Jean-François SERRATRICE
Chargé de recherche. Service de Mécanique des sols
Laboratoire régional des Ponts et Chaussées
d"Aix-en-Provence
Jean-Louis DURVILLE
Chef de la division Mécanique des sols
et géologie de l'ingénieur
Laboratoire central des Ponts et Chaussées
Introduction
L e Laboratoire central des Ponts et Chaussées a déve-
loppé une base de données sur les essais de roches et de
granulats en laboratoire, d é n o m m é e Dataroc (Durville et
al., 1991). L e Laboratoire régional d'Aix-en-Provence a
engrangé les résultats des essais courants de m é c a n i q u e
des roches effectués sur des échantillons carottés, ainsi
que des relevés de fracturation obtenus, eux aussi, à
partir de sondages carottés (Serratrice, 1994). I l parais-
sait intéressant d'exploiter ces deux bases de données,
qui rassemblent quelques milliers de mesures, dans l'op-
tique d'illustrer ce que l ' o n appelle la description des
roches et des massifs rocheux ( A F T E S , 1993 ; Durville
et Héraud, 1995) et de donner une sorte de vue statis-
RESUME tique d'ensemble sur leurs propriétés : valeurs typiques
E n vue d'illustrer la description d e s m a s s i f s et extrêmes, corrélations simples, etc. I l ne faut pas
rocheux, deux e n s e m b l e s d e données sont cacher cependant les limites d'un tel exercice : un trai-
exploités : l'un relatif aux e s s a i s d e labora-
toire, l'autre aux relevés d e fracturation e n tement de données rigoureux suppose que l'échantillon-
sondage. nage soit représentatif, que les résultats soient issus
O n présente d'abord q u e l q u e s résultats d ' e n - d'essais réalisés suivant le m ê m e mode opératoire, etc.,
s e m b l e sur l a m a s s e volumique, la porosité, conditions qui ne sont guère réunies i c i ...
la vitesse ultrasonique, l'indice de continuité,
la résistance e n c o m p r e s s i o n uniaxiale, la
résistance e n traction indirecte, le module
d ' Y o u n g et l'abrasivité : histogrammes d e
valeurs et corrélations entre couple d e pro- Les essais de laboratoire
priétés.
L e s données de fracturation, i s s u e s d e plus Les propriétés des roches prises en compte dans la suite
d e 4 0 0 0 m d e s o n d a g e s carottés, sont sont les suivantes :
représentées de d i v e r s e s manières et exploi-
tées à l'aide d e s paramètres c l a s s i q u e s , tels - la masse volumique sèche (p ), d
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 211 - SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - PP. 73-87 73
Détermination des propriétés Quatre séries d'essais de compression uniaxiale,
géomécaniques des roches réalisés au L C P C i l y a quelques années, ont
donné les résultats du tableau II, où la moyenne
Il n ' y a pas de norme française en m é c a n i q u e des
et la dispersion ont été obtenues pour vingt
roches. Il est n é a n m o i n s possible de se référer à
écrasements soigneusement réalisés selon le
certaines normes pour les granulats, en particu-
mode opératoire du L C P C . Une roche très
lier celle de l'abrasivité ( N F P 18-579) et celle
h o m o g è n e et peu fissurée telle que le marbre de
de la vitesse ultrasonique ( N F P 18-556). L ' A s -
Carrare (calcaire cristallin) donne des résultats
sociation française pour les travaux en souter- très groupés, à l ' o p p o s é du basalte, assez fissuré
rains ( A F T E S , 1993) a publié des recommanda- et hétérogène.
tions qui donnent des indications pour la
détermination de V , R , R , A .
; c t b b r E n ce qui concerne la vitesse de propagation du
son, une étude de répétabilité m e n é e r é c e m m e n t
Les recommandations de la Société internatio-
au L C P C a donné un écart-type variant de 50 à
nale de m é c a n i q u e des roches ( S I M R ) sont diffu-
100 m/s selon les échantillons.
sées très largement. L e Laboratoire central des
Ponts et Chaussées ( L C P C ) a publié deux projets
de mode opératoire, pour la mesure de la résis-
Données disponibles
tance en compression uniaxiale ( L C P C , 1988) et
pour la mesure de la résistance au fendage (essai L a base de données Dataroc du LCPC
brésilien, L C P C , 1985). compte plus de 650 enregistrements corres-
pondant à des roches diverses, dont la
O n dispose d'un certain nombre de données sur
moitié est représentée par des calcaires. Les
la dispersion des propriétés g é o m é c a n i q u e s des
résultats d'essais mis en m é m o i r e ont été
roches. Dans le cas d'essais destructifs, cette dis-
obtenus au L C P C ou ont été recueillis dans
persion est liée à la fois à la m é t h o d e d'essai et à
diverses publications. Compte tenu de l ' o r i -
l'hétérogénéité de la roche. Certains essais sont gine multiple des d o n n é e s , les essais n'ont
plus sensibles que d'autres aux défauts plus ou pas été réalisés selon un mode opératoire
moins aléatoires, fissures en particulier, présents unique ; cependant, tous les essais m é c a n i -
dans une éprouvette. Par exemple, les essais de ques sont relatifs à la roche sèche. Dans un
dispersion effectués sur un basalte américain enregistrement, les valeurs fournies pour les
( K i m et Gao, 1995), dont les résultats sont pré- différents essais, qui seront utilisées dans la
sentés dans le tableau I, montrent la faible dis- suite, sont en fait une moyenne, calculée
persion du module d ' Y o u n g , c o m p a r é e à celle sur plusieurs essais (entre un et douze en
des résistances. général).
Moyenne 74,9 G P a 229 M P a 12,5 M P a sont obtenues sur des éprouvettes humides, le
plus souvent simplement débitées dans les
Coefficient de variation 0,083 0,43 0,38
échantillons (élancement 2 pour R et élance- c
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Fig. 1 - Histogrammes de densités des roches
Fréquence (%)
30 r
Fréquence
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 211 • SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - PP. 73-87 75
aux variations de faciès ou d'état d'altération de
ce niveau calcaire. Une analyse plus fine montre
que la distribution des valeurs de R est assimi- c
R (MPa)
c
400
Fig. 3 - Histogramme des résistances en compression 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000
simple pour un lot de 68 éprouvettes de calcaire de la Vitesse du son (m/s)
région d'Aix-en-Provence (plateau du Realtor).
Moyenne : 61,7 MPa. Coefficient de variation : 0,53. Fig. 4 - Relation entre résistance en compression simple et
Groupement des résistances suivant la classification vitesse du son : cas des roches sédimentaires (données
AFTES, (données du LRPC d'Aix-en-Provence). de Dataroc).
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Fig. 5 - Relation entre la résistance en compression simple et la porosité ou le poids volumique
R (MPa)
c
200- Marne
Calcaire marneux
R (MPa) Calcaire dolomie
c
Grès
300-
Granité
150-
Schiste
Roches calcaires
250 M Gneiss
X Basaltes
200 > Gypse
100 4 Poudingue brèche
Y Divers
150H
7 1 X
100 50-
V
50
0
0 10 20 30 40 50
Porosité (%) Poids volumique y (kN/m ) 3
L a figure 5b représente la résistance en compres- celle obtenue sur des éprouvettes sèches ( R ) . E n c
être attribuée aux différences pétrographiques et bles pour les calcaires tendres, notamment pour
aussi, pour une m ê m e roche, à l'influence des les craies (les quatre points entourés dans la
défauts de la roche (microfissures ou fissures). figure 6 sont des craies). L'affaiblissement des
roches dû à l'eau est un p h é n o m è n e complexe ;
L a figure 6 montre la relation entre la résistance
l'explication doit probablement être recherchée
obtenue sur des éprouvettes saturées ( R ) et c w
R, 10 R„
0 50 100 150 200 250 300 350 avec toutefois une large dispersion autour de la
R (MPa)
c droite correspondante. S i l ' o n y regarde de plus
près, on constate que ce rapport dépend de la
Fig. 6 - Étude du rapport des résistances en compression
simple sur éprouvettes saturées et sur éprouvettes
nature pétrographique ; par exemple, i l vaut en
sèches. Les quatre points entourés représentent des moyenne 10,1 pour les calcaires, et 12,7 pour les
craies (données de Dataroc).
roches magmatiques grenues et les grès.
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES • 211 - SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - PP. 73-87 77
R, (MPa)
b Rtb (MPa)
40 20
15 -
10 -
400
+ Marne
R (MPa)
c
x Calcaire marneux
• Calcaire dolomle
Fig. 7 - Relation entre la résistance en traction indirecte 1 1 1 1 1
' ' I i
(essai brésilien) et la résistance en compression simple ;
150 200
on a tracé la droite d'équation : R, = R / 10 (données de
b c
Dataroc). Rc (MPa)
a. Pour les marnes, les calcaires marneux, les calcaires
A v e c les données du L R P C d'Aix-en-Provence, et les dolomies.
les conclusions sont analogues. Sur la figure 8,
R» (MPa)
les roches ont été classées en trois groupes : 20
les marnes, les calcaires marneux, les cal-
caires et les dolomies,
cette relation entre les résistances en compres- b. Pour les grès et les granites.
sion simple et en traction R / R : la pente c t b R* (MPa)
20
moyenne de cette enveloppe au voisinage de
l'axe des contraintes x peut être représentée par
un angle de frottement. Les valeurs observées de
R , / R sembleraient confirmer la nature frottante
t b V
des roches siliceuses et au contraire les frotte-
ments plus réduits souvent observés avec les
roches riches en m i n é r a u x micacés. M
M
V M
M
v *
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Cette variation des rapports R / R peut aussi être
c t b
La déformabilité
axiale (de 2 à 5 M P a ) .
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 211 - SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - PP. 73-87 79
L'abrasivité La densité de discontinuités
L'abrasivité rend compte de l'aptitude des roches à De façon générale, la densité de discontinuités
user les pièces métalliques de concasseurs, les peut être définie comme le rapport S de l'aire v
molettes de machines foreuses, les taillants d'outils c u m u l é e des portions de discontinuités com-
de forage, etc. L'essai L C P C ( N F P 18-579) donne prises dans une région représentative (donc suffi-
des valeurs qui s ' échelonnent de 0 (calcaires purs) à samment grande) du massif rocheux, rapportée
près de 2 500 (quartzites compacts). au volume de cette région. L a densité de discon-
tinuités a donc pour dimension l'inverse d'une
L a figure 10 présente la relation entre l'abrasi-
longueur. M a i s cette quantité, qui englobe à la
vité L C P C et la résistance en compression
fois l'espacement des discontinuités et leur per-
uniaxiale. O n sait que l'abrasivité d'une roche
sistance, n'est guère accessible directement.
est fonction de deux éléments principaux : la
dureté de ses constituants et la cohésion de l'en- E n général, i l faut se contenter d ' é v a l u e r la den-
semble. sité de discontinuités à partir du relevé sur une
ligne, en comptant les longueurs des parties mas-
sives de la roche, d'une discontinuité à la sui-
"br vante, après avoir éventuellement classé les dis-
3000
Roches non calcaires continuités en familles. Dans la pratique, cette
2500 Roches calcaires ligne est matérialisée par un fil tendu sur un
affleurement, un front de carrière, ou une paroi
2000 d'excavation. Ces informations peuvent aussi
être obtenues à partir d'un sondage carotté, ou
1500
par endoscopie en sondage destructif.
1000
•• •
500 La quantification des discontinuités
en sondage carotté
0
o 100 200 300 400 500 Il est r e c o m m a n d é de représenter les paramètres
R (MPa)
c
de fracturation sous forme de diagrammes en
fonction de l'abscisse de la ligne de levé (Four-
Fig. 10 - Relation entre résistance en compression maintraux, 1976 ; Clouet, 1988). L e diagramme
uniaxiale et abrasivité (fichier Datarne).
intégral de carottage, où sont reportées les lon-
gueurs des éléments carottés en fonction de la
profondeur, fournit la totalité de l'information
L a calcite est un minéral non abrasif, aussi les puisque chaque carotte y est représentée. C e dia-
calcaires sont-ils tous situés au voisinage de gramme permet d'identifier la présence de zones
l'axe des abscisses. L a tendance croissante h o m o g è n e s , ou des contrastes entre zones plus
visible pour les roches non calcaires, donc en ou moins fracturées.
bonne partie siliceuses, illustre le rôle de la
cohésion de la roche. L'exploitation des données de fracturation s'ef-
fectue au moyen de différents indices et de traite-
ments statistiques. L ' i n d i c e ID, d é n o m m é inter-
valle entre les discontinuités, est défini comme la
La fracturation en sondage carotté moyenne des intervalles découpés par les discon-
tinuités successives le long d'une ligne de direc-
L'exploitation d'un sondage carotté comprend la tion donnée. L a fréquence de discontinuité F D ,
description pétrographique des faciès rencontrés inverse de l'indice I D , représente le nombre de
et la description des discontinuités (nature géolo- discontinuités par mètre de sondage ; elle est donc
gique, espacement, remplissage, rugosité, orien- h o m o g è n e à l'inverse d'une longueur.
tation). Des recommandations à ce sujet ont été
publiées par la S I M R (1978) et par l ' A F T E S L ' i n d i c e R Q D (Rock Quality Désignation), pro-
(1993). L'orientation des carottes est assez peu p o s é par Deere en 1963, est défini comme le
pratiquée ; les techniques d'imagerie de paroi se pourcentage de la somme des longueurs des élé-
développent, mais i l semble qu'elles ne ments carottés e de longueur supérieure à 10 c m
i
« voient » qu'une partie des discontinuités (et, plus généralement, supérieure à la lon-
(Genter et al., 1997). gueur /) par rapport à la longueur de la passe de
sondage s :
L a densité de discontinuités, e x a m i n é e en détail
ci-dessous, contrôle en partie la taille des blocs R Q D = 100 (e, > /)
individuels du massif rocheux, ainsi que la stabi- s
lité, la déformabilité et la perméabilité de Une classification des massifs rocheux est pro-
celui-ci. posée par l ' A F T E S (1993) à partir du R Q D .
80 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 211 - SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - pp. 73-87
Difficultés du relevé pallier ces inconvénients et pour permettre néan-
des discontinuités en sondage moins le traitement des autres parties rocheuses
du sondage, diverses conventions peuvent être
C o m m e la mesure d'une propriété sur échantil-
adoptées, en admettant par exemple que ces pas-
lon, le relevé des discontinuités en sondage pose
sées sont formées de carottes de 1 c m de lon-
d'abord un p r o b l è m e de représentativité. L e son- gueur ; cette borne constitue alors la résolution
dage, comme la ligne de levé, doit posséder une du levé de fracturation.
longueur suffisante par rapport à l'espacement
moyen des discontinuités. Il est souvent utile de
procéder à la mesure des espacements dans des Exemples de données issues d'un sondage
directions différentes du massif (sondages hori-
L a figure 12 donne un exemple de visualisation
zontaux ou inclinés, lignes de levé orthogona-
de la fracturation en fonction de la profondeur
les), car un biais dû à l'anisotropie du massif
pour un sondage carotté : le diagramme inté-
rocheux peut se manifester.
gral de carottage est représenté graphiquement
L e relevé des longueurs de carottes présente plu- à l'aide d'une échelle racine carrée, F D à
sieurs difficultés pratiques : l'aide d'une échelle logarithmique, et R Q D à
i l ne faut pas confondre les discontinuités l'aide d'une échelle arithmétique. Dans le cas
naturelles avec celles qui sont provoquées par le de ce sondage, la fréquence de discontinuité
carottage ; le suivi du sondage et un examen F D a été calculée pour deux valeurs de la base
attentif des carottes permettent en général de b, déplacée à un pas d o n n é p en fonction de la
trancher, mais le p r o b l è m e reste délicat dans les profondeur z. L ' i n d i c e R Q D a été calculé au
roches schisteuses (fig. 11) ; i l est r e c o m m a n d é m ê m e pas et avec / = 10 cm. D'autres valeurs
( A F T E S , 1993) de veiller à une récupération de de b, p ou Z auraient pu être adoptées de façon
carottage totale, et de carotter en diamètre supé- à quantifier ces grandeurs selon un procédé de
rieur à 50 m m ; moyenne mobile. E n raison de la présence de
zones broyées ou argileuses, la convention a
été adoptée i c i de considérer de telles zones
comme formées de morceaux de 1 c m de lon-
gueur. Autrement dit, la taille minimale des
morceaux considérés pour le calcul de F D et
de R Q D est de 1 cm.
Ce type de représentation des données de frac-
turation permet de délimiter des zones homo-
gènes du sondage. Il permet aussi de comparer
la fracturation à des mesures de diagraphie réa-
lisées dans le m ê m e sondage, diagraphie
sonique en particulier (Allard, 1978). Il est
utile de juxtaposer tous les graphiques des
résultats d'un m ê m e sondage, car ces diffé-
Fig. 11 - Caisses de sondage carotté dans une formation rentes méthodes se complètent dans l'analyse
ardoisière : l'existence du clivage ardoisier et le fort
pendage de celui-ci rendent problématique le relevé des de la fracturation.
longueurs de carottes.
E n c o m p l é m e n t de la présentation des différents
indices en fonction de l'abscisse de la ligne de
*- la décompression, mais aussi le retrait ou le levé, les données de fracturation peuvent être
gonflement de certaines roches, entraînent une traitées d'un point de vue statistique à l'aide
ouverture supplémentaire des fissures et fausse d'histogrammes. L a figure 13 représente un his-
la mesure de l'espacement : le relevé doit être togramme des longueurs des éléments carottés
effectué d è s que possible après l'exécution du d'un sondage réalisé dans un massif de gneiss.
sondage ; Dans de nombreux cas et comme dans cet exem-
>- les discontinuités coupant l'axe du sondage ple, la distribution des longueurs des éléments
carottés possède une forme exponentielle. Cette
sous un angle faible ne permettent pas de définir
distribution correspond à une répartition des
une longueur de carotte : elles sont donc exclues
intersections des fractures avec le sondage sui-
du d é c o m p t e ;
vant un processus de Poisson, donc sans corréla-
»- dans le cas du carottage incomplet, ou de la tion spatiale : ceci n'est guère satisfaisant si l ' o n
présence de vides entre les discontinuités, dans considère une famille de discontinuités, en
le cas des zones de massif où la roche est broyée, général assez régulière ou présentant des groupe-
ou très fracturée, ou altérée sous la forme d'un ments, mais se conçoit mieux si l ' o n envisage la
sol (marno-calcaires, poches argileuses, etc.), la superposition de plusieurs familles d'orientations
notion de longueur perd toute signification ; pour différentes.
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Fig. 12 - Caractérisation de la fracturation d'un massif calcaire
(marno-calcaire) à partir d'un sondage carotté vertical de 52,5 m de profondeur
10
20
30
40
50
Fréquence
90
30 45 60
Longueur des éléments carottés (cm)
82 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 211 - SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - PP. 73-87
L'utilisation d'une telle distribution a été préco- prédéfinies suivant l'indice ID. L a figure 14 en
nisée par différents auteurs. L a distribution des donne une illustration (à comparer à la figure 13)
longueurs x des éléments d'un sondage carotté avec la classification du massif en indice ID,
ou distance entre les discontinuités est d o n n é e d ' a p r è s la longueur moyenne des éléments,
par la densité de probabilité suivante : comme indiqué sur l'échelle représentée en-
dessous du graphique.
f(x) = X e-Xx
Fréquence (%)
30
Fréquence (%)
60
10 100
Longueur des éléments carottés (cm)
30 45 60
ID4 ID3 Longueur des éléments carottés (cm)
Fig. 14 - Histogramme des longueurs des éléments Fig. 15 - Histogramme des longueurs des éléments
carottés dans un massif de gneiss, sans prise en carottés dans un massif calcaire, sans prise en compte
compte des petits éléments (même sondage que dans des petits éléments (présents sur 1,85 m au total).
la fig. 13). Nombre d'éléments 245, longueur maximale Longueur du sondage 30 m. - Nombre d'éléments 213,
59 cm, longueur moyenne 13,2 cm, écart-type des longueur maximale 58 cm, longueur moyenne 13,2 cm, -
longueurs 10,1 cm. - Classification de l'AFTES : ID4, écart-type des longueurs 9,1 cm - Distribution gamma
fracturation forte. avec a = 1,13 et b = 6,21 (données du LRPC).
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Du sondage linéaire où :
au massif à trois dimensions - E m est le module d ' Y o u n g du massif,
Il est bien connu que l ' o n ne peut pas, à partir de - E celui de la roche mesurée en laboratoire.
r
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Fig. 17 - Histogrammes des principales caractéristiques de fracturation
pour 128 sondages carottés dans différentes roches
Fréquence Fréquence
35 r- 35 r-
L a récapitulation des mesures de longueur de L a figure 17b donne l'histogramme des lon-
carottes pour les 128 sondages fait apparaître gueurs maximales rencontrées dans les 128 son-
une longueur moyenne de 11,7 cm. Cette valeur dages. Les longueurs les plus grandes sont obte-
assez faible s'explique par le fait que les recon- nues pour les calcaires. De façon générale, on
naissances géotechniques sont plus particulière- constate que ceux-ci présentent de grands élé-
ment orientées vers l'étude des massifs de mau- ments et peu d'éléments centimétriques.
vaise qualité, en particulier en zones tectonisées C o m p a r é s aux roches du socle cristallin, ces
et dans les terrains superficiels. L'histogramme matériaux sont plus récents et souvent moins tec-
des longueurs moyennes par sondage (fig. 17a) tonisés.
montre que dans les cas les plus fréquents, la
longueur moyenne est comprise entre 8 et 10 cm
(33 sondages sur 128) puis entre 10 et 12 cm
(24 sondages sur 128). S i l ' o n sépare les diffé-
Conclusion
rents types de roches, on trouve des longueurs L a description et la caractérisation des massifs
moyennes de carottes un peu différentes : rocheux, illustrées dans les paragraphes qui pré-
15,3 c m pour les calcaires et dolomies (valeur cèdent, s'opèrent sur les deux composants prin-
probablement en relation avec l'épaisseur cipaux de ces massifs, la matrice rocheuse et les
moyenne des bancs), 10,2 c m pour les granités, discontinuités. A partir de là, i l faut ensuite
et 9,2 c m pour les gneiss (leur foliation peut construire un modèle géomécanique, et estimer
expliquer cette valeur plus faible). les propriétés globales du massif : tâche encore
bien délicate dans l'état actuel des connaissances
L ' i n d i c e R Q D est très sensible au choix de la
en m é c a n i q u e des roches.
longueur / (conventionnellement égale à 10 cm).
A i n s i , à une série d ' é l é m e n t s égaux de 9 c m Parmi les essais de laboratoire sur éprouvette, on
correspond un R Q D nul, tandis q u ' à une série soulignera l'intérêt des essais d'identification,
d ' é l é m e n t s de 11 c m correspond un R Q D égal à simples et porteurs d'information s'ils sont ana-
100 %. Cette brutale variation est gênante, d'au- lysés avec soin : avec la description pétrographi-
tant plus que la borne conventionnelle de calcul que, ils permettent une estimation approchée des
de l'indice R Q D se situe justement entre les caractéristiques mécaniques de la matrice
deux classes les plus représentées de la rocheuse. Les corrélations entre deux propriétés,
figure 17a. rarement valables de façon universelle, s'amélio-
Remerciements
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
86 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 211 - SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - pp. 73-87
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Geomech. Abstr., 13, pp. 1 3 5 - 1 4 8 . SHAPIRO A., D E L P O R T J . L . ( 1 9 9 1 ) , Statistical ana-
ABSTRACT
Description of rocks and rock masses
Exploitation of two databases
First of all, a few general results are given which relate to density, porosity, ultrasonic velocity, index of continuity,
uniaxial c o m p r e s s i v e strength, indirect tensile strength, Y o u n g ' s modulus a n d a b r a s i v e n e s s : histograms of values
a n d correlations between pairs of characteristics are also presented.
Fracturing data, from 4,000 metres of core s a m p l e s , h a s b e e n presented in a variety of w a y s a n d exploited using
conventional parameters s u c h a s the s p a c i n g between c r a c k s or the R o c k Quality Designation ( R Q D ) , a n d depth
diagrams or histograms. T h e latter s h o w that the distribution of s p a c i n g s is usually practically exponential.
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 211 • SEPTEMBRE-OCTOBRE 1997 - RÉF. 4154 - PP. 73-87 87