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À nos enfants Lucie, Paul et Alexandre,
qui, adultes, vivront – et travailleront – dans un monde
qu’il nous est difficile d’imaginer, mais auquel nous nous efforçons cependant de les préparer
au mieux.

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TABLE

Titre

Dédicace

■ Présentation des auteurs

■ Avant-propos
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Préfaces
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■ Le digital, une chance pour les ressources humaines et l’entreprise ?


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■ Le Marketing RH : un triple défi pour concilier diversité et cohérence

Marketing des ressources humaines et web 2.0

Le défi de la marque employeur

Le défi de la diversité interne

Le défi de l’image de la fonction RH

■ Introduction

Partie I - Un monde qui change

■ Introduction

Médias sociaux, vidéo, mobile ou la Sainte Trinité du web social

■ 1. L’explosion des médias sociaux

Qu’est-ce qu’un réseau social ?


Les médias sociaux grand public

Les médias sociaux autour de la musique

Les médias sociaux autour de l’image

Les réseaux sociaux professionnels

■ 2. Quelles sont les raisons qui expliquent le succès des médias sociaux ?

Le service est (presque) gratuit

Le web social est accessible à tous

Le réseau social s’appuie sur l’invitation de ses amis à s’inscrire

Le web social répond aux sentiments d’appartenance et de reconnaissance

Le web social devient une source d’information

Le web social est accessible de partout

■ 3. Les médias sociaux : nouveau couteau suisse du web ?


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L’explosion de l’image partagée
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L’explosion des devices mobiles


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■ 4. Les nouveaux comportements de l’internaute 2.0

L’internaute 2.0 est le fruit d’une longue histoire

Quelques comportements remarquables

De l’internaute au salarié digital

Partie II - Le nouvel environnement des entreprises

■ Introduction

■ 1. Pourquoi les entreprises sont-elles en retard ?

Elles ne sont pas habituées à la liberté de parole

Elles sont organisées pour gérer les contacts sortants

Elles sont organisées en îlots et/ou en silos indépendants

Elles placent les valeurs de sécurité et d’obéissance en premier

■ 2. Quels impacts pour les entreprises ?


Une présence en ligne indispensable

Après la boutique en ligne, le café du commerce en ligne

Revoir la façon de faire circuler l’information en interne

Prendre en compte la porosité des frontières

Accepter la dictature de la transparence

Émergence du crowdsourcing et du réticulaire

Résistance ou accompagnement des changements culturels

■ 3. Quels impacts dans la façon de communiquer ?

S’organiser pour gérer les contacts entrants

Préférer la pertinence à la puissance

Passer de la marque à la réputation

Penser viralité et non plus diffusion


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Revoir l’allocation des budgets entre conception et diffusion
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Communiquer différemment en interne


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Partie III - La stratégie marketing RH

■ Introduction Du marketing dans les ressources humaines ?

■ 1. Évolution de la communication de recrutement

Du papier au web

Du web au web 2.0

De l’annonce d’emploi à l’offre employeur

De chasseurs-cueilleurs à éleveurs-cultivateurs

■ 2. Le candidat : un client… comme un autre

Le candidat se comporte comme un consommateur averti

Un rapport basé sur le donnant-donnant

Le cycle de vie du candidat

Le candidat n’est pas un clone


L’expérience candidat

■ 3. À la découverte du marketing RH

Tentative de définition du marketing RH

Marketing RH : d’une RH transactionnelle à une RH relationnelle

Définir son offre RH

L’offre RH doit-elle être unique ?

La promotion de cette offre

L’expérience collaborateur

Le sourcing traditionnel et le sourcing 2.0

Managers et recruteurs : vers une inversion des rôles

■ 4. La marque employeur

Comprendre les fonctions de la marque pour comprendre la marque employeur


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Définition de la marque employeur
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Quatre dimensions sur lesquelles appuyer la marque employeur


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Les sept attributs de la marque employeur

Trois composantes de marque employeur

Les acteurs de la marque employeur

Petit focus sur les stagiaires

Les limites du concept de marque employeur

Partie IV - Comment construire son marketing RH

■ Introduction

■ 1. Évaluer l’expérience collaborateur

Faire le diagnostic du niveau d’engagement

Risques et opportunités du dialogue social / conflictualité visible en externe

Connaître son offre RH… pour l’améliorer

■ 2. Connaître son environnement externe


Connaître ses cibles externes

Connaître ses concurrents

Se connaître soi-même

Quelles sources d’information utiliser ?

■ 3. Construire sa marque employeur

L’identité employeur : la réalité interne

Deux modèles d’analyse pour identifier les priorités de son marketing RH

Le cadran magique pour construire sa marque employeur

La traduction créative

Partie V - Déployer sa marque employeur

■ Introduction

■ 1. Les bons réflexes


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Définir ses objectifs et ses cibles
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Bâtir le plan d’actions


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Adapter son organisation interne

Quelques outils de pilotage utiles

Ne pas négliger l’offre d’emploi

■ 2. Le site de recrutement

L’importance de la phase d’étude utilisateurs

Les outils de candidature sont des cimetières de CV

Les volumes sont privilégiés par rapport à la qualité

Les contenus exhaustifs font perdre du temps

Les sites RH ne sont pas empathiques

Considérer les sites RH comme des sites de e-commerce

■ 3. L’importance du contenu sur les médias sociaux

Quelle stratégie de contenus adopter sur les réseaux sociaux ?


Où prendre la parole ?

Les risques et limites des réseaux sociaux

Qui doit prendre la parole ?

Les relations écoles digitales

Les ambassadeurs de la marque employeur

Le cercle vertueux du marketing RH

■ 4. Exemples d’utilisation pratique de quelques outils

Comment utiliser Twitter ?

Comment utiliser les réseaux professionnels ?

Comment utiliser Facebook ?

Comment utiliser les plateformes vidéos ?

Comment utiliser le mobile ?


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Du virtuel à l’enchantement du réel
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Comment utiliser un blog RH ?


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Faut-il utiliser Pinterest, Vine, Periscope ou le prochain réseau social ?

■ Conclusion

■ Liste des témoignages

■ Remerciements

Copyright
L’Observatoire des réseaux sociaux d’entreprise est heureux de vous recommander cet
ouvrage, écrit par deux acteurs moteurs de notre association.
Leur connaissance approfondie des mécanismes RH et marketing, des médias sociaux, font
de la lecture de ce livre une véritable plongée en entreprise, afin de mieux comprendre le
marketing des ressources humaines et la marque employeur.
En s’appuyant sur de nombreux exemples, et en prenant le temps de bien poser le cadre
actuel fait de multiples changements et défis, ils parviennent à rendre aussi utile que
passionnante la lecture de leur ouvrage.
En quoi la marque employeur est-elle aussi bien reliée au management qu’aux process RH ou
à la qualité des actions de veille et de communication ?
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Nous vous invitons à découvrir comme nous, leurs réponses dans ce livre.
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■ Présentation des auteurs
Franck La Pinta
Franck La Pinta a commencé sa carrière en conseillant les entreprises sur leurs stratégies de
communication au sein de grands groupes de communication. Il accompagne depuis plus de
15 ans un groupe bancaire de dimension internationale dans sa transformation liée aux
nouvelles technologies et au digital. Ses domaines d’intervention couvrent notamment
l’analyse des impacts et des opportunités de cette révolution numérique sur les process
business, la relation client, les ressources humaines, le management des collaborateurs, le
marketing, la communication. Il a participé à la mise en place de la stratégie marketing de la
banque en ligne au début des années 2000. En charge du marketing RH digital de ce même
groupe bancaire pendant 7 ans, il a structuré cette activité, piloté la présence de la marque
employeur sur les médias numériques pour l’ensemble du groupe. Dès 2009, il a été à
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l’initiative d’un réseau social d’entreprise dédié aux professionnels RH, et a lancé la même
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année le premier compte Twitter RH du CAC 40. Il intervient aujourd’hui sur un programme
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de transformation digitale pour l’activité de banque privée. Il anime des conférences, des
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séminaires en entreprises, enseigne comme intervenant externe (Celsa, EDHEC, ESCP, IEP), a
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participé à la rédaction de nombreux e-books et livres blancs. Il est également le directeur


du pôle Campus de l’Observatoire des réseaux sociaux d’entreprises et anime un blog
(www.francklapinta.com).
@flapinta

Vincent Berthelot
De formation RH (DESS) et communication interculturelle (DREA), c’est aussi un amoureux de
l’Asie, découverte lors de ces voyages, mais aussi durant ses DREA de siamois et
communication à l’INALCO et une pratique assidue des arts martiaux en particulier du taichi.
Spécialiste de l’intranet puis de la socialisation des process RH et de la transformation digitale
de l’entreprise, il a développé l’utilisation des NTIC au travers du premier intranet RH d’un
grand groupe de transport puis d’espace collaboratif et de self-services RH. Il a ensuite étudié
les applications du digital en RH et en particulier dans le domaine des relations sociales.
Animateurs et intervenant (conférences, webtv, formations, cours université et grandes
écoles), il poursuit avec passion les échanges sur la recherche de l’utilisation optimale des
médias sociaux que ce soit pour des TPE, associations ou grands groupes. Il partage ses
convictions de performance sociale et performance économique qu’offre la transformation
digitale au travers de son blog (www.conseilwebsocial.com), de l’association Observatoire
des Réseaux sociaux d’entreprise comme responsable du Pôle veille Stratégique et celui de
RHinfo pour lequel il est devenu l’un des experts contributeurs.
Il est co-auteur de deux ouvrages spécialisés sur les médias sociaux : Communication de crise à
l’heure des médias sociaux publié par Atramenta en 2012, et Inondé sous les e-mails, résistez ! aux
éditions Hachette en 2013.
@VinceBerthelot

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■ Avant-propos

Voltaire a écrit : « Les livres les plus utiles sont ceux dont les lecteurs font eux-mêmes la moitié. »
S’il est une matière aussi peu figée, c’est bien celle qui nous réunit. Aussi, nous avons voulu
ce livre non comme une compilation de doctrines immuables, une liste de certitudes à
appliquer à la lettre ou de vérités universelles, mais comme un recueil de nos réflexions et
de nos convictions de praticiens, construites sur la base de nos observations et
expérimentations. L’exercice du livre, à la différence de l’animation d’un blog, est une
occasion de prendre du recul, de se poser pour faire le bilan et susciter une réflexion plus
stratégique (qui va nourrir la projection).
Nous l’avons ainsi imaginé comme un objet vivant, évolutif, destiné à s’enrichir, se compléter,
à être contredit, à s’affiner.
Nous vous invitons donc à prolonger les échanges, à partager vos réflexions, vos
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expériences, soumettre vos critiques, en un mot à en écrire l’autre moitié en nous retrouvant
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demain sur nos divers espaces de discussion.
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« Les hommes qui acceptent entièrement les lois existantes peuvent vivre bien, se hisser
à des hautes fonctions, triompher des obstacles, mais ils ne produiront jamais rien de grand. »

Jean-Christophe Rufin, Le Grand Cœur.

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■ Le digital, une chance pour les ressources humaines
et l’entreprise ?
Les ressources humaines entrent dans une nouvelle ère. Sous l’influence du changement
générationnel, de la mutation de nos économies et de l’évolution du rapport au travail, les
directions des ressources humaines doivent envisager la rénovation complète de leurs
pratiques. Une approche marketing du sujet, mais aussi la double conjonction de l’apport et
de l’influence du numérique ouvrent un nouveau chapitre pour cette discipline, cruciale
pour la création de valeur dans l’entreprise d’aujourd’hui et de demain.
En effet, nous sommes tous convaincus, et nous le constatons tous les jours, que la qualité
des ressources humaines, la faculté de partager les savoirs, les enrichir et développer
l’intelligence collective sont les atouts qui feront la réussite et l’un des leviers de la
rentabilité des entreprises sur le long terme.
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L’enjeu des directions des ressources humaines est immense. Le comportement des
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collaborateurs et leur rapport au travail changent. Ils se comportent de plus en plus comme
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des « clients », qui attendent aussi de l’entreprise autre chose qu’une stricte rémunération.
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Nous sommes entrés dans un monde où il y a de la part des collaborateurs, et notamment des
plus jeunes, une volonté de comprendre a minima le sens des actions, un souci de co-
construire ces actions, voire de co-entreprendre. L’enjeu pour l’entreprise est donc de
donner envie de la rejoindre, d’y rester tout en restant efficace et « au niveau sur la durée, de
s’y investir pour la rendre plus performante, de savoir s’adapter aux changements de
l’environnement mais aussi de s’épanouir dans ses fonctions. Les ressources humaines ont
donc une mission qui se transforme en passant d’un fort pilotage social, héritage de l’après-
guerre, à une approche plus consumériste qui manipule des notions de reconnaissance et de
développement des talents, d’employabilité, d’engagement.

Le digital est un levier majeur de transformation pour les ressources humaines dans leur
nouveau rôle. En effet, il permet d’inventer un nouveau mode de gouvernance, de
circulation et de partage de l’information et des savoirs, hors des systèmes hiérarchiques
pyramidaux classiques et plus en phase avec les systèmes matriciels de nos économies de la
connaissance, ainsi qu’avec les attentes de nos collaborateurs. Les technologies digitales
permettent de créer un éco-système autour de communautés d’intérêts constituées par les
projets et l’innovation, notamment. Les réseaux sociaux d’entreprise, par exemple,
accélèrent le partage du savoir et de l’information, nouvelle donne de nos économies du XXIe
siècle.
Dans un monde qui s’appuie sur les technologies digitales, les entreprises passent d’un
système où le savoir était synonyme de pouvoir à une organisation de plus en plus régie par
l’influence.

Le digital transforme aussi profondément les codes des entreprises. Il génère par exemple
une plus grande capacité à la prise de risque, à opposer à la force d’inertie d’un individu qui
ne veut pas s’engager trop avant, au risque de porter sur ses seules épaules la responsabilité
de l’échec.
Le digital rapproche aussi des communautés d’intérêts. Il accélère la circulation des flux
d’information, permet de mieux les cibler et de les enrichir,
La transformation digitale de l’entreprise impulse naturellement des réflexions sur la
gouvernance de l’information, des projets. Elle permet de faire émerger plus rapidement de
nouvelles idées et business models en les confrontant à ses pairs mais aussi aux opérationnels,
voire aux clients.
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Elle peut même transformer la conduite du changement en permettant aux utilisateurs
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finaux, par le biais d’un réseau social interne, de s’approprier beaucoup plus rapidement,
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plus profondément les nouveaux concepts et de les déployer avec une grande agilité. C’est
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comme cela que La Poste a pu concevoir et installer les 200 premières unités de son
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nouveau modèle de bureau de poste en 2009 et, en quatorze mois, transformer en


profondeur notre relation client.
En d’autres termes, le digital oblige les entreprises à s’organiser réellement autour de la
satisfaction du client.

Le digital change nécessairement le regard que l’on porte sur l’entreprise, son organisation,
son image, tant du point de vue du manager, qui doit adapter ses postures et façons de
travailler, que du point de vue du collaborateur. Une nouvelle relation s’instaure, tripartite,
entre les managers, les collaborateurs et les clients, qui sera le ferment d’un nouvel élan
porteur de réputation positive, créateur d’envie et de motivation pour tous.
C’est la raison pour laquelle la DRH ne peut plus faire l’impasse, à la fois sur les impacts du
digital mais aussi sur une approche marketing indispensable dans sa fonction.

C’est la rentabilité future et le développement de nos entreprises qui en dépend.

Nathalie Andrieux
Membre du CNNum
Membre du Conseil de surveillance et du Comité d’audit de Lagardère SCA
Membre du Conseil d’administration du Groupe Casino.

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■ Le Marketing RH : un triple défi pour concilier diversité
et cohérence

Marketing des ressources humaines et web 2.0

Le livre de Franck La Pinta et Vincent Berthelot aborde un sujet particulièrement sensible


aujourd’hui dans les entreprises, avec l’explosion des technologies web 2.0 (incluant le cloud
computing et le Big Data) qui révolutionnent les relations entre les acteurs, et notamment
entre les collaborateurs de l’entreprise et les autres parties prenantes, dont les
responsables ressources humaines (RH) au niveau local et au niveau central. De nombreux
observateurs reconnaissent en effet que le balancier revient progressivement du côté du
collaborateur qui se voit offrir de plus en plus de choix possibles en interne ou en externe,
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notamment grâce aux réseaux sociaux, et ceci en fonction de la rareté de ses compétences.
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Cette situation du marché de l’emploi combinée à l’évolution des mentalités individuelles et


collectives doit conduire l’entreprise à réviser quelques-uns de ses fondamentaux dans les
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systèmes RH, avec l’intégration des possibilités offertes par le développement phénoménal
du web 2.0. Ce renouvellement des pratiques passe par une nouvelle conception du
marketing RH que nous propose cet ouvrage. On peut en effet y retrouver des réponses au
triple défi lancé à l’entreprise qui cherche à concilier la diversité de ses clients internes et
externes et le maintien d’une cohérence globale : le défi de la marque employeur, le défi de
la diversité interne, et le défi de l’image de la fonction RH.

Le défi de la marque employeur

Ce premier défi est celui lancé à l’entreprise qui cherche à attirer les talents dont elle a
besoin dans un contexte de plus en plus concurrentiel. La question de l’image de l’entreprise
- sa marque employeur - devient en effet cruciale à l’heure de l’Internet 2.0, où les blogs et
les réseaux sociaux permettent l’expression de tous sur tout et, en particulier, l’entreprise.
Sur ce plan, le livre de Franck la Pinta et Vincent Berthelot apporte des clés de
compréhension indispensables. Il est en effet, de plus en plus fréquent de voir apparaître sur
le Net des commentaires parfois très critiques, citant nommément des responsables
d’entreprise, à propos de l’accueil et du suivi des stagiaires, ou du parcours d’intégration
après le recrutement.
Ce qui est en jeu est l’expérience du collaborateur confronté à la réalité quotidienne de
l’entreprise et notamment sa relation avec son manager.

À l’instar du classement quasi-officiel des entreprises où il fait bon de travailler (“Great place
to work 1” ou « Meilleures Entreprises 2 »), les blogueurs et autres chatteurs n’hésitent pas à
donner leur propre palmarès des entreprises où il ne faut surtout pas postuler. Cette
capacité exponentielle du développement, ou à l’inverse de la destruction de l’image de
l’entreprise doit conduire celle-ci, comme le montrent les auteurs, à mettre en œuvre tous
les moyens pour améliorer sans cesse sa marque employeur et l’expérience collaborateur en
conservant une longueur d’avance sur ses concurrents.

Le défi de la diversité interne |


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Ce deuxième défi constitue un axe essentiel du développement de l’orientation marketing


de la fonction RH, tant il est important pour elle d’offrir des produits et des services RH
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répondant aux attentes des collaborateurs de plus en plus divers. Pour faire le parallèle avec
le marketing traditionnel, il s’agit de savoir segmenter de plus en plus finement les
populations de collaborateurs, selon des critères pertinents pour l’entreprise pour pouvoir
construire des offres RH adaptées. Le grand risque est alors un éclatement progressif du
collectif de travail qui, à la limite, serait réduit à un rassemblement d’individus ayant tous des
attentes différentes. De ce point de vue, les réseaux sociaux d’entreprise ont comme objectif
principal de développer la coopération entre les collaborateurs par la création notamment
de nombreuses communautés.

La reconnaissance de la diversité des collaborateurs et de leurs attentes conduit


nécessairement l’entreprise à faire évoluer les mentalités individuelles et collectives en
éliminant progressivement les stéréotypes, qu’ils soient liés à l’âge, au genre, à l’origine
ethnique, ou au handicap pour ne citer que les plus fréquents. Mais, plus généralement, la
prise en compte de la diversité des collaborateurs et de leurs attentes est l’occasion, pour la
fonction RH de repenser, avec le web 2.0, ses structures et ses modes de fonctionnement
pour permettre de répondre le plus efficacement possible aux demandes de ses clients
internes, tout en préservant la cohérence globale pour éviter le syndrome de la tour de
Babel.

Le défi de l’image de la fonction RH

Last but not the least, ce troisième défi concerne la fonction RH elle-même puisque la
discussion sur son orientation marketing ne peut pas faire l’économie d’une réflexion sur son
image. Celle-ci se construit tous les jours avec une expertise de plus en plus reconnue
comme on peut le voir aujourd’hui dans le domaine de la gestion des rémunérations et
avantages (Compensation and Benefits). Mais, au-delà de cette action quotidienne, la fonction
sera perçue comme plus légitime et plus professionnelle si elle est capable d’apporter les
preuves de son action en développant notamment des capacités à mesurer les retours sur
les investissements consentis pour mettre en œuvre une politique RH. Dans cette
perspective, le Big Data peut constituer une véritable opportunité pour la fonction RH en lui
permettant d’établir des relations plus clairement démontrées entre ses actions et les
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résultats obtenus. Elle pourra améliorer son image en bénéficiant des idées proposées par
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Franck La Pinta et Vincent Berthelot dans leur livre riche par la finesse de l’analyse et le
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pragmatisme des solutions proposées.


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Charles-Henri Besseyre des Horts


Professeur émérite HEC Paris

1. http://www.greatplacetowork.fr
2. http://meilleures-entreprises.com
■ Introduction
Par sa rapidité d’accès à l’information et sa quasi-gratuité, le web a profondément
bouleversé toute l’entreprise : le marketing, la communication, la stratégie commerciale, le
management et les ressources humaines. On parle même désormais de « transformation
digitale » pour illustrer à quel point les changements sont profonds. Il a modifié le rapport de
force entre les acteurs économiques : entreprises, clients, salariés, distributeurs, médias…,
donnant un pouvoir nouveau à l’individu face aux organisations. Les méls, les forums, puis les
sites collaboratifs qui permettent la notation, ont ouvert la voie au règne de la
recommandation et de la contribution. On parle aujourd’hui de « consommacteurs » et de
« consommauteurs ». Ce web social ou 2.0, celui des médias sociaux publics, privés,
généralistes ou spécialisés, où l’on partage idées, avis, photos, opinions, vidéos, lieux, a mis
en avant la valeur des contenus produits par tous, aussi vite commentés que partagés. Il relie
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les internautes et non plus uniquement les contenus. Il érige en valeur cardinale
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l’immédiateté et le renouvellement perpétuel et, dans le même temps, il rend éternelles les
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informations publiées du fait de l’absence de droit à l’oubli. Le partage, la transparence sont


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la norme. Ce web 2.0 renverse toute forme de relation par une remise en cause de l’autorité
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des émetteurs traditionnels, les « sachants officiels » (homme politique, journaliste, expert,
parent, professeur, patron, médecin…). Le pouvoir est passé progressivement du client-
consommateur de contenus, au client-producteur de contenus. Un contenu qui a désormais
moins de valeur s’il n’est pas partagé entre les membres d’un réseau social, commenté,
« twitté » ou « liké ».
Les réseaux sociaux ont envahi toutes les activités de la société : information, divertissement,
économie, culture, politique, sexe, religion… Que nous soyons citoyen, client, salarié,
étudiant, patient, usager, les réseaux sociaux ont transformé nos usages, nos pratiques, nos
jugements de valeur, nos rapports à la distance et au temps.
Ainsi, le pape Benoît XVI aura été le premier pape sur Twitter (@Pontifex), suivi par plus de
6 millions de personnes. Barack Obama avait réservé son premier message officiel de
victoire aux 22 millions d’abonnés de son compte Twitter (près de 61 millions à fin juin 2015),
faisant peut-être de « Four more years » le tweet le plus populaire de l’année 2012. Preuve
supplémentaire que Twitter est le média privilégié de la politique : Hillary Clinton y a
annoncé en avril 2015 sa candidature à l’investiture démocrate. Les réseaux sociaux ont joué
un rôle majeur dans les révolutions du « printemps arabe », à la fois pour contourner la
censure des médias nationaux, alerter la communauté internationale, faciliter l’organisation
des manifestations. Fin 2014, à Hong Kong, les manifestants ont utilisé l’application
“FireChat”, une messagerie disponible gratuitement pour les appareils Apple et Android
originale : quand aucun réseau n’est disponible, elle permet tout de même des
communications directes via l’émetteur bluetooth ou le système wifi de l’appareil.
(http://www.slate.fr/story/92755/hong-kong-firechat-mesh).

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Le tweet de Barack Obama, annonçant sa réélection à ses 22 millions d’abonnés de l’époque, re-twitté
près d’1 million de fois, est accompagné d’une photo parfaitement travaillée par les équipes de
communication, et marque définitivement la prédominance de Twitter comme un média de masse.

Plus près de nous, suite aux attentats de début 2015 à Paris, les réseaux sociaux ont offert
une formidable caisse de résonance à « Je suis Charlie ».
Notons aussi que le secteur de la santé, bien que fortement encadré par la loi, découvre les
réseaux sociaux pour développer la connaissance des pathologies des patients et de leurs
familles. Doctissimo, initialement forum de discussion avant d’être un réseau social médical, a
été un précurseur dès 2000. Il compte aujourd’hui environ huit millions de visiteurs uniques
chaque mois. Ce mouvement de « Health 2.0 » positionne là encore l’utilisateur - ici le patient
- dans une posture moins passive, moins soumise aux seuls praticiens et à leur diagnostic,
phénomène renforcé par le développement récent de l’usage des trackers d’activité et
autres objets connectés dédiés à la santé et au bien-être. Il donne accès à une connaissance
suffisante pour entamer un vrai dialogue autour du traitement et partager des expériences
individuelles. Les professionnels de santé peuvent y trouver un avantage, une fois les limites
posées, en ayant des patients plus attentifs et motivés à écouter leurs choix et
recommandations. Mais à l’inverse, cela peut favoriser une approche consumériste de la
santé, le médecin ayant lui aussi perdu son statut « d’unique sachant ». Il ne sera alors
considéré que comme un prestataire de service, dont la mission est de satisfaire les
exigences non d’un patient, mais d’un client. Dans le secteur de la santé plus que tout autre,
la validité et la véracité des informations échangées, dont la source de ces informations, est
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primordiale compte tenu des conséquences possibles. L’arrivée du Big Data avec les objets
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connectés dans ce secteur et les premières applications de “quantified self” constituent une
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nouvelle étape de cette révolution de la santé de demain. Google lui-même, toujours en


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avance d’une révolution digitale, n’en fait-il pas un axe privilégié de sa recherche ?
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Depuis le Cluetrain Manifesto 1 et son mantra « les conversations sont des marchés », il est
acquis que les internautes sont devenus des prescripteurs, des influenceurs qui peuvent, par
leur avis, assurer le succès d’une institution, d’une marque, d’un produit, d’un président peut-
être. L’image de l’entreprise est désormais composée de ces milliers d’avis et commentaires
qui sont autant de facettes de sa réputation. La parole de l’entreprise n’est plus qu’une parmi
tant d’autres, la réputation prend le pas sur la marque. L’entreprise doit revoir son
organisation en profondeur pour apprendre à écouter et gérer ces sollicitations entrantes,
savoir s’inviter poliment dans des conversations existantes, intégrer ces nouveaux espaces
de discussions dans sa stratégie et tenir compte de ces nouveaux relais d’opinion, pour
transformer le tout en opportunités puisqu’elle n’a, de toute façon, pas d’autres choix que de
les accepter.

Comparateur de prix, avis de consommateurs, benchmark d’amateurs (au sens noble), font à
présent partie du process naturel d’achat. Ce nouveau rapport de force n’épargne pas les
ressources humaines. Il agit comme un effet miroir avec le concept du salarié citoyen à la
maison et dans l’entreprise. Qu’il s’agisse de ses clients internes − les collaborateurs − ou
externes − les candidats −, l’entreprise est contrainte de revoir en profondeur ses modes de
management, ses méthodes de travail et de communication. Et ce, pour attirer, convaincre,
motiver, faire évoluer, évaluer, fidéliser ses salariés présents ou futurs. Des salariés qui
adoptent avec la valeur « travail », le monde de l’entreprise et leur employeur, les mêmes
réflexes consuméristes, les mêmes comportements d’évaluation, de comparaison et de
recherche du meilleur rapport qualité / prix.

De même, les entreprises ont pour la première fois un retard à combler vis-à-vis de la sphère
privée, sur les nouveaux outils de diffusion et de partage de l’information.
L’entreprise et l’ensemble de ses départements ne peuvent se permettre d’ignorer ces
changements d’usages profonds, qui ont un impact fort sur la façon de consommer de
l’information, et donc pour les entreprises de communiquer et de faire du business.

Les ressources humaines, traditionnellement chargées d’appliquer des procédures destinées


à assurer l’activité, ne disposent pas dans leur ADN de la brique marketing. C’est-à-dire celle
qui prend en compte les besoins et attentes de cibles diverses pour concevoir ou adapter
une offre. La révolution apportée par le web social les oblige pourtant à modifier leur
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logiciel pour élaborer une offre RH qui réponde à ces nouvelles attentes et obligations. C’est
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la vocation du marketing RH d’accompagner ce changement. Il s’agit aussi d’inventer de


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nouvelles formes de communication, pour rendre ce changement lisible, crédible et


compétitif : telle est la mission de la marque employeur et de la communication employeur.
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Un nouvel enjeu se présente aux RH, une révolution qu’il est préférable d’accompagner,
voire d’anticiper pour en tirer des opportunités nombreuses, plutôt que rester sur une
attitude de déni ou de blocage face à ces changements. Aux ressources humaines de choisir
le scénario de leur propre transformation, et le rôle qu’elles entendent jouer dans celle des
entreprises.

Cet ouvrage se fixe comme ambition d’ouvrir quelques pistes sur l’association entre
marketing et ressources humaines, d’expliquer comment les entreprises doivent construire
un véritable marketing RH pour développer et faire vivre leur marque employeur qui sera
demain un des éléments cruciaux de leur réputation corporate. Et ce, bien au-delà des seuls
objectifs d’engagement des collaborateurs ou d’attraction des candidats. Comment
peuvent-elles valoriser leur attractivité en tant qu’employeur, alors que les nouveaux usages
des candidats et des collaborateurs, portés par les nouveaux outils du web 2.0, modifient les
formes traditionnelles de la communication ? Elles doivent trouver comment rester
attractives quand la valeur même du travail, la vie en entreprise, les rapports hiérarchiques,
sont profondément bousculés par une approche consumériste, ou au contraire hédoniste, de
l’emploi, ainsi que par une certaine défiance vis-à-vis du monde de l’entreprise.

Comment les usages et les comportements des clients, des collaborateurs, des candidats
sont-ils en train d’évoluer ? Quels en sont les impacts sur l’entreprise, sa façon de
communiquer, de se vendre ? Pourquoi est-il urgent de convaincre les équipes dirigeantes
de l’enjeu stratégique que représentera demain la réputation employeur ? Quel rôle crucial
peut jouer la fonction RH dans la réussite de la transformation digitale ? Comment faire
évoluer les pratiques, les process RH ? Quelles sont les compétences et les organisations
nouvelles à mettre en place au sein des équipes RH ? Quels nouveaux équilibres trouver
pour développer la performance sociale et économique ? Voici quelques-unes des questions
auxquelles nous tenterons d’apporter des éléments de réponses.

Le marketing RH s’est déjà imposé à toutes les entreprises, même à celles qui n’en sont pas
conscientes. Pourtant, peu d’entre elles ont structuré leur démarche autour d’une vraie
stratégie RH. Enfin, il n’existe pas d’ouvrage en France qui fasse la synthèse de ce sujet.
Certains traitent spécifiquement de la marque employeur, de la communication de
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recrutement, des SIRH (systèmes d’information RH), ou de marketing produit et de marque
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commerciale. Mais ces coups de projecteur ne permettent pas de mesurer l’ampleur des
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changements qui nous attendent.


Il nous paraissait donc indispensable de répondre à cette lacune par une approche plus
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globale, afin de faire le lien indispensable entre ces deux disciplines qui s’observent encore
trop souvent avec circonspection, dans les entreprises comme dans les programmes
scolaires. Cet ouvrage est destiné aux entreprises qui souhaitent comprendre l’impact de la
transformation digitale, mettre en place ou améliorer leur stratégie de marketing RH, aux RH
voulant comprendre et agir sur cette transformation, ainsi qu’aux étudiants, qu’ils soient dans
des cursus RH ou communication/marketing, et qui seront confrontés à ces problématiques
dans leurs futures entreprises. Cette ambition de couvrir au mieux ce double sujet du
marketing et des RH a ainsi dicté le choix d’une mise en commun de nos compétences
respectives.

Vous avez entre les mains une édition revue, complétée, enrichie par rapport à la première
version parue fin 2013.

1. Rick Levine, Christopher Locke, Doc Searls, David Weinberger, McKee Jake, The Cluetrain Manifesto, Basic Books, 1999.
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« The future is no longer what it used to be. »
Sir Arthur C. Clarke

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■ Introduction

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Médias sociaux, vidéo, mobile ou la Sainte Trinité du web social
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Lancé en 2004, Facebook est aujourd’hui l’outil quotidien de près d’1,5 milliard d’utilisateurs
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dans le monde, qui y consacrent en moyenne un peu moins de 7 heures par mois et y
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échangent 2 millions de “like” chaque minute. On compte aujourd’hui plus de 3 milliards


d’internautes et plus de 2 milliards d’actifs sur les réseaux sociaux
(http://www.blogdumoderateur.com/etat-des-lieux-2015-internet-reseaux-sociaux/).
En 2015, YouTube aura fêté ses 10 ans, plébiscité par plus d’1 milliard de visiteurs chaque
jour. Il y a 10 ans, qui aurait parié sur un modèle de site web vidéo alimenté de contributions
publiques ? En cette même année 2015, celle du “first mobile”, Google a annoncé modifier son
algorithme pour privilégier les sites optimisés pour mobiles, et “selfies” et a fait son entrée
dans le dictionnaire Larousse. Géolocalisation, NFC, bluetooth, promettent une expérience
utilisateur plus riche que sur desktop.

Peut-on ignorer que le web social a envahi tous les pans de la société : information, culture,
divertissement, éducation, consommation ? Peut-on encore simplement admettre qu’il n’a
pas radicalement transformé notre comportement en tant que client, citoyen, salarié,
étudiant, patient ? Certes, Google est encore un point d’entrée privilégié pour accéder aux
ressources du web, mais il n’est de choix d’hôtel sans une visite préalable sur TripAdvisor.
Quant à une photo prise d’un smartphone, elle n’aura de vraie existence qu’une fois
partagée sur un réseau en ligne. Regardez votre quartier : les agences de voyages ont
disparu. Elles ont été remplacées par des boutiques de téléphonie mobile.

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Le clip vidéo du chanteur sud-coréen Psy, est la première vidéo a avoir dépassé le milliard de vues en
décembre 2012. Aujourd’hui à plus de deux milliards, il s’est affranchi de toutes les barrières
culturelles, sociales, géographiques, linguistiques, simplement grâce aux actions de partage et de
recommandation des internautes qui ont favorisé sa viralité.

Chaque lancement d’un nouvel iPhone est un événement planétaire. À cette occasion, des
cohortes de fidèles viennent communier devant les Apple Stores afin d’être certains de faire
partie des premiers élus, ceux qui repartiront avec l’objet tant convoité.

Sur Twitter, l’annonce anticipée de quelques heures des résultats des élections
présidentielles françaises de 2012, a démontré le retard du cadre légal sur les usages et les
technologies, l’inefficacité des menaces des politiques si vite tournées en ridicule (avec le
hashtag #radiolondres, régulièrement utilisé lors des élections suivantes), l’inadéquation de
la notion même de territorialité. Ajoutons à cela le premier grand événement médiatique du
quinquennat de François Hollande − le fameux tweet de sa compagne Valérie Trierweiler −
pour n’être pas loin de considérer que Twitter est la seule et unique innovation en politique
depuis bien longtemps.
Portons nos regards de l’autre côté de l’Atlantique, pour s’assurer que l’épidémie n’est pas
limitée à nos frontières : c’est à Twitter que Barack Obama a réservé le privilège de son
premier message de remerciement pour sa réélection en 2012. « Four more years » est entré
dans l’histoire de la communication politique. Facebook a été l’introduction en bourse la plus
médiatisée, et les paliers du nombre de comptes dans le monde font régulièrement la Une
de tous les médias.
Le Premier ministre de l’Inde, comme le président de l’Indonésie sont suivis par plus de
5 millions de personnes. Phénomène récent, l’emploi des hashtags dans cette sphère s’est
développé pour jouer sur la viralité comme #bringbackourgirls après l’enlèvement de
centaines d’adolescentes au Nigeria par le groupe terroriste Boko Haram. On a même
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commencé à voir des batailles de #hashtag avec le ministre des Affaires Étrangères de Russie
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et son #BringBackOurBoys.
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Rappelons que les révolutions arabes de 2011 se sont appuyées sur de nouveaux acteurs : les
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réseaux sociaux. Ceux-ci ont démontré de formidables capacités de diffusion de séquences


vidéos à partir de smartphones. Ils se sont substitués aux médias nationaux et internationaux
classiques, muselés et empêchés par les censures nationales, et ont alerté l’opinion
internationale sur les violences et les répressions. Ils ont aussi facilité l’organisation des
manifestations, coordonné les différents mouvements d’opposition. Les printemps arabes
ont démontré la terrible efficacité des trois ingrédients : web social, vidéo et mobile.
L’utilisation de ces nouveaux outils offre une temporalité plus longue que nous l’estimions à
leurs débuts ; malgré l’aspect « feu de paille » de certains de ces mouvements, qui n’ont pas
nécessairement les structures pour encore s’installer dans le temps, l’usage des réseaux
sociaux maintient cependant une empreinte de leur présence sur le web.
La foi n’y échappe pas avec le pape François considéré comme la personnalité la plus
influente sur Twitter en 2014 avec des tweets repris entre 6000 et 10 000 fois !
(http://twiplomacy.com/wp-content/uploads/2014/06/_MASTER_twip_2014.pdf)
FAUT-IL PARLER DE RÉSEAU SOCIAL
OU DE MÉDIA SOCIAL ?

Faut-il les différencier ? Les deux sont-ils synonymes ? Ne sont-ils pas fréquemment utilisés sans différenciation ?
Pour notre part, et tout au long de cet ouvrage, nous choisissons de les différencier selon le principe suivant :
• le terme « média social » recouvre un double sens. Nous lui donnons un premier sens générique. C’est-à-dire qu’il
va englober tous ces espaces de partage, de conversation, de contribution, incluant également les réseaux
sociaux. Son second sens s’applique à toutes les plateformes centrées sur les contenus (texte, image, vidéo). À ce
titre, YouTube, Instagram, un blog ou encore un forum sont des médias sociaux. Ils constituent un véritable canal
de communication ;
• les réseaux sociaux vont, quant à eux, être centrés sur les membres : Facebook, Twitter, LinkedIn et Viadeo sont
des réseaux sociaux. Pour ces réseaux, l’importance et la valeur des contenus est surtout déterminée par celle de
leurs émetteurs. Les réseaux sociaux ont généralement des fonctionnalités riches autour des profils des abonnés.
• Citons enfin les sites web proposant des fonctionnalités contributives ou sociales. Les contenus « froids » y sont
complétés par des « fonctionnalités 2.0 » (avis, commentaires, notations) destinées à valoriser les visiteurs,
renforcer leur implication, améliorer la visibilité des contenus grâce à la viralité.

Complétons avec la définition de P. Cordina et D. Fayon 1 : « Les médias sociaux regroupent l’ensemble des outils
collaboratifs du web 2.0, à savoir les réseaux sociaux, les blogs, les wikis, les forums de discussion. S’y ajoutent également
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une kyrielle d’autres outils de partage (par exemple : Skype et outils de chat, univers virtuels). Les réseaux sociaux, qui
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sont au cœur du web 2.0 et des médias sociaux, sont des services sur le web qui permettent aux internautes d’être reliés
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entre eux dans le but de favoriser les interactions sociales. Ils possèdent les mêmes caractéristiques que les réseaux sociaux
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de la vie physique, avec comme particularité la rapidité des contacts, la connaissance des contacts de ses contacts dans
bon nombre d’outils et la vision instantanée de son réseau. »
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1. P. Cordina et D. Fayon, Community Management, Paris, Pearson, 2013.


■ 1. L’explosion des médias sociaux
En 2015, Facebook revendique 1,375 milliard sans être présent en Chine ni en Russie et
LinkedIn indique avoir atteint les 300 millions de membres. Rappelons que Facebook n’est
ouvert à tous que depuis septembre 2006, et que LinkedIn a été lancé en mai 2003, mais
pour une cible plus restreinte, et dans un premier temps aux USA uniquement.
La Chine a développé son Facebook national − renren.com − qui a séduit plus de 160 millions
de membres, et son Twitter local − weibo.com − qui compte 200 millions d’utilisateurs.
Autant que le principal réseau social de Russie : vkontakte.ru.
La célèbre vidéo, « Social Media Revolution 1 » compare la rapidité d’adoption de certaines
innovations. Ainsi, elle nous apprend qu’il a fallu trente-huit ans à la radio pour toucher
50 millions d’utilisateurs, treize ans à la TV, seulement quatre à Internet, trois à l’iPod, quand
Facebook atteignait 200 millions d’utilisateurs moins d’un an après son lancement.
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Comme Internet, les réseaux sociaux sont en passe de devenir aussi incontournables que
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peut l’être l’eau ou l’électricité. Google, même s’il conserve une position hégémonique, n’est
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plus le seul et unique point d’entrée du web. On assiste à un combat sans merci des « GAFA »
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(Google, Amazon, Facebook, Apple) pour dominer le point d’accès au web, les contenus, le
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temps d’usage, les transactions commerciales et les flux monétaires associés.

Qu’est-ce qu’un réseau social ?

Le site de l’Encyclopædia Universalis retient comme définition du réseau social celle donnée
par deux jeunes chercheuses américaines en sciences de la communication, Danah Boyd et
Nicole Ellison. Elles définissent les sites de réseaux sociaux comme « des services web qui
permettent aux individus de construire un profil public ou semi-public dans le cadre d’un système
délimité, d’articuler une liste d’autres utilisateurs avec lesquels ils partagent des relations et de voir et
de croiser leurs listes de relations et celles faites par d’autres à travers la plateforme 2 ».

On peut distinguer différents types de réseaux sociaux. Nous nous concentrerons ici sur les
réseaux externes. Nous laisserons hors du champ de notre analyse les réseaux sociaux
d’entreprise, ou réseaux sociaux internes, dont les membres sont quasi-exclusivement les
collaborateurs d’une entreprise. Nous les évoquerons plus loin, dans la partie dédiée au
marketing RH interne. De même, nous n’avons pas souhaité être exhaustifs dans notre
présentation, mais ne retenir que quelques réseaux incontournables, porteurs de tendances
profondes.

Les médias sociaux grand public

Ouverts, ludiques, faciles d’utilisation, ces espaces regroupent des membres sans que des
critères de sélection stricts n’en limitent l’accès. À l’image de l’emblématique Facebook, ils
permettent des échanges conviviaux plutôt entre membres qui se connaissent déjà en
dehors de ces réseaux, et offrent la possibilité de se rapprocher de personnes inconnues,
mais qui ont les mêmes goûts ou activités. Ces réseaux sociaux utilisent beaucoup l’image, la
vidéo, avec en moyenne un graphe social 3 d’une centaine de personnes. Dans une célèbre
étude publiée en 1993 4, Robin Dunbar, anthropologue britannique, estime à 150 (148
exactement), le nombre maximum d’amis avec lesquels une personne peut entretenir une
relation stable. Au-delà de ce nombre, la confiance mutuelle et la communication ne sont
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plus en mesure d’assurer correctement le fonctionnement du groupe. Il faut alors passer à
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une hiérarchie formalisée, encadrée par des règles d’organisation précises. Google+
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organise vos contacts à partir de cercles, Facebook propose de « trier » ses contacts entre
amis proches et amis « tout court » et de créer des listes pour les classer, afin de pouvoir
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dépasser allégrement les 150 amis sans être noyé.


Compte tenu du volume de leurs membres et de la récurrence de fréquentation, ces réseaux
sont de plus en plus utilisés par les entreprises. Un réseau comme Facebook constitue un
nouvel espace de communication pour une marque média, en commercialisant ses espaces
publicitaires et informations sur ses membres. Il révèle un modèle économique fondé sur la
mise à disposition gratuite d’un ensemble de fonctionnalités, en échange de la possibilité de
commercialiser à des annonceurs les informations de ses membres et illustre l’adage suivant :
« Si, en tant que client, vous ne payez pas le produit, c’est que vous êtes le produit. »

Citons également Twitter (6,6 millions d’utilisateurs en France et 288 millions dans le monde
en 2015) et Foursquare, le leader des réseaux de géolocalisation (55 millions d’utilisateurs en
2015), ou encore Instagram, Snapchat (déjà 100 millions de fans à travers le monde), très
prisés des adolescents. Ils sont à l’origine des réseaux grand public, mais deviennent
familiers des stratégies des entreprises, qu’il s’agisse de présence, de promotion, ou de
création de trafic, pour n’en citer que quelques-unes.
Les médias sociaux autour de la musique

MySpace, le précurseur lancé en 2003, a été suivi par de nombreux acteurs dont la liste ne
cesse de s’allonger : Last.fm, Deezer, Jiwa, Soundcloud, Bandcamp ou Spotify proposent des
modèles approchants : offre gratuite limitée et avec publicité, ou payante et sans publicité,
création de playlists et partage de ses goûts musicaux après inscription. Leur principal
intérêt en tant que média réside dans la jeunesse de leurs membres, même si cette
particularité tend à s’estomper et le modèle économique à évoluer. Les nouveaux usages ont
investi le secteur de la musique avec le crowdfunding, qui permet de financer le projet d’un
artiste. MyMajorCompany est l’exemple le plus connu, grâce au succès du chanteur Grégoire,
qui a pu enregistrer son album et lancer sa carrière grâce à l’argent récolté auprès des
internautes sur cette plateforme. Le principe est simple : les internautes misent sur un artiste
et en cas de succès, ils percevront une part des recettes nettes générées, à la hauteur de
leur investissement. Nous sommes ici entre mécénat et investissement participatif. Ce sont
bien les internautes qui se substituent aux traditionnels producteurs ou maisons de disques,
et permettent à tel ou tel artiste d’enregistrer son album. Ce modèle économique s’appuie
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aussi sur la promotion gratuite que ne manqueront pas de faire les apprentis producteurs,
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poussés par une véritable passion pour leur artiste ou simplement pour maximiser les
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chances de rentabiliser leur investissement.


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Les médias sociaux autour de l’image

C’est autour de l’image que les réseaux sociaux sont les plus actifs, que les alliances se
nouent et se dénouent. Instagram, l’application de prise de vues avec des filtres vintage,
compte plus de 300 millions de membres, mais n’a pas encore trouvé son modèle
économique, malgré le lancement des posts sponsorisés en 2015. Elle a pourtant été achetée
1 milliard de dollars par Facebook en avril 2012. Portées par l’explosion des smartphones et
des performances accrues de leur fonction de prise de vue, les images sont les contenus les
plus diffusés, « likés », « partagés », « retweetés ». Preuve de l’importance de cet usage, TNS
Sofres a publié en décembre 2012 une étude pour le compte de la Commission nationale de
l’informatique et des libertés (CNIL) intitulée « La place des photos dans notre vie
numérique 5 ». Il est évident que les entreprises se sont rapidement emparées de ces
nouveaux espaces de communication, et notamment celles pour lesquelles l’image est
primordiale : luxe, mode, automobile, décoration, voyage… Exploitant ainsi la visibilité
gratuite offerte par les membres des réseaux sociaux à ces produits emblématiques, à forte
dimension émotionnelle ou statutaire. Pinterest, qui propose « d’épingler » ses photos sur
des tableaux thématiques, connait déjà ses premières applications pour l’entreprise afin de
présenter ses produits en image. Le pari est simple : les contenus les plus populaires sur
Facebook sont les images. Les marques ont bien compris qu’une image vaut parfois bien plus
que des mots. Alors, elles essaient de trouver la plateforme qui leur permettra de gagner
encore plus en visibilité et en viralité.

Une innovation est à peine lancée qu’une autre lui succède. Les grands acteurs affûtent leurs
armes pour prendre pied sur ce nouveau territoire des vidéos très courtes : en
décembre 2012, Google a lancé son application « Capture », suivi quelques jours plus tard par
la riposte de Twitter avec son application « Vine ». En juin 2013, c’est Instagram qui, après les
photos, a proposé de partager des vidéos courtes. Et en 2015, à moins d’un mois d’intervalle,
deux applications mobiles de vidéo en direct se sont lancées avec fracas : Merkaat et
Periscope. Un principe assez simple qui permet à l’utilisateur de diffuser un flux vidéo sur
internet via son compte Twitter. Un aboutissement de la culture du direct.

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Les réseaux sociaux professionnels


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À l’instar de Viadeo, Xing ou LinkedIn, ces réseaux sont orientés sur la mise en relation de
personnes afin de trouver des opportunités d’affaires, pour rechercher un emploi ou un
candidat. On y trouve des informations spécifiques sur les entreprises, leurs produits et
services, les profils de leurs collaborateurs, des espaces de discussion − groupes ou forums −
au sein desquels il est possible d’échanger entre pairs, et ainsi de se faire identifier comme
tels. Début 2015, LinkedIn annonce pas loin de 100 millions d’abonnés dans le monde, et
9 millions en France. LinkedIn est aujourd’hui un acteur incontournable du marché de
l’emploi, qui tire des revenus substantiels de la pub mais également de la vente aux
entreprises de services de « talent solutions ».
Le graphe social de ces réseaux, c’est-à-dire l’ensemble des relations constituées entre les
membres, est plus étendu, et donc naturellement moins dense ; les motivations étant plus
intéressées et bien moins portées sur le ludique que sur un réseau type Facebook. LinkedIn
et Viadeo ont d’ailleurs tenté d’atténuer cette faiblesse en intégrant des fils d’actualités, des
recommandations, des suggestions de nouveaux contacts, ou en multipliant les push mails
d’alertes, destinés à augmenter le nombre de visites et les interactions.
Côté individus, ces réseaux agissent comme des vitrines de compétences et présentent, à ce
titre, un rôle central dans la marque personnelle. Côté entreprises, en raison de la richesse
des informations fournies par les membres sur leur profil, ils représentent de nouveaux
viviers de candidats ou de prospects potentiels. Il y a naturellement un risque de voir ses
propres collaborateurs, également présents sur ces réseaux, se faire chasser.
À côté de ces généralistes évoqués plus haut, de nombreuses initiatives de réseaux
sectoriels voient régulièrement le jour, comme Dogfinance dans le secteur de la finance et
de la banque, Digikaa, pour les métiers du digital, ou SantéConnect pour les métiers du
médical. Notons également des réseaux qui ciblent essentiellement les étudiants, à l’instar
de Wizbii et Yupeek.

1. http://www.youtube.com/watch?v=QUCfFcchw1w,
2. http://www.cnil.fr/fileadmin/documents/Etudes/Etude_2012_place_des_photos_dans_la_vie_numerique.pdf
3. Le graphe social désigne la cartographie de vos relations au sein d’un réseau social.

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4. Dunbar, R.I.M. (1992). “Neocortex size as a constraint on group size in primates”. Journal of Human Evolution 20: 469–493.
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5. Étude réalisée par TNS Sofres pour la Cnil, du 13 au 20 novembre 2012, sur un échantillon national de 1 554 personnes âgées de 13 ans et plus (http://www.tns-
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sofres.com/_assets/files/2012.12.12-cnil.pdf).
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■ 2. Quelles sont les raisons qui expliquent le succès
des médias sociaux ?
Il semble impossible d’établir une liste exhaustive des raisons pour lesquelles les médias
sociaux se sont développés. Elles diffèrent d’ailleurs d’un espace ou d’un abonné à un autre.
Nous avons voulu retenir ici quelques traits marquants, et donner des pistes de réflexion.
Nous développerons ce sujet plus loin, dans les parties de l’ouvrage abordant les impacts
pour les entreprises et leurs équipes RH, et les bénéfices à en tirer.

Le service est (presque) gratuit

Le web avait déjà bousculé certains modèles économiques en introduisant cette notion de
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gratuité : un des fondements « philosophiques » des premiers fondateurs du web. Les
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réseaux sociaux, et notamment Facebook, premier véritable réseau grand public, ont basé
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leur modèle sur une offre gratuite d’outils pour contacter ses amis, discuter avec eux,
partager des contenus, jouer… afin de récupérer la valeur créée par les utilisateurs (les
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contenus), puis de commercialiser cette valeur auprès des entreprises. Ces contenus sont
ainsi appelés UCG, pour User Generated Content, c’est-à-dire un contenu généré par
l’utilisateur. Les entreprises peuvent apparemment développer une présence gratuitement
ou, a minima, un premier degré de présence, avec ensuite des services complémentaires
payants. C’est la logique du freemium qui se retrouve sur de nombreux réseaux sociaux. Cette
notion de gratuité est à modérer, car ce n’est pas la présence qui est gratuite, seulement
l’inscription. Ainsi Facebook a modifié en 2012 son algorithme EdgeRank pour limiter le
nombre de fans touchés par une publication (le reach étant estimé seulement à environ 2 %
à fin 2014), afin de promouvoir des options payantes de publications. La plupart des réseaux
sociaux commercialise des espaces publicitaires et joue ainsi, tout simplement, le rôle de
médias traditionnels. Il devient de plus en plus indispensable pour les entreprises de passer
par ces conditions payantes pour espérer émerger sur ces espaces. En vendant une audience
plus ou moins ciblée à des annonceurs, les médias sociaux se comportent comme des médias
classiques. Enfin, il est important pour une entreprise, d’être alertée sur les coûts induits
comme, par exemple, le salaire du collaborateur en charge de l’animation de ces présences
ou les coûts d’animation facturés par un prestataire externe.
Le web social est accessible à tous

Ne demandant ni compétences, ni connaissances particulières, les réseaux sociaux


s’appuient tous sur une interface conviviale, intuitive, immédiatement utilisable. Aucun
mode d’emploi n’est nécessaire pour comprendre l’usage des réseaux sociaux ! Un mél et un
mot de passe suffisent pour s’inscrire et se lancer. Pour l’entreprise, il n’y a donc a priori pas
de population qui soit exclue des réseaux sociaux. Certes, des disparités existent dans les
typologies d’utilisateurs d’un réseau à un autre : périmètres géographiques, finalité des
réseaux, population cible, etc. Les réseaux sociaux tendent à voir leur structure
démographique se rapprocher de celle de la société au fur et à mesure de leur croissance ;
les critères d’âges, de niveaux d’études ou de revenus étant de moins en moins
déterminants.

Le réseau social s’appuie sur l’invitation de ses amis à s’inscrire

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C’est la grande force des réseaux sociaux : quand dans « l’ancien monde », l’entreprise devait
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acheter à prix d’or chaque membre ou abonné pour se constituer péniblement une audience
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potentielle, aujourd’hui, ce sont les abonnés eux-mêmes qui assurent l’enrichissement de la


base en invitant leurs proches et en les incitant à importer leurs contacts de messagerie.
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L’audience potentielle croît d’elle-même. Les réseaux sociaux, notamment professionnels


comme LinkedIn et Viadeo, exploitent parfaitement cette mécanique et développent des
fonctionnalités pour vous suggérer régulièrement de nouveaux contacts à solliciter ou pour
« aspirer » les contacts de vos boîtes méls.

Le web social répond aux sentiments d’appartenance


et de reconnaissance

Faisant le lien avec le point précédent, un réseau social n’a de valeur (pour le membre
comme pour l’entreprise) que si vous y trouvez de nombreux contacts. C’est-à-dire si vous
multipliez ces nœuds qui permettront les interactions dont vous serez le centre. Et plus vous
multiplierez ces contacts, plus grande sera votre popularité et votre audience propre : voyez
comme les nombres de contacts s’affichent, tels des trophées sur les pages de profil.
Contrairement à un a priori largement répandu, c’est également avec son réseau d’amis
proches, ceux que l’on croise le plus fréquemment dans la « vraie vie », que l’on partage le
plus d’interactions. Le principe des « liens faibles » signifie bien qu’être connecté à un
membre n’est pas automatiquement synonyme d’interactions et de proximité. Les hubs et
autres groupes de discussions, pour les réseaux professionnels, répondent à cette volonté
de créer différents degrés d’appartenance. Mais sentiments d’appartenance et de
reconnaissance s’opposent. Comment concilier une volonté de faire partie d’un maximum de
discussions, de groupes – surtout si ces groupes sont très populaires, donc très fréquentés –
et dans le même temps risquer d’être noyé, voire invisible parmi la masse de membres plus
populaires que soi ? Ce paradoxe explique en partie le succès de la notion « d’influenceur » :
une personne dont la notoriété lui permet d’émerger des autres commentateurs et
publicateurs et de se poser en tant que référent.

Le web social devient une source d’information

De simple outil de mise en relation entre personnes ou de partage de contenus à vocation


plus ou moins ludique et personnelle, les réseaux sociaux deviennent de véritables
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plateformes d’information investis par tous les acteurs de la production et de la diffusion :
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journalistes, médias, agences de presse. Cinq raisons expliquent ce glissement.
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La présence d’un certain nombre d’acteurs

Entreprises, médias, institutions, écoles, associations, développent leur présence sur les
réseaux sociaux, sous forme de pages, de groupes de discussion ou d’applications selon les
fonctionnalités disponibles et les besoins. Il s’agit de diffuser des contenus auprès d’une
nouvelle audience à forte croissance, complémentaire de l’audience historique. On va
chercher à se rapprocher de cibles dont les usages évoluent, notamment dans la
fragmentation de la consommation de médias. C’est ensuite un moyen de développer une
forme nouvelle de relation entre ces acteurs et leur audience. Relation qui ne pouvait
historiquement être que passive, à de très rares exceptions près et de façon limitée (appel
des auditeurs radio, courrier des lecteurs par exemple). Ces acteurs trouvent dans les
réseaux sociaux le moyen de compenser les limites d’interactivité – géographiques ou
techniques – de leurs supports de communication traditionnels. Ils exploitent également les
opportunités d’agréger une communauté aux profils, aux centres d’intérêt ou aux goûts
sinon homogènes, au moins assez clairement identifiés (les amateurs de cuisine japonaise,
d’histoire médiévale, de sports mécaniques, ou de politique…).
Ratio entre producteurs de contenus et consommateurs

On considère traditionnellement que pour cent membres, on compte cinq contributeurs


actifs 1 qui vont produire des contenus, une petite minorité qui va se contenter de relayer ses
contenus, les commenter et les mettre en avant et une majorité passive qui consulte sans
interagir. Ce ratio se retrouve peu ou prou, quels que soient les réseaux sociaux concernés, y
compris les réseaux sociaux d’entreprise. Il confirme l’importance de la dimension
« fournisseur de contenus » et relais d’information pour les marques et les entreprises en
termes de marketing et d’image.

Le poids de la recommandation

Les médias sociaux remettent en cause le principe de la pertinence d’une information, et


donc de son émetteur. « Avec le web 2.0, on passe de la société de l’information à la société de la
recommandation » écrit Joël de Rosnay dans la préface du livre de David Fayon Géopolitique
d’internet 2. Traditionnellement, les grands médias (Le Figaro, Le Monde, L’Express, Europe 1,
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RTL…) avaient patiemment acquis une reconnaissance, bâti une marque, installé un label de
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sérieux, d’authenticité, de crédibilité. Même si certains de ces supports se présentaient eux-
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mêmes comme des médias d’opinion, avec des tonalités politiques susceptibles d’orienter
l’objectivité du traitement des informations, ils disposaient d’une légitimité, d’un pouvoir
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d’influence. L’information n’avait de valeur que par le support de presse (papier ou audio-
visuel) qui l’hébergeait. À l’inverse, dans les médias sociaux, la valeur de l’information, sa
crédibilité, dépendra en grande partie de la proximité que l’internaute aura avec le membre
de son réseau. En effet, sur ces nouveaux espaces, nous sommes tentés de porter davantage
de crédit aux propos rapportés ou relayés par un ami que par un inconnu. Face à la remise en
cause des émetteurs traditionnels, et à la multiplication des informations disponibles,
conséquence de la fragmentation des sources d’information, le réseau de connaissance
proche devient l’alternative qui rassure, ou tout le moins qui limite l’incertitude.
La puissance de ces recommandations éveille bien entendu l’intérêt des entreprises comme
des petits commerces et peut donner lieu à des dérives sous forme de faux avis pour son
établissement ou contre celui du concurrent. Ce phénomène, souvent artisanal au début,
s’est professionnalisé avec des agences de e-reputation peu regardantes, à tel point que le
bureau de la concurrence du Canada propose une aide aux consommateurs abusés
(http://www.bureaudelaconcurrence.gc.ca/eic/site/cb-bc.nsf/fra/03782.xhtml).
La curation

Cette action consiste à suivre un certain nombre de sources d’informations, à effectuer un tri
dans cette masse de données afin de n’en retenir que les plus pertinentes, pour en faire
profiter les membres de sa communauté. En résumé, apporter une intelligence à une masse
d’informations brutes. Pour les membres, ce traitement présente l’avantage de disposer
d’une sélection fiable, car basée sur la confiance que l’on accorde au curateur et à ses
capacités à trier l’information, et ce, avec un gain de temps certain. Pour le curateur, sans
être véritablement un producteur de contenus au sens propre, c’est un moyen de démontrer
une expertise et de se valoriser assez facilement dans la communauté de pairs, via
l’alimentation de hubs, de communautés avec des contenus ciblés et à plus-value.

L’amélioration des outils de recherche dédiés aux réseaux sociaux

Les réseaux sociaux ont intégré cette nouvelle mission d’outil de recherche, et non
uniquement de mise en relation. Ils ont enrichi leurs fonctionnalités dans ce sens. Twitter,
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qui, il y a quelques temps, limitait sa recherche aux publications datant de moins d’une
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semaine, permet désormais d’effectuer ses recherches sur un historique de plusieurs années.
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Facebook a lancé dans plusieurs pays son propre moteur de recherche « Graph search », qui
joue à la fois sur l’aspect social et l’exploitation du Big Data des données fournies par le
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milliard de membres.

Le web social est accessible de partout

C’est le principe du multi-device. Aujourd’hui, tous les médias sociaux sont accessibles via
mobile et tablette, et ont développé une application pour les principaux stores 3. Une étude
de Nielsen parue fin 2012 4, révèle qu’aux États-Unis, le temps passé par les internautes sur
un réseau social via une version mobile ou une application a augmenté de 63 % en 2012.
Cette même étude conclut que le développement des terminaux mobiles connectés à
Internet a contribué à la croissance continue des réseaux sociaux. Les plus anciens ont
adapté leur format natif, destiné aux PC, pour le rendre compatible avec le mobile, par le
biais de versions mobiles, puis d’applications dédiées. Aujourd’hui, le trafic via mobile sur
Facebook représente environ 80 % de son trafic global, et cette proportion continue
d’augmenter. La question à se poser est donc celle d’un possible palier. En revanche, les
réseaux sociaux plus récents se sont, pour la plupart, développés autour des usages du
mobile. Ils exploitent la capacité à envoyer de manière simple et parfois géolocalisée
différentes informations, ou de profiter de services s’appuyant sur lesdites informations.
C’est le cas de Foursquare, réseau social basé sur la géolocalisation, avec gain de badges et la
découverte d’endroits recommandés à proximité par des amis du réseau social, ou encore
Instagram, déjà évoqué.

➤ Témoignage

Les médias sociaux, une disruption irrévocable

Olivier Cimelière a été journaliste et directeur de la communication. Il conseille les entreprises et anime un
blog (leblogducommuniquant.com) sur la communication, l’information, la réputation et la distorsion
d’image.

C’est une litote de dire que les médias sociaux ont bouleversé en une dizaine d’années les modes
d’interaction humains, économiques, politiques et plus généralement sociétaux. Pourtant, même si plus
personne (ou presque) ne songe à remettre en cause l’influence d’un Facebook (l’équivalent de 80 % en
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moyenne des contenus partagés par les internautes), nombreux sont encore ceux qui tentent de mettre le
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pied sur la pédale de frein ou de simplement se contenter de dupliquer en version digitale, les outils de
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communication qu’ils ont toujours eu l’habitude d’utiliser et surtout de contrôler.
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Et c’est sans doute ce premier point qui constitue la toute première disruption introduite par ces réseaux
numériques où chacun peut désormais prendre la parole comme il l’entend, à n’importe quel moment et
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avec parfois une vitesse de propagation qui défie les lois du temps médiatique traditionnel. On l’a d’ailleurs
bien vérifié lors des dramatiques attentats de Paris en janvier 2015 avec la petite bannière « Je suis Charlie »
créée par un anonyme directeur artistique. Elle fut diffusée en quelques heures sur Twitter plus de
3,4 millions de fois à travers le monde entier. Cette exclusivité de la parole longtemps détenue par les
dirigeants, les institutionnels, les experts, les intellectuels et plus ou moins organisée par les médias
classiques, a désormais volé en éclats.
Votre part de voix peut continuer à compter mais plus forcément avec le même impact et dans un
environnement où il faut se faire voir, entendre, comprendre et convaincre pour susciter la confiance de
votre écosystème. Là réside tout l’enjeu communicant d’aujourd’hui et des années à venir pour les
dirigeants et leurs stratèges en communication. Comme le résume si bien le PD-G d’Amazon, Jeff Bezos :
« Votre marque est ce que les gens disent de vous lorsque vous n’êtes pas dans la pièce ! » Et en plus, tout le
monde peut potentiellement le savoir et le diffuser à son tour.
Ce n’est d’ailleurs pas par hasard que plus de 300 dirigeants d’entreprises basés en Amérique du Nord et
Latine, en Europe, en Asie Pacifique, au Moyen-Orient et en Afrique interrogés sur les risques majeurs
attenant à leur activité en 2014 par les cabinets Forbes Insights et Deloitte ont répondu, à 87 %, « la
réputation ». Le traditionnel schéma relationnel où les médias classiques étaient les principaux
interlocuteurs, est maintenant en partie caduc. Aujourd’hui, l’entreprise et ses acteurs évoluent dans un
univers où l’expression, l’opinion et l’information sont multidimensionnelles. D’où une difficulté exacerbée
à évaluer les tendances et les sentiments de la société dans cet enchevêtrement de prises de parole très
diverses mais potentiellement très impactantes pour la réputation de l’entreprise.

Tout le monde est concerné


Cette disruption sociétale concerne absolument tout le monde, à commencer par les salariés eux-mêmes.
Longtemps parent pauvre de la communication d’entreprise, la communication interne devient
actuellement plus que jamais un levier stratégique. Il est illusoire de croire que vos collaborateurs vont
uniquement se contenter de la parole interne. Celle-ci continue bien sûr de compter fortement mais elle
est mise en perspective, voire challengée, par ce que ces derniers lisent, disent et écoutent auprès d’autres
parties prenantes. Il est désormais nécessaire d’associer les collaborateurs à l’animation de la réputation de
l’entreprise. À condition que les choses soient faites avec honnêteté, valeur ajoutée et cohérence, ceux-ci
constituent des ambassadeurs importants. La SNCF a par exemple laissé des cheminots ouvrir des blogs
parlant de leur métier et des engins qu’ils conduisent. Leur ton est parfois critique mais ils sont aussi
capables de défendre leur entreprise lorsqu’ils l’estiment injustement mise en cause. Il est vrai qu’une telle
posture est une mini-révolution dans des systèmes managériaux encore très épris de hiérarchie étanche et
de circuits de validation stricts. Pourtant, qu’on le veuille ou non, ce sont ces schémas relationnels qui vont
progressivement s’imposer dans la vie des entreprises.
De même pour les journalistes : pendant longtemps, ils ont été en effet les interlocuteurs quasi uniques des
organisations et des dirigeants lorsque ceux-ci avaient quelque chose à communiquer largement.
L’irruption des médias sociaux a généré une désintermédiation qui a au début pris de court bon nombre de
journalistes habitués depuis des années à être en somme les porte-parole de la société civile. Aujourd’hui,
plus personne n’attend qu’on lui tende un micro s’il veut s’exprimer ou faire connaître une cause ou
défendre un projet. C’est ainsi que sont apparus ces fameux influenceurs, avec d’abord des blogueurs
reconnus pour leur liberté de ton et leur expertise puis dans la foulée des Youtubeurs comme la jeune
EnJoyPhenix dont les vidéos sont nettement plus vues et crues que les articles des magazines féminins
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ayant pignon sur rue. Les journalistes eux-mêmes ont maintenant embrayé. Les réseaux sociaux, Twitter en
tête, sont devenus des sources d’information et d’idées de sujet autant que le fil AFP, le sommaire du Parisien
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du jour ou ceux des chaînes info.


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L’information est clairement devenue multi-dimensionnelle et même, osons le terme, collaborative dans
certains cas. Le vénérable New York Times s’appuie par exemple sur une « social newsroom » qui source et
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vérifie des contributeurs pour étoffer et élargir les analyses de ses propres reportages. Dans ce vaste
remue-ménage communicationnel, qui certes peut faire un peu peur, il y a pourtant beaucoup
d’opportunités à prendre pied, à comprendre qui s’exprime, quels sont les sujets du moment et comment
l’entreprise peut, elle aussi, apporter sa vision, ses connaissances, ses convictions, etc. Les médias sociaux
ne sont pas une révolution mortifère pour la communication des organisations. Ils sont au contraire
l’occasion d’améliorer la conversation avec les publics et de mieux préserver sa réputation en acceptant
d’être plus ouvert, plus disponible, parfois critiqué mais finalement mieux accepté. C’est donc la
performance et l’évolutivité de l’organisation et de ses activités qui y gagnent.

1. Plusieurs études ont montré l’existence de 5 % de contributeurs actifs, dont 1 % produisent les deux tiers du contenu
(http://www.pearson.fr/resources/titles/27440100844510/extras/6419_chap02.pdf)
2. David Fayon, Géopolitique d’internet, Qui gouverne le monde ?, Paris, Economica, 2013.
3. Un store, ou marché d’applications, est une plateforme en ligne d’applications mobiles destinées à des appareils électroniques mobiles tels que les smartphones et
les tablettes. Un store est accessible par internet, depuis un appareil mobile compatible ou un ordinateur. Le téléchargement d’une application peut être gratuit ou
payant (source Wikipédia).
4. http://www.nielsen.com/us/en/reports/2012/state-of-the-media-the-social-media-report-2012.xhtml
■ 3. Les médias sociaux : nouveau couteau suisse du web ?
Le réflexe est établi : dans un process d’achat, on compare les prix et les services associés
(livraison, garanties, conditions de remboursement…) sur le site de l’entreprise, mais aussi
les avis, commentaires et notations des autres consommateurs sur les différents sites
marchands, les comparateurs de prix… Le choix est vaste !
Grâce aux médias sociaux (réseaux sociaux, forums, blogs, fonctionnalités sociales des sites),
le consommateur est en mesure de s’adresser directement à d’autres consommateurs, de les
interroger sur leur expérience avec la marque, le produit, l’enseigne. Ces informations
présentent un avantage sur celles de l’entreprise : leur objectivité perçue. En effet,
contrairement à l’entreprise ou au site marchand, ces consommateurs – mes pairs – n’ont
rien à me vendre. Je vais donc être tenté de leur faire confiance. Et ce, d’autant plus que la
proximité entre eux et moi sera importante. Comme dans la vraie vie, je ferai davantage
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confiance à un client qu’à une entreprise, mais davantage à une connaissance ou un ami qu’à
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un client lambda. Les infinies combinaisons de liens faibles des médias sociaux permettent
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de multiplier les opportunités de rapprocher deux clients qui ont le même besoin.
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Nous touchons ici une notion essentielle : il s’agit du rapport de force, dont l’avantage est
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progressivement passé du producteur au consommateur. Un phénomène qui s’est accéléré


avec les médias sociaux. En effet, le client est à la fois en mesure de « challenger » le message
commercial avec une multiplicité de sources, et de devenir lui-même un émetteur, de
contribuer à la production de ces messages alternatifs, d’interpeler directement l’entreprise.
Bien évidemment, ces nouveaux comportements ne se limitent pas à la sphère marchande.
Ils sont devenus une nouvelle façon de vivre. On trouve sur le web social de nouveaux amis,
des partenaires, des employeurs (ou des candidats), un(e) conjoint(e) que l’on ne pouvait
précédemment que rechercher dans son environnement proche, dans une démarche très
chronophage. Les médias sociaux permettent de s’informer en s’affranchissant des frontières
et en multipliant les sources d’information, de se divertir, de se former, de partager des
contenus, des passions, des centres d’intérêt.
Mais dans le même temps, les entreprises disposent de logiciels de plus en plus puissants
pour capturer, analyser et exploiter les masses de données recueillies (on parle de Big Data)
avec le consentement plus ou moins affirmé des internautes. Géolocalisation, requêtes
Google, cookies de navigation, inscription via un Facebook Connect, téléchargement
d’applications… sont autant d’actions qui redéfinissent les contours de la vie privée.
L’explosion de l’image partagée

YouTube, Viméo, Dailymotion, FlickR, Pinterest, Instagram, Vine… La liste des réseaux sociaux
centrés autour de l’image fixe ou animée n’en finit pas de s’allonger. De nouveaux acteurs
apparaissent régulièrement, apportant la petite nouveauté qui éveillera l’intérêt des
partageurs frénétiques. De leur côté, des réseaux comme Facebook ou Twitter, conscients du
pouvoir de l’image sur le taux d’usage (temps passé et nombre de visites), proposent
également des fonctionnalités de partage d’images. Les chiffres qui circulent fréquemment
sur le web donnent le vertige. À titre d’exemple, YouTube, créé en 2005, affiche fièrement
ses mensurations : un milliard d’utilisateurs en 2015, et chaque minute, soixante-douze
heures de vidéos sont uploadées et près de trois millions sont vues 1.
Fixe ou animée, l’image tend à se substituer au texte. Plusieurs raisons à cela.
En premier lieu, les contenus du réseau social ont une durée de péremption extrêmement
courte ; ils se retrouvent dans un flux continu d’informations, chacune chassant la
précédente. Il convient donc de permettre une lecture facile et immédiate de l’élément
partagé. Une photo se repère bien plus vite qu’un texte court sur un mur Facebook.
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Ensuite, face à cette dictature du temps contracté et du mouvement perpétuel, la réflexion
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et l’analyse n’y ont que rarement leur place ; l’émotion et la réaction y sont bien plus
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facilement sollicitées. Quoi de meilleur que l’image pour arracher instantanément un sourire,
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une indignation ou un « like » ? De même, dans sa volonté d’écrire le scénario idéal de sa vie
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digitale, le partageur compulsif 2.0 préférera poster négligemment une photo de cette
superbe plage polynésienne ou de cette expo d’art avant-gardiste, plutôt que de l’écrire,
avec la contrainte de devoir peser chaque mot de ce court message, au risque, sinon, de
passer pour un prétentieux.
Le web (le plus efficace en tout cas) a depuis longtemps fait évoluer les règles d’écriture
pour s’affranchir des règles de la lecture linéaire, propre au papier, au profit d’une
appréhension globale des contenus (un scan pour être précis). De nombreuses études d’eye-
tracking font apparaître des schémas bien différents entre une lecture papier (de haut en bas
et de gauche à droite) et la lecture d’une page web qui s’apparente au butinage d’une
abeille frénétique. Dans l’image, point de contrainte de sens de lecture. « Le contenu à diffuser
sur une page Facebook doit donner la priorité à un contenu image », explique Sales Force 2.

Dernier responsable de la prolifération de l’image : la facilité à la produire avec une


excellente qualité. Apple a le premier ouvert la voie avec ses logiciels iPhoto, iMovie, dont la
recette du succès tenait à la convivialité d’usage associée à des performances qui
devançaient largement les concurrents. Instagram, grâce à ses nombreux filtres, permet à
ses 300 millions de membres de partager des photos fortement teintées d’émotion (vintage,
glamour, rétro…) et fait la promesse de passer auprès de son réseau d’amis pour un
photographe de génie. Cette plus-value émotionnelle des filtres est confirmée par Fredric
Jameson, philosophe du post-modernisme : « L’essor des fausses photos vintage est une tentative
de créer une sorte de “nostalgie pour le présent”, une tentative de rendre nos photos plus importantes
et réelles. Nous voulons doter nos vies présentes des sentiments puissants liés à la nostalgie 3. »
Si vous doutez encore de la déferlante de l’image partagée, contentez-vous, lors de vos
prochaines vacances, de distinguer autour de vous le nombre de touristes armés d’un
smartphone de ceux qui disposent d’un véritable appareil photo pour immortaliser leur
voyage. Samsung, leader mondial des smartphones, a tenté une nouvelle stratégie en lançant
le Galaxy Camera, un appareil photo connecté à Internet. Comprenez : conçu nativement
pour les réseaux sociaux. Fin novembre 2012, dans Les Échos Hiroyuki Sasa, PDG de
l’entreprise japonaise Olympus témoigne que : « Le marché des appareils photo compacts
numériques s’est contracté plus brutalement que prévu, car les smartphones équipés de fonctions
photographiques se répandent partout 4 ».

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L’explosion des devices mobiles
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Quelles sont les boutiques qui, depuis un peu plus de dix ans, ont envahi tous les quartiers et
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les centres commerciaux ? Il s’agit des boutiques de téléphonie mobile. L’usage du mobile
est un tel marqueur social que le philosophe Michel Serres a choisi d’appeler « Petite
Poucette 5 » dans son livre éponyme, cette nouvelle génération baignée par les nouvelles
technologies et qui se caractérise notamment par sa dextérité à utiliser le mobile pour rester
connectée. Aujourd’hui, le téléphone mobile sert de moins en moins à téléphoner.
Applications ou sites mobiles, le marketing on line est aujourd’hui « mobile first », entendez que
les stratégies marketing, les développements de sites, les campagnes publicitaires sont en
priorité développés pour les devices mobiles et leurs fonctionnalités riches : appareil photo,
bluetooth, NFC, géolocalisation. Dans son étude Mobile Web Watch 2012 6, Accenture
expliquait déjà que le smartphone est avant tout utilisé pour communiquer. L’envoi ou la
réception de méls via un logiciel installé est l’occupation favorite des consommateurs
interrogés (70 %), suivi de la participation à des réseaux sociaux (62 %) et de la messagerie
instantanée (61 %). Dans les pays développés, l’Internet mobile est également en
progression.

Plusieurs raisons peuvent expliquer cette explosion :


• une guerre des prix que se livrent les opérateurs, et qui est favorable aux consommateurs,
parfois néanmoins aux dépens de la qualité (transmission, assistance téléphonique). Le
lancement de Sosh en 2011, l’offre low cost de Orange, en est une illustration ;
• le déploiement de la 3G, puis progressivement de la 4G, dont le haut débit va favoriser
l’usage ;
• une course à l’innovation chez les constructeurs : pour porter le combat sur un autre
registre que celui de l’innovation, sur lequel il devient difficile de se démarquer, Apple a
orchestré le lancement de son dernier modèle comme un pur objet de luxe ;
• le développement des stores d’applications, avec l’App Store d’Apple, ou celui de Google,
qui ont tous deux franchi la barre symbolique du million d’applications ;
• en termes d’usages, des interactions possibles avec le monde réel : la réalité augmentée,
les services liés à la géolocalisation, les informations disponibles sur les lieux de vente, la
social TV, et demain, avec les puces NFC, le mobile sera peut-être le premier moyen de
paiement.

Cette très forte progression du mobile est encore plus marquante dans les pays émergents.
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Elle s’explique par le fait qu’il est plus rapide, plus facile, et beaucoup moins coûteux pour les
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opérateurs d’installer des tours cellulaires plutôt que de câbler le pays avec des lignes
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terrestres. Au Brésil, en Afrique et en Russie, une très forte proportion des internautes utilise
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son smartphone pour se connecter à Internet. Pour certains pays en développement, la


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découverte d’Internet se fait directement via le mobile, sans passer par l’étape PC, instaurant
de nouveaux comportements.

La tendance mobilité ne se résume pas aux smartphones. Les tablettes participent


également de cette transformation. On tend à oublier que l’iPad ne fait partie de notre
paysage que depuis 2010, tant il est entré dans notre quotidien. Selon le cabinet d’études
IDC, il s’est vendu près de 230 millions de tablettes en 2014. Ce même institut anticipe
cependant un ralentissement de la croissance des ventes de tablettes en raison notamment
de la montée en puissance des ultra-portables et des phablettes. Quelle place prendront les
montres connectées dans l’internet mobile ? Apple n’a pas été le premier mais comme pour
d’autres produits de la marque, le lancement de l’Apple Watch devrait « créer le marché ».
Business Insider prévoit que le marché mondial des montres connectées atteindra
92 millions d’unités en 2018. De son côté, Jupiter Research est plus modéré avec une
prévision de 36 millions d’unités pour la même année
(http://www.huffingtonpost.fr/2015/01/02/apple-watch-2015-smartwatch-
montre_n_6366458.xhtml).
Tout début 2015, Google a annoncé mettre entre parenthèses son projet « Google Glass » de
lunettes connectées à réalité augmentée. Le produit, certes révolutionnaire, n’a pas
véritablement trouvé un public prêt à débourser 1 500 dollars pour un objet qui n’avait pas
démontré de réels cas d’usage et qui s’est, en plus, heurté à un certain nombre de
contraintes économiques, techniques, culturelles et juridiques que Google avait peut-être
minimisé. Mais ce demi-échec ne doit pas minimiser l’impact de l’arrivée toute récente des
objets connectés. Ils donnent une nouvelle orientation à l’internet mobile, et annoncent une
nouvelle révolution pour les particuliers comme pour les entreprises, notamment dans les
secteurs de la santé, du transport et du commerce, pour les entreprises qui sauront exploiter
les immenses quantités de données (les Big Datas) recueillies sur les internautes. L’étude
Deloitte sur les usages Mobile des Français en 2014, indique que 2 % des Français ont accès à
une montre connectée ou à un tracker fitness, mais sont à peine moins de 10 % à déclarer être
prêts à en acquérir un des deux dans les 12 prochains mois.

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1. Les chiffres du web 2012, CIL, http://www.cil.cnrs.fr/CIL/spip.php?article1926
2. Strategies for effective Facebook posts: a timeline analysis
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http://www.buddymedia.com/newsroom/2012/09/salesforce-buddy-media-facebook-timeline-best-practices-wall-posts/
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3. Fausses photos vintage : http://owni.fr/2011/07/30/fausses-photos-vintages/


4. Les compacts numériques à la peine face à la concurrence des smartphones, Le Monde.fr http://www.lemonde.fr/economie/article/2012/11/21/les-compacts-
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numeriques-a-la-peine-face-a-la-concurrence-des-smartphones_1793517_3234.xhtml
5. Michel Serres, Petite Poucette, Le Pommier, collection Manifestes, mars 2012.
6. Étude Mobile Web Watch 2012 : Internet Mobile – Source de nouvelles opportunités de croissance à l’ère de la convergence, http://www.accenture.com/fr-
fr/Pages/insight-mobile-web-watch-2012-mobile-internet.aspx
■ 4. Les nouveaux comportements de l’internaute 2.0
Il est difficile de déterminer si ces nouveaux outils ont fait émerger de nouveaux usages, ou si
les usages étaient latents et n’attendaient que les technologies disponibles pour se révéler.
Difficile également d’isoler les facteurs culturels, psychologiques, historiques, économiques,
sociaux, démographiques, et technologiques qui ont porté ces changements, et selon quel
séquencement dans le temps. Ainsi, il est fréquent d’entendre parler du « nouveau pouvoir
des consommateurs face aux entreprises », telle une émergence spontanée.

L’internaute 2.0 est le fruit d’une longue histoire

Cette situation est le fruit d’une lente évolution qui trouve son origine dès la révolution
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industrielle. Avant cette phase de développement de la production industrielle, prédominait
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une situation de pénurie : peu de volumes produits et des gammes limitées, de longs délais
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de fabrication, des coûts et prix de vente élevés. Le pouvoir était clairement du côté des
producteurs.
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Avec le développement de l’industrialisation, la production en grandes séries est devenue


possible et a permis de réduire progressivement la pénurie des principaux biens de
consommation courante, accompagnée mécaniquement par une baisse des prix et donc un
accès facilité.
Puis les industriels ont laissé une partie de leur pouvoir aux distributeurs en leur cédant la
relation avec le client. Le ver était déjà dans le fruit. Afin de ne pas être trop dépendant des
vendeurs, les industriels ont inventé la marque, supplément d’âme qui permettrait de
différencier les produits entre eux, de s’adresser directement au client qui pouvait ainsi
préciser son choix, en étant moins influencé par les conseils du vendeur que par le souvenir
d’un spot publicitaire.

Une autre phase importante de la prise de pouvoir des consommateurs se produit dans les
années 1950 aux États-Unis, une dizaine d’années plus tard en Europe. C’est l’avènement de
la publicité, la découverte des études de marché et des panels, les premières théories
marketing. La première publicité à la télévision française a été un spot pour Boursin, diffusé
le 1er octobre 1968. Aux USA, Neil Borden théorise le marketing en 1947, l’Institut Gallup se
crée officiellement en 1958 (après que Georges Gallup, professeur de Princeton, ait prédit la
victoire de Roosevelt en 1936), Nielsen naît en 1959. Dès lors, on ne va cesser de sonder,
interroger, questionner le consommateur pour repérer, analyser, comprendre ses envies et
ses « motivations d’achat », avant même qu’il en prenne conscience.
En 1973, le premier choc pétrolier donne un sévère coup de frein à la consommation et
marque la fin de ce que Jean Fourastié a nommé les Trente Glorieuses. Les producteurs (et
leurs marques) vont devoir redoubler d’efforts pour s’attirer la préférence de
consommateurs qui découvrent la crise, le chômage et la baisse du pouvoir d’achat.
Pour soutenir la consommation et le désir, les producteurs inventent l’hyper-segmentation
des gammes qui donne l’illusion d’un produit parfaitement adapté aux besoins de chacun. Ils
parviennent à faire de la possession d’un produit un marqueur statutaire. Ils encouragent
une obsolescence accélérée des produits qui maintient la demande par le renouvellement.
C’est, en France, l’époque des extravagances publicitaires : Jacques Séguéla met une Citroën
sur le pont du porte-avions Clémenceau, Chanel s’offre Ridley Scott comme réalisateur et la
boisson anisée Pacific nous emporte dans un des plus beaux lagons du monde. C’est aussi le
culte des top-modèles qui détrônent les stars du cinéma : on sait mettre un nom sur le visage
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d’Estelle Lefebure ou la plastique de Claudia Schiffer. C’est enfin l’explosion du design
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industriel qui démode plus rapidement les produits : Philippe Stark réinvente la télévision, la
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brosse à dents, le tabouret ou le presse-agrumes.


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L’étape finale de cette prise de pouvoir du consommateur, c’est sa participation à la


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fabrication du produit (en avez-vous conscience quand vous montez un meuble Ikea ?). Ou
encore sa contribution à la délivrance du service : par exemple lorsque vous décidez de
réserver et d’imprimer votre billet d’avion à deux heures du matin sans demander l’avis de
personne. Cette dernière étape, rendue possible par les technologies de l’information et de
la communication, satisfait les consommateurs qui ont un sentiment de plus grande liberté.
Dans le même temps, elle comble les entreprises qui ont déporté vers le consommateur une
partie de leurs coûts (temps de travail, électricité, encre et papier pour l’impression de notre
billet d’avion).

Quelques comportements remarquables

Ainsi, les rapports qu’entretiennent aujourd’hui clients ou prospects, collaborateurs,


candidats avec l’entreprise, leurs comportements, leurs schémas de pensée ou les usages
qu’ils font des nouveaux outils d’information, ne sont que le fruit de cette histoire que nous
venons de dérouler avec ce rapide voyage dans le temps.
Arrêtons-nous sur quelques-uns de ces comportements qui ne sont pas sans incidence sur les
stratégies de communication des entreprises.

L’immédiateté

C’est sans aucun doute un des éléments les plus marquants du web social. Il a été initié avec
les mobiles, qui offraient la liberté de ne pas attacher la communication à un lieu précis. Dès
lors, chacun devenait joignable à tout moment. En parallèle, le développement des
smartphones a libéré également l’usage d’Internet de la contrainte d’un poste physique.
Enfin, c’est l’explosion d’usages comme le check-in dans un lieu (via Foursquare par exemple),
une action simplifiée à l’extrême : le like de Facebook, ou la rédaction de messages courts
(SMS, puis tweet), qui sont rendus possibles par le maillage des réseaux et, demain, la 4G. Ce
nouveau rapport au temps, différent entre les entreprises et leur environnement, est une
des difficultés pour celles qui investissent les médias sociaux. La bataille de la vitesse peut
difficilement être gagnée par les entreprises.

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Le problème personnel porté sur la place publique
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Il permet d’interpeller les entreprises en les mettant face à un buzz : un mouvement de plus
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ou moins d’ampleur, plus ou moins organisé, mais susceptible de porter un préjudice fort à la
marque. Il peut s’agir pour l’internaute de contraindre l’entreprise par une forme de
chantage, ou tout simplement de nuire à son image en prenant la foule à témoin. Citons les
récents exemples des prothèses PIP défectueuses, les pilules de troisième et quatrième
générations, les plaintes humoristiques et virales de clients de la SNCF ou de Bouygues
Telecom sur leurs pages Facebook. Ce point est fortement lié au facteur « émotion » qui
favorise la viralité, ainsi qu’à celui de la transparence, puisque l’internaute va se dévoiler. Ces
stratégies se révèlent particulièrement efficaces, notamment contre des entreprises qui ont
le plus souvent tendance à se réfugier derrière le rationnel, les preuves, le cadre
réglementaire pour se défendre. Elles passent ainsi pour des organisations froides et sans
âme dans une société où les émotions, surtout quand elles sont collectives, prennent une
place grandissante.
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Marina Schifrin est devenue célèbre pour avoir publié sur YouTube une vidéo dans laquelle elle
expliquait les mauvaises conditions de travail qui l’amenaient à démissionner. Une bien mauvaise
publicité pour l’image de son employeur, vue près de 20 millions de fois, sans compter une invitation à
un show TV sur la chaîne américaine ABC en novembre 2014.

La remise en cause de toutes les autorités traditionnelles

Parents, professeurs, institutions, entreprises ne disposent plus d’une légitimité a priori. De


nombreuses études sociologiques se sont penchées sur le sujet, attribuant cette situation à
l’éclatement de la cellule familiale, aux théories de Françoise Dolto, à la disparition
d’institutions propres à favoriser l’intégration ou l’éducation tardive comme le service
militaire, ou à développer la notion de collectif comme les syndicats. Le savoir ne s’acquiert
plus seulement avec l’expérience. Il est de plus en plus contextuel et rapidement obsolète :
l’innovation a balayé ce rapport qui existait entre expérience et connaissance. Le savoir n’est
également plus un attribut de quelques élus : il n’a jamais été aussi disponible, gratuit,
immense. Il s’affranchit de toutes les contraintes : géographique (je peux aujourd’hui
consulter des publications de la bibliothèque du Congrès américain), nationale (la seule
contrainte est la maîtrise de la langue pour profiter de ces ressources), économique (avec la
masse d’informations gratuites disponibles, sans préjuger de leur qualité). S’y est substituée
une web démocratie, dans laquelle les sites de pétition comme change.org permettent à
l’internaute d’intervenir (ou d’avoir le sentiment d’intervenir) dans la vie publique. La parole
de chacun présente la même valeur. Il n’existe plus de détenteurs officiels. La parole de
l’entreprise, sa communication, n’est qu’une voix parmi toutes les autres. Reste que la
capacité de tirer du sens de toute cette masse d’informations demande des compétences
spécifiques et l’acquisition de nouveaux schémas cognitifs.

Le « tout-à-l’ego » ou le développement d’une identité multiple


et scénarisée
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Cette notion d’identité multiple et scénarisée est à mettre en balance avec les notions de
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transparence, de privacy, des risques à étaler sa vie privée sur les médias sociaux. Elle
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s’oppose aussi aux théories de réputation personnelle ou personal branding qui, sur le plan
des objectifs professionnels (recherche d’emploi, de partenaires d’affaires, de clients),
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conseillent de veiller à une cohérence entre les différentes traces laissées : profils ou
messages. En effet, si nous laissons de côté les médias sociaux à usage professionnel, force
est de constater que les messages et contenus déposés sur les réseaux sociaux grand public
sont très souvent choisis pour leur capacité d’auto-valorisation et les messages qu’ils
induisent. Un check-in Foursquare, une géo-localisation sur Facebook ou Instagram réalisé
dans une galerie d’art contemporain sera plus valorisant que s’il est fait dans un magasin de
bricolage, même si je fréquente plus souvent ce dernier. Il induit que je suis amateur d’art,
esthète, cultivé, branché… Une photo de soirée avec plusieurs amis sera la preuve que j’ai
une vie sociale riche et bien remplie, une autre de ski que je suis un grand sportif. La
puissance évocatrice d’une image, qui ne ment pas, évitera d’ailleurs de rédiger un message
textuel qui pourrait passer pour prétentieux (« je suis dans la galerie d’art la plus branchée du
moment ; tous mes amis m’aiment ; je ne skie qu’en hors-piste… »). Notons enfin que cette notion
d’identité multiple n’est pas réservée à la sphère digitale. L’expression récente « slasher »,
venue des USA, traduit une nouvelle réalité de l’activité professionnelle. Il s’agit de cumuler
plusieurs statuts professionnels simultanément, volontairement ou pour des raisons
économiques : salarié, consultant indépendant, professeur externe…
L’émotion prend le pas sur l’analyse

Le web social est un web « chaud » qui privilégie tout ce qui peut faire réagir, amener, des
commentaires, des recommandations, des likes et autres signes distinctifs de mise en avant
du contenu, de son auteur ou transmetteur. Il est clair que cela se ressent tant dans le type
que dans la forme du contenu : des contenus courts et souvent basés sur l’image, des titres
accrocheurs, voire racoleurs, de l’humour ou de la rage. Autant de procédés qui sollicitent
davantage l’émotion que la réflexion et l’analyse. Sur ce terreau, s’épanouissent des
activistes aux actions louables, mais aussi des opportunistes qui ont fait de la manipulation et
de la désinformation sur le web un levier puissant de négociation avec des acteurs officiels.
D’un côté le « liketivisme », qui favorise la mobilisation en nombre mais sans réel
engagement. On parle d’ailleurs aussi de « slacktivisme » (littéralement « activisme
paresseux »), formé par la fusion du terme anglais « slacker » (fainéant) et du mot « activisme »,
qui consiste à participer en ligne à un mouvement collectif sans s’engager plus activement.
Ainsi, le volet digital du mouvement « Je suis Charlie » en est une illustration récente. De
l’autre, le bad buzz comme première source d’influence et de chantage pour obtenir des
résultats ou des avantages personnels, sous couvert de défense d’une cause collective.
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La porosité des diverses sphères


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On a souvent en tête l’uniforme du travailleur, le bleu qui, une fois enlevé, permettait de
basculer clairement dans la sphère personnelle et privée. La sphère professionnelle se
caractérisait par cet uniforme, ou un autre, et par des outils de travail qui étaient la propriété
de l’entreprise et n’en sortaient jamais. Des phases de transition (passage au vestiaire, sortie
de l’atelier ou de l’usine) étaient collectives et représentaient un rituel.
Les travailleurs sont devenus en majorité des travailleurs du savoir. Et l’émergence de
nouveaux outils, dont les usages sont tant personnels que professionnels, a peu à peu rendu
poreuses les différentes sphères de vie.
Téléphone, ordinateur portable, extranet, méls, SMS s’invitent bien souvent à la maison
après les heures de travail ou pendant les repos hebdomadaires, voire les vacances. À
l’inverse, certaines tâches privées sont effectuées grâce au web dans l’entreprise
(démarches administratives, achats en ligne…). Cette porosité participe, surtout pour le
salarié, de la volonté (quand il ne s’agit pas d’une contrainte imposée par l’entreprise)
d’organiser ses agendas privés et professionnels. Cette approche est également permise
avec les outils personnels apportés dans l’entreprise, le « Bring Your Own Device », ou au
contraire des outils de l’entreprise que le collaborateur a l’autorisation de sortir de
l’entreprise pour des besoins personnels.
Enfin, la présence d’un collaborateur sur un réseau social professionnel, parfois promue par
l’entreprise elle-même qui y voit un intérêt en termes de visibilité, contribue à cette
ambiguïté. Nous y trouvons des collaborateurs ambassadeurs de leur entreprise, qui dans le
même temps précisent être ouverts à des propositions de poste sur leur profil.

Des salariés / candidats / citoyens consuméristes

Le pouvoir passé des producteurs aux consommateurs, l’élévation du niveau d’instruction, et


enfin la possibilité d’accéder facilement et gratuitement à des ressources d’information quasi
gratuites, ont fait basculer le grand public dans un réflexe d’évaluation de toutes les
propositions qui lui sont faites. Et ce, bien au-delà de la seule sphère marchande, qui ne
serait dans ce cas qu’une remise en cause du discours commercial de l’entreprise. Le citoyen,
élève, collaborateur, patient n’accepte plus docilement le discours de son représentant
politique de son professeur, de son patron ou de son médecin, sans le comparer à celui du
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compétiteur ou du confrère, dans une recherche constante de maximisation de la valeur.
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L’évolution accélérée des connaissances, voire son obsolescence, ne permet plus de faire
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confiance à un seul sachant traditionnel, qui n’aura peut-être pas mis à jour ses
connaissances, et à qui l’on reproche parfois aussi un manque d’impartialité. Le grand public
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rejette les discours uniques et veut pouvoir comparer, juger, évaluer.

La recommandation

La recommandation est au cœur des médias sociaux. En effet, positive ou négative, la


recommandation trouve sa force dans la légitimité supposée et la popularité de celui qui la
fournit. Qu’il s’agisse de recommander un restaurant sur TripAdvisor, ou un professionnel sur
LinkedIn, encore une fois, la recommandation vise à s’affranchir de la subjectivité intéressée
des émetteurs traditionnels, pour se tourner vers davantage d’honnêteté. La
recommandation est une nouvelle forme d’assurance. Le pouvoir de conviction de la
recommandation est directement lié à la valeur de celui qui la donne : compétences
évidentes, popularité dans le réseau. Celui qui cherche à se faire recommander prendra soin
de sélectionner des leaders populaires, riches en fans ou en abonnés. Les critères vont ainsi à
la fois porter sur les attributs du profil (qui est-il ?), que sur le volume de son activité au sein
de la communauté. Mais la légitimité de la recommandation est déjà remise en cause. Son
usage en tant que nouvel outil marketing amène certaines entreprises à la monnayer auprès
de prestataires spécialisés : messages de faux clients, achats de fans ou d’abonnés bidons.
Une autre critique porte sur une trop grande attention portée au volume des contributions
et pas assez à leur qualité. Klout, par exemple, est un outil qui vise à déterminer votre
potentiel d’influenceur. Il établit néanmoins son score sur le seul critère de quantité de votre
activité numérique. Tara Hunt, dans son célèbre essai 1, définit le whuffie comme une unité de
mesure du caractère social et de partage d’un individu, ce qui correspond à son degré
d’influence. Ce whuffie est à n’en pas douter un indicateur précieux pour enrichir les outils de
CRM en complément des critères traditionnels (données socio-démographiques, panier
moyen, ancienneté de la relation…).

Le personal branding et l’e-réputation

Le personal branding, ou marque personnelle, consiste à définir l’identité perçue d’un


individu, notamment au travers des activités et des traces qu’il laissera sur le web. Cette
démarche peut être volontaire, construite dans un but déterminé, ou simplement pour
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satisfaire des pulsions égotiques. Elle peut aussi être subie, c’est-à-dire bâtie par des tiers,
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sans aucune stratégie consciente. Après les produits et les entreprises, les individus :
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vedettes, sportifs, hommes politiques, et aujourd’hui candidats en recherche d’emploi, tous


sont sommés de se construire une marque. Seul moyen de survivre dans une compétition
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acharnée. Les particuliers, à l’inverse de personnalités publiques, vont notamment


développer cette identité au travers des actions et prises de parole qu’ils auront sur les
médias sociaux, ou que les membres d’une communauté décideront de leur attribuer. Le
résultat de cette identité, de cette empreinte numérique voulue ou subie, se concrétisera
par un résultat de recherche sur un moteur type Google.
Bâtir une stratégie de personal branding signifie optimiser sa présence de manière positive,
sélectionner finement ses traces, rapprocher la réalité perçue et les objectifs que l’on se fixe,
veiller aux informations vous concernant laissées par d’autres. Le risque est de développer
une image déformée de soi-même ou éloignée de l’objectif fixé. Quelques photos hors
contexte, des commentaires hors propos très difficiles à supprimer, et vous voilà avec une
image projetée bien loin de celle voulue.
Les multiples potentialités des réseaux sociaux sont aussi paradoxalement leur plus grand
risque car en augmentant la charge cognitive, on augmente les risques psychosociaux, en
particulier ceux relevant de l’addiction. Les réseaux sociaux deviennent alors un refuge
contre la solitude avec le refus d’avoir du temps « à ne rien faire », et une certaine
compulsivité à consulter sans jamais s’arrêter : contenus, avis, recommandations,
sollicitations… On constate une véritable dépendance à cet outil qui permet de mettre en
avant sa vie au travers de ses statuts, photos, vidéos au risque de ne plus vivre l’instant pour
lui-même mais pour ce qu’il apportera comme « like » et commentaires sur le réseau social
favori. Les smartphones sont déjà en passe d’être remplacés, complétés par des smartwatch
ou des lunettes connectées, pour une connexion encore plus « naturelle ».
L’exposition égotique n’est pas sans risque pour sa carrière, sa famille, son entourage.
L’entreprise est pour cela souvent bien accueillie quand elle propose à ses salariés une aide
à la compréhension des opportunités et des précautions à prendre, avec des guides de bon
usage des médias sociaux.
Ce désir d’être reconnu, repris, exposé, considéré comme incontournable, peut vite mener à
une dépendance, d’où l’émergence récente de formations de digital detox et un
positionnement syndical de la CFDT et CGT sur le droit à la déconnexion.

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➤ Témoignage

Carole Blancot est psychosociologue clinicienne, psychothérapeute et directrice de Spotpink agence de


communication RH.

Qu’est-ce que la detox digitale et quel rôle les professionnels RH peuvent-ils jouer en la matière ?

Carole Blancot : Tandis qu’il est encore courant de vanter les mérites du « tout numérique » pour près de
3 milliards d’internautes dans le monde (dont 50 millions en France), il est encore peu commun de
considérer que le digital peut pénaliser la vie personnelle (familiale, affective) et professionnelle.
Pourtant, une pratique intensive et/ou inadaptée des médias sociaux et des technologies de la
communication, peut favoriser l’apparition de symptômes psychologiques et physiques, susceptibles
d’impacter la sphère professionnelle et/ou personnelle.
Les manifestations (physiques et psychologiques) de stress, les conduites addictives, celles d’évitement, les
inhibitions, les réactions agressives, le sentiment de détresse... sont des exemples de manifestations d’une
souffrance psychique.

Les professionnels des ressources humaines peuvent-ils encore ignorer les risques associés à une pratique intensive
ou inadaptée des médias sociaux (que celle-ci soit professionnelle et/ou personnelle) ?

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C. B. : L’obligation générale de sécurité incombant à l’employeur vis-à-vis de ses salariés est « déléguée »
aux professionnels des ressources humaines qui ne peuvent donc plus désormais ignorer les risques
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associés à ce type de pratiques. L’article L4121-1 et les suivants du Code du travail précise notamment que :
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« L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et
mentale des travailleurs. »
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La détoxification digitale peut s’inscrire dans la politique de RSE des entreprises, être proposée par les RH à ceux qui
en expriment le besoin ou qui en souffrent.

C. B. : Le jour viendra peut-être où les médecins prescriront une cure de détox. digitale comme ils
prescrivent parfois des cures thermales ou encore des séances de kinésithérapie. Certaines mutuelles
prennent déjà en charge les consultations de psychologues. Tout ou partie des séances de psychothérapie
et des frais engagés pour se détoxifier des effets néfastes qu’a parfois le numérique sur notre psychisme,
notre corps et nos comportements peuvent être pris en charge par l’employeur ou la mutuelle collective
contractée par ce dernier.

De l’internaute au salarié digital

Les engagements de l’employeur envers ses salariés sur leurs conditions de travail, leur
avenir dans l’entreprise, la politique salariale et les outils de travail, forment le nouveau
contrat social qui lie l’un à l’autre. Cependant, ce lien s’est fragilisé de part et d’autre avec la
crise et un nouveau rapport au travail et à l’entreprise s’est créé chez les salariés. Il n’est plus
question de perdre sa vie en la gagnant, de répondre à la logique de l’honneur d’un travail
bien fait au prix de sa santé physique ou psychologique. Le travail n’est plus le centre de la
vie mais l’un de ses volets que l’on doit rendre le plus intéressant ou parfois le moins pénible
possible, afin de profiter des autres volets (familial, culturel, associatif, sportif…).
Le « travailler plus pour gagner plus » a fait long feu pour faire place à une approche
orientée sur les satisfactions apportées par le travail. Glassdoor 2 estime que 58 % des
employés préfèrent un salaire moins important mais un meilleur équilibre entre leur vie
privée et leur travail.
Cette recherche de l’équilibre vie professionnelle/vie privée est un critère que l’on retrouve
dans les enquêtes réalisées auprès des jeunes diplômés, comme celle de Universum 3.
On ose de nouveau parler du plaisir de travailler : la Sécurité sociale belge a mené sa
réorganisation autour du concept d’employé heureux 4, avec un succès remarquable du point
de vue de l’amélioration des performances et de son attractivité.
Les nouvelles valeurs véhiculées par cette approche autour de l’épanouissement des
salariés rencontrent un écho très favorable auprès de candidats dont certains n’adhèrent
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plus à des discours RH axés sur la performance ou l’excellence. Ces valeurs plus humaines se
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traduisent dans les entreprises par davantage d’autonomie, de responsabilisation, de
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reconnaissance accordée aux salariés dans l’organisation de leur travail. C’est sur la base de
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ce constat que des entreprises mettent en place des programmes de Qualité de Vie au
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Travail (QVT). Cela produit en retour un sentiment de confiance, de bien-être, mais aussi de
performance par un engagement plus naturel et agréable. Il est intéressant de constater
comment l’image des SCOP (Sociétés coopératives et participatives) a évolué positivement
ces dernières années. En février 2014, Arte a diffusé un documentaire intitulé « Le bonheur
au travail » (http://pro.arte.tv/2015/01/le-bonheur-au-travail-diff-20-fev-societe-et-
culture/), actualisant le concept « d’entreprise libérée » déjà théorisé en 1992 par T. Peters
dans son ouvrage Libération Management, lui-même inspiré des travaux de l’école des
relations humaines dans les années 1960.

➤ Témoignage

Comprendre et accepter le changement

David Fayon (@fayon) est consultant web dans la Silicon Valley. Auteur de plusieurs ouvrages sur le
numérique, il revient sur les changements survenus et à venir sur le sujet et leurs conséquences pour les
entreprises.
« En matière de télécoms, les entreprises ont connu trois révolutions. Nous avons d’abord eu le téléphone, dans les
années 1970. Dans les années 1990, le mél est apparu, puis c’est au tour des réseaux sociaux au cours des années
2010.
Avec les mails, nous sommes entrés dans le web 1.0. Cela induit déjà un certain nombre de changements
structurants, comme la possibilité d’inclure des pièces jointes, de transférer des messages, de mettre quelqu’un en
copie ou en copie cachée d’un message, de s’adresser à plusieurs destinataires… Ces trois révolutions ont à chaque
fois entraîné des craintes et des réticences pour les directeurs (distraction et diminution de la productivité des
collaborateurs, perte de pouvoir). Néanmoins, elles ont permis de développer de nouveaux usages et de créer de
la valeur. Quelle entreprise pourrait se passer aujourd’hui du téléphone ou du mél ? Demain, il en sera de même
avec les réseaux sociaux.

Les réseaux et les médias sociaux sont, eux, au cœur du web 2.0. Celui-ci est participatif. Chaque acteur partage,
commente, etc. Le passage du web 1.0 au web 2.0 est aussi technique. C’est la syndication de contenu avec les flux
RSS, les feuilles de style CSS… C’est enfin tout ce qui touche le rapport aux données. Celles-ci sont collectées par les
applications comme Facebook ou LinkedIn. Des applications tentent de verrouiller ces données – là où réside la
valeur – alors que les utilisateurs souhaitent pouvoir les transférer de l’une à l’autre. Toute cette dimension autour
des données est cruciale. On voit apparaître les enjeux aujourd’hui avec le Big Data et l’Open Data. Celui-ci
consiste à rendre les données d’une plateforme accessible à un écosystème d’entreprises et de partenaires pour
créer de la valeur.

La suite, c’est le web 3.0 qui, pour moi, se caractérise par l’Internet des objets – l’ensemble des objets connectés :
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au-delà des tablettes, PC et smartphones, ce sont, par exemple, les lunettes de Google, les puces RFID – et le web
sémantique. Le web sémantique permettra de trouver des informations plus facilement. Un certain nombre de
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normes du W3C permettent ainsi de marquer les données et donc de les contextualiser, pour faciliter la recherche
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d’informations pertinentes et être à l’écoute des signaux faibles, porteurs de sens.


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De nouvelles formes de management

Ces évolutions touchent de nombreux services de l’entreprise, comme le marketing, le commercial, mais aussi les
RH. Le web modifie le rapport au travail, au temps, à l’espace. Il permet l’émergence de formes de télétravail. On
voit ainsi naître et croître une certaine porosité des frontières entre la vie privée et la vie professionnelle. Les
collaborateurs font des choses personnelles au bureau, avec les outils de l’entreprise ou non. Mais, a contrario,
avec la culture du résultat plus que des moyens, ils emmènent du travail à la maison pour boucler un dossier
important. Ces phénomènes appellent de nouvelles formes de management. Par exemple, à La Poste, en 2015,
tous les facteurs auront un smartphone avec, bien entendu, des usages professionnels, mais aussi un usage
personnel toléré.

L’accroissement des données demande aussi au management de répondre à un autre enjeu : la capacité des
salariés à apprendre en permanence pour conserver leur employabilité. Les changements, très rapides, nécessitent
la mise en place d’autoformation, d’e-learning. Les profils recherchés seront alors des profils d’experts et de
connecteurs qui savent où aller chercher l’information, comment trouver les sachants, etc.

S’agissant des métiers, le web 1.0 a introduit le webmestre et le web 2.0 le community manager. À la frontière
entre le 2.0 et le 3.0, il y a le data scientist. L’entreprise doit intégrer ces nouvelles fonctions.
Mais surtout, toutes les nouvelles applications connectées permettront de nouveaux usages et services. Plus que
de nouveaux métiers – même s’il y en aura à la marge –, l’entreprise va voir ses métiers changer, évoluer. On voit
ainsi déjà l’explosion des téléconseillers pour tout ce qui concerne la gestion des back-offices.
Des niveaux d’engagement hétérogènes

Toute la difficulté sera d’affronter la résistance au changement tant des salariés que du management lui-même.
Certains cadres dirigeants devraient être coachés pour voir dans les changements induits par le web des
opportunités, et non des menaces. Le web permet de co-innover, de co-créer des produits et services, jusqu’à
impliquer les internautes, les clients, dans la création de produits. C’est aussi un formidable outil pour mener une
veille poussée.
Les entreprises doivent intégrer la révolution numérique, au risque sinon de perdre des clients, du moins de perdre
des marchés…

Les grandes entreprises prennent déjà le virage, avec certains services (marketing, système d’information,
communication) en avance sur d’autres dans la mise en œuvre de ce changement.
Chez les TPE et les PME, on constate un vrai retard. La moitié des TPE en France n’a pas de site web. Certaines sont
déjà rendues au 2.0, quand d’autres n’ont même pas intégré le 1.0. Il faut une rapide prise de conscience, avec une
vraie politique numérique et d’e-RH.
Toutes les entreprises doivent donc s’engager dans cette mise en œuvre. Il leur faut une feuille de route qui
mesure les bénéfices sur la création de valeur, le partage de l’information, etc. Par exemple, la mise en œuvre d’un
réseau social d’entreprise, pour les RH, leur permettra de mettre en place des politiques de GPEC plus efficaces,
avec une vision à cinq ans, par exemple, sur les départs à la retraite et les démissions, les nouveaux métiers, les
besoins à venir en recrutement et en formation, les valorisations des talents… Les outils participatifs représentent
un réel enjeu sur ce sujet. »

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1. Tara Hunt, L’effet Whuffie, Tirer parti de la puissance des réseaux sociaux pour développer son business, Éditions Diateino, (traduit en français par R. Falzerana), 2010.
2. Infographie de Glassdoor et Harris interactive http://pinterest.com/pin/71002131597905856
3. Google et BMW, en tête des employeurs les plus attractifs en Europe http://www.focusrh.com/ecole-entreprise/jeunes-diplomes/a-la-une/google-et-bmw-en-
tete-des-employeurs-les-plus-attractifs-en-europe.xhtml
4. Lire le témoignage de Laurence Vanhée : Le changement et le bonheur comme leviers de motivation, p. 193.
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« La définition de la folie, c’est de refaire la même chose encore et encore en espérant
un résultat différent. »
Albert Einstein

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■ Introduction

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Pourquoi les innovations en matière de technologies de l’information ont un tel impact sur
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les entreprises ? Pourquoi lit-on fréquemment que les entreprises sont en retard dans
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l’adoption des nouveaux outils ? qu’elles peinent dans la transformation digitale de leur
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activité et se font distancer par de nouveaux acteurs pure players ? On a même donné un nom
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à cette incapacité des entreprises à s’adapter : l’« ubérisation », mot issu de Uber, société de
VTC qui bouscule les taxis traditionnels. Pourtant, les entreprises ont toujours su intégrer les
innovations pour optimiser leurs process. Les innovations anciennes : charbon, électricité,
mécanisation, automatisation, informatique, et plus récemment des outils comme le fax, le
téléphone portable ou l’ordinateur individuel. Les entreprises étaient d’ailleurs précurseurs
dans leur adoption, à même d’en tirer avantage malgré des coûts d’acquisition élevés. Les
particuliers devaient attendre une augmentation des volumes produits et une simplification
des fonctionnalités qui permettent de diminuer les prix et de les rendre accessibles dans la
sphère privée.

Or, aujourd’hui, les innovations récentes liées au web et aux médias sociaux semblent
échapper à l’entreprise, ou tout au moins avoir du mal à les intégrer. L’entreprise, en raison
de contraintes de budget, de temps, de sécurité, ou plus souvent de freins culturels, est en
retard sur les matériels et sur les logiciels installés, sur les usages donc. Ces dernières années,
le degré d’adoption des nouveaux outils s’est renversé. L’innovation vient désormais du
grand public, des salariés. Ceux-ci sont habitués à des ordinateurs puissants, simples d’usage,
permettant l’installation facile de nouveaux programmes et applications. L’accès à des
ressources en ligne particulièrement performantes est facilité par des outils comme Google
Drive ou des agrégateurs de flux RSS par exemple. Le tout, accessible sans contrainte de lieu
via les outils mobiles (netbook, smartphone, tablette…) et les réseaux wifi ou 3G/4G. Les
stores d’applications ont créé un nouveau réflexe : à chaque besoin, son application gratuite
pour le satisfaire.
Il apparaît évident que les nouveaux outils du web social font déjà partie du quotidien de la
sphère privée. Ils permettent de produire facilement, rapidement et gratuitement des
contenus riches (texte, image, vidéo, son), de gérer sa présence en ligne, de se tenir informé
efficacement grâce à des sources multiples, souvent gratuites et faciles d’accès. Les
internautes sont passés naturellement du statut de consommateur de contenus à celui de
producteurs, quand dans l’entreprise, les salariés sont parfois au régime sec de l’information.

Certaines entreprises, encore essentiellement dans les IT (Information Technology) pour le


moment, expérimentent des approches nouvelles, basées sur le BYOD (Bring Your Own Device
/ Venez avec vos propres outils). Ainsi, elles permettent aux salariés qui le désirent
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d’apporter leur propre matériel. Mais ces entreprises doivent être vigilantes sur les
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consignes de sécurité, gérer l’hétérogénéité du parc, anticiper les coûts induits, organiser de
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nouvelles formes d’assistance aux utilisateurs. Ceci génère une complexité dans le suivi, la
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maintenance, et les achats pour les DSI. Surtout, ce principe semble difficile à mettre en
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place sur des populations de collaborateurs qui ne sont pas parfaitement à l’aise avec ces
outils quand d’autres sont déjà familiers des wearables. Comment gérer alors ces différences
de culture et d’usages digitaux et éviter qu’ils ne créent des inégalités nouvelles au sein de
l’entreprise ?

Le web, puis le web social ont instauré la pluralité comme modèle dominant. La liberté de
parole, associée à des sources d’information quasi illimitées, s’épanouit dans la vie de tous
les jours. Elle installe comme un réflexe, comme un nouveau symbole de liberté même, cette
consommation d’information facile, instantanée et gratuite. Quelle déconvenue, lorsque
nous pénétrons dans les murs de la plupart des entreprises ! L’information est le privilège
d’une aristocratie, dans sa production comme dans sa consommation. Elle est contrôlée, sur-
validée, édulcorée. Elle suit des parcours complexes avant d’être distribuée. Elle arrive trop
tard auprès de collaborateurs qui l’ont déjà obtenue par leurs démarches personnelles, via
des sources hors de l’entreprise, sous une forme non censurée qui termine de décrédibiliser
l’entreprise, sa communication interne et ses caciques.
Quelques entreprises permettent cependant à leurs salariés, sous certaines conditions, de se
connecter à ces sources d’information libres, comme les réseaux sociaux externes. Ces
usages sont encadrés par des chartes qui s’attachent à définir les limites de cette
convenance de l’employeur et la responsabilité du salarié. À noter que cette ouverture
s’accompagne parfois d’une surveillance renforcée des usages, du temps passé sur des sites
non liés directement à une activité professionnelle. Autant de nuances qu’il semble difficile
de définir au préalable.
Enfin, le management n’est que très rarement associé à ces changements, ou encore il ne les
souhaite pas, de peur de perdre du pouvoir. Il est parfois le frein à la diffusion du 2.0 dans
l’entreprise. Il peut se retrouver en porte-à-faux sur la manière de gérer des salariés
connectés en permanence sur certains sites pour chercher une information ou participer à
des discussions. Comment savoir si l’usage est professionnel ? Ici le cadre réglementaire, en
retard sur les usages, n’est pas d’un grand secours. Nous abordons dans ce chapitre les
raisons intrinsèques de l’entreprise qui peuvent expliquer ce retard.

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■ 1. Pourquoi les entreprises sont-elles en retard ?

Elles ne sont pas habituées à la liberté de parole

Le succès de ces outils de conversation tient, notamment, à la liberté d’expression qu’ils


offrent. Chaque internaute est égal devant la prise de parole. Il revendique cette liberté
d’expression qui fait fi des habituelles distinctions entre ceux qui sont autorisés à s’exprimer
(par leur statut social ou leur position dans l’entreprise) et ceux qui n’ont d’autre droit que
d’écouter. Aujourd’hui, la hiérarchie entre les différents émetteurs est de moins en moins
statutaire, elle est le fruit de la reconnaissance a posteriori par une audience sur la base
d’autres critères (objectivité supposée, intimité avec l’émetteur, qualité perçue des propos
émis). Le statut, sans complètement disparaître, doit composer avec l’influence. Les
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traditionnelles hiérarchies entre des acteurs légitimes (journalistes, enseignants, experts,
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scientifiques…) et un grand public cantonné dans le rôle de récepteur passif, sont remises
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en cause. Elles ne peuvent continuer à subsister face à ces nouveaux émetteurs, dont le
« bruit », même infime individuellement, s’impose par la seule multiplication des sources.
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Les entreprises, en revanche, ont pour la plupart conservé une distribution de la parole
basée sur la position hiérarchique de leurs acteurs ou sur leur rôle institutionnel. Au top
management le seul droit de s’exprimer sur l’entreprise. Un modèle cohérent avec
l’organisation pyramidale et une répartition du travail assurée par quelques décideurs
diplômés. Des décideurs qui définissent les normes du travail, et des exécutants qui les
appliquent docilement. Ce modèle d’entreprise était d’ailleurs le reflet de la structure de la
société : une élite aristocratique – dont les usages et les codes représentent le modèle à
suivre – face à une classe d’ouvriers, gonflée par l’exode rural et stigmatisée (alcoolisme,
hygiène, agitation politique…). De Germinal à Taylor, puis aux Trente Glorieuses, avant
d’arriver à l’ère post-industrielle, ces années ont vu quelques nouvelles formes de
management, mais sans foncièrement changer le concept de pyramide plus ou moins étendu
à la majorité des entreprises. Plus tard, la professionnalisation des techniques de
communication donne naissance à des speakers officiels : départements de la communication,
des relations publiques ou des relations clients. Dans tous les cas, afin d’assurer un contrôle
maximum, chaque département dispose d’un territoire d’expression bien balisé, dont il ne
peut sortir : journalistes, prospects, clients, analystes financiers, candidats, institutions
politiques.
Il en est de même pour la communication interne : des départements officiellement dédiés,
proches des organes de décision, et chargés de porter la parole formatée de la direction sans
aucune possibilité pour le collaborateur de s’exprimer, donner son avis, critiquer. Car soit les
outils ne le permettent pas, soit la culture interne fait planer la menace de la sanction. Le
collaborateur se retrouve dans une situation paradoxale : il est habitué à user de cette
liberté d’expression dans sa sphère privée, mais ne peut l’exercer dans l’entreprise, que ce
soit en interne ou en externe. Et ce, alors même qu’il en est un des acteurs principaux.

Elles sont organisées pour gérer les contacts sortants

Nous venons de l’évoquer, les entreprises ont mis en place des départements dédiés pour
gérer leurs prises de parole. Toute l’organisation de l’entreprise est structurée pour produire
des flux d’information exclusivement sortants. Le principe est simple, et n’a quasiment pas
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évolué depuis les débuts de la « réclame ». D’abord, identifier des populations-cibles définies
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par des éléments partagés (profil socio-économique, motivations d’achat…). Ensuite,
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concevoir un message propre pour chacun de ces groupes. Puis utiliser des médias de masse
pour assurer une couverture maximum de la cible, sur laquelle on applique une répétition du
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message. Taux de couverture et répétition : c’est le fameux GRP (Gross Rating Point). Dans ce
modèle, l’entreprise est maîtresse du contenu du message, du lieu d’expression et du
calendrier de diffusion qu’elle choisit via le plan média. Le process de décision est
exclusivement interne à l’entreprise. L’externe ne sera concerné qu’à la réception du
message, dans une posture plutôt passive.
Deux éléments sont à noter. Le premier, c’est l’entreprise qui détermine son rythme de prise
de parole, sans subir de pression de la part de l’externe, excepté dans les situations
particulières que sont les crises d’image... Peu importe si « l’accouchement du message »
prend plusieurs semaines ou plusieurs mois, pour des raisons de process de validation interne
lourds bien connues.
Le second élément à noter est la répartition du budget entre la conception et la diffusion : le
gros du budget étant alloué à cette seconde phase.
Il en est tout autrement des médias sociaux. En plus d’être émettrice, l’entreprise est
directement interpelée par l’externe qui peut prendre l’initiative de l’échange. Ce client ou
candidat choisit le moment (un dimanche), le lieu (le compte ou la page Facebook, le compte
Twitter, le blog…), l’interlocuteur sollicité (le premier qu’il trouve sur un réseau social) et le
sujet de la discussion. Sans se soucier de savoir si cet interlocuteur est officiellement
mandaté par l’entreprise pour s’exprimer sur la question. Ne tombons pas non plus dans un
excès d’angélisme : l’inconvénient de cette liberté du client est aussi qu’il pourra recevoir
une information erronée, même involontairement, venant du collaborateur. Or, il la
considérera comme valide car émanant d’un membre de l’entreprise.
À l’entreprise de s’organiser et de faire circuler ce message. Nous voyons ici qu’elle a
totalement perdu la maîtrise du calendrier de ses prises de parole. Des interventions qui
entrent dans une dimension essentiellement réactive. Elle doit ainsi revoir profondément
son organisation pour s’adapter à ces nouvelles règles : les équipes autorisées à s’exprimer
en externe, la circulation interne de ses informations, ses process de validation. De même,
une réflexion sur l’allocation des ressources ne peut être évitée, face à des espaces de
conversation qui permettent une forte visibilité et la nécessité de produire des contenus à
valeur ajoutée. Trop souvent, la gratuité apparente des médias sociaux face aux médias
traditionnels ne s’accompagne pas d’un effort sur la qualité des contenus produits.

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Elles sont organisées en îlots et/ou en silos indépendants
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L’entreprise est structurée selon une double segmentation : horizontale, avec des strates
hiérarchiques, et verticale, avec des organisations en lignes métiers, business units ou pôles
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d’activités. Ce principe crée simplement une organisation en damier – résistant aux bienfaits
invoqués des organisations matricielles – dans laquelle chaque carré est indépendant et
travaille en totale ignorance de son voisin. La pire situation étant une compétition interne
entre départements, dont les comptes de résultats et les évaluations, distincts les uns des
autres, détruisent tout esprit de collaboration. Les salariés n’ont d’autre choix que
d’effectuer des tâches, sans comprendre le sens global de leur travail. Cette absence de
stratégie globale, d’intérêt collectif, d’objectif partagé à atteindre, se traduit par un
désengagement plus ou moins affiché. Les travailleurs du savoir adoptent une « grève de
l’esprit », se réfugient dans une attitude d’exécution passive des tâches demandées
localement.
Les relations entre les individus sont contraintes par cette organisation en damier :
regroupements géographiques, compétences identifiées car voisines, management de
proximité. Les collaborateurs subissent plus qu’ils ne choisissent le schéma de leurs relations.
Il en est tout autrement dans la sphère privée, et sur les réseaux sociaux. La structure des
relations s’affranchit de toutes ces contraintes. C’est d’ailleurs ce qui fait le succès de ces
plateformes relationnelles : des rapprochements facilités par la technologie, sur le seul
critère de l’envie réciproque, de l’intérêt dans le cadre des réseaux professionnels, ou
uniquement ludique pour d’autres réseaux. Tout en étant à Paris, LinkedIn permet d’être en
contact et d’échanger avec un expert de la marque employeur au Canada ; Facebook, de
partager sa passion de l’histoire médiévale avec un autre amateur vivant dans le Languedoc.
L’organisation hiérarchique de l’entreprise impose des schémas d’interactions quand les
réseaux sociaux favorisent des structures de liens sociaux.

Elles placent les valeurs de sécurité et d’obéissance en premier

La sécurité est le souci majeur des entreprises et les nouveaux usages sociaux du web, ou
des différentes plateformes 2.0 amènent de nouveaux risques. Les entreprises ne font pas
confiance à leurs salariés : c’est l’une des raisons principales qui expliquent leur retard dans
la mise en place du télétravail. Le « command and control » et l’organisation pyramidale sont
toujours de mise : on aime surveiller si les ordres (donnés en haut) sont bien exécutés (en
bas), on exige des validations et des reportings malgré les discours sur l’autonomie, on
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élabore des chartes d’utilisation des réseaux sociaux à forte dominante juridique. Les
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entreprises ont découvert les vertus de la cybersurveillance : écouter les discussions, repérer
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les manquements à la confidentialité ou évaluer le temps passé en ligne.


Le mail avait déjà permis à un salarié de s’adresser directement à son N+2, ou aux dirigeants
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de l’entreprise, à la grande crainte des managers intermédiaires et des directions générales.


Les freins actuels sont de même nature, profondément ancrés dans le style de management
et la culture des entreprises.
Toute la difficulté est de mesurer le niveau de sécurité nécessaire pour l’entreprise, et
acceptable par les salariés dans le contexte actuel. À défaut de trouver la mesure juste, on
obtient la sécurité et l’obéissance en surface, mais le désengagement en profondeur.

➤ Témoignage

Entreprises et digital : comprendre pour s’engager

Didier Baichère est directeur des ressources humaines du groupe DCNS. Après avoir mené le plan de
transformation chez Alcatel Lucent, notamment en investissant les réseaux sociaux, il rejoint CGI et fait
prendre à l’entreprise le virage du digital en une petite année. Il revient sur le rapport des entreprises au
digital et à la gestion de la parole des salariés.
« Il est difficile d’adopter une position globale sur le degré de maturité des entreprises en matière de gestion de la
parole et, plus largement, des questions relatives à l’adoption du digital. La question, c’est aussi de savoir – selon la
taille de l’entreprise – s’il s’agit vraiment d’un sujet de préoccupation du quotidien. Je pense que nous n’avons pas
dépassé le stade de la simple curiosité dans le meilleur des cas. Je ne suis pas certain qu’il y ait une prise de
conscience réelle des dirigeants de l’impact de la prise de parole des salariés, même dissonante.
Le curseur est encore positionné aujourd’hui sur la prise de parole corporate, assez formatée, à destination des
médias et des marchés financiers. Là, il s’agit d’une vraie préoccupation dont l’impact est affaibli par le manque de
maîtrise des réseaux sociaux et du digital plus largement.
Pourtant, une lame de fond arrive avec les salariés que nous allons recruter dans quatre ou cinq ans : une
population née dans un environnement digital. Ils sont habitués à s’exprimer sur les réseaux sociaux, à chercher et
trouver l’information sur Internet. Et il s’agit d’un style d’information bien particulier. Ils tapent le nom du dirigeant
et de l’entreprise dans les moteurs de recherche, à l’affût de ce qu’on ne souhaite pas leur montrer. Cette
génération a nécessairement une prise de position et une liberté de parole nouvelle. L’engagement et les valeurs
de l’entreprise prennent le dessus sur la réussite commerciale ou la typologie de clients pour cette génération.

Comprendre les usages sociétaux

Les métiers en charge d’assurer la veille sur le digital, les nouvelles tendances, ont une vraie responsabilité en
matière d’évolution et de transformation de l’entreprise. En l’occurrence, cela fait vraiment partie du métier de
DRH, d’être un « outside in ». C’est-à-dire percevoir les phénomènes extérieurs à l’entreprise qui vont y entrer. Les
frontières sont de plus en plus poreuses. Il s’agit de comprendre comment les usages de la société vont aussi
impacter le fonctionnement de l’entreprise. Et l’usage des réseaux sociaux par ces générations qui arrivent fait
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partie de ces sujets. C’est une évidence. Ces générations vont
s’attendre à un mode managérial et de communication très différents.
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Nos dirigeants doivent être préparés à cette évolution. Il n’est pas tant question de techniques de communication
mais plutôt de responsabilité sociale et d’engagement de ses futures équipes.
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Il y a déjà des signes forts. Si j’ai une prise de parole en décalage avec la réalité vécue dans l’entreprise, je peux
facilement me faire interpeller par un salarié au travers d’un media social. Il faut une certaine maturité pour
engager une conversation avec ses propres salariés via twitter. Il ne faut pas être pris en défaut avec un mode de
communication trop institutionnelle. Cela oblige les directions à être vigilantes sur la marque RH. Il faut s’assurer
avant tout que le discours en interne est bien compris par les collaborateurs pour ne pas être pris en défaut
ensuite.

Une nécessaire prise de conscience

La question, finalement, ne se pose pas de savoir si les entreprises sont en retard. Mais est-ce qu’elles se demandent
si le digital va avoir une influence sur leur activité ? Beaucoup de directions ne le pensent pas. C’est pourtant
essentiel de s’exprimer et d’être présent sur les réseaux sociaux. Le plus inquiétant, c’est la latence des plus grandes
entreprises à engager des transformations. Surtout lorsque l’on connaît l’importance que peut revêtir la e-
réputation d’un dirigeant ou d’une entreprise. Et le constat est identique dans les business school. Les écoles
devraient déjà avoir perçu l’importance d’intégrer des modules de e-reputation dans leurs enseignements. Non
seulement pour la propre employabilité de leurs étudiants, mais aussi pour leur apprendre à vendre la
performance de leurs équipes, le travail de leur entreprise.
Et le retour sur investissement existe. À terme, bien sûr, il y a un coût à développer et maintenir une stratégie
d’envergure sur les réseaux sociaux. Cela vous demande de travailler avec des professionnels. Mais au lancement,
c’est un coût peu significatif et les résultats sont rapidement visibles. Avec CGI, en une année, nous sommes entrés
dans le top ten des principaux classements des entreprises préférées des étudiants.
Pour prendre ce virage avec sérieux, les dirigeants doivent être persuadés de l’importance des usages car la
transformation digitale vient de l’univers du grand public. Pour certains, il faudra qu’ils soient apostrophés ou qu’ils
aient rencontré une réelle difficulté pour passer le pas. Les RH ont aussi un rôle essentiel à jouer, dans l’identification
des sujets émergents et qui sont en relation avec la population qu’ils recrutent. Là, les RH ont un vrai travail à faire
sur les questions d’engagement, de valeur, sur le lancement de programmes de formation, de mobilité, etc. »

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■ 2. Quels impacts pour les entreprises ?
Avec l’arrivée du web, à la fin des années 1990, les entreprises, aidées par leurs conseillers et
prestataires en communication, ont rapidement compris les avantages à tirer de ce nouvel
outil, notamment comme nouveau support de communication externe. Pour nommer cette
première génération, on peut parler de sites web dits « catalogues ». Leur vocation était de
présenter l’entreprise et ses gammes de produits. L’avantage nouveau était de pouvoir
disposer d’une quasi-exhaustivité des contenus proposés, couvrant l’ensemble des gammes
de produits et des informations détaillées pour chacun. À l’inverse, le support papier et ses
contraintes de coûts et de diffusion imposaient une sélection des contenus. Ce principe
d’exhaustivité de l’offre se retrouvera d’ailleurs avec la génération des sites marchands et
leurs gammes de produits immenses, face aux contraintes de stock des points de vente
traditionnels. Puis ces sites catalogues ont évolué vers davantage de personnalisation (par
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exemple avec des simulateurs), puis peu à peu vers un canal d’échange (avec des
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fonctionnalités de mail, de call back). Enfin, la dernière étape a permis de faire des sites web
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de nouveaux canaux de vente, qui ont connu leur véritable essor grâce à des solutions de
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paiement sécurisé en ligne qui ont levé les derniers freins des clients. Progressivement, la
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présence des entreprises sur le web est devenue indispensable. Il serait d’ailleurs plus juste
de parler de présences, impactant divers services de l’entreprise : marketing, commercial,
communication, SAV, recrutement…
En parallèle de cette évolution, s’est développée une prise de parole spontanée autour des
services et des produits des entreprises. Les clients mécontents ou insatisfaits partagent
leurs expériences sur des blogs, des forums ou des réseaux sociaux avec un impact plus ou
moins important. Quelques entreprises, souvent suite à des crises, ont mis en place des
cellules de veille pour mesurer la tonalité de ces prises de parole et pouvoir y répondre de
manière directe ou indirecte. La puissance grandissante du web s’accompagne d’un besoin
de ressources supplémentaires, d’une nouvelle organisation, et de nouvelles compétences,
trop souvent sous-estimées par les entreprises. Toutes se dotent progressivement d’un
community management ou d’un département en charge du web social internalisé ou non,
comme il était indispensable avec le web 1.0 de disposer d’un webmaster.

Une présence en ligne indispensable


Une entreprise qui n’a pas d’existence on-line n’a pas d’existence tout court. A minima, son
absence est suspecte. Dans tous les cas, c’est assurément négatif en termes d’image. De
même qu’une marque de grande consommation ne peut être absente des grandes surfaces
commerciales, elle ne peut non plus s’affranchir d’une identité numérique. Aujourd’hui,
toutes les entreprises sont sur le web. Même pour les TPE, les entreprises individuelles, des
solutions sont proposées, à l’image du précurseur Pages Jaunes (aujourd’hui Solocal), ou
d’autres prestataires permettant, à moindre coût et sans compétences techniques, d’avoir
son propre site.
La présence sur Internet cherche à répondre à trois besoins primaires :
• disposer d’une ou plusieurs présences officielles (site corporate – socle essentiel de
l’existence digitale –, compte Twitter, page Facebook, chaîne YouTube…), en complément
de celle, non maîtrisable, générée par les commentaires des internautes, les opinions des
blogueurs, les discussions sur les forums ;
• être référencé par les moteurs de recherche, ces quelques portes d’entrée du web encore
incontournables et en situation de quasi-monopole, afin d’apparaître dans les premières
pages des requêtes ;
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• apporter toutes les informations nécessaires aux internautes pour faciliter leurs choix.
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Mettre à disposition les fonctionnalités de contact (mail, call back, messagerie instantanée…),
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et si l’activité le permet, proposer l’achat en ligne avec une solution de paiement sécurisée
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et une supply chain performante.


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Après la boutique en ligne, le café du commerce en ligne

Cette présence en ligne voulue et maîtrisée par les entreprises au travers de leurs sites web
se complète – est chahutée devrait-on dire – par une présence subie. En effet, la
démocratisation du web s’est traduite par une prise de parole possible de n’importe quel
internaute sur les multiples espaces participatifs du web social. Cet immense café du
commerce, où toutes les tables mènent leurs discussions simultanément et en totale
indépendance, représente pour l’entreprise à la fois une opportunité – dans la participation
et l’exploitation de ces informations précieuses –, mais aussi un risque de voir se multiplier
commentaires critiques et avis négatifs.
L’ensemble de ces conversations et échanges constitue une masse d’informations
disponibles, gratuites, d’une richesse inouïe et pourtant bien peu exploitée. En effet, trop
peu d’entreprises ont mis en place une veille professionnelle pour monitorer leur
réputation, suivre celle de leurs concurrents, écouter ce que disent leurs clients ou
prospects, se tenir informé sur leur secteur d’activité. Les mêmes entreprises qui, dans le
même temps, paient très cher des benchmarks, des études consommateurs et des baromètres
sociaux internes.
Ainsi, la première qualité d’une entreprise pour comprendre ce phénomène devrait être
l’écoute. La capacité à montrer une volonté d’engagement de conversation sur le web est un
facteur puissant d’une stratégie digitale réussie. Répondre à une conversation mettant en
cause la qualité de ses produits ou services par un simple copier/coller de contenus
institutionnels est une erreur fondamentale.
On voit la nécessité de s’adjoindre des compétences en veille et en prise de parole sur les
espaces de conversation (c’est la mission d’un community manager), avec un choix
d’internaliser ou d’externaliser ces ressources. L’objectif : mettre en place une stratégie
digitale pour notamment détecter des signaux faibles et anticiper des plans d’actions, plutôt
que ne réagir qu’après l’embrasement de manière peu efficace.

Revoir la façon de faire circuler l’information en interne


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Le modèle le plus répandu de l’entreprise reste celui d’une organisation très hiérarchisée. En
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haut de la pyramide, des centres de décisions. À sa base, des centres de production. Et entre
les deux, des corps intermédiaires d’encadrement qui assurent le rôle de courroie de
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transmission. Et aussi peu d’échanges entre la base de l’entreprise et ses dirigeants.


Conséquence de cette organisation, l’information est disponible en premier lieu dans le haut
de la pyramide, puis descend progressivement les diverses strates, jusqu’à arriver à la base.
Bien évidemment, un travers régulièrement identifié et commenté consiste à conserver une
partie de l’information obtenue avant de la transmettre à la strate inférieure, la détention de
l’information étant considérée comme une forme de pouvoir. L’information atteint alors son
destinataire en étant partielle et obsolète, après un cheminement par différents filtres plus
ou moins restrictifs et intelligents.
Ce modèle militaro-bureaucratique s’appuie sur la logique de l’obéissance qui part du
postulat que l’intelligence, le savoir, ainsi que la capacité à alimenter la stratégie de
l’entreprise, sont forcément situés en haut de la pyramide. Le « tais-toi et visse » a encore la
vie dure. Mais le désengagement, la montée du présentéisme et, surtout, l’absolue nécessité
de réagir plus vite, amènent des changements plus ou moins profonds dans ces schémas
anciens.
Cependant, certains plans d’entreprise sont menés de manière participative en sollicitant
avis et idées de l’ensemble des salariés. Ailleurs, on trouve des démarches d’innovation ou de
gestion des connaissances toutes aussi ouvertes et misant sur l’intelligence collective.
Les services de communication ne peuvent ignorer que la rétention d’information n’est plus
possible. Simplement parce qu’ils ne sont plus les seuls dépositaires de cette information.
Les syndicats se feront un plaisir de donner leur propre version sur leur blog ou site web,
avec une plus grande réactivité. Cela vaut, bien entendu, pour l’ensemble de la ligne
hiérarchique qui perd ce pouvoir de diffusion de l’information. Mais elle peut développer
celui de la transmettre avec du sens et une possibilité d’échanges.
L’information est en grande partie gratuite. Le combat entre concurrents ne se livre plus sur
le terrain de la détention de l’information (comme au sein de l’entreprise), mais dans la
capacité à la faire circuler rapidement, pour l’amener au collaborateur le plus à même de la
transformer en opportunité business. De même, les premiers récepteurs d’information ne
sont pas nécessairement en haut de la pyramide, mais plutôt ceux à proximité du client. Être
au plus près de la zone de création de valeur, c’est tout l’argumentaire que développe
Vineet Nayar dans son ouvrage Employees First, Customers Second: Turning Conventional
Management Upside Down 1.

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Prendre en compte la porosité des frontières
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Souvenons-nous qu’il n’y a pas si longtemps, un salarié qui commençait sa journée était pour
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ainsi dire coupé de l’extérieur, sans moyens de communication. Le passage de la sphère


privée à la sphère professionnelle était marqué par un rituel collectif : ouverture des portes,
passage à la pointeuse, plus récemment passage du badge par le sas de sécurité. Les deux
univers étaient clairement distincts. Si le salarié avait besoin de refaire le lien avec sa sphère
privée, il devait par exemple attendre la pause pour pouvoir téléphoner. C’est-à-dire utiliser
les outils de sa sphère privée, ou demander l’autorisation à sa hiérarchie d’utiliser le
téléphone professionnel. L’outil de travail, quel qu’il soit (machine, outil ou ordinateur de
bureau), était physiquement attaché à l’entreprise et ne pouvait quitter les murs et sa
fonction exclusivement professionnelle.
Cette séparation bien définie présentait l’avantage d’un partage des temps sans ambiguïté
dans la période d’accomplissement des tâches attendues du collaborateur. Mais elle
présentait aussi ses limites, car sa rigidité pouvait amener le salarié préoccupé par un souci
personnel à faire du présentéisme en attendant de pouvoir régler son problème.
Aujourd’hui, nous constatons une forte porosité entre la vie privée et la vie professionnelle.
Trois facteurs ont fait éclater ce modèle. Ils sont d’ordre technologique, économique et
sociologique.
Le facteur technologique

Les outils de travail nomades (téléphone et ordinateur, plus récemment la tablette, demain
les montres connectées), ne sont plus attachés géographiquement à l’entreprise. Au départ
réservés à quelques métiers itinérants et aux dirigeants (le Blackberry par exemple), ils font
aujourd’hui partie du paysage normal d’une grande partie de l’entreprise… et du domicile.
Un même PC portable permet un achat personnel en ligne pendant ses heures de bureau et
la lecture de ses mails professionnels en soirée ou en week-end. De même, les
collaborateurs se sentent de moins en moins coupables de garder constamment ouvertes de
multiples fenêtres de leur navigateur pour effectuer leurs activités professionnelles et, en
même temps, de rester connectés à leur messagerie personnelle ou sur leur page Facebook,
sans oublier leur smartphone en mode vibreur. Cette nouvelle façon de travailler, outre
qu’elle peut déstabiliser le manager, suscite de nombreux débats entre partisans d’une
ouverture et d’une connectivité indispensable à l’économie du savoir, et des tenants de
problèmes de concentration et de productivité en raison des multiples micro-coupures
subies, voire de troubles de dépendance et d’addiction.
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Le facteur « économie du savoir »
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Le passage de l’industrie aux services, puis l’évolution récente vers les technologies de
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l’information et de la connaissance font de ces moyens de communication nomade des outils


indispensables. Comme nous l’avons évoqué, ils viennent supporter le travail des
« knowledge workers » de Peter Drucker 2. Le nouvel outil de ces travailleurs du savoir n’est
même plus l’ordinateur, qui n’est que le support. C’est leur cerveau. C’est la capacité à
trouver des solutions nouvelles dans un environnement changeant, qui génère de la valeur
ajoutée. Certes, cette situation ne concerne pas la totalité des collaborateurs. Mais cela
signifie cependant que, pour un nombre croissant d’entreprises, elles ne sont plus
détentrices de l’outil de production. Il est la propriété du collaborateur. De là, découlent
toutes les réflexions sur le nouveau rapport entre le collaborateur et son entreprise, les
comportements consuméristes liés au travail ou encore les notions d’employabilité.

Le facteur sociologique

Ces innovations technologiques et ces bouleversements économiques ont entraîné des


mutations sociologiques, mais en même temps ont été accélérés par ces mêmes mutations.
La volonté de chacun d’organiser plus librement tous ses agendas – professionnels,
personnels, familiaux, amicaux – s’est accompagnée d’un nouveau rapport à la valeur travail,
à l’autorité professionnelle, ou à l’entreprise. Le collaborateur, dans la mesure où son statut
lui permet une certaine autonomie vis-à-vis de son employeur, veut être maître de son
emploi du temps. Il refuse de se sentir contraint par un modèle basé sur une unicité
géographique qui n’a plus de réalité. Des comportements récents, comme l’attente forte des
collaborateurs pour le télétravail, ou encore le BYOD (Bring Your Own Device 3) sont des
révélateurs de ce volet sociologique. Ces changements s’installent en douceur. Ils vont
fortement impacter le modèle managérial confronté à des salariés en demande d’une autre
organisation et une plus grande autonomie. Dans le même temps, l’entreprise comme les
managers devront basculer vers davantage de confiance et de délégation. À l’opposé du
télétravail, d’autres entreprises essaient d’intégrer du non professionnel : horaires plus
adaptés, moments de convivialité, espaces de détente ou de divertissement, afin de créer
une ambiance positive et d’oser la notion « d’employés heureux 4 ».
C’est l’axe principal implicite de Google dans son discours employeur : recréer dans
l’entreprise un environnement chaleureux, confortable et fun, ressemblant à un campus
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d’étudiants. Google est certainement l’entreprise qui diffuse le plus de photos de ses
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bureaux. « Son cocon d’entreprise « idéale » concrétise le rêve d’une non-séparation entre la vie
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étudiante et la vie professionnelle, mais aussi entre vie privée et vie publique », écrit Alex Kyrou dans
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Google God 5.
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Une autre expression forte, qui confirme l’importance de cette notion de porosité, est à
chercher du côté des frontières de l’entreprise. Les limites historiques et traditionnelles pour
définir l’entreprise sont essentiellement d’ordre juridique et fiscal : les collaborateurs liés par
un contrat de travail, la production réalisée, les machines détenues, le siège social et les sites
de production, l’impôt sur les bénéfices ou les taxes sociales… Or aujourd’hui, ces limites ne
sont plus le reflet de la réalité de l’activité de l’entreprise. Des prestataires sont associés à
des décisions stratégiques importantes. Des collaborateurs de sociétés sous-traitantes sont
présents à temps plein et sur le long terme dans l’entreprise. Certains collaborateurs
passent davantage de temps avec leurs homologues d’autres entreprises qu’avec leur
manager. La nouvelle tendance économique est à la coopétition, c’est-à-dire collaborer tout
en étant en compétition avec ses concurrents… Ainsi, il devient difficile de définir
précisément les acteurs à l’origine de la création de valeur.

Accepter la dictature de la transparence


La transparence est devenue une valeur cardinale. L’opacité est nécessairement vécue
comme une action faite au détriment de ceux qui ne savent pas. « On nous cache tout on nous
dit rien », écrivait Jacques Lanzmann à la fin des années 1960 pour son compère Jacques
Dutronc. Aujourd’hui, qu’il s’agisse de personnes ou d’entreprises, la pression sociale force
chacun à se dévoiler, au risque de paraître suspect. Volontairement pour certains, dans la
mise en scène de moments soigneusement choisis de leur vie intime scénarisée sur les
médias sociaux. Il s’agit de paraître plus heureux, plus riche, plus sportif, plus cultivé… Pour
être plus envié que son voisin. Moins volontairement pour les entreprises, sommées de se
mettre à nu. Cette pression balaie d’un revers de main toute notion de confidentialité, de
secret de fabrication.
Les médias sociaux n’y sont pour rien ; le phénomène est plus ancien. Jadis, le secret
entourant la vie privée des stars du cinéma hollywoodien contribuait à entretenir le mythe
d’individus hors norme, inaccessibles. Puis le public a voulu connaître les recettes de
fabrication. Souvenez-vous des bonus des films sur les DVD. On voulait passer de l’autre côté
du miroir, connaître les ficelles, ne plus se contenter de ce que l’on voulait bien nous
montrer. C’est l’explosion de la presse people. Aucun secteur n’échappe à cette mode : dans
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certains restaurants, une simple baie vitrée sépare à présent la salle et les cuisines. On veut
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des coulisses accessibles.
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Une nouvelle forme d’activisme qui porte le credo de la transparence est apparue sur le
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web. Wikileaks, les Anonymous, décrètent unilatéralement ce qui doit être mis sur la place
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publique. Ils associent transparence et liberté, se présentant comme les seuls garants de
cette liberté, mais ne font aucun cas de notions de vie privée ou de libertés individuelles. Il
est intéressant de constater que les « whistleblowers » (lanceurs d’alerte en anglais) de
Wikileaks sont anonymes, tout comme la totale opacité qui entoure les membres et les
actions des Anonymous, et les libertés qu’ils prennent avec le droit grâce à cette opacité.
Les entreprises ont aujourd’hui le plus grand mal à maîtriser et contrôler les informations qui
les concernent. D’abord, parce que la communauté du web s’exprime dans un flux continu
sur les marques, les produits, leurs conditions de fabrication. En 2013, l’exemple de Findus et
de la viande de cheval est révélateur 6. La présence digitale de Findus, au plus fort de la crise,
se concentre sur la multitude de contributions des internautes qui ont détourné ses slogans,
ses publicités, ses packagings. À l’inverse, l’entreprise Spaghero, la vraie responsable, ne
subit que très peu l’ironie digitale des internautes : la marque et le logo sont inconnus car
c’est du B to B.
Par ailleurs, les entreprises ne peuvent enrayer le flux d’informations qui sortent de leurs
murs. La numérisation des contenus a permis une multiplication à l’infini. Amusez-vous à
taper la requête « file:pdf + document provisoire à ne pas diffuser » dans Google. Vous serez
surpris par le nombre de documents disponibles en ligne qui ne devraient pas l’être. Les
entreprises sont des organismes vivants, qui voient passer nombre de personnes dans leurs
murs sur lesquelles elles n’ont quasi aucun pouvoir de contrôle : anciens collaborateurs,
stagiaires, fournisseurs, prestataires, sous-traitants… Tous sont susceptibles d’accéder à des
informations et de les diffuser largement à l’extérieur de l’entreprise. Ajoutons à cela les
collaborateurs qui, spontanément, s’expriment de plus en plus sur les médias sociaux, sans
avoir nécessairement l’intention de nuire à leur employeur. Ils sont aussi régulièrement
sollicités par des étudiants, stagiaires, thésards, journalistes pour des conseils, des
interviews, des benchmarks, des avis d’experts. Notons enfin que la notion de transparence
est intimement liée à celle d’immédiateté vue plus haut. Il semble évident que les vertus de
cette transparence totale relèvent du fantasme.

L’exemple Nestlé/KitKat

Greenpeace a mené une campagne contre Nestlé/KitKat au sujet de son utilisation de l’huile
de palme et de son impact sur l’environnement, et notamment la mort des orangs-outans :
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c’est devenu un cas d’école de ce qu’il ne faut surtout pas faire. Greenpeace a réalisé une
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fausse publicité pour le produit KitKat, remplaçant les barres chocolatées par des doigts
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d’orangs-outans coupés et sanguinolents. Cette vidéo – et les commentaires associés – s’est


répandue à la vitesse de l’éclair d’un bout à l’autre de la planète. Nestlé est certes parvenu à
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faire retirer la vidéo de YouTube (même s’il est encore possible de la retrouver), mais trop
tard. Elle était déjà sur de nombreux autres sites de partage, reprises par des centaines de
milliers d’internautes.
Face à Nestlé qui a joué à tort la carte de la menace juridique (détournement et utilisation
illicite du logo, suppression de messages sur sa page Facebook officielle), Greenpeace a
travaillé sur le registre de l’émotion, encourageant les internautes à partager, relayer, et
commenter, leur donnant ainsi le sentiment de contribuer directement à la sauvegarde de
ces pauvres primates.
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Nestlé supprime des messages de sa page Facebook et attise ainsi le mécontentement, donc la
mobilisation des internautes.

Le 19 mars Nestlé jette l’éponge et présente ses excuses sur sa page Facebook aux
internautes pour le ton employé et les réponses peu adéquates. Nestlé n’a pas su faire
coïncider sa présence sur les médias sociaux avec une nouvelle façon de communiquer, ni
mesurer l’effet boomerang de ses décisions.
Suite à cette mésaventure, Nestlé a créé quelques mois après, une puissante cellule de veille
qui scrute en continu les médias sociaux afin de prévenir toute nouvelle crise.

L’exemple Quick
Twitter s’est emballé en France en novembre 2012 avec le compte éphémère d’un certain
@equipierquick anonyme, qui dénonçait tout à la fois les conditions de travail et d’hygiène
dans un restaurant Quick du Sud de la France. L’anonyme twitonaute eut alors droit à un
article sur Slate.fr et deux autres sur Sud info Sport qui lancèrent un buzz pendant près de
deux mois. Ce buzz se finit avec l’identification puis le licenciement de cette personne par
Quick 7.
Cet incident a créé une véritable crise de communication pour cette enseigne, mêlant
dimension sociale et problème sanitaire dans la même action. L’enseigne, comme souvent, a
concentré ses actions sur le volet juridique, perdant dans les premiers jours l’avantage sur le
terrain médiatique. Les internautes et les journalistes, toujours prompts à prendre parti pour
David face à Goliath, ont cédé à l’émotion instantanée du « like » ou du « retweet » finalement
peu engageant, et plus facile que l’analyse et le recoupement des sources. Dans un second
temps, une fois le mal fait, le rideau est tombé et l’anonymat a été levé. Il a permis de
constater que cet @equipierquick était bien loin d’être un salarié ordinaire, mais un habitué
des procédures à scandale et des médias.

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Émergence du crowdsourcing et du réticulaire
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Selon Wikipedia, le néologisme crowdsourcing semble avoir été conçu en 2006 par Jeff Howe
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et Mark Robinson, rédacteurs à Wired magazine dans un article intitulé « The rise of
crowdsourcing », (la montée du crowdsourcing). Jeff Howe y explique que les sauts
technologiques et la diffusion des outils informatiques bon marché ont fortement réduit
certains écarts entre professionnels et amateurs, ce qui permet à des entreprises de profiter
du talent de la population, ce qui selon Howe n’est pas l’externalisation, mais du
crowdsourcing.
Concernant le terme « réticulaire », la définition la plus partagée est la notion de réseau, de
filet par l’interconnexion de plusieurs points.

La communication, l’innovation comme le marketing sont en train de bouleverser les process


de création. Ils mettent les parties prenantes au centre de leur dispositif et non uniquement
comme testeurs, une fois que le processus est terminé. Ainsi, ces départements cherchent à
s’appuyer dès le lancement du projet sur des communautés pour récupérer le plus
d’informations, de retours, d’idées et co-construire soit un message, un produit ou un service.
Les entreprises les plus innovantes ont laissé tomber le porte-voix et le piédestal pour se
mettre à la même hauteur que leurs salariés, clients ou partenaires. Une façon de mieux
répondre à leurs attentes, à leurs souhaits et de capter les bonnes idées. Lego 8 illustre cette
révolution en cours, avec ses applications ouvertes aux clients, pour créer de nouveaux
modèles et les partager avec une communauté en ligne. L’entreprise danoise a trouvé dans
le crowdsourcing une nouvelle source de croissance et d’innovation en rémunérant les
internautes ayant proposé les meilleurs projets.

Cette organisation 2.0 est un véritable maillage qui ne fonctionne pas selon le système de
cascade, mais bien selon les connexions de synapses, avec une agilité et une rapidité
déconcertante. La pyramide est remplacée par le filet (retis en latin) toujours en construction
et en développement grâce à de nouveaux nœuds de connaissances et de connexions. Le
filet ainsi construit permet de ramasser bien plus d’idées que des ordres de mission
consistant à rédiger des dossiers d’opportunités. Les réseaux sociaux fonctionnent sur ce
principe. Mais ce sont désormais des process entiers de l’entreprise qui, peu à peu,
deviennent plus réactifs, plus ouverts et plus performants en cassant les carcans habituels.
Le recrutement en est un exemple frappant, avec des innovations foisonnantes autour de la
recommandation, des avis, du partage, de la viralité… Les « salariés ambassadeurs »
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représentent une bonne illustration de ce changement qui donne la parole à des salariés
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choisis pour leur engagement envers leur entreprise, et leur envie de partager avec des
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candidats sur l’intérêt de venir y travailler. Finis les discours léchés du responsable
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recrutement, des RH ou de la communication et place aux vrais échanges !


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Résistance ou accompagnement des changements culturels

Les entreprises se positionnent différemment face à ces multiples changements. Certaines


cherchent à s’adapter, conscientes des possibles opportunités nouvelles, quand d’autres se
crispent pour préserver des modes de fonctionnement traditionnels. Ces crispations sont
d’autant plus acceptées qu’elles se drapent souvent de l’argument financier. Il est à craindre
que cette seconde stratégie ne devienne de plus en plus coûteuse et d’autant moins efficace
que ces transformations se démocratiseront à l’extérieur de l’entreprise.
Le désir de travailler autrement est profond. Il n’est pas le privilège de la seule génération Y
qu’il suffisait de satisfaire par des outils technologies de pointe ou des salles de détente dans
l’entreprise. Sans mise en place d’un vrai environnement permettant un meilleur équilibre
entre les attentes des salariés et les besoins de l’entreprise, cette fracture risque de coûter
cher à l’entreprise en termes de productivité.
L’intelligence de l’entreprise sera d’identifier comment amorcer sa mutation pour
développer la satisfaction de ses employés et améliorer leur performance. Nous l’avons dit,
l’économie du savoir demande de la part des collaborateurs bien plus que du temps de
présence. Elle ne peut fonctionner qu’avec des salariés qui seront disposés à mettre leur
intelligence, leur imagination, leur talent au service de leur entreprise. Il n’est pas question
de vouloir copier les entreprises les plus en pointe, mais de mesurer quelles évolutions sont
nécessaires pour entretenir ou retrouver la motivation du personnel.

➤ Témoignage

L’internet des objets au sein de l’entreprise

François Coupez (@f_coupez) est avocat à la Cour, associé- cofondateur du Cabinet ATIPIC Avocat.
Spécialiste en droit des nouvelles technologies, il s’intéresse à tous les aspects juridiques de la
transformation numérique de l’entreprise, et notamment à l’impact de la vie connectée du salarié dans
l’entreprise.

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Si « l’internet des objets » est sur toutes les lèvres depuis quelques années, il commence seulement à
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devenir réalité pour le citoyen moyen. Par contre, pour l’entreprise, cette réalité en devenir est aussi en
passe d’ajouter de nouvelles complexités dans les relations existantes entre elle et ses salariés. Ainsi, selon
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la société Ipswitch, 31 % des entreprises européennes, et plus particulièrement 34 % des sociétés


françaises, souhaitent introduire en 2015 le wearable computing (ou « informatique vestimentaire ») en
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entreprise, c’est-à-dire équiper à court ou moyen terme ses salariés d’outils leur permettant d’être plus
performants, accueillants ou en relation plus étroite avec la clientèle. Cela inclurait aussi bien les lunettes
connectées, permettant d’afficher des informations sur le client et évitant de détourner son regard pour
interagir avec un ordinateur classique, que les instructions transmises sur les montres par voie de
tapotements discrets, comme la localisation et l’assignation de lieux où se rendre en fonction de l’affluence,
ou encore les chaussures comptant les distances parcourues afin d’optimiser la charge de travail, etc.
Salesforce, qui a sondé 1 500 entreprises, arrive aux mêmes conclusions : 56 % d’entre elles sont
intéressées par l’Apple Watch, 55 % par les Google Glass et 48 % par les bracelets Fitbit par exemple.
En parallèle, et toutes les études le montrent, les salariés s’équipent et s’équiperont logiquement de plus
en plus d’objets connectés, et pour des finalités les plus diverses, comme le suivi d’activités personnelles
(activité sportive, etc.) ou le remplacement des usages d’autres objets déjà possédés (l’Apple Watch
entraînant ainsi, selon ses premiers utilisateurs, une baisse d’usage de 20 à 30 % de leurs iPhones). Cette
informatique vestimentaire pourra prendre de multiples formes (montre, bracelet, lunettes, lentilles,
chemise, costumes, chaussures, etc.). On estime ainsi à 80 milliards les objets connectés en 2020. Les
entreprises sont conscientes de cet équipement rapide, et attendent en 2015, fort logiquement, un afflux
d’employés possédant de l’informatique vestimentaire (en tout cas 36 % d’entre elles selon l’étude Ipswitch
pré-citée).
Le décor est planté, et ceux qui ont vécu l’apparition des premières pratiques de BYOD (ou « Bring Your
Own Device » ou encore AVEC pour « Apportez Votre Équipement personnel de Communication »)
pressentent la suite. Rappelons en effet que lors de la démocratisation des Smartphones et des tablettes, à
l’époque où ces objets étaient les best-sellers de Noël, leurs heureux acquéreurs avaient regardé d’un œil
immédiatement méprisant les outils informatiques mis jusqu’ici à leur disposition par leur employeur. La
pression a donc été mise de toutes parts (du salarié nouvel embauché jusqu’au VIP) afin de pouvoir utiliser
son propre matériel dans le cadre de ses activités professionnelles. Face à une opposition de l’employeur,
dans le pire des cas, pour différencier les usages et simplifier les règles, le salarié pouvait imaginer
transporter son téléphone portable professionnel et son téléphone personnel.
Mais dans quelques mois, imaginera-t-on enlever sa montre connectée ou ses lunettes numériquement
améliorées pour chausser celles imposées par l’employeur ?
Qu’en sera-t-il du suivi d’activité personnel (les chiffres risquant d’être faussés si ces objets sont mis de côté
pendant les heures travaillées) ?
Et si l’interconnexion avec le système d’information de l’employeur finit par se réaliser, comment seront
gérées ces données, dont certaines flirtent dangereusement avec les données de santé ? Qui pourra y
accéder et sous quelles conditions ?
Seront-elles utilisées (aussi) pour le suivi d’activité ou la bonne santé du salarié, en vertu par exemple de
l’obligation qu’a l’employeur – à titre de résultat – de veiller sur la santé de ses salariés ? Ces données
serviront-elles à établir la preuve d’hypothétiques plages de travail/connexion – et donc de vie
personnelle/déconnexion – du salarié ? Comment seront prises en compte les problématiques de sécurité,
tous les rapports d’expert dénonçant des risques criants ?
La CNIL et la réglementation auront certes leur mot à dire, mais pas forcément dans le sens d’une
interdiction stricte : à partir du moment où un flux de données constant sera établi, il pourrait permettre
une analyse statistique et des comparaisons avec des salariés de profils équivalents. Dès lors, des preuves
dites « probabilistes », mathématiques, pourraient apparaître, de nature à rendre objectif le contrôle de la
performance du salarié… et donc in fine d’accorder des augmentations salariales non discriminantes.
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Ces questionnements et ces situations inéluctables doivent a priori faire prendre conscience à l’entreprise
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de la nécessité de s’intéresser dès à présent à la problématique. Car, au-delà des sujets précis
d’interrogation, l’entreprise ne peut pas être schizophrène et interdire purement et simplement d’un côté
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ce qu’elle impose d’utiliser face à ses clients de l’autre. L’intrication des deux univers et l’image qu’elle
souhaite le plus souvent donner d’elle-même l’empêchent de choisir cette option. Compte tenu d’un
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bouleversement aussi majeur que la potentielle gestion de ces flux de données


professionnelles/personnelles dans l’entreprise, ne rien faire et se contenter d’interdire revient à accorder
une confiance illusoire en une ligne Maginot numérique.
Employeurs et salariés doivent dès à présent réfléchir à cette évolution induite et organiser au mieux la
prochaine étape après l’intégration du salarié dans l’entreprise : celle de l’intégration de sa vie connectée
dans l’entreprise.

1. Vineet Nayar, Employees First, Customers Second: Turning Conventional Management Upside Down, Harvard Business School Press, 2011.
2. Peter F. Drucker, The Effective Executive, Collins.
3. Le fait pour les salariés d’apporter et d’utiliser dans leur activité professionnelle leurs propres outils jugés plus performants.
4. Exemple de Laurence Vanhée, la « chief happiness officer » – le nouveau nom pour la DRH – du SPF (Sécurité sociale Belge) est une appellation au niveau mondial par une
dizaine d’autres DRH. Lire son témoignage, Le changement et le bonheur comme leviers de motivation, p. 193.
5. Alex Kyrou, Google God : Big Brother n’existe pas, il est partout, éditions Inculte Essais, 2010.
6. Début 2013, Findus a identifié de la présence de viande de cheval dans ses plats cuisinés. Alors que l’industriel avait démasqué la fraude de son sous-traitant
Spanghero, il s’est retrouvé dans la position de l’accusé en raison de l’emballement médiatique.
7. http://www.slate.fr/story/66845/equipier-quick-twitter-plainte-justice
8. Voir sur ce sujet : http://mindstorms.lego.com

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■ 3. Quels impacts dans la façon de communiquer ?
Les départements de communication doivent accepter le constat de l’inefficacité, voire du
rejet des contenus trop corporate, mis en scène depuis des années. Ce constat est valable
pour les publics internes comme externes à l’entreprise. Les statistiques de consultation des
sites institutionnels comme des intranets confirment une véritable désaffection pour ce type
de communication unidirectionnelle, descendante et, la plupart du temps, langue de bois.
Autant d’éléments qui constituent de lourds handicaps pour intéresser une cible sur-
sollicitée par de l’information commerciale, qui a appris à décoder des messages orientés, et
qui dispose d’une multitude de sources d’informations alternatives, dont la promesse (certes
pas toujours tenue) est de proposer des contenus objectifs, sincères, en tout cas, pluriels.
Les entreprises doivent revoir leur manière de produire et diffuser l’information en interne
comme en externe, modifier les répartitions budgétaires entre conception et diffusion,
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comprendre qu’elles sont plus que jamais ouvertes sur leur éco-système. Il n’est plus
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possible de communiquer de la même façon qu’avant l’arrivée des sites web participatifs ou
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des réseaux sociaux, sans perdre en crédibilité, donc en attention, donc en audience. La
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communication interne, coincée dans ses vieilles habitudes, subit cette nouvelle contrainte
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avec encore plus de violence. La communication, c’est désormais le dialogue digital impulsé
par la marque ou exigé par les clients, candidats, salariés ou partenaires. Le message est
désormais émis de manière différente sur diverses plateformes, afin de s’adapter au style et
aux habitudes de consommation d’information des différentes cibles. Cela passe par le
développement d’un éco-système média qui joue sur la diversité et l’interactivité des
différents supports utilisés.

• L’entreprise ne peut plus imposer ses idées, elle doit convaincre et séduire.
• L’entreprise ne peut plus développer une communication de masse, elle doit segmenter
ses messages, les individualiser.
• L’entreprise ne peut plus garder une information, elle doit la partager.
• L’entreprise ne peut plus ignorer la critique, elle doit l’analyser, y répondre si nécessaire et
s’en servir comme moyen d’amélioration continue.

S’organiser pour gérer les contacts entrants


De nombreuses entreprises ont organisé leurs départements de communication comme des
diffuseurs de contenus, sans réelle remise en cause depuis l’invention de la publicité. En
aucun cas, elles ne semblent conscientes de la pertinence de devenir des récepteurs de
contenus. Leur expertise et leurs modes de fonctionnement portent sur la diffusion
optimisée d’un message conçu en chambre, destiné à être poussé auprès d’une cible
donnée : clients ou collaborateurs. Le tout dans une logique de puissance et de répétition,
nous l’avons vu, condition de la mémorisation. Certes, ces départements sont de grands
consommateurs d’études marketing, de focus groups, de benchmarks, qu’ils paient très cher, et
destinés à identifier des attentes, puisque c’est le mot consacré. Ce mot est d’ailleurs
révélateur de la dimension de passivité dans laquelle sont cantonnées les cibles visées.
Acheter de l’information, mais ignorer celle disponible gratuitement.
Il est également intéressant de noter que les différents départements se répartissent selon
les techniques de communication : promotion, relations presse, publicité, communication
corporate, communication de recrutement, communication financière, sponsoring et mécénat.
Une approche qui semble plus en cohérence avec des spécialisations de prestataires, plutôt
qu’une prise en compte des populations visées. Et les discours à vocation commerciale qui
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prônent le 360, le multi-canal, l’expérience globale, la plateforme de marque ne changent
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rien à une réalité vécue au quotidien.
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Qu’en est-il à l’heure des médias sociaux ? Nous l’avons évoqué à plusieurs reprises, les
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communautés virtuelles ne cherchent pas un argumentaire commercial déroulé par une


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entreprise sourde. Ils attendent que l’entreprise fasse preuve d’écoute et d’empathie.
Qu’elle abandonne un peu la parole pour se concentrer sur l’écoute. Qu’elle s’intéresse à
leur cas personnel. Qu’elle leur parle d’égal à égal. Toutes ces interactions entre l’entreprise
et ses cibles constituent une opportunité de renforcer la relation, de fidéliser, d’identifier
des pistes de progrès, d’améliorer l’expérience du parcours client. Aux entreprises
d’accepter de revoir à la baisse les ressources allouées à ces messages sortants, dont
l’efficacité décroissante impose une inflation budgétaire. Il est grand temps de comprendre
que le traitement d’une demande client est aussi prestigieux et valorisant qu’un brainstorming
avec quelques experts de la communication. L’entreprise doit revoir son organisation pour
se mettre en posture de traiter efficacement ces contacts entrants et en faire des
opportunités de business. L’économie et le terrain de la concurrence sont passés du produit
au service. Aujourd’hui, le nouvel enjeu des entreprises réside dans la capacité à passer du
service à l’expérience client exprimée par le biais des conversations « émotionnelles ».

Préférer la pertinence à la puissance


L’exploitation des grands médias traditionnels porte sur la logique de construction d’un seul
message, simplement décliné en fonction des contraintes des médias utilisés. L’audience est
le principal indicateur de succès, c’est-à-dire une notion essentiellement quantitative.
Seulement, la logique de puissance et de répétition des grands médias devient inopérante.
D’abord parce que la fragmentation des médias permet plus difficilement de couvrir la
totalité d’une cible donnée. Télévision (avec le câble), radio (avec les radios FM), presse
(avec l’explosion de l’offre de news thématiques) : les supports se sont multipliés, avant
même l’arrivée du web et des médias sociaux. Comme pour les produits de grande
consommation, les offres de médias se sont segmentées afin de permettre à chacun d’y
trouver son bonheur. Il n’est plus possible, à moins d’y consacrer des budgets faramineux,
d’émerger dans les grands médias.
En 1978, un publicitaire du nom de Thierry Ardisson lance avec succès Business (la bien
nommée), une agence de communication spécialisée pour les entreprises moyennes qui
souhaitent accéder à la télévision. La recette : des spots de dix à quinze secondes quand le
standard est de trente secondes, et des slogans simples et martelés. Aujourd’hui, les PME ne
peuvent plus accéder aux espaces publicitaires des chaînes généralistes, qui restent de
grands carrefours d’audience. |
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La prolifération des messages commerciaux crée une saturation, biologique même, chez les
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individus. Rappelons-nous le tollé qu’avait provoqué en 2004 Patrick Le Lay, alors PDG de
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TF1, évoquant avec gourmandise le « temps de cerveau disponible » de ses téléspectateurs que
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la chaîne commercialisait à ses annonceurs ! Cette situation s’applique aujourd’hui aussi à


Facebook.
Notons enfin que la logique d’audience modélise les individus comme des êtres isolés dans
leur mode de consommation. Or, comme Jean-Noël Kapferer le rappelle dans son livre Ré-
inventer les marques 1, « le mass marketing a oublié que les consommateurs sont des êtres sociaux. »
Qui aurait envie de se promener dans un centre commercial totalement vide ? L’expérience
de la consommation, et plus encore de la consommation de contenus, est par nature une
activité sociale.

Il convient aujourd’hui de remplacer cette logique de « one to many » à celle de « one to one » ;
de préférer la recherche d’affinités plutôt que la puissance. De privilégier la qualité,
l’intensité de la relation au nombre de ces relations. Les médias sociaux sont exactement
dans cette logique, avec le principe de communautés regroupées autour de centres
d’intérêts, de relations entre membres basées sur les échanges et la conversation. On parle
d’ailleurs moins d’audience que d’interactions dans les médias sociaux. Même si les
communautés présentent certaines caractéristiques homogènes qui permettent à ces
mêmes médias de commercialiser des espaces publicitaires aux annonceurs. Le nombre de
visiteurs devrait importer moins que le volume des échanges. Cependant, les usages anciens
perdurent. À l’image de Google qui préfère communiquer sur le nombre de ses abonnés à
Google+ – c’est-à-dire tous les utilisateurs d’un compte Gmail automatiquement
comptabilisés –, et ce pour cacher le peu d’échanges que tout un chacun peut encore
constater. Apportons ici, comme souvent, une petite nuance à notre propos. Les médias
sociaux offrent un service social quasi-gratuit, mais entendent bien se rémunérer sur leur
dimension média, c’est-à-dire monétiser leur audience avec de l’espace publicitaire.

Passer de la marque à la réputation

L’entreprise n’est plus qu’une voix parmi de nombreuses autres. Jadis, elle contrôlait
l’ensemble de ses prises de parole, définissait les messages à diffuser, sans trop se soucier de
la cohérence avec sa réalité interne. Elle choisissait son sujet, son planning et les espaces de
diffusion les plus appropriés. L’entreprise était propriétaire de sa marque. Certes, la critique
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existait. Mais elle était cantonnée à des espaces d’expression confidentiels qui n’avaient rien
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à voir avec la puissance de la marque émise. L’accès à de grands médias, très onéreux,
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fonctionnait comme une barrière à la critique.


Patrick Arnoux, le rédacteur en chef du Nouvel Économiste, donne le ton dans un article
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intitulé « 2012, l’année de toutes les ruptures 2 » : « Hier, les critiques des consommateurs étaient
l’apanage de quelques organisations et journaux. Le digital, grâce à la vidéo sur Internet, donne aux
consommateurs – furieux ou satisfaits mais de toute façon équipés d’un smartphone – un pouvoir de
diffusion massive à haute influence sur la notoriété et la réputation. »
Aujourd’hui, l’entreprise n’a d’autre choix que de prendre en compte les conversations qui
portent sur sa marque, ses dirigeants, ses produits, sa politique ressources humaines. Qu’elle
le veuille ou non, ces conversations existent. D’autant que dans l’esprit des publics, la parole
de l’entreprise ne sera pas considérée comme la plus digne de confiance. Et l’ensemble de
ces conversations se retrouvera mêlé aux messages officiels de l’entreprise lors d’une
recherche sur un moteur type Google ou Bing. Il est aisé d’imaginer le rapport entre des
contenus émis par une entreprise via ses divers départements de communication
assermentés et, en face, celle d’une multitude d’émetteurs potentiels qui n’ont pas à faire
valider leurs contenus avant diffusion, sans aucun compte à rendre sur la véracité de leurs
propos. Ici, point de barrière financière : chaque contenu a droit de cité. Il sera référencé par
le moteur de recherche avec la même pertinence, et sera même favorisé dans les
rankings/classements, car les algorithmes sur-pondèrent les contenus fréquemment
renouvelés. Ce qui n’est pas le cas d’un site corporate, qui a rarement des contenus
renouvelés quotidiennement. L’enjeu se situe donc dans les quatre ou cinq premières pages
des grands moteurs de recherche : veiller à ce que la tonalité des contenus soit plutôt
positive, émise par plusieurs sources. Puisque les propos négatifs ne peuvent être
supprimés, il s’agit de les noyer ou de les repousser plus loin dans les résultats de recherche.
La stratégie se résume assez simplement : commencer par écouter ces conversations, qui
peuvent s’avérer un feedback pertinent pour faire évoluer l’entreprise ; se faire accepter
dans ces espaces de conversations et ensuite y participer en apportant sa contribution et en
respectant un certain nombre de règles différentes de celles des grands médias. « La
meilleure réputation de l’entreprise n’est pas ce que je vais communiquer, mais ce qu’on dit sur moi »,
renchérit Jean-Noël Thiollier, ancien directeur emploi et recrutement à Disneyland 3. Il faut
l’accepter : la réputation s’est substituée à la marque.

Penser viralité et non plus diffusion

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Traditionnellement, la communication cherche à atteindre les cibles visées par le produit ;
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cible de communication et cible de consommation ne font qu’une. Le message est
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directement véhiculé par le média, qui doit le restituer tel que l’entreprise l’a conçu, sans le
modifier. De plus, la communication définit une cible comme un regroupement artificiel
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d’individus isolés entre eux, mais partageant les mêmes aspirations, désirs, frustrations,
caractéristiques socio-démographiques. Les relations presse – une des techniques
traditionnelles de communication – adoptent une démarche sensiblement différente,
puisqu’elles visent la population des journalistes en tant que relais d’information. Cette
stratégie consiste à identifier une population dont la position confère une certaine
légitimité et un pouvoir d’amplification du message. Cependant, les journalistes ont à la fois
perdu le pouvoir d’amplification par la fragmentation des médias, mais aussi et surtout,
comme de nombreux experts, celui de la légitimité.
Ce type d’approche indirecte retrouve un nouvel intérêt grâce aux médias sociaux. Et la
communication redécouvre que l’être humain est social. Les communautés ou les tribus en
ligne regroupent des individus qui opèrent entre eux des interactions : ils partagent des
informations, échangent des expériences, critiquent, commentent, discutent de sujets qui
sont autant d’intérêts communs. Ce qui les réunit est moins ce qu’ils sont que ce qu’ils font ou
aiment. Ils vont échanger les sentiments, les émotions vécus lors d’expériences avec des
produits, des marques, des entreprises, indépendamment de leur situation géographique ou
de leur âge. L’ensemble de ces interactions apparaît alors comme une formidable caisse de
résonance pour l’entreprise qui saurait en tirer bénéfice.
Tout l’enjeu pour cette dernière consiste à concevoir des contenus qui seront autant de
carburant pour alimenter ces échanges. Des contenus qui, s’ils sont de qualité, seront
diffusés, relayés par les membres de la communauté. Certes, pas par tous, mais par quelques
avocats ou prosélytes qui auront trouvé un intérêt ou une motivation : se présenter comme
un expert, avoir l’information avant les autres, être invité en VIP ou bénéficier d’une
réduction de prix. Ceux-là seront de précieux ambassadeurs voire, réussite ultime, de vrais
prescripteurs. Et n’oublions pas que leur proximité avec les cibles visées et leur distance
apparente avec l’entreprise en feront des avocats d’autant plus crédibles. Il conviendra donc
de bien les identifier et de leur réserver un traitement de faveur. La logique de diffusion des
contenus au sein des communautés digitales correspond à celle de cercles concentriques :
les plus proches du centre réunissent peu de membres mais produisent (ou relaient) des
contenus, et ceux en périphérie réunissent beaucoup de membres essentiellement
consommateurs de l’information.
Mais surtout, et c’est le changement le plus dévastateur car le plus difficile à intégrer,
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l’entreprise doit aujourd’hui attacher un soin particulier à toutes les étapes de l’expérience
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client (vendeur, boutique, plateforme téléphonique, site web, packaging, design du produit,
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SAV…). Les sentiments issus de ces divers points de contact se retrouveront nécessairement
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sur les médias sociaux pour bousculer le discours officiel de la marque. Chacun adopte
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aujourd’hui le réflexe de partager ses joies comme ses souffrances de client sur les médias
sociaux. Nous quittons ici le domaine de la communication pour un autre plus profond : celui
de la transformation de l’entreprise elle-même, imposée par la porosité nouvelle avec son
environnement.
Cette dynamique de la viralité doit aussi être analysée sous un angle moins positif pour la
marque : comment réagir à une information négative sur son entreprise ou le détournement
de ses supports de communication (publicité, logo, packaging…) qui commence à faire le
tour du web ? Prévenir ce type de dérive fait partie de la gestion de crise sur les médias
sociaux et doit s’envisager en même temps que les actions courantes. Cela peut passer par
une cellule de gestion de crise rapidement activable, des messages, des relais internes et
des porte-parole identifiés en amont, des procédures précises déjà établies.
Nous ne rentrerons pas dans le détail des dispositifs à mettre en place et à activer car cela
relève de livres spécifiques sur le sujet, mais une cartographie des risques est à envisager
afin d’identifier les plus susceptibles de se produire et ceux qui ont le plus fort degré de
gravité. Il faut se rappeler que le risque de réputation d’image est dans le top 10 des risk
management 4.
Revoir l’allocation des budgets entre conception et diffusion

Traditionnellement, compte tenu du coût des grands médias, une plus forte proportion du
budget est allouée à la diffusion, à l’achat d’espace, et une moindre proportion à la
conception. Le modèle économique incite ainsi à multi-diffuser un même contenu afin de
rentabiliser l’investissement de départ.
Quelques initiatives récentes vont à l’encontre de ce modèle. À l’occasion de ses 165 ans,
Cartier a dépensé quatre millions d’euros pour réaliser un véritable court métrage de
3 minutes 30 : « L’Odyssée de Cartier ». Ce film, vu par près de quatre-vingts millions de
personnes dans le monde, doit moins sa formidable notoriété à un plan média puissant qu’à
une couverture médiatique impressionnante, une présence sur les réseaux sociaux et un
bouche à oreille justifié par la qualité esthétique du film. Plus récemment, le projet Stratos
de Red Bull aurait coûté environ cinquante millions d’euros pour permettre à Felix
Baumgartner de réaliser son exploit 5. Suivi en direct par plus de huit millions de personnes,
bénéficiant de huit mille passages à la télévision, Havas Digital a estimé ces retombées à
près de un milliard d’euros en équivalent d’achat d’espace.
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Dans des proportions tout autres, André Citroën avait expérimenté cette approche avec la
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Croisière Jaune dans les années 1930. Il avait eu l’intuition qu’une aventure incroyable,
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innovante, pleine de péripéties, riche en émotions, tel un bon scénario de film, pouvait créer
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une légende, nourrir l’imaginaire de la marque et lui associer durablement des symboles
forts. Le tout en passionnant journalistes et grand public. Il avait inventé le contenu de
marque ou brand content.
La semi-gratuité des médias sociaux devrait inciter les entreprises à reporter ces gains de
budget sur la production. Hélas, nombre d’entre elles n’y voit qu’un canal de diffusion à
répétition de contenus standardisés, conçus pour les grands médias. Ce n’est bien
évidemment pas ce qu’attendent les membres d’une communauté de marque. Ce n’est pas
non plus un moyen de tisser dans le temps une relation de fidélité avec sa communauté.
En revanche, il s’agit d’imaginer des contenus qui ne parlent pas uniquement des bénéfices
de la marque ou des bienfaits du produit. Des contenus qui répondent plutôt parfaitement
aux attentes ou aux envies de diverses communautés : divertissement, conseil, pédagogie…
Ceux-là seront plus à même de susciter l’intérêt. Planifier régulièrement des nouveautés,
inviter les membres à participer à ces contenus, créer des événements, de la surprise, de
l’empathie, de la générosité, initier l’échange et la discussion, permettront de susciter des
émotions partagées qui renforceront l’attachement à la marque. Il s’agit de penser moins en
termes de média que de contenus.
Communiquer différemment en interne

Les services de communication interne ont bien compris ces changements à défaut de
toujours y répondre avec pertinence. La communication interne demeure encore trop
souvent le modèle d’une information partisane, redondante, obsolète, (con)descendante.
Les intranets n’ont que rarement bénéficié des mêmes attentions et des allocations
budgétaires que les sites web externes. Leur utilisation est vécue par le collaborateur
comme une perte de temps et une frustration.
Certaines entreprises tentent de communiquer différemment via des espaces de
conversation comme les réseaux sociaux internes, mais sans grand succès pour l’instant chez
la plupart d’entre elles. Le collaborateur, si participatif dans sa sphère privée, l’est beaucoup
moins en interne. Comment en serait-il autrement si on a si rarement sollicité son avis dans le
passé, si les circuits de communication sont la réplique exacte de l’organisation
hiérarchique ? La possibilité de poster des commentaires sur les contenus, pourtant peu
chronophage et peu impliquante, rencontre surtout un succès d’estime. La libération de la
parole est un processus long qui passe rarement par la seule mise à disposition de nouveaux
outils. |
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Sur le plan de l’ergonomie, les intranets commencent à s’ouvrir aux fonctionnalités riches et
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aux contenus multimédias, tentant lentement de rattraper leur retard sur les usages grand
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public. La vidéo connaît un bel essor, ainsi selon l’observatoire de l’intranet 6, 55 % des
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entreprises proposent ce type de contenus et on note même l’émergence de « YouTube


internes » qui permettent le partage de vidéos. Les contenus visuels et audios sont d’ailleurs
les seuls en augmentation (+ 4 %) et quelques entreprises ont lancé des webTV sur leur
intranet comme St Gobain ou Generali, pour partager des vidéos métiers ou des
présentations de projets d’entreprise.

Le lent travail de mutation d’une information « top/down » vers une communication bien plus
riche, englobant la participation du plus grand nombre ne fait que commencer. Et à ce titre,
le besoin d’animation est désormais crucial. Ainsi, on note dans ce même rapport que la
fonction de community manager en interne devient une réalité avec un « nombre de
community managers en croissance par rapport à l’an passé : 43 % des entreprises ont nommé
des community managers contre 37 % en 2012 7». Il n’existe pas de chiffre officiel mais la
dernière enquête de 2014 sur cette profession a vu près de 800 d’entre-eux y répondre et
17 % seulement sont en free-lance, d’autres en agence et les derniers salariés d’entreprise
(http://fr.slideshare.net/captainjob/enquete-community-managers-2014). Ces signes
montrent que les entreprises s’engagent désormais vers une communication moins
contrôlée et moins ennuyeuse pour offrir de nouveaux supports, un nouveau traitement de
l’information et une place à ses salariés pour y participer.

➤ Témoignage

Communication d’entreprise :
un monde qui change

Denis Marquet est membre du bureau de l’organisation professionnelle Communication & Entreprise. Il
donne sa vision des changements majeurs qui ont touché la communication d’entreprise ces dernières
années.

« Le premier facteur qui a fait évoluer la communication en entreprise est très certainement l’accélération de la
circulation de l’information. Cette accélération est principalement due à l’importance qu’a pris Internet dans nos
vies. Au début, beaucoup ont pensé que c’était un outil. Mais c’est une vraie révolution, tant dans la façon de
consommer l’information que dans les usages qui y sont liés. Avec la multiplication des supports de types
smartphones, tablettes, une partie de la population est en connexion permanente avec l’information.

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Nous sommes également entrés dans une ère où le discours politique et institutionnel n’est pas considéré comme
juste ou vrai. Nous faisons face à une problématique de crédulité de ces messages et les directions de la
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communication ont dû s’y adapter.


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La période de crises économiques que nous vivons depuis cinq ans, avec un véritable impact sur la performance de
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l’entreprise, amène aussi à repenser la façon de communiquer. Les professionnels de la communication ont dû
travailler sur la façon dont les entreprises se positionnent en termes de contenu. Que doivent-elles dire, comment
et à qui ? Avec les années de crise que nous traversons, le métier de directeur de la communication consiste parfois
plus à éviter la destruction de valeur qu’à en favoriser la construction.

Une contribution classique

Notre métier, notre contribution dans l’entreprise en tant que communicant joue néanmoins le même rôle que
nombre d’autres fonctions : contribuer au développement du chiffre d’affaires (CA) et améliorer la productivité.
Sur l’augmentation du CA, on connaît le lien entre son développement et l’image de l’entreprise (celle qu’émet
l’entreprise), la notoriété de la marque et la réputation (ce qu’en pensent les gens). Notre rôle est donc de créer ou
d’améliorer la notoriété, de faire en sorte que la marque ou l’entreprise ait une bonne image (qualifiée, référencée)
et de travailler à la compréhension de la responsabilité de l’entreprise, à travers ses activités, dans la société, dans
l’économie.

Sur l’amélioration de la productivité, nous savons que des collaborateurs fiers de travailler dans leur entreprise
travaillent mieux. La communication contribue à cette fierté, dans le sens où un collaborateur qui a le sentiment
d’être bien informé – sur et par son entreprise – est un collaborateur plus fier de celle-ci, qui se sent respecté (par
opposition aux salariés qui apprennent tout de l’extérieur).
Dans un contexte de changement permanent, la communication contribue à travailler à l’acceptation de ce
changement. Elle aide à faire comprendre que le monde change, bouge et que l’entreprise doit suivre, à travers ses
process, ses méthodes de travail, etc.
Authenticité et pédagogie

Tout cela n’a pas changé. En revanche, c’est la façon de faire qui a changé. Sur la circulation de l’information, il faut
travailler sur la temporalité. Il faut bien privilégier l’interne comme première cible d’information, puis gérer ensuite
les autres cibles (clients, journalistes, actionnaires, etc.).

Les entreprises doivent adopter une posture qui va dans le sens de l’authenticité et de la pédagogie. Dans le
brouhaha d’information, nous entendons souvent des contre-vérités, des erreurs. La question est donc de
s’interroger sur la façon de faire pour que tout ce que dit l’entreprise soit vrai ; ce qui ne veut pas dire que l’on dit
tout.

Sur la pédagogie, nous sommes dans un monde complexe. Notre rôle peut consister à aider les collaborateurs à
décrypter cette complexité. Il y a tout un travail à faire sur les mots, les sigles, les éléments techniques de
l’entreprise. Notre rôle est de jouer les candides face à cette complexité pour l’expliquer de façon simple.

Cibles et niveaux de lecture

Avant l’essor d’Internet, le travail sur l’image et la notoriété passait essentiellement par la publicité et le sponsoring.
Avec la multiplication des supports (la newsletter quotidienne, les réseaux sociaux comme Twitter, LinkedIn,
Facebook…), les entreprises doivent s’adapter et multiplier les contenus. Elles deviennent de véritables médias,

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elles fabriquent des émissions, elles montent des chaînes YouTube, etc. Elles racontent des histoires.
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La distinction entre un service de communication externe et un service de communication interne n’a plus
beaucoup lieu d’être. Le collaborateur peut être client et actionnaire à la fois. Les cibles sont moins claires, moins
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évidentes, moins déterminées. Sur un même sujet, je peux trouver différentes cibles regroupées sous une même
communauté sur les réseaux sociaux. Il faut donc éviter les messages dissonants, contradictoires. Ce n’est pas
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l’entreprise, mais l’individu qui choisit le niveau d’information dont il a besoin. Il faut donc beaucoup travailler sur les
niveaux de lecture. On va traiter un sujet et laisser le choix au consommateur d’information final. L’essentiel, c’est
donc le sujet, les contenus, les mots, les images.

Une courbe d’expérience

Sur ces changements, tout le monde n’est pas au même niveau. Cela va dépendre de la taille de l’entreprise, du
secteur d’activité, notamment si vous travaillez en B to B ou en B to C. Par exemple, sur les grandes entreprises, le
constat est assez partagé : elles ont pris conscience de ces changements. Après, selon le degré de maturité de
l’entreprise et de son dirigeant, certaines seront plus avancées que d’autres dans la mise en œuvre de ces
changements.
Les révolutions importantes en la matière se sont aussi souvent faites dans des sociétés qui ont vécu des difficultés
et qui ont dû se pencher sérieusement sur le système.

Ce qu’il faut, c’est expérimenter, tester les choses, même si elles ne fonctionnent pas. Je pense par exemple à
l’expérience du recrutement sur Second Life menée par un certain nombre d’entreprises en 2007-2008 . Celles qui
s’y sont positionnées ont acquis une courbe d’expérience.

En revanche, si tout le monde n’est pas au même niveau, tout le monde n’a pas nécessairement besoin de
s’adapter à ces nouveaux modèles de communication. Nous ne sommes pas tous dans les mêmes cycles. Pour le
monde du luxe, par exemple, je ne suis pas sûr que les organisations soient sur ce niveau de réflexion. Leurs
problématiques sont ailleurs. Elles travaillent sur le rêve, moins sur l’explication. »
1. Jean-Noë l Kapferer, Ré-inventer les marques. La fin des marques telles que nous les connaissions, Paris, Éditions Eyrolles, 2013.
2. Publié le 18/12/2012, http://www.lenouveleconomiste.fr/2012-lannee-de-toutes-les-ruptures-17079/#.UUnaLBxfd4w
3. Propos tenus lors d’une table ronde organisée le 28 février 2013 par le cabinet de recrutement Sirca à Paris, en partenariat avec l’agence de marketing RH Quatre
Vents.
4. Communication de crise à l’heure des médias sociaux (http://www.atramenta.net/ebooks/communication-de-crise-medias-sociaux/21)
5. Le 14 octobre 2012, cet Autrichien réalise un saut depuis l’espace à plus de 34 000 mètres et atteint le mur du son dans une chute libre de plus de quatre minutes,
avant de déclencher son parachute et d’atterrir dans le désert du Nouveau Mexique aux États-Unis.
6. http://observatoire-intranet.com/
7. Résultat de l’enquête 2013 de l’Observatoire de l’intranet, page 66.

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« Que la stratégie soit belle est un fait, mais n’oubliez pas de regarder le résultat. »
Winston Churchill

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■ Introduction
Du marketing dans les ressources humaines ?

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Il peut sembler surprenant de vouloir associer marketing et ressources humaines, tant ces
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deux activités de l’entreprise peuvent paraître éloignées l’une de l’autre. Le marketing,


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traditionnellement tourné vers l’externe, concerne essentiellement l’activité commerciale


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de l’entreprise, afin que celle-ci soit en phase avec les attentes de cibles identifiées (souvent
les clients ou prospects). Ces actions visent à modifier favorablement l’opinion ou orienter
les actions de ces cibles. Le marketing a vocation à adapter les actions de l’entreprise à son
environnement : innovations de la concurrence, arrivée de nouveaux acteurs, évolutions des
attentes des clients à fidéliser et des prospects à conquérir. Mais il est parfois présenté
comme l’auxiliaire zélé d’un modèle de société mercantile, consumériste, matérialiste, et
associé péjorativement à un exercice de séduction et de manipulation pour servir les
avantages commerciaux de l’entreprise au détriment des clients, utilisant des arguments qui
travestissent la réalité.
Les ressources humaines seraient, quant à elles, plutôt tournées vers l’interne : les
collaborateurs ; l’externe se résumant au process de recrutement. Moins sensibles aux
variations de leur environnement qu’à celles de leur entreprise, les ressources humaines ont
à veiller au respect du cadre réglementaire, et au positionnement des collaborateurs dans
des conditions d’exécution qui assurent la réalisation de la production, aujourd’hui comme
demain. Ainsi, les RH sont assimilées à des actions fortement contraintes par le cadre
réglementaire et les process internes, sans grande place pour l’innovation, le changement et
la créativité.
Ces deux images sont évidemment caricaturales, bien loin de la réalité de ces deux activités
de l’entreprise. Certes, de fortes différences culturelles et d’usages professionnels existent
entre les équipes RH et marketing. Il en résulte une certaine méfiance réciproque et peu
d’attirance mutuelle car les occasions qu’ont ces deux équipes de collaborer sur des projets
communs sont bien rares, voire inexistantes. Ainsi, l’étude réalisée début 2015 par l’ANDRH-
Inergie conclut que les DRH de demain seront de plus en plus stratégiques, connectés vers
l’extérieur, mobilisés sur les enjeux d’innovation digitale. Une vraie consécration pour le
marketing RH ! (http://www.andrh.fr/l-actualite/liste-des-actualites/le-drh-de-demain-sera-
mediatique)

Le marketing et les ressources humaines se rejoignent sur plusieurs terrains : le candidat (et
donc aussi le collaborateur) est aujourd’hui un consommateur de l’emploi. Face à une
approche consumériste de l’emploi et de la carrière, il devient indispensable pour
l’entreprise de savoir séduire et convaincre le candidat, rassurer et fidéliser le collaborateur.
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Autant de verbes familiers du marketing et de ses marchés concurrentiels. Le marché de
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l’emploi est aussi dans une logique concurrentielle. Il peut sembler surprenant de parler
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d’ailleurs de concurrence entre les entreprises pour recruter, quand dans le même temps
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notre pays (et la plupart des pays industrialisés) affiche durablement un taux de chômage
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élevé. Sans entrer dans le détail d’un sujet qui nous éloignerait de notre propos, la
problématique du marché de l’emploi est celle de l’inadéquation entre l’offre et la demande.
D’un côté, on trouve des candidats dont les compétences sont insuffisantes ou en total
décalage avec les besoins des entreprises ou la réalité de la société civile, d’autres sans
aucun diplôme, et qui auront toutes les peines à trouver un emploi. Se classent notamment
dans cette catégorie les quelques 140 000 étudiants qui sortent chaque année du système
éducatif sans diplôme, et dont le taux de chômage avoisine les 50 %, selon les chiffres du
ministère de l’Éducation nationale 1. Dans le même temps, et à l’opposé de cette situation, on
trouve des entreprises qui ne parviennent pas à recruter. « Il y a 1,7 million de postes à pourvoir
en France » titrait le Figaro en avril 2015, reprenant une des conclusions de l’étude annuelle
sur les besoins de main d’œuvre de Pôle Emploi
(http://www.lefigaro.fr/emploi/2015/04/16/09005-20150416ARTFIG00159-il-y-a-17-million-
de-postes-a-pourvoir-en-france.php). Certains profils bénéficient plus que d’autres de cette
« guerre des talents ». Les Ingénieurs, dont le nombre de diplômés est chaque année
inférieur aux besoins des entreprises, ont ainsi connu un taux de chômage de moins de 4 %
(c’est-à-dire une situation de quasi plein-emploi) en 2013
(http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/ingenieur-toujours-un-metier-qui-paye.xhtml).
C’est également le cas des diplômés d’écoles prestigieuses (HEC, Sciences Po, INSEAD,
ESSEC…) qui formeront les bataillons des « hauts potentiels ». Mais c’est également vrai, et
c’est plus surprenant, pour les Bac + 2 en commerce que se disputent toutes les sociétés de
services, de distribution, de banque et assurance. L’étude annuelle de Deloitte/Ifop
« Baromètre de l’humeur des jeunes diplômés » confirme en 2015 un certain optimisme de la
part des jeunes diplômés. Lors de la « Grande Conférence Sociale pour l’Emploi », qui a eu
lieu au mois de juin 2013, François Hollande a évoqué le problème des 200 000 à
300 000 offres d’emplois non pourvues. Ce chiffre a été repris à la hausse (350 000) par son
ministre du travail en 2014 sans pour autant pouvoir proposer des statistiques vérifiables.
Notons également l’initiative de certaines start up françaises (BlaBlaCar, Capitaine Train,
iAdvize, La Fourchette, Showroomprive.com...) qui, en mai 2015, dans le cadre de la French
Tech, ont lancé le mouvement “Reviens Léon” (http://reviensleon.com) pour convaincre les
talents français expatriés à revenir travailler en France.

Dès lors, cette situation de déséquilibre entre l’offre et la demande impose aux entreprises
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de travailler leur offre en tant qu’employeur. Et ce, en tenant compte de leur univers de
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concurrence, en intégrant les attentes des candidats et des collaborateurs. C’est le concept
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de « marque employeur ». Ainsi, la stratégie de communication RH s’est peu à peu


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professionnalisée. Les outils disponibles se sont fortement développés, notamment ces


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dernières années grâce au web. Des sources d’information pilotées par des cabinets
d’études spécialisés (Universum, Best Place to Work, Potential Park…) permettent de nourrir
ces réflexions sur l’attractivité. On parle aujourd’hui de marketing des ressources humaines.

Tourné vers l’externe, le marketing RH vise à développer une posture d’employeur attractif
pour convaincre les meilleurs candidats de rejoindre ladite entreprise. Orienté vers l’interne,
il vise à passer d’une relation basée sur la contractualisation à celle de l’engagement des
ressources clés. Enfin, il assure l’alignement entre les promesses externes et les pratiques
internes.

Le marketing des ressources humaines peut donc se définir par l’utilisation de l’ensemble
des techniques du marketing, appliquées aux objectifs RH. Nous serons donc amenés à
évoquer dans les lignes suivantes des notions de stratégies (un ensemble d’actions
organisées dans un objectif donné), de définition des objectifs à atteindre (favoriser
l’attractivité, renforcer l’engagement des collaborateurs, améliorer la phase d’intégration,
développer une réputation d’employeur…), d’identification de cibles (écoles, candidats,
collaborateurs, managers…).
Notons enfin deux particularités du marketing RH : d’abord, il est à la fois tourné, nous l’avons
vu, vers l’interne et l’externe en même temps. Ensuite, il ne cherche pas à maximiser le
nombre de transactions car son offre est limitée : le nombre de postes proposés,
contrairement aux produits est une donnée de départ, non extensive. Il s’agit donc d’un
marketing que nous pourrions qualifier de réciproque et d’intensif.

L’emploi, en raison du chômage endémique évoqué, est devenu un sujet particulièrement


sensible pour la société civile et les pouvoirs politiques. L’action politique nationale – qui
avoue à demi-mot son impuissance à inverser une tendance profonde dont les origines
dépassent ses frontières et ses prérogatives – reporte cette responsabilité sur les
entreprises avec des obligations réglementaires de plus en plus contraignantes : emploi des
seniors, des travailleurs handicapés, des jeunes sans qualification… La responsabilité de
l’entreprise en tant qu’employeur devient un élément essentiel de sa réputation globale.
L’acte de consommation exige aussi de plus en plus de connaître les conditions de
fabrication, l’envers du décor, et plus uniquement dans l’alimentation. Qu’il s’agisse des
suicides chez les sous-traitants chinois de Apple, des délocalisations de nos constructeurs
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automobiles, de l’effondrement d’un immeuble au Bangladesh fournissant les grands
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distributeurs textile européens, ou d’Arnaud Montebourg qui s’affiche en marinière « made in
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France », il est clair que la responsabilité employeur aura demain un impact fort. Impact sur
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l’identité corporate de l’entreprise, sur l’envie ou non de consommer certains produits, et


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donc sur les résultats financiers de l’entreprise. Face à un retour au patriotisme économique
que l’on ne peut que constater, la responsabilité employeur deviendra un élément
fondamental de la responsabilité sociale d’entreprise. La réputation employeur dépassera le
cadre des seules ressources humaines sur de simples problématiques de recrutement ou de
fidélisation, pour devenir un véritable enjeu stratégique.
Même les équipes dirigeantes les plus cyniques et les moins sensibles à la dimension
humaine ne pourront s’y soustraire. Le développement des agences de notation extra-
financières, type Innovest, Vigéo ou BMJ CoreRatings pour ne citer que les plus connues,
pointent notamment des éléments sur le bien-être des collaborateurs et les conditions de
travail pour évaluer les entreprises. L’entreprise employeur a elle aussi ses agences de
notation : elles se nomment Glassdoor, Meilleures-entreprises ou Viadeo. Notons également
que les structures comme les fondations d’entreprises s’intéressent de plus en plus aux
sujets liés à l’inclusion sociale, à l’accès à l’emploi, au mécénat de compétence, et délaissent
les thématiques liées à l’environnement, l’art ou la culture.

Les RH sont face à une situation qui pourrait les rendre schizophrènes mais qu’elles doivent
résoudre : concilier des objectifs économiques, encore plus sensibles en période de
contraction économique, et des objectifs sociaux pour répondre aux attentes nouvelles des
candidats. C’est à cette seule condition qu’elles pourront être considérées comme un
véritable « business partner » dans l’entreprise, sans oublier d’être « employee partner ». Le
marketing RH peut contribuer à résoudre ce paradoxe en activant des leviers internes et
externes non pas au coup par coup mais dans une stratégie globale.

1. http://www.education.gouv.fr/cid66441/lancement-dispositif-objectif-formation-emploi-pour-les-jeunes-decrocheurs.xhtml

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■ 1. Évolution de la communication de recrutement

Du papier au web

Le papier est demeuré jusqu’à très récemment l’élément central de la communication


emploi. Du côté des entreprises, la presse était le média quasi exclusif pour faire connaître
ses besoins de candidats. La plupart des grands supports de presse, généralistes ou
spécialisés, proposait aux entreprises des rubriques dédiées ou des suppléments emploi.
Côté candidats, la lettre de recommandation, puis de motivation accompagnant le CV, est
restée la norme pour faire valoir ses compétences. On attribue volontiers à Léonard de Vinci
la paternité du premier CV, lorsqu’en 1482, il proposa ses services à Ludovic le More, duc de
Milan, dans une lettre détaillant ses compétences en matière d’architecture, de machines de
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guerre, de sculpture ou de peinture. L’arrivée de Microsoft Word, au début des années 1980,
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marque une certaine normalisation de la présentation du CV, sans en changer véritablement
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l’esprit.
À la fin des années 1990, de nouveaux acteurs ont débarqué : les job boards et Monster, le
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monstre US, en tête. Passé les premiers mois d’hésitation, quelques entreprises pionnières
se sont finalement laissées séduire par des tarifs bien moindres que ceux de la presse papier
et une souplesse dans la modification des descriptifs des offres en cours de diffusion. Certes,
les volumes de CV reçus n’étaient pas toujours au rendez-vous, en comparaison de ceux issus
de la presse. Mais ces pirates savaient se montrer compréhensifs et offrir des rediffusions
gratuites. Car le modèle économique était nouveau et il fallait « amorcer la pompe » : les
annonces diffusées attiraient les candidats, qui attiraient les entreprises, qui diffusaient de
nouvelles offres pour attirer les candidats. Ces mêmes candidats ont découvert les joies de la
rapidité d’une candidature envoyée par mail, en lieu et place de la photocopie et du timbre
postal. Ils se sont également affranchis du rituel quotidien et tellement onéreux de la visite
au kiosque à journaux. Il était désormais possible de gérer sa recherche d’emploi sans quitter
son domicile, via son ordinateur.
Rappelons également la naissance de LinkedIn en 2003 aux USA, puis le lancement en
France de Viaduc en 2004 – qui deviendra Viadeo en 2006 –, suivis ensuite par de nombreux
autres acteurs positionnés sur le marché de la rencontre candidats / entreprises. Mais ici
encore, même si les nouvelles technologies ont fait évoluer les usages depuis Léonard de
Vinci, elles n’ont pas profondément changé l’esprit. Ainsi, les articles et opinions qui
prophétisent régulièrement la mort du CV relèvent plus de la discussion de Clochemerle, en
posant mal un sujet qui devrait plutôt s’aborder en termes d’évolution et d’adaptation, et qui
est démentie chaque jour par la réalité.
Le coup de grâce au papier a été porté par les sites institutionnels des entreprises, qui ont
peu à peu intégré des contenus RH dans leurs pages. Les choses se sont enchaînées très vite.
Des sites dédiés au recrutement sont apparus, auxquels on a ensuite associé des outils, les
ATS (Applicant Tracking System), permettant aux recruteurs de gérer tout le process de
candidature : diffusion des offres automatique sur plusieurs job boards, réception et tri des
candidatures, réponses aux candidats. Pendant que les équipes commerciales et marketing
passaient des sites web catalogues aux sites marchands, les RH s’équipaient elles aussi de
sites web transactionnels.
Cette révolution numérique a fortement transformé le marché de l’emploi. Les supports de
presse ne se sont jamais remis de la disparition des petites annonces, qui a contribué à les
installer dans une situation financière très délicate. Le monde des agences de
communication RH a lui aussi profondément évolué : alors que quelques grands acteurs,
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appartenant à des groupes de communication, dominaient le marché, ils ont pour la plupart
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dû engager des plans de réduction d’effectifs drastiques. Dans le même temps, de nouvelles
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agences indépendantes ont vu le jour, de taille plus petite et au modèle économique moins
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dépendant des annonces dans la presse. Notons également la présence d’acteurs


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éphémères qu’ont été les logiciels de scan et de reconnaissance de mots, censés faciliter les
tris de candidatures. Quelques entreprises y ont laissé des plumes qui se sont chiffrées en
millions.

Cette première phase de digitalisation du marché de l’emploi a certes permis de


nombreuses évolutions, mais elle n’est pas exempte de critiques. Elle a favorisé une logique
quantitative plus que de pertinence et d’adéquation. Les entreprises, à l’image des grands
médias, adoptent alors une diffusion massive et automatique des offres sur une multitude de
sites web, dans une logique de puissance plus que d’affinités. Cette large diffusion est
censée multiplier le volume de candidatures reçues, maximisant ainsi les chances d’y trouver
le bon candidat. Ce phénomène est également nourri par une multitude de sites web
(Indeed, Keljob à ses débuts) qui ne font qu’agréger les offres d’emploi gratuitement, en
espérant drainer une audience de candidats qu’ils entendent, demain, revendre aux
entreprises. À l’image d’un immense filet de pêche, qui ramasse sans distinction tout ce qu’il
rencontre, et qui nécessairement engendrera du gaspillage. Comme pour la consommation,
peut-on parler de recrutement écologique ?
La diffusion d’une offre d’emploi est une action de communication positive, puisqu’elle
traduit un dynamisme et une bonne santé économique de l’entreprise. Il convient donc de lui
donner un maximum de visibilité. Mais le volume de CV reçus, pour le recruteur qui justifie
son travail, comme pour le manager qui veut se rassurer, est encore trop souvent le principal
indicateur d’efficacité de la diffusion d’une offre d’emploi.

Face à ces offres sur-diffusées, les candidats appliquent de leur côté une logique de volume
à leurs candidatures, persuadés que les lois statistiques s’appliquent au marché de l’emploi.
La contrainte financière du papier étant levée comme nous l’avons vu, le digital rend
possible cette approche. Mais les candidats sont également conscients des limites de leur
stratégie, et pour éviter que leur CV ne soit perdu dans la masse qu’ils alimentent eux-
mêmes, ils mettent en place des stratégies complémentaires, comme les envois de CV en
direct auprès des opérationnels.
Dans le même temps, ils se plaignent des entreprises qui ne prennent pas la peine de
rédiger des réponses négatives personnalisées, alors qu’ils n’ont pas fait le moindre effort
pour adapter leur CV et lettre de motivation à l’offre d’emploi de l’entreprise. Cette situation
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est néfaste pour les entreprises en termes d’image, puisque cela crée une frustration chez
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les candidats recalés, et en termes opérationnels, car cela génère des volumes croissants de
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candidatures non ciblées, donc inexploitables.


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Ainsi, cette stratégie de volume ne favorise pas efficacement la rencontre entre l’offre et la
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demande. Elle est pourtant valorisée par de nombreux acteurs qui la présentent aux
entreprises comme une solution à la guerre des talents. Le principe de « postuler en un clic »,
ou d’importer le CV dans la base de l’entreprise, tend à présenter l’acte de recrutement
comme un achat d’impulsion. La réalité quotidienne des entreprises confirme que c’est une
erreur grossière, qui n’est profitable ni aux candidats, ni aux entreprises. C’est une mauvaise
réponse à un vrai problème : celui de la qualité des outils de gestion de candidature.
Certes, il est légitime pour le candidat de considérer comme une perte de temps d’avoir à
recopier un CV dans les bases de chaque entreprise, plutôt que de maintenir à jour un CV
« source » facilement diffusable. Si cette étape est supprimée du process de candidature, elle
doit être remplacée par d’autres formes de filtres et de pré-sélection en ligne pour éviter
l’inflation de candidatures. On peut imaginer par exemple des évaluations de compétences
techniques, des mises en situation collectives ou individuelles, des cas pratiques à
résoudre… Mais cette approche se heurte encore à des freins psychologiques, car elle induit
un traitement automatique des candidatures, avec une moindre intervention humaine. Il est
alors facile de lui reprocher son manque de considération pour les candidats. Nous abordons
ici un aspect de l’expérience candidat, notion centrale que nous développons plus loin.
Du web au web 2.0

L’arrivée du web social, ou web 2.0, n’a pas épargné les ressources humaines. Qu’il s’agisse
de réseaux directement orientés vers l’emploi, comme LinkedIn ou Viadeo, de réseaux grand
public comme YouTube, Facebook, Google+ ou Twitter, des blogs, des forums, tous ces
nouveaux espaces font potentiellement partie de la panoplie des RH 2.0. La séparation
traditionnelle entre plateformes dédiées au recrutement, espaces de communication RH et
réseaux sociaux, est en train de s’estomper. En mai 2015, Monster a lancé en France ses
« Social Job Ads », une solution de recrutement permettant de cibler avec précision les
utilisateurs Twitter en fonction de leurs profils professionnels. Les phases de pré-sélection
en amont doivent permettre aux deux parties de mieux se connaître au travers des
conversations et de l’échange d’informations. C’est un des avantages des médias sociaux
appliqués au marketing RH externe. Les candidats accèdent déjà à des offres de recrutement
sur Facebook. Viadeo et l’Apec avaient signé un accord en janvier 2010 pour offrir des
services mutualisés et ainsi rapprocher leurs bases respectives de candidats. Au printemps
2013, c’est Pôle Emploi qui a passé un accord avec huit job boards 1. Comme le précise très
|
justement Thierry Delorme, directeur associé de l’agence ORC, « les job boards se socialisent et
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les réseaux sociaux se job-boardisent 2 ». Il devient de plus en plus arbitraire et artificiel de
$!

vouloir maintenir une séparation entre recrutement et marque. Appliquée au e-commerce,


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cette logique reviendrait à développer des sites catalogues présentant les produits, et
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d’autres sites destinés à l’achat. Loin de correspondre aux comportements naturels d’un
candidat, cette séparation est simplement une conséquence de l’organisation des
entreprises. Organisation qui scinde les équipes de communication RH (souvent rattachées à
la direction de la communication) et les équipes de recrutement (appartenant à la DRH).
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Exemple d’une offre d’emploi présente sur le site de l’APEC, avec possibilité de contacter des membres
de son réseau Viadeo qui travaillent dans cette entreprise.

Le web social ou web 2.0 a révolutionné en profondeur le marketing et la relation client. Il


s’attaque depuis quelques années aux RH, avec certes un rythme plus lent mais dont l’issue
ne fait aucun doute. Le premier changement à amorcer dès à présent est celui des
mentalités. Il s’agit de passer d’une logique de communication verticale et à sens unique, à
une approche plus horizontale, basée sur des échanges et de la conversation. Ce
changement consiste aussi à faire évoluer les compétences et les méthodes de travail de ces
équipes associant communication, RH et 2.0. Comment leur apprendre à développer une
présence RH sur les médias sociaux ? Comment faire vivre et animer une communauté de
candidats pour se constituer un vivier ? Comment concilier des objectifs de recrutement à
court terme, et en même temps maintenir une attractivité dans les périodes de moindres
recrutements ? Comment passer d’une communication unidirectionnelle, à la seule initiative
de l’entreprise et séquencée dans le temps, à une situation d’échanges et de dialogue en
continu, à la main des candidats ?
Le second enjeu réside dans le nouveau rôle que doivent jouer les équipes de recrutement
vis-à-vis des managers, eux aussi présents sur les médias sociaux, et donc potentiellement en
mesure de repérer de bons candidats. La répartition des rôles entre eux doit nécessairement
être revue : les managers ne peuvent plus se contenter de « passer commande » d’un
recrutement auprès des RH ; ils seront peut-être demain les principaux pourvoyeurs du
sourcing. De même, tous les collaborateurs sont potentiellement des ambassadeurs (ou des
fossoyeurs) de la réputation RH de leur entreprise. Il appartient aux RH de les former, de les
informer, de les outiller, de trouver comment maintenir un fragile équilibre entre liberté de
parole et cohérence du discours porté en externe.
Le troisième enjeu relève de la transparence. Cet enjeu vaut d’ailleurs autant pour
l’entreprise que pour le candidat. La réputation en tant qu’employeur de l’entreprise, et de
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l’employabilité du collaborateur, sont des notions centrales qui imposent une vraie
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cohérence entre le discours et la réalité, entre la communication et l’expérience vécue. Le
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risque de déception expose à des conséquences lourdes : démissions massives en cours de


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période d’essai, sentiment de malhonnêteté perçu par les anciens collaborateurs, et au final
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impact négatif sur l’activité de l’entreprise en cas d’erreur de casting.

De l’annonce d’emploi à l’offre employeur

Au départ était la petite annonce : elle décrivait dans le détail les compétences et aptitudes
recherchées pour un poste. La partie qui présentait l’entreprise était réduite à la portion
congrue, voire totalement inexistante. L’entreprise se contentait d’énumérer ce qu’elle
cherchait, sans dire ce qu’elle proposait en échange, puisqu’il était entendu par tous que la
seule contrepartie était un salaire. La tonalité était rationnelle, avec un discours
exclusivement informatif, sans aucune émotion. Il s’agissait d’informer pour susciter l’acte de
candidature. L’entreprise était dans un rapport de force qui lui était totalement favorable.
Le développement des marques commerciales, et la plus-value qu’elles étaient censées
apporter à l’acte de consommation, ont amené les entreprises à enrichir aussi
progressivement leurs offres d’emploi avec des données sur leur organisation, mais sur un
registre toujours rationnel : produits vendus, effectifs, chiffre d’affaires, implantation… Les
informations étaient de nature institutionnelle et commerciale. L’entreprise développait un
discours de conviction dans lequel elle vendait le poste et l’entreprise, à une époque où
l’emploi à vie était le modèle dominant.
L’évolution du rapport au travail, la prise en compte de l’environnement professionnel, et un
début de concurrence sur certains métiers ont fait évoluer la communication emploi vers
davantage d’empathie : les entreprises ont développé de véritables stratégies de
communication autour de leurs valeurs et de leur culture interne, destinées à répondre aux
besoins de reconnaissance et de statut des candidats. Il ne s’agissait plus uniquement de
vendre un poste, mais de proposer un environnement global au sein d’une entreprise. On
parlait d’employabilité car l’emploi à vie n’était plus la norme. La contrepartie venait donc
s’enrichir de bénéfices RH : formation, perspectives d’évolution professionnelle,
environnement stimulant, international ou innovant… Le registre d’expression était celui de
la séduction.
Nous glissons progressivement aujourd’hui vers une dimension encore plus large de la
communication emploi, qui s’éloigne des seuls objectifs opérationnels de recrutement (ou
fidélisation) pour aller vers de la réputation globale. L’entreprise devient un acteur de la
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société civile qui est sommée par des publics divers (actionnaires, clients, élus, ONG…),
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d’assumer sa responsabilité face à l’emploi, sans y répondre nécessairement par des
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recrutements. Son registre est celui de la responsabilité et de l’éthique. La communication


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RH se confond de plus en plus avec une communication corporate, on pourrait parler de


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corporate RH.
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Évolution de la communication emploi : de l’offre d’emploi au corporate RH

De chasseurs-cueilleurs à éleveurs-cultivateurs

Les recruteurs et responsables de la communication de recrutement doivent faire évoluer


leurs méthodes de travail. Sans tomber dans l’alarmisme, il est indispensable de provoquer
un électrochoc chez ceux qui ne se rendent pas compte que leur métier est en train de
changer, que des compétences nouvelles doivent être acquises, au risque de se retrouver
complètement dépassés et de voir se dégrader leur propre employabilité. Il est d’ailleurs
curieux d’observer que, tels des médecins gros fumeurs, s’ils sont censés conseiller et
orienter les candidats sur une même vigilance à piloter leur carrière et surveiller leur
employabilité, ils ne s’administrent pas le traitement. Peut-on encore adopter cette
politique de l’autruche, quand il suffit de se pencher un instant à sa fenêtre (celle de son
navigateur web) pour constater l’arrivée de nouveaux acteurs, l’émergence de nouveaux
comportements chez les candidats ou l’instauration de nouvelles règles du jeu portées par
quelques entreprises pionnières ? Quel recruteur peut encore refuser de remettre en cause
ses traditionnelles méthodes de travail alors que, les réseaux sociaux à peine utilisés, on
parle déjà de robot, de machines intelligentes et de sourcing prédictif ?

Le lecteur nous pardonnera les lignes suivantes qui peuvent paraître caricaturales et peu
respectueuses des candidats. Il n’en est rien. Nous avons simplement voulu prendre une
image qui marque les esprits, et ainsi la plus à-même d’illustrer efficacement notre propos.
Les recruteurs abordent aujourd’hui leur métier comme des chasseurs-cueilleurs. Ils
attendent que d’autres membres de la tribu (les managers) viennent les solliciter pour un
besoin urgent de ressources nouvelles (les candidats). Dès lors, ils quittent le village, partent
à la recherche de cette nourriture, avec l’urgence de la situation à l’esprit. Ils reviendront
parfois bredouilles, suscitant la colère des membres de la tribu, ou n’auront réussi à
rapporter qu’une trop faible quantité de nourriture qui sera consommée immédiatement.
Cette image peut être rapportée au recrutement : les recruteurs lancent dans l’urgence
leurs actions en réponse aux demandes pressantes du manager. Un manager d’autant plus
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pressé, que lui-même n’aura eu que tardivement un accord budgétaire sur cette création de
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poste. Et les recruteurs tenteront d’approcher dans l’urgence de la situation des candidats
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avec lesquels ils n’ont jamais eu aucun contact, mais dans un objectif de recrutement rapide.
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Les éleveurs-cultivateurs, apparus au Néolithique, ont fait le choix de la sédentarisation et


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de l’anticipation de leurs besoins. Plutôt que rester dépendants des caprices et des cycles de
la nature, ils ont fixé gibiers et végétaux comestibles à proximité de leur lieu de vie. Ils ont
apprivoisé du bétail, et s’en sont occupé afin d’assurer la pérennité du cheptel. Ils ont
également sélectionné et utilisé certains végétaux, en fonction de leurs qualités nutritives
ou de leurs rendements. Dans les deux cas, ils constituaient des stocks pour anticiper leurs
besoins futurs.
Les recruteurs doivent aujourd’hui développer des communautés de candidats. Pas pour
répondre à des besoins de recrutement à court terme, mais pour initier des relations sur la
durée, apprendre à connaître ces candidats potentiels, leur faire découvrir les différents
aspects de l’entreprise, identifier ceux dont les valeurs, les motivations et les savoir être,
correspondent à la culture de l’entreprise. C’est ainsi que les recruteurs pourront répondre à
des besoins de recrutement de plus en plus difficiles à anticiper, contribuer à l’attractivité de
leur entreprise, apporter une valeur ajoutée aux managers, améliorer les chances d’un
recrutement réussi… Et ce, grâce à une meilleure connaissance de leurs cibles.
Cette politique de développement et d’animation d’un vivier de candidats doit
naturellement s’appuyer sur la GPEC (Gestion prévisionnelle des emplois et des
compétences) et les grandes tendances identifiées dans l’évolution des emplois. C’est ce que
les entreprises anglo-saxonnes nomment le workforce planning. Le vivier doit ainsi privilégier
les emplois de demain. Il s’agit d’anticiper les mutations possibles de l’activité et des
compétences nécessaires – celles qui seront en forte demande et celles en réduction –, de
mettre en place les formations adéquates, de définir une articulation entre mobilité interne
et recrutements externes, d’alimenter les plans de succession.
Mais la GPEC montre souvent ses limites dans sa dimension prévisionnelle et comporte de
nombreuses marges d’erreur. Comme tout exercice prévisionnel, la GPEC s’appuie sur des
modèles passés pour imaginer l’avenir. Or, l’essor des nouvelles technologies de
l’information et de la communication représente pour les entreprises une révolution d’une
ampleur équivalente à l’industrialisation ou l’informatisation. Si bien qu’une nouvelle
approche émerge : l’analyse à partir des données numériques (Big Data 3) recensées par
l’entreprise sur ses salariés, mais aussi sur les candidats, au travers de l’ensemble de leurs
interactions : nature des candidatures, popularité des postes proposés sur le site de
recrutement ou la bourse à l’emploi interne, types de contenus consultés en ligne,
commentaires et échanges postés sur les réseaux sociaux ou les intranets… Cette analyse
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prédictive 4, qui n’en est qu’à ses prémices et à des promesses, n’est pas sans risques, ni
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exempte de toute critique, en raison de son manque de transparence et de son aspect Big
$!

Brother.
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➤ Témoignage

Dix ans pour intégrer une révolution

Jean-Christophe Anna est directeur Général de #rmstouch, société spécialisée en recrutement mobile et
social.
Il constate un décalage entre la naissance des innovations liées au recrutement et leur adoption par les RH.

« Dans le paysage du web et de l’emploi, la France est très innovante. De nombreux acteurs apparaissent tous les
jours. Paradoxalement, dans ce même pays, les RH sont assez conservateurs sur la question. Historiquement, nous
avons déjà pu constater une certaine résistance aux innovations web de la part des RH. Ça a commencé avec
l’arrivée des job boards à la fin des années 1990. Pendant des années, la presse a vraiment conservé une grosse
part du gâteau sur le marché des annonces avant que les sites emploi n’apparaissent comme incontournables.
Et pourtant, aujourd’hui, il s’agit d’un véritable marché mature, si bien que les job boards font figure d’acteurs
historiques et paraissent indéboulonnables.
Les réseaux sociaux professionnels existent déjà depuis plus de 10 ans. LinkedIn a été lancé en 2003 et Viadeo,
Viaduc à l’époque, en 2014. Or, force est de constater que bon nombre de recruteurs ne les utilisent pas encore de
manière optimale, sans parler de ceux qui ne les ont toujours pas investi réellement...
Il s’agit pourtant de formidables outils pour traquer tous les candidats là où ils se trouvent (sourcing), qu’ils soient
actifs, c’est-à-dire activement en recherche d’emploi, ou passifs, en poste et pas forcément à l’écoute du marché.
Ce sont également des plateformes qui offrent aux entreprises une belle vitrine pour draguer leurs candidats cibles
et les attirer via l’animation de communautés et le partage, voire la production, de contenu (marketing
employeur).
Et déjà, une nouvelle révolution est en marche avec le recrutement mobile. Les entreprises « early adopters » ont
commencé à adapter leur environnement carrières à l’ergonomie du mobile en 2012. Permettre aux candidats de
consulter les offres depuis leurs smartphones et tablettes leur semblait alors naturel. En revanche, imaginer que ces
mêmes candidats puissent postuler directement était alors inconcevable… Il a fallu attendre 2014 pour que la
candidature directe depuis un mobile soit proposée par certaines entreprises françaises. Le déclic a donc enfin eu
lieu ! Et cela bouge également sur les salons de recrutement et les forums écoles.
La tablette est le nouveau support moderne de l’interaction entreprise-candidat. Chaque nouvelle révolution
prend un certain temps pour être appréhendée, comprise et intégrée.
Les candidats adoptent souvent les innovations plus rapidement que les recruteurs. Ils entraînent ainsi ces derniers
à s’engager sur les nouvelles technologies.

Une maturation lente

Les grandes entreprises sont évidemment présentes sur les médias sociaux. Mais elles ne savent pas forcément bien
les utiliser. Les réseaux sociaux professionnels ne fonctionnent pas comme les sites emploi. Vous avez moins de
réactivité sur les réseaux, il faut engager la conversation avec des personnes en poste, animer une communauté. Il
convient finalement d’avoir à la fois une posture de chasseur pour chercher les candidats (sourcing), mais aussi
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d’éleveur pour aller les séduire et les attirer (marketing employeur), que tous les RH n’ont pas.
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Depuis deux ou trois ans, il y a une prise de conscience qu’il ne suffit pas d’ouvrir une page Facebook ou un compte
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Twitter, mais qu’il faut bien élaborer une stratégie avant et se poser les bonnes questions : pourquoi j’y vais ? Pour
toucher qui ? Avec quel contenu et quelles ressources ? Le marché est plus mûr pour les grandes entreprises et
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plus inégal pour les autres.

Des étudiants RH surprenants

Le plus flagrant, et le plus surprenant, concerne la population étudiante RH. La population RH entretient un sacré
décalage avec la réalité et aussi avec d’autres étudiants, comme ceux issus du marketing. On dirait que les
étudiants RH réunissent les clichés observés sur la profession. Ils ne voient pas forcément l’intérêt des médias
sociaux alors qu’ils sont pourtant doublement concernés, en tant que futurs candidats, mais aussi en qualité de
potentiels futurs recruteurs ! C’est fou ! »

1. http://exclusiverh.com/articles/site-emploi-generaliste/les-annonces-de-8-job-boards-bientot-accessibles-sur-le-site-de-pole-emploi.htm
2. http://exclusiverh.com/articles/site-emploi-generaliste/les-job-boards-se-socialisent-et-les-reseaux-sociaux-se-job-boardisent-eric-denaiffe-thierry-
delorme-orc.htm
3. http://pro.01net.com/editorial/588743/l-analyse-predictive-au-service-des-rh/
4. Définition Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Big_data
■ 2. Le candidat : un client… comme un autre

Le candidat se comporte comme un consommateur averti

Il en est des produits comme des carrières. Le candidat, comme le client, a appris à décoder
les discours promotionnels et pour le plus courtisé (c’est-à-dire celui qui détient une
richesse, de talents ou financière), à tirer parti du jeu concurrentiel. Celui qui dispose d’un
capital de compétences suffisant développe une véritable approche consumériste du
marché de l’emploi. Il établit ses critères d’évaluation et compare les offres concurrentes
sans émotion, ni sentiment. Anciens collaborateurs, anciens camarades d’école, sites de
notation, blogs personnels, réseaux sociaux et palmarès des meilleures entreprises, il s’est
habitué à multiplier les sources d’information afin de trier les belles promesses et les
|
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preuves.
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Il est infidèle, opportuniste, exigeant. La notion de carrière régulière et linéaire est obsolète.
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Cet engagement tacite d’une progression régulière, sur la durée, en matière de


responsabilités comme de salaire, à condition d’avoir fait ses preuves pendant quelques
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années, a fait long feu Des années de crises économiques, un chômage endémique, des
licenciements et des délocalisations ont instauré un nouveau rapport distendu entre les
collaborateurs et leur entreprise. Le contrat moral entre l’entreprise et le salarié a été
malmené par la dureté du marché du travail actuel et la nouvelle réalité économique :
internationalisation, financiarisation, concurrence accrue. Les entreprises ont depuis bien
longtemps, à de rares exceptions près dans la fonction publique, abandonné toute promesse
de l’emploi à vie. Notre candidat, qu’il soit jeune diplômé ou expérimenté, est convaincu que
son recrutement ne sera qu’une étape dans sa vie professionnelle, qui comptera de
nombreuses entreprises. Entreprises et collaborateurs se sentent désormais moins liés, tout
en conservant le filet de protection de la flexisécurité et du modèle de contrat de travail
français, pour parvenir à travailler dans un cadre minimal de confiance.

Un rapport basé sur le donnant-donnant


La grille de choix du candidat suit une logique simple : face à un marché de l’emploi incertain,
comment optimiser sa propre valeur sur ce marché ? Comment faire pour que chaque
employeur apporte au plus vite une contribution à son employabilité ? L’employabilité est
censée amortir les aléas de la vie professionnelle, faire en sorte que le rapport de force soit
au bénéfice du candidat / collaborateur. Dans cette relation provisoire avec l’entreprise, il
convient de garder un minimum l’initiative de la rupture du contrat. Ou tout au moins de
rester en veille active sur son marché, pour connaître à chaque instant sa propre valeur, ne
pas rater une opportunité potentielle, et ne pas être dans une situation de dépendance
totale. Bien sûr, seuls quelques collaborateurs, armés de leurs compétences rares, de leur
formation reconnue, de leur expérience particulière, pourront faire valoir cette valeur
marchande, et maintenir ce rapport de force face aux entreprises. Les mieux armés, ces hauts
potentiels, sont facilement reconnaissables dans les entreprises. On les retrouve dans les
programmes « leads » ou font partie des talents, un terme horrible qui laisse à penser que
tous les autres collaborateurs en sont dépourvus. Ils font souvent l’objet de toutes les
attentions en matière de gestion de carrière pour tenter de les fidéliser.
Ces happy few, conscients de leurs atouts, adoptent une stratégie d’évaluation des « offres
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employeur ». Quelles sont les entreprises qui offrent les meilleures opportunités à
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l’étranger ? Quelle est la réputation d’une entreprise, la valeur de son top management sur
$!

son marché ? Où trouver les meilleurs programmes de formation et les missions les plus
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valorisantes ?
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L’emploi est devenu pour eux un produit comme un autre. Ces candidats et collaborateurs,
quelques-uns en tout cas, opèrent une sélection stricte de leur entreprise. Sans cynisme, ils
sont également devenus un produit. Eux-mêmes veillent à optimiser leur réputation, à
maximiser leur valeur marchande – c’est-à-dire leur employabilité, en termes RH plus
politiquement corrects. Ce comportement vis-à-vis de l’entreprise a d’abord été le privilège
d’une certaine élite convoitée par les entreprises. Il touche aujourd’hui une tranche de plus
en plus large de salariés et en particulier les plus jeunes. Ces jeunes collaborateurs
assument, y compris devant leurs managers, une relation distendue avec l’entreprise et n’ont
pas un rapport avec la valeur travail formatée par deux mille ans de culture judéo-
chrétienne. Ils sont moins frileux pour tenter l’aventure ailleurs et veulent préserver leur
qualité de vie personnelle. L’épanouissement et la reconnaissance sociale ne passent plus
uniquement par la situation professionnelle. Ils n’hésitent pas à « claquer la porte », dès lors
que l’entreprise les a déçus ou qu’ils ont le sentiment que les termes et les conditions du
contrat social ne leur sont plus favorables. Cette situation est également facilitée par le
rapport de solidarité entre générations qui s’est inversé ces dernières années. Alors que
traditionnellement, les générations en activité professionnelle assuraient le soutien des plus
anciens, avec la crise économique, les seniors aident les plus jeunes : les retraités aident
leurs enfants et petits-enfants par des aides financières directes ou indirectes.

Tout l’enjeu des entreprises est de trouver comment concilier ces ambitions, ces attentes,
ces stratégies individuelles pour réunir et fédérer les collaborateurs autour d’un projet
commun, au moins pour quelque temps. Vis-à-vis des candidats, comment développer une
communication employeur qui ne soit pas dissonante avec la réalité interne, qui propose un
contrat en adéquation avec les aspirations personnelles, où chacun des co-contractants aura
quelque chose à partager, et à gagner ?
Ce défi, les entreprises doivent le relever dans un contexte de mutation profonde sur le
regard que portent désormais les économistes et certains politiques sur ce fameux modèle
français, qui, envié il y a peu, est désormais décrié et accusé du chômage de masse. Le CDD a
remplacé le CDI et la moitié des CDD se terminent avant leur date prévue ! Le Code du
Travail censé protéger employés comme salariés est source d’incertitude juridique pour les
entreprises en raison du nombre d’articles chaque année plus important et leur complexité.
Il est aussi soupçonné de constituer un frein à l’embauche en ces temps qui ne permettent
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plus guère de prévisions au-delà de quelques mois. Les textes législatifs et juridiques sont
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toujours en retard sur l’évolution de la société mais on voit des premières réponses
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d’assouplissement de la durée des CDD arriver, une reconnaissance du modèle


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d’intrapreunariat qui permet d’être tout à la fois salarié et auto-entrepreneur.


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Ces différentes données ont un impact direct sur le positionnement des acteurs autour de
l’emploi et sur les entreprises qui attirent les candidats ou doivent convaincre pour montrer
qu’elles aussi proposent des défis, missions en phase avec les attentes actuelles.

➤ Témoignage

Jean-Emmanuel Ray est professeur de Droit à Paris I - Sorbonne et à Sciences Po et directeur du Master
Professionnel « Développement des Ressources Humaines ».

Le droit du travail (encore salarié ?) dans le monde qui vient

Reflet de l’autorité naturelle structurant alors la Famille, l’École comme la Société, notre droit du travail
manuel et très subordonné, conçu au début du XXe siècle pour la manu-facture à l’organisation militaro-
industrielle, avec son unité de lieu, de temps et d’action chère à Boileau, n’est plus adapté au monde
d’aujourd’hui… et a fortiori au monde qui vient.
Ce modèle hiérarchique, que l’on retrouvait dans le système juridique, a certes permis la parenthèse
enchantée des Trente Glorieuses – avec sa croissance supérieure à 6 % par an qui fait aujourd’hui rêver –
mais il est contreproductif dans le secteur quaternaire. On ne fait pas travailler les neurones d’un travailleur
du savoir comme les bras de l’homme-machine de Charlie Chaplin. « L’organisation hiérarchique pyramidale
est le meilleur système pour reproduire un modèle ou exécuter des décisions, mais le pire pour innover ou
partager des bonnes pratiques. C’est la révolution intellectuelle la plus difficile pour l’entreprise » analyse
Benoît Sillard, délégué interministériel aux usages de l’Internet).
« Times have changed », avec un mouvement mondial de remise en cause de l’autorité d’hier, lui-même
aujourd’hui accompagné par la révolution du Web 2.0, pour l’instant nettement plus destructrice que
créatrice d’emplois salariés.

Les temps modernes 2.0 : Atawad !


« Anytime, anywhere, anydevice »

Cela tombe bien car les jeunes collaborateurs arrivés au collège en même temps que Facebook à Harvard se
sentent aujourd’hui pleinement citoyens : leur « N+1 » ne devient vraiment leur « supérieur » que lorsqu’il a
fait la preuve de son expertise et son exemplarité.
Ils ne se connectent pas mais vivent connectés, et travailler en mobilité (ex. : en dehors des bibliothèques
pour les étudiants) est pour eux naturel : disposant de leur propre et puissant matériel personnel-
professionnel, ils ont acquis une culture du travail Atawad, et d’échanges permanents grâce aux réseaux
dits « sociaux », en réalité parfois collaboratifs.

Venir tous les jours au bureau à heures fixes et être lié par une obligation de moyens relève pour nombre
d’entre eux – les meilleurs dans la chasse mondiale aux talents – de Juridic Park, et reste contreproductif
pour un employeur soucieux de rentabilité.
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Car dans notre société de l’immatériel donnant au travail le don d’ubiquité, l’essentiel n’est pas de venir au
travail à heures fixes mais que le travail soit fait, et bien fait. Or, dans un open-space aux 876 sonneries
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quotidiennes… Après leur « coloc » d’habitation, la colocation professionnelle ? Qu’il s’agisse de fatigue des
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collaborateurs ou de développement durable de notre société, dans les grandes agglomérations le


télétravail au domicile quelques jours par semaine mais aussi les « tiers lieux de travail » deviennent une
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ardente obligation : un francilien sur trois passe plus de 90 minutes par jour dans les trajets… Tout ça pour
quoi ?

Mais il faut aussi raison garder

Si les cadres et autres professions intellectuelles principalement concernés représentent 19 % de la


population active, les ouvriers (21 %) et les employés (28 %) en constituent encore près de la moitié : et au-
delà des métiers de contact physique (coiffeur(se), garagiste…), ils n’ont pas des NTIC la vision terriblement
optimiste des technophiles branchés.

Deux mondes qui divergent chaque jour davantage

Un siècle après la Révolution Industrielle, l’irruption du Web 2 horizontal déstabilise en particulier les
corps intermédiaires (managers, syndicats et représentants du personnel) qui sont littéralement court-
circuités. Et la Révolution Numérique génère deux mondes du travail, aux effets opposés en forme d’effet
Mathieu.

• Autonomie accrue pour les travailleurs du savoir


Par exemple, une obligation de résultat sera confiée au leader d’une équipe-projet internationale, où c’est
la co-labeuration hors rang hiérarchique qui est source de productivité, peu importe le lieu d’exécution et
le statut juridique. Pour « rester dans la course » dans « ce nouvel espace sans distance et ce temps sans
délais » (Françis Jauréguiberry), sa formation continue voire son personal branding sur son blog ou les
réseaux professionnels font partie de sa vie quotidienne.

• Mais parfois aussi un nouveau « système d’exploitation » ?


Oui, mais… au-delà d’une totale traçabilité de tous les échanges et de la maladie des reportings
permanents, le travail en équipe-projet peut générer une sub/organisation au collectif parfois très
contraignante. En dehors des questions de fuseaux horaires, le collaborateur est pris dans une chaîne où
toute l’équipe dépend de l’avancement du travail de chacun. Les remarques aimables puis plus acides de
collègues qu’on n’a jamais vus et à la culture fort différente peuvent faire regretter à certains le supérieur
hiérarchique unique, avec lequel il était possible de discuter, voire de s’opposer individuellement ou
collectivement avec succès.
Sans parler de la « charge de travail », qui est aujourd’hui communicationnelle et cognitive et dont la mesure
et le suivi sont bien plus délicats que les « 40 kg maximum, brouette comprise » d’autrefois (R. 4541-9). Avec
les courriels qui nous submergent, nous sommes tous débordés. Mais jusqu’où va ce débordement ? Il
empiète sur notre vie privée, et nous déconnecte de nos proches.

• Sur-subordination
L’informatique et ses dérives, en forme d’autisme quantitatif si répandu aujourd’hui, permettent de tout
contrôler en direct et à distance. À des ingénieurs qualifiés, hier autonomes, est imposée une division du
travail que Taylor n’aurait même pas imaginée : ainsi de ces méga-projets découpés en centaines de micro-
tâches effectuées de façon répétitive par des travailleurs plus ou moins indépendants, dans le monde
entier.
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Sans parler des nouveaux OS travaillant dans certains centres d’appel, ou encore des métiers rudes mais
bénéficiant dans le passé d’une réelle liberté (routiers, taxis) qui sont désormais télécommandés à distance.
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Comme au début du XXe siècle, quand la TSF a tué le métier de préfet puis d’ambassadeur, passant du statut
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de très autonome représentant de la France dans le pays en question à celui de petit télégraphiste aux
ordres de Paris, par système de code Morse interposé.
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• Capital social
Le capital social d’une entreprise du quaternaire est la somme cumulée des neurones de chacun de ses
collaborateurs, démultipliée par la confrontation physique de leurs meilleures idées.
Les importants investissements humains et financiers qui étaient hier nécessaires pour monter la moindre
entreprise ont aujourd’hui fondu.
On peut citer, par exemple, les fondateurs de Facebook connectant aujourd’hui 1,3 milliard d’êtres humains
et valorisé à plus de 150 milliards de dollars, Snapchat, valorisé à trois milliards et qui relie 200 millions de
personnes envoyant 160 millions de photos éphémères par jour fonctionne avec seulement 72 salariés ;
enfin AirBnB et ses 87 salariés fin 2014…
Le « demain, tous télétravailleurs à temps plein ! » est en passe de devenir une absurdité…

Le cycle de vie du candidat

Comme le client, le candidat va passer par diverses phases en fonction de son intensité et de
son urgence à vouloir passer à l’acte de « transaction ». Tel un client rassasié, le candidat qui
vient d’intégrer une entreprise sera a priori moins réceptif à des sollicitations directes et très
orientées sur des offres d’emploi d’entreprises concurrentes. Il pourra rester en veille
passive, à l’écoute de son marché, sans nécessairement y consacrer beaucoup de temps et
d’attention. Dans ce cas, lui transmettre des informations liées aux évolutions, aux enjeux ou
aux nouvelles compétences nécessaires dans son secteur d’activité aura davantage de
chances de l’intéresser. L’entreprise restera dans l’esprit de ce candidat, tout en
développant un sentiment positif puisqu’elle apporte une information utile au maintien de
son employabilité.
Ensuite, cet intérêt pour des opportunités de postes va aller croissant : répétition d’irritants
quotidiens, perspectives d’évolution interne qui se réduisent, incompatibilité avec le
management proche ou simple volonté de changement… Le candidat va a priori s’installer
dans ce qu’il est convenu d’appeler une veille active. C’est dans cette phase qu’il va peut-
être remettre à jour ses profils professionnels, créer des alertes mail sur les job boards,
réactiver son réseau de connaissances, consulter certains sites d’entreprises pour identifier
les employeurs potentiels.
La phase suivante va être déclenchée par différents facteurs difficilement perceptibles, qui
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vont faire basculer le candidat dans une recherche active. Sa volonté de passer à l’acte à
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court terme va se traduire par une activité plus intense : réponse à des offres d’emploi, envoi
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de candidatures spontanées, prise de contact avec des cabinets de recrutement, activation


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de son réseau de connaissances. Ici, son appétence ira plutôt vers des informations qui
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peuvent l’aider à accélérer la concrétisation de cette étape.


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Schéma du cycle de vie du candidat avec sa courbe d’attention selon ses phases de recherche
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Ces phases correspondent donc à des attentes d’informations de nature différente. Il est
évident qu’il est impossible de repérer avec précision ces différentes phases, excepté peut-
être avec les étudiants : entrée en école, recherche de stage, d’année de césure, d’emploi en
fin de cursus.
Il revient donc aux entreprises de répondre à ces différentes attentes en développant des
gammes de contenus différenciés. Nous le verrons un peu plus loin, la diversité des espaces
de communication existants, de leurs usages, de leurs fonctionnalités, de la nature des
contenus qu’ils hébergent, de leurs membres, doit permettre aux entreprises de bâtir des
éco-systèmes cohérents et complémentaires qui viennent organiser et structurer leur
territoire d’expression RH.
Le groupe Société Générale s’est appuyé sur ce cycle du candidat pour bâtir « My Coaching
Room », un site de conseils aux candidats dont les contenus sont structurés par quatre
moments forts : m’informer, optimiser ma recherche, préparer mon entretien, après mon
entretien.
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MyCoachingRoom.com, site de conseils aux candidats du groupe Société Générale, est


structuré selon le principe du cycle de vie du candidat : m’informer, optimiser ma recherche,
avant / après mon entretien.

Le candidat n’est pas un clone

Appuyons-nous une nouvelle fois sur le marketing, pour mieux nous en affranchir. Le
marketing de l’offre a vocation à définir des groupes de population avec des critères
communs ou proches, qui rendront ces catégories plus ou moins homogènes : âge, sexe,
revenu, nature et lieu d’habitation, structure familiale… Ces segmentations vont servir à
définir les messages, les arguments, les médias à sélectionner, l’USP (Unique Selling Proposition,
c’est-à-dire l’avantage concurrentiel à mettre en avant), pour toucher le plus efficacement
chaque catégorie.
Rapportée à la communication RH, cette approche a donné des segmentations selon la
séniorité, les études, le statut, les métiers : étudiants et candidats confirmés, jeunes diplômés
ingénieurs et écoles de commerce, bac+2 et bac+5, cadres et non cadres, informaticiens,
commerciaux, juristes… Ce qui signifie qu’à l’intérieur de ces groupes, on considère que tous
les membres sont semblables, que leurs attentes et leurs motivations à intégrer (ou quitter)
une entreprise, à choisir un emploi, sont identiques. Qu’ils seront tous sensibles au même
argument d’employabilité, de carrière internationale, de modèle managérial… Cette
approche était vraie il y a quelques années, quand l’emploi situait l’individu dans la société,
quand l’appartenance à une catégorie sociale déterminait les comportements, les modes de
pensée, de consommation, les valeurs, les orientations syndicales et politiques. On pouvait
alors parler de classes sociales, considérer que les ouvriers, les techniciens, les cadres, les
cadres dirigeants, constituaient des groupes homogènes.
Les médias sociaux et la dynamique des communautés en ligne amènent à s’interroger sur la
pertinence de ce modèle. En effet, les communautés en ligne regroupent moins des
individus en fonction de leur profil socio-démographique, qu’en fonction de leur appétence,
leur goût, leur intérêt pour une marque, un produit, un sujet. Les trois millions de fans d’Oasis
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sur Facebook sont-ils tous des adolescents ? Ceux du musée du Louvre habitent-ils tous
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Paris ? Bien évidemment, non. Ce qui les unit est davantage la nature de leur relation avec la
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marque, leur centre d’intérêt. Ils recherchent une proximité et la possibilité d’échanger avec
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des membres qui partagent la même passion. Un ouvrier de Limoges de soixante ans et un
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cadre supérieur de Strasbourg de trente-cinq ans se retrouveront sur les réseaux sociaux
pour partager leur même passion pour le Rugby Club de Toulon et échanger commentaires
de matchs et pronostics, sur un même pied d’égalité.
Dès lors, on est en droit de s’interroger sur la pertinence d’une promesse unique et d’une
uniformisation des arguments développés en communication RH, pour des cibles aux
attentes hétérogènes. Il convient également d’appréhender les médias sociaux en
abandonnant le réflexe des segmentations classiques de communication RH évoquées plus
haut. Si l’on attache autant d’importance à la conversation, aux messages entrants dans
l’entreprise, qu’au message officiel sortant, alors on entame cette douce révolution de prise
en compte des attentes spécifiques de ces cibles multiples et hétérogènes. On s’inscrit dans
une communication RH plus empathique. Enfin, et contrairement au marketing produit, la
finalité du marketing RH n’est pas de recruter un maximum de clients, mais de ne s’adresser
volontairement qu’à quelques-uns, d’effectuer un tri, de provoquer une auto-sélection,
puisque ce qui est offert est limité, c’est le nombre d’offres disponibles. En marketing
produit, tous les clients sont les bienvenus. En marketing RH, il en est autrement, puisque le
modèle est basé sur la sélection.
L’expérience candidat

Le candidat vit une expérience avec la marque RH au travers des différentes relations qu’il
aura pendant son process de candidature. Et ce, dès sa première entrée en relation avec la
marque. Cela comprend des contacts physiques, virtuels, à distance… comme par exemple
un rendez-vous avec un recruteur – c’est évident –, mais aussi un échange par téléphone ou
par mail, le process de candidature sur le site de l’entreprise… L’expérience candidat
commence dès que celui-ci a identifié une entreprise comme employeur éventuel et qu’il
commence à être exposé à la marque, à récolter des informations pour se faire une idée
objective des avantages et inconvénients à intégrer cette entreprise : le plan d’accès pour
venir en entretien était-il précis ? Comment étaient les locaux dans lesquels il a été reçu ?
Chaque signal, chaque action de l’entreprise produira un sentiment, une impression positive
ou négative qui incitera le candidat à poursuivre ou interrompre sa relation avec la marque.
Il y a donc, dans l’expérience candidat, un enjeu opérationnel de recrutement et un enjeu
d’image quelle que soit l’issue. Il convient également de mettre l’accent sur le fait que cette
expérience candidat est d’autant plus importante à soigner auprès des étudiants ou jeunes
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diplômés, qu’ils constituent une communauté soudée via leur école et sont plus prompts à
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partager leurs expériences. Sans parler de leur attitude particulièrement active sur les
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médias sociaux. La diversité de ces signaux, la multiplicité d’acteurs concernés, le nombre de


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points de contacts possibles, font du contrôle de l’expérience candidat un chantier qui, s’il
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est pris dans son ensemble, concerne bien plus que les seuls acteurs du recrutement. Ainsi, la
facilité à postuler sur le site web dépendra peut-être des équipes DSI en charge du volet
informatique du projet. La clarté des messages sur une brochure sera le fruit d’un travail des
équipes de communication. Le confort d’une salle d’entretien de recrutement incombera aux
responsables de l’immobilier ou des services généraux. Enfin, il ne sera jamais possible
d’assurer une parfaite homogénéité dans le ton, le discours, la convivialité, la qualité de
conseil de tous les acteurs : campus managers, recruteurs ou community managers.
Il convient d’être vigilant sur la qualité de cette expérience candidat, car même si au final, le
candidat n’est pas retenu, et que cela crée logiquement une frustration, toutes ces traces, si
elles ont été globalement positives, contribueront à une bonne réputation. L’entreprise doit
donc s’interroger sur sa volonté de ne privilégier que l’efficacité opérationnelle à court
terme, quel qu’en soit le prix en termes d’image, ou au contraire d’engager une démarche à
plus long terme, à la rentabilité plus incertaine à court terme.
➤ Témoignage

Le 136 : l’expérience candidat par Deloitte

Jean-Marc Mickeler est associé, Responsable Opérationnel Mondial des activités d’audit de Deloitte. Il présente la
mise en œuvre d’un dispositif physique innovant, dédié au recrutement et qui mise sur une expérience candidat
unique : le 136.

« En 2010, nous avons totalement repensé notre dispositif digital de promotion de la marque employeur. Nous
avons mis en place une plateforme dédiée et qui ne soit pas un sous-référent de notre site institutionnel, mais bien
une référence à part entière. Nous avons ensuite développé tout notre éco-système via les réseaux sociaux et nos
ambassadeurs de la marque employeur sur les manifestations étudiantes et dans les écoles.

Nous avons beaucoup travaillé sur l’expérience candidat. Nous sommes allés sur les blogs, les réseaux sociaux pour
échanger avec les candidats sur leurs attentes, et pour leur présenter nos métiers, nos process de recrutement.
Une façon aussi, pour les candidats, de se familiariser avec notre culture.

Derrière ce premier déploiement digital, il nous est apparu naturel de prolonger et de proposer une expérience
candidat différente, en dédiant un espace dans notre organisation pour passer de la prise de connaissance digitale
de Deloitte à ce que sont l’entreprise et ses collaborateurs physiquement. Le 136 est né.
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Un espace dédié à la marque employeur et au recrutement
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Nous avons souhaité créer un endroit où les candidats soient dans les meilleures conditions, avec le moins de stress
possible, pour avoir une discussion prolifique avec le recruteur. Pour le recruteur, c’est aussi une façon de le
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conforter dans sa prise de décision. Il peut se dire qu’il a évalué le candidat d’une façon objective, avec un
maximum d’informations à disposition aussi du candidat.

Il est important de savoir que nous n’avons pas reconditionné un lieu existant. Nous avons profité d’avoir
entièrement repensé nos espaces de travail en 2012, pour identifier un espace réservé à la marque employeur et
au recrutement. Nous souhaitions que le candidat soit accueilli par des personnes totalement au fait des process
de recrutement et donc à même de les renseigner. Un lieu où les candidats peuvent arriver en avance ou patienter
si le process a pris un peu de retard, sans être dans un couloir. Ils ont ainsi un espace d’attente comme un lounge,
avec du café, la presse, les informations sur une télévision.

Une expérience candidat utile

Nous souhaitions que toutes les étapes du process de recrutement se déroulent dans un même lieu : les
entretiens, les différents tests (langues, aptitudes…), les discussions collectives, etc. Un tel lieu devait aussi permettre
de faire prendre conscience aux recruteurs – qui, passé le premier entretien, sont des professionnels de leur métier,
et non des RH – de notre niveau d’exigence à leur égard : s’ils sont là, c’est pour recruter. Nous leur demandons
donc de ne pas venir entre deux réunions, d’être concentrés sur cette activité, de prendre le temps de remplir leurs
fiches consciencieusement.

Ce que nous disent les candidats c’est qu’ils n’ont vu ce type d’endroit nulle part ailleurs. Souvent, les entreprises
ont des espaces dédiés, fonctionnels, reconditionnés, mais pas très chaleureux. Chez nous, il s’agit d’un espace
ouvert, coloré. Nous privilégions la confidentialité et nous ne les mettons pas dans des silos ou des bunkers. Ce
qu’ils aiment : l’unité de lieu, l’unité de temps, la qualité de l’accueil et du service. Même s’ils ne sont pas retenus, ils
gardent un bon souvenir de notre marque. Le processus même de recrutement doit être pensé pour que
l’expérience candidat soit utile. Quand on fait passer un test, si le résultat n’est pas positif, nous donnons au
candidat les résultats, avec des recommandations pour que, lors d’un prochain process, il puisse ajuster, ou qu’il
réfléchisse sur ses compétences et l’orientation qu’il souhaite leur donner. Ainsi, même si nous ne le retenons pas,
nous lui donnons quelque chose sur lequel capitaliser. »

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■ 3. À la découverte du marketing RH
Pour paraphraser une ancienne et fameuse publicité de yaourt, on pourrait dire du
marketing RH que ce qu’il fait de bien à l’intérieur, se voit à l’extérieur. Le marketing RH ou
marketing employeur, comporte deux volets qui, tels les deux côtés d’une même pièce, sont
indissociables et complémentaires : l’offre RH et la promotion de cette offre RH. Nous nous
permettons d’attirer l’attention du lecteur sur les lignes qui vont suivre, car communication
RH et marketing RH sont souvent confondus et nommés indifféremment. La dimension
communication, la plus simple à expliquer et à mettre en place, fait surtout l’objet
d’attention. Cela revient à ne s’intéresser qu’à la surface visible sans s’interroger sur les
causes profondes. Il nous arrive fréquemment d’expliquer ce point en l’illustrant d’un
iceberg.

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Tentative de définition du marketing RH
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Quelle définition donner au marketing RH ? Ce terme ne recoupe bien souvent que des
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actions de recrutement via les réseaux sociaux, utilisé à tort pour donner à un ensemble
(voire un empilement) d’actions ou d’outils une cohérence qui en ferait une stratégie.
Pourtant, une réflexion sur ce concept est une occasion de reconsidérer le rôle des RH dans
la transition digitale des entreprises.

Pourquoi ne pas s’appuyer sur les nombreuses définitions qui existent sur le marketing. En
effet, elles présentent souvent l’avantage d’avoir été formalisées par des spécialistes du
marketing (chercheurs, professeurs, professionnels…), ce qui n’est pas inutile. Une requête
Google propose 8 500 000 résultats à la demande « définition du marketing ». Attention
cependant à ne pas oublier que, très souvent, ces définitions se rapportent à du marketing
produit, et que leur adaptation aux Ressources Humaines n’est pas toujours pertinente. J’en
retiens pour ma part deux :
• « Le marketing est un état d’esprit et une attitude, un choix de gestion et un ensemble de techniques
qui permettent, à travers une offre de biens et services, de satisfaire les besoins et désirs des
consommateurs d’une manière rentable pour l’entreprise. » (Source : Christian Michon, Le
Marketeur, éditions Pearson, 2010) ;
et
• « Le marketing est une science qui consiste à concevoir l’offre d’un produit en fonction de
l’analyse des attentes des consommateurs, et en tenant compte des capacités de l’entreprise
ainsi que de toutes les contraintes de l’environnement dans lequel elle évolue ». (Source :
Jean-Marc Lehu, L’Encyclopédie du Marketing, éditions Eyrolles, 2012).

Le marketing RH : un état d’esprit ET une technique

Ce qui est à retenir dans ces deux définitions, c’est que l’une parle de science, quand l’autre
insiste sur l’état d’esprit. Il s’agit bien d’appréhender le marketing RH avec ces deux
approches. Il y a certes des techniques à formaliser et des méthodes à maîtriser, mais
l’important est l’état d’esprit, une forme de réflexes à adopter, pour adapter ces méthodes à
la réalité de l’entreprise, des RH, des process RH sur lesquels on souhaite travailler. Se mettre
à la place du client (c’est-à-dire du collaborateur ou du candidat) en faisant appel à son bon
sens critique contribue souvent à faire une grande partie du chemin. Que vit le collaborateur
quand il participe à son entretien d’évaluation avec son manager, quand il fait une demande
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de formation sur le portail intranet, ou quand il recherche des informations dans le cadre de
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sa mobilité interne ? Il suffit de se mettre quelques instants à sa place pour vivre avec
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objectivité cette fameuse « expérience collaborateur » et identifier les critères


d’insatisfaction, les irritants sur lesquels travailler. Il s’agit bien ici, comme le précisent nos
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deux experts, de prendre en compte les besoins, les désirs de nos collaborateurs dans un
environnement contraint qu’est celui de l’entreprise.

Associer conception de l’offre et promotion de l’offre

Faut-il d’abord revoir son offre RH pour qu’elle réponde aux besoins des collaborateurs,
avant de communiquer sur cette offre ? L’argument étant qu’il serait peu pertinent de se
contenter de communiquer et faire du « cosmetic marketing ». L’’entreprise a très souvent la
nécessité de communiquer sur une offre, un process ou une initiative RH, même si ce dernier
n’est pas parfait. Ne serait-ce que pour rappeler aux collaborateurs ou managers qu’il existe
et les besoins auxquels il répond, même partiellement. À l’image du Bilan Social Individuel, il
est parfois utile de communiquer sur des informations pourtant connues mais pour
lesquelles il s’avère nécessaire de redonner une cohérence avec la stratégie d’ensemble.
Enfin, il ne faut pas hésiter à communiquer sur les évolutions en cours, les projets RH à venir,
à la fois pour installer les RH dans une démarche d’amélioration continue dans l’esprit des
collaborateurs et éventuellement pour recueillir des feed back utiles de leur part.

Associer réflexion des process RH et réflexion sur la contribution des RH

N’oublions pas que le marketing RH doit aussi être le marketing des RH. Le propos n’est pas
de transformer les équipes RH en bonimenteurs de foire pour leur propre bénéfice, mais
d’intégrer que les RH doivent être en mesure d’expliquer et de démontrer leur contribution
aux résultats de l’entreprise. Les RH font partie de ces fonctions « support », quel terme
horrible ! De « support » à « supporter », il n’y a qu’un pas… Le sujet du Big Data qui s’invite
dans les entreprises, encore une fois en premier via les départements marketing, doit être
pris par les RH comme une opportunité à la fois d’améliorer leur actions en appuyant des
décisions sur des données mais aussi de valoriser leur contribution. Comment évaluer cette
contribution des RH, qui doit savoir concilier la réponse aux besoins individuels des
collaborateurs, tout en assurant l’atteinte collective des objectifs de l’entreprise ? Comment
réconcilier le contrat social avec l’ambition économique ?
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Comprendre les métiers de l’entreprise


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C’est peut-être le volet le plus important et le plus ignoré du marketing RH : les entreprises
vivent avec le digital un véritable tsunami qui remet en cause toutes les certitudes
(stratégies de long terme, positions sur le marché, fidélité des clients, innovations produits,
nouveaux concurrents…). Ces bouleversements imposent de revoir tout à la fois le SAV, le
marketing, la logistique, la distribution, les investissements, la conception des produits… Il
revient alors aux RH d’être en mesure d’identifier et de développer les talents, les
compétences, les modes de travail qui seront indispensables pour répondre à ces
challenges, pour la plupart nouveaux, pour certains même encore inconnus. Comment les RH
pourraient revendiquer d’être business partners si elles ne comprennent pas comment
l’activité de leur entreprise va être bouleversée ? Comment Accor est impacté par Airbnb,
Canon par Apple, SNCF ou la RATP par BlaBlaCar ? Les RH dans une compagnie d’assurance
chahutée par les objets connectés, ne feront pas le même métier que les RH d’un
distributeur bousculé par le commerce sur les réseaux sociaux.

Le marketing RH recouvre donc plusieurs dimensions, qui vont bien au-delà du recrutement
sur Facebook ou des réseaux sociaux d’entreprise.
Une définition possible du marketing RH pourrait être : « Le marketing RH est une approche
stratégique pour concevoir ou faire évoluer tout ou partie de l’offre RH d’une entreprise, destinée à
satisfaire les besoins et attentes de cibles internes (les collaborateurs) ou externe (les candidats), tout
en formalisant la contribution des RH à la stratégie de l’entreprise ».

Marketing RH : d’une RH transactionnelle à une RH relationnelle

Il s’agit de ne plus considérer le process, le reporting, comme une finalité qui occupe la
majorité du temps des RH. Ils ne sont que de simples outils destinés à dégager du temps aux
RH sur leur priorité : les collaborateurs. Les réflexions et projets en cours sur la transition
numérique des entreprises, et donc espérons-le des RH, sont une opportunité de revoir le
rôle des RH.

Il ne faut pas confondre projet informatique et transition numérique. Les grands programmes
informatiques initiés dans les années 1970, mais qui sont toujours d’actualité dans un
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phénomène d’évolution continue, visent à optimiser les process sur des aspects d’efficacité,
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de rapidité d’exécution, de fiabilité, de coût… Cette volonté de rationalisation s’est donc
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prioritairement concentré sur un objectif : identifier ces process, les découper en différentes
phases ou séquences pour les uniformiser, les lisser, limiter les exceptions. On réduit ainsi le
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nombre de process différents, de solutions techniques et de méthodes utilisées.

La RH transactionnelle s’épanouit dans la volonté louable d’assurer équité de traitement du


service rendu au plus grand nombre de collaborateurs, dans un souci partagé par toute
l’entreprise de participer aux efforts dans des périodes de disette économique. Le travers est
que ces simples outils deviennent des finalités, et que l’on retrouve des RH exclusivement
mobilisés sur le fonctionnement, la surveillance, le reporting sur ces outils. Les potentialités
promises par le Big Data en RH seront aussi son principal défaut s’il est utilisé dans une
approche transactionnelle. Cette même approche repose également sur un principe
d’uniformisation des collaborateurs, que l’on réunit dans quelques groupes (cadres
dirigeants, managers, cols bleus, techniciens, ingénieurs…) en considérant que leurs besoins,
attentes et revendications sont homogènes. C’est d’ailleurs le même postulat que partagent
encore aujourd’hui la plupart des organisations syndicales, bien que de nombreux exemples
récents devraient les inciter à revoir leur logiciel, au risque de perdre définitivement toute
forme de représentativité et de légitimité. Cette approche est donc dans une logique de
« l’offre », sans véritablement tenir compte des attentes des collaborateurs. C’est un peu
comme de la production en grande série d’un produit standard. Les coûts de production sont
limités et répartis sur de grandes séries, mais le client ne verra ses besoins que très
partiellement satisfaits. Il est donc peu probable qu’il accorde une grande valeur à ce
produit, et donc il sera à la fois peu fidèle à ce produit et très sévère sur le prix à payer.

La RH relationnelle, c’est par opposition une certaine forme d’artisanat, c’est-à-dire une
production en série très limitée, voire à l’unité, qui va prendre en compte dès la conception,
les besoins du client pour adapter en conséquence le produit ou le service à délivrer. Il ne
s’agit plus de tenter de faire rentrer dans ces process rigides quelques groupes de
population, mais de partir des besoins individuels du collaborateur pour lui apporter une
réponse qui va maximiser sa satisfaction, donc son engagement, et certainement aussi sa
performance, et donc les résultats de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’une approche utopique et
dispendieuse. Mais c’est sans doute ici que les RH peuvent réconcilier process et
collaborateurs. Les gains obtenus dans la rationalisation de certaines tâches RH, que l’on
considère à faible valeur ajoutée, et qui, nombreuses, s’imposent aux RH pour des raisons
réglementaires, pourront être délaissées au profit d’une plus grande disponibilité pour les
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collaborateurs. C’est la vocation des « Services Clients Partagé » ou « Share Services ». Le
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métier de RH n’est pas un métier de techniciens, c’est un métier de relations qui est contrarié
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par des contraintes techniques, des obligations réglementaires et normatives, hélas de plus
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en plus présentes.
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Définir son offre RH

L’offre RH est constituée par l’ensemble des éléments du contrat social, ce que l’entreprise
s’engage à proposer à ses collaborateurs comme contrepartie à leur travail. Bien
évidemment, la première contrepartie qui vient à l’esprit est la rétribution financière, et ses
différentes composantes : salaires, primes, bonus, intéressement, participation, stock options,
actions gratuites… D’autres formes de rétributions existent aussi : en nature, avec véhicule
ou logement de fonction, ordinateur ou téléphone portable… Mais aussi sous forme de
protection sociale avec les mutuelles ou les retraites complémentaires qui, à n’en pas
douter, devraient être plébiscitées dans les années à venir, compte tenu du désengagement
progressif de l’État sur ces formes de redistribution. Pourtant, ces éléments ne constituent
qu’une faible part de ce que nous nommons le contrat social. Ils ne présentent d’ailleurs pas
tous la même efficacité pour fidéliser et motiver un collaborateur. Ils ne constituent pas
nécessairement un avantage fort pour l’entreprise face à ses concurrents, qui peuvent
aisément se montrer mieux-disant pour débaucher un collaborateur.
Cette offre RH va s’appuyer sur la réalité de l’activité de l’entreprise et son univers
concurrentiel. Elle va être influencée par les choix stratégiques qui sont faits. Elle est une
illustration de la culture et de l’histoire de l’entreprise. Cette offre RH doit illustrer les valeurs
affichées par l’entreprise et qui viennent souvent en support de sa marque employeur si on
veut leur donner du poids, de la réalité et donc de l’attractivité. Autant d’éléments qui sont
sur un temps long et qu’il est indispensable d’intégrer aux réflexions sur son marketing RH.

À titre d’exemple, nous présentons quelques éléments constitutifs de l’offre RH, à même de
maintenir l’engagement, et donc la productivité des collaborateurs :
• l’intégration : période correspondant aux premiers mois d’arrivée du nouveau
collaborateur. Cette période est extrêmement importante pour transmettre à l’arrivant les
éléments de culture interne à intégrer dans son travail et dans son savoir être. Sur un plan
plus opérationnel, c’est aussi la période au cours de laquelle il va acquérir les éléments
propres à l’entreprise nécessaires à exercer sa mission et à être rapidement performant :
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méthodes de travail, procédures internes, critères d’évaluation… ;
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• la formation : quels sont les engagements de l’entreprise en matière de formation ? Quelle
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est la latitude des collaborateurs pour choisir leur formation ? Tous les collaborateurs y ont-
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ils droit dans les mêmes conditions ? Quelle réactivité aux demandes de formation ? Autant
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de questions qui permettent de définir la volonté de l’entreprise. Ce volet de l’offre RH est


d’autant plus important aux yeux des collaborateurs que leur métier évolue rapidement. En
effet, dans le monde professionnel actuel, qui change rapidement en raison des avancées
technologiques, du durcissement réglementaire, ou encore de l’internationalisation, les
salariés sont conscients de la nécessité impérieuse de « mettre à jour » régulièrement leurs
compétences. En d’autres termes, de s’assurer que, face à un parcours professionnel qui
pourra être chaotique, ou qui connaîtra certainement de nombreuses entreprises, il convient
de maintenir son employabilité, sa valeur individuelle sur le marché de l’emploi ;
• la mobilité interne : dans le même souci de faire de chaque expérience professionnelle
une opportunité de renforcer ses compétences et d’enrichir son CV, les collaborateurs
intègrent la nécessité de réaliser un véritable parcours professionnel au sein d’une même
entreprise. Multiplier les missions, diversifier les projets, les environnements et les équipes,
sont autant de preuves de son adaptabilité. Un moyen d’enrichir son CV en excluant les
risques inhérents à un changement d’entreprise. Les entreprises mettent d’ailleurs en avant
leurs politiques de mobilité interne, formalisées parfois par des parcours balisés ou des
bourses de l’emploi. C’est à la fois le résultat d’une prise de conscience des attentes des
collaborateurs sur ce point, mais également un moyen de les fidéliser quand la réduction des
échelons hiérarchiques, ou une activité atone, ne permettent plus de promettre une
progression de carrière régulière et verticale. La mobilité interne est enfin intégrée et
formalisée dans des programmes dédiés aux hauts potentiels ou autres futurs dirigeants
pour s’assurer leur fidélité, au moins pendant la durée de ce parcours ;
• le modèle managérial : sur ce point, les équipes RH sont moins directement concernées,
puisqu’il revient aux managers d’appliquer le modèle managérial que souhaite promouvoir
l’entreprise. Même s’il diffère nécessairement d’un individu à un autre, certains
incontournables doivent être respectés. C’est aux RH d’être garants du respect de ces règles
managériales, qui sont parfois formalisées dans les référentiels de compétences
comportementales, et font donc l’objet d’une évaluation. Cependant, les transformations de
ces dernières années ont eu un impact direct sur ce corps intermédiaire et le manager
d’aujourd’hui n’a plus le même rôle et donc les compétences nécessaires que celui d’hier.
Face à lui, les collaborateurs, jeunes ou moins jeunes ont renforcé leurs exigences en matière
de feedback, de sens donné au travail et de partage de la stratégie. C’est bien aux RH que
revient le plan d’accompagnement de cette fonction pour qu’elle puisse jouer tout son rôle
de soutien et d’engagement des salariés ; |
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• les autres avantages : ils vont être très différents d’une entreprise à une autre. Ils visent à
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améliorer le confort quotidien des collaborateurs, à simplifier leur vie dans l’entreprise. Il
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s’agit par exemple des services de conciergerie, des crèches d’entreprises,


d’accompagnement des démarches administratives, de salles de sports, d’assistance
informatique, de télétravail… Ils visent aussi à limiter les nombres de contrariétés ou de
démarches qui font perdre du temps, parfois pris sur le temps de travail. Hubert Landier,
dans la note qu’il a rédigée pour l’Institut de l’Entreprise – « Des salariés engagés : qualité du
management et performance de l’entreprise 1 » –, parle d’« irritants ». Toutes ces initiatives visent
à améliorer le bien-être des collaborateurs, un des trois piliers indispensables à leur
engagement, que nous développerons plus loin.

Nous avons volontairement adopté une définition restrictive de l’offre RH, limitée au seul
champ d’investigation traditionnel des RH. Nous verrons dans le chapitre suivant que cette
offre RH est également nourrie par des éléments tels que la réputation globale de
l’entreprise, l’attractivité de ses produits, la popularité de ses dirigeants…
Cette offre RH n’a pas vocation à être définie une fois pour toutes. Elle va être en constante
évolution, s’enrichir et s’améliorer au fil du temps, vivre en fonction des changements de
l’entreprise, de son organisation. Elle va s’adapter, peut-être, aux demandes des
collaborateurs qui, elles aussi, vont certainement évoluer dans le temps. L’échelle de temps
est ici très longue, car les évolutions sont profondes. Elles peuvent impliquer un changement
de mentalités ou de modes de travail qui prennent du temps pour être acceptés par
l’ensemble du corps social. Ces éléments de l’offre, lorsqu’on souhaite les modifier, sont
parfois dépendants d’un projet informatique lourd, donc financièrement important. En effet,
et pour la plupart des entreprises, le développement à l’international, la croissance des
effectifs ou la volonté de rationaliser et d’uniformiser les grands process RH se sont
accompagnés d’une informatisation poussée, notamment au travers des ERP et des SIRH.
C’est la raison pour laquelle la construction d’une offre RH est une activité de long terme, qui
doit être anticipée, planifiée et budgétée. Elle ne peut faire l’objet d’un pilotage à vue ou de
« stop and go ».

L’offre RH doit-elle être unique ?

Il est d’usage de parler d’offre RH en employant ce terme au singulier : il n’y a qu’une offre RH
dans l’entreprise. À de très rares exceptions près, le process d’intégration, les modalités de
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formation, les critères de mobilité interne… sont identiques pour tous les collaborateurs –
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au moins sur le papier – ou font l’objet d’une segmentation dont le seul critère est la position
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hiérarchique ou les spécificités métier. Nous l’avons vu, c’est la conséquence à la fois de la
rationalisation, mais également de la volonté de préserver une équité de traitement pour
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tous les collaborateurs, d’encadrer et d’outiller des managers de plus en plus sollicités sur des
missions RH. Ces exigences sont certes louables, mais elles ont tendance à considérer le
collaborateur comme un individu unique, avec des attentes et des besoins uniformes.
Comme le marketing client, qui a depuis longtemps développé une segmentation de son
offre, il est temps que les RH s’y emploient pour assurer l’engagement des collaborateurs.
Des collaborateurs qui revendiquent de plus en plus indépendance, autonomie,
responsabilisation. Quoi de commun entre un jeune diplômé d’école d’ingénieurs
récemment recruté et un autodidacte qui a fait la majeure partie de sa carrière dans
l’entreprise ? Entre un trader de Londres et un conseiller en agence bancaire à Clermont-
Ferrand ? Entre un chef de rayon à Ivry et un autre à Jakarta ? Pourtant, ils font tous partie de
la même entreprise. L’un préférera une prime financière et une formation en ligne, quand
l’autre sera plus sensible à une protection santé pour ses enfants et une formation en
présentiel.
Et ces divergences d’attentes ne sont pas nécessairement liées au métier, à la formation
initiale, à la position dans l’entreprise ou à la situation géographique. C’est pourtant sur ces
seuls critères que les quelques adaptations de l’offre RH ont été mises en place.
Les collaborateurs sont des individus uniques, aux motivations, attentes, et leviers
d’engagement qui leur sont propres. L’enjeu des RH de demain (et les nouveaux médias
numériques et sociaux devraient les y aider) sera de bâtir un portefeuille d’offres RH. C’est
dans ce portefeuille que les RH, et les managers, pourront venir puiser pour apporter une
réponse adaptée, quasiment à la carte, aux attentes des collaborateurs. Apparaît ici un
nouveau rôle du professionnel RH, très proche du marketing. Il s’agira, en amont, de définir
ce portefeuille d’offres RH comme un chef de gamme définit son portefeuille de produits,
puis de comprendre les besoins du collaborateur, pour ensuite établir une proposition
adaptée. Et comme le chef de gamme, le RH devra veiller à la cohérence et à la
complémentarité de ces différentes offres, pour qu’elles servent de preuves sur lesquelles
appuyer le positionnement global et les diverses modalités d’activation de la politique RH
de l’entreprise.

La promotion de cette offre

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Cette offre RH n’est pas, nous l’avons vu, un objet unique, figé, fini. Conception et évolutions
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de cette offre sont à mener en parallèle de sa promotion, à destination des publics internes
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et externes.
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Promotion en interne

Il peut sembler surprenant et même inutile de communiquer sur des éléments que les
collaborateurs vivent au quotidien. Pourtant, malgré les efforts de communication, un certain
nombre de composantes de cette offre RH n’est pas connu des collaborateurs. La paie fait
partie de ces éléments qu’il convient de mieux expliquer avec une présentation de
l’ensemble des composantes de la rémunération. Il peut également être utile de donner une
cohérence, un socle commun, une perspective à des actions qui semblent isolées et ainsi ne
viennent pas efficacement nourrir la promesse en tant qu’employeur. C’est, par exemple, la
raison d’être du bilan social individuel. Appuyons-nous sur la définition qu’en donne le
cabinet Expectra : « Il a pour première vertu de faire comprendre aux collaborateurs que leur
rémunération ne se limite pas au salaire net inscrit sur leur fiche de paie. Il permet notamment de
valoriser certains avantages sociaux rarement considérés comme des éléments de rétribution aux yeux
des salariés 2. » Enfin, il est important de communiquer sur les grandes règles, afin d’en limiter
les entorses. C’est là un rôle essentiel des équipes RH.
Promotion en externe

C’est tout le travail de la communication RH destiné à favoriser l’attractivité de l’entreprise


auprès des candidats, et que nous développerons dans les pages qui suivent. L’offre RH est
un des principaux éléments constitutifs de la marque employeur voulue. L’entreprise va y
puiser les preuves qui serviront à construire son discours RH. De la qualité de ces preuves
(adéquation avec les attentes, pouvoir symbolique, différenciation…) dépendra la valeur
concurrentielle de la marque employeur. Mais cette promotion en externe va également
être alimentée par des signaux subis par l’entreprise. Nous entrons alors dans le domaine de
la réputation. Il s’agit des prises de parole des internautes au sujet de cette même marque
RH, nourries parfois par une expérience passée ou présente avec l’entreprise, qui se diffuse
dans la caisse de résonance que sont les médias sociaux. Nous verrons plus loin que le
périmètre de la réputation employeur dépasse progressivement le strict territoire de l’offre
RH pour déborder plus largement vers la réputation de l’entreprise dans son ensemble.

L’expérience collaborateur |
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Les dernières enquêtes dont celles d’ADP, tendent à montrer que les salariés sont déçus par
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l’offre RH : 26 % seulement sont satisfaits de l’offre rendue par les RH. Si 62 % des salariés ne
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s’estiment pas « très bien » gérés, 74 % des RH pensent l’inverse, d’où le nom de l’étude :
« Disconnected » (http://www.fr.adp.com/gestion-capital-humain/reconnect-360-rh).
Ce décalage vient en grande partie d’une méconnaissance des RH de la réalité vécue chaque
jour par les salariés ayant à utiliser des services RH.
Dans le cadre du mélange entre image voulue et réputation, entre discours construit et
rumeur subie, l’expérience du collaborateur a toute son importance. D’abord, parce qu’elle
prend le pas sur toute forme de communication dans le registre de la crédibilité. La réalité
des faits l’emportera sur le discours. C’est encore plus vrai à l’heure des médias sociaux,
lorsque ces faits alimentent les discussions. C’est effectivement cette expérience que
certains collaborateurs, actuels et anciens, décideront de partager spontanément sur les
médias sociaux. C’est aussi, bien sûr, sur la base de ces expériences qu’ils répondront aux
candidats qui pourraient les solliciter pour valider la véracité des promesses contenues dans
le discours employeur officiel.
Cette expérience collaborateur peut se résumer par la somme des situations, positives et
négatives, vécues au fil des jours. Situations qui vont se traduire par des sentiments et des
émotions, déterminant ainsi la satisfaction, et donc l’engagement du collaborateur.
Appuyons-nous de nouveau sur le marketing et sur la définition que donnent Jacques
Lendrevie et Julien Lévy de l’expérience client, dans le Mercator 3, une des bibles du
marketing : « Création d’expériences qui permettent d’engager le consommateur dans une relation
positive, riche en sens et en sensations, avec une marque. »
La marque RH ne peut prendre sa réelle et entière valeur qu’une fois passée par la
validation, par le filtre des employés. C’est ainsi que, passant du discours institutionnel
incantatoire au témoignage, elle acquerra toute son épaisseur. Un employé heureux
travaille mieux et constitue un vecteur puissant de communication positive pour
l’entreprise. Ainsi, certains RH en pointe ont adopté le slogan « employee first, customers
second » du PDG de HCL, Vineet Nayar 4. Un moyen de reconstruire une offre RH alignée avec
cette nouvelle approche de la performance, au cœur du travail des employés. Les RH, mais
aussi les managers, la direction générale, les autres collaborateurs, peuvent mettre en place
les conditions d’une expérience collaborateur réussie. Mais seuls les salariés pourront
communiquer sur sa réalité quotidienne, car ils seront considérés – souvent à juste titre par
les candidats – comme les seuls témoins légitimes et non inféodés, donc dignes de confiance.
Encore une fois, il revient aux RH la mission délicate de veiller à maintenir la liberté
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d’expression, la spontanéité des collaborateurs, tout en s’assurant que les prises de parole
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restent conformes à la loi, au règlement intérieur, au respect du secret professionnel, au
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non-dénigrement, etc. Une autre approche plus volontariste, que nous développerons dans
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les chapitres suivants, vise à outiller, à former certains de ses collaborateurs, pour en faire de
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véritables ambassadeurs de la marque RH, en cohérence avec les autres prises de parole RH.
Attention, cependant, à ne pas les transformer en hommes-sandwichs, car ils perdraient alors
tout intérêt pour les candidats en quête d’informations authentiques.

Le sourcing traditionnel et le sourcing 2.0

Les deux schémas ci-dessous illustrent le changement de paradigme que connaît le sourcing,
avec l’impact des médias sociaux. Il permet également de faire apparaître les conséquences,
en matière de compétences et de pratique du métier, que doivent intégrer les équipes de
recruteurs.
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Schéma du recrutement traditionnel, avec les RH comme principal point de contact entre l’entreprise
et les candidats.
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Ce premier schéma présente les équipes de recrutement comme les principaux


interlocuteurs désignés entre l’entreprise et les candidats. Ils sont le principal point de
contact pour les candidats qui souhaitent entrer en relation avec une entreprise. Leur
premier rôle est celui de représentant de l’entreprise lorsqu’ils participent à des forums
école ou des salons de recrutement ; ils sont porteurs de l’image, de l’offre RH de l’entreprise.
Leur second rôle, au moment des phases plus spécifiques de recrutement, est de
sélectionner ces mêmes candidats, de s’assurer que leur profil est en phase avec les besoins
exprimés par le manager qui recrute et la culture de l’entreprise. Les candidats ont par
ailleurs quelques contacts mineurs avec des opérationnels. Par exemple, lorsque ceux-ci
animent des cours ou participent à des forums emploi dans les écoles.
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Schéma illustrant les candidats qui contournent les recruteurs pour entrer en contact direct avec les
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opérationnels.

Dans ce schéma, nous voyons que les candidats sont susceptibles de se détourner des
équipes RH pour la recherche d’information. Les recruteurs, porte-parole officiels de la
marque, peuvent être suspectés de relayer un discours « marketé », peu fidèle à la réalité de
l’entreprise. Les candidats vont donc se rapprocher des collaborateurs de l’entreprise pour
contrebalancer cette information officielle, en allant chercher à la source, auprès de leurs
pairs, des informations sur la réalité quotidienne de l’entreprise, le contenu des missions
confiées, les possibilités réelles d’évolution professionnelle.
Ils vont facilement atteindre ces collaborateurs au travers des réseaux sociaux
essentiellement professionnels, utilisant par exemple l’argument d’une même école
fréquentée ou d’un précédent employeur commun. Certains de ces salariés sont très
présents (souvent bien plus que les RH) sur les réseaux sociaux. Les raisons peuvent être
personnelles, parce qu’ils sont en recherche d’un nouveau poste, ou professionnelles, parce
que leur métier nécessite une veille et un réseautage que favorisent ces espaces.
Il devient donc indispensable pour les recruteurs d’être présents sur les réseaux sociaux, au
risque de perdre progressivement la relation avec les candidats. « Des collaborateurs qui
exerçaient un métier qui jusqu’ici ne nécessitait pas de compétences particulières doivent à présent
être sensibilisés à l’art de formuler, de diffuser, de décrire […] car la révolution des contenus fait naître
l’ère du langage 5. » Ils doivent également faire évoluer leurs missions pour venir en soutien
aux opérationnels et s’assurer de la cohérence des messages qui peuvent être émis.
Ici, un équilibre est à trouver entre l’assurance de la conformité des informations que
communiquent les collaborateurs et, dans le même temps, un espace de liberté et
d’autonomie nécessaire pour qu’ils ne se sentent pas instrumentalisés. Sentiment que
percevraient également les candidats. De plus, les échanges que peuvent avoir les
collaborateurs avec des candidats représentent une source d’informations précieuse qu’il
convient d’exploiter.
Cette approche pragmatique doit être retenue face à des discours et des théories bien
éloignés de la réalité des entreprises, qui présentent les collaborateurs comme des
ambassadeurs magiques, des avocats spontanés, des activistes bénévoles de la marque
employeur, à la fois complètement libres de s’exprimer (pour être crédibles) mais
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parfaitement en phase avec le discours officiel (pour être efficaces). En plus d’une utopie, le
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risque principal est ici que la marque se réfugie derrière les prises de parole de ses
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collaborateurs, au point même de disparaître, pensant que cette seule dimension humaine
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et multiple contribuera à convaincre des candidats sur-sollicités. L’entreprise doit


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développer une présence officielle. Le candidat ne peut se contenter de la multiplicité des


opinions individuelles, même si celles-ci sont indispensables. Il a également besoin de
découvrir la personnalité de l’entreprise, telle qu’elle-même se présente via sa visibilité
numérique. Hélas, la réalité nous amène à constater que ce schéma, qui semble relever du
bon sens, ne se rencontre que très rarement. Les interactions sont peu nombreuses et ne
viennent souvent qu’en aval d’un processus de recrutement bien engagé, comme élément
de ré-assurance et non pas de sourcing.

Managers et recruteurs : vers une inversion des rôles

Si nous continuons notre réflexion sur les conséquences de cette évolution, nous pouvons
envisager une nouvelle répartition des rôles entre managers et recruteurs. En effet, si l’on
considère que les managers sont très présents sur les réseaux professionnels dans le cadre de
leurs missions – par exemple au sein d’espaces de discussion –, ils seront en mesure
d’identifier des candidats potentiels, dont les compétences professionnelles peuvent
correspondre à leurs besoins, et avec plus de pertinence que pendant un entretien de
recrutement d’une heure parfaitement formaté et codifié. Cela signifie donc que les
managers se chargent du sourcing, traditionnellement réalisé par les recruteurs. Cette
hypothèse peut être appuyée par le fait que certains métiers évoluent rapidement sur le
plan technique, sont fortement impactés par un nouveau cadre réglementaire ou de
nouvelles normes, doivent s’adapter à une concurrence particulièrement agressive et
innovante. Dès lors, seuls les opérationnels peuvent être au fait de ces évolutions et des
besoins de compétences nouvelles nécessaires. Des offres commerciales comme « Work with
us » de LinkedIn ou « Join us » de Viadeo valorisent cette idée que chacun peut être le
recruteur de son entreprise.

Le sourcing et les aspects de savoir-faire étant validés par le manager, il reviendrait alors aux
équipes de recrutement de valider le savoir être, dans une vision plus globale. En effet, les
managers vont se concentrer sur leur poste et leurs missions propres. Aux recruteurs de
s’assurer que ce futur collaborateur dispose de capacités pour évoluer demain dans
l’entreprise, et que ses valeurs, ses moteurs psychologiques l’aideront à s’intégrer dans
l’entreprise. Ces candidats, au-delà de leurs compétences pour le poste, seront-ils à l’aise |
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avec la culture de l’entreprise, le modèle managérial ? Pourront-ils évoluer vers d’autres
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missions, se voir confier de nouvelles responsabilités ? Ont-ils des aptitudes qui en feront de
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futurs managers, voire de futurs dirigeants ? En résumé, voulons-nous recruter des candidats
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pour un seul poste ou se projeter sur une relation plus globale avec l’entreprise ? Comment
faire pour que l’individuel se fonde, mais aussi s’épanouisse dans le collectif ? Cette
hypothèse de l’inversion possible des rôles dans l’entreprise de demain est cohérente avec
les qualités de RH attendues d’un manager. Ne dit-on pas que le manager est le premier RH de
l’entreprise ?

1. http://www.institut-entreprise.fr/index.php?id=1610
2. http://www.leblogexpectra.fr/a-quoi-sert-le-bilan-social-individuel_3289.xhtml
3. Jacques Lendrevie et Julien Lévy, Mercator 2013 – Théories et nouvelles pratiques du marketing, Paris, Dunod, 2012.
4. Vineet Nayar, Employees First, Customers Second: Turning Conventional Management Upside Down, Harvard Business Press.
5. Jeanne Bordeau, Le Langage des dirigeants : une métamorphose, Paris, Les éditions de l’Institut de la Qualité, 2013.
■ 4. La marque employeur

Comprendre les fonctions de la marque pour comprendre


la marque employeur

Pour bien cerner le sujet de la marque employeur, il convient de faire un rapide rappel des
quatre fonctions de la marque : projection, garantie, identification et personnalisation.

Projection

La marque passe par une forte représentation sur le packaging et l’identité visuelle ou
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sonore. Le consommateur recherche, dans la possession de cette marque, à afficher ses
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valeurs, son style. Très visibles, statutaires, parfois élitistes, on retrouve cette dimension dans
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les marques de la mode, du high-tech, de l’automobile. On les retrouve également dans les
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marques destinées aux adolescents, car elles valorisent cette dimension identitaire par la
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création de tribus de possesseurs. Un phénomène de transfert qui est censé communiquer


les valeurs du produit à son possesseur.

Garantie

Quand la marque dispose d’une certaine notoriété, elle fournit des éléments de réassurance,
sur la qualité du produit ou du service. Elle est censée garantir un process de fabrication,
l’utilisation de certains composants, une origine ou un savoir-faire particulier. La valeur de la
marque, sur ce type de produit, dépend grandement de la caution de l’entreprise, qui agit
comme une assurance qualité. La marque réduit l’incertitude du consommateur et donc le
risque lié à sa décision d’achat et à sa consommation. On va retrouver cette valeur dans les
marques de l’alimentaire, la santé, la banque. Dans la crise de la viande de cheval, début
2013, Findus a été attaqué sur la dimension « garantie » de sa marque.

Identification
La marque permet à l’acheteur de repérer, de reconnaître un produit ou un service
déterminé et de le différencier d’autres, qui présentent les mêmes fonctionnalités. Cette
dimension de la marque guide le choix de l’acheteur et est devenue indispensable avec le
commerce en libre-service. Imaginez un monde sans marque, sans repère, sans signe
distinctif permettant d’activer votre mémoire. Et le temps qu’il faudrait pour choisir tel ou tel
produit à chaque acte d’achat, en fonction de ses caractéristiques propres et de ses
capacités à satisfaire le besoin. La marque joue le rôle de marqueur de la mémoire pour
rappeler l’expérience précédente d’achat et de consommation. Les marques liées aux
produits de grande consommation, peu impliquants et à cycle de consommation fréquent,
entrent dans cette catégorie.

Émotion

La marque permet de « construire une relation » avec le consommateur. Le produit va


acquérir une valeur supplémentaire, un complément d’âme, en développant un lien
émotionnel, une expérience personnelle marquante, au-delà de sa dimension purement
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fonctionnelle. Généralement, une forte dimension « service » ou « accueil » sera associée à
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l’acte d’achat. C’est l’évolution que suivent les agences bancaires qui, après s’être orientées
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vers une approche service et une organisation en guichet, proposent à leurs clients des
espaces de confidentialité, moins boutique que salon. Le raffinement d’une boutique
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Nespresso transforme l’acte d’achat en une expérience dans laquelle plusieurs sens sont
sollicités : la vue, le toucher, l’odorat… On parle d’ailleurs d’expérience pluri-sensorielle.

C’est la dimension émotion qui semble se développer le plus actuellement. Elle est une
réponse à la sur-sollicitation des consommateurs blasés. Elle permet d’oublier
momentanément la crise par un comportement moins rationnel. Elle s’affranchit des seules
caractéristiques de produits de moins en moins différenciés. Ces quatre fonctions,
moyennant quelques ajustements, se retrouveront également dans la marque employeur.

Définition de la marque employeur

La marque employeur est une traduction concentrée de promesses, un raccourci d’attributs


rationnels et émotionnels, de valeurs associées consciemment ou non. C’est par cet exercice
de synthèse, de résumé, que l’on va la rendre lisible, facilement identifiable et repérable.
Certes, elle ne traduira que partiellement la richesse des promesses de l’entreprise et des
diversités des réalités internes. Mais comme tout objet de communication qu’est la marque,
elle est un repère, une identification qui rassure car elle réduit le risque inhérent à tout
choix. Au-delà de ces attributs internes, elle se définit aussi vis-à-vis de son environnement :
elle permet à l’entreprise-employeur de se différencier de la concurrence, elle intègre les
attentes de ses cibles.
La marque employeur doit afficher clairement son bénéfice. Ce bénéfice, c’est ce qui répond
à la question du candidat « Pourquoi rejoindre cette entreprise ? » ou, pour le collaborateur,
« Pourquoi rester dans cette entreprise ? ». C’est la contrepartie du travail et de l’engagement
fourni par le collaborateur. Ce bénéfice ou cette promesse doit pouvoir s’exprimer, se
résumer dans une seule phrase. Pour un produit, on parle généralement de l’USP (Unique
Selling Proposition), c’est-à-dire : quel est LE bénéfice que je vais retirer de la possession de ce
produit ? Dans le sujet qui nous concerne, on parle d’EVP (Employee Value Proposition) ou
parfois de PVP (People Value Proposition).
La marque employeur se distingue aussi de l’identité employeur, qui est l’ensemble des
attributs de l’entreprise, ce qui la définit. Comme la carte d’identité définit les
caractéristiques d’un individu (son sexe, sa date de naissance, sa nationalité, son domicile…),
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l’identité de l’entreprise, ce sont les racines, son territoire de compétences, son histoire, la
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réalité de ses produits, ses points de vente, ses succès et ses échecs. Sur un plan plus RH,
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c’est son modèle managérial, sa politique de formation, ses règles de rémunération… Bref,
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un ensemble d’éléments qu’il n’est pas aisé de modifier rapidement. Nous sommes sur du
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temps long.
Enfin, la marque employeur se différencie de la réputation employeur qui, comme nous le
verrons plus loin, intègre des éléments de discours qui sont produits par les acteurs autres
que l’entreprise : candidats, anciens collaborateurs, clients, simples internautes. Cependant,
et par praticité, nous conserverons le vocable de marque employeur dans une acception
large, incluant ainsi l’ensemble des contenus, quelle que soit leur origine ou la nature de
leurs émetteurs, considérant qu’ils contribuent tous potentiellement à la notoriété et à
l’attractivité (ou l’attrition) de l’entreprise en tant qu’employeur.
Dans les lignes suivantes, nous aborderons la marque employeur sous plusieurs angles, afin
de proposer des approches différentes et néanmoins complémentaires qui puissent
convenir à des types d’entreprises variés.

Quatre dimensions sur lesquelles appuyer la marque employeur


Dans cette approche, la marque employeur va se définir par l’origine et la nature des signaux
qui vont la nourrir.

Ce que l’entreprise est vraiment

Que propose l’entreprise à ses collaborateurs en termes d’évolution de carrières, de


missions ? Quelles sont les valeurs qui guident l’entreprise ? Quels comportements
managériaux et professionnels sont privilégiés ? Il s’agit de la réalité de l’offre RH, des
éléments intrinsèques qui différencient de la concurrence, des points faibles qui sont des
axes de progrès et des points forts qu’il faut mettre en avant via la communication. À ces
aspects purement RH, viennent s’ajouter ceux propres à l’activité de l’entreprise : ses
produits, sa solidité financière, son histoire, sa position sur son marché, sa capacité en R&D, la
notoriété des dirigeants…

Ce que l’entreprise dit d’elle


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Il s’agit de la communication de l’entreprise, sous toutes ses prises de parole officielles, de
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celles dont on contrôle le sujet, le calendrier, le lieu, la tonalité. Bien évidemment, nous ne
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parlons pas uniquement de la communication RH, mais également de tous les signaux
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auxquels on pense rarement comme impactant l’opinion des candidats : publicité


commerciale, financière, promotion, mécénat, sponsoring… Un candidat est en même temps
un citoyen, un consommateur… L’opinion qu’il va se faire d’une marque résulte d’un
amalgame complexe (et inconscient) de tous ces messages. C’est la « zone de confort » de la
communication de l’entreprise, c’est ce qu’elle maîtrise le plus et, en même temps, ce qu’elle
peut modifier le plus aisément pour s’adapter aux changements de son environnement,
contrairement à ce qui est développé dans le paragraphe précédent.

Ce que les collaborateurs disent de leur entreprise

Bien évidemment, une fois recrutés, les candidats ne perdent pas cette mauvaise habitude
de s’épancher sur les médias sociaux. Nous touchons ici l’élément qui déroute le plus les
entreprises, car c’est celui qu’elles savent gérer le moins bien. Le cadre juridique n’apporte
qu’une aide limitée, il est en retard sur les usages. Il est bien difficile de trouver le juste
équilibre entre des contraintes à imposer à une collectivité pour atteindre des objectifs
communs, et la volonté de préserver des espaces de liberté individuelle, indispensables à
l’épanouissement des collaborateurs. Comment fixer des limites à des situations qu’on ne
peut maîtriser, et en même temps chercher à transformer ces situations subies en
opportunités ? Nous sommes ici dans la zone d’inconfort extrême, fortement influencée par
la culture de l’entreprise et les usages qu’elle a érigés en matière de liberté de parole et de
circulation de l’information. Enfin, les collaborateurs sont en même temps sujets et
émetteurs de ces signaux.

Ce que le public dit de l’entreprise

Dans cette catégorie, entrent tous les émetteurs hors de l’entreprise qui s’expriment sur la
marque employeur et qui, par leur diversité, leur importance potentielle et leur subjectivité,
peuvent générer un « bruit » considérable, aisément propagé par les médias sociaux. Leur
valeur (ou leur pouvoir de nuisance) réside dans leur puissance, leur liberté d’expression et
leur rapidité de diffusion. Aucun lien contractuel ne les lie à l’entreprise ; elle ne peut en
aucun cas influencer, orienter, brider leurs prises de position, au risque de s’exposer à des
représailles.
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Les sept attributs de la marque employeur


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Nous verrons dans le prochain chapitre comment bâtir et mettre en place une marque
employeur en fonction des particularités et des objectifs de l’entreprise. Il est cependant
quelques attributs que la marque employeur doit posséder, et qui doivent guider les
réflexions tout au long de sa construction. Des attributs qui permettent d’évaluer la qualité
d’une marque employeur, et donc aussi de la promesse qu’elle synthétise.

Différenciante

Même si le travail de construction de la marque employeur est une émanation de


l’entreprise, de ses ambitions, de sa stratégie, il impose de la confronter à la réalité de
l’environnement, aux attentes des cibles directes et indirectes. Dès lors, le territoire
d’expression de la marque employeur doit facilement et rapidement être attribué à
l’entreprise et se positionner par rapport aux territoires qu’ont pu investir les concurrents
directs.
Adaptable

Une entreprise, et notamment un grand groupe, composée de nombreuses activités,


implantations, nationalités et métiers, devra réussir l’exercice délicat d’un socle commun qui
saura s’adapter aux particularités de ses différents bassins d’emplois. La dimension
internationale de ses cibles, leur mobilité géographique déterminera une orientation plutôt
globale ou au contraire locale. Cette nuance sera à étudier plus particulièrement dans le cas
de groupes composés de marques commerciales très fortes localement, sur lesquelles il sera
utile d’adosser la marque RH.

Attractive

Si elle se doit d’être fidèle à la réalité, la marque employeur n’en est pas moins un acte
marketing. Elle doit donc savoir rencontrer les attentes de ses populations cibles, apporter
les arguments pour y répondre et ainsi atteindre ses objectifs d’attractivité ou de rétention.
Elle doit savoir séduire et convaincre, nourrir une ambition qui n’est pas toujours aboutie,
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mais sans tomber dans la tromperie.
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Crédible
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Face au pouvoir des médias sociaux de renverser les frontières des entreprises, la marque
employeur ne peut mentir sur la réalité qu’elle promeut. Pas de sur-promesse, pas
d’engagements que l’entreprise ne peut tenir. La crédibilité est la valeur la plus importante
de la marque employeur. Elle se gagne lentement, mais peut se perdre avec quelques
internautes, collaborateurs, stagiaires, présents ou anciens, qui décident de porter sur la
place publique leur expérience malheureuse.

Pérenne

Le rythme de la marque employeur est un temps long : il faut du temps pour installer
progressivement une marque employeur forte. Sa pérennité contribuera à renforcer sa
légitimité, confirmant son ancrage dans la réalité, loin des effets de mode. Il faut donc
concevoir la marque employeur avec la volonté de durer, en l’adossant à une accumulation
de preuves au fil du temps, pour l’ancrer profondément dans l’ADN de l’entreprise.
Réelle

La marque employeur, nous l’avons déjà évoqué, n’aura de légitimité que si elle se rattache à
la réalité de l’entreprise. Histoire passée ou récente, succès commerciaux ou accidents de
parcours, les événements qui ont marqué les collaborateurs, les clients, les candidats, les
médias, doivent être intégrés à la réflexion.

Partagée

Par les collaborateurs, pour qu’elle puisse être acceptée. Cela rejoint l’attribut précédent :
elle doit s’appuyer sur la réalité de l’entreprise, mais elle doit aussi être « vendue » à
l’interne. Il est ainsi indispensable de faire participer les collaborateurs à sa construction,
mais également d’accorder un soin particulier à l’expliquer, à accompagner son lancement.
Très souvent, les entreprises accordent davantage de soins et de moyens à un lancement en
externe, jugeant parfois superflu la dimension interne.

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À ces sept attributs, nous pourrions en rajouter un : celui de la dimension digitale de la
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Marque Employeur. Les usages des candidats et les nouveaux outils à leur disposition ont
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tellement modifié toute la chaîne de la recherche d’emploi qu’une Marque Employeur ne


peut exister sans une forte présence digitale.
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Trois composantes de marque employeur

Une marque employeur bien conçue doit réussir un équilibre entre ces trois composantes,
qui peuvent parfois être divergentes.

Le vécu

Il correspond à la réalité de la marque employeur, telle que la vivent au quotidien les


collaborateurs. Bien évidemment, ce ne sont pas les discours qui permettront d’installer
cette composante, mais bien l’expérience collaborateur. Il serait d’ailleurs plus juste de
parler de diverses expériences, tant les réalités peuvent diverger d’un département, pays,
manager, métier… à un autre. L’enjeu sera alors de faire la synthèse de toutes ces
expériences. Il convient de veiller à ce que la formulation de la marque employeur et son
expression « publicitaire », notamment en externe, ne créent pas une distorsion trop grande
avec le climat social interne. Dès lors, l’entreprise s’expose à un triple risque : risque
opérationnel avec un désengagement fort de la part des collaborateurs, risque financier
avec des abandons de postes fréquents pendant la période d’essai, risque d’image fort si ce
maquillage de la réalité est partagé sur les médias sociaux. Nous verrons plus loin que ce
vécu doit être intégré aux phases de construction de la marque employeur, via la
participation d’un panel de collaborateurs représentatif. C’est la condition pour en faire
d’éventuels avocats ou, a contrario, des saboteurs de la marque employeur future.

Le voulu

Dans toute démarche de construction d’une marque employeur, il y a une ambition, une
volonté d’aller vers un nouvel état. Cette promesse que l’on fait au collaborateur et au
candidat est une vision de l’avenir qui dépasse le présent. Il est le reflet de la vision de
l’équipe dirigeante. N’oublions pas que le marketing RH est stratégique, il doit être au
service de cette ambition collective, contribuer à la recherche des moyens de l’atteindre. Le
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« voulu » doit s’appuyer sur le projet stratégique de l’entreprise s’il en existe un. Même s’il
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doit s’ancrer dans le « vécu », le « voulu » doit porter une aspiration. C’est lui qui doit apporter
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du souffle à la marque employeur, qui fera rêver les candidats, leur proposera une histoire à
écrire conjointement, donnera un sens à leur mission dans l’entreprise. L’ambition de
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Danone est d’améliorer la santé dans le monde grâce à l’alimentation, celle de RyanAir de
rendre les transports aériens accessibles au plus grand nombre, celle de l’Oréal de faire que
toutes les femmes se sentent plus belles. En revanche, un résultat d’exploitation, aussi bon
soit-il, ne mobilisera les énergies d’aucun collaborateur.

Le perçu

Nous l’avons dit à maintes reprises, la puissance de diffusion des médias sociaux donne une
visibilité particulière à la réputation d’une entreprise. L’ensemble de ces messages, peu ou
pas maîtrisés par l’entreprise, contribue fortement à orienter l’opinion des candidats.
D’autant plus fortement que quelle que soit leur réalité, ils racontent souvent une
expérience individuelle, avec une forte composante d’émotions, dans laquelle il est facile de
se projeter et de sur-réagir sans le recul nécessaire. Que ces informations soient le reflet de
la réalité, pure invention ou dénigrement volontaire n’y change rien. Même dans le cas où
l’entreprise apporte la preuve de la médisance a posteriori, le mal est fait, ces contenus
resteront longtemps référencés par Google. Pour paraphraser le président d’un tribunal :
« sur le web, tout ce qui est écrit pourra être retenu contre vous ». L’entreprise, à de très
rares exceptions près, et à un coût prohibitif, ne pourra faire disparaître ces propos
compromettants, même s’ils sont mensongers.

Les acteurs de la marque employeur

Nous détaillerons dans le prochain chapitre le rôle que chacun des acteurs de l’entreprise
peut jouer à différentes étapes de la construction et la promotion de la marque employeur,
et notamment celui de responsable du marketing RH et de la marque employeur. Nous nous
contentons ici d’évoquer trois principaux contributeurs qui participent également à
l’ambition interne de la marque employeur : l’engagement des collaborateurs. Un
engagement qui doit se nourrir de fierté, de bien-être et de confiance pour exister. Il s’agira
de s’assurer que ces trois acteurs partagent bien les convictions et les choix retenus, de
veiller à ce que leurs comportements et leurs paroles soient alignés avec la marque
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employeur.
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La direction générale
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Elle contribue à développer la fierté des collaborateurs. Le charisme de ses membres, la


vision qu’ils portent, les succès commerciaux dont ils peuvent se prévaloir et qui donnent
aux collaborateurs l’envie de participer à cette aventure. Actions sociales et solidaires,
mécénat, sponsoring sportif, innovation des produits, publicités marquantes… Toutes ces
actions qui dépassent le territoire des RH, mais qui font que le collaborateur aura envie de
citer son entreprise pendant un dîner entre amis, de la recommander à un camarade d’école,
ou encore de la valoriser sur les médias sociaux.

Les managers

Par leurs relations au quotidien avec les collaborateurs, ils sont les principaux artisans du
bien-être dans l’entreprise. Leur comportement respecte-t-il les valeurs de l’entreprise ?
Leur attitude est-elle conforme aux engagements du contrat social ? Chaque manager adopte
un comportement différent, propre à sa personnalité, et on n’attend surtout pas de lui qu’il
se comporte en clone, puisque parmi les qualités attendues, nous trouvons l’adaptabilité et
l’initiative. Cependant, leurs comportements feront que la marque employeur sera perçue
comme crédible, réelle et partagée, ou non.

Les RH

Ils sont les garants du respect du contrat social. Ils apportent aux collaborateurs la confiance,
parce qu’ils assurent que les règles du jeu définies dans le contrat social seront respectées.
Leurs armes ne se résument pas à l’arsenal réglementaire. Ils doivent disposer de la
légitimité et de la reconnaissance de la direction générale pour imposer à tous le respect de
la promesse RH.

Mentionnons également la direction de la communication qui, même si elle ne contribue pas


directement à l’élaboration du socle de la marque employeur, est un acteur indispensable à
la construction du discours, à la promotion de la marque RH. Associer les équipes de
communication est également la garantie d’une marque RH plus forte, plus légitime, car
alignée sur la marque corporate.
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Petit focus sur les stagiaires


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Face aux abus constatés dans certaines entreprises, le gouvernement a fait adopter au
printemps 2015 une loi sur l’encadrement des stages et l’amélioration du statut des
stagiaires (http://www.gouvernement.fr/action/l-encadrement-des-stages). Mais les
stagiaires font rarement l’objet d’une attention particulière de la part des architectes de la
marque employeur. Excepté dans le cadre de programmes de pré-recrutement sur des
profils bien particuliers, ils sont exclus des parcours d’intégration, ne bénéficient pas des
parcours de formation, ne sont pas concernés par les entretiens d’évaluation. S’ils évaluent
l’offre RH de l’entreprise à ce qu’elle leur propose, il est certain que leur jugement sera
particulièrement sévère.
Pourtant, les stagiaires peuvent représenter une population à risque pour la réputation de
l’entreprise. En effet, leur attachement à l’entreprise est moins fort que celui des
collaborateurs, et leur présence temporaire dans l’entreprise les libère de toute contrainte
ou réserve pour s’exprimer librement sur les médias sociaux. Notons aussi que les stagiaires
entrent plus que d’autres dans la catégorie des utilisateurs assidus des médias sociaux. Un
manager « chefaillon », des collaborateurs méprisants, un équipement informatique
antédiluvien ou encore des missions photocopies, sont autant de sujets croustillants,
candidats idéaux à l’ironie ou à la cabale, dont raffolent les partageurs frénétiques du web
social, et qui auront vite fait de massacrer l’image d’une entreprise au sein de leur école.
On note cependant un timide début de prise de conscience, puisque des initiatives récentes
se sont multipliées pour évaluer les entreprises par leurs stagiaires. Qu’il s’agisse de sites de
notations, qui s’apparentent plutôt à des déversoirs de bile individuelle, ou des études, dont
le panel n’est constitué que d’entreprises volontaires qui ont la possibilité de ne pas rendre
publics les résultats, ces initiatives restent encore embryonnaires. Elles ne constituent
visiblement pas encore des sources d’informations privilégiées par les étudiants, mais
doivent faire partie du périmètre de veille des entreprises.

Les limites du concept de marque employeur

Dans notre volonté de garder ouverte la contradiction, il nous semble indispensable et


salutaire d’émettre dès à présent quelques critiques sur le concept de marque employeur.

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Une marque RH qui se démarque de la marque commerciale ?
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Il est indispensable de respecter une cohérence entre la marque RH et les différentes


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marques commerciales. Compte tenu du poids des investissements publicitaires accordés


généralement pour valoriser les produits et services, face à ceux alloués à la marque
employeur, il convient d’exploiter la visibilité, la notoriété et la puissance de la marque
commerciale. Et a fortiori si cette dernière dispose d’un capital de sympathie, d’innovation ou
de proximité, sur lequel arrimer la marque RH. C’est par exemple le cas pour les secteurs du
luxe, de la mode, de la grande consommation, des high-tech, de l’industrie de pointe, qui
attirent les candidats autant sur leur offre RH que sur leurs produits. Les classements des
employeurs les plus attractifs, type Universum, basés sur la perception des candidats, sont à
cet effet révélateur : il n’est pas toujours aisé d’isoler la contribution « RH » de la contribution
« corporate » ou « produit » dans l’attractivité globale. Cette adhérence est d’ailleurs parfois
exploitée par des sites web de recrutement associés aux sites corporates ou commerciaux. Il
en est ainsi du site de recrutement LEGO (http://jobs.lego.com) ou celui des vêtements GAP
(http://www.gapinc.com) qui accordent une place importante à leurs produits, et sont très
imbriqués dans le site institutionnel. Le message est clair : un amour du produit est
recommandé pour postuler. Par exemple, Decathlon (http://recrutement.decathlon.fr)
insiste sur l’état d’esprit sportif de ses collaborateurs.
Une marque RH transnationale ?

La marque RH va être portée par un ensemble de promesses que l’on voudra souvent réunir
sous l’ombrelle unique de la PVP, pour la rendre facilement lisible, identifiable, plus facile à
communiquer. Ainsi, cet exercice de simplification peut amener à gommer certaines
aspérités pour ne retenir qu’un noyau commun qui risque de se confronter à des différences
culturelles, religieuses, que seules les équipes locales sont en mesure d’identifier. Ces
éléments sont indispensables à garder à l’esprit au moment de la construction de la marque
employeur, mais également quand il s’agira de choisir les actions pour la faire vivre. La
construction d’une marque RH, notamment si elle est de dimension internationale, doit
associer les RH des différentes plaques géographiques sur lesquelles elle sera déployée. Il
est indispensable de trouver le juste équilibre entre une « colonne vertébrale » unique et
une articulation comportant quelques éléments périphériques optionnels.

Une marque employeur sur-prometteuse ?


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En réponse à de fortes tensions sur certains profils dits « pénuriques », la principale tentation
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des architectes de la marque employeur consiste parfois à survaloriser les avantages du
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contrat social pour la rendre plus attractive. Certes, nous l’avons dit, le travail sur la marque
employeur est aussi un travail de communication destiné à sélectionner certains arguments,
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en vue de convaincre et séduire les candidats. Mais face à l’expérience quotidienne des
collaborateurs, et au pouvoir des médias sociaux d’ouvrir les portes de l’entreprise, cet
exercice doit se fixer certaines limites. De plus, le temps pour faire évoluer la réalité de
l’offre RH et celui de la communication RH sont différents. Il est légitime de vouloir se
projeter, de proposer une vision, une ambition à partager avec les futurs collaborateurs,
même si elle est encore en construction. Les candidats, comme les clients, savent décrypter
un discours « commercial » et sont prêts à accepter quelques excès de langage s’ils ne sont
pas considérés comme mensongers. La limite à ne pas dépasser est celle qui sépare
l’ambition de la malhonnêteté, en raison d’une distorsion trop grande de la réalité.

Une marque employeur « étendue » ?

Traditionnellement, la marque employeur est limitée au périmètre de l’entreprise : elle


s’adresse aux collaborateurs et aux futurs collaborateurs. Cependant, nous l’avons évoqué, la
réputation employeur de l’entreprise s’affranchit de ces limites théoriques dans l’esprit du
grand public ou de la société civile. L’image d’Apple a ainsi été impactée par les suicides
survenus chez son sous-traitant chinois Foxconn. Il en est de même des entreprises de textile
européennes dont on a trouvé des étiquettes parmi les décombres de l’immeuble effondré
au Bangladesh en mai 2013. On peut considérer qu’Apple a une part de responsabilité dans
ces suicides, car il lui serait facile d’exiger des garanties quant aux conditions de fabrication
de ses pièces détachées. Mais les relations qui lient Apple à son sous-traitant ne sont que
d’ordre commercial, et les entreprises sont tenues de respecter la législation de leur pays et
de se plier aux usages locaux. Apple peut-il exiger de son sous-traitant des engagements
incompatibles avec les usages ou la législation chinoise ? Faut-il intégrer aux réflexions sur la
marque employeur son éco-système de clients, partenaires et fournisseurs si ces derniers
présentent un risque potentiel sur la réputation employeur ? La question sera d’autant plus
sensible que les nouvelles formes de relations entre les entreprises s’accompagnent de
nouvelles formes d’organisation : équipes projets mutualisées, missions en régie ou
détachement… Le cadre réglementaire ne peut être le seul recours.

Marque employeur ou responsabilité sociale pour l’emploi ?


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La limite entre marque RH et marque corporate tend à s’estomper, car la dimension humaine
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de la marque corporate devient de plus en plus présente. À cela, plusieurs explications.


D’abord, il semble bien que les sujets de communication soient de plus en plus exposés à la
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critique.
• La communication financière des entreprises devient un exercice délicat : si les résultats
sont mauvais, la vindicte se porte sur des patrons sur-payés et jugés incompétents. Si ces
résultats sont bons, ils le sont nécessairement au détriment de certaines populations : clients
lésés ou salariés exploités, et correspondent à une stratégie court-termiste dangereuse,
visant à satisfaire les seuls marchés financiers.
• La communication RSE : elle est souvent considérée comme un cache-sexe des pires
comportements en matière de responsabilité sociale, d’écologie, de développement
durable. L’ampleur du discrédit constaté est telle qu’on lui a même inventé un nom : le
greenwashing. D’ailleurs si l’on regarde les résultats des partis écologistes aux dernières
élections, est-ce encore vraiment une préoccupation des Français ?
• La communication produit est accusée de favoriser une consommation inutile et nuisible à
la planète, de forcer l’obsolescence. Les lancements de produits se succèdent à un rythme
toujours plus rapide (les marques comme H&M et Zara ont bâti tout leur modèle économique
sur un renouvellement très rapide des références). Et ces effets de mode stimulent des
caprices artificiels qui ont depuis longtemps remplacé le besoin. La dernière critique est
d’ordre social : elle porte sur le fossé grandissant des inégalités entre ceux qui ont les
moyens de suivre ce rythme effréné et les laissés-pour-compte de la société de
consommation.

Le marketing RH semble constituer un exercice difficile : il concerne de nombreux acteurs


hors des RH, touche différentes dimensions de l’entreprise, sur lesquelles ces mêmes RH ont
parfois un pouvoir plus que limité. Il apparaît difficile à mettre en place et encore plus
difficile à faire vivre. Il doit savoir jongler entre l’interne et l’externe, concilier l’aspiration et
la réalité, satisfaire les exigences du court terme et préparer l’avenir, répondre en même
temps à des objectifs économiques et sociaux. Et surtout, il semble impossible de le résumer
à un ensemble de recettes éprouvées qu’il suffirait d’appliquer fidèlement pour s’assurer le
succès. Le marketing RH est peut-être moins une science qu’un art, celui de parvenir à la
synthèse entre des aspirations individuelles à satisfaire, mais à canaliser pour qu’elles
participent à un projet collectif.
Comment isoler la contribution des autres actions (succès commerciaux, innovations
produits…) ou formes de communication de l’entreprise (publicité produit, mécénat…) à
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l’attractivité ou la fidélisation, au regard notamment des poids budgétaires respectifs ? Ces
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interrogations portent à la fois sur des incidences positives ou négatives : quel sera l’impact
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sur l’attractivité employeur d’une crise sanitaire, d’un scandale financier ?


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Comment estimer le pouvoir de séduction de l’entreprise et celui du poste ? On comprend


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aisément que l’impact des deux évolue au fil de la carrière ? le jeune diplômé sera plus
sensible à l’empreinte de la marque sur son CV, quand le candidat confirmé sera en quête
d’une mission intéressante.

Mais le marketing RH est aussi bien plus que la marque employeur, c’est une démarche qui
place le RH constamment dans les chaussures des acteurs en interaction avec lui (candidats,
stagiaires employés, managers…) pour comprendre leur expérience et l’améliorer.
Ces limites, mais aussi ces ambitions présentes à l’esprit, il convient de définir un marketing
RH et une stratégie d’actions qui servent les objectifs de l’entreprise. Les paragraphes
suivants, loin d’imposer un mode d’emploi universel, s’efforceront cependant de proposer
quelques éléments de méthodologie, de poser quelques repères, de suggérer quelques
conseils à suivre.

➤ Témoignage
La marque employeur : une fausse nouveauté ?

Thierry Delorme est directeur associé de l’agence ORC, communication corporate et métiers. Acteur et
observateur privilégié des entreprises et de leur communication RH, il porte un regard lucide sur la marque
employeur : un phénomène qui n’est pas nouveau, mais qui gagne en visibilité.

« On ne peut pas nier que l’on a assisté à une vraie transformation des RH ces dernières années. Et ces
transformations continuent avec l’avènement de la digitalisation des entreprises, propulsant les RH au cœur
de ces problématiques de changement... Les RH sont devenues plus stratégiques, plus visibles et plus
exposées aussi au travers de leurs prises de parole. Il s’agit d’un mouvement de fond, assez long mais qui
n’est finalement pas si nouveau. Cette montée en puissance a pris quelques années. Et cette visibilité des
sujets RH a été poussée par deux grands mouvements :

Le premier est un mouvement de fond : la montée en puissance de sujets source d’inquiétude ou de débats
directement liés aux Ressources Humaines. Je pense à la guerre (et à la rétention) des talents, aux départs
en retraite massifs, au chômage durablement installé en France, à la génération Y qui bouscule les modèles
managériaux établis... Les enjeux des entreprises ont donc naturellement intégré plus fortement les
ressources humaines, partie intégrante de leur responsabilité sociale. Ce qui a permis l’émergence de la
fonction, émergence qui s’est traduite par la présence des DRH aux comités de direction ou aux comités
exécutifs des grandes entreprises.

Le second mouvement est technologique. Internet d’abord, qui a révolutionné le mode de communication
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de l’offre RH : plus d’instantanéité (un CV en 1 clic !) et une disponibilité permanente (un site ou espace
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carrière ou recrutement ouvert 24/24). Evolution ensuite avec les médias sociaux qui ont généré une plus
grande porosité entre l’interne et l’externe et une transparence souhaitée... ou subie. Ceux-ci facilitent
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également la prise de parole pour tous mais contribuent aussi à estomper des frontières : sphère privée et
sphère professionnelle finissent par se confondre et le collaborateur devient ambassadeur (malgré lui ?) de
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son entreprise. Technologie encore avec le mobile qui rend cette information disponible, partout et à tout
moment.

Une notion popularisée

Tous ces phénomènes ont participé à l’émergence de la marque employeur, de sa nouvelle visibilité plus
précisément. Pour preuve, le concept a été déposé en France en 1998, à l’heure de l’internet naissant sans
parler des médias sociaux qui n’étaient alors que des concepts...

Cette visibilité de la marque employeur a néanmoins deux mérites. Le premier est de mettre un nom sur
quelque chose d’assez intangible ; c’est compliqué de parler de l’offre RH dans toutes ses dimensions, à la
fois interne, externe et avec toutes ses parties prenantes. L’enjeu, la notion de marque employeur, s’est
donc popularisé.
Mais, d’un autre côté, le sujet est un peu devenu tarte à la crème, l’auberge espagnole RH. C’est l’effet
pervers des réseaux sociaux : tout le monde y met ce qu’il veut, tout et n’importe quoi, sans qu’il y ait
toujours de lien avec l’offre RH de l’entreprise.

De faux débats

Je suis assez étonné de la défiance qui existe autour de la question de la communication. C’est étonnant car,
selon moi, ce débat n’a pas lieu d’être. La communication est une sorte de compétence inavouée des RH,
avec parfois un faux débat sur la légitimité des RH à la mettre en œuvre. Bien sûr que la RH a vocation à
communiquer sur ses actions ! La marque employeur et l’ensemble de l’action de la DRH visent à être
valorisées en interne, comme en externe. D’où qu’en vienne l’initiative (direction de la communication,
DRH), les réseaux sociaux, les différents classements et la demande de transparence accrue qui en découle,
la communication RH n’a jamais été aussi légitime. Je suis renforcé dans cette conviction par une étude
récente de l’ANDRH qui dresse le profil du DRH 2020, le DRH de demain : il sera connecté et médiatique !

De même, le débat qui opposerait directions de la communication et directions des ressources humaines
sur la promotion de la marque employeur n’a pas lieu d’être. Je me souviens d’un article publié sur le sujet
dans un numéro de la revue Stratégies en… 2006 !

Une offre indifférenciée

Je ne pense pas que la marque employeur vive sa vie de façon autonome. Elle s’inscrit dans l’univers de
l’entreprise. Un univers à la fois structurel et conjoncturel. Elle est liée à l’activité de l’entreprise, des
marchés, ce qui a aussi un impact direct sur l’image de l’employeur.

Du fait d’une concurrence accrue, d’un environnement économique plus complexe, d’une exigence de
transparence renforcée, etc., vous avez beaucoup de similitudes entre les entreprises et les offres de
services. L’offre devient donc assez indifférenciée. La marque employeur n’échappe pas à ce mouvement et
elle devient générique, elle aussi. L’enjeu, d’un point de vue RH, n’est plus seulement le service et l’offre RH
que vous proposez à vos collaborateurs et futurs collaborateurs, mais la façon dont vous le délivrez et sa
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perception par les intéressés. »
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« Tout ce que je sais c’est que je ne sais rien. »
Socrate

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■ Introduction

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Avec ce chapitre, nous entrons dans un niveau plus opérationnel, destiné à poser quelques
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repères méthodologiques. Comment mettre en place un marketing RH qui soit en cohérence
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avec la stratégie de l’entreprise et la politique RH qui la soutient ? Comment rendre son offre
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RH cohérente, attractive, compétitive ? Quelles sont les étapes pour construire une marque
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RH associant les qualités vues dans le chapitre précédent ? Qui dans l’entreprise peut et doit
développer l’attractivité employeur qui permettra d’atteindre les objectifs de recrutement ?
Quelles sont les compétences à développer, les évolutions d’organisation ou de modes de
travail des équipes RH à mener ?
À chaque étape du travail de construction d’un marketing RH, il conviendra de garder à
l’esprit des questions qui sont des réflexes pour les hommes de marketing : quelles sont nos
cibles prioritaires, indirectes, quelles sont leurs attentes, où les trouver, quels sont nos
objectifs… ? Autant de questions qui contribueront à structurer efficacement un plan
d’actions.
Notre volonté est ici de proposer une démarche qui puisse être exploitée « à la carte », en
fonction certes des objectifs visés, mais aussi des moyens et des ressources disponibles, des
ambitions portées, de la maturité et des compétences des équipes concernées par un tel
projet. Sans être exhaustif, nous nous attarderons sur quelques moyens d’actions
incontournables, tels les sites de recrutement ou les relations écoles, et verrons comment les
rendre plus efficaces par l’intégration d’une démarche marketing et l’impact des nouveaux
médias. De même, nous avons fait le choix de certaines entrées par outils (Twitter,
Facebook…), car cela correspond à des interrogations précises que se posent fréquemment
les équipes RH que nous rencontrons. Ce parti pris ne doit pas faire oublier, au risque de se
répéter encore une fois, que ces choix d’outils ne sont pas une fin en soi et doivent toujours
servir une stratégie, des objectifs. Nativement, ils ne sont ni bons, ni mauvais.
Nous allons également consacrer une large part au sujet des contenus : comment, par qui,
pourquoi les produire ? C’est une notion qui est centrale quand il s’agit de parler de
présence de marque, de visibilité, de communication, de réputation. C’est la qualité des
contenus qui permettra de bénéficier des effets de viralité et de rayonnance, de contrer les
émetteurs de réputations négatives, d’exploiter les bénéfices du « earned media », de
valoriser in fine l’empreinte numérique de l’entreprise, sur un marché qui a depuis longtemps
plongé dans le digital.
Certains lecteurs seront surpris de ne pas voir traiter du recrutement et du sourcing sous leur
angle opérationnel, des outils ou des méthodologies, car cela nous éloignerait de notre sujet.
De plus, il existe une littérature foisonnante qui traite de recrutement, de son évolution
récente liée à l’émergence du web puis des réseaux sociaux, des nouveaux acteurs et des
opportunités nouvelles qu’ils présentent pour les équipes recrutement.
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■ 1. Évaluer l’expérience collaborateur
Comment savoir où aller quand on ne sait pas d’où l’on part ? Il est indispensable de disposer
d’une vision précise de son offre RH, de sa perception en interne et de son rayonnement en
externe, de connaître son environnement et ses évolutions possibles, d’identifier les
attentes, les freins, les moteurs de ses cibles. Il est inutile et même dangereux de travailler
sur l’expression externe si l’on n’a pas pris la peine de mesurer la qualité du climat social au
préalable, si l’on n’est pas en mesure d’estimer les faiblesses de son offre RH. Il ne s’agit pas
de reporter toute prise de parole de l’entreprise avant de disposer d’une offre RH optimale
et d’un niveau d’engagement extrême. Cette approche n’aurait aucun sens face à la réalité
des enjeux quotidiens de l’entreprise. Il s’agit simplement de mener de front l’optimisation
des deux facettes du marketing RH : l’offre RH et sa promotion.

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Faire le diagnostic du niveau d’engagement
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Nous l’avons vu au fil des pages précédentes, la marque employeur ne reste qu’une création
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marketing vide de sens si elle n’est pas vécue, incarnée par les employés dans leur travail
quotidien. Elle doit s’appuyer sur la réalité de l’entreprise, son activité, l’expérience des
collaborateurs. Ce qui pouvait encore abuser le candidat il y a quelques années par manque
de sources d’informations alternatives à celles de l’entreprise, est désormais examiné au
regard des témoignages multiples disponibles sur le web social. Vouloir travestir la réalité de
la culture d’une entreprise, maquiller le niveau de satisfaction des employés, mettre en
avant des promesses en termes de responsabilité, d’autonomie ou d’évolution
professionnelle, pour espérer attirer plus de candidats est désormais risqué et souvent voué
à l’échec.
L’engagement des salariés forme plus que jamais la pierre angulaire de l’actif immatériel de
l’entreprise. Il se traduit par un bon niveau de confiance, de la fierté à travailler pour cette
entreprise et un sentiment de bien-être au travail. Cet engagement s’articule donc entre des
éléments affectifs et d’autres rationnels. Un salarié satisfait, heureux, sera bien plus engagé
dans la réussite de son entreprise qu’un autre, désabusé sur la reconnaissance attendue de
ses managers, et sans aucune visibilité sur ses perspectives de carrière. Productivité, image,
qualité des produits et des services, et donc, au final, résultats de l’entreprise, dépendent en
grande partie de cette volonté de faire du bon travail. Cette volonté ne se commande ni ne
se décrète, elle se cultive.
Ce changement de paradigme revient à considérer désormais le collaborateur comme un
client, mais aussi comme un candidat en puissance, toujours en quête d’un meilleur ailleurs,
avec une fidélité à géométrie variable fixée sur sa satisfaction tout aussi bien professionnelle
que personnelle. Nous sommes à l’ère des « travaillacteurs 1 », concept dans la droite ligne
des enseignements de Michel Crozier sur l’acteur et le système, mais qui l’ouvre bien plus
largement sur ces nouvelles porosités entre interne et externe, personnel et professionnel.
C’est pour ainsi dire un comportement de client qui met constamment l’offre de son
entreprise en concurrence avec celle des autres, pour être certain d’être dans l’entreprise la
plus intéressante pour lui.

Mieux comprendre les choix de ses salariés passe par une analyse des socio catégories, leurs
besoins et attentes, leurs satisfactions et leurs frustrations. Des outils existent, mais ils sont
rarement utilisés dans une optique de construction ou d’amélioration de la marque
employeur. On peut citer le rapport égalité hommes-femmes, le bilan social, le plan de
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formation, le plan de GPEC, les indicateurs de mobilité et de la diversité, ainsi que la
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multitude de baromètres internes. D’autres plus nouveaux se développent, comme le travail
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d’analyse des commentaires sur les articles de l’intranet, ou pour les entreprises qui en ont,
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les sujets des conversations sur les réseaux sociaux internes. Avec cette approche, on a pour
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ainsi dire le pouls en direct de la satisfaction des employés.


Les moyens : baromètre social, enquêtes ponctuelles, analyse des commentaires sur les
intranets, des sujets de discussions sur les réseaux sociaux internes.

Demain c’est certainement au travers de l’analyse des données informatiques issues des
mails, réseaux sociaux, chats, objets connectés, consultation de l’intranet que le Big Data nous
donnera des informations précieuses sur les attentes des salariés et les sujets qui posent
problème ou qui intéressent.

➤ Témoignage

Le changement et le bonheur comme leviers de motivation ?

Laurence Vanhée est l’ex-Chief Happiness Officer au ministère belge de la Sécurité sociale et la fondatrice du
cabinet Happyformance. Elle explique comment la transformation de son ancienne organisation a participé
à la motivation et à l’engagement des collaborateurs.
« Les personnes ne sont pas des ressources, donc je ne gère pas des ressources humaines. Mon job, c’est de créer
les conditions dans lesquelles les salariés vont trouver leur bonheur. D’où ce titre de Chief Happiness Officer.
Rendre ses salariés heureux a un impact positif sur l’organisation. Ils sont deux fois moins malades, six fois moins
absents, neuf fois plus loyaux, 31 % plus productifs, 55 % plus créatifs ainsi que le démontrent les études des
universités telles que la Harvard Business School, London Business School, Henley (mentionnées sur
www.happinessday.be). En Belgique, la société Securex a interrogé les personnes de plus de 55 ans. Celles
heureuses au travail disent vouloir rester dans l’organisation encore 4,9 à 6,6 ans de plus. Les études menées par
Gallup évaluent de 300 à 350 milliards de dollars par an le coût des désengagements pour l’économie américaine.
Agir sur le bonheur du collaborateur représente un véritable gain pour la personne, mais aussi pour l’organisation,
les clients, les actionnaires… C’est une chaîne positive de création de valeur. C’est donc sur cette base que nous
avons travaillé à la réorganisation du Ministère et que nous mettons maintenant en œuvre dans des organisations
de toute taille et de tout secteur.

Des valeurs et des actes

Au sein du Ministère, nous avons voulu intégrer dans sa vision une position d’organisation sexy (attirer), happy
(épanouir) et agile (anticiper les changements économiques, politiques…). Nous avons travaillé via une approche
collaborative pour définir cinq valeurs : la confiance, le respect, le développement individuel, l’orientation résultats
et la solidarité. Les valeurs ont ensuite été traduites par les membres de l’organisation en comportements. Ces
valeurs sont donc profondément inscrites dans l’ADN organisationnel.

La transformation de l’organisation a aussi été physique. Depuis 2009, plus personne n’a de bureau attitré et il y a
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en moyenne six bureaux pour dix personnes. Le télétravail est bien entendu encouragé : 69 % des 1 200 agents
en bénéficient jusqu’à trois jours par semaine. Cela génère douze millions d’euros d’économies par an de frais
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(location, énergie, maintenance, nettoyage…). Il n’y a plus que 35 imprimantes en lieu et place des
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435 précédentes. Les impressions sont en noir et blanc et recto verso par défaut, permettant de passer de neuf
palettes de papier par mois à trois. Nous avons dématérialisé plus de 400 kilomètres de documents pour les rendre
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accessibles à distance. Ces exemples sont transposables à la plupart des organisations de services !

Du chef au facilitateur

Côté management, les objectifs sont fixés par l’équipe, et non uniquement par le management. Avec ce système,
la productivité a augmenté au bas mot de 20 %. Les agents sont fiers de se voir challenger par leurs collègues et
de se dépasser. Dans cette organisation, le leader évolue d’un rôle de chef à un rôle de facilitateur. Il enlève les
obstacles sur la route de l’équipe plus qu’il ne contrôle. Nous avons dû complètement changer nos attentes sur ces
profils en matière de compétences. Ils doivent faire preuve de courage, de compassion, de résilience et afficher des
aptitudes à gérer la distance, mais aussi à travailler avec les médias sociaux, les messageries instantanées, etc. Sur ce
dernier point, à l’été 2011, nous avons formé nos collaborateurs à l’utilisation des médias sociaux. J’ai refusé que
l’on rédige la moindre charte. Nous sommes des adultes. L’utilisation doit se faire sur la base de la confiance et de la
formation reçue.

Cette transformation emporte donc un impact financier et opérationnel. L’organisation a la responsabilité de créer
un cadre, un environnement de travail, une culture qui permet de fonctionner de cette façon et de créer cette
nouvelle génération de leaders. L’organisation, la culture, le management, c’est une vraie responsabilité RH. Nous
créons une palette d’outils, de conditions pour que chacun s’y retrouve, mais toujours dans une logique de
rentabilité et de performance. L’idée est de contribuer à la rencontre des attentes de toutes les parties prenantes :
collaborateurs, actionnaires, clients…

Identifier et délivrer ses cibles


Nous essayons de satisfaire les besoins des différentes populations qui composent l’entreprise. Pour moi, il existe
cinq types de profils. Les premiers, ce sont les bons performeurs. Ils doivent représenter 75 % des effectifs. Ensuite,
les hauts potentiels sont ceux qui ont la capacité à prendre plus de responsabilités (managériales, d’expertise, de
gestion de projet…). S’ils partent, cela représente un vrai problème car ils travaillent à préparer le futur. Ils ne
doivent pas représenter plus de 5 % de l’organisation, car vous gérez des « divas » et souvent avec une politique
d’exception. Les experts représentent la troisième catégorie. Ils ont une compétence particulière. Ils sont donc
difficiles à trouver sur le marché, à moins d’aller les chercher chez les concurrents ou d’investir à long terme sur
quelqu’un en interne, avec le risque qu’il parte. Eux non plus ne doivent pas représenter plus de 5 % de
l’organisation. Les personnes loyales, quant à elles, sont là depuis tellement longtemps qu’elles disposent d’une
connaissance particulière de l’organisation. Ce n’est pas que leurs compétences sont rares, mais leur savoir est
critique dans l’entreprise et leurs connaissances sont quasi impossibles à formaliser. Là aussi, 5 % des effectifs est un
maximum. Enfin, il y a les « low performers ». Ils doivent également représenter moins de 10 % de la population.
Sur ces profils, soit vous lancez un plan d’action pour les réintégrer dans l’organisation, soit vous prenez l’initiative
de rompre la relation.

Une fois cette segmentation réalisée, on peut déterminer les services que l’on va délivrer à chaque population. Puis
on délivre. Le marketing opérationnel est ainsi bouclé.
Le marketing stratégique correspond plus à un positionnement : sur le papier, l’intranet, sur les médias sociaux en
interne et en externe, sur la gestion des communautés d’expertise, etc. Tout cela a été appliqué avec succès au
ministère belge de la Sécurité sociale.

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Des indicateurs de succès
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Pour savoir si nous sommes dans le vrai, nous avons plusieurs indicateurs. Par exemple, le taux de candidatures
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spontanées a augmenté de 500 %. Dans le même temps, le taux de départs volontaires a diminué de moitié. Nous
avons 20 % de nos agents présents sur Twitter, contre 3 % de la population belge. Presque tous renseignent leur
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bio sur ce réseau en tant que collaborateurs du ministère, sans que cela soit obligatoire. On sent une véritable fierté
d’appartenir à cette institution. 70 % de nos collaborateurs sont sur Yammer, notre réseau social d’entreprise.
Pourtant, la moyenne d’âge dans l’entreprise est de 48 ans et 7 mois. Nous sommes donc très loin de la boîte de
Geeks avec, pourtant, une forte utilisation des médias sociaux.
Notre dernière enquête sur l’engagement des collaborateurs nous révèle que 8 9 % d’entre eux sont heureux et
8 4 % se disent fiers d’être fonctionnaires au ministère.
Enfin, mon patron a été reconnu manager public de l’année 2007 en Belgique, l’équipe de ce projet de
transformation a été élue équipe RH de l’année 2010, et moi-même, DRH de l’année 2012. Notre organisation a
été reconnue «great place to work» par deux groupes de presse différents (et non l’organisme du même nom).
Ma plus grande satisfaction reste cependant que mon ex-équipe est en auto-gestion depuis octobre 2013...
Preuve évidente que le système fonctionne bien et durablement ! »

Risques et opportunités du dialogue social / conflictualité visible


en externe
Les directions d’entreprise croisent souvent les regards RH et managériaux pour évaluer leur
climat social. Les services RH s’appuient sur un outillage connu : un baromètre d’opinion (que
la communication leur dispute parfois), des analyses quantitatives d’indicateurs classiques
(présentéisme, turnover…) et qualitatives qu’ils partagent avec les managers de proximité et
les organisations syndicales. Afin d’affiner ce ressenti et de détecter les signaux faibles avant
conflictualité, on peut là encore s’appuyer sur des focus groups, des analyses de
commentaires posés sur l’intranet ou les réseaux externes, le suivi des différents arrêts de
travail spontanés, cadrés par les syndicats ou non.
L’écoute des équipes commerciales est souvent oubliée, bien que l’image de la marque dans
l’attractivité des candidats soit évidente. Gageons que l’arrivée du Big Data, qui permet
l’analyse statistique de quantité de données massives afin d’en interpréter le sens, va encore
faire évoluer ce travail de diagnostic avec l’explosion des données sur les réseaux sociaux
internes et externes. Une première étape à franchir sera toutefois la capacité de l’entreprise
à ouvrir des espaces de conversation en interne, qui ne soient pas trop cadenassés par la
peur des critiques plus ou moins directes et virulentes.

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On peut mesurer le niveau de satisfaction global mais aussi plus finement, par service, par
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catégorie, par âge, voire auprès des salariés en contact ou non avec le public. Et ce, afin de
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pouvoir construire des actions d’amélioration concrètes. Suivant que les voyants seront au
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vert ou au rouge, on pourra déployer certains messages ou au contraire s’attacher à travailler


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sur les causes profondes du mécontentement et parfois de désengagement des salariés.


L’un des premiers pas est justement l’écoute et la restitution de ce qui a été dit, avec un plan
d’amélioration partagé et des indicateurs visibles de tous pour un changement compris, car
logique et porteur de sens. Nous nous limitons ici à cette partie d’expression et d’écoute des
partenaires sociaux comme des salariés. Mais le dialogue social, c’est aussi la négociation et
comme le dit si bien René Ruols 2, un fin connaisseur de cette question, « celle-ci implique le
concept d’intérêts différents sinon divergents ». Un dialogue social ne peut rester sans objet
et uniquement centré sur la meilleure façon de communiquer pour permettre la meilleure
efficacité dans le passage de l’information descendante vers les salariés et partenaires
sociaux. La traduction d’un dialogue social vivant peut se mesurer au nombre d’accords
signés et à leur niveau de représentativité.s

Un problème surgit quand la proportion de salariés insatisfaits ou désintéressés est


suffisamment importante pour menacer les résultats de l’entreprise et, au passage, devenir
audible à l’externe, sans que celle-ci ne donne les signes de la prise en compte de cette
dégradation. Dans les différentes mesures à entreprendre une fois le paysage social connu, il
y a celle de la mise en place d’un fonctionnement modernisé et innovant des relations
sociales.
D’une manière générale, les RH demeurent des acteurs centraux dans ce domaine. Ils sont en
interface avec le corps social, via les syndicats, avec les managers locaux pour lesquels ils
agissent comme experts des questions sociales. Ils sont les conseillers des directions
générales sur toutes les questions de risques sociaux et les relations avec les syndicats. Cette
position centrale est renforcée par leur pouvoir sur les moyens accordés aux partenaires
sociaux pour mener à bien leurs missions. En effet nombre d’entreprises, en particulier les
plus grandes, sont souvent plus généreuses avec les syndicats représentatifs à leur niveau
en leur donnant des moyens supplémentaires à ceux prévus par le Code du Travail.
La loi sur la représentativité de 2008 visait à réduire le nombre de syndicats représentatifs
dans chaque entreprise et permettre ainsi de concentrer les moyens alloués pour
professionnaliser ceux ayant dépassés la barre des 10 %. Une entreprise, aussi paradoxal que
cela puisse sembler au premier abord, a besoin de syndicats forts afin de pouvoir négocier
efficacement les grandes évolutions de l’entreprise.
Pourtant grandes comme petites entreprises freinent sur un point : celui de l’ouverture d’un
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espace de travail et de dialogue sur l’intranet dédié aux organisations syndicales.
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Permettre aux partenaires sociaux de pouvoir s’exprimer en interne en respectant certaines
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règles, c’est limiter les risques de les voir se retourner vers le web social du grand public et
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démarrer un dialogue social externalisé. Quelques entreprises se mordent aujourd’hui les


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doigts de ne pas avoir été plus conciliantes envers l’ouverture de ces nouveaux moyens de
communication en interne, vu le succès de certains blogs syndicaux qui déversent au public
les problèmes internes et donnent une image souvent peu flatteuse de leur entreprise. SFR,
La Redoute ont connu cette médiatisation ou plus récemment Helwett Packard qui a vu FO,
la CGT, la CFTC et l’UNSA exprimer leurs revendications sur leur blog public, avec plus ou
moins d’audience et de reprise média. Celui de la CFTC connaît un réel succès, à la fois de
consultation, mais aussi de participation. L’un des derniers billets publiés en mars 2013 sur
les entretiens d’appréciation compte un nombre de commentaires qui dépasse les 130,
quand d’ordinaire dix constituent déjà un bel échange sur un billet de blog.
Une rapide veille sur Facebook permet de voir une multitude de pages des différents
syndicats, de SUD, à L’UNSA en passant par la CGT ou la CFE-CGC.
C’est un réel échec de la communication RH et de la communication interne que de voir ce
type d’échange se dérouler non pas sur l’intranet ou le réseau social interne, mais sur le blog
d’un syndicat et en externe.
On perd à la fois en image, mais surtout en confiance. Quel crédit apporter à la
communication managériale qui ne laisse pas de place au dialogue, face à un blog fréquenté
par un grand nombre de salariés, modéré intelligemment et qui parvient à renseigner sans
langue de bois ?

Nous ne prétendons pas qu’une offre en interne fera disparaître les blogs externes animés
par les différents syndicats, mais que son absence ne peut que la stimuler et l’entretenir.
De plus, des sites comme « miroir social » se sont spécialisés dans la mise en avant de cette
parole sur une plateforme bénéficiant d’une audience grand public, très bien identifiée par
les journalistes comme une mine d’articles possible. La recherche des contributeurs venant
du monde syndical pour s’assurer des billets sur des conflits avec une vision de l’intérieur est
une des clefs de cette audience.

Les frilosités internes, quant à donner du pouvoir aux représentants syndicaux par un droit à
s’exprimer sur les plateformes internes, doivent être analysées en fonction de leur effet
boomerang. Un effet d’autant plus important que l’émergence de blogs de travail ou de
propagande, ne peuvent constituer des plateformes neutres de dialogue social productives.
En effet sur l’intranet, la direction, à force de ne rien proposer comme espace de dialogue
social pour les organisations syndicales, ne leur laisse que le choix de l’externe. Une fois ce
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pas franchi, celles-ci ne veulent surtout pas de l’ingérence de la direction sur leur support et
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n’ont plus vraiment envie de subir les règles trop strictes de la direction en interne. Le tout
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se terminant souvent devant les tribunaux. Belle preuve de dialogue !


La jurisprudence est clairement du côté de la liberté d’expression et de la protection des
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délégués syndicaux qui rend selon le professeur Jean-Emmanuel Ray la démarche


compréhensible mais vaine.

Les entreprises peuvent innover et sortir de cette impasse en réfléchissant aux différents
éléments d’un intranet syndical. Une partie de l’intranet pourrait être consacrée aux
échanges et préparations des dossiers et rencontres entre direction et syndicats, une autre
avec des espaces de travail. En complément de ces nouveaux moyens et droits accordés aux
partenaires sociaux, les entreprises pourraient développer leurs propres communautés
autour du bien-être au travail et chercher à améliorer, innover sur les différents process RH
au travers des conversations avec les salariés.
Pourtant les entreprises se contentent actuellement d’ouvrir leur réseau social sans y faire
une place à l’expression syndicale et donnant l’impression à leurs représentants de les
« spolier » de leur responsabilité d’information de proximité auprès des salariés.

Le paradoxe pour les RH de tenter de limiter le poids des syndicats, soit par les limites
importantes à leur communication, soit par le choix entre une « carrière » de syndicaliste et
une progression professionnelle est de se retrouver face à des représentants jusqu’au-
boutistes. En quoi un syndicaliste qui désire revenir dans l’entreprise ne pourrait bénéficier
d’une reconversion prenant en compte ses compétences ? Faciliter les passerelles
permettraient d’avoir des profils certainement plus riches et de considérer le syndicalisme
comme une expérience dans une carrière et non pas seulement une fin en soi.

Il convient tout de même de noter que les NTIC (Nouvelles technologies de l’information et
de la communication) sont considérés par les partenaires sociaux avec beaucoup de
méfiance, car ils y voient une atteinte au corps social traditionnel, avec ses rapports de force
établis et ses acteurs légitimes, au profit de la création de communautés avec des modes
d’organisation, de relations de travail bien différentes.
Les réseaux sociaux, surtout d’entreprise, développent l’individualisme, la parole unique
alors que les syndicats sont par nature le porte-voix des salariés.
La mise en place des bases de données économiques et sociales a été sur ce point une très
grande déception pour nombre de RH qui se sont investis dans ce projet, ont mis en place
des outils informatiques puissants qui au final sont très peu consultés...
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On perçoit toutefois un frémissement. Les organisations syndicales sentent aussi qu’à ne pas
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s’adapter aux nouveaux usages − ou de les limiter à l’envoi de quelques SMS ou mails − et à
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continuer à « tracter » à la sortie de l’entreprise, elles risquent de perdre une partie du lien
social, en particulier avec les plus jeunes générations. Demain, nous assisterons peut-être à
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émergence d’un marketing syndical plus adapté aux nouvelles générations qui ne se
préoccupent généralement des syndicats que lorsqu’elles ont besoin d’aide pour régler un
conflit avec le manager ou l’employeur.

La construction d’un dialogue social respectueux et structuré dans l’entreprise ne peut que
constituer un atout pour l’interne et pour l’externe vis-à-vis des salariés, comme de la
compétitivité de l’entreprise. C’est ce que les Allemands nous démontrent depuis des
années malgré, il est vrai, moins d’efficacité qu’auparavant.

➤ Témoignage

Carole Couvert est Présidente confédérale de la CFE-CGC. Le texte suivant est une retranscription d’une
interview téléphonique de Carole Couvert par Vincent Berthelot.
La CFE-CGC a commencé à vraiment utiliser les médias sociaux en 2011 lors des concertations sur les
retraites en sortant un kit de communication et surtout un clip vidéo humoristique sur YouTube : le
« retraithon ». Les retombées médiatiques ont été assez bonnes et ont convaincu l’organisation de
poursuivre dans cette voie qui lui permet d’avoir une communication plus réactive avec plus d’impact.

Depuis ce démarrage réussi vous avez fait le choix de faire reposer tout une partie de votre communication sur les
réseaux sociaux. Pouvez-vous nous en décrire quelques étapes et principes ?

Carole Couvert : Nous sommes en effet très ouverts à ces nouveaux médias et conseillés par une agence.
Par exemple sur notre campagne contre la fusion de l’AGIRC et l’ARRCO, nous avons relayé notre
conférence de presse en direct sur « Periscope » afin que les journalistes de province puissent réagir,
participer, par le biais de twitter.
La seconde étape a consisté à ouvrir un site dédié, proposer un hashtag #nonalafusionagircarrco et des
selfies repris sur un mur pour que les adhérents mais aussi le personnel d’encadrement puissent montrer
leur désaccord sur ce projet.

Pourtant, l’opération collaborative qui devait vous permettre de changer le nom de votre organisation ne s’est pas
aussi bien passé.

C. C. : En effet malgré une très forte participation et plus de 27 000 nouveaux noms proposés, le dispositif
n’a pas pu se dérouler sereinement car une liste de noms a été présentée dans la presse comme seuls choix
possibles et *a* entraîné un fort mouvement de contestation en interne.
Ce que j’ai appris depuis ma prise de fonction c’est la nécessaire humilité dont on doit faire preuve,
l’acceptation du processus d’essais et d’erreurs afin de continuer à avancer et s’améliorer. Comme le
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changement de nom est une modification statutaire qui demande l’accord de 66 % des adhérents cela
n’avait alors plus de sens de vouloir continuer cette démarche.
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Le syndicalisme, et plus largement le dialogue social, vont mal en France actuellement. Problème d’image,
d’efficacité, de représentativité réelle les causes à ce malaise sont nombreuses.
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Quelles sont les évolutions nécessaires des syndicats pour répondre aux nouveaux usages et attentes des salariés à
l’heure de la désintermédiation par les réseaux sociaux externes ou internes ?

C. C. : Il faut reconnaître que le modèle actuel est à bout de souffle. La loi de modernisation du dialogue
social de 2008 nous a fait passer d’un syndicalisme de représentation à un syndicalisme de militant. Cela
entraîne parfois des surenchères entre les organisations syndicales et renforce le clivage entre
organisations réputées comme contestataires et celle vues comme réformistes. Nous pensons qu’une
troisième voie est possible.
Celle-ci consiste à rechercher des accords gagnants/gagnants mais de conserver aussi la possibilité de ne
pas signer quand le compte n’y est pas.
Notre modèle doit aussi évoluer vers un système de co-décision à la française pour redonner de la confiance
en partageant la valeur ajoutée.
Nous pensons que les salariés attendent des représentants syndicaux qui comprennent leur travail
quotidien et c’est pour cela que nos militants ne sont que très rarement des permanents syndicaux mais
continuent d’exercer une activité professionnelle.
Enfin, cela demande aussi d’ouvrir des débats en interne pour clarifier les positions pour que celles-ci
soient acceptées et renforcent la fierté d’appartenance à notre organisation syndicale.

L’avenir du syndicalisme passe à votre avis par le digital. Le rajeunissement et la mixité revendiquée de ses
représentants ?
C. C. : Pour ma part, je souhaite en effet m’entourer d’une équipe qui représente les 160 000 adhérents mais
aussi l’avenir avec plus de jeunes et plus de femmes et surtout des meilleurs. Cela, encore une fois,
demande de l’humilité car vous ne dirigez pas une équipe très compétente et moteur en voulant être plus
compétent qu’eux dans une logique « le chef sait tout ». On en revient de nouveau à la notion de confiance.
J’ai d’ailleurs dû passer ma première année à la tête de la CFE-CGC à retrouver la confiance de l’ensemble
des adhérents pour opérer les changements actuels.
Le digital a déjà changé notre façon de faire du syndicalisme, la transformation est en marche.

On a l’impression de syndicats de plus en plus coupés de leur base en entreprise et moins écoutés, respectés par les
acteurs du dialogue social au niveau le plus élevé (cf. le processus de négociation inhabituel pour la loi Rebsamen).

C. C. : Pour ma part, j’avais décidé justement de retourner sur le terrain comprendre les problèmes des
entreprises et appréhender les difficultés liées au contexte actuel. En fait, il n’y a pas quasiment une
semaine ou je ne me rends pas pour une visite quelque part en France à l’invitation d’une section
d’entreprise. C’est souvent l’occasion de rencontrer le RH, le dirigeant local et parfois les responsables du
siège et d’échanger. Le renouveau syndical passe certainement aussi par ces liens, cette connaissance des
coulisses de l’entreprise.
Le lieu et la méthode ont en effet une responsabilité dans l’issue des dernières grandes négociations.

Comment assurer le renouveau des syndicats, du dialogue social avec des salariés n’ayant plus les mêmes attentes
de représentativité, voulant plus d’individualisme que de collectif, conscient du pouvoir de leur conversation sur les
réseaux ?
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C. C. : Il faut peut-être s’inspirer des pays qui ont un taux de syndicalisation élevé et par exemple
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développer l’idée d’un syndicalisme d’adhésion. Pour faciliter l’adhésion, la CFE-CGC souhaite réserver les
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bénéfices de la négociation collective aux seuls adhérents des organisations syndicales et nous avons
proposé ce changement au patronat comme aux politiques mais sans réponse pour l’instant.
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Je crois beaucoup aussi à un positionnement différent vis-à-vis des salariés pour les accompagner dans leur
parcours professionnels qui, nous le savons désormais, ne sera pas simple et rectiligne. Le salarié dans son
parcours sera certainement amené à être un jour lui-même créateur d’entreprise, consultant, à travailler
dans le secteur privé ou public […] et la CFE-CGC a pour ambition de l’accompagner dans ses évolutions et
non pas seulement se limiter au périmètre de salarié. Cela demande par exemple de travailler sur la
portabilité des droits entre les différents secteurs, d’imaginer des dispositions facilitant la reprise des
entreprises par les salariés…
Nous voulons pouvoir détecter, accompagner les talents et dans une vision plus large comprendre et
détecter les mutations à venir.

À ce propos, nous avons vu que vous aviez associé la CFE-CGC au lancement d’une application mobile : « Made in
emplois ». Quel était l’objectif visé ?

C. C. : Quand je suis intervenue en 2013 aux universités du MEDEF, j’ai parlé de l’importance de défendre
nos emplois en France et d’être responsable dans nos achats. Quand je suis descendue de la tribune,
Charles Huet est venu échanger avec moi sur le projet de livre qu’il avait et qui rejoignait complètement
cette idée. Cette rencontre a donné lieu à la création d’une application mobile qui permet de promouvoir
une attitude responsable de « consomm’acteur » au profit de la relocalisation des entreprises et leur
pérennisation sur le territoire. Cette application a déjà plus de 16 000 utilisateurs.
Connaître son offre RH… pour l’améliorer

Nous allons tenter de décliner les grandes activités qui composent l’offre RH et qui
impactent le plus directement la marque employeur. Ainsi, il s’agira de définir les actions
prioritaires à entreprendre, afin de concentrer des moyens toujours plus contraints sur
quelques éléments de cette offre RH à rendre plus performants. Certes, un travail de veille et
de benchmark peut être utile. Mais l’enjeu réside davantage dans la capacité à identifier et à
corriger les points de faiblesse les plus saillants de l’expérience du collaborateur. En
communication externe, le discours peut précéder l’action, afin de donner les pistes d’avenir,
de parler des ambitions sur tel projet. En interne, c’est l’inverse : l’action, ou a minima son
amorçage, doit précéder le discours. Le discours sert à informer plus qu’à séduire. Il doit
accompagner les actions et les mettre en perspective pour leur donner du sens et de la
valeur.

Ainsi, les différents process RH doivent devenir moins monolithiques et être travaillés selon
une segmentation par typologie de salariés pour correspondre le plus finement, et si
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possible individuellement, aux attentes. Si le cœur doit rester le même pour un principe
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d’égalité de traitement, les managers ou les RH doivent aussi pouvoir répondre de manière
$!

plus innovante aux demandes variées, plutôt que se retrancher derrière un « c’est le
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règlement ! ».
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Les salariés seront aussi très sensibles à la logique d’équité dans l’offre proposée, car trop
privilégier une catégorie peut avoir des effets à moyen terme sur la cohésion du corps social
et créer des fractures en interne redoutables pour le niveau d’engagement global. C’est
d’autant plus vrai que les hiérarchies traditionnelles de l’entreprise se sont réduites (moins
d’échelons hiérarchiques, moins de postes sans qualification) et que le rapport hiérarchique
a changé avec les équipes projets transverses, les espaces métiers collaboratifs.

L’intégration : des premiers moments à ne pas rater

L’intégration est le socle qui permet au nouvel arrivant de se sentir rapidement à l’aise dans
son poste et dans son environnement. C’est aussi un moment privilégié pour fidéliser des
talents que l’on a eu tant de mal à séduire et convaincre. La vision stratégique doit être
clairement exprimée par l’entreprise, pour être comprise et partagée par le nouveau
collaborateur, afin de réussir ce moment d’intégration, sentir que l’on entre dans un vaste
projet impliquant chaque salarié de l’entreprise. Pendant cette période, il doit acquérir les
bons repères, les méthodes de travail et les codes internes, les valeurs de l’entreprise,
comprendre le contenu de sa mission. De la réussite de cette intégration, souvent trop vite
expédiée avec un gaspillage de potentiels et de ressources déployés, dépendra la
performance du salarié, son engagement et son niveau de satisfaction au travail. Toutes les
entreprises s’accordent sur l’importance de ces premiers jours. Pourtant, combien d’entre
elles n’ont même pas structuré ce parcours, se déchargeant de cette tâche sur les managers
de proximité ? Combien de parcours d’intégration se résument à des documents
administratifs remis à la hâte, à une succession de présentations PowerPoint « faites
maison », composées de messages formatés déjà lus sur le site corporate et l’intranet, à
quelques rendez-vous pris (et honorés) à la hâte avec les futurs interlocuteurs directs ?

• S’interroger sur les objectifs de l’intégration


Commençons par un basique : à quoi doit servir ce parcours ? Quels sont les incontournables
à transmettre ? Qu’attendent vos nouveaux collaborateurs ? On peut s’appuyer sur la
pyramide des besoins de Maslow pour les identifier. Car malgré ses limites, elle reste un outil
intéressant pour se poser les bonnes questions.

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La pyramide des besoins de Maslow, une méthode pour évaluer son parcours d’intégration, ou
d’autres process RH.

En premier lieu, c’est la survie en milieu inconnu qui est primordiale. Comment vais-je passer
cette première heure, journée, semaine ? Les conditions de travail sont au cœur de ces
questions avec le lieu, les horaires, les modes de travail. C’est le manager de proximité et les
collègues qui permettent, ou non, de prendre ses repères et de se sentir rapidement
opérationnel. Le second niveau est lié à l’épanouissement, donc l’intérêt du travail que l’on
propose, la richesse des échanges au sein du collectif de travail. Viennent ensuite les niveaux
de reconnaissance et de sens, qui sont des facteurs managériaux et RH puissants. Puissants,
mais qui nécessitent des savoir-faire et des savoir être chez les personnes en charge du
dispositif de l’accueil des nouveaux embauchés. Pourtant connaissez-vous une formation à
l’intégration ?
Construisez un véritable plan d’action de votre intégration, bâtissez un kit comportant les
incontournables (procédures indispensables, stratégie de l’entreprise…). Sélectionnez votre
équipe d’accueillants (opérationnels ou RH) qui auront cette mission dans leurs objectifs ou
intégrez cette mission pour chaque manager susceptible d’accueillir un nouvel embauché.
Attachez un soin particulier à la forme de vos supports de communication (pensez mobile !)
comme à la formation des acteurs du dispositif d’intégration. Pensez à mener des analyses
360 de ce dispositif en interrogeant régulièrement l’ensemble des parties prenantes.

• L’intégration commence avant l’arrivée dans l’entreprise


On considère traditionnellement que l’intégration ne commence que le premier jour de
présence physique dans l’entreprise. Pourtant, dès la signature du contrat, le candidat se
projette déjà dans l’entreprise. Il est généralement très réceptif, motivé. Il éprouve le besoin
d’être rassuré sur son choix. Il faut donc profiter de ces instants précieux pour lui transmettre
les éléments de culture, de valeur, l’histoire de l’entreprise. Autant d’informations qui seront
noyées par les exigences de l’opérationnel dès qu’il commencera à travailler.
Votre entreprise sponsorise une équipe sportive ? Offrez-lui deux places gratuites. Vous
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avez déjà une présence sur LinkedIn ou Viadeo ? Créez une communauté privée avec ces
|\/
nouveaux candidats et donnez-leur des informations exclusives, en avant-première. Mettez-
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les en contact avec des salariés embauchés récemment. Informez-les sur les projets en cours,
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les nouveautés de votre entreprise. Présentez-leur les grandes étapes du parcours


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d’intégration. Transmettez les coordonnées de quelques managers de proximité avec


lesquels ils pourront échanger. Un petit mail sympathique la veille de l’arrivée est facile à
programmer et son effet est garanti !

• Utiliser les outils de vos candidats, pas les vôtres


L’intégration n’a que peu changé ces dernières années. Elle repose sur des dispositifs qui
datent de bien avant les nouvelles technologies de l’information : réunions d’information
descendante, formations présentielles, supports papier, marathon de rendez-vous. Il est
grand temps de jeter aux orties votre « rapport d’étonnement » réclamé après 3 ou 6 mois de
présence dans l’entreprise. Ce sera déjà trop tard et vous n’aurez en général que des idées
formatées et peu innovantes. À l’heure des médias numériques, le feedback se fait en continu.
L’innovation doit animer votre parcours d’intégration, surtout si c’est l’une de vos valeurs !
Inspirez-vous des chasses au trésor pour proposer une découverte des métiers. Exploitez
votre réseau social d’entreprise pour favoriser les échanges informels dans lesquels trouver
les réponses aux questions que l’on n’ose pas poser à son manager. Utilisez la géolocalisation
comme Foursquare pour valider des rencontres avec des managers. Concevez des modules
de jeu pour présenter votre politique de social media ou votre charte d’usage des médias
sociaux. L’expression des salariés découvrant l’entreprise peut être un atout pour votre
marque employeur ou une belle épine dans le pied. Prévoyez de donner les conseils et les
règles d’expression sur les réseaux sociaux publics, sans attendre de faux pas pour intervenir.

Débarrassez-vous des process rigides avec remise du « manuel de survie » qui ne font rien
pour rendre cette période mémorable ou utile. C’est un moment qui doit permettre de
confirmer le candidat dans son choix, lui donner les clefs pour entrer rapidement dans le jeu.
La création d’une communauté digitale spécifique pour les nouveaux embauchés est un bon
moyen d’y parvenir. Cette communauté doit d’ailleurs fonctionner en miroir, permettant aux
nouveaux arrivés d’avoir rapidement les informations et les contacts dont ils ont besoin, et à
l’entreprise un retour en temps réel sur la qualité du process d’intégration, avec des idées
d’amélioration, des propositions d’innovations…
Les solutions packagées de « On boarding » sont nombreuses mais elles ne vous dispensent
pas de faire du sur mesure.

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➤ Témoignage
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Bricoman : des séminaires pour intégrer les salariés


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Laurence Pierron est DRH de Bricoman, enseigne de bricolage de Groupe Adeo. Elle explique les enjeux de
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l’intégration des nouveaux salariés et les dispositifs mis en œuvre dans son entreprise sur le sujet.

« Pour nous, les enjeux de l’intégration sont clairs. Il s’agit d’attacher les collaborateurs à l’entreprise, de créer un
lien fort entre eux et nous. Nous leur donnons donc un maximum d’informations sur ce qu’est l’entreprise. Nous
les aidons à comprendre leur environnement pour qu’ils soient le plus à l’aise possible avec le client et dans leurs
missions.

Inciter à la création de réseau

Sur la population des collaborateurs en magasin, de terrain (conseillers de vente, hôtesses, etc.), dès les premières
semaines, ils sont accompagnés par un tuteur. Nous les réunissons ensuite en fonction de leur date d’arrivée, un
mois après celle-ci en moyenne. Ils se retrouvent sur un magasin proche de chez eux, mais pas nécessairement leur
magasin d’affectation. Nous leur expliquons alors le projet de l’entreprise, nous revenons sur leurs missions. Nous
leur présentons Groupe Adeo et le système de partage de l’entreprise : tout ce qui touche au plan de formation,
aux politiques de rémunération (prime de progrès, intéressement, participation…), etc.
Ils vont aussi rencontrer d’autres collaborateurs qui viennent également d’arriver. C’est important pour créer du
réseau. Sur la question du réseau, nous les informons de l’existence de blogs RH et de forums pour échanger.
Lorsqu’ils rentrent dans leur magasin, ils débriefent avec leurs managers respectifs pour voir s’il leur reste des
questions. Les managers les accompagnent pendant trois mois sur les gestes du métier.
Chaque collaborateur dispose également d’un livret d’intégration propre en fonction de son métier. Ce livret lui
rappelle ses rendez-vous avec son manager. Les collaborateurs sont également accompagnés par un système de
e-learning tout au long de leur période d’intégration pour mesurer leur acquisition de connaissances.
S’il est nécessaire, nous prolongeons cette période, en particulier si le collaborateur estime ne pas maîtriser certains
gestes professionnels.

Valeurs et stratégie

Côté managers et directeurs de magasin, ils suivent de six semaines à quatre mois de programme. Ils découvrent
d’autres magasins dans une autre région que la leur, pour les inciter, ici aussi, à se rencontrer, à développer leur
réseau, à partager leurs bonnes pratiques.
Ils assistent également à un séminaire sur les valeurs et la stratégie de Bricoman : trois jours qui se déroulent aux
services internes à Lezennes, dans le Nord. Le comité de direction Bricoman leur explique les objectifs de
l’entreprise ; d’où l’on vient et où l’on va. Ce séminaire n’est pas directif. Une large place est laissée aux questions.

Sur le bilan, nous avons mené trente-deux séminaires d’intégration en 2012. Période sur laquelle 1102 jours ont
été consacrés à l’intégration des collaborateurs et, en 2011, quarante-cinq d’entre eux ont suivi le séminaire
valeurs et stratégie Bricoman.
La mesure principale que nous avons sur la réussite, ou non, de ces politiques tient au taux de turnover. Sur les
populations de terrain, dès la première année de mise en place de ce programme, nous avons divisé par dix notre
taux de turnover. Chez les directeurs de magasins, ce taux est nul et sur les managers, nous sommes à 9 %, ce qui
est très faible. »
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La formation
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La formation est un poste budgétaire important pour une entreprise, compte tenu des
obligations réglementaires qui d’ailleurs évoluent à un rythme souvent problématique pour
les RH. C’est aussi une pièce maîtresse de son contrat social, puisque l’enjeu est de maintenir
à jour pour chaque employé un certain niveau de compétences dans un environnement en
transformation constante. Pourtant, son efficacité reste insuffisante ou, tout au moins,
difficile à évaluer dans sa dimension de performance individuelle et collective. Les modalités
actuelles restent limitées et ne proposent que peu d’alternatives entre des formations
présentielles coûteuses et des e-learning imposés, qui semblent avoir été conçus en ignorant
les nouveaux usages et les règles basiques d’ergonomie. Le double enjeu d’un ROI sur la
formation est de la rendre satisfaisante pour l’employeur comme pour les salariés, par son
efficacité et sa qualité.
Là encore, l’innovation est présente avec des formations en réseau à travers une plateforme
d’apprentissage ou un serious game qui permettent de se former à son rythme, de choisir ses
périodes et ses durées. Ainsi, on peut se former quand on en a besoin ou pour des formations
moins opérationnelles, pendant des périodes de moindre activité.
On passe ainsi du recueil des besoins, souvent fait des mois à l’avance, à la logique d’une
formation à la carte, au moment où le besoin se fait sentir dans l’activité, et qu’une réponse
immédiate est nécessaire. Dans ce cas, les bénéfices d’une formation contextualisée à un
événement vécu sont évidents, car il y a un aller-retour permanent entre apprentissage et
mise en pratique. Le succès de l’apprentissage en ligne au travers des communautés tient
beaucoup à l’envie de certains employés de partager leur savoir et à la qualité des échanges
entre apprenants et sachants d’un jour. Les seniors peuvent aussi jouer un rôle important et
vouloir transmettre leur savoir informel pendant des périodes où ils ont moins de missions
opérationnelles.

La possibilité d’avoir des formations courtes, spécifiques, de manière instantanée par l’offre
de social learning 3 et les MOOCS est une aide considérable en phase de prise de poste. Pour
un salarié avec plusieurs années d’expérience, ce seront des formations plus longues, avec
souvent des objectifs de reconversion ou de mobilité qui seront nécessaires et appréciés.
Cette nouvelle approche plus pragmatique se retrouve sous plusieurs vocables, comme
« blended » ou « mixed learning », et cherche à accroître tant l’efficacité que la satisfaction des
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parties prenantes. On parvient, dans le même temps, à renforcer le capital confiance des
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salariés envers leur entreprise par l’accroissement de leur employabilité.


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La formation doit être alignée sur les objectifs permettant à l’employé de progresser sur son
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poste, de pouvoir effectuer de nouvelles missions, de se projeter dans le suivant et de


gagner en diversité comme en souplesse. Il convient donc d’explorer d’autres possibilités de
formation, comme faire appel au coaching, aux conseils de seniors ou encore participer à des
groupes de travail internes ou externes. Chaque manager devrait, lors des entretiens
d’appréciation qu’il mène avec les collaborateurs sous sa responsabilité, remplir avec eux les
grandes lignes de leur plan de formation individuel. Les formations suivies avec leur
appréciation et utilité, les besoins identifiés et les ressources mobilisables en ligne pour
s’auto-former rapidement ou les formations présentielles envisageables. Le manager a
vraiment un rôle de facilitateur pour l’accès à la formation tant dans le conseil individualisé
que l’identification des différents moyens possibles de répondre à la demande.
Sur ce point, on peut s’inspirer des transformations actuelles de la formation des étudiants
aux États-Unis, dont les cours magistraux sont désormais assurés en ligne par MOOC. Les
« Massive Open Online Courses » proposent les cours d’établissements prestigieux comme
Harvard ou le MIT en accès libre et gratuit, et interpellent sur une utilisation en entreprise
de ce modèle de e-learning corporate transversal. Disposer de modules de formation sous forme
de cours en vidéo, de quizz et de communautés en ligne, peut permettre de former à la carte
en s’adaptant aux horaires, aux lieux de chaque salarié et à un coût bien inférieur aux
modèles actuels.
L’offre de formation est, elle aussi, en train de changer et les organismes de formation de
comprendre que, sans révolution digitale, leur déclin est certain face à la puissance du
modèle émergent des MOOC. Reste, là encore, à valider les meilleures réponses en termes
d’acquisition de savoirs et de compétences et à ne pas refaire l’erreur du e-learning, qui s’est
avéré décevant de ce point de vue.
La formation passe aussi simplement par la possibilité pour les collaborateurs de travailler
ensemble sur des thèmes ou la résolution de problèmes, lors de rencontres qui peuvent être
préparées et prolongées sur les communautés en ligne. Dans ce cas, le dynamisme dépend
souvent de la qualité des échanges et de relations nouées pendant ce type d’événement
collectif.
Sur ces différentes évolutions, les RH ont un rôle de communication auprès des salariés et
des instances représentatives du personnel important. L’objectif : rassurer sur ces évolutions
qui viennent enrichir l’offre de formation, mais qui ne constituent pas une formation low cost
ou au rabais. C’est bien en mettant en regard les avantages et les limites de ces nouvelles
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formes de formation que l’on facilitera leur adoption. On ne pourra cependant éluder les
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questions sur le temps de formation, l’imputation de ces actions au plan de formation, les
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certifications obtenues à l’issue de celles-ci…


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Au-delà des dispositifs, il convient de repenser, malgré la lourdeur de ce secteur très


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encadré juridiquement, l’articulation du temps de formation. Les formations dont 90 % sont


centrées sur le temps de formation en salle sont en fait peu efficaces. On a désormais
l’assurance par diverses études (https://en.wikipedia.org/wiki/70/20/10_Model) que la
meilleure articulation est sur le modèle 70-20-10 – 70 % de l’expérience sur le terrain, 20 %
de l’interaction avec les autres et 10 % des moments de formation formelle. Cela ne signifie
pas que les RH ne sont plus responsables que des 10 % mais qu’ils doivent mettre en place
comme détaillés ci-dessus un environnement propice à l’apprentissage sur les 90 % restant.

Les RH et managers restent des acteurs centraux de la formation comme l’échec du Droit
Individuel à la Formation (DIF) l’a démontré avec moins de 5 % des salariés ayant fait appel à
ce dispositif (source : http://celsa-rh.com/2014/07/la-formation-fort-minable-avec-le-dif-
mais-formidable-grace-au-cpf/). Le nouveau dispositif compte personnel de formation
améliore la portabilité du dispositif et la logique d’acteur du salarié envers la formation mais
ne pourra guère faire mieux que le défunt DIF sans un travail de sensibilisation et
d’information des RH.
C’est un bel exemple de marketing RH à venir que celui d’intégrer ce nouveau dispositif aux
outils déjà existants de la formation en entreprise et assurer son succès auprès des salariés.
Des salariés mieux informés, mieux formés ont toutes les chances de développer un plus
grand attachement à l’entreprise, une volonté de progresser dans leur carrière vers de
nouvelles responsabilités. Une entreprise qui mise sur la formation donne une preuve de sa
confiance envers ses salariés et développe une culture en phase avec le contexte actuel de
changement continu.

La mobilité

La mobilité est un signal puissant de la stratégie des ressources humaines choisie par
l’entreprise. Elle doit s’appuyer sur la qualité et la pertinence de la formation pour être
facilitée, surtout quand en période de crise, les recrutements externes sont limités.
Pour les entreprises, il est bon de se mettre à la place de ses salariés et se demander si la
politique de mobilité donne un signal de transversalité, d’ouverture de parcours
professionnel, de richesse d’évolution ou au contraire de manque de transparence, de silos
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et de préférence de recrutement externe. Est-elle gérée comme une évolution et une
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progression d’un parcours pour le collaborateur, co-construit avec son manager et les RH, ou
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plutôt une gestion des postes à pourvoir en urgence, voire un marché interne aux règles
opaques et sources d’inégalités ?
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Aujourd’hui encore, le principal frein à la fluidité de la mobilité interne reste le silotage


provenant du mode organisationnel et de la vision autocentrée de chaque manager sur son
seul périmètre. L’organisation doit devenir « people centric », en tentant de répondre aux
besoins du collaborateur, de multiplier des expériences formatrices afin de trouver la place à
laquelle il est le plus performant, où ses compétences sont le mieux exploitées.
Les candidats actuels se projettent très rapidement vers d’autres fonctions, d’autres postes
et s’ils ne parviennent pas à ressentir dans la politique de leur entreprise cette possibilité
d’évolution, ils risquent de la chercher ailleurs ou de quitter l’entreprise rapidement après
embauche. Si les postes les plus intéressants sont traités dans un réseau parallèle pour ne
laisser que des postes plus ordinaires, on risque de casser la dynamique en donnant le
sentiment d’une fracture entre des privilégiés, « VIP de la mobilité », et des clients standards.
C’est souvent le handicap des « bourses de la mobilité » qui semblent répondre à cette
demande de visibilité, mais laissent souvent échapper nombre de postes à pourvoir par des
arrangements en amont basés sur le relationnel.
Les entreprises peuvent travailler sur l’établissement de règles claires en matière de
mobilité : droits et devoirs des managers, des RH, comme des collaborateurs. Ce cadre, qu’on
le nomme « charte » ou « règle », doit être partagé en toute transparence et fixé comme
principe d’entreprise, sous peine de voir le développement d’une mobilité souterraine qui
ne bénéficie qu’à ceux qui disposent d’un réseau. Le message qui résulterait d’un discours et
de pratiques bien différentes serait caractéristique d’une atteinte importante à la confiance
des salariés. Cela ne ferait que renforcer le comportement des managers qui choisissent de
manager la mobilité des membres de leur équipe plus en fonction de leurs objectifs propres,
que de l’intérêt partagé des salariés et de l’entreprise.
Le marché de la mobilité interne doit être perçu comme laissant sa chance à chacun,
suffisamment transparent sur l’ensemble des postes vacants. La bourse de l’emploi ou de la
mobilité est intéressante si elle est complétée par un espace de conversation autour des
offres, des principes et des conseils sur la mobilité, des exemples de passerelles entre
métiers. Les témoignages vidéos peuvent aussi aider à rendre compte de la réalité
quotidienne d’un métier au-delà des fiches de poste, tout comme les rencontres
présentielles que les actions digitales peuvent compléter et prolonger.

Les entreprises peuvent donc améliorer ce process sur plusieurs plans :


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• la communication : des informations sur les métiers de l’entreprise permettent aux salariés
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de découvrir des possibilités de mobilité nouvelles, de préciser ceux qui sont les plus
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demandés, ceux amenés à se développer ou au contraire ceux voués au déclin en raison de


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l’évolution de l’activité. La présentation des principes de la mobilité, son mode d’emploi, les
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« droits et devoirs » de chaque acteur (RH, manager, collaborateur) sont clairement précisés
dans différents supports. À cela, peuvent s’ajouter des rencontres, des forums métiers,
permettant de juger si on est vraiment fait pour une fonction ;
• l’accompagnement : le management de proximité a un rôle essentiel lors des entretiens
d’appréciation ou pour répondre à des besoins d’informations plus ponctuels. Pour cela, les
managers doivent partager les bonnes informations avec la ligne RH, via les conseillers
mobilité, les responsables formation, et les RH de département ou de pôle ;
• les outils : nombre d’outils existent désormais, à côté des traditionnelles bourses de la
mobilité, qui permettent aux RH et aux managers de poster les offres, et aux salariés d’y
répondre. Par exemple, le portail des métiers s’appuie sur des contenus riches (textes,
vidéos, animations…), pour présenter des témoignages de collaborateurs sur des mobilités
réussies, des exemples de parcours possibles, des « coups de projecteur » sur des métiers
peu connus ou insuffisamment valorisés. Les revues de mobilité, les plans de succession, les
travaux de la GPEC, les programmes de détection des hauts potentiels peuvent aussi
favoriser la mobilité interne.
La gestion des carrières et la GPEC

La GPEC (Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences), qui était il y a encore
quelques années adaptée aux grandes mutations, est désormais sous tension perpétuelle.
L’échelle de temps entre les changements identifiés, les impacts à venir et les actions à
entreprendre pour y faire face s’est considérablement restreinte. L’évolution des métiers,
des compétences s’est accélérée. Elle rend plus difficile, pour les RH comme pour les
employés, de se projeter et de construire des plans de carrière sur le moyen et long terme.
À ce nouveau rythme, les entreprises doivent, là encore, innover en travaillant sur plusieurs
temps à la fois, en communiquant sur les opportunités de passerelles ou au contraire sur la
nécessité de préparer une reconversion. Ces informations peuvent permettre de réduire
l’anxiété des salariés sur leur avenir professionnel en leur permettant de se préparer aux
évolutions à venir. Même s’il ne s’agit que de scénarios et non pas d’une assurance.
L’importance croissante de la GPEC est liée au renforcement et à la complexité croissante de
la législation de chaque pays en termes de droit du travail, mais aussi au niveau européen
avec de nouvelles directives impactant les entreprises et leur GRH. Dans les entreprises, la
technicité et la spécialisation se renforcent pour des métiers qui évoluent plus vite,
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notamment sous l’impact du numérique.
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La GPEC devient de plus en plus individuelle, par le positionnement de « salarié-acteur ». Un


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travail personnel de premier niveau est nécessaire, même s’il doit naturellement être
complété avec les RH et managers pour valider les projets, trouver de nouvelles pistes, se
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réorienter ou préparer en douceur une cessation d’activité. L’attention portée par les
acteurs responsables de cette politique aux salariés aura un effet important sur le sentiment
de considération qu’ils ressentent, et donc sur leur satisfaction au travail comme sur leur
engagement.
Cependant, la GPEC fait encore trop souvent appel aux notions d’emplois, de postes, et aux
grilles multiples qui les accompagnent comme à un outil magique. À croire que plus on a de
fiches de postes nombreuses et détaillées, et plus l’entreprise saura faire face aux défis qui
l’attendent. Seulement, les dix dernières années montrent le contraire : l’entreprise se
transforme en paquebot incapable de virer avant les obstacles imprévus, les pilotes ayant
les yeux rivés sur la carte trisannuelle !
L’introduction des réseaux sociaux d’entreprise peut permettre de passer aujourd’hui assez
naturellement de cette ancienne GPEC à la « GRC » : Gestion des rôles et des compétences.
En effet, le réseau social bâti sur le socle de l’annuaire enrichi et participatif permet :
• de décloisonner, repérer les compétences, avoir des données fiables par une mise à jour
des compétences des salariés en temps réel ;
• de remonter en permanence les données collaborateurs dans un outil de gestion des rôles
et compétences souple et dynamique ;
• de passer d’une logique de poste à une logique de compétences et de rôles.
Il s’agit ainsi d’abandonner la logique de découpage et d’empilement, conséquence de la
définition des fiches de poste de la GPEC. Une approche plus dynamique consiste à combiner
une logique d’adaptation aux besoins à un instant donné, en s’appuyant sur des scénarios
basés sur des études démographiques et une vision des fonctions de demain. Cette
approche permet de répondre aux attentes très différentes des salariés, non par des
modèles figés, mais en misant sur le potentiel de chaque salarié et sur les moyens de le
développer. Faisons un parallèle marketing simple : les clients veulent de plus en plus un
produit unique, customisé pour eux grâce aux multiples combinaisons de couleurs,
d’accessoires ou de moteur, comme lorsqu’ils achètent une voiture ou une moto. Harley
Davidson est passé maître dans cette approche, qui tend à donner l’impression à chaque
client que la marque met tout son savoir-faire à produire la moto qui correspondra à son
style, et non à celui de n’importe quel client. Et bien ! Attachons la même importance aux
salariés en leur proposant, non pas de remplir une fiche de poste standard, mais d’assurer
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une fonction différenciée, de répondre à un vrai besoin de l’entreprise, avec leur touche
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personnelle et différents rôles spécifiques et enfin de co-construire avec leur RH et manager
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leur avenir professionnel.


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La GPEC peut aussi s’inspirer de la vision certainement plus globale de celle-ci outre-
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Atlantique, avec la démarche de Workforce planning 4. Une démarche qui insiste sur l’analyse
des data afin de construire des scénarios d’évolution du marché, du capital humain de
l’entreprise, et d’identifier les écarts pour prendre les mesures appropriées. Nul doute
d’ailleurs que, là aussi, nous verrons de nouvelles applications du Big Data pour renforcer la
justesse des hypothèses. On va donc, pour les entreprises les plus innovantes, vers une GPEC
réactive et sociale, mais travaillant à plus long terme sur des scénarios basés sur l’analyse des
données internes et externes et leur traitement de masse.

Il existe un lien étroit entre ces trois processus (formation, mobilité, GPEC) et comme le
conseillait Daniel Giffard-Bouvier 5, il s’agit de « décliner le plan de formation à partir des
orientations et de la stratégie de l’entreprise, et d’anticiper, en termes d’analyse de risque, les
personnes pour lesquelles les métiers vont changer ou disparaître, dans une démarche de GPEC
quand c’est possible car, parfois, le contexte va plus vite ».

Gestion des talents


Développée depuis plusieurs années dans les grandes entreprises, la gestion des talents
intéresse désormais aussi les entreprises plus petites. 63 % des entreprises interrogées par
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l’ANDRH considèrent la gestion des talents comme une pratique critique pour la
performance de l’entreprise. Et pourtant celle-ci n’a guère innové depuis son apparition.

Le RH doit travailler avec les managers pour repérer et développer les talents. Il doit veiller à
accompagner l’ensemble des salariés à pouvoir exprimer leurs idées, compétences et talents
sur leur poste et sur le réseau social. Si le 2.0 offre de nouvelles possibilités, l’identification
des talents ne peut pas uniquement dépendre d’un logiciel spécialisé. RH et managers
doivent suivre des formations pour apprendre à exploiter les informations des réseaux
sociaux, savoir identifier des profils publics de salariés et leurs conversations sur les
communautés pour mieux les repérer. Cette approche complétera efficacement les logiciels
de gestion des talents, pourtant très appréciés, mais qui portent en eux une logique
d’analyse et de tri qui n’est guère favorable à la diversité des profils.
On le voit, la gestion des talents à l’heure des réseaux sociaux doit compter sur l’empathie
des managers et des RH afin de comprendre ce qui motive leurs équipes et quels talents
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encore non identifiés trouveraient à mieux s’exprimer au sein de l’entreprise. Souvenez-vous
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de ce magnifique film Et au milieu coule une rivière 7. Le père apprend à ses deux fils l’art subtil
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de la pêche à la mouche. Norman s’applique bien plus que Paul, mais n’arrivera jamais à avoir
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la grâce de son frère qui fait corps avec l’élément et le poisson. Le premier aura les
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compétences habituelles d’un pêcheur à la mouche, le second, grâce à son talent, connaîtra
réussite et plaisir.

La gestion des talents est reliée à la GPEC, à la mobilité et à la formation, mais c’est bien un
domaine à part qui demande de nouveaux outils et de nouvelles méthodologies. Elle a
besoin de sortir de ses travers qui sont un principe de cooptation plus guidé par
l’appartenance à des réseaux divers − école, politique, philosophique − qu’à un potentiel
réel.
La fonction RH perd peu à peu de son rôle de garant de la diversité des talents en donnant
trop d’importance aux recommandations rassurantes entre diplômés de mêmes grandes
écoles. Il faut donc du courage aux RH pour ouvrir bien plus largement le champ des talents
et des futurs responsables et dirigeants, aussi bien en interne qu’en externe. Et les réseaux
sociaux peuvent leur permettre d’innover. La dimension individuelle très prégnante dans ce
process doit désormais s’imprégner de la dimension collective, avec la montée en puissance
des organisations en mode projet, du collaboratif et participatif comme leviers de la
performance.
La mise en avant d’une transparence dans la détection des talents est un message fort passé
en interne, sur la possibilité pour tous de pouvoir être repéré non pas sur son diplôme, ses
relations ou autres signes distinctifs, mais tout simplement sur son excellence dans un
domaine. Quelle meilleure motivation pour s’engager réellement dans son poste afin de le
dépasser ?
Au-delà de la gestion, il y a aussi l’attraction des talents vers votre entreprise grâce à la
marque employeur, et des dispositifs comme celui du Volontariat international en entreprise
(VIE) 8. Celui-ci permet de confier une mission tournée à l’international de six à vingt-quatre
mois et au candidat de faire ses preuves, de montrer sa capacité à rejoindre l’entreprise à la
fin de cette mission. C’est une preuve de dynamisme pour l’entreprise que de montrer son
ouverture à l’international, avec la possibilité de se voir confier des missions intéressantes,
de vrais challenges et une excellente expérience professionnelle. La publicité autour de ce
dispositif doit amener les entreprises à communiquer autour de leurs actions et mettre en
avant les témoignages des jeunes ayant bénéficié de ce dispositif.

Temps et mode de travail


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L’individu retrouve toute sa singularité à l’ère de la gestion des talents, de l’empowerment et
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souhaite être considéré avec des besoins uniques et spécifiques. Cela passe en particulier
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par la rupture avec le modèle angoissant du « métro-boulot-dodo » et la possibilité de briser


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ces unités de lieux et temps de travail imposés, par une souplesse dans le choix de ses
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horaires et lieux de travail. L’aspiration des jeunes diplômés tend de plus en plus vers des
espaces de travail partagés, collectifs ainsi que la possibilité de travailler aussi de chez soi
certains jours.
Ainsi selon une étude de l’ESSEC business school « 93 % des 500 jeunes interrogés “ne veulent
plus” d’un bureau classique, 73 % veulent travailler dans un espace de travail collaboratif et 87 %
pensent qu’ils ne travailleront pas qu’à leur bureau. »
Les RH doivent à la fois assurer la continuité d’un « travailler ensemble » afin de préserver le
corps collectif qui permet de développer un sentiment d’appartenance à une large entité
fédératrice comme l’entreprise mais accompagner l’émergence de profils plus divers et
d’attentes personnelles. Cela nécessite de revoir des éléments basiques comme les temps
de congé et lieux de travail 9.
Les congés sont importants pour des jeunes embauchés, qui placent le critère de l’équilibre
travail et vie personnelle dans les cinq critères les plus importants depuis ces trois dernières
années. Le nombre de jours global, ainsi que ceux accordés pour les événements de la vie
(mariage, décès, naissance…) sont un signe de la générosité de l’employeur, mais aussi de
l’importance accordée au présentéisme dans l’entreprise. Adapter les types de congés aux
besoins différents des salariés, tout en répondant aux exigences de l’activité, est un facteur
de satisfaction comme de performance. La souplesse, la réactivité sont des points appréciés,
alors que, souvent, les process nécessitent de se positionner un an à l’avance sur l’ensemble
de ces congés.
Les entreprises comme les salariés peuvent innover dans ce domaine, comme le montrent
les exemples de salariés qui ont cédé des jours de congé à un collègue dont l’épouse ou l’un
des enfants était gravement malade. L’entreprise qui décide d’abonder le nombre de jours
récoltés par cette initiative envoie là aussi un message fort sur ses valeurs traduites en
actions, au-delà des discours. Les entreprises peuvent donc travailler à la fois sur le nombre
de congés accordé, mais aussi sur les modalités des prises de congé, avec un self-service RH
permettant de poser ses congés en ligne et de recevoir la validation par mail.
Le temps de travail c’est aussi la capacité de pouvoir adapter celui-ci en fonction de
l’activité, des contraintes et pour cela pouvoir recourir à l’aménagement des horaires ou au
télétravail. Carrefour a ainsi permis aux caissières de choisir elles-mêmes leurs horaires en
fonction de leurs impératifs personnels et selon une grille de profils qui détermine les
disponibilités des plages horaires ouvertes (étudiante, mère de famille…).
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Le télétravail, qui a eu tant de mal à décoller en France 10, est en train d’émerger grâce aux
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bons résultats qu’il procure en termes de productivité, comme de satisfaction au travail et de
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baisse des risques psychosociaux. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, 40 % des entreprises du
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CAC40 ont désormais une politique de télétravail, et selon une estimation basse, 8 % de
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salariés français sont en télétravail 11.


Les chiffres du télétravail restent souvent sujets à polémique, mais la multiplication des
accords d’entreprise ainsi que son inscription dans le Code du travail depuis 2012 (loi
Warsman de mars 2012) rendent plausibles les 15 % souvent annoncés.

Le développement des usages digitaux et des supports mobiles constituent de formidables


accélérateurs pour ces évolutions de mode de travail. Ils embarquent de nouvelles logiques
dans les rapports hiérarchiques et les styles de management qui peuvent séduire des
candidats intéressants pour l’entreprise, comme le pense par exemple Dell : « L’existence de
cette politique de travail flexible nous permet d’attirer de nouveaux talents, particulièrement chez les
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jeunes générations ». Dell France a réussi cette transformation par la voie du dialogue social
au travers d’un accord avec les syndicats CFTC et CFE-CGC visant « un meilleur équilibre
entre vie professionnelle et vie privée ».
C’est une révolution douce, qui se met en place par les outils et la confiance accordée aux
employés sur la meilleure façon de travailler pour atteindre leurs objectifs. Le « comment »
doit être le lieu d’une autonomie retrouvée des employés, pour que le « combien » ne crispe
pas les managers sur le temps de présence.

La rémunération

Les principes de rémunération ont évolué ces dix dernières années, avec l’effet de la crise et
des nouvelles attentes des salariés. L’individualisation des salaires s’est développée. Ainsi, si
en 2000, seules 70 % des entreprises la pratiquaient pour les cadres, elles sont 95 % en 2012
(pour les non cadres, les proportions sont de 20 % et 86 %) 13.
Les primes de résultat sont vues comme le meilleur moyen de ne pas s’engager sur des
augmentations collectives et d’entretenir la motivation des salariés les plus performants.
Elles sont souvent un élément important, tant pour l’aspect financier que pour le signe de
reconnaissance du bon travail accompli. Mais elles doivent être justifiées et transparentes
pour garder leur sens. Les compléments de rémunération, avantages divers comme voiture
ou téléphone, ordinateur de fonction, jusqu’aux actions et stock options, permettent des
combinaisons quasi infinies pour s’adapter à chaque salarié, tout en maîtrisant la masse
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salariale globale… Les entreprises ont trouvé dans le bilan social individuel un outil leur
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permettant de mettre en avant l’ensemble des mesures dont bénéficie le salarié. Ce
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document présente de manière globale et simplifiée l’ensemble des éléments de la


rémunération et des autres avantages. Il constitue un excellent outil de marketing et
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communication RH, qu’il convient de soigner particulièrement pour donner de la valeur à ce


qui paraît parfois aller de soi.
Si l’intérêt du poste, l’ambiance au travail, l’équilibre vie personnelle et professionnelle sont
souvent des facteurs d’attraction, c’est bien le salaire qui reste en tête de ces derniers et se
renforce avec les atteintes au pouvoir d’achat. Cette réalité doit guider les entreprises dans
l’affichage de leur politique salariale, pour ne pas sur-estimer des facteurs plus humains et
perdre de leur attractivité aux yeux des profils recherchés. Ces derniers viennent renforcer
cette bonne image avec, par exemple, une politique de formation jugée comme
avantageuse, une mutuelle intéressante, un plan d’épargne ou d’intéressement attractif…
Autant d’offres pouvant répondre à autant d’attentes de cibles différentes.
Nous avons parcouru quelques process RH dont l’amélioration au travers des nouveaux outils
et nouveaux usages du digital peut avoir une conséquence directe sur l’efficacité, sur le
plaisir de travailler et donc sur l’identité employeur. C’est au travers de la stratégie définie
par la direction générale, déclinée par les RH, mise en avant par la communication et
traduite sur le terrain par les managers que l’on parvient à ces améliorations.
Il nous a paru aussi intéressant de recueillir le témoignage d’une entreprise qui a décidé de
transformer son organisation, son management sa manière de travailler pour allier
performance, engagement des salariés et bien-être.

En effet, le concept d’entreprise libérée rencontre un véritable succès en France depuis


2015 avec de nombreux articles, interviews et consultant en vantant les mérites.
Cela en dit beaucoup sur les attentes d’un nouveau modèle managérial, voire d’entreprise
comme sur celles concernant de nouvelles façons de travailler.
Essayons de voir ce que cela peut signifier pour les différentes populations de l’entreprise.

Les salariés

La première attente des salariés dans leur travail, c’est la reconnaissance soit de leur
supérieur hiérarchique, soit de leurs pairs ou directement du client. C’est cela qui donne du
sens et l’envie de se lever chaque jour pour venir au travail. La possibilité d’avoir ensuite un
travail intéressant, varié avec des horaires souples permet de concilier vie personnelle et vie
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privée, ne pas s’épuiser et pourquoi pas, avoir du plaisir à travailler.
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À ces attentes « en creux » des salariés, le message de l’entreprise libérée des petits chefs et
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des règlements pointilleux est particulièrement attractif et bien formulé.


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Les dirigeants

L’entreprise libérée, c’est surtout l’entreprise qui libère les gisements de productivité et
parfois les libère de leur poste pour profiter d’un congé sabbatique en confiant leur
entreprise aux salariés ! Leur vision de l’entreprise libérée, c’est parfois celle d’une
entreprise dans laquelle il fait bon de travailler dans la confiance et l’autonomie en misant
sur l’intelligence de tous ou plus cyniquement celle d’un cheval de Troie du lean management.
La mise en place du lean bête et méchant (bien éloigné de ses sources japonaises) par la
hiérarchie rencontre une sérieuse opposition. Maintenant, si vous parvenez avec subtilité à
ce que ce soit les salariés eux-mêmes qui décident de la mettre en place vous avez alors tout
gagné. Il y a un peu de Sun-Tzu dans cette entreprise libérée vu des dirigeants.
Sans aller jusque-là, le bon côté de l’entreprise libérée est de redonner de la motivation aux
salariés, de booster leur engagement et là encore d’augmenter la productivité. Tout le
monde est alors heureux… pendant un certain temps ! Car cette organisation est plus
exigeante et si vous n’avez plus un contrôle aussi marqué de l’encadrement, qui
éventuellement a su évoluer et garder sa place, vous l’avez remplacé par l’auto-contrôle et
celui de l’ensemble de vos collègues.
Là encore, il s’agit d’une dynamique et on peut travailler plus si l’on est plus heureux de
travailler et plus épanoui car le travail n’est pas toujours synonyme de tripalium. Mais on
oublie allégrement que celle-ci est loin d’être automatique.
Cela demande aussi un juste partage des nouvelles richesses créées car si l’on respecte
l’idée de cette entreprise libérée, il faut aussi libérer les bénéfices, les partager. Combien de
salariés ont vu leur salaire augmenter significativement dans ces entreprises libérées ? Que
ce soit par l’intéressement, les primes ou salaires statutaires ?
Quelle transparence sur l’ensemble des salaires, sur la répartition des bénéfices ?
Récemment Google qui est souvent cité en exemple d’entreprise de nouvelle génération n’a
pas du tout apprécié qu’une employée ait la bonne idée de partager un fichier sur le réseau
social interne pour que chacun puisse indiquer son poste et son salaire.
Celle-ci est partie depuis mais elle a posé la question de l’égalité des salaires suivant les
origines ethniques et le sexe et mis en avant le manque de transparence réelle sur ces
questions.
EricaJoy @EricaJoy * |
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Fighting for justice & fairness INSIDE Google doesn’t go over well. Salary sharing is only 1 example.
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Blogger porn. Real names. Many others.


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Managers et responsables syndicaux

L’entreprise libérée veut justement se libérer de leur présupposé carcan. Cela est
certainement justifié pour certains qui se comportent comme lors du siècle dernier mais
positionne en face à face salarié et dirigeant sans corps intermédiaire. Dans un contexte
d’uberisation et de diminution des protections réglementaires, de demande de
simplification du Code du Travail, des formes de contrat et rupture de travail, c’est pour le
moins risqué.

Les RH

La position des RH est ambiguë sur cette question car souvent l’idée vient directement du
(ou des) dirigeants et met en porte à faux l’organisation des RH. Là encore, vous entendrez
peu de RH se positionner sur ce concept qui semble plus un modèle de transition que de
destination.
En effet, certaines entreprises sont face à des salariés usés, démotivés et porter un projet de
cette nature constitue une possibilité de sortir de ce marasme en suscitant l’envie de
participer à une révolution interne. Comment passer ce stade et parvenir à une nouvelle
organisation qui donne du bonheur au travail, de la performance et un avenir économique à
l’entreprise est une question pourtant essentiellement RH ?
Cette entreprise libérée a le mérite d’innover et de faire souffler un vent nouveau sur le
mode d’organisation des entreprises et du travail. Aussi, nous tenions à pouvoir recueillir le
témoignage de l’une d’entre-elles.

➤ Témoignage

Anne-Sophie Chevasson, responsable de la mise en œuvre du projet d’entreprise Poult et de


l’accompagnement du développement du groupe, a bien voulu nous répondre en s’appuyant sur les retours
de ses collègues en interne.

Cette entreprise doit faire face à une concurrence vive et a fait le pari de miser sur ses salariés pour
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développer un avantage concurrentiel solide et pouvant résister aux sauts technologiques, à la
globalisation du marché. L’objectif étant de travailler plus efficacement avec moins de freins à la
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collaboration, l’innovation et de pouvoir être extrêmement réactif.
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Anne-Sophie Chevasson : Ainsi, depuis 2006, nous réalisons une démarche de démocratisation de
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l’entreprise, en nous appuyant à la fois sur des évolutions organisationnelles et culturelles.


Cette démocratisation s’appuie sur des valeurs et des principes fondamentaux : confiance, égalité
intrinsèque, autonomie et responsabilité, transparence de l’information par exemple. Notre organisation
est structurée par un maillage d’équipes interconnectées et les décisions stratégiques, concernant par
exemple les investissements, sont prises par des collectifs représentatifs et tournants. Notre objectif est de
faire en sorte que chacun puisse intervenir dans les décisions qui le concernent.
Nous avons par ailleurs supprimé un certain nombre d’outils de contrôle et de reporting, et réduit le nombre
de niveaux hiérarchiques.
Enfin, nous avons mis en place des dispositifs favorisant l’initiative et l’innovation par tous et dans tous les
domaines, et des outils permettant le partage d’informations transparentes.

Être un RH dans une telle entreprise à t-il encore un sens en dehors des obligations légales et, si oui lequel ?

A-S C. : Dans notre entreprise, nous souhaitons que les collaborateurs soient acteurs des sujets qui les
concernent directement. Les RH doivent accompagner cette appropriation, en tant qu’experts qui
alimentent les réflexions et animateurs des travaux collaboratifs sur ces sujets.
Nous avons ainsi imaginé de nouveaux métiers en lien avec ce pôle d’expertise, spécialisés dans
l’innovation managériale, le déploiement du projet d’entreprise, l’accompagnement de l’évolution des
organisations et l’animation des réflexions sur l’appropriation par chacun de son développement
individuel. Il n’y a plus depuis 2011 de Directeur RH groupe, pour éviter la centralisation des décisions qui
concernent la majorité des salariés. C’est une communauté d’expertise qui représente ce métier.
Les services RH, localisés sur les sites de production, s’occupent de l’ensemble des sujets qui nécessitent
une compétence spécifique, et notamment, en effet, ce qui concerne les obligations légales et la gestion
administrative. Ils jouent également sur le terrain un rôle important d’accompagnement vis-à-vis des
salariés car notre projet, par la perte de repères qu’il peut générer, nécessite cette proximité et cette
écoute.
Pour illustrer l’appropriation des sujets RH par les collaborateurs, nous avons par exemple initié en 2013 un
collectif, représentatif de l’ensemble des salariés concernés, qui s’occupe de la rémunération des cadres,
approche expérimentée avec cette population avant un élargissement éventuel à d’autres catégories de
salariés. Ce collectif coordonne les réflexions sur le processus des demandes, reçoit les salariés qui
viennent présenter leurs dossiers et décide des augmentations qui seront attribuées dans le cadre d’une
enveloppe déterminée par le collectif sur la base des NAO, de l’inflation, et des augmentations de branche
professionnelle. Un ou plusieurs experts métiers RH, qui viennent éclairer les discussions, appartiennent à
ce collectif de 15 personnes où leur voix est prise en compte de la même manière que celle des autres
membres de l’équipe. Ce collectif dispose uniquement des pourcentages d’augmentation des années
précédentes, est tenu à la confidentialité, et s’engage à réaliser un retour détaillé aux salariés demandeurs
pour leur permettre de travailler ensuite sur leurs plans de progrès.
Un autre collectif prend en charge l’Allocation des Ressources Humaines, avec notamment un travail réalisé
par cette équipe, représentative des métiers du groupe, pour accompagner les différentes communautés
d’expertise dans leur projection des métiers de demain.

Comment adapter GPEC, Mobilité, Parcours professionnel dans une entreprise bien plus transparente avec moins
de niveaux hiérarchiques et plus d’horizontalité ?
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A-S C. : Notre vision des développements professionnels est qu’ils doivent s’appuyer sur une logique de
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montée en compétence, par l’ajout de briques d’expertises complémentaires, l’évolution hiérarchique


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étant limitée par notre organisation et ne devenant plus une fin en soi dans les parcours de carrières. Là
encore, chacun est acteur de son propre parcours, et c’est cette appropriation que nous devons
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accompagner et faciliter par des dispositifs adaptés. Parmi ces dispositifs, nous avons par exemple créé une
Poult Académie, coordonnée par un collectif de volontaires, qui accompagne la montée en compétence de
tous les salariés, et une équipe transversale sur la reconnaissance individuelle qui travaille sur de nouvelles
approches et de nouveaux outils. Cette dernière équipe a notamment conçu et construit un outil de bilan
360 adapté à notre modèle d’entreprise, auquel les salariés peuvent faire appel lorsqu’ils le jugent
nécessaire au cours de leur parcours, en toute confidentialité vis-à-vis de l’organisation et de leur manager.
Il s’agit au final pour les salariés de développer à la fois ses savoir-faire et ses savoir-être, en lien avec
l’évolution de l’organisation de l’entreprise. Certains salariés ajoutent ainsi à leur mission d’origine des
compétences d’animation transversale, ou s’engagent activement dans les différentes démarches
d’innovation. Il existe aussi un nouveau métier d’accompagnateur 360 qui permet de réaliser des
accompagnements individuels dans le cadre de l’outil 360, et un rôle de coach interne en cours de
construction, qui permettra aussi de développer ce type de compétences sans être en positionnement
hiérarchique par rapport aux salariés concernés.
Enfin, pour les hiérarchiques, une formation spécifique est en cours de conception, afin de les aider à
réaliser un changement important de posture, puisque leur rôle aujourd’hui est d’accompagner les salariés
vers l’autonomie, et non plus de prendre en charge eux-mêmes l’ensemble de leurs questions.
Ces différents rôles sont structurants, tant comme perspective d’évolution que comme outil
d’accompagnement pour tous, et la clarification des parcours de formation, ainsi que des missions associées,
est un axe de travail important dans une organisation comme la nôtre.

Ce changement organisationnel remet en cause les corps intermédiaires naturels et historiques (managers,
syndicats) mais aussi les relais des directions et salariés. Comment êtes-vous passé à un nouveau dialogue dans
laquelle le salarié prend toute sa place sans créer freins et oppositions des anciens acteurs ?

A-S C. : Nous essayons d’impliquer l’ensemble des salariés dans toutes les réflexions, incluant l’élaboration
de la vision stratégique et de la vision RH, pour favoriser une appropriation des sujets en amont.
L’idée est de considérer l’entreprise comme un bien commun, y compris dans le cadre des discussions avec
les instances représentatives du personnel. Ces discussions se faisant autant que possible dans la
concertation et la transparence, et en lien avec l’ensemble des salariés.
Il s’agit au final d’intégrer le mieux possible, et le plus tôt possible dans ces discussions toutes les parties
prenantes pour que chacun trouve sa place, avec son rôle spécifique à jouer afin *de* prendre des
décisions communes pour le bien de l’entreprise.
Pour les anciens managers aussi, la remise en question est très importante, et un accompagnement est
nécessaire pour les aider à redéfinir leurs missions. Ceux qui ont perdu leur position hiérarchique doivent
trouver de nouveaux repères, mais le changement de rôle, comme évoqué précédemment, est important
aussi pour ceux qui conservent un poste hiérarchique.

Nous avons coutume dans nos interventions Franck et moi-même d’expliquer que « ce qui se passe à l’intérieur
se voit à l’extérieur » pour illustrer l’importance de construire sa marque employeur sur une satisfaction interne et
un engagement des salariés. Depuis votre transformation qu’en est-il de la satisfaction de vos salariés et de votre
attractivité comme employeur ?

A-S C. : Une équipe transversale, construite dans le cadre d’une formation innovante, a réalisé en 2013 un
état des lieux sur le bien-être au travail, qui confirmait un bon niveau de satisfaction sur la majorité des
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items, et dans tous les sites.
Nous avons aussi mis en œuvre en 2014 et 2015 une réflexion sur l’organisation, à l’appui de 160 interviews
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menées par une équipe de salariés au sein du groupe, pour prendre en compte les retours sur les bonnes
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pratiques et les aspects à améliorer. L’équipe qui a coordonné ces travaux a ainsi proposé des adaptations,
l’idée étant de proposer des évolutions qui permettent en permanence d’optimiser le fonctionnement de
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l’organisation, qui est toujours en construction. Les salariés valorisent aujourd’hui la transparence, la liberté
de parole et l’autonomie, tout en demandant plus de régulation des dérives individuelles au quotidien,
exercice qui nécessite un long apprentissage et une forte évolution des postures et savoir-être pour être
réalisé par les équipes concernées.
Concernant les recrutements, il est particulièrement intéressant pour une entreprise qui ne dispose pas
d’une marque visible et de la notoriété associée de pouvoir s’appuyer sur sa marque employeur, cette
marque attirant aujourd’hui des candidats très motivés par le projet managérial, avec des profils de grande
qualité.
Au-delà de cet axe, la notoriété génère des contacts et des partenariats de natures diverses, pour alimenter
l’open innovation ou des chantiers variés (par exemple des échanges avec Michelin autour de nos
expériences sur l’entreprise libérée, mais aussi de leur pratique du lean qui peut alimenter nos réflexions et
nos progrès sur le sujet).

Enfin, Anne-Sophie, le risque pour une entreprise comme la vôtre n’est-il pas d’être trop pris en exemple et de se
voir ainsi encore plus que toutes les autres entreprises prouver chaque jour dans vos actions vos propos et
promesses externes ?

A-S C. : Nous voyons un intérêt fondamental à réaliser ces échanges avec l’extérieur, pour alimenter nos
réflexions et nos travaux en interne, mais aussi parce qu’il nous semble important de partager avec d’autres
l’expérience que nous avons accumulée ces dernières années par rapport à cette approche managériale,
en espérant pouvoir inspirer de nouvelles initiatives.
Ces interactions permettent par ailleurs aux salariés de formaliser les avancées réalisées, de les percevoir
encore mieux par comparaison avec ce qui se passe dans d’autres organisations au travers des réactions et
des questions des visiteurs. Cela leur permet aussi de mesurer la notoriété de l’entreprise et, comme pour
l’ensemble des sujets, d’être acteurs de cette ouverture. C’est enfin l’occasion pour les collaborateurs de
progresser dans leur capacité à interagir avec l’extérieur et à réaliser des présentations, et de recevoir par
cet intermédiaire une certaine reconnaissance.
Pour autant, nous devons en effet aujourd’hui limiter les interventions et les interviews réalisées.
En effet, la charge représentée par ces demandes de plus en plus fréquentes devient trop importante.
Notre entreprise, spécialisée dans la fabrication de biscuits sous marque de distributeur, s’appuie sur une
structure optimisée, et il est nécessaire pour nous de conserver du temps et de l’énergie pour poursuivre
les réflexions sur notre organisation, pour les déployer en interne, et pour développer notre activité. La
médiatisation peut aussi avoir quelques travers problématiques, comme la publication d’informations
nécessairement limitées dans leur quantité et donc parfois imprécises, qui génèrent en interne des
incompréhensions.
Parmi les chantiers en cours autour de notre projet managérial, nous sommes donc en train d’imaginer aussi
de nouvelles modalités de présentation, de partenariats et d’échanges avec l’extérieur, la seule façon de
vraiment mesurer le travail réalisé (et encore à mener !) sur ces sujets de démocratisation dans notre
entreprise étant de s’y plonger de façon approfondie.

En conclusion, il est pour nous particulièrement important d’avancer sur l’ensemble de ces thématiques, sur
lesquelles nous avons l’impression que nous sommes aujourd’hui particulièrement suivis, mais sur
lesquelles aussi il nous reste énormément à construire !
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Plateformes de communication interne de l’identité employeur


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Le digital peut assurer des fondations solides à l’identité employeur. L’intranet, le RSE
(Réseau Social d’Entreprise 14), les différentes applications mobiles, forment la « digital
workplace » des salariés, leur environnement de travail numérique. Ils l’utilisent tous les jours
pour s’informer, travailler, collaborer et échanger. C’est un terreau idéal pour travailler sa
marque employeur avec ses salariés au travers de l’animation de communautés spécifiques
ou en s’appuyant sur des documents de référence. Les documents principaux à mettre en
ligne sont une charte et un guide d’usage des médias sociaux. En effet, si des salariés
s’expriment sur le web à propos de leur entreprise, autant leur donner à la fois les limites et
les conseils pour prévenir toute crise de communication par maladresse ou malveillance.
En France, les entreprises semblent hésiter à intervenir sur un champ qui n’est pas
totalement professionnel en donnant des règles ou des conseils d’utilisation des médias
sociaux à leurs salariés. C’est à notre avis une erreur stratégique. Les salariés sont sur le web
social et ils s’y expriment déjà, soit en tant que citoyen, soit en tant que salarié de leur
entreprise, voire selon leur poste ou métier ou encore leurs responsabilités syndicales. À
« faire l’autruche », les RH donnent l’impression aux salariés de ne pas avoir saisi l’importance
des médias sociaux, ni des changements culturels en cours.
Vous laissez vos salariés décider eux-mêmes des limites de leur liberté d’expression ou
comment ils peuvent défendre, soutenir, promouvoir votre entreprise en ligne. Vous
réunissez tous les éléments pour intervenir ensuite en « pompier », avec une crise en ligne et
des services juridiques mal à l’aise pour traiter ce type de problématique. Il suffit de suivre la
jurisprudence pour comprendre combien est encore mouvant le droit sur ces sujets.
La charte peut être vue comme un garde-fou, mais aussi comme un tremplin permettant à
chaque employé de comprendre comment il peut s’exprimer, soit pour aller dans le sens de
l’entreprise, soit pour assurer son droit à la libre expression sans entrer en conflit avec son
employeur. Ce dernier point sera bien sûr en creux, à moins que vous ne pensiez que vos
salariés sont tellement mal dans leur entreprise qu’ils vont utiliser les médias sociaux pour le
clamer à la terre entière. Il est indispensable de former, d’accompagner son personnel pour
éviter de devoir réagir à chaud et avec un mode défensif.
Vous pouvez au travers de votre charte, qui s’appuie sur le règlement intérieur, poser les
limites de l’expression de vos salariés en ligne et par un guide d’usage des médias sociaux,
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les conseiller sur une utilisation avisée de ces outils. En revanche, ne tombez pas dans le
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travers de vouloir, par ce biais, instrumentaliser la parole de vos salariés.
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Le schéma ci-dessus montre l’équilibre à garder dans l’accompagnement des salariés vers une
nouvelle culture digitale entre conseils et lignes à ne pas franchir. Suivant le type d’entreprise, la prise
de parole et l’autonomie de salariés seront vues sous l’angle du risque ou au contraire de
l’opportunité. N’investir que sur l’un des deux champs créera une faille digitale majeure. Ce chantier
ne peut se faire que de façon collaborative entre les grandes directions de l’entreprise pour permettre
une acculturation des nouveaux modes d’expression en interne et en externe de ces nouveaux outils.

Combien de fois avez-vous entendu que les salariés seraient les « ambassadeurs » de
l’entreprise ? Que pour activer ce levier, il convenait « d’évangéliser » ses salariés aux
conversations sur le web social ? Comment encore penser que les salariés attendent le
« messie » du web social et son berger, le community manager, pour retrouver la foi dans leur
entreprise et répandre la bonne parole autour d’eux ?
Votre responsabilité est de prévenir et d’accompagner les usages de vos salariés sur le web
social grâce aux contenus sur l’intranet, et des déclinaisons sur différents supports avec des
kits de communication, des chartes et des guides d’usages, ainsi que des conversations en
ligne pour répondre à leurs questions et propositions. Si comme nous l’avons proposé, vous
avez travaillé sur le fond la question RH de la satisfaction au travail, la performance des
process, vous avez alors réuni les conditions pour que vos salariés s’expriment en votre
faveur. Vous ne pouvez pas motiver les salariés à publier des avis pour améliorer votre
réputation, vous pouvez juste créer les conditions qui leur donneront envie de le faire
librement.

Ces plateformes permettent d’associer vos salariés à vos campagnes de recrutement ou


d’image employeur, au moins en les informant avant l’externe, ou mieux, en les associant à
vos projets. Zcomme, une agence de communication RH, a d’ailleurs déposé une
méthodologie appelée « ingénierie employeur »®, destinée à amener les collaborateurs à se
positionner en acteurs dans la stratégie RH de l’entreprise. Vous pouvez y poster les images
et vidéos des dernières campagnes, les reportages réalisés à l’occasion des derniers
événements, rencontres ou salons, les contacts au sein de l’entreprise. C’est aussi un endroit
idéal pour répondre aux questions qu’ils peuvent se poser autour de ces questions. Ces
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différentes actions permettent d’associer vos salariés à vos démarches de marketing
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employeur et de leur donner les informations dont certains se serviront pour jouer
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naturellement leur rôle d’ambassadeur.


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➤ Témoignage

Un RSE pour répondre aux évolutions sociétales

Ziryeb Marouf est directeur applicatifs RH groupe et réseaux sociaux chez Orange et directeur de
l’Observatoire des réseaux sociaux d’entreprise. Il revient sur le projet de réseau social d’entreprise Plazza,
propre au groupe, et notamment sur sa place dans la politique de marque employeur du groupe.

« La genèse du projet de réseau social d’entreprise (RSE) remonte à l’été 2008 . Nous avions alors constaté
l’existence de sept initiatives de RSE – pour celles que nous avions identifiées –, mais chacune liée à un métier, un
secteur, une division, etc. La question s’est donc posée de savoir comment toucher l’ensemble des collaborateurs
du groupe. Avec l’idée que plus vous pensez global, plus vous répondez aux promesses de casser les silos,
d’engager des démarches transverses, etc.
Forts de ces premières réflexions, et en discutant avec des collaborateurs représentatifs du tissu social de
l’entreprise, nous avons très vite compris que nous étions attendus sur deux axes majeurs : favoriser le lien
interpersonnel et favoriser un modèle participatif, pour se regrouper au sein de communautés spontanées dans
une logique d’intrapreneuriat.

Parler 2.0
À l’image de nombreuses entreprises au sein de l’Europe, mais aussi aux USA, nous sommes une entreprise qui vit
un défi démographique majeur. Un tiers de nos salariés devraient quitter l’entreprise d’ici à 2020. Nous allons donc
faire face à un turnover important et à une mutation de notre pyramide des âges. Dans notre démarche de
marque employeur, nous devons donc adopter le langage de nos futures recrues et parler 2.0. Nous le faisons
bien sur le site de recrutement, sur nos comptes Twitter ou Daylimotion dédiés au recrutement. Mais si la réalité
interne n’est pas en phase avec la modernité de la communication externe, nous n’allons pas garder nos nouvelles
recrues et elles vont se sentir flouées.
Ce qui est vrai pour les nouveaux arrivants, l’est tout autant pour l’ensemble des collaborateurs. Et cela ne
concerne pas que les hauts potentiels ou les compétences critiques. Comment diffuse-t-on la culture Orange dans
l’ensemble de l’entreprise ? Le RSE va contribuer à mettre spontanément, naturellement les salariés en action pour
capitaliser et transmettre autour de cette culture, grâce à une entreprise dont l’ADN est digital.

Revisiter sa communication interne

Plazza a ainsi été intégré dans le plan stratégique « Conquête 2015 » du groupe et officiellement lancé en 2010 et
renouvelé au sein du nouveau plan stratégique Essentiels 2020. Lorsque l’on réfléchit à la révolution sociétale qui
nous entoure, l’entreprise ne peut pas passer à côté. Par exemple, de même que les commentaires des
consommateurs sur Internet valent plus que la publicité officielle autour d’un produit, quand on revient dans
l’entreprise, comment cela pourrait être différent ? Ce que je veux dire par là, c’est que la façon d’adhérer à un
propos, à une stratégie ne peut se faire uniquement par de belles affiches et une communication interne lissée. La
communication interne est nécessaire, mais pas suffisante. En revanche, si je peux m’exprimer sur la stratégie, elle
m’appartient à 1/160 000 e (Orange compte environ 160 000 salariés).
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Créer des communautés
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Le réseau social Plazza compte trois fonctionnalités majeures : la possibilité de réaliser un profil enrichi (avec les
fonctionnalités classiques d’un réseau social de mise en relation, de discussions, d’inscriptions sur un mur et de
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gestion des paramètres de confidentialité), la création de communautés spontanées sur des thèmes libres,
professionnels comme extra-professionnels, et des communautés initiées, cette fois, par l’entreprise, la direction. Ce
sont les mêmes outils, mais la démarche est bottom up, sponsorisée par l’entreprise. La direction est à l’écoute sur
des sujets qu’elle juge importants : l’égalité professionnelle, le développement durable, le cloud… C’est une façon
de solliciter et d’être à l’écoute des collaborateurs.

Volontariat et confiance

Il y a plusieurs valeurs autour de ce RSE. D’abord, le volontariat. On y va si on le souhaite. Nous sommes sur un
espace informel, non officiel qui ne se substitue ni à l’intranet, ni aux ERP, mais qui complète les processus métier
par la transversalité et le travail en réseau.
L’autre valeur, c’est la confiance. Il n’existe pas de modération a priori sur Plazza. Mais chaque utilisateur s’exprime
en son nom, sans pseudo. À priori, il ne peut pas y avoir de graves dérives sur ce point. Nous partons du principe
que la très grande majorité de nos salariés sont des adultes responsables. De plus, les utilisateurs sont conscients
que les différents dispositifs légaux, réglementaires, s’appliquent aussi sur le réseau. Il y a la loi du pays, les
conventions collectives, le règlement intérieur, le contrat de travail et, potentiellement, les chartes éthiques, les
chartes d’utilisateurs, etc. Les utilisateurs ont donc des droits et des devoirs.

Cinq essentiels

Enfin, plazza est basé sur cinq essentiels : « Worldwide », accessible aux 160 000 salariés dans les pays Orange,
« Device Agnostic », permettant l’accessibilité au service via Smartphones, tablettes et ordinateurs, « Smart
working », centré « utilisateur » au service des métiers et de la collaboration, « Open », ouvert sur l’écosystème de
travail des collaborateurs en développant la logique d’APIs, et enfin, « OBS Inside », confiant l’intégralité du projet,
de l’hébergement sur le cloud à l’accompagnement au changement en passant par la sécurisation du réseau et la
dotation de terminaux et forfait associés au partenaire Orange Business Services.

Halte aux idées reçues

Nous comptons aujourd’hui 8 0 000 utilisateurs pour environ 4 000 communautés, en majorité spontanées. Les
données chiffrées dont nous disposons sur le réseau nous permettent de battre en brèche quelques idées reçues.
Par exemple, plus de 70 % de ces communautés sont orientées business ou métier, et non loisirs. Les mots-clés de
ces communautés sont : business, communication, IT, cloud, data.
Les premiers utilisateurs ne sont pas issus du service informatique, mais de la vente, puis du marketing. L’outil n’est
pas trusté par les Parisiens : 60 % des utilisateurs sont en province. Et ce n’est pas réservé aux Y et suivants si l’on
considère que l’âge moyen des utilisateurs est de 43 ans (contre 46 ans pour l’âge moyen dans l’entreprise)…
À une période, nous étions à 4 000 nouveaux utilisateurs par semaine. Aujourd’hui, ce taux est plus faible. Pour que
cela fonctionne, il faut entretenir la communication et les incitations à utiliser l’outil et toujours sous l’angle de la
séduction, plutôt que de façon intrusive ou directive. »

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1. Thierry de Baillon, http://www.debaillon.com/fr/2013/05/l-organisation-legere-du-social-au-social/
2. Président de l’association : Territoire et Dialogue Social (TEDIS).
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3. Définition de Frédéric Domon, directeur de l’agence SociaLearning, « le social learning peut être considéré comme l’accroissement des connaissances, des
compétences et des comportements par la connexion des autres, que ce soient des collaborateurs, des conseillers ou des experts via les médias électroniques ».
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4. Workforce planning is about “Getting the right number of people with the right skills in the right jobs at the right time”. http://www.dhs.vic.gov.au/funded-agency-
channel/management-toolkit/workforce/planning
5. Associé de PwC, en charge de l’activité « people and change », http://www.ouestfrance-emploi.com/recruteur-rh/info/employabilite-outil-fidelisation-salaries
6. http://www.andrh.fr/
7. Film de Robert Redford de 1993. L’histoire de deux frères, Norman et Paul Maclean, élevés au début du siècle sous le signe de la religion presbytérienne et de la pêche
à la mouche, deux disciplines d’une égale rigueur qui façonneront leur vision du monde.
8. http://vosdroits.service-public.fr/F10040.xhtml
9. Source Manpower http://www.manpowergroup.fr/le-grand-demenagement-les-jeunes-poussent-le-bureau-vers-la-sortie/
10. Avec un taux de 45 % inférieur à la moyenne européenne, l’Hexagone est classé au 13e rang des pays de l’OCDE. À titre de comparaison, un pays pionnier comme les
États-Unis compte 27,6 % de télétravailleurs, et les Pays-Bas plus de 30 %. Le télétravail pourrait concerner entre 40 % et 50 % des emplois de l’OCDE d’ici à 2020.
11. http://lecercle.lesechos.fr/entreprises-marches/management/rh/221148716/teletravail-france-entreprises-laissent-enfin-seduire
12. Alice Evain, directrice des ressources humaines de Dell France, http://www.silicon.fr/dell-france-accord-teletravail-79283.xhtml
13. http://www.usinenouvelle.com/article/salaires-l-individualisation-gagne-du-terrain.N181464
14. Définition de Wikipedia : les membres d’un réseau social d’entreprise (RSE) sont regroupés en communauté à des fins professionnelles et sont liés par plateforme
applicative réunissant les employés d’une entreprise, ses clients, ses actionnaires ou ses partenaires. La fiche individuelle donnant le profil de chaque salarié
(compétences, coordonnées, projets, intérêts…) et l’expression des uns et des autres s’affichant en première page du réseau forment les applications phares du RSE.
■ 2. Connaître son environnement externe
« Qui connaît l’autre et se connaît, en cent combats ne sera point défait ; qui ne connaît pas l’autre
mais se connaît sera vainqueur une fois sur deux, qui ne connaît pas plus l’autre qu’il ne se connaît
sera toujours défait. »
Sun Tzu, L’Art de la Guerre.

L’environnement externe auquel sont aujourd’hui confrontées les équipes en charge du


marketing RH n’a jamais été aussi dynamique. Les récentes innovations autour du web et du
web social, les usages nouveaux des candidats autour du mobile, de la vidéo en ligne et des
réseaux sociaux, porteurs et portés par ces sauts technologiques, imposent de développer
un réflexe de veille et de benchmark qui ne fait pas partie du patrimoine génétique des RH.
Le rôle qu’entendent jouer les RH dans la stratégie des entreprises pour accompagner les
profonds changements auxquels elles sont confrontées, contraint les équipes RH à adopter
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une posture nouvelle pour s’aventurer en dehors de leurs frontières traditionnelles.
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Connaître ses cibles externes

Les candidats (et les collaborateurs) doivent être considérés comme des clients. Il est temps
de balayer ce soi-disant mépris de certains RH qui se refusent à parler de clients, de cibles,
de concurrence. Termes odieusement marketing qui, à leurs yeux, seraient indignes de leur
métier et irrespectueux des candidats. C’est une hypocrisie partagée par certains managers,
qui traduit plus souvent un manque de considération qu’un excès d’empathie vis-à-vis de ces
populations. Combien de fois entend-on encore (sous couvert de l’anonymat ou dans la
confidentialité d’une discussion privée) des phrases comme « s’il n’est pas content, il n’a qu’à
partir, avec tous ces chômeurs, nous n’aurons aucun mal à le remplacer. »
Lors de la construction d’une marque employeur, mais également tout au long de son
activation, il est indispensable de définir avec précision les cibles visées, à la fois sur des
critères traditionnels de compétences et d’expérience, mais également sur des aspects plus
riches de comportements, d’attentes, d’usages. Attention également à ne pas se concentrer
exclusivement sur les populations de candidats. Dans la construction de son marketing RH, le
recrutement n’est pas le seul enjeu. Les cibles indirectes doivent aussi être considérées.
Identifier les candidats cibles

L’identification et la définition des candidats sont une pratique courante des équipes RH,
habituées à catégoriser leurs candidats selon des niveaux et des types de diplômes
(ingénieur, école de commerce, bac+2,…), des compétences (vente, développement
informatique, juridique, langues étrangères…), des niveaux d’expérience. Ces éléments de
profil servent de points d’ancrage pour rapprocher un CV et un descriptif de poste, et
sélectionner un candidat. Indispensables, ces éléments n’en sont pas moins insuffisants.
D’abord, parce qu’ils sont « focusés » sur le contenu du poste, et ne prennent pas en compte
l’adéquation avec l’entreprise. Est-ce à dire que l’on ne s’interroge pas sur les capacités de ce
candidat à évoluer dans l’entreprise après ce premier poste ? Ensuite, cette approche porte
en son sein des biais souvent déjà formulés sur le risque de clonage et de consanguinité des
candidats retenus ; la facilité pousse à rechercher des profils identiques, connus, déjà
recrutés dans l’entreprise. Le savoir être, le comportement que l’on exige aujourd’hui des
managers, conscients de l’impact sur le bien-être et donc la performance, est-il à exclure ? Les
valeurs de l’entreprise, son éthique, son engagement RSE quand il est réel, et qui peuvent
être demain source de crise de réputation grave en cas de manquement, sont-ils partagés
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par ces futurs collaborateurs qui auront aussi leur part de responsabilité ?
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Les attentes des candidats


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Après avoir défini un ensemble large de caractéristiques qui définissent les types de
candidats recherchés, il s’agit de s’interroger sur leurs attentes au niveau de leur future
entreprise, de leurs missions. Chacun construit consciemment ou non une liste de critères
pour orienter ses choix dans la mesure de ses possibilités : opportunités à l’international,
rémunération, équilibre vie privée / vie professionnelle, intérêt des missions, ambiance de
travail, proximité du domicile… Les palmarès d’attractivité réalisés régulièrement par les job
boards, cabinets de recrutement, instituts d’études, fournissent ce type de renseignements. Il
est nécessaire de prévoir chaque année une enveloppe budgétaire pour acquérir ces études
ou en faire réaliser directement, car elles présentent des différences d’une année sur l’autre
liées à la conjoncture économique. Ainsi, dans l’étude Randstad 2013, la sécurité de l’emploi
est devenue le premier critère 1.
Écouter les conversations de vos cibles sur les médias sociaux sera également riche
d’enseignement. Vous préparez votre campagne sur l’alternance ? Facebook héberge peut-
être déjà des pages sur le sujet qui vous renseigneront sur les préférences des étudiants
dans leur choix d’entreprise. Vous devez recruter des informaticiens réseaux et télécom ?
Certains pourraient se retrouver dans les groupes de discussion de LinkedIn pour échanger
sur le type de mission qui les passionne.

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Résultat de la requête « Alternance » sur Facebook.

Il convient donc d’identifier et de suivre ces signaux au plus près, car ils seront à rapprocher
des attributs que vous choisirez d’intégrer dans votre People Value Proposition, des arguments
que vous mettrez en valeur dans votre discours. En revanche, inutile de communiquer sur
certains de vos points forts, s’ils n’intéressent pas les candidats, même si vous en êtes très
fier.

Comment les cibles perçoivent votre marque RH ?

Pour travailler sur la construction de notre marque RH, nous avons successivement fait une
analyse de l’offre RH, déterminé quelles étaient les cibles, cherché à cerner leurs attentes. Il
est à présent nécessaire d’être éclairé sur la perception qu’ont ces candidats de votre offre
RH. Cette perception ne sera ni le reflet exact de l’offre elle-même, ni de sa communication.
Cette perception n’est pas non plus une valeur dans l’absolu, car elle sera influencée par vos
concurrents et évoluera dans le temps. Un candidat jugera votre offre RH à l’aune de ce que
lui proposent les autres entreprises, et pas uniquement celles de votre seul secteur
d’activité.
Universum, Trendence, Great Place to Work, Randstad Award, Top employeur, TNS, Palmarès
RégionsJob… ne sont que les plus célèbres d’une multitude d’acteurs qui réalisent des
études dédiées à l’attractivité employeur. Leurs méthodologies (interview en face à face,
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questionnaire en ligne, soumission volontaire), le type de résultats (palmarès, classements,
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labels), leurs échantillons (grand public, candidats, étudiants, stagiaires, salariés, directions
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RH) et leur périmètre géographique varient fortement. À vous de juger celui qui correspond
le mieux à vos besoins, et à votre budget. Car pour certains, les prestations représentent un
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coût élevé qui ne sera justifié qu’à partir d’un volume conséquent de recrutements annuels.
Il est notamment indispensable de bien définir les critères recherchés, les panels de
candidats qui vous intéressent, le degré de détail des informations attendues. Il est à noter
que pour nombre de ces palmarès, il est parfois très difficile d’isoler la seule attractivité
employeur de la réputation globale de l’entreprise ou de la popularité de ses produits. Nous
nous contentons donc d’évoquer ces acteurs du marché du marketing RH : vous trouverez
quantités d’informations disponibles en ligne sur ces instituts.
Par ailleurs, des sites web comme Glassdoor aux États-Unis, Meilleures-entreprises ou Note-
ton-stage en France, proposent aux candidats de déposer leurs témoignages sur l’entreprise
qui les emploie ou les a employés. Leur modèle économique repose sur une gratuité pour les
candidats et du freemium pour les entreprises. Il semble cependant qu’en Europe, ces acteurs
peinent à trouver leur voix entre le choix de commentaires totalement libres qui les
transforment en défouloir de problèmes personnels, et des formules très « policées » qui
rassurent les entreprises afin de leur vendre des prestations. De plus, ces plateformes ne
sont quasiment jamais citées par les candidats quand ils sont interrogés sur leurs sources
d’information privilégiées.
Il est également possible de recueillir des informations de ce type en organisant en interne
des tables rondes, des interviews. Vous pouvez par exemple vous appuyer sur les campus
managers, à l’occasion des rencontres-écoles, interroger des candidats nouvellement
recrutés, ou encore proposer des sondages en ligne sur votre site de recrutement ou sur les
réseaux sociaux que vous utilisez. La seule limite de ces études internes est qu’il sera très
difficile de vous positionner par rapport à vos concurrents.
L’objectif reste cependant le même : cerner les attentes des candidats pour les rapprocher
de la perception qu’ils ont de votre offre RH, afin d’identifier des axes d’amélioration ou de
possibles fondations pour votre marque RH et d’éventuels leviers de communication.

➤ Témoignage

Jean-Baptiste Audrerie, psychologue organisationnel spécialisé en attraction des talents. Blogueur


www.futurstalents.com
Qu’ils se nomment Glassdoor, Viadeo, Indeed, PayScale ou RateMyEmployer, ils ont comme stratégie de
rendre les organisations et leur marque employeur transparentes. La notation des entreprises met en avant
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les appréciations et les commentaires des employés et des ex-employés. Ils sont au monde du travail ce que
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TripAdvisor ou AirBnB sont pour le tourisme ou Yelp pour les restaurants. La réputation d’un employeur est
donc disponible en tous temps sur mobile. Les candidats devenus des clients évaluent et choisissent leur
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entreprise. Alors s’ils veulent conserver leur capacité à attirer et à recruter, ils vont devoir gérer leur
réputation employeur. Cela va tout changer !
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La notation des entreprises dévoile tout

La promesse de ces sites de « rating » est simple : tout dire, tout mesurer. Car bons ou mauvais, les
commentaires des informateurs en disent long sur une entreprise et son patron. Ainsi, on y apprend
l’expérience du candidat (processus de candidature, entrevues, méthodes de sélection), les salaires par
fonction avec des comparatifs, la vie des employés (management, carrière, activités sociales) et finalement
l’appréciation du PDG.

Ils dévoilent ce qui était difficile de savoir sans avoir initialement de bons contacts. Objectifs ou non,
représentatifs ou non, mêmes relatifs à l’expérience de chacun, les mobinautes comprennent rapidement la
valeur de la somme de ces appréciations surtout quand ces sites les invitent à comparer avec d’autres
employeurs qu’ils pourraient « aimer » ! Une offre d’emploi est suivie de l’appréciation de l’employeur. Cela
peut faire mal !

Mais le vrai choc, c’est l’excellent référencement sur le web de ces sites. Ils devancent souvent dans les
recherches les entreprises et les offres d’emploi qu’ils citent. Tout cela avec les contenus enrichis qu’ils
agrègent parfois mieux que certains employeurs peu ou mal représentés en ligne (commentaires,
descriptions de processus, niveaux d’appréciation, photos de l’entreprise, vidéos).

Pour occuper la scène de la première page du moteur de recherche, il convient donc d’assurer une
présence web active avec un site carrière vivant et adapté au mobile, une présence sur les médias sociaux
et une communication qui reflète la vie d’entreprise, proche de la vie des hauts dirigeants, des experts et
des employés. Les « candidats clients » veulent trouver tout rapidement.

Des talents avisés et sélectifs

Il n’y a donc pas que les candidats qui vont devoir se soumettre aux dossiers de vérification de références.
Les employeurs et les patrons aussi seront scrutés. À la quantification de soi, s’ajoute la quantification d’une
culture organisationnelle ou d’un leader d’entreprise, souvent difficile à apprécier tant que l’on ne l’a pas
vécu.

Les candidats veulent savoir pour quel patron ils travailleront. Des décisions précoces basées sur la
réputation en ligne seront prises, à tort ou à raison. Des attentes plus précises à l’égard de l’expérience
candidat, de la rémunération et du management seront formulées par les candidats et les employés. Le
questionnement et le sens critique seront plus développés chez les candidats influencés négativement.
L’engagement cognitif et émotif sera plus important chez les candidats influencés positivement. Préparez-
vous à changer vos entrevues.

Pour répondre au besoin d’information à toutes les phases décisionnelles du recrutement, les descriptions
d’emplois s’enrichissent et les entrevues adoptent le ton du dialogue. L’employeur répond aux questions
avant qu’on ne les lui pose. Mais le ton, les formats et les contenus sont aussi une aide à la segmentation et à
l’auto-sélection. On veut attirer certains profils et économiser du temps. Certaines entreprises mettent en
place des questionnaires d’auto-évaluation pour guider la décision des candidats avant de les rencontrer.
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Une culture organisationnelle et une marque employeur cohérentes
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Ces sites de classement se révèlent être des sondages en temps réel du niveau d’engagement,
d’appartenance, de satisfaction et de la fierté exprimés par les employés ou ex-employés.
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Ils exposent publiquement l’entreprise à un risque réputationnel plus rapide, plus visible et plus durable.
Les ignorer, c’est se couper d’un message. Les exploiter, c’est comprendre la puissance d’une marque, des
réseaux sociaux et du référencement web sur l’attractivité et l’engagement. Les employeurs doivent donc
surveiller leur cote d’appréciation avant de communiquer. Certes, il existe toujours des « haters », ces
individus hypercritiques, voire irrespectueux, qui cherchent de la visibilité gratuite. Mais ce qui compte en
réalité, c’est la réponse d’un patron à un mauvais commentaire. Comme en communication de crise, rétablir
le dialogue habilement peut retourner à son avantage un commentaire préjudiciable rendu trop visible.

Les organisations soucieuses de leur attractivité implantent en amont des programmes de développement
des managers pour bien encadrer et motiver les employés. Ils déploient des programmes de
développement des employés, de la relève et des hauts potentiels. Les RH deviennent ainsi hautement
imputables de la stratégie d’attraction, de veille réputationnelle, du suivi des indicateurs de réputation et
de leur progression.

Une gestion de marque employeur plus sociale et moins corporative

Les contenus développés par Glassdoor ou Payscale sont hautement visibles sur le web, facilement
partageables et irrésistibles, tantôt distrayants, tantôt éducatifs. Ils donnent des informations tangibles à
une audience devenue sceptique. S’ils aiment les marques, ils ne croient plus les messages corporatifs
déconnectés du terrain. Le succès du site américain www.themuse.com (3 millions de vues par mois) l’a bien
compris. Ses reportages « Behind the Scene » montrent les bureaux et la vie d’entreprise. Les entreprises
payent pour s’exposer à des talents qui cherchent des conseils de carrière.
Produire des contenus authentiques de la vie d’entreprise, tisser le dialogue avec les communautés de
talents et faire une promotion habile et ciblée des métiers, des emplois et des carrières répondent à la
quête de sens et d’engagement des candidats. Les programmes de références (cooptation), le sourcing sur
les réseaux sociaux, la gestion des relations avec les écoles et les ambassadeurs de l’employeur complètent
l’arsenal de l’attraction. Toutes ces initiatives nourrissent du contenu, des nouvelles et des activités sociales
qui positionnent votre marque dans le réel. Elles alimentent votre réputation d’employeur et éloignent les
risques d’un vide sidéral ou d’un mauvais buzz isolé.

À RETENIR

• Le bouche-à-oreille, l’appréciation d’une entreprise et la réputation de la direction entrent dans la vague de


digitalisation des usages entourant le recrutement.
• L’entreprise devient par défaut plus transparente même si elle n’a pas choisi de devenir une entreprise 2.0.
• Gérer sa réputation employeur fait partie intégrante de la gestion d’une marque et du capital d’attraction d’une
organisation.
• Pour alimenter une bonne réputation, l’approche se doit d’être holistique et inclusive, pas seulement
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cosmétique.
• Une expérience candidat consistante, qualitative et singulière assure une solide base réputationnelle.
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• À la marque employeur s’ajoute la marque « patron ». Les CEO jouent un grand croissant dans l’attractivité.
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• Quand les talents sont rares et le recrutement coûte cher, l’attractivité des talents a un prix, celui de sa
réputation.
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Les cibles indirectes

Les cibles du marketing RH ne se résument pas aux seuls candidats, écoles et collaborateurs.
Elles visent aussi les émetteurs tiers ou relais d’information comme moteurs de la diffusion
des contenus sur les médias sociaux. Ces émetteurs tiers présentent le double avantage
d’une audience supplémentaire gratuite et d’une légitimité qui s’appuie sur leur non
appartenance à l’entreprise. Dès lors, il est important d’identifier des cibles indirectes
susceptibles de donner cette visibilité supplémentaire à vos messages. Ces cibles indirectes
seront d’autant plus disposées à relayer vos initiatives qu’elles y trouveront un intérêt. C’est
ce principe du « gagnant/gagnant » qu’il faut garder à l’esprit quand vous les solliciterez, et
exclure le plus souvent les messages explicitement commerciaux ou « renvoi d’ascenseur ».
C’est, par exemple, le principe des billets sponsorisés, qui consiste à payer des blogueurs
pour rédiger des articles de commande. Ces démarches s’apparentent à de l’achat d’espace
déguisé.

Les journalistes sont intéressés par certaines informations parce qu’elles viennent enrichir
un article, illustrer un dossier, ou parce qu’elles présentent un caractère de nouveauté. Il
peut s’agir aussi de réserver une information en avant-première à quelques journalistes.
C’est par exemple faire témoigner un collaborateur de votre entreprise sur son domaine
d’expertise. Il pourra évoquer avec ses propres mots une initiative qui aura la force du vécu.
Ajoutons également que cette mise en valeur d’un collaborateur et la reconnaissance de sa
légitimité démontrent une posture d’entreprise séduisante pour un candidat. Dans tous les
cas, il sera préférable de travailler avec les équipes des relations presse de votre entreprise
qui connaissent déjà les journalistes et sont en mesure d’identifier les sujets potentiellement
intéressants pour certains supports. À vous de leur amener les angles et les contenus
permettant de mettre en avant l’originalité, la pertinence de votre démarche et faciliter leur
travail au moment de rédiger votre communiqué de presse.

Les blogueurs sont facilement identifiables grâce à leurs blogs, mais d’autres experts RH sur
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la formation, l’alternance, la marque employeur ou la diversité peuvent être identifiés grâce
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à leur présence sur les médias sociaux. Ils devront donc être présents dans l’écran radar de
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votre veille. Ces deux populations sont moins en quête du scoop que de l’information
susceptible de les valoriser. Notons aussi que de nombreux blogueurs ont une activité de
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conseil et qu’ils utilisent leur blog comme vitrine de leurs prestations. Il peut être intéressant
de les inviter à des événements, de les associer à la conception de certaines actions, de
contribuer à la rédaction collective d’un livre blanc. Ils apporteront leur expertise, mais
surtout ils communiqueront cette information auprès de leur communauté, par exemple par
la rédaction d’un billet positif… qui se retrouvera référencé dans Google comme une trace
positive sur votre marque. Ici encore, notons que l’absence de tout lien contractuel et le
principe du « gagnant/gagnant » seront les plus efficaces et les plus bénéfiques pour une
relation d’égal à égal sur le long terme. Identifiez ceux qui pourraient être intéressés par une
interview, une visite de vos locaux, une invitation à un événement type petit-déjeuner pour
présenter vos actions et projets. Ces rencontres sont une occasion de tisser un réseau de
relations assez solides et personnalisées qui pourra s’avérer utile en cas de crise de
réputation.
Pensez aussi à l’ensemble des sites d’information RH, communication, management, qui
s’appuient sur des rédacteurs officiels et bénévoles.
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Les parents comme cible indirecte ? Le site de recrutement de l’Armée de Terre propose une rubrique
dédiée aux parents, à la fois pour les rassurer et en faire des prescripteurs.

Où trouver vos cibles de recrutement ?


Répondre à cette question est un moyen de dessiner progressivement les espaces qu’il
faudra investir en priorité et sur lesquels concentrer actions et ressources. Identifier ces
espaces va également donner quelques indications sur le type d’actions à prévoir, les
natures de contenus à produire, les ressources financières et le temps à consacrer. Certains
espaces sont évidents et sont déjà le quotidien des entreprises : écoles cibles, job boards
locaux comme RegionsJob.com, réseaux sociaux dédiés aux étudiants comme Wizbii.com ou
Yupeek.com, ou encore événements et salons professionnels. Il est assez facile de s’appuyer
sur les moteurs des réseaux sociaux pour tester rapidement avec quelques mots-clés si ces
espaces accueillent bien vos cibles potentielles.
Les forums peuvent également être des sources intéressantes pour sourcer des candidats
difficiles à repérer. À titre d’exemple, et pour s’éloigner des traditionnelles populations de
cadres, des mécaniciens auto peuvent se trouver sur des forums dédiés aux voitures de
collection ou aux vieilles motos. Les cuisiniers se retrouvent également sur des espaces de
discussion pour partager leur passion de la gastronomie, leurs recettes. En résumé, il est
indispensable d’instaurer le réflexe du « où » à chaque réflexion sur un plan d’actions.

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Connaître ses concurrents
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La construction de la marque employeur, dans sa démarche de positionnement au sein d’un


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environnement externe, doit être nourrie par une identification et une analyse des offres
concurrentes. Nous verrons plus loin comment les informations récoltées dans ce benchmark
servent à définir les points d’ancrage de la marque employeur. Cette étape d’analyse de la
concurrence ne doit pas être perçue comme réservée aux grandes entreprises ayant
d’importants volumes de recrutement, et qui seules pourraient faire appel à des prestataires
spécialisés. Il ne s’agit pas non plus de s’engager dans un processus lourd, technique,
chronophage. Les quelques pistes proposées doivent servir à orienter les recherches pour
une meilleure efficacité.

Qui sont les concurrents ?

Cette question n’est pas anodine, et même si la réponse semble évidente, c’est souvent
parce qu’elle n’est appréhendée que superficiellement. Quels sont les concurrents directs et
indirects ? Comment d’ailleurs définir cette concurrence directe ? Faut-il ne considérer que
les entreprises du même secteur d’activité, au risque de retenir des entreprises de taille trop
diverses ? Est-il plus pertinent de sélectionner des entreprises de secteurs différents, mais
qui recrutent les mêmes profils que ceux de votre entreprise ? Dans ce cas, quel est le poids
de l’attractivité du secteur dans les critères des candidats ? L’offre RH, les arguments et le
discours développés, les actions menées peuvent également constituer une grille d’analyse
pour sélectionner la concurrence directe.

Quelle est la situation de votre univers de concurrence ?

Votre marché est-il plutôt monopolistique, avec un seul leader installé qui domine et « donne
le tempo » au marché ou, au contraire, qui vit « sur ses acquis » ? La situation est-elle plus
concurrentielle, avec quelques acteurs très dynamiques, qui multiplient les innovations pour
tenter d’émerger ? Enfin identifiez-vous une multitude d’acteurs nouveaux qui cassent les
codes traditionnels pour tenter de s’imposer malgré un déficit de notoriété ?

Les critères quantitatifs


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Les volumes de recrutement, les budgets (plus difficile à obtenir), le nombre de
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collaborateurs, constituent des critères objectifs qui permettent de définir qui sont les
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concurrents directs sur lesquels porter toute son attention. Le suivi de quelques indicateurs
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facilement accessibles peut également aider à identifier les concurrents les plus
dynamiques : progression du nombre de followers sur Twitter, suivi des « likes », des
commentaires et des partages de Facebook. Quelques outils gratuits peuvent être d’une
aide précieuse. HyperAlerts permet d’obtenir des alertes e-mails avec les derniers
commentaires des fans sur les pages de vos concurrents. TwitterCounter est un outil de
mesure dédié à Twitter qui fournit des informations statistiques comme l’évolution du
nombre de followers, de followings, de tweets.

Se connaître soi-même

Les lignes ci-dessus ont démontré l’importance d’identifier les acteurs de son éco-système :
concurrents, candidats et autres acteurs. Tous sont guidés par des motivations propres qu’il
faut comprendre. Ils mettent en place et font évoluer certains comportements dans des
objectifs précis qu’il faut savoir décrypter. Cette connaissance permettra de positionner sa
marque employeur comme acteur au sein de cet organisme vivant. Ce travail de
cartographie sera également précieux au moment de construire un plan d’action pour
imaginer comment solliciter ces acteurs, les mettre à contribution, les faire agir et réagir.
Nous avons également insisté sur la nécessité de connaître précisément son offre RH et sa
perception auprès de collaborateurs, à la fois pour la faire évoluer, mais également pour
trouver la meilleure communication interne. Nestlé a même fait de son initiative en matière
de veille un argument de communication. Leur « War Room » de Vevey, en Suisse, accueille
régulièrement des journalistes. C’est devenu l’exemple le plus abouti d’une prise de
conscience de l’importance de la réputation d’entreprise, après l’attaque orchestrée depuis
la Grande-Bretagne par Greenpeace sur leur produit Kit-Kat.

L’analyse de l’image projetée de votre propre entreprise constitue un troisième aspect


indispensable avant de se lancer dans la construction de sa marque employeur. Cette
analyse répondra à la question « comment suis-je perçu ? », auprès des différents publics que
nous avons cités, et sur différents niveaux : l’entreprise dans son ensemble, dans sa
dimension d’employeur, l’intérêt des missions proposées…

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Pour les candidats
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Quels sont les attributs positifs ou négatifs qu’ils associent à votre entreprise, dans l’absolu
et par rapport aux concurrents ? Quelle connaissance ont-ils de votre contrat social ? Ont-ils
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bien identifié les points forts que votre communication RH met en avant ? Sont-ils séduits
par d’autres critères non RH : la popularité de certains de vos dirigeants, les succès
commerciaux et les innovations produits, votre politique de mécénat/sponsoring ou de RSE ?
Ont-ils une préférence pour certains de vos points de contact : votre site de recrutement,
vos journées recrutement, vos rencontres écoles… ?

Pour les blogueurs et journalistes

Quels sont ceux qui ont une image plutôt positive de votre entreprise, dans son ensemble et
en tant qu’employeur ? Vous les identifiez facilement grâce à la tonalité de leurs articles et
billets à votre sujet, ou encore en fonction de leurs réactions quand vous les sollicitez. Assez
rapidement, vous pourrez les classer en trois catégories. Les « avocats », avec qui vous
pourrez développer des relations de confiance, mettre en place des partenariats et sur
lesquels vous pourrez vous appuyer en cas de crise. Les « opposants », qu’il faudra surveiller
avec attention, car leurs convictions personnelles ou leur ligne éditoriale les mettront
souvent dans une posture de principe contre vous. C’est le cas de tous les activistes, et c’est
souvent de ces acteurs que partent les « bad buzz », car ils disposent d’une légitimité auprès
d’une communauté de membres qui partagent leurs convictions. Entre ces deux populations
« d’e-influenceurs » se situe une masse de « neutres », qui seront souvent peu réactifs à vos
sollicitations, mais qui peuvent tout de même constituer des opportunités potentielles.

Quelles sources d’information utiliser ?

Deux écueils se présentent rapidement au moment de mettre en place une veille. Le


premier est de ne se concentrer que sur la veille sur Internet. Or, même si ce canal est
essentiel, il n’est pas le seul. Le second est de se retrouver perdu face à la multitude d’outils
disponibles sur le marché.

Ne pas penser qu’au web


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Votre entreprise dispose déjà gratuitement d’informations que vous n’exploitez pas. Les
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campus managers, en charge des relations écoles, les opérationnels qui dispensent des cours,
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les managers qui ont régulièrement des stagiaires sont une source précieuse d’informations,
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car ils sont en contact régulier avec les jeunes diplômés de vos écoles cibles. Pourquoi ne pas
instaurer régulièrement des points avec eux ? La priorité des équipes recrutement est
souvent focalisée sur le recrutement, mais pourquoi ne pas les « missionner » pour sonder les
étudiants sur certains sujets bien précis : comment est perçu votre site de recrutement ?
L’actualité récente a-t-elle modifié leur intérêt pour votre entreprise ? Dans le cadre des
relations privilégiées à entretenir avec certaines écoles, il est également possible d’imaginer
des tables rondes regroupant quelques étudiants. Plus compliquée à mettre en place, mais
extrêmement instructive, serait l’instauration de candidats-mystères, à l’image des clients-
mystères, pour évaluer la qualité de votre expérience candidat.

Quelques outils utiles sur le web

Des tas d’outils payants et très sophistiqués existent pour monitorer votre présence sur le
web et suivre celle de vos concurrents. La société allemande Glodbach, spécialisée dans le
marketing digital, en recense trois cents dans sa dernière étude comparative 2. Très
séduisants en raison des potentialités qu’ils recèlent, ils permettent de suivre les
conversations sur des milliers de sites, sur des milliers de mots-clés. Mais ils sont souvent très
chronophages et nécessitent un temps d’appropriation conséquent. À moins d’être expert
de la veille et de disposer dans vos équipes d’un collaborateur exclusivement dédié à cette
tâche, ces outils s’avèrent le plus souvent disproportionnés par rapport à l’exploitation qui
sera faite des données recueillies. Il nous semble préférable d’acquérir progressivement une
courbe d’expérience sur quelques outils gratuits, afin de déterminer dans un second temps
ses besoins et les ressources à allouer à cette mission.
Google, grâce à ses alertes, est particulièrement puissant. D’utilisation très simple, il vous
permet de choisir des mots-clés et de recevoir par mail, à une fréquence que vous définissez,
toutes les nouveautés référencées par Google contenant ces mots-clés. Vous pourrez ainsi
suivre le nom de votre entreprise, celui du DRH, vos concurrents, vos écoles cibles ou des
termes génériques (alternance, stage, VIE…).
Les flux RSS permettent de suivre les nouvelles mises en ligne de sites que vous
sélectionnez, et de regrouper ces nouveautés au sein d’agrégateurs de flux type Netvibes.
Vous pouvez ainsi suivre quotidiennement des centaines de sites : sites de la concurrence,
sites médias, blogs d’experts… que vous regrouperez dans des onglets thématiques
(innovation, communication, concurrents, alternance, business school…). |
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Twitter est également un excellent outil de veille. Il permet de suivre certaines sources : les
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comptes Twitter de vos concurrents, de journalistes, d’écoles, d’experts en RH, qu’il vous
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faudra identifier. Mais il permet aussi de suivre des thèmes, indépendamment des
personnes, via des mots-clés, les fameux hashtags, à partir de son moteur de recherche. Le
volume des échanges sur les sujets RH n’est pas celui de la grande consommation, de la
politique ou du sport, a fortiori pour une entreprise de taille moyenne, à faible notoriété. Mais
cela ne doit pas justifier de négliger ce travail de surveillance de sa marque, et de prévenir
des risques potentiels. Il s’agit simplement d’estimer correctement les moyens à y allouer.

Ici encore, nous avons fait le choix de ne pas perdre le lecteur dans un inventaire exhaustif
d’outils et de solutions comparées. Un ouvrage complet n’y suffirait pas. Ces quelques
exemples donnés, une fois bien maîtrisés, devraient répondre à vos besoins.

1. http://www.lexpress.fr/emploi-carriere/emploi/marque-employeur-la-securite-de-l-emploi-revient-en-tete-des-priorites_1233509.xhtml
2. http://www.goldbachinteractive.com/current-news/technical-papers/social-media-monitoring-tool-report-2012-1
■ 3. Construire sa marque employeur

L’identité employeur : la réalité interne

Le socle de la définition d’une marque employeur va être la recherche de la « People Value


Proposition » (PVP), aussi parfois appelée EVP pour « Employee Value Proposition ». C’est-à-dire,
rappelons-le, une promesse faite aux candidats et aux collaborateurs qui sera le cœur du
contrat social. Cette promesse s’appuiera sur des arguments réels, légitimes, tangibles de
l’entreprise qui seront les fondements de l’offre RH. Le seul et unique moyen d’identifier ces
leviers et de s’assurer de leur pertinence est de solliciter les collaborateurs. Cette identité
employeur doit également aider à mettre en œuvre la stratégie de l’entreprise. Les
paragraphes suivants proposent quelques repères méthodologiques pour établir des
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cartographies des écarts entre la réalité, les attentes et les perceptions internes et externes.
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Les acteurs à solliciter


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Nous l’avons vu, la marque employeur ne peut être une création des seules RH. Salariés,
managers, membres de la direction doivent participer activement. Le temps disponible et la
facilité à solliciter ces populations détermineront la nature du panel. L’ambition et le
périmètre géographique de la future marque employeur seront également déterminants.
L’objectif sera bien évidemment que cet échantillon soit représentatif de la réalité de
l’entreprise, sur des critères d’ancienneté, de métier, d’appartenance à une business unit, de
culture, de localisation géographique… Les jeunes collaborateurs auront des attentes en
formation différentes des plus anciens, ceux des filiales évoqueront davantage le manque
d’information que ceux du siège social. Les équipes commerciales pourront avoir été plus
sensibles aux changements de stratégies, les collaborateurs d’Europe ou d’Asie n’auront pas
la même vision du modèle managérial idéal. On peut également citer les entretiens de
départ, qui sont trop peu présents dans les entreprises. Ils offrent de précieuses sources
d’informations, en raison de la liberté de parole, la franchise, que se permettent les
collaborateurs sortants.
Comment les solliciter ?

Top managers et membres de la direction seront sollicités sous forme d’entretiens individuels
ou en groupes restreints, dans le but de s’exprimer sur leur vision de l’entreprise, les enjeux
du secteur, ou même l’histoire de l’entreprise et ses faits marquants, pour les plus anciens.
Ces entretiens sont importants dans la mesure où la marque employeur doit être au service
de la stratégie, l’offre RH devant servir l’atteinte des objectifs business. Les collaborateurs
peuvent répondre à des questionnaires en ligne, via les intranets ou les réseaux sociaux
internes. Cette logique d’études quantitatives présente l’avantage de recueillir rapidement
un échantillon large, à moindre coût et sur une large gamme d’items. Une communication en
amont pour expliquer les raisons de cette enquête, et en aval pour en partager les résultats,
est indispensable à la réussite, mais constitue également une première preuve d’une
démarche de marketing RH ! Cette phase quantitative, qui permet de dégager les grandes
tendances, sera complétée par des entretiens collectifs ou individuels pour disposer
d’éléments qualitatifs, creuser certaines des tendances identifiées, recueillir des verbatims.
Ces enquêtes peuvent être menées par des intervenants externes. Elles présenteront un
coût supérieur, mais bénéficieront d’une expertise méthodologique. De plus, il est parfois
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plus facile pour un collaborateur de s’exprimer librement auprès d’un interlocuteur
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extérieur à l’entreprise, si des règles de confidentialité sont garanties.


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L’importance de la vision de la direction générale

C’est une étape qui est souvent laissée de côté, car difficile à mettre en œuvre en raison de
la disponibilité de ses acteurs ou de leur volonté de s’investir sur le sujet de la marque
employeur, trop souvent résumé au seul enjeu du recrutement. Cela suppose aussi une
certaine maturité de la direction générale, qui aura été sensibilisée au préalable par le
directeur des ressources humaines. Seule la direction générale est en mesure de formaliser
et de verbaliser sa vision, sa stratégie, ses ambitions, de donner un éclairage sur les enjeux
du secteur d’activité, les challenges de l’entreprise. En un mot, tout ce qui va nourrir la
dimension aspirationnelle de la marque employeur.

➤ Témoignage

La construction de la marque employeur selon Mazars


Martin Huerre est DRH France de Mazars. Il revient sur la construction de la marque employeur du cabinet
d’audit : de la présence dans les campus à la digitalisation de la communication RH.

« Nous avons la particularité d’être positionnés sur des métiers qui recrutent beaucoup de jeunes diplômés, notre
marque employeur est donc indissolublement liée à l’histoire des campus. Elle y est née. Historiquement, nous
travaillons sur trois axes : les associations étudiantes, le soutien aux institutions que sont les écoles et les universités
et la présence pédagogique. Le terrain est primordial pour asseoir une notoriété qui a pu ensuite se décliner via les
réseaux sociaux.

Dans un premier temps, il était fondamental d’identifier l’originalité, l’identité de Mazars. Au-delà des valeurs, être
clair sur notre ADN.
Nous sommes très marqués par notre parcours de croissance très rapide : du challenger français au groupe
international présent dans 70 soixante-dix pays. Mais un positionnement n’est jamais acquis, c’est une matière
vivante que nous ne cessons de retravailler, afin d’être en accord avec les attentes des nouvelles générations.
Dans le passé, nous avons mis l’accent sur le fort caractère apprenant de nos métiers (l’audit troisième cycle).
Aujourd’hui, nous appuyons plus la notion d’employabilité, c’est-à-dire la promesse pour de jeunes diplômés
d’avoir accès à de très belles carrières après une expérience chez nous.

Des valeurs effectives et de réelles aspirations

Nous avons professionnalisé notre approche en fonction des différentes étapes de développement et surtout de
l’accroissement de nos besoins de recrutement !
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Dans les années 2000, il s’agissait de faire connaître le groupe, sa position de challenger crédible et notre mode
d’organisation original. Nous voulions marquer les esprits avec un positionnement mêlant l’excellence technique,
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l’aventure humaine et le fun.
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Mais quel que soit le focus de notre marque employeur, elle doit être « démontrable » et toujours en accord avec
la réalité de nos pratiques RH. Par exemple, « plus humain » se traduit, dans les faits, par un suivi individualisé des
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carrières, une politique de parrainage à tous les niveaux.

Idem pour l’expansion à l’international, nous devons nous engager à proposer de vraies opportunités de métier à
l’international à nos collaborateurs. Cette réassurance par la preuve est essentielle dans une politique RH.

Une incontournable digitalisation

Ces dernières années ont vu l’arrivée de la digitalisation de la communication RH. Nous sommes dans une phase où
il faut investir les réseaux sociaux, avoir une communication beaucoup plus directe et désinstitutionnalisée. Il s’agit
de prioriser l’échange sans intermédiaire entre notre public cible et les Mazariens.
Si notre marque employeur était déjà portée en interne, la digitalisation a accéléré le phénomène. Les
collaborateurs sont, de fait, en première ligne et dans l’immédiateté. Nous avons, par exemple, lancé l’application
Campus sur laquelle tous les candidats peuvent contacter un Mazarien de son école, ou non. Les collaborateurs
sont à la fois les porteurs des valeurs que nous défendons et la démonstration de leur réalité.
Cette phase de digitalisation nous oblige à adapter nos outils, la manière dont nous parlons, dont nous nous
présentons, dont nous racontons notre histoire.
En résumé, la marque employeur va de plus en plus échapper à l’institution. Elle sera le reflet de notre « corpus » et
ce que Facebook ou Twitter relaieront sur le sujet. »
Deux modèles d’analyse pour identifier les priorités
de son marketing RH

La cartographie des points de vigilance

Quels sont les éléments susceptibles de générer des tensions et du désengagement chez les
collaborateurs ? Quels sont les sujets d’attention prioritaires, les axes d’amélioration vécus
comme essentiels sur lesquels concentrer les actions de son marketing RH ? On peut
imaginer une sélection d’une dizaine de critères proposés au panel qui les classera selon
trois niveaux de criticité : faible / moyen / fort.
Voici une liste non exhaustive de quelques thèmes possibles :
• la charge de travail et la pression ressentie ;
• le climat général et l’ambiance de travail ;
• l’autonomie dans la prise de décision ;
• la vitesse des changements récents
• les perspectives d’évolution ;
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• le développement des compétences ;
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• les éléments de rémunération (fixe, variable, critères d’attribution) ;
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• l’équilibre vie professionnelle / personnelle ;


• le comportement des managers ;
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• la qualité de la communication ;
• la compréhension et l’adhésion à la stratégie ;
• etc.

L’analyse des écarts entre le « vécu »,


le « perçu » et le « voulu »

Dans ce modèle, il est possible de reprendre les critères ci-dessus et de les évaluer
également selon des niveaux de satisfaction, dans leurs trois dimensions « vécu », « perçu » et
« voulu ».
Le « vécu » correspond à la réalité quotidienne des salariés, leur expérience. Le « perçu » se
nourrit de l’opinion des candidats, c’est l’image projetée hors des murs de l’entreprise. Le
« voulu » traduit l’ambition de la direction générale. L’analyse des écarts éclairera sur les axes
prioritaires, sur la cohérence entre le discours et la réalité vécue, sur les attentes les plus
fortes, sur la réalité d’aujourd’hui et l’ambition pour demain. Ainsi, un écart fort sur un des
items incitera à prioriser l’action RH sur la révision du process concerné, à revoir le calendrier.
Un suivi dans le temps de ces indicateurs, à l’image d’un baromètre, servira à évaluer l’impact
des actions initiées ou identifier les sujets de communication managériale à privilégier,
comme par exemple ré-expliquer la stratégie à moyen terme.

Le cadran magique pour construire sa marque employeur

Cette méthodologie s’inspire librement d’une approche développée par Universum pour
mettre en parallèle la perception de l’entreprise sur certains critères, face à celle des
candidats. Nous l’avons enrichie avec une approche plus centrée sur la réalité de
l’entreprise, son « identité employeur », complétée par une dimension de benchmark qui
permet une vision synthétique et globale. Notre approche s’apparente à une sorte de
SWOT 1 de l’offre RH, avec ses points forts et faibles, mis en regard avec la concurrence et les
attentes des candidats. Cela suppose un travail préalable d’identification des concurrents et
une connaissance des critères de choix des candidats visés. Notre cadran, qui croise donc
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l’entreprise avec les candidats et les concurrents, se compose de quatre grandes parties :
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• l’image globale de l’entreprise ;
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• la nature et l’environnement de travail ;


• la culture d’entreprise ;
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• les rétributions.
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Le cadran magique de la marque employeur qui confronte les trois dimensions de la perception :
l’entreprise elle-même, la concurrence, les candidats.

L’image globale de l’entreprise

C’est la réalité de l’organisation dans son ensemble. C’est la qualité, la réputation et


l’innovation des produits et services, les succès commerciaux, les actions de RSE, de mécénat,
les engagements éthiques. Cela comprend aussi les résultats financiers, les performances
boursières, la qualité de l’actionnariat, le charisme et la notoriété de l’équipe de direction.
Est également concernée la visibilité auprès du grand public : présence de lieux de vente,
dimension internationale, qualité de la publicité, sponsoring sportif prestigieux…

La nature et l’environnement de travail

Ils regroupent le contenu et la qualité des missions. Sont-elles diversifiées, challengeantes,


tournées vers l’international, formatrices, proches des clients ? Quelle est l’ambiance de
travail, le modèle managérial privilégié, les relations hiérarchiques ? On s’attache ici aussi
aux conditions de travail : équipes projet souples, télétravail, flexibilité des horaires, outils
technologiques fournis.

La culture d’entreprise

C’est un ensemble d’éléments, dont la plupart sont implicites, rarement écrits et affichés.
Attention ici à ne pas se contenter des deux ou trois valeurs affichées de l’entreprise. Elles
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sont rarement une traduction de la réalité des entreprises, et plus souvent une ambition.
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Entendons par là une volonté de s’en rapprocher. Nous pouvons aussi évoquer dans cette
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catégorie l’autonomie, les usages en matière de communication, les codes et les normes
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dans les relations inter-personnelles. Entrent aussi ici la notion de diversité, l’influence des
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diplômes ou au contraire la reconnaissance des performances dans les évolutions de


carrière, la valorisation de l’excellence et de l’élitisme ou au contraire la mise en avant du
collectif, de l’équipe.

Les rétributions

Elles vont concerner bien évidemment toutes les formes de rémunération, donc les
politiques en la matière, qui privilégient l’individuel ou le collectif, les formes financières ou
d’autres formes de contreparties, les critères d’attribution. Mais cela concerne toutes les
formes d’avantages offerts : formation, opportunités de parcours professionnels, règles du
jeu en matière de d’évolution de carrière, de prises de responsabilités. L’employabilité, la
valeur marchande des références professionnelles participent aussi à ces éléments de
rétribution.

Bien évidemment ces quatre dimensions sont interdépendantes : elles s’influencent et se


nourrissent mutuellement. La définition des contenus de ce cadran magique n’est pas aisée.
Le principal écueil est de définir les critères à retenir, et de savoir fixer les limites, au risque
de s’engager dans un exercice sans fin. L’étape suivante consiste à identifier les points forts
et les points faibles de chacune de ces quatre dimensions, au regard de l’offre de la
concurrence, et dans le même temps vis-à-vis des attentes des candidats. Concrètement, un
point de faiblesse identifié en interne, mais aussi chez les principaux concurrents, et qui ne
correspond pas à un critère prioritaire de choix du candidat pourra être laissé de côté. La
seule condition sera que ce point de faiblesse ne soit pas un irritant fort chez les
collaborateurs.
À l’inverse, un critère marqué comme point fort dans l’entreprise, mais aussi chez la plupart
des concurrents, et dans le même temps identifié comme important chez le candidat ne
pourra être négligé, même s’il est certain que des efforts conséquents seront à engager pour
faire émerger la voix de l’entreprise sur un item très concurrentiel.

Nous pouvons résumer cette démarche en quatre étapes :


• lister exhaustivement les éléments d’image, de culture, de travail et de rétribution ;
• classer ces différents éléments selon qu’ils constituent des points forts ou faibles ;
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• rapprocher ces points forts / faibles des attentes des candidats et de la concurrence ;
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• établir une liste en ne retenant que les éléments qui constituent à la fois des avantages
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concurrentiels et qui répondent aux attentes des candidats.


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La traduction créative

L’étape suivante va consister en un travail de création pour mettre cette marque employeur
en musique. Définition d’un concept, écriture d’une histoire, d’un discours fondateur, choix
d’un univers graphique, seront le plus souvent confiés à une agence de communication. De
la qualité des réflexions ci-dessus, dépendra la réponse qui sera faite par l’agence. En
d’autres termes, plus le brief aura été travaillé avec soin, meilleure sera la proposition.
Les étapes de construction de la marque peuvent être réalisées avec le soutien de cabinets
de conseil ou d’agences de communication, de même que les étapes aval de déploiement
d’un plan d’actions. Ces prestataires, pour la plupart en tout cas, apportent une réelle
expertise à l’entreprise qui peut certes, disposer de telles ressources en interne, mais qui est
rarement en mesure de les dédier à 100 % à la réflexion stratégique ou à l’élaboration de
plans d’actions. Il sera souvent très difficile de se passer de ce type de prestataires pour le
travail de conception / création, dont les expertises ne sont que très rarement présentes en
entreprise. Ils apportent un regard extérieur, l’expérience d’autres secteurs d’activité et
leurs problématiques.
L’ACCE (Association des Agences Conseil en Communication pour l’Emploi) a édité un « Petit
guide du partenariat annonceurs/agences », qui rappelle quelques conseils et bonnes
pratiques de fonctionnement entre les entreprises et leurs agences de communication RH.

1. Le terme SWOT est un acronyme dérivé de l’anglais : strengths (forces), weaknesses (faiblesses), opportunities (opportunités), threats (menaces). C’est un outil
d’aide à la décision qui analyse l’interne d’une entreprise et son environnement.

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« La méthode ne vaut que par l’exécution. »
Duc de Richelieu

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■ Introduction

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La marque RH est aujourd’hui essentiellement une marque digitale. Elle va vivre, se déployer,
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être visible, principalement sur les médias numériques. Nul ne conteste aujourd’hui la
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position dominante de l’espace digital pour faire se rencontrer l’offre et la demande de


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compétences, qu’il s’agisse de la communication RH des entreprises, des sources


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d’information des candidats (même s’il en existe d’autres) ou des entreprises, et enfin de
l’acte de candidature. Nous l’avons vu précédemment, entreprises, candidats et acteurs
intermédiaires ont depuis adopté les outils digitaux à des degrés divers, au même titre que
de nombreux autres acteurs économiques. Il va donc s’agir d’activer la marque employeur au
sein d’un éco-système de présences complémentaires, articulées entre elles et orientées sur
des objectifs précis, des cibles définies, intégrant les contraintes propres à ces nouveaux
médias.
■ 1. Les bons réflexes

Définir ses objectifs et ses cibles

L’attractivité et la fidélisation sont des objectifs essentiels, mais trop généraux. Il s’agit à
présent d’entrer dans des objectifs plus précis et qui vont constituer des priorités d’actions :
s’agit-il d’objectifs opérationnels ou de communication, de notoriété, d’image ? Ces priorités
peuvent être la révision du process d’intégration, l’augmentation de l’attractivité des métiers
commerciaux sur les bac +2, le renforcement de la perception des règles de mobilité interne,
la revitalisation du process d’évaluation, l’amélioration de la notoriété de l’entreprise auprès
des universitaires… Autant de pistes de progrès qui ont été mises en lumière dans la phase
de définition de l’identité employeur. À ces objectifs sont immédiatement associées des
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cibles qu’il s’agira également de définir. Nous ne revenons pas sur les types de cibles et les
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critères à retenir pour les identifier, ils ont été largement abordés dans les chapitres
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précédents.
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Bâtir le plan d’actions

Une fois les objectifs fixés et les cibles identifiées, il s’agit de définir un plan d’actions
organisé selon les priorités, séquencé dans le temps, avec des estimations budgétaires. Il
convient d’être pragmatique et de bien cadrer son plan d’actions dans cette phase. Rares
sont les situations d’entreprises où il va être possible de remettre à plat plusieurs process RH
simultanément, à la fois en raison des coûts induits, de contrat pluri-annuels généralement
négociés avec différents prestataires, de l’accompagnement au changement indispensable
pour les différents acteurs concernés. Il n’est pas non plus raisonnable financièrement de
refondre l’ensemble des supports de communication rendus obsolètes : site web,
présentations écoles, brochures, courriers candidats, pitchs des recruteurs… Il sera donc
indispensable de lister l’ensemble de ces supports et d’identifier ceux qu’il est possible de
mettre facilement à jour, afin d’harmoniser les messages, les promesses, dans une double
contrainte d’installation de la nouvelle marque employeur et de contraintes budgétaires.
Adapter son organisation interne

La dimension stratégique d’une telle démarche justifie qu’elle soit pilotée par une instance
dédiée : une direction du marketing RH. Cette direction aura en charge la définition de la
marque employeur, veillera à sa cohérence dans toutes ses déclinaisons de communication.
La direction du marketing RH travaillera en lien étroit avec la direction de la communication
pour assurer un parfait alignement entre la marque corporate et la marque RH, entre les
différentes prises de parole qui en découlent. La direction du marketing RH assurera
également un rôle central dans la définition des priorités d’actions et des orientations
retenues, dans la coordination des différents chantiers d’optimisation de l’offre RH :
recrutement, intégration, formation, rémunération, évaluation, mobilité… et, enfin, dans la
mise en place des indicateurs de suivi, qu’ils soient internes ou externes.

La construction du plan d’actions et les présences à déployer doivent amener quelques


questions sur de nouveaux besoins de formation ou des révisions de l’organisation et de la
répartition des tâches. Nous avons vu que le déploiement de la marque employeur passera
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nécessairement par une présence digitale, avec certainement un volet sur les médias
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sociaux. Les équipes RH en charge de ces sujets disposent-elles des compétences
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nécessaires ? Avez-vous mis en place les outils de veille et de surveillance de votre


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réputation en ligne ? Un de vos collaborateurs peut-il assurer les missions de community


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manager RH ? Est-il formé à ces nouveaux outils ? Avez-vous pensé à vous coordonner et à
vous appuyer sur les départements de la communication qui ont peut-être déjà mis en place
ce type d’équipe ?
Quand les changements sont importants, cela peut se traduire par une réorganisation de la
partie RH en charge de cette politique marque employeur, avec l’apparition de nouveaux
postes et de nouvelles fonctions. Autant d’évolutions qu’il convient aussi d’anticiper et
d’évaluer dans votre approche budgétaire.

Quelques outils de pilotage utiles

Les outils suivants sont des indicateurs de l’activité. Ils assurent une évaluation et un suivi
des actions menées, servent d’aide à la décision pour les actions correctives. Ils présentent
aussi l’avantage de formaliser le travail des équipes en charge du déploiement de la marque
employeur. Ce sont aussi très souvent de formidables outils pédagogiques. À ce titre, on
pourra les enrichir d’informations sur la concurrence, sur l’arrivée de nouveaux acteurs,
d’initiatives remarquables. Il conviendra donc de réfléchir avec soin à la liste des
destinataires internes de ces outils, car ce sont à la fois des outils de pilotage et des véhicules
d’acculturation de la transition digitale.

Le brand book

C’est le document de référence qui va expliquer la PVP (People Value Proposition), présenter le
territoire de la marque employeur et sa contribution à la stratégie, donner des éléments de
discours. On y trouvera également la charte graphique et quelques exemples de création :
page de site web, annonces presse, bannières web, présentation des écoles, brochures…
Cette « bible » fixe le cadre de la marque employeur et permet d’assurer une cohérence dans
toutes les prises de parole, à la fois sur le fond des messages et dans leur traduction créative.
Elle peut être mise à disposition des équipes RH et de communication, des managers, sous
des formes différentes : sur intranet, en version papier, sur clé USB ou sur CD-ROM… Le
brand book s’enrichit régulièrement des nouvelles actions de communication qui font vivre la
marque employeur. Utilisé comme un media center, il pourra aussi mettre à disposition des
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différents prestataires les gabarits de supports (brochure, bannières et habillages de sites
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web).
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Le portfolio des présences

C’est un document de synthèse qui regroupe tous les supports et outils utilisés. Ils peuvent
être organisés selon les objectifs (image versus recrutement), les cibles (jeunes diplômés
versus candidats confirmés), types de contenus (infos froides ou chaudes), périmètre (national
ou international) ou toute autre segmentation qui paraîtra utile pour veiller à une
répartition pertinente des moyens. C’est un outil utile pour s’assurer que la multiplication
des présences ne nous éloigne pas des objectifs et de juger si des présences sont
redondantes ou manquantes.
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Exemple de portfolio des présences en ligne, organisées selon la nature des contenus et les objectifs.

Le tableau de reporting

Il comprend une sélection d’indicateurs retenus pour leur pertinence à évaluer l’atteinte des
objectifs : visiteurs du site, nombre de candidatures, ratio visiteurs/candidatures, followers,
fans, sources du trafic, coût unitaire de la candidature… Il en existe des tas. Le risque est de
concevoir un outil inutile : trop lourd à gérer et à mettre à jour, et trop d’indicateurs
impossibles à suivre.

Ne pas négliger l’offre d’emploi

Le développement de la marque employeur, les approches marketing du sourcing, l’arrivée


d’acteurs de la communication corporate sur la communication recrutement ou l’émergence
des médias sociaux ont peu à peu ringardisé – à tort – l’offre d’emploi. Les sites de
recrutement eux-mêmes ont participé à cette mise à l’index. Pourtant, les usages comme les
attentes des candidats, mais aussi les nouveaux outils disponibles, incitent à remettre
profondément en cause cette séparation et à associer étroitement discours sur l’entreprise
et sur le poste pour inventer l’offre d’emploi « augmentée ».
Historiquement, la communication pour l’emploi se résumait aux annonces de recrutement.
Informatives, peu élaborées graphiquement, elles relevaient davantage du mode d’emploi
que de l’action de communication. Elles étaient regroupées dans des pages dédiées des
supports de presse, parfois cantonnées dans des suppléments. Ces pages ne brillaient pas
par l’originalité de leur maquette, commercialisées à la ligne ou à la surface utile, preuve
supplémentaire de l’estime qu’on leur portait.

La marque employeur :
la face noble de la communication RH

La marque employeur, nouvelle dimension indispensable de la communication de


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l’entreprise, s’est imposée aussi en existant par opposition aux offres d’emploi. La marque
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employeur a développé un discours sur l’entreprise, ses valeurs, qui offre aux candidats une
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promesse de carrières, d’évolution, une culture propre qui démarque l’entreprise de ses
concurrents directs. C’est aussi une réponse naturelle à une attente nouvelle des candidats
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vis-à-vis du travail, qui s’est progressivement éloignée d’une fonction exclusivement


utilitaire pour s’enrichir d’une dimension d’accomplissement, de réalisation de soi. Cette
opposition entre marque employeur et offres d’emploi se traduit par des équipes différentes
dans les entreprises et des espaces différents au sein des nouveaux médias digitaux, même si
la plupart d’entre eux s’en défendent, pour des raisons commerciales évidentes.
Regardez les sites de recrutement des entreprises : d’un côté la présentation de la promesse
RH, des métiers, avec un soin particulier attaché à la forme, et développé sur des
plateformes de gestion de contenu, avec une volonté croissante de la communication
corporate d’y mettre son « grain de sel ». De l’autre, des « ATS », bien nommées outils de
gestion des offres, qui intéressent peu les experts de la communication ou de l’ergonomie
bien qu’ils ne brillent pas par leur expérience candidat ou par la qualité de leur interface
dans la plupart des cas. Il est indispensable de casser cette logique avec d’un côté le contenu
sur l’entreprise, de l’autre le descriptif du poste. Et plusieurs arguments justifient l’urgence
et la pertinence de ce changement.
Les attentes des candidats

Les études d’attractivité et les enquêtes montrent toutes l’importance croissance accordée
par les candidats à l’environnement immédiat du job et aux informations pratiques et
concrètes autour du poste. Faut-il y voir chez les candidats une preuve supplémentaire de
l’approche consumériste et court-termiste de l’emploi, avec une priorité donnée à
l’employabilité du poste au détriment d’une projection dans une carrière au sein de
l’entreprise ? Ou est-ce lié au rejet des discours marketing trop souvent éloignés de la
réalité, une tendance profonde en publicité commerciale comme en RH ? L’intérêt porté par
les candidats pour les échanges directs avec les collaborateurs via les réseaux sociaux est
une autre preuve de ce rejet des discours formatés, portés par des porte-parole
assermentés, donc peu dignes d’intérêt.

L’importance de Google et des agrégateurs d’offres

Google reste le chemin d’accès privilégié par les internautes pour accéder aux informations
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sur une entreprise, y compris en tant qu’employeur. Faites appel à votre propre expérience :
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lorsque vous avez été en recherche d’emploi, quelle a été votre requête sur Google ?
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« Valeurs », « politique RH », « actions handicap » ? Évidemment non, votre recherche s’est


concentrée sur le poste et son environnement immédiat : « responsable commercial
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équipements auto », « directeur logistique Paris », « acheteur textile hypermarché »… et vous


avez obtenu comme résultat une liste d’offres d’emploi. Ajoutez à cela, la montée en
puissance d’agrégateurs comme Indeed ou Keljob, qui s’intéressent davantage à vos offres
d’emploi qu’à la page sur votre programme d’intégration ! Si vous avez encore un doute,
consultez donc les statistiques de votre site carrières pour connaître la répartition du trafic
entre pages de contenus et pages d’offres. Et si un dernier argument est encore nécessaire
pour vous convaincre, après le trafic naturel, sur quoi portent vos campagnes de
communication RH ? Comment est alloué le budget média ? Les actions portent très
certainement sur des campagnes de recrutement, centrées sur des postes, avec des objectifs
opérationnels à court terme. À quand remonte votre dernière vraie campagne d’image RH ?

L’offre d’emploi « augmentée » : un véhicule autonome de la marque


employeur

Il est donc temps de réhabiliter l’offre d’emploi, à condition de lui apporter un léger
« lifting ». L’offre d’emploi n’est pas un mode d’emploi mais une invitation. Un travail sur la
rédaction des phrases et le bannissement des acronymes que seul l’interne comprend est
souvent indispensable. Cela suppose de faire de l’offre d’emploi à la fois le véhicule du
discours sur le poste et en même temps le support du discours d’entreprise, à condition que
les éléments de ce discours aident le candidat à mieux comprendre l’environnement, les
enjeux du poste, pour faire son choix en parfaite connaissance de cause. Inutile de parler de
la dimension internationale de l’entreprise pour un poste basé à Limoges avec un périmètre
business exclusivement français.
Ainsi, pourquoi ne pas enrichir ce descriptif de poste (que l’on aura bien pris soin de ré-
écrire) avec une infographie sur les chiffres-clés de l’entité concernée, d’y associer une vidéo
du manager qui présentent les enjeux de cette ligne métier, complété d’un moyen de
contacter par mail, LinkedIn ou Twitter un collaborateur qui occupe ce même poste dans
l’entreprise. L’offre d’emploi sera alors un objet autonome du marketing employeur, qui
regroupe l’information, le moyen de contact et le « call to action ». Cette nouvelle offre
d’emploi « augmentée », pourra facilement circuler sur les médias sociaux ou être référencée
par Google. Certaines offres d’emploi du site de la Marine Nationale EtreMarin.fr se
rapprochent de ce nouveau modèle.
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■ 2. Le site de recrutement
Nous sommes ici aux antipodes des discours qui condamnent un peu trop vite les sites de
recrutement sur l’autel des réseaux sociaux. Ils conservent une place essentielle dans l’éco-
système de la marque employeur, à la fois pour la dimension communication et outil de
candidature. D’après l’étude Potential Park 2013, les sites de recrutement restent le premier
canal d’information et de recrutement pour 75 % des candidats. Il s’agit simplement de
s’interroger sur une nouvelle façon de concevoir les sites de recrutement pour les adapter
aux nouveaux usages. Et l’enquête 2015 de RegionsJob sur les méthodes de recrutement
confirme l’attrait de ces mêmes sites auprès des recruteurs.

L’importance de la phase d’étude utilisateurs


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Candidats et recruteurs sont les premiers concernés puisque le site leur est prioritairement
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destiné. Pourquoi dans ce cas accorder si peu d’importance à leur opinion au moment de la
conception ? Ces deux populations sont précieuses pour disposer d’insights qui permettront
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d’identifier les points de faiblesse du site actuel, ou au contraire ceux plébiscités, de préciser
les besoins à la fois en termes de fonctionnalités et de contenus. Cette phase ne doit pas
être négligée car de sa qualité dépendra l’ensemble du projet. Elle est indispensable pour
nourrir la réflexion et se forger des convictions. L’écueil principal qui menace un projet de
refonte de site de recrutement est que tout le monde ou presque, dans l’entreprise, est
persuadé de savoir ce qui est bon pour le candidat, ce qui est la norme ou la mode en
ergonomie et les contenus qui feront « mouche ». Cette phase d’étude est d’autant plus
importante qu’elle permettra de contrer des décisions « tièdes », consensuelles ou
« politiques » parfois prises en interne, et souvent très éloignées des vrais besoins des
candidats. Aussi nous vous recommandons de cadrer ce travail d’écoute et de recueil au
travers de tables rondes, de focus groups, de sondages en ligne auprès des recruteurs de
l’entreprise, de jeunes diplômés en recherche de stage ou d’emploi, de candidats confirmés
et en poste, et des nouveaux recrutés. On pourra les interroger sur leurs usages, leurs
attentes, leurs opinions sur le site de son entreprise et ceux des entreprises concurrentes.
Suivant le budget disponible, cette étape pourra être réalisée avec l’aide d’instituts d’études
qui apporteront la caution méthodologique, ou plus simplement organisée en interne. Les
résultats seront dans tous les cas riches d’enseignements. Une source précieuse pour
réinventer votre site avec des choix pertinents.

Les outils de candidature sont des cimetières de CV

Pourquoi demander au candidat de passer vingt minutes à remplir un formulaire de


candidature en ligne (qui ne sera sans doute jamais mis à jour et donc obsolète dans six
mois), quand dans le même temps, il dispose d’un profil complet et régulièrement mis à jour
sur un réseau social professionnel ? Ce qui fait la valeur d’une base de données, c’est sa
capacité à s’enrichir des interactions au fil du temps : on comprend l’avantage des réseaux
sociaux professionnels ; c’est exactement le fonctionnement inverse des outils pour postuler.
Pourquoi ne pas accepter de lier les sites RH des entreprises avec ces réseaux
professionnels ? Non pour postuler plus vite, car la possibilité de « postuler en un clic » est
souvent un piège, mais pour solliciter et évaluer les candidats autrement.
Au lieu de perdre du temps à donner des informations déjà existantes sur d’autres
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plateformes, le candidat devrait plutôt répondre à des quizz, participer à des mises en
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situation, qui enrichiraient vraiment son profil avec des dimensions de savoir être, de valeurs,
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de priorités de vie… et donneraient une réelle valeur aux bases de données des entreprises.
C’est-à-dire des informations qui leur seraient propres, liées à leur secteur d’activité, leur
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culture d’entreprise. Pourquoi ne pas solliciter les business games qui exploitent cette
dimension des mises en situation professionnelles. Pourquoi le faire si loin des sites de
recrutement et des actes de candidature ?

Les volumes sont privilégiés par rapport à la qualité

Le problème des entreprises n’est pas tant de récolter des masses de CV que de disposer de
CV qui correspondent à leur besoin. En effet, les candidats se chargent d’alimenter un
volume constant grâce à des envois massifs et d’autant moins ciblés qu’ils sont facilités par
les nouveaux outils. Mais sans croire un instant que jouer les volumes va augmenter leurs
chances de sélection. Aujourd’hui, les volumes de CV non exploitables, hors cibles,
représentent souvent une très forte proportion de CV reçus. La crise et les difficultés d’accès
au marché de l’emploi ne sont pas les seules raisons.
Il est indispensable de trouver d’autres moyens pour identifier les compétences des
candidats, mais aussi et surtout leur motivation et la cohérence entre leurs valeurs et la
culture de l’entreprise, et ce dans un intérêt commun. Ici encore, nous sommes convaincus
que les mises en situation et les tests en ligne feront évoluer cette logique quantitative vers
plus de qualitatif, et que les candidats comme les entreprises y gagneront : la logique
quantitative a fait les preuves de sa non efficacité à faire se rencontrer l’offre et la demande.
Ces divers filtres permettent aux candidats de s’assurer que ce que propose l’entreprise leur
correspond bien, et aux entreprises d’évaluer le degré de motivation des candidats. Les
candidats se sont-ils vraiment informés sur la réalité d’un métier, le contenu de ses missions,
les qualités nécessaires et les résultats attendus ? Est-il utile pour un recruteur de consacrer
une heure d’entretien à un candidat qui n’a pas fait l’effort d’accorder quinze minutes à des
tests en ligne ? Les auteurs ont si souvent reçu en entretien des candidats qui n’avaient pas
pris la peine de se renseigner un minimum sur l’entreprise pour laquelle ils postulaient, ou
qui avaient un vague souvenir du poste proposé…

Les contenus exhaustifs font perdre du temps

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Interrogez vos candidats : ils ont une attitude des plus étranges vis-à-vis des sites de
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recrutement. Ils insistent sur l’importance d’y trouver toute l’information sur l’entreprise
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(information qu’on trouve d’ailleurs également sur le site corporate, le site commercial…), sur
son organisation, ses valeurs et ses promesses RH. Dans le même temps, ils sont très critiques
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avec ces contenus qu’ils qualifient de discours commercial.


Mais à la réponse à la question « Avez-vous lu ces contenus ? », la réponse est le plus souvent
négative, exceptée si elle est posée la veille d’un entretien de recrutement, et encore. Quel
est le problème ? Ces contenus sont trop denses, alors que le temps consacré au scan d’une
page web (et nous ne disons pas à la lecture) diminue régulièrement. On est en droit de
s’interroger sur la pertinence de la répartition des ressources allouées d’un côté aux sites RH
(et notamment les budgets informatiques), comparées aux moyens consacrés à la présence
sur les médias sociaux.
La navigation sur les sites RH est utilitariste, il faut donc l’optimiser par des fonctionnalités
qui vont aider l’internaute à gagner du temps, à être plus efficace dans sa recherche en lui
facilitant la tâche. Les internautes sont habitués à Google. Pourquoi ne pas leur proposer des
moteurs de recherche puissants qui vont sélectionner uniquement les informations utiles sur
la base de critères précis ? L’écriture web permet également de définir des niveaux de
lecture et des profondeurs de contenus variables. On pourrait également imaginer
demander aux candidats le temps de navigation dont ils disposent, pour bâtir des contenus
en fonction de cette contrainte. Cette option serait particulièrement utile dans le cadre
d’une navigation en situation de mobilité.

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Le site de recrutement du Groupe Société Générale propose aux candidats un moteur de recherche
qui va sélectionner des briques de contenus et des offres d’emploi en réponse aux critères renseignés
au moment de la requête.

Les sites RH ne sont pas empathiques

Il ne s’agit pas tant de remettre en cause la nature traditionnelle des contenus, que de les
compléter pour s’assurer qu’ils répondent bien à tous les besoins des candidats. La plupart
des contenus actuels sont exclusivement centrés sur l’entreprise. L’exercice traditionnel
consiste à mettre en valeur l’offre RH de l’entreprise, par un curieux jeu de miroir dans lequel
l’entreprise reste convaincue que c’est par l’étalement de ses atouts qu’elle valorise le
candidat. Il en résulte que le candidat devient hermétique à ce discours RH, comme il l’est en
tant que client à tout discours à vocation commerciale.
Une autre piste d’amélioration serait de compléter ces discours « descendants » par des
contenus qui contribuent à faire des sites RH de véritables ressources de conseils pour aider
les candidats, surtout les étudiants et les jeunes diplômés, et en particulier ceux qui
subissent le handicap d’un environnement familial loin de l’entreprise et l’absence d’un
réseau personnel. Aider à mieux connaître un métier, à découvrir un secteur d’activité,
pourquoi pas être conseillé sur un parcours de formation… voire même de contribuer à la
découverte du monde de l’entreprise. C’est un domaine sur lequel les entreprises ont toute
légitimité.

Considérer les sites RH comme des sites de e-commerce

Pourquoi continuer à séparer contenus et process de candidature ? Cette séparation ne


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résulte pas d’un choix stratégique, au service de l’efficacité, mais d’une contrainte imposée
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par des outils différents et des prestataires différents : agences de communication, éditeurs
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de CMS (outils de gestion de contenus), éditeurs d’ATS (outils de gestion de candidature).


Encore une fois, le marketing produit et les sites de e-commerce peuvent inspirer les sites
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RH. L’internaute candidat doit être l’élément central des réflexions : moteur de recherche
puissant pour sélectionner les contenus ET les offres pertinentes en même temps, parcours
et actions de l’internaute qui contribuent à enrichir son profil, fonctionnalités d’actions qui
ne se résument pas à « je postule ou je pars », notions de prospect chaud, de prospect froid,
de première visite ou de visiteur récurrent…
Le suivi de certains indicateurs statistiques propres aux sites marchands peut être utile :
proportion de visites régulières, nouveaux visiteurs, taux de transformation, nombre
d’abandons en cours de process de candidature, etc.

➤ Témoignage

Le site carrière : pièce maîtresse de la stratégie de recrutement

Le lieutenant-colonel Éric De Lapresle est chef du bureau marketing et communication de recrutement de


l’armée de Terre. Il revient sur le rôle central du site carrière dans leur politique de recrutement.
« En 2015, suite aux attentats de janvier, l’armée de Terre a dû se déployer rapidement sur le territoire national
pour participer à la protection des Français. Cette nouvelle mission a nécessité une augmentation de près de 50 %
du recrutement. Le nombre de jeunes à recruter est passé de 10 000 à près 15 000. Cela nécessite qu’environ
160 000 jeunes candidatent.
La réactivité de la communication de recrutement a pu s’appuyer sur le rôle central de son site carrière. »

Une stratégie drive to web to Cirfa

Notre stratégie globale de recrutement est une stratégie « drive to web to Cirfa » (Centre d’information et de
recrutement des forces armées). L’enjeu est donc de rediriger les jeunes vers notre site de recrutement, qui renvoie
lui-même auprès des Cirfa. Nous avons un maillage du terrain avec 107 Cirfa dans toute la France, y compris en
Outre-mer. 107 bureaux auprès desquels les jeunes qui souhaitent avoir un contact humain peuvent se rendre
pour y rencontrer un conseiller en recrutement.
Nous envisageons cette stratégie comme une vraie manœuvre militaire. Comme pour toute manœuvre militaire, il
faut un ennemi. Ici, il s’agit de l’attentisme des jeunes et de la méconnaissance de l’armée de Terre. Pour mettre
cette manœuvre en place, nous avons cinq lignes d’opérations : la publicité et l’achat d’espaces (actions télé, web,
affichage…) ; l’image et la marque employeur nous positionnant dans le paysage des entreprises qui recrutent, et
non comme une entité à part ; la formation et la communication interne pour inculquer à nos officiers en
formation que le recrutement les concerne au jour le jour ; les RH, avec des personnes affichant une bonne culture
RH ; et la gestion des déçus. Nous devons absolument communiquer vers les jeunes qui ne peuvent pas devenir
soldats et qui l’auraient souhaité.

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Un politique plurimédia à 360 °
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Nous avons plusieurs outils pour cette manœuvre, avec une politique plurimédia à 360 degrés. Toutes les actions
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doivent ramener le jeune vers le site sengager.fr. Nous sommes bien entendus présents sur les réseaux sociaux
comme Facebook, Twitter, Pinterest, Google+ et bientôt Flickr. Ces réseaux nous permettent de répondre quasi
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instantanément aux jeunes, et de déployer notre politique éditoriale en fonction des supports. Avec toujours un
objectif : les rediriger vers notre site de recrutement, conçu pour trouver toutes les informations nécessaires pour
nous rejoindre.
Nous organisons également des tchats réguliers et sommes présents sur plusieurs job boards.
Nos campagnes sont réalisées à chaque fois pour trois ans. Nous devons donc avoir une grosse capacité
d’innovation et d’anticipation sur ce que seront les outils dans trois ans. Nous travaillons un peu sur l’intelligence
artificielle, la sémantique et le web 3.0.

Responsive design et IA

Le nouveau site a été lancé le 17 janvier 2013. Il s’adresse à trois catégories de personnes : les profils sans le bac,
ceux à bac +2 et ceux au-delà de bac +2. Chacun, selon son parcours, sera redirigé vers les possibilités qui lui sont
offertes. Par ailleurs, nous avons également développé un nouvel onglet intitulé « Votre enfant s’engage ». Il s’agit
de s’adresser aux prescripteurs : les parents. Nous leur présentons le déroulé du parcours du jeune dès lors qu’il va
entrer en contact avec nous, sa rencontre avec un conseiller de recrutement, sa formation, etc. Cela fonctionne
bien, ça rassure.
Nous avons conçu ce site avec les retours d’expérience des années précédentes. Notre première priorité était de
construire un site en responsive design, c’est-à-dire déclinable sur les outils mobiles.
Une autre particularité du site est de proposer tout de suite au visiteur un système de questions avec une
innovation lancée il y a trois ans. Il s’agit d’un agent virtuel qui répond à toutes les questions.
À mesure que des questions sont posées, il s’enrichit. C’est le début de notre approche de l’intelligence artificielle.
Nous avons aujourd’hui un taux de satisfaction de 95 % sur cet avatar. Il est protéiforme, pouvant adopter toutes
les couleurs de peau, pour traduire notre esprit d’ouverture totale, à tous.

Un bilan positif

« En 2016, l’armée de Terre lancera une nouvelle campagne. Le site carrière restera sans doute au cœur du
dispositif mais l’idée est de compléter la communication de publicité par une communication de transformation des
contacts en engagements. Rendez-vous en mars 2016 pour savoir comment répondre à cette équation.
D’ici là, en septembre, l’armée de Terre aura sorti une application de coaching RH et sportif, la première du genre
en France pour permettre aux candidats de mieux se préparer. »

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■ 3. L’importance du contenu sur les médias sociaux
Les termes « brand content » et « storytelling » sont aujourd’hui très à la mode. On les retrouve
dans tous les ouvrages, conférences ou interviews qui parlent de communication
d’entreprise, au risque parfois de susciter indigestion et rejet. Il ne s’agit pourtant pas de
négliger cette dimension, essentielle à nos yeux pour faire vivre la marque employeur. Les
contenus sont aujourd’hui indispensables à la présence de marque dans les médias
numériques, simplement parce que sur eux repose la qualité, et donc l’attractivité de cette
présence digitale. La valeur d’une communauté en ligne, quel que soit son sujet, ne se
mesurera qu’à l’aune de la qualité des contenus qu’elle proposera. C’est la valeur ajoutée de
ces contenus qui agrégera et fidélisera une communauté de membres, la fera croître, et
l’incitera à contribuer aux discussions, à partager les contenus. Michelin s’est appuyé sur des
informations utiles aux automobilistes avec son guide lancé en 1900, qui trouvait sa place
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dans toutes les boîtes à gants. Citroën a organisé la Croisière Jaune pour constituer un stock
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de contenus audio-visuels destinés aux actualités cinématographiques. Le livre de recettes
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de SEB rendait la cocotte-minute indispensable dans toutes les cuisines des femmes
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modernes des années 1970.


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Bien avant le digital, ces entreprises avaient compris l’importance d’offrir des contenus qui
donnent – le mot est important – quelque chose à leurs clients, en complément des discours
promotionnels.
Il est indispensable de garder à l’esprit ces trois exemples quand il s’agira d’organiser ses
prises de parole pour faire vivre la marque RH sur les médias à disposition. Quels sont les
contenus qui peuvent intéresser vos cibles, les aider dans leurs démarches, résoudre certains
de leurs problèmes ? Derrière ces questions, il y a bien évidemment la nécessité de bien
connaître ses différentes cibles (candidats ou autres), de les segmenter, d’identifier leurs
attentes, d’entendre leurs préoccupations, de comprendre leurs motivations.

Quelle stratégie de contenus adopter sur les réseaux sociaux ?

Rappelons une évidence : la stratégie qui sera mise en place doit servir des objectifs, auprès
d’une population donnée. Il s’agira donc de se reposer régulièrement les mêmes questions :
ces contenus servent-ils ma stratégie, contribuent-ils à l’atteinte de mes objectifs, et
répondent-ils à un besoin de mes cibles ?
N’oublions pas que nous cherchons à être dans une logique de don qui va valoriser la marque
(donner aujourd’hui pour mieux recevoir demain), susciter l’intérêt ou la curiosité, et si
possible donner envie de participer, de contribuer, de commenter, de partager. Il est donc
difficile de répondre positivement à des attentes de ROI sur un registre qui concerne l’image.
On ne peut exiger davantage de la communication RH 2.0 qu’on ne le fait pour d’autres
formes de communication sur l’image. GMF et Société Générale soutiennent le rugby.
Demande-t-on à l’une le nombre de contrats d’assurance signés ou à l’autre le nombre de
comptes ouverts grâce à ce sponsoring ? Les critères de ROI doivent être cohérents avec les
objectifs fixés.
• Les réseaux sociaux fonctionnent sur le principe de communautés qui « se retrouvent »
autour de contenus et d’échanges, car elles y trouvent un intérêt : des contenus utiles,
informatifs, divertissants… Comment trouver les contenus, qui répondront à ces objectifs ?
C’est la phase d’étude effectuée sur les attentes des candidats qui va permettre d’identifier
des pistes. Les entreprises abordent par exemple largement la thématique des stages, de
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l’alternance et de l’apprentissage au travers des conseils, plus attractifs pour séduire des
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candidats, à qui on ne proposera des offres d’emploi que dans un second temps. Face à la
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multiplication d’initiatives de ce genre, le niveau d’exigence des candidats s’est accru ; il faut
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donc savoir y répondre car la médiocrité est sévèrement sanctionnée.


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• Dans la partie III, nous avons abordé le cycle de vie du candidat, et les attentes différentes
associées à chaque phase. La stratégie de contenu peut s’appuyer sur cette logique pour
segmenter les contenus, établir un programme éditorial qui se focaliserait sur une des
phases, ou au contraire travailler sur des contenus dédiés à chaque étape pour tenter de
maintenir la relation sur la durée.
• La principale difficulté, notamment en phase « d’amorçage », est de produire des contenus.
Ce n’est pas une problématique financière, mais bien celle de trouver quels contenus vont
nourrir les présences. Les contraintes de validation interne et d’échelle de temps différentes
entre l’entreprise et les médias sociaux ont été évoquées. Elles sont bien l’écueil principal.
Certes, la curation intelligente de contenus disponibles en ligne est une solution facile qui
peut contribuer à alimenter ces espaces. Mais est-ce suffisant pour nourrir la marque ? À
l’évidence, non. Il existe dans l’entreprise une masse non négligeable de contenus qui ont
peu ou pas été diffusés en externe. Ils présentent le double avantage d’avoir déjà été
achetés ou produits et validés. Une sélection de ces contenus, et un travail pour adapter leur
forme aux médias sociaux, sera un excellent moyen de débuter.
➤ Témoignage

Marque employeur : des contenus adaptés aux différents réseaux

Jean-François Schoonheere est directeur du développement RH. Il revient sur la politique de contenu
développée par l’entreprise sur les supports numériques.

« Nous avons commencé par travailler, début 2011, sur la construction de notre identité employeur. Nous avons
mené un travail d’audit externe et interne pour identifier les valeurs qui qualifiaient au plus juste notre entreprise.
Tout ceci a débouché sur l’identification de trois piliers : une entreprise innovante, une entreprise apprenante et
une entreprise responsable.
À la même période, nous avons revu notre positionnement digital. Nous avions jusqu’alors un site commun au
corporate et au commercial. Nous avons scindé ces deux activités en deux sites distincts. Le lancement du nouveau
site était ainsi opérationnel en septembre 2012. En parallèle, nous avons développé dès début 2012 l’ensemble de
nos supports sociaux.

Ma principale préoccupation a toujours été de « parler vrai » en donnant d’une part la parole à nos collaborateurs
et en mettant d’autre part en avant nos « preuves RH » pour sortir des déclarations de bonnes intentions et des
affirmations gratuites. Sur ce dernier point, l’obtention de la certification Top Employer en 2014 nous a permis
d’étayer plus avant la qualité de notre offre RH et a fait de Bouygues Immobilier, le premier promoteur immobilier
certifié pour l’excellence de ses pratiques RH. |
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Viadeo, LinkedIn et Twitter
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Notre page LinkedIn regroupe – en juillet 2015 – 14 600 followers. Il s’agit d’une véritable page carrière, sur
laquelle nous publions des offres d’emploi, de l’actualité corporate et RH via des vidéos métiers, des témoignages
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de collaborateurs, etc. L’audience sur ce réseau est plutôt qualitative et touche un certain nombre de profils
expérimentés.
Nous disposons également d’un profil Viadeo, ouvert début 2013. Au-delà de l’onglet actualités sur lequel nous
diffusons nos actualités RH et business, nous mettons à disposition de nos abonnés un accès direct à notre site
carrières, intégré directement sur un onglet dédié.
Pour Twitter, nous utilisons un fil commun avec le corporate, pour relayer nos événements RH. Nous sommes
également très axés développement durable sur ce réseau.

YouTube

Notre chaîne YouTube, quant à elle, s’adresse vraiment à tous les publics. Elle nous permet de relayer nos
contenus interactifs. Nous allons retrouver des vidéos métiers pour faire connaître ces derniers. Des métiers où l’on
se retrouve vite avec des responsabilités de chef de projet. Ce qui répond assez fortement aux attentes des jeunes
diplômés. Nous jouons aussi sur le côté passion du métier, qui demande d’imaginer avec trois, quatre, cinq ans
d’avance, ce que sera l’habitat de nos clients et la ville de demain. Nous mettons ainsi en avant nos valeurs
d’innovation, mais aussi d’apprenance en communiquant sur nos programmes de formation. Nous développons
des communications événementielles. Par exemple, avec nos stagiaires et alternants en 2015, nous avons lancé un
certain nombre de vidéos sur le concept du produit immobilier du futur réalisé à partir de matériaux usagés. Une
façon de mettre en avant les idées de nos étudiants, de cultiver leur esprit d’équipe tout en montrant l’univers
créatif dans lequel ils évoluent chez Bouygues Immobilier.

Facebook, Instagram et Jobteaser


Notre page Facebook s’adresse clairement aux étudiants. Nous y relayons notre actualité des relations écoles,
notre participation aux forums de recrutement, aux actions autour du handicap, etc. Dans le cadre des trois piliers
constitutifs de notre marque employeur, nous appuyons plus sur le côté développement durable, qui parle
beaucoup aux jeunes diplômés. Nous avons lancé cette page en 2012, à l’occasion de notre concours Bref. Depuis,
nous avons 2 8 33 followers. Ce qui n’est pas mal pour une entreprise de 1 900 salariés.
Nous développons des communautés pour capitaliser sur un réseau de candidats affinitaires avec notre marque
employeur.
Nous sommes également présents sur Job teaser. Nous y avons une page qui nous permet de toucher les
étudiants. Nous avons notamment organisé des chats texte et vidéos par ce biais.
Depuis mai 2013, nous sommes aussi présents sur Instagram. Nous avons lancé ce compte à l’occasion d’un
concours de stagiaires que nous organisons en interne sur l’architecture et le design. En moins d’un mois, nous
avons recueilli 670 abonnés. Ce compte s’adresse à tous les publics et doit continuer à vivre et être vecteur de
partage de contenus photos et/ou vidéos sur le thème de l’architecture et du design. Ce compte alimente en
contenus notre page Facebook
Bouygues Immobilier Campus.

Sur ces supports dédiés aux jeunes diplômés, nous essayons d’adopter un ton un peu différent, un peu plus
familier, plus décalé que sur les autres réseaux.

Un trafic qualifié
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Tous ces supports sont habillés avec une même charte graphique qui fonde notre identité visuelle. L’objectif de
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cette présence digitale est de générer du trafic qualifié sur notre site carrière. Ils sont reliés à l’ensemble de
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l’écosystème Bouygues Immobilier (blog demain la ville…) pour amplifier le trafic et les contenus.
Début 2013, nous sommes entrés dans le classement Top career website 2013 France de Potential Park. Un
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classement où nous côtoyons des groupes qui ont des moyens bien plus conséquents que les nôtres. C’est une
reconnaissance qui nous dit que nous sommes dans le vrai. »

Où prendre la parole ?

Les acteurs de la marque RH peuvent se sentir déroutés devant la multitude d’espaces de


communication disponibles. Les segmentations traditionnelles entre média et hors média, et
même off et on-line sont dépassées. De nouveaux acteurs du web apparaissent chaque jour,
d’autant plus tentant que leur modèle peut faire croire à une certaine gratuité. Le principal
risque est celui d’un empilement d’actions qui tiendrait lieu de stratégie. Face à cette
multitude d’espaces d’expression disponibles, répond la fragmentation des audiences. Il est
donc moins facile de toucher une cible dans sa totalité. Comment, dans ces conditions, ne pas
éparpiller ses moyens et ses ressources, au risque d’aboutir à un saupoudrage inefficace et
coûteux ?
Schématiquement, nous distinguons deux grands types d’espaces : les espaces propriétaires
et les espaces existants.
Les espaces propriétaires sont ceux créés par votre entreprise : sites de recrutement et
blogs principalement. Ils présentent l’avantage de pouvoir être conçus au plus près des
objectifs recherchés. Qu’il s’agisse de fonctionnalités, de contenus, de graphisme,
l’entreprise est totalement libre dans ses choix. De plus, elle est totalement maître dans la
gestion, l’évolution, l’enrichissement de ces espaces. En revanche, ces espaces présentent
un coût et des délais de conception parfois conséquents. Ils imposent aussi de disposer en
interne de compétences particulières sur la gestion de ce type de projets. Enfin, dernier
inconvénient, ces plateformes seront lancées avec une audience nulle au départ. Il faudra
donc prévoir d’acheter de l’audience via des campagnes de promotion, sinon le trafic ne
décollera pas. Liberté totale et audience à acquérir peuvent donc résumer ces espaces.

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Sephora, qui a lancé son blog RH en 2007, a ensuite fait le choix de migrer sur Facebook en 2011 pour
privilégier des échanges plus directs et spontanés.

À côté, les espaces tiers sont composés des différents réseaux sociaux : Facebook, LinkedIn,
Viadeo, Twitter, Pinterest, Vine… ou des forums, par exemple. Ils présentent les avantages
de disposer immédiatement d’une audience potentielle énorme pour certains, de mettre à
disposition des annonceurs des fonctionnalités immédiatement opérationnelles, qui
s’améliorent régulièrement par le jeu de la concurrence entre réseaux. En revanche, ces
fonctionnalités, les interfaces, la mise en pages, les types de contenus sont imposés.
L’entreprise doit s’inscrire dans un cadre qui est identique à celui de ses concurrents. Ces
mêmes concurrents qui ne sont qu’à un clic de sa page. En outre, ces espaces présentent
pour l’entreprise un certain nombre de risques et de limites dont il faut être conscient.

Les risques et limites des réseaux sociaux

Il est nécessaire d’évoquer les risques et limites pour les entreprises à lier leur sort à celui de
ces réseaux sociaux. La pérennité de ces acteurs ne peut être assurée dans le temps ; dans un
marché non encore mature, de nouveaux acteurs viendront peut-être bousculer les anciens.
Les solutions techniques pour lier des réseaux sociaux et des outils de recrutement imposent
aux entreprises des investissements informatiques pour adapter leurs sites de recrutement.
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Les entreprises peuvent ne pas souhaiter engager ces budgets et dans le même temps faire
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une forme de promotion indirecte aux réseaux sociaux, qui sont aussi des entreprises privées
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à vocation commerciale. De plus, cette contrainte budgétaire pourrait tendre à renforcer la


situation des acteurs existants et généralistes au détriment de nouveaux acteurs plus
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spécialisés et innovants. Il peut également exister des problèmes d’adéquation entre les
réseaux sociaux professionnels et votre entreprise : différence de couverture géographique,
et différence dans les structures et les informations de profils.
Le danger principal à garder à l’esprit est que les contenus et les communautés développés
par les entreprises restent la propriété des réseaux sociaux. L’exemple de Kiabi, qui s’est vu
fermer sa page par Facebook, est resté célèbre. En dehors même de tout litige, le résultat est
le même : si l’entreprise décide de mettre fin à son contrat qui la lie à LinkedIn, Facebook ou
Viadeo, aucun ne s’engage dans ses conditions générales à restituer les contenus et les
échanges présents sur les pages et les communautés créées et animées par l’entreprise. Ils
restent donc la propriété du réseau social, même si l’entreprise a « acheté » ces contacts à
partir des solutions payantes commercialisées par le réseau social. Il s’agit alors de bien
évaluer l’intérêt de bénéficier d’une audience potentielle rapidement, de définir les
ressources à y consacrer, en ayant conscience de cet état de fait. Dans tous les cas, ne pas
baser sa visibilité d’employeur sur un seul de ces espaces, ou uniquement sur ces espaces
tiers. Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, dirait le bon sens populaire.
Le PEO est une autre approche pour équilibrer votre territoire de présence. On parle alors
de médias « Paid, Earned et Owned ».
Les médias « paid » correspondent peu ou prou à l’achat d’espace : vous payez pour acquérir
de la visibilité, de l’audience, du trafic, du « clic ». Il y a un rapport direct entre
l’investissement de départ et le résultat attendu qui permet un chiffrage budgétaire précis.
Les médias « earned » sont ceux qui vous apporteront une visibilité gagnée, parce que
gratuite : par exemple un site qui relaiera une de vos initiatives, un blogueur qui rédigera un
billet sur votre dernière opération, un membre Facebook ou Twitter qui postera un message
sur votre entreprise.
Enfin les médias « owned » sont ceux que vous possédez : votre site corporate, votre blog,
votre appli mobile, votre page Facebook, hébergent du contenu, mais aussi des médias qui
relaient des messages plus ou moins promotionnels.
Une articulation efficace entre les trois consiste à investir du budget dans le « paid » et du
temps dans le « owned », avec l’ambition de nourrir le « earned ».

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Qui doit prendre la parole ?
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Les questions du « quoi » et du « où » étant résolues, reste à s’attacher au « qui ». Qui est
légitime pour prendre la parole au nom de l’entreprise ? Qui possède les qualités pour être
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accepté au sein de cet éco-système aux règles particulières ? Qui saura en comprendre les
usages et dans le même temps garder la distance qui permet le respect de la marque et la
cohérence de la stratégie ? L’histoire n’est rien sans le talent du conteur. En 1938, certains
habitants de la côte Est auraient-ils cru à une invasion des extra-terrestres sans le talent
d’Orson Wells et la qualité de son interprétation radiophonique du roman de George Wells,
La Guerre des mondes ?
La question qui se pose derrière le choix du porte-parole est celle de l’organisation. Faut-il
centraliser dans une même équipe tous ces porte-parole ou au contraire privilégier la
proximité avec le métier, l’expertise nécessaire au sujet ?

Les collaborateurs de l’entreprise

Certains collaborateurs ont toute légitimité pour s’exprimer. Nous l’avons déjà dit, la valeur
d’une communauté s’évalue à la qualité des contenus. Les experts des métiers IT, du
recrutement de travailleurs handicapés, ou de l’animation des équipes commerciales
maîtrisent par définition leur sujet. Ils seront rapidement identifiés comme les experts par
les candidats, et sont à même d’aborder les sujets susceptibles de les intéresser.
Ces collaborateurs opérationnels adopteront naturellement un discours plus personnel,
moins institutionnel, un parler plus vrai. La subjectivité de leurs prises de parole ajoutera
une dimension plus humaine, plus émotionnelle, en phase avec les règles du jeu des médias
sociaux. C’est enfin un excellent moyen de valoriser ces populations, de reconnaître leurs
compétences, et d’envoyer vers l’externe l’image d’une entreprise qui met en avant ses
collaborateurs, qui leur donne de la visibilité. Il s’agira simplement de former et
d’accompagner ces équipes le temps nécessaire, pour qu’elles soient en mesure de
s’approprier les règles particulières de ces espaces. Cet apprentissage sera d’autant plus
rapide que les collaborateurs concernés comprendront comment les réseaux sociaux
peuvent les aider dans l’atteinte de leurs objectifs propres : démultiplication de la
communication, gain de temps…

Les experts externes


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Plus que de simples relais d’information, ils seront sélectionnés pour participer aux prises de
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parole de l’entreprise en raison de leur notoriété. Nous l’avons vu, ces experts seront
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susceptibles de porter un discours considéré comme plus crédible qu’une communication


officielle, signée de l’entreprise. Enfin, certains d’entre eux disposent d’une audience propre
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avec leur blog, des communautés qu’ils animent au sein des réseaux sociaux, comme par
exemple Twitter, très utilisé par ces populations. Il est donc important d’effectuer une
sélection rigoureuse de ces experts externes et de définir avec eux des modalités
d’association bien précises. Leur réputation et leur légitimité devront être incontestables,
leur visibilité un avantage supplémentaire.

Les relations écoles digitales

Le déploiement d’une nouvelle marque employeur est une occasion de remettre à plat la
politique de relations écoles. La première étape est l’identification de toutes les actions :
participation aux forums, interventions pédagogiques, versement de la taxe
d’apprentissage, financement d’événements, d’associations, de laboratoires de recherche,
de chaires… Il sera ainsi possible de déterminer l’enveloppe financière globale de toutes
ces actions, et de s’assurer que les moyens investis sont à la hauteur, par exemple du nombre
de stagiaires ou de candidats recrutés, de la popularité de votre entreprise dans ladite école.
Ces premières recherches permettront ensuite de définir une liste d’écoles prioritaires pour
votre entreprise, puis une liste de moindre priorité.
L’utilisation des médias sociaux, hélas encore bien trop peu développée dans les relations
écoles, sera un complément efficace et à moindre coût des rencontres physiques. Ouvrir des
communautés d’étudiants par école – et animées par des collaborateurs diplômés de cette
même école – permettra d’accentuer la présence de votre entreprise auprès des écoles
prioritaires entre deux forums ou, au contraire, de se substituer à des rencontres physiques
pour des écoles jugées moins prioritaires, mais que vous ne souhaitez pas totalement
abandonner. Les community managers des écoles peuvent être des relais efficaces de vos
actions. En effet, pour nombre d’entre eux, ils ne sont apparus que récemment et ces
nouveaux alliés sont en quête de reconnaissance : ils ont à cœur de démontrer leur utilité. Ils
seront peut-être plus réceptifs à vos demandes.

En cas de déficit d’image durable de votre entreprise chez les jeunes diplômés, on pourra
étudier la pertinence d’anticiper la relation par des actions spécifiques auprès des lycées et
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collèges. C’est un pari sur l’avenir, au retour sur investissement long, mais sur des
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populations moins sollicitées par vos concurrents.
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Les stages de découverte en entreprise des élèves de classe de Troisième ne sont pas, à
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l’évidence, la priorité des politiques de stage des entreprises. Il est en effet difficile de
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convaincre des collaborateurs de « supporter » pendant une semaine des collégiens à qui on
ne peut pas confier grand-chose, et qui ne constituent pas des cibles de pré-recrutement à
court terme. Alors que ces stages sont obligatoires, les établissements scolaires ont le plus
grand mal à trouver des entreprises volontaires. Tous les élèves de Troisième n’effectuent
pas ce stage, à commencer par ceux dont les parents sont éloignés de l’entreprise, ce qui
entretient la fracture sociale. Ce devrait pourtant être une priorité pour les entreprises,
l’Éducation nationale et l’État, car c’est un des rares moments où les collégiens peuvent
découvrir le monde de l’entreprise, comprendre un métier, faire naître une vocation, donner
un sens à leurs études, trouver une motivation à l’école. Pourquoi ne pas imaginer un
partenariat entre cinq entreprises géographiquement proches, qui chacune recevrait ces
jeunes pendant une journée ? Tout le monde y gagnerait : l’entreprise, car la charge serait
bien moins lourde, les collégiens, qui découvriraient cinq entreprises au lieu d’une, la société
civile, car cela pourrait réconcilier les jeunes avec l’entreprise.

➤ Témoignage
Recrutement des jeunes diplômés :
la fin d’un cycle ?

Patrick Molle est le président Fondateur de New World University. Il a mis au point, au cours de ses
différentes expériences à la tête de Grandes Écoles de Commerce, des méthodes de recrutement novatrices
basées sur l’évaluation des aptitudes des candidats, sur leur potentiel, plus que sur leur niveau académique
sanctionné, lui, par un préalable : le diplôme. Au programme : tests de raisonnement, épreuves de groupes
et entretiens. Observateur privilégié des nouvelles générations, Patrick Molle suggère de revoir l’approche
du recrutement des jeunes diplômés par les entreprises.

« Nous sommes dans un système vieillissant au cœur duquel on retrouve la culture de l’élite. Un système
extrêmement conventionnel où les entreprises classaient les écoles dans lesquelles elles recrutaient. Mais il existe
des signaux faibles qui peuvent nous laisser deviner la fin d’un cycle.
Une première évolution a consisté à reconnaître que la différence entre quelques écoles jugées comme les
meilleures et d’autres n’était pas fondamentale et que, sur la durée, c’était finalement l’individu et ses capacités,
plus que sa formation, qui allaient jouer.
La deuxième évolution réside dans une certaine prise de conscience de l’arrogance de certaines élites, de leur
manque de souplesse et de leur cloisonnement. Des qualités qui n’aident pas à s’adapter aux changements
croissants auxquels font face les entreprises. Ces dernières ont besoin de leaders nouveaux, qui vont être capables
de créer de la richesse. Ils doivent être innovants et créatifs et aptes à affronter des défis encore jamais rencontrés
par les entreprises. Ils ne doivent donc pas reproduire des schémas passés, mais en inventer de nouveaux. En
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réponse à cette culture de l’élite, les entreprises ont donc aussi commencé à se tourner vers les universités.
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Les réseaux sociaux pour engager le dialogue
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Les méthodes traditionnelles de sourcing au sein des écoles étaient efficaces dans la culture de l’élite, pour
observer, identifier et attirer certains profils. Mais ces méthodes étaient efficaces et suffisantes lorsque les entreprises
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travaillaient avec quelques écoles ciblées, au regard de leurs propres classements… Si elles se contentent de cette
approche, elles vont passer à côté de nombreux talents, parfois atypiques.
Les réseaux sociaux, les serious games sont de nature à apporter aux entreprises les moyens d’établir un rapport
direct avec les candidats et de détecter ceux qui auront un intérêt pour leur activité, pour leur culture, etc. Nous
n’avons pas encore tiré les leçons des bénéfices des communautés et des réseaux sociaux pour recruter. De
nombreux outils aujourd’hui vous permettent de repérer les centres d’intérêt, les aspirations, le niveau d’études et
de nombreuses autres informations – toujours dans le cadre du respect de la vie privée – pour identifier les
candidats et engager un dialogue avec eux. Le futur du recrutement passera par là : la chasse à partir d’un
dialogue instauré.

Internet comme support

Les écoles ont aussi un rôle à jouer. Il ne faut pas uniquement former les étudiants au cœur de métier. Il faut leur
apporter une culture scientifique et une culture d’Internet comme outil de travail, comme support, comme aide à
la mise en relation pour mieux travailler et, surtout, travailler autrement. Il faut les aider à acquérir un état d’esprit,
une culture de résolution de problèmes par l’apport de solutions innovantes.
Les générations de demain en entreprise, celles qui suivent les Y, sont nées avec Internet. Il ne s’agit pas de leur
expliquer comment ça marche, mais plutôt de leur montrer l’éventail des possibilités, comment on travaille avec
des communautés, comment on innove sur le modèle de l’open social innovation, comment on crée une force
collective. Et elles apprennent très vite… »
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Les ambassadeurs de la marque employeur

La décision de mettre en place un réseau d’ambassadeurs est souvent portée par


l’importance que peuvent présenter des collaborateurs « non RH » comme représentants de
l’entreprise en tant qu’employeur. Ces ambassadeurs sont aujourd’hui parés de toutes les
vertus en raison de leur connaissance de la réalité business, leur liberté de ton, leur proximité
en tant qu’anciens de l’école qu’ils vont rencontrer. Tous vos collaborateurs ne se rêvent pas
ambassadeurs de votre entreprise. Un certain nombre de conditions sont nécessaires à la
mise en place d’un tel réseau, sans nécessairement être une garantie de la réussite du projet.
• L’ambassadeur doit avoir un lien suffisamment fort avec son entreprise, partager sa
stratégie, ou tout le moins ses principaux choix, être convaincu des efforts faits par
l’entreprise pour le bien-être et/ou l’employabilité des collaborateurs.
• L’ambassadeur doit disposer de temps dédié à sa mission de VRP : ce qui signifie que cette
activité doit être compatible avec ses missions premières, ou mieux faire partie de son
descriptif de poste, et que sa hiérarchie soit à la fois informée et convaincue de la nécessité
de ces actions.
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• L’ambassadeur doit être outillé : équilibre difficile à trouver entre cette indispensable
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spontanéité qui fait toute la richesse du vécu raconté, face au discours institutionnel récité,
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et dans le même temps s’assurer que les messages sont cohérents avec la culture, la
stratégie de l’entreprise, bref, la posture officielle. Il convient donc de doter l’ambassadeur
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de moyens et matériaux qui contribueront à la cohérence de la prise de parole tout en lui


laissant son espace de liberté.
• L’ambassadeur doit être récompensé : compter sur la bonne volonté et l’engagement est
certes louable, mais pas suffisant. Il en est des ambassadeurs comme de la cooptation. Cette
récompense ne prend pas nécessairement une forme pécuniaire, mais doit valoriser
l’ambassadeur : rencontre avec des membres du Comex, présentations de la stratégie, mise
en avant dans le cadre d’événements internes ou externes…
• L’ambassadeur doit être rassuré : selon le degré de maturité de l’entreprise sur sa liberté de
parole, son usage de la libre expression… L’ambassadeur doit être convaincu de la confiance
que l’entreprise porte en lui, et qu’un dérapage ne sera pas forcément sanctionné.

Pour chacune de ces cinq conditions (et il en existe certainement d’autres), il est
indispensable de bien distinguer les ambassadeurs officiellement mandatés et donc quasi
professionnels, des ambassadeurs « naturels », les avocats spontanés de l’entreprise. Ces
deux populations se verront outillées et accompagnées différemment : charte, guide,
récompenses, formation aux réseaux sociaux, selon qu’elles s’expriment sur leur entreprise
ou au nom de leur entreprise.

Les RH ont la responsabilité du réseau d’ambassadeurs qui ne peut se résumer à des


initiatives individuelles, aussi bonnes soient-elles. Ils ont en charge la définition des relations
avec les candidats (positionnement et promesse RH, discours et arguments, sélection des
écoles cibles…). Leur rôle est essentiel, qu’il s’agisse d’identifier les collaborateurs dont les
compétences (connaissance de l’entreprise, aisance relationnelle, empathie, sympathie…)
en feront de bons ambassadeurs. Ou encore pour construire les outils d’aide, négocier avec
les managers, définir les règles du jeu, choisir les récompenses… À charge également aux RH
de s’assurer de la pérennité de ce réseau dans le temps : savoir assurer un vivier pour
remplacer ceux qui se lassent ou quittent l’entreprise.
L’activité d’un réseau d’ambassadeurs ne peut faire l’économie d’une réflexion sur les
opportunités que représentent les médias sociaux. Dès lors, les actions à initier, même si
celles-ci ont vocation à se concentrer sur une sélection d’écoles cibles, doivent intégrer leur
potentiel de « viralité », que celui-ci soit orchestré et positif, mais aussi subi et négatif. Ce qui
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signifie qu’il deviendra de plus en plus indispensable aux ambassadeurs de maîtriser cette
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compétence. L’argument financier est aussi à prendre en compte : les usages des médias
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sociaux peuvent contribuer à renforcer à moindre coût les actions vers les écoles prioritaires,
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ou à l’inverse à maintenir une présence minimum sur les écoles de moindre priorité pour
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l’entreprise.

La mise en place d’un réseau d’ambassadeurs peut contribuer très efficacement à renforcer
la réputation d’une entreprise. Cela correspond effectivement aux usages et aux attentes
des candidats que de disposer de sources d’informations diversifiées, crédibles,
personnalisées, concrètes, proches pour orienter leurs choix. Autant de promesses que les
ambassadeurs peuvent tenir.

Le cercle vertueux du marketing RH

Le marketing RH n’est pas une action unique, avec un début et une fin. La démarche de
construction d’une marque employeur et d’optimisation de l’offre RH est de long terme et
cyclique. Elle doit infuser l’entreprise et s’intégrer complètement à l’activité générale, suivre
les évolutions du business et ses nouveaux enjeux, s’adapter en permanence aux nouvelles
conditions de l’environnement. Le marketing RH doit devenir le cadre de référence, le
nouveau modèle, dans lequel les équipes RH assurent leurs missions. En effet, les actions sur
l’optimisation de l’offre RH contribuent à la qualité de l’expérience vécue qui, elle-même,
modèle la perception. Les phases d’études et d’analyse permettent d’évaluer et d’analyser
cette perception, pour définir le plan d’actions. La boucle est ainsi bouclée.
Parions sur une RH holistique qui saura appréhender le salarié dans toutes ses dimensions,
utiliser les différents leviers tout en gardant une attitude ouverte, bienveillante, et une
relation tenant plus du partenaire que de l’expert. Répondre aux besoins des salariés en
terme de programmes de bien-être dans l’entreprise, d’horaires de travail flexibles ou
d’équilibre vie professionnelle, vie privée est aussi noble et important pour un RH que de
veiller à la formation, la mobilité ou la paie.
On peut critiquer les avancées de ces dernières années sur le bonheur au travail ou
l’entreprise libérée, mais au fond le succès – au moins médiatique – rencontré par ces
approches démontre que les salariés sont en attente d’un autre modèle d’entreprise et de
RH que celui d’une froide efficacité et d’une performance chiffrée.
Pour paraphraser Terence, la citation de ce RH holistique pourrait être : « Je suis un RH et rien
de ce qui est humain ne m’est étranger. »
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Le cercle vertueux du marketing RH.

1. Ce paragraphe est largement inspiré d’un billet rédigé avec François Geuze, pour son site www.opentojob.com.
■ 4. Exemples d’utilisation pratique de quelques outils

Comment utiliser Twitter ?

Twitter dispose d’une notoriété qui dépasse largement le seul cadre de ses utilisateurs
réguliers. Et la Journée européenne pour l’Emploi du 24 février 2015 démontre les ambitions
de Twitter. Quelles peuvent être ses utilisations concrètes dans le cadre d’un plan d’action
de marque employeur ?
• Nous avons vu précédemment que Twitter pouvait être un excellent outil de veille.
Pourquoi ne pas utiliser ce travail de veille pour en faire profiter vos followers et tweeter une
sélection d’informations ciblées : veille sur l’alternance, sur l’univers des nouvelles énergies,
sur l’expatriation, sur les métiers de la logistique ? Le thème retenu sera à choisir avec soin
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car il aura vocation à justifier certaines promesses de votre marque employeur, valoriser
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votre entreprise face à ses concurrents, se présenter à la pointe des réflexions de son
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secteur d’activité. En fonction des moyens disponibles, il sera possible de créer plusieurs
comptes Twitter.
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• La diffusion d’offres d’emploi est un des premiers usages que l’on imagine pour Twitter.
C’est un moyen de donner de la visibilité à ces offres, mais dont la pertinence nous semble
limitée en dehors des solutions payantes qui permettent un ciblage précis. En effet, rares
sont les comptes Twitter qui sont suffisamment segmentés pour différencier les candidats.
Twitter n’a que peu d’impact sur les volumes de candidatures drainées. En revanche, il est
possible de tweeter des familles de postes contextualisées. Par exemple : « en ce moment,
nous recrutons des auditeurs pour l’Allemagne, la Pologne, la Roumanie ». Ce type de tweet fait
passer plusieurs messages simultanément : information sur les besoins de recrutement,
dynamisme de l’entreprise dans ces pays, opportunités de carrière à l’international.
• Twitter peut être un bon complément de votre site de recrutement pour créer du trafic en
donnant de la visibilité à des contenus existants profonds, peu consultés naturellement. Il
permet aussi de diffuser des informations type actus ou news, de nature RH ou susceptibles
de valoriser l’entreprise en tant qu’employeur. C’est, par exemple, l’ouverture d’une
nouvelle filiale, une distinction reçue, un article de presse qui cite un de vos
collaborateurs… Autant d’informations dont le caractère événementiel ne justifie pas une
présence sur un site de recrutement.
• Twitter devient un canal de contact et d’échange de plus en plus utilisé par les candidats
pour interpeller les équipes RH sur le process de recrutement, le suivi d’une candidature, des
compléments d’informations sur un poste proposé. L’entreprise peut ainsi exploiter ces
contacts entrants pour améliorer sa connaissance des candidats.
• Twitter est un outil très largement utilisé par les « experts », les journalistes, les médias, les
blogueurs. C’est donc un moyen privilégié de tisser et de maintenir le contact avec ces
populations qui disposent d’une audience propre et d’un pouvoir de prescription. Il pourra
s’avérer très utile en cas de crise.
• Penser également à mettre des boutons de partage Twitter sur vos contenus web, à inclure
le fil de votre compte Twitter avec une possibilité de s’abonner à celui-ci sur vos sites.

Comment utiliser les réseaux professionnels ?

Les réseaux sociaux professionnels, notamment LinkedIn et Viadeo en France, présentent


l’avantage d’un positionnement clair, axé sur la visibilité de la marque ou le recrutement, et
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donc de fonctionnalités dédiées à ces objectifs. Tous deux sont bâtis sur un modèle
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économique similaire, le freemium : des fonctionnalités gratuites pour les entreprises et un
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service de base gratuit pour les candidats, des services supplémentaires payants pour ces
deux populations. Nous abordons ces deux médias sous l’angle des services et avantages
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qu’ils peuvent apporter à l’entreprise, laissant de côté la vision « candidat ».


À la question de l’utilité de ces outils, nous apportons une réponse simple : transmettez les
profils des candidats que vous recherchez aux équipes commerciales de ces réseaux, et
demandez-leur de réaliser des comptages dans leurs bases. Cela vous donnera un éclairage
sur vos candidats potentiels. Cette première analyse sera efficacement complétée par une
recherche de vos concurrents, et vous donnera des premiers éléments de réponse quant à la
pertinence d’investir sur ces outils. N’oubliez surtout pas de faire une recherche sur le nom
de votre entreprise. Sans que vous n’ayez rien fait, elle y sera certainement déjà présente, à
l’initiative de certains de vos collaborateurs. Cette présence spontanée ne sera donc pas
forcément en cohérence avec votre discours ou votre charte graphique. Il est possible que
certaines informations n’aient pas été régulièrement mises à jour, ou encore que ces espaces
soient laissés à l’abandon depuis longtemps, ce qui ne sera pas bon pour l’image.

Les pages entreprises, gratuites, permettent de présenter les caractéristiques de


l’entreprise sous forme de carte d’identité : chiffres clés, activités, implantations… Porte
d’entrée de la présence sur ces espaces, elles peuvent être complétées d’actualités,
d’informations sur les produits et services, si vous considérez que cela peut servir votre
attractivité en tant qu’employeur ou que votre présence est également motivée par des
ambitions business.
Les pages « carrières », payantes, sont utilisées pour le volet plus RH : promesse RH,
présentation des métiers, annonces de recrutement. Elles peuvent accueillir la palette des
médias possibles : textes, infographies, photos, sons, vidéos.
Les groupes sont un moyen d’attirer des candidats potentiels autour de discussions animées
par certains de vos collaborateurs, dans l’esprit d’échanges entre experts. C’est une
opportunité de démontrer les compétences d’une équipe, l’intérêt des missions confiées, et
pour les recruteurs, de repérer des candidats potentiels.
Plus directement axés sur le recrutement, les réseaux professionnels proposent des
fonctionnalités payantes pour accéder aux bases de données de candidats, effectuer des tris
et des ciblages, diffuser des offres d’emploi et réaliser des campagnes de communication.
Notons enfin les applications développées pour tisser des liens entre ces réseaux et d’autres
sites web : boutons de partage des contenus présents sur des sites tiers, applications
proposées sur les sites carrières des entreprises pour postuler via les profils LinkedIn ou
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Viadeo ou retrouver facilement les collaborateurs de l’entreprise présents sur ces mêmes
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réseaux.
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Il est aussi intéressant de suivre la présence de vos employés sur ces réseaux : suivre la
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progression du nombre de ceux qui se sont créés un profil, ceux qui affichent leur
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appartenance à votre entreprise, le statut qu’ils précisent (en activité ou en recherche,


ouverts aux offres), ceux qui ont déjà posté des commentaires, relayé des informations sur
votre entreprise, participé à des groupes de discussion sur leurs domaines de compétence.
Comment utiliser Facebook ?

La masse d’abonnés à Facebook, dont la moitié se connecte quotidiennement, ne peut que


susciter l’appétit, ou au moins la curiosité des responsables de la marque employeur et du
recrutement. Facebook a clairement montré ses ambitions sur le marché de l’emploi avec
l’enrichissement des profils par des informations professionnelles, des applications type
« Work4 ». Ajoutons à cela la puissance des diffusions monétisées de messages ou la
pertinence des outils de Search qui font de Facebook un acteur à ne pas négliger. La question
à se poser pour les entreprises est alors moins celle d’y aller ou pas, que du rythme auquel y
aller, dans des environnements budgétaires restreints, et pour y faire quoi.

Pour la veille

Facebook peut ne pas apparaître comme le lieu privilégié de conversations


professionnelles. Pourtant, il s’avère un espace à ne pas négliger pour des sujets qui
intéressent les populations de recrutement les plus jeunes. Il est d’ailleurs possible que des
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membres aient créé des groupes au nom de votre entreprise. Le sujet de l’alternance, de
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l’apprentissage, des stages, y est très présent, et de nombreuses entreprises, comme par
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exemple les banques, ont fait le choix de Facebook pour traiter ces sujets. On y trouve des
conseils, parfois traités sous le ton de l’humour, des vidéos, des offres d’emplois. Facebook,
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au même titre que les autres médias sociaux, ne doit pas être négligé dans la surveillance de
votre marque.

Pour les relations avec les écoles

Disposer d’une page fan est l’occasion de développer des échanges et des discussions avec
les étudiants de vos écoles cibles, notamment s’il s’agit des écoles de commerce. En effet, ces
écoles ont depuis peu massivement investi Facebook, à la fois pour la promotion de leur
école et le recrutement des futurs étudiants, et pour prolonger la vie de l’école avec les
étudiants, relayer les événements, entretenir un esprit de corps. Elles sont en revanche
encore timides dans l’utilisation de Facebook pour les relations avec les entreprises.
Facebook peut être un relais efficace de vos actions de campus management : en amont
pour annoncer ces événements, le jour J pour leur donner de la visibilité, avec des
reportages photos ou des témoignages vidéos « sur le vif », et en aval pour prolonger ces
échanges et entretenir le lien.
Pour organiser des événements auprès des jeunes diplômés

Facebook, par son taux de pénétration auprès des jeunes, sa fréquence quotidienne
d’utilisation et les fonctionnalités et applications proposées, est un très bon outil pour
assurer la promotion d’un événement, avant, pendant et après son organisation. En amont,
Facebook permet de gérer les inscriptions, d’organiser sondages et concours en soutien de
l’événement. Pendant l’événement, c’est le partage de contenus « à chaud », de photos qui
sera privilégié. Après l’événement, Facebook est un moyen de prolonger l’expérience et de
fidéliser la communauté créée à l’occasion de l’événement. Ainsi, SFR a utilisé Facebook pour
assurer la promotion d’un business destiné aux étudiants : toute l’opération, du teasing au
sourcing, s’est faite sur la page Facebook de SFR.

Pour diffuser des offres d’emplois

Il existe une multitude de solutions et d’acteurs qui ont tenté d’exploiter les potentialités de
Facebook pour en faire un mini site emploi ou un job board. Hélas, peu d’entre eux sont
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encore dans les mémoires, tant l’aventure a été éphémère. On peut cependant imaginer que
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Facebook soit la solution pour toucher des profils non cadres qui n’ont pas encore cette
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culture des réseaux sociaux professionnels.


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Facebook, par son audience et sa popularité, peut s’intégrer dans la panoplie des outils du
marketing RH, dans des objectifs de notoriété et d’image plus que de sourcing. Utilisé comme
un média grâce à Facebook Ads, il est possible de travailler la visibilité des offres, d’améliorer
la connaissance de votre marque employeur, d’acquérir plus de « j’aime » ou de drainer du
trafic vers votre site de recrutement. Mais la pauvreté des profils en termes d’informations
professionnelles (uniquement la dernière expérience professionnelle, des informations très
succinctes sur les études, rien sur les compétences) ne permet pas des actions suffisamment
ciblées. Au vu des premiers résultats en termes de sourcing, il semble évident que les
candidats n’ont pas encore acquis le réflexe, et que l’image de réseau personnel et privé soit
encore un obstacle à un usage plus professionnel pour quelques années. En revanche, on
constate une préférence pour une attitude plus passive des abonnés, comme celle de suivre
des pages d’entreprises pour consommer de l’information. Les interactions, même si elles
existent, restent encore faibles.
Plus encore que les autres plateformes, Facebook nécessite de s’appuyer sur des community
managers ayant une bonne expérience de la gestion de ce réseau (pages ou de groupes) et
conscients des enjeux de chaque conversation, comme de chaque prise de parole. La gestion
de crise sur Facebook doit être pensée largement à l’avance, avec des process établis pour
faire face aux diverses attaques ou dérives possibles comme par exemple le modèle
développé par l’US Air Force 1.

➤ Témoignage

De nouvelles plateformes à explorer

Émilie Dubois et Didier Pelletier, sont les fondateurs de HRM, un cabinet de consultants RH basé au Canada
spécialisé dans les sujets de marque employeur. Particulièrement intéressés par les outils de
communication digitale, ils s’interrogent sur la multiplication de ces nouveaux outils et leur pertinence en
marketing RH.

Il naît chaque jour quelque part une nouvelle plateforme web qui rêve de révolutionner la manière dont
nous travaillons, nous consommons ou nous entrons en relation avec les autres. À grands coups de
marketing, ces startups nous promettent une expérience nouvelle, différenciée qui rendra « meilleur » notre
travail, nos interactions sociales ou toute autre facette de notre vie. Certaines deviennent de véritables
légendes, comme Facebook, Twitter ou Instagram et d’autres, comme Ello ou Google + peinent à trouver
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leur place dans l’univers des médias sociaux.
Chaque nouvelle plateforme mérite qu’on lui accorde une attention et surtout que l’on évalue son potentiel
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en terme de marketing RH. Derrière une fonction première qui est souvent très loin du monde des
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ressources humaines, se cache parfois une belle opportunité de se démarquer sur le marché de l’emploi,
par le simple fait que l’on adopte une approche de communication différente et inusitée.
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Des essais fructueux, mais certains moins que d’autres !


Certaines plateformes ont déjà été maximisées en contexte de Marketing RH. Pensons par exemple à cette
très originale campagne menée par l’agence DDB d’Oslo pour recruter un créatif. L’idée est géniale : « Vous
êtes le créatif que nous cherchons ? Alors envoyez un pitch de 10 secondes sur Snapchat. Même principe pour
DDB Bruxelles, mais cette fois-ci avec Vine… et donc avec 4 secondes de moins 2. » Ces campagnes ont atteint
leur objectif, faire du bruit. Il ne s’agit sûrement pas de la manière la plus efficiente de dépister les
meilleurs talents pour les postes à pourvoir, mais il s’agit sans aucun doute d’une excellente manière de
recruter un candidat en se faisant remarquer !
Instagram et Pinterest sont également devenus des outils courants pour promouvoir les opportunités de
carrière au sein de son organisation. Starbucks et l’Armée de Terre française maximisent déjà ces outils avec
brio. Dans le premier cas (instagram.com/starbucksjobs/), on l’utilise pour témoigner du climat de travail et
de l’esprit de camaraderie qui prévaut dans les différents cafés du groupe Starbucks. Dans le deuxième cas
(instagram.com/recrutementterre/), c’est l’esprit de corps et l’aventure que l’on valorise à travers les
différents partages. Notons que l’Armée de Terre n’a que 3 000 abonnés sur son compte Instagram alors
qu’elle en compte plus de 10 000 sur son compte Twitter (twitter.com/RecrutemenTerre) et plus de 350 000
sur sa page Facebook. Parmi les stratégies de Marketing RH intéressantes sur Pinterest, notons la présence
de Sodexo USA qui propose 40 tableaux et presque que 2 000 épingles… mais qui n’a que 763 abonnés.

Que retenir de ces essais ?


L’avantage d’utiliser ces plateformes qui ne sont pas destinées au recrutement, pour faire du recrutement,
est double. D’une part, on se positionne comme une organisation innovante, dans le vent, qui n’a pas peur
de tester de nouvelles approches. D’autre part, on se fait remarquer par l’originalité de ses campagnes en
créant un buzz. Par contre, pour que l’utilisation de ces plateformes donnent des résultats intéressants, on
doit respecter deux règles :
· premièrement, il faut que le groupe ciblé par la campagne soit une utilisateur réel ou potentiel de la
plateforme. Si l’outil n’est pas naturel pour eux, ils ne l’utiliseront pas ;
· deuxièmement, il faut maximiser la plateforme dans ce qu’elle a de différent. Les campagnes sur Snapchat
ont fonctionné parce qu’on a maximisé la principale caractéristique de la plateforme : transmettre un
message original de courte durée. Les campagnes qui fonctionnent sur Instagram ou Pinterest sont celles
qui permettent de mettre en valeur une caractéristique de l’organisation que l’on peut visuellement
capturer. Tenter de faire sur ces outils ce que l’on ferait sur un site Web conventionnel ou encore, copier un
contenu existant pour meubler un nouveau médium ne fonctionne pas.

Les plateformes à surveiller


Parmi les nouvelles plateformes, il faut sans aucun doute s’intéresser à Periscope et Meerkat. Ces
applications moblies permettent de transmettre une vidéo en flux continue et de recevoir des rétroactions
par le biais d’un « chat » intégré à l’application. Cela permet donc de diffuser en temps réel un contenu que
l’on est en train de filmer et de recevoir les commentaires de son auditoire par écrit. Periscope appartient
maintenant à Twitter et permet de diffuser un tweet annonçant que l’on est « live ». Contrairement à Meerkat
qui ne garde pas de mémoire de la vidéo, Périscope conserve la vidéo durant 24 heures. On peut également
émettre une vidéo en mode privé et ainsi, restreindre le nombre de personnes qui peuvent le visualiser.

Quelles sont donc les deux grandes caractéristiques de ces nouveaux médiums ?
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La transmission en direct et, contrairement à Skype où les deux interlocuteurs se voient, le fait que sur
Periscope et Meerkat, seul l’émetteur est vu. En appliquant cette logique, on pourrait penser à plusieurs
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opportunités en marketing RH. Bien sûr, toutes les activités ponctuelles, Hackathon RH, salons de l’emploi,
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etc. sont des occasions de diffuser un contenu en mode reportage, mais on ne maximise pas la rétroaction
écrite que permet la plateforme. Imaginons maintenant le lancement d’un concours destiné à des étudiants,
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qui serait fait « live » par le DRH, et qui permettrait aux participants de poser des questions. Imaginons aussi
des chargés de recrutement qui donneraient un rendez-vous pour annoncer les postes « vedettes » à
combler, et qui permettrait aux candidats de poser des questions. Imaginons encore des entrevues sur
Periscope (en mode privé) où le candidat serait l’émetteur qui aurait un pitch de candidature à faire devant
des examinateurs qu’il ne verrait pas, lesquels pourraient ensuite lui adresser des questions par écrit
auxquelles il pourrait répondre. C’est une approche abominable pour les candidats, une véritable session
de torture, mais… qui sait, dans certains contextes où l’employeur potentiel souhaite demeurer anonyme
en début de processus, c’est peut-être un outil de présélection à considérer.
Il existe d’autres plateformes qui font maintenant partie du paysage 2.0 et qui sont sous-utilisées en
marketing RH. Pensons par exemple à What’s App ou encore à Foursquare. À nous de trouver une façon de
les utiliser de manière originale. De nombreuses plateformes qui ne sont pas a priori destinées au
recrutement ou, de manière générale, au marketing RH peuvent quand même être utilisées dans ces
contextes. Cependant, pour que cela soit un succès, on doit s’assurer de maximiser la plateforme dans ce
qu’elle a d’unique et d’original.

Comment utiliser les plateformes vidéos ?


L’explosion de la consommation de vidéos en ligne, et des acteurs comme YouTube ou
Dailymotion ne peut être ignorée des plans de communication RH. Il est certain que pour
toucher les générations les plus jeunes qui plébiscitent ce type de contenus, une présence
de la marque employeur sera indispensable. Les chaînes d’entreprises qui existent déjà,
offrent de nombreux exemples d’utilisations possibles, même si la plupart reste très
institutionnelle et peu engageante, tellement loin des standards de la vidéo en ligne, tant
par leur écriture que par leur format. Une recherche rapide vous permettra de découvrir
aisément un florilège de vidéos métiers et de témoignages de collaborateurs plus convenus,
tristes et soporifiques les uns que les autres.
La vidéo est en effet un canal qui ne souffre pas la médiocrité et qui constitue dans ce cas un
candidat idéal au détournement et à la parodie. Deux options se présentent alors : ces
plateformes permettent d’augmenter la visibilité de contenus déjà existants, comme les
films institutionnels, les spots TV. Et dans ce cas, sauf exception, il ne faut pas attendre
beaucoup d’interactivité ou de viralité. Dans un second cas, des contenus seront conçus
spécialement, avec une écriture plus appropriée au web, davantage propice au partage et
au commentaire. En collant à des « standards du moment », inspirés de vidéo-blogueurs ou
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d’émissions de TV, on prend le risque d’une obsolescence accélérée. Il conviendra donc de
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s’interroger sur la date de péremption de ces productions vidéos, et sur les références des
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populations ciblées.
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On peut aussi tenter d’innover par le crowdsourcing, en permettant à des candidats ou des
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collaborateurs de poster des vidéos qu’ils ont tournées eux-mêmes sur certains thèmes, et
ensuite sélectionner les meilleures. Pour donner envie de participer, il est nécessaire
d’imaginer un principe de challenge avec des prix à gagner, par exemple des invitations à
des événements particuliers.

Comment utiliser le mobile ?

Le smartphone, qui était il y a encore quelque temps un simple signe extérieur de richesse,
de mode ou de « branchitude », est devenu un outil commun, véritable couteau-suisse
indispensable au quotidien. Ne pas l’avoir relève de l’anachronisme et constitue presque un
handicap, tant les usages de la mobilité se sont développés. On parle d’ailleurs aujourd’hui
de stratégie « mobile first » pour insister sur la dimension centrale de ces devices, et Google est
allé dans le même sens en modifiant tout récemment son algorithme pour privilégier les
sites mobiles. Ce téléphone sert de moins en moins à téléphoner et de plus en plus à surfer,
consulter des applications, rester connecté en permanence sur les réseaux sociaux, écouter
de la musique, prendre et partager des photos… S’informer, se divertir, échanger, stocker,
partager, autant d’activités facilitées par le mobile. Le mobile est plus qu’un simple terminal :
il révolutionne l’expérience du consommateur comme du candidat par sa proximité, son
intimité et sa disponibilité immédiate. Toutes les projections confirment que le mobile sera
dès demain le premier moyen d’accès à Internet. Les grandes entreprises de services comme
les banques, les transporteurs (Air France, SNCF, RATP par exemple), ne s’y sont pas
trompées. Elles ont été pionnières dans le lancement de sites et d’applications mobiles pour
garder un lien constant avec les clients et les usagers, fournir de l’information utile en quasi
temps réel.
Le marché de l’emploi n’est pas épargné par ce mouvement de fond, car il présente aussi de
nombreux avantages. Sites et applications mobiles de recrutement, d’offres d’emploi, de
conseils, d’informations se sont multipliés. Il devient aujourd’hui difficile d’émerger dans ce
qui est considéré comme le « service minimum », avec un très haut niveau de qualité attendu
dans l’expérience utilisateur. Encore une fois, le développement d’un site mobile ne peut
plus être considéré comme une option, le parent pauvre d’un site web traditionnel. Le choix
peut être fait d’un site mobile complet dans ses fonctionnalités, afin de proposer une
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expérience unique et similaire selon les devices, ou au contraire de jouer la complémentarité
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des deux.
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Cela passe en premier lieu par l’optimisation des contenus pour intégrer les conditions de la
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consultation (taille de l’écran, temps de lecture…). Mais le mobile offre aussi la possibilité
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d’aller bien plus loin dans l’entretien de la relation et la personnalisation, avec des systèmes
d’alerte en fonction de votre profil. Il permet d’exploiter les potentialités de la
géolocalisation, couplée à la candidature instantanée. Certes, cela ne convient pas à toutes
les entreprises, nous l’avons dit. Mais c’est une révolution qui permet de fluidifier le marché
des offres non-cadres, que l’on ne retrouve pas sur les job boards ou les réseaux sociaux
professionnels. En passant devant un commerce de proximité (dans l’hôtellerie ou la
restauration par exemple), le candidat pourra recevoir une notification des offres
disponibles par SMS. En présentant son mobile face à la vitrine d’une boutique, la réalité
augmentée lui fournira des informations sur les besoins en recrutement saisonniers de cet
employeur potentiel. Pour certains emplois, et certains candidats, la proximité des postes
proposés par rapport au domicile est un facteur déterminant. C’est un élément loin d’être
anecdotique, puisque le développement du télétravail s’appuie sur l’argument de la
réduction de la fatigue liée au temps de transport. L’entreprise, de son côté, pourra être
tentée de privilégier des candidats qui habitent à proximité, car des horaires flexibles et
morcelés seront plus facilement acceptés, ou parce que l’activité impose une ponctualité
sans faille.
On peut imaginer des usages simples, mais très efficaces, pour optimiser l’expérience
candidat à plusieurs étapes : rappel la veille de la date du rendez-vous, accompagné de
quelques conseils et de l’envoi de l’itinéraire, message de remerciement par SMS le
lendemain de l’entretien, suivi de la candidature…

Du virtuel à l’enchantement du réel

Le virtuel et le digital, comme nous l’avons vu, sont de formidables accélérateurs


d’innovation et de performance pour la marque employeur. Pour autant, les salons, les
forums étudiants ne sont pas désertés et les visites d’entreprise sont toujours appréciées
des jeunes diplômés, de même que les discussions avec les responsables recrutement, les
managers, les opérationnels.
Alors que nous disposons d’une palette de moyens pour attirer, séduire et recruter le
candidat, on ne peut pas dire que les modes de rencontres présentielles entre les
entreprises et les candidats aient réellement évolué. Les entreprises qui comprendront
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comment innover et imaginer de nouveaux scénarios événementiels auront une longueur
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d’avance dans la séduction des talents.
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On commence à voir les premières ébauches, avec des rencontres dans des lieux culturels
qui associent de façon naturelle un lieu et un moment de rencontre, dans le cadre d’un
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concert, d’un événement caritatif, de la présentation d’un livre par son auteur. Ces
événements apportent une valeur ajoutée que n’offre pas un discours « commercial », centré
sur l’entreprise, aussi bien fait soit-il. C’est une occasion de démarrer les échanges, non pas
entre candidats et recruteurs, mais entre invités et organisateurs. En termes d’image, c’est
l’opportunité pour l’entreprise de s’associer à une démarche, une thématique en cohérence
avec ses valeurs, son secteur d’activité, d’être de nouveau dans une posture de don et
d’empathie. Une autre possibilité consiste à organiser des rencontres entre candidats
intéressés par un métier et salariés exerçant ce même métier. Pour les candidats
sélectionnés par l’entreprise, la possibilité d’accompagner pendant quelques heures ce
salarié sur son lieu de travail et ainsi voir en quoi consistent concrètement son activité, son
environnement, ses conditions de travail. En 2012 et 2013, le groupe LVMH a organisé les
« Journées Particulières 3 », pour inviter le grand public à visiter vingt-cinq de ses « maisons »
et découvrir le savoir-faire des collaborateurs du Groupe. Une opération portes-ouvertes
d’image résolument orientée RH : mise en valeur des collaborateurs mais aussi attractivité en
tant qu’employeur.
Des prestataires ont compris l’intérêt pour certains candidats de découvrir en immersion un
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métier. Ils en ont fait commerce et proposent même ce service payant au candidat !
Pourquoi ne pas imaginer, en complément des informations métiers présentes sur les sites
de recrutement, un concours pour passer une demi-journée ou une journée sur le terrain
pour découvrir un métier ? Les vidéos qui pourraient être tournées lors de ces immersions
seraient autrement plus attrayantes et virales que celles bien trop corporate que nous avons
l’habitude de voir. En interne, la possibilité d’être choisi pour représenter un métier et jouer
le rôle d’ambassadeur auprès des candidats, permettrait aussi de créer une vraie dynamique
et une reconnaissance implicite de ce métier avec sa mise en valeur.
À trop se concentrer sur le digital, on en oublie parfois de travailler le moment décisif de la
rencontre et faire ainsi la différence avec les autres entreprises concurrentes.

Comment utiliser un blog RH ?

La création et l’animation d’un blog imposent une discipline plus forte que d’autres médias
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sociaux. La taille des billets, la régularité des contenus à produire, la qualité de ces contenus,
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ne sont pas à négliger, mais le niveau d’engagement et l’investissement fourni seront
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récompensés.
Il convient de définir précisément la ligne éditoriale d’un projet de blog, et de s’assurer que
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l’on ne sera pas dans une démarche promotionnelle, centrée sur soi, ses réalisations et ses
bonnes actions : c’est l’échec assuré. Comment donc articuler cette prise de parole avec la
marque employeur ? Est-ce un blog RH de l’entreprise, un blog RH soutenu par l’entreprise,
ou le blog personnel du DRH ? Le blog doit apporter une valeur ajoutée : de l’information
inédite, un certain niveau de réflexion et d’analyse, une promesse de divertissement. Il
démontre une expertise sur un sujet donné. Même s’il est une émanation de l’entreprise, il
n’est pas une présence promotionnelle.
La plupart du temps, le blog est un projet pour lequel il faudra se faire accompagner sur la
durée par des partenaires externes : en phase de conception, mais également pour
l’animation : mettre en place un comité de rédaction, établir un planning des parutions,
organiser les interviews, trouver les contributeurs, les reportages photos ou vidéos…
Un blog permet de disposer d’un espace d’expression moins formel que le site d’entreprise.
C’est aussi l’opportunité de préempter un territoire d’expression, de devenir le référent d’un
sujet traité, à condition d’avoir au préalable une légitimité sur le sujet. Colas pourrait animer
un blog sur les grands ouvrages d’art, Yves Rocher sur la recherche cosmétique. En revanche,
EADS, légitime pour imaginer les modalités de transport du futur, ne l’est pas pour animer un
blog sur la nutrition. Lancer un blog, c’est enfin un moyen de mettre en avant des
collaborateurs qui participeront à la rédaction et une occasion de tisser des liens avec des
experts externes invités qui contribueront à améliorer la qualité des contenus.
De plus, en matière de référencement naturel, le blog reste une pièce maîtresse qui permet
de remonter plus facilement dans les résultats de Google et d’augmenter ainsi votre
visibilité digitale. Le blog peut aussi reprendre vos autres contenus sociaux, avec différents
widgets qui permettront de consulter des galeries vidéos, photos, de suivre votre fil Twitter
ou statut Facebook, ou même de partager votre veille sur les sujets RH.
Enfin, il reste un moyen efficace de nouer des conversations, répondre à des questions de
fond par l’intermédiaire des commentaires.
En 2015, pour réussir ce pari, pensez dès la conception à un blog qui saura s’adapter à une
consultation sur tous les devices possibles, de l’ordinateur à la tablette en passant bien sûr
par le mobile. C’est à la fois obligatoire vis-à-vis de Google si vous ne voulez pas être
pénalisé par ses algorithmes de classement et pour vos visiteurs dont presque la moitié
consulte désormais internet à partir d’un smartphone.

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Faut-il utiliser Pinterest, Vine, Periscope ou le prochain réseau
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social ?
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Le dynamisme du web social et l’émergence de nouveaux acteurs peuvent présenter des


opportunités pour la marque employeur. Il peut être tentant de vouloir « surfer sur la crête »
de ces nouveautés. Effectivement, dans un marché où la concurrence est féroce, où il devient
de plus en plus difficile et coûteux d’émerger, d’attirer l’attention, de susciter l’intérêt, la
« prime au premier entrant » n’est pas à négliger, surtout si votre entreprise prône des
valeurs d’innovation, de modernité et d’agilité. Mais cette tactique ne peut tenir lieu de
stratégie. Le risque principal est ainsi de s’éparpiller, de diluer ses moyens et donc sa
visibilité, de laisser ces présences en friche par manque de disponibilité ou de contenus pour
les alimenter.
Le développement exponentiel de l’audience des réseaux sociaux basés sur l’image, tels
Instagram, Pinterest, Vine ou Periscope, ne peuvent qu’interpeller les professionnels de la
communication RH. Faut-il préciser que la marque employeur n’est pas un produit, qu’elle n’a
pas d’existence « physique », de réalité visuelle, de couleur, de forme, de texture ? Certes, il
est possible d’illustrer certaines valeurs, de jouer sur la connivence avec certaines cibles de
recrutement. Les entreprises qui ont investi ces nouveaux territoires avec un prétexte RH ne
sont, pour la plupart, que sur un registre corporate, voire produits. Un registre qui, certes ne
peut nuire à la marque RH, mais qui ne constitue pas une réelle promesse d’employeur et ne
relève pas du domaine des RH.
L’aspect viral et la progression fulgurante par exemple du dernier de la bande Periscope
donne immédiatement des idées d’application aux agences pour communiquer
différemment. Imaginez un live tweet d’un événement RH avec une utilisation de Periscope
peut permettre de rendre bien plus vivante la couverture médiatique de celui-ci.

Ces réseaux peuvent présenter des opportunités tactiques. Sans se laisser éblouir par des
effets de mode, il s’agit simplement de s’assurer qu’ils répondent à la stratégie et participent
à l’atteinte des objectifs. Qu’en est-il de la réalité augmentée, du web sémantique, de la TV
connectée, du second écran, de la biométrie, des messageries instantanées ? Seront-ils
demain des canaux de communication et des modalités de candidature privilégiés par les
candidats ? Quelles seront les prochaines opportunités ? Vers où se déplacera le marché ? De
nouveaux comportements vont-ils émerger ?
La nécessité de la veille et une posture marketing trouvent ici encore, s’il était nécessaire,
une nouvelle justification. Nous remarquons cependant une tendance forte de l’image qui
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tend à supplanter le texte comme contenus les plus partagés, consultés, commentés. Se
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placer sur ces outils, même de manière non visible ou « défensive », permettra de saisir les
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opportunités qui pourraient se présenter.


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➤ Témoignage

À chaque réseau ses usages

Jacques Olivier Pô est directeur de l’information de ManpowerGroup, la holding qui fédère les différentes
marques et entités du groupe en matière de formation, de gestion de l’emploi ou de recrutement. Il revient
sur la façon dont le groupe utilise les différents réseaux sociaux en matière d’influence et de construction
de sa marque employeur.

« Nous souhaitions occuper un territoire de réflexion qui nous paraissait assez désordonné, autour de grandes
problématiques RH, et nous donner les moyens de porter sur la place publique un certain nombre de réflexions et
d’observations. Voilà pourquoi nous avons créé « L’Atelier de l’Emploi », lors de la naissance de ManpowerGroup,
début 2011, qui est une sorte de think-tank qui explore des domaines pas toujours bien connus ou maîtrisés et sur
lesquels nous essayons de faire de la pédagogie. Les réseaux sociaux sont naturellement un bon moyen de diffuser
de façon différente cette réflexion, en fonction des supports.

Nous avons construit une ligne éditoriale autour de quatre ou cinq grands thèmes que sont la dynamique des
territoires, l’insertion dans le monde du travail de la jeunesse, le rapport au travail en lien avec l’essor du numérique
dans les organisations ou encore la notion de flexibilité responsable. Nous produisons, à un rythme soutenu, bon
nombre de contenus, et faisons participer certains experts à nos réflexions. Aujourd’hui cette démarche permet à
nos marques de mieux se différencier. Cette capacité d’analyse est un levier important pour approcher les clients et
nous poser en tant qu’experts de nos secteurs d’activité.

Le fil info des bonnes nouvelles

Sur Twitter, nous avons 7 000 followers avec lesquels nous sommes par ailleurs en discussion régulière (journalistes
économiques, RH, DRH, professionnels, etc.). Cela nous permet d’entretenir le lien. Sur ce fil, nous avons peu de
candidats ou d’intérimaires, car ManpowerGroup n’a pas de vocation commerciale – donc nous ne diffusons pas
d’offre, par exemple.
Sur Facebook, nous menons une politique éditoriale différente. Nous sommes plus dans une logique de services.
Nous allons mettre en avant des contenus plus pratiques : « Savez-vous que l’aéronautique embauche ? », « Les 10
bonnes astuces pour rédiger un CV », etc. Nous sommes dans une logique de fil info des bonnes nouvelles, des
solutions concrètes pour l’emploi. En revanche, il ne s’agit pas d’une plateforme de « service après vente » pour nos
intérimaires. Manpower dispose déjà d’une hotline performante sur le sujet pour répondre de façon individuelle et
confidentielle. Bien sûr, il arrive que des candidats ou des intérimaires nous interpellent sur la page Facebook de
ManpowerGroup. Il y a donc là un vrai travail de community management à opérer pour répondre et les rediriger
vers le service dédié ou l’agence concernée. Sauf cas exceptionnels, nous ne supprimons aucun message, nous
répondons vite, parfois fermement. Cette page participe au dialogue que nous entretenons quotidiennement avec
nos intérimaires dans nos agences.

Opération Pen B reizh

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Nous avons beaucoup travaillé sur les réseaux sociaux grand public. Maintenant que c’est en place, nous
attaquons les réseaux sociaux professionnels. C’est donc encore en construction. Lorsque nous produisons des
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contenus qui nous paraissent pouvoir constituer un élément de persuasion à destination des clients ou des
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prospects, nous les publions sur la page entreprise de Viadeo et de LinkedIn. De telle sorte que nos collaborateurs
(qui, en raison de leur métier de recruteur, sont très actifs sur ces réseaux) peuvent s’y référer. Nous sommes moins
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dans l’analyse macro du marché ou des tendances de l’emploi, et plus sur la mise en avant de solutions que nous
avons pu développer au niveau local. Par exemple, nous avons mené un gros chantier sur la filière numérique en
Bretagne. En étroite collaboration avec Pôle Emploi et la région Bretagne, nous avons lancé un dispositif de
formation – baptisé Pacte Pen Breizh – qui entend former cinq cents demandeurs d’emploi sur des compétences
« sur mesure » et attendues par les entreprises numériques de la région et partenaires de ce pacte. Nous partons
donc du besoin réel de recrutement de l’entreprise, qui ne trouve pas les compétences nécessaires à sa croissance,
puis nous allons chercher des ingénieurs bac + 2 ou bac +5, que nous formons pour répondre à leur besoin. Sur ce
projet, les réseaux sociaux nous ont été d’une grande utilité. Nous sommes allés chercher les candidats pour les
attirer sur le site dédié à l’opération. Nous avons beaucoup travaillé nos relations presse et institutionnelles sur ce
projet via les réseaux sociaux. Ces derniers vous offrent une réelle capacité à toucher les médias locaux, les médias
hyperspécialisés, mais aussi les associations, les politiques ou les décideurs susceptibles d’être intéressés par ce projet.

De la microchirurgie

Contrairement aux idées reçues, vous ne faites pas forcément de la masse sur les réseaux sociaux. En tout cas, sur
un sujet comme celui-ci, ils nous ont permis de faire de la microchirurgie. Twitter nous a permis de toucher les
personnes influentes directement, de rentrer en conversation. Cela vous permet, par exemple, de toucher le
rédacteur en chef d’un magazine du Morbihan et de rentrer dans un dialogue constructif, avec une information
centrée sur le cœur de son lectorat. Via Twitter, sur Pen Breizh, nous avons réussi à constituer un fichier très qualifié
des 250 personnalités incontournables sur le numérique en Bretagne.
De même, sur un projet comme celui-ci, je ne vais pas envoyer un communiqué de presse par mail au président du
conseil régional de Bretagne ou au préfet de région. En revanche, si je les apostrophe sur Twitter, là, ils vont tendre
l’oreille. Cela va bien au-delà des relations presse ou institutionnelles. C’est un moyen de faire connaître l’opération
auprès des politiques, des associations qui agissent sur le numérique… Le spectre est beaucoup plus large qu’avec
des relations presse classiques.

Sur cette opération, les réseaux sociaux ont été un moyen de nous faire connaître auprès des différents publics
concernés. Un public à la fois très diversifié, mais également choisi. Finalement, on est passé des « relations presse »
aux « relations parties prenantes. »

1. http://www.dansoschin.com/2012/02/12/social-media-response-flow-chart-updated/
2. http://www.blogdumoderateur.com/recrute-creatif-avec-snapchat/
3. http://www.lesjourneesparticulieres.fr/
4. http://www.jobsenboite.com/accueil.xhtml

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■ Conclusion
Les médias sociaux et plus largement la vague digitale transforment la société civile dans
toutes ses dimensions. Cette révolution dessine de nouveaux rapports entre les personnes,
les citoyens, les salariés, les élus, les étudiants, les patients, les consommateurs et entre les
différents acteurs économiques. Ils bousculent toutes les formes d’autorité − individuelles ou
collectives –, représentent une accélération et une facilité dans l’accès à l’information
comme l’histoire en a peu rencontré au même titre que l’invention de l’écriture, de
l’imprimerie et de l’informatique. Ils offrent en plus, et c’est la grande nouveauté, un pouvoir
renforcé à l’individu, grâce à des moyens de production et de diffusion de l’information
simples et quasi gratuits.

Les entreprises sont naturellement bousculées par ces nouveaux usages, à la fois dans leur
organisation interne et dans leurs relations avec leur environnement. La raison en est
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simple : pour la première fois de leur histoire, cette révolution technologique a d’abord
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commencé en dehors des murs de l’entreprise, elle est poussée par les clients ou par des
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concurrents « pure players », ou étrangers à leur secteur d’activité. Ses modes de


communication et, osons le dire, ses mentalités, sont en retard sur les usages. Et ce retard
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semble croire au fur et à mesure que l’on remonte la structure hiérarchique des entreprises.
Les entreprises n’ont d’autre choix que de se transformer à marche forcée pour répondre aux
enjeux de la nouvelle économie du savoir et de l’information, aux contraintes violentes de la
compétition internationale, à un avenir de plus en plus difficilement prédictible, aux
attentes nouvelles de leurs collaborateurs. Leur organisation pyramidale et hiérarchique,
leur culture « aristocratique » ne convient plus aux impératifs d’agilité, de réactivité,
d’innovation, seules conditions de leur survie. Laure Belot ne parle-t-elle pas de « la
déconnexion des élites » ? (http://ladeconnexiondeselites.fr).
Pour répondre à ces enjeux, elles doivent faire fructifier leur patrimoine de compétences et
de talents, développer l’engagement de leurs collaborateurs, savoir concilier les aspirations
individuelles et les ambitions collectives. Elles n’y parviendront qu’en acceptant le fait que
les rapports à l’entreprise, au pouvoir et la valeur « travail » ont changé, et qu’ils ne
s’intègrent plus dans un schéma unique et homogène au sein d’une population donnée
(fonctionnaires, cols bleus, cadres, jeunes diplômés, dirigeants…). Le modèle devient
complexe et multiple, les collaborateurs, au sein d’un même groupe, ont des volontés
diverses, changeantes, auxquelles doit répondre un nouveau modèle d’entreprise, un
nouveau contrat social. Le donnant/donnant ne produira pas grand-chose. Il faut passer
donnant/donnant au gagnant/gagnant, et concevoir le contrat social de l’entreprise dans
une approche marketing, au sens noble du terme, celui de la prise en considération de
l’autre, et surtout pas comme une technique de bonimenteur. L’entreprise de demain est en
train de naître sur de nouveaux équilibres vie privée/vie professionnelle, ambition/bien-
être, où la satisfaction du salarié est synonyme de réussite partagée. Elle doit aussi prendre
en compte le fait que le statut de salarié n’est pas un statut figé et que ces derniers ont
parfois été, ou seront peut-être demain, des créateurs d’entreprise ou des consultants. Ces
carrières développent certaines qualités mais aussi portent un regard sur l’entreprise que
celle-ci doit prendre en compte pour réussir à mobiliser les compétences de tous.

Cette réflexion du modèle d’entreprise doit s’inscrire dans une vision partagée par tous les
membres de la direction générale, et se traduire dans une politique et un marketing RH
renouvelés. Comment revoir ce modèle d’entreprise, indispensable pour répondre à la
compétition de l’attraction et de la rétention des talents et des compétences qui deviennent
rares ? Une compétition qui sera plus dure dans les années à venir, en raison des évolutions
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démographiques, de la rareté de certaines qualifications, et de l’inadéquation entre les
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formations et les besoins des entreprises.
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Il revient au marketing RH de réussir ce tour de force : inscrire cette offre RH dans la stratégie
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de l’entreprise, répondre aux besoins des collaborateurs et être plus performant que la
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concurrence. Les principaux process RH (intégration, formation, mobilité, gestion de carrière,


évaluation…) seront revus à l’aune de cette nouvelle philosophie et trouveront des axes
d’amélioration dans les Nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Les équipes RH doivent être les acteurs principaux pour accompagner ces changements,
définir et faire respecter le nouveau contrat social appuyé sur une offre RH compétitive et
attractive. Leur légitimité nouvelle sera acquise par leur capacité à concilier les objectifs
économiques et les engagements sociaux.

Les RH doivent aussi faire leur propre révolution, si elles veulent gagner leur place parmi les
acteurs légitimes de la nouvelle stratégie de l’entreprise. Acteurs pivots de la
communication managériale, les départements RH doivent trouver le ton juste auprès du
réseau RH, des collaborateurs comme des candidats afin de rendre leur message audible et
convainquant. Face à de tels enjeux, il convient de remettre à plat les méthodes de travail,
de revoir l’organisation des équipes, de monter en compétence sur le digital pour rattraper
le retard qu’elles ont pris et adopter des réflexes marketing, qui répondent à ces nouveaux
usages des candidats-collaborateurs-clients-citoyens qui, ne l’oublions pas, ne forment
qu’un.
Les RH sont actuellement trop éloignés des attentes de leurs clients internes. La dernière
enquête d’ADP les jugeait même « Disconnect ». Selon cette étude, 76 % des salariés ne
portent pas une appréciation positive sur la fonction RH de leur entreprise
(http://www.fr.adp.com/gestion-capital-humain/livres-blancs-disconnect/disconnect-
france).

L’entreprise se retrouve face à une nouvelle responsabilité en tant qu’employeur. Devenue


plus transparente et poreuse à cause de l’activisme de ses salariés sur les médias sociaux,
elle fait face à la société civile comme aux pouvoirs publics, qui deviennent de plus en plus
exigeants sur l’éthique et la moralité de ses actes. La responsabilité de l’entreprise en tant
qu’employeur quitte le seul champ du recrutement, pour passer à un niveau plus corporate et
se porter sur trois dimensions : en tant qu’employeur actuel vis-à-vis des salariés, en tant
qu’employeur potentiel vis-à-vis des candidats, et comme un acteur responsable du marché
de l’emploi. Face à un chômage élevé qui devient la norme et la principale préoccupation, la
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question de la responsabilité sociale des entreprises devient prépondérante.
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Ainsi, on peut comprendre la décision de l’ancien ministre du Travail, François Rebsamen, de
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confier à Bruno Mettling DRH d’orange un rapport sur « la transformation numérique et la vie au
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travail ».
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Celui-ci a souligné dans son rapport l’avènement d’une entreprise étendue qui s’accommode
mal des simples statuts de salariés ou sous-traitants en devenant un éco-système basé sur la
collaboration, l’innovation ouverte, la coproduction. Ces évolutions ne sont pas sans impacts
sur la notion de salariat ni sur certains fondamentaux du Code du travail.

La région Auvergne offre le gîte pendant la période d’essai aux candidats qui viennent
travailler chez un employeur local. Le maire de Londres, Boris Johnson, invite les entreprises
françaises à s’installer en Angleterre pour profiter des conditions fiscales.
De leur côté, les startups de la French Tech, avec leur opération « Reviens Léon ! », invitent les
jeunes Français expatriés à préférer Silicon Sentier à la Silicon Valley. On peut citer aussi une
application soutenue par la CFE-CGC : « Made in emploi » qui permet d’orienter ses achats
pour soutenir les entreprises qui emploient en France. On voit apparaître une chaîne de la
marque employeur : métier > entreprise > ville > région > pays, dans laquelle l’entreprise
aura tout intérêt à s’intégrer.
Parallèlement, des initiatives sectorielles sont lancées pour tenter de pallier des déficits
d’image sur des filières d’activités en forte pénurie de candidats : c’est le cas de l’artisanat,
des métiers de bouche, du bâtiment ou de la métallurgie. On peut supposer que ces
initiatives seront amenées à se développer sous l’influence des syndicats et des
groupements professionnels, qui seront sollicités par leurs entreprises adhérentes. Nous
sommes ainsi dans une logique qui dépasse l’attractivité de l’entreprise et de sa marque
employeur, pondérée par l’image et l’attractivité du département, de la région, du pays, et
du secteur d’activité. Le marché des talents s’est internationalisé et les entreprises doivent
aussi travailler avec les élus pour prendre en compte cette dimension. Les exemples récents
d’entreprises allemandes, qui à cause des fortes pressions démographiques, vont chercher
des ingénieurs dans des pays fortement frappés par la crise économique comme l’Espagne
ou la Grèce, annoncent une nouvelle forme de mobilité internationale, qui devra
s’accompagner d’une réflexion sur un modèle social et d’un discours employeur adapté à ces
populations.

Les projets de réseaux sociaux d’entreprise échouent dans plus de 75 % des cas 1, faute de
leaders naturels de la transformation et de la définition d’objectifs d’entreprise clairs. Les
programmes de transformation digitale des entreprises semblent concentrer leurs efforts
sur la communication plus que sur de réels chantiers de transformation des process. La
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socialisation des process RH permet par exemple de mettre le réseau social interne
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directement au service de l’amélioration des grands domaines de compétences RH, d’offrir
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de nouveaux services aux managers comme aux salariés, et de retrouver les sens des mots
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« collectif » et « corps social ». Le défi est de gagner en productivité et en satisfaction au


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travail pour développer son attractivité interne et externe.

L’importance des actions internes pour créer une marque employeur solide et attractive est
encore sous-estimée, accordant une place démesurée à la communication dans l’émergence
artificielle de cette marque. À reprendre les idées de Vineet Nayar 2, nous aimerions que
l’une des idées majeures qui ressortent de ce livre soit : Employee first, Job Applicant second.
Rééquilibrer les efforts entre l’interne et l’externe pour développer une marque employeur
authentique et attractive, non seulement déployer de manière plus solide celle-ci, mais
augmenter aussi la confiance, la satisfaction et l’engagement des salariés.
Le marketing RH représente une opportunité d’accompagner la transformation digitale des
entreprises, de créer les conditions pour faire fructifier le véritable patrimoine de
l’entreprise, de repositionner les RH comme acteur de premier plan de cette transformation,
de trouver un levier pour leur reconnexion à ces transformations majeures et au rôle qu’elles
doivent y jouer.
Les nouvelles politiques RH sont un levier de la performance de l’entreprise car elles
obligent à réfléchir à un nouveau modèle d’organisation, de management, de nouvelles
conditions de production des biens ou des services, de nouvelles compétences associées
(nécessaires), de nouveaux modes de collaboration et de communication interne. En
adoptant une approche marketing qui prenne en compte la satisfaction des collaborateurs,
les équipes RH pourront inscrire l’entreprise dans une démarche au bénéfice à la fois de
l’engagement des collaborateurs et des résultats de l’entreprise par l’innovation sociale.
C’est-à-dire satisfaire la double ambition de la performance économique et sociale garante
d’un développement durable.
Il n’y a pas de réponse rapide et facile, voire miraculeuse, comme peut le faire penser le
battage médiatique autour de l’entreprise libérée, l’holacracy en particulier, mais des
réponses adaptées au contexte de chaque entreprise pour mieux travailler ensemble.

Nous avons voulu donner dans cet ouvrage, des pistes de réflexion et de travail pour
engager les entreprises vers une transformation possible et indispensable. Notre ambition
aura été de faire réfléchir les équipes RH sur le rôle qu’elles souhaitent jouer dans cette
transformation, et aux futurs professionnels RH, encore sur les bancs des écoles, d’imaginer
leur métier avec un regard neuf, enfin d’aider tous nos lecteurs à prendre le chemin de cette
nouvelle entreprise. Une nouvelle étape de la transformation digitale des entreprises est en
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train de voir le jour : l’internet des objets, les wearables, le Big Data, la réalité virtuelle, les
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interfaces biométriques, les machines apprenantes…
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L’Uberisation de l’économie, le poids des GAFA, la montée en puissance de la robotisation,


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digitalisation du travail vont totalement transformer la répartition du travail demain.


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Ces nouvelles modalités des relations humaines et des pratiques du travail marqueront de
leur empreinte le prochain chapitre de la révolution des RH.

« Un voyage de mille lieues commence par le premier pas. »


Lao Tseu

1. Selon Gartner http://www.gartner.com/newsroom/id/2402115


2. http://www.amazon.fr/livres/dp/1422139069 Employees First, Customers Second: Turning Conventional Management Upside Down.
■ Liste des témoignages
• Olivier Cimelière, journaliste et directeur de la communication.

• Carole Blancot, psychosociologue clinicienne, psychothérapeute et directrice de Spotpink


agence de communication RH.

• David Fayon, consultant web dans la Silicon Valley.

• Didier Baichère, directeur des ressources humaines du groupe DCNS.

• François Coupez, avocat à la Cour, associé-cofondateur du Cabinet ATIPIC Avocat.

• Denis Marquet, membre du bureau de l’organisation professionnelle


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Communication & Entreprise.
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• Jean-Christophe Anna, directeur général de #rmstouch (société spécialisée en


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recrutement mobile et social).


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• Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit à Paris I - Sorbonne et à Sciences Po et directeur


du master professionnel « Développement des ressources humaines ».

• Jean-Marc Mickeler, associé, responsable opérationnel mondial des activités d’audit de


Deloitte.

• Thierry Delorme, directeur associé de l’agence ORC, communication corporate et métiers.

• Laurence Vanhée, ex-Chief Happiness Officer au ministère belge de la Sécurité sociale et la


fondatrice du cabinet Happyformance.

• Carole Couvert, présidente confédérale de la CFE-CGC.

• Laurence Pierron, DRH de Bricoman (enseigne de bricolage de Groupe Adeo).


• Anne-Sophie Chevasson, responsable de la mise en œuvre du projet d’entreprise Poult et
de l’accompagnement du développement du groupe.

• Ziryeb Marouf, directeur applicatifs RH groupe et réseaux sociaux chez Orange et directeur
de l’Observatoire des réseaux sociaux d’entreprise.

• Jean-Baptiste Audrerie, psychologue organisationnel spécialisé en attraction des talents.


Blogueur www.futurstalents.com.

• Martin Huerre, DRH France de Mazars.

• Lieutenant-colonel Éric De Lapresle, chef du bureau marketing et communication de


recrutement de l’armée de Terre.

• Jean-François Schoonheere, directeur du développement RH.

• Patrick Molle, président fondateur de New World University.


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• Émilie Dubois et Didier Pelletier, fondateurs de HRM, un cabinet de consultants RH basé au
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Canada spécialisé dans les sujets de marque employeur.


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• Jacques Olivier Pô, directeur de l’information de ManpowerGroup.


■ Remerciements
Ce livre est un livre de connaissances, de respect et d’amitiés entre les deux auteurs mais
aussi nombreux contributeurs qui ont accepté de collaborer à ce projet soit sous forme
d’interviews, de remarques ou d’idées.

Merci donc à celles et ceux qui n’apparaissent pas toujours dans ce livre mais ont aidé à sa
rédaction : Valérie Anglade, Laure Bernadou, Thierry Delorme, David Fayon, Christophe
Fourleignie, Loïc Lecharny, Laurent Pernelle, Anthony Poncier, Arnaud Pottier Rossi, Vincent
Rostaing et Claude Super pour leur relecture attentive, la justesse de leurs remarques, leurs
critiques toujours pertinentes mais bienveillantes.

À nos épouses et nos enfants, pour leur soutien et compréhension, car l’écriture d’un livre est
une aventure mais aussi une maîtresse possessive.
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© GROUPE STUDYRAMA

34/38, rue Camille-Pelletan - 92309 Levallois-Perret cedex

Service éditorial : Marjorie Champetier, Benjamin Dias Pereira, Deborah Lopez, Elodie Sebbah

Conception graphique : Catherine Aubin

EAN 978-2-7590-3179-5

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Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo.
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