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Va,
un couvent pour la ville d’aujourd’hui
vis, deviens
VA | VIS | DEVIENS
UN COUVENT POUR LA VILLE D’AUJOURD’HUI
Yann Petter
REMERCIEMENTS
9 | Architectures de Vérité
11 | Un monde de dichotomies
VA | L’ESSENCE DU MONASTÈRE
23 | Un lieu d’acèse
25 | Un lieu d’échanges
29 | Un lieu d’exodes
SOMMAIRE
ETUDE MORPHOLOGIQUE
47 | L’enclos
53 | Les barres
57 | Les hybrides
59 | Une architecture cyclique
ETUDE TYPOLOGIQUE
BIBLIOGRAPHIE
GLOSSAIRE
Basilique Saint-Pierre
du Vatican
Rome
1506-1626
visitée le 060708
Le Corbusier
Chapelle Notre-Dame-
du-Haut
Ronchamp
1950-55
visitée 140611
8
AVANT-PROPOS
- Fernand Pouillon -1
ARCHITECTURES DE VÉRITÉ
1 Fernand Pouillon, Les pierres sauvages, Editions du seuil, Paris, 1964, pp. 138-139
9
Mario Botta
Chapelle Santa Maria
degli Angeli
Monte Tamaro
1992-96
visitée le 310712
Alvaro Siza
Eglise Santa Maria
Marco de Canavezes
1996
visitée le 110508
10
moi, l’architecture sacrée ne se laisse classer dans aucune catégorie.
Nulle autre n’est à ce point vouée à sa fonction. Tout, les formes,
les matériaux, les dimensions, l’acoustique, la lumière, sert la voca-
tion unique de l’édifice religieux : l’élévation de l’âme. Le Corbu-
sier évoque sa vision de ce phénomène dans son fameux texte J’étais
venu ici… : « Lorsqu’une œuvre est à son maximum d’intensité,
de proportion, de qualité d’exécution, de perfection, il se produit
un phénomène d’espace indicible : les lieux se mettent à rayon-
ner, physiquement ils rayonnent. Ils déterminent ce que j’appelle
l’espace indicible, c’est-à-dire qui ne dépend pas des dimensions
mais de la qualité de perfection. C’est du domaine de l’ineffable. »2
UN MONDE DE DICHOTOMIES
2 Le Corbusier, « J’étais venu ici... », L’architecture d’aujourd’hui, n°96 (juin-juillet 1961), pp. 2-21
11
Le Corbusier et les frères
du couvent dominicain
de la Tourette.
Photographie
René Burri, 1959
12
Marcel Breuer et les
soeurs de l’Abbaye
Saint-Jean
Il faut savoir que le terme grec monachos est dérivé du terme monos
qui signifie « seul ». Il reflète la vie de retraite constante des moines
isolés du monde dans un monastère. Les Dominicains, au contraire,
ont une vocation différente qui les conduit à adopter d’autres ma-
4 John Pawson, « Pause for thought », El croquis, n°127 (novembre 2005), John Pawson 1995-2005, p. 19
13
Louis I. Kahn et une
soeur du couvent
dominicain de Sainte-
Catherine-de-Ricci
Photographie
tirée du film
« Signature Against
the Sky », 1967
John Pawson
et les frères du
monastère Notre-Dame
de Nový Dvůr
14
nières de vivre. Bien que les sœurs dominicaines soient moniales et
vivent, à l’instar des autres ordres, dans des monastères, les frères
vivent quant à eux dans des couvents en ville. De leur mission de
prédication, un appel est né à sortir de leur clôture pour prêcher au
monde. C’est pourquoi ils habitent des couvents, terme dérivé du
latin conventus signifiant « assemblée ». La différence majeure entre les
deux apostolats concerne la définition de l’enceinte. Alors que les uns
souhaitent une retraite radicale hors de la société, les autres privilé-
gient une clôture partielle, née des mêmes désirs de retraite, de silence
et de paix à l’origine de la fondation de tous les ordres. Tout au long
de cet énoncé, j’adopterai cependant parfois le terme monastère pour
désigner à la fois les monastères et les couvents. D’une part, cette
« simplification » permet une plus grande clarté des propos et évite une
redondance qui, sans améliorer le contenu, en alourdirait la lecture.
Page suivante :
Hiroshi Sugimoto
« Seascape : Aegean Sea,
Pillon »
1990
15
va
Dom Hans van der laan
Jesu Moder Marias Kloster
Tomelilla
1987-95
VA | L’ESSENCE DU MONASTÈRE
- Jacques Attali -1
19
John Pawson
Monastère Notre-Dame
de Nový Dvůr
Toužim
1999-2004
2 Fernand Pouillon, Les pierres sauvages, Editions du seuil, Paris, 1964, pp. 134-135
20
Jensen & Skodvin
Couvent Tautra Maria
Tautra
2004-06
pour les frères. Le monastère est une architecture de seuils, une des ar-
chitectures dans lesquelles le passage d’un lieu à l’autre, d’un espace à
l’autre prend tout son sens. Les mots de Patrick Mestelan définissent
à merveille cette épaisseur construite : « Selon son étymologie, le seuil
se réfère au mot sandale ou semelle, une planche où l’on pose le pied
pour franchir la porte. Il évoque le franchissement d’une limite par une
ouverture. Le passage qu’offre l’ouverture dans une clôture permet la
continuité spatiale entre deux univers. Ainsi, issue de la conjonction
entre la limite et le parcours, l’ouverture est un seuil, qui réclame une
épaisseur. il est un espace qui lie deux espaces différents. Il évoque et en-
gendre des pratiques et des usages divers aux significations multiples. »3
21
Le Corbusier
Couvent Sainte-Marie
de la Tourette
Eveux
1956-60
22
UN LIEU D’ASCÈSE : LE MONASTERE SACRÉ
Les monastères et couvents sont tous deux des lieux d’ascèses, des lieux
dans lesquels une relation privilégiée est tissée entre l’homme et Dieu.
Ce lieu protège des influences du monde extérieur qui lui est totale-
ment antithétique, il marque une volonté de rupture avec la vision
que la société a du divin. A l’intérieur, toute la vie est dédiée à cette
relation, toute action, parole ou pensée lui est consacrée. C’est une vie
organisée et vécue dans ce seul but. Ainsi, la journée est rythmée par
les offices, jusqu’à dix par jour pour certains ordres. Les attitudes y
sont aussi réglementées : le port de l’habit, le silence presque constant
et la modestie favorisent cet idéal de vie. Le monastère est un lieu de
transformation, de changement dans l’identité profonde l’homme.
En tant qu’hétérotopie, il s’agit d’un lieu dans la société qui est « autre
», un monde qui s’en détache et qui permet l’amélioration de l’être,
une condition supérieure pour ce dernier. Les frères religieux sont des
êtres en « crise » dans cette culture, ils réagissent à ce qu’ils considè-
rent comme n’étant pas en accord avec leurs valeurs par un retrait de
la société. Selon Michel Foucault, les hétérotopies de crise sont des «
lieux privilégiés, ou sacrés, ou interdits, réservés aux individus qui se
trouvent, par rapport à la société, et au milieu humain à l’intérieur
duquel ils vivent, en état de crise. »5 Bien que le monastère se classe
dans la même catégorie que les hôpitaux, prisons, établissements mé-
4 Michel Foucault, Le corps utopique suivi de les hétérotopies, Nouvelles éditions lignes, Paris, 2009
5 Idem
23
Herzog & de Meuron
Centre Rehab
Bâle
1998-2002
Photographie
Herzog & de Meuron
Jean-Baptiste André
Godin
Familistère
Guise
1858-83
Moisej Guinzburg
Immeuble Narkomfin
Moscou
1928-29
24
dicaux sociaux et internats, il ne s’agit pas d’un enfermement forcé,
mais d’un éloignement volontaire à la poursuite d’un idéal supérieur
et d’une certaine compassion envers l’être humain. En ceci, il est plus
comme la cabane d’un enfant dans lequel un nouveau monde est
possible, un monde de rêves. Loin d’être insolites ou féériques, ces
rêves sont ancrés dans une réalité qui, dans la conception de la vie
des moines, est difficile. Néanmoins, c’est un cadre pour une vie dif-
férente qui n’est pas réalisable hors des murs du monastère. Dans
cette relation d’ascèse, le silence, la paix et la pauvreté sont primor-
diaux. Ces éléments représentent la condition indispensables à une
vie contemplative. Les Dominicains ajoutent cependant une « clause
» qui les différencie fortement des autres ordres : la mobilité. L’ascèse
se vit pour eux aussi à travers la relation à la société et le partage
avec l’autre. Le couvent est plus que tous les lieux monastiques un
« lieu autre » car il est véritablement ancré au coeur de la société.
25
Le Corbusier
Unité d’habitation
Marseille
1945-52
6 Patrick Berger, Lux sonus - leçons du Thoronet, Mav Paca, Paris, 2010
7 Albert Levy, « La distribution de l’espace monastique », Architecture et comportement, vol. 5, n°4, 1989, p. 342
26
Chartreuse d’Ema
Galluzzo
1342
27
Le Corbusier
Corquis de la
Chartreuse d’Ema
28
Rem Koolhaas &
Elia Zenghelis
« Exodus or The
Voluntary Prisoners of
Architecture »
1971-72
9 Roberto Gargiani, Rem Koolhaas - the construction of merveilles, PPUR, Lausanne, 2011, p.7
29
Rem Koolhaas &
Elia Zenghelis
« Exodus or The
Voluntary Prisoners of
Architecture »
1971-72
Alors que les moines sont les acteurs d’un exode de la ville, les frè-
10 Michel Foucault, Le corps utopique suivi de les hétérotopies, Nouvelles éditions lignes, Paris, 2009
30
res dominicains vivent un exode à plus petite échelle, au sein même
de la ville. Les moines entreprennent un mouvement de la ville à la
nature, les frères dominicains de la ville à la ville. Outre le contex-
te différent, l’autarcie et l’hermétisme ne sont pas considérés de la
même façon. Le monastère a des frontières claires et imperméables,
comme celles d’Exodus. Celles du couvent sont, au contraire, carac-
térisées par la porosité. Elles ne constituent pas une fermeture volon-
tairement définitive, mais sont partielles et parsemées d’ouvertures
permettant le contact avec le monde extérieur. C’est ainsi un éloi-
gnement partiel de la société qui est choisi ou plutôt une tempora-
lité d’isolement différente. Alors que le retrait du moine dure la vie
entière, celui du frère dominicain n’est qu’épisodique. En somme, la
radicalité du monastère se révèle riche en nuances selon les ordres.
31
vis
Yannig Hedel
« Toit de la chapelle de la Tourette »
2010
VIS | TYPOLOGIES ACTUELLES
35
fin, quelle est la pertinence de ces choix architecturaux aujourd’hui?
36
discutées. L’étude ne se penchera pas sur l’influence des couleurs et
le riche développement de mobiliers religieux conçus par les archi-
tectes pour les monastères. Bien que ces approches apporteraient
quelques précisions sur certains procédés architecturaux, elles dévie-
raient du sujet de l’énoncé sans l’enrichir de manière significative.
37
1
le corbusier
couvent sainte-marie
de la tourette
Eveux
France
1956-60
2
pierre pinsard
couvent des dominicains
Lille
France
1955-64
3
patel c. hasmukh
couvent saint-xavier
Ahmedabad
Indes
1965
4
HANS SCHILLING
MAISON MÈRE DES FRANCISCAINES
Olpe
Allemagne
1963-67
5
LOUIS I. KAHN
PRIEURÉ DE SAINT-ANDRÉ
Valyermo
Etats-Unis
1961-67
6
LOUIS I. KAHN
COUVENT DE
SAINTE-CATHERINE-DE-RICCI
Media
Etats-Unis
1965-69
7
DOM HANS VAN DER LAAN
ABBAYE ROOSENBERG
Waasmunster
Belgique
1972-75
8
MARCEL BREUER
MAISON MÈRE DES FRANCISCAINES
Baldegg
Suisse
1967-75
9
MARCEL BREUER
ABBAYE SAINT-JEAN
Collegeville
Etats-Unis
1953-81
10
DOM HANS VAN DER LAAN
ABBAYE SINT BENEDICTUSBERG
Vaals
Pays-Bas
1956-86
11
GABETTI & ISOLA
MONASTÈRE MATER MISERICORDIAE
Villair de Quart
Italie
1984-89
12
LUND & SLAATTO
COUVENT CARMÉLITE
Tromsø
Novège
1995
13
DOM HANS VAN DER LAAN
COUVENT JESU MODER MARIAS
Tomelilla
Suède
1987-95
14
SIMONET & CHAPPUIS
couvent CARMÉLITE
Fribourg
Suisse
1998-2001
15
JOHN pAWSON
Monastère Notre-Dame de Nový Dvůr
Toužim
République Tchèque
1999-2004
16
ODOS
KNOCKTOPHER FRIARY
Kilkenny
Irlande
2002-06
17
JENSEN & SKODVIN
COUVENT TAUTRA MARIA
Tautra
Norvège
2004-06
18
PIERRE THIBAULT
ABBAYE VAL NOTRE-DAME
Saint-Jean-de-Matha
Canada
2002-10
1940 1945 1950 1955 1960 1965
Seconde Guerre M
Vatican II
mondiale 6
1 75
2 42
3 45
4 90
5 72
6 120
9 300
10
11
12
13
14
15
16
17
18
36
200
40
15
25
30
40
18
30
BARRES
HYBRIDES
ETUDE MORPHOLOGIQUE
45
ENCLOS
4 17 12
11
13
14
16
10 2
15
18
1940 1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Seconde Guerre Mai Suppression lois
Vatican II
mondiale 68 d'exception
10
11
12
13
14
15
16
17
18
L’ENCLOS
L’enclos est la forme la plus utilisée par les architectes, mais également
celle qui est le sujet de la plus grande gamme de variations du modèle
médiéval. La famille des monastères enclos comprend cinq séries, c’est-
à-dire cinq manières différentes de réinterpréter l’enclos. La première
série est la vision la plus fidèle de la tradition : le cloître est unique et en-
clavé par une enceinte constituée de quatre ailes. Dans la seconde série,
le cloître est toujours unique, mais il n’est plus défini par enceinte, il
est «creusé» dans une masse construite. La troisième catégorie se carac-
térise par les monastères dans lesquels le cloître est multiplié. Il est en
effet composé de différents quartiers ayant chacun leur propre préau.
Dans la quatrième classe, certains architectes fractionnent le cloî-
tre en une multitude de petits patios disséminés dans l’édifice.
Enfin, la cinquième série comprend des monastères « tentaculaires ».
Les ailes du bâtiment s’étendent au-delà des limites du quadrilatère
et constituent des excroissances, ceci afin d’isoler certaines fonctions.
47
énoncé, la transmission orale, les voyages missionnaires et les règles
observées de générations en générations lui ont tout de même permis
de se répandre et de se perpétuer au travers des différentes époques.
LA RÈGLE DE SAINT BENOÎT
Saint Benoît divise les activités en trois lieux distincts : les lieux réguliers
qui accueillent les espaces pour les frères « intellectuels », les quartiers
périphériques destinés aux fères « étudiants », les novices, et aux hôtes.
Plus éloignés encore, on trouve les annexes pour les frères « manuels »
que l’on appelle convers. Dès le début, une hiérarchie forte est installée
entre les rangs sociaux des différents occupants du monastère. Ainsi,
les frères « intellectuels » habitent le bâtiment principal, alors que
les novices, les malades, les hôtes et les convers sont logés en dehors.
LA PLAN DE SAINT-GALL
Vers 820, un plan utopique est dessiné. Encouragés par les souve-
rains carolingiens, les abbés bénédictins étudient un projet idéal qui
comprend tous les éléments importants d’une grande abbaye. On
y repère les trois lieux de la règle de saint Benoît : les lieux régu-
liers, les quartiers périphériques et les annexes. Il s’agit de la trans-
cription de ces fonctions en architecture et leur agencement au sein
1 Noisette cité in Albert Levy, « La distribution de l’espace monastique », Architecture et comportement, vol. 5,
n°4, 1989, p. 347
48
Plan de Saint-Gall
Dessin d’Eugène Viollet-
le-duc
Bien que le Plan de Saint-Gall soit une sorte de plan-type, les différents
ordres l’adopteront avec liberté, y apportant certaines modifications
exigées par leurs spécificités. Cette souplesse dans l’interprétation du
plan est aussi due à une volonté constante d’un retour à la simplicité
des valeurs évangéliques. Nombreux sont les ordres, tels que les Cis-
49
Plan type réalisé à
partir de plans
d’historiens 0 5 10
terciens, qui rejetteront non pas l’agencement des fonctions, mais l’or-
ganisation hiérarchique et le luxe architectural du plan de Saint-Gall,
jugé comme une construction de type « palatial » et aristocratique.
50
cains et Franciscains, et les Chartreux vont instaurer une séparation
claire entre les espaces communautaires et privés. Allant à l’encontre
de cette promiscuité typique du Moyen âge, ces ordres vont apporter
une attention plus grande à l’intimité des frères. Le cœur de la mis-
sion de l’Ordre dominicain étant l’étude, les frères ont besoin d’un
lieu calme et privé dans lequel ils peuvent étudier, se concentrer, se
retirer et contempler. Les Dominicains vont donc bannir les dortoirs
parfois insalubres pour instaurer des cellules privées pour chacun des
frères. Cette révolution témoigne de l’esprit avant-gardiste de l’Ordre
car, contrairement à l’image traditionnelle véhiculée aujourd’hui, les
religieux ont de tout temps été ouvert aux nouveautés, voire même
précurseurs de nouvelles façons de vivre. La volonté de mettre en
place un modèle adaptable et flexible, ouvert aux particularités des
lieux et communautés marque l’histoire architecturale monastique.
2 Dom Emmanuel d’Able do Amaral, « Rôle et fonction du cloître », www.aimintl.org, consulté le 29.12.12
51
BARRES
1
3
8
1940 1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Seconde Guerre Mai Suppression lois
Vatican II
mondiale 68 d'exception
BARRES
1
3
8
1940 1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Seconde Guerre Mai Suppression lois
Vatican II
mondiale 68 d'exception
9
LES BARRES
53
Chantier de l’église de
l’abbaye de Saint-Jean
Chantier du couvent
Sainte-Maire de la
Tourette
54
les années 50 que les communautés religieuses peuvent à nouveau
occuper la plupart des pays d’Europe touchés par ces événements.
Ces lois d’exception ne seront abrogées en Suisse qu’en 1980. Ces
conditions expliquent la longue période sans nouvelles construc-
tions monastiques à travers l’Europe du 16e à la moitié du 20e siècle.
55
HYBRIDES
1940 1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Seconde Guerre Mai Suppression lois
Vatican II
mondiale 68 d'exception
HYBRIDES
1940 1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Seconde Guerre Mai Suppression lois
Vatican II
mondiale 68 d'exception
6
LES HYBRIDES
57
Louis I. Kahn
« Form and Design »
Louis I. Kahn
« The making of a
room »
4 Lettre de la Mère Mary Bernadette à Louis Kahn, Box LIK 10, Collection Kahn, 18 mars 1969
58
tion des rites et des rapports plus étroits avec les autres confessions
chrétiennes, les autres religions et la société. Les bases même de la
vie monastique et conventuelle sont remises en question. Les frères
et soeurs ne trouvent plus de raison de perpétuer leur style de vie
en retrait de la société. D’autre part, les événements de mai 68 qui
secouent l’Europe, puis le monde, fragilisent d’avantage l’équilibre
instable provoqué par le concile. Une nouvelle époque commence
pour les communautés religieuses. Bien que les persécutions fassent
partie du passé, les ambitions nées dans les années 50 s’évanouissent.
Le climat général de révolte tant culturelle, que sociale et politique,
envahit les frères et pénètre les frontières des monastères. Les modes
de vie et le retrait de la société sont remis en question. « Il est interdit
d’interdire », ce slogan de la révolution de mai 68 confirme un déca-
lage entre la volonté de liberté sans limite de la société et les règles,
la discipline et la rigueur mises en place dans les ordres religieux.
Un dominicain m’a même confié que certains frères fuyaient leurs
cellules pendant la nuit, parfois en grand nombre. Chaque matin, les
effectifs restant diminuaient. Il semble qu’une nouvelle ère monasti-
que apparaisse et explique en partie l’échec de quelques monastères
de cette époque. L’environnement instable de ces années produisait
des monastères charnières qui auguraient de vrais changements.
59
ment diminués. Ils sont de plus petite taille et expriment une cer-
taine modestie. Néanmoins, quelques monastères des années 2000
retrouvent une échelle plus ample et une architecture plus impo-
sante, voire démonstrative. Le nombre de frères est pourtant tou-
jours raisonnable et n’évolue pas vraiment. S’agit-il d’une volonté
d’un retour à une architecture plus traditionnelle? Est-ce un désir
d’exprimer à nouveau l’identité du monastère et ses modes de vie?
60
ETUDE TYPOLOGIQUE
61
0 5 10
0 5 10
Plan du rez-de-chausée
Coupe
62
L’église
ASSIMILATION DE L’EGLISE
63
Entrée du monastère
Intérieur de l’église
une influence sur les seuils entre les deux parties. Bien qu’englobée
dans la masse, l’église devient un objet intérieur creusé dans celle-ci.
65
0 5 10
0 5 10
0 5 10
0 5 10
Coupe
66
L’église
EXPRESSION DE L’EGLISE
67
Intérieur de l’église
Le patio
69
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
0 5 10
Entrée de l’église
70
Le Corbusier
Intérieur de l’église du
couvent Sainte-Marie
de la Tourette
bre anéchoïque, lieu où le moine perd ses sens. La vision est bou-
chée par des murs aveugles et l’acoustique est purifiée des sons ex-
térieurs. Le moine peut alors se concentrer sur le monde spirituel.
AUTONOMIE DE L’EGLISE
71
Jensen & Skodvin
Intérieur de l’église du monastère Maria Tautra
Intérieur de l’église
2 Lettre de l’Abbé Baldwin Dworschak à Marcel Breuer concernant l’abbaye de Saint-Jean, 1950
73
0 5 10
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
L’aile privée
Photographie
Leonardo Finotti
74
semble cependant appartenir à une époque révolue. Aujourd’hui,
la période faste des institutions monastiques a laissé place à une
discrétion à la fois contrainte et désirée. La relation ouverte ou
fermée sur l’extérieur dépend de l’ordre religieux, de sa vocation
et se traduit en architecture par des seuils plus ou moins filtrés.
AXIALITÉ
75
Axonométrie d’une
cellule
Couvent Sainte-Marie
de la Tourette
Le Corbusier
Une cellule du couvent
Sainte-Marie de la
Tourette
76
L’un des quatre cloîtres
Photographie
Leonardo Finotti
77
0 5 10
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
0 5 10
78
pées par Le Corbusier au couvent de la Tourette. Véritable modèle
pour les générations à suivre, ces cellules basées sur les dimensions du
modulor ne vont pas connaître de grands changements typologiques
jusqu’à aujourd’hui. Par cette organisation de chambres individuel-
les distribuées par un couloir et comprenant toutes les commodités,
le monastère devient une sorte d’hôtel. Chaque chambre, longue et
étroite, est divisée en trois espaces. Le premier est définipar l’entrée
et est clairement séparé de la chambre par un meuble cachant le la-
vabo. Puis, le plus grand espace est dédié au séjour avec un lit et
un bureau. La pièce se termine enfin en loggia, autre espace tam-
pon entre la chambre et l’extérieur. Sorte de réminiscence du jardi-
net personnel des moines que Le Corbusier découvre dans la Char-
treuse d’Ema, cette parcelle d’espace extérieur individuel incite à la
méditation et l’étude par sa lumière filtrée qui pénètre la chambre.
CENTRIFUGE
79
Louis I. Kahn
Bibliothèque de l’Académie Phillips Exeter
New Hampshire, Etats-Unis, 1971
Coupe et perspective
d’une cellule
3 Louis I. Kahn cité in Natalie Befve, Habiter l’espace intermédiaire, Ecole nationale supérieure d’architecture de
Marne-la-Vallée, Paris, 2011
81
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
0 5 10
Galerie intermédiaire
82
prend même davantage d’importance que les deux espaces qu’il lie.
VERTICALITÉ
83
Cage d’escaliers
John Pawson
Dortoirs du monastère
de Nový Dvůr
Toužim
mite créée par la superposition est atténuée par une grande trans-
parence dans le traitement architectural. Scandés de poteaux
régulièrement disposés, la passerelle et les escaliers centraux de-
viennent des filtres poreux entre l’extérieur et l’intérieur. Has-
mukh C. Patel multiplie ainsi les contacts visuels et sociaux.
85
ODOS architects
Cloître de Knocktopher Friary
time est réduit à son strict minimum : les cloisons ne montent pas
jusqu’au plafond et la chambre n’a ni commodité, ni lumière natu-
relle directe, elle n’est vouée qu’au repos. Les couloirs qui longent les
façades sont, quant à eux, baignés de lumière et font office de transi-
tion entre leur « enclos individuel » et la communauté. Ces disposi-
tions témoignent d’une volonté accrue d’un esprit de communauté.
Cette idée de confrérie dans laquelle l’intimité est pres-
que inexistante semble aller à l’encontre de la société ac-
tuelle qui se veut de plus en plus individualiste, mais confor-
te le désir de retour aux sources des frères d’aujourd’hui.
4 Richard Saul Wurman, What will be has always been - The words of Louis I. Kahn, Harper Collins publishers,
1986.
87
0 5 10
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
Le cloître secondaire
en toiture
Photographie
Jacqueline Salmon
88
biances intérieures variées qui révèlent l’espace. C’est aussi une balade
contemplative qui nécessite un espace qui lui est propre. Le monas-
tère est ainsi le seul type d’habitat comprenant un réel espace dédié au
mouvement : le cloître. La nature et le mouvement combinés de façon
harmonieuse provoquent la symbiose entre l’homme et Dieu dans un
élan contemplatif. Les architectes du corpus travaillent de manière
plus ou moins innovante. Certains en gardent la forme d’un couloir
fonctionnel, alors que d’autres explorent les possibilités d’un retour à
l’enfilade. Enfin, le tournant réel du 21e siècle est l’arrivée de la pro-
menade verticale matérialisée par l’escalier, voire même l’ascenseur.
LE COULOIR
89
Le cloître surélevé
John Pawson
Le cloître surélevé du
monastère Notre-Dame
de Nový Dvůr
Toužim
90
Les trois types d’ouver-
tures de la promenade
5 Le Corbusier, « J’étais venu ici... », L’architecture d’aujourd’hui, n°96 (juin-juillet 1961), pp. 2-21
91
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
0 5 10
Le cloître
92
des atmosphères différentes au gré de ses détours. A chaque chan-
gement de direction, Le Corbusier crée une fenêtre différente selon
l’ambiance qu’il veut susciter. Ainsi, les seuils entre l’intérieur et l’ex-
térieur filtrent plus ou moins la lumière selon les besoins de l’espace.
Dans les espaces principaux, il a recours à un damier qui se joue du
contraste entre les carreaux transparents et opaques. Dans les cou-
loirs faisant face au paysage, une fente horizontale longe le parcours
et cadre la vue à la hauteur de l’œil humain. Enfin, dans les ailes
du cloître, il filtre l’arrivée de lumière d’une façon poétique. L’at-
mosphère créée est stupéfiante et mystique. Les intervalles différents
entre les montants verticaux cadencent le pas du frère qui parcourt le
cloître, ils créent une musique de l’esprit inaudible et harmonieuse.
Dans l’architecture du Corbusier, tout est question de nuances. Par
les différents traitements de la fenêtre, l’architecte intériorise plus ou
moins l’espace, ce qui donne à ce dernier un aspect paisible ou non.
L’ENFILADE
93
0 5 10
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
94
Dom Hans van der
laan
Enfilade du
monastère Jesu Moder
Maris Kloster
Tomelilla
95
Traces de seuils
L’enfilade
97
0 5 10
0 5
Plan du rez-de-chaussée 0 5 10
0 5 10
0 5
Coupe
98
Le cloître intérieur
99
Jensen & Skodvin
Monastère Maria Tautra
une simple nécessité, mais qu’ils provoquent des expériences sen-
sorielles. Les expérimentations dans le système des circulation mo-
difient également les dispositions du cloître. Il devient le sujet de
réinterprétations radicales par les architectes. Celui développé par Si-
monet & Chappuis, tel un atrium, marque la plus grande évolution
du modèle traditionnel. Serait-ce l’avènement d’un nouveau type de
déambulation monastique porté par la technologie? Un cloître in-
térieur et vertical correspond-il à sa vocation contemplative? Le be-
soin d’un espace « naturel » généreux reste un élément important
pour les frères. Comment trouver ce morceau de nature paisible dans
une configuration verticale? Une chose est certaine, la superposition
des fonctions et une réelle verticalité des circulations bouleverse l’ar-
chitecture monastique et augure de nouvelles façons de l’aborder.
101
0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
de la tour du couvent
de Sainte-Catherine-
de-Ricci 0 5 10
Tour d’entrée du
couvent de Sainte-Ca-
therine-de-Ricci
John Pawson
Brèche d’entrée du
monastère Notre-Dame
de Nový Dvůr
Toužim
102
tes leur permet un développement horizontal du programme. La
morphologie du monastère est dès lors réellement formée des modes
de vies internes. La plupart des monastère situés en pleine nature
ont tendance à traiter une échelle imposante, voire monumentale.
Comme leur ancêtre médiéval, ils sont autant de palais et forteresses
dans des territoires vierges. A l’opposé, d’autres architectes adoptent
une échelle domestique. Tous les architectes jouent de cette double
identité du monastère, une maison de Dieu et une maison de l’hom-
me, mais l’une des deux se révèle toujours davantage que l’autre.
103
Le Corbusier
Portique d’entrée du
couvent
Sainte-Marie de la
Tourette
Eveux
ODOS architects
Porte d’entrée de
Knocktopher Friary
Kilkenny
104
frère dépose son ancien statut. Le Corbusier atténue par ce biais le
contraste brutal entre les deux atmosphères. L’entrée est composée
premièrement d’un modeste portique et d’une petite place aména-
gée avec des bancs. Puis, des volumes organiques sous le corps du
bâtiment principal accueille les fonctions ouvertes au public : l’ad-
ministration et les parloirs. Enfin, une porte mène à la commu-
nauté. Par ce biais, Le Corbusier met en place un système plus ac-
cueillant, plus humain que le font Louis I. Kahn ou John Pawson.
8 Georges Duby cité in Albert Levy, « La distribution de l’espace monastique », Architecture et comportement, vol.
5, n°4, 1989, p. 344
105
0 5 10 0 5 10
Plan du rez-de-chaussée
106
Le parc distance le
couvent de la ville
107
Une assimilation au
contexte
L’entrée du couvent
108
Le volume du couvent
reprend le gabarit des
bâtiments voisins
barit des maisons et petits immeubles alentour. Par son volume com-
pact et le caractère de ses façades, il s’assimile au contexte. Il revêt
une peau neutre qui englobe indifféremment toutes les fonctions et Construit
renvoie l’image d’un édifice de logements que l’on trouve en ville. assimilation
Seule la courbe de la chapelle transparaît sur la façade d’entrée afin
d’indiquer modestement le caractère du bâtiment. Le seuil d’entrée
est caractérisé par une faille discrète entre le volume arrondi de la
chapelle et les murs orthogonaux du reste du bâtiment. Comme les
monastères-maisons analysés précédemment, l’entrée revêt un esprit
domestique par une porte qui pourrait aussi appartenir à un logement
collectif. Alors que Pierre Pinsard renforce la visibilité du couvent
dans la ville, Simonet & Chappuis l’assimile subtilement au contexte.
109
Ponnie
« Monastery above the city »
Berlin
2005
EMERGENCE D’UNE NOUVELLE ARCHITECTURE
MONASTIQUE
9 John Pawson, « The simple expression of complex thought », El croquis n°127 (novembre 2005), p. 7
111
Le monsatère-tour
Dans l’optique de cet énoncé, celui d’un couvent urbain bâti dans
un tissu dense, une formée découlant uniquement des modes de vie
ne peut résister à l’environnement construit. Dans ce corpus, le cou-
vent de Simonet & Chappuis est le seul témoin de cette tendance
car peu de monastères sont réellement confrontés à l’urbanité. Les
exemples les plus proches des villes ne tissent qu’un contact timide
et estompé avec leur environnement urbain. Situé dans un quar-
tier résidentiel, le couvent de Fribourg instaure, à une échelle plus
petite, les principes d’un couvent réellement urbain : la superposi-
tion des fonctions, l’intériorité du cloître, la verticalité des circula-
tion et surtout l’expression neutre de l’enveloppe prédéfinie. Dans
la ville, le monastère n’est plus un objet indépendant créé ex-ni-
hilo, il est façonné par son contexte et s’y assimile. A partir de là,
les modes de vie s’adaptent et le modèle médiéval n’est plus appli-
cable tel quel, mais une réinterprétation radicale doit être pensée.
112
Le « Downtown
Athletic Club », extrait
du livre « New York
Delire »
Bien qu’il reflète une urbanité extrême, le gratte-ciel est un modèle in-
téressant d’organisation interne pour le développement d’un couvent
urbain à plus petite échelle. Les notions d’anonymat du programme,
de neutralité de l’enveloppe, de la superposition de fonctions oppo-
sées et la verticalité des échanges représentent des défis communs. Le
monastère-tour redéfinit la collectivité et les relations entre les acteurs
10 Rem Koolhaas, New-York Délire, Editions parenthèses, Marseille, 2002, pp. 152-159
113
Couvent Saint-Jacques
à Paris
115
pendant, il marque une brèche dans l’îlot par son articulation en trois
volumes carrés qui, inclinés de quelques degrés par rapport à la rue,
crééent des rendants et détachent le bâtiment du tissu. Ces cassures
dans l’alignement abritent les accès. De plus, la différence de hauteur
du petit pavillon d’entrée entre les deux autres volumes augmente
cet effet de coupure dans l’îlot. Par cette implantation différente,
l’architecte tente de garder un objet qui se distingue du contexte.
116
117
Deviens
John Pawson
Maquettes
UN COUVENT DOMINICAIN À GENÈVE
1 Mère Charles Hélie, « L’art de construire des monastères aujourd’hui », www.aimintl.org, consulté le 31.12.12
121
QUI SONT LES DOMINICAINS?
122
Saint Dominique
Fresque de Fra Angelico
Couvent San Marco
123
convers, plutôt manuels, n’existe plus. Outre le Prieur, qui est le res-
ponsable de la communauté, tous les frères ont voix au chapitre, c’est-
à-dire qu’ils prennent part aux décisions importantes concernant la
communauté. Tous sont égaux et mettent leurs revenus en commun.
Le pape, ne désirant pas la création d’un nouvel ordre avec de nouvel-
les règles, les encouragera de plus à adopter une règle déjà existante.
Saint Dominique choisit la Règle de saint Augustin qui lui donne
une certaine souplesse et une plus grande liberté de mouvement. En-
voyé premièrement en France où l’hérésie est la plus forte, il parcourt
ensuite le monde à pied et propage ainsi les préceptes de l’Ordre.
124
Genève Ascona
Zürich
Weesen
Lucerne
Schwyz
Estavayer Fribourg
le-lac
L’Ordre dominicain en
Suisse, 2012
Genève
Lugano
Frères
Soeurs
Frères & soeurs
Ordre Dominicain en Suisse en 2012
125
L’église Saint-Paul
126
Le couvent actuel
127
6h00 - 6h50 Lever 13h00 - 13h30 Dîner
Cellule Office des lectures Couvent Café
Douche
12h25 - 13h00 Office du milieu du jour 22h00 - 6h00 Office des Complies
Chapelle Cellule Coucher
128
Temps quotidien passé
dans les différents lieux
Temps quotidien
consacré aux différentes
activités
129
Carte de Genève
Différents lieux
d’activités des frères
Ville
Centre ville
Lieux
d’activités
Site actuel
131
INDISPENSABLE
Indispensable
Dispensable
Cellules Eglise orientée à l’Est
Salles d’eau individuelles
Organisation traditionnelle du
programme
DISPENSABLE
VERS DE NOUVEAUX HORIZONS : EXODE VERS LA VILLE
Des divers entretiens avec les Dominicains, il ressort que les jeunes
frères ont un désir de retour aux sources, un réflexe identitaire qui
aurait des répercussions tant au niveau de leur mode de vie que de
l’architecture qui les abrite. Ils semblent vouloir des couvents concor-
dant davantage avec leur vie, des couvents plus traditionnels. Une
tradition qui se traduit par un espace extérieur de contemplation bien
défini, le cloître, et une disposition classique des fonctions. Ce be-
soin de retour aux sources se traduit-il obligatoirement par un retour
au modèle médiéval? N’ayant pas vécu le difficile retour en Suisse
des dominicains, peut-être que les plus jeunes ne se retrouvent pas
dans le « patchwork architectural » actuel. Y aurait-il un besoin d’un
retour à une identité forte et affirmative qui contrebalancerait la dis-
crétion obligée des débuts? Le sentiment d’un frère du couvent de la
Tourette a parfaitement exprimé ce besoin lors de son aménagement
dans le nouveau couvent : « Nous nous sommes habitués, hélas, à
vivre dans des maisons douillettes, sagement laides, et que l’adjonc-
tion de fausses ogives transformait immédiatement en couvent! »2
133
Couvent dominicain de
Louvain-La-Neuve
134
dominicain de Lille, semble en avoir eu pleinement conscience : «
Pinsard élabore un vocabulaire architectural qui lui est propre et dé-
veloppe une esthétique particulière où la pureté des volumes, la « ba-
nalité » des matériaux utilisés, cautionnent le projet sans pour autant
faire coïncider simplicité avec facilité ou pauvreté. Cette soumission
aux exigences de l’utilité et de l’économie de moyens, que l’architecte
impose à ses édifices religieux, n’est certes pas antinomique avec le
caractère sacré de l’église, mais au contraire permet d’accéder, selon
Pinsard, au sommet de l’Art. »3 Le couvent dominicain n’est pas un
monument, mais une maison dans sa définition la plus ordinaire.
L’ordinaire n’est pas à prendre de manière péjorative. Mies van der
Rohe, lorsqu’il déclare less is more, reflète parfaitement ce à quoi tend
l’architecture dominicaine : une richesse acquise par la simplicité.
3 Magalie Génuite, « Pierre Pinsard, architecte de l’ascèse », Colonnes, n°13 (avril 1999), pp. 8-27
4 Simon Bradley, « La galère des étudiants en quête de logement », www.swissinfo.ch, 10 septembre 2010, consulté
le 31.12.12
135
Carte de Genève
Transports publics
Lignes CFF
Lignes TPG
Site
136
A LA RECHERCHE D’UN SITE
5 Le Corbusier, « J’étais venu ici... », L’architecture d’aujourd’hui, n°96 (juin-juillet 1961), pp. 2-21
137
Carte de Genève
Localisation des
paroisses et
logements étudiants
Paroisses
Logements
étudiants
Site
138
Le site de la rue
Abraham-Gevray
6 Service social Ville de Genève, Pour la qualité de vie dans le quartier des Pâquis, Genève, 2007, p. 11
139
07 03
02
10
03
06
04
05
02
08
02
03
01
09
La première constatation porte sur le fossé entre le luxe des bords du lac
et la vie populaire du centre du quartier. La frontière entre la richesse
périphérique du quartier et la multiculturalité intérieure est claire-
ment définie par la Rue Philippe-Plantamour. Les palaces, banques et
restaurants chics forment une bordure autour du quartier situé près du
lac. Au-delà de cette tranche construite, une vie cosmopolite et multi-
culturelle prend place. On y découvre un quartier des Pâquis étonnant.
Depuis les bords du lac, plus on pénètre dans le quartier, plus les hôtels
141
Seuils du bord du lac
Seuils de l’intérieur du quartier des Pâquis
Contrastes du quartier
des Pâquis
7 Roland Hippenmeyer cité in Service social Ville de Genève, Pour la qualité de vie dans le quartier des Pâquis,
Genève, 2007, p. 7
8 Idem
144
des Pâquis par un projet de couvent et logements étudiants. Quel
visage ce nouveau couvent donnera-t-il à voir au quartier? Quelle
place prendra-t-il? Quelle relation à la ville? Comment procurer le si-
lence et la paix aux Dominicains tout en les ancrant dans le quartier?
145
John Pawson
Monastère Notre-Dame de Nový Dvůr
A SUIVRE...
147
BIBLIOGRAPHIE
LIVRES
LEBRAS Gabriel, Les ordres religieux actifs - la vie et l’art - tome II,
Flammarion, Paris, 1979.
148
Merrill Michael, Louis Kahn on the thoughtful making of spaces
- The dominican motherhouse and a modern culture of space, Lars
Müller publishers, Baden, 2010.
REVUES
ATTALI Jacques, « La renaissance de l’utopie », Le magazine litté-
raire, n°387 (mai 2000).
149
TRAVAUX UNIVERSITAIRES
BEFVE Natalie, Habiter l’espace intermédiaire, Ecole nationale supé-
rieure d’architecture de Marne-la-Vallée, Paris, 2011.
SITES INTERNETS
BRADLEY Simon, « La galère des étudiants en quête de logement »,
www.swissinfo.ch, consulté le 31.12.12.
150
151
GLOSSAIRE
10
9
8
C F
d f E G H I J
B
7
e D 7
3 c 15
K 18
4 14 R 17 16 L
19
11
5 1 6 g
M
13
b Q
12
A
P O N J
a
0 5 10
153
SACRISTIE | du latin sacristia, sacrista « sacristain »
Annexe d’une église, où sont déposés les vases sacrés, les vête-
ments sacerdotaux, les registres de baptême et de mariage.
154
155