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LA DOCTRINE DU DIEU TRI UN

N° 1

La Trinité
dans l'Unité

Conférence de
G. E. REGAMEY, Pasteur

PRIX: 38 centimes

AGENCE DES
PUBLICATIONS DE LA NOUVELLE ÉGLISE
LAUSANNE - GENÈVE PARIS

1930
La Trinité dans l'Unité

La Bible est monothéiste.

S'il est une doctrine catégoriquement exprimée dans les


Ecritures, c'est bien celle de l'unité de Dieu. La Bible est
monothéiste d'un bout à l'autre et tout esprit qui n'est pas
enchaîné par les préjugés de l'éducation religieuse ne peut
s'empêcher de le reconnaître.
Et pourtant. chose étrange, malgré le grand nombre de
passages qui, dans la Bible, proclament que Dieu est un,
qu'il est le seul Seigneur, qu'Il est Jehova et qu'Il ne don-
nera pas sa gloire à un autre, malgré le témoignage de
Jésus-Christ Lui-même qui, dans sa réponse au scribe qui
l'interrogeait, a consacré l'unité de Dieu en rappelant le
premier commandement : a Ecoute, Israél, le Seigneur
notre Dieu est le seul Seigneur », une grosse fraction de
l'Eglise chrétienne n'est monothéiste que de nom, car elle
affirme que Dieu existe en trois personnes divines, sépa-
rées et distinctes, Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le
Saint Esprit.
Concevoir Dieu de cette manière, c'est non seulement ne
pas tenir compte du témoignage de la Bible entière, mais
c'est encore s'élever contre le témoignage de la raison, car
la raison éclairée affirme que la Création ne saurait avoir
qu'un seul Créateur, autant qu'il n'y a qu'un seul Dieu,
Principe et Fin de toutes choses, qu'un seul Absolu et qu'un
seul Incréé.

Il y a mystères et mystères.

Les chrétiens qui croient à l'existence de trois personnes


divines affirment qu'elles ne font qu'un seul Dieu et cela
en raison d'un mystère devant lequel nous n'avons qu'à
—2—

nous incliner, sans chercher à comprendre ce que notre


intelligence est capable de s'expliquer.
Il y a sans doute des mystères devant lesquels on doit
s'incliner avec respect, parce qu'ils dépassent la raison.
Nous sommes assez intelligents pour savoir que, pauvres
êtres finis et limités, nous ne pouvons pas tout comprendre
et qu'en particulier nous ne pouvons pas solutionner le
problème de la Divinité. •Mais il est des mystères devant
lesquels nous ne devons pas nous incliner. Ce sont les mys-
tères qu'une théologie surannée veut imposer à notre foi
quand bien même ils contredisent la raison. Et parmi ces
derniers, nous nous heurtons en particulier à celui d'une
Trinité de personnes divines formant un seul Dieu.

L'Eglise et les intellectuels.

De tous les dogmes qui, dans le cours des siècles, ont


été promulgués dans le sein de la chrétienté, il n'en est
aucun qui lui ait été aussi préjudiciable que celui-là.
Plus que tout autre, il contribue à éloigner de l'Evangile
la fraction la plus importante, sinon la plus nombreuse de
nos populations dites chrétiennes, les intellectuels et les
penseurs. Or, de même que c'est l'esprit de l'homme qui
le dirige et qui gouverne son corps, de •même aussi les
intellectuels et les penseurs exercent une influence consi-
dérable sur le grand corps social qu'est l'humanité envi-
sagée comme un tout. Ils en sont la tête et le cerveau. Ce
sont eux qui la conduisent vers ses destinées heureuses ou
malheureuses, suivant qu'ils sont eux-mêmes au bénéfice
de lumières spirituelles bannes ou mauvaises. Le rôle de
l'Eglise. en ce qui les concerne, consiste à les alimenter de
vérités qui, parce qu'elles sont l'essence divine, doivent
être marquées au coin de la plus saine raison. L'Eglise,
dans le grand corps social, joue le rôle du cœur et des
poumons. Dans notre corps physique le sang qui vient du
coeur se purifie dans les poumons avant de circuler dans
le cerveau et dans tous les autres organes. Mais si le sang
—3—

alimente et entretient la vie du corps naturel, la vérité


divine est appelée à jouer le même rôle dans le corps so-
cial dont la santé dépend de la pureté des aliments qu'il
doit assimiler.

Il faut restaurer le Christianisme.

Si l'humanité nous offre, depuis de si longs siècles, le


spectacle d'un organisme débile, languissant et malade,
c'est que le sang spirituel qui circule dans ses veines n'est
pas suffisamment pur, suffisamment riche. C'est que les
vérités dont s'alimente sa vie ne sont pas assez dégagées
de toutes les erreurs dont elles ont été entachées. Le chris-
tianisme a été falsifié dans le cours des siècles. Il s'agit de
le restaurer et d'en adapter tes enseignements aux besoins
rationnels en même temps que spirituels de notre époque.
Ce n'est plus seulement par le coeur, mais c'est encore par
l'intelligence que nous désirons aujourd'hui pénétrer dans
les mystères de la foi. Jamais encore comme de nos jours
on n'a réclamé un exposé clair, logique et précis des prin-
cipes essentiels de la religion. C'est le cri d'une aspiration
légitime et profonde. On n'est pas . hostile à l'Evangile.
On ne demande pas mieux que de croire aux grandes •vé-
rités de la religion chrétienne, car on pressent hien qu'elles
renferment un principe vital et régénérateur, mais encore
est-il indispensable que la forme dont on les habille ne
heurte pas le sens de la logique et de la saine raison.

Les droits de ta raison.

Les droits de la raison, la prédication de l'Evangile les


a trop longtemps méconnus, c'est pourquoi le monde ac-
tuel échappe à son influence, Depuis de trop longs sièCles
on a fait appel au coeur et à la sentimentalité des fidèles
du haut des chaires chrétiennes sans se préoccuper, comme
il l'aurait fallu, de nourrir également leur intelligence spi-
rituelle. Aussi bien est-ce plutôt dans le sein de la classe
dirigée que dans celui de la classe dirigeante de la société
—4—

que l'Evangile de Jésus-Christ a conquis les sympathies.


C'est une grave lacune. Il faut que I'Eglise comprenne que
pour gagner les intellectuels, force lui sera de réformer,
et d'une manière beaucoup plus étendue encore qu'au
seizième siècle, toute sa théologie. On n'a que faire de nos
jours de dogmes qui sont en contradiction avec la raison,
d'enseignements qu'un esprit bien pensant ne peut accep-
ter sans faire fi de son intelligence. Le Seigneur ne nous
le demande pas. Lui qui est la Sagesse Suprême ne nous
a pas créés à son image et selon sa ressemblance pour que
nous méprisions le plus noble de ses apanages, l'intelli-
gence. Il veut, au contraire, que nous la cultivions, que nous
la nourrissions, que nous l'enrichissions, que nous lui don-
nions dans le domaine des enseignements spirituels aussi
bien que dans tous les autres, la plus entière satisfaction.
Le dogme d'une Trinité de personnes divines est antibibli-
que et irrationnel. Il faut l'abandonner. S'il existe trois per-
sonnes divines, distinctes, le Père, le Fils et le Saint. Esprit,
également infinies, éternelles, omnipotentes et omniscien-
tes. c'est qu'il y a trois Dieux. Or, les textes sacrés décla-
rent expressément qu'il n'y a qu'un seul Dieu, qui a fait
les cieux et la terre. C'est là, me semble-t-il, une vérité
intelligible, rationnelle, qui nie satisfait pleinement et à
laquelle j'adhère sans aucune difficulté,

La Bible proclame l'unité de Dieu.

Des passages bibliques qui proclament l'unité de Dieu,


je ne rappellerai que quelques-uns choisis parmi les plus
importants. C'est tout d'abord celui qui se trouve en tête
des dix commandements que les enfants d'IsraM ont été
appelés à observer dès après la sortie d'Egypte, alors qu'ils
se trouvaient encore dans le désert du Sinaï : « Ecoute,
Israël, le Seigneur ton Dieu est le seul Seigneur. Tu n'auras
point d'outre Dieu devant ma face ›. (Exode 20 : 3). Au
chapitre 6 du Deutéronome, verset 4, cette assertion est
répétée. L'unité divine est encore fortement affirmée au
--5—

32 — chapitre du même livre, surtout au verset 39: • q bser-


vez que c'est Moi, Moi qui suis votre Dieu, et il n'y en a
point d'autre avec Moi ». Le livre du prophète Esaie cor-
robore à plusieurs reprises cette doctrine. « Je suis Jéhova,
c'est là mon nom, et je ne donnerai point ma gloire à un
autre (42 : 8). « Ainsi parle Jéhova, le roi d'Israël et son
Rédempteur, l'Éternel des armées : Je suis le premier et
je suis le dernier, et hors de Moi il n'y a point de Dieu
(44 6). « Excepté Moi, y a-t-il un Dieu, y a-t-il un
:

rocher ? Je n'en connais point » (44 : 8). « Regardez vers


Moi, peuples de la terre, et vous serez sauvés, car je suis
Dieu et il n'y en a point d'autre (45 : 22). Au chapitre
46, v. 9, nous lisons : « Rappelez le passé dans votre mé-
moire ;' car je suis Dieu et il n'y en a point d'autre ; je suis
Dieu et il n'y en a aucun de semblable à Moi ».
Dans le Nouveau Testament, Jésus confirme cet ensei-
gnement. Il cite Lui-même le premier commandement au
scribe qui l'interrogeait : « Ecoute, Israël, le Seigneur notre
Dieu est le seul Seigneur ,. Ces passages suffisent, me
semble-t-il, pour nous convaincre du fait que la révélation,
tant juive que chrétienne, est monothéiste. Dieu est un Etre
unique. Son unité est si catégoriquement affirmée, si clai •

rement exprimée que cette doctrine ne devrait faire l'objet


d'aucun doute.

Qui est Jésus-Christ ?

Mais alors, me demanderont ceux d'entre mes lecteurs


qui sont au courant des enseignements de l'Evangile, s'il
n'y a qu'un seul Dieu personnel, que devons-nous penser
de Jésus-Christ ?
Cette question, le Seigneur l'avait déjà Lui-Même posée
à ses disciples (Matth. 16, 15). Elle est restée depuis les
premiers siècles de l'Eglise chrétienne à l'ordre du jour
des préoccupations des théologiens et des penseurs croyants.
Après plus de dix-neuf siècles d'études, de critiques et de
discussions à ce sujet, les opinions sont aussi divergentes
-6—

de nos jours qu'elles ne font jamais été. Et suivant le lieu


de culte où vous vous rendrez. suivant les prédicateurs de
la Parole que vous écouterez, vous apprendrez de Jésus-
Christ ou bien qu'Il a été un homme semblable par la
naissance et par la mort à tous les autres hommes, et que
la seule différence qui existe entre Lui et les autres hu-
mains consiste dans le fait qu'Il a vécu une vie en parfaite
harmonie avec les commandements de Dieu, ce qui Lui a
mérité le titre de Fils unique et de Fils bien-aimé du Père ;
ou bien qu'Il a été un grand Maître, un Initié, c'est le
point de vue de la théosophie. Ou bien encore. et c'est
l'opinion et même la croyance de la grosse majorité des
chrétiens de nos jours, qu'Il a été et qu'Il reste la seconde
personne de la Trinité divine. Au sein de cette Trinité, Il
a joué le rôle de Rédempteur et de Sauveur du monde, en
tant qu'Il a été et qu'Il demeure l'égal du Père, auquel Il
est intimement uni par les liens de communion de senti-
ments, de pensées, d'amour, de sagesse et de puissance,
mais dont II est distinct en tant que personne divine.
Qui est Jésus-Christ ?
Il semble au premier abord que le Nouveau Testament
est également favorable à deux conceptions différentes de
la nature de Celui que nous appelons le Sauveur du Monde.
Plusieurs passages des Evangiles et des Epitres représen-
tent en effet le Seigneur Jésus-Christ comme Dieu Lui-
même incarné dans un corps d'homme, tandis que d'autres
passages paraissent établir une séparation complète entre
le Père et le Fils et une infériorité de Christ à l'égard de
Dieu. Si le Seigneur dit à Philippe : « Celui qui m'a vu a
vu le Père », si l'apôtre Paul affirme que « la plénitude de
la Divinité habite corporellement en Christ », Jésus dit
d'autre part : « Le Père est plus grand que moi ». Il le prie,
Il réclame son secours. Il se présente aux hommes comme
un frère. un ami. un exemple qu'ils doivent suivre pour
s'élever jusqu'à Dieu. De ces deux catégories de passages
sont nées plusieurs doctrines contradictoires, dont celle des
tripersonnalistes et celle des unitaires sont les plus anciennes.
—7—

Le point de vue trinitaire orthodoxe.

Il ressort de plusieurs passages des Ecritures qu'il y a


en Dieu une Trinité constituée par ce que la Parole appelle
le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Le Seigneur a dit à ses
disciples : « Allez, faites de toutes les nations des disciples,
les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit
Ce passage, comme d'ailleurs tous ceux qui nous parlent
du Père et du Fils, a fait prévaloir dans la chrétienté l'idée
que le Père, le Fils et le Saint-Esprit désignent chacun
une personne divine et que, par conséquent, il existe en
Dieu une Trinité de personnes dont chacune a des devoirs
spéciaux et distincts à remplir dans l'oeuvre de la Rédemp-
tion. C'est pour satisfaire, nous dit-on, à la justice comme
à la colère du Père, que Dieu le Fils est venu mourir sur
la croix en lieu et place des hommes pécheurs. En ce fai-
sant, Il les a rachetés de leurs péchés, autrement dit, Il leur
a obtenu le pardon du Père.

Le point de vue unitaire,

Mais cette doctrine d'une Trinité de personnes divines


est si catégoriquement opposée aux déclarations réitérées
de l'unité de Dieu dans les Ecritures, qu'un grand nombre
de personnes l'ont repoussée et qu'elles en sont venues à nier
la divinité du Seigneur Jésus-Christ. Pour maintenir cette
unité de Dieu, elles font donc de Jésus-Christ un homme
qui n'a différé de Moïse et de tous les autres législateurs
du monde qu'en ce que sa vie a été plus pure et plus en
conformité avec la volonté du Père céleste.
Et, comme cela arrive très souvent lorsque de fausses
doctrines prennent naissance, chaque parti a appuyé sa
croyance d'une étude plutôt partiale des textes sacrés pour
dévier par suite du sentier de la vérité dans des directions
opposées.
Entre les Tripersonnalistes qui croient à l'existence de
trois personnes divines et les Unitaires qui ne trouvent pas
d'autre moyen de conserver l'unité de Dieu qu'en niant la
-8—

divinité de Jésus-Christ, se trouve la vraie doctrine des


Écritures Saintes en ce qui concerne la Trinité divine, celle
qui fait du Père et du Fils un seul et même Etre divin.

Le pourquoi de la Rédemption.

Il est généralement admis que le genre humain est déchu


et qu'il a perdu l'état de la perfection spirituelle et par
suite de bonheur dans lequel il a été originairement créé.
Sa déchéance spirituelle et son éloignement de Dieu ont
rendu nécessaire l'oeuvre grandiose de la Rédemption. Mais
on connaît encore très peu de nos jours la véritable nature
de l'oeuvre de la Rédemption.
L'état originel de félicité de l'homme, sa sagesse, la bonté
de son cœur, la pureté de ses intentions, tout cela est admi-
rablement décrit dans la Genèse par le récit symbolique
du séjour d'Adam et d'Eve dans le jardin d'Eden. Mais
l'homme ne s'est pas maintenu dans son état primitif d'in-
nocence. Il s'est graduellement détourné du gouvernement
divin, par suite, il a perdu graduellement aussi sa félicité
d'antan, félicité dont Je souvenir est resté gravé dans les
enseignements de toutes les anciennes religions et de toutes
les mythologies qui nous parlent de l'âge d'or de l'huma-
nité.
L'homme est devenu amoureux de lui-même. Il s'est peu
à peu laissé gouverner par son égoïsme personnel et, de
génération en génération, il est tombé dans un état de dé-
gradation, d'asservissement à la matière et de mort spiri-
tuelle qui l'empêche de comprendre intuitivement, comme
;a l'origine, la volonté de Dieu et, par conséquent. de jouir
de la vie du ciel sur la terre.
Dans une conférence subséquente, nous étudierons la
nature et le pourquoi de l'incarnation du Verbe divin.
Qu'il nous suffise pour aujourd'hui de rappeler que si pour
faire sortir l'humanité de son état de péché et de misère
spirituelle, il devint nécessaire qu'une intervention divine
se produisit, il a été de tout temps dans la pensée de notre
—9—

Dieu et Père qu'Il viendrait Lui-même pour accomplir le


grand œuvre de notre Rédemption. Les témoignages bibli-
ques à ce sujet sont très nombreux.

L'Ancien Testament déclare que Jéhova sera le Rédempteur.

Le prophète Esaie prédit d'une manière frappante que


Jéhova revêtira l'humanité pour devenir le Rédempteur et
le Sauveur de son peuple : « Un enfant nous est né, dit-Il,
un Fils nous a été donné, l'empire a été mis sur son épaule.
Il sera appelé Admirable, Conseiller, Dieu Puissant, Père
d'éternité, Prince de la Paix Esaie 9, 5. Voici, lisons-
nous a-u ch. 25 du même livre, Celui qui est notre Dieu, que
nous avons attendu. Soyons dons la joie de son salut
Dans ces remarquables passages, l'enfant qui doit naître,
le Fils qui doit nous être donné, est expressément appelé
Dieu, Père d'éternité. Il est dit d'autre part que c'est Jéhova
qui doit apporter le salut.
Fréquemment ailleurs 11 est nommé le Rédempteur et le.
Sauveur. « C'est moi qui suis Jéhova. Il n'y a point d'autre
Sauveur que Moi. Ainsi a dit Jéhova, votre Rédempteur et
votre Sauveur, le Saint d'Israël » Esaie 43, 11 et 14.
L'Eglise chrétienne aurait dû rester fidèle à cet enseigne-
ment.. Celui qui a lu avec quelque attention les Ecritures a
certainement remarqué dans la naissance et les miracles de-
Jésus-Christ, l'accomplissement des anciennes prophéties
concernant l'incarnation de Jéhova.
11 est écrit dans Esaïe, 700 ans avant la naissance de Jé-
sus-Christ : « Voici une vierge sera enceinte. Elle enfantera
un fils et l'on appellera son nom « Emmanuel » Esaie 7, 14.
Cette prophétie est citée par Matthieu qui, en parlant de la
conception miraculeuse et de la naissance de Jésus-Christ,
s'exprime comme suit : « Tout cela se fit pour accomplir
ce qui avait été dit du Seigneur par le prophète : Voici une
vierge sera enceinte et l'on appellera son nom Emmanuel,
ce qui veut dire : Dieu avec nous » Matth. 1. 23. L'apôtre
Jean, dans son Evangile, 1. 1,14, s'exprime comme suit «
— 10 ---

commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu,


et la Parole était Dieu. Et la Parole a été faite chair et a ha-
bité avec nous. » Qu'est-ce à dire, sinon que Dieu Lui-même
s'est manifesté en chair, afin de se rapprocher de ses créa-
tures déchues et de leur ouvrir le chemin du salut ?
Qu'est-ce à dire encore, sinon que Jéhova,. qui est souvent
appelé le Rédempteur et le Sauveur dans l'Ancien Testament,
et Jésus-Christ qui porte les mêmes titres dans le Nouveau
Testament sont un seul et même Etre divin? Le nom de Jé-
hova exprimant l'Etre divin avant sa venue en chair, et le
nom de Jésus, celui de ce même Etre divin après son incar-
nation.
Cette doctrine a été pleinement enseignée par le Sei-
u,neur Lui-même au cours de son ministère ici-bas. A Phi-
'

lippe. son apôtre, qui Lui demandait de lui faire voir le


Père, Jésus a répondu : Je suis avec vous depuis si long-
temps, et tu ne m'as pas connu Philippe, celui qui m'a vu
a vu le Père. » Jean 14, 19.

Jéhova et Jésus sont un seul et même Etre divin.

Les expressions «Père et Fils , si fréquemment employées


dans la Parole et mal comprises par un grand nombre de
chrétiens, les ont amenés à se faire une idée erronée de
deux personnes distinctes en Dieu. Cette erreur ne se se-
rait point produite si Ion avait prêté une attention conve-
nable aux propres paroles de Jésus. Son témoignage con-
cernant le Père est le suivant : « Moi et le Père, nous som-
mes un » Jean 10. 30. « Je suis dans le Père et le Père est
-en Moi ». Jean 14. 10.
Si ce témoignage signifie quelque chose, il est incontesta-
ble que Jéhova et Jésus-Christ ne sont pas deux personnes,
mais un seul Etre divin.
Il faudrait, à l'appui de cette affirmation, rappeler en-
core un grand nombre de passages de la Parole qui attri-
buent à Jéhova dans l'Ancien Testament et à Jésus-Christ
dans le Nouveau, les mêmes titres, les mêmes attributs, les
mêmes qualités, les mêmes rôles. On Lit au Psaume 23
Jéhoun, Tu es mon Berger, Je ne manquerai de rien. » Et
dans l'Evangile de Jean 10, 14 nous lisons aussi ces paro-
les sorties de la bouche de Jésus « Je suis le Bon Berger ».
:

Nous avons déjà vu que Jéhova et Jésus-Christ sont appelés


l'un et l'autre : « le Rédempteur, le Sauveur, le Vrai Dieu
et la Vie éternelle. » Jéhova est désigné comme » le Pre-
mier et le Dernier » par Esaiie le prophète 441. 4.), et Jésus-
Christ porte les mêmes titres dans l'Apocalypse (1. 11).
De tous ces passagesi) il ressort qu'il n'y a qu'un seul
Dieu et que Jéhnva dans l'Ancien Testament et Jésus-Christ
dans le Nouveau Testament sont les deux principaux noms
bibliques par lesquels l'unique Dieu, Créateur. Rédempteur
et Sauveur du monde s'est fait connaître aux hommes ; au-
trement dit Jésus-Christ est Dieu manifesté en chair.
C'est là la vraie doctrine concernant le Seigneur. Elle
brille d'un éclat lumineux dans les Saintes Ecritures dont
chaque expression témoigne que Jésus-Christ est le seul
Vrai Dieu et la Vie éternelle. Cette doctrine céleste est l'es-
prit de toutes les prophéties.
Les Ecritures ne sanctionnent aucune doctrine contraire
à celle de la parfaite unité de Dieu en essence et en per-
sonne. Jéhova a dit « Je suis Jéhova, c'est là mon nom
:

et je ne donnerai ma gloire à aucun autre. » Esaie 42, 8.


Jésus-Christ a dit «Toute puissance m'a été donnée dans
:

k ciel et sur la terre. » Matth. 28. 18. Si donc Jésus-Christ


n'est pas Jéhova, et si tout pouvoir lui appartient dans le
ciel et sur la terre, il devient évident que Jéhova a donné sa
gloire à un autre. Cette difficulté cesse d'exister pour celui
qui comprend que Jéhova et Jésus-Christ sont les deux
noms d'un seul et même Etre divin, du seul vrai Dieu.

1) Nous en publierons une liste plus complète.


— 12 —

Le Fils de Dieu.

Mais ici quelqu'un me demandera peut-être pourquoi,


puisque Jésus-Christ était Dieu, la Bible le désigne-t-elle
comme le Fils de Dieu ? Cette appellation, c'est range Ga-
briel qui le premier la fit entendre à la vierge Marie lors de
sa visitation. « Le saint enfant qui naîtra de toi, lui dit-il,
sera appelé Fils de Dieu. Lue 1. 35.
Nous sommes rendus attentifs par ces paroles à la dou-
ble nature de Jésus-Christ en qui le Père et le Fils ne font
qu'un de même que l'âme et le corps ne font qu'un dans
chacun de nous.
L'âme de Jésus-Christ était Dieu le Père.
L'Essence divine de Jésus-Christ est appelée le Père, parce
qu'elle est la source et la cause de l'existence de son Huma-
nité, c'est à dire du Fils ou de la manifestation de Dieu.

Le Divin et l'Humain en Jésus-Christ.

L'existence de ces deux natures, dont le Seigneur ressen-


tit parfaitement l'influence au cours de son ministère, nous
explique le langage parfois contradictoire avec lequel Il a
parlé souvent de Lui-même. Quand 11 parlait de sa dépen-
dance à l'égard du Père en Lui, c'est qu'alors 11 s'identi-
fiait avec Sa nature humaine, le Fils. Quand au contraire
il proclamait son égalité avec le Père dans l'exercice de ses
divines prérogatives, c'est qu'alors Il s'identifiait avec Jé-
/lova. Il prétendait dans ces momentq là qu'Il était un avec le
Père, Jean 10. 30, et qu'Il faisait tout ce que le Père faisait,
Jean 5, 19. H affirmait alors sa toute Puissance et son om-
niscience. Il guérissait les malades, Il apaisait la tempête,
ressuscitait les morts. Il déclarait qu'Il avait le pouvoir de
donner sa vie et de la reprendre. Il enseignait qu'Il était le
Pain de vie, Jean 6, 35, la Résurrection et la Vie, Jean 11, 25;
le Chemin, la Vérité et la Vie, Jean 14. 6 ; que tout ce que
le Père avait était à Lui, Jean 16, 15,
Dans d'autres moments au contraire, Il déclarait que le
— 13 —

Père était plus grand que Lui et. que Lui, Jésus, ne pou-
vait rien faire de Lui-même.
Toutes ces déclarations qui sont apparemment contradic-
toires sont parfaitement vraies et en parfait accord les unes
avec les autres. Celles d'entre elles par lesquelles Il affir-
mait ses attributs divins, Lui étaient dictées par la prédonii-
nence en Lui de sa nature divine ; et celles par lesquelles
Il exprimait son absolue dépendance à l'égard du Père, Il
les émettait sous l'influence de sa nature humaine.
La pauvreté du langage humain nous oblige, nous aussi,
à nous servir d'expression qui ne répondent pas à la par-
faite réalité de ce que nous éprouvons. Quand nous disons :
« Je suis malade », nous nous identifions h' plus souvent
avec notre corps matériel. Quand nous disons « J'aime, je
:

sais, je pense nous nous identifions avec les affections


de notre mental. En employant le pronom « je » dans ces
deux catégories d'expressions, nous prenons la partie pour
le tout. C'est quelque chose de pareil que nous retrouvons
clans le langage humain de Jésus-Christ. Quand Il disait
qu'Il ne pouvait rien faire de Lui-même, c'est de sa nature
humaine, externe, qu'Il voulait parler, de même que nous
dirions en parlant de notre nature matérielle, de notre
corps. qu'il ne peut rien faire par lui-même, l'âme étant en
nous l'instrument de toute notre activité, de toute notre
force, de toute notre intelligence.
C'est dans ce sens également que l'Humain ou le Fils
priait le Père en Lui, pour qu'Il Lui apportât aide et se-
cours dans l'accomplissement du grand oeuvre qui avait né-
cessité leur union. Lorsque dans une grande épreuve, dans
un violent chagrin, il nous semble que toute force nous est
enlevée. nous nous adressons involontairement au principe
intérieur de notre double nature. Ainsi David, qui était le
type du Seigneur, s'est écrié : «Pourquoi es-tu abattue, ô
mon âme, et pourquoi frémis-tu au dedans de moi Espère
en Dieu ! » Ps. 42, 6. C'est ainsi également qUe lorsque l'Hu-
main du Seigneur souffrait sur la croix, il s'écria : « Mon
Dieu. mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné t, »
--14 -

Le Fils est la nature humaine dont Dieu s'est revétu et qu'Il a


divinisée.
Les passages ci-agrès nous prouvent enfin que Jésus-
Christ, le Fils, a bien été la nature humaine que Dieu le
Père a revêtue pour venir dans le monde: «Je suis venu du
Père dans le monde », Jean 16, 28 ; « Je suis issu de Dieu
et je viens de sa part », Jean 8, 42 ; Personne n'est monté
au ciel que celui qui est descendu du ciel, savoir le Fils de
l'homme qui est dans le ciel », Jean 3, 13. « Je connais le
Père parce que je viens de sa part et c'est Lui qui m'a en-
voyé ,. Venir du Père et avoir été envoyé dans le monde, ne
signifient pas que le Seigneur est venu d'une place ou d'un
monde dans lequel se trouvait le Père, dans un autre. « Le
Père demeure en Moi», a-t-II dit. Il est venu du Père comme
une plante vient d'une semence. En tant qu'être humain,
Il n'est pas venu de Lui-même. S'il avait été un Etre divin
égal au Père, comment serait-Il provenu de Lui ?
Nous disons donc que pour accomplir son but, venir dans
le monde, le Divin s'est revêtu d'un corps matériel, de même
que pour vivre dans ce monde nous devons tous en avoir un.
Ce corps matériel et toute la nature qui s'y rattache, Dieu
l'a appelé son Fils, ce Fils qu'il a glorifié, cette nature qu'il
a divinisée et dont il a fait son tabernacle humain, en le
remplissant corporellement, selon le langage de l'apôtre
Paul, de la plénitude de la Divinité jColoss. 2, 9). Nous re-
prendrons d'ailleurs ce sujet, que nous traiterons plus com-
plètement, dans une prochaine conférence sur Jésus-Christ.

La dualité de sa nature rend compréhensibles les tentations


du Seigneur.
Disons encore que l'existence de ces deux natures distinc-
tes dans le Seigneur peut seule expliquer les combats spi-
rituels. les tentations de Jésus. Si cette dualité n'eut point
existé, les tentations auraient été impossibles. Comment
Dieu, dans sa nature divine, aurait-il pu être tenté sans
cesser d'être Dieu ? C'est donc l'humain ou le Fils seul qui
— 15 —

l'a été ; mais, d'autre part, comment cet humain aurait-il


pu triompher de ces tentations sans le secours de l'âme
divine qui l'habitait ? Pour être tenté, il fallait que Jésus-
Christ fut un homme. Pour vaincre dans ses combats spi-
rituels il fallait qu'Il fut Dieu.

Le sens originel du mot « personne ».

A l'appui de notre manière de voir, nous pouvons dire


enfin que les termes « Père et Fils » ne sont pas uniquement
employés pour désigner des personnes, mais qu'ils servent
souvent à exprimer des rapports. C'est ainsi que dans les
Ecritures on trouve ces expressions : le Pére d'éternité, le
Père de miséricorde, le Père des lumières, le Fils de la paix,
le Fils du tonnerre, le Fils de perdition ». Ces expressions
étaient très courantes dans les langues anciennes. Nous di-
sons de nos jours encore le père d'un ouvrage, d'un sys-
:

tème, d'une école, pour désigner celui qui en est l'auteur.


Il s'en suit que l'idée de g personnes » ne doit pas être né-
cessairement attachée aux termes de Père et de Fils. Et la
doctrine des trois personnes de la Trinité devient d'autant
plus suspecte qu'elle s'apppuie sur un sens secondaire et
retréci de ces termes, toutes les fois qu'ils sont appliqués
à la plus élevée de toutes les existences, à l'Eire qui remplit
les terres et les cieux de sa personne vivante, à l'âme de
l'univers 1).

1 ) il est vrai qu'une intelligence finie ne peut jamais comprendre


complètement le Dieu infini « Ses perfections sont immenses, et dé-
passent toutes recherches». Mais nous pouvons bien, autant que le
permettent nos capacités finies, comprendre ce qu'il a plu à Dieu de
révéler concernant Lui-même, et il y a la plus grande différence pos-
sible entre ce qui surpasse notre r a ison et ce qui contredit entière-
ment ses perceptions les plus claires. L'obscurité répandue sur la
doctrine de la Trinité, telle qu'elle est généralement reçue, provient
du changement opéré par le temps dans la signification du mot Per-
sonne. Ce mot ne s'applique pas exclusivement à un être à part, à une
identité distincte: mais le mot latin Persona. d'où vient le mot fran-
çais personne, signifie aussi bien un rôle qu'une personne, et c'est
da ns ce premier sens qu'il a été employé par les Pères latins dans
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Disons enfin que si le Christ a Lui-Même recommandé à


ses apôtres de faire de toutes les nations des disciples et de
les baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit
(Matth. 28, 19), il est frappant de constater que dans le
livre des Actes, les apôtres n'ont jamais baptisé qu'au nom
du Seigneur Jésus seul (Actes 2, 38 ; 8, 16 ; 19, 4. 5. 6 ; etc.),
ce qui nous prouve que, dans l'esprit des disciples immédiats
du Sauveur du inonde, le Christ a bien été l'incarnation de
Jehova, la manifestation sur le plan visible du Dieu invisible
dans son essence intime, le Divin qui s'est revêtu, pour être
approché par les puissances infernales et en triompher,
d'une nature humaine semblable à la nôtre, nature qu'Il a
glorifiée et emportée avec Lui dans le ciel, nature en qui
habite désormais corporellement la plénitude de la Divinité
(Coi. 2, 9).

F IN

(Suite de la note de la page 1.5).


leur traduction du symbole d'Athanase de l'original grec. Le substan-
tif Per.wna est dérivé du participe personans, résonnant, du verbe
persono, sonner à travers, résonner. C'était le terme usité pour dési-
gner les personnages des anciens drames, parce que, dans les repré-
sentations, les acteurs portaient des masques, au travers desquels se
faisait entendre la voix du récitant; et à cause de cette circonstan-
ce le masque lui-même était appelé persona. Lorsque cette significa-
tion était universellement connue, l'expression tres personoe, trois
personnes, était convenablement employée pour désigner la triple
manifestation de l'Etre Divin, et l'on pourrait conséquemment dire,
tres personne, sed unus Deus, trois personnes, mais un seul Dieu.
Mais la signification restreinte qu'on donne aujourd'hui au mot per-
sonne, ne le rend plus propre à être employé, si nous tenons à avoir
des idées claires et conséquentes sur l'objet de notre adoration.

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