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SOMMAIRE

Titre 1 Présentation générale du droit international privé


§ 1 : Définition du DIP

p3
§ 2 : L’objet du DIP

p4
§ 3 : Les sources du DIP français

p5
§ 4 : Les sources de DIP internationales

p6

Titre 2 Le conflit de lois / Partie 1ère Théorie générale des conflits de lois

‫ ﮭ‬Chapitre 1 Détermination du droit applicable à la relation internationale

Section 1 : La diversité des méthodes de détermination du droit applicable à une relation internationale p9
§ 1 : La diversité historique des méthodes

§ 2 : Les diverses méthodes contemporaines

Section 2 : La résolution du conflit de lois par le juge français

p13
§ 1 : Les obstacles préalables

§ 2 : La mise en cause de la règle de conflit de lois

§ 3 : L’opération de qualification

‫ ﮭ‬Chapitre 2 Les problèmes spécifiques posés par l’application du droit étranger


Section 1 : Le renvoi

p22
§1 : La notion de renvoi

§2 : La légitimité du renvoi

§3 : Les solutions du droit positif

Section 2 : La détermination du contenu de la loi étrangère

p25
§1 : La charge de la preuve de la loi étrangère

-1-
§2 : Le contrôle de l’application du droit étranger par la Cour de Cassation

‫ ﮭ‬Chapitre 3 L’éviction du droit étranger normalement compétant


§1 : L’exception d’ordre public international (OPI)

p28
§2 : L’exception de fraude à la loi

p30

Titre 2 Le conflit de lois / Partie 2nd Le droit spécial des conflits de loi

‫ ﮭ‬Chapitre 1 Le statut personnel


Section 1 Présentation général

p33
§1 : Le contenu du statut personnel

§2 : La localisation de la personne

Section 2 Les différentes règles de conflit du statut personnel

p35
§1 : Les incapacités

§2 : Le nom

§3 : Le mariage

§4 : Le divorce

§5 : La filiation

‫ ﮭ‬Chapitre 2 Le statut réel


Section 1 La règle de conflit de lois applicable au statut réel

p44
§1 : Les fondements de la RCL
§2 : La mise en œuvre de la RCL
Section 2 Le domaine de la loi réelle

p45
A) Les modes d’acquisitions
B) La transmission des biens par voies successorales

‫ ﮭ‬Chapitre 3 Le statut des faits juridiques


Section 1 La responsabilité délictuelle et quasi-délictuelle p47
§1 : La loi du lieu de survenance du délit ou quasi-délit
§2 : Les rattachements dérogatoires
Section 2 L’application de la loi du lieu du quasi-contrat p49

‫ ﮭ‬Chapitre 4 Les actes juridiques


Section 1 La forme des actes juridiques p51
§1 : La forme des actes patrimoniaux
§2 : La forme des actes extra-patrimoniaux
Section 2 Le fond des actes juridiques p53

-2-
§1 : La Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations
contractuelles
§2 : Convention de la Haye du 14 mars 1978 relative à la loi applicable aux régimes
matrimoniaux

Titre 3 Le conflit de juridiction / Partie 1ère La compétence judiciaire internationale


‫ ﮭ‬Chapitre 1 Le droit commun, droit d’origine interne
Section 1 : La compétence du juge français p58
§1 : Les règles ordinaires de compétence
§2 : Les règles de compétences exorbitantes
§3 : La coordination internationale des compétences
Section 2 L’incompétence du juge français p62
§1 : La possibilité pour les parties de déroger aux règles de compétences internationales
§2 : Les immunités de juridiction
§3: La sanction de l’incompétence

‫ ﮭ‬Chapitre 2 Le droit d’origine communautaire


Section 1 Le règlement Bruxelles I p66
§1 : Règles de compétence
§2 : Le régime de la compétence
Section 2 Le règlement Bruxelles II bis p72
§1 : Les règles de compétence
§2 : Le régime de la compétence

Titre 3 Le conflit de juridiction / Partie 2nd Les effets en France de jugements étrangers
‫ ﮭ‬Chapitre 1 Le droit commun
Section 1 La notion de jugement étranger p75
Section 2 La gradation des effets des jugements étrangers p75
§1) Les effets admis d’emblé et sans condition pour tous les jugements étrangers
§2) Les effets admis d’emblé, mais à la condition de la régularité internationale du jugement
étranger
§3) Les effets subordonnés à l’exequatur
Section 3 Les conditions de l’exequatur p77
§1) La compétence du tribunal étranger
§2) La conformité à l’OPI
§3) L’absence de fraude à la loi
Section 4 La procédure d’exequatur p78
§1) Le tribunal compétent pour l’instance d’exequatur
§2) Les effets de la décision rendue

‫ ﮭ‬Chapitre 2 Le droit d’origine communautaire


Section1 : Le règlement Bruxelles I

p79ui !m
§1 : Les conditions de la régularité
§2 : Les procédures de vérification
Section 2 Le règlement Bruxelles II bis p81
§1 : Les conditions de la régularité
§2 : La procédure de vérification

-3-
Titre 1 Présentation générale du droit international privé

§ 1 : Définition du DIP

L’affaire Pattinot est un cas de relation internationale privée, une affaire de divorce
ayant entraîné plus de 20 décisions. Dans les faits, M-C de Bouilon (duchesse espagnole) a
épousé un diplomate bolivien en 1931, Mr Pattinot. Un contrat de mariage fut conclu, plaçant
les époux sous le régime de séparation des biens du droit bolivien. Mme P a acquise la
nationalité bolivienne, puis les époux se sont séparés. Mme et les enfants vivant aux USA, Mr
P résidant à Paris.

Il existe des relations privées que l’on peut qualifier d’internationales car celles-ci se
rattachent à des ordres juridiques différents à raison des éléments d’extranéité1, à l’exemple
du mariage et du divorce des époux P. Ce sont ces éléments qui caractérisent l’internationalité
du litige et du régime. L’on considère comme élément d’extranéité tout élément qui se
rattache à un ordre juridique étranger.

Une relation privée peut être internationalement subjective ou objective :


- subjective : celle qui présente un élément d’extranéité par l’organe étatique qui la
contemple.
Ex. le divorce de deux époux italiens qui vivent en Italie, si le divorce est présenté au juge
italien c’est alors une relation interne, si le divorce est soumis au juge français : le relation est
subjectivement internationale.
- Objective : celle qui met en cause deux, ou plusieurs, pays par des éléments
intrinsèquement indépendant de l’organe étatique qui l’observe.
Le DIP s’applique peut importe que la relation privée soit objectivement, ou subjectivement,
internationale.

Les relations privée internationales sont le plus souvent des relations familiales, mais il existe
aussi des relations d’affaires internationales du fait de la mondialisation de l’économie :
relation de commerce internationale, relation de consommation, relation de responsabilité
délictuelle… Le DIP est donc une matière transversale qui traverse toutes les branches du
droit.

Mr P saisit la juridiction française pour divorcer, et le premier problème rencontré est


alors celui de la compétence internationale, du conflit de juridictions.

Les relations privées internationales se rattachent à deux pays différents au minimum, or


chacun de ces pays est soumis à son propre système judiciaire : quel tribunal peut être saisi du
litige ? → le conflit de juridictions

Le tribunal est un organe étatique mis en place par un Etat et fonctionne administrativement
conformément au droit de l’Etat. Un Etat peut alors, par le droit, déterminer dans quels cas le
tribunal est compétent ; mais il est impossible à un Etat de déterminer dans quels cas un
tribunal étranger est compétent (principe de la souveraineté des Etats).
Dans l’affaire P, il fallait interroger le droit français pour savoir si le tribunal est compétent
pour prononcer le divorce. La CCass a décidée le 21/06/1946 d’abandonner le principe
d’incompétence des tribunaux français dans les litiges entre étrangers.
1
Elément étranger du droit du for, né des relation juridiques internationales entre personnes privées et justifiant de ce fait
l’application du droit international privé.

-4-
L’unilatéralisme des règles de conflits de juridictions ne permet pas de les utiliser pour
déterminer les compétences internationales d’un tribunal national, l’on ne peut que utiliser les
règles de droit national.

Mr P a obtenu une décision de fond, puis le tribunal de la Seine l’a débouté de sa


demande de divorce. Car, selon la cour, la loi bolivienne compétent ignorait le divorce.

Remarque : en DIP il n’y a pas de lien nécessaire entre la compétence judiciaire et la


compétence législative. Ce n’est pas parce qu’un juge français est compétent qu’il applique la
loi française. C’est le second problème spécifique que pose le DIP : quelle loi pour résoudre le
litige ? → le conflit de lois

Chaque ordre juridique a sa propre loi, dans le cas d’une relation internationale privée il faut
alors choisir quelle est la loi applicable au litige parmi les différentes lois nationales en cause.
Pour résoudre ce conflit de droit, il est nécessaire d’avoir une règle de droit déterminant
quelle loi est applicable : la règle de conflit de lois.
Dans l’affaire P, les juges considérèrent que le divorce n’était qu’un aspect du mariage, et en
conséquence de quoi la règle de conflit de lois applicable à un divorce était la règle de conflit
de lois applicable au mariage, la loi des époux.

Mr P a donc obtint le divorce au Mexique, et voulu que celui-ci ait des effets en France.

Se pose alors le problème de l’effectivité en France de décisions étrangères, problème intégré


au conflit de juridiction.
Ce distingue alors la compétence internationale directe : lorsque les tribunaux ont à statuer sur
leur propre compétence ou incompétence, et la compétence internationale indirecte : lorsque
le litige est traité à l’étranger, la reconnaissance ou non du jugement.

Le DIP englobe aussi des questions de droit français portant sur la nationalité, sur les
règles de conditions des étrangers définissant leur statut. Ces questions du DIP français se
retrouvent aussi dans d’autre Etats.

§ 2 : L’objet du DIP

A) Un droit des relations privées

Le DIP est privé en ce qu’il a pour objet de réguler les relations internationales entre
personnes physiques ou morales. Il s’oppose, dans ce sens, au droit international public qui est
l’ensemble des règles applicables entre les relations de personnes publiques.
Mais cette distinction entre DIP et DIPublic méconnaît le phénomène de plus en plus présent
qu’est que certaines relations internationales entre personnes publiques, ou entre personnes
publique et privée, appartiennent au DIP car les Etats se livrent de plus en plus à des activités
sortant de leur sphère de souveraineté.

Le DIP s’applique à toutes relation internationale considérée comme une relation de


droit privé, quelque soit les personnes privées, ou publiques, y participant (pas de
souveraineté d’un Etat en cause).

B) Un droit des relations privées internationales

-5-
Ce n’est pas un droit international par sa source ou par sa portée. Le DIP contient des
sources de droit international et de droit national, et cet ensemble de règles est propre au droit
français (pas de portée internationale).
Si le droit privé est international c’est car il n’est applicable qu’à des relations privées
internationales (possédant des éléments d’extranéité).

§ 3 : Les sources du DIP français

Pour les universalistes tel Friedrich Karl von Savigny (19ème S) ou A. Pillet (20ème S),
les problèmes surgissant lors de relations internationales concernent la société internationale
dans son ensemble, et ne peuvent alors qu’être résolu de manière internationale. La source
idéale du DIP est alors la concertation internationale.
En opposition avec les particularistes, tel Bartin ou Niboyet, pour qui le DIP n’a
comme objectif que de résoudre les problèmes propres à chaque pays en respectant l’esprit et
les doutes de la législation nationale. Pour eux il n’y a pas d’unification possible du DIP sauf
quelques rares exceptions tel le commerce international. Le DIP est perçu comme une
projection du droit interne sur le plan international, aussi tous les DIP sont différents.

Le DIP est de source interne et international, de plus en plus de règle de DIP sont influencées
par l’universalisme. Il se met en place une harmonisation du DIP par le biais des droits
communautaires.

A) Les sources internes

- 1 La loi

Le législateur s’est longtemps refusé d’intervenir en DIP.


Le code civil & NCPC : contiennent plusieurs articles de conflit de lois et de juridictions.
Part de la loi reste faible dans l’élaboration du DIP.

- 2 La jurisprudence

Les textes étant insuffisant, cela oblige une jurisprudence abondante et constructive.
Le DIP français est donc majoritairement issu de la jurisprudence de la CCassation, mais
aussi des juridictions inférieures.

- 3 La doctrine, force persuasive, source indirecte

Le rôle de la doctrine en DIP est important car :


- il y a peu de texte en DIP, ainsi se sont majoritairement les tribunaux qui le créé.
La doctrine procède à une interprétation jurisprudentielle, et en dégage les
principes généraux.
- les auteurs de la doctrine guident souvent la jurisprudence en DIP car les
problèmes posés sont complexes, abstraits. Les tribunaux sont alors très
perméables à l’influence doctrinale, l’éclairage de spécialistes.

§ 4 : Les sources de DIP internationales

A) La coutume internationale

-6-
- 1 La coutume internationale de DIP regroupe l’ensemble des règles non écrites de
DIPublic que la plupart des Etats estiment devoir respecter (ex : la liberté en haute mer…).
Certaines de ces coutumes sont parfois invoquées par la CCassation pour donner une solution
de DIP, ou « principes de droit international régissant les relations entre Etats ».

- 2 La coutume internationale de DIP, ou lex mercatoria (la loi des marchands).


• lex mercatoria : usages ou coutumes du commerce international
Les droits étatiques sont inadaptés pour fournir des solutions aux problèmes du commerce
international (en retard ou impuissante). Depuis le M-A les opérateurs du commerce
international ont été amenés à développer leur propre corps de règles : les usages et pratiques
du commerce international.
• Origines de la lex mercatoria
Tout d’abord une création corporative : les usages peuvent être créé par des organisations
internationales qui regroupent les commerçants d’une même branche. Elles se reconnaissent
une activité normative basée sur les contrats types (modèle de contrat établit par un tiers) qui
consacrent les usages ou peuvent en être la source, ou bien sur la création des codes d’usages :
le recensement des usages d’une branche spécifique.
Notons le rôle important de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris à l’origine des
incoterms2, les usages, ou régimes juridiques, désigné par trois lettres (FOB → free on board).
Mais aussi le droit prétorien généré par l’arbitrage international, souvent utilisé à
raison de sa confidentialité, de sa rapidité et du choix de l’arbitre, spécialiste du domaine. Les
arbitres disposent d’une grande liberté dans le choix des règles applicables, conformément
avec l’art. 1496 ncpc : « l’arbitre applique la règle de droit choisit par les parties et, à défaut
de choix, l’arbitre applique les règles qui lui paraissent appropriées », dont les usages !
• Reconnaissance de la lex mercatoria par les Etats
Les Etats peuvent reconnaîtrent la lex mercatoria par la signature et ratification de
conventions internationales. Ex : l’art. 7 de la convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la
vente international de marchandises prévoit que les usages du commerce international
l’emportent toujours, en cas de contradiction, sur les règles de la convention.
Les Etats reconnaissent aussi la lex mercatoria par la reconnaissance des jugements
d’arbitrage.
Enfin, la législation des Etats peut prévoir l’application des usages du commerce
international (ex : art. 1496 ncpc…).

B) La jurisprudence des juridictions internationales

Les juridictions internationales, permanentes ou temporaires, ont à plusieurs reprises


répondues à des questions de DIP, notamment sur la nationalité et les conditions des
étrangers. La jurisprudence des ces juridictions s’impose alors en droit interne.

- 1 La cour internationale de justice


L’arrêt Nottebohm du 6 avril 1955 consacre le principe d’effectivité de la nationalité (liens
réels et sérieux).
- 2 La cour de justice des communautés européennes
Le droit communautaire peut influencer le DIP.
- 3 La cour européenne des droits de l’homme

2
Abréviation de international commercial terms, recueil des usages du commerce international élaboré par la
chambre de commerce internationale depuis 1936

-7-
Elle intervient dans le domaine du droit des étrangers, elle veille à ce que les législations
nationales respectent la vie privée des étrangers, notamment.

C) Les traités internationaux

- 1 Une typologie des conventions internationales

• Les traités qui unifient les règles de conflits :


Importance forte du droit communautaire, ex : la convention de Bruxelles du 27 sept 1968 sur
la compétence judiciaire et l’effet des jugements en matière civile et commerciale, la
convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles… Le
conseil de l’Europe cadre les différentes conventions en DIP, ex : la convention de Strasbourg
du 6 mai 1963 sur la réduction des cas de pluralité de nationalité.
La plus importante unification s’effectue par la conférence de DIP de la Haye (organisation
permanente instituée en 1893 regroupant 150 Etats) dont l’objectif est l’unification
progressive des règles de DIP afin de limiter les conflits de lois et de juridictions.
• Les conventions qui édictent des règles matérielles uniformes :
Ex : la convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale de marchandises
etc…

- 2 Sur l’application d’un traité

Trois questions sont à se poser pour déterminer l’application d’un traité :


_ vérifier si les faits litigieux rentrent dans le champ d’application matériel du traité.
_ vérifier que les faits litigieux rentrent dans le champ d’application spatial du traité. Il y a
une différence entre les conventions de portée universelle, où le juge d’un Etat membre doit
appliquer le traité à toutes les relations internationales qui lui sont soumise sans se préoccuper
de savoir si les plaideurs sont, ou non, des ressortissants (ou résidants) d’un Etat membre ; et
les conventions à portée limitée.
_ vérifier que les faits litigieux rentre dans le champ d’application temporel du traité.

- 3 Les conflits de conventions

Attention aux faux conflits de conventions ! Il ne suffit pas que deux traités aient
simultanément à régir une question posée pour qu’il y ait conflit. Les conventions peuvent
adopter les mêmes règles, ou, même si les règles sont différentes que leurs applications
aboutissent à un résultat identique.
Néanmoins, les véritables conflits, en cas d’incompatibilité des conventions et de leurs
solutions, sont de plus en plus fréquents. Il y a une obligation de choisir liée au déni de
justice, comment faire ?
• Certaines conventions prennent soin de prévenir le conflit (ex : obligation de dénoncer
d’anciennes conventions pour pouvoir adhérer…), donne la solution pour le résoudre
(offre à l’une des parties la possibilité de choisir la convention applicable, ou dicte au
juge la solution du conflit en s’imposant ou s’effaçant), ou se substitue ou droit
antérieur.
• Si la convention est muette en cas de conflit, il est possible de se tourner vers la
neutralisation du conflit en précisant les champs d’application respectifs, s’impose
alors la règle de la spécialité :
- spécialité rationae materiae : préférence à la convention qui régit plus
spécifiquement la matière du litige.

-8-
- spécialité rationae loci : préférence au traité qui n’est pas d’application
universelle.
Si malgré cela l’on est toujours en présence d’un conflit, il est possible de le résoudre selon
deux directives :
- la règle de l’efficacité maximale : priorité au traité qui permet la réalisation, de
manière la plus efficace, des objectifs commun aux conventions conflictuelles.
- donner la priorité à la convention qui sert le respect d’une valeur universelle.

-9-
Titre 2 Le conflit de lois

Partie 1ère Théorie générale des conflits de lois

Chapitre 1 Détermination du droit applicable à la relation internationale

Section 1ère : La diversité des méthodes de détermination du droit applicable à une relation
internationale

§ 1 : La diversité historique des méthodes

A) La phase pré doctrinale

Cette période, de la fin de l’empire Romain au haut Moyen-Âge, fut façonnée par
l’évolution naturelle des juges. L’on est passé de la personnalité à la territorialité des lois. La
chute de l’empire Romain entraîna l’invasion de celui-ci par des barbares ayant d’autre usages
et coutumes. C’est donc mis en place la cohabitation de populations hétérogènes, des relations
intercommunautaires privées. Et pour résoudre ces conflits de lois, les juges appliquaient à
chaque personne la loi de sa communauté.
Le système territorial des lois c’est instauré au fur et à mesure que les communautés se
mélangeaient. Car du fait de la mixité, les individus ont perdu conscience d’appartenir à une
communauté spécifique.
Et avec le début du féodalisme, où un seigneur faisait valoir sa loi sur un territoire, les juges
se sont mis à appliquer la loi dominant le territoire où se trouvaient les personnes en litige.

B) 14ème – 15ème, la phase doctrinale du DIP

Sous l’apparition des facultés de droit (notamment en Italie), le droit devient une
matière savante ; un droit savant étudié par Bartole et Balde. Les auteurs ont développé la
théorie des statuts :
- les statuts personnels : toutes les lois qui ont comme principal objet la
personne et son état. Ces statuts personnels s’appliquaient à toutes les
personnes qui sont nées dans l’Etat du législateur (statut étendu aux meubles).
- les statuts réels : toutes les lois qui avaient pour objet les immeubles. Ces
statuts s’appliquaient à tous les immeubles situés dans l’Etat du législateur.
- les statuts mixtes : tout ce qui n’appartient pas aux statuts personnels ou réels.
Ce sont donc les actes juridiques, les contrats, les délits, etc… Les statuts
mixtes s’appliquaient à tous les actes passés dans l’Etat du législateur.

A un groupe de lois s’associe donc une application dans l’espace. La théorie statutaire
envisage les conflits de lois comme des conflits de souverainetés, puisqu’il s’agissait de
déterminer dans l’espace les champs d’application respectif des différentes lois.

Cette théorie des statuts fut remplacée par la théorie moderne des conflits de lois
développée par Savigny. C’est l’abandon de la perspective et de la méthode statutaire.
Le conflit de lois n’est plus un conflit de souveraineté, car l’Etat n’est que rarement
véritablement intéressé à l’application de sa propre loi à des relations purement privées.

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Savigny abandonne donc la méthode statutaire qui partait du contenu de la norme pour
se demander si celle-ci appartenait dans les statuts réels, personnels ou mixtes, afin de
déterminer le champ d’application spatial de la loi.
Savigny part quant à lui de la relation litigieuse, du fait, et se demande à quelle norme il faut
soumettre cette relation. Le juge, ou le législateur, doit alors rechercher pour chaque rapport
quel est l’ordre juridique et la loi avec lequel celui-ci présente le plus de liens étroits (le centre
de gravité du rapport litigieux).
Ex. Un litige porte sur l’aptitude au mariage d’un milanais vivant à Bologne :
- si le milanais vit de façon permanente, et depuis longtemps, à Bologne, il est
logique d’appliquer la loi bolognaise car il n’a plus de lien caractérisé avec
Milan.
- si le milanais ne vit à Bologne que de façon temporaire, alors le centre de
gravité est Milan.
- si l’on applique la méthode statutaire, l’aptitude au mariage appartient aux
statuts personnels, c’est donc la loi milanaise qui sera toujours d’application.

§ 2 : Les diverses méthodes contemporaines

Opposition entre : - édicter des règles matérielles propres aux relations internationales
- déterminer, parmi les lois nationales en conflit, la loi applicable à la
relation internationale.

A) La méthode fondée sur l’élaboration de règles matérielles

Principe : les lois nationales en conflit ne sont pas nécessairement adaptées aux relations
internationales, d’où la nécessité de créer des règles spécifiques.
Il existe trois sources à ces règles matérielles :

- La règle matérielle d’origine nationale : un Etat va créer dans son ordre


juridique un ensemble de règles spécifiques pour appréhender les relations
internationales soumises à ses juges. Ces règles peuvent s’appliquer :
 à toutes relations internationales soumises au juge national.
 en l’associant à une règle de conflit de lois. Càd que seulement si la
règle de conflit de lois désigne comme loi applicable la loi de l’Etat
qui a créé la règle matérielle que cette loi va s’appliquer.

- La règle matérielle d’origine conventionnelle : tel la convention de Vienne


sur la vente internationale de marchandise.

- La règle matérielle d’origine coutumière : les usages et coutumes du


commerce international peuvent s’assimiler à des règles matérielles.

B) La méthode dite conflictuelle

Principe : les lois nationales en conflit sont toutes aussi aptes à régir des relations
internationales privées qu’elles ne le sont à régir des litiges privés internes. Les lois ont donc
une égale vocation à s’appliquer.
Aussi, si la relation n’est que subjectivement internationale, le litige est intrinsèquement
interne à un ordre juridique. Les lois de cet ordre ont donc vocation à s’appliquer.

- 11 -
Mais si la relation est objectivement internationale, alors il n’est pas certain que les lois
internes soient inadéquates au point qu’il deviendrait nécessaire d’élaborer des règles
matérielles spécifiques.
Ex. un père UK, un enfant naturel français, quelle loi est applicable pour
l’autorité parentale ? Cette question n’est pas nouvelle pour les droits internes,
ce sont les mêmes enjeux pour un conflit purement interne.
Néanmoins, il n’y a bien que les relations de commerce international qui appellent à des
réponses spécifiques, car les problèmes y sont spécifiques, d’où la nécessité de règles
matérielles spécifiques.

1- Les règles de conflit bilatérales

a) La méthode bilatérale3

Cette méthode représente l’héritage direct de Savigny, on envisage les faits, la


situation litigieuse, afin de rechercher l’ordre juridique avec lequel cette situation présente les
liens les plus étroits.
Ex. Un accident d’un touriste français survient en Espagne, dans un hôtel dont
le propriétaire est allemand. La relation internationale privée comporte
différents éléments d’extranéité liés à différents ordres juridiques :
 ordre juridique français par la nationalité
 ordre juridique espagnol par le lieu de survenance
 ordre juridique allemand par la nationalité
Dans une telle hypothèse, l’on considère que la situation litigieuse a le plus de
liens avec l’Espagne.
Cela résulte de l’intérêt des plaideurs : il faut essayer d’obtenir la prévisibilité et la sécurité
juridique des personnes qui cherchent à développer une activité. Et donc permettre au
propriétaire allemand de savoir selon quelles règles il impliquera sa responsabilité, c’est
pourquoi l’on applique la loi du lieu de survenance du dommage. Ce dernier est un élément
caractéristique de la relation litigieuse : c’est l’élément de rattachement.

Cette méthode est appliquée par le législateur qui créé la règle de conflit de lois, ou par le juge
en l’absence de règles. Il recherche donc les éléments de rattachement :
- rattachement d’après l’objet du rapport de droit. Le rattachement est fondé sur
l’idée que la meilleure législation pour un litige est celle qui indique l’objet
de ce rapport, objet meuble ou immeuble.
- rattachement d’après la source du rapport de droit. L’idée consiste en ce que
la loi applicable au litige est la loi du pays où s’est produit le fait générateur
du rapport de droit.
- rattachement par le sujet du rapport de droit. Il s’agit de localiser la relation
internationale par la personne impliquée dans cette relation, recourir à la
nationalité ou au domicile.
Ces catégories de rattachements sont des questions de droit qui présentent entre elles des
points communs si bien que l’on peut les soumettre aux mêmes éléments de rattachements. Le
statut personnel est une catégorie de rattachement dans laquelle nous allons trouver toutes les
questions relatives à la personne : la capacité, la filiation, l’état etc… soumise à l’élément de
rattachement qu’est la nationalité de la personne afin de lui appliquer sa loi maternelle.
3
Règle de conflit bilatérale : règle de conflit pouvant aboutir indifféremment à la désignation de la loi du for ou
d’une loi étrangère.

- 12 -
Bilan : méthode pour résoudre le conflit de lois :
1- Opération de qualification de la question de droit, afin de l’affilier à une catégorie de
rattachement.
2- Déterminer la loi applicable par l’élément de rattachement
3- Appliquer l’ordre juridique déterminé à la situation internationale privée litigieuse.

b) Les caractéristiques de la règle de conflit de lois bilatérale

C’est une règle indirecte, elle ne répond pas au problème de droit posé. Cette règle
désigne la loi matérielle nationale dans laquelle l’on trouvera la solution au problème.
C’est une règle abstraite. Elle désigne la loi applicable au litige sans que le juge ait à
prendre connaissance du contenu des lois en conflit.
C’est une règle bilatérale, càd qu’elle peut désigner indifféremment la loi du for ou la
loi étrangère.
C’est une règle neutre dans le sens où elle ne cherche pas à privilégier telle ou telle
solution au conflit.

Exceptions, il existe des règles de conflit de lois qui ne sont pas neutre :
• La règle de conflit à rattachement en cascade. C’est une règle qui propose au juge
successivement plusieurs lois, il doit alors envisager les lois dans l’ordre établit, et
s’arrêtera à l’application de la première loi qui obtient le résultat recherché.
Ex. La convention de la Haye (2 octobre 1973) sur la loi applicable aux obligations
alimentaire dispose dans son art. 4 que la loi de résidence habituelle du créancier
d’aliments a pour vocation de s’appliquer. Mais l’art. 5 détermine que si la loi
précédente ne lui permet pas d’obtenir les aliments de la part du débiteur, alors il
faut appliquer la loi nationale commune au créancier et au débiteur. Toutefois, si le
créancier ne peut obtenir les aliments en vertu des art. 4 et 5, alors l’art. 6 dispose
que l’on applique la loi du for.
• La règle de conflit dite « alternative ». Ce type de règles de conflit déclare
plusieurs lois compétentes de s’appliquer à un seul litige, il revient alors au juge,
ou à l’une des parties, de choisir la loi applicable.
Ex. L’art. 311-18 Cciv dispose « L'action à fins de subsides est régie, au choix de
l'enfant, soit par la loi de sa résidence habituelle, soit par la loi de la résidence
habituelle du débiteur. » ( cette règle est remplacée par la convention de la Haye).
L’objectif de ces exceptions à la neutralité est de favoriser l’obtention d’un résultat déterminé,
et pour cela l’on multiplie le nombre de lois envisagées.
• La règle de conflit à rattachements cumulatifs. La CCass belge décida que le
divorce d’époux de nationalité différente ne pouvait être prononcé en Belgique que
pour des causes reconnues par la loi nationale du mari et par la loi nationale de la
femme.
L’objectif de cette exception est de marquer l’hostilité à une institution. On la retrouve au sein
de l’art. 370-3 Cciv concernant l’adoption internationale. Il est prévu que l’adoption par deux
époux ne peut être prononcée si la loi nationale de l’un et l’autre époux prohibe l’adoption.

2- Les règles de conflit unilatérales

- 13 -
La méthode unilatérale4 considère la souveraineté des Etats. Dans l’optique bilatérale
la règle de conflit de lois du for détermine, éventuellement, l’application d’une loi étrangère.
Or ce droit étranger ne serait peut-être pas applicable si l’on avait mis en œuvre son propre
DIP. Pour les unilatéralistes, il ne faut pas forcer la vocation d’un droit étranger à
s’appliquer : un droit étranger ne peut être déclaré applicable que si les règles du DIP étranger
le souhaitent.

La méthode unilatéraliste considère que chaque DIP ne doit se préoccuper que de


déterminer le champ d’application de ses propres lois.
Le DIP français contient quelques règles de conflit de lois unilatérales, ainsi l’art. 309 Cciv
dispose que « Le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française :
- lorsque l'un et l'autre époux sont de nationalité française ;
- lorsque les époux ont, l'un et l'autre, leur domicile sur le territoire français ;
- lorsque aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence, alors que les
tribunaux français sont compétents pour connaître du divorce ou de la séparation de corps. »
Aussi il n’y a pas de bilatéralisme possible, c’est une règle unilatérale. Cet article s’efforce de
délimiter quand la loi française doit s’appliquer, et si la loi française ne s’applique pas le juge
doit rechercher la loi étrangère compétente.

Problèmes liés à la méthode unilatérale :


• Hypothèse de la lacune.
Lorsque qu’aucune loi, étrangère ou nationale, ne se reconnaît compétente, alors il n’y a
aucune loi pour régler le litige internationale. Pourtant le juge a obligation de juger (déni de
justice), il y a donc obligatoirement une loi à laquelle rattacher le litige : on appliquera alors la
loi du for à titre de subsidiarité, mais il se peut que la solution soit inadéquate.
Ou bien, on appliquera la loi avec laquelle la situation a le plus de liens étroits, ou la loi
imaginée applicable par les parties, un retour à la méthode bilatérale.
• Hypothèse du cumul de lois applicables.
Si le juge saisi voit que parmi les lois applicables se trouve la loi du for, alors celui-ci
appliquera cette loi. Mais si les lois applicables sont toutes étrangères, Niboyet propose
d’appliquer la loi que désignerait la règle de conflit si elle était bilatérale. C’est donc
appliquer la méthode bilatérale à la méthode unilatérale.
Quadri propose d’appliquer « la loi qui aurait le plus de chance d’être effective », en quelque
sorte la loi ayant les liens les plus étroits, un retour au bilatéralisme.

Section 2nd : La résolution du conflit de lois par le juge français

Le juge français doit vérifier, en premier lieu, qu’il n’y a pas d’obstacle à l’application
des règles de conflit de lois, car il existe des lois impératives.

§ 1 : Les obstacles préalables

Avant de mettre en œuvre la règle de conflit, le juge français doit vérifier qu’il n’y a
pas d’obstacle préalable. Dans les cas où intervient une règle de compétence exclusive ou une
loi de police, ces lois s’imposent de manière impérative au juge français, court-circuitant alors
la règle de conflit.

A) Les règles de compétence exclusive


4
Règle de conflit ne pouvant aboutir qu’à la la désignation de la loi du for et à la détermination de son champ
d’application.

- 14 -
La juge français doit appliquer la loi française car celle-ci comporte une compétence
exclusive de l’Etat. La relation internationale privée litigieuse intéressant directement la
souveraineté de l’Etat français.

1- Définition des règles de compétence exclusive5

Une règle de droit a une compétence exclusive lorsque la situation litigieuse intéresse
à un titre, ou à un autre, la souveraineté de l’Etat. Seul cet Etat peut donner compétence à sa
loi pour régler la situation.

Hypothèses d’atteintes à la souveraineté de l’Etat :


• si l’Etat est en position de sujet. Ex. la nationalité est une compétence exclusive
des Etats etc…
• si l’organisation interne de l’Etat est en question. Ex. les juridictions etc…
• si l’Etat est en position d’agent. Càd qu’il intervient par l’un de ses organes dans la
vie des individus afin de réaliser des objectifs.
• si le commandement que donne l’Etat a pour objet direct son propre territoire.
Ex. Réclamer au juge l’exercice d’une voie d’exécution forcée sur un bien localisé
sur le territoire d’un Etat. La seule loi susceptible de s’appliquer est la loi du pays
où la voie d’exécution doit être exécutée.

Si deux lois ont une compétence exclusive, il faut alors les appliquer cumulativement.
Ex. Peut-on payer en $ en France ? La loi US a une compétence exclusive sur
l’utilisation de sa monnaie à l’étranger, sur sa sortie de territoire. La loi française a une
compétence exclusive sur la capacité de payer en France avec une devise étrangère.
Application cumulative des deux lois.

2- Application par le juge français des règles de compétence exclusive

Le juge français a toujours l’obligation d’appliquer les règles françaises de


compétence exclusive. Mais doit-il appliquer les règles de compétence exclusive étrangères ?
Il n’appartient pas au juge français d’être l’agent de la politique d’un Etat étranger, donc il ne
doit pas appliquer les règles de compétence exclusive étrangère. Le juge français est
incompétent.

B) Les lois de police

La loi de police ne concerne plus la souveraineté d’un Etat, il s’agit d’une loi d’une
importance particulière. Au point que l’Etat l’ayant édictée n’admet pas l’application d’une
autre loi, même dans les relations internationales privées.

1- La notion de « loi de police »

L’art. 3 al1 Cciv dispose que « Les lois de police et de sûreté obligent tous ceux qui
habitent le territoire. ». L’idée consiste en ce que même si la relation est internationale, les
lois de police s’appliquent à tous ceux qui habitent le territoire français. Le droit français
n’admet pas l’application d’une loi étrangère en remplacement.

5
Compétence exclusive : matière réservée à certaines juridictions.

- 15 -
- Définition fonctionnelle des lois de police par Mayer : « ensemble de règles impératives qui,
selon le pays dont elles émanent, sont applicables quel que soit la loi désignée par la RCL de
ce pays ».
- Définition conceptuelle des lois de police par Francescakis : « ce sont les règles dont
l’observation, sur le plan international, est voulu par un Etat afin de sauvegarder son
organisation politique, sociale et économique ». La règle est donc internationalement
impérative et d’application immédiate, écartant alors les règles de conflit de lois.
→ C’est cette définition qui a été retenue en droit positif, arrêt « Arblade » du 23 novembre
1999 de la CJCE : « dispositions nationales dont l’observation a été jugée cruciale pour
l’organisation politique, sociale, ou économique de l’Etat, au point d’en imposer le respect à
toute personne se trouvant sur le territoire ou à tout rapport juridique localisé dans celui-ci ».

2- Le champ d’application spatial des lois de police

Les lois de police française n’ont pas vocation à s’appliquer à toutes les relations
internationales soumises au juge français. Les lois de police ne peuvent s’appliquer aux
relations internationales que si celles-ci présentent un lien étroit avec le territoire français.
Ex. CA Paris, arrêt rendu le 21 janvier 1994.
Un français a conclu un contrat de mandat avec un agent immobilier situé à
Monaco pour un immeuble situé à Monaco. La question était de déterminer si
la loi du 2 janvier 1970, régissant les contrats avec les agences immobilières,
devait s’appliquer.
La CA a considéré que cette loi était une loi de police, mais que le litige n’avait
pas de lien suffisamment étroit avec le sol français.

3- Les critères de reconnaissance des lois de police

_ Le critère formaliste : le législateur a pris soin d’indiquer lui-même que la règle de


droit devait s’appliquer impérativement aux relations internationales.
Ex. L’art. 16 de la loi du 18 juin 1966 sur le contrat d’affrètement maritime dispose que cette
loi s’applique à tous les transports effectué au départ ou à destination d’un port français.

_ Le critère finaliste : le juge français va considérer que telle loi est une loi de police,
car dans le cas contraire la finalité de la règle de droit ne serait pas satisfaite.
Ex. La législation sur le salaire minimum a pour but d’assurer la paix sociale en France.
Aussi, afin d’assurer la paix sociale, le juge va appliquer cette loi à tout travail fourni sur le
territoire français.

Francescakis considère que les lois de police sont souvent mises en œuvre par l’administration
ou par une juridiction spécialisée. Cela qui peut être révélateur d’une loi de police, mais ce
n’est ni obligatoire, ni systématique.

Différentes lois de police :


- Droit du travail : ce sont généralement des lois de police, appliquées aux
relations internationales si le travail est effectué en France.
La chambre sociale de la CCass, par un arrêt du 9 décembre 1960, a jugé que la
réglementation française créant le statut de Voyageur Représentant Placier était applicable à
un VRP tchécoslovaque employé par une entreprise tchèque, mais exécutant son travail en
France.

- 16 -
Le Conseil d’Etat, par arrêt du 29 juin 1973 Compagnie internationale des wagons-lits
considère que la législation française du comité d’entreprise s’impose à toutes personnes
morales, même étrangère, exerçant en France en qualité d’employeur.
- Certaines règles du droit de la consommation sont des lois de police.
Ex. L’art L 311-4 Cconso dispose que relativement aux opérations de crédit à la
consommation, toute publicité faite, reçue ou perçue en France, quel que soit son support, doit
comporter un certain nombre d’informations obligatoires.
- Certaines règles du droit de la famille, notamment relatives à l’assistance
éducative (art. 375suiv) applicables à tout enfant sur le sol français (dans le
but de préserver l’enfance), mais aussi le régime primaire des époux…
- L’ensemble de la législation des baux réglementés (bail commercial, rural
etc…) est considérée comme loi de police. Ces règles s’appliquent dès
l’instant où l’objet du bail est sur le territoire français.

4- Le régime des lois de police

1) Le juge français a l’obligation d’appliquer les lois de police françaises.


2) Le juge français doit-il appliquer une loi de police étrangère ?
Débat doctrinal entre : - contre l’application des lois de police étrangères en vertu du principe
d’inapplicabilité des lois étrangères de droit public (mais de plus en plus des lois de police ne
sont plus du domaine du droit public). Mais aussi car le juge français n’a pas à protéger les
intérêts fondamentaux d’un Etat étranger. Et enfin car aucune règle de droit français ne rend
compétente, en tant que loi de police, une loi de police étrangère. La loi de police étrangère
doit être appliquée comme une loi de police nationale.
- pour l’application des lois de police étrangères à raison de la
coopération internationale. La défense des intérêts fondamentaux de la France sera d’autant
plus efficace si les juges étrangers y contribuent, mais cela nécessité une réciprocité.

Néanmoins l’évolution du droit positif tend à ce que l’application d’une loi de police
étrangère soit une possibilité. Possibilité ouverte par la convention de Rome (18 juin 1980)
relative à la loi applicable aux obligations contractuelles.
L’art. 7 dispose que « Lors de l'application, en vertu de la présente convention, de la loi d'un
pays déterminé, il pourra être donné effet aux dispositions impératives de la loi d'un autre
pays avec lequel la situation présente un lien étroit, si et dans la mesure où, selon le droit de
ce dernier pays, ces dispositions sont applicables quelle que soit la loi régissant le contrat. »
L’article présente par la suite dans quels cas, et sous quelles conditions, le juge peut appliquer
la loi de police étrangère. Ce dernier doit tenir compte de l’objet et de la nature de la loi de
police étrangère : la convention invite le juge à porter un jugement de valeur sur la règle, pour
vérifier si celle-ci est légitime. La convention invite aussi le juge à tenir compte des
conséquences de l’application, ou non, de la loi de police étrangère.

5- Possible conflit de lois de police

Si les lois de police sont incompatibles :


- si parmi les lois de polices il se trouve la loi française, alors le juge français
appliquera sa loi.
- si le conflit ne comprend que des lois de police étrangères, la doctrine
suppose qu’il faut se référer aux critères de la convention de Rome (art. 7)
pour décider de l’application d’une loi de police, porter un jugement de
valeur.

- 17 -
§ 2 : La mise en cause de la règle de conflit de lois

Si dans le litige n’apparaît aucun élément d’extranéité, la situation est présentée


comme purement interne, la juge n’a pas à mener d’investigation complémentaire, il
n’applique aucune règle de conflit de loi (RCL).
Si des éléments d’extranéité apparaissent dans le litige, se pose alors la question de
l’autorité de la RCL.

A) L’autorité de la règle de conflit pour le juge

Hypothèse de litige avec des éléments d’extranéité.


Si l’une des parties invoque l’application d’une loi étrangère, le juge n’a pas le choix,
il est tenu d’appliquer d’office la RCL, et de déterminer la loi applicable au litige.
Si volontairement, ou par ignorance, aucune des parties n’invoque l’application d’une
loi étrangère, le juge est-il tenu d’appliquer la RCL ?
→ Il y a une grande variation de jurisprudence sur cette question, « la valse de l’hésitation ».

1- La jurisprudence Brisbal du 12 mai 1959

Les époux Brisbal sont de nationalité espagnole vivant en France, et voulant divorcer
font une demande de divorce devant un juge français.
Les juges ont refusé le divorce car la loi espagnole prohibait ce dernier. Aussi les époux ont-
ils développé leurs arguments de divorce uniquement sur le fondement du droit français.

La Cour de Cassation a indiqué que l’autorité de la règle de conflits de loi variait selon
qu’elle est désigne la loi française ou la loi étrangère :
- Si la loi française est désignée, alors la règle de conflits de loi est d’ordre public, le
juge doit la relever d’office.
- Si la loi étrangère est désignée, alors la règle de conflits de loi n’a pas le caractère
d’ordre public et c’est au juge de choisir ou non de l’appliquer.

Dans l’affaire Brisbal, la règle de conflits de loi désignait la loi espagnole, le juge pouvait
donc l’écarter et appliquer la loi française.

Il y lutte une forte critique de cette solution par Motulsky car :


 la règle de conflits de loi française est une règle de droit français, elle fait partie de
l’ordre juridique et à ce titre elle s’impose au juge comme n’importe quelle règle de
droit.
 Il est incohérent d’appliquer la règle de conflits de loi selon son résultat, il n’y a pas de
fondement juridique.

2- Abandon de la jurisprudence Brisbal, 1988

La Cour de Cassation, arrêt de la 1ère ch.civ. du 11 octobre 1988, l’arrêt Rebouh.


Mme R. voulait enclencher une action en recherche de paternité naturelle. Or de selon la règle
de conflits de loi c’est la loi nationale de la mère, au jour de la naissance de l’enfant, qui est
d’application. art. 311-14 La loi algérienne est donc d’application.

- 18 -
La CCass a cassé l’arrêt de la CA en indiquant que le juge à l’obligation de relever
d’office la règle de conflits de loi, même si celle-ci désigne une loi étrangère, au visa de l’art.
12 NCpc (hommage à Motulsky).

La CCass par l’arrêt Schule du 18 octobre 1988 casse l’arrêt de la CA, car le juge devant
trancher le litige conformément aux règles de droit, il lui appartient, au besoin d’office, de
déterminer la loi étrangère applicable.

3- La remise en cause partielle des arrêts Rebouh et Schule

Les juges du fond furent très retissant aux arrêts rendus par la CCass, car son point de vue
rend leurs jugements plus complexes.
La CCass : arrêt société Coveco du 4 décembre 1990
arrêt Masson du 10 décembre 1990.

Par ces arrêts la CCass décide et que le juge n'était pas tenu de relever d'office la règle
de conflits de loi par exception dans deux cas déterminés :
- lorsque la RCL n’est pas d'origine conventionnelle, qu'elle ne provient
pas d'une convention internationale.
- lorsque le la matière litigieuse est une matière dans laquelle les parties
ont la libre disposition de leurs droits.

4- Les derniers développements

Le dernier revirement de la CCass est en date du 26 mai 1999 :


- arrêt sociétés mutuelles du Mans,
- arrêt Elkhbizi

La CCass met en place le système actuel, elle a est revenu à l'exception tenant à
l'origine conventionnelle de la règle de conflits de loi.
- Soit les parties ont la libre disposition de leurs droits, alors le juge n'est pas tenu de relever
d'office la RCL.
- Soit les parties n'ont pas la libre disposition de leurs droits, le juge doit alors soulever
d'office l'application de la RCL.

Comment définir la disponibilité ou l'indisponibilité de droit ?


Les matières dans lesquelles les droits sont indisponibles, sont celles où la
manifestation des volontés des personnes privées est totalement dépourvue d'effet, ou n’a
d’effet que si elle est approuvée par une autorité publique (car un intérêt public est en jeu).

Ex. de matière indisponibles : état des personnes, la filiation, les conventions


sur le changement de régime matrimonial ou les conventions de divorce (non
des faits qu'elle homologuée par l'autorité judiciaire)…

Ex. de matière disponible : responsabilité délictuelle…

Il faut analyser les droits litigieux si disponibles ou indisponibles. Mais la qualification des
droits disponibles ou indisponibles se fait en rapport à quelle loi ?
Il y a deux systèmes possibles :

- 19 -
- qualifier lege fori (d'après la loi du for), c'est-à-dire que le juge français doit vérifier
si le droit est disponible ou indisponible d'après le droit français. → système retenu.
- qualifier lege causae, c'est-à-dire que l'on qualifie en consultant les dispositions de la
loi matérielle désignée par la règle de conflits de loi.

B) L’autorité de la RCL pour les parties au litige

Les parties au litige peuvent-elles s'entendre, par un accord, pour que le juge ne leur fasse pas
application de la loi normalement compétente, mais leur applique une loi qu'elles choisissent ?
Les parties peuvent conclure un accord procédural, et ainsi déterminer la loi applicable
(arrêt du 19 avril 1988).
Mais la CCass encadre ce choix : les parties peuvent « en vertu d'un accord exprès, et pour les
droits dont elles ont la libre disposition, demander l'application d'une loi différente de celle
désignée par la règle de conflits de loi ».
→ Le choix d'un droit applicable n'est donc possible que si les droits litigieux sont des droits
disponibles.

Par l'arrêt société Hannover International du 6 mai 1997, la CCass admet que l'accord
procédural puisse simplement être tacite, qu'il résulterait du comportement des parties
(n'évoquant qu'une seule et même loi par exemple), mais il doit néanmoins être certain. C'est-
à-dire que les parties doivent avoir connaissance que le litige est international, qu'ils ont une
possibilité de choix dans la loi applicable, et qu'ils ont conclu un accord tacite.

L'accord procédural doit-il être au bénéfice de la loi du for ou de la loi étrangère ?


→ Le juge accepte un accord procédural sur une loi française
→ Un juge accepte-il un accord procédural pour une loi étrangère ?
Par un arrêt du 26 mai 1999, arrêt société Deltadraht, la CCass admet que le juge peut
reconnaître un accord sur une loi étrangère. Car la formule employée par CCass est générale,
mais aussi ambiguë, un doute subsiste.

§ 3 : L’opération de qualification

La qualification est une étape fondamentale dans la mise en oeuvre de la règle de


conflits de loi, elle consiste à insérer la question de droit posé dans l'une des catégories de
rattachement.

A) Les difficultés communes à toutes les opérations de qualification

1- L’intégration de la question de droit dans une catégorie de rattachement

L'opération peut devenir complexe lorsque la question de droit posé est à la frontière entre
deux, voire trois, catégories de rattachement.
Ex. Contester la validité d'une donation entre deux époux de nationalités différentes, il
y a trois catégories de rattachement possible :
* catégorie du fond des actes juridiques : s'il s'agit de fonder la contestation pour vice de
consentement.
* catégorie des effets du mariage : car par la donation entre époux l'un des époux capte le
patrimoine de l'autre.
* catégorie des successions : si l'on craint que cette donation ne contrarie le droit des héritiers.

- 20 -
Le problème est donc de trouver la bonne qualification. Il faut toujours s'appuyer sur la façon
dont les parties ont formulé la question de droit quand ils ont présenté le litige au juge

2- Le conflit de qualification

Il y a un conflit de qualification lorsque le système juridique du for et un autre système


juridique (avec lequel la situation est rattachée) qualifient différemment la même question de
droit.

La CCass, arrêt Caraslamis du 22 juin 1955 « affaire du mariage du grec orthodoxe » :


Un grecque orthodoxe se marie civilement à Paris. Son épouse française demande le
divorce devant un tribunal français. L'époux réplique en demandant la nullité du
mariage au motif que le droit grec ne reconnaît que le mariage religieux.

La question de droit porte sur la validité d’un mariage car célébré uniquement civilement, et
pas religieusement.
- Pour le droit français, cette question de droit appartient à la catégorie des formes du mariage,
régie par la loi du lieu de célébration du mariage.
- Pour le droit grec cette question de droit est une question de fond du mariage. La célébration
religieuse est une condition de fond, elle se rattache aux statuts des personnes (car cela
dépend de la religion des mariés) et se rattache à la loi nationale.
→ La CCass considère que l’on ne retient que la qualification lege fori.

Le conflit de qualification n'existe que lorsque la qualification commande la détermination de


la loi applicable, et non pas lorsque que la qualification intervient dans l'application de la loi
étrangère déterminée par le RCL. On doit donc respecter le contexte de la loi.

B) La difficulté de qualification de l’institution étrangère

La difficulté apparaît lorsque le juge français doit qualifier une situation internationale
fondée sur une institution juridique étrangère qui n'a pas d'équivalence en droit français.

→ Affaire Bartholo « affaire de la succession du maltais ». Arrêt de la CA d'Alger du 24


décembre 1889 :
Un couple de maltais mariés à Malte, vivant à Malte, puis le mari immigre en Algérie
où il décède. L'épouse maltaise prétend alors exercer sur des immeubles, situés en
Algérie, un droit (reconnu à l'époque dans le droit maltais) : la quarte du conjoint
pauvre (un quart des biens de la succession en usufruit).
À cette même époque dans le droit français le conjoint n’hérite pas de l'époux décédé,
il n'y a pas cette règle de la quarte du conjoint pauvre.
Problème de qualification :
• Si la quarte du conjoint pauvre est un élément du régime matrimonial maltais, alors
la loi applicable est la loi du 1er domicile commun des époux. → loi maltaise
• Si la quarte du conjoint pauvre est un élément du droit successoral, alors pour les
successions immobilières on applique la loi du lieu des immeubles. → loi française

1- Le rôle de la loi étrangère

Dans un 1er temps il faut analyser l’institution étrangère tel que le droit étranger en
définit les caractéristiques.

- 21 -
Le juge constate que dans le droit maltais, la quarte du conjoint pauvre est considérée comme
une conséquence du mariage, un élément du régime matrimonial.

2- Le rôle de la loi du for

Dans un 2nd temps l’on peut intégrer l’institution étrangère dans la catégorie de
rattachement la plus proche des traits caractéristiques de celle-ci.
Donc la quarte du conjoint pauvre est rattachée à la catégorie française des régimes
matrimoniaux. C’est donc la loi maltaise qui est d’application, et Mme Bartholo pouvait
bénéficier de la quarte du conjoint pauvre.

- 22 -
Titre 2 Le conflit de lois

Partie 1ère Théorie générale des conflits de lois

Chapitre 2 Les problèmes spécifiques posés par l’application du droit


étranger

Section 1 : Le renvoi

Il existe deux types de renvoi. Il y a le renvoi au 1er degré lorsque la loi désignée par la
RCL de la loi française renvoie à la loi du for. Il y a renvoi au 2nd degré lorsque la loi désignée
par la RCL française renvoi à une autre loi que la loi du for. Le renvoi au 1er degré est plus
largement accepté que la renvoi au 2nd degré.

§1 : La notion de renvoi

Définition : le juge français détermine la règle de conflit de lois françaises et l'applique au


litige, celle-ci désigne alors une loi étrangère comme loi compétente. Or à ce moment-là, le
juge français va constater que le DIP de ce pays, pour la même question de droit, désigne une
autre loi compétente.

Ex. Le juge français doit régler une question de régime matrimonial pour des époux
anglais domiciliés en Suède.
Conformément aux règles de conflits de lois françaises, on applique la loi du premier domicile
commun aux époux. → loi suédoise
Mais le juge français constate en même temps que le DIP suédois, pour la même question de
droit, rend compétente la loi commune des époux. → loi anglaise

Le juge doit-il ignorer cette solution différente du DIP étranger, ou doit-il appliquer
cette solution ? Doit-il tenir compte du renvoi fait par le DIP étranger à une autre loi ?
D’autant plus que le renvoi peut se prolonger : le DIP anglais peut renvoyer à un autre droit
international privé etc...

Il existe différents types de renvoi :


• Le renvoi au 1er degré : arrêt Forgo du 24 juin 1878.
Mr Forgo, enfant naturel bavarois, vit en France depuis l'âge de cinq ans jusqu'à sa mort.
L'art.13 du Cciv subordonnait l'acquisition d'un domicile de droit en France par un étranger à
l'obtention d'un décret d'admission à domicile. Mr Forgo n'avait jamais sollicité ce décret, si
bien que, du point de vue du droit français, il avait toujours conservé son domicile de droit en
Bavière.
A sa mort, il laisse une importante succession immobilière réclamée par :
- des collatéraux de sa mère sur le fondement de la loi bavaroise
- l'État français car la loi française ne considère pas les oncles et tantes comme des
ayants droit successoral. La succession étant vacante, l'État se devait la recueillir.

Par cet arrêt la CCass a consacré le mécanisme du renvoi au premier degré car la RCL
française désigne comme loi applicable, à une succession immobilière, la loi du dernier
domicile de droit du défunt : la Bavière.

- 23 -
C'est donc la loi bavaroise qui est d’application. Mais la CCass tient compte de la RCL de la
loi bavaroise qui ne distingue pas entre domicile de droit et domicile de fait.

Aussi, la CCass interrompt le mécanisme du renvoi et accepte la compétence de la loi


française. Le mécanisme du renvoi au premier degré (un seul droit étranger consulté) est
admis.

• Le renvoi au 2nd degré : arrêt banque Ottomane du 11 mars 1965, CA de Paris


Le juge français est saisi d'une question de droit : savoir quelle loi régissait le fonctionnement
d'une société constituée à Istanbul, selon la loi turque, mais dont les établissements principaux
sont situés à Londres.
→ La RCL française désigne la loi du siège social effectif : la loi anglaise.
→ Mais le DIP anglais considère que la loi applicable est la loi du lieu de
constitution : la loi turque.
→ Le DIP turc accepte la compétence de sa propre loi.
C'est donc un renvoi au second degré.

La CCass admet le renvoi au 2nd degré au vu du « caractère en principe obligatoire du renvoi


fait par la loi nationale d’un étranger à la loi d’un autre Etat pouvant être le cas échéant la
législation française »6.

Toutefois, le renvoi ne peut être exponentiel car généralement un litige n’est en rapport
qu’avec deux ou trois juridictions différentes.

§2 : La légitimité du renvoi

1) Objection formulée contre le renvoi

A- D’ordre théorique

• Le juge français doit appliquer la loi matérielle désignée par le DIP français, car ce
dernier exprime la manière dont l'ordre juridique français conçoit la compétence
internationale du droit français.
En conséquence le juge ne doit pas se préoccuper du DIP étranger, il ne doit pas
tenir compte de l'éventuel refus de ce DIP de désigner la même loi que le DIP
français.
• Le renvoi serait un faux problème, car le conflit de loi a été résolu par l'application
de la RCL française. Prendre en considération le renvoi serait faire naître un
nouveau conflit de lois, alors que celui-ci a déjà été résolu.

B- D’ordre pratique

- Le renvoi affole le juge qui est obligé de connaître le DIP étranger.


- L'on reproche au renvoi de pouvoir aboutir à une cascade de renvoi.

2) Pourquoi le droit positif accepte le renvoi

6
CCass. 1re Civ. 7 mars 1938, arrêt « Marchi Della Costa », principe confirmé par l’arrêt « Patino » du 15 mai
1963.

- 24 -
→ Le renvoi permet de coordonner les différents systèmes de DIP, il permet de donner une
solution acceptée par les différents ordres juridiques touchés par le litige.

Ex. Des les anglais domiciliés au Danemark le veulent à contracter en France.


Pour le DIP français → nationalité → loi anglaise
Pour le DIP anglais → domicile → loi danoise
Pour le DIP danois → domicile → loi danoise
Les différents systèmes juridiques intéressés obtiennent donc satisfaction.

→ Le renvoi permet d'éviter le « forum shopping », éviter qu'un plaideur ne choisisse le juge
devant lesquels il portera son litige en considération de la loi que ce juge appliquera.

§3 : Les solutions du droit positif

Le DIP français accueille le mécanisme du renvoi (pas forcément le cas de tous les
DIP) depuis l'arrêt Forgo pour le premier degré, et depuis l'arrêt du 7 mars 1938 (Marchi
Della Costa) pour le second degré.

Néanmoins il existe des exceptions où le renvoi est exclu :


- Exclusion exprès, certains textes internationaux indiquent que lorsqu'ils désignent la
loi de tel pays, ils entendent uniquement la règle de droit matériel de ce pays (exclusion des
DIP). Ex. Art. 21 al.1 de la convention de la Haye du 19 octobre 1996

Certaines conventions désignent comme loi applicable la loi interne de tel ou tel pays,
exclusion implicite du renvoi. (Généralement les convention de la Haye refusent le renvoi,
Romme II art. 24 : exclusion exprès du renvoi)

- Exclusion lorsque la règle de conflit intègre la volonté des parties, la loi applicable
est alors la loi choisie par les parties (possible pour actes juridiques, régimes matrimoniaux 7
etc…). Le renvoi est incompatible avec ses règles de conflits de loi, car si on l’admet il déjoue
la volonté et les prévisions des parties.

- Exclusion lorsque la RCL ouvre des options, lorsqu'elle est alternative. La RCL
prévoit alors l'application possible de plusieurs lois, le juge où l'une des parties choisissant la
loi applicable. Le renvoi peu alors déjouer les prévisions de la partie ou du juge ayant choisi
la loi applicable
Certains auteurs proposent de réintroduire le renvoi dans la RCL alternative lorsque celui-ci
produit des effets plus favorables que l'absence de renvoi. Ses auteurs proposent un renvoi in
favorem ou sélectif (en faveur du résultat recherché par la règle de conflit).

- Exclusion par les règles de conflits unilatérale (art. 309 du Cciv). La règle de conflits
unilatérale se préoccupe de déterminer le champ d'application de la loi interne, elle ne
détermine jamais quand une loi étrangère s'applique. Elle laisse à la loi étrangère le soin de
définir son champ d'application internationale.
Donc le correctif à l'application de la loi étrangère qu’est le renvoi n'a pas de raison d'être, car
elle choisit déjà.

7
CCass, 1re Civ. arrêt « Gouthertz » du 1er février 1972, domaine étendu par l’arrêt 1re Civ. du 11 mars 1997 :
« la mise en œuvre de la loi d’autonomie de la volonté est exclusive de tout renvoi »

- 25 -
- Exclusion (douteuse) du renvoi dans la situation de l'art. 311-14 du Cciv : l’article
applicable à l'établissement de la filiation (la loi nationale de la mère au jour de la naissance
de l'enfant).
Au lendemain de son adoption certains auteurs ont fait valoir que cette solution était propre au
droit français, non partagé par les droits étrangers. Donc si on admet le renvoi pour l’art. 311-
14, alors l’on n’aboutira jamais à appliquer la loi nationale de la mère de l'enfant. Pour assurer
le choix du législateur il faut donc exclure le renvoi. Ce courant fut suivi par les CA de Paris
et Lyon pour des arrêts de 1976 à 1994.
Mais cette position est critiquée car il est difficile de justifier la spécialité de l’art. 311-14 par
rapport aux autres règles de conflits de loi. Car toutes les règles de conflits constituent
nécessairement un choix, une prise de position en faveur d'un certain rattachement. Admettre
le renvoi c'est admettre qu'un autre rattachement est possible. Certains auteurs préconisent
alors l'application d'un renvoi sélectif, in favorem, en soulignant que parfois ce sera
l'exclusion du renvoi qui produira un effet favorable à l’établissement de la filiation.

Section 2 : La détermination du contenu de la loi étrangère

Appliquer la loi étrangère peut poser problème car le juge ne la connaît pas, cela
nécessite donc d'établir le contenu de celle-ci : la preuve de la loi étrangère. Par un arrêt du 13
janvier 1993, arrêt Consort Couck, la CCass affirme le principe de valeur de règle de droit de
la loi étrangère.

§1 : La charge de la preuve de la loi étrangère

A) Qui doit prouver le contenu de la loi étrangère, le juge ou le plaideur ?

- Arrêt du 25 mai 1948 « Lautour »

En Espagne un train est entré en collision avec un camion d'essence appartenant à Mr Lautour
(français) conduit par son employé. Le camion explose et tue Mr Girot, français, conduisant
un camion appartenant à une société française.
La veuve de Mr Girot poursuit Mr Lautour en réparation de son préjudice. Elle agit sur le
fondement du droit français dans la responsabilité du fait des choses. Mr Lautour lui oppose
un argument de droit : le droit applicable est le droit espagnol en tant que lex locqui delicti (la
loi du lieu du délit), et ce droit ne reconnaît que la responsabilité pour faute.

La CCass considère que :


- Il appartient au demandeur à l'action de prouver que le droit étranger applicable
satisfait sa prétention.
- Peu importe que le demandeur fonde sa demande sur le droit français, ou étranger, si
il apparaît au juge que le droit étranger est applicable. Il doit obliger le demandeur de prouver
le contenu du droit étranger.

- Arrêt du 24 janvier 1984 « Thinet »

Cet arrêt précise les conséquences du défaut d'établissement du contenu de la loi étrangère.
- Si le défaut de preuve est imputable à la mauvaise volonté, à la carence, du
demandeur. Il faut rejeter sa prétention.
- Si le défaut de preuve résulte d'une impossibilité, ou d'un coût excessif, le litige doit
être tranché par la loi française à titre subsidiaire.

- 26 -
Avantage :
- Obliger le demandeur d'établir le contenu de la loi étrangère applicable à sa prétention.
Inconvénient :
- L'auteur d'une prétention n'a pas toujours intérêt à établir le contenu de la loi étrangère.
- Cela permet au défendeur d'invoquer de façon purement dilatoire l'application d'une loi
étrangère, notamment lorsqu'il sait que les contenus sont similaires.
- Cela fait dépendre l'établissement du contenu d'une loi étrangère de la diligence des parties,
ce qui revient à traiter la loi étrangère comme un élément de fait.

La jurisprudence actuelle a repris le critère de la disponibilité ou indisponibilité des droits


litigieux :
* Si les droits sont indisponibles, alors on ne peut pas laisser aux parties le soin
d'établir le contenu de la loi étrangère. C'est donc au juge qu’il revient d’établir le contenu de
la loi étrangère, mais il a le droit de faire intervenir les parties.
Si le juge constate que la preuve est trop difficile, coûteuse, impossible, il peut toujours
trancher le litige par la loi française à titre subsidiaire ; ou rejeter la prétention de l'auteur qui
n'aura pas fourni les efforts raisonnables.
* Si les droits sont disponibles, le régime est identique depuis deux arrêts du 28 juin
2005 rendus par la 1ère civ et la 1ère com, une harmonisation des régimes. (On considérait en
droit commercial que c'était au plaideur d’établir le contenu de la loi étrangère).

B) Les procédés de preuve du contenu du droit étranger

1- Les procédés de preuve du contenu du droit étranger pour le juge

Le juge dispose du pouvoir général de pouvoir ordonner des mesures d'instruction, et


notamment de pouvoir faire appel à un expert du droit étranger.
La convention du 7 juin 1968 sur l'entraide judiciaire internationale (ratifié en France en
1972) dispose que chaque État signataire crée en son sein un organe destiné à répondre aux
demandes de renseignements portant sur leur droit qui provienne de l'étranger ; et un organe
destiné à transmettre à son homologue international les demandes émanant des juridictions
nationales. En France cet organe se nomme le bureau de droit international du ministère de la
justice.
Aussi le juge faisant cette demande doit surseoir à statuer car cela rallonge de beaucoup le
délai de la décision.

2- Les procédés de preuve du contenu du droit étranger pour les parties

Les parties peuvent intervenir indirectement par le certificat de coutume. Celui-ci est
un document émanant d'un juriste étranger, du consulat ou d'une ambassade en France d’un
Etat étranger, il atteste du contenu du droit étranger. Mais ce certificat n'a qu'une force
probatoire très faible car c'est un simple renseignement pour le juge (crainte d'un certificat de
complaisance).
Mais faire la preuve du droit étranger revient à faire la preuve d'un fait, le contenu du droit
étranger, et donc peu normalement être fait par tous moyens.

§2 : Le contrôle de l’application du droit étranger par la Cour de Cassation

- 27 -
A) La spécificité de l’interprétation du droit étranger

Le juge peut tomber sur un texte insuffisant, sur une règle de loi lacunaire, aussi doit-il
l’interpréter. Mais pour l'interprétation du droit étranger le juge ne peut pas déployer ses
techniques habituelles, car il doit appliquer le droit étranger tel qu'il existe à l'étranger, tel
qu'il est interprété par les juridictions étrangères. Il n'y a donc pas d'interprétation, mais le
juge doit déterminer l'interprétation étrangère de la loi.
Cela explique que la CCass refuse de contrôler l'interprétation du droit étranger. Les juges du
fond déterminent souverainement interprétation de celui-ci.

B) Le contrôle de la dénaturation du droit étranger

Si la CCass refuse de contrôler l'interprétation du droit étranger, elle se réserve un


contrôle minimum sur l'application que fait le juge français du droit étranger.
Il y a dénaturation lorsque le juge face à une règle, claire et précise, lui donne un sens
contraire à l'évidence.

Ex. Dans un arrêt du 21 novembre 1961, la CCass casse un arrêt rendu en CA qui «
avait méconnu est dénaturé le sens clair et précis du droit étranger ».
Par un arrêt du 1er juillet 1997, la CCass reproche à la CA d'avoir méconnu le sens
littéral de la loi sénégalaise « sans faire état d'aucune autre source de droit positif
sénégalais donnant à la disposition litigieuse le sens qu'elle a établi ».

- 28 -
Titre 2 Le conflit de lois

Partie 1ère Théorie générale des conflits de lois

Chapitre 3 L’éviction du droit étranger normalement compétant

§1 : L’exception d’ordre public international (OPI)

A) La notion d’OPI

1- L’OPI et les notions voisines

‫ ﻖ‬Distinction avec les lois d’ordre public : ces lois sont un préalable au mécanisme des
conflits de loi. Lorsque le juge constate que certaines règles s'imposent (en raison de leur
contenu, de leur importance), ces lois court-circuitent le raisonnement conflictualise. Le juge
doit appliquer la loi d’ordre public.

L’OPI intervient à la fin de la mise en œuvre de la règle de conflits de loi, il ne peut donc
fonctionner qu'en l'absence de loi publique et avec l'application de la règle de conflits de loi.
La notion d’OPI va permettre d'écarter la loi étrangère normalement applicable, lorsque les
effets produits par celles-ci sont contraires à nos conceptions juridiques fondamentales, à nos
valeurs fondamentales.

‫ ﻖ‬Distinction avec l'ordre public interne : L'OPI français regroupe les valeurs
fondamentales de l'ordre juridique français. La différence avec l'ordre public interne, c'est que
l’OPI est le noyau dur de l'ordre public interne : ce sont les principes juridiques essentiels
auxquels le droit français n'est pas prêt à renoncer, même dans ses relations internationales :
« les principes de justice universelle considérés dans l’opinion française comme doués de
valeur internationale absolue »8.

2- Les définitions de l’OPI

L’OPI est une exception, c'est-à-dire qu'il va paralyser la mise en œuvre de la loi
étrangère compétente en fonction de valeurs essentielles que sont :
- les droits de l'homme,
- la laïcité,
- la monogamie,
- l'intérêt des enfants,
- les droits de la défense...
La conception de l’OPI français est de plus en plus influencée par des sources extérieures que
sont le droit communautaire (repose sur des principes fondamentaux) et le droit européen (la
CEDH).
Aussi l’OPI français est « l’ensemble des principes considérés à un moment donné en France
comme des principes fondamentaux du système français. Correctif exceptionnel permettant
d’écarter la loi étrangère normalement compétente, lorsque cette dernière contient des
dispositions dont l’application est jugée inadmissible par le tribunal saisi » (Lessoir).

8
Arrêt « Lautour » du 25 mai 1948

- 29 -
Cette exception est une réaction aux résultats produits par l'application du droit
étranger. Appréciation in concreto par le juge.
Ex. TGI de Nancy 6 novembre 1973.
Le tribunal devait appliquer au divorce la loi canadienne, or à cette époque le
droit français ne reconnaît que le divorce pour se faute. Le tribunal devait donc
décider si l’OPI français s'opposait à l'application de la loi canadienne :
- Si l'appréciation s'effectue in abstracto: le défaut de communauté juridique
entre la loi canadienne et la loi française empêche l'application de la loi
étrangère.
- Si l'appréciation s'effectue in concreto : le tribunal a constaté que le mari
ayant abandonné le domicile conjugal pour vivre avec sa maîtresse cela
constitue une faute, et donc que le divorce est possible en droit français.
Le tribunal valide donc la loi canadienne car le résultat est similaire avec la loi française, cela
ne heurte pas l’OPI français.

3- La variabilité de l’OPI

• Variabilité temporelle

L’OPI comprend les valeurs essentielles à une société, donc celui-ci évolue avec la
société. Le juge devant toujours appliquer l'ordre public international contemporain.

Ex. En matière de divorce : 1816 suppression du divorce en droit français / 1884


réintroduction du divorce pour faute / 1975 libéralisation du divorce.
Dans la période ou le divorce est prohibé, l’OPI est utilisé par les juges pour empêcher
l’application des lois étrangères admettant le divorce.
Tandis qu’à partir de 1975, l’OPI est utilisé par les juges pour permettre le divorce en
France.

• Variabilité d’intensité

L’idée de l’effet atténué de l'OPI est que l'on ne peut pas s'opposer avec la même force
à l'application des lois étrangères selon, qu'il s'agit de créer une situation juridique en France,
ou de laisser une situation créée à l'étranger produire des effets en France. Dans le premier
cas, l’OPI doit avoir un effet plein (réagir avec force), tandis que dans le second cas, l'OPI
peut n'avoir qu'un effet atténué. C'est-à-dire n'intervenir que dans les cas exceptionnels où
l'ordre juridique français va absolument refuser de prendre en considération les droits acquis à
l'étranger en application de la loi étrangère.

Selon la CCass, arrêt « Rivière » du 17 avril 1953, « la réaction à l’encontre d’une


disposition contraire à l’OP n’est pas la même suivant qu’elle met obstacle à l’acquisition
d’un droit en France ou suivant qu’il s’agit de laisser se produire en France les effets d’un
droit acquis sans fraude à l’étranger et en conformité de la loi ayant compétence en vertu du
DIP ».
A la différence de l’arrêt « Buckley », du 28 février 1960, l’arrêt « Rivière » permet au juge
d’étendre son contrôle de l’OP à l’ensemble de la situation, et non aux seuls effets produit en
France.

- 30 -
Mais cette théorie porte à controverse car la distinction entre la création d’une situation
juridique en France et les effets en France d’une situation juridique créée à l'étranger, est
difficile à réaliser.
D'où la proposition de la théorie de l'ordre public de proximité qui consiste en une approche
plus juridique que la théorie de l’effet atténué. Le seul fait qu'une situation juridique soit née à
l'étranger ne suffit pas à justifier sa neutralisation par l’OPI. Il faut rechercher si cette
situation présente des liens significatifs avec l'ordre juridique du for, soit au moment de la
création, soit au moment de la production de ses effets. Et l’OPI ne doit fonctionner que si les
situations présentes effectivement des liens significatifs avec l'ordre juridique du for.

Ex. Arrêt du 10 février 1993 de la CCass


L'objet est une action en recherche de paternité naturelle engagée devant le juge
français. Cette action est normalement soumise à la loi tunisienne (loi de la nationalité
de la mère au jour de la naissance de l’enfant), or le droit tunisien interdit cette action.
Mais l'enfant était français et il vivait en France.
La CCass considère que « si les lois étrangères qui prohibent l'établissement de la filiation
naturelle ne sont pas en principe contraire à la conception française de l’OPI, il en est
autrement quand ces lois ont pour effet de priver un enfant français, résidant habituellement
en France, de la possibilité d'établir sa filiation ».

B) Les effets de l’exception d’OPI

1- Effet d’éviction de la loi étrangère normalement compétente.


2- L’OPI remplace la loi étrangère par la loi du for. Mais l’application
subsidiaire de la loi française doit avoir un domaine d’application le plus restreint possible.
Seules sont écartées les règles de droit étranger contraire à l’OPI.
Ex. En succession la RCL désigne la loi musulmane, et le juge découvre que la loi fait
une différence entre musulman et non musulman : elle écarte les non musulmans de la
succession. Aussi l’OPI écarte cette disposition pour déterminer les successibles, mais
conserve la loi musulmane pour les autres mesures de la succession : partage …
3- Effet réflexe de l’OPI. Lorsqu’une situation a été créée dans un pays
étranger avec l’application de la loi du for sur le fondement de son OPI, faut-il admettre, ou
non, en France les effets de la situation ainsi créée ?
Ex. Deux polonais de religions différentes ont voulu se marier en Belgique. Or la loi
polonaise normalement applicable interdit le mariage entre personnes de religions
différentes. Cette loi polonaise est écartée en Belgique en raison de l’OPI belge,
remplacée par la loi belge. Ce mariage est-il valide au regard du droit français ?
Normalement non, car selon le droit français la loi applicable aux conditions du
mariage est la loi polonaise. Mais, comme l’OPI français aurait lui aussi écarté la loi
polonaise en lui substituant la loi française, l’on considère la situation valide.
L’effet réflexe est admit lorsqu’il y a concordance entre l’OPI étranger et l’OPI français. La
situation ainsi créée à l’étranger est valide en France.

§2 : L’exception de fraude à la loi

A) Les différentes formes de fraudes internationales à la loi

1- La fraude internationale à la compétence législative

- 31 -
Cette fraude consiste en la manipulation d’une RCL afin d’échapper à la loi normalement
applicable, pour placer le litige sous l’emprise d’une autre loi plus favorable.

Ex. Arrêt « Princesse de Bauffremont » du 18 mars 1878, CCass


La princesse de B, belge, épouse Bx, un prince français, par ce mariage elle acquiert la
nationalité française. En 1874, la CA de Paris prononce la séparation de corps entre les deux
époux. La princesse tombe amoureuse d’un prince roumain et veut se marier avec lui, mais
cela lui est impossible car la loi française ne reconnaît pas le divorce.
Aussi la princesse établit domicile dans le duché allemand Saxe Atenburg et obtint la
nationalité de celui-ci, sa situation personnelle étant alors soumis à la loi allemande. Et la loi
de ce duché considérant comme divorcé les catholiques séparés de corps, la princesse s’en est
retrouvée divorcée. Elle peut alors se marier avec le prince roumain.
Le prince Bx engage alors en France une procédure judiciaire pour faire annuler la
naturalisation allemande et le 2nd mariage au mépris de l’interdiction de la polygamie.
La CCass considère le divorce obtenu dans le duché allemand comme inopposable en
France, dès lors que la princesse n’avait obtenu la nationalité allemande dans le seul but de
divorcer et d’éluder les dispositions d’ordre public de la loi française.

Ex. Arrêt « Caron » du 20 mars 1985


Un américain possédait en France des immeubles qu’il souhaitait léguer à sa maîtresse. La
RCL française désigne en matière de succession d’immeubles la loi du lieu des immeubles
comme loi compétente. La loi successorale française est donc applicable, or celle-ci comporte
une réserve héréditaire empêchant le don des immeubles à la maîtresse.
Aussi l’américain créé une société à laquelle il apporte ses immeubles, et reçoit des parts
sociales en échange. Et en matière de biens meubles la loi applicable est la loi successorale
américaine, qui ne connaît pas la réserve héréditaire. Le legs en faveur de la maîtresse est
donc validé.
La CCass sanctionne la fraude, cette mobilisation des immeubles français par la création
d’une société est inopposable en France parce que fait en fraude à la loi française.

2- La fraude à la compétence juridictionnelle

Cette fraude consiste à aller saisir un juge spécifique afin qu’il applique une loi
particulière. La manipulation porte à titre principal sur une règle de conflit de juridictions. On
créé artificiellement un chef de compétence international (une résidence dans un pays) afin de
se faire juger par un autre juge que le juge normalement compétent. L’objectif étant que ce
juge applique sa RCL qui rend compétente une autre loi plus favorable que celle désignée par
le DIP normalement compétent.

Ex. CA de Paris, 18 juin 1964


Des époux américains souhaitaient divorcer en application du droit mexicain. Et selon
le droit mexicain, dès lors que le juge mexicain est compétent les parties peuvent réclamer et
obtenir l’application du droit mexicain à leur litige. Les époux créent alors un résidence au
Mexique pour donner compétence au juge mexicain et donc compétence à la loi mexicaine.
Le juridiction française fut saisie pour considérer l’effet du divorce en France, et la
CA de paris considère que le divorce ne peut être reconnu en France car il fut obtenu par
fraude.

Ex. CCass, arrêt du 24 novembre 1987

- 32 -
Une société suisse est en litige avec deux sociétés américaines devant le juge
américain. Or le droit américain reconnaît la discovery procédure qui oblige les parties à
produire des documents sur la demande du juge. Le société suisse chercha à échapper à cette
procédure en cédant ses créances litigieuses à une société française. Celle-ci prenant sa place
dans le procès, mais pouvant bénéficier de l’article 14 Cciv. permettant à un français de
bénéficier d’un privilège de juridiction française. La CCass considère cette manipulation
comme étant une fraude.

B) Les éléments constitutifs de la fraude à la loi

Trois éléments sont constitutifs d’une fraude :


- élément matériel : la manipulation, la modification du facteur de
rattachement. La fraude n’est possible que lorsque le rattachement peut subir l’influence de la
volonté des parties (nationalité, lieu de naissance…). Toutes ces manipulations sont des
éléments réels (pas de simulation).
- élément légal : la disposition obligatoire d’une loi normalement compétente
que l’on veut éluder. L’élément légal peut être une norme impérative, mais aussi une norme
supplétive. Dans la mesure où celle-ci ne peut pas être écartée par la volonté contraire des
parties, elle est juridiquement tout aussi obligatoire qu’une norme impérative.
- élément moral qui relie l’élément matériel et l’élément légal. C’est l’idée que
la manipulation a été réalisée dans le seul but d’échapper à la disposition obligatoire de la loi
normalement compétente.

C) Le domaine de la fraude à la loi

Sanction de la loi française ? étrangère ? L’arrêt Bauffremont détermine seulement une


fraude à la loi française, mais la CCass 1ère cmce. 7 mars 1961 admet la sanction de la fraude à
la loi étrangère, 1ère civ. 11 juillet 1977 admet la sanction en matière de divorce.
Toutes les fraudes à la loi, française ou étrangère, peuvent être sanctionnées.

D) La sanction de la fraude à la loi

Pour certains auteurs, la sanction doit être la nullité des actes frauduleux, pour d’autres
l’inopposabilité.
Finalement la fraude doit avoir pour sanction sa propre inefficacité, et selon les cas l’on
pourra contrecarrer la fraude soit par la nullité, soit par l’inopposabilité.

- 33 -
Titre 2 Le conflit de lois

Partie 2nd Le droit spécial des conflits de loi

Chapitre 1 Le statut personnel

La source des règles de conflit de lois en matière de statut personnel se trouve dans
l’art.3 al3 Cciv « Les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français,
même résidant en pays étranger.».
Dès le début du 19ème siècle la jurisprudence a bilatéralisée cette règle en déduisant que l’état
et la capacité des étrangers (même ceux résidants en France) sont régis par leurs lois
nationales.

Section 1 Présentation général

§1 : Le contenu du statut personnel

L’art. 3 dispose de l’état civil des personnes (nom, prénom, sexe…).

- Arrêt CA de Paris du 14 juin 1994. Un transsexuel argentin établit en


France demande à ce que l’on modifie l’indication du sexe figurant sur ses papiers d’identité.
Cette question est soumise à la loi nationale de l’individu, or la loi argentine n’admet aucun
changement.
Les droits relatifs à : - la capacité, l’incapacité des personnes
- le statut familiale des personnes (mariage, divorce, filiation)
→ Les droits extra-patrimoniaux relève de la loi nationale de l’individu.

Les droits de la personnalité appartiennent-ils au statut personnel ?


La CCass par un arrêt du 13 avril 1988, portant sur des photos compromettantes de
l’ex-impératrice d’Iran et cette dernière poursuit le journal en France pour obtenir
l’interdiction de la publication. Le journal soutenait que les droits de la personnalité
appartenaient au droit des personnes, et donc régit par la loi nationale de l’individu. Aussi la
loi iranienne, moins protectrice, devait s’appliquer.
La CCass affirme que l’atteinte à la vie privée, et ses conséquences, relevait de la loi du lieu
où les faits ont été commis, et non pas de la loi personnelle de la victime.

Droits de la personnalité ne relève donc pas du statut personnel, mais appartient à la


catégorie des faits juridiques.

§2 : La localisation de la personne.

L’élément de contrôle de tous les rapports au droit constituant le statut personnel est la
personne, le sujet de droit. Donc pour localiser le rapport de droit (pour déterminer son centre
de gravité) l’on s’attache à localiser la personne.
Deux critères : la nationalité, le domicile ou le lieu de résidence.
Le Code civil définit le domicile comme étant le lieu dans lequel une personne possède son
principal établissement. De son côté, la résidence est conçue comme une situation de fait :
ç'est le lieu ou une personne habite lorsqu'elle se trouve hors de son domicile

- 34 -
1) La nationalité de la personne

On peut soumettre une question de droit du statut personnel à la loi nationale de la


personne, du sujet de droit. L’avantage d’une telle localisation est qu’elle assure une
permanence des lois concernant la personne. Où que soit établit cette personne, quel que soit
ses déplacements, cette personne sera toujours soumise à la même loi : sa loi nationale.
C’est une garantie pour les tiers qui peuvent ainsi connaître la règle applicable à une
personne, peut importe ses déplacements. Mais aussi une facilité pour le sujet, car sa loi
nationale reflète ses mœurs, sa culture. L’application de la loi nationale permet aussi de
réduire les fraudes à la loi internationale.

En cas de pluri-nationalités :
‫ ﻖ‬Si parmi les nationalités de l’individu il y a la nationalité du juge saisi, en principe
le juge ne retient que cette nationalité.
Ce principe a été condamné par la CJCE dans l’arrêt « Garci Avelo » de 2004. Un père belge,
une mère espagnole, vivant en Belgique, eurent des enfants dont le nom posa problème :
- selon le droit belge, seul le nom du père est conservé
- selon le droit espagnol, il est possible d’accoler le nom du père et le nom de la mère.
Le juge belge décida d’appliquer seul la loi belge, posant problème aux enfants pour voyager
en Espagne.
La CJCE considéra que les autorités belges avaient eues tort de faire prévaloir la loi nationale,
car cela ne convient pas avec la construction communautaire.

‫ ﻖ‬Si parmi les nationalités en conflit il n’y a pas la nationalité du juge saisi, alors il
faut déterminer et faire primer la nationalité la plus effective (arrêt Notteböhm, 1955).

Problème pour les apatrides : convention de New-York du 28 décembre 1954


Relative au statut des apatrides, cette convention soumet leur statut personnel à la loi de
leur domicile ou, à défaut de domicile, leur pays de leur résidence.
Les Etats étrangers doivent respecter les droits acquis précédemment par l’apatride et
découlant de son statut personnel (notamment ceux résultant de son mariage).

2) Le domicile de la personne

L’avantage de la loi du domicile est qu’elle protège mieux les tiers en relation juridique
avec la personne au jour le jour.
Le domicile (sérieux et sincère), reflète véritablement l’environnement quotidien de la
personne. Et est donc très révélateur de l’imbrication de la personne dans le contexte juridique
du pays de son domicile. De plus, la loi du domicile est bien souvent la loi du juge saisi, et
permet au pays d’immigration de fondre la population immigrée dans la population nationale
(assimilation plus rapide).

Mais la loi du domicile est aussi facilement manipulable car l’on peut facilement changer
de domicile. La loi n’assure donc pas une permanence du statut juridique de la personne.

3) La combinaison des deux éléments

Le droit français combine l’application de la loi nationale et l’application de la loi du


domicile. Mais parfois le critère du domicile est remplacé, par une convention internationale
(la Haye), par le critère de la résidence habituelle (critère concret, factuel) de l’intéressé.

- 35 -
Le critère du domicile n’étant pas courant dans les autres droits.

Section 2 Les différentes règles de conflit du statut personnel

§1 : Les incapacités

Nous allons uniquement nous intéresser aux incapacités d'exercice, car les incapacités
des jouissances tiennent, non pas à la personnalité, mais à la position de l’incapable, à sa
profession (incapacités successorales pour le médecin...). L'incapacité de jouissance ne relève
pas spécifiquement du statut personnel, il est donc plus logique d'appliquer la loi de
l'institution dont découle l'incapacité de jouissance.
Les incapacités d'exercice tiennent à la personne de l'incapable (minorité, trouble
mental...), elles relèvent donc du statut personnel. Et doit en principe être soumis à la loi
nationale de l'individu, garantissant une permanence de l'état de la personne.
L’on va donc étudier l'incapacité d'une part, puis la protection organique de l'incapable d'autre
part.

A) L'incapacité en elle-même

La compétence de la loi nationale de l'incapable est de principe. Cela fut affirmé dès
1814 dans un arrêt de la CA de Paris en date du 13 juin 1814, l'arrêt « Busqueta ».
Un Espagnol vivant en France se marie avec un Mlle Style, américaine. Puis celle-ci découvre un par la suite que
son mari était un moine défroqué poursuivi de peine de mort en Espagne. Style attaque donc pour nullité le
mariage, en raison de l'incapacité de se marier de M. Busqueta car il est un moine défroqué. La CA de Paris
raisonne selon l'art. 3 al.3 du Cciv et considère que M. B est incapable de se marier selon la loi espagnole, le
mariage est donc nul.

La loi nationale détermine :


- Les faits et juridiques qui sont sources incapacité. A l'exception des incapacités liées
au mariage, soumises à la loi régissant le mariage lui-même.
- L'étendue de l'incapacité : les actes que l'incapable ne peut pas faire seul.
- Les formes habilitantes, les formes qui permette à l'incapable d'agir juridiquement.
- Le régime de la nullité des actes juridiques accomplis par l'incapable sans être
habilité.

Toutefois il existe des exceptions à l’application de la loi nationale de l’individu. La


loi nationale de l'incapable est écartée lorsque la solution établie par celle-ci est défavorable
au tiers cocontractant. Car le tiers peut ignorer qu'il contracte avec un étranger, avec un
incapable. Le tiers n'est pas tenu de connaître la loi étrangère déterminant incapacité.
Les actes de la vie courante ne sont pas l'occasion de mener une enquête quant à la capacité
du cocontractant. Aussi pour sauvegarder la sécurité du commerce, la jurisprudence a cherché
à limiter les dangers encourus par les personnes contractant avec un incapable étranger.
La CCass par l'arrêt « Lizardi » du 16 janvier 1861 mit en place « l'excuse d'ignorance
légitime de la loi étrangère ». M. L., mexicain de 22 ans (mineur sous la loi mexicaine, majeur
sous la loi française), achète des bijoux en France puis demande la nullité de la vente devant
les tribunaux français en raison de son incapacité.
La CCass considère alors que « l'incapacité qui résulte de la loi étrangère n'est pas
applicable au cocontractant français si celui-ci est excusable de l'ignorer ». Il faut donc
apporter la preuve de l'ignorance légitime. La jurisprudence a depuis bilatéralisé la règle,

- 36 -
l'étranger peut lui aussi revendiquer l'erreur légitime sur l'incapacité. Cette règle fut consacrée
par la Convention de Rome du 19 juin 1980 en son article 11.

B) La protection organique de l'incapable

• protections familiales et étatiques autour de l'incapable, les protections organiques sont


régies par la convention de la Haye du 5 octobre 1961, uniquement pour les mineurs.
Entrée en vigueur le 10 novembre 1972, son but est de régler les conflits de loi
soulevée par la protection des mineurs, mais aussi les conflits de juridiction y étant
liés. Aussi la convention peut entrer en conflit avec le règlement de Bruxelles II bis à
du 27 novembre 2003, entrée en vigueur le 1er mars 2005, qui règle les conflits de
juridiction en matière de responsabilité parentale. Le règlement de Bruxelles II bis
s'impose en vertu de son article 60.

La Convention de la Haye détermine « Les autorités, tant judiciaires


qu'administratives, de l'Etat de la résidence habituelle d'un mineur sont […] compétentes pour
prendre des mesures tendant à la protection de sa personne ou de ses biens ».
La minorité est définie à l'article 12 : pour être considéré comme mineur une personne doit
être mineur à la fois en application de sa loi nationale, mais aussi en application de la loi de sa
résidence habituelle (rattachement cumulatif).
La convention ne s'applique et que si le mineur réside habituellement sur le territoire d'un État
membre, sinon application du droit commun.

La convention, par principe, s'attache à reconnaître la protection exercée dans le cadre


familial. Pour ce faire, elle impose la reconnaissance dans tous les états contractants d'un «
rapport d'autorités résultant de plein droit de la loi interne de l'État dont le mineur est
ressortissant » (art. 3). C'est-à-dire sans qu'il soit nécessaire d'intervenir judiciairement, tel
l'autorité parentale résultant de plein droit de la loi interne.
Puis la convention prévoit que, par exception, lorsqu'une mesure de protection est nécessaire
(urgente), les autorités de la résidence habituelle de l'enfant, agissant conformément à leurs
propres lois internes, sont compétentes (art. 4). Mais même dans le cadre de cette mesure de
protection, les autorités de l'État national du mineur ne perdent pas toutes compétences. Si
elles estiment que l'intérêt du mineur à l’exige, à condition d'en aviser les autorités de l'État de
résidence, elles peuvent aussi prendre des mesures de protection en application de leur droit
interne.
S’il n'y a pas de rapports d'autorité découlant directement de la loi nationale, les mesures de
protection nécessaire sont de la compétence des autorités de l'État de résidence habituelle,
agissant sous leur législation.

L'on reproche à cette convention le manque de coordination entre les lois internes et
les autorités. La convention de 1961 a pour vocation d'être remplacée par la convention de la
Haye du 19 octobre 1996. Cette nouvelle convention privilégie par principe la loi de la
résidence habituelle de l'enfant. Ce n'est que par exception que cette autorité de l'État de
résidence, si elle estime que l'autorité d'un autre État contractant est mieux placée, peut lui
demander d'accepter sa compétence pour prendre les mesures nécessaires. Et réciproquement
l'État national peut demander la compétence de l'État résidence habituel de l'enfant.
La convention de la Haye sur la protection internationale des adultes (due aux migrations de
retraités vers le sud) n'est pas encore ratifiée. Le droit commun s'applique à la protection des
incapables majeurs, relevant de la loi nationale de l'individu.

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Par exception, la convention donne compétence aux autorités et à la loi de l’Etat contractant
dont l’adulte possède la natinalité. Pour prendre des mesures de protection si ces autorités
considerent qu’elles sont mieux placées et après en avoir avisé les autorités de l’Etat de
résidence habituelle ou de présence.
Las autorités de l’etat contrcatant de résidence habitielle ou de presence, peuvent requerir les
autorités d’un autre etat contractant (art 8).

§2 : Le nom

Mis à part un la transmission du nom de la jurisprudence considère un comme une


conséquence de la filiation, et qu'elle soumet donc à la loi applicable de la filiation, l'origine
du nom relève par principe de la loi nationale.

§3 : Le mariage

1) La notion de mariage en droit international privé.

En droit international privé le mariage a le même sens qu’en droit interne, c'est une
union légale entre deux personnes de sexe différent.
Remarque :
- la condition de sexe différent relève du droit interne, la CEDH se déclare incompétente sur
la question, le refus du mariage homosexuel n'est pas une atteinte aux droits de l'homme.
- l'union légale permet la distinction avec le concubinage qui échappe aux statuts personnels
et ne fait pas l'objet d'une règle de conflits de loi spécifique. Les problèmes juridiques posés
par le concubinage sont résolus au cas par cas, en fonction de leur nature propre.
Ex. Les conséquences d'une rupture abusive de concubinage relèvent de la loi applicable à la
responsabilité délictuelle. Un problème de succession entre deux concubins relève de la loi
applicable à la succession.
Le concubinage n'est pas une institution en tant que tel, aussi les problèmes liés au
concubinage sont résolus par la nature propre de la question.

Réponse ministériel du 26 juillet 2005 : effet en France d’un mariage homo célébré à
l’étranger. Admis dans la notion de mariage pour déterminé la loi applicable.

Le PACS pose un problème de qualification car le législateur l’a qualifié de contractuelle,


mais les dispositions relatives aux PACS se trouve dans le livre 1er du code civile : les
personnes. Les auteurs préconisent l'inclusion du PACS dans le statut personnel, mais cela
pose un problème juridique car alors il faudrait appliquer au PACS les mêmes règlent de
conflits de loi que celle pour le mariage, or le PACS est différent du mariage. La doctrine
distingue alors deux hypothèses :
• si les partenaires ont une nationalité commune, ils pourront entrer dans le partenariat
organisé par leur loi nationale commune. Celle-ci s'appliquera aux conditions et aux
effets du partenariat.
• si les partenaires n'ont pas de nationalité commune, il devrait leur être possible d'entrer
en partenariat que si l'institution est connue dans les deux lois.

- 38 -
2) La loi applicable aux conditions de formation du mariage :

Nous ne nous intéresserons qu'aux conditions de fond du mariage, car les conditions
de forme relèvent de la catégorie des actes juridiques. La loi applicable est la loi nationale des
futurs époux (art. 3 al.3), confirmé dans l'art. 171-1. Cet article subordonne la reconnaissance
du mariage d'un français célébré à l'étranger à sa conformité aux règles de fond du mariage
français.
Aptitudes des époux à ce marié : loi nationale de chaque époux qui détermine si chaque époux
est apte à se marier.
L'on applique la loi nationale des futurs époux, mais y compris aux problèmes liés à
l'aptitude des époux à se marier. On applique la loi nationale, peu importe que les époux
soient ou non de même nationalité. Si ils sont de nationalité différente, il y aura une
application distributive des lois nationales, mais cela pouvant poser problème lorsque qu'un
des époux est de statut polygamique et que l'autre de statut monogamique.
Ex. Si un homme de statut polygame est déjà marié lorsqu'il épouse une seconde
femme, sa loi nationale autorise la polygamie donc le mariage est valide. En revanche
si la femme est de statut monogamique et elle se marie pour la première fois, aussi le
mariage est valide. Ainsi l'application distributive de la loi nationale valide le mariage,
alors que pourtant l'un des époux est de statut monogame et se retrouve de fait dans un
mariage polygame.

La jurisprudence avait alors développé la notion « d'empêchement bilatéral » au mariage dans


un arrêt du 15 octobre 1958. Il existe un empêchement bilatéral dès lors qu'un époux de
statut monogamique est sur le point de vivre un mariage polygamique si celui-ci se réalise.
Mais l'empêchement bilatéral ne permet pas de régler toutes les situations.
Ex. Un mari de statut polygamique se marie en premier lieu avec une femme
monogamique. Puis il se marie une seconde fois avec une femme de statut
polygamique.
L'empêchement bilatéral ne peut pas entrer en jeu, et ne peut pas protéger la première épouse
du mariage polygamique. L'on met donc en œuvre l'exception d'ordre public international afin
d’empêcher un tel mariage.

Le second problème relève de la nullité du mariage. Par principe la loi nationale de chacun
des époux s'applique à la nullité du mariage.

3) La loi applicable aux effets du mariage

On ne peut appliquer distributivement la loi nationale de chacun des époux (sous


condition qu’ils soient nationalités différentes ;). La Cour de Cassation donne une solution en
trois règles de rattachement alternatif :
• Les époux ont une nationalité commune, on applique aux effets du mariage la loi
commune des époux.
• Les époux n'ont pas, ou n'ont plus, la même nationalité, la loi applicable aux
effets du mariage est la loi du domicile commun, si ils habitent dans le même pays
(Cour de Cassation, « Tarwid » du 15 mai 1961). Lorsqu’il y a un conflit mobile
(lorsque l'élément de rattachement varie dans le temps : changement de nationalité
d’un époux), ce conflit, en matière de mariage, est résolu en appliquant la loi
nationale des époux au jour de l'effet en cause.
• Les époux sont de nationalités différents et habitent dans des pays différents, à
titre subsidiaire l’on applique la loi du juge saisi, la loi du for.

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Les effets du mariage comprennent :
 les devoirs respectifs des époux entre eux.
 le régime primaire des époux.
 le statut de la femme mariée.
 l’émancipation en raison du mariage.

§4 : Le divorce :

La règle de conflit de lois en matière de divorce est disposée à l’art. 309 Cciv.
Et s’applique en trois règles successives :
« Le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française :
- lorsque l'un et l'autre époux sont de nationalité française.
- lorsque les époux ont, l'un et l'autre, leur domicile sur le territoire français.
- lorsque aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence, alors que les tribunaux français
sont compétents pour connaître du divorce ou de la séparation de corps ».

A respecter dans l’ordre de l’article 309 cciv :


1) Application directe du droit français

Le droit français est applicable quand les époux ont tout deux la nationalité française,
indifféremment de leur domicile.
Le droit français est applicable quand les époux ont leur domicile sur le territoire français.

2) La recherche du droit étranger qui se reconnaît compétent

Si il n’y a pas de nationalité commune française, ni de domicilie commun en France, dans


un premier temps le juge doit identifier les systèmes juridiques intéressés par la relation
litigieuse. Puis il doit questionner les DIP des systèmes intéressé pour déterminer si l’un
d’entre eux reconnaît compétence à se propre loi. Si l’un des systèmes se reconnaît
compétent, alors le juge applique cette loi. Mais en cas de lacune de loi (aucune loi
compétente) ou de conflit de loi compétentes, alors le juge passe à la troisième étape.

3) L’application subsidiaire de la loi du for

Quand aucune loi ne se reconnaît compétente alors que les tribunaux français sont compétents
pour entendre le litige, le divorce est régi par la loi française.
La jurisprudence a étendue cette solution à l’hypothèse du conflit de lois compétentes : CA de
Versailles, arrêt du 23 octobre 1979.
Deux époux, espagnols au moment du mariage, installés en Belgique où l’épouse acquiert
la nationalité belge. Puis l’un des époux vient vive en France et demande le divorce.
Le tribunal a constaté que l’alinéa 1 et 2 de l’art. 309 Cciv ne pouvaient s’appliquer car les
deux systèmes juridiques (belge et espagnol) se reconnaissaient compétent. Le DIP
espagnol donnait comme loi compétente la loi de la dernière nationalité commune des
époux : la loi espagnol. Le DIP belge donnait compétence à la loi belge, dès lors que l’un
des époux avait la nationalité belge. → conflit de lois
Aussi, la CA a appliquée la loi française à titre subsidiaire

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Il se peut que l’art. 309 aboutisse à une solution illogique : dans l’hypothèse du divorce d’un
français vivant en France mais marié à une personne étrangère vivant à l’étranger. Le droit
français ne s’applique pas, si la loi étrangère se reconnaît compétente mais ignore le divorce,
alors le français ne peut divorcer.
La CCass 1ère civ., par un arrêt du 1er avril 1981, énonce une règle dérogatoire : une
français vivant en France peut toujours obtenir le divorce selon la loi française, quand la loi
étrangère applicable ignore l’institution. Le divorce est considéré comme d’ordre public
international.

4) Le domaine de l’art. 309

L’art. 309 cciv régissent :


 la détermination de la liberté de divorcer.
 les causes de divorce.
 les effets du divorce, notamment les obligations alimentaires liés au divorce
Conformément à la Convention de la Haye du 2 octobre 1973, avec la règle de conflit de
lois par rattachement en cascade, par dérogation aux articles 4, 5 et 6, l’art. 8 soumet les
obligations alimentaires consécutives au divorce à la loi régissant le divorce, dans l’Etat
contractant et où celui-ci est prononcé et reconnu.

L’art. 309 cciv s’appliquent aussi à la séparation de corps. Mais il y a un possible problème
lorsque le divorce est demandé par transformation de la séparation de corps : hypothèse où la
séparation de corps est prononcée dans un Etat étranger (après le prononcé de la séparation de
corps, les époux vont dans un nouvel Etat et y demande le divorce pour séparation de corps).
Après détermination de la loi applicable au divorce, il faudra vérifier que le principe même de
la transformation de la séparation de corps en divorce est admis par la loi régissant le divorce.
Et vérifier que la séparation de corps a été prononcée pour une cause admise par la loi
régissant le divorce.

Ne relève pas de la loi du divorce :


- la situation des enfants mineurs → Convention de la Haye de 1961
- le partage de la communauté ou le calcul des récompenses → la loi régissant le régime
matrimonial
- les mesures provisoires prononcées dans le cadre de la procédure de divorce → tout ce
qui est procédural est soumis à la loi du for.

§5 : La filiation
Il existait auparavant une distinction entre la filiation légitime, conséquence du mariage et
régit par la loi du régime matrimonial. Et la filiation naturelle soumise à la loi nationale de
l'enfant.
Loi du 3 juillet 1972 : posée une égalité des filiations légitimes et naturelles, ce qui suppose
une seule et même règle pour les deux filiations. On favorise, dans l'intérêt de l'enfant
l'établissement de sa filiation, d'où la règle de conflits de loi par rattachement alternatif.

- 41 -
1) Les règles applicables à l'établissement de la filiation

A) La compétence de principe de la loi nationale de la mère de l'enfant

 L'article 311-14 Cciv : la filiation dépend de la loi nationale de la mère de l'enfant au


jour de la naissance de celui-ci. Cela est dû au rôle prépondérant de la mère dans l'action
en filiation, mais aussi car généralement la filiation est établie par rapport à la mère. La
mère est entendue comme la mère biologique de l'enfant, pas nécessairement la mère
juridique.
 Si la mère n'est pas connue, l'art. 311-14 prévoit que la filiation est régie par la loi
nationale de l'enfant.
La règle de conflits de loi résout le problème du conflit mobile, car l'on retient la nationalité
de la mère à un moment précis : le jour de la naissance de l'enfant.

B) Application de la loi de police française

L'article 311-15 Cciv : précise que les effets de la possession d'état, tel que prévu par la
loi française, doivent être pris en considération quelque soit la nationalité de la mère ou de
l’enfant, quand l'enfant et ses pères et mères (ou l’un d’eux) réside habituellement sur le
territoire français, peu importe la nationalité de la mère.

C) Les autres règles, art. 311-17 et 311-18.

Art. 311-17 cciv « La reconnaissance volontaire de paternité ou de maternité est valable si


elle a été faite en conformité, soit de la loi personnelle de son auteur, soit de la loi
personnelle de l'enfant. ».
Cela permet de valider la reconnaissance volontaire de paternité, ou de maternité, dans
l'intérêt de l'enfant. A contrario pour invalider cette reconnaissance, celle-ci doit être affirmée
parler les deux lois : du père (ou mère) et de l’enfant.

Art. 311-18 cciv édicte la règle de conflits de loi à fin de subsides. Cette disposition est
caduque depuis l’entrée en vigueur de la Convention de la Haye du 2 octobre 1973 sur la
loi applicable aux obligations alimentaires.

2) La loi applicable aux effets de la filiation

Le législateur n'a pas donné de règle de conflits de loi quand aux effets de la filiation.
Aussi l’on étend la règle de la filiation aux effets de celle-ci, selon la nouvelle règle de
filiation. Mais à défaut de règles spécifiques établies par le législateur, en matière d'effet de
filiation on maintient les règles établies par la jurisprudence avant 1972 :
- les effets de la filiation légitime sont régis par la loi du mariage
- les effets de la filiation naturelle sont régis par la loi nationale de l'enfant.

Les effets de la filiation comportent :


- l'attribution de l'autorité parentale, mais Convention de la Haye du 5 octobre 1961
- les obligations alimentaires, mais Convention de la Haye du 2 octobre 1973
- la transmission du nom patronymique

- 42 -
3) Le cas particulier de la filiation adoptive

La filiation adoptive fut toujours très controversée car :


 l'adoption internationale est un phénomène en pleine expansion
 l'adoption internationale est un phénomène très sensible au plan international car il
peut y avoir des différences radicales entre les systèmes juridiques (en pays de droit
musulman l'adoption est prohibée).
 l'adoption internationale reflète les déséquilibres sociaux, économiques et
démographiques du monde actuel.
 l'adoption internationale peut donner lieu à des dérives, des trafics et des
enlèvements internationaux d'enfants.
 pendant longtemps le législateur n'est pas intervenu dans ce domaine. La convention
de la Haye du 15 novembre 1965 n'est pas ratifiée par la France (seulement par trois
Etats).

La loi du 6 février 2001 intègre au Code civil de nouveaux articles destinés à régler les
problèmes de conflits de loi en matière d'adoption internationale, sous l'influence de la
Convention de la Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en
matière d'adoption internationale, ratifiée par la France en 1998.

A) Les articles 370-3 et 370-4 du Code civil

Ces articles distinguent les conditions et les effets de l'adoption.


• L'article 370-3 détermine les conditions de l'adoption : par principe les conditions de
l'adoption sont régies par la loi de l'adoptant, plus précisément par la loi nationale de
l'adoptant, ou si l'adoption est effectuée par deux époux par application de la loi qui
régit les effets de leur mariage. Cet article précise que si les lois nationales des deux
époux prohibent l'adoption, celle-ci ne pourra pas être prononcée (conditions
cumulatives).
o L'article 370-3 pose une règle particulière concernant les enfants mineurs :
l'adoption ne peut être prononcée si la loi nationale de cet enfant prohibe
l'adoption. Sauf si l'enfant mineur étranger est né et réside en France
(illustrations de l'ordre public de proximité).
o L'article 370-3 pose de règles matérielles : quelque soit la loi applicable,
l'adoption requiert le consentement du représentant légal de l'enfant. Ce
consentement devant être libre, obtenue sans aucune contrepartie, donné après
la naissance d'un enfant et éclairé sur les conséquences de l'adoption, en
particulier s'il est donné en vue d'une adoption plénière.
L’article 370-3 est donc une règle de conflits de loi, mais aussi une règle de fond impérative.

• L’article 370-4 : les effets de l'adoption prononcée en France sont ceux de l'adoption
française. Soit une adoption simple, soit une adoption pleinière.

B) La Convention de la Haye du 29 mai 1993

Convention sur la protection des enfants et l'adoption internationale, entrée en vigueur le


1er octobre 1998, elle lie 30 Etats.
Champ d'application matériel et spatial : la convention s'applique dès lors qu'il est question
d'adoption entre personnes résidant dans un pays contractant (État d'accueil) et un enfant

- 43 -
résidant dans un autre pays contractant (Etat d'origine), elle concerne le déplacement
international de l'enfant.
La convention ne s'applique que si l'enfant a moins de 18 ans, et dès lors qu’au jour où les
adoptants demandent l'adoption, la Convention est entrée en vigueur à la fois dans l'État
d'accueil et dans l'État d'origine.
La convention ne s'occupe pas de la décision d'adoption, elle n'affecte ni la compétence des
autorités qui prononcent l'adoption, ni la loi applicable à l'adoption. Elle se contente d'agir en
amont et en aval de la décision d'adoption :
- en amont, car elle s'efforce de coordonner l'action des autorités administratives
des Etats contractants pour le déplacement de l'enfant.
- en aval, car elle assure la reconnaissance de plein droit de la décision adoption
dans les autres pays contractants.

La philosophie générale de la Convention est dominée par l'intérêt de l'enfant, et le


respect de ses droits fondamentaux. À tel point que dans le préambule de la convention, il est
précisé que l'intérêt de l'enfant est de rester dans son pays d'origine.

1 - Le déplacement international de l'enfant

La convention met en place dans chaque État signataire une autorité centrale pour
l'adoption qui est spécialement investie d'une mission d'information et de surveillance des
adoptions internationales. Et surtout une mission de coopération avec leurs homologues dans
chaque État contractant concerné.
La Convention interdit les adoptions libres, il faut nécessairement passer par les autorités
centrales. Et chaque autorité centrale, en application de son DIP, réalise un certain nombre de
vérifications :
• L'autorité centrale du pays de résidence de l'adoptant, saisie en
premier, doit vérifier que les futurs parents adoptifs sont «
compétents à adopter ». Contrôler qu'ils remplissent les conditions
légales et sociologiques requises par l'adoption. Elle doit aussi s'assurer
que les adoptants ont reçu les conseils nécessaires et que l'enfant pourra
entrer et séjourner régulièrement sur le territoire étatique. L'autorité
centrale établit un rapport qu’elle transmet à l'autorité centrale de
l'origine de l'enfant.
• L’autorité centrale de l’enfant doit vérifier que celui-ci est adoptable,
que l’adoption internationale répond à son intérêt supérieur. Elle
doit aussi contrôler le consentement nécessaire de l’enfant ou de son
représentant légal, qu’il soit donné librement, en pleine connaissance de
cause et sans contrepartie.

2 – Les effets de l’adoption

La décision d’adoption prononcée dans un Etat signataire (dans le respect de la


convention) : donne lieu à l’établissement d’un certificat de conformité qui permet la
reconnaissance automatique (du lieu de filiation et de la responsabilité parentale) de la
décision d’adoption dans un autre Etat signataire.
L’Etat signataire peut refuser la reconnaissance, uniquement, si celle-ci est manifestement
contraire à son ordre public, compte tenu de l’intérêt de l’enfant.

- 44 -
La rupture du lien de filiation par le sang est réglée de façon nuancée par la Convention.
Art. 26 : la rupture est reconnue si l’adoption produit cet effet dans l’Etat contractant où celle-
ci a été prononcée.
Exception à l’art. 27 : si l’adoption dans le pays où elle a été prononcée ne rompt pas le lien
de filiation par le sang, elle peut être convertie dans le pays d’accueille de l’enfant en une
adoption rompant ce lien de filiation, sous deux conditions cumulatives :
• Le droit de l’Etat d’accueille doit lui-même admettre cette rupture.
• Les autorités de l’Etat d’origine doivent s’être assurées du respect des règles relatives à
l’expression de la volonté, de l’information de la famille et à l’enfant.

- 45 -
Chapitre 2 Le statut réel
Section 1 La règle de conflit de lois applicable au statut réel
La RCL est traditionnellement plus homogène et plus simple : une seule est unique RCL :
lex rei sitae. On applique la loi du lieu de situation de la chose.

§1 : Les fondements de la RCL

C’est une règle ancienne, l’illustration de la tendance territorialiste qui soumettait à la loi
locale les relations juridiques se déroulant sur le territoire. Cette règle s’imposait de manière
très forte pour les meubles en raison de leur importance sociale.
Il est facile et naturel de rattacher un rapport de droit à partir de l’objet matériel qui en
constitue le support.

Donne satisfaction aux intérêts du titulaire du droit réel : permet de centraliser ses intérêts
sous l’empire d’une même et seule loi qu’il connaît généralement (loi du lieu de domicile).
Cette solution satisfait aussi l’intérêt des tiers : car ils peuvent déterminer facilement la loi
applicable à un état juridique des biens.
L’Etat (règles urbaines, expropriations…), trouve aussi son intérêt puisqu’il sera certain que
sa propre loi s’appliquera à tous les biens situés sur son territoire.

§2 : La mise en œuvre de la RCL

A) Les immeubles

La RCL ne pose pas de difficulté, c’est une des règles les plus ancienne en DIP : la
bilatéralisation de l’art. 3 al.2 Cciv par la jurisprudence.
« Les immeubles, même ceux possédés par des étrangers, sont régis par la loi française.».

B) Les meubles en déplacement

Ce sont certains meubles qui, en raison de leur finalité, sont en déplacement et peuvent
même se trouver dans un espace sans souveraineté (haute mer, espace extra-atmosphérique).
Cela concerne essentiellement les navires, bateaux9 et aéronefs.
On ne peut appliquer la loi de la situation, on va alors procéder à une localisation par
immatriculation du bien. On les considère alors fictivement rattachés en permanence au pays
de leur immatriculation : la loi du pavillon. Cette loi détermine les conditions de al propriété,
de sûreté sur le bien et la responsabilité du propriétaire.

Les meubles en transit ne sont pas localisé sur un territoire spécifique, ou ne s’y trouve
que de façon éphémère et peu significative à l’occasion d’un déplacement. On leur applique
alors, soit la loi du pavillon si le bien est transporté par air ou mer, soit la loi de destination
pour une opération réalisée à distance.

C) Les meubles corporels

9
Navire pour la mer, bateau pour fleuve et canaux

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Le rattachement des meubles corporels s’effectue selon la loi lex rei sitae depuis un arrêt
en date du 19 mars 1872, arrêt « Craven », car jusqu’à lors on appliquait aux meubles la loi du
domicile du titulaire du droit réel.
Cela peut être difficile car le meuble peut être déplacé au delà des frontières, il peut alors
naître un conflit mobile : quand un bien est successivement soumis à deux, ou plusieurs, lois
différents en raison de son déplacement dans l’espace.
Ex. Lorsqu’une sûreté mobilière est constituée sur un bien meuble situé dans un pays
déterminé. Si ce meuble est ensuite déplacé dans un autre pays dont le droit ignore ce
type de sûreté mobilière.
Par un arrêt du 8 juillet 1969, affaire relative à un gage sans dépossession, la CCass solutionne
ce conflit.
Un automobiliste acheta à crédit une voiture qui faisait l’objet d’un gage sans dépossession en Allemagne. Selon
le droit allemand produisait des effets car le créancier gagiste pouvait primer le conservateur du bien.
L’utilisateur a fait passer le véhicule en France, où un garagiste a fait des réparations sans être payé, à ce
moment le créancier gagiste allemand demande paiement sur la voiture.
La CCass s’est inspirée des règles applicables au conflit dans le temps : l’appréciation de la
validité du gage est soumise à la loi du lieu de situation du meuble, au moment où le gage fut
constitué. Mais une fois la validité confirmée par la loi allemande, les effets du gage sont
soumis à la loi de la situation du bien au moment où ceux-ci sont revendiqués : la loi
française.

Néanmoins il peut paraître nécessaire de protéger les tiers qui traitent actuellement avec le
détenteur du bien. Aussi la CCass a décidé, par exemple, qu’un gage sans dépossession dans
un pays qui en admet la validité, ne pouvait pas être opposé au créancier qui saisissait le bien
en France, car celui-ci ne pouvait pas avoir connaissance de ce droit réel.

D) Les meubles incorporels10

Cet ensemble de biens est par définition intangible et immatériel, aussi on ne peut recourir
à la règle classique. La solution est l’application du principe de territorialité, c'est-à-dire que
la loi applicable est la loi du pays pour le territoire duquel sont revendiqué l’existence et
l’effet d’un droit de propriété intellectuelle. C’est la solution de droit commun, et la solution
préconisée par les conventions internationales (Convention de Berne 9/09/1886, et du
20/03/1883 sur la protection des œuvres littéraires).

Cette règle est confirmée par la question de la loi applicable aux atteintes portées au droit de
propriété intellectuel par l’art. 8 du règlement Rome II (entrée en vigueur le 11 janvier O9).
« La loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d’une atteinte à un droit de
propriété intellectuelle est celle du pays pour lequel la protection est revendiquée.»
Le fonds de commerce est assez facile à localiser parce que l’on peut le localiser par son
élément central : la clientèle. Le fonds de commerce est régi par la loi du lieu de la clientèle.

10
Droit de nature patrimoniale non susceptible d’une appréhension matérielle : droit de la propriété artistique,
fonds de commerce…

- 47 -
Section 2 Le domaine de la loi réelle
Le statut réel a pour objet la détermination des droits réels et leurs régimes, c'est-à-dire la
création, la transmission et le contenu de ces droits.

A) Les modes d’acquisitions

Il existe différent modes d’acquisition des droits réels, certains relève incontestablement
du statu réel et donc de la loi réel, aussi appliquerons nous lex rei sitae à l’occupation, la
possession et l’accession.

D’autres modes d’acquisition du droit réel échappent à cette règle, car ils résultent d’un
fait ou d’un acte juridique. La loi applicable sera alors la loi du fait où l’acte juridique donne
naissance au droit réel.
CCass 1er civ. arrêt du 21 juillet 1987 : un contrat qui transmet un droit réel est soumis à la
catégorie de rattachement des actes juridiques, et non pas à celle du statut réel.
→ Risque de chevauchement ! La transmission du droit réel est régi par la loi du contrat,
tandis que les prérogatives attachées au droit réel sont déterminées par la lex rei sitae.

B) La transmission des biens par voies successorales

1) Pour la succession sans testament, ou ab intestat, la succession mobilière échappe au statut


réel pour être soumise au statut des faits juridiques : le décès. On applique la loi du pays où le
défunt avait son dernier domicile. Cour de Cass, arrêt « LABEDAN » du 19 juin 1939.
La succession immobilière relève du statut réel, l’art. 3 al.2 Cciv s’applique (CCass, arrêt
« Stewart » du 14 mars 1837), aussi la loi française est seule applicable aux immeubles situés
en France. L’inconvénient de ce rattachement est qu’il entraîne un morcellement du règlement
successoral, car chaque immeuble se voit appliquer la loi du lieu où il se situe.
Les tribunaux français refusent de se reconnaitre compétent pour régler la succession d’un
immeuble à l’étranger !

2) Pour la succession testamentaire, le législateur a voulu écarter la possibilité de choisir la loi


applicable pour préserver le caractère impératif de la succession. Donc la succession
testamentaire à la loi applicable à la succession ab intestat. Arrêt du 14 mars 1967

Les conditions de formes en matière de testaments, relèvent de la Convention de la


Haye du 5 octobre 196111. Depuis lors, la règle de rattachement est alternative : tout testament
est valable en la forme s’il satisfait aux exigences de la loi du lieu où la de cujus a testé, ou à
celles de la loi du lieu de son décès, ou, le cas échéant, à celles de la loi du lieu où l’immeuble
est situé.
Enfin, il résulte d’une Convention de Washington12, que tout testament accompli dans les
formes de celle-ci doit être reconnu pour valable en la forme dans tout les Etats contractants.

11
Entrée en vigueur le 19 novembre 1967
12
Entrée en vigueur le 1er décembre 1994

- 48 -
Chapitre 3 Le statut des faits juridiques
Le rattachement de cette catégorie s’effectue par rapport à la source du rapport de
droit. On soumet les obligations naissant de faits juridiques à la loi du lieu où le fait juridique
c’est produit.

Section 1 La responsabilité délictuelle et quasi-délictuelle


Par principe la loi applicable est la loi du lieu de survenance du délit, ou quasi-délit,
mais des exceptions sont introduites par des Conventions Internationales.

§1 : La loi du lieu de survenance du délit ou quasi-délit

Lex loci delicti, cette règle répond à l’attente légitime des parties qui supposent,
logiquement, à ce que le comportement de l’auteur du dommage soit régit par la loi du lieu où
le dommage se manifeste.
Cette règle favorise aussi la prévisibilité et la sécurité des relations internationales, car elle
permet à ceux qui agissent dans un pays donné de savoir que c’est la loi locale qui
déterminera les conditions et le régime de leur responsabilité.

Ce rattachement peut avoir un caractère artificiel lorsque la situation concrète a des


liens plus étroits avec un autre pays vers lequel converge la majeur partie des facterus de
rattachement.
Ex. Lorsque l’auteur et la victime d’un dommage sont d’un même pays, mais
que le dommage est situé à l’étranger.
Les pays de common law ont tenu compte de cette idée pour élaborer la théorie de la proper
law of the tort. La Cour de l’état de New York en 1963, confronté à ce type affaire, car un
américain est tombé dans un ravin au Canada. Le juge américain a tout de même retenu la
compétence de la loi américaine, et non pas la loi canadienne, car celle-ci avait des liens plus
étroits avec le litige.
La CCass a toujours refusé de rendre plus flexible la règle lex loci delicti (ex. arrêt
« Lautour »13, arrêt du 30mai 1967 accident entre deux français en Allemagne).

Il peut arriver que le lieu ou le fait générateur s’est produit ne corresponde pas au lieu
du dommage (ex. pollution d’un fleuve survenant dans un pays causant un dommage dans un
autre pays en aval, ou bien un délit de presse dans un autre pays que la résidence de la
victime).
Pour déterminer si on applique la loi du lieu du fait générateur : lex loci delicti
commisi, ou la loi du lieu où le dommage est apparu : lex loci delicti damni.
‫ ﮭ‬Si on applique la loi du dommage, on peut consacrer une incohérence : rendre illicite un fait
considéré comme licite là où il a été réalisé. De plus le dommage est parfois fortuit, ex. une
mauvaise réparation d’un véhicule peut entraîner un dommage en Allemagne ou dans
n’importe quel autre pays.
‫ ﮭ‬Si on applique la loi du fait générateur, on répond à l’attente légitime des victimes qui
pourraient ne pas comprendre qu’un fait dommageable ne soit pas réparé parce qu’une loi
étrangère ne l’admet pas.

13
Cf. p25

- 49 -
La jurisprudence a longtemps été hésitante, mais la CCass admet l’application soit du
lieu du fait générateur, soit du lieu du préjudice. Le choix devant être dicté par des
considérations de proximité, c'est-à-dire copte tenu des éléments factuels du litige. On
appliquera la loi la plus proche de la relation litigieuse.

Arrêt de la 1ère civ. du 11 mai 1999, arrêt « Mobil North Sea » : une plateforme pétrolière
avait naufragé en mer du Nord. La société Mobil avait poursuivit en réparation la Lloyd’s, la
société chargée d’effectuer des contrôles su la plateforme. La société Mobil considère
que la loi française est d’application, car un contrôle avait eu lieu en France.
La CA avait appliqué la loi UK, la loi du lieu du naufrage.
La CCass approuva ce rattachement à la loi UK, considérant que le rattachement à la
loi française est trop faible car il y avait eu des contrôles en France, mais aussi en Belgique,
en Allemagne et en UK. En revanche, le dommage était clairement localisé dans le ressort de
la loi anglaise.
→ Appréciation casuistique de chaque litige.

Application plus délicate de la lex loci delicti lorsque le délit est réalisé dans des lieux
sans souveraineté (haute mer…). On fait alors application de la loi du pavillon ou de la loi du
for à défaut.
Cette règle a vocation disparaître avec l’entrée en vigueur le 11 janvier 09 de Rome II (n°
864/2007 du 11 juillet 07) sur la loi applicable aux obligations non contractuelles.
Ce règlement s’applique dans les situations comportant un CL aux obligations non
contractuelles en matière civile et commerciale, notamment la responsabilité délictuelle et
quasi-délictuelle.
Ce règlement a un caractère universel, càd que le juge français sera tenu d’appliquer la loi que
le règlement désigne, même si c’est la loi d’un Etat non membre de l’UE.
La RCL générale applicable aux responsabilités délictuelle ou quasi-délictuelle se
trouve à l’art. 4 du règlement. Par principe la loi applicable à l’obligation non contractuelle
résultant d’un fait dommageable, et celle du pays où le dommage survient, quelque soit le
pays où le fait générateur se situ, quelque soit le (ou les) pays dans lequel les conséquences
indirectes surviennent.
→ La règle donne une solution unique pour les délits simples et complexes : lex loci delicti
damni.
→ LA RCL insite qu’il ne faut pas prendre en compte le préjudice14 résultant indirectement
du dommage15, seul compte ce dernier.

Exception : lorsque la personne responsable et la victime ont leurs résidences habituelles dans
un même pays au moment de la survenance du dommage.
LE règlement prévoit alors que le juge peut déroger aux règles précédentes lorsqu’il résulte de
l’ensemble des circonstances que le fait dommageable présente des liens manifestement plus
étroit avec un autre pays : on appliquera alors la loi de celui-ci (principe de proximité).

§2 : Les rattachements dérogatoires


14
Les conséquences juridiques du dommage, l’atteinte à des droits patrimoniaux ou extra-patrimoniaux.
15
Le fait matériel de l’atteinte.

- 50 -
1) La Convention de la Haye du 4 mai 1971 sur la loi
applicable aux accidents de la circulation routière16

Cette convention s’applique à la responsabilité civile extracontractuelle qui découle


d’un accident de la circulation, peut importe la juridiction saisie (civile ou pénale). Elle est
d’application universelle (peut appliquer une loi d’un Etat non membre).

La convention prévoit deux types de règles, le principe (art. 3) dispose que la loi
applicable à la réparation d’accident est la loi interne de l’Etat sur le territoire duquel
l’accident est survenu.

Exception (art. 4) : dans certains cas, on peut appliquer une autre loi si elle présente des liens
plus étroits avec le litige.
- Lorsque qu’un seul véhicule est impliqué dans l’accident, et que les victimes et
auteurs du dommage sont établis dans le pays d’immatriculation du véhicule, alors on
applique la loi de ce dernier.
- Lorsque plusieurs véhicules sont impliqués, et que tous sont immatriculés dans un
même pays, alors on applique la loi du pays d’immatriculation.

2) La Convention de la Haye du 2 octobre 1973 sur la


responsabilité délictuelle du fait des produits17

Cette convention (application universelle) s’applique lorsque le dommage est causé


par un produit dangereux, une description inexacte du produit, ou en raison de l’absence de
mode d’emploi. Elle ne régit que les rapports extra-contractuels, le dommage doit avoir été
subi par quelqu’un qui n’est pas l’acquéreur du produit.

Principe (art.4) : application de la loi lexloci delicti comisi, la loi du pays où le fait
dommageable est survenu.
Mais l’application de cette loi n’est possible que si ce pays est aussi :
- le pays de la résidence habituelle de la victime,
- ou le pays du principal établissement du responsable,
- ou le pays du lieu d’acquisition du produit.

Si ces conditions ne sont pas remplies (double rattachement), ou bien si la victime le veut
ainsi, on peut appliquer la loi de la résidence habituelle de la victime. A condition qu’elle soit
aussi la loi du principal établissement du responsable, ou la loi du lieu d’acquisition du
produit (art.5).

Si les articles 4&5 ne peuvent s’appliquer, la victime a une option :


- soit elle réclame l’application de la loi du principal établissement du responsable,
- soit la loi du lieu de survenance du fait dommageable

Section 2 La loi applicable aux quasi-contrats

16
Entrée en vigueur en 1975
17
Entrée en vigueur en le 1er octobre 1977

- 51 -
Il n’y a aucun texte, la jurisprudence est inexistante, mais à compter du 1er janvier
2009 une loi va être établie par le règlement Rome II. Dans ses articles 10&11, le règlement
prévoit que en cas d’obligation non-contractuelle, découlant d’un enrichissement sans cause,
d’un paiement indu, ou d’une gestion d’affaires, se rattache à une relation existante entre les
parties (tel une obligation découlant d’un contrat) ; ou lorsque l’obligation découle d’un fait
dommageable : la loi applicable est la loi régissant le contrat ou le fait dommageable.
Aussi, lorsque le contrat n’est pas autonome, on applique la loi de la relation préexistante.

En revanche, si la relation quasi-contractuelle ne se rattache pas à une relation


préexistante, alors la loi applicable est la loi du pays de résidence commune des parties, au
jour où survient le fait à l’origine du quasi-contrat.
A défaut, loi applicable est la loi du pays dans lequel le quasi-contrat s’est exécuté.

Le règlement prévoit que si le juge constate, au regard de toutes les circonstances de


l’espèce, que l’obligation quasi-contractuelle présente des liens manifestement plus étroit avec
un autre pays, il faut appliquer la loi de celui-ci.

Article 10
Enrichissement sans cause
1. Lorsqu’une obligation non contractuelle découlant d’un enrichissement sans cause, y
compris un paiement indu, se rattache à une relation existante entre les parties, telle qu’une
obligation découlant d’un contrat ou d’un fait dommageable présentant un lien étroit avec cet
enrichissement sans cause, la loi applicable est celle qui régit cette relation.
2. Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 1 et que les parties ont
leur résidence habituelle dans le même pays au moment où le fait donnant lieu à
l’enrichissement sans cause survient, la loi applicable est celle de ce pays.
3. Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base des paragraphes 1 ou 2, la loi
applicable est celle du pays dans lequel l’enrichissement sans cause s’est produit.
4. S’il résulte de toutes les circonstances que l’obligation non contractuelle découlant d’un
enrichissement sans cause présente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre
que celui visé aux paragraphes 1, 2 et 3, la loi de cet autre pays s’applique.

Article 11
Gestion d’affaires
1. Lorsqu’une obligation non contractuelle découlant d’une gestion d’affaires se rattache à
une relation existante entre les parties, telle qu’une obligation découlant d’un contrat ou d’un
fait dommageable présentant un lien étroit avec cette obligation non contractuelle, la loi
applicable est celle qui régit cette relation.
2. Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 1 et que les parties ont
leur résidence habituelle dans le même pays au moment où le fait donnant lieu au dommage
survient, la loi applicable est celle de ce pays.
3. Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base des paragraphes 1 ou 2, la loi
applicable est celle du pays dans lequel la gestion d’affaires s’est produite.
4. S’il résulte de toutes les circonstances que l’obligation non contractuelle découlant d’une
gestion d’affaires présente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui
visé aux paragraphes 1, 2 et 3, la loi de cet autre pays s’applique.

- 52 -
Chapitre 4 Les actes juridiques
Section 1 La forme des actes juridiques
§1 : La forme des actes patrimoniaux

1) La solution de la jurisprudence française

La jurisprudence s’applique en l’absence de convention internationale (notamment de la


convention de Rome du 19 juin 1980), par principe : locus regit formam actus.
Par un arrêt du 29 juin 1922, la CCass considère que la loi applicable à la forme de l’acte
juridique est la loi du lieu de rédaction, ou de conclusion (en l’absence d’écrit) de l’acte.
Ce principe fut confirmé par l’art. 47 (actes d’état civil), art. 999 (testament) et 71-1 (mariage)
du Cciv.

Ce principe a un caractère facultatif si la loi du lieu de conclusion du contrat ne valide pas


l’acte quant à sa forme, la jurisprudence reconnue que d’autres lois peuvent être invoquées,
par les parties, pour fonder la validité formelle de l’acte.
Ex. On applique la loi nationale commune des parties (si l’acte juridique est bilatéral),
ou la loi nationale de la seule partie à l’acte unilatéral, arrêt du 20 juillet 1909.
‫ ﮭ‬Arrêt « Viditz » : un anglais ayant rédigé un testament en France selon la forme prévue par
la loi anglaise, la CCass a jugée que le principe désignait certes la loi française, mais qu’il est
possible de valider le testament par l’application de la nationale du testateur.
‫ ﮭ‬Arrêt du 28 mai 1963, affaire « The kid » : C. Chaplin avait cédé, à Paris, ses droits sur le
film The Kid, sous la forme imposée par le droit américain ; puis il a demandé la nullité du
contrat au regard de la loi française. La CCass a expliquée que le principe ne s’opposait pas à
ce que des contrats internationaux soient passé en France en une forme prévue par la loi qui
les régi au fond.
La CCass a ensuite précisée qu’il y avait une hiérarchie à respecter, c'est-à-dire que le
principe locus regit formam actus doit normalement s’appliquer à la forme de l’acte juridique,
sauf si une clause l’écarte au bénéfice :
- soit de la loi applicable au fond de l’acte
- soit la loi nationale.

2) La solution donnée par le droit international

A) La Convention de la Haye du 5 octobre 1961 18 sur le conflit de loi en


matière de forme des dispositions testamentaires

Cette convention prévoit que la forme du testament est valable si il est validé par 1 des 5 lois
possibles :
¤ la loi du lieu de disposition du testateur
¤ la loi du lieu de situation de l’immeuble
¤ la loi nationale du testateur
¤ la loi du domicile du testateur
¤ la loi du lieu de la résidence habituelle du testeur

18
Entrée en vigueur le 19 novembre 1967, art. 999 Cciv

- 53 -
La Convention de Washington du 26 octobre 197319 porte sur la loi uniforme sur la forme
du testament international. Elle contient des règles matérielles qui suffisent à garantir la
validité du testament.

B) La Convention de Rome du 19 juin 198020 sur la loi applicable aux


obligations contractuelles

Convention d’application universelle, elle s’applique à tous les contrats sauf exception.
Pour favoriser la validité formelle des actes juridiques elle consacre le caractère facultatif de
la règle locus regit formam actus.
Elle établit la distinction :
- Si les deux parties à l’acte, ou les représentants, se trouvent dans un même Etat au
moment de la conclusion du contrat, celui-ci est formellement valable dès lors qu’il
satisfait aux conditions de formes posées par la loi du lieu de conclusion, ou de la loi
régissant le contrat au fond.
- Si les deux parties à l’acte, ou les représentants, se trouvent dans deux Etats différents
au moment de la conclusion du « contrat en absence », celui-ci est formellement
valable dès lors qu’il satisfait aux conditions de formes posées par la loi régissant le
contrat au fond, ou la loi de l’un des ces deux Etats.

Exception :
Pour le consommateur, l’art. 9 §5 prévoit que la forme d’un contrat conclu par celui-ci est
impérativement régit par la loi du pays de sa résidence habituelle, si cette loi est la loi
applicable au fond du contrat prévu à l’art. 5 (l’objectif étant la protection du consommateur).

En matière d’immeuble (art. 9 §6), on tient compte d’une loi de police du lieu de situation de
celui-ci. Elle s’applique alors aux contrats ayant pour objet un droit réel immobilier : la forme
de ceux-ci est soumise aux règles de formes impératives de la loi du pays où l’immeuble est
situé. Pour autant que cette loi s’applique indépendamment du lieu de conclusion du contrat et
de la loi le régissant au fond !

3) Le domaine de la catégorie de rattachement

La catégorie de rattachement de la forme des actes juridiques concerne tous les actes
juridiques, et par forme il faut comprendre :
- les formes validante : c'est-à-dire exigible sous peine de nullité
- les formes probatoires : c'est-à-dire exigée pour prouver l’existence de l’acte juridique
en cas de litige.

Exception : Convention de Rome fait de la forme probatoire une question à part, soumise à
une règle spéciale disposée à l’art. 14 :
« La loi régissant le contrat en vertu de la présente convention s'applique dans la mesure où,
en matière d'obligations contractuelles, elle établit des présomptions légales ou répartit la
charge de la preuve. »
Admissibilité des modes de preuve des actes juridiques= l’art. 14 prévoit que le contrat peut
être prouvé par tous modes de preuves admis par la loi du for, ou l’une des lois applicables à
la forme du contrat.

19
Entrée en vigueur en 1094
20
Entrée en vigueur le 1er avril 1991

- 54 -
Les formes de publicité (afin de rendre l’acte opposable aux tiers) sont soumises à la loi du
pays de publication.

§2 : La forme des actes extra-patrimoniaux

1) La forme du mariage

La diversité des formes du mariage au niveau international nécessite l’application du


principe : locus regit formam actus. Il impose lorsqu'un le mariage est célébré en France ou à
l'étranger, celui-ci doit être célébré dans les formes de la loi locale.

Par exception : les mariages consulaires ou diplomatiques. Ce mariage peuvent être célébré en
France entre de l'étranger devant leurs agents consulaires ou diplomatiques, selon les formes
prévues par la loi nationale des époux.
Dès les époux français peuvent être mariés à l'étranger selon les formes de la loi française, dès
lors que le mariage est officié par des agents diplomatiques ou consulaires français. En
principe les deux époux doivent avoir la nationalité française, mais dans certains pays les
agents peuvent célébrer un mariage mixte (art.171-1 Cciv).

Le mariage contracté à l'étranger, dès lors qu'il concerne un français doit respecter certaines
règles françaises :
- Art. 171-2 Cciv « le mariage d'un Français doit être précédé de la délivrance d'un
certificat de capacité à mariage »
- Art. 146-1 Cciv « Le mariage d’un français, même contracté à l’étranger, requiert sa
présence »

2) Les formes du divorce

Par principe s’applique locus regit formam actus, il n’y a pas d’exception pour le divorce
prononcé en France ou à l’étranger : respect de la loi du lieu où le divorce est prononcé.

Section 2 Le fond des actes juridiques

Le principe est l’autonomie de la volonté, en cas de RCL : le principe de la loi de l’autonomie


permet aux parties de choisir la loi applicable au contrat.
C'est un principe universel : lorsque les parties n'ont pas exprimé de volonté alors il peut y
avoir une grande diversité de solutions, d'où la Convention de Rome pour uniformiser ces
solutions.

§1 : La Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux


obligations contractuelles

1) Le champ d’application de la convention

‫ ﮭ‬Le champ d'application spatiale : l'art. 28 dispose que les Etats membres de l'union
européenne peuvent adhérer à la Convention de Rome, mais ne sont membres seulement les
15 premiers Etats membres de l'union européenne. Cette convention est d'application
universelle.

- 55 -
‫ ﮭ‬Le champ d'application temporel : la convention s'applique dans un Etat contractant, au
contrat conclu après son entrée en vigueur pour cet État (1er avril 1991 pour la France).

‫ ﮭ‬Le champ d'application matériel :


L'art. 1er (définition positive) considère que les dispositions de la Convention sont
applicables dans les situations comportant un conflit de lois aux obligations contractuelles21.

Pendant longtemps la CJCE n'avait pas compétence pour donner un sens aux obligations
contractuelles, aussi celle-ci est une obligation qui nait d'un accord de volontés.
Mais cela pose des difficultés de qualification car : l’action directe dans une chaîne du contrat
est considéré comme une obligation contractuelle en France, tandis que la CJCE, par un arrêt
Jacob Handte du 17 juin 1992, considère celle-ci comme une obligation extra contractuelle au
sens de la Convention de Bruxelles. e
La solution fut apportée par deux protocoles d'interprétation du 19 décembre 1988 qui
ouvrent la possibilité aux juridictions nationales de former une question préjudicielle auprès
de la CJCE en interprétation de la Convention de Rome. Entré en vigueur le 1er août 2004,
cette question est uniquement pour les juridictions suprêmes : la Cour de Cassation et le
Conseil d'État.

L’art. 1er exige aussi, afin de rendre la Convention applicable, que la situation contractuelle
doit comporter un conflit de lois (non pas que le contrat soit international).
La Convention de Rome peut donc s'appliquer à des contrats internes, mais qui sont soumis
aux tribunaux d'un autre État membre (c'est-à-dire une situation internationale subjective), ou
lorsque le contrat comporte une clause qui fait le choix d'une loi étrangère applicable.

L'art. 1er (définition négative) exclut certaines obligations contractuelles du champ de la


Convention, car il existe déjà des Conventions internationales régissant les matières.

La convention a aussi un caractère subsidiaire, elle ne s’applique qu’en l’absence d’autre


conventions internationales (art. 21).

2) Le principe de la loi d’autonomie

Le principe universel de la Convention de Rome est consacré à l'art. 2 : « La loi désignée par
la présente convention s'applique même si cette loi est celle d'un État non contractant. » Mais
il existe des exceptions, afin de protéger la partie faible :

→ Pour les contrats de consommation, définit à l’art. 5 « contrats ayant pour objet la
fourniture d'objets mobiliers corporels ou de services à une personne, le consommateur, pour
un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle ».
La loi choisie par les parties ne peut avoir pour résultat de priver le consommateur de la
protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi du lieu de sa résidence
habituelle.

→ Pour les contrats de travail, l’art.6 dispose que « le choix par les parties de la loi
applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection qui lui assurent
les dispositions impératives de la loi qui serait applicable ».

21
Les dispositions de la présente convention sont applicables, dans les situations comportant un conflit de lois,
aux obligations contractuelles.

- 56 -
La Convention de Rome règle également les difficultés que pose la loi d’autonomie :

- L’expression tacite de la volonté (art. 3) :


Lorsque les parties ont choisi la loi applicable, n'ont pas expressément, mais tacitement,
résultant de certains des éléments du contrat ou des circonstances de la cause. La Convention
de Rome a limité les hypothèses où la volonté tacite peut être prise en compte :
‫ ﮭ‬lorsque le contrat a fait référence à des règles de droit qui permette d'identifier l'ordre
juridique que les parties ont tacitement choisi.
‫ ﮭ‬lorsqu'il existe un usage entre les parties en relations habituelles d'affaires, on retient
qu'elles ont tacitement choisi de soumettre leurs contrats à la loi régissant les contrats
précédents.

- Le dépeçage du droit applicable (art. 3):


Les parties peuvent soumettre une première partie du contrat à une loi, et une seconde partie à
une autre loi. La Convention de Rome dispose que les parties peuvent désigner la loi
applicable à tout, ou à une partie, de leur contrat.

- L’invalidation du contrat par la loi choisie (art. 8) :


La Convention de Rome considère que le contrat est régie par la loi choisie, peu importe
qu'elle assure, ou non, la validité du contrat.

- L’hypothèse du contrat sans loi (art. 4) :


Les parties peuvent tel soustraire le contrat à toute loi étatique ? La Convention de Rome
interdit cette pratique par l'affirmation que tout contrat est régi par la loi d'un État.

- L’hypothèse du changement de loi en cours d’exécution du contrat (art. 3 §2):


« Les parties peuvent convenir, à tout moment, de faire régir le contrat par une loi autre que
celle qui le régissait auparavant » (cela peut remédier à une loi invalidant le contrat)
Cette faculté ne peut poser problème par rapport au tiers, l’art. 3 §2 précise que le changement
de loi applicable ne peut pas porter atteinte aux droits des tiers.

- La stabilisation du droit applicable :


Les parties peuvent convenir, dans le contrat, que le droit choisi est le droit tel qu'il existe au
jour de la conclusion du contrat.
Si le contrat est passé entre deux particuliers, une telle clause ne semble pas pouvoir être
admise par les tribunaux étatiques.
Si le contrat est passé entre un État est un particulier, il est possible d'admettre que l'État
s'engage à ne pas modifier la loi à l'égard du contrat qu'il a signé.

3) La détermination du droit applicable en l’absence de choix des parties

A) Solutions jurisprudentielles antérieures à la convention de Rome

La jurisprudence s'attachait à définir le contrat international selon deux critères


d'internationalité (non cumulatif):
¤ Critère juridique : le contrat est international quand il peut être localisé dans au moins
deux pays différents en raison de ses éléments juridiques.
¤ Critère économique : le contrat est international lorsqu’il crée un flux transfrontalier de
marchandises, de services ou de devises.

- 57 -
Si les parties n'avaient pas choisi de loi applicable, il appartenait aux juges du fond de «
rechercher d'après l'économie la convention, et les circonstances de la cause, la localisation du
contrat pour en déduire la loi applicable » arrêt du 6 juillet 1959 « Fourrures Renel ».
La jurisprudence avait dégagé des indices généraux de localisation :
→ le lieu d'exécution du contrat
→ le lieu de conclusion du contrat
Ou des indices subsidiaires :
- la nationalité commune des parties
- le domicile commun des parties
- la langue du contrat
- la monnaie de paiement

La jurisprudence a développé deux techniques pour déterminer la loi applicable:


α La technique du faisceau d'indices : identifier les différents éléments de rattachement
du contrat, et retenir la loi désignée par le plus grand nombre d'éléments de rattachement (plus
quantitatif que qualitatif).
α La technique de l'indice déterminant : principalement utilisé dans les contrats de
mariage (l'indice déterminant étant alors le premier domicile commun des époux) et dans les
contrats de travail (le pays du lieu d'exécution du travail).

B) Solution de la convention de Rome

La Convention de Rome dispose et que, par principe, le contrat est régi par la loi du pays
avec lequel le contrat présente les liens les plus les étroits (art. 4).

Ce pays est identifié par un indice déterminant : le lieu où réside la partie qui fournit la
prestation caractéristique du contrat.
On considère que la partie qui fournit la prestation caractéristique du contrat n'est en principe
jamais la partie qui paye le prix. Cette localisation n'est qu'une présomption simple, elle peut
être combattue par la preuve contraire. Une des parties peut démontrer que le contrat présente
des liens plus étroits avec un autre ordre juridique.

Il existe dès hypothèse de rattachement spécial :


→ Le contrat dont l'objet est un immeuble, la loi applicable est la loi du pays de situation
de l'immeuble.
→ Le contrat de consommation, la loi applicable est la loi du pays de résidence du
consommateur, sous condition que celui-ci ait été passif et sollicité par le professionnel
dans son pays.
→ Le contrat de travail, la loi applicable et la loi du pays où s'exécute le contrat, le travail.

4) Le domaine de la loi du contrat

A) Le domaine de la loi applicable au contrat quant à sa formation

Par principe, la formation relève du droit du contrat, déterminé par la Convention de


Rome.
Mais, le problème de la capacité relève du statut personnel : la loi national du contractant, la
capacité échappe à la loi du contrat, sous réserve de la jurisprudence « Lizardi » reprise dans
l’art. 11 : l’ignorance légitime de l’incapacité du partenaire contractuel.
Le problème de la preuve du contrat relève des dispositions spécifiques énoncées à l’art. 14.

- 58 -
B) Le domaine de la loi applicable aux contrats quant à ses effets

Par principe, les effets du contrat sont régis par la loi applicable au contrat.

Exceptions :
- l'exécution forcée du contrat ne peut être prononcée que si elle est admise par la loi
régissant le contrat, et par la loi du juge saisi.
- la fixation conventionnelle de dommages et intérêts, clause pénale, il faut prendre en
considération la loi du juge saisi, en plus de la loi du contrat, car cette clause n'est pas
forcement admise dans tout pays, ni de même manière.

§2 : Convention de la Haye du 14 mars 1978 relative à la loi applicable aux


régimes matrimoniaux

Acte juridique, car généralement pas de contrat de mariage. Convention d’application


universelle, entrée en vigueur le 1er septembre 1992, elle ne s’applicable donc qu’aux époux
mariés après cette date.
Cette convention s’applique aussi aux époux ayant changés leur régime matrimonial après
l’entrée en vigueur de la convention.

A) Application de la loi d’autonomie

Les époux peuvent choisir la loi applicable à leur régime matrimonial, pas de règle
particulière de forme. Maas ce choix est limité à trois lois : la loi nationale de l’un des époux,
la loi de l’Etat où les époux ont établit leur résidence habituelle au moment de la désignation
de la loi applicable, ou la loi du 1er Etat sur le territoire duquel l’un des époux établira une
nouvelle résidence habituelle après le mariage.

B) La loi applicable en l’absence de choix

Principe : on applique la loi du pays où les époux établissent leur première résidence après le
mariage, choix implicite des époux.

Exception : les Pays-Bas ont émis une réserve, si bien que la loi applicable est la loi de la
nationalité commune, si les époux ont tous deux la nationalité néerlandaise.

C) La loi de situation de l’immeuble

La convention autorise les époux, par une déclaration exprès, à soumettre les immeubles, se
trouvant dans leur patrimoine, à la loi du lieu de leur situation. Les époux peuvent alors
morceler la loi applicable à leur régime matrimonial.

D) La mutabilité de la loi applicable

1- Le changement en raison de la volonté des époux

Au cours de leur mariage, les époux peuvent soumettre leur régime matrimonial à une loi
autre que celle jusqu’alors applicable.
Limite : les époux ne peuvent changer qu’au profit de l’une des deux lois suivantes :

- 59 -
• Soit la loi d’un Etat dont l’un des époux à la nationalité, au moment de ce changement.
• Soit la loi d’un Etat sur le territoire duquel l’un des époux a sa résidence habituelle, au
moment de ce changement.

2- Les changements automatiques, de plein droit

Lorsque les époux fixent leur résidence habituelle dans le pays de leur nationalité
commune, le régime matrimonial est alors immédiatement soumis à la loi de leur nationalité
commune.
→ « la loi du retour »

Lorsque les époux installent leur nouvelle résidence dans un pays dont la loi ne régit
pas leur régime matrimonial, alors cette loi va s’appliquer au bout de 10 ans de résidence.

Dans ces deux cas les époux peuvent s’opposer à ce changement.

- 60 -
Titre 3 Le conflit de juridiction

Partie 1ère La compétence judiciaire internationale

Chapitre 1 Le droit commun, droit d’origine interne

Abandon du principe de l’incompétence des tribunaux français dans les litiges entre
étrangers par l’arrêt « Patino » du 21 juin 1948. Est issu des arrêts « Pelassa » du 19 octobre
1959 et « Scheffel » 30 octobre 1962, le principe de transposition internationale des règles de
compétence territoriale interne : l’extension des règles internes de compétence territoriale à la
compétence internationale.

Section 1 : La compétence du juge français

§1 : Les règles ordinaires de compétence22

1) Le principe de transposition

Le principe de transposition a pour conséquence que toute les règles de droit interne sont,
potentiellement, utilisables en matière internationale. Il peut s’agir de règles de compétence
générale, notamment l’art. 42 NCpc : « La juridiction territorialement compétente est, sauf
disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur ».
Juge français compétent dès lors que le défendeur est domicilié en France, et pour les
personnes morales l’on se réfère le lieu où elles sont établit (art. 43 NCpc) : le siège social
mais aussi établissements secondaires (jurisprudence des gares principales).
Lorsqu’il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisi, à son choix, la juridiction du lieu au
réside l’un d’eux.

Ce principe est aussi valable pour l’art. 44 NCpc en matière réelle immobilière, la juridiction
du lieu où est situé l’immeuble est compétente.

L’art. 46 NCpc ouvre des options au demandeur,


- en matière contractuelle, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du
lieu de l'exécution de la prestation de service ;
- en matière délictuelle, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de
laquelle le dommage a été subi ;
- en matière mixte, la juridiction du lieu où est situé l'immeuble ;
- en matière d'aliments ou de contribution aux charges du mariage, la juridiction du lieu où
demeure le créancier.

Principe de transposition est aussi valable pour des règles spéciales : en matière de divorce ou
séparation de corps, règles spéciales (art. 1070 NCpc), ou en matière de droit du travail (art. R
517-1 Ctvail)

2) Exceptions

22
Rappel : règles unilatéralistes, uniquement pour le juge français. Sauf cas de compétence communautaire.

- 61 -
A) Règles adaptées à la spécificité de la compétence internationale

En matière de succession, l’art. 45 NCpc donne compétence à la juridiction du lieu


d’ouverture de la succession (fixé par l’art. 720 Cciv au dernier domicile du défunt).
La transposition de cette règle ne joue pas pleinement : elle fonctionne en matière de
succession mobilière, mais ne fonctionne pas en matière de succession immobilière. Seuls les
juges français sont compétent pour la succession d’un immeuble situé en France, mais
incompétent si celui-ci est situé à l’étranger, même si le défunt fut domicilié en France.

En matière de voie d’exécution et mesure conservatoire, ces mesures ne peuvent être


exécutées que par des organes agissant au nom de l’Etat sur le territoire duquel la mesure est
exécutée, et sous le contrôle des autorités judiciaires de cette Etat.
Les tribunaux français ne sont donc compétents que pour des voies d’exécution, ou mesure
conservatoire, exécutée sur le sol français.

B) Les règles spécifiques à la compétence internationale

Les actions qui mettent en cause le fonctionnement d’un service public sont de la compétence
exclusive des tribunaux de l’Etat ayant institué ce service.
L’urgence, les tribunaux français peuvent être saisie au titre de l’urgence lorsqu’un litige ce
produit sur le territoire et que la sécurité des personnes, ou de leurs intérêts, se trouvent en
péril.
Il faut faire de la circonstance qu’aucun tribunal étranger n’est pratiquement saisissable une
cause autonome de compétence des tribunaux français. Le déni de justice peut aussi fonder la
compétence d’un tribunal français23, dès lors que le litige présente un rattachement suffisant
avec la France24.

§2 : Les règles de compétences exorbitantes25

L’art. 14 Cciv prévoit que tout français, qui a contracté des obligations avec un étranger en
France ou à l’étranger, peut valablement saisir le juge français (demandeur).
L’art. 15 Cciv assure au demandeur étranger d’attraire le défendeur français devant une
juridiction française.
→ Privilège de juridiction, fort nationalisme !

1) Le domaine des articles 14 et 15

Ces articles ne donnent aux tribunaux français qu’une compétence subsidiaire, c'est-à-dire
qu’ils ne fonctionnent que si aucunes des règles ordinaires de compétence territorial (générale
ou spéciale) ne s’applique au fait litigieux.

La compétence est fondée sur la nationalité, appréciée au moment de l’introduction de


l’instance. Pour les personnes porales, le lieu du siège social détermine la nationalité.

23
CCass 1re Civ. 13 janvier 1981
24
CCass 1re Civ. 7 janvier 1982
25
Art. 14&15 du Code civil

- 62 -
La règle a été formulée par la CCass en énonçant que : « La compétence internationale des
tribunaux français est fondée non sur les droits nés des faits litigieux mais sur la nationalité
des parties »26.

Les art. 14 & 15 sont applicables à tous types d’actions, pas seulement aux actions
contractuelles !
Exception pour : - les actions réelles immobilière et demande en partage pour des
immeubles situés à l’étranger.
- Les demandes relatives aux voies d’exécutions et mesures
conservatoires pratiquées en hors de France27.

2) Le régime des articles 14 et 15 cciv.

A) Une compétence facultative

Double signification : - On peut renoncer au bénéfice des art.14&15, renonciation


exprès ou tacite (doit résulter d’une volonté certaine : déduit de la conclusion d’un compromis
ou de la présence d’une clause compromissoire, ou d’une clause attributive de juridiction à un
tribunal étranger). Principe du privilège de juridiction.
Si renonciation de l’art.14, la renonciation tacite peut résulter du fait que le demandeur
français a saisi volontairement une juridiction étrangère. Sauf s’il démontre qu’il a saisi la
juridiction étrangère par nécessité.
Si renonciation de l’art.15, il est difficile de tirer du silence gardé par le défendeur français sur
la compétence du tribunal étranger devant lequel il est attrait, une renonciation implicite de
l’art.15. Renonciation tacite s’il a formé des demandes reconventionnelles : arrêt 1ère civ. 31
janvier 2006.
Une société française ayant assigné au Burkina-Faso une société locale, la société
burkinabaise avait formée une demande reconventionnelle : la société française avait conclue
en défenderesse reconventionnelle, sans même invoquer art.15.
Pour la Cour de Cass cela signifie une renonciation, sans équivoques, de l’art.15.
- Le juge ne peut pas appliquer d’office les art.14&15 : si les
parties ne s’en prévalent pas, il ne peut les relever, arrêt 1ère civ. 26 mai 1999.

B) Une compétence non-exclusive.

Pendant longtemps, la jurisprudence a décidée que les art.14&15 instauraient une


compétence exclusive des tribunaux français, daignaient toutes conséquences des tribunaux
étrangers. Aussi le français assigné devant un tribunal étranger pouvaient concurremment agir
devant un tribunal français, sans craindre une exception de litispendance puisque compétence
exclusive. Et le français condamné à l’étranger, ayant prouvé qu’il n’avait accepté la
compétence du tribunal étranger, pouvait s’opposer à l’exécution, en France, de la décision
étrangère.

Revirement par deux arrêts :


Arrêt « Prieur » du 23 mai 2006 dans lequel elle a affirmée que l’art.15 créé une
compétence facultative de la juridiction française « impropre à exclure la compétence
indirecte d’un tribunal étranger, pour autant que le litige se rattache de manière caractérisé à

26
CCass 1re Civ. 21 mars 1966
27
CCass. 1re civ. 27 mai 1970

- 63 -
l’Etat étranger dont la juridiction est saisie, et le choix de cette juridiction n’est pas
frauduleux ».
Arrêt « Banque de développement local » du 22 mai 2007 l’art.14 du Cciv n’ouvre au
demandeur français qu’une simple faculté de saisir les tribunaux français, et ne dicte pas à son
profit une compétence impérative, exclusive de la compétence indirecte d’un tribunal étranger
déjà saisi et dont le choix n’est pas frauduleux.

C) Une compétence générale

Les art.15&14 donne compétence au juge français en général, reste à déterminer le


tribunal territorialement compétent. CCass arrêt « Dame Mora » du 13 juin 1978, le
demandeur a le choix du tribunal, mais ce choix doit s’expliqué par un lien de rattachement
entre l’instance et le territoire, ou, à défaut, ce choix doit respecter les exigences d’une bonne
administration de la justice.

§3 : La coordination internationale des compétences

A) La litispendance

En droit interne, la litispendance est réglée par l’art.100 NCpc, cela suppose que le
même litige soit soumis devant deux juridictions de même degré, compétentes. La juridiction
saisie en 2nd doit se dessaisir au profit de l’autre juridiction, si l’une des parties le demande, à
défaut elle peut le faire d’office.
Règle transposée au domaine international depuis un arrêt du 26 novembre 1974. Cette
exception de litispendance est soumise à conditions : c’est une possibilité de se dessaisir pour
le juge français, et a prévue que l’exception ne saurait être accueillie lorsque la décision à
intervenir à l’étranger ne pas susceptible d’être reconnue en France.

B) La connexité

Hypothèse lorsqu’il existe entre deux litiges, portés devant des juridictions différentes, un lien
de connexité tel qu’il est de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire et juger
ensembles. Art.101 Ncpc : il peut être demandé à l’une de ces juridictions de se dessaisir et de
renvoyer en l’état la connaissance de cette affaire devant l’autre juridiction.
La CCass reconnaît la connexité comme un chef de compétence internationale pour les
juridictions française.
La connexité internationale permet au juge français de se déclarer compétent d’une demande,
en principe soustrait de sa compétence, mais qui présentait un lien étroit d’une demande dont
il était régulièrement saisi.
La connexité internationale est aussi reconnu comme un chef d’incompétence du juge
français, celui-ci peut se dessaisir du litige dont il est saisi au profit d’une juridiction étrangère
(arrêt 1ère civile. 22 juin 79).
Ce n’est qu’une faculté du juge français, le dessaisissement est subordonné à la vérification
que le jugement étranger puisse être reconnu en France.

Section 2 L’incompétence du juge français

§1 : La possibilité pour les parties de déroger aux règles de compétences


internationales

- 64 -
Les parties peuvent provoquer l’incompétence du juge français par :
- Clause attributive de juridiction
- Clause d’arbitrage, compromissoire

A) Clause attributive de juridiction, ou prorogation volontaire de compétence

Ces clauses permettent aux parties de désigner la juridiction compétente pour régler leur
litige. Elle permet de choisir la juridiction que les parties tiennent pour la plus appropriée, et
permet d’assurer une sécurité juridique car l’on sait à l’avance la juridiction compétente (ni
lacune, ni conflit de juridictions).
Par un arrêt 17 décembre 1985 « Compagnies de signaux et d’entreprises électriques », la
CCass reconnaît « les clauses prorogeant la compétence internationale sont licites lorsqu’il
s’agit d’un litige international ». Seule condition : que le litige soit international, pas
d’exigence d’un lien étroit entre le litige et la juridiction choisie. La clause doit préciser
l’ordre juridictionnel compétent pour qu’elle puisse s’appliquer, pas nécessaire d’identifier la
juridiction précisément compétente.

La clause attributive de juridiction n’est pas absolue :


- elle ne doit pas faire échec à la compétence territoriale impérative d’une juridiction
française.
- elle doit être stipulée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui
elle est opposée.

B) Les clauses d’arbitrage

Très souvent utilisée en commerce internationale en raison de rapidité, discrétion et


compétence, la clause compromissoire est insérée par avance dans un contrat qui prévoit la
soumission de tout litige ultérieur à un arbitre.
Par un arrêt du 4 juillet 1972, « Hecht », la CCass considère que la clause compromissoire
insérée dans un contrat international est valable, sans qu’il y ait lieu de rechercher la loi
applicable.

§2 : Les immunités de juridiction

Il est de tradition qu’un certain nombre de personne bénéficie d’une immunité de


juridiction, retirant toutes compétences au juge français pour trancher leur litige.
Cette immunité de juridiction concerne Etat ou personnes.

A) L’immunité des personnes

Concerne souverain et chef d’Etats étrangers, aucun texte ne cible cette immunité et la
jurisprudence s’est peut prononcée.
L’immunité est certaine et semble définitive pour les actes commis pendant la durée des
fonctions et se rattachant à l’exercice des fonctions. Les actes commis à des fins privées ne
bénéficient de l’immunité » qu’aussi longtemps que dur les fonctions.

L’immunité concerne aussi les agents diplomatiques selon la Convention de Vienne 18


avril 196128, personne accrédité par un Etat auprès d’un autre pour le représenter
(ambassadeur, conseiller et attaché d’ambassade).
28
Entrée en vigueur en 1971

- 65 -
L’immunité est totale en matière pénale (peut importe la gravité de l’acte et son lien avec les
fonctions), l’immunité civile est exclue pour trois types d’actions :
- Action réelle concernant un immeuble situé en France
- Succession intéressant personnellement l’agent
- Action concernant une activité professionnelle et commerciale exercée par l’agent
en dehors de ses fonctions officielles.
L’immunité joue, par principe, dès l’entrée en fonction jusqu’à la fin des fonctions. Si en
principe l’immunité cesse avec la cession des fonctions cela ne joue pas pour les actes
accomplis pendant les fonctions et pour l’exercice de celle-ci : immunité persiste.
L’immunité est étendue au conjoint et enfant mineur de l’agent diplomatique, dès lors que
ceux-ci sont ressortissants de l’Etat accréditaire.
L’immunité pour les agents consulaires conformément à la Convention de Vienne 24
avril 1963. Immunité pour les actes accomplis dans l’exercice de leur fonction, sauf pour les
actions civiles nées d’un contrat où l’intéressé n’agissait pas comme mandataire, et les actions
résultant d’un accident de la circulation.

L’immunité pour les agents de Organisation Internationale, quais-absolue dans la


limite du déni de justice et des règles particulières convenu entre l’OI et l’Etat d’accueil
.
B) L’immunité des Etats

L’immunité des Etats n’est pas régie par un texte, progressivement élaborée par la CCass par
des arrêts visant les principes de droit international relatifs à immunité de juridiction ou
d’exécution.

A l’origine l’immunité des Etats était absolue et s’attachait à la personne même de


l’Etat. Elle s’appliquait à tous les actes de l’Etat lui-même et de ses organes.
Le principe de l’immunité demeure, mais il n’est plus aussi absolu. L’immunité est désormais
fondée sur la nature de l’acte, non plus simplement sur la qualité de celui qui le réalise.
L’immunité peut être accordée à un organisme privée ou commerciale agissant pour la compte
d’un Etat étranger dès lors qu’il accompli un acte de puissance publique : un acte d’autorité.
L’immunité peut être refusée à un organisme même public quia git pour le compte d’un Etat
étranger, mais qui accompli un acte de gestion.

Distinction gestion/autorité :
- Critère objectif (formaliste), acte d’autorité si l’acte comporte des clauses
exorbitantes de droit commun.
- Critère subjectif (ou finaliste) : sont des actes d’autorité des actes accomplis en
vue, ou dans l’intérêt, du service public étranger.
Les immunités sont considérées procéduralement comme des fins de non recevoir (art.122
NCpc), le juge n’est pas tenu de la soulever d’office et elle peut être invoquée pour la 1 ère fois
en appel. Le renonciation ne vaut que pour l’immunité de juridiction, pas forcement
l’immunité d’exécution.

§3 : La sanction de l’incompétence

La sanction peut avoir lieu de deux façons distinctes :


- soit le juge relève d’office son incompétence
- soit le défendeur oppose une exception d’incompétence (art.74 NCpc) avant toute
défense au fond ou fin de non recevoir. Cette exception peut, par exception, être

- 66 -
soulevée en appel, pour la 1ère fois, par un défendeur défaillant contre lequel a été
rendu un jugement réputé contradictoire.
Art.75 NCpc, l’exception d’incompétence doit être motivée et le défendeur doit
faire connaitre la juridiction normalement compétente. Le défenseur doit préciser
l’Etat dans lequel se trouve la juridiction compétente.

- 67 -
Chapitre 2 Le droit d’origine communautaire

Section 1 Le règlement Bruxelles I

Depuis le 1er mars 2002 est entré en vigueur le n°44/2001 du 22 décembre 2000,
concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en
matières civile et commerciale.

‫ ﮭ‬Champ d’application territorial du règlement, art.1er §3 : il lie les Etats membre de l’UE, à
l’exception du Danemark. Mais le 19 octobre 2005 un accord fut pris en Communauté
Européenne et Danemark, entrée en vigueur le 1er février 2007, qui étend Bruxelles I à tous les
Etats membres.
Mais, art. 68, le règlement ne s’applique pas aux territoires des Etats membres qui bénéficient
du régime spéciale d’association (art. 299) : les DOM TOM.

‫ ﮭ‬Champ d’application temporel : entré en vigueur le 1er mars 2002 !

‫ ﮭ‬Champ d’application matériel est la matière civile ou commerciale, peut importe la nature
de la juridiction saisie. Notion autonome, c'est-à-dire qu’il faut interpréter en se référent aux
objectifs et systèmes du règlement, mais aussi aux principes généraux se dégageant de
l’ensemble des droits nationaux.
Le règlement prend soin d’écarter de son champ les matières qui sont à la frontière du droit
privé, droit public. Selon l’art. 1er §1, le règlement ne recouvre pas les matières fiscales,
douanières ou administratives.
CJCE dans un arrêt du 14 octobre 1976 « LTU vs Eurocontrol », considère que les matières
fiscales, douanières ou administratives sont définies par deux critères cumulatifs :
- l’une des parties au litige soit une autorité publique
- cette autorité publique ait agie dans l’exercice de ses prérogatives de puissance
publique
Le règlement exclu aussi de son champ d’application certaines matières civiles et
commerciales :
« Sont exclus de son application: a) l'état et la capacité des personnes physiques, les régimes
matrimoniaux, les testaments et les successions; b) les faillites, concordats et autres
procédures analogues; c) la sécurité sociale; d) l'arbitrage. »

Le règlement énonce, à l’art. 7129, qu’il n’affecte pas les conventions auxquelles les Etats
membres sont partie, et qui règlent la compétence judiciaire dans des matières particulières.
Art. 67, le règlement ne préjuge pas à l’application d’autres instruments communautaires, tel
un règlement, qui, dans des matières particulières, auraient adopté des compétences
judiciaires particulières.

§1 : Règles de compétence

Le règlement n’est pas d’application universelle, il s’impose aux juges des Etats
membres, mais il y a dans le règlement de règles qui ne s’applique que si le défendeur est

29
Le présent règlement n'affecte pas les conventions auxquelles les États membres sont parties et qui, dans des
matières particulières, règlent la compétence judiciaire, la reconnaissance ou l'exécution des décisions.

- 68 -
domicilié sur le territoire d’un Etat membre et des règles de compétences pouvant s’appliquer
même si le défendeur n’est pas domicilié sur le territoire d’un Etat membre.
Par principe, le règlement doit être appliqué par le juge français dès lors que le défendeur est
domicilié sur le territoire d’un membre (art.2 §1). Si le défendeur n’est pas domicilié sur le
territoire d’un Etat membre, en principe le règlement ne s’applique pas et le juge doit
appliquer son droit commun de conflit de juridictions (art.4 §1). Mais il existe deux
exceptions:
- les règles de compétences exclusives de l’art.22
- s’il existe une clause attributive de juridiction en faveur du tribunal d’un Etat
membre (art.23)

Le domicile du défendeur (art.59 et 60), société et personne morale est situé soit au siège
statutaire soit au lieu où se trouve l’administration centrale, soit au lieu du principal
établissement. Pour déterminer si une personne physique a un domicile sur un Etat membre, il
faut appliquer le droit interne de cet Etat membre.

1) Les règles de compétence s’appliquant si le défendeur est domicilié dans un Etat


membre

A) La compétence de principe

La compétence de principe revient aux juridictions de l’Etat membre du domicile du


défendeur (art.2 §1) : « les personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat membre sont
attraites, quelque soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat membre ».
→ Il n’est donc pas nécessaire d’être ressortissant d’un Etat membre.
→ Cet article donne une compétence générale puisqu’il vise les juridictions de l’Etat membre
du domicile du défendeur, l’identification la juridiction compétente il faut faire application
des règles de compétence interne de cet Etat membre.
→ Le règlement consacre une règle de compétence universellement reconnue : la compétence
du domicile du tribunal du défendeur.

B) Les compétences additionnelles

La compétence des juridictions de l’Etat membre du domicile du défendeur n’est pas


une compétence exclusive. Si bien que le défendeur peut être valablement attrait devant les
juridictions d’un autre Etat membre lorsque certaines conditions sont remplies, art. 3§1 :
« Les personnes domiciliées sur le territoire d'un État membre ne peuvent être attraites devant les
tribunaux d'un autre État membre qu'en vertu des règles énoncées aux sections 2 à 7 du présent
chapitre. »

Ces autres juridictions peuvent fonder leurs compétences sur les règles de compétences
spéciales, ou sur des règles de compétences dérivées, ou sur des règles de compétences
protectrices de la partie faible. Mais ces juridictions ne peuvent jamais fonder leur
compétence sur des règles nationales de compétence exorbitantes (art.3 §2) « Ne peuvent être
invoquées contre elles notamment les règles de compétence nationales figurant à l'annexe I.» parmi
lesquels figure les art. 14 et 15 du Cciv.

1 : Les règles de compétences spéciales à certaines matières

- 69 -
Art. 5 du règlement prévoit des règles applicables en considération de la matière du litige.
Ainsi, l’obligation alimentaire, l’action en réparation de dommage en restitution fondée sur
une infraction, la contestation relative à l’exploitation d’une succursale d’une agence ou d’un
établissement, ou les litiges liés au trust, ou litiges consécutifs à l’assistance au sauvetage dont
a bénéficié un fret, ont des compétences spéciales.

a) En matière contractuelle
Le défendeur peut aussi être attrait devant le tribunal du lieu, où l’obligation qui sert
de base à la demande, a été ou doit être exécuté.
La notion de matière contractuelle est une notion autonome, il faut l’interpréter dans le sens
du règlement (tenir compte des conceptions des autres pays). La CJCE considère, dans l’arrêt
« Arcado » du 8 mars 1988, que l’on est en matière contractuelle si la demande a pour
fondement même un contrat, et trouve sa base dans le non respect d’une obligation
contractuelle.
Lorsque la matière est contractuelle, le règlement implique de procéder par deux étapes : 1)
déterminer l’obligation qui sert de base à la demande, 2) déterminer le lieu de son exécution.
1ère étape, le point de référence pour le règlement est l’obligation litigieuse. Il ne s’agit
pas du contrat dans son ensemble, ni l’obligation principale du contrat, seule compte
l’obligation litigieuse. Parfois le contrat comporte plusieurs obligations litigieuses, aussi la
CJCE (arrêt « Shenavaï » du 15 janvier 87) considère que seule l’obligation litigieuse
principale doit établir la compétence.
2nd étape, le lieu d’exécution de l’obligation litigieuse : la CJCE (arrêt « Tessili » du 6
octobre 1976) considère que le lieu est déterminé par la loi applicable à l’obligation. Càd que
le juge saisi doit d’abord appliquer ses propres règles de conflit de lois afin de déterminer la
loi applicable à l’obligation, déterminant alors le lieu d’exécution de l’obligation qu’elle
considère celle-ci comme quérable ou portable.
Désormais le règlement définit lui-même le lieu d’exécution de l’obligation dans deux types
de contrats : les ventes de marchandises (le lieu d’un Etat membre où, en vertu du contrat, les
marchandises ont été ou auraient dû être livrée), et pour les fournitures de services (lieu d’un
Etat membre où, en vertu du contrat, ont été ou auraient dû être fournis). Pour les autres
contrats, la jurisprudence Tessili continue de s’appliquer.

b) En matière délictuelles ou quasi-délictuelle

Le défendeur domicilié sur le territoire d’un Etat membre peut aussi être attrait devant
le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit.
La notion de matière délictuelle ou quasi-délictuelle : arrêt « Kalfelis »du 27 septembre 1988,
la CJCE considère que « est de nature délictuelle ou quasi-délictuelle, toute demande qui vise
à mettre en jeux la responsabilité du défendeur et qui ne se rattache pas à la matière
contractuelle ». Càd, que relève de cette catégorie : les faits juridiques accomplis
volontairement ou involontairement, mais aussi les actes juridiques librement souscris dès lors
que l’action n’est pas dirigée contre le cocontractant.
Quant au lieu du fait dommageable, la CJCE (arrêt « mines de potasse d’Alsace » du 30
novembre 1976) ce lieu représente à la fois le lieu où le dommage est survenu et celui de
l’évènement causale. Ce qui confère en pratique une option au demandeur, celui-ci peut aussi
saisir le tribunal de l’Etat membre du fait générateur du dommage.
Mais depuis l’arrêt « Fiona Shevill » du 7 mars 1995, la CJCE a précisée que le tribunal de
l’Etat membre du lieu de survenance du dommage, s’il est saisi, n’aura compétence que pour
réparer le préjudice réalisé dans son pays ; alors que le tribunal de l’Etat membre du lieu du
fait générateur est compétent pour entendre l’ensemble des dommages.

- 70 -
Le tribunal compétent est le tribunal du lieu où le fait dommageable se produit, ou
risque de se produire. Cela donne un fort aux actions préventives.

2 : Les règles de compétences dérivées

Ces règles sont prévues à l’art.6 du règlement :


- Le cas de pluralité de défendeurs : le défendeur peut être attrait, s’il y a plusieurs
défendeur, devant le tribunal d’un autre Etat membre où l’un des co-défendeur a son domicile.
Ce texte donne une compétence spéciale (concentration de compétences) au tribunal de l’un
des défendeurs. Pour fonctionner, ce texte suppose que s’il existe, entre les différentes
demandes formées par un même demandeur à l’encontre de différents défendeurs, un lien de
connexité tel qu’il y a intérêt à les juger ensemble afin d’éviter des solutions inconciliables si
les causes étaient jugées séparément.

- L’hypothèse où, dans le cadre d’une procédure originaire, une demande en garantie
ou une demande en intervention est formulée contre un tiers, ce tiers défendeur pourra être
attrait devant le tribunal saisi de la 1ère demande (ne fonctionne pas si fraude).

- Les demandes reconventionnelles : le défendeur peut être attrait dans un autre Etat
membre s’il s’agit d’une demande reconventionnelle qui dérive du contrat, ou du fait, sur
lequel est fondé la demande originaire, devant le tribunal saisi de celle-ci.

- En matière d’actions contractuelles jointent à des actions réelles immobilières. Le


défendeur peut être attrait dans un autre Etat membre si l’action peut être jointe en matière de
droit réel immobilier dirigée contre le même défendeur. Cette concentration de compétence se
réalisant au profit de l’Etat membre où l’immeuble est situé.

3 : Les règles protectrices des parties faibles

Généralement, les parties faibles sont protégées par une multiplication, en leur faveur,
des juridictions potentiellement compétentes. Chacune des sections constituent un système
propre à l’intérieur du règlement, mais chacune reprend aussi en son sein le principe de
compétence de base selon lequel le demandeur peut agir devant la juridiction de l’Etat
membre du défendeur ; et chacune de ces sections complète le principe avec la compétence
additionnelle possible d’autres juridictions.

Matière assurance :
* L’art.9 prévoit que l’assureur, au choix du demandeur, peut être attrait devant les tribunaux
de l’Etat membre du domicile demandeur.
* L’art.12 prévoit que l’action de l’assureur doit être portée devant les tribunaux de l’Etat
membre du domicile du défendeur.

Matière consommation : les contrats visés à l’art.15 ne sont pas tous les contrats de
consommations envisageables. Si le contrat de consommation ne rentre pas dans la définition
de l’art.5, alors seule la section IV ne s’applique pas.
* L’art.16 distingue selon que l’action soit engagée par le consommateur, ou par le
professionnel. Si par le consommateur, sont compétents, au choix de ce dernier, soit les
tribunaux de l’Etat membre du domicile du défendeur, soit les tribunaux de l’Etat membre du
domicile du demandeur. Si par le professionnel, seuls sont compétents les tribunaux de l’Etat
membre du domicilie du défendeur.

- 71 -
Matière contrat de travail : art. 19 et 20, même distinction : si le salarié agit et accompli sont
travail dans un même pays → il peut saisir les tribunaux de l’Etat membre où l’employeur a
son domicile, soit les tribunaux de l’Etat membre du lieu où le salarié accompli
habituellement son travail, ou les tribunaux du dernier lieu où le travailleur a accompli
habituellement son travail. Si le salarié agit et a accompli son travail dans plusieurs pays → il
peut saisir soit les tribunaux de l’Etat membre où se trouve l’établissement qui l’a embauché.
Si l’employeur agit, il peut saisir les tribunaux de l’Etat membre du domicile du travailleur.

Ces sections ont des principes communs :


* règles sur les conventions attributives de juridiction → une telle convention est valide si elle
est conclue après la naissance du litige, ou s’il elle permet à la partie faible de saisir d’autres
tribunaux que ceux prévu par le règlement.
* autorise une conception élargie du domicile de la partie forte, en assimilant succursales,
agences, ou autres établissements se trouvant sur le territoire d’un Etat membre à un domicile
de celle-ci.

2) Les règles de compétences s’appliquant même si le défendeur n’est pas domicilié


dans un Etat membre

Art.4 : la compétence est régit dans chaque Etat membre par le loi interne, aussi bien pour les
règles de compétences ordinaires ou exorbitantes.
Néanmoins l’art.4 §2 ouvre au demandeur (quelque soit la nationalité), dès lors qu’il est
domicilié sur le territoire du Etat membre, le bénéfice de toute les règles de compétences de la
loi de cette Etat membre, en l’assimilant à nationale de cette Etat membre.

a) Compétence exclusives

Art.22 attribue des compétences exclusives aux tribunaux d’Etat membre avec lequel le
litige présente un lien jugé significatif. Aussi, tout tribunal d’un autre Etat membre doit se
déclarer d’office incompétent.
• Les litiges relatifs aux droits réels immobiliers et aux baux d’immeubles doivent être
soumis aux tribunaux de l’Etat membre où est situé l’immeuble (exception pour
location de très courte durée).
• Les litiges relatifs à la validité, la nullité ou la dissolution des sociétés, ou personnes
morales, ayant leur siège sur le territoire d’un Etat membre ; ainsi que les litiges
relatifs à la validité des décisions de leurs organes, tous ces litiges doivent être soumis
aux tribunaux de l’Etat membre du siège. Le siège doit être déterminé par le juge saisi
du litige, en fonction de son droit interne.
• Les litiges relatifs à la validité des inscriptions sur les registres publics doivent être
soumis aux tribunaux de l’Etat membre où ces registres sont tenus.
• Les litiges relatifs à l’inscription, ou à la validité, des brevets, marques, dessins et
modèles (ou autres droits analogues) donnant lieu à un dépôt sont soumis aux
tribunaux et juridiction de l’Etat membre de dépôt ou enregistrement.
• Les litiges relatifs aux mesures d’exécution des décisions relèvent de la compétence
des tribunaux de l’Etat membre du lieu de l’exécution.

Ces règles de compétences exclusives sont impératives, il n’est pas possible d’y déroger au
profit d’un autre tribunal.

- 72 -
b) La prorogation volontaire de compétence

Les art.23 & 24 reconnaissent expressément la possibilité d’une prorogation de compétence


par les parties.

1) La prorogation expresse

Le règlement Bruxelles I ne peut s’appliquer qu’à une clause donnant compétence à un


tribunal d’un Etat membre. Si la clause donne compétence à un Etat tiers, alors le règlement
ne régit pas la clause, et la validité de la clause est étudiée sous l’angle du droit de l’Etat
membre.
Si la clause est validée par le droit interne, celle-ci ne peut néanmoins porter atteinte à
l’art.22, ni aux règles spéciales de la section V.
Si le droit du for ne valide pas la clause, alors les règles générales de Bruxelles I s’appliquent.
L’art.23 distingue deux hypothèses :
- Aucunes des parties n’a son domicile sur le territoire d’un Etat membre, la validité
de la clause doit encore être appréciée au regard du droit interne du juge saisi, mais
les tribunaux des autres Etats membres ne peuvent pas connaître du litige tant que
les tribunaux désignés n’ont pas déclinés leurs compétences.
- Si une des parties est domiciliée sur le territoire d’un Etat membre, alors le
règlement régit la validité de la clause en imposant des conditions de formes et de
fonds.
• Conditions de formes : la clause attributive de juridiction doit être conclue soit par
écrit (transmission électronique), soit verbalement avec confirmation par écrit, soit
sous une forme conforme aux habitudes établies entre les parties, soit une forme
respectant un usage dont les parties avaient connaissance (ou étaient sensées avoir
connaissance) parce que celui-ci est largement connu et régulièrement observé dans ce
type de commerce par les parties dans des contrats du même type (pour faciliter le
commerce internationale).
• Conditions de fonds : la clause attributive de juridiction peut désigner un tribunal, ou
l’ensemble des tribunaux d’un pays, ou qui se contente d’exclure la compétence de
certaines juridictions. La seule limite est que la clause ne saurait porter atteinte aux
compétences exclusives ou spéciales.
Si les conditions sont remplies, le tribunal désigné a une compétence exclusive, sauf
convention contraire.

2) La prorogation tacite

Cette prorogation est issue de l’art.24 qui reconnaît celle-ci résultant de la comparution du
défendeur devant un tribunal dont il ne conteste pas la compétence. Quelque soit le domicile
des parties, dès lors que le tribunal est celui d’un Etat membre.
Celle-ci ne peut jamais porter atteinte aux dispositions de compétences exclusives de l’art.22.

§2 : Le régime de la compétence

A) La sanction de l’incompétence

Lorsqu’une juridiction est saisie au mépris de l’art.22 du règlement, l’art.25 oblige le juge
à se déclarer d’office incompétent.

- 73 -
Mais lorsque le tribunal saisi l’est en violation d’une règle de compétence non exclusive, le
juge ne doit se déclarer d’office incompétent que si le défendeur n’a pas comparu (art.26).
Si le défendeur a bien comparu, celui-ci peut soulever l’incompétence de juridiction, par la loi
procédurale du juge saisi.

B) Les conflits de procédures

En cas de litispendance, l’art.27 du règlement énonce que la juridiction saisi en 2nd lieu
sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence du premier tribunal saisi soit établie.
Lorsque celle-ci est établie, le tribunal 2nd doit se dessaisir.
→ Importance de la date de saisine des juridictions, déterminée à l’art.30 : « la juridiction est
réputée saisie à la date soit du dépôt de l’acte introductif d’instance, soit de la réception de
l’acte introductif d’instance par l’autorité chargée de le signifier au défendeur ».

En cas de connexité, l’art.28 ne fait pas obligation au juge saisi en 2nd lieu de se dessaisir,
mais il lui donne la possibilité de sursoir à statuer. Le juge pourra alors se dessaisir lorsque les
demandes sont pendantes au 1er °, à la demande de l’une des parties, et à condition que sa loi
permette la jonction d’affaires connexes et que le tribunal 1er saisi soit compétent pour
connaître des deux demandes.

La convention de Lugano du 16 septembre 1988, a pour objectif d’établir des règles


similaires à celles de la convention de Bruxelles de 1968 entre les Etats membres de l’UE et
trois Etats de AELE (Suisse, Norvège et Islande).
Le 30 octobre 07 fut signée la nouvelle convention de Lugano, qui a vocation de mettre en
œuvre des règles similaires à Bruxelles I dans les relations entres les 27 Etats de l’UE et les
Etats de AELE.

Section 2 Le règlement Bruxelles II bis30

Règlement n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance


et à l’exécution des décisions en matières matrimoniale et de responsabilité parentale. Précédé
de la convention Bruxelles II du 28 mai 1998, jamais ratifiée car remplacée par le règlement
communautaire du 29 mai 00, lui-même abrogé par Bruxelles II bis afin d’élargir sa porter et
d’aborder le thème du rapt international d’enfant. En projet Rome III, Bruxelles II bis avec
des règles de conflit de lois.

L’art.1 précise que le règlement s’applique aux procédures civile de dissolution du


mariage : divorce, séparation de corps, annulation du mariage (n’inclut pas le PACS et le
concubinage). Il ne porte que sur le sort du lien matrimonial, n’aborde pas les questions
patrimoniales (obligations alimentaires…).

Le règlement s’applique aussi aux procédures civiles liées à l’attribution, l’exercice, la


délégation, ou le retrait total ou partiel de la responsabilité parentale31. Cela comprend
notamment le droit de garde, de visite, de tutelle…

30
Le règlement est entré en application le 1er mars 2005.
31
L’ensemble des droits et obligations conférées par des personnes, physique ou morale, sur la base d’une
décision judiciaire, d’une attribution de plein droit, ou d’un accord en vigueur, à l’égard de la personne, ou des
biens d’un enfant (art.2).

- 74 -
Le règlement ne s’applique pas :
a) à l'établissement et la contestation de la filiation;
b) à la décision sur l'adoption et les mesures qui la préparent, ainsi que l'annulation et la
révocation de l'adoption;
c) aux noms et prénoms de l'enfant;
d) à l'émancipation;
e) aux obligations alimentaires;
f) aux trusts et successions;
g) aux mesures prises à la suite d'infractions pénales commises par des enfants.

Champ d’application spatial : s’applique de plein droit dans tous les Etats membre de l’UE, à
l’exception du Danemark. Bien que le règlement soit silencieux, le juge de l’Etat membre doit
l’appliquer dès lors que la situation soumise est internationale (Cf. art.7§2).

§1 : Les règles de compétence

L’art.20, en cas d’urgence, il donne compétence aux juridictions de l’Etat membre sur
le territoire duquel se trouvent les personnes, ou biens, concernés pour prendre des mesures
conservatoires et provisoires. Même si « même si, en vertu du présent règlement, une
juridiction d'un autre État membre est compétente pour connaître du fond. »
La juridiction normalement compétente peu reprendre la main en prenant les mesures
appropriées.

Les règles de compétence sont générales et désignent les juridictions d’un Etat membre, puis
appliquer le droit interne pour déterminer la juridiction compétente.

Les règles de Bruxelles II bis sont alternatives et non hiérarchisées, le demandeur peut, au
choix, saisir les juridictions désignées compétentes.

‫ ﮭ‬En matière de Divorce, séparation de corps et annulation du mariage, le demandeur peut


à son choix saisir une des juridictions listées à l’art.3, retenant principalement la nationalité
commune ou le domicile commun.
S’agissant de convertir une séparation de corps en divorce, l’art.5 ajoute aux tribunaux
compétents le tribunal de l’Etat membre ayant rendu la décision de séparation de corps, sous
condition que la loi de celui-ci admette la conversion.
L’art.4 précise que les juridictions compétentes le sont aussi pour examiner la demander
reconventionnelle.
L’art.6 déclare les compétences des art.3 à 5 sont exclusives. Càd que si le juge saisi constate,
en application des art.3 à 5, aucune juridiction des Etat membre comme compétente, la
compétence est alors réglée par la loi du juge saisi (art.7).
Art7 §2 « Tout ressortissant d'un État membre qui a sa résidence habituelle sur le territoire
d'un autre État membre peut, comme les nationaux de cet État, y invoquer les règles de
compétence applicables dans cet État contre un défendeur qui n'a pas sa résidence habituelle
dans un État membre et qui ou bien n'a pas la nationalité d'un État membre ou, dans le cas du
Royaume-Uni et de l'Irlande, n'a pas son «domicile» sur le territoire de l'un de ces États
membres. », y compris les privilèges de juridiction.
Si les juge saisi constate qu’en vertu des art.3 à 5 qu’il est la, ou une, des juridictions
compétente, alors il tranche le litige. Mais s’il constate, qu’en application des art.3 à 5, que se

- 75 -
sont les juridictions d’un, ou plusieurs, autres Etats membres sont compétentes, alors si le
défendeur est intégré à une Etat membre : l’art.6 interdit au juge saisi de reconnaître
compétent en vertu de ses règles internes.

En matière de responsabilité parentale, l’art.8 dispose que le principe est la


compétence des juridictions de l’Etat membre de la résidence habituelle de l’enfant.
Les art.9 à 12 prévoient les compétences exclusives d’autre juridiction.
Art.9 → compétence transitoire de l’ancienne résidence de l’enfant ayant déménagé.
Art.10 → compétence des juridictions de l’Etat membre à destination duquel l’enfant à été
enlevé.
Art.12 → prorogation de compétence au profit de la juridiction compétente pour la désunion.
Art.11 → l’enlèvement d’enfant intra-communautaire, retranscrit les règles de la convention
de la Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfant.

§2 : Le régime de la compétence

L’art. 17 pose les règles quant au contrôle de sa compétence par le juge, s’il constate que
celle-ci n’est pas fondée, il doit, d’office, se déclarer incompétent.
En revanche, si le règlement ne donne compétence à aucune juridiction, l’art.17 n’oblige pas
le juge à se déclarer d’office incompétent : c’est son droit interne qui lui dictera sa
compétence.

En cas de litispendance, dans des procédures relative à la responsabilité parentale, l’art.19


demande au juge saisi en 2nd de sursoir à statuer jusqu’à ce que la compétence de la juridiction
saisie en 1er soit établie, et doit alors se dessaisir ou pas.
En cas d’actions en désunion dépendantes, même lien matrimonial en cause.
Art.16 → date de saisine des juridictions.

- 76 -
Titre 3 Le conflit de juridiction

Partie 2nd Les effets en France de jugements étrangers

Chapitre 1 Le droit commun

Champ d’application de plus en plus restreint avec l’avancé du droit européen. Un jugement
étranger émane d’une souveraineté étrangère, qui n’a aucun pouvoir de contrainte en France.
Mais, le jugement étranger intéresse les parties au litige, des individus déterminés, pour qui le
jugement étranger est une base de prévision, plus ou moins précise, un droit acquit. Le
jugement constitue une situation juridique qui ne peut être purement niée pour les parties, afin
de sauvegarder leur sécurité juridique. Régime intermédiaire de la reconnaissance.

Section 1 La notion de jugement étranger

Un jugement étranger est une décision de droit privé, prononcé au nom d’une souveraineté
étrangère, ayant un caractère juridictionnel.
→ Décision de droit privé : décision statuant en matière civile et commerciale au sens
large (englobant le droit du travail), mais dont sont exclu les décisions d’ordre pénal
(uniquement l’aspect pénal), fiscal, ou administratif, car les tribunaux français ne doivent pas
prêter la main aux systèmes étrangers de répression, ni à l’exercice de la puissance publique
étrangère.
→ Au nom d’une souveraineté étrangère : peut importe le lieu ou l’autorité ; seul
importe que la décision soit rendue par une autorité investie d’un pouvoir juridictionnel par
une souveraineté étrangère (peut importe que cet Etat soit reconnu ou non).
→ Caractère juridictionnel : certains actes, en France, requièrent l’intervention d’un
juge et ont clairement un caractère juridictionnel, mais il se peut que ces actes soient, à
l’étranger, soustrait à la compétence judiciaire, et ne semble alors plus appartenir à la matière
juridictionnel. Sont soumises à l’exequatur les décisions gracieuses, ou contentieuses, rendues
par des autorités exerçant une fonction que le droit français réserve à l’autorité judiciaire.

Les jugements étrangers, se sont aussi les actes reçu par les officiers publics étrangers et les
sentences arbitrales étrangères (art. 509 et 1498 NCpc).

Section 2 La gradation des effets des jugements étrangers

Il existe trois catégories de gradations, trois catégories d’effets.

§1) Les effets admis d’emblé et sans condition pour tous les jugements
étrangers

Càd que les jugements produisent ces effets, sans qu’il soit nécessaire de les soumettre
à une procédure spéciale, tel que l’instance en exequatur. Ces effets sont admis sans condition
car il n’est pas nécessaire d’établir la régularité internationale du jugement. Cela concerne
tous les jugements, patrimoniaux ou extra-patrimoniaux, constitutifs ou déclaratifs.
Tous les jugements étrangers ont un effet de fait : càd que l’existence du jugement étranger
est un fait dont la réalité et les conséquences matérielles ne peuvent pas être niées. Le fait

- 77 -
qu’un jugement étranger fut prononcé dans un pays donné est source de certaines
conséquences juridiques dans d’autres systèmes juridiques.
Ex. art21-23 Cciv admet comme obstacle à la naturalisation d’un étranger, le
fait que certaines condamnations pénales étrangères ont été prononcées contre
l’étranger.

Tous les jugements étrangers ont un effet de titre : le jugement étranger peut servir à justifier
d’un titre déclenchant des conséquences juridiques qui sont attaché par une norme émanant
d’un autre ordre juridique.
Ex. Un jugement étranger condamne une personne à payer sa dette, constitue
un titre permettant à un étranger, un créancier de pratiquer, en France, une
mesure conservatoire.

Tous les jugements étrangers ont une force probante : le jugement constate certains faits, il
peut être invoqué comme preuve des faits qu’il constate. Il a alors la valeur d’indice de
présomption pour le juge français.

§2) Les effets admis d’emblé, mais à la condition de la régularité internationale


du jugement étranger

Cela ne concerne que les jugements extra-patrimoniaux, constitutifs ou déclaratifs, rendu à


l’étranger en matière d’état et de capacité des personnes.
Cela concerne aussi les jugements patrimoniaux constitutifs : ces jugements sont reconnus de
plein droit. Ils sont pourvus de l’autorité négative de chose jugée, et l’on reconnaît la
modification que celui-ci apporte au rapport de droit considéré.

Arrêt Bulkley du 28 février 1860, la CCass a permis, à une étrangère régulièrement divorcée
dans son pays, de se remarier en France, sans que le jugement de divorce ait reçu l’exequatur.
Arrêt De Wrede du 9 mai 1900, la CCass a admis la validité du mariage contracté en France
par une personne de nationalité Russe, dont le précédent mariage avait été déclaré nul par un
jugement allemand, car « l’état des personnes ne peut demeurer incertain ».

Ces effets sont admis d’emblé, il n’est pas nécessaire de mettre en œuvre une
procédure spéciale tel l’exequatur, mais ils sont, en revanche, subordonné à la régularité
internationale du jugement. Celle-ci est présumée, mais elle peut être contestée, ou établi avec
certitude, la régularité va alors être contrôlée par un tribunal.
Soit un contrôle de manière incidente, càd qu’un plaideur invoque le jugement étranger au
cours d’une instance française pour former une exception de chose jugée, ou pour motiver ses
prétentions : le juge français ne peut faire produire de conséquence au jugement étranger que
s’il contrôle la régularité internationale du jugement.
Soit un contrôle à titre principal, càd qu’une personne agit directement, et exclusivement,
pour faire contrôler la régularité du jugement étranger : soit une action en inopposabilité
(établit que la décision est irrégulière, inefficace), soit une action en opposabilité (établit que
le jugement est régulier, efficace). « Action en exequatur à toutes fins utiles »
Le contrôle est réalisé par la vérification de conditions, identiques aux conditions
d’exequatur (voit infra).

Art.370-5 Cciv, en matière d’adoption, pose la règle spéciale en France des décisions
étrangère d’adoption, reconnaissance de plein droit sous condition de régularité
internationale : « une adoption régulièrement prononcée ».

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« L'adoption régulièrement prononcée à l'étranger produit en France les effets de l'adoption
plénière si elle rompt de manière complète et irrévocable le lien de filiation préexistant. A
défaut, elle produit les effets de l'adoption simple. »

§3) Les effets subordonnés à l’exequatur

L’exequatur confère, aux jugements patrimoniaux déclaratifs, la reconnaissance : autorité


négative de chose jugée et la reconnaissance de la modification du rapport de droit.
L’exequatur confère, à tous les jugements, la force exécutoire. Càd que l’exequatur donne, à
celui qui se prévaut de la décision étrangère, la possibilité de faire exécuter cette décision en
France, en sollicitant la force publique.

Section 3 Les conditions de l’exequatur

L’exequatur a fait l’objet d’une grande évolution jurisprudentielle.


Arrêt Munzer du 7 janvier 1964, la CCass fixe 5 conditions à l’exequatur.
Arrêt Bachir du 4 octobre 1967, la CCass réduit à 4 conditions.
Arrêt Cornelissen du 20 février 2007, la CCass restreint à 3 conditions (suppression que la loi
appliquée au litige est la même que la loi qu’appliquerait le juge français). Pour accorder
l’exequatur, hors de toutes conventions internationales, le juge français doit s’assurer que 3
conditions sont remplies : la compétence indirecte du juge étranger fondée sur le rattachement
du litige au juge saisi, la conformité à l’ordre public international de fond et de procédure, et
l’absence de fraude à la loi.

§1) La compétence du tribunal étranger

Doit-on vérifier la compétence internationale ? la compétence interne ?


L’on ne s’intéresse ici qu’à la compétence internationale, mais au regard du droit étranger ?
au regard du droit français ?
L’on vérifie par rapport à des règles françaises résultant de l’arrêt Simitch du 6 février 1985,
la CCass considère que « toutes les fois que la règle française de conflits de juridictions,
n’attribue pas compétences exclusive aux tribunaux français, le tribunal étranger doit être
reconnu compétent si le litige se rattache d’une manière caractérisée au pays dont le juge a été
saisi et si le choix de la juridiction n’a pas été frauduleux »
Lorsque la règle française de compétence internationale directe, donne compétence exclusive
au juge français : l’exequatur doit être refusé. C’est le cas pour les litiges réels ou
successoraux concernant un immeuble situé en France, ou en matière de voie d’exécution
pratiquée en France.
Lorsque la règle française de compétence internationale n’attribue pas une compétence
exclusive aux juridictions française, l’exequatur peut être accordée sous certaines conditions :
le litige se rattache de manière caractérisé au pays dont le juge a été saisi (proximité), et que le
choix du juge n’est pas le fruit d’une manœuvre frauduleuse.

§2) La conformité à l’OPI

Cela concerne l’OPI procédural, et l’OPI substantiel (valeurs substantiels au for).

§3) L’absence de fraude à la loi

Une condition dont l’importance n’a cessé de se renforcer depuis l’arrêt Bachir.

- 79 -
Section 4 La procédure d’exequatur

La procédure d’exequatur est une instance propre, elle a pour objet de permettre
l’exécution, en France, d’une décision étrangère. Elle doit être distinguée d’une instance
directe ayant le même objet que l’instance étrangère d’origine.

§1) Le tribunal compétent pour l’instance d’exequatur

A) Compétence matérielle

Sont compétent les tribunaux civils, et plus précisément le TGI statuant à juge unique. C’est
une compétence exclusive du juge français (art. L311-11 Coj).

B) Compétence territorial

Le tribunal du défendeur est compétent par application des art. 42 et 43 du Cciv. Mais si le
défendeur n’a ni domicile ni résidence en France, le demandeur peut saisir le tribunal de son
choix. Pourvu que ce choix respecte l’administration d’une bonne justice.

§2) Les effets de la décision rendue

Si le TGI accorde l’exequatur, le juge de l’exequatur ne peut pas modifier le dispositif du


jugement étranger, l’exequatur ne s’étend pas au-delà de ce qui fut jugé à l’étranger
(impossible de présenter des demandes additionnelles ou reconventionnelles).
En revanche, le juge peut n’accorder qu’un exequatur partiel couvrant certains chefs de la
décision, à la seule condition de veiller à une certaine cohérence (ne pas séparer deux parties
inséparables dans le jugement étranger).

Si la décision rejette l’exequatur, la décision a autorité de chose jugée entre les parties. Elle
fait dons obstacle à une nouvelle demande d’exequatur entre les parties.
Mais cette décision ne fait pas obstacle à une demande au fond, intenté en France, pour
obtenir un jugement le plus proche de celui accordé à l’étrange.

- 80 -
Chapitre 2 Le droit d’origine communautaire

Section 1 Le règlement Bruxelles I

Objectif : simplifier les procédures, créer un espace judiciaire européen.

Applicable aux actions judiciaires intentées et aux actes authentiques reçu après le 1 er mars
2002 (art.66§1). Art.66§2 : les décisions rendues sur le territoire d’un Etat membre sur une
action intentée avant l’entrée en vigueur du règlement, par exception cet article prévoit que
certains jugements puissent s’appliquer.
Le règlement s’applique à toutes décisions judicaires émanant d’une juridiction d’un Etat
membre de l’UE, dans un litige interne ou international, mais seulement des décisions rendues
dans des matières traitées du règlement (civile et commerciale).
Le règlement repose sur la distinction entre reconnaissance et exécution des jugements
étrangers. La reconnaissance est accordée de plein droit (contestation possible), il en va , à
peu près de même, pour l’exécution d’un jugement, nécessitant une procédure formelle pour
faire déclarer le jugement exécutoire : l’autorité saisie doit déclarer la décision exécutoire dès
lors que les pièces du dossier sont réunies. Le juge n’est amené à se prononcer sur la
régularité qu’en cas de contestation.

§1 : Les conditions de la régularité

Le règlement envisage les différents motifs de refus de reconnaissance de l’exécution


dans les art.34 à 36.

A) Les motifs de refus interdits

Le juge de l’Etat requit ne peut s’en prévaloir afin de déclarer le refus de reconnaissance.

→ Est interdite la révision au fond, qui consisterai pour le juge de l’Etat requit à vérifier que
le juge d’origine n’a pas commis d’erreur de droit ou de fait dans la solution du litige.

→ Est interdit la compétence de la loi appliquée au fond n’a pas a être vérifiée. Une décision
ne peut être repoussée au motif que la loi ne serait pas compétente.
La Convention de Bruxelles admettait, exceptionnellement, le contrôle de la loi appliquée
selon les règles de l’Etat requit dans le cas où le juge étranger avait statué dans une matière,
en principe, étrangère au champ de la convention, à l’occasion d’une question accessoire
rentrant dans le champ de la convention (art.27).

Il n’est pas nécessaire que la décision contrôlée soit définitive, provisoire ou susceptible d’un
recours. Le juge de l’Etat requit doit sursoir à statuer si la décision est frappée d’un recours
dans son Etat d’origine (art.34).

B) Un motif de refus exceptionnellement autorisé

La compétence indirecte du juge de l’Etat d’origine peut, exceptionnellement, justifier


un refus. Mais, en principe, cette compétence n’a pas à être vérifier : peut importe qu’elle

- 81 -
repose sur une compétence internationale particulière (art.71) et peut importe qu’elle heurte
l’ordre public de l’Etat requit (art.35 §3).
Par exception, art. 35 §1, le juge de l’Etat requit peut contrôler la compétence du juge
originaire, pour sanctionner :
- une violation des règles de compétences exclusives
- une violation des règles particulières prévues en matière d’assurance et de contrat
passé par les consommateurs (pas le travail !).

C) Les motifs de refus possible

‫ ﮭ‬Art.34 admet comme motif de refus, de reconnaissance ou d’exécution, la contrariété,


manifeste, de la décision à l’ordre public (de fond et procédural 32) de l’Etat requit. Confirmé
par l’arrêt Krombach de la CJCE du 28 mars 2000, dans lequel un juge allemand refusa de
reconnaître un jugement français de condamnation à des DI, lié à une condamnation pénal par
contumace : « si le contenu des valeurs d’OP est définit par les Etats membres, leur liberté
d’appréciation s’exerce dans les limites fixées par la CJCE ».

‫ ﮭ‬Art.34 autorise le refus, de reconnaissance ou d’exécution, de la décision dont l’acte


introductif d’instance n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant, en temps utile et
de telle manière qu’il puisse se défendre, à moins que ce défendeur n’ai pas exercé de recours,
alors qu’il était en mesure de la faire.

‫ ﮭ‬Art.34 autorise à repousser une décision qui serait inconciliable, soit avec une décision
redue entre les mêmes parties dans l’Etat requit, soit avec une décision rendue antérieurement
dans un Etat tiers ou un autre Etat membre.
Dans le premier cas, le règlement ne distingue pas entre les différentes dates des jugements. Il
semble donc qu’il soit nécessaire de revenir au droit interne, du juge saisi, afin de trancher ce
litige.
Dans le deuxième cas, la décision 1ère en date, ne s’impose que si elle est susceptible de
reconnaissance dans l’Etat requit.

§2 : Les procédures de vérification

A) La reconnaissance

La décision, qui émane d’un Etat membre, bénéficie de plein droit de la reconnaissance. Elle
bénéficie donc de l’autorité négative et positive de la chose jugée, … sauf l’exécution forcée.
Cette reconnaissance est tout de même subordonnée à la régularité de la décision, celle-ci
étant simplement présumée. Il est donc possible de contesté la régularité de la décision, par
voie incidente ou par voie principale.
Le contrôle par voie incidente survient lorsqu’une partie au litige oppose l’autorité de chaos e
jugé, la juridiction saisie de l’action nouvelle est compétente pour procéder au contrôle de la
régularité.
Le contrôle par voie principale, ou une action principale en reconnaissance d’une décision
étrangère, est ouvert à tout intéressé. Cette action est si proche d’une action en exécution
qu’elle est soumise à sa procédure (art.33 §2). Il est aussi possible d’agir en inopposabilité
contre une décision rendue dans un Etat membre.

32
CCass, arrêt Pordéa, 1re Civ. 16 mars 1999 : contraire à l’OPI un jugement UK condamnant un plaideur
français à des frais de procédures, d’un montant très élevé, alors que sa demande ne fut pas examinée.

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B) L’exécution

Dans la convention de Bruxelles, la demande en exécution prenait la forme d’une


requête unilatérale, portée devant le président du TGI, et la juridiction saisie vérifiait que la
décision étrangère ne se heurtait à aucun motif de refus de reconnaissance, ou d’exécution,
énumérés dans le règlement. Ce n’était qu’en cas de recours que la reconnaissance devenait
contradictoire.

Dans le règlement, il y a un recours unilatéral devant le greffier en chef du TGI, qui ne


procède plus à un examen de la décision étrangère, mais à un simple contrôle de la régularité
formelle de la requête, devant contenir :
- Une expédition de la décision, réuni les conditions nécessaires à sont authenticité
(possible traduction certifiée).
- Certificat délivré par la juridiction d’origine (en annexe du règlement), permet
d’identifier l’Etat d’origine, la juridiction ayant statué, la date de la décision, la
date de la signification, le nom des parties ayant bénéficié de l’aide juridictionnel,
ainsi que l’affirmation du caractère exécutoire de la décision dans l’Etat d’origine.
L’autorité de l’Etat requit, par un regard aux pièces de la requête, peut délivrer une
déclaration constatant la force exécutoire de la décision. Cette décision est portée à la
connaissance du requérant, et s’il elle déclare la décision étrangère exécutoire : elle est aussi
signifiée à la partie envers laquelle l’exécution est demandée. Un recours est possible devant
la CA dans un délai d’un mois à compter de la signification (2 mois si la partie contre laquelle
l’exécution est demandée est domiciliée dans un autre Etat membre), la CA vérifiera la
régularité de la décision en application des art.34 à 36.

Section 2 Le règlement Bruxelles II bis

Règlement applicable à la reconnaissance, ou l’exécution, émanant d’un Etat membre statuant


sur des matières relevant de son champ d’application : la désunion et la responsabilité
parentale.
Champ d’application temporel : le règlement s’applique aux actions intentées après son entrée
en vigueur, mais l’art.64 al2 précise que le règlement peut s’appliquer à des décisions rendues
après son entrée en vigueur, mais dont les actions ont été intentées avant.

§1 : Les conditions de la régularité

Les motifs de refus, de reconnaissance ou d’exécution, interdit que dans le règlement


Bruxelles I : interdiction de la révision au fond (art.26), interdiction du contrôle de la loi
applicable d’origine (art.25), et interdiction de refuser sur le fondement de l’incompétence du
juge de l’Etat d’origine (art.24).

Les motifs de refus possible, le règlement distingue selon que la décision soit rendue en
matière de désunion ou de responsabilité parentale.
En cas de désunion, l’art.22 reprend les mêmes motifs de refus que le règlement Bruxelles I.
En cas de responsabilité parentale, l’art.23 a adapté les motifs de refus à cette matière
spéciale : - contrariété manifeste de la décision à l’OP de l’Etat requit, eu égard des
intérêts supérieurs de l’enfant.
- la décision peut être repoussée, si, en violation des règles fondamentales de
l’Etat requit, l’enfant n’a pas eu la possibilité d’être entendu (sauf urgence).

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- la défaillance du défendeur par défaut de notification, ou notification, de
l’acte introductif d’instance.
- lorsque la personne, qui estime que la décision fait obstacle à l’exercice de sa
responsabilité parentale, n’a pas été entendue dans la procédure.
- si la décision étrangère est inconciliable avec une décision rendue,
ultérieurement, en matière de responsabilité parentale, dans l’Etat membre requit, dans un
autre Etat membre, ou un Etat tiers dans lequel l’enfant réside habituellement.

§2 : La procédure de vérification

A) La reconnaissance

Mêmes principes que dans le règlement Bruxelles I :


- Reconnaissance de plein droit
- Contestation par voie incidente, ou principale

B) L’exécution

Une décision exécutoire dans l’Etat d’origine, ayant été signifiée ou notifiée, dès lors qu’elle
ne se heurte à aucun motif de refus, pourra être mise à exécution dans l’Etat requit, après une
procédure simplifiée d’exequatur. Celle-ci est organisée par le règlement, reprenant le
système de la Convention de Bruxelles :
1° La procédure est unilatérale, la personne intéressée forme une requête devant le président
du TGI de la résidence habituelle de la personne contre laquelle l’exécution est demandée, ou
de l’enfant concerné, ou, à défaut, du lieu d’exécution. Cette partie demande au juge que la
décision ait force exécutoire sur le territoire de l’Etat requit. Le juge vérifie qu’il n’y a pas de
motifs de refus.
2° La décision rendue par le juge (acceptant ou refusant l’exequatur) peut faire l’objet d’un
recours devant la CA avec une procédure contradictoire.

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