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MODERNE
Sommaire – n° 112
PAGES
réalisations SAINTE-LUCE – Chambre des métiers 01
Architecte : Jean-Pierre Lott

Le parti pris
05
éditorial
de la rupture Qu’il s’agisse de logements collectifs ou
PAGES individuels, d’équipements publics, ou encore
PARIS – École maternelle de bâtiments industriels ou tertiaires,
06 les bétons sont la matière des projets des
Architecte : Gilles Margot-Duclot 09 architectes contemporains dans toute la
diversité de leurs écritures et de leurs styles.
La modernité Et s’ils constituent déjà notre cadre de vie
à l’école de la tradition quotidien, les bétons inspirent aussi des
>>> En couverture :
le hall de la chambre des PAGES architectes dont les projets avant-gardistes
métiers de Sainte-Luce.
ANNECY – Hôtel des douanes 10 verront le jour dans les prochaines années.
Le nombre des étudiants inscrits au
Architectes : B. Dollé et Ch. Labbé 14 concours d’architecture Cimbéton suffit
à témoigner de leur intérêt pour les bétons.
Des équerres Associés pour certains d’entre eux avec des
de béton choisies pour emblème élèves ingénieurs, ils travaillent actuellement
à la conception d’une “maison des cultures
PAGES nouvelles”, où imagination et créativité se
solutions béton Industrie agroalimentaire 15 placent au service des loisirs et de la culture.
Dans la lignée de leurs aînés, ces architectes
Béton, matériau 22 et bâtisseurs de demain nous livreront ainsi,
à leur tour, leur idée de ce que peut être
agroalimentaire la rencontre des bétons et de l’architecture.
JEAN CARLOS ANGULO,
président de Cimbéton
PAGES
réalisations LA ROCHELLE – Logements 23
Architecte : Christian Menu 26 MODERNE
L’exception DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Anne Bernard-Gély
DIRECTEUR DE LA RÉDACTION : Roland Dallemagne
confirme la règle CONSEILLERSTECHNIQUES :
Bernard David ; Serge Horvath ; Jean Schumacher
PAGES
LYON – Entrepôts 27
Architecte : Tectoniques 29
L’innovation
au service de l’économie
7, place de la Défense • 92974 Paris-la-Défense Cedex
Té l . : 0 1 5 5 2 3 0 1 0 0 • F a x : 0 1 5 5 2 3 0 1 1 0
PAGES • E-mail : centrinfo@cimbeton.net •
• internet : www.infociments.fr •
portrait HERMAN HERTZBERGER 30 La revue Construction moderne est consultable
sur www.infociments.fr
Vers un environnement 34
CONCEPTION, RÉDACTION ET RÉALISATION :
plus sociable ALTEDIA EDITING
5,rue de Milan – 75319 Paris Cedex 09
RÉDACTEUR EN CHEF : Norbert Laurent
RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE : Maryse Mondain
SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Philippe François
MAQUETTISTE : Sylvie Conchon
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Pour les abonnements, fax : 01 55 23 01 10,
bloc-notes
• Actualités 35 E-mail : centrinfo@cimbeton.net
Pour tout renseignement concernant la rédaction,
tél.: 01 44 91 51 00
• Livres
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réalisation SAINTE-LUCE - Chambre des métiers

Le parti pris
de la rupture
●●● Le contexte : un paysage périurbain déstructuré où urbanisme et architecture sont très peu

présents, où les surfaces commerciales, les entrepôts et les stations-service se succèdent sans

souci d’alignement, de rythme ou de cohérence. La solution : rompre. Mais pas question de rompre

sans comprendre, sans analyser le tissu existant. Voici donc comment est né le nouveau siège social

de la chambre des métiers de Loire-Atlantique tel que l’a imaginé Jean-Pierre Lott. Et la ville

s’enrichit d’une enclave architecturale qui déploie d’étonnants volumes en béton teinté de blanc…

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réalisation SAINTE-LUCE - Chambre des métiers

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>>> 1 Une portion de sphère abrite le hall d’accueil, avec une


entrée juste suggérée par la présence d’une porte. 2 Des fentes

L a forme comme un signal. dans un large cocon, toujours différent, vitrées créent une limite “creuse” entre la coque du hall et les autres
Le procédé architectural mais avec une même volonté de maîtri-
volumes. 3 Une géométrie très forte de lames horizontales
n’est pas nouveau. Seuls le ser la lumière et de créer des sensations
contexte et le propos tenu font spatiales. Le siège social de la chambre pour briser les rayons du soleil. 4 Vers l’arrière de la parcelle,
la différence, pour valider un des métiers de Loire-Atlantique illustre le bâtiment du centre de formation fait le lien avec l’existant.
geste qui pourrait facilement devenir encore une fois ce principe de concep-
une démonstration emphatique. Les tion, tout en poussant assez loin la dis-
lignes dessinées par Jean-Pierre Lott crétion du volume construit. nouvelle composition urbaine. Ce qui Cette logique d’inversion est appliquée,
appartiennent systématiquement à un revenait à trouver la bonne place dans mais en apposant un filet. Il était hors de
vocabulaire formel qu’il développe et un capharnaüm visuel et à montrer la question de rompre sans comprendre et
suit sans prêter attention aux tendances ● Le choix de la rupture voie d’un début de “rangement”, tout sans analyser le tissu existant. De ce
“imposées”, proposant des volumes qui en respectant les règles d’urbanisme. constat est née une volumétrie générale
cachent un intérieur semé de surprises. Le nouvel établissement créé se devait Une zone non ædificandi, le long de la constituée de volumes qui s’imbriquent.
Sous leur peau se dévoilent des parcours pourtant de signaler la présence d’une route nationale, ainsi que le recul obli- Très fermés dans leur apparence, ils sont
qui conduisent et enveloppent le corps institution et tenter de démarrer une gatoire de 6 mètres par rapport aux issus d’une géométrie simple, discrète,
limites séparatives et aux autres bâti- mais forte. Parois inclinées et courbes
ments du site, ne laissaient que peu de rompent avec la monotonie ambiante.
marge de manœuvre. Face à l’impossi- Leur position par rapport à la route
bilité de poursuivre une ligne déjà en nationale est le plus reculée possible,
place, qu’elle soit structurante ou archi- afin qu’elle soit autant en décalage que
tecturale, le parti adopté fut de rompre. le trait adopté. Ainsi le siège social de la
Pour être vu et reconnu, il ne fallait abso- chambre des métiers donne-t-il à voir
lument pas ressembler aux bâtiments une série de vues imprenables jusque-là,
voisins qui expriment banalement une déroutantes pour la plupart des pas-
fonction. Il était au contraire important sants. Elles le rendent repérable, mais
de se détacher du contexte et d’appor- pas forcément reconnaissable comme
ter de la “matière”, en somme de pro- une institution. Le contexte y est pour
duire une image pleine et calme qui se beaucoup, car il ne laissait aucune
détache du paysage et raconte une nou- chance à la création d’une entrée prin-
velle histoire, sans agressivité, simple- cipale qui fût évidente… En effet, le
ment par opposition à ce qui existe. volume implanté a beau être étonnant, il

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TECHNIQUE

semble confiné derrière une clôture en sa place près de la route nationale, dans
grillage, inaccessible côté route natio- la zone la plus haute du terrain. Concrè-
Radiographie d’une naissance
nale. Sa participation à la recomposition tement, toutes les voitures arrivent du “Nous avons l’habitude de travailler avec Jean-Pierre Lott, et cela
d’un paysage est effective, mais sans même côté, par l’arrière du bâtiment, ce
dès le stade de l’APD, explique M. Manuel, ingénieur pour le bureau
avoir les moyens de signaler son identité. qui lui enlève une grande part de magie
d’études structures Etco. Il est en effet important de déterminer suf-
et de valeur de représentation pour le
public extérieur. L’idéal aurait été d’offrir fisamment tôt le profil exact de certaines des formes ‘inhabituelles’
● De l’importance des accès un accès direct depuis la route nationale, qu’il dessine. Ainsi, pour le bâtiment de Sainte-Luce, il nous sem-
à la manière d’une voie menant directe- blait judicieux que la coque abritant le hall d’entrée corresponde à
Car pour accéder au siège social, il faut ment à la façade avant, ce qui fut impos- une courbe mathématique ‘simple’, en l’occurrence une portion de
emprunter une petite voie secondaire. À sible pour des raisons de sécurité. En sphère. Les avantages en sont évidents : le calcul et l’implantation
peine signalée, elle amène le visiteur sur conséquence, la découverte de la volu-
des différents éléments sont facilités, y compris les coffrages, qui
l’arrière du bâtiment, côté parking, en métrie générale s’effectue par vues
peuvent être réutilisés dans certains cas – par exemple ceux des
contrebas d’un terrain présentant une rapprochées, en la contournant, sans
différence de 3 m entre son point le plus appréhension possible d’une logique nervures soutenant la coque de 16 cm d’épaisseur, toutes iden-
haut et le niveau bas. Cette déclivité a d’ensemble pourtant existante. tiques et rayonnantes par rapport au centre de la sphère.
effectivement servi à répondre à l’une Même chose pour les prédalles composant cette fameuse coque,
des contraintes du programme : créer cintrées sur un coffrage qui devait respecter scrupuleusement les
deux accès, l’un ouvert au public et ● Abrités sous la voûte doubles courbures, malgré une flèche inférieure ou égale à 3 cm. Si le
l’autre réservé aux employés, correspon-
calage en trois dimensions des différents volumes est absolument
dant à deux parkings différents. En fond Ainsi le visiteur se retrouve-t-il face à une
de parcelle, en partie basse, se situe celui coque blanche, signal extérieur de l’en- nécessaire au moment des études, en effet, la précision demeure un
des employés, alors que le stationne- trée, une portion de sphère fermée, mise facteur primordial lors de la réalisation des éléments en béton,
ment des véhicules des visiteurs trouve à part la percée réservée à la porte prin- qu’ils soient préfabriqués ou coulés en place. Le suivi, la vérification
et les conseils de mise
en œuvre constituent
une part importante de
notre mission, surtout
en termes d’enjeu et de
qualité du résultat.”

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réalisation SAINTE-LUCE - Chambre des métiers

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térieur de la parcelle. Pour les locaux hension de ce qui se passe autour. Dis-
orientés est ou ouest, des lames pare- crètement, il interdit l’isolement, à la
soleil pérennes protègent les occupants manière d’une vie de village.
des rayons trop perturbants. Ce souci de Si l’extérieur du siège social dissimule
confort est soutenu et renforcé par la parfaitement son organisation inté-
qualité des espaces de circulation. Cour- rieure, le quart de dôme néglige tout
sives intérieures et passerelles priment, autant de nous informer sur la nature
excluant presque entièrement le couloir de l’ossature qui le compose… Com-
classique. Pour se rendre d’un bureau à ment repose cette coque ? De quelle
un autre, le personnel se retrouve systé- façon ces rubans s’enroulent-ils autour
matiquement dans un volume étonnant d’un large mât ? Mystère. Poursuivant sa
qui ne peut laisser indifférent. Il s’agit quête du trait libéré, J.-P. Lott s’est à
cipale. Il peut alors s’imaginer pénétrer des vues, une invitation à la déambula- d’une respiration, d’un réel effet de nouveau affranchi de toute contrainte
dans un univers sombre et a priori tion et, semble-t-il, à la communica- pause pour le corps qui peut se dilater structurelle pour dessiner les volumes de
étroit… La surprise est là dès les pre- tion. Depuis son arrivée dans ces nou- et retrouver une liberté de mouvement cette chambre des métiers – non pas par
miers pas, lorsqu’il pénètre dans le hall veaux locaux, le personnel exprime son inespérée dans un espace de travail insouciance, mais par confiance en un
installé sous cette coque. Une profonde contentement bien plus que son éton- dépassant rarement 25 mètres cubes. Et savoir-faire, celui des ingénieurs avec
sensation d’espace, de lumière envelop- nement face à un territoire si différent puis ce déroulement de rubans, cet lesquels il collabore depuis de nom-
pante, de parois en spirale, inspire un du bâtiment occupé précédemment. enchevêtrement de lignes et de garde- breuses années. Une démarche qui fait fi
léger sentiment de vertige qui ne dure corps incite au croisement, à la compré- de la superposition des descentes de
pas et se transforme très vite en apaise-
ment. Paisible et feutrée, telle est donc ● Intimité lumineuse
l’atmosphère qui se dégage de ce
volume commun autour duquel se gref- Outre cette coque marquante et fédéra-
fent les différentes zones de bureaux, les trice, les deux autres volumes abritant
salles de réunion, etc. les zones de travail sont totalement fer-
De cette configuration spatiale résulte més côté route nationale. Ils tournent le
une circulation très fluide des per- dos à ce boulevard bruyant, les espaces
sonnes, un repérage aisé des différents de circulation étant éclairés par des
niveaux accueillant chacun une unité prises de lumière zénithale. Les bureaux
clairement définie, une multiplication disposent de fenêtres donnant vers l’in-

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>>> 5 Sous la voûte, le hall d’accueil éclairé par de longues


fentes de lumière zénithale. 6 Un mât évasé soutient l’une des
salles de réunion, installée au sommet de ce phare. 7 Passerelle peintes en noir à l’intérieur du bâtiment. comme matière première et unitaire,
À cela, une raison majeure : la volonté c’était préserver l’identité des premières
et coursives animent de rubans enlacés le volume central, pour une
de préserver la pureté des lignes et de esquisses. Ce qui tendrait à prouver
circulation libre et fluide des personnes. 8 Un espace de travail pousser au plus loin l’abstraction et la qu’ici, la matière, plus que la forme, est
constitué de lignes très graphiques, apaisantes par leur rondeur. simplicité du geste. Seul un voile imma- taillée sur mesure. ❚
culé venant recouvrir l’ensemble des TEXTE : BÉATRICE HOUZELLE
surfaces pouvait le permettre. Le béton PHOTOS : JEAN-MICHEL LANDECY
charges comme passage obligé lors de la vrage, elle a pourtant mené à bien sa cache le grain de sa peau, mais offre
définition des volumes, de la rationalisa- mission, malgré un temps de mise en ses épaisseurs, ses prouesses méca-
tion à outrance d’une ossature, et qui œuvre bien plus long que ceux auxquels niques (ici un béton 40 MPa qui offre
prône la liberté formelle. Elle est servie elle pouvait être accoutumée. environ 60 % de résistance supplé-
par la souplesse de caractère du béton, mentaire par rapport à un béton
dont les qualités plastiques, complices 25 MPa plus “classique”). En témoi-
d’un affranchissement délibéré face à ● Béton de précision gnent quelques éléments exception-
une logique constructive trop contrai- nels, tels que la coque du hall, ou
gnante, matérialisent fidèlement les Dans le cas de volumes “complexes” encore la salle de réunion installée à la
esquisses de l’architecte. À l’ingénieur de dans leur définition – ici une portion de manière d’un phare au cœur du volume Maître d’ouvrage :
trouver une solution, même si celle-ci sphère –, la précision est l’arme maî- central. Un escalier s’y enroule, une pas- chambre des métiers
demande quelques ajustements en tresse, pour mettre en place les éléments serelle la frôle, un système poteaux- de Loire-Atlantique

termes de rayons de courbure, de figures mais aussi pour confectionner les diffé- poutres semble poser quelques règles et Maître d’œuvre :
géométriques mises en œuvre, d’épais- rents coffrages, ou pour réaliser les régir le squelette général de l’ensemble. Jean-Pierre Lott,architecte
seurs de voiles, de positionnement des pièces en béton composant la coque du Il permet la mise en place d’un cloison- BET structures :
pleins et des vides, etc. Le résultat final hall, un voile de béton de 16 cm d’épais- nement modulable dans le temps, seule Etco
est réellement respectueux des intentions seur réalisé en assemblant par clave- concession au béton. Bureau de contrôle :
exprimées dans les premiers croquis. tage une série de prédalles de format Les lignes dessinées par Jean-Pierre Lott Afitest
À quelques exceptions près, tout ce qui 4,5 x 1,2 m, reproduisant chacune une pourraient difficilement être réalisées Coordinateur :
pouvait être en béton l’est. La structure portion de sphère ; idem pour les ner- avec une autre matière. Certes, elles Quatuor
armée a été coulée en place en grande vures qui les soutiennent. pourraient l’être en métal, mais en per-
Entreprise gros œuvre :
majorité. Quelques éléments ont été Le béton n’est jamais laissé apparent, dant l’effet monolithique, ce qui revien- Vezin
préfabriqués par souhait de l’entreprise. mais recouvert de résine ou de peinture drait justement à modifier profondément
Peu habituée à réaliser ce type d’ou- blanche, excepté quelques sous-faces cette architecture. Choisir le béton

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réalisation PARIS - École maternelle

La modernité
à l’école de la tradition
●●● Inscrite sur un terrain exigu, caractéristique des contraintes de la ville contemporaine,

la nouvelle école maternelle de la rue de la Villette, dans le 19e arrondissement de Paris, revendique

comme référence les écoles de Jules Ferry. Pour atteindre les qualités architecturales des

institutions de la fin du xixe siècle tout en produisant un édifice résolument actuel, le concepteur

a fait confiance aux qualités d’un matériau décidément plus moderne que jamais : le béton.

Un béton poli de couleur claire, présent depuis la structure jusqu’à l’enveloppe du bâtiment.

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C onstruite non loin du parc motivé la réalisation de ce programme Situé à l’angle du nouveau lotissement,
des Buttes-Chaumont, dont la problématique peut se résumer l’équipement établit une continuité
dans le 19e arrondissement de en ces termes : comment construire une avec la rue de la Villette grâce à son
Paris, l’école maternelle de la école de 1 850 m2 SHON accompagnée positionnement à l’alignement et à son
rue de la Villette constitue une d’une cour de récréation de 1 000 m2 sur gabarit qui reprend celui du bâti à R + 3
pièce particulière dans un lotisse- un terrain tout en longueur d’à peine du faubourg. Parfaitement identifiable
ment d’immeubles réalisés sur le site 1 500 m2 ? Face à cette équation diffi- depuis la rue, il se développe le long du
désaffecté des anciens studios de la cile, le concepteur a mis à profit les com- mail semi-piétonnier qui structure le
Société française de production. Com- plexités du plan d’occupation des sols nouveau quartier.
pact, développé sur trois niveaux, le bâti- pour développer un projet en terrasses,
ment tranche par rapport aux édifices de lesquelles sont exploitées pour distribuer
neuf étages qui abritent les huit cents les espaces extérieurs. ● Volumes bigarrés
logements récemment construits sur les Côté rues, l’équipement affiche une
flans de la colline parisienne. façade rigoureuse, en béton poli, à même Côté cour, sur l’arrière, la volumétrie, net-
de caractériser l’institution publique. Le tement plus bouleversée, s’organise par
corps principal, un long parallélépipède une suite de volumes traités par des
● Un foncier limité de deux niveaux, paraît flotter au-dessus murs en béton enduits de couleurs vives
du rez-de-chaussée. Ce dernier est mar- ou par des structures vitrées. Les possibi-
C’est la forme du terrain – une parcelle qué par un socle de pierres meulières de lités offertes par les gabarits de mitoyen-
de 9 m de large –, jugée difficile pour y 37 cm d’épaisseur qui se prolonge au- neté déterminent tout un ensemble de
réaliser de l’habitat en promotion pri- delà de l’édifice par une clôture métal- retraits, de décrochements, d’accidents
vée, doublée de la volonté de la ville de lique dont le motif floral reprend le de toiture exploités pour générer entrées
Paris de voir se réaliser dans ce nouveau thème développé sur les ferronneries de lumière, variété spatiale et réponses
quartier un équipement public, qui ont des immeubles voisins. au programme du bâtiment.

1 2

>>> 1 Pour implanter 1 850 m2 de SHON sur un terrain tout


en longueur d’à peine 1 500 m2, le concepteur a développé un projet
“en escalier”, en distribuant les espaces extérieurs sur les terrasses
accessibles. 2 Le corps principal de l’équipement, un long
parallélépipède de deux niveaux, repose sur un socle de pierres
meulières de 37 cm d’épaisseur.

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réalisation PARIS - École maternelle

3 4

TECHNIQUE

À l’intérieur du bâtiment, le programme


La façade sur rue est distribué de manière pragmatique. Le
rez-de-chaussée est occupé par les ser-
Réalisée en béton poli, la façade sur rue présente une géométrie
vices communs (entrée, direction, res-
rigoureuse. Elle a été conçue pour exprimer l’institution, mais aussi
béton peint tauration, salle de repos…). Deux salles
pour répondre à de nombreuses contraintes environnementales – d’exercice, réservées aux plus petits,
gestion de l’éclairement, confort d’été, pollution urbaine, etc. Le profil accompagnent les 700 m2 de cour de
de la façade et sa section ont été travaillés pour contrôler l’ensoleille- récréation situés à ce niveau. Sept autres
ment à l’intérieur des locaux, eu regard à l’exposition plein sud de la classes occupent les étages ainsi qu’une
façade principale. Impostes en retrait et couronnements en avancée béton salle de jeux, une tisanerie et un second
préfabriqué poli espace extérieur. Les deux cours, orien-
permettent ainsi de protéger du soleil d’été les longues bandes
tées au sud et à l’ouest, sont reliées par
vitrées, tandis qu’en partie haute, une corniche en béton préfabriqué
un emmarchement. Un préau linéaire en
vient renforcer la protection solaire. L’élément, disposé dans la conti- forme d’auvent traite la limite avec
nuité des plafonds du dernier niveau, cadre les regards vers l’exté- l’école primaire voisine.
rieur et limite les vues depuis les immeubles voisins.
béton
Isolée par l’intérieur, la façade est réalisée avec des éléments préfa- préfabriqué poli

briqués en béton clair poli, composé de gravillons de marbre des ● La fonctionnalité


en héritage
Pyrénées alliés à un ciment blanc. Le calepinage régulier du projet a
permis d’utiliser un panneau type pour les allèges filantes inférieures C’est “dans la pérennité du construit, la
bossage pierre
et supérieures, tandis que les angles et le pignon ont été traités par meulière souplesse d’adaptation et la perma-
des panneaux spécifiques. Retenu pour sa facilité de mise en œuvre nence de l’institution propres aux écoles
et l’assurance d’obtenir un parement irréprochable, le béton archi- Jules Ferry” que le concepteur a recher-
tectonique n’a pas déçu l’architecte, qui note qu’un très léger défaut ché les références conceptuelles de son
édifice. Distribués sur plusieurs niveaux,
d’alignement de la façade a pu être repris directement sur chantier
les espaces d’enseignement affichent
par repolissage des panneaux d’angle. Une souplesse d’exécution à
une fonctionnalité et une adaptabilité
laquelle s’ajoutent les qualités de pérennité du matériau et de résis- maximales. Conçues sur une trame de
tance aux pollutions urbaines qui garantissent au maître d’ouvrage ❙❙❙ Coupe de détail 5,6 x 9 m, les classes se prêtent facile-
la constance des qualités d’aspect du bâtiment. sur l’une des façades ment à une partition en différents lieux

8 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


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>>> 3 et 4 Sur la rue, l’institution publique est signifiée par


une façade rigoureuse, en béton clair poli, soigneusement calepinée.
d’activité et à l’évolution des effectifs ou poutres inversées du dernier niveau qui 5 Lumières et couleurs vives, multiplication des ouvertures,
des pratiques scolaires. Elles sont sépa- forment l’acrotère du bâtiment. Un dis-
mobilier et aménagement spécifiques animent un univers pensé pour
rées par des salles de repos qui garantis- positif périlleux, qui a imposé un lourd
sent le confort acoustique entre les dif- ferraillage des poutres aux endroits où la les enfants. 6 La façade en béton poli est travaillée pour contrôler
férents espaces. L’exposition au sud toiture est ajourée. l’ensoleillement et le confort thermique à l’intérieur des locaux.
assure un éclairement naturel maximal,
tandis que les circulations, reportées au
nord, sont elles aussi très lumineuses. Le ● Un lieu à l’adresse aménagements (porte-manteaux, occu-
choix du système constructif révèle le des plus jeunes lus dans les portes des classes, range-
même souci d’efficacité. ments, hauteur des rampes, sanitaires…)
Attentif à l’inscription urbaine autant Pensé en fonction des attentes des usa- sont pensés pour permettre aux enfants
qu’à la rationalité de son édifice, Gilles gers, l’équipement s’ouvre sur la rue par de se les approprier facilement.
Margot-Duclot a travaillé à partir d’une un porche aménagé en creux dans la Cette volonté de mettre l’espace à la dis-
structure coulée en place à laquelle sont façade. Équipé de bancs, ce lieu convivial position des petits est développée dans
suspendus des éléments de façade pré- permet aux parents d’attendre à l’abri la tout le bâtiment. Dans le hall, elle prend
fabriqués. La structure poteaux-poutres sortie de leurs enfants. Au-delà des une dimension manifeste au travers
en béton armé est dessinée suivant la portes, un hall généreux distribue les d’un aménagement conçu dans le cadre Maître d’ouvrage :
Ville de Paris,
fameuse “trame Éducation nationale” de fonctions principales de l’école. du 1 % artistique, et qui fait référence à
direction du Patrimoine
7,20 m,usitée à l’époque de la préfabrica- À n’en pas douter, on se trouve dans un la mémoire télévisuelle du site en s’ins- et de l’Architecture,
tion lourde. Fondés sur pieux à travers les lieu créé à l’adresse des jeunes enfants. pirant des personnages de la célèbre direction des Affaires scolaires
remblais consolidés par injections, les À partir d’une enveloppe en béton rigou- émission “Bonne Nuit les petits”. Les Maître d’œuvre :
poteaux cylindriques sont exécutés dans reuse, dictée par la lumière, des éléments constellations de la Grande et de la Gilles Margot-Duclot,
des coffrages circulaires en carton. Ils de mobilier et d’organisation fonction- Petite Ourse s’affichent ainsi sur le mur architecte

reprennent un réseau de poutres paral- nelle animent un univers pensé pour les principal, contre lequel un long banc en Bureau d’étude structures :
lèles et orthogonales à la rue qui suppor- plus jeunes. La multiplication des vues et béton poli est adossé. Sur le banc, deux GECIBA
tent les planchers porteurs coulés en leur positionnement à diverses hauteurs sculptures qui représentent les person- Entreprise gros œuvre :
place. Les composants de façade, des privilégient sans cesse l’usage pour les nages de l’émission pour tenir compa- GTM
panneaux préfabriqués de béton clair petites tailles. Lumières et couleurs vives gnie aux enfants qui, le matin, atten- Préfabricant :
poli, sont accrochés au nez des dalles, ponctuent les aménagements et assurent dent l’entrée dans les classes… ❚ CIR
tandis que la casquette qui chapeaute le des repères spatiaux. Le mobilier – tables TEXTE : HERVÉ CIVIDINO
haut du bâtiment est accrochée aux et chaises – est spécifique, tandis que les PHOTOS : HERVÉ ABBADIE

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réalisation ANNECY – Hôtel des douanes

Des équerres
de béton choisies pour emblème
●●● Le nouvel hôtel des douanes d’Annecy assure la gestion administrative des brigades

douanières de la région du Léman. Il se dresse à quelques centaines de mètres des rives du lac,

dans un quartier résidentiel caractérisé par la présence de généreux jardins qui entourent

les immeubles de logements. Implanté en cœur d’îlot, l’édifice moderne et contemporain dessiné par

Béatrice Dollé et Christian Labbé s’inscrit de façon harmonieuse dans son environnement. Lignes,

plans et équerres en béton blanc composent le volume et fabriquent sa cohérence, sa continuité.

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L e tout nouvel hôtel des d’environ 750 agents. Il abrite aussi la
douanes d’Annecy est recette régionale, qui reçoit un public
installé à quelques centaines de constitué exclusivement de profession-
mètres des rives du lac. À l’ori- nels. Le caractère spécifique du lieu et
gine de son urbanisation, le quar- les contraintes d’urbanisme qui s’y ratta-
tier du “bord du lac” était constitué de chent ont eu un rôle majeur sur la pos-
grandes villas bâties au centre des par- ture du projet dans son site et sur sa
celles et entourées de végétation. Il est conception architecturale.
encore aujourd’hui très résidentiel, et son “Nous avons choisi d’installer l’hôtel des
ambiance est fortement marquée par la douanes au cœur de sa parcelle, comme
présence de généreux jardins, qui com- une de ces grandes villas qui ont forgé
posent de véritables “îlots végétaux”. l’identité du lieu, souligne l’architecte
Ainsi, sans conserver son homogénéité Christian Labbé. Cependant, notre pro-
initiale, le caractère urbain spécifique du jet n’est pas un immeuble de logements,
lieu a été préservé au fil du temps. mais un édifice public essentiellement
constitué de plateaux de bureaux. Le
bâtiment que nous avons conçu s’inscrit
● Visiblement public dans le volume enveloppe déterminé par
les règles d’urbanisme, tout en tissant
L’hôtel des douanes d’Annecy assure la des cohérences avec les éléments du
Avenue du Parmelan
gestion administrative des brigades programme. Dans ce quartier, les règles
douanières de la région du Léman, qui d’urbanisme sont plutôt pensées pour
comprend les départements de la Haute- du logement et autorisent par exemple
N Savoie et de l’Ain, soit une population la réalisation d’importantes toitures sur

1 2

>>> 1 Vers l’avenue du Parmelan, la façade nord exprime


l’institution. L’équerre de béton blanc se perçoit comme un signe fort,
emblématique du projet. 2 Le pignon ouest donne à lire les deux
équerres en béton qui fabriquent la logique formelle de l’édifice.

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 11


réalisation ANNECY – Hôtel des douanes

3 4

>>> 3 et 5 La façade sud est constituée d’un jeu


de lignes horizontales et verticales en béton blanc qui contribuent
à installer l’édifice dans sa monumentalité et sa permanence. posent le volume, fabriquent sa cohé- en utilisant une passerelle qui le conduit
rence, sa continuité, son identité for- sur un parvis légèrement surélevé. Là,
4 Lignes, plans et équerres composent le volume et lui donnent
melle et institutionnelle. l’équerre de béton prend de l’épaisseur.
son identité. 6 Au rez-de-chaussée de la façade sud, la salle Le terrain en forme de L est en partie La partie horizontale de l’équerre et
de réunion s’ouvre largement vers l’extérieur. enclavé dans l’îlot. Il ne dispose sur deux poteaux de structure fabriquent un
l’avenue du Parmelan que d’un linéaire porche sous lequel on pénètre. Le plan
assez réduit et non constructible. De horizontal en béton et un mur de pierre
plus, l’implantation obligatoire de l’édi- encadrent la progression du visiteur et le
fice en cœur de parcelle installe une dis- guident vers le sas d’entrée qui donne
trois niveaux, ce qui n’a pas de sens pour muns. Les différents services (direction, tance de 40 m entre l’hôtel des douanes accès au hall d’accueil.
un bâtiment tel que l’hôtel des douanes. centre d’enquêtes et de renseignements et l’espace public urbain. Pour affirmer la Le hall d’accueil se développe sur toute
Tout le travail consiste à établir un douaniers, réglementation, tabacs, for- présence de l’institution dans la ville, les la hauteur du bâtiment, offrant une véri-
concept formel objectif, synthétisant mation, gestion du personnel, etc.) et architectes ont donc développé une mise table dilatation verticale de l’espace. Il
l’analyse et la lecture des contraintes leurs bureaux se répartissent aux 1er et en scène de la séquence d’entrée depuis constitue le lieu central, le point de
urbaines, du programme, etc., pour 2e étages. Les deux logements de fonc- l’avenue jusqu’au hall d’accueil. repère, de représentation de l’édifice, et
produire un édifice public exprimant sa tion occupent le 3e et dernier étage. Le donne une respiration aux espaces inté-
propre identité tout en s’intégrant rez-de-chaussée, d’une emprise plus rieurs de ce bâtiment de bureaux aux
dans son environnement résidentiel. large au sol, est surmonté par deux ● Une invite de béton blanc dimensions somme toute modestes.
Nous partons toujours de l’idée que niveaux de bureaux identiques, tandis Éclairé naturellement, et de façon géné-
l’architecture naît de la réponse aux que les logements ressortant d’une Une équerre de béton, qui semble flotter reuse, à travers la façade sud, le vide du
contraintes, et non d’un geste.” autre logique typologique et formelle au-dessus du sol, affirme la présence de hall est animé par le jeu des courbes des
couronnent l’ensemble. l’institution. Évoquant le geste de la volées d’escaliers décalées. Leur plas-
En l’inscrivant dans les règles de pros- main qui invite, elle est comme un appel tique est exprimée par le béton blanc qui
● Espaces publics et bureaux pect et dans son gabarit urbain, les qui engage à s’approcher du bâtiment. les moule et donne aux formes une
architectes, par un rigoureux travail de Constituée d’éléments en béton blanc matière qui vient habiter le vide central.
Le rez-de-chaussée de l’hôtel des recherche graphique, redivisent le sablé, elle accroche la lumière du matin Ainsi celui-ci n’est pas uniforme et
douanes abrite essentiellement les volume issu de l’organisation fonction- et du soir, qui lui donne plus ou moins homogène sur toute sa hauteur, mais
espaces collectifs – accueil, grande salle nelle, créent des séquences, des avan- d’épaisseur. Une fois la grille sur l’ave- scandé, ponctué. Au jeu des formes
de réunion divisible, salle à manger et cées, des retraits, des soulèvements, un nue franchie, l’utilisateur est accueilli par s’ajoute le mouvement des agents qui
de détente du personnel, salle de for- jeu d’opacités et de transparences. une sculpture d’Alquin représentant un traversent les paliers ou empruntent les
mation, locaux syndicaux, services com- Lignes, plans et équerres de béton com- oiseau, puis il traverse le jardin paysager escaliers, plus agréables que l’ascenseur.

12 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


5 6

TECHNIQUE

Préfabrication et béton coulé en place


Constituée de poteaux, voiles, poutres et planchers en béton coulé en
place, la structure, composée sur une trame générale de 6,10 m, 2 2
exprime l’identité formelle de l’édifice. Lorsqu’ils sont laissés appa-
rents, les poteaux ronds sont en béton blanc sablé sur le chantier. Du 1
côté de la façade nord, au 1er et 2e étages, deux poutres retroussées
portent les planchers et reprennent en drapeau les panneaux de béton
1
du pignon ouest. Cela permet de supprimer toute retombée de poutre
au niveau du plafond du rez-de-chaussée, qui correspond à la sous-
face du plan horizontal de la grande équerre, et au 2e étage la retombée 1
4

est minimale. Pour la réalisation des éléments de façade en béton


3 3
apparent et des escaliers du hall d’accueil, différentes solutions
4
constructives ont été utilisées. Des panneaux et des éléments pré-
fabriqués ont été mis en œuvre sur les façades nord et sud pour les
pignons. Ils sont en béton blanc sablé en usine et sur le chantier. Cer-
tains panneaux présentent par endroits trois faces visibles : la face
principale, visible intégralement, la face latérale et la face intérieure,
0 1 2 5m
visibles partiellement. N’étant pas en contact avec la peau coffrante du 1 - éléments préfabriqués en béton blanc
moule, les faces latérales et arrière présentaient un parement moins 2 - béton coulé en place
3 - prédalle en béton blanc
parfait au sortir du banc de préfabrication. Un sablage plus ou moins 4 - béton blanc coulé en place
fort a été effectué sur ces faces pour obtenir une homogénéité de per-
ception entre toutes les parties visibles. Les plans horizontaux en
❙❙❙ Coupe transversale sur le hall d’accueil
béton apparent ont été obtenus à partir de prédalles préfabriquées en La partie supérieure de chaque poutre retroussée fabrique une allège épaisse qui s’inscrit
parfaitement dans le calepinage des panneaux d’habillage de la façade nord. Dans les deux
béton blanc sablé installées en fond ce coffrage, lors de la mise en
cas, les poutres sont habillées pour constituer des banquettes utilisées dans tous les
œuvre. Les volées et garde-corps des escaliers du hall d’accueil ont été bureaux comme un meuble de desserte. Au deuxième étage, les appareils de chauffage
entièrement coulés en place dans des coffrages spécifiques en bois. y sont même intégrés.

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 13


réalisation ANNECY – Hôtel des douanes

7 8

>>> 7 Égayés par le jeu des couleurs qui s’opposent, les


paliers offrent des vues variées sur l’intérieur et l’extérieur.
À chaque étage, un palier ouvert en bal- Vers l’avenue du Parmelan la façade 8 Le mouvement des volées courbes vient animer, scander
con sur le vide central donne accès aux nord exprime avec sobriété et retenue
et ponctuer l’espace toute hauteur du hall d’accueil.
circulations desservant les bureaux. Le le caractère institutionnel de l’édifice.
hall et les paliers offrent une palette infi- Orientée au nord, elle présente un plan
nie de vues directes et indirectes, en assez lisse dessiné selon un calepinage
plongée ou en contre-plongée, sur l’inté- alternant parois vitrées, panneaux
rieur du bâtiment comme sur l’extérieur. opaques rouges et lignes noires des volumes et l’échelle générale sont dessi-
Lieu fédérateur et de représentation, le menuiseries métalliques. La composition nés en rapport avec les immeubles rési-
hall participe par la qualité de son recherche une expression esthétique dentiels avoisinants. Dans le cadre miné-
ambiance et de son espace à la mise en volontairement abstraite. Ainsi, cette ral, les éléments de fenêtres et d’allèges
valeur de l’institution. partie de façade-rideau ne renvoie pas sont disposés au nu extérieur ou en
une image connotée de bâtiment de retrait, selon les contraintes fonction-
bureaux. Enchâssée entre la ligne d’at- nelles et pratiques des bureaux. Les
● Langage moderne tique et les pignons en béton blanc, elle lignes horizontales et verticales en béton
Maître d’ouvrage :
se lit comme un tableau abstrait et blanc constituent de véritables brise- ministère de l’Économie,des
“Dans ce bâtiment, comme dans tous devient un élément autonome représen- soleil qui accrochent tout un jeu d’ombre Finances et de l’Industrie
nos projets, nous utilisons les codes et le tatif de l’hôtel des douanes en tant et de lumière. Le pignon ouest donne à
Maître d’œuvre :
vocabulaire de l’architecture du Mouve- qu’institution. L’équerre de béton blanc lire les deux équerres en béton qui, en se Béatrice Dollé & Christian Labbé
ment moderne. Nous en utilisons les semble la supporter et donne son unité à développant dans les trois dimensions et architectes,Bruno Meur
architecte assistant
outils et nous nous inscrivons dans sa l’ensemble. Elle se détache de ce plan en se rejoignant, fabriquent la logique
parenté intellectuelle, tout en évitant lisse et se perçoit comme un signe fort, formelle du projet. Bureau d’étude
toute attitude dogmatique formelle. emblématique du projet. Le nouvel hôtel des douanes d’Annecy et économiste :
GEC Ingénierie
Nous avons été très attentifs à ne pas La façade sud est constituée d’une résille est un bâtiment contemporain qui
reproduire des archétypes, des formes large de lignes horizontales et verticales affirme la présence d’une institution Entreprise gros œuvre
et préfabricant :
néomodernes codifiées, appliquées de en béton blanc sablé qui fixent le cadre publique. Dessiné sans concession au
Floriot
façon doctrinaire. Notre travail s’inscrit de cette partie de l’édifice et installent pittoresque ou au néorégionalisme, il
dans la posture intellectuelle de la sa permanence. Ces lignes donnent de est inscrit avec justesse dans son site, de Surface :
1 966 m2
modernité et non dans son formalisme. l’épaisseur à la façade et marquent une telle sorte qu’il est totalement intégré
Tout ce qui est dessiné a du sens par rap- division exprimant l’identité du bureau par le voisinage. ❚ Coût :
port au site, au programme, etc. Il n’y a et de la vie qui s’y déroule. De ce côté, le TEXTE : NORBERT LAURENT 2 469 674 € HT
pas de geste gratuit.” vocabulaire architectural, le rythme des PHOTOS : HERVÉ ABBADIE

14 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


solutions
B É T O N

Béton, matériau
agroalimentaire ➜ Une solution
évidente
Les raisons d’une union naturelle. p. 16
●●● L’ INDUSTRIE AGROALIMENTAIRE CONNAÎT, DEPUIS UNE VINGTAINE

D ’ ANNÉES , DES BOULEVERSEMENTS PROFONDS . U NE CONCURRENCE

EXACERBÉE , DES HABITUDES DE CONSOMMATION QUI ÉVOLUENT

ET DES NORMES DE PLUS EN PLUS DRASTIQUES IMPLIQUENT UNE

INCONTOURNABLE SOPHISTICATION TECHNIQUE , TANT AU NIVEAU DES


➜ Fromagerie Guilloteau
Quand le béton se rit des contraintes. p. 18
BÂTIMENTS QUE DES ÉQUIPEMENTS INTÉRIEURS . AUJOURD ’ HUI , TOUT

PROJET LIÉ À CETTE ACTIVITÉ IMPLIQUE DE CE FAIT DES INVESTISSEMENTS

TRÈS ÉLEVÉS , JUSTIFIÉS PAR DES EXIGENCES PORTANT SUR L’ HYGIÈNE ,

LA RÉSISTANCE À L’ AGRESSIVITÉ DE CERTAINS PRODUITS , LE BESOIN D ’ UNE

HYGROMÉTRIE ET D ’ UNE TEMPÉRATURE STABLES , MAIS AUSSI SUR ➜ Château


Gruaud Larose
L’ INTÉGRATION DANS LES SITES CONCERNÉS ET LA VALEUR PATRIMONIALE . Du béton pour l’atmosphère. p. 21

AUTANT D’ARGUMENTS QUI PLAIDENT EN FAVEUR DU BÉTON .

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 15


solutions béton

➜ Pertinence
technique, esthétique et économique
L ’industrie agroalimentaire n’est pas riaux résistant durablement à des produits de nettoyage toutes sortes de phénomènes de condensation, de cor-
une industrie comme les autres. On parfois agressifs, ainsi qu’à des rinçages réalisés souvent rosion, voire de pourrissement pour les matériaux les
pourrait résumer ses spécificités à quatre à haute température et à haute pression. plus sensibles au “trio infernal” chaleur-humidité-
contraintes majeures : l’hygiène, la résistance Cette nécessaire résistance des matériaux est égale- confinement. Là encore, le béton, par sa totale impu-
à l’agressivité de certains produits, le besoin ment liée à l’agressivité de certains produits de base, trescibilité et sa résistance élevée dans ces ambiances
d’une hygrométrie et d’une température très présents dans l’agroalimentaire, que sont le sel, le difficiles, s’impose en termes de durabilité. Enfin, les
stables, et enfin l’intégration dans les sites sang et le sérum, ce dernier représentant un des élé- joints, inserts et autres pièces de raccord, qui sont
concernés. On peut y ajouter la prise en compte de ments les plus corrosifs et les plus destructeurs pour les autant de points faibles potentiels générateurs de
plus en plus forte de la valeur patrimoniale des ouvrages structures en général, avec des atouts importants pour dégradations, n’existent pas ici, et comme le précise
réalisés, qui là encore favorise l’émergence de systèmes le béton, dont les constituants restent insensibles à Yvan Patet, le président d’EM2C, le contractant général
constructifs “béton”, aidée en cela par une prise en toute forme de corrosion. qui a réalisé l’unité de Pélussin (voir pages suivantes),
compte maintenant réelle du concept de coût global, une “on ne peut pas tricher avec le béton !”
notion “forte” et lourde de conséquences, mais encore L’intégration dans un site d’une unité agroalimentaire
trop souvent galvaudée et sacrifiée sur l’autel de la mode. ● Taux d’humidité est contraignante à plusieurs niveaux. D’une part, les
et température élevés contraintes et les sensibilités environnementales sont
de plus en plus une source de bloquage vis-à-vis des
● L’hygiène au cœur du débat Le besoin d’une hygrométrie et d’une température projets de ce type, particulièrement lorsqu’ils doivent
stables impose des bâtiments bénéficiant d’une cer- être implantés dans des zones agricoles, champêtres et
Les contraintes d’hygiène sont en effet drastiques, et la taine inertie thermique, et le béton apporte naturelle-
mise en place progressive des normes européennes ne ment ces qualités, durablement, et sans nécessiter un
>>> 1 Les chais souterrains de
fait qu’intensifier cet état de fait, au point que ce secteur recours à des procédés d’isolation complémentaires.
d’activité est maintenant devenu pratiquement inac- Cela dit, température et degré d’hygrométrie stables Château Margaux et leurs voûtes surbaissées.
cessible à de petites organisations relevant de l’arti- peuvent aussi se traduire par des taux permanents 2 Détail des poteaux cruciformes
sanat. Ces contraintes imposent généralement des d’humidité parfois très élevés, de 85 à 90 %, pour des
supportant les voûtes surbaissées des chais
volumes importants nécessaires à la séparation phy- températures de 25 °C et plus – des conditions qui ne
sique des différentes activités de fabrication, des maté- ménagent pas les structures et favorisent d’autre part de Château Yquem.

1 2

16 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


solutions béton

plus ou moins protégées au niveau des paysages et des longtemps ses capacités de tenue dans le temps, au
pollutions diverses. D’autre part, les normes HQE impo- plan technique, mais aussi sous l’angle esthétique. Il 5
sent parfois aux concepteurs des choix qui ne vont pas faut ajouter à cela l’effet d’image : l’usine, qui est sou-
toujours dans le sens d’un optimum de rentabilité pour vent le siège social de l’entreprise, doit véhiculer une
le maître d’ouvrage. image positive, de stabilité et de solidité de la société,
Enfin, qui dit activité agroalimentaire sous-entend des et ce, durablement. Le béton, par la conservation de son
rejets importants et polluants, avec à la clé des unités aspect d’origine pendant de très longues années,
d’épuration sophistiquées et coûteuses. C’est dans ce apporte une contribution majeure à cette demande.
contexte difficile que le béton apporte toutes ses quali-
tés, d’abord par son aspect varié qui permet, par des
teintes et des peaux extérieures très différentes, de se ● La prise en compte du coût global 6
fondre avec élégance dans son décor, et ensuite par un favorable au béton
coût très concurrentiel qui permet de contenir l’enve-
loppe budgétaire prévisionnelle, malgré toutes les diffi- On en parlait beaucoup, il devient enfin une réalité.
cultés et les surcoûts précédemment décrits. Sous une dénomination un peu technocratique, le coût
global cache en fait une évidence qu’intégraient tous
les anciens, qui, comme M. Jourdain, pratiquaient le
● L’usine gagne une valeur coût global sans le savoir. De fait, on avait un peu oublié
patrimoniale ces dernières années qu’un bâtiment, quel qu’il soit,
c’est un coût d’investissement, mais également un coût
L’époque des usines “jetables” semble se situer derrière d’entretien et de maintenance non négligeable. 7
nous. L’air du temps, les notions de coût global, les Lorsque l’on intègre ces données sur plusieurs années,
concepts de haute qualité environnementale – des on s’aperçoit que le choix d’une structure béton s’avère >>> 3 4 Le chai de vinification
valeurs qui deviennent maintenant des réalités tan- particulièrement pertinent par ses qualités de durabilité
du domaine de Thuerry, à Villecroze, avec ses
gibles – font que les maîtres d’ouvrage souhaitent tou- et d’absence d’entretien. Mais une structure béton, ce
jours des retours sur investissement rapides, mais qu’ils sont également des primes réduites au niveau des assu- cuves inox et bois disposées en cercle.
exigent de plus que cet investissement se valorise dans rances vis-à-vis de l’incendie, ou encore des prêts boni- 5 6 7 Fromagerie Guilloteau :
le temps, ou encore qu’il puisse être revendu sans perte fiés de la part des sociétés de capital-risque, qui savent
au bout d’un certain nombre d’années. Il s’agit là d’une qu’en cas de faillite de l’emprunteur, un bâtiment en une architecture discrète, qui impose néanmoins
tendance très favorable au béton, qui a prouvé depuis béton conservera une valeur de revente élevée. ❚ sa modernité dans un décor naturel.

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 17


solutions béton

➜ Fromagerie Guilloteau
Quand le béton se rit des contraintes

A PÉLUSSIN, DANS LA LOIRE, LA vaste et plus rationnelle, devenait incontournable. Dans >>> 1 Un ensemble très horizontal, qui
FROMAGERIE GUILLOTEAU A INAUGURÉ ce site protégé, les contraintes d’intégration ne sont pas
négligeables, et le béton s’est imposé naturellement, véhicule un aspect puissant et fonctionnel.
FIN 2001 UNE NOUVELLE UNITÉ
d’autant qu’il présentait techniquement le meilleur
PRINCIPALEMENT CONSACRÉE À LA ratio coût/performances/adéquation aux besoins. homogène. La sobriété du graphisme s’inscrit naturelle-
FABRICATION. UN ENSEMBLE À LA FOIS ment dans le décor, grâce entre autres au choix d’une
MODERNE, DYNAMIQUE ET RATIONNEL, peau extérieure en gravillon désactivé. Celle-ci alterne
DURABLE ET ESTHÉTIQUE.
● Image forte mais discrète deux nuances, un blanc rosé des Pyrénées et un greige
du Vercors, des teintes validées par la direction du Parc
L’architecture doit ici se faire discrète, sans pour autant naturel régional du Pilat, dont la commune de Pélussin
L a transition est brutale. À peine a-t-on tomber dans le pastiche ou la mièvrerie. Le siège social, fait partie.Toujours dans le cadre d’une démarche envi-
quitté une vallée du Rhône plutôt en dehors de son aspect fonctionnel, se devait de véhi- ronnementale poussée, une station de traitement des
“besogneuse” et escaladé les quelques culer une image moderne et forte, et l’architecte Claude eaux usées, installée en contrebas de l’usine, plantée de
centaines de mètres très pentus du célèbre Violet a pris le pari d’un ensemble très horizontal et végétaux et par suite peu visible, permet de traiter l’équi-
vignoble de la côte Rôtie, que l’on se retrouve
sans transition dans un paysage de plateaux agricoles,
où se niche le bourg de Pélussin, fief historique de l’en- isolation
treprise. La fromagerie Guilloteau transforme en fro- tôle plane

mages divers (voir encadré) plus de 30 millions de


étanchéité
mètres cubes de lait par an. En tant que siège social,
l'unité de Pélussin accueille tous les services administra-
tifs tels que la direction générale, la direction adminis- renfort d’étanchéité
trative et financière, la direction commerciale et marke- ❙❙❙ Coupe de détail sur toiture
ting, ainsi qu’une partie de la recherche et du Les toitures voûtées recouvertes d’une étanchéité
pare vapeur
développement. Les bâtiments existants, tant au niveau multicouche assurent par leur constitution une
des bureaux que de la production, étaient devenus trop homogénéité avec les parois verticales.
petits, et la mise en œuvre d’une nouvelle entité, plus

18 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


solutions béton

HISTORIQUE les panneaux de façade alors que seulement deux tra- couvertine
vées sont en place – un gain de temps important au
Guilloteau : une “success story” niveau de la pose – mais elle autorise également l’accro- isolant
chage ultérieur d’équipements lourds, en évitant ainsi de
à la française
créer une deuxième structure encombrante et coûteuse.
La fromagerie Guilloteau voit le jour en 1983 à Les panneaux de façade en béton double peau, d’une contre bardage

Pélussin. C’est la première fromagerie équipée surface unitaire de 20 m2 (2,50 m x 8 m), apportent
d’un système d’ultrafiltration, et l’entreprise durabilité, esthétique et résistance à l’effraction, mais
connaît son développement grâce à la création également des performances thermiques de premier
plan en termes de déperdition et d’inertie, avec à la clé
d’un produit totalement adapté aux aspirations
une réduction très importante des ponts thermiques.
du consommateur, le Pavé d’Affinois. Aujour-
Les toitures voûtées recouvertes d’une étanchéité mul-
d’hui, son fondateur, Jean-Claude Guilloteau, est ticouche assurent par leur constitution une homogé- étanchéité
à la tête de deux usines et dirige 216 salariés. La néité avec les parois verticales, et permettent de déga-
société produit de nombreux fromages à base ger des volumes importants, pour un ensemble de
pare vapeur
de lait de chèvre, de brebis et de vache, dont 11 000 m2 qui se développe principalement au niveau
environ 50 % de la production est exportée. du rez-de-chaussée, avec néanmoins quelques locaux
techniques et de bureaux au premier étage. Ce niveau
accueille également un show-room et toutes les circula- poutre béton
valent d’une ville de 9 600 habitants. En septembre tions dédiées aux visiteurs, une activité en hausse liée à
2000, après 9 mois d’études et de consultations, le pre- l’intérêt du grand public et des acteurs locaux pour
mier coup de pioche est donné ; la structure est en place cette forme de communication.
3 mois plus tard, l’ensemble des bâtiments hors d’air au ❙❙❙ Coupe de raccordement
printemps 2001, pour un démarrage de la production toiture-mur
en octobre de la même année. ● L’expérience Un système constructif homogène, conçu pour une
Les fondations, classiquement constituées de semelles du maître d’ouvrage a parlé durabilité maximale dans le cadre d’un entretien limité.
et de longrines, reçoivent une structure poteaux-
poutres en béton, un matériau également retenu pour Yves Careil, le directeur technique de la fromagerie, autre site déjà réalisé sur la base mixte d’une structure
la charpente, la peau extérieure et la couverture, dans le possède une longue expérience de ce type de site. béton et de façades en béton cellulaire. Le béton
cadre d’un procédé italien mis en place par la société “Pour nous, précise t-il, le béton s’imposait pratique- représente pour nous un gage de pérennité, d’équi-
Eurobéton et apprécié de longue date. ment d’emblée. En effet, pour ce projet devenu indis- libre hygrothermique et de sécurité accrue, tant au
Cette structure présente dès le départ deux atouts pensable à notre développement, nous souhaitions niveau de la résistance au feu que de l’effraction.
importants : elle permet d’une part de mettre en œuvre retrouver, en plus performant encore, les qualités d’un N’oublions pas la facilité d’utilisation du matériau, les
avantages d’une isolation intégrée et pérenne, et
enfin l’aspect des façades, bien adaptées à un site
protégé, du fait de l’utilisation de matériaux présen-
tant un aspect très naturel.” En effet, ces façades, par
leur parement extérieur minéral, se fondent avec dis-
crétion dans le paysage, et à l’intérieur, les toitures
voûtées, agréables à l’œil, dégagent des volumes
confortables, jusqu’à 8,30 m sous voûte.
Parallèlement, le choix d’une structure béton apporte
nombre d’avantages dans le cadre de l’activité de
l’usine : les portées des poutres et des éléments de
couverture – jusqu’à 26 m – suppriment un nombre

>>> Les portées des poutres et des éléments


de couverture (jusqu’à 26 mètres) suppriment
un nombre important de poteaux et offrent des
surfaces libres de 470 m2.

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 19


solutions béton

>>> Les panneaux de façade en béton double


peau apportent durabilité, esthétique et
résistance à l’effraction, qualités complétées par
des performances thermiques de premier ordre.

feu grâce aux matériaux retenus, à l’implantation du


bâtiment énergie, aux murs coupe-feu 2 heures… mais
aussi à l’intérieur, par des choix qui vont dans le sens
d’une durabilité optimisée ou d’une hygiène maximale :
carrelage collé à la résine, peinture anti-microbienne,
qualité des matériaux utilisés… avec de plus un accent
particulier sur la sécurité alimentaire, par le respect de la
“marche en avant” des produits, le traitement et la sur-
pression d’air au niveau des ateliers, ou encore l’auto-
matisation des séquences de lavage.

● Principe d’économie

Au plan financier, le principe constructif retenu, eu


égard aux contraintes du projet, s’avère le plus écono-
mique à l’étape de l’investissement, mais également à
important de poteaux, et offrent ainsi des surfaces riaux très résistants qui ne nécessitent pas de protec- l’usage, avec un coût d’entretien sur 25 ans très limité.
totalement libres d’obstacles sur 470 m2. En effet, les tion supplémentaire, et qui ne soient pas, de surcroît, Le plus souvent, le retour sur investissement avec ce
poteaux, s’ils sont préjudiciables à la souplesse des dégradables dans le temps. Les besoins en isolation, type d’ouvrage est calculé sur 15 ans, mais, dans ce
aménagements, sont également des sources de chocs, stabilité en température, hygrométrie, charges à cas, on peut réellement utiliser le terme “d’investisse-
de dégradations et présentent des recoins difficiles à suspendre, sécurité à l’effraction, vis-à-vis de l’incen- ment pierre”, avec des valeurs de revente qui reste-
maintenir propres, en contradiction avec la recherche die, etc. ne laissaient pas la place à une quelconque ront élevées à moyen et à long terme. Les maîtres
d’une hygiène parfaite. Enfin, la structure utilisée per- hésitation. Enfin, cette structure reste très souple, et d’ouvrage ne s’y trompent pas ; les dirigeants d’EM2C
met un cheminement rationnel des galeries et plan- tout à fait adaptée, si le besoin s’en faisait sentir, à une constatent que de plus en plus de clients s’orientent
chers techniques, un accès aisé au personnel de main- éventuelle extension, par une réutilisation totale ou vers le béton, même pour des applications moins tech-
tenance, ainsi que la circulation de tous les fluides, hors partielle des panneaux existants.” niques. Cette tendance confirme une réelle prise de
des zones de production, et ce, depuis un bâtiment Les dirigeants d’EM2C apprécient également ces conscience : la notion de coût global, qui entre petit à
“énergie” volontairement implanté à l’écart des sec- structures pour leurs qualités vis-à-vis de l’implanta- petit dans les mœurs, amène à des prises de décision
teurs de fabrication et de bureaux. tion des réseaux. Les poteaux béton comportent tou- qui dépassent la simple notion de coût immédiat. Elle
jours deux trous prévus à l’origine pour le levage – des inclut aussi la valeur de revente, les dépenses prévi-
cavités utilisables par la suite pour passer les réseaux sionnelles d’entretien, les coûts d’assurance, avec des
● Une option rapidement rentable d’eau ou d’air. Cette méthode évite ainsi les chicanes primes généralement moins élevées pour ce type de
et les dévoiements, obstacles complexes qui rendent structures, du fait de performances particulièrement
Yvan Patet et Pierre-Yves Labille, respectivement prési- les réseaux plus vulnérables aux chocs et les font élevées vis-à-vis de la sécurité incendie. ❚
dent et directeur technique de la société EM2C, le empiéter, au surplus, sur l’espace intérieur. Il est égale- PHOTOS : GUILLAUME MAUCUIT-LECOMTE ET EM2C DÉVELOPPEMENT
contractant général auteur du projet, expliquent la ment possible de noyer les descentes pluviales dans Lieu : Pélussin (42)
démarche retenue : “Nous étions dans une configura- ces mêmes poteaux ; on résout ainsi avec élégance et Projet : réalisation d’une unité de production
tion de contraintes sévères, et l’option béton s’est discrétion les problèmes de condensation et de pro- Maître d’ouvrage : fromagerie Guilloteau
immédiatement imposée au plan technico-écono- tection face aux chocs divers. Les prestations retenues Contractant général : EM2C
mique. De plus, notre client, qui n’en était pas à son font de cet ouvrage un bâtiment de référence, tant au Architecte : Claude Violet
coup d’essai, connaissait parfaitement les atouts de niveau de la partie bâtie que des équipements. La struc- Entreprise principale : Eurobéton-France
cette technique… mais aussi les limites des autres pro- ture béton et les façades en béton désactivé apportent Montant de l’opération : 13,5 millions d’euros
cédés. La présence de sérum, les méthodes de net- des prestations d’usage et de durabilité élevées, le Emprise au sol : 8 700 m2
toyage utilisées, imposaient dès le départ des maté- concept architectural optimise la protection contre le Durée des travaux : 10 mois

20 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


solutions béton

➜ Château Gruaud Larose


Du béton pour l’atmosphère
CHANGEMENT DE DÉCOR. DANS aménagements extérieurs ne sont pas en reste, avec la blématique. La faible surface disponible, mais égale-
LE HAUT-MÉDOC , SUR CETTE BANDE DE réalisation d’une station de traitement et de l’ensemble ment la nécessité de retrouver “une marche en avant”
des réseaux de rejet des effluents – une première dans le depuis la réception des vendanges jusqu’au stockage
TERRE QUI SÉPARE L’OCÉAN ATLANTIQUE
Médoc – dans un souci affiché par le maître d’ouvrage des bouteilles, oriente alors les concepteurs vers un
DE LA GIRONDE, ON NE COMPTE PAS d’une protection maximale de l’environnement. Parallè- positionnement très central, dans et sous la cour du
MOINS DE 60 CHÂTEAUX “CRUS lement, les aménagements de surface redéfinissent un château. Le projet intégrera ainsi deux chais superposés.
CLASSÉS” ET ENVIRON 350 CHÂTEAUX nouveau découpage des aires en plusieurs zones indé- D’abord le chai à barriques 1re année, situé au rez-de-
pendantes : le parc du château avec ses jardins à la fran- chaussée, qui s’étend sur une superficie de 1 500 m2
“CRUS BOURGEOIS”.
çaise ; la cour d’honneur avec le logement de direction, pour une capacité totale de 1 200 barriques. Son traite-
les cuviers et les chais ; la cour d’exploitation pour les ment architectural reste classique, avec un plafond en

S ur le territoire de la petite commune de


Saint-Julien-Beychevelle, le domaine
expéditions et le matériel agricole. L’ensemble de ces
aménagements apporte maintenant un outil fonctionnel
chêne, et pour les visiteurs une vue panoramique sur les
barriques. Ensuite le chai à barriques 2e année, situé
de Gruaud Larose étend ses 82 hectares sur de qualité, dans un décor où, comme l’explique l’archi- sous le premier chai, qui se distingue par une concep-
un plateau de graves denses et profondes. tecte, “la discrétion devait rester de mise”. tion beaucoup plus originale, avec des voûtes néogo-
Racheté en 1994 par le groupe Alcatel, il nécessitait Pour Bernard Mazières, la difficulté principale venait de thiques entrecroisées, préfabriquées sur place, et qui en
d’importants travaux, un projet confié au cabinet d’ar- la nécessité de développer les surfaces liées à l’activité
chitecture Mazières de Bordeaux. viticole, sans pour autant dénaturer l’aspect du site, ni >>> 1 Le château Gruaud Larose
évidemment empiéter sur les vignes. Si la plupart des et ses jardins à la française. 2 Recréer
bâtiments ont pu être réaménagés ou agrandis afin
l’atmosphère unique des caves anciennes,
● Respecter l’équilibre esthétique d’accueillir des fonctions nouvelles ou complémen-
et l’histoire du site taires, l’implantation des chais à barriques restait pro- en oubliant leurs contraintes.

Dans un premier temps, Bernard Mazières recueille les


souhaits du maître d’ouvrage. C’est en fait un projet glo-
bal qui est mis en œuvre, et qui concerne les façades du
château, la construction et le regroupement de cuviers,
un hall de réception des vendanges, des bâtiments d’ex-
ploitation, mais aussi la réalisation de deux chais à bar-
riques, l’un en rez-de-chaussée, l’autre enterré, sans
oublier la réfection de nombreux locaux de stockage, de
locaux administratifs et de logements de fonction. Les

1 2

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 21


solutions béton

HISTORIQUE

Trois siècles de grands crus


C’est vers le début du XVIIIe siècle que les frères
Gruaud rassemblent et unifient leurs territoires
pour en faire un des plus grands vignobles de
l’époque. Mais ce n’est qu’en 1934 que le
domaine prend la dimension qui est la sienne
aujourd’hui. Le vignoble, composé de 64 % de
cabernet sauvignon, 24 % de merlot, 9 % de
cabernet franc et 3 % de petit verdot, produit
600 000 bouteilles d’un vin viril par la puis-
sance de ses tanins et féminin par les charmes
subtils de son bouquet qui, selon Georges Pauli,
le directeur du domaine, “est le fruit de l’élabo-
3 4 ration d’un vin d’une très grande typicité”.

>>> 3 Les poteaux coulés en place


reçoivent les voûtes entrecroisées préfabriquées Château Yquem. Célestin Apouey, le directeur de l’en- sont drastiques, et le bâtiment doit être exempt de
sur le site. 4 Le béton traité au sol comme treprise, explique la réussite de ce chantier par des germes et de bactéries. Le béton apporte sous cet angle
recettes simples mais précises. Le béton doit être correc- tous les avantages d’un matériau moderne : il n’ac-
un matériau de finition n’accroche pas, se nettoie
tement dosé, régulier dans sa teneur en eau, tout en croche pas, il se nettoie facilement et ne retient pas les
facilement, ne retient pas les poussières. évitant toutes formes de bullage et de ségrégation. La poussières ; il est traité au sol comme un matériau de
main-d’œuvre doit être rodée à ces interventions, et finition. Certes, l’imaginaire est très fort, le résultat
font, selon les propres termes de l’architecte, “une l’entreprise dispose pour ce faire de deux responsables esthétique est réel, mais les gestionnaires gardent les
cathédrale du vin où il fait bon se recueillir dans la de chantier aguerris aux ouvrages en “beau béton”, pieds sur terre, avec un ouvrage très rapidement renta-
pénombre et l’atmosphère mystique du caveau.” des qualités de finition auxquelles sont d’ailleurs habi- bilisé, et qui se trouve être conforme aux prévisions en
tuées les entreprises qui réalisent des ouvrages d’art. termes de température, d’hygrométrie et d’usage. L’en-
Enfin, les coffrages, constitués d’une charpente bois et semble des travaux aura duré deux ans pour un effectif
● Le béton comme moyen d’expression d’une peau en contreplaqué, ont été spécialement étu- moyen de 30 personnes : une réussite dans la discré-
diés et réalisés pour cette opération. tion, tant pour l’architecte que pour l’entreprise, ou
Le terrain, constitué bien sûr de graves mais également encore pour Thales, le bureau d’études associé à l’opé-
de couches d’argile, s’est avéré relativement homogène. ration. Bernard Mazières explique ce résultat par le res-
Les fondations, puis les poteaux coulés en place, reçoi- ● L’atmosphère des caves anciennes… pect d’une ligne de conduite qui consiste à regarder les
vent des voûtes entrecroisées, préfabriquées sur le site sans leurs contraintes lieux, à écouter les utilisateurs, à savoir rester humble, et
même, et mises en œuvre à l’aide de la grue installée sur à tenter de s’exprimer en priorité par l’intérieur, et en
le site, chaque élément pesant de 8 à 10 tonnes. Le choix Un chai à barriques doit être un lieu de calme et de rêve, douceur pour les ouvrages visibles de l’extérieur. ❚
de la fabrication sur le site a permis de limiter les rebuts un espace ou le temps s’arrête. Le but est atteint, grâce TEXTE : GÉRARD GUÉRIT
et les erreurs, en permettant d’une part aux personnes à la texture du béton, à la qualité et à la précision des PHOTOS : DIDIER BONREPAUX
qui assurent la mise en place des éléments de contrôler joints, mais aussi à une mise en lumière très étudiée,
Lieu : Saint-Julien-Beychevelle (33)
la fabrication, et d’autre part de s’adapter au fur et à avec des lampes incandescentes branchées sur varia-
Projet : réalisation d’un chai à barriques
mesure de l’avancement du chantier aux points particu- teurs, ou encore une intensité très basse. L’éclairage Maître d’ouvrage : Domaine de Gruaud Larose
liers. Le sol, enfin, est constitué d’un remplissage de naissant en partie basse des poteaux assure la conti- Architecte : Cabinet Mazières
graves, d’un feutre drainant et d’une dalle béton de nuité du mouvement des voûtes ; c’est une véritable Bureau d’études : Thales
16 cm d’épaisseur, sans oublier une étanchéité consti- scénographie qui, bien que discrète, est mise en œuvre Entreprise principale : GTBA
tuée d’une chape bitumineuse et d’un non-tissé. dans ce chai, avec l’aide d’un béton qui capte particuliè- Montant de l’opération : 3 millions d’euros
L’entreprise GTBA qui a réalisé le chantier, possède une rement bien la lumière et permet de retrouver sans diffi- Surface au sol : 1 000 m2
expérience importante de ce type d’ouvrage, avec culté l’ambiance des vieilles caves voûtées. Mais le rêve Durée des travaux : 2 ans (durée liée au maintien de
quelques références prestigieuses, comme les chais de n’est pas suffisant. Aujourd’hui, les normes d’hygiène l’activité durant les travaux)

22 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


réalisation LA ROCHELLE - Logements

L’exception
confirme la règle
●●● À quelques minutes du centre-ville de La Rochelle, face à l’océan, un immeuble abrite vingt-

quatre logements HLM tous différents, agrémentés de commerces au rez-de-chaussée. Deux plots

à R + 4 enserrent un jardin privatif tout en reprenant la modénature du bâtiment voisin. Entièrement

construit en béton coulé en place, aussi pur que la lumière qui l’éclaire, l’ensemble installe

la fragmentation de ses lignes horizontales et verticales, multipliant ainsi volumes et perspectives

pour déterminer une échelle commune à l’immeuble et au quartier : l’échelle humaine.

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 23


réalisation LA ROCHELLE - Logements

1 2

>>> 1 Le travail de l’architecte sur la fragmentation


et le pliage des parois de béton apparaît nettement sur la façade sud.

L ‘immeuble de logements mails plantés, des équipements publics 2 L’architecte a opéré un “tricotage” urbain, en tenant compte
HLM de Christian Menu à et des logements sortent de terre tout
du gabarit des immeubles environnants. 3 Dans le patio,
La Rochelle est à considérer autour. Les façades de l’immeuble, qui
comme une exception dans abrite vingt-quatre logements (neuf T2, des murets, des plots, des jardinières orientent les circulations
le domaine des “habitations dix T3 et cinq T4) ainsi que des com- et les points de vue. 4 Le jeu sur les pleins et les vides établit
à loyer modéré”. Les habitants, merces au rez-de-chaussée, déterminent
d’ailleurs, ne s’y trompent pas. Ils sont les limites de la parcelle, entourée de un dialogue savant entre l’ombre et la lumière.
logés à la même enseigne que leurs voies sur ses quatre côtés.
proches voisins, pour nettement moins Le bâtiment reprend la modénature, le
cher. Les uns et les autres sont situés à gabarit et l’alignement sur la rue, face à
quelques minutes du centre-ville et à la mer, de l’immeuble voisin, créant ainsi, du parking. On y accède par un escalier urbaine, faite d’une sédimentation des
proximité de la mer – autant dire une en venant du centre-ville, une perspec- pris dans la paroi ouest, ce qui lui constructions successives d’une ville. De
situation exceptionnelle dans la ville de tive cohérente et homogène. À l’arrière, confère une certaine intimité en le cou- ce fait, Christian Menu a procédé à un
La Rochelle – et dans une construction la continuité avec la médiathèque est pant ainsi de la ville grâce à un mur travail axé sur le pliage des parois en
de caractère aux lignes contemporaines. respectée, le volume de l’immeuble neuf aveugle et à un escalier dissimulé, béton du bâtiment, en multipliant à l’ex-
Certes, l’architecte a dû rogner sur cer- ne dépassant pas R + 4. comme une anfractuosité. térieur les éléments en trois dimensions,
taines prestations – le niveau de qualité Le parti pris de l’implantation du bâti- en plan mais aussi en élévation : frag-
des menuiseries, par exemple, sur cer- ment en deux parties répondait égale- mentation des lignes de composition
taines surfaces des appartements, et ● Un jardin privatif entre ment à un désir de l’architecte d’opérer horizontales et verticales, creusement
également réduire certaines ouvertures, deux plots “un tricotage urbain” : ne pas se des façades, traitement des balcons en
car le budget était très serré et les démarquer trop brutalement de l’archi- relief ou en creux, présence de débords
contraintes considérables, mais son bâti- L’ensemble architectural est composé de tecture environnante, et fragmenter les de toiture monumentaux et d’appuis de
ment présente une qualité architecturale deux plots parallèles séparés par un jar- points de vue de proximité, pour conser- fenêtres débordants.
tout à fait convaincante. din privatif surélevé. En réalité, le règle- ver ou même créer une échelle humaine.
Il s’agit donc d’une parcelle urbaine ment d’urbanisme imposait un nombre L’architecte “rejette délibérément les
située dans un quartier dont les terrains important de places de parking pour les principes du Mouvement moderne par ● Façade multiple
– à l’origine des marais remblayés et véhicules des locataires (27 boxes fer- une tendance ‘anti-pureté’ des lignes et
appartenant au domaine maritime – ont més), ce qui a contraint l’architecte à en des espaces” ; sur une matrice ortho- Si l’on observe la façade sud, elle pré-
été récemment rachetés par la ville, et disposer une partie en sous-sol, et le normée, le cube a explosé en une multi- sente trois registres verticaux distincts et
qui sont actuellement en cours d’amé- reste au niveau des commerces. Le jar- tude d’éléments. Il s’agissait aussi de dissymétriques. Dans sa partie gauche, le
nagement. Dans le même temps, des din planté a donc été conçu au-dessus rappeler la complexité de l’évolution mur se replie vers l’intérieur et forme un

24 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


3 4

renfoncement, pour accueillir une struc- de murets qui se retournent, agissant possèdent des balcons, d’autres non, la de pièces. Christian Menu a néanmoins
ture vitrée et des terrasses ; au centre, un comme des paravents ou des écrans qui taille et le nombre des fenêtres peuvent conservé l’esprit initial de son esquisse,
élément maçonné percé de quelques orientent les regards et les corps. Les également varier d’un niveau à l’autre. travaillant principalement sur les circula-
ouvertures forme une sorte de borne points de vue ainsi créés déterminent Les locataires sont ainsi considérés indi- tions dans les appartements. Là encore,
massive en avancée, tandis qu’en partie des correspondances et des liens avec le viduellement, chacun a la possibilité de il ménage des points de vue, donne des
droite, le mur recule pour recevoir une voisinage, le quartier, la ville. s’approprier son aire de vie. Les espaces orientations, dilate ou comprime les
série de grands balcons. ont été conçus en fonction de l’homme, volumes et, du coup, les personnalise.
Les autres façades présentent le même de l’habitant, de l’usager, et non pas L’agencement des logements est aussi le
type de traitement dissymétrique, parfois ● Le logement, expression comme une application de règles archi- résultat de la réflexion globale menée
aléatoire, où le rapport des pleins et des de l’individualité tecturales, stylistiques ou financières. sur l’échelle de l’immeuble. “On ne vit
vides établit un dialogue entre l’ombre Les normes HLM, en matière de super- pas dans une cellule isolée, on est tou-
et la lumière. Les zones d’obscurité À l’intérieur, les appartements sont tous ficie notamment, ont naturellement jours en rapport avec l’environnement,
créées par les effets de niche, de pliure, différents. Ils renvoient à la diversité et à poussé le concepteur à remanier cer- immédiat ou plus lointain. Il est impor-
de repliement, s’opposent à l’éclat du la multiplicité de traitement des volumes taines parties de son projet. Il a dû se tant de savoir comment chaque loge-
béton lisse peint en blanc. Les cieux extérieurs. Certains logements superpo- conformer aux règles strictes qui impo- ment tisse des liens avec son entou-
marins de La Rochelle exacerbent les sés n’ont pas la même surface, certains sent une surface précise pour tel nombre rage”, confie Christian Menu, pour qui
contrastes qui, en “modelant” le bâti-
ment, établissent une proportion, une
échelle. Des pare-soleil verticaux proté-
geant certains balcons, les dalles de toi-
ture légèrement décollées et formant de >>> Les volumes éclatés forment
vastes auvents, des commerces situés en
des pliures, ménagent des niches,
retrait des façades, nichés sous les loge-
ments, les porte-à-faux, les escaliers créent des écrans. Ils produisent
d’accès au patio planté pris dans les des effets d’ombre et de lumière
murs ouest et est, sont autant de détails
pensés comme une accumulation d’in- accentués par la présence d’une
dices répondant au tout. peau de béton d’un blanc éclatant.
Dans le jardin, les circulations vers les
différentes cages d’escalier ou espaces
de jeu et de repos se font par la présence

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 25


réalisation LA ROCHELLE - Logements

5 6

>>> 5 La multiplicité des volumes et des éléments


architecturaux – pare-soleil, auvents de toiture, parois double
le problème du voisinage fait partie inté- Le bâtiment est conçu entièrement en peau, appuis de fenêtres – fabrique autant de détails pensés comme
grante de la conception des habitations. béton coulé in situ, la dissymétrie et la
les parties d’un tout. 6 L’orientation des pièces et les
Un soin particulier a été apporté à multiplicité des éléments architecturaux
l’orientation des pièces de jour et de ne permettant pas la préfabrication. En ouvertures des appartements – tous différents – ont été conçues
nuit, et de leurs ouvertures – en évitant outre, le béton, matériau malléable par en fonction des attentes de l’usager.
les vis-à-vis, par l’ajout d’éléments archi- excellence, a offert à l’architecte une
tectoniques de protection, par la pré- grande liberté, en particulier la possibi-
sence du jardin planté, etc. L’isolation lité d’opérer les pliages et les retourne- La peinture et les revêtements corres-
thermique et phonique (dalles épaisses) ments des parois, des écrans, des piliers, pondent à des coefficients réglemen-
des appartements répond aux normes des dalles des balcons en porte-à-faux, taires de construction en bord de mer.
HLM ; le chauffage au gaz n’a pas des pare-soleil et des murets.
entraîné de surisolation. Le béton est peint en blanc sur presque
toute la surface du bâtiment. Quelques ● Vocabulaire moderne
éléments ont été laissés bruts de décof-
● Le béton, logiquement frage – des appuis de fenêtres débor- Même s’il s’en défend en se rappro-
dants, notamment – comme pour mar- chant d’une conception “organique”,
Aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur, le quer davantage encore leur relief. Au Christian Menu emploie ici un vocabu-
Maître d’ouvrage :
bâtiment présente donc une grande rez-de-chaussée, plusieurs murs situés laire architectural moderne, reconnais-
Office public municipal
diversité de volumes et de traitements derrière une sorte de vitrine présentent sable à la présence des systèmes de La Rochelle
pour les façades et les espaces. Le choix l’image minérale et rugueuse du béton d’écrans parfois percés pour filtrer la
Maître d’œuvre :
du béton comme matériau de structure laissé brut. Le matériau est ici célébré, lumière ou les vues, des toitures-ter- Christian Menu
et de surface n’est pas anodin ; le projet exposé, il dévoile à tout un chacun la rasses planes en parapluie, des poteaux
Entreprise béton :
a véritablement déterminé cette solu- structure de l’édifice, et évoque une ronds et des aplats de béton. Quant au ECBL
tion, mais sans aucun dogmatisme. image de sécurité, de pérennité. travail sur la peau du bâtiment et sur
BET structures :
Idéal, en effet, pour exprimer la pureté L’architecte avoue qu’il aurait aimé gar- l’agencement des volumes (de l’infini-
Setec
des lignes, le béton se prête aussi par- der partout son aspect brut au béton, ment grand à l’infiniment petit), il ne fait
faitement à la construction complexe. mais les exigences du maître d’ouvrage qu’apporter une nouvelle fois la preuve Surface :
3 825 m2 SHOB ;
Ici l’absence de trame régulière a néces- ont été les plus fortes. Et au final, si le des multiples possibilités constructives 2 180 m2 SHON
sité l’adoption d’un système structurel bâtiment est sans doute plus contrasté et esthétiques du béton… ❚
mixte : le système poteaux-poutres est sous le soleil marin, reconnaissons qu’il TEXTE : CLOTILDE FOUSSARD
associé au système des voiles porteurs. ne perd rien de sa qualité architecturale. PHOTOS : PHILIPPE RUAULT

26 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


réalisation LYON - Entrepôts

L’innovation
au service de l’économie
●●● Dans un contexte hétérogène, bric-à-brac urbain de friches industrielles et d’habitat modeste,

le centre de logistique de la ville de Lyon affiche fièrement son identité contemporaine. Sous la forme

d’un simple bâtiment parallélépipédique, il se pare sur toutes ses faces d’un damier de panneaux

préfabriqués associant trois matériaux – l’acier, le verre et le béton. L’agence Tectoniques poursuit

là son travail sur l’industrialisation des composants et introduit le béton dans cette démarche

que les architectes qualifient de “low tech”, où l’innovation va de pair avec une volonté d’économie.

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 27


réalisation LYON - Entrepôts

1 2

L eville
8e arrondissement de la
de Lyon est un quar-
routière, vitrines d’exposition – la liste
n’en finirait pas – sont soumis à un taux
4

tier d’anciennes manufactures de rotation parfois soutenu, justifiant


et d’habitat populaire. Sans efficacité dans l’organisation, clarté dans
1
❙❙❙ Coupe verticale
vraie logique apparente, on y le rangement, aisance dans les circula- 5 sur les trois types
découvre une juxtaposition de friches tions et optimisation de l’espace. 6 de panneaux
et d’ateliers, de grands ensembles, de de façade
petites résidences et de maisons indivi-
duelles. Du fait même de la discontinuité ● Travail de programmation 2
1 – Toit : gravillons,
de ce tissu urbain, les terrains dispo- étanchéité multicouche,
nibles attirent aujourd’hui de nombreux L’intervention de l’agence d’architecture 3 isolation.
investisseurs, et cet arrondissement Tectoniques a donc commencé par un 2 – Console béton renforcé
connaît une profonde mutation. La travail de programmation visant à réor-
3 – Poteau à section
direction de la Logistique de la ville de ganiser cette plate-forme logistique, et à
circulaire en béton
Lyon est à l’image de ce quartier : un la compléter de surfaces de stockage et 7
préfabriqué
agglomérat d’édifices sans cohérence de vestiaires. Une clarification du fonc-
architecturale ou fonctionnelle, faisant tionnement du site fut préconisée, via la 4 – Couvertine
face à une aire de parkings et à une démolition de certains éléments, la réha- en aluminium laqué.
8
étendue vouée à l’empilement d’objets bilitation d’autres parties, la rationalisa- 5 – Tôle en acier pliée
hétéroclites. En outre, différents services tion des stockages extérieurs et des sta-
6 – Panneaux de façade en
(logistique, garage mécanique, espaces tionnements, et enfin la construction
béton préfabriqué avec
verts, taxis) y cohabitaient jusque récem- d’un corps de bâtiment complémentaire. lasure de finition colorée
ment dans des locaux vétustes. Il était illusoire, pour ces architectes, de (vert d’eau).
prétendre pouvoir, par la seule vertu de
7 – Panneaux de façade
ce dernier, mettre en place en élément
vitrés Reglit (section en U).
● Répondre au contexte fédérateur à l’échelle du site. De sur-
croît, une ancienne usine couvre de ses 8 – Panneaux de façade en
Ce bout de territoire est avant tout un sheds une surface importante de la par- acier perforé peint. Bardage
vaste lieu de stockage dont l’inventaire celle. En conséquence, leur réponse a 9 polyester, isolation, tôle
nervurée.
semble difficile à établir. Isoloirs et urnes été de jouer plutôt la confrontation et
électorales, panneaux de signalisation de composer avec l’existant. 9 – Soubassement béton

28 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


3 4

>>> 1 et 2 Une peau riche de trois textures, déroulée pour


envelopper le bric-à-brac logistique. 3 La nuit, les panneaux
Silo parallélépipédique de stockage ver- superposition de ses couches de verre de Réglit – toujours décalés les uns par rapport aux autres – laissent
tical, ce nouveau corps de bâtiment de translucide ; le grillage métallique, qui
filtrer la lumière et perpétuent l’image du damier. 4 Les façades
R + 2 a été construit pour répondre à laisse deviner en arrière-plan la texture
des normes d’usage assez strictes. Les d’un bardage en polycarbonate translu- sont tramées sur un module de 98 cm.
surcharges d’exploitation demandées cide et les trappes de désenfumage
(1,5 à 2 t/m2) allant bien au-delà de ce naturel ; le béton, dont la lasure “céla-
qui est pratiqué pour les bâtiments don” transparente laisse la matière pré-
usuels, la solution béton s’est immédia- sente et clairement identifiable. en œuvre tout en tirant des matériaux
tement imposée. Elle résout en outre la Ainsi le bâtiment change-t-il d’allure choisis le maximum de leur potentiel
question de la sécurité incendie pour ce selon l’orientation du soleil, jouant de technique et plastique. Pour les archi-
local considéré comme “à risque” du fait reflets et d’oppositions entre brillant et tectes de l’agence, l’esthétique n’est
de sa fonction de stockage. mat. La préfabrication de ces panneaux que le résultat d’une démarche rigou-
de béton présentait un double avantage. reuse dans laquelle se croisent ou s’af-
D’une part, elle s’inscrivait dans la frontent les différentes contraintes. Dans
● Mise en œuvre rapide… démarche de ce jeu de panneaux et de cette démarche que les architectes quali-
en centre-ville matériaux, d’autre part, elle répondait fient de “low tech”, l’innovation va de Maître d’ouvrage :
Ville de Lyon,
aux exigences de chantier, le temps pair avec une volonté du moindre coût.
services techniques
La structure est conçue autour d’un sys- gagné dans la mise en œuvre compen- Ce centre de logistique leur a permis de
tème poteaux-poutres, avec planchers sant le surcoût de la préfabrication. Tous démontrer que l’emploi du matériau Maître d’œuvre :
Tectoniques
précontraints et façades non porteuses. les panneaux furent accrochés par simple béton n’implique pas le coulage en
Le chantier n’a duré que 8 mois, durée boulonnage en suivant l’édifice, de place, et que, contrairement à la pratique Entreprise gros œuvre :
Campenon-Bernard
relativement courte en centre-ville. façon périmétrique. Pour des questions courante, grâce à la préfabrication et à la
Cette façade a été pensée comme une de sécurité incendie et de C + D, aucun vitesse d’exécution en phase chantier, il Préfabrication
panneaux béton :
sorte de peau, une texture rapportée élément vitré ne vient se superposer à est possible d’obtenir à la fois une éco-
Floriot
devant l’édifice, selon trois types de un autre élément vitré. Pour limiter le nomie d’échelle sur l’ensemble d’une
panneaux préfabriqués disposés de nombre d’éléments,le bâtiment est tramé opération et la possibilité de travailler le Surface créée :
3 005 m2
façon aléatoire. Sa nature composite et six modules de béton ont été utilisés. matériau béton de façon contempo- (surface réhabilitée : 31 103 m2)
renvoie à l’hétérogénéité du site, et L’agence Tectoniques s’est fait une spé- raine, en l’incluant dans une réflexion sur
cette logique se voit encore renforcée cialité du travail sur l’emploi et l’opti- les composants. ❚ Coût :
par la perception d’une épaisseur pour misation de composants préfabriqués. TEXTE : VINCENT BORIE 1,5 M€
chaque matériau : le Réglit, dans la Objectif : rationaliser et faciliter la mise PHOTOS : CHRISTIAN MICHEL

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 29


portrait HERMAN HERTZBERGER

Vers un environnement
plus sociable
●●● Fidèle à ses principes, qui privilégient une architecture fondée avant tout sur

l’appropriation des espaces par leurs utilisateurs, Herman Hertzberger continue d’œuvrer dans

le contexte des Pays-Bas d’aujourd’hui, en développant ses thèmes fondateurs dans un nouveau

registre architectural. Refusant la tendance actuelle qui met l’accent sur l’édifice comme objet

sculptural vu de l’extérieur et détaché de tout contexte, il poursuit sa quête d’espaces ajustés

à la dimension humaine, de lieux entièrement dévolus à l’individu en tant qu’“être sociable”.

30 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


L ’œuvre de Herman Hertz- français Claude Lévi-Strauss, provien- Herman Hertzberger issus de cette pen-
berger ne peut être dis- nent de sa formation d’architecte, lors- sée, comme l’immeuble de bureaux de
sociée de sa ville d’origine, qu’il était élève de Aldo van Eyck, dont Central Beheer ou les écoles Apollo, en
Amsterdam, où il est né, où il la position au sein de Team X avec Jacob sont les démonstrations évidentes.
vit et où il travaille encore Berend Bakema a déterminé, dans les L’architecte, cependant, insiste sur une
aujourd’hui. Chaque souvenir de son années cinquante, l’orientation de l’ar- précision de vocabulaire : “La notion de
enfance est attaché à un angle de rue, chitecture hollandaise après la Seconde structuralisme comporte un malentendu
un porche, un balcon de brique, un envi- Guerre mondiale. au départ : on l’associe trop souvent
ronnement mesuré et articulé avec soin, avec une architecture d’éléments préfa-
une harmonie de rues et de squares briqués, ce qui n’est pas totalement
aux dimensions conformes aux plans de ● Genèse du structuralisme faux, mais n’est pas suffisant pour la
1915 du grand architecte et urbaniste architectural hollandais caractériser.” La valeur exemplaire et la
hollandais Berlage. Si l’on ajoute à ceci richesse spatiale des écoles Apollo
son éducation Montessori, et la manière C’est dans ce contexte, autour de la construites en 1983 aident à com-
dont la famille Hertzberger est ancrée revue Forum, qu’ils ont développé prendre le sens de la théorie de Hertz-
dans cette éthique pédagogique de ensemble les concepts pratiques de berger, avant de considérer d’autres
génération en génération, on a alors un “l’habiter”, de l’individualité et de la œuvres plus ambitieuses par la taille, ou
portrait presque complet de l’architecte, modularité, à travers une approche plus récentes.
et du milieu dans lequel il a évolué et critique de la société moderne. Ces Du point de vue urbain, les écoles mater-
développé ses idées en architecture. concepts sont ainsi devenus les fonda- nelles Apollo Montessori et Willemspark
Les affinités de Herman Hertzberger tions du structuralisme architectural se présentent sous la forme de deux
avec la pensée structuraliste issue de la hollandais, extension naturelle du ratio- cubes placés en diagonale dans la par-
pensée du linguiste suisse Ferdinand de nalisme structurel de Berlage et du celle, formant des cours d’entrée dis-
Saussure, ou encore de l’anthropologue modernisme hollandais. Les projets de tinctes, retrouvant l’échelle des grosses

1 2

>>> 1 Construites sur un même terrain, les deux écoles


Apollo sont disposées en quinconce, l’une à l’angle de deux rues,
l’autre en retrait. Chacune fabrique ses propres espaces extérieurs.
2 Résultat des niveaux décalés, les gradins du hall central jouent
le rôle d’un amphithéâtre : les enfants s’y sentent à l’aise, chez eux.

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portrait HERMAN HERTZBERGER

3 4

villas bourgeoises qui bordent l’avenue une entité identifiable, autour de l’es- avec l’intention d’intensifier les relations d’hospitalité : comme dans tout travail
plantée de ce quartier cossu d’Amster- pace central en forme d’amphithéâtre, humaines, en créant des conditions pro- de qualité, ces détails font référence et
dam. Le plan de chaque bloc est formé où se déroulent les assemblées d’écoles pices aux rencontres et aux échanges. ponctuent l’œuvre de multiples atten-
des quatre carrés des salles de classe et les représentations théâtrales. Les lumières filtrées par les voûtes trans- tions aux usages quotidiens.
autour d’un atrium central éclairé zéni- lucides ou les parois latérales de briques Tout ceci est exprimé à grande échelle
thalement, avec un principe de coupe en de verre, les colonnes de béton, les élé- dans l’immeuble de bureaux de la com-
niveaux décalés pour dynamiser les rela- ● La monumentalité absente ments de mobilier en blocs béton ou en pagnie d’assurances Central Beheer,
tions spatiales d’un étage à l’autre. L’in- bois et autres banquettes intégrées, construit à Apeldoorn en deux tranches,
terpénétration visuelle qui en découle Cette conception illustre parfaitement sont autant d’éléments familiers dans le la première en 1972, la seconde en
sert à établir l’école comme une commu- la “grammaire de l’espace social” telle vocabulaire de Herman Hertzberger, qui 1995. Ici, le bâtiment concrétise une
nauté, dans laquelle chaque classe est qu’elle est élaborée par Hertzberger apportent à ces espaces un sentiment vision communautaire de l’espace de

Entretien avec Herman Hertzberger

« Le béton exprime sa propre mise en œuvre »


Construction moderne : Dans votre bâtiments un ordre universel, une construire de cette façon : on adapte explication donnez-vous à cette
travail des années 70-80, vos bâtiments manière de prévision constructive. la poutre exactement à l’espace préférence ? L’utilisez-vous encore ?
obéissaient à une grille constructive Le dernier bâtiment que j’ai réalisé dont on a besoin. Les budgets
qui était la base de vos espaces selon ce principe est le ministère des très bas imposent d’utiliser les H. H. : Aujourd’hui, par nécessité, je
sociaux. Avez-vous abandonné ce Affaires sociales, dont la construction éléments de construction selon leur travaille de manière plus abstraite
mode constructif ? a duré 10 ans ! Son mode constructif fonctionnement immédiat. avec des matériaux de revêtement
est le plus strict que j’aie réalisé : On applique ensuite un revêtement comme l’acier, la brique noire, le
Herman Hertzberger : On peut il est fabriqué avec un système ou un enduit qui rend le bâtiment béton enduit, le bois. Les blocs
construire des espaces sociaux sans d’assemblages très rigoureux. plus abstrait. C’est le cas de la béton sont moins utilisés
grille constructive ! Néanmoins, plupart des bâtiments actuels : ce qui aujourd’hui aux Pays-Bas. Lourds à
je me suis en effet attaché à utiliser C. M. : Votre mode constructif importe, c’est de construire vite. manipuler, ils ne peuvent plus être
le même type d’éléments de poutres semble donc avoir évolué… mis en œuvre manuellement pour
et de colonnes assemblées, avec C. M. : Vous avez souvent utilisé des raisons de réglementation. J’ai
des joints et des matériaux très H. H. : Aujourd’hui, nous n’avons le béton préfabriqué associé au bloc donc décidé de changer de mode
précis, pour tenter d’établir dans mes plus les moyens économiques pour béton dans votre architecture. Quelle constructif, tout en poursuivant mes

32 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


5 6

>>> 3 À Central Beheer, les principes de construction


contribuent à la réalisation d’un ordre architectural. 4 Les
travail, comme une “ville en miniature” contours, et à le comprendre comme ins- espaces intérieurs des bureaux proposent des lieux que l’usager
dans laquelle la syntaxe structurelle et la titution civique dans la “fabrique”
peut s’approprier. 5 La résidence YKK, au Japon, avec une
typologie modulaire des bureaux, urbaine environnante. Le ministère des
ouverts en porte-à-faux sur le vide cen- Affaires sociales de La Haye, dont la double hauteur systématique à l’intérieur de chaque appartement.
tral, fabriquent un ordre spatial et construction s’est terminée en 1990, est 6 À Dordrecht, des maisons-digues multiplient les éléments
constructif. Il offre un labyrinthe d’es- l’aboutissement d’une démarche dans
paces pour des activités potentielles, laquelle Hertzberger réussit à combiner architectoniques pour le bien-être des occupants.
encourageant l’appropriation spontanée les composants structurels pour réaliser
et la décoration par les occupants. La une réelle façade urbaine. Les éléments
limite de ce projet réside sans doute de béton successifs comme les planchers, béton pleins ou perforés, les colonnes à jeunes architectes et le pavillon de Riet-
dans la difficulté à en percevoir ses les panneaux de remplissage de blocs tête de champignon et les vitrages indus- veld, qui lui a valu une récompense à la
triels ont été assemblés pour former un Biennale de Venise en 2002. Depuis
corps de bâtiment au sens traditionnel, et 1990, son langage architectural semble
réaliser une unité avec sa hiérarchie com- s’orienter vers une nouvelle direction, où
plexe de vides intérieurs. sont abandonnés les modes constructifs
Aujourd’hui, l’agence de Herman Hertz- fondés sur l’idée de modularité spatiale,
thèmes principaux. C’est à la fois C. M. : L’architecture est-elle berger à Amsterdam continue à avoir au profit d’une mise en œuvre plus
une perte et une libération. toujours, pour vous, un art social ?
une activité régulière et soutenue : un abstraite. Tout en adoptant des maté-
C. M. : On a souvent parlé de votre
H. H. : Elle l’est de plus en plus. collège Montessori à Amsterdam, une riaux plus variés, il continue à considérer
œuvre en termes de “structuralisme
La dimension humaine est l’aspect maison sur l’eau à Middelburg, des loge- l’espace comme essentiel dans sa
hollandais”. Qu’entendez-vous par
de l’architecture qui me motive ments, ont été réalisés récemment. Des conception. Trois de ses récents projets
structuralisme en architecture ?
le plus actuellement. J’ai constaté
H. H. : Il me semble que l’intérêt
bureaux à Amsterdam, une école à de logements expriment une nouvelle
qu’au-delà d’une certaine distance
du structuralisme est de mettre entre deux bâtiments, la relation Hoorn, un musée et un théâtre à Apel- rationalité, ancrée dans le sol fertile du
en évidence une structure qui peut ne peut plus exister. J’ai beaucoup doorn sont en cours de construction… modernisme hollandais.
être interprétée de différentes écrit sur ce thème de l’espace social Un nouvel ouvrage sur son œuvre inti-
manières : la structure reste dans mon ouvrage Leçons pour des
et s’adresse à un cycle de temps étudiants en architecture. Ce qui est
tulé Articulations vient d’être publié chez
long, tandis que l’aménagement important, pour l’architecte comme Prestel ; le NAI, Institut d’architecture ● Une nouvelle abstraction
intérieur et les partitions peuvent pour le romancier, c’est d’avoir néerlandais, a invité ce mentor de la
changer et évoluer selon un cycle un thème, une histoire à raconter.
jeune génération hollandaise pour La résidence pour chercheurs à Kurobe,
plus court. Cela reste ma L’espace social est le mien.
philosophie, même si j’ai changé Propos recueillis par concevoir l’exposition “Fresh Facts”, construite au Japon en 1998 pour l’usine
de moyens pour y parvenir. Nathalie Regnier créant ainsi un lien entre le travail des YKK, est composée de cent unités amé-

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portrait HERMAN HERTZBERGER

7 8

>>> 7 et 8 La courbe des logements à Capelle a/d Ijssel


est ponctuée de balcons en béton imprimés en relief. La ligne
continue des maisons se développe dans le paysage néerlandais de mettre en relation les espaces entre vement, nous devons créer la possibilité
eux.Ainsi, les maisons ont une entrée et de l’interprétation personnelle, en fai-
comme une “muraille des temps modernes”.
un garage sur la rue au rez-de-chaussée, sant les choses de telle manière qu’elles
un bureau au premier, le séjour aux soient interprétables.“
deuxième et troisième étages, et les
nagées comme des lofts, et d’équipe- l’agence, consiste en trois rangées de chambres aux troisième et quatrième
ments collectifs incluant un restaurant logements croisées par une allée pié- étages, le toit-terrasse ajoutant une ● Béton “tectonique”
et une bibliothèque. Pour s’accorder tonne centrale, et une rangée courbe qui pièce supplémentaire. Dans une triparti-
avec la petite échelle pavillonnaire envi- suit la ligne de la digue, divisée en quatre tion classique, les soubassements sont Quant au matériau béton, il présente
ronnante, le bâtiment est fragmenté en sections. Ces maisons-digues de quatre habillés de brique noire, surmontés d’un pour l’architecte l’avantage d’exprimer
six unités séparées, reliées par des étages ont leur entrée et leur garage sur étage intermédiaire revêtu de panneaux la mise en œuvre. “Avant 1990, j’étais
ponts. Les appartements ont été conçus rue, les séjours au niveau de la digue, et métalliques gris, d’un corps de bâtiment très stoïcien : je n’utilisais que le béton
avec une hauteur suffisante pour pou- les chambres aux étages supérieurs. Elles en béton enduit blanc, et d’un attique en pièces préfabriquées identifiables
voir créer des mezzanines permettant forment une barrière de protection pour constitué par le bandeau de béton hori- avec un remplissage de blocs béton ou
de dormir ou d’étudier, et pour donner l’ensemble du quartier. zontal des terrasses cadrant la vue. La de bois.” Un système qui a permis à Her-
le sentiment d’être dans une maison où ligne continue des maisons se développe man Hertzberger d’obtenir une sorte de
l’on peut habiter à deux. Contexte japo- dans le plat pays néerlandais comme neutralité dans le choix des matériaux,
nais oblige, le béton brut s’imposait ● Quatre étages une muraille des temps modernes, ponc- tout en marquant une différence entre
pour ses qualités de mise en œuvre. sur une trame étroite tuée d’escaliers et de balcons métal- la structure et le remplissage, à la dif-
Les 113 habitations Merwesteijn-Nord liques, et de petits murets de béton férence de l’enduit. “C’est ce qu’on
réalisées à Dordrecht en 1999, et les À Capelle a/d Ijssel, les logements sont imprimés en relief qui rythment la com- appelle la tectonique, qui rend lisible la
75 habitations Paradijssel à Capelle a/d également construits le long d’une digue position de carrés noirs sur fond blanc. manière de construire. J’aime les
Ijssel près de Rotterdam, terminées en courbe, mais cette fois en retrait. Pour Chacun à leur manière, ces projets illus- rythmes structurels, martiaux, tecto-
2000, ont en commun d’être construites pouvoir échapper à la digue et regarder trent les propos de Herman Hertzberger niques, mais j’aime aussi les rythmes
dans un paysage typiquement hollan- le fleuve, la typologie des maisons s’est sur la participation de l’habitant : plus ouverts, les porte-à-faux antitecto-
dais, en relation avec une digue et un développée sur quatre étages égale- “Nous devons faire des maisons d’une niques, qui fabriquent des bâtiments
fleuve. Les premières sont construites ment, ce qui a impliqué des trames manière particulière, comme si chacun plus volants, plus légers.” ❚
juste au-dessus de la digue, fait unique étroites pour rester dans les surfaces pouvait amener sa propre interpréta- TEXTE : NATHALIE REGNIER
en Hollande où les bâtiments et les imparties. Le décalage en demi-niveaux tion du modèle collectif. Parce qu’il est PHOTOS 1 À 4 : HERMAN HERTZBERGER
digues doivent toujours être séparés. Le du séjour a permis d’ouvrir une vue en impossible de faire des installations PHOTOS : 5 SHINKENCHIKU-SHA,
plan directeur du quartier, dessiné par profondeur à l’intérieur du logement, et individuelles qui fonctionnent collecti- 6 CHRISTIAN RICHTERS, 7-8 DUCCIO MALAGAMBA

34 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


actualités

évènement
brèves publications
techniques
➜ La voirie en béton
à l’honneur CIMBÉTON
Une importante campagne
d’information a lieu sur le
thème des applications du
béton dans la voirie urbaine
La réponse béton
et rurale, à l’initiative du
SNBPE (Syndicat national du
RT 2000
béton prêt à l’emploi) et de Conformément aux accords
Cimbéton. Sujet de ces de Rio et de Kyoto, et dans le cadre
manifestations programmées du plan national de réduction
dans toute la France : de la consommation d’énergie
“Esthétique et des bâtiments afin de limiter les
performance”. Une action émissions de gaz à effet de serre,
au service de la sécurité des
une nouvelle réglementation
usagers et de la valorisation
6e session du concours Cimbéton du cadre de vie. ❚
thermique est applicable aux
logements collectifs, aux logements
Une maison des cultures nouvelles ➜ Écoles d’architecture
individuels et aux
locaux tertiaires.
La 6e session 2002-2003 du concours “Bétons, matière d'archi- et colloques “béton” Objectif de cette
tecture” sur le thème “Une maison des cultures nouvelles” a Le 3 décembre dernier, nouvelle réglemen-
l’architecte Livio Vacchini
mobilisé les étudiants des 24 écoles d'architecture réparties sur tation dénommée
donnait une conférence dans
le territoire national. Cette consultation est destinée aux étu- le cadre de l’école
“RT 2000” :
diants des écoles d’architecture françaises inscrits en 2e ou d’architecture de Nancy. réduire de 30 % la
3e cycle, aux architectes inscrits en DEA ou ayant passé leur Son intervention, intitulée consommation
“Penser librement”, livrait sa d’énergie à
diplôme au cours de l’année 2002, ainsi qu’aux étudiants des
conception de l’architecture l’horizon 2015.
écoles d’ingénieurs. et du métier d’architecte. Diminuer les
À la clôture des inscriptions, le secrétariat du concours compta- Le dialogue entamé à cette déperditions thermiques d’un
bilise 805 candidats représentant 444 équipes. Rappelons que occasion avec les étudiants bâtiment pour mieux maîtriser la
cette consultation est ouverte pour la première fois aux élèves et les enseignants de l’école consommation énergétique en hiver,
s’est poursuivi le lendemain, limiter l’élévation de la température
ingénieurs. Parmi les équipes concurrentes, 8 % sont mixtes et
lors du colloque organisé intérieure durant les périodes
associent élèves architectes et ingénieurs. par l’École française du
les plus chaudes de l’été, voilà donc
Le jury, dont la composition est mentionnée dans la plaquette du béton (EFB) et l’école
les deux volets d’un programme
concours, se réunira les 29 avril et 14 mai 2003 à la Société d’architecture de Nancy sur
le thème “Architecture et
ambitieux, où les qualités du béton
d’encouragement pour l’industrie nationale (SPI) à Paris, pour sont largement valorisées.
bétons : permanence et
sélectionner les lauréats. La remise des trophées aura lieu le innovations”. La réglementation RT 2000
19 juin 2003 à partir de 16 heures dans les locaux de Drouot- Le prochain rendez-vous des constitue même une réelle
Montaigne à Paris (annexe du Théâtre des Champs-Élysées), architectes, élèves architectes, opportunité pour l’ensemble
bâtiment en béton armé classé “monument historique”. ❚ bureaux d’études et maîtres de la filière béton, qui n’a jamais
d’ouvrage avec les écoles cessé d’afficher son haut niveau
d’architecture et l’EFB se d’exigence en matière de confort
tiendra à Versailles le et de qualité architecturale.
mercredi 2 avril 2003. La brochure RT 2000 – Les réponses
Bergame se penche sur l’architecture nouvelle Thème de cette session béton s’adresse à tous les acteurs
À l’initiative des écoles d’architecture de Paris-Belleville et de Versailles, en association au cours de laquelle inter-
de la construction concernés par
avec le Polytechnique de Milan, une quarantaine d’étudiants se sont rendus en viendront Jacques Ripault et
l’application de la nouvelle
Italie du 2 au 7 décembre dernier, pour y travailler sur un projet de “centre culturel Rudy Riciotti, architectes, et
Yves Malier, président de réglementation, et notamment aux
européen” et sur un funiculaire, dans la ville ancienne de Bergame. Thème choisi :
l’EFB : “Les nouveaux maîtres d’œuvre. Ils y trouveront
“ville ancienne, architecture nou-
bétons, conception et les valeurs exigées pour le respect des
velle”. Le “workshop”, soutenu par
Cimbéton, s’est déroulé dans un local architecture”. À noter nouvelles normes, accompagnées
prêté par la ville de Bergame, dans la également, les quatre ateliers des performances atteintes par le
porte Sant’Agostino, et s’est terminé pratiques qui seront animés matériau béton dans les applications
par la visite, à Côme, de l’œuvre de en parallèle. Sujets abordés : correspondantes. Plus largement,
Giuseppe Terragni et, à Vérone, de les adjuvants, les bétons à le document leur apportera la preuve
celle de Carlo Scarpa, avec le cime- ultra-hautes performances de la pertinence du matériau dans
tière de Brion à San Vito di Altivole (BUHP), les bétons les applications liées au confort
(ci-contre), célèbre pour ses murs de autoplaçants et la diversité thermique, domaine où il excelle. ❚
béton coulé “à la planche”. ❚ des parements béton. ❚

CONSTRUCTION MODERNE /N°112 35


bloc-notes

Livres

➜ Encyclopédie Perret ➜ Atlas du Paris ➜ Paul Chemetov ➜ De Ledoux


Sous la direction de haussmannien – Un architecte à Le Corbusier
Jean-Louis Cohen, Joseph Pierre Pinon dans le siècle Origine et développement
Abram et Guy Lambert de l’architecture autonome
“L’objectif premier de cet Cet ouvrage retrace le
Plus qu’un simple catalogue, Emil Kaufmann
ouvrage est de décrire, par le parcours d’un des architectes
cette publication qui dessin et par le texte, ce qui français les plus célèbres À l’occasion d’une nouvelle
prolonge l’exposition a été l’essentiel des aujourd’hui, à la fois par sa traduction par Guy Ballangé,
havraise consacrée à Auguste transformations de Paris sous production et par ses prises les Éditions de la Villette
Perret (sept. 2002-janv. le Second Empire : les percées de position nombreuses dans proposent une réédition de
2003) est un ouvrage de dites haussmanniennes.” Voilà le débat public. Membre de cet ouvrage d’Emil Kaufmann,
référence qui témoigne des comment Pierre Pinon l’AUA, puis associé de Borja publié pour la première fois
recherches les plus récentes introduit son ouvrage sur le Huidobro, Paul Chemetov est à Vienne en 1933. L’essai
menées sur les frères Perret. Second Empire et son donc un illustre et infatigable suscite alors l’intérêt et crée
Les quinze chapitres qui emprise sur le paysage urbain constructeur, mais aussi un la surprise, car il développe
composent l’ouvrage de Paris. La démarche du homme de recherche et de une thèse jusque-là inédite,
décrivent la personnalité préfet Haussmann y est réflexion, soucieux de définir où la rupture avec la
d’Auguste Perret et présentée depuis la les valeurs fondant le métier tradition, revendiquée par le
renseignent le lecteur sur conception des projets d’architecte, la citoyenneté Mouvement moderne, serait
les principaux projets comme jusqu’à la réalisation, en ou la modernité. Il est aussi déjà présente dans
sur les notions développées passant par le processus de l’auteur de l’introduction qui l’architecture de la période
par l’architecte. Ses décision. Également à ouvre cet ouvrage, révolutionnaire du XVIIIe siècle.
relations et ses liens l’honneur, la nouveauté des introduction dans laquelle il Le concept d’autonomie de
professionnels sont processus, qui mettent en élabore une réflexion l’architecture constitue la clé
également évoqués, avec place un cadre administratif personnelle sur son travail de voûte de la démonstration
de larges développements et étatique à travers lequel la professionnel, son d’Emil Kaufmann, qui
sur son enseignement fabrication de la ville sera engagement et les valeurs qui s’attache à démontrer que la
et son héritage. Quarante- désormais conduite. Une les ont toujours fondés. Une parenté entre l’œuvre de
cinq auteurs ont contribué invitation à voyager dans le leçon d’engagement et de Claude-Nicolas Ledoux
à cet ouvrage. passé d’une ville qui s’élabore créativité placée au service et l’architecture du XXe siècle
Éditions Monum, Ifa, et se construit. de l’art de construire. n’est ni formelle ni
Le Moniteur accidentelle.
Éditions Parigramme Éditions Le Moniteur
Éditions de la Villette

exposition

avec Michel Jacques, architecte, et Franck Tallon,


“New Trends 2002” graphiste, a été inaugurée à Tokyo le 31 mai 2002,
Nouvelles tendances de l’architecture et Arc en rêve en a coordonné la réalisation en
en Europe et au Japon Europe. Initiée par la galerie Art Front, à Tokyo, l’ex-
position a pour objectif de développer une coopéra-
Arc en rêve Centre d’architecture accueille, du tion culturelle entre le Japon et les pays de l’Union
6 février au 23 mars 2003, l’exposition “Nou- en faisant la promotion de la jeune architecture.
velles tendances de l’architecture en Europe et
au Japon”, entièrement consacrée à la jeune Exposition du 6 février au 23 mars 2003
création architecturale contemporaine euro- Arc en rêve Centre d'architecture
péenne et japonaise. Cette exposition dont le 7, rue Ferrère
33000 Bordeaux
catalogue et le dispositif scénographique ont été http://www.arcenreve.com
réalisés par Arc en rêve Centre d’architecture, tél. : 05 56 52 78 36

36 CONSTRUCTION MODERNE /N°112


portfolio

1) 2)

E n prolongement de l’exposition qui s’est tenue


au Havre jusqu’en janvier dernier, et qui se déplacera
prochainement à Turin puis à Paris, Construction
moderne présente quelques-uns des chapitres
les plus marquants de l’œuvre d’Auguste Perret.
3) Une façon de rendre hommage à ce promoteur de
l’art de construire et de reconstruire avec le béton.

1) Ateliers Esders (1919), av. Philippe-Auguste, Paris 11e. Photographie, mai 1919, Cliché Chevojon. 2) Garde-meuble
du Mobilier national, rue Croulebarbe, Parie 13e (1934-1936).Vue de l’entrée. Cliché anonyme. 3) Immeuble d’habi-
tation, 25 bis, rue Franklin, Paris 16e (1903). Façade sur la rue. Cliché anonyme. 4) Salle Cortot de l’École normale
de musique, 76, rue Cardinet, Paris 17e (1928-1929). L’intérieur de la salle. Cliché Chevojon. 5) Reconstruction du
Havre (Seine-Maritime), 1945-1955. Perspective axonométrique d’un immeuble. 6) Musée des Travaux publics
(aujourd’hui Conseil économique et social), place d’Iéna, Paris 16e (1936-1940). L’escalier du grand hall. 7) Église

4) Notre-Dame-de-la-Consolation, Le Raincy (Seine-Saint-Denis).

5) 6) 7)

4e de couverture : immeuble de logements HLM, à La Rochelle.

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