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AUTRUI

I. L’identité du moi face à autrui


 

II. La connaissance d’autrui

III. La relation avec autrui


Introduction :
Comment définir autrui ?

1. Du latin alter : autre

2. Mais autrui n’est pas synonyme de autre

3. Autrui désigne tout autre être humain que moi

4. Notion d’alter ego : autrui est autre que moi ET un autre


moi

5. Car Autrui, c’est d’abord une autre conscience

Problèmes philosophiques :
- la présence d’autrui en face de moi et
- mon rapport à autrui
I. L’identité du moi face à autrui

Questions :
Faut-il être seul pour être soi-même ?
L’exercice philosophique suppose-t-il de s’éloigner d’autrui ?

1. La recherche de la vérité de notre être au fond de nous-


même

2. Exemples de

- Socrate : « connais-toi toi-même »


- Platon : « la pensée est le dialogue de l’âme avec elle-
même
- Descartes : « je pense, je suis, j’existe »
- jusqu’à Kant : « ose penser par toi-même »
I. L’identité du moi face à autrui

Toutefois, il est difficile de penser le moi sans autrui

1. Socrate : pas de réflexion et de connaissance sans


dialogue (maïeutique)

2. Platon : le philosophe est celui qui éclaire les autre et qui


à terme doit guider la Cité (allégorie de la Caverne)

3. Aristote : « l’homme isolé est soit un être dégradé soit un


être surhumain » car « l’homme est un animal politique »

À l’Antiquité, l’homme ne peut être pensé seul, en


dehors de la Cité.
I. L’identité du moi face à autrui

1. Avec Descartes autrui devient un problème


philosophique

2. Car la conscience de soi devient le fondement de toute


connaissance.

Question : Comment ouvrir mon ego, seule certitude, à la


connaissance d’autrui ?

3. Pour Descartes : pas d’expérience directe d’autrui

4. L’existence d’autrui et du monde extérieur est déduite par


ma raison

5. Solipsisme cartésien : le moi est plus certain que le


monde
I. L’identité du moi face à autrui

Question : La conscience est-elle véritablement fermée sur


elle-même ?

1. pour Husserl, elle n’est pas une substance fermée mais


toujours une ouverture à l’altérité :
« toute conscience est conscience de quelque chose »

2. La conscience est d’emblée rapport au monde et à autrui,


elle « vise » ce qui est hors d’elle

3. Le cogito comporte toujours en lui-même son cogitatum

4. Jamais une conscience pure, mais toujours des états de


conscience

5. Chaque état de conscience est intentionnel


I. L’identité du moi face à autrui

Question : La conscience est-elle véritablement fermée sur


elle-même ?

1. Heidegger s’inspire de Husserl : il conteste la thèse d’un


existant qui serait de prime abord sans relation à autrui

2. « l’être-avec » est pour Heidegger une détermination


nécessaire de l’existence humaine.

3. Même la solitude ne signifie pas absence de rapport à


autrui :
« L’autre ne peut manquer que dans et pour un être-avec »

4. L’existence est toujours co-existence


II. La connaissance d’autrui

1. Pour s’interroger sur le mode d’accès à un alter ego


encore faut-il se fonder sur la certitude de l’ego

2. Pour Descartes je perçois des autres mais pas d’autres


ego

3. C’est toujours en moi seulement que j’éprouve la pensée

4. Seule l’intervention de mon jugement me permet


d’identifier autrui : je juge que ce sont des hommes

5. Seule ma conscience est certaine.


II. La connaissance d’autrui

Question : Partant de ces difficultés comment comprendre


autrui ?

1. Le langage me met en relation avec autrui (Aristote)

2. Dans une situation d’interlocution, l’autre se révèle


comme un ego : il m’exprime ses pensées

3. Par le langage, il y a possibilité de compréhension


réciproque

4. Le langage comme outil pour une « communauté


intersubjective » (Husserl)
II. La connaissance d’autrui

Toutefois, cette relation n’est pas directe : elle s’établit par


l’entremise du discours

1. Le langage accentue notre incapacité à voir les choses telles


qu’elles sont (les choses extérieures et les choses intérieures)

2. Le langage désigne ce qui est commun et non les choses-


mêmes : « nous ne voyons pas les choses mêmes mais des
étiquettes collées sur elles », Bergson

3. Si je n’ai pas d’accès direct à autrui il y a une solitude


indépassable

Pascal : « on n’aime jamais personne, seulement des qualités »


Proust : « l’homme est l’être qui ne peut sortir de soir, qui ne
connaît les autres qu’en soi, et, en disant le contraire, ment »
II. La connaissance d’autrui

Question : ma perception d’autrui ne me le dévoile-t-elle pas ?

1. Pour Husserl (comme pour Descartes) l’ego est le point de


départ de toute connaissance

2. Mais c’est mon incarnation (ma conscience existe


charnellement) qui me permet de transférer à autrui un ego

3. Tous les corps ne se ressemblent pas, les mouvement du corps


d’autrui sont les indices de l’existence de sa conscience

4. Grâce à mon corps que je meus et avec lequel je perçois, je


reconnais chez autrui un autre moi
III. La relation avec autrui

Questions : La rencontre d’autrui se réduit-elle à sa perception ?


N’est-ce-pas la moralité qui suppose toujours la rencontre
d’autrui ?

1. Le terme autrui apparaît le plus souvent dans un contexte moral


(Evangile, règle d’or, droits de l’Homme,…)

2. Outre l’instinct de conservation, l’homme est soumis à un autre


penchant naturel : nous compatissons aux souffrances d’autrui

3. La pitié, instinct et sympathie naturelle, est une ouverture


originaire à autrui : « la pitié modère l’activité de l’amour de soi-
même », Rousseau

4. Pour Rousseau, la culture et la raison ôtent de sa vivacité à cet


élan naturel : « la réflexion replie l’homme sur lui-même »
III. La relation avec autrui

Question : cette sympathie naturelle suffit-elle à fonder une


morale et une relation authentique avec autrui ?

1. Pour Kant la morale est bien une ouverture essentielle à autrui


mais c’est l’exercice de ma raison qui me fait reconnaître l’autre
dans sa dignité, comme sujet moral

2. En autrui je reconnais son humanité : ce sentiment moral n’est


pas un instinct, il est produit par la la seule raison

3. « L’impératif catégorique » est le devoir moral sans condition ni


intérêt extérieur, il vise à l’universalité

4. Autrui est la personne humaine que je me dois de respecter


« agis de façon telle que tu traites l’humanité toujours en même
temps comme fin, et jamais simplement comme moyen »
III. La relation avec autrui

Question : l’expérience morale est-elle la seule à nous mettre en


relation avec autrui ?

1. La vie affective déploie des rapports très divers avec autrui

2. Sadisme et plaisirs égoïstes comme figure négative de ces


rapports (Sade) ainsi que la lutte entre les désirs (Hobbes)

3. L’amitié comme figure positive et relation symétrique


(Aristote)

4. L’amour comme réjouissance et non comme possession


(Spinoza) : aimer autrui pour lui-même
III. La relation avec autrui

Question : N’est-ce pas plutôt le regard qu’autrui porte sur moi


qui me fait le rencontrer ?

1. Pour Sartre, autrui n’est pas constitué dans le secret de ma


conscience, il est toujours déjà là

2. Je me découvre objet devant le regard d’autrui (cf. Huis Clos)

3. Exemple de la honte : elle n’est pas un phénomène de réflexion,


« elle est honte devant quelqu’un »

4. Autrui est nécessaire à la connaissance de moi, il est « le


médiateur entre moi et moi-même »

5. Par son regard qui me fige, Autrui m’apparaît comme un sujet,


contrairement au choses : il est liberté.
III. La relation avec autrui

Question : La présence nécessaire d’autrui n’appelle-t-elle pas en


moi une responsabilité ?

1. Pour Levinas, une vulnérabilité est inscrite dans le visage


d’autrui, il est un appel à la responsabilité morale.

2. Le visage est le signe d’une éthique concrète, non d’une morale


abstraite, nous y lisons une loi moral « tu ne tueras point »

3. Nous pouvons passer à côté de cette dimension morale lorsque


nous cherchons trop à connaître, à ranger autrui dans des
catégories

4. Le visage d’autrui exprime une fragilité radicale qui m’engage


III. La relation avec autrui

« Le solipsisme ne serait rigoureusement vrai que de quelqu’un


qui réussirait à constater son existence sans être rien et sans rien
faire, ce qui est impossible, puisqu’exister c’est être au monde »
Merleau-Ponty

 
« Par une froide journée d’hiver un troupeau de porcs-épics s’était mis
en groupe serré pour se garantir mutuellement contre la gelée par leur
propre chaleur. Mais tout aussitôt ils ressentirent les atteintes de leurs
piquants, ce qui les fit s’écarter les uns des autres. Quand le besoin de
se réchauffer les eut rapprochés de nouveau, le même inconvénient se
renouvela, de sorte qu’ils étaient ballottés de çà et de là entre les deux
maux jusqu’à ce qu’ils eussent fini par trouver une distance moyenne
qui leur rendît la situation supportable. Ainsi, le besoin de société, né du
vide et de la monotonie de leur vie intérieure, pousse les hommes les
uns vers les autres ; mais leurs nombreuses manières d’être
antipathiques et leurs insupportables défauts les dispersent de nouveau.
 La distance moyenne qu’ils finissent par découvrir et à laquelle la vie
en commun devient possible, c’est la politesse et les belles manières. »
Schopenhauer, Parerga et Paralipomena

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