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Projet de programme de campagne 2023

INTRODUCTION

Le 24 Janvier 2019, Felix Antoine Tshisekedi Tshilombo, fraichement élu Président de la République
prêtait serment lors d’une cérémonie inédite en République Démocratique du Congo, pays qui venait
de réaliser pour la toute première fois de son histoire ce qu’on a qualifié de passation civilisée du
pouvoir. Dès l’entame de son discours d’investiture le nouveau Président entrevoyait en ces termes
un nouveau défi : « si cette étape de transition démocratique peut être considérée comme
l’aboutissement d’un combat, nous devons aussi y voir l’horizon d’une nouvelle ère. Sans aucun doute
le commencement d’un autre combat dans lequel nous voulons engager tout le peuple congolais, le
combat pour le mieux-être de chaque citoyenne et citoyen de ce pays ». 1

A la lumière de Franz Fanon, le Président est également conscient du rôle que devrait jouer son pays
dans le concert des nations et qu’il décrit comme suit : « Par sa situation géographique et en
considération des enjeux géostratégiques de ses richesses naturelles et de son capital humain, La
République Démocratique du Congo porte une espérance pour l’Afrique et le Monde. En effet, avec
ses quatre-vingts millions d’habitants, ses diverses et innombrables ressources naturelles, son bassin
hydrographique riche, sa forêt équatoriale dense, capable d’apporter une solution aux enjeux
climatiques, notre pays est un véritable atout pour les pays de la région, pour l’Afrique et pour notre
planète ».2

C’est donc sur fond de ces défis majeurs que le Chef de l’Etat entame son mandat de Cinq ans dans
une coalition contre-nature, fruit d’un compromis dont la stabilité du pays était le gage et où les
acteurs se surveillaient dans une logique de neutralisation permanente. Deux ans c’est le temps qui a
suffi pour voir cette coalition volée en éclats. Dans l’entre-temps certains programmes lancés en vue
de réaliser les promesses de campagne peinent à se concrétiser. C’est notamment le cas du
programme de 100 jours, la gratuité de l’enseignement de base, la lutte contre la corruption et le
détournement des deniers publics, le programme de 145 territoires, etc. La subite guerre d’agression
qui vient à son tour annihiler les quelques bons résultats engrangés çà et là. C’est dire que des
pesanteurs existent. Il faut donc les identifier et y faire correspondre des solutions idoines.

Dans une interview accordée aux journalistes de TV 5, le Président révèle qu’avant son accession au
pouvoir, il n’avait jamais imaginé le niveau de corruption dans le pays, pointant de doigt un
phénomène endémique et une justice défaillante.

D’un autre côté, la population de la RDC est caractérisée par l’importance de sa jeunesse. 60 % des
habitants ont moins de 20 ans. 41,25% ont entre 0 et 14 ans tandis que la tranche de 15 à 64 ans
représente 56% de la population3 c’est dire que les efforts et ressources suffisantes devraient être
allouées aux politiques tournées vers les jeunes pour d’une part assurer leur encadrement dans
l’acquisition des compétences et d’autres part leur donner les moyens leur permettant la possession
effective du territoire national. S’il est vrai que le pays fait face actuellement à une agression
extérieure, il est évident que si rien n’est fait pour les jeunes, la prochaine agression viendra de
l’intérieur.

1
Felix Tshisekedi, discours d’investiture, Kinshasa-rdc, jeudi 24 janvier 2019
2
ibid
3
Wikipedia, Démographie de la République démocratique du Congo.

1
La Présidence de la République révèle quant à elle qu’une gouvernance inadaptée, un déficit d’accès
aux services sociaux de base, et une croissance économique non inclusive constituent les principaux
obstacles structurels à la dynamique de développement socio-économique de la RDC 4 A cela il faut
sans doute intégrer les incertitudes créés par les bouleversements d’ordre mondial dont la maitrise
semble être loin de notre portée. Le rapport du PNUD sur le développement humain 2021/2022
intitulé « Temps incertains, vies bouleversées » vise à comprendre et à aborder l’ensemble
d’incertitudes actuel alimenté à la fois par l’Anthropocène, les transformations sociétales volontaires
et l’intensification de la polarisation.5 A ce propos, le rapport affirme que « nous vivons dans un
monde d’inquiétude. La pandémie actuelle de COVID-19 a entrainé un recul du développement
humain dans presque tous les pays et continue de faire des variants de façon imprévisible. La guerre
en Ukraine et dans d’autres parties du monde génère de nouvelles souffrances humaines dans un
ordre géopolitique mouvant et un système multilatéral exsangue »6.

Que faire ? Quelle réponse apporter à ces défis ? Quelle recette pour la RDC au moment où le Chef
de l’Etat s’apprête à postuler pour un second mandat dans un contexte de guerre d’agression qui
secoue la partie orientale du pays et dont l’agresseur est désormais identifié et connu ? D’autant plus
que les motivations de cette guerre d’agression ne font plus l’ombre d’un doute, mettant en jeu
l’existence même de l’Etat congolais, quelles politiques seront mises en place afin d’assurer sa survie
en tant que Nation?

« Je crois qu’une nouvelle voie est possible. Sans doute la plus difficile, sans doute la plus complexe, la
plus exigeante qui nous impose de sortir des sentiers battus ».7 Ces paroles du Président Tshisekedi
illustre son ambition et sa volonté d’explorer les voies nouvelles pour trouver des solutions durables
au cas « Congo ».

En 2018, le candidat Felix Tshisekedi présentait un contrat social intitulé « programme pro-pauvre ».
Ce programme réalisable sur 10 ans, le temps de deux mandats présidentiels de cinq ans 8 s’articulait
autour de quatre axes stratégiques à savoir la bonne gouvernance, l’Homme, la croissance
économique et Société Solidaire, pour un total de 20 piliers. 2023 apparait donc comme une année
d’évaluation à mi- exécution. Si certains piliers du programme ont certes connu un début
d’exécution, il est cependant regrettable de constater que malgré cette volonté affichée du chef de
l’Etat, un certain nombre d’entre eux peinent à se matérialiser. Il s’agit entre autre de piliers tels :

- Lutter contre la corruption et les crimes économiques, pilier 7


- Faire de l’éducation la clé du changement et le principal ascenseur social, pilier 8
- Mettre en place la couverture santé universelle, pilier 9
- Promouvoir l’emploi et la formation professionnelle continue, pilier 10
- Lutter contre le changement climatique, pilier 13
- Développer l’agriculture et l’agro-industrie, pilier 16
- Développer le tourisme, la culture et les arts, pilier 19
- Combattre la pauvreté, l’exclusion et la vulnérabilité, pilier 20

4
Programme Présidentiel Accéléré de lutte contre la Pauvreté et les inégalités, point 8, p.10
5
PNUD, rapport sur le développement humain2021/2022, Temps incertains, vies bouleversées, p.5
6
PNUD, rapport sur le développement humain2021/2022, Temps incertains, vies bouleversées, p.3
7
Felix Tshisekedi, cité dans Programme Présidentiel Accéléré de lutte contre la Pauvreté et les inégalités, p.5
8
Felix tshisekedi Tshilombo, Programme Pro-pauvre, 2018, p.5

2
Le nouveau programme de campagne de candidat Felix Tshisekedi devra sans doute connaitre des
aménagements pour incarner une gouvernance basée sur les valeurs sociales tournées vers
l’intégration nationale et un partage équitable du revenu national. Ainsi, il faut entre autre
envisager :

- La mise en place des programmes devant promouvoir l’intégration nationale par diverses
voies de communication (route, rail, voies fluviales et lacustres, voie aerienne) devant
faciliter les échanges entre congolais d’abord et ainsi tirer profit du marché interne de plus
de cent millions d’âmes. Comment faire parvenir par exemple à Kinshasa le fromage de
Goma à moindre cout ?
- Concrétiser « la revanche du sol sur le sous-sol » et faire de l’agriculture le nouveau
paradigme du développement du pays en lui dotant d’un programme agricole innovant et en
créant des chaines de valeur ;
- Définir une politique claire et ambitieuse de l’encadrement des jeunes en vue de les
impliquer dans la protection, la reconstruction et le développement du pays ;
- Fonder un état de droit basé sur une justice effective et implacable ;
- Créer une administration au service du développement et capable d’implémenter les
programmes de développement en lieu et place d’une administration refuge d’incompétents
et chômeurs payés. ;
- Créer et protéger une industrie locale gage du développement du pays ;
- A l’instar des pays du golf qui ont tiré profit du pétrole pour leur développement, la RDC
devrait tirer profit des matières premières stratégiques dont elle dispose pour assurer son
développement c’est le cas du lithium et du cobalt, matières premières stratégiques dans la
transition énergétique ;
- Mener une réflexion sur l’industrie du pétrole au Congo pendant que le monde cherche à
remplacer les énergies fossiles par celles renouvelables ;
- Mettre en place une armée dissuasive pour assurer l’intégrité territoriale et la sécurisation de
ses neuf frontières ;
- Elaborer la politique de sécurité du pays en déclinant une doctrine claire ;
- Elaborer des politiques claires en matière de l’urbanisation, de construction et la possession
des terres ;
- Définir des stratégies pertinentes pour la construction des infrastructures durables et éviter
ainsi les gaspillages dans les réhabilitations interminables ;
- Répertorier les fameuses terres arables. Où sont-elles ? qu’est ce qui s’y fait ?
- Promouvoir les PME sur les modèles existant comme celui de l’Inde ;
- Développer et multiplier des stratégies permettant de donner le pouvoir économique aux
congolais.

Tels sont les défis auxquels le pays fait face et auxquels il serait impérieux que des réponses
approfondies et réfléchies soient proposées dans le cadre du nouveau pacte social que le Chef de
l’Etat entant nouer avec la population. Si certaines solutions existent déjà dans certains domaines et
ne demandent parfois que leur application effective, il faut pour certaines envisager des reformes qui
dans certains cas peuvent s’avérer impopulaires. C’est aussi cela sortir des sentiers battus.

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