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L’Histoire de Barlaam et Josaphat:

transformations et transpositions
d’un recueil de fables enchâssées
dans la littérature exemplaire

Victoria Smirnova

L
a littérature exemplaire du Moyen Âge est à juste titre comparée à un
‘melting pot culturel et religieux’1 qui refond le flux narratif hétérogène
dans les ‘récits brefs donnés comme véridiques et destinés à être insérés
dans un discours (en général un sermon) pour convaincre l’auditoire par une
leçon salutaire’.2 Plus une œuvre est célèbre et à la portée de tous, meilleures
sont les chances de la trouver démembrée, dispersée dans plusieurs recueils
et adaptée aux besoins du prédicateur. Pas plus que plusieurs autres légendes
hagiographiques, celle de Barlaam et Josaphat ne fait exception à cette règle. La
deuxième traduction latine du texte grec — la version dite vulgate — remonte
au xiie siècle;3 or, déjà dans le premier tiers du xiiie siècle, à l’aube même de

1
Groupe d’anthropologie historique de l’Occident médiéval, Une Culture du livre dans une
société d’illettrés: parler, figurer, écrire dans l’Europe médiévale, Programme de recherche, 2006–
2010 <http://gahom.ehess.fr/index.php?601> [consulté le 10 janvier 2014].
2
Bremond, Le Goff, et Schmitt, L’Exemplum, pp. 37–38.
3
Sur la première adaptation du texte faite en 1048 à Constantinople, voir Le Roman de
Barlaam et Josaphat, éd. par Sonet, i, 73–74. Nous citons la version vulgate d’après Barlaam et
Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma. Les références plus générales sont données
d’après la traduction de Jacques de Billy datant du xvie siècle et publiée par l’abbé Migne dans
Victoria Smirnova (smirnova.victoria@gmail.com) est maître de conférences à l’Université
d’État des sciences humaines de Russie à Moscou (Российский государственный гуманитарный
университет, RGGU).

D’Orient en Occident: Les recueils de fables enchâssées avant les Mille et une Nuits de Galland,
ed. by Marion Uhlig and Yasmina Foehr-Janssens, CELAMA 16, (Turnhout: Brepols, 2014)
pp. 79–112 BREPOLS PUBLISHERS 10.1484/M.CELAMA-EB.1.101987
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l’épanouissement de la littérature exemplaire, on trouve des récits remontant à


l’Histoire de Barlaam et Josaphat insérés dans des sermons et des recueils d’exem-
pla, comme ceux de Jacques de Vitry4 et d’Eudes de Cheriton.5 À partir de la
deuxième moitié du xiiie siècle, ce sont des prédicateurs Dominicains célèbres
qui y recourent volontiers: Étienne de Bourbon,6 Humbert de Romans,7 Arnold
de Liège,8 et Jean Gobi.9 L’apparition des épitomés de la légende, dont les plus
célèbres sont ceux contenus dans le Speculum historiale de Vincent de Beauvais10
et dans la Legenda aurea de Jacques de Voragine,11 contribuent considérable-
ment à la popularité de la légende: ces deux ‘best-sellers’ médiévaux servent,
à leur tour, de sources courantes pour des exempla, comme le montre, par
exemple, le Speculum exemplorum12 du xve siècle qui puise explicitement dans
le Speculum historiale.
Au vu du destin de l’Histoire de Barlaam et Josaphat dans la littérature
exemplaire, le chercheur se pose trois questions principales: quels épisodes
(il ne s’agit pas seulement des fameux apologues, mais aussi de récits tirés de
l’histoire-cadre, riche en matière exemplaire) sont les plus demandés par les
prédicateurs? Comment, une fois extraits, changent-ils dans le contexte nou-
veau qui est le leur? Et quelles sont les voies de leur transmission? Mais d’autres
questions qui n’ont encore fait l’objet que de peu d’analyses sont parfois évo-
quées: la complexité de la structure narrative, caractéristique des recueils des
fables enchâssées, influence-t-elle le travail des prédicateurs et des compilateurs

la Patrologie latina ( Jean Damascène, Vita sanctorum Barlaam eremitae et Iosaphat Indiae regis,
trad. par Billy, PL 73, col. 443–606).
4
Jacques de Vitry, The Exempla, éd. par Crane, pp. 3, 10, 16, 18–19, 35–36, 37–38, 55, 60.
5
Eudes de Cheriton, Liber parabolarum et Sermones dominicales. Voir Eudes de Cheriton,
Liber parabolarum, éd. par Hervieux, pp. 217, 252–53, et Eudes de Cheriton, Sermones domini-
cales, éd. par Hervieux, pp. 294, 317–19.
6
Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus, éd. par Berlioz, i, 11,
131–32, 205–06, 272, 302–03, 354–55; iii, 289–90
7
Humbert de Romans, De dono timoris, éd. par Boyer, pp. 4–5, 112, 201–03.
8
Voir An Alphabet of Tales, éd. par Banks, i, 119, 132; ii, 284–85, 416–17 437, 500–01.
L’édition latine de C. Ribaucourt nous reste indisponible.
9
Jean Gobi le Jeune, Scala coeli, éd. par Polo de Beaulieu, pp. 202, 207–08, 216, 218–19,
347, 406–07, 422, 573–74.
10
Vincent de Beauvais, Speculum quadruplex, iv: Speculum historiale, 578–604.
11
Jacques de Voragine, Legenda aurea, éd. par Maggioni, ii, 1241–55.
12
Speculum exemplorum. Sans pagination. ISTC is00654000; in-f o. Strasbourg : Georg
Husner,1490.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 81

médiévaux? En se référant à la légende, prennent-ils en considération les rap-


ports existants entre l’histoire-cadre et les récits encadrés? Les stratégies rhé-
toriques de persuasion propres à l’Histoire de Barlaam et Josaphat restent-elles
pour eux encore actuelles?
Les questions de la transmission de la légende dans la littérature exemplaire
ont déjà été abordées par les médiévistes: J. Sonet, F. C. Tubach, M.-A. Polo
de Beaulieu et M. Derron ont étudié la diffusion tant des récits enchâs-
sés que des épisodes de l’histoire-cadre. 13 Nous visons à compléter leur tra-
vail ainsi qu’à cerner la matière de recherche: puisque nous nous intéressons
au destin littéraire des versions latines de l’Histoire de Barlaam et Josaphat,
c’est la littérature exemplaire latine qui est mise en cause. Nous prendrons
en compte des textes explicitement liés à la prédication, mais aussi des textes
qui sont issus d’un contexte non-homilétique: des traités d’éducation et de
morale, souvent compilés par des moines et, sans doute, largement appré-
ciés par des prédicateurs comme des sources riches et fiables de récits exem-
plaires, comme la Summa virtutum ac vitiorum, 14 les Gesta Romanorum, 15
ou le Dialogus creaturarum. 16 Les recueils en langues vulgaires sont aussi
pris en considération, d’autant plus qu’ils sont apparentés aux recueils
latins. Par exemple, l’Alphabet of Tales et le Recull de eximplis e miracles 17
sont les traductions de l’Alphabetum narrationum d’Arnold de Liège, et
le Libro de los gatos 18 celle du Liber parabolarum d’Eudes de Cheriton.
Nicole Bozon, 19 Clemente Sánchez, 20 et l’auteur anonyme du Ci nous dit 21

13
Le Roman de Barlaam et Josaphat, éd. par Sonet; Polo de Beaulieu, ‘Les exempla d’origine
orientale dans la Scala coeli de Jean Gobi’; Tubach, Index exemplorum. Derron, Des Strickers
ernsthafter König: ein poetischer Lachtraktat des Mittelalters: eine motivgeschichtliche Studie zur
ersten Barlaam-Parabel.
14
Perault, Summa virtutum ac vitiorum.
15
Gesta romanorum, éd. par Oesterley.
16
Nicolas de Bergame, Dialogus creaturarum. Sans Pagination. ISTC id00159200. in-f°.
Cologne: Konrad Winters, 1481.
17
Recull de eximplis e miracles, éd. par Aguiló y Fuster.
18
Libro de los gatos, éd. par Gayangos.
19
Bozon, Les Contes moralisés, éd. par Toulmin Smith et Meyer. Comme L. Hervieux le sup-
pose, Nicole Bozon, aurait pu s’inspirer directement par Eudes de Cheriton. Voir Les Fabulistes
latins, éd. par Hervieux, iv, 92–106.
20
El libro de los exemplos, éd. par del Mar Gutiérrez Martínez.
21
Ci nous dit, éd. par Blangez.
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(sous quelques réserves),22 quant à eux, puisent largement dans les sources
latines, y compris dans celles contenant des récits issus du Barlaam et Josaphat.23

Apologues

Répartition des apologues dans les recueils d’exempla


La transmission de l’Histoire de Barlaam et Josaphat dans la littérature
exemplaire latine commence avec celle des fameux apologues que la légende
contient. Au xiiie siècle, les compilateurs ne semblent s’intéresser qu’aux his-
toires enchâssées. Toutefois, tous les apologues ne jouissent pas d’une popula-
rité égale dans la tradition postérieure, et ne sont pas répartis également dans
les recueils. Certains, comme la Scala coeli de Jean Gobi ou le Liber ad status24
anonyme, en utilisent en grand nombre, tandis que d’autres n’en gardent que
quelques-uns ou même un seul.25 Le choix des compilateurs peut être motivé

22
Comme G. Blangez l’affirme, il est impossible de dire d’aucune partie du Ci nous dit qu’elle
est reprise de telle ou telle œuvre. Tout au plus retrouve-t-on çà et là des exemples qui racontent
la même histoire que des chapitres isolés du Ci nous dit (Ci nous dit, éd. par Blangez, p. cii). De
plus, à la différence des recueils qui citent régulièrement leurs autorités, l’auteur du Ci nous dit
(peut-être un religieux mendiant) semble les cacher (Ci nous dit, éd. par Blangez, p. lxviii).
23
En revanche, nous n’examinons pas de nombreux dits et lais, comme Li Dis dou roi et des
hiermittes de Jean de Condé ou Le Lai de l’oiselet, mentionnés par J. Sonet (sur le Lai de l’oiselet
voir, par exemple, Le Lai de l’oiselet, éd. par Wolfgang). Nous laissons de côté, de même, des
récits typologiquement similaires à ceux l’Histoire de Barlaam et Josaphat (et pour cela indexés
par F. C. Tubach sous le même numéro), mais issus d’une autre tradition narrative, celle des
Vitae Patrum (comme l’histoire d’un jeune homme qui n’a jamais vu de femmes) ou celle de la
Disciplina clericalis (comme l’apologue de ‘L’Archer et du rossignol’ dans El libro de los enxem-
plos et dans la Scala coeli, ou l’apologue des ‘Trois amis’ dans le Dialogus creaturarum et dans
l’Alphabet of Tales, etc.). Nous ne traitons pas, de même, ceux dont la différence est tellement
frappante qu’on peut à peine parler d’un lien de parenté quelconque (c’est le cas de l’histoire des
coffrets dans le chapitre 251 des Gesta Romanorum, éd. par Oesterley, pp. 655-57). Enfin, nous
excluons de notre aperçu les épitomés gardant tant l’histoire-cadre que les apologues, même
brefs, comme, par exemple, celui qu’on trouve dans le Große Seelentrost (Der große Seelentrost,
éd. par Schmitt) et dans le Viaticum narrationum (Hermann de Bologne, Das Viaticum narra-
tionum, éd. par Hilka, p. 95).
24
Le Liber ad status, Paris, BnF, MS lat. 6368. Un recueil d’exempla, compilé à la fin du
premier tiers du xive siècle par un religieux cistercien italien.
25
Comme, par exemple, Herolt, Sermones discipuli de tempore et sanctis; Martin de Troppau
Sermones de tempore et de sanctis; Nicolas de Bergame, Dialogus creaturarum; ‘Libro de los gatos’,
éd. par Gayangos; Perault, Summa virtutum ac vitiorum.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 83

par la thématique de la collection en question26 ou bien paraître arbitraire à un


lecteur moderne. Mais la disposition est claire: les apologues les plus répandus
sont ceux de ‘L’Unicorne’ et de la ‘Trompette de la mort’. La comparaison des
recueils latins avec ceux en langues vulgaires le montre d’autant plus clairement.
La popularité de l’apologue de ‘L’Unicorne’ n’est pas étonnante. Son
imagerie pittoresque est renforcée par la moralisation consécutive de tous ses
éléments narratifs (l’unicorne est la mort, le puits est le monde etc.), qui est
d’ailleurs gardée presque intacte dans la tradition exemplaire. Le succès de
l’apologue de la ‘Trompette de la mort’ est assuré, semble-t-il, par son contenu
social qui le rend efficace pour l’instruction des nobles. Notons en passant que
le début de l’apologue se trouve déjà modifié chez Jacques de Vitry: la ren-
contre du roi avec deux pauvres est remplacée par une description brève du roi
de Grèce qui ne rit jamais pendant les fêtes. Cette modification sera exami-
née plus tard; pour le moment, mentionnons simplement que l’image d’un roi
pieux et triste avait dû être particulièrement parlante à l’époque où le rire était
souvent condamné, conformément au fameux postulat attribué à saint Jean
Chrysostome: ‘le Christ n’a jamais ri’.27 La littérature exemplaire connaît beau-
coup de nobles qui accordent de l’attention aux pauvres, mais ne connaît pas,
pour autant que je le sache, de nobles qui, tout en pensant au Jugement Dernier,
s’abstiennent de rire et de se divertir.
Les apologues les moins répandus sont le ‘Roi et les pauvres heureux’ (il se
trouve seulement dans les sermons de Jacques de Vitry) et le ‘Jeune bélier’ — ce
dernier semble être complètement ignoré des prédicateurs. Il est révélateur à cet
égard que les deux apologues négligés soient absents dans l’épitomé de Jacques
de Voragine. Vincent de Beauvais garde la parabole du ‘Jeune bélier’ mais omet
celle des ‘Pauvres heureux’.28 Pour quelles raisons? L’apologue du ‘Roi et des
pauvres heureux’ redouble non seulement l’apologue du ‘Jeune homme riche
et de la fille pauvre’, mais aussi l’histoire de Josaphat lui-même voulant sortir de
son palais pour connaître la vie. En ce qui concerne l’apologue du ‘Jeune bélier’,
il est privé du pittoresque des autres récits enchâssés du Barlaam et Josaphat,

26
Ainsi, Humbert de Romans ne prend que deux apologues dont la thématique — la peur
— coïncide parfaitement avec celle de son recueil intitulé De dono timoris; Humbert de Romans,
De dono timoris, éd. par Boyer.
27
Sur le rire voir, par exemple, Le Goff et Truong, Une histoire du corps au Moyen Âge;
Verdon, Rire au Moyen Âge.
28
L’apologue du jeune bélier est parfois négligé même par les chercheurs modernes.
W. F. Bolton ne le mentionne pas dans son article Bolton, ‘Parable, Allegory and Romance in
the Legend of Barlaam et Josaphat’.
84 Victoria Smirnova

ainsi que de leur signification universelle. Il semble être trop circonstanciel pour
posséder un contexte théologico-moral apte à produire une leçon pour tous. Le
jeune bélier, élevé en captivité, se risque dehors et se joint à un troupeau de
chèvres sauvages. Les domestiques de son maître s’aperçoivent de sa disparition
et lui donnent la chasse si bien qu’ils saisissent le jeune bélier, tout en abattant
et en dispersant les chèvres. Barlaam, par cet apologue, persuade Josaphat ne
pas le suivre dans le désert tout de suite et d’attendre le moment favorable. Mais
quelle conduite le prédicateur médiéval doit-il exiger de son auditoire lorsqu’il
lui raconte une histoire pareille? Il est donc peu étonnant que cet apologue
reste dans l’ombre.

Question de la source
Les apologues commencent donc dès le début à circuler de manière indépen-
dante. On les trouve déjà, sans aucune référence au Barlaam et Josaphat, chez
Jacques de Vitry (qui, selon toute probabilité, est d’ailleurs le premier à les
introduire dans la littérature exemplaire) et Eudes de Cheriton.29 Dans certains
cas l’attribution est incorrecte. Par exemple, l’apologue de ‘L’Unicorne’ est
attribué à un Bernard dans les Sermones dominicales d’Eudes de Cheriton et
à Valerianus dans l’édition incunable d’Ulm (1480) de la Scala coeli. Et même
si la source est citée correctement, la référence est le plus souvent au Liber
Barlaam, plutôt qu’à saint Jean Damascène ou au Liber gestorum Barlaam et
Josaphat, conformément à l’intitulé de la plupart des manuscrits de la version
vulgate.30 Cette référence peut être abrégée en Barlaam: on trouve d’habitude
legitur in Barlaam (nous lisons dans Barlaam), parfois refert Barlaam (Barlaam
rapporte), et deux fois, narrat Barlaam (Barlaam raconte).31 Notons que dans
les recueils d’exempla les mots narrat et refert s’ajoutent dans la plupart des cas
à un nom d’auteur, et plus rarement à un titre de livre (refert Barlaam égale
refert liber Barlaam). La convergence des noms du livre et de son personnage,

29
Les apologues de Barlaam coïncidant avec ceux de Jacques de Vitry, se trouvent aussi
des Libri octo miraculorum de Césaire de Heisterbach, éd. par Mesiter, pp. 117–20, 126–27.
Pourtant, comme le montre avec évidence Alfons Hilka, la partie en question est une addi-
tion tardive. Die Wundergeschichten des Caesarius von Heisterbach, éd. par Hilka, iii, pp. 3–4,
9–11. En ce qui concerne Eudes de Cheriton, si la datation de son recueil après 1225, proposée
par A. C. Friend (Friend, ‘Master Odo of Cheriton’), est correcte, il aurait pu être inspiré par
Jacques de Vitry.
30
Le Roman de Barlaam et Josaphat, éd. par Sonet, i, pp. 74–87.
31
Sur toutes les indications de sources, voir le tableau général en annexe.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 85

ainsi que les nuances des mots refert et narrat aurait pu produire une identifi-
cation très intéressante. Dans le Speculum laicorum, on trouve la formule refert
Barlaam in libro suo (Barlaam rapporte dans son livre) à côté du plus tradi-
tionnel legitur in vita Barlaam (on lit dans la vie de Barlaam).32 Il est bien pro-
bable que, en se référant à ‘un livre de Barlaam’, l’auteur (ou bien un copiste du
manuscrit) ait fait un lapsus, même s’il n’est pas le seul à attribuer à Barlaam la
paternité du livre. Nicole Bozon dans les Contes moralisés dit la même chose:
‘Barleam conte en son livere’.33 Une tendance se dégage: les apologues peuvent
être considérés comme un cycle indépendant dont un Barlaam est l’auteur ou
bien dont ‘Barlaam’ est l’intitulé.
Ainsi, les auteurs de recueils d’exempla n’ont pas besoin, semble-t-il, de ren-
forcer leur discours en citant saint Damascène comme l’auteur de la légende;
le Liber Barlaam ou Barlaam sont suffisants pour établir l’autorité nécessaire
de l’exemplum cité. Mais dans le cas où aucune source n’est citée, devons-nous
supposer que la parole tenue par saint Barlaam et mise en écrit par saint Jean
Damascène (et donc a priori vraie et digne de confiance) lègue son autorité
aux apologues et les rend prêts à être utilisés dans un large contexte de forma-
tion spirituelle en tant qu’exempla authentiques? Ou bien faut-il admettre que,
faute de liens avec l’histoire-cadre, les apologues sont perçus comme des fables
anciennes d’origine imprécise?
De fait, ce sont les compilateurs de recueils de fables, de contes, et de para-
boles qui se passent d’indications de source — à la différence de ceux dont les
recueils se composent, pour la plupart, d’exempla ‘donnés comme véridiques’
— ou le font inexactement et de façon peu systématique (Eudes de Cheriton
et Nicole Bozon).34 Notons que Jacques de Vitry qui, comme nous l’avons

32
Le Speculum laicorum, éd. par Welter, p. 76.
33
Bozon, Les Contes moralisés, éd. par Toulmin Smith et Meyer, p. 46. Mentionnons aussi
l’intitulé que porte le manuscrit München, Bayerische Staatsbibliothek, MS 19161 (Teg. 161)
de la vulgate: Liber Barlaam de vita Yosaphat (Le livre [de] Barlaam sur la vie de Josaphat). Voir
Le Roman de Barlaam et Josaphat, éd. par Sonet, i, p. 82.
34
Précisons qu’on ne trouve dans le Liber parabolarum qu’un seul apologue, celui de
‘L’Unicorne’; Eudes de Cheriton, Liber parabolarum, éd. par Hervieux, p. 217. ‘L’Archer et
le rossignol’ est placé seulement dans le manuscrit d’Arras (Arras, BM, MS 184). L. Hervieux
hésite à l’attribuer à Eudes, cependant, il est clair que le compilateur de la collection d’Arras le
perçoit comme une fable. Les apologues de la ‘Trompette de la mort’ et des ‘Trois amis’ font
partie des Sermones dominicales d’Eudes; Eudes de Cheriton, Sermones dominicales, éd. par
Hervieux, pp. 294, 317–18. Eudes insère dans ses sermons aussi bien des exempla donnés comme
véridiques que des fables; il est donc impossible d’affirmer avec certitude qu’Eudes considère la
‘Trompette de la mort’ et les ‘Trois amis’ comme des fables liées à l’apologue de ‘L’Unicorne’.
86 Victoria Smirnova

déjà dit, ne mentionne pas l’Histoire de Barlaam et Josaphat, non seulement


approuve l’utilisation des fables dans les sermons, mais aussi y recourt volon-
tiers.35 F. R. Whitesell dénombre 102 fables d’origine diverse dans les Sermones
vulgares. Le résultat est tout à fait comparable à celui obtenu pour le recueil
d’Eudes de Cheriton qui comprend 116 fables.36 Le continuateur anonyme de
Césaire de Heisterbach insère les apologues de Barlaam — sans le nommer —
dans le deuxième livre des Libri viii miraculorum, plus précisément, juste à la
fin, là où il regroupe des légendes bibliques, des fables profanes et des contes
pieux. Dans les Gesta Romanorum, qui, pour une grande part, se composent
d’exempla remontant à l’Antiquité profane, seul un des cinq apologues, celui
de ‘L’Unicorne’, est marqué, dans la plupart des manuscrits, comme étant narré
par Barlaam. Barlaam n’est pas mentionné non plus dans le Tractatus de diuersis
hystoriis romanorum qui se réfère à l’Antiquité profane.37

Question de terminologie
L’hypothèse supposant que la séparation définitive des apologues de l’histoire-
cadre aurait pu faire circuler les récits enchâssés en tant que ‘fables anciennes’
d’origine imprécise se confirme-t-elle par la terminologie que les prédicateurs
et les compilateurs d’exempla utilisent pour les désigner? Autrement dit, les
apologues sont-ils désignés comme fabulae dans les recueils de fables et de para-
boles qui ne mentionnent pas l’Histoire de Barlaam et Josaphat en tant que
source? Et, dans le même temps, cette dénomination, est-elle évitée dans les
recueils de récits ‘donnés comme véridiques’?

35
‘Infructuosas enim fabulas et curiosa poetarum carmina a sermonibus nostris debemus
relegare. […] Sed etiam fabulas ex quibus ueritatem edificationis dicimus interserere aliquando
ualemus. […] Hec diximus contra quosdam neophytos, qui sibi uidentur scioli, nec reprehendere
formidant illos qui per experientiam nouerunt quantus fructus proueniat ex huiusmodi fabu-
losis exemplis laicis et simplicibus personis, non solum ad edificationem, sed ad recreationem,
maxime quando fatigati et tedio affecti incipiunt dormitare’ (Nous devons éviter d’insérer dans
nos sermons des fables infructueuses et de curieuses chansons de poètes. […] Cependant, par-
fois, il est permis d’utiliser les fables dont nous pouvons tirer une vérité éducative. […] Nous le
disons contre certains néophytes se vantant en vain d’être instruits, pour qu’ils n’osent pas répri-
mander ceux qui savent par expérience combien les fables prises en tant qu’exempla sont fruc-
tueuses pour les laïcs et les personnes simples. Elles sont utiles non seulement pour l’instruction,
mais aussi pour la récréation, surtout quand l’auditoire affecté par la fatigue et l’ennui commence
à s’endormir). Jacques de Vitry, The Exempla, éd. par Crane, p. xlii.
36
Whitesell, ‘Fables in Mediaeval Exempla’, p. 351.
37
Tractatus de diversis hystoriis romanorum, éd. par Herzstein.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 87

Le terme fabula est un des plus ambigus du vocabulaire rhétorique du


Moyen Âge. D’un côté, les rhétoriciens et les encyclopédistes, suivant l’auto-
rité d’Isidore de Séville, qualifient de fabula un récit imaginé, composé soit
pour charmer l’auditoire, soit pour lui apprendre les propriétés des choses
naturelles, soit pour corriger les mœurs.38 En rejetant la fonction divertissante,
ils accordent à la fable une signification vraie qui est cachée sous le voile de la
fiction. Dans cette logique même, des récits bibliques peuvent être qualifiés,
sans aucune irrévérence, de fabulae: parmi les auteurs qui se réfèrent à l’Histoire
de Barlaam et Josaphat, Jacques de Vitry et Vincent de Beauvais le font, par
exemple.39 De l’autre côté, dans le langage courant de la littérature hagiogra-

38
Isidore de Séville, Etymologiae (1.40.1–3): ‘Fabulas poetae a fando nominaverunt, quia
non sunt res factae, sed tantum loquendo fictae. Quae ideo sunt inductae ut fictorum multorum
animalium inter se conloquie imago quaedam vitae hominum nosceretur. […] Sunt autem fabu-
lae aut Aesopicae aut Libisticae. Aesopica sunt cum animalia muta inter se sermocinasse fingun-
tur, vel quae animam non habent, ut urbes et montes, petrae et fulmina. Libisticae autem dum
hominum cum bestiis, aut bestiarum cum hominibus fingitur vocis esse commercium. Fabulas
poetae quasdam delectandi causa finxerunt, quasdam ad naturam rerum, nonnulas ad mores
hominum interpretati sunt’ (Les poètes choisirent le nom de fables du mot fari (parler), parce
que ce ne sont pas des faits, mais des choses inventées dans le discours. Elles sont introduites
pour qu’on puisse reconnaître l’image de la vie humaine dans la conversation imaginée de plu-
sieurs animaux. […] Les fables sont soit ésopiques soit lybiennes. Dans les fables ésopiques, on
imagine des animaux qui se parlent l’un à l’autre, ou les choses inanimées, comme des villes et des
montagnes, des pierres et la foudre. Les fables lybiennes représentent des êtres humains parlant
aux animaux, ou des animaux à des êtres humains. Certaines fables sont inventées pour le plaisir,
certaines pour la démonstration de la nature des choses, certaines pour qu’elles soient interpré-
tées dans le cadre moral), Etymologiarum sive Originum libri XX, éd. par Lindsay, i, 80–81.
39
Vincent de Beauvais reprend assez fidèlement le passage des Etymologiae, cité dans la
note 39, dans son Speculum doctrinale, iii. 113; Vincent de Beauvais, Speculum quadruplex, ii:
Speculum doctrinale, iii. cols 289–90. Jacques de Vitry: ‘Sed etiam fabulas ex quibus ueritatem
edificationis dicimus interserere aliquando ualemus. Sicut in libro Judicum xx. legimus de
rampno et lignis siluarum et de situ uite et oliue que lignis siluarum prefici renuerunt. Similiter
et iv. Reg. xiv. legimus quod Joas rex Israel dixit ad Amasiam regem Juda: “Carduus Lybani
misit ad cedrum que est in Lybano, dicens: Da filiam tuam, filio meo uxorem, transieruntque
bestie saltus et conculcauerunt carduum”. Licet hec sunt secundum litteram fabulosa, non tamen
fabulose dicta, sed ad reprehensionem elationis Amasie […]’ (Mais parfois, il est même permis
d’utiliser des fables dont nous pouvons tirer une vérité éducative. Nous lisons dans le Livre des
Juges, 20, du buisson d’épines et des arbres, de l’olivier et de la vigne qui refusèrent la principauté.
De même dans le Livre des Rois, ii. 14, nous lisons que Joas, roi d’Israël, dit à Amatsia, roi de
Juda: ‘L’épine du Liban envoya dire au cèdre du Liban: donne ta fille pour femme à mon fils!
Alors passèrent les bêtes sauvages et elles écrasèrent l’épine’. Bien que ce récit soit fabuleux selon
le sens littéral, il n’était pas raconté comme fable, mais pour reprocher à Amatsia son orgueil
[…].) Jacques de Vitry, The Exempla, éd. par Crane, p. xlii.
88 Victoria Smirnova

phique et exemplaire, le terme fabula ne signifie pas tout simplement la fiction,


mais souvent le mensonge futile et potentiellement nuisible, inadmissible dans
la prédication.40 C’est pourquoi la dénomination ‘fable’ n’est que très rarement
applicable aux récits chargés de morale et issus d’un contexte respectable: on
lui préfère des termes plus neutres et plus nobles, comme figura, parabola, ou
exemplum qui servent d’habitude à désigner le discours figuratif incarnant la
plus haute autorité.41
Si les liens entre l’histoire-cadre et les récits encadrés subsistent, le terme
fabula a dû être quasiment exclu du vocabulaire. Pourrait-on soupçonner saint
Barlaam et saint Damascène de dire des mensonges? Ou soupçonner les récits,
qui ont à ce point influencé saint Josaphat, d’être futiles et nuisibles? Dans la
version vulgate on trouve, en effet, les notions de parabola,42 d’exemplum,43 de
figura, de similitudo,44 et de typus.45 Jacques de Voragine n’utilise, dans son épi-
tomé, que le mot exemplum. Vincent de Beauvais semble être le seul à souligner

40
Voir Bernard d’Angers, Liber miraculorum sancte Fidis, éd. par Robertini, p. 73: ‘Que [les
miracles de sainte Foy], quia partim uulgarium fama celebrari uidebantur, partim quia inaudita
habebantur, haud aliter quam inanis fabule commenta a fide reiciebantur’ (Etant donné que
c’était des gens simples qui les racontaient et qu’ils contenaient des choses inouïes, on n’y croyait
pas, comme on ne croit pas aux fables futiles).
41
Jean Gobi le Jeune, Scala coeli, Prologus: ‘Cum enim, reuerende pater, impossibile sit
nobis superlucere diuinum radium nisi sub uelamine similitudinis et figure, ut testatur in angelica
ierarchia. Hinc est quod mentis nostre ratio in tam excellenti luce non figitur nisi eam aspiciat
per similitudines et exempla. Unde unigenitum Dei uerbum ut sedentes in tenebris et in umbra
mortis (Psaumes 107, 10; Luc 1, 79) ad celestia eleuaret in exemplis et parabolis loquebatur eo
quod fortius moueant, auidius audiantur, firmius retineantur, et a terris mentem erigant ad eter-
num, ut Augustinus attestatur’ (Il est impossible, ô père vénérable, que le rayon de la lumière
divine nous illumine, sinon sous le voile de la similitude et de la figure, comme en témoigne la
Hiérarchie angélique. C’est ainsi que la capacité rationnelle de notre esprit ne peut s’attacher à
une lumière si éminente, sinon en l’apercevant au moyen de comparaisons et d’exemples. Voilà
pourquoi le Verbe unique de Dieu parlait par paraboles et par exemples afin d’élever ceux qui
résident dans les ténèbres et l’ombre de la mort vers les réalités célestes). Jean Gobi le Jeune,
Scala coeli, éd. par Polo de Beaulieu, p. 165; la traduction est citée d’après Foehr-Janssens, La
Veuve en majesté, pp. 76–77.
42
Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 250.
43
Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 212.
44
Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 248.
45
Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 168. Le terme typus
désigne la signification figurative dans le sens général. Jacques de Billy utilise dans le même con-
texte le terme figura ( Jean Damascène, Vita sanctorum Barlaam eremitae et Iosaphat Indiae regis,
trad. par Billy, PL 73, cols 496–97).
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 89

la différence rhétorique entre les divers types d’apologues: il introduit dans les
titres des chapitres les termes de narratio 46 (l’apologue de la ‘Trompette de la
mort’, le plus proche d’une anecdote historique), de parabola,47 et une seule
fois, dans le titre du chapitre contenant l’apologue de ‘L’Archer et du rossignol’
(le plus proche d’une fable animalière), de fabula.48
Cependant, à la différence des auteurs des versions complètes ou des épi-
tomés, les compilateurs de recueils d’exempla, en introduisant les apologues
du Barlaam et Josaphat, se passent d’habitude de précisions terminologiques.
C’est seulement dans le Pomerium sermonum de tempore du prédicateur hon-
grois Pelbárt Temesvári qu’on trouve les termes exemplum et, une fois, parabola
(apologue du ‘Roi pour un an’). 49 Ajoutons que le rubricateur du manuscrit
de Chantilly du Ci nous dit50 nomme fabula l’apologue de ‘L’Archer et du ros-
signol’ (ainsi que d’autres fables animalières), tout en laissant sans rubrique
d’autres apologues de Barlaam. Dans les prologues des recueils d’Étienne de
Bourbon et d’Humbert de Romans, la tournure parabole et exempla désigne non
pas les récits concrets, mais plutôt la méthode de Barlaam.51 Le fait qu’Étienne
de Bourbon, Humbert de Romans et d’autres auteurs, dans l’œuvre desquels
la quantité de fables est infime, introduisent les apologues à côté des exempla
historiques et sur le même plan qu’eux, témoigne du fait qu’ils ne les perçoivent
pas en tant que fictions au sens de mensonges. L’histoire-cadre transforme les
récits de Barlaam en exempla authentiques, pleins d’autorité et dignes de foi. Et
c’est bien suffisant pour un prédicateur et pour son auditoire.
C’est dans un recueil de fables et de paraboles que le terme fabula émerge
d’une façon évidente. Dans le manuscrit dit de Londres des Contes moralisés de

46
Vincent de Beauvais, Speculum quadruplex, iv, p. 581.
47
Vincent de Beauvais, Speculum quadruplex, iv, p. 584.
48
Vincent de Beauvais, Speculum quadruplex, iv, 12, p. 582.
49
Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum, sans pagination. Voir aussi Pelbárt Temesvári,
Specimina et elenchus exemplorum quae in Pomerio serm., éd. par Katona.
50
Chantilly, Musée Condé, MS 26.
51
‘Attendens uir sanctus quantum ualerent exempla, predicando ei de quacumque materia
uerba sua ornabat parabolis et exemplis’ (Le saint homme savait combien les exempla avaient
de la valeur, voilà pourquoi il ornait sa prédication de paraboles et d’exempla); Étienne de
Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus, éd par Berlioz, i, p. 11. ‘Narrat Iohannes
Damascenus in libro qui dicitur Barlaam quod Barlaam […] loqutus est semper quasi per parab-
olas et exempla pulcherrima’ ( Jean Damascène raconte dans le livre dit Barlaam que Barlaam
[…] parla toujours comme en paraboles et en exempla très beaux). Humbert de Romans, De dono
timoris, éd. par Boyer, pp. 4–5.
90 Victoria Smirnova

Nicole Bozon, on trouve les rubriques fabula et narratio accompagnant certains


récits.52 Le rubricateur désigne comme fabulae de préférence des fables anima-
lières, des contes d’origine orientale (issus, par exemple, de la Disciplina cleri-
calis) et des contes profanes, proches des fabliaux. Les récits proches des anec-
dotes historiques reçoivent, quant à eux, la rubrique narratio.53 Dans ce cadre,
les apologues tirés de l’Histoire de Barlaam et Josaphat sont toujours désignés
comme fabulae. Il est séduisant de supposer que le rubricateur du manuscrit de
Londres ne connaissait par la légende intégrale et donc qu’il n’associait pas les
apologues en question avec l’Histoire de Barlaam et Josaphat: pour cela, il était
sensible au caractère fictif et au ‘goût oriental’ des apologues. Dans les recueils
de fables et paraboles, la tendance à la ‘fabulisation’ des apologues se dégage
assez clairement.

Modifications des apologues


Les modifications que les apologues subissent dans le contexte exemplaire
contribuent, elles aussi, à appuyer notre hypothèse. Les récits exemplaires
changent inévitablement en circulant de recueil en recueil. A priori, un apo-
logue perçu comme une fable ancienne devrait être plus exposé aux transfor-
mations de son sujet que celui dont les liens avec l’histoire-cadre sont toujours
forts: c’est ce que confirme le parcours des apologues de la ‘Trompette de la
mort’, des ‘Quatre coffrets’, et des ‘Trois amis’.
Dans la version vulgate, les apologues de la ‘Trompette de la mort’ et des
‘Quatre coffrets’ forment un seul épisode qui comporte deux volets. Déjà, chez
Jacques de Vitry, ils sont traités séparément. Les deux apologues ne sont réunis,
à notre connaissance, que dans le Speculum exemplorum anonyme et le Magnum
speculum exemplorum de Jean Major,54 qui se réfèrent directement et explicite-
ment à l’épitomé de Vincent de Beauvais. Jacques de Vitry, de plus, change le
préambule de l’apologue de la ‘Trompette de la mort’, en le combinant avec la
légende de l’épée de Damoclès.55 Le morne roi de Grèce est interrogé par son

52
London, Gray’s Inn Libr., MS 12. Voir Bozon, Les Contes moralisés, éd. par Toulmin
Smith et Meyer, pp. ix–x.
53
Le rubricateur le fait avec certaines conséquences, mais parfois il qualifie de fabulae des
récits apparentés aux chroniques ou bien des récits qui représentent des personnes historiques.
En même temps il peut désigner une fable animalière comme narratio.
54
Jean Major , Magnum speculum exemplorum, pp. 405–06.
55
Jacques de Vitry rapporte l’histoire de Damoclès dans les mêmes Sermones vulgares.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 91

frère, qui lui demande pourquoi il ne se réjouit jamais. Il envoie des hérauts avec
des trompettes devant la maison de son frère (comme signe de condamnation à
mort). Le frère se présente au palais où le roi le fait se déshabiller et le menace
avec des glaives. Après, le roi convoque des musiciens et des jongleurs et, à son
tour, demande à son frère pourquoi il est triste. La conclusion de l’apologue est
conforme à la version vulgate. Quant au préambule originel (à savoir le salut du
roi aux deux pauvres ermites), il est ajouté directement à l’histoire des quatre cof-
frets.
La version modifiée de l’apologue de la ‘Trompette de la mort’ apparaît chez
le (Pseudo-)Césaire de Heisterbach, Eudes de Cheriton, Guillaume Perault, et
chez les auteurs anonymes du Speculum laicorum et des Gesta Romanorum qui
suivent l’exemple de Jacques de Vitry. Aucune mention de Barlaam n’est faite
dans la quasi-totalité des cas (la seule exception est le Pomerium sermonum de
Pelbárt Temesvári). Il est possible que deux versions de l’apologue fonctionnent
comme deux exempla indépendants: le Speculum laicorum se réfère à l’histoire
‘De rege quodam numquam ridente’ (‘D’un roi qui ne rit jamais’) sans aucune
mention de source, tandis que le titre du second renvoie directement à Barlaam
(‘Legitur in Barlaam: De tuba mortis’). 56 Notons en passant que la légende
de l’épée de Damoclès aurait pu influencer de la même façon l’apologue de
‘L’Unicorne’: Jacques de Vitry et après lui, le (Pseudo-)Césaire de Heisterbach
et Nicole Bozon mentionnent, parmi d’autres dangers de l’abîme où le protago-
niste tombe en fuyant l’unicorne, une épée aiguë le menaçant.
Le premier à utiliser la version originelle de l’apologue de la ‘Trompette de
la mort’ semble être Étienne de Bourbon. Humbert de Romans, Jean Gobi,
Arnold de Liège et ses traducteurs, ainsi que l’auteur du Speculum exemplorum
et Jean Major font de même. Tous les recueils sont constitués, pour la majeure
partie, d’exempla donnés comme véridiques, et tous mentionnent régulière-
ment Barlaam (et même Damascène) comme la source des apologues. Étienne
de Bourbon, Humbert de Romans, Arnold de Liège, et Jean Gobi se réfèrent
aux événements de l’histoire-cadre; Jean Gobi et Arnold de Liège connaissent
la Legenda aurea; Jean Major et l’auteur du Speculum exemplorum, comme nous
l’avons déjà mentionné, puisent dans le Speculum historiale. Il semble que tous
aient dû prendre en considération soit la version vulgate soit un épitomé: les

C’est l’exemplum no. viii dans l’édition de Th. F. Crane ( Jacques de Vitry, The Exempla, éd. par
Crane, p. 3)
56
Le Speculum laicorum, éd. par Welter, pp. 35, 62.
92 Victoria Smirnova

liens toujours existants entre l’histoire-cadre et les récits encadrés assurent,


dans la plupart des cas, l’absence de modifications majeures.
Si les liens avec l’histoire-cadre sont rompus, le récit enchâssé présente des
transformations visibles, surtout dans le préambule de l’apologue, comme le
montre celui des ‘Trois amis’. Selon la version vulgate, le protagoniste de cet
apologue a une grande dette de dix mille talents qu’il ne peut pas solder.57 Pour
les fabulistes latins du Moyen Âge, ce préambule avait dû paraître insuffisant
ou peu captivant, c’est pourquoi il se trouve souvent modifié. Chez Jacques de
Vitry, le (Pseudo-)Césaire de Heisterbach, et Hermann de Bologne,58 le pro-
tagoniste devient un serviteur perfide qui trahit son seigneur. 59 Dans les Gesta
Romanorum, c’est un sénéchal qui, après avoir maltraité la fille de l’empereur,
refuse de la restituer à son père (notons que grâce au personnage de la pauvre
fille de l’empereur, cet apologue s’apparente à un conte).60 Et, encore une fois,

57
‘Uenerunt ergo die quadam terribiles quidam ac precipui milites festinantes celeritate
multa hunc ad imperatorem ducere rationem redditurum pro debito decem milium talentorum’
(Un jour des guerriers redoutés et puissants vinrent, se hâtant de le conduire à l’empereur, afin
qu’il réglât la dette de dix mille talents); Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz
Palma, p. 250.
58
Notons que Hermann de Bologne donne une version épitomé de l’Histoire de Barlaam et
Josaphat; l’apologue des ‘Trois amis’ est le seul que le compilateur insère dans son recueil excepté
l’épitomé. A. Hilka, malheureusement, abrège l’épitomé dans son édition, donc il est impossible
pour nous de dire si l’apologue des ‘Trois amis’ en fait partie ou pas. Voir Hermann de Bologne,
Das Viaticum narrationum, éd. par Hilka, p. 12.
59
‘Unde legimus quod quidam uir potens et magnus cuidam seruo suo castrum custodien-
dum commisit in quo hostes domini recepit, propter quod dominus eum suspendi iussit’ (Nous
lisons qu’un homme noble et puissant chargea son vassal de garder une ville. Le vassal y accueillit
des ennemis de son maître, c’est pourquoi ce dernier ordonna de le pendre); Jacques de Vitry,
The Exempla, éd. par Crane, p. 55. Le (Pseudo-)Césaire de Heisterbach dit à peu près la même
chose.
60
‘Narratur quod quidam imperator nobilis habuit filiam pulcram sibi similem, quam com-
misit seneschalco suo custodiendam et peregre profectus est. Promisit seneschalco magnum
honorem si bene eam custodiret usque ad reditum suum. At ille oblitus est precepto domini
sui, tractauit eam male, intantum quod misera facta est et totam pulcritudinem amisit. Post
modicum tempus misit imperator nuncios seneschalco pro filia sua sibi reddenda ; non reddit ;
tandem peremptore citatus est’ (On raconte qu’un empereur noble avait une très belle fille qui
lui ressemblait. Il la confia à son sénéchal et s’en alla à l’étranger. Il promit au sénéchal beaucoup
d’honneurs, s’il s’en occupait bien jusqu’à son retour. Le sénéchal oublia les ordres de son maître
et maltraita la fille au point qu’elle devint pauvre et perdit toute sa beauté. Peu après, l’empereur
envoya ses messagers au sénéchal pour qu’il rendît la fille. Mais celui-ci ne le fit pas et fut donc
condamné à mort); Gesta Romanorum, éd. par Oesterley, p. 588.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 93

l’auteur du Speculum exemplorum, Martin de Troppau, ainsi que Jean Major,


gardent le préambule originel.
Pour les recueils dont les auteurs prennent en compte l’histoire-cadre, les
modifications du sujet ne sont pas caractéristiques. Mais on y trouve parfois des
personnages nouveaux qui, en principe, affectent non pas la trame de l’exem-
plum, mais sa moralisation. Par exemple, Étienne de Bourbon introduit le per-
sonnage de l’ami tenant l’échelle dans l’apologue de ‘L’Unicorne’. Si nous sup-
posons qu’Étienne de Bourbon a bien connu l’Histoire de Barlaam et Josaphat,
ce changement peut avoir été délibéré: étant donné que l’ami est interprété
comme le Christ ou le prédicateur, il serait logique pour le Dominicain de
souligner, de cette façon, l’importance de la prédication qui fait la réputa-
tion de son Ordre. Après lui, le personnage de l’ami apparaît dans les Gesta
Romanorum et leur traduction française Le Violier des histoires rommaines.61
Martin de Troppau, quant à lui, ajoute le quatrième ami dans l’apologue des
‘Trois amis’. Ce personnage est interprété comme le Diable. Jean Gobi invente
le personnage du Sage, qui tire la moralité de l’apologue du Prince qui n’a
jamais vu de femmes.

Modifications des moralités


Les modifications des moralités des apologues qui sont, d’ailleurs, plus nom-
breuses que celles du sujet, sont communes pour tous les types de recueils, en
dépit de leur contenu et du traitement des apologues qui leur est propre. Rien
d’étonnant à cela, si l’on considère la plasticité du récit exemplaire et sa capa-
cité à servir les différents besoins rhétoriques et idéologiques des prédicateurs
médiévaux. Dans certains cas, la modification de la moralité est même indis-
pensable pour que l’apologue puisse fonctionner dans la littérature exemplaire.
C’est le cas, par exemple, du seul apologue qui n’appartient pas à Barlaam,
mais au magicien païen Théodas. En racontant l’histoire du prince élevé dans
l’obscurité, Théodas affirme que même un homme qui n’a jamais vu de femmes
serait inévitablement séduit en en rencontrant une. Autrement dit, Josaphat va
être séduit comme les autres. Cette leçon, sans doute, doit être perçue comme
inappropriée pour la prédication. Ainsi, l’apologue du ‘Prince qui n’a jamais vu
de femmes’, une fois mis dans un recueil d’exempla ou dans un sermon, perd
son narrateur (Théodas n’est jamais mentionné) et change de moralité. La pas-
sion pour les femmes dont Théodas parle sans la désapprouver, comme d’une

61
Le Violier des histoires rommaines, éd. par Hope, p. 420.
94 Victoria Smirnova

chose naturelle, est désormais considérée comme un signe de la culpabilité de


la chair. Jean Gobi, par exemple, en tire la moralité suivante: ‘Nunc uideo quod
oculi ante omnia sunt raptores uelocissimi, consiliatores turpissimi, proditores
nequissimi, et sunt porte mortis et ianue inferni’ ( Je vois maintenant que les
yeux sont les ravisseurs les plus habiles, les conseillers les plus vicieux, les traîtres
les plus odieux; ce sont les portes de la mort et l’entrée de l’enfer).62 De plus,
la passion pour les femmes est forte, mais, comme le dit déjà Jacques de Vitry,
non pas invincible. Il faut justement fuir la compagnie de séductrices: ‘Ecce
quomodo hominis natura in hac parte prona est ad lapsus et idcirco qui uolunt
esse continentes necesse est ut fugiant mulieres’ (Voici combien la nature de
l’homme est prompte, dans ce cas, à la chute. Alors, ceux qui veulent être chastes
doivent fuir les femmes).63 C’est ainsi que l’apologue de Théodas rejoint ceux
de Barlaam pour être traité de la même façon.
Mais revenons aux autres apologues. Les récits enchâssés de l’Histoire de
Barlaam et Josaphat enseignent par une comparaison, en assimilant un événe-
ment raconté soit à un certain événement de l’histoire-cadre, soit à une règle
générale de comportement humain. Il est peu étonnant que, dans les recueils
d’exempla de toutes sortes, nous voyions, en premier lieu, la substitution des
comparants et la modification des comparés. Prenons l’exemple de l’apologue
de ‘L’Archer et du rossignol’. Dans la version vulgate, l’archer est comparé à
des idolâtres stupides: ‘Aiebat enim quia similes sunt ydolorum adoratores
uiro saggitario qui comprehendit unam deminutissimis auiculis […]. Sic ergo
stulti sunt et illi qui confidunt in ydolis’ (Il disait que les adorateurs des idoles
ressemblaient à un archer qui avait attrapé un tout petit oiseau […]. Ceux qui
croient aux idoles sont aussi stupides).64 Jacques de Vitry dénonce, à l’aide de
cet apologue, les maîtres qui inventent des nouveautés inouïes (en les assimi-
lant à l’oiseau) afin de séduire les naïfs (symbolisés par le protagoniste).65 Jean

62
Jean Gobi le Jeune, Scala coeli, éd. par Polo de Beaulieu, p. 202.
63
Jacques de Vitry, The Exempla, éd. par Crane, p. 38.
64
Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 212.
65
‘Vani sunt [magistri] et singulares qui nova et inaudita adinvenire nituntur, probatos at
antiquos magistros sequi nolentes […]. Verum plerumque nova et inaudita fingunt, quibus, licet
incredibilia sint, fidem adhibent curiosi et stolidi auditores, similes cuidam homini qui, cum
cepisset phylomenam, dixit ei phylomena: Tu vides quam valde sum parva …’ (Vains et singuli-
ers sont ceux qui inventent des choses nouvelles et inouïes et ne veulent pas suivre les maîtres
sûrs et anciens […]. Ils imaginent des choses nouvelles et inouïes que croient les gens curieux et
stupides, bien qu’elles soient invraisemblables. Ceux-ci sont pareils à un homme qui attrapa un
rossignol, et le rossignol lui dit: Tu vois comme je suis petit …); Jacques de Vitry, The Exempla,
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 95

Gobi l’insère dans une partie de son recueil consacrée au regard qui peut, entre
autres, nous amener à commettre des erreurs. L’oiseau signifie, cette fois, les
trésors séculiers; et le chasseur, l’homme avare et cupide.66 L’auteur des Gesta
Romanorum, quant à lui, va plus loin: il remplace une comparaison générale
des idolâtres et de l’archer par la moralisation systématique de tous les éléments
de l’apologue (même les flèches de l’archer sont moralisées!), et donne ensuite
deux interprétations. Dans la première, l’archer est comparé au pécheur, et
l’oiseau au Christ;67 dans la deuxième, l’archer représente, comme chez Jean
Gobi, l’homme avare. Pelbárt Temesvári dit que l’archer est l’image des sots qui
aspirent à une vie longue, qui vivent dans le péché et, donc, perdent la béatitude
éternelle et qui, toutefois, se croient sauvés!68
Ajoutons que la moralisation, qui reprend systématiquement tous les élé-
ments du récit, se trouve non seulement dans les recueils qui traitent les apo-
logues en question comme des fables anciennes, 69 mais aussi, bien que plus

éd. par Crane, p. 10.


66
‘Philomena est mundi prosperitas, uenator auarus qui eam apprehendens tria hec dicta
probat: Primum quod impossibile comprehendere non conetur ad plures habendas. Secundum
ut non doleat de irrecuperabili, et ideo quia diuitie sunt labiles, eis perditis non est dolendum.
Tercium quod non credat uerbo incredibili. Ad quorum oppositum conatur auarus’ (Le ros-
signol représente les richesses du monde, le chasseur représente l’homme avare qui en les désirant
prouve trois choses: premièrement, on ne doit pas aspirer à toucher, afin d’accumuler les rich-
esses, à ce qu’il est impossible de posséder; deuxièmement, parce que la richesse est temporaire,
on ne doit pas pleurer sa perte; troisièmement, on ne doit pas croire à une parole invraisembla-
ble. Un homme avare désire toujours le contraire de tout ceci); Jean Gobi le Jeune, Scala coeli, éd.
par Polo de Beaulieu, p. 208.
67
‘Moralizacio. Carissimi, iste potest dici quilibet bonus Christianus, qui in baptismo a pec-
cato originali est lotus, in quo baptismo sagittas acutas recepit scilicet uirtutes contra diabolum,
mundum et carnem. Accepit philomenam scilicet dominum nostrum Ihesum Christum, quando
renunciauit diabolo et omnibus pompis eius. Qui miro modo dulciter cantauit, quando ora-
cionem patri celesti pro genere humano infudit, sed miser peccator istam philomenam, scilicet
dominum nostrum Ihesum Christum, cogitauit occidere, quotiens cogitauit peccatum mortale
perpetrare’ (Moralisation. Mes chers frères, celui-ci peut désigner chaque bon chrétien, lavé par
le baptême du péché originel. Avec le baptême il reçut les flèches aiguisées, c’est-à-dire les vertus
pour lutter contre le diable, le monde et la chair. Il prit le rossignol, c’est-à-dire notre Seigneur
Jésus-Christ, quand il renonça au diable et à tous ses fastes. Le Christ chanta très doucement
quand il prêcha au genre humain le Royaume de son Père céleste. Mais le pécheur se propose
de tuer ce rossignol, c’est-à-dire le Christ, chaque fois qu’il se propose de commettre un péché
mortel); Gesta Romanorum, éd. par Oesterley, p. 554.
68
Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum, p. 65.
69
Par exemple, Jacques de Vitry (et ensuite le (Pseudo-)Césaire de Heisterbach) donnent,
96 Victoria Smirnova

rarement, dans des recueils constitués pour la plupart d’exempla historiques.


Étienne de Bourbon, par exemple, introduit dans l’apologue du ‘Jeune homme
riche et de la fille pauvre’ une moralisation absente dans la version vulgate:
‘Attende quis sit iste filius ; que filia repudiata, scilicet mundi gloria ; filia lau-
dans, religio ; pater, Deus’ (Considère qui est ce jeune homme, qui est la fille
méprisée, c’est-à-dire la gloire mondaine; qui est la fille en prière, c’est à dire la
religion; qui est le père, c’est-à-dire Dieu).70
Les modifications des moralités ne sont pas seulement thématiques. Elles
affectent de même les relations existantes entre le récit et sa leçon. Les apolo-
gues enchâssés de la vulgate enseignent souvent par une comparaison person-
nelle: Josaphat, son père ou Barlaam servent de comparés dans les apologues
de la ‘Trompette de la mort’, du ‘Roi pour un an’, du ‘Jeune homme riche et
la fille pauvre’, du ‘Roi et les pauvres heureux’, du ‘Jeune bélier’, et du ‘Prince
qui n’a jamais vu de femmes’. Mais les prédicateurs médiévaux, à la différence
de Barlaam, s’adressent à un public très large, ils doivent donc fonder la com-
paraison sur une analogie plus globale, visant non pas une personne particu-
lière, mais un ou plusieurs groupes sociaux. Par exemple, le sage conseiller de
l’apologue du ‘Roi pour un an’, que Barlaam compare avec lui-même,71 devient,
dans le Speculum exemplorum, l’image d’un saint docteur ou d’un prédica-
teur.72 Étienne de Bourbon présente le protagoniste de l’apologue du ‘Jeune
Homme riche et de la fille pauvre’ (comparé dans la vulgate à Josaphat) comme
un exemple de la dévotion exceptionnelle. La fille pauvre, dont le personnage

dans l’apologue de la ‘Trompette de la mort’, la moralisation des glaives que le roi fait pointer sur
la poitrine de son frère: ils signifient la crainte des péchés, la crainte de la mort et la crainte de
l’enfer. Jacques de Vitry, The Exempla, éd. par Crane, p. 17; Die Wundergeschichten des Caesarius
von Heisterbach, éd. par Hilka, iii, p. 136.
70
Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus, éd. par Berlioz, iii,
p. 290.
71
‘Consiliarium autem bonum qui omnia uera nota fecit et salutaria edocuit studia sapi-
entem ac prudentem regem meam estima paruitatem qui bonam et rectam uiam ueni demons-
trare tibi, introducens te in eterna et infinita bona’ (Le bon conseiller, qui fit connaître toutes les
vérités et enseigna les leçons salutaires au roi sage et prudent, c’est moi, infime, qui suis venu te
montrer la bonne voie, te menant vers les biens éternels et infinis); Barlaam et Iosaphat: versión
vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 258.
72
‘Sapientem qui regem premonuit de consuetudine ciuitatis quemlibet sanctum doctorem
et predicatorem’ (Le sage qui prévint le roi de la coutume de la ville [signifie] un saint docteur ou
un prédicateur); Speculum exemplorum, iv. 18. Dans le même Speculum exemplorum, un autre
apologue fondé sur la comparaison personnelle, celui du ‘Jeune homme riche et de la fille pau-
vre’, reste tout simplement sans aucune leçon; Speculum exemplorum, iv, 19.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 97

n’est pas interprété dans la vulgate, incarne, quant à elle, la prière idéale.73 Le roi
pieux de l’apologue de la ‘Trompette de la mort’, comparé dans la vulgate avec
Josaphat, devient le modèle de l’humilité et de la crainte de Dieu. Il sert donc
d’exemple à toute la chrétienté. Si Barlaam, en assimilant le statut du protago-
niste et celui de son destinataire, encourage Josaphat dans sa décision de renon-
cer au monde, ou le loue pour sa capacité au-delà des apparences, le prédicateur
médiéval illustre la règle générale (on doit assidûment prier, on doit craindre
Dieu, etc.) par une de ces manifestations particulières.
Les relations entre le récit exemplaire et sa moralisation, propres à la vulgate,
peuvent être qualifiées de métaphoriques, fondées sur la comparaison. Suite à
la dépersonnalisation des apologues dans la littérature exemplaire, les relations
métaphoriques sont remplacées, au moins en partie, par les relations synecdo-
chiques, fondées sur l’induction.74 Certains auteurs d’exempla, comme Jacques
de Vitry et Étienne de Bourbon, introduisent des moralisations absentes dans
la version vulgate: cela, comme Cl. Bremond et autres le montrent, fait paraître
l’exemplum hybride, synecdochique pour une part et métaphorique pour une
autre part, utilisant l’induction à côté de l’analogie.75 Il est donc impossible d’af-
firmer que les relations entre l’apologue et sa leçon dépendent essentiellement
du type de recueil dans lequel ils figurent. Dans la même collection d’exempla,
les apologues de Barlaam peuvent être aussi bien transformés en exempla ‘par
synecdoque’ (et donc être mis en parallèle avec des anecdotes historiques au
moins vraisemblables) que moralisés (et donc rejoindre les fables et paraboles).

Histoire-cadre
D’après ce qui précède, il n’est pas étonnant que seuls les compilateurs d’exem-
pla pour la plupart historiques, tirés de plusieurs sources écrites, se réfèrent à

73
L’apologue intitulé ‘De filio diuitis et filia pauperis assidue laudantibus Deum’ (‘Du fils
d’un riche et de la fille d’un pauvre qui prient assidûment Dieu’) est placé dans le chapitre vi ‘De
deuotione eius [orationis]’ (‘De la dévotion de la prière’): la prière, dit Étienne, doit être ‘deuota
ut thymiama boni odoris, sicut uirgula fumi ex aromatibus, etc., Can. 3 e, ut cera et thus lique-
fiens in igne’ (dévouée comme le parfum odoriférant (Exode 25. 6), comme des colonnes de
fumée au milieu des aromates (Cantique 3. 6), comme la cire et l’encens se liquéfiant dans le feu);
Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus, éd. par Berlioz, iii, p. 289.
74
Bremond, Le Goff, et Schmitt, L’Exemplum, pp. 114–19. Les relations métaphoriques
sont propres aux paraboles et similitudines, tandis que les exempla historiques sont d’habitude
synecdochiques. Voir aussi Strubel, ‘Exemple, fable, parabole’.
75
Bremond, Le Goff, et Schmitt, L’Exemplum, p. 117.
98 Victoria Smirnova

l’histoire-cadre. Le premier à le faire semble être Étienne de Bourbon: si Jacques


de Vitry ouvre aux apologues une large voie dans la prédication, Étienne le fait
pour l’histoire-cadre. Ensuite, viennent Arnold de Liège, l’auteur anonyme
du Sertum florum moralium,76 Jean Gobi, l’auteur anonyme du Liber exemplo-
rum ad usum praedicantium (celui-ci, à la différence des autres, n’insère dans
son recueil que des épisodes de la vie de Josaphat),77 et Pelbárt Temesvári. Ils
n’en tirent que sept récits: la rencontre de Josaphat avec un vieillard et avec
des malades, et sa tentation, qui pourrait être découpée en deux ou trois récits
distincts — Josaphat tenté par les démons du magicien Théodas; Josaphat
tenté par la princesse païenne; Josaphat ayant la vision du paradis et de l’en-
fer. Ensuite, le détour que Barlaam prend pour pénétrer dans le palais du roi
Avennir (il prétend avoir une pierre merveilleuse, en sous-entendant la foi chré-
tienne). On le trouve uniquement dans la Scala coeli. Le septième récit est celui
de l’âge de Barlaam, mentionné seulement par Pelbárt. Ce n’est pas beaucoup
si l’on considère la complexité de l’histoire-cadre, qui contient en abondance
des histoires frappantes et édifiantes: par exemple, l’histoire d’un courtisan qui
est secrètement chrétien;78 le martyre de deux moines tués par le roi païen;79 ou
encore la ruse de Josaphat qui fait de Nachor, le faux Barlaam, le défenseur de la
foi chrétienne.80 Tous ces épisodes de l’histoire-cadre sont négligés.
Il est difficile de dégager les causes de la popularité de certains sujets et de
la marginalisation des autres, d’autant plus que dans les épitomés de Jacques de
Voragine et de Vincent de Beauvais, les récits mentionnés sont présents. Mais il
est probable que l’efficacité d’un récit exemplaire aux yeux des prédicateurs et
des compilateurs d’exempla soit affirmée non seulement par son univocité, sa
brièveté, son authenticité, sa véridicité etc., mais aussi par le rôle qu’il joue dans
le texte original.81 Plus l’épisode en question est pertinent pour le développe-
ment du sujet, plus il a de la chance de se trouver dans un recueil d’exempla. Si

76
Sertum florum moralium (BnF, MS lat. 13475), un recueil d’exempla, compilé par un
moine cistercien, étudiant du collège Saint-Bernard de Paris, en 1346.
77
Liber exemplorum ad usum predicantium, éd. par Little, pp. 16–17, 90.
78
Jean Damascène, Vita sanctorum Barlaam eremitae et Iosaphat Indiae regis, trad. par Billy,
PL 73, cols 453A–455D.
79
Jean Damascène, Vita sanctorum Barlaam eremitae et Iosaphat Indiae regis, trad. par Billy,
PL 73, cols 456A–D.
80
Jean Damascène, Vita sanctorum Barlaam eremitae et Iosaphat Indiae regis, trad. par Billy,
PL 73, cols 546C–547B.
81
Sur la notion d’efficacité, voir Berlioz, ‘Le Récit efficace’.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 99

c’est le cas, le choix des compilateurs n’est guère étonnant. Ceux-ci se réfèrent
aux moments les plus dramatiques de la vie de Josaphat et de sa vita, à savoir
le premier changement radical dans son âme et les épreuves finales qu’il doit
traverser pour devenir un chrétien parfait. Sans la rencontre de Josaphat avec
le vieillard et les malades, la mission de Barlaam aurait été impossible. Sans la
victoire de Josaphat sur la tentation la plus forte, sa conversion n’aurait pas été
éprouvée et, par conséquent, n’aurait pas été accomplie. Ce sont les événements
essentiels qui font l’armature et le noyau de la légende, comme nous le montre
un petit épitomé du Große Seelentrost, qui ne comprend qu’un squelette narra-
tif très simpliste (y compris les épisodes en question), entourant les apologues
choisis. En ce qui concerne le récit de la pierre merveilleuse, qui est, lui aussi,
important pour le développement du sujet, il s’apparente aux apologues grâce à
une comparaison symbolique qu’il contient. Jean Gobi est le seul qui s’y réfère
et en même temps un des rares auteurs qui utilisent la majorité des apologues
du Barlaam et Josaphat.

Résumé de la légende entière


Le résumé de la légende dans son intégralité ne se trouve que chez Étienne de
Bourbon et Humbert de Romans. Jean Gobi, qui donne l’épitomé de l’autre
recueil de fables enchâssées, à savoir le Roman des Sept Sages de Rome, ne le fait
pas pour Barlaam et Josaphat. Citons le résumé d’Étienne de Bourbon:
Item ad hoc est quo dicit Iohannes Damascenus in libro Barlaam quod, precepiente
Domino, missus est dictus Barlaam heremita ad conuertendum Iosaphat, filium
Regis Auentur, et eum instruendum in moribus et fide. Attendens uir sanctus
quantum ualerent exempla, predicando ei de quacumque materia uerba sua ornabat
parabolis et exemplis, usquequo, relinquens eum perfectum in fide et moribus, pro-
mouit eum ad tantam perfectionem per hoc, quod ad ultimum, relicto regno suo
quo post multos agones ad fidem conuerterat, fugiens et sequens dictum Barlaam
ad heremum, factus perfectissimus heremita, fine beato, ad Dominum migrauit in
Egypti deserto.82

(Ajoutons à cela ce que dit Jean Damascène dans le livre dit de Barlaam. Par l’ins-
piration de Dieu, l’ermite Barlaam fut envoyé pour convertir Josaphat, fils du roi
Avennir, et pour l’instruire dans les mœurs et dans la foi. Le saint homme savait
combien les exempla avaient de la valeur. Voilà pourquoi il ornait sa prédication de
paraboles et d’exemples. Et après il laissa Josaphat dans la foi et les mœurs parfaites,

82
Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus, éd. par Berlioz, i, 11.
100 Victoria Smirnova

et cette perfection était si élevée que Josaphat quitta son royaume après l’avoir
converti au christianisme avec beaucoup de troubles, il fuit et suivit Barlaam dans
le désert en Egypte où il passa en Dieu par la mort glorieuse.)

Humbert de Romans dit la même chose à peu près dans les mêmes termes.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat est mentionnée dans les prologues des deux
recueils à côté des célèbres démonstrations de l’efficacité de l’exemplum. Tout
d’abord, un récit très célèbre attribuée à Bède le Vénérable: il s’agit d’un prédi-
cateur peu cultivé qui réussit à convertir les païens grâce aux exempla. Ensuite,
le succès immense des sermons de Jacques de Vitry, remplis d’exempla. Et enfin,
la conversion de saint Augustin qui se montre plus sensible aux exempla racon-
tés par ses amis qu’à la prédication de saint Ambroise. C’est l’exemplum en tant
qu’instrument rhétorique qui est préconisé.
Mais si on consulte la version vulgate, on se rend compte que les apologues
célèbres y occupent une place secondaire. Pour convertir le fils du roi païen,
Barlaam se sert plutôt d’exhortations, de raisonnements et de matière biblique,
que de récits exemplaires. Josaphat réagit différemment aux préceptes et aux
apologues: sa réaction aux préceptes est toujours plus forte. Les apologues le
réjouissent, il les écoute avec plaisir, il les trouve justes et opportuns;83 mais ce
sont les sujets dogmatiques et les exposés de l’Écriture qui lui procurent un
vrai changement dans l’âme et qui le font pleurer d’émotion.84 Tout en ornant

83
‘Ista quidem omnia bene et conuenienter dixisti sed illud uolo discere: quis est dominus
tuus’ (C’est bien dit et d’une façon appropriée, mais maintenant je veux savoir qui est ton dieu);
Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 168. ‘Hac ergo Iosaphat ualde
libenter suscepta parabola ait: Quam uerus est iste sermo et quam bene coaptus! Ne queso, pigri-
teris tales semper michi typos subrogare’ (Après avoir écouté de bonne grâce cette parabole,
Josaphat dit: Que ton sermon est vrai et approprié! C’est pourquoi je te prie de ne pas hésiter
à me proposer de tels types); ibid., p. 250. ‘Rursus ergo Iosaphat ait: Bonum sit tibi a Domino
Deo tuo o sapientissime hominum. Letificasti namque animam meam congruis ac dignis ser-
monibus tuis [...]’ ( Josaphat dit encore: Que ton Dieu t’accorde le bonheur, ô toi le plus sage des
hommes! Tu égayas mon âme par tes paroles dignes et convenables); ibid., p. 256.
84
‘Ut ergo audiuit uerba ista regis filius, lumen illustrauit eius animum qui surgens de
throno suo pre gaudio complexatus est Barlaam’ (Quand le fils du roi entendit cette parole,
la lumière éclaira son âme. Il sauta de son trône et embrassa Barlaam); Barlaam et Iosaphat:
versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 184. ‘His auditis Iosaphat uehementer compunc-
tus corde totusque lacrimis perfusus ait ad senem: aperta mihi omnia nota fecisti et luculenter
perorasti terribilem hanc atque mirabilem narrationem’ (Ayant écouté tout cela, Josaphat, pro-
fondément touché et tout en larmes dit à Barlaam: tu rendis tout cela clair pour moi et délivras
parfaitement une parole terrible et merveilleuse); ibid., p. 210. ‘Si multo tempore meditareris
sapientissime quatinus propositarum enodacionem questionum nobis dissolueris non melius
id facere posse michi uideris quam talia dicendo qualia paula ante protulisti. Auctorem enim
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 101

le discours et en le rendant plus plaisant à écouter et plus clair, ainsi que plus
nuancé pour son auditoire, les apologues ne convertissent pas Josaphat au chris-
tianisme: ce sont les raisonnements menés au cours de la catéchèse qui le font.
Les récits exemplaires dans l’Histoire de Barlaam et Josaphat n’illustrent pas ni
n’expliquent les concepts doctrinaux, ils prouvent plutôt la pertinence de cer-
taines dispositions morales pour Josaphat lui-même. Le fait que les apologues,
considérés d’habitude comme le sel de la légende, ne soient pas indispensables,
est prouvé par l’apparition, à la fin du xiv e siècle, de l’épitomé fait par Pierre
Nadale (Petrus de Natalibus) dans lequel tous les apologues sont supprimés.85
Mais — ne nous étonnons pas! — la plupart des épitomés du texte prolixe de
la vulgate réservent une place primordiale aux apologues au détriment des pré-
ceptes. Vincent de Beauvais abrège considérablement le sermon de Barlaam en
faveur des apologues, dont chacun — à la différence de la vulgate — forme un
chapitre individuel. Jacques de Voragine est plus radical: il résume toutes les
exhortations de Barlaam en une ou deux phrases.

Dans le melting pot de la littérature exemplaire, tout se passe comme si les apo-
logues incarnaient toute la prédication de saint Barlaam. La lecture sélective de
la légende change inévitablement la répartition des discours et permet aux élé-
ments secondaires (quoique passionnants et émouvants) de prendre une place
principale. Les apologues qui n’étaient que des outils aidant à charmer l’audi-
teur, tout en lui faisant la leçon, deviennent l’instrument le plus efficace de la
conversion. Ainsi, le triomphe de la foi chrétienne est remplacé, en quelque
sorte, par le triomphe du discours exemplaire. De toute façon, qu’est-ce qu’un
recueil de fables enchâssées, sinon un triomphe de la fonction discursive du
récit? Il est donc peu étonnant que, dans la littérature exemplaire qui aspire
toujours à un tel succès (malgré toute sa variation interne), le recueil de fables
enchâssées connaisse une telle fortune.

cunctorum et datorem bonorum deum docuisti esse, incomprehensibilem eciam cogitationibus


humanis gloriam magnificencie eius sermonibus euidentissimis ostendisti et quam non aliter
quis ualet hanc apprehendere nisi ipse Deus compertum sibi placet reuelauerit’ (Si, ô le plus sage
des hommes, tu avais longtemps médité sur le moyen de me rendre compréhensible la réponse
aux questions proposées, tu n’aurais pu le faire mieux que tu ne le fis en me disant ceci. Car
tu m’appris que Dieu est l’auteur de toutes choses et le dispensateur des biens. Tu me démon-
tras par des raisonnements clairs que la gloire de sa majesté excède la compréhension humaine,
et qu’aucune raison ne peut le saisir, à moins que Dieu ne révèle ses jugements par sa propre
volonté); Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina, éd. par Cruz Palma, p. 296.
85
Le Roman de Barlaam et Josaphat, éd. par Sonet, i, 92–93.
102 Victoria Smirnova

Annexe

La Table récapitulative
La table donne l’idée de la répartition des récits tirés de la Légende de Barlaam
et Josaphat dans les recueils d’exempla médiévaux. La première bande hori-
zontale renvoie aux récits selon Patrologia latina et l’Index exemplorum de F.
Tubach.86 La première colonne renvoie aux recueils d’exempla avec leurs dates
de composition. Pour chaque recueil, nous indiquons le numéro du livre et du
chapitre (ou de la page); nous citons également le titre du chapitre, ainsi que la
référence explicite à la Légende faite par le compilateur du recueil.

Josaphat rencontre un lépreux et un aveugle (no Tubach 486). PL 73, col. 458C.

Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis I, VII. Cap. I, De morte timenda.


materiis predicabilibus (1250–1261). Secundo timenda est mors propter moriendi
necessitatem et ineuitabilitatem. Exemplum ad
hoc de Iosaphat obuiante leproso et ceco. Dicit
Iohannes Damascenus in Barlaam… p. 272.

Josaphat voit un vieillard décrépit (no Tubach 486). PL 73, col. 459A.

Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis I, VII. Cap. I, De morte timenda. Secundo


materiis predicabilibus (1250–1261). timenda est mors propter moriendi necessitatem
et ineuitabilitatem. Exemplum ad hoc de
Iosaphat obuiante leproso et ceco. Dicit
Iohannes Damascenus in Barlaam… p. 272.
Ibid. I, VII. Cap. VII, De memoria mortis. Secundo
ualet ad contemptum mundi... Unde legitur in
Barlaam... pp. 302–03.

Pierre merveilleuse. PL 73, col. 460C.


Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli n° 958. De Uerbo Dei. Octauo est infirmantium
(1323–1330). curatiua. Legitur in Barlaam quod cum uenisset
ad filium regis scilicet Josaphat… pp. 573–74.

86
Tubach, Index exemplorum.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 103

Trompette de la mort: le roi et son frère i (no Tubach 4994). PL 73, col. 462D–463B.
Jacques de Vitry, Exempla dans les n° 42. Cf. l’épée de Damoclès... pp. 16–17.
Sermones vulgares (1226–1240).
Césaire de Heisterbach (-pseudo), 10 (II, n°41). De rege, qui singulis annis conuiuio
Libri octo miraculorum (après 1227). magno conuocato tristis apparuit, qui fratri causam
huius ab eo petenti per similitudinem declarauit.
Cf. l’épée de Damoclès. p. 135–36.
Eudes de Cheriton, Sermones dominicales n° LXXV. De rege Graecie et fratre suo (Cf. l’épée
(1219). de Damoclès). p. 294.
Guillaume Perault, Summa virtutum ac viti- De donis. Et uarietate, acerbitate et infinitate
orum (fin de la première moitié du xiiie s.). penarum infernalium (Cf. l’épée de Damoclès).
pp. 409–10.
Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis I, VI. Cap. IIII. De timore future iudicii. De
materiis predicabilibus (1250–1261). generali citatione et peremptoria. De rege osculante
duos pauperes heremitas, flente coram curia sua
et de fratre perterrito as uocem tubarum. Dicit
Iohannes Damascenus in Barlaam… p. 205.
Humbert de Romans, Tractatus de vi. De terribilibus circa iudicium. Loquitur
habundantia exemplorum sive De dono Damascenus in libro Barlaam dicens[…], pp. 112–
timoris (1263–1277). 13; ix. De timore presenti periculi,
De periculo ex parte status, pp. 201–02.
Speculum laicorum (1279–1292). Cap. XXVIII 198, De die Iudicii [et eius timore].
Legitur in Barlaam… p. 43; Cap. XXXIX 303, De
gaudio uero et falso (Cf. l’épée de Damoclès), p. 62.
Arnold de Liège, Alphabetum narrationum n° CCCCXV, Iudicium ultimun debet timeri.
(dans An Alphabet of Tales) (1297–1308). ii, 284.
Gesta Romanorum (fin xiiie–xive s.). Cap. 143. De timore extremi iudicii
(Cf. l’épée de Damocles). pp. 498–500.
Liber ad status (premier tiers du xive s.). i, cap. 9. Qualiter se habeat specialiter ad pauperes.
Unde refert Barlaam... ff. 104v–105r.
Nicole Bozon, Contes moralisés n°43. Fabula ad idem (Quod multos excecat
(première moitié du xive s.). gaudium mundiale). p. 59.
Ci nous dit (1313–1330). Cap. 363, 1–4 (Cf. l’épée de Damoclès).
Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli n° 609. De Iudicio Extremo. Iudicium extremum
(1323–1330). debet timeri propter rationes sequentes:
Primo quia est consolationis mundane
repressiuum... Fefert Damascenus. p. 422.
Sertum florum moralium (1346). Iudex. Rex ille de quo narrat Iohannes Damascenus
in gestis Barlaam et Iosaphat... ff. 69v–70r.
Recull de eximplis e miracles per A-B-C Cap. CCCLXII. Iudicium ultimum debet timeri.
(xve s.). i, 331.
104 Victoria Smirnova

Clemente Sánchez, Libro de los exemplos Cap. 192 (121). Honorari sunt serui dei, quamuis
(1400–1420) pauperes, et amandi. ii, 275.
Speculum exemplorum (1490). IV, 15.
Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum n°149. Hiem. 3Q. Tertio denique fertur
de tempore (1489–1497). Damascenus scripsisse in Uita Barlaam…
(Cf. l’epée de Damoclès). p. 28.
Jean Major, Magnum speculum exemplorum Judicium Dei, Exemplum V. pp. 475–76.
(1610).

Quatre coffrets: le roi et son frère II (no Tubach 967). PL 73, col. 463B–464B.

Jacques de Vitry, Exempla dans les n° 47, pp. 18–19.


Sermones vulgares (1226–1240).
Speculum laicorum (1279–1292). Cap. LXIV 458. De paupertate pro Christi
amore meritoria. Legitur in libro Barlaam… p. 88.
Liber ad status (premier tiers du xive s.). I, cap. 14. Contra eos qui honorant exterius
apparentes. Unde narrat Barlaam... f. 106r.
Nicole Bozon, Contes moralisés n° 84. Fabula (ad Quod sancti et saluandi per
(première moitié du xive siècle). aduersitatem uariam comprobantur). p. 106.
Ci nous dit (1313–1330). Cap. 217, 1–16.
Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli (1323–1330). n° 128. De Baliuo. Debet esse humilis.
Refert Barlaam... p. 216.
Tractatus de diuersis hystoriis romanorum Cap. 29. De quatuor capsis. p. 13.
(avant 1326).
Speculum exemplorum (1490). IV, 15.
Jean Major, Magnum speculum exemplorum Judicium Dei. Exemplum V. pp. 475–76.
(1610).

Archer et rossignol (cf. no Tubach 322). PL 73, col. 479B–480A.

Jacques de Vitry, Exempla dans les n° 18, pp. 10–11.


Sermones vulgares (1226–1240).
Eudes de Cheriton, Liber parabolarum n° LXXVII, p. 252.
(après 1225).
Arnold de Liège, Alphabetum narrationum n° CXCI. Consilio bono est aquiescendum.
(dans An Alphabet of Tales) (1297–1308). i, 132–33.
Gesta Romanorum (fin xiiie–xive s.). Cap. 167. De audiendo bono consilio. pp. 554–55.
Liber ad status (premier tiers du xive s.). V, cap. Contra non acquiescentes consilio.
Unde refert Barlaam... f. 135r.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 105

Nicolas de Bergame (Mayno de Mayneri?), Dial. C. De leone venatore… Unde fabulatur de


Dialogus creaturarum (après 1326). Philomena <…> ut legitur in Barlaam…
Ci nous dit (1313–1330). Cap. 213, 1–17.
Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli (1323–1330). n° 101. De Aspectu. Nono est stulticie causatiua.
Refert Barlaam… pp. 207–08.
Recull de eximplis e miracles per A-B-C Cap. CLXII. Consilio bono est adquiescendum.
(xve s.). Eximpli <...> segons se recompta en la historia
de Barlam. i, 148–49.
Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum n° 376, 65 R. Circa tertum de exemplificatione
de tempore (1489–97). nota quod in historia Barlaam quam compilauit
Iohannes Damascenus inter cetera exempla ponit
quiddam exemplum de fatuitate hominum male
uiuentium… p. 44.
Violier des histoires rommaines (1521). n° 137 [136]. Le bon conseil qui est à tenir. pp. 418–19.

Unicorne (no Tubach 5022). PL 73, col. 493A–494A.

Jacques de Vitry, Exempla dans les n° 134, p. 60.


Sermones vulgares (1226–1240).
Césaire de Heisterbach (-pseudo), 9 (II, 40). De uita hominis, quam fragilis et
Libri octo miraculorum (après 1227). labilis finietur. p. 135.
Eudes de Cheriton, Liber parabolarum n° XLV. Contra uiuentes in deliciis. pp. 217–18.
(après 1225). n° CXXXVIII, Narrat Bernardus...
(Sermones dominicales), pp. 318–19.
Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis I, IX. Cap. IIII. De presenti pericolo timendo.
materiis predicabilibus (1250–1261). De periculoso statu peccatorum in mundo. De
homo fugiente a facie unicornis. Peccator similis
est homini de quo dicit Barlaam Iosaphat, ut
dicit Iohannes Damascenus... pp. 354–55.
Humbert de Romans, Tractatus de habun- IX. De timore presenti periculi. De periculo
dantia exemplorum sive De dono timoris ex parte status. Pertinet quod scriptum in
(1263–1277). Barlaam... pp. 202–03.
Speculum laicorum (1279–1292). Cap. LII b. De mortis memoria. Refert Barlaam
in libro suo… 388, p. 76.
Arnold de Liège, Alphabetum narrationum n° DCXXIII. Pericula mundi sunt pertimenda.
(dans An Alphabet of Tales) (1297–1308). We rede in ‘Dictis Barlaam’... ii, 416–17.
Gesta Romanorum (fin xiiie–xive s.). Cap. 168. De eterna dampnatione.
Barlaam narrat… p. 556.
Liber ad status (premier tiers du xive s.). V, cap. 1. De periculis huius uite. Narrat autem
Barlaam... ff. 132r–132v.
106 Victoria Smirnova

Nicole Bozon, Contes moralisés n° 29. Fabula (ad.De periculoso transitu hujus
(première moitié du xive s.). mundi), Barleam conte en son livere… pp. 46–47.
Ci nous dit (1313–30). Cap. 195, 1–16.
Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli (1323–1330). n° 435. De Deliciis. Refert Valerianus… p. 347 (Le
manuscrit Paris, BnF, lat. 16517 donne “Barlaam”).
Tractatus de diuersis hystoriis romanorum Cap. 30. De bestia et baratro. p. 13.
(avant 1326).
Libro de los gatos (après 1350). Cap. XLVIII, p. 557.
Recull de eximplis e miracles per A-B-C Cap. DLI. Pericula mundi sunt postponenda.
(xve s.). Eximpli de Barlam <…> segons ques recompte
en los dits de Barlam. ii, 164–65.
Speculum exemplorum (1490) IV, 16.
Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum n° 377, 65R. p. 44.
de tempore (1489–97).
Violier des histoires rommaines (1521). n° 138 [137]. D’eternelle dampnation.
Barlaam raconte… p. 420.
Jean Major, Magnum speculum exemplorum Delitiae, Exemplum IV. pp. 238–39.
(1610).

Trois amis (no Tubach 2407). PL 73, col. 495B–495D.


Jacques de Vitry, Exempla dans les n° 120, p. 55.
Sermones vulgares (1226–1240).
Césaire de Heisterbach (-pseudo), 25 (II, n° 57). Quam amicabiliter misertus est
Libri octo miraculorum (après 1227). nobis Deus. pp. 144–45.
Eudes de Cheriton, Sermones dominicales n° CXXXVII, pp. 317–18.
(1219).
Martin de Troppau, Sermones cum Cap. XI B. Legitur in Barlaam quem scripsit
promptuarium (1261–1279). Damascenus, quod dixit ad Iosaphat….
Speculum laicorum (1279–1292). Cap. VI. De amore mundi et eius fallaciis.
Legitur in libro Barlaam… 35, p. 11.
Gesta Romanorum (fin xiiie–xive s.). Appendix, 182 germ. 11, p. 588.
Liber ad status (premier tiers du xive s.) III, cap. 1. De fallacia huius mundi. Refert
Barlaam... f. 116r.
Libro de los gatos (après 1350). Cap. XLVIII, p. 557.
Hermann de Bologne, Viaticum narrationum Cap. IV, Amicitia falsa in necessitate hominem
(xve s.). demittit. pp. 12–13.
Recull de eximplis e miracles per A-B-C Cap. LI. Amicus in necessitate probatur.
(xve s.). Eximpli de tres amichs, segons que recompte
Damacenus. i, 55–56
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 107

Speculum exemplorum (1490). IV, 17.


Jean Major, Magnum speculum exemplorum Amicus, Exemplum I. pp. 16–17.
(1610).

Roi pour un an (no Tubach 2907). PL 73, cols 496A–497A.

Jacques de Vitry, Exempla dans les n° 9, p. 3.


Sermones vulgares (1226–1240).
Césaire de Heisterbach (-pseudo), 12 (II, n°43). De illo, qui tantum in terra laborat,
Libri octo miraculorum (après 1227). quod in celo ipso multa bona possideat. p. 137.
Speculum laicorum (1279–1292). Caput XXXI 252. De elemosina [et eius
effectibus]. Legitur in vita Barlaam. De principe
quodam pro uno anno electo. p. 51.
Arnold de Liège, Alphabetum narrationum Cap. DCLV. Prouidentia in futurum est
(dans An Alphabet of Tales) (1297–1308) laudabilis. Barlaam tellis… ii, 437–38.
Gesta Romanorum (fin xiiie–xive s.) Cap. 224, app. 28. pp. 630–31.
Liber ad status (premier tiers du xiv s.)
e
I, cap. 21. De prudentia necessaria in prelatis.
Refert Barlaam... f. 108r.
Ci nous dit (1313–30) Cap. 501, 1–10.
Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli (1323–1330). n° 135. De Bauilo. Decimo debet esse prouidus.
Unde refert Barlaam… pp. 218–19.
Tractatus de diuersis hystoriis romanorum Cap. 31. De regibus per unum annum
(avant 1326). regnantibus. p. 14.
Recull de eximplis e miracles per A-B-C Cap. DLXXVIII Prouidentia in futurum est
(xve s.). laudabilis. Eximpli de Barlam <...> segons que
recompte Barlam. i, 187.
Clemente Sánchez, Libro de los exemplos 366 (310), Prudens debet sua disponere in
(1400–20). futura. Leise in Barlaam… p. 518.
Speculum exemplorum (1490). IV, 18. Rursus ait Barlaam…
Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum de n° 395, 74Q. Ad idem parabola ibidem ponit
tempore (1489–1497). talis… p. 46.
Jean Major, Magnum speculum exemplorum Mundus, Exemplum II. Rursus ait Barlaam...
(1610). p. 607

Roi et les pauvres heureux (n° Tubach 4390). PL 73, col. 503D-505C.

Jacques de Vitry, Exempla dans les Sermones n° 78, pp. 35–36.


vulgares (1226–1240).
Clemente Sánchez, Libro de los exemplos 350 (288) Pauperes leta regnum Dei
(1400–20). acquirut. pp. 491–92.
108 Victoria Smirnova

Jeune homme riche et fille pauvre (n° Tubach 4755). PL 73, cols 506A–507B.

Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis III, VII. Cap. VI. De oratione satisfactoria.
materiis predicabilibus (1250–1261). De deuotione euius. De filio diuitis et filia
pauperis assidue laudantibus Deum. Item,
dicit Iohannes Damascenus in Barlaam…
pp. 289-90.
Liber ad status (premier tiers du xive s.) III, cap. 24. De gratiarum actione.
Refert Barlaam... ff. 121r-121v.
Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli (1323–1330). n° 557. De Gratiarum actionibus.
Refert Barlaam… pp. 406-07.
Speculum exemplorum (1490). IV, 19.

Jeune bélier. PL 73, cols 513 A–B.


Cet apologue semble être complètement ignoré des prédicateurs.

Âge de Barlaam (n° Tubach 484). PL 73, col. 510 B–C.

Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum n° 394, 74 Q. Annos in uanitate mundi con-


de tempore (1489–97). sumptos non computat quidam senex sanctus.
Pro his exemplum finale legitur in historia
Barlaam quam uidel. Damascenus scriptsit,
ut habetur etiam in legenda.... pp. 45–46.

Prince qui n’a jamais vu de femmes (n° Tubach 5365). PL 73, cols 562 A–C.

Jacques de Vitry, Exempla dans les n° 82, pp. 37–38.


Sermones vulgares (1226–1240).
Arnold de Liège, Alphabetum narrationum n° CLXX. Conscupientia carnalis naturaliter
(dans An Alphabet of Tales) (1297–1308) ad mulierem inclinatur. We rede in þe storie of
Barlaam… i, 119.
Jean Gobi le Jeune, Scala Coeli (1323–30). n° 89. De Aspectu. Aspectus irregulatus
et specialiter mulierum multa mala facit
in homine. Quarto est omnium bonorum
depredatio. Unde legitur in Barlaam… p. 202.
Jean Herolt, Promptuarium exemplorum (1440). L 24.
Recull de eximplis e miracles per A-B-C Cap. CXLI. Cinscupientia carnalis ad mulierem
(xve s.) naturaliter inclinatur. Eximpli <…> segons ques
recompte en la historia de Barlam. i, 132–33.
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 109

Tentation de Josaphat: Démons de Théodas (n° Tubach 2838).


PL 73, col. 562D–563D; 568B–D.

Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis I, IV. Cap. IX. De consideratione et meditatione


materiis predicabilibus (1250–1261). pene inferni. Item legitur in Barlaam, ut dicit
Iohannes Damascenus… pp. 131-32.
Liber exemplorum ad usum predicantium n° 27. De cruce. Inuenimus in libro gestorum
(1275–1279), Barlaam et Iosaphat seruorum Dei… pp. 16–17.

Tentation de Josaphat: fille de roi. PL 73, cols 564A–566D.

Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis I, IV. Cap. IX. De consideratione et meditatione


materiis predicabilibus (1250–1261). pene inferni. Item legitur in Barlaam, ut dicit
Iohannes Damascenus… pp. 131-32.
Arnold de Liège, Alphabetum narrationum n° DCCXLIX. Temptat uirum mulier ultro
(dans An Alphabet of Tales) (1297–1308). se ingerens. We rede in 'Historiis Barlaam'…
ii, 500-01.
Liber ad status (premier tiers du xive s.) IV, cap. 6. Legitur enim in historia Iosaphat...
f. 127v.
Sertum florum moralium (1346) Infernus. Legitur in gestis Barlaam et Iosaphat,
ut dicit Iohannes Damascenus… ff. 86r-86v.

Tentation de Josaphat: vision du paradis et de l’enfer (n° Tubach 2839).


PL 73, cols 566D–567D.

Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis I, IV. Cap. IX. De consideratione et meditatione


materiis predicabilibus (1250–1261). pene inferni. Item legitur in Barlaam, ut dicit
Iohannes Damascenus… pp. 131-32.
Liber exemplorum ad usum predicantium n° 148. De gaudio celesti. Legitur in libro
(1275–1279). gestorum Barlaam et Iosaphat seruorum Dei…
pp. 90-91.
Sertum florum moralium (1346) Infernus. Legitur in gestis Barlaam et Iosaphat,
ut dicit Iohannes Damascenus… ff. 86r-86v.

Barlaam convertit Josaphat à l’aide de paraboles et d’exemples (n° Tubach 486).

Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis Prologus. Dicit Iohannes Damascenus in libro


materiis predicabilibus (1250–1261). Barlaam… p. 11.
Humbert de Romans, Tractatus de Prologus. Narrat Iohannes Damascenus in
habundantia exemplorum sive De dono libro qui dicitur Barlaam… pp. 4–5.
timoris (1263–1277).
110 Victoria Smirnova

Œuvres citées
Manuscrits et documents archivistiques
Arras, Bibliothèque municipale, MS 184
Chantilly, Musée Condé, MS 26
London, Gray’s Inn Library, MS 12
München, Bayerische Staatsbibliothek, MS 19161 (Teg. 161)
Paris, Bibliothèque nationale de France, MS fonds latin 6368
Paris, Bibliothèque nationale de France, MS fonds latin 13475

Sources primaires
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126–27, 2 vols (London: Early English Text Society, 1904–05)
Barlaam et Iosaphat: versión vulgata latina; con la traducción castellana de Juan de Arce
Solorceno (1608), éd. par Oscar de la Cruz Palma (Madrid: Consejo superior de inves-
tigaciones científicas, 2001)
Bernard d’Angers, Liber miraculorum sancte Fidis, éd. par Luca Robertini (Spoleto:
Centro italiano di studi sull’Alto medioevo, 1994)
Bozon, Nicole, Les Contes moralisés de Nicole Bozon, frère mineur, éd. par Lucy Toulmin
Smith et Paul Meyer (Paris: Firmin-Didot, 1889)
Césaire de Heisterbach, Die Fragmente der Libri viii miraculorum des Caesarius
von Heisterbach, éd. par Aloys Meister, Römische Quartalschrift für christliche
Altertumskunde und Kirchengeschichte, 14 (Roma: Herder/Spithöver, 1901)
—— , Die Wundergeschichten des Caesarius von Heisterbach, éd. par Alfons Hilka, vol. iii
(Bonn: Peter Hanstein, 1937)
Ci nous dit: composition de l’Écriture sainte, éd. par Gérard Blangez, 2 vols (Paris: Société
des anciens textes français, 1979–86)
Clemente Sánchez, El Libro de los exemplos por a.b.c., éd. par María del Mar Gutiérrez
Martínez, Memorabilia 12, 13, 15 (2009–2011).
Étienne de Bourbon, Tractatus de diuersis materiis predicabilibus, éd. par Jacques Berlioz,
3 vols, vols  i and iii publ. dans Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis,
124–124B; vol. ii publ. dans Instrumenta Lexicologica Latina, 141 (Turnhout:
Brepols, 2002–06)
Eudes de Cheriton, Liber parabolarum, dans Les Fabulistes latins, depuis le siècle d’Auguste
jusqu’à la fin du Moyen Âge, éd. par Léopold Hervieux, 5 vols (Paris: Firmin-Didot,
1893–99), iv: Eudes de Cheriton et ses dérivés (1896), pp. 173–255.
—— , Sermones dominicales, dans Les Fabulistes latins, depuis le siècle d’Auguste jusqu’à la fin
du Moyen Âge, éd. par Léopold Hervieux, 5 vols (Paris: Firmin-Didot, 1893–99), iv:
Eudes de Cheriton et ses dérivés (1896), pp. 265–343.
Les Fabulistes latins depuis le siècle d’Auguste jusqu’à la fin du Moyen Âge, éd. par Léopold
Hervieux, 5 vols (Paris: Firmin-Didot, 1893–99; réimpr. New York: Franklin, 1965)
L’Histoire de Barlaam et Josaphat 111

Gesta Romanorum, éd. par Hermann Oesterley (Berlin: Weidmann, 1872)


Der große Seelentrost: ein niederdeutsches Erbauungsbuch des vierzehnten Jahrhunderts, éd.
par Margarete Schmitt (Köln: Böhlau, 1959)
Hermann de Bologne, Das Viaticum narrationum des Henmannus Bononiensis: mit liter-
argeschichtlichen Anmerkungen, éd. par Alfons Hilka (Berlin: Weidmann, 1928)
Herolt, Jean, Sermones discipuli de tempore et sanctis […] cum promptuario exemplorum
(Lyon: Du Ry, 1529)
Humbert de Romans, Humberti de Romanis De dono timoris, éd. par Christine Boyer,
Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis, 218 (Turnhout: Brepols, 2008)
Isidore de Seville, Etymologiarum sive Originum libri XX, éd. par Wallace Martin Lindsay,
2 vols (Oxford: Clarendon Press, 1911)
Jean Damascène, Vita sanctorum Barlaam eremitae et Iosaphat Indiae regis, trad. par Jacques
de Billy, dans Patrologiae cursus completus: series latina, éd. par Jacques-Paul Migne,
221 vols (Paris: Migne, 1844–64), lxxiii. 1: Vitae Patrum (1849), cols 443–604
Jacques de Vitry, The Exempla or Illustrative Stories from the Sermones vulgares of Jacques
de Vitry, éd. par Thomas F. Crane (London: Nutt, 1890)
Jacques de Voragine, Legenda aurea, éd. par Giovanni Paolo Maggioni, 2 vols (Firenze:
Galluzzo, 1998)
Jean Gobi le Jeune, La Scala coeli de Jean Gobi, éd. par Marie-Anne Polo de Beaulieu (Paris:
Centre national de la recherche scientifique, 1991)
Jean Major, Magnum speculum exemplorum (Douai: Belleri, 1610)
Le Lai de l’oiselet: An Old French Poem of the Thirteenth Century, éd. par Lenora D.
Wolfgang (Philadelphia: American Philosophical Society, 1990)
Liber exemplorum ad usum predicantium: saecula xiii, compositus a quodam fratre Minore
Anglico de Provincia Hiberniae, éd. par Andrew G. Little, British Society of Franciscan
Studies, 1 (Aberdeen: Typis academicis, 1908)
‘Libro de los gatos’, in Escritores en prosa anteriores al siglo xv, éd. par Pascual de Gayangos,
Biblioteca de Autores Españoles, 51 (Madrid: Rivadeneyra, 1860), pp. 543–60
Martin de Troppau, Sermones de tempore et de sanctis [… ] cum promptuario exemplorum
(Strasbourg: Husner, 1484)
Nicolas de Bergame, Dialogus creaturarum, moralisatus, jucundus, fabulis plenus (Gouda:
Leeu, 1481)
Pelbárt Temesvári, Pomerium sermonum de sanctis hyemales et estivales (Hagenau: [s.éd.],
1515)
—— , Specimina et elenchus exemplorum quae in Pomerio serm. Quadragesimalium et De
tempore fr. Pelbarti de Temesvár occurrunt, éd. par Ludovic Katona (Budapest: [s.éd.],
1903)
Perault, Guillaume, Summa virtutum ac vitiorum, 2 vols (Paris: Boullenger, 1648)
Recull de eximplis e miracles, gestes e faules e altres ligendes ordenades per A-B-C, tretes de un
manuscrit en pergamí del començament del segle xv, ara per primera vegada estampades,
éd. par Marian Aguiló y Fuster, 2 vols (Barcelona: Verdaguer, 1881)
Le Roman de Barlaam et Josaphat, éd. par Jean Sonet, Bibliothèque de la Faculté de phi-
losophie et lettres, 6–7, 2 vols en 3 tomes (Leuven: Presses universitaires de Louvain,
1949; Namur: Bibliothèque de la Faculté de philosophie et lettres; Paris: Vrin,
112 Victoria Smirnova

1950–52), i: Recherches sur la tradition latine et française (1949); ii.  1: La Version


anonyme française: texte critique (1950); ii.  2: La Version anonyme française: études
critiques et mise en prose (1952)
Speculum exemplorum (Strasbourg: [Husner], 1490)
Le Speculum laicorum: édition d’une collection d’exempla composée en Angleterre à la fin du
xiiie siècle, éd. par Jean-Thiébaut Welter (Paris: Picard, 1914)
Tractatus de diversis hystoriis romanorum et quibusdam aliis, éd. par Salomon Herzstein
(Erlangen: Junge, 1893)
Vincent de Beauvais, Speculum quadruplex: siue, Speculum maius, 4 vols (Douai: Belleri,
1624; réimpr. Graz: Akademische Druck-und Verlaganstalt, 1964–65)
Le Violier des histoires rommaines, éd. par Geoffroy Hope (Genève: Droz, 2002)

Études secondaires
Berlioz, Jacques, ‘Le Récit efficace: l’exemplum au service de la prédication (xiiie–xve siè-
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Bremond, Claude, Jacques Le Goff, et Jean-Claude Schmitt, L’Exemplum, Typologie des
Sources du Moyen Âge Occidental, 40 (Turnhout: Brepols, 1982)
Derron, Marianne, Des Strickers ernsthafter König: ein poetischer Lachtraktat des Mittel-
alters; eine motivgeschichtliche Studie zur ersten Barlaam-Parabel (Frankfurt am Main:
Peter Lang 2008)
Foehr-Janssens, Yasmina, La Veuve en majesté: deuil et savoir au féminin dans la littérature
médiévale (Genève: Droz, 2000)
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Incunabula Short Title Catalogue < http://www.bl.uk/catalogues/istc/index.html>
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Le Goff, Jacques, et Nicolas Truong, Une histoire du corps au Moyen Âge (Paris: Levi, 2003)
Polo de Beaulieu, Marie-Anne, ‘Les Exempla d’origine orientale dans la Scala coeli de
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transmission et ouverture, éd. par Frédéric Bauden, Aboubakr Chraïbi, et Antonella
Ghersetti (Genève: Droz, 2008), pp. 173–93
Strubel, Armand, ‘Exemple, fable, parabole: le récit bref figuré au Moyen Âge’, Moyen Âge,
94 (1988), 341–61
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Verdon, Jean, Rire au Moyen Âge (Paris: Perrin, 2001)
Whitesell, Frederick R., ‘Fables in Mediaeval Exempla’, Journal of English and Germanic
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