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I

EPIGRAPHE

Il n’est pas de plus lourde hypothèque au


monde que la pauvreté au milieu de
l’abondance.

James D. Wolfensohn, Président du groupe


de la Banque Mondiale
II

DEDICACE

A nos chers parents ;

A nos frères et sœurs ;

A ceux qui ont contribué, a ceux qui contribuent et à ceux qui


contribueront au développement durable et effectif de la République
Démocratique du Congo ;

A elle et à eux ;
III

AVANT- PROPOS

Dans la bataille du développement, la République Démocratique


du Congo, comme la plupart des Etats africains, se fait assister par les
institutions de Bretton Woods (Fonds Monétaire International et
Banque Mondiale), institutions catalyseurs de ressources extérieures
en vue du développement des Etats membres. Arpenter avec mérite un
tel sujet si complexe et peu exploré n’aurait pu être possible sans la
participation active d’autres personnes.

Ainsi, au seuil du présent travail qui sanctionne la fin de notre


premier cycle de droit, nous nous acquittons du merveilleux devoir qui
est celui de remercier tous ceux qui nous ont encadrés et dont l’aide a
été indispensable pour la réalisation de ce travail.

Nos remerciements s’adressent particulièrement au professeur


docteur KUMBU ki NGIMBI, non seulement pour la passion du droit
économique qu’il a fait naître en nous à travers ses enseignements,
mais aussi pour avoir bien voulu assurer la direction de ce travail.

Nous pensons également à l’assistant Coco KAYUDI MISAMU qui


n’a pas manqué de soutenir l’évolution de ce travail. Sa disponibilité et
ses encouragements ont été d’un apport inestimable pour la réussite
de cette œuvre scientifique.

De tout cœur, nous rendons hommage à tous les professeurs,


chefs de travaux et assistants de la Faculté de Droit pour leurs
enseignements et pour le dévouement dont ils font montre malgré
l’insatisfaisante rémunération.

Nous tenons aussi à exprimer notre profonde gratitude à l’égard


de notre père, professeur Prosper KANYANKOGOTE et notre mère
Patientie BISAGA, pour tant de sacrifices consentis pour notre
épanouissement intellectuel.

Enfin, que tous nos frères et sœurs, amis et connaissances,


trouvent ici l’assurance de notre profond amour.

Steve KANYANKOGOTE NDUNGUTSE


IV

PRINCIPALES ABREVIATIONS

A.M.G.I :Agence Multilatérale de Garantie des Investissements


B.I.R.D. :Banque Mondiale Internationale pour la Reconstruction et le
Développement
DSRP :Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté ou
CSLP (Cadre stratégie de Lutte contre la Pauvreté)
DTS :Droits de Tirages Spéciaux
éd. :Edition
FASR :Facilité d’Ajustement Structurel Renforcée
F.M.I. :Fonds Monétaire International
FRPC :Facilité pour la Réduction de la Pauvreté et la Croissance
I.D.A. :Association Internationale de Développement
Initiative PPTE : Initiative en faveur des Pays Pauvres très Endettés
Op.cit. :Opus Citatio (œuvre citée)
p. :Page
PAS :Programme d’Ajustement Structurel
PIR :Programme Intérimaire Renforcé
PMURR :Programme Multi-sectoriel d’Urgence de Réhabilitation et de
Reconstruction
RDC :République Démocratique du Congo
S.F.I. :Société Financière Internationale
1

INTRODUCTION GENERALE

I. PROBLEMATIQUE

Les Etats africains, plus particulièrement ceux de l'Afr ique


subsaharienne, abordent le XXI ème siècle dans la catégorie des pays
moins avancés du monde (PMA), caractérisée par leur extrême
pauvreté et par la fragilité de leur économie.

De nombreux problèmes de développement (l'arrêt de la


croissance, l'endettement excessif, la dégradation des infrastructures
de base, la forte mortalité infantile, les maladies endémiques
notamment le paludisme et le VIH/SIDA, etc.) sont devenus en grande
partie le lot exclusif de l'Afrique (1).

Qui plus est, à l'exception de certains pays (Afrique du Sud,


Maroc…), plusieurs Etats africains sont prisonniers d'un cercle vicieux
de sous-développement et de conflits armés.

La République Démocratique du Congo, géant au cœur de


l'Afrique, ne se soustrait malheureusement pas de cette triste réalité.
En effet, la RDC apparaît comme un géant aux pieds d'argile.
Disposant d'un potentiel presque unique au monde en matière de
ressources naturelles, le pays se traîne pourtant en queue des nations
sous-développées. Il est un constat implacable, sans qu'il constitue
une pétition de principe, que la situation économique générale de la
RDC, plutôt que de s'améliorer, ne cesse de se détériorer
inexorablement au fil des années.

Le pays est prisonnier d'une forme dynastique de pauvreté à


laquelle il lui est de plus en plus difficile d'échapper (2). Face à cette
situation, le gouvernement congolais, de plus en plus conscient de
l'état du pays, décide de sortir de son long sommeil et de s'engager
résolument dans la bataille du développement. En effet, les pouvoirs
publics semblent déterminés à attaquer de front le problème de
pauvreté du pays en mettant en œuvre une stratégie globale pour

1 L’Afrique peut-elle revendiquer sa place dans le 21 ème siècle ?, éd. Meadaws press, Banque
Mondiale, p.3
2 Ibidem, p.6
2

sortir du sous-développement et accéder à une croissance économique


durable.

Mais les caisses de l'Etat sont quasiment vides. Le pays,


exsangue tant de capitaux que d'autres ressources indispensables à
son développement, se trouve dans l'incapacité de mettre seul en
œuvre un programme de développement. Face à l'amenuisement des
ressources internes, le recours au financement extérieur constitue la
voie obligée pour résoudre les questions de développement. Il s'agit là
d'un problème d'actualité. En effet, beaucoup d'Etats, surtout ceux du
tiers-monde, sont contraints (faute de ressources suffisantes) à
recourir à l'aide internationale pour financer leur développement (1).

C'est dans ce contexte que la RDC a renoué sous peu ses


relations avec la communauté financière internationale et
particulièrement avec les institutions de Bretton Woods (2). Ces
institutions financières internationales (le Fonds Monétaire
International et la Banque Mondiale) fournissent une assistance
financière et technique aux Etats membres en vue de leur
développement économique. Cette assistance financière, notamment
pour celle du F.M.I. prend la forme des crédits et des prêts accordés au
pays en proie à des difficultés de balance des paiements pour leur
permettre de restaurer les conditions d'une croissance économique
durable.

Le professeur Dr. KUMBU ki NGIMBI dit à ce propos que "le


F.M.I. est l'hôpital central des finances publiques des pays malades" (3).
Pour avoir accès à ces ressources, le pays bénéficiaire est soumis à
l'observation d'une série de réformes et mesures que les bailleurs de
fonds estiment nécessaires pour favoriser le développement et
permettre à ce pays de rembourser rapidement (la conditionnalité). En
effet, le F.M.I. conditionne son aide à l'adoption des mesures de
politique économique ("programme d'ajustement structurel")
auxquelles sont subordonnés non seulement les prêts du F.M.I. mais

1 BAKANDEJA wa MPUNGU, Droit des finances publiques, éd. Noraf, Kinshasa, 1997, p.138
2 « En appui à nos propres efforts, je demande à la communauté financière internationale de
nous assister à mobiliser les ressources humaines, techniques et financières pour
accélérer notre programme de reconstruction nationale ». (Discours-programme du
Président Joseph KABILA, prononcé le 26 janvier 2001 : cfr. Congo-Afrique, février 2001,
p.74-75)
3 KUMBU ki NGIMBI, Cours de législation en matière économique, notes manuscrites 2 ème

année, Faculté de Droit, UNIKIN, 2001-2002


3

aussi les crédits accordés par la Banque Mondiale (1). Ces programmes
d'ajustement structurel (PAS) visent à réduire les déséquilibres
financiers internes et externes des pays en développement. Dans un
second cas, c'est un ensemble de programmes financiers, globaux ou
sectoriels, visant à soutenir les points forts de l'économie "sous
traitement", et capable de remettre cette dernière sur le chemin de la
croissance(2).

Depuis 1963, notre pays a conclu avec le FMI près de douze


programmes d'ajustement qui dans leur majorité ont été des échecs
suite à l'absence d'une réelle volonté de réformes politiques (3). Des
fonds considérables accordés par ces institutions financières furent
utilisés par les pouvoirs publics de l'époque pour financer des projets
de prestige communément appelés "éléphants blancs" (projets
pharaoniques, souvent inachevés et non suivis d'effets bénéfiques).
C'est le cas de la ligne à haute tension entre le barrage Inga et les
centre miniers du Katanga, la création d'une usine de fabr ication de
pneus (Good Year), etc (4). Au début des années 90, la République
Démocratique du Congo avait rompu la quasi-totalité de ses relations
avec les institutions de Bretton Woods.

Depuis l'arrivée au pouvoir de l'actuel Chef de l'Etat, le pays a


renoué ses liens avec ces institutions, appelées à voler au secours de
l'économie congolaise.

Le gouvernement a donc lancé et mis en œuvre des réformes


économiques profondes dans le cadre d'un vaste programme
économique et social appuyé par le FMI à travers les prêts accordés au
titre de la Facilité pour la Réduction de la Pauvreté et pour la
Croissance (FRPC), et par la Banque Mondiale par le biais des crédits
consentis par l'Association Internationale de Développement (IDA).

Au reste, de nombreux programmes de développement sont


financés par la Banque Mondiale, à savoir le Programme Multi-
sectoriel d'Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction (PMURR), le

1 LLOVERAS Badia, Tiers (le) Monde, éd. Armand Colin, Paris, 1997, p.194
2 FREUD C., Quelle coopération ? Un bilan d’aide au développement, éd. KARTHALA, Paris,
1988, p.236
3 MUTAMBA LUKUSA, Congo/Zaïre : la faillite d’un pays. Déséquilibre macroéconomique et

ajustements, éd. Harmattan, Paris, 1999, p.34


4 BOSSEKOTA Léopold, RDC : Dernier pays pauvre du monde ?, éd. Presses Universitaires

Bel Campus, Kinshasa 2001, p.99


4

Programme d'Urgence de Redressement Rapide (PURR),le Programme


des projets prioritaires à impacts visible et immédiat sur la
population(1).

A la différence des années antérieures où les programmes


d'ajustement et/ou de stabilisation étaient conçus à l'étranger et
apportés comme des prêts-à-porter au pays, ignorant ainsi les réalités
socio-économiques propres du pays (formulation directive). Ces divers
programmes, quant à eux, s'inscrivent dans la logique d'une
formulation participative. Ils sont élaborés et pilotés par les autorités
nationales qui maîtrisent ainsi davantage leurs programmes.

Le F.M.I. et la Banque Mondiale se limitent à apporter une


assistance technique et à financer les programmes et projets qui
restent dans un cadre de stratégie de lutte contre la pauvreté. En effet,
ces programmes sont plus ouverts et directement liés à la préparation
et à l'exécution du Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté
(DSRP). Concept lancé en 1999 par les institutions de Bretton Woods,
ce document sert à la fois d'instrument de plaidoyer en faveur des
politiques pro-pauvres et de moyen de mobilisation des ressources
auprès des principaux bailleurs de fonds (2). Le DSRP de la RDC va être
établi définitivement en 2005 mais un DSRP intérimaire, devant
permettre au pays d'avoir toujours accès aux prêts concessionnels de
ces institutions, a été élaboré.

Comme solution à l'épineux problème de la dette extérieure du


pays, ces institutions financières en accord avec les autorités ont
réussi de faire admettre la RDC à bénéficier de l'initiative des pays
pauvres très endettés (PPTE) pour un allègement de sa dette(3).

De ce qui suit, il ressort qu'une panoplie de programmes et


d'initiatives en perspective est mise en marche pour sortir la RDC du
sous-développement. Une série de questions passe donc à notre esprit

1 Ministère des finances et budget, Bureau Central de Coordination (BCeCo), Rapport des
activités au 30 septembre 2002, Kinshasa, octobre 2002, p.1
2 PAUL Elisabeth, Le DSRP : Du neuf à l’horizon de l’aide au développement ?, Université de

Liège, 2003, p.1


3 « J’ai bon espoir également qu’une exécution continue d’un programme appuyé par la

FRPC devrait permettre à la RDC de bénéficier d’un allègement de sa dette dans le cadre
de l’Initiative des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) » (Discours du Directeur Général du
F.M.I., M. Horst KÖHLER, prononcé au cours de sa visite à Kinshasa le 30 avril 2002 :
http://www.bcc.cd/fmirdc.htm
5

auxquelles nous tenterons, autant que faire se pou rra, d'y répondre
dans le corps de ce travail:

• Ces programmes sont-ils des réponses appropriées à la crise


économique et financière que traverse notre pays?

• Quelles sont les causes de l'échec des PAS antérieurs?; et


quelles sont les leçons à tirer de cette expérience?

• Quels mécanismes juridiques doivent être mises en place pour


canaliser l'aide des institutions de Bretton Woods vers le
développement réel de la République Démocratique du Congo?

C'est autour de ces questions que gravitera l'essentiel d e notre


exercice intellectuel qui d'évidence présent un intérêt certain.

II. INTERET DU SUJET

Au seuil du 3 ème millénaire, le développement pose d'énormes


défis à la République Démocratique du Congo. Le sous-développement
actuel de la RDC on contradiction patente avec les richesses
faramineuses de son sol et de son sous-sol, interpelle au plus haut
point tous les intellectuels congolais, juristes en particulier.

Ainsi, toute coopération bilatérale ou multilatérale susceptible de


sortir le pays du sous-développement mérite d'être suffisamment
étudiée.

Après près de quatre décennies de relations infructueuses pour


la République Démocratique du Congo avec les institutions de Bretton
Woods, nous sommes en droit de nous demander si cette fois-ci la
présence de ces institutions contribuait effectivement au
développement du pays. En réfléchissant sur cette question, l'objectif
est d'apporter notre modeste contribution au développement de notre
pays en particulier et de l'Afrique en général. En présence de tels
enjeux, nous osons croire que le choix de ce sujet s'avère opportun et
son intérêt réel. Par ailleurs, étudier le FMI et la Banque Mondiale
sous un angle juridique nous paraît aussi être d'un intérêt non
négligeable.
6

III. DELIMITATION DU SUJET

Le sujet sous examen étant vaste et complexe, il échet d'en


délimiter le contour dans l'espace et dans le temps.

• Au point de vue spatial, nous nous limiterons à la République


Démocratique du Congo, bien qu'il nous soit utile de faire parfois
une approche qui touche tous les pays africains en général;

• Au point de vue temporel, notre travail partira de l'année 2001, date


de la reprise des relations de la République Démocratique du Congo
avec les institutions de Bretton Woods, jusqu'à nos jours. Toutefois,
il sera intéressant aussi de survoler la période (avant 1994) qui a
précédé la rupture de ces relations.

La complexité du sujet nous recommande d'examiner avec


beaucoup d'attention grâce à une méthode de travail appropriée.

IV. METHODES ET TECHNIQUE DE TRAVAIL

Madeleine GWAWITZ définit la méthode comme étant "Un


cheminement cohérent de la pensée en vue de donner une solution à
une question posée"(1). A la lumière de cette définition, il ressort que
tout travail scientifique doit comporter l'utilisation de méthod es et
technique d'approche adoptée au genre de problème en cause. Notre
travail n'a pas échappé à cette règle.

Pour le premier chapitre, la méthode juridique nous a servi à


analyser le texte juridique portant création du FMI et de la Banque
Mondiale, leurs contextes juridiques et institutionnels et leurs
organisations internes.

L'approche diachronique nous a été d'un grand secours pour


appréhender le contexte historique qui a présidé à la création de ces
institutions et leur évolution dans le temps.

Pour le deuxième et le troisième chapitre, nous avons eu recours


à la méthode analytique et prospective qui nous a permis de donner un

1 GRAWITZ Madeleine; Méthodes des sciences sociales, 7ème éd. Dalloz, Paris, 1980, p.448
7

aperçu critique sur les PAS antérieurs, d'évaluer les programmes


financiers et leurs possibilités de réussites, et de formuler des
suggestions et propositions dans le cadre des perspectives d'avenir.
Pour ce faire, nous avons utilisé la technique documentaire qui a
consisté en la consultation d'ouvrages, revues, articles, notes de cours
et sites web, qui ont constitué notre arsenal de travail.

V. ANNONCE DU PLAN

La présente étude sera divisée en trois chapitres.

Le premier chapitre sera consacré aux institutions de Bretton


Woods. Dans la première section, nous évoquerons le contexte
historique qui a présidé à la création de ces institutions ; la deuxième
section sera réservée au Fonds Monétaire International et la troisième ;
à la Banque Mondiale.

Le deuxième chapitre traitera des programmes d’ajustement


structurel (PAS). La première section de ce chapitre étudiera la
définition du concept de PAS ; la deuxième se penchera sur la nature
juridique des accords sur les PAS tandis que la troisième évaluera les
PAS appliqués par les institutions de Bretton Woods en RDC.

Le troisième chapitre portera sur l’intervention des institutions


de Bretton Woods dans le développement de la RDC. La première
section analysera l’apport du F.M.I. et de la Banque Mondiale dans la
relance économique de la RDC ; et la seconde explorera quelques
mécanismes juridiques susceptibles de canaliser l’aide d es institutions
de Bretton Woods vers le développement de la RDC.

Une conclusion générale donnera l’appréciation globale de la


question analysée.
8

CHAPITRE 1. DES INSTITUTIONS DE BRETTON


WOODS

Les institutions de Bretton Woods, en l'occurrence le Fonds


Monétaire International et la Banque Mondiale, sont des institutions
de caractère public dont la portée relève du système économique
mondial(1).

Dans le présent chapitre, nous allons analyser le contexte


historique qui a présidé à la création de ces institutions (section 1)
avant d'étudier successivement le Fonds Monétaire International
(section 2) et ensuite la Banque Mondiale (section 3).

Section 1. DU CONTEXTE HISTORIQUE

§.1. Les institutions antérieures à 1940

Dans la période antérieure à 1940, on peut déjà relever quelques


courants de coopération économique internationale:

• La coopération des groupements économiques, peu structurés et


fondés principalement sur les relations commerciales
privilégiées: le Zollverein, fondé en 1833, créait une union
douanière entre Etats allemands avant l'unification politique de
l'Allemagne, les accords d'Ottawa de 1932, créaient un réseau de
préférences tarifaires entre le Royaume-Uni et les autres pays du
Commonwealth;

• La coopération financière: la Société des Nations a patronné


plusieurs conférences économiques internationales, notamment
sur les problèmes monétaires; le problème des réparations
infligées à l'Allemagne par le Traité de Versailles a suscité une
intense activité diplomatique culminant dans la création, en
1930, de la Banque des Règlements Internationaux (B.R.I.).

Il sied de souligner que la Banque des Règlements Internationaux


n'a jamais eu pour mission de surveiller le fonctionnement du système

1 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, Institutions économiques internationales, éd.


Bruylant, Bruxelles, 1997, p.9
9

monétaire international. A l'origine, elle était chargée d'une mission


technique et bancaire liée au problème des réparations allemandes (1).

Les institutions créées à cette époque n'avaient pas la prétention


d'établir un système économique mondial, ni de discipliner
l'intervention des Etats dans l'organisation de leurs échanges
économiques avec le reste du monde (2). Elles étaient conçues pour
répondre à des besoins spécifiques confinés à des domaines
particuliers. C'est à partir des années 1940 que l'idée vient alors
d'organiser les relations monétaires et financières entre nations. Cette
idée connaîtra sa consécration lors de la conférence de Bretton Woods.

§.2. La conférence de Bretton Woods

Au lendemain de la 2 ème guerre mondiale, les Etats entreprirent


de construire un ordre économique international. Les bouleversements
entraînés par la seconde guerre mondiale sont sans commune mesure
avec ceux de la première. Il eut partout la mise en place d'un système
d'économie de guerre dirigé par l'Etat (contrôle des changes, direction
du commerce extérieur, organisation de la production, etc.) (3). C'est
dans ce contexte que commence dès 1941 les conversations anglo -
américaines sur les problèmes monétaires internationaux. Les vues
américaines et britanniques étaient incorporées respectivement dans le
"plan White" et le "plan Keynes"-4). Ces deux plans qui se rejoignaient
sur de nombreux points, s'écartaient l'un de l'autre en particulier sur
deux éléments:

• Keynes souhaitait préserver une plus grande autonomie des


politiques nationales que White en matière de taux de change et
de contrôle des changes; l'option retenue dans ce domaine a
plutôt penchée vers Keynes;

• Keynes proposait de créer une super banque centrale émettant


une nouvelle monnaie, le "bancor" et de surveiller d'aussi près
les créanciers que les débiteurs. White prévoyait une structure
financière d'assistance mutuelle, fondée sur une caisse
commune, composée d'or et de monnaies nationales, et orientées

1 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.7


2 Ibidem, p.18
3 BYE Maurice, Relations économiques internationales, 5ème éd. Dalloz, Paris, 1987, p.637
4 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.22
10

vers une surveillance plus particulière des débiteurs. Le F.M.I.


est la réplique du plan White à cet égard.

La conférence monétaire et financière des Nations Unies fut


convoquée dès que ces divergences eurent été raisonnablement
aplanies. Elle se réunit à Bretton Woods (New Hampshire, Etats-Unis),
du 1 er au 22 juillet 1944. A l'issue de la conférence, les statuts du
Fonds Monétaire International et de la Banque Internationale pour la
Reconstruction et le Développement (B.I.R.D.) furent adoptés.

Le F.M.I. constituait la Charte de relations monétaires


internationale. Il instituait, pour la première fois, un système
monétaire à vocation mondiale, fondé sur un traité international.

La B.I.R.D. devait mettre le crédit de ses Etats membres au


service de la collecte de l'épargne aux fins de la reconstruction des
pays ruinés et du développement des régions les plus pauvres.

Section 2. DU FONDS MONETAIRE INTERNATIONAL

Le F.M.I. créé à la conférence de Bretton Woods, est entré


officiellement en existence le 27 décembre 1945 après ratification de
ses statuts. Ses activités financières ont débuté le 1 er mars 1947. Le
F.M.I. comporte actuellement 184 pays membres (1).

§.1. Les deux grands amendements aux statuts du F.M.I.

Depuis sa création, le F.M.I. a connu une évolution considérable


tant au niveau de sa conception, de son rôle que de ses objectifs. Cette
transformation graduelle de cette institution s'étale dans le temps à
travers les divers amendements apportés à ses statuts.

1. La création, en 1969, des droits de tirage spéciaux(DTS) (2)

Les statuts du F.M.I. sont modifiés par un texte qui entre en


vigueur le 6 août 1969. L'élément le plus important de la réforme
réside dans la création des DTS, nouvelles facilités de paiement que le

1 A propos du FMI, www.imf.org


2 D.T.S, en anglais S.D.R, Special Drawing Rihts
11

F.M.I. alloue périodiquement aux banques centrales des Etats afin


d'accroître leurs réserves (1).

Au point de vue de leur nature juridique, on doit considérer les


DTS comme une véritable monnaie scripturale internationale dont
l'utilisation est réservée aux Etats et à quelques organisations
internationales. Ils présentent par ailleurs des analogies avec les
monnaies nationales, l'or et les tranches « or » du système initial du
F.M.I.(2).

2. L'accord de Jamaïque, en 1976, légalisant le flottement


généralisé des monnaies

La fonction principale du F.M.I. dans sa conception initiale était


d'établir et de faire respecter une certaine discipline dans les pratiques
monétaires des Etats membres (3).

Ainsi, le régime des parités instituées par celui-ci reposait sur les
quatre dispositions suivantes (article IV des statuts du F.M.I.):

• L'obligation pour chaque pays de déclarer une parité pour s a


monnaie, c’est-à-dire l'équivalence de son unité monétaire en
termes d'un commun dénominateur qui, à l'époque, était l'or ; de
la comparaison des poids de l'or pouvait se déduire la parité de
change entre deux monnaie;

• La détermination de marges de fluctuation des cours de change


centrées sur les parités de change et à l'extrémité desquelles se
situaient les cours-plafond et les cours-plancher;

• L'obligation de prendre les "mesures appropriées" pour


maintenir les cours de change dans les marges prescrites;

• La possibilité de modifier la parité en cas de déséquilibre


fondamental et avec l'accord du F.M.I.

1 COLLIARD Claude-Albert, Institutions internationales, 10ème éd. Dalloz, Paris, 1995,


p.392.
2 Idem, p.392.
3 KUMBU ki NGIMBI, cours de législation en matière économique, notes manuscrites, 2 ème

année, Faculté de Droit, UNIKIN, 2001-2002


12

L'accord de Jamaïque (entré en vigueur le 1 er avril 1978) qui


constitue une refonte complète de l'art. IV des statuts du F.M.I., a mis
fin au régime des parités. L'abandon de ce régime a fait place au libre
choix, par chaque pays membre des pratiques de change jugées
conformes à ses intérêts. C'est la stabilité du système monétaire
international et non plus seulement des taux de change qui est
devenue l'objectif (article IV, section 1). Dès lors, on passe d'une
collaboration dans le seul domaine monétaire à une collaboration
beaucoup plus large dans tous les domaines de la politique
économique(1).

Au demeurant, force est de constater que F.M.I., créé pour


former le centre institutionnel de la coopération monétaire, continue à
jouer ce rôle, bien que son influence paraisse aujourd'hui
sensiblement plus modeste que ne l'avaient envisagé ses fondateurs.

§.2. Du contexte juridique et institutionnel

Le F.M.I. est constitué à l'image d'une société par action où


chaque Etat dispose d'un droit de vote proportionné à sa quote -part,
c’est-à-dire à sa souscription au pool de devise qu'est le F.M.I. (2). Le
contexte juridique et institutionnel du F.M.I. peut être analysé sous
trois aspects:

 Celui d'un corps de règles de bonne conduite s'imposant au


comportement des Etats membres;

 Celui d'une institution financière, disposant de ressources


mises au service d'objectifs déterminés dans un esprit de
solidarité internationale;

 Celui d'une organisation internationale, habilité à prendre des


décisions de portée obligatoire et à poser des actes de gestion.

1. Le F.M.I., code de bonne conduite

Les statuts du F.M.I. soumettent les Etats membres à diverses


obligations dans la conduite de leurs relations monétaires

1 SOREL Jean-Marc, Sur quelques aspects juridiques de la conditionnalité du FMI et leurs


conséquences, 2001, www.ejil.org/journal . p.2
2 , KUMBU ki NGIMBI, op.cit
13

internationales. Chaque Etat membre s'engage à collaborer avec le


Fonds et avec les autres Etats membres pour assurer le maintien de
régime de change (cfr. article IV rénové des statuts du F.M.I.).

Le Fonds est gardien du respect de ces obligations. A ce titre, il


peut exiger des Etats membres la communication de toutes les
informations nécessaires à l'exercice de sa mission (1).

En outre, le F.M.I. dispose d'un pouvoir de sanction à l'égard des


Etats qui ne respectent pas leurs obligations. Il peut déclarer un Etat
membre inéligible à l'utilisation des ressources qu'il gère, il peut
suspendre ses droits de vote et peut même aller jusqu'à exiger d'un
Etat membre qu'il se retire de l'organisation (2).

Cette influence du point de vue normatif revêt un caractère peu


contraignant, les obligations des Etats membres étant formulées avec
des nuances ou concernent des domaines qui s'accompagnent
difficilement de sanctions juridiques.

Le F.M.I. est alors chargé d'une mission de surveillance qu'il


exerce par le dialogue et la persuasion dans le cadre des contacts
entretenus avec les administrations nationales (3).

Néanmoins, ce que le F.M.I. perd en contrainte sur le système


monétaire, il va le gagner en pouvoir de contrôle et de pression sur les
pays qui ont besoin de ressources.

2. Le F.M.I., institution financière internationale

Le F.M.I. administre des mécanismes financiers de structures


diverses dont l'objet commun consiste à procurer des devises aux
Etats membres qui en éprouvent le besoin pour financer un déficit de
la balance des paiements (4).

1 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.124


2 Cette sanction a été rendue possible par le 3 ème amendement aux statuts du FMI, entré en
vigueur en 1992; voire BURDEAU, G "Du deuxième au troisième amendement aux statuts
du FMI: le problème des arriérés", journal de droit économique international, n°1, 1992,
p.71-79.
3 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.125
4 La balance des paiements est un compte des recettes et des dépenses de la nation, dans

ses relations avec l'étranger, au cours d'une période déterminée.


14

L'art.1 er des statuts qui définit les objectifs fondamentaux du


Fonds , on peut y lire ce qui suit: " Donner confiance aux membres en
mettant les ressources générales du Fonds temporairement à leur
disposition moyennant des garanties adéquates". En d'autres termes,
les ressources du Fonds sont disponibles pour aider les pays membres
confrontés à des difficultés économiques et qui manquent de fonds
propres pour y faire face.

Le F.M.I. est désormais d'abord un organe d'assistance aux


Etats.

A. Assistance financière

Cette assistance financière prend la forme des crédits et des


prêts que le F.M.I. accorde aux pays membres pour soutenir leurs
programmes d'ajustement et de réforme.

Au 31 janvier 2003, 89 pays membres bénéficiaient de crédits et


de prêts du FMI dont l'encours d'élevait à 69,6 milliards de DTS
(environ 96 milliards de Dollars US) (1).

Le F.M.I. a créé au fil des ans un certain nombre d'instruments


ou facilités de prêt, qui sont adaptés aux conditions spécifiques de ses
divers pays membres. Les prêts non concessionnels relèvent de cinq
grandes facilités: accords de confirmation, mécanisme élargi de crédit
(MEDC), facilité de réserve supplémentaire (FRS), lignes de crédit
préventive (LCP) et facilité de financement compensatoire (FFC). Tous
ces mécanismes et facilités de financement sont assortis d'un taux
d'intérêt basé sur le marché – le « taux de commission » - (qui est
ajusté pour tenir compte des commissions comptabilisées comme
recettes différées et des arriérés) ; certaines facilités entraînent un coût
d’intérêt supplémentaire, le « taux de commission additionnelle »(2).

En plus de ses mécanismes ordinaires (accords de confirmation,


mécanisme élargi de crédit…), le F.M.I. fournit aux pays à faible
revenu des concours concessionnels au titre de la facilité pour la
réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC).

1 Fiche technique, Quels sont les grands domaines d’activité du FMI, avril 2003,
http://www.imf.org, p.1
2 Fiche technique, Par quels moyens le FMI prêt-t-il des fonds, avril 2003,

http://www.imf.org, p.1
15

Les prêts au titre de la FRPC sont basés sur un document de


stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP), qui est élaboré par le
pays en concertation avec la société civile et d’autres partenaires du
développement, notamment la Banque Mondiale.

Les prêts de la FRPC sont assortis d’un taux d’intérêt de 0,5%


seulement par an et sont remboursables sur une période de cinq ans
et demi à dix ans(1).

Les caractéristiques de cette facilité éloignent le Fonds de sa


vocation purement monétaire et le rapprochent des institutions de
financement du développement.

Pour bien comprendre l’activité du F.M.I., il faut savoir que celui-


ci n’est pas une banque, que ses avoirs ont une valeur et qu’il ne
consent pas de découverts (2).

Du point de vue strictement juridique, le F.M.I. n’accorde pas de


« crédits » et on ne peut parler de « prêts » pour ses opérations. Il se
borne à vendre aux Etats qui en ont besoin des devises et des DTS en
échange de leur monnaie nationale : cette opération est qualifiée de
« tirage », ce qui est le synonyme du mot « achat »(3). Ceci est possible
car le capital du Fonds est partagé entre les Etats membres, chacun
souscrivant un certain nombre de parts dont le montant est fixé selon
les critères qui ont varié au cours du temps qui, globalement, reflète le
poids économique de l’Etat sur la scène internationale.

B. L’accès aux ressources du F.M.I. : La conditionnalité

Aucun prêt du F.M.I., à l’exception de ceux qui sont liés aux


catastrophes naturelles, n’est accordé sans conditions. Lorsqu’un pays
emprunte au F.M.I., son Gouvernement prend des engagements à
l’égard des politiques économiques et financières, dispositions qui sont
connues sous le nom de « conditionnalité ». Le mot conditionnalité se
rapporte donc aux politiques économiques que le F.M.I. souhaite voir
suivre par les pays membres pour qu’ils puissent utiliser les

1 Fiche technique, Par quels moyens le FMI prêt-t-il des fonds, avril 2003,
http://www.imf.org, p.2
2 SOREL Jean-Marc, op.cit, p.2
3 Idem, p.2
16

ressources du F.M.I. conformément aux objectifs et aux dispositions


des statuts(1).

La conditionnalité donne au FMI l’assurance que l’argent prêté


sera utilisé pour résoudre les difficultés économiques de l’emprunteur
et que le pays sera en mesure de rembourser rapidement, de manière à
rendre les fonds disponibles pour les autres pays qui en ont besoin.

Comme tout activité avant économique, la conditionnalité


s’inscrit difficilement dans un moule juridique. Toutefois, trois aspects
méritent de retenir notre attention pour confronter la conditionnalité
au droit :

 La question de la responsabilité ;
 Le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des
Etats et ;
 Le principe de l’égalité souveraine des Etats.

a. La question de la responsabilité

Il sied de souligner que les documents établis entre le F.M.I. et


les pays membres ne sont pas des accords internationaux au sens
strict du terme. Le pays emprunteur n’a donc aucune obligation
juridique à remplir ses engagements, pas plus que le F.M.I. . Ce qui
empêche ce dernier à mettre en cause la responsabilité des Etats et
inversement. Néanmoins, le F.M.I. dispose des moyens de pression et
de persuasion sur les Etats membres, notamment la menace de
suspension de droit de vote.

A l’inverse, il paraît impossible pour un Etat de mettre en cause


la responsabilité du F.M.I. car le lien éventuel entre la décision du
F.M.I. (fait générateur) et le préjudice subi (retard dans la croissance
économique) ne peut être qu’indirect. De plus, il n’y a pas atteinte à un
droit du fait de l’absence de lien juridique entre le Fonds Monétaire
International et l’Etat(2).

1 GOLD J., La conditionnalité, brochure du FMI n°31, F.M.I., Washington DC, 1979
2 SOREL Jean-Marc, op.cit, p.10
17

b. Le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des


Etats

Le Fonds Monétaire International met en avant sa neutralité et sa


non politisation et prétend se pencher uniquement sur les problèmes
d’ordre économique. Cette appréciation est fallacieuse car elle part du
postulat très critiquable de la séparation du politique, de l’économique
et du juridique(1).

Dans la pratique, le F.M.I. s’ingère profondément dans les choix


politiques de l’Etat emprunteur, ce qui est de nature à violer le
principe sacro-saint de la souveraineté de l’Etat. Cependant, il ne peut
être accusé de s’ingérer car il utilise l’argument de l’acceptation de
l’Etat.

c. Le principe de l’égalité souveraine des Etats

On reproche à la conditionnalité d’enfreindre le respect du


principe de l’égalité souveraine des Etats. Le principe d’uniformité en
vigueur dans le droit du F.M.I. empêche théoriquement un traitement
inégalitaire des Etats membres. Mais dans la réalité, le F.M.I. se
comporte différemment selon qu’il est en présence d’un pays en
développement ou d’une puissance occidentale.

Jean-Marc SOREL, professeur à l’Université de Rhennes I, dit à


ce propos : « Vis-à-vis des pays en développement et des pays de
l’Europe de l’Est confrontés aux bailleurs de fonds occidentaux, la
conditionnalité donne au F.M.I. un rôle catalyseur important ; vis-à-vis
du « système » monétaire et financier dans son ensemble, le F.M.I. est
impuissant. Il n’a aucun pouvoir sur le pays le plus déficitaire du
monde : les Etats-Unis »(2).

Au demeurant, force est de constater que, sur le plan juridique la


conditionnalité (malgré plus de 800 précédents) n’est pas devenu un
phénomène coutumier, faute d’une opinio juris uniforme. L’on est
néanmoins parvenu à un processus quasi coutumier auquel on peut
appliquer le cadre du « standard international ». Par définition, il s’agit
de principes juridiques entre lesquels les Etats choisissent ceux qu’ils
entendent appliquer. L’option est ici fort réduite, les pays agissant

1 SOREL Jean-Marc, op.cit, p.15


2 Idem, p.15
18

souvent en dernier recours par leur demande auprès du F.M.I. et


connaissant parfaitement les conséquences d’une marginalisation sur
le plan monétaire et financier.

A présent, analysons le dernier aspect du contexte juridique et


institutionnel du F.M.I..

3. Le F.M.I., organisation internationale

Le Fonds Monétaire International est organisation internationale


qui a le statut d’une institution spécialisée des Nations Unies. En tant
qu’organisation internationale, le F.M.I. se caractérise par l’attribution
des quotes-parts aux Etats membres et par la structure des organes de
délibération.

A. Les quotes-parts

L’adhésion d’un Etat au F.M.I. implique qu’il lui soit attribué une
« quote-part ». il s’agit d’une grandeur exprimée en DTS,
représentative, par comparaison avec l’ensemble des quotes-parts, de
l’importance économique et financier du pays (1).

La quote-part d’un Etat sert à déterminer :

 La souscription : la quote–part d’un pays membre détermine sa


souscription soit le montant maximal de ressources financières qu’il
est tenu de fournir au F.M.I.. Au maximum 25% de cette
souscription doit être réglée en devises étrangères largement
acceptées à l’échelle internationale ou en DTS, le solde étant versé
en monnaie nationale du pays concerné;

 Le nombre de voix : la quote-part détermine le poids exercé par le


pays dans les décisions du F.M.I.. Chaque membre dispose de 250
voix de base auxquelles s’ajoute une voix supplémentaire pour
chaque fraction de la quote-part équivalent à 100.000 DTS. Ce
calcul a pour conséquence que les Etats-Unis détiennent la quote-
part la plus élevée, soit un nombre de voix équivalent à celui de la
Russie, la Chine, l’Afrique et l’Amérique du sud mis ensemble (2).

1 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.127


2 Fiche technique, Quote-part du FMI et leurs révisions, avril 2003, http://www.imf.org
19

Nombre de voix des principaux pays membre du FMI (état de décembre


2001)

Pays Voix (%) Pays Voix (%)


 Etats-Unis 17,16  Canada 2,95
 Allemagne 6,02  Chine 2,95
 Royaume-Uni 4,97  Brésil 1,41
 France 4,97  Suède 1,12
 Italie 3,27  Corée du Sud 0,77

Source : Fiche technique, Quote-part du FMI et leurs révisions, avril


2003, http://www.imf.org

 L’accès au financement : la quote-part détermine aussi le montant


de l’aide financière qu’un pays membre peut obtenir du F.M.I.. Par
exemple, dans le cadre des accords de confirmation et des accords
élargis, chaque pays membre peut emprunter jusqu’à 100% de sa
quote-part annuellement et 300% au total. La fraction des
allocations générales des DTS qui est attribuée à chaque pays
membre est aussi fonction de sa quote-part.

Les quotes-parts font l’objet d’un réexamen tous les 5 ans. Elles
peuvent être augmentées de façon uniforme ou adaptées aux
modifications intervenues dans l’importance économique relative des
pays membre.

Notons aussi que le siège principal du F.M.I. est situé dans le


pays dont la quote-part est la plus élevée, en l’occurrence les Etats-
Unis (Washington, D.C).

B. Les organes

Le Fonds Monétaire International délibère à 3 niveaux


différents :

a) Le Conseil des Gouverneurs

Le Conseil des gouverneurs est l’instance suprême où chaque


Etat membre est représenté soit par le ministre qui a les finances dans
ses attributions, soit par le gouverneur de la banque centrale (ou
autres personnalités de rang comparable). Il a compétence pour
20

prendre les décisions les plus importantes. Il se réunit une fois par an.
Pendant le reste de l’année, des décisions peuvent être prises par le
canal d’un vote par correspondance.

b) Le Conseil d’Administration

Le Conseil d’Administration est l’organe compétent pour pr endre


les décisions de gestion courante et siège en permanence. Il comprend
une vingtaine d’administrateurs.

c) Le Directeur Général

Le Directeur Général dirige les services du F.M.I. et préside le


Conseil d’Administration par lequel il est nommé. Actuellement, le
poste de Directeur Général est occupé par M. Horst KÖHLER
(Allemagne).

d) Le Comité Monétaire et Financier International

Le Comité Monétaire et Financier International est chargé de


conseiller le F.M.I. sur le fonctionnement du système monétaire
international.

e) Le comité Intérimaire

Le Comité Intérimaire est l’organe de négociation des décisions


importantes. Lorsque les décisions politiques sont prises, elles sont
renvoyées pour adoption formelle soit au Conseil des Gouverneurs, soit
au Conseil d’Administration car le Comité Intérimaire, créé en 1974,
n’a pas d’existence statutaire et n’a donc pas de pouvoirs propres au
sens juridique du terme.

De ce qui précède, il ressort que F.M.I. est une organisation


internationale dominée par les pays occidentaux. La domination
politico-financière des pays industrialisés sur le F.M.I. apparaît à la
fois dans la composition de l’organe restreint (Conseil
d’Administration), dans l’importance reconnue à ces pays et en matière
de vote(1).

1 BAKANDEJA wa MPUNGU, Le manuel de droit financier, éd. Universitaires africaines,


Kinshasa, 1997, p.217.
21

A présent, étudions rapidement les moyens par lesquels le


Fonds Monétaire International s’approvisionne en ressources
financières.

§.3. Des ressources du F.M.I.

Pour financer ces programmes, le Fonds Monétaire International


dispose de deux grandes catégories de ressources :

❖ Les contributions des Etats membres (quote-part)(1).


❖ Les accords généraux d’emprunt

Le Fonds s’est prévalu de cette faculté pour la première fois en


1962 en concluant avec les dix principaux pays membres des
arrangements appelés « Accords généraux d’emprunt » lui permettant
d’emprunter des ressources auprès d’eux pour des montants et à des
conditions fixées d’avance (2).

La première institution de Bretton Woods ainsi étudié penchons-


nous à présent sur la deuxième, à savoir la Banque Mondiale.

Section 3. DE LA BANQUE MONDIALE

La Banque Mondiale a été créée par les accords de Bretton


Woods. Ses statuts sont entrés en vigueur le 27 décembre 1945. La
Banque Mondiale n’est pas une « banque » au sens commun du terme.
Elle est l’une des institutions spécialisées des Nations Unies et compte
184 pays membres.

L’expression « Banque Mondiale » est utilisée pour désigner les


deux institutions complémentaires qui sont la Banque Internationale
pour la Reconstruction et le Développement (BIRD) et l’Association
Internationale de Développement (IDA) (3) tandis que le terme « Groupe
de la Banque Mondiale » couvre cinq institutions, à savoir : la B.I.R.D.,
l’IDA, la SFI (Société Financière Internationale), l’AMGI (Agence
Multilatérale de Garantie des Investissements) et le CIRDI (Centre

1 Voire Supra
2 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.148
3 L’Association Internationale de Développement, désignée même en français par le sigle

« IDA », pour ne pas confondre avec l’AID( Agency for International Development) qui est
l’administration américaine chargée de l’aide au développement.
22

International de Règlement des Différends Relatifs aux


Investissements).

§.1. Du contexte juridique et institutionnel

La Banque Mondiale est une institution de transfert de


ressources, elle constitue un intermédiaire entre des détenteurs de
capitaux des divers pays et les utilisateurs de capitaux dans d’autres
pays. Il s’agit d’une banque qui peut accorder ou garantir des prêts et
se procurer des fonds par le moyen d’emprunts, mais c’est un
organisme inter-étatique car les Etats fournissent son capital social et
contrôle son administration par le moyen de leurs représentants (1).

Dans ce paragraphe, nous allons étudier distinctement les


diverses institutions que regroupe le Groupe de la Banque Mondiale.

1. La Banque Internationale pour la Reconstruction et le


Développement(2)

Créée en 1945, la Banque Internationale pour la Reconstruction


et le Développement (B.I.R.D.) est à la fois la plus ancienne et la plus
importante des institutions engagées de façon opérationnelle dans
l’aide au développement. Elle a peu contribué à la reconstruction
européenne (contrairement au projet initial), celle-ci ayant été prise en
charge par le plan Marshall(3).

Les ressources de la Banque se composent de son capital


d’emprunt et, accessoirement, des bénéfices mis en réserve.

L’adhésion à la B.I.R.D. implique la souscription à un certain


nombre de parts de son capital proportionnellement à l’importance du
pays. L’échelle de ces contributions ressemble fortement à l’échelle des
quotes-parts du F.M.I..

Ces souscriptions ne sont libérées qu’à concurrence d’une très


faible proportion (moins de 10%) : le capital de la Banque sert
essentiellement de garantie des emprunts qu’elle contracte. La B.I.R.D.
ne peut appeler cette partie du capital que si cet appel est nécessaire

1 COLLIARD Claude Albert, op.cit, p.457


2 La RDC a adhéré à cette institution le 28 septembre 1963
3 BYE Maurice, op.cit, p.637
23

pour le service de ses emprunts ; le cas ne s’est jamais présenté en


près de 50 ans(1).

L’activité de la B.I.R.D. est dès lors financée principalement par


la voie d’emprunts. En grande majorité, ces emprunts sont contractés
à moyen et à long terme dans les marchés financiers, la Banque
Mondiale y jouit des meilleures conditions disponibles en raison de
l’ampleur de son capital de garantie, en raison de la sécurité de ses
prêts et en raison de sa solide réputation auprès des milieux
financiers.

La B.I.R.D. utilise ses ressources à consentir des prêts en faveur


du développement. Les prêts de la B.I.RD. ont des échéances plus
longues que ceux des banques commerciales puisque les pays
empruntant à la B.I.R.D. ont entre 15 à 20 ans pour rembourser celle-
ci, et ne commencent à rembourser le principal qu’à l’issue d’un délai
de grâce de trois à cinq ans (2).

Le taux d’intérêt perçu est légèrement supérieur au coût de ses


emprunts, mais se situe néanmoins au niveau le plus favorable parmi
les conditions du marché pour des échéances comparables. Les
« clients » de la B.I.R.D. sont les pays en voie de développement, à
l’exclusion de :

• Ceux qui sont suffisamment développés pour avoir accès aux


marchés financiers sans passer par son intermédiaire;

• Ceux qui sont trop pauvres pour supporter le poids des


conditions financières de ses prêts; ces pays sont alors éligibles
aux interventions de l’IDA.

2. L’Association Internationale de Développement 3)

Créée en 1960, l’IDA est chargée de fournir aux pays les plus
démunis une assistance financière assortie de conditions très
libérales, incompatibles avec la structure financière de la B.I.R.D..
L’IDA est une entité juridique distincte de la B.I.R.D., mais les deux

1 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.185


2 Groupe de la Banque Mondiale, Qu’est ce que la Banque Mondiale ?, 2001,
http://www.banquemondiale.org
3 La République Démocratique du Congo a adhéré à cette institution le 28 septembre 1963
24

institutions sont étroitement associées ; le président de la BIRD est de


droit président de l’IDA.

L’IDA consent des crédits de développement de longue durée.


Cette durée s’étendait à 50 ans jusqu’en 1987, et depuis lors, a été
ramenée de 35 à 40 ans selon le cas. Elle comporte un délai de grâce
de 10 ans(1).

Les financements de l’IDA revêtent la forme de crédits ne portant


pas d’intérêts et de dons. Les crédits sont consentis sans intérêts mais
à charge d’une commission de service inférieure à 1% l’an, supposée
couvrir les frais (2). Ces crédits sont en principe réservés à des pays à
faible revenu qui ne peuvent généralement pas emprunter sur les
marchés internationaux ou ne peuvent emprunter à des taux d’intérêt
élevés.

Pour financer de tels crédits, l’IDA ne peut évidemment faire


appel, comme la B.I.R.D., à l’épargne privée. Ses ressources
proviennent pour l’essentiel des budgets publics; elles sont formées
des quatre éléments suivants :

❖ Souscriptions initiales de chaque pays membres : les pays


développés doivent verser leur souscription en monnaie librement
utilisable par l’IDA tandis que les pays en développement ne versent
sous cette forme que 10% de leurs souscriptions ;

❖ Les contributions supplémentaires demandées par l’IDA. Vu


l’épuisement de ses moyens d’action, l’IDA sollicite environ tous les
3 ans la reconstitution de ses ressources. Ces contributions
supplémentaires qui constituent de loin la source principale de
financement de ses activités font l’objet de négociation entre l’IDA
et les pays disposés à y participer ;

❖ Les ressources fournis par la B.I.R.D., qui y affecte régulièrement


une fraction de ses bénéfices ;

❖ Les ressources provenant du remboursement des crédits octroyés.

1 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.187


2 Idem, p.187.
25

Les dons de l’IDA sont alloués aux pays les plus pauvres et les
plus vulnérables pour faire face aux difficultés particulières auxquelles
ils sont confrontés (exemple : l’épidémie de VIH/SIDA).

Outre la Banque Internationale pour la Reconstruction et le


Développement (B.I.R.D.) et l’Association Internationale de
Développement (IDA), le Groupe de la Banque Mondiale comprend trois
autres organisations.

3. La Société Financière Internationale (1)

Créée en 1956, la Société Financière Internationale (SFI) a pour


mission d’encourager l’investissement privé dans ses pays membres en
développement. Sa création en tant qu’entité juridique distincte de la
BIRD lui permet :

• D’intervenir sans la garantie du gouvernement du pays d’accueil,


condition exigées par les statuts de la B.I.R.D. ;

• De prendre des risques d’entreprise, incompatibles avec la


structure financière de la B.I.R.D. ;

Les ressources de la SFI proviennent de son capital


intégralement libéré, d’emprunts contractés auprès de la BIRD elle-
même; et plus récemment dans le marché ainsi que de la cession à des
tiers de ses titres de prêt ou participation (2).

La SFI dispose d’une grande liberté de choix pour utiliser ces


ressources à des prêts, à des conditions commerciales. Elle jouit d’une
indépendance fonctionnelle plus marquée à l’égard de la B.I.R.D. que
de l’IDA. Elle collabore néanmoins étroitement avec ces deux
institutions.

4. L’Agence Multilatérale de Garantie des Investissements (3)

Créée en 1988, l’Agence Multilatérale de Garantie des


Investissements a pour objet d’encourager les investissements directs
étrangers dans les pays en développement en diminuant les obstacles

1 La République Démocratique du Congo a adhéré à cette institution le 15 avril 1970


2 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.188
3 La République Démocratique du Congo a adhéré à cette institution le 7 février 1989
26

non commerciaux à l’investissement et en prenant en charge les


risques politiques auxquels sont exposés les investisseurs et les
bailleurs de fonds dans les pays en développement.

En tant qu’entité juridique distincte de la B.I.R.D., elle remplit


son mandat :

• En assumant les risques d’expropriation, de transfert, de conflits


armés ou de troubles civils et de rupture de contrat pour de
nouveaux investissements d’investisseurs étrangers privés ou
publics, des pays membres de l’institution. L’AMGI peut
également faire de la coassurance et de la réassurance de
nouveaux investissements . Sa garantie est normalement
accordé pour une durée de 15 ans ;

• En offrant des services de promotion et de conseil à ses pays


membres en développement afin de les aider à attirer des
investissements étrangers directs ;

Les ressources de l’AMGI proviennent de son capital et des


primes d’assurance perçues.

5. Le Centre International de Règlement des Différends relatifs


aux Investissements (1)

Crée en 1996, le CIRDI facilite le règlement des différends


relatifs aux investissements entre les investisseurs étrangers et leur
pays d’accueil en fournissant des services internationaux de
règlement, par voie de conciliation ou d’arbitrage, contribuant par -là à
instaurer un climat de confiance mutuelle entre les Etats et les
investisseurs étrangers.

Un grand nombre d’accords internationaux relatifs aux


investissements reprennent les mécanismes d’arbitrage du CIRDI.

§.2. De la structure de la Banque Mondiale

La structure des organes de chaque institution, à l’exception du


CIRDI, est analogue à celle du F.M.I.. Le pouvoir de vote est pondéré

1 La République Démocratique du Congo a adhéré à cette institution le 29 mai 1970


27

d’après l’importance de la contribution financière de chaque pays au


capital de l’institution.

Chaque Etat membre siège au Conseil des Gouverneurs, et un


Conseil d’Administration, de composition restreinte , assume les
décisions de gestion courante.

Au reste, les deux institutions (le Fonds Monétaire International


et la Banque Mondiale) sus-étudiées paraissent nettement différentes
mais non sans être intimement liées, rapprochées notamment quand
elles mettent leurs ressources propres à la disposition de leurs
membres demandeurs de fonds, moyennant garanties ou mieux
conditions. L’articulation cohérente et planifiée de ces conditions de
mesures de politique économique que l’Etat emprunteur adopte, dans
le cadre de la conditionnalité de l’utilisation des ressources de ces
institutions, s’effectue dans ce que l’on est convenu d’appeler « le
programme d’ajustement structurel » auquel nous réservons le
chapitre qui suit.
28

CHAPITRE 2. DES PROGRAMMES D’AJUSTEMENT


STRUCTUREL (PAS)

Dans ce chapitre, nous allons d’abord définir le concept de


programme d’ajustement structurel (Section 1), ensuite aborder la
nature juridique des accords sur les PAS (Section 2) avant d’élucider
l’épineuse question des PAS appliqués par les institutions de Bretton
Woods en République Démocratique du Congo (Section 3).

Section 1. DEFINITION DU CONCEPT

L’article 1 des statuts du F.M.I., qui en définit les objectifs,


stipule entre autres que les ressources du F.M.I. doivent fournir aux
Etats membres la possibilité de corriger les déséquilibres de balance
des paiements sans recourir à des mesures préjudiciables à la
prospérité nationale et internationale.

Si au départ, l’aide apportée était considérée comme


conjoncturelle et temporaire pour permettre à l’Etat de retrouver le
droit chemin du code de bonne conduite, elle est devenue avec
l’apparition de difficultés économiques croissantes une aide à moyen
ou long terme.(1)

De la même manière, il ne s’agit plus de remédier à un


déséquilibre conjoncturel de la balance des paiements mais d’engager
l’Etat dans un programme d’ajustement structurel, impliquant la
conduite d’une politique économique et monétaire de nature à
entraîner la croissance.

C’est l’Etat qui intègre la structure en son sein : l’adaptation dont


il est question dans l’ajustement doit se faire par rapport aux Etats
dont le niveau de vie est plus avancé. La mise en conformité des
structures se fait par rapport aux exigences de la vie internationale.
Ainsi, la finalité de cet ajustement serait sans doute de permettre aux
divers secteurs de la vie nationale de fonctionner dans une certaine
harmonie, sans interférences nocives afin de répondre aux nécessités
du bien-être de la société. C’est dans ce sens que l’adaptation des
structures d’un Etat aux conditions de l’économie mondiale devrait

1 SOREL Jean-Marc, op.cit., p.7


29

permettre d’instaurer une croissance interne et surtout d’être


compétitif sur la scène internationale (1).

Pour mieux cerner les contours de la question, il s’avère à cet


effet nécessaire d’en comprendre la notion telle que l’entendent les
institutions de Bretton Woods, qui en sont les principales initiatrices.

§.1. Définition du concept selon le F.M.I.

Le Fonds Monétaire International est l’une des institutions qui a


lancé des opérations d’ajustement structurel pour répondre aux
besoins des pays en développement, et ainsi pallier aux profondes
difficultés auxquelles ces pays se sont confrontés à la fin des années
1970.

Vu par le F.M.I., l’ajustement structurel est un processus qui vise


à rétablir la balance extérieure courante de façon à réduire les baisses
de production à court terme et à préserver la capacité de l’économie à
poursuivre sa croissance.

Il ne s’agit plus, dans ce cas, d’un simple examen du pays en


cause, mais bien d’une négociation au terme de laquelle le F.M.I..
s’engage à mettre le crédit à la disposition du pays pour autant que le
programme d’ajustement structurel agréé soit respecté.

Le fondement de cette conditionnalité réside dans le fait que les


ressources du F.M.I. doivent être mises au service du respect des
disciplines qu’il impose. Le financement doit aller de paix avec
l’ajustement(2).

L’action du F.M.I. s’inscrit aussi dans une logique de


rééquilibrage à moyen et long terme pour éviter de s’enliser dans des
tentatives répétées de stabilisation des balances des paiements.

§.2. Définition du concept selon la Banque Mondiale

1 KALONJI NGOIE MUBENGA, Les déséquilibres économiques de la République


Démocratique du Congo face à la politique d’appui à l’ajustement structurel , Mémoire ,
Faculté de Droit, UNIKIN, 1996, p.8
2 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.143
30

Du côté de la Banque Mondiale, le concept d’ajustement


structurel reçoit une approche beaucoup plus large que celui du
F.M.I.. En effet, la Banque Mondiale aborde d’une part, le cadre étroit
de la balance des paiements, et d’autre part, elle atteint les autres
paramètres fondamentaux de l’économie des Etats, tels que les
finances publiques, le taux de croissance économique et le taux de
croissance démographique (1).

A la lumière de ce qui précède, il y a lieu de remarquer que


l’ajustement structurel est en définitif un équilibrage de la balance des
paiements qui se fait au moyen d’une adaptation des structures
économiques de production grâce à une augmentation de la croissance
économique ou grâce à un recours accrû aux capitaux extérieurs.

Toutefois, alors qu’à l’origine, les programmes d’ajustement


structurel étaient surtout conçus pour régler des difficultés
conjoncturelles et portaient sur le réglage macro-économique des pays,
progressivement, le F.M.I., en liaison avec la Banque Mondiale, a pris
en compte de façon croissante les problèmes de développement et les
difficultés de l’intégration des pays dans le système monétaire et
financier international. Ces institutions cherchent ainsi davantage, au
travers de ses programmes, à restaurer les grands équilibres macro -
économiques et à favoriser des réformes structurelles, notamment le
renforcement des capacités institutionnelles, la promotion du secteur
privé et la lutte contre la pauvreté (2).

La mise en œuvre de ces PAS se fait moyennant des garanties


adéquates et selon une procédure arrêtée à l’avance. Ceci va faire
l’objet de notre section qui porte sur la nature juridique des accords
sur les programmes d’ajustement structurel.

Section 2. NATURE JURIDIQUE DES ACCORDS SUR LES


PROGRAMMES D’AJUSTEMENT STRUCTUREL
1 KALONJI NGOIE MUBENGA, op. cit., p.10
2 LAFERRERE Armand , Finances publiques : les notices, éd. Biadec, Paris ,2000, p.62
31

Pour mieux appréhender les différents aspects de la nature


juridique des PAS, il sied d’en examiner le processus d’élaboration, de
conclusion et d’exécution.

§.1. Du processus d’élaboration des PAS

Le processus d’élaboration des accords sur les PAS diffère selon


qu’il s’agit du F.M.I. ou de la Banque Mondiale. Mais dans la pratique
comme nous l’avons dit plus haut, ces institutions mettent en œuvre
et élaborent les accords sur les PAS en parfaite synergie.

En général, ces accords se présentent sous deux formes : au


F.M.I., un premier document consiste en un certain nombre de clause
standards qui indiquent le but de l’accord, sa durée, son montant, etc.
Il s’agit ici d’adopter une opération spécifique à la politique et aux
mécanismes du F.M.I.(1).

Le second document consiste en une « lettre d’intention » ou « un


mémorandum » du Gouvernement de l’Etat bénéficiaire qui indique la
politique économique, financière, monétaire et celle de change qu’il
entend mettre en œuvre.

Il n’existe pas de procédure réglementaire pour déterminer le


F.M.I. à initier les discussions sur un programme avec un Etat en
difficulté pour la simple raison qu’il y a une permanence de rapports
entre les pouvoirs publics des pays membres et celui-ci(2).

Trois étapes sont nécessaires à ce niveau d’élaboration du PAS :

 La première consiste à diagnostiquer les difficultés de la


balance des paiements du pays membre ;
 La seconde est celle de l’établissement des objectifs
économiques et financiers de l’Etat en difficulté ;
 La troisième consiste, elle, à la formulation des mesures
d’ajustement nécessaires compte tenu des objectifs du pays
dans les besoins et de l’évolution des facteurs externes.

1 Voir l’article XXX, §b des statuts du FMI


2 Article VIII §5.a. des statuts du FMI
32

C’est à l’issue de ces discussions avec le Fonds que le pays


demandeur évalue l’importance de l’amélioration qu’il faut apporter à
sa balance des paiements et les ressources en devises étrangères dont
il a besoin pour ce faire.

En revanche, à la Banque Mondiale, nous retrouvons également,


dans le cadre des accords ou prêts d’ajustement structurel, deux
documents qui précisent : le premier, les clauses ou modalités des
engagements des parties et le deuxième document, la justification de la
demande d’aide dans une « Déclaration de politique économique et de
développement », document dans lequel elle offre les éléments sur la
base desquels la Banque Mondiale se fonde pour contrôler l’exécution
de ces accords. Ici, le dialogue s’effectue sur une base beaucoup plus
large ; il se préoccupe des meilleures conditions de relance de la
croissance et du développement économique. Cet aspect de chose
explique ainsi la démarche suivie par la Banque Mondiale quant à
l’identification de façon précise des secteurs malades et des
déséquilibres, l’étude des mesures concrètes et raisonnables,
réalisables au cours d’un calendrier préétabli, compte tenu des
conditions institutionnelles et sociales propres du pays. Enfin,
intervient l’apport d’un soutien financier afin de lever certaines
contraintes de ressources extérieures qui en rendraient l’exécution
plus difficile.

De ce qui précède, il ressort que le processus d’élaboration est le


fait des deux institutions qui n’agissent pas de leur propre chef mais à
l’initiative des Etats en situation peu confortable qui introduisent leur
« déclaration de politique économique et de développement » ou leur
« lettre d’intention » selon le cas.

§.2. Du processus de la conclusion des accords sur les PAS

C’est l’étape qui correspond à la signature d’accords


sanctionnant l’issue des discussions qui ont eu lieu entre les experts
de deux parties. En effet, d’un coté, il y a les autorités nationales
compétentes en matière financière et monétaire, et de l’autre, les
experts du F.M.I. et ceux de la Banque Mondiale qui prennent part
active dans le processus.
33

C’est à l’issue de la signature que les décisions du F.M.I.


prennent la forme « d’accords de confirmation » qui peuvent être
simples ou élargis.

Comme souvent dans la terminologie du F.M.I., il faut se méfier


du sens littéral des expressions ou du moins de leur traduction.
L’expression « accord de confirmation » provient de son appellation
anglaise : « stand by arrangement » qui fut traduite au départ par un
curieux néologisme : « assurement de tirage » avant que l’expression
« accord de confirmation » ne l’emporte dans le langage du F.M.I..
Néanmoins, l’article XXX (b) des statuts en vigueur précise que par
accord de confirmation, il faut entendre une décision par laquelle le
Fonds donne à un Etat membre l’assurance qu’il pourra,
conformément à ladite décision, effectuer des achats au compte des
ressources générales pendant une période spécifiée et jusqu ’à
concurrence d’un montant spécifié (1).

Force est de constater que l’accord de confirmation stricto sensu


est une décision unilatérale du Fonds par laquelle celui-ci exprime son
intention d’apporter son aide à l’Etat sous certaines conditions. J.
GOLD affirme à ce propos : « Il ne s’agit pas d’un accord ni même d’un
document contractuel car il n’y a pas de rencontre de volonté ni
volonté de se lier mais une simple « assurance » donnée à une
« intention de faire »(2).

Et il renchérit : « La détermination du Fonds de ne pas contracter


lorsqu’il approuve des accords de confirmation est probante, car si une
partie n’a pas l’animus contrahendi (intention de contracter) et fait
clairement connaître son attitude à l’autre partie, on ne peut maintenir
qu’un accord a été conclu »(3).

Si l’on tient compte de la lettre d’intention, il y a par conséquence


deux déclarations sur le même sujet. Ceci pourrait s’apparenter à un
acte concerté non conventionnel sans valeur obligatoire, cette forme
d’accord informel correspond à l’idée d’assurances mutuelles que se
donnent le F.M.I. d’une part et l’Etat d’autre part, et dont le non-
respect n’est pas susceptible de sanctions juridiques.

1 SOREL Jean-Marc, op.cit, p.3


2 GOLD J., L’importance du caractère juridique des accords de confirmation du Fonds,
brochure du FMI n°35, FMI, Washington DC, 1980, p.30
3 Idem, p.30
34

La Banque Mondiale s’engage par voie de « prêts d’ajustement


structurel » qui portent sur une série d’investissement à financer dans
le cadre d’une politique globale ou sectorielle.

§.3. Du processus d’exécution des accords sur les PAS

Les décisions relatives à l’exécution des mesures d’ajustement


sont de la seule compétence des pouvoirs publics du pays emprunteur.
Si les dirigeants ne sont pas intimement convaincus de ce plan et
décidés à le mettre en œuvre dans toute sa cohérence, il y a peu de
chance qu’il puisse réussir. C’est pour cela qu’il est laissé aux
autorités nationales le soin de déterminer la répartition du poids des
mesures d’ajustement entre les différentes composantes de l’économie
par la distribution des crédits alloués et le choix de mesures de
réduction des dépenses publiques (1).

Les accords sur les PAS constituent une nature juridique sui
generis en ce sens qu’ils font l’objet des dispositions particulières entre
parties ; ils sont à la fois contractuels, unilatéraux ou réglementaires.

Il s’ensuit que ces accords obéissent à un régime mixte dont les


principes peuvent être ramenés à deux, l’un conventionnel et l’autre
réglementaire.

1. Régime conventionnel

Le régime conventionnel est constitué d’obligations pesant sur les


pays membres des institutions de Bretton Woods dans le cadre d’un
régime conventionnel général et particulier. Les obligations relevant du
régime conventionnel général correspondent à celles qui se dégagent
des statuts de ces institutions et qui prescrivent le respect des
disciplines qu’elles établissent et qu’elles fondent pour tout Etat
désireux de recourir aux ressources générales . En autres obligations ,
celles relatives au maintien des taux de change à la convertibilité
monétaire et à la collaboration réciproque. Les obligations relevant du
système conventionnel particulier correspondent à celles qui
garantissent aux emprunteurs la latitude de discuter les mesures de
politique économique qu’ils comptent suivre.

1 KALONJI NGOIE MUBENGA, op. cit., p.15


35

2. Régime réglementaire

Le régime réglementaire est quant à lui constitué d’obligations


qui incombent aux Etats emprunteurs en vertu des décisions
unilatérales par lesquelles les instances dirigeantes des institutions
pourvoyeuses des ressources approuvent les accords d’ajustement
structurel. Ces obligations portent essentiellement sur, entre autres :

▪ Les exigences des clauses –standards à tous les accords et les


clauses de consultations périodiques et régulières ;
▪ Les critères de performance sur lesquels porte le contrôle
d’exécution des programmes.

Il y a lieu de rappeler que les accords sur les PAS présentent


nettement le caractère d’acte unilatéral en ce qu’ils font l’objet des
décisions du Conseil d’Administration des institutions financières
internationales, et cela se fait ressentir dans l’exécution des
programmes.

Enfin, il sied de remarquer que le caractère original du régime


juridique des accords sur les PAS tient au pouvoir d’auto -juridiction
ou d’auto-interprétation de leurs statuts, dévolus aux Conseils
d’Administration des deux institutions de Bretton Woods.

En effet, conformément à l’article XVIII des statuts du F.M.I. et


aux dispositions statutaires relatives au Conseil d’Administration de la
Banque Mondiale, ces institutions disposent du pouvoir d’interpréter
leurs statuts et leurs décisions en cas de désaccord ou de différend
entre elles et les Etats demandeurs en difficulté.

Par conséquent, le Fonds Monétaire International et la Banque


Mondiale soumettent à leurs juridictions tous les différends qui
procèdent du processus d’ajustement structurel alors qu’un principe
général de droit exige que : « Nul ne peut être à la fois et dans une
même cause, partie et son propre juge ». C’est ainsi que ces
institutions prévoient à l’encontre des Etats membres irrespectueux de
leurs obligations envers leurs statuts une série de sanctions allant de
la simple pression morale à l’exclusion du membre en passant par la
36

suspension ou encore la privation de la faculté de recourir aux


ressources disponibles qu ‘elles gèrent(1).

Le concept d’ajustement structurel ainsi circonscrit, tant du


point de vue de sa définition que de sa portée juridique, nous nous
étalerons dans la troisième section sur les programmes d’ajustement
structurel appliqués en République Démocratique du Congo par les
institutions de Bretton Woods.

Section 3. LES PROGRAMMES D’AJUSTEMENT STRUCTUREL


APPLIQUES PAR LES INSTITUTIONS DE BRETTON
WOODS EN RDC

Les PAS ont été largement appliqués par les institutions de


Bretton Woods dans les pays du tiers-monde particulièrement ceux de
l'Afrique subsaharienne où ils étaient perçus comme une nouvelle
stratégie de développement économique.

Comme objectifs prioritaires, tout programme d’ajustement


structurel vise à (2):

• Assurer la libéralisation des prix au sens large : taux de change


réaliste, taux d’intérêt en termes réels positifs, prix des produits
agricoles rémunérateurs, prix des services rendus même par les
organismes publics sur base de la vérité des prix de manière à
en couvrir exactement les coûts ;

• Eviter toute protection excessive de l’industrie nationale ;

• Maîtriser l’influence par une gestion budgétaire et monétaire


rigoureuse ;

• Une plus grande ouverture vers le reste du monde (promotion


des exportations, transfert des invisibles…)

Cependant, voici trois décennies d’application des PAS, les


résultats auxquels est parvenu le continent sont loin de satisfaire aux

1 BIAMOKO TEKASSALA, L’ajustement structurel au Zaïre : Programmes et problèmes ;


mémoire, Faculté de Droit, UNIKIN, 1995-1996,p.86
2 SAMBWA Jules Fontaine, Programmes d’ajustement structurel (ou une nouvelle stratégie

de développement économique pour l’afrique), éd. In memoriam Jules Fontaine SAMBWA,


Bruxelles 2001, p.165
37

exigences de développement. Les programmes de stabilisation et/ou


d »ajustement structurel se sont avérés être un obstacle à l’essor
économique des pays africains. Si le Ghana semble avoir récolté des
résultats positifs dans l’application depuis 1980 d’un programme
d’ajustement structurel, il n’en est pas de même pour de nombreux
pays africains parmi lesquels la RDC (1).

En effet, au lendemain de l’indépendance, après des moments


difficiles de troubles politiques (1959 à 1966) et de graves déclins
économiques, l’économie congolaise est passée par trois grandes
périodes (2):

 La période des années de prospérité (1967-1974)

Période pendant laquelle l’économie a progressé au rythme


moyen de 4,4% par an en valeur réelle ; le compte courant affichait
régulièrement un excédent, l’inflation était faible et les indicateurs
sociaux en progrès ;

 La seconde période a été celle des années de crise (1975-1982)

Cette période est caractérisée par l’extension des dépenses


publiques financées par la création de monnaie et le recours à
l’emprunt massif extérieur. De nombreux projets furent lancés
quelques années auparavant et s’avéreront être des projets de
prestiges communément appelés « éléphants blancs ». C’est le cas de la
ligne à la haute tension entre le barrage d’Inga et les centres miniers
du KATANGA,… Ces projets mal conçus nécessitaient des fortes
sommes en devises étrangères, ce qui allait ouvrir la voie à
l’accroissement alarmant de la dette publique.

Pour tenter de trouver des solutions à ses divers problèmes, la


RDC va se lancer dans une série de programme d’ajustement
structurel.

 En mars 1976, la RDC adopte, avec le concours du F.M.I., un


programme de stabilisation et reçut une assistance sous la forme de

1 OLOFIO ben OLOMY, Cours de mouvement des capitaux et sociétés multinationales,


syllabus, 2ème licence, Faculté des Sciences Sociales, Politiques et Administratives, UNIKIN,
1999-2000, p.36
2 BOSSEKOTA Léopold, op.cit., p.45
38

facilités pétrolières et d’un accord stand-by pour un montant de 150


millions de dollars. Ce programme aura très peu d’impact sur
l’économie(1).

 En 1977, face à des difficultés économiques de plus en plus


croissantes, le Gouvernement adopta un autre programme de
stabilisation. Il obtint une aide du F.M.I. d’un montant de 85 millions
de dollars sous forme d’arrangement stand-by et de facilités de
financement compensatoires. Les objectifs poursuivis ne furent pas
atteints(2).

 En 1979, la RDC conclu de nouveau avec le F.M.I. un


programme de redressement économique couvrant la période du 1
juillet 1979 au 31 décembre 1980. C’est le programme connu sous le
nom de « plan Mobutu ».

 En 1981, les autorités concluent avec le F.M.I. un accord


permettant d’accéder à une facilité élargie de 912 millions de Zaïres
répartis en 3 ans, de 1981-1983. Comme ses prédécesseurs, ce
programme n’eût pas un impact positif sur l’économie congolaise.

 La troisième période dite années d’ajustement structurel(1983-


1990)

Les déséquilibres extérieurs et budgétaires étaient devenus


tellement graves que le F.M.I. vola de nouveau au secours de
l’économie congolaise en proposant un plan de stabilisation 1983 -1986
et un programme d’ajustement structurel de 1987-1990. L’effort
d’ajustement a été abandonné en 1990.

Il y a lieu de remarquer, ainsi que nous venons de le démontrer,


que la République Démocratique du Congo a, pour corriger les
déséquilibres qu’accusait sa balance des paiements, mis en œuvre
plus d’un programme d’ajustement structurel avec l’appui des
institutions de Bretton Woods. Ces programmes se sont soldés par des
échecs dus à sa mise en œuvre rigide, ignorant les réalités socio -
économiques du pays et au détournement par les autorités de l’époque
des fonds mis pour l’exécution de ces programmes.

1 BOSSEKOTA Léopold, op.cit., p.47


2 idem, p.47
39

Actuellement, le Gouvernement a lancé, avec le concours du


F.M.I. et de la Banque Mondiale, un vaste programme économique et
social. Il nous paraît anticipé d’évaluer son impact sur l’économie.

Nous contenterons donc dans le chapitre suivant à aborder les


différents projets sectoriels de développement soutenu par la Banque
Mondiale, à analyser le Document de Stratégie de Réduction de la
Pauvreté de la RDC tout en mettant en relief l’allègement de 90% de la
dette extérieure de la République Démocratique du Congo grâce à
l’initiative PPTE.
40

CHAPITRE 3. DE L’INTERVENTION DES


INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS DANS LE
DEVELOPPEMENT DE LA RDC

Le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale sont


considérés comme les principaux partenaires de développement des
Etats africains. Ces institutions les aident au moyen de divers crédits
et multiples programmes économiques à surmonter leurs difficultés et
à retrouver sinon trouver le chemin de la croissance.

Au début des années 90, ces institutions financières


internationales avaient rompu la quasi-totalité de leurs relations avec
la RDC, à l’époque le Zaïre, suite à la mauvaise gestion des affaires
financières et à la répression dans le sang des manifestations
d’étudiants (massacre à Lubumbashi).

Mais depuis l’accession de l’actuel Chef de l’Etat, le pays a


normaliser ses relations avec ces institutions, appelées à voler au
secours de l’économie congolaise ruinée.

Dans ce chapitre, nous traiterons de l’apport du F.M.I. et de la


Banque Mondiale dans le processus de relance de l’économie
congolaise (section1.) avant d’illustrer quelques mécanismes juridiques
susceptibles de conduire l’aide financière de ces institutions vers le
développement (section 2).

Section 1. DE L’APPORT DU F.M.I. ET DE LA BANQUE


MONDIALE DANS LA RELANCE ECONOMIQUE DE
LA RDC

L’économie congolaise avait besoin d’une stabilisation et/ou d’un


ajustement pour prétendre à une croissance économique soutenue
passant par la relance. Et pour cela, la RDC n’a eu ainsi qu’à passer
par le FMI et la Banque Mondiale, les deux institutions ou systèmes
catalyseurs des ressources extérieures en vue d’un appui efficace dans
ses différentes politiques de relance économique.
41
§.1. De la nature juridique de l’aide financière

Il est sans nul doute que les institutions de Bretton Woods sont
un passage obligé pour bénéficier de l’aide multilatérale et bilatérale
publique. En effet, non seulement qu’elles fournissent à la RDC divers
prêts et crédits en vue de son développement mais aussi le fait pour la
RDC d’être en coopération avec ces institutions lui ouvre la voie à une
assistance financière provenant de multiples bailleurs de fonds
bilatéraux (particulièrement les Etats occidentaux, Belgique, Etats-
Unis, France…) comme multilatéraux (Union Européenne, Banque
Africaine de Développement…).

Du point de vue juridique, il est important de souligner que l’aide


financière apportée par les institutions de Bretton Woods, excepté les
dons de l’IDA, ne comporte pas un élément de gratuité. Il s’agit des
prêts et crédits avec intérêts qui sont alloués à la RDC et qui d evront
être remboursés à une certaine échéance.

Concrètement, le prêteur (le F.M.I. et/ou la Banque Mondiale)


transfère ses fonds à l’emprunteur (RDC). Après un certain délai, il (le
prêteur) percevra les intérêts sur sa créance de même que le
remboursement du capital.

Les crédits consentis par la Banque Mondiale à la RDC par


l’intermédiaire de l’IDA ont un taux d’intérêt de 0,5% par an avec une
durée de remboursement de 30 ans, assortis d’un délai de grâce de 10
ans1.Les prêts du F.M.I. accordés au titre de la FRPC sont, quant à
eux, assortis d’un taux d’intérêt annuel de 0,5% et sont remboursables
sur dix ans par paiement semestriels dont le premier a lieu cinq ans et
demi après la décaissement du prêts (2).

Au bout de quelques années, la RDC devra donc rembourser tous


ces fonds.

1 Mr. ONNO RÜHL (Représentant de la Banque Mondiale en RDC), Exposé sur l’apport de la
Banque Mondiale à la relance de l’économie en RDC, Faculté des Sciences Sociales,
Politiques et Administratives, UNIKIN, 2 mai 2003.
2 Fiche technique, La facilité du FMI pour la réduction de la pauvreté et la croissance

(FRPC), avril 2003, http://www.imf.org


42
§.2. Divers programmes de développement

Les deux institutions de Bretton Woods ont en commun l’objectif


de favoriser la croissance et le développement durable de la RDC. Pour
ce faire, elles travaillent en étroite collaboration.

Le F.M.I. s’occupe de la restauration des grands équilibres


économiques (casser l’hyper-inflation, stabiliser le cadre macro-
économique, créer les conditions favorables à la relance de l’économie).
C’est ainsi qu’après la bonne exécution du Progr amme Intérimaire
Renforcé (PIR) (clôturé avec succès à fin mars 2002) qui a abouti à la
stabilisation du cadre économique et à la réduction du taux
d’inflation(1), la RDC a conclu avec le F.M.I. un programme triennal
(couvrant la période allant d’avril 2002 à juin 2005). Ce programme,
communément appelé PEG, Programme économique du gouvernement,
vise les objectifs suivants:

▪ Un taux de croissance du PIB réel positif d’au moins 5% l’an,


▪ Une baisse du taux d’inflation à 60% maximum et ;
▪ Une augmentation graduelle de réserves de changes brutes. (2)

La Banque Mondiale se charge de la mise en œuvre de cette


politique économique dans des programmes spécifiques de
développement ou des interventions sectorielles.

En effet, plusieurs programmes sont mis en œuvre dont le plus


vaste et le plus global est sans conteste le Programme Multi-sectoriel
d’Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction (PMURR).

1. Programme Multi-sectoriel d’Urgence de Réhabilitation et de


Reconstruction

La négligence de la population, la mauvaise gestion et les


dommages de la guerre ont conduit à l’effondrement de l’infrastructure
de la RDC et de la capacité du gouvernement de fournir des services de
base et de jouer pleinement son rôle.

1 En 2002, l’inflation a été maîtrisée, passant de 135,1% à fin 2001 à 15,04% à fin 2002
2 Allocution du Gouverneur de la Banque Centrale du Congo, J.C MASANGU MULONGO, à
l’occasion de la cérémonie de présentation des vœux, 10 janvier 2003, http://www.bcc.cd
43

Le but global du PMURR est de lancer le processus à long terme


de la reconstruction, du redressement et de la relance économique. Le
coût estimé du PMURR se chiffre à environ 1,755 milliards US, toutes
taxes et droits compris (1).

Ce programme est financé par l’IDA (soit 26%), le Gouvernement


congolais (soit 14%), les donateurs identifiés (soit 30%) et autres
bailleurs (soit 30%)(2).

Il se base sur quatre secteurs prioritaires :

▪ Réadaptation et reconstruction de l’infrastructure critique


(transport, approvisionnement d’eau, électricité et
infrastructure urbaine) ;
▪ Agriculture et développement communautaire ;
▪ Développement des secteurs stratégiques à moyen et à long
terme et renforcement des capacités humaines et
institutionnelles ;
▪ Secteurs sociaux (éducation, santé et protection sociale).

Les objectifs du PMURR sont globaux et spécifiques. Les objectifs


globaux visent à :

a) Entamer le démarrage du processus de reconstruction et de


réhabilitation économique ;
b) Assurer la pérennité à long terme du programme de façon à ce que
les actions entreprises durant la phase d’urgence n’aient pas d’effets
pervers et néfastes sur les programmes et institutions futures.

Les objectifs spécifiques consistent à :

a) Mettre en place les grands travaux de reconstruction et de


réhabilitation des infrastructures clés (transport, eau,
assainissement, énergie électrique urbain) en vue de rétablir les
grandes connections interurbaines et les services publics et sociaux
de base minimum dans le pays et d’assurer la sécurité alimentaire
à Kinshasa et dans les grands centres urbains ;

1 Point sur le Programme Multi-sectoriel d’Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction,


http://www.minfinrdc.cd/programmegouv/pmurr/pmurr.htm
2 Idem.
44

b) Reconstruire les capacités humaines et institutionnelles, redéfinir


les méthodes de travail et de développer les grands axes des
politiques sectorielles ;

c) Mettre en place un système de financement croissant pour des


initiatives communautaires dans les zones urbaines et rurales pour
la fourniture des services publics et sociaux de base et pour la
reconstruction et l’entretien des infrastructures de base ;

d) Assurer la sécurité alimentaire par une production agricole


suffisante et accessible à tous.

En dehors du PMURR, d’autres programmes de développement


sont en cours d’exécution.

2. Programme d’Urgence de Redressement Rapide (PURR)

Le PURR a pour mission principale le renforcement institutionnel


des capacités, particulièrement des entités impliquées dans le PMURR
ainsi que la satisfaction des besoins urgents des populations afin de
servir de projet pilote à des interventions futures de plus grande
envergure.

Le PURR dispose d’un budget de 50 millions de dollars US


financé par le Don IDA qui sont répartis sur quatre composantes, à
savoir (1):

• La lutte contre le SIDA ;


• Les infrastructures (dont la Route Nationale N°1 Kinshasa-
Matadi) ;
• Le volet du développement communautaire ;
• Le Programme de Renforcement Institutionnel

1 Ministère des Finances et Budget, Bureau Central de Coordination (BCECO), Rapport des
activités au 30 septembre2002, Kinshasa, octobre 2002, p.7
45

3. Programme des projets prioritaires à impact visible et


immédiat sur la population

Ce programme est financé par le fonds d’appui budgétaire de 42


millions de dollars US consentis à la RDC par l’IDA au titre de l’accord
de développement pour la relance économique (1).

Dans le cadre de ce programme, plusieurs projets de


réhabilitation ont été entrepris notamment :

 La réhabilitation de 40 km de voiries de la ville de Kinshasa. Il


s’agit des avenues : Ecuries, Force Publique, Kalembe-Lembe,
Yolo-Bongolo, Kianza, etc. ; de la reconstruction du pont
Kiyimbi ;

 La réhabilitation de quatre formations médicales de Kinshasa


et de Lubumbashi, et la fourniture d’équipements médicaux. Il
s’agit de l’hôpital Général Jason Sendwe à Lubumbashi,
l’hôpital Provincial Général de Référence (ex Maman Yembo),
les cliniques universitaires et l’hôpital général de Réfénce de
Makala de Kinshasa ;

 La réhabilitation de plusieurs écoles et instituts supérieurs à


Kinshasa, Lubumbashi et Mbuji-Mayi. C’est le cas de l’UNIKIN
(Home 80, 150, 10…) ;

 La réhabilitation du stade Vélodrome de Kitambo.

Un aperçu général sur ces différents programmes de


développement montre qu’ils s’attaquent aux besoins les plus
pressants et les priorités des services sociaux et du rétablissement
économique. Ils auront un impact direct et rapide sur la situation
économique et sociale du pays dans la mesure où ils sont bien
exécutés. Il est à noter que ces programmes sont coordonnés et
exécutés par le Bureau Central de Coordination (BCeCo), créé par le
décret présidentiel n°639/2001 du 08 août 2001. Il s’agit d’un service
public doté de l’autonomie administrative et financière, et placé sous
tutelle du Ministère ayant les finances dans ses attributions.

1 Idem, p.30
46

En outre, tous ces programmes rentrent dans un cadre de


stratégie de lutte contre la pauvreté et sont directement liés à la
préparation et à l’exécution du document de stratégie de réduction de
la pauvreté (DSRP).

§.3. De l’élaboration du Document de Stratégie de Réduction


de la Pauvreté (DSRP)

En 1999, les institutions de Bretton Woods ont lancé le concept


de DSRP (aussi appelé Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté
(CSLP), visant à devenir un instrument de large portée qui servirait de
référence pour baser une grande part de l’aide internationale au
développement et constituerait un cadre global intégrant les stratégies
de réduction de la pauvreté des pays prétendant aux prêts du F.M.I. et
de la Banque Mondiale (1).

Il s’agit d’un document élaboré par les pouvoirs publics après un


processus participatif. Il doit inclure une analyse de la pauvreté dans
le pays et en déduire des stratégies sectorielles sur la base
d’indicateurs de résultats objectivement vérifiables. C’est donc un
cadre d’analyse, de diagnostic et d’action. La RDC s’est, depuis mars
2002, dotée d’un DSRP intérimaire qui établit une stratégie de « retour
à la vie » et permet ainsi au pays d’avoir toujours accès aux prêts
concessionnels du F.M.I..

Le DSRP final est prévu pour être terminé en 2005. Il est axé sur
trois piliers, à savoir : la paix et la bonne gouvernance, la stabilisation
macroéconomique et la dynamique communautaire (2). Il a comme
principales priorités sectorielles : l’agriculture, l’éducation, la santé, les
petites et moyennes entreprises, l’énergie, le transport et
l’environnement.

§.4. De l’allègement de la dette extérieure de la RDC

1. La structure de la dette extérieure congolaise

La dette extérieure de la RDC découle essentiellement des


conventions ou accords conclus avec les partenaires étrangers. Elle

1 PAUL Elisabeth, op. cit, p.1


2 Compte rendu de la présentation du DSRP intérimaire par les représentants de la RDC,
Réunion Banque Mondiale Paris, Décembre 2002, Presse de la Banque Mondiale :
http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/NEWS
47

comprend les encours d’emprunts extérieurs, les intérêts contractuels


et les intérêts moratoires (1).

Le stock de la dette extérieure de la RDC a atteint 13.535


millions de dollars US à fin décembre 1999, alors qu’il se chiffrait à
9.600 millions de dollars US en 1990 (2).

Elle est essentiellement due aux créanciers ci-après :

 Le club de Paris pour les créanciers publics (principaux


gouvernements occidentaux). Il s’agit ici de la dette bilatérale ;
 Les institutions financières internationales, le Fonds Monétaire
International, la Banque Mondiale, la Banque Africaine de
Développement. Il s’agit de la dette multilatérale ;
 Le club de Londres pour les créanciers privés (banques
commerciales) ;
 Le club de Kinshasa (banques commerciales de la place).

La dette bilatérale à moyen et long terme représente 70% du


stock, contre 18,7% pour la dette multilatérale (hors FMI) et 3,9% pour
la dette envers le FMI (3).

Ces dettes ont financé essentiellement les appuis à la balance


des paiements ainsi que les différents programmes de stabilisation et
d’ajustement structurel qui, du reste, n’ont eu aucun impact positif
sur l’économie du pays.

La dette extérieure de la RDC n’étant pas soutenable, c’est-à-dire


le pays se trouvant dans l’incapacité de rembourser sa dette en
fonction des recettes de ses exportations et éventuellement des
ressources budgétaires annuelles allouées au service de la dette, le
pays a eu comme issue pour alléger ce pesant fardeau que d’accéder
au mécanisme d’allègement de la dette au titre de l’initiative PPTE.

1 BAKANDEJA wa MPUNGU, op.cit, p.125


2 Troisième conférence des Nations Unies sur les pays moins avancés, Mémoire présenté par
le Gouvernement de la RDC, Bruxelles, 14-20 mai 2001, p.15
3 Idem, p.15
48

2. L’initiative PPTE

L’allègement des dettes a été longtemps conduit dans l’esprit que


le capital de l’emprunt était intouchable (1). Le débiteur pouvait
solliciter termes et délais, ouvrant de cette façon une négociation
portant sur les dettes échues au cours d’une période limitée, et
aboutissant dans les meilleurs des cas à un report des échéances
conventionnelles, on parlait de consolidation ou de rééchelonnement
des dettes. Mais depuis quelques années, on assiste à une rupture
avec ces pratiques d’allègement de la dette. En effet, depuis septembre
1996, le FMI et la Banque Mondiale ont lancé l’initiative en faveur des
Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) afin de réduire substantiellement
l’endettement excessif de certains pays très pauvres. Fondée sur une
approche plus globale de l’allègement de la dette multilatérale, elle
représente une innovation majeure en termes de financement du
développement(2).

A l’échelle mondiale, 42 pays ont été retenus pour bénéficier de


l’initiative PPTE dont plusieurs Etats africains (Bénin, Burkina Faso,
Ouganda, Congo-Brazzaville, Mali, …).

La RDC a accédé, depuis le 24 juillet 2003, au point de décision


de l’initiative PPTE avec à la clé l’allègement de 90% de sa dette
extérieure. Mais il importe de relever que pour être éligible à l’initiative
PPTE, le pays a dû remplir certains pré-requis.

En premier lieu, il s’agit pour la RDC de rembourser ses arriérés


envers le F.M.I. et la Banque Mondiale. En 2000, le montant de la
créance envers la Banque Mondiale s’élevait à 280,2 millions de dollars
US, celle du F.M.I. s’élève à 402 millions DTS, soir l’équivalent de 550
millions de dollars US(3).

Le règlement de ces arriérés n’a été possible que grâce à des


prêts octroyés par des Etats actionnaires de ces institutions. Ainsi, ils
prêtent les fonds nécessaires à la RDC pour que cette dernière
rembourse ses arriérés. Ensuite, pour rembourser les prêts des Etats

1 REY Jean-Jacques et ROBERT Eric, op. cit, p.202


2 Précis initiative PPTE :Accomplissement et perspectives, numéro 230, Banque Mondiale,
2003, p.1
3 Document de la Banque Mondiale, annexe technique : Sur un crédit proposé de 576

millions US $ à la RDC pour un crédit multi-sectoriel d’urgence de reconstruction et de


réhabilitation, 11 avril 2002, p.12
49

ayant servi au remboursement de ses arriérés dus au F.M.I. et la


Banque Mondiale, la RDC obtient de nouveaux prêts, cette fois
octroyés par le F.M.I. et la Banque Mondiale.

En définitive, la RDC a troqué ses arriérés contre une nouvelle


dette à 0,5% due au FMI et à la Banque Mondiale (1). Après avoir
satisfait à ces exigences, la RDC a accédé à l’initiative PPTE qui a
permis la réduction de 90% de sa dette extérieure (les allègements
étant étalés sur plusieurs décennies) ce qui ramène le stock de la dette
extérieure à moins de 2 milliards de dollars US, auquel il faut
évidemment ajouter les nouveaux prêts consentis entre-temps.

Cet allègement de la dette a comme effet pervers d’amoindrir les


moyens d’intervention de l’Etat congolais dans des secteurs tels que la
santé, l’éducation, etc. En effet, conforté dans une certaine
insolvabilité, le pays ne payait rien mais avec l’allègement de 90% de la
dette, les 10% restant doivent être payés. Ce qui fait qu’une partie des
ressources budgétaires de la RDC sera désormais allouée au service de
la dette.

Section 2. DES MECANISMES JURIDIQUES SUSCEPTIBLES


DE CANALISER L’AIDE DES INSTITUTIONS DE
BRETTON WOODS VERS LE DEVELOPPEMENT DE
LA RDC

Il s’agira ici pour nous d’explorer quelques pistes qui peuvent


endiguer l’assistance financière du F.M.I. et de la Banque Mondiale
vers le développement effectif de la RDC.

§.1. Le contrôle du parlement

La fonction de contrôle du parlement sur l’action


gouvernementale est de l’essence de la démocratie parlementaire ou
représentative. Dans notre pays, cette fonction reconnue au parlement
est cristallisée par l’art.98 de la Constitution de la Transition du 04
avril 2003.

1 ZACHARIE Arnaud, Le cas de la dette extérieure de la République Démocratique du Congo,


http://www.users.skynet
50

Le parlement, qui défend les intérêts du peuple qu’il représente,


doit donc user de tous les mécanismes juridiques (question orale ou
écrite, l’interpellation, commission d’enquête…) pour faire pression sur
le gouvernement afin que celui-ci, dans ses différentes réformes
économiques, budgétaires et monétaires engrangées pour satisfaire
aux exigences des institutions de Bretton Woods, privilégie en premier
l’intérêt du peuple partant de la nation. Le contrôle du parlement
favorisera la gestion transparente et responsable des ressources
destinées à l’exécution des différents programmes économiques. Il aura
aussi pour avantage de veiller à ce que l’exécutif dans ses rapports
avec ces institutions n’hypothèque pas la souveraineté de l’Etat.

En outre, il se dégage de l’analyse de l’article 102 de la


constitution l’obligation d’approbation légale de tous traités engageant
les finances publiques. Les accords de financement conclus avec ces
institutions doivent rentrer dans les dispositions dudit article étant
donné qu’ils chargent l’Etat de dettes qu’il devra rembourser. Ceci
implique qu’ils devraient faire l’objet de débats parlementaires et au
final être ratifiés par une loi d’approbation. Cependant, le caractère
secret et informel de ces accords n’est pas de nature à rendre la tâche
facile.

§.2. Le contrôle juridictionnel

Le bilan négatif de la coopération structurelle RDC-F.M.I.-


Banque Mondiale passée, caractérisée par des pratiques de corruption
et/ou de détournement des fonds d’emprunt tant par les bailleurs que
par quelques responsables du pays, doit motiver au plus haut point les
cours et tribunaux dont la mission première est d’assurer l’ordre et le
respect des lois, à surveiller de très près les autorités publiques
chargées de gérer les fonds provenant de cette coopération.

Le juge congolais doit donc de manière indépendante et


impartiale appliquer la loi dans toute sa rigueur contre toute personne
qui tenterait détourner ces sommes d’argent. « Nul n’est au-dessus de
la loi ».
51

§.3. L’utilisation rationnelle de l’aide financière

Analysant les causes de l’échec de la coopération multilatérale de


la RDC avec les institutions de Bretton Woods, Mr. Jules F. SAMBWA
stigmatise le comportement des autorités congolaises de l’époque en
disant ce qui suit : « Plutôt que d’avoir la sagesse de se constituer une
poire pour la soif, ils avaient préféré vivre carpe diem. C’est ainsi que
l’on a assisté à une véritable explosion de leurs dépenses ; en
l’occurrence, il s’agissait très souvent de dépenses de prestige ou des
dépenses de consommation et non d’investissements »(1).

A la suite de ces propos, nous tirons deux éléments susceptibles


de faire converger les prêts du F.M.I et de la Banque Mondiale et le
développement réel de la RDC. Premièrement, l’Etat congolais doit
placer ces sommes d’argents dans des investissements rentables et
productifs qui rentrent dans une politique globale de croissance et de
développement économique. Ensuite, les dépenses de l’Etat doivent
être limitées aux seuls impératifs nationaux, et orientées vers une
perspective de développement économique durable.

1 SAMBWA Jules-Fontaine, op. cit., p.164


52

CONCLUSION

Au terme de ce travail, il nous paraît utile de récapituler l’idée


maîtresse des différents chapitres en vue d’en tirer les conclusions qui
s’imposent.

Il ressort de l’analyse du premier chapitre que les institutions de


Bretton Woods, fortement dominées par les pays industrialisés, sont
les principaux architectes extérieurs de la politique économique dans
les pays en voie de développement.

Le F.M.I. accorde des prêts aux pays membres en proie à des


difficultés de balance des paiements pour soutenir leur effort de
redressement et de croissance. La Banque Mondiale, prestataire
mondiale d’aide au développement, finance multiple programmes et
projets spécifiques de développement susceptibles d’avoir un impact
positif sur l’économie de l’Etat membre.

Ces prêts et financements s’accompagnent des programmes


d’ajustement structurel destinés à restaurer les grands équilibres
macro-économiques et à favoriser des réformes structurelles, qui
tendent sinon à arrêter, du moins à ralentir sensiblement la
dégradation de l’économie d’un pays. Et nous avons démontré que la
RDC a connu plusieurs programmes d’ajustement structurel avec le
concours des institutions de Bretton Woods sans pour autant relever
sa situation économique ; ceci a fait l’objet du deuxième chapitre.

Dans la troisième chapitre, il a été question d’évaluer


l’intervention des institutions de Bretton Woods dans le développement
de la RDC. A cet effet, nous avons mis un accent sur la nature
juridique des ressources allouées à la RDC qui sont essentiellement
composées de prêts et crédits avec intérêts qui devront être
remboursés.

L’analyse des différents programmes de développement appliqués


en RDC a révélé que ceux-ci ont pour objectif essentiel de reculer la
pauvreté , ce qui n’est pas toujours synonyme de développement
économique.
53

Pour éviter de compromettre l’efficacité de l’aide, la RDC, à la


lourdeur de sa dette extérieure, a réussi à satisfaire aux critères
d’éligibilité au point de décision de l’initiative PPTE pour l’allègement
de 90% de sa dette extérieure. Concrètement, le pays réduit le stock de
sa dette extérieure en contractant de nouvelles dettes.

Le tableau de la question ainsi posé, nous, juriste, sommes en


droit de nous poser une question : La coopération multilatérale de la
RDC avec le F.M.I. et la Banque Mondiale est-elle susceptible de la
conduire vers un développement effectif ? A cette question, nous
répondons à l’affirmative ; mais c’est un « Oui » nuancé qui dépend de
l’engagement politique des pouvoirs publics congolais qui doivent user
de perspicacité et de réalisme pour investir les fonds empruntés dans
un vaste programme économique intégré dans une perspective de
développement durable, notamment en privilégiant des secteurs clés
du développement (agriculture, industrie, mines, etc.).

Au demeurant, la RDC doit générer ses propres ressources pour


financer son développement afin de briser le cycle infernal de
l’endettement et se départir davantage de la tutelle des institutions de
Bretton Woods car, dit-on, celui qui reçoit est esclave de celui qui
donne.
54

BIBLIOGRAPHIE

I. DOCUMENTS OFFICIELS

1. Ministère des finances et budget, Bureau Central de Coordination


(BCeCo), Rapport des activités au 30 septembre 2002, Kinshasa, octobre
2002.
2. Document de la Banque Mondiale, annexe technique : Sur un crédit
proposé de 576 millions US $ à la RDC pour un crédit multi-sectoriel
d’urgence de reconstruction et de réhabilitation, 11 avril 2002

II. OUVRAGES

1. BAKANDEJA wa MPUNGU, Droit des finances publiques (Moyen d’action


et plan financier de l’Etat), éditions NORAF,
Kinshasa, 1997
2. BAKANDEJA wa MPUNGU,Manuel de droit financier, édition
Universitaire africaine, Kinshasa, 1997
3. BOSSEKOTA Léopold, RDC : Dernier pays pauvre du monde ?, éditions
Presses Universitaires Bel Campus, Kinshasa,
2001.
4. BYE Maurice, Relations économiques internationales, 5ème édition,
Dalloz, Paris, 1987.
5. COLLIARD Claude-Albert, Institutions internationales, 10ème édition,
Dalloz, Paris, 1995.
6. FREUD C., Quelle coopération ? Un bilan d’aide au développement,
édition KARTHALA, Paris, 1988.
7. GRAWITZ Madeleine, Méthodes des sciences sociales, 7ème édition,
Dalloz, Paris, 1980.
8. LAFERRERE Armand, Finances publiques : les notices, édition BIADEC,
Paris, 2000.
9. LLOVERAS Badia, Tiers (le) Monde, édition Armand Colin, Paris, 1997.
10. MUTAMBA LUKUSA Gaston, Congo/Zaïre : La faillite d’un pays.
Déséquilibre macro-économique et ajustements,
éditions L’Harmattan, Paris, 1999.
11. REY Jean Jacques et ROBERT Eric, Institutions économiques
internationales, édition Bruylant, Bruxelles, 1997.
55

12. SAMBWA Jules-Fontaine, Programmes d’ajustement structurel (ou une


nouvelles stratégie de développement
économique pour l’Afrique), édition In
memoriam Jules-Fontaine SAMBWA,
Bruxelles, 2001.

III. COURS ET MEMOIRES

 Cours

1. KUMBU ki NGIMBI, Législation en matière économique, notes


manuscrites, 2ème année graduat, Faculté de Droit, UNIKIN, 2001-2002.
2. OLOFIO ben OLOMY, Mouvements des capitaux et sociétés
multinationales, syllabus, 2ème licence, Faculté des sciences sociales,
politiques et administratives, UNIKIN, 1999-2000.

 Mémoires

1. BIAMOKO TEKASSALA, L’ajustement structurel au Zaïre : Programmes et


problèmes, Mémoire, Faculté de Droit, UNIKIN, 1995-1996.
2. KALONJI NGOIE MUBENGA, Les déséquilibres de la République
Démocratique du Congo face à la politique d’appui à l’ajustement
structurel, Mémoire, Faculté de Droit, UNIKIN, 1996-1997.

IV. ARTICLES ET REVUES SPECIALISES

 Articles

1. GOLD J., La conditionnalité, série de brochure, n°31, F.M.I., Washington


DC, 1979.
2. GOLD J., L’importance du caractère juridique des accords de
confirmation du Fonds, brochure du F.M.I. n°35, F.M.I.., Washington DC,
1980.
3. SOREL Jean-Marc, Sur quelques aspects juridiques de la conditionnalité
du F.M.I. et leurs conséquences, http://www.ejil.org/journal, 2001.
4. PAUL Elisabeth, Le DSRP : Du neuf à l’horizon de l’aide au
développement ? ; Université de Liège, 2003.
5. Précis initiative PPTE :Accomplissement et perspectives, numéro 230,
Banque Mondiale, 2003.
56

 Revues

1. L’ESPOIR d’un monde sans pauvreté, éditions Meadows press, Banque


Mondiale, 2003.
2. L’Afrique peut-elle revendiquer sa place dans le 21 ème siècle ?, éditions
Meadows press, Banque Mondiale, 2003.

V. CONFERENCES

1. Mr. ONNO RÜHL (Représentant de la Banque Mondiale en RDC), L’apport


de la Banque Mondiale à la relance de l’économie en RDC, Faculté des
sciences sociales, politiques et administratives, UNIKIN, 2 mai 2003.
2. Troisième conférence des Nations Unies sur les pays moins avancés,
Mémoire présenté par le Gouvernement de la RDC, Bruxelles, 14-20 mai
2001.

VI. SITES INTERNET

1. Site officiel du F.M.I. : http://www.imf.org


2. Site officiel de la Banque Mondiale : http://www.banquemondiale.org
3. Site officiel de la Banque Centrale du Congo : http://www.bcc.cd
4. Site officiel du Ministère des Finances : http://www.minfinrdc.cd
57

TABLE DES MATIERES

EPIGRAPHE ........................................................................................................................... I

DEDICACE ......................................................................................................................... II

AVANT- PROPOS ................................................................................................................. III

PRINCIPALES ABREVIATIONS ....................................................................................... IV

INTRODUCTION GENERALE ............................................................................................ 1


I. PROBLEMATIQUE ........................................................................................................... 1
II. INTERET DU SUJET........................................................................................................ 5
III. DELIMITATION DU SUJET .......................................................................................... 6
IV. METHODES ET TECHNIQUE DE TRAVAIL .............................................................. 6
V. ANNONCE DU PLAN ...................................................................................................... 7
CHAPITRE 1. DES INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS......................................... 8
SECTION 1. DU CONTEXTE HISTORIQUE ........................................................................ 8
§.1. Les institutions antérieures à 1940 ............................................................................. 8
§.2. La conférence de Bretton Woods ................................................................................ 9
SECTION 2. DU FONDS MONETAIRE INTERNATIONAL .............................................. 10
§.1. Les deux grands amendements aux statuts du F.M.I................................................. 10
1. La création, en 1969, des droits de tirage spéciaux(DTS) () ................................. 10
2. L'accord de Jamaïque, en 1976, légalisant le flottement généralisé des monnaies
.............................................................................................................................. 11
§.2. Du contexte juridique et institutionnel ...................................................................... 12
1. Le F.M.I., code de bonne conduite....................................................................... 12
2. Le F.M.I., institution financière internationale .................................................... 13
A. Assistance financière ....................................................................................... 14
B. L’accès aux ressources du F.M.I. : La conditionnalité .................................... 15
a. La question de la responsabilité ................................................................... 16
b. Le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats........... 17
c. Le principe de l’égalité souveraine des Etats ............................................... 17
3. Le F.M.I., organisation internationale.................................................................. 18
A. Les quotes-parts............................................................................................... 18
B. Les organes ...................................................................................................... 19
a) Le Conseil des Gouverneurs ........................................................................ 19
b) Le Conseil d’Administration........................................................................ 20
c) Le Directeur Général .................................................................................... 20
d) Le Comité Monétaire et Financier International.......................................... 20
e) Le comité Intérimaire ................................................................................... 20
§.3. Des ressources du F.M.I. .......................................................................................... 21
SECTION 3. DE LA BANQUE MONDIALE ........................................................................ 21
§.1. Du contexte juridique et institutionnel ...................................................................... 22
1. La Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement.............. 22
2. L’Association Internationale de Développement ................................................. 23
3. La Société Financière Internationale .................................................................... 25
4. L’Agence Multilatérale de Garantie des Investissements .................................... 25
5. Le Centre International de Règlement des Différends relatifs
aux Investissements .............................................................................................. 26
58
§.2. De la structure de la Banque Mondiale ................................................................... 26
CHAPITRE 2. DES PROGRAMMES D’AJUSTEMENT STRUCTUREL (PAS) ......... 28
SECTION 1. DEFINITION DU CONCEPT ........................................................................... 28
§.1. Définition du concept selon le F.M.I......................................................................... 29
§.2. Définition du concept selon la Banque Mondiale ..................................................... 29
SECTION 2. NATURE JURIDIQUE DES ACCORDS SUR LES PROGRAMMES
D’AJUSTEMENT STRUCTUREL.................................................................. 30
§.1. Du processus d’élaboration des PAS ........................................................................ 31
§.2. Du processus de la conclusion des accords sur les PAS........................................... 32
§.3. Du processus d’exécution des accords sur les PAS .................................................. 34
1. Régime conventionnel .......................................................................................... 34
2. Régime réglementaire .......................................................................................... 35
SECTION 3. LES PROGRAMMES D’AJUSTEMENT STRUCTUREL APPLIQUES PAR
LES INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS EN RDC............................... 36
CHAPITRE 3. DE L’INTERVENTION DES INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS
DANS LE DEVELOPPEMENT DE LA RDC .......................................... 40
SECTION 1. DE L’APPORT DU F.M.I. ET DE LA BANQUE MONDIALE DANS LA
RELANCE ECONOMIQUE DE LA RDC....................................................... 40
§.1. De la nature juridique de l’aide financière............................................................... 41
§.2. Divers programmes de développement ..................................................................... 42
1. Programme Multi-sectoriel d’Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction .. 42
2. Programme d’Urgence de Redressement Rapide (PURR)................................... 44
3. Programme des projets prioritaires à impact visible et immédiat
sur la population ................................................................................................... 45
§.3. De l’élaboration du Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP).. 46
§.4. De l’allègement de la dette extérieure de la RDC .................................................... 46
1. La structure de la dette extérieure congolaise ...................................................... 46
2. L’initiative PPTE.................................................................................................. 48
SECTION 2. DES MECANISMES JURIDIQUES SUSCEPTIBLES DE CANALISER
L’AIDE DES INSTITUTIONS DE BRETTON WOODS VERS LE
DEVELOPPEMENT DE LA RDC................................................................... 49
§.1. Le contrôle du parlement .......................................................................................... 49
§.2. Le contrôle juridictionnel.......................................................................................... 50
§.3. L’utilisation rationnelle de l’aide financière ............................................................ 51
CONCLUSION....................................................................................................................... 52

BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................. 54

TABLE DES MATIERES ..................................................................................................... 57

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