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Histoire Québec

Les archives, notre mémoire collective


Stéphanie Favreau et Julie Bellefeuille

État des lieux de la mémoire archivistique


Volume 22, numéro 3, 2017

URI : https://id.erudit.org/iderudit/84309ac

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Éditeur(s)
Les Éditions Histoire Québec
La Fédération Histoire Québec

ISSN
1201-4710 (imprimé)
1923-2101 (numérique)

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Citer cet article


Favreau, S. & Bellefeuille, J. (2017). Les archives, notre mémoire collective.
Histoire Québec, 22(3), 19–22.

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Les archives, notre mémoire collective
par Stéphanie Favreau et Julie Bellefeuille

Stéphanie Favreau est diplômée du baccalauréat et de la maîtrise en histoire ainsi que du certificat en gestion des documents
et des archives de l’UQAM. Elle travaille au Centre d’archives de Vaudreuil-Soulanges depuis mars 2016 à titre d’archiviste
adjointe et contribue activement à la mission du Centre.

Possédant déjà un baccalauréat en géographie et une maîtrise en urbanisme, Julie Bellefeuille, après avoir opéré un change-
ment de carrière, a obtenu une majeure en histoire ainsi qu’un certificat en gestion des documents et des archives de l’UQAM.
Depuis janvier 2014, elle est archiviste et directrice du Centre d’archives de Vaudreuil-Soulanges où elle peut mettre à profit ses
connaissances afin de préserver et diffuser la mémoire de la région où elle a grandi.

Les archives sont le reflet de notre des événements et bien préservés par préserver les supports tels les
passé. Grâce à elles, tous peuvent la suite deviennent la preuve dont plaques d’argile cuites, les tablettes
connaître l’histoire d’une personne, on a besoin pour asseoir la véracité de bois, les vases, les papyrus et les
d’une famille, d’un événement ou d’un fait. Qui plus est, une archive est murs des temples sur lesquels on a
d’un organisme. Ces documents rarement conservée seule. On nomme vu apparaître mots et dessins. De ces
laissent des traces et servent de fonds d’archives un ensemble de supports, quelques­uns sont parve­
preuves afin de documenter un documents de toute nature ayant été nus jusqu’à notre époque parce qu’ils
moment ou une action passée. réunis par une même personne ou étaient plus durables. Toutefois, cer­
Pourtant, les archives sont mécon­ un organisme. Le fonds d’archives, tains sont disparus, tels le papyrus et
nues de la population. S’attardant le contrairement à la collection, contient les tablettes de bois, emportant avec
plus souvent aux objets, peu d’entre donc des documents reliés entre eux, eux leurs secrets et la mémoire d’évé­
nous connaissent l’existence de ces dont la valeur d’information justifie la nements passés.
trésors documentaires. Pour beau­ conservation permanente.
coup, ce ne sont que de vieux papiers Selon Bruno Delmas, « [c]’est au
ramassés par les historiens amateurs Les archives, un aperçu historique Proche­Orient, où l’écriture est
qui, de toute façon, ramassent tout ce Depuis des millénaires, les peuples apparue, que l’on trouve les plus
qu’ils trouvent, ou bien ce sont des ont produit des documents et ont anciennes archives »2. C’est aussi dans
documents seulement accessibles tenté de les conserver. L’écriture cette région que se sont regroupées
aux universitaires. S’ils savaient! Plus est apparue, mais encore fallait­il des populations afin de se constituer
que de vieux papiers, les archives,
qui existent depuis la nuit des temps,
représentent notre mémoire collective.

Les documents, ces archives


Les archives prennent différentes
formes selon qu’on les dit actives
(documents toujours utilisés par
une personne ou un organisme),
semi­actives (documents utilisés à
l’occasion) ou historiques (qui ne
sont plus d’utilité courante). Ce sont
ces dernières qui nous interpellent
lorsqu’on effectue une recherche his­
torique ou lorsqu’on s’intéresse plus
particulièrement à l’histoire d’un
personnage ou d’un événement, car
elles sont conservées « sans limita­
tion de durée pour la documentation
historique de la recherche »1. Les
documents ayant été reçus ou produits une carte postale : souvenir et informations. (Source : Fonds émery Lalonde,
par une personne à l’époque même P29, E1, Centre d’archives de Vaudreauil­Soulanges.

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en société. La logique veut qu’un Bien qu’éloignés de la mère patrie, documents. Pourtant plusieurs le
peuple se regroupant devienne plus les dirigeants de la Nouvelle­France font et ainsi l’histoire d’une région à
sédentaire, qu’il édifie des structures se préoccupent tout autant de leurs travers une famille, une entreprise ou
urbaines et qu’il veuille conserver la archives coloniales : l’intendant Gilles un organisme est préservée.
trace des faits et gestes tant sociaux Hocquart fait aménager, vers 17324,
que commerciaux ou politiques. deux dépôts pour bien conserver les La conservation, une affaire
Ainsi naissent les archives. Tant en archives du Conseil supérieur, celles de famille et de société
égypte qu’en grèce ou à rome, la de la prévôté et les actes des notaires Si ce n’était de l’effort déployé entre
bureaucratie devient importante et décédés. Les preuves de l’histoire du autres par les civilisations anciennes,
les édifices voués aux archives sont pays sont donc protégées à Québec. les administrations, les monastères,
localisés près des bâtiments de pou­ En est­il de même en région? Nous les dynasties royales et les nations
voir. Certains lieux sont accessibles pouvons supposer qu’il existe une pour conserver les traces de l’évo­
à la population, tel le Tabularium, certaine forme de conservation : les lution de l’humanité, que resterait­il
édifice situé sur la place de l’agora paroisses ont leurs registres, les sei­ aujourd’hui du passé de l’homme?
à Rome, abritant les archives admi­ gneurs possèdent des documents Une volonté et un devoir de conser­
nistratives. Au cours des siècles sui­ dont certains sont parvenus jusqu’à vation des manuscrits et des impri­
vants, le parchemin, support plus nous, tandis que des marchands et més se sont imposés au fil du temps,
durable et fabriqué localement, fait des citoyens ont sauvegardé des et cela, pour toutes sortes de raisons.
son apparition en Europe. Au Moyen documents relatant leurs activités Aujourd’hui, il ne fait pas de doute
Âge, le papier est inventé. Puis à la et leur vie personnelle, les trans­ que l’archive est l’indispensable outil
Renaissance, l’imprimerie le sera à son mettant à leur famille de généra­ de base de toute recherche historique,
tour. Il s’ensuit alors une production tion en génération puis aux centres jouant un rôle capital dans l’étude du
accrue et une accumulation de docu­ d’archives et d’histoire. Un bond en passé. Tout le monde produit des
ments. Ceux-ci, le plus souvent gar- avant nous mène en 1983 alors que archives : les individus, les familles,
dés dans des coffres ou des chartriers, la loi sur les archives est adoptée. les organismes, les entreprises, les
appartiennent principalement aux Celle­ci oblige les organismes publics gouvernements, etc. Nos vies au
dirigeants comme les rois, les princes à produire un calendrier de conserva­ quotidien, nos activités et nos réali­
et les seigneurs, aux monastères et aux tion afin de connaître les documents sations laissent des traces et celles­ci
abbayes. Le plus souvent juridiques, qu’ils conservent pour leur valeur se trouvent dans les documents que
les archives sont déjà « numérotées et d’information et de témoignage ou nous créons. Voilà pourquoi il est
classées suivant différents systèmes ceux qu’ils peuvent éliminer. Les important de conserver ces traces.
et dotées de registres d’inventaire et organismes privés et les familles Nous produisons tout un chacun
conservées dans des coffres et des n’ont aucune obligation quant à une mine d’or d’information qui ren­
salles spéciales »3. la préservation de leurs précieux seigne sur notre époque, notre société
et notre culture. évidemment, tout ne
nous est pas utile et il est impossible
de tout garder. Les documents d’ar­
chives doivent avoir une valeur de
témoignage et d’information, mais ils
doivent également avoir un sens pour
nous. Ils doivent nous permettre de
reconstituer les événements du passé
et d’en préserver la mémoire pour les
générations futures.

Comment conserver cette mémoire


Une fois le patrimoine archivistique
conservé dans un environnement
propice à sa sauvegarde, il peut être
mis à la disposition de tous et valo­
risé. Mais comment bien le conserver
et où? Si beaucoup croient que l’en­
droit le plus sécuritaire pour conser­
ver leurs documents d’archives est
à la maison, détrompez­vous. Les
Des archives de toutes sortes. Photographe : Madeleine Charette. archives ont besoin de conditions
(Source : Centre d’archives de Vaudreuil­Soulanges) ambiantes particulières pour être

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préservées à long terme et ce n’est
ni dans les sous­sols, les greniers, les
placards ou les entrepôts qu’elles se
trouvent. Température et humidité
contrôlées sont de mise pour éviter
une détérioration prématurée. Les
documents doivent également être à
l’abri de la lumière et de la chaleur.
Aussi, pour prévenir les dommages
causés par le temps, les archives
sont rangées dans des boîtes et che­
mises sans acide. Les agrafes et les
trombones métalliques sont retirés.
Il faut, de préférence, mettre à plat
tous les documents ayant été pliés et
roulés. Voilà une série de règles qui
n’est pas à négliger et les organismes
les mieux placés pour répondre aux
besoins particuliers des archives
sont les centres et les services d’ar­
chives agréés.

Les centres d’archives agréés,


des lieux de conservation
et de diffusion
Une très bonne façon de conserver
le patrimoine documentaire d’une
région est de le donner à un centre
d’archives agréé par Bibliothèque et
Archives nationales du Québec. Les
centres d’archives qui méritent ce
statut répondent à des critères déci­
dés par BAnQ touchant l’acquisition,
la conservation et la diffusion des
archives. Ces centres sont reconnus
pour leur capacité à conserver et dif­
fuser le patrimoine archivistique. Au Du rangement adapté : les étagères mobiles. Photographe : Julie Bellefeuille.
(Source : Centre d’archives de Vaudreuil­Soulanges)
Québec, on compte 37 centres d’ar­
chives agréés répartis dans toutes
les régions administratives, dont
le Centre d’archives de Vaudreuil­
Soulanges. Chacun d’entre eux
acquiert des fonds d’archives qui
traitent de l’histoire de leur région.

Le Centre d’archives de
Vaudreuil-Soulanges, gardien
de la mémoire d’une région
Le Centre d’archives de Vaudreuil­
Soulanges est un organisme à but
non lucratif en fonction depuis 1991.
D’abord conçu comme un centre de
documentation et de généalogie, le
Centre acquiert ses lettres de noblesse
en l’an 2000 à la suite de son agré­
ment par BAnQ. Sa mission : récolter Boîte et chemise pour bien conserver. Photographe : Julie Bellefeuille.
la mémoire documentaire de tous (Source : Centre d’archives de Vaudreuil­Soulanges)

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ceux et celles qui, par leurs acti- (MRC) de Vaudreuil­Soulanges, soit
vités et réalisations, ont illustré à le territoire des anciennes seigneu­
leur façon l’histoire de Vaudreuil­ ries de l’Île Perrot, de Nouvelle­
Soulanges. Cette mission s’accom­ Longueuil, de Rigaud, de Soulanges
plit par l’acquisition, la conserva­ et de Vaudreuil ainsi que le can­
tion et la diffusion du patrimoine ton de Newton. Dans son contexte
archivistique de la région. Les régional, le Centre d’archives de
activités diffusant les archives per­ Vaudreuil­Soulanges propose à sa
mettent de prendre connaissance clientèle des services professionnels
de ces trésors documentaires, mais de qualité et des activités visant la
favorisent également la partici­ sauvegarde de cette mémoire docu­
pation citoyenne à cette prise de mentaire et l’affirmation de l’identité
conscience de sauvegarde. collective régionale.

À preuve, le projet « avec les yeux Le Centre d’archives de Vaudreuil­


d’hier et d’aujourd’hui », fort d’une Soulanges est un partenaire de
participation multigénérationnelle, a Bibliothèque et Archives nationales
gagné le prix du gouverneur général du Québec et membre du Réseau des
pour le projet communautaire fran­ services d’archives du Québec ainsi
cophone 2016. Le territoire d’acti­ que du Regroupement des services
vité du Centre d’archives recouvre d’archives privées agréés du Québec.
Entrée du Centre d’archives de la municipalité régionale de comté
Vaudreuil­Soulanges.
Photographe : Julie Bellefeuille.
(Source : Centre d’archives de
Vaudreuil­Soulanges)

Bibliographie

BRAZEAU, Jean­Luc et Isabelle AUBUCHON. Le Centre d’histoire La Presqu’Île, 20 ans au service de la mémoire de Vaudreuil-Soulanges,
éditions Centre d’histoire La Presqu’Île, Vaudreuil­Dorion, 2011, 48 pages.

DELMAS, Bruno. Les archives, une longue histoire : quelques jalons, Module 2, section 2, 14 novembre 2011, PIAF (portail international
archivistique francophone), p.7. [en ligne] http://www.piaf-archives.org/sites/default/files/bulk_media/m02s2/section2_papier.
pdf . (Page consultée le 12 octobre 2016).

DIRECTION DES ARCHIVES DE FRANCE, Dictionnaire de terminologie archivistique, 2002, Mise en forme par les Archives dépar­
tementales du Nord, 2007. [en ligne] http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/static/3226. (Page consultée le 7 février 2016,
relue le 12 octobre 2016).

Notes
1 DIRECTION DES ARCHIVES DE FRANCE, Dictionnaire de terminologie archivistique, 2002, Mise en forme par les Archives dépar­
tementales du Nord, 2007. [en ligne] http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/static/3226. Page consultée le 7 février 2016,
relue le 12 octobre 2016.
2 Bruno DELMAS, Les archives, une longue histoire : quelques jalons, Module 2, section 2, 14 novembre 2011, PIAF (portail interna­
tional archivistique francophone), p.7. [en ligne] http://www.piaf-archives.org/sites/default/files/bulk_media/m02s2/sec-
tion2_papier.pdf . Page consultée le 12 octobre 2016.
3 Op. cit., p. 11.
4 Jean­Luc BRAZEAU et Isabelle AUBUCHON, Le Centre d’histoire La Presqu’Île, 20 ans au service de la mémoire de Vaudreuil-Soulanges,
éditions Centre d’histoire La Presqu’Île, Vaudreuil­Dorion, 2011, p. 7.

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