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Revue des Études Grecques

70. Plutarchi Moralia, VII, rec. et emend. F. H. Sandbach


(Bibliotheca Teubneriana)
Robert Flacelière

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Flacelière Robert. 70. Plutarchi Moralia, VII, rec. et emend. F. H. Sandbach (Bibliotheca Teubneriana). In: Revue des Études
Grecques, tome 81, fascicule 384-385, Janvier-juin 1968. pp. 298-300;

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298 COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
la concerne, qu'une particularité et une question d'ordre général, dans la seule
intention d'être utile.
Le détail tout d'abord. Dans 1,80, 1. 28-29 (p. 16), il serait étrange que les
ύποδημάτια d'un âne, mentionnés entre ses harnachements et sa nourriture,
désignent ses sabots. Le contexte, le sens courant du mot, tout y répugne. C'est
peut-être une tradition qui a accrédité cette traduction : on la retrouve chez
Bréhier, Les Stoïciens, p. 1049. Or il y a deux autres possibilités. Ou bien c'est un
très ancien témoignage sur l'usage du fer à cheval (c'est le sens qu'admet le
Liddell-Scott), bien que l'on estime qu'il n'ait été répandu que par les invasions
germaniques. Ou bien c'est un des textes, fort rares, je crois, qui montrent que
les Anciens ont eu parfois l'idée de chausser leurs bêtes de somme, soit, comme
ici, de façon modeste et utilitaire, soit pour la parade. Un texte que je n'ai
malheureusement pas noté, parce que je ne pensais pas avoir à m'en servir,
parle d'un empereur romain qu'avait mis des chaussures dorées à un attelage.
La question d'intérêt général concerne le sort qu'il faut faire aux nombreux
diminutifs en -ιον qui utilise Épictète. Ils peuvent avoir encore une valeur
propre, mais souvent plus dépréciative que diminutive, ou bien même n'exprimer
déjà plus que l'idée de la forme simple. Il n'est pas toujours facile d'en décider.
Dans le passage que je citais à l'instant, Γόνάριον auquel est assimilé notre
corps est-il réellement un « ânon » ? J'en doute, puisqu'il serait de stature
suffisante pour être l'objet d'une réquisition. Il me paraît plus vraisemblable,
étant donné la pensée, d'entendre ici un ton d'ironie familière : un méchant
âne, « un bourricot ». Il est bien difficile, je le reconnais, d'être cohérent à ce
sujet d'un bout à l'autre d'un volume. Παιδισκάριον est traduit, pp. 4 et 5,
par « fillette », dans un contexte erotique. S'agit-il vraiment d'une Lolita ou,
comme on dirait familièrement, d'« une petite garce quelconque » ? En tout cas,
p. 43, dans un contexte de même nature, le terme est rendu par «jeune fille ».
Certainement les δουλάρια de la p. 13 ne sont rien que des esclaves, sans aucune
nuance supplémentaire ; quand il s'agit d'en emprunter pour faire figure dans
le monde, ne manquerait-on pas l'effet voulu s'ils ne devaient être que « de
pauvres esclaves » (p. 52) ? Chaque cas pose un problème.
Le grec du Nouveau Testament (je ne l'apprendrai pas à M. Jagu) contient
des difficultés de cet ordre. Il est curieux de voir comment s'en tire la Vulgate,
œuvre d'un homme qui connaissait « le grec tel qu'on le parle ». En Marc, VII,
24 sq. (guérison de la fille d'une Syrophénicienne) elle rend uniformément par
fûia les mots θυγάτριον et θυγατήρ, παιδίον par puella ou puer (c'est donc
déjà le παιδί moderne), mais κυνάρια une fois par canes, une fois par catelli
(inconséquence ? ou faut-il penser que catellus n'a plus de valeur diminutive ?).
Il est très utile, on le voit, que notre enseignement dispose maintenant d'un
texte de cette nature, qui peut montrer aux étudiants une physionomie de la
langue grecque qu'ils n'ont pas autrement l'occasion de voir. Que les éditeurs
en soient remerciés.
Gabriel Germain.

70. Plutarchi Moralia, VII, rec. et emend. F. H. Sandbach (Bibliotheca


Teubneriana). Leipzig, Teubner, 1967 : 1 vol. relié toile, 14,5 cmx21, xvi-
147 p. Prix : DM 19.
Ce mince volume contient les fragments attribués à Plutarque ; ceux que
l'éditeur estime non authentiques ou suspects sont marqués d'un astérisque.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES 299
On ne trouve pas ici les traités pseudépigraphes conservés en entier, tels le De
nobilitate, le De fluviis, le De metris, etc..., qui figuraient dans le tome VII
de l'édition Bernardakis. On n'y trouve pas non plus la plupart des 152 fragmenta
incerla que Bernardakis avait recueillis dans les anthologies byzantines et
placés aux pages 150-182 de son tome VII : quelques-uns seulement ont paru
à F. H. Sandbach dignes d'être retenus comme appartenant peut-être à
Plutarque.
Viennent en tête du volume le catalogue dit « de Lamprias », qui est sans
doute celui d'une bibliothèque anonyme du me ou du ive siècle, — et un passage


de Photius, Bibl. 161, qui donne les titres de plusieurs ouvrages, conservés ou
perdus, de notre auteur.
Dans le catalogue dit de Lamprias, l'éditeur a bien raison de fournir entre
parenthèses la référence, soit au numéro d'ordre qu'elle porte dans l'édition
Estienne quand il s'agit d'une œuvre conservée entièrement, soit aux fragments
de la présente édition. J'exprimerai pourtant à ce propos plusieurs regrets.
L'éditeur aurait dû, je crois, distinguer parmi les Vies que cite ce catalogue
celles qui sont conservées de celles qui sont perdues et dont il ne nous reste
aucun fragment. Il aurait dû aussi faire suivre ce catalogue de la liste des titres
qui n'y figurent pas et qui sont attestés par des fragments : on aurait eu ainsi,
à peu de frais, un conspectus général de l'œuvre de Plutarque. Enfin, une table
de concordance avec les fragments figurant dans le tome VII de Bernardakis
et repris par F. H. Sandbach n'aurait pas été inutile, car le lecteur ne se retrouve
pas toujours facilement dans ces textes disposés de façon très différente par
l'un et l'autre éditeurs.
Logiquement, les fragments des Fies perdues ne devraient pas se trouver
dans un volume consacré aux Moralia, mais sur ce point F. H. Sandbach a
été entraîné sans doute par l'exemple de Bernardakis. Aux p. 13-17, il mentionne
les biographies suivantes : Ëpaminondas et Scipion, Scipion l'Africain, Tibère,
Néron, Héraclès, Pindare, Crates, Daïphantos et Aristoménès. C'est là un
ordre bizarre et indéfendable ; l'ordre alphabétique eût été bien préférable. Si
l'on compare ces pages aux pages 144-149 du tome VII de Bernardakis, on
s'aperçoit que le nouvel éditeur a ajouté Pindare et Néron, — et il a raison de le
faire, — mais aussi qu'il a écarté Léonidas et Métellus. Il faut lui accorder que le
De malign. Herodoti, 866 b, et la Vie de Marius, 29 attestent seulement que
Plutarque avait projeté d'écrire ces deux biographies, qui d'ailleurs ne figurent
pas dans le catalogue dit de Lamprias. Cependant nous ne pouvons affirmer
que Plutarque n'avait pas rédigé ces deux Vies, car l'absence d'une œuvre dans
ce catalogue ne prouve nullement qu'elle n'ait pas existé.
Ainsi, pour ne citer que deux exemples, le commentaire de Plutarque Εις
τα Ησιόδου έργα n'est pas cité dans le catalogue, et pourtant ses fragments
(25-110), occupent ici une quarantaine de pages ; de même le traité "Οτι και
γυναίκα παιδευτέον n'est connu que par les fragments 128-133, que nous a
conservés Stobée.
Ces derniers fragments présentent des hiatus, et F. H. Sandbach écrit à ce
propos : * An genuina sint fragm. 128-133 propter hiatus... dubitat Ziegler, RE
XXI, 792. Sed hiatus brevialori adscripserim neque is erat Plutarchus ut ad rem
propositam adslricie haereret. » A mon avis, l'éditeur aurait dû se demander
d'abord si K. Ziegler avait raison de penser que Plutarque évitait tout hiatus
de propos délibéré, ce dont je doute fort pour ma part.
300 COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
Tel qu'il est, ce volume rendra les plus grands services, et il fait honneur au
professeur de Cambridge, qui a déjà antérieurement, par de nombreux travaux,
si bien mérité de Plutarque.
R. Flacelière.

71. Plutarh. Viefi paralele. III. Notice introductive, traducere si note


N. I. Barbu. Bucarest, Editura stiintifïcâ, 1966. In-8°, 565 p. ill.
Ce troisième volume de Vies parallèles contient, en traduction roumaine,
les biographies suivantes : Pyrrhus, Marius, Cimon, Lucullus, Lysandre, Sylla,
Alexandre, César. Chaque morceau est introduit par une notice historico-
littéraire, munie d'une bibliographie sommaire et, éventuellement, de références
aux sources. Cette publication est parfaitement adaptée à la vaste audience
qu'elle vise, par le style coulant de la traduction et l'abondance de l'annotation.
Jean Gouillard.

72. The Cambridge History of Later Greek and Early Medieval Philosophy,
edited by A. H. Armstrong. Cambridge University Press, 1967. 1 vol. in-8°
relié toile xiv + 711 p.
Ce beau volume doit être considéré comme la suite de celui de K. W. C. Guthrie,
A History of Greek Philosophy. Il s'agit ici de décrire comment la philosophie
grecque fut connue et interprétée par ses héritiers culturels jusqu'à saint
Anselme, la figure dominante étant naturellement Plotin. Les savants les plus
qualifiés se sont partagé ce domaine immense. P. Merlan décrit la philosophie
grecque de Platon à Plotin. Le Rev. H. Chadwick étudie Philon et les débuts du
christianisme : Justin, les Gnostiques, Clément d'Alexandrie, Origène. La vie,
l'enseignement et les doctrines de Plotin sur l'Homme et la réalité, l'Un et
l'Intellect, nous sont présentés de façon magistrale par A. H. Armstrong, avec
en outre une note savante sur Plotin, Amélius et Porphyre. Les derniers
Platoniciens, de Porphyre et Jamblique aux deux écoles athénienne et alexandrine,
sont le domaine d'A. C. Lloyd. R. A. Markus étudie Marius Victorinus, son
ontologie et sa psychologie trinitaires, en relation avec s. Augustin. Le
platonisme grec chrétien, des Cappadociens à Maxime le Confesseur et Jean Scot en
passant par le Pseudo-Denys, fait l'objet d'une centaine de pages écrites par
I. P. Sheldon-Williams, tandis que H. Liebeschiitz se réserve la pensée
occidentale, de Boèce à Anselme. La dernière partie, œuvre de R. Walzer, est peut-
être celle qui réservera le plus de surprise à l'usager, touchant l'ancienne
philosophie islamique, si souvent méconnue même des érudits.
L'ouvrage s'adresse à la fois au grand public et aux étudiants « avancés »
pour lesquels il constituera un précieux manuel. On y trouve d'une part des
synthèses des meilleurs spécialistes touchant les plus grands auteurs : Philon,
Plotin, Augustin, d'autre part des renseignements sur des auteurs de moindre
envergure ou dont l'œuvre est en partie perdue, mais qui ont joué un grand rôle
dans l'évolution des idées, un Nouménius, par exemple. Comme il arrive pour un
ouvrage d'une telle étendue, aucune conclusion d'ensemble n'est fournie ;
d'autre part, les collaborateurs ont conçu et mené l'entreprise avec des libertés.
On trouve ainsi plus de 10 pages sur le seul problème du christianisme de Boèce,
tandis que tout Philon est traité en 20 pages seulement, tout Origène en 13
pages. Une centaine de pages pour Plotin paraissent encore trop peu, malgré

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