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Dieudonné KALUBA DIBWA

justice
La

constitutionnelle
en République démocratique du Congo

Éditions
Eucalyptus
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du Congo
La justice constitutionnelle
en République démocratique
Du même auteur :
La saisie immobilière en droit congolais, Kinshasa, Revue annuelle de
doctrine, RCN-Justice et Démocratie, 2005.
La saisine du juge constitutionnel et du juge administratif suprême en
droit public congolais. Lecture critique de certaines décisions de la Cour
suprême de justice d’avant la Constitution du 18 février 2006, Kinshasa,
éditions Eucalyptus, 2007.
Démocratie et développement au Congo-Kinshasa. Essai d’explication
socio-juridique de l’inadéquation institutionnelle postcoloniale, Paris,
L’Harmattan, 2010.
Précis de droit constitutionnel congolais (à paraître).
Contentieux administratif congolais (à paraître).
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FONDEMENTS ET MODALITÉS D’EXERCICE


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© Academia-L’Harmattan s.a.
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© Éditions Eucalyptus
Grand’Place, 29 728, avenue Tombalbaye
al.sc

B-1348 LOUVAIN-LA-NEUVE KINSHASA/GOMBE (RÉP. DÉM. DU CONGO)


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intern

D/2013/4910/34 QV 3.01302-57051
ISBN : 978-28061-0117-4 ISBN : 99951-650-1-2

Tous droits de reproduction, d’adaptation ou de traduction, par quelque procédé que ce


soit, réservés pour tous pays sans l’autorisation de l’éditeur ou de ses ayants droit.

www.editions-academia.be
ÉPIGRAPHE

« Celui qui gravit les plus hautes montagnes,


celui-là se rit de toutes les tragédies qu’elles soient réelles ou
jouées ».
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Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra,


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traduction et présentation de
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Georges-Arthur Goldschmidt,
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Paris, Le Livre de poche,


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1972, p. 50.
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DÉDICACE

À mes enfants, pour l'exemple.

Aux usagers de la justice constitutionnelle congolaise.


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LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

REMERCIEMENTS

Le présent ouvrage est un extrait abrégé et corrigé d’une thèse de


doctorat en Droit que nous avons défendue le mardi 31 août 2010
devant la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa et qui a été
sanctionnée par les honneurs académiques les plus élevés. Ces hon-
neurs sont le fruit de maints efforts collectifs. Aussi appellent-ils,
inévitablement, des remerciements à l’égard de ceux qui ont apporté
de l’eau au moulin.
Nous remercions spécialement feu le Professeur Bonaventure
Bibombe Muamba qui, depuis quelques années, nous avait accepté
dans son équipe de recherche et avait bien voulu diriger, de main de
maître, la rédaction de la thèse intitulée : « Du contentieux
constitutionnel en République démocratique du Congo. Contribution
à l’étude des fondements et des modalités d’exercice de la justice
994

constitutionnelle ». Il avait très courageusement assumé cette tâche


9511

avant d’être emporté dans l’autre monde le mardi 18 mai 2010 alors
:163

qu’il projetait de gravir les marches de la Salle des promotions


.197
.234

Mgr Luc Gillon pour la soutenance de ce travail qui lui doit sa rigueur
8.69

et sa perspicacité. Cette œuvre gardera ainsi ses empreintes les plus


0:15
4229

indélébiles. Nous lui adressons ces mots, car nous croyons à la vie au-
:888

delà de la mort charnelle.


5329
3853

Nos remerciements les plus sincères à Monsieur le Professeur


e:10

Évariste Boshab Mabudj, ancien président de l’Assemblée nationale


:Non
x.com

de notre pays et Chef du Département de Droit public interne de


larvo

notre Université, pour nous avoir tendu la main, après la mort du


scho

Père, malgré ses multiples et exaltantes occupations, comme un frère


l.
tiona

aîné compatissant, en vue de la traversée tumultueuse dans les eaux


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fangeuses et boueuses du doctorat et pour la préface qu’il a daigné


accorder à cet ouvrage.
Notre gratitude doit être ici adressée aux maîtres et aux collègues qui
ont joué à la mouche du coche lorsque, des fois, une soudaine fatigue
intellectuelle nous envahissait : Auguste Mampuya Kanunk’a Tshiabo,
Jean-Louis Esambo Kangashe, Henri-Floribert Mupila Ndjike
Kawende, Zacharie-Richard Ntumba Musuka, mon jumeau dans la
tourmente débilitante de l’épreuve doctorale, Mukadi Bony, et Robert
Tshilombo Kalolo.

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LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Monsieur Bijou Lomboto Itofo, notre informaticien, mérite nos fé-


licitations les plus chaleureuses pour ce travail merveilleux de mise en
page.
Le doyen Mulumba Katchy mérite, de manière spéciale, une
mention pour son appui efficace et discret en faveur de ce travail
dont les résultats sont aujourd’hui portés à la connaissance du pu-
blic. C’est également le lieu de remercier et de saluer le travail re-
marquable effectué par les Professeurs Clément Kabange Ntabala,
Félix Vunduawe te Pemako, Édouard Mpongo Bokako Bautolinga,
Jacques Djoli Eseng’Ekeli, Ambroise Kamukuny Mukinay et Paul-
Gaspard Ngondankoy ea Loonghya. Ils ont été membres suffragants
de notre jury de thèse.
L'auteur manifeste ici sa gratitude aux éminents professeurs
Victor Mboyo Empenge-ea-Longila et Kayemba Ntamba Mbilanji
pour avoir éveillé sa conscience sur les questions de droit coutumier.
Merci à tous et pour tout.
994
9511

L’auteur de ces lignes les destine aux juristes achevés ou en forma-


:163
.197

tion pour le progrès de la science constitutionnelle et la justice cons-


.234

titutionnelle qui est son expression la plus moderne, en même temps


8.69
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qu'il formule ici son souhait de voir une floraison de juristes congo-
4229

lais prolonger cette réflexion.


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Dieudonné KALUBA DIBWA


:Non
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LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

PRÉFACE

Depuis l’Antiquité, les Anciens mettaient des préfaces en tête de


leurs livres. Dans la tradition académique cependant, le promoteur
se charge d’en élaborer une dans laquelle il fait connaître les vues de
l’auteur, le plan de l’étude, prévient ou répond à des critiques.
Présenter un ouvrage auquel on a concouru, c’est comme se pré-
senter soi-même au public. C’est une chose si délicate et parfois si
périlleuse, que plusieurs écrivains faisaient écrire ou signer leur pré-
face par un écrivain sympathique et faisant autorité. Cette menace
est écartée ici, car le présent ouvrage est issu d’une thèse qui est
l’œuvre personnelle de l’auteur et non celle du promoteur.
Alors que la République démocratique du Congo amorce depuis
le 18 février 2006 un retour réussi aux valeurs de la démocratie,
l’occasion a été saisie avec pertinence d’étudier, de fond en comble,
994
9511

le contentieux constitutionnel dans le pays.


:163
.197

Après une introduction qui a l’avantage de présenter, d’emblée,


.234

les problèmes que soulève l’étude, l’auteur étudie en deux parties :


8.69
0:15

les fondements théoriques du contentieux constitutionnel avant


4229

d’analyser les modalités d’exercice de la justice constitutionnelle en


:888
5329

République démocratique du Congo.


3853

L’on peut immédiatement remarquer que cette recherche est d’un


e:10
:Non

grand intérêt, pour plusieurs raisons, notamment : elle concerne une


x.com

institution qui caractérise l’État de droit constitutionnel. Elle est en


larvo

outre une des rares thèses permettant de saisir, dans l’ensemble, le


scho
l.

contentieux constitutionnel dans ce pays.


tiona
a
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Au niveau du contenu, l’auteur mérite toutes nos félicitations,


dans la mesure où, à aucun moment, il ne peut être accusé de disper-
sion. Il concentre toute son attention sur l’objet d’étude choisi. Il
faut saluer la manière à la fois sobre et judicieuse dont l’auteur ex-
prime la proposition qu’il entend défendre en ces termes :
« D’emblée, il faut dire que le transfert de souveraineté de Dieu au
Roi et du Roi au peuple a transformé, le fondement de la justice et,
surtout de la justice constitutionnelle. En effet, exercée par le Roi au
nom de Dieu puis en son nom propre, la justice est demeurée une

11
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

prérogative régalienne bien que théoriquement faisant partie désor-


mais des attributs du souverain qui est devenu le peuple ».
Nous pensons donc qu’il y a une corrélation évidente entre la lo-
calisation de la souveraineté dans le pays et le contrôle juridictionnel
des actes de cette souveraineté. Il s’agit donc de savoir si le fonde-
ment de la justice constitutionnelle est le même qu’en Occident.
Si le fondement est différent, – ceci pourrait être une hypothèse à
tester –, cela doit déteindre sur des modalités d’exercice de la justice
constitutionnelle. Du reste, n’est-il pas déjà acquis, comme l’observe
Charles Goossens, que le droit constitutionnel africain est dualiste ?
Comment dès lors assumer ce dualisme constitutionnel qui est
marqué par l’existence d’un texte constitutionnel calqué sur ceux
d’Occident et une présence discrète mais agissante d’une « coutu-
me », en tout cas, des pratiques constitutionnelles, de plus en plus,
persistantes mais tendant de manière frénétique à émasculer la su-
prématie de la Constitution ?
994
9511

Le débat juridique est fécond tout au long de cette étude ; l’auteur


:163

fait des percées et des intuitions théoriques d’une grande intensité


.197
.234

tellement il va dans le détail de certaines questions. C’est la marque


8.69

d’un brillant universitaire, formé aux meilleurs éléments culturels et


0:15
4229

poreux à tous les souffles du monde, en même temps très ancré dans
:888

une conscience historique de son appartenance au Congo et à


5329

l’Afrique. Il fallait ces atouts naturels et acquis pour engager une ré-
3853

flexion constitutionnaliste de cette ampleur.


e:10
:Non

La thèse de Dieudonné Kaluba Dibwa demeurera, à cet égard, une


x.com

référence en la matière dans la mesure où elle retrace l’historique des


larvo
scho

normes du contentieux constitutionnel, entrevoit les difficultés


l.
tiona

qu’elles peuvent susciter et propose, avec à propos, des solutions ju-


a
intern

ridiques qui n’emportent pas toujours l’adhésion de tous, mais qui


ont l’avantage de la cohérence, et, disons-le, de l’audace du cher-
cheur.
La proposition centrale est que l’architecture juridictionnelle pré-
vue par la Constitution du 18 février 2006 devrait être maintenue
avec quelques accommodements techniques, notamment en intro-
duisant la notion des juges ad hoc qui seraient des chefs coutumiers
chaque fois que le juge constitutionnel serait amené à se prononcer
sur un conflit touchant aux intérêts d’une communauté de base.

12
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Une démonstration a été fournie sur ce modèle que l’étude pro-


pose comme susceptible d’installer un juge constitutionnel efficace,
efficient et effectif. L’auteur discute de conditions de son recrute-
ment et celles de son travail qui constituent son statut juridique et
financier, seul garant de son indépendance. Quelques suggestions
sont formulées pour rendre la justice elle-même accessible et trans-
parente à ses destinataires que sont les populations congolaises.
Cette tentative d’analyse des fondements de la justice constitu-
tionnelle est inscrite tout logiquement dans les données heuristiques
d’une solution au problème fondamental d’installer un État de droit
constitutionnel en République démocratique du Congo.
En effet, sans État de droit comme arrière-fond épistémologique,
Dieudonné Kaluba Dibwa démontre que le juge constitutionnel
n’apparaîtrait que comme un visage défiguré et pâle dans une carica-
ture institutionnelle propre à un pays à forte tradition autocratique.
À bien lire la thèse, car il s’agit d’une véritable thèse au sens aussi
994

bien grec que latin de ce mot, l’auteur semble insister sur un axe im-
9511

portant. L’existence d’un juge constitutionnel à l’image de celui


:163

d’Occident n’est pas de nature à garantir la suprématie de la Consti-


.197
.234

tution.
8.69
0:15

L’affirmation procède du fait que le fondement de la justice n’est


4229

pas le même. L’auteur recourt à des arguments philosophiques, so-


:888
5329

ciologiques et même mythologiques pour étayer cette proposition.


3853

De là, il se met à proposer sa contribution originale : la présence des


e:10

chefs coutumiers au sein de la Cour constitutionnelle. La proposi-


:Non

tion est discutable, mais elle a le mérite d’être argumentée. Par là, il
x.com
larvo

est visible que le débat scientifique ne peut être clos.


scho

Le juge constitutionnel n’est en effet respecté que dans la mesure


l.
tiona

où il incarne la bouche de la Constitution qui contient la proclama-


a
intern

tion et la garantie des droits fondamentaux des citoyens. En d’autres


termes, au sens de l’auteur, la Constitution doit, pour être respectée,
contenir un compromis social entre le pouvoir et le peuple sur le-
quel il s’exerce. C’est dire en conclusion que cette étude se situe aux
confins de la problématique de l’État de droit constitutionnel dans
un pays à forte tradition autocratique. Mais comment l’organiser ?
La réponse à cette question tout aussi capitale que celle des fonde-
ments est l’objet de développements que l’auteur expose dans la se-
conde partie de cette étude.

13
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

L’abord de questions de fondements théoriques du contrôle juri-


dictionnel des lois et d’autres normes infralégislatives à l’aune de la
Constitution a offert, à l’auteur, un prétexte pour voir dans la réalité
les mécanismes concrets de l’exercice de la justice constitutionnelle
en République démocratique du Congo.
Il est apparu que les origines de la justice constitutionnelle se si-
tuent historiquement sur le plan du droit positif écrit dans la Loi
fondamentale relative aux structures du Congo du 19 mai 1960. L’on
n’a pas discuté en effet de la présence des éléments caractéristiques de
cette notion dans nos sociétés traditionnelles précoloniales, non pas
que cela ne fût pas intéressant, mais plutôt que cela ouvrait large-
ment les perspectives de l’étude dont le temps aurait manqué proba-
blement à l’auteur. Il s’en excuse, du reste.
Par ailleurs, la thèse a indiqué que la notion de justice constitu-
tionnelle a évolué à travers tous les textes constitutionnels qui ont
régi le pays, en jouant selon le type de régime politique en place, soit
994

un rôle décoratif, soit, enfin, un rôle institutionnel de régulation de


9511

la vie politique.
:163
.197

L’étude des compétences du juge constitutionnel a été abondam-


.234

ment traitée car, au sens de l’auteur, la question posée est celle de


8.69
0:15

savoir ce que peut le juge de la Constitution. Il ne s’est pas agi


4229

d’énumérer les compétences, – ce qui aurait été simple et pédagogi-


:888
5329

que – il s’est plutôt agi de les analyser du point de vue critique et


3853

sous les lumières de la praxis jurisprudentielle de dernières années.


e:10

L’auteur a brillamment réussi l’exercice, tant il a pris le constituant


:Non

en flagrant délit d’omission sur le régime des édits. Cette analyse à la


x.com
larvo

fois exégétique et jurisprudentielle constitue le soubassement de la


scho

technique du droit du contentieux constitutionnel congolais. La


l.
tiona

compétence indique également la procédure à suivre devant le juge


a
intern

constitutionnel dont les arrêts ne souffrent, en principe, d’aucun re-


cours.
L’auteur a analysé les outils conceptuels du travail du juge lors-
qu’il interprète la Constitution. Dans ce rôle de constituant sui gene-
ris, la Cour constitutionnelle demeure « la bouche de la Constitu-
tion » de sorte que les craintes maintes fois exprimées par la doctrine
sur le gouvernement des juges s’avèrent fondées. Qui contrôlera le
contrôleur ? La thèse répond que c’est le constituant qui est le der-
nier rempart dans la protection juridique de la Constitution.

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LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Mais les contraintes les plus diverses, mais toutes fondées sur une
appréhension des misères que le juge ainsi investi d’énormes pou-
voirs pourrait infliger au politique, sont là pour maintenir la justice
constitutionnelle au milieu du village.
En plus, il n’est pas inutile de constater que le choix levé par le
constituant congolais est, à maintes reprises, confirmé dans sa struc-
turation de la vie administrative : les tribus sont reconnues à la fois
comme pourvoyeuses de la nationalité congolaise et matrice sociolo-
gique de la coutume comme norme de droit public. Au demeurant,
la géographie politique de notre pays indique que la République dé-
mocratique du Congo demeure encore un pays rural de sorte qu’il
semble perturbant, aux yeux de l’auteur, que les Congolais résidant
dans nos campagnes et cités ne soient pas suffisamment représentés
dans les structures de la justice des justices.
La richesse de l’argumentation a son revers : à de nombreuses re-
prises, le lecteur est abandonné dans des discussions de philosophie
994

de droit très pointues que l’auteur aborde avec délectation.


9511
:163

L’ouvrage de Dieudonné Kaluba Dibwa est une contribution très


.197

informée, originale et inédite au contentieux constitutionnel en Ré-


.234

publique démocratique du Congo. Il doit donc être salué.


8.69
0:15

Le style est clair, pédagogique et savant à la fois. En effet, au plan


4229
:888

de la forme, j’ai été heureux de découvrir une écriture limpide qui


5329

épouse parfaitement l’expression juridique de la pensée. Le langage


3853

est clair, et la compréhension, fort aisée.


e:10
:Non

L’auteur a, sans nul doute, effectué de brillantes études littéraires


x.com

et il est pourvu d’une vaste culture générale qui transpire dans son
larvo
scho

style et dans sa manière de présenter le texte. La bibliographie est


l.
tiona

immense et bien exploitée. Il est au fait de derniers développements


a
intern

dans sa discipline, à consulter sa bibliographie qui contraste avec la


sécheresse tant chantée de nos bibliothèques universitaires.
L’idée-force de l’auteur de cet ouvrage est de montrer et démon-
trer dans quelle mesure la justice constitutionnelle qui est le ther-
momètre de l’État de droit constitutionnel ne saurait être efficace
sans que et l’institution et le personnel chargé de l’animer ne soient
adaptés à la mentalité du peuple congolais.
L’hypothèse de travail – qui commande le plan binaire – est loua-
ble et respectable : les tribus comme auteur des normes ne devraient

15
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

pas être écartées de l’exercice de la justice constitutionnelle, celle qui


garantit la suprématie de la Constitution vue ici comme un pacte
entre les franges de la population.
Il y a là matière à discussion : l’ouvrage ouvre des perspectives et
alimente la réflexion des constitutionnalistes que les crises ou encore
les « nouveaux conflits » condamnent à renouveler à la fois leurs ap-
proches et leurs paradigmes. C'est le propre de belles thèses : celle-ci
pose des questions qui ouvrent d'autres perspectives à d'autres thè-
ses.
L’auteur fait preuve d’un attachement au positivisme juridique. À
cet égard, il faut saluer cet effort remarquable dans la dimension do-
cumentaire de la thèse. Mais il ne s’enferme pas dans la seule analyse
juridique qu’il maîtrise bien, par ailleurs. Il fait recours à l’approche
de science politique avec plus ou moins de bonheur.
Juriste de formation et de profession, avocat de renom et ensei-
gnant à la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa, Dieudonné
994

Kaluba Dibwa réunit en lui-même ce que l’on pourrait appeler les


9511
:163

contradictions entre la rationalité juridique et la rationalité politi-


.197

que. Homme de métiers juridiques, il reste emporté par la pensée


.234

politique et la culture citoyenne. L’ouvrage provoque des véritables


8.69
0:15

questions politiques. C’est là qu’il faut souligner le courage de


4229

l’auteur qui propose ainsi à la discussion académique un sujet qui n’a


:888
5329

pas encore la maturité historique nécessaire. La faiblesse de la juris-


3853

prudence peut être relevée, mais la qualité de l’exploitation que


e:10

l’auteur en fait, assure à cette thèse une place de référence dans les
:Non

bibliothèques de contentieux de droit public en République démo-


x.com
larvo

cratique du Congo. Je puis terminer ce propos liminaire par rappeler


scho

que les Italiens appellent la préface « la salsa del libro » : la sauce du


l.
tiona

livre. Marville dit que, si elle est bien assaisonnée, elle sert à donner
a
intern

de l’appétit, et qu’elle dispose à dévorer l’ouvrage. Bon appétit,


alors.

Évariste BOSHAB MABUDJ


Professeur ordinaire et Chef de
Département de Droit public interne
de l’Université de Kinshasa

16
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

AFDI : Annuaire français de droit international


APT : Administration publique (trimestriel)
B.A. : Bulletin administratif du Congo belge (1908 à 1959)
BACSJ : Bulletin des Arrêts de la Cour Suprême de Justice
Bel. Col. : Belgique coloniale et commerce international
B.O. : Bulletin Officiel de l’État indépendant du Congo
C.E.b. : Conseil d’État belge
CEDAF : Centre d’étude et de documentation africaines
CEDEJ : Centre d’études et de documentation économiques,
juridiques et sociales
C.E. fr. : Conseil d’État français
CERDAF : Centre de recherche et documentation africaines
994
9511

CERJC : Centre d’études et de recherches sur la justice


:163

constitutionnelle
.197
.234

CC : Conseil constitutionnel français


8.69

CNS : Conférence Nationale Souveraine


0:15
4229

COCJ : Code de l’organisation et de la compétence


:888

judiciaires tel qu’il résulte de l’Ordonnance-loi n


5329
3853

° 82/020 du 31 mars 1982


e:10

coll. : Collection
:Non
x.com

CSJ : Cour suprême de justice


larvo

CPC : Code de Procédure Civile


scho
l.

CPP : Code de Procédure Pénale


tiona
a
intern

CRISP : Centre de recherche et d’information


sociopolitiques
CRP : Centre de recherches pédagogiques
DEA : Diplôme d’Études Approfondies
DES : Diplôme d’Études Supérieures
DIN : Droit et Idées Nouvelles
EUA : Éditions universitaires africaines
Doc. Parl. : Documents parlementaires

17
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

HCR-PT : Haut Conseil de la République-Parlement de


transition
IADHD : Institut africain des droits de l’homme et de la
démocratie
Ibidem : Même auteur, même endroit
Idem : Même auteur
IDLP : Institut pour la démocratie et le leadership politique
IFEP : Institut de formation et d’études politiques
IRS : Institut de recherche scientifique
JORDC : Journal Officiel de la République démocratique du
Congo (1997 à ce jour)
JOZ : Journal Officiel de la République du Zaïre (1972-
1997)
Jur. Col. : Revue de doctrine et de jurisprudence coloniale
Jur. Congo : Jurisprudence et droit du Congo
994

J.T. : Journal des tribunaux de Belgique


9511
:163

Kat. : Revue de droit et de jurisprudence du Katanga


.197
.234

Léo : Jurisprudence de la Cour d’Appel de Léopoldville


8.69

LGDJ : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence


0:15
4229

MB : Moniteur belge
:888
5329

MC : Moniteur congolais (1959-1971)


3853

MES : Mouvements et Enjeux Sociaux


e:10
:Non

MPR : Mouvement Populaire de la Révolution


x.com

MZ : Moniteur zaïrois (1971-1972)


larvo
scho

N° : Numéro
l.
tiona

ONRD : Office national de la recherche et du développement


a
intern

Op. cit. : Ouvrage cité


Pas. : Pasicrisie (Belgique)
pp. : Pages
PUAM : Presses Universitaires d’Aix-Marseille
PUC : Presses Universitaires du Congo
PUF : Presses Universitaires de France
PUG : Presses universitaires de Grenoble

18
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

PULg : Presses Universitaires de Liège


PULIM : Presses de l’Université de Limoges
PUK : Presses de l’Université de Kinshasa
PUZ : Presses Universitaires du Zaïre
RBDC : Revue belge de droit constitutionnel
RBDI : Revue belge de droit international
RDC : Revue de droit congolais
RDJA : Recherches et Documentation Juridiques Africaines
RDP : Revue du Droit Public et de la science politique en
France et à l’étranger
Rev. Dr. ULG. : Revue de la Faculté de droit de l’Université de Liège
RFDA : Revue française de droit administratif
RFDC : Revue française de droit constitutionnel
RIDC : Revue internationale de droit comparé
RJC : Revue Juridique du Congo
994

RJCB : Revue juridique du Congo belge


9511

RJPIC : Revue juridique et politique. Indépendance et


:163
.197

coopération
.234

RJZ : Revue juridique du Zaïre


8.69
0:15

RPC : Revue Pénale Congolaise


4229

RTDH : Revue trimestrielle des droits de l’homme (Belgique)


:888
5329

RZD : Revue zaïroise de droit


3853

s.e. : Sans éditeur


e:10
:Non

s.d. : Sans date de publication


x.com

s.l. : Sans lieu d’édition


larvo

UNAZA : Université Nationale du Zaïre


scho
l.
tiona

UNIKIN : Université de Kinshasa ex-Lovanium


a
intern

UNIKIS : Université de Kisangani ex-Université libre au


Congo
UNILU : Université de Lubumbashi ex-Université officielle
du Congo
Voy : Voir ou Voyez ou Que l’on veuille bien se référer
à…

19
intern
ationa
l.scho
larvo
x.com
:Non
e:10
3853
5329
:888
4229
0:15
8.69
.234
.197
:163
9511
994
INTRODUCTION GENERALE

INTRODUCTION GÉNÉRALE

L’État de droit est celui qui est soumis au droit. Ainsi, l’action des
gouvernants comme les activités des particuliers sont-elles enserrées
dans une hiérarchie des normes au sommet de laquelle trône la
Constitution. Cette affirmation est devenue un truisme mais elle
prend de la consistance lorsque l’effectivité du droit dans un État
implique que l’ordre juridique est cohérent et que sa méconnaissance
est sanctionnée par des juges suffisamment indépendants.
De ce point de vue, il se dégage que l’ordre juridique apparaît
comme un ordre logique dans la mesure où la multiplicité des sour-
ces du droit impose que s’établisse logiquement une hiérarchie entre
les normes. La réalité juridique révèle à ce sujet que dans un État
c’est finalement la Constitution qui répartit la matière normative et
la loi ne peut exprimer, selon l’heureuse formule du Conseil consti-
994

tutionnel français, la volonté générale que dans le respect de la Cons-


9511
:163

titution. Il s’en déduit donc deux légalités : l’une constitutionnelle


.197

qui relève du pouvoir constituant et, l’autre, ordinaire puisqu’elle


.234
8.69

relève du pouvoir législatif et réglementaire autonome.


0:15
4229

De cette prémisse logique, il découle que les pouvoirs constitués


:888

doivent être subordonnés au pouvoir constituant qui les crée et leur


5329

attribue leurs compétences. Car l’exercice du pouvoir constituant se


3853
e:10

révèle être, comme le souligne le professeur Dominique Rousseau, la


:Non

« manifestation première et suprême de la souveraineté »1. Il s’évince


x.com

enfin qu’étant acte d’un pouvoir constitué, la loi doit se conformer à


larvo
scho

la Constitution qui est plutôt acte du pouvoir constituant qui est par
l.
tiona

définition un pouvoir souverain parce qu’initial, inconditionné et


a
intern

autonome.
Du point de vue des jusnaturalistes qui ont une conception diffé-
rente de celle des positivistes que nous venons d’exposer, le contrôle
de constitutionnalité des lois est un moyen pour soumettre l’État au
respect des libertés et des droits de l’homme. Le juge constitutionnel

1
ROUSSEAU (D.), Droit du contentieux constitutionnel, 6e édition, Paris,
Montchrestien, 2001, p. 474.

21
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

devient dès lors le premier gardien de droits fondamentaux protégés


par la Constitution.
C’est cette question de la centralité de droits de l’homme qui est
en jeu, lorsqu’il faut étudier le contentieux constitutionnel, mais
aussi celle du bon fonctionnement des institutions dans le sens de la
protection des droits de l’homme par ailleurs déjà proclamés par le
constituant.
Il s’agira donc, à travers les problématiques liées aux fondements
théoriques et aux modalités d’exercice de la justice constitutionnelle
que pose cette étude, de fixer, de manière claire, le vocabulaire em-
ployé tout au long de la thèse sur des notions importantes du thème
avant d’aborder, de manière un tant soit peu exhaustive, l’état de la
question que nous avons ainsi choisie d’explorer.
La question des fondements théoriques et des modalités d’exercice
de la justice constitutionnelle passe inéluctablement par le débrous-
saillage du cadre conceptuel dont les éléments essentiels sont étudiés
994
9511

à travers cette introduction.


:163
.197
.234

I. PROLÉGOMÈNES
8.69
0:15
4229

Le discours introductif de notre étude consiste à dire, d’emblée,


:888

ce qu’est la justice constitutionnelle, le contentieux constitutionnel,


5329

et d’autres notions voisines.


3853
e:10

Ce point se structure autour de trois idées essentielles :


:Non
x.com

l’affirmation que le contentieux constitutionnel est une partie du


larvo

droit constitutionnel, le contenu de ce contentieux ainsi que les fon-


scho

dements théoriques du contrôle juridictionnel.


l.
tiona
a
intern

A. Le contentieux constitutionnel est une partie


du droit constitutionnel
L’affirmation ainsi faite peut surprendre les esprits juridiques ha-
bitués au raisonnement par déduction, plutôt qu’à des énoncés à
l’allure d’un dogme. En effet, la démonstration de l’affirmation ainsi
faite de manière péremptoire est essentielle à l’établissement des
énoncés principiels et l’instauration du cadre épistémologique dans
lequel se déroulera la présente étude.

22
INTRODUCTION GENERALE

Il est donc utile pour démontrer cette affirmation de dire déjà ce


qu’est le droit constitutionnel, ce qu’est la Constitution et de bros-
ser, en ce qui concerne la République démocratique du Congo, un
aperçu des textes constitutionnels de 1885 à nos jours.

a. Qu’est-ce le droit constitutionnel ?


La question ainsi posée peut paraître élémentaire mais elle est es-
sentielle pour l’intelligence des développements ultérieurs.
Il y a, à notre avis, deux manières de résoudre la question : définir
l’objet par ses éléments constitutifs, c’est l’approche nouménologi-
que2 ou plutôt l’aborder par ce qu’il paraît. C’est l’analyse phénomé-
nologique3.
Du point de vue juridique, il est admis que le droit peut s’analyser
tantôt comme corps des règles sociales, édictées par l’autorité publi-
que et sanctionnées par elle, applicables dans une société donnée à
994

un moment donné, tantôt comme discipline scientifique ayant pour


9511

objet d’étude lesdites règles.


:163
.197

Aussi, la doctrine classique enseigne-t-elle que « le droit public


.234
8.69

constitutionnel jouit de la primauté à l’égard des autres droits consti-


0:15

tutionnels ; le droit politique détient la priorité au sein des divers


4229
:888

droits publics constitutionnels ». Dans le langage courant, affirme


5329

Marcel Prélot, il lui est même attribué l’exclusivité ; on le dénomme,


3853

comme s’il était le seul, « le droit constitutionnel tout court »4.


e:10
:Non
x.com
larvo
scho
l.
tiona

2
Il s’agit d’un néologisme que l’on doit à Emmanuel KANT qui devrait s’écrire
a
intern

correctement nooumène du grec ancien noumenon qui signifie tout simplement


« la réalité intelligible, objet de la raison, opposée à la réalité sensible, objet des
sens ».
3
LALANDE (A.), Vocabulaire technique et critique de la philosophie, 9e édition,
Paris, PUF, 1962, p. 726. Par phénoménologie, il faut entendre « une étude
descriptive d’un ensemble des phénomènes, tels qu’ils se manifestent dans le
temps ou l’espace, par opposition soit aux lois abstraites et fixes de ces
phénomènes ; soit à des réalités transcendantes dont ils seraient la manifestation ;
soit à la critique normative de leur légitimité ».
4
PRELOT (M.), Institutions politiques et droit constitutionnel, 5e édition, Paris,
Dalloz, 1972, p. 31, n° 21.

23
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Outre le fait aujourd’hui évident qu’il n’y a qu’un droit constitu-


tionnel et non quatre comme l’enseignait la doctrine prélotienne, 5
mais surtout que les aspects d’un objet ne devraient pas constituer
des définitions diverses de l’objet, il y a lieu de voir que l’on n’est
pas avancé du tout dans la recherche de la définition.
Aussi, retournons-nous aux auteurs modernes pour tenter de sa-
voir ce qu’est le droit constitutionnel.
Louis Favoreu et les membres du Groupe d’études et de recher-
ches sur la justice constitutionnelle d’Aix-Marseille, à la suite de
Dominique Turpin, nous fournissent des éclairages intéressants lors-
qu’ils nous retracent l’évolution et la mutation du droit constitu-
tionnel au XXe siècle. Ils notent, en effet, que le droit constitution-
nel classique est marqué par un objet unique, à savoir : les institu-
tions politiques, alors que le droit constitutionnel contemporain est
marqué par une profonde et irréversible mutation due à quatre élé-
ments essentiels qui le rapprochent du droit constitutionnel de type
994
9511

américain :
:163
.197

 La désacralisation de la loi ;
.234

 L’expansion des constitutions et du constitutionnalisme ;


8.69
0:15

 La diffusion internationale de l’idéologie des droits de


4229

l’homme ;
:888
5329

 L’apparition de la justice constitutionnelle6


3853
e:10

M. Alphonse-Daniel Ntumba Luaba Lumu, quant à lui, enseigne


:Non
x.com

qu’étymologiquement, « le droit constitutionnel est l’ensemble des


larvo

règles contenues dans la Constitution, l’étude de ces normes ».7 Par


scho

ailleurs, le professeur Édouard Mpongo Bokako, pour sa part, re-


l.
tiona

prenant la définition de Marcel Prélot et Jean Boulouis qu’il cite,


a
intern

5
Voir CONSTANTINESCO (V.) et PIERRE-CAPS (S.), Droit constitutionnel,
Paris, PUF, 2004. Ces deux auteurs sont dans la mouvance de Marcel Prélot ci-
haut exposée.
6
FAVOREU (L.), GAIA (P.), GHEVONTIAN (R.) et Alii, Droit constitutionnel,
8e édition, Paris, Dalloz, 2005, pp. 19-24. ; voir aussi TURPIN (D.), Droit
constitutionnel, Paris, PUF, 1997, pp. 1-8.
7
NTUMBA-LUABA LUMU (A.-D.), Droit constitutionnel général, Kinshasa,
EUA, 2005, p. 8.

24
INTRODUCTION GENERALE

opine que le « droit constitutionnel est l’ensemble des règles juridi-


ques relatives aux institutions grâce auxquelles le pouvoir s’établit,
s’exerce ou se transmet dans l’État ».8
Gilles Champagne, se situant dans la perspective pédagogique qui
est la sienne, avance que « le droit constitutionnel est une discipline
juridique, car il rassemble les règles qui fondent le statut de l’État et
encadrent les phénomènes politiques : il pose les règles du jeu politi-
que et distribue les rôles entre différents acteurs ».9
Toutes règles se rapportant au statut de l’État et encadrant les
phénomènes politiques sont-elles des normes constitutionnelles et
fonderaient-elles ainsi le droit constitutionnel ? Rien ne semble
moins sûr, en effet. L’on ne peut du reste passer sous silence les dif-
férentes fonctions symbolique, programmatique et proclamatoire10
des textes constitutionnels qui occultent de façon magistrale le posi-
tivisme juridique qui fait saisir le droit constitutionnel comme une
sorte d’idéalité juridique parfois en parfait hiatus avec la réalité
994
9511

concrète. Au-delà de ces multiples approches définitionnelles, il reste


:163

la sempiternelle difficulté de trouver une définition susceptible de


.197
.234

ramasser, dans une seule et même formule, l’essentiel des éléments


8.69

constitutifs de l’objet à définir. Une des manières de résoudre cette


0:15
4229

difficulté, c’est de recourir à la synthèse.


:888
5329

La meilleure synthèse de ces différentes définitions nous semble


3853

être celle de Hubert Lenoir et Alain Moyrand qui affirment que


e:10

« dans une première acception, le droit constitutionnel se définit


:Non
x.com

comme l’ensemble des règles de droit qui concernent le pouvoir


larvo

dans l’État (sa conquête, son exercice, sa dévolution). Ces normes


scho

régissent la structure, le fonctionnement et les compétences des or-


l.
tiona

ganes suprêmes de l’État ainsi que les relations qui s’établissent d’une
a
intern

8
MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA (E.), Institutions politiques et droit
constitutionnel, Kinshasa, EUA, 2001, p. 6.
9
CHAMPAGNE (G.), L’essentiel du droit constitutionnel, 1. Théorie générale du
droit constitutionnel, 4e édition, coll. Les Carrés, Paris, Gualino Éditeur, 2004,
p. 9.
10
LACROIX (B.), « Les fonctions symboliques des constitutions », in SEURIN (J.-L.)
(sous la direction de), Le constitutionnalisme aujourd’hui, Paris, Economica, 1984,
pp. 186-199.

25
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

part, entre les organes étatiques et d’autre part, entre les gouvernants
et les gouvernés. Dans une seconde acception, le droit constitution-
nel peut être envisagé comme une discipline scientifique : le juriste
va décrire, classer et expliquer les règles constitutionnelles »11.
Au lieu d’être satisfaisante, cette définition a l’inconvénient ma-
jeur d’être classique c’est-à-dire de faire croire que le pouvoir politi-
que est le seul objet du droit constitutionnel. Réductrice, telle défini-
tion ne laisse pas des coudées franches à l’étude de la justice constitu-
tionnelle qui se trouve être l’un des objets modernes du droit consti-
tutionnel.
En effet, resté longtemps hors du prétoire, le droit constitution-
nel jusqu’en ces années, dans notre Alma Mater, s’enseignait comme
une sorte de droit « inachevé » dont la « sanction était inorganisée »,
en tout cas, un « droit imparfait »12. Hélas ! À ce point de vue, les
programmes universitaires de la République démocratique du
Congo élaguaient un chapitre important qu’est la justice constitu-
994
9511

tionnelle alors qu’elle était déjà depuis trente ans, au moins en droit
:163

comparé, le thermomètre et la pierre d’angle du droit constitution-


.197
.234

nel.13
8.69
0:15

Il y a lieu de signaler toutefois que l’affirmation selon laquelle le


4229

contentieux constitutionnel ressortit du droit constitutionnel est


:888
5329

étayée de façon globale et holistique par le regretté Louis Favoreu et


3853

les membres de son école d’Aix en ce qu’ils proposent une définition


e:10
:Non
x.com
larvo

11
LENOIR (H.) et MOYRAND (A.), L’essentiel sur le droit constitutionnel et
scho

institutions politiques, Paris, L’Hermès, 1994, p. 5. La définition proposée par ces


l.
tiona

auteurs a le mérite cependant d’avoir souligné les deux angles de vision du droit
a
intern

constitutionnel en dépit de la critique épistémologique que nous lui opposons ci-


dessus.
12
PINDI MBENSA KIFU, Cours d’introduction générale à l’étude du droit, 1er
graduat, 1984-1985, Faculté de Droit, UNIKIN, polycopié, pp. 23-24, inédit. Le
Professeur cite parmi les branches du droit imparfait, le droit public interne sans
aucune distinction ainsi que le droit international public.
13
Les travaux de l’École d’Aix dirigés notamment par Louis FAVOREU et son
CERJC sont là pour témoigner en effet de la vitalité de la question de la justice
constitutionnelle au cœur du droit constitutionnel contemporain. François
LUCHAIRE est de la même veine lorsque l’on lit les nombreux travaux qu’il a
publiés à propos de la justice constitutionnelle.

26
INTRODUCTION GENERALE

qui saisit le droit constitutionnel dans son triple objet : institutions,


normes et libertés14.
Nous donnons nos suffrages à cette définition qui présente
l’avantage d’être globale et globalisante et susceptible, de façon opé-
ratoire, de fonder la justice constitutionnelle qui se trouve être la
trame essentielle de notre étude. En effet, le droit constitutionnel
peut bien s’entendre d’une discipline du droit public interne dont
l’objet est l’étude des normes relatives aux institutions politiques en
ce qui est des rapports entre elles et leurs relations avec les citoyens
en ce qui est de leurs droits fondamentaux, lesquelles normes sont
susceptibles d’être sanctionnées par l’activité juridictionnelle.
Le plus difficile venant à être exécuté, il nous reste à dire un mot
sur la notion de Constitution.

b. Qu’est-ce la Constitution ?
994

La réponse à cette question passerait par l’affirmation selon la-


9511

quelle « tout groupement politique, si rudimentaire que soit son or-


:163

ganisation, a une Constitution »15. Mais telle réponse manquerait de


.197
.234

pertinence du moment qu’elle ne résoudrait pas encore la question


8.69

de la définition. En outre, cette affirmation ressortit de la concep-


0:15
4229

tion juridique de la Constitution qui serait ici synonyme de statut de


:888

l’État c’est-à-dire acte constitutif de la personne morale : État.16


5329
3853

Dans cette conception, la Constitution s’entendrait d’un corpus


e:10

des règles relatives aux modes de désignation de gouvernants, à


:Non

l’organisation et au fonctionnement du pouvoir politique.


x.com
larvo

Sous ce rapport, toute société politique possède ce corps des nor-


scho

mes écrites ou non écrites.17


l.
tiona
a
intern

14
L. FAVOREU et Alii, op. cit.., p. V.
15
BURDEAU (G.), Traité de science politique, 2e édition, tome IV, Paris, LGDJ,
p. 45.
16
Lire aussi la contribution du Professeur PINI (J.) : « Qu’est-ce qu’une
constitution ? », in MATHIEU (B.) et Alii (sous la direction de), Constitution et
construction européenne, Cahiers constitutionnels de Paris I, Dalloz, 2006, pp. 13-18
17
TROPER (M.), « Marshall, Kelsen, Barak et le sophisme constitutionnaliste », in
ZOLLER (E.) (sous la direction de), Marbury v. Madison : 1803-2003. Un dialogue
franco-américain, Paris, Dalloz, 2003, p. 215-228.

27
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

La doctrine18 fait état d’une conception politique de la notion de


Constitution qui fait apparaître celle-ci tantôt comme un outil
d’organisation de l’État mais aussi celui de limitation du pouvoir du
monarque et de garantie des libertés individuelles tantôt comme un
instrument de garantie de droits fondamentaux et de limitation des
pouvoirs par leur séparation19.
Il faut ajouter, avec Dominique Chagnollaud, que cette seconde
conception est la signification moderne de la Constitution. Il s’agit
de la démocratie constitutionnelle.
Pour cet auteur, elle est un instrument de limitation du pouvoir,
un acte du peuple souverain et l’expression d’une philosophie politi-
que. Cette philosophie peut n’être qu’implicite ; aussi, le doyen
Maurice Hauriou distinguait-il la Constitution politique de la Cons-
titution sociale20.
De nos jours, s’élève même une théorie biologique de la Consti-
994

tution dont l’intérêt est encore à scruter dans les errements de la


9511

doctrine. Ainsi, comprendre la Constitution comme la traduction


:163
.197

juridique de la pacification des rapports de force entre les groupes


.234

politiques présents dans la communauté nationale, suppose


8.69
0:15

d’abandonner l’idée d’une norme suprême édictée par la volonté ra-


4229

tionnelle du peuple souverain. Par là, on rejoint l’hypothèse de


:888
5329

Konrad Lorenz selon laquelle l’organisation des groupes humains


3853

repose, en majeure partie, sur les rites d’inhibition phylogénétiques


e:10

et culturels de l’instinct d’agression. Sur le plan phylogénétique, le


:Non
x.com

conflit maîtrisé crée nécessairement une hiérarchie entre les forces


larvo

sociales qui devient la norme sociale commune. Sur le plan culturel,


scho

une infinité de variations est possible dans le contenu de la norme


l.
tiona

sociale commune, à des moments ou des lieux différents. 21


a
intern

18
NTUMBA-LUABA LUMU (A.-D.), op. cit.., pp. 119-120.
19
Article 16 de la Déclaration de droits de l’homme et du citoyen.
20
CHAGNOLLAUD (D.), Droit constitutionnel contemporain, 4e édition, Paris,
Armand Colin, 2005, pp. 24-26.
21
Lire, pour une recherche approfondie de cette théorie, LORENZ (K.) et
POPPER (K.), L’avenir est ouvert. Entretiens d’Altenberg. Textes du symposium
Popper à Vienne (1985), Paris, Flammarion, 1990, Traduction par J. Étoré, 175
p. : L’avenir est ouvert. ; LORENZ (K.), Les fondements de l’éthologie (1978),

28
INTRODUCTION GENERALE

De ce point de vue, la Constitution est l’expression juridique de


ces rites. On peut en déduire l’irrationalité de la création et du déve-
loppement des groupes sociaux humains. Ainsi, si l’on adopte
l’hypothèse de Konrad Lorenz, l’irrationnel est la source de l’unité
des communautés. La cohésion est assurée par les « symboles » créés
par la ritualisation culturelle « auxquels tous les membres du groupe
accordent une même valeur ». Les symboles ne « représentent jamais
une chose ou une action très précisément définissable, mais au
contraire, tout un complexe de choses et d’actions et surtout de sen-
timents et d’émotions, complexe dans lequel tout se mêle et dont il
est impossible de donner une définition simple ». Cette compréhen-
sion de la genèse des peuples et de leur organisation se retrouve
presque à l’identique dans les théories constitutionnelles des roman-
tiques allemands et de l’École historique du droit, par l’intermédiaire
du concept de Volksgeist.22
Par ailleurs, selon Konrad Lorenz, l’évolution même des com-
994

munautés n’est dirigée ni par la volonté ou la pensée conceptuelle, ni


9511
:163

par la raison ou l’entendement humains. En effet, les impulsions na-


.197

turelles de l’homme et leur contrôle imposé par la ritualisation


.234
8.69

culturelle « forment un système unique à l’intérieur duquel ces deux


0:15

facteurs sont complémentaires ». Ce système est très fragile : c’est un


4229

équilibre instable car les rites culturels, par définition, ne sont pas
:888
5329

transmis héréditairement et peuvent lentement se transformer ou


3853

rapidement être modifiés ou disparaître, entraînant une évolution


e:10
:Non
x.com
larvo

Paris, Champs Flammarion, 1997, Traduction par J. Étoré, 426 p. : Les


scho

fondements de l’éthologie ; LORENZ (K), Les huit péchés capitaux de notre


l.
tiona

civilisation, Paris, Flammarion, 1973, Traduction par É. de Miribel, 169 p. : Huit


a
intern

péchés capitaux ; LORENZ (K.), L’envers du miroir. Une histoire naturelle de la


connaissance (1973), Paris, Champs Flammarion, 1975, Traduction par J. Étoré,
349 p. : L’envers du miroir ; LORENZ (K.), L’agression. Une histoire naturelle du
mal (1963), Paris, Champs Flammarion, 2006, Traduction de V. Fritsch, 285 p. :
Agression ; LORENZ (K.), « Le tout et la partie dans la société animale et humaine.
Un débat méthodologique » (1950), in LORENZ (K.), Trois essais sur le
comportement animal et humain, Paris, Seuil, 1970, Traduction par C. et P.
Fredet, pp. 73-176. : « Le tout et la partie ».
22
Lire BEISER (F.C.), Enlightenment, Revolution and Romanticism. The Genesis of
Modern German Political Thought, 1790-1800, Cambridge-Massachusetts,
London, Harvard University Press, 1992, pp. 238-239.

29
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

substantielle de l’organisation du groupe. L’instinct d’agression, ja-


mais éteint, peut reprendre le dessus et une nouvelle hiérarchie so-
ciale en découlera si de nouveaux rites culturels d’inhibition vien-
nent à se former.
L’équilibre des forces sociales, d’où va surgir un ordre constitu-
tionnel, se construit en dehors d’un processus volontaire. C’est,
pour des raisons différentes, une idée exploitée par les premiers
théoriciens du socialisme et par deux juristes français, Duguit et
Hauriou.
En effet, si la notion d’instinct, telle qu’elle est définie par Lo-
renz, n’apparaît pas dans les ouvrages des romantiques allemands,
particulièrement du Frühromantik, et de l’École historique du droit,
leur conception de la Constitution s’accorde remarquablement avec
la mise en valeur d’éléments irrationnels à la base de l’unité des peu-
ples. Inspiré des travaux de Herder, le courant Frühromantik présen-
te le Volk comme un organisme animé par un esprit propre, le Volk-
994
9511

sgeist, et au sein duquel les individus sont unis par un lien de solidari-
:163

té qui a remplacé la concurrence des intérêts personnels. La survie de


.197
.234

la communauté dépend donc d’un sentiment d’affection entre les


8.69

citoyens.
0:15
4229

La légitimité du droit et de l’État ne dépend plus de volontés in-


:888
5329

dividuelles ayant librement consenti un contrat social mais de sym-


3853

boles ralliant le sentiment des individus. Tel est le sens de l’État


e:10

« poétique » de Novalis, État où le fondement de l’obéissance réside


:Non
x.com

dans l’admiration qu’ont les hommes pour le souverain, incarnation


larvo

des symboles traditionnels populaires. Ces derniers sont, en effet,


scho

purement culturels : ils sont construits par le poète qui, son inspira-
l.
tiona

tion alimentée par le Volksgeist, crée une aura mystique autour du


a
intern

souverain.
Évacuant les questions de volontés individuelles et d’opposition
entre la majorité et les minorités, le Volksgeist permet d’imaginer
une parfaite harmonie, une unanimité complète à l’intérieur de la
communauté nationale. Les individus ne peuvent choisir la Consti-
tution qui régit le Volk : elle s’impose nécessairement à eux en tant
que manifestation de l’esprit populaire, elle leur est donnée comme
leur est donné le langage de la nation à laquelle ils appartiennent.

30
INTRODUCTION GENERALE

L’irrationalité et la spontanéité du Volksgeist présentent ainsi des


traits communs avec l’hypothèse de Lorenz de rites culturels
d’inhibition des conflits, produisant des symboles complexes de sen-
timents et d’émotions garantissant l’unité des peuples. Il y a, toute-
fois, une différence importante quant à la compréhension de ces
symboles.
Pour le biologiste, ils ne représentent pas « une valeur éthique ab-
solue » : leur caractère sacré n’existe que « par rapport au cadre de ré-
férence de telle ou telle culture ». Ils peuvent être étudiés scientifi-
quement, au moins quant à leurs finalités.
Pour le romantisme, en revanche, le symbole est magique, il ne
peut être révélé que par l’artiste. Inaccessible à la raison, il est ressen-
ti par la sensibilité du peuple. Le Volksgeist est aussi un programme
politique, à tel point qu’il est difficile de dire si la valorisation de la
création spontanée du droit est, pour l’École historique, la consé-
quence de leur conception organique du Volk ou si, à l’inverse, c’est
994
9511

dans le but de donner une assise populaire à leur représentation du


:163

droit que l’École adhère à la définition romantique du Volksgeist.


.197
.234

La scission de l’École en un courant germaniste, favorable à la pri-


8.69
0:15

mauté de la coutume, et un courant romaniste, privilégiant le travail


4229

de doctrine juridique et la science du droit, révèle la portée polémi-


:888
5329

que d’un concept présenté comme irrationnel et indéfinissable. 23


3853

De même, l’on peut observer qu’une signification plus juridique


e:10
:Non

fait valoir la primauté de la Constitution sur toutes autres normes.


x.com

Aussi, distingue-t-on la Constitution au sens matériel (saisie par son


larvo

contenu) et la Constitution au sens formel qui se caractérise par la


scho
l.

spécialité des règles d’élaboration et de révision qui la placent ainsi


tiona
a

au-dessus des autres règles et lui confèrent une autorité supérieure à


intern

ces dernières.

23
Voir BÖCKENFORDE (E.W.), Le droit, l’État et la constitution démocratique.
Essais de théorie juridique, politique et constitutionnelle, Paris-Bruxelles, LGDJ-
Bruylant, coll. La pensée juridique, 2000, Présentation et traduction par
JOUANJOUAN (O.), avec la collaboration de ZIMMER (W.) et BEAUD (O.),
pp. 55-62 ; DUFOUR (A.), Droits de l’Homme, Droit naturel et histoire. Droit,
individu et pouvoir, de l’École du Droit naturel à l’École du Droit historique, Paris,
PUF, Léviathan, 1991, p. 235 notamment.

31
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Cette caractérisation formelle de la Constitution est l’œuvre de la


construction doctrinale de l’Autrichien Hans Kelsen pour qui, au
sommet de normes, la Constitution commande tout l’édifice juridi-
que et lui donne sa validité et son effectivité24.
Il est acquis que les deux contenus des Constitutions aux sens ma-
tériel et formel ne coïncident pas toujours. Des règles constitution-
nelles matérielles peuvent être consignées dans des textes qui ne sont
pas constitutionnels.
Par ailleurs, la Constitution au sens formel recèle parfois des rè-
gles non constitutionnelles au sens matériel. Ainsi, l’exemple désor-
mais classique de la disposition constitutionnelle helvétique relative
au mode d’abattage du bétail.
Pour faire le tour de la question, il est utile de savoir que la Cons-
titution peut revêtir deux formes : coutumière et écrite. Si la majori-
té des États modernes possède des Constitutions écrites, il n’est pas
superflu de constater que la Constitution coutumière existe notam-
994

ment en Grande-Bretagne même si un nombre important des règles


9511
:163

constitutionnelles au sens matériel sont consignées dans des textes


.197

écrits qui constituent ainsi « des îlots épars dans un océan de coutu-
.234

mes ».25
8.69
0:15

Tel est le cas de la Magna Carta de 1215 accordée par Jean Sans
4229
:888

Terre à ses barons après la défaite de Bouvines, la pétition des droits,


5329

l’Habeas Corpus de 1679 protégeant les sujets britanniques contre


3853

l’arbitraire du monarque, le Bill of Rights accordé au Parlement par


e:10
:Non

Guillaume d’orange en 1689, l’Establishment Act de 1701 réglant les


x.com

questions de succession au trône ainsi que les divers Parliament Acts


larvo

de 1911 et 1949 retraçant les pouvoirs respectifs de deux chambres


scho

du Parlement britannique.
l.
tiona
a
intern

À cet égard, le Professeur Jacques Djoli Eseng’Ekeli fait état des


mythes fondateurs qui tiendraient lieu de Constitutions coutumiè-
res26 pour les États africains précoloniaux.

24
CHAGNOLLAUD (D.), op. cit.., p. 27.
25
TURPIN (D.), op. cit., p. 74.
26
DJOLI ESENG’EKELI (J.), Le constitutionnalisme africain : Entre la gestion des
héritages et l’invention du futur. Contribution à l’émergence d’une théorie africaine
de l’État, Paris, Connaissances et Savoirs, 2006, p. 492.

32
INTRODUCTION GENERALE

Le Fukiansi pour le Royaume Kongo en est un exemple.


Il est entendu, toutefois, que de ce point de vue, la Constitution
coutumière est une norme fondatrice de la société traditionnelle, in-
violable et qui a primauté sur toutes autres règles du fait qu’elle est
l’œuvre des ancêtres fondateurs du clan ou de la tribu.27
La conformité des autres règles inférieures à cette Grundnorm est
le pendant naturel du respect que l’Africain doit aux morts surtout
que ceux-ci sont les fondateurs de la société. Se rebeller contre cette
norme, c’est, sans coup férir, se rendre étranger à la communauté de
base, s’ostraciser ; or, en dehors de la société, point de salut.
Cependant, le recours à la théorie de la dysfonctionnalité de
Kayemba Ntamba Mbilanji aboutit à relativiser cette vision plutôt
européocentrique du droit.
En effet, selon cet auteur, le droit présente une tout autre face en
Afrique pour des raisons qu’il faut chercher ailleurs. Cela explique le
994
9511

rapport que l’Africain entretient avec le droit et la justice comme


:163

institution chargée de trancher les conflits survenant dans la société.


.197
.234

Bien entendu, l’Africain évitera souvent de provoquer lui-même


8.69

des procès, de recourir aux voies que lui ouvre le droit pour obtenir
0:15
4229

justice et cela pour s’en tenir à des solutions mystiques : envoi de


:888

serpent venimeux, de foudre à un adversaire, l’envoûtement de ce


5329
3853

dernier. Et la peur de ces sanctions mystiques joue un rôle fonda-


e:10

mental pour policer les individus et en obtenir la soumission à la


:Non

normalité collective. Elle est par conséquent une composante fon-


x.com

damentale de l’autorégulation sociale sous l’Afrique noire d’hier


larvo
scho

comme celle d’aujourd’hui.


l.
tiona

Dans cette ambiance mystique où baigne l’Africain, le droit – s’il


a
intern

apparaît – ne peut être, en l’absence de l’autonomie individuelle, que

27
KAYEMBA NTAMBA MBILANJI, « L’autorégulation sociale sous l’Afrique
noire postcoloniale. Impuissance du droit, primauté de la parenté et de la mysticité »,
Communication au colloque « Droit et Développement », Kinshasa, Faculté de
droit, Université de Kinshasa, 1981.

33
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

d’expression collective comme pour toutes les sociétés précitées ou à


niveau d’évolution politique insuffisant.28
Mais l’on doit souligner que l’Afrique pré-européenne était en
voie de transformation à cet égard. Dans les sociétés politiquement
organisées (royaumes et empires), surtout dans leurs métropoles po-
litico-commerciales, la volonté individuelle s’affirmait en effet à la
faveur de l’autonomie et des activités individuelles et du patrimoine
personnel lié à ces activités ; et parallèlement au développement de la
volonté individuelle s’affirmait le droit contractuel de type moder-
ne : abandon des noms claniques qui étaient collectifs en faveur des
noms individuels, succession individuelle, mariage supratribal,
commerce, division du travail individuelle à la place de la division
du travail collective ou spécialisation par clans entiers.
Toutefois, qu’il soit d’expression collective ou individuelle, le
droit sous l’Afrique ancienne était, en l’absence de la cité (forêts, dé-
sert) ou en raison de sa jeunesse (savane), une donnée négligeable,
994
9511

embryonnaire, étouffée qu’il était non seulement par la mysticité


:163

mais aussi par la parenté.29


.197
.234

Voilà pourquoi, en Afrique noire précoloniale, l’autorité de la


8.69
0:15

Loi fondamentale a un fondement théorique différent de celui de la


4229

Constitution écrite dont le respect est assuré par la caractérisation


:888
5329

formelle de ses règles d’élaboration et de révision ainsi que le fait po-


3853

litique admis que c’est un acte de volonté du souverain : le peuple


e:10

lui-même.
:Non
x.com

Cette parenthèse d’anthropologie juridique refermée, il importe


larvo

de noter que la notion de Constitution est riche de sens, ainsi que


scho
l.

nous venons de l’indiquer, mais d’emblée, disons, avec Kitete Ke-


tiona
a

kumba Omombo, que la Constitution « tente en définitive de conci-


intern

lier les aspirations populaires qui, loin d’être toujours centripètes,

28
Pour les détails, consulter KALUBA DIBWA (D.), Démocratie et Développement
au Congo-Kinshasa. Essai d’explication socio-juridique de l’inadéquation
institutionnelle postcoloniale, Paris, L’Harmattan, 2010.
29
KAYEMBA NTAMBA MBILANJI, « L’autorégulation sociale sous l’Afrique
noire postcoloniale. Impuissance du droit, primauté de la parenté et de la mysticité »,
Communication au colloque « Droit et Développement », Kinshasa, Faculté de
droit, Université de Kinshasa, 1981.

34
INTRODUCTION GENERALE

sont généralement centrifuges. La raison est d’ordre sociologique en


ce que l’on rencontre rarement les peuples foncièrement homogè-
nes »30.
Dans chaque société politique, il se crée nécessairement le phéno-
mène universel de stratification sociale qui engendre une différencia-
tion individuelle laquelle produit, à son tour, des couches ou classes
sociales. Naturellement, ces diverses différenciations produisent une
divergence d’intérêts à la fois politiques et économiques. Mais pour
que la société demeure, il faut un compromis que la Constitution
écrite cristallise dans un document solennel qui protège et défend les
différentes couches sociales31.
Cette conception sociologique n’avait pas recueilli l’approbation
de la théorie marxiste qui considère la Constitution, tout comme le
droit qu’elle produit, comme la superstructure engendrée par
l’infrastructure constituée des forces sociales et des modes de pro-
duction. À chaque type de mode de production correspond un type
994
9511

d’organisation politique.
:163
.197

À ce niveau, la société industrielle européenne du XVIIIe siècle


.234

qui est à la base du constitutionnalisme contemporain ne peut


8.69
0:15

s’inscrire que dans la dynamique de renversement des rapports des


4229

classes sociales dû au changement de mode de production qui était


:888
5329

jusque-là féodal. L’industrialisation de la société ayant émancipé les


3853

forces sociales laborieuses, tel renversement se devait d’être consigné


e:10

en termes politiques par la limitation du pouvoir du monarque qui,


:Non
x.com

en réalité, n’en avait plus, car le machinisme avait dépouillé le Roi


larvo

au profit des barons avant de consacrer le dernier patron qu’est le


scho

capitaliste32.
l.
tiona
a

Dès lors, dans ces conditions, est Constitution le document par


intern

lequel le prolétariat s’émancipe du diktat de la bourgeoisie. Cette

30
KITETE KEKUMBA OMOMBO, Cours de droit constitutionnel et institutions
politiques, 1er graduat, Faculté de Droit, UNIKIN, 1986-1987, polycopié, p. 34,
inédit.
31
Voir MARX (K.) et ENGELS (F.), Le capital, coll. Œuvres complètes, Moscou,
Éditions sociales, 1977, pp. 23-45.
32
Idem, p. 45.

35
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

conception marxiste et polémologique n’est pas partagée en Afrique


noire précoloniale où la Constitution est saisie comme une instance
de conciliation de l’autorité et de la liberté du groupe 33.
Yves-André Faure, dans l’excellente étude citée en bas de page,
montre, par une sorte de césure épistémologique, « que la Constitu-
tion a été longtemps lue selon les prismes de l’Occident comme un
texte suprême de (et dans) l’État, qui organise le pouvoir, s’analyse
comme une garantie des gouvernés, que sa diffusion dans le temps et
dans l’espace correspond à des étapes successives de la conquête de la
liberté par ceux qui, jusqu’alors, ont été soumis à la force mécanique
de la domination » ; il fait le procès de la perspective historique du
droit constitutionnel et enchaîne que « cette démarche qui s’explique
par le déroulement même de la vie publique (de l’Occident) présente
de sérieux inconvénients lorsqu’elle sous-tend l’analyse des Constitu-
tions africaines.
Là comme ailleurs, le positivisme juridique occulte les conditions
994
9511

bien particulières d’émergence et d’application des normes, de trahir


:163

leur signification réelle, d’imposer des catégories universelles devant


.197
.234

lesquelles doivent plier les réalités diverses et complexes. Bref, par


8.69

ses aboutissements, cette démarche, dénonce-t-il, suscite des analyses


0:15
4229

irréalistes des textes constitutionnels africains ».34


:888
5329

Pour cet auteur, la Constitution en Afrique noire devrait être sai-


3853

sie comme étant une technique gouvernementale, non pas établie


e:10

dans le but de reconnaître la mise du pouvoir au service de la collec-


:Non
x.com

tivité ou de diverses fictions juridiques ou intellectuelles qui ren-


larvo

voient à celle-ci (la nation, le pays, la patrie, le bien commun,


scho

l’intérêt général…), mais exercée en vue de la fixation des rôles politi-


l.
tiona

ques, de la localisation définitive des acteurs à la relation. 35


a
intern

Pour révolutionnaire qu’elle pourrait être, cette définition de


Monsieur Faure présente aussi l’inconvénient épistémologique de
transformer une notion simple au départ en une sorte de double face

33
FAURE (Y.-A.) « Les constitutions et l’exercice du pouvoir en Afrique noire. Pour
une lecture différente des textes », in SEURIN (J.-L.), op. cit., pp. 214-230.
34
Idem, p. 216.
35
Ibidem, p. 220.

36
INTRODUCTION GENERALE

de Janus qui s’apprécierait selon l’angle de vision de chaque cher-


cheur.
À notre avis, il a présenté la Constitution comme technique de lé-
gitimation du jeu et des rôles politiques ; l’Occident lui-même ne nous
semble guère avoir échappé à cela, tout au moins au début de son
constitutionnalisme. Le reproche qu’il fait au droit constitutionnel
que nous n’approuvons pas du tout est justement l’explication ration-
nelle, puisque historique, des étapes successives du constitutionnalis-
me qu’il faut mettre en relief avec les évolutions sociologiques de la
société.
Il ne nous semble guère excessif de voir dans la Constitution à la
fois ce que l’humanité entière y voit et le compromis social qu’elle
est censée renfermer entre diverses franges de la population.
À force de trop particulariser l’Afrique, la Constitution pourrait
y paraître finalement comme un objet juridiquement non identifié ;
994

ce qui en enlèverait à la notion l’essentiel de son contenu sémantique


9511

et, du même coup, son utilité opératoire.


:163
.197

Avant de passer à un bref aperçu des textes constitutionnels de


.234
8.69

notre pays de 1885 à nos jours, pour des raisons de lisibilité de nos
0:15

développements ultérieurs, du point de vue diachronique, disons que


4229
:888

la Constitution est un document solennel, écrit selon une procédure


5329

spéciale et contenant de règles relatives aux institutions politiques,


3853

aux normes régissant celles-ci et les citoyens ainsi qu’aux droits et


e:10
:Non

libertés reconnus à ces derniers. Ces règles ont, disons-le, vocation à


x.com

être permanentes, impersonnelles et transcendantales.36


larvo
scho
l.
tiona
a
intern

36
Cet adjectif apparaît, à la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa, sous la
plume du Professeur Augustin KITETE KEKUMBA OMOMBO. Au-delà du
caractère métaphysique que l’on s’expliquerait difficilement dans une définition
strictement juridique, nous devons à cet auteur de souligner déjà à vingt ans
d’écart ce qui est en train de s’appeler « le droit constitutionnel théologique ». Le
droit constitutionnel étant un droit de la fondation, la tentation est grande de
l’assimiler à la science de la création qui est la théologie chrétienne avec son
credo d’un Dieu unique, créateur de tout le cosmos et qui édicte des règles
éternelles et transcendantales. N’est-ce pas là déjà l’émergence ou la résurgence de
l’inconscient du mythe judéo-chrétien fondateur de l’occident et de son droit,
expression de cette cosmogonie ?

37
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Tel doit être le sens que nous accordons au concept de Constitu-


tion dont « on sait que les techniques doivent beaucoup aux prati-
ques très anciennes des ordres religieux »37.
Comment ces textes sont-ils présentés chronologiquement en Ré-
publique démocratique du Congo ?

c. Aperçu des textes constitutionnels de 1885 à nos jours


Ici, il est question, non pas de faire la « politoscopie constitution-
nelle » mais plutôt d’indiquer les différentes étapes que la République
démocratique du Congo a connues dans son processus de constitu-
tionnalisme.
Nous partirons donc de l’État indépendant du Congo pour abou-
tir au texte constitutionnel du 18 février 2006.

 État Indépendant du Congo


994
9511

Félix Vunduawe enseigne que « c’est à partir de l’Acte Général de


:163
.197

la Conférence de Berlin qu’ont été jetées les bases de la naissance du


.234

Congo, aujourd’hui République démocratique du Congo »38.


8.69
0:15

Il serait tout de même difficile de considérer cet Acte comme un


4229
:888

texte constitutionnel tant sa nature juridique demeure celle d’un


5329

traité international. Toutefois, cet Acte, renchérit Félix Vunduawe,


3853

a permis au Roi Léopold II de se proclamer Roi souverain et Chef de


e:10
:Non

l’État39. Ainsi, l’État Indépendant du Congo était devenu sa proprié-


x.com

té exclusive et le décret était l’expression de la volonté du souverain.


larvo
scho

C’est autant dire que l’E.I.C. n’avait pas de Constitution au sens


l.
tiona

formel. Mais, au sens matériel, tous les textes ayant jeté les bases de
a
intern

l’organisation et l’exercice du pouvoir politique de l’État indépen-


dant du Congo peuvent être reconnus comme des textes constitu-

37
de VILLIERS (M.), Dictionnaire de droit constitutionnel, 3e édition, Paris,
Armand Colin, 2001, p. 48.
38
VUNDUAWE te PEMAKO (F.), Traité de droit administratif, Bruxelles,
Larcier, Kinshasa, Afrique-Éditions, 2007, p. 184.
39
Idem, p. 184.

38
INTRODUCTION GENERALE

tionnels materiae sensu. Tel est le cas, notamment, des décrets sui-
vants :
 Décret du Roi-Souverain du 30 octobre 1885 sur l’organisation
provisoire du Gouvernement central40 ;
 Décret du Roi-Souverain du 1er septembre 1894 sur
l’organisation du Gouvernement central41 ;
 Décret du Roi-souverain du 16 avril 1887 sur l’organisation
du Gouvernement local. Pouvoirs du Gouverneur général 42 ;
 Décret du Roi-souverain du 16 avril 1889 instituant le Conseil
supérieur43 ;
 Décret du Roi-souverain du 8 octobre 1890 sur l’organisation
du Conseil supérieur44.
À ce propos, Léon de Saint Moulin renseigne que « certains
commandants, et même des responsables des sociétés privées, rece-
vaient des pouvoirs exorbitants, sans avoir de comptes à rendre à
994

aucune autre autorité que le Roi »45.


9511
:163

Du point de vue strictement juridique, il nous paraît exact


.197
.234

d’affirmer que le seul mode d’expression du Roi étant le décret, ce-


8.69

lui-ci intervenait en toutes matières. La doctrine a dégagé le critère


0:15
4229

matériel pour distinguer le décret constitutionnel, le décret législatif


:888

ainsi que le décret administratif.


5329
3853

Il importe de souligner que les résolutions des chambres législati-


e:10

ves belges des 28 et 30 avril 1885 ont renforcé les pouvoirs du Roi
:Non
x.com

Souverain. Ces résolutions l’ont autorisé à être le Chef de l’État In-


larvo

dépendant du Congo.
scho
l.

La déclaration de neutralité du 1er août 1885 faite par le Roi Sou-


tiona
a

verain est à mettre dans le même panier car par elle, le Roi garantis-
intern

sait le commerce international et fixait le droit de préemption re-

40
B.O., 1885, pp. 25-29.
41
B.O., 1894, pp. 186-187.
42
B.O., 1887, pp. 169-172.
43
B.O., 1889, pp. 161-163.
44
B.O., 1890, pp. 154-159.
45
de SAINT MOULIN (L.), « Brève histoire des constitutions du Zaïre », Zaïre-
Afrique, Kinshasa, 31e année, n° 256, p. 291.

39
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

connu à la France « au cas où le Roi n’arriverait pas à gérer le


Congo »46.
De même, il n’est pas superfétatoire de noter que le traité de ces-
sion du Congo au Royaume de Belgique du 28 novembre 1907 et
son acte additionnel du 5 mars 1988 sont à prendre pour des actes
juridiques ayant une incidence constitutionnelle évidente tant leur
objet semble s’incruster dans la matière constitutionnelle. Mais dans
la mesure où il s’agit d’un acte de droit international, le traité de ces-
sion ne semble nullement revêtir la qualité constitutionnelle.
Dans un tel régime de confusion des pouvoirs, il n’est pas exclu de
voir que le Roi est le constituant, et dès lors, il n’y a pas de Constitu-
tion au sens formel, cependant il a existé des décrets épars régissant la
fondation, l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs. L’on
peut noter que l’absolutisme du régime politique de l’État indépen-
dant du Congo se caractérise par le fait que les collaborateurs du Roi-
Souverain ne détenaient pas de véritables prérogatives constitutionnel-
994
9511

les au point que Félicien Cattier les qualifie « d’instruments aveugles


:163

dans la main puissante du Roi-Souverain »47.


.197
.234

Ce marasme constitutionnel a perduré jusqu’en 1908.


8.69
0:15
4229

 La Constitution belge du 7 février 1831


:888
5329

Il faut affirmer d’emblée que le Congo belge était régi par la


3853
e:10

Constitution belge de 1831 telle que révisée par la loi constitution-


:Non

nelle du 7 septembre 1893 car la colonie faisait bel et bien partie du


x.com

royaume. Pour mettre en application cette Constitution, une loi


larvo
scho

particulière a été adoptée en 1908. En cette date du 18 octobre 1908,


l.
tiona

la doctrine identifie trois lois prises dans l’ordre logique et chrono-


a
intern

logique ci-après :
Par la première loi du 18 octobre 1908 approuvant le traité de
cession du 28 novembre 1907, le Congo devenait une colonie de la
Belgique, cessant ainsi d’être la chose du Roi Souverain.

46
VUNDUAWE te PEMAKO (F.), op. cit., p. 184.
47
CATTIER (F.), Étude sur la situation de l’État indépendant du Congo, Paris,
Bruxelles, Veuve Larcier, 1906, p. 323.

40
INTRODUCTION GENERALE

Une seconde loi de la même date viendra approuver l’acte addi-


tionnel au traité de cession pris le 5 mars 1908.
La troisième loi et la seule qui nous importe ici est la fameuse
« Charte Coloniale » qui est une loi belge, élaborée par le Parlement
belge, sanctionnée et promulguée par le Roi des Belges. Elle est en-
trée en vigueur le 15 novembre 1908 « car en vertu du traité de ces-
sion, le Roi devait prendre un arrêté fixant son entrée en vigueur »48.
Ce texte a régi le pays, dans le sillage de la Constitution belge 49, pen-
dant cinquante-deux ans et constitue, à n’en point douter, le clou
juridique de la colonisation qui prendra fin le 30 juin 1960.

 Les lois fondamentales de 1960


Il s’agit ici encore de deux lois belges votées par le Parlement bel-
ge à Bruxelles, sanctionnées et promulguées par le Roi des Belges. La
première en date est celle du 19 mai 1960 relative aux structures du
994

Congo tandis qu’en date du 16 juin 1960 intervenait celle relative


9511

aux libertés publiques.


:163
.197

Ainsi que l’on sait, ces deux lois sont élaborées sur la base des ré-
.234
8.69

solutions de la Table Ronde belgo-congolaise de janvier-février 1960


0:15

dite Table Ronde politique. Elles constituent, toutes deux, la Consti-


4229

tution provisoire de l’État du Congo en vertu des articles 3, 5 et 230


:888
5329

de la Loi fondamentale du 19 mai 1960. Ajoutons, pour être com-


3853

plet, qu’en date du 17 juin 1960, une autre Loi fondamentale fut pri-
e:10
:Non

se et portait sur les enquêtes parlementaires. Par ailleurs, par son ob-
x.com

jet, telle Loi fondamentale fait partie intégrante de la Constitution


larvo

provisoire de 1960.50
scho
l.
tiona

Il est tentant de conclure, avec le Professeur Kayemba Ntamba


a
intern

Mbilanji, que les Lois fondamentales sont une œuvre belge, une

48
VUNDUAWE te PEMAKO (F.), op. cit., p. 187.
49
Article 1er, alinéa 4 de la Constitution belge.
50
IYELEZA MOJU-MBEY et Alii, Recueil des textes constitutionnels de la
République du Zaïre du 19 mai 1960 au 28 avril 1991 avec, en annexe, la Charte
coloniale du 18 octobre 1908, Kinshasa, Ise-Consult, 1991, p. 23.

41
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Constitution provisoire et un bouclier juridique de l’ordre colonial


établi51.
Disons, d’un mot, que du point de vue du constitutionnalisme, il
y a une situation intérimaire entre la confusion des pouvoirs dans le
chef du monarque dans la charte coloniale et l’institutionnalisation
du pouvoir politique que l’on retrouve dans les Lois fondamentales
de 1960. Du reste, la pratique institutionnelle de ces textes nous in-
dique de façon magistrale qu’ils n’étaient pas le produit de
l’expression des Congolais.
Ainsi, outre les Lois fondamentales de 1960 susdécrites, il y a lieu
de noter les décrets-lois constitutionnels des régimes de crise nés à la
suite de la révocation du Premier ministre Patrice-Emery Lumumba
et le renvoi du Parlement en congé sine die.
S’agissant de la révocation du Premier ministre Lumumba par le
Chef de l’État Joseph Kasa Vubu, la doctrine a longtemps été parta-
994

gée sur le point de savoir si elle a été opérée ou non dans la légalité 52.
9511

Nous opinons, quant à nous, que cette révocation non seulement


:163
.197

viole l’esprit de la Loi fondamentale, comme le soutient le Profes-


.234

seur Félix Vunduawe, mais aussi et surtout sa lettre53. En effet, la


8.69
0:15

révocation du Premier ministre ne pouvait être acquise qu’à la suite


4229

de la désinvestiture du Parlement, de même que le contreseing mi-


:888
5329

nistériel de M. Delvaux intervenu le lendemain de la révocation ne


3853

peut qu’en souligner l’invalidité formelle54.


e:10
:Non

Issu d’une légitimité biaisée, le Chef de l’État ne disposait pas suf-


x.com

fisamment d’assez de bases pour engager cette crise de légitimité avec


larvo

le Premier ministre qui, malgré sa popularité, a tôt mal fait de révo-


scho
l.

quer à son tour le Chef de l’État. Bref, l’inexpérience a eu raison des


tiona
a

institutions importées de la Belgique qui exigeaient une assez longue


intern

pratique.

51
KAYEMBA NTAMBA MBILANJI, Cours des institutions politiques du Zaïre,
polycopié, 2e graduat, Faculté de droit, 1987-1988.
52
DJELO EMPENGE OSAKO, L’impact de la coutume sur l’exercice du pouvoir en
Afrique noire. Le cas du Zaïre, Ottignies-Louvain-la-Neuve, Le Bel Élan, 1990,
p. 40.
53
VUNDUAWE te PEMAKO (F.), op. cit., p. 191.
54
DJELO EMPENGE OSAKO, op. cit., p. 40.

42
INTRODUCTION GENERALE

À l’occasion de cette crise qui donna lieu au coup d’État militaire


du 14 septembre 1960, le colonel Mobutu neutralisa les deux têtes de
l’exécutif et institua le Conseil des commissaires généraux qui sera
reconnu rétroactivement par le Chef de l’État à travers le décret-loi
constitutionnel du 29 septembre 1960.
Ce décret-loi constitutionnel confie au Conseil des commissaires
généraux un double rôle : celui de gouvernement, en remplacement
de celui de Joseph Ileo qui n’a pas fonctionné, ainsi que celui de par-
lement. À ce titre, le Conseil de commissaires généraux a légiféré par
décrets-lois délibérés en conseil, sanctionnés et promulgués par le
Chef de l’État. Félix Vunduawe note que les décrets-lois instituant la
Banque Nationale ou l’unité monétaire sont de cette époque 55.
Après quatre mois, le Conseil de commissaires généraux céda la
place au gouvernement provisoire de Joseph Ileo. Ce gouvernement
fut institué par décret-loi du 9 février 1961 confiant les mêmes pou-
voirs qu’au Conseil des commissaires généraux.
994
9511

Étudiant la validité de ces décrets-lois constitutionnels, la doctrine


:163
.197

retient qu’ils ont valeur des règles constitutionnelles bien qu’ils n’aient
.234

pas été prévus dans la Loi fondamentale, car ils ont été pris avec le
8.69
0:15

concours du Chef de l’État, une des branches du pouvoir législatif.


4229
:888

La seule justification pouvait être trouvée dans la notion de gou-


5329

vernement de fait qui se fonde, elle aussi, sur le principe « nécessité


3853

fait loi » et sur celui de la continuité de l’État, lesquels principes as-


e:10
:Non

surent, selon la doctrine moderne, la survie de l’État malgré les


x.com

troubles qui peuvent menacer son existence.


larvo
scho

C’est l’essence même de l’adage latin : « salus populi suprême lex ».


l.
tiona

L’orthodoxie juridique interdit d’y voir des décrets-lois réguliers


a
intern

même si le critère matériel permet d’y voir des règles à valeur consti-
tutionnelle tant ils ont régi l’organisation et le fonctionnement des
structures étatiques.

55
VUNDUAWE te PEMAKO (F.), op. cit., p. 192.

43
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Pour mettre fin à cette crise de légitimité et de légalité, la classe


politique trouvera une solution globale, malgré l’effacement du bloc
lumumbiste, à travers la Constitution du 1er août 1964.

 La Constitution du 1er août 1964 dite de Luluabourg


L’histoire mouvementée de la première République fit que jus-
qu’en 1963 le Parlement ne s’était pas réuni en constituante pour
élaborer la constitution définitive. Le Chef de l’État décida en
août 1963 de mettre en congé le parlement et de confier la rédaction
de la Constitution à une commission composée d’experts congolais
dont le Professeur Marcel-Antoine Lihau.
La doctrine a, longtemps, opiné que les règles d’élaboration de
cette Constitution prévues par la Loi fondamentale du 19 mai 1960
n’ont pas été respectées, entraînant ainsi l’invalidité de la Constitu-
tion du 1er août 196456. Il est cependant à noter que la Constitution
994

ayant été adoptée par référendum, il est vain de reprocher au peuple


9511

souverain d’avoir adopté un texte tant son pouvoir constituant est


:163
.197

inconditionné.
.234
8.69

Le coup d’État du 24 novembre 1965 par le Haut-Commandement


0:15

militaire mit fin à ce régime et institua un gouvernement de crise à la


4229

suite de la révocation du Premier ministre Moïse Tshombe57.


:888
5329

Il y a lieu de noter les dispositions fondamentales du 24 novembre


3853
e:10

1965 qui ne seront pas invoquées dans la pratique pour ne pas donner
:Non

l’impression de mettre de côté la Constitution en impliquant la révi-


x.com

sion implicite. Le Chef de l’État légiféra par ordonnance-loi parallè-


larvo
scho

lement au Parlement qu’il enverra en congé sine die un peu plus tard.
l.
tiona
a
intern

56
KAYEMBA NTAMBA MBILANJI, op. cit., p. 123 ; voir aussi VUNDUAWE te
PEMAKO (F.), op. cit.., p. 194. Les deux auteurs précités opinent justement que
la Constitution dite de Luluabourg avait, dans sa phase d’écriture
constitutionnelle, été l’œuvre d’un organe non prévu par la Loi fondamentale
relative aux structures du Congo du 19 mai 1960. Il s’agit, à ce jour, d’un débat
dépourvu d’intérêt scientifique tant l’approbation par referendum semble, à nos
yeux, agir ex tunc.
57
VUNDUAWE te PEMAKO (F.), Traité de droit administratif, op. cit., p. 194.

44
INTRODUCTION GENERALE

Pour mettre fin à cette situation de crise, le constituant procéda à


l’élaboration de la Constitution du 24 juin 1967.

 La Constitution du 24 juin 1967


Le coup d’État du 24 novembre 1965 ayant fini de mettre fin aux
institutions de Luluabourg, la Constitution du 24 juin 1967 sera
l’œuvre du gouvernement du Général Mobutu. Elle sera l’œuvre
d’une commission présidée par le Chef de l’État entouré des experts
congolais (Etienne Tshisekedi, Gérard Kamanda et Marcel-Antoine
Lihau).
Le référendum qui a tout à fait l’allure d’un plébiscite avalisera
tout ce qui avait été fait par le Haut-Commandement militaire.
Il faut noter, avec la doctrine, que cette Constitution a fait beau-
coup d’emprunts théoriques et même idéologiques à la Constitution
française de la Ve République du 4 octobre 1958, son initiateur ayant
994

été, nous dit le Professeur Vunduawe te Pemako, un fervent admira-


9511
:163

teur du Général de Gaulle58.


.197
.234

Dès lors, il importe de citer les différentes révisions intervenues


8.69

sous l’empire de cette Constitution. Il faut reconnaître, avec Paul-


0:15
4229

Gaspard Ngondankoy, que la simple énumération est fastidieuse dans


:888

la mesure où pendant longtemps aucun travail doctrinal de systémati-


5329

sation de ces révisions n’avait été réalisé.59 Ainsi, l’on peut citer, par
3853
e:10

ordre chronologique :
:Non

 L’ordonnance-loi n° 70-025 du 17 avril 1970 détermina que la


x.com
larvo

première élection du président aurait lieu dans les 90 jours au


scho

lieu de « 90 jours » à dater du 24 novembre 1970 ;


l.
tiona
a
intern

58
VUNDUAWE te PEMAKO, À l’ombre du léopard. Vérités sur le régime de
Mobutu Sese Seko, tome I, Bruxelles, Éditions Zaïre Libre, 2000, p. 165.
59
NGONDANKOY NKOY-ea-LOONGYA (P. -G.), Droit congolais des droits de
l’homme, Louvain-la-Neuve, Academia-Bruylant, 2004, p. 70. Voir
VUNDUAWE te PEMAKO (F.), Traité de droit administratif, Bruxelles,
Kinshasa, Larcier, Afrique Éditions, 2007 qui consacre de belles pages au
recensement de ces révisions constitutionnelles. C’est le premier travail doctrinal
de systématisation en droit congolais, à notre connaissance.

45
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

 La loi n° 70-001 du 23 décembre 1970 consacra le MPR


comme une des principales institutions de la République ;
 La loi n° 71-006 du 29 octobre 1971 introduisit les nouvelles
appellations « République du Zaïre, Zaïrois, Bas-Zaïre » ;
 La loi n° 71-007 du 19 novembre 1971 adopta comme dra-
peau national le drapeau vert avec une main tenant le flam-
beau sur fond jaune au centre ;
 La loi n° 71-008 du 31 décembre 1971 introduisit dans la
Constitution le principe de la reprise par l’État de la plénitu-
de de ses droits fonciers, forestiers et miniers, affirmant que
le « sol et le sous-sol zaïrois ainsi que leurs produits naturels
appartiennent à l’État » (l’article 14 bis) ;
 La loi n° 72-003 du 5 janvier 1972 introduisit dans la Consti-
tution la nouvelle appellation de Shaba, au lieu de Katanga ;
 La loi n° 72-0008 du 3 juillet 1972 institua, au sein de la Cour
994

suprême de justice, une section de législation, compétente


9511

pour donner des avis consultatifs sur des projets de lois ou


:163
.197

des textes réglementaires. Elle rendait la Haute Cour compé-


.234

tente pour juger certaines autorités et hauts cadres du


8.69

M.P.R ;
0:15
4229

 La loi n° 73-014 du 5 janvier 1973 introduisit les nouvelles


:888
5329

appellations de conseil législatif, commissaire du Peuple,


3853

Conseil Exécutif, Département, Commissaire d’État, Région,


e:10

Commissaire de Région, Commissaire urbain, Sous-région,


:Non
x.com

Commissaire sous-régional, Commissaire de zone, Collectivi-


larvo

té et Chef de collectivité ou de cité, etc. ;


scho

 La loi constitutionnelle n° 74-020 du 15 août 1974 qui a insti-


l.
tiona

tué le Parti- État et conduit à la confusion entre le Parti et


a
intern

l’État.

Par son ampleur, cette révision radicale a changé le système poli-


tique du texte originel du 24 juin 1967 au point où une frange de la
doctrine l’a toujours tenue pour une nouvelle Constitution60.

60
DJELO EMPENGE OSAKO, op. cit.. pp. 72 et s ; KAYEMBA NTAMBA
MBILANJI, op. cit.., p. 158 ; il semblerait même que le Professeur Marcel-

46
INTRODUCTION GENERALE

 La loi n° 78-010 du 15 février 1978 intégra dans la Constitu-


tion plusieurs réformes relativement au rôle du président-
Fondateur du MPR, président de la République et aux droits
et libertés des citoyens. Elle est promulguée à la suite de la
première guerre du Shaba et du discours présidentiel devenu
historique du 1er juillet 1977. 61 Une partie de la doctrine ensei-
gne qu’il s’agit d’un retour au régime de 196762.
 La loi n° 80-007 du 19 février 1980 apporta deux mesures de
restriction à la démocratisation de 1978. La première fut la
suppression de la désignation par élection d’une part des
membres du Bureau politique. Cette réforme fait suite au dis-
cours présidentiel du 4 février 198063.
Par ailleurs, seuls les Commissaires d’État pourraient être inter-
pellés par le Conseil législatif et ce, après information préalable du
chef de l’État. Telle est la seconde mesure.
994

Il importe de souligner que les dispositions spéciales qui concer-


9511

naient le président-Fondateur du MPR sont étendues à tout prési-


:163
.197

dent du MPR., président de la République notamment le pouvoir de


.234

dissoudre le Conseil législatif ;


8.69
0:15

 La loi n° 80-012 du 15 novembre 1980 qui institua le Comité


4229

Central du MPR. Il devenait, à la place du Bureau politique,


:888
5329

l’organe de conception, d’inspiration, d’orientation et de dé-


3853
e:10
:Non
x.com

Antoine LIHAU aurait opiné dans le sens de deux premiers doctrinaires, à lire le
larvo

témoignage du Professeur Sayeman BULA-BULA, En ce temps-là, in Pour


scho

l’épanouissement de la pensée juridique congolaise, Liber Amicorum Marcel Antoine


l.
tiona

Lihau, Bruxelles, Kinshasa, Bruylant, Presses de l’Université de Kinshasa, 2006,


a
intern

pp. XXII-XXIII. Évariste BOSHAB voit dans ce texte une nouvelle Constitution
différente de la Constitution du 24 juin 1967. Lire dans ce sens son article intitulé
« L’état d’urgence et le contrôle de la constitutionnalité des mesures d’urgence
dans l’Acte constitutionnel de la transition zaïroise », Revue de Droit Africain,
n° 2, avril 1997, Bruxelles, p. 12
61
MOBUTU SESE SEKO, Discours, allocutions et messages, Paris, Éditions du
Jaguar, 1988.
62
KAYEMBA NTAMBA MBILANJI, Cours d’institutions politiques du zaïre,
p. 234.
63
MOBUTU SESE SEKO, Discours, allocutions et messages, tome 3, Paris, Éditions
du Jaguar, 1988, pp. 388- 428.

47
LA JUSTICE CONSTITUTIONNELLE EN RDC

cision du MPR64. Cet organe renforça le rôle dirigeant du


Parti notamment par sa Commission Permanente de discipli-
ne qui sanctionna de nombreux cadres pour manquement à la
discipline. Les premiers cadres sanctionnés par cette Com-
mission furent, nous dit Léon de Saint Moulin, les treize par-
lementaires impliqués dans « le complot de la Saint Sylves-
tre », le 31 décembre 1980 ;
 La loi n° 82-004 du 31 décembre 1982 supprima le Comité
Exécutif du MPR et remplaça l’appellation de « commissaire
politique » par celle de « Membre du Bureau politique ». Elle
apportera la solution au conflit entre le Comité central et le
Bureau politique, d’une part, et entre le Comité exécutif et le
Conseil exécutif, d’autre part.

Cette révision constitutionnelle fait écho à la décision d’État


n° 32/CC/83 du Comité central du Mouvement populaire de la ré-
volution du 1er avril 1983 qui proclamait que le « MPR commande et
994
9511

oriente l’État, qui est devenu son instrument pour la réalisation de


:163

ses objectifs ».
.197
.234

 La loi n° 88-004 du 29 janvier 1988 retira la compétence en


8.69

matière des contestations électorales à la Cour suprême de


0:15

justice pour la confier au Comité central ;


4229
:888

 La loi n° 88-009 du 27 juin 1988 retira la liste des Régions de la


5329

Constitution pour la remplacer par la disposition générale :


3853

« la République du Zaïre comprend la ville de Kinshasa et les


e:10
:Non

régions ». Ceci a eu l’avantage de ne pas procéder à une révi-


x.com

sion constitutionnelle pour créer une nouvelle région ou en


larvo

modifier la dénomination ou les limites. Dans ce cadre, furent


scho
l.

ainsi créées les trois régions du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du


tiona
a

Maniema par ordonnance-loi n° 88-031 du 20 juillet 1988.


intern

 La loi n° 90-002 du 5 juillet 1990


Cette loi introduisit le multipartisme et abolit le monopole du
Parti-État. Par l’ampleur de sa révision quant au fond, cette révision

64
Article 60 de la Constitution du 24 juin 1967 telle que révisée le 31 décembre
1980.

48
INTRODUCTION GENERALE

du reste irrégulière de la Constitution de 1967 apparaît, à coup sûr,


comme une nouvelle Constitution ou pour reprendre l’heureuse
formule de Félix Vunduawe te Pemako, une Constitution intérimai-
re. Elle connut une modification.
– La loi n° 90-008 du 25 novembre 1990 a de nouveau modifié la
Constitution en y introduisant le multipartisme intégral que la
loi n° 90-002 du 5 juillet 1990 avait limité à trois partis politi-
ques.

 La loi n° 93-001 du 2 avril 1993 portant Acte constitutionnel


harmonisé relatif à la période de transition.
Elle est l’œuvre du Conclave politique de Kinshasa qui a tenté, en
vain, de mettre fin à un dédoublement institutionnel : deux textes
constitutionnels (la Constitution du 24 juin 1967 et l’Acte portant
dispositions constitutionnelles relatives à la période de la transition
élaborée par la Conférence nationale et non promulguée par le pré-
994
9511

sident de la République), deux gouvernements (celui de Faustin Bi-


:163

rindwa et celui dit « des verts » dirigé par Étienne Tshisekedi). L’on
.197
.234

peut situer d’emblée cette querelle politique dans le sillon de la lutte


8.69

pour le maintien au pouvoir de M. Mobutu et la lutte pour la


0:15
4229

conquête des libertés par le peuple congolais.


:888

Cette double lutte a inéluctablement engendré des points de vue


5329
3853

divergents dans la doctrine congolaise qui voit le jour au lendemain


e:10

de la Conférence Nationale Souveraine, et à l’occasion de l’Arrêt


:Non
x.com

R.A. 266 du 8 janvier 1993.


larvo

Mabanga Monga Mabanga fait un excellent état de la question,


scho
l.

dans son ouvrage précité, en exposant ainsi l’obiter dictum de l’arrêt


tiona
a

problématique : « il s’ensuit que cette ordonnance n’est pas motivée


intern

et qu’il y a eu ainsi atteinte aux droits garantis aux particuliers par


les articles 17 et 18 de la Constitution de 1967 telle que révisée, en
vigueur à la date de la signature de l’ordonnance attaquée, mais
abrogée par l’Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à
la période de transition applicable présentement, lequel, acte, en ses
articles 17, 18 et 27 a repris la substance des articles constitutionnels
visés au moyen ».

49

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