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SOMMAIRE

PREAMBULE _______________________________________________ 3

I. Les équilibres politiques sont globalement respectés ___________ 4

II. Analyse structurelle de l’organigramme du gouvernement _______ 4

1. Seulement 6 ministres reconduits, uniquement parmi les indépendants _____________ 4

2. Aucun Ministre d’État, mais des changements protocolaires du même ordre _______ 5

3. Moins de « super-portefeuilles », au profit de nouveaux départements portant les


leviers stratégiques du nouveau modèle de développement _________________________ 5

4. Quelques changements de dénomination à remarquer, qui soulignent plus encore les


objectifs du nouveau modèle de développement __________________________________ 7

III. Profils des ministres du nouveau gouvernement _______________ 8

IV. CONCLUSION GÉNÉRALE __________________________________ 9

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PREAMBULE

Pour introduire cette étude, qui va principalement se fonder sur la comparaison systématique du
nouveau gouvernement avec le précédent, afin d'en déduire ce que pourra être la politique
gouvernementale, j’aimerais commencer par souligner quelques différences importantes entre
les scrutins de 2016 et de 2021.

Le taux de participation satisfaisant à ce triple scrutin, quoiqu’encore inférieure à celui du


tournant démocratique de 1997, fait néanmoins de cette élection une belle réussite. On peut
également noter la rapidité avec laquelle les résultats ont été annoncés, avec une estimation
officielle du Ministère de l’Intérieur le soir-même, ce qui est une première au Maroc, et qui
constitue également un beau signal pour notre démocratie en devenir. Une participation encore
supérieure en 2026 sera une des marques mesurables de la réussite de l’actuel mandat quant à
sa capacité à mobiliser les citoyens dans le débat public.

À la suite de ce scrutin, la constitution a été scrupuleusement respectée, puis le gouvernement


a bien été nommé avant le Discours d’Ouverture de la nouvelle session parlementaire par le Roi,
ce qui on s’en rappelle fut loin d’être le cas lors du précédent scrutin, qui avait abouti à la
situation pénible des 6 mois de blocage et de tractations pour former une majorité
gouvernementale et un gouvernement relativement pléthorique (40 portefeuilles).

Cette année, les négociations ont nécessairement été âpres, puisque la composition exacte du
gouvernement a dû attendre la nomination des maires et des présidents de Région, et enfin la
formation de la Chambre des Conseillers pour que chaque parti puisse totalement connaitre et
faire valoir son poids politique, mais la majorité gouvernementale a bien compris qu’elle serait
potentiellement désavouée si elle ne parvenait pas à s’entendre et à annoncer un nouveau
gouvernement avant le discours de Sa Majesté. Pari tenu, et le gouvernement est d’ores et déjà
sur les starting blocks.

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I. Les équilibres politiques sont globalement respectés

Commençons cette analyse en se penchant simplement sur les grands équilibres de ce


gouvernement, par parti politique : Le gouvernement compte 25 membres en comptant son chef
Aziz Akhannouch, chef du RNI. Les portefeuilles ministériels sont répartis à égalité entre RNI et
PAM (7 ministres chacun), puis environ moitié moins de ministres Istiqlal. Les indépendants
constituent une part non négligeable avec 7 ministres.

A la lecture de ces quelques chiffres, il est observable que le PAM s’est extrêmement bien
défendu et s’est taillé la part du lion dans ces négociations. Mais on peut également faire
l’hypothèse, puisque le gouvernement s’enrichira très prochainement de Secrétariats d’État, que
le Parti de l’Istiqlal – et probablement également le RNI – s’attendent à obtenir quelques
portefeuilles secondaires.

II. Analyse structurelle de l’organigramme du gouvernement

1. Seulement 6 ministres reconduits, uniquement parmi les indépendants

Les quatre ministres indépendants nommés en avril 2017 sont reconduits, respectivement à
l’Intérieur (A. Laftit, 54 ans), au MAEC (N. Bourita, 52 ans), à la Santé (K. Aït Taleb, 55 ans) et au
Secrétariat Général du Gouvernement (M. Hajoui, dont je préfère écrire ici l’immense expertise
plutôt que l’âge, cela me semble la moindre des décences face au dévouement de ce grand
homme). De plus, les Habous (A. Toufiq, en poste depuis 2002), et l’Administration de la Défense
Nationale (A. Loudiyi, en poste depuis 2010) demeurent également inchangés.

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2. Aucun Ministre d’État, mais des changements protocolaires du même ordre

À l’époque des gouvernements El Othmani, le titre de Ministre d’État avait été décerné à M.
Ramid, poids lourd du gouvernement Benkirane (2011 – 2016) avec un Ministère des Droits de
l’Homme où il n’a pas exactement donné une très bonne image du Maroc par ses propos jugeant
toute une minorité sexuelle dont il était censé défendre les droits. Autant dire que ce poste et
ce ministère étaient vraiment issus d’une négociation interne entre courants du PJD, et le fait
qu’il n’y ait aujourd'hui aucun ministère d’État indique que la nouvelle coalition n’est pas
disposée à renouveler l’expérience.

Dans le même ordre d'idée, Nizar Baraka, chef de l’Istiqlal, remplace A. Amara à l’Equipement et
l’eau, mais dans l’ordre protocolaire, il est placé 5 crans au-dessus de son prédécesseur, juste
après le Ministère de l’Économie et de Finances, et avant l’Agriculture, l’Éducation Nationale ou
la Santé. Cette place protocolaire est sans aucun doute honorifique et méritée, pour ce
talentueux chef de parti de seulement 57 ans, petit-fils de Allal El Fassi, et qui a déjà à son actif 5
ans de responsabilités ministérielles, ainsi que 5 autres années au CESE.

3. Moins de « super-portefeuilles », au profit de nouveaux départements portant les


leviers stratégiques du nouveau modèle de développement

Malgré son ordre protocolaire réhaussé, l’important portefeuille précédemment occupé par A.
Amara a été séparé en deux ministères distincts, et N. Baraka a dû accepter que la Logistique et
les transports partent dans un ministère dédié et nouvellement créé, que mènera Mohamed
Abdeljalil (PI). À noter que le transport aérien lui revient, alors qu’il était autrefois intégré au
département du tourisme, ce qui témoigne là aussi d’une remise en cohérence de l’action
publique.

Ce qui se constate à l’Équipement peut être observé dans plusieurs autres ministères. Ainsi, le
portefeuille occupé par MH. Elalami est redistribué sur au moins un département supplémentaire
: celui de Ghita Mezzour (PAM), à la Réforme administrative (qui sort du MEF et retrouve un
ministère de plein exercice), renforcée désormais par le portefeuille de la transition numérique,
et donc logiquement par l’Agence de développement digital (ADD) qui travaillait déjà sur les
thématiques de la e-gouvernance et de la e-participation.

Coté enseignement, Chakib Benmoussa (63 ans, Ancien président de la CSMD, ancien président
du CESE, 3 ans à la tête du ministère de l'intérieur, 8 ans ambassadeur), nouveau ministre de
l’Éducation nationale, prend le portefeuille des Sports (auparavant à la Culture, la jeunesse et la
communication), mais le portefeuille de l’Enseignement supérieur va désormais être piloté par
un ministère de plein exercice, doté de surcroit de la Recherche scientifique et de l’Innovation,
avec à sa tête Abdellatif Miraoui (PAM), ancien président de l'Université Cadi Ayyad de
Marrakech (2011-2019) et membre de la Commission Spéciale sur le Modèle de Développement
(CSMD).

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En outre, le portefeuille de la formation professionnelle sort lui aussi du département de
l’Éducation nationale, pour rejoindre celui de Younes Sekkouri (PAM), en charge du ministère de
l'Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l'Emploi et des Compétences. Au regard du
tissu économique marocain, et au besoin immense de formation professionnelle tout au long de
la vie, ce choix est particulièrement adapté. Il témoigne d’un accent mis sur la très petite
entreprise, qui a particulièrement souffert de la pandémie actuelle, et laisse espérer une
adaptation pragmatique de l’offre de formation professionnelle aux besoins véritables des
entreprises marocaines. Personnellement, je crois énormément à l’apprentissage par l’exemple
et la pratique, et j’espère qu’à l’issue de cette mandature, il sera possible au Maroc de faire des
études en alternance à partir de 15 ans, et pourquoi pas jusqu’au niveau Master.

En écho à ces nouveaux ministères, on pourrait s’inquiéter d’un risque accru de dilution de
l’action publique (le fameux syndrome de l’administration en silos), mais le chef du
gouvernement A. Akhannouch (60 ans, 13 ans à la tête du ministère de l’Agriculture) a
visiblement décidé de prendre ce problème à bras le corps. En effet, on compte désormais un
tout nouveau ministère délégué auprès du Chef du gouvernement, chargé de l'Investissement,
de la Convergence et de l'Évaluation des politiques publiques. À sa tête, il place un ministre
expérimenté (Mohcine Jazouli, 54 ans), ayant œuvré à la coopération africaine pendant les 3
dernières années auprès de N. Bourita. Gageons que cet original nouveau ministère est un signe
vraiment encourageant, et susceptible d’inscrire dans la loi – et espérons-le dans les faits – une
véritable coopération entre départements ministériels. Le profil de ce ministre, auparavant à la
tête de Valyans (champion national du conseil en stratégie et en organisation) est
particulièrement convaincant quant à sa capacité à détecter des synergies entre les différents
portfolio stratégiques pour catalyser un esprit d’intelligence collective, d’agilité et de rétroaction
dans le pilotage de l’action gouvernementale. Il y aura encore beaucoup à dire sur ce ministère,
car il reste à comprendre ce que désigne l’Investissement dans son intitulé, et aussi comment
l’action publique sera évaluée, sachant que cette responsabilité est également celle du
Parlement.

Signalons également deux nouveaux ministères délégués :

- Faouzi Lekjaa (Indépendant) sera en charge du budget auprès du MEF, allégeant d’autant
le précédent « super portefeuille » de M. Benchaaboun à l’Économie et aux Finances (qui
je le rappelle, englobait de surcroit la Réforme administrative)
- Mustapha Baitas (RNI) sera en charge d’un nouveau ministère délégué chargé des
Relations avec le Parlement et du porte-parolat du gouvernement.

Ces cinq tout nouveaux départements constituent autant de moyens matériels et symboliques
(Secrétaires / Ingénieurs / Inspecteurs généraux, cabinets ministériel, staff de hauts
fonctionnaires, ressources humaines, budget, bâtiments, place potentielle dans l’agenda
médiatique) dédiés à des priorités stratégiques : Efficacité, lisibilité et cohérence de l’action
publique, Équilibre budgétaire, Développement industriel et logistique de l’ensemble du tissu
économique, Recherche et Innovation, Réforme et numérisation de l’administration.

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En bémol de ces observations, il faut tout de même noter que certains ministères demeurent
dotés de périmètres immenses, tels que celui de l’Aménagement du territoire national, de
l'urbanisme, de l'Habitat et de la Politique de la ville, ou encore la Santé, désormais enrichie de
la protection sociale. Je reste personnellement peu convaincue que les problématiques
spécifiques d’Aménagement du territoire disposent dans de telles conditions d’une véritable
prise en main, car le périmètre de ce département reste trop lié à l’urbanité, ce qui n’est pas
cohérent avec ce qu’est géographiquement notre pays. La population marocaine est certes
aujourd’hui majoritairement urbaine, mais bien heureusement, le territoire national marocain est
bien plus complexe qu’une simple conurbation, et il gagnerait à être traité à son échelle, avec
ses différents environnements, ses infrastructures, ses flux,... et ses transformations futures.

Pour terminer, je n’arrive pas à interpréter la disparition pure et simple du département des
Mines, pour le moment je fais l’hypothèse que c’est un oubli, et qu’un Secrétariat d’État dédié
sera créé, à l’énergie… ou pas !

4. Quelques changements de dénomination à remarquer, qui soulignent plus encore


les objectifs du nouveau modèle de développement

Le ministère de A. Rebbah autrefois chargé de l'Energie, des mines et de l'environnement, est


désormais chargé de la Transition énergétique et du Développement durable, ce qui est
hautement signifiant, d’autant qu’à sa tête est placée, sans mauvais jeu de mot, un pur cerveau
: Leila Benali, Centralienne, docteur en économie de l’Energie, experte internationale de renom,
et membre elle aussi de la CSMD. Bref n’en jetez plus, on ne pouvait pas choisir meilleur profil
pour inscrire le Maroc dans une démarche éclairée et volontariste face aux nombreux et
complexes défis énergétiques et environnementaux auxquels doit faire face notre pays.

Cela a déjà été mentionné, et faisait partie des promesses du RNI lors de la campagne électorale
: la volonté de Sa Majesté d’offrir une protection sociale à tous les marocains sera mise en œuvre,
et pour ce faire, le ministère de la Santé sera désormais également chargé de la protection
sociale. Cependant, au Maroc, il n'existe pas de fonction publique hospitalière spécifique, la
gestion des dizaines de milliers de personnels des hôpitaux incombe de ce fait à ce ministère, et
rend sa gestion compliquée, comme on a pu le constater lors de la précédente mandature. En
cette période de pandémie, il est très probable que ce ministère confie la mise en place du futur
système universel à une entité organisationnelle dédiée. C’est un immense chantier qui s’ouvre
ici, et laisse espérer que la commande publique ainsi générée profitera en priorité à des
entreprises marocaines.

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CONCLUSION DE LA PARTIE II

Les changements structurels opérés dans la composition du nouveau gouvernement signent la


volonté d’un rééquilibrage de l'action publique par la création de ministères aux intitulés et aux
périmètres redéfinis, aptes à susciter davantage d'efficacité, de synergies et de transparence.
Les dénominations et le recoupage des ministères reflètent fidèlement les enseignements tirés
des travaux de la Commission Spéciale sur le Modèle de Développement (CSMD), commission
dont émanent pas moins de 3 ministres : Éducation Nationale, Enseignement supérieur,
recherche scientifique et Innovation, Transition énergétique et développement durable.

III. Profils des ministres du nouveau gouvernement

On compte pas moins de 16 nouveaux ministres parmi les 24 que compte le nouveau
gouvernement, cette proportion de deux tiers est en soi déjà remarquable.

Par ailleurs, l’âge des nouveaux ministres et leur niveau d’études et de qualification
professionnelle est véritablement impressionnant. Le processus de récompense des meilleurs
serviteurs de l' État se poursuit. Pour exemple la promotion en tant que ministres de secrétaires
généraux particulièrement brillants, comme Mohamed Sadiki (successeur de A. Akhannouch à
l’Agriculture, où il occupait le poste de SG depuis 2013), ou comme auparavant Khalid Aït Taleb
(IND.), reconduit à son poste suite à rééquilibrage gouvernemental, Nabila Rmili (Maire RNI de
Casablanca), ayant dû abandonner le portefeuille de la Santé suite aux protestations de l'opinion
publique refusant un tel cumul de mandats. Dans le même état d’esprit, les anciens « super –
ministres » (MH Elalami, M. Benchaaboun) qui n'avait plus leur place dans un gouvernement ainsi
rééquilibré, ont été promus à des positions plus importantes encore au service de la nation.

Autre grande nouveauté, le Maroc compte désormais 6 femmes ministres (Économie et finances,
Aménagement du territoire et urbanisme, Tourisme, Transition énergétique, Solidarité, insertion
sociale et famille, Réforme administrative). Cela est quasiment le double du gouvernement
précédent (4 femmes ministres et 1 secrétaire d’état, respectivement à l’Aménagement du
territoire, le Tourisme, la Famille, et les Marocains à l’étranger), et place des femmes à des
responsabilités bien supérieures. Enfin, détail visuel amplement mis en évidence sur les réseaux
sociaux, il n’y a désormais plus aucune femme voilée au gouvernement. Gageons que l’image du
Maroc à l’étranger va s’en trouver fortement modifiée quant à sa modernité.

CONCLUSION DE LA PARTIE III

Les profils choisis pour constituer le nouveau gouvernement marocain induisent une
revivification et une montée en compétence et en parité du personnel politique, au moyen de
l’intégration de nombreux ministres jeunes, féminins, et issus de formations académiques de très
haut niveau.

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IV. CONCLUSION GÉNÉRALE

Ma lecture du discours de Sa Majesté du vendredi 8 octobre lors de l’ouverture l'année


parlementaire est qu’il a adressé au gouvernement et aux parlementaires un message de
satisfaction, d’optimisme et d’exigence face à des défis immenses. Ce discours fut didactique,
voire par moment technique, citant volontiers statistiques nationales et données
macroéconomiques, et exprime avec clarté et pédagogie une politique très énergique pour un
Maroc de demain plus solide, plus efficace, et plus inclusif, en trois volets :

- Consolidation stratégique du pays par sa diplomatie, sa défense nationale et la poursuite


de la réussite de sa politique de réponse à la pandémie de Covid 19 (limitation des risques,
transformations des opportunités), pandémie qui a profondément rebattu les cartes au
niveau global ;
- Face à la crise mondiale et au nouveau contexte macro-économique, une politique
volontariste de relance économique, notamment par l’investissement public et
l’incitation à l’entreprenariat, mais aussi par l’attraction d’Investissements directs
étrangers (IDE) aptes à rééquilibrer la balance commerciale et à consolider plus encore
nos réserves de change ;
- Opérationnalisation du nouveau modèle de développement, en tant que cadre commun
pour mettre en œuvre des changements considérés comme vitaux pour la Nation, avec
en sus, la poursuite de trois chantiers de long terme précédemment initiés par Sa Majesté
: 1.la généralisation de la protection sociale ; 2.la réforme des Entreprises et
Établissements Publics, ainsi que de la fiscalité des entreprises dans le cadre d’une charte
compétitive de l’Investissement, qui devra être proposée prochainement ; 3.la réforme
de l’action publique et du fonctionnement de l’appareil exécutif, en vue de la
concrétisation du nouveau modèle de développement. Il est désormais explicite que
l’ancien commissariat au plan (HCP) et ses importants moyens (statistiques nationales)
feront l’objet d’une refonte pour répondre aux besoins du nouveau ministère délégué
confié à Mohcine Jazouli.

Ce seul discours suffit à comprendre ce que veut la plus haute autorité du pays pour les cinq
années à venir, mais j’espère que ces quelques lignes vous auront éclairé sur les moyens mis en
œuvre pour que cette volonté ait toutes les chances d’aboutir.

Ainsi, avec un gouvernement issu d’une coalition tripartite, où les équilibres politiques sont peu
ou prou respectés, le gouvernement de Aziz Akhannouch accepté par Sa Majesté le 7 octobre
2021 apparait spontanément stable et durable. Composé aux deux tiers de nouveaux ministres
(davantage paritaires, jeunes, très diplômés, contributeurs pour certains de la CSMD), le
nouveau gouvernement s’appuie sur un socle solide de ministres indépendants expérimentés,
et est piloté par un chef de gouvernement qui a la confiance du souverain.

Dans ces conditions, la tentation serait de se convaincre qu’absolument tous les moyens ont été
mis en œuvre pour opérer une rupture nette avec l’ancien gouvernement, et qu’il est désormais

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possible de se tourner vers l’avenir avec un passé totalement purgé. J’aimerais aussi le croire,
mais je n’en serais vraiment totalement convaincue que lorsqu’il sera fait mention dans le
programme gouvernemental à venir du 3ème pouvoir constitutionnel, celui de la Justice.

Chaque individu qui vit au Maroc le sait dans un coin de sa conscience, il y a dans notre pays deux
cas de figure qui peuvent emmener n’importe quel citoyen en prison sans qu’il n’ait en quoi que
ce soit troublé l’ordre public : la faillite de son entreprise, et la relation sexuelle hors mariage.

En 2021, avec de tels objectifs d’inclusion économique, est-il bien raisonnable que le Maroc
perpétue un tel cadre juridique ? L’échec étant la condition sine qua non de la réussite, il est selon
moi illogique et contreproductif de déshonorer un entrepreneur en faillite ; peut-on imaginer la
même carrière pour un Bill Gates, un Walt Disney ou un Thomas Edison s’ils avaient fait de la
prison lors de leur faillite ?

De même, les relations sexuelles hors mariage sont un fait social pour toute une jeunesse, ainsi
que les divorces et leur procédure (qui dure), ou encore la progression inéluctable de la part de
femmes vivant seules dans les agglomérations. Interdire les relations sexuelles hors mariage par
la loi fait peser une épée de Damoclès sur l’ensemble de la population, qui ne peut que ralentir
son inclusion sociale, et la rend vulnérable à la violence, au chantage et à la corruption. Si tout
doit changer, ne serait-il pas temps que cela cesse également ?

Enfin, pour conclure sur les espoirs qu’éveillent en moi ce nouveau gouvernement quant à sa
volonté de construire un Maroc plus inclusif, je plaide pour que l’on anticipe correctement les
difficultés d’intégration que vont rencontrer les nouveaux ministres, car de grosses questions
d’interculturalité vont se poser dans les prochains mois : rien que sur l’aspect des langues, la
puissance publique est confrontée aux mêmes problèmes que les marocains : la population et
l’administration travaillent et s’expriment en arabe, les entreprises et les classes aisées en
français, et les chercheurs en anglais. Par ailleurs, le vocabulaire, les outils et les méthodes de
travail et de gouvernance ayant cours dans l’administration sont clairement déroutantes pour
des professionnels de l’opérationnel, et inversement.

Cette interculturalité est la preuve irréfutable et enthousiasmante que notre nouveau


gouvernement reflète davantage la société telle qu’elle est : jeune, mixte, douée, volontaire, et
ontologiquement interculturelle.

Pourvu que cela dure, pourvu qu’il réussisse, longue vie au Maroc et à Sa Majesté, que Dieu, et
le peuple, L’assistent.

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