d'autant que les fréquences des doubles recombinés et des parentaux sont diminuées.
Exemple
On considère que sur ce segment de 30 UR, l'interférence est de 40 %. Quelles sont les fréquences
des différents génotypes obtenus dans la descendance d'un croisement a+b+c+ x abc ?
L'interférence étant égale à 40 %, cela signifie que 40 % des doubles crossing-over attendus
apparaîtront sous forme de simples crossing-over. Ainsi 0,20 x 0,10 x 0,40 = 0,008 ou 0,8 % des
double crossing-over attendus, apparaîtront sous forme de simples crossing-over.
42
Comme l'interférence est égale à 40 % on en déduit que la coïncidence est égale à 1-0,40 = 0,60 ou
60 %. Cela signifie que 60 % des doubles crossing-over attendus sont observés.
Ainsi 0,20 x 0,10 x 0,60 = 0,012 ou 1,2 % de doubles crossing-over, seront observés.
Calculons les fréquences des différents génotypes de la descendance.
Doubles recombinés a+bc+ et ab+c : 0,20 x 0,10 x 0,60 = 0,012 ; a+bc+ = 0,006 ab+c = 0,006
Simples recombinés a+bc et ab+c+ : 0,20 - 0,012 = 0,188 ; a+bc = 0,094 ab+c+ = 0,094
Simples recombinés a+b+c et abc : 0,10 - 0,012 = 0,088 : a+b+c = 0,044 abc''" = 0,044
Parentaux a+b+c+ et abc : 1-(0,188 + 0,088 + 0,012) = 0,712 a+b+c+ = 0,356 abc = 0,356
Si l'interférence était nulle c'est à dire que la coïncidence était égale à 1, on aurait les fréquences
suivantes pour les différents génotypes :
Doubles recombinés a+bc+ et ab+c : 0,20 x 0,10 = 0,020 ; a+bc+ = 0,01 ab+c = 0,01
Simples recombinés a+bc et ab+c+ : 0,20 x 0,90 = 0,180; a+bc = 0,09 ab+c+ = 0,09
Simples recombinés a+b+c et abc : 0,80 x 0,10 = 0,080 : a+b+c = 0,04 abc''" = 0,04
Parentaux a+b+c+ et abc : 0,80 x 0,90 = 0,720 : a+b+c+ = 0,36 abc = 0,36
Classes I= 0 et I= 0,40 et Différence entre
C=1 C=0,60 I=0 et I=0,40
Doubles recombinés 0,020 0,012 - 0,008
a+bc+ et ab+c
Simples recombinés 0,180 0,188 + 0,008
a+bc et ab+c+
Simples recombinés 0,080 0,088 + 0,008
a+b+c et abc
Parentaux 0,720 0,712 - 0,008
a+b+c+ et abc
Lorsque l'on compare les fréquences obtenues dans les 2 cas, il apparaît que quand l'interférence
est égale à 40% les fréquences des simples recombinés augmentent d'un facteur 0,008 alors que
les doubles recombinés et les parentaux diminuent de ce même facteur. Ce facteur correspond à
la fréquence des doubles recombinés attendus qui apparaissent sous forme de simples
recombinés dûs à 1 crossing-over du fait de l'interférence de 40 % : 0,20 x 0,10 x 0,40 = 0,008.
Ainsi les fréquences des simples recombinés dûs à un crossing-over sont augmentées d'autant
que les fréquences des doubles recombinés et des parentaux sont diminuées.
Si le croisement impliquant à la fois les gènes B et C montre qu'ils sont séparés de 12 UR on retient
l'ordre BAC. Par contre si la distance est de 2 UR on retient l'ordre ABC.
Cette méthode simple qui permet d'ordonner linéairement les gènes est basée sur l'additivité des
distances. Elle n'est valable que si les gènes sont relativement proches. Lorsque les gènes sont très
proches cette méthode ne permettra pas de les ordonner du fait des fluctuations statistiques des
distances calculées.
Lorsque les gènes sont très éloignés, les distances calculées ne seront plus additives. Elles sont
sous-estimées car les fréquences de recombinaison ne traduisent pas en totalité les remaniements
chromatidiques du fait de l'existence de crossing-over multiples.
Il ressort donc que les croisements bi-factoriels sont insuffisants pour établir sans ambiguïté l'ordre
des gènes le long du chromosome.
Solution de l’exercice
Ce croisement fait intervenir 3 caractères : la coloration de la spore, la forme de la spore et l'auxotrophie par
rapport à la tyrosine. L'analyse réalisée est celle des spores en vrac.
44
Pour le caractère auxotrophie par rapport à la tyrosine, la descendance se compose de :
[tyr+] = 362 + 83 + 57 + 4 = 506
[tyr-] = 373 +72+ 48 + 1 = 494
II y a autant de spores tyr+ que de spores tyr-, c'es à dire une ségrégation 1-1 qui permet de conclure que ce
caractère est gouverné par un couple d'allèles tyr+ /tyr-
Trois couples d'allèles interviennent donc dans ce croisement. Si ces 3 couples étaient indépendants, nous aurions
eu une descendance composée de 8 types de spores ayant la même fréquence de 1/8 donc le même effectif c’est à
dire 1000 x 1/8 = 125, ce qui n’est pas le cas.
Cette descendance est composée de 4 classes sur la base des effectifs. Nous pouvons donc envisager l'hypothèse de
3 couples d'allèles liés ; dans cette hypothèse le croisement réalisé serait un test à 3 points.
Les effectifs 373 et 362 sont ceux des phénotypes de la classe des parentaux. Les effectifs 4 et 1 sont ceux des
phénotypes de la classe des doubles-recombinés.
On sait que :
- Coïncidence= % doubles crossing-over observés / % doubles crossing-overobservés
- Coïncidence + Interférence = 1
- Interférence = 1 - Coïncidence
45