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Les auteurs locaux ont eux bien du mal à influencer S’ils s’organisent aujourd’hui pour les revitaliser,
le reste du Brésil. Les ouvrages de Dalcídio Jurandir, les brèches attirent les profiteurs. De
l’un des grands écrivains modernistes d’Amazonie, nouveaux missionnaires intensifient leurs activités,
sont presque introuvables. Plus contemporains, Milton notamment depuis l’arrivée au pouvoir de Jair
Hatoum ou Márcio Souza sont aujourd’hui parmi les Bolsonaro, tandis que les trafiquants de bois ou
rares auteurs reconnus. les orpailleurs alternent menaces et propositions
Le pays a en fait renié son histoire amazonienne, en de partenariat. Cette pression constante nourrit les
commençant par en rejeter l’héritage autochtone. Au- divisions internes. Severino ne le reconnaît pas mais,
delà de siècles de massacres et d’épidémies, « l’État selon un autre Parintintin interrogé, leur peuple est
s’est construit contre les autochtones pendant les maintenant divisé, car certains vendent du bois issu du
territoire.
XIXe et XXe siècles, cherchant notamment à effacer
leurs spécificités pour s’emparer de leurs terres, Sur le bord de la route,des empilements de troncs
explique ainsi Davi Avelino, professeur d’histoire à modestes sont entreposés avec leurs prix dessinés à la
l’UFAM (Université fédérale d’Amazonie). Via les craie. Ce ne sont ici que des bois de clôture, mais chez
missionnaires d’abord, puis via les militaires, qui les Tenharim voisins, les trafiquants de bois travaillent
ont commencé à exercer une grande influence sur la main dans la main avec plusieurs d’entre eux pour
politique autochtone à partir du début du siècle». exploiter les essences les plus nobles.
L’approche développée par ces derniers, privilégiant Sur mediapart.fr, un objet graphique est disponible à cet endroit.
l’intégration comme force de travail plutôt que Au-delà des autochtones, le Brésil a délaissé
l’extermination, n’empêche pas de nombreux abus l’Amazonie. Durant la période coloniale et jusqu’au
et violences. Mais avec le coup d’État et, surtout, début de la république, elle s’est plutôt tournée vers
l’arrivée au pouvoir du général Médici fin 1969, c’est l’Europe. Quand ces liens se rompent avec la fin du
une nouvelle période dramatique qui s’ouvre pour les boom du caoutchouc (1879-1912), ce territoire en crise
autochtones, considérés dès lors comme des obstacles se tourne vers la capitale, qui ne fait pas d’effort pour
à la sécurité nationale. Même ce calvaire subi pendant intégrer cette région peu intéressante électoralement,
la dictature a longtemps été occulté par l’histoire car pauvre et faiblement peuplée.
officielle. « Les militaires n’ont jamais reconnu leur Quant au développement promis par le régime
rôle, malgré les preuves et les témoignages »,constate militaire, il ne s’est jamais vraiment produit.
Davi Avelino. L’Amazonie reste défavorisée, malgré les nombreuses
Au moins 8 350 autochtones ont été tués par l’action richesses déjà extraites, tandis que le peuplement
directe ou l’omission du régime, selon les chiffres chaotique a engendré des conflits pour la terre. « Il
divulgués en 2014 par la commission nationale de la y a une incapacité à comprendre les spécificités de
vérité. la région. Cette idéologie a survécu à la dictature
Les identités et les idées de ces peuples sacrifiés, dont alors qu’elle renferme l’Amazonie sur elle même et
la tradition est le plus souvent orale, sont marginalisées l’empêche de se développer, assure Flavio Pinto. Et la
ou disparaissent. « On a des difficultés à faire revivre démocratie brésilienne n’a pas non plus compris ce
notre culture qui est presque en voie d’extinction territoire. »
»,se désole ainsi Edson Diarroi. De son côté, le Les grands investissements entraînent toujours un
cacique Severino Parintintin explique que la BR-320 a développement chaotique ainsi qu’une explosion des
sérieusement malmené « la cohésion et l’organisation problèmes sociaux et environnementaux, comme
de notre société. Or la culture est essentielle pour récemment dans la ville d’Altamira avec la
défendre notre territoire. » construction du barrage de Belo Monte.
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Le gouvernement actuel, avec plus de 6 000 militaires régions les plus préservées d’Amazonie. Là encore, les
dans ses rangs et avec à sa tête un admirateur de justifications mélangent promesses de développement
la dictature, semble vouloir redonner une nouvelle économique, paranoïa et raisons stratégiques.
jeunesse à cette doctrine. En 2019, le site The Les critiques récurrentes de Jair Bolsonaro contre
Intercept révèle les enregistrements d’une réunion les autochtones ou contre les ONG sont également
de gradés organisant le « projet Rio Branco », un un héritage de cette doctrine, et trouvent un fort
grand plan d’infrastructures pour avancer sur les écho dans la région, où une partie de la population
ne voit d’opportunité que dans une économie de la
destruction.
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