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ANNÉE UNIVERSITAIRE
2008-2009
CM 19H30
Bernard TABUCE
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INTRODUCTION
« La question de l'image est, en effet, l'un des axes que nous avons retenus pour
favoriser la démocratisation de la culture. Car il s'agit de l'un des champs où
l'apprentissage de codes de lecture et de techniques de fabrication sont les plus
susceptibles d'intéresser les jeunes, de contribuer à leur donner la compréhension des
images et donc la maîtrise du monde qui les entoure, de leur offrir des débouchés
professionnels. »
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CHAPITRE I. GÉNÉRALITÉS SUR L’IMAGE
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Soyez prudente :
Il faut néanmoins être prudent sur la notion de « motivation » telle que Baticle la présente. Dans
son Précis de sémiotique générale, Jean-Marie Klinkenberg aborde la notion de motivation. Pour
lui, cette notion de « motivation » présente des « difficultés peu surmontables » :
On ne peut en tout cas se satisfaire de formules comme celle qui consiste à dire qu'un signe est
motivé lorsqu'il présente « certains traits de ressemblance » avec son référent.
Des images peuvent être en syntagme: vous avez l’exemple d’un parchemin mexicain
illustrant l’invention du tabac et d’une miniature anglaise du Psautier de la reine Mary,
XIVè siècle. On savait raconter en images bien avant la BD (vous avez des images)
A la suite des travaux de Christian Metz et Umberto Eco, Y. Baticle recense ainsi, en 1985, les
différents codes de l’image. Elle les classe en grandes catégories :
1) Les codes dénotatifs et éventuellement également connotatifs
2) Les codes connotatifs
3. Les trois âges du regard en Occident (Régis Debray) et le point de vue de Marie-
José Mondzain
Pour Régis Debray, (R. Debray, Vie et mort de l'image. Une histoire du regard en Occident,
Paris nrf Gallimard, 1992.)
l’humanité a connu en Occident ce qu’il appelle trois césures médiologiques : écriture,
imprimerie, audiovisuel. Il identifie donc trois « continents distincts » : l’idole, l’art, le
visuel. Ce qui détermine selon lui « trois charnières » :
1. La logosphère, ou l’ère des idoles, au sens large, puisqu’il précise que eidôlon signifie
« image » en grec. Cette ère s’étend, dit Debray, de l’invention de l’écriture à celle de
l’imprimerie.
2. Il appelle graphosphère l’ère de l’art qu’il dit aller de l’imprimerie à la télévision
couleurs.
3.S’ensuit une troisième ère, celle du visuel, nommée vidéosphère.
∗ Les données qui suivent sont à lire, retenez-en l’essentiel, mais ne les apprenez pas
par cœur !
EN LOGOSPHÈRE
L’image a pour régime : idole. L’image est transcendante, elle est voyante elle est
vivante, c’est un être
Référent crucial de l’image (source d’autorité) : le surnaturel (Dieu)
Source de lumière : spirituelle (lumière « du dedans »)
But et attente de : protection, salut. L’image capture
Contexte historique : de la magie au religieux
Déontologie : extérieure (direction théologico-politique)
Idéal et norme de travail : je célèbre (une force) d’après l’Ecriture (canon)
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Horizon temporel et support : l’eternité (répétition), le support est dur (pierre et bois)
Mode d’attribution : collective, anonymat (du sorcier à l’artisan)
Fabricants organisés en : cléricature, corporation
Objet du culte : le saint (je vous regarde)
Instance de gouvernement : 1. curiale = l’Empereur
2. ecclésiastique = monastères, cathédrales
3. seigneuriale = le palais
Continent d’origine et ville-pont : Asie – Byzance (entre Antiquité et chrétienté)
Mode d’accumulation : publique (le Trésor)
Aura : Charismatique (anima)
Tendance pathologique : paranoïa
Visée du regard : à travers l’image (l’image transite)
Relations mutuelles : l’intolérance (religieuse)
2. EN GRAPHOSPHÈRE
L’image a pour régime : art. Une représentation illusoire, l’image est vue.
Modalité d’existence de l’image : physique, l’image est une chose
Référent crucial de l’image (source d’autorité) : le réel (la nature)
Source de lumière : solaire (du dehors)
But et attente de : délectation (et prestige). L’image est captive
Contexte historique : du religieux à l’historique (temps linéaire)
Déontologie : interne (administration autonome)
Idéal et norme de travail : je crée une œuvre d’après un modèle (l’Antique)
Horizon temporel et support : l’immortalité (tradition). Support souple (toile)
Mode d’attribution : personnelle (signature de l’artiste)
Fabricants organisés en : académie, école
Objet du culte : le Beau. « je vous plais »
L’image a pour régime : art. Une représentation illusoire, l’image est vue.
Modalité d’existence de l’image : physique, l’image est une chose
Référent crucial de l’image (source d’autorité) : le réel (la nature)
Source de lumière : solaire (du dehors)
But et attente de : délectation (et prestige). L’image est captive
Contexte historique : du religieux à l’historique (temps linéaire)
Déontologie : interne (administration autonome)
Idéal et norme de travail : je crée une œuvre d’après un modèle (l’Antique)
Horizon temporel et support : l’immortalité (tradition). Support souple (toile)
Mode d’attribution : personnelle (signature de l’artiste)
Fabricants organisés en : académie, école
Objet du culte : le Beau. « je vous plais »
Continent d’origine et ville-pont : Europe – Florence (entre chrétienté et modernité)
Mode d’accumulation : particulier (la collection)
Aura : pathétique (animus)
Tendance pathologique : obsessionnel
Visée du regard : la vision « contemple » l’image
Relations mutuelles : la rivalité (personnelle)
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3. EN VIDÉOSPHÈRE
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CHAPITRE II. APPROCHE SÉMIOLOGIQUE D’IMAGES
FIXES.
UNE INTRODUCTION
« On peut donc concevoir une science qui étudie la vie des signes au sein de la vie
sociale... nous la nommerons sémiologie [...]. Elle nous apprendrait en quoi consistent
les signes, quelles lois les régissent. Puisqu'elle n'existe pas encore, on ne peut dire ce
qu'elle sera ; mais elle a droit à l'existence, sa place est déterminée d'avance. La
linguistique n'est qu'une partie de cette science générale, les lois que découvrira la
sémiologie seront applicables à la linguistique, et celle-ci se trouvera ainsi rattachée à un
domaine bien défini dans l'ensemble des faits humains [...]. La tâche du linguiste est de
définir ce qui fait de la langue un système spécial dans l'ensemble des faits
sémiologiques. » SAUSSURE
Les images entrent dans le domaine de la sémiotique, quand Charles Sanders Peirce, à
peu près au même moment que Saussure, mais aux USA, développera sa sémiotique,
semiotics dans sa langue, à la suite d’une appellation déjà proposée par Locke vers la fin
du XVIIè siècle. Il faudra plusieurs dizaines d’années avant que les Européens ne
puissent accéder aux longs travaux de Peirce.
L'école américaine, issue de Peirce, se développe grâce à Charles Morris dans trois
directions principales :
- la sémiotique « pure », qui concerne la linguistique et la philosophie du langage ;
- la sémiotique descriptive, d'inspiration behaviouriste, qui étudie les comportements
sociaux non verbaux (gestion socio-culturelle de l'espace, du temps, de la gestuelle), des
langages non verbaux (image, vêtements...) ;
- la sémiotique appliquée, intéressée par la pragmatique, les rapports entre signe et
individu. Elle inclut aussi la zoosémiotique, qui étudie les signes de la communication
animale.
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En Europe, les post-saussuriens se distinguent selon leur plus ou moins grande
orthodoxie linguistique :
— les plus orthodoxes [Buyssens, Mounin, Martinet, Prieto] n'étudient que la seule
communication intentionnelle utilisant des codes composés d'un nombre fini d'éléments
tels que les langues, bien sûr, le code morse, le code de la route, le code des ascenseurs
et ainsi de suite. On parle alors d'une « sémiologie de la communication » [Guiraud,
dans son Que sais-je ? La sémiologie], que l'on a opposée à :
— une sémiologie de la signification , plus souple, pour laquelle un code peut être un
système ouvert, voire flou, et peut toujours être considéré comme code ou champ
d'observation structuré, dès lors qu'il produit des significations et qu'on le choisit comme
objet d'étude. Les références scientifiques de ce courant sont plutôt le cercle linguistique
de Prague, cofondé par le linguiste Roman Jakobson, et la glossématique danoise
fondée, elle, par le linguiste Hjelmslev.
Les sémiotiques spécifiques sont, elles, d'ordre grammatical au sens large du terme, c'est-
à-dire qu'elles englobent la syntaxe, la sémantique et la pragmatique ; elles sont chargées
d'étudier, d'un point de vue théorique et conceptuel, des systèmes de signes particuliers
tels que ceux de l'image ou du cinéma : comprennent-ils des signes ? Si oui, quels sont-
ils ? Comment s'agencent-ils ? etc.
La sémiotique appliquée, enfin, a des limites plus imprécises. Son problème n'est pas la
scientificité (proposition de concepts et de modèles) mais sa force de persuasion
rhétorique pour la compréhension d'un texte. Sa tâche est de rendre intersubjectivement
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contrôlable, grâce à l'utilisation d'outils empruntés aux sémiotiques précédentes, un «
discours sur », une interprétation d'un texte donné. La sémiotique appliquée est une
méthode d'analyse dont la rigueur se fonde sur l'utilisation des outils sémiotiques et ce
qu'ils supposent de consensus socio-culturel s'opposant aux interprétations non justifiées,
« impressionnistes », ou trop aléatoires.
Alex Mucchielli, Manuel de sémiotique situationnelle pour l'interprétation des conduites et des
communications, Montpellier, Alex Mucchielli, 2007.)
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Notre démarche, pour analyser les images, vise, pour plagier ce qu’écrit Umberto Eco*,
à décrire le fonctionnement de la communication par l’image et la signification des
images.
* U. Eco, Le Signe, Bruxelles pour la trad. française, Labor
Notes sur le signe (repères pour le signe selon Saussure et selon Peirce)
Saussure était un linguiste, il s’est attaché à la nature du signe linguistique. Pour lui, le
signe est une entité qui peut être représentée ainsi :
Sé
St
Pour lui, le signe est une entité psychique à deux faces. Ces deux faces sont
indissociables reliant un signifiant St (les sons) à un signifié Sé (le concept).
Peirce a développé une autre théorie et permis une autre représentation du signe, dans
une perspective plus large que celle de Saussure. Pour Peirce, tous nos sens peuvent être
concernés. Ainsi je perçois des signes (matérialité du signe) grâce à tous mes sens. On
peut voir, entendre, sentir toucher ou goûter. Un signe est une chose qui tient lieu
d’autre chose.
interprétant
representamen objet
∗ Le signe peircien est triadique
Cette définition de Peirce montre qu'un signe entretient une relation solidaire entre trois
pôles au moins (et non plus seulement deux comme chez Saussure) : la face perceptible
du signe : «representamen» ou signifiant (St), ce qu'il représente : «objet» ou référent, et
ce qu'il signifie : «interprétant» ou signifié (Sé).
Sémiologie : Dans son sens actuel et du moins pour nous, européens, il date de Saussure
: « On peut concevoir une science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale...
; nous la nommerons sémiologie. » Prospectivement - puisqu'elle n'est pas encore
constituée (1964) - la sémiologie a donc pour objet tout système de signes, quelle qu'en
soit la substance, quelles qu'en soient les limites : les images, les gestes, les sons
mélodiques, les objets et les complexes de ces substances que l'on retrouve dans des
rites, des protocoles ou des spectacles constituent, sinon des « langages », du moins des
systèmes de signification.
Sémiologie : le mot est proposé ici dans un esprit de confiance, mais aussi de retenue.
Dans son sens actuel et du moins pour nous, européens, il date de Saussure : « On peut
concevoir une science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale... ; nous la
nommerons sémiologie. » Prospectivement— puisqu'elle n'est pas encore constituée — la
sémiologie a donc pour objet tout système de signes, quelle qu'en soit la substance,
quelles qu'en soient les limites : les images, les gestes, les sons mélodiques, les objets et
les complexes de ces substances que l'on retrouve dans des rites, des protocoles ou des
spectacles constituent, sinon des « langages », du moins des systèmes de signification. Il
est certain que le développement des communications de masse donne aujourd'hui une
très grande actualité à ce champ immense de la signification (encore qu'il ne faille pas
confondre communication et signification), au moment même où le succès de disciplines
comme la linguistique, la théorie de l'information, la logique formelle et l'anthropologie
structurale fournit à l’ analyse sémantique des moyens nouveaux. Il y a aujourd'hui une
sollicitation sémiologique, issue, non de la fantaisie de quelques chercheurs, mais de
l'histoire même du monde moderne.
Cependant, le mot n'est pas sans inconfort, celui-là même d'un projet qu'on affirme sans
cesse et qu'on accomplit difficilement : il y a beaucoup de danger à programmer une
science avant qu'elle soit constituée, c'est-à-dire en somme, enseignée; et c'est un fait, la
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sémiologie se cherche lentement. La raison en est peut-être simple. Saussure, repris par
les principaux sémiologues, pensait que la linguistique n était qu'une partie de la science
générale des signes. Or il n'est pas du tout sûr qu'il existe dans la vie sociale de notre
temps des systèmes de signes d'une certaine ampleur, autres que le langage humain. La
sémiologie n'a eu jusqu'ici à traiter que de codes d'intérêt dérisoire, tels le code routier;
dès que l'on passe à des ensembles doués d'une véritable profondeur sociologique, on
rencontre de nouveau le langage. Certes, objets, images, comportements peuvent signifier,
et ils le font abondamment, mais ce n'est jamais d'une façon autonome ; tout système
sémiologique se mêle de langage. La substance visuelle, par exemple, confirme ses
significations en se faisant doubler par un message linguistique (c'est le cas du cinéma, de
la publicité, des comics, de la photographie de presse, etc), en sorte qu'au moins une
partie du message iconique est dans un rapport structural de redondance ou de relève
avec le système de la langue; quant aux ensembles d'objets (vêtement, nourriture), ils
n'accèdent au statut de systèmes qu'en passant par le relais de la langue, qui en découpe
les signifiants (sous forme de nomenclatures) et en nomme les signifiés (sous forme
d'usages ou de raisons) : nous sommes, bien plus qu'autrefois et en dépit de
l'envahissement des images, une civilisation de l'écriture. Enfin d'une manière beaucoup
plus générale, il parait de plus en plus difficile de concevoir un système d'images ou
d'objets dont les signifiés puissent exister en dehors du langage : percevoir ce qu'une
substance signifie, c'est fatalement recourir au découpage de la langue : il n'y a de sens
que nommé, et le monde des signifiés n'est autre que celui du langage.
Ainsi, quoique travaillant au départ sur des substances non-linguistiques, le sémiologue
des sociétés contemporaines (pour nous en tenir au champ des communications de masse)
est appelé à trouver tôt ou tard le langage (le « vrai ») sur son chemin, non seulement à
titre de modèle, mais aussi à titre de composant, de relais ou de signifié. Toutefois, ce
langage-là n'est plus tout à fait celui des linguistes : c'est un langage second, dont les
unités ne sont plus les monèmes ou les phonèmes, mais des fragments plus étendus du
discours renvoyant à des objets ou des épisodes qui signifient sous le langage, mais
jamais sans lui. La sémiologie est donc peut-être appelée à s'absorber dans une trans-
linguistique, dont la matière sera tantôt le mythe, le récit, l'article de presse, bref tous les
ensembles signifiants dont la substance première est le langage articulé, tantôt les objets
de notre civilisation, pour autant qu'ils sont parlés (à travers la presse, le prospectus,
l'interview, la conversation et peut-être même le langage intérieur, d'ordre
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fantasmatique). Il faut en somme admettre dès maintenant la possibilité de renverser un
jour la proposition de Saussure : la linguistique n'est pas une partie, même privilégiée, de
la science générale des signes, c'est la sémiologie qui est une partie de la linguistique :
très précisément cette partie qui prendrait en charge les grandes unités signifiantes du
discours; de la sorte apparaîtrait l'unité des recherches qui se mènent actuellement en
anthropologie, en sociologie, en psychanalyse et en stylistique autour du concept de
signification.(…) »
AVERTISSEMENT
Nous voudrions ici livrer à des étudiants « commençants » quelques aperçus du texte de
Roland Barthes. Nous savons notre présentation très incomplète, réductrice, et reconnaissons
volontiers que l’esprit ne saurait s’en satisfaire.
PREMIER SIGNE
DEUXIÈME SIGNE
Une redondance, une correspondance entre cette « italianité » des produits et des
couleurs (tricolore, drapeau italien), avec le nom de la marque : Panzani. Il souligne que
cette « reconnaissance » de l’italianité est du fait d’un public français, qui, par le
fonctionnement des stéréotypes touristiques, relie tomate, poivron, nom de la marque et
couleurs du drapeau en construisant « l’italianité ».
TROISIÈME SIGNE
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Pour Barthes, le deuxième message est de nature iconique (qu’il faut comprendre :
symbolique, avec l’idée d’italianité qui suppose que je connaisse le drapeau, par
exemple), mais ce n’est pas tout.
TROISIÈME MESSAGE
« Si l'on retire tous ces signes de l'image, il y reste encore une certaine matière
informationnelle ; privé de tout savoir, je continue à « lire » l'image, à « comprendre »
qu'elle réunit dans un même espace un certain nombre d'objets identifiables
(nommables), et non seulement des formes et des couleurs.
Les signifiés de ce TROISIÈME MESSAGE sont formés par les objets réels de la
scène, les signifiants par ces mêmes objets photographiés, car il est évident que dans la
représentation analogique le rapport de la chose signifiée et de l'image signifiante n'étant
plus « arbitraire » (comme il l'est dans la langue), il n'est plus nécessaire de ménager le
relais d'un troisième terme sous les espèces de l'image psychique de l'objet. Ce qui
spécifie ce troisième message, c'est en effet que le rapport du signifié et du signifiant est
quasi-tautologique* ; sans doute la photographie implique un certain aménagement de la
scène (cadrage, réduction, aplatissement), mais ce passage n'est pas une transformation
(comme peut l'être un codage) ; il y a ici perte de l'équivalence (propre aux vrais
systèmes de signes) et position d'une quasi-identité. Autrement dit, le signe de ce
message n'est plus puisé dans une réserve institutionnelle, il n'est pas codé, et l'on a
affaire à ce paradoxe (sur lequel on reviendra) d'un message sans code.
EN RÉSUMÉ
BARTHES IDENTIFIE TROIS MESSAGES :
UN MESSAGE LINGUISTIQUE
UN MESSAGE ICONIQUE SYMBOLIQUE
UN MESSAGE LITTÉRAL
Barthes reconnaît qu’il est aisé de séparer le message linguistique (M 1) des deux autres
messages, mais qu’il est malaisé de distinguer le message iconique codé (symbolique,
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M2) et le message iconique non-codé (M3: je reconnais un paquet de pâtes, c’est tout).
Il y a donc à distinguer dans le même ensemble visuel (ici la réclame Panzani) l’image
littérale, qui est dénotée, et l’image symbolique qui, elle, est connotée.
Φ l’image littérale est dénotée
Φ l’image symbolique est connotée
Ce que l’on appellera message visuel, c’est ce qui est constitué par deux catégories de
signes :
les signes plastiques qui sont les couleurs, les formes, la composition et la texture.
(∗ Nous reviendrons bientôt sur les signes iconiques et sur les signes plastiques.)
RAPPORT TEXTE/IMAGE
Barthes analyse d’abord le message linguistique. Certes, il existe des images « sans
paroles ». Mais
1.Barthes rappelle que dès que le livre est apparu, on observe une liaison entre le texte et
l’image. (illustration : enluminure)
2. Il considère que la communication contemporaine propose un lien permanent entre
texte et image, et que le message linguistique qui accompagne l’image joue deux
fonctions possibles : une fonction d’ancrage et une fonction de relais.
La fonction d’ancrage
L’image est polysémique, le lecteur peut choisir certains signifiés et en éliminer (ou
ignorer) d’autres. Aussi, le message linguistique peut-il « fixer la chaîne flottante des
signifiés ».
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La fonction de relais
Un bon exemple de fonction de relais dans les images fixes : les bandes dessinées, où il
y a un rapport de complémentarité entre texte et image (bien qu’il existe des BD sans
texte, ce que trop peu d’auteurs soulignent …). Au cinéma, évidemment, dit Barthes,
« la parole-relais devient très importante ».
TYPE
stabilisation reconnaissance
conformitˇ conformitˇ
R F RENT SIGNIFIANT
Transformations
Le mod¸ le du signe iconique dÕapr¸ s le Groupe μ
Explications, empruntées au Traité du signe visuel du Groupe μ. Les phrases ont été
élaguées afin de les rendre plus accessibles.
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Le signe iconique est composé de trois éléments
Type : modèle intériorisé et stabilisé qui, confronté avec le produit de la perception, est à
la base du processus cognitif. Dans le domaine iconique, le type est une
représentation mentale, constituée par un processus d'intégration (qui peut être
génétiquement décrit). Sa fonction est de garantir l'équivalence (ou identité transformée)
du référent et du signifiant, équivalence qui n'est jamais due à la seule relation de
transformation. Le référent et le signifiant sont donc entre eux dans une relation de
cotypie.
Très important : Le type n'a pas, on l’a dit, de caractères physiques ; il peut être
décrit par une série de caractéristiques conceptuelles, dont quelques-unes peuvent
correspondre à des caractéristiques physiques du référent (par exemple, en ce qui
concerne le chat, la forme de l'animal couché, ou assis, ou en pied, la présence de
moustache, de queue, de rayures), d'autres ne correspondant pas à de telles
caractéristiques (comme le miaulement).
Ces traits constituent un produit de paradigmes dont les termes sont dans une relation de
somme logique (par exemple, le type « chat » comporte le paradigme de la couleur — ou
noir, ou roux, etc. — et celui de la position, etc.).
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Quelle est l’utilité de cette notion de « signe iconique » ?
Elle permet de relativiser, dit Joly, « à la fois l’ancienne notion d’iconicité (ou de
ressemblance) et celle de reconnaissance. »
(ce qui nous renvoie à un cours précédent)
- La photographie d’un chat n’a pas pour référent le chat particulier qui a été pris en
photo, mais la catégorie des chats dont ce chat constitue un élément.
L’image de Félix le Chat invite aussi le lecteur à sélectionner très rapidement des traits
pertinents de reconnaissance (pelage, forme des oreilles, queue,…) qui font que sous le
regard, Félix est un chat, même si sa bouche est « humaine » et si l’on ne voit pas ses
moustaches !
Cette image (le dessin simplifié du chat en illustration) ne « ressemble pas » à un chat,
pourtant elle est lisible. On « reconnaît » ici un chat. Reconnaître, écrit Joly reprenant
des propos de certains devanciers, « c’est ranger dans une classe, de telle sorte que le
chat comme concept, qui ne figure pas explicitement dans l’image, s’y trouve réintroduit
par le regard du spectateur ». D’où l’idée de coproduction du sens (ou co-élaboration).
Je donne ici une longue citation de M. Joly, L'image et les signes, approche
sémiologique de l'image fixe, à lire intégralement.
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son titre spécifique de peinture » selon l'expression du théoricien de l'art Hubert
Damisch. La confusion entre signifiant plastique et signifiant iconique correspondait en
réalité à l'idée d'un « signe-image » unique, exerçant une fonction essentiellement
iconique et susceptible de connaître des variations stylistiques. »
- la couleur (axe des couleurs – celles du spectre de la lumière- , axe des valeurs, axe des
tonalités ;
- la forme (axe des formes – carrés, triangles, cercles,…) axes des lignes, des points, des
surfaces ;
- la spatialité qui comprend la composition interne de la représentation, la dimension
(petit ou grand), la position par rapport au cadre (en haut, en bas, à droite, à gauche)
l’orientation (vers le haut, vers le bas), le proche et le lointain ;
- la texture avec grain vs lisse, épais vs mince, et le tramé, la tache, etc.
Parmi les signes plastiques, il faut distinguer les signes plastiques non spécifiques et
les signes plastiques spécifiques.
Les signes plastiques non spécifiques sont ceux que notre vie, notre expérience, nous
donnent à percevoir. Ces signes plastiques non spécifiques aux images (préférons, une
fois encore, « messages visuel ») sont les couleurs, l’éclairage, la texture.
Les signes plastiques spécifiques aux messages visuels ont été élaborés par les artistes,
ils relèvent de conventions. Ces signes plastiques spécifiques sont, par exemple, le cadre,
le cadrage, la pose du modèle.
1. La couleur
2. La texture
3. Les lignes et les formes
4. L’espace
1. Le cadre
2. Le cadrage
3. La visée et la composition interne
4. La pose du modèle
B. 1. Le cadre
Le cadre est un élément spécifique de l’image.
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Il la délimite, l’isole et « dit » qu’il en fait une image.
Le cadre, ou la clôture de l’image.
Le cadre isole l’image de ce qui l’entoure, le cadre est la frontière physique d’une image.
Le mot « cadre » peut désigner le cadre d’un tableau ou d’une photographie, mais aussi
l’écran du téléviseur ou de l’ordinateur ou bien l’écran de cinéma.
Dans le domaine de la BD
Une vignette de BD peut être appelée:
- Une case, si elle est limitée par un trait qui la sépare des autres.
- Mais toutes les vignettes ne sont pas des cases, car toutes les vignettes de toutes les BD
ne sont pas contenues par un cadre…
- Notez que toutes les cases sont des vignettes.
(exemples dans la galerie d’images)
« Ce sur quoi nous voudrions insister, c'est sur le fait que cet oubli du cadre, de
quelque manière qu'on l'obtienne, préside à une conception de l'image
culturellement très marquée, qui implique, au-delà des choix esthétiques, une
véritable éthique de l'image. En effet, en masquant le caractère de
représentation (c'est-à-dire de construction) de l'image, on la donne non pas
comme un énoncé visuel, une interprétation, mais une fois encore comme le
monde même. C'est pourquoi il nous semble que l'examen du traitement du
cadre peut d’emblée nous fournir des informations précieuses sur les
inductions de signification et d’interprétation du message visuel. » Martine
Joly.
B. 2. Le cadrage
A ne pas confondre avec le cadre
En photographie, au cinéma, en BD, on parle d’échelle des plans
Nous allons voir la nomenclature assez largement admise, bien que tout le monde ne
l’adopte pas
Nomenclature assez largement admise
gros plan,
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plan rapproché,
plan américain,
plan italien,
plan moyen,
plan de demi-ensemble,
plan de grand ensemble.
Pour nuancer, il existe des plans que l’on situe entre certains des plans précités, comme
le très gros plan, ou le plan taille.
Comme Martine Joly, et de même que je l’ai suggéré pour la symbolique des couleurs, je
pense qu’il faut être très prudent en matière d’interprétation des cadrages.
(une image est donnée, avec la présentation des plans)
Il s’agit d’un choix esthétique, non neutre, à interpréter avec prudence, comme on le
verra.
Ces trois illustrations en galerie d’images montrent l’emploi habituel, convenu, des
angles de vue.
L’angle de vue « normal » est habituellement dit « neutre »,
la plongée écrasante,
la contre-plongée, au contraire, magnifierait le sujet.
Mais tous les analystes s’accordent sur un point : les angles de vue peuvent être utilisés à
« contre-emploi ».
Une plongée peut au contraire être magnifiante, une contre-plongée dévalorisante.
Quoi qu’il en soit, « plongée » et « contre-plongée » sont des angles de vue qui
demandent une maîtrise de la perspective.
B. Duc dit que, dans le domaine de la BD, « leur effet psychologique [est] directement
dépendant d’un effet de perspective réussi. »
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La perspective.
*E. Gombrich, Histoire de l’art, Paris, René Julliard pour la première éd. française,
1963.
la composition axiale,
la composition focalisée,
la composition séquentielle.
B. 4. La pose du modèle
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