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Guide sur le brevet d’invention :

Le Guide sur le brevet d’invention a été élaboré en étroite collaboration entre le


Programme « Amélioration du Climat des Affaires au Maroc » de l’USAID et l’Office
Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC).

Ce guide fait suite à celui déjà développé sur les marques. Il couvre les aspects
juridiques et pratiques des brevets d’invention. Il vise à apporter un éclairage sur le
domaine des brevets d’invention qui est parmi les plus techniques en matière de
propriété intellectuelle.

Guide sur le brevet d’invention - Loi 17.97


Elaboré en tant qu’outil de référence pour tous les utilisateurs du système qu’ils soient
juristes, chefs d’entreprise, investisseurs ou chercheurs, ce guide met en exergue le
haut niveau de protection qui est accordé par le nouveau cadre juridique. Guide sur le brevet
d’invention
Loi 17.97

relative à la protection de la propriété industrielle


modifiée et complétée par la loi 31.05
Guide sur le brevet
d’invention

Loi 17.97
relative à la protection de la propriété industrielle
modifiée et complétée par la loi 31.05
Ce guide a été réalisé grâce au soutien de l’Agence Américaine pour le Développement
International (USAID), au titre du Contrat Nº: GEG-I-00-04-00001, Ordre Nº: GEG-
I-02-04-00001.

L’équipe du Programme tient à remercier tout particulièrement Mme Nadia Amrani,


Chargée de Programme au Département de la Croissance Économique de l’USAID, pour
son appui.

Les opinions émises par les auteurs de ce guide n’engagent en rien ni l’Agence Américaine
pour le Développement International ni le gouvernement américain.
Remerciements
Le brevet d’invention est un stimulant économique très important pour l’innovation tech-
nologique. Il donne à son titulaire le monopole de l’exploitation de son invention pour une
durée de 20 ans. En contrepartie de cette protection, le titulaire du brevet est tenu de di-
vulguer les informations sur son invention par des publications.

Ces dernières sont très importantes du fait qu’elles permettent l’orientation de l’innovation
dans l’entreprise et par la même occasion évite à celle-ci des dépenses inutiles d’argent
et de temps qui résultent de son engagement dans des recherches pour lesquelles les ré-
sultats sont déjà connus et protégés par un brevet.

Une entreprise avisée doit donc être attentive à ces publications qui restent le meilleur,
voire même le seul moyen de connaitre l’état de la technologie dans un domaine spécifi-
que, d’en suivre l’évolution, d’apprécier la liberté d’exploitation d’un nouveau produit, de
dégager des voies de recherche ou de s’informer sur la stratégie de la recherche et de la
protection de ses concurrents.

En outre, le brevet permet à son titulaire d’interdire à toute autre personne d’exploiter
l’invention sans son autorisation. Par conséquent, il lui garantit de profiter des efforts
fournis dans le domaine de la recherche et du développement.

Le présent guide, moderne dans sa conception, simple et facile dans sa consultation,


traite du brevet d’invention dans tous ses aspects : définitions, exclusions de brevetabilité,
critères de brevetabilité, procédure de dépôt aux niveaux national et international, l’im-
portance de l’information en matière de brevet, etc. Il est conçu à l’intention de toute
personne assoiffée de savoir, mais également aux praticiens tels que les magistrats, les
chercheurs universitaires et les entreprises innovantes en vue de faciliter leur compréhen-
sion du système de protection des brevets et de répondre à leur interrogations en donnant
des exemples et des illustrations.

L’OMPIC remercie le programme « Amélioration du Climat des Affaires au Maroc » de


l’USAID pour son appui pour la réalisation de ce guide, menée en étroite collaboration
avec maître Mohamed Zaoug, ex-magistrat à la Cour Suprême, et le Professeur Tijani
Bounahmidi, Vice-Président de l’Université Mohamed V-Agdal de Rabat. Les efforts dé-
ployés par ce programme, ainsi que par messieurs Zaoug et Bounahmidi ont en fait un
document de travail important pour tout magistrat, avocat ou juriste.

Guide sur le brevet d’invention 3


Sommaire
6 Liste des tableaux
6 Liste des schémas
6 Liste des abréviations
8 Préambule
9 Partie 1 : Cadre général du système des brevets d’invention
10 Section 1 : Qu’est-ce qu’un brevet d’invention ?
10 1.1. Concepts généraux
13 1.2.Système international des brevets
14 1.3. Système national des brevets
16 1.4. Relation du brevet avec les autres titres de propriété intellectuelle et concepts voisins
22 Section 2 : Que peut-on breveter ?
22 2.1. Objets brevetables
23 2.2. Application industrielle
24 2.3. Nouveauté
28 2.4. Activité inventive
30 2.5. Divulgation de l’invention
31 2.6. Examens de la demande de brevet
32 Section 3 : C omment rédiger le mémoire descriptif d’une invention pour
une demande de brevet
32 3.1. Considérations générales
33 3.2. Unité de l’invention
33 3.3. D escription de l’invention
35 3.4. Revendications
37 3.5. Dessins
37 3.6. Abrégé
38 Section 4 : I nformation technique divulguée par les brevets et recherche
sur l’état de la technique
38 4.1. Information technique divulguée par les brevets
40 4.2. Recherche sur l’état de la technique
44 Section 5 : A  ctivité « brevet » dans le monde et au Maroc
44 5.1. Activité « brevet » dans le monde
50 5.2. Activité « brevet » au Maroc
52 Partie 2 : Cadre pratique du système des brevets d’invention
53 Section 1 : À qui appartient le droit au brevet ?
53 1.1. Inventeur
53 1.2. Invention du salarié
57 1.3. Invention et pluralité des inventeurs
58 1.4. À qui appartient la propriété des inventions produites par les organismes
publics de recherche ?

60 Section 2 : Contenu de la demande de brevet


60 2.1. Conditions exigées à la demande
60 2.2. Informations exigées dans la demande

62 Section 3 : Délais liés à la demande de brevet d’invention

4 Guide sur le brevet d’invention


62 3.1. Délai de régularisation du dossier
62 3.2. Délai exceptionnel pour la régularisation du dossier
63 3.3. Délai relatif aux besoins de la défense nationale
64 3.4. Délai de délivrance du brevet
65 Section 4 : Procédure de dépôt de la demande de brevet d’invention
65 4.1. Présentation de la demande
66 4.2. Examen du dossier de la demande de brevet d’invention
69 4.3. Effets de l’enregistrement
69 4.4. Effets de la recevabilité de la demande
69 4.5. Cas de rejet de la demande de brevet d’invention
70 4.6. Décision de la délivrance du brevet d’invention
70 4.7. Acte d’octroi du brevet
71 Section 5 : Procédures de dépôt d’une demande de brevet à l’étranger
72 5.1. Système d’enregistrement international des brevets : présentation générale
73 5.2. Phase internationale du PCT
78 5.3. Phase nationale du PCT
79 Section 6 : Maintien de la validité du brevet
79 6.1. Nécessité de respecter les délais et d’éviter les fautes entachant les demandes
80 6.2. Paiement des droits exigibles
83 Partie 3 : Les droits conférés par le brevet
84 Section 1 : Champ de protection du brevet
84 1.1. Champ de protection du brevet initial
87 1.2. Champ de protection du certificat d’addition
89 1.3. Des actes ne figurant pas parmi les droits conférés par le brevet
90 1.4. Actes nécessitant le consentement du propriétaire du brevet
92 Section 2 : Le droit du propriétaire à l’exploitation
92 2.1. Étendue du droit d’exploitation exclusive
95 2.2. Limites au droit sur le brevet
98 Section 3 : L es actes portant sur le droit attaché au brevet
99 3.1. Règles communes aux actes accomplis par le titulaire du droit sur le brevet
102 3.2. Règles particulières à chaque opération
116 Section 4 : L’expiration du droit sur le brevet
117 Partie 4 : La protection du droit sur le brevet
119 Section 1 : Quelques principes régissant la protection du droit sur le brevet
119 1.1. Caractère territorial de la protection du brevet d’invention
119 1.2. Inscription
119 1.3. Liberté contractuelle
121 Section 2 : Les actions en justice
121 2.1. De la protection temporaire aux expositions
121 2.2. Action en revendication de la propriété du brevet
123 2.3. Action en nullité du brevet
127 2.4. Action en contrefaçon
143 2.5. Concurrence déloyale

Guide sur le brevet d’invention 5


Liste des tableaux
Tableau n° 1 : Pays d’origine de demandes étrangères p.50

Tableau n° 2 : Tableau de comparaison entre les périodes


de protection de quelques droits relatifs à la propriété industrielle p.84

Tableau n° 3 : Comparaison entre les durées


de prescription entre le brevet et la marque p.137

Liste des schémas


Schéma n° 1 : Délai exceptionnel pour la régularisation du dossier p.62

Schéma n° 2 : Déroulement de la procédure


d’examen du dossier de la demande de brevet d’invention p.68

Schéma n° 3 : Système d’enregistrement international des brevets p.72

Schéma n° 4 : La période durant laquelle le brevet


d’invention remplit ses fonctions p.86

Schéma n° 5 : Procédure d’attribution de la licence d’office p.114

Liste des abréviations


Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce
(équivalent en anglais : TRIPS) ADPIC

African Regional Intellectual Property Organization


Organisation régionale africaine de la propriété intellectuelle ARIPO

Annales de la propriété industrielle, littéraire et artistique Ann. prop. ind.

Article(s) d’une loi, d’une convention, d’un traité régional ou international art.

Article(s) d’un décret d’application art. D.

Bulletin civil de la Cour de cassation Bull. civ.

Convention sur le brevet européen CBE

Convention sur le brevet eurasien CBEA

Chambre d’une juridiction ch.

Chambre commerciale ch. com.

Code (marocain) de procédure civile CPC

Code (français) de la propriété intellectuelle CPI

Classification internationale des brevets CIB

Centre national (français) de la recherche scientifique CNRS

6 Guide sur le brevet d’invention


Diplôme d’études approfondies DEA

Dahir des obligations et contrats DOC

Japan Patent Office - Office japonais des brevets JPO

Journal officiel de la République française, document administratif JO doc. adm.

Korean Intellectual Property Office


Office coréen de la propriété intellectuelle KIPO

Numéro n°

Organisation africaine de la propriété intellectuelle OAPI

Office européen des brevets OEB

Organisation mondiale du commerce OMC

Organisation mondiale de la propriété intellectuelle OMPI

Office marocain de la propriété industrielle et commerciale OMPIC

Patent Cooperation Treaty - Traité de coopération en matière de brevets PCT

Produit intérieur brut PIB

Bulletin de documentation de la propriété industrielle PIBD

Petite et moyenne entreprise PME

Patent Law Treaty - Traité sur le droit des brevets PLT

Procès-verbal PV

Recherche et développement R&D

Section sect.

State Intellectual Property Office of China


Office chinois de la propriété intellectuelle SIPO

Liste des 50 premiers déposants de demandes


internationales de brevet via la procédure PCT TOP 50

Union internationale pour la protection des obtentions végétales UPOV

États-Unis US

United States Agency for International Development


Agence des États-Unis pour le développement international USAID

Dollar américain USD

 nited States Patent and Trademark Office


U
Office des brevets et des marques des États-Unis USPTO

Versus v.

Guide sur le brevet d’invention 7


Préambule
La place et la grandeur des nations se mesurent par leurs connaissances scientifiques et
non par leurs richesses matérielles.

La science crée et développe l’industrie ; et l’industrie transforme les richesses naturelles.


L’homme est créatif de nature. Cette qualité fait de lui une source de création dans diffé-
rents domaines de la vie et particulièrement dans le domaine de l’industrie. Il demeure
cependant, que toute action inventive ne peut connaitre de succès que par l’encourage-
ment matériel et financier des personnes qui ont un savoir faire et des compétences leurs
permettant de mener à bien des activités inventives.

De nos jours l’engagement est irréversible puisque la technologie occupe une place impor-
tante dans nos vies et dans l’économie modiale. Ceci est dû d’une part, à l’accroissement de
la valeur des actifs scientifiques au détriment de la valeur des matières premières ; et d’autre
part, à l’instauration par les Etats de politiques technologiques et de leurs programmes de
réalisation.

Cette prise de conscience a poussé les grands pays à réserver d’important investissement au
domaine de la recherche et par la même occasion à s’accaparer la majeure partie des brevets
d’invention. D’autres pays en voie de développement, tels que le Taiwan, l’Afrique du sud et
le Brésil cherchent à devenir une source de production technologique. Quant au Maroc, il se
dirige vers l’adoption de stratégies dans les domaines de la science et de la technologie afin
de trouver des solutions aux multiples problèmes auxquels il est confronté; et ce, en cherchant
à diversifier son économie, à améliorer son pouvoir concurrentiel, ainsi que sa gestion de
l’énergie et de l’eau.

Le brevet d’invention est un contrat par lequel l’inventeur s’oblige à divulguer le secret de
son invention au public ; en contrepartie l’Etat s’oblige de son côté à lui conférer un droit
exclusif d’exploitation pour une durée déterminée pendant laquelle ce dernier bénéficie
d’une protection spéciale à l’égard des tiers. Il s’agit donc d’un mécanisme juridique d’en-
couragement et d’appui à la recherche en vue d’un développement industriel.

Dans ce sens, le présent guide se fixe comme objectifs :

• De faire connaitre les principaux aspects liés au brevet d’invention, qu’ils soient ju-
ridiques ou techniques -s’adressant ainsi à tous les opérateurs intervenants dans les
domaines juridiques, économiques, de la recherche et développement et, de façon
générale à toute personne intéressé par le brevet ;

• D’amener les opérateurs concernés à œuvrer pour le développement des voies et


des moyens susceptibles de rendre plus efficaces les activités d’innovation technolo-
gique et le système national des brevets.

Par ailleurs, afin de cerner les différents aspects du brevet d’invention, ce guide est orga-
nisé en quatre parties : 1. Le cadre général du système des brevets d’invention; 2. Le cadre
pratique du système des brevets d’invention; 3. Les droits conférés
par le brevet; 4. protection des droits sur les brevets d’invention.

8 Guide sur le brevet d’invention


1
Cadre général
du système des brevets
d’invention

Guide sur le brevet d’invention 9


Section 1 : Qu’est-ce qu’un brevet d’invention ?
1.1. Concepts généraux
1.1.1- Pourquoi le brevet ?

La plupart des produits commercialisés sont le résultat d’activités de recherche et


développement (R & D) qui, souvent, ont nécessité beaucoup de temps et de moyens
matériels et humains. Ces efforts n’auraient jamais pu être consentis si leurs résultats
n’avaient pas été protégés par différents types de titres de propriété intellectuelle, dont
essentiellement les brevets.

Les produits de consommation et biens d’équipement qui font l’objet d’échanges commerciaux
au niveau international résultent fréquemment d’activités d’innovation importantes mettant en
œuvre des inventions pour l’élaboration d’objets commerciaux.

La fabrication d’un objet commercial peut être fondée sur l’exploitation de plusieurs
inventions et d’autres titres de propriété intellectuelle qui nécessitent d’être protégés sur
l’ensemble des territoires constituant des marchés potentiels de cet objet. La finalité du
système de brevet est donc d’encourager l’amélioration des techniques, et par là même le
développement économique, en récompensant la créativité intellectuelle. Grâce à l’effort
d’encouragement par les États depuis plusieurs siècles, des inventions brevetées ont été
développées dans tous les domaines. On peut citer, à titre d’exemples, les brevets d’Edison
et Swan relatifs à l’éclairage électrique, de Baekeland pour le plastique, de Bic concernant
les stylos à bille ou d’Intel et autres se rapportant aux microprocesseurs.

En contrepartie de la jouissance de ce droit exclusif conféré par le brevet à son détenteur


ou à ses ayants droit, le titulaire du brevet a l’obligation de divulguer au public toutes les
informations nécessaires à la mise en œuvre de son invention.

Ainsi, tout en offrant à son détenteur ou à ses ayants droit un pouvoir commercial puissant
(par l’exclusivité de la mise sur le marché d’un nouveau produit ou procédé, l’augmentation
des parts de marché d’un produit en réduisant son prix de revient, l’amélioration des revenus
grâce à la concession de licences ou l’acquisition d’une notoriété d’innovation), le brevet
d’invention permet de mettre à la disposition des inventeurs, des innovateurs et des chercheurs
des connaissances techniques susceptibles d’être employées pour développer de nouveaux
savoirs scientifiques et technologiques, sources de progrès économique et social des nations.

1.1.2. Que protège le brevet ?

a) Une invention
Le brevet d’invention est un titre de propriété industrielle dont l’objet est de protéger une in-
vention qui apporte une nouvelle solution à un problème technique. L’invention peut consis-
ter en la création d’un nouvel objet ou en l`amélioration d’un objet existant. L’objet de l’in-
vention peut être un produit (par exemple une molécule, un matériau ou une machine) ou un
procédé (ensemble d’opérations industrielles permettant de fabriquer un produit : procédé
de fabrication du sucre, d’un produit pharmaceutique, d’un matériau de construction, etc.).

10 Guide sur le brevet d’invention


L’invention peut aussi porter sur toute nouvelle application d’une invention existante ou sur
une combinaison d’inventions existantes donnant lieu à un nouveau résultat. Quant au
brevet, il protège une seule invention à la fois ou un ensemble d’inventions liées entre elles
de telle manière qu’elles ne forment qu’un concept inventif général unique.
L’invention - sur laquelle porte le brevet - doit être distinguée de la simple découverte.

b) Découvertes et inventions
Les découvertes et les inventions sont toutes les deux le fruit de l’effort et de l’intelligence
de l’Homme, qui ne cesse d’explorer les secrets de la nature afin de créer de nouveaux
objets ou d’améliorer l’utilisation des ceux déjà existants.

En effet, l’exploration des secrets de la nature débouche surdes découvertes permettant


d’approfondir la connaissance d’objets ou de phénomène préexistant. La découverte per-
met donc, d’étendre le savoir et la connaissance.

A titre d’exemple, on peut citer les résultats d’une grande part des recherches de base en
science-physiques et naturelles, qui ont permis de révéler des constituants de la matière
de la nature ou encore de l’univers. Ainsi définie, la découverte semble découler du simple
hasard.

L’invention quant à elle; elle est le fruit de l’activité inventive de l’Homme, qui donne lieu
à l’invention d’objets dans le domaine de la technologie. De ce fait, elle est le fruit d’une
recherche scientifique, d’un savoir faire très pointu, de compétences hautement qualifiées
et d’une volonté ciblée sur un objectif bien déterminé.

Notons enfin, que si toutes les inventions sont brevetables, seules les découvertes obte-
nues grâce à une activité inventive reconnue peuvent faire l’objet de brevet. Il es est ainsi
par exemple de la découverte de l’effet « transistor » faite par John Bardeen ,Walter Brat-
tain et William Shockley en 1947.

Cette découverte –invention couronnée du prix Nobel de physique en 1956 est à la base
de toute l’industrie électronique et informatique actuelle.

1.1.3. N
 ature de la protection

Pour obtenir un brevet, une demande doit être déposée. Selon les pays, elle peut être
examinée uniquement quant à la forme, en vérifiant alors le seul respect des dispositions
administratives relatives à la forme de la demande de brevet (système à simple
enregistrement) ; ou bien subir également un examen quant au fond, pour vérifier si les
critères de brevetabilité sont satisfaits (système à examen préalable).

Signalons ici qu’au Maroc, en matière de brevet, la législation - comme expliqué plus loin - a
exclusivement adopté le premier mode de vérification. Aussi, dans le système marocain, le brevet
est octroyé dès que la demande remplit les conditions de forme exigées par l’administration,
et ce, en dépit de toute condition de fond nécessaire pour la validité du brevet. Celle-ci fait
plutôt l’objet d’un contrôle postérieur à travers un éventuel recours en annulation du brevet.

Guide sur le brevet d’invention 11


Si sur le plan économique, le brevet d’invention n’est que la contrepartie octroyée par
l’État à l’inventeur en rémunération de la divulgation du secret de l’invention sur le plan
juridique, c’est aussi un acte administratif, vu qu’il est le fruit d’une décision prise par
l’Office marocain de la propriété intellectuelle et commerciale (OMPIC) du moment que
les procédures de forme exigées par la loi n° 17.97 relative à la protection de la propriété
industrielle (art. 46 et 47), et par ses textes d’application, ont bien été respectés.

Il en résulte que le droit de brevet octroyé dans ces conditions est caractérisé par l’existence
d’une présomption de propriété qui, loin d’être irréfragable, demeure simple et limitée
dans le temps. Elle peut être réfutée par la production de la preuve contraire, notamment
en justifiant que le brevet a été octroyé sans que soient respectées les conditions de sa
validité. C’est le cas du défaut d’une condition de forme ou de fond nécessaire à la
validité du brevet, ou encore en prouvant que le brevet a été accordé au détriment d’un
droit antérieur suite à la violation d’une obligation légale ou conventionnelle (art. 19).
Toutefois, passé un certain délai, le brevet acquiert une immunité à l’égard des tiers, et
par conséquent, personne ne peut revendiquer sa propriété en prétendant son octroi par
voie de fraude, par infraction à la loi ou par engagement contractuel.

1.1.4. Durée limitée de la protection

Le fondement par lequel un titre de propriété industrielle est conféré au titulaire du bre-
vet est incompatible avec le caractère éternel de ce droit. La protection du brevet revêt,
pour cette raison, un caractère temporaire. Il est généralement délivré pour une durée
de 20 ans pendant laquelle des droits exigibles doivent être payés pour son maintien en
vigueur.

1.1.5. P
 ortée et limites du droit sur le brevet

a) Monopole d’exploitation
Le titulaire d’un brevet bénéficie du droit exclusif d’interdire à des tiers, sur le territoire
concerné par la protection, de fabriquer, d’utiliser, d’offrir à la vente, de vendre ou
d’importer un produit ou procédé fondé sur l’invention, sans son autorisation. C’est au
titulaire du brevet de veiller au respect de ce droit.

Dans la plupart des systèmes, les droits conférés par le brevet sont habituellement protégés
par une action devant les tribunaux qui ont compétence pour faire cesser les éventuelles
atteintes à ces droits.

b) Limites au droit
En général, le brevet ne confère pas pour autant à son détenteur ou à ses ayants droit
d’effectuer « automatiquement » les actes déjà abordés. Ainsi, par exemple, lorsque l’in-
vention brevetée se base sur un brevet antérieur appartenant à un tiers, son exploitation
nécessite l’acquisition d’une licence d’exploitation accordée par le titulaire de ce brevet
antérieur. De même, l’exploitation d’un brevet sur un produit pharmaceutique nécessite
l’autorisation de mise sur le marché de ce produit.

12 Guide sur le brevet d’invention


1.2.S
 ystème international des brevets
Le système international des brevets repose sur plusieurs principes et est régi par des
conventions et traités.

La Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle (couramment appelée


« Convention de Paris »), établie en 1883, adoptée par le Maroc le 30 juillet 1917 et dont la
dernière révision date de 1979, permet une gestion harmonisée de la propriété industrielle
dans les différents pays membres de l’Union internationale pour la protection de la propriété
industrielle (dite aussi « Union de Paris »), notamment pour le respect de trois principes :

• le principe du traitement national - assimilation de l’unioniste au national - selon


lequel chaque pays membre de l’Union accorde une protection et des privilèges identiques
aux demandeurs étrangers ou locaux, sans toutefois être obligé d’offrir la même protection
que celle proposée par les autres pays membres (art. 2 de la convention) ;

• le principe du droit de la priorité, qui permet aux demandeurs de brevet d’un
pays membre de l’Union de déposer des demandes d’extension dans les autres pays
membres dans un délai ne dépassant pas une année à compter de la date de dépôt
de la demande nationale (art. 4) ;

• le principe de l’indépendance des brevets obtenus pour la même invention


dans les différents pays : les brevets obtenus dans un pays membre de l’Union
sont indépendants de ceux obtenus pour la même invention dans les autres pays
membres (art. 4 bis).

En plus de la Convention de Paris, le système international des brevets est régi par :

• le Traité de coopération en matière de brevets (PCT), établi à Washington


en 1970 et dont la dernière modification date de 2001, qui facilite les procédures
de dépôt dans plusieurs pays contractants au traité par un dépôt international
enregistré par le Bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété
intellectuelle (OMPI) ;

• le Traité sur le droit des brevets (PLT), adopté à Genève en 2000, qui définit
les modalités à satisfaire pour les demandes de brevet déposées auprès des offices
de brevets des parties et susceptibles de faire l’objet d’un dépôt international dans
le cadre du PCT ;

• l’Arrangement de Strasbourg relatif à la classification internationale des


brevets (dite CBI) ;

• l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent
au commerce (dits ADPIC), établi en 1994 entre les membres de l’organisation
mondiale du commerce (OMC) et adopté par le Maroc le 15 avril 1994.

Mis à part l’Accord sur les ADPIC administré par l’OMC, les autres accords du système
International des brevets sont administrés par l’OMPI.

Guide sur le brevet d’invention 13


1.3. Système national des brevets
Au Maroc, les brevets, comme les autres titres de propriété industrielle, sont régis par la loi
n° 17.97 promulguée en 2000, telle que modifiée et complétée par la loi n° 31.05.

Cette loi est entrée en vigueur six mois après la publication de son décret d’application
n° 2-00-368 (7 juin 2004), lui-même complété et modifié par le décret n° 2-05-1485
(20 février 2006). Elle abroge toutes les dispositions législatives antérieures relatives au
même objet : le dahir du 23 juin 1916 relatif à la protection de la propriété industrielle, la
loi du 4 octobre 1938 relative à la protection de la propriété industrielle dans la zone de
Tanger et le dahir du 14 août 1940 relatif à la délivrance des brevets d’invention intéressant
la défense nationale, tels qu’ils ont été modifiés et complétés (art. 234). Sa version modifiée
et complétée est conforme aux dispositions des accords internationaux précités qui
régissent le système international des brevets.

La loi n° 17.97 définit, dans son article 22, une invention brevetable par toute invention
nouvelle, impliquant une activité inventive et susceptible d’application industrielle.

Selon l’article 16 : Toute invention peut faire l’objet d’un titre de propriété industrielle
délivré par l’organisme chargé de la propriété industrielle. Ce titre confère à son titulaire
ou à ses ayants droit un droit exclusif d’exploitation de l’invention.

L’article 17, lui, précise les deux types de titres protégeant les inventions au Maroc :
les brevets d’invention et les certificats d’addition. Ces derniers sont des titres accessoires
pour des inventions dont l’objet est rattaché à au moins une revendication d’un brevet
principal. Ils sont délivrés pour une durée qui prend effet à compter de la date de dépôt de
leur demande et qui expire avec celle du brevet principal auquel ils sont rattachés.

Dans sa version initiale, la loi n° 17.97 accordait une durée de validité maximale de 20 ans
à tout brevet d’invention à compter de la date de dépôt de sa demande. Dans sa version
modifiée et complétée, pour se mettre en conformité avec l’article 15.1(9)(6) et (7) de
l’Accord de libre-échange entre le Maroc et les États-Unis, la loi prévoit exceptionnellement
une possibilité de prolongation de la durée de validité du brevet (art. 17.1 et 17.2).

Il est à souligner que cette loi ne s’est pas étendue à d’autres réglementations prévues par
certaines législations internationales. C’est le cas pour le rapport de recherche et l’avis
documentaire :

• Le rapport de recherche est un document établi au cours de la procédure visant la


délivrance de brevet d’invention, le certificat d’addition ou des améliorations.

• L’avis documentaire est un document prévu par certaines législations telles que celle
de la France depuis 1990. Il se rattache à une procédure facultative postérieure à la
délivrance de brevet, et ce, à la demande de toute personne désirant s’informer sur
les antériorités afin d’apprécier le caractère de nouveauté et l’activité inventive.

14 Guide sur le brevet d’invention


Ce dernier titre revêt une grande importance, car c’est une sorte d’expertise servant à
valoriser le brevet ou le certificat d’addition. De plus, il constitue un facteur permettant de
mener à bien les négociations relatives à l’octroi des licences.

Dans le cadre de l’amélioration et de la mise à niveau du système d’enregistrement des


brevets au Maroc, des études sont en cours d’élaboration à l’OMPIC.

Parmi les propositions pouvant être retenues, il existe un système intermédiaire entre le
système d’enregistrement actuel (loi n° 17-97) et un système d’examen élaboré de breve-
tabilité qui nécessiterait des ressources conséquentes en examinateurs et agents adminis-
tratifs à l’OMPIC.

Ce système intermédiaire - similaire à ce qui est en vigueur dans certains pays européens
(France, Belgique...) - peut révéler des caractéristiques importantes, dont :

• l’établissement d’un rapport de recherche obligatoire afin d’élever la qualité et la


validité juridique des brevets délivrés ;

• l’établissement d’une opinion sur la brevetabilité de l’invention revendiquée, qui est


une pratique courante, par exemple dans la procédure internationale (PCT) depuis
le 1er janvier 2004 et dans la procédure européenne depuis le 1er juillet 2005 ;

• la possibilité de modifier des revendications après recherche ;

• la possibilité de rejet de la demande.

Guide sur le brevet d’invention 15


1.4. R
 elation du brevet avec les autres titres de propriété
intellectuelle et concepts voisins
La famille des droits de propriété intellectuelle regroupe, d’une part, les droits de propriété
industrielle et, d’autre part, les droit d`auteur et droits voisins (droits de propriété littéraire et
artistique). Le brevet présente des particularités qui le distinguent de chacune de ces deux
catégories de droit. En revanche, il offre des ressemblances avec d’autres concepts - aussi
ces concepts sont-ils voisins.

1.4.1. D
 roit sur le brevet et autres droits de propriété intellectuelle

Le système de protection des brevets diffère de ceux des schémas de configuration topo-
graphique de circuits intégrés, des dessins et modèles industriels ou des marques.

a) Schéma de configuration (ou topographie) de circuits intégrés


Selon la loi n° 17.97 (art. 90), le schéma de configuration (ou topographie) est la
disposition tridimensionnelle, quelle que soit son expression, des éléments, dont l’un au
moins est un élément actif, et de tout ou partie des interconnexions d’un circuit intégré, ou
une telle disposition tridimensionnelle préparée pour un circuit intégré destiné à être fabriqué ;
tandis que le circuit intégré est un produit, sous sa forme finale ou sous une forme intermé-
diaire, dans lequel les éléments, dont l’un au moins est un élément actif, et tout ou partie des
interconnexions font partie intégrante du corps et/ou de la surface d’une pièce de matériau
et qui est destiné à accomplir une fonction électronique.

Le brevet d’invention et les schémas de configuration (ou topographies) de circuits intégrés


sont régis par des règles similaires. L’article 93 prévoit que les dispositions relatives au
brevet des chapitres II et III du titre II de cette loi s’appliquent aux schémas de configuration
(ou topographies) de circuits intégrés, sous réserve des dispositions particulières à ce droit
introduites par les articles 94 à 103. Parmi ces différences, on peut signaler la durée de
protection, qui n’est que de 10 ans pour les schémas de configuration (ou topographies)
de circuits intégrés à partir de la date de dépôt de leur demande (art. 94).

b) Dessin ou modèle industriel


Un dessin ou modèle industriel d’un objet utile - produit industriel ou artisanal - est consti-
tué des éléments de cet objet ayant trait à son apparence ornementale ou esthétique. Au
sens de la loi n° 17.97, un dessin industriel est tout assemblage de lignes ou de couleurs,
alors qu’un modèle industriel est toute forme plastique, associée ou non à des lignes ou à
des couleurs ; pourvu que cet assemblage ou cette forme donne une apparence spéciale
à un produit industriel ou artisanal et puisse servir de type pour la fabrication d’un produit
industriel ou artisanal.

Le dessin ou modèle industriel doit se différencier de ses similaires soit par une configuration
distincte et reconnaissable lui conférant un caractère de nouveauté telle que définie par
l’article 105, soit par un ou plusieurs effets extérieurs lui donnant une physionomie propre
et nouvelle (art. 104). Leur protection est subordonnée au dépôt et à l’enregistrement
auprès de l’OMPIC (art. 112).

16 Guide sur le brevet d’invention


La principale différence entre la protection d’un dessin ou modèle industriel et celle d’une
invention par brevet réside dans le fait que la première concerne l’apparence d’un objet
utile indépendamment de ses aspects fonctionnels, alors que la seconde s’intéresse au
contenu technique et fonctionnel d’un objet ou processus, qui doit avoir un caractère
inventif. Une autre différence, non moins importante, est liée à leurs coûts ; en effet, la
conception et la protection d’un dessin ou modèle industriel sont peu onéreuses, compa-
rées à celles des inventions.

Lorsqu’un objet peut être considéré à la fois comme une invention brevetable et comme
un nouveau dessin ou modèle industriel susceptible d’acquérir ce droit, l’article 108 prévoit
que cet objet ne peut être protégé que conformément aux dispositions applicables aux
brevets d’invention si les éléments constitutifs de la nouveauté du dessin ou modèle indus-
triel sont inséparables de ceux de l’invention.

Si la législation marocaine attribue, sous réserve des dispositions de l’article 18, la


propriété d’une invention à celui qui en a déposé la demande en premier ou à ses ayants
droit, elle accorde la propriété d’un dessin ou modèle industriel à son créateur ou à ses
ayants droit, sauf que le premier déposant dudit dessin ou modèle est présumé, jusqu’à
preuve du contraire, en être le créateur sous réserve des dispositions de l’article 107.

La Cour Suprême a décidé que le premier déposant d’un dessin ou modèle est présumé
en être l’inventeur, mais cette présomption est susceptible d’être infirmée par preuve
contraire (arrêt de la Cour Suprême n° 743, 1er décembre 1983, dossier n° 91362,
Édition de la Cour Suprême, droit commercial 1970 1997, p. 29).

Un dessin ou modèle industriel est protégé durant cinq ans à compter de la date de dépôt,
renouvelables deux fois de suite dans les conditions définies par l’article 122.

c) Marque
La marque de fabrique, de commerce ou de service peut être définie comme tout signe
susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une
personne physique ou morale. Le législateur a cependant interdit toute marque susceptible
de créer une confusion dans l’esprit du consommateur, telle une marque constituant égale-
ment le titre d’une invention utilisée par son titulaire comme signe pour la commercialiser.

À la différence du brevet dont la durée de protection est généralement limitée à 20 ans,


la marque, grâce à la possibilité de renouvellement indéfini de son enregistrement, peut
être protégée aussi longtemps que le souhaite le titulaire.

d) Droit d’auteur
Le système de protection des brevets diffère aussi de celui des droit d’auteur et droits voisins
que régit la loi n° 02-00 promulguée par le dahir n° 1-00-20 du 15 février 2000.

L’objet du droit d’auteur est la protection des œuvres littéraires et artistiques. Selon la loi
n° 02-00, tout auteur bénéficie des droits prévus dans cette loi sur son œuvre littéraire ou
artistique. La protection commence dès la création de l’œuvre, même si celle-ci n’est pas

Guide sur le brevet d’invention 17


fixée sur un support matériel. Elle est indépendante du mode ou de la forme d’expression,
ainsi que de la qualité et du but de l’œuvre.

L’article 3 de cette loi énumère les œuvres littéraires et artistiques telles que : les œuvres
exprimées par écrit ; les programmes d’ordinateur ; les conférences, allocutions, sermons
et autres œuvres faites de mots ou exprimées oralement ; les œuvres musicales, qu’elles
comprennent ou non des textes d’accompagnement ; les œuvres dramatiques et dramatico-
musicales ; les œuvres chorégraphiques et pantomimes ; les œuvres audiovisuelles, y compris
les œuvres cinématographiques et le vidéogramme ; les œuvres des beaux-arts, y compris
les dessins, les peintures, les gravures, les lithographies, les impressions sur cuir et toute
autre œuvre des beaux arts ; les œuvres d’architecture ; les œuvres photographiques ; les
œuvres des arts appliqués ; les illustrations, les cartes géographiques, les plans, les croquis
et les œuvres tridimensionnelles relatives à la géographie, la topographie, l’architecture ou
la science ; les expressions du folklore et les œuvres inspirées du folklore ; et les dessins des
créations de l’industrie de l’habillement.

Il s’agit des œuvres originales, et non des idées, relevant des domaines littéraire, scientifi-
que et artistique sous n’importe quelle forme ou mode d’expression, et ce, quel que soit leur
mérite littéraire, scientifique ou artistique.

L’auteur d’une œuvre jouit de droits patrimoniaux et moraux. Sauf disposition contraire de
la loi n° 02-00, les droits patrimoniaux sont protégés pendant la vie de l’auteur et 50 ans
après sa mort. Les droits moraux, eux, sont illimités dans le temps ; ils sont imprescriptibles,
inaliénables et transmissibles à cause de mort aux ayants droit.

Un titulaire du droit d’auteur bénéficie de l’exclusivité d’utilisation de l’œuvre protégée, en


jouissant notamment des trois droits patrimoniaux suivants :

• Le droit de reproduction (copyright) : Il concerne la reproduction des écrits par


n’importe quel moyen : photocopie, impression d’un texte, copie sur cassette, disque
compact, disquette ou cédérom.

• Le droit de représentation ou d’exécution : Il a trait à l’exécution de l’œuvre


protégée devant un public comportant des personnes en dehors du cercle familial et de
son entourage proche : représentation d’une pièce théâtrale, interprétation d’une chanson
par un chanteur ou au moyen d’un enregistrement, etc. Les droits de radiodiffusion et de
communication au public par diffusion d’un signal par fil ou par câble relèvent aussi du
droit de représentation ou d’exécution.

• Le droit de traduction et d’adaptation : Toute traduction d’une œuvre de la


langue d’origine vers une autre langue nécessite l’autorisation du titulaire du droit d’auteur
de cette œuvre. L’œuvre traduite est, elle aussi, protégée par le droit d’auteur ; l’utiliser
nécessite l’autorisation du titulaire du droit d’auteur de l’œuvre d’origine et du titulaire
de celui de l’œuvre traduite. Quant à l’adaptation des œuvres, elle consiste en leur
modification pour en faire de nouvelles œuvres : adapter un roman en film, un livre
d’histoire en émission documentaire, etc. Et le droit d’adaptation est comparable au
droit de traduction.

18 Guide sur le brevet d’invention


e) Droits voisins
Les droits voisins, appelés aussi droits connexes, sont aussi régis par la loi n° 02 00. Ils ont
pour objet la protection des intérêts des personnes ou organismes qui œuvrent pour la
communication au public des œuvres littéraires et artistiques protégées par le droit d’auteur.

Les trois catégories suivantes en sont bénéficiaires :

• les artistes interprètes ou exécutants comme les musiciens, les chanteurs, les
danseurs, les acteurs de théâtre ou de cinéma…

• les producteurs d’enregistrements, qui rendent les sons enregistrés accessibles au


public sur des supports commerciaux tels que les bandes magnétiques, les cassettes
ou les disques compacts ;

• les organismes de radiodiffusion.

1.4.2. Autres concepts voisins

a) Concurrence déloyale
Au sens de l’article premier de la loi n° 17.97, la protection de la propriété industrielle a
pour objet les brevets d’invention et la répression de la concurrence déloyale. Ainsi, tant
que les éléments d’un acte de concurrence se révèlent contraires aux usages honnêtes en
matière industrielle ou commerciale, celui-ci est considéré comme un acte de concurrence
déloyale soumis aux dispositions des articles 184 et 185.
Rentrent notamment dans la sphère des dispositions de ces deux articles :

• les allégations fausses dans l’exercice du commerce de nature à discréditer


l’établissement, les produits ou l’activité industrielle ou commerciale d’un concurrent ;

• les fausses allégations de nature, à discréditer dans le domaine de commerce, dans


l’exercice du commerce, à discréditer l’établissement, les produits ou l’activité indus-
trielle ou commerciale d’un concurrent ;

• les indications ou allégations susceptibles, dans l’exercice du commerce, d’induire le


public en erreur sur la nature, le mode de fabrication, les caractéristiques, l’aptitude
à l’emploi ou la quantité de marchandises.

b) Fonds de commerce
Le fonds de commerce est un bien meuble incorporel constitué par l’ensemble des biens
mobiliers réservés à l’exercice d’une activité commerciale. Le brevet d’invention est un
élément parmi d’autres pouvant faire partie du fonds.
De ce fait, il représente une partie inséparable du capital de l’entreprise qui exploite le
fonds de commerce.

L’article 80 du code de commerce dispose que « le fonds de commerce comprend obliga-


toirement la clientèle et l’achalandage.

Guide sur le brevet d’invention 19


Il comprend aussi, tous autres biens nécessaires à l’exploitation du fonds tels que […] les
brevets d’invention […] et, généralement, tous droits de propriété industrielle , littéraire ou
artistique qui y sont attachés. »

En cas de vente du fonds de commerce l’article 90 ajoute au sujet des brevets d’invention
que « les brevets d’invention, […] compris dans la vente d’un fonds de commerce demeu-
rent, en ce qui concerne leur mode de transmission, régis par la législation relative à la
protection de la propriété industrielle …

c) Secret
 industriel, commercial, d’affaires ou de fabrique
Toutes les entreprises commerciales ou industrielles, des plus petites aux plus grandes,
disposent de procédés, de formules de fabrication, d’innovations, de secrets ou d’autres
informations qui leur procurent un avantage pratique, commercial ou stratégique,
et qu’elles désirent garder secrets. Il s’agit du secret dit « industriel », « commercial »,
« d’affaires » ou « de fabrique ».

Beaucoup de moyens pratiques et juridiques existent pour protéger le secret d’affaires.


Il peut notamment l’être en prenant des mesures pratiques contre sa divulgation, par
exemple par une bonne gestion de la confidentialité.

Aux États-Unis, dans la plupart des États, des législations visent directement le secret
d’affaire (trade secret law). En vertu de ces lois, le propriétaire qui prend les mesures
appropriées et raisonnables pour préserver la confidentialité de l’information bénéficie
de la protection de son secret d’affaires contre tout détournement. Aussi peut-il saisir
le juge pour interdire à une partie de commencer ou continuer à exploiter ou divulguer
l’information, et l’obliger à remettre ou détruire des informations relevant du secret
commercial. Il peut également obtenir des dommages-intérêts du défendeur.

La loi marocaine ne prévoit pas de dispositions particulières visant directement le secret


d’affaires. Cela dit, conformément aux règles générales prévues par l’article 184 de la loi
n° 17.97, il existe la possibilité de l’action en concurrence déloyale, et le Code pénal ma-
rocain, à travers son article 447, sanctionne toute divulgation du secret de fabrique. La
jurisprudence marocaine estime que les secrets de fabrique et d’affaires sont constitués
par tout moyen conférant un avantage pratique et commercial créé par un fabricant ou
commerçant, tout en veillant à garder son secret (Cour d’appel de commerce de Marra-
kech, 29 octobre 2002, dossier n° 498/10/02).

Lorsque les conditions de brevetabilité sont satisfaites, un secret peut être protégé par
le brevet d’invention, mais il perd alors évidemment sa qualité de secret. En fait, pour
préserver les informations sur une invention, un choix judicieux doit être opéré entre le
secret ou le dépôt d’une demande de brevet.

20 Guide sur le brevet d’invention


Analyser les formes mêmes d’exploitation de ce savoir-faire peut grandement contribuer à
définir une telle stratégie en prenant en compte la nécessité ou non de divulguer ce savoir-
faire du fait de son exploitation. Des stratégies mixtes secret/brevet peuvent également voir
le jour, mais en prenant garde à ce que la description des brevets délimite précisément les
informations devant être révélées pour lui donner une consistance.

En France, le savoir-faire recouvre les tours de mains, les procédés, les formules
de fabrication, les secrets de fabrique, les méthodes de gestion et les innovations
commerciales ou techniques non rendus publics. À la différence du brevet d’invention,
le savoir-faire ne confère pas de droit de propriété intellectuelle exclusif et opposable
à tous. Le détenteur du savoir-faire ne peut ni se prévaloir d’un quelconque monopole
d’exploitation, ni s’opposer à ce que des concurrents obtiennent de manière honnête
un savoir-faire identique, voire déposent une demande de brevet dans le cas d’une
invention brevetable.
Néanmoins, la loi française sanctionne les actes de détournement ou de divulgation de
savoir-faire, notamment à l’occasion d’une action en concurrence déloyale ou parasi-
taire, ou d’une action pénale relative a la violation du secret de fabrique ou du secret
professionnel.

d) Protection des obtentions végétales


La protection des obtentions végétales répondant à un certain nombre de critères est oc-
troyée, pour une période définie, aux obtenteurs afin de reconnaître leur créativité et de les
encourager à développer de nouvelles variétés susceptibles d’améliorer les rendements et
la qualité des plantes pour l’agriculture, l’horticulture et la sylviculture. Elle est assurée au
Maroc par la loi n° 9-94.

Pour qu’une obtention végétale puisse être protégée, elle doit satisfaire à cinq conditions,
dont deux d’ordre juridique ou administratif : (1) la nouveauté, à vérifier en s’assurant que
la variété n’a pas été déjà commercialisée ; (2) la dénomination appropriée, qui deviendra
sa dénomination générique. Les trois autres sont des critères d’évaluation technique à
faire valider par un expert : (3) la distinction, qui permet de s’assurer que la variété
est très différente de celles déjà connues jusqu’à la date du dépôt de la demande ; (4)
l’homogénéité, vérifiant que la variété est suffisamment uniforme dans ses caractères
pertinents ; (5) la stabilité, qui indique que ces derniers restent inchangés à la suite des
reproductions et multiplications successives.

À l’instar du rôle joué par l’OMPI pour la protection des autres aspects de la propriété
intellectuelle, l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) -
à laquelle le Maroc adhère - est, comme son nom l’indique, chargée de la protection de
la propriété intellectuelle liée aux obtentions végétales.

Guide sur le brevet d’invention 21


Section 2 : Que peut-on breveter ?
Pour qu’une invention puisse être protégée par un brevet et prétendre bénéficier des droits
conférés par ce titre, elle doit tout d’abord porter sur un objet brevetable, puis satisfaire
aux conditions de brevetabilité exigées par la loi, soit :

• être susceptible d’application industrielle ;

• être nouvelle ;

• impliquer une activité inventive.

En plus de ces conditions caractéristiques de la brevetabilité, généralement indiquées


dans les lois sur les brevets des pays, d’autres conditions, quant au fond, sont aussi
exigées : l’une d’elles dispose que, dans la demande de brevet, l’invention doit être
divulguée de manière suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier, sans
expérimentation excessive, puisse l’exécuter (telle que connue de l’inventeur le jour du
dépôt de la demande de brevet).

La présente section est consacrée à l’analyse détaillée de chacune de ces conditions à la


lumière des législations nationale et étrangère en matière de brevets.

2.1. Objets brevetables


L’article 21 de la loi n° 17.97 précise que l’invention peut porter sur des produits, sur des
procédés et sur toute application nouvelle ou une combinaison de moyens connus pour
arriver à un résultat inconnu par rapport à l’état de la technique, de même que sur des
compositions pharmaceutiques, des produits pharmaceutiques ou remèdes de toute espèce
y compris les procédés et appareils servant à leur obtention.

En pratique, les objets brevetables sont identifiables en se référant à une liste


d’objets non brevetables.

Ainsi, selon l’article 23, ne sont pas considérés comme des inventions ces éléments, pris
séparément les uns des autres :

a) les découvertes ainsi que les théories scientifiques et les méthodes mathématiques ;

b) les créations esthétiques ;

c) les plans, principes et méthodes dans l’exercice d’activités intellectuelles en matière


de jeu ou dans le domaine des activités économiques, ainsi que les programmes
d’ordinateurs ;

d)les présentations d’informations.

22 Guide sur le brevet d’invention


À cette liste s’ajoutent les inventions non brevetables définies par deux articles :

• l’article 24 :

a) les inventions dont la publication ou la mise en œuvre serait contraire à l’ordre public
ou aux bonnes mœurs,

b ) les obtentions végétales qui sont soumises aux dispositions de la loi n° 9.94 sur la
protection des obtentions végétales ;

• l’article 25 :

les méthodes de traitement chirurgical ou thérapeutique du corps humain ou animal et


les méthodes de diagnostic appliquées au corps humain ou animal. Cette disposition ne
s’applique pas aux produits, notamment aux substances ou compositions, pour la mise
en œuvre d’une de ces méthodes.

Les dispositions de la législation nationale relatives aux objets brevetables sont conformes
à l’Accord sur les ADPIC, notamment à son article 27 qui prévoit, d’une part, qu’un brevet
pourra être obtenu pour toute invention, de produit ou de procédé, dans tous les domaines
technologiques - art. 27(1) - et d’autre part, que les Membres pourront exclure de la breve-
tabilité les inventions portant atteinte à l’ordre public, à la moralité, à la santé des personnes
et des animaux, aux végétaux ou à l’environnement - art. 27(2), les méthodes diagnostiques,
thérapeutiques et chirurgicales pour le traitement des personnes ou des animaux - art. 27(3)
(a) - ainsi que les végétaux et les animaux autres que les micro-organismes, et les procédés
essentiellement biologiques d’obtention de végétaux ou d’animaux, autres que les procédés
non biologiques et microbiologiques - art. 27(3)(b).

2.2. Application industrielle


L’article 28 de la loi n° 17.97, telle que modifiée et complétée par la loi n° 31 05, considère
une invention comme étant susceptible d’application indus trielle lorsqu’elle présente
une utilité spécifique, substantielle et crédible.
Selon cette définition, il ne suffit pas que l’objet de l’invention puisse être fabriqué indus-
triellement ; il doit présenter un intérêt substantiel et crédible ; autrement dit, l’utilité d’une
invention doit être connue au moment du dépôt de la demande de brevet.

Cette signification a été adoptée par l’Accord sur les ADPIC - art. 27 - et celui de libre-
échange entre le Maroc et les États-Unis - art. 15.9(11)(b). La version initiale de la loi
n° 17.97 prévoyait, dans son article 28, une invention comme étant susceptible d’application
industrielle si son objet peut être fabriqué ou utilisé dans tout genre d’industrie, y compris
l’agriculture.

Guide sur le brevet d’invention 23


La loi fédérale américaine impose l’utilité (usefulness) d’un produit comme condition
de brevetabilité - 35 US Code 101 Inventions patentable - Patent Laws. La définition
de l’utilité est établie par la jurisprudence. Par exemple, pour satisfaire la brevetabilité
d’un procédé chimique, il est nécessaire de montrer l’utilité du produit correspondant ;
un produit encore en cours d’étude scientifique, mais qui appartient à une catégorie
de produits efficaces pour inhiber les tumeurs chez la souris, a été jugé non utile par la
Cour Suprême - v. Brenner v. Manson, 383 US 519 (1966).

En France, il a été jugé que la condition d’application industrielle requise par l’article
L611 15 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) est remplie dès lors que l’objet de
l’invention est réalisable, peu importe le caractère éventuellement imparfait du résultat
obtenu (Cour d’appel de Paris, 4e ch., sect. A, 20 septembre 2006, RG n° 2005/14964,
PIBD n° 841 III 768).

2.3. Nouveauté
Selon l’article 26 de la loi n° 17.97 : Une invention est considérée comme nouvelle si elle
n’est pas comprise dans l’état de la technique. L’état de la technique est constitué, selon ce
même article, par tout ce qui a été rendu accessible au public par une description écrite ou
orale, un usage ou tout autre moyen, avant la date de dépôt de la demande de brevet au
Maroc ou d’une demande de brevet déposée à l’étranger et dont la priorité est valablement
revendiquée.

D’après cette définition, l’état de la technique est constitué de toute information divulguée
n’importe où dans le monde - et pas seulement sur le territoire national - et par n’importe
quel moyen : expression écrite (demande de brevet antérieure, brochure commerciale,
publication dans des revues scientifiques ou technologiques, article ou communiqué de
presse, etc.), expression orale (communication publique lors d’un cours ou d’un séminaire,
présentation à un salon d’exposition, sur une foire ou dans n’importe quel lieu public) ou
usage public.

À ce niveau, une question peut être formulée :

une demande de brevet en instance (déposée, mais pas encore publiée), du fait qu’elle n’a
pas encore été rendue publique, fait-elle partie de l’état de la technique ?

Selon la Cour Suprême des États-Unis, en droit américain, la réponse est « oui » : une demande
de brevet déposée fait partie de l`état de la technique, même si elle n’est pas encore
divulguée - Hazeltine Research V. Brenner, 383 US 252 (1965).

Des dérogations à l’application de l’article 26 précité, relatives à la divulgation des


inventions, sont prévues par l’article 27 dans trois cas décrits ci-après.

24 Guide sur le brevet d’invention


2.3.1. P
 remier cas de dérogation : le délai de grâce

La divulgation de l’invention n’est pas prise en considération si elle a lieu dans les douze
mois précédant la date du dépôt de la demande de brevet d’invention et a été effectuée,
autorisée ou obtenue du titulaire de la demande de brevet d’invention - art. 27(1) de la loi
n° 17.97. Ce délai de grâce permet aux titulaires d’une invention d’envisager la négociation
de partenariats avec des tiers, et aux chercheurs de présenter leurs résultats dans des
colloques et congrès ou de les publier dans des revues scientifiques ou technologiques
avant l’éventuel dépôt de la demande de brevet.

Mais l’avantage qu’il confère doit être confronté à la prise de risque de se voir refuser
la délivrance du brevet ou limiter les droits qui lui sont associés dans un pays étranger
n’accordant pas un tel délai.

Pour mieux comprendre ce délai de grâce, qui n’était que de six mois dans la version initiale
de la loi n° 17.97, il y a lieu d’examiner les dispositions correspondantes de la Convention de
Paris. Mis à part celles de son article 11, se rapportant à la protection de la propriété industrielle
qu’accordent temporairement les pays de l’Union de Paris aux inventions divulguées lors des
expositions internationales (voir le troisième cas de dérogation présenté ci-dessous), aucune
autre ne concerne les délais de grâce pour la divulgation des inventions.

Néanmoins, le Maroc étant membre de l’Union, tout dépôt national régulier peut faire
bénéficier le demandeur d’un droit de priorité de 12 mois pour déposer une demande de
brevet dans n’importe quel autre pays membre. En effet, l’article 4.A.2 de cette convention
reconnaît comme donnant naissance au droit de priorité tout dépôt ayant la valeur d’un
dépôt national régulier, en vertu de la législation nationale de chaque pays de l’Union ou de
traités bilatéraux ou multilatéraux conclus entre des pays de l’Union. L’article 4.A.3 définit
ensuite un dépôt national régulier comme étant : tout dépôt qui suffit à établir la date à
laquelle la demande a été déposée dans le pays en cause, quel que soit le sort ultérieur de
cette demande, tandis que l’article 4.B précise que les droits acquis par des tiers avant le
jour de la première demande qui sert de base au droit de priorité sont réservés par l’effet
de la législation intérieure de chaque pays de l’Union.

Il apparaît donc que si le droit de priorité n’empêche pas le déposant d’une demande de
brevet au Maroc bénéficiant du délai de grâce de déposer des demandes de brevet dans
d’autres pays de l’Union, l’exploitation de l’invention par des tiers à l’étranger, avant la
date de la première demande, peut être provoquée par la divulgation pendant la période
de grâce non accordée par les pays concernés. Par conséquent, le risque de perte de
droits de brevet dans ces pays existe, et il est de taille. Une évaluation plus précise de ce
risque est décrite plus loin, dans le cadre de l’examen du troisième cas de dérogation.

2.3.2. Deuxième cas de dérogation : l’abus de droit

La divulgation de l’invention n’est pas prise en considération si elle résulte de la


publication, après la date du dépôt de la demande de brevet, d’une demande de brevet
d’invention antérieure qui résulte directement ou indirectement d’un abus évident à l’égard
du demandeur ou de son prédécesseur en droit - art. 27(2) de la loi n° 17.97.

Guide sur le brevet d’invention 25


Un tel abus peut par exemple se présenter si le titulaire de la demande antérieure n’est
pas le vrai propriétaire de l’invention. Aussi, pour pouvoir justifier de l’antériorité, une
règle de bonne pratique est de faire usage d’un cahier de laboratoire permettant d’établir
la traçabilité des travaux qui ont conduit à l’invention.

L’effet de cette mesure législative sur le dépôt de demandes de brevet à l’étranger peut
être déduit de l’examen de l’article 4.C.4 de la Convention de Paris : Doit être considérée
comme première demande dont la date de dépôt sera le point de départ du délai de prio-
rité, une demande ultérieure ayant le même objet qu’une première demande antérieure …
déposée dans le même pays de l’Union, à la condition que cette demande antérieure, à la
date du dépôt de la demande ultérieure, ait été retirée, abandonnée, ou refusée, sans avoir
été soumise à l’inspection publique et sans laisser subsister de droits, et qu’elle n’ait pas
encore servi de base pour la revendication du droit de priorité.

Ainsi, la non-prise en considération de la divulgation décrite par l’article 27(2) précité ne


peut être validée pour une revendication du droit de priorité que si la demande antérieure
remplit les conditions suivantes :

• Elle n’a pas été soumise à l’inspection publique, c’est-à-dire qu’elle n’a pas été publiée.

• Elle n’a pas laissé subsister de droits.

• Elle n’a pas encore servi de base pour la revendication du droit de priorité.

La première condition ci-dessus ne peut pas être satisfaite car l’origine de la divulgation
considérée dans l’article 27(2) est la publication de la demande antérieure. Autrement dit,
la demande ultérieure mentionnée dans cet article ne pourra jamais faire l’objet d’une
demande dans un pays étranger membre de l’Union de Paris.

2.3.3. Troisième cas de dérogation : l ’exposition internationale officielle ou


officiellement reconnue

La divulgation de l’invention n’est pas prise en considération du fait que l’invention a été
présentée pour la première fois par le demandeur ou son prédécesseur en droit dans des
expositions internationales officielles ou officiellement reconnues, organisées sur l’un des ter-
ritoires de l’Union internationale pour la propriété industrielle.

Toutefois, dans ce […] cas, l’exposition de l’invention doit être déclarée lors du dépôt de la
demande - art. 27(3) de la loi n° 17.97.

La dérogation relative aux expositions internationales, telle que définie ci-dessus,


consomme le délai de priorité. En effet, si le délai de priorité commence à courir à partir
du moment de la divulgation dans les conditions de l’article 27(3), tout retard du dépôt
de la demande par rapport à cette date est retranché du droit de priorité de 12 mois
normalement compté à partir de la date du dépôt. Le système marocain des brevets est
celui qui présente, en ce sens, le plus de possibilités d’application de ce délai.
Si cette situation peut être considérée comme confortable par les déposants étrangers de

26 Guide sur le brevet d’invention


demandes de brevets marocains, elle doit être exploitée avec beaucoup de précautions par
les déposants marocains effectuant leur premier dépôt au Maroc. Elle peut assurément être
perçue comme une facilité de protection sur le territoire marocain, mais peut également,
pour la même invention, être à l’origine d’un refus de protection par brevet sur un territoire
étranger qui n’accorde pas les mêmes facilités relatives au délai de grâce.

2.3.4. D
 ocument détruisant la nouveauté

Pour qu’un document faisant partie de l’état de la technique puisse détruire la nouveauté
d’une invention revendiquée, celui-ci doit comporter cette invention de manière explicite.
Aussi, lors de l’examen de la nouveauté, chaque revendication est comparée, élément par
élément, avec les documents de l’état de la technique mentionnant ladite revendication.
Un document détruit la nouveauté d’une revendication si et seulement s’il contient de ma-
nière explicite toutes les caractéristiques cette revendication. Cependant, la destruction de
la nouveauté peut aussi avoir lieu si les caractéristiques de l’invention sont implicitement
déduites d’un même document par l’office des brevets. Donc, si ces caractéristiques se
trouvent réparties dans plusieurs documents différents, la nouveauté de la dite revendica-
tion n’est pas considérée comme étant détruite.

Selon la jurisprudence française, pour détruire la nouveauté d’une revendication, l’antériorité


se doit d’être totale, c’est-à-dire révéler l’invention dans la structure qui lui est propre et
reproduire les éléments la composant dans le même agencement (Cour d’appel de Paris,
4e ch., sect. A, 20 septembre 2006, RG n° 2005/14964, PIBD n° 841- III-768).

Il est important de signaler que la destruction de la nouveauté d’une invention est parfois
provoquée par l’inventeur lui-même en raison de sa méconnaissance de la législation
relative aux brevets. Ainsi, la nouveauté est détruite si l’invention est rendue accessible à
des personnes non autorisées ou non tenues par un engagement de confidentialité.

En effet, l’entreposage d’une invention ou de l’un de ses éléments dans un lieu librement
accessible est considéré comme une divulgation de cette invention. Il en est de même
d’une demande de devis comportant les éléments d’une invention sans spécifier la mention
« document confidentiel », ou d’essais réalisés dans des conditions non confidentielles.

L’inventeur a tout intérêt à prendre les précautions nécessaires pour protéger la nouveauté de
son invention. Aussi doit-il faire signer un engagement de confidentialité à toutes les personnes
susceptibles d’y avoir accès - employés, sous-traitants, fournisseurs, partenaires intervenant
dans l’exploitation de l’invention, etc. - afin de se munir de preuves suffisantes à faire valoir, en
cas de rupture de confidentialité, contre une divulgation abusive de l’invention.

Il est à souligner que la jurisprudence française a considéré que le fait d’utiliser la même
référence pour commercialiser un produit avant et après le dépôt d’un brevet est inopérant
pour établir une identité dans la composition chimique du produit, et ne peut, de ce fait être
destructeur de nouveauté. En effet, il est fréquent, en matière commerciale, de ne conser-
ver qu’une référence pour un produit dont les caractéristiques évoluent (Cour d’appel de
Paris, 4e ch., sect. A, 10 janvier 2007, RG n° 2004/16096, PIBD n° 847 III 139).

Guide sur le brevet d’invention 27


2.4. Activité inventive
La condition d’implication d’une activité inventive (aussi connue sous l’appellation de la
non-évidence de l’invention) est définie par l’article 26 de la loi n° 17.97 comme suit : Une
invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du
métier, elle ne découle pas de manière évidente de l’état de la technique.

Cette condition de brevetabilité des inventions, qui pose le plus de difficultés à l’examen
quant au fond des brevets pour les pays qui le pratiquent, est conçue de manière à ne dé-
livrer un brevet d’invention que pour une réalisation impliquant un réel travail de création
et d’inventivité, et non pour une amélioration pouvant être déduite aisément de l’état de la
technique par une personne possédant une compétence normale dans le métier concerné.

Les difficultés liées à cette condition sont également constatées dans les pays qui, tel le
Maroc, optent pour le système d’enregistrement sans examen, et ce, lors d’une contesta-
tion sur l’existence de l’activité inventive.

La loi n° 17.97 n’a pas donné de définition de l’« homme du métier ». Cependant, pour
définir l’étendue des connaissances de ce terme, on peut se référer aux législations et
jurisprudences étrangères. Ainsi, par exemple, l’homme du métier en thermique est
quelqu’un qui connaît les lois de transfert de chaleur bien décrites dans les ouvrages
spécialisés de thermique, mais qui n’a pas les connaissances à jour par rapport aux
résultats de recherche récemment publiés dans les revues scientifiques, et non encore
répertoriés dans les livres spécialisés en thermique.

D’après les Directives relatives à l’examen pratiqué à l’Office européen des brevets
(OEB) : L’« homme du métier » s’entend d’un praticien d’un domaine technologique
normalement qualifié, qui possède les connaissances générales dans le domaine concerné
à une date donnée. Il est également censé avoir eu accès à tous les éléments de l’état de
la technique - notamment les documents cités dans le rapport de recherche - et avoir eu
à sa disposition les moyens et la capacité dont on dispose normalement pour procéder
à des travaux et expériences courants. Si le problème suggère à l’homme du métier de
rechercher la solution dans un autre domaine technique, le spécialiste compétent pour
trouver la solution est le spécialiste dans ce domaine. En conséquence, les connaissances
et les possibilités de ce spécialiste doivent être prises comme base pour apprécier si la
solution implique une activité inventive […]. Il peut parfois être plus approprié de faire
appel à un groupe de personnes, tel qu’une équipe de recherche ou de production, plutôt
qu’à une seule personne. Cela peut être le cas, par exemple, pour certaines technologies
avancées, telles que les ordinateurs ou les systèmes de téléphone, ou en ce qui concerne
des procédés hautement spécialisés, tels que la production commerciale de circuits
intégrés ou de substances chimiques complexes - directive C IV, 13.1.

Comme la nouveauté, l’activité inventive est définie par rapport à l’état de la technique.
Néanmoins, les deux concepts diffèrent. Alors que la condition de nouveauté exige que
les caractéristiques de l’invention revendiquée ne soient pas toutes contenues dans un
seul document de l’état de la technique (par document, il faut entendre ici tout moyen
de divulgation par expression écrite ou orale ou par usage). La condition d’implication

28 Guide sur le brevet d’invention


de l’activité inventive, quant à elle, n’est pas remplie si, en combinant les informations
contenues dans des documents de l’état de la technique, un homme du métier, doté
de compétences ordinaires dans son domaine, déduit de manière évidente l’invention
revendiquée.

Autrement dit, il n’y a implication de l’activité inventive que si l’invention revendiquée


constitue un progrès significatif par rapport à l’état de la technique dans sa globalité. Bien
entendu, l’examen relatif à la condition sur l’activité inventive ne doit être envisagé que si
la condition de nouveauté est satisfaite. En effet, il ne peut pas y avoir activité inventive si
la nouveauté fait défaut.

Pour établir l’absence du caractère inventif d’une revendication d’une invention, il ne suffit
pas de montrer que tous les éléments caractéristiques de cette revendication se trouvent
dans une combinaison de documents de l’état de la technique.

Il faut aussi prouver que la combinaison de ces éléments caractéristiques en ladite reven-
dication n’exige pas un effort significatif de la part d’un homme du métier.

Il est utile de citer, parmi les Directives relatives à l’examen pratiqué à l’OEB, la C IV,
11.5 qui porte sur la combinaison, la juxtaposition ou l’assemblage de caractéristiques
d’une invention : L’invention revendiquée doit normalement être considérée comme un
tout. Lorsqu’une revendication consiste en une « combinaison de caractéristiques », il
n’est pas correct d’alléguer que les caractéristiques séparées de la combinaison, prises
individuellement, sont connues ou évidentes, et que par conséquent, l’objet indiqué dans
son ensemble est évident.

Toutefois, lorsque la revendication est un « simple assemblage » ou une « simple


juxtaposition de caractéristiques », et non pas une véritable combinaison, il
suffit de montrer que les caractéristiques individuelles sont évidentes pour prouver que
l’assemblage des caractéristiques n’implique pas une activité inventive […]. Un ensemble
de caractéristiques techniques représente une combinaison de caractéristiques si
l’interaction fonctionnelle entre les caractéristiques produit un effet technique combiné
qui est différent, par exemple allant au-delà de la somme des effets techniques qu’elles
produisent individuellement. En d’autres termes, les interactions des caractéristiques
individuelles doivent produire un effet de synergie. En l’absence d’un tel effet, on est en
présence d’un simple assemblage de caractéristiques […].

Par exemple, l’effet technique d’un transistor individuel est pour l’essentiel celui d’un
interrupteur électronique. Cependant, des transistors interconnectés pour former un
microprocesseur interagissent de façon synergique pour obtenir des effets techniques
tels que le traitement de données, qui vont au-delà de la somme des effets techniques
qu’ils produisent individuellement.

Guide sur le brevet d’invention 29


La vérification de la condition relative à l’implication inventive est généralement effectuée
en considérant trois aspects de l’invention :

• le problème que l’invention propose de résoudre ;

• la solution proposée pour résoudre ce problème ;

• les avantages qu’offre l’invention par rapport à l’état de la technique antérieur.

Si le problème traité par l’invention est évident ou a déjà été étudié dans l’état de la
technique, l’implication de l’activité inventive est recherchée au niveau de la solution
proposée pour résoudre ce problème. Si la solution est, elle aussi, connue ou évidente,
l’examen de l’activité inventive porte alors sur les avantages de l’invention par rapport à
l’état de la technique antérieur.

Plusieurs indices sont utilisés par les tribunaux pour juger de la non-évidence d’une
invention. L’un de ces indices est le fait que l’invention permet de vaincre un préjugé. Par
exemple, ce fut le cas de l’utilisation de l’AZT pour le traitement thérapeutique du SIDA
alors que l’état de la technique ne permettait pas à l’homme du métier de songer à cette
solution (du fait qu’elle était développée pour un rétrovirus animal très différent du SIDA
et considérée comme toxique pour les cellules saines).


2.5. Divulgation de l’invention
La demande de brevet doit divulguer l’invention de manière assez claire et complète pour
permettre son exécution par un homme du métier. Cette manière d’exposer l’invention est
ainsi précisée par le dernier alinéa de l’article 34 de la loi n° 17.97 : La description de l’in-
vention doit exposer l’invention d’une façon suffisamment claire et complète en divulguant
des informations suffisantes permettant à un homme du métier, sans expérimentation
excessive, d’exécuter l’invention connue de l’inventeur à la date du dépôt. Une invention
revendiquée est suffisamment étayée par les informations divulguées lorsque lesdits ren-
seignements montrent raisonnablement à un homme du métier que le demandeur était
en possession de l’invention revendiquée, à la date du dépôt de la demande de brevet
de l’invention.

Dans le même sens, le 5e alinéa de cet article exige que la description de l’invention
comporte un exposé détaillé d’au moins un mode de réalisation de l’invention.

30 Guide sur le brevet d’invention


2.6. Examens de la demande de brevet
Avant de délivrer un brevet d’invention, l’administration chargée de cette délivrance
procède à l’examen quant à la forme et/ou quant au fond.

Le premier mode concerne la vérification du respect des dispositions administratives


relatives à la forme de la demande de brevet, tandis que le second évalue les conditions
de brevetabilité analysées dans la présente section.

Seul le premier mode a été adopté par la législation marocaine en matière de brevets. En
effet, l’article 47 de la loi n° 17.97 en vigueur stipule que les brevets, dont la demande n’a
pas été rejetée, sont délivrés sans examen préalable, aux risques et périls des demandeurs
et sans garantie, soit de la réalité de l’invention, soit de la fidélité ou de l’exactitude de la
description, soit du mérite de l’invention.

La nullité du brevet délivré peut être prononcée par le tribunal à la demande de toute
personne y ayant intérêt ou du ministère public, notamment si au moins une des conditions
de brevetabilité décrites dans la présente section n’est pas satisfaite (art. 85 et 86). Bien
entendu, il est à la charge du prétendant de prouver cette affirmation.

Guide sur le brevet d’invention 31


Section 3 : C
 omment rédiger le mémoire
descriptif d’une invention pour
une demande de brevet
Cette section examine en profondeur la façon dont le mémoire descriptif de l’invention
doit être rédigé pour assurer le maximum de chances de succès à la demande de brevet,
ainsi que la solidité des droits conférés par un brevet obtenu.

3.1. Considérations générales


Comme déjà présenté dans la section 2 de la présente partie, pour que l’invention soit
brevetable, elle doit satisfaire aux conditions de brevetabilité qui concernent l’objet,
la nouveauté, l’activité inventive et l’application industrielle. La rédaction du mémoire
descriptif de l’invention doit permettre de mettre en évidence tous ces aspects de manière
claire et convaincante, susceptible de ne pas provoquer d’objections de la part de tiers
qui pourraient être à l’origine de risques de non-délivrance du brevet ou de perte des
droits conférés par celui-ci (par exemple, dans le cadre d’une action en nullité devant les
tribunaux).

Pour atteindre un tel objectif, une bonne pratique est de commencer à bien dégager les
principaux aspects inventifs dont la combinaison forme la solution constituant l’invention.
Par la suite tester que cette combinaison satisfait aux conditions de brevetabilité et dans
quelle mesure substituer quelques-uns de ces aspects à d’autres peut permettre d’obtenir
la même solution ou son équivalent. Ce type d’analyse est très utile pour, d’une part, bien
rédiger la description permettant d’inclure le maximum de variantes susceptibles d’être
proposées par des concurrents, et d’autre part, bien formuler les revendications qui défi-
nissent l’étendue de la protection de l’invention.

D’une façon générale, le mémoire descriptif d’une invention doit répondre à ces trois
exigences de la loi n° 17.97 :

• ne concerner qu’une invention ou une pluralité d’inventions liées entre elles afin de ne
former qu’un seul concept inventif général (art. 38) ;

• exposer l’invention de manière suffisamment claire et complète pour qu’un homme du


métier puisse l’exécuter (art. 34) ;

• comporter des revendications qui définissent l’objet de la protection demandée (art. 35).

Ce mémoire est constitué d’une description de l’invention et d’une ou plusieurs reven-


dications pouvant se référer, le cas échéant, à des dessins. De plus, il est accompagné
d’un abrégé. Le contenu de chacun de ces éléments est analysé ci-après en indiquant les
bonnes pratiques pour les rédiger.

32 Guide sur le brevet d’invention


3.2. Unité de l’invention
Comme signalé plus haut, la loi n° 17.97 précise, dans l’article 38, qu’un brevet d’invention
ne permet de protéger qu’une invention ou plusieurs inventions liées entre elles de manière
à ne former qu’un seul concept inventif général. Ce caractère d’unité de l’invention rattaché
à un brevet se retrouve dans la plupart des systèmes de brevets à travers le monde,
notamment ceux des pays parties à la Convention du brevet européen (CBE).

En effet, la loi n° 17.97 reprend la même définition de l’unité de l’invention que celle de
l’article 82 de la CBE.

La directive C III, 7, relative à l’examen pratiqué à l’OEB, indique les conditions qui,
dans le cas de la pluralité d’inventions, doivent être satisfaites pour que ces inventions
soient considérées comme étant liées entre elles de manière à ne former qu’un seul
concept inventif général.

Le lien entre les inventions visé par l’art. 82 [de la CBE] doit être de nature technique. Il doit
être exprimé dans les revendications par des éléments techniques particuliers identiques
ou correspondants. L’expression éléments techniques particuliers désigne dans chaque re-
vendication le ou les éléments techniques particuliers qui déterminent une contribution
apportée à l’état de la technique par chacune des inventions revendiquées, considérées
comme un tout. Une fois que les éléments techniques particuliers de chaque invention ont
été identifiés, il y a lieu de déterminer si une relation technique existe ou non entre ces
inventions et également si cette relation implique ces éléments techniques particuliers. Les
éléments techniques particuliers de chaque invention ne doivent pas nécessairement être
identiques. […] La relation qui est exigée peut exister entre des éléments techniques corres-
pondants. Cette correspondance peut être illustrée par l’exemple suivant : dans une revendi-
cation, l’élément technique particulier qui assure l’élasticité est un ressort métallique, tandis
que dans une autre revendication, c’est un bloc de caoutchouc.

3.3. Description de l’invention


Le brevet d’invention étant un moyen de protection et un document d’information technique.
Pour qu’il confère des droits à son titulaire, sa demande doit répondre aux exigences
afférentes à ce double rôle. Ainsi, selon l’article 34 de la loi n° 17.97, la description de
l’invention doit comprendre :

1) l’indication du domaine technique auquel se rapporte l’invention ;

2) l’indication de l’état de la technique antérieur, connu du demandeur, pouvant être


considéré comme utile pour la compréhension de l’invention ;

3) un exposé de l’invention, telle que caractérisée dans les revendications, permettant
la compréhension du problème technique ainsi que la solution qui lui est apportée ;
sont indiqués, le cas échéant, les avantages de l’invention par rapport à l’état de la
technique antérieur ;

Guide sur le brevet d’invention 33


4) une brève description des dessins s’il en existe ;

5) u
 n exposé détaillé d’au moins un mode de réalisation de l’invention ; l’exposé est en
principe assorti d’exemples et de références aux dessins s’ils en existent ;

6) l’indication de la manière dont l’invention est susceptible d’application industrielle,


si cette application ne résulte pas à l’évidence de la description ou de la nature de
l’invention.

3.3.1. Domaine de la technique

La description de l’invention se divise en sections dont la première comporte deux


éléments : l’intitulé de l’invention (art. 31 de la loi n° 17.97 et art. 4 de son décret
d’application) et l’indication du domaine technique auquel elle se rapporte - art. 34(1) de
la loi. Et comme le précise l’article 36 de la loi : L’intitulé doit caractériser l’objet de
l’invention. Il doit faire apparaître de manière claire et concise la désignation technique de
l’invention et ne comporter aucune dénomination de fantaisie.

3.3.2. Contexte

Le contexte de l’invention est présenté dans la seconde section de la description - art.


34(2) de la loi n° 17.97. Il s’agit de poser le(les) problème(s) que l’on cherche à résoudre,
d’indiquer les solutions antérieures décrites dans l’état de la technique en faisant apparaître
les lacunes qu’elles ont laissées par rapport au(x) problème(s) posé(s), et de préciser,
parmi ces lacunes, celles qui sont visées pour être comblées par l’invention.

Autrement dit, cette section doit situer l’invention par rapport à l’état de la technique. Cela
doit se faire sans déclarations dénigrantes concernant des produits ou procédés de tiers
ou le mérite ou la validité de demandes de brevets ou de brevets de tiers - art. 37(2).

3.3.3. Identification

La section suivante de la description - art. 34(3) de la loi n° 17.97 - permet d’identifier


l’invention. Il est recommandé que son premier paragraphe soit consacré à une définition
de l’invention avec des termes généraux qui seront repris dans la formulation de la
revendication principale. Cela permet d’éviter les oppositions pouvant être dues à des
différences entre la description de l’invention et la formulation des revendications.

Chaque autre paragraphe peut décrire un aspect essentiel de l’invention sur lequel peut
se baser la formulation d’une revendication dépendante de la revendication principale.
La description de l’invention ne doit pas comporter d’éléments qui lui sont manifestement
étrangers - art. 37(3).

34 Guide sur le brevet d’invention


3.3.4. D
 escription des dessins et modes de réalisation

La quatrième section - art. 34(4) et (5) de la loi n° 17.97 - comporte deux éléments : une
brève description des dessins s’il en existe, et une description détaillée d’au moins un mode
de réalisation de l’invention en se référant aux dessins s’il y a lieu. Les règles standard de
dessins industriels, de schémas électriques, de formules chimiques ou de diagrammes de pha-
ses doivent être observées selon que l’invention se rapporte aux domaines respectifs de la
mécanique, de l’électricité ou de l’électronique, de la chimie ou de la métallurgie. Les élé-
ments des dessins sont numérotés, et leurs numéros reportés dans la description du mode
de réalisation de l’invention. Des règles précises relatives aux dessins sont spécifiées dans le
décret d’application de la loi. Un paragraphe de cette section est fréquemment voué à une
brève description du fonctionnement de l’invention selon le mode de réalisation décrit.

Pour finir cette analyse du contenu de la description de l’invention, il est utile de souligner
qu’elle doit, comme d’ailleurs toute autre partie de la demande de brevet, être exempte
de tout élément ou dessin dont la publication ou la mise en œuvre serait contraire à l’ordre
public ou aux bonnes mœurs - art. 37(1).

3.4. Revendications
Les revendications définissent l’étendue de la protection juridique conférée par le brevet
au titulaire de l’invention en indiquant les caractéristiques techniques de cette invention
(art. 35 de la loi n° 17.97). Seules les caractéristiques techniques prises en compte dans
les revendications sont protégées par le brevet. Toute caractéristique technique non
mentionnée dans les revendications et exposée dans la partie « description de l’invention
» ne bénéficie d’aucune protection juridique et est considérée comme faisant partie du
domaine public. Aussi est-il nécessaire d’accorder un très grand intérêt à la rédaction des
revendications ; il est d’ailleurs recommandé de la confier à un spécialiste.

L’interprétation des revendications se base sur des règles juridiques précises, définies par
la législation en vigueur en matière de brevets. L’article 35 - déjà cité plus haut - de la
loi et les articles 6 à 9 de son décret d’application indiquent les règles à suivre pour la
rédaction des revendications.

Selon l’article 6 du décret, toute revendication doit être rédigée :

1) soit en deux parties, la première consistant en un préambule indiquant la désignation


de l’objet de l’invention et les caractéristiques techniques qui sont nécessaires à la dé-
finition des éléments revendiqués mais qui, combinées entre elles, font partie de l’état
de la technique. La seconde partie, consiste en une indication des caractéristiques
techniques qui, combinées aux caractéristiques énoncées dans la première partie, sont
celles pour lesquelles la protection est demandée ;

2) soit en une seule partie présentant une combinaison de plusieurs éléments ou étapes,
ou bien un seul élément ou étape, qui définit l’objet de la protection demandée.

Guide sur le brevet d’invention 35


De même, une revendication ne peut, sauf absolue nécessité, se fonder pour exprimer les
caractéristiques techniques de l’invention, sur de simples références à la description ou
aux dessins (art. 35 de la loi).

Les revendications sont usuellement de deux types : revendications de portée générale et


revendications de portée restreinte. Les premières sont vastes et visent la prise en compte
de tous les aspects de l’invention mentionnés dans sa description, à laquelle le rédacteur
spécialiste tente d’intégrer les équivalents et versions futures plausibles de l’invention mais
dont un examinateur de brevets cherchera à restreindre la portée réelle. Ce sont des
revendications fonctionnelles de portée très large, permettant d’englober la contrefaçon
par équivalence de moyens. Au cas où le brevet est délivré sans examen, comme au
Maroc, de telles revendications de portée générale risquent fortement de susciter des
contestations de la part de tiers pouvant engendrer la nullité du brevet. Quant aux
revendications de portée restreinte, elles se limitent à la protection d’aspects spécifiques
de l’invention et sont susceptibles d’être contournées par des concurrents apportant de
légères modifications à ces aspects. Il y a donc intérêt à combiner de façon adéquate des
revendications des deux types pour obtenir un bon équilibre de protection.

Ainsi, les revendications associées à une invention sont constituées d’une à trois revendi-
cations indépendantes, de portée générale, selon que l’objet de l’invention est un produit
et/ou un procédé et/ou une utilisation (art. 7 du décret d’application de la loi n° 17.97),
chacune étant suivie d’une à plusieurs revendications dépendantes, de portée restreinte
à une caractéristique spécifique de l’invention. Une revendication peut dépendre d’une ou
de plusieurs revendications et peut renvoyer aux revendications dont elle dépend. Toute re-
vendication qui comprend les caractéristiques d’une ou de plusieurs autres revendications
de la même catégorie (produit, procédé, dispositif ou utilisation) doit, au début, renvoyer
à cette autre revendication ou, selon le cas, à ces autres revendications par indication de
leurs numéros, puis indiquer les caractéristiques revendiquées qui s’ajoutent à celle dont la
protection est demandée dans la ou les autres revendications (art. 8 du décret).

La rédaction des revendications doit aussi respecter la mesure de l’article 9 du décret,


qui précise que la description et les revendications ne doivent pas contenir de dessins ou
de graphiques. Toutefois, elles peuvent contenir des tableaux ou des formules chimiques ou
mathématiques.

Des recommandations pratiques pour la rédaction des revendications sont fournies par
un didacticiel mis en ligne par l’Office de la propriété intellectuelle du Canada afin d’aider
les particuliers et les PME à rédiger des demandes de brevet d’invention. Il est accessible
au www.cipo.ic.gc.ca/eic/site/cipointernet internetopic.nsf/fra/accueil.

36 Guide sur le brevet d’invention


3.5. Dessins
Les dessins ne sont pas obligatoires, mais leur présence est utile lorsqu’ils permettent une
meilleure compréhension de la description de l’invention. Dans ce cas, ils doivent être
exécutés selon des règles précises, définies par les articles 12 et 13 du décret d’application
de la loi n° 17.97. Cependant, il convient d’observer que les dessins ont vocation à illustrer
la description sans s’y substituer.

3.6. Abrégé
Comme stipulé dans l’article 10 du décret d’application de la loi n° 17.97 : L’abrégé du
contenu technique de l’invention est établi exclusivement à des fins d’information technique.
Il ne peut être pris en considération à d’autres fins, notamment pour apprécier l’étendue de la
protection demandée ou pour l’appréciation de la nouveauté ou de l’originalité. Cet abrégé
doit être concis et peut être accompagné d’un dessin récapitulatif.

L’abrégé étant très utile à la recherche dans les bases de données de brevets, les mots-
clés caractéristiques de l’invention les plus significatifs doivent être employés pour sa
rédaction.

Guide sur le brevet d’invention 37


Section 4 : I nformation technique divulguée par
les brevets et recherche sur l’état de la
technique
Les sections précédentes ont permis de faire ressortir les deux rôles concomitants joués
par les brevets, à savoir la protection des droits des titulaires d’invention et la mise à
disposition du public de l’information technique divulguée par les brevets.
Selon l’OMPI, plus de 80 % de l’information technique disponible est divulguée par les
documents de brevet (demandes de brevet publiées et brevets délivrés). De ce fait, ces
documents sont la principale ressource documentaire technique ; ressource qui consti-
tue, grâce aux innovations technologiques qu’elle suscite, le moteur essentiel du progrès
technologique ou économique et des conditions de vie des populations.

Cette section présente l’information technique divulguée par les documents de brevet,
ainsi que l’exploitation de cette information qui, avec l’information scientifique et tech-
nique publiée par les revues scientifiques et techniques ou par tout autre moyen de
divulgation déjà cité, constitue l’état de la technique.

4.1. Information technique divulguée par les brevets


4.1.1. I mportance de l’information technique divulguée par les brevets

Près d’un million de documents de brevet ont été publiés chaque année dans le monde au
cours des dix dernières années : soit, en moyenne, un nouveau document de brevet publié
toutes les trente secondes. Chacun de ces documents correspondant à une nouvelle inven-
tion et fait l’objet de dépôt dans trois pays différents.

Ces documents décrivent un très large spectre d’inventions qui touchent à tous les domaines de
l’activité humaine, allant d’une simple théière à un capteur intelligent. Même si une bonne
proportion de documents de brevet porte sur des améliorations d’inventions existantes et
correspond donc à des inventions incrémentales, une partie non négligeable concerne des
inventions de rupture qui ont été à l’origine de domaines technologiques tout à fait nouveaux.

L’importance de l’information technique divulguée par les brevets ne réside pas que dans
la richesse et la très grande diversité des objets inventés ; elle est aussi due à la qualité du
processus de divulgation de cette information qu’assure une législation dont les grands
principes font l’objet d’un consensus au niveau international, dans le cadre de l’Union régie
par la Convention de Paris. C’est ainsi que, dans tous les pays de l’Union, les demandes de
brevet sont publiées après 18 mois à compter de la date de dépôt ou de priorité.

Grâce aux technologies de l’information et de la communication, l’information relative


aux brevets d’inventions devient de plus en plus exploitée pour la recherche dans l’état
de la technique et pour des besoins de veille technologique et concurrentielle. Des bases
de données de brevets ont été constituées par l’OMPI et la plupart des offices de brevets
à travers le monde, et sont rendues accessibles de plus en plus gratuitement via Internet.

38 Guide sur le brevet d’invention


Des moteurs de recherche en information « brevet » sont développés par des sociétés
spécialisées. Globalement, le marché d’information « brevet » se caractérise par une
complémentarité entre services gratuits et services payants, ces derniers devant, pour
garder leur raison d’être, apporter une valeur ajoutée de plus en plus importante. C’est
le cas du service Total Patent, lancé par la société Lexis Nexis, et du service Thomson
Innovation, introduit dernièrement par le groupe Thomson.

Les documents de brevet sont disponibles sous différentes formes : dactylographiée ;


imprimée ; gazettes, bases de données et autres sortes de littérature secondaire ; photocopies,
microfilms, cédéroms et services en ligne tels que ceux de :

• l’OMPI : www.wipo.int/ipdl/fr/index.jsp ;

• Esp@cenet : ep.espacenet.com ;

• l’OMPIC : www.ompic.ma.

4.1.2. L
 a classification internationale des brevets

Comme toute source d’information qui se respecte, la classification internationale des


brevets (CIB) doit être bien organisée pour en faciliter l’accès. Pour une consultation effi-
cace des documents de brevet à l’échelle internationale, la CIB, instituée par le Conseil de
l’Europe en 1954, a été adoptée par l’Union particulière régie par l’Arrangement de Stras-
bourg au sein de l’Union pour la protection de la propriété industrielle, elle-même régie par
la Convention de Paris. Actuellement, plus de 100 pays l’utilisent. Leur liste est disponible à
cette adresse : www.wipo.int/classifications/ipc/fr/general/brochure.html.

La huitième édition de la CIB comprend huit sections - divisées en 120 classes, 628 sous-
classes et environ 70 000 groupes. Ces huit sections sont

• section A : nécessités courantes de la vie ;

• section B : techniques industrielles diverses et transports ;

• section C : chimie et métallurgie ;

• section D : textile et papier ;

• section E : constructions fixes ;

• section F : mécanique, éclairage, chauffage, armement et sautage ;

• section G : physique ;

• section H : électricité.

Pour plus de détails, on peut consulter le www.wipo.int/classifications/ipc/fr.

Guide sur le brevet d’invention 39


4.2. Recherche sur l’état de la technique
Comme déjà exposé dans la section 2 de la présente partie, l’examen quant au fond d’une
demande de brevet se base sur la comparaison de l’invention avec l’état de la technique,
notamment en ce qui concerne la nouveauté et l’implication de l’activité inventive. De ce
fait, la recherche sur l’état de la technique constitue une étape essentielle de l’examen
quant au fond des demandes de brevet.

Cependant, cette recherche devrait normalement être effectuée avant le dépôt de la de-
mande de brevet ; et ce, afin d’éviter des efforts et des frais infructueux, sanctionnés par
un rejet de la demande ou la non-délivrance du brevet.

Mis à part l’intérêt qu’elle présente pour l’examen de la brevetabilité d’une invention, la
recherche sur l’état de la technique peut être très utile pour répondre aux besoins suivants :

• orientation des activités de R & D vers des problématiques nouvelles, susceptibles de


conduire à des inventions brevetables ;

• évolution de l’état de la technique sur une technologie donnée en constituant la


base de données des détenteurs de brevets, des inventeurs et des fournisseurs
de cette technologie (qui peut être exploitée pour les besoins d’acquisition de
licence d’exploitation, de recrutement de compétences techniques, de partenariats
commerciaux ou d’information pour le respect des droits de tiers) ;

• identification des technologies faisant partie du domaine public et susceptibles d’être


encore commercialement exploitables ;

• suivi de l’activité des concurrents et études de marchés.

Ci-après, nous nous intéresserons plus particulièrement à la recherche sur l’état de la


technique en relation avec l’examen quant au fond d’une demande de brevet, la démar-
che utilisée pour cet objectif n’étant pas différente de celle relative aux autres objectifs
précités. La recherche est effectuée par rapport aux domaines techniques en relation
directe avec l’invention. Si ses résultats sont infructueux, l’examinateur peut envisager de
l’étendre à des domaines analogues. Toutefois, il est nécessaire de souligner que des
imperfections de la recherche sont toujours possibles et que le fait de ne pas trouver de
document en relation avec une demande de brevet donnée ne garantit pas qu’il n’en
existe pas dans l’absolu.

Seront aussi analysés les moyens disponibles pour effectuer des recherches sur l’état de la
technique. D’ores et déjà, il y a lieu de distinguer deux grandes classes de documents :

• les documents de demandes de brevet ou de brevets délivrés ;

• les documents bibliographiques, scientifiques ou techniques, publiés dans des revues,


des actes de colloques et de congrès, des catalogues commerciaux ou tout autre
type de documents sous forme imprimée ou numérique.

40 Guide sur le brevet d’invention


Les formes de divulgation d’invention n’appartenant pas aux deux grandes classes
précédentes, notamment en raison de l’usage des inventions, ne sont pas prises en
considération dans la recherche sur l’état de la technique pour les besoins d’examen
de brevetabilité. Elles peuvent être employées lors des procédures d’opposition dans les
pays où elles sont prévues, ou de nullité à l’encontre des brevets délivrés.

4.2.1. R
 echerche dans les documents de brevets

Une méthodologie pour la recherche dans les documents de brevet en relation avec les
besoins liés au dépôt d’une demande de brevet est ici proposée.

a) Recherche dans la base de données en ligne des brevets marocains


L’OMPIC permet une recherche dans la base de données des brevets qui ont été déposés
en son sein (www.ompic.ma). Une recherche par mots-clés et d’autres informations
relatives au brevet permettent d’accéder à la liste des brevets figurant dans cette base de
données et répondant aux critères de recherche choisis.

b) Services de recherche offerts à l’OMPIC


L’OMPIC joue le rôle d’intermédiaire entre les déposants de demandes de brevet et les
administrations chargées de la recherche et agréées par l’OMPI : soit dans le cadre du
dépôt de demandes de brevet par la procédure PCT (voir la section 5 de la partie 2) en
tant qu’office récepteur, soit dans le cadre du service gratuit offert par les administrations
de recherche aux nationaux « personnes physiques » en tant que ressortissants de pays
en développement.

c) R
 echerche dans les bases de données en ligne de brevets étrangers
Les bases de données des demandes de brevet déposées auprès des différents pays ou
organismes régionaux de propriété intellectuelle, et des brevets délivrés par ces derniers
sont, pour un certain nombre, sur Internet. On peut y accéder via le répertoire des offices
de brevets mis à disposition par l’OMPI au www.wipo.int/directory/fr/urls.jsp.

D’autres adresses Web permettent d’accéder aux bases de données des brevets des cinq
offices les plus importants au monde au niveau du nombre de dépôts de demande de
brevet (selon le Rapport sur les brevets 2007 de l’OMPI, ils ont enregistré, en 2005, 77 %
des demandes de brevet déposées au niveau mondial). Ces offices sont ici cités par ordre
décroissant du nombre de dépôts :

• l’Office japonais des brevets (JPO) : www.19.ipdl.inpit.go.jp/PA1/cgi-bin/PA1SEARCH ;

• l’Office des brevets et des marques des États-Unis (USPTO) : patft.uspto.gov ;

• l’Office chinois de la propriété intellectuelle (SIPO) : www.sipo.gov.cn, seulement


consultable en chinois ;

Guide sur le brevet d’invention 41


• l’Office coréen de la propriété intellectuelle (KIPO), qui offre une recherche en ligne
de brevets coréens déposés depuis 1948 ou de brevets déposés au JPO, à l’USPTO et
à l’OEB depuis 1980 (les documents trouvés sont par défaut disponibles en coréen,
mais peuvent être consultés en anglais via un logiciel de traduction payant) : patent2.
kipris.or.kr/paent_eng/kclo1000a.do?searchType=G ;

• l’Office européen des brevets (OEB) dont le réseau de bases de données Esp@
cenet (www.espacenet.com), créé pour promouvoir et utiliser le système de brevets
européen, permet aux petites structures et aux personnes physiques d’accéder au
contenu de plus de 60 millions de documents de brevet enregistrés dans différents
offices à travers le monde.

d) Recherche sur le site de l’OMPI


Les demandes de brevet ayant fait l’objet d’un dépôt international dans le cadre du Traité
de coopération en matière de brevets (PCT) peuvent être consultées sur le site de l’OMPI au
www.wipo.int/ipdl/fr. Cette base de données comporte toutes les demandes internationales
ayant fait l’objet d’une publication selon la procédure PCT. Les demandes entrées dans la
phase nationale de ce processus sont aussi publiées par des offices élus (voir la section 5
de la partie 2).

4.2.2. Recherche dans les autres types de documents bibliographiques

a) Publications scientifiques et techniques


De nombreux résultats de recherche scientifique et technique sont publiés dans des actes
de colloques ou de congrès et dans des revues spécialisées sans pour autant faire l’objet
de demandes de brevet, bien que beaucoup soient brevetables. Cela s’explique par la
nature de la mission de la recherche universitaire qui, jusqu’il y a une vingtaine d’années,
se limitait à la production et à la diffusion des savoirs sans trop se soucier de leur valorisation
commerciale. La communication dans les colloques ou congrès, ainsi que la publication
dans des revues internationales, sont toujours considérées par la communauté scientifique
comme le moyen privilégié pour acquérir une bonne renommée parmi les pairs.

Par ailleurs, la plupart des universités développent, en plus de leurs missions classiques
d’enseignement et de recherche, celle de services pour la société. Cette nouvelle mission
intègre, parmi ses objectifs, la valorisation des résultats de recherche à travers la protec-
tion de la propriété intellectuelle inhérente à ces résultats. Tant que ce type de mission ne
sera pas généralisé, des résultats de recherche originaux, susceptibles d’être brevetables,
continueront d’être divulgués sous forme de communications et de publications scientifi-
ques et techniques.

Ainsi, la recherche sur l’état de la technique doit inclure ce type de documents. Pour ce
faire, des méthodes de recherche documentaire dans les bases de données bibliométriques
doivent être utilisées.

L’un des moteurs de recherche dans ces bases de données est Scholar Google. Disponible
au www.scholar.google.com, il scrute les bases de données bibliométriques relatives

42 Guide sur le brevet d’invention


à tous les champs disciplinaires à l’aide de mots-clés, de noms d’auteur ou de noms
d’organisme. D’autres bases de données bibliométriques peuvent être consultées sur
les sites Web d’organismes spécialisés dans l’information scientifique (par exemple, aux
www.inist.fr et www.thomsonscientific.com) ou sur les sites de maisons d’édition de revues
scientifiques (comme le www.sciencedirect.com).

b) Documentation commerciale
La documentation commerciale peut comporter des éléments d’information technique
non divulgués par les brevets et la bibliométrie. Ce type de documents peut être accessible
via le www.business.com.

c) Autres types de documents


Les autres documents non accessibles par les moteurs de recherche déjà cités peuvent être
repérés à l’aide de Google (www.google.com) en utilisant, pour faciliter la recherche, le
mode de recherche avancée.

Guide sur le brevet d’invention 43


Section 5 : A
 ctivité « brevet » dans le monde
et au Maroc

Connaître les principales tendances de l’activité « brevet » dans le monde peut être très
utile aux inventeurs et aux entreprises. En effet, les statistiques sur le nombre et la nature
des dépôts de demande de brevet au niveau international sont riches d’enseignements sur
la dynamique industrielle et commerciale des pays, ainsi que sur leurs efforts en matière
de développement technologique.

Cette section a pour but d’exposer cette dynamique à travers les statistiques internationales
en matière de brevets, de même que la situation du développement technologique et
industriel du Maroc à travers les données relatives au système national des brevets.

Les statistiques employées proviennent essentiellement du Rapport sur les brevets 2007 de
l’OMPI et du Rapport d’activité 2007 de l’OMPIC.

5.1. Activité « brevet » dans le monde


5.1.1. Données générales

L’activité « brevet » dans le monde est la plupart du temps caractérisée en classant les
demandes de brevet déposées en deux catégories :

• les demandes de personnes physiques ou morales résidant dans les pays ou régions
du dépôt ;

• les demandes de personnes physiques ou morales ne résidant pas dans les pays ou
régions du dépôt.

Les statistiques relatives au nombre de dépôts effectués par les résidents renseignent sur
l’intensité de l’activité inventive et du développement technologique et industriel du pays
concerné, alors que celles portant sur le nombre de dépôts effectués par les non-résidents
informent sur l’importance des échanges commerciaux du pays correspondant avec le
reste du monde.

Les statistiques internationales relatives aux brevets délivrés permettent de constater que
49 % d’entre eux sont détenus par des déposants de deux pays industriels bien établis :
le Japon et les États-Unis. Elles montrent donc l’importance de ces deux pays sur le plan
technologique, industriel et commercial.

Effectivement, le Japon et les États-Unis sont respectivement classés premier et deuxième


pour les dépôts de résidents, et quatrième et premier pour les dépôts de non-résidents.
En ce qui concerne ce dernier type de dépôts, la Chine et la République de Corée (Corée
du Sud) obtiennent respectivement les deuxième et cinquième places, tandis que pour le
premier type, elles occupent respectivement les quatrième et troisième places. Cela prouve

44 Guide sur le brevet d’invention


le dynamisme continu de ces deux pays du Sud-Est asiatique dans leur développement
technologique, industriel et commercial au niveau mondial.

Quant aux statistiques mondiales relatives aux brevets pour l’année 2005, elles permettent
de dégager les principales tendances générales du système mondial des brevets :

• Le taux de croissance annuel moyen du nombre de dépôts de demande de brevet


depuis 1995 est de 4,7 %. Ce nombre a dépassé 1,6 million en 2005 pour 600 000
brevets finalement délivrés, ce qui a porté le nombre de brevets en vigueur dans le
monde à 5,6 millions à la fin de 2005. Le taux de croissance précité est similaire à
celui enregistré par l’activité économique dans le monde pour la même période.

• Au niveau du nombre de demandes de brevet reçues, le JPO (Japon) vient en tête,
suivi dans l’ordre par l’USPTO (États-Unis), le SIPO (Chine), le KIPO (République de
Corée) et l’OEB (Europe). En 2005, à eux seuls, ces cinq offices ont reçu 77 % des
demandes de brevet déposées dans le monde et accordé 74 % des brevets délivrés.
Parmi les 20 premiers offices, figurent ensuite successivement ceux des pays suivants :
l’Allemagne, le Canada, la Russie, l’Australie, le Royaume-Uni, l’Inde, la France,
le Brésil, le Mexique, Hong-Kong, Singapour, la Nouvelle-Zélande, la Pologne, la
Thaïlande et Israël.

• Le dépôt des demandes de brevet par des non-résidents, dont le taux de croissance
était de 7,6 % en 2004, s’accentue de plus en plus, surtout en Chine, en Inde, au
Mexique, en République de Corée et en Russie. L’internationalisation grandissante
de l’utilisation du brevet est aussi reflétée par une plus grande utilisation du PCT : avec
un taux de croissance de 7,9 % entre 2005 et 2006, portant le nombre de demandes
internationales déposées en 2006 à 147 500 (soit 48 % des demandes déposées
par des non-résidents à travers le monde).

• Les principaux pays d’origine des non-résidents déposant des demandes de brevet
sont, par ordre d’importance décroissante : les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, la
République de Corée et la France ; ce qui reflète bien leur puissance technologique,
industrielle et commerciale.

À travers ces statistiques, il apparaît que la connaissance du système mondial des brevets
permet de bien caractériser le développement technologique, industriel et commercial
des différents pays du monde, et d’être informé sur le potentiel des marchés au niveau
mondial pour une technologie brevetée donnée. C’est pourquoi les entreprises et les
centres de recherche et d’innovation ont intérêt à suivre ce système au moyen d’une veille
technologique organisée.

5.1.2. Intensité inventive des pays

L’intensité inventive d’un pays peut être mesurée à travers le nombre de demandes de brevet
déposées par des résidents. En effet, même si ces demandes ne correspondent pas toujours
à des inventions réalisées par des résidents (du fait qu’une invention développée dans un
pays étranger, dans le cadre d’une sous-traitance, par exemple, peut être déposée dans un

Guide sur le brevet d’invention 45


autre pays par un donneur d’ordre y résidant), la grande majorité des dépôts effectués par
les résidents est le fruit d’une activité inventive menée dans le pays de résidence.

En réalité, le précédent indicateur ne donne pas une image complètement fidèle de


l’intensité inventive d’un pays, car toute demande de brevet déposée ne correspond pas
toujours à une invention réelle respectant les conditions de brevetabilité. On pourrait être
tenté de relier l’intensité inventive au nombre de brevets délivrés aux résidents, mais cela
n’améliorerait pas sa mesure en raison des différences entre les modes de délivrance
utilisés à travers le monde : système à simple enregistrement contre système d’examen
quant au fond. Aussi, l’indicateur basé sur les dépôts semble plus fiable que celui fondé
sur la délivrance, car il est indépendant du mode de délivrance du brevet.

Pour les besoins d’analyse comparative entre pays (benchmarking) en matière d’intensité
inventive, le nombre de dépôts de demande de brevet par des résidents est rapporté au
nombre d’habitants, au PIB ou au montant des dépenses en R & D. Les trois indicateurs
ainsi obtenus sont employés pour classer les pays par rapport aux activités de création
inventive, et le classement dépend de l’indicateur utilisé.

Concernant le premier indicateur (nombre de dépôts effectués par les résidents par million
d’habitants), le Japon est en tête du classement avec 2 876 dépôts par million d’habitants en
2005. La République de Corée arrive en deuxième avec 2 530 dépôts par million d’habitants,
puis viennent dans l’ordre les États-Unis, l’Allemagne et l’Australie avec des valeurs très
inférieures à 1 000 dépôts par million d’habitants. Si on admet que cet indicateur mesure
l’intensité inventive de la population d’un pays, alors les populations du Japon et de la
République de Corée sont de loin plus inventives que celles de tous les autres pays.

À propos du deuxième indicateur (nombre de dépôts par des résidents par milliard USD
de PIB), c’est la République de Corée qui prend la première place avec 129,1 dépôts par
milliard USD (constants de l’an 2000 avec parité de pouvoir d’achat) de PIB, suivie du Japon,
de l’Allemagne, de la Nouvelle-Zélande et des États-Unis avec respectivement : 103,53 ;
22,3 ; 20,77 ; et 18,82 dépôts par milliard USD de PIB. Ces valeurs peuvent signifier
que les activités inventives des résidents contribuent beaucoup plus à créer de la valeur
ajoutée en République de Corée qu’en d’autres pays. Mais cette interprétation suppose
que les demandes de brevet des résidents ont une réelle incidence sur l’économie, ce qui
n’est pas le cas pour tous les pays : en particulier pour ceux en développement où une
grande partie des dépôts de brevet par les résidents provient d’inventeurs indépendants
qui peinent, souvent sans succès, à valoriser commercialement leurs inventions.

Par rapport au troisième indicateur (nombre de demandes de brevet déposées par des résidents
par million USD dépensés en R & D par année), qui donne une indication sur l’efficacité
des activités de R & D, la République de Corée garde sa position de leader obtenue pour
le deuxième indicateur, avec 5,08 demandes déposées par des résidents par million USD
dépensés en R & D par année. Avec une valeur de 3,37 pour cet indicateur, le Japon garde lui
aussi sa position de second. Les 3e, 4e et 5e rangs sont occupés par la Nouvelle-Zélande, la
Russie et l’Ukraine avec une valeur respective de : 1,82 ; 1,56 ; et 1,09.

46 Guide sur le brevet d’invention


5.1.3. D
 épôts de demandes de brevet par domaine technique

Les statistiques mondiales en matière de demandes de brevet déposées permettent de


relever la répartition du volume des activités inventives relatif à un domaine technique
donné entre différents pays. Cette information peut être très utile pour évaluer le potentiel
de marché et la compétitivité des entreprises au niveau international. Ainsi, les demandeurs
de brevet au niveau national ont tout intérêt à être au courant de cette répartition pour
mieux valoriser leur brevet d’invention. Une telle connaissance doit permettre de bien
mettre en évidence les avantages compétitifs par rapport aux technologies existantes
avant de décider de se porter concurrent des détenteurs de ces technologies.

Il ressort de ces statistiques que sur les 32 domaines techniques de la CIB, ceux relatifs à
l’électricité et à l’électronique enregistrent le plus grand nombre de dépôts de demande de
brevet dans deux offices : l’USPTO (États-Unis) et le JPO (Japon). En complément, suit une
brève description de la répartition du volume d’activité en matière de demandes de brevet :
entre les principaux offices de brevets et pour les principaux domaines techniques.

a) Technologies de l’information
Les statistiques relatives aux demandes de brevet déposées entre 2000 et 2004 permettent
de classer l’office des États-Unis, avec une proportion de 36 %, à la première place du
classement mondial relatif au domaine des technologies de l’information. Viennent après,
dans l’ordre, les offices des pays et régions suivants : Japon (29 %), République de Corée
(11 %), Europe (7 %), Chine (7 %), autres pays (5 %), puis Royaume-Uni, Allemagne et
Australie avec 2 % chacun.

b) Appareils électriques, électroniques, énergie électrique


Répartition : Japon (38 %), États-Unis (24 %), République de Corée (8 %), Chine (8 %),
Europe (7 %), autres pays (7 %), Allemagne (5 %), Royaume-Uni (2 %) et Australie (1 %).

c) Technologies audiovisuelles
Répartition : Japon (42 %), États-Unis (26 %), République de Corée (9 %), Chine (8 %), Europe
(7 %), autres pays (4 %), Royaume-Uni (2 %), Allemagne (2 %) et Australie (1 %).

d) Biens de consommation et matériel grand public


Répartition : Japon (33 %), États-Unis (23 %), autres pays (12 %), République de Corée
(11 %), Europe (6 %), Chine (5 %), Allemagne (4 %), Royaume-Uni (4 %) et Australie (2 %).

e) Techniques d’analyse, de mesure et de contrôle


Répartition : Japon (31 %), États-Unis (26 %), autres pays (11 %), Europe (9 %), Chine (6 %),
République de Corée (6 %), Allemagne (5 %), Russie (3 %) et Royaume-Uni (2%).

Guide sur le brevet d’invention 47


f) Machines et appareils pour l’industrie agro-alimentaire
Répartition : Japon (43 %), États-Unis (19 %), autres pays (12 %), Europe (8 %), Allemagne
(5 %), République de Corée (5 %), Chine (5 %), Royaume-Uni (2 %) et Australie (2 %).

g) Télécommunications
Répartition : États-Unis (29 %), Japon (23 %), République de Corée (14 %), Europe (9 %),
Chine (9 %), autres pays (7 %), Allemagne (3 %), Royaume-Uni (3 %) et Australie (2 %).

h) Génie chimique
Répartition : États-Unis (27 %), autres pays (26 %), Chine (13 %), Europe (12 %), Japon
(6 %), Australie (5 %), Canada (5 %), Mexique (3 %) et Russie (3 %).

À travers cette description, on peut constater que, sauf pour le domaine du génie chimique
pour lequel il existe une certaine diversification des offices de brevets bénéficiaires de
dépôts de demande de brevet, la répartition des dépôts concerne, en très grande partie,
les mêmes offices bénéficiaires : ceux des États-Unis, du Japon, de la République de
Corée, de l’Europe, de la Chine, de l’Allemagne, du Royaume-Uni et de l’Australie.

La suprématie de ces pays est due à leur grande intensité inventive et aux dépôts des non-
résidents, souvent effectués pour l’importance de leurs marchés et/ou pour des besoins de
stratégies de blocage et de persuasion envers des concurrents y résidant.

5.1.4. Nature des déposants

Trois principales catégories de déposants peuvent être distinguées :

• les entreprises et autres opérateurs socio-économiques ;

• les universités et autres établissements d’enseignement supérieur, ainsi que des


organismes de recherche publics et privés ;

• les inventeurs indépendants.

Les statistiques fournies par l’OMPI et les offices des brevets ne permettent pas toujours
d’établir une répartition précise des déposants de demandes de brevet entre ces catégories
de déposants. Néanmoins, certains indicateurs disponibles sont susceptibles d’aider à
dégager les tendances générales de cette répartition.

Parmi ces indicateurs, il existe le « TOP 50 » des déposants, c’est-à-dire la liste des 50 plus
importants déposants de demandes internationales de brevet via la procédure PCT. En
examinant celle de 2007, on peut constater que :

• sur les 20 premières entreprises déposantes, six proviennent des États-Unis, six du
Japon et trois d’Allemagne ;

48 Guide sur le brevet d’invention


• une seule université y figure : l’université de Californie, classée 30e ;

• un seul institut de recherche en fait partie : l’Electronics and Telecommunications


Research Institute, classé 41e ;

• la quasi-majorité des entreprises listées sont des sociétés multinationales faisant
de la propriété intellectuelle, en général, et du brevet d’invention, en particulier, un
élément essentiel dans l’élaboration de leur stratégie concurrentielle ; et consacrant
une fraction importante de leur chiffre d’affaire aux activités de R & D et d’innovation
technologique.

Cette analyse permet de mettre en évidence des renseignements utiles pour bien
comprendre les soubassements des systèmes de brevet :

• Vu que le brevet est un titre qui permet de protéger les intérêts commerciaux de ses
détenteurs, il doit être considéré en tant que tel. Par conséquent, la gestion de toute
activité visant l’obtention d’un brevet gagnerait à être basée sur une politique en
matière d’innovation et sur la finalité commerciale d’un tel titre, ce qui passe par une
bonne connaissance du marché.

• Les activités inventives nécessitent des dépenses importantes en R & D, comme le


montre la moyenne mondiale de la valeur de l’indicateur « nombre de demandes
déposées par des résidents rapportée aux dépenses en R & D », qui est de 0,83
demande par million USD (soit 1,2 million USD par brevet). Cela est corroboré par
le fait que, d’une part, les trois pays détenant la plus grande part des déposants
du « TOP 50 » consacrent aux activités de R & D une part du PIB parmi les plus
élevées au monde R & D ; et que, d’autre part, les organismes classés dépensent une
bonne partie de leur chiffre d’affaire dans les activités génératrices d’innovations
technologiques.

• La présence de seulement deux organismes de recherche dans le « TOP 50 » peut


révéler la répartition des efforts de recherche entre l’État et le privé qui, au niveau
des dépenses liées aux activités de R & D, revient en grande partie au privé. En
effet, la part du privé est d’environ 80 % au Japon, dépasse largement les deux
tiers aux États-Unis et, dans tous les autres pays développés, est supérieure à 50 %.
La répartition de l’effort de recherche ne concerne pas que l’aspect financier ; elle
s’étend aussi à la nature des activités de recherche. Ainsi, la recherche publique,
en particulier universitaire, est principalement dédiée à la génération de nouveaux
savoirs et à la recherche de base, alors que l’effort déployé par les entreprises en
R & D est orienté vers le développement de technologies et de nouveaux produits et
procédés.

Guide sur le brevet d’invention 49


5.2. A
 ctivité « brevet » au Maroc
Le Rapport d’activité 2007 de l’OMPIC fait apparaître un résultat record en matière de
dépôts de brevet : 932 demandes de brevet d’invention enregistrées contre 910 en 2006,
soit le double du nombre de demandes déposées en 1997. Sur l’ensemble des demandes,
45 % ont concerné les nécessités courantes de la vie qui englobent les domaines techniques
suivants : activité rurale, alimentation, tabac, objets personnels ou ménagers, santé,
sauvegarde, amusements et préparations à usage médical, dentaire ou pour la toilette ;
et 23 % étaient relatives à la classe « chimie et métallurgie ».

5.2.1. Demandes de brevet d’origine étrangère

84 % des demandes de brevet déposées en 2007 − soit 782 demandes − sont d’origine
étrangère. Parmi elles, 716 sont des demandes d’entrée en phase nationale dans le cadre
du PCT, soit 91,56 % des demandes déposées par des non-résidents au Maroc. La figure
indique le nombre de demandes d’origine étrangère par pays : les États-Unis viennent en
tête avec 188 demandes, suivis par la France avec 151.

Ces demandes sont réparties selon les huit sections de la CIB comme suit : nécessités
courantes de la vie (A) : 384 ; techniques industrielles et transports (B) : 66 ; chimie et
métallurgie (C) : 200 ; textiles et papier (D) : 4 ; constructions fixes (E) : 43 ; mécanique,
éclairage, chauffage, armement et sautage (F) : 29 ; physique (G) : 37 ; électricité (H) : 20.

Tableau n° 1 : Pays d'origine de demandes étrangères


Nombre de
demandes

200 -
188

150 -
151

125

100 -
72

71

50 -
41

40

29

19
23

23

0-
U

Fr

Al

Su

An

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ne

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5.2.2. Demandes de brevet d’origine marocaine

La part des demandes d’origine marocaine est de 16 %, ce qui représente 150 demandes.
Le nombre de demandes déposées par des personnes morales montre une progression
relative en 2006 et 2007 grâce au Programme de prédiagnostic en matière de propriété
industrielle (réalisé par l’OMPIC au profit des entreprises).

50 Guide sur le brevet d’invention


Depuis 2005, l’OMPIC a développé un service de prédiagnostic de propriété industrielle
afin d’aider les PME à choisir une stratégie de propriété industrielle adaptée à leurs besoins
et perspectives de développement à partir de l’analyse de leur potentiel innovant et du
contexte concurrentiel dans lequel elles évoluent. Pour plus de détails, on peut consulter le
www.ompic.ma/publication/p131.xml.

Le nombre de demandes de brevet déposées par des personnes physiques, depuis 1997,
évolue en dents de scie avec une légère tendance à la hausse. Il représente 74,7 % du
nombre total de demandes d’origine marocaine. Les personnes physiques concernées sont
en grande majorité des inventeurs indépendants, et une faible partie de ces personnes
physiques sont des enseignants-chercheurs.

Depuis l’adhésion du Maroc au PCT, en 1999, l’OMPIC a servi d’office récepteur de 40


demandes internationales, dont 13 en 2007. Parmi ces dernières, deux ont été déposées
par des entreprises.

5.2.3. Analyse de l’activité inventive au Maroc

Grâce aux statistiques sur le système national des brevets précédemment décrites, on peut
dégager les principaux renseignements suivants :

• Plus de 80 % des demandes de brevet déposées au Maroc sont d’origine étrangère.


Elles sont surtout liées aux activités industrielles et commerciales menées au Maroc
par les entreprises étrangères relevant, principalement, de deux classes de la CIB :
« nécessités courantes de la vie » et « chimie et métallurgie ».

• Les demandes de brevet d’origine marocaine sont pour la plupart déposées par
des personnes physiques (74,7 % en 2007). Cela fait ressortir que les opérateurs
potentiels de R & D, publics et privés, ne contribuent pas suffisamment à l’activité
« brevet ». En effet, seulement 4,4 % du nombre total des demandes de brevet
déposées au Maroc en 2007 sont dues aux personnes morales d’origine
marocaine.

Guide sur le brevet d’invention 51


2
Cadre pratique
du système des brevets
d’invention

52 Guide sur le brevet d’invention


Section 1 : À qui appartient le droit au brevet ?
Pour arriver au stade de la délivrance du brevet d’invention, Il faut d’abord remplir certaines
conditions tenant notamment à la qualité de la personne du demandeur de brevet.

À ce propos, on peut noter que si la loi n° 17.97, dans l’article 31, accorde le droit à « toute
personne » souhaitant obtenir un brevet d’invention de déposer une demande auprès de
l’OMPIC.

1.1. Inventeur
Le principe est que le droit au brevet appartient à l’inventeur ou à ses ayants droits. Il peut
s’agir d’une seule personne ou d’une copropriété avec une ou plusieurs personnes. De ce
fait une invention peut bien se produire dans le cadre d’un travail en entreprise.

Conformément à l’article 16 de la loi n° 17.97, le droit au brevet appartient à l’inventeur.


Seule cette personne a la qualité de déposer le dossier de demande de brevet d’invention,
et peut légalement se défendre contre toute personne désirant s’approprier illégitimement
ce droit. Le titulaire de ce droit peut être une personne physique ou morale, de droit public
ou privé.

Il est à souligner que le bénéfice du droit au brevet revient aux nationaux et étrangers
résidant au Maroc, comme aux détenteurs d’entreprises industrielles ou commerciales au
Maroc ou aux ressortissants des pays accordant au Maroc l’égalité de traitement au sens
de l’article 3.

L’expression « ayant droit » de l’inventeur fait référence à toute personne succédant au


droit de celui-ci, par exemple par voie de succession ou de cession. Les ayants droit
détiennent les mêmes pouvoirs que le titulaire de l’invention ; c’est pourquoi ils peuvent
déposer une demande d’enregistrement, tout comme se défendre contre les tiers en cas
d’usurpation de l’invention.

1.2. Invention du salarié


Les règles précisées ci-dessus, qui régissent la propriété du titre constatant l’invention,
connaissent une exception en ce qui concerne le salarié inventeur. Celle-ci est prévue par
l’article 16 de la loi n° 17.97, qui renvoie aux dispositions de l’article 18.

Il est à noter que cette loi ne traite que les cas du salarié et de l’appropriation de l’invention
pour les besoins de la défense nationale.

En cas de soumission à un pouvoir hiérarchique, faire la distinction entre l’invention de


service, l’invention occasionnelle et l’invention libre est possible.

Guide sur le brevet d’invention 53


1.2.1. Invention de service

La propriété d’une invention qui résulte d’un travail dans le cadre d’une mission de
recherche revient à l’employeur. L’invention est considérée comme telle, selon l’article
18(a) de la loi n° 17.97, lorsqu’elle est le résultat d’études et de recherches ordonnées par
l’employeur. Celui-ci se charge alors des conséquences qui en découlent, en ayant ainsi le
droit de bénéficier des avantages de l’invention réalisée grâce aux recherches.

L’invention de service résulte soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive
qui correspond aux fonctions effectives du salarié inventeur, soit d’études et de recherches
qui sont explicitement confiées au salarié. Dans la pratique, ce type d’invention se rencontre
dans les entreprises menant une activité de R & D ou dans des universités et centres de
recherche.

La loi n° 17.97 précise bien que le brevet lié à l’invention de service est la propriété de
l’employeur, mais le salarié bénéficie toujours d’une contrepartie de son invention. En
effet, en plus des avantages éventuellement prévus - en vertu du 1er alinéa de l’article
18(a) déjà cité - par le contrat de travail, si le salarié réalise une quelconque invention.
L’inventeur conserve dans tous les cas le droit d’être mentionné dans le brevet (art. 20).

Une question se pose par rapport aux droits du salarié concernant la rémunération
supplémentaire liée aux inventions qu’il a réalisées au cours de l’exécution de son contrat
de travail.

Si le 2e alinéa de l’article 18(a) renvoie expressément la compétence au tribunal pour


trancher tout litige pouvant naître entre l’entreprise et le salarié (quant à la rémunération
supplémentaire que ce dernier pourrait percevoir suite à l’invention réalisée dans le
cadre de son contrat de travail), il ressort du 1er alinéa qu’il est nécessaire de déterminer
les conditions du bénéfice de cette rémunération supplémentaire dans les conventions
collectives et le contrat individuel de travail. Le tribunal compétent a une appréciation
souveraine dans le règlement du litige à condition que sa décision soit bien motivée.

La relation entre le salarié et l’employeur repose sur quelques principes énoncés dans le
1er alinéa et le c) de l’article 18 et l’article 20, dont les suivants :

• Si le contrat de travail contient des stipulations contractuelles plus favorables au


salarié, celles-ci s’appliquent en priorité.

• L’article 18 de la loi n° 17.97 constitue le cadre légal qui régit le rapport entre
l’entreprise et le salarié en cas du défaut de stipulations contractuelles plus favorables
au salarié.

• Le devoir général auquel sont soumis aussi bien l’entreprise que le salarié est de se
communiquer tous les renseignements utiles sur l’invention en cause.

• Chacun d’eux doit s’abstenir de toute divulgation de l’invention de nature à


compromettre en tout ou partie l’exercice des droits conférés par le brevet
d’invention.

54 Guide sur le brevet d’invention


• S ous peine de nullité, l’écrit est une condition exigée pour prouver l’accord entre le
salarié et son employeur.

• L’inventeur salarié est mentionné comme tel dans le brevet. Il peut également s’opposer
à cette mention (art. 20).

Au Maroc, les établissements d’enseignement supérieur et les centres de recherche


publics constituent l’infrastructure de base nationale en matière de production de ré-
sultats de recherche scientifique et technologique susceptibles d’être protégés par des
brevets d’invention. La loi n° 01 00 portant organisation de l’enseignement supérieur,
promulguée en mai 2000, permet aux universités de servir, à partir de leurs recettes
propres provenant des travaux de recherche et des prestations de services, des indem-
nités complémentaires à leurs personnels à titre d’encouragement et d’émulation
(art. 17).

Les régimes de ces indemnités complémentaires sont fixés par le conseil de l’université
auquel il revient de délibérer sur toutes les questions relatives aux missions et à la
bonne marche de l’université (art. 12 de la même loi). Les recettes propres précitées
sont généralement réparties ainsi : 20 % pour l’établissement d’enseignement et l’uni-
versité, de 40 à 60 % pour les indemnités complémentaires et de 20 à 40 % pour les
frais de réalisation.

1.2.2. Invention occasionnelle

L’invention occasionnelle, tout en étant effectuée dans le cadre de l’activité de l’entreprise,


revient à un salarié lié par un contrat de travail ne relevant ni d’une mission inventive, ni
d’une mission de recherche ou d’études.

Le point de vue qui s’attache à ce genre d’invention a évolué depuis longtemps. Après avoir
considéré que l’invention occasionnelle était un droit du salarié, des difficultés pour trouver
des solutions se sont posées avec l’apparition de situations délicates : par exemple, quand
un salarié divulgue l’idée à son employeur et que ce dernier, en l’admettant, lui fournit la
capacité de poursuivre les recherches ; à cet égard, la jurisprudence a considéré que cette
invention est une propriété commune entre le salarié et son employeur, puisqu’elle est le
fruit d’un effort partagé.

Ainsi, pour que cette invention occasionnelle soit jugée comme telle, il est nécessaire que
le salarié arrive à réaliser l’invention à travers l’une des situations suivantes :

• dans le cadre de l’exécution de ses fonctions ;

• dans le domaine des activités de l’entreprise ;

• par la connaissance ou l’utilisation des techniques ou moyens spécifiques


à l’entreprise ;

• par l’utilisation des données procurées par l’entreprise.

Guide sur le brevet d’invention 55


En vue d’une réglementation des rapports existant entre le salarié et l’entreprise, l’article
18(b) prévoit des conditions à respecter par les deux parties afin de préserver leurs droits
liés à l’invention réalisée. Aussi :

• Le salarié est tenu d’informer immédiatement l’entreprise, et ce, par une déclaration
écrite dont l’envoi doit être effectué par lettre recommandée avec accusé de réception.

• L’entreprise a l’obligation de veiller à s’attribuer la propriété ou la jouissance de tout


ou partie des droits attachés à l’invention. Cette revendication doit avoir lieu dans
un délai de 6 mois à compter de la date de la réception de la déclaration sous peine
de forclusion du délai ; autrement dit, l’entreprise qui laisse passer ce délai sans
déposer une demande de brevet perd son droit pour toute demande postérieure, et
l’invention revient de plein droit au salarié qui en est titulaire.

• Le dépôt de la demande de brevet relatif aux droits revendiqués doit être effectué
par l’entreprise auprès de l’OMPIC.

Si l’entreprise choisit de déposer la demande de brevet après réception de la déclaration


du salarié inventeur, exprimant à cet effet sa volonté de s’approprier l’invention, l’article
18(b) exige expressément qu’elle rémunère l’inventeur - sauf désistement de sa part - par
l’octroi d’une contrepartie de l’invention qu’il a réalisée et dont elle a bénéficié. Il est à
remarquer que l’option entre la licence d’exploitation et le rachat du brevet d’invention est
une prérogative de l’entreprise.

Il convient de signaler les critères qui caractérisent le droit du salarié :

• La rémunération obtenue par le salarié en raison de son invention doit porter sur un
juste prix, et dans le cas de plusieurs inventeurs, le partage s’effectue entre eux.

• Le calcul du juste prix revient :


- en principe aux parties ;
- en cas de litige, au tribunal.

• Le tribunal prend en considération les éléments suivants pour déterminer le juste prix :
- en particulier, les éléments que pourraient présenter aussi bien le salarié que
l’entreprise en fonction :
> des apports initiaux offerts par les parties ;
> de l’utilité industrielle et commerciale de l’invention ;
- en général, tous les éléments qui pourront découler de la cause, par exemple les
rapports des experts et la comparaison des situations similaires.

L’employeur qui a lui-même reconnu, par différents courriers, l’importance de


l’invention pour l’entreprise se doit d’accorder à chaque inventeur une rémunération
supplémentaire plus importante que celle déjà attribuée (Cour d’appel de Paris, 4e ch.,
sect. B, 24 novembre 2006, RG n° 2005/05528, PIBD n° 844 III 43).

56 Guide sur le brevet d’invention


1.2.3. Invention libre

L’invention libre est celle qui est complètement étrangère à l’entreprise et au contrat de
travail. Ainsi, la nature de cette invention correspond à son titre. Il s’agit, par exemple,
d’une invention libre quand un ingénieur lié à une société spécialisée dans l’industrie de la
moto parvient, en dehors de ses heures de travail, à une nouvelle technique du domaine
de l’aviation.

Dans ce cas, l’invention et le brevet qui s’y attache sont la propriété propre de l’inventeur,
sans aucun droit pour l’employeur.

1.2.4. Violation du droit

Toute violation de la part de l’entreprise ou du salarié inventeur des dispositions prévues


par la loi donne à la personne qui a subi un préjudice le droit de demander la propriété
du titre délivré par l’OMPIC.

La loi n° 17.97, dans l’article 19, prévoit les cas dans lesquels la revendication du titre de
propriété est possible : il s’agit de la soustraction de l’invention à l’inventeur ou à ses
ayants droit, de la violation d’une obligation légale (les dispositions de la loi en question)
et de la violation des obligations contractuelles (le contrat de travail).

Dans son article 15, elle définit que seuls les tribunaux de commerce sont compétents pour
connaître de tout litige né de l’application de la présente loi, à l’exception des décisions
administratives qui y sont prévues.

1.3. Invention et pluralité des inventeurs


Il est possible de se trouver devant le cas où plusieurs personnes ont réalisé la même
invention indépendamment l’une de l’autre. Il est alors naturel de se demander laquelle
a droit à l’invention.

L’article 16, 2e alinéa, de la loi n° 17.97 apporte la solution à ce problème. Il confère le


droit au titre de propriété industrielle, relatif à cette invention, à l’inventeur qui justifie de la
date de dépôt la plus ancienne par rapport aux dépôts des autres inventeurs ayant réalisé
la même invention.

Le législateur s’appuie sur le critère du dépôt, et non de l’invention, pour attribuer la qualité
de titulaire du droit de brevet, ce qui exige de l’inventeur qui arrive à une nouveauté, pour
en faire valoir l’antériorité, de déposer rapidement sa demande.

Guide sur le brevet d’invention 57


1.4. À
 qui appartient la propriété des inventions produites
par les organismes publics de recherche ?
L’examen des dispositions du levier 11 de la Charte d’éducation et de formation, ainsi que
celles de la loi n° 01 00 portant organisation de l’enseignement supérieur, ne permettent
pas de répondre à cette question avec certitude.

En effet, si l’article 18 de la loi n° 17.97, relative à la propriété industrielle, exclue le


personnel des organismes de recherche de la propriété des brevets d’inventions issus des
résultats de recherche parce que l’activité inventive fait partie de leur mission de salariés,
il est légitime de se demander : à qui appartiennent les résultats des activités de recherche
financées par des fonds publics ? La réponse n’est pas évidente quand on sait qu’aux
États-Unis, la décision d’attribuer à des organismes de recherche la propriété intellectuelle
des résultats qu’ils ont obtenus sur fonds publics a fait l’objet de la fameuse loi « Bayh-
Dole Act » promulguée en 1980.

Dans le cas du Maroc, peut-on attribuer cette propriété à l’université marocaine pour
les activités qui la concernent, en vertu de l’article 7 de la loi citée ci-dessus, qui autorise
les universités à exploiter des brevets et licences et commercialiser les produits de leurs
activités ? A priori, oui, car selon ce même article, les ressources disponibles dégagées de
ces activités relèvent des fonds propres des universités, puisqu’elles peuvent les dépenser,
entre autres, dans des prises de participations dans des entreprises ou pour créer des
sociétés filiales.

Par ressources disponibles, doit-on comprendre la totalité des revenus des activités des
universités ou seulement une partie, à définir, de ces revenus ? Cette question s’impose
lorsqu’on considère les contrats conclus dernièrement entre les universités et leur ministère
de tutelle, relatifs à la réalisation de projets de recherche en télécommunications financés
par le Fonds national de la recherche scientifique et du développement technologique,
dont une clause prévoit qu’en cas de valorisation de résultats de recherche obtenus dans
le cadre de tels projets, 25 % des revenus lui soient versés.

Ainsi, si les dispositions législatives disponibles autorisent sans équivoque l’université à


valoriser ses résultats de recherche, elles ne semblent pas pour autant lui garantir la
propriété complète de ces résultats. Aussi, il serait utile de préciser par la loi la propriété
des inventions développées par les universités dans le cadre d’activités de recherche
financées par des subventions publiques.

Il faut souligner qu’actuellement, les demandes de brevet relatives aux résultats de


recherche obtenus par les universités sont souvent déposées par les enseignants-
chercheurs en leur propre nom. Cela peut causer la nullité du brevet éventuel en cas
de litige avec la personne intéressée. Pour éviter ce risque, les universités gagneraient à
définir une politique en matière de protection par brevet des inventions déduites de leurs
activités de recherche.

Par ailleurs, que l’invention obtenue par l’université soit due à des activités de recherche
financées par des fonds publics ou à des activités contractuelles menées avec des partenaires
socio-économiques ou dans le cadre de la coopération internationale, en vertu de l’article

58 Guide sur le brevet d’invention


18 de la loi n° 17.97 et de l’article 7 de la loi n° 01 00, la demande de brevet ne peut être
déposée qu’au nom de l’université. Cependant, pour permettre une meilleure valorisation
des résultats de recherche, si l’université ne désire pas déposer la demande de brevet,
les enseignants-chercheurs inventeurs peuvent lui demander l’autorisation d’effectuer le
dépôt en leur propre nom. Si accord et dans l’intérêt du déposant, cette autorisation est à
joindre au dossier de la demande de brevet afin de servir de pièce justificative en cas de
revendication ultérieure, par l’université, ou d’opposition de tiers à l’octroi du brevet.

Il est important de préciser les droits des étudiants et des stagiaires par rapport à la
propriété intellectuelle issue des résultats des travaux de recherche auxquels ils contribuent,
notamment ceux des thèses de doctorat. En effet, la loi n° 17.97 ne prévoit pas ce cas vu
que les étudiants et stagiaires, n’étant pas salariés, ne sont pas directement concernés par
l’article 18. Le cas de la jurisprudence française cité ci-après illustre bien la problématique
en question. Le règlement intérieur de l’organisme d’enseignement ou de recherche peut
prévoir des dispositions permettant de lever l’indétermination concernant les droits de
cette catégorie de ressources humaines de recherche.

Michel Puech, stagiaire d’un laboratoire associé au Centre national français de la


recherche scientifique (CNRS) de mars à juin 1997, a réalisé, dans le cadre d’un stage
de DEA à l’université technologique de Compiègne, une invention dont il a déposé une
demande de brevet en son nom.

Le CNRS a introduit en justice une action en revendication de propriété de l’invention


basée sur la signature par le stagiaire du règlement intérieur du laboratoire,
considérant tous les droits de propriété intellectuelle obtenus par le stagiaire comme
étant sa propriété. La Cour de cassation relevant dans son arrêt du 25 avril 2006
que, d’une part, le stagiaire n’étant pas rémunéré, l’invention lui appartient en vertu
de l’article L. 611 6 du CPI, et que, d’autre part, ce même article attribue la propriété
de l’invention à l’« ayant cause » du stagiaire (qualité revendiquée par le CNRS du
fait de la signature du règlement intérieur du laboratoire par le stagiaire), elle a
renvoyé l’affaire devant la Cour d’appel de Paris qui a considéré que seul le tribunal
administratif est compétent pour statuer sur les règlements de travail sursoit à statuer.
Le 11 juillet 2008, le tribunal administratif, saisi par le stagiaire, déclara les dispositions
dudit règlement intérieur - concernant la propriété des inventions effectuées par les
stagiaires - entachées d’incompétence du fait de leur visée à déposséder ces derniers
de leur titre de propriété.

En guise de conclusion de cette affaire, non encore tranchée d’une manière définitive,
il y a lieu de souligner la nécessité d’instaurer un contrat de stage et l’insuffisance du
règlement intérieur pour décider des questions relatives à la propriété intellectuelle des
inventions réalisées par les ressources humaines de recherche non rémunérées.

Guide sur le brevet d’invention 59


Section 2 : Contenu de la demande de brevet
Une demande de brevet doit respecter un certain nombre de conditions de forme et de
contenu.

2.1. Conditions exigées à la demande


La demande présentée pour l’obtention du brevet d’invention revêt une grande importance
dans la mesure où son contenu détermine son acceptation ou son rejet, aussi parce qu’elle
permet de divulguer l’invention et son état technique, ou encore de définir l’étendue de la
protection du brevet.

Le dossier de demande comprend la demande en elle-même, matérialisée par un


formulaire spécifique (art. 31 de la loi n° 17.97 et art. 2 de son décret d’application), et
des pièces jointes (art. 5 du décret). Le tout doit répondre à des conditions déterminées :
tandis que la demande doit contenir les informations requises au moment du dépôt, les
pièces jointes doivent présenter des caractéristiques bien définies qui fixent les contours
de la protection du brevet.

2.2. Informations exigées dans la demande


2.2.1. Préparation du dépôt de la demande

Il est vivement recommandé de s’assurer au préalable que l’objet qu’on demande à


l’OMPIC d’enregistrer est brevetable conformément aux conditions visées par les articles
22, 23, 24 et 25 de la loi n° 17.97. La brevetabilité de l’invention ne constitue pas une
condition de recevabilité dans un système d’enregistrement tel que le système marocain.
Mais peut être soumise ultérieurement à une vérification, par exemple lors d’une action
en annulation.

Le dépôt de la demande de brevet exige auparavant de :

• remplir un formulaire fourni à cet effet par l’OMPIC, en langue arabe ou française,
selon les dispositions de l’article 2 du décret ;

• s’acquitter des droits exigibles.

2.2.2. Contenu de la demande

La demande de brevet d’invention ou de certificat d’addition doit contenir les informations


figurant sur le formulaire B1 qui accompagne la demande de dépôt conformément aux
dispositions de l’article 2 du décret d’application.

60 Guide sur le brevet d’invention


Ce formulaire, consultable et téléchargeable sur le site de l’OMPIC (www.ompic.ma),
contient des cases à remplir :

• case 1 : référence du brevet d’invention principal (en cas de certificat d’addition) ;

• case 2 : informations de la demande internationale (phase nationale du PCT : voir


la section 5 de la présente partie) ;

• case 3 : identification du déposant ;

• case 4 : désignation du (des) inventeur(s) qui ont réalisé l’invention ;

• case 5 : le cas échéant, le mandataire ;

• case 6 : intitulé de l’invention ;

• case 7 : le cas échéant, revendication de la priorité − avec éventuellement la mention


de l’acte affectant la jouissance du droit de la priorité ;

• case 8 : informations relatives aux certificats de garantie délivrés aux expositions


internationales visées à l’article 186 de la loi n° 17.97 ;

• case 9 : montant des droits exigibles.

Une case est aussi réservée aux pièces jointes, et une autre à la signature du déposant ou
de son mandataire.

En cas d’une demande en copropriété, il est exigé de noter l’identification de l’ensemble


des copropriétaires et la mention d’une seule adresse à des fins de correspondance avec
[l’OMPIC]. Les copropriétaires peuvent se faire représenter par l’un d’entre eux qui doit être
muni de son pouvoir à cet effet - art. 4(2) du décret.

Guide sur le brevet d’invention 61


Section 3 : D
 élais liés à la demande de brevet d’invention
Le dépôt de la demande de brevet d’invention se fait au moment choisi par l’inventeur ou
ses ayants droit, qui y procèdent généralement au plus court délai après s’être assuré(s)
qu’il s’agit bien d’une invention brevetable.

3.1. Délai de régularisation du dossier


Dans certains cas, l’opération de dépôt du dossier de la demande de brevet s’effectue
sans que soient réunies toutes les pièces requises du déposant ou avec des pièces se
trouvant affectées de certaines erreurs. À cet égard, le législateur donne l’occasion de
remédier à la situation en prévoyant, à l’article 32 de la loi n° 17.97, un délai de 3 mois
accordé au déposant ou à son mandataire afin de régulariser son dossier.
Le dossier du déposant garde sa priorité, puisque la demande, ainsi régularisée dans le
délai, conserve la date du dépôt initial.

Le dernier alinéa dudit article confirme que le délai de 3 mois est un délai franc - ce qui
signifie qu’il n’inclut ni le premier jour du dépôt, ni le dernier jour du délai - et que si le
dernier jour est un jour férié ou non ouvrable, le délai est prorogé jusqu’au jour ouvrable
qui suit conformément aux règles générales. À l’inverse, il ressort de ces dispositions que
les autres délais, qui ne sont pas francs, sont des délais forclos.

3.2. Délai exceptionnel pour la régularisation du dossier


Si le déposant dispose d’un délai de trois mois pour régulariser son dossier, le non-
respect de cette procédure est considéré comme un désistement de la demande de la
part de l’intéressé, ce qui constitue une cause de rejet de l’enregistrement de la demande
en question, tel que prévu par l’article 41(4) de la loi n° 17.97. Toutefois, en plus de
la prorogation du délai précité, une exception est accordée par l’article 14.1 : un délai
supplémentaire fixé à 2 mois peut être obtenu lorsque la régularisation n’a pas été
observée dans le délai imparti et, dans ce cas, le déposant est tenu de présenter tous les
documents qui manquent à son dossier conformément à l’article 3.1 du décret.

Quant au délai de régularisation du dossier, la loi prévoit qu’il court à compter de la date
de son dépôt (art. 32). Par ailleurs, le délai de présentation de la requête en poursuite
de la procédure relative au dépôt court à compter de la date d’expiration du délai de
régularisation du dossier (art. 14.1).

Schéma n° 1 : Délai exceptionnel pour la régularisation du dossier

Les délais supplémentaires pour la régularisation


du dépôt de la demande de brevet

Délai supplémentaire à compter Délai exceptionnel à compter


de la date de dépôt du dossier : de la date d’expiration du délai
3 mois (art. 32) de régularisation : 2 mois (art. 14.1)

62 Guide sur le brevet d’invention


Il y a lieu d’insister sur le fait que le déposant est tenu de veiller à la régularisation
de son dossier, puisque les deux délais susmentionnés se succèdent sans interruption à
compter de la date de dépôt. La loi n° 17.97 n’exige de l’administration aucune formalité
de notification du départ des délais précités.

3.3. Délai relatif aux besoins de la défense nationale


La loi n° 17.97 mentionne des exigences relatives au cas où l’invention ayant fait l’objet
d’un dossier déposé auprès de l’OMPIC est en rapport avec la sûreté nationale. Il en
découle deux points essentiels :

• l’interdiction de divulguer le secret de l’invention qui touche à la défense nationale ;

• l’interdiction de l’exploitation totale ou pour une période donnée.

Habituellement, les inventeurs déposants ne se soucient pas de ces dispositions, car ils s’occupent
avant tout de mettre leur invention en exécution et d’exploiter rapidement leur idée.

Les étapes à travers lesquelles l’administration de sûreté nationale utilise le droit


d’appropriation du brevet, définitivement ou provisoirement, ainsi que la procédure à
suivre, connaissent un échelonnement selon les éléments suivants :

a) E
 n principe, en vertu des dispositions de l’article 42 de la loi n° 17.97, il est permis,
mais seulement pour les besoins de la défense nationale, d’interdire la délivrance et
l’exploitation d’un brevet d’invention à titre définitif ou provisoire, au cas où la publication
de l’invention est susceptible de nuire à la sûreté nationale. À cet effet, la consultation
des demandes de brevet se fait à titre confidentiel dans les locaux de l’organisme chargé
de la propriété industrielle après la régularisation du dossier de la demande de brevet,
et ce, pendant le délai de 15 jours prévu au 1er alinéa de l’article 43 .

Avant l’expiration du délai de 15, la décision rendue est notifiée à l’autorité administrative
compétente et à l’OMPIC. Elle vise :

• soit à surseoir à la délivrance et à la divulgation du brevet jusqu’à l’expiration du


délai de 18 mois prévu au 1er alinéa de l’article 44 ;

• soit à interdire à titre définitif la délivrance, la divulgation et l’exploitation du brevet.

b) Si à l’expiration du délai de 15 jours, aucune décision n’a été notifiée à l’autorité
administrative compétente et à l’OMPIC, le procès-verbal constatant le dépôt de la
demande, prévu à l’article 43, est remis ou notifié au déposant ou à son mandataire.

En cas de sursis et si aucune décision concernant le maintien ou la levée du sursis


à la délivrance du brevet n’a été notifiée à l’autorité administrative compétente et à
l’OMPIC pendant le délai de 18 mois visé au 1er alinéa de l’article 44, le procès-verbal
est remis ou notifié, et le brevet est délivré au déposant ou à son mandataire dans les
conditions prévues aux articles 46 à 48.

Guide sur le brevet d’invention 63


c) S
 ’il y a une interdiction définitive à la délivrance, à la divulgation et à l’exploitation
du brevet, le procès-verbal constatant le dépôt de la demande n’est pas dressé, et le
brevet n’est pas délivré. L’OMPIC est tenu de notifier par écrit au déposant ou à son
mandataire toute décision prise.

d) L es articles 19 et 20 du décret d’application citent quelques précisions et garanties


relatives à l’étude de la demande. Ainsi, les représentants de la défense nationale, qui
peuvent consulter à titre confidentiel, dans les locaux de l’OMPIC, les demandes de
brevet d’invention ou de certificat d’addition déposées auprès de cet office, doivent être
spécialement habilités à cet effet. L’autorité chargée de la défense nationale notifie à
l’OMPIC l’identité de ces représentants.

3.3.1. D
 écisions de l’autorité chargée de la défense nationale

L’autorité chargée de la défense nationale fixe les décisions visant à :

• surseoir à la délivrance et à la divulgation du brevet d’invention jusqu’à l’expiration


du délai de 18 mois visé au 1er alinéa de l’article 44 de la loi n° 17.97 ;

• interdire à titre définitif la délivrance, la divulgation et l’exploitation du brevet d’invention.

3.3.2. Protection de l’inventeur

Afin de protéger le titulaire du droit en cas d’interdiction définitive ou provisoire de la


divulgation ou de l’exploitation de son invention, le législateur lui confère une indemnité
fixée avec son accord ou celui de son mandataire. Tout litige en matière d’indemnisation est
du ressort du tribunal administratif de Rabat qui a la compétence territoriale et matérielle
en la matière (art. 42 de la loi n° 17.97), même si le titulaire de la demande de brevet n’est
pas du ressort de ce tribunal et bien que le siège de l’OMPIC soit situé à Casablanca.

3.4. Délai de délivrance du brevet


Le législateur marocain fixe le délai nécessaire à l’étude du dossier à travers l’article 46 de
la loi n° 17.97. À cette fin, les brevets sont délivrés après un délai de 18 mois, tel que prévu
au 1er alinéa de l’article 44. Leur remise a lieu en fonction de la date de dépôt de leur
demande à l’OMPIC à compter du premier jour du mois suivant celui où expire le délai de
18 mois. Lorsque le premier jour du mois susvisé est un jour férié ou non ouvrable, ils sont
délivrés le jour ouvrable qui suit (art. 22 du décret d’application de la loi).

64 Guide sur le brevet d’invention


Section 4 : P
 rocédure de dépôt de la demande de
brevet d’invention
La loi limite l’autorité habilitée à recevoir le dépôt spécifique d’une demande de brevet
d’invention à l’OMPIC, dont le siège se situe à Casablanca.

Le dépôt exige assurément de l’inventeur une préparation préalable et l’accomplissement


de procédures déterminées auprès de l’administration ; et ce, en passant par des étapes
qui mènent, lorsque la demande satisfait aux exigences de forme, à l’enregistrement du
brevet et à la délivrance du titre correspondant.

Les formalités du dépôt de la demande et son contenu ayant déjà été étudiés en détail, il
convient de s’intéresser à la procédure d’examen de la demande et à ses étapes.

4.1. Présentation de la demande


En principe, la demande de brevet d’invention doit être déposée par l’inventeur. Cependant,
le dépôt peut souvent ne pas être réalisé par l’intéressé lui-même, soit parce qu’il s’agit
d’une personne physique qui ne peut pas ou ne veut pas entamer la procédure elle-
même, soit parce qu’il s’agit parfois d’une personne morale dont la gestion administrative
ne permet pas au responsable délégué de se déplacer pour effectuer le dépôt et entamer
la procédure. Dans cette hypothèse, le dépôt par un « mandataire » est toléré.

Le mandataire est occasionnellement cité dans la loi n° 17.97 par ses articles 32 et 33
à propos du délai conféré au déposant ou à son mandataire pour régulariser son dossier
irrégulier. Cela étant, les termes utilisés à l’article 33 confirment la possibilité, pour
l’inventeur ou son mandataire, de déposer la demande de brevet, précisant qu’un récépissé
constatant la date de la remise des pièces visées aux 2e et 4e alinéas de l’article 31 […] est
immédiatement remis après dépôt de la demande au déposant ou à son mandataire.

La loi ne prévoit aucune exigence quant à la qualité des mandataires pouvant représenter
les inventeurs ou leurs ayants droit pour les formalités de dépôt et l’accomplissement des
procédures. De toute évidence, ils doivent être les plus qualifiés et compétents dans le
domaine de la propriété industrielle, précisément dans celui des brevets. On peut citer les
experts et conseillers en la matière, ainsi que les avocats titulaires de plein droit du pouvoir
de représenter les parties auprès des administrations et tribunaux ; mais le déposant peut
se faire représenter par toute autre personne.

Au sujet des pouvoirs du mandataire, la loi n° 17.97 établit une distinction entre, d’une
part, la demande de dépôt, et d’autre part, son retrait. À cet égard, si dans le cadre de
la présentation des formulaires du dépôt du dossier, un pouvoir général est accepté, en
revanche, dans celui du retrait de la demande déposée, un pouvoir spécial est exigé selon
les dispositions de l’article 40.

Il est possible de se trouver face à la situation où le dépôt est effectué par l’inventeur lui-
même mais en qualité de mandataire d’un tiers. C’est par exemple le cas de l’invention

Guide sur le brevet d’invention 65


réalisée par un salarié et dont la propriété revient à l’employeur. Par ailleurs, l’inventeur
se trouve en même temps en qualité de représentant de son employeur devant les tiers, y
compris les organismes spécialisés.

4.2. Examen du dossier de la demande de brevet d’invention


L’OMPIC est chargé d’examiner la demande de dépôt quant à la forme. À cet égard, il
convient de distinguer deux phases :

4.2.1. P
 remière phase : examen des formalités de la recevabilité de la
demande

Au moment du dépôt, l’OMPIC a autorité pour déclarer irrecevable tout dossier dont les
conditions exigées par le 3e alinéa de l’article 31 de la loi n° 17.97, complété par l’article
4 du décret d’application, ne sont pas réunies, notamment en cas de :

• non-présentation de la demande de brevet conformément aux exigences prévues à


l’article 4 du décret ;

• non-paiement des droits exigibles.

Les articles 4 et 5 du décret citent le contenu de la demande de brevet et les pièces à fournir
dans un délai de trois mois à compter de la date de dépôt si le dossier est alors incomplet.

L’OMPIC doit s’assurer de la satisfaction des conditions définies par l’article 37, selon
lequel la demande de brevet ne doit pas contenir :

1) d ’éléments ou de dessins dont la publication ou la mise en œuvre serait contraire à


l’ordre public ou aux bonnes mœurs ;

2) de déclarations dénigrantes relatives à des produits ou procédés de tiers ou le mérite


ou la validité de demandes de brevet ou de brevets de tiers (de simples comparaisons
avec l’état de la technique ne sont pas en elles-mêmes considérées comme telles) ;

3) d ’éléments manifestement étrangers à la description de l’invention ;

Elle ne peut également comporter ni restrictions, ni conditions, ni réserves.

Cela étant, l’article 5 du décret énumère les pièces à joindre à la demande de brevet
d’invention ou de certificat d’addition, qui sont :

a) la description de l’invention ;

b) une ou plusieurs revendications ;

c) l’abrégé du contenu technique de l’invention ;

66 Guide sur le brevet d’invention


d) le cas échéant, les dessins nécessaires à l’intelligence de l’invention ou de la création ;

e) le pouvoir du mandataire, s’il en est constitué un ;

f) en cas de revendication de priorité, la copie officielle du dépôt antérieur accompagnée,


le cas échéant, de l’autorisation de revendiquer la priorité donnée par écrit par le
propriétaire de la demande antérieure ;

g) le cas échéant, le certificat de garantie lorsque l’invention brevetable, les


perfectionnements ou additions se rattachant à l’invention brevetée, ont fait l’objet
des expositions visées à l’article 186 de la loi n° 17.97.

Dans tous les cas : Les pièces visées aux a), b), c) et d) ci-dessus doivent être présentées
en double exemplaire.

4.2.2. Deuxième phase : décision de l’OMPIC

Après la recevabilité d’une demande de dépôt de brevet, l’OMPIC est compétent pour
traiter le dossier et procéder à son enregistrement notamment :

• selon l’article 31, 4e alinéa, de la loi n° 17.97 si le dossier comporte la demande de


brevet et que les droits exigibles sont bien payés ;

• si la régularisation du dossier est effectuée dans le délai donné pour régulariser la
situation du dossier incomplet.

Guide sur le brevet d’invention 67


Schéma n° 2 : Déroulement de la procédure
d’examen du dossier de la demande de brevet d’invention

Présentation du dossier de la demande


de brevet Formulaire B1 + pièces + paiement des droits exigibles

Non Oui
Dossier complet ?

Dossier régularisé Oui


dans un délai de 3 mois ?

Contrôle de forme des pièces fournies avec


possibilité de rectification (formulaire B9)
et vérification des exclusions et des exceptions
(art. 23, 24 et 25)
Non

Anomalie de forme,
Oui Non
exception ou
exclusion détectée ?
Rejet de la demande

Requête en poursuite dans


un délai de 2 mois (art. 14.1)

Non Requête en Oui


poursuite fondée ? Non Consultation de la demande
par la défense nationale ?
(art. 42/art. D. 19-20)

Rejet de la requête
Oui

Édition du PV Non Interdiction définitive Oui


de délivrance ?
Édition du PV
après 18 mois
Arrêt de la procédure
de délivrance

Délivrance après 18 mois


Notification
au déposant

Publication du brevet

68 Guide sur le brevet d’invention


4.3. Effets de l’enregistrement
La décision définitive concernant la recevabilité du dépôt du dossier de la demande de
brevet produit un effet juridique prévu comme suit à l’article 16 de la loi n° 17.97 : Ce titre
confère à son titulaire ou à ses ayants droit un droit exclusif d’exploitation de l’invention,
sous réserve des limites au droit conféré par le brevet.

Ainsi, la règle adoptée par le droit marocain est que l’enregistrement produit un effet
constitutif car il confère la propriété du brevet, sous condition du respect des dispositions
prévues par l’article 47 qui dispose que les brevets, dont la demande n’a pas été rejetée,
sont délivrés sans examen préalable, aux risques et périls des demandeurs et sans garantie,
soit de la réalité de l’invention, soit de la fidélité ou de l’exactitude de la description, soit
du mérite de l’invention.

4.4. Effets de la recevabilité de la demande


La protection du brevet d’invention est valable pour une période de 20 ans qui court à
partir de la date du dépôt de la demande, et non de celle de l’émission du brevet. La
même règle s’applique au certificat d’addition qui lui est accessoire, mais dans les limites
de la durée du brevet initial.

Aussi, passé le délai de 15 jours qui commence à la date du dépôt de la demande de


brevet ou de la régularisation du dossier incomplet, l’OMPIC est tenu d’établir le procès-
verbal constatant le dépôt de la demande, et de préciser la date de ce dépôt et les pièces
accompagnant la demande (art. 43 de la loi n° 17.97).
Ce procès verbal est remis ou notifié au déposant ou à son mandataire.

4.5. Cas de rejet de la demande de brevet d’invention


Il ressort de la lecture des dispositions de la loi n° 17.97 qu’il existe des cas où la décision
de rejet du brevet doit être prise, à savoir :

• pour les demandes non considérées comme inventions selon l’article 23 de la loi
susvisée ;

• pour les inventions non brevetables selon l’article 24, c’est-à-dire les inventions dont
la publication ou la mise en œuvre serait contraire à l’ordre public ou aux bonnes
mœurs, ainsi que les obtentions végétales ;

• pour les inventions non susceptibles d’application industrielle selon l’article 25 ;

• lorsque la régularisation du dossier de demande de brevet n’a pas été effectuée dans
le délai de trois mois prévu par l’article 32, exception faite du cas de la poursuite de
la procédure selon l’article 14.1 ;

Guide sur le brevet d’invention 69


• lorsque le demandeur du brevet d’invention n’a pas respecté les exigences de l’article
37, car sa demande contient [des] éléments ou [des] dessins dont la publication
ou la mise en œuvre serait contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs, [des]
déclarations dénigrantes concernant des produits ou procédés de tiers, ou encore
[des] éléments manifestement étrangers à la description de l’invention ;

• lorsqu’il s’agit d’une invention ou d’une pluralité d’inventions qui ne sont pas liées
entre elles au sens de l’article 38.

4.6. Décision de la délivrance du brevet d’invention


Un brevet d’invention est délivré passé un délai de 18 mois à partir de la date de dépôt
ou de priorité prévue au 1er alinéa de l’article 44 de la loi n° 17.97. Sa délivrance est
concrétisée par le titre de propriété industrielle qui émane de la décision de l’OMPIC
conformément aux dispositions de l’article 48 ; et ce, après expiration des délais fixés et
satisfaction aux formalités exigées pour que puisse être déclarée au déposant sa propriété
industrielle, en l’occurrence de l’invention faisant l’objet de la demande de brevet.

La décision de l’OMPIC suppose la conformité de la demande aux dispositions juridiques.


Quant à la délivrance d’un brevet, elle constitue une présomption de l’exactitude de la
procédure, sauf décision contraire émanant de l’autorité judiciaire compétente. Toutefois,
l’octroi d’un brevet ne signifie pas que l’invention a une valeur technologique ou
économique.

4.7. Acte d’octroi du brevet


Cet acte se matérialise par :

• sa délivrance au déposant ou à son mandataire, conformément à l’article 48 de la


loi n° 17.97 ;

• son inscription au registre national des brevets défini à l’article 58 ;

• sa publication au catalogue officiel des brevets d’invention qui est prévu par l’article 89.

70 Guide sur le brevet d’invention


Section 5 : P
 rocédures de dépôt d’une demande
de brevet à l’étranger
Le brevet d’invention délivré au Maroc ne permet de protéger l’invention concernée
que sur le territoire marocain. La mondialisation de l’économie régie dans le cadre de
l’OMC et la multiplication des accords de libre-échange entre pays de différentes régions
incitent les entreprises et inventeurs à se pencher sur l’extension de la protection de leurs
inventions à l’étranger.

Des efforts et frais non négligeables sont nécessaires pour mener à terme une demande
de brevet au Maroc. Afin de ne pas réitérer ce travail pour chaque dépôt dans tout pays
pouvant être élu pour l’extension de la protection, des systèmes régionaux de brevets,
ainsi qu’un système de dépôt international, ont été mis en place durant les quarante
dernières années.

Il s’agit des systèmes régis par :

• la Convention sur le brevet européen (CBE) ;

• l’Accord de Bangui établissant l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle


(dite OAPI) ;

• l’Accord de Harare relatif à l’Organisation régionale africaine de la propriété


intellectuelle (dite ARIPO) ;

• la Convention sur le brevet eurasien (CBEA) ;

• le Traité de coopération en matière de brevets (PCT).

Vu les avantages offerts par le système du PCT, celui-ci est de plus en plus utilisé pour
le dépôt de demandes de brevet à l’étranger. En effet, grâce au dépôt d’une demande
internationale unique, il constitue une voie rapide et peu coûteuse pour obtenir la protection
des inventions à l’étranger, dans tous les pays parties au traité. Le traitement de cette
demande pendant la phase internationale de la procédure PCT permet une meilleure
préparation à la phase nationale grâce aux rapports de recherche internationale, de
l’opinion écrite et de l’éventuel examen préliminaire, assurant ainsi une meilleure évaluation
de la brevetabilité et de la valeur commerciale des inventions concernées.

Cette section permet d’examiner la procédure de dépôt à travers ce système qui, comme
décrit ci-après, est formée de deux phases : l’une, internationale, gérée principalement
par le Bureau international de l’OMPI, et l’autre, nationale, concernant les pays ou régions
visés pour la protection de l’invention (pays désignés et élus).

Guide sur le brevet d’invention 71


5.1. Système d’enregistrement international des brevets :
présentation générale
Le Traité de coopération en matière de brevets établi à Washington le 19 juin 1970, tel
qu’il a été modifié et complété, est le système international qui régit le dépôt de demandes
de brevet en vue d’obtenir une protection dans plusieurs pays contractants. La liste des
pays contractants du PCT (141 en mars 2009) peut être consultée sur le site Web de
l’OMPI au www.wipo.int/pct/guide/fr/gdvol1/annexes/annexa/ax_a.pdf.

La procédure PCT est constituée de deux phases séquentielles : la première, internationale,


et la seconde, nationale :

• La phase internationale, qui comporte quatre étapes, débute par : (1) le dépôt
auprès d’un office récepteur - généralement l’office national - ou du Bureau
international de l’OMPI. Viennent ensuite dans l’ordre : (2) l’étape de la recherche
internationale, qui peut être réalisée par l’un des offices agréés ; (3) l’étape de
la publication internationale par le Bureau international de l’OMPI ; (4) celle de
l’examen préliminaire international, qui peut être menée, si le déposant le souhaite,
par l’office ayant déjà réalisé la recherche internationale. La synthèse des résultats
des étapes de cette première phase, par le déposant, peut déboucher sur le choix
de la liste des pays élus.

• La phase nationale peut alors avoir lieu, le déposant effectuant des dépôts auprès
de chaque pays élu ou d’offices régionaux qui décideront, chacun en fonction de la
législation en vigueur, de la délivrance du brevet sur le territoire correspondant.

Cette procédure est schématisée par la figure ci-dessous :


Schéma n°3 : Système d’enregistrement international des brevets

Dépôt de la demande PCT auprès d’un office récepteur

Recherche internationale

Publication internationale

Examen préliminaire international

Phase
internationale
Élection des
pays désignés
Phase
nationale

Région A Pays B Pays C

72 Guide sur le brevet d’invention


Les points saillants de chacune des deux phases sont examinés ci-après à la lumière du
PCT, de son règlement d’exécution et de ses instructions administratives établies par la
Conférence diplomatique. Tous ces textes sont accessibles en ligne sur le site de l’OMPI
au www.wipo.int/pct/fr/texts/index.htm.

5.2. Phase internationale du PCT


5.2.1. Dépôt de la demande PCT auprès d’un office récepteur

Les articles 3 à 14 du PCT, les règles 2 à 15 du règlement d’exécution de ce traité, ainsi


que ses instructions administratives 201 à 216, se rapportent aux procédures de dépôt
d’une demande internationale auprès d’un office récepteur. Dans le cas du Maroc, l’office
récepteur est généralement l’office national (OMPIC). Quant au Bureau international
de l’OMPI, il peut aussi servir d’office récepteur pour tous les ressortissants des pays
contractants.

On peut relever de ces textes les principaux traits suivants :

• Un brevet national dans un pays contractant - par exemple, le Maroc - peut être
obtenu par une demande internationale dans laquelle ce pays est désigné - art. 3(1)
du PCT.

• Toute demande internationale doit respecter un certain nombre de conditions pour


être acceptable par n’importe quel pays contractant désigné, sans qu’il soit nécessaire
de l’amender en fonction des différences qui existent entre les systèmes de brevets
des pays contractants. Comme dans le système marocain, elle doit comporter une
requête, une description, une ou plusieurs revendications, un ou plusieurs dessins (si
nécessaire) et un abrégé - art. 3(2).

Une demande internationale doit être rédigée dans une langue prescrite par l’office
récepteur - art. 3(4)(i) et règle 12.1 - en tenant compte des langues utilisées par
les administrations chargées de la recherche internationale et pour la publication
internationale. Les langues des publications internationales sont l’allemand, l’anglais,
l’arabe, le chinois, l’espagnol, le français, le japonais et le russe. Elle doit satisfaire à la
condition relative à l’unité de l’invention - art. 3(4)(iii) - et est soumise au paiement des
taxes prescrites - art. 3(4)(iv) - dont les montants et modalités sont fixés par la règle 15.
Ces taxes permettent de payer les prestations de l’office récepteur (taxe de transmission),
du Bureau international de l’OMPI (taxe internationale de dépôt) et de l’administration
chargée de la recherche sur l’état de la technique (taxe de recherche). Une réduction
importante est accordée aux déposants qui sont à la fois des personnes physiques et des
ressortissants de pays en développement, dont les taux sont évalués en tenant compte des
PIB par habitant des pays concernés.

Guide sur le brevet d’invention 73


La requête (dont le formulaire est téléchargeable sur le site Web de l’OMPI au www.wipo.
int/pct/en/forms/index.htm) doit comporter :

• Une pétition de préférence rédigée comme suit : « Le soussigné requiert que la


présente demande internationale soit traitée conformément au Traité de coopération
en matière de brevets ».

• La désignation du(des) États contractant(s) où la protection de l’invention est


demandée sur la base de la demande internationale (États désignés) en respectant
les dispositions de l’alinéa ii) de l’article 4 du traité. Cependant, la règle 4.9(a)(i)
précise que le dépôt d’une requête vaut désignation de tous les États contractants du
traité à la date du dépôt international.

• Le titre de l’invention, qui doit être bref - de préférence de deux à sept mots lorsqu’il
est établi ou traduit en anglais - et précis.

• Des indications relatives au déposant et, le cas échéant, le mandataire ainsi


que l’inventeur, si la législation nationale d’au moins un État désigné exige la
communication du nom de l’inventeur lors du dépôt d’une demande nationale.
Les personnes morales doivent être nommées par leurs désignations officielles
complètes. Les adresses doivent être indiquées selon les exigences usuelles en vue
d’une distribution postale rapide. Une seule adresse peut être indiquée pour chaque
déposant, inventeur ou mandataire, mais si aucun mandataire n’a été désigné pour
représenter le(s) déposant(s), une adresse doit être fournie afin que les notifications
y soient envoyées.

• Le cas échéant, une revendication de priorité selon les prescriptions de l’article 8 et
de la règle 4.10.

• Le cas échéant, la mention d’une recherche antérieure - internationale, de type


international ou autre - selon des prescriptions de la règle 4.11 (voir le 5.2.2 de la
présente section).

• Le cas échéant, la mention d’une demande principale ou d’un brevet principal selon
les prescriptions de la règle 4.11(a)(iii).

• L’indication de l’administration compétente chargée de la recherche internationale


et choisie par le déposant (voir le 5.2.2).

• Une requête adressée à l’office récepteur afin qu’il établisse le document de priorité
et le transmette au Bureau international lorsque la demande, dont la priorité est
revendiquée, a été déposée auprès de l’office national ou de l’administration
intergouvernementale qui est l’office récepteur.

La requête peut aussi, aux fins de la législation nationale applicable dans un ou plusieurs
États désignés (principalement aux États-Unis), inclure une ou plusieurs déclarations
supplémentaires, libellées conformément aux prescriptions des instructions administratives :
l’abrégé, la description, la(les) revendication(s) et, le cas échéant, les dessins, doivent

74 Guide sur le brevet d’invention


respecter les prescriptions des articles 3(3), (5), (6) et (7) du PCT ainsi que les règles
d’exécution afférentes. Ces prescriptions ressemblent d’ailleurs à celles de la loi n° 17.97
décrites plus haut, relatives aux mêmes items.

L’article 12 du PCT précise qu’une fois la procédure de dépôt de la demande internationale


validée par l’office récepteur selon la procédure décrite par l’article 11, celui-ci transmet
un exemplaire de la demande au Bureau international (exemplaire original) et à
l’administration compétente chargée de la recherche internationale (copie de recherche),
et en conserve un exemplaire (copie pour l’office récepteur). L’exemplaire original est
considéré comme l’exemplaire authentique de la demande internationale devant être
reçue dans le délai prescrit ; à défaut, la demande internationale est considérée comme
retirée.

Si l’office récepteur constate des irrégularités dans la demande internationale, telles que
définies par l’article 14 du PCT, il invite le déposant à corriger cette demande dans le délai
prescrit, sans quoi il déclare cette dernière comme étant retirée.

5.2.2. Recherche internationale

Chaque demande internationale fait l’objet d’une recherche internationale pour découvrir
l’état de la technique pertinent, susceptible de provoquer l’annulation de la nouveauté et
de la non-évidence de l’invention objet de la demande. Cette recherche est effectuée,
sur la base de revendications en tenant compte de la description et, le cas échéant, des
dessins, par une administration chargée de cette tâche par la plus haute autorité du
PCT (l’Assemblée de l’Union du PCT) en s’efforçant de découvrir l’état de la technique
pertinent dans toute la mesure où ses moyens le lui permettent et doit, en tout cas, consulter
la documentation spécifiée par le règlement d’exécution (art. 15.4). Cette administration
peut être soit un office national, soit une organisation intergouvernementale, tel l’Institut
international des brevets dont les attributions comportent une telle activité.

Pour être nommé(e) par l’Assemblée, l’office national (ou l’organisation intergouvernementale)
doit satisfaire les exigences minimales définies par le règlement d’exécution, notamment à
propos du personnel et de la documentation. Il (ou elle) doit avoir en stock aussi bien des
documents de brevets de la plupart des pays industrialisés à partir de 1920 que d’autres
documents techniques convenus. La nomination, faite sur la base d’un accord qui spécifie
les droits et obligations des parties, engage l’administration chargée de la recherche à
respecter toutes les règles communes de la recherche internationale pour une période
déterminée susceptible de prolongation.

Actuellement, les administrations chargées de la recherche internationale sont les suivantes :


l’Office des brevets et des marques des États-Unis, l’Office des brevets d’Australie, l’Office
des brevets d’Autriche, l’Office de la propriété intellectuelle de la Chine, l’Office des
brevets de l’Europe, l’Office des brevets et des marques d’Espagne, l’Office des brevets
du Japon, l’Office des brevets et des marques de Russie, l’Office national des brevets et de
l’enregistrement de la Finlande, l’Office de la propriété intellectuelle de la République de
Corée, l’Office des brevets et de l’enregistrement de Suède, l’Institut nordique des brevets
et l’Office de la propriété intellectuelle du Canada.

Guide sur le brevet d’invention 75


Le délai pour l’établissement du rapport de recherche internationale […] est de trois mois
à compter de la réception de la copie de recherche par l’administration chargée de la
recherche internationale ou de neuf mois à compter de la date de priorité, le délai qui
expire le plus tard devant être appliqué (règle 42 du règlement d’exécution). Ce rapport est
transmis dès qu’il est terminé au déposant et au Bureau international. Si l’administration
chargée de la recherche internationale décide, conformément à l’article 17(2) du PCT, de
ne pas procéder à la recherche (objet de l’invention non convenable, mauvaise description,
mauvaise formulation des revendications, dessins ne remplissant pas les conditions
prescrites), elle le déclare et notifie, dans le même délai prescrit ci-dessus, au déposant et
au Bureau international, qu’un rapport de recherche internationale ne sera pas établi.

Si cette situation concerne juste une partie des revendications, le rapport de recherche
internationale l’indique pour cette seule partie, et est établi pour l’autre partie des
revendications.

Si l’administration chargée de la recherche internationale considère que l’unité de


l’invention, telle qu’elle est définie dans le règlement d’exécution, n’est pas respectée,
elle invite le déposant à payer des taxes additionnelles et établit le rapport de recherche
internationale sur les parties relatives à l’invention principale, et au cas où les taxes
additionnelles sont payées dans le délai prescrit, sur les parties correspondantes de la
demande internationale. Selon la législation nationale des pays désignés, les parties de la
demande n’ayant pas fait l’objet de la recherche internationale peuvent être considérées
comme retirées de la demande pour les pays qui exigent un rapport de recherche afin
que le dépôt soit validé.

Dans tous les cas, les résultats de la recherche internationale permettent au déposant
d’évaluer les chances de succès de sa demande auprès des offices des pays désignés ou
des offices agissant pour ces pays, ainsi que la solidité commerciale des brevets demandés
et dans quelle mesure il est utile de continuer la procédure de recherche de protection de
l’invention considérée. Si le déposant estime qu’il est opportun de la continuer, l’article
19 du PCT lui donne le droit de modifier une fois les revendications de la demande
internationale dans le délai prescrit, auprès du Bureau international, sans aller au-delà de
l’exposé de l’invention figurant dans la demande internationale telle que déposée pour les
pays qui exigent cette condition. Pour ce faire, le déposant peut joindre aux modifications
effectuées une brève déclaration conformément au règlement d’exécution, expliquant les
modifications et précisant les effets qu’elles peuvent avoir sur la description et, le cas
échéant, les dessins.

Le rapport de recherche internationale, transmis par l’administration de recherche


internationale au Bureau international, est inclus par ce dernier dans la publication
internationale de la demande internationale. Une copie de ce rapport accompagnant
une copie de la demande internationale est communiquée par le Bureau international
aux offices des États désignés qui l’exploitent, surtout à ceux, parmi eux, qui ne disposent
pas de capacités nécessaires pour effectuer eux-mêmes la recherche et l’évaluation de la
demande internationale considérée.

76 Guide sur le brevet d’invention


5.2.3. Publication internationale

Le Bureau international procède à la publication de la demande internationale rapidement


après l’expiration d’un délai de 18 mois à compter de la date de priorité de cette demande.
Cette publication peut être effectuée avant cette date, à la demande du déposant et sous
certaines conditions précisées dans le règlement d’exécution du PCT.

La demande internationale doit être publiée dans la langue utilisée pour son dépôt,
si celle-ci figure parmi les langues de publication mentionnées au paragraphe 5.2.1
ci-dessus. Dans le cas contraire, la publication de la demande internationale est effectuée
en anglais.

La publication de la demande internationale comporte :

• une page normalisée de couverture incluant les données bibliographiques fournies


par le déposant et le symbole de la classification internationale de l’invention objet
de la demande ;

• la description de l’invention ;

• les revendications ;

• le cas échéant, les dessins ;

• le cas échéant, le rapport de recherche internationale ;

• toute déclaration, toute demande ou tout fait qui sont prescrits dans la règle 48
relative à la publication internationale.

Selon l’article 29 du PCT, sous réserve des conditions qu’il expose, la publication
internationale d’une demande internationale produit dans les États désignés les mêmes
effets que ceux engendrés par la publication nationale obligatoire de demandes nationales
non examinées comme telles.

5.2.4. Examen préliminaire international

Après réception du rapport de recherche internationale, le déposant peut soumettre


sa demande internationale à l’examen préliminaire international, directement à
l’administration chargée de l’examen et en précisant les pays désignés auxquels les
résultats de l’examen préliminaire international seront appliqués (pays élus).

La demande d’examen préliminaire international doit être présentée à l’administration


compétente pour un tel examen et indiquée par l’office récepteur ; de plus, elle donne lieu au
paiement de taxes. Les administrations chargées de l’examen préliminaire international sont
nommées par l’Assemblée du PCT sur la base d’une procédure identique à celle utilisée pour
nommer les administrations chargées de la recherche internationale. Ces dernières sont toutes
habilitées à effectuer ledit examen, excepté l’Office espagnol des brevets et des marques.

Guide sur le brevet d’invention 77


L’examen préliminaire international a pour objet de formuler une opinion préliminaire et
sans engagement sur la satisfaction des trois conditions de brevetabilité de l’invention objet
de la demande internationale (la nouveauté, la non-évidence et l’application industrielle) ;
et ce, en prenant en considération tous les documents cités dans le rapport de recherche
internationale et tout autre document jugé pertinent. Au cours de la phase de l’examen
préliminaire international, le déposant peut communiquer avec l’administration chargée
de ce travail et modifier les revendications, la description et, le cas échéant, les dessins, en
respectant les prescriptions du PCT et de son règlement d’exécution.

Le rapport d’examen préliminaire international, qui doit être établi dans le délai et la
forme prescrits, ne comporte aucune déclaration se rapportant au respect ou non des
conditions de brevetabilité au regard d’une législation nationale quelconque. Il donne
de telles déclarations, revendication par revendication, selon les prescriptions des règles
relatives aux conditions de brevetabilité. Ce rapport est transmis dans le délai requis,
avec les annexes réclamées, au déposant et au Bureau international qui le traduit dans
les langues prescrites et le communique, avec ses annexes et sa traduction obligatoire à
chacun des offices élus.

5.3. Phase nationale du PCT


Une fois les quatre étapes de la phase internationale achevées, c’est-à-dire au plus tard 30
ou 31 mois à compter de la date de priorité, le déposant dispose du rapport de recherche
internationale et, le cas échéant, du rapport d’examen préliminaire international. Il
est ainsi outillé pour évaluer la solidité de sa demande internationale par rapport aux
législations nationales des pays désignés ou élus. En fonction de cette évaluation, il décide
du maintien ou non de la désignation ou de l’élection d’une partie ou de la totalité des
États désignés ou élus.

Si le déposant décide de maintenir la désignation ou l’élection de l’un ou plus des


États désignés ou élus, la demande internationale entame la phase nationale, à savoir
l’application des règles relatives au système des brevets de chaque pays désigné ou élu.

78 Guide sur le brevet d’invention


Section 6 : Maintien de la validité du brevet
La validité d’un brevet est conditionnée par l’absence d’irrégularités susceptibles d’émailler
la procédure relative à son obtention, telles que le non-respect des délais, et par le respect
des exigences afférentes au maintien en vigueur des droits attachés à ce brevet.
Ces principales conditions sont traitées dans les paragraphes ci-dessous.

6.1. Nécessité de respecter les délais et d’éviter les fautes


entachant les demandes
Le titulaire d’un droit sur la demande de brevet, sur la demande de certificat d’addition,
sur le brevet ou sur le certificat d’addition, de même que son mandataire, sont tenus de
prendre les précautions suffisantes pour satisfaire à certaines exigences élémentaires. Il
en est ainsi de certaines formalités qui ne requièrent que peu d’effort ou d’argent, mais
dont le non-respect risque d’avoir des répercussions considérables, conduisant parfois à
la déchéance même des droits. Parmi ces situations figurent celles qui suivent.

6.1.1. Soin de respecter les délais de priorité

Le dépôt de la demande de brevet dans un pays étranger impose au déposant de déposer


également cette demande au Maroc avant qu’un délai d’un an ne s’écoule, et ce, à partir
du dépôt effectué à l’étranger. La même règle s’applique aussi à chaque État au sein
duquel le titulaire du droit sur le brevet souhaite garantir ses droits. Dans ce cas précis, si
le titulaire ne respecte pas le délai, la sanction encourue est la perte de priorité, et non la
déchéance de la demande.

6.1.2. Nécessité d’éviter le dépôt d’un dossier contenant des fautes

L’article 39 de la loi n° 17.97 ne permet de rectifier que les fautes d’expression ou de


transcription, ou encore les erreurs matérielles relevées dans les pièces et documents
déposés. Par ailleurs, il convient de noter que si la demande de rectification porte sur
la description, les revendications ou les dessins, il n’y est fait droit que si elle s’impose
à l’évidence, aucun autre texte ou tracé n’ayant pu manifestement être envisagé par le
demandeur.

En outre, pour la recevabilité de la demande de rectification, il est nécessaire de satisfaire


à certaines exigences :

• La demande de rectification doit être justifiée.

• La requête doit être présentée avant la délivrance du brevet.

• La demande doit être rédigée par écrit.

Guide sur le brevet d’invention 79


• La demande doit être présentée à l’OMPIC selon le modèle B2 élaboré à cet effet
(qu’il est possible de télécharger via le site www.ompic.ma).

• La demande doit comporter le texte des modifications proposées.

L’OMPIC statue sur la demande de rectification dans un délai de quinze jours à compter
de la date de dépôt de la demande.

6.1.3. Soin de donner avis sur tout changement d’adresse

Le titulaire de la demande de brevet ou du brevet a l’obligation de ne pas négliger


de signaler tout changement d’adresse, de siège social, de forme juridique, de nom
commercial… ayant trait à l’établissement du demandeur de brevet. La mise à jour de
ces éléments est importante pour le maintien des droits issus du brevet, notamment dans
le cas de la réception, par le titulaire, des notifications et mises en demeure. L’absence
d’avertissement n’engage pas la responsabilité de l’OMPIC et ne saurait constituer une
cause de restauration des droits du titulaire du brevet. La même règle s’applique lorsque
la notification de l’avertissement au titulaire du droit ne peut être réalisée du fait que ce
dernier a omis de communiquer sa nouvelle adresse.

Le modèle utilisé pour procéder à ces modifications réside dans l’imprimé B3 (qu’il est
possible de télécharger via le www.ompic.ma).

6.2. Paiement des droits exigibles


Le paiement des droits exigibles constitue un élément essentiel, concomitant au droit sur
le brevet : il représente en effet une condition pour la recevabilité de la demande de
dépôt en vue d’obtenir le brevet ou le certificat d’addition, mais également pour maintenir
en vigueur le titre sous peine de déchéance. La loi n° 17.97 réglemente la procédure de
paiement des droits exigibles par le biais des articles 82 et suivants, dont les dispositions
sont complétées par les articles 41 et suivants du décret d’application.

Les prix des services rendus par l’OMPIC sont fixés par décision du président de son conseil
d’administration après l’approbation de ce conseil. La dernière décision à ce propos est
la décision n° 4/2008 du 12 décembre 2008 relative au prix des services rendus par
l’OMPIC en matière de propriété industrielle et de registre de commerce. Les tarifs sont
affichés sur le site de l’office (www.ompic.ma).

Les formalités liées au paiement des droits exigibles peuvent être résumées comme dans
les points suivants.

80 Guide sur le brevet d’invention


6.2.1. D
 élais prescrits pour le paiement des droits exigibles de maintien en
vigueur

Le paiement doit être effectué tous les cinq ans de la durée de protection du brevet
d’invention fixée à 20 ans, sauf exception relative à la prorogation de la durée de protection
mentionnée dans les articles 17.1 et 17.2 de la loi n° 17.97.

a) Délai initial
Selon les dispositions de l’article 41 du décret d’application de la loi n° 17.97, l’acquittement
des droits exigibles doit être effectué le jour du dépôt de la demande de brevet d’invention.
Lorsque ce jour correspond à un jour férié ou non ouvrable, le paiement doit avoir lieu le
jour ouvrable suivant.

b) Délai supplémentaire
Le paiement des droits de maintien en vigueur exigibles peut être effectué pendant un délai
supplémentaire de six mois courant à compter de la date d’échéance du délai initial. À défaut
de paiement à cette dernière date, l’OMPIC adresse un avertissement avec accusé de réception
au titulaire du brevet ou à son mandataire, lui indiquant qu’en cas de non-paiement dans le
délai de six mois à compter de la date d’échéance, il sera déchu de ses droits.
L’absence d’avertissement n’engage pas la responsabilité de l’OMPIC et ne constitue pas
une cause de restauration des droits du titulaire du brevet (art. 82 de la loi n° 17.97).

c) Détermination des périodes et des droits exigibles


Lors de la présentation de la demande de paiement du droit exigible devant l’ OMPIC, un
modèle prévu exclusivement à cet effet doit être rempli : il s’agit de celui portant le signe A,
susceptible d’être complété, en cas d’insuffisance, par le modèle portant le signe AS (pouvant
être téléchargé via le www.ompic.ma). Les périodes de paiement sont ainsi réparties : les
années 1 à 5 ; les années 6 à 10 ; les années 11 à 15 ; et les années 16 à 20.

À la lumière de ces indications, les sommes exigibles sont fixées comme suit :
le nombre de périodes restantes pour la validité du brevet x le droit relatif à la période
restante/5 = le droit afférent au maintien du brevet en vigueur.

6.2.2. Effets du défaut de paiement des droits exigibles

Le non-paiement des droits exigibles entraîne certaines répercussions, dont :

• la déchéance des droits du titulaire du brevet s’il ne paie pas les sommes exigibles
au terme du délai supplémentaire ;

• la déchéance du droit prenant effet à la date de l’échéance du paiement non effectué ;

• la déchéance des droits relatifs aux certificats d’addition se rattachant au brevet
objet de la déchéance.

Guide sur le brevet d’invention 81


6.2.3. Possibilité de restauration du droit après la décision de constatation
de la déchéance

L’article 84 de la loi n° 17.97 permet au titulaire du brevet de présenter un recours devant


l’OMPIC en vue d’être restauré dans ses droits. Cette restauration peut être accordée par
décision écrite, à charge par le titulaire du brevet de remplir les conditions suivantes :

• présenter la requête par écrit ;

• fonder le recours sur une excuse légitime du non-acquittement des droits exigibles, à
titre d’exemple un fait extérieur à l’entreprise l’ayant désorganisé (tel un incendie) ;

• former le recours dans les trois mois courant à compter de la date de réception de
la notification de la décision constatant la déchéance ;

• administrer la preuve du paiement des droits exigibles avant l’expiration du délai de


trois mois prévu pour présenter le recours.

La décision de restauration des droits doit être inscrite au registre national des brevets. La
décision précitée est notifiée au titulaire du brevet ou à son mandataire.

82 Guide sur le brevet d’invention


Les droits conférés
par le brevet
3
Guide sur le brevet d’invention 83
Cette troisième partie est consacrée à la délimitation du champ des droits qui découlent
du brevet et à la clarification des procédés d’exploitation issus de ces droits, des moyens
permettant la préservation de ces derniers, des actes dont ils peuvent faire l’objet et des
raisons conduisant à leur déchéance.

Section 1 : Champ de protection du brevet


1.1. Champ de protection du brevet initial
La protection du brevet s’étend sur un espace spatial et temporel déterminé et concerne
un objet bien défini.

1.1.1. Champ territorial de la protection

Parmi les principes reconnus au niveau international et consacrés par le droit marocain, il existe
le « principe de la territorialité du droit sur le brevet », qui signifie que la protection du brevet et
ses effets restent limités aux frontières de l’État dans lequel ont lieu le dépôt et la délivrance du
brevet ; la protection n’est pas assurée au sein d’autres pays sauf si elle y est étendue.

Si les effets de ce principe sont essentiellement liés à l’exploitation et au bénéfice tiré de


l’utilité du brevet, la divulgation de ce dernier et du secret de l’invention entraînent des
effets qui dépassent les frontières nationales puisqu’elles deviennent un empêchement à
la nouveauté dans tous les pays même si la protection n’y est pas étendue.

1.1.2. Champ temporel de la protection

La loi n° 17.97 a limité la durée de la protection accordée au brevet d’invention à 20


ans au maximum, sauf exceptions prévues par les articles 17.1 et 17.2 de cette loi, et
ce, contrairement - à titre comparatif - à la durée de protection de la marque qui est
indéfiniment renouvelable.

Voici un tableau de comparaison entre les périodes de protection de quelques


droits relatifs à la propriété industrielle :
Tableau n° 2 : Tableau de comparaison entre les périodes
de protection de quelques droits relatifs à la propriété industrielle

L’article dans la
Le droit La période du droit
loi n° 17.97
Le brevet d’invention 20 ans (avec des exceptions limitées) 17
Le certificat d’addition La période restante pour le brevet initial 17
Les dessins et modèles 5 ans renouvelables deux fois 122
industriels
La marque 10 ans renouvelables indéfiniment 152

84 Guide sur le brevet d’invention


Deux exceptions relatives à la prolongation de la durée de protection ont été intégrées,
décrites ci-après :

Première exception : cas d’une délivrance tardive du brevet d’invention.

La durée de protection du brevet d’invention est prolongée au-delà de 20 ans selon


le nombre de jours écoulés entre la date d’expiration de la période de quatre ans - à
compter de la date du dépôt de la demande de brevet d’invention auprès de l’OMPIC - et
la date effective de la délivrance du brevet d’invention, si cette délivrance a lieu après la
période précitée de quatre ans (art.17.1 de la loi n° 17.97) et sous réserve des dispositions
de l’article 42 relatives aux besoins de la défense nationale.

La décision de prolongation de la durée de protection du brevet doit impérativement être inscrite


au registre national des brevets, et ce, par souci de protection des droits des usagers dudit brevet.

Seconde exception : tenant compte de la durée de l’octroi de l’autorisation de mise sur


le marché d’un médicament

La durée de protection du brevet d’invention d’un produit pharmaceutique est prolongée


d’une période équivalant au nombre de jours écoulés entre la date d’expiration du délai
prescrit pour l’obtention de l’autorisation de mise sur le marché et la date effective de
délivrance de cette autorisation, sans pour autant excéder deux ans et demi.

Cette prolongation ne peut être accordée que si certaines exigences sont satisfaites :

• Le produit pharmaceutique, en tant que médicament, doit faire l’objet d’une
autorisation de mise en vente sur le marché conformément à la législation et à la
réglementation en vigueur en la matière.

• Une demande de prolongation est présentée par le titulaire du brevet d’invention


ou son mandataire dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle le
produit pharmaceutique, en tant que médicament, a fait l’objet de l’autorisation de
mise en vente sur le marché.

• Les droits exigibles ont été acquittés.

La délivrance d’un certificat de prolongation de la durée du brevet relatif à un produit


pharmaceutique ne peut s’effectuer que si certaines conditions sont remplies à la date du
dépôt de la demande de prolongation, à savoir :

• que le produit soit protégé, en tant que médicament, par un brevet d’invention en
cours de validité ;

• qu’il ait obtenu, en tant que médicament, l’autorisation de mise sur le marché ;

• qu’il n’ait pas déjà fait l’objet d’un certificat de prolongation ;

• que l’autorisation soit la première autorisation de mise sur le marché.

Guide sur le brevet d’invention 85


Pour que soit fait droit à la demande de prolongation de la durée de protection du brevet
d’invention, l’article 22.1 du décret d’application exige, de la part du titulaire du brevet ou
de son mandataire, le respect des formalités suivantes :
• déposer une demande en ce sens à l’OMPIC, contenant l’identification du déposant
et les références du brevet objet de la demande de prolongation.

• annexer à la demande la preuve de l’acquittement des droits exigibles.

• joindre à la requête l’attestation délivrée par l’autorité gouvernementale chargée de la santé.

La loi n° 17.97 prévoit des sanctions en cas de survenance de certains événements. L’article
17.5 prévoit que le certificat de prolongation de la durée de validité du brevet d’invention
ne produit pas d’effet :

a) si son titulaire y renonce ;

b) si son titulaire ne s’est pas acquitté des droits exigibles conformément à l’article 82 ;

c) pendant la durée où le produit couvert par ledit certificat n’est plus autorisé à être
mis sur le marché par suite de retrait de l’autorisation de mise sur le marché à titre
temporaire ou définitif.

L’article 17.6 édicte ensuite la nullité du certificat de prolongation si :

• le défaut de paiement des droits exigibles ;

• l’annulation ou la limitation du brevet d’invention auquel se rapporte le certificat


de prolongation, de telle sorte que le produit pour lequel il a été délivré n’est plus
protégé par les revendications du brevet.

Quoi qu’il en soit, concernant le produit pharmaceutique, le certificat de prolongation de la


durée de protection du brevet d’invention est délivré au déposant ou à son mandataire par
l’OMPIC, et mention de la prolongation est inscrite au registre national des brevets. Ce certifi-
cat confère les mêmes droits que ceux qui sont conférés par le brevet d’invention et est soumis
aux mêmes limitations et aux mêmes obligations (art. 17.3). Il est possible de caractériser la
période durant laquelle le brevet d’invention remplit ses fonctions comme suit :
Schéma n° 4 : La période durant laquelle le brevet d’invention remplit ses fonctions
18 mois La période de prolongation
selon les cas :
d’expiration
de dépôt

La délivrance
La date

La date

de brevet • la durée du retard dans


+ antériorité ? la délivrance du brevet après
Exception 4 ans (art. 17.1)
permettant
prolongation OU
20 ans à condition :
• d’avoir payé les droits • 30 mois comme
de maintien en vigueur ; délai maximal
• d’assurer la défense (le produit pharmaceutique :
de la propriété du brevet ? art. 17.2).

86 Guide sur le brevet d’invention


1.1.3. Champ de la protection du brevet selon l’objet

La protection conférée en vertu de la loi n° 17.97 comprend le brevet en fonction de la


date de dépôt de leur demande (art. 46). Les brevets sont délivrés le 1er du mois suivant
celui où expire le délai de 18 mois, conformément à l’article 22 du décret d’application.
Par ailleurs, étant donné que, parmi les caractéristiques du droit sur le brevet, figure le fait
qu’il est susceptible d’application industrielle, tout perfectionnement ou addition ajouté
au brevet déposé ou délivré donne à celui qui y est parvenu le droit d’obtenir un certificat
d’addition.

L’étendue de la protection du droit exclusif d’exploitation de l’invention est déterminée


par la teneur des revendications annexées à la demande de brevet d’invention, et ce,
conformément à l’article 35 de la loi n° 17.97. De plus, il est possible, en vertu de l’article
52, d’interpréter ces revendications en utilisant la description ou les dessins produits avec
la demande au cas où l’étendue de la protection n’a pas pu être fixée sur la seule base
des revendications. Il importe également de noter qu’en application du même article, le
champ de protection du droit exclusif portant sur un procédé ou une méthode s’étend aux
produits obtenus directement par ce procédé ou cette méthode.

Il a précédemment été fait état des exceptions que la loi a liées à la recevabilité du dépôt
de la demande de brevet d’invention, à la délivrance du brevet ou à son exploitation, et
qui peuvent être réparties en diverses catégories : certaines ne sont pas reconnues comme
des inventions, conformément à l’article 23 ; d’autres sont considérées comme telles,
mais ne peuvent faire l’objet d’un brevet en vertu de l’article 24 ; et enfin, d’autres encore
ne sont pas susceptibles d’application industrielle, comme précisé par l’article 25 (voir le
point 2.2 de la section 1 de la partie 1 sur les objets brevetables).

1.2. Champ de protection du certificat d’addition


1.2.1. Les personnes ayant droit au certificat d’addition

La protection du brevet additionnel et la raison de l’adoption d’un régime propre à ce


dernier trouvent leur fondement dans la vie pratique.

En effet, l’inventeur qui conçoit et exploite immédiatement son invention en dépit des
lacunes pouvant l’émailler, et ce, pour récolter le fruit de cette exploitation, vise dans le
même temps à ajouter une innovation substantielle à l’invention initiale, à déceler les
failles de cette dernière et à en déterminer les potentialités, sans que cela constitue un
empêchement pour un tiers à parvenir au même résultat. Pour cette raison, la détermination
du certificat qui va être attribué à celui qui est arrivé à inventer des perfectionnements
contenant une « idée novatrice » - susceptible de compléter ou modifier l’objet du brevet
initial - diffère selon deux hypothèses :

• Si l’auteur de l’invention complémentaire est le titulaire du brevet initial ou celui


auquel échoient ses droits, il lui est possible d’obtenir un certificat d’addition.

Guide sur le brevet d’invention 87


• Si l’auteur de l’invention complémentaire est une personne autre que le titulaire
du brevet initial, il peut déposer une demande afin d’obtenir un brevet d’invention
indépendant du brevet initial. Les litiges pouvant naître de ce genre de situations
sont, en général, réglés par des licences croisées.

1.2.2. Formalités de l’obtention du certificat d’addition

L’octroi du certificat d’addition est soumis aux mêmes formalités et conditions requises
pour l’attribution du brevet d’invention. De plus, le perfectionnement doit constituer une
invention complémentaire à l’invention objet du brevet initial, sous peine de ne pas être
considéré comme un brevet additionnel - par exemple pour défaut d’activité inventive – et
d’encourir la nullité. Généralement, l’objet du brevet additionnel comprend l’ajout d’une
méthode permettant de procurer de nouveaux avantages industriels ou économiques,
telle que l’utilisation d’un procédé à même d’assurer l’entretien d’une machine ou d’en
améliorer la productivité.

1.2.3. Autonomie du brevet additionnel

En dépit du fait qu’à l’origine, le brevet additionnel a été obtenu accessoirement au brevet
initial, il jouit d’une existence propre, puisque son objet réside dans une nouvelle innovation,
même si celle-ci reste accessoire au premier brevet en ce qui a trait à l’exploitation. Il en résulte
que le titulaire du brevet postérieur ne pourra exploiter ce dernier qu’en vertu d’un accord
conclu avec le titulaire du brevet antérieur ou après l’expiration de la durée de celui-ci.

Le certificat d’addition, en tant que titre de propriété industrielle, est délivré, conformément
au 1er alinéa de l’article 29 de la loi n° 17.97, dans deux cas :

• lorsque des perfectionnements ont été apportés à l’invention ;

• lorsque l’invention a fait l’objet d’additions.

1.2.4. Durée de validité et droits exigibles

Étant lié au brevet initial, le certificat d’addition est soumis aux mêmes règles à l’exception
de la durée et du paiement des droits exigibles ; et ce, conformément aux articles 17(a) et
82 de la loi n° 17.97.

Cette connexion entre les deux brevets a des conséquences :

• Il n’y a pas lieu d’acquitter des droits annuels relatifs au brevet additionnel, seuls
sont payés les droits annuels afférents au brevet initial. De ce fait, la déchéance des
droits attachés au brevet initial pour défaut de paiement des droits exigibles entraîne
la déchéance des droits liés au brevet additionnel.

88 Guide sur le brevet d’invention


• Puisque l’accessoire suit le principal et que le brevet additionnel est une partie du
brevet initial, tout transfert de la propriété de ce dernier ou de sa licence d’exploitation
entraîne la transmission des droits attachés au brevet additionnel ou à sa licence
d’exploitation, sauf convention expresse contraire. Par ailleurs, le certificat d’addition
prend fin avec le brevet principal (art. 88), excepté s’il est mis fin au brevet initial par
voie de nullité : les certificats d’addition ne sont alors pas atteints par cette nullité si
les perfectionnements qui en font l’objet constituent, en eux-mêmes, une invention.

1.3. Des actes ne figurant pas parmi les droits conférés


par le brevet
La propriété d’un brevet d’invention suppose la jouissance du droit exclusif d’exploitation et
l’interdiction faite aux tiers de porter atteinte aux droits conférés par le brevet. Cependant,
certains actes n’affectent pas le statut juridique du propriétaire, car ils ne sauraient
être reconnus comme une exploitation de l’invention au niveau de la concurrence
commerciale.

L’article 55 de la loi n° 17.97 énonce, à titre limitatif, ces différents actes. Il dispose que les
droits conférés par le brevet ne s’étendent pas :

a) aux actes accomplis dans un cadre privé et à des fins non commerciales ;

b) aux actes accomplis à titre expérimental qui portent sur l’objet de l’invention brevetée ;

c) à la préparation de médicaments faite extemporanément et par unité dans les officines


de pharmacie, sur ordonnance médicale, ni aux actes concernant les médicaments
ainsi préparés ;

d) a
 ux actes concernant le produit couvert par ce brevet, accomplis sur le territoire
marocain, après que ce produit ait été mis dans le commerce au Maroc par le
propriétaire du brevet ou avec son consentement exprès ;

e) à l’utilisation d’objets brevetés à bord d’aéronefs, de véhicules terrestres ou de


navires de pays membres de l’Union internationale pour la protection de la propriété
industrielle qui pénètrent temporairement ou accidentellement dans l’espace aérien,
sur le territoire ou dans les eaux territoriales du Maroc ;

f) aux actes effectués par toute personne qui, de bonne foi, à la date de dépôt de la
demande ou, lorsqu’une priorité est revendiquée, à la date de priorité de la demande
sur la base de laquelle le brevet est délivré sur le territoire du Maroc, utilisait l’invention
ou faisait des préparatifs effectifs et sérieux pour l’utiliser, dans la mesure où ces actes
ne diffèrent pas, dans leur nature ou leur finalité, de l’utilisation antérieure effective ou
envisagée. Le droit de l’utilisateur antérieur ne peut être transféré qu’avec l’entreprise
à laquelle il est attaché.

Guide sur le brevet d’invention 89


1.4. A
 ctes nécessitant le consentement du propriétaire du
brevet
La propriété d’un brevet d’invention confère le droit d’interdire aux tiers d’effectuer toute
forme d’exploitation, d’utilisation et de disposition se rapportant à ce brevet sans avoir
préalablement obtenu le consentement du titulaire de ce dernier, sous peine qu’elle soit
considérée comme une atteinte au droit sur le brevet susceptible de donner lieu à des
sanctions pénales et civiles à l’encontre de l’auteur des agissements précités.

La loi n° 17.97 énumère, dans ses articles 53 et 54, les actes qu’il est interdit aux tiers
d’accomplir et qui constituent, dans le même temps, l’élément matériel de l’action en
contrefaçon (traité dans le cadre de la quatrième partie du présent guide). L’article 53 fait
état des ces actes dans l’ordre ci-après :

a) Par rapport aux produits

• La fabrication du produit objet du brevet aux fins de commercialisation.

• L’offre du produit objet du brevet aux fins de commercialisation.

• La mise dans le commerce du produit objet du brevet.

• L’utilisation du produit objet du brevet aux fins de commercialisation.

• L’importation du produit objet du brevet aux fins de commercialisation.

• La détention du produit objet du brevet aux fins de commercialisation.

b) Par rapport aux procédés

• L’utilisation d’un procédé objet du brevet sur le territoire marocain lorsque les
circonstances rendent évident que l’utilisation du procédé est interdite sans le
consentement du propriétaire du brevet.

• L’offre d’utilisation d’un procédé objet du brevet sur le territoire marocain lorsque
les circonstances rendent évident que l’utilisation du procédé est interdite sans le
consentement du propriétaire du brevet.

c) P
 ar rapport à un produit obtenu directement par le procédé objet du
brevet

• L’offre du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet à des fins
commerciales.

• La mise dans le commerce du produit obtenu directement par le procédé objet du
brevet.

90 Guide sur le brevet d’invention


• L’utilisation du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet à des fins
commerciales.

• L’importation du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet à des


fins commerciales.

• La détention du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet à des fins
commerciales.

Sont également interdites, conformément à l’article 54 :

• la livraison, sur le territoire marocain, des moyens mis en œuvre de l’invention et se
rapportant à un élément essentiel de celle-ci à une personne autre que celle habilitée
à exploiter l’invention brevetée, lorsque le tiers sait ou lorsque les circonstances
rendent évident que ces moyens sont aptes et destinés à cette mise en œuvre, sauf
si le propriétaire du brevet y consent ;

• l’offre de livraison, sur le territoire marocain, des moyens mis en œuvre de l’invention
et se rapportant à un élément essentiel de celle-ci à une personne autre que
celle habilitée à exploiter l’invention brevetée, lorsque le tiers sait ou lorsque les
circonstances rendent évident que ces moyens sont aptes et destinés à cette mise en
œuvre, sauf si le propriétaire du brevet y consent.

Il convient de signaler que les actes énoncés par l’article 54 précité ne requièrent pas le
consentement du propriétaire du brevet lorsque les moyens de mise en œuvre sont des
produits se trouvant couramment dans le commerce, hormis si le tiers incite la personne à
laquelle il livre à commettre des actes interdits par l’article 53.

Soulignons enfin que ne sont pas considérées comme personnes habilitées à exploiter
l’invention celles qui accomplissent les actes visés à l’article 55 (voir supra 1.3).

Guide sur le brevet d’invention 91


Section 2 : Le droit du propriétaire à l’exploitation
Si l’exploitation peut faire l’objet de plusieurs actes juridiques autorisés, en revanche,
il existe certains impératifs qui restreignent l’exercice des droits découlant du brevet
d’invention de telle manière qu’ils entraînent soit la limitation des pouvoirs de l’inventeur
de disposer de son brevet, soit la perte de son droit sur ce dernier.

La loi n° 17.97 opte donc pour le principe de restriction du droit absolu à l’exploitation
exclusive de l’invention, et ce, en faisant état de certaines conditions et situations qui
conduisent à limiter ou restreindre les droits attachés au brevet.

À cet égard, cette loi s’est inspirée des conventions internationales, puisque l’Accord
sur les ADPIC précise que les droits de l’inventeur ne revêtent pas un caractère absolu.
Ils peuvent ainsi faire l’objet de limites ou d’exceptions, dont l’usage du brevet à titre
expérimental par les tiers pour des raisons tenant à la recherche lorsque l’objectif est
la meilleure compréhension de l’invention en vue de favoriser l’évolution des sciences
et de la technologie.

2.1. Étendue du droit d’exploitation exclusive


L’étendue de ce droit diffère selon qu’il fait l’objet de propriété individuelle ou collective.

2.1.1. Règles générales régissant le droit à l’exploitation

La détermination de l’étendue des droits conférés par le brevet, qu’il s’agisse d’un inventeur
individuel, d’un établissement de recherche ou d’une entreprise, s’opère au regard de la
teneur de l’article 16 de la loi n° 17.97, qui dispose que le titre de propriété dont l’invention
a fait l’objet confère à son titulaire ou à ses ayants droit un droit exclusif d’exploitation de
l’invention.

Ce droit d’exploitation est le principal attribut découlant de la propriété du brevet ; mais


il ne s’agit pas d’un droit absolu, certains obstacles pouvant en effet se dresser devant lui,
dont :

• les obligations édictées par des dispositions légales telles que l’exigence d’une
autorisation déterminée ou la nécessité de prendre certaines mesures ou de remplir
certaines conditions ; il n’est donc permis d’entreprendre l’exploitation qu’après
s’être conformé aux prescriptions légales ;

• les impératifs liés à la sécurité des droits des tiers, spécialement lorsque le brevet
réside dans une addition ou un perfectionnement d’un brevet antérieur demeurant
en vigueur et appartenant à un tiers, ce qui nécessite de définir les différents contours
de la situation du brevet initial afin de se prémunir contre tout événement inattendu
(par exemple, en s’assurant du véritable propriétaire du brevet initial ou du fait que
les droits annuels ont été payés ou que la durée de validité est encore en vigueur).

92 Guide sur le brevet d’invention


Pour cette raison, le droit à l’exploitation implique d’avoir deux principes à l’esprit :

• Présumer que l’inscription du brevet a été valable, de même qu’ont été remplies
toutes les conditions de forme et au moins certaines exigences de fond telles que
la non-contrariété du brevet à l’ordre public et aux bonnes mœurs, surtout que la
législation marocaine adopte le régime de l’enregistrement sans examen préalable
à la délivrance du brevet, et ce, sous la responsabilité du déposant ;

• E xercer le droit de manière à ne pas affecter les droits antérieurs des tiers. La liberté
de l’inventeur d’exploiter son invention s’arrête en effet lorsque le brevet est lié à un
droit antérieur à l’invention.

Avant de commencer l’exploitation, il est souhaitable, surtout lorsque d’importants


moyens matériels sont déployés, que l’inventeur effectue une étude approfondie de l’état
du marché y compris de l’état de la technique. Afin de déterminer l’étendue de sa liberté
d’exploitation, cela ne concerne pas uniquement le cas de l’exploitation directe mais
également d’autres situations telles que l’apport du brevet comme part dans une société
(art. 24 de la loi n° 17-95 relative aux sociétés anonymes) ou la conclusion d’un contrat de
licence ou cession de brevet.

2.1.2. Règles régissant la relation entre les copropriétaires du brevet

Ces règles peuvent être principalement regroupées comme suit :

• Le droit de tout copropriétaire d’exploiter l’invention à son profit à condition


d’indemniser les autres propriétaires qui n’exploitent pas personnellement l’invention
ou qui n’ont pas concédé de licences d’exploitation. À défaut d’accord amiable, cette
indemnité est fixée par le tribunal - art. 77(a) ;

• Le droit de chacun des copropriétaires de concéder à un tiers une licence d’exploitation
non exclusive à son profit, sauf à indemniser les autres copropriétaires. Le montant
de l’indemnité est fixé d’un commun accord entre les copropriétaires ou, à défaut
d’accord amiable, par le tribunal - art. 77(c) ; celle-ci n’est due que si les autres
copropriétaires n’exploitent pas personnellement l’invention ou n’ont pas concédé
de licence d’exploitation.

La loi n° 17.97 a mis en place une procédure spéciale pour protéger les droits de tous les
copropriétaires :

• Le projet de concession doit être notifié aux autres copropriétaires.

• La notification dudit projet doit être accompagnée d’une offre de cession de la
quote-part à un prix déterminé.

• La faculté, pour tout copropriétaire, de s’opposer à la concession de licence, et ce,


dans un délai de trois mois suivant la notification. L’opposant doit, dans ce cas,
acquérir la quote-part de celui qui désire accorder la licence. S’il y a un désaccord

Guide sur le brevet d’invention 93


sur le prix et que les intéressés ne parviennent pas à s’entendre dans le délai précité
de trois mois, le montant est fixé par le tribunal. Une fois la décision judiciaire
rendue, les parties disposent, à compter de sa notification, d’un délai de 30 jours
pour renoncer à la concession ou à l’achat de la part de copropriété sans préjudice
des dommages intérêts pouvant être dus ; les dépens sont à la charge de la partie
qui renonce.

• Le copropriétaire peut accorder une licence d’exploitation exclusive à condition


d’obtenir l’accord de tous les copropriétaires ou une autorisation de justice.

• Chacun des copropriétaires peut agir en contrefaçon à son seul profit, mais à
condition de notifier la requête en contrefaçon aux autres copropriétaires – art.
77(b). Tant qu’il n’est pas justifié de cette notification, il est sursis à statuer sur l’action
en contrefaçon.

• Chaque copropriétaire a le droit de céder sa quote-part. Les autres copropriétaires


disposent dans ce cas d’un droit de préemption qui doit être exercé dans un délai de
trois mois à compter de la notification du projet de cession - art. 77(e). Le tribunal
fixe le prix à défaut d’accord entre les parties. Ces dernières disposent d’un délai de
30 jours, à compter de la notification de la décision judiciaire, pour renoncer à la
vente ou à l’achat de la part de copropriété sans préjudice des dommages-intérêts
qui peuvent être dus ; les dépenses sont à la charge de la partie qui renonce.

• Chaque copropriétaire peut abandonner sa quote-part au profit des autres


copropriétaires (art. 79). Si ces derniers acceptent l’abandon, il en résulte que ledit
copropriétaire est déchargé de toutes obligations à leur égard, et ce, à compter de la
date de l’inscription de l’abandon au registre national des brevets. Les copropriétaires
précités se répartissent la quote-part abandonnée à proportion de leurs droits dans
la copropriété, sauf convention contraire.

Par ailleurs, les règles qui s’appliquent à la copropriété des brevets se caractérisent ainsi :

•E
 lles ne sont pas soumises aux principes généraux relatifs à la copropriété contenus
dans le Dahir des obligations et contrats (DOC). L’article 78 de la loi n° 17.97 a
d’ailleurs explicitement formulé cette exception.

• L a primauté est accordée au règlement de copropriété s’il existe. Les dispositions


des articles 77 à 79 de la loi n° 17.97 ne reçoivent effectivement application qu’en
ce qui a trait à ce qui n’a pas fait l’objet de stipulations entre les copropriétaires.
L’article 80, 2e alinéa, affirme ainsi que les copropriétaires peuvent […] déroger [aux
dispositions de la loi précitées] à tout moment par un règlement de copropriété. Il
s’ensuit qu’il importe peu que ce règlement ait été prévu en amont ou parallèlement
à l’exercice des droits issus de la demande de brevet ou du brevet : la primauté est
accordée à ses stipulations à condition qu’elles soient conformes aux dispositions
impératives de la loi et qu’elles ne portent pas atteinte aux droits des tiers.

94 Guide sur le brevet d’invention


2.2. Limites au droit sur le brevet
L’aptitude du brevet à être exploité, tout comme la faculté d’exercer les droits qui y sont
attachés, trouvent des limites dans les droits antérieurs d’autrui ou dans l’intérêt général.

2.2.1. Limites découlant des articles 19 et 42 de la loi n° 17-97

La décision définitive ayant conclu à la recevabilité de dépôt du dossier de la demande


de brevet d’invention entraîne la délivrance d’un titre de propriété industrielle qui confère
à son titulaire ou à ses ayants droit un droit exclusif d’exploitation du brevet. La règle en
droit marocain réside donc dans le fait que l’inscription revêt un effet translatif, puisque
cette inscription est en fait le fondement du droit de propriété du brevet sous réserve de
la condition édictée par l’article 47 de la loi n° 17.97 qui dispose que les brevets, dont la
demande n’a pas été rejetée, sont délivrés sans examen préalable, aux risques et périls
des demandeurs et sans garantie, soit de la réalité de l’invention, soit de la fidélité ou de
l’exactitude de la description, soit du mérite de l’invention.

Le législateur a cependant apporté certaines restrictions au droit issu du titre de propriété


du brevet, par exemple :

• la restriction édictée par l’article 19 de la loi n° 17.97 relatif à la protection du titulaire
d’un droit antérieur ;

• la restriction prévue par l’article 42 de cette loi pour les besoins de la défense
nationale et de la sûreté de la nation.

2.2.2. Limites découlant de l’obligation d’exploitation

L’obligation d’exploitation de l’invention trouve sa source dans la volonté des pouvoirs


publics de permettre à la société de bénéficier de ladite invention, et il incombe à
l’inventeur - dans des délais qui varient entre trois ans à compter de la date de l’obtention
du titre de brevet ou quatre ans à partir de la date du dépôt de la demande - de prendre
les mesures nécessaires pour rendre son invention exploitable.

En effet, l’intérêt de l’invention, spécialement le profit tiré des avantages qu’elle offre dans le
secteur de l’industrie, ne se réalise que si elle est exploitée, que ce soit au profit de l’inventeur
ou de la société, et il est possible de citer, parmi lesdits avantages, ce qui suit :

• L’obligation d’exploitation permet de couper le chemin aux brevets obtenus pour


empêcher les concurrents d’exploiter les inventions qu’ils seraient parvenus à
concevoir ou en vue de n’autoriser l’exploitation que sous de sévères conditions.
L’adoption du principe de l’obligation d’exploitation constitue donc un obstacle à un
tel usage du brevet par son propriétaire.

• L’obligation d’exploitation contribue à créer des opportunités économiques et, dans


le même temps, à acquérir des compétences techniques supplémentaires.

Guide sur le brevet d’invention 95


• L’exploitation permet de déceler les failles de l’invention, puis d’effectuer les
perfectionnements et additions susceptibles de suppléer à ces carences. Elle favorise
également la détermination des avantages de l’invention, ce qui conduit en définitive
à une utilisation optimale de cette dernière.

• L’obligation d’exploitation permet de décourager les dépôts effectués par des


étrangers dans le but d’empêcher l’exploitation des brevets au Maroc.

Ainsi, la loi n° 17.97 impose-t-elle, en son article 60, au propriétaire du brevet ou à son
ayant cause d’exploiter le brevet, sous réserve des dispositions portant sur les licences
obligatoires et les licences d’offices (art. 60 à 75). L’obligation peut revêtir la forme d’un
acte positif tel que le commencement de l’exploitation, tout comme d’un fait négatif tel que
l’abandon de l’exploitation après l’avoir entreprise.

Cette obligation, mise à la charge du propriétaire du brevet (ou de son ayant cause), peut
prendre les formes suivantes :

• S oit exploiter l’invention dans le délai de trois ans à compter de la date de délivrance
du brevet ou le délai de quatre ans à partir de la date de dépôt de la demande de
brevet, sauf si des excuses légitimes ont empêché l’exploitation. L’exécution de cette
obligation se traduit :

- par le commencement de l’exploitation de l’invention objet du brevet sur le


territoire du Royaume du Maroc ;

- ou en effectuant des préparatifs effectifs et sérieux pour exploiter l’invention objet
du brevet sur le territoire du Royaume du Maroc ;

- ou en commercialisant le produit objet du brevet en quantité suffisante pour


satisfaire aux besoins du marché marocain.

• S oit ne pas abandonner l’exploitation ou la commercialisation du brevet au Maroc


pendant plus de trois ans. L’interruption, après le commencement d’exploitation, ne
doit donc pas excéder, au Maroc, la durée précitée.

Si le propriétaire du brevet n’exploite pas celui-ci personnellement ou par le biais de


son mandataire, il dispose de la faculté de concéder une licence aux tiers pour effectuer
l’exploitation.

2.2.3. Limites d’exploitation liées au droit de la concurrence

Il importe de signaler que le droit d’exploitation exclusive conféré sur le brevet peut
impliquer l’application de la loi n° 06 99 sur la liberté des prix et de la concurrence dans
le cas de création de monopoles ou de positions dominantes conduisant à la violation des
dispositions de cette loi.

96 Guide sur le brevet d’invention


Parmi les pratiques restrictives de concurrence, figure par exemple, le refus de vente qui
peut avoir des relations avec l’exploitation des inventions.

À propos de l’application du droit des ententes aux accords de propriété industrielle et


à titre indicatif, l’avis de la Commission de la concurrence française (rapport de l’année
1983, JO doc. adm. 17 avril 1984, p. 21) était que les accords en matière de propriété
industrielle et en particulier ceux relatifs à l’exploitation des inventions n’échappent pas par
leur nature à l’application du droit des ententes.

L’article 6 de la loi susvisée proscrit les situations de monopole :

Sont prohibées, lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’empêcher, de
restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées,
conventions, ententes ou coalitions expresses ou tacites, sous quelque forme et pour quelque
cause que ce soit, notamment lorsqu’elles tendent à :

1) limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d’autres entreprises ;

2) faire obstacle à la formation des prix par le libre jeu du marché en favorisant
artificiellement leur hausse ou leur baisse ;

3) limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès


technique ;

4) répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement.

Quant à l’article 7, il vise les faits qui constituent la position dominante :

Est prohibée, lorsqu’elle a pour objet ou peut avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou
de fausser le jeu de la concurrence, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe
d’entreprises :

1) une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci ;

2) une situation de dépendance économique dans laquelle se trouve un client ou un


fournisseur ne disposant d’aucune alternative.

Toutefois, la loi n° 06.99 a pris en considération les situations qui n’entrent pas dans le
champ d’application des deux articles précités, notamment lorsque les auteurs des faits
reprochés ont pu justifier ceux-ci par leur contribution au progrès économique et que cette
contribution est suffisante pour compenser les restrictions de la concurrence (art. 8).

Guide sur le brevet d’invention 97


Section 3 : L
 es actes portant sur le droit attaché
au brevet
Le propriétaire du brevet dispose du droit d’exploiter ce dernier soit de façon personnelle
ou par un tiers. Il peut également abandonner ses droits sur le brevet précité au profit
d’un tiers à titre gratuit ou transmettre son droit d’utilisation par le biais d’une cession ou
à travers les licences d’exploitation, comme il peut mettre le brevet en gage.

L’article 56 fait état de quelques-uns de ces actes tels que :

• la possibilité de transmettre les droits attachés à la demande de brevet ou au brevet,


qui :

- soit comprend tous les droits attachés à la demande de brevet ou au brevet,

- soit se limite uniquement à certains droits ;

• la possibilité de concéder une licence d’exploitation exclusive attachée à la demande


de brevet ou au brevet, possibilité susceptible également de revêtir deux formes :

- soit la concession de la licence d’exploitation recouvre tous les droits conférés par
le brevet (ou la demande de brevet),

- soit ladite concession ne comprend que certains de ces droits ;

• la possibilité de concéder une licence d’exploitation non exclusive qui comprend :

- soit l’exploitation non exclusive de tous les droits conférés par le brevet,

- soit la concession de la licence d’exploitation non exclusive, limitée à quelques


droits seulement ;

• la possibilité que les droits attachés à la demande de brevet ou au brevet fassent
l’objet d’une mise en gage.

98 Guide sur le brevet d’invention


3.1. Règles communes aux actes accomplis par le titulaire
du droit sur le brevet
La loi n° 17.97 fait état des règles générales relatives à la transmission et à la perte des
droits.

3.1.1. I nterdiction faite au licencié d’enfreindre les limites des droits dont il
a été disposé

La transmission, la concession d’exploitation ou la mise en gage ne recouvrent parfois


pas l’intégralité des droits conférés par le brevet, ce qui permet au titulaire du droit initial
de se prévaloir de ces droits à l’encontre de toute personne excédant les limites de la
transmission ou de tout licencié enfreignant les limites de la licence − même si l’article 56,
dans son 4e alinéa, ne fait état que du cas de la licence.

3.1.2. I nterdiction de porter atteinte aux droits acquis antérieurement par


les tiers

La transmission des droits visés à l’article 56 précité ne saurait porter atteinte aux droits
acquis par les tiers avant la date de transmission. Ces derniers peuvent, dans ce cas,
revendiquer la propriété du titre délivré dans le délai de trois ans à compter de la date
d’inscription du titre au registre national des brevets, à condition que l’auteur de l’inscription
postérieure soit de bonne foi (art. 19 de la loi n° 17.97).

3.1.3. Exigence d’un écrit

La loi n° 17.97 pose une règle commune à tous les actes dont le brevet est susceptible de
faire l’objet et qui conduisent à la transmission des droits. Dans l’article 56, 5e alinéa 5,
elle exige la présence d’un document écrit sous peine de nullité de ces actes, en disposant
que les actes comportant une transmission ou une licence […] sont constatés par écrit sous
peine de nullité.

Cette exigence d’un écrit est susceptible de répondre à certaines nécessités pratiques.
Elle est ainsi de nature à faciliter l’opération de publicité pour permettre aux tiers, par
l’inscription de l’acte sur le registre national des brevets, de connaître les bénéficiaires du
brevet d’invention (cessionnaires, licenciés, nantissement, etc.)

La jurisprudence française a opté pour la nature relative de cette nullité ; le tribunal ne


peut donc la prononcer d’office (Cour de cassation, ch. com., novembre 1976, Bull. civ.
IV, n° 7278, p. 233).

Guide sur le brevet d’invention 99


3.1.4. Relation du certificat d’addition avec le brevet objet de la licence

Le licencié profite de plein droit des certificats d’addition se rattachant au brevet objet
de la licence, qui seraient délivrés ultérieurement à la date de la conclusion du contrat
de licence d’exploitation, au titulaire du brevet ou à ses ayants droit ; et ce, au cas où le
contrat de licence ne réglementerait pas les événements imprévus pouvant survenir après
la conclusion dudit contrat, étant précisé que les stipulations conventionnelles détiennent
la primauté au niveau de la prise en considération et de l’application.

De même, le titulaire du brevet ou ses ayants droit profite des certificats d’addition se
rattachant au brevet, qui seraient délivrés ultérieurement au licencié à compter de la date
de la conclusion du contrat de la licence d’exploitation (art. 57).

3.1.5. Publicité des actes portant sur le brevet

L’article 58 de la loi n° 17.97 réglemente l’annonce de l’existence d’actes portant sur le


brevet, et ce, pour donner une image claire à toute personne en quête de la situation
juridique du brevet. Pour ce, il dispose que tous les actes transmettant, modifiant ou
affectant les droits attachés à une demande de brevet ou à un brevet, doivent [...] être
inscrits sur un registre dit «registre national des brevets».

Ce registre est tenu par l’OMPIC. Il s’infère de cette obligation de procéder à la publicité
de tous les actes en matière de brevets qu’il n’est possible d’opposer lesdits actes aux tiers
qu’à compter de la date de leur inscription sur le registre national des brevets (art. 58).

À titre comparatif entre les dispositions relatives à la marque et celles afférentes au


brevet en ce qui a trait à la publicité des droits, une exception tenant aux contrats de
licence a été prévue concernant la marque, puisque l’article 157, alinéa 1, dispose :
À l’exception des contrats de licence d’exploitation des marques, tous les actes
transmettant, modifiant ou affectant les droits attachés à une marque enregistrée
doivent, pour être opposables aux tiers, être inscrits sur un registre dit « registre national
des marques » tenu par l’organisme chargé de la propriété industrielle.

En revanche, la loi n° 17.97 n’affranchit aucun contrat portant sur le brevet de l’obligation
de publicité par son inscription sur le registre national des brevets. Les tiers sont donc admis
à se prévaloir d’un contrat et d’en prouver l’existence ; et ce, même avant l’inscription au
registre national des brevets, puisque la présomption prévue par l’article 58 est établie au
profit de ces tiers. Il est possible de déduire cette affirmation des dispositions de l’article
précité qui indique qu’avant son inscription, un acte est opposable aux tiers qui ont acquis
des droits après la date de cet acte mais qui avaient connaissance de celui-ci lors de
l’acquisition de ces droits. Il s’agit donc d’une exception à la règle initiale : en effet, la
connaissance, par le tiers, de l’existence du contrat avant son inscription conduit à écarter
la présomption découlant de l’obligation de publicité.

100 Guide sur le brevet d’invention


a) Contenu de l’inscription
L’inscription au registre national des brevets repose sur la volonté de la personne ayant
un intérêt à effectuer cette inscription et, parfois, sur des décisions judiciaires rendues à
cet effet. Cependant, la voie usuelle reste l’initiative prise par la partie contractante la plus
insistante ou qui considère comme urgent de procéder à cette formalité.

Par ailleurs, lorsqu’il s’agit d’une procédure judiciaire, concernant l’inscription des mentions
consécutives à une décision judiciaire devenue définitive, le secrétariat-greffe adresse à
l’OMPIC dans un délai de 15 jours à compter de la date de ladite décision, en expédition
gratuite et complète, les décisions relatives à l’existence des droits attachés à la protection
prévue par le titre II de la loi n° 17.97 régissant les brevets, à l’étendue desdits droits ainsi
qu’à leur exercice.

En outre, conformément à l’article 24 du décret d’application, l’OMPIC est tenu, dès ré-
ception d’une décision judiciaire définitive, d’inscrire cette dernière au registre national
des brevets. Enfin, en guise de confirmation du droit, l’article 59 de la loi n° 17.97 dispose
que toute personne intéressée peut se faire délivrer un extrait du registre national des
brevets.

b) Procédure d’inscription des contrats de transmission des droits


L’article 23 du décret d’application organise la procédure et les formalités d’inscription des
contrats relatifs à la transmission des droits sur le brevet. Seuls certains modèles imposés
légalement peuvent être utilisés à cet effet devant l’OMPIC. Il s’agit en l’occurrence : du
formulaire B4, afférent aux inscriptions des contrats de transfert ou de jouissance de la
propriété ; du formulaire B5, relatif à la renonciation ; puis du formulaire B6, relatif au
retrait (imprimés téléchargeables via le www.ompic.ma).

Jouit de la qualité qui permet de déposer la demande d’inscription des actes transmettant,
modifiant ou affectant les droits attachés à une demande de brevet ou à un brevet, toute
partie à l’acte, et il est également possible de désigner un mandataire pour effectuer les
diverses formalités y relatives.

L’inscription est effectuée sur demande émanant de toute personne concernée. Cette
demande ne peut porter que sur un seul acte, et ce, selon l’un des modèles cités plus
avant ; et un récépissé constatant la date de son dépôt est remis au demandeur ou à son
mandataire.

Après l’accomplissement des formalités d’inscription, l’OMPIC doit remettre au demandeur


ou à son mandataire un certificat constatant l’inscription au registre national des brevets
de la mention de la demande d’inscription, soit remis directement, soit notifié par lettre
recommandée avec accusé de réception.

Guide sur le brevet d’invention 101


Les pièces devant être produites à l’appui de la demande d’inscription d’actes de transfert
de propriété, et être annexés à cette demande, ont été précisées par l’article 23 du décret
d’application. Il s’agit :

1) du justificatif du paiement des droits exigibles ;

2) du pouvoir du mandataire, s’il en est constitué un ;

3) d ’une expédition de l’acte authentique ou de l’original de l’acte sous seing privé


légalisé constatant la modification de la propriété ou de la jouissance des droits qui
sont attachés au brevet d’invention.

Dans des cas spéciaux, la production de certains documents est requise, en l’occurrence :

• un acte établissant le transfert en cas de mutation par décès ;

• une copie certifiée conforme de l’acte justifiant le transfert par fusion, scission ou
absorption.

3.2. Règles particulières à chaque opération


3.2.1. Cession du brevet

Le contrat de cession conduit à transférer, à titre onéreux, les droits du propriétaire du brevet ; il
emprunte la voie des contrats de vente ou peut être conclu dans le cadre de la cession de proprié-
té du fonds de commerce lorsque le brevet constitue l’un des éléments de ce fonds. Le contrat est
soumis aux conditions générales du contrat conformément aux articles 488 et suivants du DOC,
ainsi qu’aux conditions de forme particulières prévues par la loi n° 17.97 telles que l’exigence de
l’écrit (art. 56) ou l’obligation d’inscription de l’acte au registre national des brevets (art. 48).

Pour rappel, lorsque le brevet est l’un des éléments du fonds de commerce, l’article 90
du Code de commerce dispose que les brevets d’invention [...] compris dans la vente
d’un fonds de commerce demeurent, en ce qui concerne leur mode de transmission, régis
par la législation relative à la protection de la propriété industrielle.

La transmission du droit sur le brevet peut également emprunter la voie de donation, mais
l’application la plus significative de la transmission réside dans le contrat de vente. Les
contrats de transmission ont pour effet de rompre tout lien entre le propriétaire et la perte
de son droit à exploiter le brevet et à en disposer, et ce, même si son nom demeure attaché
à l’invention en sa qualité de concepteur de l’innovation.

Il convient de rappeler que la transmission volontaire du droit sur le brevet d’invention peut
s’effectuer soit de manière indépendante, soit dans le cadre d’une cession du fonds de
commerce lorsque ce brevet constitue l’un des éléments de ce fonds. Toutefois, la transmission
du droit peut être obligatoire lorsqu’elle est attachée à une saisie du brevet (art. 76) ou un
nantissement du fonds de commerce.

102 Guide sur le brevet d’invention


a) Conditions de cession du droit sur le brevet
Il est généralement fait référence aux conditions de fond, ainsi qu’aux exigences de forme,
ces dernières résidant principalement dans les points déjà étudiés dans le cadre des règles
générales, en l’occurrence l’écrit et la publicité.

Quant aux conditions de fond, elles résident surtout dans le contenu de l’acte, son
espèce et le prix fixé. Il faut que le contrat de transmission du droit sur le brevet contienne
impérativement le prix de la cession ou, à défaut, qu’il soit possible de déterminer ce prix
en ayant recours aux règles du DOC. Si cette détermination n’est pas possible, le contrat
sera qualifié en donation ou sera susceptible de nullité.

Au sujet de l’objet de la transmission, il peut s’agir de la totalité ou d’une partie du droit


sur le brevet. Ledit objet peut aussi résider dans le droit de jouissance, être relatif à une
des demandes attachées au brevet, ou encore porter sur plusieurs inventions à la fois ou
seulement sur la demande de brevet dont la date de dépôt constitue celle de la naissance
du droit de l’inventeur. Si ce dépôt n’atteint pas l’objectif escompté, à savoir l’inscription,
cela entraîne l’annulation du contrat pour défaut d’objet.

L’éventualité de la transmission partielle peut mettre les parties dans une situation de
copropriété. La même situation peut également être imaginée dans le cas de la cession
du droit d’exploitation en ce qui a trait à une partie déterminée qui ne recouvre pas tout
le territoire national.

La cession associée à l’inscription au registre national des brevets conduit à déterminer la


qualité de la personne titulaire du droit d’intenter une action en contrefaçon ; effectivement,
tant que l’acte n’est pas inscrit au registre national des brevets, le bénéficiaire de l’acte n’est
pas admis à enrôler une telle demande en justice, et toute diligence effectuée préalablement
à cette action, telle que la saisie descriptive, est nulle pour défaut de qualité.

Lorsque la cession du même droit a été effectuée au profit de plusieurs personnes, la


priorité est accordée à celle qui s’est empressée de procéder à l’inscription au registre
national des brevets, à condition qu’elle soit de bonne foi.

Enfin, la transmission des droits sur le brevet ne doit pas porter atteinte aux droits acquis par
des tiers avant la date de transmission, à condition, toutefois, que ce droit acquis n’ait pas
été soustrait à un tiers ou obtenu en violation d’une obligation légale ou conventionnelle
(art. 19 et 56, 4e alinéa, de la loi n° 17.97).

b) Effets de la cession du droit sur le brevet


Le contrat de transmission a pour effet de transférer la propriété du droit conféré par le
brevet de son titulaire au cessionnaire, et de générer des obligations réciproques pouvant
soit revêtir un aspect général et être de ce fait soumises aux règles générales, soit être
privées et résulter de la nature du contrat ou de textes particuliers ou de stipulations
contractuelles.

Guide sur le brevet d’invention 103


b.1) Obligations du cédant
• L’obligation de délivrance : la transmission du droit sur le brevet s’effectue par la
délivrance du titre de propriété industrielle, et les termes du contrat de transmission
fixent les conditions de la cession. Il est en effet présumé, en vertu de l’article 34 de
la loi n° 17.97, que le dossier déposé à la base duquel le brevet a été délivré contient
l’indication de la manière dont l’invention est susceptible d’application industrielle,
si cette application ne résulte pas à l’évidence de la description ou de la nature de
l’invention.

• L’obligation de garantie : cette obligation trouve son assise textuelle dans l’article
précité qui a trait à la garantie de la cession d’une chose susceptible d’application
industrielle. Cependant, le cédant ne garantit pas la mauvaise utilisation de
l’invention ni la valeur commerciale de l’invention brevetée.

La garantie assurée par le cédant vise à créer un climat paisible qui permet au cessionnaire
de profiter du droit, en s’abstenant de tout acte qui empêcherait ce dernier de disposer de
son droit, tel qu’un propriétaire le ferait quant à son bien, et en évitant de l’inquiéter par
des procédures de contrefaçon.

Il est préférable que le cessionnaire qui souhaite protéger ses droits fasse figurer dans le
contrat de cession toutes les conditions qu’exigent l’espèce et la nature de l’invention et du
droit cédé ; et ce, en vue d’une protection optimale lors de l’exploitation après la cession.
De plus, il rentre dans ce cadre la possibilité de bénéficier des perfectionnements et des
additions auxquels le cédant parvient, ainsi que les conditions à remplir pour les obtenir.

b.2) Obligations du cessionnaire


Les obligations du cessionnaire peuvent être résumées comme suit :

1) le paiement du prix comptant ou échelonné ;

2) l’acquittement des droits annuels sous peine d’appliquer la teneur de l’article 83 de


la loi n° 17.97.

b.3) Sanction du non-respect des obligations


La sanction du non-respect des obligations découlant du contrat diffère selon le genre de
violation commise par son auteur, mais également selon la nature de l’engagement non
exécuté. Il appartient aux juges de statuer à ce sujet, puisqu’ils détiennent la compétence
pour rattacher la faute à l’une des parties ou pour déterminer à quel point il a concouru
dans la commission de ladite faute. Quoi qu’il en soit, le non-respect des obligations peut
entraîner la nullité du contrat, par exemple quand l’invention n’existe plus (cette nullité
est relative si c’est seulement une partie de l’invention qui n’a plus d’existence), comme
donner lieu au paiement des dommages-intérêts.

104 Guide sur le brevet d’invention


La seconde sanction est la rescision du contrat pour non-respect des conditions qui y
ont été stipulées, et ce, conformément aux dispositions générales du DOC. Quant à
la violation des obligations, elle donne droit à réclamer des dommages-intérêts sur le
fondement de la faute contractuelle.

3.2.2. Renonciation au droit d’exploitation exclusive du brevet

Le propriétaire du brevet peut spontanément décider de renoncer à l’inscription effectuée à


l’OMPIC pour un brevet déterminé. La raison de cette renonciation peut résider dans le fait
qu’il a connaissance de l’existence d’un titulaire de droit antérieur sur le brevet, tel le cas où
ce dernier est le titulaire d’un brevet initial et où il apparaît que le brevet de la personne qui y
renonce n’est qu’une simple addition, ou encore que l’invention ne satisfait pas à l’exigence
de nouveauté. Dans les éventualités précitées, le titulaire d’un tel brevet est conscient que
celui-ci sera déclaré nul, il décide donc de renoncer, de son propre chef, à l’inscription.

L’article 81 de la loi n° 17.97 affirme le principe selon lequel le titulaire d’un brevet est en
droit de renoncer à la protection dont il bénéficie au sujet dudit brevet si, toutefois, les
conditions suivantes sont remplies :

• La renonciation doit être formulée par une déclaration écrite.

• La déclaration doit émaner du titulaire du brevet ou de son mandataire muni d’un
pouvoir spécial.

• La détermination de la partie objet de la renonciation, celle-ci pouvant être totale


ou partielle.

 ar ailleurs, lorsque le brevet est en copropriété ou s’il est grevé par des droits réels de
P
licence ou de gage, des exigences supplémentaires doivent être satisfaites, à savoir :

• La renonciation doit être requise, par écrit, par l’ensemble des copropriétaires.

• Les titulaires des droits inscrits au registre national des brevets - en tant que droits
réels - doivent consentir à cette renonciation.

3.2.3. Gage

L’article 56 mentionne expressément la mise en gage du brevet parmi les moyens de


transmission des droits. Il dispose ainsi que les droits attachés au brevet peuvent faire l’objet
[...] d’une mise en gage. Ce gage vise généralement à obtenir des fonds pour l’entreprise.

La mise en gage du brevet est soumise aux règles générales régissant les contrats de gage sous
réserve de l’application des dispositions relatives au brevet, notamment celles afférentes aux
étapes donnant lieu à son obtention ou aux raisons y mettant fin. Pour être admis à se prévaloir
du gage à l’encontre des tiers, celui-ci doit être inscrit au registre national des brevets (art. 58).

Guide sur le brevet d’invention 105


3.2.4. Licence d’exploitation

La licence d’exploitation constitue l’un des actes les plus importants dont le brevet est
susceptible de faire l’objet ; il procure ainsi au titulaire dudit brevet des avantages financiers
substantiels tout en maintenant, dans le même temps, la propriété du droit.

Le contrat relatif à cette licence se distingue par certaines caractéristiques. Il est soumis à
des conditions et peut faire l’objet de quelques incidents.

a) Nature et utilité de la licence d’exploitation


La licence d’exploitation, constitue une forme d’exploitation du droit sur le brevet. Le titulaire
de ce dernier peut, pour bon nombre de raisons, décider d’y renoncer au profit de tiers dans
la limite du contrat relatif à la licence d’exploitation des utilités de l’invention objet du brevet.
Il s’agit donc d’un moyen par lequel la loi permet au titulaire du brevet d’autoriser les tiers à
exploiter ledit brevet en totalité ou en partie : moyennant le paiement d’une somme d’argent
dénommée « royalties » ou redevances de licence ou à titre purement gratuit.

L’obligation d’exploitation trouve sa source dans la nature du droit conféré à l’invention,
qui représente la contrepartie du profit que tire la société du brevet. Les avantages
éventuels du contrat de licence est qu’il constitue un moyen d’éviter d’être déchu des droits
attachés au brevet ou d’être soumis à des licences obligatoires accordées contre le gré du
propriétaire du brevet au cas où ce dernier n’aurait pas commencé à exploiter ledit brevet,
personnellement ou par le biais de son mandataire (art. 60).

b) Licence conventionnelle
La licence d’exploitation emprunte l’une des deux formes visées par l’article 56 de la loi
n° 17.97, qui sont les suivantes :

• la licence d’exploitation exclusive :

- considérée comme « exclusive » lorsque celui qui la concède n’a plus le droit de
conclure d’autres contrats dont l’objet serait relatif à des licences accordées ; et s’il
est tenu de s’abstenir de continuer à exploiter le droit sur le brevet, sauf stipulation
contractuelle contraire,

- pouvant être limitée dans le temps (15 ans par exemple), dans l’espace (tel que
le fait de la restreindre à une région déterminée) ou dans son objet (comme le
fait d’autoriser l’exploitation de certaines demandes tout en conservant le droit
d’exploiter les autres demandes attachées au brevet) ;

• la licence d’exploitation non exclusive :

- Elle concerne le cas où celui qui concède la licence détient la faculté d’accorder
cette dernière à plusieurs personnes ou conserve le droit d’exploitation, et ce,
à côté de la licence concédée au tiers.

106 Guide sur le brevet d’invention


Étant donné que dans cet article, la loi s’est contentée de souligner que les droits attachés
à une demande de brevet ou au brevet peuvent faire l’objet, en totalité ou en partie,
d’une concession de licence d’exploitation exclusive ou non exclusive, les règles générales
contenues dans le DOC reçoivent application en cas de désaccord quant aux clauses du
contrat.

b.1) Conditions de la licence conventionnelle


En principe, les conditions de la licence résident dans l’existence d’un brevet susceptible de
former l’objet du contrat. Par ailleurs, le contrat de licence revêt un caractère personnel ; le
licencié est de ce fait tenu d’exploiter lui-même le droit que la licence lui concède ou par
le biais d’une personne agissant pour son compte.

En outre, si certaines conditions de validité ont déjà été précédemment traitées parmi les
règles générales qui gouvernent les actes portant sur le brevet, il importe de relever les
points essentiels se rapportant au contrat de licence :

• La durée de la licence d’exploitation ne peut excéder celle de la validité du brevet.

• L’objet du contrat de licence ne peut être qu’un brevet valide ou une demande de
brevet présentée de façon légale sous la responsabilité de la personne qui concède
ladite licence, et il est toujours préférable de prévoir le sort des sommes versées
au cas où le contrat de licence ferait l’objet de nullité ou d’annulation après sa
conclusion, la raison d’être de ce contrat étant en effet le monopole dont jouit le
titulaire du brevet et le fait qu’un profit en a été tiré d’une manière ou d’une autre.

• Il est également impératif que les parties s’assurent que la personne qui va
concéder une licence d’exploitation a effectivement qualité pour effectuer ledit acte,
notamment lorsqu’on est en présence de certaines situations telles que la copropriété
ou l’existence de droits antérieurs (inscriptions au registre national des brevets ou
licences antérieures).

• Le prix du contrat de licence est fixé librement par les parties à condition, toutefois,
que ce prix soit déterminé ou susceptible d’être déterminé, et peu importe, par la
suite, qu’il soit versé en un seul temps ou échelonné sur plusieurs échéances, ou bien
que le montant de ces dernières soit ou non en hausse ; il peut également consister
en pourcentages liés à la production ou emprunter divers aspects selon les zones
géographiques.

Les conditions du contrat de licence ayant été traitées, il convient de signaler que ce
dernier doit contenir les obligations qui incombent à chacune des parties et qu’il est
susceptible de générer certains effets.

Guide sur le brevet d’invention 107


b.2) Obligations mises à la charge des parties au contrat de licence
Ces obligations sont les suivantes :

• Concernant la partie qui concède la licence, elle est tenue :

- de l’obligation de délivrer le brevet objet du contrat de licence d’exploitation,


c’est-à-dire d’offrir un cadre qui permette au licencié de jouir du contrat : comme
l’exploitation des brevets est souvent liée à des secteurs techniques requérant un
degré élevé d’habilité, il est préférable que le contrat de licence prévoit l’obligation
de délivrer les connaissances d’application sous réserve, bien évidemment, de
garantir le secret de l’invention et la non-concurrence après l’expiration de la
durée du contrat ;

- de l’obligation de garantie, qu’il s’agisse des vices cachés tels que le défaut de
nouveauté de l’invention et la déchéance du droit sur le brevet, ou des troubles
relatifs à l’exploitation comme l’existence d’actions en contrefaçon contre l’auteur
de la licence, étant à ce sujet précisé que le licencié ne dispose pas du droit
d’intenter directement une telle action, et ce, conformément à l’article 202 de la
loi n° 17.97 ;

- de maintenir la validité du brevet en acquittant les droits exigibles dans les délais
légaux (art. 82).

• Concernant le licencié, il lui incombe :

- une obligation essentielle consistant dans le paiement du prix relatif à la licence,


et ce, dans les formes et délais stipulés au contrat ou prévus légalement ;

- l’exploitation effective du brevet pour conserver la valeur de ce dernier,


spécialement dans le cas du bénéficiaire d’une licence exclusive, puisque tout
défaut d’exploitation de la part de celui-ci peut entraîner l’application du droit de
licence obligatoire (art. 60) ;

- de s’engager à exploiter le droit issu du brevet selon les conditions stipulées
au contrat, sous peine d’être déclaré responsable pour toute violation d’une
obligation contractuelle ou pour concurrence déloyale.

b.3) Effets du contrat de licence


Le contrat de licence d’exploitation confère à chacune de ses parties d’exiger du
cocontractant l’exécution de ses obligations. Par ailleurs, le propriétaire ou toute personne
ayant un quelconque intérêt peut se prévaloir du contrat de licence à l’encontre du licencié
qui enfreint l’une des limites de la licence qui lui a été concédée (loi n° 17.97, art. 56,
3e alinéa). C’est le cas de l’exploitation qui continue au-delà de la durée de la licence
ou lorsqu’elle dépasse les limites géographiques dans lesquelles elle est autorisée, ou
lorsque l’objet de la production est différent de celui qui avait été convenu.

108 Guide sur le brevet d’invention


Concernant le licencié, aux termes de l’article 57 de la loi n° 17.97, celui-ci profite de plein
droit, et à défaut de stipulations contractuelles, des certificats d’addition se rattachant au
brevet, objet de la licence, qui seraient délivrés ultérieurement à la date de la conclusion du
contrat de licence d’exploitation, au titulaire du brevet ou à ses ayants droit.
Réciproquement, le titulaire du brevet ou ses ayants droit profite des certificats d’addition se
rattachant au brevet, qui seraient délivrés ultérieurement au licencié à compter de la date
de la conclusion du contrat de la licence d’exploitation.

En vertu de l’article 58, le contrat de licence doit être inscrit à l’OMPIC pour pouvoir être
opposable aux tiers.

c) Licences concédées contre le gré du titulaire du brevet

Le brevet d’invention se caractérise par son attachement à des droits qui exercent une
influence principalement sur la vie économique, mais parfois également sur les besoins
essentiels des citoyens, surtout dans des secteurs tels que la santé ou les produits de base.
C’est pour cette raison que le législateur n’a pas laissé l’exercice du droit d’exploitation
au bon vouloir du titulaire ; cela aurait en effet conduit à des monopoles ou négligences.
Il a donc mis en place des systèmes juridiques qui offrent des solutions à des situations
spéciales. Ces systèmes résident dans certaines formes de concession des licences.

Cette licence imposée contre la volonté du propriétaire favorise, en principe, l’exploitation


que ce dernier n’a pas réussi à entreprendre. D’autre part, le fait que des dispositions
légales consacrent ce genre de licences constitue un moyen de pression sur le propriétaire
pour qu’il effectue cette exploitation de façon directe ou en concédant des licences à cet
effet aux tiers.

La licence obligatoire est un thème essentiel, abordé dans toutes les conférences
organisées au sujet des brevets, spécialement dans les conférences relatives à la
convention de Paris et à sa modification.

L’article 5 de la convention de Paris contient les règles relatives à cette obligation, il


dispose en effet que :

« … 2) Chacun des pays de l’Union aura la faculté de prendre des mesures législatives
prévoyant la concession de licences obligatoires, pour prévenir les abus qui pourraient
résulter de l’exercice du droit exclusif conféré par le brevet, par exemple faute
d’exploitation.

3) La déchéance du brevet ne pourra être prévue que pour le cas ou la concession


de licences obligatoires n’aurait pas suffi pour prévenir ces abus. Aucune action en
déchéance ou en révocation d’un brevet ne pourra être introduite avant l’expiration de
deux années à compter de la concession de la première licence obligatoire.

Guide sur le brevet d’invention 109


4) Une licence obligatoire ne pourra pas être demandée pour cause de défaut ou
d’insuffisance d’exploitation avant l’expiration d’un délai de quatre années à compter du
dépôt de la demande de brevet, ou de trois années à compter de la délivrance du brevet,
le délai qui expire le plus tard devant être appliqué; elle sera refusée si le breveté justifie
son inaction par des excuses légitimes. Une telle licence obligatoire sera non exclusive et
ne pourra être transmise, même sous la forme de concession de sous–licence, qu’avec la
partie de l’entreprise ou du fonds de commerce exploitant cette licence. … » .

Il en est de même concernant l’ADPIC dans son article 7.

Il s’agit en l’occurrence de deux genres de licences : les licences obligatoires et les licences
d’office qui revêtent toutes l’aspect de décision émanant des pouvoirs publics.

c.1) Licences obligatoires

1) Raisons de la licence obligatoire


L’article 60 de la loi n° 17.97 détermine les situations dans lesquelles l’administration
a le droit de passer outre la volonté du propriétaire du brevet ou son ayant cause et
d’intervenir en accordant des licences d’exploitation à des tiers. Pour rappel, ces situations
existent dans le cas où le titulaire du droit n’a pas commencé à exploiter l’invention objet
du brevet sur le territoire du Royaume du Maroc ou a omis de faire des préparatifs effectifs
et sérieux en vue de cette exploitation, ou s’il n’a pas commercialisé le produit objet du
brevet en quantité suffisante pour satisfaire aux besoins du marché marocain, ou encore
s’il a abandonné l’exploitation ou la commercialisation du brevet au Maroc pendant plus
de trois ans.

2) Conditions d’octroi de la licence obligatoire


L’octroi de la licence obligatoire à toute personne de droit public ou privé est soumis aux
conditions suivantes :

• Former une demande en ce sens au tribunal compétent, en l’occurrence le tribunal


de commerce, et ce, conformément à l’article 15 de la loi n° 17.97 ;

• Attendre que s’écoule une durée de trois ans après la délivrance du brevet ou quatre
ans après la date de dépôt de la demande de brevet ;

• Annexer à la demande la justification que le demandeur n’a pu obtenir du propriétaire


du brevet une licence d’exploitation à l’amiable notamment à des conditions et
modalités commerciales raisonnables (art. 61).

• Joindre à la demande la justification que le demandeur est en état d’exploiter


l’invention de manière à satisfaire aux besoins du marché marocain (art. 61).

110 Guide sur le brevet d’invention


3) Principes de base de la licence obligatoire
Aux termes de l’article 62 de la loi n° 17.97 :

• La licence obligatoire ne peut pas être exclusive ; autrement dit, le titulaire du brevet
conserve son droit à l’exploitation selon les règles en vigueur.

• La licence obligatoire doit être octroyée principalement pour l’approvisionnement


du marché marocain ; elle ne saurait par exemple être accordée pour couvrir les
besoins relatifs à l’exportation.

• Les conditions de l’octroi de la licence obligatoire sont déterminées par le tribunal


(notamment quant à sa durée et à son champ d’application, qui seront limités aux
fins auxquelles la licence est accordée), de même que le montant des redevances
auxquelles elle donne lieu. Ces redevances sont fixées, selon le cas d’espèce, compte
tenu de la valeur économique de la licence. Par ailleurs, le propriétaire, ainsi que
le licencié, disposent du droit de saisir le tribunal afin de modifier ces conditions s’il
existe des raisons justifiant une telle mesure.

• Il est possible d’accorder une licence obligatoire d’exploitation pour un certificat
d’addition. Il arrive en effet parfois que l’inventeur titulaire du brevet parvienne à
ajouter des perfectionnements à l’invention objet de la licence obligatoire et, étant
donné que l’exploitation du certificat d’addition est liée au brevet initial, l’article
65 dispose que le titulaire d’une licence obligatoire peut se voir accorder par le
tribunal dans les conditions prévues aux articles 60 à 62 […], une licence obligatoire
d’un certificat d’addition rattaché au brevet même si ce certificat a été délivré avant
l’expiration des délais prévus à l’article 60 ci-dessus.

• Le recours à la procédure précitée n’est possible qu’à défaut d’entente amiable entre
le titulaire du brevet initial et celui de la licence obligatoire quant aux conditions
d’exploitation du certificat d’addition.

• Il peut exister une connexité entre deux brevets inscrits. L’article 66 de la loi n° 17.97
dispose à ce sujet que lorsqu’une invention protégée par un brevet ne peut être
exploitée sans qu’il soit porté atteinte aux droits attachés à un brevet antérieur dont le
propriétaire refuse la licence d’exploitation à des conditions et modalités commerciales
raisonnables, le propriétaire du brevet ultérieur peut obtenir du tribunal une licence
obligatoire, dans les mêmes conditions que celles prévues aux articles 60 à 62.

Pour que le tribunal fasse droit à cette demande de licence obligatoire, certaines exigences
doivent être satisfaites :

• L’invention revendiquée dans le brevet ultérieur doit traduire un progrès technique


important, d’un intérêt économique supérieur à l’invention revendiquée dans le
brevet antérieur.

• Le titulaire du brevet antérieur doit avoir droit à une licence réciproque à des conditions
raisonnables pour utiliser l’invention revendiquée dans le brevet ultérieur.

Guide sur le brevet d’invention 111


• La licence en rapport avec le brevet antérieur doit être incessible, sauf si le brevet
ultérieur est également cédé.

4) Expiration de la validité de la licence obligatoire


A côté de la règle générale qui gouverne la durée du brevet, selon laquelle la validité du
brevet expire à la fin de ladite durée, le droit à la licence obligatoire s’éteint par le retrait
de celle-ci, retrait qui peut être conventionnel ou judiciaire, et ce, lorsque les circonstances
ayant conduit à l’octroi de la licence obligatoire cessent d’exister et ne se reproduiront
vraisemblablement pas.

En outre, il paraît évident qu’il ne faudrait pas porter atteinte aux intérêts légitimes des
licenciés. Le tribunal peut donc réexaminer les circonstances précitées pour s’assurer
qu’elles continuent d’exister, et ce, sur demande motivée par toute partie y ayant intérêt.

La licence obligatoire prend également fin par décision du tribunal rendue à la requête
du propriétaire du brevet et, le cas échéant, des autres licenciés, lorsque le titulaire de
la licence obligatoire ne satisfait pas aux conditions auxquelles cette dernière lui a été
octroyée.

Quoi qu’il en soit, lorsque le propriétaire du brevet décide de céder des droits attachés
à une licence obligatoire, il est tenu d’obtenir une autorisation du tribunal sous peine de
nullité de la cession.

En vue de protéger les personnes qui exercent une activité liée aux droits attachés au
brevet, la décision prononçant le retrait de la licence doit faire l’objet d’une publication
pour informer les tiers au sujet de la situation du brevet, en particulier celle des licences
obligatoires. L’article 64 définit ainsi le rôle dévolu au secrétariat-greffe du tribunal qui
a accordé la licence obligatoire résidant dans la notification de toute décision judiciaire
rendue en ce sens et devenue définitive, et ce, à l’OMPIC dans l’optique de son inscription
au registre national des brevets.

c.2) Licences d’office


La licence d’office est un moyen à la disposition des pouvoirs publics, visant la réalisation de
l’intérêt général dans le secteur de la santé publique ou pour satisfaire des besoins requis
par l’économie nationale, ou encore pour couvrir les besoins de la défense nationale.

Ce genre de licences ne peuvent être que non exclusives, quel que soit le licencié ; il est
donc permis à tout un chacun d’en profiter, y compris au propriétaire du brevet (art. 69
de la loi n° 17-97). Par ailleurs, les droits attachés à une licence d’office ne peuvent être ni
cédés, ni transmis, ni hypothéqués.

112 Guide sur le brevet d’invention


1) Licence d’office pour cause d’intérêt de la santé publique
Situations conduisant à édicter la licence d’office par acte administratif et les
effets de cette licence

Si l’intérêt de la santé publique l’exige, les brevets délivrés, que ce soit pour des
médicaments, des procédés d’obtention de médicaments, des produits nécessaires à
l’obtention de ces médicaments ou des procédés de fabrication de tels produits, peuvent
être exploités d’office si les médicaments en question ne sont mis à la disposition du public
qu’en quantité ou qualité insuffisante ou à des prix anormalement élevés.

Dans l’article 26 de son décret d’application, la loi n° 17.97 confère à l’administration, à


la demande du ministère de la Santé publique, la compétence pour attribuer la licence
d’office relative à l’exploitation, contrairement à la licence obligatoire qui est accordée par
le tribunal. L’acte administratif octroyant l’exploitation d’office d’un brevet d’invention est
édicté par décret pris sur proposition de l’autorité gouvernementale chargée de l’industrie
et du commerce, décret publié au Bulletin officiel et dans lequel figurent les mentions
visées par ce même article 26 afin que soient clairement définis tous les aspects relatifs au
brevet faisant l’objet de la licence d’office.

Dans son article 68, la loi impose la notification du décret précité au titulaire du brevet,
aux titulaires de licences le cas échéant, et à l’OMPIC. Son décret fait ensuite l’objet d’une
inscription d’office au registre national des brevets sur initiative de l’OMPIC et sans nul
besoin de présenter une demande en ce sens, l’objectif étant la mise à jour des mentions
relatives au brevet qui figurent dans ledit registre.

Procédure d’attribution de la licence d’office

La procédure menant à l’octroi de la licence d’office a été définie par les articles 25 à
30 du décret d’application de la loi n° 17.97. Ainsi, après la parution du décret édictant
l’exploitation d’office d’un brevet d’invention, puis l’accomplissement des formalités
relatives à la publicité dudit décret, toute personne se sentant qualifiée peut présenter une
demande d’octroi de licence d’office, et ce, à partir du jour de la publication du décret
pris en la matière.

La procédure d’attribution de la licence d’office s’étend donc sur deux étapes :

• La première est celle où le décret relatif à la licence d’office est pris.

• La seconde consiste en la désignation du bénéficiaire de la licence d’office sur la


demande de ce dernier.

En outre, dans le cadre de la procédure du parallélisme des formalités, l’article 70 de la loi


dispose que les modifications des clauses de la licence demandée soit par le propriétaire
du brevet, soit par le titulaire de cette licence sont décidées et publiées selon la procédure
prescrite pour l’octroi de ladite licence. Si elles portent sur le montant des redevances,
elles sont décidées selon la procédure prescrite pour la fixation initiale de ce montant, ce
qui nécessite le respect de la procédure précitée, notamment la parution du décret, sa
notification et sa publication.

Guide sur le brevet d’invention 113


Signalons enfin qu’en cas de non-respect des obligations mises à la charge du licencié, le
retrait de la licence peut être décidé à la demande du propriétaire du brevet selon les mêmes
formalités que celles prescrites dans le cas de l’octroi de la licence précédemment évoquée.
Schéma n° 5 : Procédure d’attribution de la licence d’office

Demande du ministère de la Santé

L’autorité gouvernementale chargée


de l’industrie et du commerce

Notification au propriétaire du brevet Mise en place d’un comité technique


ou au licencié ou au mandataire dans le délai de deux mois pour
pour présenter leurs observations donner son avis

Décret

Notification au propriétaire du brevet


Notification à l’OMPIC
ou au licencié ou au mandataire

2) Licence d’office pour les besoins de l’économie nationale


L’objectif de la recherche et de l’invention est de faire face aux difficultés que rencontrent
les applications industrielles et de répondre à certains besoins, dont ceux relatifs à
l’économie nationale. Pour cela, l’administration peut présenter une demande de licence
à l’autorité gouvernementale chargée de l’industrie et du commerce, qui envoie une mise
en demeure aux propriétaires de l’invention afin d’entreprendre l’exploitation de cette
dernière de façon à satisfaire les besoins de l’économie nationale (art. 71 à 77 du décret
d’application de la loi n° 17-97).

La licence d’office ne peut être accordée que si des conditions précises sont remplies,
parmi lesquelles figurent les exigences relatives à la durée et au champ d’application de
ce type de licence. Quant au propriétaire du brevet, il bénéficie de redevances auxquelles
donne lieu la licence d’office, fixées par le tribunal à défaut d’accord amiable à ce sujet
entre les parties.

Les conditions de la prise du décret relatif à la licence d’office pour les besoins de
l’économie nationale, peuvent être résumées comme suit :

Si les pouvoirs publics observent, par le biais notamment de l’administration concernée par
l’objet de l’invention, que certains besoins de l’économie nationale ne sont pas satisfaits,
qu’un brevet d’invention déterminé est de nature à apporter une solution pour répondre à
ces besoins, et que le propriétaire dudit brevet ne l’exploite pas ou l’exploite d’une manière
insuffisante qui ne permet de satisfaire aux dits besoins, l’administration peut mettre en

114 Guide sur le brevet d’invention


demeure ledit propriétaire afin d’entreprendre cette exploitation de façon à couvrir les
besoins de l’économie nationale (art. 71).

Cette décision de mise en demeure doit être motivée et notifiée, le cas échéant, aux
titulaires des licences inscrites au registre national des brevets ou à leurs mandataires.

Si la personne touchée par la mise en demeure n’a pas pris les mesures qui s’imposaient
dans le délai d’un an courant du jour de la réception de sa notification, le brevet, objet de
la mise en demeure, peut être exploité d’office, et ce, en vertu d’un décret.

Pour que ce dernier soit pris, il est impératif que l’absence d’exploitation ou l’insuffisance
en qualité ou en quantité de l’exploitation entreprise porte gravement préjudice au
développement économique et à l’intérêt public.

Lorsque le titulaire du brevet justifie d’excuses légitimes et compatibles avec les exigences
de l’économie nationale, le délai d’un an peut être prolongé par décision administrative
à la demande du titulaire précité. Cette décision est prise et notifiée selon la procédure et
dans les formes prévues pour la décision de mise en demeure.

Quant au délai supplémentaire, il court à compter de la date d’expiration du délai initial


d’un an.

Lorsqu’en vertu des dispositions des premier et deuxième alinéas de l’article 73 ci-dessus,
il est fait application de l’exploitation d’office des brevets, les dispositions des articles 68
à 70 sont applicables (art. 74).
Enfin, concernant les formalités et la procédure d’obtention de ce genre de licences, elles
ont été détaillées par les articles 35, 36 et 37 du décret d’application.

3) Licence d’office pour les besoins de la défense nationale


La licence d’office pour les besoins de la défense nationale est exclusivement prévue au
profit de l’État. Elle peut être accordée d’office et à tout moment, que l’exploitation soit
faite par l’État lui-même ou pour son compte (art. 75 de la loi n° 17.97).

La licence d’office est attribuée par décret sur proposition de l’autorité gouvernementale
chargée de l’industrie et du commerce à la demande de l’autorité chargée de la défense
nationale. Les conditions de la licence sont contenues dans ledit décret à l’exception
de celles relatives aux redevances auxquelles elle donne lieu. L’article 75 déjà évoqué
a en effet donné compétence au tribunal administratif de Rabat pour fixer le montant
des redevances, et ce, à défaut d’accord amiable entre le propriétaire du brevet et
l’administration intéressée.

Quant aux effets de la licence, toujours selon l’article 75, ils courent à compter de la date
de présentation de la demande de licence d’office.

En dernier lieu, notons que, conformément à l’article 39 du décret d’application, les


dispositions et règles précitées, relatives au brevet et à la demande de brevet, sont
applicables aux certificats d’addition et à la demande de ces certificats.

Guide sur le brevet d’invention 115


Section 4 : L’expiration du droit sur le brevet
Le droit sur le brevet expire pour plusieurs raisons, et la loi n° 17.97 a mentionné les cas
suivants :

• le rejet de la demande de brevet (art. 41) ;

• l’expiration de la durée légale de validité du brevet (art. 81) ;

• la déchéance du droit pour non-acquittement des droits exigibles (art. 83) ;

• la renonciation au droit sur le brevet (art. 81) ;

• la nullité du brevet (art. 85).

Ces différents points ont été étudiés auparavant ; il suffit donc de souligner ce qui suit :

• En cas d’expiration du droit sur le brevet, l’article 87 de ladite loi dispose que l’invention
brevetée dont le titulaire a été déchu, de même que l’invention dont le brevet a été
annulé, ne peuvent faire l’objet d’un autre dépôt de demande de brevet.

• La loi n’omet pas d’affirmer que les certificats d’addition prennent fin avec le brevet
principal (art. 88), et ce, à l’exception de l’hypothèse où les perfectionnements qui
font l’objet des certificats d’addition constituent, en eux-mêmes, une invention. Dans
ce cas, la nullité du brevet initial n’affecte pas la validité du certificat d’addition qui
continue à produire tous ses effets.

• Lorsque le brevet est en copropriété, la renonciation au droit exclusif d’exploitation


ne peut être effectuée que si elle est requise par l’ensemble des copropriétaires.
Cette renonciation requiert, en outre, le consentement des titulaires des droits réels
de licence ou de gage qui ont été inscrits au registre national des brevets. De surcroît,
elle doit être inscrite dans le registre précité et ne prend effet qu’à la date de cette
inscription (art. 81).

116 Guide sur le brevet d’invention


La protection du droit
sur le brevet
4
Guide sur le brevet d’invention 117
Élaborer un texte de loi pour procurer la protection escomptée ne suffit pas. Il importe
aussi de prévoir une sanction, et cette dernière n’aura, en outre, aucune valeur à défaut
de son exécution.

La loi n° 17.97 a mis en place les moyens nécessaires pour sanctionner les actes portant
atteinte au droit sur le brevet. De plus, ces moyens sont complétés par d’autres dispositions
des textes généraux tels que le DOC ou le Code de commerce, ainsi que dans des textes
spéciaux - comme la loi n° 06 99 relative à la liberté des prix et de la concurrence -
ou encore les textes relatifs à la répression des fraudes ou aux données commerciales
et industrielles ou à l’utilisation de produits nocifs. Ces moyens de protection du droit
sur le brevet ne se limitent pas à la réglementation juridique des actions en justice : la
préservation des intérêts du titulaire de ce droit peut également puiser son fondement dans
le régime contractuel ou dans le cadre de règles déontologiques afférentes à certaines
professions. En cas de désaccord sur l’application de ces dernières, l’appréciation de
l’opportunité de cette application est remise à la diligence des juges.

Si la mission des juges est d’insuffler la vigueur aux textes juridiques et d’éviter qu’ils
ne deviennent lettre morte, ce rôle revêt une importance particulière dans le cadre de
la protection des droits issus des titres de propriété industrielle. Si ces droits sont régis
par la législation nationale, la source de cette législation provient des conventions
internationales, dont la dernière est l’Accord sur les ADPIC.

Les personnes concernées espèrent que les magistrats prennent des décisions
convaincantes et adaptées à l’évolution, et ce, au moment opportun, avec l’impartialité,
le sérieux et la rigueur nécessaires à la protection des intérêts de la partie qui en a le
droit. La pratique judiciaire ne peut en effet atteindre un niveau élevé que si les parties
en litige et le travail des auxiliaires, ont le même degré d’évolution. En fait, la neutralité
des juges leur impose de statuer dans les limites de ce qui leur est exposé.

À l’instar des autres droits relatifs à la propriété industrielle, la protection du droit sur le
brevet se caractérise par le fait que la loi n° 17.97 lui a allouée un cadre de protection qui
lui est propre, en l’occurrence le titre VIII, articles 201 et suivants, lesquels traitent de façon
détaillée de l’action en contrefaçon. Si cette action figure au premier rang des actions
en justice permettant de protéger le droit sur le brevet, il en existe aussi d’autres tendant
au même but telles que l’action en nullité, qui se distingue par son caractère spécial, et
l’action en concurrence déloyale, qui revêt un aspect général, vu qu’elle se base sur les
principes généraux de la responsabilité, et ce, bien que sa réglementation soit contenue
dans la loi n° 17.97.

Par conséquent, cette partie est dédiée à l’étude des divers moyens permettant d’assurer
la protection du droit sur le brevet.

118 Guide sur le brevet d’invention


Section 1 : Q
 uelques principes régissant la
protection du droit sur le brevet

1.1. C
 aractère territorial de la protection du brevet
d’invention
Le brevet délivré au Maroc n’a aucune valeur en dehors de ses frontières. Le même constat
vaut également pour le brevet étranger inscrit dans un autre pays et qui ne confère aucun
droit au Maroc, et ce, conformément au principe de la territorialité du brevet sauf si la
protection a été étendue à un pays autre que celui où ledit brevet a été délivré. Cette
stratégie d’extension territoriale dépend de différents facteurs : entre autres de la capacité
de l’entreprise à supporter les dépenses que requiert l’extension de la protection à
d’autres pays ; et de l’intérêt commercial de l’entreprise, justifié par sa capacité à exploiter
l’invention dans un pays donné, à rechercher un licencié potentiel et à l’existence d’un
marché commercial.

1.2. Inscription
L’inscription du droit sur le brevet constitue le fondement de toute action visant le bénéfice
de la protection particulière conférée par l’action en contrefaçon. Ce privilège est lié à la
disposition du titre de propriété de l’invention ou du certificat d’addition inscrits au registre
national des brevets. Ainsi, l’action en contrefaçon (art. 201), l’action en nullité (art. 85) et
la déchéance des droits (art. 82) exigent l’existence d’un brevet inscrit selon les conditions
définies par la loi n° 17.97.

Confirmant cette assertion, l’article 207 de la même loi dispose que les faits antérieurs
à l’inscription de la délivrance des brevets d’invention, des certificats d’addition, […] ne
donnent ouverture à aucune action découlant de la présente loi. De ce fait, les personnes
concernées par l’invention ou le certificat d’addition ont intérêt à inscrire leur droit afin
de bénéficier des avantages conférés par cette protection particulière. Cette dernière se
distingue de la protection accordée à travers l’action en concurrence déloyale basée sur
les règles générales de la responsabilité découlant d’une faute et à propos de laquelle,
il n’est exigé du demandeur ni d’avoir antérieurement obtenu un titre de propriété de
l’invention ni d’avoir procédé à l’inscription au registre national des brevets. L’action en
concurrence déloyale trouve fondement dans les pratiques déloyales et non pas dans
l’atteinte à un droit.

1.3. Liberté contractuelle


La volonté est une source de l’obligation et peut conduire à la mise en place de règles
déterminées par consentement mutuel en vue de protéger les droits attachés à l’invention.
Les clauses contractuelles sont donc susceptibles de préserver le droit sur l’invention
objet du brevet. Ainsi, à titre d’exemple, lorsque plusieurs inventeurs ont agi de concert

Guide sur le brevet d’invention 119


dans l’élaboration d’une conception déterminée, certains d’entre eux peuvent renoncer
à l’invention au profit des autres - ce qui permet à ces derniers d’obtenir le brevet en
leurs noms personnels - et l’accord qu’ils ont conclu interdit à la partie ayant renoncé de
réclamer ultérieurement la propriété du brevet.

L’accord précité peut également intervenir après l’obtention par les copropriétaires du
brevet. Effectivement, l’article 80, 1er alinéa, de la loi n° 17.97 prescrit que les dispositions
relatives à la copropriété des brevets s’appliquent, et ce, en l’absence de stipulations
contraires. Le salarié peut aussi protéger ses droits de manière efficace par le biais des
conventions collectives ou du contrat de travail si ce dernier contient, comme affirmé par
l’article 18 de la même loi, des stipulations contractuelles plus favorables au salarié.

L’article 230 du DOC proclame le principe général selon lequel les obligations
contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne
peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par
la loi.

L’importance de ces clauses contractuelles transparaît clairement lors de l’étude de l’action


tendant à réclamer la propriété du brevet.

120 Guide sur le brevet d’invention


Section 2 : Les actions en justice
La loi n° 17.97 régit les modalités de la protection du droit lié au brevet. On peut citer,
d’une part, la protection antérieure à l’émission du brevet, qui consiste en la protection
temporaire dans les expositions ; et d’autre part, la protection concomitante ou postérieure
à l’émission du brevet, donnant lieu au recours à différentes actions en justice qui diffèrent
par leur cause - comme c’est le cas de la violation du secret professionnel, du droit de
priorité ou de l’atteinte au titre de propriété.

Avant d’aborder les actions en justice proprement dites, les dispositions de la loi n° 17.97
relatives à la protection temporaire aux expositions seront passées en revue ci-après.

2.1. De la protection temporaire aux expositions


La loi n° 17.97 a mis en place une protection temporaire en vertu de laquelle est conféré
un droit de priorité attaché à l’inscription et à l’acquisition d’un titre de propriété. La durée
de cette protection, fixée à six mois à dater de l’ouverture officielle de l’exposition, est
incorporée au délai de priorité prévu à l’article 7 de la loi n° 17.97, et ce, conformément aux
articles 186 à 188. Cette protection trouve sa base dans les conventions internationales.

La condition essentielle pour jouir de cette protection réside dans le fait de présenter
l’invention dans des expositions internationales officielles ou officiellement reconnues
(art. 26). En outre, il importe de prendre les précautions nécessaires lorsqu’on expose
l’invention, en s’assurant que deux exigences sont respectées :

• l’organisation de l’exposition sur le territoire de l’un des pays de l’Union internationale


pour la protection de la propriété industrielle ;

• la présentation de l’invention pour la première fois dans l’exposition.

2.2. Action en revendication de la propriété du brevet


L’objectif de l’action intentée afin d’obtenir un titre de propriété du droit sur le brevet est
de permettre de restituer ledit titre à son titulaire légal, que ce titre ait trait à la même «
invention » ou qu’il s’agisse d’une « soustraction » de cette dernière, comme dans le cas de
l’exploitation sans autorisation du titulaire.

L’action précitée protège l’inventeur ou ses ayants droit, ou celui qui ne dispose pas d’un
titre de propriété mais bénéficie d’une antériorité de dépôt. Ladite action tend également à
préserver les intérêts du propriétaire d’un brevet antérieur dont les droits sont illégitimement
exercés par un tiers.

Un principe est donc constant : il n’est pas permis à une personne autre que l’inventeur,
sauf dans des cas déterminés tel celui de l’employeur - art. 18(a) de la loi n° 17.97 -, de
requérir l’inscription de l’invention auprès de l’OMPIC. Si toutefois cela se produisait au

Guide sur le brevet d’invention 121


mépris du principe susmentionné, l’article 19, de la même loi, permet à la personne lésée
de revendiquer la propriété du titre délivré soit pour une invention soustraite à l’inventeur
ou à ses ayants droit, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle.

Quant aux règles qui régissent cette action en revendication, elles peuvent être détermi-
nées comme suit :

2.2.1. Les conditions de l’action en revendication de la propriété du brevet résident d’abord


dans l’exigence de l’existence d’une invention. De plus, celle-ci doit avoir fait l’objet d’une
délivrance de brevet. La demande d’inscription de l’invention doit, de son côté, avoir été
attachée à une soustraction du droit d’un tiers et, enfin, cette inscription ne doit avoir
aucun fondement légal ou conventionnel : toute violation des obligations découlant de la
loi ou de la convention met le demandeur en effet le demandeur de l’inscription dans la
situation d’un contrevenant (art. 19 de la loi n° 17.97).

Les conditions de l’action en revendication de la propriété du brevet :


- l’existence d’une invention.
- la délivrance du brevet ;
- la preuve de l’élément de soustraction ;
- la violation de la loi ou du contrat.

2.2.2. La juridiction compétente de cette action est le tribunal de commerce, et ce, en


application des dispositions expresses de l’article 15 de la loi n° 17.97 qui prévoit que seuls
ce type de tribunaux sont compétents pour connaître de tout litige né de l’application de la
présente loi, à l’exception des décisions administratives qui y sont prévues. La même règle
a été réaffirmée par l’article 205 de la même loi qui dispose, en son 2e alinéa, que les
exceptions tirées par le défenseur des questions relatives à la propriété dudit titre [le titre
de propriété industrielle] ne peuvent être soulevées devant le tribunal correctionnel.

2.2.3. La prescription de l’action en revendication de la propriété du brevet d’invention est


fixée par l’article 19 de la loi n° 17.97 à trois ans à compter de la date de l’inscription du titre au
registre national des brevets, et ce, lorsque le demandeur de l’inscription est de bonne foi. En
cas de mauvaise foi au moment de la délivrance ou de l’acquisition du titre, le délai de trois ans
ne commence à courir qu’à compter de la date de l’expiration du titre de propriété du brevet.

Dans la pratique, l’action en revendication constitue, en sus des vertus précédemment


dégagées, un moyen pour écarter la force probante relative du brevet d’invention inscrit.
Pour rappel, ce brevet est délivré, conformément à l’article 47 de la loi n° 17.97, sans
examen préalable et sans garantie de la part de l’OMPIC, ni de la réalité de l’invention, ni
de la fidélité ou de l’exactitude de la description, ni du mérite de l’invention.

122 Guide sur le brevet d’invention


2.3. Action en nullité du brevet

Le brevet d’invention confère à son titulaire un droit d’exploitation exclusive pouvant donner
lieu, sans droit légitime, à une situation de monopole économique ; ce qui est susceptible
de porter atteinte aux droits des tiers et aux règles de la concurrence loyale. L’action en
nullité du brevet peut donc jouer un rôle important dans la protection, et ce, à travers une
action principale – si les conditions inhérentes à cette dernière sont bien entendu satisfaites.
Mais elle peut également constituer un moyen pour contrer l’action en contrefaçon.

L’action en nullité est une action exercée par toute personne ou le ministère public, par
laquelle on demande au tribunal de prononcer l’annulation totale ou partielle du titre
du brevet (art. 85 et 86 de la loi n° 17.97). Cette action tend à sanctionner l’absence des
conditions de validité d’un brevet édictées par l’article 85 précité. Elle revêt une importance
remarquable dans le cadre de cette loi et ce en l’absence de tout examen préalable avant
la délivrance du brevet.

2.3.1. Qui a le droit d’intenter l’action en nullité ?

En vertu des articles 85 et 86 de la loi n° 17.97, la personne admise à requérir du tribunal


la prononciation de la nullité du brevet est celle qui y a intérêt. Il peut donc s’agir de
l’inventeur ou de ses ayants droit, d’une personne revendiquant un droit antérieur sur le
brevet, d’un bénéficiaire d’une licence conventionnelle, obligatoire ou d’office, ou d’un
copropriétaire.

En France, un syndicat ou une association professionnelle peut demander la nullité du


brevet pour autant que cette requête ait pour objectif la préservation de l’intérêt commun
de la profession représentée (Cour d’appel de Paris, 9 mai 1979, Ann. prop. ind. 1981,
319), et pas uniquement la défense des intérêts des concurrents de l’inventeur.

Le ministère public joue un rôle dans le cadre de l’action en nullité du brevet. L’article 86
précité lui octroie effectivement la faculté :

• de se rendre partie intervenante dans toute instance tendant à faire prononcer la
nullité du brevet, et même de pouvoir, en cours d’instance, prendre des réquisitions
pour faire prononcer la nullité absolue du brevet ;

• de se pourvoir directement par action principale pour faire prononcer la nullité.

Enfin, considérant que l’objectif de l’action en nullité du brevet est de faire prononcer la
non-validité du brevet d’invention, et ce, entre le demandeur de la nullité et le défendeur
titulaire du brevet, l’OMPIC n’est pas considéré comme partie, même si sa présence lors
de l’instance est généralement requise pour des raisons de forme.

Guide sur le brevet d’invention 123


2.3.2. Causes de la nullité

L’article 85 de la loi n° 17.97 énumère les cas pouvant donner lieu à la prononciation
de la nullité du brevet, auxquels il convient d’ajouter deux autres éventualités prévues à
l’article 17.6 et ayant trait à la nullité du certificat de prolongation de la durée du brevet
d’invention. Précisons, à ce propos, que ces cas ont été énoncés à titre limitatif, et non
indicatif.

a) Cas prévus par l’article 85 de la loi n° 17.97


Ces cas sont les suivants :

a.1) D élivrance d’un brevet pour une invention qui ne peut légalement en
faire l’objet
À ce sujet, il a déjà été indiqué que le demandeur de brevet supporte les conséquences
de l’inscription, l’OMPIC ne pouvant en effet encourir aucune responsabilité de ce chef
(art. 47).

L’invention qui ne peut être brevetée, comme exposé dans la partie 1 de ce guide, est
celle qui ne fait pas figure de nouveauté, n’implique pas une activité inventive ou n’est
pas susceptible d’application industrielle selon les conditions et exceptions édictées par
les articles 22 à 28.

Parmi les applications jurisprudentielles étrangères de la règle précitée, signalons à


titre d’exemple qu’en France, il a été décidé, que la nouveauté d’une invention ne peut
être ruinée que par une antériorité de toutes pièces qui doit être prise telle quelle, sans
avoir besoin d’être complétée, et son appréciation doit se faire uniquement à partir
des revendications des brevets dont il s’agit. Le Tribunal, après comparaison, constatant
de même que les autres caractéristiques de la revendication 1 sont reprises dans cette
antériorité, qualifiée de « toutes pièces », prononce sa nullité pour défaut de nouveauté
(tribunal de grande instance de Paris, 3e ch., 3e sect., 15 novembre 2006, PIBD
n° 846-III-103).

a.2) Insuffisance de la description détaillée


L’insuffisance de la description détaillée est le cas de la délivrance d’un brevet pour une
invention dont la description ne permet pas de manière suffisante, à l’homme du métier
disposant de plusieurs informations acquises, d’exécuter l’invention.

Le critère retenu par le législateur pour désigner l’homme du métier diffère selon le genre
ou le niveau technique de l’invention, et toutes les fois que l’objet de l’invention touche à
plus d’un domaine de spécialisation, cela requiert plus d’un homme du métier.

Étant donné que l’inventeur est légalement tenu de joindre, à la demande de dépôt du
dossier de brevet, une description qui clarifie le mode de fonctionnement de l’invention
lorsque ce mode est un élément essentiel de l’invention, toute ambiguïté à ce propos est
réputée être une description insuffisante pouvant conduire à l’annulation du brevet.

124 Guide sur le brevet d’invention


Signalons, à titre d’illustration du cas où la description est suffisante, l’affirmation du
tribunal de grande instance de Paris selon laquelle la nullité de la revendication ne
saurait être retenue pour insuffisance de description. En effet, la description de la finalité
de l’élément de conditionnement dont est équipé le produit revendiqué et renvoyant
à la mention comme cela se produisait avec le conditionnement antérieur précité est
suffisamment claire pour renvoyer à l’état de la technique. De même, la revendication
qui renvoie à la notion de globalement rectangulaire est suffisamment précise dans la
mesure où l’homme du métier se reportera aux figures du brevet et comprendra aisément
la caractéristique de la forme revendiquée (tribunal de grande instance de Paris, 3e ch.,
3e sect., 13 décembre 2006, PIBD n° 848 III 206).

a.3) Délivrance d’un brevet d’invention dont l’objet s’étend au-delà de la


demande telle qu’elle a été déposée
C’est le cas de revendications non couvertes par la description de l’invention.

a.4) Délivrance d’un brevet d’invention dont la demande de dépôt n’a pas
défini l’étendue de la protection demandée

La Cour de cassation française a décidé qu’avant de prononcer la nullité, les juges du fond
doivent rechercher la possibilité de la complémentarité des documents produits à l’appui
du dossier de brevet. Elle a ainsi affirmé que pour prononcer la nullité du brevet, la cour
d’appel retient qu’en application de l’article L. 612 du CPI, la description de la revendication
manque de précision et de clarté pour exposer l’invention de façon suffisamment claire
et complète pour que l’homme du métier puisse l’exécuter. En se déterminant ainsi, sans
rechercher si ce dernier peut s’aider de la description et des dessins du brevet pour reproduire
l’invention, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision (Cour de cassation,
ch. com., 20 mars 2007, pourvoi C/2005/12626, PIBD n° 852 III 3).

Les cas précédemment exposés peuvent également servir de base au rejet de l’inscription
du brevet, décision dont la prononciation relève de la compétence de l’OMPIC (art. 41 de
la loi n° 17.97).

b) Cas prévus par l’article 17.3 de la loi n° 17.97


Étant donné que la durée de protection du brevet peut être prolongée et qu‘alors est
délivré un certificat de prolongation de la durée du brevet d’invention, conformément à
l’article 17.3, 3e alinéa, de la loi n° 17.97, les règles relatives à l’annulation du certificat
sont édictées par l’article 17.6, qui fait état de deux cas :

1) lorsque le titulaire du brevet ne s’est pas acquitté des droits exigibles ;

2) lorsque le brevet d’invention auquel il se rapporte est annulé ou limité, de telle sorte
que le produit pour lequel il a été délivré n’est plus protégé par les revendications du
brevet d’invention.

Guide sur le brevet d’invention 125


2.3.3. Effets de la nullité du brevet

Le jugement prononçant la nullité du brevet d’invention conduit à détruire le brevet et à


annuler ses effets juridiques. Il est ainsi considéré comme non avenu, de sorte que les
effets de la nullité ne valent pas uniquement pour l’avenir, mais s’appliquent également
de manière rétroactive, ce qui implique la remise des choses à leur situation antérieure
en consacrant les pouvoirs du titulaire du droit sur le titre de propriété industrielle relatif
à l’invention.

Il convient toutefois de tempérer cette affirmation, puisque les effets de la nullité ne


dépassent pas les limites du droit auquel il a été porté atteinte. Si le motif de nullité n’est
que partiel, c’est-à-dire s’il n’affecte le brevet qu’en partie, la nullité est prononcée sous
la forme d’une limitation correspondante des revendications (art. 85, dernier alinéa, de
la loi n° 17.97).

Le jugement de nullité du brevet d’invention entraîne d’autres effets, dont :

• L’irrecevabilité de toute nouvelle demande de dépôt en vue de l’obtention d’un brevet


pour une invention qui a fait l’objet d’un brevet antérieur déclaré nul (art. 87). Ceci
ne signifie aucunement que le brevet dont l’action en nullité a été rejetée acquiert
une force probante absolue, puisqu’il demeure possible de lui opposer une autre
action en justice telle que l’action en revendication de la propriété.

Dans une espèce qui a été soumise aux juges français, ceux-ci ont décidé que si la nullité
est invoquée comme exception dans le cadre d’une action en contrefaçon, le tribunal
est tenu de surseoir à statuer en attendant que le litige relatif à la validité du brevet soit
tranché (tribunal de grande instance de Paris, 20 mars 1987, PIBD1987 III 311).

• L a fin de la validité du certificat d’addition attaché au brevet qui a été déclaré nul
sauf si les perfectionnements qui en font l’objet constituent une invention (art. 88).

• La relaxe du prévenu qui a été poursuivi pour contrefaçon, mais a pu obtenir un
jugement prononçant la nullité du brevet qui constituait le fondement de l’action en
contrefaçon dirigée à son encontre.

126 Guide sur le brevet d’invention


2.4. Action en contrefaçon
L’importance de la mise en place d’une protection efficace du droit sur le brevet
d’invention participe du fait que la durée de ce droit est brève et n’excède pas 20 ans (sauf
en cas d’application des dispositions des articles 17.1 et 17.2, période pendant laquelle
est incorporée la durée qu’exige la délivrance du brevet et celle requise pour préparer
l’exploitation effective comme l’industrialisation, la production et la distribution.

L’action en contrefaçon représente le meilleur moyen de protection contre les atteintes que
le titulaire du droit sur le brevet pourrait subir, et l’appellation de cette action reflète sa
teneur. La contrefaçon est en effet un fléau concomitant au développement. Aussi, à mesure
que l’invention et la conception évoluent, on assiste à un développement parallèle des
moyens d’exploitation qui vont à l’encontre de la volonté du titulaire du droit. Compte tenu
des effets néfastes et des répercussions désastreuses de la contrefaçon sur les économies
nationales et les échanges internationaux, l’objectif essentiel des conventions conclues à
ce propos est de procurer une protection adéquate et optimale pour la combattre.

Le législateur marocain a accordé à l’inventeur propriétaire du brevet, qui a subi un préjudice


du fait d’une atteinte ayant été portée à son droit, de saisir la juridiction répressive ou
commerciale dans le cadre de la contrefaçon, et ce, en accord avec l’esprit de l’Accord sur les
ADPIC et, surtout, en vertu des clauses de l’Accord de libre-échange avec les États-Unis.

L’action en contrefaçon est étroitement liée à la plupart des droits de la propriété


industrielle - seuls en sont exceptés le nom commercial, les indications géographiques
et les appellations d’origine (art. 1 et 201 de la loi n° 17.97). Par ailleurs, si l’on compare
l’action relative à la marque et celle afférente au brevet, il en ressort que le législateur
a distingué, dans le cadre de la première, entre deux actes incriminés, l’imitation et la
contrefaçon ; en revanche, dans le cadre de la seconde action, c’est à-dire celle relative
au brevet, la loi s’est contentée de sanctionner la contrefaçon.

2.4.1. Conditions de l’action en contrefaçon

a) Conditions générales attachées au droit sur le brevet


La loi n° 17.97 a mis l’accent sur le fait que celui qui intente l’action en contrefaçon doit
impérativement posséder un brevet délivré dont les droits sont maintenus en vigueur et ne
tombent pas sous le coup de la déchéance pour non-acquittement des droits exigibles (art.
82). De plus, l’inscription doit toujours figurer au registre national des brevets ; en effet,
cette dernière atteste que le brevet est toujours valide et permet également de déterminer
la qualité du demandeur ou du plaignant dans le cadre de l’action en contrefaçon, à savoir
s’il s’agit du titulaire du droit lui-même ou de la personne autorisée à exploiter le brevet.
Étant donné que l’action en contrefaçon exige l’inscription du brevet au registre national
des brevets, le titulaire de la demande de brevet ou de la demande de certificat d’addition
- qui se rattache à un brevet principal - profite de la préparation des moyens de preuve
et des décisions judiciaires ordonnant la description ou la saisie (art. 211). Dans ce cas,
l’action en contrefaçon ne pourra être jugée qu’après la délivrance du brevet, ce qui
signifie que la procédure de contrefaçon déjà entamée sera suspendue, et ce, jusqu’à la
délivrance du brevet.

Guide sur le brevet d’invention 127


b) Conditions spéciales de l’action en contrefaçon

b.1) Existence d’un acte de contrefaçon


L’article 201 de la loi n° 17.97 prévoit que constitue une contrefaçon toute atteinte portée
aux droits du propriétaire d’un brevet, d’un certificat d’addition… tels qu’ils sont définis
respectivement aux articles 53, 54 […].

Il y a deux catégories d’actes dans le cadre de la contrefaçon : ceux directement liés à


l’auteur de la contrefaçon, tels que la fabrication, la vente, la détention… et ceux émanant
d’une personne autre que le fabricant, comme dans le cas de l’utilisation ou de l’offre de
vente.

Bien entendu, il n’y a pas de contrefaçon en cas d’autorisation du propriétaire. Quant


aux actes qui constituent une contrefaçon conformément à la loi n° 17.97, il s’agit de ceux
énumérés aux articles 53 et 54.

b.1.1) Actes mentionnés à l’article 53 de la loi n° 17.97


Première catégorie - paragraphe a) :

• la fabrication du produit objet du brevet aux fins de commercialisation, envisagée


pour un produit dont un brevet a été délivré à travers la production ou la reproduction
de la chose objet du brevet, que cela ait été effectué à l’identique ou avec une légère
modification n’affectant nullement les éléments essentiels du brevet ;

• l’offre du produit objet du brevet aux fins de commercialisation ;

• la mise dans le commerce du produit objet du brevet ;

• l’utilisation du produit objet du brevet aux fins de commercialisation ;

• l’importation du produit objet du brevet aux fins de commercialisation ;

• la détention du produit objet du brevet aux fins de commercialisation.

Seconde catégorie - paragraphe b) :

• l’utilisation d’un procédé objet du brevet sur le territoire marocain ;

• l’offre d’utilisation d’un procédé objet du brevet sur le territoire marocain.

Dans ces deux cas, la loi exige que le tiers sache que l’utilisation du procédé est interdite
sans le consentement du propriétaire du brevet ou que les circonstances accompagnant
l’utilisation rendent évident que cette utilisation est prohibée si le consentement du
propriétaire du brevet n’a pas été obtenu.

128 Guide sur le brevet d’invention


Troisième catégorie - paragraphe c) :

• l’offre du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet aux fins de
commercialisation ;

• la mise dans le commerce du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet ;

• l’utilisation du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet aux fins de
commercialisation ;

• l’importation du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet aux fins
de commercialisation ;

• la détention du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet aux fins
de commercialisation.

b.1.2) Actes mentionnés à l’article 54 de la loi n° 17.97


Il s’agit de : « La livraison ou l’offre de livraison, sur le territoire marocain, à une personne
autre que celle habilitée à exploiter l’invention brevetée, des moyens de mise en oeuvre,
sur ce territoire, de cette invention se rapportant à un élément essentiel de celle-ci, lors-
que le tiers sait ou lorsque les circonstances rendent évident que ces moyens sont aptes et
destinés à cette mise en œuvre ».

Certaines conditions doivent donc être remplies pour que l’acte reçoive la qualification de
contrefaçon :

• La livraison ou l’offre de livraison doit s’effectuer sur le territoire marocain.

• Les moyens que l’on a l’intention de livrer doivent être affectés à la mise en œuvre
de l’invention brevetée.

• Les moyens que l’on a l’intention de livrer doivent être attachés à un élément essentiel
de l’invention.

• La livraison ou l’offre de livraison doit être faite à une personne autre que celle
habilitée à exploiter l’invention brevetée sur le territoire marocain. Signalons à
ce propos que ne sont pas considérées comme personnes habilitées à exploiter
l’invention, au sens du premier alinéa ci-dessus [article 54], celles qui accomplissent
les actes visés à l’article 55, c’est-à-dire les actes auxquels ne s’étendent pas les
droits conférés par le brevet.

• Les moyens de mise en œuvre ne doivent pas être des produits qui se trouvent
couramment dans le commerce, sauf si le tiers incite la personne à qui il livre à
commettre des actes interdits par l’article 53 (art. 54, 2e alinéa).

• Le défaut de consentement du propriétaire du brevet à effectuer l’acte.

Guide sur le brevet d’invention 129


b.2) Limites du droit du breveté

Pour rappel, certains actes qui rentrent dans le cadre de ce qui est considéré comme
contrefaçon (du moins en tant qu’actes) ont fait l’objet d’une exception de la part de la loi
n° 17.97 et ne peuvent donc donner lieu à une action en contrefaçon. L’article 55 dispose
en effet que les droits conférés par le brevet ne s’étendent pas :

a) aux actes accomplis dans un cadre privé et à des fins non commerciales ;

b) aux actes accomplis à titre expérimental qui portent sur l’objet de l’invention brevetée ;

c) à la préparation de médicaments faite extemporanément et par unité dans les officines


de pharmacie, sur ordonnance médicale, ni aux actes concernant les médicaments
ainsi préparés ;

d) aux actes concernant le produit couvert par ce brevet, accomplis sur le territoire
marocain, après que ce produit ait été mis dans le commerce au Maroc par le
propriétaire du brevet ou avec son consentement exprès ;

e) à l’utilisation d’objets brevetés à bord d’aéronefs, de véhicules terrestres ou de


navires de pays membres de l’Union internationale pour la protection de la propriété
industrielle qui pénètrent temporairement ou accidentellement dans l’espace aérien,
sur le territoire ou dans les eaux territoriales du Maroc ;

f) aux actes effectués par toute personne qui, de bonne foi, à la date de dépôt de la demande
ou, lorsqu’une priorité est revendiquée, à la date de priorité de la demande sur la base de
laquelle le brevet est délivré sur le territoire du Maroc, utilisait l’invention ou faisait des
préparatifs effectifs et sérieux pour l’utiliser, dans la mesure où ces actes ne diffèrent pas,
dans leur nature ou leur finalité, de l’utilisation antérieure effective ou envisagée. Le droit
de l’utilisateur antérieur ne peut être transféré qu’avec l’entreprise à laquelle il est attaché.

Il convient d’observer que, si le législateur a réprimé l’acte de livraison ainsi que l’offre de
livraison, il n’a pas jugé opportun d’adopter la même position en ce qui a trait à l’acceptation
de la livraison ou de l’offre de livraison, ce qui signifie que seule la partie qui livre ou offre de
livrer est passible de sanctions pénales. Toutefois, cela ne signifie pas que la responsabilité
civile sera également écartée, puisqu’il demeure possible d’intenter une action en concurrence
déloyale si les conditions inhérentes à cette dernière sont bien évidemment remplies.

b.3) Preuve de la contrefaçon

b.3.1) Règles procédurales


L’action en contrefaçon emprunte deux aspects : pénal et civil ; et chacun d’entre eux est
soumis à des règles de compétence qui lui sont propres.
La protection du droit sur le brevet d’invention possède une caractéristique dans le domaine
probatoire, qui réside dans le fait que tous les moyens de preuve sont admis pour démontrer
la contrefaçon. Toutefois, le meilleur moyen auquel les titulaires de droits ont recours consiste
dans la procédure prévue à l’article 211 de la loi n° 17.97, qui formule le principe, puis la

130 Guide sur le brevet d’invention


voie juridique spéciale à suivre en disposant que le titulaire [...] a la possibilité de faire la
preuve, par tous moyens, de la contrefaçon dont il se prétend victime.
Il est par ailleurs en droit de faire procéder, sur ordonnance du président du tribunal du lieu
de la contrefaçon, par un huissier de justice ou par un greffier, à la description détaillée,
avec ou sans saisie, des produits ou procédés argués de contrefaçon….
Si l’action portant sur le fond est considérée comme le cadre adéquat pour trancher le litige
dans tous ses contours, la longueur qui caractérise habituellement la procédure devant
les juges du fond a déterminé le législateur à accorder au titulaire du droit la possibilité
d’obtenir des décisions qui mettent fin, de façon temporaire, au préjudice que subit son droit
sur le brevet ou le certificat d’addition. Il s’agit en l’occurrence d’une procédure rapide dont
l’objectif est de suspendre les actes argués de contrefaçon.

b.3.2) Action en contrefaçon et moyens en défense


Le meilleur moyen pour défendre le droit sur le brevet est une préparation minutieuse
de la procédure judiciaire que l’on entend mettre en œuvre. Dans le cadre de l’action en
contrefaçon, il convient de s’assurer que l’inscription du brevet a été effectuée en bonne et
due forme et que ce dernier remplit toutes les conditions pour bénéficier de la protection,
auquel cas l’adversaire ne pourra pas faire échec à l’action.

Cependant, il peut arriver que l’action en contrefaçon revête un caractère abusif ou soit
infondée. Il sera dès lors aisé, pour le défendeur, de la repousser en demandant son rejet
et en exposant les raisons sur lesquelles il se base.

Par ailleurs, il a déjà été fait état que, si les conditions de l’action en annulation sont
remplies, il est possible de la soulever comme exception dans le cadre de l’action en
contrefaçon, en particulier lorsque l’invention ne fait pas figure de nouveauté ou qu’elle
n’implique pas une activité inventive, ou encore quand la description s’avère insuffisante.
Si l’une de ces éventualités venait à se produire, cela entraînerait la déchéance du droit
de poursuivre la procédure de l’action en contrefaçon, ce qui donne lieu à la relaxe du
prévenu qui a été poursuivi devant la juridiction répressive ou au rejet de la demande
lorsque celle-ci est soumise à la juridiction commerciale.

Il est également possible de prouver qu’il n’y a pas de concordance entre le produit fabriqué
ou le procédé utilisé et ce qui a fait l’objet du brevet. En effet, la preuve de l’existence de
différences entre les demandes de brevet conduit à écarter l’action en contrefaçon, et il
incombe à la partie qui se prévaut de cette différence de prouver ses allégations.

Il convient de signaler que toute modification par le biais de la suppression ou de l’addition n’a
aucun effet sur la qualification de l’acte de contrefaçon si ladite modification est mineure ou,
en d’autres termes, lorsqu’elle ne rentre pas dans le cadre du perfectionnement de l’invention
au point qui permet d’acquérir un certificat d’addition ou une invention autonome.

b.4) Protection du brevet d’invention et mesures aux frontières


Les articles de la loi n° 17.97, qui traitent des brevets d’invention, ne contiennent pas
de dispositions spéciales – similaires à celles qui concernent les marques (art. 176.1) -
permettant de prendre des mesures aux frontières.

Guide sur le brevet d’invention 131


Il est possible de déduire de l’absence de disposition légale relative à la protection aux
frontières qu’il existe des obstacles pratiques au fait d’attribuer à l’administration des
douanes le pouvoir de suspendre la mise en libre circulation aux frontières, notamment au
regard de la difficulté à déceler la contrefaçon, opération qui exige que les objets argués de
contrefaçon fassent l’objet d’une expertise dont les formes et spécialités sont nombreuses.

L’acte de contrefaçon est présumé avoir été accompli dès que les objets contrefaits
franchissent les frontières, à condition qu’une atteinte soit portée à l’encontre d’un droit
protégé sur le territoire marocain, et il n’est, dès lors, nul besoin de parler de mesures aux
frontières.

b.5) Élément intentionnel dans la contrefaçon


En disposant, en son article 213, que toute atteinte portée sciemment aux droits
du propriétaire d’un brevet [...] constitue une contrefaçon, la loi n° 17.97 a posé un
principe général qui vaut pour tous les actes de contrefaçon portés devant les juridictions
répressives.

Pour qu’il en soit ainsi, le législateur a exigé que l’intention générale soit caractérisée,
mais également une intention spéciale, tel que cela ressort de l’article 201 qui dispose
que l’offre, la mise dans le commerce, la reproduction, l’utilisation, la détention en vue
de l’utilisation ou la mise dans le commerce d’un produit contrefait, lorsque ces faits
sont commis par une autre personne que le fabricant du produit contrefait, n’engage la
responsabilité de leur auteur que si les faits ont été commis en connaissance de cause. La
distinction opérée entre les deux cas précités puise en effet son fondement du fait que le
fabricant est présumé avoir connaissance de la contrefaçon, puisque c’est lui-même qui
a utilisé ce qui revient de droit au tiers pour se procurer la production, puis la présenter
comme offre au public.

La qualité de salarié joue également un rôle important pour retenir sa responsabilité :


effectivement, il est présumé connaître les secrets de l’invention de façon naturelle, vu qu’il
est continuellement en contact avec l’activité de l’entreprise à laquelle il est rattaché.

b.6) Action publique conditionnée par le dépôt d’une plainte


Le principe est que l’action publique est l’un des attributs du ministère public qui juge de
l’opportunité des poursuites, sauf quelques exceptions limitées. Toutefois, l’article 205
de la loi n° 17.97 met cette faculté entre les mains de la personne ayant un intérêt à
déclencher l’action précitée, en prévoyant tout de même une exception limitée. L’article
suscité distingue donc deux cas :

• le premier est relatif à la restriction des pouvoirs du ministère public dans le
déclenchement de la poursuite, en ne lui permettant d’exercer ce pouvoir que sur la
plainte de la partie lésée ;

• le second est celui où le ministère public peut, d’office, déclencher l’action publique
si la publication ou la mise en œuvre de l’invention est susceptible de porter atteinte
à l’ordre public ou aux bonnes mœurs – art. 205 et 24(a).

132 Guide sur le brevet d’invention


En revanche, la loi n° 17.97 ne fait pas état de l’éventualité du retrait de la plainte par
la partie qui l’a déposée et de l’effet dudit retrait sur le déroulement de la procédure de
l’action publique.

Pour rappel, l’article 4 du Code de procédure pénale dispose que l’action publique s’éteint
par transaction lorsque la loi en dispose expressément.
Il en est de même en cas de retrait de plainte, lorsque celle-ci est une condition nécessaire
de la poursuite, sauf dérogation résultant des lois.

À titre comparatif, signalons qu’en ce qui a trait à la marque, le pouvoir du ministère public
d’exercer l’action publique n’est pas conditionné par l’existence d’une plainte déposée par
la partie lésée (art. 205). Effectivement, en vertu de l’article 227.1, en cas d’atteinte portée
aux droits du propriétaire d’un certificat d’enregistrement de la marque, des poursuites
peuvent être ordonnées d’office par le ministère public, et ce, sans nul besoin d’une plainte
portée par une partie privée ou un détenteur de droits.

b.7) Incidence de l’action civile sur l’action pénale


L’article 205, 2e alinéa, de la loi n° 17.97 dispose que le tribunal correctionnel ne peut
statuer qu’après que la juridiction saisie de l’action en constatation de la réalité du
dommage ait prononcé un jugement passé en force de chose jugée.

Le souci du législateur est d’éviter que des jugements contradictoires ne soient rendus par
des juridictions qui se basent sur des moyens différents pour statuer sur les litiges relatifs
au brevet, plus spécialement à la propriété de ce dernier.

Cette disposition est basée sur la règle selon laquelle la procédure répressive suit son
cours normal en ce qui a trait à l’enquête, à la poursuite et au jugement, pour autant que
le prévenu ne formule pas de demande de sursis à statuer fondée sur l’existence d’une
action pendante devant le tribunal de commerce (art. 15).

La juridiction pénale n’est donc pas compétente, en vertu du même article, pour se
prononcer sur la nullité du titre de propriété du brevet ou sur la propriété dudit titre, car
le prévenu n’est pas admis à lui soumettre pareilles demandes ; il est donc tenu d’intenter
l’action qu’il considère comme susceptible de préserver ses intérêts (après s’être assuré
que les conditions y relatives sont bien remplies), et ce, devant le tribunal de commerce,
ou formuler ses requêtes dans le cadre d’une action reconventionnelle, ou encore en les
invoquant à titre d’exceptions ou de moyens de défense pour faire échec à l’action civile
en contrefaçon.

b.8) Qualité et intérêt dans le cadre de l’action en contrefaçon


Pour être admis à intenter une action en contrefaçon, le demandeur doit disposer de la
qualité pour ce faire et, de surcroît, y avoir intérêt.

Guide sur le brevet d’invention 133


b.8.1) Qualité
La personne qui dépose une plainte auprès du ministère public doit avoir la qualité
pour ce faire. Elle constitue également une condition pour la recevabilité des actions
civiles exercées à titre principal par le propriétaire du brevet d’invention ou du certificat
d’addition.

Quant au non-propriétaire, sa qualité dépend, d’une part, du type de la licence


d’exploitation dont il s’agit, et exige, d’autre part, que des conditions suspensives soient
remplies :

• Concernant le type de licence, la loi n° 17.97 n’a pas permis au bénéficiaire d’une
exploitation non exclusive d’intenter l’action en contrefaçon. En revanche, la qualité
pour enrôler une telle demande en justice a été attribuée, en vertu des articles 202
et 210, au :

- bénéficiaire d’un droit exclusif d’exploitation du brevet ou du certificat d’addition


(art. 202) ;

- bénéficiaire d’une licence obligatoire (art. 60, 66 et 210) ;

- bénéficiaire d’une licence d’office (art. 69, 74 et 210).

Certaines exigences doivent être satisfaites pour que les bénéficiaires précités jouissent
de la qualité :

• Le propriétaire du brevet ne doit pas avoir exercé l’action en contrefaçon, car si tel était
le cas, l’objectif consistant dans la protection du droit sur le brevet serait déjà réalisé.

• Le bénéficiaire de la licence doit envoyer au propriétaire du brevet une mise en


demeure d’intenter l’action en contrefaçon.

• Le propriétaire du brevet ne doit pas avoir exercé l’action, et ce, en dépit de la mise
en demeure précitée.

• S’agissant seulement du bénéficiaire de la licence exclusive d’exploitation, le contrat


ne doit pas comporter de clause lui interdisant d’intenter cette action.

S’il est permis au propriétaire du brevet d’intervenir à l’instance en contrefaçon engagée


par le bénéficiaire d’une licence exclusive d’exploitation, l’article 202 prévoit le droit
des licenciés à intervenir volontairement à l’instance en contrefaçon engagée par le
propriétaire, sauf que dans ce cas, le champ de cette intervention doit se limiter à la seule
demande d’obtention de la réparation du préjudice qui est propre au licencié.

Si le propriétaire néglige de poursuivre l’action après l’avoir intentée, il semble


apparemment que l’intervention du licencié autorisé doive être précédée de la mise en
demeure dont il a été précédemment fait état.

134 Guide sur le brevet d’invention


b.8.2) Intérêt
Il est possible d’invoquer et de se prévaloir du titre de propriété de l’invention à compter
de la date de dépôt du dossier du brevet en sa qualité de preuve du début de la priorité
qui empêche tout dépôt ultérieur au profit d’un tiers. Le titulaire du droit peut de ce fait
défendre son titre de propriété dès l’inscription au registre national des brevets (art. 46
de la loi n° 17.97).

Comme cela a été précédemment relevé, il est possible de soulever une exception
d’irrecevabilité de la prétention du propriétaire du titre du brevet pour plusieurs motifs,
dont la déchéance du droit à cause du non-acquittement des droits exigibles ou la nullité
du brevet, puisque l’OMPIC procède à l’inscription sans contrôle antérieur concernant
l’objet.

2.4.2. Procédures et effets de l’action en contrefaçon

Les procédures relatives à l’action en contrefaçon diffèrent selon le type d’action, civile
ou pénale, ce qui implique l’application des dispositions appropriées figurant au Code
de procédure pénale ou au Code de procédure civile (CPC) ou à la loi instituant des
juridictions de commerce ou à la loi n° 17.97. Dans le cadre de ce guide, deux points
essentiels vont maintenant être abordés, qui concernent la compétence et la prescription.

a) Compétence
L’organisation judiciaire du Royaume connaît une diversité des juridictions compétentes,
que ce soit sur un plan horizontal au regard de la spécialisation – juridictions telles que les
tribunaux administratifs, les tribunaux de commerce et les tribunaux de première instance
- ou sur un plan vertical pour accorder des degrés de juridictions permettant de réviser
les jugements - juridictions réparties entre les tribunaux de première instance, les cours
d’appel et la Cour Suprême.

Reliant les principes précités à la contrefaçon, il convient de distinguer l’action publique de


l’action civile en contrefaçon, qui ne lui est pas accessoire. En effet, la compétence en matière
d’action pénale en contrefaçon revient aux tribunaux de première instance, tandis que les
juridictions de commerce sont compétentes pour statuer sur l’action civile en contrefaçon.

a.1) Tribunal de commerce


L’action civile en contrefaçon est une action principale, car elle constitue le cadre du litige
portant sur le droit à l’invention et au brevet dont elle a fait l’objet, et en même temps,
tient l’action pénale en l’état.

L’article 15 de la loi n° 17.97 affirme que les tribunaux de commerce sont seuls compétents
pour connaître de tout litige né de l’application de la présente loi, à l’exception des
décisions administratives qui y sont prévues.

D’autre part, en ce qui concerne la compétence territoriale, en vertu de l’article 204 :


Est compétent le tribunal du lieu du domicile réel ou élu du défendeur, celui du lieu où

Guide sur le brevet d’invention 135


est établi son mandataire ou le tribunal du lieu où est établi l’organisme chargé de la
propriété industrielle si le défendeur est domicilié à l’étranger.
Dans ce dernier cas, compte tenu du fait que le siège de l’OMPIC est situé à Casablanca,
la compétence appartient au tribunal de commerce de Casablanca.

a.2) Recours exercé à l’encontre des décisions administratives de l’OMPIC


Il est possible de former des recours à l’encontre des décisions administratives rendues
par l’OMPIC si ces décisions revêtent effectivement cet aspect et que les conditions
du recours en annulation sont remplies conformément à la loi n° 41 90 instituant des
tribunaux administratifs. Ainsi, l’article 15 de la loi n° 17.97 dispose que les décisions
administratives prévues dans cette loi ne rentrent pas dans le champ de la compétence
des juridictions de commerce ni dans celui des tribunaux de première instance - statuant
en matière répressive.

Le fait de présenter un recours devant le tribunal administratif, puis d’obtenir un jugement


d’annulation de la décision administrative (qui affecte la qualité du titulaire du brevet ou
du certificat d’addition ou l’étendue et la validité du brevet) est susceptible de modifier les
conditions et l’issue de l’action en contrefaçon.

Quant aux décisions rendues par l’OMPIC, elles sont nombreuses et ne peuvent être
délimitées, que ce soit au niveau de leur nature ou de leur quantité, mais il est tout de
même possible d’en fournir certains exemples :

La loi n° 17.97 fait état d’une compétence spéciale attribuée au tribunal administratif de
Rabat. Dans le dernier alinéa de l’article 42, elle prescrit les règles relatives aux dossiers de
brevet ayant un rapport avec les besoins de la défense nationale, disposant que tout litige
en matière d’indemnisation est soumis au tribunal administratif de Rabat. Dans la même
ligne, le dernier alinéa de l’article 75 affirme également que, dans le cas des licences
d’office, à défaut d’accord amiable entre le propriétaire du brevet et l’administration
intéressée, le montant des redevances est fixé par le tribunal administratif de Rabat.

a.3) Recours devant l’OMPIC


L’article 84, 4e alinéa, fait état d’un cas spécial où il est possible de présenter un recours
devant l’OMPIC, ce qui constitue une exception aux règles précédemment exposées. Ledit
cas concerne donc la possibilité de former un recours en vue d’être restauré dans les droits
sur le brevet délivré après en avoir été déchu. Ce recours est présenté par le titulaire de la
demande de brevet, et il y est fait droit si les conditions prescrites par l’article précité ont
bien été remplies.

b) Prescription
La prescription est l’expression d’un principe juridique qui fixe des délais au-delà desquels le ti-
tulaire du droit est présumé ne plus avoir le souhait de protéger ou de revendiquer son droit.

Dans le but d’unifier les délais de prescription, la loi n° 17.97 n’a pas prévu de différence de
régime entre la prescription de l’action civile et celle de l’action pénale en ce qui a trait à la
contrefaçon de brevet. L’article 205, alinéa 3, dispose ainsi que les actions civiles et pénales

136 Guide sur le brevet d’invention


prévues par le présent titre sont prescrites par trois ans à compter des faits qui en sont la cause.
En vertu de l’article 205, 4e alinéa, l’introduction de l’action civile en contrefaçon suspend
la prescription de l’action pénale.

Observons également que la loi n° 17.97 se contente de prescrire un délai de prescription


concernant seulement l’action en contrefaçon et n’y a fait aucune référence en ce qui a
trait aux autres actions comme celles en nullité, tandis que, concernant la marque, le
législateur a pris le soin de distinguer la prescription des deux actions précitées.

Le tableau ci-après met en lumière la comparaison entre le brevet et la marque à ce sujet :


Tableau n° 3 : Comparaison entre les durées
de prescription entre le brevet et la marque

Le brevet Durée de la
Type de l’action La marque
d’invention prescription
L’action pénale en contrefaçon Articles 201 et 3 ans Articles 201 et 226
L’action civile en contrefaçon 213 3 ans Articles 205 et 226

L’action en nullité - 5 ans 161-162 Articles

2.4.3. Procédures en référé pour empêcher la contrefaçon

La loi n° 17.97 donne la possibilité d’obtenir des ordonnances en référé lorsqu’une


atteinte est portée au droit au brevet ou au certificat d’addition, la justification en est que
si l’on laisse subsister cette atteinte en attendant que le juge statue sur le fond, cela va
conduire à générer un préjudice qui s’avérera irrémédiable. Aussi, la victime des actes de
contrefaçon, dans le domaine du brevet, peut, sous quelques conditions, saisir le juge des
référés et obtenir de sa part une ordonnance visant à suspendre provisoirement les actes
qui relèvent, selon les affirmations du demandeur, de la contrefaçon, ou une ordonnance
de saisie des objets contrefaits ou certaines mesures préventives.

Cette procédure spéciale, concomitante à la contrefaçon, ne peut être mise en œuvre


qu’en ce qui a trait aux droits protégés par l’action en contrefaçon en vertu du 1er alinéa
de l’article 201 de la loi n° 17.97 qui affirme que toute atteinte portée aux droits du
propriétaire d’un brevet, d’un certificat d’addition, d’un certificat de schéma de configuration
(topographie) de circuits intégrés, d’un certificat d’enregistrement de dessin ou modèle
industriel ou d’un certificat d’enregistrement de marque de fabrique, de commerce ou de
service […]. En revanche, ne rentrent pas dans le champ de cette procédure les autres droits
de propriété industrielle prévus à l’article premier de la même loi qui dispose que, au sens de
la présente loi, la protection de la propriété industrielle a pour objet […] le nom commercial,
les indications de provenance et les appellations d’origine […].

Guide sur le brevet d’invention 137


La loi instituant des juridictions de commerce confère au président du tribunal de
commerce, outre les attributions qui lui sont dévolues en matière commerciale, celles
dévolues au président du tribunal de première instance par le CPC (art. 20).

Concernant ses pouvoirs en matière de référé, l’article 21 dispose que le président du


tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en
référé toutes les mesures qui ne font l’objet d’aucune contestation sérieuse.
Lorsque le litige est soumis à la cour d’appel de commerce, lesdites attributions sont
exercées par son premier président.

Le président du tribunal de commerce peut, dans les mêmes limites et même en cas de
contestation sérieuse, ordonner toutes les mesures conservatoires ou la remise en état, soit
pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Voir également pour comparaison les articles 148 et 149 du CPC.

Parmi les caractéristiques de ces mesures la possibilité d’en présenter la requête avant
d’intenter l’action en contrefaçon ou pendant que l’instance est pendante.

a) Interdiction provisoire
La procédure d’interdiction provisoire peut emprunter deux formes. Chacune prend en
considération l’intérêt de la partie qui a manifestement le plus besoin de protection ; il
s’agit en l’occurrence de :

• L’interdiction provisoire de poursuivre les actes argués de contrefaçon, et ce, à la


suite d’une demande à laquelle il est fait droit, émanant du propriétaire du titre de
propriété industrielle ou du licencié ;

• L’autorisation de poursuivre les actes argués de contrefaçon mais en subordonnant


cette décision à la constitution, par celui contre lequel est alléguée la contrefaçon,
de garanties destinées à assurer l’indemnisation du propriétaire du titre de propriété
industrielle ou du licencié. Cette autorisation va dans le sens de la position du
défendeur contre lequel l’action en contrefaçon est intentée et est accordée lorsque
le juge des référés déduit des faits de l’espèce que la position du défendeur pourrait
prévaloir, l’intérêt de ce dernier méritant de ce fait d’être provisoirement protégée.

Toutefois, il n’est fait droit à la demande d’interdiction provisoire que si deux conditions
essentielles sont remplies :

• L’action en contrefaçon intentée au fond doit apparaître sérieuse.

• L’action au fond doit avoir été engagée dans un délai maximum de 30 jours à compter
du jour où le propriétaire a eu connaissance des faits sur lesquels elle est fondée.

Dans tous les cas, et pour éviter tout abus dans la mise en œuvre de ces procédures,
le juge peut ordonner au demandeur de constituer des garanties destinées à assurer
l’indemnisation éventuelle du préjudice subi par le défendeur si l’action en contrefaçon est
ultérieurement jugée non fondée.

138 Guide sur le brevet d’invention


b) Description détaillée
La description détaillée constitue, dans la pratique, l’une des plus importantes procédures
mises en œuvre par la partie victime d’une atteinte portée à son droit au brevet d’invention
ou au certificat d’addition. En effet, elle permet, avant même que l’auteur de la contrefaçon
ne détruise ou ne dissimule le produit contrefait, de procurer une preuve de l’existence
d’une concordance entre, d’une part, les éléments constituants d’un produit argué de
contrefaçon et, d’autre part, les éléments substantiels qui forment le droit qui a subi une
atteinte soudaine.

La raison de la mise en place et du recours à cette procédure réside dans le fait que le
demandeur, sur lequel pèse la charge de prouver la contrefaçon, peut éprouver plusieurs
difficultés pour y arriver au regard des moyens de preuve édictés par les règles générales.
La loi n° 17.97 admet cette possibilité de procéder à la « description détaillée », et ce, par
le biais d’une ordonnance rendue par le président du tribunal selon les conditions prévues
aux articles 202 et 211.

Le droit de mettre en œuvre cette procédure appartient à celui qui a le droit d’intenter
l’action en contrefaçon ; il doit présenter une demande au président du tribunal du lieu
de la contrefaçon dans le cadre d’une procédure non contradictoire (art. 211). Après que
l’ordonnance ait été rendue à la suite de la requête tendant à procéder à la description
détaillée des produits ou procédés prétendus contrefaits, un huissier de justice ou un
greffier dresse un procès-verbal qui contient ses constatations, de même que le fait qu’il
a obtenu des échantillons devant faire l’objet de constat et de comparaison si le tribunal
en décide ainsi.

Compte tenu de l’aspect souvent technique des opérations qu’il y a lieu d’effectuer, il peut
être procédé à la description détaillée avec l’assistance d’un expert qualifié. Quant à la
constatation visant à établir l’origine, la consistance et l’étendue de la contrefaçon, elle est
autorisée par le président du tribunal, et seul le greffier, assisté d’un expert qualifié, a le
pouvoir d’y procéder, et ce, à l’exclusion de l’huissier de justice (art. 211, 4e alinéa).

La jurisprudence de la Cour Suprême est constante à considérer que la description


détaillée, accompagnée ou non de prélèvement d’échantillons, n’est pas une formalité
obligatoire devant avoir lieu avant d’intenter l’action en contrefaçon ; elle n’est
également pas le seul moyen admis pour prouver la contrefaçon, en ce sens que si
une autre preuve permet d’établir cette dernière, la nullité du procès-verbal relatif à la
description ne produit aucun effet (arrêt de la Cour Suprême n° 892, 30 mars 1988,
dossier 4/8/86, Revue de la jurisprudence de la Cour Suprême n° 42/43).

Pour que le procès-verbal contenant la prescription détaillée et établie par l’huissier de


justice ou le greffier conserve sa valeur juridique, le requérant de cette mesure doit, en
vertu du dernier alinéa de l’article 211, s’être pourvu devant le tribunal de commerce en
sa qualité de juridiction de fond, et ce, dans le délai maximum de 30 jours. À défaut, la
description détaillée, avec ou sans saisie, est nulle de plein droit sans préjudice d’éventuels
dommages-intérêts. L’article précité a par ailleurs précisé que le délai de 30 jours
commence à courir à compter du jour de l’exécution de l’ordonnance, peu importe donc
la date à laquelle le procès-verbal relatif à la description a été dressé.

Guide sur le brevet d’invention 139


Au cas où les prescriptions précitées ne sont pas respectées, la description détaillée est
réputée nulle de plein droit sans que cela entraîne toutefois la nullité de l’action intentée
au fond ou les formalités y afférentes, le demandeur disposant en effet de la faculté de
prouver ses allégations par tout autre moyen de preuve admis par la loi.

c) Saisie
L’article 211 de la loi n° 17-97 fait état de la possibilité que l’ordonnance relative à la
description soit accompagnée de la saisie, cette dernière sera dès lors effectuée en
parallèle avec la description ou le constat. La procédure qui mène à ordonner la saisie,
ainsi que son exécution et son issue, est soumise aux mêmes formalités que celles exposées
dans le point b) ci-dessus.

Il ne faut pas confondre la saisie descriptive des produits ou procédés prétendus contrefaits
dont il est question ici, avec celle de l’article 76 engagée par les créanciers du breveté et
portant sur le brevet lui-même en vue de le mettre en vente.

2.4.4. Sanctions prévues pour la contrefaçon

L’action qui a été choisie pour la protection du droit au brevet détermine la sanction encourue.
Cette dernière puise son assise textuelle dans les dispositions des articles 201 et 210 de la loi
n° 17-97 lorsqu’on est en présence d’une action en contrefaçon introduite devant le tribunal
de commerce. En revanche, la sanction répressive est édictée par les articles 213 et suivants.

Observons, par ailleurs, que les deux actions se basent sur les actes énumérés aux articles
53 et 54.

a) Peines répressives
En application du principe qu’il n’y a ni crime ni peine sans texte, l’acte incriminé, de même
que la peine répressive, ne sauraient faire l’objet d’interprétation extensive. Il faut donc s’en
tenir, en ce qui a trait aux délits de contrefaçon, à ce qui a été édicté par la loi n° 17.97.

L’article 3 du Code pénal dispose que nul ne peut être condamné pour un fait qui n’est
pas expressément prévu comme infraction par la loi, ni puni de peines que la loi n’a pas
édictées.

a.1) Délimitation des peines encourues par le contrefacteur


L’article 213 de la loi n° 17.97 énonce les peines prévues pour l’acte de contrefaçon.
Concernant les peines principales, il s’agit :

• d’une peine d’emprisonnement de deux à six mois ;

• d’une amende de 50 000 à 500 000 dirhams ;

• de l’une de ces deux peines seulement.

140 Guide sur le brevet d’invention


a.2) Délimitation des peines encourues par les personnes autres que le
contrefacteur
L’incrimination ne se limite pas uniquement au contrefacteur mais s’étend également aux
personnes énumérées à l’article 214 de la loi n° 17.97, qui encourent les mêmes peines
que les contrefacteurs sans préjudice des peines édictées par des lois spéciales. Il s’agit en
l’occurrence des personnes qui ont sciemment :

• recelé les produits prétendus contrefaits ;

• exposé les produits prétendus contrefaits ;

• mis en vente les produits prétendus contrefaits ;

• vendu les produits prétendus contrefaits ;

• introduit les produits prétendus contrefaits ;

• exporté les produits prétendus contrefaits ;

• apporté une aide à l’auteur des infractions visées ci-dessus.

L’incrimination comprend également les actes énumérés à l’article 216 et concerne ceux
qui ont donné tous renseignements, indications ou descriptions quelconques concernant
des brevets d’invention ou des certificats d’addition se rattachant à un brevet principal
[...] dont la demande a été déposée par eux ou par autrui, mais qui ne sont pas encore
délivrés.

Quant aux méthodes qui constituent la base de ces actes, ce sont :

• soit les discours ou les conférences dans les lieux ou réunions publics ;

• soit les écrits, les imprimés vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans les
lieux ou réunions publics ;

• soit les placards ou affiches exposés au regard du public.

Par ailleurs, l’article 217 fait état d’autres actes, à savoir :

• l’infraction d’une des interdictions prévues à l’article 42, punie d’une amende de
100 000 à 500 000 dirhams.

• une peine d’emprisonnement, d’un à cinq ans, pouvant en outre être prononcée si
la violation a porté préjudice à la défense nationale.

Guide sur le brevet d’invention 141


b) Aggravation des peines

b.1) Cas de récidive


La récidive révèle l’intention malicieuse consistant dans le fait de vouloir nuire au droit du
tiers sur le titre de propriété, ce qui exige que la sanction édictée à l’encontre de l’auteur
de cet acte soit à la hauteur de son intention. Le législateur édicte généralement dans ce
cas une peine aggravée, tel qu’il ressort des articles 213 et 216 de la loi n° 17-97 à propos
du cas de la contrefaçon et des délits y relatifs. Ainsi :

• Les peines prévues à l’article 213 sont portées au double.

• En plus de l’amende édictée par l’article 216, une peine de trois mois à deux ans est
également prononcée.

b.2) Cas du salarié


L’article 215 de la loi n° 17.97 dispose que si les actes de contrefaçon sont commis par un
salarié ayant travaillé dans les ateliers ou dans l’établissement du breveté, la peine est plus
grave que celle encourue par le contrefacteur non salarié. De ce fait, les peines prévues
aux articles 213 et 214 […] sont portées à un emprisonnement de six mois à deux ans et à
une amende de 100 000 à 500 000 dirhams ou à l’une de ces deux peines seulement.

Par ailleurs, si dans la commission de l’acte de contrefaçon, le salarié s’est associé au


contrefacteur après lui avoir donné connaissance des procédés décrits au brevet, il
encourt les mêmes peines précitées, sachant qu’il peut être poursuivi conformément aux
dispositions de l’article 447 du Code pénal.


c) Peines additionnelles et complémentaires
• La destruction des objets reconnus contrefaits, qui sont la propriété du contrefacteur
(art. 213 de la loi n° 17-97).

• La destruction des dispositifs ou moyens spécialement destinés à la réalisation de la


contrefaçon (art. 213).

Le tribunal statuant en matière répressive n’a nul besoin qu’une demande de destruction lui
soit présentée pour qu’il l’ordonne, car cela rentre d’office dans le champ de sa compétence,
et ce, contrairement à l’action civile en contrefaçon qui ne peut donner lieu à un jugement
ordonnant la confiscation que si la partie lésée en formule la demande (art. 212).

Signalons enfin, l’existence de peines complémentaires communes aux deux actions -


civile et pénale – en contrefaçon qui peuvent donc être prononcées dans les deux cas
précités. Il s’agit en l’occurrence de :

• la privation, pour une période de cinq ans au maximum, du droit de faire partie des
chambres professionnelles (art. 208) ;

• la publication de la décision judiciaire (art. 209).

142 Guide sur le brevet d’invention


2.5. Concurrence déloyale
Si le fondement de l’industrie et du commerce réside dans la liberté d’entreprise et de la
concurrence, ladite liberté est supposée devoir être exercée sans porter atteinte aux intérêts
des tiers. Toute transgression de cette limite est considérée comme illicite et donne lieu à
responsabilité si un préjudice résulte de cet acte, que ce dernier soit intentionnel ou pas.

2.5.1. Cadre juridique de l’action en concurrence déloyale

Il a précédemment été relevé que les actes portant atteinte au titre de propriété du brevet
sont légalement sanctionnés par des dispositions spéciales (art. 201 et suivants de la loi
n° 17.97).

En revanche, la protection contre d’autres types d’actes n’est pas assurée par des textes
spéciaux, ce qui nécessite le recours à l’action connue sous le nom de la concurrence
déloyale ou du parasitisme, et qui donne lieu à la responsabilité des auteurs des actes
précités selon les règles de la responsabilité civile. L’acte de concurrence déloyale est un
acte qui viole l’usage établi par des professionnels dans un secteur déterminé et susceptible
d’engendrer un préjudice.

Les règles relatives à la concurrence déloyale sont édictées par les articles 184 et 185,
lesquels énoncent certains actes qui relèvent de cette concurrence et des actions y
afférentes. Par contre, l’assise juridique de ces actes et les procédures qu’il convient de
mettre en œuvre sont soumises aux règles générales, à l’exception de la compétence en
raison de la matière, laquelle appartient au tribunal de commerce en vertu de l’article 15.

L’article 77 du DOC dispose : Tout fait quelconque de l’homme qui, sans l’autorité de la
loi, cause sciemment et volontairement à autrui un dommage matériel ou moral, oblige
son auteur à réparer ledit dommage, lorsqu’il est établi que ce fait en est la cause directe.
Toute stipulation contraire est sans effet.

Quant à l’article 78, il précise que chacun est responsable du dommage moral ou
matériel qu’il a causé, non seulement par son fait, mais par sa faute, lorsqu’il est établi
que cette faute en est la cause directe. Toute stipulation contraire est sans effet.

La faute consiste, soit à omettre ce qu’on était tenu de faire, soit à faire ce dont on était
tenu de s’abstenir, sans intention de causer un dommage.

2.5.2. Formes de concurrence déloyale

La notion de concurrence déloyale, tel que cela résulte de son appellation, repose sur l’idée
de concurrence, c’est-à-dire qu’il est nécessaire, pour la mise en œuvre de la responsabilité,
qu’existe une concurrence entre les parties en litige. Toutefois, il s’infère de la pratique
judiciaire que certains actes sont susceptibles de porter atteinte aux droits du titulaire du
brevet sans qu’il y ait aucune concurrence entre les parties. Cet état de fait a commandé
d’élaborer et d’adopter le concept de parasitisme qui n’exige pas l’existence d’une situation

Guide sur le brevet d’invention 143


de concurrence entre l’auteur de l’acte et la victime. Les agissements parasitaires reposent
donc sur l’idée qu’une personne se glisse dans le sillage d’une autre et tire profit des efforts
que cette dernière a déployés et de la notoriété qu’elle a acquise à travers son brevet.

Signalons à ce propos, à titre d’exemple, le cas du salarié qui dépose une demande de
brevet d’invention après s’être séparé de l’entreprise dans laquelle il travaillait : si cet
acte permet à l’employeur de revendiquer la propriété du brevet sur la base du fait que
l’invention pour laquelle le brevet est requis a été conçue dans le cadre de l’activité de
l’entreprise, le même acte, c’est-à-dire, celui du dépôt, peut relever de la concurrence
déloyale ou parasitaire au regard du profit tiré par le salarié des efforts financiers investis
dans la société pour arriver à l’invention et la faire connaître.

2.5.3. Conditions de réalisation de la concurrence déloyale

L’action en concurrence déloyale dont le fondement juridique renvoie en principe aux


règles de la responsabilité civile, exige que trois conditions soient remplies : la faute,
le préjudice et le lien de causalité. L’application des éléments constituant les conditions
précitées diffère, dans le domaine de la propriété industrielle de celle qui est de mise en
ce qui concerne la responsabilité de droit commun.

Effectivement, le concept relatif à chacun de ces éléments a évolué dans les règles de
la concurrence déloyale d’une façon qui a conduit à une nette distinction entre ceux qui
ont trait à la propriété commerciale et industrielle et leurs homologues qui concernent le
domaine civil.

a) Faute ou actes de concurrence déloyale


L’article 184 de la loi n° 17.97 fait état de certains cas considérés comme des fautes pouvant
entraîner la responsabilité dans le cadre d’une action en concurrence déloyale. Lesdits cas
ne sont pas énoncés à titre limitatif, ce qui implique la possibilité de qualifier d’autres cas
similaires comme constituant une concurrence déloyale.

Il est à noter que la faute doit être prouvée par le demandeur à l’action de sorte qu’il ne
soit pas possible de parler, dans le cadre de l’action en concurrence déloyale, d’une faute
présumée qui requiert l’administration de la preuve contraire par le défendeur.

La formulation de l’article 184 de la loi n° 17.97 régissant les actes de concurrence déloyale est
identique à celle de l’article 10 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété
industrielle. L’article 184 dispose en effet que constitue un acte de concurrence déloyale, tout
acte de concurrence contraire aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale.
Sont notamment interdits :

1) tous faits quelconques de nature à créer une confusion par n’importe quel moyen avec
l’établissement, les produits ou l’activité industrielle ou commerciale d’un concurrent ;

2) les allégations fausses dans l’exercice du commerce de nature à discréditer


l’établissement, les produits ou l’activité industrielle ou commerciale d’un concurrent ;

144 Guide sur le brevet d’invention


3) les indications ou allégations dont l’usage dans l’exercice du commerce est susceptible
d’induire le public en erreur sur la nature, le mode de fabrication, les caractéristiques,
l’aptitude à l’emploi ou la quantité des marchandises.

L’article 10 bis de la Convention de Paris impose aux pays de l’Union d’assurer à leurs
ressortissants une protection effective contre la concurrence déloyale.

Les actes précités peuvent être répartis selon les points suivants :

a.1) Création d’un risque de confusion dans l’esprit du public


Ce cas est celui que l’on retrouve le plus souvent dans la vie pratique ou dans les litiges
soumis aux tribunaux. Il consiste dans le fait de commettre des actes de n’importe quelle
manière susceptible de créer une confusion avec l’établissement d’un concurrent ou avec
ses produits ou son activité industrielle ou commerciale. Il est possible d’en donner un
exemple dans le domaine du brevet par le fait de se référer à un brevet antérieurement
inscrit, et ce, dans des activités commerciales en vue d’en retirer un profit aux dépens de
son propriétaire.

a.2) Fausses allégations


Il rentre dans le cadre de ce cas toute allégation visant à dénigrer ou ruiner la réputation
du titulaire du droit afin d’éloigner les personnes qui traitent avec ce dernier. Signalons
à titre d’exemple, dans le domaine du brevet, le fait de prétendre qu’un produit dont le
brevet d’invention a été obtenu est nuisible à la santé ou susceptible de provoquer des
maladies chroniques.

a.3) Indications trompeuses


Ce type d’acte de concurrence déloyale vise à porter atteinte aux moyens de production
ou aux moyens et méthodes de commercialisation en induisant le public en erreur sur
le procédé de fabrication des produits ou leurs caractéristiques ou leur quantité ou leur
aptitude à être utilisés.

b) Préjudice
Le préjudice est une condition pour que la responsabilité en matière de concurrence
déloyale soit établie.

Selon les règles de droit commun, le préjudice doit revêtir un caractère direct, personnel et
certain, ce qui implique que le préjudice éventuel ne suffit pas pour réclamer la réparation
du dommage.

Dans le cadre de la concurrence déloyale, la jurisprudence se contente de constater


l’existence d’un préjudice éventuel, estimant que le simple fait de porter atteinte au droit
sur le brevet est suffisant pour établir la survenance d’un préjudice.

Guide sur le brevet d’invention 145


2.5.4. Compétence en raison de la matière

Compte tenu du fait que l’action en concurrence déloyale revêt un aspect civil, et non
pénal, le tribunal de commerce est compétent pour trancher les litiges qui y sont relatifs
conformément aux dispositions de l’article 15 de la loi n° 17.97.

2.5.5. Prescription

Étant donné que le fondement de la concurrence déloyale réside dans les règles générales
de la responsabilité, l’action y afférente se prescrit par cinq ans à partir du moment où
la partie lésée a eu connaissance du dommage et de celui qui est tenu d’en répondre.
Elle se prescrit dans tous les cas par 20 ans à partir du moment où le dommage a eu lieu
(art. 106 du DOC).

2.5.6. Sanction de la concurrence déloyale

L’article 185 de la loi n° 17.97 permet d’intenter une action visant, d’une part, à faire cesser
les actes déloyaux et, d’autre part, à obtenir une réparation financière du préjudice subi.

a) Action en cessation des actes déloyaux


Le premier objectif poursuivi par la victime d’un acte de concurrence déloyale est de
faire cesser les agissements qui lui sont préjudiciables, et ce, avant de demander des
dommages-intérêts. Ceci est, d’un autre côté, le seul but recherché par le concurrent qui
n’a subi aucun préjudice, puisque celui-ci ne dispose bien évidemment d’aucun fondement
pour obtenir une quelconque réparation.

b) Action en dommages-intérêts
L’action en indemnisation est la partie complémentaire à celle visant à faire cesser les
actes déloyaux. Il est possible de les regrouper en une seule demande, et d’ailleurs, rares
sont les dommages-intérêts requis individuellement.

L’action précitée vise à mettre fin au préjudice de façon totale, qu’il s’agisse du dommage
matériel ou moral. Pour atteindre cet objectif, il incombe à la partie qui prétend avoir
subi un dommage causé par l’acte déloyal de prouver l’étendue de ce préjudice dont la
réparation relève, dans tous les cas, du pouvoir d’appréciation du tribunal.

2.5.7. Publication du jugement


Il est possible d’ordonner la publication du jugement ayant condamné le défendeur pour
actes relevant de la concurrence déloyale, et ce, en vertu de l’article 209 de la loi n° 17.97
relatif à la publication des décisions définitives et dont la formulation est empreinte de
généralité. En effet, ledit article dispose que la juridiction ordonne la publication des
décisions judiciaires devenues définitives rendues en application des dispositions de la
présente loi.

146 Guide sur le brevet d’invention


Guide sur le brevet d’invention :

Le Guide sur le brevet d’invention a été élaboré en étroite collaboration entre le


Programme « Amélioration du Climat des Affaires au Maroc » de l’USAID et l’Office
Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC).

Ce guide fait suite à celui déjà développé sur les marques. Il couvre les aspects
juridiques et pratiques des brevets d’invention. Il vise à apporter un éclairage sur le
domaine des brevets d’invention qui est parmi les plus techniques en matière de
propriété intellectuelle.

Guide sur le brevet d’invention - Loi 17.97


Elaboré en tant qu’outil de référence pour tous les utilisateurs du système qu’ils soient
juristes, chefs d’entreprise, investisseurs ou chercheurs, ce guide met en exergue le
haut niveau de protection qui est accordé par le nouveau cadre juridique. Guide sur le brevet
d’invention
Loi 17.97

relative à la protection de la propriété industrielle


modifiée et complétée par la loi 31.05

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