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ISTP 2020/2021

Auscultation des barrages

Insaf NAJAR
Plan de l’exposé

1.Principes généraux et cadre réglementaire de la


surveillance des barrages

2.Les outils d'analyse des données d'auscultation


1. Principes généraux et cadre réglementaire de la surveillance des barrages

Le rôle des barrages est de retenir une réserve d’eau pour des utilisations multiples: fourniture
d’énergie, alimentation en eau, irrigation, soutien d’étiage, maîtrise des crues, etc.. Ces
ouvrages présentent des enjeux importants, sur le plan de la sécurité publique, car leur rupture
aurait des conséquences catastrophiques, mais aussi sur le plan de l’économie des
installations, en raison de l’importance des coûts d’une indisponibilité et des travaux de
maintien en état. En conséquence, les fonctions attendues des barrages, stabilité structurelle et
étanchéité, doivent être contrôlées, pour s’assurer en permanence de leur intégrité et de leurs
performances, sous le double aspect de la sécurité publique et de l'économie d'exploitation

En effet, les processus de vieillissement peuvent à la longue altérer les fonctions essentielles
que sont la stabilité et l'étanchéité, mais également influer sur les conditions d'exploitation.
Les causes possibles de ce vieillissement sont multiples, physiques, chimiques ou
biologiques. Il importe d'identifier au plus tôt ces processus de vieillissement et de
diagnostiquer leur niveau de gravité et de nocivité.
1. Principes généraux et cadre réglementaire de la surveillance des barrages
1.1.Les objectifs de la surveillance

La surveillance des barrages a trois objectifs et qui sont pendant les périodes
suivants :
• Pendant la construction
• la première mise en eau
• En phase d'exploitation
1. Principes généraux et cadre réglementaire de la surveillance des barrages
1.1.Les objectifs de la surveillance

Pendant la construction et la première mise en eau, on cherche essentiellement à comparer le


comportement de l'ouvrage par rapport aux prévisions du projet, que ce soit pour:
- vérifier certaines hypothèses de calcul
- valider les résultats de ces calculs
- vérifier la pertinence de tel ou tel choix technique.

La première mise en eau fait l'objet de consignes particulières de gestion de la retenue, de


surveillance visuelle et de suivi d'auscultation
1. Principes généraux et cadre réglementaire de la surveillance des barrages
1.1.Les objectifs de la surveillance

En phase d'exploitation, les objectifs essentiels sont:


la sécurité de l'ouvrage et la maîtrise des coûts d'exploitation

On cherche donc à déceler tout signe avertisseur de changement dans le comportement


de l'ouvrage, ce qui amène à s'intéresser d'une part à l'apparition de phénomènes
nouveaux et d'autre part aux évolutions lentes liées au vieillissement. Il faut garder en
mémoire que, passée la première épreuve de la mise en eau et en dehors d'événements
exceptionnels tels que crues et séismes, la rupture d'un barrage en exploitation est
toujours précédée de signes avertisseurs
1. Principes généraux et cadre réglementaire de la surveillance des barrages
1.1.Les objectifs de la surveillance

Enfin, un dernier objectif, commun aux deux phases ci-dessus est le retour d'expérience
pour l'ingénierie, ce retour d'expérience étant valorisé autant sur les futurs projets que sur
le suivi des autres barrages d'une même famille (un phénomène constaté sur un barrage
peut se produire sur un autre barrage semblable).

Cela concourt à garantir, sur le long terme, d'une part la sûreté des ouvrages, et d'autre part
la maîtrise des coûts par une maintenance qui peut être programmée et optimisée.

L'aspect sécurité prime avant toute autre considération, mais il est évident que plus tôt une
anomalie est détectée, moindres en sont les conséquences en termes de travaux ou de coût
d'exploitation.
1. Principes généraux et cadre réglementaire de la surveillance des barrages
1.2. Les principes généraux

La surveillance inclut trois composantes complémentaires :

-L'inspection visuelle dont l'objectif est de déceler des anomalies perceptibles à l'œil ;

-L'auscultation qui permet de mesurer l'évolution de certains paramètres et d'établir une


analyse du comportement de l'ouvrage sur le long terme ;

-Les essais périodiques de certains organes, les vannes en particulier, dans différentes
conditions de fonctionnement.
1. Principes généraux et cadre réglementaire de la surveillance des barrages
1.2. Les principes généraux
1.2.1.L’inspection visuelle:

Dans le domaine de la surveillance, l’accent est mis prioritairement sur l'inspection visuelle :

-visites systématiques et formalisées (périodicité hebdomadaire à mensuelle selon les cas) ;

-inspection visuelle si possible en crue et systématiquement post-crue ;

-visites techniques : examen visuel approfondi du barrage et de ses abords, une fois par an
avec un ingénieur spécialiste ;

-tenue à jour d’un registre avec report de toutes les observations et interventions sur le
barrage
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage

Le dispositif d'auscultation est spécifique à chaque barrage et dépend de son type, de ses
dimensions et des points particuliers à surveiller. Il a vocation à évoluer pendant la vie de
l'ouvrage, certains appareils pouvant être délibérément abandonnés après la première mise en
eau ou après plusieurs années d'exploitation, d'autres appareils pouvant être rajoutés en cas
d'anomalie décelée par l'observation visuelle ou l'auscultation.

Dans tous les cas, le dispositif d'auscultation d'un barrage doit être conçu en se posant les deux
questions suivantes :
-Quels sont les mécanismes potentiels de dégradation de l'ouvrage ?
-Par quelles grandeurs physiques se traduisent ces mécanismes et comment les mesurer ?
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.1.Les barrages poids

Etablis en général sur des fondations rocheuses, ces barrages sont surtout sensibles aux
phénomènes suivants classés par ordre de gravité décroissante:
-Passage d’une crue extrême, dépassant la crue de projet et causant une élévation du plan
d’eau dont la poussée compromettrait la stabilité d’ensemble du barrage, ou causant une
surverse avec érosion de la fondation en pied aval et diminution de la résistance au glissement;
-Colmatage des drains de fondation (s’ils existent) entraînant une augmentation des sous-
pressions sous la base du barrage et diminuant sa stabilité;
-Vieillissement de la maçonnerie du corps de l'ouvrage ou vieillissement du voile d'injection
de fondation, par entraînement de liant par les percolations d’eaux agressives; ce phénomène à
tendance à s’auto-accélérer avec, comme conséquence, une augmentation des débits de fuites
et le risque de sous-pressions se développant dans le corps du barrage ou en fondation;
-Dégradations au niveau des éventuels joints entre plots avec augmentation des fuites
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.1.Les barrages poids

Le passage des crues risque de se traduire par des sollicitations qui font que l'ouvrage sort
du domaine élastique : des fissurations peuvent se produire, entraînant à la longue des
phénomènes de fatigue. Dans les cas extrêmes, on peut enregistrer des déplacements brutaux
et irréversibles. La mesure des déplacements en crête est donc importante pour déceler tout
comportement anormal de l'ouvrage sous fortes sollicitations. Elle se fait sur les grands
barrages au moyen de pendules, et sur les ouvrages plus modestes au moyen de mesures
d'alignement. On peut également suivre l'ouverture d'éventuelles fissures en pied amont
grâce à des extensomètres multipoints débouchant en galerie. Les mouvements différentiels
entre plots se mesurent au moyen de fissuromètres.
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.1.Les barrages poids

Les sous-pressions à la base du barrage sont contrôlées par des piézomètres ou des cellules
de pression posées au contact fondation - barrage (pour des considérations de maintenance,
on préfèrera les premiers aux seconds). Les drains de fondation, s’ils existent, doivent être
équipés de façon à pouvoir mesurer leur débit. On peut mesurer le niveau d’eau
dans les drains ne débitant pas, sans pour autant que ces appareils puissent être
réellement considérés comme des piézomètres. Le vieillissement de la maçonnerie, la
perte d'efficacité du voile d'injection et les dégradations au niveau des joints
s'apprécient par la mesure des débits de fuites, localement au droit d'une venue d'eau
identifiée, ou globalement par des seuils de mesure dans un caniveau en galerie ou
en pied aval.
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.2.Les barrages voûtes

Un barrage voûte et sa fondation rocheuse constituent un système mécanique


hautement hyperstatique. Si l'on connaît aujourd'hui assez bien le comportement du
matériau béton, il est plus délicat de modéliser correctement le rocher de fondation.
La mesure des déformations d'une voûte va donc constituer l'entrée indispensable de
la validation des modélisations faites au stade du projet, ainsi que des calculs inverses
faits pendant la vie de l'ouvrage. Les déplacements sont classiquement mesurés à l'aide de
repères scellés sur le parement aval et le couronnement, visés par triangulation depuis
des piliers fixes implantés sur les flancs de la vallée. Comme indiqué plus haut, ces
dispositifs sont longs et coûteux à mesurer, ce qui conduit en général à adopter des
fréquences semestrielles. C'est pourquoi les dispositifs de pendules, là où leur
installation est possible, remplacent progressivement les mesures topographiques,
et ont été systématiquement installés dans les barrages voûtes construits ces dix
dernières années.
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.2.Les barrages voûtes

L'ouverture d'une fissure en pied amont des consoles de clé est un phénomène bien connu sur
les barrages voûtes, qui conduit parfois à des dispositions constructives sophistiquées sur les
plus grands. Le suivi de cette fissure (ou de ce joint) se fait à l'aide d'élongamètres
multipoints installés à partir de la galerie de pied. La mesure des contraintes internes au béton
a été très pratiquée dans les années 1960-70, à l'époque du développement des méthodes
modernes de calcul des voûtes (méthodes aux éléments finis); elle en a constitué une
validation essentielle.
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.2.Les barrages voûtes

Le phénomène le plus redouté sur les barrages voûtes est une piézométrie excessive dans
les appuis. Ce fut la cause de la rupture du barrage de Malpasset (1959) et plus récemment
de la vidange puis de l'abandon du barrage de Pinay (Yziquel, 2001). Le suivi de la
piézométrie en fondation et dans les rives est donc un aspect primordial de la surveillance
des voûtes. Les piézomètres doivent être judicieusement implantés en fonction de la
structure géologique des appuis, reconnue lors des phases préliminaires du projet, mais
aussi lors de la réalisation des fouilles. Le complément indispensable en est le suivi des
débits des drains. Compte tenu des phénomènes assez courants de report de débit d'un drain
sur ses voisins, des mesures globales par zone sont recommandées à fréquence élevée.
Les mesures individuelles des drains seront moins fréquentes et ne concerneront que
les drains présentant un débit significatif.
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.3.Les barrages en remblai avec étanchéité en terre
Nous considérons que rentrent dans cette catégorie tous les barrages en remblai dont la
fonction étanchéité est assurée par de la terre, qu'il s'agisse de barrages zonés en
enrochements avec noyau interne en argile ou de remblais plus ou moins homogènes en terre.
Les principales pathologies susceptibles de conduire à des désordres, voire à des ruptures de
ces barrages, sont globalement de quatre types:-des pressions interstitielles excessives
apparaissant lors de la construction du remblai ou lors de la première mise en eau, et qui
peuvent remettre en cause les hypothèses adoptées lors du projet ;-des tassements de la crête
du remblai entraînant une diminution de la revanche*, ce qui limite la sécurité du barrage vis-
à-vis du risque de surverse, ou des tassements différentiels du noyau et des recharges,
pouvant entraîner la fracturation hydraulique du noyau;-un colmatage des drains entraînant
une montée de la piézométrie, qui peut, à terme, atteindre le talus aval et mettre en danger la
stabilité du remblai;-l’existence de circulations d'eau à travers le remblai ou la fondation, non
contrôlées par le système de filtration et de drainage, et pouvant, par érosion interne, conduire
à un phénomène de renard
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.3.Les barrages en remblai avec étanchéité en terre

Les tassements sont contrôlés à l’aide d’un dispositif topographique constitué de bornes
placées en crête de remblai et sur les risbermes, tous les 20 à 30 m dans le sens de rive à rive,
et de piliers d’observation placés sur les rives dans des zones non susceptibles d’être affectées
par des mouvements. Les levers topographiques sont faits par triangulation pour les grands
barrages et en altimétrie uniquement pour les petits. La piézométrie dans le corps de remblai et
dans la fondation sous-jacente est observée par des cellules de pression interstitielle, réparties
sur un ou plusieurs profils amont - aval. Sur chaque profil, un dispositif idéal comprend
plusieurs niveaux horizontaux de cellules, auscultant ainsi la fondation, l'amont du noyau, le
noyau lui-même et parfois l'aval du drain; ceci permet l’interprétation physique de l’évolution
de la saturation. Le suivi de la piézométrie en aval du drain (pour vérifier la pérennité de
l'efficacité de ce dernier) peut plus efficacement se faire à l'aide de piézomètres (un profil rive
à rive sur le parement ou la risberme aval), à crépines longues de façon à détecter plus
sûrement l’apparition d’une zone de fuite.
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.3.Les barrages en remblai avec étanchéité en terre

Les fuites sont contrôlées par des dispositifs de mesure des débits. Les drains du barrage
débouchent dans un collecteur aménagé à cet effet. Il peut être intéressant de séparer les zones
de mesure pour faciliter l’analyse des résultats (rive droite – rive gauche, voire seuils de
mesures intermédiaires pour des barrages de grande longueur). De même, les éventuels puits
de décompression en pied aval d’un barrage en terre doivent pouvoir être équipés pour
mesurer les débits interceptés et leur variation. En cas d’augmentation anormale de débit, des
mesures de teneurs en éléments fins peuvent renseigner sur un processus éventuel d’érosion
interne. Dans cette optique, la conservation d’un échantillon témoin des matériaux constitutifs
du drain est donc préconisée, afin de pouvoir comparer avec les éventuels dépôts aux
exutoires des drains.
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.4.Les barrages en enrochements à masque

Nous considérons que rentrent dans cette catégorie tous les barrages en remblai (généralement
en enrochements ou en tout-venant) dont la fonction étanchéité est assurée par un organe
mince en parement amont (masque en béton ou béton bitumineux, dispositif d’étanchéité par
géomembrane), prolongé en fondation par un voile d'injection ou une paroi moulée. C’est la
défaillance de l'organe d'étanchéité qui risque de compromettre la pérennité de l’ouvrage. De
ce fait, le contrôle des débitsdes drains et de la piézométrie en aval de l’étanchéité est
primordial. Il se fait le plus en amont possible, c'est-à-dire directement depuis la galerie
périmétrale si le barrage en est doté.Le risque de tassements du corps en enrochements est plus
limité que pour les autre types de barrages en remblai, pour autant bien sûr que le compactage
des matériaux ait été réalisé avec des engins appropriés (rouleaux vibrants lourds).
2.LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D'AUSCULTATION
2.1.L'adaptation du dispositif d'auscultation à l'ouvrage
2.1.4.Les barrages en enrochements à masque

Dans le cas d’un barrage en enrochements de moins de 20 m de hauteur construit sur une
fondation non compressible, on peut considérer qu’il est inutile de prévoir des mesures de
tassement. Par contre, dans les autres cas, les mesures de tassements sont recommandées, au
moyen de bornes implantées sur le couronnement, sur le masque amont et sur les risbermes
du talus aval. La mesure des repères sur le masque revêt une grande importance, ce qui doit
amener à choisir judicieusement les dates des levers. Passé le jeune âge et après confirmation
du bon comportement du remblai, le dispositif topographique peut être allégé.

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