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ECONOMIE-POLITIQUE-VIE SOCIALE-CULTURE
CONSEIL DE RÉDACTION
Alphonse NTUMBA Luaba Lumu Ghislain TSHIKENDWA, S.J.
André YOKA Lye Mudaba Jean-Claude MASHINI D.M.
Augustin MBANGALA Mapapa Léon de SAINT MOULIN, S.J.
Bernard LUTUTALA Mumpasi Luka LUSALA lu ne Nkuka, S.J.
Bertin MAKOLO Muswaswa Marie-Madeleine KALALA
Daniel MUKOKO Samba Noël OBOTELA Rashidi
Dieudonné MAMPASI Kapita, S.J. Paulin MANWELO, S.J.
Elie P. NGOMA-BINDA Rigobert MINANI Bihuzo, S.J.
Emmanuel BUEYA Bu Makaya, S.J. Rufin MFITZSCHE Mika
François KABUYA Kalala Yves ALONI Mukoko
Fredrick OGENGA
BUREAUX
Adresses :
9, Avenue Père Boka, Kinshasa/ Gombe, en face du Ministère des Affaires Étrangères
Boîte postale : B.P. 5717 Kinshasa/ Gombe (République démocratique du Congo)
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Dépôt Légal n° DB 3.01801-57019 | ISSN 1819-1010
Imprimerie Médiaspaul/ Kinshasa
SOMMAIRE
Naupess K. KIBISWA
Quoi changer ? Comment changer ? 804
Esquisse de vertus et d’actions pour démarrer
un changement adéquat en RD Congo
Cet article soutient que, si le Chef de l’État et son gouvernement veulent
démarrer avec succès les transformations attendues par les Congolais,
ils doivent commencer par une double cure : l’extirpation des vices dans
le cœur aussi bien des leaders politiques que des cadres congolais et
l’implantation, en eux, des vertus du changement. En même temps, ils
doivent entreprendre des actions minimales qui initient, implantent et
enracinent le changement dans la société congolaise.
Justin BISANSWA
Droit d’entrée et champ universitaire. Pour une cohérence
du système universitaire congolais 838
Cette réflexion sur la cohérence du cheminement dans le système
universitaire congolais prend pour prétexte le droit d’entrée dans la
carrière universitaire. Elle en examine son « ordre », c’est-à-dire son
rituel accompagné de ses rites d’initiation et de passage. Elle se demande
si on commence la carrière en tant qu’assistant de premier mandat ou
en tant que professeur associé même si on n’avait jamais acquis des
performances et incorporé un habitus et sans connaître le code ni la
nécessité du champ, ses contraintes et ses libertés, ses règles du jeu et
ses enjeux.
Recension
Léon de SAINT MOULIN, S.J. 845
Alain Flavien N’KISI, Le basculement géopolitique de l’Afrique
des Grands Lacs, Décennie 1990, Paris, L’Harmattan, 2018,
158 pages.
P
Alain NZADI- our qui s’intéresse à l’actualité politique de
a-NZADI, S.J. la RD Congo, il y a une expression écœurante
Chercheur en
qui est à la mode, répétée à volonté par les ir-
littératures
francophones. réductibles fanatiques de certains acteurs politiques,
Directeur du CEPAS lorsqu’on déplore la désinvolture avec laquelle ceux-ci
et Rédacteur en Chef transhument politiquement : la politique est dyna-
de Congo-Afrique. mique. Comme si dynamisme et manque de racines
nzadialain@ et d’idéal devraient à tout prix rimer en politique et
gmail.com que la constance d’option ou d’opinion politique et la
défense des valeurs n’y auraient plus droit de cité !
Ainsi, l’on peut changer d’avis ou d’alliances à la
vitesse de l’éclair, aussi longtemps que sa place à la
mangeoire est assurée, en attendant d’opérer une
autre transhumance dès que les intérêts poursuivis
au départ sont menacés ou n’existent plus. Et tant pis
si, dans cette course au bonheur nombriliste, il y a, au
passage, des « effets collatéraux » qui transforment
des milliers de sympathisants en simple chair à canon
électorale.
Au moment où la RD Congo débat des questions
liées à son développement, et pour prévenir les
citoyens contre les promesses du vent de certains
opportunistes politiques, il me paraît capital de
remettre sur la table des questions essentielles sur
le devenir du pays et le sérieux des animateurs des
institutions publiques. Aussi faudrait-il, dans ce
sens, stigmatiser cette tendance pathologique à la
1 J. KANKWENDA Mbaya, (dir.), Le Degré zéro de la dynamique poli-
tique en République démocratique du Congo 1960-2018, Kinshasa-Mon-
tréal-Washington, ICREDES, 2018, p. 51.
I
Introduction
2.2.1. L’industrialisation
Le fonctionnement du secteur industriel, en général, et minier en
particulier, qui est le moteur de la croissance économique en RD Congo, est
tributaire de l’existence d’une fourniture fiable de l’électricité. La RD Congo
est loin de répondre à cette exigence. Les deux centrales hydroélectriques
d’Inga 1 et Inga 2 ont une capacité disponible représentant 50% de leur
capacité installée de 1773 MW, suite à une maintenance insuffisante depuis
leur construction. Le faible niveau d’accès à l’électricité est un important
goulot d’étranglement au développement social et économique. La fiabilité
de l’alimentation en énergie, pour ceux qui y ont accès, est notoirement
faible et sujette à des fréquentes interruptions, avec une moyenne de 10
jours de panne d’électricité par mois.
Ces interruptions pénalisent gravement les entreprises privées qui
assument, dans bien des cas, les coûts additionnels de génératrices de secours
et également des coûts relatifs à la réparation des équipements endommagés
par les surcharges. La mauvaise qualité de l’électricité attribuable à la piètre
Africa Progress Report 2013.
3
maîtrise de son potentiel. C’est ainsi que les contrats miniers conclus ont
résulté des accords signés aux conditions qui ne reflètent pas nécessairement
la valeur marchande réelle du patrimoine minier. La minorisation de la
valeur marchande des gisements s’explique également par le fait qu’en
RD Congo, peu d’activités de recherche ont été menées à l’échelle nationale
depuis l’indépendance. Le résultat en est que 90% du pays est inexploré
et les 10% restants ont été explorés à l’aide de techniques et méthodes
scientifiques rudimentaires, vieilles de 50 ans.
Invité à la Commission Économique du Sénat, lors du vote du Budget
2010, le Ministre des Hydrocarbures avait confirmé une certaine opacité en
ce qui concerne les recettes pétrolières revenant à l’État. Chose étonnante,
le même Ministre avait relevé que la production pétrolière congolaise était
restée constante au niveau de 25.000 barils par jour, pendant quarante ans,
malgré l’augmentation du nombre de puits, passé de 100 à 300.
Pour ce qui est des réserves pétrolières, le Ministre avait affirmé
qu’elles ne sont pas connues avec certitude et qu’il y avait lieu d’engager
au minimum près de 50 millions de dollars pour déterminer le niveau
de réserves pétrolières du pays et espérer ainsi tirer les ressources
conséquentes dans ce secteur.
2.2.3. L’agriculture
Le pays doit intégrer à court terme dans ses stratégies de la relance de
l’agriculture, la valorisation des spéculations agricoles où il a connu des
performances dans le passé (production d’hévéa, d’arachide, de robusta,
de thé, de palmier à huile). C’est pour éliminer la sous-utilisation des
ressources naturelles et corollairement les ressources humaines en chômage
déguisé et pour répondre aux besoins du marché en actionnant ce potentiel
de production et de création d’emplois et d’amélioration des revenus pour
un grand nombre (situé dans le monde agricole), afin que les retombées de
la croissance soient inclusives.
En conclusion
D
Introduction
1 Pascal BONIFACE, La Géopolitique. 48 Fiches pour comprendre l’actualité, Paris, Eyrolles, 2018, p. 60.
2 Dans cet article, je laisse de côté tout langage mathématique avancé afin de rendre la théorie des
jeux accessible à un large public. Quant au public spécialisé, je le renvoie aux ouvrages cités ici.
d’« équilibre corrélé » qui fait intervenir une tierce personne, la plus neutre
possible, la Nature, pour résoudre le problème de coordination entre
équilibres multiples. Le concept de « point focal » ou « convention », proposé
par Schelling, a la même valeur heuristique.
Plus récemment encore, l’approche expérimentale a permis de réévaluer
les différents concepts et hypothèses de la théorie des jeux en mettant en
évidence leurs limites, et en ouvrant de nouvelles pistes de recherche. C’est
dans ce contexte qu’est née une nouvelle discipline, la neuro-économie,
qui combine, dans une démarche interdisciplinaire, la psychologie et
l’économie7. Il s’agit surtout de montrer que les contextes, croyances,
normes, valeurs, conventions, règles, jouent un rôle déterminant dans la
solution d’un jeu.
Malgré ces récents développements, il faut bien reconnaître que la
théorie des jeux existe depuis longtemps, aussi longtemps au moins que
le calcul des probabilités comme le révèle le « jeu contre la nature » à
un ou plusieurs joueurs. Dans ce type de jeu, seul compte, pour chaque
joueur, la réalisation éventuelle d’un événement aléatoire qui ne dépend
ni de son propre choix, ni de celui des autres. Cette réalisation peut être
considérée comme le résultat d’un choix « au hasard » qui fait intervenir
un joueur passif appelé « Nature ». Ainsi par exemple, lors du jet d’une
pièce de monnaie, on peut dire que la nature a choisi pile ou face selon le
cas. Ce type de jeux a intéressé d’abord des philosophes et mathématiciens,
à commencer par Blaise Pascal et son fameux « paris ». D’autre part, les
réflexions autour des problèmes posés par ces jeux ‒ dits « de hasard »
sont, en bonne partie, à l’origine du calcul des probabilités et du concept
d’espérance d’utilité qui fut proposé pour résoudre le problème posé par le
Chevalier de Méré8. Cette approche de la théorie des jeux est aussi appelée
théorie de la décision en incertain. Laissons de côté ce type de jeu pour nous
focaliser sur la solution des jeux non coopératifs engageant deux joueurs
actifs qui sont en interaction directe.
de prison), tandis que celui qui a nié subira la peine la plus lourde (10 ans
de prison). Au cas où les deux avoueraient le crime, ils écoperaient d’une
peine intermédiaire (5 ans de prison). Si les deux prisonniers se taisent, ils
sont libérés, et le gain de chacun est de 0. Ce problème peut être visualisé
dans la matrice des gains suivante :
A avoue A nie
B avoue (5, 5) (0, 10)
B nie (10, 0) (1, 1)
A
Conciliant Agressif
B
Conciliant 1, 1 0, 2
Agressif 2, 0 -2, -2
L’analyse de ce jeu indique que pour jouer, chaque joueur doit se mettre
à la place de l’autre. Si le joueur A choisit la stratégie C, alors le joueur
B a intérêt de jouer A parce qu’il gagne 2 contre 0. Et si A opte pour la
stratégie A, alors l’intérêt de B est de jouer C parce qu’il gagne le minimum
0 au lieu de perdre (-2$). Le jeu étant symétrique pour les deux joueurs,
le raisonnement de chaque joueur va procéder de la même manière.
La stratégie individualiste ou égoïste (A, A) se traduit par une lourde perte
pour les deux acteurs (-2, -2), alors qu’ils gagneraient tous les deux s’ils
choisissaient la stratégie fondée sur l’esprit de coopération (1, 1). Ainsi,
10 John MAYNARD KEYNES, La pauvreté dans l’abondance, Paris, Gallimard, 2002, pp. 164-165.
11 La métaphore keynésienne des deux chauffeurs s’apparente bien au « jeu du croisement », très
connu en théorie des jeux. Pour en savoir plus, voir Laurent CORDONNIER, Coopération et réciprocité,
Paris, PUF, 1997, p. 50.
chaque joueur est appelé à jouer « conciliant » quelle que soit l’attitude de
l’autre, car la seule issue coopérative ici est la conciliation mutuelle (C, C).
Cette stratégie rapporte 0 contre – 2, lorsqu’on joue agressif. Toutefois,
cet état n’est pas stable parce que la rationalité individuelle peut inciter
chacun à jouer la stratégie contraire de l’autre : (C, A) ou (A, C). Ces points
représentent l’équilibre de Nash où l’un des joueurs profite de la situation
en raflant tout.
Ce type de jeu, appelé aussi « chickengame » ou « le jeu de la poule
mouillée », fonctionne selon le principe suivant : si un joueur montre de
la détermination dans sa stratégie, l’autre a tout intérêt à « s’écraser » ou
à perdre la face pour éviter le déchaînement de la violence. L’instabilité
de l’issue coopérative s’explique par le comportement opportuniste d’un
des deux joueurs ou de tous les deux à la fois. Comme dans le dilemme du
prisonnier, à force de tourner en rond, l’incertitude radicale rend impossible
la prévision du comportement du partenaire même lorsqu’on essaie de se
mettre à sa place. Pour finir, cette situation débouche sur un conflit de
rationalité qui oppose : le théorème du minimax (C, C) et la fonction de
meilleure réponse (C, A) ou (A, C). Pour que la solution (C, C) soit stable,
il faut que chaque joueur obtempère son égoïsme, ce qui correspond chez
Keynes à trouver le petit truc qui consiste pour chaque chauffeur à se
déplacer un peu à sa droite. Ce jeu nous aide à comprendre et à expliquer
pourquoi certains pays sont stables et d’autres instables ; pourquoi certaines
nations réussissent ou progressent pendant que d’autres échouent, stagnent
voire régressent.
sens, il s’agit d’une société où, premièrement, chacun accepte et sait que
les autres acceptent les mêmes principes de la justice et où, deuxième-
ment, les institutions de base de la société satisfont, en général, et sont
reconnues comme satisfaisant ces principes, etc. Il existe un point de
vue commun à partir duquel les revendications peuvent être arbitrées14.
La justice est pensée ici comme équité dans la mesure où elle doit,
d’une part, lutter contre les inégalités injustes et, d’autre part, accepter
certaines inégalités nécessaires pour améliorer le sort de tous et des plus
défavorisés en particulier. En d’autres termes, tous les biens sociaux (la
liberté, les facilités, les revenus, la richesse et les bases sociales du respect
envers soi-même) doivent être distribués par parts égales à moins qu’une
répartition inégale de ces valeurs ou de l’une d’entre elles soit dans l’intérêt
de tous. De ce point de vue, on distingue plusieurs sortes de justice : la
justice distributive, objet des analyses de Rawls, qui consiste à distribuer
des biens peu abondants entre individus en situation similaire ; la justice
commutative règle les aspects particuliers des relations entre individus ;
la justice rétributive condamne à une peine ou une punition celui qui a
enfreint une norme ; et enfin, la justice réparatrice ou transitionnelle juge
ceux qui sont impliqués dans un changement de régime politique.
Une fois qu’une conception publique de la justice est adoptée, les
individus peuvent alors choisir des institutions équitables dont l’objectif
est d’atténuer les effets du hasard sur les distributions initiales dans la
structure de la société. La détermination de ces institutions exige que
les individus soient dans une situation de « position originelle » et de
« voile d’ignorance ». En effet, dans la position originelle, les individus
se comportent comme s’ils choisissaient les règles d’un jeu de hasard qui
les placeraient dans une situation d’ignorance de leurs positions futures.
Ainsi, la position originelle est censée leur permettre de faire le choix des
principes et des institutions sans être égoïstes, car personne ne se trouve
avantagée par rapport aux autres. De ce fait, cette impartialité, relative à
la procédure de la décision collective, fait intervenir la justice-équité dans
la construction du contrat social. Pour garantir l’impartialité, les individus
doivent être placés « derrière un voile d’ignorance » qui implique l’ignorance
de leurs positions sociales actuelles et futures, de leurs intérêts, de leurs
capacités, de leurs talents, de leurs catégories morales ; bref, de ce qu’ils sont
vraiment. La position originelle et le voile d’ignorance débouchent sur deux
autres principes que Rawls considère comme les piliers du contrat social
juste, notamment : le principe d’égale liberté et le principe de différence.
de base égales pour tous qui soit compatible avec le même système pour les
autres. En second lieu : les inégalités sociales et économiques doivent être
organisées de façon que, à la fois, (a) l’on puisse raisonnablement s’attendre
à ce qu’elles soient à l’avantage de chacun et (b) qu’elles soient attachées
à des positions et à des fonctions ouvertes à tous »15. Les libertés de base,
dont il est question, renvoient aux libertés politiques, d’expression, de
réunion, de pensée et de conscience. Ces libertés de base sont des droits,
par exemple, le droit au vote ou à l’éligibilité, le droit à la propriété privée.
Elles sont nécessaires au fonctionnement d’une société démocratique. Celle-
ci doit organiser les inégalités de façon à ce qu’« elles apportent aux plus
désavantagés les meilleures perspectives ». D’autre part, ces inégalités
doivent être attachées à des fonctions et des positions ouvertes à tous afin
de respecter le principe de la justice égalités des chances.
L’égalité est fondée sur la ressemblance entre des êtres humains en
tant que personnes morales, capables du bien et capables d’un sens de la
justice. Dès lors, ce principe est lié à la règle du maximin, c’est-à-dire du
« maximum minimorum » qui sert de critère de délibération. Étayons cette
règle en nous appuyant sur un exemple que donne Rawls lui-même :
Soit g (g) une fonction de gain à maximiser, et qui dépend de la décision
individuelle (d) et du contexte (c). Ainsi g = f(d, c). Si on suppose qu’il y
a trois décisions possibles et trois contextes possibles, alors on obtient le
tableau ci-après :
Contextes
Décisions C1 C2 C3
D1 -7 +8 +12
D2 -8 +7 +14
D3 +5 +6 +8
Ce tableau représente, selon Rawls, des gains et des pertes dans une
situation qui n’est pas un jeu de stratégie. Personne ne joue contre la
personne qui prend la décision et qui se trouve face à plusieurs contextes
possibles. La réalisation effective de certains de ces contextes plutôt que
d’autres ne dépend ni de la décision de la personne qui choisit, ni de
l’annonce de ses choix. Les nombres sur le tableau représentent des valeurs
monétaires (en centaines de dollars) par rapport à une certaine situation
initiale donnée. Si on applique la règle du « maximin », on choisit alors,
eu égard au contexte (c), la D3 qui correspond à une situation où on gagne
plus et on perd moins. Dans ce cas, le pire est de gagner 500 dollars ; mais
cette situation est mieux que le pire des autres décisions où on perd soit
800 dollars (D2), soit 700 dollars (D1). « Ainsi, conclut Rawls, le choix
D3 maximise la fonction f (d,c) pour la valeur de c qui, pour un d donné,
15 John RAWLS, Op. cit., p. 91.
Dans ce sens, la justice est conçue comme réciprocité puisque chacun peut
se trouver dans une pire situation. C’est donc sur une conception partagée
de la justice qu’est fondée la coopération qui garantit la stabilité, la cohésion
sociale et politique.
Conclusion
D
Introduction
mais plutôt pour ce qu’il/elle entend en tirer. C’est mon tour de jouir, c’est
notre tour, lui dit son clan, sa tribu dès sa nomination. La notion même de
« vision » chez lui/elle, peut d’ailleurs être inexistante parce que son parti
ou organisation d’origine ne lui en a jamais parlé. C’est généralement un/e
amateur/trice dans les affaires publiques malgré ses diplômes. Car, depuis
la descente aux enfers de la 2e République, les diplômes en RD Congo,
préparent moins à l’exercice des charges publiques. La parenthèse ENDA6
avait été vite ouverte mais vite fermée quelques années après pour laisser
la place aux facultés universitaires formant des personnes orientées plutôt
vers la recherche que la pratique. Des perroquets qui débobinent mal des
théories qu’ils/elles ont mal apprises.
6 L’École Nationale de Droit et d’Administration (ENDA) créée en 1963 pour former des cadres
bien informés sur l’État et préparés pour prendre celui-ci en charge dans tous ses rouages avait
vite été remplacée par les facultés de sciences politiques qui produisent en réalité des amateurs
superficiellement informés sur l’État.
7 Certains ont par contre gardé et développé leurs identités tribales, d’où le tribalisme ancré dans la
plupart des congolais.
noms cités tels que Lumumba, Kasa-Vubu, (etc.), lesquels ne sont que
très vaguement connus. Ceci renforce le psittacisme mentionné ci-avant
et la superficialité des congolais qui ne peuvent se référer qu’aux modèles
théoriques de leadership qu’ils essaient de mimer tant soit peu. En plus, le
pays n’a pas développé une tradition d’immortalisation des faits historiques
et/ou figures politico-intellectuelles congolaises par des mémorielles, musées
ou monuments et la tradition orale prime sur celle du livre. Ainsi, la nation
congolaise, est amnésique et déficitaire dans son histoire avec tout ce que
cela comporte comme conséquences pour son avenir8.
actif/ve lorsqu’il/elle pense que celui/celle qui a autorité sur lui/elle a violé
d’un seul iota ses droits selon les mêmes textes. C’est contradictoire, mais
il/elle va remuer ciel et terre, galvaniser les masses, parfois jusqu’à la
violence et au sacrifice suprême de certains dans les rues pour revendiquer
la « légalité » et obtenir gain de cause. Mais aussitôt au pouvoir, la/le leader
congolais/e agit souvent selon ses intérêts personnels ou familiaux au
mépris des textes dont il revendiquait pourtant le respect en sa faveur. Et
ceci devient alors une nouvelle source des conflits et violences politiques.
Lorsqu’il/sera encore sans position d’autorité, il revendiquera encore la
légalité. La supercherie se poursuivra.
Conclusion
C
Introduction
En guise de conclusion
P
Willy MOKA-MUBELO, ourquoi l’Afrique semble-t-elle avoir déli-
S.J., PhD. bérément choisi la voie de la politique de
Professeur à la
zombification ? Pourrait-on s’interroger face
Faculté de Philosophie
SP. Canisius/ au naufrage de la raison causé par l’incom-
Université Loyola du préhensibilité de l’agir du politique Africain ? Un tel
Congo (RD Congo). questionnement, loin d’être une provocation contre
momuwi71@gmail.com les africanistes fanatiques qui rêvent de reconstruire
une Afrique prospère, est à comprendre comme une
incitation de notre imagination à envisager des stra-
tégies capables de permettre de passer de la politique
de zombification à la politique d’humanisation.
En effet, beaucoup d’analystes politiques sont
déconcertés lorsqu’ils s’engagent non seulement
dans le processus d’opérer ce passage, mais aussi
sur la voie de la description des régimes politiques
d’un bon nombre de pays africains. Toute tentative
de définition a été, à maintes reprises, contredite par
la réalité sur le terrain. Le cas de la RD Congo est
un exemple patent du paradoxe politique en Afrique.
Comme le notent de nombreux observateurs, ce qui
se passe en RD Congo est exceptionnel et unique
dans l’histoire de la politique moderne. Face à cette
situation, d’aucuns suggèrent la révision des théories
politiques classiques.
La considération du paysage politique de l’Afrique,
en général, et de la RD Congo, en particulier, avec un
système de gouvernementalité qui défie toute théorie
politique, suscite un certain nombre de questions : les
régimes politiques en Afrique sont-ils des dictatures ?
Des monarchies ? Des démocraties ?
Une analyse rigoureuse du mode de fonctionnement
de la majorité des gouvernements africains révèle
que les régimes politiques de la plupart des pays
Africains ne reflètent aucun des régimes précités.
C’est plutôt un mélange d’une mise en œuvre sélective
de certains aspects de différents régimes politiques.
Une telle pratique a donné naissance à un monstre
11 Jean PORTER, The Recovery of Aquinas for Christian Ethics, Louisville, Westminster/John Knox Press,
1990, pp. 49-51. (La traduction française est mienne)
12 Gaston FESSARD, Autorité et bien commun, 2e éd., Paris, Aubier-Montaigne, 1969, p. 54.
13 Ibid., p. 55.
lutte ne pourra porter des fruits escomptés que lorsqu’on s’attaque aux
comportements qui tendent à légitimer les pratiques corruptrices tout en
banalisant tout effort d’éradication de ce fléau. Deuxièmement, instituer un
Etat de droit où chacun répond de ses actes afin d’ébranler les structures
nuisibles de la politique du ventre. Troisièmement, s’assurer que la justice et
le travail sont orientés vers le bien commun dans le but de garantir à tous,
et surtout aux plus démunis et aux plus vulnérables, l’accès aux ressources
nécessaires permettant de participer à la vie économique, sociale et politique
de la société. Quatrièmement, promouvoir une éthique de responsabilité et
une culture d’excellence capables non seulement de combler l’érosion morale
et l’amnésie collective qui provoquent l’effondrement d’un vivre ensemble
harmonieux, mais aussi de contribuer à l’édification d’une société juste et
prospère. Une société juste est à comprendre ici dans son sens Rawlsien.
Ce dernier décrit une société juste comme celle dans laquelle « l’égalité des
droits civiques et des libertés pour tous est considérée comme définitive ;
les droits garantis par la justice ne sont pas sujets à un marchandage
politique »22.
Ces pistes pourront constituer le fondement à partir duquel nous
pouvons amorcer le passage de la politique de zombification à la politique
d’humanisation.
aux contraintes qui les écrasent ! Si l’on pouvait s’imaginer que dans ces
pays d’Europe et d’Amérique on se préoccupe plus du rendement de l’outil
que des dimensions du chantier. Si on pouvait penser aux gros montants
d’argent en devises que des Congolais transfèrent aux membres de leurs
familles et qui entrent dans le circuit économique du pays. Voudrait-on dire
qu’en rentrant travailler au pays où ils investissent souvent l’argent gagné
en Europe ou en Amérique, ces « Congolais de la diaspora » sont dispensés
de l’effort pour gagner leur vie et que tout leur est acquis d’avance ?
Il se fait justement que cette opposition manichéenne enfer (Congolais
vivant au Congo et ailleurs en Afrique) vs paradis (Congolais vivant
en Europe et en Amérique) vitrifie les rapports humains par une sorte
de diffraction verbale. Cette réfraction verbale détruit la sociabilité.
L’expression « Congolais de la diaspora » est comme un chien de garde qui
enferme en eux-mêmes ceux qui l’utilisent, dans un monde à eux, homogène,
achevé (où chacun a sa place et s’en émerveille), gage d’assurance et de
tranquillité, et qui, de façon inférentielle, revendiquent le bon sens contre
les tempêtes de rêves insensés et des expériences autres qui viendraient
troubler leur quiétude.
De plus, cette expression est aussi une polysyndète. Elle lie tous les
Congolais vivant au Congo à travers la « sueur, les peines, les sacrifices, les
risques » comme s’il ne faisait pas bon vivre au Congo pour une catégorie de
Congolais. Elle établit une jonction entre les Congolais qui vivent en Europe
et en Amérique en ce qui concerne leur exclusion de l’espace national et elle
lie l’Europe à l’Amérique. Du coup, elle enferme ces Congolais dans une
certaine homogénéité qui supprime la particularité des pays où ils vivent
ainsi que la spécificité ou l’individualité des Congolais qui forment ici une
masse informe et compacte. Elle est enfin un symbole de l’arbitraire par
lequel on peut se plaire justement à stigmatiser des individus sans jamais
avoir des comptes à rendre ni avoir l’obligation de se justifier.
Le mot « diaspora » donne à lire, sur le plan historique, la violence de la
déportation des noirs dans les plantations de canne à sucre aux Antilles, en
Haïti et dans les Amériques. « Diaspora » est un cri de détresse physique,
morale, psychologique qui rappelle le bateau négrier et sa cale. Gorée (au
Sénégal) que le guide du lieu appelle lors des présentations « le voyage
sans retour » en dit long sur la souffrance et la douleur des déportés. Que
veut dire alors, vraiment, « Congolais de la diaspora » ? Ces « Congolais
de la diaspora » qui espéraient au retour trouver à l’intérieur de leur
pays d’origine des hommes pleins d’humanité (et qui allaient regarder à
l’intérieur d’eux-mêmes), croyant que leur propre humanité allait enfin être
reconnue (par leurs congénères) affrontent une réalité sociale dissimulée
à travers le déterminatif (« de la diaspora ») comme si leurs compatriotes
les condamnaient à demeurer dans l’espace diasporal même, c’est-à-dire
exilés de dedans. En Afrique de l’Ouest, surtout au Sahel, on appelle ceux
qui vivent à l’extérieur de leur région (pas pays) d’origine les « migrants »,
et on s’enchante de la richesse de leurs expériences et de leur contribution
à l’économie du pays. Gestes et actes de solidarité les lient. Les agents
d’immigration les accueillent avec enthousiasme. Les mots, comme on
l’observe, sont des pièges ou des projectiles.
À cette réfraction verbale qu’est l’expression « Congolais de la diaspora »
s’ajoutent des tensions latentes mais vives tout en étant sourdes et vaines,
au sein des universités, entre ceux qui ont obtenu leur doctorat dans des
universités occidentales et ceux des universités congolaises. À se demander
si les compétences et l’engagement dans la recherche dépendent du lieu
où on a accompli sa formation doctorale et non de l’habitus du chercheur.
Nous devrions pourtant, aujourd’hui, avoir des raisons d’être fiers d’avoir
acquis des compétences suffisantes et nécessaires pour bien former les
chercheurs dans des universités congolaises. Roland Barthes notait avec
justesse que « toute la mythologie petite bourgeoise implique le refus de
l’altérité, la négation du différent, le bonheur de l’identité et l’exaltation
du semblable »1.
Conclusion
4 Taillés sur mesure et datant d’un autre contexte politique, social et universitaire selon lesquels le chef
d’établissement est à lui tout seul une institution (incréée) au-dessus du conseil universitaire ou de
l’Institut, et qui peut engager l’institution dans tous les secteurs de fonctionnement sans consulter
les mandataires (Secrétaire général académique, Secrétaire général administratif, Administrateur
du budget, etc.) et qu’il suffit d’en informer par la suite le comité de gestion, le conseil universitaire
ou de l’Institut.
L
éon de SAINT MOULIN est né à Naast
(Soignies) en Belgique, le 17 décembre 1932. De
1944 à 1950, il entreprit des études d’humanités
gréco-latines à l’athénée royal de Thuin, puis aux
collèges jésuites St Stanislas à Mons et St Servais
à Liège. Entre au noviciat d’Arlon le 14 septembre
1950. Candidature en philologie classique à Namur
(1954), licence en philosophie à Eegenhoven (1957),
licence en histoire (1959) à l’Université Catholique
de Louvain (UCL). Deux ans de régence au Congo,
au collège Albert (Boboto) de Kinshasa (1959-1960)
et St François-Xavier (Sadisana) de Kikwit (1960-
1961). C’est à ce moment qu’est rédigée la première édition du Manuel d’histoire
contemporaine, qui a été reécrit en 1983. Après la théologie à Eegenhoven, il
est ordonné prêtre le 6 août 1964, par Mgr Musty, évêque auxiliaire de Namur.
Le 22 février 1967, il achève son doctorat en histoire à l’UCL et le troisième an
à St Asaph en Grande Bretagne (1966-1967) sous la direction du Père Kelly.
À son retour au Congo, il est attaché au Cepas et prononce ses derniers vœux
le 25 mars 1968.
Pendant trois ans, avec un mandat de recherches du Fonds National Belge de
la Recherche Scientifique, il participe à l’Étude socio-démographique de Kinshasa
1967 et à la mise à jour du Plan de la ville de Kinshasa, avec l’Institut National
de la Statistique et l’Institut Géographique du Congo. En 1970-1971, il est
professeur au Département d’histoire de la Faculté des Lettres de l’Université
Lovanium. De 1971 à 1979, Campus de Lubumbashi de l’Université Nationale
du Zaïre, Chef de Département d’histoire (1971-1974), Doyen de la Faculté
des Lettres (1975-1979). De 1979 à 1981, Vice-Recteur chargé du Campus de
Kinshasa : réouverture du restaurant et construction de l’amphithéâtre en
plein air (non terminé en 1981). Ensuite, année sabbatique et enseignements
à l’Institut St Pierre Canisius et au Grand Séminaire Jean XXIII de Kinshasa.
Première série d’émissions radios à la RTNC sur l’histoire et la géographie
du Zaïre. De février 1983 à août 1984, Recteur du collège Alfajiri à Bukavu et
enseignement à l’ISP/Bukavu. En 1984, retour à Kinshasa, début des émissions
Zaïre Oyé à la télévision nationale, à raison de quatre par province.
De 1985 à 1988, Secrétaire Académique de la Faculté de Théologie
Catholique, puis professeur à temps plein et directeur du Centre des Archives
Ecclésiastiques Abbé Stefano Kaoze jusqu’en 1997 et à mi-temps jusqu’en 2000.
Enseignement de l’Histoire des problèmes du développement du Zaïre et de
l’analyse sociale appliquée à la théologie pastorale, notamment dans un cours
de Lecture scientifique de la vie chrétienne en Afrique. Publication, avec une
large collaboration, des Œuvres complètes du Cardinal Malula en 7 volumes
1997 et, avec Roger Gaise OP, de Église et société. Le discours socio-politique
de l’Église catholique du Congo (1956-1998), ainsi que de la Carte des diocèses
et des implantations pastorales de l’Église catholique au Congo au 1:3.000.000.
édition revue et amplifiée, Kinshasa, Cepas, 2011, 256 p. (en collaboration avec Jean-
Luc KALOMBO Tshibanda).
• "Les cinquante ans de Congo-Afrique et l’objectif d’apostolat social du CEPAS", dans
Congo-Afrique (2011) n° 452, pp. 89-128.
• "Analyse des résultats officiels des élections du 28 novembre 2011", dans Congo-Afrique
(2012) n° 462, pp. 87-125.
• Kinshasa, Enracinements historiques et horizons culturels, Cahiers Africains n° 79,
Tervuren, Musée Royal de l’Afrique Centrale - Paris, L’Harmattan, 2012.
• "Enjeux et défis du découpage administratif", dans Le Journal du fonctionnaire,
avril-juin 2015, pp.34-38.
• Histoire des Jésuites en Afrique. Petite Bibliothèque Jésuite, Bruxelles, Editions
Lessius, 2016.
• Encadreur scientifique du volume de l'INSTITUT PANAFRICAIN CARDINAL
MARTINO, Pour l'enseignement social de l’Église en Afrique. Documents de référence
du Magistère de Léon XIII à François (1891-2015), Kinshasa, Éditions IPCM, 2016,
2.238 p.
• « Le deuxième centenaire de la restauration de la Compagnie en Afrique », dans Congo-
Afrique (2014), n° 486, pp. 385-422.
• « L’instabilité constitutionnelle, un voile trompeur pour les vrais problèmes de la RD
Congo », dans Congo-Afrique (2014) n° 488, pp. 700-708.
• « Le jubilé d'or du Cepas. Vers le 500e numéro de Congo-Afrique », dans Congo-
Afrique (2015) n° 491, pp. 7-22.
• « La perception et le rôle de l’Université de Kinshasa par la population des quartiers
périphériques Cogelos et Tchad », dans Congo-Afrique (2015) n° 499, pp. 756-772.
• « Les 500 numéros de Congo-Afrique : de janvier 1966 à décembre 2015 », dans Congo-
Afrique (2015) n° 500, pp. 808-821.
• « Les 26 nouvelles provinces de la RDC selon la constitution de 2006 », dans Congo-
Afrique (2016), n° 504, pp. 313-316.
• « L’évolution de la justification par l’Église de ses interventions en matière sociale »,
dans Congo-Afrique (2016) n° 506, pp. 476-494.
• « La perception de l’État par la population : résultats d’enquêtes à Kinshasa et en RD
Congo de 1992 à 2015 », dans Congo-Afrique (2017), n° 516, pp. 532-543.
• « Les élections locales sont-elles possibles en RD Congo ? », dans Congo-Afrique (2017),
n° 511, pp. 8-18.
• « Que penser des interventions de l’Église catholique en matière politique ? », dans
Congo-Afrique (2018), n° 523, pp. 201-212.
• « Les inégalités économiques sont-elles des injustices ? », dans Congo-Afrique (2018),
n° 526, pp. 521-538.
• « Les élections du 30 décembre 2018 en RD Congo », dans Congo-Afrique (2019),
n° 532, pp. 105-116.
• « La redevabilité des pouvoirs publics, cas des élections », dans Congo-Afrique (2019),
n° 536, pp. 573-583.
• À paraître bientôt (à titre posthume) : La place de la religion dans la société à Kinshasa
et en RD Congo, Collection « Cahiers africains », n° 94, Tervuren, Musée Royal de
l’Afrique Centrale-Paris, L’Harmattan, 2019, 240 p.
Anicet N’TEBA, S.J.
Pr. à l’Institut de Théologie de la Compagnie de Jésus
Abidjan/Côte d’Ivoire.
848 Congo-Afrique n° 538 � OCTOBRE 2019 � 59e Année
Léon de Saint Moulin, S.J.
S
i une préface c’est le témoignage d’un attachement à un auteur et à son
œuvre, au-delà de la simple expression protocolaire, alors je me sens
honoré de « présenter » Léon de Saint Moulin. Mais est-il vraiment à
présenter ?
Résident au Congo depuis près de 50 ans, religieux de la Compagnie de
Jésus (les Jésuites), Professeur des universités en charge des enseignements
de démographie, auteur d’une production scientifique riche et diversifiée,
recteur honoraire de l’Université de Kinshasa, Léon de Saint Moulin est une
figure emblématique dans le paysage académique et scientifique national et
international ; un modèle d’intellectuel et de chercheur chevronné et engagé.
Nous dirions, chez nous les Bantous, qu’il est « bokulaka », c’est-à-dire
« doyen », « notable » ; ou encore « nganga-mayele », c’est-à-dire « grand-
prêtre du Savoir », « homme aux quatre-z-yeux et aux quatre-z-oreilles ».
Sans compter par ailleurs que l’auteur est doté de ressources rhétoriques
et oratoires talentueuses et percutantes (« vir bonus, disaient les Latins,
peritus dicendi » : « homme de bien, homme de la Parole, homme de parole »).
C’est donc par devoir de reconnaissance, et par admiration pour l’homme
et son œuvre, que j’ai accepté la proposition d’être préfacier, tout en mesurant
combien redoutable était ma responsabilité !
Peut-être, Léon de Saint Moulin a-t-il préjugé que mes propres écrits
sur Kinshasa, « mon village natal », avec toute son énergie et tout son génie
de dynamique culturelle populaire, pouvaient, dans le meilleur des cas,
contribuer à une réflexion interdisciplinaire.
1 Livre sous presse.
C’est donc avec enthousiasme que j’ai lu le texte de Léon de Saint Moulin.
Il s’agit en réalité d’une miscellanée, compilation logique d’un certain nombre
d’enquêtes majeures depuis près de 30 ans sur les questions de la religion
à Kinshasa et en RD Congo.
Le titre de l’ouvrage est déjà en soi d’une actualité brûlante : La place de la
religion dans la société à Kinshasa et en RD Congo. Trois parties composent
l’ouvrage : 1°) L’évolution des appartenances religieuses en RD Congo ;
2°) Le rôle d’une Eglise dans la société ; 3°) La perception du mal et du salut.
Vaste programme, qui couvre la mégapole de Kinshasa (et en milieux
des étudiants), mais aussi le reste du pays, notamment Bukavu, Matadi,
Kisangani, Lubumbashi et Kananga ; mais qui également s’effectue sur
base d’enquêtes de proximité avec des focus groups ciblés avec soin :
La technique des enquêtes, écrit l’auteur, consiste à sélectionner dans
une population un échantillon tel que chaque personne ait les mêmes
chances de figurer parmi celles qui sont interrogées. Cette condition
est remplie si aucun biais ne s’introduit dans le choix des interviewés,
c’est-à-dire s’il n’y a aucun facteur qui amène dans l’échantillon plus
de catholiques, ou de salariés, ou de mères de famille, (etc.) qu’il y en
a dans la population totale. En milieu urbain du Congo, on a établi
que la liste exhaustive des parcelles habitées était facile à dresser
et qu’elle fournissait une base de sondage efficace.
Revenons aux trois parties du volume pour signaler combien elles
reflètent, d’une certaine manière, des angoisses, des interrogations, voire
des prises de position du Congolais du XXIe siècle : « Le XXIe siècle, a écrit
André Malraux, sera spirituel ou ne sera pas ».
La 1re partie : sur base d’une enquête de 1986 auprès des étudiants
de l’Université de Kinshasa, l’auteur indique la grille des appartenances
religieuses en RD Congo ainsi que les transformations conséquentes,
notamment avec l’irruption des Églises de réveil. Au demeurant, l’Église
catholique a été perçue comme celle qui, moyennant quelques réserves,
encadre ses fidèles mieux que les autres.
La 2e partie tente de répondre à la question centrale : quel est, pour la
population, le rôle de l’Église et de la religion dans la vie et dans la société ?
La 3e partie récapitule et rend compte de l’essence philosophique et
sociologique des enquêtes comme résultat à atteindre. Question : quelle est
« la perception du mal et celle du salut et de la libération par la population
de Kinshasa et de certaines localités de la RD Congo ? ».
Aborder la question des appartenances religieuses et de leur impact
social, c’est donc interroger l’histoire, la géographie, la sociologie, la
démographie, voire la philosophie : autant de lieux-oxymores comme l’est
en particulier la ville de Kinshasa.
originel, alors que ce à quoi nous devons fonder notre foi, c’est l’amour
originel divin3.
Mais, à ce propos précis, que disent exactement les enquêtes sur de
terrain de Léon de Saint Moulin, notamment celles de 1994-95 ? À travers
les réponses reçues (18 sur 34 à Kinshasa, le reste étant réparti en provinces,
et même en Angola et au Congo-Brazzaville), il y a lieu de noter ce qui suit :
1°) est mal, ce qui détruit la vie ;
2°) est mal, ce qui détruit la société ; ce qui brise l’harmonie et la
stabilité ;
3) est mal, ce qui agresse volontairement la morale ; c’est le mal délibéré
et l’intention mauvaise, criminelle, et qui est tout à fait contraire à la
volonté de Dieu.
Bien entendu, plane dans toutes ces réponses l’ombre hideuse du
« kindoki » (sorcellerie). Mais la foi en la rédemption, en la victoire du
salut, reste la fibre résiliente. « Pour que la religion, écrit l’enquêteur,
qui relie l’homme à Dieu devienne en effet force de transformation de la
société, elle doit s’organiser en Église (…). Dieu à Kinshasa n’est pas un
inconnu, et la religion y est perçue comme une valeur ». Autre motif d’espoir
selon l’enquêteur : « On doit en conclure que l’Église catholique véhicule
aujourd’hui une position plus engagée que celle des autres Églises sur le
lien à établir entre la foi et la promotion humaine, ou même le combat pour
la justice et le respect des droits de l’homme ».
Que dire enfin de compte sinon que l’ouvrage de Léon de Saint Moulin
est en soi une pièce à conviction méthodologique, avec tout ce que cela
implique d’approche quantitative (et donc statistique) minutieuse,
et de valeur ajoutée de l’ordre qualitatif, « perlocutoire », comme
disent les sémiologues, c’est-à-dire avec la force des exhortations et
même des interpellations explicites. Par les temps qui courent, période
intense d’entropie, de telles approches ne sont-elles pas en même temps
des embrayeurs de mobilisation sociale et d’engagements alternatifs,
progressistes ?4
Une année après l’enquête pour les quotes-parts mensuelles des articles non alimentaires
non récurrents mensuellement (cf. point C) dont les valeurs ont été mises à jour pour la
dernière fois au mois de septembre 2018, le secteur Appuis au développement du CEPAS a
reconduit la collecte des données de l’intégralité des articles du 26 au 27 septembre 2019 et
propose ci-dessus la nouvelle mise à jour annuelle des prix de tous les articles.
Les prix moyens ont été calculés sur base des prix au détail récoltés dans les marchés
(Grand-marché, marché de la liberté, marché Pumbu de Mont-Ngafula, marché Delvaux),
les supermarchés (Shoprite et Kin-marché) et 8 alimentations réparties sur 8 sites
géographiques différents.
À la fin du mois de Septembre 2019, le taux moyen de la Banque Centrale du Congo était de
1 653,8602 Francs congolais pour 1 dollar.
Contact BNB : Tél. +243 898923309 ** E-mail – patmavinga@gmail.com
AFRIQUE
L’Afrique du Sud a défrayé la chronique, en ce mois de septembre 2019,
à la suite d’une vague d’actes xénophobes sur des sujets nigérians notamment.
Face à cette situation, le Consul du Nigéria à Johannesburg avait annoncé, le 9
septembre, que plus de 600 ressortissants nigérians avaient manifesté l’intérêt
de quitter l’Afrique du Sud. La RD Congo a condamné, le 8 septembre 2019,
les actes xénophobes contre les ressortissants congolais en Afrique du Sud.
Quelques réactions ont été enregistrées à Lubumbashi, le 5 septembre 2019,
où un magasin sud-africain, Mister Price, a été pillé. Les vitrines du Consulat
à Lubumbashi ont été attaquées à coup de pierres. À Kinshasa, les tentatives
des jeunes d’attaquer le supermarché sud-africain Shoprite ont été anéanties.
Par ailleurs, un tribunal sud-africain avait condamné, le 18 septembre
2019, un nigérian à 129 ans de prison pour traite d’êtres humains et pour viol !
Après deux semaines de violences, les Sud-africains ont organisé une
marche pacifique pour implorer le pardon des nigérians et des citoyens d’autres
pays africains.
Au Burkina Faso, l’accès à la Fonction Publique est sujet à un concours.
Pour 2019, on a dénombré 1.247.751 candidats pour 6.892 postes disponibles,
soit un poste pour 211 candidats. Ce concours avait débuté, le 19 septembre
2019, à Ouagadougou.
En Côte-d’Ivoire, l’ancien président Henri Konan Bédié a annoncé sa
candidature à la présidentielle de 2020.
Au Burundi, le pouvoir accuse les Évêques d’immixtion dans les affaires
de l’État. En effet, le 22 septembre 2019, le message de la Conférence des
évêques dénonçant les assassinats dans le pays a été lu.
Au Rwanda, le chef de la rébellion des FDLR a été tué dans la nuit, du
17 au 18 septembre 2019, par l’armée congolaise à l’Est de la RD Congo.
La Tunisie a perdu, le 19 septembre 2019, son ancien Président Ben Ali
en exil en Arabie Saoudite, à Djeddah. Il avait quitté le pays après les mani-
festations populaires qui avaient secoué le pays à la fin de 2010.
Le Zimbabwe a perdu, le 6 septembre 2019, son ancien Président
Mugabe (95 ans) à Singapour. Son successeur Emmerson Mnangagwa a révélé
qu’il souffrait d’un cancer à un stade avancé. Il a été enterré, le 8 septembre
2019, dans son village natal de Katuma.
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à la promotion de Congo-Afrique et donc de la culture.
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