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Revue critique d’Analyse de Cycle de Vie

Austin Mini by Ian Motion

Le 24/09/2020

1 Introduction
Ian Motion a commandé auprès de GreenFlex un bilan carbone de sa solution d’électrification d’Austin
Mini. Green Flex est largement reconnu dans ce domaine d’expertise pour avoir accompagné plus
de 750 entreprises notamment à travers l’Europe. L’entreprise possède une licence d’exploitation
auprès de l’Association Bilan Carbone (ABC) et est donc habilitée à utiliser la méthodologie du Bi-
lan Carbone® pour autrui. L’analyse critique qui suit a pour but de venir consolider les résultats
communiqués.

2 Contexte de rédaction
Ian Motion est le 1er acteur du rétrofit français à communiquer sur la comptabilité carbone en Analyse
de Cycle de Vie (ACV) de son produit. Pour une meilleure compréhension des chiffres avancés, il
semble absolument nécessaire d’expliciter les contours et les limites de cette étude tant les hypothèses
et variables d’entrées peuvent affecter le résultat. Cette revue critique rédigée en interne par l’équipe
de Ian Motion apportera un esprit critique sur ces travaux pour que le lecteur puisse avoir en sa
possession une liste la plus exhaustive possible des éléments influant sur le bilan carbone d’une
automobile rétrofitée.

3 Rappel de la définition du champ de l’ACV réalisée


3.1 Système de produit étudié
• Scénario 1, référence : « Je mets mon véhicule à la casse et j’en rachète un neuf et électrique. »
• Scénario 2, rétrofit : « Je fais électrifier mon véhicule par la solution Ian Motion. »

3.2 Unité fonctionnelle


Transport de personnes en véhicule de tourisme pour de courts trajets, sur un kilométrage total de 80
000 km (environ 50 000 miles), pendant 10 ans, dans le respect des normes d’homologation M1 et/ou
de la réglementation s’appliquant au rétrofit électrique en France.

3.3 Flux de référence


Le flux de référence est une automobile, compacte, 3 portes, 4 places assimilable par son usage à un
véhicule moderne de segment B1.

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3.4 Frontière du système
Du berceau à la tombe = "Cradle to grave". Nous ne tenons pas compte d’événements pouvant
intervenir dans la vie du véhicule : accidents, éventuelles maintenances, remplacement des pneuma-
tiques, des fluides ou tout autre éventualité inhérente à la vie du véhicule. Nous ne considérons pas
l’impact des infrastructures nécessaires à l’utilisation de notre véhicule car en première approxima-
tion cette infrastructure est identique quel que soit le véhicule électrique utilisé.

3.5 Exigences portées aux données


L’étude se réfère à des données directement fournies par Ian Motion lorsqu’il s’agit d’établir l’impact
de la solution d’électrification. Dans de nombreux cas, l’étude se réfère également à l’ACV de
l’ADEME* pour établir l’impact du véhicule neuf électrique de référence du scénario 1. Cette ACV
utilise elle-même la base de données génériques GaBi5 professionnal. Ces données ont à présent près
de 10 ans. C’est une limite à considérer. De plus, bien qu’ils soient cohérents, l’année de référence
des mixes électriques considérés par GreenFlex n’est pas précisée.
*Rapport intitulé : "Elaboration selon les principes des ACV des bilans énergétiques, des émissions de gaz à
effet de serre et des autres impacts environnementaux induits par l’ensemble des filières de véhicules électriques
et de véhicules thermiques, VP de segment B (citadine polyvalente) et VUL à l’horizon 2012 et 2020"

3.6 Règles d’allocation


La détermination de l’impact des composants de Ian Motion à la fabrication et en fin de vie est réalisée
au prorata massique des matériaux employés sur la base des données de l’ACV de l’ADEME.

3.7 Méthodologie de l’impact du cycle de vie


Calcul de la consommation d’énergie primaire de chaque étape du cycle de vie puis déduction des
émissions de gaz à effet de serre selon les règles du Bilan Carbone®.

3.8 Limites sociétales liées à l’usage


Cette ACV ne vise pas à établir les potentiels effets rebonds de la solution proposée. Toutefois, la
certaine contrainte liée à l’autonomie de 150km de la Mini retrofitée peut ré-interroger l’utilisateur
sur le bien fondé de l’usage de la voiture pour de longues distances.

3.9 Règle de coupure


Nous regrettons dans ce chiffrage l’absence d’une limite de coupure chiffrée. Cela devra être corrigé
dans de futurs travaux et augmentera la robustesse des travaux. Une analyse de sensibilité serait
également souhaitable. Ce travail n’est pas été réalisé à ce jour pour des raisons de moyens dédiés
sur ces questions.

3.10 Champ couvert par les chiffres communiqués


Ce chiffre de 84 g CO2e/km est bien distinct des émissions de CO2/km communément établies
des véhicules thermiques dans leur unique phase de roulage. Ce chiffre que nous communiquons
ne s’arrête pas uniquement à l’usage mais couvre l’intégralité du cycle de vie du produit comme
rappeler dans le communiqué réalisé sur l’ACV.

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4 Commentaires détaillés
Cette analyse critique de Ian Motion ne vise pas à rendre un avis sur la cohérence des méthodes
utilisées vis-à-vis des normes ISO 14040: 2006 et 14044: 2006. Nous nous focaliserons cependant sur
la qualité des données employées, leurs interprétations, ainsi que la transparence et la cohérence de
l’étude.

4.1 Le mix électrique : première variable de résultat final


Le choix d’un mix électrique moyen : 1/3 France, 1/3 Royaume-Uni, 1/3 Allemagne est judicieux
vis-à-vis de la cible marché que vise Ian Motion. Il faut néanmoins prendre conscience de l’impact
prépondérant de la nature du mix électrique employé quant aux résultats explicités. En considérant
par exemple un mix 100% français, l’impact est abaissé à 52 g CO2e/km.

4.2 Influence forte du kilométrage totale de l’étude


Le choix pour cette étude d’un kilométrage de 80 000km est très prudent. Nous pourrions largement
porter cette étude à 200 000km d’autant que la chimie que nous utilisons permet d’atteindre 2000
cycles complets de charges/décharges théoriques à 100% de profondeur de décharge. Sur la base de
200 000km et en gardant les autres hypothèses de départ, l’impact est abaissé à 59 g CO2e/km.
Remarque : en cumulant un mix électrique 100% français et une durée de vie de 200 000km, l’impact en
Analyse de Cycle de Vide de notre solution est de seulement : 27 g CO2e/km.

4.3 Batterie
L’impact carbone des cellules de la batterie a été calculé au pro-rata de la masse du scénario de
2012 du véhicule particulier issu du rapport de l’ADEME mentionné précédemment. Voici quelques
remarques sur ce choix et la méthodologie appliquée :
• La chimie employée dans ce scénario de l’ADEME est à 100% NMC et est donc complètement
différente de celle de notre solution d’électrification (LFP).
• La fabrication des cellules est supposée en France alors que nos cellules sont fabriquées en
Chine.
Ces deux premières hypothèses ne représentent pas la réalité. La fabrication des cellules en France
tend à minimiser l’impact carbone des cellules alors que les méthodes de calcul couplées à la chimie
considérée tendent à l’augmenter. Nos recherches bibliographiques réalisées en interne sur ces ques-
tions laissent à penser que l’addition de ces deux hypothèses permet d’approcher assez fidèlement
notre produit. En première approche, le choix de GreenFlex sur ces deux hypothèse est donc recev-
able.

Cependant :
• Les données utilisées : de masse (238kg) et d’impact carbone (3170kg de CO2e) du scénario de
l’ADEME sont celles du pack batterie complet (cellules + casing + électronique) dont l’intensité
carbone est affectée uniquement aux cellules utilisées par Ian Motion (120kg). C’est une impru-
dence.
• Ce raisonnement au pro rata de la masse ne tient aucunement compte des densités énergétiques
potentiellement différentes entre les cellules. Il aurait été plus judicieux de calculer l’impact au
pro rata de la capacité des batteries. Cela doit être considéré dans de prochains calculs.
Les chutes liées à la production de la batterie lors de sa fabrication ne sont pas prises en compte.
Cette hypothèse est acceptable, la littérature s’accorde à dire qu’elles sont minimes.

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4.4 Autres émissions liées à l’usage véhicule
De récentes études montrent l’impact important de l’abrasion des pneumatiques et des plaquettes
de frein responsables de l’émission de polluants. Nous pouvons d’ores-et-déjà saluer la réduction
de l’usure des plaquettes de frein sur les véhicules électriques grâce à l’utilisation prépondérante du
freinage régénératif en utilisation quotidienne.
Dans des conditions d’usage strictement identiques et notamment avec des taux de récupéra-
tion d’énergie au freinage égaux, un véhicule plus léger et avec des montes pneumatiques plus
étroites, générera moins de polluants liés à l’usure de ses pneumatiques et de ses plaquettes de frein
en valeur absolue.
Ces éléments, s’ils étaient pris en compte dans l’ACV augmenteraient le différentiel entre un
véhicule électrique neuf et notre solution de par le différentiel de masse entre les deux véhicules :
plus de 400kg.

4.5 Existence hypothétique du véhicule du scénario 1


Il est ici utile de rappeler quelques caractéristiques intrinsèques des véhicules dont nous comparons
les impacts carbones à savoir : notre Mini retrofitée et le véhicule neuf du scénario 1 auquel nous
ajoutons ici volontairement 2 véhicules existants de masse proche et servant ainsi de référentiel : la
Mia électrique et la Citroën C-Zero
Nous nous concentrons sur 3 caractéristiques prépondérantes sur l’impact environnemental :
• la masse du véhicule ; la masse affecte l’impact carbone à toutes les étapes du cycle de vie du
produit notamment lors de sa construction et lors du roulage.
• la chimie des batteries ; la chimie lithium-fer-phosphate emploie des ressources abondantes sur
terre et n’a ni recours au cobalt, au nickel et au manganèse.
• la capacité des batteries ; plus une batterie possède une capacité importante plus elle nécessite
l’emploi du matières premières et plus elle affecte la masse du véhicule.

Table 1: Comparaison de la masse, de la chimie et des capacités de 4 véhicules électriques

Véhicule Masse (kg) Chimie batterie Capacité (kWh) Statut


Mini Ian Motion 720 LFP 18 En homologation
Véhicule scénario 1 1033 LFP 18 Hypothétique
Mia électrique 764 - 850 LFP 8 ou 12 Vendue par le passé
Citroën C-Zero 1120 LMO 16 Disponible en stock

Diminuer l’impact environnemental d’un véhicule électrique c’est donc contenir sa masse,
opter pour une capacité modérée et choisir une chimie de batterie durable.

Nous pouvons tirer de ce tableau les observations suivantes :


• Aucun véhicule neuf sur le marché ne réunit les caractéristiques du véhicule de référence du
scénario 1.
• À capacité de batterie égale à la Mini, ce véhicule neuf du scénario 1 devrait être environ 100kg
plus léger qu’une Citroën C-Zero
• À masse presque similaire, la Mia offre 2 fois moins de capacité batterie.
Ces éléments de comparaison montrent que le véhicule de référence du scénario 1 affichent des
caractéristiques optimistes alors que les véhicules existants et qui servent de référentiels dans cette

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comparaison s’illustrent déjà par des masses faibles par rapport notamment à la voiture électrique la
plus vendue en France en 2019 : la Renault Zoé et ses 1500kg.

4.6 Une consommation électrique optimiste pour le scénario 1


Dans l’ACV réalisée, nous considérons la même consommation électrique au roulage pour les deux
véhicules. Il s’agit pour la Mini de la consommation en usage réel établie à 12kWh/100km. Seule
la Citroën C-zero, véhicule neuf électrique 4 places affiche une consommation sensiblement proche.
Il aurait pu être intéressant de considérer une consommation d’au moins 14kWh/100km pour le
véhicule électrique neuf de référence ce qui aurait été plus proche de la réalité du marché en 2020.
De plus, un rendement de charge des batteries de 95% est considéré dans les deux scénarios.

4.7 Une fin de vie qui pourrait être préciser


La méthode des impacts évités est utilisée pour traiter la fin de vie du véhicule thermique mis à la
casse dans le scénario de référence. Cependant, la méthode utilisée pour traiter la fin de vie des
véhicules électrifiés n’est pas suffisamment claire. Cela doit être précisé.

De plus, l’ACV établie considère un impact en fin de vie égaux pour les deux véhicules électri-
fiés.
Pourtant :
• Le montage vissé de notre pack batterie facilite une réutilisation/un recyclage des batteries.
• Cette facilité de maintenance laisse une porte ouverte à un remplacement du pack batterie pour
prolonger encore la durée de vie du véhicule.
• La masse des véhicules diffère et donc, sur la base des méthodes employées l’impact en fin de
vie également, au bénéfice de la Mini.

4.8 Incertitudes sur la chaine d’approvisionnement


Sont considérés dans cet étude l’impact de tous les fournisseurs de rang 1 pour les deux scénar-
ios.
La très grande complexité des chaines d’approvisionnement d’un véhicule neuf se traduit par
des incertitudes marquées sur l’impact de la chaine d’approvisionnement du scénario 1. Par le plus
faible nombre de composants ainsi que l’appel à des fournisseurs locaux, le Rétrofit et en particulier la
solution de Ian Motion tire indéniablement un avantage sur ce poste de l’approvisionnement.

4.9 Le bilan carbone n’est qu’une partie de l’impact environnemental


Cette étude ne vise qu’à établir un bilan carbone comparatif. Il serait intéressant d’ouvrir le champ à
des chiffrages sur :
• l’épuisement des ressources minérales
• le potentiel d’acidification
• le potentiel d’eutrophisation
• l’atteinte à la couche d’ozone
• la création d’ozone photochimique
• l’émission de particules fines
• etc.

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Des moyens beaucoup plus importants seraient à consacrer à ce sujet et permettraient d’obtenir un
spectre beaucoup plus large de l’impact environnemental du produit.

4.10 Un scénario de distribution à préciser


Dans le scénario choisi, la distribution de notre Mini ne fait intervenir aucune émission liée au client
venant chercher son véhicule sur le lieu du Rétrofit. Il serait judicieux de prendre en considération les
émissions liées à la venue du client sur le lieu de production. Ce manquement pourra être préciser
avec le retour d’expérience issu des premières livraisons.

4.11 Deux offres potentiellement distinctes à l’usage


Notre solution ne laisse aucune possibilité au "Vehicle to Grid" (V2G) alors qu’un véhicule neuf saura
potentiellement plus à même de proposer cette fonctionnalité pouvant permettre une réduction des
émissions de GES par un lissage de la production électrique à l’échelle du réseau et facilitant par
ailleurs l’introduction de moyens intermittents tels que le solaire et l’éolien.
D’autre part, notre solution n’offre aucune recharge rapide et reste limitée à son chargeur em-
barqué 3,5kW. La recharge rapide est présente sur la quasi-totalité des véhicules électriques neufs
arrivant sur le marché en 2020. C’est une distinction notable.
Il est enfin certain que ces deux véhicules n’offrent pas les mêmes prestations de confort in-
térieur (chauffage, info-divertissement, etc), ni de sécurité.

4.12 Une phase d’assemblage à ré-interroger


Nous notons la difficulté de compréhension des écarts constatés lors des phases d’assemblage. Un
différentiel très conséquent est observé au bénéfice de la solution de Rétrofit. Pourtant, sur le strict
point de l’assemblage, nous pourrions penser que les effets de volumes réduisent l’impact relatif de
chaque véhicule neuf produit en grande série. Ce point est à préciser.
Seul l’impact lié à l’usage des bâtiments de Ian Motion est considéré dans cette étude. Ne sont
pas pris en compte les déplacements du personnel sur le site. Cet élément ayant été négligé du fait de
la taille très réduite des équipes au moment de la réalisation de cette étude et du fait que les mobilités
douces sont privilégiées.

4.13 Date de réalisation de l’étude


Ce présent calcul d’impact carbone a été livré fin 2018.

5 Voies d’amélioration
Grâce à notre ACV, nous savons à présent que dans les hypothèses choisies :
• Le mix électrique employé pour propulser notre Mini représente 50% de son bilan carbone.
• La production des batteries représente à elles-seules 24% du bilan carbone total.
Il convient donc pour réduire l’impact de notre solution :
• D’oeuvrer à la décarbonation de la production électrique notamment à l’échelle européenne et
mondiale. Sur cette absolue nécessité, Ian Motion ne dispose malheureusement que de leviers
d’action quasi inexistants.
• De promouvoir la production de batteries sur le territoire français. Selon le GIEC, le mix én-
ergétique utilisé en Asie contribue à au moins 50%* des émissions de la fabrication des cellules.
*Rapport intitulé : "Effects of battery manufacturing on electric vehicle life-cycle greenhouse gas emissions"
de février 2018.

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6 Conclusion
Cette ACV est riche d’enseignement par la différence d’impact carbone observée entre un véhicule
neuf et notre solution faisant appel au rétrofit et à des choix techniques spécifiques et recherchés.
Grâce au chiffrage établi par GreenFlex, nous sommes convaincus que l’impact carbone en
valeur absolue de notre Mini Retrofitée est particulièrement faible. Notre proposition couplée à un
mix électrique décarboné et utilisée à son plein potentiel de durée de vie est dès 2020 pleinement
alignée avec les objectifs nationaux de la France pour 2050 dans le cadre de l’Accord de Paris sur le
Climat.
Ian Motion anticipe par son activité les futures exigences environnementales et propose de ce
fait une solution pérenne.
Le présent document souligne des manquements ainsi que des points d’amélioration. Nous
avons à coeur de travailler dès à présent sur ces éléments.

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