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MÉCANIQUE

Dr. Sylvain Bréchet


Table des matières

1 Etudier la mécanique page 1


1.1 Introduction 1
1.1.1 Histoire 1
1.1.2 Objectifs 2
1.1.3 Limites 3
1.1.4 Expériences 4
1.1.5 Livre 4
1.1.6 MOOC 5
1.2 Dérivées 5
1.2.1 Dérivées d’une fonction 5
1.2.2 Dérivée d’une fonctionnelle 6
1.2.3 Développement limité d’une fonction 7
1.3 Produits scalaire et vectoriel 8
1.3.1 Repère direct 8
1.3.2 Produit scalaire 9
1.3.3 Produit vectoriel 10
1.3.4 Produit mixte 11
1.3.5 Identité vectorielle 11
2 Cinématique et dynamique du point matériel 13
2.1 Cinématique du point matériel 13
2.1.1 Point matériel 13
2.1.2 Référentiel 14
2.1.3 Repère 14
2.1.4 Vecteur position 15
2.1.5 Trajectoire 15
2.1.6 Vecteur vitesse 16
2.1.7 Vecteur accélération 16
2.2 Mouvement rectiligne 17
2.2.1 Mouvement rectiligne uniforme 17
2.2.2 Mouvement rectiligne uniformément accéléré 18
2.3 Lois de Newton 19
2.3.1 Grandeurs extensives et intensives 19
2.3.2 Masse 19
2.3.3 Quantité de mouvement 20
2.3.4 1ère loi de Newton 20
2.3.5 Force 21
2.3.6 2e loi de Newton 22
2.3.7 Quantité de mouvement et vitesse 23
2.3.8 Dynamique du point matériel 25
3 Frottements et balistique 27
3.1 Forces de frottement 27
3.1.1 Frottements secs 27
3.1.2 Frottements visqueux 28
4 Table des matières

3.2 Balistique sans frottement 30


3.2.1 Démarche de résolution 31
3.2.2 Poids 31
3.2.3 Loi du mouvement balistique 31
3.2.4 Repère et conditions initiales 32
3.2.5 Equations du mouvement balistique 33
3.2.6 Chute libre 33
3.2.7 Trajectoire balistique 34
3.3 Balistique avec frottement 35
3.3.1 Loi du mouvement balistique 35
3.3.2 Repère et conditions initiales 36
3.3.3 Equations du mouvement balistique 36
3.3.4 Mouvement balistique horizontal 36
3.3.5 Mouvement balistique vertical 38
3.3.6 Trajectoire balistique 40
4 Oscillateur harmonique et mouvement circulaire 41
4.1 Oscillateur harmonique 41
4.1.1 Force élastique 41
4.1.2 Loi du mouvement harmonique oscillatoire 42
4.1.3 Equation du mouvement harmonique oscillatoire 43
4.1.4 Conditions initiales 45
4.2 Oscillateur harmonique amorti 46
4.2.1 Loi du mouvement oscillatoire harmonique amorti 46
4.2.2 Equation du mouvement harmonique oscillatoire amorti 46
4.2.3 Amortissement faible 47
4.2.4 Amortissement fort 48
4.2.5 Amortissement critique 49
4.2.6 Conditions initiales 49
4.3 Mouvement circulaire et vitesse angulaire 50
4.3.1 Abscisse curviligne 50
4.3.2 Vitesse angulaire scalaire 51
4.3.3 Accélération centripète 51
4.3.4 Vecteur vitesse angulaire 52
5 Coordonnées cylindriques, sphériques et rotations 55
5.1 Coordonnées cylindriques 55
5.1.1 Repère cylindrique 56
5.1.2 Vecteur position 57
5.1.3 Vecteur vitesse 58
5.1.4 Vecteur accélération 58
5.2 Coordonnées sphériques 58
5.2.1 Repère sphérique 59
5.2.2 Vecteur position 60
5.2.3 Vecteur vitesse 61
5.2.4 Vecteur accélération 62
5.3 Rotations 62
5.3.1 Rotation d’un repère direct mobile 62
5.3.2 Formules de Poisson 63
5.3.3 Rotation du vecteur position 64
5.3.4 Vecteurs polaires et axiaux 64
6 Contraintes, puissance, travail et énergie cinétique 67
6.1 Contraintes géométriques 67
6.1.1 Force de contrainte 68
6.2 Pendule mathématique 69
6.2.1 Loi et équation du mouvement 70
6.2.2 Petites oscillations autour de l’équilibre 71
Table des matières 5

6.2.3 Période d’oscillation générale 71


6.3 Puissance, travail et énergie cinétique 73
6.3.1 Puissance 73
6.3.2 Travail 73
6.3.3 Energie cinétique 74
6.3.4 Théorème de l’énergie cinétique 75
7 Energie potentielle, énergie mécanique et résonance 77
7.1 Energie potentielle et énergie mécanique 77
7.1.1 Energie potentielle 77
7.1.2 Energie mécanique 78
7.1.3 Force conservative 78
7.1.4 Energie potentielle de pesanteur 79
7.1.5 Energie potentielle élastique 79
7.2 Puissance dissipée, équilibre et stabilité 80
7.2.1 Puissance mécanique dissipée 80
7.2.2 Position d’équilibre et stabilité 81
7.2.3 Stabilité du pendule mathématique 81
7.3 Résonance 82
7.3.1 Oscillateur harmonique forcé 82
7.3.2 Régimes transitoire et stationnaire 84
7.3.3 Réponse harmonique 85
8 Loi d’action-réaction, collisions 89
8.1 Loi d’action-réaction 89
8.1.1 3e loi de Newton 89
8.1.2 Forces intérieures et extérieures 89
8.1.3 Conservation de la quantité de mouvement 90
8.2 Collisions 91
8.2.1 Impulsion 91
8.2.2 Choc élastique 92
8.2.3 Choc mou 94
8.2.4 Coefficient de restitution 95
8.3 Problème à deux corps 96
8.3.1 Loi du mouvement réduit 96
8.3.2 Quantité de mouvement et énergie cinétique 97
8.3.3 Référentiel du centre de masse 98
9 Moment cinétique, moment de force et loi de la gravitation 99
9.1 Moment cinétique et moment de force 99
9.1.1 Moment cinétique 99
9.1.2 Moment de force 100
9.1.3 Théorème du moment cinétique 100
9.1.4 Mouvement circulaire uniforme 101
9.2 Loi de la gravitation universelle 101
9.2.1 1ère loi de Kepler 102
9.2.2 2e loi de Newton 103
9.2.3 3e loi de Kepler 104
9.2.4 Loi de la gravitation universelle 104
9.2.5 Constantes du mouvement 105
9.2.6 Orbites gravitationnelles 106
10 Système de masse variable et référentiels accélérés 109
10.1 Système de masse variable 109
10.1.1 Poussée d’une fusée 109
10.1.2 Condition de décollage et vitesse 110
10.2 Référentiels accélérés 112
10.2.1 Position relative 112
10.2.2 Vitesse relative 113
6 Table des matières

10.2.3 Accélération relative 114


10.2.4 Forces d’inertie 115
10.3 Mouvement relatif 116
10.3.1 Pendule dans un train accéléré 116
10.3.2 Poids apparent 117
10.3.3 Centrifugeuse 118
10.3.4 Pendule sur une porte tournante 119
11 Dynamique terrestre, pendule de Foucault et système de points
matériels 121
11.1 Dynamique terrestre 121
11.1.1 Champ gravitationnel terrestre 121
11.1.2 Mouvement relatif vertical 123
11.1.3 Mouvement relatif horizontal 124
11.2 Pendule de Foucault 125
11.3 Système de points matériels 128
11.3.1 Centre de masse 128
11.3.2 Dynamique d’un système de points matériels 130
11.3.3 Principes de conservation 131
12 Cinématique et dynamique du solide indéformable 133
12.1 Cinématique du solide indéformable 133
12.1.1 Solide indéformable 133
12.1.2 Angles d’Euler 134
12.1.3 Vitesse et accélération d’un point du solide indéformable 136
12.1.4 Roulement sans glissement 137
12.2 Dynamique du solide indéformable 138
12.2.1 Théorème de transfert du moment cinétique et premier
théorème de König 138
12.2.2 Théorème de transfert du moment de force résultant 139
12.2.3 Théorème du moment cinétique par rapport à un point du solide 139
12.3 Tenseur d’inertie et équations d’Euler 139
12.3.1 Tenseur d’inertie 140
12.3.2 Moments d’inertie et axes principaux d’inertie 141
12.3.3 Equations d’Euler 143
13 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes 145
13.1 Moments d’inertie 145
13.1.1 Barre mince 145
13.1.2 Cylindre creux 146
13.1.3 Cylindre plein 147
13.2 Solide indéformable avec un axe fixe 148
13.2.1 Théorème de Huygens-Steiner 148
13.2.2 Energie cinétique du solide indéformable 149
13.2.3 Théorème de l’énergie cinétique 150
13.2.4 Roue mal équilibrée 150
13.3 Gyroscope et effets gyroscopiques 152
13.3.1 Effets gyroscopiques 152
13.3.2 Roue de vélo 153
13.3.3 Toupie 156
1
Etudier la mécanique

1.1 Introduction
Le cours ex-cathedra est constitué de quatorze leçons hebdomadaires de trois heures cha-
cune qui seront consacrées à développer la théorie de la mécanique. Cette théorie sera bien
sûr vérifiée par de belles expériences préparées avec soin par les préparateurs de cours des
auditoires de physique. Les cours seront divisés en trois sections d’une heure chacune.
Pour mieux comprendre les notions théoriques vues au cours et savoir les appliquer dans
des cas concrets auxquels vous serez confrontés dans votre future carrière d’ingénieur, vous
aurez des sessions hebdomadaires de tutorat durant lesquelles vous aurez une série d’exercices
à résoudre. Toutes les informations utiles concernant ce cours sont disponibles sur le site
moodle de ce cours.

1.1.1 Histoire
La racine grecque du mot mécanique est µηξανικη, i.e. michanikı́, qui signifie relatif
aux machines. L’origine du mot mécanique a donc une signification utilitaire. Il s’agit
de développer une science qui permet de faire fonctionner des machines. En termes plus
modernes, la mécanique est la branche de la physique qui étudie l’équilibre des systèmes
physiques, c’est-à-dire la statique, leur mouvement, c’est-à-dire la dynamique, et leur
déformation.
Lorsqu’on aborde l’étude de la mécanique, on se pose naturellement deux questions fon-
damentales. La première est : “Qu’est-ce que la mécanique ? ” et la seconde est : “Pourquoi
est-ce qu’on commence l’étude de la physique par la mécanique ? ” Il y a deux réponses à
cela. La première est historique et la seconde est méthodologique et pédagogique.
La raison historique est que la mécanique a permis à la science moderne de naı̂tre. Les
premières lois physiques qui ont pu être découvertes sont les lois de Newton. En ayant
bien compris les lois de mécanique, les physiciens des siècles passés ont ensuite peu à peu
découvert les autres lois physiques. La mécanique est en somme le fondement de la physique.
La raison pédagogique est que la mécanique est la branche de la physique qui est la
plus intuitive et la plus facile à modéliser mathématiquement. La mécanique décrit des
expériences qui font partie de la vie de tous les jours, comme une chute sur un plan incliné,
des ressorts, des pendules ou des montres mécaniques. La mécanique introduit des lois de
cause à effet qui permettent de décrire mathématiquement l’évolution d’un système physique
simple. Elle permet donc de se familiariser avec l’emploi des mathématiques comme langage
universel de l’ingénieur. Elle répond donc à l’objectif principal de ce cours de mécanique qui
est de savoir mettre sous forme mathématique un phénomène physique.
Le but de cette introduction à la mécanique est de vous montrer pourquoi la mécanique est
importante pour votre formation. Pour ce faire, je vous propose une perspective historique
qui met en évidence le rôle de la mécanique dans le développement des sciences modernes.
Commençons en examinant les conclusions d’Aristote. Aristote a été le disciple de Platon
Aristote
pendant 20 ans. Fortement inspiré sur le plan philosophique par son maı̂tre, Aristote a conclu,
dans son livre De la Physique, qu’il fallait distinguer le monde terrestre corrompu du monde
céleste parfait. Le mouvement des corps célestes est un cercle parfait alors que le mouvement
des corps terrestres est capricieux. Selon Aristote, les lois physiques qui régissent le mouve-
2 Etudier la mécanique

ment des corps terrestres et célestes sont de nature différente. Elles sont irréconciliables. Le
défaut de la méthodologie d’Aristote réside dans le fait qu’elle n’est pas vraiment scientifique.
La méthodologie scientifique nécessite une interaction entre la théorie et l’expérience. Aris-
tote n’a pas essayé d’interroger la nature, il lui a imposé ses présupposés philosophiques... Il a
développé sa théorie dans sa tour d’ivoire et ne l’a pas proprement confrontée à l’expérience.
Il a fallu attendre presque deux millénaires pour que ce paradigme aristotélicien soit remis
en cause.
Le nouveau paradigme a commencé à émerger au XVIe siècle grâce notamment aux tra-
vaux de Galileo Galilei dit Galilée. Galilée est un des pionniers de l’expérimentation scienti-
fique de la nature. En faisant interagir l’expérience et la théorie, Galilée permet à la science
moderne de naı̂tre. Il fallait un langage pour interroger la Nature et ce langage, c’est celui des
mathématiques. Par ses observations, il conclut que le mouvement rectiligne uniforme d’un
corps est son mouvement naturel. Toute déviation de cette uniformité est attribuée à une
force. Ceci est a été qualifié de principe d’inertie. Galilée définit également le mouvement rec-
tiligne uniformément accéléré. Pour lui, cette définition est utile, parce qu’elle représente un
mouvement qui s’observe dans la nature : la chute des corps. Il démontre expérimentalement
que le mouvement de chute libre est bien un mouvement uniformément accéléré. Galilée a
également prédit que dans le vide, une plume tomberait à la même vitesse qu’une masse de
plomb. Cette expérience a été réalisée après sa mort par son disciple Torricelli et le résultat
a été concluant. Lors de la mission spatiale Apollo 15, cette expérience a été effectuée avec
une plume et un marteau devant des millions de téléspectateurs. Galilée est le père de la
Galileo Galilei
cinématique et le grand-père de la dynamique. Sans lui, Newton n’aurait probablement pas
pu découvrir les lois de la dynamique.
Un autre personnage important dans le développement de la science est Johannes Kepler.
Kepler s’est autant intéressé à l’astronomie qu’à l’astrologie. En se basant sur les observations
précises de Tycho Brahé sur les orbites planétaires, Kepler a déduit trois lois mathématiques
régissant la mécanique céleste, c’est-à-dire le mouvement des planètes autour du soleil. La
première loi est la loi des orbites. Elle stipule que les planètes du système solaire se déplacent
selon des orbites elliptiques dont le Soleil occupe l’un des foyers. La deuxième loi est la loi
des aires. Elle stipule que l’aire balayée par unité de temps par le mouvement de la planète
autour du soleil est une constante. La troisième loi est la loi des périodes. Elle stipule que le
rapport de la période de rotation au carré divisé par le demi-grand axe de l’ellipse au cube
est une constante. Ces lois de la mécanique céleste de Kepler sont un exemple absolument
remarquable de modélisation mathématique à partir de données expérimentales. Elles ont
joué un rôle central dans la découverte de la loi de la gravitation universelle par Newton.
Isaac Newton est probablement le plus grand physicien de tout les temps. Newton a fait des
Johannes Kepler
études de mathématiques au Trinity College à Cambridge. A l’aide du principe d’inertie de
Galilée et des lois de Kepler, Newton découvre les lois de la mécanique et les expose dans son
célèbre livre Philosophiae Naturalis Principia Mathematica, i.e. les principes mathématiques
de la philosophie naturelle. Pour énoncer ces lois, il pose les bases du calcul différentiel et
intégral. Newton est un génie sans égal tant sur le plan mathématique que sur le plan phy-
sique ! Grâce à Newton, la mécanique est devenue une théorie physique clairement exprimée
dans le langage des mathématiques. De plus, le calcul différentiel et intégral de Newton
permet de faire des prédictions en déterminant les solutions mathématiques de la théorie
physique de Newton. Si un jour vous vous rendez à Cambridge, je vous recommande de visiter
la Wren Library où vous trouverez un exemplaire original des Principia Mathematica avec
une boucle de cheveux dorés de Newton. Vous pourrez ensuite voir sa statue dans la chapelle
du College. Pour l’anecdote, le meilleur étudiant de première année en mathématiques du
Trinity College à Cambridge a le privilège de choisir sa chambre d’étudiant pour la deuxième
année de ses études. La tradition veut qu’il choisisse la chambre où Newton a lui-même fait
Isaac Newton ses études, qui surplombe le pommier qui selon la légende a fortement inspiré le jeune Isaac.

1.1.2 Objectifs
Le principal objectif dans l’apprentissage de la mécanique, c’est d’apprendre à décrire un
phénomène physique en utilisant le langage des mathématiques. L’analyse d’un phénomène
1.1 Introduction 3

physique commence par une modélisation d’un système physique sur le plan conceptuel.
Cette modélisation doit être formalisée de manière claire. Pour ce faire, on utilise le lan-
gage universel des mathématiques. On transcrit donc le modèle du phénomène physique
sous forme mathématique. On applique alors les lois physiques et on aboutit à un système
d’équations différentielles qui régissent l’évolution dans le temps du système étudié.
Il est essentiel d’apprendre à reconnaı̂tre les limites d’applicabilité des modèles et des
théories physiques qu’on utilise. Par exemple, on commencera notre étude de la mécanique
avec le modèle du point matériel et on se posera la question de savoir dans quelle mesure
on peut se contenter de ce modèle. Un cours de mécanique n’est pas un cours qui exige de
mémoriser un grand nombre de lois ou d’équations. C’est un savoir-faire qu’on développe
progressivement en essayant de modéliser mathématiquement toute une série d’expériences
physiques choisies, comme la collision d’une balle de fusil sur une cible ou la destruction
d’un verre par résonance acoustique (Fig. 1.1).

Figure 1.1 Lorsque la cible est en verre, la balle de fusil conserve sa quantité de mouve-
ment. Lorsque la cible est en bois, la balle de fusil transmet sa quantité de mouvement à la
cible. Lorsque le verre est excité acoustiquement à l’aide d’un haut-parleur à sa fréquence
de résonance, il est d’abord déformé puis, il se casse.

Sur le plan pratique, c’est d’abord en résolvant des problèmes concrets qu’on apprend
vraiment la mécanique. Je vous encourage donc vivement de participer à toutes les sessions
d’exercices et d’essayer, autant que possible, de résoudre les exercices par vous-même. On
vous apprend aussi à adopter une démarche systématique. Il ne s’agit pas de repérer l’astuce
subtile qui permet d’obtenir le bon résultat le plus efficacement. Non ! Il s’agit d’appliquer
systématiquement l’approche tout-terrain qu’on va élaborer dans ce cours.
Dans un cours de mécanique, on apprend à utiliser des outils mathématiques en de-
hors du contexte mathématique dans lequel ils sont normalement enseignés. On verra que
cela n’est pas toujours évident. Il arrive souvent qu’un enseignant de physique utilise un
outil mathématique qui n’a pas encore été vu formellement par ses étudiants dans le
cadre d’un cours de mathématiques. Quand cela m’arrivera, j’introduirai proprement l’outil
mathématique en question. Ce sera pour vous l’occasion d’être sensibilisé à l’importance
de cet outil mathématique et d’être motivé quand le sujet surviendra dans un cours de
mathématiques. Vous pourrez ainsi découvrir les mathématiques de manière ludique par la
physique.

1.1.3 Limites
Etudier la mécanique, c’est s’inscrire dans une longue tradition scientifique. La mécanique
de Newton a triomphé durant trois siècles, mais à la fin du XIXe siècle, son universalité a
été remise en cause. Son domaine d’applicabilité est toujours encore très important, mais il
n’est pas universel.
L’immense succès de la mécanique de Newton a laissé penser aux physiciens que toute
réalité physique pouvait être expliquée de manière déterministe. Ce déterminisme triom-
phant est bien illustré par le Marquis Simon de Laplace qui aurait affirmé à l’empereur
Napoléon Bonaparte : “Donnez-moi les conditions initiales et je vous prédirai l’évolution du
monde”. Laplace était convaincu qu’un jour on disposerait d’une équation qui puisse prédire
entièrement l’évolution du monde à partir des conditions initiales.
A la fin du XIXe siècle, Henri Poincaré a montré que les équations différentielles décrivant
4 Etudier la mécanique

des systèmes physiques très simples peuvent avoir des solutions très complexes. Il faudra
attendre 1960 pour que ces idées se popularisent notamment par Edward Lorenz et David
Ruelle sous le nom de théorie du chaos. Deux pendules articulés ou une balle de ping-
pong mise en mouvement par un vibreur régulier peuvent avoir un mouvement chaotique
(Fig. 1.2).

Jules Henri Poincaré

Figure 1.2 Si les deux pendules articulés sont lancés avec de faibles amplitudes initiales
comparables, leurs mouvements restent synchronisés. A grandes amplitudes initiales com-
parables, leurs mouvements se désynchronisent très rapidement. Une balle de ping-pong
rebondit sur une plateforme astreinte à un mouvement périodique bien déterminé. Lorsque
le tube est ouvert, la fréquence des rebonds est aléatoire. Avec le frottement imposé par le
bouchon, le mouvement devient périodique.

Le début du XXe siècle est le témoin de deux révolutions physiques qui vont définitivement
remettre en cause l’universalité de la mécanique newtonienne. La relativité restreinte,
développée par Hendrik Antoon Lorentz et Jules Henri Poincaré et finalisée par Albert
Einstein, montre que pour des vitesses suffisamment proches de la vitesse de la lumière, la
mécanique newtonienne n’est plus valable. Elle doit être remplacée par la mécanique rela-
tiviste. Vingt ans plus tard, Erwin Schrödinger, Werner Heisenberg et Paul Dirac montrent
qu’à petite échelle la mécanique newtonienne doit être remplacée par la mécanique quan-
tique.

1.1.4 Expériences
Les expériences ont une importance historique. Depuis Galilée, la physique s’enseigne en
démontrant expérimentalement les phénomènes qu’on veut décrire par des lois.
Les expériences ont aussi une importance symbolique. Les démonstrations d’auditoire nous
rappellent que la physique ne peut pas se construire ex-nihilo. La méthodologie scientifique
consiste en une démarche hypothético-déductive. On fait des hypothèses que l’on vérifie
ensuite expérimentalement. Il ne faut jamais oublier que toute théorie physique se construit
par une confrontation à l’observation des phénomènes naturels ! Sinon, vous feriez mieux
d’aller suivre le cours de mathématiques ou le cas échéant celui de philosophie... A ce propos,
il est pertinent de citer la mise en garde de James Clerk Maxwell, le physicien qui a unifié les
phénomènes électriques et magnétiques : “Je n’ai pas de raison de penser que l’intelligence
humaine est capable de conceptualiser les lois physiques en se basant uniquement sur ses
propres ressources sans faire appel aux résultats expérimentaux. De telles tentatives se sont
toujours soldées par des théories artificielles et pleines de contradictions.”
Finalement, les expériences ont une importance méthodologique. En observant une
James Clerk Maxwell
expérience, on réalise mieux que la mécanique consiste en modèles simples, et parfois trop
simplistes, qui idéalisent une réalité matérielle complexe. L’observation des expériences vous
encourage à repérer ces phénomènes démontrés au cours dans la vie quotidienne, ce qui
constitue un excellent entrainement à la curiosité scientifique.

1.1.5 Livre
Ce cours est basé sur le livre de Mécanique du Professeur Jean-Philippe Ansermet publié
aux Presses polytechniques et universitaires romandes (2e édition largement remaniée en
1.2 Dérivées 5

2013). Les références à ce livre sont données au début de chaque section. Je vous recommande
donc vivement de vous en procurer une copie.

1.1.6 MOOC
L’acronyme MOOC désigne en anglais un Massive Open Online Course. En français,
l’acronyme est CMELL et désigne un Cours Massif en Ligne Libre. Ces cours sont en accès
libres dans le monde entier et des milliers d’étudiants les suivent. Les deux plus grandes
plateformes de MOOC sont Coursera, géré par une start-up de Stanford, et EdX, géré Mécanique
par une start-up du MIT. Le Professur Ansermet, qui est le directeur de la section de (parties 1, 2, 3)
physique et qui a enseigné la mécanique pendant plus de vingt ans à l’EPFL a lancé un
MOOC de mécanique en français sur Coursera. Ce cours couvre l’équivalent du programme
de mécanique de la section de physique, c’est-à-dire un cours de quatre heures par semaine
durant un semestre. Le cours que je vous donne a une structure proche de celle du MOOC,
mais certains sujets avancés comme la relativité et la mécanique analytique ne seront pas
abordés dans ce cours. C’est la raison pour laquelle, je vous encourage donc de vous inscrire
sur Coursera et de suivre le MOOC.

MOOC
1.2 Dérivées
La dérivation permet de déterminer le taux de variation d’une fonction lorsqu’on varie
la variable dont elle dépend. On appelle dérivée la limite infinitésimale du rapport de la
variation de la fonction et de la variation de la variable correspondante.

1.2.1 Dérivées d’une fonction


Dans le contexte de la mécanique, on cherche le plus souvent à déterminer l’évolution
temporelle d’un système. On considère donc ici des fonctions du temps t qu’on suppose
être un paramètre réel continu, i.e. t ∈ R. A titre d’exemple, on choisit comme fonction du
temps t la coordonnée de position x (t) le long d’un axe fixe. On suppose que la coordonnée
de position est une fonction continue et deux fois dérivable, i.e. x (t) ∈ C 2 (R). La vitesse
scalaire v (t) le long de l’axe de coordonnée est définie comme la dérivée de la coordonnée
de position x (t) par rapport au temps t. Elle s’écrit explicitement comme,
∆x (t) x (t + ∆t) − x (t)
v (t) = lim = lim (1.1)
∆t→0 ∆t ∆t→0 ∆t
Les physiciens utilisent la lettre d pour représenter la limite infinitésimale d’une variation
∆. L’expression (1.1) de la vitesse v ≡ v (t) peut donc être écrite comme,
dx x (t + dt) − x (t)
v= = ainsi dx = v dt (1.2)
dt dt
Géométriquement, la dérivée v (t) représente la pente de la tangente à la fonction x (t) au
temps t (Fig. 1.3).

x(t)

x(t+Dt)

Dx
vDt
x(t)
Dt
t
O t t+Dt

Figure 1.3 La vitesse scalaire v (t) est la pente de la tangente à la fonction coordonnée
de position x (t) au temps t.
6 Etudier la mécanique

En effet, dans la limite d’une variation infinitésimale, l’intervalle de temps ∆t se réduit à


l’intervalle de temps infinitésimal dt et la variation de coordonnée ∆x se réduit à la variation
infinitésimale de position dx. Compte tenu de l’équation (1.2), on a montré que dx = v dt,
ce qui implique que la vitesse scalaire v est bien la pente de la dérivée de la coordonnée de
position x.
L’accélération scalaire a (t) le long de l’axe de coordonnée est définie comme la dérivée de
la vitesse scalaire v (t) par rapport au temps t qui s’écrit explicitement comme,
∆v (t) v (t + ∆t) − v (t)
a (t) = lim = lim (1.3)
∆t→0 ∆t ∆t→0 ∆t
En notation de physicien, l’accélération scalaire a ≡ a (t) s’écrit comme,
dv v (t + dt) − v (t)
a= = ainsi dv = a dt (1.4)
dt dt
L’accélération scalaire a (t) est donc la dérivée seconde de la coordonnée de position x (t).
En substituant l’expression (1.1) de la vitesse dans celle de l’accélération (1.3), on obtient,
 
∆x (t)
∆ lim
∆t→0 ∆t
a (t) = lim (1.5)
∆t→0 ∆t
En notation de physicien, l’accélération scalaire a ≡ a (t) s’écrit comme,
 
dx
d
d2 x
 
dt d dx
a= = = 2 (1.6)
dt dt dt dt
Pour les dérivées d’une fonction par rapport au temps t, et uniquement par rapport au
temps, les physiciens utilisent une notation abrégée qui consiste à remplacer la fraction par
un point. Compte tenu des expressions (1.2), (1.4) et (1.6), en notation abrégée la vitesse
scalaire s’écrit,
v = ẋ (1.7)

et l’accélération scalaire s’écrit,


a = v̇ = ẍ (1.8)

1.2.2 Dérivée d’une fonctionnelle


Une fonctionnelle est une fonction de fonction. En mécanique on est souvent confronté
à des fonctions de fonctions du temps dont on doit déterminer la dérivée par rapport au
temps. On considère à présent le cas où la coordonnée de position x (t) est une fonctionnelle
qui est définie comme la composition d’une fonction f (g) et d’une fonction g (t), c’est-à-dire

x (t) ≡ f (g (t)) (1.9)

La dérivée de la fonction g (t) par rapport au temps s’écrit,


dg g (t + dt) − g (t)
= donc g (t + dt) = g (t) + dg (1.10)
dt dt
De manière similaire, la dérivée de la fonctionnelle f (g) par rapport à la fonction g s’écrit,
df f (g + dg) − f (g) df
= donc f (g + dg) = f (g) + df = f (g) + dg (1.11)
dg dg dg
Compte tenu des expressions (1.10) et (1.11), la dérivée de la fonctionnelle x (t) par rapport
au temps s’écrit,

f (g  + df dg − f (g
(t)) (t))

dx f (g (t + dt)) − f (g (t)) f (g (t) + dg) − f (g (t))  dg
= = =
dt dt dt dt
(1.12)
1.3 Produits scalaire et vectoriel 7

Par conséquent, la dérivée de la fonctionnelle x (t) par rapport au temps t nous donne la
règle de la dérivation en chaı̂ne de la composition de fonctions f (g (t)) par rapport au temps
t,
dx df dg
= (1.13)
dt dg dt

A présent, on va considérer deux applications physiques de cette dérivation d’une com-


position de fonctions. La première est un oscillateur harmonique à une dimension dont la
coordonnée de position est définie comme,

x (t) = x0 cos (ωt + ϕ) (1.14)

où x0 est l’amplitude d’oscillation, ω est la pulsation et ϕ est l’angle de déphasage. Les
grandeurs x0 , ω et ϕ sont des constantes. En appliquant la règle de dérivation (1.13) on
obtient la vitesse d’oscillation,

dx d (x0 cos (ωt + ϕ)) d (ωt + ϕ)


= = − x0 ω sin (ωt + ϕ) (1.15)
dt d (ωt + ϕ) dt

La seconde est l’énergie cinétique d’un objet de masse m constante en translation le long de
l’axe de coordonnée x (t),
1
T (t) = m ẋ2 (1.16)
2
En appliquant la règle de dérivation (1.13) on obtient la puissance mécanique appliquée sur
l’objet,
 
1 2
d mẋ
dT 2 dẋ
= = mẋẍ (1.17)
dt dẋ dt

1.2.3 Développement limité d’une fonction


Le développement limité d’une fonction, aussi appelé le développement de Taylor
d’une fonction en référence au mathématicien Brook Taylor, est une approximation de l’ex-
pression d’une fonction dans le voisinage d’une valeur fixée de la variable.
Compte tenu de l’équation (1.2), la fonction x (t + dt) évaluée à l’instant t + dt s’exprime
en terme de la fonction x (t) évaluée à l’instant t comme,

dx
x (t + dt) = x (t) + dt (1.18)
dt

Dans cette expression, il n’y a pas d’approximation puisque l’intervalle de temps dt est
Brook Taylor
infinitésimal. On désire trouver une expression analogue lorsque l’intervalle de temps ∆t
n’est pas infinitésimal. De manière équivalente, l’équation (1.18) peut s’écrire,

x (t + ∆t) − x (t)
lim x (t + ∆t) = x (t) + lim ∆t (1.19)
∆t→0 ∆t→0 ∆t
Dans le cas où l’intervalle de temps ∆t n’est pas infinitésimal mais suffisamment petit, i.e.
∆t  t, on peut faire l’approximation suivante pour la dérivée par rapport au temps,

dx x (t + ∆t) − x (t)
' (1.20)
dt ∆t
Dans ce cas, l’équation (1.20) nous conduit à l’approximation suivante,

dx
x (t + ∆t) ' x (t) + ∆t (1.21)
dt
appelée le développement limité au premier ordre en ∆t de la fonction x (t) autour de t.
8 Etudier la mécanique

1.3 Produits scalaire et vectoriel


Méca
A présent, on va introduire les outils de géométrie vectorielle dont on a besoin pour faire
de la mécanique. Les grandeurs cinématiques comme la position, la vitesse et l’accélération
sont des grandeurs vectorielles, car elles sont caractérisées par une norme et une orientation
spatiale. Dans un espace vectoriel, il y a deux moyens de multiplier des vecteurs ; soit on
obtient un scalaire soit un autre vecteur. Le premier produit s’appelle un produit scalaire et
le second un produit vectoriel.
Le produit vectoriel a été introduit par Josiah Willard Gibbs afin de pouvoir décrire les
rotations dans le cadre d’un espace vectoriel. L’espace vectoriel n’est pas nécessairement le
cadre mathématique le plus adapté pour l’étude de la cinématique et de la dynamique. On
pourrait aussi l’étudier dans le cadre de l’algèbre géométrique qui permet de mieux visualiser
les phénomènes mais présente le désavantage d’être moins répandu et parfois plus ardu et
subtil pour les manipulations algébriques. Cependant, ici on va se restreindre à l’espace
vectoriel.

1.3.1 Repère direct


Dans la pratique, on a souvent besoin d’exprimer un vecteur en termes de ses composantes
Josiah Willard Gibbs projetées dans un repère. Dans l’espace, un repère est une entité géométrique constituée de
trois vecteurs non-nuls et non-colinéaires attachés à un point. Un repère est orthonormé si
les trois vecteurs sont orthogonaux et de norme unité. Ces vecteurs n’ont pas de dimension
e3
physique. Un repère orthonormé est un repère direct s’il satisfait la règle de la main droite,
c’est-à-dire que si le premier vecteur est orienté selon l’index de la main droite et que le
deuxième vecteur est orienté selon le majeur de la main droite alors le troisième vecteur est
e1
orienté selon le pouce de la main droite. Cette orientation particulière s’appelle la chiralité
dextrogyre. Le choix de la main est une convention historique. On aurait tout aussi bien pu
choisir la règle opposée de la main gauche obtenue par image miroir. Un repère qui satisfait
la règle de la main gauche est un repère indirect. Dans ce cours, on considérera que des
repères directs. Les repères peuvent être fixes ou mobiles suivant que leurs points d’attache
e2 et leur orientation changent ou non.
Les scalaires sont des nombres, les vecteurs sont des éléments de droite définis par une
Règle de la main norme et une orientation et les tenseurs − de rang 2 − sont des applications linéaires qui
droite envoient des vecteurs sur d’autres vecteurs. Il est donc utile de les distinguer. Dans ce cours,
on adoptera la convention de notation usuelle en mécanique et en physique qui consiste à
écrire les scalaires en police normale, les vecteurs en gras et les tenseurs en sans-serif.

x3

e3

O
e2
e1

x1 x2

Figure 1.4 Repère cartésien direct (O, e1 , e2 , e3 ).

Un repère cartésien direct s’écrit mathématiquement comme (O, e1 , e2 , e3 ) où O est l’ori-
gine et e1 , e2 et e3 sont les vecteurs de base fixes, de norme unité et orthogonaux entre eux.
Ces vecteurs satisfont la règle de la main droite (Fig. 1.4).
Une convention équivalente consiste à considérer la règle du tire-bouchon. Si le mouve-
1.3 Produits scalaire et vectoriel 9

ment de rotation s’effectue dans un plan du vecteur e1 vers le vecteur e2 alors le tire-bouchon
s’enfonce dans la direction définie par le vecteur e3 .

1.3.2 Produit scalaire


Le produit scalaire de deux vecteurs est un scalaire obtenu par multiplication des coor-
données identiques de ces vecteurs exprimées par rapport à un repère direct. On considère
deux vecteurs a et b exprimés comme combinaisons linéaires des vecteurs de base du repère
cartésien direct (O, e1 , e2 , e3 ),

a = a1 e1 + a2 e2 + a3 e3 Règle du tire-bouchon
(1.22)
b = b1 e1 + b2 e2 + b3 e3

où (a1 , a2 , a3 ) et (b1 , b2 , b3 ) sont les coordonnées cartésiennes de ces vecteurs. Le produit
scalaire entre les vecteurs a et b s’écrit,

a · b = a1 b1 + a2 b2 + a3 b3 (1.23)

ce qui implique que le produit scalaire est commutatif, c’est-à-dire qu’on peut échanger
l’ordre des vecteurs sans changer l’expression du produit scalaire,

a·b=b·a (1.24)

En substituant les expressions (1.22) des vecteurs a et b, exprimés comme combinaisons


linéaires des vecteurs de base e1 , e2 et e3 du repère cartésien, dans la définition (1.23) du
produit scalaire, on conclut que le produit scalaire des vecteurs de base est de la forme
suivante,
ei · ej = δij ∀ i, j = 1, 2, 3 (1.25)

où le symbole de Kronecker est un scalaire défini comme


(
1 si i = j
δij = (1.26)
0 si i 6= j

Afin d’établir quelques propriétés importantes du produit scalaire, on peut considérer en


toute généralité que les vecteurs a et b ont la même origine. Le vecteur a peut s’écrire
comme la somme vectorielle d’un vecteur ak parallèle au vecteur b et d’un vecteur a⊥
perpendiculaire au vecteur b,
a = ak + a⊥ (1.27)

On oriente le repère cartésien (O, e1 , e2 , e3 ) tel que le vecteur b est colinéaire au vecteur
e2 , le vecteur a est dans le plan engendré par les vecteurs e1 et e2 et l’orientation du vecteur
e3 est définie par la règle de la main droite. On prend l’origine O à l’intersection entre les
vecteurs a et b. On dénote θ l’angle entre les vecteurs a et b, et kak et kbk leurs normes
(Fig. 1.5).

b
e3 a ||
e2

O q
a^
a
e1

Figure 1.5 Produit scalaire des vecteurs a et b.

Les coordonnées cartésiennes des vecteurs a et b sont respectivement


10 Etudier la mécanique

(kak sin θ, kak cos θ, 0) et (0, kbk, 0). La définition (1.23) du produit scalaire implique
alors que,
a · b = kak kbk cos θ (1.28)
Les coordonnées cartésiennes des vecteurs ak et a⊥ sont respectivement (0, kak cos θ, 0) et
(kak sin θ, 0, 0). De la définition (1.23) du produit scalaire, on tire alors les trois propriétés
suivantes,
(i) a · a = kak2 (ii) ak · b = a · b (iii) a⊥ · b = 0 (1.29)

1.3.3 Produit vectoriel


Le produit vectoriel de deux vecteurs est un vecteur obtenu en calculant le déterminant
des vecteurs de base du repère direct et des coordonnées de deux vecteurs exprimées par
rapport à ce repère direct. Le produit vectoriel entre les vecteurs a et b s’écrit,

e1 a1 b1

a × b = e2 a2 b2 = (a2 b3 − a3 b2 ) e1 + (a3 b1 − a1 b3 ) e2 + (a1 b2 − a2 b1 ) e3 (1.30)
e a b
3 3 3

Ce produit s’écrit explicitement en composantes comme,


 
a2 b3 − a3 b2
a × b =  a3 b1 − a1 b3  (1.31)
a1 b2 − a2 b1
ce qui implique que le produit vectoriel est anticommutatif, c’est-à-dire qu’en échangeant
l’ordre des vecteurs on change le signe de l’expression du produit vectoriel,
a × b = −b × a (1.32)
En substituant les expressions (1.22) des vecteurs a et b, exprimés comme combinaisons
linéaires des vecteurs de base e1 , e2 et e3 du repère cartésien, dans la définition (1.30) du
produit vectoriel, on conclut que le produit vectoriel des vecteurs de base est de la forme
suivante,
ei × ej = εijk ek ∀ i, j, k = 1, 2, 3 (1.33)
où les composantes du tenseur complètement antisymétrique de Levi-Civita sont des scalaires
définis comme 
 1 pour ε123 , ε231 , ε312


εijk = −1 pour ε321 , ε213 , ε132 (1.34)


 0 sinon

Par conséquent, ei × ei = 0 pour tout i = 1, 2, 3. De nombreux auteurs utilisent le symbole


∧ au lieu du symbole × pour représenter le produit vectoriel. On ne va pas adopter cette
convention ici étant donné que le symbole ∧ est réservé au produit extérieur d’une algèbre
géométrique, aussi appelée algèbre de Clifford, alors que le produit vectoriel est défini dans le
cadre d’un espace vectoriel. Le produit extérieur est associatif alors que le produit vectoriel
ne l’est pas. En effet, la définition (1.30) appliquée aux produits vectoriels des trois vecteurs
implique que,
William Kingdon a × (b × c) 6= (a × b) × c (1.35)
Clifford Le produit vectoriel peut être défini uniquement dans un espace à trois dimensions. Afin
d’établir quelques propriétés importantes du produit vectoriel, on peut considérer en toute
généralité que les vecteurs a et b ont la même origine. On oriente le repère cartésien
(O, e1 , e2 , e3 ) tel que le vecteur b est colinéaire au vecteur e2 , le vecteur a est dans le
plan engendré par les vecteurs e1 et e2 et l’orientation du vecteur e3 est définie par la règle
de la main droite. On prend l’origine O à l’intersection entre les vecteurs a et b. On dénote
θ l’angle entre les vecteurs a et b, et kak et kbk leurs normes (Fig. 1.6).
Les coordonnées cartésiennes des vecteurs a et b sont respectivement
1.3 Produits scalaire et vectoriel 11

a ´b

e3 a ||
e2

O q
a^
a
e1

Figure 1.6 Produit vectoriel des vecteurs a et b.

(kak sin θ, kak cos θ, 0) et (0, kbk, 0). La définition (1.30) du produit vectoriel implique
alors que,
a × b = kak kbk sin θ e3 (1.36)
où l’angle θ est aigu. L’interprétation géométrique de l’équation (1.36) est que la norme du
produit vectoriel de deux vecteurs correspond à la surface du parallélogramme engendré par
ces deux vecteurs et que son orientation est orthogonale à cette surface. Les coordonnées
cartésiennes des vecteurs ak et a⊥ sont respectivement (k0, ak cos θ, 0) et (kak sin θ, 0, 0).
De la définition (1.30) du produit vectoriel, on tire alors les trois propriétés suivantes,
(i) a × a = 0 (ii) ak × b = 0 (iii) a⊥ × b = a × b (1.37)

1.3.4 Produit mixte


On considère trois vecteurs a, b et c exprimés comme combinaisons linéaires des vecteurs
de base du repère cartésien direct (O, e1 , e2 , e3 ),
a = a1 e1 + a2 e2 + a3 e3
b = b1 e1 + b2 e2 + b3 e3 (1.38)
c = c1 e1 + c2 e2 + c3 e3
où (a1 , a2 , a3 ), (b1 , b2 , b3 ) et (c1 , c2 , c3 ) sont les coordonnées cartésiennes de ces vecteurs. En
prenant le produit scalaire du vecteur obtenu par produit vectoriel des vecteurs a et b et du
vecteur c, on obtient le produit mixte,

c1 a1 b1

(a × b) · c = c2 a2 b2 = (a2 b3 − a3 b2 ) c1 +(a3 b1 − a1 b3 ) c2 +(a1 b2 − a2 b1 ) c3 (1.39)
c a b
3 3 3

De la définition (1.39) du produit mixte, on tire alors les deux propriétés suivantes,
(i) (a × b) · c = (b × c) · a = (c × a) · b (ii) (a × b) · a = (a × b) · b = 0 (1.40)
La propriété (i) est une conséquence de l’invariance du déterminant lors de la permutation
cyclique des colonnes et la propriété (ii) est une conséquence du fait que le déterminant
s’annule si deux colonnes sont identiques.

1.3.5 Identité vectorielle


A présent, on va établir une identité vectorielle très importante pour la suite de ce cours.
A l’aide de la définition du produit vectoriel (1.30), on montre que
 
e1 a1 (b2 c3 − b3 c2 ) a2 (b1 c2 − b2 c1 ) − a3 (b3 c1 − b1 c3 )

a × (b × c) = e2 a2 (b3 c1 − b1 c3 ) =  a3 (b2 c3 − b3 c2 ) − a1 (b1 c2 − b2 c1 )  (1.41)
e a (b c − b c ) a1 (b3 c1 − b1 c3 ) − a2 (b2 c3 − b3 c2 )
3 3 1 2 2 1
12 Etudier la mécanique

De plus, à l’aide de la définition du produit scalaire (1.23), on montre également que


 
(
a1c1 + a2 c2 + a3 c3 ) b1 − (
a1b1 + a2 b2 + a3 b3 ) c1
(a · c) b − (a · b) c =  (a1 c1 +  a2c2 + a3 c3 ) b2 − (a1 b1 + 
a2b2 + a3 b3 ) c2  (1.42)
(a1 c1 + a2 c2 + 
a3c3 ) b3 − (a1 b1 + a2 b2 + 
a3b3 ) c3
On identifiant les équations (1.41) et (1.42) après simplification, on obtient l’identité vecto-
rielle,
a × (b × c) = (a · c) b − (a · b) c (1.43)
2
Cinématique et dynamique du point matériel

2.1 Cinématique du point matériel


Mécanique § 1.2 et 2.2
La mécanique se divise en deux parties : la cinématique et la dynamique. La cinématique
étudie le mouvement des corps sans se préoccuper de la nature des causes qui provoquent
ce mouvement. La dynamique, par contre, cherche à identifier les causes de ce mouvement.
Afin d’étudier le mouvement d’un point matériel, il faut un objet de référence physique
appelé le référentiel. Pour décrire mathématiquement le mouvement du point matériel, il
faut l’exprimer par rapport à un repère géométrique. La cinématique consiste à décrire, la
position, la vitesse et l’accélération d’un corps. Ces grandeurs sont des vecteurs.

2.1.1 Point matériel


Pour commencer ce cours de mécanique, on va adopter un modèle très simple. On va
supposer que l’objet physique que l’on veut décrire peut être représenté simplement par un
point auquel on attribue toute la masse, c’est-à-dire la quantité de matière de l’objet. Ce
point est un point physique que l’on appelle point matériel. Ce modèle du point matériel
est une idéalisation de la réalité physique. Ce modèle n’est jamais parfaitement exact, parce
que la réalité physique est toujours trop complexe. Cependant, dans certains cas, on peut
considérer par exemple qu’une boule de billard, un pendule, un homme ou même un avion
sont des points matériels. Ces objets sont bien sûrs différents, mais suivant la nature de leur
mouvement, ils peuvent tous être considérés comme des points matériels. Le modèle du point
matériel est donc un modèle très simple, mais qui est une bonne approximation quantitative
et qualitative dans bon nombre de cas. En général, on prend comme point matériel le centre
de masse − aussi appelé centre de gravité − d’un objet.
Le modèle du point matériel est limité. Il ne permet pas de rendre compte de la rota-
Boules de billard
tion propre d’un solide. La différence entre le modèle du point matériel et celui du solide
indéformable est bien illustré par l’exemple de la boule de billard. En frappant une boule de
billard de différentes manières avec une queue de billard, on peut lui donner différents effets.
On peut permettre à la boule blanche de s’arrêter lors d’un choc, d’accompagner l’autre
boule ou de revenir en arrière. On peut aussi lui donner une trajectoire courbe. Ceci est
impossible avec un point matériel.
Si un pendule consiste en une masse suspendue au bout d’un fil sans masse, le modèle du
point matériel sera un bon modèle. On appelle un tel pendule, un pendule simple ou un
pendule mathématique. En revanche, si le balancier consiste en une barre métallique dont
l’épaisseur n’est pas négligeable par rapport à la longueur, alors il faudra le modéliser comme
un solide. Si un homme plonge à la verticale d’un plongeoir des 10 mètres, la description
de sa chute peut bien se faire avec le modèle du point matériel. En revanche, si maintenant
il effectue une triple saut périlleux, il faudra nécessairement considérer le modèle du solide
pour faire une bonne description de sa dynamique. Si vous êtes un ou une athlète vous
pouvez essayer d’expérimenter la différence entre ces deux modèles en vous rendant à la
piscine. Si on veut décrire le mouvement d’un avion qui vole en ligne droite, on peut le
modéliser comme un point matériel. Mais lorsqu’il effectue un virage, il tourne autour de
son centre de gravité et là on doit le considérer aussi comme un solide. Pour traiter tous les
14 Cinématique et dynamique du point matériel

problèmes de mécanique qui décrivent un mouvement de rotation propre, on devra utiliser


la dynamique du solide.
Lorsqu’on considère un solide comme un point matériel, on commet deux types d’erreurs :
des erreurs quantitatives d’une part et des erreurs qualitatives d’autre part. Si on
traite une barre métallique comme un point matériel, on fera une erreur quantitative sur la
valeur de sa période d’oscillation. Si on traite une boule de billard comme un point matériel
on fera une erreur qualitative en ne tenant pas compte de son mouvement de rotation.

2.1.2 Référentiel
Pour décrire le mouvement d’un objet, on doit le faire par rapport à un objet indéformable
de référence. Cet objet, qui peut être immense, est appelé le référentiel. Formellement, un
référentiel est un ensemble de N points matériels, où N ≥ 4, non-coplanaires et à distance
constante les uns par rapport aux autres.
Pour décrire les expériences de physique montrées dans ce cours, on choisit comme
référentiel l’auditoire, c’est-à-dire la terre. Si par exemple, on désire mesurer la vitesse de
déplacement relatif des vagues par rapport à un voilier, on choisira comme référentiel le
voilier. Pour décrire le mouvement de la terre autour du soleil, on choisira comme référentiel
le système solaire, constitué du centre du soleil et de trois étoiles fixes.
Un objet physique doit être indéformable pour servir de référentiel. Un solide indéformable
Voilier
est constitué de points matériels non-coplanaires et à distance constante les uns par rapport
aux autres. Pour servir de référentiel un objet doit être au moins constitué de quatre points
matériels non-coplanaires. Il peut évidemment en avoir un très grand nombre mais il en
faut au minimum quatre. Pourquoi est-ce que les points doivent être à distance constante
les uns par rapport aux autres ? Parce que si ce n’était pas le cas, on n’aurait pas d’étalon
pour définir et mesurer des distances. Pourquoi est-ce qu’un référentiel doit être défini par
au minimum quatre points non-coplanaires ? Parce qu’il faut pouvoir définir et mesurer des
distances dans trois directions spatiales orthogonales.
Le choix du référentiel est très important. Si on choisit un référentiel accéléré, on devra
tenir compte des forces d’inertie dans la description du mouvement. Par exemple, lorsqu’un
bateau hors-bord fait un virage rapide, une force centrifuge agit sur les occupants dans le
référentiel du bateau. On peut citer comme autre exemple la force de Coriolis qui agit sur
le mouvement des nuages dans le référentiel accéléré de la terre qui tourne sur elle-même.
Le choix du référentiel a joué un rôle crucial dans l’histoire de la mécanique et de la phy-
sique. La relativité est une question de référentiel ! La relativité restreinte requiert que les
lois de la physique soient les mêmes par rapport à tous les référentiels d’inertie. La relati-
vité générale généralise la relativité restreinte à tous les référentiels, même les référentiels
accélérés.
x3

2.1.3 Repère
ez
ef Pour décrire mathématiquement le mouvement d’un point matériel par rapport à un
P er référentiel, il faut se référer à un repère. Un repère est un concept géométrique. C’est une
O x2
base de trois vecteurs non-coplanaires de norme constante qui sont attachés à un point de
f r l’espace. Puisque ces vecteurs sont non-coplanaires, ils forment une base de l’espace à trois di-
mensions. En algèbre linéaire, on dit qu’ils engendrent l’espace à trois dimensions. Puisqu’ils
x1 sont de norme constante, ils servent d’étalon géométrique pour quantifier le mouvement.
Un repère orthonormé est un repère dont les vecteurs de base sont orthogonaux et de norme
Repère cylindrique
unité. En mécanique du point matériel et du solide indéformable, on considère uniquement
x3 des repères orthonormés. Toutefois, lorsqu’on veut décrire des solides déformables ou faire de
la relativité générale, on doit aussi considérer des repères non-orthonormés. Mais, rassurez-
er vous, dans ce cours on va se faciliter la vie et considérer uniquement des repères orthonormés.
ef L’exemple le plus célèbre de repère direct est le repère cartésien. Mais, il existe aussi
P

q d’autre repères comme le repère cylindrique ou le repère sphérique que nous allons
eq
O x2 définir ultérieurement et utiliser abondamment dans ce cours.
f J’attire votre attention sur le fait qu’il ne faut confondre la notion géométrique de repère
x1

Repère sphérique
2.1 Cinématique du point matériel 15

avec la notion physique de référentiel. Le référentiel désigne un objet physique décrit en


termes de point matériels. Le repère est une entité géométrique décrite en termes de points
d’espace et de vecteurs. Le repère sert d’étalon géométrique pour mesurer des distances par
rapport au référentiel et ainsi quantifier le mouvement.

2.1.4 Vecteur position


Le vecteur position OP indique la position du point matériel P par rapport à l’origine
O d’un repère cartésien (Fig. 2.1).

O y

r(t)
OP

Figure 2.1 Vecteur position OP ≡ r (t) du point matériel P .

On notera le vecteur position OP du point matériel P de manière plus concise comme


r (t) car la position d’un point matériel est une fonction du temps t. En effet, lorsque le
point matériel se déplace sa position change au cours du temps. Dans le repère cartésien
(O, ex , ey , ez ) qui définit un système d’axes (x, y, z) dont l’intersection se trouve à l’origine
O, les coordonnées du vecteur position sont (x (t) , y (t) , z (t)).
En physique en général et en mécanique en particulier, lorsqu’on introduit une grandeur,
il faut toujours spécifier son unité. C’est la différence principale entre la physique et les
mathématiques. En physique, on s’intéresse à la réalité matérielle et tangible. L’unité phy-
sique de la position dans le système international d’unités (SI) est le mètre noté [ m ].
L’unité physique du temps est la seconde notée [ s ].

2.1.5 Trajectoire
Après avoir défini le vecteur position d’un point matériel, on est en mesure de définir
la notion de trajectoire. La trajectoire d’un point matériel est l’ensemble des points de
l’espace qui sont occupés par le point matériel au cours du temps. En mathématiques on
parle de lieu géométrique. Par exemple, la trajectoire d’un avion de ligne est facilement
observable par beau temps. Elle correspond à la trace laissée par la combustion de kérosène
dans le ciel.
On peut mentionner plusieurs exemples de trajectoires particulières de points matériels.
Trajectoire
La trajectoire d’un mouvement rectiligne est, comme son nom l’indique, une ligne droite. La
trajectoire d’un mouvement circulaire est, comme son nom l’indique, un cercle. La trajectoire
balistique d’un projectile − par exemple un boulet de canon − en absence de frottement est
une parabole. La trajectoire de la terre autour du soleil est une ellipse, c’est ce qu’affirme la
loi des orbites de Kepler. La trajectoire d’une comète traversant le système solaire est une
hyperbole.
16 Cinématique et dynamique du point matériel

2.1.6 Vecteur vitesse


La vitesse v (t) est un vecteur. C’est une grandeur avec une norme et une orientation
bien précises tout comme le vecteur position r (t). La vitesse correspond intuitivement au
déplacement au cours du temps. Le vecteur vitesse d’un point matériel s’exprime donc comme
le rapport du vecteur déplacement ∆r (t) et de l’intervalle de temps ∆t. Etant donné qu’on
cherche la vitesse instantanée au temps t, il faut prendre la limite lorsque l’intervalle de temps
∆t tend vers 0. Le vecteur déplacement ∆r (t) s’exprime comme la différence vectorielle entre
les vecteurs positions r (t + ∆t) et r (t) (Fig. 2.2).

Dr(t)
r(t)

r(t +Dt)
O y

Figure 2.2 Vecteur déplacement ∆r (t) qui est colinéaire vecteur vitesse v (t) d’un point
matériel.

L’expression mathématique du vecteur vitesse est donc définie comme la dérivée du vecteur
position par rapport au temps,
∆r (t) r (t + ∆t) − r (t) dr
v (t) = lim = lim = = ṙ (2.1)
∆t→0 ∆t ∆t→0 ∆t dt
En utilisant la convention des physiciens, on dénote cette dérivée comme le rapport du
vecteur déplacement infinitésimal dr et de l’intervalle de temps infinitésimal dt. Le vecteur
vitesse est tangent à la trajectoire du point matériel représentée en gras (Fig. 2.2). L’unité
physique de la vitesse dans le système d’unités international est notée [ m/s ].
A titre d’exemple, on peut citer la mesure de la vitesse d’une balle de fusil à l’aide de
Mesure de la vitesse
cellules photoélectriques distantes d’un mètre. L’inverse du temps de passage de la balle
entre les deux cellules distance correspond la vitesse exprimée en [ m/s ].

2.1.7 Vecteur accélération


L’accélération a (t) est un vecteur. C’est une grandeur avec une norme et une orientation
bien précises tout comme le vecteur position r (t) et le vecteur vitesse v (t). L’accélération
correspond intuitivement à la variation de vitesse au cours du temps. L’accélération s’ex-
prime donc comme le rapport du vecteur variation de vitesse ∆v (t) et de l’intervalle de
temps ∆t. Etant donné qu’on cherche l’accélération instantanée au temps t, il faut prendre
la limite lorsque l’intervalle de temps ∆t tend vers 0. Le vecteur variation de vitesse ∆v (t)
s’exprime comme la différence vectorielle entre entre les vecteurs vitesses v (t + ∆t) et v (t)
(Fig. 2.3).
L’expression mathématique du vecteur accélération est donc définie comme la dérivée du
vecteur vitesse par rapport au temps,
∆v (t) v (t + ∆t) − v (t) dv
a (t) = lim = lim = = v̇ (2.2)
∆t→0 ∆t ∆t→0 ∆t dt
En utilisant la convention des physiciens, on dénote cette dérivée comme le rapport du
vecteur variation de vitesse infinitésimale dv et de l’intervalle de temps infinitésimal dt.
L’unité physique de l’accélération dans le système d’unités international est notée [ m/s2 ].
2.2 Mouvement rectiligne 17
z

v(t)

Dv(t)
r(t ) v (t+Dt)

r(t+Dt)

O y

Figure 2.3 Vecteur variation de vitesse ∆v (t) qui est colinéaire au vecteur accélération
a (t) d’un point matériel.

2.2 Mouvement rectiligne


Mécanique § 2.2.3
Dans cette section, on va considérer deux mouvements rectilignes différents. Le mouvement
rectiligne uniforme d’un point matériel, pour lequel la vitesse est constante, et le mouvement
rectiligne uniformément accéléré, pour lequel l’accélération est constante. Il existe bien sûr
beaucoup de mouvements rectilignes pour lesquels l’accélération n’est pas constante. Ici, on
va se limiter aux cas d’une accélération nulle ou constante.

2.2.1 Mouvement rectiligne uniforme


Un point matériel qui se déplace en ligne droite à vitesse constante suit un mouvement
rectiligne uniforme. Sa trajectoire est donc une droite. Pour caractériser ce mouvement,
on choisit un axe x le long de la droite. La position est donc repérée par la coordonnée x (t).
On cherche à déterminer l’équation horaire qui donne la position au cours du temps. Par
définition d’un mouvement rectiligne uniforme, la coordonnée v de la vitesse le long de l’axe
x est constante (Fig. 2.4). Ainsi, l’équation de la vitesse s’écrit
dx
v = ẋ = = cste et dx = v dt (2.3)
dt

x0 P v
x

Figure 2.4 Mouvement rectiligne uniforme à vitesse v constante d’un point matériel P .

La primitive de cette équation intégrée par rapport au temps t s’écrit,


Z Z
x (t) = dx = v dt = v t + c0 (2.4)

où c0 est une constante d’intégration. Pour déterminer la constante c0 , il faut tenir explici-
tement compte de la condition initiale sur la coordonnée de position,
x (0) = x0 (2.5)
ce qui implique que,
c0 = x 0 (2.6)
En substituant l’expression (2.6) dans l’équation horaire (2.4), celle-ci devient,
x (t) = v t + x0 (2.7)
L’équation de la vitesse (2.3) est une équation différentielle du premier ordre par rapport
Glisseur sur rail à air
18 Cinématique et dynamique du point matériel

au temps. Il faut donc une seule condition initiale sur la position (2.5) pour déterminer
l’équation horaire (2.7).
A titre d’exemple, on peut citer le mouvement d’un glisseur libre sur un rail à air hori-
zontal, le mouvement d’un pierre de curling sur une patinoire bien lisse ou le mouvement
d’une balle de fusil lorsqu’on néglige l’action de la force de pesanteur.

2.2.2 Mouvement rectiligne uniformément accéléré


Un point matériel qui se déplace en ligne droite à accélération constante suit un mou-
vement rectiligne uniformément accéléré. Sa trajectoire est donc une droite. Pour
caractériser ce mouvement, on choisit un axe x le long de la droite. La position est donc
repérée par la coordonnée x (t). On cherche à déterminer l’équation horaire qui donne la
position au cours du temps. Par définition d’un mouvement rectiligne uniformément accéléré,
la coordonnée a de l’accélération le long de l’axe x est constante (Fig. 2.5). Ainsi, l’équation
du mouvement s’écrit
d2 x dv
a = ẍ = 2
= = cste et dv = a dt (2.8)
dt dt

x0 , v 0 P a
x

Figure 2.5 Mouvement rectiligne uniformément accéléré à accélération a constante d’un


point matériel P .

La primitive de cette équation intégrée par rapport au temps t s’écrit,


Z Z
v (t) = dv = a dt = a t + c1 (2.9)

où c1 est une constante d’intégration. Pour déterminer la constante c1 , il faut tenir explici-
tement compte de la condition initiale sur la coordonnée de vitesse,

v (0) = v0 (2.10)

ce qui implique que,


c1 = v0 (2.11)

En substituant l’expression (2.11) dans l’équation de la vitesse (2.9), celle-ci devient,

v (t) = a t + v0 (2.12)

La vitesse s’écrit aussi comme la dérivée de la position,


dx
v (t) = (2.13)
dt
L’identification des membres de droites des équations (2.12) et (2.13) s’écrit,
dx
= a t + v0 ainsi dx = a t dt + v0 dt (2.14)
dt
La primitive de l’équation (2.14) intégrée par rapport au temps t s’écrit,
Z Z Z
1
x (t) = dx = a t dt + v0 dt = a t2 + v0 t + c2 (2.15)
2
Pour déterminer la constante c2 , il faut tenir explicitement compte de la condition initiale
sur la coordonnée de position,
x (0) = x0 (2.16)

ce qui implique que,


c2 = x0 (2.17)
2.3 Lois de Newton 19

En substituant l’expression (2.17) dans l’équation horaire (2.15), celle-ci devient,


1 2
x (t) = a t + v 0 t + x0 (2.18)
2
L’équation du mouvement (2.8) est une équation différentielle du second ordre par rapport
au temps. Il faut donc deux conditions initiales, une sur la vitesse (2.10) et l’autre sur la
position (2.16) pour déterminer l’équation horaire (2.18).
A titre d’exemple, on peut citer le mouvement d’un glisseur entraı̂né par une masse sur
un rail à air horizontal et le mouvement de chute libre d’une pomme soumis à l’accélération
constante du champ de pesanteur.

Pomme en chute libre

2.3 Lois de Newton


Mécanique § 1.3
Jusqu’à présent, on a défini les grandeurs cinématiques. On va maintenant définir des
grandeurs dynamiques afin d’être en mesure d’énoncer les lois de la dynamique généralement
appelées lois de Newton. Il y a trois lois de Newton. On abordera les deux premières lois
dans cette section. La troisième loi sera traitée ultérieurement. Le but de cette section est
de pouvoir déterminer le mouvement d’objets soumis à des forces extérieures.

2.3.1 Grandeurs extensives et intensives


Avant d’introduire les grandeurs caractéristiques de la dynamique, nous devons au
préalable définir les propriétés d’extensivité et d’intensivité.
Une grandeur physique est extensive si, pour un ensemble d’objets, la grandeur de l’en-
semble est égale à la somme de la grandeur pour chaque objet. Cette définition peut sembler
quelque peu abstraite. On va donc considérer quelques exemples. La quantité de matière est
une grandeur extensive. La quantité de matière de deux objets identiques est égale à deux
fois la quantité de matière d’un objet. La quantité de mouvement et la force sont aussi des
grandeurs extensives. La force résultante qui s’applique sur un système est égale à la somme
des forces. Le volume est bien sûr un autre exemple de grandeur extensive. Le volume de
deux objets est égal à la somme des volumes des objets.
Une grandeur physique est intensive si, pour un ensemble d’objets, la grandeur est
indépendante du nombre d’objets. La vitesse est un bon exemple de grandeur intensive.
Prenons une voiture qui se déplace à une vitesse v. La voiture a quatre roues qui se déplacent
à vitesse v. La vitesse de la voiture n’est pas la somme des vitesses de chaque roue, parce
que la vitesse est une grandeur intensive. On verra que la vitesse est le quotient de deux
grandeurs extensives. En utilisant le même raisonnement, on montre que l’accélération est
aussi une grandeur intensive. Finalement, si on prend deux blocs de même température et
qu’on les met en contact, la température du système sera la température de chaque bloc et
non la somme des températures. La température est donc aussi une grandeur intensive.

2.3.2 Masse
La masse m d’un objet considéré comme un point matériel représente une quantité de
matière. C’est donc une grandeur extensive définie positive. Si vous prenez deux objets, la
masse totale est la somme des masses des deux objets. La masse est donc une grandeur
additive. Comme la masse est une quantité de matière, elle n’a pas d’orientation. C’est donc
une grandeur scalaire. La masse est une grandeur conservée. En mécanique newtonienne,
on ne peut ni créer ni détruire de la matière. Cela n’est plus le cas en relativité, puisque la
masse peut se transformer en un autre type d’énergie E comme le montre la célèbre formule
établie par Albert Einstein : E = mc2 où c représente la vitesse de propagation de la lumière
dans le vide.
En mécanique newtonienne, la masse est globalement conservée, mais elle peut sortir ou
entrer dans un système. Si la masse d’un système change, c’est que de la masse est sortie
ou entrée dans le système. S’il n’y a pas d’échange de masse avec l’extérieur, on dit que
20 Cinématique et dynamique du point matériel

le système est fermé. Quand il y a échange de masse, on dit qu’il est ouvert. Un lingot
d’or de masse donnée est un système fermé, sa masse est une constante. Une fusée entrain
de décoller est un système ouvert, sa masse diminue au cours du temps parce que la fusée
rejette des gaz dans l’atmosphère par combustion.
L’unité de la masse dans le système international d’unités est le kilogramme noté [ kg ].
La masse étalon définissant le kilogramme est un barreau de platine iridié qui se trouve au
Bureau International des Poids et Mesures à Sèvres, dans la banlieue de Paris.
Deux masses sont identiques si elles provoquent la même élongation lorsqu’on les suspend
à des ressorts identiques.
Etalon de platine
2.3.3 Quantité de mouvement
La quantité de mouvement p est une grandeur physique qui a été introduite par Isaac
Newton. L’idée géniale de Newton a été d’introduire cette grandeur physique pour décrire
le mouvement. La quantité de mouvement est une grandeur extensive, car elle permet de
décrire spécifiquement le mouvement d’une quantité de matière. La quantité de mouvement
de deux objets est la somme de la quantité de mouvement de chaque objet, contrairement
à la vitesse. Cette grandeur doit être vectorielle parce que le mouvement a une orientation
bien précise.
Pour l’instant, on ne peut pas encore définir l’unité physique de la quantité de mouvement.
La motivation de notre démarche deviendra plus clair lorsque nous aurons énoncé la 1ère
et la 2e loi de Newton. Le concept de quantité de mouvement est un concept absolument
central de la physique et pas seulement de la mécanique. Ce concept s’applique en relativité
restreinte et générale et aussi en mécanique quantique. C’est donc un concept universel qu’a
défini Isaac Newton !
Isaac Newton
2.3.4 1ère loi de Newton
Je dois vous mettre en garde contre une erreur historique. La 1ère loi de Newton n’a en
réalité pas été découverte par Newton mais par Galilée. Il s’agit en fait du principe d’inertie
de Galilée. J’ai beaucoup d’admiration pour Newton, mais je pense qu’il faut quand même
rendre à Galilée ce qui lui revient.
La 1ère loi de Newton ou le principe d’inertie de Galilée est énoncée par Newton
dans ses Principia Mathematica de la manière suivante :

Tout corps persévère dans l’état de mouvement uniforme en ligne droite à moins que
quelque force n’agisse sur lui et ne le contraigne à changer d’état.

En termes plus modernes, on dirait simplement :

Un corps a un mouvement rectiligne uniforme en absence de force extérieure résultante.


Si sa vitesse est nulle, alors il est au repos.

Galilée a trouvé ce principe en se basant sur ses propres observations. Ce principe n’était
pas du tout une évidence à l’époque de Galilée. Il faut se replacer dans le contexte histo-
rique de l’époque. Selon Aristote, le mouvement d’un objet dans l’air est son mouvement
naturel. Il est porté par l’air. Les observations de Galilée sont diamétralement opposées. Le
mouvement d’un objet dans l’air n’est pas son mouvement naturel. Il est freiné par l’air. Son
mouvement naturel en absence d’interaction extérieure résultante est un mouvement recti-
ligne uniforme. Ce principe d’inertie est vraiment un tour de force conceptuel. Le concept de
force a été proprement introduit en dynamique par Newton. Galilée ne parle que de l’effet
du monde extérieur. Donc, si on mentionne le principe d’inertie en se référant à la 1ère loi
de Newton, c’est parce qu’il a complété l’énoncé du principe d’inertie en attribuant la cause
de l’accélération d’un mouvement à une force.
Galileo Galilei
2.3 Lois de Newton 21

Pourquoi parle-t-on de principe d’inertie ? Qu’est-ce que l’inertie ? L’inertie d’un objet est
la résistance que cet objet présente lorsqu’on le met en mouvement. L’inertie c’est ce qui
s’oppose à une accélération. Le principe d’inertie définit sous quelle condition un objet suit
un mouvement rectiligne uniforme, c’est-à-dire un mouvement en absence d’accélération. Il
ne faut pas confondre le concept très général d’inertie avec les notions spécifiques de moment
d’inertie ou de tenseur d’inertie d’un solide. Ces deux notions sont un cas particulier d’inertie
pour un solide en rotation. On verra cela plus en détails lorsqu’on abordera la dynamique
du solide.
Dans la section précédente, on a défini les vecteurs position, vitesse et accélération. La
question qui se pose ici est de savoir par rapport à quel référentiel on peut définir ces notions.
Peut-on choisir n’importe quel référentiel ? La réponse est non. Ces grandeurs cinématiques
dépendent du référentiel choisi. Le principe d’inertie permet de choisir les référentiels par
rapport auxquels on peut définir les lois de la dynamique. Ces référentiels sont les référentiels
d’inertie. Par définition, un référentiel d’inertie est un référentiel par rapport auquel le
principe d’inertie est vérifié. Par conséquent, dans un référentiel d’inertie, un objet qui n’est
pas soumis à une force est soit au repos soit en mouvement rectiligne uniforme.
On voit tout de suite que par définition un référentiel d’inertie n’est pas unique. Si on prend
deux référentiels qui se déplacent à vitesse constante l’un par rapport à l’autre, un objet
qui a un mouvement rectiligne uniforme dans un référentiel aura également un mouvement
rectiligne uniforme dans l’autre. S’il est au repos dans un référentiel, il aura un mouvement
rectiligne uniforme dans l’autre. Ces deux référentiels sont deux référentiels d’inertie. Il existe
donc une infinité de référentiels d’inertie.
Le concept de référentiel d’inertie n’est pas un concept absolu. Il dépend du système phy-
sique qu’on cherche à décrire. Si on veut décrire la dynamique d’un petit pendule, d’environ
10 cm de long, dans un laboratoire sur une petite échelle de temps, d’une durée d’une mi-
nute environ, on peut considérer que la terre est un bon référentiel d’inertie. Par contre si on
considère un grand pendule, d’environ 67 m comme celui de Foucault attaché au sommet du
dôme du Panthéon à Paris, et qu’on veut décrire sa dynamique, on va devoir tenir compte du
mouvement de rotation de la terre sur elle-même. Le plan d’oscillation du pendule va tour-
ner au cours du temps. Pour décrire la dynamique d’un tel pendule, on va devoir prendre
comme référentiel d’inertie le système solaire. Si un train se déplace à vitesse constante,
et qu’on désire modéliser le mouvement d’un pendule attaché au plafond, on peut choisir
comme référentiel d’inertie le train ou la terre. En général, il sera plus facile de choisir comme
référentiel le train. Dans le cas où le train accélère, la dynamique du pendule change et le
train n’est plus un référentiel d’inertie.
Il est important de faire la distinction entre les termes principe et loi. Un principe est
Pendule de Foucault
plus fondamental et général qu’une loi. On utilise un principe pour formuler des lois. Le
principe d’inertie porte bien son nom puisqu’il pose les bases de la dynamique à partir
desquelles on va pouvoir formuler les lois de la dynamique.

2.3.5 Force
Le concept de force est très ancien. Archimède a introduit ce concept pour expliquer la
flottabilité d’un objet. Simon Stevin a utilisé la notion statique de force pour décrire des
états d’équilibre au XVIe siècle. Cependant, c’est Newton qui donné à la notion de force
un statut dynamique. La force F est une grandeur physique qui modifie l’état de repos ou
de mouvement uniforme d’un objet. C’est une grandeur extensive qui permet de décrire la
cause de la variation de l’état de mouvement uniforme d’un objet. C’est une grandeur qui
doit par construction être additive pour décrire la cause du mouvement d’une quantité de
matière. Si deux forces s’exercent sur un objet, la force résultante est la somme des forces
appliquées. Une force doit être une grandeur vectorielle parce qu’elle s’exerce sur l’objet
dans une direction bien précise.
Si une force est appliquée sur un point matériel on peut la mesurer avec un dynamomètre
relié par un fil au point matériel. Le point matériel est maintenu immobile par la force
élastique exercée par le dynamomètre. La direction du fil donne la direction de la force et la
valeur lue sur le dynamomètre, son intensité.
Simon Stevin
22 Cinématique et dynamique du point matériel

Pour l’instant, on ne peut pas encore définir l’unité physique de force. Pour pouvoir la
déterminer, on doit définir la 2e loi de Newton. Mais au préalable, on va examiner la règle
de composition vectorielle des forces découverte expérimentalement par Stevin et établie
théoriquement par Newton. Dans l’expérience de Stevin (Fig. 2.6), le point matériel P est
immobile. Cela signifie que la somme vectorielle des forces F A et F B , dont les normes sont
indiquées sur les dynamomètres en A et B, est égale à la force F C , dont la norme est
indiquée sur le dynamomètre en C. Lorsque deux forces F A et F B sont appliquées sur un

Figure 2.6 L’expérience de Stevin constitue une mesure de la composition de deux forces :
la somme des forces exercées sur le point matériel P doit être nulle. La force mesurée par
le dynamomètre en C doit être égale à la somme vectorielle des forces mesurées par les
dynamomètres en A et B.

point matériel P , la somme vectorielle de ces forces est la force résultante F C orientée selon
la diagonale du parallélogramme engendré par F A et F B . La norme de la force résultante
F C correspond à la longueur de la diagonale du parallélogramme (Fig. 2.7). Quand les

FA
FC

P FB

Figure 2.7 La force F C est la somme vectorielle des forces F A et F B appliquées sur le
point matériel P .

forces sont décrites par des vecteurs, cette règle de composition vectorielle paraı̂t naturelle
et presque triviale, mais elle ne l’était pas du temps de Newton.

2.3.6 2e loi de Newton


Après avoir défini les notions de référentiel d’inertie, de quantité de mouvement et de force,
on peut à présent énoncer la 2e loi de Newton et la transcrire sous forme mathématique. La
1ère loi de Newton affirme que c’est sous l’action d’une force qu’un corps modifie son état
de mouvement. La grandeur physique qui caractérise l’état de mouvement est la quantité
de mouvement. La force va donc modifier la quantité de mouvement. La 2e loi de Newton
est énoncée par Newton dans ses Principia Mathematica de la manière suivante :

Les changements de mouvement sont proportionnels à la force motrice, et se font selon


la ligne droite dans laquelle cette force est imprimée à l’objet.

En termes plus modernes, on dirait simplement :

La variation de quantité de mouvement d’un corps au cours du temps est due à la


résultante des forces extérieures appliquées sur ce corps.

Il peut y avoir plusieurs forces appliquées sur un objet, mais étant donné que la force est
une grandeur extensive, la force résultante est la somme vectorielle des forces. A présent,
2.3 Lois de Newton 23

on désire transcrire la 2e loi de Newton, aussi appelée loi du mouvement, sous forme
mathématique. La variation de la quantité de mouvement p au cours du temps, lorsque
l’intervalle de temps tend vers 0 est simplement la dérivée de la quantité de mouvement
par rapport au temps. Puisque la cause de la variation de quantité de mouvement est la
résultante des forces extérieures F ext , l’équation du mouvement s’écrit simplement comme,

X dp
F ext = (2.19)
dt
Cette équation est très générale puisqu’elle est valable non seulement en mécanique, mais
également en électrodynamique, en physique quantique et même en relativité restreinte. En
relativité générale, elle est remplacée par un concept plus abstrait. Ce concept est la courbure
de l’espace-temps.
Pour pouvoir établir la loi du mouvement (2.19), il est essentiel de considérer que la
quantité de mouvement est une grandeur extensive. Sinon, on ne pourrait pas identifier sa
dérivée par rapport au temps avec la résultante des forces extérieures. Dans une équation
physique, on ne peut identifier que des grandeurs physiques de même nature. On voit ici le
bien-fondé de la démarche de Newton qui postule l’existence de la quantité de mouvement
pour pouvoir établir un lien explicite entre la variation de l’état de mouvement et sa cause.
On va maintenant déterminer l’expression explicite de la quantité de mouvement d’un point
matériel.

2.3.7 Quantité de mouvement et vitesse


La quantité de mouvement p doit satisfaire la loi du mouvement (2.19). Par conséquent,
la quantité de mouvement est définie à une constante près puisque la loi du mouvement
est définie en termes de la dérivée de la quantité de mouvement. Ainsi, deux quantités de
mouvement qui diffèrent d’une constante conduisent à une loi du mouvement identique. La
quantité de mouvement n’est donc à priori pas définie de manière unique. La convention est
de choisir la quantité de mouvement telle qu’elle s’annule lorsque l’objet est au repos. Cette
convention, appelée un choix de jauge, dépend du référentiel choisi.
A présent, on désire établir la relation entre la quantité de mouvement p et la vitesse
v. La quantité de mouvement p décrit le mouvement d’une quantité de matière de masse
m. Par conséquent, la quantité de mouvement p (m) doit être une fonction de la masse m.
Comme la quantité de mouvement est une grandeur extensive, la quantité de mouvement
p (km) d’un système constitué de k points matériels de masse m et de vitesse v identiques
est égale à la somme des quantités de mouvement p (m) de chaque point matériel,
p (km) = k p (m) (2.20)
En appliquant la définition (1.13) de la dérivée d’une fonctionnelle, on prend la dérivée de
la relation d’extensivité de la quantité de mouvement (2.20) par rapport à k en gardant m
fixe qui s’écrit,
dp (km) d (km) dk
= p (m) (2.21)
d (km) dk dk
et se réduit à,
dp (km)
m = p (m) (2.22)
d (km)
La relation (2.22) doit être satisfaite quel que soit le nombre de points matériel k. En
particulier pour k = 1, elle peut être mise sous la forme,
dp (m) p (m)
= (2.23)
dm m
La relation (2.23) implique que la quantité de mouvement est proportionnelle à la masse
m, où le facteur de proportionnalité est une grandeur vectorielle indépendante de la masse,
qui est exprimée comme le rapport des deux grandeurs extensives p et m. La vitesse v est
une grandeur intensive décrivant le mouvement. Ainsi, le facteur de proportionnalité est
24 Cinématique et dynamique du point matériel

une fonction vectorielle f (v) de la vitesse v. Par conséquent, la quantité de mouvement est
exprimée en termes de la masse m et de la vitesse v comme,

p = m f (v) (2.24)

et f (0) = 0, d’après notre choix de la définition de la quantité de mouvement. L’expres-


sion (2.24) de la quantité de mouvement est tout à fait générale et s’applique aussi bien
en mécanique classique qu’en mécanique relativiste. L’expression explicite de la fonction
vectorielle f (v) doit être tirée de l’expérience.
Pour ce faire, on se place dans le cadre de la mécanique classique où les vitesses sont
très faibles par rapport à la vitesse de propagation de la lumière dans le vide. L’expérience
consiste en un choc mou entre deux glisseurs identiques de masse m sur un rail à air horizon-
tal. Les deux glisseurs restent accrochés après le choc (Fig. 2.8). Le premier glisseur qui a un

Figure 2.8 Choc mou entre deux glisseurs identiques sur un rail à air horizontal.

mouvement rectiligne uniforme de vitesse initiale v percute le second glisseur qui est initia-
lement au repos. Lors de la collision, la pointe qui se trouve sur le premier glisseur s’enfonce
dans la pâte à modeler fixée sur le second. Après la collision, on observe que le système formé
des deux glisseurs a un mouvement rectiligne uniforme de vitesse v/2. Comme la résultante
des forces extérieures agissant sur le système formé des deux glisseurs est nulle, la 2e loi de
Newton affirme que la quantité de mouvement totale est conservée lors de la collision. La
quantité de mouvement initiale du second glisseur est nulle. Par conséquent, la quantité de
mouvement initiale du premier glisseur doit être égale à la quantité de mouvement finale
des deux glisseurs,
v 
m f (v) = 2 m f (2.25)
2
La dérivée de la relation (2.25) par rapport à la vitesse divisée par la masse m s’écrit,
v  v 
df (v) df df
=2 2 =  2 (2.26)
dv dv v
d
2
La relation (2.26) implique que la dérivée de la fonction vectorielle f (v) est constante,
df (v)
= α = cste (2.27)
dv
où la grandeur scalaire α > 0 est définie positive pour que la quantité de mouvement soit
orientée dans le sens du mouvement défini par la vitesse v. En intégrant la relation (2.27)
compte tenu de la condition initiale f (0) = 0, on en conclut que la fonction vectorielle f (v)
est une fonction linéaire de la vitesse v,

f (v) = α v (2.28)

Par conséquent, pour des vitesses très faibles par rapport à la vitesse de propagation de la
lumière dans le vide, en substituant la relation (2.28) dans la relation (2.24), celle-ci devient,

p = αmv (2.29)

Sans perte de généralité, on peut choisir de prendre α = 1. Dans ce cas, la quantité de


2.3 Lois de Newton 25

mouvement (2.29) se réduit au produit de la masse et de la vitesse,


p = mv (2.30)
qui est une expression phénoménologique puisqu’elle est tirée de l’expérience. Compte tenu
de la relation phénoménologique (2.30), l’unité physique de la quantité de mouvement dans
le système international d’unités est notée [ kg·m/s ].

2.3.8 Dynamique du point matériel


La dynamique d’un point matériel s’obtient à partir de la dynamique d’un système
mécanique en imposant une condition supplémentaire. Un point matériel est caractérisé
par une masse constante, ce qui impose la condition,
dm
=0 (2.31)
dt
En substituant l’expression (2.30) de la quantité de mouvement dans la loi du mouve-
ment (2.19), celle-ci s’exprime explicitement en termes de la vitesse comme,
X dv dm
F ext = m + v (2.32)
dt dt
Compte tenu de la condition (2.31) et de la définition du vecteur accélération (2.2), la 2e loi
de Newton (2.32) se réduit à la loi du mouvement d’un point matériel,
X
F ext = m a (2.33)

Compte tenu de la loi du mouvement (2.33), l’unité physique de la force dans le système
international d’unités est le Newton noté [ N ] = [ kg·m/s2 ].
3
Frottements et balistique

3.1 Forces de frottement


Mécanique § 1.14
Comme les frottements sont omniprésents dans les phénomènes physiques, ils ont été
considérés jusqu’au XVIIe siècle comme des propriétés fondamentales et non comme des
interactions. Aristote considérait que le mouvement d’un objet soumis au frottement de l’air
était son mouvement naturel. Galilée a réalisé que le mouvement naturel d’un corps est un
mouvement rectiligne uniforme en absence de force de frottement. Cela a remis en cause le
paradigme aristotélicien qui a été remplacé par le paradigme newtonien.
Les frottements, aussi appelé friction, sont dus à une interaction entre deux systèmes
qui s’oppose à leur mouvement relatif. Les frottements sont caractérisés par des forces
phénoménologiques, c’est-à-dire qu’elles sont tirées de l’expérience. La branche de la
mécanique qui étudie les frottements est la tribologie. Les frottements sont le résultat
de différents types d’interactions qui ont lieu principalement à l’échelle microscopique. Il
existe des frottements de deux types différents : des frottements secs qui ont lieu à l’in-
terface entre des solides ou des frottements visqueux d’un solide immergé dans un fluide
− c’est-à-dire un liquide ou un gaz.

3.1.1 Frottements secs


e
A la fin du XVIII siècle, Charles Augustin de Coulomb a étudié l’action d’une surface sur
Charles Augustin de
un solide. Il a montré qu’il fallait distinguer deux types de frottements secs. Les frottements
Coulomb
qui empêchent le glissement de la surface de contact d’un solide par rapport à un autre
ont été appelés frottements statiques. Les frottements qui s’opposent au glissement de
la surface de contact d’un solide par rapport à un autre et ralentissent ce mouvement ont
été appelés frottements cinétiques. Au début du XVIe siècle, Léonard de Vinci étudie

Figure 3.1 Une plaque de bois glisse sur une surface lisse et sèche. Des poids sont posés
sur la plaque de bois. On mesure la force appliquée sans glissement, puis la force appliquée
lors du glissement.

les frottements secs et en conclut que la force de frottement est proportionnelle à la force
exercée par la surface du dessous sur la surface du dessus et qu’elle est indépendante de
l’aire de la surface de contact. Deux siècles plus tard, Guillaume Amontons montre qu’elle
est indépendante de la norme de la vitesse de mouvement relatif d’un solide par rapport à
l’autre.
Léonard de Vinci
28 Frottements et balistique

Frottements statiques
On considère un solide immobile posé sur une surface (Fig. 3.1). Il subit une force de
réaction normale N qui compense son poids P . On exerce une force de traction T tangente
à la surface sans que le solide glisse. Le solide subit alors une force de frottement statique
Ff pour compenser la force de traction T . Elle s’ajuste pour qu’il n’y ait pas de glissement
(Fig. 3.2). Lorsque la force de frottement statique Ff atteint une valeur maximale, il y a

T Ff

Figure 3.2 La force de frottement statique Ff s’ajuste pour compenser la force de traction
T.

décrochement et glissement. L’expression de la norme kFf k de la force de frottement statique


est donnée par une inéquation établie par de Coulomb,
kFf k ≤ µs kN k (3.1)
où kN k est la norme de la réaction normale N exercée par la surface sur le solide et µs est
un nombre positif sans dimension physique appelé le coefficient de frottement statique.
La valeur de ce coefficient dépend notamment des matériaux en contact, de leur état de
surface et de l’humidité.

Frottements cinétiques
Lorsque le solide se met en mouvement il subit alors une force de frottement cinétique Ff
qui s’oppose à la force de traction T (Fig. 3.3). L’expression de la norme kFf k de la force

v
T Ff

Figure 3.3 La force de frottement cinétique Ff s’oppose au mouvement dû à la force de


traction T .

de frottement cinétique est donnée par une équation établie par de Coulomb,
Ff = − µc kN k v̂ (3.2)
où v̂ = v/kvk est le vecteur unitaire sans dimension physique qui est colinéaire au vecteur
vitesse et µc est un nombre positif sans dimension physique appelé le coefficient de frot-
tement cinétique. Dans ce modèle, on considère que le coefficient µc est indépendant de
la vitesse.
On constate expérimentalement que le coefficient de frottement cinétique entre deux so-
lides est plus petit que le coefficient de frottement statique, i.e. µc < µs (Tab. 3.1). On en fait
l’expérience lorsqu’on fait glisser un meuble lourd sur un sol lisse. Avant le décrochement, en
régime statique, la norme de la force de frottement kF f k est une fonction linéaire croissante
de la norme de la force de traction kT k. Lorsqu’elle atteint la valeur maximale µs kN k, il y
a décrochement. Puis la norme de la force de frottement kF f k chute brutalement en régime
cinétique pour atteindre la valeur constante µc kN k qui est indépendante de la norme de la
force de traction kT k (Fig. 3.4).

3.1.2 Frottements visqueux


Une force de frottement visqueux s’exerce sur un objet qui se déplace dans un fluide. Elle
dépend de la vitesse relative v de l’objet par rapport au fluide. Il convient de distinguer
3.1 Forces de frottement 29

||Ff ||
ms ||N ||

mc ||N ||

||T ||

Figure 3.4 Comportement de la norme de la force de frottement kF f k en fonction de la


norme de la force de traction kT k en régime statique puis cinétique.

Table 3.1 Coefficients de frottement sec


Matériaux Statique µs Cinétique µc
Caoutchouc/Asphalte 1.0 0.8
Acier/Acier 0.74 0.57
Aluminium/Acier 0.61 0.47
Cuivre/Acier 0.53 0.36
Glace/Glace 0.1 0.03
Téflon/Téflon 0.04 0.03
Articulation humaine 0.01 0.003

deux types de régimes. Le premier est le régime d’écoulement laminaire qui correspond
à une vitesse relative suffisamment basse. Le second est le régime d’écoulement turbulent
qui correspond à une vitesse relative suffisamment élevée, mais inférieure à la vitesse du son.

Loi de Stokes
En régime d’écoulement laminaire, la force de frottement est proportionnelle à la vitesse
relative v et satisfait la loi de Stokes,

Ff = − k η v = − b v (3.3)

où k est un facteur géométrique et η est la viscosité du fluide. Dans le cas d’une sphère,
le facteur géométrique k = 6πR où R est le rayon de la sphère. La viscosité η qui dépend
notamment de la température représente une résistance à l’écoulement (Tab. 3.2). L’unité
George Gabriel Stokes
de la viscosité dans le système international d’unités est noté [ N·s/m2 ].

Traı̂née
En régime d’écoulement turbulent, la force de frottement est la traı̂née qui est propor-
tionnelle au carré de la norme de la vitesse relative v 2 , Ff

1
Ff = − Cx A ρ v 2 v̂ (3.4)
2
où Cx est le coefficient de traı̂née qui n’a pas de dimension physique, A est l’aire de la
projection de l’objet sur le plan orthogonal au vecteur vitesse et ρ est la densité du fluide Ecoulement laminaire

Table 3.2 Viscosité à 25◦ C


Substances Viscosité η [ N·s/m2 ]
Air 0.00002
Eau 0.0009
Sang 0.004
Huile 0.2
Miel 10
Ketchup 100
Verre 1000
30 Frottements et balistique

− c’est-à-dire le rapport de sa masse et de son volume. Le coefficient de traı̂née est un


coefficient qui est entièrement déterminé par la géométrie de l’objet (Fig. 3.5).

Ff
Cx = 1.1 Cx = 0.34

Cx = 1.4 Cx = 0.05
Ecoulement turbulent

Cx = 0.45 Cx = 0.1-0.2

Figure 3.5 Le coefficient de traı̂née est déterminé par la forme géométrique de l’objet.

L’histoire de l’automobile illustre l’évolution du coefficient de traı̂née Cx . Au début du


XXe siècle, les voitures avaient un coefficient de traı̂née Cx = 0.7 − 1.0. Aujourd’hui, les
voitures les plus aérodynamiques ont un coefficient de traı̂née Cx = 0.2 − 0.3 (Fig. 3.6). Le
coefficient de traı̂née a donc pu être réduit d’un facteur trois en un siècle grâce au progrès
de l’aérodynamique − la branche de la mécanique qui étudie l’écoulement de l’air.

Figure 3.6 Evolution du coefficient de traı̂née Cx des voitures du XXe au XXIe siècle.

3.2 Balistique sans frottement


Mécanique § 2.3
Après avoir posé les bases de la mécanique newtonienne et introduit différents modèles
pour les frottements, on va à présent examiner une application pratique de ces lois : la
balistique. La balistique est l’étude des trajectoires d’objets, qui peuvent être assimilés à
des points matériels, lorsqu’ils sont soumis à l’attraction terrestre à la surface de la terre.
La balistique cherche donc à déterminer l’équation horaire d’un point matériel soumis à la
force de pesanteur due à son propre poids. Lorsqu’on parle de balistique, on pense tout de
suite au lancer d’une balle ou à la trajectoire d’un obus.
Si une craie est lancée avec une vitesse initiale quelconque dans un plan vertical, sa tra-
jectoire est parabolique alors que si elle est lancée verticalement sa trajectoire est rectiligne.
Pour comprendre ceci, on doit établir les équations horaires de la balistique. Dans un premier
temps, on considère les cas simples où le frottement peut être négligé.
3.2 Balistique sans frottement 31

3.2.1 Démarche de résolution


Lorsqu’on désire résoudre un problème de dynamique, il est utile d’utiliser une démarche
systématique. En utilisant une telle approche, on structure l’esprit et on adopte une
méthodologie connue en terrain inconnu. Cette approche systématique est donc en quelque
sorte une approche tout-terrain. Cette approche n’est pas toujours nécessairement la
meilleure, mais elle est très certainement la plus polyvalente. Dans le cas particulier de
la balistique sans frottement, la marche à suivre est la suivante :
• On choisit un référentiel et un repère adapté − ou un système de coordonnées. Dans
le cas du mouvement balistique, il n’a pas de symétrie particulière. On choisit donc un
repère cartésien.
• On identifie les forces extérieures agissant sur le point matériel. Dans le cas d’un
mouvement balistique sans frottement, la seule force agissant sur le point matériel est
la force de pesanteur due à l’attraction gravitationnelle.
• On définit les conditions initiales sur la position et la vitesse du mouvement balistique
spécifique qu’on désire décrire.
• On énonce la loi vectorielle du mouvement − c’est-à-dire la 2e loi de Newton − dans
le cas du mouvement balistique.
• On projète la loi vectorielle du mouvement sur les axes de coordonnées. On obtient trois
équations du mouvement. Ces équations sont des équations différentielles exprimées
en termes des dérivées des composantes de la position par rapport au temps.
• Pour obtenir les équations horaires du point matériel, on intègre les équations du
mouvement par rapport au temps. En combinant les équations horaires, on obtient
l’équation de la trajectoire de l’objet.

3.2.2 Poids
Pour faire de la balistique, il faut commencer par définir la force de pesanteur exercée sur
un objet à la surface de la terre par l’attraction gravitationnelle. La force de pesanteur d’un
objet, c’est simplement son poids. Un objet en chute libre subit une accélération dirigée vers
le bas qui due à la force de pesanteur. Il existe donc un champ vectoriel de gravitation g
qu’on dénote g. On utilise le terme champ, parce que la force de pesanteur agit partout,
c’est-à-dire en tout point. Ce champ varie lorsqu’on s’éloigne ou se rapproche du centre de
la terre. Il varie aussi avec la latitude à cause des effets liés à la rotation de la terre et
à cause du fait que la terre n’est pas une sphère parfaite, mais a une forme d’ellipsoı̈de.
Seulement, à l’échelle de distances qu’on considère lorsqu’on lance une balle ou qu’on tire
un obus, ces effets sont négligeables et on peut considérer que le champ de pesanteur est à
peu près constant et dirigé vers le centre de la terre.
La force de pesanteur ou le poids d’un objet est défini comme le produit de la masse
Poids
m de l’objet et du champ gravitational g en accord avec la 2e loi de Newton (2.33),

P = mg (3.5)

Le poids P est considéré comme une force extérieure F ext puisque la cause de cette force est
le champ de pesanteur qui est extérieur à l’objet. Pour trouver des solutions quantitatives
aux problèmes de balistique, il faut pouvoir disposer d’une valeur numérique de ce champ
de pesanteur. La valeur expérimentale de la norme du champ g évaluée à une latitude de
45◦ au niveau de la mer est g = 9.81 [ m/s2 ].

3.2.3 Loi du mouvement balistique


Après avoir établit l’expression (2.33) de la 2e loi de Newton et obtenu l’expression (3.5)
de la force de pesanteur, on est à présent en mesure d’établir la loi dynamique du mouvement
balistique. La seule force extérieure F ext est le poids de l’objet P . Par conséquent, la loi du
32 Frottements et balistique

mouvement balistique (2.33) s’écrit,

F ext = P = m a (3.6)

En substituant l’expression (3.5) du poids dans l’équation du mouvement et en la divisant


par la masse m de l’objet, on obtient,

a=g (3.7)

Ainsi, l’accélération de l’objet est constante et indépendante de sa masse m. Si on laisse


tomber en chute libre une goutte d’eau et une bille d’acier de même volume, leur accélération
est la même. Evidemment ces deux objets ont une masse différente, mais leur accélération est
la même. On observe cela en absence de frottement ou si les frottements sont négligeables.
Galilée a prédit et Torricelli a observé que dans le vide une plume et un cube de plomb ont
la même accélération (Fig. 3.7).
Accélération constante

Figure 3.7 Dans le vide, en absence de frottement, la plume et le cube de plomb ont la
même accélération.

Evangelista Torricelli
3.2.4 Repère et conditions initiales
Etant donné que le mouvement balistique en absence de frottement n’a pas de symétrie
particulière, on choisit comme repère, le repère cartésien (O, x, y, z). La loi du mouvement
Plume et plomb balistique (3.7) décrit toutes sortes de mouvements possibles. Pour déterminer un mouve-
ment balistique spécifique, on doit spécifier les coordonnées cartésiennes de la position et de
la vitesse à un instant donné. Pour simplifier, on donne, en général, la position et la vitesse
à l’instant initial t = 0. Pour cette raison, on parle de conditions initiales.

O y

r0 v0

Figure 3.8 Le point matériel P a une position initiale r 0 et une vitesse initiale v 0 quel-
conques.

Le vecteur position initiale r (0) = r 0 s’écrit en composantes cartésiennes comme


3.2 Balistique sans frottement 33

(x (0) , y (0) , z (0)) = (x0 , y0 , z0 ). Par conséquent, il y a trois conditions initiales sur la posi-
tion (Fig. 3.8),

(i) x (0) = x0 (ii) y (0) = y0 (iii) z (0) = z0 (3.8)

Le vecteur vitesse initiale v (0) = v 0 s’écrit en composantes cartésiennes comme


(ẋ (0) , ẏ (0) , ż (0)) = (v0x , v0y , v0z ). Par conséquent, il y a trois conditions initiales sur la
vitesse (Fig. 3.8),

(i) ẋ (0) = v0x (ii) ẏ (0) = v0y (iii) ż (0) = v0z (3.9)

3.2.5 Equations du mouvement balistique


Le vecteur accélération s’écrit en coordonnées cartésiennes a = (ẍ, ÿ, z̈). Le champ de
gravitation g est dirigé vers le bas et s’écrit donc en coordonnées cartésiennes g = (0, 0, − g)
où g > 0. En projetant la loi vectorielle du mouvement (3.7) selon les axes de coordonnées
du repère cartésien, on obtient trois équations scalaires du mouvement,

ẍ = 0
ÿ = 0 (3.10)
z̈ = − g = cste

En intégrant les équations du mouvement (3.10) par rapport au temps, compte tenu des
conditions initiales (3.9) sur la vitesse, on obtient les équations de la vitesse,

ẋ = v0x = cste
ẏ = v0y = cste (3.11)
ż (t) = − gt + v0z

En intégrant les équations de la vitesse (3.11) par rapport au temps, compte tenu des
conditions initiales (3.8) sur la position, on obtient les équations horaires,

x (t) = v0x t + x0
y (t) = v0y t + y0 (3.12)
1
z (t) = − gt2 + v0z t + z0
2
Le mouvement selon les axes de coordonnées Ox et Oy est rectiligne uniforme car il n’y a
pas de force qui agit dans ces directions. Le mouvement selon l’axe de coordonnée Oz est
rectiligne uniformément accéléré vers le bas dû au champ gravitationnel.

3.2.6 Chute libre


On considère le mouvement de chute libre d’un point matériel le long de l’axe Oz d’une
position initiale r 0 = (0, 0, h) où h est la hauteur initiale avec une vitesse initiale nulle, i.e.
v 0 = 0. Au temps de chute t = tc lorsque le point matériel touche le sol, i.e. z (tc ) = 0, la
troisième équation du mouvement balistique (3.12) devient,
1 2
− gt + h = 0 (3.13)
2 c
Ainsi, le temps de chute libre est de la forme suivante,
s
2h
tc = (3.14)
g

Alternativement, en connaissant la hauteur de chute h et en mesurant le temps de chute tc


on peut déterminer expérimentalement le champ gravitationnel g.
Mesure de g
34 Frottements et balistique

3.2.7 Trajectoire balistique


On considère le mouvement balistique d’un point matériel initialement à l’origine, i.e.
r 0 = (0, 0, 0), avec une vitesse initiale contenue dans le plan vertical Oxz et orientée selon
un angle de tir α par rapport à l’axe horizontal Ox, i.e. v 0 = (v0 cos α, 0, v0 sin α). Ainsi, les
équations du mouvement balistique (3.12) deviennent (Fig. 3.9),
x (t) = v0 cos α t
y (t) = 0 (3.15)
1
z (t) = − gt2 + v0 sin α t
2
En substituant la première équation du mouvement (3.15) dans la troisième équation du

v0

P
a

Figure 3.9 Le point matériel P est initialement à l’origine avec une vitesse initiale v 0
dans le plan Oxz qui est orientée selon un angle de tir α par rapport à l’axe horizontal Ox.

mouvement, on élimine explicitement le paramètre temps t et on obtient l’équation de la


trajectoire balistique (Fig. 3.10),
1 g
z (x) = − x2 + tan α x (3.16)
2 v02 cos2 α

z(x)

a
x

Figure 3.10 La trajectoire du mouvement balistique d’un point matériel en absence de


frottement est une parabole.

A titre d’exemple, on considère un mécanisme qui permet de lâcher deux boules simul-
tanément. La première boule n’a pas de vitesse initiale, elle est donc en chute libre. La
3.3 Balistique avec frottement 35

deuxième a une vitesse initiale horizontale due à l’action d’un ressort et suit donc un mou-
vement rectiligne uniforme selon l’axe horizontal et un mouvement rectiligne uniformément
accéléré selon l’axe vertical (Fig. 3.11). Les deux boules frappent le sol en même temps, car
elles ont sont soumises à la même accélération verticale du champ de pesanteur.

Figure 3.11 La boule de gauche est en chute libre alors que la boule de droite est éjectée
par un ressort horizontal.

Comme autre exemple, on considère une table à air inclinée de sorte que le bord long soit
horizontal et que le bord court soit incliné. Un puck est lâché depuis le coin droit du haut
de la table. Simultanément, un puck est lancé depuis le coin gauche du bas de la table dans
la ligne de visée du premier avec une vitesse bien choisie. Les deux pucks entrent en collision
au coin droit du bas de la table (Fig. 3.12).

Figure 3.12 Le puck de bas est lancé sur une table à air inclinée avec une vitesse initiale
orientée vers le puck du haut lâché simultanément sans vitesse initiale.

3.3 Balistique avec frottement


Mécanique § 2.4
Les frottements subit par un objet en mouvement dans l’air ou dans d’un autre fluide
sont des frottements visqueux. Dans cette section, on considère que la vitesse relative entre
l’objet et le fluide est suffisamment basse. Par conséquent, le mouvement de l’objet a lieu en
régime d’écoulement laminaire. De manière analogue au cas de la balistique sans frottement,
on considère que l’objet peut être modélisé comme un point matériel. En présence de frot-
tement, on suit une démarche analogue à l’analyse balistique sans frottement. Sur le plan
mathématique, l’intégration des équations du mouvement pour obtenir les équations de la
vitesse puis les équations horaires est un peu plus compliquée. On verra que les équations
de la vitesse et les équations horaires sont caractérisées par un temps d’amortissement qui
est dû à la présence d’une force de frottement visqueux.

3.3.1 Loi du mouvement balistique


Pour un mouvement balistique en présence de frottement en régime d’écoulement lami-
naire, les forces extérieures F ext sont le poids de l’objet P et la force de frottement visqueux
F f donnée par la loi de Stokes. Par conséquent, la loi du mouvement balistique (2.33) s’écrit,

X
F ext = P + F f = m a (3.17)
36 Frottements et balistique

En substituant l’expression (3.5) du poids P et la loi de Stokes (3.3) dans la loi du mouve-
ment (3.17), celle-ci devient,
ma = mg − bv (3.18)

Contrairement à la loi du mouvement balistique sans frottement (3.7), la loi du mouvement


balistique avec frottement (3.18) montre que l’accélération dépend de la masse m comme
dans le cas de la chute d’une plume et d’une masse de plomb en présence de frottement.

3.3.2 Repère et conditions initiales


Comme dans le cas de la balistique sans frottement, on choisit comme repère, le repère
cartésien (O, x, y, z). Initialement, le point matériel se trouve à l’origine O, i.e. r (0) =
(0, 0, 0). Sa vitesse initiale se trouve dans le plan vertical Oxz, i.e. v (0) = (v0x , 0, v0z ). Par
conséquent, il y a trois conditions initiales sur la position (Fig. 3.9),

(i) x (0) = 0 (ii) y (0) = 0 (iii) z (0) = 0 (3.19)

Il y a également trois conditions initiales sur la vitesse (Fig. 3.9),

(i) ẋ (0) = v0x (ii) ẏ (0) = 0 (iii) ż (0) = v0z (3.20)

3.3.3 Equations du mouvement balistique


Le vecteur vitesse s’écrit en coordonnées cartésiennes v = (ẋ, ẏ, ż) = (vx , vy , vz ) et le
vecteur accélération s’écrit a = (ẍ, ÿ, z̈) = (v̇x , v̇y , v̇z ). Le champ de gravitation g est dirigé
vers le bas et s’écrit donc en coordonnées cartésiennes g = (0, 0, − g) où g > 0. En projetant
la loi vectorielle du mouvement (3.18) selon les axes de coordonnées du repère cartésien, on
obtient trois équations scalaires du mouvement,
mẍ = − bẋ ou mv̇x = − bvx
mÿ = − bẏ ou mv̇y = − bvy (3.21)
mz̈ = − bż − mg ou mv̇z = − bvz − mg
Le temps d’amortissement τ est défini comme,
m
τ= (3.22)
b
Cette définition est cohérente, car en absence de frottement, i.e. b = 0, le temps d’amor-
tissement devient infini, i.e. τ → ∞. Les équations du mouvement balistique avec frotte-
ment (3.21) peuvent être divisées par la masse m et mises sous la forme,
1
v̇x = − vx
τ
1
v̇y = − vy (3.23)
τ
1
v̇z = − vz − g
τ
Comme le vecteur vitesse initiale v 0 est contenu dans le plan vertical Oxz, il n’a pas de
mouvement balistique selon l’axe horizontal Oy. Le mouvement balistique se décompose en
un mouvement horizontal selon l’axe Ox et un mouvement vertical selon l’axe Oz. A présent,
on va déterminer l’équation de la vitesse puis l’équation horaire du mouvement horizontal
d’abord et du mouvement vertical ensuite.

3.3.4 Mouvement balistique horizontal


La première équation du mouvement balistique avec frottement (3.23) peut être mise sous
la forme,
dvx (t) dt
=− (3.24)
vx (t) τ
3.3 Balistique avec frottement 37

Afin d’obtenir l’équation de la vitesse selon l’axe horizontal Ox, on intègre l’équation
différentielle du mouvement (3.24) du temps initial 0 au temps t et donc de la vitesse initiale
v0x à la vitesse vx (t),
Z vx (t) 0 0
1 t 0
Z
dvx (t )
=− dt (3.25)
v0x vx0 (t0 ) τ 0
où les variables et fonctions apparaissant dans l’expression de l’intégrant sont notées avec
des primes pour ne pas les confondre avec les bornes d’intégration. La solution de l’équation
intégrale (3.25) s’écrit,
 
vx (t) t
ln (vx (t)) − ln (v0x ) = ln =− (3.26)
v0x τ
En prenant l’exponentielle de l’équation (3.26), on obtient l’équation de la vitesse (Fig. 3.13),
 
t
vx (t) = v0x exp − (3.27)
τ

vx (t)

v0x

t
t

Figure 3.13 La vitesse v (t) du mouvement horizontal décroı̂t exponentiellement dû à la


force de frottement à partir d’une valeur initiale v0x .

Comme la vitesse est la dérivée (1.2) de la position, le déplacement infinitésimal horizontal


dx (t) est donné par,
 
t
dx (t) = v0x exp − dt (3.28)
τ
Afin d’obtenir l’équation horaire selon l’axe horizontal Ox, on intègre l’équation différentielle
du déplacement (3.24) du temps initial 0 au temps t et donc de la position initiale 0 à la
position x (t),
Z x(t) Z t  0
t
dx0 (t0 ) = v0x exp − dt0 (3.29)
0 0 τ
La solution de l’équation intégrale (3.29) s’écrit,
 t0 =t
t0


x (t) = − v0x τ exp − (3.30)
τ 0
t =0

L’équation horaire du mouvement horizontal (3.30) peut être mise sous la forme (Fig. 3.14),
  
t
x (t) = v0x τ 1 − exp − (3.31)
τ
L’équation horaire du mouvement horizontal montre que la coordonnée horizontale de la
position tend vers une valeur maximale,

lim x (t) = v0x τ (3.32)


t→∞
38 Frottements et balistique
x(t)

v0x t

t
t

Figure 3.14 La coordonnée horizontale de la position x (t) tend vers une valeur maximale
v0x τ .

3.3.5 Mouvement balistique vertical


Afin de résoudre l’équation du mouvement balistique vertical (3.23), on doit faire un
changement de variable pour rendre cette équation différentielle homogène, c’est-
à-dire que la dérivée doit être proportionnelle à la fonction. En utilisant le changement de
variables,
uz (t) = vz (t) + gτ (3.33)
la troisième équation du mouvement balistique avec frottement (3.23) s’écrit,
1
u̇z = − uz (3.34)
τ
L’équation (3.34) peut être mise sous la forme,
duz (t) dt
=− (3.35)
uz (t) τ
Afin d’obtenir l’équation de la vitesse selon l’axe vertical Oz, on intègre l’équation
différentielle du mouvement (3.35) du temps initial 0 au temps t et donc de la vitesse initiale
u0z = v0z + gτ à la vitesse uz (t) = vz (t) + gτ ,
Z vz (t)+gτ 0 0
1 t 0
Z
dvz (t )
= − dt (3.36)
v0z +gτ vz0 (t0 ) τ 0
La solution de l’équation intégrale (3.36) s’écrit,
 
vz (t) + gτ t
ln (vz (t) + gτ ) − ln (v0z + gτ ) = ln =− (3.37)
v0z + gτ τ
En prenant l’exponentielle de l’équation (3.37), on obtient l’équation de la vitesse (Fig. 3.15),
 
t
vz (t) = (v0z + gτ ) exp − − gτ (3.38)
τ
L’équation de la vitesse du mouvement vertical montre que la coordonnée verticale de la
vitesse tend vers une valeur minimale appelée vitesse limite vl ,
vl = lim vz (t) = − gτ (3.39)
t→∞

Compte tenu de l’expression (3.22) du temps d’amortissement τ = m/b et du coefficient


Vitesse limite
b = kη obtenu par la loi de Stokes (3.3), le temps d’amortissement est inversement pro-
(eau, glycérine, huile)
portionnel à la viscosité du fluide η, i.e. τ = m/ (kη). Par conséquent, plus le liquide est
visqueux plus le temps d’amortissement est court. Une bille en chute libre dans de l’huile est
plus rapidement amortie que dans de l’eau. La vitesse limite est inversement proportionnelle
à la viscosité du fluide η, i.e. vl = − gτ = − mg/ (kη). Par conséquent, plus le liquide est
visqueux plus la vitesse limite est faible. La vitesse limite d’une bille en chute libre dans de
l’huile est plus faible que dans de l’eau.
3.3 Balistique avec frottement 39
vz (t)

v0z

-gt

Figure 3.15 La vitesse v (t) du mouvement vertical décroı̂t exponentiellement dû à la force
de frottement à partir d’une valeur initiale v0z pour tendre vers la vitesse limite vl = − gτ .

La vitesse limite de chute libre de l’homme dans l’atmosphère est d’environ 200 km/h alors
que le faucon pèlerin atteint une vitesse limite de 300 km/h. A cette vitesse l’écoulement
de l’air a lieu en régime turbulent et le coefficient de traı̂née Cx du faucon est bien meilleur
que celui de l’homme.
Comme la vitesse est la dérivée (1.2) de la position, le déplacement infinitésimal vertical
dz (t) est donné par,
 
t
dz (t) = (v0z + gτ ) exp − dt − gτ dt (3.40)
τ
Afin d’obtenir l’équation horaire selon l’axe vertical Oz, on intègre l’équation différentielle
du déplacement (3.40) du temps initial 0 au temps t et donc de la position initiale 0 à la Faucon pèlerin
position z (t),
Z z(t) Z t  0 Z t
0 0 t 0
dz (t ) = (v0z + gτ ) exp − dt − gτ dt0 (3.41)
0 0 τ 0

La solution de l’équation intégrale (3.41) s’écrit,


 0  t0 =t t0 =t
2
 t 0

z (t) = − v0z τ + gτ exp − − gτ t (3.42)
τ
t0 =0 t0 =0

L’équation horaire du mouvement vertical (3.42) peut être mise sous la forme (Fig. 3.16),
  
2
 t
z (t) = v0z τ + gτ 1 − exp − − gτ t (3.43)
τ

z(t)

Figure 3.16 La coordonnée verticale de la position z (t) augmente, atteint un maximum,


puis diminue. Elle tend à diminuer linéairement lorsque la vitesse de chute est suffisamment
proche de la vitesse limite.
40 Frottements et balistique

3.3.6 Trajectoire balistique


En substituant l’équation du mouvement horizontal (3.31) dans l’équation du mouvement
vertical (3.43), on élimine explicitement le paramètre temps t et on obtient l’équation de la
trajectoire balistique (Fig. 3.17),
 
x x
z (x) = (v0z + gτ ) + gτ 2 ln 1 − (3.44)
v0x v0x τ

z(x)

v0x t

Figure 3.17 La trajectoire du mouvement balistique d’un point matériel en présence de


frottement a une asymptote verticale en x = v0x τ .
4
Oscillateur harmonique et mouvement
circulaire

4.1 Oscillateur harmonique


Mécanique § 2.5
Le mouvement oscillatoire harmonique joue un rôle central en physique. Ce mouvement
est un mouvement d’oscillation idéal dont la fréquence et l’amplitude d’oscillation sont
constantes. Le mot harmonique vient du fait que les oscillations sont sinusoı̈dales comme
dans le cas des ondes sonores. Beaucoup de mouvements en physique peuvent être considérés
comme des mouvements oscillatoires harmoniques. Le mouvement d’un ressort est un mou-
vement oscillatoire. Les mouvements vibratoires sont des mouvements d’oscillation harmo-
nique. Les mouvements d’oscillation autour d’une position d’équilibre peuvent aussi, en
première approximation, être considérés comme des mouvement oscillatoires harmoniques.
Le modèle de l’oscillateur harmonique est un des trois modèles qu’on sait résoudre exac-
tement en mécanique quantique. On le retrouve aussi en cosmologie pour expliquer la for-
mation des galaxies et autres grandes structures de l’univers. Les vibrations entre les atomes
appelés des phonons peuvent aussi être modélisés par un série d’oscillateurs harmoniques.
L’étude du mouvement d’un oscillateur harmonique est donc tout un programme. . .
Un mouvement oscillatoire harmonique mécanique est en général dû à une force
Vibrations dans un
élastique exercée sur un point matériel. Il faut donc commencer par introduire un modèle
solide (phonons)
phénoménologique pour la force élastique. A l’aide de ce modèle, on peut définir la loi du
mouvement et déterminer l’équation du mouvement par projection. En intégrant l’équation
du mouvement, on trouve la solution générale du mouvement oscillatoire harmonique. On
peut en déduire la pulsation, la fréquence et la période. En utilisant les conditions initiales
sur la position et la vitesse, on détermine aussi l’amplitude.

4.1.1 Force élastique


Il existe deux domaines de déformations d’un solide. Le premier domaine appelé
déformation élastique est réversible, c’est-à-dire que le solide revient à sa forme initiale
après avoir été déformé. Le second domaine appelé déformation plastique est irréversible,
c’est-à-dire que le solide ne revient pas à sa forme initiale et reste ainsi partiellement déformé.
Lorsqu’on exerce une contrainte mécanique sur un ressort mou la déformation est élastique
si la contrainte est suffisamment faible. Si la contrainte est plus importante, la déformation
devient plastique jusqu’à une valeur critique où il y a fracture et le ressort se casse. On
considère ici uniquement le domaine de déformation élastique.
Le premier modèle de force élastique est dû à Robert Hooke qui en se basant sur des
résultats empiriques a énoncé une loi qui porte son nom. Dans le domaine de déformation
élastique, pour des déformations suffisamment faibles, la loi de Hooke affirme que la force
élastique F e exercée sur un point matériel est proportionnelle à la déformation r par rapport
à la position d’équilibre O et elle est orientée vers la position d’équilibre,

Fe = −kr (4.1)

où k est la constante élastique du matériau. Hooke a écrit que cette loi signifiait que
l’allongement est proportionnel à la force.
La force est mesurée avec un capteur de force et le déplacement avec un capteur de
Robert Hooke
déplacement. Pour des déformations suffisamment faibles dans le domaine de déformation
42 Oscillateur harmonique et mouvement circulaire

k Fe m

r
O

Figure 4.1 La force élastique F e exercée sur un point matériel de masse m provoque une
déformation suffisamment petite proportionnelle à l’allongement r où k est la constante
élastique. Elle est orientée vers la position d’équilibre initiale O.

élastique, l’élongation est proportionnelle à la force appliquée. Cela démontre la loi de Hooke
pour la force élastique (Fig. 4.2).

Figure 4.2 Vérification de la loi de Hooke dans le domaine de déformation élastique


linéaire. La force élastique F e et la déformation élastique r d’un ressort, à l’extrémité
duquel est suspendu un point matériel de masse m, sont mesurées avec des capteurs.

Intuitivement, on se rend bien compte que le mouvement oscillatoire d’une masse suspen-
due à un ressort est amorti par les frottements de l’air. Si on observe ce mouvement durant
un intervalle de temps suffisamment court, on peut négliger la force de frottement visqueux
entre la masse et l’air. Lorsque ce mouvement a lieu dans l’eau, on doit tenir compte des frot-
tements visqueux car l’eau a une viscosité bien plus élevée. Dans cette section, on considère
un oscillateur harmonique libre, c’est-à-dire qu’on néglige l’action de la force de frottement
visqueux. On tiendra explicitement compte des frottements dans la section suivante.
Oscillateur (air, eau)

4.1.2 Loi du mouvement harmonique oscillatoire


A l’aide l’expression (2.33) de la 2e loi de Newton et de l’expression (4.1) de la loi de Hooke,
on est à présent en mesure d’établir la loi dynamique du mouvement harmonique oscillatoire
en absence de frottement. On considère un point matériel de masse m suffisamment faible
pour pouvoir négliger son poids P par rapport à la force élastique F e , i.e. P  F e . La seule
force extérieure F ext est la force élastique F e exercée sur l’objet. Par conséquent, la loi du
mouvement mouvement harmonique oscillatoire (2.33) s’écrit,

F ext = F e = m a (4.2)

En substituant l’expression (4.1) de la loi de Hooke dans l’équation du mouvement, on


obtient,

ma = −kr (4.3)

Comme la force élastique F e = − k r est une force centrale orientée vers le point d’attache
du ressort, le mouvement a lieu dans un plan. Dans le cas où la vitesse initiale est nulle ou
orientée selon l’axe défini par le point d’attache du ressort et le point matériel, le mouvement
harmonique oscillatoire est rectiligne.
4.1 Oscillateur harmonique 43

4.1.3 Equation du mouvement harmonique oscillatoire


On considère ici uniquement des mouvements harmoniques oscillatoires rectilignes. On
choisit l’axe Ox qui relie le point d’attache du ressort et le point matériel et qui est orienté
positivement dans la direction du point matériel de masse m. La position s’écrit r = x ex
et l’accélération est donnée par a = ẍ ex . En projetant la loi vectorielle du mouvement os-
cillatoire harmonique (4.3) selon l’axe Ox, on obtient l’équation du mouvement harmonique
oscillatoire rectiligne,
m ẍ = − k x (4.4)

La pulsation de ce mouvement oscillatoire harmonique en absence de frottement est définie


comme,
r
k
ω= (4.5)
m
L’équation du mouvement harmonique oscillatoire (4.4) peut être mise sous la forme,

ẍ + ω 2 x = 0 ou ẍ = − ω 2 x (4.6)

L’équation (4.6) admet les solutions mathématiques suivantes,



− ω2 t
x (t) = e = e±i ωt = cos (ωt) ± i sin (ωt) (4.7)

où la deuxième identité est la formule d’Euler (Fig. 4.3) obtenue par inspection graphique
compte tenu du fait que les solutions mathématiques sont des nombres complexes de module
unité,
|e±i ωt |2 = e±i ωt e∓i ωt = e0 = 1

Im(x(t))

|e iwt |
sin(wt)
wt
Re(x(t))
cos(wt)

Figure 4.3 Le cercle trigonométrique de rayon unité dans le plan complexe, aussi appelé
le plan de Gauss, est le lieu géométrique des solutions |ei ωt |. La projection de |ei ωt | sur
l’axe réel Re (x (t)) donne cos (ωt) et la projection sur l’axe imaginaire Im (x (t)) donne
sin (ωt).

Cette solution est complexe, i.e. x (t) ∈ C, mais l’amplitude d’oscillation est réelle, i.e.
x (t) ∈ R. Les solutions physiques de l’équation mouvement harmonique oscillatoire (4.3)
sont donc des combinaisons linéaires réelles des solutions mathématiques linéairement
indépendantes (4.7) avec une pulsation ω et une pulsation − ω. Il y a donc deux types
de solutions physiques linéairement indépendantes,
ei ωt + e− i ωt ei ωt − e− i ωt Leonhard Euler
(i) x (t) = cos (ωt) = (ii) x (t) = sin (ωt) = (4.8)
2 2i
Si une équation différentielle admet des solutions linéairement indépendantes, la solution
générale est une combinaison linéaires de ces deux solutions,

x (t) = A cos (ωt) + B sin (ωt) (4.9)


44 Oscillateur harmonique et mouvement circulaire

où A et B sont des longueurs constantes qui dépendent des conditions initiales. En intro-
duisant le changement de variable suivant,

A = C cos ϕ et B = − C sin ϕ

la solution générale peut être exprimée comme,


 
x (t) = C cos (ωt) cos ϕ − sin (ωt) sin ϕ

En utilisant la formule de trigonométrie,

cos (ωt + ϕ) = cos (ωt) cos ϕ − sin (ωt) sin ϕ

la solution générale se réduit à (Fig. 4.4),

x (t) = C cos (ωt + ϕ) (4.10)

où ϕ est l’angle de déphasage et C est l’amplitude d’oscillation, qui dépendent des condi-
tions initiales.

x(t) = C cos(wt)

C j=0
t

Figure 4.4 Solution du mouvement oscillatoire sans frottement x (t) = C cos (ωt) d’am-
plitude C, de pulsation ω, de période T et d’angle de déphasage ϕ = 0.

L’amplitude C correspond à la longueur de déformation maximale de l’équation ho-


raire (4.10). Le déphasage ϕ correspond à un angle de translation de l’équation horaire (4.10).
La fréquence f d’oscillation est liée à la pulsation ω par,

ω = 2πf (4.11)

La période d’oscillation T est l’inverse de la fréquence,


1
T = (4.12)
f
L’unité physique de la période d’oscillation T dans le système international d’unités est la
seconde notée [ s ]. Par conséquent l’unité physique de la fréquence d’oscillation et de la
pulsation est notée [ 1/s ].

j=0
x(t) = - w2C cos(wt)
x(t) = - wC sin(wt)
x(t) = C cos(wt)
t

Figure 4.5 Graphique de la position x (t), de la vitesse ẋ (t) et de l’accélération ẍ (t) d’un
mouvement harmonique oscillatoire pour un angle de déphasage ϕ = 0. La vitesse est
déphasée d’un angle π/2 par rapport à la position et l’accélération est déphasée d’un angle
π par rapport à la position.

L’équation horaire (4.10) permet une identification plus claire des grandeurs physiques
4.1 Oscillateur harmonique 45

caractérisant le mouvement oscillatoire harmonique que l’équation (4.9). L’expression de la


vitesse est obtenue en dérivant l’équation horaire (4.10) par rapport au temps t (Fig. 4.5),

ẋ (t) = − ω C sin (ωt + ϕ) (4.13)

L’expression de l’accélération est obtenue en dérivant l’équation de la vitesse (4.13) par


rapport au temps t (Fig. 4.5),

ẍ (t) = − ω 2 C cos (ωt + ϕ) (4.14)

L’équation horaire (4.10) d’un mouvement harmonique oscillatoire peut aussi être ex-
primée explicitement en fonction de la fonction sinus en prenant un autre angle de déphasage
ϕ0 = ϕ + π/2 (Fig. 4.6),
x (t) = C sin (ωt + ϕ0 ) (4.15)

x(t) = C sin(wt)

C j’ = 0
t

Figure 4.6 Solution du mouvement oscillatoire sans frottement x (t) = C sin (ωt) d’am-
plitude C, de pulsation ω, de période T et d’angle de déphasage ϕ0 = 0.

L’expression de la vitesse est obtenue en dérivant l’équation horaire (4.15) par rapport au
temps t,
ẋ (t) = ω C cos (ωt + ϕ0 ) (4.16)

L’expression de l’accélération est obtenue en dérivant l’équation de la vitesse (4.16) par


rapport au temps t,
ẍ (t) = − ω 2 C sin (ωt + ϕ0 ) (4.17) écran

Il est possible d’observer un mouvement oscillatoire similaire pour un système en rotation.


Par exemple, dans le cas du pendule de torsion une barre rigide suspendue à un fil métallique laser

tendu oscille autour de l’axe correspondant au fil. On peut visualiser ces oscillations de faible
amplitude sur le mur de l’auditoire grâce à un faisceau laser réfléchi sur un miroir collé à la
barre.
Pendule de torsion
4.1.4 Conditions initiales
Jusqu’à présent, on a établi les formes générales (4.10) et (4.15) de l’équation horaire
d’un oscillateur harmonique. En toute généralité, le mouvement oscillatoire harmonique est
déterminé par deux paramètres : l’amplitude C et l’angle de déphasage ϕ ou ϕ0 . Il faut deux
conditions initiales pour déterminer ces deux paramètres qui donnent lieu à un mouvement
spécifique : une sur la position et l’autre sur la vitesse.
A titre d’exemple de mouvement spécifique, on considère un oscillateur harmonique avec
une déformation initiale x0 et une vitesse initiale nulle. La condition initiale sur la position
s’écrit,
x (0) = x0 (4.18)

et la condition initiale sur la vitesse s’écrit,

ẋ (0) = 0 (4.19)
46 Oscillateur harmonique et mouvement circulaire

En substituant la condition initiale (4.19) sur la vitesse dans les expressions (4.13) et (4.16)
de la vitesse, on en tire les angles de déphasage ϕ et ϕ0 ,
π
ϕ=0 et ϕ0 = (4.20)
2
En substituant la condition initiale (4.18) sur la position dans les expressions (4.10) et (4.15)
de la position, compte tenu des expressions des angles de déphasage (4.20), on en tire l’am-
plitude,
C = x0 (4.21)

En substituant les conditions (4.20) et (4.21) dans les expressions (4.10) et (4.15) de la
position, on montre que celles-ci sont identiques et s’expriment comme,
 π
x (t) = x0 cos (ωt) = x0 sin ωt + (4.22)
2

4.2 Oscillateur harmonique amorti


Mécanique § 2.5
L’oscillateur harmonique dont la dynamique est décrite uniquement par une force élastique
est un cas idéal. En réalité, la plupart des oscillateurs sont soumis à des forces de frottements
dues au milieu extérieur. Les oscillations d’une masse suspendue au bout d’un ressort sont
freinées par les frottements de l’air. Si on plonge cette masse dans un récipient rempli d’eau,
les forces de frottement jouent un rôle important. On va à présent examiner le modèle phy-
sique qui nous permettra de décrire la dynamique d’un oscillateur harmonique en présence
de frottements.
La démarche qu’on va adopter est la suivante. La première étape consiste à identifier les
Oscillateur amorti
forces agissant sur le point matériel. Après avoir établi ce bilan de forces, on peut énoncer la
loi du mouvement et la projeter pour obtenir l’équation du mouvement. La description for-
melle du système physique s’arrête là. On se livrera ensuite à une résolution mathématique
de ces équations différentielles du mouvement. On verra que cette équation différentielle
relativement simple a des solutions assez complexes. En particulier, il faut considérer trois
type d’amortissements qualitativement différents. A l’aide des solutions générales pour ces
trois types d’amortissements, on cherchera à déterminer des solutions particulières en te-
nant compte de conditions initiales identiques. Finalement on illustrera graphiquement ces
solutions particulières.

4.2.1 Loi du mouvement oscillatoire harmonique amorti


On considère un point matériel de masse m suffisamment faible pour pouvoir négliger son
poids P par rapport à la force élastique F e , i.e. P  F e . Les forces extérieures F ext sont
la force élastique F e et la force de frottement visqueux F f donnée par la loi de Stokes. Par
conséquent, la loi du mouvement harmonique oscillatoire amorti (2.33) s’écrit,
X
F ext = F e + F f = m a (4.23)

En substituant la loi de Hooke (4.1) et la loi de Stokes (3.3) dans la loi du mouvement (4.23),
celle-ci devient,
ma = −kr − bv (4.24)

4.2.2 Equation du mouvement harmonique oscillatoire amorti


On considère ici uniquement des mouvements harmoniques oscillatoires amorti rectilignes.
On choisit l’axe Ox qui relie le point d’attache du ressort et le point matériel, on obtient
l’équation du mouvement harmonique oscillatoire rectiligne,

m ẍ = − b ẋ − k x (4.25)
4.2 Oscillateur harmonique amorti 47

La pulsation de ce mouvement oscillatoire harmonique en absence de frottement est définie


comme,
r
k
ω0 = (4.26)
m
qui est différente de la pulsation ω du mouvement harmonique en présence de frottements.
Le facteur d’amortissment γ est défini comme,
b
γ= (4.27)
2m
Compte tenu des définitions (4.26) et (4.27), l’équation du mouvement (4.25) peut être mise
sous la forme,
ẍ + 2 γ ẋ + ω02 x = 0 (4.28)
La solution mathématique (4.7) du mouvement d’un oscillateur harmonique sans frottement
est une exponentielle imaginaire du type eiωt . De plus, en présence de frottement visqueux un
mouvement est exponentiellement amorti, comme c’est le cas pour le mouvement balistique
amorti selon l’axe horizontal qui contient un terme proportionnel à e− t/τ . Par conséquent,
l’équation du mouvement d’une oscillateur harmonique amorti (4.24) admet comme solu-
tion mathématique un produit des deux solutions mentionnées ci-dessus, c’est-à-dire une
exponentielle à argument complexe,
x (t) = e λ t (4.29)
où λ ∈ C. En substituant la solution (4.29) on obtient l’équation caractéristique qui doit
être satisfaite en tout temps t,
e λ t λ2 + 2γλ + ω02 = 0 λ2 + 2γλ + ω02 = 0

ainsi (4.30)
L’équation caractéristique (4.30) du deuxième ordre en λ a deux solutions complexes,
q q
λ1 = − γ + γ 2 − ω02 et λ2 = − γ − γ 2 − ω02 (4.31)
où λ1 , λ2 ∈ C. La solution mathématique générale est donc une combinaison linéaire de ces
deux solutions particulières,
x (t) = A1 e λ1 t + A2 e λ2 t (4.32)
où les coefficients A1 , A2 ∈ C. Le type d’amortissement d’un mouvement harmonique os-
cillatoire dépend de l’argument qui se trouve sous la racine carrée des solutions λ1 et λ2 .
Par conséquent, ce type dépend de la valeur respective de la pulsation ω0 et du facteur
d’amortissement γ. Il existe trois type d’amortissement : un amortissement faible si γ < ω0 ,
un amortissement fort si γ > ω0 et un amortissement critique si γ = ω0 .

4.2.3 Amortissement faible


La pulsation ω du mouvement harmonique oscillatoire avec frottement est définie comme,
q
ω= | γ 2 − ω02 | (4.33)
A l’aide de la définition (4.33), les solutions (4.31) de l’équation caractéristique s’écrivent,
λ1 = − γ + i ω et λ2 = − γ − i ω (4.34)
car γ 2 < ω02 pour un amortissement faible. L’équation horaire x (t) doit être réelle. Pour
qu’elle soit réelle, il faut que les coefficients A1 et A2 soient complexes conjugués, i.e. A1 = A
et A2 = A∗ . Ainsi, compte tenu des solutions (4.34) de l’équation caractéristique, la solution
générale (4.32) s’exprime comme,
x (t) = e− γ t A ei ωt + A∗ e− i ωt

(4.35)
En utilisant la formule d’Euler (4.7), la solution générale (4.35) devient,
 
x (t) = e−γt (A + A∗ ) cos (ωt) + (A − A∗ ) i sin (ωt) (4.36)
48 Oscillateur harmonique et mouvement circulaire

où A + A∗ = 2 Re (A) ∈ R et (A − A∗ ) i = − 2 Im (A) ∈ R, ce qui montre qu’il s’agit d’une


solution réelle. En introduisant le changement de variable suivant,

(A + A∗ ) = C cos ϕ et (A − A∗ ) i = − C sin ϕ (4.37)

la solution générale peut être exprimée comme,


 
x (t) = C e−γt cos (ωt) cos ϕ − sin (ωt) sin ϕ (4.38)

En utilisant la formule de trigonométrie,

cos (ωt + ϕ) = cos (ωt) cos ϕ − sin (ωt) sin ϕ (4.39)

la solution générale (4.38) se réduit à,

x (t) = C e−γt cos (ωt + ϕ) (4.40)

ce qui correspond à un mouvement oscillatoire harmonique dont l’amplitude C e−γt est


amortie exponentiellement (Fig 4.7).

x(t)

critique

fort

faible

Figure 4.7 Solution du mouvement harmonique oscillatoire avec frottement dans le cas
d’un amortissement faible, d’un amortissement fort et d’un amortissement critique avec
des conditions initiales identiques.

Il est possible d’observer un mouvement oscillatoire amorti faiblement similaire pour un


système en rotation. Par exemple, on peut construire un pendule de torsion formé d’un oeuf
suspendu à un fil métallique. On considère deux pendules à torsion analogue dont l’un est
constitué d’un oeuf cru et l’autre d’un oeuf cuit. Comment peut-on les distinguer ? L’oeuf
cru est liquide à l’intérieur et la rotation du liquide génère une force de frottement visqueux
interne à l’oeuf qui ralentit son mouvement de rotation oscillatoire. L’oeuf cuit est solide
et le frottement visqueux est négligeable. Ainsi, l’oeuf cru est faiblement amorti alors que
l’oeuf cuit ne l’est pas.
Oeuf cru et oeuf cuit
4.2.4 Amortissement fort
A l’aide de la définition (4.33), les solutions (4.31) de l’équation caractéristique s’écrivent,

λ1 = − γ + ω et λ2 = − γ − ω (4.41)

car γ 2 > ω02 pour un amortissement fort. L’équation horaire x (t) doit être réelle. Pour qu’elle
soit réelle, il faut que les coefficients A1 et A2 soient réels. Les temps d’amortissements
caractéristiques τ1 et τ2 sont définis comme,
1 1
τ1 = et τ2 = (4.42)
γ− ω γ+ω
4.2 Oscillateur harmonique amorti 49

Ainsi, compte tenu des solutions (4.41) de l’équation caractéristique, la solution


générale (4.32) s’exprime comme (Fig. 4.7),
t t
x (t) = A1 e− τ1 + A2 e− τ2 (4.43)

Lorsqu’il y a amortissement fort, le frottement est trop important par rapport à l’action de
la force élastique et l’oscillateur est amorti avant d’avoir pu osciller.

4.2.5 Amortissement critique


Pour un amortissement critique, i.e. γ = ω0 , ce qui implique que la pulsation ω = 0 et
que γ = 1/τ1 = 1/τ2 . L’amortissement critique est le cas limite des amortissements faible
et fort. Ainsi, les solutions générales de l’équations horaire (4.36) et (4.43) implique que la
solution générale pour un amortissement critique est proportionnelle à e− ω0 t . Le facteur
qui multiplie l’exponentielle e− ω0 t doit contenir deux paramètres réels indépendants A et
B puisque l’équation du mouvement (4.24) est une équation du deuxième ordre. Le facteur
du plus bas ordre en t est du type A + B t. Ainsi, la solution générale pour un mouvement
harmonique oscillatoire avec amortissement critique est (Fig. 4.7),

x (t) = (A + B t) e− ω0 t (4.44)

Lorsqu’il y a amortissement critique, le frottement compense l’action de la force élastique


et l’oscillateur est amorti au seuil de l’oscillation.

4.2.6 Conditions initiales


On considère un mouvement oscillatoire harmonique amorti spécifique déterminé par les
conditions initiales suivantes sur la position et la vitesse,

x (0) = x0 et ẋ (0) = 0 (4.45)

Amortissement faible
L’équation de la vitesse pour un amortissement faible est obtenue en prenant la dérivée
de l’équation horaire (4.40) par rapport au temps,
 
ẋ (t) = − Ce−γt γ cos (ωt + ϕ) + ω sin (ωt + ϕ) (4.46)

La condition initiale (4.45) sur la vitesse s’écrit,


γ γ 
tan ϕ = − ainsi ϕ = − arctan (4.47)
ω ω
La condition initiale (4.45) sur la position s’écrit,

x0 = C cos ϕ (4.48)

En utilisant l’identité trigonométrique


1
cos (± arctan θ) = √ (4.49)
1 + θ2
pour θ = γ/ω, l’amplitude C s’écrit explicitement,
r
x0 γ2
C= = x0 1 + 2 (4.50)
cos ϕ ω
L’équation horaire (4.40) du mouvement harmonique oscillatoire faiblement amorti satisfai-
sant les conditions (4.47) et (4.50) s’écrit alors explicitement,
r
γ 2 −γ t
 γ 
x (t) = x0 1 + 2 e cos ωt − arctan (4.51)
ω ω
50 Oscillateur harmonique et mouvement circulaire

Amortissement fort
L’équation de la vitesse pour un amortissement fort est obtenue en prenant la dérivée de
l’équation horaire (4.43) par rapport au temps,
A1 − τt A2 − τt
ẋ (t) = − e 1 − e 2 (4.52)
τ1 τ2
Les conditions initiales (4.45) sur la position et la vitesse s’écrivent,
A1 A2
A1 + A2 = x 0 et − − =0 (4.53)
τ1 τ2
Ainsi, les coefficients A1 et A2 sont donnés par,
x0 τ1 x0 τ2
A1 = et A2 = − (4.54)
τ1 − τ2 τ1 − τ2
L’équation horaire (4.43) du mouvement harmonique oscillatoire fortement amorti satisfai-
sant les conditions (4.54) s’écrit alors explicitement,
 
x0 t t
x (t) = τ1 e− τ1 − τ2 e− τ2 (4.55)
τ1 − τ2

Amortissement critique
L’équation de la vitesse pour un amortissement critique est obtenue en prenant la dérivée
de l’équation horaire (4.44) par rapport au temps,
 
ẋ (t) = B − ω0 (A + B t) e− ω0 t (4.56)

Les conditions initiales (4.45) sur la position et la vitesse s’écrivent,

A = x0 et B = A ω0 = x0 ω0 (4.57)

L’équation horaire (4.44) du mouvement harmonique oscillatoire amorti critique satisfaisant


les conditions (4.57) s’écrit alors explicitement,

x (t) = x0 (1 + ω0 t) e− ω0 t (4.58)

4.3 Mouvement circulaire et vitesse angulaire


Mécanique § 1.6 et 2.6
Un point matériel qui se déplace sur un cercle de rayon constant avec une vitesse sca-
laire constante suit un mouvement circulaire uniforme. Ce mouvement est caractérisé
par deux grandeurs qui sont le rayon constant R de la trajectoire circulaire et la vitesse
angulaire scalaire constante ω, qui a la même la même unité physique − notée [ 1/s ] −
et joue un rôle analogue à celui de la pulsation du mouvement oscillatoire harmonique. Un
mouvement circulaire uniforme est aussi caractérisé par une accélération centripète, car
d’après la 1 ère loi de Newton un point matériel suit un mouvement rectiligne uniforme en
absence d’accélération.

4.3.1 Abscisse curviligne


Un mouvement circulaire uniforme a lieu sur un cercle qui est une courbe particulière. La
distance parcourue par un point matériel P , à partir d’une origine O, le long d’une courbe
quelconque est l’abscisse curviligne notée s (t) (Fig. 4.8).

O P
s(t)

Figure 4.8 Abscisse curviligne s (t) d’un point matériel P .


4.3 Mouvement circulaire et vitesse angulaire 51

La vitesse scalaire v (t) le long de la courbe est définie comme la dérivée de l’abscisse
curviligne par rapport au temps,
ds
v (t) = (4.59)
dt
Il s’agit de la vitesse indiquée par le compteur de vitesse d’un véhicule.

4.3.2 Vitesse angulaire scalaire


L’abscisse curviligne d’un point matériel qui suit un mouvement circulaire uniforme sur
un cercle de rayon R constant est donnée par,

s (t) = R φ (t) où R = cste (4.60)

où φ est l’angle de rotation défini positif dans le sens trigonométrique (Fig. 4.9).

v(t)

a(t) P
f (t) s (t)
x
O R

Figure 4.9 Mouvement circulaire d’un point matériel P .

Compte tenu de la définition (4.59), la vitesse scalaire s’écrit,

v = R φ̇ (4.61)

La vitesse angulaire scalaire ω est définie comme la dérivée de la cordonnée angulaire


φ (t) par rapport au temps,
ω = φ̇ (4.62)

ainsi,
v
v = Rω et ω= (4.63)
R
Comme la vitesse scalaire v est constante pour un mouvement circulaire uniforme, il faut
que la vitesse angulaire scalaire soit également constante,

v = cste ainsi ω = cste (4.64)

En intégrant l’équation (4.62) par rapport au temps t, on exprime l’angle φ (t) en fonction
de la vitesse angulaire scalaire,
φ (t) = ωt (4.65)

4.3.3 Accélération centripète


On considère le mouvement circulaire uniforme de rayon R d’un point matériel P , centré
à l’origine O. Ce mouvement a lieu à vitesse angulaire ω constante dans le plan Oxy et le
point matériel se déplace dans le sens trigonométrique (Fig. 4.9). On décrit ce mouvement
52 Oscillateur harmonique et mouvement circulaire

en coordonnées cartésiennes. Le point matériel se trouve initialement sur l’axe Ox. Les
composantes cartésiennes du vecteur position r (t) sont
x (t) = R cos (ωt)
y (t) = R sin (ωt) (4.66)
z (t) = 0
En projetant le mouvement circulaire uniforme selon les axes cartésiens Ox et Oy, on obtient
deux mouvements harmoniques oscillatoires déphasés d’un angle de 90◦ (Fig. 4.10).

Figure 4.10 On observe sur un mur l’ombre projetée d’un pendule et d’une bille en mou-
vement circulaire uniforme. On peut ajuster la vitesse angulaire et superposer les deux
projections.

Les composantes cartésiennes du vecteur vitesse v (t) = ṙ (t) sont obtenues en dérivant
les composantes cartésiennes du vecteur position r (t) par rapport au temps t,
ẋ (t) = − R ω sin (ωt)
ẏ (t) = R ω cos (ωt) (4.67)
ż (t) = 0
p
et la vitesse scalaire v = ẋ2 + ẏ 2 + ż 2 = R ω. Les composantes cartésiennes du vecteur
accélération a (t) = v̇ (t) sont obtenues en dérivant les composantes cartésiennes du vecteur
vitesse v (t) par rapport au temps t,
ẍ (t) = − R ω 2 cos (ωt)
ÿ (t) = − R ω 2 sin (ωt) (4.68)
z̈ (t) = 0
En comparant les composantes (4.66) et (4.68) des vecteurs position r (t) et accélération
a (t), on en conclut que le vecteur accélération est radial et orienté dans la direction opposée
au vecteur position,
a (t) = − ω 2 r (t) (4.69)
Cette accélération dirigée vers le centre est appelée accélération centripète. La norme de
l’accélération centripète a (t) est donnée par,
p v2
kak = ẍ2 + ÿ 2 + z̈ 2 = R ω 2 = (4.70)
R

4.3.4 Vecteur vitesse angulaire


Pour un mouvement circulaire, le vecteur vitesse angulaire ω est orienté selon l’axe
de rotation. Pour un mouvement circulaire dans le plan Oxy qui a lieu dans le sens tri-
gonométrique, l’axe de rotation est l’axe Oz qui est normal au plan Oxy. Dans ce cas, le
vecteur vitesse angulaire ω est défini positivement selon l’axe Oz, i.e. ω = ω ez .
A présent, on établit deux relations vectorielles entre le vecteur position r, le vec-
teur vitesse v, le vecteur accélération a et le vecteur vitesse angulaire ω pour le
mouvement circulaire mentionné ci-dessus. Ces vecteurs sont exprimés en coordonnées
4.3 Mouvement circulaire et vitesse angulaire 53

cartésiennes comme r = (R cos (ωt) ,R sin (ωt) , 0), v = (− R ω sin (ωt) , R ω cos (ωt) , 0),
a = − R ω 2 cos (ωt) , − R ω sin (ωt) , 0 et ω = (0, 0, ω). Par conséquent, ces vecteurs sa-
tisfont les relations vectorielles importantes suivantes (Fig. 4.11),
v ≡ ṙ = ω × r
(4.71)
a ≡ v̇ = ω × ṙ = ω × v = ω × (ω × r)

v=w r
a = w (w r)
r

Figure 4.11 Les vecteurs positions r et accélération a sont radiaux, le vecteur vitesse v
est tangentiel et le vecteur vitesse angulaire ω est normal.

Le vecteur vitesse v est tangentiel à la trajectoire circulaire, car il est orthogonal au


vecteur position r qui est radial. La première relation (4.71) s’applique également dans le
cas où le vecteur position r n’est pas orthogonal au vecteur vitesse angulaire ω. Si le vecteur
position r est colinéaire au vecteur vitesse angulaire ω, le point matériel se trouve sur l’axe
de rotation et il reste immobile lors du mouvement circulaire. Le vecteur accélération a
est colinéaire au vecteur position r, car il est orthogonal aux vecteurs vitesse v et vitesse
angulaire ω qui sont orthogonaux au vecteur position r. En effet, en utilisant l’identité
vectorielle (1.43), la seconde relation vectorielle (4.71) s’écrit,
a = ω × (ω × r) = (ω · r) ω − (ω · ω) r = − ω 2 r (4.72)
car ω · r = 0 et ω · ω = ω 2 .
5
Coordonnées cylindriques, sphériques et
rotations

Jusqu’à présent, on a décrit le mouvement d’un point matériel en coordonnées


cartésiennes. Les coordonnées cartésiennes sont souvent les plus adaptées pour décrire
la dynamique d’un point matériel lorsque cette dynamique ne présente pas de symétrie par-
ticulière. Mais lorsque le point matériel se déplace par exemple sur une sphère ou un cylindre,
il est plus commode d’utiliser des coordonnées plus appropriées. Pour décrire un mouvement
de symétrie cylindrique on prendra des coordonnées cylindriques et pour décrire un mou-
vement de symétrie sphérique, on choisira des coordonnées sphériques. On peut faire le
contraire, mais cela n’est pas judicieux puisque les calculs sont beaucoup plus longs. On
choisit les bonnes coordonnées pour un problème spécifique avant tout pour des raisons pra-
tiques. On choisissant les bonnes coordonnées, on simplifie considérablement la résolution
mathématique du problème et on découvre plus facilement les propriétés dynamiques du
mouvement.

5.1 Coordonnées cylindriques


Mécanique § 1.7 et 2.7
Les coordonnées polaires ont été employées en premier par Bonaventura Cavalieri.
Un siècle plus tard, Leonhard Euler a étendu les coordonnées polaires à l’espace à trois
dimensions et a ainsi introduit les coordonnées cylindriques et sphériques. Les coordonnées
polaires sont particulièrement adaptées pour décrire un mouvement circulaire dans un plan et
les coordonnées cylindriques sont un choix judicieux pour décrire un mouvement qui présente
une symétrie cylindrique dans l’espace. C’est par exemple le cas d’un système formé d’un
feutre en mouvement relatif par rapport à un plateau horizontal circulaire (Fig. 5.1).

feutre
Bonaventura Cavalieri

Figure 5.1 Lorsque le feutre est relâché, il suit une ligne droite par rapport au sol et il
marque la trajectoire telle qu’elle est perçue dans le référentiel du plateau immobile ou du
plateau tournant.

D’abord, on introduit les coordonnées cylindriques. Ensuite, on va définir un repère cy-


lindrique lié au point matériel. On verra qu’on doit tenir compte du déplacement du repère
attaché au point matériel. Il est donc nécessaire de prendre en compte le mouvement du
repère cylindrique par rapport au repère cartésien. Le repère cartésien est un repère fixe
alors que le repère cylindrique est un repère mobile. On sera alors en mesure d’exprimer
les grandeurs cinématiques comme la position, la vitesse et l’accélération par rapport au
repère cylindrique.
Les coordonnées cylindriques (ρ, φ, z) d’un point matériel P sont trois grandeurs scalaires.
La première coordonnée est la distance ρ entre l’origine O et le point obtenu par projection
56 Coordonnées cylindriques, sphériques et rotations

du point P sur le plan horizontal contenant O. La deuxième coordonnée est l’angle φ qui
détermine l’orientation du plan vertical contenant les points O et P . La troisième coordonnée
est la hauteur z du point P , c’est-à-dire la distance entre les plans horizontaux contenant
respectivement l’origine O et le point matériel P (Fig. 5.2). Les coordonnées cartésiennes
(x1 , x2 , x3 ) s’expriment en termes des coordonnées cylindriques (ρ, φ, z) comme,
x1 = ρ cos φ x2 = ρ sin φ x3 = z (5.1)

x3
P

O x2
f
r
x1 P’

Figure 5.2 Coordonnées cylindriques (ρ, φ, z) du point matériel P .

Afin d’être en mesure de définir les repères associés aux coordonnées cylindriques, on in-
troduit la notion de ligne de coordonnée. Une ligne de coordonnée est le lieu géométrique
des points qui ont deux coordonnées fixes. En fixant deux coordonnées, on impose deux
contraintes mathématiques − c’est-à-dire deux équations − dans l’espace à trois dimensions
ce qui définit une droite ou une courbe, qui correspond à la ligne de coordonnée. Une ligne
de coordonnée est orientée dans le sens croissant de la coordonnée variable. En coordonnées
cylindriques, la première ligne de coordonnée (φ, z) est la demi-droite horizontale et ra-
diale d’angle d’inclinaison φ contenue dans le plan horizontal à la hauteur z. La deuxième
ligne de coordonnée (z, ρ) est le cercle horizontal de rayon ρ à la hauteur z. La troisième
ligne de coordonnée (ρ, φ) est la demi-droite verticale contenue dans le plan vertical d’angle
d’inclinaison φ, séparée de l’origine O par une distance ρ (Fig. 5.3).

x3
(r,f)
(z,r)

P
(f,z)

O x2
f

x1

Figure 5.3 Lignes de coordonnées cylindriques (φ, z), (z, ρ) et (ρ, φ) qui passent par le
point matériel P .

5.1.1 Repère cylindrique


A présent, on est en mesure de définir le repère cylindrique (P, eρ , eφ , ez ) lié au point
matériel P qui est un repère orthonormé direct construit géométriquement sur les lignes de
5.1 Coordonnées cylindriques 57

coordonnées. Le premier vecteur eρ est un vecteur unitaire orienté le long de la première


ligne de coordonnée (φ, z) où ρ varie. Le deuxième vecteur eφ est un vecteur unitaire tangent
à la deuxième ligne de coordonnée (z, ρ) où φ varie. Le troisième vecteur ez est un vecteur
unitaire orienté le long de la troisième ligne de coordonnée (ρ, φ) où z varie (Fig. 5.4). Comme
le repère est orthonormé, les vecteurs de base sont unitaires et orthogonaux,

eρ · eρ = eφ · eφ = ez · ez = 1
(5.2)
eρ · eφ = eφ · ez = ez · eρ = 0

De plus, ce repère est direct. Cela signifie que ces vecteurs satisfont la règle de la main droite,

eρ × eφ = ez eφ × ez = eρ ez × eρ = eφ (5.3)

x3

ez
ef

e3 er
z
O x2 O x2
e2 ef
r r
e1 f f
P’ f
e2
P’ f
er
x1 x1 e1

Figure 5.4 Repère cylindrique (P, eρ , eφ , ez ).

Les vecteurs de base du repère cylindrique sont exprimés en termes des vecteurs de base
du repère cartésien comme,

eρ = cos φ e1 + sin φ e2
eφ = − sin φ e1 + cos φ e2 (5.4)
ez = e3

Le repère cylindrique (P, eρ , eφ , ez ) est un repère mobile attaché au point matériel, ce qui
signifie que les vecteurs de base qui le composent peuvent changer d’orientation au cours
du temps en fonction du mouvement du point matériel P . Les vecteurs eρ et eφ changent
d’orientation lorsque l’angle φ change alors que le vecteur ez conserve son orientation verti-
cale en tout temps.

5.1.2 Vecteur position


Le repère cylindrique est un repère mobile attaché au point matériel P en rotation autour
d’un axe vertical. Ainsi, l’orientation des vecteurs unité eρ et eφ change au cours du temps. Le
vecteur position r = OP du point matériel P peut être exprimé comme la somme vectorielle
du vecteur horizontal OP 0 et du vecteur vertical P 0 P où le point P 0 est la projection du
point P sur le plan horizontal contenant l’origine O. Le vecteur OP 0 a une norme ρ et il est
colinéaire au vecteur unité eρ . Le vecteur P 0 P a une norme z et il est colinéaire au vecteur
unité ez . Ainsi, le vecteur position r du point matériel P en coordonnées cylindriques s’écrit,

r = ρ eρ + z ez (5.5)
58 Coordonnées cylindriques, sphériques et rotations

où le vecteur unité eρ est une fonction de l’angle φ compte tenu de la première relation (5.4).
Par conséquent, le vecteur position r est une fonction des coordonnées cylindriques ρ, φ et
z.

5.1.3 Vecteur vitesse


Lorsqu’un vecteur change de norme ou d’orientation au cours du temps sa dérivée tem-
porelle est non-nulle. Les vecteurs base e1 , e2 et e3 du repère cartésien sont des vecteurs
unitaires, ce qui signifie que leur norme est constante. Etant donné que le repère cartésien
est fixe, son orientation est aussi constante. Par conséquent, la dérivée temporelle des vec-
teurs de base du repère cartésien est nulle. Les vecteurs de base eρ , eφ et ez du repère
cylindrique sont des vecteurs unitaires, ce qui signifie que leur norme est constante. Vu que
le repère cylindrique est mobile son orientation varie. Par conséquent, la dérivée temporelle
des vecteurs de base du repère cylindrique peut être non-nulle. La dérivée temporelle des
expressions (5.4) des vecteurs de base du repère cylindrique s’écrit,
ėρ = φ̇ (− sin φ e1 + cos φ e2 ) = φ̇ eφ
ėφ = − φ̇ (cos φ e1 + sin φ e2 ) = − φ̇ eρ (5.6)
ėz = 0
Le vecteur vitesse v est la dérivée temporelle du vecteur position r. En dérivant le vecteur
position (5.5) exprimé en coordonnées cylindriques par rapport au temps, on obtient,
v = ṙ = ρ̇ eρ + ρ ėρ + ż ez + z ėz (5.7)
Compte tenu des expressions (5.6) de la dérivée temporelle des vecteurs de base, le vecteur
vitesse (5.7) se réduit à,
v = ρ̇ eρ + ρφ̇ eφ + ż ez (5.8)
L’interprétation géométrique du vecteur vitesse (5.8) exprimé en coordonnées cylindriques
est la suivante : le terme ρ̇ est la vitesse radiale horizontale, le terme ρφ̇ est la vitesse
tangentielle horizontale et le terme ż est la vitesse verticale.

5.1.4 Vecteur accélération


Le vecteur accélération a est la dérivée temporelle du vecteur vitesse v. En dérivant le
vecteur vitesse (5.8) exprimé en coordonnées cylindriques par rapport au temps, on obtient
 
a = v̇ = ρ̈ eρ + ρ̇ ėρ + ρ̇φ̇ + ρφ̈ eφ + ρφ̇ ėφ + z̈ ez + ż ėz (5.9)

Compte tenu des expressions (5.6) de la dérivée temporelle des vecteurs de base, le vecteur
accélération (5.9) se réduit à,
   
a = ρ̈ − ρφ̇2 eρ + ρφ̈ + 2ρ̇φ̇ eφ + z̈ ez (5.10)

L’interprétation physique du vecteur accélération (5.10) exprimé en coordonnées cylindriques


est la suivante : le terme ρ̈ est l’accélération radiale, le terme − ρφ̇2 est l’accélération cen-
tripète, le terme ρφ̈ est l’accélération tangentielle, le terme 2ρ̇φ̇ est l’accélération de Coriolis
et le terme z̈ est l’accélération verticale.
Gaspard-Gustave de
Coriolis
5.2 Coordonnées sphériques
Mécanique § 1.7 et 2.7
Les coordonnées sphériques sont un choix judicieux pour décrire un mouvement qui
présente une symétrie sphérique dans l’espace. C’est par exemple le cas d’une bille qui
se déplace dans une glissière hémisphérique en rotation (Fig. 5.5).
Les coordonnées sphériques (r, θ, φ) d’un point matériel P sont trois grandeurs scalaires.
La première coordonnée est la distance r entre l’origine O et le point matériel P . La deuxième
coordonnée est l’angle θ qui détermine l’inclinaison par rapport à la verticale de la droite
5.2 Coordonnées sphériques 59

Figure 5.5 Une bille roule dans un anneau vertical en rotation uniforme. A faible vitesse
angulaire, la bille oscille autour du bas de l’anneau. A vitesse plus élevée, la position
d’équilibre se déplace.

qui contient les points O et P . La troisième coordonnée est l’angle φ qui détermine l’orien-
tation du plan vertical contenant les points O et P (Fig. 5.6). Les coordonnées cartésiennes
(x1 , x2 , x3 ) s’expriment en termes des coordonnées sphériques (r, θ, φ) comme,

x1 = r sin θ cos φ x2 = r sin θ sin φ x3 = r cos θ (5.11)

x3
P

r
q

O x2
f

x1 P’

Figure 5.6 Coordonnées sphériques (r, θ, φ) du point matériel P .

En coordonnées sphériques, la première ligne de coordonnée (θ, φ) est la droite d’angle


d’inclinaison θ par rapport à la verticale contenue dans le plan vertical d’angle d’inclinaison
φ. La deuxième ligne de coordonnée (φ, r) est le cercle de rayon r contenu dans le plan
vertical d’angle d’inclinaison φ. La troisième ligne de coordonnée (r, θ) est le cercle de rayon
r sin θ contenu dans le plan horizontal à la hauteur r cos θ (Fig. 5.7).

5.2.1 Repère sphérique


A présent, on est en mesure de définir le repère sphérique (P, er , eθ , eφ ) lié au point
matériel P qui est un repère orthonormé direct construit géométriquement sur les lignes de
coordonnées. Le premier vecteur er est un vecteur unitaire orienté le long de la première
ligne de coordonnée (θ, φ) où ρ varie. Le deuxième vecteur eθ est un vecteur unitaire tangent
à la deuxième ligne de coordonnée (φ, r) où θ varie. Le troisième vecteur eφ est un vecteur
unitaire tangent à la troisième ligne de coordonnée (r, θ) où z varie (Fig. 5.8). Comme le
repère est orthonormé, les vecteurs de base sont unitaires et orthogonaux,
er · er = eθ · eθ = eφ · eφ = 1
(5.12)
er · eθ = eθ · eφ = eφ · er = 0
De plus, ce repère est direct. Cela signifie que ces vecteurs satisfont la règle de la main droite,

er × eθ = eφ eθ × eφ = er eφ × er = eθ (5.13)
60 Coordonnées cylindriques, sphériques et rotations
x3
(q,f)
(r,q)
P

(f,r)

O x2
f

x1

Figure 5.7 Lignes de coordonnées sphériques (θ, φ), (φ, r) et (r, θ) qui passent par le point
matériel P .

x3

x3
q er
er
P er
ef r q
P
O eq r
e3
q r P’
eq
O x2 O x2
e2 r sinq ef
f f f
e1 P’ e2
P’ f
er
x1 x1 e1

Figure 5.8 Repère sphérique (P, er , eθ , eφ ).

Les vecteurs de base du repère sphérique sont exprimés en termes des vecteurs de base du
repère cartésien comme,

er = sin θ cos φ e1 + sin θ sin φ e2 + cos θ e3


eθ = cos θ cos φ e1 + cos θ sin φ e2 − sin θ e3 (5.14)
eφ = − sin φ e1 + cos φ e2

Le repère sphérique (P, er , eθ , eφ ) est un repère mobile attaché au point matériel, ce qui
signifie que les vecteurs de base qui le composent peuvent changer d’orientation au cours
du temps en fonction du mouvement du point matériel P . Les vecteurs er , eθ changent
d’orientation lorsque les angles θ et φ changent et le vecteur eφ change d’orientation lorsque
l’angle φ change.

5.2.2 Vecteur position


Le repère sphérique est un repère mobile attaché au point matériel P en rotation autour
d’un axe vertical et d’un axe horizontal. Ainsi, l’orientation des vecteurs unité er , eθ et eφ
change au cours du temps. Le vecteur position r = OP du point matériel P a une norme r
et il est colinéaire au vecteur unité er . Ainsi, le vecteur position r du point matériel P en
5.2 Coordonnées sphériques 61

coordonnées sphériques s’écrit,

r = r er (5.15)

où le vecteur unité er est une fonction des angles θ et φ compte tenu de la première rela-
tion (5.14). Par conséquent, le vecteur position r est une fonction des coordonnées sphériques
r, θ et φ.

5.2.3 Vecteur vitesse


Les vecteurs de base er , eθ et eφ du repère sphérique sont des vecteurs unitaires, ce qui
signifie que leur norme est constante. Vu que le repère sphérique est mobile son orientation
varie. Par conséquent, la dérivée temporelle des vecteurs de base du repère sphérique peut
être non-nulle. La dérivée temporelle des expressions (5.14) des vecteurs de base du repère
sphérique s’écrit,

ėr = θ̇ (cos θ cos φ e1 + cos θ sin φ e2 − sin θ e3 ) + φ̇ sin θ (− sin φ e1 + cos φ e2 )


= θ̇ eθ + φ̇ sin θ eφ
ėθ = − θ̇ (sin θ cos φ e1 + sin θ sin φ e2 + cos θ e3 ) + φ̇ cos θ (− sin φ e1 + cos φ e2 ) (5.16)
= − θ̇ er + φ̇ cos θ eφ
ėφ = − φ̇ (cos φ e1 + sin φ e2 ) = − φ̇ eρ = − φ̇ (sin θ er + cos θ eθ )

où la dernière expression est déduite par inspection graphique (Fig. 5.9). Le vecteur vitesse

x3

er
P ef

e3 er
q r z
eq x3
O x2 er
e2 q
f r P er
e1 P’ r q
r
O eq r
x1 P’

Figure 5.9 Vecteur eρ exprimé dans le repère cartésien (O, e1 , e2 , e3 ) et dans le repère
sphérique (P, er , eθ , eφ ).

v est la dérivée temporelle du vecteur position r. En dérivant le vecteur position (5.15)


exprimé en coordonnées sphériques par rapport au temps, on obtient,

v = ṙ = ṙ er + r ėr (5.17)

Compte tenu de l’expression (5.16) de la dérivée temporelle du premier vecteur de base, le


vecteur vitesse (5.17) se réduit à,

v = ṙ er + rθ̇ eθ + rφ̇ sin θ eφ (5.18)

L’interprétation géométrique du vecteur vitesse (5.18) exprimé en coordonnées sphériques


est la suivante : le terme ṙ est la vitesse radiale, le terme rθ̇ est la vitesse tangentielle verticale
et le terme rφ̇ sin θ est la vitesse tangentielle horizontale.
62 Coordonnées cylindriques, sphériques et rotations

5.2.4 Vecteur accélération


Le vecteur accélération a est la dérivée temporelle du vecteur vitesse v. En dérivant le
vecteur vitesse (5.18) exprimé en coordonnées sphériques par rapport au temps, on obtient
   
a = v̇ = r̈ er + ṙ ėr + ṙθ̇ + rθ̈ eθ + rθ̇ ėθ + ṙφ̇ sin θ + rφ̈ sin θ + rφ̇ θ̇ cos θ eφ + rφ̇ sin θ ėφ
(5.19)
Compte tenu des expressions (5.16) de la dérivée temporelle des vecteurs de base, le vecteur
accélération (5.19) devient,
   
a = r̈ − rθ̇2 − rφ̇2 sin2 θ er + rθ̈ + 2ṙθ̇ − rφ̇2 sin θ cos θ eθ
  (5.20)
+ rφ̈ sin θ + 2ṙφ̇ sin θ + 2rφ̇ θ̇ cos θ eφ

L’interprétation physique du vecteur accélération (5.20) exprimé en coordonnées sphériques


est la suivante : le terme r̈ est l’accélération radiale, le terme rθ̇2 est l’accélération centripète
dans le plan vertical, le terme rφ̇2 sin2 θ est la projection radiale de l’accélération centripète
dans le plan horizontal, le terme rθ̈ est l’accélération tangentielle dans le plan vertical, le
terme 2ṙθ̇ est la composante nodale de l’accélération de Coriolis, le terme rφ̇2 sin θ cos θ est la
projection tangentielle de l’accélération centripète dans le plan horizontal, le terme rφ̈ sin θ
est l’accélération tangentielle dans le plan horizontal, les termes 2ṙφ̇ sin θ et 2rφ̇ θ̇ cos θ sont
les composantes azimutales de l’accélération de Coriolis.

5.3 Rotations
En dynamique, un mouvement quelconque peut s’exprimer comme la combinaison d’un
mouvement de translation et d’un mouvement de rotation. Il faut distinguer deux types
de mouvements de rotation, le premier est le mouvement de rotation d’un point matériel
− le mouvement circulaire est un exemple particulier − et le deuxième est le mouvement
de rotation propre d’un solide sur lui-même. Dans cette section, nous n’allons aborder que
le premier type de mouvement de rotation. La notion de rotation d’un point matériel fait
intervenir un axe et un angle de rotation. L’orientation de l’axe est définie par la règle du
tire-bouchon caractérisée mathématiquement par un produit vectoriel.
La notion de rotation est très intuitive, ce qui n’est pas le cas de son expression formelle.
Dans cette section, on va formaliser cette notion et l’exprimer dans un langage mathématique
rigoureux. La notion de rotation est centrale pour décrire la dynamique par rapport à un
repère cylindrique ou sphérique. La raison est la suivante : ces repères sont mobiles et en
rotation autour d’un ou plusieurs axes. Ces repères permettent de simplifier l’expression
mathématique de la dynamique en tenant compte des symétries du mouvement.

5.3.1 Rotation d’un repère direct mobile


On désire définir de manière générale la dérivée temporelle du vecteur position r d’un point
matériel P immobile par rapport à un repère direct mobile (P, e1 , e2 , e3 ) attaché au point
matériel P . Les mouvements de translation ne changent pas l’orientation du repère, seuls
les mouvements de rotation peuvent modifier l’orientation des vecteurs unitaires de base du
repère. On commence donc par déterminer l’évolution temporelle des vecteurs unitaires du
repère lors d’un changement d’orientation. Les vecteurs de base sont des vecteurs unitaires.
Ainsi,
ei · ei = 1 ∀ i = 1, 2, 3 (5.21)

La dérivée temporelle de l’équation (5.21) s’écrit explicitement,

ėi · ei + ei · ėi = 0 ainsi ėi · ei = 0 ∀ i = 1, 2, 3 (5.22)

Par conséquent, la dérivée temporelle des vecteurs de base est orthogonale aux vecteurs de
base puisque ce sont des vecteurs unitaires. On a déjà pu constater cet état de fait pour
5.3 Rotations 63

les vecteurs de base des repères cylindrique et sphériques. D’après l’équation (5.22), il doit
exister des grandeurs scalaires ωij telles que,
3
X
ėi = ωij ej où ωii = 0 ∀ i = 1, 2, 3 (5.23)
j=1

Les vecteurs de base sont orthogonaux. Ainsi,


ei · ek = δik ∀ i, k = 1, 2, 3 (5.24)
La dérivée temporelle de l’équation (5.24) s’écrit explicitement,
ėi · ek + ei · ėk = 0 ∀ i, k = 1, 2, 3 (5.25)
En substituant l’expression (5.23) dans l’équation (5.25), celle-ci devient
   
X 3 X3
 ωij ej  · ek + ei ·  ωkj ej  = 0 ∀ i, k = 1, 2, 3 (5.26)
j=1 j=1

Compte tenu de la relation d’orthogonalité (5.24), l’équation (5.26) se réduit à,


ωik + ωki = 0 ainsi ωki = − ωik ∀ i, k = 1, 2, 3 (5.27)

5.3.2 Formules de Poisson


D’après la relation (5.23), il existe une application linéaire qui envoie le vecteur (e1 , e2 , e3 )
sur le vecteur (ė1 , ė2 , ė3 ). Compte tenu de la condition (5.27), cette application linéaire est
représentée par une matrice antisymétrique 3 × 3. Elle s’écrit explicitement,
    
ė1 0 ω12 ω13 e1
ė2  = − ω12 0 ω23  e2  (5.28)
ė3 − ω13 − ω23 0 e3
La matrice antisymétrique est déterminée par trois grandeurs scalaires indépendantes, i.e.
ω12 , ω13 et ω23 . Le changement d’orientation des vecteurs unitaires du repère mobile est
dû à la rotation du repère. Cette rotation est décrite par le vecteur vitesse angulaire ω qui
a trois composantes scalaires. Pour que le vecteur vitesse angulaire ω soit orienté selon la
règle du tire-bouchon lors de la rotation du repère, les composantes ω1 , ω2 et ω3 du vecteur
ω sont définies comme,
ω1 ≡ ω23 et ω2 ≡ ω31 = − ω13 et ω3 ≡ ω12
Ainsi, l’application linéaire (5.28) est mise sous la forme,
    
ė1 0 ω3 − ω2 e1
ė2  = − ω3 0 ω1  e2  (5.29)
ė3 ω2 − ω1 0 e3
Les trois composantes de l’application linéaire (5.29) s’écrivent,
ė1 = ω3 e2 − ω2 e3 ė2 = ω1 e3 − ω3 e1 ė3 = ω2 e1 − ω1 e2 (5.30)
Le vecteur vitesse angulaire ω est exprimé explicitement en composantes par rapport au
repère mobile comme,
ω = ω1 e1 + ω2 e2 + ω3 e3 (5.31)
Compte tenu de l’expression (5.31) du vecteur vitesse angulaire, les équations (5.30) peuvent
être mises sous la forme,
ė1 = ω × e1 ė2 = ω × e2 ė3 = ω × e3 (5.32)
qui sont les formules de Poisson,
ėi = ω × ei ∀ i = 1, 2, 3 (5.33)
établies par Siméon Denis Poisson.
Siméon Denis Poisson
64 Coordonnées cylindriques, sphériques et rotations

5.3.3 Rotation du vecteur position


On considère un point matériel immobile par rapport à un repère en rotation pure, c’est-
à-dire sans translation. Dans ce repère le vecteur position du point matériel s’écrit explici-
tement,
r = r1 e1 + r2 e2 + r3 e3 où ṙ1 = ṙ2 = ṙ3 = 0 (5.34)
car il n’y a pas de mouvement relatif par rapport au repère. Le vecteur vitesse v est obtenu
en dérivant le vecteur position r par rapport au temps,
v = ṙ = r1 ė1 + r2 ė2 + r3 ė3 (5.35)
Compte tenu des formules de Poisson (5.32) et de l’expression (5.34) du vecteur position r,
l’expression (5.35) du vecteur vitesse v peut être mise sous la forme,
v = r1 (ω × e1 ) + r2 (ω × e2 ) + r3 (ω × e3 ) = ω × (r1 e1 + r2 e2 + r3 e3 ) = ω × r (5.36)
Par conséquent, en absence de translation, l’expression du vecteur vitesse (5.36) est la même
que celle obtenue dans le cas d’un mouvement circulaire (4.71). Ce n’est pas surprenant
puisqu’un mouvement circulaire est précisément un mouvement de rotation.

5.3.4 Vecteurs polaires et axiaux


Il existe trois symétries fondamentales en physique. La symétrie par renversement du
temps T , la symétrie par parité P et la symétrie par conjugaison de charge C. Un théorème
de mécanique quantique, établi par Julian Schwinger en 1951, appelé le théorème CP T ,
affirme que le produit de ces trois symétries n’est jamais violé lors d’une interaction entre
particules élémentaires. Autrement dit, les lois de la physique ne changent pas lorsque toutes
les particules impliquées dans une interaction sont remplacées par leur antiparticule, les trois
directions de l’espace sont inversées et le temps est inversé. Il est connu que la nature viole la
symétrie CP , mais il n’y a pas de preuve expérimentale de violation de la symétrie CP T . Une
telle violation serait contraire à la théorie de la relativité restreinte. L’application linéaire
de parité envoie les vecteurs de base (e1 , e2 , e3 ) sur leur opposé,
Julian Schwinger
(e1 , e2 , e3 ) −→ (− e1 , − e2 , − e3 ) (5.37)
Les vecteurs polaires changent de signe par l’application linéaire de parité. Comme
exemple, on peut citer les vecteurs position r, vitesse v, accélération a, quantité de mouve-
ment p et force F , qui se transforment par l’application de parité comme,
r −→ − r v −→ − v a −→ − a
(5.38)
p −→ − p F −→ − F
Les vecteurs axiaux ne changent pas de signe par l’application linéaire de parité. Comme
exemple, on peut citer le vecteur vitesse angulaire ω, le vecteur moment cinétique L et le
vecteur moment de force M que l’on définira ultérieurement,
ω −→ ω L −→ L M −→ M (5.39)
Le produit scalaire de deux vecteurs polaires ou de deux vecteurs axiaux donne un scalaire.
Si les deux vecteurs sont identiques, ce scalaire est le carré de la norme du vecteur. D’après les
définitions (5.38) et (5.39), le produit vectoriel de deux vecteurs polaires donne un vecteur
axial et le produit vectoriel d’un vecteur polaire et d’un vecteur axial donne un vecteur
polaire (Fig. 5.10).
5.3 Rotations 65

-r
v=w r

-v = w (-r) r

Figure 5.10 L’application linéaire de parité envoie le vecteur vitesse d’un point matériel
en mouvement circulaire sur son opposé : v = ω × r −→ − v = ω × (− r).
6
Contraintes, puissance, travail et énergie
cinétique

Dans cette section, on va d’abord examiner la notion de contrainte géométrique qui se


traduit par la présence de forces de contrainte − aussi appelées forces de liaison − dans
l’expression des lois du mouvement. Dans un deuxième temps, on étudiera la dynamique du
pendule mathématique. Troisièmement, on définira les notions de puissance, de travail et
d’énergie cinétique.

6.1 Contraintes géométriques


Mécanique § 1.9
Les lois de la dynamique décrivent le mouvement d’un point matériel en présence de
forces données. En général, le point matériel est soumis à des contraintes extérieures qui
déterminent la géométrie du mouvement. Ces contraintes géométriques imposent des
restrictions sur le mouvement. Si le mouvement du point matériel a lieu sur une sphère, son
rayon en coordonnées sphériques sera constant ce qui a des conséquences importantes sur
la dynamique. Si le mouvement a lieu sur une surface horizontale, la coordonné verticale
sera constante. Ces contraintes géométriques peuvent aussi s’exprimer en termes de forces
appliquées au point matériel. Un point matériel suspendu à un fil peut être en équilibre
seulement si une force de liaison ou de contrainte s’oppose à son poids. Cette force c’est la
tension dans le fil. Les forces de contraintes empêchent le point matériel d’accélérer dans des
directions particulières ce qui fait écho aux contraintes géométriques.
A présent, on va considérer quelques exemples concrets de contraintes géométriques qui
limitent le mouvement d’un point matériel. Le premier exemple est celui d’une bille − que
l’on peut considérer comme un point matériel − qui se déplace sur la surface intérieure
d’une demi-sphère creuse de rayon R. Pour modéliser la dynamique de la bille astreinte à se
déplacer sur cette surface, on utilise des coordonnées sphériques. En coordonnées sphériques,
la contrainte géométrique est que la coordonnée radiale r est égale au rayon R de la sphère, O

R
r = R = cste (6.1)
r
Le deuxième exemple est celui d’une bille qui se déplace sur la surface intérieure d’un en-
tonnoir. Pour modéliser la dynamique de la bille astreinte à se déplacer sur cette surface,
Demi-sphère
on utilise des coordonnées cylindriques puisque l’entonnoir présente une symétrique cylin-
drique, c’est-à-dire qu’il est invariant par rotation autour de l’axe vertical. L’intersection
entre l’entonnoir et un plan vertical contenant l’axe vertical de symétrique, donne lieu à
deux branches d’hyperbole. En coordonnées cylindriques, la contrainte géométrique est que
l’opposé de la coordonnée verticale z est une fonction hyperbolique de la coordonnée radiale z

ρ, i.e.
O r
1
z = − = cste (6.2)
ρ
Le troisième exemple est celui d’une bille qui se déplace sur une glissière avec un looping.
Pour modéliser la dynamique de la bille astreinte à se déplacer sur cette courbe, on utilise
Entonnoir
des coordonnées cartésiennes le long de la rampe et des coordonnées polaires au niveau du
cercle (Fig. 6.1).
68 Contraintes, puissance, travail et énergie cinétique

Figure 6.1 Le point matériel est astreint à se déplacer une glissière constituée d’une rampe
et d’un cercle.

6.1.1 Force de contrainte


En absence de force de contrainte, le mouvement du point matériel peut à priori avoir
lieu dans l’ensemble de l’espace à trois dimensions. Pour rendre compte des contraintes
géométriques dans l’expression de la loi du mouvement (2.33), il faut introduire des forces de
contrainte qui limitent le mouvement du point matériel à une région spécifique de l’espace.
Ces forces sont toujours normales à la surface physique sur laquelle le point matériel se
déplace et elles sont orthogonales au mouvement du point matériel en tout temps. Dans le
cas d’un point matériel posé sur une surface horizontale comme le sol, il existe une force
de contrainte N appelée la réaction normale du sol sur le point matériel qui est égale et
opposée au poids. Si cette force n’était pas incluse dans la loi du mouvement, le point
matériel s’enfoncerait dans le sol.
x3

x3
q
O x2 O r
f R a
a
r
x1
N ef
m a
eq
a er
eq er P
P

Figure 6.2 La bille de masse m est astreinte à se déplacer dans un anneau vertical en
rotation à vitesse angulaire constante ω autour de l’axe vertical Ox3 .

Pour lier les notions de contrainte géométrique et de force de contrainte, on va considérer


un exemple particulier qui est celui d’une bille de masse m coulissant dans un anneau
vertical de rayon R en rotation autour de son axe de symétrie vertical à vitesse angulaire
ω = cste (Fig. 5.5). Pour modéliser la dynamique de la bille astreinte à se déplacer sur cette
courbe en rotation qui définit une surface, on utilise des coordonnées sphériques (r, θ, φ). En
coordonnées sphériques, les contraintes géométriques sont que la coordonnée radiale r est
6.2 Pendule mathématique 69

égale au rayon R de l’anneau et que la dérivée temporelle de la coordonnée tangentielle φ


est la vitesse angulaire de rotation constante (Fig. 6.2),

r = R = cste ainsi ṙ = 0 et r̈ = 0
(6.3)
ω = φ̇ = cste ainsi ω̇ = 0

Les forces extérieures qui agissent sur le point matériel sont son poids P et la force de
réaction normale N de l’anneau sur le point matériel. Le poids P est orienté vers le bas.
Dans le plan de l’anneau, la bille peut se déplacer tangentiellement selon le vecteur eθ .
Par conséquent, en toute généralité, la force de réaction normale N a deux composantes
non nulles qui sont orthogonales au vecteur eθ . Ainsi, le poids P et de la force de réaction
normale N s’écrivent en coordonnées sphériques comme,

P = m g = mg (cos α er + sin α eθ ) = mg (− cos θ er + sin θ eθ )


(6.4)
N = Nr er + Nφ eφ

compte tenu du fait que α + θ = π, ainsi sin α = sin θ et cos α = − cos θ. Afin d’obtenir une
expression explicite pour la force de contrainte, on doit déterminer la dynamique de la bille
donnée par la loi du mouvement (2.33) qui s’écrit,
X
F ext = P + N = m a (6.5)

Compte tenu des contraintes géométriques (6.3) l’expression générale (5.20) de l’accélération
en coordonnées sphériques se réduit ici à,
   
a = − R θ̇2 + ω 2 sin2 θ er + R θ̈ − ω 2 sin θ cos θ eθ + 2Rω θ̇ cos θ eφ (6.6)

En projetant la loi vectorielle du mouvement (6.5) selon les trois axes de coordonnées er ,
eθ et eφ respectivement, compte tenu des expressions (6.4) pour les forces extérieures P et
N ainsi que de l’expression (6.6) pour l’accélération a, on obtient trois équations scalaires,
 
− mg cos θ + Nr = − mR θ̇2 + ω 2 sin2 θ
 
mg sin θ = mR θ̈ − ω 2 sin θ cos θ (6.7)

Nφ = 2mRω θ̇ cos θ

La première et la troisième équation donnent l’expression des coordonnées Nr et Nφ de la


force de réaction normale N . La deuxième équation est l’équation du mouvement de la bille
dans l’anneau qui dépend que de l’angle θ étant donné que les autres paramètres sont fixés.
Compte tenu des équations (6.7), la force de réaction normale N s’écrit explicitement,
 
N = m g cos θ − Rθ̇2 − Rω 2 sin2 θ er + 2mRω θ̇ cos θ eφ (6.8)

La force de réaction normale N est orthogonale au mouvement non-contraint qui a lieu selon
eθ où le degré de liberté est l’angle θ.
Prof. Tournesol

6.2 Pendule mathématique


Mécanique § 2.9
Il existe plusieurs types de pendules. Le pendule le plus simple a décrire est appelé le pen-
dule mathématique par opposition à un pendule plus réaliste que l’on appelle le pendule
physique. Dans le modèle du pendule mathématique, on considère que toute la masse est
contenue en un point suspendu au bout d’un fil de masse négligeable alors que dans le modèle
du pendule physique on ne néglige pas la masse et l’inertie du fil. Le pendule mathématique
est aussi parfois appelé pendule simple. Ici, on privilégiera le terme de pendule mathématique
pour des raisons qui deviendront plus claires en fin de section.
70 Contraintes, puissance, travail et énergie cinétique

6.2.1 Loi et équation du mouvement


On considère un pendule modélisé comme un point matériel astreint à se déplacer sur un
cercle de rayon ` constant dans un plan vertical et soumis au champ gravitationnel terrestre.
Pour modéliser mathématiquement ce pendule, on choisit des coordonnées polaires (r, φ)
dans un plan vertical, c’est-à-dire des coordonnées cylindriques (r, φ, z) avec la contrainte
géométrique z = 0 où z est la coordonnée horizontale. On prend comme origine O le point
d’attache du fil. La contrainte géométrique dans le plan d’oscillation du pendule est de
conserver la longueur ` du pendule (Fig. 6.3),

ρ = ` = cste ainsi ρ̇ = 0 et ρ̈ = 0 (6.9)

Figure 6.3 Le pendule mathématique est constitué d’une masse attachée à un fil de masse
négligeable oscillant dans un plan vertical. Un dynamomètre mesure la tension dans le fil,
qui est maximale lorsque le fil est vertical.

Les forces extérieures qui agissent sur le point matériel sont son poids P et la tension T
dans le fil. Le poids P est orienté vers le bas. Le pendule oscille dans un plan vertical et la
tension est orthogonale au mouvement tangentiel de la masse. Ainsi la tension T est radiale
et orientée vers le point d’attache puisqu’elle s’oppose au poids P . Ainsi, le poids P et la
tension T s’écrivent en coordonnées polaires dans le plan vertical comme (Fig. 6.4),

P = m g = mg (cos φ eρ − sin φ eφ ) et T = − T eρ (6.10)

O
x2

f
ef
T
m
f
er
P

x1

Figure 6.4 La masse m suspendue à l’extrémité d’un fil de longueur ` oscille dans le plan
vertical Ox1 x2 .

La dynamique de la masse est donnée par la loi du mouvement (2.33) qui s’écrit,
X
F ext = P + T = m a (6.11)
6.2 Pendule mathématique 71

Compte tenu des contraintes géométriques (6.9) l’expression générale (5.10) de l’accélération
en coordonnées cylindriques se réduit dans le plan vertical z = 0 à,

a = − `φ̇2 eρ + `φ̈ eφ (6.12)

En projetant la loi vectorielle du mouvement (6.11) selon les deux axes de coordonnées eρ
et eφ respectivement, compte tenu des expressions (6.10) pour les forces extérieures P et T
ainsi que de l’expression (6.12) pour l’accélération a, on obtient deux équations scalaires,
mg cos φ − T = − m`φ̇2
(6.13)
− mg sin φ = m`φ̈
La première équation (6.13) donne l’expression de la norme de la tension dans le fil qui
dépend de l’angle φ et de la vitesse angulaire scalaire φ̇,
 
T = m g cos φ + ` φ̇2 (6.14)

La deuxième équation (6.13) est l’équation du mouvement tangentiel de la masse m qui peut
être mise sous la forme,
g
φ̈ + sin φ = 0 (6.15)
`
ce qui montre que le mouvement est indépendant de la masse m.
Mouvement
6.2.2 Petites oscillations autour de l’équilibre indépendant de la
masse
Avant de discuter la solution générale de l’équation du mouvement (6.15), on va considérer
un cas particulier, celui des petites oscillations autour de la position d’équilibre lorsque le
fil est vertical, c’est-à-dire lorsque φ = 0. Dans la limite des petites oscillations, i.e. φ  1,
en utilisant la formule (1.21) du développement limité au premier ordre de la fonction sin φ
autour de φ = 0, on obtient,
 
d sin φ
sin φ ' sin 0 + (0) φ = 0 + cos 0 φ = φ (6.16)

Compte tenu de la relation (6.16) dans la limite des petites oscillations, l’équation du mou-
vement se réduit en bonne approximation à,
g
φ̈ + φ = 0 (6.17)
`
qui est l’équation d’une oscillateur harmonique où la variable est l’angle φ. D’après les
définitions (4.6), (4.11) et (4.12), la pulsation ω et la période d’oscillation T s’expriment
comme,
r s
g 2π `
ω= et T = = 2π (6.18)
` ω g
Ainsi, pour de petites oscillations autour de la position d’équilibre, la pulsation ω et la
période d’oscillation T du pendule sont indépendantes de l’angle initial φ0 .

6.2.3 Période d’oscillation générale


Pour de plus grands angles initiaux φ0 , l’expression de la période d’oscillation T dépend
de l’angle initial φ0 . Pour déterminer l’expression générale de la période d’oscillation T , on
la multiplie l’équation du mouvement (6.15) par φ̇ ce qui donne,
g
φ̇ φ̈ + φ̇ sin φ = 0 (6.19)
`
D’après la définition (1.13) de la dérivée temporelle d’une fonctionnelle, l’équation (6.19)
peut être écrite comme une dérivée temporelle,
 
d 1 2 g
φ̇ − cos φ = 0 (6.20)
dt 2 `
72 Contraintes, puissance, travail et énergie cinétique

La primitive de l’équation (6.20) par rapport au temps s’écrit,


1 2 g
φ̇ − cos φ = cste (6.21)
2 `
Pour déterminer la constante d’intégration, on substitue les conditions initiales sur l’angle
et la vitesse angulaire,
φ (0) = φ0 et φ̇ (0) = 0 (6.22)

dans l’équation (6.21) ce qui implique que,


1 2 g g
φ̇ − cos φ = − cos φ0 (6.23)
2 ` `
Etant donné que φ̇ = dφ/dt, on peut maintenant écrire l’intervalle de temps infinitésimal dt
comme fonction de la variation infinitésimale de l’angle dφ,
s
` dφ
dt = √ (6.24)
2g cos φ − cos φ0

L’expression de l’intervalle de temps entre le temps initial t = 0 et le temps t est obtenue


par intégration de l’équation (6.24) par rapport au temps,
Z t s Z
φ(t)
0 ` dφ0
t= dt = √ (6.25)
0 2g φ0 cos φ0 − cos φ0

Initialement, la position angulaire du pendule est φ0 et au bout d’un quart de période


d’oscillation T /4, le pendule se trouve au minimum en φ = 0. La période d’oscillation T est
la somme de quatre quarts de période identiques,
s Z
0
` dφ0
T =4 √ (6.26)
2g φ0 cos φ0 − cos φ0

L’équation (6.26) est une intégrale elliptique de première espèce. La résolution de cette
intégrale est longue et compliquée. Elle fait notamment intervenir les polynômes de Legendre.
Au final, la solution s’écrit,
 
Adrien-Marie s

!2   s  
` X  (2n)! 2n φ 0 ` 1 2 11 4
Legendre T = 2π sin  = 2π 1+ φ + φ + O (6)
g n=0 (2n n!)
2 2 g 16 0 3072 0
(6.27)
Le premier terme entre parenthèses de l’expression (6.27) de la période T correspond
à la période d’oscillation dans la limite des petites oscillations, i.e. φ0  1 (Fig. 6.5).
Le terme suivant est un terme correctif du 2e ordre en φ20 et le dernier terme est un
terme correctif du 4e ordre en φ40 (Tab. 6.1). On néglige les termes d’ordre supérieur.

2.4 1 2 11 4
φ0 φ φ
période T(f0)/T(0)

2.2 16 0 3072 0
2.0 10◦ 0.19 % 0.003 %
1.8 30◦ 1.7 % 0.027 %
1.6 60 ◦
6.9 % 0.43 %
1.4 90◦ 15 % 2.2 %
Pendule 1.2 120 ◦
27 % 6.9 %
1.0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3
f0 Table 6.1 Termes correctifs
HA HA
Figure 6.5 La période d’oscillation T du pendule HA HA
dépend de la position angulaire initiale φ0 .
6.3 Puissance, travail et énergie cinétique 73

6.3 Puissance, travail et énergie cinétique


§ 1.10
Dans cette section, on va définir des notions centrales en mécanique et plus généralement
en physique. Ces notions sont la puissance exercée par une force sur un point matériel, le
travail accompli par cette force et l’énergie cinétique du point matériel par rapport à un
référentiel donné.

6.3.1 Puissance
La puissance P d’une force F exercée sur un point matériel est une grandeur scalaire
extensive qui rend compte de la capacité de la force à accélérer ou à freiner le point matériel,
c’est-à-dire à modifier son état de mouvement. Le mouvement du point matériel est décrit par
le vecteur vitesse v qui est colinéaire au mouvement. Comme la puissance est une grandeur
scalaire, elle est donc définie comme le produit scalaire entre le vecteur force F et le vecteur
vitesse v,
P =F ·v (6.28)

L’unité de la puissance dans le système international d’unités est le Watt noté [ W =


kg m2 /s3 ], en honneur à James Watt qui a joué un rôle considérable dans le développement
des machines à vapeur.
Lorsque la force F est appliquée dans la direction du mouvement, elle accélère le point
James Watt
matériel, ainsi sa puissance est positive, i.e. P > 0. Lorsque la force F est appliquée dans la
direction opposée au mouvement, elle freine le point matériel, ainsi sa puissance est négative,
i.e. P < 0. Lorsque la force est appliquée dans une direction orthogonale au mouvement, sa
puissance est nulle, i.e. P = 0.
La notion de puissance est extrêmement utile en mécanique pour comparer quantitative-
ment le fonctionnement de différentes machines. Ces machines peuvent êtres des moteurs
mécaniques de tout genre (Fig. 6.6) ou même des muscles humains.

Figure 6.6 Moteur de Stirling : un brûleur rempli d’alcool à brûler échauffe l’air à
l’intérieur d’un cylindre, fournissant ainsi de la chaleur au moteur qui est activé par le
lancement du volant d’inertie. Moteur à dépression : moteur à air chaud qui aspire la
flamme au moyen d’une soupape (bruit caractéristique)

6.3.2 Travail
Le travail W12 effectué par une force F (t) exercée sur un point matériel est une grandeur
scalaire extensive correspondant à l’intégrale de la puissance exercée par cette force sur le
point matériel durant l’intervalle de temps [ t1 , t2 ],
Z t2 Z t2
W12 = P (t) dt = F (t) · v dt (6.29)
t1 t1

En toute généralité, on considère que la force peut dépendre de la position r (t), i.e. F (t) ≡
F (r (t)) ≡ F (r). Etant donné que le déplacement infinitésimal dr = v dt, compte tenu de
la définition (6.29), le travail W12 effectué par une force F le long de la trajectoire C12 entre
74 Contraintes, puissance, travail et énergie cinétique

une position initiale r (t1 ) et une position finale r (t2 ) est donnée par l’intégrale curviligne
suivante (Fig.6.7),
Z
W12 = F (r) · dr (6.30)
C12

L’unité du travail dans le système international d’unités est le Joule noté [ J = kg m2 /s2 ], en
honneur à James Prescott Joule qui a démontré l’équivalence entre travail et chaleur. A titre
d’exemple, on peut mentionner le travail effectué par les forces musculaires d’un randonneur
lors de l’ascension du Mont-Blanc ou le travail effectué par la force de frottement cinétique
lors du freinage d’un véhicule.
James Prescott Joule

1
r(t)
r (t +Dt)

Figure 6.7 Trajectoire courbe C12 qui va de la position initiale r (t1 ) à la position finale
r (t2 ).

Le travail infinitésimal δW effectué par la force F est l’intégrant de l’intégrale curvi-


ligne (6.30). Par définition du produit scalaire (1.28), le travail infinitésimal δW s’écrit
explicitement,
δW = F · dr = kF k kdrk cos θ (6.31)
où θ est l’angle entre le vecteur force F et le vecteur déplacement infinitésimal dr (Fig. 6.8).

F
q
trajectoire
r(t) F cos q r(t +Dt)

Figure 6.8 Projection de la force F sur la trajectoire.

6.3.3 Energie cinétique


L’énergie cinétique T est une grandeur scalaire et extensive associée au mouvement
d’un point matériel. En absence de force, l’énergie cinétique est une grandeur conservée,
c’est-à-dire qu’elle ne change pas au cours du temps. Le mouvement d’un point matériel en
absence de force est caractérisé entièrement par sa quantité de mouvement p et sa vitesse v.
L’énergie cinétique est une grandeur scalaire définie comme l’intégrale du produit scalaire
du vecteur vitesse v et du vecteur variation infinitésimale de quantité de mouvement dp.
Compte tenu de l’expression (2.30) de la quantité de mouvement p d’un point matériel de
masse m, l’énergie cinétique T s’écrit,
Z T Z p
1 p 0 p2
Z
1
T = dT 0 = v · dp0 = p · dp0 = = m v2 (6.32)
0 0 m 0 2m 2
6.3 Puissance, travail et énergie cinétique 75

où le symbole prime a été ajouté sur la variable d’intégration afin de ne pas la confondre
avec la borne d’intégration. L’unité de l’énergie cinétique T dans le système international
d’unités est le Joule noté [ J = kg m2 /s2 ].
L’expression (6.32) de l’énergie cinétique T est très intéressante. L’énergie cinétique s’ex-
prime comme le produit d’une grandeur extensive et d’une grandeur intensive. Ceci est le
cas de toutes les formes d’énergie qui sont étudiées dans le cadre de la thermodynamique.
Comme la quantité de mouvement est définie à une constante près, l’énergie cinétique l’est
aussi. De plus, comme l’énergie cinétique est une fonction quadratique de la vitesse v, il
doit exister un minimum d’énergie. En relativité restreinte, l’énergie cinétique n’est pas une
fonction quadratique de la vitesse, mais elle peut être écrite comme une somme de puissances
paires de la vitesse ce qui garantit aussi l’existence d’un minimum.
Historiquement, le concept de “force vive” dont l’expression est m v 2 a été proposé en pre-
mier par Gottfried Wilhelm Leibniz. Il a fallu attendre un siècle et demi pour voir apparaı̂tre
le terme d’énergie cinétique avec le bon facteur 1/2 dans les travaux de Gaspard-Gustave
de Coriolis.
Gottfried Wilhelm
6.3.4 Théorème de l’énergie cinétique Leibniz
P ext
Théorème 6.1 Le travail W12 effectué par la résultante des forces extérieures F sur
un point matériel de masse m d’une position initiale r (t1 ) à une position finale r (t2 ) est
égale à la variation d’énergie cinétique entre les temps t1 et t2 ,
W12 = T2 − T1 (6.33)
Démonstration La définition (6.30) du travail, la loi du mouvement (2.33) et la
définition (2.2) de l’accélération impliquent que,
Z t2 X Z t2 Z t2
dv
W12 = F ext · v dt = m a · v dt = m · v dt (6.34)
t1 t1 t1 dt
Compte tenu de la définition (6.32) de l’énergie cinétique, le travail (6.34) peut être mis sous
la forme,
Z t2   v=v2
d 1 2 1 2 1 1
= m v 22 − m v 21 = T2 − T1

W12 = m v dt = m v (6.35)
t1 dt 2 2 v=v 1 2 2

Pour conclure cette section, voici un tableau récapitulatif (Tab. 6.2) résumant les unités
physiques des grandeurs principales en mécanique exprimées dans le système international
d’unités. Après avoir établi un résultat physique, je vous encourage fortement − spécialement
durant l’examen − à procéder systématiquement à l’analyse dimensionnelle, c’est-à-dire
à vérifier la cohérence des unités physiques des grandeurs apparaissant dans l’expression
analytique du résultat. Cela vous évitera de faire des fautes d’inattention et améliorera
sensiblement votre note finale !

Table 6.2 Unités physiques des grandeurs mécaniques principales (système international).

Grandeur Unité (SI) Abréviation


Masse kilogramme [ kg ]
Longueur mètre [m]
Temps seconde [s]
Vitesse [ m/s ]
Accélération [ m/s2 ]
Force Newton [ N = kg m/s2 ]
Travail, énergie Joule [ J = kg m2 /s2 ]
Puissance Watt [ W = kg m2 /s3 ]
7
Energie potentielle, énergie mécanique et
résonance

Au chapitre 6, on a défini l’énergie cinétique d’un point matériel. Dans la première section,
on va montrer qu’on peut définir des énergies potentielles liées aux forces conservatives. La
somme des énergies cinétique et potentielles constitue l’énergie mécanique. Dans la deuxième
section, on va discuter la puissance dissipée par les forces non-conservatives ainsi que la
notion de stabilité d’une position d’équilibre. Au chapitre 4, on a étudié la dynamique d’un
oscillateur harmonique libre et d’un oscillateur harmonique amorti. Dans la troisième section
de ce chapitre, on va examiner la dynamique d’un oscillateur harmonique forcé couplé à une
force extérieure périodique. On verra que l’amplitude du mouvement dépend de manière
critique de la fréquence d’oscillation. Ce comportement est à l’origine du phénomène de
résonance.

7.1 Energie potentielle et énergie mécanique


Au chapitre 6, on a défini le travail W12 effectué par une force F sur un point matériel
d’une position initiale r 1 à une position finale r 2 comme l’intégrale du produit de la force
F et du déplacement dr le long de la trajectoire du point matériel. Cette intégrale cur-
viligne (6.30) dépend en général du chemin suivi. Cependant, il existe des forces appelées
forces conservatives − terme qui sera justifié ultérieurement − pour lesquelles l’intégrale
est indépendante du chemin suivi. Elle dépend uniquement de la position initiale r 1 et de
la position finale r 2 . Le travail effectué par une force conservative F c sur un point matériel
d’une position initiale r 1 à une position finale r 2 s’écrit donc,
Z r2 Z rs Z r2
0 0 0 0
W12 = F c (r ) · dr = F c (r ) · dr + F c (r 0 ) · dr 0 (7.1)
r1 r1 rs

7.1.1 Energie potentielle


A présent, on peut définir le potentiel associé à une force conservative F c , qui est une
fonction de la position r et correspond à l’énergie potentielle,
Z r
V (r) = − F c · dr 0 (7.2)
rs

où r s est une position de référence que l’on appelle la référence de potentiel et que l’on peut
choisir judicieusement. Le potentiel ou l’énergie potentielle est donc définie à une constante
près comme l’opposé de l’énergie cinétique. Compte tenu de la définition (7.2), on peut main-
tenant exprimer le travail (7.1) de la force conservative F c comme l’opposé de la variation
d’énergie potentielle,
Z r1 Z r2
W12 = − F c · dr 0 + F c · dr 0 = V (r 1 ) − V (r 2 ) ≡ − (V2 − V1 ) (7.3)
rs rs

L’unité de l’énergie potentielle dans le système international d’unités est le Joule noté [ J =
kg m2 /s2 ]. Il s’agit bien entendu de la même unité que le travail et l’énergie cinétique.

Théorème 7.1 La condition nécessaire et suffisante pour qu’il existe un potentiel ou une
78 Energie potentielle, énergie mécanique et résonance

énergie potentielle V (r) associée à une force F , c’est-à-dire pour que la force F soit conser-
vative, est que l’intégrale curviligne du travail infinitésimal F · dr sur tout chemin fermé soit
nulle,
I
F · dr 0 = 0 (7.4)

Démonstration Comme l’intégrale de la force doit être nulle sur tout chemin fermé, elle
doit être indépendante du chemin et dépend uniquement de la position initiale r 1 et de la
position finale r 2 . Pour un chemin fermé, la position initiale est identique à la position finale,
i.e. r 1 ≡ r 2 . Par conséquent,
I Z r1
F · dr 0 = F · dr 0 = 0 (7.5)
r1

Historiquement, c’est William John Macquorn Rankine qui a introduit la notion


William John
extrêmement utile d’énergie potentielle.
Macquorn Rankine

7.1.2 Energie mécanique


L’énergie mécanique E est une grandeur scalaire et extensive qui est la somme de
l’énergie cinétique T et de l’énergie potentielle totale V associée à toutes les forces conser-
vatives,
E =T +V (7.6)
L’unité de l’énergie dans le système international d’unités est le Joule noté [ J = kg m2 /s2 ].
Il s’agit bien entendu de la même unité que l’énergie cinétique et l’énergie potentielle.
Théorème 7.2 Si toutes les forces agissant sur le point matériel sont des forces conser-
vatives, alors l’énergie mécanique E est conservée, ce qui implique que l’énergie mécanique
E1 au temps initial t1 est égale à l’énergie mécanique E2 au temps final t2 ,
E1 = E2 = cste (7.7)
Démonstration En identifiant les expressions (6.33) et (7.3) du travail W12 , on obtient la
relation
T2 − T1 = − (V2 − V1 ) ainsi E1 = T1 + V1 = T2 + V2 = E2 = cste (7.8)

7.1.3 Force conservative


On désire à présent exprimer une force conservative F c en terme du potentiel V associé à
cette force. Pour ce faire, on calcule le travail infinitésimal effectué par la force conservative
F c lors d’un déplacement infinitésimal dr d’une position initiale r à une position finale
r + dr. Dans un repère cartésien, le vecteur position et le vecteur déplacement s’écrivent,
3
X 3
X
r= xi e i ainsi dr = dxi ei (7.9)
i=1 i=1

et ainsi le travail infinitésimal de la force conservative F c s’exprime comme,


3  
  X V (r + dxi ei ) − V (r)
F c · dr = − V (r + dr) − V (r) = − dxi
i=1
dxi
! (7.10)
3 3
X ∂V X ∂V dV
=− dxi = − ei · dr ≡ − · dr
i=1
∂xi i=1
∂xi dr

où le terme ∂V /∂xi signifie dérivée partielle du potentiel V par rapport à la coordonnée
xi qu’on calcule en maintenant constantes les autres coordonnées dans l’expression du po-
Gradients vertical et
tentiel V . Le gradient de potentiel ∇ V est un vecteur dont les coordonnées cartésiennes
radial
7.1 Energie potentielle et énergie mécanique 79

sont obtenues en prenant la dérivée partielle du potentiel V par rapport aux coordonnées
correspondantes,
3  
dV X ∂V ∂ ∂ ∂
∇V ≡ = ei où ∇= , , (7.11)
dr i=1
∂xi ∂x1 ∂x2 ∂x3

Le gradient de potentiel est la dérivée vectorielle du potentiel. En un point donné, il est


orienté dans la direction de la plus grande variation du potentiel et sa norme correspond à
la valeur de la pente. Les courbes de potentiel constant s’appellent des équipotentielles.
En chaque point d’une équipotentielle, le vecteur gradient de potentiel est orthogonal à
l’équipotentielle. En substituant la définition (7.10) dans l’équation (7.11), on peut exprimer
la force conservative F c comme l’opposé du gradient du potentiel associé,
Fc = −∇V (7.12)
On dit que la force dérive du potentiel qui est appelé une intégrale du mouvement.

7.1.4 Energie potentielle de pesanteur


L’énergie potentielle de pesanteur Vg (r) est l’énergie potentielle associée au poids
P = m g d’un point matériel de masse m. C’est une force conservative. D’après la
définition (7.2), l’énergie potentielle de pesanteur s’écrit,
Z r Z r ez
Vg (r) = − P · dr 0 = − m g · dr 0 (7.13)
rs rs z m
Etant donné que le champ gravitationnel g est vertical, on choisit un axe vertical Oz avec
une origine au niveau du sol. On prend comme référence de potentiel de pesanteur le plan g
horizontal qui passe par l’origine O, i.e. r s = 0. Le vecteur position r, le vecteur déplacement
infinitésimal dr et le champ gravitationnel g le long de l’axe vertical s’écrivent respective-
ment,
r = z ez dr = dz ez g = − g ez (7.14) O
Compte tenu des expressions vectorielles (7.14), l’énergie potentielle (7.13) est mise sous la
forme suivante,
Z r Z z Energie potentielle de
Vg (z) = − m g · dr 0 = mg dz 0 = mgz (7.15) pesanteur
0 0

D’après l’expression (7.12), le poids P du point matériel dérive de l’énergie potentielle de


pesanteur,
dVg dVg
P = − ∇ Vg = − =− ez = − mg ez = m g (7.16)
dr dz
A titre d’exemple, on peut mentionner le yo-yo qui transforme de l’énergie potentielle de
pesanteur en énergie cinétique et vice versa, en conservant l’énergie mécanique.
Yo-yo
7.1.5 Energie potentielle élastique
L’énergie potentielle élastique Ve (r) est l’énergie potentielle associée à la force
élastique F e = − k r exercée sur un point matériel par un ressort de constante élastique
k. C’est une force conservative. D’après la définition (7.2), l’énergie potentielle élastique
s’écrit,
Z r Z r
Ve (r) = − F e · dr 0 = k r 0 · dr 0 (7.17) Fe ex
rs rs

On choisit un axe horizontal Ox le long du ressort avec une origine au niveau du point O x
de suspension du point matériel au repos. On prend comme référence de potentiel élastique
Energie potentielle
le plan vertical qui passe par l’origine O, i.e. r s = 0. Le vecteur position r et le vecteur
élastique
déplacement infinitésimal dr le long de l’axe horizontal s’écrivent respectivement,
r = x ex dr = dx ex (7.18)
80 Energie potentielle, énergie mécanique et résonance

Compte tenu des expressions vectorielles (7.18), l’énergie potentielle (7.17) est mise sous la
forme suivante,
Z r Z x
0 0 1
Ve (x) = k r · dr = k x0 dx0 = kx2 (7.19)
0 0 2
D’après l’expression (7.12), la force élastique F e exercée sur le point matériel dérive de
l’énergie potentielle élastique,
Pendule de
Wilberforce dVe dVe
F e = − ∇ Ve = − =− ex = − kx ex = − k r (7.20)
dr dx
A titre d’exemple, on peut mentionner le pendule de Wilberforce qui transforme de l’énergie
potentielle élastique de translation en énergie potentielle élastique de rotation et en énergie
cinétique.

7.2 Puissance dissipée, équilibre et stabilité


Dans cette section, on va d’abord démontrer que les forces non-conservatives, qu’on appelle
des forces dissipatives, dissipent de l’énergie mécanique. Dans un deuxième temps, on
va montrer qu’on peut déterminer analytiquement l’expression des positions d’équilibre en
dérivant l’expression de l’énergie potentielle totale. On étudiera aussi leur stabilité.

7.2.1 Puissance mécanique dissipée


On considère un point matériel de masse m sur lequel s’applique une force extérieure
conservative F cext (t) et une force extérieure non-conservative ou dissipative F nc
ext
(t). La
somme des forces extérieures s’écrit,
X
F ext (t) = F cext (t) + F nc
ext
(t) (7.21)

La force conservative dérive du potentiel associé,

F cext (t) = − ∇ V (r (t)) (7.22)

L’énergie potentielle s’écrit,


V (t) ≡ V (r (t)) (7.23)

La puissance mécanique dissipée Pnc (t) est définie comme la dérivée de l’énergie mécanique
E (t) par rapport au temps,
dE (t)
Pnc (t) = (7.24)
dt
Compte tenu de la définition (7.6) de l’énergie mécanique E (t), de l’expression (6.32)
de l’énergie cinétique T (t), de l’expression (7.23) de l’énergie potentielle V (t), de la
définition (2.1) de la vitesse, de la définition (2.2) de l’accélération et de la définition (7.11)
du gradient de potentiel, la puissance mécanique dissipée (7.24) peut être mise sous la forme,

 
dE(t) d  d 1 2
Pnc (t) = = T (t) + V (t) = m v (t) + V (r (t))
dt dt dt 2
(7.25)
dv (t) dV (r (t)) dr (t)  
= m v (t) · + · = m a (t) + ∇ V (r (t)) · v (t)
dt dr (t) dt
La loi du mouvement (2.33) pour le point matériel s’écrit,
X
Antoine Laurent de F ext (t) = m a (t) (7.26)
Lavoisier
Compte tenu de l’expression (7.22) des forces conservatives et de la loi du mouvement (7.26),
la puissance mécanique dissipée (7.25) se réduit à,
X 
Pnc (t) = F ext (t) − F cext (t) · v (t) = F nc
ext
(t) · v (t) (7.27)
7.2 Puissance dissipée, équilibre et stabilité 81

ce qui montre que la dissipation d’énergie mécanique est due uniquement à la force non-
conservative ou dissipative.
A titre d’exemple, on peut considérer la puissance mécanique dissipée par une force de frot-
tement visqueux F f (t) = − b v (t) où b > 0 en régime laminaire. D’après l’équation (7.27),
la puissance mécanique dissipée s’écrit alors,
Pnc (t) = F f (t) · v (t) = − b v 2 (t) < 0 (7.28)
La puissance mécanique dissipée est négative ce qui signifie que le point matériel perd de
l’énergie mécanique. Or, Antoine Laurent de Lavoisier a très justement affirmé : “Rien ne
se perd, rien ne se crée, tout se transforme”. En réalité, l’énergie mécanique dissipée par la
force de frottement se transforme en une autre forme d’énergie appelée l’énergie thermique
comme vous le verrez au deuxième semestre au cours de thermodynamique, qui est une
extension de la mécanique permettant d’inclure toutes sortes d’autres formes d’énergie.
Thermodynamique
7.2.2 Position d’équilibre et stabilité (parties 1, 2)
On considère le mouvement d’un point matériel en absence de force non-conservative ce
qui implique la conservation de l’énergie mécanique E. A l’équilibre, l’énergie cinétique (6.32)
est nulle. Compte tenu de la définition de l’énergie mécanique (7.6),
T =0 ainsi E = V = cste (équilibre) (7.29)
La dynamique du point matériel est caractérisée par une seule variable qui correspond à un
degré de liberté. Cette variable appelée coordonnée généralisée et notée q, peut être soit
une position soit un angle, i.e. q ∈ {x, y, z, θ, φ}. A l’équilibre, en q = q0 , la condition (7.29)
sur l’énergie potentielle V (q) associée à la force conservative F c s’écrit,

dV
=0 (équilibre) (7.30)
dq q=q0
ce qui signifie que l’état d’équilibre correspond à un extrémum de l’énergie potentielle. Pour
étudier la stabilité de la position d’équilibre q0 , il faut considérer la dynamique du point
matériel au voisinage de la position d’équilibre. Le développement limité au 2e ordre de
l’énergie potentielle V (q) autour de la position d’équilibre q0 s’écrit,
1 d2 V

dV 2
(q − q0 ) + O q 3

V (q) = V (q0 ) + (q − q 0 ) + 2
(7.31)
dq q=q0
2 dq q=q0

Compte tenu de la condition (7.30), le développement limité (7.31) au voisinage de l’équilibre


se réduit à,
1 d2 V

2
(q − q0 ) + O q 3

V (q) = V (q0 ) + 2
(7.32)
2 dq q=q0

Compte tenu des expressions (7.11) et (7.12), la force conservative F c est donnée par,
dV
Fc = −∇V = − eq (7.33)
dq
où eq est le vecteur unité tangent à la ligne de coordonnée q. La position d’équilibre q0
est stable si le signe de la dérivée seconde de l’énergie potentielle est positif car la force
conservative F c ramène le point matériel vers la position d’équilibre dans son voisinage. La
position d’équilibre q0 est instable si le signe de la dérivée seconde de l’énergie potentielle
est négatif car la force conservative F c éloigne le point matériel de la position d’équilibre
dans son voisinage (Fig. 7.1).

7.2.3 Stabilité du pendule mathématique


A titre d’exemple, on va déterminer la stabilité des positions d’équilibre d’un pendule
mathématique constitué d’un point matériel de masse m suspendu à l’extrémité d’un fil de
longueur ` oscillant dans un plan vertical. Le degré de liberté est l’angle d’inclinaison du fil
du pendule q = φ. On prend comme référence de potentiel la surface horizontale passant
82 Energie potentielle, énergie mécanique et résonance
V(q) V(q)
instable
stable
Fc Fc

Fc Fc

q q
q0 q0

Figure 7.1 La position d’équilibre q0 est stable si d2 V /dq 2 |q=q0 > 0 et instable si
d2 V /dq 2 |q=q0 < 0

par le point matériel lorsque le fil est vertical et que le point matériel se trouve à sa position
la plus basse. La coordonnée verticale s’écrit alors z = ` (1 − cos φ). Compte tenu de la
définition (7.15), l’énergie potentielle de pesanteur est donnée par,
Vg (φ) = mg` (1 − cos φ) (7.34)
D’après la condition (7.30), à l’équilibre le pendule satisfait la condition,

f dVg
= mg` sin φ0 = 0 ainsi φ0 ∈ {0, π} (7.35)
dφ φ=φ0
m
O Pour déterminer la stabilité des positions d’équilibre φ0 = 0 et φ0 = π, on calcule la dérivée
seconde de l’énergie potentielle de pesanteur Vg (φ),
Pendule
d2 Vg

mathématique
= mg` cos φ0 (7.36)
dφ2 φ=φ0
On en conclut que la position d’équilibre inférieure φ0 = 0 est stable car,
d2 Vg

= mg` > 0 (position stable) (7.37)
dφ2 φ=φ0 =0
et que la position d’équilibre supérieure θ0 = π est instable car,
d2 Vg

= − mg` < 0 (position instable) (7.38)
dφ2 φ=φ0 =π

7.3 Résonance
Mécanique § 2.10
La résonance d’un système physique soumis à une force périodique externe donne lieu
à une amplification de son amplitude d’oscillation pour une fréquence bien précise appelée
la fréquence de résonance et pour des multiples de cette fréquence appelés des har-
moniques. Cette résonance peut être de nature acoustique ou mécanique, dans le cas du
tube d’air d’un trombone ou de la vibration de tiges (Fig. 7.2). Elle peut aussi être de na-
ture électrique ou magnétique, dans le cas d’un circuit RLC ou de l’imagerie par résonance
magnétique.
Imagerie par
résonance magnétique 7.3.1 Oscillateur harmonique forcé
Pour étudier ce phénomène de résonance très courant en physique, on va considérer le
modèle mécanique le plus simple, à savoir un oscillateur harmonique forcé amorti par
des frottements visqueux et excité par une force extérieure périodique. Dans ce modèle, un
point matériel de masse m est suspendu à un ressort de constante élastique k et de longueur
à vide l0 . Le ressort est attaché à un vibreur qui exerce sur lui une force périodique de
fréquence modulable.
Les forces extérieures F ext sont le poids P = m g du point matériel, la force élastique
7.3 Résonance 83

Figure 7.2 Trombone de Koenig : à certaines fréquences acoustiques précises, le son


est amplifié ; le système acoustique résonne. Tiges : A certaines fréquences de vibra-
tions mécaniques précises, l’amplitude des vibrations augmente ; les tiges d’une longueur
spécifique résonnent.

F e = − k r, la force de frottement visqueux F f = − b v et la force d’entraı̂nement périodique


F (t) = F0 cos (ω t) eX d’amplitude F0 et de pulsation ω générée par le vibreur où eX est
le vecteur unitaire orienté vers le bas. Par conséquent, la loi du mouvement harmonique
oscillatoire forcé (2.33) s’écrit,

m g − b v − k r + F0 cos (ωt) eX = m a (7.39)

On choisit l’origine O de l’axe vertical OX − orienté positivement vers le bas − au niveau du

Figure 7.3 Oscillateur harmonique forcé constitué d’un point matériel de masse m sus-
pendu à un ressort de constante élastique k, de longueur à vide `0 attaché à un vibreur.

point d’attache du ressort au vibreur lorsque le vibreur ne vibre pas (Fig. 7.3). La projection
des vecteurs r, v, a et g selon l’axe OX s’écrit, Johann Samuel
Koenig
r = (X − l0 ) eX v = Ẋ eX a = Ẍ eX g = g eX (7.40)

Compte tenu des expressions (7.40), la projection de la loi du mouvement selon l’axe OX
s’écrit,
mg − bẊ − k (X − l0 ) + F0 cos (ωt) = mẌ (7.41)

A l’aide du changement de variables suivant,


mg
x = X − l0 − ainsi ẋ = Ẋ et ẍ = Ẍ (7.42)
k
l’équation du mouvement (7.41) peut être mise sous la forme suivante,

mẍ + bẋ + kx = F0 cos (ωt) (7.43)

En utilisant l’expression (3.22) du temps d’amortissement τ et l’expression (4.26) de la


pulsation ω0 , et en introduisant l’intensité de l’accélération d’entraı̂nement a0 exprimée
84 Energie potentielle, énergie mécanique et résonance

comme,
F0
a0 = (7.44)
m
l’équation du mouvement de l’oscillateur forcé (7.43) peut être mise sous la forme suivante,
1
ẍ + ẋ + ω02 x = a0 cos (ωt) (7.45)
τ

7.3.2 Régimes transitoire et stationnaire


La solution générale de l’équation différentielle (7.45) correspond à une combinaison
linéaire de deux types de mouvements. Avant d’enclencher le vibreur, lorsque l’intensité
a0 de l’accélération d’entraı̂nement est nulle, i.e. a0 = 0, l’équation du mouvement (7.45) est
celle d’un oscillateur harmonique amorti par les frottement visqueux du fluide environnant
− généralement de l’air ou de l’eau. Si on attend suffisamment longtemps, le mouvement
propre de l’oscillateur harmonique est entièrement amorti par le frottement visqueux. Alors,
le mouvement l’oscillateur harmonique est complètement déterminé par la force d’excitation
F (t), c’est-à-dire qu’il acquiert la même pulsation ω que la force d’excitation. La solu-
tion mathématique de l’équation du mouvement (7.45) x (t) est la somme de la solution
de l’équation homogène xh (t), définie par a0 = 0, et d’une solution particulière xp (t) vers
laquelle tend le système à suffisamment grand temps,

x (t) = xh (t) + xp (t) (7.46)

Au chapitre 4, on a établi que pour un oscillateur harmonique amorti, l’amplitude d’oscilla-


tion C e− t/τ décroı̂t exponentiellement au cours du temps,

xh (t) = C e− t/τ cos (ωh t + ϕh ) (7.47)

où ωh est la pulsation du mouvement oscillatoire amorti en absence d’excitation et ϕh est


l’angle de déphasage. La solution particulière xp (t) de pulsation ω indépendante de ωh est
donnée par,
xp (t) = ρ cos (ωt + ϕ) (7.48)

où ρ est l’amplitude d’oscillation et ϕ est l’angle de déphasage dû au frottement visqueux
qui provoque un retard de la réponse du système par rapport à l’excitation générée par le
vibreur.
En présence d’une force d’excitation périodique, il existe ainsi deux régimes que l’on peut
distinguer qualitativement et quantitativement. Lorsqu’on enclenche le vibreur au temps
initial, i.e. t = 0, jusqu’à un temps qui est de l’ordre de grandeur du temps d’amortissement,
i.e. t ∼ τ , il y a coexistence des oscillations propres du système et des oscillations dues
à la force d’excitation. Il s’agit du régime transitoire caractérisé qualitativement par
l’interférence entre des oscillations de pulsations différentes qui ont des amplitudes du même
ordre de grandeur et génèrent de ce fait des battements perceptibles (Fig. 7.4),

xh (t) ∼ xp (t) (régime transitoire) (7.49)

Pour un temps qui est beaucoup plus grand que le temps d’amortissement, i.e. t  τ ,
l’amplitude des oscillations propres du système devient négligeable par rapport à l’amplitude
des oscillations générées par la force d’excitation périodique. Le mouvement de l’oscillateur
harmonique est alors entièrement déterminé par la force d’excitation périodique. Il s’agit du
régime stationnaire.

x (t) ' xp (t) car xh (t)  xp (t) (régime stationnaire) (7.50)

La réponse du système à la force d’excitation en régime stationnaire s’appelle la réponse


harmonique. On va à présent étudier cette réponse.
7.3 Résonance 85

Figure 7.4 En faisant interférer deux diapasons résonnant à des fréquences différentes on
entend des battements.

7.3.3 Réponse harmonique


En régime stationnaire, la solution de l’équation du mouvement (7.45) est donc de la
forme,
x (t) = ρ cos (ωt + ϕ) (7.51)

Pour déterminer l’expression de l’amplitude ρ et du déphasage ϕ de la réponse harmonique,


on introduit une solution stationnaire de l’équation du mouvement (7.45) déphasée d’un
angle π/2 par rapport à x (t), ce qui signifie qu’on effectue la transformation ωt → ωt − π/2
dans l’expression (7.51) de x (t) pour obtenir,

y (t) = ρ sin (ωt + ϕ) (7.52)

L’équation du mouvement (7.45) s’écrit en terme de la variable y et de ses dérivées tempo-


relles comme,
1
ÿ + ẏ + ω02 y = a0 sin (ωt) (7.53)
τ
En prenant la somme de l’équation (7.45) et de l’équation (7.53) multipliée par i et en
exprimant cette somme en terme de la variable z = x + iy, compte tenu de la formule
d’Euler (4.7), on obtient,
1
z̈ + ż + ω02 z = a0 eiωt (7.54)
τ
Compte tenu de la formule d’Euler (4.7), la solution stationnaire de l’équation du mouve-
ment (7.54) s’écrit,
z (t) = z0 eiωt où z0 = ρ eiϕ (7.55)

En substituant la solution stationnaire (7.55) dans l’équation du mouvement (7.54), on


obtient la condition suivante,
 ω 
− ω 2 + i + ω02 z0 eiωt = a0 eiωt (7.56)
τ
Ainsi, l’amplitude complexe z0 s’écrit,
a0 ω02 − ω 2 − i (ω/τ )
z0 = = a 0 (7.57)
ω02 − ω 2 + i (ω/τ ) 2
(ω02 − ω 2 ) + (ω/τ )
2

D’après la définition (7.55), l’amplitude réelle ρ est donnée par le module de z0 ,


a0
ρ = |z0 | = q (7.58)
2 2
(ω02 − ω 2 ) + (ω/τ )

et la tangente de l’angle de déphasage ϕ est donné par le rapport des parties imaginaire et
réelle de z0 ,

ρ sin ϕ Im ρ eiϕ Im (z0 ) ω/τ
tan ϕ = = iϕ
= =− 2 (7.59)
ρ cos ϕ Re (ρ e ) Re (z0 ) ω0 − ω 2
86 Energie potentielle, énergie mécanique et résonance

Par définition, l’amplitude réelle ρ est maximale à la résonance. Ceci est le cas lorsque le
dénominateur de la fraction dans l’expression (7.58) est minimal. Le système atteint donc
la fréquence de résonance − en réalité la pulsation de résonance − lorsque,
ω = ω0 (fréquence de résonance) (7.60)
D’après l’expression (7.59), on constate que l’angle de déphasage est maximal à la résonance,

π
ϕ=−
(déphasage à la résonance) (7.61)
2
Le rapport des amplitudes à fréquence nulle et à fréquence de résonance est donné par
(Fig 7.5),
ρ (ω0 )
= ω0 τ (7.62)
ρ (0)

12
10
8 w0t = 10
r(w)/r(0)

6
4 w0t = 4
2
w 0t = 2
0
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 1.4 1.6
w/w0

Figure 7.5 Amplitude de l’oscillateur harmonique forcé en fonction de la fréquence d’ex-


citation. L’amplitude est normalisée à l’amplitude à fréquence nulle. La fréquence est nor-
malisée à la fréquence de résonance.

Au chapitre 3, on a montré que plus la viscosité du fluide est faible plus le temps d’amor-
tissement τ sera élevé. Par conséquent, comme le rapport des amplitudes à la fréquence de
résonance (7.62) est proportionnel à τ , plus la viscosité du milieu est faible plus l’amplitude
à la fréquence de résonance sera grande pour une excitation donnée. Par exemple, l’ampli-
tude à la fréquence de résonance sera plus grande dans l’air que dans l’eau, ce qui paraı̂t
assez intuitif.
Le plus célèbre exemple historique de résonance est probablement celui de la destruction
du pont de Tacoma en 1940 due au vent (Fig. 7.6). Le pont de Tacoma s’est effondré quand
un fort vent a généré une résonance dont l’amplitude est devenue si grande que la structure
du pont n’a plus pu résister.

Figure 7.6 Le pont de Tacoma peu avant sa rupture. Un modèle de résonance mécanique
responsable de la destruction du pont.

Un deuxième exemple de résonance mécanique est celui de l’oscillation de pendules dis-


posés sur un fil. En faisant osciller le premier pendule, les autres pendules se mettent aussi
à osciller (régime transitoire). Après un certain temps, seulement le premier et le quatrième
7.3 Résonance 87

continuent à osciller et les autres deviennent immobiles, c’est le régime transitoire. En effet,
le premier pendule (rouge) apla même longueur que le quatrième et donc la même pulsation
parce que la pulsation ω = g/` d’un pendule dépend de sa longueur (Fig. 7.7).

Figure 7.7 En faisant osciller le premier pendule, les autres pendules se mettent aussi à
osciller (régime transitoire). Après un certain temps, seulement le premier et le quatrième
continuent à osciller et les autres deviennent immobiles (régime stationnaire). En effet, le
premier pendule (rouge) a la pmême longueur que le quatrième et donc la même pulsation
parce que la pulsation ω = g/l d’un pendule dépend de sa longueur.

Un troisième exemple est de la synchronisation de métronomes posés sur une seule plaque
en bois. Lorsque la plaque est posée sur des cylindres et qu’elle est ainsi libre d’osciller
latéralement, les métronomes se synchronisent par résonance à travers la plaque. Lorsque la
plaque n’est plus libre d’osciller, les métronomes se désynchronisent (Fig. 7.8).

Figure 7.8 Six métronomes de même fréquence d’oscillation oscillent sur une même plaque
de bois. Lorsque la plaque peut rouler sur deux cylindres en Plexiglas, les métronomes se
synchronisent, sinon ils se désynchronisent.

Un quatrième exemple est celui de la destruction d’un verre par résonance acoustique à
l’aide d’ultrasons générés par un haut-parleur (Fig. 1.1). Destruction d’une
verre par résonance
8
Loi d’action-réaction, collisions

Au chapitre 2, on a énoncé les deux premières lois de Newton qui déterminent la dynamique
d’un point matériel. Dans la première section de ce chapitre, on va énoncer la 3e loi de Newton
qui détermine l’interaction dynamique entre des points matériels au sein d’un système. Dans
la deuxième et la troisième partie de cette section, on abordera l’étude des collisions entre
des points matériels au sein d’un système de points matériels.

8.1 Loi d’action-réaction


Mécanique § 1.17
La 3e loi de Newton appelée aussi loi d’action-réaction décrit l’interaction entre
deux ou plusieurs points matériels. Un ensemble de deux ou plusieurs points matériels en
interaction est appelé un système de points matériels. Dans le cas d’un système de points
matériels, il faut distinguer les forces extérieures F αext exercées sur les points matériels
Pα par l’extérieur des forces intérieures F αint exercées sur les points matériels Pα par
les autres points matériels du système. Les deux premières lois de Newton sont définies en
termes de forces extérieures exercées sur un point matériel. Ces lois restent valables pour un
système de points matériels.

8.1.1 3e loi de Newton


La 3e loi de Newton est énoncée par Newton dans ses Principia Mathematica de la
manière suivante :

L’action est toujours égale à la réaction ; c’est-à-dire que les actions de deux corps l’un
sur l’autre sont toujours égales et de sens contraires.

En termes plus modernes, on dirait simplement :

Un point matériel 1 qui exerce une force F 1→2 sur un point matériel 2 subit une force
de réaction F 2→1 d’intensité égale, de même direction mais de sens opposé, exercée par
le point matériel 2.

La 3e loi de Newton s’écrit donc simplement comme,


Isaac Newton
F 1→2 + F 2→1 = 0 (8.1)

8.1.2 Forces intérieures et extérieures


Pour illustrer la différence entre des forces intérieures et extérieures, on considère un
système constitué de deux points matériels de masses égales reliées entre elles par un fil
de masse négligeable passant par deux poulies. Si les masses sont égales, le système est à
l’équilibre. On peut virtuellement décomposer le système en deux. Evidemment, la force
F 2→1 exercée par le point matériel 2 sur le fil sera égale et opposée à la force F 1→2 exercée
90 Loi d’action-réaction, collisions

par la masse 1 sur le fil en vertu de la 3e loi de Newton. Ainsi, la résultante des forces
d’action et de réaction est nulle (Fig. 8.1).

F2 1
F1 2
1 2 1 2

P1 P2 P1 P2

Figure 8.1 Les forces F 1→2 et F 2→1


sont intérieures au système alors que les poids P 1
et P 2 sont des forces extérieures.

Dans le cas de ce système (Fig. 8.1), les forces intérieures sont les tensions dans le fil
puisque ces tensions F 1→2 et F 2→1 sont générées par les masses qui appartiennent au
système. Les forces extérieures sont les poids P 1 et P 2 des masses qui sont dus à l’interaction
gravitationnelle de la terre qui n’appartient pas au système.
Les notions de forces intérieures et extérieures dépendent du choix de système de points
matériels. Par exemple, si le système est la terre et un avion, alors le poids de l’avion est
une force intérieure au système. Si le système est l’avion sans la terre, le poids est une
force extérieure. Comme autre exemple de force intérieure, on peut mentionner les forces de
cohésion exercées entre les atomes au sein d’un solide.

8.1.3 Conservation de la quantité de mouvement


Un système de points matériels est isolé s’il n’y a pas d’interaction avec l’extérieur. En
mécanique, il n’y a pas de force extérieure agissant sur un système isolé. On considère un
système constitué de deux points matériels 1 et 2 en interaction. Soit p1 et p2 les quantités
de mouvement de ces points matériels et F 1→2 et F 2→1 les forces d’interaction exercées par
un point matériel sur l’autre. La loi du mouvement (2.33) appliquée séparément à chaque
sous-système formé d’un point matériel s’écrit,
dp1 dp2
F 2→1 = et F 1→2 = (8.2)
dt dt
Compte tenu des lois du mouvement (8.2) et de la 3e loi de Newton (8.1), la variation de la
quantité mouvement totale du système p = p1 + p2 s’écrit,
dp d (p1 + p2 ) dp1 dp
= = + 2 = F 2→1 + F 1→2 = 0 ainsi p = p1 + p2 = cste
dt dt dt dt
(8.3)
Par conséquent, pour un système isolé ou un système pour lequel la force résultante est
nulle, la quantité de mouvement totale est conservée. Cette loi de conservation joue un rôle
très important dans l’étude des collisions.
A titre d’exemple, on peut mentionner le mouvement d’un homme sur un chariot. Lorsque
l’homme monte sur le chariot, les deux sont initialement immobiles par rapport au référentiel
d’inertie de l’auditoire, c’est-à-dire que la quantité de mouvement totale du système constitué
de l’homme et du chariot est nulle. Lorsque l’homme se déplace vers la droite, le chariot se
déplace vers la gauche et vice versa afin que la quantité de mouvement totale du système reste
nulle en vertu du principe de conservation de la quantité de mouvement totale (Fig. 8.2).
Le deuxième exemple est celui d’un chariot contenant un cylindre rempli d’eau pouvant
rouler sur un rail horizontal : l’eau s’échappe du bas du réservoir avec une quantité de mou-
vement horizontale à la sortie. Par le principe de conservation de la quantité de mouvement
totale, le chariot se déplace en sens inverse de l’écoulement de l’eau (Fig. 8.3). Si on attache
un wagon au chariot et que l’eau se déverse dans le wagon, l’écoulement de l’eau est interne
au système et le système reste immobile.
8.2 Collisions 91

Figure 8.2 Par conservation de la quantité de mouvement totale, lorsqu’un homme se


déplace sur le chariot ce dernier se déplace dans le sens contraire.

Figure 8.3 Le chariot se déplace dans le sens opposé à l’écoulement de l’eau en absence
de wagon. Si l’eau s’écoule dans un wagon récepteur accroché au chariot, l’ensemble reste
immobile.

8.2 Collisions
Mécanique § 1.12 et
Les collisions entre des points matériels sont caractérisées par un impact ou choc qui 2.12
conserve la quantité de mouvement totale du système. En général, dans le modèle le plus
simple, on peut considérer que les points sont en mouvement rectiligne uniforme et que
durant un temps très court, lorsque l’impact a lieu, il y a une discontinuité de la quantité
de mouvement.
Il y a deux types de collisions qu’il s’agit de distinguer, des collisions élastiques
d’une part et des collisions inélastiques d’autre part. Les collisions élastiques conservent
l’énergie cinétique du système et les collisions inélastiques ne la conservent pas. Expérience CMS -
Il existe touts sortes de collisions comme celle de deux boules de billard ou celle de par- CERN
ticules fondamentales dans le détecteur de l’expérience CMS de l’accélérateur de particules
LHC, i.e. Large Hadron Collider, au CERN.

8.2.1 Impulsion
La durée d’un choc peut être mesurée en frappant avec un marteau sur une enclume
en acier ou sur un bloc de plomb. Le circuit électrique est fermé lorsque le marteau est
en contact avec l’enclume ou le bloc. Le résultat est visualisé sur un oscilloscope. Comme
l’enclume est plus dure que le bloc, le choc est plus court avec l’enclume qu’avec le bloc parce
qu’un matériau plus dur absorbe moins bien les chocs qu’un matériau plus mou (Fig. 8.4).
La durée du choc entre le marteau et l’enclume ou entre le marteau et le bloc de plomb
est suffisamment courte pour qu’on puisse raisonnablement considérer que la variation de
quantité de mouvement a lieu durant un intervalle de temps infinitésimal dt. L’impulsion I
est définie comme la variation de quantité de mouvement dp due à l’action de la force F
durant le choc,
I = dp = F dt (8.4)

compte tenu de la 2e loi de Newton (2.19). Soit deux points matériels 1 et 2 qui entrent en
92 Loi d’action-réaction, collisions

Figure 8.4 Mesure de durée d’un choc entre un marteau et une enclume ou un marteau
et un bloc de plomb.

collision. D’après la définition (8.4), leurs impulsions lors du choc sont données par,
I 1 = dp1 = F 2→1 dt et I 2 = dp2 = F 1→2 dt (8.5)
Par conséquent, compte tenu de la 3e loi de Newton, l’impulsion totale I durant le choc est
donnée par,
I = I 1 + I 2 = F 2→1 + F 1→2 dt = 0

(8.6)
ce qui signifie que l’impulsion est nulle durant le choc, en accord avec le principe de conser-
vation de la quantité de mouvement.
A titre d’exemple, on peut mentionner l’impulsion transmise à une cible par une balle de
fusil ou l’effet de recul d’un glisseur sur un rail à air lors du tir d’un projectile (Fig. 8.5).

Figure 8.5 Lors de l’impact de la balle de fusil, il a une impulsion transmise au bois, ce qui
fait osciller la cible, contrairement au verre qui se brise. Lors de l’explosion du combustible
(H2 ) le glisseur subit un effet de recul pour que l’impulsion totale soit nulle.

8.2.2 Choc élastique


On considère un choc élastique ou une collision élastique entre deux points matériels de
masse m1 et m2 respectivement. Le premier point matériel se déplace initialement selon un
axe horizontal Ox et le second point matériel est initialement au repos donc sa quantité de
mouvement initiale est nulle, i.e. p2i = 0, dans le référentiel d’inertie choisi (Fig. 8.6). Ce
choc élastique est caractérisé par la conservation de la quantité de mouvement totale p et
de l’énergie cinétique totale T du système. Les bilans de la quantité de mouvement et de
l’énergie cinétique juste avant et juste après le choc s’écrivent,
p1i + p2i = p1f + p2f où p2i = 0 (8.7)
T1i + T2i = T1f + T2f où T2i = 0 (8.8)

Les projections de l’équation de bilan de la quantité de mouvement (8.7) selon les axes
Ox et Oy s’écrivent respectivement,
p1i = p1f cos θ1 + p2f cos θ2 et 0 = p1f sin θ1 − p2f sin θ2 (8.9)
8.2 Collisions 93
Initial Final
p 1f
y y
m1
p 1i p 2i = 0
q1
x x
m1 m2 q2
m2

p 2f

Figure 8.6 Choc élastique d’un point matériel de quantité de mouvement initiale p1i
contre un point matériel initialement au repos, i.e. p2i = 0. Les quantités de mouvement
finales p1f et p2f sont dans le plan Oxy.

En élevant au carré les équations (8.9), on obtient,


2
(p1i − p1f cos θ1 ) = p22f cos2 θ2 et p21f sin2 θ1 = p22f sin2 θ2 (8.10)

La somme des équations (8.10) s’écrit,


2
(p1i − p1f cos θ1 ) + p21f sin2 θ1 = p22f (8.11)

Comme l’énergie cinétique s’écrit T = m v 2 /2 = p2 /2m, la loi de conservation de l’énergie


cinétique (8.8) peut être exprimée comme,

p21i p21f p22f m2 2


p22f = p1i − p21f

= + ainsi (8.12)
2m1 2m1 2m2 m1
L’identification des équations (8.11) et (8.12) donne
   
m2 2 m2
1+ p1f − 2 p1i p1f cos θ1 + 1 − p21i = 0 (8.13)
m1 m1

En divisant l’équation (8.13) par p21i , on obtient une équation du 2e degré en p1f /p1i dont
les solutions sont,
( s )
2

p1f m1 v1f v1f m1 m 2
= = = cos θ1 ± cos2 θ1 − 1 − 2 (8.14)
p1i m1 v1i v1i m1 + m2 m1

Masses égales
On considère le cas particulier où les masses sont égales, i.e. m1 = m2 . Dans ce cas, le
principe de conservation de la quantité de mouvement (8.7) et le principe de conservation
de l’énergie cinétique (8.8) se réduisent à,

v 1i = v 1f + v 2f (8.15)
v 21i = v 21f + v 22f (8.16)

En élevant au carré l’équation (8.15), on obtient,

v 21i = v 21f + 2 v 1f · v 2f + v 22f (8.17)

La différence entre les équations (8.17) et (8.16) se réduit à la condition,

 si v 1f 6= 0 et v 2f 6= 0 alors θ1 + θ2 = π

v 1f · v 2f = 0 ainsi 2 (8.18)
 si v 1f = 0 alors v 2f = v 1i

A titre d’exemple, on peut mentionner la collision entre deux pucks de masse égale sur une
table à air horizontale (Fig. 8.7). En réalité, dans cet exemple l’angle entre les pucks est
légèrement inférieur à 90◦ dû à la rotation propre des pucks.
94 Loi d’action-réaction, collisions

Figure 8.7 Le puck bleu lancé depuis la gauche heurte le puck blanc initialement au repos.
Après le choc, l’angle entre les trajectoires des deux pucks est légèrement inférieur à 90◦ .

Choc rectiligne
On considère un choc élastique qui a lieu en ligne droite, i.e. θ1 = θ2 = 0. Pour un tel
choc, cos θ1 = cos θ2 = 1, et l’équation (8.14) se réduit à,
( s )
v1f m1 m22 m1 ± m2
= 1± = (8.19)
v1i m1 + m2 m21 m1 + m2

La solution mathématique (8.19) avec le signe + est à rejeter car si la vitesse finale v1f du
point matériel 1 était égale à sa vitesse initiale v1i , cela signifierait qu’il n’y a pas eu de
choc ! Par conséquent, la solution physique s’écrit,
m1 − m2
v1f = v1i (8.20)
m1 + m2
L’expression (8.12) de la conservation de l’énergie cinétique peut être mise sous la forme,
1 2 1 2 1 2 2 m1 2 2

m1 v1i = m1 v1f + m2 v2f ainsi v2f = v1i − v1f (8.21)
2 2 2 m2
En substituant l’équation (8.20) dans l’équation (8.21) et en prenant ensuite la racine carrée,
on obtient,
2 m1
v2f = v1i (8.22)
m1 + m2
A l’aide des expressions (8.20) et (8.22), on examine maintenant deux cas particuliers de
chocs rectilignes :
1) masses égales : m1 = m2 ainsi v1f = 0 et v2f = v1i
2) masse infinie : m1 /m2 → 0 ainsi v2f = 0 et v1f = − v1i
Le premier cas correspond au choc rectiligne entre deux boules de billard ou entre deux
boules métalliques de même masse, et aussi au choc élastique rectiligne entre deux pucks de
même masse sur une table à air horizontale ou entre deux glisseurs de même masse sur un
rail à air horizontal (Fig. 8.8). Le deuxième cas correspond au choc élastique d’une balle en
chute libre contre le sol ou d’une molécule contre la paroi d’un récipient.
Choc élastique
rectiligne 8.2.3 Choc mou
Un choc parfaitement inélastique, aussi appelé choc mou, entre deux points matériels est
un choc après lequel les deux points matériels restent attachés l’un à l’autre. Un tel choc pro-
voque une perte d’énergie cinétique. On considère un choc mou entre deux points matériels
de masse m1 et m2 respectivement. Le premier point matériel se déplace initialement selon
un axe horizontal Ox et le second point matériel est initialement au repos donc sa quantité
de mouvement initiale est nulle, i.e. p2 = 0, et son énergie cinétique est nulle également, i.e.
8.2 Collisions 95

Figure 8.8 Choc élastique rectiligne entre deux pucks sur une table à air horizontale.
Choc élastique entre deux glisseurs sur un rail à air horizontal.

T2 = 0, dans le référentiel d’inertie choisi. Après le choc, la quantité de mouvement totale


du système est pf et l’énergie cinétique totale est Tf (Fig. 8.9). Le principe de conservation

Initial Final
p1 p2 = 0 pf
x x
m1 m2 m1 + m2

Figure 8.9 Choc mou d’un point matériel de quantité de mouvement initiale p1 contre
un point matériel initialement au repos, i.e. p2 = 0. La quantité de mouvement finale est
pf .

de la quantité de mouvement durant le choc s’écrit,


p1 + p2 = pf où p2 = 0 ainsi p1 = pf (8.23)
La variation d’énergie cinétique ∆T durant le choc s’écrit,
∆T = Tf − (T1 + T2 ) où T2 = 0 ainsi ∆T = Tf − T1 (8.24)
Le principe de conservation de la quantité de mouvement (8.23) peut être mis sous la forme,

m1
m1 v 1 = (m1 + m2 ) v f ainsi vf = v1 (8.25)
m1 + m2
L’énergie cinétique initiale T1 du point matériel 1 et l’énergie cinétique finale Tf du système
sont données par,
1 1
T1 = m1 v 21 et Tf = (m1 + m2 ) v 2f (8.26)
2 2
Compte tenu des équations (8.25) et (8.26), la variation d’énergie cinétique (8.24) s’écrit,
1 m21 1 1 m1 m2
∆T = Tf − T1 = v 21 − m1 v 21 = − v2 < 0 (8.27)
2 m1 + m2 2 2 m1 + m2 1
Ainsi, le choc mou est un processus dissipatif qui provoque une perte d’énergie cinétique.
Cette énergie est utilisée principalement pour déformer l’objet, comme une boule en pâte
à modeler par exemple. Comme exemple de choc mou, on peut mentionner le choc entre
deux glisseurs qui restent accrochés parce la pointe de l’un vient s’enfoncer dans de la pâte
à modeler fixée sur l’autre (Fig. 2.8).

8.2.4 Coefficient de restitution


Les chocs élastiques et les chocs mous sont des cas particuliers de tout un ensemble de
chocs possibles. L’élasticité d’un choc contre un objet de masse infinie peut être quantifiée
par le coefficient de restitution défini comme le rapport de la norme de la vitesse finale
et de la norme de la vitesse initiale d’un corps,
vf
e= (8.28) Coefficients de
vi
restitution 0 < e < 1
Il existe trois types de collisions ou de chocs :
96 Loi d’action-réaction, collisions

1) élastique : e = 1
2) inélastique : 0 < e < 1
3) mou : e = 0

vf
vi

Figure 8.10 Chocs inélastiques d’une balle de tennis (e ≈ 0.90) et d’un ballon de basket
contre le sol (e ≈ 0.85).

A titre d’exemple, on peut mentionner les chocs inélastiques d’une balle de tennis ou d’un
ballon de basket contre le sol (Fig. 8.10). Plus le matériau est dur, moins il se déformera
durant le choc et donc plus le coefficient de restitution sera grand.

8.3 Problème à deux corps


Mécanique § 5.1
Les systèmes à deux corps sont très courant en mécanique. On peut mentionner le mouve-
ment de la lune autour de la terre, celui de la terre autour du soleil, le mouvement d’étoiles
binaires ou même le mouvement d’un électron et d’un proton dans un atome d’hydrogène.
La dynamique d’un système constitué de deux corps, que l’on peut assimiler à des points
matériels, en absence de force extérieure présente des propriétés de symétrie qu’on cherche
à découvrir. On commence par décrire la dynamique de chaque point matériel par rapport
à un référentiel d’inertie quelconque.
Système terre-lune
8.3.1 Loi du mouvement réduit
Soit r 1 le vecteur position du point matériel de masse m1 et r 2 le vecteur position du
point matériel de masse m2 (Fig. 8.11).

m2
m1 F2 1 F1 2

r2
r1
référentiel

Figure 8.11 Problème à deux corps de masse m1 et m2 considérés comme des points
matériels.

Les lois du mouvement (2.33) pour les points matériels sont les suivantes :
F 2→1 = m1 r̈ 1 et F 1→2 = m2 r̈ 2 (8.29)
2→1 1→2
où les forces d’interaction F et F sont des forces intérieures au système constitué
des deux points matériels mais elles sont considérées comme des forces extérieures à chaque
sous-système constitué d’un seul point matériel. Ces deux forces d’interaction sont de na-
ture quelconque et elles satisfont la loi d’action-réaction (8.1). Pour repérer la position des
8.3 Problème à deux corps 97

deux points matériels, il faut deux vecteurs : r 1 et r 2 . Comme les lois du mouvement (8.29)
sont indépendantes du choix de l’origine O du système d’axes, on peut faire un change-
ment de variables qui définit de nouveaux vecteurs positions qui rendent mieux compte des
symétries du mouvement. On définit le vecteur position du centre de masse RG et le
vecteur position relative r de la manière suivante,
m1 m2
RG = r1 + r2 et r = r1 − r2 où M = m1 + m2 (8.30)
M M
Le centre de masse est le centre de gravité du système qui sera défini explicitement pour
un système de points matériels lorsqu’on abordera l’étude de la dynamique du solide
indéformable. La dérivée temporelle seconde du changement de variables implique que,

M R̈G = m1 r̈ 1 + m2 r̈ 2 et r̈ = r̈ 1 − r̈ 2 (8.31)

En prenant la somme des lois du mouvement (8.29), compte tenu des identités (8.31), on
obtient,
F 2→1 + F 1→2 = m1 r̈ 1 + m2 r̈ 2 = M R̈G (8.32)

D’après la 3e loi de Newton (8.1), on en conclut alors,

R̈G = 0 ainsi VG = ṘG = cste (8.33)

ce qui signifie que le centre de masse du système est en mouvement rectiligne uniforme ou
au repos en absence de force extérieure au système. En prenant la différence de la première
loi du mouvement (8.29) multipliée par m2 et de la deuxième multipliée par m1 , on obtient,

m2 F 2→1 − m1 F 1→2 = M µ (r̈ 1 − r̈ 2 ) = M µ r̈ (8.34)

où la masse réduite est définie comme,


m1 m2 1 1 1
µ= ainsi = + (8.35)
M µ m1 m2
En divisant l’équation (8.34) par la masse totale M , compte tenu de la 3e loi de Newton (8.1),
on obtient la loi du mouvement réduit,

F 2→1 = µ r̈ (8.36)

8.3.2 Quantité de mouvement et énergie cinétique


La quantité de mouvement totale p et l’énergie cinétique totale T du système de deux
points matériels s’écrivent,

p = m1 v 1 + m2 v 2 (8.37)
1 1
T = m1 v 21 + m2 v 22 (8.38)
2 2
En inversant le changement de variable (8.30), compte tenu de la définition de la masse
réduite (8.35), on obtient,
µ µ
r 1 = RG + r et r 2 = RG − r (8.39)
m1 m2
La dérivée temporelle de la relation (8.39) s’écrit,
µ µ
v 1 = VG + v et v 2 = VG − v (8.40)
m1 m2
En substituant les équations (8.40) dans l’expression (8.37) de la quantité de mouvement,
celle-ci devient,
p = M VG (8.41)
98 Loi d’action-réaction, collisions

En substituant les équations (8.40) dans l’expression (8.38) de l’énergie cinétique, celle-ci
devient,
 2  2
1 µ 1 µ
T = m1 VG + v + m2 VG − v
2 m1 2 m2
  (8.42)
1 2 1 1 1 2 2
= (m1 + m2 ) VG + + µ v
2 2 m1 m2
Compte tenu de la définition de la masse réduite (8.35), l’expression de l’énergie
cinétique (8.42) se réduit à,
1 1
T = M VG2 + µ v 2 (8.43)
2 2
où le premier terme est l’énergie cinétique constante associée au mouvement du centre de
masse et le deuxième terme est l’énergie cinétique associée au mouvement réduit.

8.3.3 Référentiel du centre de masse


Comme le mouvement du centre de masse est un mouvement rectiligne uniforme, on peut
faire une transformation de coordonnées et définir les vecteurs positions r 01 et r 02 relatifs au
référentiel du centre de masse qui, compte tenu des relations (8.39), s’écrivent,
µ µ
r 01 = r 1 − RG = r et r 02 = r 2 − RG = − r (8.44)
m1 m2
La dérivée temporelle des relations (8.44) est donnée par,
µ µ
v 01 = v et v 02 = − v (8.45)
m1 m2
Compte tenu des expressions (8.44) des vitesses relatives au référentiel du centre de masse,
la quantité de mouvement totale p0 relative au référentiel du centre de masse est nulle,
p0 = m1 v 01 + m2 v 02 = 0 (8.46)
Compte tenu des expressions (8.44) des vitesses relatives au référentiel du centre de masse et
de l’expression (8.35) de la masse réduite, l’énergie cinétique totale T 0 relative au référentiel
du centre de masse s’écrit,
 
0 1 02 1 02 1 1 1 1
T = m1 v 1 + m2 v 2 = + µ2 v 2 = µ v 2 (8.47)
2 2 2 m1 m2 2
L’énergie cinétique T contient un terme de plus que l’énergie cinétique T 0 . Ce terme corres-
pond à l’énergie cinétique associée au mouvement du centre de masse du système.
9
Moment cinétique, moment de force et loi de
la gravitation

Dans la première section de ce chapitre, on va définir deux grandeurs extensives qui


permettent de caractériser le mouvement de rotation d’un point matériel. Ces grandeurs
sont le moment cinétique et le moment de force. Dans la deuxième section, on établira la loi
de la gravitation universelle à partir des lois de la mécanique céleste de Kepler.

9.1 Moment cinétique et moment de force


Mécanique § 1.13
Au chapitre 2, on a défini la quantité de mouvement qui est une grandeur extensive
conservée lors d’un mouvement rectiligne uniforme. La grandeur extensive conservée lors
d’un mouvement de rotation uniforme est le moment cinétique. La loi du mouvement affirme
que les forces extérieures modifient l’état de mouvement en translation uniforme d’un point
matériel. La grandeur extensive qui modifie l’état de mouvement de rotation uniforme d’un
point matériel est le moment de force.

9.1.1 Moment cinétique


Le moment cinétique LO est une grandeur vectorielle extensive et axiale, définie par
rapport à un point O et associée au mouvement de rotation d’un point matériel P autour de
O. Le moment cinétique est défini comme le produit vectoriel du vecteur position r ≡ OP du
point matériel P par rapport au point O et du vecteur quantité de mouvement p (Fig. 9.1),

LO = OP × p = r × p (9.1)

LO

O y

r
OP p

Figure 9.1 Vecteur moment cinétique LO d’un point matériel P défini par rapport à un
point O.
100 Moment cinétique, moment de force et loi de la gravitation

L’unité physique du moment cinétique dans le système d’unités international est notée
[ kg m2 /s ]. Isaac Newton a introduit la notion de vitesse aréolaire pour décrire un mouvement
de rotation. Cette vitesse correspond à la dérivée temporelle de l’aire balayée par le vecteur
position au cours du temps. Newton a utilisé cette notion pour modéliser mathématiquement
la 2e loi de Kepler. Cependant, la vitesse aréolaire n’est pas une grandeur extensive. C’est
à Daniel Bernoulli qu’on doit l’introduction d’une grandeur extensive pour caractériser un
mouvement de rotation. Il a appelé cette grandeur moment de mouvement de rotation dans
une lettre à Leonhard Euler.

Daniel Bernoulli
9.1.2 Moment de force
Le moment de force M O est une grandeur vectorielle extensive et axiale, définie par
rapport à un point O et associée à l’action d’une force F exercée sur ce point matériel qui
modifie son état de mouvement de rotation uniforme autour de O. Le moment de force est
défini comme le produit vectoriel du vecteur position r ≡ OP du point matériel P par
rapport au point O et du vecteur force F (Fig. 9.2),

M O = OP × F = r × F (9.2)

MO

O y

r
OP F

Figure 9.2 Vecteur moment de force M O exercé sur un point matériel P et défini par
rapport à un point O.

L’unité physique du moment de force dans le système d’unités international est notée
[ kg m2 /s2 ]. Le concept de moment de force tire son origine des études de mouvements de
leviers réalisées par Archimède. Le terme de moment de force ou de couple a été introduit
en 1884 par James Thomson, le frère de Lord Kelvin.
James Thomson

9.1.3 Théorème du moment cinétique


Théorème 9.1. Le théorème du moment cinétique affirme que la dérivée temporelle du
moment cinétique LO d’un point matériel est égale à la somme des moments de forces
extérieures M Oext exercés sur le point matériel,
X dLO
M Oext = (9.3)
dt
Démonstration En utilisant la définition de la quantité de mouvement (2.30), du moment
cinétique (9.1), du moment de force (9.2) ainsi que la 2e loi de Newton (2.19), on montre
9.2 Loi de la gravitation universelle 101

que,
dLO d dr dp X X X
= (r × p) = ×p+r× = v×m v+r× F ext = r × F ext = M Oext
dt dt dt dt
(9.4)

Le théorème du moment cinétique (9.3) est l’analogue en rotation de la 2e loi de New-


ton (2.19). Il joue un rôle très important en dynamique du solide.

9.1.4 Mouvement circulaire uniforme


Pour illustrer le concept de moment cinétique (9.1) et appliquer le théorème du moment
cinétique (9.3), on considère le mouvement circulaire uniforme d’un point matériel P autour
d’un point O. Comme on l’a montré au chapitre 4, l’accélération d’un mouvement circulaire
P ext
est une accélération centripète. La somme des forces extérieures F qui s’appliquent
sur le point matériel P est donc une force radiale. Par conséquent, en vertu de la loi du
mouvement (2.33), de l’expression (4.69) de l’accélération centripète et de la définition (9.2)
P ext
du moment de force, on montre que la somme des moments de forces extérieures F
est nulle,
X X X
M Oext = r × F ext = r × F ext = r × m a = − mω 2 r × r = 0 (9.5)

Par conséquent, en vertu du théorème du moment cinétique (9.3), le moment cinétique LO


du point matériel par rapport au point O est une constante pour un mouvement circulaire
uniforme,
LO = cste (9.6)
Le mouvement circulaire a lieu dans un plan qui contient les vecteurs position r et quantité
de mouvement p. D’après la définition (9.1) du mouvement cinétique, le vecteur moment
cinétique LO est orthogonal au plan du mouvement. Le vecteur LO est donc colinéaire au
vecteur vitesse angulaire ω (Fig. 9.3).

LO

p
O
a r

Figure 9.3 Le vecteur moment cinétique LO est colinéaire au vecteur vitesse angulaire ω
et orthogonal au plan engendré par les vecteurs position r et quantité de mouvement p.

Le concept de moment cinétique est un concept essentiel pour pouvoir déduire la loi de la
gravitation universelle en se basant sur les trois lois de Kepler.

9.2 Loi de la gravitation universelle


Mécanique § 2.13
La loi de la gravitation a été établie par Isaac Newton qui s’est basé sur les trois lois de la
mécanique céleste de Johannes Kepler. A l’aide des observations extrêmement précises de son
maı̂tre Tycho Brahe, Johannes Kepler a pu établir les trois lois suivantes sur le mouvement
des planètes autour du soleil :

1) Loi des orbites : L’orbite des planètes est une ellipse dont le soleil est le foyer.
102 Moment cinétique, moment de force et loi de la gravitation

2) Loi des aires : L’aire balayée par le vecteur position, centré sur le soleil, par
unité de temps est constante.
3) Loi des périodes : Le rapport de la période orbitale au carré sur le demi-grand
axe de l’ellipse au cube est constant.

Pour établir la loi de la gravitation universelle, on va utiliser la 1ère et la 3e loi de Kepler


ainsi que la 2e loi de Newton qui contient la 2e loi de Kepler.
Pour commencer, on définit un référentiel d’inertie constitué du soleil et de trois étoiles
Tycho Brahe
lointaines qui peuvent être considérés comme fixes. On prend comme origine O le soleil et
on prend des coordonnées cylindriques (ρ, φ, z) où l’axe vertical Oz est orthogonal au plan
z = 0 du système solaire contenant la trajectoire de la terre autour du soleil. On considère
la terre comme un point matériel de masse m, c’est-à-dire qu’on ne tient pas compte ici
du mouvement de rotation de la terre sur elle-même. Compte tenu de la définition de la
quantité de mouvement (2.30), du moment cinétique (9.1), du vecteur position (5.5) et du
vecteur vitesse (5.8) en coordonnées cylindriques, le moment cinétique LO de la terre autour
du soleil s’écrit,
 
LO = r × p = m r × v = mρ eρ × ρ̇ eρ + ρφ̇ eφ = mρ2 φ̇ ez ≡ L ez (9.7)

Par conséquent, la dérivée temporelle du moment cinétique (9.7) s’écrit,


Johannes Kepler dLO  
= mρ 2ρ̇φ̇ + ρφ̈ ez (9.8)
dt

9.2.1 1ère loi de Kepler


D’après la 1ère loi de Kepler, le mouvement de la terre autour du soleil est une ellipse
dont le soleil fixé à l’origine O occupe un des foyers. L’autre foyer est O0 . L’ellipse est le lieu
géométrique des points P dont la somme des distances ρ et ρ0 aux deux foyers fixes O et O0
est une constante (Fig. 9.4).

P
r’ r
f
x
c c P’
O C O
a

Figure 9.4 L’ellipse de foyers O et O0 est le lieu géométrique des points P tel que ρ + ρ0 =
2a = cste.

En coordonnées polaires (ρ, φ), la définition de l’ellipse s’écrit explicitement,


q
2 2
ρ + ρ0 = ρ + (ρ sin φ) + (2c + ρ cos φ) = 2a = cste (9.9)
où a est le demi grand-axe de l’ellipse et c est la distance entre son centre C et ses foyers
O et O0 . En isolant la racine carrée dans l’équation (9.9), en élevant ensuite au carré cette
équation puis en la simplifiant, on en tire l’expression de la distance radiale,

a 1 − e2
ρ= (9.10)
1 + e cos φ
où l’excentricité de l’ellipse est définie comme e = c/a, qui s’annule dans le cas particulier
où l’ellipse se réduit à un cercle.
9.2 Loi de la gravitation universelle 103

9.2.2 2e loi de Newton


La force de la gravitation F G est une force attractive exercée par un point matériel
sur l’autre. Par conséquent, elle doit être orientée le long de la droite qui lie ces points
matériels. En coordonnées polaires (ρ, φ), elle est indépendante de l’angle φ. Ainsi, la force
de gravitation exercée par le soleil sur la terre s’écrit donc,

F G = − FG (ρ) eρ (9.11)

où FG (ρ) > 0 est la norme de la force de la gravitation, qui est une fonction positive de la dis-
tance radiale ρ qu’il s’agit de déterminer. Pour ce faire, on utilise la loi du mouvement (2.33)
dû uniquement à la force de gravitation,

FG = ma (9.12)

En projetant la loi vectorielle du mouvement (9.12) selon les deux axes de coordonnées
polaires eρ et eφ respectivement, compte tenu de l’expression de l’accélération (5.10) et de
l’expression (9.11) de la force de gravitation, on obtient deux équations scalaires,
 
− FG (ρ) = m ρ̈ − ρφ̇2
  (9.13)
0 = m ρφ̈ + 2ρ̇φ̇

Compte tenu des expressions (9.7) et (9.8), la deuxième équation (9.13) implique que
dLO
=0 ainsi LO = cste et L = cste (9.14)
dt
ce qui signifie que la norme L et l’orientation ez du vecteur moment cinétique LO sont des
constantes. Le vecteur moment cinétique est donc une constante du mouvement gravitation-
nel. En réalité, ceci est une conséquence du théorème du moment cinétique pour le système
formé de la terre et du soleil. En effet, la force de gravitation F G est une force radiale et
interne au système ce qui signifie qu’il n’y a pas de moment de force extérieure au système
et donc le moment cinétique est une grandeur conservée.
A présent, on va tenir compte explicitement de la conservation du moment cinétique pour
mettre en forme l’équation du mouvement. L’équation (9.7) permet d’exprimer φ̇ en fonction
de m, ρ et de L,
L
φ̇ = (9.15)
mρ2
Compte tenu de l’expression (9.15), la dérivée temporelle de l’expression (9.10) de la distance
radiale s’écrit,

a 1 − e2 eL
ρ̇ = eφ̇ sin φ 2 = ma (1 − e2 ) sin φ (9.16)
(1 + e cos φ)
Compte tenu de l’expression (9.15), la dérivée temporelle de l’expression (9.16) de la vitesse
radiale s’écrit,
eL eL2
ρ̈ = φ̇ cos φ = cos φ (9.17)
ma (1 − e2 ) m2 a (1 − e2 ) ρ2
Compte tenu des expressions (9.10), (9.15) et (9.17), la première équation (9.13) est mise
sous la forme suivante,
 !

2
 L2 a 1 − e2 L2
FG (ρ) = m ρφ̇ − ρ̈ = − e cos φ = (9.18)
ma (1 − e2 ) ρ2 ρ ma (1 − e2 ) ρ2

Par conséquent, la norme de la force de la gravitation FG (ρ) exercée par le soleil sur la terre
est inversement proportionnelle au carré de la distance radiale ρ qui sépare la terre du soleil,

K L2
FG (ρ) = où K= = cste > 0 (9.19)
ρ2 ma (1 − e2 )
104 Moment cinétique, moment de force et loi de la gravitation

9.2.3 3e loi de Kepler


L’équation (9.15) peut être mise sous forme différentielle,
mρ2
dt = dφ (9.20)
L
Compte tenu de l’expression de la distance radiale (9.10), la période orbitale T est obtenue
en intégrant l’expression différentielle (9.20) sur une révolution d’orbite elliptique,
Z T Z 2π 2 Z 2π
mρ2 ma2 1 − e2 dφ
T = dt = dφ = 2 (9.21)
0 0 L L 0 (1 + e cos φ)
En utilisant un software comme Mathematica, qui se sert du changement de variables u =
tan (φ/2) pour mettre l’intégrant de (9.21) sous la forme d’une fraction rationnelle de u, on
obtient le résultat suivant,
Z 2π
dφ 2π
2 = 3/2
(9.22)
0 (1 + e cos φ) (1 − e2 )
La 3e loi de Kepler s’écrit mathématiquement comme,
T2
= cste (9.23)
a3
Compte tenu des équations (9.19), (9.20) et (9.22), la 3e loi de Kepler (9.23) est mise sous
la forme,

T2 4π 2 m2 a 1 − e2 4π 2 m
3
= 2
= = cste ainsi K∝m (9.24)
a L K
Comme le rapport m/K doit être une constante pour toute valeur de m, i.e. quelle que
soit la planète considérée, cela signifie que K est proportionnel à m. D’après la 3e loi de
Newton (8.1), la force gravitationnelle F G exercée par le soleil sur la terre est l’opposé
de la force gravitationnelle − F G exercée par la terre sur le soleil. D’après la 2e loi de
Newton (2.19), la force est proportionnelle à la masse du point matériel. Par conséquent, la
force − F G exercée par la terre sur le soleil est proportionnelle à la masse M du soleil, i.e.
K ∝ M . Ainsi, la constante K doit être proportionnelle au produit des masses,
K = GM m où G = 6.67 · 10−11 [ m3 /kg s2 ] (9.25)
est la constante de la gravitation universelle. Les expressions (9.11), (9.19) et (9.24) donnent
l’expression de la loi de la gravitation universelle que nous allons maintenant énoncer.

9.2.4 Loi de la gravitation universelle


La loi de la gravitation universelle établie par Isaac Newton peut être énoncée de la
manière suivante :

Deux points matériels massifs sont soumis à des forces d’attraction gravitationnelle
égales et opposées, proportionnelles au produit des masses et inversement proportion-
nelles au carré de la distance qui les sépare.

r
FG
M

Figure 9.5 La force gravitationnelle F G est exercée par le point matériel de masse M sur
le point matériel de masse m.

Isaac Newton
9.2 Loi de la gravitation universelle 105

On prend comme origine O, un point matériel de masse M . La force gravitationnelle


F G exercée par le point matériel de masse M sur un point matériel de masse m s’exprime
mathématiquement comme (Fig. 9.5),

GM m r
FG = − r̂ où r̂ = (9.26)
r2 r

La force de la gravitation F G est une force centrale, comme la force élastique F e , puisqu’elle
est radiale et toujours dirigée vers le centre. La valeur de la constante de la gravitation
universelle G a été mesurée précisément par Henry Cavendish. Son expérience appelée la
balance de Cavendish est un pendule de torsion constitué de deux petites masses m attachées
à une tige horizontale qui peut osciller autour d’un axe vertical. Un miroir est fixé sur l’axe.
Deux grosses masses M peuvent être approchées des petites masses. La force résultante
constituée de la force d’attraction gravitationnelle F G et d’une force de rappel élastique
F e qui s’oppose à F G va donner lieu à un mouvement harmonique oscillatoire amorti. La
déviation finale en position d’équilibre permet de déterminer la valeur de la constante de la
gravitation universelle G (Fig. 9.6).
Henry Cavendish
Faisceau de lumière

Grandes masses
Position I

Miroir b

Grandes masses
Position II

Figure 9.6 La constante de la gravitation universelle G est mesurée à l’aide d’un pendule
de torsion constitué de deux petites masses attachées à une tige oscillant dans un plan
horizontal dû à la force d’attraction gravitationnelle générée par deux grosses masses.

9.2.5 Constantes du mouvement


Pour établir les constantes du mouvement gravitationnel, on va se baser sur l’équation
du mouvement exprimée en coordonnées cylindriques. En substituant les relations (9.15)
et (9.19) dans la première équation (9.13), celle-ci peut être mise sous la forme,

L2 K
mρ̈ − 3
+ 2 =0 (9.27)
mρ ρ

En multipliant l’équation (9.27) par ρ̇, on peut la mettre sous la forme d’une dérivée tem-
porelle,
L2 ρ̇ L2
 
ρ̇ d 1 2 K
mρ̈ρ̇ − + K = m ρ̇ + − =0 (9.28)
m ρ3 ρ2 dt 2 2mρ2 ρ

La primitive de l’expression (9.28) introduit une constante qui est l’énergie mécanique E du
mouvement gravitationnel,
1 L2 K
E= mρ̇2 + 2
− (9.29)
2 2mρ ρ

Compte tenu de l’expression (9.15) et de la définition (5.8) du vecteur vitesse en coordonnées


cylindriques dans le plan z = 0, l’énergie mécanique gravitationnelle (9.29) peut être mise
sous la forme,
1   K 1 K
E = m ρ̇2 + ρ2 φ̇2 − = mv 2 − (9.30)
2 ρ 2 ρ
106 Moment cinétique, moment de force et loi de la gravitation

où le premier terme du membre de droite est l’énergie cinétique T du point matériel de
masse m et le deuxième terme est son énergie potentielle gravitationnelle,
K GM m
VG = − =− (9.31)
ρ ρ
d’après la relation (9.25).
En plus du moment cinétique LO et de l’énergie mécanique E, il existe une autre constante
vectorielle du mouvement gravitationnel qu’on va maintenant établir. En identifiant les
expressions (9.11) et (9.12) de la force gravitationnelle F G compte tenu de l’expression (9.19)
de la norme de cette force, l’accélération du point matériel de masse m s’écrit,
K
a=− eρ (9.32)
mρ2
Compte tenu de l’expression (5.6) de la dérivée du vecteur de base ėρ , l’expression (9.7) du
moment cinétique LO peut être mise sous la forme,
LO = mρ eρ × (ρ̇ eρ + ρ ėρ ) = mρ2 eρ × ėρ (9.33)
A l’aide de l’identité vectorielle (1.43), le produit vectoriel du vecteur moment
cinétique (9.33) et du vecteur accélération (9.32) s’écrit,
LO × a = − K (eρ × ėρ ) × eρ = − K ėρ (9.34)
Comme le moment cinétique LO est une constante, i.e. L̇O = 0, et que le coefficient K est
une constante, i.e. K̇ = 0, et que l’accélération est la dérivée temporelle de la vitesse, i.e.
a = v̇, compte tenu de l’équation (9.34) on a,
d
(LO × v + K eρ ) = LO × a + K ėρ = 0 (9.35)
dt
La primitive de l’équation (9.35) divisée par la constante K donne le vecteur d’excentricité,

1
e= LO × v + eρ (9.36)
K
qui est un vecteur dont la norme vaut l’excentricité e de l’ellipse et dont l’orientation est
parallèle au demi-grand axe de l’ellipse. Il s’agit donc d’un vecteur qui rend compte de la
géométrie du mouvement et qui s’annule dans le cas particulier d’un mouvement circulaire.
Le vecteur Ke est appelé vecteur de Laplace-Runge-Lenz. La loi de conservation du vecteur
de Laplace-Runge-Lenz est valable pour les forces centrales dont la norme est inversement
proportionnelle au carré de la distance. C’est le cas notamment de la force électrostatique
qui lie les électrons au noyau atomique. Le physicien Wolfgang Pauli a utilisé l’invariance
de ce vecteur pour déterminer les niveaux d’énergie de l’atome d’hydrogène.
Pierre-Simon Laplace
9.2.6 Orbites gravitationnelles
L’énergie mécanique (9.29) peut être divisée en deux parties,
1
E= mρ̇2 + VGeff (9.37)
2
où le premier terme est l’énergie cinétique due à la partie radiale du mouvement et le
deuxième terme est l’énergie gravitationnelle effective VGeff définie comme,
L2 K
VGeff = 2
− (9.38)
2mρ ρ
Le premier terme du membre de droite de l’expression (9.38) est un terme répulsif appelé
la barrière de potentiel gravitationnel et le deuxième terme est un terme attractif qui est
l’énergie potentielle gravitationnelle VG . La forme géométrique de l’orbite gravitationnelle
d’un point matériel dépend de manière cruciale de la valeur numérique de l’énergie gravi-
tationnelle effective VGeff . Les valeurs asymptotiques de l’énergie potentielle gravitationnelle
effective VGeff sont,
K L2
lim VGeff = lim − = −0 et lim VGeff = lim = +∞ (9.39)
ρ→∞ ρ→∞ ρ ρ→0 ρ→∞ 2mρ2
9.2 Loi de la gravitation universelle 107

D’après la relation (9.37), la coordonnée radiale ρ est extrêmale, i.e. ρ̇ = 0, lorsque E = VGeff .
Ainsi, il y a quatre types d’orbites qui dépendent de la valeur de l’énergie mécanique E
(Fig. 9.7) :
A) Orbite circulaire (e = 0) : E < 0 et ρmin = ρ = ρmax .
B) Orbite elliptique (0 < e < 1) : E < 0 et ρmin < ρ < ρmax .
C) Orbite parabolique (e = 1) : E = 0 et ρmin < ρ.
D) Orbite hyperbolique (e > 1) : E > 0 et ρmin < ρ.

VGeff
1/r 2

C D
D

C r
B A O
B
A

-1/r

Figure 9.7 Les lignes horizontales A) - D) correspondent à des valeurs différentes


constantes de l’énergie mécanique E. Les orbites gravitationnelles sont A) circulaire, B)
elliptique, C) parabolique et D) hyperbolique.

Les orbites circulaire et elliptique correspondent à des états liés (i.e. E < 0) et les orbites
parabolique et hyperbolique correspondent à des états de diffusion (i.e. E ≥ 0). Comme
exemples d’états liés, on peut mentionner le mouvement des planètes autour du soleil ou
de la lune autour de la terre. Comme exemples d’états de diffusion, on peut mentionner le
mouvement de certains astéroı̈des et de certaines comètes qui passent à travers le système
solaire sans y rester.
10
Système de masse variable et référentiels
accélérés

Dans la première partie de ce chapitre, on va examiner les systèmes de masse variable.


Dans la deuxième section, on abordera l’étude de la dynamique d’un point matériel dans un
référentiel accéléré. Finalement, dans la troisième partie, on discutera quelques exemples de
mouvements décrits par rapport à un référentiel accéléré.

10.1 Système de masse variable


Mécanique § 1.13 et
Un système de masse variable est un système dont la masse m (t) varie au cours du 3.17
temps. Un système de masse variable est un système ouvert ce qui signifie qu’il échange
de la matière, ou de la masse, avec l’extérieur. Il existe une multitude de systèmes de masse
variable. On peut mentionner le cas d’une baignoire qui se remplit ou se vide, d’une chaı̂nette
qui tombe progressivement dans un réceptacle ou d’une fusée qui décolle. Au chapitre 2,
on a énoncé la 2 e loi de Newton (2.19) puis on en a déduit une expression de la loi du
mouvement (2.33) pour un point matériel de masse constante. Comme la masse varie, on va
devoir en tenir compte explicitement dans l’expression de la dynamique, c’est-à-dire qu’on
va baser notre analyse sur la forme générale (2.19) de la 2 e loi de Newton.
Baignoire

10.1.1 Poussée d’une fusée


On considère un système physique de masse variable constitué d’une fusée et de son
carburant. Les gaz sont éjectés avec une vitesse d’éjection relative vectorielle u mesurée par
rapport au référentiel de la fusée, c’est-à-dire qu’elle est opposée à la vitesse v de la fusée,
i.e. u·v < 0. On considère l’évolution du système durant un intervalle de temps infinitésimal
dt. Compte tenu de l’identité (1.18), la masse m (t + dt) de la fusée s’écrit,

dm
m (t + dt) = m (t) + dm où dm = dt < 0 (10.1)
dt
et dm < 0 est la variation de masse de la fusée due à l’éjection des gaz. La quantité de
mouvement p (t + dt) du système formé de la fusée et des gaz s’écrit au 1 er ordre,

p (t + dt) = (m (t) + dm) (v (t) + dv) + (− dm) (v + u) = m (t) v (t) + m (t) dv − dm u


| {z } | {z }
fusée gaz
(10.2)
où on a négligé le terme dm dv qui est un terme du 2 e ordre. Compte tenu de la définition
de la quantité de mouvement (2.30) et de l’expression (10.2), la variation infinitésimale de
quantité de mouvement dp est donnée par,

dp = p (t + dt) − p (t) = m (t) dv − dm u (10.3)

En substituant l’expression (10.3) dans la 2 e loi de Newton, on obtient,


X dv dm
F ext = m − u (10.4)
dt dt
110 Système de masse variable et référentiels accélérés

Compte tenu de la définition du vecteur accélération (2.2), on peut mettre la loi du mouve-
ment (10.4) sous la forme suivante (Fig. 10.1),
X dm
F ext + u = ma (10.5)
dt

Figure 10.1 Fusée propulsée par la poussée de l’air comprimé et par un mélange d’air et
d’eau.

Dans le cas particulier où les frottements de l’air sont négligeables, la seule force extérieure
agissant sur la fusée est son poids P . Ainsi, la loi du mouvement (10.5) se réduit à,
dm
P+ u = ma (10.6)
dt
Le deuxième terme du membre de gauche dm dt u est une force appelée la poussée parce
qu’elle s’oppose au poids P et pousse la fusée dans son mouvement. En effet, le vecteur
vitesse u est opposé au mouvement et dm/dt < 0, donc la poussée est orientée dans le sens
du mouvement.
La poussée permet de propulser un enseignant de physique sur un tricycle lorsqu’il vide
une bonbonne de CO2 . La poussée augmente le poids apparent d’une chaı̂nette qui tombe
à vitesse constante dans un réceptacle (Fig. 10.2).

Figure 10.2 Tricycle propulsé par du CO2 qui s’échappe d’une bonbonne. Mesure du
poids apparent d’une chaı̂nette qui tombe dans un réceptacle.

10.1.2 Condition de décollage et vitesse


On va considérer le cas particulier où la vitesse d’éjection des gaz u par rapport au
référentiel de la fusée est constante et orientée vers le sol. On considère un décollage vertical
de la fusée selon l’axe Oz centré sur la rampe de lancement et orienté positivement vers le
haut. Les projections des grandeurs vectorielles selon l’axe vertical s’écrivent,
P = m g = − m g ez
u = − u ez (10.7)
a = z̈ ez
10.1 Système de masse variable 111

La projection de la loi du mouvement (10.6) selon l’axe de coordonnée verticale s’écrit,


dm
− mg − u = m z̈ (10.8)
dt
Pour que la fusée décolle à l’instant initial t = 0, il faut que l’accélération verticale soit
positive,

dm
z̈ (0) > 0 ainsi dt (0) u > m (0) g
(10.9)

ce qui implique que la norme de la poussée doit être supérieure à la norme du poids. Pour
obtenir l’équation de la vitesse en fonction du temps, on met l’équation du mouvement (10.8)
sous la forme,
dm (t)
dż (t) = − g dt − u (10.10)
m (t) Décollage de la
L’intégrale de l’équation (10.10) par rapport au temps s’écrit explicitement, navette spatiale

v(t) t m(t)
dm0 (t0 )
Z Z Z
0 0
dż (t ) = − g dt − u (10.11)
0 0 m(0) m0 (t0 )

La solution de l’intégrale (10.11) est,


 
m (t)
v (t) = − gt − u ln (10.12)
m (0)
où l’argument du logarithme est positif et inférieur à 1 car la masse de la fusée diminue,
ce qui implique que le logarithme est négatif. Donc pour un temps suffisamment petit, le
deuxième terme domine et la vitesse v (t) est positive. On adopte maintenant le modèle
suivant : on suppose que la masse m (t) de la fusée est égale à la somme de la masse à vide
M et de la masse de carburant qui décroı̂t exponentiellement de la manière suivante,

m (t) = M + (m (0) − M ) e− t/τ (10.13)

Les valeurs asymptotiques de la masse m (t) sont données par (Fig. 10.3),

lim m (t) = m (0) et lim m (t) = M (10.14)


t→0 t→∞

m(t)

m(0)

t
t

Figure 10.3 La masse m (t) de la fusée décroı̂t exponentiellement dû à l’éjection des gaz
à partir d’une valeur initiale m (0) et tend vers la valeur de la masse à vide M .

En substituant l’expression (10.13) de la masse m (t) dans l’expression (10.12), celle-ci


devient,
   
M M − t/τ
v (t) = − gt − u ln + 1− e (10.15)
m (0) m (0)
112 Système de masse variable et référentiels accélérés

10.2 Référentiels accélérés


Au chapitre 2, on a défini un référentiel d’inertie à l’aide de la 1 ère loi de Newton. On a
ensuite montré que la 2 e loi de Newton est la même pour tous les référentiels d’inertie. A
présent, on aimerait étendre notre analyse à des référentiels accélérés définis par le fait
que les points matériels de ce référentiel accélèrent par rapport aux points matériels d’un
référentiel d’inertie. En particulier, on aimerait savoir quelle est l’expression de la 2 e loi de
Newton dans un référentiel accéléré. C’est un problème très important en pratique. Comment
décrire le mouvement d’un point matériel dans une voiture qui effectue un virage ? Quel est
le mouvement d’un pendule dans un train qui accélère ? Pour répondre à ces questions, on
va présent décrire la dynamique dans un référentiel accéléré. Par exemple, dans le référentiel
d’un jet d’eau en rotation, la trajectoire de l’eau − filmée par une caméra en rotation − est
une courbe (Fig. 10.4). Ceci est dû à l’action de forces qu’on appelle des forces d’inertie.

Figure 10.4 Le mouvement radial de gouttes d’eau qui sortent d’une buse horizontale est
filmé par une caméra en rotation avec la buse. Dans le référentiel accéléré (tournant) de la
buse, la trajectoire du jet d’eau est une courbe fixe.

10.2.1 Position relative


Pour décrire les mouvements par rapport à un référentiel accéléré, on appelle référentiel
absolu le référentiel d’inertie par rapport auquel on décrit le mouvement absolu d’un
point matériel. On appelle référentiel relatif le référentiel accéléré par rapport auquel on
décrit le mouvement relatif du point matériel. On décrit la dynamique du point matériel
P par rapport au référentiel absolu en utilisant le repère absolu (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) d’origine
O et on décrit sa dynamique par rapport au référentiel relatif en utilisant le repère relatif
(A, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) d’origine A.

y3
y2
P

x3

A y1

O x2

x1

Figure 10.5 Le repère absolu (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) d’origine O est immobile par rapport au
référentiel absolu et le repère relatif (A, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) est immobile par rapport au référentiel
relatif.
10.2 Référentiels accélérés 113

La position absolue r a (P ) et la position relative r r (P ) du point matériel P sont définies


comme (Fig. 10.5),
3
X 3
X
r a (P ) = OP = xi x̂i et r r (P ) = AP = yi ŷ i (10.16)
i=1 i=1

et la position absolue du point A s’écrit r a (A) = OA. Ainsi, comme OP = OA + AP , la


position absolue du point matériel P est liée à sa position relative par,

r a (P ) = r a (A) + r r (P ) (10.17)

10.2.2 Vitesse relative


En toute généralité, le repère absolu (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) est immobile et le repère relatif
(A, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) est en mouvement de translation et de rotation à vitesse angulaire Ω par
rapport au référentiel absolu. Compte tenu des formules de Poisson (5.33), les dérivées tem-
porelles des vecteurs de base s’écrivent,

x̂˙ i = 0 et ŷ˙ i = Ω × ŷ i ∀ i = 1, 2, 3 (10.18)

La dérivée temporelle de l’équation (10.17) s’écrit,

ṙ a (P ) = ṙ a (A) + ṙ r (P ) (10.19)

Compte tenu des relations (10.16),


3
X 3
X 3
X
ṙ a (P ) = ẋi x̂i et ṙ r (P ) = ẏi ŷ i + yi ŷ˙ i (10.20)
i=1 i=1 i=1

D’après les relations (10.16) et (10.18), le dernier terme du membre de droite de la deuxième
équation (10.20) peut être mis sous la forme,
3 3 3
!
X X X
˙
yi ŷ i = yi (Ω × ŷ i ) = Ω × yi ŷ i = Ω × r r (P ) (10.21)
i=1 i=1 i=1

La vitesse absolue v a (P ) et la vitesse relative v r (P ) du point matériel P sont définies


comme,
3
X 3
X
v a (P ) = ẋi x̂i et v r (P ) = ẏi ŷ i (10.22)
i=1 i=1

Compte tenu de l’équation (10.21) et des définitions (10.22), les dérivées temporelles des
positions (10.20) deviennent,

ṙ a (P ) = v a (P ) et ṙ r (P ) = v r (P ) + Ω × r r (P ) (10.23)

En substituant les équations (10.23) et la vitesse absolue du point A, qui s’écrit v a (A) =
ṙ a (A), dans l’équation (10.19), on obtient l’identité suivante entre les vitesses,

v a (P ) = v a (A) + v r (P ) + Ω × r r (P ) (10.24)

La vitesse d’entraı̂nement v e (P ) du point matériel P est définie comme la vitesse qu’aurait


le point matériel s’il était fixe dans le référentiel accéléré, c’est-à-dire si v r (P ) = 0,

v e (P ) = v a (A) + Ω × r r (P ) (10.25)

Par conséquent, la vitesse absolue (10.24) du point matériel P peut s’écrire,

v a (P ) = v e (P ) + v r (P ) (10.26)

Théorème 10.1. La vitesse angulaire Ω est indépendante du choix de l’origine A, qui est
un point fixe du repère relatif, lequel est immobile par rapport au référentiel relatif.
114 Système de masse variable et référentiels accélérés

Démonstration A l’aide de la définition (10.16), l’identité entre les vitesses (10.24) est mise
sous la forme,
v a (P ) = v a (A) + v r (P ) + Ω × AP (10.27)
On considère un autre point matériel B fixe par rapport au référentiel relatif, ce qui signifie
que sa vitesse relative est nulle, i.e. v r (B) = 0. Par conséquent, pour le point matériel B,
l’identité entre les vitesses (10.27) se réduit à,
v a (B) = v a (A) + Ω × AB ainsi v a (A) = v a (B) + Ω × BA (10.28)
En substituant l’équation (10.28) dans l’équation (10.27), on obtient,
v a (P ) = v a (B)+v r (P )+Ω×BA+Ω×AP = v a (B)+v r (P )+Ω×(BA + AP ) (10.29)
qui compte tenu de l’identité vectorielle BP = BA + AP se réduit à,
v a (P ) = v a (B) + v r (P ) + Ω × BP (10.30)
En remplaçant le point matériel A par le point matériel B dans l’identité entre les vi-
tesses (10.27), on obtient l’identité des vitesses (10.30) sans changer le vecteur vitesse an-
gulaire Ω.

10.2.3 Accélération relative


La dérivée temporelle de l’équation (10.24) s’écrit,
v̇ a (P ) = v̇ a (A) + v̇ r (P ) + Ω × ṙ r (P ) + Ω̇ × r r (P ) (10.31)
Compte tenu des relations (10.22),
3
X 3
X 3
X
v̇ a (P ) = ẍi x̂i et v̇ r (P ) = ÿi ŷ i + ẏi ŷ˙ i (10.32)
i=1 i=1 i=1

D’après les relations (10.22) et (10.18), le dernier terme du membre de droite de la deuxième
équation (10.32) peut être mis sous la forme,
3 3 3
!
X X X
ẏi ŷ˙ i = ẏi (Ω × ŷ i ) = Ω × ẏi ŷ i = Ω × v r (P ) (10.33)
i=1 i=1 i=1

L’accélération absolue aa (P ) et l’accélération relative ar (P ) du point matériel P sont


définies comme,
X3 X3
aa (P ) = ẍi x̂i et ar (P ) = ÿi ŷ i (10.34)
i=1 i=1

Compte tenu de l’équation (10.33) et des définitions (10.34), les dérivées temporelles des
vitesses (10.32) deviennent,
v̇ a (P ) = aa (P ) et v̇ r (P ) = ar (P ) + Ω × v r (P ) (10.35)
Compte tenu de la dérivée temporelle de la position relative (10.20),
   
Ω × ṙ r (P ) = Ω × v r (P ) + Ω × r r (P ) = Ω × v r (P ) + Ω × Ω × r r (P ) (10.36)

En substituant les équations (10.35), (10.36) et l’accélération absolue du point A, qui s’écrit
aa (A) = v̇ a (A), dans l’équation (10.31), on obtient l’identité suivante entre les accélérations,

 
aa (P ) = aa (A) + ar (P ) + 2 Ω × v r (P ) + Ω × Ω × r r (P ) + Ω̇ × r r (P ) (10.37)

L’accélération de Coriolis aC (P ), l’accélération centripète ac (P ) et l’accélération d’Euler


aE (P ) du point matériel P sont définies respectivement comme,
Gaspard-Gustave de
Coriolis aC (P ) = 2 Ω × v r (P )
 
ac (P ) = Ω × Ω × r r (P ) (10.38)
aE (P ) = Ω̇ × r r (P )
10.2 Référentiels accélérés 115

L’accélération d’entraı̂nement ae (P ) du point matériel P est définie comme l’accélération


qu’aurait le point matériel s’il était fixe dans le référentiel accéléré, c’est-à-dire si v r (P ) = 0
et ar (P ) = 0,
ae (P ) = aa (A) + ac (P ) + aE (P ) (10.39)
Compte tenu des définitions (10.38) et (10.39), l’accélération absolue (10.37) du point
matériel P peut s’écrire,
aa (P ) = ae (P ) + ar (P ) + aC (P ) = aa (A) + ar (P ) + ac (P ) + aE (P ) + aC (P ) (10.40)

10.2.4 Forces d’inertie


La loi du mouvement absolu (2.33) du point matériel P s’écrit,
X
F ext = m aa (P ) (10.41)

Compte tenu de l’expressions (10.37) de l’accélération absolue et de l’accélération d’en-


traı̂nement, la loi du mouvement (10.41) peut être mise sous la forme,
X  
F ext = m aa (A) + ar (P ) + aC (P ) + ac (P ) + aE (P ) (10.42)

En passant tous les termes du membre de droite de l’équation (10.42) dans le membre de
gauche à l’exception du terme m ar (P ), on obtient la loi du mouvement relatif du point
matériel P ,
X  
F ext − m aa (A) + aC (P ) + ac (P ) + aE (P ) = m ar (P ) (10.43)

Les termes du membre de gauche de l’équation (10.43) sont des forces qu’il s’agit à présent
de caractériser physiquement. Compte tenu des définitions (10.38) des accélérations, la force
de translation F t , la force de Coriolis F C , la force centrifuge F c et la force d’Euler F E sont
respectivement définies comme,
F t = − m aa (A)
F C = − m aC (P ) = − 2 m Ω × v r (P )
  (10.44)
F c = − m ac (P ) = − m Ω × Ω × r r (P )
F E = − m aE (P ) = − m Ω̇ × r r (P )
La force de translation F t exercée sur le point matériel A est orientée dans la direction op-
posée à son accélération absolue aa (A). La force de Coriolis F C exercée sur le point matériel
P est orientée dans la direction opposée à l’accélération de Coriolis aC (P ). La force centri-
fuge F c exercée sur le point matériel P est orientée dans la direction opposée à l’accélération
centripète ac (P ), qui elle est orientée vers le centre ou l’origine O. Ainsi, la force centrifuge
F c est orientée radialement vers l’extérieur : elle fuit le centre. La force d’Euler F E exercée
sur le point matériel P est orientée dans la direction opposée à l’accélération d’Euler aE (P ).
La force d’entraı̂nement F e est la force exercée sur le point matériel P lorsqu’il est au repos
dans le référentiel accéléré, c’est-à-dire lorsque v r (P ) = 0,
F e = − m ae (P ) = F t + F c + F E (10.45)
Compte tenu des définitions (10.44), la loi du mouvement relatif (10.43) devient,
X
F ext + F t + F C + F c + F E = m ar (P ) (10.46)

Sur le plan formel, il y a quatre forces d’inertie F in : la force de translation F t , la force


de Coriolis F C , la force centrifuge F c et la force d’Euler F E . Ainsi, la résultante des forces
d’inertie s’écrit,
X
F in = F t + F C + F c + F E (10.47)

et la loi du mouvement relatif (10.46) se réduit à,


X X
F ext + F in = m ar (P ) (10.48)
116 Système de masse variable et référentiels accélérés

Les expressions des lois du mouvement absolu (10.41) et relatif (10.48) sont rigoureusement
identiques sur le plan mathématique mais leur signification physique est différente. Les
accélérations du point matériel P dans la loi du mouvement absolu sont des effets, et les
forces d’inertie dans la loi du mouvement relatif sont des causes.
A titre d’exemple, on considère une voiture qui effectue un virage. Par rapport au
référentiel absolu de la terre, le conducteur de la voiture, que l’on peut assimiler à un point
Accélération matériel P , subit une accélération centripète ac (P ) orientée radialement vers le centre O
centripète et force du virage. Par rapport au référentiel accéléré de la voiture, le conducteur subit une force
centrifuge centrifuge F c qui le pousse radialement vers l’extérieur du virage dans la direction opposée
à l’accélération centripète.
Dans l’expérience de la caméra tournante qui filme un jet d’eau en rotation (Fig. 10.4), le
référentiel absolu est celui de l’auditoire et le référentiel accéléré est celui de la buse tournante
ou de la caméra tournante. Comme ces référentiels sont en rotation l’un par rapport à l’autre,
les points matériels O et A au centre des repères absolu et relatif sont confondus, ce qui
implique que aa (A) = 0. Comme la buse et la caméra tournent à vitesse angulaire constante
Ω, cela implique que Ω̇ = 0. Par conséquent, les forces d’inertie qui agissent sur les gouttes
d’eau dans le référentiel accéléré − considérés comme des points matériels P qui sortent à
la vitesse relative v r (P ) de la buse − sont la force de Coriolis F C et la force centrifuge F c .
Ainsi, dans le référentiel accéléré, le mouvement des gouttes d’eau est une courbe. Dans le
référentiel absolu de l’auditoire, les gouttes sont en mouvement rectiligne uniforme puisqu’il
n’y pas de force d’inertie dans ce référentiel.
Dans l’expérience du feutre en mouvement circulaire sur un plateau horizontal, on
Jet d’eau en rotation
considère deux types de mouvements. Premièrement, lorsque le plateau est immobile et
le feutre tourne à vitesse angulaire constante Ω, le plateau est un référentiel absolu. Ainsi,
lorsque le feutre est relâché, il est en mouvement rectiligne uniforme. Deuxièmement, lorsque
le plateau et le feutre tournent à vitesse angulaire constante Ω, le plateau est un référentiel
relatif et le feutre est immobile par rapport au plateau. Ainsi, lorsque le feutre est relâché,
il subit la force de Coriolis F C et la force centrifuge F c . Par conséquent, le mouvement
du feutre est une courbe dans ce référentiel. Au moment où le feutre est relâché, la force
de Coriolis est nulle puisque la vitesse relative est nulle. Cependant, vu que le feutre est
accéléré par la force centrifuge, la force de Coriolis vient progressivement s’exercer sur le
feutre. Ainsi, après que le feutre soit relâché, sa trajectoire est initialement radiale, car la
force centrifuge domine. Ceci n’est pas le cas pour le jet d’eau tournant où la trajectoire
initiale est quasiment tangentielle parce la force de Coriolis domine initialement.
Feutre sur un plateau

10.3 Mouvement relatif


Mécanique § 2.15
Dans la section précédente, on a établi la loi du mouvement relatif dans un référentiel
accéléré. Dans cette section, on va considérer quatre exemples de mouvement relatif. Dans
le premier exemple, on examine la dynamique d’un pendule mathématique dans un train
uniformément accéléré. Dans le deuxième exemple, on veut déterminer le poids apparent
d’une personne dans un ascenseur uniformément accéléré. Dans le troisième exemple, on
décrit le mouvement d’un point matériel dans une centrifugeuse. Dans le quatrième exemple,
on considère un pendule qui oscille dans le plan d’une porte tournante.

10.3.1 Pendule dans un train accéléré


On considère un train qui a un mouvement rectiligne uniformément accéléré par rapport
aux voies. Un pendule mathématique, constitué d’un point matériel de masse m suspendu
au bout d’un fil de masse négligeable, est attaché au plafond d’un wagon. On associe au
référentiel absolu des voies le repère absolu (O, x̂1 , x̂2 ) et au référentiel relatif du train le
repère relatif (A, ŷ 1 , ŷ 2 ) (Fig. 10.6).
Les forces extérieures sont le poids P = m g et la tension T dans le fil. Comme le référentiel
relatif est en mouvement de translation par rapport au référentiel absolu, la vitesse angulaire
d’entraı̂nement est nulle, i.e. Ω = 0. Cela implique que la seule force d’inertie est la force
10.3 Mouvement relatif 117
x2
y2

T
P q a
mg
y1
A
0 x1

Figure 10.6 Pendule mathématique suspendu au plafond d’un wagon de train en mouve-
ment uniformément accéléré.

de translation F t = − m aa (A). Ainsi, la loi du mouvement relatif (10.48) se réduit à,

m g + T − m aa (A) = m ar (P ) (10.49)

On considère que le pendule a atteint sa position d’équilibre par rapport au référentiel


relatif, ce qui signifie que son accélération relative est nulle, i.e. ar (P ) = 0. La projection
des grandeurs vectorielles dans le repère (A, ŷ 1 , ŷ 2 ) s’écrit,

g = − g ŷ 2 T = T sin θ ŷ 1 + T cos θ ŷ 2 aa (A) = a = a ŷ 1 (10.50)

Compte tenu des expressions (10.50), les projections de la loi du mouvement (10.49) selon
les axes de coordonnées Oy1 et Oy2 s’écrivent,

T sin θ − ma = 0 et − mg + T cos θ = 0 (10.51)

Par conséquent, la position d’équilibre satisfait la relation,


a
tan θ = (10.52)
g
Ainsi, si le train freine uniformément, c’est-à-dire que le signe de l’accélération devient
négatif, alors l’angle de la position d’équilibre du pendule deviendra négatif également
(Fig. 10.6).

10.3.2 Poids apparent


On aimerait trouver une expression analytique pour le poids apparent d’une personne
dans un ascenseur qui est en mouvement rectiligne uniformément accéléré. Le poids apparent
P 0 correspond au poids mesuré sur une balance dans l’ascenseur. Pour modéliser ceci, on
convient d’assimiler la personne à un point matériel de masse m attaché à un dynamomètre
constitué d’un ressort suspendu au plafond de l’ascenseur. On associe au référentiel relatif
de l’ascenseur l’axe de coordonnée vertical Ay3 (Fig. 10.7).
Les forces extérieures sont le poids P = m g et la tension T dans le fil. Comme le référentiel
relatif est en mouvement de translation par rapport au référentiel absolu, la vitesse angulaire
d’entraı̂nement est nulle, i.e. Ω = 0, cela implique que la seule force d’inertie est la force de
translation F t = − m aa (A). Ainsi, la loi vectorielle du mouvement relatif est la même que
celle du pendule (10.49). On considère que le point matériel a atteint sa position d’équilibre
par rapport au référentiel relatif ce qui signifie que son accélération relative est nulle, i.e.
ar (P ) = 0. La projection des grandeurs vectorielles sur l’axe vertical Ay3 s’écrit,

g = − g ŷ 3 T = T ŷ 3 aa (A) = a = a ŷ 3 (10.53)

Compte tenu des expressions (10.53), la projection de la loi du mouvement relatif (10.49)
selon l’axes de coordonnées Oy3 s’écrit,

− m g + T − ma = 0 ainsi T = m (a + g) (10.54)

Le poids apparent P 0 = − T est la force qui compense la tension T dans le fil. Ainsi,

P 0 = − m (g + a) ŷ 3 (10.55)
118 Système de masse variable et référentiels accélérés
x 3,y 3 a

ressort

P masse

mg

O A

Figure 10.7 Mesure du poids apparent d’une masse dans un ascenseur en mouvement
rectiligne à accélération constante.

Si l’ascenseur accélère vers le haut, i.e. a > 0, la norme du poids apparent m (g + a) est
supérieure à la norme du poids réel mg. En revanche, si l’ascenseur accélère vers le bas,
i.e. a < 0, la norme du poids apparent est inférieure à la norme du poids réel. Dans le
cas où l’ascenseur est en chute libre, i.e. g = −a, le poids apparent est nul, ce qui signifie
que la personne est en état d’apesanteur. Les vols paraboliques permettant d’expérimenter
l’apesanteur fonctionnent selon ce principe.
Vol parabolique
10.3.3 Centrifugeuse
On considère une centrifugeuse constituée d’un tube qui tourne dans un plan horizontal à
vitesse angulaire Ω constante autour de son extrémité située au point O. Un point matériel
P de masse m est astreint à se déplacer dans le tube. On associe au référentiel absolu de la
centrifugeuse le repère absolu (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) et au référentiel relatif du tube le repère relatif
(O, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) où l’axe Oy1 est orienté le long du tube (Fig. 10.8).

x 3,y 3

W = cste

y2
O A
x2
N

P
x1

mg y1

Figure 10.8 La centrifugeuse est constituée d’un tube en mouvement de rotation uniforme
dans lequel un point matériel P est astreint à se déplacer.

Les forces extérieures sont le poids P = m g et la force de réaction normale N du tube.


Comme le référentiel relatif est en mouvement de rotation uniforme par rapport au référentiel
absolu, la dérivée temporelle de la vitesse angulaire d’entraı̂nement est nulle, i.e. Ω̇ = 0.
Dans ce cas, les forces d’inertie sont la force de Coriolis F C et la force centrifuge F c . Ainsi,
la loi du mouvement relatif (10.48) s’écrit,
m g + N + F c + F C = m ar (P ) (10.56)
Comme le point matériel se déplace dans le tube orienté selon l’axe Oy1 dans le référentiel
10.3 Mouvement relatif 119

relatif, les projections de la position relative r r (P ), de la vitesse relative v r (P ) et de


l’accélération relative ar (P ) dans ce référentiel sont données par,
r r (P ) = y1 ŷ 1 v r (P ) = ẏ1 ŷ 1 ar (P ) = ÿ1 ŷ 1 (10.57)
Les projections de la vitesse angulaire Ω, du champ gravitationnel g et de la force de réaction
normale N dans le référentiel relatif sont données par,
Ω = Ω ŷ 3 g = − g ŷ 3 N = N2 ŷ 2 + N3 ŷ 3 (10.58)
Compte tenu des expressions (10.57) et (10.58), les projections de la force centrifuge F c et
de la force de Coriolis F C dans le référentiel relatif sont données par,
 
F c = − m Ω × Ω × r r (P ) = − m Ω2 y1 ŷ 3 × (ŷ 3 × ŷ 1 ) = m Ω2 y1 ŷ 1
(10.59)
F C = − 2 m Ω × v r (P ) = − 2 mΩẏ1 ŷ 3 × ŷ 1 = − 2 m Ω ẏ1 ŷ 2
Compte tenu des expressions (10.57), (10.58) et (10.59), la projection de la loi du mouvement
relatif (10.56) selon les axes de coordonnées Oy1 , Oy2 et Oy3 donne trois équations,
m Ω2 y1 = m ÿ1 − 2 m Ω ẏ1 + N2 = 0 − mg + N3 = 0 (10.60)
La première équation (10.60) est l’équation du mouvement qui peut être exprimée comme,
ÿ1 − Ω2 y1 = 0 (10.61)
et les deux autres équations donnent les composantes N2 et N3 de la force de réaction
normale N . L’équation horaire du point matériel P , qui est une solution de l’équation du
mouvement (10.61), s’écrit,
y1 (t) = y1 (0) e Ω t (10.62)
ce qui signifie que le point matériel s’éloigne exponentiellement vite dans la direction radiale
sous l’action de la force centrifuge, d’où le nom de l’appareil : la centrifugeuse.
Centrifugeuse
10.3.4 Pendule sur une porte tournante
Un pendule mathématique constitué d’un point matériel P de masse m suspendu au bout
d’un fil de longueur ` et de masse négligeable, est attaché à la charnière d’une porte. Le
pendule est astreint à osciller dans le plan de la porte qui est en mouvement circulaire
uniforme à vitesse angulaire constante Ω. On associe au référentiel absolu du bâtiment le
repère
 absolu
 (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) et au référentiel relatif de la porte le repère sphérique relatif
A, r̂, θ̂, φ̂ (Fig. 10.9).

x3
A ^
q

^
f ^
r
q
T
W = cste
N
P
O x2

mg
x1
porte

Figure 10.9 Un pendule mathématique oscille dans le plan d’une porte tournant à vitesse
angulaire constante.
120 Système de masse variable et référentiels accélérés

Les forces extérieures sont le poids P = m g, la force de réaction normale N de la porte et


la tension T dans le fil. Comme le référentiel relatif est en mouvement de rotation uniforme
par rapport au référentiel absolu, la dérivée temporelle de la vitesse angulaire d’entraı̂nement
est nulle, i.e. Ω̇ = 0. Dans ce cas, les forces d’inertie sont la force de Coriolis F C et la force
centrifuge F c . Ainsi, la loi du mouvement relatif (10.48) s’écrit,
m g + N + T + F c + F C = m ar (P ) (10.63)
Comme le point matériel au bout d’un fil de longueur ` se déplace dans le plan de la
porte φ = cste décrit par rapport au référentiel relatif, la position relative (5.15), la vitesse
relative (5.18) et l’accélération relative (5.20) dans ce référentiel sont données par,
r r (P ) = ` r̂ v r (P ) = ` θ̇ θ̂ ar (P ) = − ` θ̇2 r̂ + ` θ̈ θ̂ (10.64)
Les projections de la vitesse angulaire Ω et du champ gravitationnel g dans le référentiel
relatif sont données par,
Ω = − Ω cos θ r̂ + Ω sin θ θ̂ et g = g cos θ r̂ − g sin θ θ̂ (10.65)
Les projections de la force de réaction normale N et de la tension T dans le référentiel
relatif sont données par,
N = − N φ̂ et T = − T r̂ (10.66)
Compte tenu des expressions (10.64) et (10.65), les projections de la force centrifuge F c et
de la force de Coriolis F C dans le référentiel relatif sont données par,
      
F c = − m Ω × Ω × r r (P ) = − m ` Ω2 cos θ r̂ − sin θ θ̂ × r̂ − sin θ θ̂ × r̂
cosθ


= m ` Ω2 sin2 θ r̂ + m ` Ω2 sin θ cos θ θ̂



F C = − 2 m Ω × v r (P ) = 2 m ` Ω θ̇ cos θ r̂ −  θ θ̂ × θ̂ = 2 m ` Ω θ̇ cos θ φ̂
sin
(10.67)
Compte tenu des expressions (10.64), (10.65), (10.66) et (10.67), la projection de la loi du
mouvement relatif (10.63) selon les axes de coordonnées d’orientation r̂, θ̂ et φ̂ donne trois
équations,
m g cos θ − T + m ` Ω2 sin2 θ = − m ` θ̇2
− m g sin θ + m ` Ω2 sin θ cos θ = m ` θ̈ (10.68)
− R + 2 m ` Ω θ̇ cos θ = 0
La deuxième équation (10.68) est l’équation du mouvement qui peut être exprimée comme,
g 
θ̈ + − Ω2 cos θ sin θ = 0 (10.69)
`
et les deux autres équations donnent la composante N de la force de réaction normale N et
la composante T de la tension T .
11
Dynamique terrestre, pendule de Foucault et
système de points matériels

Dans la première section de ce chapitre, on va considérer la terre comme un référentiel


accéléré en rotation propre. Dans la deuxième section, on verra que la rotation de terre est
mise en évidence par la rotation du plan d’oscillation du pendule de Foucault. Finalement,
on examinera en détails les propriétés et les lois de conservation physiques d’un système de
points matériels.

11.1 Dynamique terrestre


Mécanique § 1.16
Jusqu’à présent, on a considéré la terre comme un référentiel d’inertie. En réalité, la terre
n’est pas un référentiel d’inertie puisqu’elle tourne sur elle-même et que son centre de masse
est en rotation autour du soleil. Pour de nombreux systèmes physiques à une échelle de temps
donnée, on peut très bien négliger le mouvement de rotation de la terre. Dans ce chapitre,
on verra que cela n’est pas toujours le cas. La période de rotation de la terre sur elle-même
est de 1 jour alors que la période de rotation de la terre autour du soleil est de 365.24 jours.
Par conséquent, on peut négliger la norme Ω0 = 1.99 · 10−7 [ s−1 ] de la vitesse angulaire de
rotation de la terre autour du soleil par rapport à la norme Ω = 7.27·10−5 [ s−1 ] de la vitesse
angulaire de rotation de la terre sur elle-même. La dynamique terrestre est le mouvement
de rotation propre du référentiel relatif de la terre par rapport à un référentiel absolu fixe. Rotation de la terre
En réalité, la terre est un ellipsoı̈de de révolution dont le rayon polaire r- = 6357 [ km ] est
légèrement inférieur au rayon équatorial r+ = 6378 [ km ]. L’ellipsoı̈de de révolution est dû à
la force centrifuge F c qui provoque un aplatissement aux pôles terrestres. Etant donné que
l’excentricité e  1 de l’ellipsoı̈de de révolution terrestre est très faible,
s
r2
e = 1 − 2- = 0.08 (11.1)
r+

on va à présent considérer que la terre est une sphère de rayon r0 = 6371 [ km ] dont le Ellipsoı̈de de
volume est identique à l’ellipsoı̈de de révolution terrestre. révolution

11.1.1 Champ gravitationnel terrestre


On considère l’observateur comme un point matériel P de masse m à la surface de la terre.
On associe au référentiel absolu fixe le repère absolu (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) et au référentiel relatif
de la terre en rotation propre le repère relatif (A, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ). L’angle d’inclinaison θ de l’axe
Ay3 par rapport à l’axe Ox3 est la co-latitude définie comme l’angle complémentaire à la
latitude λ, i.e. θ = π/2 − λ (Fig. 11.1).
La vitesse angulaire Ω de rotation de la terre est constante, i.e. Ω̇ = 0, et le point A
est en mouvement circulaire uniforme, ce qui implique que son accélération absolue est une
accélération centripète, i.e. aa (A) = Ω × (Ω × OA). Compte tenu de ces considérations et
du fait que la position relative du point matériel r r (P ) = AP , l’équation du mouvement
relatif (10.43) se réduit à,
X  
F ext − m Ω × Ω × (OA + AP ) − 2 m Ω × v r (P ) = m ar (P ) (11.2)
122 Dynamique terrestre, pendule de Foucault et système de points matériels
y3

y2

A
q
x3
x2
O y1
x1

Figure 11.1 Le repère absolu (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) est associé au référentiel absolu fixe et le
repère relatif (A, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) est associé au référentiel relatif de la terre en rotation propre.

Le champ gravitationnel terrestre g 0 est défini par rapport au référentiel absolu fixe. Pour
obtenir l’expression du champ gravitationnel terrestre apparent g exprimé par rapport au
référentiel relatif terrestre, on suspend le point matériel à un fil de masse négligeable et on
attend qu’il atteigne un état d’équilibre dans le référentiel relatif terrestre. A l’équilibre, la
vitesse relative et l’accélération relative sont nulles, i.e. v r (P ) = 0 et ar (P ) = 0. Les forces
extérieures qui s’exercent sur le point matériel sont son poids m g 0 et la tension dans le fil
T où g 0 est le champ gravitationnel en absence de rotation de la terre. La distance k AP k
qui sépare le point matériel P du point A situé à la surface de la terre est négligeable par
rapport au rayon de la terre r0 = k OA k, i.e. k AP k  k OA k (Fig. 11.2).

W x3

P - m W x (W x OA)
q
O mg 0
x1

Figure 11.2 Le poids m g 0 , la tension dans le fil T et la force centrifuge − m Ω ×


(Ω × OA) agissent sur le point matériel P à la surface de la terre.

Ainsi, à l’équilibre, l’équation du mouvement relatif terrestre (11.2) se réduit à,


 
m g 0 + T − m Ω × (Ω × OA) = 0 ainsi T = − m g 0 − Ω × (Ω × OA) (11.3)

Le poids apparent m g est définit comme la force qui est égale et opposée à la tension dans
le fil T ,
 
m g = − T = m g 0 − Ω × (Ω × OA) (11.4)

Compte tenu de l’équation (11.4), le champ gravitationnel terrestre apparent s’écrit,

g = g 0 − Ω × (Ω × OA) (11.5)

Le champ gravitationnel terrestre apparent g et le poids apparent m g ne sont pas orientés


vers le centre de la terre lorsque la force centrifuge − m Ω×(Ω × OA) est non-nulle. Compte
tenu des relations g 0 − g = − (g0 − g) x̂1 , où g0 > g, et Ω × (Ω × OA) = − r0 Ω2 sin θ x̂1 ,
la norme du champ gravitationnel terrestre apparent g s’exprime en terme de la norme du
champ gravitationnel terrestre g0 comme (Fig. 11.2),

g = g0 − r0 Ω2 sin θ = g0 − r0 Ω2 cos λ (11.6)


11.1 Dynamique terrestre 123

Ainsi, le champ gravitationnel est minimal à l’équateur (i.e. λ = 0) dû à l’action de la force
centrifuge qui s’oppose à la force de la gravitation dans le référentiel terrestre. Il est maximal
(i.e. λ = π/2) aux pôles où la force centrifuge est nulle. C’est pour cette raison que la terre
a une forme d’ellipsoı̈de de révolution. La correction relative due à la rotation de la terre
dans l’expression du champ gravitationnel est très faible,
δg0 g0 − g r0 Ω2 cos λ
= = ≤ 0.3 % (11.7)
g0 g0 g0
ce qui implique que la terre est quasiment une sphère.

11.1.2 Mouvement relatif vertical


Dans cette section, on aimerait décrire l’influence de la rotation de la terre sur un objet
dont le mouvement a lieu initialement selon l’axe vertical, c’est-à-dire un tir vertical ou un
mouvement de chute libre à la surface de la terre. Pour alléger l’écriture, le repère relatif
associé au référentiel relatif terrestre sera dénoté (A, x̂, ŷ, ẑ) (Fig. 11.3).

W
z
l
W
A
q x
l

Figure 11.3 L’axe Ax est orienté vers le sud, l’axe Ay est orienté vers l’est et l’axe Az est
vertical.

La seule force extérieure est le poids P = m g où g est le champ gravitationnel appa-
rent (11.5). Comme la rotation a lieu à vitesse angulaire Ω constante, i.e. Ω̇ = 0, cela signifie
que la force de translation F t = − m aa (A) = − m Ω × (Ω × OA) est contenue dans l’ex-
pression du poids apparent m g. Compte tenu de l’expression (10.44) de la force de Coriolis
F C , la loi du mouvement relatif (10.46) s’écrit explicitement,

m g − 2 m Ω × v r (P ) = m ar (P ) (11.8)

Les grandeurs vectorielles sont exprimées dans le repère relatif comme,

Ω = − Ω cos λ x̂ + Ω sin λ ẑ g = − g ẑ
(11.9)
v r (P ) = ẋ x̂ + ẏ ŷ + ż ẑ ar (P ) = ẍ x̂ + ÿ ŷ + z̈ ẑ

Par conséquent, la force de Coriolis F C s’écrit en composantes comme,

F C = − 2 m Ω × v r (P ) = − 2 m (− Ω cos λ x̂ + Ω sin λ ẑ) × (ẋ x̂ + ẏ ŷ + ż ẑ)


(11.10)
= 2 m Ω ẏ sin λ x̂ − 2 m Ω (ż cos λ + ẋ sin λ) ŷ + 2 m Ω ẏ cos λ ẑ

Compte tenu des expressions (11.9) et (11.10), les projections de la loi du mouvement (11.8)
selon les axes de coordonnées Ax, Ay et Az divisées par la masse m sont données par,

ẍ = 2 Ω ẏ sin λ
ÿ = − 2 Ω (ż cos λ + ẋ sin λ) (11.11)
z̈ = − g + 2 Ω ẏ cos λ

Les conditions initiales sur la position relative et la vitesse relative sont,

r r (0) = z0 ẑ v r (0) = v0 ẑ (11.12)


124 Dynamique terrestre, pendule de Foucault et système de points matériels

Compte tenu des conditions initiales (11.12), les équations des vitesses, obtenues en intégrant
les équations du mouvement (11.11) par rapport au temps de 0 à t, sont données par,
ẋ = 2 Ω y sin λ
 
ẏ = − 2 Ω (z − z0 ) cos λ + x sin λ (11.13)
ż = v0 − gt + 2 Ω y cos λ
La substitution des équations des vitesses (11.13) dans l’équation du mouvement le long de
l’axe Ay s’écrit,
ÿ = − 2 Ω cos λ (v0 − gt + 2 Ω y cos λ) − 2 Ω sin λ (2 Ω y sin λ) (11.14)
Comme la norme de la vitesse angulaire de rotation de la terre Ω est très faible, on peut
négliger les termes en Ω2 . Au 1 er ordre en Ω, l’équation du mouvement (11.14) se réduit
alors à,
ÿ = − 2 Ω cos λ (v0 − gt) (11.15)
En intégrant l’équation du mouvement (11.15) deux fois successivement, compte tenu des
conditions initiales (11.12), on obtient l’équation horaire selon l’axe Ay,
 
2 1 3
y (t) = − Ω cos λ v0 t − gt (11.16)
3
En substituant l’équation horaire (11.16) dans les équations de la vitesse (11.13), on obtient,

   
1 1 3
ẋ = − 2 Ω sin λ cos λ v0 t − gt3
2 2
et 2
ż = v0 − gt − 2 Ω cos λ v0 t − gt 2 2
3 3
(11.17)
Au 1 er ordre en Ω, les équations de la vitesse (11.17) se réduisent alors à,
ẋ = 0 et ż = v0 − gt (11.18)
Les équations horaires selon les axes Ax et Az sont obtenues en intégrant les équations de
la vitesse (11.18) par rapport au temps,
1 2
x (t) = 0 et z (t) = z0 + v0 t −
gt (11.19)
2
Ainsi, au premier ordre en Ω, les équations horaires dans le plan vertical Axz sont identiques
aux équations horaires (3.15) d’un mouvement balistique où la terre est considérée comme
un référentiel absolu. La déviation due à la force de Coriolis est donnée par l’équation
horaire (11.16) selon l’axe Ay.
A titre d’exemple, on considère une balle lancée de la surface de la terre, i.e. z0 = 0, avec
une vitesse verticale initiale v0 = 10 [ m/s ] à une latitude λ = π/4. Au temps T = v0 /g, le
point matériel atteint sa hauteur maximale car sa vitesse verticale est nulle, i.e. ż (T ) = 0.
La hauteur maximale z (T ) et la déviation latérale y (2T ) de la balle lorsqu’elle touche le sol
au temps 2T = 2v0 /g valent,
v02 4 v03
z (T ) = = 5.1 [ m ] et y (2T ) = − Ω cos λ = − 0.71 [ mm ] (11.20)
2g 3 g2
Vu que y (2T ) < 0, la déviation a lieu vers l’ouest. Cette déviation est environ 4 ordres de
grandeur inférieure à la hauteur maximale.

11.1.3 Mouvement relatif horizontal


Dans un plan horizontal localement parallèle à la surface de la terre, i.e. z = cste, les
équations du mouvement (11.11) se réduisent à,
ẍ = 2 Ω sin λ ẏ et ÿ = − 2 Ω sin λ ẋ (11.21)
Les équations du mouvement sont proportionnelles à sin λ ce qui signifie que l’effet de la
rotation de la terre − décrit par la force de Coriolis − sur le mouvement horizontal sera nulle
11.2 Pendule de Foucault 125

à l’équateur (i.e. λ = 0) et maximal aux pôles, i.e. (i.e. λ = ± π/2). D’après les équations
du mouvement relatif (11.21), le vecteur vitesse relative v r (P ) et le vecteur accélération
relative ar (P ) d’un point matériel P , exprimés en composantes comme,
v r (P ) = ẋ x̂ + ẏ ŷ et ar (P ) = ẍ x̂ + ÿ ŷ (11.22)
sont orthogonaux,
v r (P ) · ar (P ) = ẋ ẍ + ẏ ÿ = 0 (11.23)
comme dans le cas d’un mouvement circulaire. Pour comprendre le comportement qualitatif
du mouvement relatif horizontal, on considère quatre cas particuliers (Fig. 11.4).
Mouvements relatifs
circulaires

l>0 2. 1. l>0

y (est)

l<0 4. 3. l<0

x (sud)

Figure 11.4 Les trajectoires du point matériel P tournent dans le sens des aiguilles
d’une montre dans l’hémisphère nord (i.e. λ > 0) et dans le sens trigonométrique dans
l’hémisphère sud (i.e. λ < 0).

Compte tenu des équations du mouvement (11.21), les trajectoires du point matériel P
dans les quatre cas particuliers ci-dessous sont illustrées sur les quatre quadrants (Fig. 11.4). Cyclone

1. Si λ > 0 alors ẏ > 0 → ẍ > 0 et ẏ < 0 → ẍ < 0.


2. Si λ > 0 alors ẋ > 0 → ÿ < 0 et ẋ < 0 → ÿ > 0.
3. Si λ < 0 alors ẏ > 0 → ẍ < 0 et ẏ < 0 → ẍ > 0.
4. Si λ < 0 alors ẋ > 0 → ÿ > 0 et ẋ < 0 → ÿ < 0.
En observant les trajectoires qualitatives des mouvements relatifs horizontaux à la surface
de la terre (Fig. 11.4), on constate que l’effet de la force de Coriolis due à la rotation de la
terre est de dévier la trajectoire du point matériel P dans le sens des aiguilles d’une montre
dans l’hémisphère nord (i.e. λ > 0) et dans le sens trigonométrique dans l’hémisphère sud
(i.e. λ < 0). La force de Coriolis est responsable de la formation de cyclones bien visibles
en regardant une image prise par un satellite en orbite géostationnaire. Dans un cyclone,
la trajectoire des nuages est même une spirale due à la présence d’un gradient de pression
entre le centre et l’extérieur. Comme la force de Coriolis est nulle à l’équateur, les masses
d’air sont poussées des zones tropicales des hémisphères nord et sud vers l’équateur − qui
joue le rôle d’attracteur − ce qui donne lieu à la formation d’un vent tropical appelé alizé.
Alizé

11.2 Pendule de Foucault


Mécanique § 5.2
En 1851, Léon Foucault a démontré expérimentalement la rotation de la terre à l’aide
d’un pendule suspendu au sommet du dôme du Panthéon à Paris. Le pendule de Foucault
126 Dynamique terrestre, pendule de Foucault et système de points matériels

du Panthéon est constitué d’une masse m = 28 [ kg ] suspendue à un fil d’une longueur


` = 67 [ m ]. L’amplitude des oscillations est faible par rapport à la longueur du pendule.
Compte tenu de la relation (6.18), la période d’oscillation est T = 16 [ s ] (Fig. 11.5). Le
principe de fonctionnement du pendule est le suivant. Par rapport au référentiel absolu
fixe, le plan d’oscillation vertical du pendule est fixe. Comme la terre est en rotation sur
elle-même, le plan vertical d’oscillation du pendule dans le référentiel relatif terrestre a un
mouvement de rotation à vitesse angulaire constante qui dépend de la latitude λ.

Léon Foucault

Figure 11.5 Pendule de Foucault au Panthéon, à Paris.

Pour décrire le mouvement du pendule de Foucault, on prend la loi du mouvement relatif


vertical (11.8) et on ajoute au poids m g du point matériel P la tension T exercée dans le
Rotation du plan
fil,
d’oscillation
m g + T − 2 m Ω × v r (P ) = m ar (P ) (11.24)

W y A f
N y

A x

x z q
O l
Z
T

P
Ax: vers ouest
S Ay: vers nord z
mg

Figure 11.6 Repère relatif (A, x̂, ŷ, ẑ) et angles θ et φ qui permettent de définir des
coordonnées sphériques (r, θ, φ) de manière usuelle.

Les projections du champ gravitationnel apparent g et de la vitesse angulaire Ω dans le


repère relatif (A, x̂, ŷ, ẑ) associé au référentiel relatif de la terre en rotation propre s’écrivent
(Fig. 11.6),
g = g ẑ et Ω = Ω cos λ ŷ − Ω sin λ ẑ (11.25)

Afin de tenir compte des symétrie du mouvement, on exprime les vecteurs ŷ et ẑ en termes
des vecteurs er , eθ et eφ du repère sphérique attaché au point matériel P à l’aide du vecteur
auxiliaire eρ du repère cylindrique (Fig. 11.7).

ẑ = cos θ er − sin θ eθ et eρ = sin θ er + cos θ eθ


(11.26)
ŷ = cos φ eφ + sin φ eρ = sin φ sin θ er + sin φ cos θ eθ + cos φ eφ

Il y a deux contraintes géométriques, à savoir que la longueur ` du pendule est une constante
11.2 Pendule de Foucault 127
z

z er
z
q
er P er
eq
ef q
P
q

q eq
A r

A y A y
ef ef
f f
P’ f
x er y
P’
x
er
r

Figure 11.7 Illustrations auxiliaires pour établir l’expression des projections de vecteurs
unités.

et que la vitesse angulaire de rotation φ̇ du plan vertical d’oscillation est une constante,
r = ` = cste ainsi ṙ = 0 et r̈ = 0
(11.27)
φ̇ = cste ainsi φ̈ = 0

Comme l’angle d’oscillation θ est faible et que les vitesses angulaires Ω et φ̇ sont également
faibles, au 1 er ordre en θ, Ω et φ̇ on néglige les termes du 2 e ordre, c’est-à-dire les termes
en θ2 , Ω2 , φ̇2 , θ Ω, θ φ̇ et Ωφ̇. De plus, au 1 er ordre, sin θ = θ et cos θ = 1. Ainsi, les
vecteurs (11.26) se réduisent au 1 er ordre à,
ẑ = er − θ eθ et ŷ = θ sin φ er + sin φ eθ + cos φ eφ (11.28)
Compte tenu des expressions (11.28), les vecteurs (11.25) et la tension dans le fil T s’ex-
priment au 1 er ordre comme,
g = g er − g θ eθ et T = − T er
Ω = Ω cos λ (  φ er + sin φ eθ + cos φ eφ ) − Ω sin λ (er − 
θ sin θ e
θ) (11.29)
 


= − Ω sin λ er + Ω cos λ sin φ eθ + Ω cos λ cos φ eφ


Compte tenu des contraintes (11.27), les vecteurs vitesse relative (5.18) et accélération rela-
tive (5.20) se réduisent au 1 er ordre à,
v r (P ) = ` θ̇ eθ et ar (P ) = − ` θ̇2 er + ` θ̈ eθ + 2` θ̇ φ̇ eφ (11.30)
Par conséquent, compte tenu des expressions (11.29) et (11.30), la force de Coriolis F C
s’exprime au 1 er ordre comme,
((
F C = − 2 m Ω × v r (P ) = − 2 m (− Ω sin λ er + ( Ω cos
(( sin(φ eθ + Ω cos λ cos φ eφ ) × ` θ̇ eθ
λ(
= 2 m ` θ̇ Ω cos λ cos φ er + 2 m ` θ̇ Ω sin λ eφ (11.31)
En substituant les expressions des grandeurs vectorielles (11.29), (11.30) et (11.31) dans
l’équation du mouvement relatif (11.24) et en la projetant selon les axes de cordonnées
colinéaires aux vecteurs er , eθ et eφ respectivement, on obtient les trois équations scalaires,

mg − T + 2 m ` θ̇ Ω cos λ cos φ = − m ` θ̇2


− mg θ = m ` θ̈ (11.32)
2 m ` θ̇ Ω sin λ = 2 m ` θ̇ φ̇
La première équation (11.32) donne la norme T de la tension dans le fil,
 
T = m g + ` θ̇2 + 2` θ̇ Ω cos λ cos φ (11.33)
128 Dynamique terrestre, pendule de Foucault et système de points matériels

où le second terme rend compte de la force centrifuge due à l’oscillation du pendule et le
dernier terme rend compte de la force de Coriolis due à l’oscillation du pendule et à la rota-
tion de la terre. La deuxième équation (11.32) est l’équation d’un mouvement harmonique
oscillatoire de faible amplitude autour de la position d’équilibre θ = 0,
g
θ̈ + ω 2 θ = 0 où ω2 = (11.34)
`
La dernière équation exprime la vitesse angulaire φ̇ de rotation du plan vertical d’oscillation
du pendule en terme de la vitesse angulaire Ω de rotation de la terre sur elle-même,

φ̇ = Ω sin λ (11.35)

Par conséquent, la vitesse de rotation φ̇ est nulle à l’équateur et elle est maximale aux pôles
où φ̇ = ± Ω. La rotation du plan d’oscillation change de sens lorsqu’on traverse l’équateur.
A Lausanne (i.e. λ = 46.5◦ ), la période de rotation T vaut,
2π 2π
T = = = 33.1 [ h ] (11.36)
φ̇ Ω sin λ
Cela signifie que la vitesse de rotation angulaire du plan d’oscillation est 10.9◦ /h (Fig. 11.8).

Figure 11.8 Le plan d’oscillation vertical tourne d’un angle de 10.9◦ par heure dans la
direction des aiguilles d’une montre à Lausanne.

11.3 Système de points matériels


Mécanique § 1.17
Au chapitre 8, pour analyser les collisions entre points matériels, on a introduit la notion
de système constitué d’un ensemble de points matériels. On adopte la convention usuelle
qui consiste à dénoter ces points matériels par une lettre grecque, par exemple l’indice α.
L’évolution temporelle du système de points matériels est déterminé par le mouvement des
points matériels Pα de masse mα .

11.3.1 Centre de masse


On considère un repère quelconque d’origine O associé à un référentiel donné. Le centre
de masse ou le barycentre G du système, constitué des points matériels Pα de masse mα ,
est la position moyenne de ces points matériels pondérée par leur masse,
1 X X
OG = mα OP α où M= mα (11.37)
M α α

Théorème 11.1. La définition (11.37) du centre de masse G du système de points matériels


Pα est indépendante du choix de l’origine O du repère.

Démonstration On considère un repère d’origine O0 et on appelle G0 le centre de masse du


11.3 Système de points matériels 129

système de points matériels Pα exprimé par rapport à ce repère. D’après la définition (11.37),

1 X 1 X
O 0 G0 = mα O 0 P α = mα (O 0 O + OP α )
M α M α
! (11.38)
1 X 1 X
= mα O 0 O + mα OP α = O 0 O + OG = O 0 G
M α M α

Ainsi, on en conclut que les centres de masse coı̈ncident, i.e. G = G0 .


Le référentiel par rapport auquel le centre de masse est au repos s’appelle référentiel
du centre de masse. Pour adopter la même convention d’écriture que celle utilisée au
chapitre 8 pour traiter du problème à deux corps, on définit les vecteurs position du centre
de masse RG , position r α et position relative r 0α du point matériel Pα comme,
RG = OG r α = OP α r 0α = GP α (11.39)
Compte tenu des définitions (11.39),
r α = RG + r 0α car OP α = OG + GP α (11.40)
La position du centre de masse (11.37) peut être exprimée en terme des vecteurs (11.39)
comme,
1 X
RG = mα r α (11.41)
M α

A l’aide des relations (11.40) et (11.41),


X X X
mα r 0α = mα (r α − RG ) = mα r α − M RG = 0 (11.42)
α α α

Les vecteurs vitesse du centre de masse V G , vitesse v α et vitesse relative v 0α du point


matériel Pα sont définis comme,
VG = ṘG v α = ṙ α v 0α = ṙ 0α (11.43)
Compte tenu des définitions (11.43),
v α = VG + v 0α car ṙ α = ṘG + ṙ 0α (11.44)
La vitesse du centre de masse est obtenue en prenant la dérivée temporelle de la posi-
tion (11.37) du centre de masse,
1 X 1 X
ṘG = mα ṙ α ainsi VG = mα v α (11.45)
M α M α

A l’aide des relations (11.44) et (11.45),


X X X
mα v 0α = mα (v α − VG ) = mα v α − M VG = 0 (11.46)
α α α

Les vecteurs accélération du centre de masse AG , accélération aα et accélération relative a0α


du point matériel Pα sont définis comme,
AG = V̇G aα = v̇ α a0α = v̇ 0α (11.47)
Compte tenu des définitions (11.47),
aα = AG + a0α car v̇ α = V̇G + v̇ 0α (11.48)
L’accélération du centre de masse est obtenue en prenant la dérivée temporelle de la vi-
tesse (11.45) du centre de masse,
1 X 1 X
V̇G = mα v̇ α ainsi AG = mα aα (11.49)
M α M α

A l’aide des relations (11.48) et (11.49),


X X X
mα a0α = mα (aα − AG ) = mα aα − M AG = 0 (11.50)
α α α
130 Dynamique terrestre, pendule de Foucault et système de points matériels

11.3.2 Dynamique d’un système de points matériels


D’après la définition (2.30), la quantité de mouvement d’un point matériel Pα s’écrit,

pα = mα v α (11.51)

et d’après la définition (9.1), le moment cinétique du point matériel Pα par rapport au point
O s’écrit,
LO,α = OP α × pα = r α × pα (11.52)

La 2 e loi de Newton (2.19) et le théorème du moment cinétique (11.66) appliqués au point


matériel Pα s’écrivent,
dpα dLO,α
= Fα et = M O,α (11.53)
dt dt
où F α est la force résultante et M O,α est le moment de force résultant exercés sur le point
matériel Pα . D’après la définition (9.2), le moment de force exercé sur le point matériel Pα
s’écrit,
M O,α = OP α × F α = r α × F α (11.54)

La force résultante F α et le moment de force résultant M O,α appliqués sur le point matériel
Pα sont extérieurs à Pα mais peuvent être intérieurs au système de points matériels.
A présent, on doit distinguer les forces et les moments de force intérieurs et extérieurs au
système de points matériels. Pour un système de points matériels, la 3 e loi de Newton (8.1)
s’écrit,
F α→β = − F β→α ∀ α, β (11.55)

La somme des forces intérieures F αint exercées sur l’ensemble des points matériels Pα , s’ex-
prime en termes des forces F β→α exercées par les points matériels Pβ sur les points matériels
Pα . Compte tenu de la 3 e loi de Newton (11.55),
X X X X X X X
F αint = F β→α = F β→α + F β→α
α α β | β6=α α β | β>α α β | β<α
α↔β X X   (11.56)
= F β→α + F α→β = 0
α β | β>α

La force intérieure F β→α exercée par le point matériel Pβ sur le point matériel Pα est
orientée selon l’axe qui lie ces points matériels afin de satisfaire la 3 e loi de Newton (11.55),
ce qui implique que,
P β P α × F β→α = 0 ∀ α, β (11.57)
int
D’après la définition (11.54), la somme des moments de forces intérieures M O,α exercés sur
l’ensemble des points matériels Pα évaluée par rapport au point O, s’exprime en termes
des forces intérieures F αint exercées sur l’ensemble des points matériels Pα . D’après les
équations (11.56), elle s’exprime en fin de compte en termes des forces F β→α exercées par les
points matériels Pβ sur les points matériels Pα . Compte tenu de la 3 e loi de Newton (11.55)
et de la condition (11.57),
X X X X
int
M O,α = OP α × F αint = OP α × F β→α
α α α β | β6=α
X X X X
β→α
= OP α × F + OP α × F β→α
α β | β>α α β | β<α
α↔β X X  
= OP α × F β→α + OP β × F α→β (11.58)
α β | β>α
X X X X
= (OP α − OP β ) × F β→α = P β P α × F β→α = 0
α β | β>α α β | β>α
11.3 Système de points matériels 131

La quantité de mouvement totale P et le moment cinétique total LO par rapport au point


O sont définis comme,
X X
P = pα LO = LO,α (11.59)
α α

Compte tenu de la relation (11.44) entre les vitesses et des expressions (11.51) et (11.46)
de la quantité de mouvement et de la quantité de mouvement relative totale, la quantité de
mouvement totale se réduit à,
X X X
P = mα v α = mα (VG + v 0α ) = M VG + mα v 0α = M VG (11.60)
α α α

La force extérieure résultante F ext et le moment de forces extérieures résultant M Oext ap-
pliqués sur le système au point O sont donnés par,
X X
F ext = F αext M Oext = ext
M O,α (11.61)
α α

Théorème 11.2. Le théorème de la quantité de mouvement du système de points matériels


s’énonce comme suit,
dP
F ext = (11.62)
dt
Démonstration Compte tenu des équations (11.53), (11.56), (11.59) et (11.61) et du fait
que les forces F α sont soit des forces intérieures F αint soit des forces extérieures F αext ,
dP X dp X X X
= α
= Fα = F αint + F αext = F ext (11.63)
dt α
dt α α α

Théorème 11.3. Pour un système fermé de points matériels, le théorème du centre de


masse du système de points matériels s’énonce comme suit,

F ext = M AG (11.64)

Démonstration La masse totale M d’un système fermé de points matériels est constante.
Compte tenu de l’expression (11.47) de l’accélération du centre de masse et de l’expres-
sion (11.60) pour la quantité de mouvement, le théorème de la quantité de mouvement (11.62)
est mis sous la forme suivante,
dP dM dVG
F ext = = VG + M = M AG (11.65)
dt dt dt

Théorème 11.4. Le théorème du moment cinétique du système de points matériels s’énonce


comme suit,
dLO
M Oext = (11.66)
dt
Démonstration Compte tenu des équations (11.53), (11.58), (11.59) et (11.61) et du fait
int
que les moments de force M O,α sont soit des moments de forces intérieures M O,α soit des
ext
moments de forces extérieures M O,α ,
dLO X dLO,α X X
int
X
ext
= = M O,α = M O,α + M O,α = M Oext (11.67)
dt α
dt α α α

11.3.3 Principes de conservation


Les théorèmes de la quantité de mouvement (11.62) et du moment cinétique (11.66) nous
permettent d’énoncer deux principes de conservation pour un système isolé. Si le système
132 Dynamique terrestre, pendule de Foucault et système de points matériels

est isolé ou que la force extérieure résultante est nulle, le théorème de la quantité de mou-
vement implique que la quantité de mouvement totale est conservée,
dP
=0 ainsi P = cste (11.68)
dt
ce qui signifie que la quantité de mouvement totale est une constante du mouvement.
Si le système est isolé ou que le moment de forces extérieures résultant est nul, le théorème
Tir d’arme à feu du moment cinétique implique que le moment cinétique total est conservé,
dLO
=0 ainsi LO = cste (11.69)
dt
ce qui signifie que le moment cinétique total est une constante du mouvement. Les prin-
cipes de conservation de la quantité de mouvement (11.68) et du moment cinétique (11.69)
dépassent largement le cadre la mécanique classique puisqu’ils sont valables en mécanique
quantique et en relativité générale. En réalité, si le système physique est invariant par trans-
lation, la quantité de mouvement totale P est une constante du mouvement, et s’il est
invariant par rotation autour du point O, le moment cinétique total LO est une constante
du mouvement. A titre d’exemple, on peut mentionner la conservation de la quantité de
mouvement totale d’un système constitué d’une arme à feu et d’une balle lors d’un tir qui
donne lieu à un effet de recul. On peut aussi mentionner la conservation du moment cinétique
total d’une patineuse lors d’un mouvement de rotation sur la glace.
Patineuse en rotation
12
Cinématique et dynamique du solide
indéformable

Au chapitre 2, on a établi la cinématique et la dynamique du point matériel. Dans ce


chapitre, on va étendre ce modèle pour considérer la cinématique et la dynamique du solide
indéformable. La première section est consacrée à la cinématique du solide indéformable et
la deuxième section est consacrée à la dynamique du solide indéformable. La dernière section
est consacrée au tenseur d’inertie et aux équations d’Euler.

12.1 Cinématique du solide indéformable


Mécanique § 1.18
Au chapitre 2, on a défini le modèle du point matériel. Dans ce modèle, on attribue toute
la masse d’un objet à un point qui correspond au centre de masse de l’objet. Dans ce modèle,
la cinématique et la dynamique de l’objet sont entièrement déterminées par le mouvement
du point matériel. En d’autres termes, on ne tient pas compte du changement d’orientation
de l’objet lors de son mouvement, ce qui signifie que l’on ignore ou néglige le mouvement de
rotation propre de l’objet sur lui-même autour d’un axe passant par son centre de masse.
C’est la raison pour la laquelle on introduit à présent un modèle plus général qui permet
de rendre compte de l’orientation du solide au cours du temps. Ce modèle est le solide
indéformable (Fig. 12.1).

x3 x3
A A

0 0
x1 x1

x1 A x1 A
A A

Figure 12.1 Sur l’image de gauche, le centre de masse du cube a un mouvement de


rotation par rapport au point O, mais il n’y a pas de mouvement de rotation propre du
cube. Sur l’image de droite, le cube a un mouvement de rotation propre autour de son
centre de masse, car la figure allégorique Helvetia change d’orientation. Ce cube est un
solide indéformable que l’on peut considérer comme un référentiel.

12.1.1 Solide indéformable


Un solide indéformable est un système constitué d’un ensemble de points matériels
dont les distances relatives sont constantes. Comme les distances sont constantes, le solide
indéformable ne change ni de volume ni de forme mais uniquement d’orientation spatiale.
Les référentiels sont des solides indéformables. Les déformations élastiques et plastiques des
solides sont le domaine d’étude de la résistance des matériaux qui dépasse largement le cadre
de ce cours.
134 Cinématique et dynamique du solide indéformable

Théorème 12.1 6 coordonnées sont nécessaires pour déterminer entièrement la position


et l’orientation d’un solide indéformable de forme quelconque par rapport à un référentiel
donné.
Démonstration Un solide indéformable peut être considéré comme un référentiel. On peut
donc complètement déterminer la position et l’orientation de tout solide indéformable à
l’aide de 4 points matériels non-coplanaires. On peut donc considérer un tétraèdre régulier
de longueur d’arête r dont les sommets sont les points matériels A, B, C et D, ce qui
implique qu’il y a une distance r entre chaque couple de points. L’orientation respective des
points A, B, C et D est choisie telle que (AB × AC) · AD > 0.
Pour déterminer la position du point A, il faut 3 coordonnées, par exemple des coordonnées
cartésiennes. Le point matériel B se trouve sur la sphère de rayon r centrée au point A. Il faut
donc 2 coordonnées supplémentaires pour déterminer la position du point B, par exemple
deux angles. Le point matériel C se trouve sur le cercle obtenu par intersection entre les
D sphères de rayon r centrées en A et B. Il faut donc 1 coordonnée supplémentaire pour
déterminer la position du point C, par exemple un angle. Le point matériel D se trouve
au point d’intersection entre les sphères de rayon r centrées en A, B et C. A priori, il y a
deux points possibles de part et d’autre du plan ABC. Cependant, la condition d’orientation
respective des points matériels A, B, C et D détermine de quel côté du plan ABC se trouve
A C
le point D. Le point D est donc entièrement déterminé une fois que la position des points A,
B et C est connue. Il faut donc 6 coordonnées pour déterminer la position et l’orientation
B d’un solide indéformable par rapport à un référentiel donné.
Tétraèdre
12.1.2 Angles d’Euler
L’orientation d’un solide indéformable peut être repérée par des angles particuliers appelés
angles d’Euler. Pour déterminer ces angles, on considère un repère cartésien (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 )
associé au référentiel d’inertie et un repère cartésien (O, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) associé au référentiel
accéléré du solide en rotation autour du point O. Les angles d’Euler sont définis comme les
trois angles de rotation (φ, θ, ψ) qui amènent le repère cartésien (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) sur le repère
cartésien (O, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ).
Leonhard Euler x3

q
y2
y3

y1 x2
O
f y
x1

Figure 12.2 Repères cartésiens (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) et (O, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) centrés en O et angles
d’Euler (φ, θ, ψ).

Le premier angle d’Euler est l’angle de précession φ autour de l’axe vertical Ox3 qui amène
l’axe horizontal Ox1 sur l’axe nodal Ou (Fig. 12.3a). Le second angle d’Euler est l’angle de
nutation θ autour de l’axe nodal Ou qui amène l’axe vertical Ox3 sur l’axe Oy3 (Fig. 12.3b).
Le troisième angle d’Euler est l’angle de rotation propre φ autour de l’axe de rotation propre
Oy3 qui amène l’axe Ou sur l’axe Oy1 et l’axe Ov sur l’axe Oy2 (Fig. 12.3c).
En général, les rotations ne s’additionnent pas car ce sont des applications linéaires des
vecteurs de bases représentées par des matrices 3 × 3 qui ne commutent pas. En revanche, les
rotations infinitésimales commutent toujours. Le vecteur vitesse angulaire Ω de rotation du
solide par rapport au référentiel d’inertie est défini à l’aide des formules de Poisson (10.18) −
12.1 Cinématique du solide indéformable 135
x3

O x2
f
x1
u

(a) Rotation d’angle φ autour de l’axe Ox3


x3 x3
v
q
y2
y3 y3
y

x2 y1 x2
O O
ψ x1 y
x1

u u

(b) Rotation d’angle θ autour de l’axe Ou (c) Rotation d’angle ψ autour de l’axe Oy3

Figure 12.3 Rotations successives (a), (b) et (c) qui définissent les trois angles d’Euler
(φ, θ, ψ).

décrivant des rotations infinitésimales au cours du temps − donnant les dérivées temporelles
des vecteurs de base du repère lié au solide. Par conséquent, la vitesse angulaire du solide
Ω − qui est un référentiel accéléré − par rapport au référentiel d’inertie peut être exprimée
comme la somme de trois vecteurs vitesse angulaire dont la norme est la dérivée temporelle
d’un angle d’Euler et dont l’orientation est donnée par l’axe de rotation correspondant,

Ω = φ̇ + θ̇ + ψ̇ = φ̇ x̂3 + θ̇ û + ψ̇ ŷ3 (12.1)

Le vecteur φ̇ est la vitesse angulaire de précession du solide indéformable autour de


l’axe vertical Ox3 . Le vecteur θ̇ est la vitesse angulaire de nutation du solide indéformable
autour de l’axe nodal Ou et le vecteur ψ̇ est la vitesse angulaire de rotation propre du
solide indéformable autour de l’axe de rotation propre Oy3 .
Ces mouvements de précession, de nutation et de rotation propre sont bien illustrées par
le gyroscope formé d’une sphère sur coussin d’air (Fig. 12.4).

Figure 12.4 Gyroscope à sphère sur coussin d’air.

Comme autres illustrations de ces mouvements, on peut mentionner la toupie chinoise,


qui peut se retourner sur sa pointe par nutation, et le disque d’Euler où la vitesse angulaire
du point de contact avec une surface plane diverge lorsqu’il s’arête (Fig. 12.5).
Une variante des angles d’Euler connue sous le nom d’angles de Tait-Bryan est utilisée
136 Cinématique et dynamique du solide indéformable

Figure 12.5 Toupie chinoise qui se retourne sur sa pointe et disque d’Euler.

en aéronautique. L’axe de précession s’appelle l’axe de lacet, l’axe de nutation porte le


nom d’axe de tangage et l’axe de rotation propre s’appelle de l’axe de roulis (Fig. 12.6).

Axe de tangage Axe de lacet

Peter Guthrie Tait


Axe de roulis

Figure 12.6 Angles de Tait-Bryan décrivant les lacets (précession), le tangage (nutation)
et le roulis (rotation propre)

12.1.3 Vitesse et accélération d’un point du solide indéformable


On considère un repère cartésien (O, x̂1 , x̂2 , x̂3 ) lié au référentiel d’inertie absolu qui est
immobile et un repère cartésien (A, ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) lié au référentiel relatif du solide indéformable
qui est en rotation à vitesse angulaire Ω par rapport au référentiel absolu (Fig. 10.5). On
aimerait exprimer la vitesse d’un point matériel P quelconque du solide en fonction de la
vitesse du point matériel A à l’origine du repère et de la vitesse angulaire Ω qui rend compte
du changement d’orientation du solide par rapport au référentiel d’inertie. Comme le solide
est indéformable et que le points matériel P appartient au solide, sa vitesse relative et son
accélération relative sont nulles,
v r (P ) = 0 et ar (P ) = 0 (12.2)
Pour alléger l’écriture, on dénote la position relative du point P et les vitesses et accélérations
absolues des points A et P comme,
AP ≡ r r (P ) VA ≡ v a (A) VP ≡ v a (P ) AA ≡ aa (A)AP ≡ aa (P )
(12.3)
Compte tenu des conditions (12.2) et de la notation (12.3), l’identité entre les vitesses (10.24)
− obtenue dans le cadre du mouvement relatif − pour un solide indéformable se réduit à,
VP = VA + Ω × AP (12.4)
Théorème 12.2 Les vitesses VP et VQ de points matériels P et Q quelconques qui appar-
tiennent au solide satisfont la relation,
VQ = VP + Ω × P Q (12.5)
12.1 Cinématique du solide indéformable 137

Démonstration Compte tenu de l’identité (12.4), comme le point Q est un point matériel
quelconque du solide au même titre que le point P , cela implique que,
VQ = VA + Ω × AQ (12.6)
La différence entre les relations (12.6) et (12.4) s’écrit,
VQ − VP = Ω × (AQ − AP ) = Ω × P Q (12.7)

Compte tenu des conditions (12.2) et de la notation (12.3), l’identité entre les
accélérations (10.37) pour un solide indéformable se réduit à,
AP = AA + Ω × (Ω × AP ) + Ω̇ × AP (12.8)
Théorème 12.3 Les accélérations AP et AQ de points matériels P et Q quelconques qui
appartiennent au solide satisfont la relation,
AQ = AP + Ω × (Ω × P Q) + Ω̇ × P Q (12.9)
Démonstration Compte tenu de l’identité (12.8), comme le point Q est un point matériel
quelconque du solide au même titre que le point P , cela implique que,
AQ = AA + Ω × (Ω × AQ) + Ω̇ × AQ (12.10)
La différence entre les relations (12.10) et (12.8) s’écrit,
 
AQ − AP = Ω × Ω × (AQ − AP ) + Ω̇ × (AQ − AP )
(12.11)
= Ω × (Ω × P Q) + Ω̇ × P Q

12.1.4 Roulement sans glissement


Sur le plan pratique, on est souvent confronté à des solides indéformables qui roulent sur
une surface horizontale ou un plan incliné. Ces solides sont en général des cylindres ou des
sphères. La cinématique de ce roulement peut être décrite dans le plan vertical qui passe
par le centre de masse G de l’objet. Dans ce plan, l’objet en coupe est un cercle. Le point
matériel C est le point de contact entre le cercle et la surface (Fig. 12.7).

Figure 12.7 Roulement avec ou sans glissement d’un solide

Si le solide glisse sans rouler, la vitesse du point de contact VC doit être égale à la vitesse du
centre de masse VG . Si le solide glisse et roule, la vitesse du point de contact VC et la vitesse
du centre de masse VG sont non-nulles, mais elles ne sont pas égales dû au mouvement de
roulement du solide. Si le solide roule sans glisser, la vitesse du point de contact VC est nulle
mais la vitesse du centre de masse VG est non nulle dû au roulement. Par conséquent, d’après
la relation (12.5), la condition de roulement sans glissement (12.5) s’écrit explicitement,

VG = Ω × CG car VC = 0 (12.12)
Lorsque le solide roule, le point matériel qui correspond au point de contact C entre le solide
et la surface change au cours du temps lors d’un mouvement de roulement sans glissement,
mais à chaque instant la vitesse VC de ce point est nulle.
138 Cinématique et dynamique du solide indéformable

12.2 Dynamique du solide indéformable


Mécanique § 1.19
Etant donné qu’un solide indéformable est un ensemble de points matériels dont les dis-
tances relatives sont fixes, le théorème de la quantité de mouvement (11.62) et le théorème
du centre de masse (11.64) pour un solide indéformable sont identiques à ceux obtenus pour
un système fermé de points matériels,
dP
F ext = et F ext = M AG (12.13)
dt
De manière similaire, par rapport à un point fixe O du référentiel d’inertie, i.e. VO = 0, le
théorème de la quantité de mouvement (11.66) pour un solide indéformable est identique à
celui obtenu pour un système fermé de points matériels,
dLO
M Oext = (12.14)
dt
Le théorème du moment cinétique (12.14) dépend du point par rapport auquel le moment
cinétique et le moment de force résultant sont évalués. On aimerait à présent généraliser
ce théorème à un point quelconque P qui appartient au solide et en particulier au centre
de masse G. Pour ce faire, on doit d’abord établir les théorèmes de transfert du moment
cinétique et du moment de forces extérieures résultants.

12.2.1 Théorème de transfert du moment cinétique et premier


théorème de König
Théorème 12.4 Le théorème de transfert du moment cinétique affirme que le moment
cinétique LP du solide évalué par rapport à un point quelconque P du solide est exprimé en
fonction du moment cinétique LO du solide évalué par rapport au point fixe O du référentiel
d’inertie comme,
LP = P O × M VG + LO (12.15)

Démonstration Compte tenu des expressions (11.52), (11.59) et (11.60)


X X
LP = P P α × pα = (P O + OP α ) × pα
α α
X (12.16)
= PO × P + OP α × pα = P O × M VG + LO
α

Pour le centre de masse G, le théorème de transfert du moment cinétique (12.15) s’appelle


le premier théorème de König et s’écrit,

LO = OG × M VG + LG (12.17)

Johann Samuel Théorème 12.5 Le moment cinétique LP du solide, évalué par rapport à un point quel-
Koenig conque P du solide, est exprimé en fonction du moment cinétique LG du solide évalué par
rapport au centre de masse G comme,

LP = P G × M VG + LG (12.18)

Démonstration En substituant l’expression (12.17) du moment cinétique LO dans l’expres-


sion (12.15) du moment cinétique LP , on obtient,

LP = (P O + OG) × M VG + LG = P G × M VG + LG (12.19)
12.3 Tenseur d’inertie et équations d’Euler 139

12.2.2 Théorème de transfert du moment de force résultant


Théorème 12.6 Le théorème de transfert du moment de force résultant affirme que le
moment de forces extérieures résultant M Pext évalué par rapport à un point quelconque P du
solide est exprimé en fonction du moment de forces extérieures résultant M Oext évalué par
rapport au point fixe O du référentiel d’inertie comme,
M Pext = P O × M AG + M Oext (12.20)
Démonstration Compte tenu des expressions (11.54), (11.61) et (11.64)
X X
M Pext = P P α × F αext = (P O + OP α ) × F αext
α α
X (12.21)
ext
= PO × F + OP α × F αext = P O × M AG + M Oext
α

Pour le centre de masse G, le théorème de transfert du moment de forces extérieures


résultant (12.20) s’écrit,
M Oext = OG × M AG + M Gext (12.22)
Théorème 12.7 Le moment de forces extérieures résultant M Pext évalué par rapport à
un point quelconque P du solide est exprimé en fonction du moment de forces extérieures
résultant M Gext évalué par rapport au centre de masse G comme,
M Pext = P G × M AG + M Gext (12.23)
Démonstration En substituant l’expression (12.22) du moment de forces extérieures
résultant M Oext dans l’expression (12.20) du moment de forces extérieures résultant M Pext ,
on obtient,

M Pext = (P O + OG) × M AG + M Gext = P G × M AG + M Gext (12.24)

12.2.3 Théorème du moment cinétique par rapport à un point du solide


La dérivée temporelle du théorème de transfert du moment cinétique (12.15) s’écrit,
dLP dOP dVG dLO
=− × M VG + P O × M +
dt dt dt dt (12.25)
dLO
= − VP × M VG + P O × M AG +
dt
car VP = dOP /dt et AG = dVG /dt. En substituant les expressions (12.20) et (12.25) dans le
théorème du moment cinétique (12.14) évalué par rapport au point O, on obtient le théorème
du moment cinétique évalué par rapport au point P qui appartient au solide,
dLP
M Pext = + VP × M VG (12.26)
dt
Pour le centre de masse G, le théorème du moment cinétique (12.26) se réduit à,
dLG
M Gext = (12.27)
dt

12.3 Tenseur d’inertie et équations d’Euler


Mécanique § 1.19
La quantité de mouvement du solide indéformable P est liée à la vitesse du centre de
masse VG par la relation phénoménologique (11.60),
P = M VG (12.28)
où la masse du solide M est la constante de proportionnalité entre les vecteurs colinéaires
P et VG . On aimerait trouver une relation phénoménologique similaire pour lier le moment
140 Cinématique et dynamique du solide indéformable

cinétique du solide indéformable LG , évalué par rapport à son centre de masse G, à sa


vitesse angulaire de rotation Ω. Dans le cas général, le vecteur moment cinétique LG n’est
pas nécessairement colinéaire au vecteur Ω. Ces vecteurs sont donc liés par une application
linéaire appelée le tenseur d’inertie IG du solide par rapport au centre de masse G, qui est
représenté par une matrice 3 × 3. Ainsi, la relation phénoménologique s’écrit,

LG = IG Ω (12.29)

Sur le plan formel, un tenseur est une application linéaire qui se transforme de manière
particulière lors d’un changement de référentiel.

Théorème 12.8 Le moment cinétique du solide indéformable LG , évalué par rapport à


son centre de masse G, peut être mis sous la forme suivante,
X
LG = mα GP α × (Ω × GP α ) (12.30)
α

Démonstration L’identité entre les vitesses (12.5) pour un point Pα qui appartient au solide
et le centre de masse du solide G s’écrit,

v α = VG + Ω × GP α (12.31)

Compte tenu des expressions (11.39), (11.42), (11.51), (11.52) et (11.59), le moment cinétique
du solide indéformable LG , évalué par rapport à son centre de masse G, s’écrit,
X X X
LG = GP α × pα = GP α × mα v α = GP α × mα (VG + Ω × GP α )
α α α
X X X
= mα r 0α × VG + mα GP α × (Ω × GP α ) = mα GP α × (Ω × GP α )
α α α
(12.32)

12.3.1 Tenseur d’inertie


D’après l’identité vectorielle (1.43), l’expression (12.30) du moment cinétique LG peut
être mise sous la forme suivante,
X  
LG = mα GP α2 Ω − (GP α · Ω) GP α (12.33)
α

Pour déterminer l’expression du tenseur d’inertie IG , on va à présent projeter le moment


cinétique LG selon les vecteurs de base ŷ 1 , ŷ 2 et ŷ 3 du repère cartésien lié au solide. La
décomposition du vecteur Ω dans cette base s’écrit,
3
X 
Ω= Ω · ŷ j ŷ j (12.34)
j=1

Compte tenu de la décomposition (12.34), la projection du moment cinétique LG selon le


vecteur de base ŷ i s’écrit,
X  
LG · ŷ i = mα GP α2 (Ω · ŷ i ) − (GP α · Ω) (GP α · ŷ i )
α
3 X 
X 
mα GP α2 ŷ i · ŷ j − (GP α · ŷ i ) GP α · ŷ j
 
= Ω · ŷ j
j=1 α
3
X X
! (12.35)
mα GP α2
 
= ŷ i · 1 − GP α ⊗ GP α ŷ j Ω · ŷ j
j=1 α
3
X  
≡ ŷ i · IG ŷ j Ω · ŷ j = (IG Ω) · ŷ i
j=1
12.3 Tenseur d’inertie et équations d’Euler 141

où 1 est l’application linéaire identité qui envoie tout vecteur sur lui-même et le symbole ⊗
représente un produit tensoriel. Le tenseur d’inertie IG du solide par rapport au centre
de masse G s’écrit donc formellement,
X
mα GP α2 1 − GP α ⊗ GP α

IG = (12.36)
α

La relation phénoménologique (12.35) s’écrit en composantes comme,


3
X
LG,i = IG,ij Ωj (12.37)
j=1

où les composantes IG,ij du tenseur d’inertie IG par rapport à la base (ŷ 1 , ŷ 2 , ŷ 3 ) s’écrivent,

3
!
X X
2
IG,ij = mα GPα,k δij − GPα,i GPα,j (12.38)
α k=1

Les composantes diagonales IG,11 , IG,22 et IG,33 du tenseur d’inertie IG s’écrivent,


X  X
2 2 2
IG,11 = mα GPα,2 + GPα,3 ≡ mα rα,23
α α
X X
2 2 2

IG,22 = mα GPα,3 + GPα,1 ≡ mα rα,31 (12.39)
α α
X X
2 2 2

IG,33 = mα GPα,1 + GPα,2 ≡ mα rα,12
α α
2 2
où rα,23 est la distance du point Pα à l’axe Gy1 , rα,31
est la distance de ce point à l’axe Gy2
2
et rα,12 est la distance de ce point à l’axe Gy3 (Fig 12.8).

y3

GPa

G y2
ra,12

y1

Figure 12.8 Distance rα,12 d’un point Pα à l’axe Gy3 .

12.3.2 Moments d’inertie et axes principaux d’inertie


e3
Les composantes IG,ij du tenseur d’inertie sont les éléments d’une matrice 3×3 symétrique G
à coefficients réels, i.e. IG,ij = IG,ji . D’après le théorème spectral d’algèbre linéaire, une
matrice symétrique à coefficients réels est diagonalisable. Par conséquent, il existe une base
de vecteurs (e1 , e2 , e3 ) liés au solide par rapport à laquelle le tenseur d’inertie est diagonal. e2
Le repère cartésien (G, e1 , e2 , e3 ) est appelé le repère d’inertie et les axes Ge1 , Ge2 , Ge3
sont appelés les axes principaux d’inertie. Par rapport au repère d’inertie, la relation
phénoménologique (12.29) s’écrit en composantes comme, e1
    
LG,1 IG,1 0 0 Ω1 Repère d’inertie
LG,2  =  0 IG,2 0   Ω2  (12.40)
LG,3 0 0 IG,3 Ω3
142 Cinématique et dynamique du solide indéformable

et de manière vectorielle comme,

3
X
LG = IG,i Ωi ei = IG,1 Ω1 e1 + IG,2 Ω2 e2 + IG,3 Ω3 e3 (12.41)
i=1

Les valeurs propres du tenseur d’inertie IG,1 , IG,2 et IG,3 sont appelées les moments d’iner-
tie et les vecteurs propres correspondants e1 , e2 e3 sont les vecteurs de norme unité orientés
le long des axes principaux d’inertie. Les moments d’inertie sont exprimés comme,
X X X
2 2 2
IG,1 = mα rα,1 IG,2 = mα rα,2 IG,3 = mα rα,3 (12.42)
α α α

2 2
où rα,1 est la distance du point Pα à l’axe principal d’inertie Ge1 , rα,2 est la distance de
2
ce point à l’axe principal d’inertie Ge2 et rα,3 est la distance de ce point à l’axe principal
d’inertie Ge3 .
Il existe trois types de solides indéformables, homogènes et réguliers. Le premier type est
l’ellipsoı̈de pour lequel les trois moments d’inertie sont différents. Le deuxième type est le
cylindre pour lequel le moment d’inertie IGk le long de l’axe de symétrie est différent des
deux moments d’inertie IG⊥ perpendiculaires à cet axe qui sont égaux. Le troisième type
est la sphère pour laquelle les trois moments d’inertie sont égaux (Fig. 12.9).

Figure 12.9 Ellipsoı̈de (trois moments d’inertie différents), cylindre (deux moments d’iner-
tie différents) et sphère (trois moments d’inertie égaux).

En absence de moment de force extérieures résultant par rapport au centre de masse G, i.e.
M Gext = 0, le théorème du moment cinétique implique que le moment cinétique par rapport
au centre de masse est conservé, i.e. LG = cste. Si le solide a un mouvement de rotation
de vitesse angulaire Ω = Ω3 e3 autour de l’axe vertical alors le moment cinétique (12.41)
s’exprime comme LG = IG,3 Ω3 e3 . Par conséquent, si le moment d’inertie IG,3 augmente,
la vitesse angulaire de rotation Ω3 diminue et vice versa. Le moment d’inertie augmente si
une partie de la masse du solide s’éloigne de l’axe. Les patineuses artistiques utilisent cet
effet pour accélérer ou freiner leur mouvement de rotation (Fig. 12.10).

Figure 12.10 Le moment d’inertie par rapport à l’axe vertical est plus grand lorsque les
haltères sont plus éloignées de l’axe de rotation du tabouret. En variant la distance des
haltères à l’axe de rotation, on varie la vitesse de rotation angulaire.
12.3 Tenseur d’inertie et équations d’Euler 143

12.3.3 Equations d’Euler


Le repère d’inertie (G, e1 , e2 , e3 ) lié au solide est un repère mobile. Les dérivées temporelles
des vecteurs de base satisfont les formules de Poisson,
ėi = Ω × ei ∀ i = 1, 2, 3 (12.43)
Pour un solide indéformable, les moments d’inertie sont constants, i.e. IG,i = cste. Compte
tenu de la formule de Poisson (12.43), la dérivée temporelle du moment cinétique (12.41)
s’écrit,
3 3 3 3
!
dLG X X X X
= IG,i Ω̇i ei + IG,i Ωi ėi = IG,i Ω̇i ei + Ω × IG,i Ωi ei (12.44)
dt i=1 i=1 i=1 i=1

Dans le cas particulier où la vitesse angulaire est constante par rapport au repère d’inertie,
i.e. Ω̇1 = Ω̇2 = Ω̇3 = 0, compte tenu de l’expression (12.41) du moment cinétique, la
relation (12.44) se réduit à,
dLG
= Ω × LG (12.45)
dt
et décrit la précession du vecteur LG autour du vecteur Ω. Dans le cas général, la rela-
tion (12.44) est mise sous la forme suivante,
dLG
= IG,1 Ω̇1 e1 + IG,2 Ω̇2 e2 + IG,3 Ω̇3 e3
dt
+ (Ω1 e1 + Ω2 e2 + Ω3 e3 ) × (IG,1 Ω1 e1 + IG,2 Ω2 e2 + IG,3 Ω3 e3 )
(12.46)
= IG,1 Ω̇1 e1 + IG,2 Ω̇2 e2 + IG,3 Ω̇3 e3 + (IG,3 − IG,2 ) Ω3 Ω2 e1

+ (IG,1 − IG,3 ) Ω1 Ω3 e2 + (IG,2 − IG,1 ) Ω2 Ω1 e3

Le moment de forces extérieures résultant M Gext se décompose dans le repère d’inertie


comme,
M Gext = MG,1
ext ext
e1 + MG,2 ext
e2 + MG,3 e3 (12.47)
En substituant les expressions (12.46) et (12.47) dans le théorème du moment
cinétique (12.27) et en le projetant ensuite selon les axes de coordonnées Ge1 , Ge2 et Ge3 ,
on obtient les équations d’Euler qui déterminent le mouvement de rotation propre du
solide,
ext
MG,1 = IG,1 Ω̇1 + (IG,3 − IG,2 ) Ω3 Ω2 Leonhard Euler
ext
MG,2 = IG,2 Ω̇2 + (IG,1 − IG,3 ) Ω1 Ω3 (12.48)
ext
MG,3 = IG,3 Ω̇3 + (IG,2 − IG,1 ) Ω2 Ω1
Les premiers termes des membres de droite des équations d’Euler (12.48) sont l’analogue des
termes obtenus par projection du théorème de la quantité de mouvement selon les axes prin-
cipaux d’inertie. La cause de l’accélération V̇ G du centre de masse G du solide indéformable
est la résultante des forces extérieures F ext appliquées sur ce solide. De manière analogue,
la cause de l’accélération angulaire de rotation propre Ω̇ du solide indéformable autour d’un
des axes principaux d’inertie passant par son centre de masse G est la résultante des mo-
ments de forces extérieures M Gext évaluée par rapport au centre de masse G. La masse M
rend compte de la résistance du centre de masse G du solide indéformable à sa mise en mou-
vement. De manière similaire, le moment d’inertie IG,i rend compte de la résistance du solide
indéformable à sa mise en mouvement de rotation propre autour de l’axe principal d’inertie
G ei . Les deuxièmes termes des membres de droite des équations d’Euler (12.48) n’ont pas
d’analogue dans l’expression du théorème de la quantité de mouvement. Ils décrivent le mou-
vement de précession du vecteur moment cinétique LG autour du vecteur vitesse angulaire
Ω qui peut avoir lieu parce que le moment cinétique LG n’est pas colinéaire à la vitesse
angulaire de rotation propre Ω. Or, il n’y a pas de mouvement de précession possible du
vecteur quantité de mouvement P autour du vecteur vitesse anglaire du centre de masse v G
car ces deux vecteurs sont colinéaires.
13
Solide indéformable avec un axe fixe et
gyroscopes

Au chapitre 12, on a établi la cinématique et la dynamique du solide indéformable. Dans


la première section de ce chapitre, on va calculer explicitement les moments d’inertie de
certains solides indéformables par rapport à un axe principal d’inertie. La deuxième section
est consacrée à la dynamique du solide indéformable en rotation autour d’un axe fixe. La
troisième section est consacrée aux gyroscopes et aux effets gyroscopiques.

13.1 Moments d’inertie


Mécanique § 2.20
Par calculer le moment d’inertie d’un solide indéformable par rapport à un axe principal
d’inertie, on considère que les points matériels Pα du solide sont suffisamment proches les
uns des autres pour former un continuum dans une région de l’espace à trois dimensions
qui correspond au volume V du solide indéformable. Dans ce cas, la somme discrète dans
la définition (12.42) du moment d’inertie IG,i du solide indéformable exprimé par rapport
à un axe Gei qui passe par le centre de masse G devient une intégrale sur le volume V du
solide,
X Z
2
IG,i = mα rα,i −→ IG,i = dm r 2 (13.1)
α V

où mα est la masse et rα,i est la distance du point matériel Pα à l’axe de rotation Gei ,
et dmα est la masse d’un volume infinitésimal dV du solide et r est sa distance à l’axe de
rotation Gei .
A l’aide de l’expression intégrale (13.1), on va à présent calculer explicitement le moment
d’inertie de quelques solides indéformables réguliers. Ces solides réguliers sont une barre
mince, un cylindre creux et un cylindre plein.

13.1.1 Barre mince


On considère une barre homogène de masse M très mince telle que son épaisseur e est
négligeable par rapport à la longueur L, i.e. e  L. Par conséquent, on peut considérer que
toute la masse de la barre se trouve sur un segment de longueur de L (Fig. 13.1).

e3

G
e1
-L/2 d L/2

Figure 13.1 Barre très mince de longueur L, orientée selon l’axe Ge1 , en rotation autour
de l’axe vertical Ge3 .

On désire calculer le moment d’inertie IG,3 de la barre mince, orientée selon l’axe Ge1 , qui
146 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes

est en rotation dans le plan horizontal autour de l’axe vertical Ge3 passant par son centre
de masse G. Par conséquent, son moment d’inertie (13.1) s’écrit,
Z L/2
IG,3 = dm ` 2 (13.2)
− L/2

où ` ≡ r est la distance à l’axe le long de la barre. La densité linéique de la barre homogène
ρ` est définie comme le rapport de la masse M de la barre et de sa longueur L,
M
ρ` = (13.3)
L
La masse infinitésimale dm s’écrit en termes de la longueur infinitésimale d` comme,
M
dm = ρ` d` = d` (13.4)
L
En substituant la relation (13.4) dans l’intégrale (13.2), le moment d’inertie IG,3 devient,
L/2 L/2
M `3 M L3
Z
M 1
IG,3 = ` 2 d` = = = M L2 (13.5)
L − L/2 L 3 − L/2
L 12 12

13.1.2 Cylindre creux


On considère un cylindre creux homogène de masse M , de hauteur L, de rayon R et
d’épaisseur e très mince par rapport à son rayon, i.e. e  R, ce qui signifie que son rayon
peut être considéré comme constant (Fig. 13.2).

dq R

Figure 13.2 Cylindre creux de longueur L, de rayon R et d’épaisseur e en rotation autour


de l’axe vertical Ge3 .

On désire calculer le moment d’inertie IG,3 du cylindre creux en rotation autour de l’axe
vertical Ge3 passant par son centre de masse G. Par conséquent, son moment d’inertie (13.1)
s’écrit,
Z
IG,3 = dm R 2 (13.6)
V

où R ≡ r est le rayon constant du cylindre creux. On divise le cylindre creux en éléments
de volumes infinitésimaux dV de hauteur L, d’épaisseur e et de largeur R dθ qui se situent
à une distance R de l’axe vertical Ge3 , i.e.

dV = R L e dθ (13.7)

La densité volumique ρ du cylindre creux est définie comme le rapport de la masse M du


cylindre et de son volume V ,
M
ρ= (13.8)
V
13.1 Moments d’inertie 147

Compte tenu des expressions (13.7) et (13.8), la masse infinitésimale dm s’écrit en termes
du volume infinitésimal dV d’un parallélépipède comme,
M
dm = ρ dV = R L e dθ (13.9)
V
En substituant l’expression (13.9) de la masse infinitésimale dm dans l’intégrale (13.6), et
en intégrant l’angle θ de 0 à 2π, le moment d’inertie IG,3 devient,
Z 2π
M 3 M 3
IG,3 = R Le dθ = 2π R Le (13.10)
V 0 V
Le volume V du cylindre creux est égal au produit de la circonférence 2π R des sections
circulaires, de la longueur L et de l’épaisseur e,
V = 2π R L e (13.11)
En substituant l’expression (13.11) du volume du cylindre dans l’expression (13.10) du mo-
ment d’inertie IG,3 , ce dernier se réduit à,
IG,3 = M R2 (13.12)

13.1.3 Cylindre plein


On considère un cylindre plein homogène de masse M , de hauteur L et de rayon R
(Fig. 13.2).

dr
L

Figure 13.3 Cylindre plein de longueur L et de rayon R en rotation autour de l’axe vertical
Ge3 .

On désire calculer le moment d’inertie IG,3 du cylindre plein en rotation autour de l’axe
vertical Ge3 passant par son centre de masse G. On divise le cylindre plein en cylindres
creux concentriques de volumes infinitésimaux dV , de hauteur L, de circonférence 2πr et
d’épaisseur dr, i.e.
dV = 2π L r dr (13.13)
Compte tenu des expressions (13.13) et (13.8), la masse infinitésimale dm s’écrit en termes
du volume infinitésimal dV d’un cylindre creux comme,
M
dm = ρ dV = 2π L r dr (13.14)
V
En substituant l’expression (13.14) de la masse infinitésimale dm dans l’intégrale (13.1), et
en intégrant le rayon r de 0 à R, le moment d’inertie IG,3 devient,
Z R R
M M 1 π M
IG,3 = 2π L r3 dr = 2π L r4 = L R4 (13.15)
V 0 V 4 0 2 V
Le volume V du cylindre plein est égal au produit de la surface de la section π R2 et de la
longueur L,
V = π R2 L (13.16)
148 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes

En substituant l’expression (13.16) du volume du cylindre dans l’expression (13.15) du mo-


ment d’inertie IG,3 , ce dernier se réduit à,
1
IG,3 = M R2 (13.17)
2
Le moment d’inertie d’un cylindre plein est inférieur à celui d’un cylindre creux de même
taille et de même masse. Si ces deux cylindres roulent sans glisser le long d’un plan incliné,
le cylindre plein aura un accélération angulaire plus grande que le cylindre creux. Ainsi, si
ces cylindres sont lâchés en même temps de la même hauteur, le cylindre plein atteindra le
bas du plan incliné avant le cylindre creux.
Cylindres roulant sur
un plan incliné
13.2 Solide indéformable avec un axe fixe
Mécanique § 2.20
Dans cette section on va considérer la dynamique du solide indéformable lorsque le solide
est en rotation autour d’un axe fixe A ei . Pour ce faire, on va commencer par énoncer le
théorème d’Huygens-Steiner.

13.2.1 Théorème de Huygens-Steiner


Théorème 13.1. Le théorème de Huygens-Steiner, aussi connu sous les noms de théorème
du transport parallèle ou théorème des axes parallèles, affirme que le moment d’inertie IA,i
d’un solide indéformable de masse M en rotation autour d’un axe fixe A ei , qui est parallèle
à l’axe principal d’inertie G ei et orthogonal au vecteur AG (Fig. 13.4), est exprimé en
Christian Huygens
termes du moment d’inertie IG,i et de la distance d = kAGk = cste comme,
IA,i = IG,i + M d2 (13.18)

W ei

d G
A

Figure 13.4 Solide de masse M en rotation à vitesse angulaire Ω autour de l’axe A ei qui
est parallèle à l’axe principal d’inertie G ei à distance d.

Jakob Steiner Démonstration En prenant comme origine le point matériel A, le théorème de transfert du
moment cinétique (12.17) s’écrit,
LA = AG × M VG + LG (13.19)
Comme le point matériel A appartient à l’axe de rotation, sa vitesse est nulle, i.e. VA = 0.
Compte tenu de la relation (12.6), la vitesse du centre de masse s’exprime en termes du
vecteur vitesse angulaire Ω de rotation du solide comme,
VG = Ω × AG (13.20)
En substituant l’équation (13.20) dans l’équation (13.19), le théorème de transfert du mo-
ment cinétique devient,
LA = M AG × (Ω × AG) + LG (13.21)
Compte tenu de l’identité vectorielle (1.43), le théorème de transfert du moment
cinétique (13.21) devient,
 
LA = M AG2 Ω − (AG · Ω) AG + LG (13.22)
13.2 Solide indéformable avec un axe fixe 149

Le vecteur vitesse angulaire Ω est colinéaire à l’axe de rotation fixe A ei et orthogonal


au vecteur AG, i.e. AG · Ω = 0. Par conséquent, le théorème de transfert du moment
cinétique (13.22) se réduit à,
LA = M d2 Ω + LG (13.23)

où d = kAGk. Comme le vecteur vitesse angulaire Ω = Ω ei est colinéaire à l’axe de rotation
fixe A ei , qui est parallèle à l’axe principal d’inertie G ei , les moments cinétiques LA et LG
du solide indéformable sont exprimés respectivement en termes des moments d’inertie IA,i
et IG,i comme,
LA = IA,i Ω et LG = IG,i Ω (13.24)

En substituant les équations (13.24) dans le théorème de transfert du moment


cinétique (13.23), on obtient,

IA,i Ω = IG,i + M d2 Ω

(13.25)

ce qui implique que,


IA,i = IG,i + M d2 (13.26)

13.2.2 Energie cinétique du solide indéformable


Comme l’énergie cinétique (6.32) est une grandeur extensive, l’énergie cinétique T d’un
solide indéformable est la somme des énergies cinétiques de tous les points matériels Pα qui
le constituent, i.e.
1 X
T = mα v 2α (13.27)
2 α

Compte tenu de la relation (11.44), l’énergie cinétique (13.27) est mise sous la forme,
! !
1 X 0 2 1 X X
0 1 X
T = mα (VG + v α ) = 2
mα VG + VG · mα v α + mα v 0α2 (13.28)
2 α 2 α α
2 α

D’après les relations (11.37) et (11.46), l’énergie cinétique (13.28) se réduit à,
1 1 X
T = M VG2 + mα v 0α2 (13.29)
2 2 α

Compte tenu des relations (11.44), (11.39) et (12.5), la vitesse relative v 0α d’un point matériel
Pα s’écrit,
v 0α = v α − VG = Ω × GP α = Ω × r 0α (13.30)

D’après la première identité (1.40) et l’expression (13.30), la vitesse relative au carré est
mise sous la forme,
 
v 0α2 = (Ω × r 0α ) · (Ω × r 0α ) = r 0α × (Ω × r 0α ) · Ω (13.31)

En substituant l’équation (13.31) dans l’équation (13.29), l’énergie cinétique devient,


!
1 2 1 X 0 0
T = M VG + mα r α × (Ω × r α ) · Ω (13.32)
2 2 α

Compte tenu des relations (11.39) et (12.30), le moment cinétique angulaire LG évalué par
rapport au centre de masse s’écrit,
X
LG = mα r 0α × (Ω × r 0α ) (13.33)
α

En substituant l’équation (13.33) dans l’équation (13.32), l’énergie cinétique devient,


1 1
T = M VG2 + LG · Ω (13.34)
2 2
150 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes

Le premier terme du membre de droite de l’équation (13.34) est l’énergie cinétique du centre
de masse et le deuxième terme est l’énergie de rotation propre du solide. En utilisant l’ex-
pression (12.41) du moment cinétique LG dans le repère d’inertie (G, e1 , e2 , e3 ), l’expression
de l’énergie cinétique (13.34) est mise sous la forme suivante,
3
1 1 X
T = M VG2 + IG,j Ω2j (13.35)
2 2 j=1

Dans le cas particulier où le solide est en rotation autour de l’axe principal d’inertie G ei ,
le vecteur vitesse angulaire Ω = Ω ei , ce qui implique que Ωj = Ω δij . Ainsi, dans ce cas,
l’énergie cinétique (13.35) se réduit à,
1 1
T = M VG2 + IG,i Ω2 (axe fixe) (13.36)
2 2

13.2.3 Théorème de l’énergie cinétique


Théorème 13.2. On considère le cas où les moments d’inertie exprimés par rapport au
repère d’inertie d’un solide indéformable sont des constantes, i.e. IG,j = cste où j = 1, 2, 3.
Dans ce cas, la dérivée temporelle de l’énergie cinétique du solide dont le centre de masse
G a une vitesse VG et qui est rotation autour du centre de masse G à vitesse angulaire Ω
s’écrit,
dT
= F ext · VG + M Gext · Ω (13.37)
dt
où F ext est la résultante des forces extérieures et M Gext est la résultante des moments de
forces extérieures évalués par rapport au centre de masse G.
Démonstration A l’aide de l’expression (12.29) du moment cinétique LG , l’énergie
cinétique (13.34) est mise sous la forme,
3
1 1 X
T = M VG2 + IG,j Ω2j (13.38)
2 2 j=1

Comme la masse M et les composantes du tenseur d’inertie IG,j sont des constantes, la
dérivée temporelle de l’énergie cinétique (13.38) s’écrit,
3 3
dT dVG X dΩj d (M VG ) X d (IG,j Ωj )
=M · VG + IG,j Ωj = · VG + Ωj (13.39)
dt dt j=1
dt dt j=1
dt

A l’aide de l’expression (11.60) de la quantité de mouvement P et de l’expression (12.41)


du moment cinétique LG , l’équation (13.39) devient,
dT dP dLG
= · VG + ·Ω (13.40)
dt dt dt
En substituant le théorème du centre de masse (12.13) et le théorème du moment
cinétique (12.27) dans les expressions des dérivées temporelles (13.40) de la quantité de
mouvement et du moment cinétique, on obtient le résultat souhaité,
dT
= F ext · VG + M Gext · Ω (13.41)
dt

13.2.4 Roue mal équilibrée


Avant d’aborder les effets gyroscopiques, on considère d’abord le cas d’une roue mal
équilibrée dont l’axe de rotation n’est pas un axe principal d’inertie, contrairement à une
roue bien équilibrée dont l’axe de rotation est l’axe de symétrie. La roue peut être considérée
comme un cylindre qui tourne à vitesse angulaire Ω constante autour d’un axe fixe qui passe
par son centre de masse G. Soit (G, e1 , e2 , e3 ) le repère d’inertie du cylindre qui est immobile
par rapport au cylindre. L’axe principal d’inertie G e3 est l’axe de symétrie du cylindre qui
13.2 Solide indéformable avec un axe fixe 151

fait un angle θ constant avec l’axe fixe qui est colinéaire au vecteur vitesse angulaire Ω
(Fig. 13.5).

e3

q
G
W

e1
e2

Figure 13.5 Cylindre en rotation à vitesse angulaire Ω constante par rapport à un axe
fixe qui décrit un angle θ par rapport à son axe de symétrie G e3 .

A l’instant initial t = 0, le vecteur e2 se trouve dans le plan vertical engendré par les
vecteurs e3 et Ω. Les composantes du vecteur vitesse angulaire Ω exprimées dans le repère
d’inertie s’écrivent,

Ω1 = Ω sin θ sin (Ωt)


Ω2 = Ω sin θ cos (Ωt) (13.42)
Ω3 = Ω cos θ

Le vecteur vitesse angulaire Ω est constant par rapport au référentiel d’inertie de la terre,
mais pas par rapport au référentiel accéléré de la roue. Les dérivées temporelles des compo-
santes (13.42) du vecteur vitesse angulaire s’écrivent,

Ω̇1 = Ω2 sin θ cos (Ωt)


Ω̇2 = − Ω2 sin θ sin (Ωt) (13.43)
Ω̇3 = 0

Le moment d’inertie le long de l’axe de symétrie est IG,3 ≡ IG,k et les moments d’inertie
le long des deux autres axes sont IG,1 = IG,2 ≡ IG,⊥ . Compte tenu des expressions (13.42)
et (13.43), les équations d’Euler (12.48) s’écrivent explicitement,
ext
= IG,⊥ Ω2 sin θ cos (Ωt) + IG,k − IG,⊥ Ω2 cos θ sin θ cos (Ωt)

MG,1
ext
= − IG,⊥ Ω2 sin θ sin (Ωt) + IG,⊥ − IG,k Ω2 cos θ sin θ sin (Ωt)

MG,2 (13.44)
ext
MG,3 =0

D’après l’expression (12.47), le moment de force M Gext exercé par l’axe de rotation sur la
roue mal équilibrée s’écrit,
 
M Gext = IG,⊥ + IG,k − IG,⊥ cos θ Ω2 sin θ cos (Ωt) e1

  (13.45)
− IG,⊥ + IG,k − IG,⊥ cos θ Ω2 sin θ sin (Ωt) e2


Le moment de force M Gext dépend du temps de manière périodique, d’où les secousses
périodiques ressenties sur l’axe. Dans la limite où θ = 0, le moment de force s’annule, i.e.
M Gext = 0, et la roue devient bien équilibrée. En mesurant le moment de force exercée sur
une roue mal équilibrée, un garagiste parvient à identifier à quel endroit ajouter des masses
sur la jante d’une roue de voiture afin d’équilibrer la roue.
Equilibrage d’une roue
152 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes

13.3 Gyroscope et effets gyroscopiques


Un gyroscope est une roue ou un disque en rotation dont l’axe de rotation se maintient
dans une orientation donnée. La roue est montée sur deux cadrans concentriques qui peuvent
tourner autour d’axes orthogonaux passant par son centre de masse. Lorsque la roue est
en rotation, l’orientation de l’axe n’est pas modifiée par la rotation des cadrans interne
ou externe. Pour cette raison, les gyroscopes sont utiles pour mesurer ou maintenir une
orientation donnée. Ils sont par exemple abondamment utilisés en aéronautique.

Figure 13.6 Gyroscope constitué d’un disque en rotation autour d’un axe dont l’orienta-
tion ne change pas lors d’une rotation des deux cadrans concentriques sur lesquels l’axe du
disque est monté. Les axes de rotation des cadrans sont orthogonaux et ils passent par le
centre de masse du disque.

L’invention du gyroscope est due à Léon Foucault. A la suite de sa démonstration


expérimentale de la rotation de la terre en 1851 à l’aide d’un pendule accroché au som-
met du dôme du Panthéon, il a ensuite développé un instrument capable de maintenir une
orientation fixe par rapport au plan du système solaire. Cet instrument destiné à convaincre
ses contemporains les plus sceptiques que la terre est réellement en rotation sur elle-même
est le gyroscope, dont l’étymologie désigne l’outil qui permet de voir tourner la terre. L’axe
du gyroscope est fixe par rapport au plan du système solaire, ce qui signifie que, depuis
le référentiel en rotation de la terre, l’axe de rotation du gyroscope a un mouvement de
précession apparent par rapport à l’axe de rotation de la terre. Pour mettre en évidence
cette précession d’une période de 24 heures afin de démontrer expérimentalement la ro-
tation de la terre, il faut que l’axe de rotation du gyroscope soit différent de celui de la
terre.

13.3.1 Effets gyroscopiques


Par analogie avec le gyroscope, on parle d’effets gyroscopiques pour désigner le com-
portement dynamique d’un disque ou d’une roue dont la rotation autour d’un axe a pour
effet de résister aux changements de son orientation. Ces effets gyroscopiques sont liés à la
conservation du moment cinétique en absence de moment de force extérieure.
Comme premier exemple d’effet gyroscopique, on considère une personne assise sur un
tabouret tournant autour d’un axe vertical qui tient à bout de bras une roue en rotation
rapide autour de son axe de symétrie (Fig. 13.7). Initialement, l’axe de symétrie de la
roue est horizontal et la roue tourne dans un plan vertical. Par conséquent, la composante
verticale du moment cinétique du système constitué de la personne, du tabouret et de la
roue est nulle, i.e. Lz = 0. La personne exerce alors un moment de force sur la roue pour la
redresser telle que son axe de symétrie devienne vertical et que sa rotation ait finalement lieu
dans un plan horizontal. Comme le moment de force est interne au système, la composante
verticale du moment cinétique du système constitué de la personne, du tabouret et de la
roue reste nulle, i.e. Lz = 0. Comme la roue tourne finalement dans un plan horizontal,
la composante verticale de son moment cinétique est non-nulle. Pour que la composante
verticale du moment cinétique du système constitué de la personne, du tabouret et de la
roue reste nulle, le tabouret et la personne doivent tourner autour de l’axe vertical du
tabouret dans la direction inverse à la roue.
Si la roue est remplacée par deux roues identiques tournant autour d’un axe avec une
13.3 Gyroscope et effets gyroscopiques 153

Figure 13.7 Une personne assise sur un tabouret, qui peut tourner autour d’un axe vertical
déplace une roue en rotation rapide d’une position initiale où la roue tourne dans un plan
vertical à une position finale où la roue tourne dans un plan horizontal. En position finale,
la personne assise sur le tabouret tourne en sens inverse de la roue.

vitesse angulaire scalaire de signe opposé, l’effet gyroscopique disparaı̂t car la somme vec-
torielle des moments cinétiques des deux roues s’annule. Ainsi, lorsqu’on redresse l’axe, la
personne et le tabouret restent immobiles.
Lorsqu’une roue est mise en rotation autour de son axe de symétrie et qu’elle est main-
tenue à bout de bras par une personne, le poids P de la roue génère un moment de force
extérieure M Oext = r × P sur le poignet O de la personne, où r = OG est le bras de levier Roues tournant en
(Fig. 13.8). Ce moment de force est orienté dans le plan horizontal et il est orthogonal à sens opposé
l’axe de rotation. D’après le théorème du moment cinétique (12.14), i.e. M Oext = dLO /dt, la
variation du moment cinétique LO est colinéaire au moment de force extérieure M Oext . Par
conséquent, l’axe de rotation change d’orientation dans la direction définie par le moment de
force extérieure M Oext , ce qui conduit à la précession de l’axe de rotation de la roue autour
de l’axe vertical. Pour maintenir fixe l’axe de rotation, la personne doit appliquer avec son
poignet sur cet axe un moment de force de norme égale et de direction opposée.

ext

Figure 13.8 Le poids d’une roue en rotation autour d’un axe génère un moment de force
sur l’axe qui provoque un mouvement de précession de l’axe dans le plan horizontal.

Dans le cas d’une roue de vélo tournant autour d’axe attaché à un fil vertical, l’effet
gyroscopique est similaire (Fig. 13.8). Le moment de force M O généré par le poids P de la
roue au point d’attache O provoque un mouvement de précession de l’axe de la roue autour
du fil en vertu du théorème du moment cinétique (12.14).

13.3.2 Roue de vélo


On considère une roue de vélo de masse M et de rayon R qui roule sans glisser. Le centre
de masse G de la roue est en mouvement circulaire uniforme de rayon ρ = cste à vitesse
154 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes

angulaire scalaire φ̇ = cste autour de l’axe vertical O ez (Fig. 13.9). Le vecteur vitesse
angulaire de précession de la roue est φ̇ = φ̇ ez . La roue est en mouvement de rotation
propre à vitesse angulaire scalaire ψ̇ = cste autour de l’axe de symétrie G e3 . Le vecteur
vitesse angulaire de rotation propre de la roue est ψ̇ = ψ̇ e3 . Le plan de rotation de la roue
est incliné d’un angle de nutation θ = cste par rapport à la verticale. On associe le repère
d’inertie (G, e1 , e2 , e3 ) à la roue. Le repère d’inertie est en général immobile par rapport
au solide indéformable afin que les moments d’inertie soient constants. Comme la roue est
invariante par rotation autour de l’axe de rotation propre G e3 , les deux autres vecteurs de
base du repère n’ont pas besoin d’être immobiles par rapport à la roue mais simplement
d’être situés dans le plan de la roue. Ainsi, le vecteur e1 = eφ ne suit pas le mouvement de
rotation propre de la roue et se trouve en tout temps dans le plan horizontal qui contient le
centre de masse G. Le vecteur e2 ne suit pas non plus le mouvement de rotation propre de la
roue et se trouve en tout temps dans le plan vertical qui contient le centre de masse G et le
vecteur e3 . On considère que le rayon de courbure ρ est suffisamment grand par rapport au
rayon R de la roue, i.e. R  ρ, et que la roue est un cylindre creux d’épaisseur négligeable
et de rayon R, c’est-à-dire que toute la masse M de la roue se trouve sur sa circonférence à
distance R du centre de masse.

. e2
f

ez
q
e3
r e 1,ef q er
G
.
y N

P
O C

Figure 13.9 Une roue de vélo a un mouvement de précession uniforme autour de l’axe
vertical et un mouvement de rotation propre uniforme autour de l’axe de symétrie de la
roue.

A présent, on va se livrer à l’analyse de la dynamique de la roue afin de déterminer


l’expression explicite de l’angle θ que prend le plan de la roue de vélo par rapport à un plan
vertical. Pour commencer, on détermine les grandeurs cinématiques d’intérêt. Le vecteur
vitesse angulaire totale Ω est la somme du vecteur vitesse angulaire de précession φ̇ et du
vecteur vitesse angulaire rotation propre ψ̇, i.e.
 
Ω = φ̇ + ψ̇ = φ̇ ez − ψ̇ e3 = φ̇ cos θ e2 + φ̇ sin θ − ψ̇ e3 (13.46)

La vitesse VG du centre de masse qui suit un mouvement circulaire de rayon ρ et de vitesse


angulaire φ̇ dans un plan horizontal s’écrit,

VG = VG eφ = ρ φ̇ eφ (13.47)

Comme la roue roule sans glisser, compte tenu de l’expression (12.12), la vitesse du centre
de masse s’écrit,
     
VG = Ω × CG = φ̇ cos θ e2 + φ̇ sin θ − ψ̇ e3 × R e2 = − R φ̇ sin θ − ψ̇ e1 (13.48)

En identifiant les expressions (13.47) et (13.48) de la vitesse du centre de masse VG , on


obtient l’identité suivante,
 
− R φ̇ sin θ − ψ̇ = ρ φ̇ (13.49)

Compte tenu de l’identité (13.49), le vecteur vitesse angulaire totale (13.46) est mis sous la
13.3 Gyroscope et effets gyroscopiques 155

forme,
ρ
Ω = φ̇ cos θ e2 − φ̇ e3 (13.50)
R
On détermine maintenant les grandeurs dynamiques d’intérêt. Les seules deux forces
extérieures qui sont exercées sur la roue sont le poids P = − M g ez , qui est exercé au
centre de masse G de la roue, et la force de réaction normale N exercée sur la roue par le
sol au point de contact C entre la roue et le sol. Comme la force de réaction normale N
est inconnue, il est judicieux d’évaluer le moment cinétique et le moment de force extérieure
résultant exercés sur la roue par rapport au point C. Le moment de force extérieure M Cext
évalué au point de contact C de la roue avec le sol est uniquement dû au poids, i.e.
M Cext = CG × P = (R e2 ) × (− M g sin θ e3 ) = − M Rg sin θ e1 = − M Rg sin θ eφ (13.51)
Compte tenu des expressions (12.18) et (13.47), le moment cinétique LC de la roue évalué
par rapport au point de contact C s’écrit,
 
LC = LG + CG × M VG = LG + (R e2 ) × M ρ φ̇ e1 = LG − M Rρ φ̇ e3 (13.52)

Compte tenu des relations (12.37) et (13.50), le moment cinétique LG évalué au centre de
masse G s’écrit,
ρ
LG = IG,2 φ̇ cos θ e2 − IG,3 φ̇ e3 (13.53)
R
Les moments d’inertie de la roue, qui est considérée comme un cylindre creux de masse M ,
de rayon R et d’épaisseur négligeable, sont donnés par,
1
IG,1 = IG,2 = M R2 et IG,3 = M R2 (13.54)
2
En substituant les expressions (13.54) dans la relation (13.53), le moment cinétique évalué
par rapport au centre de masse G devient,
1
LG = M R2 φ̇ cos θ e2 − M R ρ φ̇ e3 (13.55)
2
En substituant l’expression (13.55) dans la relation (13.52), le moment cinétique évalué par
rapport au point de contact C devient,
1
LC = M R2 φ̇ cos θ e2 − 2 M R ρ φ̇ e3 (13.56)
2
Les vecteurs de base e2 et e3 du repère d’inertie s’expriment en termes des vecteurs de base
du repère cylindrique eρ et ez comme,
e2 = − sin θ eρ + cos θ ez et e3 = cos θ eρ + sin θ ez (13.57)
Compte tenu des formules de changement de base (13.57), le moment cinétique évalué par
rapport au point de contact C devient,
   
1 1
LC = − M R2 φ̇ cos θ sin θ + 2 M Rρ φ̇ cos θ eρ + M R2 φ̇ cos2 θ − 2 M Rρ φ̇ sin θ ez
2 2
(13.58)
Les termes en parenthèses dans la relation (13.58) sont constants. A l’aide des expres-
sions (5.6) des dérivées temporelles des vecteurs de base, i.e. ėρ = φ̇ eφ et ėz = 0, la dérivée
temporelle du moment cinétique LC évalué par rapport au point de contact C s’écrit,
 
dLC R
= − 2M R ρ φ̇2 cos θ 1 + sin θ eφ (13.59)
dt 4ρ
Comme le rayon R de la roue est négligeable par rapport au rayon de courbure ρ, i.e. R  ρ,
on peut négliger le deuxième terme entre parenthèses dans la relation (13.59) en première
approximation, i.e.
dLC
= − 2M R ρ φ̇2 cos θ eφ (13.60)
dt
Le théorème du moment cinétique (12.26) appliqué au point de contact C se réduit à,
dLC
M Cext = (13.61)
dt
156 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes

compte tenu du fait que la vitesse du point de contact est nulle, i.e. VC = 0. En substituant
les équations (13.51) et (13.60) dans le théorème du moment cinétique (13.61) compte tenu
de l’expression (13.47), on obtient la condition suivante sur l’angle θ,
2 ρ φ̇2 2 VG2 2 AG
tan θ = = = (13.62)
g ρg g
L’interprétation physique de la condition (13.62) permet de comprendre les effets gyrosco-
piques associés à la dynamique d’un roue de vélo dans un virage. Pour une roue de vélo
qui roule à une vitesse VG fixée, plus le rayon de courbure ρ du virage diminue plus l’angle
d’inclinaison vertical θ augmente et vice versa. Pour une roue de vélo qui prend un virage
dont le rayon de courbure ρ est fixé, plus la vitesse VG augmente plus l’angle d’inclinaison
θ augmente et inversement. Les moto de course ont un grand angle d’inclinaison θ dans les
virages car leur vitesse VG est très élevée.
Moto dans un virage
13.3.3 Toupie
On considère une toupie en rotation par rapport à son axe de symétrie O e3 . On suppose
que le point de contact O entre la toupie et le sol est fixe. La toupie a un mouvement de
précession de vitesse angulaire φ̇ = φ̇ ez , un mouvement de nutation de vitesse angulaire
θ̇ = θ̇ eφ et un mouvement de rotation propre de vitesse angulaire ψ̇ = ψ̇ e3 . On associe
le repère d’inertie (G, e1 , e2 , e3 ) à la toupie (Fig. 13.10). Le repère d’inertie est en général
immobile par rapport au solide indéformable afin que les moments d’inertie soient constants.
Comme la toupie est invariante par rotation autour de l’axe de rotation propre G e3 , les deux
autres vecteurs de base du repère n’ont pas besoin d’être immobiles par rapport à la roue
mais simplement d’être situés dans le plan orthogonal à l’axe de symétrie de la toupie. Ainsi,
le vecteur e1 = eφ ne suit pas le mouvement de rotation propre de la toupie et se trouve en
tout temps dans le plan horizontal qui contient le centre de masse G. Le vecteur e2 = − eθ
ne suit pas non plus le mouvement de rotation propre de la toupie et se trouve en tout temps
dans le plan vertical qui contient le centre de masse G et le vecteur e3 .

q
e 3,er
e2

G y

e 1 ,ef N
.
f
eq .
y y
O
P
f .
x q

Figure 13.10 Une toupie, dont le point de contact avec le sol est immobile, a un mouve-
ment de précession par rapport à l’axe vertical, un mouvement de nutation par rapport à
un axe horizontal et un mouvement de rotation propre par rapport à son axe de symétrie.

La vitesse angulaire Ω de rotation de la toupie s’écrit comme


 
Ω = φ̇ ez + θ̇ e1 + ψ̇ e3 = θ̇ e1 + φ̇ sin θ e2 + ψ̇ + φ̇ cos θ e3 (13.63)

Les seules deux forces extérieures qui sont exercées sur la toupie sont le poids P = − M g ez ,
qui est exercé au centre de masse G de la toupie, et la force de réaction normale N exercée
sur la toupie par le sol au point de contact O entre la toupie et le sol. Comme la force de
réaction normale N est inconnue, il est judicieux d’évaluer le moment cinétique et le moment
13.3 Gyroscope et effets gyroscopiques 157

de force extérieure résultant exercés sur la toupie par rapport au point O. Le moment de
force extérieure M Oext évalué au point de contact O de la toupie avec le sol est uniquement
dû au poids, i.e.
M Oext = OG×P = (` e3 )×(− M g ez ) = − M g ` sin θ e3 ×e2 = M g ` sin θ e1 = M g ` sin θ eφ
(13.64)
où kOGk ≡ `. Les moments d’inertie le long de l’axe de symétrie est IO,3 = IO,k et les mo-
ments d’inertie le long des deux autres axes sont IO,1 = IO,2 = IO,⊥ . L’expression du moment
cinétique LO évalué par rapport au point O est obtenue en évaluant l’expression (12.41) en
O,
 
LO = IO,⊥ θ̇ e1 + IO,⊥ φ̇ sin θ e2 + IO,k ψ̇ + φ̇ cos θ e3
  (13.65)
= IO,⊥ θ̇ eφ − IO,⊥ φ̇ sin θ eθ + IO,k ψ̇ + φ̇ cos θ er

La dérivée temporelle du moment cinétique (13.65) s’écrit,


dLO    
= IO,⊥ θ̈ eφ − IO,⊥ φ̈ sin θ + φ̇ θ̇ cos θ eθ + IO,k ψ̈ + φ̈ cos θ − φ̇ θ̇ sin θ er
dt
 
+ IO,⊥ θ̇ ėφ − IO,⊥ φ̇ sin θ ėθ + IO,k ψ̇ + φ̇ cos θ ėr
(13.66)
A l’aide des relations (5.16) pour les dérivées temporelles des vecteurs de base d’un repère
sphérique, l’expression (13.66) devient,
dLO    
= IO,⊥ θ̈ eφ − IO,⊥ φ̈ sin θ + φ̇ θ̇ cos θ eθ + IO,k ψ̈ + φ̈ cos θ − φ̇ θ̇ sin θ er
dt
   
+ IO,⊥ θ̇ − φ̇ (sin θ er + cos θ eθ ) − IO,⊥ φ̇ sin θ − θ̇ er + φ̇ cos θ eφ
  
+ IO,k ψ̇ + φ̇ cos θ θ̇ eθ + φ̇ sin θ eφ
(13.67)
et se factorise comme,
dLO  
= IO,k ψ̈ + φ̈ cos θ − φ̇ θ̇ sin θ er
dt
    
+ IO,k ψ̇ + φ̇ cos θ θ̇ − IO,⊥ φ̈ sin θ + 2 φ̇ θ̇ cos θ eθ (13.68)
 
+ IO,⊥ θ̈ + IO,k − IO,⊥ φ̇2 sin θ cos θ + IO,k ψ̇ φ̇ sin θ eφ


Le théorème du moment cinétique (12.14) appliqué au point de contact O se réduit à,


dLO
M Oext = (13.69)
dt
En substituant les équations (13.64) et (13.68) dans le théorème du moment
cinétique (13.69), on obtient trois équations scalaires du mouvement selon les trois lignes de
Toupie
coordonnées,
 
IO,k ψ̈ + φ̈ cos θ − φ̇ θ̇ sin θ = 0
   
IO,k ψ̇ + φ̇ cos θ θ̇ − IO,⊥ φ̈ sin θ + 2 φ̇ θ̇ cos θ = 0 (13.70)
 2
IO,⊥ θ̈ + IO,k − IO,⊥ φ̇ sin θ cos θ + IO,k ψ̇ φ̇ sin θ = M g ` sin θ

Dans le cas particulier où le mouvement de nutation de la toupie est négligeable, i.e. θ̇ = 0
et θ̈ = 0, les équations du mouvement (13.70) se réduisent à,
ψ̈ + φ̈ cos θ = 0
φ̈ = 0 (13.71)
2

IO,k − IO,⊥ φ̇ cos θ + IO,k ψ̇ φ̇ = M g `

Les deux premières équations impliquent que la vitesse angulaire de précession φ̇ = cste et
158 Solide indéformable avec un axe fixe et gyroscopes

la vitesse angulaire de rotation propre ψ̇ = cste sont des constantes. Dans la limite où la
précession est lente par rapport à la rotation propre, i.e. φ̇  ψ̇, la troisième relation (13.71)
montre que la vitesse angulaire de précession φ̇ est inversement proportionnelle à la vitesse
angulaire de rotation propre ψ̇,
Mg `
φ̇ = (13.72)
IO,k ψ̇
A l’aide d’une roue de vélo et de deux axes, on peut réaliser une toupie qui permet
de mettre en évidence les mouvements de précession, de nutation et de rotation propre
(Fig. 13.11).

Figure 13.11 Toupie consituée d’un roue de vélo en rotation propre autour de son axe de
symétrie, en précession autour de l’axe vertical et en nutation autour d’un axe horizontal.

Un anagyre est une espèce de toupie de forme très particulière qui a un mouvement de
précession dans un seul sens. Si on lance l’anagyre dans le sens de rotation naturel, il tourne
rapidement. Si on le lance dans le sens opposé, il s’arrête rapidement et repart dans le sens
opposé. A première vue, l’anagyre semble être un demi ellipsoı̈de de révolution, mais en
réalité il s’agit d’un ellipsoı̈de coupé selon un plan qui ne contient pas deux axes de symétrie
(Fig. 13.12). Lorsqu’il est lancé dans le bon sens, l’axe de rotation est un axe un axe principal
d’inertie. Lorsqu’il est lancé dans le mauvais sens, l’axe de rotation n’est pas un axe principal
d’inertie, ce qui donne lieu à un mouvement de tangage et de roulis − généré par un moment
de forces extérieures résultant comme pour la roue mal équilibrée − qui augmente au cours
du temps et finit par arrêter le mouvement de précession de l’anagyre et à le relancer dans
le sens opposé...

Figure 13.12 Anagyre dont le mouvement de précession n’est stable que dans un seul sens
de rotation.

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