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L’Empire d’Émeraude

Le Guide Essentiel de Rokugan


crédits
CONCEPTION ET DÉVELOPPEMENT Tim Cox
DU SUPPLÉMENT

DÉVELOPPEMENT ADDITIONNEL
Per Andreassen, Marie Brennan, Robert Denton, E.A. Dunn, John Dunn, Lisa Farrell, C. Thomas Hand, Rob Hobart,
Keith Kappel, D.G. Laderoute, Monte Lin, James Mendez Hodes, Neall Raemonn Price et Nancy Sauer
ÉDITION Christine Crabb
RELECTURE Alexis Dykema et Jeremiah Shaw
SUPERVISION JDR Sam Gregor-Stewart
SUPERVISION NARRATIVE Katrina Ostrander
CONTRÔLE DE L’HISTORIQUE Max Brooke et Tyler Parrott
CONCEPTION GRAPHIQUE DU SUPPLÉMENT Michael Silsby, Scott Nicely et Evan Simonet
COORDINATEUR DE LA CONCEPTION GRAPHIQUE Joseph D. Olson
RESPONSABLE DE LA CONCEPTION GRAPHIQUE Christopher Hosch
ILLUSTRATION DE COUVERTURE Chris Ostrowski
ILLUSTRATION DE 4 DE COUVERTURE
E
Haibin Wu

ILLUSTRATIONS INTÉRIEURES
Sabbas Apterus, Francesca Baerald, Stefano Baldo, Lukas Banas, Noah Bradley, Joshua Cairós, Caravan Studio,
Anna Christenson, Carlos Palma Chruchaga, Calvin Chua, Mauro Dal Bo, Alayna Danner, Max Degen,
Nele Diel, Stanislav Dikolenko, Derek D. Edgell, Shen Fei, Felipe Gaona, John Anthony Di Giovanni,
Kevin Zamir Goeke, Gong Studios, Jeff Himmelman, Hai Hoang, B.D. Judkins, Daria Khlebnikova,
Pavel Kolomeyets, Greg Lambrakis, Diego Gisbert Llorens, Asier Martinez Lopez, Diana Martínez, Jorge Matar,
mocaran, Tomas Muir, Chris Ostrowski, Borja Pindado, Chris Pritchard, Paolo Puggioni, Eli Ring, Andrew Sonea,
Filip Storch, Alberto Tavira, Tropa Entertainment, Andreia Ugrai, Halil Ural, Le Vuong et Mario Wibisono
DIRECTION ARTISTIQUE Crystal Chang et Andrew Christensen
RESPONSABLE DE LA DIRECTION GRAPHIQUE Melissa Shetler
COORDINATEUR QUALITÉ Zach Tewalthomas
RESPONSABLES DE PRODUCTION Jason Beaudoin et Megan Duehn
DIRECTEUR DE LA CONCEPTION VISUELLE Brian Schomburg
RESPONSABLE EXÉCUTIF DU PROJET John Franz-Wichlacz
RESPONSABLE EXÉCUTIF DU DÉVELOPPEMENT Chris Gerber
CONCEPTEUR EXÉCUTIF Corey Konieczka
PUBLICATION Andrew Navaro

ADAPTATION FRANÇAISE EDGE ENTERTAINMENT FRANCE

TRADUCTION ET RELECTURE Valérie Florentin et Jérôme « Kakita Ryoichi » Vivas


SUPERVISION DE LA TRADUCTION Pauline Marcel avec l'aide de Madeleine "Sayonara"
Bouclette
RESPONSABLE ÉDITORIAL Stéphane “Boggy the Monk” Bogard

TESTEURS
Max Brooke, Stephen Calomino, Daniel Lovat Clark, Nicole Conley, Julien Escalier, Tim Huckelbery,
Casey Kipping, Kees-Jan Kleef, Ryan Kurnik, Romain Labrot, François Martinez, Pim Mauve, Katrina Ostrander,
Tyler Parrott, Kyle Pritchard, Karol Rybaltowski, Erik Strijbos, Samantha Thompson, Jan-Cees Voogd,
Joris Voogd, Joris Van der Vorst y Gerlof Woudstra

FANTASY
FLIGHT
GAMES
© 2019 Fantasy Flight Games. Legend of the Five Rings est TM de Fantasy Flight Games. Fantasy Flight Games et le logo FFG sont ® de Fantasy Flight Publishing, Inc.
Distribution par Novalis, 18 rue Jacqueline Auriol, Quartier Vallaroy, BP 40119, 78041 Guyancourt Cedex, France. Tél. : 01 34 52 19 70. Conservez ces informations pour vos archives.

ISBN : 8435407630017 Code Produit : L5R04FR Imprimé en Lituanie

Pour plus d’informations sur la gamme La Légende des Cinq Anneaux : le Jeu de Rôle, trouver des téléchargements
gratuits, obtenir des réponses aux questions concernant les règles, rendez-vous visite via :

t s i t es r e e st i et
sommaire

5 INTRODUCTION 155 Le sanctuaire de la Ki-Rin


15 en en Seid
5 Bienvenue à Rokugan
160 Le sanctuaire du kami Saule-Guérisseur
5 Que contient ce livre ?
162 Les croyances interdites
8 L’âge des cieux et de la terre
11 Le Millénaire paisible
165 CHAPITRE 5
Les voies de l’Illumination
21 CHAPITRE 1
Les forteresses du pouvoir 166 Le mystère de Shinsei
169 La confrérie de Shinsei
22 Les seigneurs et la gouvernance
172 Les temples et les monastères
28 La vie au château
shinséistes dans la société
32 Les châteaux et les palais
175 La vie quotidienne
38 Toshi Ranbo
178 Les temples
1 ūden a hi
181 Shinden Kasai
ūden ji
183 Le temple des Esprits attentifs
45 Le palais impérial
185 Les Quatre Temples
ūden ei
187 Les monastères
49 La guerre et la diplomatie
191 La Vénérable Demeure de la Lumière
193 Le monastère du Silence
59 CHAPITRE 2
Les carrefours commerciaux 194 Le monastère du Vent des Plaines

60 Le centre de l’Empire
196 CHAPITRE 6
60 La vie urbaine Les grands espaces
66 Les villes et métropoles de Rokugan
72 Otosan Uchi 197 Au-delà de l’enceinte de la civilisation
ari hi la i de en nge 199 La vie en pleine nature
77 Khanbulak 202 Les montagnes
78 Le village de la Corne écarlate 204 La mine de jade du village des
80 Les ports Montagnes occidentales
84 Le district portuaire de Gotei 207 Les montagnes du Dragon
87 La cité de la Grenouille riche 208 Les forêts
89 Crime et châtiment 210 La forêt Kitsune
213 La forêt de Shinomen
96 CHAPITRE 3 216 Les ruines
Le cœur de l’Empire 218 Le temple du Moine brûlé
97 La fondation d’une civilisation 220 Wasureta Mura, le village Oublié
103 La vie rurale 222 Les côtes
107 Les villages et les fermes 223 La grotte des Enfants de pierre
112 Le village de la mouche vrombissante ( hi n )
113 Le village d’Anbasukai 225 Les Terres d’été
115 Le village du Bassin tournoyant
116 La ferme de thé Kaori 227 CHAPITRE 7
118 Les samouraïs et les gens du peuple De nouvelles options de jeu
123 Les routes et les rivières 228 De nouvelles réponses au jeu
128 La rivière de l’Or (Kin no Kawa) des vingt questions
130 La route de l’Empereur 241 De nouveaux avantages
1 1 en h 245 De nouveaux désavantages
248 De nouvelles techniques
133 CHAPITRE 4 249 Des titres supplémentaires
Les lieux sacrés
134 Les sanctuaires de l’Empire d’Émeraude
134 La cosmographie de Rokugan
140 Les kamis et les fortunes
143 Le sanctuaire de la vie
145 Les pratiques religieuses
153 Les sites sacrés

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18e jour du mois de Hantei, 1122, sur une route à l’est de la province Yama

Daidoji Narisawa n’avait jamais été particulièrement pieux. Ce n’était sûrement pas un danger physique, se corri-
Il commençait pourtant à se demander si brûler de l’en- gea Narisawa. Il courait fort probablement tous les autres
cens pour honorer les kamis des montagnes qui se dres- types de risques.
saient abruptement sur la plaine pourrait les convaincre Peu après, il vit le même nuage de poussière que celui
d’arrêter de l’observer. Selon les cartes, il se trouvait dans repéré par Taro. L’ashigaru s’approchait justement de lui,
la même chaîne que celle qui protégeait l’arrière de Châ- au trot, pour faire son rapport.
teau Daidoji, mais le pâle soleil qui se reflétait sur les pics — C’est une patrouille, monseigneur. Une demi-douzaine
enneigés en cette fin de printemps lui semblait bien moins de gardes, je pense, tous montés et en armure.
chaleureux. Narisawa acquiesça et ordonna d’une voix forte :
Il en était de même des passants qu’il croisait. Les pay- — Halte ! Agenouillez-vous face aux arrivants.
sans du Clan du Lion connaissaient bien l’emblème du Les ashigaru obéirent immédiatement. Ils se placèrent
Clan de la Grue et tous cessaient leur travail éreintant dans sur le bas-côté avant de poser leur visage au sol. Seuls
les rizières pour lancer à son escorte un regard hostile. S’il Narisawa et Asao restèrent en selle. Inhalant profondé-
se plaignait de leur insolence, le Clan du Lion battrait ou ment le parfum de la terre humide et des fleurs printa-
décapiterait les coupables avant de rire dans son dos de la nières, il attendit que le Clan du Lion approche.
sensibilité du Clan de la Grue, dont les membres ne sup- La femme qui menait la patrouille ne fut aucunement
portaient pas un regard de travers. surprise de voir des soldats du Clan de la Grue le long de
Mais la famille Daidoji n’était pas faible, et si Narisawa la route. Les Matsu avaient dû recevoir des rapports régu-
ne montrait pas sa force aux paysans, son problème ne liers depuis leur entrée sur les terres du Clan du Lion. Elle
ferait qu’empirer. annonça simplement :
— Nous devrions atteindre le château du Dernier Sou- — Je m’appelle Matsu Hideji, magistrate du Clan du
pir d’ici l’heure du Cheval, lui dit Hirachimi Asao. Lion. Auriez-vous l’obligeance de me montrer vos papiers ?
Elle pensait qu'il s'était levé de sa selle car il était impa- Il avait déjà produit ces mêmes pièces en traversant le
tient d'arriver, mais aurait volontiers passé des jours à che- pont du fleuve des Trois Pierres, quelques kilomètres plus
val, à profiter de cette relative tranquillité, à regarder le loin. De tels contrôles étaient monnaie courante en terri-
soleil qui se reflétait sur l’eau des rizières, à écouter les toire ennemi, et Narisawa était paré à cette éventualité. Il
paysans chanter au loin, au lieu d’arriver à destination. attrapa les documents, entourés de fines planches pour
Mais il ne subirait pas l’opprobre lié à un tel aveu. Il pré- les protéger, qu’il gardait dans son kimono. Asao descen-
féra répondre : dit de cheval, prit les papiers en s’inclinant, puis les appor-
— Je pensais à l’accueil qui nous serait réservé. ta à la magistrate.
— S’ils veulent conclure cette union, les Matsu, malgré Matsu Hideji les examina plus longtemps que néces-
leurs réticences, devront respecter les bonnes manières. saire, mais elle finit par les replier et s’incliner.
Sinon…, répliqua Asao, les lèvres pincées. — Daidoji-san. J’espère que votre voyage n’a pas été
— Sinon, ils me jetteront aux pieds de Matsu Chieko-san trop pénible.
avant même que j’aie pu prendre un bain. l enai de ūden ji ai e n’ ai a i l in
Il avait pris soin de se laver à la dernière auberge, mais l’étendue de l’Empire d’Émeraude. Pris d’une inspiration
il serait tout de même humiliant de rencontrer sa future aussi subite que courtoise, Narisawa répondit :
femme encore couvert de la poussière et de la sueur accu- — Comment me plaindre de la longueur du voyage,
mulées durant le voyage. alors que le bonheur m’attend ?
Le Clan du Lion avait accepté cette union. Narisawa Hideji ne releva pas et se contenta d’affirmer :
ne pensait pas que cela mettrait un terme définitif aux — Je vais vous escorter jusqu’au château.
combats qui avaient valu son nom au lac du Désespoir, — Votre offre m’honore, répondit Narisawa sans dou-
situé à proximité, mais les Matsu n’auraient pas proposé ter un seul instant que c’était l’unique raison de sa venue.
un membre de leur propre famille s’ils ne souhaitaient pas Il ordonna aux ashigaru de se relever et tous se remirent
une trêve. en chemin vers les hautes murailles de la ville des Matsu,
Un sifflement strident retentit, émis par l’un des ashiga- et vers les inquiétantes montagnes qui la bordaient.
ru de leur escorte. Taro, qui avait le regard le plus perçant Ainsi commencent mes obligations, pen-
de l’escorte, avait vu quelque chose sur la route. sa Narisawa. S’il devait échouer, le lac
Ce n’était sûrement pas un danger. Si du sang était du Désespoir pleurerait d’autres
versé aussi près du château du Dernier Soupir, ce serait samouraïs tombés au com-
sous les lames de l’armée du Clan de la Grue venue mena- bat… et il serait le pre-
cer les Matsu jusque sous leurs murailles. Aucun bandit mier à mourir.
n’était inconscient au point de se montrer aussi près de
la forteresse de la famille qui entraînait les berserkers et
les dresseurs.

4
INTR O DU CTIO N

Bienvenue à Rokugan
mais tous ont leurs propres traditions et croyances, sou-
vent très différentes. L’adhésion au bushido unit les clans,
mais l’interprétation et les priorités qu’ils en retiennent
L’Empire d’Émeraude s’étend des montagnes du Crépus- les divisent.
cule au sud jusqu’aux monts de la Grande Muraille Septen-
trionale, et de la forêt de Shinomen à l’ouest jusqu’à la mer
de la déesse Soleil à l’est. Rokugan est un empire féodal
que contient ce livre—?
de droit divin, régi par le représentant de l’Ordre céleste et L’Empire d’Émeraude est un guide de Rokugan qui décrit
policé par les clans majeurs, fondés par les frères et sœurs ses terres, sa culture et ses peuples. Que vous soyez
divins du premier Empereur. joueurs ou maître du jeu, vous trouverez ici une mine
Rokugan est soumis à un strict découpage des classes d’informations pour comprendre l’Empire d’Émeraude et
sociales. Les innombrables paysans de l’Empire sont tous créer des aventures excitantes et dramatiques, mais ce
au service de la caste des samouraïs, divisée entre les livre n’est pas exhaustif pour autant, loin de là. Rokugan
buke, qui en constituent la majeure partie, et les kuge. est un territoire vaste et en décrire chaque ville, chaque
Ces derniers sont les propriétaires terriens, que les buke vallée, chaque tradition et chaque rôle social serait impos-
er en ha e a ra a r er en n dai sible en un seul volume.
et cette loyauté est l’un des piliers du bushido, le code qui Ce livre est divisé en sept chapitres qui explorent les
dicte leur conduite et celle de chacun de leurs pairs. aspects principaux de Rokugan, afin que vous puissiez y
Rokugan est un pays magnifique aux horreurs indi- créer des campagnes de jeu de rôle. Les six premiers cha-
cibles, théâtre de grandes joies et de tragédies ineffables, pitres se concentrent sur des lieux cruciaux, urbains ou
d’honneur inégalé et de terribles injustices. Des plaines ruraux, sans lesquels l’Empire d’Émeraude n’existerait pas,
luxuriantes aux villes surpeuplées, les paysans besognent ainsi que sur leur place dans la société et sur leurs habi-
dans les champs et les rizières tandis que les samouraïs tants. En plus de ces informations génériques, chaque cha-
combattent pour l’honneur et la gloire. Les sept clans pitre décrit des endroits spécifiques et fournit des profils
majeurs possèdent une histoire et une culture communes, de PNJ qui leur sont associés. Enfin, des idées d’aventures
sont proposées pour aider les MJ à incorporer ces lieux et
ces PNJ dans leurs parties.
Le septième chapitre présente de nouvelles options
pour les personnages joueurs, en puisant dans la grande
diversité de Rokugan pour multiplier les possibilités
offertes par le Livre de Règles de La Légende des
Cinq Anneaux.
I N T R O DUC T I O N

Chapitre 1
Le chapitre es rteresses ir décrit les châteaux
idées d’aventure
et palais de Rokugan, des édifices fonctionnels du Clan du Tout au long de ce livre, vous trouverez des
Crabe à l’architecture élégante privilégiée par le Clan de encadrés tels que celui-ci, destinés à présen-
la Grue. Ce chapitre examine le rôle des châteaux en tant ter des idées d’aventure aux MJ. Si vous par-
que centres politiques et militaires. En plus des informa- ticipez au jeu en tant que joueur, vous devriez
tions nécessaires sur les châteaux, leurs fonctions et les éviter de les lire, car vous vous gâcheriez le plai-
variantes régionales, vous y trouverez de nouvelles infor- sir de la découverte si votre MJ s’empare de
mations sur la diplomatie et l’art de la guerre. ces suggestions ! Si vous êtes MJ, vous pou-
vez soit développer ces propositions pour créer
Chapitre 2 des aventures complètes, soit piocher des idées
ici et là, soit les utiliser simplement comme
Le chapitre es rre rs er i se concentre source d’inspiration.
sur les cités et les villes, sur leurs origines, leur configura-
tion et leur importance en ce qui a trait au commerce ou Accroche L’accroche fournit le contexte pour
à la société. Il évoque également les ports, qui sont pré- lancer l’aventure et présente les PNJ importants.
sents dans presque toutes les villes riches et influentes de On y suggère aussi une manière d’impliquer les PJ
Rokugan. De plus, comme toute cité comprend son lot de dans les événements, que vous pourrez personna-
crimes, le chapitre 2 regroupe également des détails sur la liser afin qu’elle corresponde à votre campagne.
loi et son application.
Développement La partie suivante décrit
brièvement l’enchaînement le plus probable par
Chapitre 3 lequel les événements vont dégénérer, impli-
quer les personnages de plus en plus et faire
e r e ire s’intéresse aux villages et fermes
monter les enjeux.
qui nourrissent l’Empire, ainsi qu’aux routes et rivières qui
les relient et permettent la circulation des denrées néces- 三 Paroxysme Enfin, nous vous proposons un
saires à la survie des villes plus peuplées. Ce chapitre point culminant pour l’aventure, qu’il s’agisse
décrit aussi les relations et interactions entre les samouraïs d’une rencontre décisive avec un PNJ ou d’un
et les différentes castes de paysans qui occupent l’Empire choix difficile pour les PJ. À ce moment, les évé-
d’Émeraude. nements ont probablement pris une tournure
inattendue en raison des actions des PJ : vous
Chapitre 4 ne devez pas hésiter à modifier le dénouement
ou à résoudre les dilemmes d’une manière qui
Le chapitre es ie s r s détaille la cosmogonie de sied à l’ensemble de l’aventure.
l’univers telle que comprise dans l’Empire d’Émeraude,
du royaume Céleste aux enfers du Jigoku en passant par
le n r e e l e d’e ri ar e r d Sen
apprendrez où vénérer les kamis et les fortunes et décou-
Chapitre 6
vrirez tous les autres lieux de culte, leur organisation et Le chapitre es r s es es e R se concentre
leur fonction, mais aussi les pratiques interdites, comme sur la nature indomptée, qu’il s’agisse des forêts, des mon-
les malédictions ou la terrifiante magie du sang. tagnes ou des zones côtières. Il couvre tous les points de
jonction entre civilisation et nature, y compris les mines,
Chapitre 5 les villages de bûcherons ou les ruines oubliées de tous.

Dans es ies e i ti vous découvrirez le mys-


térieux et vénéré Shinsei ainsi que le débat qui entoure la
Chapitre 7
véritable signification de ses enseignements. Ce chapitre Dans e e es ti s e e , vous découvrirez de
mentionne aussi les raisons qui poussent un individu à nouvelles possibilités de personnages joueurs, dont des
devenir moine ou prêtre, ainsi que la marche à suivre pour samouraïs des familles impériales et leurs écoles, comme
y parvenir, de même que des explications sur la manière le héraut Miya ou l’astrologue Seppun. Des avantages
dont le clergé, les temples et les monastères shinséistes et désavantages inédits renforcent la grande variété de
s’intègrent dans la société. Enfin, ce chapitre évoque les personnalités et d’historiques disponibles, et des titres
édifices religieux : leur organisation, leur fonctionnement l en aire (allan de dai yoriki) enrichissent
et ce qui rend chacun d’entre eux unique. encore cette diversité.

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I N T R O DUC T I O N

L’âge des cieux et de la terre


publiques. Le Kami Shiba, fondateur du Clan du Phénix,
épousa Tsumaru, des ningyo, et leur petite-fille publia, des
années plus tard, les récits de sa grand-mère.
Compilation du scribe impérial Miya Chinatsu L’historien Ide Takauji, du Clan de la Licorne, affirme
AR qu’une race ophidienne aurait succédé aux Cinq Races
La longue et glorieuse histoire de notre Empire d’Éme- antiques et aurait vécu sur les terres qui allaient devenir
Cette section contient raude remonte à sa fondation par les Kamis divins. Grâce Rokugan. Il fonde ses dires sur des ruines découvertes
l’histoire de Roku- aux nombreux et merveilleux présents qu’ils accordèrent à dans la forêt de Shinomen, qui comprendraient de nom-
gan, telle que contée l’humanité, y compris l’art, l’éducation et le code du bushi- breuses statues et gravures de serpents humanoïdes.
par ses habitants do, Rokugan demeure le pinacle de la civilisation. Et grâce

la chute des kamis


et attestée par de
aux dons du royaume Céleste, Rokugan eut la force néces-
nombreux scribes
saire pour vaincre les innombrables menaces qui se pré-
impériaux. Cepen-
dant, la vérité dépend sentèrent à ses débuts. Au fil des ans, Amaterasu et Onnotangu eurent la joie d’ac-
souvent du point de cueillir des enfants : les neuf Kamis. Au début, ils étaient
vue du narrateur, et des
renseignements qu’il
la création du monde enchantés, mais tandis que leurs fils et leurs filles grandis-
saient, Onnotangu s’aperçut qu’ils étaient forts et talen-
choisit d’omettre. Les Au début, il y avait le Néant. Ce n’était pas le néant du tueux, bénis par son héritage et celui de Dame Soleil. Il
étrangers, les Yobanjin Vide qui, lui, est immuable. Le Néant fut la source de tout commença alors à craindre que l’un d’eux n’en vienne à
et nombre de groupes mais, au commencement, il n’y avait rien et il était seul. usurper son pouvoir. Rongé par la jalousie et la peur, il déci-
secrets de Rokugani
Après des éons, le Néant comprit qu’il était seul et il prit da de s’assurer qu’une telle chose n’advienne jamais… en
ont leurs propres
peur. Il en résulta le premier tiers du monde. Ensuite, le dévorant ses enfants. Amaterasu pleura amèrement à cette
récits historiques, qui
ne correspondent pas Néant se mit à désirer ardemment de la compagnie, et un idée, et ses larmes tombèrent au sol, créant de profonds
toujours aux archives deuxième tiers du monde fut créé. Comprenant ce qu’il bassins. Refusant de déchirer le royaume Céleste en décla-
officielles. avait fait, il regretta sa peur et son envie, donnant nais- rant la guerre à son époux, elle trouva une autre solution.
sance au troisième tiers. Alors, le Néant cessa d’exister et, Chaque fois qu’Onnotangu avalait l’un des enfants, elle
à sa place, le monde était né. lui faisait boire une coupe de saké contenant une unique
Le monde d’alors n’avait pas du tout la forme que goutte de poison. Lorsqu’il en arriva au plus jeune, Hantei,
nous connaissons aujourd’hui. À l’époque, il était fluide et Amaterasu remplaça l’enfant par une pierre portant ses
dénué de forme, comme une masse d’huile noirâtre qui vêtements. Onnotangu était si confus par le poison qu’il
flotterait sur l’eau. À l’issue d’une longue période, les par- ne s’en rendit pas compte, avala le leurre puis s’endormit.
ties plus légères se séparèrent et devinrent le royaume Dame Soleil fit sortir Hantei du palais et le cacha.
Céleste, alors que les plus lourdes formèrent la terre. Puis, Durant son enfance, elle lui enseigna l’honneur et la
les Trois Dieux Sans Nom apparurent et ils constatèrent guerre. Une fois son éducation terminée, elle l’arma d’un
que, bien que les cieux et la terre aient été créés, tout sabre de lumière stellaire et l’envoya sauver ses frères et
le reste était encore sauvage et à l’état brut. Après s’être sœurs. Onnotangu se réveillait quand Hantei entra dans
consultés, ils donnèrent naissance à deux dieux qu’ils le palais. À la vue de son fils rayonnant, Sire Lune gronda
envoyèrent façonner le monde. Ces deux êtres réfléchirent de rage, se saisit de sa lame et chargea. Leur combat dura
à la manière de procéder avant de s’incliner, de baiser le des siècles, mais Hantei parvint à esquiver les attaques de
sol et de lui donner un nom. son père et à porter nombre de coups. Le sang d’Onno-
Une fois nommée, la terre se couvrit de vie, de nou- tangu coula ainsi des cieux pour tomber dans les bassins
veaux dieux et créatures apparurent, dont Suijin, dieu des formés des larmes d’Amaterasu. De chacun d’entre eux,
océans, Kaze no Kami, dieu du vent et des quatre vents car- deux humains sortirent et regardèrent autour d’eux, hébé-
dinaux, les dragons élémentaires et bien d’autres. Les créa- tés. L’humanité naquit des larmes de Dame Soleil et du
teurs de la terre obtinrent également un nom : l’homme sang de Sire Lune.
devint Onnotangu, la lune, et la femme Amaterasu, le soleil. Une éternité passa, mais Hantei finit par voir une ouver-
Au royaume Céleste, ils étaient entourés des shinzoku, ture. Rassemblant ses forces, il enfonça sa lame profondé-
une tribu de dieux, tandis que les mazoku, des démons ment dans le ventre de son père, et ses frères et sœurs
du monde souterrain, étaient asservis sous terre et s’occu- en sortirent et chutèrent sur terre. Fu Leng tomba en der-
paient des âmes des morts (peu nombreuses à l’époque). nier, mais Onnotangu le rattrapa. Hantei frappa à nouveau,
Les humains n’existaient pas encore, mais la terre était tranchant la main de son père pour permettre à Fu Leng
peuplée par les Cinq Races antiques : les tengu, les kitsu, de tomber avec les autres. Hurlant de désespoir, Fu Leng
les ningyo, les trolls et les zokujin. Nous ne savons presque se saisit de Hantei, entraînant son frère dans sa chute. Tan-
rien de cette époque, puisque les empires florissaient et dis que le glorieux royaume Céleste s’éloignait, les deux
s’écroulaient sans laisser de traces écrites. Les derniers kit- frères furent séparés, et Hantei ne put voir où son aîné
su épousèrent des descendants du seigneur Akodo pour s’écrasa. Hantei, Akodo, Doji, Hida, Togashi, Shinjo et les
fonder la famille Kitsu, mais s’ils léguèrent leurs histoires jumeaux Shiba et Bayushi atterrirent tous proches les uns
à leurs descendants, le Clan du Lion ne les rendit pas des autres.

8
À leur arrivée sur terre, les Kamis furent doublement dieux des tempêtes et des océans pouvait les anéantir
surpris. Ils réalisèrent d’abord qu’ils étaient devenus mor- en un instant.
tels, puis ils découvrirent l’humanité qui, malgré sa filiation Le cœur de l’humanité n’avait pas encore été éveillé
avec Dame Soleil et Sire Lune, était en piteux état. aux créations artistiques. Sans alphabet pour écrire leur
passé, les humains comptaient sur des histoires transmises

l’ère primitive d’une génération à l’autre. Sans colorants ni culture du riz,


leurs vêtements étaient ternes et leurs récoltes maigres.
(préhistoire – 5 ci) Les tribus dansaient et chantaient au rythme des tam-
bours, sans connaître ni mélodie ni harmonie. Les guerres,
Au commencement de l’ère de l’humanité, celle-ci vivait surtout des attaques contre les autres populations, se
en tribus éparses, ce qui est toujours le cas des Yobanjin livraient sans stratégie ni honneur.
du nord. Les hommes vénéraient les fortunes, divinités Les Kamis se consultèrent et décidèrent que chacun
des entreprises humaines, tandis que les prêtres parcou- irait explorer une partie du monde pour en jauger la valeur.
raient les espaces habités par les humains, les esprits et Comme ils étaient tous beaux, forts et sages, ils attirèrent
les animaux. Les futurs Rokugani vivaient dans de petits l’attention des tribus visitées. Rapidement, tous furent
villages, certains parfois plus conséquents. Ils s'habil- entourés d’un groupe d’humains qui voulaient apprendre
laient de peaux d'animaux et de végétaux tissés, et se les arts célestes à leurs côtés. L’écriture et la calligraphie,
nourrissaient grâce à la chasse et à la cueillette dans les l’art de forger le fer et l’acier, celui d’accorder des instru-
forêts. Certaines tribus tentèrent de cultiver les grains et ments, la sagesse issue de l’honneur et de la loyauté, ainsi
pousses qu’elles trouvaient, mais les récoltes se révélaient que de nombreuses autres techniques et idées se propa-
aussi fragiles que des pétales au vent, et la fureur des gèrent au fil des voyages des Kamis.

9
I N T R O DUC T I O N

l’aube d’un nouvel la guerre contre


âge (5–39 ci) fu leng (39–42 ci)
A

Certains shugenja et
autres moines érudits Les Kamis finirent par se regrouper à l’endroit où ils avaient Durant de nombreuses années, la vie fut paisible dans
pensent qu’il existait un atterri. Une fois de plus, ils se consultèrent et décidèrent l’Empire nouvellement créé. Les clans prospéraient au fur
dixième Kami, Ryoshun, que, même si l’humanité avait une immense valeur, elle et à mesure que la sagesse et la noblesse des Kamis se
qui serait mort dans devait être organisée et administrée avec sagesse pour propageaient. L’Empereur Hantei promulgua des lois qui
le ventre de Sire Lune. pouvoir prospérer. Ils tinrent donc un tournoi pour savoir reproduisaient la perfection du royaume Céleste.
De nombreux prêtres qui serait le premier gouverneur de ces terres. Sire Togashi Un beau jour, Fu Leng entra dans Otosan Uchi et
d’Osano-wo croient que,
ne participa pas, car, dit-on, dans sa grande sagesse, il retrouva ses frères et sœurs. Tous furent, dans un premier
lorsque Hantei a éventré
avait prédit la victoire de Hantei. temps, enchantés d’apprendre que leur frère avait survé-
Onnotangu, le dixième
Kami serait tombé dans Une fois l’empereur nommé, les Kamis s’attelèrent à la cu, mais l’inquiétude prit rapidement le pas sur la joie. Le
le monde souterrain, où il création d’un empire. Tous fondèrent un clan composé de Clan du Crabe ne connaissait que trop le mal qui avait
aide, voire sert, la fortune leurs disciples, à l’exception de l’Empereur Hantei. Il alloua pris racine au sud, d’où arrivait Fu Leng. Ce dernier lais-
de la mort. D’autres jugent des terres à chaque clan, leur permettant de les cultiver sa éclater sa colère en découvrant qu’il avait été exclu du
qu’une telle croyance est à condition qu’ils lui versent une taxe. La plupart des tournoi destiné à élire l’empereur. Tous eurent beau lui
blasphématoire, et cette humains ne comprirent pas la chance que leur offraient les expliquer qu’ils le croyaient mort, il les accusa de men-
divergence d’opinions fait Kamis et s’opposèrent à leur règne. Chaque Kami organisa tir et de l’avoir abandonné à son funeste sort sans cher-
parfois couler le sang. Les
les tribus sur ses terres et érigea des écoles où enseigner cher à le retrouver. Les autres Kamis, dans leur grande
combattants malheureux
le bushido. Tous créèrent également des centres martiaux sagesse, comprirent que Fu Leng avait été corrompu par
rejoignent alors le monde
souterrain, et peuvent puisque les contrées étaient encore dangereuses, mais les envoûtements du Jigoku, le pendant maléfique du
ainsi, dans une forme de certains fondèrent d’autres écoles. Celle de Dame Doji monde souterrain.
justice poétique, vérifier la était la plus célèbre, les étudiants de la patronnesse des Fu Leng exigea de pouvoir défier Hantei. À regret,
vérité par eux-mêmes . arts parcourant l’Empire naissant pour partager des his- ce dernier accepta et désigna Togashi comme cham-
toires et œuvres d’art sur les Kamis et le royaume Céleste. pion. Lorsque Fu Leng intima à celui-ci de sélectionner
Rapidement, les villages devinrent des villes, et des routes une arme, le fondateur du Clan du Dragon choisit tout
se rejoignirent pour créer un réseau à travers les terri- Rokugan et ses habitants. Fou de rage, Fu Leng se reti-
toires. Hantei choisit d’installer sa capitale sur la colline ra dans l’Outremonde et jura de revenir avec sa propre
où les Kamis avaient atterri, et c’est ainsi que fut fondée armée pour livrer ce duel.
Otosan Uchi. Bientôt, les villes et villages du sud rapportèrent des
invasions de créatures cauchemardesques : des gobelins,
des oni démoniaques et d’autres êtres inconnus et ter-
rifiants. Les guerriers à la solde de l’Empire se réunirent
pour combattre, mais tous furent vaincus. Fu Leng recou-
rait à une magie maléfique pour invoquer ses armées
et les mener à la victoire. Lentement, les troupes de
Hantei reculèrent.
INTR O DU CTIO N

Un Kami s’incline
C’est à cette époque que la tribu d’Isawa rejoignit l’Em-
Le Millénaire paisible A N R R
A A

pire. Avant cela, Isawa, un meneur spirituel aux capa- Le calendrier d’Isawa
Vint ensuite une époque surnommée, à juste titre, le Millé-
cités étonnantes à qui les fortunes et les kamis accor- compte les années à partir
naire paisible. Sous le règne avisé de Hantei et la direction
daient leur confiance, n’avait pas jugé utile de placer de la chute des Kamis, qui
des descendants des Kamis, le peuple de Rokugan connut
son peuple sous la protection des enfants du Soleil et marque l’an 1. Le système
des siècles de paix et de prospérité. Les voyageurs gai-
de la Lune. Durant la guerre, Shiba se rendit auprès de a été adopté dans tout
jin, lorsqu’ils avaient l’autorisation d’entrer dans Rokugan, Rokugan, en raison de sa
la tribu pour demander de l’aide, mais Isawa refusa, de
admiraient l’élégance, la sagesse et l’opulence de l’empire. simplicité par rapport à
peur de perdre ses traditions. Shiba s’agenouilla alors
celui du Droit impérial,
la bienveillance de
devant lui en promettant que ses descendants et lui
utilisé dans les archives
serviraient et protégeraient le chef de tribu et les siens
l’empereur s’étend
officielles, où les dates
s’ils voulaient bien rejoindre le clan du Kami. Isawa fut à sont exprimées en années

(42–390 ci)
ce point impressionné par cet acte sincère qu’il accep- de règne d’un empereur
ta. Depuis, même si les Champions du Clan du Phénix précis. Certains se de-
appartiennent à la famille Shiba, le clan est dirigé par mandent pourquoi Isawa
des descendants d’Isawa. a créé un tel système,
Le départ du Clan de la Ki-Rin puisqu’il était opposé au
règne des Kamis. Cepen-
Le Petit Maître Les armées de Fu Leng ne représentant plus une menace, dant, rares sont ceux qui
le peuple de Rokugan recommença à établir l’Empire. soutiennent l’idée que le
Un jour, un vieil homme habillé en moine se présenta au calendrier puisse débuter
Cependant, Hantei gardait en mémoire le mal causé par
château de Hantei. Il dit s’appeler Shinsei et savoir com- avec un événement autre
un ennemi externe et il convoqua sa sœur, Shinjo. Dame
ment vaincre les armées de Fu Leng. Dans un premier que la chute des Kamis.
Shinjo avait toujours été la voyageuse de la famille : elle
temps, Hantei refusa de l’écouter, mais après que Shinsei
aimait rencontrer de nouvelles personnes. L’Empereur lui
eut défait, sans armes, les gardes qui devaient le raccom-
confia, ainsi qu’à ses disciples qui formaient le Clan de la
pagner, l’Empereur se révéla curieux. Tous deux parlèrent
Ki-Rin, la mission d’explorer les contrées au-delà de l’Em-
toute la nuit, et Shiba transcrivit la conversation. Ces par-
pire, pour identifier les possibles menaces. Dame Doji fut
chemins devinrent le Tao de Shinsei et ils contiennent
très triste de voir partir sa sœur Shinjo, dont elle était très
toutes les connaissances du Petit Maître sur le monde,
proche, et elle lui offrit en souvenir un magnifique éventail
les Cinq Éléments et l’Illumination.
qu’elle avait peint à la main.
Shinsei expliqua à l’Empereur que la fortune sou-
rit aux mortels et qu’il devait rassembler sept guerriers
humains pour vaincre le Sombre Kami. Hantei lui don- Le Prince étincelant
na sa permission, et un combattant de chaque clan fut
e a r le d ar de Shinj an ei i a le ingen-d
choisi. Shinsei conduisit les Sept Tonnerres dans le sud.
le royaume des mortels. Selon certaines sources, il aurait
Durant plusieurs semaines, ils ne donnèrent aucun signe
succombé à une blessure subie durant la guerre contre Fu
de vie. Puis un jour, au cours d’une grande bataille, les
Leng. D’autres prétendirent que, las du monde mortel, il
armées de Fu Leng devinrent soudainement confuses et
était retourné vers le royaume Céleste dans un éclat de
désorganisées. Les guerriers de l’Empire reprirent cou-
lumière. Il s’agit là d’un sujet concernant plutôt les prêtres
rage et combattirent plus férocement encore, boutant
que les historiens, nous ne nous y attarderons donc pas.
leurs ennemis hors du champ de bataille. Tout le monde
Le trône passa au fils de Hantei, Genji, surnommé le
célébra la victoire des Tonnerres : ce jour devint le Jour
Prince étincelant. Élégant et raffiné, il avait vécu, durant sa
des Tonnerres. Hantei ordonna qu’un grand festin soit
jeunesse, de nombreuses aventures, à l’origine de bien des
organisé en l’honneur des héros, mais seuls Shinsei et
histoires des conteurs de l’époque. Au cours de son règne,
Shosuro, la Tonnerre du Clan du Scorpion, se présen-
il fit bâtir de nombreux temples et monastères pour que les
tèrent. Shosuro portait douze parchemins, dans lesquels,
Cinq Éléments et le Tao de Shinsei puissent être enseignés
selon elle, Fu Leng était emprisonné. Hantei décréta que
dans tout l’Empire. Il poursuivit également la construction
ces parchemins ne seraient jamais ouverts et il confia au
des routes qui reliaient les villes. À sa mort, sa fille aînée,
Clan du Scorpion la mission de les conserver.
Murasaki, lui succéda et connut un règne long et paisible.

11
I N T R O DUC T I O N

La loi impériale et les Les bénédictions de Daikoku


magistrats d’Émeraude Une fois la paix revenue, les fermiers de l’Empire purent
Sous le règne de Genji, Doji Hatsuo et Soshi Saibankan chercher à faire progresser l’agriculture. La première grande
se concertèrent pour réformer et codifier la loi impé- avancée fut la généralisation des outils en fer, plus solides
riale. Les lois avaient été formulées par le Kami Hantei et moins chers que ceux en bronze. Avec de tels instru-
et étaient donc parfaitement équitables et complètes, ments, les fermiers purent déboiser et obtenir plus de
mais les juges de l’Empire, qui étaient de simples mor- parcelles arables. Les rigoles et canaux que ces outils per-
tels, faisaient parfois preuve d’incompétence dans leur mettaient de creuser donnèrent naissance à un système
application. En publiant des versions annotées des lois d’irrigation fiable, qui facilita la culture du riz et permit
originelles, Hatsuo et Saibankan permirent aux magistrats d’obtenir de meilleures récoltes sans augmenter la taille
de tout l’Empire de rendre des jugements similaires. Ils des champs. Les clans qui vivaient dans des plaines bien
créèrent également les magistrats d’Émeraude, des juges irriguées constatèrent rapidement un accroissement de
bénéficiant de l’autorité impériale pour enquêter et juger leur population et de leur richesse.
les criminels. La dernière invention majeure fut la découverte de la
recette des nouilles à base de farine de blé. Cette céréale
résistante pousse dans les régions trop froides ou trop
sèches pour le riz, mais ses grains entiers nécessitent
une longue cuisson, et les bouillies qu’on en tire ne sont
pas appétissantes. Les délicieuses nouilles, par contre,
devinrent rapidement populaires auprès de tous. Le défri-
chage des terres se poursuivit, permettant de nourrir
tout l’Empire.
INTR O DU CTIO N

Le commerce crût au rythme des populations, seigneurs des Clans du Crabe et du Lion réalisèrent à
mais les marchands commencèrent à se plaindre du leur tour que ce présent pourrait servir à leurs guerriers.
système de troc, qu’ils jugeaient contraignant. Dans de Les cartes annotées facilitaient la logistique des cam-
nombreuses régions, de petites barres d’or ou de jade se pagnes militaires. Les ordres écrits ne dépendaient pas
substituèrent ainsi aux biens, mais ce système posait des de l’aptitude d’un messager à retenir précisément les
problèmes de variation de taille et de falsification. Avec la paroles de son commandant. Les rapports rédigés après
progression des technologies dans les mines et les forges, les batailles permettaient d’archiver des leçons impor-
des pièces purent s’échanger entre marchands, et l’Empe- tantes dont les commandants des futures générations
reur déclara que le koku représenterait la quantité de riz pourraient bénéficier.
nécessaire pour nourrir une personne pendant un an (cinq La capacité à lire progressa au rythme du nombre
boisseaux de riz). Grâce au koku et à ses subdivisions, les d’œuvres écrites. Aux premiers jours de l’Empire, Akodo
marchands se mirent à échanger plus facilement des biens, écrivit Commandement, son traité sur la guerre et le géné-
et la nourriture, les tissus, les teintures et bien d’autres pro- ralat. Quant à Kakita, le mari de Dame Doji et le premier
duits commencèrent à circuler. Champion d’Émeraude, il rédigea Le sabre, qui explique
sa technique et sa philosophie.
Les bénédictions de Fukurokujin En réaction, peut-être, son rival, Mirumoto Hojatsu,
rédigea Niten qui décrit les techniques au sabre double
L’art de lire et écrire se propagea rapidement parmi les développées en compagnie de son père adoptif, Miru-
samouraïs. Les Clans de la Grue, du Phénix, du Dragon moto. Nul besoin de décrire le Tao de Shinsei, connu à
et du Scorpion avaient toujours attaché beaucoup de travers tout l’Empire. Le traité d’Isawa, Éléments, fut
valeur à la sagesse et à la diffusion des idées. Ils avaient écrit à la même époque. Vers la fin du premier siècle,
accepté dès le départ le don de l’écriture accordé par Les Mensonges parut. Si son auteur réel demeure incon-
les Kamis, le jugeant indispensable à leurs devoirs. Les nu, le texte est généralement attribué au Kami Bayushi.
I N T R O DUC T I O N

Au cours du deuxième siècle, des œuvres littéraires


commencèrent à paraître. Seppun Namika écrivit Le Prince
étincelant, une série de romans plus ou moins centrée sur
Hantei Genji. De nombreux livres de l’époque traitaient du
même sujet, mais ceux de Namika furent jugés meilleurs et
sont encore lus de nos jours.
Le peuple de Rokugan en apprit également plus sur le
royaume Céleste, grâce aux enseignements des Kamis et
de Shinsei. Le Clan du Dragon et la famille Seppun firent
de grandes avancées en astrologie. En étudiant les mou-
vements de Dame Soleil, de Sire Lune et des autres corps
célestes, les astrologues purent interpréter les désirs et
les actes des dieux, voire les anticiper. Ainsi, les sages
purent prédire les grands événements ou déterminer
le meilleur moment pour que leur seigneur entreprenne
certaines actions.

Les bénédictions de Jurōjin


La shugenja Agasha, disciple de Togashi, fut parmi les
premières à comprendre clairement qu’il n’existe aucune
contradiction entre les enseignements de Shinsei et les
croyances liées aux fortunes, longtemps suivies par le
peuple. En puisant dans la sagesse du Petit Maître et en se
fondant sur ses propres études des kamis et de la nature,
elle découvrit de nombreux soins sur lesquels la médecine
actuelle s’appuie toujours.
Aux premières décennies de l’Empire, les disciples
d’Agasha et les érudits de tout Rokugan firent beaucoup
progresser la médecine et l’alchimie. Ils découvrirent les
propriétés guérisseuses d’herbes et d’autres plantes,
seules ou en concoction. Ils développèrent également
une méthode pour exploiter le ki d’une personne afin l’âge de la cupidité
d’accélérer le processus de guérison, notamment en pla-
çant des aiguilles à des points précis du corps pour corri-
(390–435 ci)
ger le d ili re de nergie enjir ig re ar i
les érudits les plus influents. Ce moine aveugle, capable L’assombrissement du
d’identifier les herbes par leur odeur, arpenta Rokugan chrysanthème
pour enseigner la Voie de Shinsei.
Vers la fin du quatrième siècle, des altercations se produi-
Les bénédictions du thé sirent entre les Clans de la Grue et du Crabe pour savoir
qui détiendrait le contrôle de terres frontalières. Le conflit
Ce fut à la même époque que la cérémonie du thé, ima- dégénéra lorsque, pour des raisons inconnues, la famille
ginée par Dame Doji, se répandit à l’extérieur du Clan de Yasuki décida de quitter le Clan de la Grue pour prêter ser-
la Grue. Elle devint populaire dans un premier temps au ment au Champion du Clan du Crabe. Un décret impérial
sein des Clans du Phénix et du Dragon, qui appréciaient aurait facilement pu régler ce différend mais, à l’époque,
le calme et l’état méditatif qu’elle provoquait. Elle s’éta- bien qu’un membre de la famille Hantei soit assis sur le
blit ensuite à la cour impériale, où les courtisans des Clans trône, le pouvoir n'était pas entre ses mains.
du Lion et du Scorpion l’apprirent puis l’enseignèrent dans Trois samouraïs, les Champions des Clans de la Grue,
leur province natale. du Phénix et du Scorpion, avaient conspiré contre l'Empe-
Des siècles s’écoulèrent avant que le Clan du Crabe reur, n'hésitant pas à déshonorer leurs noms. Ils s'étaient
ne l’adopte, mais ses membres qui jugeaient la pratique donné le nom de Gozoku et avaient enlevé l'héritier du
comme une perte de temps, ne servant aux vains cour- trône pour obliger son père à leur accorder certaines
tisans qu’à exhiber leur belle vaisselle, changèrent d’avis concessions politiques. Lorsque l'Empereur mourut, ils ins-
lorsqu’ils découvrirent que cette discipline mentale per- tallèrent sur le trône, comme ils l'avaient prévu, l'héritier
mettait de vider les esprits avant une bataille. soumis à leur volonté.

14
INTR O DU CTIO N

L’Empire restauré En plus du Tao, les moines enseignaient la cérémo-


nie du thé à tous ceux qui s’y intéressaient, qu’ils soient
Tandis que les fils de l’Empereur avaient tous été pla- samouraïs ou heimin. Les geishas l’apprirent également,
a r de dai de lan de la r e d h ni e pour pouvoir l’accomplir avec leurs clients. Certains nobles
du Scorpion pour les soumettre à la volonté du Gozoku, étaient effarés à l’idée que de simples marchands puissent
Yugozohime, la plus jeune de ses enfants, fut élevée au profiter de la cérémonie du thé, mais de nombreux prêtres
sein du Clan du Lion. Le clan d’Akodo lui apprit les arts de leur démontrèrent que cette pratique ne leur causait pas
la guerre ainsi que le respect du bushido et de ses ancêtres de tort et qu’ils pouvaient s’en servir pour purifier leur
impériaux. À la mort de l’Empereur, Yugozohime défia son esprit après avoir manipulé de l’argent. De nos jours, les
frère aîné en duel, le tua et s’empara du trône. Le Gozoku geishas, de même que les marchands et artisans fortunés
n’avait pas envisagé une telle éventualité, et la nouvelle des villes, sont les gens du peuple les plus susceptibles
Impératrice se débarrassa rapidement de leur influence au d’accomplir la cérémonie ; il est rare que des fermiers
sein du gouvernement. Une fois encore, l’éclat de Dame s’y intéressent. Au cours des années, plusieurs heimin
Soleil s’était exprimé à travers ses descendants pour ren- devinrent célèbres pour leur aptitude en la matière. Vers
forcer leur droit à régner. la fin du septième siècle, la maîtresse du thé Risa, fille d’un
teinturier prospère, jouissait du mécénat d’un seigneur du
Le développement de la ville Clan de la Grue.

Sous le règne du Gozoku, Otosan Uchi connut une impor- L’épanouissement des amitiés
tante expansion. Avant cela, elle était essentiellement
composée du palais et des quelques résidences néces- Au cinquième siècle, des étrangers vinrent à Otosan Uchi
saires aux courtisans des clans et à leurs serviteurs. Le demander une audience à l’Impératrice Yugozohime, et
Gozoku développa le port et étendit le réseau routier. En cette requête créa beaucoup de remous au sein de la cour
conséquence, un plus grand nombre de samouraïs, d’ar- impériale. Avant cela, les seuls gaijin de l’Empire avaient
tisans et de marchands se présentèrent en ville, certains été les tribus des déserts occidentaux et les flottes de mar-
provenant de terres au-delà de l’horizon. chands originaires des royaumes d’Ivoire ou de territoires
encore plus éloignés. Ces gaijin qui souhaitaient rencon-

l’éclosion du lotus trer Hantei venaient de Pavarre, un royaume par-delà la


mer de la déesse Soleil, et ils espéraient conclure des
(435–442 ci) accords commerciaux avec l’Empire. Dans sa grande man-
suétude, l’Impératrice Yugozohime leur permit de rester à
Otosan Uchi pendant deux ans, le temps qu’ils démontrent
Les enseignements leur aptitude à adopter un comportement civilisé.
de la confrérie Cette autorisation causa la consternation des diri-
geants et des courtisans des clans, qui débattirent de la
Avant le cinquième siècle, les moines de la confrérie de manière dont réagir. Les mœurs étranges des visiteurs et
Shinsei avaient déjà développé la médecine, gagnant leur méconnaissance de l’Ordre céleste dégoûtaient la
ainsi le soutien de la population et des nobles dans tout plupart des samouraïs. Mais le Clan de la Mante, un clan
Rokugan. En raison des ressources florissantes de la mineur, se montra particulièrement actif dans ce débat,
confrérie et du respect qu’on lui vouait, elle put grossir ses puisqu’il y voyait une occasion d’accroître sa richesse et
rangs et enseigner à un grand nombre de gens du peuple son influence.
la Voie de l’Illumination et le Tao. Mais même si les paysans
des régions les plus reculées avaient entendu parler du
Petit Maître, de nombreux territoires de l’Empire ne per-
des traîtres de
mettaient aucun accès à une connaissance approfondie de l’intérieur comme de
ses enseignements.
Bien déterminée à répandre ces leçons le plus large-
l’extérieur (442–610 ci)
ment possible, la confrérie organisa des festivals dans Au sixième siècle, les armes parlèrent et le sang coula au
tout Rokugan. Ceux-ci proposaient des sermons sur le sein de l’Empire d’Émeraude, même si ces combats ne
Tao et des mises en scène des événements de la vie de mirent pas un terme au Millénaire paisible. Ces alterca-
Shinsei. Ces dernières donnèrent naissance au théâtre tions n’ont pas été considérées comme des guerres, ce
kabuki. Les costumes et intrigues dramatiques propres au terme impliquant que des humains aient affronté leurs
genre le propulsèrent au rang de favori parmi les riches semblables avec honneur. Lorsque des samouraïs abattent
heimin et les samouraïs de moindre rang. Lorsque de des gaijin et des créatures corrompues de l’Outremonde,
bons écrivains s’y adonnèrent, les nobles de plus haut ce n’est pas plus une guerre que lorsqu’un magistrat ter-
rang l’acceptèrent. rasse un criminel.

15
I N T R O DUC T I O N

A R La trahison des gaijin Une lampe rallumée


AN N
Après deux ans de controverses, l’Impératrice se las- Les années suivantes virent un regain d’intérêt pour le
Chaque clan possède ses sa des protestations liées aux gaijin. Dans sa grande théâtre no, qui avait décliné face au kabuki, grâce à une
propres institutions et sagesse et comme elle en avait le droit, elle ordonna étonnante série sur la vie et la mort des Kamis écrite par
traditions, et la plupart brutalement aux gaijin de cesser tout commerce au sein Kakita Iwane. Pour de nombreux samouraïs, après les tra-
n’ont que peu changé de Rokugan et de quitter ses terres. Puisque la parole gédies de la bataille du Cerf blanc et de l’attaque des non-
au cours des siècles. de l’Impératrice a force de loi, les protestations et sup- morts sur la capitale, le no rappelait le passé glorieux de
Pourtant, malgré les plications des gaijin demeurèrent lettre morte. C’est Rokugan et attisait la nostalgie d’une époque légendaire.
restrictions en place à
alors que ces invités ingrats révélèrent leur nature bar- Les pièces d’Iwane reposaient sur l’aptitude des acteurs à
Rokugan, des individus
bare, et prirent les armes contre l’Empire. L’Impéra- communiquer diverses émotions et non sur l’action, ce qui
exceptionnels peuvent
défier les conventions. trice mourut au cours des combats, ce qui scella le sort les distinguait du kabuki, plus visuel.
des gaijin : tous ceux qui furent découverts sur le ter- Alors que les samouraïs retrouvaient leur amour pour
Sur les terres du Clan du ritoire de Rokugan furent immédiatement exécutés. On le no, le kabuki perdit de sa renommée auprès des nobles,
Lion, un fils de paysan surnomma ce conflit la bataille du Cerf blanc, en l’honneur mais progressa chez les paysans. Les bonge urbains révé-
naquit avec l’aptitude de
des falaises depuis lesquelles les samouraïs lancèrent la raient les acteurs populaires de kabuki presque autant que
converser avec les kamis
contre-attaque. Les gaijin qui parvinrent à rejoindre leur les personnages qu’ils interprétaient. Au même moment,
élémentaires. La famille
Kitsu le repéra très jeune, bateau furent attaqués par la flotte conjointe des Clans une technique rudimentaire d’estampes à base de blocs
l’adopta immédiatement de la Grue et de la Mante. Ceux qui réussirent à regagner de bois, récemment développée, gagna en popularité et
et le nomma Kitsu Taiko. leur pays d’origine rapportèrent le récit du courage et du permit la circulation de portraits des acteurs en vogue et
Il avait une affinité excep- talent des guerriers de l’Empire d’Émeraude. de leurs personnages. Pour les samouraïs, ces images pro-
tionnelle pour l’élément duites en masse représentaient une perversion de l’art,
du Feu et fit de grandes
découvertes sur l’invoca- L’ascension du sorcier du sang sans âme ni identité. Le fait qu’elles dépeignaient des hinin
sous un jour favorable ne faisait qu’ajouter à l’indignité.
tion et la manipulation de
Profitant peut-être des troubles occasionnés par les gai-
celui-ci. Son talent était
à ce point remarquable
jin, Iuchiban, un abject pratiquant de la mahō, la magie
du sang interdite, rassembla une coterie d’impurs et lança
Une leçon sévère
que, lorsqu’il prit sa
retraite au sein du Clan une campagne de viles attaques contre l’Empire. Il se fit En 533, à une époque où l’optimisme du Clan du Scorpion
du Lion, le Clan du Phénix connaître dès le sixième siècle, lorsqu’Asahina Yajinden, était inébranlable, et ses stratégies douteuses, le clan lan-
lui proposa le poste de un samouraï artisan, offrit les sabres qu’il venait de forger ça une attaque contre Château Ikoma. L’offensive échoua
Maître du Feu au Conseil aux Champions des Clans du Crabe, de la Grue, du Lion et et, pour se venger, la famille Matsu prit d’assaut la forte-
des Maîtres Élémentaires. du Scorpion. Peu après, le Champion du Clan du Lion lan- resse de Meiyo no Shiro, dont elle s’empara. Elle exécuta
Il accepta et devint le ça une campagne hivernale désastreuse contre le Clan tous les membres du Clan du Scorpion qui s’y trouvaient
premier membre externe
du Dragon ; le Champion du Clan du Crabe assassina ses et, pour transmettre un message clair, elle renomma les
au Clan du Phénix (et l’un
enfants et le Champion du Clan de la Grue confessa son lieux Kenson no Gakka, « La leçon d’humilité ».
des rares qui ne fassent
pas partie de la famille infidélité devant sa cour rassemblée. Tous trois se suici-
Isawa) à obtenir un siège dèrent par la lame offerte. Seul le Champion du Clan du
Le jugement céleste
au Conseil. Scorpion échappa à un tel sort : il révéla la corruption de
l’artisan et la présence du culte des Adeptes du sang. Les dernières années du siècle virent le couronnement, le
À sa tête se trouvait Iuchiban, dont personne ne règne et le décès de Hantei XVI, le seul Empereur à avoir
connaît ni la famille ni le clan. Ce vil sorcier leva une armée perdu le Mandat céleste. Bien que les premières années de
de non-morts (à l’époque, les défunts étaient enterrés et son règne aient été prometteuses, le Chrysanthème d’acier,
non brûlés) qui attaqua Otosan Uchi. Grâce à l’avertisse- comme il fut surnommé, céda à une vague de violence
ment du Champion du Clan du Scorpion, les légions impé- paranoïaque. Voyant des traîtres partout, il fit exécuter des
riales et les armées claniques purent vaincre les forces des milliers de samouraïs pour des crimes qu’ils n’avaient pas
non-morts. commis. Les demandes de courtisans, de shugenja et de
Après son exécution, Iuchiban fut inhumé dans une moines de faire preuve de retenue ne furent accueillies
tombe spéciale, qui devait empêcher son esprit de s’échap- que par d’autres assassinats. Finalement, quand Hantei XVI
per : il est ainsi la dernière personne de tout l’Empire à avoir ordonna que sa mère soit étranglée devant la cour impé-
été enterrée. Dès cette date, l’Empereur décréta que tous riale, son fils obtint que la Garde impériale se soulève. La
les cadavres seraient brûlés, pour qu’aucune magie malfai- réussite de cette intervention ne fit que confirmer que son
sante ne puisse les profaner. père avait perdu les faveurs d’Amaterasu.

16
INTR O DU CTIO N

Pour avoir osé lever la main contre son père, le fils de Les ténèbres se lèvent au sud
Hantei XVI se rasa la tête et rejoignit la confrérie de Shinsei.
Tous les membres de la Garde impériale impliqués com- Au huitième siècle, la corruption de l’Outremonde fit deux
mirent seppuku. Le plus jeune frère du Chrysanthème d’acier incursions au sein de l’Empire. Dans ce qui allait s’appeler la
devint Hantei XVII, et son long règne paisible est la preuve bataille du Pont des Marées, le gros de l’Outremonde atta-
que la lignée de Hantei détient toujours le Mandat céleste. qua l’armée principale du Clan du Crabe tandis qu’une force
plus petite, sous les ordres de Kinjiro no Oni, s’en prenait à

des flux d’ombre et de la tour de guet proche de la baie des Poissons morts. Les
défenseurs de la tour étaient presque vaincus lorsque des
lumière (610–815 ci) ren r arri ren en la er nne d dai de la a ille
Daidoji, Daidoji Masashigi, accompagné de sa garde per-
Après des siècles sans attaques de créatures de l’Ou-
sonnelle. Ils chargèrent à travers la baie à marée basse et
tremonde, la plupart des habitants de Rokugan avaient
parvinrent à repousser les forces de l’Outremonde dans
oublié l’existence de cette menace. À l’extérieur des terres
l’eau, où la marée montante scella leur sort.
du Clan du Crabe, l’Outremonde était considéré comme
Aucun membre du Clan de la Grue ne survécut à la
un épisode de l’histoire de Rokugan, important, certes,
bataille, et le casque défoncé de Masashigi s’échoua sur le
mais plus lointain que les Kamis, qu’ils priaient chaque
rivage ; le Clan du Crabe construisit alors un sanctuaire où
jour. De nos jours, de nombreux Rokugani sont convain-
préserver le kabuto. Les rescapés du Clan du Crabe sur-
cus que le retour de l’Outremonde et du sorcier du sang,
nommèrent la famille Daidoji « les Grues de fer », un sobri-
au huitième siècle, fut une sanction divine, mais aucun
quet qui allait se propager dans tout l’Empire.
ne peut affirmer savoir si cette punition sanctionnait les
Il fut rapidement évident que les attaquants de la
crimes du Chrysanthème d’acier ou le sacrilège des gardes
bataille du Pont des Marées n’étaient que l’avant-garde.
qui avaient osé se rebeller contre lui.
L’année suivante, les forces du redoutable oni surnommé
la Gueule balayèrent les terres du Clan du Crabe, repous-
Le développement des arts sant les armées si loin au nord que même le Château du
Matin, forteresse ancestrale de la famille Hiruma, tomba.
Vers la fin du règne de Hantei XVII, Agasha Hyuotaru, un
Les forces combinées des familles Hiruma et Hida, aidées
alchimiste du Clan du Dragon, créa des vernis pour céra-
par les purificateurs et les chasseurs de sorciers Kuni,
mique dont la couleur jetait un éclat jamais vu encore. Au
parvinrent à arrêter l’avancée des armées maléfiques, et
même moment, Kaiu Naizen inventa une nouvelle chemi-
les Kaiu construisirent le Mur du Bâtisseur tel que nous
née qui offrait aux potiers un meilleur contrôle de la cuis-
le connaissons. Les terres des Hiruma ne furent jamais
son. Ces deux technologies permirent la création de nom-
reprises ; elles représentent les premières pertes de terres
breux objets décoratifs en céramique. Les maîtres de la
depuis la fondation de l’Empire.
cérémonie du thé se disputèrent âprement quant à l’adé-
quation entre les nouveaux styles et leur rituel, et plus d’un
duel fut livré à ce sujet.
I N T R O DUC T I O N

Le retour du sorcier du sang Un clan de chevaux


Les invasions de l’Outremonde auraient pu être les plus
et de samouraïs
grands malheurs du siècle (même en dehors des terres En l’an 815, les descendants de Shinjo revinrent de leur
du Clan du Crabe) sans les événements de l’an 750 CI. errance avec perte et fracas. En raison de circonstances
À cette date, l’esprit du sorcier Iuchiban s’échappa de sa particulières impliquant de la magie gaijin, ils arrivèrent
tombe pour prendre possession d’un corps qu’il soumit à par les confins nord de l’Outremonde. Dans leur hâte
sa volonté. Après avoir rassemblé une armée d’adeptes d’échapper à ces terres désolées et Souillées, ils igno-
de la ah e de lda n n- r il a a a l’ ire rèrent la diplomatie la plus élémentaire et recoururent tout
Les troupes des clans majeurs arrêtèrent la progression simplement à leur puissante cavalerie pour enfoncer les
d’Iuchiban lors de la bataille de la Rivière endormie, et lignes de défense du Clan du Crabe. L’Empire s’en offus-
l’un des mystérieux moines de l’Ordre de Togashi du Clan qua puisqu’il ne reconnut pas immédiatement le clan de
du Dragon parvint à piéger l’esprit d’Iuchiban dans son Shinjo. Au cours de ses voyages, il avait pris le nom de
propre corps, assez longtemps pour qu’on les enferme Clan de la Licorne et adopté des vêtements et des cou-
tous deux dans un tombeau scellé. tumes étranges. De plus, si la langue avait évolué au sein
Par la suite, des magistrats découvrirent que, depuis la de l’Empire, la leur n’était plus qu’un lointain dialecte
première défaite d’Iuchiban, de nombreux chefs et prêtres rokugani. Cependant, leurs chevaux étaient magnifiques :
de petits villages éloignés avaient désobéi au décret impé- imposants, parfaitement dressés et rapides. Lorsque les
rial interdisant l’enterrement. Pour avoir respecté leurs tra- armées du Clan du Scorpion attaquèrent, la cavalerie du
ditions plutôt que la volonté des Hantei et avoir ainsi mis Clan de la Licorne recourut à des tactiques inconnues des
l’Empire en danger, ils subirent de sévères représailles. bushi de Rokugan pour écraser ses adversaires.
Tandis que les hordes du Clan de la Licorne progres-
un nouveau vent se saient lentement le long du Toit du monde, le Clan du Lion

lève (815–1123 ci) mobilisa ses troupes. Cependant, alors que la neige met-
tait un terme à l’avancée des deux armées, des représen-
Le retour à Rokugan d’un Clan de la Ki-Rin métamorpho- tants du Clan de la Licorne parvinrent à contacter le Clan
sé marqua le début d’une vague de changements et de de la Grue. Parmi les trésors qu’ils rapportaient figurait un
bouleversements sociaux. Pour la première fois depuis la éventail ancien qui aurait appartenu à Shinjo. Le Clan de la
fondation de l’Empire, les clans majeurs faillirent entrer en Grue confirma qu’il s’agissait bien de celui que Dame Doji
guerre les uns contre les autres. Les gaijin et leurs mar- avait offert à sa sœur et que les intrus étaient donc bien
chandises se répandirent à travers Rokugan dans des pro- le clan de Shinjo. L’Empereur accepta cette confirmation
portions inégalées depuis la bataille du Cerf blanc. Cer- et interdit au Clan du Lion d’attaquer. Il donna également
tains érudits se demandent si ces changements ne furent au Clan de la Licorne les anciennes terres du Clan de la
pas à l’origine du déséquilibre élémentaire constaté par Ki-Rin pour qu’il s’y installe. Cette décision ne fit qu’exa-
les shugenja, qui culmina lors du tremblement de terre et cerber l’animosité du Clan du Lion, qui avait la responsa-
du tsunami cataclysmiques de 1120. bilité d’entretenir ces contrées et qui perdait une étendue
considérable de parcelles arables. Cependant, il obéit aux
ordres de l’Empereur et laissa le Clan de la Licorne traver-
ser ses terres sans encombre.
INTR O DU CTIO N

Malgré le témoignage du Clan de la Grue, de nombreux Par ailleurs, les herboristes de la famille Yogo découvrirent
Rokugani considérèrent le Clan de la Licorne comme des e le a ai r ien r le erre en ran
gaijin : ses membres portaient des noms étranges et des Owari Toshi, et le Champion du Clan du Scorpion demanda à
vêtements criards, mangeaient une nourriture écœurante, l’Empereur de légiférer pour que le pavot (tant sa culture que
et faisaient preuve de manières frustes. Pire encore, au cours son utilisation) soit soumis à des décrets impériaux. Hantei
de leurs voyages, ils avaient adopté une nouvelle famille, acquiesça et accorda au Clan du Scorpion le droit exclusif de
les Moto, apparentée aux tribus ujik des steppes occiden- cultiver le pavot et de préparer l’opium.
tales. Certains courtisans suggérèrent d’expulser la famille Au cours des dix années suivantes, la cité des
Moto vu qu’une loi interdisait aux gaijin de vivre à Rokugan. Mensonges quadrupla de taille, puis continua encore
Mais le Champion du Clan de la Licorne implora l’Empe- de s’agrandir, tandis que le commerce de l’opium atti-
reur : l’ancêtre de la famille Moto avait été accepté dans rait sans cesse plus de marchands et d’argent. Bien que
le clan par Shinjo elle-même, affirma-t-il, ce qui en faisait la mainmise du Clan du Scorpion sur l’opium médical
des Rokugani. Hantei reconnut qu’il était impossible de nier lui ait permis de s’enrichir, plusieurs magistrats se plai-
l’autorité d’un Kami et les Moto purent rester. gnirent que cela n’enrayait en rien le recours à la drogue.
Le Clan de la Grue se donna pour mission de civiliser le Les magistrats de la famille Kitsuki constatèrent d’ailleurs
Clan de la Licorne, mais son succès fut mitigé. Les descen- que les terres destinées à la culture du pavot dépassaient
dants de Shinjo adoptèrent de bon cœur le théâtre (sur- de loin ce qui était nécessaire pour la simple produc-
tout le no), la cérémonie du thé, les préceptes du Tao et tion d’opium légal. Le gouverneur de la province rétor-
des Éléments, la cuisine et l’encens. Ils refusèrent cepen- qua que la quantité supplémentaire servait à garantir la
dant d’abandonner leurs noms, leur nourriture, leur style qualité car les récoltes non conformes étaient détruites.
vestimentaire ou leur habitude de se serrer la main pour Personne n’a encore osé le contredire et, jusqu’à ce jour,
se saluer. Lorsqu’ils se déplaçaient hors de leurs terres, le erre en ran ari n re er e de
leurs courtisans et leurs émissaires se comportaient en champs de pavot.
Rokugani, mais de nos jours encore, visiter les contrées du
Clan de la Licorne revient à entrer en pays étranger.
Néanmoins, le Clan de la Licorne réintégra l’Empire.
L’avènement des villes
Au départ, son influence politique était inexistante, mais Les dixième et onzième siècles connurent la plus impor-
son retour eut un effet notable sur l’économie. Il rappor- tante expansion urbaine depuis les balbutiements de l’Em-
ta de nouvelles techniques pour travailler le métal et le pire. D’innombrables facteurs y contribuèrent, y compris
cuir, mais aussi pour teindre les tissus. En plus de ses che- les innovations introduites par le Clan de la Licorne. Le
vaux plus puissants et plus rapides que les races locales, il regain de popularité des chevaux facilita les voyages entre
introduisit les étriers et d’innovantes manières de monter. les provinces et les villes, à la grande consternation des
La demande pour ses chevaux grandit bientôt dans tout seigneurs responsables de l’entretien des routes.
l’Empire, mais le clan n’accepta de vendre que des étalons Des progrès dans les outils et techniques agricoles
castrés et très rarement des juments, pour s’assurer de permirent d’accroître les récoltes. Les villages purent ainsi
demeurer le seul fournisseur. Lors de ses pérégrinations, il répondre aux demandes des collecteurs d’impôts, même
avait noué des contacts hors de Rokugan, qu’il transforma si les jeunes quittaient les campagnes en nombres tou-
en des routes commerciales rémunératrices. Il ne fallut pas jours croissants. Les harnais et les jougs rapportés par le
longtemps avant que l’ivoire, les essences rares de bois, Clan de la Licorne rendirent le bétail bien plus utile, alors
les bijoux ainsi que les herbes et les épices coûteuses ne que ses améliorations aux pompes accrurent l’irrigation
transitent par ses terres pour entrer dans l’Empire. des champs. Certains fermiers purent ainsi commencer
Plus important encore, le Clan de la Licorne introduisit à vendre leurs productions sur les marchés avoisinants,
le meishōdō. Grâce à cette magie des noms, ses shugen- devenant du même coup des marchands.
ja peuvent lier des esprits dans des talismans pour obtenir Aux yeux des nobles traditionalistes, la mobilité sociale
des effets similaires à ceux des autres clans, qui supplient des paysans est une insulte à l’Ordre céleste, mais le sujet
les kamis en leur accordant des offrandes. Pour de nom- reste souvent inconvenant. Les samouraïs du Clan du
re h genja e r re le ei h d n i e ne ra- Lion s’opposèrent vigoureusement à ces changements
tique gaijin blasphématoire. et imposèrent des punitions brutales aux heimin qui vou-
laient quitter leur village natal pour démarrer une nouvelle
La fleur du sommeil et des rêves vie en ville. Les fermiers qui vendaient leur production se
firent accuser d’avoir volé leur seigneur et furent traités
Parmi les herbes importées par le Clan de la Licorne, figure le en conséquence.
pavot dont est tiré l’opium. Le clan se sert de cette substance Après quatre siècles de séparation entre les Rokugani
depuis des siècles pour soulager les douleurs, et les soigneurs et les gaijin, l’importance de la ville de Khanbulak, du Clan
de l’Empire l’adoptèrent par la suite. Cependant, tandis que de la Licorne, démontra que l’influence des étrangers ne
l’utilisation médicale de l’opium croissait, certains commen- fit que croître. Encouragé par les succès commerciaux du
cèrent à le fumer à des fins récréatives. Il s’avéra rapidement Clan de la Licorne, le Clan de la Mante accrut ses propres
que les samouraïs qui s’adonnaient à ce vice étaient moins échanges avec les gaijin. D’une certaine manière, l’accep-
dévoués à leur seigneur ; de vives protestations s’ensuivirent. tation du retour du Clan de la Licorne au sein de l’Empire

19
I N T R O DUC T I O N

semblait valider les pratiques des gaijin… de même que Une gloire renouvelée
le sang mêlé qui en fut la conséquence. Les biens et les
mœurs des gaijin furent ainsi progressivement mieux Le retour du Clan de la Licorne a également eu un impact
acceptés, ou moins farouchement récusés, dans les villes notable sur les arts au sein de l’Empire, grâce à des tech-
de l’Empire. Les petites communautés côtières comme le niques et des matériaux inédits. Depuis, bien que certains
village de l’Eau pure ou la ville du Rivage solitaire s’agran- Rokugani déplorent la « pollution gaijin » et que certains
dirent considérablement à cette époque. artisans aient commis des excès dans leurs recours à ces
nouveaux procédés, les esprits critiques plus modérés
reconnaissent que les effets sont globalement positifs.
La quête de la Terre Parfaite Au huitième siècle, la plupart des artistes de l’Em-
Vers la fin du neuvième siècle, une jeune moine du sanc- pire avaient cessé d’imiter les classiques pour se copier
tuaire des Sept Tonnerres émit l’idée controversée qui mutuellement, ce qui eut des résultats désastreux. De
cette époque, seul le journal du duelliste Ikoma Honzo,
donna naissance à la secte de la Terre Parfaite. Yuzue était
Les jours du sel et du soleil, a su faire preuve d’une grande
persuadée que la conversation entre Shinsei et Hantei
qualité. Sa maîtrise du pinceau laisse à désirer sur le plan
avait instauré un Âge de la Vertu Céleste qui avait duré
technique, mais sa composition demeure irréprochable et
huit cents ans, un siècle pour chaque Kami qui avait écou-
il est brillamment parvenu à capturer ses sujets en plein
té les préceptes de Shinsei. Le neuvième siècle marquait
mouvement. Son humour acerbe convenait parfaitement.
le début de l’Âge du Déclin de la Vertu, identifiable à
Un talent moindre aurait simplement tourné en farce le
la corruption et aux difficultés à respecter le Tao. Pour
récit des deux paysans, de la jarre de vin et de la truite,
convaincre Shinsei de revenir, Yuzue ne cessait de chan-
mais sous la plume de Honzo, il s’agit d’une œuvre délicate
ter le mantra Shoshi ni kie (« dévotion au Petit Maître » ou
et amusante. Les poèmes de Kakita Ayano, qui décrivent
« confiance absolue en le Petit Maître »). Elle pensait que, de manière sensible la morosité liée au passage des sai-
si suffisamment de personnes entonnaient ce mantra en sons, sont d’une qualité presque égale. Nulle œuvre ne se
toute sincérité, Shinsei reviendrait et donnerait naissance classe troisième.
à un nouvel Âge de la Vertu Céleste. Tout cela changea au neuvième siècle. Que les artistes
À la mort de Yuzue, un de ses disciples, Gatai, fonda la choisissent d’adopter les nouvelles idées du Clan de la
secte de la Terre Parfaite, en se basant sur un sutra qu’elle Licorne ou de les rejeter, tous furent obligés de regar-
avait écrit peu avant son décès. Le parchemin prétendait der le monde comme s’ils le voyaient pour la première
que Shinsei n’était pas retourné dans le Vide en quittant le fois. Les peintures sur paravent de Kakita Ume, conser-
ingen-d ai ’il ’ ai l in all a eng le e ūden ji ili en le n elle er e i e
royaume Céleste. Les membres de la secte pensent que sur des sujets classiques et démontrent que le nouveau
ceux qui entonnent le kie (le mantra de Yuzue), pourront ne chasse pas nécessairement le classique. De nombreux
rejoindre Shinsei à la Terre Parfaite après leur mort, au peintres suivirent son exemple. Les Fleurs de pruniers au
lieu d’être jugés au Meido et de renaître selon leur karma. crépuscule de Shiba Kanko et L’Acier rouge de Doji Suko
Dans la Terre Parfaite, sous la direction du Petit Maître en ravivèrent l’intérêt pour les romans, et la publication de
personne, les croyants atteindront l’Illumination sans avoir l’œuvre remarquable de Kakita Ryoku, Hiver, prouve que la
à subir la réincarnation. qualité de l’art n’a pas diminué depuis. À la même époque,
Au sein de la confrérie de Shinsei, ces croyances sont Bayushi Kiko et Kakita Mako débutèrent leur longue com-
une hérésie et vont à l’encontre du Tao et de l’Ordre pétition de poésie, utilisant leurs sensibilités délicates et
céleste. Mais la secte de la Terre Parfaite gagna rapide- leur humour mordant. Les exemples sont si nombreux
ment en popularité auprès des paysans, en raison de la qu’ils pourraient remplir un parchemin entier.
singularité de ce qu’elle offrait à ses adeptes : se libérer
des épreuves de cette vie mortelle et de la suivante. De le dévoilement d’une
nombreux heimin pensent que l’Âge du Déclin de la Vertu
était une référence à la corruption qui régnait parmi les promesse glorieuse
samouraïs. Ces derniers renforcèrent ainsi leurs dénon- Ainsi s’écoulèrent les mille premières années de notre
ciations de la secte. Vers le milieu du dixième siècle, la Empire, une terre resplendissante d’honneur et de cou-
secte de la Terre Parfaite fut proscrite sur les terres du rage. Nous connaissons une époque où la bienveillance
Clan du Phénix, obligeant de nombreux adeptes à cher- de Dame Soleil brille sur les Hantei et où nos contrées
cher sécurité et isolement dans les montagnes du Clan jouissent d’une paix, d’une prospérité et d’une justice per-
du Dragon. mises par le règne de l’Empereur.

20
1
CHAPITRE

Les
forteresses
du pouvoir
Le samouraï arrête son cheval, puis lève la tête pour pro- arrivant. Les odeurs de la cour, un mélange de parfum et
fiter de la vue, malgré les forts rayons de Dame Soleil en de soie, flottent dans l’air.
cette fin de matinée. La lumière fait ressortir la blancheur Il atteint enfin l’estrade au fond de la pièce et hésite
du plâtre des murs d’enceinte. Les portes du château sont une fraction de seconde avant de s’incliner devant le sei-
ouvertes, pour accueillir tous les courtisans du seigneur gneur. Les courtisans échangent un regard complice : voilà
Doji Sabato. quelqu’un qui s’est absenté de la cour trop longtemps.
La cour intérieure est déserte à cette heure, et le vent Rokugan est un empire dirigé par des guerriers et, dès
balaie la poussière sur la surface dure. De nombreux sa fondation, ceux-ci ont bâti des châteaux d’où proté-
gardes sont en poste et s’inclinent à son arrivée. L’un d’eux ger leurs terres. Bien que ces édifices soient avant tout
prend les rênes de sa monture pendant qu’il en descend. des places fortes et des casernes, ce sont aussi les centres
— Daidoji-sama, Sire Sabato vous attend dans la salle névralgiques du gouvernement, de l’administration, de la
de la cour. diplomatie et de la civilisation. Si certains samouraïs pos-
Le soleil entre dans la pièce par les fenêtres hautes, sèdent de petits fiefs ruraux, tous considèrent comme une
et quelques grains de poussière sont visibles dans ses promotion d’être invités à vivre dans une ville fortifiée ou,
rayons, au-dessus des courtisans. Une dizaine d’éventails mieux encore, dans l’enceinte du château. Plus un noble
s’affairent, révélant les couleurs et les mon de cinq clans est proche de son seigneur, plus il est considéré comme
différents, tandis que les courtisans dévisagent le nouvel bien placé et influent.
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

Les seigneurs et Les grandes villes des clans majeurs disposent de leur
propre gouverneur, qui habite, lui aussi, dans un château,

la gouvernance voire dans une résidence urbaine. Les gouverneurs de


villes ou de provinces règnent sur leur territoire : ils font
respecter la loi et l’ordre et collectent les impôts.
e l’ ere r a l ai le de dai r gi na la Sous la direction des gouverneurs se trouvent les shu-
gouvernance s’exerce depuis des châteaux. Ils servent de go, qui supervisent des zones plus petites. Ces seigneurs
sièges symboliques du pouvoir et de centres administra- régionaux, malgré leur statut mineur, jouissent du titre de
tifs : les impôts collectés y sont conservés, les soldats et dai l e n ren g n rale en a i ie e agre -
magistrats y vivent, et les gens du peuple doivent s’y pré- sifs, prompts à se quereller avec leurs voisins, surtout si
senter pour rencontrer leur seigneur. ceux-ci appartiennent à une autre famille ou à un autre
Les territoires des clans majeurs sont divisés en pro- clan. Bien entendu, ils résident tous dans des châteaux,
in e ha ne dirig e ar n dai i r ide ha i el- sans quoi ils perdraient la face. La nature même du sys-
lement dans la plus redoutable place forte. Le Champion tème féodal de Rokugan exige donc la présence de cen-
du clan ainsi que les dirigeants des familles principales taines de châteaux à travers tout l’Empire.
peuvent y demeurer ou posséder leur propre château. Le système féodal s’étend ensuite aux seigneurs locaux
Ces seigneurs de haut rang gouvernent parfois la province qui servent des gouverneurs régionaux. Ces samouraïs
eux-mêmes, mais ils délèguent souvent la tâche à un séné- dirigent de toutes petites zones, souvent quelques villages
chal ou à un hatamoto. seulement, voire un seul. Cette responsabilité minime leur
permet tout de même d’appartenir aux nobles proprié-
taires terriens et de collecter des impôts sur leurs terres.
Un seigneur qui règne sur un unique village isolé sera
mieux placé sur l’échelle sociale qu’un samouraï qui pro-
tège les frontières ou combat dans l’armée. Cependant, il
sera bien trop modeste pour posséder un château et vivra
sûrement dans un manoir plus ou moins fortifié.
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

les châteaux des concepts étrangers aux plans rokugani des débuts de
l’Empire, et le clan commence seulement à adopter les
de rokugan préférences impériales modernes. Par exemple, le château
des Grands Voyageurs est composé d’un unique donjon
Les Rokugani construisent des châteaux depuis les débuts triangulaire, tandis que les nombreuses tours du château
de l’Empire. À en croire certains textes anciens, la tribu des Vierges de bataille sont surmontées de dômes. Enfin,
d’Isawa en érigeait avant même que les Kamis ne tombent le palais de la famille Moto, à Khanbulak, n’est pas une
du royaume Céleste. Comme tous les autres aspects de la structure solide, mais plutôt une série de tapisseries gran-
culture et de la civilisation, l’architecture et la construction dioses tendues entre de hautes colonnes. La seule place
sont régies par des traditions ancestrales. Les méthodes forte du clan de la Licorne conforme aux attentes est le
et styles de rigueur lorsque Hantei fonda la cité impé- château de la Grande Conjonction, érigé spécifiquement
riale d’Otosan Uchi sont donc encore considérés comme pour nouer de bonnes relations diplomatiques avec le
étant la seule « bonne manière » de procéder. À l’époque, reste de l’Empire.
Hantei et les Kamis imposèrent leur vision de l’architec-
ture et de l’ingénierie. Ils enseignèrent à leur peuple
comment construire des châteaux qui ressembleraient à les devoirs
ceux du royaume Céleste. Les toits en pente, les tours et
donjons verticaux, semblables à des pagodes, ainsi que
des seigneurs
les murs en plâtre inclinés vers l’extérieur sont donc com- Les devoirs principaux de tout seigneur consistent à main-
muns à presque tous les châteaux de l’Empire. Mais la cou- tenir l’ordre, à protéger leurs terres et leurs biens contre
tume ne s’arrête pas là : par exemple, comme le donjon du toute invasion ou menace interne (bandits, pirates et rébel-
palais impérial s’élève sur dix niveaux, aucun autre donjon lions), et à percevoir les impôts. Pour cela, tous comptent
ne d a e le ne ni ea de e r e le dai i sur un grand nombre de jizamurai qui patrouillent les
accusé de vouloir égaler l’Empereur. routes et les frontières et défendent le château. Plus le
Dans une société où les apparences comptent autant seigneur est puissant, plus il peut embaucher de jizamu-
que la vérité, les châteaux jouent un double rôle. Pre- rai et mieux ses terres seront protégées. Chacun nomme
mièrement, ils centralisent le pouvoir militaire, les activi- aussi des petits fonctionnaires pour faciliter l’administra-
tés culturelles et la gouvernance administrative. Deuxiè- tion : collecteurs d’impôts, magistrats et régisseurs. Si une
mement, ils symbolisent le pouvoir de chaque clan, ainsi guerre devait éclater, chacun serait tenu de recruter et
que sa richesse et ses idéaux. Bien que tous les châteaux d’entraîner ses ashigaru, des paysans soldats.
se conforment à une architecture commune, chaque clan Si une région est mal défendue ou rongée de l’intérieur
l’adapte à ses besoins, à ses valeurs ou à son sens esthé- par des activités illégales, le seigneur est responsable de
tique : les châteaux du Clan du Crabe sont résolument pra- cet échec et doit rapidement redresser la situation. Ne pas
tiques, ceux du Clan du Lion austères et traditionnels, ceux y parvenir donne lieu à une punition : des remontrances
du Clan de la Grue aérés et somptueux, ceux du Clan du publiques et infamantes, ou plus probablement une rétro-
Scorpion regorgent de passages secrets, et ainsi de suite. gradation, voire un seppuku.
De plus, les familles ajoutent à leurs châteaux des caracté- Chaque seigneur doit veiller à la richesse et au bon-
ristiques correspondant à leurs devoirs et à leurs valeurs, heur de ses vassaux, mais tous les clans et familles ont
qui peuvent s’éloigner de ceux de leur clan. Ainsi, le châ- une perception différente de cette obligation. Certains
teau de la famille Kakita est différent de celui des Daidoji, seigneurs feront tout pour faciliter la vie de leurs vassaux,
même si toutes deux appartiennent au Clan de la Grue. allant jusqu’à conclure pour eux des mariages avantageux
Les châteaux du Clan de la Licorne, comme tous les ou à leur présenter des cadeaux outranciers lors d’événe-
aspects de ce clan, divergent énormément des autres. ments importants. D’autres, à l’inverse, jugent que leur
Comme le clan a été absent de l’Empire durant huit seule responsabilité est de leur verser leurs allocations
siècles, il a adopté de multiples influences étrangères au mensuelles. La plupart des seigneurs se situent entre ces
cours de son long voyage. Son architecture mêle donc deux extrêmes.

23
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

Comme le château est à la fois l’emplacement le mieux


fortifié et le point central de l’administration, il constitue
le lieu privilégié pour la plupart des activités importantes les bannières
de dai e i n a r ha e a ne
puis comptabilisés et sécurisés en attendant d’être redis- Même en l’absence de toute autre décoration,
tribués aux seigneurs principaux et à l’Empereur. Les ban- la salle de la cour d’un château arbore tou-
dits et criminels capturés y sont souvent conduits pour jours, au-dessus de l’estrade, les bannières de la
leur exécution, mais si elle a lieu ailleurs, leur tête peut a ille d eigne r e de n lan Si le dai
être exhibée aux portes, en guise d’avertissement. Plus dispose de son propre mon, il peut également
important encore, les châteaux accueillent autant les mis- l’afficher. Lorsque des invités de marque sont
sions diplomatiques que les réunions stratégiques en présents, leur bannière est déployée face à celle
temps de guerre. d eigne r en igne de re e e dai
Les seigneurs ont également des obligations d’hospi- irascibles ou belliqueux pendent parfois ces
talité. Ils doivent fournir un logement sûr et civilisé à tout bannières de manière à insulter leurs convives :
samouraï qui se présente, qu’il s’agisse d’un voyageur ils font alors placer les mon de ces derniers légè-
d’un rang inférieur ou d’un noble en visite officielle. Le rement plus bas que les leurs ou sur un mur laté-
niveau d’hospitalité adéquat varie selon les clans. Les sei- ral plutôt qu’en face.
gneurs des Clans du Crabe et du Lion estiment remplir Lorsqu’un palais accueille la cour d’hiver
leur devoir en fournissant à leurs invités de la nourriture impériale, des règles complexes dictent com-
et une chambre où dormir. Au sein du Clan de la Grue, ment les bannières doivent être suspendues.
le dai ’a ren d’ rir n l ge en n r a le de Selon la tradition, la bannière impériale (frap-
mets fins, des spectacles pour se divertir et des conversa- pée du chrysanthème choisi par Hantei aux bal-
tions agréables pour passer le temps. Les différents clans butiements de l’Empire) doit être la plus grande
ont également des avis variés sur la place des châteaux et être accrochée directement au-dessus de
comme centres artistiques et culturels. Les clans aux ten- l’estrade. À ses côtés se trouvent les bannières
dances martiales ou ascétiques minimisent ou rejettent cet Seppun et Otomo. Les bannières des clans
aspect tandis que d’autres y voient là une obligation tout majeurs sont disposées sur les murs latéraux, et
aussi cruciale que les autres. leur emplacement révèle lesquels jouissent de
Les seigneurs sont tous responsables d’organiser les la faveur de l’Empereur. (Généralement, ce sont
différentes célébrations religieuses annuelles. Ils doivent celles des Clans de la Grue et du Lion, les deux
donc consulter les temples locaux et leurs shugenja pour Mains de l’Empereur, qui se trouvent les plus
s’assurer que ces événements se déroulent selon les règles proches, sauf s’ils ont déplu au Hantei.) La ban-
et sans accrocs. Les Rokugani forment une nation très nière du Clan du Dragon est accrochée directe-
pieuse et les gens du peuple sont terriblement supersti- ment en face de celle de l’Empereur, pour illus-
tieux. Un seigneur qui ne vénérerait pas convenablement trer que Togashi avait refusé de participer au
les kamis et les fortunes, ou dont la région serait frap- tournoi des Kamis.
pée par de mauvais augures, ferait rapidement face à des
soulèvements.

24
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

ar i le a re de ir rin i a d dai ig re
l’obligation de faire respecter l’ordre chez les heimin et les
hinin, pour que ces humbles paysans accomplissent leurs les bouffons
tâches simples, mais vitales, qui assurent le fonctionne-
Les bouffons sont des artisans bien particuliers
ment de l’Empire. Un seigneur qui tolérerait un manque
dont l’art consiste à tenir des représentations
de respect ou des activités illégales au sein des castes
devant la cour. Pour cela, ils étudient longtemps
inférieures ou qui ne les protégerait pas adéquatement en
et maîtrisent de nombreuses formes artistiques,
temps de guerre manquerait à ses obligations et pourrait
dont la poésie, la danse, le chant et l’art drama-
faire face à l’humiliation d’une révolte paysanne. Dans un
tique kabuki. Ils étudient également la politique
tel cas, le château devient une prison où le seigneur et ses
et la nature humaine, puisque leur rôle consiste
vassaux sont enfermés par le peuple en colère.
à mettre à jour les prétentions et les hypocrisies

la cour et ses habitants


qui les entourent. Ils sont l’exception acceptée
à la règle qui veut que les Rokugani ignorent
ce qui se passe autour d’eux et « tuent par leur
Tout château qui ne sert pas uniquement d’avant-poste
silence ». Ils dénoncent ce que les autres doivent
militaire contiendra une salle de la cour, même si elle n’est
endurer sans broncher. Leur fonction rappelle
que symbolique et a pour unique fonction d’illustrer une
donc celle des bardes Ikoma du Clan du Lion :
aspiration nobiliaire. Au strict minimum, c’est l’endroit
ils expriment des sentiments humains que les
où le seigneur rassemble les samouraïs pour discuter, de
autres ne peuvent pas révéler.
sujets agréables, mais aussi de diplomatie de haute volée.
Les bouffons, comme de nombreux autres
Comme pour tout autre aspect de la vie à Rokugan, des
éléments de la culture rokugani, semblent être
conventions ancestrales dictent l’apparence de la pièce et
issus du Clan de la Grue, probablement au
son utilisation.
deuxième ou troisième siècle. Cependant, un
Traditionnellement, il s’agit d’une grande salle sur-
samouraï n’a pas besoin d’étudier pour deve-
plombée par une mezzanine qui court le long de ses murs.
nir un bouffon. Avoir une aptitude naturelle
Elle ne contient aucun meuble, à l’exception d’une estrade
suffit, à condition d’être embauché par un sei-
face à la porte, où s’assied le seigneur ou son mandataire.
gneur. (S’arroger le rôle du bouffon sans avoir
La mezzanine est souvent occupée par quelques tables.
été embauché par un seigneur et bénéficier ainsi
Les courtisans et diplomates circulent sur les deux étages,
de sa protection se terminerait sûrement par la
formant des petits groupes de conversation tout en s’ob-
disgrâce et la mort.)
servant les uns les autres. Les représentations artistiques
Les bouffons ne sont ni joyeux ni légers. Ils
et les présentations officielles ont lieu dans cette pièce,
sont sardoniques et leur humour est cinglant. Ils
devant l’estrade.
s’expriment en sous-entendus, en jeux de mots
Idéalement, une telle salle peut accueillir au moins
et en énigmes pour dénoncer les comporte-
deux cents samouraïs, sans devoir recourir à la mezzanine.
ments déshonorables et ridiculiser les conven-
Cependant, seuls de rares châteaux peuvent s’en targuer.
tions sociales de la cour. Tant qu’ils s’en tiennent
Bien souvent, même la combinaison des deux étages ne
à des moqueries, ils n’ont pas à craindre d’être
peut contenir autant de monde, et les seigneurs apprêtent
défiés en duel. Mais leur protection sociale
d’autres pièces ou organisent les événements à l’extérieur,
a des limites (les membres austères des Clans
dans les jardins ou sur la place d’armes.
du Lion et du Crabe ne supporteront pas long-
La salle de la cour est ouverte aux visiteurs durant la
temps, impassibles, les piques d’un bouffon), et
j rn e ai ’e le a in e le dai ’ r e e ien
les bouffons avisés savent quand il est temps de
des discussions officielles avec les diplomates. Les invités
s’arrêter et de changer de cible.
peuvent demander au seigneur l’autorisation de s’adresser
à la cour, particulièrement pour annoncer des événements
importants comme des mariages, des alliances, ou des
déclarations de guerre. Ces requêtes se tiennent générale-
en de an l’e rade le i i nnaire arle a dai
en sachant que tout le monde l’écoute.
Les événements spéciaux, et notamment des présen-
tations artistiques, peuvent avoir lieu dans la journée ou
en soirée. En dehors des heures formelles, ils se déroulent
généralement ailleurs, dans le jardin, la salle à manger, le
dojo ou une pièce privée. Lorsque la cour ne tient pas ses-
sion et que la pièce est utilisée à d’autres fins, des pan-
neaux shōji peuvent y être installés pour diviser l’espace.
En temps de guerre, ces paravents permettent aussi de
créer une caserne pour des samouraïs prestigieux ou de
transformer la salle en infirmerie pour les blessés.

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C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

les dessous de la cour : les serviteurs


Chaque château abrite une communauté entière qui Ironiquement, l’aveuglement social qui inter-
demeure invisible aux yeux des samouraïs : les ser- dit aux samouraïs de remarquer les serviteurs les
viteurs, qui travaillent dur de l’aube, voire avant, à la empêche aussi de profiter des connaissances de
nuit pour que les lieux restent propres, rangés et en ces derniers. S’adresser à eux sans leur donner
bon état. Ils entrent et sortent par des portes déro- d’ordre est avilissant. Cependant, la petite minori-
bées que de rares samouraïs remarquent. D’une cer- té de samouraïs prête à s’humilier de la sorte jouit
taine manière, ils jouissent d’une plus grande liber- d’un avantage de taille sur ses rivaux. Des pots-de-
té que leurs maîtres. Hormis le seigneur, sa famille vin, des menaces, le chantage ou la simple politesse
et d’autres individus de haut rang, les nobles ne sont autant de moyens de s’assurer de la coopéra-
peuvent pas se promener comme ils veulent dans le tion des serviteurs. De la même manière, les pas-
château. Les serviteurs circulent quant à eux partout, sages réservés aux serviteurs se révèlent utiles à
de jour comme de nuit, sans être repérés. Mieux ceux qui voudraient entrer sans se faire voir, car rares
encore, ils entendent et voient tout. Les samou- sont ceux qui pourraient envisager qu’un samouraï
raïs sont passés maîtres dans l’art de garder leurs accepte d’entrer de la sorte dans un château. Sans
secrets, même dans les pièces confinées d’un châ- aucune surprise, ce sont les membres du Clan du
teau, mais il est parfois impossible d’échapper à l’in- Scorpion qui recourent le plus souvent à ces straté-
discrétion d’un serviteur. gies retorses.

Les arts et divertissements présentés à la cour varient Les ambassadeurs


d’un château à l’autre. Certains seigneurs aiment avoir des
musiciens qui jouent depuis les balcons, d’autres appré- Bien que la plupart des clans tentent de maintenir une pré-
ien le n a le h ji ein le arrange en l - sence diplomatique dans les cours de leurs homologues,
raux d’ikebana, qu’ils disposent savamment dans la pièce le poste d’ambassadeur est prestigieux et comporte des
afin de fournir à leurs courtisans des sujets de conversa- responsabilités. Les ambassadeurs s’expriment au nom
tion. Un bouffon peut être présent pour alléger les ten- de leur seigneur et ils concluent des accords comme s’il
sions ou se moquer subtilement des visiteurs d’une cour était présent. Le poste est donc très exigeant puisque ces
rivale. Les seigneurs fortunés (ou ambitieux) peuvent faire samouraïs se voient confier le futur et la réputation de
construire des aménagements plus coûteux, comme une leur clan. S’ils échouent, perdent la face ou font preuve
scène de théâtre ou un bassin intérieur où nagent des de faiblesse, ils feront du tort à leur seigneur et au clan
carpes koï. À l’inverse, les seigneurs pauvres ou ascètes entier. C’est l’une des raisons principales pour lesquelles
minimalisent les décorations, se justifiant souvent en citant les courtisans recourent toujours à un langage ampoulé
les enseignements de Shinsei quant aux dangers des dis- et détourné. S’exprimer de manière directe est considéré
tractions terrestres. comme impoli et pourrait mener à sceller des engage-
ments peu souhaitables. La parole d’un samouraï fait loi,
et une déclaration claire de la part d’un ambassadeur est
Les principaux courtisans tout aussi ferme qu’un contrat écrit. Les propos ambigus
Toute cour est principalement peuplée par des courti- et indirects laissent une certaine marge de manœuvre pour
sans : des samouraïs spécialement entraînés pour évoluer pouvoir se désister si nécessaire sans se montrer impoli ni
au cœur de l’espace fermé et sécurisé d’un château. Ils perdre la face.
ne sont pas nombreux, mais forment l’épine dorsale du
petit monde de la politique, de la diplomatie et de l’in-
trigue. Ces fonctionnaires spécialisés graissent les rouages
de l’administration impériale, et certains occupent un
rôle spécifique, dont voici les plus communs et les plus
importants.

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CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

Les sénéchaux (karō) Les entremetteurs (nakōdo)


Le sénéchal est le bras droit d’un seigneur. Il peut éga- Comme presque tous les mariages rokugani sont arran-
lement faire office de conseiller, mais son premier rôle gés, les familles de samouraïs engagent généralement des
consiste à diriger les affaires quotidiennes, à superviser entremetteurs, les nakōdo, pour conclure de telles unions.
la vie au château, à conserver des archives, à transmettre e er i e d’ n na d alen e n r de and
les ordres aux serviteurs, etc. De plus, le karō remplace le d’autant que les mariages se décident souvent dans le
seigneur en l’absence de ce dernier : il gouverne alors le cadre de tractations diplomatiques. Tout seigneur impor-
h ea e le erre e r ide la r e enir ar e an de n na d en a r e e er-
un honneur et une marque de confiance. Souvent, le poste vices peuvent en soi peser dans la négociation. Lorsque
est héréditaire et, lorsque c’est possible, il est confié à un son seigneur n’a pas besoin d’arranger des mariages, un
hatamoto, pour une plus grande tranquillité d’esprit. entremetteur effectue des tâches similaires à celles des
autres courtisans.
Les valets (hatamoto)
Les instructeurs (sensei)
Le hatamoto est un samouraï au service personnel d’un
eigne r d’i r an e el ’ n dai de a ille n Les châteaux sont aussi les lieux d’entraînement des
champion. Seuls de puissants nobles peuvent nommer samouraïs. Tous possèdent donc au moins un dojo, et
un hatamoto, dont la loyauté est entièrement dirigée vers les plus vastes en comptent plusieurs. Les écoles les plus
son seigneur. Rien ne doit le détourner de sa mission. Le prestigieuses et les meilleurs instructeurs sont presque
rang d’ n ha a e rie r el i d’ n dai r - toujours situés dans les principaux châteaux d’un clan, ce
vincial, ce qui permet de les dépêcher dans des châteaux qui en fait des centres d’érudition et de pouvoir militaire.
peu loyaux pour y faire régner la volonté de leur maître. Tout château, même modeste, dispose au moins d’un petit
dojo et d’un sensei en résidence pour entraîner les bushi.
Les artisans Les sensei sont souvent les conseillers du seigneur, sur-
tout s’ils l’ont formé. Leurs paroles sont toujours prises au
De nombreux samouraïs s’attellent à des entreprises artis- sérieux, d’autant qu’ils sont responsables de l’entraîne-
tiques : ces activités civilisées les différencient des hei- ment des samouraïs et les gardiens des secrets ancestraux
min aux manières frustes. Cependant, seuls quelques-uns de leur école.
apprennent les arts plutôt que les techniques guerrières
traditionnelles. Les artisans et les artistes opèrent sou-
vent au sein d’une cour, afin de montrer leur savoir-faire
et de trouver des mécènes qui les entretiendront finan-
cièrement. Le dévoilement d’œuvres artistiques, qu’il
s’agisse de pièces de théâtre, de peintures, de sculptures
ou autres, est un événement prisé dans toutes les cours.
Les seigneurs qui prétendent régner sur une cour civili-
sée accueillent au moins un ou deux artistes en résidence
et cherchent à attirer des artisans externes célèbres pour
qu’ils exposent leur travail.
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

La vie au château
Pour un soldat en bas de l’échelle, il peut simplement
s’agir de surveiller les alentours, posté sur la muraille, ou
de garder un couloir vide, tout en demeurant alerte en
La vie au château, comme dans tout endroit de Rokugan, tout temps, et traquant les dangers sans relâche, même
R N
est marquée par les rituels et les traditions. Les mêmes lorsque tout semble calme et sûr. (Bien entendu, rares
R G NA sont les samouraïs qui parviennent à atteindre cet idéal :
actions sont répétées quotidiennement, toujours avec
soin et précision, par les serviteurs comme par les samou- les gardes distraits ou somnolents sont le point faible de
Le régime alimentaire toute défense.) Les officiers accomplissent quant à eux
et le style de vie d’un raïs, les soldats, les courtisans, et même le seigneur. Les
Rokugani apprécient avant tout la sérénité et l’harmonie des tâches plus complexes, comme lire les rapports rédi-
samouraï varient d’une
et ils refusent d’agir de manière irréfléchie ou farfelue. gés par des subordonnés, planifier l’horaire des gardes ou
région à l’autre, et en
fonction des courants Bien qu’ils suivent des rituels religieux spécifiques, d’une mener une expédition punitive contre des bandits locaux.
culturels qui y sont en certaine manière, toute leur vie est menée avec le même Le déjeuner est servi à midi, l’heure du Cheval. Il est
vogue. Dans les hautes sérieux que les prières. généralement composé d’un repas frugal de riz ou de
montagnes du Clan du nouilles, accompagné de légumes et de poisson ou de

les bushi
Dragon, le riz est un luxe légumineuses et, bien entendu, de thé, boisson servie à
et l’orge le plat de base, chaque repas et lors de chaque rencontre. Évidemment,
alors que la viande ne l’alcool est interdit pour les soldats en service.
représente qu’une partie La journée typique d’un bushi rattaché à la garnison d’un
h ea la i e d lan de la r e e ūden Les devoirs du bushi cessent en début de soirée, à
infime, mais primordiale,
Doji, se déroulera comme suit. Il se lève à l’aube, à l’heure l’heure du Coq. Il fait de nouvelles ablutions, se rend au
de l’alimentation. Le Clan
de la Licorne jouit d’une du Lièvre, et se baigne pour se débarrasser de la sueur de sanctuaire familial pour prier et obtenir des conseils, puis
gastronomie très variée, la nuit. Si c’est un simple soldat, il se rend à la salle de bain il prend son dîner, le repas le plus nourrissant de la jour-
puisqu’il a rapporté des communautaire adjacente à la caserne. Un officier possède née, bien que les clans les plus stricts y servent également
recettes du monde entier. une salle de bain privée attenante à sa chambre, ainsi que des plats simples. Le bushi peut avoir d’autres devoirs à
Même les clans plus accomplir en soirée, surtout si son clan est en guerre, ou
des serviteurs. Une fois lavé et habillé, il prend un simple
traditionalistes, comme bénéficier de temps libre pour s’occuper de ses affaires
repas composé de riz, de thé, de soupe miso et de pois-
ceux du Scorpion ou du personnelles. Il en profite en général pour rencontrer des
Lion, cuisinent d’une son séché. S’il appartient à un clan connu pour sa disci-
pline stricte ou ses ressources limitées, son petit-déjeuner amis et boire du saké avec eux, mais les samouraïs mariés
manière unique. Le Clan
peut se cantonner à du riz et du thé. Même les clans riches peuvent aussi consacrer ce temps à leur famille.
du Scorpion préfère les
épices rares et les saveurs comme ceux de la Grue et de la Licorne considèrent qu’il Souvent, à l’heure du Sanglier, peu avant minuit, ils
fortes, tandis que celui du vaut mieux manger avec parcimonie pour éviter le péché prient une dernière fois et se couchent.
Lion consomme des repas de gourmandise, surtout le matin.
roboratifs, adaptés au Une partie de sa matinée est consacrée à l’entraîne-
mode de vie très actif de
ment : seul, au dojo, ou en groupe, sur la place d’armes.
ses guerriers.
Ces exercices peuvent durer jusqu’à l’heure du Serpent,
voire plus. Ensuite, il se lave puis revêt son armure (un
rituel qui peut prendre près de trente minutes) avant de
vaquer à ses occupations quotidiennes.

28
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

les artisans les étudiants R

Au sein du même château, les tâches quotidiennes d’un Un étudiant du dojo se réveille bien avant le lever du soleil, À Rokugan, la journée
artisan sont très différentes, mais sa journée n’en est pas à l’heure du Tigre. Sa journée commence par des tâches commence à l’aube, à
ménagères qui devraient être accomplies par des ser- l’heure du Lièvre (ce qui
moins structurée. Comme le bushi, il se lève tôt pour cher-
viteurs : nettoyer la caserne ou laver les vêtements, par correspond à 6 heures,
cher l’inspiration artistique et spirituelle en regardant le sur les montres du monde
lever du soleil. Après avoir pris son bain dans sa chambre, exemple. Ces corvées sont censées instiller en lui l’humi-
réel actuel). Les autres
lité, la discipline et l’obéissance, afin qu’il se trouve dans
il déguste le même petit-déjeuner qu’un bushi, puis gagne heures sont marquées
le bon état d’esprit pour apprendre. Une fois ses tâches elles aussi par des noms
son atelier pour travailler toute la matinée sur différents
accomplies, l’étudiant se lave et prend un petit-déjeuner de constellation, dans
projets artistiques. Plus tard, à l’heure du Serpent, il peut
frugal composé de riz, de soupe miso et de thé. l’ordre : dragon, serpent,
se rendre à la salle de la cour pour y donner une représen-
Dès l’heure du Dragon, les étudiants se retrouvent dans cheval, chèvre, singe, coq,
tation. Il déjeune probablement sur place avec les autres la cour pour y effectuer leurs exercices quotidiens : échauf- chien, sanglier, rat, bœuf
diplomates, artisans et invités, et profite de l’occasion pour fement et positions de combat basiques, avec une arme et tigre. Comme il n’y a
écouter les derniers commérages, consulter le travail de en bois à la main. Certains dojos ajoutent le tir à l’arc ou que douze divisions et
ses rivaux ou lancer une ou deux rumeurs. La qualité de ce non vingt-quatre, chaque
le combat à mains nues. Tous les étudiants pratiquent ces
« heure » correspond à
repas est supérieure à celui du bushi, et du saké est servi exercices en même temps, placés en rang, sous la supervi-
deux de nos heures.
à l’occasion. sion d’un sensei ou d’un étudiant plus avancé bénéficiant
Durant l’après-midi, l’artisan cherche l’inspiration pour de cet honneur. Généralement, chaque mouvement rituel
ses prochaines œuvres. Les Rokugani considèrent la nature est accompagné d’un kiai (cri de guerre). Certains étu-
comme l’apogée de la beauté artistique, et l’artisan peut diants peuvent aussi entrer dans le dojo pour combattre à
donc se rendre dans les jardins ou aller se promener sur les un contre un sous le contrôle du sensei.
terres avoisinantes, afin de passer quelques heures dans L’étudiant bénéficie d’une courte pause à l’heure du
des endroits magnifiques et paisibles. Bien entendu, dans Cheval, pour prendre un autre repas simple. Ensuite, il net-
toie la place d’armes et prépare le dojo pour l’après-midi,
certaines régions ou à certaines périodes, sortir du châ-
ce qui nécessite généralement de balayer, de laver et
teau s’avère dangereux, et l’artisan peut être accompagné
de polir le sol. Selon les écoles, ces tâches peuvent être
d’un garde du corps choisi au sein de la garnison.
réparties également entre tous les étudiants ou divisées
Il visite aussi plusieurs sanctuaires durant la journée,
en fonction des tranches d’âge. Dans un tel cas, les plus
pour prier les fortunes qui régissent les différents aspects jeunes réalisent les travaux les plus exigeants.
de sa vie et de son art. Les fortunes préférées des artisans L’après-midi est consacré à l’entraînement thématique :
sont Benten, Fortune des arts et de l’amour romantique ; maniement du sabre (travail de katas claniques ou des tech-
Tenjin, fortune des histoires et des secrets ; et Sadahako, niques de duel), étude d’une autre arme (il peut s’agir du
fortune des artistes. tir à l’arc au sein d’un clan qui considère l’arc inférieur au
Dans la soirée, il assiste à un dîner officiel organisé par sabre), ou encore équitation. Les leçons théoriques, comme
l’un des courtisans ou par le seigneur, à moins qu’il n’en les récits d’un samouraï célèbre ou les stratégies mar-
soit l’hôte. Il se baigne et s’habille avec le même soin méti- tiales, se tiennent également à ce moment-là. L’étudiant se
culeux qu’un bushi qui revêt son armure. En tant qu’arti- concentre généralement sur un seul sujet de manière inten-
san et courtisan, il emploie sûrement plusieurs serviteurs. sive pendant un mois environ avant de passer au suivant.
Le repas n’est pas forcément copieux, mais la qualité et la Les classes se terminent après le coucher du soleil, à
variété des mets sont nettement supérieures à celles du l’heure du Coq. L’étudiant prend un nouveau bain pour
se débarrasser de la sueur et de la poussière de la jour-
dîner simple du bushi et peuvent même inclure des plats
née, puis il va prier. Il mange avec les autres, mais les
exotiques aux ingrédients et épices rares, importés par les
plus jeunes sont généralement séparés de leurs aînés, qui
marchands du Clan de la Licorne ou les marins du Clan de
peuvent avoir l’honneur de partager la table du sensei.
la Mante.
Ce repas est plus généreux, mais les plats demeurent
Il consacre sa soirée aux passe-temps préférés de la simples. Bien entendu, le saké est interdit puisque les étu-
cour : commérer, séduire et comploter, le tout avec une diants ne sont pas adultes et n’ont pas le droit de boire
retenue et une délicatesse propres à l’Empire. Sa nuit d’alcool. Cependant, lors d’événements spéciaux, comme
se termine sûrement plus tard que celle du bushi, après une cérémonie en l’honneur d’étudiants plus âgés ou des
minuit, au cours de l’heure du Rat, surtout si l’inspiration ancêtres, ils peuvent se voir servir une tasse de saké pour
surgit et le pousse vers son atelier. le toast cérémoniel.

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C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

Après le dîner, l’étudiant bénéficie d’une courte


période de repos, sans devoirs ni études. Toutefois, de
nombreux dojos s’attendent à ce qu’il utilise ce temps pour les serviteurs
approfondir ses connaissances, par exemple en lisant des
livres pédagogiques comme le Commandement d’Akodo
personnels
ou Le sabre de Kakita. La prière et la méditation sont éga- Les serviteurs remplissent de nombreux rôles à
lement considérées comme des passe-temps acceptables. Rokugan. Ceux qui travaillent dans un château
Néanmoins, les étudiants doivent rester sur place, à moins œuvrent jour et nuit à son entretien, qui que soit
que leur sensei ne leur accorde la permission de sortir. Les leur seigneur et même en l'absence de machina-
étudiants turbulents ou indignes sortent parfois la nuit, au tions politiques et de menaces de guerre. Cer-
risque d’être punis ou expulsés. tains sont placés chez des samouraïs, mais leurs
La journée se termine à l’heure du Sanglier. Les étu- tâches demeurent similaires. Enfin, de nombreux
diants dorment sur des futons ou, dans les dojos les plus samouraïs ont des domestiques personnels qui
stricts, sur de simples tatamis. voyagent partout avec eux.
Ces derniers, qui peuvent être seuls ou
les serviteurs en groupe, selon le prestige et la richesse du
samouraï concerné, doivent répondre à toutes
Par opposition à ces trois classes de samouraïs, ses demandes. Les devoirs les plus courants
intéressons-nous maintenant à la vie d’un serviteur au incluent d’aider leur maître à s’habiller, à se
sein du même château. Il se réveille bien avant l’aube, maquiller et à enfiler son armure. Ils envoient et
à l’heure du Tigre, mange un petit bol de riz ou d’orge reçoivent les messages, effectuent ses achats et
froid, puis se lave le visage et les mains avant de revê- s’occupent de ses repas ainsi que de son loge-
tir un simple kimono et des sandales. Il entre au château ment. Tous doivent être aptes à devancer les
par une porte dérobée, se rend à la cuisine où d’autres désirs de leur maître, sous peine de se voir attri-
serviteurs préparent déjà le riz, le poisson séché et la buer les travaux les plus ingrats du domaine,
soupe miso. Le serviteur apporte les plateaux de nourri- voire d’être congédiés.
ture dans les chambres d’une demi-douzaine de samou-
raïs. À chaque fois, il doit s’agenouiller, faire glisser la
porte, porter le plateau à l’intérieur, s’agenouiller à nou-
veau puis refermer la porte. Il doit marcher silencieuse- manger du riz ou des nouilles accompagnés de légumes
ment, mais avec grâce, sans faire le moindre bruit ni mou- vinaigrés et de thé. Parfois, pour des occasions spéciales
vement brusque qui pourrait déranger un samouraï. Plus ou si le seigneur est particulièrement généreux, les servi-
tard, il devra réaliser le même rituel éreintant pour récu- teurs reçoivent un peu de poisson séché ou des légumi-
pérer les plateaux et les rapporter en cuisine, où il aide- neuses pour compléter leur repas. À l’inverse, si le clan
ra à laver les assiettes et les bols. Les arêtes de poisson ou le seigneur est très pauvre, ils peuvent ne manger que
et autres déchets alimentaires finissent dans un tonneau du millet à la place du riz. Le repas demeure une occasion
devant l’entrée de service, avec le contenu des pots de de se détendre un peu, d’échanger des commérages, de
chambre des samouraïs. Ces déchets, trop vils pour les flirter et d’exprimer toutes les émotions humaines que les
heimin, seront collectés par des hinin. serviteurs doivent cacher en présence des samouraïs.
Une fois que les tâches liées au petit-déjeuner sont ter- Le serviteur consacre son après-midi à d’autres
minées, le serviteur commence le reste du ménage et de tâches, selon les besoins du jour et les talents de cha-
l’entretien. Le chef des serviteurs assigne les tâches pour cun. Par exemple, un serviteur doué en couture peut pas-
la journée, comme nettoyer les planchers de bois du châ- ser plusieurs heures à réparer et à ajuster les vêtements
teau en les polissant avec un linge épais. Courbé en deux, des samouraïs.
frottant à deux mains pour plus d’efficacité, le serviteur Le serviteur prend un dîner tardif, après avoir servi les
nettoie alors les salles dont les samouraïs sont absents, repas des samouraïs, et parfois des invités de courtisans
puisque de telles tâches sont inconcevables en leur pré- résidents. Une fois de plus, son repas est simple, mais
sence. Garder les sols propres est un travail colossal et peut être bonifié par les restes des samouraïs. Enfin, peu
continu, planifié avec précision. avant minuit, à l’heure du Sanglier, il prend un bain dans la
À midi, il sert les repas des samouraïs puis revient en salle communale avant de quitter le château pour retrou-
cuisine pour déjeuner à son tour, en compagnie des autres ver sa maison à une seule pièce dans le village. D’autres
serviteurs, autour d’une grande table. Tout le monde reste serviteurs restent en service plus tard, pour s’assurer que
debout ou s’assied en tailleur autour de la table pour quelqu’un soit toujours disponible.

30
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

les invités Les droits des invités A


AR
N

Puisque les châteaux sont au centre de l’administration et Une fois qu’un samouraï est accueilli à titre d’invité dans
de la diplomatie, il est fréquent que des samouraïs venus un château, il bénéficie de l’hospitalité et de la protec- Qu’il soit à la cour, chez
d’autres provinces, d’autres familles ou d’autres clans y soient tion du seigneur, même s’ils sont ennemis jurés. Si le un autre samouraï, dans
accueillis. L’hospitalité, comme tous les aspects de la culture, dai e nd i a re en e erai n an e en une maison de thé ou chez
à l’étiquette et aux préceptes du bushido (et notamment une geisha, un samouraï
est régie par des lois strictes et par des traditions ancestrales.
à la vertu de courtoisie). En plus de déshonorer le sei- se doit de déposer ses
Lorsqu’un samouraï arrive au château, il doit se présen-
gneur, cette transgression serait une insulte pour l’invité. armes. S’il les garde en
ter devant le seigneur et le remercier de son hospitalité. présence de son hôte, il
Ne pas procéder immédiatement à cette rencontre est un Ainsi, même au paroxysme d’une guerre ou d’une âpre
devra les poser à terre, et
manque de respect qui peut aboutir à l’expulsion si le sei- lutte familiale, un noble en visite sera à l’abri dans les le côté où il rangera son
gneur est particulièrement frustré. murs du château et laissera ses armes dans sa chambre. sabre n’est pas vide de
Selon son rang, le visiteur peut patienter longtemps Les porter en public équivaudrait à insulter son hôte en sens. Le poser à droite,
a an d’ re re ar le dai i e e d l - sous-entendant un sentiment d’inquiétude. (Bien enten- où il sera plus difficile à
g er e e he n e re de a a ille a ar du, les samouraïs qui agissent à titre de yōjimbō, les dégainer, implique une
gardes du corps, doivent porter leur sabre en tout temps certaine confiance. Le
à quelqu’un d’un statut encore inférieur. Cette première
puisqu’ils pourraient devoir représenter leur protégé placer à gauche exprime
rencontre offre donc un moyen de faire preuve de défé-
la méfiance, voire de
rence ou d’insulter quelqu’un. Une attente longue signifie dans un duel.)
l’hostilité, et est toujours
que le seigneur privilégie d’autres devoirs à son invité, ce De plus, les invités ne seront ni harcelés ni ouverte- insultant.
qui serait particulièrement injurieux pour des invités de ment maltraités. « L’art de l’insulte » est une compétence
marque. De la même manière, ne pas recevoir soi-même subtile et délicate à Rokugan puisqu’il doit s’opérer sans
les invités est un soufflet, surtout si l’individu envoyé à la jamais manquer à l’étiquette, y compris aux droits des invi-
rencontre est d’un statut inférieur aux invités. À l’inverse, tés. Un samouraï qui insulterait ou attaquerait physique-
n dai i ren n re en er nne e ra ide en de ment un invité offenserait ce dernier, mais jetterait aussi
invités d’un rang moindre leur montre ses faveurs, ce qui le d h nne r r n eigne r e l i- e e dai
peut insulter d’autres invités qu’il n’a pas aussi bien traités. devrait alors punir son vassal impoli. Bien entendu, l’invité
Un seigneur peut faire passer un certain nombre de se doit aussi de respecter l’étiquette et il ne peut ni insul-
messages au cours de la rencontre. S’il accueille ses invi- ter autrui ni perturber la vie paisible de la cour. Agir autre-
tés en compagnie de sa famille, c’est une preuve d’amitié ment lui vaudrait le déshonneur. De telles offenses sont
et de confiance, alors qu’une rencontre en face à face est passibles non seulement d’un duel, mais également d’une
plus formelle. Si le seigneur est armé ou, pire encore, en expulsion du château par l’hôte.
armure, il montre sa méfiance et son hostilité à l’égard de Tous les châteaux ont des gardes postés à des endroits
ses invités, ce qui constitue clairement une insulte. stratégiques dans les couloirs et les salles importantes,
À l’inverse, si sa garde habituelle est absente de la comme la salle de la cour. Les raisons en sont principa-
alle il a i he a n ian e n dai e de ander e lement pratiques puisqu’il faut bien garder l’accès aux
ses invités posent leurs armes avant l’audience. C’est une appartements du seigneur, mais cette précaution repré-
requête légitime, mais qui demeure insultante pour nombre en e a i l’ liga i n li e d’ n dai en er
de samouraïs. Ceux-ci peuvent alors déposer leurs armes ses invités. La présence de gardes armés illustre que les
chez les « polisseurs » : cette astuce permet à tout le monde résidents du château sont en sécurité sous la protection
de sauver la face sans laisser croire à une hostilité latente. de son seigneur.

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C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

Les châteaux et les palais les emplacements


des châteaux et
Les châteaux et leurs fortifications font partie des rares
bâtiments constitués de pierre, particulièrement leurs fon-
leur construction
dations et enceintes extérieures. Le bois est plus courant Les châteaux de Rokugan sont généralement placés de
pour les niveaux supérieurs et les édifices intérieurs, mais manière à protéger les voies importantes pour les déplace-
la répartition entre la pierre et le bois dépend des tradi- ments ou la communication, comme les grand-routes, les
tions et des ressources de chaque clan. Le Clan du Crabe cols des montagnes et les rivières navigables. Idéalement,
est celui qui compte le plus sur la pierre pour bâtir des for- ils sont construits sur des reliefs : à flanc de montagne ou
teresses imposantes et la Grande Muraille Kaiu. Le Clan au sommet d’une colline. Dans les plaines, le château est
du Lion, composé de guerriers, utilise la pierre autant que bâti au milieu d’une étendue déserte où les attaquants ne
possible. Étonnamment, le Clan du Dragon en fait autant, pourront pas profiter du terrain alentour pour s’approcher.
mais cela s’explique par le fait que les montagnes envi- Les Rokugani utilisent des termes différents pour désigner
ronnantes offrent plus de pierre que d’arbres. Le Clan de les châteaux selon leur emplacement : yamajiro dans les
la Licorne, malgré son imposante armée, n’utilise que peu montagnes, hirayamajiro au sommet des collines ou hirajiro
la pierre en raison de ses traditions nomades et de l’abon- à terrain découvert (qui sont les plus fréquents).
dance d’arbres sur ses terres. Les autres clans comptent Les plans des châteaux sont dessinés par les artisans du
peu sur la pierre et préfèrent le bois, qui rend la construc- clan, qui expriment leur style tout en obéissant à une tradi-
tion plus facile. Les Clans de la Grue et du Phénix, notam- tion stricte et aux préférences esthétiques du clan. Souvent,
ment, considèrent les châteaux comme des œuvres d’art le seigneur tiendra un concours pour savoir quel architecte
et non comme des ouvrages défensifs, ils privilégient ainsi sera retenu. Dans un tel cas, chaque architecte est soute-
le bois pour sa beauté et son élégance, plutôt que l’aspect nu par un mécène qui cherche à obtenir plus de pouvoir
pratique et militaire de la pierre. au sein du clan en étant associé au vainqueur. Décider de
qui aura le droit de présenter des plans peut prendre des
semaines de négociations secrètes, qui nécessiteront autant
de manœuvres complexes et de jeux d’influence que toute
autre intrigue courtisane. Les architectes et leur mécène
offrent également des cadeaux au seigneur, officiellement
pour démontrer leur dévouement envers le projet et leur
sérieux, mais ce sont souvent des pots-de-vin.
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

shiro et kyūden
Les forteresses de Rokugan sont désignées par les le nom de shiro, alors que d’autres, qui n’ont pas la
cartographes impériaux sous deux noms : shiro, les capacité de recevoir l’Empereur, sont tout de même
châteaux, et kyūden, les palais. La différence est h n r d i re de ūden
’ n ūden d i ir a eillir la r d’hi er Les exemples pullulent dans la première catégo-
impériale. Selon une tradition qui remonte au pre- rie. Shiro Mirumoto, sur les terres du Clan du Dragon,
mier siècle, les empereurs ne tiennent jamais leur a logé l’Empereur à deux reprises au moins, et le châ-
cour à Otosan Uchi en hiver, mais choisissent plutôt teau du Chêne clair, sur les terres du Clan du Phénix,
l’un des clans majeurs qui devra l’accueillir. C’est un est honoré par les Hantei depuis plusieurs généra-
grand honneur, qui implique de nombreux efforts et tions. Quant au Clan de la Licorne, il a bâti le magni-
dépenses, et qui ne saurait être refusé sans perdre fique Shiro Ide spécifiquement pour accueillir la cour
la face. (Plusieurs empereurs ont d’ailleurs recouru d’hiver impériale, mais ce dernier ne s’est toujours
à cet « honneur » pour punir un seigneur impudent.) a a ri er le i re de ūden
Durant les deux premiers siècles, la famille Seppun Les exemples abondent également dans la
a a li ’ n ūden d i ir re e ir a in e nde a g rie ūden ga hi la n ra le
deux cent cinquante invités : trente pour chaque clan Demeure de la Lumière, serait totalement incapable
majeur, auxquels s’ajoute l’entourage considérable de recevoir la cour d’hiver impériale puisqu’il s’agit
de l’Empereur. d’un vaste complexe de sanctuaires, de temples et de
Cependant, comme de nombreux autres aspects cellules monacales, situé loin de tout et protégé par
de gan la di in i n en re hir e ūden e des forces spirituelles qui empêchent toute approche.
plus théorique et symbolique que pratique, et prend En fait, il semble qu’aucun membre de la lignée de
en compte des éléments comme l’apparence, l’hon- an ei ne l’ai e ja ai ūden ida r le
neur, le symbolisme et l’influence politique. Même si terres du Clan du Crabe, serait en théorie suffisam-
la d i i n d’a rder le i re de ūden n h - ment grand pour accueillir l’Empereur, mais il serait
teau appartient à l’Empereur, elle fait l’objet de illogique de soumettre la cour d’hiver impériale aux
manœuvres politiques et de jeux d’influence. En dangers et aux dures conditions des terres des Hida.
conséquence, de nombreux châteaux qui devraient (Le roman Meifumado prétend que Hantei XXXI a
re re nn e de ūden e i n ar- choisi de passer l’hiver auprès des Hida, mais l’his-
fois accueilli la cour d’hiver impériale, ne portent que toire officielle ne confirme pas cette version.)

Bien entendu, de telles pratiques ne sont pas univer- main d’œuvre, et les rumeurs prétendent que les fonda-
selles. Ainsi, les Clans du Crabe et du Lion ne permet- tions contiennent les ossements de la plupart d’entre eux.
traient jamais que des manipulations politiques interfèrent
avec une décision aussi importante que la construc-
tion d’un nouveau château. La manière dont les archi-
Les donjons (tenshukaku)
tectes présentent leurs plans à leur seigneur varie aussi Le cœur de tout château est son donjon, qui se dresse sur
d’un clan à l’autre : le dévoilement peut être public ou d’épaisses fondations en pierre, généralement sur trois à
privé ; les architectes du Clan du Crabe construisent des six niveaux, sans compter les fondations et les éventuels
répliques à l’échelle ; ceux du Clan de la Grue dessinent sous-sols. Les seigneurs les plus puissants peuvent ériger
les jardins ; ceux du Clan du Scorpion ne discutent des un donjon de neuf niveaux (seul le palais impérial d’Otosan
aspects spécifiques que lors d’une réunion privée avec Uchi se targue de dix niveaux). Le dernier étage du donjon
leur seigneur. e la de e re d dai r de rai n a an -
La construction à proprement parler est générale- boliques que pratiques : c’est le point le plus difficile à
ment confiée à des ouvriers choisis parmi la population attaquer et sa position illustre la place privilégiée du sei-
locale. L’architecte et les samouraïs artisans supervisent gneur. (Les shugenja aiment prétendre qu’il symbolise aus-
le chantier et engagent des ouvriers qualifiés (charpen- i la rela i n en re le eng e le ingen-d le r a e
tiers, tailleurs de pierre, etc.) pour les aider. Le Clan du Céleste et celui des mortels.) Les seigneurs qui craignent
Crabe décide parfois que les heimin qualifiés conduiront les espions ou les assassins font souvent installer aux
directement certaines parties du chantier, une approche étages supérieurs des planchers rossignols, en bois poli
pragmatique que les autres clans méprisent. À l’inverse, le standard, mais conçus de telle manière qu’ils « chantent »
Clan du Scorpion utilise les criminels condamnés comme (ou plutôt qu’ils grincent et craquent) sous les pas.

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Les étages inférieurs abritent les chambres des invi- Contrairement aux châteaux des gaijin, ceux de Roku-
tés, les salles d’audience, la salle de la cour, les sanctuaires gan possèdent des murs en pente, dont le degré d’incli-
des fortunes et des ancêtres, les bureaux administratifs, naison varie d’un château et d’un clan à l’autre. Il n’existe
les bibliothèques et les ateliers des artistes. La plupart pas de murs parfaitement verticaux. Si la pente peut
des châteaux comprennent au moins un sanctuaire des théoriquement faciliter l’escalade par des ennemis, les
esprits de la terre. En vénérant les kamis des lieux où le pierres impeccablement ajustées n’offrent que peu de
château se dresse, ses occupants s’assurent de leur pro- prises, et le plâtre lisse qui les recouvre, moins encore.
tection contre les catastrophes naturelles. Les sous-sols, Comme de nombreuses décisions architecturales, les
taillés dans la pierre, accueillent les celliers, les archives, murs en pente sont nés à Otosan Uchi et ont probable-
l’armurerie et parfois les casernes. Si possible, le donjon ment pour but de rendre les bâtiments plus résistants en
contient un puits au sous-sol, ou au minimum une citerne, cas de tremblement de terre (qui frappent régulièrement
pour pouvoir soutenir un siège si nécessaire. La plupart la cité impériale).
des châteaux comprennent aussi un ou plusieurs tunnels La plupart des murs d’enceinte ne sont pas surmontés
pour pouvoir s’évader. de chemins de garde. De lourdes poutres y sont encastrées
et dépassent de plusieurs dizaines de centimètres à l’inté-
Les enceintes extérieures (maru) rieur, afin d’y placer des planches où les bushi peuvent se
poster. Ces parapets amovibles sont appelés des ishi uchi
Tout château digne de ce nom possède non seulement un tana, ou étages à jet de pierre. Seuls les châteaux du Clan
donjon, mais aussi un vaste complexe de structures diver- du Crabe et la cité interdite d’Otosan Uchi ont opté pour
sifiées, entièrement entouré par une muraille. Un château des chemins de garde classiques.
plus modeste, consacré à la politique plutôt qu’à la guerre,
peut ne présenter qu’une seule enceinte. Les châteaux
plus imposants ou destinés principalement à la guerre dis-
Les tours (yagura)
posent de plusieurs murs d’enceinte séparés par des pas- Tous les châteaux importants renforcent leurs murs d’en-
sages étroits, parsemés de cours isolées et de postes de ceinte par des tours. La porte centrale est presque tou-
garde, pour compliquer tout assaut. jours gardée par deux tours, et d’autres tours sont pla-
Les murs d’enceinte sont constitués de pierre, à moins cées aux angles et aux points plus sensibles. Plus le clan
que les terres alentour soient parfaitement paisibles ou le est guerrier ou plus le château risque de connaître des
clan très pauvre. La taille et l’épaisseur des murs, ainsi que combats, plus les tours sont nombreuses. Ainsi, les vastes
l’équilibre entre l’esthétique et le pratique, dépendent des le e de ūden ji e ūden a i a ne r en en
clans. L’enceinte est souvent recouverte d’une couche de que deux tours à l’entrée, alors que les châteaux plus
plâtre, peinte en blanc ou blanc cassé et ornée des motifs petits des Clans du Lion ou du Crabe disposent générale-
du clan, afin de présenter une surface lisse et brillante au ment de cinq ou six tours.
monde extérieur. Le Clan du Crabe ne se soumet pas à Les tours ont plusieurs fonctions. Leur hauteur per-
cette préférence et laisse les murs à l’état brut. Tous les met aux soldats d’apercevoir les ennemis de loin, et aux
murs d’enceinte sont percés de meurtrières (les yasama) archers de les atteindre. Elles servent aussi de postes
pour en faciliter la défense, mais celles-ci peuvent ne défensifs d’où repousser des attaques, ou de points de ral-
jamais servir. liement pour les guerriers si la muraille devait être percée.
Le Clan du Crabe monte également des engins poliorcé-
tiques sur les tours, mais c’est rare partout ailleurs.
En résumé, une tour est un donjon miniature. Les
premiers étages servent de casernes et de celliers, les
étages supérieurs sont destinés au combat et com-
portent des meurtrières pour les archers. Plus la tour est
imposante, plus elle est sophistiquée et plus elle peut
loger de soldats. Les exemples les plus notables sont les
douze tours de la Grande Muraille Kaiu, toutes aussi forti-
fiées que les plus puissants châteaux de Rokugan. À l’in-
verse, les tours des Clans de la Grue, du Scorpion et du
Phénix sont petites et souvent plus ornementales qu’utili-
taires. Le Clan de la Licorne ne construit que rarement de
tours, pour la même raison qu’il bâtit peu de châteaux :
il préfère combattre sur la plaine plutôt qu’attendre der-
rière des murs.

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C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

le gempuku
G R A GAR

Les casernes d’un château


sont réservées aux samou- Les enfants des samouraïs entament l’école entre huit d’une simple démonstration des compétences
raïs et, si nécessaire, aux et dix ans et passent les années suivantes au dojo, acquises, comme les katas, ou la récitation des
ronin. Leur demander de
à apprendre les compétences nécessaires pour ser- noms des ancêtres.
partager leurs quartiers
vir leur clan. Lorsqu’ils maîtrisent la technique fonda-
avec des paysans soldats $ re ise   : après le défi, les jeunes
est une insulte que la mentale de leur école, généralement entre quatorze
samouraïs participent à une cérémonie où ils
plupart des bushi ne tolé- et dix-huit ans, leur éducation à temps plein est jugée
choisissent leur prénom d’adulte. S’ils peuvent
reront pas (à l’exception, complète, et ils peuvent commencer à servir leur
garder celui qui leur a été donné à la nais-
peut-être, des membres famille et leur clan comme des adultes. C’est alors
sance, la plupart décident d’en changer afin
les plus pragmatiques du que se tient la cérémonie de passage à l’âge adulte,
Clan du Crabe).
de démontrer leurs intentions. Ils jurent ensuite
le gempuku.
fidélité à leur famille et à leur clan. C’est un
Les clans n’arment pas C’est un moment crucial de la vie des samou-
samouraï de haut rang de la famille qui reçoit
les ashigaru en temps de raïs : celui où ils et elles endossent pleinement leur
les serments au nom du Champion du clan. Plus
paix : ils les recrutent et rôle et réclament le nom de leurs ancêtres. En consé-
le rang de la personne est élevé, plus grand est
les entraînent uniquement quence, chaque famille et chaque clan possède des
l’honneur accordé aux jeunes samouraïs (et plus
en cas de guerre. En traditions et des habitudes complexes et immuables.
conséquence, les châteaux
leur famille attendra qu’ils accomplissent de
Cependant, toutes les cérémonies ont trois éléments
ne comprennent pas de grandes choses).
en commun :
casernes prévues pour $ e is   : à la fin de la cérémonie, tous
eux. Généralement, ils ne $ e i  : les jeunes doivent toujours démon- reçoivent un daishō. Il peut s’agir d’une paire
s’entraînent d’ailleurs pas
trer, au cours d’un défi quelconque, qu’ils de sabres forgés spécialement ou hérités d’un
non plus au château, mais
plutôt dans les plaines
ont réussi leur entraînement et qu’ils sont ancêtre. Par l’octroi des sabres, qui repré-
alentour. Ils sont donc dévoués aux idéaux de leur famille et de leur sentent l’âme et l’honneur d’un samouraï,
logés dans des tentes et clan. La difficulté varie beaucoup et, dans cer- l’adulte est pleinement accepté dans la caste
des abris temporaires, tains cas, l’épreuve peut se révéler incroyable- des samouraïs. Il faut noter que les courtisans,
installés uniquement en ment ardue, voire dangereuse. Par exemple, les artisans et les shugenja reçoivent un dai-
cas de besoin. la famille Hida du Clan du Crabe exige que h l r de le r ge e ’il lai en
chacun se rende seul dans l’Outremonde et souvent leurs katanas chez eux, bien en évi-
en revienne avec la tête d’une créature souil- dence, plutôt que de les porter sur eux comme
lée. Cela étant, le défi prend souvent la forme les bushi.

Les casernes Les casernes, comme tous les autres petits bâtiments à
l’intérieur des murs d’enceinte, sont généralement bâties
Tous les châteaux d’une certaine taille disposent de en bois et l’extérieur est recouvert de plâtre, ce qui les
casernes où loger leur garnison. Généralement, elles sont rend ignifugées et plus résistantes que les édifices clas-
purement utilitaires et fournissent juste un petit espace où siques de Rokugan.
peuvent se reposer les samouraïs qui ne sont pas en ser- Leur architecture dépend du clan. Le Clan du Dra-
vice. Seuls les célibataires peuvent y vivre, ainsi que les gon incorpore des cellules de prière et de méditation,
r nin a er i e d dai e a erne n iennen a - où des copies du Tao de Shinsei sont disponibles. Le
si de modestes sanctuaires des ancêtres et une armurerie Clan du Lion est bien plus austère et n’offre que des
de réserve. La plupart du temps, elles sont séparées du matelas de sol et un réfectoire, puisqu’il juge qu’un
donjon, mais elles peuvent en occuper les deux premiers samouraï ne doit rejoindre la caserne que pour dormir et
niveaux dans les petits châteaux. Quant aux plus grands, manger. Le Clan du Crabe partage cette opinion, mais
ils offrent souvent un espace dans le donjon, ainsi que plus par nécessité que par choix. Les Clans de la Grue,
d’autres bâtiments. du Phénix et du Scorpion se montrent bien plus géné-
reux et proposent des œuvres d’art et de littérature, car
ils estiment que les bushi doivent connaître autre chose
que le combat.

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CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

Le dojo Les douves sont plus fréquentes dans les châteaux des
Clans de la Grue, du Scorpion et du Lion, ainsi que dans
Le terme « dojo » se rapporte à toute salle d’entraîne- ceux de la famille impériale. Elles sont presque inexis-
ment de n’importe quelle école, mais il est plus géné- tantes dans les Clans de la Licorne, du Dragon et du
ralement appliqué à celles où s’exercent les bushi, qui Crabe, même si la rivière de l’Ultime Résistance sert en
composent la grande majorité des samouraïs. Tous les quelque sorte de douves à la Grande Muraille Kaiu.
châteaux comprennent au moins un dojo pour entraî-
ner leurs soldats. Dans un château imposant, le dojo ne
se situe pas dans le donjon, mais plutôt dans une struc-
Les logements des invités
ture distincte, souvent proche de la place d’armes. Les Les petits châteaux logent leurs invités dans le donjon,
châteaux extrêmement grands disposent de plusieurs mais les plus grands contiennent un ou plusieurs bâtiments
dojos pour satisfaire aux besoins de leur importante spécialement prévus à cet effet. Tous les châteaux suscep-
population. tibles d’accueillir des rencontres diplomatiques d’enver-
Chaque dojo présente une architecture particulière, gure (ou la cour d’hiver impériale) réservent un bâtiment
mais les styles les plus traditionnels se trouvent sur les pour chaque délégation des clans majeurs, ce qui permet
terres des Clans du Lion, de la Grue et du Dragon. Cela à leurs membres de se rencontrer, de discuter de stratégie
étant, les traits généraux demeurent identiques. Un dojo et de tenir des soirées privées sans être entendus par les
est toujours composé d’un édifice central, d’une cour dis- autres invités.
tincte de la place d’armes et de plusieurs bâtiments où Ces bâtiments offrent aux samouraïs tous les services
loger les étudiants. Ces logements sont reliés au bâti- nécessaires, mais leur niveau de luxe varie. Les quartiers
ment principal et sont séparés des casernes où vivent les d’invités du Clan de la Grue et du palais impérial sont les
adultes. Le bâtiment principal, le dojo à proprement par- plus beaux et les plus spacieux, tandis que ceux des Clans
ler, comprend une unique grande pièce au sol de bois du Lion et du Dragon sont spartiates. Le Clan du Crabe, à
poli par les générations précédentes. Les murs sont ornés l’exception de la famille Yasuki, n’offre généralement pas
d’armes d’entraînement, comme les bokken (des sabres de résidence pour les invités.
en bois), et de plaques où sont listés les noms des anciens
étudiants. Même dans les dojos de clans riches, comme
celui de la Grue, ce bâtiment demeure généralement
La cour
très simple, pour ne pas distraire les étudiants. La plupart Tous les châteaux contiennent au moins une petite cour,
contiennent un petit sanctuaire ancestral dédié aux fonda- souvent devant l’entrée du donjon. Cet espace ouvert,
teurs et anciens sensei. Les étudiants doivent s’incliner et qui n’est en général qu’une surface en terre battue, par-
montrer leur déférence chaque fois qu’ils y entrent. fois recouverte d’herbe rase ou, très rarement, de pavés,
Les étudiants vivent sur place tout au long de leurs est le lieu où les invités peuvent laisser leur monture, où
études. Leurs logements sont austères : de simples salles les soldats pratiquent leurs manœuvres et où le seigneur
communautaires remplies de tatamis et parsemées de harangue son armée avant le départ en guerre. Dans un
quelques paravents pour offrir un peu d’intimité. grand château qui comprend de nombreux bâtiments,
un tel espace est plus vaste et porte le nom de « place
Les douves (mizuki) d’armes » en raison du grand nombre de soldats qui s’y
en ra nen an de h ea e ūden ida
Les douves ne sont pas fréquentes à Rokugan, mais elles Shiro Sano ken Hayai, la place d’armes peut accueillir plus
existent et doivent donc être mentionnées. Générale- d’un millier de guerriers.
ment, elles se trouvent à l’extérieur du mur d’enceinte, ou
entre deux maru, et sont alors intégrées au système de
défense à niveaux multiples. Il est très rare que des douves
soient creusées directement autour du donjon, pour des
raisons pratiques.
À Rokugan, les douves ne sont pas remplies d’eau
stagnante et sale, et sont donc de simples fossés vides.
Cependant, des architectes de talent ont réussi à détour-
ner des ruisseaux de montagne pour que l’eau des douves
soit constamment renouvelée et propre. Dans de tels cas,
prier les kamis de l’eau ou protéger les fondations en
pierre grâce à des glyphes permet aussi d’empêcher l’eau
d’éroder la roche. Les ponts qui enjambent les douves
sont bâtis de façon à être facilement détruits par les défen-
seurs en cas d’attaque.

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C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

Les jardins écuries seront plus grandes et proposeront des montures


supplémentaires que les invités pourront emprunter. Dans
Les jardins sont un élément obligatoire dans toutes les un tel cas, des serviteurs spécialisés sont assignés au soin
demeures de samouraïs, qui y trouvent calme et harmo- des chevaux.
nie en admirant la beauté (soigneusement entretenue) Au sein du Clan de la Licorne, les écuries sont les bâti-
du monde naturel. Si les châteaux ne font pas excep- ments les plus vastes du château et elles sont bien plus
tion à cette règle, la taille et l’importance de leurs jardins grandes et luxueuses que partout ailleurs. De plus, le per-
varient grandement. Les châteaux les plus modestes ne sonnel y est plus nombreux et comprend des samouraïs
contiennent souvent qu’un seul jardin, au rez-de-chaussée, spécialisés dans l’entraînement des chevaux.
face à la salle de la cour. Les plus grands en abritent en
général plusieurs, y compris un jardin privé sur un balcon
réservé au seigneur et à sa famille. Bien entendu, tous
toshi ranbo
doivent être parfaitement entretenus par les serviteurs du Toshi Ranbo wo Shien Shite Reigisaho, ou la cité de la
château, qui peuvent être supervisés par un samouraï arti- Courtoisie perfide, s’est développée autour d’un petit
san spécialisé dans les ornements végétaux. Les seigneurs donjon de trois étages seulement, mais l’endroit s’est
doivent donc équilibrer leurs dépenses dans ce domaine retrouvé au centre d’un conflit entre les Clans du Lion et
avec les autres frais d’embellissement de leur château. de la Grue pendant des siècles, et a ainsi considérable-
Dans les plus grands châteaux, toute une section du ment grandi. Son nom s’explique d’ailleurs par les nom-
complexe est réservée à un jardin extérieur où se prome- breux affrontements qui s’y sont déroulés et par les réu-
ner, doté de mares, de ruisseaux, de passerelles, de sen- nions diplomatiques subséquentes, destinées à régler les
tiers et de sanctuaires des fortunes ou des ancêtres. Les différends et signer des traités de paix.
e e le le l nn n re en e de ūden L’apparence du château est relativement classique pour
a hi e de ūden ji ai e ne n a le e l une forteresse de taille moyenne située dans une plaine.
Quelques bâtiments jouxtent le donjon : des casernes, des
Les villes fortifiées (jokamichi) quartiers pour les invités, une petite salle de la cour (ajou-
tée par le Clan de la Grue), un sanctuaire des ancêtres,
Bien que certains châteaux soient isolés, la plupart et des sanctuaires majestueux de Hachiman et Bishamon.
coexistent avec la ville voisine, car ils sont à la fois l’en- Le tout est entouré d’un mur d’enceinte protégé par deux
droit le plus sûr d’une région et le siège de l’administration tours. Au-delà de cette forteresse se trouve un camp for-
locale, ce qui attire inévitablement la population. Certains tifié défendu par d’autres tours, qui abrite de nouvelles
clans encouragent d’ailleurs cette pratique, notamment casernes, une place d’armes, un dojo, ainsi que les quar-
le Clan de la Grue. D’autres, comme le Clan du Lion, s’y tiers des officiers et des serviteurs.
opposent fermement, puisqu’ils jugent que la présence de
villes affaiblit les défenses du château.
Les villes fortifiées attirent surtout les marchands, les
Une histoire sanglante
artisans, les ouvriers et les heimin qualifiés. Les serviteurs Pourquoi un petit château au nord des terres du Clan du
du château y vivent souvent, s’ils ne disposent pas de Lion a-t-il été si âprement disputé ? Un hasard au début
chambre sur place. de l’histoire de l’Empire accorda au Clan de la Grue le
Les fermiers sont plus rares puisque les châteaux s’ap- contrôle de la vallée Kintani, la vallée Dorée, une région
provisionnent à l’extérieur et non localement. La présence isolée, mais de grande valeur, proche de la cité impériale.
de samouraïs au château attire enfin certaines classes Au cinquième siècle, le Clan du Lion érigea Kita no Yosa
de hinin, dont les geishas et les acteurs, qui proposent (la forteresse Septentrionale) pour surveiller le Clan de la
des divertissements. Grue voisin. Le château fut confié à une nouvelle famille
Certaines villes fortifiées deviennent suffisamment vassale, les Goseki, qui combattit ensuite le Clan de la
importantes pour abriter des milliers d’habitants, et c’est à Grue à de nombreuses reprises au cours des cinq siècles
ce moment-là que le seigneur fait généralement construire suivants. Le conflit culmina au septième siècle, quand le
un mur d’enceinte autour de la ville. Il sépare ainsi les Clan de la Grue attaqua le château par deux fois (bien qu’il
défenses de la ville de celles du château et, si un ennemi ait occupé la ville pendant huit jours, la forteresse tint bon).
s’empare de la première, le second peut tenir bon. Le Clan du Lion organisa une contre-attaque, qui lui permit
presque de s’emparer de la vallée Kintani.
Les écuries La ville devint alors suffisamment importante pour
acquérir son célèbre nom, mais une vague d’attaques en
Tous les châteaux abritent au moins une petite écurie où réduisit la taille au point qu’au début du douzième siècle,
installer les montures du seigneur, de sa famille et de ses elle était retombée à la taille d’un village de quelques cen-
plus proches conseillers. Si le château accueille réguliè- taines d’habitants. Ce modeste village, une insulte au nom
rement des visiteurs ou des missions diplomatiques, les qui lui avait été accordé par les générations précédentes,

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CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

R R

fut saisi par Tsume no Doji Retsu, seigneur de la vallée Tout au long de ce
in ani e dai de la a ille e a ale d lan de sujets de livre, vous trouverez
des textes en marge
la Grue. Lors d’une audacieuse attaque-surprise, il éra-
diqua la famille Goseki et s’empara du château au nom controverse semblables à celui-ci,
qui présentent les
du Clan de la Grue, une prétention rendue possible par rumeurs qui circulent à
la faveur dont jouissait celui-ci à la cour impériale. La propos d’un lieu donné.
$ Un certain nombre de serviteurs du châ-
famille Daidoji se vit confier la direction du château et, Le MJ peut les utiliser
teau demeurent loyaux au Clan du Lion et
prévoyant les contre-attaques du Clan du Lion, elle accrut comme source d’inspi-
n’attendent qu’une occasion pour saboter
les défenses du château et ajouta des murailles au village, ration quand les PJ se
les défenses de l’intérieur. renseignent sur des ru-
pour contrôler la route qui traversait la province.
Les campagnes du Clan du Lion pour reprendre le châ- $ Toshi Ranbo abrite un grand nombre de meurs locales. Enquêter
teau furent contrées autant par les manipulations poli- documents et d’objets importants qui ont sur de telles rumeurs
peut même servir de
tiques du Clan de la Grue que par les combats. Les deux été cachés précipitamment quand la direc-
point de départ à une
clans ne cessèrent d’amplifier leurs tentatives, jusqu’à la tion du château a changé de mains.
aventure complète.
grande bataille de 1123, où le Champion du Clan du Lion, $ Des esprits agités errent parfois dans
Akodo Arasou, est mort. Toshi Ranbo a donc une place Comme pour toutes
les couloirs du donjon ou sur les terrains
grossièrement exagérée dans l’histoire, bien au-delà de sa les rumeurs, il n’est
de bataille où ils sont morts des siècles jamais facile de déceler
taille ou de son importance stratégique. plus tôt. le vrai du faux. Nous
vous laissons le soin de
déterminer la part de
vérité dans ces rumeurs.
Bien entendu, même
les histoires les plus
étranges peuvent avoir
un fond de vérité.
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

régisseur de Toshi Ranbo idée d’aventure :


duplicité à
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  2
Kakita Sukenobu est le régisseur actuel de Toshi Ranbo.
4
toshi ranbo
Ce beau jeune homme a effectué son gempuku seulement
quelques années auparavant. Il porte les longs cheveux Accroche Les PJ se trouvent à Toshi Ranbo,
teints en blanc de son clan. Il a hérité de ce poste presti- où la situation est tendue après la mort du
gieux de manière soudaine, après le renvoi inattendu du Champion du Clan du Lion Akodo Arasou sous
précédent régisseur, Daidoji Yoshida. Autant ce dernier une flèche tirée par la Championne du Clan de
était martial, autant Sukenobu a l’âme d’un artiste et d’un la Grue Doji Hotaru. Kakita Sukenobu cherche à
romantique, et rares sont ceux qui le jugent prêt à assu- empêcher d’autres combats, mais le Clan du Lion,
mer ses tâches. campé non loin, est vigilant et prêt à venger son
Puisqu’il dirige une cour composée de tacticiens agres- champion. De plus, le régisseur passe beaucoup
sifs dans un château assiégé, Sukenobu est bombardé de temps avec une mystérieuse ronin nommée
de conseils qui s’opposent à tout ce en quoi il croit. Pié- Hanako, et les rumeurs d’une romance scanda-
gé entre son envie de paix, pour se concentrer sur son lisent la cour.
art, et son devoir, il cherche à établir son propre cercle
Développement À Toshi Ranbo, les courti-
de conseillers. Il s’entoure donc de samouraïs au tempé-
sans et conseillers hurlent à qui veut les entendre
rament artistique tout aussi répugnés que lui par les atti-
qu’il faut préparer les défenses en attendant la
tudes belliqueuses qui dominent la cour de Toshi Ranbo.
prochaine attaque du Clan du Lion, voire lancer
une offensive pour les repousser hors des terres
SOCIÉTAL PERSONNEL
du Clan de la Grue. Parmi les autres intrigues,
60 HONNEUR ENDURANCE
10 les PJ entendent (sûrement au travers d’un pan-
2 4 neau en papier de riz) Hanako s’entretenir avec
50 GLOIRE SANG-FROID
10 un allié inconnu d’un complot visant à aider le
3 3 Clan du Lion à reprendre le château. Que ce soit
45 STATUT 3 ATTENTION
7 en la confrontant, en fouillant dans les archives
ou en interrogeant les membres du Clan de la
+2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
3 Grue présents lors de la prise du château, les PJ
apprennent que Hanako est la seule survivante
ARTISANAL 3 MARTIAL 2 SAVANT 2 SOCIAL 3 PRO. 0 de la famille Goseki. Après avoir échappé au
massacre de Retsu, elle a reçu une éducation
AVANTAGES DÉSAVANTAGES martiale. Elle compte aider le Clan du Lion à
récupérer le château, afin de reprendre son nom
e i e i R ti e sti
de famille du même coup. Bien qu’elle puisse
 artisanal ; mental  social ; relations
s’approcher facilement de Sukenobu, elle n’en-
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
visage pas de l’assassiner puisque son affection
pour lui n’est pas feinte.
t : portée 1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5/7 ; Acéré,
Cérémoniel 三 Paroxysme Le temps presse et, sans l’inter-
vention des PJ, Hanako utilisera les informations
i e e t rt )  : kimono somptueux (Résistance qu’elle a dénichées à titre d’invitée à la cour du
physique 1 ; Cérémoniel), wakizashi Clan de la Grue et ses impressionnants talents
i e e t tre)  : armure laquée (Résistance phy- au sabre pour donner un avantage au Clan du
sique 4 ; Cérémoniel, Militaire), yumi Lion lors de la prochaine attaque. Les PJ doivent
choisir entre alerter le Clan de la Grue et aider
CAPACITÉS Hanako à reprendre le château et son nom. Pour
compliquer encore les choses, ils ne peuvent pas
R N
prévenir Sukenobu sans admettre avoir écouté
Lorsque Kakita Sukenobu ou l’un de ses alliés à portée 0-4 aux portes, ce qui constitue un manquement
échoue à un test d’attaque avec une arme, il élimine majeur à l’étiquette. De plus, l’affection de Suke-
2 points de Conflit. nobu pour Hanako ferait en sorte qu’il refuserait
de les écouter et qu’il s’en prendrait à eux.

40
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

kyūden bayushi
les légendes du
clan du scorpion
Le palais de la Soie et de l’Ombre, demeure de la famille
dirigeante du Clan du Scorpion, est inhabituel en ce qu’il
semble, vu de l’extérieur, assez ordinaire. Ce donjon
de neuf niveaux plutôt conventionnel se situe au milieu
$ Le labyrinthe a été dessiné aux premiers
d’un vaste et magnifique complexe (peu défendu en
jours de l’Empire par Kaiu en personne, à
apparence, même s’il bénéficie d’un mur d’enceinte et
la demande de Bayushi.
se trouve au sommet d’un plateau). Sous de nombreux
a e il re e le a l re ūden ji d lan de $ Les sous-sols du château renferment un
la Grue, un autre immense complexe bâti en hauteur et réseau de tunnels, qui s’étendent sous
faiblement fortifié, mais la comparaison n’est valable que les terres du Clan du Scorpion pour relier
de l’extérieur. Comme tout ce qui touche au Clan du Scor- toutes les forteresses du clan.
pion, le beau visage présenté au reste de l’Empire n’est $ A l r nd de nnel de ūden
qu’un mensonge. Bayushi, il existe un mystérieux lac étin-
L’intérieur du donjon est plutôt agréable et confor- celant. L’esprit de Bayushi en personne y
table, similaire à celui d’un château du Clan de la Grue. flotte parfois.
Des serviteurs attentifs s’assurent que chaque invité béné-
ficie de tout le luxe possible, mais ces derniers réalisent $ Tous ceux qui dérobent des objets au bos-
rapidement l’un des traits distinctifs du château. L’intérieur quet des Traîtres sont frappés de mal-
du donjon ne présente aucun mur non porteur. Les salles chance.
e l ir n l d li i ar de annea h ji
et par des paravents faciles à déplacer, ce qui permet de
reconfigurer l’espace à volonté. Au réveil, nombre d’invités
ont ainsi cru se retrouver dans une autre partie du château, pièges, et le labyrinthe devient un obstacle fort dangereux
une astuce qui permet de les embarrasser aisément en les pour tous ceux qui tenteraient de s’approcher du donjon
empêchant de retrouver la salle de réunion de la veille, ou sans autorisation.
tout simplement de les déstabiliser. ūden a hi n ien gale en n agni i e
Le donjon est entouré d’un labyrinthe complexe qui jardin qui recouvre tout l’espace du plateau inoccupé par
semble taillé dans de hautes haies, mais celles-ci cachent des bâtiments. En son centre se trouvent une mare artifi-
en fait d’épais murs. Surnommé le Labyrinthe de Bayushi, cielle et un réseau de ruisseaux. Des allées et des ponts
cet espace comprend des chemins et entrées secrètes permettent de passer d’une section à l’autre. De nom-
destinés à accéder au réseau de tunnels qui parcourent le breux sanctuaires sont disséminés dans le jardin et tous
plateau. En temps de paix, le Clan du Scorpion utilise le sont consacrés aux membres du Clan du Scorpion célèbres
labyrinthe comme une épreuve de sagacité, pour divertir dans tout l’Empire.
ses invités. s. En temps de guerre, il en active les nombreux
Le bosquet des Traîtres
a ara ri i e la l nn e de ūden a hi ne
se trouve pas dans l’enceinte du château, mais à l’exté-
rieur de ses murs, juste derrière le plateau : il s’agit du
bosquet des Traîtres, un massif d’arbres lugubre et hanté.
Selon la tradition, il tombe sous la responsabilité du sei-
gneur du château. Il fut créé au cinquième siècle, lorsque
Bayushi Tesaguri vendit trois des Parchemins Noirs au Clan
du Phénix. Pour avoir trahi le devoir sacré du Clan du Scor-
pion et vendu les parchemins qu’il devait protéger, son
âme fut liée à un arbre, le condamnant à un tourment éter-
nel. Ses possessions furent accrochées aux branches de
l’arbre, formant une décoration macabre qui sert d’aver-
tissement aux passants. Depuis, de nombreux traîtres ont
subi le même sort et, contrairement à la plupart de ses pra-
tiques, le bosquet des Traîtres n’est pas un secret au sein
du Clan du Scorpion. Le lieu sert même d’avertissement :
tout acte déloyal sera sévèrement puni. (Le rituel utilisé n’a
quant à lui jamais été révélé.)

41
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

Shosuro Sanae, maîtresse de go


idée d’aventure :
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  2
Bien que seulement dix années se soient écoulées depuis
4
élire un maître
son gempuku, Shosuro Sanae figure parmi les meilleurs
joueurs de go de Rokugan. Elle voyage régulièrement
Accroche Le Clan du Scorpion organise un
dans tout l’Empire pour représenter son clan en tournoi, rn i de g ūden a hi e re r en-
le visage couvert d’un masque ne laissant apparaître que tants des différents clans y participent, et les
ses yeux et sa bouche. Elle aime converser, mais cache deux favoris sont Shosuro Sanae et son rival de
un conflit interne. Bien qu’elle partage la philosophie du longue date, Kitsuki Taizo, du Clan du Dragon.
Clan du Scorpion selon laquelle le bushido est une poli- Les courtisans s’affairent en coulisses pour tenter
tesse pour samouraïs idéalistes et qu’elle fasse preuve d’apporter de la gloire à leur clan grâce à une
d’un profond cynisme face à l’humanité, elle ressent aus- victoire, et compétiteurs comme spectateurs
si une certaine jalousie et un peu d’admiration pour ceux sont au cœur de leurs machinations.
qui connaissent cet optimisme. Elle cherche donc souvent Développement Les PJ sont piégés dans
à converser avec ce genre de personnes. Son respect peut des intrigues destinées à influencer l’issue du
vous garantir sa loyauté, mais ceux qui trahissent leurs tournoi. Les tentatives vont des perturbations
idéaux trouveront en elle une ennemie acharnée, et elle mineures au sabotage, en passant par le chan-
n’hésitera pas à les punir pour avoir osé confirmer sa vision tage et les pots-de-vin. Cependant, au pire
noire du monde. moment pour lui, Kitsuki Taizo tombe malade,
Les tournois de go l’amènent dans tout l’Empire, où victime d’un empoisonnement. Les accusations
elle a noué de nombreuses amitiés et bénéficie d’innom- ne tardent pas de la part du Clan du Dragon,
ra le na ri ar i le dai le agi - qui prétend que Sanae a fait empoisonner Taizo
trats, les courtisans et les autres joueurs de go. Elle peut plutôt que de risquer une défaite.
devenir une alliée exceptionnelle, source d’aide et d’infor-
mations, ou une ennemie terrifiante, qui saura frapper ses
三 Paroxysme Le coupable est en fait un autre
cibles bien au-delà de ses terres. participant, rival de Kitsuki Taizo, tellement
obsédé par ses défaites qu’il espère se débar-
SOCIÉTAL PERSONNEL rasser de lui et faire porter le chapeau au Clan
du Scorpion. Si les PJ parviennent à identifier le
25 HONNEUR ENDURANCE
10 véritable coupable (que le MJ choisira en fonc-
2 4 tion de sa campagne), ils s’attireront la gratitude
65 GLOIRE SANG-FROID
12
3 3 des clans du Dragon et du Scorpion, et bénéfi-

20 STATUT 3 ATTENTION
7
cieront d’une alliance avec Sanae et Taizo. Bien
entendu, selon leurs propres loyautés claniques
ou croyances, les PJ peuvent préférer accuser
+2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
2 Sanae, voire quelqu’un d’autre.

ARTISANAL 3 MARTIAL 1 SAVANT 2 SOCIAL 4 PRO. 0

AVANTAGES DÉSAVANTAGES

etit ris r ssi


 martial ; physique  social ; mental
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS

i s i : portée 0-1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5/7 ; Acé-


ré, Cérémoniel, Discret

i e e t rt )  : tunique somptueuse (Résistance


physique 1 ; Cérémoniel), jeu de go

CAPACITÉS

A R
Lorsque Shosuro Sanae exploite le désavantage de son
adversaire durant un jeu quelconque, elle peut relancer
jusqu’à quatre dés (au lieu de deux).

42
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

kyūden doji L’éternel deuxième


Le siège de la famille dirigeante du Clan de la Grue se situe Les plans originaux du palais auraient été dessinés par
sur un haut plateau entouré de falaises, qui surplombe la Dame Doji, en hommage au palais impérial d’Otosan Uchi.
mer d’Amaterasu. Nichée sur la plage en contrebas du Depuis, le Clan de la Grue met un point d’honneur à s’as-
château se trouve une ville portuaire accueillant des mil- rer e ūden ji garde a la e de de i e l
liers d’habitants. Depuis celle-ci, le donjon est d’une beau- beau château de l’Empire, après le palais impérial. Bien
té surprenante, qui suscite l’admiration de tous, même de entendu, égaler ce dernier serait une insulte, mais des-
ceux qui y ont toujours vécu. cendre au classement équivaudrait à perdre la face.
ūden ji n’e a ne r i i a i n ili aire e la- ūden ji a a eilli la r d’hi er i riale l
teau est entouré d’un mur simple et élégant qui délimite souvent que tout autre château, au point que le Clan de la
le territoire et évite aux invités imprudents de tomber du Grue a depuis longtemps bâti une magnifique résidence
haut de la falaise. Le donjon lui-même, à peine moins haut pour l’Empereur, ainsi que de nombreux autres quartiers
que celui du palais impérial à Otosan Uchi, est construit à luxueux pour les invités. Même lorsque la cour se trouve
des fins esthétiques plus que défensives. Les Vénérables aille r a er l’hi er ūden ji e n grand ri i-
Palais de la Grue sont un centre artistique et culturel, et lège, et les samouraïs des autres clans travaillent dur pour
pas une installation militaire. Les palais se trouvant au en bénéficier.
cœur du territoire du Clan de la Grue, ils n’ont jamais été
menacés par une armée ennemie.
ne i le a an e r he e a ied de ūden ji
représente le site le plus sacré du territoire : le Grand
Voyage de la Dame est l’endroit où Dame Doji a été vue des histoires
pour la dernière fois dans le monde des hommes. Elle survé-
cut longtemps à son époux mortel, Kakita, mais lorsqu’elle
alléchantes
apprit le décès de Hida, dernier membre divin de sa fra-
trie, elle s’avança au bord des roches au coucher du soleil, $ Dame Doji est parfois aperçue, à l’aube ou
puis leva les bras en attendant les vagues. La légende veut au crépuscule, dans les jardins.
qu’elle ait été emportée par une grande vague au moment
précis où les ultimes rayons d’Amaterasu l’atteignirent. De
$ Les sous-sols du palais accueillent un
nos jours, tous les Champions du Clan de la Grue doivent musée secret des déboires artistiques. Il
passer une nuit à prier sur le Grand Voyage de la Dame rappelle à tous le coût des imperfections :
pour bénéficier de la sagesse de leur ancêtre divine. Au les nouvelles pièces sont rares, mais voire
cours du festival annuel du Chrysanthème, les jeunes de son œuvre y être exposée est un sort pire
tous les clans s’y retrouvent pour décorer les roches de que la mort.
fleurs fraîchement écloses, en l’honneur de Dame Doji. $ Certains serviteurs ont gagné tellement
d'argent en révélant aux autres clans
Les jardins merveilleux les futures tendances de la mode ou de
l'art qu'ils ont pu partir vivre dans des
’ n de rai rin i a de ūden ji n e jardin villes lointaines.
légendaires, qui n’étaient au départ que le jardin floral $ Les magistrats du Clan de la Grue et
de Dame Doji. Ces jardins étagés constituent un réseau
leurs serviteurs surveillent étroitement la
de terrasses de sable, de pierres et de fleurs reliées entre
ville portuaire pour assurer qu’aucun pro-
elles. Plus vastes que nombre de villages, ils occupent
blème n’entache l’expérience des estimés
r de la i i de l’e a e l de ūden ji e
visiteurs.
maîtres jardiniers de l’académie Kakita veillent sur les jar-
dins et effectuent des changements subtils tout au long
de l’année pour assurer un renouvellement constant des
plantations. Bien que le Clan de la Grue préserve la splen-
deur des jardins uniquement pour le plaisir d’offrir une
telle beauté au monde, il est évidemment conscient de
leur valeur diplomatique. De nombreux samouraïs sont en
effet prêts à échanger des faveurs pour ne serait-ce qu’une
chance de visiter les lieux.

43
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

idée d’aventure :
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  2 4
l’amour maudit
Shijin est l’un des poètes encore en vie les plus célèbres
Accroche Une compétition artistique doit
de l’Empire puisqu’il a consacré toute sa longue vie à se
perfectionner. Voûté et maigre, doté d’une fine et longue e enir dan le jardin de ūden ji en re
barbe blanche, il passe une bonne partie de son temps deux des plus talentueux jeunes artistes du Clan
dan le agni i e jardin de ūden ji di er r de la Grue : Kakita Shiko, fille du grand poète
la beauté qui l’entoure et à rédiger les poèmes qu’elle lui Shijin, et Kakita Torikago, qui s’est récemment vu
inspire. Bien qu’il préfère éviter les distractions liées à la accorder l’honneur de résider dans les quartiers
politique, sa longue vie de poète lui a fait rencontrer des d’invités du Clan de la Grue à Otosan Uchi. Tous
milliers de samouraïs dans tout l’Empire, et il peut compter deux devront créer une œuvre d’art à offrir au fils
sur de nombreux alliés qui lui doivent des faveurs. de l’Empereur, et les enjeux très élevés poussent
La rumeur veut qu’il cherche un apprenti. Que ce soit les mécènes à chercher à s’associer aux deux
vrai ou non, elle lui vaut beaucoup d’attention. Les rares samouraïs. Cependant, Shiko et Torikago sont
fois où il se présente à la cour, il est entouré de samouraïs amants et, la première nuit du concours, les
qui cherchent désespérément à s’attirer ses faveurs ou à lettres envoyées par Torikago à Shiko sont
bénéficier de son amitié. dérobées. Cette dernière cherche donc, en
compagnie de son père, des alliés qui pourront
SOCIÉTAL PERSONNEL retrouver les missives. Bien entendu, le contenu
de ces lettres ne leur est pas révélé, sans quoi les
60 HONNEUR ENDURANCE
10
2 4 deux amants perdraient la face.

70 GLOIRE SANG-FROID
10 Développement Si les PJ parviennent à
3 3 démasquer les coupables, ils découvrent qu’ils
25 STATUT 4 ATTENTION
7 travaillent pour un courtisan du Clan de la Grue
qui a perdu sa place à Otosan Uchi en raison de
, +1, –2
ATTITUDE : DÉTACHÉ
VIGILANCE
3 la promotion de Torikago. Son but est donc de
le faire chanter pour qu’il perde la compétition,
ARTISANAL 5 MARTIAL 0 SAVANT 3 SOCIAL 4 PRO. 0 en espérant que cela suffise à mettre un terme
à son affectation. Apprendre la vérité sur l’affaire
AVANTAGES DÉSAVANTAGES pourrait obliger les PJ à se questionner sur leur
honneur puisqu’ils pourraient avoir à cacher une
N t ire e t e i e ie i r e :
déshonorable liaison.
 artisanal ; relations iei esse
 martial ; physique 三 Paroxysme Si les PJ décident de récupérer
les lettres, plusieurs approches s’offrent à eux :
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
tenter de les voler, ce qui les obligera à recou-
i s i : portée 0-1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5/7 ; Acé- rir à des techniques déshonorables, ou rencon-
ré, Cérémoniel, Discret trer le rival de Torikago pour le faire chanter, en
lui indiquant qu’ils ont des preuves de sa traî-
i e e t rt )  : tunique somptueuse (Résistance trise. Cette solution en fera un ennemi juré qui
physique 1 ; Cérémoniel), matériel d’écriture cherchera à détruire les PJ et la menace qu’ils
représentent.
CAPACITÉS

GN A R N
Une fois par session de jeu, au prix d’une activité de
temps mort, Kakita Shijin peut passer plusieurs semaines
à former un étudiant qui l’a impressionné. Un person-
nage qui s’adonne à l’étude gagne 3 points de Gloire et
e a rir le hūji le ar ne n ’ n an enir
compte des prérequis.

44
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

le palais impérial Décrire l’intérieur du palais impérial nécessiterait un


livre distinct. Chaque pièce, dans ses moindres détails,
Au cœur d’Otosan Uchi, ceint par les Murs Enchantés est une œuvre à l’esthétique incomparable. L’art et l’archi-
d’Ekohikei, le district central, se trouve la cité interdite, le tecture sont d’une qualité inégalée, mais d’une concep-
domaine personnel de l’Empereur. Ce palais d’une forme tion traditionnelle et conservatrice. De nombreuses parties
irrégulière est entouré de sa propre enceinte peu élevée, du palais n’ont pas changé depuis la construction de la
mais épaisse et bien gardée, et percée de deux portes structure originale au premier siècle. Une armée de servi-
seulement. La porte principale est réservée à l’Empereur teurs travaille dur, jour et nuit, pour s’assurer que le palais
et à ses visiteurs, tandis que la porte Fonctionnelle est uti- soit parfaitement entretenu et propre. Les shugenja de la
lisée par les serviteurs et les hinin. famille Seppun effectuent également des rituels de purifi-
Seuls l’Empereur, sa famille immédiate et les quelques cation quotidiens pour éliminer la moindre trace de conta-
samouraïs de premier plan qui dirigent la cour impériale mination spirituelle.
ont le droit de vivre dans la cité interdite. Le Hantei y À l’extérieur de la butte impériale, la cité interdite
réside huit mois par an, y accueille la cour impériale et y est occupée par de grands jardins et par les quartiers
écoute les doléances et demandes de ses sujets. Tous les des invités des clans majeurs. Chaque délégation à la
autres, y compris les gardes qui la défendent et les servi- cour impériale y réside. Cet honneur suprême est réser-
teurs, tant heimin que hinin, doivent vivre à l’extérieur et vé à de rares samouraïs, qui appartiennent à l’élite poli-
n’y viennent que pour travailler. tique et qui jouissent de faveurs et de soutiens, unique-
Au cœur de la cité interdite se trouve le palais impé- ment parce qu’ils se présentent quotidiennement à la
rial, la magnifique demeure ancestrale de l’Empereur, cour impériale.
un donjon de dix niveaux bien plus vaste que certains
châteaux. Elle se situe sur un plateau artificiel, la butte
impériale, qu’elle partage avec deux autres bâtiments
plus modestes, occupés par les Otomo et les Seppun.
L’accès à la butte se fait par l’une des nombreuses
rampes. La plus importante, qui passe direc-
tement sous la porte principale, franchit
une série de grandes arches et rejoint
la route principale (la fameuse route
du Tout-Puissant) que l’Empereur
utilise pour entrer ou sortir
d’Otosan Uchi.
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

les rumeurs au idée d’aventure :


palais impérial l’honneur disparu
$ Une porte secrète se trouve à l’arrière de la Accroche Un souvenir de l’épouse défunte
salle du trône, afin de permettre au Hantei de l’Empereur a été dérobé dans sa chambre,
d’entrer et de sortir sans être vu, voire de au palais impérial. La découverte du vol signifie
pouvoir espionner sa propre cour. que le membre de la Garde d’honneur Seppun
qui devait surveiller cette partie du palais devra
$ Des tunnels relient le palais impérial aux
commettre seppuku. Seppun Ishikawa pense
cavernes et passages qui sillonnent les
que cette garde est une femme honorable et
sous-sols d’Otosan Uchi. Si un ennemi
compétente qui ne mérite pas cette fin, et il
s’emparait de la cité interdite, l’Empereur
cherche des alliés qui retrouveront et rapporte-
pourrait s’en servir pour s’échapper.
ront l’objet en toute discrétion.
$ Les arches majestueuses qui surmontent
l’escalier menant à la butte impériale sont Développement L’objet, un netsuke en or
protégées par des glyphes du Clan du frappé du mon des Hantei, a été volé par un
Scorpion. Ceux qui tentent de monter les serviteur qui a emprunté la porte Fonctionnelle
marches sans invitation ou sans appartenir pour partir. Il est relativement facile de retrouver
à la lignée de Hantei se perdent et n’at- le coupable, qui confesse son crime, mais il n’a
teignent jamais le palais. plus l’objet. Il l’a donné au maître du tripot de
la ville afin de payer les dettes de jeu de son
$ Quiconque remplit son devoir envers l’Em-
père malade.
pire peut jouir de bénédictions lors de sa
visite au Temple de Hantei. Un homme 三 Paroxysme Le malfrat qui dirige le tripot
aurait même disparu, emporté vers le ne compte pas coopérer avec les PJ, d’autant
royaume Céleste par Hantei en personne. plus qu’il a compris ce qu’était l’objet et les
moyens de pression que ce dernier lui offre. Pire
encore, il est en contact avec un adepte de la
ah - ai i n i e n ien de an ei
des fins sinistres.
Les jardins abritent également le Temple de Hantei,
érigé par Hantei Genji en l’honneur de son divin père. Le
sanctuaire n’a jamais eu besoin de la moindre réparation
depuis, malgré les siècles écoulés. Il est plutôt petit, tout dai de la a ille n e l ie r kanrinin (gardiens)
juste suffisant pour qu’une personne s’y tienne debout. Il se qui s’occupent du palais impérial. Il s’agit généralement de
situe sur une île de la plus grande mare des jardins, acces- samouraïs de bas niveau des clans majeurs qui ont acquis
sible par un pont orné de statues de tous les Empereurs. les faveurs de la famille Miya. Durant l’hiver, les kanrinin ont
Dès qu’un Hantei meurt et rejoint le royaume Céleste, le les pleins pouvoirs sur le palais. Ils sont responsables des
pont est réaménagé pour y ajouter une nouvelle statue. serviteurs, mais aussi des gardes et des nobles demeurés
sur place. Cette mission, loin d’être passionnante, consiste
Les habitudes hivernales principalement à réviser sans cesse des rapports de servi-
teurs, à inspecter le palais et ses alentours, et à veiller à
Chaque hiver, l’Empereur et sa cour quittent Otosan Uchi ce que les réparations nécessaires soient effectuées. Mais
pour passer la saison auprès d’un clan. À ce moment, la en être chargé est un grand honneur, et remplir cet office
cité interdite est vide et silencieuse, et seuls y restent des avec succès assure aux kanrinin la confiance de leurs supé-
serviteurs, des gardes et les fonctionnaires trop insigni- rieurs. Ils se verront ainsi peut-être attribuer des tâches
fiants pour accompagner la cour. Quelques invités peuvent plus importantes dans le futur. À l’inverse, ne pas mainte-
également demeurer dans leurs quartiers, pour raisons nir le palais en excellent état provoque une immense perte
personnelles, mais c’est exceptionnel. d’honneur. Au minimum, les kanrinin concernés tombent
Malgré cet exode, la résidence de l’Empereur doit à jamais en disgrâce, et ils finissent en général par com-
être supervisée, entretenue et propre dans l’attente de mettre seppuku pour s’épargner la honte. Ainsi, des trem-
son retour au printemps. Cette responsabilité incombe à blements de terre ont causé la perte de plusieurs kanrinin
la famille Miya. À cette fin, au début de chaque hiver, le au cours des siècles.

46
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

Seppun Ishikawa, capitaine de


CAPACITÉS

A A AN N R
Lorsqu’il résiste à l’effet d’une compétence sociale qui
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  5 4 pourrait le distraire de son devoir, Seppun Ishikawa lance
Né à Otosan Uchi durant le festival du Nouvel An, Seppun deux dés de compétence supplémentaires.
Ishikawa a montré très tôt des signes de ses talents mar-
tiaux. Ses parents l’ont alors envoyé suivre l’entraînement
de la famille Kakita. Simple membre de la Garde impériale,
kyūden gotei
il a rapidement retenu l’attention de ses supérieurs, et plus ūden ei in arne ar ien de a e le lan
particulièrement du Champion d’Émeraude Doji Satsume, de la Mante. Il est grandiose, voire extravagant, et met
qui l’a nommé magistrat d’Émeraude. Quand Ishikawa les autres au défi de s’offusquer de cet étalage exagéré
s’est distingué à ce poste, il a reçu le titre de capitaine de de richesse et d’influence étrangère. Il est principalement
la Garde d’honneur Seppun. constitué d’une pierre aux veines verdâtres et rouille, issue
Ishikawa arbore l’allure trompeuse d’un homme ordi- des carrières de l’île de Gotei, sur laquelle il se trouve. Les
naire plutôt doux, qui a été utile durant son emploi de boiseries proviennent d’arbres tropicaux plutôt que des
magistrat, d’autant qu’il a fait preuve de considération chênes, pins et érables du continent. Les toits sont recou-
envers les castes inférieures. Romantique au plus profond verts de cuivre et non de tuiles en argile cuite.
de lui, il aime une femme fiancée à un autre, même s’il De l’intérieur, le château est plus spectaculaire encore
sait que cette émotion pourrait nuire à son devoir. Toute- (ou, selon le point de vue traditionaliste des Rokugani, gro-
fois, c’est un bushi honorable et dévoué qui prend très au tesque). En lieu et place de couloirs étroits, de portes basses
sérieux son devoir envers la famille Hantei. En raison de et de fenêtres protégées par des volets, il dispose de salles
son expérience de magistrat, il connaît la valeur des alliés larges, hautes et ouvertes qui laissent passer le vent pour
et contacts fiables à travers l’Empire, et il cherche toujours rendre plus supportable la chaleur tropicale et humide. Il
à accroître son réseau, en jaugeant les estimés visiteurs est décoré de pierres précieuses et semi-précieuses, d’or et
(tels que les PJ) selon ce critère. d’argent, de plantes exotiques en fleurs et de cages conte-
nant des oiseaux inconnus et des lézards aux couleurs vives.
SOCIÉTAL PERSONNEL

60 HONNEUR ENDURANCE
16 La grotte des Vents divins
4 3 Les grottes et tunnels pullulent sous le château. Creusés
70 GLOIRE SANG-FROID
12
4 3 il y a bien longtemps par l’activité volcanique, ils ont été

45 STATUT 3 ATTENTION
5 étendus par le Clan de la Mante. La connaissance des pas-
sages sûrs est réservée aux dirigeants du clan et à l’uni-
, +1, –2
ATTITUDE : DÉTACHÉ
VIGILANCE
4 té d’élite de la légion des Tempêtes. En plus de fournir
de multiples voies d’accès au château et aux ports secrets
d’où opèrent les bateaux de contrebande du Clan de
ARTISANAL 2 MARTIAL 4 SAVANT 1 SOCIAL 3 PRO. 0 la Mante, ces tunnels mènent également au Coffre-fort
Céleste, une impressionnante caverne, enfoncée dans les
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
profondeurs de la terre, où le Clan de la Mante garde ses
r e ssi re se tet trésors les plus précieux et les plus célèbres. La rumeur
 martial ; courtoisie  social ; relations veut qu’une grande partie de ses richesses provienne des
gaijin, mais nul n’a jamais pu vérifier.
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS

t : portée 1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5/7 ; Acéré, Un humble début


Cérémoniel
ūden ei e a ille n nd la in d re ier
i e e t rt ) : armure laquée (Résistance phy- siècle. À l’époque, il s’agissait simplement d’un village et d’un
sique 4 ; Cérémoniel, Militaire), insigne de son poste donjon défensif que le Clan de la Mante, fidèle à sa répu-
a i n a ai d j n ūden d lan de la an e
i e e t tre) : kimono cérémoniel (Résistance phy-
( r ire e e a ella i n de ūden n’a ja ai
sique 1 ; Cérémoniel), yumi (arc), wakizashi, étalon
admise par les cartographes impériaux, qui réfèrent à l’en-
droit sous le nom de Shiro Gotei.) Le nom de Gotei a été
adopté au cinquième ou sixième siècle, alors que le petit
donjon s’était déjà transformé en un palais imposant.

47
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

idée d’aventure :
une histoire de
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  3
Koharu, une femme musclée et bronzée, est née dans les
2
chauve-souris
rangs des ronin. Durant sa jeunesse, elle a été pirate et
mercenaire, au gré des contrats. Grâce à son charisme et Accroche n i ie ūden ei le
ses compétences, elle a fini par attirer l’attention du Clan rencontrent un vieil homme voûté qui prétend
de la Mante, qui l’a recrutée, ainsi que les ronin auxquels se sentir seul et aimerait avoir un peu de compa-
elle s’était associée. Koharu n’a pas changé son mode de gnie à qui raconter des histoires. Il est étrange-
vie depuis qu’elle a prêté serment au Clan de la Mante, ment perceptif et en sait plus sur les PJ qu’il ne le
mais elle bénéficie maintenant du soutien du clan quand devrait. Ceux qui ont une affinité avec le monde
une mission tourne mal. spirituel remarquent qu’il s’agit d’un kōmori, un
Il est possible de croiser Koharu en de nombreux esprit chauve-souris polymorphe, natif des îles
endroits, embauchée comme mercenaire ou en train de de la Soie et des Épices.
commettre des actes de piraterie. Elle juge les gens selon
leur propre mérite : elle admire les forts et méprise les Développement Le vieil homme raconte
faibles. Quiconque s’en prendra à elle ou ses amis devien- plusieurs histoires à propos de trésors perdus
dra son ennemi juré, mais elle exerce ses activités de mer- dans une grotte située dans les profondeurs des
cenaire avec détachement. C’est une alliée peu fiable, qui jungles des îles du Clan de la Mante. Si les PJ
changera de maître si la somme lui convient, mais une r ali en ’il arlen n ri il e en
amie loyale qui combattra jusqu’à la mort pour les per- décider de chercher la grotte et de braver les
sonnes auxquelles elle tient réellement. périls de l’île.

三 Paroxysme La grotte existe vraiment et


SOCIÉTAL PERSONNEL
contient de nombreuses reliques plus anciennes
35 HONNEUR ENDURANCE
10 que l’humanité. Cependant, elle abrite aussi
3 3 d’innombrables pièges et esprits hostiles. Si les
30 GLOIRE SANG-FROID
12 n rai le ri a e re e il le a ra
2 3 avertis du danger, ce qui leur donne une chance
30 STATUT 2 ATTENTION
6 d’en sortir vivants. Bien entendu, les objets eux-
mêmes peuvent être dangereux puisque ce sont
+2, –2
ATTITUDE : AMBITIEUX
VIGILANCE
3 des reliques d’un âge lointain reliées au pouvoir
d’êtres mythiques.
ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 0 SOCIAL 1 PRO. 2

AVANTAGES DÉSAVANTAGES

N t ire e t r essi e A i e
 social ; relations  social ; relations
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS

s ri : portée 1 (2-3 à deux mains) ; dégâts 3 ;


Dangerosité 3 ; Discret, Entrave, Militaire

i e e t rt ) : armure d’ashigaru (Résistance phy-


sique 3 ; Militaire), wakizashi, rubans de pièces, criquet
porte-bonheur

i e e t tre) : katana

CAPACITÉS

AR N R NN
Tant que Koharu est sur un bateau, si elle effectue un test
ou est prise pour cible, elle peut subir 2 points de Fatigue
et relancer deux dés.

48
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

La guerre et la diplomatie les mains de


Le code du bushido est appelé la Voie du Guerrier puisque l’empereur
tous les samouraïs sont des guerriers. La plupart sont des
bushi, entraînés à l’art de la guerre, mais tous, y compris Deux clans majeurs sont surnommés les Mains
les courtisans, les artisans et les shugenja exercent leur de l’Empereur, des postes cérémoniels qui sou-
devoir envers leur seigneur en s’imposant par une volon- lignent leur importance aux yeux de Hantei et de
té indomptable et par leurs compétences, si ce n’est par l’Empire d’Émeraude.
la force brute. Chaque samouraï combat sur son propre
champ de bataille. La mort ne se trouve qu’à trois pieds $ La Main Gauche est généralement le
d’un bushi mais, à la cour, elle peut résulter d’un simple Clan de la Grue. Il rédige les lois au nom
regard ou d’un mouvement indolent d’éventail. de l’Empereur, promulgue des décrets
À Rokugan, les luttes politiques se livrent principale- et exerce son influence politique pour le
en a ein de r de l’ ire ha e dai e soutenir. Il est assisté dans ses tâches par
chaque gouverneur tient une cour dans son château, son les familles Otomo et Miya, ainsi que par
palais ou son manoir. Ils invitent des courtisans et des arti- les magistrats d’Émeraude. Si l’Empe-
sans des autres familles ou clans pour discuter d’affaires reur devait daigner rencontrer des digni-
importantes, négocier des traités et des accords commer- taires étrangers (aussi impossible que cela
ciaux, et tenter, de manière plus générale, de rehausser le paraisse de nos jours), il serait représenté
pouvoir et le prestige de leur seigneur grâce à des machi- par des membres de sa Main Gauche.
nations sociales. Plus l’hôte détient un rang prestigieux, $ La Main Droite revient habituellement
plus la cour sera puissante, et plus grands seront les dan- au Clan du Lion, qui agit à titre d’armée
gers, ainsi que les possibles récompenses, pour les samou- personnelle de l’Empereur. Ses membres
raïs présents. La cour impériale, tenue par l’Empereur et parcourent l’Empire pour régler les escar-
les Champions Sertis, est la plus grande et la plus impor- mouches et défendre Rokugan contre les
tante. Chaque hiver, la cour d’hiver se tient dans un palais envahisseurs étrangers, dont les Yobanjin.
différent, et il est encore plus prestigieux d’y être convié. La Main Droite peut compter pour cela sur
De nombreux courtisans consacrent leur vie à tenter d’ob- l’aide de la famille Seppun et des légions
tenir une invitation, qui leur permettrait de passer des impériales.
mois aux côtés des plus puissants samouraïs de l’Empire, à
discuter de faits cruciaux pour l’année à venir.
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

R G NA
R
l’art de la diplomatie Ces conventions s’appliquent à toutes les disputes,
qu’elles se livrent à la cour ou sur le champ de bataille.
Rokugan est un empire où les apparences priment. Il est De nombreuses traditions dépendent du maintien des
Dans chaque région, les crucial de réaliser l’importance de préserver sa réputa- apparences et d’une sincérité démontrée plutôt que de
cours ont des pratiques et tion pour comprendre une civilisation érigée par les Kamis l’honnêteté. Ces obligations touchent toutes les sphères
traditions qui changent et dans le but de ressembler au royaume Céleste : aux yeux sociales. Certains clans sont plus doués que d’autres : le
évoluent au fil du temps. Clan du Crabe est méprisé pour sa nature brusque, le Clan
du divin, la perception est la réalité. La courtoisie permet
Clan du Crabe : sur ses de bénéficier de nombreux avantages, tandis que l’ab- du Dragon pour son imprévisibilité ; les Clans de la Grue
terres, la cour, comme sence de politesse coûte cher. Contredire des apparences et du Scorpion sont louangés pour leur élégance et leur
toutes les autres fonctions sans preuve ni cause valable est une source d’embarras subtilité, tandis que le Clan du Lion est connu pour son
bureaucratiques, est autant pour le délateur que pour les personnes présentes, stoïcisme, tant en période de guerre que de paix.
souvent tenue durant les puisque le faux pas ou le fait d’y avoir assisté perturbent
repas, et non avant ou
après, pour que ceux qui
l’harmonie. Les samouraïs honorables et respectueux La structure de la cour
laissent toujours aux autres l’occasion de sauver la face en
y participent puissent Des samouraïs très différents peuvent se présenter à la
retourner plus rapidement ignorant délibérément qu’un éclat de voix honteux a eu
lieu ou en leur permettant de reconnaître leurs torts et de cour. Les courtisans sont omniprésents, mais les officiers
à leurs tâches.
corriger la situation. (les généraux et capitaines aux plus hautes cours, les
Clan de la Grue : depuis À Rokugan, lorsque l’on s’exprime, le fond est moins sergents et lieutenants aux autres) doivent s’y rendre si
le tsunami, toute mention leurs devoirs le leur permettent. Dans les cours les plus
important que la forme. Porter une accusation ou dénon-
d’une catastrophe naturelle notables, des délégués des écoles des clans majeurs, sou-
cer un comportement inadmissible doit se faire minutieu-
est jugée impolie et la plu- vent des sensei, sont présents. Les temples importants
part des courtisans feront sement, pour ne pas se déshonorer soi-même. Tant qu’une
personne est respectueuse, la bienséance est observée et envoient des moines, les forteresses ou villes des repré-
de leur mieux pour l’éviter,
et recourront notamment la société prospère. sentants, et tous les groupes dignes de ce nom s’assurent
aux euphémismes. de dépêcher un délégué à la cour pour écouter les délibé-
rations et planifier leurs actions, voire pour des missions
Clan du Dragon : le plus spéciales.
daimyō ouvre souvent la
séance par un kōan ou une
autre énigme et demande
son interprétation à
chaque participant.
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

En ordre croissant d’importance, les cours municipales Hantei et sa suite pendant une saison. Les familles impé-
R
précèdent les cours régionales, qui cèdent le pas à la cour riales et le Clan de la Grue ont souvent accueilli la cour R G NA
impériale. Les cours claniques sont souvent réservées aux d’hi er a r de dernier i le a in e ūden
er nne inen e d lan e a dai de a ille ’il ji e ūden Se n rennen de ar ier er- Clan du Lion : les
ne sont pas retenus auprès de leur propre cour. Elles se manents pour le Hantei, mais tous les clans majeurs ont eu exercices militaires sont
tiennent généralement à la résidence du Champion du clan, cet honneur au moins une fois. Le Clan du Renard a égale- fréquemment utilisés en
mais la tâche de tenir la cour peut être confiée à un hata- ment accueilli l’Empereur deux fois au cours des premiers guise de préliminaires aux
moto. Les délégations des autres clans (alliés ou ennemis) siècles de Rokugan. initiatives politiques, sujet
inévitablement évoqué
mettent un point d’honneur à assister aux cours claniques,
lorsque les seigneurs
et un invité impérial se présente souvent pour rappeler
le pouvoir de l’Empereur. Une cour tenue par l’une des
Les pratiques et périls de la cour se croisent dans les
campements. Proposer
familles d’un clan majeur ressemble à une cour clanique à Les courtisans doivent s’armer du même courage que le des exercices communs ou
plus petite échelle. Les invités d’une cour familiale viennent guerrier qui affronte les lames ennemies, et l’échec peut une fausse bataille contre
généralement des autres familles du même clan, même si être plus dommageable pour une famille que la mort d’un un autre seigneur est une
des représentants d’autres clans peuvent être présents. samouraï ou la perte d’une bataille. Les victoires des cour- ouverture classique de
Les cours des clans mineurs sont, en théorie, égales tisans sont majeures : savoir déjouer les risques et appor- négociations.
à celles des clans majeurs, mais dans les faits, elles res- ter l’honneur à sa famille sans avoir fait couler le sang Clan du Phénix : le daimyō
semblent plutôt aux cours familiales puisque les clans est une aptitude très courue. Dans un pays où l’honneur quitte généralement la
mineurs ne contrôlent que de petits territoires. En consé- se lave dans le sang et les insultes sont effacées par des pièce après avoir rencontré
quence, leurs courtisans tentent d’obtenir des postes d el le ji j gen e la re ne e rien e ses conseillers, pour que
semi-permanents auprès des cours des clans majeurs. éreintante, au cours de laquelle leur vie et celle de leurs ces derniers puissent
Aucune cour n’est supérieure à la cour impériale. Bien personnes à charge peuvent se trouver en grave danger parler librement. Lorsqu’il
que ce soit la cour personnelle de l’Empereur, son impor- d’un seul regard ou éclat de rire. Les courtisans émérites revient, un porte-parole
désigné fait état des préoc-
tance dans les enjeux politiques des clans majeurs est telle doivent savoir contrecarrer, miner et détruire leurs adver-
cupations du groupe, afin
qu’elle a toujours lieu, que Hantei daigne s’y présenter saires sans subir le même sort en retour.
que le daimyō ne sache pas
ou non (et il s’abstient généralement). La cour impériale Plus encore que tout autre aspect de la vie, la cour qui en est à l’origine.
actuelle est un lieu de confrontation où les représentants étouffe sous le poids des conventions sociales, bouffies
et meneurs de clans ont le plein pouvoir de prendre des du pouvoir et de l’importance des lieux. Chaque seconde Clan du Scorpion : lorsque
décisions sans devoir en référer à leur Champion, et seuls passée à la cour doit être empreinte d’une grâce, d’une le saké ou le thé est servi,
l’invité qui est arrivé en
les plus compétents et les plus dignes de confiance y sont étiquette et d’un art du discours indirect destinés à expri-
dernier doit boire en
donc dépêchés. mer ce que de simples mots ne sauraient dire. Le moindre
premier. Si deux invités
Le Chancelier impérial représente l’Empereur lorsque mot est pesé pour tout offrir sans rien promettre, ce qui arrivent en même temps,
celui-ci ne peut venir en personne. Le chancelier dirige la permet aux négociateurs de jouer entre diverses interpré- ils boivent ensemble.
cour, en compagnie de vice-chanceliers et de hérauts : il tations sans jamais perdre la face. Un sens plus profond
détermine l’ordre de parole des délégations et s’assure encore est toujours caché entre les lignes, et tout s’entend Clan de la Licorne : à
Khanbulak, la poésie
que tous les membres présents respectent l’étiquette et sans jamais être dit. Dans l’écart entre ce qui est dit et ce
rokugani moderne est à
le protocole. Son poste lui permet d’influencer l’ordre du qui est signifié, des accords sont conclus et des guerres
la mode et de nombreuses
jour de manière plus ou moins discrète. Le poste informel gagnées, bien qu’aucun traité ou alliance ne soit mention- séances sont ouvertes par
de Conseiller impérial a récemment été créé pour aider né directement. des récitals.
l’Empereur dans toutes les tâches que celui-ci souhaite e le dai ine r i in l en ign ren n
déléguer. Bayushi Kachiko est la première Conseillère courtisan sans bonne raison peuvent jeter le déshonneur
impériale. Les représentants des autres clans murmurent sur leur famille pour avoir manqué à l’étiquette. Presque
qu’elle aurait une influence indue sur Hantei, mais per- toutes les cours sont subdivisées en salles et jardins pri-
sonne n’a encore osé tenter d’affaiblir sa position. vés où il est possible de discuter sans être entendu, et où
Durant la majeure partie de l’année, la cour impé- les détails des ententes peuvent être confirmés. Les cour-
riale siège à Otosan Uchi, mais à l’automne, l’Empereur tisans retournent auprès de leur clan en basse saison ou
annonce l’endroit où se tiendra la cour d’hiver et quel envoient des messagers porter la nouvelle des accords
clan aura l’honneur de l’accueillir. Il s’agit d’un privilège conclus. Peu de ces alliances sont couchées sur le papier,
immense, et les clans se battent pour avoir le droit de loger puisque la parole d’un samouraï suffit.

51
C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

les conversations privées


Les murs en papier de Rokugan ont mené à l’adoption manière. Il suffit de cacher sa bouche pour indiquer
de certaines conventions. Conformément à l’étiquette, que l’on tient une conversation privée et que seul
tout le monde doit ignorer ce qui a été dit derrière un l’interlocuteur est concerné. Le décorum exige que
mur en papier, même si les échanges étaient parfai- toute personne qui entendrait une telle conversation
tement audibles. Mentionner une conversation privée doive l’ignorer, au même titre que celles qui éma-
équivaut à admettre l’avoir écoutée, un acte déshono- nen de derri re n h ji n r en a ier ien
rable qui minerait les entreprises futures. Comme les entendu, en pratique, cette convention empêche
annea h ji lia le e a i le n en e simplement d’admettre avoir entendu, mais les
semblables à des murs permanents, les mêmes règles samouraïs agissent tout de même souvent en fonc-
s’appliquent. Cela arrange les samouraïs qui œuvrent tion de ces informations. La plupart des courtisans
dans des châteaux envahis par les courtisans, puisqu’ils comptent là-dessus et utilisent avec une grande pré-
peuvent bénéficier d’un peu d’intimité en passant sim- cision leur éventail, ou les paravents, pour colporter
plement derrière un paravent. des rumeurs ou manipuler le flux d’informations, sans
Une conséquence moins évidente de cet état qu’il soit possible de remonter jusqu’à eux, même si
de fait est que les éventails sont traités de la même tout le monde sait qu’ils en sont les instigateurs.

L’échange d’otages (hitojichi) copie des Mensonges de Bayushi ou du Commandement


d’Akodo, envoie donc un message clair.
Il s’agit là d’une pratique aussi ancienne que l’Empire, sou-
vent utilisée par l’Empereur pour faire respecter la paix, par-
fois plus que de raison. Des échanges d’otages ont généra-
Les mariages et adoptions
lement lieu entre samouraïs suite à de longues négociations Les unions entre familles sont un élément clé de la poli-
à la cour, ou en réaction à l’issue d’une bataille. tique, et elles se font au travers des adoptions et des
Les otages sont particulièrement bien traités par le clan mariages. Les fiançailles et adoptions se font par contrat,
qui les accueille. Ils sont toujours jeunes, n’ayant pas effec- négocié entre les familles, et peuvent ou non prévoir de
tué leur gempuku, proviennent de familles importantes et consulter les futurs époux, enfants ou parents. La plupart
sont doués de grands talents. Ils peuvent parfois fréquen- des familles emploient un nakōdo afin de trouver un bon
ter l’école du clan, parce qu’ils ont reçu une faveur ou que parti pour leur héritier ou pour identifier un enfant à adop-
les termes de l’échange l’indiquaient. Si leur présence vise ter, mais aussi pour mener les négociations.
à assurer que leur clan d’origine se tienne à carreau, ce Quand les entremetteurs planifient des mariages, ils
n’est aucunement une garantie, mais plutôt un moyen de considèrent de nombreux facteurs, comme les person-
pression supplémentaire pour faire respecter une entente nalités, la différence d’âge, l’orientation sexuelle et les
à sa famille. compétences. Le facteur le plus important reste toute-
fois que les besoins politiques des clans soient comblés
Les présents par le mariage, et non que la félicité conjugale soit au
rendez-vous. Les désirs des individus passent après les
n dai rni e a ra e d n il e en besoins familiaux, si tant est qu’ils soient pris en compte.
avoir besoin. Il est donc insultant d’offrir un cadeau utile à e i le n na d rennen e e in e d ir
un noble : on insinuerait que leur seigneur est incapable en considération. Benten, Fortune des arts et de l’amour
de le leur procurer. En théorie, seul un ronin ou un pay- romantique, est l’une des huit Fortunes majeures, et nul ne
san serait susceptible d’accepter un don en argent, mais nie le pouvoir de l’amour ou l’attrait de la passion. Cette For-
les pots-de-vin font partie des problèmes sur lesquels les tune n’établit aucune discrimination sociale ou de genre et
magistrats enquêtent régulièrement. laisse l’amour s’exprimer. De plus, le Tao de Shinsei explique
Les présents sont offerts pour plusieurs raisons : célé- que l’amour et le romantisme font partie de la nature
brer un événement ou une occasion joyeuse, rencontrer un humaine. Cependant, seuls les paysans peuvent s’autoriser
supérieur pour la première fois, reconnaître le mérite du à exprimer leur amour puisque tout samouraï est d’abord
récipiendaire, souligner un anniversaire particulier. Malgré redevable à son clan et à son seigneur. Un mariage réussi
les trois refus de politesse traditionnels, le récipiendaire n’est pas nécessairement fondé sur les sentiments, bien que
n’a aucun moyen socialement acceptable de refuser un l’absence de haine viscérale semble être nécessaire. Il n’est
cadeau. Ce dernier peut donc être une insulte subtile pas impossible pour un samouraï de se marier par amour,
pour le noble qui le reçoit ou pour son seigneur. Offrir à mais il faut une certaine dose de chance pour que l’autre
un samouraï une chose qu’il possède déjà, comme une famille et l’entremetteur soient favorables à cette union.

52
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

La partie cruciale du contrat indique qui du mari ou de presque impossibles. La plupart des armées de Rokugan
la femme se joint à l’autre famille. En règle générale, la ne sont pas équipées pour briser un siège, et bien que le
famille la plus haut placée accueille le partenaire inférieur. Clan du Crabe possède des spécialistes en la matière, ils
Cette tradition permet aux familles de choisir de talen- sont souvent occupés par la défense de la Muraille.
tueux samouraïs de rang inférieur, qui progressent alors
socialement par ce biais.
Les armées d’Émeraude
Les adoptions sont tout aussi importantes que les
mariages pour consolider les unions politiques. Là encore, Les armées de Rokugan sont principalement compo-
les personnalités, l’âge et d’autres facteurs sont pris en sées de forces d’infanterie réunissant des ashigaru, des
compte, mais demeurent secondaires. Adopter des nour- paysans-soldats semi-professionnels, et des conscrits. Les
rissons ou des samouraïs prometteurs de familles vas- ashigaru sont généralement des réservistes qui rentrent
sales ou mineures est monnaie courante, et représente dans leur village quand ils ne sont pas de service. Quant
un grand honneur pour toutes les personnes impliquées. aux conscrits, souvent mal équipés et peu entraînés, ils
Les samouraïs adoptés prennent le nom de leur nouvelle sont envoyés au front, en première ligne pour y mourir.
famille et sont traités en tout point comme les enfants natu- De nombreux clans majeurs comportent des familles
rels. Adopter un adulte n’est pas rare, surtout quand un d’ashigaru qui sont fières de les servir depuis des généra-
mariage est impossible, à cause de l’orientation sexuelle tions à titre de gardes et d’assistants dōshin de magistrats.
du candidat ou d’un mariage préexistant. Malgré tout, en temps de guerre, les ashigaru doivent
Certaines familles ont des pratiques différentes : chez compter sur des commandants compétents, une aide
les Utaku, les filles n’ont pas le droit d’épouser des hommes divine et une supériorité numérique écrasante pour espé-
de statut supérieur, de même, la famille Matsu les en décou- rer vaincre des bushi en armure.
rage fortement, tandis que les Doji les y poussent (ainsi que Les véritables tactiques de cavalerie ne peuvent être
leurs fils). Les traditions familiales en lien avec l’adoption mises en place qu’en la présence de chevaux du Clan de
sont extrêmement rares, c’est pourquoi elle est souvent la Licorne, dont les étalons ne sont pas natifs de l’Empire.
utilisée comme une alternative au mariage. Quoi qu’il en Le poney rokugani n’est pas assez robuste pour la cavale-
soit, la famille de statut supérieur qui a accueilli un nou- rie militaire, mais il est utilisé par les éclaireurs et l’infanterie
veau membre paie traditionnellement celle qui vient d’en montée. Depuis le retour du Clan de la Licorne, les autres
perdre un. Il appartient à l’entremetteur de réaliser les arran- armées s’entraînent pour contrer sa cavalerie, souvent suite
gements nécessaires pour le paiement, qui peuvent créer à une défaite humiliante, mais rares sont ceux qui peuvent
des tensions politiques bien plus importantes qu’un simple se targuer de posséder une cavalerie digne de ce nom.
(et vil) échange d’argent. Parmi les seigneurs les plus puis- Rokugan est une société féodale, ce qui se reflète dans
sants, des échanges de terres, de châteaux, de personnel, l’ rgani a i n de e ar e ha e dai r in ial e
d’œuvres d’art et de biens rares, comme des chevaux ou du responsable de lever son armée, formée de villageois et de
bétail, peuvent être inclus dans les négociations. vassaux, de l’entraîner et de l’équiper. Au besoin, les gardes
du château peuvent être réaffectés dans l’armée. Il en résulte

la guerre des unités bigarrées composées de lanciers ashigaru et de


samouraïs armés d’un sabre et d’un arc, parfois renforcées par
La guerre ne peut avoir lieu qu’au printemps, en été ou en des cavaliers et des shugenja. Chaque unité est commandée
automne. Partir en guerre en hiver serait de la folie : les par un meneur, le kashira, qui répercute les directives du géné-
neiges abondantes, la glace et le froid mordant qui règnent ral. En plus des combattants, les unités accueillent des joueurs
sur presque tout Rokugan mettraient l’armée en danger. Les de clairon et de tambour, ainsi que des porte-bannières, dont
zones préservées de la neige, comme les côtes ou les îles le rôle est essentiel en ce qu’ils permettent aux kashira de
de la Soie et des Épices, sont souvent impraticables pour les diriger leurs forces pendant la bataille et aux tacticiens de les
armées, en raison des jungles denses, des plages rocheuses identifier afin de prévoir leurs stratégies. Dans les grandes
ou sablonneuses, des falaises et des deltas. Peu de batailles armées, une hiérarchie détaillée est nécessaire pour coordon-
prennent place au printemps, par respect des coutumes ner les piquiers et les samouraïs : des capitaines (taisa) et des
anciennes et de la sagesse populaire. La plupart des com- sergents (gunsō) prennent alors la relève du kashira. Bien que
bats se tiennent sous la chaleur et l’humidité de l’été : le sang la l ar de dai aien re ne r a i n dan l’ar de la
des samouraïs et des paysans se mélange alors à la pous- guerre, ils peuvent déléguer les décisions stratégiques et tac-
sière créée par les sécheresses fréquentes. Si les campagnes tiques à un général, leur hatamoto par exemple.
sont particulièrement longues, elles peuvent durer jusqu’en and l ie r dai d i en a re n enne i
automne, mais la saison des récoltes et de la collecte des commun, leurs armées sont jointes mais gardent leur hié-
impôts motive les clans à leur trouver une conclusion. rarchie d’origine, et chaque seigneur donne des ordres à
Les batailles sont souvent livrées le long des routes ses subalternes. Dans tous les cas, la formation des unités
ou près de châteaux fortifiés, pour que l’armée perdante demeure prévisible. Les lanciers ashigaru se déploient en
puisse facilement battre en retraite. Les sièges prolongés rectangles plus larges que longs. Les archers, en rang der-
sont rares puisque coûteux : nourrir une armée prise au rière les ashigaru, font pleuvoir leurs flèches sur les forces
piège coûte cher, et l’hiver rend les approvisionnements ennemies. Au moment où les deux camps se rejoignent,

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C H API T R E 1 : L E S F O RT E R E S SES DU PO U V O IR

les formations disparaissent et le champ de bataille se


transforme en un millier de corps à corps brutaux et san- l’armée de
glants. Les combats s’arrêtent quand un général sonne
la retraite, quand tous les soldats sont morts, ou quand l’empereur
les ashigaru rompent les rangs et s’enfuient. Un samouraï
qui prendrait la fuite doit compter sur la même absence Les légions impériales sont très différentes des
d’honneur de la part de tous les bushi présents. armées claniques puisqu’elles sont formées de
Le nombre de soldats et de samouraïs qu’un seigneur samouraïs de tous les clans et menées par le
peut déployer est limité par des édits impériaux, promul- Champion d’Émeraude. Les légions ont toujours
gués pour empêcher que des guerres éclatent entre voi- été au nombre de dix, fortes au maximum de
sins hostiles. Ne pas respecter ces édits impériaux peut dix mille soldats chacune. Cependant, leur taille
être puni de censure, de perte de statut ou de proprié- varie selon les époques et, depuis des siècles,
tés, ou d’une sanction plus sévère, infligée par les légions elle est bien moindre. Chaque légion est divi-
impériales, selon la volonté divine du Hantei. sée en dix régiments, eux-mêmes subdivisés en
cinq compagnies composées de pelotons. Les
commandants viennent de la famille Seppun
Sur le champ de bataille ou de la crème de chaque clan. La plupart des
Au quatrième siècle, après que la guerre Yasuki entre samouraïs proviennent du Clan du Lion, et les
les Clans de la Grue et du Crabe faillit signer la fin de seigneurs peuvent décider d’envoyer des pay-
l’Empire, l’Empereur Hantei Fujiwa décréta que les clans sans pour gonfler les rangs. Ces ashigaru sont
majeurs ne pourraient plus entrer en guerre totale les uns ce qui se rapproche le plus de soldats de métier,
contre les autres. Depuis, les conflits entre clans majeurs puisqu’ils signent un contrat renouvelable de six
se limitent à de « légers » combats aux frontières et à des ans et ne retournent pas chez eux avant de finir
escarmouches entre des armées fortes de quelques cen- leur mandat.
taines d’hommes, un millier au maximum dans chaque L’administration requise pour entretenir,
camp. Mais bien que l’époque actuelle soit surnommée le coordonner et équiper autant de soldats est la
Millénaire paisible, ces batailles sont constantes au prin- responsabilité de la famille Otomo, assistée par
temps et en été. Que ce soit à la cour ou sur le champ de les Miya et les Seppun, connus pour leur esprit
bataille, les clans majeurs cherchent à prendre l’ascendant analytique, et par les clans majeurs, si néces-
sur les autres et à obtenir les faveurs du Hantei. saire. Selon les estimations, la capitale contien-
Les clans majeurs ne lèvent plus la totalité de leurs drait deux fois plus de fonctionnaires que de sol-
armées, sauf pour affronter des ennemis considérés dats en exercice, et plus encore de paysans, qui
comme inhumains : l’Outremonde, les adeptes du sang aident les légions en campagne en s’occupant
des armées d’Iuchiban, ou encore les gaijin. Le Clan du de la cuisine, du nettoyage et de la maintenance
Crabe est toujours prêt à se battre, et celui du Lion est de l’équipement.
disposé à traverser Rokugan à la demande de l’Empe- En temps de paix, les légions impériales
reur dès que les légions impériales ne suffisent pas à la peuvent être affectées aux travaux publics, et
tâche. Le Clan du Lion prend très au sérieux son devoir il est donc primordial que les courtisans aient
de protéger l’Empire et, au fil des siècles, il a combat- l’oreille d’un dirigeant de la famille Otomo ou
tu les gaijin tant à l’intérieur de ses frontières qu’à l’exté- du Champion d’Émeraude.
rieur. Les affrontements sont omniprésents, et il est très
rare que les clans majeurs ne connaissent pas la moindre
escarmouche durant les mois plus chauds. La plupart sont
des luttes intestines entre des familles d’un même clan, Clan du Lion. Celui-ci envahit alors immédiatement la val-
pour des terres ou des questions d’honneur. lée des Deux Généraux, sur les terres du Clan du Phénix,
ce qui avait été son plan initial. Ayant signé le pacte de
La guerre entre les Clans non-agression, le Clan de la Grue dut regarder, impuis-
du Lion et du Phénix sant, son allié se faire assiéger à Shiro Shiba par le Clan
du Lion, qui massacra une grande partie des membres
Au début de l’Empire, le Clan du Lion avait consom- du Clan de la Ki-Rin encore présents à Rokugan, réfugiés
mé toutes ses réserves de nourriture et de trop nom- près de Shiro Shiba pour bénéficier de la protection du
breux paysans avaient été recrutés parmi les ashigaru. Clan du Phénix pendant que le reste du clan voyageait.
En conséquence, le Champion du clan décida de sai- Cependant, le Clan de la Grue recourut à une stratégie
sir des terres du Clan de la Grue à la fin de l’été, pour qui allait fonctionner à merveille durant des siècles : il prit
s’approprier les récoltes. Les descendants de Dame Doji l’ascendant sur le Clan du Lion à la cour, et s’assura que
manœuvrèrent durant des mois à la cour impériale, jusqu’à les surplus de riz mal acquis ne lui profitent pas économi-
obtenir la signature d’un pacte de non-agression avec le quement. De plus, il coupa les lignes d’approvisionnement

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CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

que le Clan du Lion maintenait dans les autres provinces, La guerre entre les Clans de la Grue
pour l’obliger à prendre le risque de traverser ses terres. et du Crabe (la guerre Yasuki)
Lorsque le Clan du Lion s’y aventura, le Clan de la Grue
signala immédiatement ce manquement au pacte de Vers la fin du quatrième siècle, l’Empereur Hantei Fujiwa
non-agression et menaça d’entrer en guerre. tenta de mettre un terme au pouvoir dont bénéficiait une
Pris en tenaille, le Clan du Lion demanda une trêve et cabale de samouraïs, le Gozoku, qui usurpait son autori-
la paix revint. Le Clan du Lion se vit octroyer les terres du té. Il décida de faire éclater l’unité de l’un des principaux
Clan de la Ki-Rin, dont les derniers samouraïs formèrent le soutiens du Gozoku, le Clan de la Grue, en créant un dif-
Clan du Renard. Ce dernier obtint son indépendance et férend entre la famille de courtisans Doji et la famille mar-
des terres dans une autre région de l’Empire. Cette guerre chande Yasuki, qui faisait à ce moment partie du Clan de
est aussi reconnue pour son absence totale de compas- la Grue. À la demande de Fujiwa, le Clan du Crabe enva-
sion. Lorsqu’Isawa Tomokazu tenta de se venger du Clan hit les terres voisines du Clan de la Grue, ce qui donna des
du Lion, la Championne du Clan de la Grue, Doji Ritsuko, idées au Clan du Lion. La guerre éclata quand le Clan du
s’avança pour l’en empêcher, mais refusa le duel. Elle Crabe s’empara des terres des Yasuki, en affirmant que le
encaissa ses attaques élémentaires sans céder et, après Clan de la Grue n’en avait pas besoin.
des jours de résistance passive, les kamis rejetèrent la
requête de Tomokazu de l’abattre. Les forces du Clan du
Phénix perdirent alors toute volonté de se battre et se ren-
dirent. Les trois clans concernés virent là une magnifique
démonstration de stratégie : la victoire Sans Coup montra
qu’il était possible d’atteindre ses objectifs en anéantissant
la volonté de l’ennemi.
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Les machinations de Fujiwa se révélèrent trop efficaces. par un Champion d’Émeraude tyrannique et un Empereur
e dai a i a ai de i l ng e de e faible. Alors que des pluies diluviennes avaient fait pour-
rendre au Champion du Clan de la Grue. Après s’être fait rir les récoltes de tout l’Empire, le Clan du Dragon, déjà
répéter trop souvent qu’il « était inutile aux yeux de son pauvre, demanda un répit pour payer ses taxes annuelles,
seigneur », il décida d’interpréter ces paroles comme un afin d’éviter la famine. Pour seule réponse, le Champion
ordre et non un reproche. La famille Yasuki prêta donc ser- d’Émeraude lui a imposa des amendes, et les réfugiés en
ment au Clan du Crabe, et toutes les tentatives de récon- quête de nourriture commencèrent à quitter les terres du
ciliation ultérieures échouèrent ou furent sabotées par des Clan du Dragon pour rejoindre celles du Clan du Lion.
forces externes. Lorsque ce dernier accusa le Clan du Dragon d’incom-
En fin de compte, cette guerre coûta beaucoup à pétence, son Champion, Togashi Toshimasa, mena une
l’Empire, puisque la famille Yasuki et le Clan de la Grue attaque contre les terres du Clan du Lion pour saisir de
saisirent une grande partie de la récolte de riz impé- la nourriture. Bien que ses forces aient été réduites par
riale. Cette guerre, qui allait avoir des répercussions à son devoir de protection de l’Empire et par une révolte
long terme, démontra les dangers d’une guerre ouverte. paysanne, le Clan du Lion vainquit facilement l’armée du
En conséquence, Fujiwa décréta qu’aucun clan ne pour- Clan du Dragon, qui n’avait pas l’habitude de se défendre
rait plus entrer en guerre totale contre un autre. Bien sur des terres inconnues. Seule l’intervention du Clan du
qu'elle eût des conséquences sur le long terme, cette Phénix modéra les intentions du Clan du Lion, et les réfu-
guerre n’eut aucun effet à court terme pour l’Empereur : giés du Clan du Dragon furent accueillis sur les terres des
le Gozoku était toujours en place, et il gagna même en Shiba et des Isawa.
pouvoir par la suite, au point que Fujiwa devint un simple
pantin. Les Yasuki font toujours partie du Clan du Crabe
et, de nos jours encore, les Clans du Crabe et de la Grue
Les clans face à la guerre
se détestent. Les clans diffèrent beaucoup en ce qui a trait à leurs
croyances et à leur militarisation. Tous ont des armées
La guerre entre les Clans professionnelles et une hiérarchie, mais chaque clan a sa
propre approche de la stratégie.
du Dragon et du Lion
Bien qu’il n’en soit pas fait mention dans l’histoire impé- Le Clan du Crabe
riale, il suffit d’ analyser les registres des familles au cours
du septième siècle pour constater un déclin de tous les Le Clan du Crabe est extrêmement militarisé, mais il
clans, tant en termes de richesses que de lignées. Il s’agit s’agit là d’une tradition observée par nécessité puisque
des conséquences de la Grande Famine, une décennie de les créatures corrompues de l’Outremonde sont incroya-
disette, de maladies et de guerres ouvertes, provoquée blement dangereuses. Leurs hordes innombrables sont
renforcées par des géants invulnérables et jouissent du
pouvoir insidieux de la Souillure. Les unités militaires du
Clan du Crabe sont petites, parfaitement soudées et para-
noïaques. Les soldats portent des armures forgées dans
de l’acier Kaiu et utilisent des armes lourdes, comme des
ōtsuchi ou des tetsubō en plus des katanas, plus fragiles,
mais traditionnels. Le Clan du Crabe a adapté ses armes
et ses stratégies au combat contre un ennemi inhumain,
ce qui le rend moins efficace face à d’autres samouraïs,
mais ses bushi livrent plus de batailles en une année que la
plupart de leurs pairs en une décennie. Passé maître dans
l’art de livrer ou de soutenir un siège, le Clan du Crabe se
détourne rarement de son devoir à la Muraille pour livrer
des guerres au sein de l’Empire, mais sa force et sa déter-
mination sont terrifiantes lorsque c’est le cas.
CHAPIT R E 1 : L ES F O RTER ES SES DU PO U V O IR

Le Clan du Dragon d’Akodo, le Clan du Lion est le plus militarisé de l’Em-


pire et il se targue d’une armée inégalée, d’un entraî-
Plus encore que celles de tout autre clan, les forces du nement constant et d’une économie de guerre. Chaque
Clan du Dragon reflètent parfaitement leur seigneur. Cer- aspect de la vie des bushi est prévu en conséquence : tous
ain dai re e en le r e e d Tao de Shinsei doivent accomplir des tâches difficiles, comme pratiquer
pour remporter une victoire, d’autres comptent sur les leurs katas ou prier leurs ancêtres guerriers dans des sanc-
talents extraordinaires de la famille Agasha pour forger tuaires élaborés. Leurs seuls loisirs sont des jeux de go
des armes. D’autres encore entraînent sans relâche leurs ou de shōgi, qui améliorent leur sens tactique. Lorsque le
troupes à combattre dans une grande diversité d’environ- Clan du Lion lève son armée entière, elle est immense et
nements, tandis que certains recrutent des moines guer- il utilise ce nombre pour submerger ses adversaires grâce
riers de l’ordre de Togashi. En raison de cet entraînement à des stratagèmes classiques. Le clan est très fier de ses
diversifié et de la tendance du Clan du Dragon à former multiples réussites historiques : il est donc lent à innover et
ses bushi en compagnie des shugenja et des ise zumi, les méprise le recours aux techniques peu orthodoxes, mais
moines guerriers, de petites unités constituent des adver- il développe tout de même des contre-attaques avec une
saires terriblement efficaces et singuliers. Grâce à leurs efficacité déconcertante.
attaques rapides et puissantes, elles peuvent isoler des
unités ennemies et les vaincre en un clin d’œil.
Le Clan du Phénix
Le Clan de la Grue Le Clan du Phénix préfère la paix à la guerre. Sa partici-
pation aux conflits est donc rare et vise plutôt à y mettre
Le Clan de la Grue excelle à la cour et dans l’art du duel, pas fin par des accords et par la reconnaissance que la paix
sur les champs de bataille. Ses forces se reflètent dans ses doit toujours être favorisée. Cependant, s’il est contraint
stratégies : un commandant peut demander un duel et pri- à se battre, il bénéficie du soutien des forces de la nature.
ver ainsi l’armée ennemie de sa hiérarchie pendant que ses Le Champion du Clan du Phénix, généralement subor-
bushi adoptent une stratégie de la terre brûlée et que ses donné aux Maîtres Élémentaires, bénéficie d’une voix
courtisans sabotent l’économie du clan adverse dans tout égale à celle du Conseil des Cinq dans son ensemble.
l’Empire. Cette approche, ainsi que l’entraînement impec- Le Champion et la Garde Élémentaire se rendent en per-
cable de son infanterie, pallie la plus grande faiblesse du sonne sur les champs de bataille importants, déchaînant
Clan de la Grue : son petit nombre. Bien que le clan entre le pouvoir des maîtres shugenja et la pleine puissance
en guerre avec honneur, ses éclaireurs ne portent pas d’em- des kamis contre leurs ennemis, au point que les terres
blèmes et sont connus pour recourir à des techniques discu- en sont déformées, et que la composition spirituelle des
tables : saboter les armes, poser des pièges et empoisonner alentours modifiée à jamais. La Garde Élémentaire est si
les provisions sur le passage des ennemis. efficace qu’elle peut jouir des faveurs des kamis en terri-
toire adverse. Généralement, chaque membre du Clan du
Le Clan de la Licorne Phénix prie pour obtenir le pardon avant même le début
de la bataille.
Le Clan de la Licorne figure parmi les clans les plus belliqueux
de l’Empire : son esprit a été forgé dans les feux de lointains
Le Clan du Scorpion
soleils. L’inclusion de peuples étrangers, comme les Ujik, n’a
rendu le clan que plus agressif. Depuis son retour au sein de La duperie est le point fort du Clan du Scorpion, et cela
l’Empire, il n’a pas modifié ses tactiques, mais ses archers et s’avère tout aussi exact en temps de guerre. Ses comman-
sa cavalerie bien supérieurs les rendent difficilement éga- dants aiment tromper les éclaireurs, propager de faux plans
lables. La cavalerie est la pièce maîtresse du clan, et chaque de bataille, attirer les armées ennemies dans la mauvaise
combat permet de le vérifier. Le Clan de la Licorne immobi- direction, et révéler leurs forces uniquement quand vient le
lise son ennemi grâce à la marche rapide de son infanterie temps de tirer le sabre. Les éclaireurs du Clan du Scorpion
et compte sur la charge de sa cavalerie pour faire le reste : sont parfaitement entraînés et soutenus par une escouade
cet amas d’acier et d’étalons écrase les forces ennemies sans d’espions et d’informateurs dont le réseau ignore les distinc-
aucune pitié. Les shugenja et leurs talismans accroissent la tions de classe ou de rang et infiltre même le palais impé-
vitesse de l’infanterie et de la cavalerie, formée d’étalons rial. Ceux qui doivent affronter la Main Cachée de l’Empe-
Utaku, les plus beaux chevaux de l’Empire, dont la reproduc- reur ont intérêt à garder leurs plans avec le même sérieux
tion est strictement surveillée. Aucun poney rokugani ne peut que leur ennemi, sous peine de constater que leur stratégie
égaler un destrier du Clan de la Licorne. a été devinée ou que leur commandant a été empoisonné
en mangeant son bol de nouilles. Bien entendu, aucun acte
Le Clan du Lion ne permet de remonter jusqu’au Clan du Scorpion. Lorsque
celui-ci entre au combat, il compte sur une armée parfai-
La seule école de Rokugan consacrée à l’étude de la guerre tement entraînée, mais plutôt traditionaliste, qui n’est pas
se trouve sur les terres du Clan du Lion, et elle porte le sans rappeler celles des Clans du Lion et de la Grue, aptes
nom du fondateur du clan, le Kami aux penchants martiaux au combat rangé et aux autres formes d’affrontement, au
les plus développés. Comme le veulent les enseignements plus noir de la nuit comme au petit matin.

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Les clans mineurs


A GAR
N AR les dieux de Chaque clan mineur dispose d’une force similaire à celle

En période de crise,
la guerre d’une famille de clan majeur. Bien que certains soient plus
belliqueux que d’autres, rares sont ceux qui peuvent lever
l’Académie Élémentaire
Les shugenja doivent en appeler à l’aide des une grande armée ou rassembler plus de quelques cen-
de la famille Isawa divise
esprits, mais il est souvent difficile de l’obtenir taines d’hommes. Seuls les Clans du Lièvre, du Faucon,
ses shugenja les plus
compétents en unités en temps de guerre. Comme les armées prient de la Libellule et de la Mante entretiennent des armées
spécialisées chacune dans les esprits locaux, celles qui se défendent béné- conséquentes, qui ne sauraient pour autant égaler celles
un élément différent. Bien ficient d’un avantage crucial, car leurs shugenja des clans majeurs, à l’exception de la marine du Clan de la
qu’ils n’aient pas eu à connaissent les kamis régionaux : il est difficile Mante. Les clans mineurs sont protégés par un décret de
appeler de tornades de de convaincre le kami d’un lieu particulier de tuer l’Empereur, distinct des autres édits qui limitent les pou-
feu ou de tsunamis depuis voirs militaires des clans. Il fut promulgué lorsque le Clan
les habitants qui lui présentent régulièrement
des générations, ces shu- du Lion, toujours expansionniste, tenta de s’approprier les
genja et leurs protecteurs
des offrandes et entretiennent ses sanctuaires.
Le sang et la mort qui abondent sur les champs terres du Clan du Renard. Sans cette loi, les clans mineurs
Shiba jouissent d’une
de bataille peuvent aussi attirer l’attention des deviendraient terriblement vulnérables.
force terrifiante.
kansen, des kamis Souillés qui, alors que le car-
nage se poursuit, perturbent les forces élémen-
taires et les tentatives des shugenja. Cependant,
il existe quelques exceptions connues parmi les
fortunes. Hachiman, fortune des combats, ainsi
que les fortunes des sabres et de la bravoure,
sont plus susceptibles de répondre aux armées
d’envahisseurs et d’intervenir en leur faveur pour
leur assurer la victoire.
Au vu de ces limitations, les shugenja ne
peuvent pas être traités comme tous les autres
combattants. Ils se trouvent souvent aux côtés
du commandant et comptent sur leur expertise
pour déterminer comment utiliser les esprits. Un
général qui essaierait de diriger ses shugenja
comme ses bushi découvrira rapidement que
leurs pouvoirs sont limités par la volonté des
esprits et qu’ils sont plus efficaces lorsqu’ils
agissent en toute liberté. Où qu’ils soient pla-
cés, les shugenja sont accompagnés d’un ou
l ie r ji le r ger e en
cas de défaite de toute l’unité.

58
2
CHAPITRE
Les carrefours
commerciaux
La samouraï avance dans les rues bondées, ignorant les cris des marchands heimin vantant leurs produits depuis le pas
de leur porte ou un étal. Son estomac grogne à l’odeur épicée qui s’échappe d’un restaurant de nouilles, mais son pro-
chain repas devra attendre. Elle a des affaires importantes à conclure avant la nuit, ici même, dans le quartier marchand
de Ryokō Owari Toshi. Dame Soleil commence déjà à se cacher derrière la haute tour du grand Temple de Daikoku, et
il lui reste donc environ une heure.
Son pied s’enfonce dans une flaque, ses sourcils
se froncent. Un jeune hinin ployé sous le poids d’un
panier de détritus recule immédiatement pour plon-
ger dans une ruelle. La samouraï l’ignore et poursuit
son chemin.
Dépassant une charrette chargée de riz, elle
débouche dans la rue suivante. L’odeur âcre
et persistante de l’opium lui signale qu’elle
approche de sa destination, l’un des nombreux
bâtiments anonymes de la rue. Se préparant
mentalement, elle s’avance vers la porte
et le heimin agressif qui s’y appuie. Un
badge abîmé est cousu sur son kimono.
Les pompiers sont donc impliqués dans
cette affaire, pense-t-elle, et sa main se
pose sur la garde de son katana.
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Le centre de l’Empire
marchandises sont bon marché ou en grande demande. Ils
subissent le dédain des samouraïs et paient des taxes doua-
nières exorbitantes aux clans qui les laissent traverser leurs
Avant la chute des Kamis et la naissance de l’Empire, la terres, ce qui diminue leur profit. De plus, les lentes cara-
population de ce qui deviendrait Rokugan était majoritai- vanes sont la cible préférée des brigands. Enfin, en temps
rement composée de groupes nomades et de petites com- de guerre, les marchands peuvent découvrir que des routes
munautés agraires. Leurs traces demeurent dans les fonda- sont fermées ou voir leurs biens saisis par une armée de
tions des plus vieilles villes. Les Kamis ont façonné Rokugan passage. Ceux qui opèrent en ville ne sont pas vraiment
à leur image, provoquant une ère de grands changements confrontés à ces déconvenues, puisqu’ils délèguent les
alors qu’ils traversaient les différents territoires et fondaient tâches les plus ingrates aux marchands itinérants.
les villes et métropoles de l’Empire actuel. De nos jours, Les villes sont aussi des centres religieux. La plupart
presque tous les événements politiques, culturels, sociaux abritent de vastes temples et de nombreux sanctuaires de
et économiques importants s’y déroulent. fortunes locales ou vénérées dans tout l’Empire. Souvent,
La plupart des villes sont entourées de grands murs qui un quartier entier est réservé aux temples et propose des
séparent les gens du peuple et les samouraïs des villages jardins où jouir d’un peu de tranquillité et prier les kamis.
hinin adjacents, ainsi que des routes, rizières et champs qui Les moines s’y promènent librement. Les districts reli-
permettent de les alimenter. Les bâtiments sont de bois et gieux sont en général adjacents aux quartiers nobles, qui
de papier dans tout l’Empire. Quand un typhon, un ouragan servent ainsi de zone tampon entre les temples et les sec-
ou un incendie détruit des parties importantes d’une ville, teurs dédiés aux marchands et aux divertissements. Le sym-
elle retrouve ensuite rapidement une configuration similaire, bolisme est évident : les villes sont bâties de manière à ce
mais légèrement différente, de celle qui précédait le drame. que les transactions méprisables à base d’argent restent à
Presque toutes les villes contiennent des remparts plus bonne distance des aspects religieux et spirituels. Pourtant,
petits, parsemés de portes bien gardées, qui séparent un l’argent se rend invariablement jusque dans les temples et
district de l’autre. Les districts marchands et religieux sont sanctuaires, qui peuvent, dans les villes majeures ou presti-
généralement ouverts à tous, sauf aux hinin, qui doivent gieuses, amasser une fortune.
utiliser des chemins cachés pour s’y rendre. Des douves Les jardins d’un quartier religieux font souvent l’ob-
et des fortifications traversent les places fortes, mais leurs jet de compétitions d’aménagement si les moines ne s’en
habitants les contournent facilement. Les villes sont divi- occupent pas eux-mêmes. Toutes les villes, même les plus
sées en quartiers correspondant au rang des samouraïs, et petites, possèdent de grands jardins de roche et des arran-
les soldats, artisans et marchands itinérants vivent à l’écart. gements d’ikebana. Les salons de danse et les théâtres de
Souvent, ces derniers s’installent près de la route poussié- kabuki se trouvent généralement dans les quartiers mar-
reuse, dans des tentes et derrière des bâches pour ne pas chands, mais les moines organisent de magnifiques spec-
salir leur production. tacles pieux dans leurs espaces publics.
Les villes rokugani sont bondées : plusieurs millions Bien évidemment, les villes ne sont pas dénuées d’in-
de personnes vivent dans l’Empire d’Émeraude, majo- convénients. Les maisons de jeux et les bordels qui singent
ritairement dans les villes. Les samouraïs qui traversent les établissements du quartier des Plaisirs pullulent dans les
une ville y verront des paysans, des serviteurs, des arti- zones réservées aux paysans. Les fumeries d’opium sont
sans, des marchands, ainsi que des gardes heimin sous omniprésentes, et de nombreux samouraïs entrent dans ces
la direction de samouraïs mineurs. Le décorum est moins espaces souterrains décorés de gravures représentant de la
respecté dans cet environnement surpeuplé, puisque per- fumée et des dragons pour se perdre durant quelques heures
sonne ne veut créer de problèmes. Les rues sont envahies dans un brouillard de plaisir. Des gangs de roturiers règnent
de samouraïs comme de paysans, mais s’y risquer signifie sur ces quartiers, enrôlant parfois dans leurs manigances des
composer avec la foule et éviter les palanquins de puis- samouraïs assaillis par la honte, mais qui leur sont redevables.
sants nobles ou de riches marchands.

La vie urbaine
De nombreuses villes sont reliées d’une manière ou
d’une autre à la route commerciale nationale orientée
nord-sud, puisque leur but premier est de faciliter le com-
merce. Malgré l’aversion des samouraïs pour les affaires La lumière de Dame Soleil éclaire tout le monde à Roku-
d’argent, ils savent que les marchands sont un mal néces- gan, des hinin au Hantei. Par contre, la vie quotidienne de
saire, car ces derniers se procurent des biens contre des chacun varie grandement en fonction du statut social. Les
koku et échangent des produits et de l’argent avec leurs hinin, les heimin, les moines et les samouraïs mènent des
confrères des autres clans. existences radicalement différentes, qu’ils vivent dans une
Pour cela, les marchands parcourent l’Empire avec des métropole, une ville ou un village. Bien que tous les statuts
documents de voyage en ordre et conduisent des cara- sociaux coexistent au jour le jour dans les centres urbains,
vanes aux couleurs vives entre les différentes régions où les ils ne se mélangent pas, comme l’eau et l’huile.

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CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

Au premier regard, la vie quotidienne de toutes les


classes sociales est similaire : les hinin, les heimin et les les hinin
samouraïs sont tous mortels, ils doivent manger et dor- Les hinin, aussi appelés burakumin, représentent le plus
mir. Tous prient leurs ancêtres et apprécient leur famille, les
bas échelon de l’Ordre céleste, ce qui se reflète dans
divertissements et les loisirs. Mais les similitudes s’arrêtent là.
la façon dont ils sont traités. Puisqu’ils sont considérés
La vie des samouraïs se déroule à la cour. Bien qu’ils
comme impurs, la plupart des samouraïs et des autres
jouissent de temps libre, ils s’occupent quotidiennement
paysans évitent l’indignité de leur parler. À l’excep-
des priorités de leur clan, le trafic dans les rues suit donc le
tion des geishas, les hinin ne parlent presque jamais
rythme des quartiers nobles. L’activité constante marque
la vie d’un citoyen urbain, et le calme ne revient qu’au aux nobles (et les esquivent autant que possible). Ils
coucher du soleil, quand le silence envahit lentement la s’adressent aux paysans avec respect et obéissance.
ville. Malgré cela, les soirées à boire du saké et à s’impli- Vêtus de haillons, ils vivent dans leurs propres bidon-
quer dans des intrigues de cour décadentes tiennent les villes, reliés aux villes par des sentiers poussiéreux et
samouraïs occupés, tandis que les gens du peuple gèrent sinueux. Dans de rares cas, leur village se trouve à l’in-
le nettoyage et organisent leur journée suivante et que les térieur de l’enceinte de la ville, mais demeure physique-
marchands préparent leurs articles. ment séparé des autres quartiers.

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C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

le théâtre
Il y a trois principales catégories de théâtre : le no, des artisans samouraïs ont tenté d’écrire des pièces.
le kabuki et le bunraku (marionnettes). Samouraïs et Le kabuki présente des costumes magnifiques et éla-
paysans apprécient le théâtre, mais ces derniers ne borés, de l’action dramatique (dont des combats
R ETA verront que très rarement une pièce no, tandis que sur scène) et un mélange de récits traditionnels et
les premiers évitent les spectacles de marionnettes. d’intrigues qui imitent ostensiblement des faits réels
Certains samouraïs et Le no, un long poème d’un symbolisme prégnant et actuels. L’improvisation y règne en maître, et le
heimin désignent les
chanté par une poignée d’acteurs accompagnés de succès d’une pièce dépend du talent des acteurs :
hinin sous l’appella-
musique, est la plus ancienne et la plus respectée des l’écrivain ne peut donc pas vraiment s’en attribuer
tion « eta ». Ce terme
provient du Japon formes de théâtre. Les acteurs stylisent leurs mou- le mérite.
féodal, où il décrivait vements et portent des masques minimalistes pour Le bunraku est un spectacle de marionnettes. Un
les burakumin. Il transmettre leurs émotions et représenter certains chanteur raconte l’histoire pendant que le marion-
représente une insulte personnages. Les pièces relatent généralement des nettiste, caché derrière un écran, manipule des
dans le Japon moderne, événements tragiques de l’histoire ou des légendes, marionnettes complexes et finement ouvragées.
et rares sont donc ceux et des kyōgen, des saynètes comiques basées sur des Leur souplesse et leur petite taille leur permettent
qui l’emploient. Bien gaffes, sont jouées aux entractes pour alléger l’at- de prendre des positions impossibles pour des
que Rokugan soit un humains. De plus, des mécanismes permettent de
mosphère. Le no est un art majeur, et plusieurs clans
monde fantastique,
possèdent des écoles enseignant leurs propres tradi- rapidement changer les décors, et des petits engins
les joueurs doivent
prendre en compte cet tions. Les représentations d’une journée entière sont pyrotechniques peuvent décapiter des marionnettes
héritage historique. monnaie courante durant les festivals saisonniers ou pour choquer le public. Les êtres surnaturels sont
les mois où se tient la cour. faciles à représenter, et les dragons y seront bien
Chaque groupe doit e a i i de gen e l r en e l plus imposants que les frêles humains. Le théâtre de
décider d’accepter ou marionnettes est considéré comme la moins intel-
tape-à-l’œil que le no (et plus populaire auprès de
non le terme « eta ».
la classe moyenne). Malgré cela, de nombreux sei- lectuelle des formes de théâtre, mais il demeure
Comme toujours, il
est important de se gneurs samouraïs financent des troupes de kabuki, et très populaire.
montrer respectueux
et de s’assurer que tout
le monde soit à l’aise.
Bien que L5A puise dans Néanmoins, les villages hinin sont bien entretenus. L’ab- peuvent donc parler à un samouraï et sont traitées avec
l’histoire et les mythes, sence de pureté des hinin est sociétale et spirituelle, non un certain respect.
cela ne signifie pas physique. Les maisons, assez grandes, abritent une seule Quand ils ne sont pas retenus ailleurs pour leur tra-
pour autant que tous pièce, dont le sol est constitué de terre battue et les murs de vail, les hinin restent dans leur communauté, où leur vie
les aspects doivent être bois bon marché. Bien qu’ils accomplissent les tâches érein- n’est pas si différente de celle des heimin. Les ragots s’y
intégrés aveuglément.
tantes que tout Rokugani refuserait et qu’ils vivent dans la répandent comme une traînée de poudre et, une fois
peur, ils connaissent des moments de joie. Ils tannent le cuir, leurs obligations remplies, ils jouent, conversent, mangent
préparent les morts, nettoient les champs de bataille et exé- (parfois même de la viande, lors d’occasions spéciales)
cutent de nombreuses autres tâches détestables, qui néces- et vivent leur vie loin des contraintes du bushido. Les
sitent presque toutes de toucher des chairs mortes, mais mariages sont des engagements civils sans la présence
ils passent aussi du temps en famille. Certains s’occupent d’un prêtre, mais la communauté les reconnaît, et les hinin
de leur jardin, d’autres préfèrent les passe-temps simples prient leurs ancêtres morts aux sanctuaires.
comme boire, chanter ou jouer aux dés.
La vie de hinin demeure difficile et peut s’achever sur le
caprice d’un samouraï. Certains clans guerriers, comme le
les heimin
Clan du Lion, considèrent qu’une arme n’est prête qu’une Aussi appelés bonge, ils forment la classe sociale entre
fois qu’elle a servi à tuer un être vivant, et les burakumin les hinin et les samouraïs. En ville, ils représentent les ser-
conviennent parfaitement. Les hinin trouvent une forme de viteurs, artisans, ouvriers, marchands et autres paysans
sécurité dans leurs villages, puisque toutes les autres castes qui accomplissent au quotidien les tâches ménagères
évitent de s’y rendre, sauf circonstance exceptionnelle. des samouraïs, créent la richesse qui se retrouve dans
Les gens du spectacle et les criminels sont aussi des les coffres des seigneurs et, de plus en plus, se livrent au
hinin, bien que les geishas de cette caste soient traitées commerce et échangent des bu. Les préceptes du bushi-
différemment. Puisque les samouraïs doivent demeurer do requièrent que les gens du peuple soient traités avec
irréprochables en public, ils ne peuvent se détendre que courtoisie et compassion par leurs supérieurs malgré la
devant une personne qui ne fait pas partie de la socié- soumission totale inhérente à leur position. Cet idéal est
té. Les geishas leur offrent cette échappatoire : elles rarement respecté.

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Les marchands et autres roturiers riches vivent dans exagéré de croire que les heimin peuvent être exécutés au
des maisons similaires à celles des samouraïs. Les autres moindre mot de travers, mais leurs conditions de vie sont
heimin possèdent leur propre demeure, propre et élé- extrêmement difficiles. Les serviteurs croisent les samou-
gante aux yeux de tous, sauf des nobles de l’Empire. Pour raïs dans les rues, mais ils évitent ces derniers avec le plus
certains bonge assez riches pour vivre dans les districts grand soin. Dans certaines villes prestigieuses, ils attendent
marchands, leur maison sert de boutique. Dans les villes dans des salles à l’écart d’être convoqués et empruntent
modernes, elle est souvent étroite et profonde, puisque des ruelles pour contourner les routes principales, réser-
l’espace qui donne sur la rue est en grande demande. Les vées aux samouraïs. Par contre, leur argent, quand ils en
maisons des heimin ressemblent plus à celles des samou- ont, est toujours accepté. Lors de leurs rares congés et
raïs qu’à celles des hinin, avec leurs alcôves décoratives, moments libres, ils peuvent s’acheter des ravioles ou assis-
les bureaux intégrés (chez les marchands lettrés), les tata- ter à une pièce kabuki, mais aussi jardiner, prier, voire lire,
i a l le re li an e e le annea h ji s’ils font partie des rares paysans lettrés.
Si les nobles bénéficient d’un salon où accueillir leurs vas- Les marchands s’en sortent mieux que les autres hei-
saux, les bonge utilisent plutôt cet espace pour y recevoir min. Ils se lèvent tôt pour préparer leur magasin ou faire
des invités ou gérer leurs affaires. transiter leurs marchandises vers le quartier commercial,
Des paysans aux samouraïs, tous portent une sorte loin de celui des nobles. Ils emploient des serviteurs pour
de kimono, une tunique à manches longues retenue par transporter leurs produits ou s’en chargent eux-mêmes
une ceinture, l’obi, mais ceux des premiers sont simples grâce à des animaux de trait, souvent des bœufs. S’ils ne
et en coton, parfois en soie au plus fort de l’été. Les hei- souhaitent pas se déplacer à pied, les marchands riches
min rangent des petites bourses et objets sous l’obi ou peuvent même engager des serviteurs additionnels pour
les y suspendent, tandis que les nobles portent wakizashi les porter dans un palanquin appelé un kago. Bien que
et katana passés dans la ceinture, le tranchant des lames les marchands soient eux aussi limités dans leurs inte-
tourné vers le ciel. Les paysannes essaient d’avoir au ractions avec les samouraïs, nombreux sont ceux qui
moins un kimono aux couleurs vives pour les festivals et s’enrichissent, plus que certains jizamurai et seigneurs
autres célébrations, mais elles arborent au quotidien un indigents. Ils décorent alors souvent leur maison d’art pré-
kimono simple et pratique, accompagné d’une jupe plus tentieux et affichent une richesse inconvenante pour leur
courte pour travailler et marcher plus facilement. Les pay- statut, ce qui attire le courroux de la plupart des nobles. Ils
sans revêtent un kimono similaire, des culottes en coton mangent fréquemment du riz et de la viande, et leur fier-
serrées s’arrêtant aux genoux et un haori, un manteau en té ne tolère aucune critique, pas même des samouraïs, et
coton. De nombreux heimin, surtout s’ils travaillent dans encore moins des paysans moins prospères.
les champs, portent des chapeaux coniques en paille pour
se protéger du soleil.
Les bonge disposent de peu de repos, quelle que
les samouraïs
soit leur activité. Ceux qui entretiennent un domaine ou Pour les samouraïs urbains, le quotidien suit un rythme
servent de domestiques doivent se lever avant les samou- immuable, sauf en hiver, quand les nobles et courtisans
raïs et ne peuvent se coucher qu’après leur maître. Ceux suffisamment importants rejoignent la cour d’hiver impé-
qui travaillent dans un magasin ou comme vendeurs de rue riale. Tous travaillent à la cour du gouverneur, et leur
jouissent d’un peu plus de liberté, mais, s’ils sont absents devoir envers leur clan leur impose d’assister aux ren-
à l’arrivée d’un noble (ou, plus probablement, de son ser- contres commerciales ou martiales, ou de protéger ceux
viteur) ils encourent de sévères sanctions. Les familles qui s’y rendent. Le seul lien qu’entretient une cour de ville
bonge vivent sous le même toit, et bien que les enfants avec le commerce est établi par des samouraïs faisant
puissent jouer, ils doivent aussi travailler. Si les heimin office de mécènes pour des marchands. Cependant, les
ruraux ne bénéficient d’aucune éducation outre les rares villes abritent un grand nombre de nobles, accompagnés
leçons religieuses d’un prêtre, ceux qui vivent en milieu de leurs serviteurs : leurs cours attirent donc aussi des gens
urbain profitent de choix plus nombreux. Certaines métro- plus puissants qui ne possèdent pas encore de maison ou
poles et villes abritent des académies privées financées de terres. Les samouraïs urbains, ambitieux et talentueux,
par un samouraï généreux ou des écoles ecclésiastiques se concentrent avant tout sur leurs propres objectifs tout
dirigées par la confrérie de Shinsei. Ces écoles enseignent en étant bien trop conscients du plafond de verre qui les
la lecture, l’écriture, les mathématiques, la théologie et la empêchera de les accomplir s’ils ne réussissent pas un
philosophie aux familles heimin suffisamment riches pour coup d’éclat au nom de leur clan. Si le but premier des
payer les frais de scolarité. villes est d’assurer le commerce, elles regorgent néan-
Bien que ceux qui vivent dans des villages pro- moins d’intrigues.
fitent d’une vie relativement exempte de responsabili- La demeure typique d’un noble est séparée du reste de
tés sociales, sauf quand des samouraïs itinérants se pré- la ville par un mur d’enceinte, percé d’un portail et d’une
sentent, les bonge urbains subissent la pression constante entrée de service face à la route. À l’intérieur, une cour
de devoir se conformer aux attentes des nobles. Il est ou un jardin entoure une maison aux fondations en pierre,

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a r en i e a en re en annea h ji e n lan ne rgani a i n e dai e r i an de


portail est aligné avec l’escalier de l’entrée aux portes de haut rang peuvent porter une veste appelée kataginu. Les
bois assez épais pour résister aux tempêtes. La pièce prin- samouraïs choisissent en général des vêtements aux cou-
cipale comprend un sol recouvert de tatamis, une pro- leurs de leur clan, mais ils n’y sont pas tenus, et les artistes
fonde alcôve où sont suspendus des parchemins ou des ou les plus férus de mode utilisent des coupes et des cou-
œuvres d’art, et des bureaux. leurs destinées à attirer l’attention et demeurer à la pointe
Le décor varie selon le clan : la simplicité des Clans des tendances.
du Lion et du Dragon s’oppose aux colonnes et poutres Tous les samouraïs prennent par contre bien garde
dorées et gravées préférées par les Clans de la Grue et à ne pas porter les couleurs d’un clan auprès duquel ils
du Phénix. Des portes coulissantes fusuma, décorées ou séjournent, puisque ce serait une insulte. (Certains choi-
non, permettent d’accéder au reste de la maison, où une sissent de le faire, précisément à cette fin.) Les samouraïs
demi-douzaine de pièces de tailles variables ont de multi- urbains jouissent d’une plus grande liberté dans leur habil-
ples fonctions : dormir la nuit, et effectuer diverses activi- lement, car ils n’ont pas besoin de porter des chaussettes
tés durant la journée. Seuls les serviteurs des samouraïs les épaisses, de lourdes chaussures et un manteau pour les
plus pauvres n’habitent pas sur place ou dans un bâtiment protéger contre les éléments durant leurs déplacements.
adjacent qui sert aussi de cellier et de cuisine. Les samouraïs en voyage qui arrivent dans une ville
Les kimonos des samouraïs sont toujours de bonne fac- ou une métropole doivent se présenter au magistrat, au
ture, taillés dans le meilleur coton ou dans la soie la plus seigneur ou au gouverneur en exercice, pour indiquer
raffinée. Les samouraïs qui ont besoin de leur liberté de leur présence et leurs intentions. Ne pas le faire dans un
mouvement, comme les bushi, portent généralement une délai raisonnable, après avoir pris un bain pour se débar-
jupe plissée ample appelée un hakama, combinée à une rasser de la poussière du voyage, est un manquement à
tunique kosode aux manches plus étroites qu’un kimono. l’étiquette. Les samouraïs les plus puissants n’ont géné-
Souvent, ils y ajoutent un manteau haori monochrome, soit ralement pas beaucoup de saleté à nettoyer, puisqu’ils se
pour avoir plus chaud, soit pour montrer leur allégeance à déplacent dans des litières fermées, les norimono.
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la nourriture l’alcool local


Les samouraïs urbains ont un régime varié riche en
légumes, poissons et viandes, toujours accompagnés de Selon un proverbe rokugani : « Le saké est le
riz. Bien que le riz brun soit parfois consommé et serve balai constellé qui chasse tous vos maux ». Rares
à cuisiner les mochi (des douceurs) et que le riz parfumé sont ceux qui se privent de ce répit lorsqu’ils
existe dans certaines régions (rapporté et cultivé par le sont en compagnie d’amis proches ou de gei-
Clan de la Licorne), le riz blanc collant demeure le plus shas. La boisson la plus en vogue demeure, sans
commun et il est présent dans presque tous les repas des conteste, le thé (cha) au point qu’en servir est
nobles. De plus, les sushis et les boules de riz sont faits de le point zéro de l’hospitalité, mais le saké arrive
riz blanc collant, le saké est de l’alcool de riz et le vinaigre juste derrière et fait tout autant l’objet d’un
de riz accompagne tous les plats. Le riz blanc est servi rituel. Il est souvent servi dans des bars spéciali-
nature dans un bol distinct, et les baguettes sont croisées sés appelés des maisons de saké.
sur le dessus. Elles ne doivent jamais être placées dans Le saké est un alcool à base de riz fermenté,
le bol, ce qui rappellerait trop certains rites funéraires. populaire bien avant la chute des Kamis, et qui
Le régime des paysans, bien moins varié, est principale- a su traverser les siècles, apprécié des samou-
ment constitué d’orge. Les plus pauvres doivent même se raïs comme des gens du peuple. Il est généra-
contenter de millet, tandis que les marchands et les pay- lement servi chaud, mais les meilleurs seront
sans les plus riches mangent du riz presque aussi souvent dégustés froids.
que les samouraïs et peuvent se permettre du poisson ou Une boisson plus rude et plus forte, le
de la viande à l’occasion. shōchū, existe également, à base de patates
Les nouilles, en farine de sarrasin ou de blé, et parfois douces, d’orge ou de riz fermentés, mais seuls
les ignames, sont à peine moins populaires que le riz. Les les ivrognes en consomment (et surtout ceux
fruits de mer sont très répandus dans les régions côtières du Clan de la Mante). Les autres Rokugani
et, à l’intérieur des terres, les poissons de lacs et de rivières méprisent ceux qui en boivent.
sont consommés aussi souvent que possible. La volaille D’autres boissons sont populaires dans cer-
(poulet, faisan, parfois dinde) est également très courante, taines régions ou certains clans : le Clan de la
autant pour la viande que pour les œufs. Les fèves de soja Grue aime un vin de prune, l’umeshu, et le Clan
représentent le reste des protéines, d’autant plus qu’elles de la Licorne boit de l’airag, du lait de jument
peuvent être cultivées dans presque tout l’Empire. Une fermenté qui ne se trouve que sur ses terres.
grande partie de la récolte de soja est transformée en tofu,
mais aussi en une sauce salée et aromatique ou en une
épaisse pâte miso.
En dehors du poisson, la mer fournit également les selon leurs goûts ou leur situation, et les répercussions
algues, fraîches ou séchées, et les paysans font pousser sociales vont du dégoût à la perte de statut, en fonction
des courges, des concombres, des choux (dont le kale), des gens présents.
des ignames, des bardanes, des carottes, des radis et des À l’exception de la soupe, tout est mangé avec des
oignons, mais aussi des prunes, des abricots, des poires, baguettes ou les mains. Des hinin à l’Empereur, tout
des cerises et des pommes dans leurs vergers. le monde possède sa propre paire de baguettes. Bien
Les règles sociétales veulent que la viande rouge qu’elles soient généralement de bois simple, comme le
soit impure, et de nombreux samouraïs s’abs- bambou, les riches recourent aux baguettes taillées dans
tiennent donc d’en consommer, surtout dans les des bois chers ou aromatiques, voire dans l’ivoire ou le
régions côtières. Le Clan de la Licorne, lui, ignore jade. Les cuillers servent aux soupes et aux ragoûts même
généralement cette règle. Face aux privations, le si, la plupart du temps, les éléments solides sont mangés
Clan du Crabe ne peut pas toujours choisir ce qu’il à la baguette avant de boire le bouillon directement au
mange et adopte de toute manière une vision pragma- bol. Bien que les couteaux soient très courants à la cuisine,
tique : si quelque chose est impur, ses membres pour- pour la préparation des repas, ils ne sont jamais utilisés à
ront se purifier par la suite. Le Clan du Dragon affirme table. Les salles de banquet n’existent pas : les plats sont
à qui veut l’entendre que la viande fumée qu’il aime servis dans la pièce qui convient le mieux (mais jamais à la
tant est du « thon des montagnes », et non de la cuisine). Les en-cas vendus par les marchands ambulants
chèvre. Les samouraïs ignorent parfois ce tabou sont présentés sur des pics en bois.

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Les villes et métropoles


pas rare que des villes de plus de dix mille habitants n’aient
pas de gouverneur, soit parce qu’elles sont dénuées d’im-
portance économique ou stratégique, soit en raison de
Elles répondent à la même utilité que dans tout autre manœuvres politiques ou d’inefficacité bureaucratique.
monde civilisé : elles servent de carrefours commerciaux Les métropoles représentent le sommet de la pyra-
ainsi que de centres politiques et administratifs. L’empla- mide sociale, culturelle et économique fondée sur une
cement de chacune peut s’expliquer par une combinaison société principalement agraire. Les fermiers, bûcherons,
de facteurs géographiques, historiques, culturels, écono- mineurs et autres ouvriers en forment la base, puisqu’ils
miques ou religieux. Densément peuplées, elles sont sou- alimentent et fabriquent les outils dont dépend l’écono-
vent bâties dans des zones faciles à défendre, comme au mie. Une partie de ces ressources passe par une multitude
sommet d’une colline ou près d’une rivière. Elles sont ali- de villages répartis à travers l’Empire, qui constituent le
mentées par un imposant réseau de fermes et de villages, deuxième niveau de cette pyramide. À partir de ces der-
qui se sont développés au fil du temps pour faciliter le niers, les ressources sont acheminées vers des centres
système peu pratique de taxes payables en sacs de riz. régionaux, les villes, avant de rejoindre le dernier éche-
lon, les métropoles. À chaque étape, les produits sont raf-

les métropoles finés ou transformés et prennent de la valeur. Les taxes,


qui consistent en une partie de ces ressources, sont per-
Même si elles accueillent une bonne partie de la popula- çues à chaque niveau de la pyramide afin de financer l’ad-
tion de l’Empire, elles demeurent fort peu nombreuses. De ministration et l’armée.
manière générale, le terme « métropole » s’applique à tout
centre urbain qui abrite plus de dix mille habitants, mais La naissance d’une métropole
ce chiffre n’est qu’un seuil pratique pour les distinguer des
villes. D’un point de vue légal, les métropoles sont des Le facteur primordial est la géographie : les métropoles
villes où un gouverneur est en poste. En pratique, il n’est se trouvent souvent dans des régions relativement pla-
nes, faciles d’accès et bien drainées. Vu la culture guer-
rière de l’Empire, la défense est un autre point crucial :

les villes en
une large rivière, une forêt dense ou de hautes montagnes
qui limitent les voies d’approche peuvent constituer des

contexte atouts. Certaines métropoles se sont développées autour


d’un château, d’autres dans les environs d’une halte le
long d’une route importante.
Bien que les cartes impériales n’indiquent que
Les routes, commerciales ou non, affectent égale-
quelques grandes villes dans tout Rokugan, un
ment l’emplacement des métropoles, surtout lorsqu’elles
MJ peut souhaiter en inclure davantage dans
sont éloignées des terres agricoles fertiles. Il est essen-
ses aventures. Bien entendu, elles ne peuvent
tiel, mais souvent difficile, de permettre le transport des
pas apparaître n’importe où. Le modèle pyra-
biens (y compris les aliments) et services, mais aussi des
midal définit sommairement la manière dont
armées. Les cols montagneux, rivières navigables, plaines
elles s’articulent dans le contexte économique,
e r na rel re r en en a an d’a Ain i
social, culturel et politique de l’Empire. Com-
Owari Toshi est située entre le Toit du Monde et la forêt de
prendre ce mécanisme aidera le MJ à présen-
Shinomen, non loin du col qui traverse les monts Seikitsu
ter aux PJ une ville intéressante qui respectera
et des eaux navigables de la rivière de l’Or.
la logique du monde. Par exemple, des PJ ver-
Le dernier point à prendre en considération est plus
ront sûrement des marchands et des caravanes
culturel que pratique. Rokugan est un empire qui baigne
sur la route, qui livrent aux villes de la nourriture
dans le divin et le surnaturel, et les aspects métaphy-
ou des matières premières, dont du bois, de la
siques peuvent jouer un rôle dans la décision de bâtir
pierre et des huiles, ou qui en repartent char-
un centre urbain. L’exemple le plus célèbre est, sans nul
gés de produits manufacturés à vendre dans la
doute, Otosan Uchi, la capitale impériale. Bien qu’elle
région. Penser à ce genre d’activités donnera vie
soit située sur un port naturel de premier plan, elle fut
à la description et plongera les joueurs dans le
à l’origine érigée sur le mont Seppun, le lieu saint où les
monde de Rokugan.
Kamis atterirent après leur chute du royaume Céleste vers
le ingen-d

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C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

$ Un ou plusieurs quartiers de samouraïs, où vivent


les pompiers ceux qui occupent le bas de cette caste. On y
trouve aussi une myriade de maisons de saké, de
Les parties basses des châteaux sont bâties en boutiques de nouilles, de tailleurs, d’armuriers et
pierre, mais le papier et le bois dominent par- d’autres commerces.
tout ailleurs, et les incendies représentent donc $ Un district des loisirs, où sont érigés les théâtres,
l’un des plus grands dangers dans les centres les maisons de geishas et les auberges luxueuses.
urbains de Rokugan. Une escouade de pompiers Des institutions connexes, comme des écoles d’ac-
vigilante, armée de seaux de sable et de cartes teurs ou des ateliers confectionnant les décors, s’y
des puits et des pompes à eau, est le meilleur trouvent également.
moyen de minimiser les dégâts. Si elle ne suf-
$ Un quartier marchand, où les activités commer-
fit pas à la tâche, elle démolira les bâtiments
ciales et mercantiles ont lieu et où les biens sont
adjacents pour éviter que l’incendie ne se pro-
entreposés.
page. La plupart des villes confient la supervi-
sion des pompiers à des fonctionnaires d’un rang $ Un ou plusieurs districts réservés aux gens du
mineur et leur donnent un petit montant pour peuple, où les heimin vivent et travaillent. Ces
qu’ils embauchent un groupe de heimin locaux. zones représentent la majeure partie de la métro-
Inévitablement ou presque, dans les villes pole. Les hinin sont confinés dans leur propre dis-
moins bien policées, les pompiers sont impli- trict ou habitent hors de la ville.
qués dans le milieu des paris et de la prostitution. $ Selon la richesse de la cité, les districts où les
Ils ont notamment l’habitude de faire payer pour samouraïs vivent peuvent avoir leur propre mur
leurs services : citoyens et marchands sont alors d’enceinte pour les séparer des autres. Dans de
forcés de leur verser un pot-de-vin. Ceux qui tels cas, des portes permettent de se rendre dans
refusent peuvent être agressés ou risquent de les zones suivantes, et des gardes sont postés pour
perdre leur demeure ou leur commerce lorsque surveiller l’accès aux quartiers les plus huppés.
l’escouade « ne parviendra pas » à éteindre un D’un point de vue militaire, cette disposition aide
feu à temps ou si « elle a été obligée » de détruire les samouraïs urbains attaqués à tenir bon en atten-
le bâtiment. Le seul point positif de la chose est dant que les renforts arrivent.
que les pompiers ne laisseront personne d’autre
s’installer sur leur territoire, et ceux qui paient $ Si une ville se trouve proche d’une rivière ou d’un
bénéficient donc d’une certaine protection. Bien port, elle contiendra aussi des quartiers réservés
entendu, les samouraïs ne subissent jamais une aux activités attenantes : des quais, un quartier des
telle arnaque, et ils pourraient être surpris d’ap- pêcheurs, etc.
prendre son existence.
À mesure que les métropoles gagnent en importance
et que leur population s’accroît, elles s’étalent autant que
leur environnement le leur permet. Au sein des quartiers,
la construction est souvent imprévisible. Les routes pré-
S’orienter en ville existantes demeurent relativement droites et deviennent
En termes d’organisation, les métropoles sont parfaite- les artères principales, mais le reste est desservi par un
ment chaotiques. La plupart se sont étendues à partir d’un écheveau de ruelles étroites et tortueuses, surtout dans
point central, généralement un bâtiment défensif quel- les quartiers les moins favorisés. Les parcours les plus laby-
conque, tel qu’un château, où vit le gouverneur et où se rinthiques se trouvent dans les villes du Clan du Scorpion,
tient la cour. La plupart de ces centres administratifs sont où, selon la plupart des Rokugani, cette apparence erra-
entourés des domaines des citoyens les plus riches et les tique est en fait orchestrée pour déstabiliser les étran-
plus puissants. Ce quartier des nobles, central, est jouxté gers. Cependant, certains districts sont contrôlés de près,
de districts définis par leur fonction : notamment ceux des temples et des nobles. Les rues et les
bâtiments ont été soigneusement établis selon des plans
$ Le quartier des temples regroupe les divers sites qui tiennent compte des hiérarchies sociales, politiques et
religieux ainsi que les maisons des prêtres ou des spirituelles, mais aussi des besoins en termes d’accès et
gardiens de sanctuaire, qui répondent aux besoins de sécurité.
des fidèles et entretiennent les lieux.

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CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

L’architecture des logements La gouvernance


La plupart des bâtiments sont construits en bois, la pierre La plupart des métropoles sont dirigées par un gouver-
étant réservée aux lieux plus vastes et importants (les ne r n ar le ha i n d lan le dai de
palais ou les temples), aux ouvrages défensifs (les tours la famille sur le territoire desquels elles se trouvent. De
et les murs d’enceinte) et aux demeures des puissants, ani re g n rale le g erne r e i ilaire n dai
e le dai e le agi ra an le de a la mais sa juridiction se limite à la ville et à ses alentours
plupart des séparations internes sont constituées de bois immédiats. Le gouverneur préside sur la cour municipale,
et de papier, et peuvent être facilement déplacées pour écoute les doléances de son peuple et fait des annonces.
changer la disposition des pièces. Les murs permanents La cour administre les affaires municipales, y compris les
sont l’exception, à moins qu’ils ne soient porteurs ou indis- travaux publics (l’entretien des routes, la construction des
pensables à la sécurité. En raison du grand pourcentage murs d’enceinte), et le recensement de la population. Un
de matériaux de construction inflammables, les villes sont magistrat en chef, qui dépend du gouverneur, supervise
très vulnérables en cas d’incendie. Toutes prennent donc une armée de magistrats responsables de la perception
des précautions, et les départs de feu criminels sont sévè- des taxes, du maintien de la loi et de l’ordre, et de l’appli-
rement punis. cation des décrets du gouverneur. (Pour en savoir plus sur
les magistrats, consultez la page 89.)
Dans les métropoles les plus tentaculaires, les quartiers
peuvent disposer de leur propre gouverneur. À Otosan
Uchi, les membres prééminents de la cour
impériale et les samouraïs de premier
plan gouvernent un district et remettent
des rapports au Conseil central qui,
lui, dépend de la cour impériale.
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

La pègre et les criminels Des centres qui


En ville, les délits sont commis par des petits criminels isolés s’agrandissent
comme par de vastes organisations. Les métropoles attirent Les nécessités commerciales sont souvent plus
généralement cette dernière catégorie, dont les cartels de importantes que les considérations militaires
l’ i de ari hi i j gen ’il e l a ile quand vient le temps de déterminer l’emplacement
de camoufler leurs opérations dans le chaos urbain. Pour les
des nombreuses villes. La géographie demeure un fac-
mêmes raisons, les gangs des rues préfèrent les quartiers
teur essentiel : elles se trouvent en général le long d’axes
densément peuplés. Dans certaines villes et, une fois de
commerciaux, qu’il s’agisse de routes maritimes ou ter-
l r ari hi le ier (de gen
restres, ou de terres arables. Un lieu difficile à défendre,
du peuple payés pour combattre rapidement les feux et
mais mieux positionné dans le réseau de voies commer-
empêcher leur propagation) composent les gangs des rues
ciales et de fermes sera toujours privilégié par rapport à un
les plus puissants et les plus dangereux (même s’ils conti-
nuent de lutter contre les incendies). autre, plus facile à protéger, mais aussi plus isolé.
Une autre faction étonnamment bien organisée est De nombreuses villes ont, elles aussi, commencé sous
celle des « sociétés de mendiants », des groupes coordon- la forme d’une simple structure défensive, souvent un petit
nés de voleurs à la tire, de vagabonds, de gamins des rues donjon ou une tour de guet. Par contre, la plupart étaient
et autres qui accomplissent toutes sortes de délits mineurs de petits villages mieux positionnés que les autres pour
et partagent équitablement le fruit de leurs larcins. Des gagner en importance. Bien que leur construction ne soit
cultes blasphématoires peuvent également avoir une cer- pas plus planifiée que celle des métropoles, elles sont
taine présence en ville, mais préfèrent souvent l’anonymat en général moins chaotiques, en raison de leur taille res-
des régions reculées de l’Empire. treinte. Si une ville est située sur la route de l’Empereur,
Bien entendu, tous les criminels n’appartiennent pas à celle-ci constitue généralement la rue principale de la ville,
une organisation. Chaque ville comprend des pickpockets, et son axe premier de développement. Les autres quar-
des voleurs, des maîtres chanteurs et tous les autres types tiers sont bâtis en fonction de la géographie.
possibles de hors-la-loi. Les magistrats et leurs adjoints La plupart des villes sont moins denses que les
s’efforcent de maintenir un état de droit, mais partout métropoles : elles grossissent de manière plus naturelle,
où le commerce existe, la cupidité finit par corrompre les exemptes des exigences des seigneurs et des fonction-
plus faibles. De nombreux magistrats cultivent d’ailleurs naires. En conséquence, les bâtiments y sont plus espacés,
un réseau de contacts dans le monde interlope de leur ce qui n’empêche pas les passants d’utiliser principale-
juridiction et acceptent de détourner le regard en cas de ment les ruelles, car les rues sont envahies par les char-
délits mineurs pour pouvoir attraper de plus gros poissons. rettes, qui occupent tout l’espace et peuvent être dange-
reuses pour les piétons.
les villes de rokugan Il est rare que les villes soient divisées en quartiers
comme le sont les métropoles, mais elles ne sont pas
L’appellation « ville » désigne tout centre urbain qui abrite
homogènes pour autant. Les citoyens riches, puissants et
de quelques centaines à dix mille habitants. En dessous de
influents vivent à proximité de la cour et du domaine du
cette barre, il s’agit de villages. Les villes sont plus nom-
magistrat ou du seigneur, dans la zone la mieux protégée,
breuses que les métropoles et, par bien des aspects, ont
peut-être plus d’influence sur le tissu social, culturel et alors que les gens du peuple sont relégués à la lisière ou
économique de l’Empire. aux districts moins recommandables. Les hinin vivent en
Elles se situent juste en dessous des métropoles dans général dans des quartiers à l’écart, à une petite distance
la hiérarchie de l’Empire et remplissent le rôle de carrefours de la ville, et sous le vent.
régionaux. Les aliments, les matières premières et les pro- L’architecture des villes ressemble à celle des métro-
duits finis issus des fermes et villages environnants y sont poles, mais les édifices sont plus petits et moins souvent
transportés, qu’ils soient acquis par le commerce ou en guise bâtis en pierre, à l’exception de ceux qui abritent le gou-
de taxes. Ensuite, ils repartent vers les villes et métropoles vernement ou qui concernent la défense. Les autres sont
proches, là encore pour nourrir le commerce ou, dans le cas en bois, les murs intérieurs en bois et en papier, et rares
des taxes, pour être entreposés à la trésorerie impériale. sont les bâtiments de plus d’un étage.
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

La gouvernance Crime et conspirations


Alors que les métropoles ont un gouverneur, les villes sont L’activité criminelle des villes demeure la même que dans
dirigées par un magistrat de clan ou un seigneur samouraï. les métropoles, mais à moindre échelle. Les syndicats du
Le prestige lié au poste dépend de la réputation de la ville crime y tiennent une filiale, souvent pour une raison spé-
et de l’affectation précédente du noble. Dans les faits, être i i e ar e e le l’ n de ar el de l’ i de
nommé chef d’une ville lointaine ou mal famée est sou- Owari Toshi peut avoir des représentants à Kudo, une ville
vent une punition pour des samouraïs qui ont fait preuve portuaire de la rivière de l’Or, parfaite pour accueillir les
d’incompétence ou de duplicité, mais qui ne méritent pas contrebandiers.
pour autant de sanction plus sévère. En dehors de cela, les activités criminelles demeurent
Le seigneur vit dans un domaine dont la taille est mineures : les agressions et vols sont inévitables dès que
proportionnelle à l’importance de la ville. Les magis- plusieurs centaines de personnes vivent au même endroit.
trats occupent invariablement un manoir en ville d’où ils Par contre, une offense sérieuse se développe plus fré-
dirigent plus facilement le gouvernement et la police, tan- quemment dans les villes que dans les métropoles : les
dis que les samouraïs préfèrent en général demeurer à cultes blasphématoires y conduisent souvent leurs activi-
l’écart de la ville et des gens du peuple, d’autant plus s’ils tés, loin des magistrats d’Émeraude et des autres groupes
considèrent que la ville est indigne de leur statut. qui s’opposent à eux.
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

A
G
R
RN R
otosan uchi balaient la côte pour creuser des tunnels naturels sous
la ville. Au cours des siècles, ils ont été utilisés en secret
R Otosan Uchi, la plus vieille ville de Rokugan (même si cer- par des criminels, des contrebandiers, des samouraïs des
taines colonies des Isawa datent d’avant l’Empire) illustre Clans de la Mante, du Scorpion et de la Tortue, voire par
Chaque gouverneur de parfaitement comment une simple ville fortifiée a grandi les Hantei. Les sous-sols comprennent actuellement de
district de l’Ekohikei au fil du temps : ce modeste village, situé non loin de l’en- nombreuses salles creusées par les humains, récemment
occupe un rôle précis au ou non, et même un lac souterrain doté d’une île, qui sert
droit où les Kamis sont tombés, est devenu la ville la plus
sein du Conseil Sentaku, de terrain d’échanges entre groupes de criminels.
a e e e l e de gan an le ai ari
et chacun de ces postes
revient généralement à un Toshi couvre une plus grande superficie et pourrait accueil-
clan prédéterminé. lir plus de résidents, mais il serait irrespectueux de le dire
à voix haute.
District Kanjo (Clans du Otosan Uchi est divisée en trois districts : le Toshiso-
Phénix, du Scorpion et du
Lion) : la religion et les
to, les quartiers extérieurs ; l’Ekohikei, les quartiers inté- les rumeurs et
cérémonies
rieurs (y compris le mont Seppun) et la cité interdite, un
complexe fortifié qui comprend le palais impérial ainsi que les légendes
District Chisei (Clans de
la Grue, du Dragon et
les bâtiments adjacents. Les quartiers intérieurs, protégés
par les légendaires Murs Enchantés, ont été construits au
d’otosan uchi
mineurs) : la loi et les premier siècle par les clans majeurs assemblés, ce qui leur
relations entre les clans
confère une disposition plus organisée et traditionaliste. $ Le Conseil Sentaku accueille un grand
District Hito (Clans de la Au fil des siècles suivants, les quartiers extérieurs se sont nombre de dirigeants de syndicats crimi-
Licorne et du Lion) : la développés au gré des besoins. Même si une enceinte nels, qui œuvrent tous pour un clan majeur
défense et la logistique externe a été débutée, elle n’a jamais été finalisée et la ou pour un courtisan.
ville s’est étendue au-delà de cette dernière. Elle est main- Aux cascades de la Peine, une jeune
District Karada (Clans du $
Crabe et de la Grue) : les tenant abîmée au point qu’elle menace de s’écrouler à samouraï Ikoma se serait suicidée pour
politiques commerciales plusieurs endroits, affaiblie par les tremblements de terre protéger de noirs secrets de la lignée des
et la trésorerie qui secouent parfois la ville. Hantei. Certains affirment que son fan-
La division physique entre les districts de la ville encou- tôme hante encore les lieux, tandis que
rage la scission sociale et culturelle. Les quartiers exté- d’autres croient qu’elle avait sur elle des
rieurs, qui accueillent tout le monde, sauf les burakumin, documents mentionnant les secrets hon-
abritent une population mixte de gens du peuple et de teux qu’elle a gardés (son corps n’a jamais
samouraïs mineurs (ainsi qu’un grand nombre de crimi- été retrouvé).
nels), tandis que les quartiers intérieurs sont réservés aux
samouraïs de haut rang et à leurs serviteurs. Ces quartiers $ Dans le district Karada de l’Ekohikei se
accueillent aussi les ambassades des clans majeurs, toutes trouve une maison de thé appelée Le
magnifiques, et d’autres bâtiments célèbres comme le champ des gains substantiels. C’est un
Musée impérial des antiquités, le Temple des Kamis et les bâtiment modeste et bondé qui sert un
Jardins aquatiques de Hito. Le mont Seppun, le lieu le plus thé unique, voire légendaire, confection-
vénéré de l’Ekohikei, demeure sacré et virginal. C’est le né à base d’une plante qui ne pousse que
lieu où Seppun, une femme sage de sa tribu, rencontra les dans le jardin adjacent. Nul doute que de
huit Kamis qui venaient de tomber du royaume Céleste. nombreuses personnes aimeraient mettre
L’architecture des quartiers internes est très traditio- la main sur cette plante.
naliste et classique, même pour Rokugan, ce qui n’est $ Le Musée impérial des antiquités expose
pas surprenant puisqu’ils se dressent à l’ombre du palais le cadavre séché (ou pétrifié) d’une créa-
impérial, qui est considéré comme parfait. Bâti pour le pre- ture mystérieuse, supposément apportée
mier Hantei, il n’est égalé par aucune autre structure, que par le fondateur du musée, Kuni Hazu.
ce soit en hauteur ou en splendeur (pour en savoir plus,
$ Un passage conduit de l’intérieur du palais
consultez e is i ri , en page 45).
impérial jusqu’à la baie du Soleil couchant,
mais une protection surnaturelle empêche
Les tunnels tous ceux qui n’appartiennent pas à la
lignée des Hantei de l’emprunter sans
Otosan Uchi est souvent frappée par des séismes assez
se perdre.
mineurs, puisque les kamis de la terre ne se sont toujours
pas remis de la chute des Kamis. Ces facteurs se sont ajou-
tés à l’œuvre de l’océan et des typhons occasionnels qui

72
Les gouverneurs
et le Sentaku
Otosan Uchi est divisée en plusieurs districts, tous dirigés
par un gouverneur. Si les districts des quartiers extérieurs
adoptent le nom de leur gouverneur actuel, les quatre dis-
tricts intérieurs ont eux un nom immuable. Les gouver-
ne r i alen le dai de r in e en er e d’a -
rité et de prestige, et une telle nomination est donc source

la porte
d’une grande fierté. Ils répondent au Conseil Sentaku, un
département de la bureaucratie impériale.
Le Conseil a été créé au cinquième siècle par la famille
Otomo et remplit de nombreuses fonctions, dont la plus
méridionale
importante est de contrôler l’accès aux quartiers intérieurs
La principale porte d’accès vers la cité interdite
et à la cité interdite, notamment pour que la cour impé-
se situe à la jonction des murs sud et est pour
riale ne soit pas prise d’assaut par des plaignants ou des
permettre l’entrée depuis les districts Chisei et
visiteurs. Dans ses domaines de compétences, le Conseil
Kanjo. Une arche massive en cristal sacré la sur-
Sentaku fait loi et seuls le Champion d’Émeraude ou l’Em-
plombe. La légende veut qu’elle brille d’une
pereur peuvent infirmer ses décisions.
lumière sainte en présence de la Souillure de
l’Outremonde. (Nul ne sait si c’est vrai : après le
Les Murs Enchantés premier siècle, l’histoire ne fait aucune mention
(Miwaku Kabe) d’une telle manifestation.)

Le célèbre Miwaku Kabe, les Murs Enchantés de la cité


interdite, fut construit durant la Première Guerre à la
demande de Hantei en personne. Il choisit quatre clans s’est avérée étonnamment résistante face aux pouvoirs
majeurs (les Clans de la Grue, du Crabe, de la Ki-Rin et des kamis de la terre qui mettent si souvent la ville à
du Phénix) pour construire les murailles qui protégeraient l’épreuve. Des shugenja Isawa ont été très impliqués dans
la ville contre les forces de Fu Leng. Heureusement, les la construction : ainsi, chacun des quatre murs a été doté
bénédictions gravées dans l’enceinte l’ont maintenue en de pouvoirs spirituels, qui leur ont permis de résister au
bon état durant toute la guerre et, même depuis, elle passage des siècles.

73
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

Le mur est La réputation sulfureuse de la ville est due à une impor-


tante caste de burakumin qui s’occupe des champs de
Censé puiser sa force des armées glorieuses qui s’y sont pavot hors des murs d’enceinte et à une escouade de
battues, ce mur est décoré de kanji en or, qui représentent pompiers particulièrement corrompus. Toutes deux sont
les noms de chaque samouraï tombé pour le défendre. tolérées par le clan dirigeant, le Clan du Scorpion. L’Empire
Certains prétendent que leurs esprits y résident, prêts à a confié à ce clan la tâche d’organiser, au sein de Rokugan
prendre les armes pour protéger la ville en cas de besoin. et au-delà, le commerce de l’opium, un médicament et
une drogue puissante. Cette activité est depuis divisée en
Le mur sud trois branches, contrôlées par les familles Bayushi, Shosuro
et Soshi.
L’édifice fut béni par les vies d’un shugenja du nom d’Isawa ari e e de i ar ier el i
Naigama et de ses disciples. Lorsque les forces de Fu Leng des pêcheurs, principalement des heimin cantonnés
assaillirent la ville, le mur sembla prendre vie pour les ter- dans la partie occidentale de la baie de l’Honneur noyé ;
rasser. Tout du moins, la horde a disparu. Au cours des celui des marchands, densément peuplé et arborant trois
siècles suivants, les artificiers Asahina ont tenté de déter- immenses quais destinés aux activités commerciales ; celui
miner ce qui avait pu arriver, mais les esprits du mur ont des temples, qui abrite l’imposant Temple de Daikoku et
gardé leurs secrets. le tout aussi resplendissant Temple d’Amaterasu ; celui des
nobles, où se trouvent la cour et les nobles du Clan du

Le mur ouest Scorpion ; et le quartier des Plaisirs de l’île aux Larmes,


le district des divertissements en tous genres. Le dernier
Depuis l’assaut contre la ville, durant la Première Guerre, quartier, celui des tanneurs, s’étend au-delà du mur d’en-
le mur ouest est censé contenir les esprits des créatures ceinte sud-ouest et regroupe les marchands de cuir, les
de l’Outremonde qui ont péri pendant l’attaque. Un faible éboueurs et les crématoriums. Les trois familles du Clan
hurlement surnaturel, audible dans les districts Toshisoto du Scorpion contrôlent la ville d’une manière ou d’une
tout proches, émane parfois de l’extérieur du mur. Au autre et, par extension, la grande majorité du commerce
cours des siècles, de nombreux shugenja ont étudié ce de l’opium au sein de l’Empire (les Clans de la Mante et de
dernier, sans pouvoir déterminer s’il était dangereux ou la Tortue se partagent le reste).
non. Les quartiers les plus proches demeurent toutefois
moins densément peuplés. Le désordre céleste
e la e iale n l l e ari n
Le mur nord raison des grandes richesses de la ville, les marchands et
Détruit par les forces de Fu Leng durant la Première Guerre, artisans ont un pouvoir supérieur à celui qui revient à leur
le mur nord a ensuite été reconstruit. Bien qu’il soit officiel- statut. Les pompiers se livrent à un racket parfaitement
lement considéré comme l’égal des trois autres en termes organisé et ne combattent les incendies que si cela n’inter-
de pouvoir et de prestige, il n’a démontré aucune com- fère pas avec leurs activités illégales : ils gèrent également
pétence extraordinaire. Principalement bâti par le Clan du des fumeries d’opium, des maisons closes et des tripots,
Crabe, il est percé de tunnels, de labyrinthes, de pièges et qui se font tous passer pour d’ordinaires maisons de saké.
de zones destinées à mettre en place des embuscades, de Les marchands se plaignent à voix basse de l’extorsion en
manière assez similaire à ce que le clan allait planifier plus vogue, mais ils n’osent rien dire vu les pots-de-vin que les
tard pour la Grande Muraille Kaiu. gangs paient aux troupes d’élite du gouverneur, la garde
du Tonnerre. Celle-ci assure la paix en ville, mais pas la jus-

ryokō owari toshi, la


tice. Son but est d’empêcher tout acte de violence, toute
émeute ou tout autre événement perturbateur. La gouver-
cité des mensonges neure, Shosuro Hyobu, se contente d’ignorer la corruption
endémique qui règne en ville, d’autant que chaque garde
ari hi r e de n re n d n la in ou noble profite de rentrées d’argent illégales. Même les
du Voyage, pour avoir résisté aux velléités expansionnistes hinin locaux manquent de respect et jouissent d’un trop
du Clan du Crabe au cinquième siècle ; la cité aux Murs grand pouvoir. Comme ils emportent les déchets de la ville
verts, pour la couleur de la pierre des carrières proches, pour fertiliser les champs de pavot, ils sont plus riches et
qui ont permis la construction des murs d’enceinte ; la plus influents que tous les autres burakumin de Rokugan.
cité des Histoires, en raison de sa population cosmopo- Ils se promènent librement hors des murs d’enceinte, et
lite. Mais la deuxième plus grande ville de Rokugan reste certains osent même adresser des rictus aux samouraïs
toutefois principalement appelée la cité des Mensonges. qu’ils croisent.

74
Le quartier des Plaisirs
Densément peuplée, l’île aux Larmes, qui émerge au tenu par des gaijin, sont ouverts aux samouraïs qui
milieu d’une petite baie, accueille les établissements de peuvent payer et désirent échapper à leurs devoirs pen-
divertissement d’une ville plutôt libertine. Le quartier est dant quelques heures. Mais ce n’est qu’un exemple de ce
ouvert à tous les nobles qui le souhaitent, dissimulés sous e ari e rir i e e h r de l’ le
leurs tengai, tant qu’ils laissent leurs armes sur le quai, le vice et l’opium règnent en maîtres. Des lanternes rouges
soi-disant pour les faire polir. Les innombrables maisons éclairent l’île et la baie entière, et donnent aux lieux une
de geishas, fumeries d’opium, maisons de saké et autres teinte irréelle qui apaise l’esprit des samouraïs et leur per-
établissements du même genre, dont l’un est illégalement met, sans honte, de ne plus policer leur expression.

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C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

idée d’aventure : le prix du pouvoir


Accroche e a rennen e Sh r h il de la g erne re de ari hi e d d
d’une overdose d’opium. C’est une honte qui pourrait miner l’influence de la famille, puisqu’être terrassé par
l’opium est assurément un signe de faiblesse. Les circonstances qui entourent le décès sont toutefois étranges,
et les PJ se voient demander d’enquêter.
Développement Au cours de l’enquête, il devient rapidement évident que quelqu’un tente de leur mettre
des bâtons dans les roues. Les témoins craignent de leur parler, des preuves disparaissent et les PJ pensent
être suivis. Finalement, que ce soit grâce aux témoignages ou à leur examen du corps, ils comprennent que
Jocho a été empoisonné. Ils retracent le poison jusqu’à Shosuro Giichi, un ami proche de Jocho.
Giichi a effectivement assassiné Jocho pour affaiblir Hyobu : le fait qu’un Shosuro, et plus encore le fils de
la gouverneure, meure en consommant sa propre production est déshonorant. Giichi espère pouvoir récupé-
rer certaines attributions de Jocho tout en endommageant la réputation de Hyobu, pour finalement la rempla-
cer au pouvoir.
三 Paroxysme Giichi offre une récompense aux PJ si son plan réussit et qu’ils ne révèlent pas ce qu’ils ont
appris. S’ils refusent, il les accusera du meurtre, et plusieurs de ses alliés, des membres influents du Clan du
Scorpion, témoigneront en sa faveur. Les PJ devront non seulement prouver la culpabilité d’un accusé insoup-
çonnable, mais aussi laver leur réputation, ce qui n’est pas tâche facile dans la cité des Mensonges où tout le
monde poursuit ses propres objectifs.

AVANTAGES DÉSAVANTAGES

gouverneure corrompue ise i e e Ne s se s ir es i s


 social ; physique  martial ; mental
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  5  12
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
Hyobu est la gouverneure de la ville puisqu’elle était la
femme du gouverneur précédent, mais elle demeure une i s i : portée 0-1 ; dégâts 3 ; Dangerosité 5/7 ; Acé-
membre du Clan du Scorpion et elle gouverne d’une main ré, Cérémoniel, Discret
de fer. La ville est désordonnée, car elle en tire profit : si la
i e e t rt )  : kimono raffiné, sceau lié à son
justice et l’équité régnaient, le rôle sociétal de la cité des
poste, masque en tissu, éventail
Mensonges et le commerce de l’opium en seraient affaiblis,
ce qui aurait des conséquences néfastes pour l’Empire. CAPACITÉS
e re ige e l’a aren e ri en ari
Toshi. Hyobu, patiente et intelligente, protège farouche- N NG
ment son fils, Jocho. Elle ne sanctionne pas les infractions Une fois par session de jeu, au prix d’une action de Sou-
mineures des résidents et des visiteurs, mais les réperto- tien, Hyobu peut dépenser un point de Vide pour révé-
rie e a e in Si ari e ne ile de en- ler l’un des nombreux mensonges qu’elle tisse, et changer
songes, Hyobu compte bien en être l’araignée. ainsi le cours d’une intrigue. À la fin du round suivant, elle
échangera ses points de Progression avec un (ou plusieurs)
SOCIÉTAL PERSONNEL PJ de son choix.
35 HONNEUR ENDURANCE
12
3 4
70 GLOIRE SANG-FROID
18
4 2
65 STATUT 3 ATTENTION
7
+2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
4
ARTISANAL 1 MARTIAL 3 SAVANT 3 SOCIAL 5 PRO. 4

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CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

khanbulak idée d’aventure :


Khanbulak, la ville du Khan, est la capitale de la famille
Moto, le point de départ de la route de Sable et l’extrémi-
au-delà des murs
té ouest de Rokugan. Comme la moitié de la ville se trouve
techniquement en dehors de l’Empire, il s’agit de l’un des Accroche Alors qu’ils traversent la ville en
rares endroits où les marchands gaijin peuvent commercer. soirée, pour affaires, les PJ croisent un meneur
Ainsi, la ville accueille autant les caravanes qui ont traver- de caravanes gaijin accompagné de ses gardes
sé les Terres brûlées par la route de Sable que celles qui du corps. Le fait qu’il soit en ville après le cou-
arrivent des royaumes d’Ivoire par la route du Ki-Rin. Elle cher du soleil est une violation criante des lois
abrite aussi la Garde Blanche, qui patrouille à la frontière locales. Le marchand discute avec des samouraïs
de Rokugan. Moto et Ide qui, tout comme les PJ, sont tenus
Khanbulak est au moins aussi vaste que la capitale de rapporter cette infraction et de s’assurer que
Shinjo. Son prestige et sa richesse ont facilité la montée l’intrus soit puni.
en puissance de la famille Moto, tant sur le plan politique
Développement Si les PJ interpellent les
que militaire. D’autres courtisans du clan se demandent
étrangers à ce sujet, le samouraï Moto leur
d’ailleurs si les Moto tenteront de s’approprier le poste de
demande de ne pas s’en mêler et affirme que
Champion actuellement détenu par les Shinjo.
le gaijin prête serment au Clan de la Licorne.
Des murs d’enceinte d’un blanc éclatant séparent
Les PJ se rendront probablement compte que
cette ville carrée d’un désert qui devient progressivement
ni le lieu ni l’heure ne conviennent à un tel évé-
al-Zawira (les Terres brûlées) puis les royaumes d’Ivoire.
nement, et que tout le monde semble nerveux.
À l’intérieur, des tapisseries féériques sont tendues entre
S’ils n’acceptent pas ce mensonge, le samouraï
de hautes colonnes : elles constituent les murs du palais,
Moto les menace physiquement. Pour finir, les
à partir duquel le Clan de la Licorne défend Rokugan
deux samouraïs proposent de partager avec les
contre toutes les menaces extérieures. Bien que ce soit
PJ les fruits de leur entente, ou laissent devi-
la capitale de la famille Moto, ou peut-être en est-ce la
ner la vérité malgré eux : le marchand doit leur
raison, Khanbulak est une affectation indésirable pour les
vendre une grande quantité d’esclaves, ce qui
samouraïs Utaku ou Ide, qui se considèrent plus proches
est illégal au sein de l’Empire.
de la société rokugani. Les rares ambassadeurs des clans
majeurs qui y exercent s’estiment mis au placard, et n’ont 三 Paroxysme Les samouraïs comme le carava-
plus d’espoir pour leur future carrière. À l’exception des nier gaijin connaissent la peine associée à leur
représentants des Clans du Dragon et du Crabe, la plu- délit, et ils sont inquiets que les PJ n’acceptent
part doivent se réinventer une vie en ville à la fin de leur pas de se montrer raisonnables. Si les PJ ne les
mandat, puisque ceux qui retournent auprès de leur clan ont pas reconnus, tous trois tentent de fuir, ce
sont traités avec mépris. Malgré les apports inestimables qui peut provoquer une course poursuite dans
de Khanbulak, Rokugan demeure une société repliée sur les rues sombres de la ville. Cependant, s’ils
elle-même et juge qu’une ville ouverte sur le monde est pensent que les PJ pourraient les identifier, tous
une aberration. trois, ainsi que les gardes du corps, deviennent
violents. Le marchand gaijin possède également
Une ville de tentes une bouteille d’une mixture alchimique qui, une
fois brisée, crée un gros nuage de fumée noire.
En plus des samouraïs dangereux et mal dégrossis de la
famille Moto, Khanbulak accueille une vaste cité de tentes,
toujours changeante, à l’extérieur de son enceinte, où
Khanbulak est donc une ville où coexistent la civilisa-
des bannières affichent des milliers de blasons et de mon.
tion et la barbarie, à l’instar de la famille Moto. Bien qu’elle
Ce lieu est destiné aux marchands, impériaux ou gaijin,
qui proviennent principalement des terres desservies par soit composée de samouraïs, tous échangent avec les mar-
les routes de Sable et du Ki-Rin, mais aussi de bien plus chands itinérants, comme leurs ancêtres avant eux. Des
loin. Ces groupes bigarrés fréquentent librement la famille marchandises étrangères et des personnes mystérieuses
Moto, qui garde sur place ses soldats les plus fougueux. traversent chaque jour la porte d’entrée de la ville.
Bien que ces derniers offensent souvent les familles tra- Lorsque le soleil se couche, tous les gaijin doivent quit-
ditionalistes du clan, les Moto se reconnaissent en leur ter Khanbulak. Cette obligation concerne évidemment les
tempérament ardent et leur inébranlable passion, qui marchands venus des Terres brûlées et au-delà, mais aus-
découlent de leur héritage d’habitants des steppes. si les tribus ujik qui n’ont pas encore officiellement prêté

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C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

serment à la famille Moto ni accepté l’offre de la Kami Shinjo CAPACITÉS


de rejoindre son clan. Cette règle sert aux gaijin à démon-
A A R A A
trer leur bonne foi, mais facilite aussi la protection de la ville.
Ce couvre-feu n’est pas une simple question de poli- Une fois par scène, au prix d’une action de Soutien,
tesse : les gaijin sont traités durement dans tout l’Empire Rurame peut ordonner à tout samouraï du Clan de la
d’Émeraude et, techniquement, leur présence y est inter- Licorne qui peut l’entendre de ne pas faire de quartier sur
dite. L’autorité de la ville ne s’étend pas au-delà du mur d’en- le champ de bataille. Jusqu’à la fin du round suivant, tous
ceinte, et des prêtres locaux bénissent la cité tous les matins, les samouraïs affectés qui effectuent une action d’Attaque
proclamant que tous les habitants sont citoyens de l’Empire, depuis leur monture augmentent de 2 points les dégâts et
en hommage au premier Hantei. Tout gaijin trouvé en ville la Dangerosité de leurs armes.
après le coucher du soleil est donc tué sans hésitation. Si les samouraïs affectés font partie des Bannières écar-
lates de Rurame, ils augmentent de 4 points les dégâts et
la Dangerosité de leurs armes.
Moto Rurame,
commandante impatiente
le village de la
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  7 3 corne écarlate
Moto Rurame, Noyan des Bannières écarlates et sœur du
khan de la famille, Moto Ogödei, pense que la ville tire Situé au sud-est des plaines du Cœur du Dragon, le vil-
sa famille vers le bas. Ses Bannières écarlates, mingghan lage de la Corne écarlate est un carrefour commercial et
de la Horde blanche, patrouillent dans la ville et les terres un centre diplomatique de second rang. Des visiteurs des
qui s’étendent au nord et à l’est, et pourtant, elle consi- Clans du Lion, de la Licorne et du Phénix (dont la présence
dère que son poste est trop restreint à la ville. Figurant constante explique le nom du village) s’y rendent réguliè-
parmi les plus traditionalistes de la famille, elle pense que rement, et les routes qui y passent rejoignent certaines des
tous devraient revenir à leurs racines ujik et retourner dans régions les plus peuplées de l’Empire. Les Isawa y ont une
les steppes. Elle juge que les Ide symbolisent la faiblesse ambassade permanente et gèrent un commerce, la Mai-
du Clan de la Licorne, convaincue que ces sycophantes son de l’Aube de jade. Le village, sans prétention, est aus-
trahissent tout ce qui rend la horde forte pour plaire aux si une destination festive pour certains étrangers, puisqu’il
Rokugani trop mous. Elle est néanmoins demeurée loyale accueille plusieurs tripots, une cantine, un village hinin et
jusque-là. Elle surveille Khanbulak comme si la ville était suffisamment de maisons de nobles pour donner l’impres-
l’un des campements des bons vieux jours et encourage sion d’une ville active en plein développement.
les luttes amicales entre soldats le soir, pendant que la Le commerce et l’ambassade ne sont que des façades,
viande rouge cuit sur les feux de camp. malgré les affaires légales qui s’y déroulent. L’Aube de jade
est une référence indirecte à Dame Soleil, mais pas pour
SOCIÉTAL PERSONNEL lui rendre hommage, et plutôt pour la dépeindre comme
le plus grand ennemi de l’humanité. La secte du Kolat est
45 HONNEUR ENDURANCE
13 bien implantée en ville, et presque tous les résidents, des
2 4 hinin aux nobles des familles Isawa et Shinjo, jouent un
64 GLOIRE SANG-FROID
9
2 4 rôle dans ses conspirations, qu’ils le sachent ou non. Les

60 STATUT 2 ATTENTION
8 adeptes du Kolat surveillent de près tous les samouraïs qui
entrent en ville et leur posent des questions anodines pour
jauger leur foi et leur loyauté envers l’Empereur, ainsi que
+2, –2
ATTITUDE : SÛR DE SOI
VIGILANCE
3 leur utilité potentielle.
Tout comme l’Empire, le Kolat est le résultat de la
ARTISANAL 0 MARTIAL 5 SAVANT 1 SOCIAL 2 PRO. 2 chute des Kamis à Rokugan. Si d’autres se sont pliés à la
volonté du royaume Céleste, le Kolat refuse de se laisser
AVANTAGES DÉSAVANTAGES gouverner par les enfants des dieux. Le but du Kolat est
G errier es ste es tie e de renverser la dynastie Hantei pour que l’humanité se
 martial ; physique  social ; mental dirige seule, libre des restrictions et des lignées de diri-
geants fondées par les Kamis. À cette fin, il a très tôt éri-
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS gé un réseau d’espions, de cellules secrètes et d’assassins
impitoyables, et ses communications sont toutes codées.
i eterre  : portée 1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5 ; Acé-
Parmi les armes les plus terribles du Kolat figurent des
ré, Solide
agents dormants qui opèrent sous une fausse identité
Ar e erie i : portée 2-4 ; dégâts 4 ; Dange- pendant des années, voire des décennies, colligeant des
rosité 5 ; Militaire informations et attendant que vienne l’heure d’accomplir
des actes plus drastiques. Ces espions ont été entraînés
i e e t rt ) : armure lamellaire (Résistance phy- pour résister à la torture. Le village de la Corne écarlate,
sique 4 ; Militaire)

78
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

malgré sa petite taille et son allure anodine, pourrait être R NA N


le cœur d’une conspiration qui s’étend à tout Rokugan, Lorsque Chinoko effectue une action d’Attaque contre une
mais personne ne sait exactement à quel point le Kolat est cible Désorientée ou qui ne se doute de rien, elle peut
implanté dans le reste de l’Empire. dépenser comme suit :
+ : en cas de succès, la cible subit un coup critique
Chinoko, geisha traîtresse d’une gravité égale à deux fois la Dangerosité de l’arme
Chinoko,
ANTAGONISTE RANG DEgeisha traîtresse
CONFRONTATION 6 6
de Chinoko, plus 1 pour chaque
façon en plus du premier.
dépensé de cette

Née dans un taudis, Chinoko s’est naturellement lais-


sée attirer par les délits et les intrigues du monde de la
rue. Elle exècre l’Ordre céleste qui limite ses possibilités
et celles de ses pairs. Le Kolat est devenu sa deuxième idée d’aventure :
famille, et elle y a été entraînée à tuer et à espionner. de fausses
Chinoko drape son corps musclé de riches vêtements de
soie noire, et elle porte les bijoux exotiques du Clan de la propositions
Licorne. Ses talents de geisha égalent ceux des meilleures
de l’Empire, mais cet emploi respectable n’est qu’une Accroche L’un des PJ trouve un mystérieux
façade. Elle dirige un petit empire criminel : tripots, fume- message codé dans ses affaires, suffisamment
ries d’opium et réseau de prostitution. Un certain nombre complexe pour l’intriguer, mais pas impossible
d’agents dormants dans tout le nord de l’Empire lui four- à déchiffrer. Il provient du Kolat et contient une
nissent des rapports et, en cas de besoin, assassinent les invitation à rejoindre la conspiration dans sa
cibles qu’elle leur désigne. guerre contre l’Ordre céleste. C’est à la fois un
test et un piège. Le Kolat pense que le PJ ira voir
SOCIÉTAL PERSONNEL
n dai r l ir ler
28 HONNEUR ENDURANCE
12 Développement
3 3 le e i n d
Si le PJ agit de cette façon,
la a r d dai n er n
25 GLOIRE SANG-FROID
14
2 3 la réaction publique du seigneur ainsi que de

30 STATUT 2 ATTENTION
6 ses samouraïs, pour voir si certains pourraient
être sensibles à leur cause. En provoquant la
r a i n de d g d dai r e e e e
+2, –2
ATTITUDE : INTIMIDANT
VIGILANCE
3 secrète », le PJ pourrait avoir permis d’identifier
une demi-douzaine de samouraïs prêts à être
ARTISANAL 3 MARTIAL 3 SAVANT 2 SOCIAL 4 PRO. 4 recrutés.

AVANTAGES DÉSAVANTAGES 三 Paroxysme Si le PJ ou ses compagnons


répondent à l’invitation, ils se verront confier
e t t e re se ret une mission simple ou la tâche ultime d’infiltrer
 social ; relations  social ; relations Otosan Uchi. Cependant, s’ils sont particulière-
ment compétents ou bien placés, le Kolat pour-
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
rait en faire des agents dormants qui devront
esse  : portée 0-1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 3 ; Cérémo- attendre un signal avant de passer à l’action. Les
niel, Discret PJ se laisseront-ils embringuer ? Quel est le but
de la secte ?
i e e t rt )  : kimono en soie, parfum raffiné,
couteau, trois fioles de Lait de la nuit (poison)

CAPACITÉS

N N N R AN
Lorsque Chinoko effectue un test de compétence sociale,
elle peut dépenser comme suit :
e Air : l’une des cibles qui peut l’entendre subit
l’état Désorienté jusqu’à la fin du round suivant, plus un
round supplémentaire pour chaque dépensé de cette
façon en plus du premier.

79
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

Les ports La plupart des ports dépendent d’une ville, dont ils
peuvent être le cœur ou un simple district parmi d’autres,
Synonymes de sécurité, les ports sont des zones proté- mais ils représentent toujours un atout économique. Ils
gées aux eaux calmes où les bateaux peuvent accoster. emploient des paysans qui travaillent sur les quais ou dans
Les marchandises et passagers peuvent y être débarqués les entrepôts à l’entretien des navires ou à la manutention
sans craindre une mer houleuse ou une attaque de pirates. des marchandises. Ils peuvent aussi fournir des services de
Les ports sont divisés en deux catégories, maritimes ou flu- divertissement ou d’hôtellerie pour les équipages.
viaux, et sont destinés à la pêche, à la défense, aux chan-
tiers navals, au commerce ou à toutes ces activités à la fois. l’aménagement
Quel que soit leur premier rôle, les ports permettent
aussi de faciliter le commerce. La plupart des villages et des ports
des villes mourraient de faim en une génération sans le La géographie, les conditions de navigation, la fonction
réseau de ports grâce auquel ils s’approvisionnent en et la capacité d’accueil recherchée déterminent l’agence-
ien di er e dai l a n en de g er- ment du port. Ce dernier peut se développer dans des cri-
neurs et des magistrats qui supervisent le commerce, ins- ques naturelles ou, si les lieux ne s’y prêtent pas, dans des
pectent les marchandises, perçoivent les taxes douanières bassins artificiels. Quoi qu'il en soit, le but est de préserver
et délivrent les permis nécessaires. Bien que de nombreux les vaisseaux des tempêtes, des courants et des vagues.
fonctionnaires mineurs acceptent des pots-de-vin pour Des digues sont souvent ajoutées aux protections natu-
détourner le regard, les magistrats ne sont pas aussi faciles relles : ces barrières de bois ou de pierre sortent de l’eau
à acheter (et coûtent plus cher). pour empêcher l’assaut constant des vagues d’abîmer les
navires ou d’éroder les quais. Certains ports vont plus loin
encore et construisent des murs de protection censés arrê-
ter les tsunamis et les tempêtes.
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

réparer les voiles, du goudron, des gouvernails et autres.


les phares Les guildes marchandes proposent généralement de louer
des entrepôts près des docks et vendent de la volaille, du
De nombreux ports et zones côtières sont équi- riz, du tofu, des graines et de la terre.
pés d’un phare pour prévenir les bateaux de la Les services destinés aux marchands et aux marins, y
présence de rochers, de bas-fonds et d’autres compris les auberges et les lieux où boire et se divertir,
dangers qui pourraient ne pas être repérés à se trouvent un peu plus loin. Ces entreprises sont rare-
temps la nuit ou en cas de brouillard. Un phare ment fréquentées par les classes sociales supérieures,
consiste généralement en une petite tour aux qui les jugent déshonorables et grossières. La ville qui se
murs en pente, souvent en bois, parfois en trouve derrière le port est le lieu de résidence de la main-
pierre. La salle de la lanterne est au sommet, d’œuvre locale.
sous un long toit en pente recourbé typique de
Rokugan. La plupart des phares sont plus gros Les types de ports
à la base, pour ressembler aux maisons du vil-
lage. Les parties de l’édifice autres que la tour Les ports sont situés au bord de rivières d’eau douce ou
du phare sont généralement surmontées d’un de la mer, ce qui entraîne des différences de conception.
toit en paille. Le gardien vit sur place et se rend Les ports fluviaux ne peuvent accueillir que des barges, et
au sémaphore aussi souvent que nécessaire. ils sont généralement protégés par une seule digue, en
La plupart des lanternes des phares brûlent de amont. Les plus importants peuvent être équipés de quais
l’huile mais, dans les ports plus prospères ou pri- tentaculaires ou de bassins artificiels le long de la rive,
vilégiés, des shugenja peuvent invoquer un kami mais la plupart du temps, les barges doivent accoster dans
du feu. En préparant un shintai pour accueillir la boue. À l’inverse, les ports maritimes attirent des hordes
cet esprit, un shugenja propose un lieu de rési- de bateaux de pêche ou de marchandises accueillis par
dence agréable au kami, afin qu’il entretienne une un air marin et les cris des mouettes. De longues digues
flamme éternelle, du moins tant qu’il est conve- sont alors nécessaires pour bénéficier d’une eau calme et
nablement vénéré. Le gardien d’un tel phare est de longues jetées s’étendent vers la mer pour maximiser
alors aussi le gardien du sanctuaire, et la vie des l’espace disponible.
marins dépend de sa capacité à satisfaire le kami.
les fonctions des ports
La fonction principale d’un port (servir les armées, les
Les ports permettent aux bateaux d’accoster à quai : pêcheurs, les marchands, les chantiers navals ou plusieurs
les navires peuvent s’amarrer à des docks en bois ou en de ces entités) dicte sa forme. Chaque usage impose ses
pierre le long de la côte ou d’un bassin artificiel. Des jetées conditions. Un seul port peut remplir toutes ces fonctions,
s’étendent perpendiculairement à la côte et s’avancent tant que ses équipements sont adaptés.
dans l’eau, soit dans les endroits peu profonds, soit dans
les ports où la capacité doit être accrue. Lorsqu’un navire Les ports de pêche
arrive, les agents du magistrat inspectent les marchan-
dises, calculent les taxes douanières et appliquent leur Ils accueillent des petits bateaux, dont les équipages vont
sceau sur toutes les caisses vérifiées. Ensuite, les débar- d’une à dix personnes. La pêche commerciale compte sur
deurs forment une chaîne de la cale jusqu’au port où ils deux techniques : la pêche au filet ou au cormoran. La
déposent les cargaisons sur des charrettes qui se rendent pêche au filet attrape principalement des poissons d’eau
vers d’autres bateaux ou vers les entrepôts. salée, souvent des bancs de petits poissons comme les
Pour maximiser l’espace utile dans les régions plus sardines, les demi-becs et les chinchards le long de la côte,
escarpées, certains ports abritent des entrepôts et maga- ou des poissons plus gros, comme les thons, les saumons,
sins sur une petite île à quelques centaines de pas de la les vivaneaux et les bars en haute mer. La pêche au cor-
côte. Des ponts en bois couvrent la distance. Lorsque les moran utilise l’oiseau, dressé, pour capturer des poissons
îles naturelles ne suffisent pas à répondre aux besoins d’eau douce, notamment des saumons et des truites.
grandissants de la ville, les habitants en quête d’espace Pour la pêche au filet, des petits navires partent avec
construisent parfois des édifices sur pilotis. un équipage de trois ou quatre personnes. Ils lancent à
Sur le port, un bâtiment gouvernemental permet d’ob- l’eau de quatre à six filets, larges d’une vingtaine de
tenir les permis nécessaires, les drapeaux pour les com- mètres chacun. La grosseur des mailles du filet et leur posi-
munications en mer ainsi que des cartes. Les commerces tionnement dépendent des poissons de saison et des cou-
alentour vendent des marchandises et services indispen- rants. Selon les périodes de l’année, les poissons les plus
sables à la préparation des voyages, dont des pièces pour nombreux varient.

81
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

Les poissons périment vite, et les ports de pêche


les sanctuaires doivent donc être suffisamment grands pour que la cargai-

portuaires son ne pourrisse pas en attendant qu’un espace se libère


à quai. Même ainsi, les ports de pêche et ceux qui y tra-
vaillent empestent le poisson séché et les entrailles pour-
La plupart des ports contiennent une grande rissantes. Ces ports proposent aussi de grands entrepôts
variété de sanctuaires, bâtis sur les berges, pour réfrigérer, saler ou sécher le poisson, ainsi qu’un mar-
les digues, les jetées et les quais. Ils sont sou- ché aux poissons frais. Les ports fluviaux des montagnes
vent consacrés à une ou plusieurs des For- comptent sur la glace pour conserver la pêche, tout comme
tunes majeures ou aux innombrables fortunes un certain nombre de ports du Clan du Phénix. Ces der-
mineures et aux kamis des rivières locales, des niers demandent à des shugenja en formation d’invoquer
rochers ou de tout autre élément du port ou des les kamis de l’air et de l’eau pour obtenir de la glace.
alentours. Ils visent à favoriser la pêche ou le
commerce, ou à influencer la météo. Les sanc-
tuaires portuaires les plus fréquents sont dédiés Les ports militaires
aux fortunes suivantes : Ils assurent la sécurité et découragent les bandits comme
ri : la fortune des poissons et des repas les pirates. Les soldats accompagnent aussi les agents du
roboratifs est généralement représentée sous la magistrat dans leurs inspections. Les ports militaires béné-
forme d’un pêcheur endormi portant un bol à ficient de quais fortifiés distincts et sécurisés qui pourraient
moitié vide. accueillir des navires marchands en temps de paix. Ils sont
i : Fortune de la richesse et patron aussi équipés de casernes et d’entrepôts pour répondre
des marchands et des fermiers. Daikoku est aux besoins des soldats. La plupart des ports militaires flu-
l’une des Fortunes majeures, et ses sanctuaires viaux prévoient, en aval, un barrage anti-pirates surveil-
contiennent souvent un bol de riz, un rat ou son lé par des archers. Les ports maritimes prennent d’autres
ÉVALUER LES TAXES marteau distinctif. mesures pour décourager et combattre les forces navales
DOUANIÈRES i i et s r : la fortune de la mer et la fortune hostiles, dont des digues fortifiées surmontées par des
des rivages ont autant de sanctuaires communs tours pour les archers ou, principalement au sein du Clan
Les taxes payables sur que distincts, puisque ces deux amants sont du Crabe, d’équipements plus lourds comme des cata-
les marchandises sont souvent séparés. Leurs sanctuaires comprennent
environ égales à cinq pour pultes. Les navires de guerre patrouillent souvent près
des représentations d'un bateau kobune en jade des côtes et sur les voies maritimes pour éloigner ou com-
cent de la valeur totale
pour Suijin et des flammes éternelles pour Isora. battre les pirates.
de celles-ci, mais elles
varient selon l’humeur es s t ires es e ts : Kaze no Kami, la for-
tune des vents, règne sur les fortunes des quatre
du fonctionnaire et sa
relation avec le capitaine, vents : Tamon (nord), Zocho (sud), Jikoju (est) et Les chantiers navals
mais aussi selon la Komoku (ouest). De nombreux sanctuaires leur Ils permettent d’accomplir des réparations importantes,
relation entre le clan sont consacrés, individuellement ou non. même sous la ligne de flottaison des vaisseaux. Les cales
qui possède le bateau et
sèches sont différentes des ports puisqu’elles sont entou-
celui qui dirige le port.
Le type et la valeur des rées sur trois côtés de murs en pierre qui sont posés sur le
marchandises, ainsi que fond marin et d’une porte en bambou et en goudron qui
Les barques réservées à la pêche au cormoran se referme derrière le navire. Ensuite, une roue installée
la demande, peuvent
également influencer contiennent généralement deux ou trois personnes et sur un mur sert à vider l’eau et le bateau repose sur des
l’estimation finale. partent avant l’aube. Une petite torche fumeuse se trouve cales, ce qui permet d’accéder à sa surface ventrale.
à l’avant, et le dresseur tient des cordes attachées au cou Les chantiers navals offrent toujours de grandes
des oiseaux, au nombre de cinq à dix. Les cordes sont suf- réserves de bois, de goudron, de voiles et de cordes, ain-
fisamment serrées pour empêcher le volatile d’avaler les si que des pièces plus spécialisées en bois ou en métal. Ils
poissons, qui sont aveuglés par la torche, pour que les emploient également des ouvriers qui savent fabriquer les
cormorans les attrapent plus facilement. Quand un oiseau pièces manquantes, mais aussi des plongeurs qui peuvent
capture un poisson, le dresseur le ramène au bateau retenir leur souffle durant de longues minutes pour gratter
et récupère la prise dans sa gorge. Si le dresseur est com- les saletés ou réaliser de petits travaux sous l’eau. La varié-
pétent, chaque oiseau peut attraper jusqu’à cent cin- té des emplois disponibles attire souvent des heimin sans
quante poissons par heure. qualifications qui espèrent apprendre un métier.

82
Les ports commerciaux
L’immense majorité des ports de Rokugan a été
construite uniquement pour le commerce ou
pour faciliter ce dernier, en plus de leurs autres
fonctions. Ils emploient des hordes de débardeurs
qui transportent les marchandises et abritent de nom-
breuses guildes qui proposent les autres services néces-
saires. Les magistrats des douanes bénéficient souvent
d'une petite maison sur chaque quai, pour que les inspec-
Les résidents
tions et les évaluations de taxes douanières ne retardent Les villes portuaires figurent souvent parmi les plus hétéro-
pas indûment le processus. Les ports offrent générale- clites de Rokugan. Elles accueillent des visiteurs des autres
ment de meilleurs prix et un plus grand choix que les com- clans et même, rarement, des gaijin. La plupart permettent
merces des terres, qui doivent d’abord être approvision-
aussi un plus grand nombre de pratiques religieuses que des
nés. L’abondance de marchandises et d’argent qui change
villes de même taille situées à l’intérieur des terres. Contrai-
de mains attire invariablement les pirates et les bandits.
rement aux petits villages où tout le monde se connaît, les

les villes portuaires


ports abritent une majorité d’étrangers, qui ont tendance à se
méfier les uns des autres. Les habitants du cru craignent les
Les ports dépendent de nombreux employés et adminis- voleurs, les arnaques et les distractions, qui sont nombreuses.
trateurs pour leur fonctionnement. La ville qui les accueille La violence y est également endémique, surtout au sein des
doit donc être assez conséquente pour loger, nourrir et établissements qui accueillent les marins, où des combats
divertir une main-d’œuvre aussi diversifiée. éclatent fréquemment.

La gestion des villes portuaires La vie en ville


La plupart des villes portuaires sont dirigées par un seul Les villes portuaires disposent de tous les types de diver-
clan, qui nomme un gouverneur ou un magistrat. Même tissements : des établissements allant de frustes à distin-
les petits ports sont considérés comme des atouts impor- gués promettent les meilleurs thés, sakés ou sushis. La
tants et attirent des représentants de toutes les familles musique et le théâtre (le no, les pièces dramatiques du
majeures. Dans une ville portuaire, le gouverneur ou le kabuki, les spectacles de marionnettes du bunraku) sont
magistrat en chef tient une cour où il interagit avec les
présentés dans des théâtres spécifiques, à la cour, voire
magistrats et les principaux nobles, surtout s’ils sont impli-
dans la rue. Les villes portuaires abritent en tout temps
qués dans le commerce et les travaux publics. Les heimin
une importante population itinérante. À l’exception des
et les membres des guildes commerciales s’y présentent
aussi. Cependant, comme ils appartiennent à une caste carrefours commerciaux les plus courus, les ports offrent
inférieure, leur participation se limite à écouter les conver- le flux le plus constant de voyageurs qui vont et viennent
sations durant les pauses, à observer et à faire des rap- au rythme des arrivées et des départs de bateaux. La plu-
ports. Un petit nombre de ports se trouvent aux frontières part de ceux-ci suivent des routes régulières, et leurs équi-
entre des clans, mais, vu leur importance pour Rokugan, pages deviennent des visages familiers qui s’intègrent
l’Empereur y dépêche souvent une force impériale pour dans la communauté, même s’ils ne sont présents qu’une
éviter les tensions et favoriser un commerce équitable. ou deux fois par année.

83
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

le district quel gaijin ?


A A portuaire de gotei
Malgré leur excentricité, les îles de la Soie et des
Bien que cela demeure La ville de Gotei est la capitale des îles de la Soie et des
Épices font partie intégrante des terres impé-
rare, le plus humble hei- Épices. Elle se trouve à une journée de bateau, à l’est des
riales. Sans cela, le Clan de la Mante ne pour-
min peut quitter le port côtes du Clan de la Grue. Située dans une crique naturelle
rait pas prétendre au statut de clan à Rokugan,
en tant que simple marin de l’île à la pointe occidentale de l’archipel du Clan de la
et leurs actes de piraterie seraient des attaques
et y revenir capitaine. Mante, cette ville portuaire est indubitablement la plus inter-
Dans les îles, le contrôle
contre l’Empire et non une simple compétition
nationale de Rokugan, en grande partie grâce à l’accepta-
d’un bateau, comme celui économique entre clans.
tion relative dont jouissent les gaijin. Les marchands locaux
d’une terre, est normale- Cela signifie que l’interdiction impériale qui
servent d’intermédiaires entre les commerçants de Rokugan
ment réservé aux nobles. frappe les gaijin est en vigueur… en théorie.
et ceux qui viennent des royaumes d’Ivoire et au-delà.
En pratique, cet édit n’est respecté que lorsque
Même si les capitaines
quelqu’un souhaite s’en prévaloir pour exiler un
heimin ne sont rien
de plus que des gens
La culture rival particulièrement compétent.
du peuple aux yeux du Pour ne pas laisser croire qu’il ne respecte
Le Clan de la Mante est ouvert au commerce et aux inte-
Rokugan continental, sur pas les lois impériales, le Clan de la Mante a pris
ractions avec les gaijin, plus encore que le Clan de la
les îles de la Soie et des certaines mesures, comme fournir aux gaijin des
Licorne, et surtout à Gotei, l’un des lieux les plus multi-
Épices, ils sont traités réponses à donner aux magistrats d’Émeraude
comme des nobles mi- culturels de l’Empire. Les religions et croyances des gaijin
et aux représentants impériaux. Ainsi, tous ceux
neurs, indépendamment s’expriment à travers une série de superstitions respectées
qui demeurent sur les îles pendant un certain
de leur naissance. Cela dans toute la ville. À Gotei, le décorum est bien inférieur à
temps apprennent notamment qu’ils doivent
dit, la majorité des na- celui dont fait preuve le reste de l’Empire, obsédé par l’éti-
prétendre être des vassaux du Clan de la Mante,
vires de la flotte du Clan quette et le protocole. Les membres du Clan du Scorpion
que ce soit vrai ou non.
de la Mante sont dirigés plaisantent souvent en affirmant que le comportement
par des samouraïs. observé à Gotei fait passer Khanbulak pour Otosan Uchi.

Des bandits honorables Le quai, long de sept cent cinquante mètres, présente
une demi-douzaine de styles architecturaux de hauteurs et
La plupart des habitants de Gotei sont honorables, même matériaux diversifiés. Des jetées ont été construites pour
s’ils ne respectent pas les bonnes manières. Le code des accroître la capacité d’accueil, toutes différentes les unes
marins ne suit pas toujours le bushido, mais tous obéissent des autres. Aucun maître de port n’a été nommé, per-
à cette version difforme de ses préceptes, même si de sonne ne dirige les bateaux vers les espaces disponibles,
nombreux citoyens considèrent que la distinction entre ni ne s’occupe de l’évaluation des marchandises pour le
un marchand et un pirate est plutôt vague. Malgré tout,
paiement des taxes douanières. Les gros commerçants
Yoritomo et ses ancêtres jugent que le droit à un port
paient un tribut à Yoritomo, mais les plus petits font ce
sûr est absolu. Les infractions graves et les meurtres sont
qu’ils veulent et ne paient que s’ils ont besoin d’un service
punis de manière extrêmement sévère et sont assez rares
ou d’une audience avec le Champion.
en ville, mais aucune loi ne régit ce qui se passe en mer.

La voie des Gaijin


La baie des Bandits
Cette longue rue, où se trouvent les magasins, les fume-
Gotei est divisée en deux quartiers. Le premier est le
palais du Clan de la Mante, la forteresse des samouraïs. Le ries d’opium, les bars, les sanctuaires et les auberges,
second est le port, qui s’étend au nord. Séparé du palais comprend le plus grand nombre de commerces tenus
par la voie du Tonnerre, il accueille des marins venus de par des étrangers de tout l’Empire. Même si les Rokugani
terres lointaines et portant d’étranges parfums et vête- demeurent légèrement majoritaires en ville, la plupart
ments, ainsi que les marchandises qu’ils accompagnent. Le des négoces sont gérés par des gaijin, pour des gaijin.
port est chaotique, mais rarement dangereux. La rumeur Un temple des royaumes d’Ivoire surmonté du disque de
veut que son aspect le plus menaçant soit la silhouette pierre côtelé d’un amalaka peut donc rivaliser avec un
de ses immeubles, dénuée de recherche esthétique et minaret ou un dôme, lieu de culte des voyageurs venus
d’harmonie. Malgré cette absence apparente d’organisa- d’al-Zawira, pour attirer l’attention des visiteurs. Les biens
tion, les lanternes de la ville brillent suffisamment pour être et enseignements du monde entier sont disponibles, en
aperçues à une demi-journée de distance. une concentration inégalée.

84
les racontars
de bar
$ J’ai vu la capitaine Fumiko avec une carte
des passages secrets qui relient la biblio-
thèque de Kanidoko Itte au Coffre céleste.
Je pense qu’il va y avoir un vol !
$ Avez-vous vu les navires des royaumes
d’Ivoire quitter massivement le port ? J’ai
entendu dire qu’ils étaient venus payer leur
dette à Yoritomo, mais que l’un des bateaux
La brasserie Sen’in (Au Marin endormi) avait disparu la nuit dernière. Apparem-
ment, tous les capitaines de Gotei veulent
Cette brasserie est très connue à Gotei. Les marins s’y pré-
tenter de le retrouver en premier !
cipitent pour fêter un voyage réussi, et remplissent la salle
principale à toute heure. Cette dernière accueille parfois cinq $ D’ambitieux jeunes magistrats d’Émeraude
ou six équipages qui boivent du saké ou de l’arak, bien plus posent beaucoup de questions. Ils essaient
fort, une liqueur de dattes mélangée à du thé ou à du miel de respecter l’édit impérial qui interdit aux
et de l’eau chaude. À l’étage, les marins s’allongent, comme gaijin de se trouver sur le territoire et de
dans une fumerie d’opium, pour écouter une musique tran- faire fermer tous les commerces et lieux de
ille e ire de l’ara n d ri l al d h hū ae culte étrangers.
de dattes. La combinaison du calme des lieux et des alcools
forts pousse souvent les clients à s’endormir.

85
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

La bibliothèque de Kanidoko Itte


idée d’aventure :
une garde
Le local de Kanidoko Itte, maîtresse des cartes, est situé
dans une ruelle tranquille non loin de la voie du Tonnerre,
et sa porte est frappée d’une rose des vents de Pavarre.
Itte est une vieille femme dont la canne n’est pas moins
d’honneur
dangereuse que sa langue de vipère. Malgré son caractère
acariâtre, elle apprécie sincèrement les capitaines locaux. Accroche Le capitaine Byakko recrute des
D’ailleurs, la plupart des capitaines les plus expérimentés samouraïs dignes de confiance pour protéger le
la consultent avant d’entreprendre un voyage périlleux cadeau de Yoritomo à l’Empereur, puisque ses
ou important. gardes sont inexplicablement tombés malades.
La rumeur prétend que sous sa maison se trouve un Bien qu’il n’aime pas l’idée de confier cette
réseau de passages secrets qui se rendent aux quatre tâche à des étrangers, il contacte les PJ en raison
coins du monde. On raconte que ses visiteurs vont de gai- de leur réputation. Le cadeau est, soi-disant, une
jin assoiffés de sang à des démons taillés dans l’ombre. lame Kaiu égarée, l’arme sacrée d’un légendaire
Une seule chose est vraie : le réseau souterrain abrite sa héros du Clan du Crabe, Hida Daisuke. Grâce
bibliothèque de cartes. Seuls ses capitaines préférés sont à ce présent, Yoritomo est persuadé d’améliorer
invités en bas, où elle montre des cartes rares à ceux qui les relations entre son clan, l’Empereur et le Clan
souhaitent se rendre dans des ports éloignés pour livrer du Crabe.
des messages ou des marchandises en son nom.
Développement Le capitaine conduit les PJ
jusqu’au Coffre céleste pour leur remettre l’arme
Capitaine Byakko lors d’une cérémonie où Yoritomo leur donnera
du Takarabako
Capitaine Byakko
ses consignes. Durant le trajet vers le port, des
bandits gaijin munis de cimeterres les attaquent :
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  3 2 ils semblent savoir ce qu’ils convoitent.
Le capitaine Byakko est un cousin au cinquième degré du 三 Paroxysme Deux ronin bloquent la route
Champion du Clan de la Mante, Yoritomo, et tous deux aux PJ au moment où ils approchent du quai. La
ont grandi ensemble. Malgré le manque d’expérience de cheffe, toute de blanc vêtue, est une samouraï
Byakko, son puissant cousin l’apprécie. Byakko est le capi- connue, rejetée par le Clan de la Grue. Son com-
taine du Takarabako, un kobune tout neuf à trois mâts. pagnon, un empoisonneur du Clan du Scorpion,
Yoritomo a demandé à Dame Aguri, une jeune mais talen- a été déclaré mort depuis plusieurs années. Est-il
tueuse shugenja adoptée par son oncle, de veiller sur possible que des adeptes de Doji complotent
Byakko et de le tenir éloigné de tout danger. pour s’approprier l’arme ?
Byakko préfère de loin l’exploration aux actes de pira-
terie ou aux mandats confiés par Yoritomo, mais il lui est
farouchement loyal et cherche désespérément sa recon-
naissance. Il espère que, s’il remporte suffisamment de sta- AVANTAGES DÉSAVANTAGES
tut, il pourra convaincre Yoritomo de lancer une expédition
vers le sud, un endroit de vastes déserts, de récifs coral- A i rit e ri e t
liens et de créatures sauvages qui se laissent tomber des  social ; relations  social ; mental
arbres ou sortent de la mer. Il compte être le premier à car-
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
tographier la région.
 : portée 0-1 ; dégâts 3 ; Dangerosité 3 ; Discret
SOCIÉTAL PERSONNEL
i e e t rt )  : vêtements de marin (Résistance
40 HONNEUR ENDURANCE
13 physique 2 ; Ordinaire, Solide)
2 3
52 GLOIRE SANG-FROID
12 CAPACITÉS
3 4 A N R R RA A
41 STATUT 2 ATTENTION
6 Une fois par scène, après avoir effectué un test relatif à la
+1, –1 VIGILANCE
4 navigation ou à l’exploration, Byakko peut choisir de relan-
ATTITUDE : COURAGEUX cer tous ses dés avant de décider lesquels il garde. S’il
choisit de le faire, tous les points de Conflit subis après le
ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 0 SOCIAL 2 PRO. 4 test sont doublés.

86
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

la cité de la les spéculations


grenouille riche des marchands
La cité de la Grenouille riche est l’un des ports les plus
importants de Rokugan : située à la jonction des rivières
des Trois Rives et du Marchand noyé, elle facilite le com- $ Iuchi Konomi, la fille de Iuchi Shichiro a été
merce interclanique. Les Clans du Dragon, du Lion, de la vue avec Miya Tetsua, alors qu’elle est pro-
Licorne et de la Libellule la jugent essentielle, stratégique- mise à Tonbo Kuma, non ? Quelle honte !
ment et économiquement. Le mariage sera sûrement annulé si le Clan
de la Libellule apprend la nouvelle.

Un peu d’histoire $ Avez-vous remarqué toutes les manœuvres


militaires aujourd’hui ? J’ai entendu dire
Jadis, la cité de la Grenouille riche s’appelait le village de qu’un ninja avait volé le Nid du Phénix, et
la Grenouille riche, mais elle était déjà l’un des plus gros qu’il le transportait sur la rivière du Mar-
ports fluviaux de l’Empire. Pendant des siècles, la ville fut chand noyé.
au cœur d’affrontements entre les Clans du Lion et du
$ Avez-vous vu tous les bateaux du Clan de
Dragon. Quand le Clan de la Licorne revint de son exil
la Licorne aujourd’hui ? On raconte qu’une
volontaire, il tenta de se l’approprier. Lassé des combats,
nouvelle mine de jade a été découverte et
l’Empereur déclara que la ville appartenait à l’Empire et il
que le clan en déplace bien plus qu’il ne
dépêcha un gouverneur impérial pour la diriger. Depuis,
peut en protéger, comme ça, sur la rivière !
elle est considérée comme un territoire neutre. Pour faire
respecter la loi et l’ordre, son gouverneur dépend de ronin
plutôt que de samouraïs affiliés à un clan. Puisque les
conflits perdurent, plusieurs générations de ronin ont servi
le gouverneur et ses magistrats. Ils se sont adjugé le nom Le clan possède quelques bâtiments surmontés de
de famille Kaeru, et acceptent guerriers et administrateurs toits en pierre mauve dont, à l’extrémité sud du quai, une
compétents dans leurs rangs, peu importe leur passé. tour tellement haute que les flèches qui en sont tirées tra-
Malgré le moratoire sur les combats visant à s’ap- versent la rivière. Le vieux Iuchi Shichiro y supervise le
proprier le port, chaque clan souhaite toujours prendre commerce du clan, dont les caravanes Ide qui arrivent ou
un ascendant économique sur ses rivaux, par exemple sortent de la ville. Il détient ce poste depuis vingt ans, et
en soutirant le manifeste révélant la nature de la cargai- il parle de passer le flambeau à l’un de ses sept fils pour
son d’un navire, avant de s’assurer que des bandits en vivre une dernière grande chevauchée.
prennent connaissance. Les ronin constituent un autre
sujet de tension entre les clans, qui essaient d’obtenir leurs Le district du Clan du Lion
faveurs. Les ronin gardent une apparente neutralité tout
en montant les clans les uns contre les autres pour tirer un Situé sur la rive est de la rivière des Trois Rives et au sud
maximum de profits et d’influence. de la rivière du Marchand noyé, ce district est l’un des
plus grands carrefours commerciaux du clan. Ce dernier
y échange nourriture et vêtements contre la pierre et le
Une ville d’intrigues fer nécessaires à la construction de bâtiments et la forge
La ville comprend trois districts, chacun doté de ses propres d’armes. La jeune samouraï du Clan du Lion en poste se
infrastructures et forces de l’ordre, et contrôlé par un clan nomme Akodo Minami. Elle est toujours prête au combat,
différent. Le manoir du gouverneur impérial se trouve sur obsédée au quotidien par la sécurité. Elle prie les fortunes
une île au carrefour des rivières. Les agents impériaux cal- pour trouver une bonne raison de lâcher son armée de
culent et perçoivent les taxes douanières. trois mille soldats de l’autre côté de la rivière du Marchand
noyé, sur le Clan de la Libellule.

Le district du Clan de la Licorne


Le Clan de la Licorne contrôle la rive ouest de la rivière des
Trois Rives. Son quai massif est taillé dans du granite noir
poli agrémenté de jointures de bois tendre pour résister
aux mouvements de l’eau. La plupart des marchandises,
surtout des textiles, du bois et du charbon, sont immédia-
tement déplacées dans des chariots vers les terres du Clan
de la Licorne.
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

Le district du Clan du Dragon


idée d’aventure : le Une fois de plus, la présence du Clan du Dragon laisse
vaisseau fantôme les autres clans perplexes. Il octroie au Clan de la Libel-
lule l’utilisation des rives potentiellement profitables et
concentre son attention sur un étrange regroupement de
Accroche Les PJ sont invités à souper chez le
sanctuaires, à la jonction des deux rivières. Cinquante sol-
gouverneur Miya avec des représentants majeurs
dats y sont postés, comme s’ils s’attendaient à ce qu’une
des clans locaux. Alors qu’ils sont à table, le
menace sorte de l’eau. Ils sont dirigés par le mystérieux
gouverneur apprend qu’un vaisseau étrange est
Tonbo Kuma, un puissant shugenja du Clan de la Libellule,
amarré à l’un des quais du Saibanshoki. Aucun
dont la famille veille sur les possessions locales du Clan
membre d’équipage n’est à bord, et le pont est
du Dragon depuis des temps immémoriaux. Ce shugenja
recouvert de longs morceaux de jade. Tous les
mince et androgyne parle peu, ce qui encourage les autres
clans présents réclament immédiatement la pro-
à se poser des questions sur ses motivations.
priété du mystérieux navire. Après une longue
Sur les rives nord et est de la rivière du Marchand noyé
dispute, le gouverneur demande aux PJ d’en-
se trouve un quai modeste, occasionnellement utilisé par
quêter et de déterminer à quel clan appartient
les visiteurs du Clan du Phénix. Tous leurs achats sont
le bateau.
envoyés en aval jusqu’à la mer, où ils sont récupérés et
Développement Le pont du navire abrite expédiés vers les terres du clan. La berge nord de la rivière
un véritable trésor, mais les PJ ne trouvent rien du Marchand noyé, à l’ouest du quai du Clan du Phénix,
aux niveaux inférieurs. Quand ils remontent, ils abrite un grand bassin artificiel dodécagonal à onze quais
découvrent que le bateau navigue maintenant et un côté ouvert. Chaque bord correspond à un mois de
a a i-d le r a e de r a a e il l’année, représenté par une statue et des gravures d’ani-
se font attaquer par des fantômes. maux. Une haute lanterne est déplacée d’un bollard à
chaque lever de soleil, dans le sens des aiguilles d’une
三 Paroxysme Le bateau, qui navigue dans
montre, pour servir de calendrier communautaire.
le royaume des morts affamés et traverse une
masse organique inconnue, arrive enfin face
à un gros arbre putréfié, qui ressemble à un Le Saibanshoki
reflet corrompu du Saibanshoki. L’esprit d’un
Le plus grand et le plus vieux des saules de Rokugan
gros oiseau, probablement un phénix, y est per-
pousse dans l’eau, au croisement des rivières. Il s’appelle
ché. Les PJ reviendront à Rokugan après avoir
le Saibanshoki. Son tronc dépasse les vingt mètres de dia-
détruit ou soigné l’arbre spirituel. Sa destruc-
mètre et est couvert de mystérieuses ciselures centenaires.
i n re n a age er le a i-d de i le
À son pied se trouvent cinq postes d’amarrage pour des
manoir du gouverneur. Sa guérison emprisonne
barques, et l’escalier qui monte jusqu’au manoir du gouver-
le mal pendant un siècle de plus.
neur. La légende prétend que le saule abrite la résidence
d’un esprit grenouille espiègle, le dieu du croisement des
rivières, et que les chants des grenouilles le soir seraient sa
Le Clan du Lion ne possède ni de quai traditionnel le déclaration d’amour à l’esprit kodama de l’arbre.
long de la rivière, ni d’entrepôts proches. La berge regorge Le manoir, qui surplombe la rivière, est protégé de la
plutôt de murs défensifs qui datent du passé tumultueux chaleur du soleil estival par les énormes branches du saule.
de la ville. À la place d’un quai, une demi-douzaine de Les bureaux des fonctionnaires, qui utilisent des drapeaux
portes d’écluses sont alignées. Cet ingénieux système de pour communiquer avec les percepteurs des taxes doua-
canaux compte sur les courants pour porter les marchan- nières le long des rives, surtout quand le chant des gre-
dises jusqu’à de grands entrepôts loin de la rive, où le nouilles les empêche de crier leurs ordres, sont à l’étage,
déchargement se fait dans l’ombre. au-dessus d’une salle réservée à la famille du gouverneur.

88
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

gouverneur impérial Crime et châtiment


ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  2 5 Dans une maison du saké louche de Toshi Ranbo, un
samouraï en tue un autre dans un élan de rage ivre. Non
Miya Tetsua est le gouverneur impérial de la cité de la
loin, un heimin profite de la confusion pour voler un sac de
Grenouille riche depuis sept ans. Bien que les otokodate
riz à un marchand. Les deux ont commis des délits en ver-
s’occupent seuls ou presque des inspections et des esti-
tu de la loi impériale et doivent se soumettre au système
mations, Tetsua passe la plupart de son temps à arbitrer
judiciaire rokugani, brutal et impitoyable.
les disputes entre clans sur l’utilisation de la rivière et les
L’approche impériale de la justice pénale et adminis-
cargaisons endommagées, ainsi que nombre d’autres pro-
trative a été établie mille ans auparavant. Il s’agit d’un
blèmes anodins et lassants. Seules sa passion pour les
mélange complexe d’enquêtes impartiales, de témoi-
arts et sa curiosité envers l’énigmatique Tonbo Kuma l’ont
gnages d’autant plus subjectifs qu’ils sont influencés par
empêché de se jeter dans la rivière. Tetsua s’efforce de
le statut social du témoin, de considérations religieuses et
continuer à gouverner de manière impartiale malgré son
d’une efficacité pragmatique et brutale. Le processus com-
affection pour Kuma. Tous deux jouent chaque semaine au
mence par une enquête sous l’autorité d’un magistrat, qui
go, et Tetsua essaie à chaque fois d’en apprendre plus sur
décide généralement du jugement, selon les témoignages
l’indéchiffrable shugenja.
et une confession souvent obtenue sous la torture. Les
SOCIÉTAL PERSONNEL
preuves physiques, même irréfutables, sont rarement
prises en compte. Les coupables sont punis sur-le-champ,
45 HONNEUR ENDURANCE
12 et la peine de mort est fréquente. La meilleure façon de
2 4 s’en sortir face à la loi impériale est de ne jamais avoir
55 GLOIRE SANG-FROID
12 affaire à elle.
3 4
60 STATUT 2 8
les magistrats
ATTENTION

+2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
4 Jusqu’au milieu du deuxième siècle, des lois et des châ-
timents arbitraires et injustes étaient en vigueur. De nom-
ARTISANAL 3 MARTIAL 2 SAVANT 4 SOCIAL 4 PRO. 1 breux conflits entre samouraïs étaient résolus par un duel
de iaijutsu, une tradition qui existe encore à ce jour, mais
AVANTAGES DÉSAVANTAGES régler tous les problèmes à l’épée n’était pas efficace. Le
Champion d’Émeraude Doji Hatsuo finit par réaliser que
i e e i r
les lois étaient appliquées de manière désordonnée, et
 social ; relations  social ; relations
il confia au célèbre juge Soshi Saibankan la tâche d’éta-
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS blir un système judiciaire équitable et reproductible à
travers tout l’Empire. En analysant l’ancien système, ils
i s i : portée 0-1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5/7 ; Acé- conclurent qu’il leur fallait nommer des responsables de
ré, Cérémoniel, Discret l’application juste et impartiale de la loi : les magistrats
i e e t rt )  : hakama de courtisan (Résistance d’Émeraude. Ces derniers, choisis dans les rangs des
physique 1 ; Cérémoniel, Magnifique), tampon personnel, samouraïs, se trouvent en première ligne du système. Ils
sceau impérial appliquent la loi impériale, enquêtent sur les délits et,
dans certains cas, prononcent le verdict et voient à l’exé-
CAPACITÉS cution de la sentence.
A R RA
Une fois par scène, lorsqu’il effectue un test, Miya Tetsua
peut considérer que ses rangs de compétence sont égaux
à sa valeur de rang de Statut.

89
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

Les magistrats d’Émeraude


interpréter
les magistrats
Ce sont les plus hauts magistrats de Rokugan. Ils se recon-
naissent à l’insigne de leur office, une sphère de jade gra-
vée et un manteau haori distinctif, vert émeraude. Leur
juridiction et leurs prérogatives, spécifiées dans la Charte
d’émeraude
des magistrats d’Émeraude, s’étendent à tout l’Empire. Ils Comme ces magistrats peuvent provenir de
forment donc la « police nationale » et ne rendent compte tous les clans, nommer les PJ à un tel poste per-
qu’au Champion d’Émeraude. Cependant, malgré leurs met d’assurer la formation d’un groupe plus ou
pouvoirs étendus, ils ne s’occupent pas des délits locaux. moins uni. Même les samouraïs dont les clans
Ils gèrent plutôt les crimes majeurs, les affronts graves à sont en guerre mettent leurs différences de côté
l’autorité impériale, et les soulèvements qui menacent une fois en fonction. De plus, ce sont des indivi-
la paix et la stabilité de l’Empire, à l’échelle régionale dus importants, dont l’arrivée dans une ville est
ou nationale. suivie par la rencontre des notables locaux, dont
La Charte des magistrats d’Émeraude, rédigée par le g erne r e le dai e i aidera
Soshi Saibankan, est un long document, qui peut être résu- présenter les protagonistes aux PJ. Enfin, leurs
mé ainsi : fonctions justifient qu’ils s’opposent à la pègre
et à toutes sortes de criminels, dont les adeptes
1. Les magistrats d’Émeraude traitent les délits
de la mahō, ce qui peut donner naissance à des
majeurs : trahisons, délits à l’échelle nationale,
campagnes passionnantes.
offenses blasphématoires ou collaboration avec
Souvenez-vous cependant que les magis-
l’Outremonde, fugitifs qui traversent les frontières
trats d’Émeraude ne sont pas omnipotents. Si
claniques ou territoriales, soulèvements et déso-
les PJ dépassent le cadre de leur Charte ou se
béissance civile généralisée. S’ils apprennent l’exis-
mettent à dos des PNJ puissants tels que des
tence de délits mineurs, ils doivent en informer les
g erne r de dai il e en ’a irer
autorités appropriées.
les foudres du Champion d’Émeraude.
2. Les magistrats d’Émeraude gèrent la perception
des taxes et les tarifs douaniers, émettent les
documents de voyage valables partout à Rokugan
et protègent les dignitaires étrangers. Ils peuvent Ils travaillent souvent seuls, mais il n’est pas inhabituel
aussi entrer dans tout lieu de l’Empire, et ques- de les voir en groupe, surtout face à des menaces ou délits
tionner ou arrêter n’importe qui, à l’exception majeurs. La plupart du temps, ils sont secondés par une
des samouraïs de plus haut rang qu’eux, auquel escouade d’assistants (voir es i ts es istr ts,
cas ils doivent obtenir la permission du Cham-
en page 92). Ils peuvent également recruter des troupes
i n d’ era de d dai d eigne r d
si elles sont nécessaires à l’accomplissement de leurs
samouraï concerné.
devoirs. Les seigneurs locaux doivent les aider autant que
3. Les magistrats d’Émeraude ne peuvent pas s’occu- possible, tant que le soutien demandé demeure raison-
per de délits locaux, même s’ils n’hésitent jamais à nable et conforme à la Charte.
intervenir si la transgression se produit sous leurs En outre, un dernier poste de magistrat a été créé
yeux. Enfin, ils ne peuvent ni se pencher sur les par l’Empereur aux débuts de l’Empire, pour combattre la
affaires de vengeance ni recevoir de cadeau ou de magie illégale et blasphématoire : le Champion de Jade.
compensation pour leur travail.
Un contingent de magistrats de Jade a été formé pour
Les magistrats d’Émeraude, choisis par le Champion l’assister. Cependant, le poste de Champion de Jade est
d’Émeraude au nom de l’Empereur, jouissent donc de vacant depuis des siècles, et il ne subsiste plus de magis-
pouvoirs considérables, mais uniquement face aux délits trats de Jade. Leurs devoirs sont à la charge du Cham-
majeurs qui touchent tout l’Empire. Ils proviennent de tous pion d’Émeraude et de ses magistrats, épaulés par cer-
les clans majeurs, rarement des clans mineurs, et se sont taines organisations : les chasseurs de sorciers Kuni du
montrés dignes de cet honneur. Bien qu’ils conservent leur Clan du Crabe, les inquisiteurs Asako du Clan du Phénix,
affiliation clanique, ils doivent accomplir leurs tâches pour ou encore les discrets Kuroiban, la Garde Noire du Clan
le bien de l’Empire. du Scorpion.

90
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

Les magistrats de clan


interpréter les
magistrats de clan
Ils sont l’équivalent des magistrats d’Émeraude, mais
leur juridiction se limite aux terres de leur clan. Ils n’ont
aucune autorité au-delà de ces frontières. Ils enquêtent
Puisque les magistrats de clan sont issus d’un
parfois sur les délits mineurs qui se produisent sur leurs
même clan et que leur juridiction s’arrête sur
terres, si les magistrats locaux ne sont pas disponibles
ses terres, ils offrent moins de choix d’aven-
ou ont besoin d’aide. Ils jouissent sinon des mêmes pou-
tures. Cela dit, si tous les joueurs optent pour
un même clan et que la campagne se déroule voirs généraux que ceux accordés aux magistrats d’Éme-
sur les terres de ce dernier, les PJ peuvent béné- raude par leur Charte, pourvu qu’ils opèrent au sein de
ficier d’un statut similaire à celui des magistrats leur clan et sur ses terres. Au vu de leurs pouvoirs et juri-
d’Émeraude. Leur principale limitation serait de dictions complémentaires, ils assistent souvent les magis-
ne pas pouvoir quitter leurs terres : être magis- trats d’Émeraude qui se trouvent sur leur territoire. Ainsi,
trat comprend de nombreuses responsabilités, les clans s’assurent que leurs intérêts sont pris en compte
qui ne doivent pas être délaissées sous prétexte et, bien entendu, savent sur quoi enquêtent les magis-
que les joueurs aimeraient faire voyager leur trats d’Émeraude.
personnage dans tout l’Empire. e agi ra de lan n n ar n dai
Si les joueurs souhaitent interpréter des de province, et se voient confier une partie du terri-
personnages qui débutent au bas de l’échelle, toire, une ville ou tout autre lieu d’importance. Comme
devenir yoriki, l’adjoint d’un magistrat de
pour les magistrats d’Émeraude, une telle nomination
clan, leur permettra d’apprendre les fonde-
s’avère prestigieuse et n’est accordée qu’aux samou-
ments du système judiciaire et de se hisser
raïs accomplis.
au rang de magistrat une fois qu’ils auront fait
leurs preuves.
Il est rare pour les gens du peuple de croiser un magis- à leur supérieur. Ils jouissent d’un plus grand pou-
trat d’Émeraude, mais les magistrats de clan circulent sou- voir face aux délits commis par les gens du peuple,
vent dans les rues des villes ou des métropoles, ou sur les puisqu’ils peuvent enquêter, mais aussi prononcer
routes qui les relient. Ils ont ainsi une meilleure connais- le jugement et appliquer la sentence.
sance des problèmes locaux et peuvent développer des $ e d hin ar i de a ra ai l -
contacts au sein de la pègre, qu’ils utilisent comme sources vent des heimin, épaulent les yoriki. Eux aussi
d’informations dans leurs enquêtes sur des délits majeurs ont le pouvoir d’enquêter sur des délits simples,
et sur des conspirations à plus grande échelle. uniquement s’ils ont été commis par des gens
du peuple.

les adjoints des $ Des hinin, qui effectuent les tâches spécifiques

magistrats inappropriées pour un samouraï, telles que mani-


puler les cadavres ou torturer les suspects pour
Les magistrats, quel que soit leur titre, sont souvent obtenir une confession.
accompagnés d’adjoints, des subalternes qui les aident $ À l’occasion, les magistrats recrutent pour un
dans leurs enquêtes et l’exécution des jugements. temps des samouraïs à titre de yoriki, voire lèvent
Ils incluent : une troupe de soldats. Ce n’est possible qu’avec
l’accord des autorités locales, le gouverneur ou
$ Les yoriki, des samouraïs embauchés à titre d’as- le dai r g rer n r l e ii e
sistants. Leurs pouvoirs judiciaires se limitent aux tel qu’un culte ou une organisation criminelle, qui
enquêtes routinières sur des délits commis par pose une menace grave dont le magistrat ne peut
des samouraïs, et ils rapportent leurs conclusions s’occuper seul.

92
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

les tribunaux Le processus judiciaire


La plupart des audiences se déroulent dans des lieux
Après qu’un magistrat a mené l’enquête et décidé de
qui conviennent aux magistrats et témoins impliqués,
porter une plainte formelle, celle-ci est référée à un tri-
bien souvent dans la pièce de la demeure du magistrat
bunal. Normalement, le magistrat le plus expérimenté de
où il organise les réceptions. Seules quelques villes, dont
la juridiction concernée convoque les membres du tribu-
an hi ari hi e le a i ale de lan
nal et agit à titre de juge pour la durée du procès. Si l’ac-
disposent de tribunaux établis. Ce sont généralement des
cusé est une personne très importante ou, dans le cas
cours ouvertes où se trouve une estrade couverte pour le
d’un samouraï, si son statut est élevé, le tribunal peut être
juge, son bras droit et le scribe qui transcrira le procès.
n ar le g erne r le dai e endan Une seconde estrade, plus petite, est également installée
le rôle de juge n’est souvent pas important puisque, la pour les témoins et leurs serviteurs.
plupart du temps, l’accusé aura avoué avant le procès, La cour d'un tribunal, surnommée « les sables blancs
de son plein gré ou sous la torture. Le rôle du juge est du jugement », est une zone plane couverte de sable blanc,
alors purement symbolique : il apporte un côté solennel où l’accusé s’agenouille face au juge. Le sable reflète et
à l’audience et prononce la sentence. Cependant, cer- intensifie la chaleur de Dame Soleil, afin de symboliser le
tains magistrats, et notamment ceux de la famille Kitsuki rôle du royaume Céleste, qui supervise les procédures. En
du Clan du Dragon, choisissent d’ignorer les traditions et cas d’intempéries, le tribunal se réunira ailleurs, souvent
de tenir de véritables procès, mais ce sont les exceptions he le g erne r le dai le agi ra ire dan
qui confirment la règle. une maison de saké réquisitionnée pour l’occasion.

les preuves et les témoignages


Dans la plupart des procès, les seuls éléments pris en accusations portées par le clan contre un samouraï du
compte sont la confession et les témoignages. En rai- Clan du Scorpion. Pourtant, après ce témoignage, le
son de l’Ordre céleste et des préceptes d’honneur et Clan du Scorpion ramena le général du Clan du Lion,
de sincérité du bushido, les Rokugani considèrent le en parfaite santé. Nul ne sut qui avait été invoqué
témoignage d’une personne de haut statut plus cré- par le médium Kitsu mais, après ce procès, un décret
dible que celui d’une personne inférieure. Ainsi, seul impérial interdit le témoignage des esprits et autres
le témoignage de la personne dotée du plus impor- entités non humaines.
tant statut aura une influence sur le processus. La famille Kitsuki du Clan du Dragon accorde
Au cours des premiers siècles de l’Empire, cette beaucoup d’importance aux preuves physiques
approche comprenait les dépositions des kamis et et circonstancielles, et elle juge parfois selon ses
des esprits, témoins influents par excellence. Cepen- déductions, à la consternation des samouraïs tradi-
dant, des problèmes dans l’acquisition de tels témoi- tionalistes. Certains estiment même que cette pra-
gnages furent soulevés. Comme les kamis élémen- tique est blasphématoire puisqu’elle mine l’impor-
taires considèrent la réalité très différemment des tance de l’Ordre céleste. En effet, elle laisse croire
humains, leur récit pouvait être vague et déroutant. que les preuves pourraient être plus importantes que
De plus, il dépendait de l’interprétation des shugenja la parole d’un noble, ce qui constitue une atteinte
qui servaient d’intermédiaires, dont les préjugés pou- autant à l’honneur de ce dernier qu’aux préceptes du
vaient influencer la traduction, intentionnellement bushido. Hormis au sein du Clan du Dragon, cette
ou non. L’habitude de laisser les esprits témoigner méthode est rarement appliquée, mais ni l’Empe-
fut abandonnée après le procès notoire du meurtre reur ni le Champion d’Émeraude n’ont jugé bon de
d’un général célèbre du Clan du Lion. Un médium l’interdire, et elle demeure donc acceptable, bien
Kitsu invoqua l’esprit de la victime qui confirma les que controversée.

93
C H API T R E 2 : L E S C AR R E F O UR S CO MMERCIAU X

Où qu’ils se déroulent, les procès sont publics, à moins


qu’un juge ait une raison de réclamer un huis clos. les délits et leurs
Une fois l’accusé agenouillé devant le juge, soit sur les
sables blancs de la cour soit sur le sol d’une pièce apprê-
sanctions
tée pour l’occasion, le scribe procède à la lecture des Une fois que l’accusé est jugé coupable, le juge prononce
délits présumés de l’accusé et de sa confession. Le juge la sentence, généralement en lien avec le délit, mais la
peut interroger l’accusé pour clarifier certains points de sa politique et le favoritisme peuvent s’immiscer dans le
déclaration ou pour en apprendre plus sur son passé. Il r e e dai g erne r e a re er nne
peut également autoriser des témoins à s’exprimer, ce qui importantes peuvent influencer la sanction, pour la rendre
pourrait influencer le verdict. C’est à ce moment-là que les plus ou moins sévère selon leurs objectifs.
juges qui adoptent la méthode des Kitsuki s’éloigneront Tout comme les procès, la sanction est généralement
du processus habituel pour examiner les preuves et par- publique, pour décourager tout comportement criminel.
fois interroger les témoins. Ensuite, le juge rend son ver-
dict (la plupart du temps, l’accusé est déclaré coupable) et Les délits mineurs
prononce la sentence. La décision du juge est sans appel,
et la sentence appliquée immédiatement. Les délits mineurs sont commis par des samouraïs envers
Si l’accusé est un samouraï, la procédure diffère. Le des pairs d’un statut inférieur ou des gens du peuple :
moindre doute sur sa culpabilité permet aux deux parties coups et blessures, y compris frapper un roturier sans
de demander un duel. À moins que le juge n’ait des rai- aucune raison ; bagarre publique ; vandalisme mineur ;
sons de croire que le défi est lancé par insolence ou dans petits larcins ou actes de contrebande. Dans de nombreux
une tentative désespérée d’échapper à la sentence, ce qui cas, le coupable devra simplement s’excuser et rembour-
serait un délit grave, il autorisera le duel. Normalement, il ser la personne lésée. Les autres sanctions possibles sont
se livrera au premier sang mais, pour des offenses impor- le versement d’une amende ou une période d’assignation
tantes, un duel à mort peut être consenti. L’issue du com- à résidence.
bat est considérée comme la volonté du royaume Céleste
et n’est donc pas discutable. Si l’accusé l’emporte, il est
lavé de tout soupçon et immédiatement libéré. S’il perd,
c’est la preuve irréfutable de sa culpabilité, et la sanction
applicable sera prononcée.
CHAPIT R E 2 : L ES C AR R EF O U R S CO MMERCIAU X

Dans le cas d’un délit commis par un samouraï à l’en- Les gens du peuple condamnés pour des délits graves
contre d’un roturier, même s’il s’agit d’une infraction grave, encourent la peine de mort. Cependant, d’autres sanc-
le magistrat peut ne pas enquêter, ou n’enquêter que tions existent, comme d’être emprisonné ou fouetté en
partiellement, et prononcer un jugement rapide. La sen- public, ou de perdre une main après un vol. En effet, la
tence sera sûrement d’offrir une compensation symbolique sanction correspond parfois à la nature du crime commis.
au noble dont le heimin est un vassal. Cependant, il arrive
que des samouraïs apprécient particulièrement certains de
leurs vassaux. Par exemple, si le roturier en question est un
Les délits majeurs
artisan, un ouvrier spécialisé ou un marchand de talent et Pour les samouraïs, les délits majeurs concernent les crimes
que son seigneur est influent, l’affaire sera analysée avec commis contre l’Empereur et sa famille, les représentants
plus de sérieux. Cependant, cela demeurera sûrement une majeurs de l’Empire (comme le Champion d’Émeraude, le
offense mineure. n eiller i rial le ha i n dai de lan
aje r ) en re le dai de la a ille i riale e
Les délits graves des clans mineurs. Ils comprennent également la trahison
de l’Empire ; les offenses qui ont des retombées natio-
Les délits graves commis par des samouraïs sont ceux qui nales, comme l’implication dans une organisation crimi-
n’entrent pas dans la catégorie des délits majeurs, mais nelle tentaculaire, l’utilisation d’une magie illégale ou l’ap-
qui méritent une sanction significative. En général, ce sont partenance à un culte blasphématoire et, enfin, le fait de
des délits commis contre des gens d’un statut supérieur ou provoquer intentionnellement un incendie, vu les risques
égal au leur (les offenses qui touchent des nobles d’un sta- liés au feu.
tut inférieur ou des gens du peuple sont considérées, au La sanction pour de tels actes est presque toujours la
mieux, comme des délits mineurs). Ce sont les meurtres, mort. Le mode d’exécution dépend du crime commis et
les agressions suivies de blessures graves, les vols ou la du statut du samouraï coupable. Ceux qui ont été jusque-
contrebande d’objets de valeur, la destruction de la pro- là irréprochables peuvent se voir condamnés à une mort
priété d’autrui, les tentatives d’échapper à la justice. Tuer rapide par décapitation. Un juge bienveillant peut même
quelqu’un lors d’un duel autorisé ou un ennemi en temps autoriser l’accusé à commettre seppuku, un suicide rituel
de guerre n’est pas un délit, mais assassiner un samouraï qui blanchit son honneur et celui de sa famille avant d’ar-
au cours d’un duel illégal ou d’un combat au premier sang river au Meido, le royaume de l’attente, où son jugement
peut être considéré comme un meurtre. final sera prononcé. Cependant, si le crime est particuliè-
Les nobles jugés coupables de tels délits peuvent être rement ignominieux ou s’il a été perpétré par un samouraï
condamnés à mort mais, dans un tel cas, ils se voient géné- jugé immoral ou sans honneur, une mort lente et doulou-
ralement accorder le droit de commettre seppuku. Être reuse peut être décrétée. Dans ce cas, elle inclut souvent
exilé et devenir ronin serait extrêmement inhabituel. Les des actes de torture, comme plonger le coupable dans de
sanctions les plus probables sont l’emprisonnement, une l’eau bouillante ou le brûler vif.
forte amende, un remboursement de la partie lésée ou S’il n’est pas condamné à mort, un samouraï ayant
une réprimande publique. Dans ce dernier cas, le samou- commis un délit majeur peut être rejeté par son clan et sa
raï doit se présenter dans un lieu public, déclarer son crime famille, et rejoindre les rangs des ronin. Pour la plupart des
et s’excuser auprès de tous ceux qui auraient pu être bles- samouraïs, ce sort est pire que la mort : perdre son clan et
sés par son attitude. Dans une société où l’honneur et la sa famille signifie perdre son identité, chuter dans l’Ordre
réputation sont primordiaux, la réprimande publique est céleste et être condamné à mener une existence misé-
une sanction terrible. reuse en marge de la société, proscrit par tous les samou-
raïs honorables de l’Empire.
Les gens du peuple déclarés coupables de délit majeur
sont tous condamnés à mort. Là encore, la forme d’exécu-
tion varie, mais est généralement rapide, par pendaison
ou décapitation. Les petites gens ne méritent pas que du
temps soit perdu lors de leur exécution.

95
3
CHAPITRE
Le fermier plante dans la rizière inondée un autre
grain de riz, décortiqué de la récolte de l’an der-
nier et récemment germé dans l’eau. Ensuite, il
se redresse et s’étire en grognant de douleur. Le
panier d’osier sur son épaule est presque vide de
graines, mais la charrette, sur la digue à proximi-
té, en contient d’autres : il lui en reste un grand
nombre à semer avant l’heure du Coq.
Protégeant ses yeux du soleil, il regarde
autour de lui. Sa femme et leurs enfants, ain-

Le cœur
si que son beau-frère et les siens, se penchent
et se relèvent, plantant méthodiquement des
grains dans l’eau trouble qui couvre leurs pieds.
Au village, deux rizières plus loin, des silhouettes
distantes marchent pesamment dans le regrou-

de
pement de huttes et de bâtiments, en appor-
tant toujours plus de graines vers les champs.
D’autres personnes portent des vêtements au
ruisseau pour les laver, s’assoient et réparent des
tenues, ou s’occupent des feux pour la prépara-

l’Empire
tion des repas. Le fermier se permet un sourire.
Tant que la météo reste tempérée, que la rouille
ne prend pas et que les fortunes sont satisfaites,
la récolte sera bonne cette année.
Sur la route, un groupe attire son attention :
des cavaliers aux couleurs du seigneur du village
qui avancent au petit galop. Ce sont les magis-
trats, probablement en avance pour demander
au chef du village qu’il estime la récolte de riz
et lui indiquer quelle portion ils prélèveront à
titre de taxes. Le sourire du fermier disparaît,
et il marmonne une prière à Inari, la fortune
du riz, pour garantir une bonne moisson.
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

La fondation d’une
secs pour permettre une agriculture productive. Pour
autant, ces terres ne sont pas inutiles. Par exemple, les
forêts fournissent du bois d’œuvre et une grande varié-

civilisation té de plantes, employées entre autres à des fins médi-


cinales ou décoratives. Les montagnes contiennent sou-
vent des filons de minerai et les Rokugani y extraient
Peu importe la puissance politique ou militaire d’une civi- de la pierre. Là encore, les gens du peuple servent de
lisation, ou sa sophistication culturelle, sociale ou éco- bûcherons, de mineurs et d’ouvriers pour l’exploitation
nomique, elle est vouée à l’échec sans une base solide :
de ces ressources. La terre et ses richesses sont décrites
un approvisionnement assuré en nourriture, en eau et en
au itre 6.
produits de première nécessité. L’Empire d’Émeraude ne

les fermes et
fait pas exception. Les Kamis le savaient, et bien que cha-
cun ait transmis une leçon différente à ses adeptes après
avoir chuté du royaume Céleste, tous ont insisté sur l’im-
portance de l’artisanat et de l’agriculture. Les avancées de
les villages
celle-ci ont alimenté l’empire naissant. La population s’est Au dernier échelon de la délégation des terres se trouvent
multipliée, et les Kamis ont conduit leurs disciples dans de les fermes, pierres angulaires de l’économie de Rokugan.
grandes villes, qui sont devenues des métropoles, nour- Omniprésentes dans l’Empire, elles sont indispensables
ries par les infrastructures qui les entouraient. L’Empire que pour nourrir ses habitants, samouraïs comme roturiers. La
l’on connaît est né de ces humbles débuts. nourriture est récoltée, puis transportée vers les villages
et enfin vers les villes. En échange, ceux-ci fournissent les
la terre autres biens et services utiles, tels que les produits finis ou
les forces militaires déployées pour défendre les petites
Peu après sa victoire au tournoi et son sacre en tant que agglomérations et les zones rurales éloignées. Ce cycle
premier Empereur, le Kami Hantei promulgua des lois fon- continu (de la ferme au village, du village à la ville, de la
damentales. L’une des premières, et des plus importantes, ville à la métropole, et inversement) est la fondation de
stipule que toutes les terres et toutes les ressources de l’économie de l’Empire.
l’Empire appartiennent à Hantei, le gardien choisi par le Quand elles le peuvent, les fermes se rassemblent
royaume Céleste. Cette règle demeure la pierre angulaire
dans les zones fertiles pour bénéficier d’une sécurité dans
du système, et explique la structure fondamentale de la
le nombre et permettre aux familles paysannes de gagner
gouvernance de Rokugan.
en efficacité en partageant la main-d’œuvre et les res-
Il est évidemment impossible pour une personne
sources. Depuis fort longtemps, plusieurs de ces regrou-
seule, même pour un empereur, de s’occuper directe-
pements fabriquent sur place les outils et bâtiments grâce
ment de tout le territoire. Un système a ainsi été déve-
auxquels ils augmentent la production ou transforment,
loppé : Hantei confie aux clans des régions administrées
entreposent et transportent leurs récoltes. Cette produc-
par leurs Champions. Ces derniers subdivisent à leur
tion va des cordes aux séchoirs à riz, et des paniers et ton-
r e erre en ne g ern e ar n dai de
neaux aux moulins et aux granges. Ces groupes de fer-
famille, qui délègue des territoires aux seigneurs samou-
raïs parmi ses vassaux, et ainsi de suite. À la fin de cette miers et d’artisans, en développant ce dont ils avaient
chaîne se trouvent les gens du peuple : les fermiers qui besoin pour leurs fermes, ont créé les premiers villages
retournent le sol, plantent les graines et s’occupent des de l’Empire.
récoltes. Il ne faut pas oublier que malgré l’allocation pro- Certains villages ont continué de grossir jusqu’à deve-
gressive des terrains, les vassaux ne les possèdent pas nir des villes ou des métropoles, mais la plupart sont res-
réellement : les terres appartiennent exclusivement à tés petits et isolés, habités principalement par des gens
l’Empereur. du peuple. Certaines fermes demeurent évidemment éloi-
Évidemment, toutes les zones ne se valent pas et elles gnées de ces nouveaux villages, toujours éparpillées sur
ont des fonctions différentes. Les terres fertiles et arables, tout le territoire. La plupart des régions agricoles typiques
nécessaires à l’agriculture, sont rares, et sont concentrées de l’Empire sont encore organisées ainsi, parsemées de
dans certaines régions de l’Empire : le long des grandes fermes individuelles, à l’écart de tout, et de villages entou-
rivières et des côtes. D’autres territoires sont trop mon- rés d’exploitations paysannes, où vivent une bonne partie
tagneux, trop humides, trop chauds, trop boisés ou trop des gens du peuple.

97
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

les autres ressources la communication


Une grande partie du territoire de Rokugan n’est pas
adaptée à l’agriculture, et les fermes y sont rares. Mais ces Les clans et les familles impériales comptent
régions rocheuses, forestières ou autrement infertiles pro- sur plusieurs méthodes (à l’efficacité variable)
duisent néanmoins des ressources utiles à l’Empire, et des pour tenter de maintenir un minimum de com-
villages y sont établis pour en faciliter l’exploitation. munication avec les régions les plus reculées
de l’Empire.
$ es i es e e  : la mer fournit beaucoup
d’aliments de base, dont le poisson, les fruits de $ Les clans envoient leurs propres messagers
mer et les algues. Ceux qui extraient ces ressources ou obtiennent des informations de la part
vivent dans des villages placés près des rivières ou des samouraïs en voyage.
des côtes, mais qui demeurent similaires à leurs
$ Les Hérauts impériaux de la famille Miya
homologues agricoles. Ils sont placés dans des
traversent l’Empire pour annoncer les nou-
lieux favorables à la pêche et où il est possible de
veaux décrets et lois impériaux.
construire un port abrité.
$ La confrérie des Pieds nus, une secte de la
$ es i es  : le fer, le cuivre, l’étain, l’argent et
confrérie de Shinsei dévouée à Koshin, la
l’or sont essentiels à l’Empire. D’autres minerais
fortune des routes, traverse Rokugan à la
peuvent avoir une utilité spécifique. Ainsi, le jade
demande des samouraïs ou des gens du
sert à combattre les créatures et la corruption de
peuple pour annoncer les nouvelles.
l’Outremonde. Les filons sont souvent petits, et
les mines ont une durée de vie limitée avant d’être $ Les pigeons voyageurs, originellement
épuisées. Les villages miniers sont donc en général utilisés par le Clan de la Grue puis réin-
modestes, isolés et temporaires. troduits par celui de la Licorne, sont une
méthode de communication rare, dont
$ e is : la plupart des structures de l’Empire sont
se servent les membres les plus pragma-
constituées de bois, avec des murs en papier. Le
tiques de certains clans.
bois est donc une ressource cruciale, mais heureu-
sement renouvelable. Par conséquent, les commu-
nautés de bûcherons sont anciennes et bien éta-
blies, mais, comme les villages miniers, elles restent
souvent petites et isolées.
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

l’herbe et la neige
L’Empire d’Émeraude couvre un grand territoire, Le climat des terres côtières du second est assez
englobant d’interminables forêts, de larges plaines et doux, mais les hauteurs montagneuses appréciées
de hautes montagnes, où le climat est tout aussi diver- par le second sont plus froides : certains monas-
sifié. Certains prétendent que l’essence de chaque clan tères Togashi restent sous la neige à l’année. Malgré
est définie par son environnement, mais de nombreux leur emplacement au nord, les terres du Clan de la
samouraïs des clans majeurs détestent cette idée. Licorne demeurent plus chaudes que celles de ses
Une grande partie du climat de Rokugan est tem- voisins, grâce aux vents tièdes qui soufflent à la fois
péré. Les terres des Clans du Lion et du Scorpion pro- de l’extrémité ouest des monts de la Grande Muraille
fitent de toutes les saisons, des étés caniculaires aux Septentrionale et du Toit du Monde.
hivers enneigés. Les terres du second, sous le vent Au sud, les terres des Clans de la Grue et du
du Toit du Monde, reçoivent plus de pluie durant les Crabe sont les plus chaudes de Rokugan, avec des
mois chauds et plus de neige en hiver. Quant à celles climats qui peuvent être qualifiés de subtropicaux.
du Clan du Lion, elles bénéficient d’un ciel plus clair La région côtière et les terres des disciples de Hida
à toutes les saisons, et de précipitations suffisantes aux pieds des montagnes du Crépuscule sont parti-
pour arroser les plaines fertiles du clan. culièrement humides et pluvieuses. Certains Rokuga-
Les terres froides des Clans du Dragon et du Phé- ni estiment que l’architecture sobre du Clan du Crabe
nix jouissent d’étés tempérés, mais d’hivers glacials. et l’attitude austère de ses membres en découlent.

les difficultés des caprices météorologiques. Pendant la germination, des


précipitations abondantes peuvent inonder et endomma-
communautés rurales ger les champs, tandis que trop peu de pluie peut mener
à une sécheresse et à la mort des pousses. La grêle peut
Les fermes et les villages de l’Empire connaissent les mêmes détruire les cultures. Le déséquilibre élémentaire affli-
problèmes que ses villes et ses métropoles. Par contre, en geant l’Empire a amplifié ces problèmes, menaçant de
raison de leur isolement, et de leurs ressources et savoir- transformer des difficultés locales en des désastres régio-
faire limités, les communautés rurales subissent plus dure- naux ou nationaux.
ment les catastrophes, et s’en relèvent plus difficilement.

Les catastrophes naturelles


La météo
Plusieurs régions sont sujettes aux catastrophes natu-
La météo est de loin le facteur qui influence le plus la vie relles, qui, au vu du déséquilibre élémentaire, gagnent en
et la prospérité des fermes et des villages. Les hivers sont intensité et en fréquence. Les zones côtières connaissent
plus modérés sur les côtes que dans les régions enfon- des tsunamis, ces immenses vagues déclenchées par des
cées dans les terres, où ils sont souvent longs, froids et tremblements de terre sous-marins. Les plaines situées
venteux, ainsi qu’accompagnés de fortes accumulations sur le littoral du Clan de la Grue, parmi les plus fertiles
de neige. Les fermiers et les villageois se préparent pour de l’Empire, ont été inondées trois ans auparavant par
l’hiver suivant dès que la saison touche à sa fin : la nour- une série de raz-de-marée au cours desquels de grandes
riture doit être entreposée de manière à ce qu’elle ne parcelles de terre ont été recouvertes de boue, de limon
pourrisse pas durant les interminables mois de la froide et d’eau salée, empêchant toute activité agricole. Des
saison. La difficulté à se nourrir pendant cette période séismes frappent à l’intérieur des terres, endommageant
doit être prise en compte dans le calcul des taxes de ces les bâtiments et les routes, ainsi que les digues et les
régions, pour s’assurer que l’Empire retire un profit maxi- systèmes d’irrigation nécessaires à la production de riz.
mal de ses fermes tout en laissant aux fermiers ce dont Des volcans entrent parfois en éruption dans la chaîne
ils auront besoin. Les seigneurs samouraïs doivent aussi du Toit du Monde et les monts de la Grande Muraille
mesurer prudemment la portion des récoltes de leurs vas- Septentrionale, projetant des cendres sur d’immenses
saux qu’ils vendront ou échangeront. surfaces. Enfin, des incendies ravagent forêts et prairies,
Par contre, ces estimations, même les plus minutieuses particulièrement pendant les mois chauds et secs de la
et prudentes, ne peuvent pas prendre en compte les fin de l’été.

99
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

l’isolement
Bien que certains villages isolés ne reçoivent des tous les burakumin, à rapidement trouver une raison
samouraïs que lorsque ces derniers viennent per- de partir pour ne pas attirer l’attention de ces visi-
cevoir les taxes, la plupart des régions mieux des- teurs intimidants. De la même manière, si certains vil-
servies peuvent n’être que rarement visitées par la lageois sans scrupules ont des choses à cacher (par
noblesse et encore, uniquement par des samouraïs exemple une fraude fiscale ou la participation à des
de passage. En conséquence, l’arrivée d’un noble cultes hérétiques), ils utiliseront ce laps de temps
dans un village de heimin ou de burakumin est pour dissimuler toutes les preuves. Bien entendu,
presque toujours une occasion importante. Dans les ils n’y parviennent pas toujours. Une accroche inté-
hameaux les plus isolés, elle peut même constituer un ressante pour un scénario pourrait consister pour
événement extraordinaire. les PJ samouraïs à découvrir des preuves de tels
La plupart des villageois essaient de ne pas se actes illégaux.
laisser surprendre par l’apparition inattendue d’un Les autres, dont le chef du village, en profitent
samouraï. Sauf au cœur de l’hiver, quand peu de pour se préparer à accueillir respectueusement les
Rokugani voyagent sur de grandes distances, les nobles et leur offrir une hospitalité qu’ils refuseront
heimin travaillent généralement dans les champs ou sûrement. Si les voyageurs sont des magistrats venus
dans la forêt autour de leur village. En utilisant un sys- percevoir les taxes, les marchandises concernées sont
tème discret de signes spécifiques à chaque com- préparées. Dans tous les cas, l’objectif des villageois
munauté, les premiers à apercevoir un samouraï en consiste à éviter d’insulter les invités tout en leur per-
approche relaient la nouvelle jusqu’au bourg. Cet mettant de reprendre la route le plus rapidement
avertissement incite la plupart des heimin, et presque possible, afin de retourner à la tranquillité de leur vie.

Les plus touchés par ces catastrophes sont les gens Le bushido et le bon sens veulent que les samouraïs
du peuple des zones rurales et isolées. Ceux qui sur- essaient d’éviter de causer des dommages graves aux pay-
vivent doivent se remettre et reconstruire presque entiè- sans. Le contraire violerait le précepte de compassion du
rement seuls, du moins au début. Des secours peuvent bushido et réduirait la production de nourriture et d’autres
arriver, mais pas avant des jours ou des semaines. L’aide ressources dont les nobles ont besoin.
dépend aussi des ressources disponibles et de l’impor- Malheureusement, en période de guerre, il est pos-
tance que le seigneur samouraï accorde à cette région et sible de faire attention, mais pas d’empêcher totalement
à sa population. ces conséquences néfastes. De plus, des samouraïs agres-
sifs ou désinvoltes peuvent éliminer la main-d’œuvre
La guerre d’un ennemi pour diminuer sa capacité à entrer en
guerre en limitant ses ressources logistiques et éco-
Rokugan est un territoire guerrier, dont la culture et nomiques. Ce manque de considération à long terme
la société sont fondées sur les combats. Les invasions est rare (après tout, les paysans changent de maître en
venues de l’extérieur sont très rares, à l’exception des même temps que les fermes), mais a déjà été observé.
hordes maléfiques de l’Outremonde. Celles-ci sont Sans aucune surprise, les samouraïs cherchent à rame-
repoussées sans faillir par l’héroïsme et les sacrifices du ner les heimin au travail le plus vite possible après la fin
Clan du Crabe. Une incursion réussie de l’Outremonde des combats.
entraînerait une destruction dépassant de loin les consé-

les habitants de
quences d’un conflit entre mortels. Les luttes entre les
clans, voire au sein d’un clan, sont par contre communes.
Inéluctablement, la terre est alors ravagée par les armées
en marche et les batailles, les constructions sont démolies
la campagne
(de manière accidentelle ou non) et des hordes de réfu- La relation entre samouraïs et gens du peuple est com-
giés sont déplacées. Les gens du peuple forcés de fuir plexe et plus nuancée qu’on pourrait le penser (voir es
leurs fermes et leurs villages cessent d’être des citoyens s r s et es e s e e, en p. 118). Certains
productifs de l’Empire aux yeux des dirigeants, et le aspects spécifiques de l’interaction entre les nobles et les
besoin continu de nourriture et de ressources met rapide- paysans sont propres aux fermes et villages des régions
ment à mal les réserves disponibles. rurales de l’Empire.

100
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Les samouraïs et les paysans


les goshi En général, les samouraïs préfèrent ne pas passer plus de
La plupart des samouraïs doivent rester aux temps que nécessaire dans les régions rurales. Non seu-
côtés de leur seigneur, au château ou à la cour, lement elles n’offrent pas le luxe auquel ils sont habitués,
loin des serviteurs. Ceux qui s’y refusent sont mais en plus, même les samouraïs les plus modestes n’y
souvent exilés vers des endroits isolés et ruraux. trouveront pas de pairs. La plupart des nobles ne s’inté-
Par contre, certains nobles choisissent de vivre ressent donc pas au Rokugan rural.
dans des régions rurales, parmi les paysans. Ils De manière générale, les samouraïs croient qu’il ne se
sont appelés goshi, guerriers ruraux. passe rien d’essentiel hors des villes et des métropoles.
Bien que les goshi gardent leur statut et Cette déduction est erronée, puisque ces régions « sans
l’autorité qui leur reviennent, il est relativement importance » et « inintéressantes » leur fournissent nour-
commun de les voir remonter les manches de riture et ressources. Ils reconnaissent tout de même que
leur kimono pour travailler avec les heimin qu’ils l’Empire s’écroulerait rapidement sans le travail des gens
dirigent. Les samouraïs du Clan du Moineau du peuple.
poussent cette pratique à l’extrême en l’appli- Quand le devoir des samouraïs les y oblige, ils quittent
quant tous. Au vu de leur nature rustique, les le confort des villes ou des métropoles pour se rendre
goshi sont victimes des moqueries des nobles dans des fermes et des villages. Par exemple :
urbains, qui utilisent le terme comme une insulte.
$ Les samouraïs chargés de transmettre des mes-
Dans de rares cas, des paysans peuvent se
sages, parfois sur de longues distances à travers
voir attribuer la fonction de goshi et bénéfi-
l’Empire, passent dans des régions rurales. Pour
cier de privilèges spécifiques aux samouraïs. Ils
certains d’entre eux, notamment les hérauts Miya,
peuvent gagner le droit de porter un sabre ou un
il s’agit là de leur devoir. Ils s’habituent alors aux
nom de famille et d’obtenir une audience avec le
difficultés et privations liées aux longues périodes
seigneur. Ils se trouvent uniquement dans les ter-
passées sur la route, parmi les fermes et les vil-
ritoires les plus isolés, où il serait impossible de
lages. Certains finissent même par préférer ces
nommer un vassal parmi les véritables samouraïs.
environnements au brouhaha de l’Empire urbain,
Les goshi sont souvent plus proches des hei-
mais ils sont souvent considérés comme étranges
min qu’ils supervisent que les autres samou-
par leurs pairs.
raïs. Pour cette raison, la loyauté des paysans
envers les goshi est infaillible, et ces samouraïs $ Les samouraïs qui voyagent d’un château à l’autre
ruraux exercent une influence importante dans doivent également traverser les régions rurales,
leur région. mais ils le font généralement aussi vite que possible.
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

Les magistrats arpentent régulièrement les routes


les soulèvements
$
rurales et secondaires de l’Empire pour faire res-
pecter la loi impériale et pour récolter les taxes
dues aux seigneurs samouraïs et, ultimement,
populaires
à l’Empereur. L’histoire officielle de l’Empire ne mentionne que quelques
révoltes parmi les heimin et se contente souvent de les
$ Certains nobles malchanceux se voient assigner décrire comme des faits isolés et rapidement écrasés. Par
des tâches qui les obligent à demeurer dans des contre, de nombreux soulèvements paysans ont eu lieu et
villages isolés ou ruraux. Par exemple, un samouraï certains ont été d’envergure.
peut être nommé magistrat pour gérer un groupe Ils s’expliquent en général par le mauvais traitement
de villages, ce qui le contraint à vivre sur place. de la part des samouraïs. Malgré l’Ordre céleste, les gens
Généralement, ces décisions sont des sanctions du peuple ne tolèrent pas mieux que les nobles les trai-
pour incompétence ou pour des méfaits qui ne tements cruels, les piètres conditions de vie et la taxa-
méritent pas seppuku ou toute autre mesure dras- tion excessive. De plus, l’existence dure et monotone des
tique. Elles servent également à neutraliser des paysans les rend influençables par des orateurs charis-
adversaires politiques ou à écarter des membres matiques et sensibles aux causes populistes. Un exemple
embarrassants de la famille. contemporain est la secte de la Terre Parfaite, une héré-
$ En période de guerre, les samouraïs passent de sie réclamant l’égalité entre toutes les castes, des gens
longues périodes à vivre, progresser ou com- du peuple aux nobles, grâce au culte de Shinsei. Une
battre dans les plaines, les forêts, les fermes et les fois que l’étincelle de la révolution contre l’injustice ou
villages ruraux. la fougue de chefs dynamiques ont allumé les feux de
la rébellion, celle-ci s’étend rapidement contre l’autorité
des samouraïs.
Les taxes En général, la réaction, brutale, ne tarde pas puisqu’une
telle révolte constitue un crime contre l’Ordre céleste,
Les samouraïs ne paient pas de taxes. Celles-ci sont impo- et donc contre le royaume Céleste. Des armées sont
sées sur les richesses qui proviennent du travail, et les déployées pour écraser la rébellion et les instigateurs, réels
samouraïs ne travaillent pas. En réalité, plusieurs exercent ou présumés, sont mis à mort sans aucune forme de pro-
des activités commerciales, mais au travers de nombreux cès. La plupart des samouraïs savent que les soulèvements
intermédiaires, dont les marchands heimin. Ces activités populaires sont un danger constant et que, pour les éviter,
sont souvent sujettes à des taxes, mais qui ne représentent il faut se montrer immuablement vigilant et punir sévère-
qu’une infime partie des revenus générés par les clans ment toute envie de révolte.
et les autorités impériales. La vaste majorité des taxes
consiste en une proportion des marchandises, comme de
la nourriture ou d’autres ressources produites par les gens
du peuple dans les régions rurales.
Elles sont généralement exprimées en pourcentage.
Par exemple, les fermiers peuvent devoir verser à leur
seigneur un dixième de leur moisson de riz. Le montant
réel varie donc en fonction de la quantité de riz et des
autres denrées récoltées dans l’année, des maladies et
sécheresses potentielles, mais aussi des impératifs et
de a ri e de dai a l ar d’en re e ’e -
forcent véritablement de trouver un équilibre entre les
taxes et les besoins des paysans : les surtaxer jusqu’à
les affamer serait contre-productif et pourrait provoquer
des soulèvements.
Malgré tout, ils n’acceptent aucune négociation sur les
taxes qu’ils fixent. Toute tentative de ne pas payer le plein
montant est considérée comme un crime et sanctionnée
sévèrement, souvent par l’exécution des coupables à titre
d’avertissement.

102
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

La vie rurale
natale. Au fil des générations, les voisins deviennent des
membres de la famille élargie, car l’absence de migrations
mène à la consanguinité.
La majorité de la population de Rokugan habite loin des La nourriture et les autres biens produits dans le vil-
villes et du confort relatif de la vie urbaine. Elle vit plutôt lage sont au cœur de la vie des paysans. Tout ce qui ne
dans de petites communautés principalement autarciques. peut être cultivé ou fabriqué à proximité est précieux ou
Les petits villages et les fermes isolées ne peuvent pas rare. Le thon, qui constitue la majeure source de proté-
dépendre d’un approvisionnement externe régulier. Leurs ines dans un village côtier, peut être inconnu dans une
habitants doivent donc faire pousser et fabriquer tout ce communauté minière profondément enfoncée dans les
dont ils ont besoin. terres. Une bêche en métal peut être un outil prestigieux
Les hameaux situés à proximité d’une grande route transmis de génération en génération dans un village,
peuvent être visités fréquemment, tandis que les commu- tandis que, dans un autre hameau, un forgeron permettra
nautés plus à l’écart passent des années sans voir d’étran- à chaque famille de posséder la sienne. La différence de
gers autres que les percepteurs. Avec la permission du rareté de produits du quotidien joue un rôle prédominant
chef ou du seigneur samouraï local, les habitants peuvent dans la distinction des villages et des régions les uns par
gagner les villes voisines pour faire du troc ou rencontrer rapport aux autres.
un artisan reconnu, mais ces voyages sont longs et parfois L’arrivée d’un voyageur entraîne des célébrations ou
dangereux, ce qui les rend peu pratiques. Le monde est de la défiance. Dans les zones les moins sûres, les étran-
donc restreint pour ceux qui vivent dans des communau- gers sont souvent des bandits. Sans surprise, les villa-
tés rurales. Nombreux sont ceux qui restent toute leur exis- geois de ces secteurs se révèlent peu accueillants et se
tence dans un rayon de trois lieues autour de leur maison méfient de toute personne qu’ils ne connaissent pas. Par
contre, certains camps isolés ont l’habitude des visites
des marchands itinérants. Quand un étranger arrive, les
habitants se rassemblent pour entendre des histoires sur
des contrées lointaines et regarder les biens en vente.

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C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

La réaction des villageois envers les inconnus est aus-


si influencée par le clan qui gère la région. Les paysans les samouraïs en voyage
des terres du Clan de la Grue se montrent généralement La noblesse a peu de raisons de visiter les communautés
accueillants, ceux du Clan du Crabe plus froids. rurales. Les percepteurs la représentent dans la plupart
Bien que les villageois fassent presque tous preuve du des hameaux isolés. Il est rare que des samouraïs décident
respect dû à Hantei et à son gouvernement, leur relation de faire le tour des terres sous leur contrôle, sauf en cas de
avec l’Empire est limitée. Ils s’identifient d’abord comme problème important : insurrection, bandits, etc. Ils peuvent
des membres d’un village, et non d’un clan, puisque aussi s’y arrêter lorsqu’ils traversent la région pour deman-
ce dernier et l’Empire semblent lointains. Ce sentiment der logement et hospitalité.
d’appartenance s’explique par l’isolement des villageois, Une visite commence normalement par une halte à la
mais aussi par le nombre restreint de services offerts par maison du chef du village. Au vu de ses responsabilités, sa
l’Empire. Les hameaux de heimin doivent payer des taxes demeure possède souvent une pièce destinée à accueillir
et servir dans l’armée si nécessaire, mais ils reçoivent les voyageurs, et surtout les nobles. Durant le séjour du
peu en retour. Dans plusieurs régions, les routes sont mal samouraï, le chef se doit d’être un hôte affable et géné-
entretenues et l’armée ne lutte pas vraiment contre les reux. Les autres bonge du village aident, notamment en
brigands. Par conséquent, certains citoyens, qui ont déjà fournissant tout ce que le samouraï pourrait demander.
du mal à survivre, jugent injuste de verser une partie de Ces requêtes sont naturellement limitées par les biens
leur riz aux samouraïs. En général, seules la religion et que le village peut offrir. Un noble aux papilles gustatives
la peur du châtiment expliquent qu’ils demeurent loyaux développées jugera décevante la cuisine locale. La plupart
envers l’Empire. des fermes ne disposent que d’un légume de saison, des
e r gi n dirig e ar n dai g n re - carottes ou des radis, servi sans assaisonnement avec le
patissant, abritent souvent des bonge plus fidèles à l’Em- riz. Cette céréale constitue déjà un produit de luxe pour
pire. Les heimin qui jouissent de l’aide ou de la protection les bonge, qui se contentent généralement de millet.
de leur seigneur comprennent mieux pourquoi ils paient Tout comme la nourriture, le logement ne répondra sûre-
des taxes et doivent accomplir leurs tâches. Certaines ment pas aux attentes d’un noble. Les meubles de la mai-
communautés reçoivent même un appui des samouraïs son d’un chef de village sont certes de la meilleure qualité
pour des améliorations importantes, comme la construc- disponible dans la région, mais ils demeurent rudimentaires,
tion de routes et de systèmes d’irrigation. Bien que ces sauf si un artisan exceptionnel exerce dans les alentours. Le
situations ne soient pas communes, lorsque les samou- matelas sera inconfortable, et l’espace privé de la chambre
raïs traitent ainsi les gens du peuple, ils s’assurent de du visiteur sera délimité par un simple mur de papier, expo-
leur loyauté. sant le samouraï aux bruits nocturnes de ses hôtes.
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Dans ces conditions, peu de samouraïs choisissent Bien que l’arrivée d’un prêtre ou d’un moine consti-
de rester longtemps dans un village. De plus, prolonger tue une occasion spéciale, plusieurs villageois continuent
leur séjour nuirait à la production, car de nombreux hei- leurs activités habituelles pendant la visite : à moins que
min s’occupent du visiteur au lieu de vaquer à leurs tâches. celle-ci coïncide avec une fête, il faut bien que le travail se
Heureusement, le riz et les autres biens consommés par le fasse. Les rencontres avec le moine ont alors lieu en soi-
voyageur sont retranchés des taxes payables au seigneur. rée, durant la période généralement consacrée à la prière.
Par contre, le seigneur local pourrait demander des répa- Les séjours des moines s’avèrent donc bien moins onéreux
rations au daimyō du visiteur si ce dernier profitait trop de que ceux des samouraïs.
cette hospitalité. De la même manière, le chef du village
s’inquiétera de la quantité déduite des taxes, puisqu’il
devra la justifier au percepteur. Ces problèmes se trouvent
Les heimin
amplifiés si le visiteur est membre d’un clan rival, auquel La grande majorité des Rokugani vivant dans les com-
cas un remboursement est improbable. Si le seigneur local munautés rurales sont des bonge, qui accomplissent les
ne comble pas le montant manquant de la taxe, le chef du tâches nécessaires à la survie du village. Leur vie est cen-
village peut être puni par le magistrat ou le daimyō régio- trée sur la famille et sur leurs pairs, qui forment souvent
nal, voire par les deux. leur famille étendue. Nourrir les habitants, payer des taxes
et s’assurer de la bonne santé de ses proches demandent

Le clergé itinérant un travail quotidien qui laisse peu de temps aux loisirs. Les
bonge ne peuvent donc pas s’éloigner de leur domicile. Ils
De nombreux monastères de l’Empire d’Émeraude sont œuvrent sans relâche pour profiter de leurs ressources limi-
volontairement érigés dans des zones rurales et isolées tées, de peur qu’on les leur prenne.
pour que les moines puissent méditer sans être dérangés.
Plusieurs villages se trouvent à quelques jours de voyage
L’eau
d’une telle communauté. Les rites religieux, dont les funé-
railles, les mariages et les fêtes saisonnières, peuvent être Tout village a besoin d’eau. Souvent, une rivière navi-
accomplis par un moine itinérant si aucun prêtre n’est dis- gable ou une source constante déterminent d’ailleurs où
ponible. La plupart des sanctuaires qui se sont associés à un hameau sera établi. Les bonge commencent générale-
des villages particuliers accueillent un prêtre, mais ce n’est ment leurs journées en tirant l’eau requise pour leur famille
pas toujours le cas, et certains hameaux peuvent même ne et le ménage. Ils s’en servent également pour arroser les
bénéficier d’aucun accès à un des membres du clergé. Les jardins où ils font pousser des plantes qui complémentent
moines visitent alors régulièrement les bonge et les hinin de la nourriture achetée ou échangée. Chaque point d’eau
ces zones reculées pour répondre à leurs besoins spirituels. est un bien commun et précieux pour le village, que ce soit
Leurs tuniques, et particulièrement celles couleur un puits, une rivière ou une source.
safran populaires dans de nombreuses sectes, per-
mettent de reconnaître facilement les moines, même de
Le travail collectif
loin. Les fermiers affairés dans les champs les repèrent
donc souvent bien avant leur arrivée : ils ont alors le Chaque jour de travail est planifié en avance selon les
temps de se réunir et de se préparer, par exemple en cui- saisons. Durant les saisons agricoles, dont seul l’hiver
sinant un repas spécial, en avertissant les responsables est exclu, les fermiers passent leurs journées dans les
du sanctuaire, ou simplement en rendant le village et ses champs, qui sont généralement communautaires. Tant
habitants plus présentables pour l’arrivée d’un person- que le soleil est levé, ils sèment des graines, s’occupent
nage aussi respecté. des plantes et récoltent les parcelles mûres. Les outils
La venue d’un moine itinérant est en général l’occa- sont souvent faits de bambou et de coquillages, puisque
sion d’une modeste célébration où il est traité comme un le métal s’avère trop précieux pour risquer de rouiller
invité d’honneur. Les habitants ne lui accorderont pas le dans les rizières.
même traitement qu’à un samouraï, mais ils consentent Quand le besoin s’en fait sentir, les villageois se ras-
à de petits sacrifices. Le moine peut visiter le sanctuaire, semblent pour construire de nouveaux bâtiments, dont
rencontrer les chefs de la communauté et parler aux vil- les maisons. Dans les régions où la pêche ou la cueillette
lageois réunis. Le moine peut aussi organiser des entre- constituent des sources de nourriture, les bonge accom-
tiens privés, dans les maisons des villageois ou le sanc- plissent ces tâches ensemble. Durant l’hiver, les fermiers
tuaire, afin d’accorder des bénédictions ou de répondre à réparent les outils afin qu’ils soient prêts pour la prochaine
des besoins spirituels. saison agricole.

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C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

S’occuper des enfants est également une tâche par- La population des villages étant restreinte, leurs habi-
tagée. Certains villageois élèvent les petits de plusieurs tants se reconnaissent de loin, et les hinin ne peuvent donc
familles afin de libérer de la main-d’œuvre pour cultiver les pas échapper au mépris. Non seulement leurs tâches sont
champs. L’éducation est donc commune, ce qui rapproche éreintantes, mais leurs conditions de travail sont dégra-
encore plus les habitants. dantes. Même durant un festival, si les bonge peuvent
Les artisans, dont les forgerons, les tisserands et ignorer leurs responsabilités, les hinin doivent supporter
les brasseurs, constituent une exception au travail col- des regards noirs et des insultes.
lectif. Bien qu’ils puissent contribuer aux grands tra- De plus, les burakumin ne représentent qu’une petite
vaux tels que la construction de bâtiments, la commu- partie de la population d’un village. Ils remplissent des fonc-
nauté ne participe pas à leur labeur, qui demande des tions essentielles, mais pas assez nombreuses pour justifier
connaissances spécialisées. la présence d’un grand nombre de hinin. Dans des fermes
isolées, un seul d’entre eux se verra confier toutes les tâches

les hinin ingrates. Quant aux petits villages, ils n’accueillent souvent
qu’une famille de burakumin, privée d’interactions avec des
Chaque village dépend de tâches qui ne peuvent revenir pairs qui comprendraient son désespoir.
qu’aux hinin. Les ordures doivent être sorties régulière- Ces travailleurs n’ont aucune chance d’échapper
ment de chaque maison, y compris les excréments, qui aux conditions dans lesquelles ils ont vu le jour. Ils n’au-
peuvent être compostés et devenir du fertilisant pour les ront jamais de promotion et ne pourront pas même visi-
champs. Les morts doivent être préparés à la crémation. ter un autre village. À moins qu’il épouse un membre de
Le bétail et le gibier doivent être abattus et écorchés. sa caste dans un autre hameau, un hinin inconnu ne sera
Le cuir est nécessaire, mais seuls les hinin s’affairent à la pas accepté ailleurs que sur son lieu de naissance. Beau-
tannerie. coup de brigands proviennent de ce milieu, car le vol est
Ces travailleurs souffrent quotidiennement dans leur la seule échappatoire à leur misère quotidienne. La peine
communauté. Leur maison se dresse à l’écart de celles capitale peut sembler moins grave qu’une vie à s’occuper
des heimin, et ils passent toujours en dernier. Ils sont obli- d’excréments. Cependant, la plupart des hinin ne songent
gés de tirer leur eau après leurs supérieurs ou d’aller à pas à quitter leur communauté. Les plus croyants pensent
un autre puits, en général en retrait du village. Lorsqu’ils ne pouvoir prétendre à une existence meilleure que grâce
effectuent leur labeur, qui demande souvent de manipuler à la réincarnation, après l’accomplissement inconditionnel
des déchets nauséabonds, ils doivent éviter de croiser les de leur devoir. Les plus réalistes savent que leurs chances
autres. S’ils n’y parviennent pas, ils sont battus. de survie sont pires hors du village.
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Les villages et les fermes


régional pour y négocier avec un autre hameau et réaliser
du troc contre d’autres biens.
La fréquence des visites varie selon les régions et
La plupart des villages sont établis afin d’exploiter une les préférences des samouraïs. Les visites annuelles sont
ressource particulière, telle que de la terre arable ou chose courante dans les territoires où l’entreposage du riz
des poissons abondants. L’accessibilité de certains biens est difficile en raison du climat ou de l’infrastructure. La
dépend des échanges, des cultures et des autres res- perception aux cinq ans est privilégiée dans les villages
sources locales. Si un type de culture ne convient pas au où la production évolue peu d’une année à l’autre. Cette
climat de la région, la denrée concernée sera peu dispo- solution nécessite moins de percepteurs, mais les villages
nible. Les différences régionales confèrent des particulari- et les samouraïs concernés doivent jouir de grandes capa-
tés à chaque communauté, dans des domaines tels que la cités d’entreposage du riz.
tenue vestimentaire, l’alimentation et l’outillage. Les rési- Si de nombreux percepteurs se montrent justes et équi-
dents d’un hameau qui cultive les vers à soie seront mieux tables, ce n’est pas le cas de tous. De la même manière,
vêtus que des mineurs. Les villages des plaines arides certains chefs de village sont plus prédisposés aux erreurs
cultivent le blé, le millet, le thé et le soja, qui nécessitent de comptabilité, qu’ils soient bien intentionnés ou non.
moins d’eau que les rizières. Les hameaux et les monas- Dans certains hameaux, la visite du percepteur est un évé-
tères situés dans les zones montagneuses dépendent de la nement stressant et inquiétant, car les habitants craignent
chasse, et certains utilisent excessivement le cuir et les par- que leurs cachettes soient découvertes ou que le fonction-
ties animales dans l’habillement, l’habitat et la fabrication naire annonce une taxe élevée. Dans d’autres, elle lance
d’outils. Le bambou est cultivé dans tout Rokugan, mais un festival où le saké coule à flots, pour que l’ambiance
surtout dans les régions humides du sud. Il sert dans tous assure la bonne humeur du percepteur.
les domaines, de la confection de gourdes à l’art, en pas-
sant par la construction. Le riz est cultivé partout où le cli-
mat le permet, et il peut enrichir un village. Les pruniers et
les cerisiers sont populaires chez les paysans et les samou-
raïs autant pour leur beauté que pour leurs fruits. une autorité
Les bâtiments importants d’un village reflètent éga-
lement ses ressources. Un hameau de pêche héberge- incontrôlée
ra probablement un charpentier naval et une cale sèche
Les samouraïs sont rares dans les communau-
pour réparer les bateaux. Un village minier contiendra une
tés rurales, où leur position sociale leur donne
grande forge pour façonner et restaurer les outils. Un vil-
un pouvoir illimité sur les résidents. Bien qu’un
lage de commerce accueillera suffisamment de voyageurs
noble soit normalement sanctionné s’il se com-
pour bénéficier d’une auberge. La taille d’une bourgade
porte sans honneur, les villages isolés ne peuvent
joue un rôle crucial dans la présence de spécialistes et de
rien faire pour l’en empêcher. Ils n’ont pas le droit
leur lieu de travail. Un hameau de cinquante habitants ne
de rejeter ses demandes.
jouira probablement pas des services d’un forgeron, mais
À son arrivée, un samouraï peut s’arrêter au
un village de cinq cents âmes ne pourra pas s’en passer.
centre d’un hameau et crier pour attirer l’atten-

les percepteurs
tion du chef. La réponse doit être rapide et l’ac-
cueil chaleureux. Sinon, il peut sévir et confisquer
ce qui lui a été refusé, ou punir les impertinents.
La plupart des contacts des villageois avec la noblesse
Un samouraï honorable ne provoquerait
sont les visites planifiées du percepteur, souvent un magis-
jamais de dégâts dans une bourgade qu’il visite,
trat. Quand il arrive, il se livre à une estimation de la pro-
mais tous les membres de cette caste n’adhèrent
duction du village. Il consulte pour cela le chef et d’éven-
pas au bushido, surtout quand ils savent que
tuels documents. Les percepteurs les plus consciencieux
leur absence d’honneur n’aura pas de consé-
peuvent aussi s’occuper personnellement de l’inventaire.
quences, car les régions éloignées sont moins
La taxe, généralement payable en riz même pour les vil-
policées. Si un samouraï honorable en voit un
lages qui n’en récoltent pas, correspond à un pourcentage
autre agir contre les intérêts d’un village, il devra
déterminé annuellement par chaque province, selon les
intervenir pour rectifier les méfaits commis.
demandes discordantes de l’Empereur, des Champions,
des nobles et des fonctionnaires influents. Si le riz n’est
pas disponible, le chef du village doit se rendre au marché

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CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

les dōshin et Les bourgades qui accueillent des voyageurs se


dressent à proximité de la route pour les rendre facile-
N AN

les bandits ment accessibles. Par contre, dans un village de pêche,


certains édifices sont installés loin de la côte, surtout si la
La plupart des villages
ont besoin de bâtiments
Puisque les samouraïs sont rares et que la communica- zone est inondable. spécialisés, dont un
tion est limitée, le brigandage est un problème dans les kura, un entrepôt pour
régions rurales. Des bandits, bien cachés ou nomades,
qui choisissent leurs cibles avec soin peuvent sévir pen- Les résidences les ressources précieuses
(souvent le riz) ou un
dant des décennies dans une même région. Certains vil- Toutes les maisons d’un hameau sont généralement simi- koya, un enclos pour les
lages les acceptent à contrecœur, les considérant comme animaux. Les villages de
laires, sauf pour leurs décorations. À l’exception de celle
une autre forme de percepteurs. D’autres savent que les pêcheurs disposeront d’une
du chef du village, chacune est composée d’une seule cale sèche pour réparer
brigands ne possèdent pas le mandat divin qui leur per- i e di i e ar de annea h ji les bateaux. Les villages
met d’agir ainsi, et peu de prêtres et de moines tolèrent la Ces paravents en papier donnent peu d’intimité. miniers construiront
moindre complicité. Conséquemment, les règles sociales dictent que chacun plutôt un dépôt où stocker
San a ra r a rer la ri le d hin est censé ignorer tout ce qui se passe de l’autre côté le minerai avant qu’il ne
doivent combattre les activités criminelles. Ils sont les d’un panneau, même si l’activité est clairement audible. soit raffiné ou transporté.
plus bas placés au sein des forces de l’ordre de Roku- e h ji n d la r e la a ille r i e d’ n Souvent, ces structures
gan et sont majoritairement composés de bonge. Bien vaste espace commun en journée et d’un peu d’intimi- sont communautaires.
e le agi ra h i i en le d hin il le n - té le soir.
vent sur la recommandation des chefs de village. Dans les La maison du chef du village est facilement identifiable,
bourgades où les visites de magistrats sont rares, le chef puisqu’elle est deux fois plus grande que les autres : elle
n era ar i n d hin ar in ri i e er ir dispose d’une seconde pièce pour accueillir des visiteurs
longtemps avant qu’un magistrat ne confirme son man- nobles. Dans des régions reculées, ces pièces sont rare-
dat. Par défaut, les chefs de village assument les devoirs ment utilisées, mais doivent être entretenues.
des forces de l’ordre. Certaines habitations de communautés agricoles
e d hin e en r er ne ar e e ra e ler de moins prospères contiennent un enclos pour le bétail. Bien
hommes, particulièrement pour s’occuper des bandits. Ils que la plupart des fermiers préfèrent installer les animaux
doivent également faire appliquer la loi impériale dans dans une grange, la construction d’un tel édifice prend du
leur village et aux alentours. Cette autorité ne s’étend temps et nécessite des ressources parfois indisponibles.
cependant que sur les heimin et les hinin. Quand la température le permet, les animaux restent dans
des enclos extérieurs. Sinon, lorsque la météo est capri-
la composition cieuse ou que des dangers rôdent, ou même simplement

d’un village pour profiter de la chaleur dégagée en hiver, le bétail peut


être rentré dans les maisons, y compris dans les villages
Certains bâtiments, comme les maisons, les granges et plus riches.
les entrepôts, sont essentiels à toute communauté rurale.
Bien que ces édifices aient la même utilité dans tout l’Em-
pire, leur emplacement, leur style architectural et leurs
matériaux de construction peuvent varier, ce qui permet
de distinguer les villages les uns des autres.
La disposition d’un village dépend surtout de sa fonc-
tion. Pour ne pas empiéter sur les terres disponibles, un
village agricole rassemblera les maisons dans une petite
zone. Une route unique reliera ces maisons aux champs.
Les autres bâtiments communautaires se trouvent avec
les habitations, à moins que leur éloignement soit justifié.
Par exemple, le sanctuaire de l’esprit d’un arbre, d’une
rivière ou d’un rocher ne pourra pas être déplacé. Les
boucheries, les forges et les bâtiments d’où émane une
odeur désagréable peuvent également être placés loin
des maisons.

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Les sanctuaires l’agriculture


Presque tous les villages disposent au moins d’un petit Tous les villages réservent des parcelles arables, à l’ex-
sanctuaire ou d’un modeste temple. Comme les habitants ception de ceux où toute agriculture est impensable. Par
dépendent de la nature pour survivre et sont vulnérables exemple, si l’eau d’un village est saumâtre, le peu d’eau
à ses dangers, ils se doivent d’apaiser les kamis. Dans les potable ne saurait être gaspillé sur des cultures. Par
petites fermes isolées, ce lieu de culte peut être un simple contre, un terrain tel qu’une colline peut être transformé
recoin où les villageois laissent des offrandes et prient. en terre arable grâce à l’installation de terrasses, tant que
Dans les hameaux plus peuplés ou ceux où la religion tient les ressources et la main-d’œuvre sont disponibles. Enfin,
une place importante, le temple peut être le plus grand pour qu’une culture soit viable, il suffit que l’investisse-
bâtiment. Les sanctuaires plus conséquents accueillent ment nécessaire pour nourrir tout le village soit inférieur
souvent un gardien ou un prêtre affecté à l’entretien et qui aux coûts d’importation (s’il est possible de se procurer
tient le rôle de chef spirituel de la communauté. Les sanc- la denrée).
tuaires renommés attirent des pèlerins des villages voisins
ou de plus loin encore, et constituent une source de fier-
té et de développement économique pour les habitants. L’irrigation
En général, le sanctuaire représente le centre émo- Les systèmes d’irrigation sont vitaux pour les cultures d’un
tionnel et spirituel du village. Les événements importants village, surtout pour les rizières. Ils comprennent des bas-
de l’existence, en particulier les mariages, y sont célé- sins artificiels destinés à récolter l’eau de pluie, ainsi que
brés. Les festivals s’y déroulent aussi, permettant aux habi- des réseaux de canaux et de barrages qui dévient l’eau des
tants d’exprimer leur reconnaissance envers les esprits à rivières. Certains villages possèdent des systèmes com-
chaque réjouissance. plexes de conduites en bois pour réduire l’évaporation de
l’eau. Parfois, ces installations renvoient même l’eau vers
Les boutiques les maisons, qui bénéficient alors d’un petit bassin. Entre-
tenir ces systèmes demande beaucoup de travail, et la
Les marchands et artisans prospères peuvent installer responsabilité est donc communale. Les villageois se ras-
une boutique dans leur maison. La partie la plus acces- semblent ainsi régulièrement pour réparer les conduites,
sible du bâtiment fait office d’étal. Les biens destinés à la ou encore draguer les digues d’irrigation et renforcer les
vente y sont placés à la vue des clients. Une autre pièce, barrages. Dans le cas de réparations urgentes, le village
g n rale en ar e ar n ran h ji er d’a elier a entier se mobilise.
propriétaire.
Les produits vendus par les marchands sont générale-
ment les plus utiles pour la communauté. Ainsi, personne
Les récoltes
ne fabriquera d’équipement de pêche dans un village Les villages déterminent leurs cultures en fonction des fac-
minier. De la même manière, les biens réservés aux samou- teurs environnementaux et de leurs besoins. Une fois ces
raïs ne se trouveront pas dans un village. derniers remplis, priorité est accordée aux récoltes qui ne
pourront pas être obtenues par des échanges et qui pous-
Les lieux de rencontre seront facilement. Dans les cas où deux cultures satisfont
des besoins similaires, comme les abricots et les prunes, la
Le sanctuaire est le centre spirituel de la communauté, plupart des villages n’en choisiront qu’une.
mais il ne convient pas forcément comme lieu de ren-
contre. Plusieurs villages proposent d’autres endroits pour
Les fèves
se rassembler, selon les ressources et les besoins des habi-
tants. Une bourgade proche d’une source chaude peut Les fèves sont une source cruciale de protéines pour les
construire une maison de bains communautaire. Une autre, habitants de Rokugan. La plupart des villages cultivent
à proximité d’une grande route, disposera probablement au moins du soja, en raison de la grande quantité qu’ils
d’une auberge pour les voyageurs épuisés. Si un village se consomment et de la facilité à en faire pousser. Les hari-
targue d’une distillerie, une taverne y sera adjointe. De la cots mungos et adzuki sont courants. Pour récolter le soja,
même manière, un hameau qui cultive ou transforme du on attend que les tiges aient poussé, avant de les lais-
thé contiendra une maison de thé. Seuls les grands vil- ser sécher dans les champs. Ensuite, elles sont battues
lages peuvent héberger plusieurs bâtiments spécialisés, pour récupérer les fèves, qui sont transformées en miso
puisque l’entretien de ces derniers est onéreux. et en tofu.

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CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Les céréales Les légumes


Presque tous les villages font pousser un peu de riz, néces- Les légumes frais fournissent de nombreuses vitamines
saire pour payer les taxes. Par contre, si l’eau est trop pré- et ajoutent de la saveur aux repas. Les plus communs
cieuse pour entretenir une rizière, il sera acheté. D’autres sont les concombres, les courges, les choux, dont le kale,
céréales, telles que le blé, l’orge, le sarrasin et le millet, les ignames, les bardanes, les carottes, les radis et les
sont cultivées dans tout l’Empire. La plupart poussent oignons. La plupart poussent facilement et se trouvent en
plus facilement que le riz et demandent moins d’eau. Par petites quantités dans les villages non agricoles. La priori-
contre, elles ont moins bon goût et moins de valeur. Cer- té est donnée aux légumes qui peuvent être stockés long-
taines, telles que l’orge ou le blé, sont plus précieuses une temps, comme les oignons.
fois fermentées, et les villages où elles poussent installent
des brasseries ou des distilleries. Le thé

Les fruits Le thé est une culture cruciale, qui nécessite ses propres
champs et dont la transformation après la récolte
De nombreux villages s’assurent d’avoir au moins quelques demande un travail considérable. Les plants de thé,
arbres fruitiers, mais certains plantent des vergers entiers. comme les arbres fruitiers, fournissent des feuilles pendant
Les fruits cultivés comprennent les prunes, les abricots, les des années. Ils sont cultivés en rangs denses à hauteur de
pêches, les kakis, les pommes, les poires, les melons, les taille. La récolte a lieu deux fois par semaine pendant les
agrumes et les cerises. Grâce à leurs racines profondes, mois chauds, ce qui nécessite un effort constant des villa-
les arbres fruitiers ne nécessitent pas d’arrosage régulier, geois. Les feuilles doivent être traitées à proximité de la
mais ils meurent souvent en cas de sécheresse. Comme ferme, car elles s’abîment rapidement.
ces arbres produisent des fruits pendant des générations,
ils sont entretenus avec soin.
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

Les fibres
le village de la
Toutes les cultures ne visent pas à nourrir le peuple. Le tex-
tile, important à Rokugan, dépend des plantes fibreuses,
mouche vrombissante
dont le chanvre, le coton et le lin. Le bambou, bien qu’il Cette bourgade se trouve sur les terres des Kitsu, membres
serve surtout à la construction, entre aussi dans cette caté- du Clan du Lion, dans la province Rugashi, à quelques
gorie, tout comme (indirectement) les feuilles de mûrier jours de voyage de la ville éponyme, un carrefour commer-
qui nourrissent les vers à soie. Les fermiers qui cultivent cial d’importance. Proche de l’une des routes principales,
des plantes fibreuses s’emploient également à filer ou tis- le village connaît un trafic constant, surtout composé de
ser leur production. marchands qui rentrent après avoir conclu leurs affaires
en ville.
Le bétail La distillerie de la Mouche vrombissante propose un
saké particulier qui a retenu l’attention des marchands iti-
Les fermes comptent rarement sur le bétail. La volaille, nérants. La méthode de distillation est gardée secrète,
et surtout les poulets, prime. Les bovins servent d’ani- mais implique l’utilisation d’une variété de riz spéciale que
maux de trait, puisque leur viande est considérée comme la famille d’artisans ne dévoile pas. Que ce soit pour fêter
impure. Si le village est pourvu d’une tannerie, le bétail leur succès ou noyer leurs problèmes, les marchands itiné-
comptera plus de têtes qu’ailleurs, mais demeurera en rants visitent souvent la distillerie et sa taverne attenante.
nombre restreint. Les élevages les plus courants sont Plusieurs dépensent une partie de leurs profits à acheter
les vers à soie, essentiels à la production textile. Les des caisses de saké qu’ils offriront à leurs amis ou parte-
fermes qui en élèvent doivent cultiver des mûriers pour naires commerciaux, ce qui ne fait qu’augmenter la popu-
les nourrir. larité de la boisson.

autour d’un verre


$ Ceux qui offrent une bouteille de saké
de la Mouche vrombissante à leur sanc-
tuaire préféré verront la chance leur sourire
durant la prochaine saison.
$ Pendant la nuit, quelqu’un a fouillé dans les
biens des marchands en visite au village de
la Mouche vrombissante. Rien ne semble
avoir été volé, mais les marchandises ont
été déplacées et mal rangées. Personne ne
sait qui est coupable, ni pourquoi.
$ Des bandits attaquent régulièrement les
marchands non loin du village de la Mouche
vrombissante, mais bizarrement, ils s’en
prennent uniquement à ceux qui n’appar-
tiennent pas au Clan du Lion.
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Reiha, maître-brasseur
idée d’aventure : Reiha gère la distillerie de la Mouche vrombissante. Elle
délier les langues préserve fièrement les traditions et recettes que sa famille
suit depuis douze générations. La réussite et l’expansion
relativement récentes de l’entreprise ont représenté un
Accroche Alors qu’ils traversent la province défi de taille, et elle a accepté à contrecœur d’apporter
Rugashi, les PJ rencontrent un autre voyageur, un les changements nécessaires, craignant que le succès ne
bushi du Clan du Lion. Étonnamment, l’homme soit que temporaire. Mais les ventes de la distillerie conti-
est agréable et vante les mérites de la région. Il nuent de progresser au même rythme que la production,
les invite à venir goûter les mets locaux, et les et elle envisage maintenant d’automatiser certaines tâches
conduit ainsi à la distillerie de la Mouche vrom- pour accroître encore les volumes. Elle demeure hésitante
bissante, qu’il prétend être la meilleure du Clan à prendre autant de risques, mais s’y sent obligée.
du Lion. Cependant, elle est surtout poussée au développe-
Développement ment par un espion du Clan du Scorpion qui la tient sous
Au cours de leur visite à
sa coupe. Lors des premiers travaux, elle a eu besoin de
la taverne, le bushi boit trop et commence à
capitaux et a effectué de mauvais choix pour les obtenir.
divulguer des informations confidentielles sur
Le Clan du Scorpion l’a appris et s’en sert pour la faire
les déploiements de troupes du Clan du Lion. À
chanter. Elle est désormais contrainte d’essayer de souti-
la surprise du groupe, Reiha, la tavernière, conti-
rer les secrets de tous les marchands et samouraïs du Clan
nue de faire couler le saké à flots, comme si elle
du Lion, qu’elle divulgue ensuite au Clan du Scorpion.
souhaitait encourager un comportement aussi
Elle supporte difficilement cette situation, mais est terri-
irresponsable. Les PJ doivent alors décider s’ils
fiée à l’idée du déshonneur qu’elle subirait si ses secrets
veulent protéger l’honneur du membre du Clan
étaient dévoilés.
du Lion ou découvrir les motivations de Reiha.
三 Paroxysme Le bushi n’apprécie pas du tout
les efforts des PJ pour qu’il se dégrise et conserve
le village d’anbasukai
son honneur. Ivre, il les provoque en duel pour Situé dans les montagnes de la province Senseki, Anba-
avoir osé mettre en doute sa capacité à se sukai est un village minier agréable et relativement isolé.
contrôler. Si les PJ accusent Reiha de duplicité, Il offre une vue imprenable sur les monts de la Grande
elle tentera de les empoisonner afin de préser- Muraille Septentrionale et surplombe des plaines dis-
ver son commerce. tantes. Les maisons sont disposées autour d’un beau
sanctuaire du kami de la montagne proche, le sanctuaire
du Cœur de la Terre. Les tremblements de terre et glis-
Grâce à son succès, la distillerie se développe, sements de terrain figurent parmi les dangers principaux
embauche de nouveaux employés et accroît sa produc- de la région, mais la plupart des villageois reconnaissent
tion. Cependant, de nouvelles terres arables pour la que la situation serait pire sans leurs offrandes régulières.
culture de ce riz si particulier ne sont pas disponibles, la Grâce à l’altitude, le village reste frais même au plus fort
famille est donc en négociation avec ses voisins pour leur de l’été, et terriblement froid en hiver. La possibilité de fuir
permettre de cultiver cette variété. la chaleur estivale et la présence d’un temple remarquable
Le village a conservé ses origines agricoles, même si attirent parfois des pèlerins.
l’expansion de la distillerie signifie qu’il abrite maintenant
plus de cinq cents habitants. Le centre de la bourgade est
traversé par un petit ruisseau surmonté d’un pont en bois.
La distillerie se trouve près du cours d’eau, qui entraîne
son polissoir et fournit l’eau nécessaire. Ce bâtiment est
le plus imposant du village et les maisons sont disposées
en cercle autour. La bourgade est entourée de rizières à
perte de vue.
En approchant, une odeur de riz cuit et de fermenta-
tion prend au nez. Si le polissoir fonctionne, le bruit des
roues à eau et du frottement des meules résonne à travers
tout le village. En soirée, les rires et parfois les chansons
paillardes des clients de la taverne prennent le dessus.

113
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

des profondeurs idée d’aventure :


des priorités
$ Le village a subi des tremblements de
terre et des glissements de terrain qui ne
divergentes
cessent de croître en intensité. Le kami qui
réside au sanctuaire du Cœur de la Terre Accroche Après avoir visité le sanctuaire du
semble mécontent et devra être apaisé. Cœur de la Terre, les PJ apprennent que le village
recrute de nouveaux gardes pour accompagner
$ Le village recrute des gardes pour accom- la prochaine production de minerai. Les derniers
pagner les caravanes. C’est un travail peu ont été blessés par un glissement de terrain et
risqué et la paie est considérable pour tra- ne peuvent pas encore voyager. Le directeur
vailler dans une région aussi paisible du de la mine demande l’aide des PJ, puisqu’il est
Clan de la Licorne. évident que personne d’autre ne peut s’en char-
$ Le village comprend un dojo secret où ger. Le minerai doit être livré à Shiro Ide, ce qui
sont enseignées des techniques gaijin ter- représente un long voyage. Le ronin Uchida fait
riblement efficaces, qu’il est impossible également partie des gardes embauchés, mais
d’apprendre ailleurs. ses intentions sont déshonorables.
Développement Au cours du voyage, Uchida
approche les PJ pour leur faire part de son plan.
l e ai ir le inerai e l’e dier
Un observateur perspicace pourrait remarquer, au vu
Owari Toshi, avant de l’envoyer par bateau à la
du nombre de maisons, que le village semble abriter plus
Grande Muraille Kaiu, où ses contacts du Clan
de résidents que les fermes alentour ne peuvent en nourrir.
du Crabe l’attendent. Il explique que les besoins
En effet, le village importe beaucoup d’aliments et d’équi-
du Clan du Crabe sont supérieurs à ceux du Clan
pements miniers pour faire face aux besoins de sa popula-
de la Licorne, et que le minerai serait immédiate-
tion. De plus, de nombreux habitants se déplacent comme
ment converti en armes et en armures pour pro-
des guerriers entraînés, y compris ceux qui travaillent dans
téger l’Empire. Mais selon le droit rokugani, le
les champs ou les mines.
fer appartient au Clan de la Licorne et nul n’a le
Le village est en fait l’une des possessions les plus pré-
droit de s’en saisir, quels que soient ses besoins.
cieuses du Clan de la Licorne. Il s’élève au-dessus d’un
vaste réseau de grottes et de tunnels qui regorge de 三 Paroxysme Si les PJ laissent Uchida détour-
filons ferriques, et le clan compte donc sur des défenseurs ner le minerai, ils auront échoué dans leur
déguisés pour assurer le fonctionnement et la sécurité de devoir : ils pourraient subir le grave déshon-
la mine. Plus de la moitié des villageois sont en fait des neur d’avoir manqué à leurs obligations envers
soldats qui doivent aider dans les champs ou les mines le Clan de la Licorne. S’ils livrent le minerai en
en dehors de leurs entraînements. Ces derniers ont lieu personne au Clan du Crabe, ils seront traités
dans les tunnels, afin que personne ne les voie. Les car- comme des héros mais, si la vérité venait à se
gaisons qui quittent les mines disposent toujours d’une savoir, leur triomphe serait de courte durée.
lourde escorte, et les troupes reviennent souvent avec des
charrettes entières d’aliments et d’outils obtenus dans les
villages alentour.
Le Clan de la Licorne a fondé ce village après avoir
pris conscience de sa richesse minière. Utaku Anbasukai
découvrit les gisements par hasard alors qu’il cherchait la
source d’un ruisseau de montagne. Surpris, il a rapporté sa
trouvaille au clan, qui a bâti le village après s’être assuré de
l’ampleur et de la pureté des filons.

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CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Uchida
à la pêche
aux ragots
Le Clan de la Licorne recrute ses gardes à différents
endroits et choisit même des ronin qui semblent dignes de
confiance, dont Uchida. Il a travaillé sans relâche dans les
mines pour faire croire qu’il n’était qu’un bonge comme
les autres. Il a démontré sa bonne humeur au travail et
$ La pêche du jour est toujours bonne
son efficacité au combat lors des entraînements secrets. depuis qu’un villageois a trouvé une statue
Cependant, il a ses propres objectifs. Ancien membre du inhabituelle dans ses filets, la saison précé-
Clan du Crabe, Uchida croit encore fermement en son dente. Le village a commencé à ériger un
devoir de protéger l’Empire, et il est persuadé que le Clan sanctuaire où la prier.
de la Licorne a tort de garder le minerai pour lui. Il juge $ Une colonie de gobelins s’est installée sur
donc nécessaire de détourner le minerai pour que celui-ci l’autre rive, à environ un jour de marche
serve plutôt à l’Empire dans son intégralité. (Pour repré- vers le sud. Il devient dangereux de voya-
senter Uchida, utilisez le profil de Ronin compétent en ger dans les alentours.
p. 316 du Livre de Règles.)

le village du bassin haute, pour éviter les risques d’inondation, même en cas
tournoyant de tempête. Chaque habitation comprend un petit quai
ainsi qu’un atelier où entreposer et réparer les filets, mais
Pour s’alimenter, le Clan du Crabe compte sur de nom- aussi où vider et saler les poissons. L’arôme distinctif du
breux villages de pêcheurs le long de la baie des Poissons poisson séché imprègne les lieux, et la marée évacue
morts. La vaste quantité de poisson séché que produisent les déchets.
ces petites communautés nourrit les soldats stationnés sur La communauté entretient le sanctuaire des Quatre
la Muraille, puisque le désert qui jouxte l’Outremonde ne Présents, qui célèbre les kamis de chacun des ruisseaux
permet pas l’agriculture. Le village du Bassin tournoyant se réunissant dans le village. L’intérieur contient une sta-
est l’un de ces villages. Dirigé par la famille Yasuki, il se tue de chaque esprit, une par mur. Les habitants s’assurent
trouve au croisement de quatre ruisseaux qui descendent de toujours proposer des offrandes équivalentes à chacun
des collines de la province Sunda Mizu. des esprits, pour ne pas faire de jaloux. Ils croient ferme-
Les maisons sont construites au bord de la rive, sur ment que le village est plus prospère lorsque les quatre
des pieux qui s’enfoncent jusqu’au lit de la rivière et kamis sont satisfaits et œuvrent de concert.
s’élèvent trois mètres au-dessus du niveau de la marée Tous les habitants dépendent de la qualité de la
pêche, soit parce qu’ils pêchent, soit parce qu’ils parti-
cipent à l’entretien des flottes. Le village paie d’ailleurs
ses taxes en poisson séché. Bien que la plupart utilisent
des filets, certains villageois dressent plutôt des cormo-
rans pour pêcher. Les visiteurs complimentent souvent la
qualité et la saveur du poisson local, surtout lorsqu’il est
fraîchement pêché.
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

Murata Hisao la ferme de thé kaori


Le prêtre qui s’occupe du sanctuaire des Quatre Présents Les marais Uebe sont une région inhospitalière de la pro-
est jeune et enthousiaste. Toujours prêt à partager sa vince Anshin, sous l’autorité de la famille Hiramori, vas-
sagesse ou à raconter les dernières anecdotes, il voit l’in- sale des Daidoji. L’odeur puissante de la végétation en
fluence des kamis dans tous les aspects de la vie. Malheu- décomposition imprègne l’air humide, et une forêt dense
reusement, il ne sait pas garder un secret et ne donne pas empêche tout courant d’air de passer. Certaines com-
souvent de bons conseils. En conséquence, il peut paraître munautés parviennent tout de même à survivre dans les
rustre, et il a déjà révélé des informations qui lui avaient forêts ou les marécages, mais l’environnement rend l’agri-
été confiées sous le sceau de son office. La patience de culture presque impossible. De plus, le village maudit des
la communauté envers son jeune prêtre commence à Nuages noirs se trouve non loin, et sa réputation tient les
atteindre ses limites. visiteurs éloignés.
Malgré tout, une famille de paysans cultive du thé sur
cinquante acres depuis une dizaine d’années. Elle travaille
idée d’aventure : la terre pour faire pousser des plants malgré la moiteur du

des poissons morts climat. Bien que la température convienne, le sol est trop
humide, ce à quoi la famille a répondu en faisant venir à
grand-peine du sable, qu’elle a mélangé à la terre. Ses
Accroche Lorsque les PJ approchent du vil- efforts commencent à payer, mais il faudra au moins une
génération avant que les cultures prospèrent réellement.
lage, la puanteur du poisson pourri les prend au
nez. Ils remarquent rapidement que les habitants
semblent maigres et misérables. En parlant aux
bonge, ils découvrent qu’une bonne partie des
poissons pêchés étaient malades et avaient pour-
ri avant que les villageois ne puissent les sécher. qu’est-ce qui
Développement Murata Hisao, le prêtre se mijote ?
du sanctuaire des Quatre Présents, pense qu’il
faut accomplir une cérémonie de purification $ Les feuilles de thé de la ferme Kaori ont
dans la baie. Il demande aux PJ de l’accompa- des propriétés curatives exceptionnelles
gner : il veut parcourir une bonne distance en qu’elles tirent des marais. Les guérisseurs
bateau pour pouvoir purifier les eaux. En cours paieront un bon prix pour en obtenir.
de route, la mer devient de plus en plus houleuse
et de nombreux poissons morts flottent sur les $ Quelque chose s’en prend aux voyageurs
hautes vagues. sur la route qui mène à la ferme Kaori,
entraînant la perte des deux derniers
三 Paroxysme Lorsque le rituel commence, une convois de feuilles de thé. La ferme pour-
sorcière des mers attaque le bateau pour mettre rait ne pas s’en sortir si elle ne parvient pas
un terme à la cérémonie. Elle s’est installée dans à vendre la prochaine récolte.
les alentours et sa présence rend les poissons
malades. Les PJ doivent alors tuer la sorcière ou
$ Récemment, un diseur de bonne aven-
la convaincre de partir. ture a prétendu que le destin de l’un des
ouvriers de la ferme était de transformer le
Clan de la Grue. Bien entendu, les diseurs
de bonne aventure affirment toujours ce
genre de choses, ce n’est sûrement rien.
$ « Méfiez-vous de la ferme Kaori. Elle abrite
un être surnaturel et maléfique. Rien de
bon ne peut provenir des marais, où la
mort est assurée. »

116
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

La ferme n’abrite que peu d’ouvriers et tous appar-


tiennent à la même famille très soudée : Hirotaka et idée d’aventure :
Noriko, leurs sept enfants, et Kotomi, la sœur de Noriko.
Chaque membre de la famille participe au travail de un visage connu
la ferme, mais celui-ci représente parfois plus qu’ils ne
peuvent en accomplir. Pour l’instant, ils n’ont pas les res- Accroche À leur arrivée à la ferme, les PJ, qui
sources pour embaucher d’autres ouvriers, ni même pour
ont passé un certain temps à la capitale, pense-
loger et nourrir ceux qui voudraient se joindre à eux. Leurs
ront reconnaître Hirotaka. Ils finissent par réaliser
vêtements sont usés jusqu’à la corde, ont été raccommo-
que le fermier était autrefois un membre impor-
dés à outrance ou sont mal ajustés.
tant de la famille Daidoji et de la cour impériale.
La ferme est constituée d’une seule maison et d’un
Il a fui la cour après avoir été accusé de détour-
entrepôt où les feuilles de thé sont séchées et prépa-
ner des fonds au profit d’un ami plutôt que de
rées en vue de leur expédition. Les deux bâtiments, de
les accorder aux armées dans le besoin.
construction médiocre, sont mal entretenus. Bâtis trop
rapidement, ils sont constitués des seuls matériaux dispo- Développement Les PJ devront d’abord
nibles dans le marais. confirmer l’identité de Hirotaka. Ensuite, ils
Les quelques animaux de ferme présents sont des devront décider s’ils veulent le laisser mener une
poules, qui caquettent dans leur enclos, à côté de la mai- vie discrète sans honneur ou s’ils préfèrent le
son. Un petit jardin de légumes est placé à côté, mais la ramener de force à la capitale pour qu’il réponde
plupart des plants semblent maladifs. Un bosquet de bam- de son crime. Le samouraï devenu fermier a
bous pousse à l’arrière, dont certaines cannes ont visible- accepté que ce style de vie rural soit la consé-
ment été coupées récemment. quence de ses actes.

三 Paroxysme S’ils choisissent de le traîner


Hirotaka devant la justice, ils doivent savoir que sa femme,
En compagnie de Noriko, de leurs enfants et de Kotomi, leurs enfants et sa belle-sœur ne parviendront
Hirotaka travaille à la ferme. Il est content de voir des visi- sûrement pas à survivre à la ferme sans lui.
teurs et curieux d’apprendre les nouvelles de l’extérieur. Cependant, s’ils l’accompagnent à la capitale,
Il invite rapidement les étrangers à partager leur repas, ils souffriront forcément une fois que Hirotaka
mais n’a que des ressources limitées. En fait, les voyageurs aura subi sa sanction. Si les enfants apprennent
qui acceptent son hospitalité peuvent remarquer que les que la famille va devoir partir, certains fuiront
enfants n’ont pas mangé ou doivent dormir à l’extérieur. dans les marais, où ils pourraient être la cible
Ils constatent toutefois que Hirotaka semble avoir eu une de prédateurs.
bonne éducation. Il peut s’engager dans des discussions
philosophiques ou militaires complexes, mais paraît bien
moins s’y connaître en agriculture.
Bien que la famille ait visiblement du mal à faire tour-
ner la ferme, les parents et les enfants ont l’air heureux
ensemble. Les adultes laissent les enfants participer aux
conversations et se montrent extrêmement polis et dési-
reux de transformer tout échange en une nouvelle leçon.
Curieusement, ils s’intéressent plus à la philosophie et à la
religion qu’aux sujets utiles à la vie dans une ferme.

117
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

Les samouraïs et les


Lorsqu’un roturier doit interagir avec un samouraï, sou-
vent parce que ce dernier a choisi de s’adresser à lui et
qu’il attend une réponse, la même déférence aura pré-

gens du peuple séance. Le roturier se contentera de répondre aux ques-


tions posées et n’amorcera jamais le dialogue. Cette habi-
tude présente un effet regrettable : les gens du peuple
Malgré les profonds clivages sociaux qui existent à rechignent à divulguer des informations qui seraient utiles
Rokugan entre les nobles et les guerriers d’une part, et les aux nobles. Il n’est donc pas rare que ceux-ci apprennent
gens du peuple d’autre part, les samouraïs interagissent avec surprise une information que les roturiers connais-
régulièrement avec les heimin et, à l’occasion, avec les saient depuis longtemps.
burakumin. Bien que tous soient socialement inférieurs aux Quel que soit le statut d’un samouraï, les gens du
samouraïs (surtout les hinin), la relation entre les samouraïs peuple s’adresseront toujours à lui avec le suffixe hono-
et les paysans est bien plus complexe que celle qu’entre- rifique « -sama  », qui s’ajoute au nom de famille (par
tiennent les seigneurs et leurs vassaux. exemple, Bayushi-sama) ou au générique « samouraï » (par
exemple, samouraï-sama). De plus, ils garderont une pos-
de manière générale ture servile et éviteront de croiser le regard du noble tout
au long de l’échange.
L’attitude des gens du peuple à l’égard des samouraïs se
résume en un seul mot : déférence. Dès leur plus jeune
âge, les enfants apprennent à éviter les nobles autant
que possible. Si les interactions sont nécessaires, les rotu-
riers se montreront courtois et respectueux, s’inclineront
profondément jusqu’à ce qu’on leur adresse la parole,
ne parleront que s’ils y sont invités ou si leurs devoirs le
leur imposent, se garderont de tout contact visuel et ne
se comporteront jamais d’une manière irrespectueuse ou
menaçante. La plupart du temps, ils se mettront simple-
ment à l’écart pour laisser passer les samouraïs.
Ne pas offrir cette déférence est un manquement à
l’Ordre céleste, ce qui représente un blasphème et un
crime grave. Les coupables seront au minimum vertement
tancés, et uniquement si le samouraï offensé se sent par-
ticulièrement magnanime. Ils seront plus certainement
battus, voire tués, sans que cette sanction extrême soit
considérée comme un crime. Au pire, le samouraï pour-
rait devoir compenser le seigneur, à moins que le rotu-
rier ne lui appartienne, auquel cas l’affaire sera réglée
d’avance. Il n’est donc pas étonnant que la déférence
montrée aux nobles soit la plupart du temps teintée d’une
peur abjecte.

118
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Une réalité tout en nuances


les interactions
entre les samouraïs
La relation entre les samouraïs et les gens du peuple est
plus complexe que ce que l’étiquette peut laisser croire. La
et les gens du grande majorité des nobles sont conscients que l’Empire

peuple dans
prospère grâce au dur labeur des burakumin qui portent
les cadavres et jettent les ordures, des heimin spéciali-
vos parties sés qui fabriquent les objets du quotidien, des marchands
qui se livrent aux sordides aspects du commerce et, sur-
Les samouraïs qui sont particulièrement aimables tout, des paysans et pêcheurs qui nourrissent l’Empire. Ils
ou, au contraire, agressifs envers les paysans les traitent donc avec une indifférence polie qui reconnaît
sont de bons candidats pour un certain nombre leurs contributions, mais les ignorent tant qu’ils n’ont pas
d’avantages et de désavantages. Ceux-ci de raison spécifique d’agir autrement.
peuvent être choisis lors de la création du per- Cependant, certains samouraïs vont plus loin, convain-
sonnage ou acquis au cours du jeu (voir page 99 cus que le précepte de compassion du bushido doit être
du Livre de règles). Par exemple, un samou- interprété au sens large, et ne pas se limiter à protéger les
raï bienveillant obtiendra Soutien du peuple ou gens du peuple de tragédies comme une invasion mili-
Parangon d’un précepte du bushido [Compas- taire ou une catastrophe naturelle. Ils choisissent plutôt
sion] tandis qu’un autre, hostile, développera de l’appliquer à toute interaction avec les paysans et font
Réputation de cruauté, Intolérance [envers les preuve de politesse. Certains vont même jusqu’à les pré-
gens du peuple] ou Mépris pour un précepte server de toute forme de violence. De tels samouraïs sont
du bushido [Compassion]. Les nouveaux avan- rares et se trouvent surtout au sein des Clans du Phénix et
tages et désavantages inclus au itre 7 de ce de la Licorne. En général, leurs pairs les jugent étranges.
livre vous proposent aussi d’autres choix appro- De temps en temps, ils sont même ridiculisés pour avoir
priés, comme Paysan adopté et Aversion pour montré de la sympathie envers des paysans. Cependant,
les paysans. ils reçoivent souvent des faveurs de la part des roturiers et
Soyez cependant prudents : même si un PJ sont parfois surnommés « les héros du peuple ».
peut interpréter un samouraï qui traite les gens À l’inverse, certains nobles manifestent un mépris cer-
du peuple de façon impolie ou cruelle, il ne tain envers leurs subalternes et considèrent que le sta-
doit pas le faire de manière trop graphique ou tut « moins qu’humain » que leur octroie l’Ordre céleste
explicite. Un jeu de rôle doit demeurer un loisir justifie les mauvais traitements et la cruauté dont ils font
agréable, il est donc souhaitable d’éviter trop de preuve. Certains puniront même de mort toute injure,
descriptions d’actes méprisables. Nous conseil- réelle ou imaginaire. Ce type de comportement enfreint
lons au MJ et à ses joueurs de discuter au préa- le précepte de compassion du bushido, ce qui a des
lable de leur degré de tolérance face aux sujets conséquences, parfois graves. Tuer les vassaux d’un autre
plus sensibles, afin que tout le monde sache à seigneur peut le mettre en colère et le pousser à deman-
quoi s’attendre. der en a i n aire re i n r le dai d
samouraï pour que ce dernier soit puni. D’autres samou-
raïs peuvent également s’opposer à la maltraitance et au
meurtre de citoyens de l’Empire, aussi insignifiants qu’ils
soient, et même s’ils ont commis une infraction. Enfin,
cette attitude peut conduire les gens du peuple à se
soulever, malgré la servilité dont ils font généralement
preuve envers les samouraïs. Une foule de paysans en
colère en raison des crimes perpétrés envers leur famille
ou leurs proches peut facilement encercler, blesser ou
tuer un bushi expérimenté. Savoir que les conséquences
seront terribles peut ne pas les décourager.
La plupart des samouraïs comprennent les contribu-
tions importantes des gens du peuple et savent que tous
en bénéficient. Les sections suivantes décrivent comment
la relation entre les deux groupes peut profiter à tout le
monde, malgré certaines difficultés.

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C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

les samouraïs Les armuriers sont certainement les ouvriers spécialisés


les plus prisés, bien qu’ils ne fabriquent pas les armes les
et les bonge plus importantes aux yeux des samouraïs. Aucun bonge ne
se verra confier la tâche de forger un katana ou un waki-
La plupart des samouraïs reconnaissent que les bonge, zashi, même s’il sait le faire, puisqu’aucun noble n’accep-
« ceux qui travaillent », sont nécessaires à l’Empire et qu’ils terait de porter une telle arme. Cependant, les escadrons
peuvent donc leur être utiles à eux aussi. Certains œuvrent d’ashigaru ont besoin d’armes en grandes quantités, et les
à titre de serviteurs dans les châteaux ou les cours, mais yari de ces paysans enrôlés sont forgées par des bonge.
la grande majorité vit et travaille dans les fermes, villages, Aux yeux des seigneurs, les outils et armes de bonne
villes et métropoles de Rokugan, autant d’endroits où les facture sont indispensables à la vie sur le domaine, mais
samouraïs peuvent les rencontrer. ils peuvent aussi représenter une source de revenus sup-
plémentaires s’ils sont vendus. En conséquence, la plupart
Les paysans et les pêcheurs des samouraïs traitent les ouvriers avec politesse, tant que
ceux-ci font preuve de déférence.
Les paysans et les pêcheurs, qui nourrissent l’Empire,
sont les bonge les plus élevés en raison de leur fonction
vitale  : sans nourriture, l’Empire mourrait de faim, et les
Les marchands
seigneurs tendent à les protéger et à bien les traiter (ou, Puisqu’ils ne fabriquent rien et ne font que réaliser des
du moins, à ne pas se montrer trop durs). Ils récompensent transactions avec les biens des autres, les marchands sont
souvent ceux qui travaillent particulièrement dur ou qui au dernier échelon des bonge. Ce sont aussi les gens du
jouissent de récoltes abondantes. En effet, ces moissons peuple qui ont la relation la plus complexe avec les samou-
assurent que les seigneurs disposeront de suffisamment raïs. D’un côté, comme ils s’occupent de commerce, ce
de nourriture pour leur maisonnée et leurs vassaux, mais que les nobles jugent disgracieux, ils sont traités avec
aussi pour vendre ou échanger des surplus une fois leurs dédain, voire avec mépris. D’un autre côté, la plupart des
taxes payées. samouraïs sont bien contents d’accroître leur fortune, et
La plupart des seigneurs traitent tout aussi bien les avoir pour vassaux des marchands talentueux peut leur
paysans de leurs ennemis. D’une part, le massacre de hei- permettre d’y parvenir. Il n’est donc pas étonnant de trou-
min n’est pas bien vu par les samouraïs et les autorités ver des nobles qui détestent les marchands et le commer-
impériales (même si empêcher un ennemi de se nourrir cialisme répugnant qu’ils représentent, mais qui entre-
constitue un avantage stratégique), et, d’autre part, leurs tiennent de bonnes relations avec eux pour profiter de
ennemis peuvent décider de se venger et de décimer leurs leurs compétences.
paysans. Par ailleurs, dans l’éventualité d’une victoire, ne Tous les samouraïs ne méprisent pas le commerce pour
pas avoir tué les roturiers des terres ennemies signifie autant : les familles Daidoji du Clan de la Grue, Yasuki du
que le nouveau seigneur pourra profiter des récoltes sans Clan du Crabe et Ide du Clan de la Licorne comprennent
devoir tout réorganiser. toutes des membres qui s’adonnent en personne au
Par extension, la plupart des samouraïs traitent décem- commerce. Dans tous les clans et dans de nombreuses
en le hei in ’il a ar iennen n n le r dai familles, certains samouraïs en font autant, mais, même
Agir ainsi incite les paysans à se montrer accommodants dans ces cas, les bonge sont utiles puisqu’ils réalisent les
en retour et à offrir nourriture et logement lorsque les négociations, supervisent les envois et la réception des
nobles sont loin de toute auberge, voire à les aider s’ils marchandises, et s’occupent des paiements au nom de
sont blessés, par exemple. À l’inverse, les samouraïs qui leur seigneur. Les nobles agissent alors à titre de mécènes,
maltraitent les heimin et leur famille se verront attribuer donnent des instructions générales et apportent le sou-
des logements inconfortables ainsi que de la nourriture tien dont les heimin peuvent avoir besoin pour mener leurs
maigre, et toute autre aide leur sera refusée. entreprises à bien. En retour, les marchands négocient
âprement et s’assurent de tirer un profit maximal au nom
Les ouvriers spécialisés de leur seigneur. Le samouraï peut ainsi maintenir ses dis-
tances avec ces activités méprisables tout en bénéficiant
Ce sont eux qui fabriquent les outils de première nécessi- de leurs fruits.
té : des paniers aux tonneaux, en passant par les cordes et La plupart des nobles jugent de tels arrangements
les outils de ferme. Ils se situent plus bas que les paysans avec un certain dédain, regrettant que leurs confrères
sur l’échelle des bonge. Pourtant, les ouvriers talentueux matérialistes ne sachent pas suivre les idéaux du bushido.
et les marchands sont, d’une certaine manière, tout aussi Ils ne réalisent pas que les samouraïs riches vivent mieux
utiles, puisque leur travail permet aux fermiers de produire et sont plus influents au sein de l’Empire, ou ils choisissent
la nourriture si chère à l’Empire. de l’ignorer.

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CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

les samouraïs et et de nombreux arts, dont le chant, la danse ou les récitals


de poésie, et jouent de plusieurs instruments. Les débu-
les burakumin tantes doivent atteindre un niveau de maîtrise exception-
nel avant même d’être considérées comme des appren-
Les burakumin occupent les plus bas échelons de l’Ordre ties, et plus encore avant de devenir des geishas à part
céleste et accomplissent les tâches ingrates nécessaires entière. Nombreuses sont celles qui échouent. Parmi
au fonctionnement de l’Empire, comme jeter les ordures celles qui réussissent, les meilleures sont très recherchées
ou transporter et incinérer les cadavres. Ces gens du et obtiennent souvent le mécénat d’un samouraï puissant
peuple, également appelés hinin, font face au mépris des qui profitera du prestige de sa protégée, sans compter les
samouraïs, bien plus que les bonge auxquels on recon- revenus conséquents qu’il peut en tirer. Contrairement à la
naît une certaine humanité. Les hinin ne sont pas consi- croyance répandue chez les gaijin, les geishas ne sont pas
dérés comme des personnes, mais comme des biens. Il des courtisanes.
est extraordinairement rare qu’un noble daigne interagir Comme les geishas sont extrêmement douées pour
avec un burakumin et, lorsque c’est le cas, cela se termine fournir compagnie et divertissement aux samouraïs tout en
presque toujours mal pour ce dernier. D’un point de vue leur permettant d’exprimer des émotions trop longtemps
légal, tuer un hinin est considéré comme une atteinte à la réprimées, certains nobles tombent amoureux de leur gei-
propriété, au même titre que le vandalisme, et peut néces- sha. Des enfants peuvent naître d’une telle union mais,
siter le versement d’une compensation si le seigneur se dans la plupart des cas, les samouraïs ne reconnaissent
donne la peine d’enquêter. pas l’enfant, qui grandira dans la caste des hinin. Cepen-
Malgré cela, le précepte de compassion du bushi- dant, certains samouraïs reconnaissent ces enfants ou les
do s’applique. Le massacre gratuit et massif de buraku- adoptent, voire les confient à une autre famille. Dans de
min peut être ennuyeux pour leur seigneur et donner une rares cas, l’enfant peut même être élevé dans les rangs des
mauvaise image au samouraï coupable. La plupart des nobles et devenir un secret dangereux.
samouraïs choisissent donc d’ignorer les hinin, comme ils Malgré leur position subalterne au sein de l’Ordre
le feraient pour les objets ou les animaux. Cette attitude céleste, certaines geishas jouissent de la confiance de
convient parfaitement aux hinin : ils n’aiment pas attirer l’at- leurs clients ainsi que d’une influence bien supérieure à
tention des nobles, qu’ils jugent terrifiants pour des raisons celle des autres hinin. Certaines profitent de la situation
évidentes. À leurs yeux, les samouraïs sont imprévisibles et pour apprendre les secrets de leurs clients et s’en servir
souvent dangereux, et devoir interagir avec eux ne mène pour faire chanter des samouraïs. Des geishas sont même
jamais à une fin heureuse. Bien entendu, cette ignorance a spécialement formées pour cela, notamment par le Clan
un coût : si les hinin souffrent, seuls des parangons de com- du Scorpion. Plusieurs nobles ont baissé leur garde en
passion le remarqueront ou feront un effort pour les aider. présence de geishas et en ont trop dit, avant de réaliser,
L’échelle sociale de Rokugan est profondément injuste, et trop tard, l’effet désastreux que leur indiscrétion aurait sur
ce sont les hinin qui en paient le prix le plus fort. leur carrière.
Malgré ce statut indigne, certaines classes de buraku-
min bénéficient de l’attention des samouraïs.
Les tortionnaires
Les geishas Pour qu’une condamnation soit proclamée par un tribu-
nal, un aveu est normalement nécessaire (voir ri e et
Geisha signifie « artiste , et ce sont des professionnelles ti e t, en page 89). Les magistrats et les juges pré-
du divertissement qui occupent une place unique dans fèrent que la confession soit volontaire, mais si ce n’est pas
la société. Ce sont des hinin, et elles ne sont donc pas le cas, comme souvent, l’accusé peut être torturé. Comme
considérées comme des personnes. Par conséquent, elles aucun samouraï ne s’abaisserait à un acte aussi mépri-
devraient être traitées au même titre que les bouchers, les sable, les hinin s’en chargent. La torture est en effet avilis-
tanneurs ou les éboueurs. Cependant, comme ce ne sont sante et en dessous de la condition des heimin.
pas des personnes, les samouraïs peuvent profiter de leur Les tortionnaires composent une bonne partie des
compagnie et oublier pendant quelque temps de dissimu- employés des magistrats et ne doivent pas être de simples
ler rigoureusement leurs émotions. En raison du statut des brutes. Leur objectif est d’obtenir une confession et non
geishas, il n’est pas honteux d’exprimer ses sentiments d’infliger des douleurs sans raison. Les tortionnaires talen-
auprès d’elles, un peu comme si les nobles étaient par- tueux sont donc, d’une certaine manière, des « artistes
faitement seuls. à part entière. Les meilleurs parviennent à recueillir des
Les geishas, qui peuvent être des deux sexes, suivent aveux simplement en menaçant l’accusé. Comme ils com-
une formation exigeante qui dure des années. Elles prennent parfaitement l’anatomie et les nombreuses
apprennent à engager la conversation avec des samouraïs manières de provoquer la douleur, certains assistent les

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C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

magistrats dans leurs enquêtes, notamment dans les


affaires de meurtre, pour identifier les types de blessures
et dans quel ordre elles ont été infligées. De tels profes- inclure des gaijin
sionnels sont très demandés et peuvent avoir autant d’in-
fluence sur leur seigneur que les geishas.
dans le jeu
Bien que Rokugan soit, bien évidemment, au
les samouraïs cœur La Légende des Cinq Anneaux : le Jeu de

et les gaijin
Rôle, l’Empire d’Émeraude n’est qu’une nation
dans un monde plus vaste. Les autres pays
d’importance sont les royaumes d’Ivoire, for-
Gaijin signifie « barbares ». Ce terme est réservé aux
tement inspirés de la culture et du folklore du
humains qui ne viennent pas de Rokugan ou, dans le cas
sous-continent indien, et l’Empire Mweneta,
des tribus de Yobanjin, aux humains nés dans ce qui allait
vaguement basé sur les civilisations antiques
devenir l’Empire, mais qui ont refusé de suivre les Kamis.
de l’Afrique subsaharienne. Bien entendu, les
Quelle que soit leur origine, les gaijin se distinguent des
MJ peuvent développer ces deux pays ou créer
Rokugani par leur non-appartenance à l’Ordre céleste.
leurs propres nations. Les nombreuses cultures
Cette exclusion les rend inférieurs aux hinin qui, même s’ils
du monde réel constituent autant d’inspirations
ne sont pas considérés comme des personnes, y figurent.
possibles pour des nations fictives fascinantes,
Cette croyance alimente une profonde xénophobie dans
mais elles doivent être transposées dans le res-
tout l’Empire, et la plupart des samouraïs évitent tout
pect, pour éviter qu’une civilisation tout en
contact avec les gaijin.
nuances devienne une caricature insultante.
Malgré tout, certaines interactions ont lieu. Elles
Quoi que vous décidiez, la xénophobie
sont généralement de courte durée, très spécifiques et
latente influence nécessairement toutes les inte-
tenues entre les samouraïs des Clans de la Licorne et de
ractions entre des samouraïs et des représen-
la Mante d’une part et les royaumes d’Ivoire, Pavarre ou
tants d’un pays étranger. Si les PJ choisissent de
l’Empire Mweneta d’autre part. Les Clans de la Licorne
parler à des gaijin, ils doivent en connaître les
et, dans une moindre mesure, du Dragon et du Phénix
risques, et notamment celui de s’attirer la colère
entrent parfois en contact avec des nations étrangères
ou l’hostilité de nobles plus traditionalistes qui
par-delà les grands déserts du nord et de l’ouest. Le
considèrent tous les gaijin comme des barbares,
Clan du Phénix a, au cours de son histoire, rencontré les
indépendamment de leur pays d’origine.
Yobanjin, mais en général, il refuse de l’admettre publi-
quement. Les gaijin sont généralement les instigateurs
de ces rencontres puisqu’ils souhaitent établir des rela-
tions commerciales ou diplomatiques avec l’Empire. La
plupart des samouraïs refusent de telles offres en raison
des nombreux risques qu’elles comportent (dont la perte
de statut et de pureté spirituelle) vis-à-vis des bénéfices
escomptés.
Certains samouraïs, plus progressistes, curieux ou
opportunistes, acceptent parfois de rencontrer les gaijin.
D’autres encore se donnent la peine d’apprendre leurs
coutumes ou leurs langues. Bien entendu, pour les tra-
ditionalistes, il s’agit là de blasphèmes, et certains vont
jusqu’à considérer ces interactions comme des crimes,
mais les jugements varient d’une région à l’autre, certaines
étant très strictes et d’autres plus laxistes. Ainsi, une ren-
contre avec des gaijin doit se faire en toute discrétion, au
risque de subir des critiques, voire une perte de pouvoir
et d’influence.

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CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

Les routes et les rivières


et des changements de direction inattendus. Ce strata-
gème ralentit la progression des armées et laisse à des RÉCIT DE VOYAGE
A AN
escadrons Daidoji une chance de les surprendre avant de
Ce sont les artères qui nourrissent l’Empire. Elles per- disparaître pour éviter une éventuelle contre-attaque. Les
Certains samouraïs ne
mettent le transport d’aliments, de minéraux, de produits routes montagneuses du Clan du Dragon se révèlent tout quittent jamais leur
de luxe, de voyageurs et de soldats. aussi dangereuses, puisque les cols étroits et les pentes province natale, où leur
prononcées aident à compenser le petit nombre de défen- devoir les retient, mais ils

les grand-routes seurs en cas d’attaque.


Toutes les routes d’importance, y compris les Cinq
connaissent néanmoins
les routes et les rivières

(kaidō) Grand-routes, sont dotées de postes de péage et de


haltes où les voyageurs peuvent passer la nuit s’il leur est
de l’Empire d’Émeraude
grâce au Récit de voyage
L’histoire et la politique de l’Empire d’Émeraude se de Miya Hisano. Cette
impossible d’atteindre le village suivant. Ces bâtiments
devinent à travers ses routes. Les Clans du Crabe et du collection de trente-six es-
simples contiennent des futons où dormir et des brase-
tampes relate les voyages
Lion construisent des routes solides, qui permettent le ros où chauffer sa nourriture, ainsi qu’un puits. Ne pas les de l’artiste durant l’année
déplacement rapide des troupes et des approvisionne- entretenir serait source de déshonneur puisque de nom- où elle parcourut Rokugan
ments, tandis que les vastes plaines du Clan de la Licorne breux voyageurs ont besoin de s’y réfugier, et cette res- en tant que ronin.
sont sillonnées de simples sentiers qui résultent du pas des ponsabilité incombe à la bourgade la plus proche. La plu-
chevaux et non d’une quelconque planification. De nombreuses scènes
part des villes et villages se trouvent sur une route, ou du
y sont dépeintes. Son
Les routes les plus parcourues de Rokugan sont sur- moins à proximité, ce qui signifie que seuls les plus éloi-
illustration de la Grande
nommées les Cinq Grand-routes ou la route de l’Empereur gnés peuvent prendre le risque de ne pas être prêts à Muraille Kaiu est tout
(voir page 130). Celles-ci s’étendent jusqu’au cœur des accueillir de visiteurs. Si une route est très passante, les en nuances, et l’artiste
territoires de tous les clans majeurs pour faciliter le com- villages qu’elle traverse comprendront au moins une mai- présente les rizières des
merce, la communication ou la guerre. son de thé. terres côtières du Clan
À partir de ces axes principaux, de nombreuses autres L’Empereur impose aux clans majeurs d’entretenir les de la Grue dans toute
routes sont construites pour accélérer les voyages sur r e de le r erri ire e a n ha i n dai leur gloire pastorale. La
les terres claniques. Si elles demeurent essentielles aux n’oserait manquer à ce devoir, malgré le coût important gravure la plus touchante
représente un moine ise
samouraïs et aux gens du peuple, ces routes s’avèrent sou- des travaux et la main-d’œuvre requise. Toutefois, dans
zumi en pleine médita-
vent dangereuses : les bandits y guettent les caravanes de les régions frontalières, les routes ne correspondent pas
tion, qui semble ne faire
marchands, et des pluies torrentielles peuvent les transfor- souvent aux standards impériaux. Les représentants des qu’un avec la montagne
mer en champs de boue. clans responsables affirment toujours que ces conditions dressée derrière lui.
Les voyageurs qui traversent les terres des Clans de la sont temporaires, liées à la présence de brigands ou à une
Grue et du Dragon peuvent toutefois tomber sur des dan- météo peu clémente, et non à une négligence volontaire Les estampes sont
accompagnées de récits,
gers qui ne sont pas dus au hasard. Le premier a construit de la ar de dai i ien l ne a i n de ar-
tirés des journaux de
ses routes en prenant soin d’y inclure des angles morts faire leurs défenses. Miya Hisano, et de contes
folkloriques des divers
clans. La richesse de
cette œuvre explique son
succès, depuis sa première
impression en 1088. La
plupart des bibliothèques
en contiennent au moins
une copie.

Les voyageurs qui se


lancent sur les traces de
Hisano s’interrogent sou-
vent sur la véracité de ses
descriptions, et d’autres
ouvrages contestent
d’ailleurs certains faits.
Cependant, nul autre
document n’a réussi à
dépeindre l’Empire dans
toute sa sainte étendue.

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C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

les routes et l’environnement


Les routes doivent permettre des voyages rapides ces routes pour ralentir l’avancée ennemie. En
et sûrs. Cependant, si elles ne sont pas entretenues conséquence, elles peuvent être considérées
ou si elles ont été volontairement sabotées, elles comme un terrain Dangereux.
peuvent devenir aussi dangereuses que leur environ- $ La Souillure de l’Outremonde poursuit sa pro-
nement, voire plus.
gression sur les terres impériales, et les terrains
Profanés sont donc monnaie courante. Au vu
$ Les routes boueuses ou cahoteuses peuvent
des campagnes militaires qui se déplacent le
être considérées comme un terrain Handica-
long des routes, les corps non incinérés ne sont
pant. Les voyageurs expérimentés savent qu’ils
pas rares, et les fantômes non plus.
doivent surveiller la météo et prévoir que cer-
taines routes happeront leurs sandales ou $ Certaines routes de pèlerinages deviennent des
immobiliseront le bétail. terrains Sanctifiés en raison soit des prières des
AR A
prêtres et des shugenja, soit d’une maintenance
AN AR $ Les routes moins fréquentées sont parfois lais-
soigneuse.
sées à l’abandon. Des pavés disjoints peuvent
La route aux mille briser les essieux des charrettes ou être à l’ori- $ En cette période trouble, les terrains Déséquilibrés
sanctuaires se trouve gine de blessures aux chevilles. Les ponts en sont plus nombreux, surtout sur les terres du Clan
sur les terres du Clan du bois pourrissent et peuvent céder. Des clans du Phénix : les kamis du feu y ont laissé de longs
Phénix. Elle est parsemée envahis peuvent même volontairement saboter couloirs calcinés et secs, même sous la pluie.
de petits sanctuaires, très
nombreux. La légende
veut qu’il y en ait un par
fortune. Seuls les voya-
geurs désespérés ou très Les temps de trajet échange de donations spécifiques destinées à financer la
pieux empruntent cette maintenance des routes empruntées.
voie, puisque s’arrêter À Rokugan, il est difficile d’estimer les distances : même Les sanctuaires, les temples, les auberges et de nom-
pour rendre hommage à sur des routes souvent empruntées, les temps de trajet breux autres commerces vendent les tsūkō-tegata aux
chaque fortune provoque fluctuent énormément selon la météo ou l’état des voies, gens du peuple qui voyagent pour affaires, aux pèlerins et,
des retards importants,
et tous les voyageurs le savent. parfois, aux samouraïs qui circulent en temps de paix. Les
mais s’y refuser entraîne
De plus, la question des distances a des ramifications vendeurs peuvent être responsables des travaux publics
le courroux des esprits.
insoupçonnées. Les cartographes ont fait de leur mieux, ou simplement collecter les redevances au nom du sei-
Tout le monde a entendu mais la technologie existante, la nature du terrain et le gne r e ū - ega a er e i igni ie ille de a -
parler d’un hérétique ou manque de temps ont complexifié leur tâche. Pire encore, sage en bois », sont des tablettes en bois réutilisables qui
d’un criminel qui aurait certains clans présument que des bureaucrates ont volon- portent la mention de la route concernée et le sceau rouge
tenté d’utiliser cette route
tairement modifié les cartes pour cacher des villages ou de l’émetteur. Aucune loi ne régit leur utilisation, et les
pour échapper à ses pour-
présenter des raccourcis inexistants, autant de moyens de magistrats et patrouilles claniques peuvent donc les refu-
suivants, plus croyants.
De telles histoires ont protéger leurs alliés politiques et de nuire à leurs rivaux. ser. Elles ne sont valides que si les autorités reconnaissent
invariablement la même Néanmoins, toutes les cartes officielles ont été approu- le sceau de l’émetteur et approuvent la nature du voyage
conclusion : le coupable vées par l’Empereur, qui ne saurait se tromper, et souli- du porteur.
n’a jamais été revu, mais gner des inexactitudes équivaudrait à un faux pas poten- La plupart des samouraïs obtiennent un passeport,
il est impossible de savoir tiellement mortel. Si un élément ne se trouve sur aucune un document de voyage officiel, auprès de leur sei-
s’il a réussi à s’enfuir carte officielle, mieux vaut admettre qu’il n’existe pas. Pour gneur ou du propriétaire des terres qu’ils traversent. Les
ou s’il a subi la colère pallier ces manquements, les seigneurs locaux paient des magistrats d’Émeraude, certains fonctionnaires impé-
des kamis.
magistrats ou des espions afin d’obtenir des cartes détail- ria le ha i n de lan e le dai a ilia
lées de leur province. Ils ne les montrent jamais aux fonc- détiennent l’autorité nécessaire pour émettre des docu-
tionnaires impériaux, pour ne pas sous-entendre que les ments de voyage qui permettront au porteur de parcourir
cartes impériales sont incomplètes. les territoires de plusieurs clans. Les magistrats de clan,
le dai de r in e e le g erne r ne e en
Les sauf-conduits émettre que des papiers plus limitatifs, pour se rendre sur
un autre territoire à des fins précises, ou pour se déplacer
La circulation endommage les routes, qui doivent alors librement au sein de leur terres. Au vu de l’importance de
être réparées, et l’entretien est coûteux. Dans l’Empire tels documents, il n’est pas étonnant que les seigneurs
d’Émeraude, le problème est en partie réglé par un sys- ou magistrats avides fassent fortune ou acquièrent d’in-
tème de sauf-conduits, que les voyageurs obtiennent en nombrables faveurs.

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CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

De tels documents précisent l’identité du samou- navigables cruciales où de nombreux heimin passent leur
raï, décrivent ses vêtements et armes, et spécifient d’où vie. Leurs bateaux, des barges en bois équipées d’un
il vient et où il va. Dès qu’il croise un poste de contrôle, simple abri couvert au centre et propulsées à la perche, y
son sauf-conduit est tamponné ou signé pour que sa pro- sont omniprésents. N AR
gression soit suivie et qu’il ne puisse pas emprunter plu- Le transport fluvial varie énormément selon la saison,
sieurs fois le même chemin. Les postes de péage servent la météo et les caprices des esprits des rivières. De plus, il Le pont des Marées se
également de points de contrôle et peuvent aussi abriter ne permet pas aussi facilement que les voyages terrestres trouve entre les terres
des Clans de la Grue et
une auberge. La fréquence de tels lieux et des patrouilles d’éviter les postes de péage et autres points de contrôle.
du Crabe et figure parmi
mobiles dépend entièrement du bon vouloir et des res- Enfin, les blocus sont courants, de même que les attaques
les merveilles naturelles
sources du seigneur local. depuis les berges. Néanmoins, les samouraïs en déplace- de l’Empire. Il traverse la
Dans les faits, certains seigneurs utilisent les docu- ment se doivent souvent d’affronter ces périls. baie des Poissons morts
en de age e il li i e n dai i Les rivières qui sont trop agitées ou dangereuses et, à marée basse, consti-
souhaiterait empêcher un invité belliqueux de retourner pour les bateaux forment des frontières naturelles. Leurs tue un raccourci apprécié
auprès de son maître peut simplement retarder leur émis- rapides peuvent s’étendre sur des kilomètres, obligeant des marchands.
sion, souvent en envoyant le samouraï auprès d’un subal- les voyageurs comme les armées à faire un long détour
Le contrôle du pont est
terne impossible à trouver ou qui répète à l’envi que les pour trouver un gué. Ces passages revêtent une impor- disputé depuis des siècles,
papiers seront « bientôt » prêts. tance stratégique incontestable, qui explique qu’ils soient et chaque clan a installé
Puisque les chevaux, et leurs sabots, causent plus généralement fortifiés sur une berge, voire sur les deux, une garnison de son côté
de dommages que les humains, ils doivent obtenir leur par les forces locales. de l’édifice, officiellement
propre sauf-conduit, plus onéreux. La plupart des clans La plupart des ponts de Rokugan sont d’étroites struc- pour contrôler le passage
n’émettent qu’un nombre limité de tels documents par tures en bois qui permettent au maximum à deux ou trois des voyageurs.
année, ce qui explique également la rareté des chevaux personnes de marcher de front. Souvent, les frais payables En 715, la garnison Hida
dans l’Empire. pour les traverser sont exorbitants. Dans les montagnes, le fut attaquée par les forces
e d en de age e le ū - ega a n Clan du Dragon a établi de longs ponts suspendus qui se de l’Outremonde et ne dut
nécessaires et souvent contrôlés sur les routes principales balancent au vent, à des centaines de mètres du sol. son salut qu’à l’interven-
reconnues par l’Empereur et répertoriées sur les cartes Au cœur des jungles tropicales des îles de la Soie et tion de Daidoji Masashigi
officielles. Au contraire, les chemins des paysans sont trop des Épices, le Clan de la Mante cultive des ponts vivants. du Clan de la Grue, qui
mal entretenus et trop dangereux pour que les magistrats Ceux-ci mettent des années avant d’être prêts, le temps traversa le pont avec ses
troupes. Masashigi mou-
cherchent à y faire régner l’ordre. Ces pistes sont encore que leurs concepteurs contraignent les plantes grimpantes
rut en combattant, balayé
plus périlleuses sans guide : elles tournent sur elles-mêmes des deux côtés d’une rivière ou d’un ravin à se rejoindre.
par la marée montante, et
et s’arrêtent n’importe où, et il est facile de s’y perdre. Leur construction est généralement confiée à des moines, le Clan du Crabe érigea,
Dénicher un accompagnateur digne de confiance peut se qui profitent de cette tâche pour méditer en l’honneur de en son nom, un sanctuaire
révéler complexe, puisque de nombreux bandits rusés se certains kamis de la terre. qui existe encore.
font passer pour des guides et conduisent les voyageurs Les rivières de Rokugan abritent plusieurs kamis aqua-
dans des endroits déserts à l’écart de tout avant de les tiques puissants, et la présence d’un shugenja à bord per-
détrousser. Les marchands et autres riches voyageurs qui met souvent d’abréger un trajet. Les tronçons où vivent
doivent quitter la route de l’Empereur choisissent souvent des esprits faibles ou mécontents recèlent parfois des
d’embaucher des ronin pour les protéger. bancs de sable et, à d’autres moments, s’assèchent. Un
kami du feu peut s’amuser à provoquer des rapides vio-

les rivières (kawa) lents, tandis que d’étranges visions danseront dans la
bruine d’une cascade qui abrite des kamis de l’air.
Plusieurs rivières larges traversent l’Empire d’Émeraude Les esprits des rivières ont souvent influencé l’issue
et servent de voies maritimes empruntées autant par des d’une bataille. Lorsque les combats se livrent sur l’eau, les
marchands que par des armées. Lorsqu’il fait beau et que barges permettent de passer aux endroits les plus étroits,
les kamis sont satisfaits, les voyages en bateau sont bien chacune tentant d’acculer l’autre pour lancer l’abordage et
plus rapides que par la route. Le placement fréquent des entamer les corps à corps. Des shugenja peuvent alors en
carrefours commerciaux de l’Empire le long des voies appeler aux kamis pour modifier subitement les courants
d’eau souligne leur importance stratégique. et faciliter les manœuvres ou pour invoquer des bancs de
Les villes se sont souvent développées le long des sable, qui retiendront les navires ennemis, et de hautes
grandes rivières, qui fournissent eau, poisson et voies vagues, qui les détruiront.

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les haltes Les relais se trouvent généralement sur les routes


entre les villes et les métropoles ou au carrefour de
Aussi appelées relais, ces haltes n’ont, en théorie, qu’une routes principales. Certains fournissent un point d’at-
seule fonction : faciliter les déplacements exigés par les tache sûr pour le transport fluvial. Tous sont bien plus que
affaires impériales. Les fonctionnaires impériaux et les de simples auberges sur la route, puisque leur emplace-
AN A N magistrats qui traversent le pays s’arrêtent dans ces lieux ment nécessite qu’ils subsistent en autarcie. Ils peuvent
spécifiquement conçus. Les plus petits relais n’offrent que donc comprendre d’imposants jardins, abriter des érudits
Un samouraï désespéré le minimum : nourriture, futon et toit sur la tête. Les clans, ou des prêtres capables de soigner les blessures, et pro-
peut devoir recourir majeurs ou mineurs, de même que les familles impériales poser d’autres services. Nombreuses sont les haltes qui
à un faussaire pour logent une petite garnison en cas d’attaque, mais la ban-
les entretiennent au nom de l’Empereur.
obtenir les papiers qui nière impériale suffit généralement à décourager les ban-
À chaque halte, les samouraïs trouveront, entre autres,
lui permettront d’obéir dits, à l’exception des plus désespérés.
à son daimyō. des porteurs, une écurie, une auberge ou un établisse-
ment où dormir, des produits locaux, des équipements Apercevoir une halte au loin est toujours un plaisir
Préparer de faux pa- utiles à tout voyageur. Les marchands des alentours, les pour les voyageurs qui détiennent des documents de
piers n’est pas difficile heimin et les ronin y côtoient les nobles plus que par- voyage, mais les autres y voient un obstacle. Certes, elles
pour un calligraphe sont au service des visiteurs, mais elles accueillent aus-
tout ailleurs (en respectant toujours les limites socié-
qui détient les encres si souvent la plus forte présence impériale de la région,
tales), et représentent une source inégalée de connais-
et cires appropriées : il chargée de contrôler les routes. Selon la halte, un voya-
doit simplement réussir sances sur la région. Les magistrats peuvent y embaucher
de r nin r i re de ri i de ji e re geur sans papier peut baratiner un garde ou lui verser un
un test de Composition
leurs cartes à jour, se divertir et y bénéficier d’un repos pot-de-vin, mais il est en général plus sûr de contourner
(Air) ND 2. Le ND pour
repérer la contrefaçon bien mérité. Plus important encore, les haltes servent de le relais.
est égal au nombre de postes de contrôle et de péage, parfois autorisés, parfois Les haltes non autorisées sont normalement illé-
succès bonus obtenus simplement parce que le propriétaire désire écarter les gales, mais elles sont souvent tolérées puisqu’elles
lors de ce test. brigands et récolter les sommes nécessaires à la mainte- rendent des services dans des endroits reculés. Elles
nance des lieux. se trouvent généralement loin des routes officielles,
Des samouraïs parti-
sur des pistes dangereuses que les voyageurs pres-
culièrement audacieux
peuvent parvenir à sés empruntent pour gagner du temps et que les ban-
tromper un contrôleur
en réussissant un test idée d’aventure : dits choisissent pour éviter les forces de l’ordre. On y
croise souvent les franges les moins recommandables
de Courtoisie ou de
Représentations. Après
le marché noir de la population, des tripots, des bordels ou des mar-
chés noirs. Être noble ne garantit pas un bon accueil
tout, il serait terrible- ou une quelconque sécurité dans de tels établissements,
ment impoli d’insinuer Accroche Une halte non autorisée se dresse puisque les propriétaires et leurs clients forment la lie
qu’un noble voyage sur une route secondaire. Récemment, des de la société et que leur seul « honneur » se mesure en
sans autorisation. reliques étranges et possiblement Souillées ont espèces sonnantes et trébuchantes.
été échangées sur le marché noir qui s’y tient. Malgré leur mauvaise réputation, les haltes non auto-
Les PJ doivent enquêter à la demande de leur risées sont populaires auprès des ronin, des heimin et de
seigneur, d’un magistrat d’Émeraude ou d’un tous ceux qui ne sont pas bien accueillis ailleurs. Parfois,
allié quelconque. même des samouraïs honorables peuvent avoir besoin
Développement La propriétaire de la halte de marchandises qui ne se trouvent qu’au marché noir,
est une ronin shugenja, ancienne membre du comme des faux papiers, de l’opium, des poisons ou
Clan du Dragon, tombée en disgrâce. Elle d’autres biens rares, méprisés ou illégaux.
jure avoir abandonné les kamis et ne plus les
entendre. Elle pratique maintenant le shinséisme
de la Terre Parfaite et considère son établisse-
ment comme une extension de cette philoso-
phie égalitaire. Lors de leur première nuit sur
place, les PJ entendent des hurlements : une
bagarre dégénère et des paysans s’étripent.
三 Paroxysme Alors que la situation empire,
les PJ sauront-ils trouver l’origine de la Souillure
avant que toute la halte ne cède à cette violence
aveugle ?

126
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

les plaines sesshō-seki


Les plaines ondoyantes de Rokugan pourraient bien séduire
les voyageurs. Pourquoi faire un long détour par la route Sur les terres du Clan du Lion, une rumeur
alors qu’il est possible d’atteindre sa destination en ligne parle d’un énorme rocher sur les plaines de la
droite ? Pour les cavaliers pressés du Clan de la Licorne, les Guerre. L’herbe ne pousse pas autour, et il est
plaines constituent des raccourcis appréciables. encerclé d’un espace infertile. Les animaux qui
Cependant, les samouraïs des autres clans évitent de s’en approchent meurent et pourrissent sur
parcourir les plaines s’ils le peuvent, pour de bonnes rai- place. Même les oiseaux qui passent au-dessus
sons. Si le terrain semble, à première vue, facile à traver- tombent, sans vie, à terre. Leurs os forment une
ser, les dangers sont nombreux. Des animaux sauvages couche épaisse sur le sol.
peuvent attaquer soit pour se défendre, soit parce qu’ils Ces récits mentionnent tous un prêtre itiné-
ont un instinct territorial développé, et les incendies se rant, l’ami d’un ami du narrateur, qui aurait vu
propagent rapidement à la moindre étincelle. Dans cer- quelque chose sur la pierre. Un esprit. Un renard
taines régions, sur des kilomètres, l’herbe est si haute à neuf queues, selon certains, ou une femme
qu’elle dépasse les bushi du Clan du Crabe : ces zones qui pleurait, le visage caché dans ses mains.
sont donc difficilement franchissables. L’absence de On entend parfois que l’esprit est enchaîné à
points de repère fiables rend l’orientation dans les plaines la pierre, ou qu’il arpente le cercle, tendant les
presque impossible. mains pour qu’on l’aide, avant de tuer tous ceux
Dans les plaines les plus éloignées de l’influence civili- qui le touchent.
satrice de l’Empire, le paysage spirituel peut être sauvage La légende veut que cette pierre soit tout
et imprévisible. Les régions désacralisées s’y développent ce qu’il reste d’un oni qui aurait comploté pour
pendant des années, et les kamis qui y résident n’ont pas assassiner l’Empereur, des siècles auparavant. Il
l’habitude de répondre aux invocations des shugenja. De aurait été tué par un Champion d’Émeraude, un
nombreuses légendes mentionnent des esprits puissants bushi du Clan du Lion à en croire les gens de la
et anciens qui vivent dans les plaines, et que nul ne devrait région, qui aurait extrait son cœur pour l’enter-
déranger. Parfois, les dangers des plaines se présentent rer dans la plaine, sous un gros rocher. Peut-être
directement au seuil des fermes et dans les villages ruraux. est-ce cet héritage de corruption et de malfai-
sance qui attire des silhouettes noires campant

la rivière de l’or aux portes de la mort.

(kin no kawa)
La Kin no Kawa est un fleuve large au débit lent qui prend L’incapacité ou le refus de la famille Kitsune d’empêcher
sa source dans les montagnes, au nord des terres du Clan les navires du Clan de la Mante d’attaquer ceux du Clan
du Scorpion, et finit sa course non loin de celles des Yasuki. du Scorpion est une source de contentieux entre les deux
À une certaine époque, le fleuve était la voie commerciale clans depuis des générations.
préférée du Clan du Scorpion, ce qui lui a valu le surnom Le dernier tronçon navigable se termine au village de
de rivière de l’Or. l’Eau pure, qui n’a de village que le nom. Après cela, les
Se ea n li ide e al e j ’ ari rapides et les cascades empêchent la navigation. Le vil-
Toshi, deuxième ville la plus importante de Rokugan et car- lage de l’Eau pure est le plus grand port commercial du
refour commercial pour l’opium. Une fois la cité franchie, Clan du Crabe, et il est donc entouré d’imposantes fortifi-
la rivière s’élargit et forme la baie de l’Honneur noyé, puis cations. Un mur d’enceinte défend tout accès par la terre
elle poursuit son cours vers le sud. Selon la légende, deux tandis que le Mur des Vagues protège le port contre les
samouraïs se seraient retrouvés pour un duel sur le pont de attaques maritimes.
l’Ultime Moment, qui surplombe le nord de la baie, mais D’innombrables villes et villages ont été créés sur cette
une vague imposante aurait emporté l’un des duellistes. voie navigable, pour profiter des retombées des échanges
Son adversaire aurait sauté à l’eau pour terminer le com- commerciaux. La volonté de s’enrichir est forte au point
bat, et les deux corps auraient été balayés sur le rivage le que de nombreuses bourgades hésitent entre commerce et
lendemain matin. piraterie. Saison après saison, les marchands de la famille
Mais la baie n’est pas connue que pour ses histoires Bayushi du Clan du Scorpion et de la famille Yasuki du Clan
romantiques : elle sert à déverser tous les déchets de la d ra e l en de nd e lien le r dai de le
ville. Néanmoins, de nombreux entrepôts et quais y ont aider à combattre les pirates. Ceux du Clan de la Mante
été bâtis, puisqu’elle facilite le commerce légal et sert deviennent plus hardis chaque année, contraignant les
notamment de carrefour pour celui de l’opium. Bayushi et les Yasuki à travailler ensemble. Malgré cette coo-
Le fleuve se divise au sud des terres du Clan du pération, les Bayushi ont confié à leur famille vassale, les
Scorpion. Son affluent le plus petit poursuit son cours vers Rokugo, la prise de contrôle des tripots et des marchés noirs
l’est et l’océan, tandis que le plus important continue vers le long du fleuve, pour bénéficier des actes de piraterie com-
le sud. Le palais du Clan du Renard est bâti à la bifurcation. battus aux yeux de tous par les représentants de leur famille.

128
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

SOCIÉTAL PERSONNEL

64 HONNEUR ENDURANCE
9
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  3 6 3 4
a i ’e in all e ari hi la i 35 GLOIRE SANG-FROID
16
des Mensonges, la cité des Histoires, pour se faire un nom. 3 2
D’une certaine manière, elle y est parvenue. Élevée par 45 STATUT 1 ATTENTION
6
la famille Yasuki, elle a appris à conduire des négocia-
tions de contrats, et à naviguer entre flatterie et refus. Ces +2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
4
compétences font d’elle une personnalité importante du
marché noir.
ARTISANAL 2 MARTIAL 2 SAVANT 2 SOCIAL 3 PRO. 4
Elle se trouve généralement à la Fleur épanouie, une
maison de thé qui sert de fumerie d’opium, non loin des AVANTAGES DÉSAVANTAGES R A
quais. Elle y dirige ses affaires : les paiements se font N
d’avance, et les biens ou services sont livrés avant la nuit. At t e te ss es e s es
Nobuko est une femme à l’air sévère et au visage  social ; mental  social ; relations Nobuko est une
émacié. Elle s’adonne à son amour pour le saké dans intermédiaire parfaite
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS et, comme peuvent en
l’arrière-salle de la boutique. Comme elle a l’alcool triste,
attester tous les rece-
ne i i re elle d ri ari e la i iser serti : portée 0 ; dégâts 2 ; Dangerosité 2 ; Discret, leurs, contrebandiers et
des étrons ». Magnifique, Ordinaire voleurs de la ville, elle
Malgré sa vie de criminelle, l’honneur de Nobuko est obtiendra tout ce dont
irréprochable. Elle rend un service inestimable à son clan, i e e t rt )  : tunique raffinée (Résistance phy- les PJ ont besoin, pour-
qu’elle finance et approvisionne en informations impos- sique 1), wakizashi, gobelet, bouteille de saké à moitié vu qu’ils soient prêts à
sibles à obtenir ailleurs. Elle s’est ainsi taillé une place dans vide, bourse de koku et de bu y mettre le prix.
la bonne société et se permet une certaine authenticité Nobuko peut approcher
CAPACITÉS
lorsqu’elle traite avec les autres nobles. Avoir un pied dans les PJ s’ils sont en quête
les deux mondes fait d’elle une intermédiaire très popu- N A N
d’un objet particulier. Il
laire entre les honorables samouraïs et la pègre locale, et À la demande d’un personnage, au prix d’une activité de est aussi possible qu’ils
elle a, à plusieurs reprises, su couvrir les comportements temps mort, Nobuko peut acquérir un bien ou un service entendent parler d’elle
discutables de personnages éminents. d’une rareté inférieure ou égale à 9 sans attirer l’attention. lorsqu’ils cherchent
L’acheteur doit payer le plein montant d’avance, plus un un objet ou un service
particuliers.
pourboire égal à la moitié du prix. Sinon, un PJ peut effec-
tuer un test e er e Air) N  3 pour acheter à crédit.
En cas de succès, il met en jeu 10 points d’Honneur dans
cette faveur, dont Nobuko déterminera la nature ultérieu-
rement, et elle « offre » au personnage ce qu’il a demandé.
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

la route de l’empereur avoir découvert les restes d’une lettre écrite sous le règne
de Hantei XVI. La révélation au grand jour de son contenu
De nombreuses routes sillonnent l’Empire d’Émeraude, pourrait couvrir de honte la lignée impériale. Étonnamment,
mais cinq d’entre elles surpassent toutes les autres en Taishi a accepté son renvoi sans sourciller.
termes de taille et d’importance. On les appelle les Cinq Le pas de cet homme petit et enjoué reste sautillant
Grand-routes ou encore la route de l’Empereur. Elles même lorsqu’il a déjà parcouru des lieues. Bien qu’il n’en
parcourent les territoires des Clans de la Licorne, du soit pas conscient, les compétences de Taishi ne sont pas
Scorpion, du Phénix, du Lion et de la Grue et y relient des tout à fait naturelles : un esprit s’est lié à lui et l’a encou-
lieux d’importance. ragé à les développer. Il murmure sans cesse à l’érudit
Les Cinq Grand-routes furent construites au début du que sa destinée est grandiose et qu’un jour, son nom sera
septième siècle, sous le règne de Hantei XVI, le Chrysan- connu dans tout l’Empire.
thème d’acier. Cet Empereur, éternel paranoïaque, crai- Taishi parcourt la route de l’Empereur sur un coup de
gnait que son autorité soit usurpée : il ordonna donc aux tête, du moins le croit-il, et collecte contes folkloriques
di er dai d r a e de n r ire e ie ain i e et chansons sur son chemin. Où qu’il aille, on lui ouvre
d’autres gigantesques infrastructures, afin de vider leurs les bibliothèques, et sa capacité de mémorisation semble
coffres. Cette astuce lui permit probablement de prolon- sans limites.
ger son règne, mais il finit tout de même tué par sa propre
SOCIÉTAL PERSONNEL
Garde d’honneur Seppun, pour le bien de l’Empire.
Lorsqu’il choisit l’emplacement de ces routes, le Chry- 40 HONNEUR ENDURANCE
12
santhème d’acier se concentra surtout sur les possibilités 3 1
de contrôle impérial offertes par les tracés. Il relia ainsi des 20 GLOIRE SANG-FROID
8
régions dont les habitants lui étaient loyaux à d’autres où 2 4
la rébellion couvait, ce qui facilita de brutales actions de 42 STATUT 3 ATTENTION
12
maintien de l’ordre. Depuis, la plupart de ces cités ont
développé leur rôle d’extension locale de l’autorité impé- +2, –2
ATTITUDE : PASSIONNÉ
VIGILANCE
1
riale… une tendance que les clans majeurs ont acceptée
avec plus ou moins de silence et de frustration. ARTISANAL 3 MARTIAL 2 SAVANT 6 SOCIAL 1 PRO. 1
Les Cinq Grand-routes sont encore entretenues par
décret impérial et permettent de voyager rapidement AVANTAGES DÉSAVANTAGES
entre les villes les plus importantes de l’Empire. En plus
ire s s i e ri sit sessi e
d’être larges et planes, elles sont en général bien gardées
 savant ; mental  savant ; mental
et dotées d’un nombre inhabituel de haltes. On y croise
plus souvent qu’ailleurs toutes sortes d’agents impériaux, ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
tels que des percepteurs ou des magistrats d’Émeraude…
pour le meilleur ou pour le pire.  : portée 1-2 ; dégâts 6 ; Dangerosité 2 ; Ordinaire
Quasiment aucun flux commercial ne transite par la i e e t rt )  : tunique raffinée, mais négligée
route de l’Empereur : les caravanes et les charrettes y sont (Résistance physique 1), wakizashi, tente (petite), sacoche
interdites. Les marchands doivent emprunter des routes contenant des rations de voyage, ainsi que plusieurs zeni
commerciales prévues à cet effet, ce qui les laisse à la mer- et un intéressant assortiment de cailloux et de carapaces
ci du bon vouloir des clans. Les voyageurs croisés sur les d’insectes
Cinq Grand-routes sont pour la plupart des courtisans, des
magistrats, des pèlerins, des érudits ou d’autres individus CAPACITÉS
qui se déplacent pour des raisons honorables. AR AN G N
L’esprit Manjigen pousse Asako Taishi à chercher tou-
Asako Taishi, érudit itinérant jours plus d’informations et l’utilise pour assouvir sa soif
Asako Taishi,
ANTAGONISTE érudit itinérant
RANG DE CONFRONTATION 2 5
incessante de connaissances. Lorsqu’Asako Taishi ren-
contre pour la première fois un PJ ou un PNJ antagoniste
Asako Taishi, l’un des nombreux voyageurs qui parcourent la i nna de in a i n de e hni e de ah
route de l’Empereur, est un érudit hors pair. Dans sa famille, de ih de ri el ien a lig d’ n d a an-
il jouit d’une réputation de chercheur tenace et créatif, qui a tage de type malédiction ou spirituel, il doit effectuer un
découvert des vérités que d’autres n’ont pas réussi à mettre test e ie i e) N  3. En cas de réussite, l’affi-
au jour (ou ne l’ont pas souhaité). Mais, pour un samouraï, nité du personnage avec le surnaturel fascine Taishi, qui
un tel talent peut aussi représenter une malédiction : Taishi cherche alors à en apprendre davantage, sans se soucier
a été renvoyé de son poste aux bibliothèques Asako après des conséquences.

130
CHAPIT R E 3 : L E CŒU R DE L’EMPIR E

hyōzenshō Au cours de l’été, la halte n’a que peu d’utilité : le cycle


du gel et du dégel rend le terrain étonnamment traître :
a r in e a n’e ’ ne laine gla iale e d - des zones meubles s’enfoncent soudain et risquent de bri-
lée, même en plein été. En hiver, le sol gèle, et la neige se ser les pattes d’un cheval, voire de l’avaler avec son cava-
déverse des nuages poussés par des vents hurlants depuis lier. La majeure partie de la végétation n’est constituée
les montagnes à l’est. Dans ces lieux, les moins hospita- que d’une herbe dure à peine adaptée au broutement,
lier d lan de la i rne e dre e en h l’a an - contrairement à celle des plaines fertiles situées au sud et
poste des Glaces. à l’ouest. De temps en temps, un messager qui passe par
n raire en a a re hal e de l’ ire en- là a besoin d’une monture fraîche et d’un repas chaud…
h ne r l ea ne ie ni a ne r e er- un luxe que le gardien des lieux, Utaku Sabuteki, fournit
ciale, et l’endroit n’accueille que rarement des agents impé- de son mieux, en rationnant les maigres réserves de riz et
riaux. Elle se dresse simplement au sommet d’une petite en proposant des oiseaux chassés dans la lande alentour.
élévation, une minuscule colline juste assez haute pour que L’odeur de la tourbe brûlée emplit l’air, mais le feu ne par-
la halte soit visible au-dessus de l’immense plaine. vient pas vraiment à chasser le froid persistant.
En hiver, les Vierges de bataille arrivent, et le tonnerre
de leur galop résonne dans la plaine tel d’énormes tam-

idée d’aventure :
bours. Elles apportent des chariots de charbon pour la
halte, des rations pour l’année à venir, ainsi que du bois
les observations pour les flèches et du fer pour les sabots des chevaux.

de l’hérétique
Les étendues désertes fournissent un terrain parfait
pour que la cavalerie d’élite Utaku s’entraîne à tourner et
à charger en formation. Ces cavalières, incarnation de la
beauté de la brutalité, sont effrayantes. Menées par l’intré-
Accroche Asako Taishi a des ennuis. Deux
pide Utaku Kamoko, les Vierges de bataille sont toujours
groupes avec lesquels il voyageait ont subi des
prêtes à partir en guerre.
attaques, et il est certain que les assaillants en
n rai n de e in de e e ni d’ li e en h
avaient après lui. Il a peur de quitter la halte dans
s’est grandement développé au fil des siècles : des dépen-
laquelle il séjourne sans une escorte de samou-
dances telles qu’une forge et de vastes écuries ont été
raïs compétents tels que les PJ.
ajoutées à ce qui n’était autrefois qu’une simple tour
Développement Sur la route, Taishi est de garde construite sur un sol à peine assez solide pour
attaqué par des tirailleurs Daidoji, visiblement accueillir des tentes. Bien que les lieux soient presque
déterminés à récupérer quelque chose dans son vides la majeure partie de l’année, ils peuvent servir de
paquetage : un rouleau décrivant l’histoire de base pour une opération militaire de grande envergure…
la route de l’Empereur et qui jette un doute sur comme un assaut contre le Clan du Lion situé au sud. Les
la lignée même des Hantei (ou tout autre docu- vastes étendues sauvages et sans pistes qui séparent le vil-
ment hérétique ou scandaleux qui correspond lage de la Frontière Noire et la rivière du Marchand noyé
mieux au sujet de la campagne). Les Daidoji dissuadent la plupart des clans d’adopter ce genre de stra-
ne cherchent pas à tuer qui que ce soit, mais ils tégie, mais de telles zones constituent des voies rapides
combattront les PJ si ceux-ci s’interposent. pour le Clan de la Licorne. Une cavalerie comme celle des
Vierges de bataille, bien équipée en destriers, peut couvrir
三 Paroxysme Taishi insiste pour rendre public
cette distance en une nuit et une journée… et malgré tout
le document à la cour. L’esprit en lui semble
frapper avec des montures encore fraîches.
également vouloir révéler ces informations, au
mépris de la sécurité de Taishi. Cependant, une
telle révélation peut avoir des conséquences
imprévisibles, auxquelles les PJ, du fait de leur
implication, ne pourront échapper.

131
C H API T R E 3 : L E C Œ U R DE L’EMPIR E

CAPACITÉS

A R R
R A commandant d’avant-poste
A Une fois par session de jeu, au prix d’une activité de temps
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  5 4 mort, Utaku Sabuteki peut préparer autant de chevaux
Sabuteki est un inten- qu’il le souhaite en vue d’un voyage, et également équi-
Ce lointain cousin d’Utaku Kamoko gère l’avant-poste des
dant accompli et un per leur cavalier. Chaque cheval et chaque cavalier ainsi
artisan talentueux. Il Glaces avec compétence et élégance, et le maintient sur
le pied de guerre. Ces qualités l’ont mis dans les bonnes préparé augmente de 2 points son Endurance jusqu’à la
peut obtenir, réparer ou
grâces de sa parente, au comportement tout aussi belli- fin de la session de jeu.
fabriquer la plupart des
objets nécessaires aux queux. Tandis qu’elle a tout d’une vaillante commandante,
PJ, en particulier si ces Sabuteki est plutôt un maître de la logistique, qui a com-
derniers préparent un
voyage. Les émotions
pris que des troupes au ventre vide et dépourvues de mon-
idée d’aventure : un
bien étrange œuf
tures fraîches n’ont d’armée que le nom. Sabuteki tire ses
n’ont que peu d’emprise
compétences de son expérience de maître d’écurie. Bien
sur lui, mais en appeler
qu’il s’agisse d’une fonction honorable pour tout homme
à son sens du devoir
de la famille Utaku, l’intelligence et la fiabilité de Sabuteki Accroche
fait véritablement écho Au cours de leur périple, les PJ
chez lui. lui ont valu l’attention de Kamoko, qui s’est arrangée pour
rencontrent un groupe de bandits (probable-
e le r le de gardien de en h l i re ienne
Les PJ peuvent rencon- ment des ronin) en train de dépouiller les corps
Sabuteki se distingue de la plupart des Utaku, répu-
trer Sabuteki lorsqu’ils de voyageurs récemment tués, dont au moins
tés pour la vitesse et l’intensité avec laquelle ils réalisent
se retrouvent coincés une samouraï à en juger par son sabre. En inter-
chacune de leurs entreprises, par son sens de la mesure,
quelque part. Ils venant pour mettre un terme au pillage, les PJ
peuvent aussi le croiser sa méticulosité et son stoïcisme. Certains membres de sa
parviennent à chasser les bandits sans trop de
dans le camp militaire famille jugent ces traits inhabituels, voire frustrants, mais
difficultés.
d’Utaku Kamoko lors- Kamoko est consciente que de telles qualités sont essen-
qu’elle part au combat. tielles pour le responsable de son avant-poste. Bien que sa Développement Les seules choses intéres-
fonction semble peu glorieuse, Sabuteki sait qu’en restant santes que les PJ trouvent sont les multiples
tout au long de l’année dans ce lieu isolé, et en s’assurant chevaux morts (dont la race indique que la
qu’il soit prêt à tout instant, il joue un rôle vital dans toute samouraï faisait partie du Clan de la Licorne, et
future bataille. probablement des Vierges de bataille) et un œuf
étrangement chaud. L’avant-poste du Clan de
SOCIÉTAL PERSONNEL la i rne le l r he e en h d n
70 HONNEUR ENDURANCE
16 les habitants souhaitent récupérer le corps de
5 2 leur défunte camarade. Au cours de la nuit, les
40 GLOIRE SANG-FROID
12 bandits reviennent, plus nombreux, et certains
3 2 anien la ah l e len ’il en aien
40 STATUT 2 ATTENTION
6 après l’œuf.

三 Paroxysme Au plus fort de la bataille, l’œuf


+1, +1, –2
ATTITUDE : PASSIONNÉ
VIGILANCE
3 commence à éclore. La créature qui en émerge
possède la queue d’un serpent, mais un visage
ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 2 SOCIAL 2 PRO. 5 humain. Les samouraïs la traitent-ils avec respect
et la ramènent-ils dans la forêt, s’attirant ainsi les
AVANTAGES DÉSAVANTAGES bonnes grâces de cette race, qui semble faire
ert i r r e t son retour dans l’Empire ? Ou la prennent-ils
 social ; relations  martial ; mental pour un monstre ou un démon et risquent-ils
l’animosité des anciens reptiles qui sommeillent
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS dans les forêts de Rokugan ?

ri e t  : portée 2 ; dégâts 4 ; Dangerosité 4 ; Entrave,


Militaire

i e e t rt ) : tunique matelassée de cuir (Résis-


tance physique 3), katana, wakizashi

i e e t tre) : selle d’équitation, musette, sac de


foin, tente (yourte), livre de chevet rédigé d’une écriture
inhabituelle, mais fluide et élégante

132
4
CHAPITRE

Les lieux
sacrés
Une jeune samouraï pauvre erre dans une
forêt à flanc de montagne. À la tombée de
la nuit, elle consulte la carte délavée subtili-
sée à la bibliothèque de son clan. Quelque
part au sein de cette forêt se cache un sanc-
tuaire dédié à un kami local… peut-être
pourrait-elle y trouver refuge.
Peu après, son cheval sursaute : un
bruissement dans un buisson ici, un batte-
ment d’ailes là, une ombre fugace à l’orée
de sa vision. Elle pousse sa monture au
trot, puis au galop. En guise de réponse,
des voix venues de nulle part s’élèvent en
un croassement rauque. Elle comprend en
voyant les becs et l’acier : une volée de
tengu, sur leur territoire. Chacun de ces
individus est maître du sabre, assurément
malveillant, probablement sanguinaire…
alors qu’elle est inexpérimentée, épuisée,
affamée et seule.
L’éreintement coule de ses épaules
jusque dans ses muscles. Son armure et ses
armes lui semblent lourdes. Elle chute plus
qu’elle ne descend de selle : si elle doit
mourir, autant que son cheval s’échappe.
Les jambes faibles et tremblantes, elle
s’agenouille sous les feuilles d’un pau-
lownia. Les tengu l’encerclent… et, par-
faitement synchronisés, ils s’agenouillent
et s’inclinent trois fois à trois reprises cha-
cun, puis s’envolent. Perplexe, elle leur
rend leur salut… et ne remarque qu’alors
les bandes de papier couvertes de prières
effacées qui entourent le tronc de l’arbre.
Enfin seule, elle s’adosse aux racines de
celui-ci et finit par se laisser aller au repos.
Elle a trouvé le sanctuaire.
C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

Les sanctuaires de
où vivaient les oni, le Jigoku. Les humains évoquaient le
Yomi comme s’il s’agissait de la totalité des enfers, car
ses frontières impénétrables contenaient les démons du

l’Empire d’Émeraude Jigoku. Mais la chute de Fu Leng détruisit ces frontières,


ce qui permit au mal de profaner le Yomi comme un
cadavre souille un sol sacré. Tandis que Fu Leng, empreint
Dès les premiers jours de ces terres d’émeraude, bien du vice du Jigoku, gagnait en puissance et en influence,
avant la chute des Kamis, des sanctuaires ont existé. son royaume empiétait de plus en plus sur le Yomi et par-
Du plus humble des paysans à l’Empereur en personne, vint même à capturer plusieurs sorei malchanceux, qui y
chaque Rokugani comprend la différence entre le sacré souffrent depuis lors.
et l’impie, entre la pureté et l’ignominie. Les sanctuaires Puis vint le Jour des Tonnerres. Les Kamis aimaient tel-
ponctuent les étapes de la vie de chacun : ils marquent les lement ces héros qu’ils demandèrent au royaume Céleste
événements importants comme la naissance, le mariage et d’accorder aux Tonnerres défunts de venir vivre à leurs
la mort, et ils connectent les vivants aux défunts. Ils relient côtés au Tengoku plutôt que de risquer la corruption au
Rokugan à un vaste univers de Cieux et d’enfers, de vil- Yomi. Les intendants des Cieux surpassèrent leurs vœux :
lages et d’étendues sauvages, de dieux et de démons. ils transportèrent le Yomi et tous les sorei qu’il contenait
Des érudits reclus aux ascètes itinérants, en passant dans le ciel, loin des profanations du Jigoku. Le Yomi était
par les prédicateurs révérés, nombre formulent des hypo- sauf, mais les enfers, à l’exception du Meido, furent aban-
thèses ou débattent, de l’humble point de vue de l’hu- d nn a ig a- e i de n er e le r
manité, sur la nature des divers royaumes qui composent fidèles mazoku sont descendus du Tengoku pour recon-
R N le cosmos au-dessus, autour et au-dessous de Rokugan. quérir le monde souterrain. Ils chassèrent les forces du
G Où les humains se trouvent-ils avant leur naissance ? Où Jigoku des niveaux qu’on appelle à présent le Meido, le
se rendent-ils à leur mort ? Quelles autres créatures vivent a i-d e le hig e endan garder le n r le de
Nombre de sages phi- à leurs côtés ? Les renseignements contenus ci-après, ras- ces deux derniers royaumes se révéla difficile, même pour
losophes ont remarqué
semblés auprès des shugenja les mieux informés de l’his- l’un des dieux les plus puissants.
que la vérité dépend
du référentiel de l’ob-
toire de Rokugan, visent à expliquer la façon dont les forces Pour appréhender la relation qui unit ces mondes, il
servateur. Bien que les et les entités surnaturelles influent sur la vie humaine. faut comprendre l’âme et le karma. L’âme de tout humain,
théologiens rokugani démon, animal, esprit d’ancêtre et même dieu (petit ou

La cosmographie
aient trouvé des expli- grand) a toujours existé : elle se réincarne sans cesse après
cations au fonctionne- la mort de l’individu. Lors de chaque renaissance, le karma
ment de l’univers et de l’âme (le poids spirituel des actes commis dans sa vie la

de Rokugan
les aient vérifiées du plus récente) détermine la forme et la destination de cette
mieux possible, il en
dernière. Les pires criminels deviennent des démons des
va de même pour les
enfers et des fantômes affamés. Ceux au comportement
autres cultures. Dans
le monde imaginaire
a n r e h i e de gan (le ingen-d en tolérable prennent la forme d’animaux ou d’humains.
de La Légende des Cinq termes cosmographiques) occupe un carrefour entre Seuls les plus vertueux deviennent des sorei.
Anneaux, la vérité peut diverses régions importantes d’un point de vue spiri- Le culte des fortunes et le shinséisme, même si le décret
dépendre littéralement el ar le e-d i i a r re l gi e ni- de l’Empereur Hantei Genji les a formellement rassemblés
de l’endroit où l’on rique et réside dans la pensée humaine, ces royaumes et réconciliés, interprètent différemment le concept de
se situe. ne sont ni des dimensions, ni des réalités, ni des plans, karma. Pour les tenants du premier, le karma peut être bon
ni des univers parallèles. Ils occupent le même monde ou mauvais, et les actions positives et altruistes renforcent
e le ingen-d e ’ enden a -de a le bon karma à hauteur de l’effort consacré à l’action et de
et au-dessous les uns des autres, bien que leur relation son effet. Shinsei, le Petit Maître, au contraire, soutenait
spatiale ne soit aucunement euclidienne. Une carte de l’hypothèse que tout karma était « mauvais ». Il enseigna
ces royaumes ressemblerait à une feuille de papier, fra- à ses disciples que chaque acte génère du karma, qui lie
gile, ancienne et élimée, pliée, chiffonnée, déchirée puis l’individu au cycle de la réincarnation, bien que des actions
réparée à maintes et maintes reprises depuis l’origine du motivées par la peur, le regret ou un désir particulier en
monde. Il serait ainsi possible de se réveiller un beau jour génèrent une plus grande quantité. Personne n’a prouvé
et de découvrir que des mains cosmiques ont lacéré les quelle religion avait raison et il est probable que personne
terres alentour et qu’un autre royaume a jailli du trou ainsi n’y parvienne.
créé dans l’univers. La transition entre les royaumes peut
aussi être plus subtile, comme un long virage qui mène à
une nouvelle perspective sur la réalité.
au-dessus
Au fil du temps, le placement de ces régions et Les Cieux flottent bien au-dessus de la surface de la
leurs relations sont devenus plus confus. De très vieilles Terre, par-delà les nuages. Des créatures mystiques
légendes, par exemple, racontent que les enfers étaient comme les dragons ou les Ki-Rin peuvent voler jusqu’à
constitués d’un royaume de passage qu’on appelait le Mei- ces royaumes, et très certainement y emmener des cava-
do, puis du lieu de l’ultime repos des sorei (les esprits des liers si elles daignent s’en donner la peine… bien que peu
ancêtres) nommé le Yomi, et enfin d’un lieu reculé oublié de légendes évoquent des mortels suffisamment dignes

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pour s’y rendre. Cependant, la route la plus directe pour jade et d’autres pierres précieuses reçoivent les offrandes
atteindre ces contrées supérieures reste une échelle : tout envoyées d’en dessous.
dispositif, naturel ou artificiel, qui permet aux humains La bureaucratie impériale de Rokugan suit l’organisa-
inaptes à voler de grimper jusqu’aux Cieux ou d’en des- tion du Tengoku, selon laquelle Dame Soleil et Sire Lune
cendre. Les échelles célestes les plus connues, des portes règnent sur une pyramide descendante de courtisans et
divines gardées et administrées par les serviteurs du Ten- d’administrateurs. Des querelles mesquines, l’inefficacité
goku, surplombent des montagnes sacrées. D’autres sont bureaucratique, des assignations scandaleuses et d’autres
des reliques magiques (des échelles pliables, des chaînes, imperfections du genre pimentent parfois la vie céleste,
des grappins, les plumes de créatures sacrées) ou des mais en général, le Tengoku reste résolument dévoué
êtres vivants tels que des arbres gigantesques. Certaines au bon fonctionnement du cosmos et à la progression
ne semblent exister que lorsque l’alignement des Cieux vers la sagesse et la vertu de tous les êtres dotés d’une
est propice : la lumière du croissant de lune ou un motif conscience. De nos jours, nombre des débats animant la
d’étoiles étincelant les révèle alors. salle du trône concernent les actions à entreprendre au
Jigoku. Autrefois, bien avant la chute des Kamis, les âmes
Le Tengoku qui le méritaient y étaient envoyées pour être réhabilitées,
mais il devint un terrain propice aux complots maléfiques.
Le Tengoku est le royaume où résident Dame Soleil, Sire Les démons qui dévoient le royaume à des fins égoïstes et
Lune, les plus importantes fortunes, les dragons élémen- destructrices dépassent en nombre les fidèles serviteurs
taires, les Empereurs exemplaires des temps passés, ainsi d’ a- e la r ne de la r r e di i ile
que leurs serviteurs shinzoku. D’immenses pagodes et des de séparer les honnêtes et justes mazoku des infâmes, et
ponts constellés d’étoiles jaillissent de nuages sombres sa charge de travail ne cesse d’augmenter, rendant, avec
et agités qui font aussi office de rizières pour nourrir les chaque année qui passe, ses visites aux siens, dans sa
habitants du royaume. De splendides sanctuaires d’or, de demeure céleste, de plus en plus rares.

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C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

Puisque le Tengoku couronne littéralement le ciel, l’une n r len er ain erri ire e ani a d hi h -d
de ses fonctions les plus importantes consiste à s’occuper de se consacrent à des existences de vertu et d’entraide afin de
la météo. Les dragons élémentaires supervisent de gigan- se garantir une meilleure réincarnation. La plupart d’entre
tesques machines divines qui gèrent le cycle des saisons, eux, et notamment leurs dirigeants, sont des fidèles shin-
ajustent la température, font tomber la pluie et la neige, séistes ou cherchent à se faire ordonner moines ou prêtres
chassent les nuages et infligent les catastrophes naturelles. de Shinsei. Au contraire, les tenants du Sakkaku n’en ont
que faire : ils pensent que leur incarnation bestiale est
Le Yomi idéale et qu’il s’agit de leur forme parfaite et ultime. Ils
sont convaincus que la meilleure façon d’utiliser leur temps
Depuis le Jour des Tonnerres, au premier siècle, le Yomi est d’accepter leur nature animale (et tout le chaos qu’ils
est une jolie zone des Cieux, une sorte de province du Ten- sèment) et d’atteindre l’immortalité dans leur vie actuelle.
goku. Les sorei arpentent ses couloirs, ses gigantesques e hi h -d e le Sa a e rai en e de
demeures et ses bureaux, où ils remplissent leurs devoirs cours étrangères. Leurs interactions sont en général diplo-
de gardiens tutélaires. La plupart du temps, leurs tâches matiques et neutres, même si chacun essaie de saper l’in-
consistent à veiller sur les familles auxquelles ils apparte- fluence de l’autre au travers de magouilles, de manœuvres
naient dans leur incarnation la plus récente. À l’occasion, sociales… et à l’occasion de violence pure et simple. Cha-
ils surveillent aussi des régions ou des organisations. Une cune de ces deux entités, composées d’individus plutôt
femme du nom de Chifune, une marchande sans parents que de territoires, domine certaines étendues sauvages
vivants, voua son existence entière à un immense com- de Rokugan, se tient à l’écart de certaines autres, et lutte
merce de construction navale : elle payait généreusement contre son homologue pour s’emparer des régions contes-
ses employés et les traitait, tout comme ses clients, avec la tées. Certains esprits animaux prêtent allégeance à l’une
plus grande gentillesse. Devenue une sorei, elle continua ou à l’autre, tandis que d’autres demeurent neutres ou
à superviser son entreprise, puis elle prit sous sa protection essaient d’attiser leurs rivalités pour leur propre bénéfice.
des chantiers navals similaires, appréciant la vénération et Traditionnellement, un Grand Tengu dirige chacune de
les offrandes des divers contremaîtres et de leurs ouvriers. ces cours, même si, parfois, ce poste revient à un autre
Les édifices du Yomi sont en majorité jaune soufre, une e d’e ri ani al a radi i n rale d hi h -d
couleur qui rappelle les Sources jaunes souterraines dont rapporte que l’un de ces Grands Tengu, qui a renoncé à
le royaume tire son nom. son nom et se faisait simplement appeler « le Haut prêtre
de Shinsei », avait appris le Tao de Shinsei aux côtés du

à côté : le senkyō Petit Maître et de Shiba afin de mettre l’Illumination à la


portée des animaux. Le Sakkaku, quant à lui, maintient
Les royaumes les plus proches des humains sont, parado- qu’il ne s’agissait que d’une plaisanterie recherchée que le
xalement, les moins bien compris. Le terme « Senkyō » se hi h -d n’a j r a ri e
traduit par « contrées enchantées » ou « contrées immor-
telles ». Dans ce royaume, au cœur de forêts et de régions
montagneuses au-delà des rizières et des murs des châ-
Le Yume-dō
teaux, des créatures capricieuses et imprévisibles utilisent Le Yumeji, la quête de la sagesse surnaturelle à travers les
des pouvoirs mystiques à des fins que les humains ne com- rêves, est une activité à la mode dont la pratique se déve-
prendront jamais. loppe rapidement dans toutes les classes sociales. Depuis
Les contes et légendes évoquent des humains qui se des temps immémoriaux, des esprits bons et mauvais,
sont aventurés dans des contrées reculées de Rokugan, où nobles et mineurs (comme des fantômes affamés venus
des entités sauvages leur jouent des tours ou les aident tourmenter les vivants qu’ils estiment responsables de
dans leurs entreprises, selon l’histoire. Ces animaux doués leur triste sort, ou des fortunes qui annoncent leur desti-
de conscience prennent la forme d’une bête, d’un humain née aux grands héros) ont communiqué avec les Rokugani
aux traits bestiaux, ou de quelque intermédiaire… quand au travers de leurs rêves. Cependant, l’ère durant laquelle
ils ne passent pas de l’une à l’autre. Les âmes placées par un samouraï recevait un salut de Hachiman dans son som-
leur karma au-dessus des animaux, mais en dessous des meil, puis se réveillait en découvrant un arc et des flèches
humains, renaissent sous cette forme. Leur nature chan- enchantées à ses côtés est depuis longtemps révolue.
geante les pousse à se comporter en fauteurs de trouble Les rêves offrent une échappatoire excitante et osée
et à répandre le chaos, compromettant ainsi leurs chances aux conventions sociales et aux mondanités de la société
de se réincarner en un être plus noble. r gani A e-d n a ra r di e n er ier
curieux peuvent interagir sur un pied d’égalité. Un men-
Le Chikushō-dō et le Sakkaku diant peut explorer un palais dans la mémoire d’un Empe-
reur. Une générale peut se confier à un enfant. Moyen-
Dans les contes, le territoire sauvage de ces créatures nant un peu d’entraînement, des rêveurs lucides peuvent
e en n le hi h -d la ie de ani a dissimuler leur véritable identité et leur apparence sous
ou le Sakkaku, l’illusion, ce qui n’est pas tout à fait juste. un déguisement, si telles sont leur intention et leur volon-
e hi h -d e le Sa a n en ai de a g rie té. Un mazoku peut rêver qu’il est une charmante gei-
politiques et non des régions, bien que leurs membres sha humaine. Un pêcheur peut rêver qu’il est un papillon.

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CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

On rapporte même des rumeurs d’espions et de saboteurs De nombreux genres de démons et de nombreux types de
qui parviennent, à travers les rêves, à voler des informa- dystopie infernale composent les niveaux de ces royaumes,
tions confidentielles dans des esprits au secret. la plupart d’entre eux étant trop lointains ou trop déplai-
Savoir si une interaction donnée est le fruit de l’imagi- sants pour qu’on les évoque. Les moins infâmes de ces
nation ou un véritable échange par-delà le voile fascine les infâmes créatures se nomment les mazoku : des démons
groupes florissants de marcheurs oniriques, qui mettent en a er i e d’ a- e de e i de n er ain-
pratique le rêve lucide et des techniques divinatoires pour si qu’au fonctionnement juste et efficace des enfers. Les
explorer de plus en plus profondément la voie des rêves. textes sacrés les présentent comme des humains à la peau
Bien que l’intérêt pour ce sujet grandisse, les adeptes les bleue ou rouge, pourvus de cornes, de griffes et de dents
plus accomplis (les tisseurs de rêves de la famille Kaikoga du acérées. Les mazoku servent le cycle de la réincarnation en
lan de la hal ne) ar en en le e-d de i de i le tant que geôliers, tortionnaires, gardiens de prison, juges,
De manière assez inquiétante, depuis que ce passe- scribes, messagers, concierges, entre autres rôles… S’ils
temps s’est développé, le voile entre le royaume des rêves et s’acquittent honorablement de leur tâche et rejettent la sau-
le ingen-d ’e e il h e hi ire d e e r de vagerie somme toute inhérente à leurs activités, ils peuvent
yōkai n a e-d e le baku à la longue trompe espérer renaître en tant qu’animal ou humain.
qui torturent les âmes endormies ou combattent leurs cau-
chemars, se sont multipliées, en particulier celles évoquant
de sinistres baku qui rejoignent le monde de l’éveil pour tour-
Le Jigoku
menter les innocents. Ces racontars inquiètent fortement les D’anciens documents et des textes religieux apocryphes
Kaikoga, qui pourraient bien être les seuls capables de répa- affirment que le labyrinthe de tortures et de tourments
rer les dégâts provoqués par des amateurs imprudents. qu’on appelle le Jigoku était autrefois un lieu de réhabili-
tation plutôt que de damnation, où les âmes étaient lavées

au-dessous de leur infamie en vue d’un nouveau départ. Mais Fu Leng


et le Jigoku ont attisé les pires tendances de l’autre, et les
Dans les profondeurs du sol qu’arpente le peuple de Roku- prisonniers ont conquis les geôles : le royaume n’est plus
gan, enfouis sous les cryptes dans lesquelles il dépose les un pénitencier, mais une forteresse.
cendres de ses morts vénérés, sous les mines desquelles il
extrait le minerai de la terre, sous le fond de la mer et sous
la lave qui bouillonne encore en deçà, plus profondément
qu’on n’a jamais creusé, se trouvent les enfers : anciens,
bien plus vieux que la civilisation humaine, et suffisam-
ment archaïques pour que tout le monde se questionne
sur ce qui s’y passait avant, mais pour que personne ne
connaisse la vérité. Les enfers sont composés de plu-
sieurs strates, des régions empilées les unes sur les
autres tels les étages d’un bâtiment en ruines ou
les pages d’un livre en décomposition.
Une âme accablée par le karma au
terme d’une vie égoïste et dévoyée
subit une réincarnation en tant que
démon et se retrouve bannie dans
un royaume de cruauté et de
douleur. Les démons doivent
lutter pour rester vertueux
malgré de tels traitements
s’ils espèrent renaître dans
de meilleures conditions.
C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

Techniquement, le Jigoku comprend la totalité des tant qu’animal. Les gaki se retrouvent donc dans les vastes
enfers actuels, mais dans le langage courant, le terme ne quartiers pauvres souterrains qui entourent les austères et
d igne a le r i e e r r le el r gne a- superbes citadelles, portes et bâtiments administratifs du
il décrit plutôt les innombrables strates de malheur infé- Meido, avec lesquels ils contrastent grandement. La taille
rieures, abandonnées à jamais à Fu Leng, à ses lieute- de ha e ir n ri i n e ne d a i-d a i-
nants oni et aux esprits maléfiques nés pour le servir. Ces sine celle d’une province de Rokugan, et des magistrats
oubliettes sont l’ignoble pays du mal à l’état brut, où et gardes mazoku sont à leur tête. La météo n’y est jamais
les oni préparent leurs plans pour ébranler le monde qui clémente. L’air fétide sent le renfermé. Les gaki vivent, tra-
les surplombe et pour le consumer par la corruption et vaillent, mangent, se battent les uns contre les autres et
le vice. Peut-être qu’un jour, des héros aussi grands que périssent dans ces faubourgs misérables.
Shinsei et les Sept Tonnerres s’aventureront dans ces pro- a- ne l’ad e a de nne gr e ai la
fondeurs que même les dieux craignent d’arpenter, afin de aille d a i-d d a e le en e ad ini ra-
les arracher aux griffes des démons et de les transformer tives de ses mazoku. En fait, s’échapper de ce royaume
en un lieu d’ordre, de justice et de réhabilitation. Pour l’ins- est bien trop aisé. Les frontières de certaines circonscrip-
tant, personne ne s’est porté volontaire. tions semblent se confondre et fusionner avec certains
de ire endr i d ingen-d de e ne
Le Meido des sites de batailles ou de massacres, des temples pro-
fanés, des contrées sauvages corrompues et les quartiers
Tous les défunts rokugani passent d’abord par le Meido, les plus déshérités des grandes villes. On raconte souvent
avant leur éventuelle réincarnation. Cette région tran- qu’un voyageur qui s’enfonce trop dans le secteur le plus
i ire e le i ge d ir d’ a- r ne de la corrompu d’une immense ville peut finir par atteindre le
mort et juge des défunts. Là, les âmes des morts attendent a i-d Se l le rage e la han e i en n el al-
en ligne qu’on les compte, les enregistre, les juge et leur heureux d’être abordé par les gaki avant de trouver un
attribue une réincarnation en adéquation avec leur karma. magistrat démoniaque prêt à l’écouter. Bien que certains
a- r ide e e r d re l’aide de e ne spectres locaux se montrent suffisamment malins et géné-
i de n er Shin S S ai an enj ai en reux pour indiquer une échappatoire à un voyageur per-
hi d e enrin n r i n j ge rd nn li du (le plus souvent en échange de quelque chose), la plu-
le karma de l’âme et lui attribue une réincarnation sous part d’entre eux sont consumés par une faim terrible, et
une forme et dans un royaume qui sied à ses exploits et les vivants leur mettent particulièrement l’eau à la bouche.
à ses défauts. Les mazoku (gardes, scribes, juges, assis-
tants, huissiers et concierges) facilitent la procédure, dans
l’espoir de gagner le droit à une meilleure réincarnation
Le Tōshigoku
grâce à leurs loyaux services dans l’un des pires métiers l’ rigine a- r a le hig le r a e d
de l’univers. massacre, pour en faire une division spéciale affectée à la
Cependant, tout comme les humains, les mazoku réhabilitation des trop nombreux Rokugani tués dans des
peuvent dévier du droit chemin. Les agents de Fu Leng, guerres injustes et futiles. Il vida une zone particulièrement
ainsi que son influence, se cachent partout, même au i ra le d a i-d n r i i n h ea e n a
Meido, et promettent pouvoir et faveurs aux mazoku l’ n de a le l en ( j i le an e
faibles à condition qu’ils influencent le sort de certaines de l’impermanence) à la tête de la légion qui y stationna
âmes : un grand héros pourrait tout bonnement se retrou- et dont les rangs grossissaient rapidement grâce aux âmes
ver expédié au Jigoku, ou une méprise dans la paperasse qui mouraient de violence inutile.
pourrait entraîner la réincarnation d’un scélérat dévoué à l’in d’ a- la er idie in de j i
Fu Leng en un samouraï important, plutôt qu’en un fan- Fu Leng envoya d’astucieux oni se faufiler entre les fron-
tôme affamé. Dénicher et punir ces êtres corrompus rend i re er a le d a i-d a in d’in il rer le h ea d
le ra ail d’ a- en re l re an hig e d’enle er j i ni e r i a ri n
apparence règne maintenant à la place de ce dernier et
Le Gaki-dō adre e de a ra r a- ide en el i- i
est bien trop occupé pour venir contrôler celui qui semble
On appelle gaki une âme totalement consumée par le re n ini re l al e a j i n ni adi e
d ir i rena a a i-d ien ’ n rad i e ar i en eigne r en a ha i an d hig de a -
le terme par l’expression « fantôme affamé », un gaki n’est tiques et des arts martiaux toujours plus brutaux. Pendant
pas à proprement parler un spectre qui n’aurait pas réussi à ce temps, les sbires de Fu Leng cherchent les plus impi-
atteindre l’au-delà : tous les gaki sont passés par le Meido a le g errier d ingen-d e le ani len r
et y ont été jugés… décevants. Médiocres. En dessous de qu’ils laissent parler leur soif de sang, s’adonnent à des car-
la moyenne. Les méfaits d’un gaki ne sont ni assez violents nage e ien en i e en a hig e e
r ri er le hig le r a e d a a re ni torturées ne se rendent pas vraiment compte qu’elles s’en-
assez vils ou maléfiques pour valoir le Jigoku. Mais un gaki traînent pour servir de troupes d’élite à Fu Leng quand il
ne s’est pas non plus assez bien comporté pour renaître en lan era en in n en i e r ha er a-

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CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

l’adoration des morts le kami


Bien que tous les ancêtres ne montent pas au Yomi pour
veiller sur leur famille, la piété filiale veut que leurs des- À l’insu des citoyens de Rokugan, un autre Kami
cendants les honorent tous (à l’exception des pires d’entre réside au Meido : Ryoshun, le premier enfant
eux) comme si c’était le cas. Chaque famille, même chez qu’Onnotangu a dévoré et le seul qui soit mort
les paysans, entretient un petit autel pourvu de plaques avant qu’Hantei ne parvienne à le délivrer.
et de statues pour commémorer ses chers défunts. Les and a- de endi a en er r en-
maisons riches possèdent parfois une niche creusée dans ter de reprendre le Jigoku à Fu Leng et à ses
un mur, voire une salle entière, destinée à abriter l’au- démons, il y trouva Ryoshun, qui attendait. À pré-
tel des ancêtres. Dans d’autres demeures, il occupe une sent, Ryoshun supervise la défense de la frontière
place d’honneur dans une pièce principale. Même les entre le Jigoku et les autres niveaux, mais les oni
rares Rokugani qui ne s’intéressent ni à Shinsei ni aux au service de Fu Leng voient dans le dixième
kamis érigent un tel autel, pour apaiser les morts en s’in- Kami un formidable allié potentiel, pour peu
clinant, en tapant dans leurs mains et en récitant prières et qu’ils réussissent à le retourner contre les Cieux.
mantras. Ils y laissent aussi des offrandes d’encens, ainsi
que du riz dans lequel ils ont planté des baguettes à la ver-
ticale… la seule occasion où il pourrait venir à l’idée d’un
Rokugani de planter ses baguettes dans quelque chose. Un Rokugani n’évoque que rarement les ancêtres
Ces autels ne remplacent pas les cimetières, ils les de son interlocuteur, à moins d’en être particulièrement
complètent. À l’heure actuelle, peu de tertres funéraires proche. Cette coutume se veut non seulement pragma-
sont construits, mais certains de ces sites anciens (parfois tique (mentionner soudainement la grand-mère défunte
petits, parfois de véritables mausolées élaborés, emplis de et adorée d’un ami peut le plonger dans une profonde
présents funéraires en argile et entourés de douves) par- mélancolie), mais aussi philosophique : qui parmi les
sèment encore le paysage. Les résidents actuels des terres vivants peut prétendre à la sagesse des aînés disparus ?
en prennent grand soin, même si les descendants ne se Cette courtoisie s’applique également aux ennemis.
souviennent pas des occupants de ces tombes. Toute critique revenant à clamer « vous faites honte à vos
Depuis le décret impérial qui rend la crémation obli- sorei » donne une plus mauvaise image de l’orateur que de
gatoire, les cendres sont souvent enterrées dans un cime- son interlocuteur, et fait même encourir la désapprobation
tière, sous un bloc de pierre où sont gravés le nom du de ses propres ancêtres à l’auteur de la calomnie.
défunt et parfois un poème sur la mort. Les familles se
rendent de temps en temps à la dernière demeure de
leurs ancêtres afin de l’entretenir et de se laisser aller au
souvenir, en particulier au cours du festival Bon, qui a lieu
tous les ans.
Les cimetières accueillent parfois des statues. Cepen-
dant, elles ne représentent pas les disparus, mais les for-
tunes ou des figures shinséistes glorifiées, notamment
la r ne i en e ar en er le en er a in de
réconforter les défunts. Les familles décorent
ar i le a e de i l’aide de e-
ments, de bijoux ou de jouets, pour
honorer les enfants morts prématu-
r en i e i e n aga-
bond, il est aussi le saint patron
des voyageurs, pour lesquels il
est représenté dans de nom-
breux petits sanctuaires en
bord de route.
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Les kamis et les fortunes


sombre et à la chevelure noire et humide. Elle chevauche
un dragon à cinq têtes, son symbole est le biwa et son lieu
sacré le lit d’une rivière. Benten est particulièrement popu-
Une fortune est un puissant kami qui gouverne un concept laire chez les jeunes samouraïs qui n’ont pas encore pas-
de l’univers plutôt qu’un lieu ou un aspect de la nature : la sé leur gempuku : au plus fort de leur éducation, accablés
force, les chats, l’artisanat, etc. L’appellation « fortune » est de poésie à retenir et de calligraphie à pratiquer, ces ado-
une contraction du titre complet, que l’on peut traduire lescents et adolescentes sentent leur cœur battre la cha-
par « dieu de la fortune » ou « dieu chanceux ». Les for- made pour certains de leurs camarades. Les dramaturges,
tunes, tout comme les autres kamis, veillent sur Rokugan acteurs, marionnettistes et autres artistes vénèrent Benten
et son peuple depuis l’aube des temps. comme leur sainte patronne.
Cependant, l’introduction du shinséisme a changé la
façon dont la plupart des habitants conceptualisent les for- Bishamon
tunes. Par décret impérial, le Tao de Shinsei et la recherche
de l’Illumination sont devenus la loi suprême pour les kamis Bishamon, Fortune de la force, apparaît vêtu d’une armure
comme pour les humains. Les fortunes gardent leur impor- archaïque. Il porte une hallebarde massive dans une main
tance, mais en tant que parangons de sagesse et de pra- et un temple shinséiste enrubanné de sutras dans l’autre.
tiques shinséistes. Néanmoins, les festivals, les rituels et Même si les plus cyniques des Rokugani se demandent
les autres traditions mises en place pour les apaiser et les parfois ce que Shinsei représente vraiment pour les for-
honorer ont relativement peu changé au cours des millé- tunes et leurs dévoués serviteurs, Bishamon est réputé
naires. De plus, l’Empire d’Émeraude est une vaste contrée, pour son étude honnête et assidue de la doctrine du Petit
et la légitimité des décrets concernant le shinséisme est Maître. Bien qu’il se présente à la plupart des personnes
qu’il rencontre comme un guerrier en armure, il prend à
plus ou moins reconnue en fonction des régions. Le culte
l’occasion l’apparence d’un prêtre shinséiste itinérant, por-
des fortunes et celui des ancêtres (et d’autres traditions plus
tant un sac à dos empli de lourds tomes et d’épais rou-
anciennes ou ésotériques) restent les principales religions
leaux. On le dépeint toujours avec un grand sourire, qui
pour de nombreux Rokugani.
symbolise la joie et la satisfaction résultant d’un équilibre
Les fortunes passent leur temps entre le royaume Céleste
entre la forme physique et la sagesse contemplative.
e le ingen-d e i le r rea e le r i en e
demeures au Tengoku, elles surveillent tout Rokugan. Quand
arrive l’heure de s’impliquer plus activement dans les affaires Daikoku
erre re elle de enden a ingen-d en a an ar de
Daikoku, Fortune de la richesse, personnifie la contradic-
lieux sacrés qui leur sont dédiés, comme des sanctuaires ou
tion : il est joyeux et enjoué, pourvu de lobes d’oreille
des régions qui incarnent leur domaine de prédilection. À
charnus (signe de bonne fortune), mais sa peau n’en est
l’instar des autres kamis, les fortunes résident en général sur
pas moins couverte de cendres funéraires. Des pièces d’or
terre dans des éléments naturels, géographiques ou manu-
pleuvent de son grand maillet de bois à chaque coup, mais
facturés, alors appelés shintai. Ces derniers sont souvent la
l’association de Daikoku à la mort et aux cimetières rap-
composante centrale de nombreux sanctuaires.
pelle aux Rokugani qu’ils n’emporteront pas leur fortune
La tradition populaire affirme que les fortunes peuvent
au Meido. On le représente assis sur plusieurs balles de
choisir une forme humaine en guise de shintai. Les histoires
riz pour symboliser la richesse et l’abondance, mais un
mythiques de diverses fortunes décrivent leur vie d’homme
groupe de rats affamés grignotent ces paquets pour nous
ou de femme, que ce soit à Rokugan ou dans une quel-
rappeler que la fortune ne signifie rien si elle n’est ni inves-
conque contrée occidentale, avant qu’ils n’aient accédé à
tie ni défendue. Les marchands et les fermiers constituent
leur statut divin. Un acte d’excellence suprême leur a per-
les plus dévoués des adorateurs de Daikoku. Les moines
mis de s’élever et de devenir des fortunes, une bénédiction
qui le servent expliquent souvent aux samouraïs de bonne
que les humains actuels peuvent toujours obtenir grâce à
naissance qu’ils ne doivent pas considérer leur richesse
des faits héroïques ou une vertu légendaire. De nos jours,
comme acquise : bien que l’argent ne puisse pas acheter
les Rokugani qui accordent du crédit à ces histoires sont
le bonheur, manquer de liquidités, de nourriture ou d’abri,
peu nombreux, les chances de tomber sur une fortune sous
mène au bout du compte au chagrin.
forme humaine étant assez faibles.

les huit fortunes Ebisu


majeures Ebisu, Fortune du travail honnête, est bon ami avec Dai-
koku, bien qu’il soit plus versatile que ce dernier. Il nous
Ces fortunes sont les plus révérées de tout Rokugan. enseigne que la chance sourit surtout aux personnes qui
travaillent dur. Ebisu est pêcheur itinérant, représentant
Benten ainsi le plus vieux métier de Rokugan, qui a nourri les
humains avant qu’ils n’apprennent à cultiver et moissonner
Benten est la Fortune des arts et de l’amour romantique, le grain. Il porte des vêtements archaïques, ainsi qu’une
qui apparaît sous les traits d’une femme élégante à la peau canne à pêche et un gros poisson qu’il vient d’attraper. Les

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CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

pêcheurs qui trouvent une pierre au milieu des prises de écouter, une expression béate sur le visage, Shinsei expo-
leurs filets la vénèrent en lui offrant de la nourriture et des ser les principes de la Voie. Il sortit ensuite avec le Petit
boissons, car la légende raconte que cette pierre est en Maître et Shiba.
fait Ebisu déguisé. Quand les trois hommes se séparèrent devant le palais,
Ebisu est la seule Fortune majeure à ne pas posséder le vieux moine remarqua un petit garçon qui jouait à proxi-
de shintai dans ses sanctuaires : on y trouve des icônes mité. Il tira alors du sac qu’il portait une balle de kemari
le représentant, mais il n’y vit pas, car il préfère résider trop grande pour y tenir et l’envoya d’un coup de pied à
dans la mer sous la forme d’une baleine. Bien que des shu- l’enfant, qui l’attrapa, puis le remercia avant de partir en
genja vénèrent Ebisu, il ne leur parle pas, et comme il est courant. À ce moment, ceux qui observaient la scène com-
dur d’oreille, on ne l’implore pas avec des prières à voix prirent que le vieux moine n’était autre que Hotei, dégui-
haute, mais plutôt en tapant dans ses mains et en faisant sé en humain. Quand ils demandèrent à Shinsei s’il le
tintinnabuler des cloches. Les moines d’Ebisu, même s’ils connaissait, celui-ci répondit : « Non, mais quelque chose
montrent un respect de façade pour le shinséisme, sont en lui semblait familier. J’ai le sentiment que je le reverrai. »
les moins orthodoxes des shinséistes dans leurs pratiques L’ordre des moines de Hotei fut le premier ordre du culte
et leurs traditions. des fortunes à voir le jour, bien avant que l’Empereur ne
fusionne cette religion avec le shinséisme.
Fukurokujin
Fukurokujin est la Fortune de la sagesse. Selon la légende
Jurōjin
populaire (à ne pas confondre avec certaines croyances et r jin r ne de la l ng i e nh e in e e
pratiques du Clan du Phénix), il aurait été autrefois un mor- âgé, aussi vieux que les étoiles. Il vit dans une constellation
tel parvenu à maîtriser la Voie : il aurait appris à se nourrir qui lui ressemble, dans le ciel austral. Comme Fukuroku-
du souffle de l’univers plutôt que d’aliments et de boissons jin, il s’appuie sur un bâton, et est accompagné d’un cerf,
et a fini par s’élever à son poste divin. Les artistes martiaux d’une tortue ou d’une grue, mais il est très mince alors que
le vénèrent souvent : il incarne la sagesse qu’ils cherchent la r ne de la age e e r e r jin e le a r n
à atteindre par leur démarche combative. des arts visuels : tous les moines qui le révèrent sont des
On le représente sous les traits d’un vieil homme, artistes appliqués qui produisent de splendides peintures,
robuste et de petite taille, au long front, appuyé sur un écrans et sculptures de toutes tailles, dont la vente à de
grand bâton et tenant un livre savant. Il est toujours accom- riches mécènes entretient confortablement les monastères
pagné d’une tortue, d’une grue ou d’un cerf noir, voire de de l’ordre.
plusieurs d’entre eux. Son symbole sacré est l’aiguille, et
ses fidèles les plus dévoués sont les tailleurs. On raconte
que Fukurokujin sait ramener les morts à la vie, mais qu’il Kisshōten
ne se sert jamais de cette connaissance ni ne l’enseigne, i h en e la r ne de la j ie de la er ili e de la
de peur de la voir utilisée pour de mauvaises raisons. beauté. En fonction des régions et des époques, elle rem-
la e ar i r jin r jin a e de ga-
Hotei ni i h en e r r e ar le e e le r ari
(hommes comme femmes), les futurs parents et les fidèles
Hotei, Fortune du contentement, ressemble à Daikoku sur qui désirent obtenir beauté ou chance. Son culte est plus
bien des points : il est tout aussi enjoué et rondelet, et il prononcé dans les clans ou dans les familles fondés par
possède de grands lobes d’oreille. Mais contrairement à ne e e e le a le a la dai
Daikoku, il n’est pas recouvert de cendres funéraires. Son risquant de mourir en couches, ses suivants ont tendance
symbole sacré est un sac (un hōtei) empli de jouets et de
à prier la Fortune la plus susceptible de lui venir en aide.
cadeaux qu’il offre aux enfants méritants. Sans surprise, il
e e l’ad ra i n de i h en e d el e dan le
est l’une des fortunes les plus populaires et les plus appré-
régions où les enfants revêtent une grande importance
ciées. De plus, il serait la seule fortune à avoir rencontré
(par exemple, les terres du Clan du Dragon, compte tenu
Shinsei en personne.
de leur démographie).
La légende raconte qu’avant que quiconque connaisse
i h en e en re r en e dan ne en e
Shinsei, un moine âgé et excentrique serait arrivé au palais
rose, dorée ou rouge, debout dans une fleur de lotus.
impérial, et serait entré directement dans la salle du trône
Son objet sacré est le chintamani, qu’elle tient en main :
pour s’asseoir dans un coin et méditer en silence. D’un
cette gemme en forme de pêche est réputée pour exau-
geste, l’Empereur ordonna de s’éloigner aux gardes hési-
cer les souhaits.
tants qui s’apprêtaient à arrêter le vieil homme. Hantei en

les autres fortunes


personne lui apporta des légumes et du thé chaque jour,
tout en l’ignorant le reste du temps. Lorsque Shinsei arri-
va enfin, le moine se leva pour accueillir le Petit Maître.
Les deux hommes s’inclinèrent et se sourirent comme
populaires
deux vieux amis. Ils tinrent une brève conversation pri- Les habitants de Rokugan vénèrent bien d’autres fortunes,
vée avant que le moine ne s’assoie tranquillement pour mais à un moindre degré que les Fortunes majeures.

141
C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

Emma-Ō enfers est une fortune extrêmement lasse. Son visage est
renfrogné et rouge, et sa bouche est hérissée de crocs et
a- a rai le re ier h ain rir Se l il i - de défenses. Il porte un chapeau orné, au niveau du front,
ta la terre des vivants pour descendre dans les enfers du d’un idéogramme signifiant « roi », et il tient toujours une
Yomi (car à l’époque, le Yomi et non le Jigoku composait les vieille planche sur laquelle il accroche le dossier du karma
enfers). Il devint la fortune de la mort et le juge des défunts, de l’âme avant de la juger pour sa réincarnation (ou de délé-
et régna avec équité et justice. Certaines histoires racontent guer cette décision à l’un des juges sous ses ordres).
’ a- n r i i l i- e le in alla i n de en er Des prêtres le révèrent, mais il reçoit peu de prières :
Selon d’autres légendes, lorsqu’il découvrit les lieux, les on estime en général que celles-ci le dérangent, car il est
bâtiments, demeures et palais y figuraient déjà, bien qu’il tellement surchargé de travail qu’il ne pourra jamais les
ait été le premier sur place… comme c’est curieux ! traiter, et elles ne feront que s’empiler sur son bureau.
Après que le Yomi et ses sorei furent montés aux Cieux, a- ’ era de re ri re l ard e n
a- n ia e de ir a die d iel e rede endi adage qualifiant les efforts « considérables, mais vains »
r re n rir le eid e le a i-d el n l i i er- d’un Rokugani. Les fonctionnaires et les administrateurs
sonne ne restait aux enfers pour les administrer, Fu Leng la en en de i age re r en an a- dan
l’emporterait. Il a eu raison, mais quiconque lève les yeux leur cabinet : son terrifiant visage y fait office de rempart
r a- ne rra e n der e le eigne r de contre la corruption et l’inefficacité.

des références au monde réel


Comme vous le savez peut-être déjà, de nombreux d’interpréter le débat. Il évitera ainsi de donner l’im-
kamis et fortunes présentés dans L5A ne sont pas pression de dénoncer ou critiquer les croyances de
qu’inspirés de figures religieuses réelles : la plu- quelqu’un.
part sont de véritables figures religieuses, vénérées De même, quand des personnages prient ou
par des personnes tout aussi réelles. Quelles que scandent des mantras, veillez à les décrire à la troi-
soient vos opinions sur l’importance de Benten, de sième personne au lieu de prier ou de psalmodier
Hachiman et des autres fortunes dans la vraie vie, cer- à voix haute. Par exemple, un joueur dit « Hiruma
taines de ces divinités peuvent constituer un objet de Taro salue la sagesse de Benten et lui demande de
culte pour les autres joueurs, sans parler des passants bénir sa représentation lors de la prochaine produc-
qui ne connaissent pas le contexte de votre conver- tion théâtrale ». Ainsi, vous évitez de donner l’impres-
sation ludique. Vous pourrez ainsi rencontrer des per- sion que vous psalmodiez réellement une prière ou
sonnes qui vénèrent les fortunes, ou dont les proches un mantra, ce que certaines religions dissuadent ou
sont croyants, ou encore qui se sentiront gênées à interdisent en dehors de situations particulières, et
l’idée d’utiliser une pratique religieuse réelle dans le notamment pour les non-pratiquants.
but de s’amuser ou d’éprouver des sensations fortes. Les joueurs et les MJ effectuent souvent quelques
Ces personnes peuvent, ou non, se sentir suffisam- recherches sur les cultures asiatiques pour enrichir
ment à l’aise pour vous exprimer leur gêne. leur jeu. Bien que le Japon ait reçu de nombreuses
Vos intentions sont peut-être louables. Vos mots influences d’Inde, de Chine et de Corée, prenez garde
et vos actes peuvent s’avérer parfaitement logiques au mélange des cultures : veillez à ne pas confondre
dans le contexte de votre jeu. Mais ces circonstances les marqueurs de traditions et de régions distinctes.
n’empêchent pas de blesser des personnes réelles, Par exemple, des détails d’Asie du Sud peuvent cor-
pas plus qu’elles ne l’excusent. Même si vous jouez respondre à Benten et à Daikoku, d’origine hindoue,
en privé, profitez de ces occasions pour parler avec mais pas à Hachiman et Ebisu, issus du Japon. Dans
courtoisie et compassion des divinités, ainsi que des le doute, puisez seulement dans la culture japonaise.
pratiques religieuses. Si votre jeu se déroule en costume, ne vous
Lorsque des PJ évoquent des sujets religieux avec déguisez pas en fortunes. Au lieu de cela, privilégiez
critique ou révérence, gardez un ton posé pour que des habits représentatifs plutôt qu’exacts : une tenue
personne ne puisse confondre les sentiments pas- sans ornement et peut-être un symbole. Ebisu peut
sionnés du personnage avec ceux du joueur ou de porter une canne à pêche, Benten un instrument à
la joueuse. Si un débat en jeu commence à s’enflam- rde e a- ne ri ire in e
mer, résumez les positions et attitudes des différents Suivre ces quelques conseils permet à la fois d’ho-
partis en utilisant un discours à la troisième personne norer votre propre expérience ludique et d’adapter
au lieu de lancer haut et fort des invectives et de cla- vos attitudes de jeu aux sensibilités rokugani (et japo-
mer votre scepticisme. Par exemple, le MJ annonce- naises) à l’égard du sacré. Merci de nous aider à ce
ra que « Sire Isawa dénonce la doctrine de la secte que les figures religieuses réelles incluses dans La
de la erre ar ai e andi e l’a e e de - Légende des Cinq Anneaux soient traitées avec res-
cend en flamme son argumentaire faussé » plutôt que pect et considérées comme des représentations.

142
CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

Hachiman comme s’il enlevait une trace sur un tissu.


Les services proposés dans un sanctuaire se révèlent
Hachiman, fortune des combats, est peut-être la fortune la inestimables pour les villages comme pour les villes. Ils
plus populaire au sein de la caste des samouraïs. Humain, incluent des activités de sage-femme et constituent sou-
il est né avec un gant de tir à l’arc sur la main. Les historiens vent le seul choix d’une bourgade en matière d’obsté-
en font le créateur du tir à l’arc monté. Encore aujourd’hui, trique. Le sanctuaire conserve dans des registres chaque
de nombreux archers murmurent une prière à son atten- naissance, et une carte stellaire de cet instant y est jointe.
tion lorsqu’ils tirent leur première flèche de la journée. Les Ces archives jouent un rôle essentiel pour les arrange-
moines de Hachiman conservent dans son plus grand sanc- ments maritaux, et les unions heureuses sont la plupart
tuaire une bibliothèque composée de lettres, de poèmes du temps dues au travail précis des serviteurs des lieux.
et de textes qu’il aurait lui-même écrits. Lus attentivement, Les oracles prononcés par les gardiens de sanctuaire four-
nombre d’entre eux semblent prédire l’arrivée de Shinsei nissent des informations essentielles, autant pour les mois-
des siècles plus tard. La rumeur affirme que, si une flotte sons du fermier que pour les conquêtes du général. Mais
d’invasion venue d’au-delà de Rokugan approchait des un sanctuaire est avant tout le lieu de résidence d’un kami,
côtes de l’Empire, Hachiman descendrait du Tengoku sous où il est possible de demander humblement à ses servi-
la forme d’une tornade, pour repousser l’envahisseur. teurs de partager sa sagesse.

Le sanctuaire de la vie les serviteurs


des esprits
Les sanctuaires représentent une part importante de la Le clergé de Rokugan occupe une place spéciale dans
vie de chaque Rokugani, indépendamment de son statut l’Ordre céleste. Il se positionne au-dessus de la caste des
social, de sa caste ou de sa profession. Les cérémonies qui heimin, mais ses membres sont généralement considérés
s’y déroulent assurent des récoltes saines, maintiennent les comme inférieurs aux buke et aux kuge. Les shugenja restent
maladies à distance et empêchent les catastrophes natu- l’exception, puisqu’ils sont samouraïs de naissance. Comme
relles. Les gardiens des sanctuaires assistent aux accouche- pour les autres castes, il existe un ordre précis pour les diffé-
ments, enregistrent les naissances et prédisent le but divin rents rangs sociaux du clergé. Le membre le plus important
de la vie de chaque nouveau-né. Après son cinquième anni- est l’Empereur en personne, chef de la religion shintao, et
versaire, l’enfant revient au sanctuaire pour y recevoir son par conséquent de tous les cultes. Après Hantei viennent les
nom d’enfant et être formellement présenté à ses ancêtres. shugenja, suivis par les prêtres. Les gardiens de sanctuaire
Les mariages et les funérailles se tiennent au sanctuaire. se trouvent au bas de l’échelle et font office de serviteurs
Lorsqu’un faux pas entache une âme, il est rare que le sanc- et de protecteurs religieux. Techniquement, les moines font
tuaire ne puisse pas la purifier. Ce dernier est l’essieu de aussi partie du clergé, mais pas de l’Ordre céleste.
la vie de chacun, et toutes les saisons tournent autour de La plupart des sanctuaires sont entretenus par un ou
cet espace sacré. Dans les sanctuaires, les Cieux touchent plusieurs gardiens. Bien que ces derniers soient au bas de
la terre, les prêtres déposent des offrandes sur l’autel et ils
l’échelle cléricale, ils n’en restent pas moins indispensables
éloignent les âmes des vivants des mâchoires avides des
pour cette tâche : grâce à eux, les terres sont propres et
esprits. Rokugan est la terre sur laquelle marchaient autre-
sanctifiées. Ils connaissent les rituels les plus simples, l’her-
fois les dieux, où chaque chose est la demeure d’une âme
boristerie, les arts divinatoires mineurs et un ensemble de
vivante. Chaque village, sans exception, dispose d’un sanc-
traditions populaires : le mikodo. De plus, ils sont en charge
tuaire sous une forme ou une autre, qu’il s’agisse d’un
de la protection du sanctuaire et maîtrisent donc certaines
immense complexe aux toits voûtés et aux gigantesques
disciplines de combat, comme l’arc et la naginata, une arme
salles bénies ou d’une simple statue grise qui scintille de la
d’hast. Les obligations martiales des gardiens de sanctuaire
faible lumière du kami qui l’habite.
impliquent qu’ils sont souvent issus des rangs des buke.
Ils sont, en général, nés dans des familles d’ashigaru ou
pourquoi visiter de jizamurai. Malgré tout, aucune origine n’est vraiment

un sanctuaire—? requise, et ils peuvent aussi appartenir aux bonge. Cette


fonction constitue alors un immense honneur, puisqu’il
La présence d’un sanctuaire à moins d’un jour de marche s’agit d’une des rares manières pour un enfant de fermier
d’une communauté s’avère une nécessité pratique, et non de s’élever dans l’Ordre céleste.
une option ésotérique. Sans sanctuaires, la nature serait Les prêtres sont les administrateurs et les principaux
déséquilibrée, les récoltes pourriraient, et les fortunes protecteurs d’un temple. Leur devoir consiste à organi-
mineures ne pourraient pas recevoir la dévotion du peuple. ser toutes les cérémonies nécessaires, à aider les visiteurs
La vie de tous les jours met les Rokugani en contact régu- dans leurs besoins spirituels et à offrir avis et conseils. Ils
lier avec des substances salissantes pour l’âme, véritables ne bénéficient pas de la même relation de proximité avec
aimants à malchance. Sans un sanctuaire, ces taches spi- les kamis que les shugenja, mais ils peuvent accorder des
rituelles s’accumuleraient et ouvriraient la porte à la tra- bénédictions simples et fournir des présages peu com-
gédie. En visitant ce lieu sacré, un fidèle nettoie son âme, plexes, ainsi qu’implorer à l’occasion les esprits grâce à

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C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

des rituels. Quelle que soit sa caste de naissance, toute


personne peut devenir prêtre, malgré quelques difficul- l’économie des
tés : un prêtre doit faire preuve non seulement de connais-
sances spirituelles acceptables, mais aussi d’un lien avec
sanctuaires
l’esprit qui vit au sanctuaire. À Rokugan, le commerce est considéré comme une activi-
Les shugenja sont les prêtres issus de la caste des té sale. Les préoccupations matérielles au sujet de l’argent
samouraïs. Seuls celles et ceux que les kamis ont étreints et des possessions entachent l’âme et enchaînent encore
peuvent prétendre à ce titre. Sensibles au monde invi- l l’indi id a ingen-d e i e r a le en
sible des esprits, ils peuvent sentir et influencer les kamis, inévitable pour les paysans. Cependant, on attend des
ainsi que communiquer avec les fortunes et les ancêtres. prêtres et des samouraïs qu’ils se placent au-dessus de
Les rituels d’un prêtre ne sont que l’ombre de ce dont est telles affaires. Il est donc gênant pour ces derniers que les
capable un shugenja. Les kamis n’étreignent qu’un samou- sanctuaires dépendent de financements extérieurs.
raï sur mille, et ce don rare doit être cultivé dès le plus Les prêtres ne peuvent pas s’adonner ouvertement au
jeune âge. Ce lien permet aux shugenja de détenir un commerce sans se couvrir de honte et risquer d’offenser
pouvoir considérable, puisqu’ils peuvent implorer directe- l’esprit du sanctuaire (en particulier s’il s’agit d’un ancêtre
ment les kamis et leur demander de se manifester d’in- béni) : ils se voient donc obligés de se montrer créatifs.
nombrables façons. Les shugenja ne se cantonnent pas Ils acceptent souvent les pièces en guise d’offrandes et
aux sanctuaires, à moins de le choisir. « empruntent » des matières premières supplémentaires en
fonction de leurs besoins. Les puits à souhait constituent

l’entretien des une autre source de revenus. Le personnel d’un sanctuaire


attend aussi une modeste donation en échange de ser-
sanctuaires vices d’importance (tels que les mariages), bien qu’il ne la
demande jamais directement.
Le concept de pureté spirituelle est au centre des croyances Les sanctuaires les plus importants bénéficient de la pro-
shintao. Tout ce qui existe accumule de la « saleté » spiri- tection de familles des clans majeurs. Par exemple, le sanc-
tuelle, et les sanctuaires ne font pas exception. Les prêtres tuaire de Hotei est financé par la famille Bayushi, qui paye
et les gardiens de sanctuaire doivent donc sans cesse toutes ses dépenses. Chacune des parties tire profit de
rénover les lieux qu’ils protègent. Un sanctuaire est ainsi cette relation : les sanctuaires fournissent des services ines-
constamment nettoyé, réparé et reconstruit. Les glyphes, timables aux samouraïs des clans, et les clans font montre
les cordes de bénédiction et les icônes sont régulièrement de piété en faisant don de larges sommes aux fortunes.
remplacés, et l’esprit du sanctuaire est relâché au moins « L’entraînement des sainenshō » (ce qui signifie « les plus
une fois par an pour que les gardiens nettoient son shintai. jeunes ») constitue une autre source de revenus tradition-
Même les zones en parfait état sont démontées et recons- nelle. Il est de coutume au sein d’une frange de la noblesse
truites. Certains sanctuaires vont même jusqu’à bâtir une d’envoyer son dernier héritier recevoir une formation de
réplique grandeur nature où déplacer leurs activités, prêtre et de verser une somme d’argent pour couvrir les
démantelant ensuite l’ancien lieu grâce à un rite.
Cet entretien constant crée une forte demande en
matériaux, et les sanctuaires sont donc plutôt onéreux.
Certains des clans ruraux les plus pauvres, tels que ceux
du Moineau ou du Lièvre, doivent se contenter de sanc-
tuaires miniatures, des hokora, qui ressemblent un
peu à des maisons de poupée en pierre.
CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

dépenses. Comme le montant est déterminé par le sanc- À l’heure de la Chèvre, une autre visiteuse interrompt
tuaire (et accepté sans hésitation), de nombreux lieux saints le ra ail ad ini ra i de ji a i hai e aire
sont en compétition pour accueillir des étudiants. Un seul bénir son nouveau sabre. Pendant que quelques gardiens
héritier samouraï peut apporter suffisamment de ressources du sanctuaire se préparent à oindre la lame avec les eaux
à un sanctuaire pour financer celui-ci pendant des années. du lac Kanawa, la Matsu attend dans la salle de prière,
où elle révère ses ancêtres. Une fois que le rituel est ter-
le sanctuaire au miné et qu’elle a repris son sabre, la Matsu reconnais-

jour le jour an e lie ne e i e ile de i e en ar an


ramasse et la dépose dans le tronc du sanctuaire.
ji la

La section suivante présente une journée typique au sanc- Pendant ce temps, un étudiant du dojo d’Ukabu Mura
tuaire de Mezameta, situé en banlieue de la ville d’Ukabu est arrivé : après s’être purifié, il fixe sur une branche du
Mura, le Village Flottant. Y vit le kami du lac Kanawa tout prunier du sanctuaire une bande de papier sur laquelle
proche, qui alimente la rivière du Marchand noyé. Selon la il a transcrit son souhait : un vœu romantique. Il dépose
légende, Shinsei but un jour à la cascade voisine et éveil- ensuite une offrande et quitte les lieux.
la l’esprit de ces eaux. Malgré l’importance du sanctuaire Le quartier libre des gardiens du sanctuaire commence
pour la ville en pleine expansion, il reste relativement petit à l’heure du Singe. Ils s’entraînent au tir à l’arc, pratiquent
et n’emploie qu’un prêtre et quelques gardiens. des jeux de poésie ou étudient les textes sacrés du sanc-
ji le r re d an aire e r eille l’he re d i re tuaire. Kokka lit les vœux accumulés sur le prunier au fil de
et médite pendant une demi-heure. Les gardiens balaient déjà la semaine. Elle les retire à la fin de l’heure.
les marches extérieures, nettoient le sanctuaire et remplissent Agasha Kiori est arrêtée à la porte : elle essaie d’em-
les bassins de purification d’eau bénite. À l’heure du Dragon, porter un objet sacré. Le prêtre lui demande prudemment
le prêtre réveille le kami en jouant du shakuhachi, une sorte de
de le laisser ici, tout en sachant qu’il ne pourra pas faire
flûte en bambou, et lui offre des gâteaux de riz. Chaque jour
grand-chose si elle refuse. Heureusement, elle accepte,
correspond à une cérémonie différente. Aujourd’hui, une fois
mais annonce qu’elle doit continuer sa communion : elle
e ji e n ain e l’e ri a a e n rande il
restera donc toute la nuit. Le prêtre s’y résout : c’est la
lui demande d’aider les fermiers à semer le riz.
meilleure issue possible pour cette situation. Quant aux
Les portes du sanctuaire ouvrent aux visiteurs à l’heure
gardiens, ils grommellent en leur for intérieur : en plus d’un
du Serpent. Le prêtre attribue les missions quotidiennes :
sanctuaire, ils gèrent un hôtel, à présent.
aujourd’hui, il faut accueillir les visiteurs et confectionner
des breloques pour un festival à venir. Agasha Kiori arrive. Le soleil approche de l’horizon à l’heure du Coq, et le
Après s’être purifiée et avoir fait ses offrandes, elle souhaite an aire er e e re ji j e d ha ha hi r
utiliser les jardins du sanctuaire. En raison de sa caste et rappeler le kami au sanctuaire. C’est au tour de Kokka de
de son statut de shugenja, elle peut obtenir tout ce qu’elle aire l’ rande d ir A a era lle i re i nne ji ar
demande, et les gardiens ne s’y opposent donc pas. le choix de son chant, et il note dans sa tête de veiller person-
Une demi-heure plus tard, Kokka, la gardienne du nellement à son éducation de prêtresse. Après quoi, on brûle
sanctuaire, se réveille enfin. La cinquième enfant d’un sei- les vœux du prunier pour qu’ils s’élèvent jusqu’aux fortunes.
gneur Asako se trouve ici pour accomplir un devoir fami- Les gardiens dînent, se lavent, puis déterminent à la
lial. Son manque de discipline lui vaut de recevoir une r e aille i rendra le re ier ar ji er ine a
he ingra e la r e de le i e ji ai e lan de journée par des recherches dans les textes sacrés et par
ne pas l’entendre se plaindre à voix basse. une méditation sur les événements du jour.
À l’heure du Cheval, le prêtre prend son premier repas

Les pratiques religieuses


de la journée. Trente minutes plus tard, Miya Boshin, fils du
gouverneur local, arrive pour sa leçon du jour. Comme le
père du jeune samouraï s’acquitte de contributions régu-
li re a n i nne en d an aire ji ’ e er-
Bien que l’intégralité du culte des fortunes fasse officiel-
sonnellement de son éducation spirituelle.
lement partie de la religion shintaoïste, les pratiques qui
Un ronin se présente, mais il est arrêté à la porte. Il a
le constituent varient grandement d’un bout à l’autre de
récemment mangé un ragoût épicé et ne peut donc pas
l’Empire : des centaines de traditions locales forment un
entrer, car le plat a déséquilibré son Feu interne et l’homme
pourrait offenser le kami du sanctuaire. L’altercation qui s’en- ensemble unifié par sa mythologie et par un accord général
i lige ji in err re la le n de hin r ’ - sur des croyances fondamentales. Chaque clan possède ses
cuper du ronin en colère. Très vite, le vacarme attire l’atten- propres variantes, et les variations régionales dépendent
tion d’Agasha Kiori, qui approche du ronin et lui murmure des esprits locaux et des traditions populaires. Les débats
à l’oreille. L’homme pâlit, présente ses excuses et quitte les entre écoles de shugenja ne sont pas rares, et la compré-
lieux. Kiori demande ensuite à accéder au sanctuaire inté- hension mortelle des forces cosmiques ne cesse d’évoluer.
rie r ne re e ’a rde l n ier ji re nnai an Pourtant, même si deux régions mitoyennes ne partagent
Le reste de la leçon de Boshin se déroule sans plus de désa- pas la même interprétation religieuse, il existe des pratiques
gréments, et le jeune homme part à la fin de l’heure. de base communes à tous au sein de l’Empire.

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C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

approcher le divin accepte une confidence écrite sur un bout de papier plié et
brûlé à l’autel, tandis que Sadahako, fortune des artistes,
Chaque esprit d’un sanctuaire se doit d’être approché et préfère une offrande de fond de teint. Les kamis acceptent
vénéré de la manière qu’il préfère. Connaître chaque for- souvent n’importe quelle offrande qui correspond à leur
tune et chaque esprit est impossible : après tout, elles sont élément, comme du saké, de l’encens, des herbes sacrées,
un millier, et ils sont mille fois plus nombreux. Les gardiens des chandelles, du sel, du riz ou du poisson en conserve.
de sanctuaire et les prêtres assistent les visiteurs afin qu’ils Il faut toujours déposer une offrande en s’inclinant à deux
contactent l’esprit sans l’offenser. De plus, il existe des reprises : la première pour montrer son respect, la seconde
comportements généraux suffisamment fiables pour être pour prouver la sincérité de la première.
adoptés en tout temps. Le pèlerin doit ensuite attirer l’attention de l’esprit.
Avant d’entrer dans un sanctuaire, le visiteur doit passer La méthode la plus courante consiste à taper deux fois
sous une arche torii, qui le purifie et le prépare à pénétrer dans ses mains : on exprime ainsi sa joie d’être en pré-
dans un espace sacré. Contourner l’arche torii est un acte sence de l’esprit. Faire sonner une cloche, chanter ou dan-
grossier qui invite le blasphème à entrer, un peu comme fou- ser convient également, bien que ces méthodes soient en
ler les tatami d’une maison avec des chaussures boueuses. général utilisées par les shugenja ou les gardiens de sanc-
Le visiteur se lave ensuite au pavillon de purification : il se tuaire plutôt que par les pèlerins ordinaires. Puis le visi-
rince les extrémités et la bouche à l’aide d’une louche, avant teur s’incline à nouveau et exprime son souhait de discuter
de la rincer également. Il peut à présent pénétrer librement avec l’esprit. Une fois sa prière terminée, il s’incline une
dans le sanctuaire ou entrer dans la salle de prière. dernière fois et part promptement.
Souvent, les gardiens du sanctuaire ou le prêtre Les sanctuaires abandonnés et de campagne dont
aident à la prière, mais les habitués n’en ont pas besoin. personne ne s’occupe présentent un défi unique aux visi-
Tout d’abord, l’implorant s’agenouille devant la repré- teurs : comment éviter d’offenser un esprit inconnu ? Sans
sentation de l’esprit et présente son offrande. Pour les gardien pour guider les pèlerins, la situation peut être ris-
ancêtres, il peut s’agir de ce qu’ils préféraient durant leur quée : après tout, des comportements et des offrandes qui
vie ou du symbole d’un objet qu’ils possédaient autre- apaisent un esprit peuvent tout à fait en insulter un autre.
fois. Les offrandes destinées aux fortunes dépendent de En l’absence de shugenja pour converser directement avec
leur nature : Tenjin, la fortune des histoires et des secrets, l’esprit, le moyen le plus sûr reste de s’en remettre à l’humi-
lité : l’implorant regarde alors le sol et garde la tête baissée,
présente sincèrement ses excuses et demande à se faire
pardonner. L’esprit peut se montrer clément si des erreurs
se produisent par inadvertance tant que le pèlerin est bien
intentionné et fait montre du respect adéquat.
CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

les interdits religieux les ces


La pureté spirituelle constitue la principale préoccupation
du culte des fortunes : l’âme est comparée à un tissu blanc,
sacrées
et entrer en contact avec des matières ou états sales, des
Trois substances sont plus sacrées que toute
kegare, entache celle-ci. L’individu devient alors offensant
autre, car elles viennent des dieux.
pour les esprits, en particulier pour les ancêtres et pour les La première est le jade, créé lorsque les
kamis, et attire la malchance. Pour qu’une âme reste à l’abri larmes d’Amaterasu ont touché le sol. En tant
des impuretés, de nombreuses pratiques sont à proscrire. que source de pureté spirituelle issue de son
La sueur, le sang et les autres sécrétions sont impurs lien a e le ingen-d e le eng le jade
et il faut éviter tout contact. C’est la raison pour laquelle repousse les habitants des autres royaumes
le travail manuel est indigne de la condition de samou- spirituels et protège l’âme de la Souillure de
raï et de prêtre. Il en va de même pour la consomma- l’Outremonde.
tion de viande. La volaille et les poissons sont les moins La deuxième s’est formée lorsque les larmes
impurs, et il est socialement acceptable d’en manger. La de Dame Soleil se sont solidifiées au contact
viande rouge, quant à elle, est largement rejetée et inter- de l’air.
l’air Le cristal, qui a capturé
capturé l’essence
dite. D’autres aliments, tels que les plats épicés ou les même du Soleil, éloigne les ténèbres et les
champignons, sont considérés comme impurs en trop créatures corrompues.
grande quantité (il convient donc d’en consommer avec La dernière est l’obsidienne, obtenue à par-
par
modération). Après tout contact avec ces impuretés, il faut tir du sang d’Onnotangu. Elle représente le plus
entreprendre un rituel de purification pour restaurer son terrible fléau pour les habitants des royaumes
équilibre interne. Les samouraïs se purifient donc chaque spirituels. Cette matière contient aussi une once
jour, et les prêtres évitent complètement ces substances de la folie de Sire Lune qu’elle transmet à son
(ils sont souvent végétariens et laissent les travaux manuels porteur, après une longue période d’exposition.
aux gardiens du sanctuaire). Les gens du peuple sont
impurs de par leur profession et leur condition. Ainsi, bien
qu’ils se purifient au temple malgré tout, ils le font beau-
coup moins régulièrement que les samouraïs. Certains ne
s’en préoccupent que lors des festivals.
Les rituels de purification
Manipuler les morts constitue l’une des transgressions Les méthodes de purification varient grandement d’un
les plus importantes. La mort est une source puissante de sanctuaire à l’autre, en fonction des esprits qui y résident.
kegare, et elle s’attache à tout ce qu’elle touche. Même En général, le visiteur se lave les mains et le visage, puis
par accident, toucher de la chair morte enveloppe l’âme médite pendant qu’un gardien ou un prêtre agite une
d’une couche de crasse spirituelle. Lorsqu’un samou- baguette couverte de dizaines de bandelettes de papier.
raï meurt dans cet état, l’entrée au Yomi lui est interdite. Cette dernière attire les impuretés spirituelles comme un
Cependant, il peut se nettoyer grâce à un rituel de puri- plumeau retient la poussière physique. Ensuite, le visiteur
fication plus complexe, connu de chaque shugenja et de prend la baguette et la brûle, pour symboliser la dispari-
nombreux prêtres. Il implique de passer sous une arche tion de ses maux. Une autre méthode consiste à saupou-
torii, de prendre un bain rituel et de renaître symbolique-
drer le pénitent de sel, qui absorbe les essences impures.
ment en la présence de l’esprit du sanctuaire. Quant aux
Puis le visiteur le balaie hors du sanctuaire tout en répétant
hinin, ils ne sont même pas autorisés sur le sol du sanc-
un mantra sacré.
tuaire : leur présence offenserait l’esprit et le chasserait, ce
Une autre méthode courante est le misogi, un rituel de
qui attirerait les désastres.
purification par l’eau. Après un court jeûne, le participant
Le commerce aussi est salissant, car il enchaîne encore
se tient nu sous une cascade glacée tout en chantant un
plus les individus au monde physique. La monnaie en elle-
mantra sacré. L’eau emporte les pensées négatives et les
même est sans danger, et Daikoku, Fortune de la richesse,
fait partie des huit Fortunes majeures. Les actes stricte- impuretés spirituelles. On peut aussi effectuer le misogi
ment commerciaux et les jeux d’argent, ainsi que l’obses- dans des eaux froides et calmes : la plupart des sanctuaires
sion pour les biens matériels éphémères, empoisonnent disposent de puits dans ce but.
l’esprit et entachent l’âme. Dès lors, les marchands pieux Les éléments, sous leur forme la plus pure, peuvent
se purifient régulièrement. également bannir les impuretés spirituelles. Ainsi, les shu-
Enfin, les émotions négatives ternissent l’esprit. Les genja se purifient en mettant leur endurance élémentaire
trois péchés (la peur, le désir et les regrets) attirent la mal- à l’épreuve. Marcher sur des charbons ardents, plonger ses
chance et engendrent les maux du monde. Se purifier dans mains dans de l’eau bouillante ou méditer nu sur un affleu-
un sanctuaire permet non seulement de nettoyer son corps rement balayé par un vent froid… constituent autant d’ex-
et son âme, mais aussi d’apaiser son esprit et de relâcher ploits physiques qu’un shugenja peut entreprendre afin de
ces pensées dans des endroits où elles seront oblitérées. se purifier en l’absence de sanctuaire.

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C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

les samouraïs et leurs ces derniers peuvent également être vénérés au sanctuaire
local, où les gardiens parviennent à discerner les réponses à
pratiques religieuses des questions particulières grâce à des rituels de divination.
Si un noble contrarie l’un de ses ancêtres, celui-ci peut lui
Les bushi ne peuvent pas éviter de se salir en remplissant rendre la vie difficile à l’aide de malédictions ou de coups de
leurs devoirs, puisqu’ils entrent régulièrement en contact malchance, voire le hanter, tout simplement.
avec du sang, de la sueur ou d’autres substances qui Lorsqu’un ancêtre ne dispose d’aucun descendant, il
entachent l’esprit. De plus, les tensions de la vie de guerrier, peut se sentir abandonné, ce qui peut l’amener à se trans-
dont font partie les tueries, peuvent déséquilibrer l’âme. Les former en muenbotoke, des esprits apathiques qui hantent
bushi doivent se purifier régulièrement afin que les consé- les vivants et les maudissent. Pour éviter un tel destin, les
quences de leurs devoirs n’attirent pas la malchance spiri- samouraïs peuvent révérer des ancêtres avec lesquels ils
RA tuelle. Ils recourent aussi aux bénédictions et aux divinations n’entretiennent aucun lien de parenté direct. Il n’est pas
AR pour gagner un avantage dans les épreuves à venir. rare qu’un samouraï s’approprie un ancêtre, non pas par
Les familles de samouraïs vénèrent leurs morts et lien de sang, mais en raison de l’admiration portée aux
Les pratiques religieuses cherchent à obtenir les conseils de ceux qui les ont précé- exploits du défunt. Cette pratique honorant l’histoire est
ne prennent pas partout,
dées. Les nobles révèrent aussi le fondateur ou la fondatrice considérée comme particulièrement noble.
et leur absence laisse
de leur clan, ainsi que les héros légendaires de celui-ci : ils L’adoration des ancêtres est bien plus courante parmi
éclore des croyances
populaires qui permettent pensent en effet que ces âmes peuvent leur accorder la faveur les samouraïs que ne l’est celle des fortunes ou des kamis.
aux gens du commun d’une aide surnaturelle. Bushi et courtisans partagent cette Lorsqu’un noble vénère une fortune, c’est souvent pour
d’obtenir une éventuelle croyance : à la cour comme sur le champ de bataille, recevoir obtenir une bénédiction particulière, comme la faveur de
aide de la part des esprits. les conseils de ses ancêtres peut faire pencher la balance vers Hachiman au combat, la grâce de Benten pour une repré-
Bien entendu, la plupart la victoire. Chaque demeure de samouraïs contient un sanc- en a i n l’aide de i r r d ire le e ’ n
des shugenja considèrent tuaire spécifiquement dédié à l’adoration des ancêtres, mais ancêtre passe au Meido.
de telles pratiques comme
des sornettes entretenues
par des ignorants.

Sur les terres du Clan de


la Grue, il serait possible
de se débarrasser de la
quelques superstitions
malchance en jetant sept
Les paysans, sans éducation, se montrent particuliè- bataille que sous des étoiles propices ou en sui-
pois dans un puits et en
rement superstitieux. Pour autant, les samouraïs ne vant des présages particuliers. Les araignées
jeûnant pour le reste de
la journée. Les Shiba esti- sont pas non plus épargnés par ce type de croyances portent chance, et en tuer une la poussera à
ment que tracer un kanji sans fondement, dont voici quelques exemples : hanter la maison.
par-dessus un diagramme
$ r e  : les éclairs sont de bons pré- $ i   : le premier jour de neige de
leur confère la vertu trans-
crite. Les samouraïs du sages. Laisser la porte ouverte la nuit permet chaque année porte chance. Les esprits ne
Clan de la Licorne croient aux fantômes d’entrer dans la maison. Siffler la peuvent pas traverser les ponts en arc. Si l’on
qu’écrire le nom d’une nuit porte malheur, car un fantôme peut vous entend des bruits de pas derrière soi sans voir
fortune sur leur bras droit prendre pour un de ses congénères. personne, on doit s’écarter du chemin et invi-
attire la bénédiction de ter le fantôme à passer, sous peine de souffrir
ladite fortune. Selon le
$ e Gr e  : chatouiller les pieds d’un
de cauchemars.
Clan du Scorpion, boire bébé le rendra bègue. Un tailleur qui se pique
le sang encore frais avec sa propre aiguille finira par commettre $ r i   : dans un cœur sans haine,
d’un coq guérirait une une infidélité. Casser la lanière de sa sandale des adversaires ne peuvent pas déceler l’inten-
indigestion. Sans accès annonce un malheur proche. tion de donner la mort. Si l’on fait sécher son
aux experts religieux d’un linge dans un endroit visible, ses secrets seront
sanctuaire, les traditions
$ r  : s’incliner devant un esprit ven-
geur le forcera à s’arrêter un instant. Un forge- révélés au grand jour. Se faire toucher par une
populaires locales offrent
ron doit veiller à ne pas laisser le feu de sa forge crotte d’oiseau tombée du ciel porte chance
des alternatives.
s’éteindre, sans quoi il ne parviendra plus à y for- (un, le terme familier pour une crotte, peut aus-
ger de bonnes lames. Il ne faut pas oublier qu’un si signifier « chance » prononcé différemment).
des passe-temps favoris parmi les Togashi est d’in- $ e i r e : on ne doit jamais faire cou-
venter de nouvelles superstitions et de les trans- per ses cheveux lors de la pleine lune, cela ren-
mettre aux paysans pour voir lesquelles prennent. drait chauve à un jeune âge. Une promesse
$ i  : un bushi doit toujours porter ses faite à cheval ne peut être brisée, sous peine de
attaques le pied droit en avant, pour éveiller mort. Il faut toujours s’incliner devant un cheval
son esprit guerrier. Un général ne doit mener sauvage, car il peut s’agir d’un Ki-Rin déguisé.

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CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

les paysans et leurs le mariage dans


pratiques religieuses les clans
Pour les bonge, les questions religieuses semblent bien
plus simples : lorsqu’ils ont besoin de l’aide d’une fortune Chaque famille de clan majeur dispose de sa
ou d’un esprit en particulier, ils se déplacent au sanctuaire propre version de la cérémonie de mariage. Les
et déposent une offrande. Lorsqu’un événement tourne prêtres doivent donc se renseigner sur les diffé-
mal, le prêtre identifie l’esprit offensé, et le paysan pré- rentes traditions pour n’offenser aucune des par-
sente une autre offrande. Les paysans n’ont pas besoin ties. Voici quelques exemples de ces multiples
d’être versés dans les textes sacrés ou de connaître plu- coutumes :
sieurs rites : il est du ressort du prêtre et des gardiens de
sanctuaire de leur fournir assistance en la matière. Les hei- $ Le Clan du Dragon ne célèbre que rare-
min se doivent juste de participer aux festivals, de présen- ment les mariages dans un sanctuaire ou
ter des offrandes régulières, et de se montrer révérencieux dans un temple. Le mariage tradition-
et respectueux. nel se déroule plutôt dans un magnifique
Les préoccupations matérielles des paysans se limitent environnement naturel.
la plupart du temps à leur demeure et aux terres qu’ils $ Les mariages dans le Clan du Phénix se
cultivent. Par conséquent, leur relation avec les fortunes tiennent dans le sanctuaire d’une for-
est souvent simplifiée et plutôt transactionnelle puisqu’ils tune, en général Hotei (puisque dans un
les vénèrent pour deux raisons : s’attirer leurs bienfaits, tels mariage, le contentement est plus impor-
que la chance, des récoltes saines et une longue vie, ou les tant que le côté romantique). Faire preuve
apaiser afin d’éviter les répercussions négatives. de légèreté pendant cet événement est
Les paysans révèrent également leurs ancêtres, mais à scandaleux, mais la réception qui s’ensuit
leurs yeux, il s’agit plutôt d’une pratique de conciliation, offre souvent un spectacle joyeux.
à titre préventif : ils déposent des offrandes afin que les
$ Les mariages dans le Clan du Scorpion
morts se cantonnent au royaume auquel ils appartiennent.
sont toujours conduits par un membre de
Il est inconcevable pour un paysan de chercher à obtenir
la famille Soshi, puisque ceux qu’un Yogo
les conseils de ses ancêtres. À la mort, les âmes des heimin
préside se révèlent désastreux. On y pro-
ne vont pas au Yomi. Leur vie est emplie de considéra-
cède souvent à un échange de masques.
tions matérielles qui les en empêchent. Seuls les samou-
Par tradition, les banquets de mariage sont
raïs peuvent accéder au royaume des ancêtres sacrés. Les
ouverts à tous, même aux paysans (mais les
défunts de la caste paysanne patientent au Meido avant
castes ne se mélangent pas pour autant).
de se réincarner, ou bien finissent dans un royaume puni-
i el e le a i-d le hig l r le hei in $ Les clans mineurs disposent de leurs
craignent les fantômes de leurs ancêtres pour une excel- propres coutumes ésotériques. Par
lente raison : si l’un d’eux revient d’entre les morts, il ne exemple, le Clan de la Libellule rejette tout
distribue pas de bienfaits, mais des malédictions ! mariage arrangé, celui du Moineau orga-
nise ses cérémonies à domicile (puisqu’il

les rituels dans ne possède aucun sanctuaire assez grand


sur ses terres), et celui du Mille-pattes les
les sanctuaires célèbre à l’aube. Les membres du Clan de
la Mante se marient toujours sur l’eau (que
L’importance que revêt un sanctuaire vaut pour les samou-
ce soit sur un bateau en mer ou à bord
raïs comme pour les gens du peuple. Au fil de leur vie, ils
d’un radeau sur une rivière), et le capitaine
visiteront ce genre de lieux pour des cérémonies et des
du navire préside souvent la cérémonie.
événements majeurs, dont :

Les mariages
Les mariages constituent des occasions particulièrement mariage : on y conserve des registres mentionnant chaque
joyeuses et se tiennent presque toujours dans un sanc- naissance aux alentours, ainsi que les cartes stellaires corres-
tuaire. Les noces varient grandement d’une région à ndan e e na d harg d’arranger le ariage
l’autre et incorporent diverses coutumes locales, traditions en voient leur tâche facilitée : ils peuvent comparer les
de clan et arrangements spéciaux pour l’esprit du sanc- constellations et les dates de naissance pour trouver le
tuaire, qui y assiste aussi. Malgré tout, il existe une céré- conjoint ou la conjointe idéale. Chaque union est signalée
monie de base commune à tout l’Empire. n lan n na d i rial (e e - i d i en l’a -
Pour les samouraïs, les sanctuaires jouent un rôle majeur prouver), et les sanctuaires se font un plaisir de fournir ce
dans la formation des couples, et ce, bien avant le jour du service aux participants.

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Un prêtre officie en général aux mariages de paysans,


tandis que ceux entre samouraïs se voient présidés par un les funérailles de
shugenja. Au cours de la cérémonie, le couple se baigne
et est purifié à l’aide de sel, avant de revêtir le traditionnel champ de bataille
habit de mariage. L’esprit du sanctuaire est libéré et invité à
la cérémonie. Le prêtre ou un shugenja officie lors de l’enga-
du clan du lion
gement des mariés : ces derniers échangent trois serments À Rokugan, après une bataille, des hinin ras-
et partagent trois coupes de saké béni. Les futurs époux semblent pour incinération les corps des samou-
s’approchent ensuite de l’autel, prononcent leurs vœux et raïs tombés au combat. Puis les cendres, ainsi
témoignent de leur gratitude à l’esprit du sanctuaire en lais- que les possessions de leur être cher, sont ren-
sant des offrandes selon les conseils du célébrant. dues aux familles, qui organisent alors des funé-
Au début de cette cérémonie, celui ou celle des deux railles classiques dans un temple.
fiancés qui va quitter sa famille est vêtu de blanc, pour Le Clan du Lion, quant à lui, voit le champ
représenter sa mort symbolique au sein de sa famille précé- de bataille d’une autre manière. Mourir au com-
dente. Au cours de la cérémonie, il ou elle ôte cette couche bat représente la plus grande aspiration d’un
de tissu et révèle du rouge, qui représente la renaissance, samouraï de ce clan : par cet acte, il oint le sol
puis retire aussi ce vêtement pour dévoiler les couleurs et le de sa vie et mélange ses cendres aux os de la
mon de sa nouvelle famille. Dans le cas d’un mariage pay- terre. Les traditions du Clan du Lion veulent que
san, ces tenues sont fournies par le sanctuaire et sont sou- les rites funéraires se tiennent sur le champ de
vent les plus belles que le couple portera de toute sa vie. bataille, présidés non par des moines, mais par
Après la cérémonie, un banquet est organisé en l’hon- de r re d’ a- e d r l de e e r -
neur du nouveau couple. Contrairement à la célébration, monie constitue un secret étroitement gardé par
celui-ci est ouvert aux invités. Les discours, la poésie, les le h genja d’ a- de endan de i
représentations et les jeux y sont courants. En l’absence de la famille, les ancêtres du défunt
sont invoqués pour la remplacer, et ils jugent son
Les funérailles âme en premier. S’ils l’estiment digne, ils l’ac-
agnen j ’ a- e lan d i n
Les préceptes du culte des fortunes tiennent la mort comme ne révélera pas ce qui arrive aux âmes dont la
la pire des impuretés spirituelles, car elle s’accroche à tout valeur n’est pas reconnue par les ancêtres.
ce qu’elle touche. Par conséquent, tout ce qui est associé
aux défunts est impur. Au contraire, la tradition shinséiste
encourage la contemplation de la mort. Ainsi, les funérailles
sont présidées par des moines et non par des prêtres, et un autre office important : honorer celui-ci afin que personne
elles se déroulent dans des temples, jamais dans un sanc- d’autre n’attire son attention.
tuaire. Il n’existe presque aucune tradition funéraire dans le e h genja d’ a- n ar i li re en rare n
culte des fortunes, les ultimes rites sont donc pratiqués en les identifie très jeunes grâce à des signes qui indiquent que
suivant le Tao de Shinsei, afin de protéger les sanctuaires,
la fortune les a bénis, comme des marques de naissance
et ceux qui y servent, de l’influence résiduelle de la mort
a rd irr g lier e h genja d’ a- r en
et des attentions de leur fortune tutélaire mécontente. Les
une tunique blanche et des sode (des épaulettes-boucliers)
sanctuaires célèbrent la vie et non la mort.
cérémonielles. Ils suivent un entraînement qui les destine
Malgré tout, le culte des fortunes joue un rôle impor-
exclusivement à communier avec leur fortune tutélaire, à
tant dans les cérémonies funéraires, où il est incarné par
interpréter ses réponses aussi rares que cryptiques et, plus
le r re d’ a- e e e a er i e de la r ne
terrifiant encore, à faire appel à ses faveurs.
de la mort parcourent l’Empire dans un but explicite : s’as-
Parmi leurs plus impressionnantes capacités, on trouve
surer que les âmes des défunts puissent trouver leur che-
elle d’in l en er la d i i n d’ a- an la r -
in j ’a j ge en d’ a- e le r de ina i n
chaine destination du défunt. Tandis que les moines du
e le r iden a n raille n h genja d’ a-
Les prêtres et les shugenja d’Emma-Ō habillé comme la fortune afin que personne n’oublie la pré-
Chaque clan majeur se targue de disposer d’une secte de sence de celle-ci, assiste en silence à la cérémonie. Après
r re d’ a- r e erre e er ain lan la fin des rites et le départ des invités, le shugenja avance
mineurs. Bien qu’elles servent toutes la même fortune, ces enfin pour accomplir son devoir : il invoque le Grand Juge,
sectes respectent les pratiques locales et les traditions de a- e r ide n r r niel e h gen-
leur clan tutélaire. Les sanctuaires dans lesquels officient ces ja défend le défunt, rappelle ses actes et demande hum-
prêtres sont rares : il est plutôt de coutume pour ces hommes blement une meilleure sentence. Il peut se contenter de
et femmes de voyager sans cesse avec leurs reliques sacrées. requérir un bref séjour au Meido pour le mort, ou même un
i ’en g n ral le gani ne n ren a a- passage immédiat au Yomi, le royaume des ancêtres sacrés.
(il n endan e rier i la r ne de la i i and il Bien que tout le monde respecte les prêtres et les shu-
s’agit de mort), les prêtres du Juge des défunts remplissent genja d’ a- il n en ain en di an e en

150
raison de la nature de leurs devoirs. L’influence viciatrice de purification extrêmes, par exemple en plongeant les mains
la mort les entoure constamment, et une fois qu’ils ont rempli dans de l’eau bouillante ou restant debout sur des char-
leur office, ils reçoivent les honneurs et des cadeaux, puis sont bons ardents. Puis on supplie l’esprit auquel le festival est
congédiés sans attendre. Leur présence en dehors de funé- dédié de s’éveiller. Le shugenja explique au kami ou à la
railles apporterait la malchance. Les paysans les évitent, les fortune pour quelle raison il abuse de sa gentillesse et l’in-
personnes superstitieuses les craignent, et seuls les samou- vite à pénétrer dans le shintai du sanctuaire.
raïs désespérés ou imprudents les cherchent. Ces prêtres et Quand le shugenja confirme que le shintai est occupé,
ces shugenja vivent une existence solitaire, mais elle remplit ce dernier est placé dans un récipient portable pour défiler
un devoir nécessaire qu’ils sont les seuls à pouvoir accomplir. dans la ville ou le village, où les habitants le saluent selon
la coutume locale et se livrent à des représentations pour
Les festivals le divertir. Chaque festival possède son propre lot de spec-
tacles, tels que du théâtre no, des danses de dragon ou
Une autre fonction importante des sanctuaires est la des feux d’artifice. Chaque esprit a ses préférences : Benten
conduite des nombreux festivals annuels. Le calendrier apprécie le kabuki, Bishamon préfère les affrontements de
rokugani est riche en fêtes, sans compter les centaines de sumai et Hachiman aime les reconstitutions de bataille.
festivals célébrés dans chaque province. Même le village Même si les participants au festival adorent ces représen-
le plus reculé possède au moins un festival unique pour tations, au bout du compte, elles sont destinées à l’esprit
célébrer un phénomène culturel important dans la région. du sanctuaire. Les esprits aiment que les mortels boivent,
Certaines festivités datent du début de l’Empire ou même s’amusent et passent du bon temps : le village entier par-
d’avant, tandis que d’autres célébrations sont des inven- ticipe donc aux festivités, durant lesquelles de la nourri-
i n r en e de dai d’ ere r e e i al ture spéciale est servie et des jeux uniques sont organisés.
témoignent des changements de saison et commémorent Puisque l’esprit du sanctuaire assiste à la fête, de nombreux
des événements historiques majeurs. Ils célèbrent des for- services particuliers qui, en temps normal, ne sont propo-
tunes, des ancêtres honorés et d’autres esprits. sés qu’à une date précise sont offerts : bonne aventure, soin
Même si chaque festival répond à ses propres cou- d’états préjudiciables et consultations spirituelles gratuites.
tumes, la plupart se déroulent d’une façon similaire. Le À l’approche de la fin du festival, un immense banquet
prêtre ou le shugenja entreprend un rituel de purifica- est tenu en l’honneur de l’esprit. Il comprend souvent du
tion au sanctuaire et le long du chemin que l’esprit vénéré saké bénit, ainsi que des aliments interdits la plupart du
doit emprunter. Les shugenja s’adonnent à des rituels de temps, mais autorisés au cours de ces festins. Par exemple,

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le festival de Hida est le seul événement durant lequel les où il est célébré chaque année. Kan’o et Nagameru, for-
N R
samouraïs du Clan du Crabe peuvent consommer la chair tunes jumelles des cerisiers, y sont à l’honneur, mais aus-
A de l’animal éponyme. Le repas est collectif, et tous ceux si Nagameru, qui s’avère difficile et capable de gâcher les
qui assistent au festival y participent. festivités par des tempêtes printanières. Son nom signifie
En plus de célébrer les Quand le banquet est terminé et que l’esprit du sanc- d’ailleurs « contempler », mais épelé différemment, le sens
festivals d’importance, tuaire est, a priori, de bonne humeur, le shugenja lui change pour devenir « il pleut longtemps ».
chaque ville et chaque demande d’accorder ses faveurs pour l’année à venir : de La contemplation des fleurs de cerisiers constitue l’une
village possède son lot de bonnes récoltes, un temps clément et la protection contre des principales activités de ce festival, tout comme les
festivités commémorées les maladies sont autant de requêtes courantes, au même pique-niques sous les branches. Les participants déposent
nulle part ailleurs, afin
titre qu’une longue vie pour l’Empereur. Les dernières céré- du saké et des poèmes en guise d’offrandes aux plus vieux
d’honorer des esprits
locaux ou un élément que
monies sont alors réalisées et l’esprit, congédié, reprend le arbres, et en particulier à ceux dans lesquels pourraient
les habitants de la région chemin de son sanctuaire… ou du lieu d’où il vient. vivre les esprits kodama. Grâce à la dispersion de pétales
estiment indispensable Même si la plupart des festivals majeurs suivent ce roses, les prêtres prédisent les dates auxquelles les pay-
à leur mode de vie. Le déroulé, des festivals régionaux ou de moindre impor- sans doivent semer, et la contemplation des cerisiers en
village de la Croisée tance peuvent parfois s’en éloigner, tout comme les fes- fleur peut se prolonger tard dans la nuit.
des chemins organise le tivals d’origine atypique. Par exemple, le festival du
festival des pieds nus,
dédié à Koshin, la fortune
Courroux lunaire, célébré au cours de la première semaine Le Jour des clameurs
de la cour d’hiver, ne contient aucune demande à l’esprit
des routes. Les villages
honoré, Onnotangu, ni aucune représentation. En lieu et Le quatrième jour du mois du Tigre se déroule le Jour des
côtiers célèbrent le festival
de Suijin en l’honneur de
place de festivités, les commerces ferment, et les courti- clameurs, un festival en l’honneur de la fortune du ton-
la fortune de la mer. Et, sans s’abstiennent de parler et de chanter pendant un jour nerre et du feu, Osano-wo. Cependant, plutôt que de
comme chacun le sait, et une nuit, plongeant la terre dans le silence en l’honneur le supplier ou de lui offrir des divertissements, les par-
le village de l’Aimable de Sire Lune. Quiconque brise ce silence subira le courroux ticipants se tiennent sur une scène prévue à cet effet et
Voyageur organise chaque du dieu. Ainsi, tous les festivals ne sont pas des moments crient leurs doléances à pleins poumons. Tout est permis,
année un festival du saké ! heureux, et l’ambiance de certains est plutôt morose. puisque même les déclarations les plus scandaleuses se
Les familles des clans
doivent d’être oubliées dans l’instant. Ainsi, les paysans se
majeurs possèdent aussi Le festival Bon plaignent de leurs seigneurs, les fermiers et les pêcheurs
leurs propres festivals des maigres récoltes et du mauvais temps, les personnes
pour vénérer leurs an- Le dernier jour du mois du Chien se tient le festival Bon, en mariées de leur partenaire, les enfants de leurs parents,
cêtres communs ou des l’honneur des défunts et pour apaiser les esprits errants. et parfois, les dévots protestent contre les fortunes. Ces
moments importants de Ce festival, le plus important des anciens festivals, est l’oc- doléances amusent Osano-wo, et fournissent un exutoire
leur histoire. Par exemple, casion pour chaque Rokugani de se souvenir des exploits aux tensions accumulées au long de l’année.
le festival de Hida, que de e an re e i e le ingen-d ’ ni en e La plupart des membres des clans majeurs (au contraire
le Clan du Crabe est le
jour-là, et les ancêtres sacrés peuvent alors rendre visite de ceux des clans mineurs) ne participent pas à ce festival,
seul à célébrer, se tient le
troisième jour du mois
aux mortels et participer aux festivités. Les familles laissent car crier des plaintes est indigne d’un samouraï. Mais des
du Sanglier et honore le des offrandes pour leurs chers défunts, et exécutent une nobles se déguisent parfois pour contourner cet interdit.
fondateur du clan avec la danse régionale, le bon odori, en leur honneur.
plus grande compéti- À la fin du festival, les participants déposent des lan-
tion de vantardise de ternes de papier flottantes sur les rivières et les cours
tout l’Empire. d’eau. Chacune d’entre elles contient le nom d’une per-
sonne décédée au cours de l’année écoulée. Les Rokugani
entretiennent l’espoir que ces lanternes atteignent la mer,
afin que les âmes perdues qui n’ont pas pu traverser le
pont des Lumières suivent ces lueurs dans l’au-delà.

Le festival de la fleur de cerisier


Le festival de la fleur de cerisier est l’un des plus populaires,
et marque le début de la saison de floraison (le hanami).
Les traditions régionales varient, de même que le jour

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CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

Les sites sacrés


l’Empereur peuvent y pénétrer : toute autre personne
pourrait offenser l’esprit par inadvertance.
Les honden se trouvent parfois dans la salle de prière
Chaque sanctuaire reflète l’esprit qui l’habite. La nature de ou sont enchâssés dans une caractéristique naturelle du
celui-ci est visible dans la disposition des lieux, les objets sanctuaire, telle qu’une grotte ou un étang. Certains sanc-
qu’ils contiennent et les traditions respectées. Un sanc- tuaires ruraux, comme le sanctuaire de la Ki-Rin ou celui de
tuaire est la demeure de l’esprit, construite de façon à cor- Sengen, fortune du mont Sengen, en sont dénués. Dans de
respondre à ses préférences. tels cas, une statue ou un autre objet remplit cette fonction.
Les sanctuaires sont érigés à n’importe quel endroit, l’im-
portant est qu’un esprit les visite régulièrement ou y réside : Le haiden
dans les villes ou les villages, dans les palais, ou complète-
ment à l’écart du reste de la civilisation. Parfois, plusieurs Le haiden est la salle de prière du sanctuaire, dans laquelle
sanctuaires se partagent un lieu, d’autres fois, ils sont intégrés se déroulent les cérémonies. En général, il est relié au hon-
à un temple shinséiste ou au foyer d’un samouraï. Au final, den ar n l ir n i an h ji n a re e de
l’élément qui permet d’identifier un sanctuaire est la pré- porte. Le haiden consiste habituellement en une salle princi-
sence d’un shintai, un objet ou un élément naturel capable pale qui s’ouvre sur plusieurs sanctuaires intérieurs de taille
de contenir un esprit. Certains shintai sont des objets créés plus modeste, dans lesquels les visiteurs peuvent prier en
par des shugenja, mais la plupart se trouvent dans la nature : privé. S’y trouvent aussi des représentations des fortunes
un très vieux chêne peut servir de demeure à un esprit-arbre locales et de petits sanctuaires dédiés aux ancêtres.
(un kodama), une cascade peut héberger un kami de l’eau Certains haiden comprennent des défenses telles que
joueur, et le mont Sengen est le palais de la fortune épo- des meurtrières, des passages secrets pour s’évader ou des
nyme. Dans ce cas, le sanctuaire est érigé à proximité de fondations en pente. Des exemples de tels haiden incluent
façon à attirer l’attention sur la merveille où réside l’esprit. les sanctuaires de Bishamon ou de Hachiman, ou les sanc-
tuaires ruraux aisés qui s’exposent à des attaques de bandits.
les caractéristiques
d’un sanctuaire Le clocher
Les cloches repoussent les esprits malins. Par conséquent le
Les éléments suivants sont communs à la plupart des sanc-
shōrō, ou clocher, porte bonheur. La plupart de ces bâtiments
tuaires, voire tous.
méritent à peine le titre de tours, puisqu’ils possèdent rare-
ment plus d’un étage. D’autres types de clochers existent,
Les arches torii par exemple celui du sanctuaire de Hotei, où la cloche est
Un torii indique l’entrée d’un sanctuaire et délimite le terrain incorporée au portail de l’entrée principale, ou encore celui
sacré. Il s’agit de portails sacrés vers un espace béni. Traver- du sanctuaire d’Amaterasu sur les terres côtières de la famille
ser un torii aide à préparer son esprit et son corps à la puri- Moshi et sa « cloche encagée » au rez-de-chaussée.
fication. Les visiteurs pénètrent dans le sanctuaire par ces
arches, et certains sanctuaires sont clôturés afin que les torii Les quartiers résidentiels
soient les seules entrées possibles. Parfois, un chemin passe
sous plusieurs arches, formant ainsi une sorte de vestibule. Les gardiens du sanctuaire vivent ensemble sur ses terres,
Les torii sont généralement taillés dans le bois, mais dans des salles modulaires délimitées par de fins panneaux
peuvent aussi être en pierre ou couverts de métaux rares. h ji andi e le r re di en de le r r re ai-
La plupart du temps, ils sont simples et consistent en son, composée d’une seule pièce, mais séparée des autres
deux colonnes surmontées de deux poutres horizontales. quartiers. Les aménagements se veulent simples afin de ne
Quant aux plus modestes, ils ne possèdent que les deux pas distraire de la dévotion aux fortunes. La résidence du
colonnes, et une corde sacrée, le shimenawa, remplace sanctuaire peut aussi inclure d’autres pièces telles qu’une
alors les linteaux supérieurs. Les torii peuvent aussi être bibliothèque, un dojo (en particulier dans les sanctuaires
élaborés, avec des brides pointues, des piliers évasés, des de fortunes guerrières) et une cuisine.
poutres courbes et toutes sortes de décorations telles que Les sanctuaires disposent rarement de quartiers pour les
des cordes, des plaques de métal ou des statues. Quand invités. Les pèlerins ne peuvent pas rester sur place après
ils sont peints, un rouge flamboyant est presque toujours le coucher du soleil, et encore moins à l’heure du Bœuf,
choisi, afin de repousser les esprits malins. durant laquelle les esprits nocturnes se montrent particu-
lièrement actifs. Les disciples des fortunes croient qu’au
Le honden crépuscule, les frontières entre les royaumes des esprits
sont les plus fragiles : de nombreux gardiens de sanctuaire
La salle principale, le honden, est le bâtiment le plus sacré chassent donc les visiteurs au coucher du soleil. Quand des
sur les terres du sanctuaire. Le shintai et les reliques s’y voyageurs doivent rester pour la nuit, ces derniers logent
trouvent, et il sert de demeure à l’esprit des lieux. Seuls dans le clocher (les esprits évitent la cloche) ou dans les
les prêtres, les gardiens du sanctuaire, les shugenja et quartiers résidentiels, dans une chambre temporaire.

153
R
NA A
La scène les jardins ressemblent aux paysages des royaumes des
esprits, pour qu’elles s’y sentent comme chez elles quand
Les représentations dédiées à l’esprit du sanctuaire font elles s’y rendent.
Les shimenawa sont des partie du quotidien des lieux. La plupart des sanctuaires
cordes de paille de riz
destinées à entourer des
disposent donc d’une quelconque scène bénite, sur
laquelle les gardiens dansent et interprètent des pièces.
Le miroir d’eau
espaces sacrés. Elles sont
décorées de bandes de Dans les plus grands d’entre eux, un théâtre complet et Cet ornement apprécié des visiteurs est un cauchemar
papier irrégulières et de équipé pour du no est parfois érigé. pour les gardiens de sanctuaire, en raison de sa difficulté
pampilles de paille, et d’entretien. Le miroir d’eau symbolise la nature illusoire du
généralement disposées
autour de rochers ou
Le pavillon de purification monde : le sanctuaire s’y reflète en entier, mais une simple
ondulation fait disparaître l’image et révèle la réalité qui se
d’arbres sacrés, ou encore Les invités procèdent à leurs ablutions dans le chōzuya, cache en dessous. Ainsi, le miroir d’eau rappelle à toutes
dans tout le sanctuaire. où ils se purifient avant d’entrer dans le sanctuaire. Habi- et à tous l’omniprésence des royaumes des esprits.
Il existe deux types de
tuellement, ce pavillon consiste en un puits peu profond
shimenawa : les cordes de
bénédiction, qui protègent
et abrité, mais il inclut parfois une source d’eau naturelle,
telle qu’un ruisseau ou une crique. Grâce à une louche, les
Les statues gardiennes
contre les esprits malins
et créent des « demeures » fidèles se versent de l’eau sur les mains, la bouche et les Les statues d’animaux en pierre sont fréquentes dans les
où vivent les kamis, et pieds avant de rincer l’instrument. sanctuaires. Elles s’élèvent en général à l’entrée, mais aus-
les cordes d’entrave, qui si sur les toits, parfois taillées dans les coins des bâtiments
retiennent les esprits et
les empêchent de partir.
Les jardins ou au sommet de ponts en arc. Elles servent à effrayer les
esprits importuns et à protéger le sanctuaire contre les
Les prêtres entourent Les jardins des sanctuaires offrent des endroits tranquilles malédictions. La croyance veut que ces gardiens s’animent
parfois des maisons, voire
où les visiteurs et les gardiens peuvent méditer. Le type si certains esprits maléfiques devaient apparaître à proxi-
des villages entiers, de
de jardin reflète la nature de l’esprit des lieux : des jardins mité. Le type d’animal représenté varie en fonction des
shimenawa afin de bénir
les habitations et de les de pierre pour des esprits guerriers, des jardins de fleurs régions, mais les plus communs sont des chiens-lions (des
protéger des dangers pour des esprits de la nature, des jardins de sable pour les komainu), des renards (notamment dans les sanctuaires
surnaturels. ancêtres, etc. Dans les sanctuaires des Fortunes majeures, d’Inari) et des sangliers.

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CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

les sanctuaires kamid


les kamidana
des kamis El kamidana es un altar doméstico en miniatura
Un kamidana est un autel familial miniature,
Les sanctuaires des kamis sont en général simples, para los kami o una fortuna concreta. Se sitúa
dédié aux kamis ou à une fortune en particulier.
incorporés dans le paysage ou la caractéristique géo- en un estante o en una pequeña alcoba lo sufi-
Il se trouve dans une minuscule alcôve à peine
graphique qui sert de shintai à l’esprit des lieux. Ces cientemente grande como para acomodarse de
assez grande pour s’y agenouiller, ou bien sur
constructions peuvent être très modestes : de simples rodillas y contiene pequeñas esculturas, amule-
une étagère. Il contient de petites sculptures,
lanternes au pied de cascades, des cordes nouées tos, sogas bendecidas y, a menudo, una especie
des breloques, des cordes bénites et souvent un
autour de rochers couverts de mousse, ou des répliques de shintai humilde.
shintai modeste.
de véritables sanctuaires, mais de la taille d’une mai- La mayoría de las casas rokuganesas no dis-
La plupart des foyers ne disposent pas d’un
son de poupées. L’espace sacré est en général délimité ponen de un kamidana. Tanto samuráis como
kamidana. Les samouraïs comme les paysans
par un yorishiro, un objet capable de plaire aux kamis et campesinos reservan este espacio para los san-
réservent cet espace au sanctuaire de leurs
autres esprits bienveillants, et de les attirer. Les yorishiro tuarios de sus ancestros. Sin embargo, muchos
ancêtres. Mais de nombreux shugenja citadins
se fondent dans les environs naturels et préservent ainsi shugenja urbanos encuentran útil tener un kami-
jugent utile de posséder ce genre d’autel dans
l’harmonie de l’espace sacré. Les sanctuaires des kamis dana en su casa para poder comunicarse con los
leur demeure : ils peuvent ainsi communier avec
sont le plus souvent isolés et ne disposent donc ni de kami sin tener que visitar un santuario de la ciu-
les kamis sans se rendre au sanctuaire de la ville.
torii ni de bassin de purification. Toutefois, ils sont par- dad. Los samuráis que trabajan estrechamente
Les samouraïs qui travaillent en lien étroit avec les
fois intégrés à des sanctuaires plus grands, comme ceux con shugenja o que son especialmente devotos
shugenja ou qui se montrent particulièrement res-
des fortunes. de los kami, como la familia Shiba del Clan del
pectueux envers les kamis, tels que les membres
Fénix y la familia Mirumoto del Clan del Dragón,
des familles Shiba du Clan du Phénix ou Mirumo-
les sanctuaires también acostumbran a tener un kamidana en
to du Clan du Dragon, ont aussi tendance à dis-
su casa. También es posible encontrarlos en bar-
des fortunes poser d’un kamidana dans leur foyer. Ces petits
cos (especialmente en los del Clan de la Mantis),
autels se trouvent également sur des navires
para que los marineros sigan pudiendo adorar a
Les sanctuaires des fortunes se ressemblent presque tous, (notamment ceux du Clan de la Mante) afin que
las fortunas en el mar.
même si leur disposition et leur architecture varient d’un les marins puissent prier les fortunes en mer.
clan à l’autre. Les sanctuaires des Fortunes majeures se
trouvent dans tout l’Empire. Chacune d’entre elles pos-
sède un sanctuaire principal : l’agencement et les ensei-
Cependant, chaque famille de samouraïs entretient
gnements de tous les autres en découlent.
un sanctuaire des ancêtres sur ses terres, qu’il soit installé
Les sanctuaires des fortunes font souvent partie des
à l’écart ou directement dans sa demeure. De tels autels
plus grands édifices de ce type et peuvent parfois être
sont en général modestes et discrets, et contiennent des
aussi imposants qu’un temple : ils disposent presque tou-
représentations de chaque ancêtre honoré, la plupart du
jours d’au moins un torii et d’un honden dans lequel le
temps sous la forme de peintures ou de statues, ainsi
shintai est conservé. Celui-ci est en général un objet que
qu’au moins un objet ayant appartenu à chaque ancêtre
possédait la fortune de son vivant (dans le sanctuaire
de son vivant, afin d’attirer ce dernier sur place.
principal) ou un portrait à son image. Un escalier ou un
Les familles des clans majeurs entretiennent également
chemin mène au torii, derrière lequel se tient un espace
des sanctuaires dédiés à leur fondateur ou à leur fonda-
carré et clôturé où sont installées les autres structures du
trice. Ceux-ci sont les plus grandioses et se confondent
sanctuaire. Ces sanctuaires sont construits de sorte qu’ils
facilement avec des sanctuaires consacrés aux fortunes :
dérangent le moins possible le paysage : un ruisseau
en effet, ils possèdent des dispositions similaires et des
peut les traverser, la salle de prière peut être bâtie autour
éléments communs, tels que des torii, des bassins de puri-
d’une pierre ou d’un chêne sacré, ou bien le chemin qui y
fication et des salles de prière. Les gardiens de ces sanc-
conduit peut avoir été dangereusement taillé dans le flanc
tuaires incarnent la philosophie de l’ancêtre qu’ils vénèrent
d’une montagne.
et cherchent à égaler. Les plus imposants de ces sanc-
Des sanctuaires dédiés aux Fortunes majeures sont
tuaires sont évidemment ceux des fondateurs de clan et le
souvent intégrés à d’autres sanctuaires de moindre impor-
sanctuaire du Kami Hantei.
tance. En général, ils sont alors de la taille d’un nichoir et

le sanctuaire
contiennent des versions miniatures de tout ce que leurs
homologues de taille normale nécessitent.
de la ki-rin
Les sanctuaires des ancêtres
Au sommet d’une montagne isolée, dans les terres les plus
Tous les grands sanctuaires consacrent une petite zone à occidentales du Clan du Phénix, se dresse un modeste sanc-
la vénération des ancêtres, en général sous la forme d’un tuaire. Sans son torii massif, clairement visible depuis les
autel inoccupé sur lequel les visiteurs placent le shintai de alentours, il serait facile de le manquer. Une légende pré-
leur ancêtre. Le plus souvent, cet objet est une modeste tend que de petits troupeaux de Ki-Rin parcourent encore
tablette en bois qui arbore le nom de l’aïeul en question. les environs, dans les clairières et les torrents dissimulés.

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C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

Ceux qui cherchent à obtenir leurs faveurs déposent des épais shimenawa entoure son encolure. Sur le piédestal en
offrandes sur l’autel du sanctuaire et prient pour apercevoir pierre, ces antiques mots sont gravés : « Contemplez l’hori-
les mystérieuses créatures. zon, car les visions qui s’y trouvent appartiennent au futur ».
Des offrandes sont disposées un peu partout à son pied :
Son histoire du chou découpé, des glands polis, des verres de saké et
des cônes d’encens qui diffusent un parfum entêtant d’anis
La fondation du sanctuaire de la Ki-Rin demeure incon- et d’épices.
nue. D’après la légende locale, Dame Shinjo s’est reposée Les gardiens du sanctuaire forment un petit groupe
au bord du précipice qui le longe avant d’entreprendre très uni. Le prêtre à sa tête, un homme d’âge mûr du nom
son voyage hors de l’Empire. Au coucher du soleil, elle de Hinoki, a obtenu son poste récemment. Sa position est
a aperçu un Ki-Rin, un mystérieux équidé né du royaume délicate, car il est responsable d’un sanctuaire d’impor-
Céleste. Une statue a été érigée sur le lieu de la rencontre. tance, sans pour autant être de noble extraction. Quelques
En raison de la place importante qu’occupe le sanc- gardiens effectuent les tâches quotidiennes des lieux en
tuaire de la Ki-Rin dans l’histoire du Clan de la Licorne, il balayant, en bénissant les sols et en aidant les pèlerins.
est devenu une destination fréquente pour les pèlerins de L’équipe a récemment vu l’ajout d’un nouveau membre :
ce clan. Un accord de longue date autorise les visiteurs du Kaito Hinowa, une gardienne de sanctuaire rustique issue
Clan de la Licorne à se rendre au sanctuaire comme bon de la famille Kaito. Les traditions de cette dernière sont
leur semble, une politesse valable même en période de dédiées à la protection des sanctuaires contre le déséqui-
guerre, et qui ne nécessite pas de laissez-passer. libre spirituel et ont conduit Hinowa jusqu’au sanctuaire de
la Ki-Rin. Elle pense que les kamis veulent qu’elle reste en
Approcher du sanctuaire ces lieux et qu’elle en garde le sol sacré. Aucun prêtre ne
refuserait la protection d’un Kaito. Cependant, Hinoki ne
Le sanctuaire de la Ki-Rin se trouve environ à une l’accueille plus de bon cœur, car malgré ses bonnes inten-
demi-journée de voyage de Shiro Gisu, dans la monta- tions, Hinowa n’est pas coutumière des traditions uniques
gneuse province Asako. La côte rocailleuse est couverte du sanctuaire, et elle dérange. Par respect pour le rang
d’une dense forêt. Elle borde des rapides sinueux dont d’Hinowa, Hinoki n’ose pas la renvoyer, mais sa patience
le réseau descend en cascade des plateaux supérieurs atteint ses limites.
jusque dans les étroites vallées. De loin, seul le torii écar-
late du sanctuaire est visible. Il n’y a pas de route. Des lan-
ternes de pierre indiquent subtilement le chemin à inter-
valles réguliers, et le recours à des guides est souvent
nécessaire pour les trouver. À l’aube et au crépuscule, les les ki-rin
voyageurs peuvent entendre le tambour lointain des taiko
qui retentit depuis le sommet des montagnes. Les Ki-Rin font partie des créatures mystiques les
Enfin, la pente s’adoucit et se transforme en un sen- moins comprises de Rokugan. Ils seraient origi-
tier détérioré le long de nombreuses cascades. La brise naires du Tengoku, mais ils errent en troupeaux
rafraîchissante devient plus froide avec l’altitude. La forêt dans tous les royaumes des esprits. Selon les
finit par laisser place à des rochers nus et à des pins soli- légendes locales, ils n’apparaissent qu’aux plus
taires dans l’air glacial de la montagne. Le chemin passe vertueux ou aux plus malfaisants pour octroyer
sous un torii et conduit, plus haut, à l’arche massive qui leurs bénédictions aux premiers et accabler les
domine le pic érodé. Au-delà du second sommet se seconds de malédictions.
trouve un plateau qui offre une vue à couper le souffle Le plus souvent, un Ki-Rin ressemble à un
sur les terres du Clan du Phénix qui s’étendent à l’est et cheval ou à un cerf à tête de dragon enveloppé
au sud, ainsi que sur les plaines du Cœur du Dragon qui de flammes et de fumée, dont la queue évoque
occupent l’ouest. celle d’un tigre ou d’un bœuf. Certaines per-
Ceux qui s’attendent à une architecture grandiose sonnes affirment que ces créatures ne possèdent
typique des sanctuaires du Clan du Phénix sont en géné- qu’une corne sur le front, tandis que d’autres
ral déçus : ils se trouvent plutôt face à une poignée de bâti- clament qu’elles présentent deux bois tournés
ments modestes qui entourent le plateau montagneux. Plu- vers l’arrière. Selon les écrits du Clan du Phé-
sieurs d’entre eux renferment les quartiers résidentiels, et un nix, les Ki-Rin peuvent scruter le cœur des mor-
autre édifice d’une seule pièce est dédié aux affaires admi- tels et ainsi découvrir le karma de ceux-ci. Dans
nistratives. Le sanctuaire ne dispose ni d’une salle de prière, les légendes du Clan de la Licorne, les Ki-Rin
ni d’un jardin de méditation, ni d’un honden où conserver se montrent si compatissants qu’ils lévitent
le shintai. Au lieu de ces éléments, il n’est constitué que au-dessus du sol afin de ne blesser aucun être,
d’une seule statue, un Ki-Rin de marbre enveloppé de pas même le moindre brin d’herbe.
flammes sculptées et tourné face aux monts de la Grande
Muraille Septentrionale. Ses yeux sont sertis de jade, et un

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CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

pèlerine mélancolique quelques rumeurs


ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  3 2 $ Un Ki-Rin apparaît à quelqu’un presque
Cette jeune femme réservée est telle la feuille de chêne chaque jour, mais uniquement si la per-
emportée par le vent printanier : elle ne sait ni où est sa sonne est seule.
place, ni où elle finira par atterrir. Cadette d’une fratrie
de six enfants, elle n’a passé son gempuku que cinq mois
$ D’étranges empreintes de sabots ont été
plus tôt. Elle se sent perdue et n’a pas d’objectif dans la découvertes à proximité du sanctuaire,
vie. Takeko espère apercevoir un légendaire Ki-Rin et ainsi où elles avaient carbonisé le sol et laissé
trouver l’inspiration qui donnera un sens à son existence. des brûlures dans la pierre, ainsi que des
Quiconque lui montrera un chemin à suivre gagnera son braises dans la terre. Le lendemain, il n’en
indéfectible et farouche loyauté. restait aucune trace.
$ Les patrouilles frontalières de Shiro Gisu
SOCIÉTAL PERSONNEL sont de plus en plus nombreuses, et les
60 HONNEUR ENDURANCE
12 éclaireurs Shiba prennent les pèlerins du
3 2 Clan de la Licorne en filature. Les consé-
40 GLOIRE SANG-FROID
10 quences des tensions croissantes entre les
3 2 clans du Phénix et de la Licorne se font
39 STATUT 3 ATTENTION
4 sentir jusqu’ici…

+1, +1, –2


ATTITUDE : DÉTACHÉ
VIGILANCE
2
démons ne sont que des prêtres costumés, et leur défaite
ARTISANAL 1 MARTIAL 2 SAVANT 2 SOCIAL 0 PRO. 0 une simple cérémonie à grand spectacle qui n’en reste pas
moins indispensable à la récolte automnale.
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
La fête de Setsuban la plus élaborée de l’Empire se
t r e ti s re es déroule au sanctuaire de la Ki-Rin, et elle offre l’une des
 social ; relations  social ; mental plus grandes démonstrations de kitō de tout Rokugan.
Ce grand tournoi oppose des shugenja venus de partout.
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS Chaque participant met en jeu une précieuse relique ou un
rouleau contenant des enseignements sacrés de son dojo,
t   : portée 1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5/7 ; Acéré,
de son monastère, de son temple ou de sa bibliothèque.
Cérémoniel
Les shugenja s’affrontent en duel dans une « bataille »
i e e t rt ) : tunique ordinaire (Résistance phy- d’invocations, une démonstration de puissance desti-
sique 1 ; Ordinaire), wakizashi, une poignée de bu née à effrayer les démons estivaux qui en sont témoins.
Le gagnant reçoit tous les rouleaux et toutes les reliques
CAPACITÉS mises en jeu, ainsi que les acclamations et le respect de
A N RN ses pairs. Cela dit, impossible d’effacer la honte infligée
Quand Takeko suit un présage ou un autre signe divin, par la perte d’un rouleau : les participants à ce tournoi sont
elle et ses alliés de la scène éliminent 1 point de Fatigue donc en général sûrs d’eux, stupides ou désespérés.
chaque fois qu’ils subissent au moins 1 point de Conflit.

La fête de Setsuban
Cette fête annuelle, pendant automnal de celle de
Setsubun qui se tient au début printemps, célèbre le
passage de l’été à l’automne. L’été est la saison de la
guerre dans l’Empire d’Émeraude, et il est impératif
que les maux créés durant ces mois disparaissent et
ne viennent pas souiller les récoltes avant la moisson.
Dans tous les sanctuaires de Rokugan, on convoque
symboliquement les démons dans lesquels se
concentrent alors tous les maux de l’année écou-
lée. Les prêtres « tuent » ensuite ces démons,
s’assurant au passage que les malheurs de
l’été meurent avec eux. Bien entendu, ces
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benten seidō quelques rumeurs


Les sanctuaires des Fortunes majeures sont disséminés
dans tout l’Empire, et le plus grand et le plus impression-
nant de ceux qui sont dédiés à Benten se dresse sur les $ Une des reliques conservées dans la grotte
terres du Clan de la Grue. Ce sanctuaire, le premier érigé sacrée n’est autre que le biwa que Kakita a
en l’honneur de la Fortune des arts et de l’amour roman- sculpté dans un morceau de bois flottant,
tique, marque la frontière entre les terres septentrionales réussissant ainsi l’exploit de « ramener à la
du clan et ses terres australes, plus rustiques. Les amou- vie ce qui est mort » et s’attirant l’amour
reux entêtés traversent l’Empire pour s’y rendre afin d’ob- de Doji en personne. Il n’est presque
enir le n eil de en en e la r e de en en Seid jamais retiré de l’étoffe dans laquelle il
est pavée d’autant d’histoires tragiques que de récits à la est conservé.
fin heureuse. $ Le prêtre Kanawa était autrefois un noble
de la famille Kakita et un séducteur sans
Son histoire vergogne. Il a laissé dans son sillage
nombre de cœurs brisés, puis un évé-
Benten incarne une vertu que les samouraïs se doivent nement lui fit prendre conscience de sa
d’ignorer, et sa relation avec le peuple de Rokugan est cruauté. Honteux d’avoir abusé des béné-
donc pour le moins inhabituelle. Il en va de même pour dictions de Benten, il vit à présent au sanc-
son magnifique sanctuaire, construit afin d’apaiser la tuaire pour expier ses fautes.
Fortune, qu’un Champion du Clan de la Grue insensible
$ Une des gardiennes du sanctuaire serait
avait offensée. Il avait forcé sa fille à choisir entre l’homme
Benten en personne, mais nul ne sait avec
qu’elle aimait et sa vie. Elle choisit la mort et sauta d’une
certitude de laquelle il s’agit.
falaise surplombant une rivière tumultueuse. La légende
raconte qu’une immense bourrasque monta des flots et
ramena la jeune femme au sommet de la paroi, jusque
dans les bras de son amant. Le Champion, gêné, vit là le
jugement de Benten et organisa le mariage des jeunes possède à présent tout d’une auberge si ce n’est le nom.
gens, avant d’ériger le sanctuaire pour remercier la For- Les bénéfices reviennent directement au sanctuaire, tout
tune de son intervention. Depuis, les pèlerins amoureux comme les innombrables pièces qui scintillent dans l’eau
s’arrêtent souvent dans ces lieux, tout comme les artisans après que les pèlerins les y ont jetées pour exprimer leurs
en quête d’une muse. souhaits. Le sol sur lequel est bâti le sanctuaire est irré-
gulier : la salle de prière, étagée, et les édifices attenants
sont donc reliés par des ponts de corde et des volées de
Approcher du sanctuaire marches suspendues. Une grotte fait office de honden :
r a eindre en en Seid le lerin d i en ra er- un ruisseau glacé la traverse, issu de la fonte des glaces
ser l’étroit col du Vent glacé, puis franchir l’extrémité est du plus haut sommet des Seikitsu. La rencontre des eaux
des monts Seikitsu. Bien que les visites soient fréquentes glacées et chaudes crée un nuage de vapeur qui se répand
au sanctuaire, le chemin qui y mène est mal entretenu, doucement hors de la grotte.
inégal et jonché de rochers et de plantes enchevêtrées. e r re en e nd de en en Seid e n e
Les prêtres laissent volontairement la route dans cet état Kawana, un très vieil homme complètement dévoué aux
déplorable : après tout, la voie vers l’amour véritable doit enseignements de la Fortune. La nature de plus en plus
être semée d’embûches. commerciale du sanctuaire lui déplaît très clairement, et il
L’ascension prend une journée. Près du but, cent huit se plaint à quiconque lui prête l’oreille que le commerce
torii forment un tunnel autour de marches escarpées issu de la gestion d’un hôtel et de sources chaudes souille
construites à même la pente. Des papiers couverts de la sacralité du site. Il est souvent vu en train de jouer du
confessions jonchent les escaliers, ainsi que des pétales biwa et de réciter des mantras en dehors des jardins clôtu-
roses et des poèmes d’amour. En haut, un lac scintillant rés des quartiers des invités. Il espère ainsi rappeler à tous
entouré de cerisiers et d’érables accueille les pèlerins. Le la raison de leur présence.
vent transporte sur les eaux chaudes des odeurs d’encens La prêtresse en chef s’appelle Tsubaki, une orpheline que
et le pépiement des bouscarles chanteuses. Un pont cré- son prédécesseur a mystérieusement nommée pour lui suc-
nelé en bois dépourvu de rambardes mène à la petite île céder. Même si elle n’a reçu qu’une formation de gardienne
sur laquelle se trouve le sanctuaire. de sanctuaire, elle s’est révélée particulièrement efficace dans
en en Seid re e le l n le e h elier la gestion du sanctuaire. Tsubaki se montre toujours gaie et
qu’à un véritable sanctuaire, en partie à cause des sources patiente. Elle considère avec un franc amusement le mécon-
chaudes qui alimentent le lac. En raison du nombre de visi- tentement de Kawana, qu’elle surnomme « grand-père »,
teurs, il a été décidé d’agrandir la salle des invités, qui quant au commerce auquel se livre le sanctuaire.

158
CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

Suzume Hinagiku, cœur égaré


idée d’aventure :
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  1 3
une fortune
Hinagiku du Clan du Moineau, originaire d’une vallée rus-
tique, est une jeune femme brillante qui a toute la vie offensée
devant elle. La voir ainsi déambuler, l’air triste et sans par-
ler er nne dan la alle de ri re de en en Seid Accroche Hisao, fils du gouverneur Daidoji
est donc particulièrement déconcertant. Son souffle n’est Haranobu, s’apprête à se marier, à la grande
que lourds soupirs, ses légers sourires sont mélancoliques, fierté de son père. La lignée Seppun de sa future
et ses mots sont peu nombreux… à l’opposé des divaga- belle-fille couvrira sa famille d’honneur : il a
tions interminables pour lesquelles sa famille est réputée. donc dépensé sans compter pour obtenir que
Elle ne dira rien de ce qui la pousse à hanter les salles le ariage e d r le en en Seid alhe -
sacrées de la Fortune des arts et de l’amour romantique, reusement, la cérémonie a dû être reportée suite
mais elle ne partira pas pour autant, pas avant d’avoir don- à neuf jours de pluies incessantes. Haranobu
né un sens à ce qui tourmente son cœur. est bouleversé et cherche l’aide de samouraïs
compétents pour découvrir ce qui a offensé les
SOCIÉTAL PERSONNEL
esprits, et surtout ce qui pourrait les apaiser.
45 HONNEUR ENDURANCE
8 Développement
3 1 Lorsque les PJ se ren-
seignent sur la météo, Tsubaki, la prêtresse en
40 GLOIRE SANG-FROID
8
2 2 chef, leur confirme que la tempête n’a rien de
25 STATUT 2 ATTENTION
5 naturel. S’ils l’interrogent plus avant, elle émet
l’hypothèse que la Fortune pourrait être en
+1, –1
ATTITUDE : ABATTU
VIGILANCE
2 colère. Mais qu’est-ce qui aurait pu offenser la
Fortune de l’amour romantique ?
Questionné, Hisao admet qu’il n’éprouve
ARTISANAL 1 MARTIAL 0 SAVANT 3 SOCIAL 0 PRO. 2 aucun sentiment pour sa fiancée Meiko, mais
qu’il est prêt à accomplir son devoir. Il peut aus-
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
si évoquer en passant son affection pour son
e e te ire ret amie d’enfance, Suzume Hinagiku, que les PJ
 savant ; mental  professionnel ; relations ont aperçue se morfondre dans le sanctuaire, en
proie à un intense désarroi. La jeune femme ne
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS veut pas parler de sa tristesse, mais un interro-
gateur compatissant pourrait découvrir qu’elle a
i s i : portée 0-1 ; dégâts 3 ; Dangerosité 5/7 ; Acé-
fait part de son amour à Hisao dans une lettre…
ré, Cérémoniel
pour n’essuyer qu’une rebuffade.
i e e t rt )  : kimono en toile de jute (Résis-
tance physique 1 ; Ordinaire), sac de voyage, journal, bijou
三 Paroxysme Grâce à des questions rusées ou
à une subtile duplicité, les PJ découvrent que
de Benten
Haranobu a intercepté la lettre de Hinagiku et
CAPACITÉS a contrefait une réponse écrite dans laquelle
« Hisao » la repoussait avec mépris. Benten en
GR N N
personne est donc en colère qu’Haranobu ose
Quand Suzume Hinagiku parle de la personne qu’elle aime organiser un mariage politique dans son sanc-
ou de ses propres émotions, on considère qu’elle pos- tuaire. La Fortune risque même d’accabler
sède 3 rangs dans ses compétences sociales. Une fois par encore plus la lignée du gouverneur pour le
scène, les personnages qui l’entendent parler avec sincéri- punir de son audace. Annuler la noce représen-
té peuvent éliminer 3 points de Conflit. terait une grave insulte pour les Seppun, et les
Daidoji perdraient grandement la face. Les PJ
doivent donc décider s’ils risquent de se désho-
norer, ainsi que Haranobu, en révélant la vérité
ou si le mariage peut être sauvé.

159
C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

le sanctuaire du kami quelques rumeurs


saule-guérisseur
Le village de l’Eau pure est la plus grande cité portuaire $ r a ai er i ga i le a i l i a
du Clan du Crabe et un important pôle de commerce, qui offert sa bonne santé. L’esprit faiblit donc
abrite aussi l’un des plus anciens sanctuaires de l’Empire. de décennie en décennie, et il aurait
Situé sur un îlot rocheux juste au-delà des docks, celui-ci même dû mourir depuis bien longtemps. À
consiste en une simple lanterne de pierre au pied d’un saule présent, l’arbre est vide, et plus personne
crevette. Bien que certains ne le remarquent pas en passant n’entend les prières qui lui sont adressées.
à côté, sans le kami du Saule-Guérisseur qui y réside, le vil-
lage de l’Eau pure n’existerait tout simplement pas.
$ Lors des tremblements de terre, un ancien
dragon de l’eau se dispute avec Sui-
jin, ce qui entraîne l’éruption des volcans
Son histoire sous-marins. Les conséquences seraient
Le village de l’Eau pure n’a plus rien d’un village, si ce n’est bien plus terribles sans les interventions du
le nom. Cependant, dans le passé, ce n’était qu’un minus- kami Saule-Guérisseur pour calmer le dra-
cule campement de pêcheurs sur l’estuaire de la rivière de gon et la fortune.
l’Or, surplombant la baie des Poissons morts. Malgré sa $ Au cours du festival du kami Saule-Guérisseur,
petite taille, la famille Yasuki y attachait une grande impor- le kodama prend forme humaine et se mêle
tance, car elle en retirait les richesses de la mer et nourris- aux mortels qui assistent à la fête.
sait son clan grâce aux prises quotidiennes effectuées dans
$ Le gardien du sanctuaire est contrarié : il
les eaux anormalement chaudes de la baie.
joue de malchance dans toutes ses amitiés
L’histoire n’a pas retenu les détails de l’offense des
et ses aventures potentielles. C’est comme
ha i an en er i ga i ai a r d de i e
s’il était maudit !
siècle, la fortune de la pestilence leur fit part de son mécon-
tentement. Une épidémie de peste terrifiante se répandit
dans le campement, entraînant fièvres, bubons squameux
et emplis de pus sur tout le corps, douleurs musculaires,
feuilles sans couleur qui tombent doucement des branches
faiblesse et, au final, mort. Même les poissons semblaient
affaissées dans l’eau, où elles se reflètent. L’épais shime-
affectés par la maladie et, alors que celle-ci se propageait
nawa qui entoure le tronc irrégulier ne laisse aucun doute :
rapidement parmi les habitants, les prêtres déposèrent
le visiteur contemple la demeure bénie d’un ancien esprit.
idienne en de rande i ga i ri l -
Les pèlerins sont rares. Les raisons de rendre visite au
rer sa pitié.
kami Saule-Guérisseur le sont tout autant, et l’esprit ne
Tout aurait été perdu sans l’intervention d’un kodama
s’est pas manifesté depuis des décennies. Cependant,
solitaire, l’esprit d’un humble et jeune saule. Quand la fil-
certains laissent régulièrement des offrandes sous la forme
lette qui lui rendait visite chaque jour pour jouer dans ses
d’encens et de saké afin de remercier le gentil kodama et
branches attrapa la maladie et fut sur le point de mourir,
de lui demander humblement sa protection éternelle.
le kodama alla rencontrer la fortune et passa un marché
en échange des vies des habitants. Personne ne sait ce
e l’e ri ri i ga i n re a l en e ai
lorsque l’affliction disparut miraculeusement, les branches
du saule, autrefois fortes, s’affaissèrent, son écorce devint
grise et molle, et ses feuilles d’un vert vif blanchirent. Elles
sont restées ainsi depuis.

Approcher du sanctuaire
Puisque le sanctuaire du kami Saule-Guérisseur s’élève sur
un îlot rocheux au-delà des docks bruissant d’activité, il
faut s’y rendre par bateau. Dans ce but, un kobune bénit
est accessible, décoré de bandelettes de papier et d’un
torii, et nombre de personnes le considèrent comme par-
tie intégrante du sanctuaire.
De l’autre côté de la petite île se dresse le modeste
sanctuaire : une lanterne de pierre haute de quelques
dizaines de centimètres installée au pied d’un saule cre-
vette de deux mètres. Cet arbre ancien est perpétuelle-
ment en fleurs, orné de pétales roses et marbrés et de

160
CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

N R R A A A
Kuni Kayo, jardinier du saule
Une fois par scène et au prix d’une action de Soutien, Kayo
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  5 3 peut conjurer le Kodama du Saule tant qu’il se tient à por-
Le devoir de Kuni Kayo, descendant du tout premier gar- tée 0-5 du sanctuaire du kami Saule-Guérisseur. Le Koda-
dien du sanctuaire du kami Saule-Guérisseur, est obscur ma du Saule apparaît pour combattre les ennemis de Kayo
et solitaire. Il s’occupe seul des lieux, tout comme son ou protéger celui-ci d’une autre façon, et ce, jusqu’à la fin
père, sa grand-mère et tous ses autres ancêtres avant lui. de la scène.
Heureusement, le kodama du saule lui tient compagnie.
L’esprit lui parle avec beaucoup de tendresse, et leurs
conversations interminables attirent de nombreux curieux
(et amènent certains à penser que le gardien est un peu LeRANG
ANTAGONISTE Kodama du Saule
DE CONFRONTATION 7 4
étrange). Kayo, un homme déterminé, instruit et à peine Le kodama du saule ne s’est pas manifesté depuis des
antipathique (comparés aux autres Kuni), rêve en secret de générations, mais une prière intense le tirera de son pro-
plus grandes aventures, mais il n’abandonnera jamais ni fond sommeil. S’il apparaît, il prend la forme d’un être bos-
son devoir ni le kodama avec qui il s’est lié d’amitié. su à la longue chevelure blanche, à la peau noueuse et
Le gardien du sanctuaire n’a ni femme ni descendance, grise, similaire à de l’écorce, et aux yeux doux.
mais il désire se marier. Cependant, sa malchance et ses
mystérieuses fonctions jouent contre lui, et il ne sait plus
quoi faire. Le kodama semble inquiet, voire jaloux, si le 4 1
ENDURANCE
12 ATTENTION
3
sujet du mariage est évoqué en sa présence. On dirait
presque qu’il ne souhaite pas que Kayo se marie, de peur
SANG-FROID
8 VIGILANCE
2
de perdre ses attentions. L’esprit ne serait tout de même 4 4 1 +2, –2
pas responsable de la malchance amoureuse de l’homme ? ATTITUDE : CALME

SOCIÉTAL PERSONNEL ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 2 SOCIAL 1 PRO. 0

40 HONNEUR ENDURANCE
12 AVANTAGES DÉSAVANTAGES
4 1
iss tes r i es A r rt
40 GLOIRE SANG-FROID
14
2 3  martial ; physique  social ; mental
25 STATUT 3 ATTENTION
4
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
+2, –2 VIGILANCE
1
ATTITUDE : BOURRU r es ette ses : portée 0-2 ; dégâts 6 ; Dangerosi-
té 3 ; inflige des dégâts physiques ou surnaturels
ARTISANAL 0 MARTIAL 2 SAVANT 4 SOCIAL 0 PRO. 0
i e e t rt )  : écorce épaisse (Résistance phy-
AVANTAGES DÉSAVANTAGES sique 4 ; Sacré)
s rit ti e e er t e e CAPACITÉS
 social ; mental  social ; relations
N N A A
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS Une fois par scène, au prix d’une action de Soutien, le
Kodama du Saule peut prendre pour cible autant de per-
 : portée 1-2 ; dégâts 6 ; Dangerosité 2 ; Ordinaire
sonnages situés à portée 0-5 qu’il le souhaite. Chaque per-
i e e t rt )  :  kimono (Résistance physique 1 ; sonnage pris pour cible élimine 4 points de Fatigue, ainsi
Ordinaire), livre de chevet, bouteille de saké qu’un état au choix du Kodama.
R AN A
CAPACITÉS
Le Kodama du Saule est une créature Extérieure de gaba-
A R N
rit 2. De plus, une fois par scène et au prix d’une action du
Au prix d’une action de Soutien, Kayo peut effectuer un type approprié, il peut accomplir n’importe quelle invoca-
test e ie erre) N  1 prenant pour cible un per- tion de la Terre ou de l’Eau de rang 1 ou 2. Il réussit avec
sonnage situé à portée 0-1. En cas de réussite, la cible 3 succès bonus et 2 .
diminue de 2 points le ND de tous ses tests pour résis-
ter aux effets du poison et de la maladie (jusqu’à un ND
minimum de 1) et ne peut pas s’enivrer. Cet effet persiste
jusqu’à la fin de la scène.

161
C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

Les croyances interdites


Leur existence est une honte pour le clan qui les abrite, et
un Rokugani digne de ce nom les détruira sur-le-champ.

Le shintao n’est pas la seule religion de Rokugan. Des Les sanctuaires corrompus
cultes dédiés à Sire Lune, qui déteste les humains,
cherchent à lui conférer plus de puissance et à précipiter Quand un sanctuaire se délabre, l’esprit qui l’habite fuit,
son jugement sur ses enfants. L’organisation des adeptes ou un élément malsain peut pénétrer l’espace sacré et
du sang essaie de libérer Iuchiban. Des individus pétris s’y développer : les lieux deviennent alors corrompus. Le
d’égoïsme, à la recherche d’un pouvoir incommensurable, même résultat survient lorsqu’un royaume de pénitence
se tournent vers l’art des malédictions et marchandent el e le hig le a i-d ’e are de erre
avec des oni. Le monde contient moult dangers, et les d’ n an aire e re la e l’ nergie d ingen-d e
royaumes des esprits en renferment leur part. esprits de ces royaumes expulsent l’esprit des lieux ou le
transforment en une entité malveillante.

de sombres sanctuaires,
Insidieusement, les sanctuaires corrompus ressemblent
à des sanctuaires normaux, sauf pour celles et ceux qui
de nobles buts peuvent sentir leur nature. Des particules de poussière
flottent dans l’air pesant, les eaux bénites semblent tièdes,
Tous les esprits ne sont pas bienveillants. Certains, tels et les efforts pour nettoyer les lieux ne parviennent jamais
que les terribles oni, émergent du Jigoku pour semer le à les rendre tout à fait propres. Le sol résiste à la consécra-
ha a ingen-d ’a re n i i e d’ n d i- tion, car les fortunes et les ancêtres ont abandonné l’en-
libre, comme le dragon maudit P’an Ku, enfermé dans le droit. Quant aux kamis qui y sont liés, l’état du sanctuaire
royaume des mortels. D’autres enfin ne font que leur devoir, les irrite, ou pire, les transforme en kansen, des esprits mal-
par exemple la redoutable fortune de la pestilence. veillants Souillés par l’influence du Jigoku.
Il faut craindre et révérer des esprits aussi terrifiants,
au même titre que les autres. Les clans entretiennent des
sanctuaires dédiés aux esprits malins comme aux esprits
bienveillants, et des offrandes sont déposées sur leurs
autels. De tels lieux sont courants dans l’Empire. Les
Doji s’occupent des plus grands sanctuaires de la
fortune de la pestilence, et une partie des récoltes
rin i ale n r l e r l’a el d’ i ga i
afin qu’il ne vienne pas lui-même ramasser
son dû. Sur les terres du Clan du Dragon, la
famille Agasha gère des sanctuaires dédiés
a hig e a a i-d r ain enir
un équilibre avec les sanctuaires bienveillants
consacrés au Meido et au Tengoku. On pour-
rait se demander pour quelles raisons les
Rokugani entretiennent de tels sanctuaires
maudits, mais certaines forces ne peuvent
pas être vaincues, seulement apaisées.
Mieux vaut qu’elles résident là plutôt que
d’errer librement dans Rokugan !

inviter le mal
Cachés aux yeux de tous, des sanc-
tuaires secrets honorent des esprits
ennemis de l’Ordre céleste ou de l’hu-
manité. Ces lieux sont entretenus par
des cultes hérétiques dévoués aux
forces des ténèbres. Parmi ceux-ci, cer-
tains sombrent dans une spirale nihiliste
et autodestructrice, tandis que d’autres
sont simplement désespérés ou désa-
busés par le culte des fortunes. Ces
sanctuaires perturbent sauvagement
l’harmonie naturelle et constituent une
menace directe au bien-être de Rokugan.

162
CHAPIT R E 4 : L ES L IEU X SACR ÉS

des fortunes malveillantes


Toutes les fortunes possèdent un aspect paisible $ s i r rt e ri   : elle a
et un autre colérique, mais certaines préfèrent par- pour rôle de rendre les mortels parfaitement
fois de loin leur côté irritable. Les villageois aiment n ien e le r e a ingen-d e
mieux éviter d’attirer l’attention de telles fortunes : limité, de façon à ce qu’ils ne le perdent pas.
ils déposent alors des offrandes pour les apaiser ou $ ir rt e e t rt re : de son vivant,
les enjoindre à poursuivre leur chemin. Voici une liste
Suzume Kirako a protesté contre la torture d’un
non exhaustive de fortunes de ce genre :
samouraï auprès du Chrysanthème d’acier. Pour
la punir, celui-ci l’a fait torturer à mort, puis l’a
$ i i rt e e esti e e : cette for-
élevée au rang de fortune de la torture. Elle est
tune malveillante répand la maladie et les afflic-
ainsi devenue pour toujours l’incarnation et le
i n ai a d e elle er r jin
témoin de ce qu’elle méprisait le plus.
la fortune de la longévité, et entretient l’équilibre,
de sorte que la vie ne l’emporte jamais sur la mort. $ t ire e : père des Kamis et mari
d’Amaterasu, Onnotangu est persuadé que sa
$ s rt e e e e e  :
famille l’a trahi. Tout le monde connaît sa haine
Hofukushu serait plus âgé que la fortune de la
pour le royaume des mortels.
justice. Les personnes lésées lui adressent leurs
prières, tandis que celles qui se sentent cou-
pables cherchent à l’éviter.

Un sanctuaire peut se délabrer si personne ne s’en et, parfois, les fortunes ne parviennent pas à déloger les
occupe, mais ce n’est pas suffisant pour que la corruption esprits les plus résistants. Par conséquent, un shugenja a
s’en empare. Cette dernière doit venir de l’extérieur. Parfois, tout intérêt à exorciser un tel sanctuaire : il sauve ainsi des
elle survient par accident, par exemple lorsqu’une personne vies innocentes et obtient au passage les faveurs de la for-
impure passe sous le torii et pénètre dans le sanctuaire. tune concernée. Mais cela semble plus facile à dire qu’à
Le plus souvent, les responsables sont des forces mal- faire, car il est rare de pouvoir combattre un esprit directe-
eillan e e la ah e er nne i r eillen le ment : la plupart doivent plutôt être apaisés.
sanctuaire peuvent renverser la spirale qui mène à sa corrup-
tion, mais une fois que celle-ci est totale, nettoyer complète-
Les sanctuaires de l’Outremonde
ment l’impureté devient une tâche particulièrement difficile.
Si l’Outremonde s’en mêle, c’est presque impossible. Les plus ignobles et impurs des sanctuaires sont ceux
’ rigen le ah - ai r le ni le an en re -
Les sanctuaires hantés sés à l’écart de la civilisation, ces sanctuaires alimentent
les forces du Jigoku, créant ainsi des lieux qui attirent les
De par la nature des sanctuaires, ceux-ci sont au moins kansen et où les oni peuvent se manifester. Sur place, la
en partie « hantés », mais par des esprits bienveillants. touche corruptrice de l’Outremonde est tangible, et ceux
Cependant, les sanctuaires qu’on qualifie ainsi étouffent qui se recueillent sur ces autels impies repartent Souillés.
sous la poigne des esprits malveillants, qui chassent les Dans ces sanctuaires, la présence de la corruption et
êtres vivants des lieux. Plusieurs événements peuvent de l’immondice est désirée, l’architecture incorpore ainsi
être à l’origine de cet état, par exemple des funérailles des éléments impurs, comme des os ou du sang. Des êtres
ratées, un ancêtre irrité ou, dans certains cas, la libération vivants peuvent être emmurés dans les fondations : leur
d’un esprit malveillant que les gardiens du sanctuaire vou- douloureuse torture donne alors naissance à des gardiens
laient emprisonner. Quelle qu’en soit la cause, des esprits d’un autre monde qui se mettent au service du démon
infestent à présent les lieux. Ils font échouer les consécra- des lieux.
tions et chassent l’esprit qui y réside, rendant le sanctuaire Le but de ces sanctuaires consiste à offrir un lieu de pou-
inutile, avec des conséquences néfastes sur les récoltes, ir a ah - ai e - i nd i en en e re de er-
les festivals et les bénédictions. ribles rituels et font des expériences avec les kansen. Il est
Les fortunes accordent de la valeur à leurs sanc- facile de faire pression sur un oni qui habite un sanctuaire,
tuaires, et lorsque l’un d’entre eux devient hanté, sa for- afin d’obtenir une entrevue et de marchander avec lui. Le
tune essaie souvent de le récupérer. Des tremblements de suppliant peut même lui offrir son vrai nom en échange
terre secouent alors ses fondations, des inondations tentent d’un fragment de sa puissance. Au sein de ces sanctuaires,
de chasser les fantômes, ou des tempêtes surgissent pour de sinistres bibliothèques regorgent de connaissances
bannir ces esprits des lieux sacrés. Ces efforts causent tou- interdites et s’étendent sous les flèches tortueuses, tandis
jours des dommages collatéraux aux habitations proches que des objets maudits attendent d’être utilisés.

163
C H API T R E 4 : L E S L I E UX S ACR ÉS

Les chasseurs de sorciers Kuni, les inquisiteurs du Clan Au cours du huitième siècle, le Grand Maître des élé-
du Phénix et les membres de la Garde Noire du Clan du ments est parvenu devant le palais Kakita et en a trouvé
Scorpion, les Kuroiban, cherchent tous ces lieux mena- les portes closes. Face à cette insulte, il en a maudit les
çants. Quand l’un de ces groupes découvre un sanctuaire portes : tout enfant né dans le palais alors que les portes
maudit, il le passe par les flammes et sale le sol : des sont fermées conduira la famille à sa perte s’il tire son sabre.
décennies s’écouleront avant que la terre ne revive, et des Afin d’éviter cette malédiction, la famille a ordonné que
générations avant qu’elle ne puisse être à nouveau consa- les portes restent toujours ouvertes. Néanmoins, quelques
crée… si tant est qu’une telle chose soit possible un jour. malheureux ont vu le jour alors que les portes étaient fer-
Néanmoins, ces conséquences ne sont rien face à l’exis- mées : ces Kakita ne se voient pas enseigner les voies de
tence d’un tel sanctuaire. leur famille et n’ont pas le droit de toucher une lame.

des rituels interdits La mahō


En tant que chef de la religion rokugani, l’Empereur a a l ign le de ra i e e la ah e i igni ie
décrété certaines pratiques hérétiques. Les adopter repré- « magie du sang ». Clairement interdite, elle permet d’in-
sente une grave insulte envers l’Ordre céleste et est consi- voquer des kansen, des kamis corrompus par la Souil-
déré comme de la haute trahison. Un Rokugani qui adhère lure de l’Outremonde, et d’appeler à l’aide les forces du
à l’une d’entre elles est une honte pour sa famille, et son Jigoku. Ses adeptes peuvent réveiller les morts, conjurer
existence même entache l’honneur de tous ceux qui par- des démons, infliger des malédictions et obtenir les faveurs
tagent son nom de famille. Quiconque s’y adonne peut d’e ri al i e ha e re r la ah a ire le
N R NAR être tué sur-le-champ, effacé des archives de son clan, r e d ig e in i e le r a e d al a ingen-d
et oublié de ses descendants. Cependant, ceux qui sont r ili er la ah in ile de der le d n de
Un célèbre conte populaire prêts à prendre de tels risques en échange d’une ven- shugenja : il suffit d’adresser les bonnes prières à Fu Leng,
porté à la scène raconte geance semblent innombrables. suivies par une offrande de sang frais, le sien ou celui de
la conjuration d’un esprit
quelqu’un d’autre. Le sang est une substance impure qui
renard par le fils désavoué
d’un seigneur samouraï. Les malédictions entache l’esprit, mais le Jigoku le considère comme l’es-
sence de la vie mortelle : c’est donc l’offrande suprême.
Le fils marchande avec
l’esprit renard : il lui Une malédiction est une série de malheurs récurrents cau- r ’ n ah - ai re n r re ang a an en
promet de lui emmener sés par des puissances surnaturelles. Elle peut avoir pour il les force à commettre des actes impies, et lorsqu’il uti-
un boisseau de tofu grillé origine un esprit, qui suit la personne maudite et provoque lise des rituels du sang, il accepte les ignobles dons de la
chaque pleine lune s’il des désastres en restant invisible, ou être liée au karma Souillure de l’Outremonde.
accepte de hanter son de l’individu, ne se manifestant que lorsque des compor- Les animaux qui ont goûté le sang humain en veulent
père. Le renard tourmente tements précis se produisent. Les malédictions les plus toujours plus, et il en va de même pour les utilisateurs de
le seigneur samouraï à
puissantes peuvent durer sur plusieurs générations : elles la ah i e en ir n lig de ’en er ir en re e
l’aide de ses ruses et en
affligent alors chaque descendant et descendante de la encore. Le pouvoir qu’offre cet art est immense, mais il en
lui infligeant des revers
de fortune jusqu’à ce personne maudite. La plupart des méthodes pour maudire résulte une dépendance à la puissance, ainsi que la Souil-
que sa réputation et sa quelqu’un proviennent du folklore et des superstitions : lure de tout son être, et au bout du compte, l’asservisse-
richesse ne soient plus elles ne tirent donc pas leur origine des écrits des shugen- ment à Fu Leng.
qu’un souvenir. Un jour, ja. Par conséquent, elles n’entrent pas dans le champ de la
le jeune homme ne laisse
qu’un seul morceau de
religion et ne sont pas autorisées.
La sagesse populaire mentionne de nombreuses façons
Offrir son nom
tofu en guise d’offrande d’infliger une malédiction, par exemple en plantant des Les habitants du Jigoku ne désirent pas simplement du
mensuelle : le renard entre
clous dans un arbre sur lequel le portrait de la cible a été sang. Le nom d’un mortel contient aussi une puissance
dans une colère noire et
dessiné pendant l’heure du Bœuf, ou en répandant plu- importante. Les oni naissent sans forme et sans identité.
révèle l’arrangement au
seigneur samouraï. sieurs nuits de suite les cendres de son foyer sur le pas de la Ils viennent d’un endroit impie et n’ont donc aucun nom.
porte de la victime. Cependant, la plupart des malédictions Lorsqu’ils adoptent celui d’un mortel, leur puissance est
Le seigneur met le fils comportent un pacte avec un esprit farceur ou un ancêtre. multipliée au centuple.
face à ses agissements, les Les malédictions des shugenja font partie des plus Certains individus échangent leur nom avec un oni
deux hommes se disputent
craintes : en effet, puisqu’ils peuvent directement négo- contre une partie de sa puissance. Mais le nom d’un
et se menacent toute la
cier avec les esprits, leurs malédictions ont tendance à se samouraï appartient à ses ancêtres : par cet acte, il com-
nuit, à la grande satisfac-
tion du renard. Mais au révéler très puissantes. Elles affectent le karma même de la met donc une horrible trahison contre sa lignée. Le nom
bout du compte, celui-ci cible et peuvent durer pour toujours. Un des exemples les est entaché pour toujours, et ne serait-ce que l’écrire peut
s’ennuie : il règle alors la plus connus est celui de la malédiction de la famille Yogo. attirer la malchance et l’impureté sur celui qui s’y risque.
querelle en les dévorant Pour se venger de l’avoir mis en échec, Fu Leng l’a mau- En échange de son nom, le généreux donateur devient
tous les deux. dite et ses membres sont condamnés à trahir la personne lié à l’oni : il obtient les pouvoirs du démon et peut l’invo-
qu’ils aiment le plus. Ils ne savent ni quand cette malé- quer à tout instant. Chacun entend les pensées de l’autre,
diction se manifestera ni l’importance de la trahison, mais et ils ne peuvent pas s’ignorer. Rien ne peut briser ce lien,
après un millier d’années et de nombreuses générations, à l’exception du bannissement de l’oni ou, si le donateur
elle affecte toujours chaque Yogo. est chanceux, la mort.

164
5 Les voies de
CHAPITRE

l’Illumination
Après une marche forcée pour atteindre une tête de pont Les officiers querelleurs baissent d’un ton, prennent
cruciale, la discussion s’envenime lors d’un conseil de une profonde inspiration, écoutent. Le moine guide leur
guerre nocturne dans la tente du daimyō. Un jeune capi- discussion vers un compromis : les soldats restés au
taine impétueux souhaite mener un assaut total contre camp retrancheront celui-ci, pendant que le capitaine
l’ennemi. Le commissaire des ashigaru demande une mènera un petit détachement de combattants piller
bonne nuit de repos avant que les troupes épuisées n’en- les lignes d’approvisionnement ennemies. Tandis
gagent le combat. L’intendant informe l’assemblée que que les membres du conseil, satisfaits, prennent
les provisions diminuent et conseille de piller la campagne congé, le daimyō s’incline bien bas devant le
plutôt que d’affronter l’armée adverse. moine et le remercie pour cette leçon impor-
Pendant toute la dispute, un vieil homme chauve se tante, sur l’art de la guerre comme sur
tient assis en silence, jusqu’à ce que le daimyō, exaspé- le shinséisme.
ré, lui demande son opinion. Le sage cite alors le Tao de
Shinsei et exhorte à chercher les causes réelles de la souf-
france. Le capitaine peut-il se couvrir de gloire par une
approche moins directe ? Le commissaire peut-il détacher
quelques ashigaru pour une mission de moindre impor-
tance, tout en laissant les autres se reposer ? L’intendant
peut-il nourrir l’armée si le convoi d’approvisionnement
la rejoint ?
C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

Le mystère de Shinsei
À la suite de cette rencontre capitale, Shinsei, réticent
mais déterminé, réunit les Sept Tonnerres pour affronter Fu
Leng lors du Jour des Tonnerres. À la fin de la bataille, vic-
Shinsei, le Petit Maître, déclencha un véritable boulever- torieux, il pleura.
sement dans la vie, les prières et la pensée rokugani. Il Mais qui était Shinsei, en réalité ?
prophétisa des explications sur la manière dont la vie, la Un proverbe bien connu indique que « quiconque
vous a déjà parlé de Shinsei vous a menti ». Un autre, plus
mort, les éléments et la société travaillent ensemble en un
cynique, affirme que « quiconque vous a déjà expliqué
vaste cycle dont les révolutions dépassent la perception
Shinsei l’a assassiné ». Ces deux adages évoquent la dif-
humaine. Les enseignements de Shinsei sur la cosmolo-
ficulté à comprendre les enseignements du Petit Maître,
gie ne servaient pourtant que de toile de fond à sa leçon
ainsi que les centaines d’années et de couches d’inter-
principale, centrée sur l’opinion et le choix. Les humains ne
prétations et d’exégèses que les prêtres, les moines, les
n en a ne a n de i n r le je de h gi -
empereurs, les seigneurs et les anciens y ont ajoutées,
sant le bien au mal, les cieux aux enfers : ils sont respon-
malgré le goût de Shinsei pour la brièveté.
sables de leurs propres progrès personnels, ainsi que de

shinsei le philosophe
ceux de leur société, par la contemplation et la compas-
sion. Aucune fortune, aucun kami et aucun démon ne sur-
passe l’Illumination.
L’interprétation la plus conservatrice de l’identité de
Les Rokugani connaissent certains éléments de la vie
Shinsei et de ses croyances (la plus proche du texte du Tao
de Shinsei.
de Shinsei) décrit le Petit Maître comme un logicien qui a
Shinsei était un professeur, un orateur et un philosophe expliqué en détail la nature de l’existence et de la condi-
qui parcourait Rokugan pour partager des vérités. Son ser- tion humaine par pure compassion pour autrui. Selon les
mon le plus célèbre et le plus influent eut lieu au cours shinséistes qui partagent cette opinion, les leçons éthiques
d’une conversation avec le premier Empereur Hantei, de Shinsei sont au cœur de la pratique de cette religion.
que Shiba retranscrit consciencieusement dans le Tao de Leurs détracteurs peuvent être d’accord sur l’identité de
Shinsei. L’ouvrage débute par une explication du cycle des Shinsei et sur ses enseignements, mais ne pas être du
Cinq Éléments, en guise de préface. Il se poursuit par la même avis quant à leur importance.
description de la façon dont la conduite d’un individu peut Dans cette interprétation des préceptes de Shinsei, la
l’aider à s’améliorer, mais aussi à faire progresser sa socié- doctrine de la coproduction conditionnée tient une place
té. Le Tao se termine par une explication de la manière centrale : il s’agit de la croyance selon laquelle chaque
dont le karma et la réincarnation affectent l’âme en tran- phénomène a une cause, ou « origine ». Les quatre élé-
sit… bien que Shinsei ait répété que chercher à atteindre ments manifestes (l’Air, la Terre, le Feu et l’Eau) trouvent
une meilleure renaissance en y consacrant sa vie et ses chacun leur origine dans l’un de leurs homologues, ain-
pensées était une folie, une perte de temps, et même une si que dans le Vide, qui surviendra à la fin de tout, et le
entreprise contre-productive. Vide est issu des quatre éléments manifestes. Pourtant,
En sortant du palais de l’Empereur, Shinsei et Shiba la division des éléments est une illusion, tout comme le
eurent une courte conversation en privé. Bien qu’au- royaume des mortels. Tout provient du Vide et y retourne.
cun d’entre eux n’ait divulgué les détails de cet échange, Par conséquent, le Vide est tout. Ainsi, toute existence est
de nombreux documents apocryphes prétendent révéler liée : les distinctions entre les éléments, et entre tout ce
la vérité. qui est vivant, sont une illusion.
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

De même, le cycle de la réincarnation, qui nécessite de


souffrir, provient de l’accumulation de karma dans l’âme shinsei le héros
humaine. Ce karma tire son origine de la peur, des regrets Cette représentation privilégiée de Shinsei provient de
et, par-dessus tout, du désir. Ainsi, les disciples de Shinsei l’un des nombreux documents le concernant à avoir connu
le philosophe affirment que la solution aux problèmes du une large diffusion (toutefois bien moindre que celle du
monde consiste à trouver les sources de ces problèmes et Tao de Shinsei), bien qu’il soit postérieur tant au Tao qu’à
à les éliminer. Cependant, la voie de l’Illumination ne peut l’existence du Petit Maître : le Dialogue avec la déesse
être parcourue qu’en reconnaissant que la vie est illusion : du Tonnerre du Centre parfait, ou plus communément Le
la souffrance découle du désir, et il faut donc comprendre dialogue du Tonnerre. Selon cet ouvrage, avant les évé-
qu’il n’y a rien à désirer, puisque tout émerge du Vide et nements qui conduisirent au Jour des Tonnerres, Shinsei
tout retourne au Vide. gravit le mont Kite pour expliquer sa Voie à une déesse
agin n ’ ne dai a r ie n al l r i du Tonnerre et à une assemblée d’auditeurs dévoués. Le
affecte sa santé, son jugement et ses ressources. Com- Dialogue présente cet événement avec force hyperboles :
ment de loyaux samouraïs devraient-ils réagir ? Une inter- le sermon dura plus longtemps que si Shinsei avait raconté
prétation maladroite de la coproduction conditionnée leur l’histoire de Rokugan, et le public (dont tous les membres
imposerait peut-être de retirer la source du problème, à avaient atteint l’Illumination) incluait non seulement la
savoir l’alcool. Les samouraïs s’épuisent donc à extraire déesse du Tonnerre, mais aussi tous les kamis et toutes
le a e le h hū d h ea n n en e les fortunes connus, ainsi que des moines, des prêtres et
la dai n’a l ’ ne e i n r er l d’al l de vénérables maîtres. À en croire cet écrit, le public pré-
Elle essaie désormais aussi de cacher sa consommation. sent était plus nombreux que la population actuelle de
Une interprétation plus pertinente amènerait à chercher la Rokugan. Personne n’est parvenu à situer le Dialogue du
source du problème dans l’esprit de la dame : pour quelle Tonnerre à une date précise de l’existence de Shinsei. Le
raison a-t-elle besoin de boire ? Six coupes de saké ne sont lien entre la mystérieuse déesse et le Jour des Tonnerres,
guère plus satisfaisantes que trois, après tout. Est-elle ron- dont le nom semble être inspiré, reste à définir. La déesse
gée par la mélancolie ou a-t-elle pris une habitude dont du Tonnerre n’est jamais reparue.
elle souhaiterait se débarrasser ? Un ami ou un compa- Cette version du Petit Maître, qui dépasse l’homme
triote fait-il pression sur elle ? La réponse shinséiste clas- posé et à la voix douce présenté dans le Tao de Shinsei
sique à ce problème ne concerne pas l’alcool : il s’agit de et son introduction par Shiba, révèle que la doctrine et
trouver un compromis, d’atteindre un état dans lequel le la voie du Tao conviennent pour atteindre l’Illumination,
besoin de boire n’affecte plus le jugement de l’individu. mais s’avèrent moins efficaces que celles qu’il décrit à pré-
Les shinséistes qui suivent le courant de pensée attri- sent. Sa nouvelle méthode préconise une vie de justice et
bué à Shinsei le philosophe ont tendance à se mon- de grande compassion, au lieu d’essayer de se libérer des
trer introspectifs et réfléchis, que ce soit par bon sens vicissitudes de la roue de la réincarnation. Shinsei propose
ou par rigueur académique. Ils méditent sur des vérités de parcourir la terre pour accomplir des miracles et aider
et débattent ou discutent entre eux, en s’inspirant de les opprimés. Les moines qui adoptent cette vision pré-
l’échange entre l’Empereur et Shinsei. Ces pratiques per- fèrent voyager à travers Rokugan pour aider son peuple,
mettent à l’âme de progresser et d’échapper à la souf- en particulier les pauvres et les faibles, plutôt que de s’en-
france, quelle que soit la nature de sa réincarnation. Après fermer dans un monastère. Les ordres de moines qui par-
tout, affirment-ils, s’attarder sur la question de la réincar- tagent ces croyances s’impliquent plus que les autres en
nation garantit que la suivante sera pire. politique et même dans les affaires militaires, et inter-
Les samouraïs, les riches marchands, les moines cloî- viennent directement pour le bien du peuple.
trés et d’autres individus dotés des ressources, du temps Shinsei le héros attire bien plus les gens du peuple
libre et de l’érudition nécessaires tirent le meilleur parti de de Rokugan et certains samouraïs que sa version philoso-
cette interprétation de Shinsei. De par leur autorité, ils sont phique, même si celle-ci se conforme probablement plus
confrontés à des dilemmes éthiques qui mettent à l’épreuve au personnage historique. Des statues, des paravents,
leur philosophie et leur logique. Au sein de la noblesse guer- des pièces de théâtre et toutes sortes d’œuvres d’art
rière, les Clans du Crabe et du Scorpion sont les plus grands dépeignent le Shinsei du Dialogue du Tonnerre en train
adeptes de Shinsei le philosophe : ils apprécient cette de canaliser et contrôler les éléments, de rayonner d’une
approche de l’Illumination, contemplative et pragmatique. lumière divine émanant de chacun de ses pores, ou de
Les disciples de Shinsei le philosophe s’adonnent par- lancer des éclairs sur des démons symbolisant la peur, le
fois à des formes de méditation centrées sur des pratiques regret ou le désir. Pour beaucoup, son message élémen-
artistiques ou martiales répétitives. Dernièrement, la pra- taire de compassion et de devoir civique surpasse celui
tique du tir à l’arc comme forme de méditation a gagné de la philosophie orthodoxe : même les fermiers et les
en popularité auprès des samouraïs et des moines, ce qui porteurs illettrés comprennent la valeur de l’entraide. Cet
a mené à identifier cet aspect du shinséisme avec l’arc : aspect de Shinsei porte aussi en grande estime le travail
silencieux, exigeant et intransigeant. en équipe et les organisations.

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C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

du terrain. Selon les analyses les plus répandues, Shinsei


les fondations possédait une connaissance surhumaine du fonctionnement

du shinséisme des éléments et de la réincarnation. Il prédit le Jour des


Tonnerres et coordonna la résistance contre Fu Leng. Il fit
preuve de pouvoirs surnaturels sur le mont Kite, selon l’in-
Shinsei enseigna que les distinctions perçues
terprétation littérale du Dialogue du Tonnerre… qui est la
entre les Cinq Éléments n’étaient qu’une illu-
plus répandue. Par conséquent, certains affirment que Shin-
sion. Tout provient du Vide, et tout y retournera.
sei n’était pas qu’un « simple » sage, mais plutôt le shintai
C’est en embrassant l’unité des éléments et en
(un objet hébergeant un kami ou un esprit) d’une fortune du
regardant au-delà des divisions illusoires entre
n de ng en e e d rine er e de r n ilier le
les mondes physique et spirituel que commence
cultes des fortunes et de Shinsei, car elle affirme qu’un être
le voyage vers l’Illumination.
ayant atteint l’Illumination a transcendé les différences entre
Shinsei présenta plusieurs concepts impor-
tants qui altérèrent à jamais la compréhension divinité et humanité, et que l’Illumination exprime le destin
de la réalité, même pour les Kamis. Il apprit à ses divin de l’âme. Shinsei est un dieu, déclarent ses adeptes, et
disciples que, tout comme le ki provient du Vide en le suivant, nous aussi, nous pouvons devenir des dieux.
et y retourne, l’âme humaine ne reste pas dans Ces affirmations concordent avec les points de vue
l’au-delà pour l’éternité, mais se perpétue dans de la secte de la Terre Parfaite, un mouvement popu-
un cycle de mort et de renaissance. L’Illumina- liste convaincu que Shinsei veille à présent sur l’humanité
tion permet d’échapper à ce cycle et à toute la depuis une « terre parfaite » située au Tengoku, où les shin-
souffrance qu’il implique. séistes loyaux peuvent le rejoindre s’ils chantent le mantra
« Shoshi ni kie » souvent et avec assez de sincérité. Cer-
tains shinséistes de la Terre Parfaite répugnent à décrire
Shinsei purement et simplement comme un dieu, mais
La structure du Dialogue du Tonnerre intègre les for- d’autres ne s’en privent pas. Le dogme de la Terre Parfaite,
tunes et leur culte dans le giron du shinséisme. Comme en présentant Shinsei comme un immortel bienveillant qui
les fortunes ne sont présentes que pour assister au prêche guide et bénit l’humanité depuis le Tengoku plutôt que
de Shinsei, le Dialogue sous-entend qu’elles sont certes depuis le Yomi, valide cette croyance, du moins dans ses
importantes, mais surtout en tant que shinséistes dévouées grandes lignes.
et accomplies. L’audacieuse affirmation du texte sur la véri- Le clan le plus fasciné par Shinsei le dieu est celui de
table importance des fortunes se perçoit dans le raison- la Licorne. En privé, Shinjo Altansarnai en personne a fait
nement de Hantei Genji lorsqu’il déclara que le culte des re ar er e l’in arna i n di ine de Shin ei ng en
fortunes et le shinséisme n’étaient qu’une seule et même évoquait peut-être un important dieu du ciel et des tem-
religion. Le peuple rokugani n’y prêta pas vraiment atten- pêtes du pays dont elle tire son nom. Nombre de jeunes
tion, puisqu’il était déjà habitué à pratiquer des religions
samouraïs du Clan du Lion sont aussi séduits par cette
différentes sans étudier leurs contradictions.
interprétation, qui présente Shinsei comme audacieux
Le Clan de la Grue adopta avec enthousiasme la ver-
et dynamique, et constitue un contrepoint tentant aux
sion héroïque de Shinsei. Toujours à la pointe de la mode,
conventions bien ancrées de leur clan.
le clan soutient haut et fort ce Petit Maître, et de manière
Plusieurs des nobles scandalisés qui dénoncent l’hé-
bien visible, en faisant de généreuses donations à des
résie de la Terre Parfaite feraient pression en faveur de
temples et des monastères enclins à l’héroïsme. Les shin-
son éradication pure et simple s’ils découvraient qu’elle
séistes dévoués du Clan de la Grue ont engendré un
souhaite mettre en place un gouvernement fédéral
nombre considérable d’ouvrages sur la concordance entre
l’héroïsme shinséiste et l’idéal de grâce, interne comme supervisé par des prédicateurs populistes et des sages
externe, cher à leur clan. issus du monde paysan… ce qui représente un terrible
Fréquemment associée aux gens du peuple, la nagina- affront à la gouvernance féodale établie de Rokugan. Les
ta représente souvent les disciples de Shinsei le héros. De moines-guerriers au service de la secte de la Terre Parfaite
plus, le monstrueux bisentō (dont le nom signifie « lame ne sont pas des moines au sens traditionnel du terme. Ils
sourcil » en raison de la ressemblance de la lame gigan- portent le bandeau et l’uniforme blanc des moines novices,
tesque de cette lance avec un sourcil humain) est particu- mais la plupart sont illettrés et manquent de connaissances
lièrement apprécié de ces shinséistes. sur les préceptes et les textes de leur propre religion. Ils ne
se soucient que de manier une lance, une naginata ou un

shinsei le dieu kongōsho (une arme indestructible proche du varja) au ser-


vice de leur vision de Shinsei et de la défense de ce qu’ils
Il existe une troisième interprétation du personnage histo- considèrent être la première province de la Terre Parfaite
rique de Shinsei, qui en fait un dieu. Cette perspective, long- dans Rokugan, persuadés que mourir au combat en défen-
temps considérée comme hérétique, gagne actuellement dant ces causes assure une meilleure réincarnation.

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CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

La confrérie de Shinsei
destination du peuple et s’adonnent à d’autres activités
de méditation et d’amélioration de leur personne. En pra-
tique, la plupart des moines se situent à mi-chemin de ces
En théorie, la religion impériale officielle du shintao, qui deux extrêmes : ils se lancent dans des activités pour mieux
vénère à la fois le Tao de Shinsei et les mille fortunes, unifie comprendre le Tao tout en s’efforçant de transmettre leurs
tout Rokugan. En pratique, le clergé se consacre à l’un des connaissances aux gens du peuple.
aspects de cette religion, quitte à se détourner des autres
voies. En général, les prêtres et les shugenja pratiquent le
kami no michi, l’adoration des dieux, des fortunes et des
rejoindre la confrérie
autres esprits, tandis que les moines se vouent au Tao de N’importe qui (mais notamment les samouraïs, qui bénéfi-
Shinsei. Ces derniers forment la confrérie de Shinsei, une cient des moyens nécessaires et peuvent se permettre un
sorte de religion à l’intérieur même du shintao. tel choix) peut devenir moine à n’importe quel moment de
La confrérie de Shinsei, composée d’hommes et de sa vie. Il suffit de faire vœu de non-violence, de pauvreté,
femmes, comprend plusieurs ordres sacrés. Chacun est en de chasteté, d’honnêteté, de tempérance et d’austérité
général dédié à une perspective ou à un aspect précis du (chaque ordre de moines ajoute ou enlève souvent les vœux
shinséisme. Les ordres érudits écrivent, débattent entre qu’il souhaite), se raser la tête, se vêtir de blanc, de brun ou
eux et enseignent à de riches mécènes. Les ordres mar- de safran, et se consacrer à apprendre auprès d’un maître.
tiaux étudient les armes et la stratégie afin de défendre les Les vœux sont en général permanents, mais ce n’est pas
shinséistes vulnérables ou pacifiques. Les ordres thérapeu- systématique : les moines qui se rendent compte qu’une
tiques gèrent des centres de soins dans des lieux publics. existence cloîtrée ne leur convient pas peuvent quitter leur
Enfin, les exorcistes repoussent les démons et les esprits. ordre sans problème, et même le rejoindre à nouveau plus
Certains moines se tournent vers l’extérieur, à l’image tard. Cette souplesse n’est offerte que par le monastère :
des prêtres : ils viennent en aide aux congrégations de shin- le code du bushido est beaucoup moins accommodant, et
séistes non initiés, animent des festivals et célèbrent des certains samouraïs qui abandonnent la vie monacale n’ont
funérailles, offrent des conseils et s’occupent des temples d’autre choix que de devenir ronin.
publics. D’autres moines sont plus introspectifs : ils Techniquement, seule la foi dans les enseignements de
s’isolent dans des monastères et consacrent leur vie Shinsei doit motiver l’entrée dans un ordre de moines. En
entière à la contemplation des enseignements du pratique, de nombreux facteurs, même égoïstes, peuvent
Petit Maître, recopient des textes shinséistes à pousser un individu (et notamment un samouraï) à intégrer
la confrérie : il peut vouloir fuir une mauvaise famille ou un
mariage insatisfaisant afin de jouir du statut et du respect
dus à un moine d’un ordre célèbre. Il peut aussi souhaiter se
convertir à un certain aspect du shinséisme pour obtenir
l’estime des disciples de ce courant. Enfin, il peut
être fatigué du conflit constant et des jeux
politiques et vouloir s’isoler.

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C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

Les personnes qui se rasent la tête pour échapper à la Les moines de Bishamon
politique doivent choisir avec soin le monastère qu’elles
rejoignent lorsqu’elles aspirent à la paix et à la tranquil- Ces moines incarnent la contradiction du shintao
lité. En effet, de nombreux prêtres et moines d’impor- moderne. Puisque leur divinité tutélaire est la Fortune de
tance, et autant de temples, jouent des rôles majeurs dans la force, ils font partie des moines des fortunes. Leur ordre
la vie politique rokugani. L’implication du shinséisme en est celui qui reflète le mieux l’unité du shintao, en ce que
politique est le sujet de vifs débats. D’un côté, Shinsei lui- les moines doivent accomplir deux types de devoirs corré-
même a longuement évoqué la façon dont le principe de lés. Le premier consiste à étudier, à méditer et à créer des
compassion associe conduite personnelle et bien social. œuvres d’art, comme tous les autres moines shinséistes.
Par essence, les humains sont des créatures sociales, et les Le second vise à faire respecter (et à mener) tous les rites
pratiques shinséistes d’un individu affectent ses interac- destinés apaiser et honorer les fortunes, ce qui inclut l’en-
tions avec ses amis et sa famille, avec les étrangers, avec le tretien des sanctuaires des fortunes.
gouvernement et avec les autres autorités. De nombreuses Le siège des moines de Bishamon est la Bibliothèque
paraboles de Shinsei traitent, du moins en surface, des divine de Bishamon, située dans les régions montagneuses
questions éthiques qui touchent les autorités féodales : qui jouxtent Otosan Uchi. Ces moines sont particulière-
existe-t-il une guerre juste ? Quelle réponse apporter à la ment réputés pour leur propension à protester lorsque des
révolte d’une population agitée si ses doléances sont justi- décisions politiques leur déplaisent. Par exemple, si l’Em-
fiées ? Ainsi et sans surprise, la tradition veut que les shin- pereur nomme un abbé ou un prêtre peu apprécié à un
séistes conseillent les dirigeants, à défaut de s’impliquer poste important, les moines peuvent sortir le shintai de
davantage. Après tout, tel était l’objet du Tao de Shinsei. Bishamon de son sanctuaire de la Bibliothèque et le placer
D’un autre côté, de nombreux disciples du Petit dans un coffre afin de manifester hors de leurs monastères,
Maître considèrent ses discussions avec les dirigeants et en le transportant sur les épaules de plusieurs moines
ses leçons sur la gouvernance comme des illustrations robustes et en agitant leurs armes et leurs rosaires, tout
basiques ou des allégories de ce qui compte vraiment : le en scandant des slogans et des sutras. Ils se rassemblent
chemin introspectif de chacun. Une autre preuve de cette ainsi dans les rues d’une ville ou d’un village à proximi-
croyance réside, selon eux, dans les erreurs des prêtres té du lieu de l’offense et attirent des foules gigantesques.
shinséistes impliqués en politique ou en commerce qui se Les moines les plus bruyants et les plus en colère dis-
voient contraints d’user de violence ou de duperie. courent sur les péchés qu’implique la décision qu’ils esti-
ment injuste, sur les conséquences (néfastes, évidemment)

des ordres de d’une telle décision pour le futur de l’Empire, et sur la réin-
carnation inévitable de la figure d’autorité incriminée en
moines célèbres un ver plat ou en toute autre créature répugnante.
Envoyer une garnison pour effrayer les moines et les
Il existe peu de différences entre la plupart des ordres de
pousser à rentrer chez eux échoue le plus souvent, puisque
moines : leurs membres s’entraînent avec une arme en
même les guerriers qui acceptent d’attaquer le clergé
particulier, brassent du saké ou peignent des paravents,
rechignent à marcher sur le shintai de Bishamon de peur
par exemple. Mais certains d’entre eux sont reconnais-
d’offenser la Fortune… en particulier devant un peuple en
sables entre tous.
adoration et dont ils dépendent pour obtenir nourriture,
eau et ressources matérielles. Certains seigneurs et cer-
tains empereurs se plaisent à dépêcher de jeunes samou-
raïs audacieux et charismatiques pour régler l’insoluble
problème d’une manifestation de moines de Bishamon.

Les moines des Sept Tonnerres


L’ordre des Sept Tonnerres s’occupe du sanctuaire du
même nom. Ses moines se concentrent sur la représenta-
tion, la personnalité, l’histoire et la vocation de chacun de
ces sept héros. Ils étudient ces derniers, ainsi que les rela-
tions qui les unissent les uns aux autres et les croyances
classiques à leur sujet, afin d’écrire abondamment sur ces
thèmes. Comment prendre exemple sur Mirumoto ? Ou
Matsu ? Les moines des Sept Tonnerres accordent une
grande importance à l’étude académique de ces héros,
mais l’art religieux qu’ils produisent pour honorer les Ton-
nerres, ainsi que leur relation avec Shinsei, leur tient encore
plus à cœur. Les moines des Sept Tonnerres définissent
les tendances dans la création des statues, des peintures,

170
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

des styles d’aménagement paysager, et même des pièces


de théâtre qui représentent les personnages historiques
des Tonnerres, leur vie et leurs actes… et ils sont très sou-
vent imités.
Les œuvres d’art, les études et les voyages de ces
moines ont une importance inavouée. Ils se préparent
pour un jour qu’ils savent venir et qui constitue un secret
qu’ils n’ont pas beaucoup partagé : un second Jour des
Tonnerres arrive, au cours duquel les Sept Tonnerres réin-
carnés affronteront de nouveau Fu Leng. Ce jour marque-
ra la fin du monde ou le début d’un nouveau monde… les
moines n’ont aucune certitude. Ainsi, leur étude se veut
pragmatique : ils souhaitent développer leurs connais-
sances des Tonnerres afin de les partager de la manière la
plus large et la plus évocatrice possible, avec l’espoir d’in-
fluencer celles et ceux qui sont destinés (si ce destin est
bien réel) à devenir les nouveaux Tonnerres.

Les moines d’Osano-wo


À un âge avancé, Osano-wo, la future fortune du tonnerre
et du feu, ouvrit une école d’arts martiaux pour trans-
mettre ses vastes connaissances guerrières. Il construisit
un beau dojo à l’aide de bois qu’il coupa seul dans la forêt,
une tâche simple pour un homme aussi fort. Il garnit les
murs de ses armes et armures préférées. Puis il attendit
que des disciples se présentent. La toute première d’entre
eux fut une vieille moine minuscule. Elle n’avait aucune
expérience du combat, mais elle voyageait souvent et
souhaitait donc apprendre à se défendre. Tout d’abord,
Osano-wo lui proposa une arme à deux mains pour com-
penser son manque de portée et de force sans trop mettre d’honorer la mémoire de la fortune du tonnerre et du feu.
ses muscles à l’épreuve, mais cela convenait mal à sa petite Les novices de l’école, attirés par la réputation hors du
carrure. Il lui donna donc deux sabres, mais leur poids fati- commun d’Osano-wo, se montrent souvent frustrés par
guait ses faibles bras. Enfin, il suggéra la boxe. la précision exigée par son style de combat, qui impose
Le choix s’avéra judicieux. Osano-wo avait beau être même aux plus costauds des combattants de se battre
rapide, la vieille moine était si petite qu’elle évitait et comme quelqu’un de faible et de petit, et qui ne peut être
contournait sans problème la carrure massive de l’homme. maîtrisé que grâce à une pratique répétitive et épuisante.
Il dut adapter ses techniques d’entraînement mises au La plupart des novices abandonnent et apprennent
point pour des soldats grands et robustes à la stature de plutôt à se battre de manière tout aussi efficace mais
la vieille moine. Il lui enseigna comment utiliser les parties
avec un style qui correspond mieux à leurs forces. Mais le
solides de son corps pour frapper les zones molles de sa
a ad ra-r ū er e de a an li i ar le r
cible : elle apprit donc à endommager les petits os, les tis-
physique de s’adapter à un monde plus grand et plus fort
sus mous et les muscles en visant habilement. Pour que
qu’eux… s’ils ne rechignent pas à travailler plus dur que
ces techniques adaptées fonctionnent, elle devait se mon-
quiconque. Parfois, ces efforts ne suffisent pas, mais ce
trer d’une précision impeccable, mais elle s’entraîna avec
style de combat leur donne une chance… et il constitue
application, et réussit. Enfin, elle apprit à manier des armes
plus lourdes telles que des sabres ou des bâtons, mais elle une excellente base s’ils décident d’apprendre un autre art
préférait des petits couteaux et poids, qu’elle pouvait martial par la suite.
cacher dans ses vêtements ou dans ses mains… des armes Les leçons éthiques du monastère d’Osano-wo coïn-
idéales pour devenir l’égale de brutes trop confiantes. cident avec ses leçons guerrières. À l’image d’Osano-wo,
Selon la légende (et personne ne peut la confir- qui dut lutter, au sens propre comme au figuré, pour aider
mer, à part les moines de cette école), la moine, Tama- quelqu’un dépourvu de ses avantages physiques, les
dora, devint la deuxième directrice du dojo d’Osano-wo moines de son ordre étudient la compassion de Shinsei et
après la mort du maître. Elle développa l’école et en fit la puissance d’Osano-wo en enseignant aux forts à tirer les
un monastère (qu’il ne faut pas confondre avec le temple faibles vers le haut, aux érudits à instruire les ignorants, et
d’Osano-wo construit sur les îles du Clan de la Mante) afin aux petits à frapper les grands.

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C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

Les temples et les monastères


le plus beau) de la plupart des petites villes. Les habitants
des alentours s’y entassent en cas de pluies torrentielles,
de dangereuses créatures en maraude ou à la suite de la

shinséistes dans la société destruction de leurs habitations.


Les monastères fortifiés des ordres guerriers offrent
une protection encore supérieure, avec leurs douves, leurs
Les sanctuaires shinséistes (à l’exception des monastères murs concentriques percés de meurtrières et leurs fourrés
reclus) sont des centres communautaires aussi bien que cachant de désagréables surprises. De jeunes moines impé-
spirituels. Ils remplissent de nombreuses fonctions dans la tueux passent leur temps libre, conséquent, à manier des
société rokugani en général. Tout d’abord, bien entendu, lances et à se convaincre que mourir en défendant d’autres
les résidents enseignent la doctrine et les pratiques reli- shinséistes leur vaudra une excellente réincarnation. Les
gieuses à la congrégation. Les moines, surtout les prêtres, bandits et les éclaireurs des armées ennemies rechignent à
officient lors des offrandes, des lectures de textes sacrés, tester les compétences d’adversaires aussi intrépides.
des festivals, des mariages et des funérailles. Les prêtres
locaux conseillent les shinséistes en crise intellectuelle ou
spirituelle. Les moines mendiants colportent des nouvelles
des lieux de savoir, de
et des courriers d’un endroit à un autre. Les temples et science et de médecine
les monastères shinséistes remplissent aussi d’autres fonc-
Les temples, mais surtout les monastères, font depuis
tions moins communes.
longtemps office de centres d’érudition. Les prêtres et les

à boire et à manger
moines savent presque tous lire et écrire et connaissent sou-
vent plusieurs dialectes grâce à l’étude de textes ou à leur
expérience de missionnaires dans les villages les plus recu-
Presque chaque monastère ou temple d’importance
lés. Recopier et commenter le Tao de Shinsei et le Dialogue
cultive des céréales comme le riz ou le millet et vend
du Tonnerre, ainsi que d’autres textes sacrés, occupent quo-
parfois des biens tels que l’indigo, les mûres ou la soie.
tidiennement de nombreux moines pendant des heures.
Nombre d’entre eux distillent aussi de la liqueur. Ces
Les bibliothèques des monastères accumulent également
récoltes et ces produits permettent aux habitants de se
des rouleaux de presque tous les types d’écrits : de la poé-
nourrir et à la trésorerie de l’organisation de rester appro-
sie, des romans, des pièces de théâtre, mais aussi des trai-
visionnée, réduisant ainsi la dépendance à de capricieux
tés scientifiques et des manuels d’escrime. Les moines et les
mécènes extérieurs. Les moines novices travaillent parfois
prêtres s’occupent en étudiant la philosophie naturelle ou
dans les champs, mais leurs aînés préfèrent souvent les
en s’adonnant à des recherches médicales, et ils accueillent
activités plus raffinées, en particulier le jardinage : ils dis-
dans leurs infirmeries et leurs cliniques quiconque, ami
posent les plantes autour du sanctuaire selon les anciens
comme ennemi, croyant ou non, dont la santé l’exige. Plu-
manuels de jardinage et d’aménagement paysager sacrés
sieurs temples d’inclination philosophique explorent aussi
ou cultivent de nouveaux légumes délicieux pour agré-
les maladies de l’esprit : leurs membres s’appuient sur la
menter leurs repas simples et en général dépourvus de
doctrine shinséiste de coproduction conditionnée et ana-
viande. Les riches monastères dotés de vastes champs
lysent les causes enracinées de la souffrance. Ces temples
doivent s’en remettre à la main-d’œuvre paysanne.
proposent, en plus des conseils que les prêtres ont toujours
Les catastrophes naturelles et les dégâts de la guerre
fournis, des cours de méditation et de pleine conscience,
obligent souvent des gens du peuple démunis à se masser
des exercices revigorants et des traitements aux herbes. Ces
aux portes d’un monastère ou d’un temple pour supplier
services présentent un intérêt particulier pour les samouraïs
qu’on les aide. Même si les plus grands et les mieux gérés
qui subissent des tensions liées au commandement ou des
des monastères accumulent plus facilement les ressources
traumatismes de guerre.
que les paysans, de telles vicissitudes drainent rapidement
leurs réserves. Dans ce cas, un prêtre ou un moine se rend
auprès du seigneur ou du magistrat local et lui demande Les funérailles
de l’aide, faisant ainsi remonter les dangers de la famine le
Contrairement aux prêtres et aux shugenja du culte des
long de la chaîne de commandement féodale.
fortunes, les moines shinséistes ne reculent pas devant

des lieux de refuge


le sujet de la mort. En fait, ce sont les principaux experts
du processus de décès, car la mort n’est pas considérée

et de défense comme intrinsèquement mauvaise ou impure selon le Tao


de Shinsei. Pour ces moines, elle fait plutôt partie du cycle
Les catastrophes naturelles comme les inondations, les naturel, et précède une renaissance et la transition vers
tsunamis, les tremblements de terre et les glissements de une autre vie. En effet, l’un des objectifs de la confrérie
terrain ne font que peu de cas des bâtiments en papier et de Shinsei est de préparer les samouraïs à la retraite aux
en bois de Rokugan. Au contraire, la pierre et les poutres étapes finales de leur existence, en intégrant au quotidien
robustes parfaitement emboîtées par un maître menuisier des séances de méditation sur l’impermanence et en culti-
d’un temple shinséiste en font l’édifice le plus solide (et vant la sérénité face à la mort.

172
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

les références à notre monde


Le shinséisme découle de figures religieuses et histo- En prenant garde à la façon dont vous faites s’ex-
riques de notre monde réel, vénérées en Asie de l’Est primer votre personnage shinséiste, vous pouvez faci-
et en Asie du Sud. Le professeur itinérant qui débat liter la disparition de ces stéréotypes. Tout d’abord,
avec l’Empereur est inspiré de Bodhidharma, à l’ori- ne prenez jamais d’accent asiatique et ne parlez pas
gine des bouddhismes chan et zen. Le fondateur des dans un mauvais français lorsque vous interprétez des
disciplines ésotériques qui scande des mantras rap- shinséistes (ou tout autre Rokugani). Évitez de scan-
elle ū ai l’ini ia e r d ddhi e Shing n e der des prières ou des mantras comme le kie, de
politologue qui détaille la relation éthique entre les peur que d’autres personnes considèrent ces chants
individus et leur société évoque Confucius, Han Fei Zi comme de véritables pratiques religieuses détour-
et Nichiren. Des concepts métaphysiques tels que les nées à des fins de divertissement. N’oubliez pas non
cycles de la réincarnation et les éléments proviennent plus que, pour des raisons de jouabilité, la version
du protohindouisme et du taoïsme. La secte de la de Shinsei de la coproduction conditionnée est for-
Terre Parfaite fait écho à l’école de la Terre pure. Enfin, tement simplifiée par rapport à celle de Bouddha et
nous n’avons pas oublié un certain prince népalais qui que l’accent y est mis sur des aspects différents.
médite sous un figuier : Bouddha en personne. De plus, le shinséisme est assez déroutant et contra-
Un stéréotype occidental récurrent dépeint les dictoire pour qu’il soit préférable de ne pas y ajouter
figures classiques de la pensée asiatique (Confu- ne ar de i i e gal a d e an r i e
cius en particulier, mais aussi Bouddha ou Lao Tseu) du zen y trouvent leur place, mais ils influencent moins
comme des mystiques obscurs et insondables, aux le hin i e e le Sū ra d e le e e d
incompréhensibles raisonnements par l’absurde, sou- hera da i le e dire en arai n re
vent représentés avec des mimiques et des accents interprétation de Shinsei et de ses adeptes semblera
ridicules. Ces clichés doivent beaucoup aux Occi- plus véridique si vous vous concentrez sur les leçons
dentaux qui ont cherché à légitimer leurs propres pratiques. La compassion, la raison, la modération et
enseignements et à leur donner un côté mystique en le civisme ont permis au confucianisme, au taoïsme,
s’appropriant des noms, des traditions et des signi- au bouddhisme et à l’hindouisme de traverser les
fications venues d’Asie. Les joueurs d’origine asia- âges malgré l’âpre compétition que leur opposaient
tique reconnaîtront peut-être dans ces incarnations d’autres religions ou écoles de pensée.
les moqueries de cours de récréation subies pendant Une bonne connaissance des racines du shin-
leur enfance, ou les caricatures auxquels ils sont tou- séisme, et des stéréotypes sur l’Asie, vous permet-
jours confrontés dans leur vie d’adulte. tront de créer un Rokugan qui respecte les cultures
Même si certains estiment que ces stéréotypes sont dont il s’inspire et qui leur rend justice. Mais restez
inoffensifs et insignifiants, ils forment la pointe d’un vigilants : que vous soyez joueur, joueuse ou MJ,
long couteau retourné dans la plaie lorsque des per- soyez attentifs, chez celles et ceux qui vous entourent
sonnes asiatiques sont opprimées ou blessées, et que (en particulier chez les novices de La Légende des
leurs croyances sont marginalisées et discréditées. Les Cinq Anneaux), aux signes de malaise lorsque vous
joueuses et les joueurs à votre table (ou les passants prenez la parole. Créez un environnement dans
dans les halls de convention, dans les magasins de jeu lequel ils se sentiront assez en confiance pour vous
ou dans tout autre espace public où vous jouez) peuvent demander de changer un élément qui les dérange.
se hérisser, et à juste titre, en entendant la moindre ver- Même si vous ne comprenez pas leur malaise dans un
sion de ces stéréotypes, après une longue journée (voire premier temps, ne le rejetez pas d’emblée. Préférez
une longue vie) passée à subir ces manques d’égards. la compassion.

Ainsi, les funérailles sont présidées par des moines objectif de la cérémonie consiste à éloigner l’influence de
shinséistes dans les temples plutôt que par des prêtres la mort de la famille du défunt et à lui permettre de faire
des fortunes dans les sanctuaires. Cette organisation est son deuil sans perdre la face. Les funérailles shinséistes
aussi plus pratique, puisque de nombreux samouraïs à la sont donc destinées aux vivants, et non aux disparus.
retraite deviennent moines durant les dernières années de Les funérailles se déroulent quatre jours après le décès.
leur vie : ils se trouvent donc probablement déjà dans un Pendant ce délai, des membres de la caste des hinin pré-
temple ou un monastère au moment de leur décès. Les parent le corps sous les directives de moines… bien à l’écart
cérémonies funéraires de la confrérie s’inspirent des ensei- du temple. Le corps est lavé, oint et frotté avec du sel. Ensuite,
gnements du Tao et varient légèrement d’une province un masque dépourvu de traits est placé sur son visage, afin
à l’autre sous l’influence des coutumes locales. En raison que l’esprit du défunt, s’il reste dans les parages, ne recon-
des importants effets karmiques de la mort, le principal naisse pas son ancien corps ou ne tente de le récupérer.

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C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

Le jour des funérailles, le temple fournit à la famille une vers la liberté et l’Illumination. Lorsqu’un Empereur et un
plaque de bois sur laquelle sont gravés le nom du défunt paysan (une fortune et un mortel) suivent la Voie de Shin-
et ses réussites. Les membres de la famille assistent à la sei, ils sont identiques. Shinsei a mentionné qu’une nais-
cérémonie vêtus des tenues blanches du deuil, puis un sance privilégiée ou aristocratique signifiait que le karma
modeste repas, constitué de mets spécialement préparés de la personne était léger dans sa vie antérieure. Il a aussi
pour ces cérémonies (des otoki) leur est offert. affirmé qu’un grand privilège impliquait une plus grande
Un décret impérial interdit les enterrements. Le corps obligation envers la société et donnait de plus nom-
est plutôt transporté jusqu’à un bûcher, où les proches breuses occasions d’accomplir des actions héroïques ou
assistent à sa crémation. Selon une croyance répandue, de connaître des échecs catastrophiques. Les commenta-
faire preuve d’un trop grand chagrin pendant cette partie teurs de l’ouvrage ont toutefois mis un accent plus pro-
de la cérémonie trouble l’esprit du défunt, qui reste alors au noncé sur le lien entre karma et statut social.
ingen-d n de in e e de gani d iren r En théorie, lors de la lecture de sutras dans un temple,
leurs chers disparus. Par conséquent, ceux qui assistent à un domestique du Clan de la Grue et Bayushi Kachiko en
des funérailles masquent leur douleur derrière des voiles et personne peuvent se retrouver assis côte à côte et se traiter
des visages de glace, de peur de maudire involontairement avec la courtoisie due à un égal. En pratique, les préjugés et
le défunt, qui deviendrait alors une âme perdue et errante. les stéréotypes affectent aussi bien les croyants que les laïcs.
Après la crémation, les membres de la famille ramassent les Les samouraïs qui intègrent un ordre sacré parviennent sou-
os parmi les cendres à l’aide de baguettes cérémonielles et vent plus vite à des postes de direction que les paysans, que
les font passer de mains en mains jusqu’à les déposer dans ce soit grâce à des liens familiaux ou sociaux établis avec le
une urne funéraire. Les moines allument ensuite une série clergé en place ou à une éducation qui a porté sur les clas-
de bougies pour symboliser la renaissance du défunt à tra- siques ou sur d’autres connaissances attendues d’un abbé
vers ses multiples vies antérieures. shinséiste. Ainsi, les manières, l’élégance et les habitudes des
Les traditions funéraires varient quelque peu en fonc- prêtres samouraïs, généralement apprises avant leur ordina-
tion des coutumes des clans et des croyances locales. tion auprès d’autres membres de leur caste, leur permettent
Par exemple, les membres du Clan de la Grue pratiquent la plupart du temps d’obtenir les postes consistant à com-
un échange de dons funéraires appelé koden-gaeshi. mander des personnes qui partagent leur origine sociale…
Selon cette coutume, les amis du défunt présentent à ses et les dons d’argent des congrégations aristocratiques n’en
proches un petit gage d’amitié, qui revêt en général un seront que plus importants. La réforme du shinséisme, légi-
sens personnel, et la famille leur offre un cadeau en retour. timement populiste, que prône la secte de la Terre Parfaite
À l’inverse, des funérailles formelles sont un luxe que le décontenance de nombreux membres du clergé haut placés
Clan du Crabe peut rarement se permettre, en raison de sa et issus de la caste des samouraïs qui apprécient les avan-
proximité avec l’Outremonde et des menaces qui l’accom- tages conférés par le statu quo… qu’ils l’admettent ou non.
pagnent. Mais lorsqu’elles ont lieu, elles prennent place à Les amitiés et les rivalités entre clans génèrent des
l’intérieur d’un temple dont toutes les fenêtres sont lais- effets similaires dans les communautés religieuses, plan-
sées ouvertes (à l’exception de celles qui font face au sud, tant ainsi les graines de la discorde en des lieux sacrés.
barrées et scellées) afin que l’âme puisse s’échapper. Des approches différentes du shinséisme peuvent entraî-
ner des dissensions entre les clans, mais des vues sem-

la politique et blables peuvent engendrer l’harmonie entre ceux qui ne

la diplomatie
la trouvent pas dans d’autres domaines. Lors de tables
rondes philosophiques, des samouraïs des Clans du Scor-
pion et de la Grue, qui estiment que leurs approches de la
Les monastères et les temples font souvent office de terrain
vie et de la résolution de problèmes sont diamétralement
neutre pour des négociations entre des clans de samouraïs
opposées, peuvent élargir leurs horizons et découvrir,
et toute partie impliquée dans un conflit. Cependant, seule
dans un environnement sûr, comment pense leur homo-
une minorité de prêtres et de moines sont réellement impar-
logue. Les membres des Clans du Lion et de la Licorne, qui
tiaux en politique. Leurs avis éclairés et leurs vastes réseaux
ne s’attendent à se faire face qu’au cours d’une bataille,
de contacts confèrent aux moines et prêtres les plus anciens
sont souvent surpris de se retrouver côte à côte lors des
une influence considérable sur les cours et les conseils
rares assemblées clandestines de la Terre Parfaite qui auto-
de guerre. La menace d’une manifestation de moines qui
risent la présence de nobles. En revanche, un bon nombre
mènerait à un soulèvement des habitants ennuie les magis-
de samouraïs des Clans du Crabe et du Lion, qui sont en
trats et les samouraïs, qui n’hésitent pas dans ce cas à mena-
général d’accord sur tout, ont appris à ne pas parler de
cer en retour les bâtiments agricoles de ces moines, à lésiner
shinséisme durant des soirées arrosées.
sur les donations ou à favoriser des ordres rivaux.
Les membres du Clan du Phénix sont les « gardiens du

le shinséisme, les
Tao », en mémoire de la retranscription de ce document
par Shiba. En effet, sur les sujets théologiques relatifs au

castes et les clans shinséisme, les autres clans s’en remettent majoritairement
à l’avis du Clan du Phénix, dont l’approche de l’étude et
Le Tao de Shinsei affirme sans détour que tous les milieux de la pratique de cette religion est largement reconnue
sociaux et toutes les familles doivent suivre la même voie comme la bonne. À l’évocation du shinséisme et du sens

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CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

du Tao, la plupart des Rokugani partent du principe qu’il


est question des enseignements du Clan du Phénix, à la vie dans les
moins de préciser le contraire. monastères
Même si les styles de vie des moines varient d’un ordre

La vie quotidienne à l’autre, la routine est primordiale dans la plupart des


monastères : elle permet aux résidents de vivre en har-
monie, et elle garantit que leurs devoirs sont accomplis
La religion joue un rôle important dans tous les aspects de et que leurs existences sont dévouées à l’ordre et à ses
la vie à Rokugan, car elle façonne la manière de penser des idéaux. Les moines ont l’habitude de se lever tôt, souvent
individus, leur morale et leurs aspirations. Du plus humble avant l’aube, afin de débuter la journée par une séance
de hinin a l i an de dai ha n ai ’il ne de méditation silencieuse avant de s’occuper des jardins,
pourra progresser dans l’Ordre céleste qu’en remplissant de réparer le monastère, de copier des textes sacrés,
son rôle du mieux possible. Échouer condamne à renaître d’étudier ou de remplir les diverses obligations que
dans de pires conditions. L’Ordre céleste s’étend jusqu’aux l’ordre estime importantes. Chaque activité implique des
cieux, avec Dame Soleil et Sire Lune au sommet. Mais les prières, de la frappe matinale du gong ou de la cloche
moines shinséistes se tiennent en dehors de cet ordre. Ils aux petits rituels associés à chaque tâche quotidienne,
rêvent d’échapper complètement au cycle de la renais- en passant par le chant de sutras en groupe, qui résonne
sance, plutôt que d’aspirer à une vie glorieuse et à une réin- dans tout le monastère à des heures bien précises. Cer-
carnation dans de meilleures conditions. Pour atteindre cet tains ordres dansent et jouent de la musique pour célé-
objectif, les moines doivent parvenir à l’Illumination. brer les vertus de Shinsei ou divertir les Tonnerres. Toute
Tandis que la plupart des Rokugani considèrent que la activité devient spirituelle lorsqu’elle est effectuée en
religion fait naturellement partie de leur vie quotidienne, pleine conscience.
pour les moines, la religion représente leur vie entière. La
sagesse acquise sur le chemin personnel vers l’Illumina-
tion peut aider autrui. Les moines se voient donc deman-
der de partager leur sagesse et leurs conseils, de la même
manière que les prêtres et les shugenja.
Tout le monde respecte la religion officielle du shintao,
mais certains se concentrent plutôt sur Shinsei, tandis que
d’autres se dévouent aux fortunes. C’est aussi le cas pour
les moines, bien que les moines shinséistes surpassent en
nombre ceux des fortunes. Ces derniers servent les fortunes
selon les préceptes de Shinsei, ce qui les différencie des
prêtres des fortunes, dont les pratiques traditionnelles pré-
cèdent le shintao. La confrérie de Shinsei rassemble la plu-
part des innombrables temples et monastères de Rokugan,
de différents ordres, et son caractère inclusif (malgré le sens
restrictif de son nom) implique qu’elle croît constamment.
Les ordres extrémistes sont jugés hérétiques et éliminés,
mais même une organisation aussi vaste que la confrérie ne
peut surveiller chaque moine de l’Empire, et de temps en
temps, une secte hérétique se développe.
C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

De nombreux ordres incluent dans leurs tâches quoti-


les arts martiaux diennes une forme quelconque d’entraînement physique,
qui possède souvent des applications martiales, ne serait-
Bien que certains moines ne combattent jamais, e e r l’a d en e an le rdre de ine hei
e e le hei ili en ar i de ar e (des moines-guerriers qui se battent avec des armes), l’en-
tous les moines ont la réputation de maîtri- traînement guerrier occupe une bonne partie de la journée,
ser le combat à mains nues. Cette croyance mais les ordres pacifiques y consacrent eux aussi quelques
est principalement issue des histoires de per- heures. Shinsei a inculqué à ses disciples que la séparation
sonnes âgées inoffensives en apparence, mais perçue entre le monde physique et le monde spirituel n’est
qui font preuve d’une compétence martiale qu’une illusion. Même les moines les plus méditatifs doivent
inattendue lorsqu’elles sont attaquées sur la maîtriser leur corps, rester suffisamment en forme pour rem-
route. Rien n’est plus impressionnant pour les plir leurs devoirs sans être distraits et apprendre à contrô-
gens du peuple que de voir un samouraï pré- ler le flux de leur ki, l’énergie interne. En développant leur
tentieux en armure complète être mis au tapis conscience du ki (de sa circulation à travers leur corps et
par le petit moine rabougri qu’il vient d’insulter. dans le monde qui les entoure), les moines obtiennent des
e ih de ine ne e len a re rir effets en apparence surnaturels grâce à leurs techniques de
d’efforts particuliers, malgré les années d’entraî- ih e il a li ren le r r hen i n de l’ ni er
nement nécessaires pour les maîtriser. La diffu- Les moines font pousser leurs aliments, les préparent
sion de ces histoires fournit une protection aux et les consomment ensemble. Les heures des repas, qui
moines itinérants, car les voyageurs les traitent dépendent de leur nombre (entre un et trois par jour), sont
avec prudence. définies par l’ordre. Les produits d’origine animale, quelle
Certains ordres de moines évitent toute vio- qu’elle soit, sont généralement évités, de même que tous
lence. Même si leurs membres pratiquent des les aliments qui proviennent de la mort et de la décompo-
exercices martiaux, apprennent la maîtrise de sition, dont les champignons.
soi et l’union du corps et de l’esprit, ils ne déve- De nombreux monastères sont autosuffisants, du moins
loppent pas de techniques utiles en combat. en partie, et reposent sur les dons pour obtenir ce que
Ces cas demeurent rares : la plupart des ordres les moines ne peuvent ni fabriquer ni cultiver. Même si la
pacifiques s’assurent que leurs membres savent plupart des ordres entretiennent des jardins d'herbes aro-
suffisamment se défendre et protéger autrui. matiques et des potagers, voire des champs de céréales,
Grâce à leur entraînement, ces moines peuvent certains travaillent dur pour produire suffisamment de res-
désarmer leurs adversaires sans les blesser et les sources et approvisionner les communautés voisines. Les
neutraliser assez longtemps pour s’échapper. moines de certains monastères sont célèbres pour leurs
De nombreux ordres considèrent que se battre céramiques ou leur ferronnerie, tandis que d’autres brassent
pour une cause juste, telle que la défense d’un du saké. Certains monastères proposent divers services, tels
monastère, est acceptable et nécessaire. Cer- que l’accueil et le soin des malades, la création ou la copie
tains sont même prêts à transmettre leur savoir de documents importants ou toute autre activité qui rentre
à des étrangers, bien qu’en général, cette pra- dans le champ de compétence de leurs membres. Que le
tique soit limitée aux gens du peuple, à qui il est monastère produise du riz, du saké ou de la porcelaine,
interdit de porter des armes et qui n’ont donc ou qu’il fournisse un service, tout est gratuit, même si les
aucun autre moyen de défense. bénéficiaires offrent des contributions aux moines en retour.
Les yamabushi constituent un cas à part : Ceux qui s’en abstiennent ne recevront probablement plus
ces moines-guerriers itinérants ont atteint l’Il- rien et subiront les conséquences karmiques de leur avarice.
lumination en communiant avec la nature. Ils La partie la plus importante d’un monastère est son
cherchent l’isolement dans les étendues sau- sanctuaire, son temple ou l’endroit où sont entrepo-
vages et se tiennent à l’écart des routes et des sées les reliques vénérées. Le devoir sacré des moines
centres d’habitation. Le style de vie austère de consiste à s’occuper de ce lieu et à le protéger. Le sanc-
ces moines, ainsi que leur dévouement à leur tuaire permet aux moines de concentrer leur dévotion, et
entraînement physique, les ont endurcis, et fait le lien entre le monastère physique et le monde spi-
un samouraï désespéré peut quémander leur rituel. D’autres zones sont réservées à l’entraînement et
aide… qu’il ne pourra obtenir sans faire ses à l’étude. Dans certains ordres, le terrain d’entraînement
preuves : il devra tout d’abord trouver le yama- ou la salle de méditation peuvent devenir la deuxième
bushi, une tâche compliquée, puis lui présenter partie la plus importante du monastère. Si les moines
sa cause et enfin le persuader de la noblesse méditent tout en travaillant, la forge, la brasserie ou l’ate-
de son combat. lier remplissent ce rôle. Les pièces où dorment les moines
revêtent une importance moindre. Qu’elles soient indivi-
duelles ou communes, elles répondent aux besoins phy-
siques des moines, mais n’offrent aucun confort superflu.

176
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

la vie dans les temples rencontrer


Tandis que les monastères sont construits en priorité pour
que les moines y vivent, s’y entraînent et y prient, les temples
des moines
sont érigés pour l’adoration et sont destinés à toutes
Puisque les moines se dévouent aux affaires spiri-
et à tous. Ils sont en général bien plus ouverts et acces-
tuelles et ont abandonné leur ancienne vie, ils se
sibles que les monastères, même si certains sont construits
tiennent en dehors de l’Ordre céleste. Les samou-
dans des lieux inatteignables, soit sur une zone sacrée soit
raïs comme les gens du peuple peuvent devenir
pour transformer l’arrivée au temple en pèlerinage. Les
moines : la plupart des laïcs traitent donc tous les
grands temples demandent plus d’attention, et des moines
moines avec le même respect. Cependant, tous
peuvent y vivre, se dévouant au lieu et aux rituels accom-
les moines ne réagissent pas de la même façon
plis. Les petits temples dépendent des moines, des prêtres
aux insultes, ni aux demandes polies. Certains
et des shugenja itinérants, voire de volontaires locaux pour
rejettent la violence, mais d’autres sont prompts à
leurs rituels et leur entretien, mais la plupart disposent d’au
prendre les armes, tandis que d’autres encore, qui
moins un moine à résidence, responsable des lieux. e len in en i a ri en de ih r el
La vie des moines est souvent publique dans un temple, Les moines croisés sur les routes sont sou-
car les visiteurs peuvent solliciter la plupart d’entre eux à vent en quête d’expériences, cherchant leur voie
n’importe quel moment. Dans les temples assez grands, un spirituelle à travers le monde. En général, ils
espace réservé est dédié à la méditation des moines hors de aident volontiers ceux qui en ont besoin. En plus
la vue des pèlerins, mais la configuration des lieux ne le per- d’offrir leurs conseils, ils ont souvent quelques
met pas toujours. Cependant, tous les temples ne reçoivent connaissances en médecine et sont capables de
pas un flot de visiteurs continu. Certains, reculés ou secrets, se défendre ou de protéger autrui.
fonctionnent comme des monastères, et les monastères les Les moines installés à la cour exercent des
plus accessibles peuvent faire office de temple. fonctions différentes. Certains ordres, comme
Les moines qui vivent sur place purifient l’air, en s’assu- celui des Quatre Temples, essaient de mettre
rant que de l’encens brûle sans cesse, et garantissent que leur sagesse à profit pour conseiller les diri-
le sanctuaire ou le lieu dans lequel est déposée la relique geants, au bénéfice du peuple et des monastères
conserve son caractère sacré. De nombreux temples sont de l’ordre. D’autres se contentent d’envoyer des
construits dans l’unique but de protéger un sanctuaire ou membres à la cour pour qu’ils observent les évé-
d’entreposer des objets sacrés hors de portée. Les visi- nements et fassent des rapports à leurs supé-
teurs vont et viennent. Certains habitent non loin, d’autres rieurs, qui décideront s’il faut agir ou non.
effectuent des pèlerinages depuis des régions lointaines Si un moine est armé, il est fort probable qu’il
et se voient offrir l’hospitalité pour une nuit en échange soit prêt à se battre. S’il est tatoué, il doit certai-
d’un don. Même si les moines accueillent des personnes nement faire partie des ise zumi, les membres
issues de n’importe quel milieu, ils renvoient quiconque ne de l’ordre de Togashi. Malgré ces quelques
respecte pas l’étiquette des lieux, qui implique de retirer signes extérieurs, les moines sont généralement
couvre-chef, chaussures et armes avant d’entrer, ainsi que plus difficiles à identifier que les samouraïs, qui
de parler à voix basse. arborent leurs couleurs de clan et leur mon avec
Les temples jouent souvent un rôle important dans fierté, et dont les réactions sont plus prévisibles.
leur communauté. Les habitants des alentours s’y rendent Lors d’une rencontre avec un moine, mieux vaut
chaque jour pour présenter leurs hommages et obtenir simplement lui présenter ses hommages et le
des bénédictions. Les moines ou les prêtres qui y vivent laisser vaquer à ses occupations.
accomplissent des rituels publics quotidiens, ou seule-
ment lors des fêtes et des festivals. En fonction du temple
et de la déité vénérée, les lieux peuvent aussi remplir un
autre rôle, mais leur vocation principale reste d’offrir aux son caractère béni, à même d’accueillir des reliques sacrées,
dévots un endroit où révérer cette divinité. Les temples aucun élément ne doit prendre plus d’importance que les
tiennent à disposition le matériel nécessaire aux prières, y autres. Cette représentation reste en général symbolique, et
compris de l’encens et des offrandes, que les moines pré- se matérialise par l’incorporation des couleurs et d’images
parent en général eux-mêmes. L’un des devoirs les plus de chaque élément dans l’architecture, mais certains vastes
importants du prêtre, du moine ou du shugenja en chef temples contiennent un bassin pour l’Eau, un brasero pour
consiste à enseigner aux profanes des sujets tels que les le Feu, de l’encens pour l’Air et un bol de sel pour la Terre.
Tonnerres, les fortunes, les éléments ou tout autre aspect Chacun doit être constamment plein ou ne jamais s’éteindre,
des leçons de Shinsei auquel le temple est consacré. et ils peuvent tous être utilisés pour purifier un visiteur avant
Les moines veillent aussi au délicat équilibre des élé- qu’il ne s'approche de la représentation de Shinsei, de la for-
ments au sein du temple. Certains de ces édifices sont bâtis tune ou du Tonnerre, devant laquelle il s’incline pour lui offrir
de sorte que chaque façade représente un élément, et le ses salutations. Les moines effectuent ce rituel de purifica-
toit symbolise alors le Vide. Afin que le temple conserve tion personnel chaque fois qu’ils pénètrent dans le temple.

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C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

Les temples les pèlerinages


Les temples sont en général dédiés à une fortune, un Un pèlerin qui visite un temple peut aussi bien
N N A avoir traversé tout Rokugan que provenir de
Tonnerre ou un aspect de Shinsei, mais les plus vastes
A R R
peuvent l’être à plusieurs fortunes, à tous les Tonnerres ou la ville voisine. Il peut s’agir d’un riche samou-
aux nombreuses leçons de Shinsei. Les temples sont ouverts raï ou d’un paysan ordinaire, et son voyage
De nombreuses personnes
conservent chez elles toute la journée pour que les visiteurs viennent y prier, peut avoir été motivé par le besoin de trouver
de l’encens, des bougies déposer des offrandes ou demander conseil aux moines qui le pardon ou d’obtenir une bénédiction pour
et d’autres objets dont y habitent. Ces derniers entreprennent leurs propres rituels une nouvelle aventure, ou bien par d’autres
elles se serviront au afin de garantir le caractère sacré des lieux, et ils accom- raisons. Les moines entreprennent des pèleri-
temple, mais aussi dans plissent parfois des rituels de groupe les jours de fête ou nages sur ordre de leurs supérieurs ou de leur
le sanctuaire familial. de festival. Même si certaines parades commencent dans propre gré. Les plus grands temples proposent
Elles peuvent également le temple, les cérémonies publiques se déroulent en géné- des chambres spartiates pour les pèlerins,
les emporter lors de leurs
ral à l’extérieur. Les bénédictions pour les morts se tiennent sans quoi ces derniers doivent s’en remettre
voyages pour déposer des
à l’intérieur, mais les cendres sont placées dans un cime- à la charité d’étrangers ou compter sur leurs
offrandes dans les sanc-
tuaires en bord de route tière attenant, et les familles de samouraïs de la région pos- propres moyens.
afin de s’assurer un trajet sèdent un sanctuaire familial sur place. Les temples sont des Le pèlerinage peut s’avérer ardu, mais le
sans encombre. lieux de prière et de contemplation, et une atmosphère de voyage est aussi important que la destination
révérence silencieuse y est encouragée. et constitue une chance pour celui qui l’entre-
L’encens est composé
Même si chaque temple est unique, tous partagent des prend de prouver sa dévotion. Il n’est pas rare
d’herbes et de bois que
caractéristiques communes, telles que des portes domi- qu’un moine se joigne à un pèlerin en difficul-
les esprits apprécient, qui
purifient ou protègent, ou nées par des tours ou une architecture rappelant celle de té et lui apporte soutien et encouragements
qui évoquent un élément. pagodes. À l’intérieur, le hall principal contient un objet dans son voyage si sa volonté vacille. Entre-
Le parfum de l’encens d’adoration, et une salle de méditation offre un espace de prendre un périple sacré accorde au pèlerin le
d’un temple est doux, et il prière. Le temple peut aussi inclure un ou plusieurs sanc- respect de ceux qu’il rencontre, et la plupart
contient souvent du bois tuaires, ainsi que des autels où des chandelles restent allu- des individus honorables offrent leur hospitalité
d’agar ou de santal. mées. Au moins un bol d’encens est présent, pour recueil- à ces voyageurs, qu’elle prenne la forme d’une
Extraire l’huile des plantes lir les cendres des offrandes du jour. La plupart des objets coupe d’eau, d’un endroit sûr où dormir ou d’un
ou des baies locales, puis sacrés sont entreposés dans des salles privées, inacces- peu de compagnie. Cependant, certains indivi-
la transformer en bougies sibles aux visiteurs ordinaires. dus abusent de cette tradition et clament que
pures à la lente consuma- la raison de leur voyage est sacrée pour cacher
tion, nécessaires dans les
temples, est un processus les richesses et de plus obscurs mobiles : par conséquent, cer-
taines personnes se méfient des pèlerins. Enfin,
laborieux que seuls les ar-
tisans compétents peuvent
les bénédictions des voleurs sans honneur peuvent prendre pour
cible d’honnêtes pèlerins qui voyagent seuls, en
mener à bien. La confrérie de Shinsei est une organisation pleine de res-
particulier s’ils n’ont pas trouvé de refuge.
sources, mais il est rare qu’elle finance seule l’édification
Les visiteurs d’un temple
qui souhaitent poser une d’un nouveau temple. Apporter les fonds nécessaires à
question à l’esprit peuvent cette construction demande un investissement conséquent,
écrire leur requête sur des mais assure au donateur des bénédictions qui rentabilisent
a d en e n dai i i n e le n r i r e Les temples sont parfois construits autour d’un sanc-
plaques en bois (des ema)
confectionnées par les terres gagne en prestige et améliore son karma : il en retire tuaire, sur le site d’un événement miraculeux ou dans
moines. Les pèlerins les donc un bénéfice tant spirituel que physique. Nombre de des villes récentes dont la population augmente et qui
accrochent ensuite dans familles et de clans entretiennent des temples sur leurs terres nécessitent donc un lieu où prier. De nouveaux ordres de
le temple ou le jardin. À moines bâtissent aussi des temples pour leur propre usage
pour cette raison, mais aussi, souvent, parce que les temples
la fin de la journée, les et pour attirer l’attention de la confrérie de Shinsei. Dans
en question revêtent une signification particulière pour eux.
moines rassemblent les ce cas, ces ordres cherchent un site approprié afin d’in-
ema et les brûlent selon Même si les temples ne sont pas aussi autonomes que
les monastères, les moines qui y résident trouvent des tégrer le paysage dans la construction. Idéalement, les
un rituel.
moyens pour suppléer les dons des visiteurs. Par exemple, temples sont érigés dans un endroit pur, dans une région
ils produisent souvent les objets nécessaires à la prière, à la beauté naturelle ou dans une zone urbaine bien entre-
comme l’encens ou les bougies, que les pèlerins peuvent tenue. Un lieu entouré par une montagne au nord, un
alors utiliser. Bien entendu, les moines attendent un don volcan au sud et une étendue d’eau à l’est est considéré
en retour. Cette pratique permet aussi de garantir la qua- comme de particulièrement bon augure. Un temple sera
lité de fabrication de ces accessoires, ainsi que leur effica- perçu comme plus sanctifié que les autres si sa conception
cité. Les créer devient en soi un acte de prière, une autre est exemplaire et son entretien irréprochable. Un tel bâti-
façon dont les moines servent le temple et concentrent ment rayonne d’une puissante aura que même les gens du
leur esprit sur l’unité de l’univers. peuple ressentent dès l’entrée.

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CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

les reliques des seuils sacrés


Même si la taille et le rôle des temples varient grande-
La principale relique de la confrérie de Shinsei ment, certaines caractéristiques possèdent une telle
est l’original du Tao de Shinsei… ou du moins, importance symbolique qu’elles sont communes à tous,
ce serait le cas si la confrérie savait qu’elle est ou presque. La première est la porte principale, dotée
conservée dans la ville secrète de Gisei Toshi, sur d’une ou plusieurs tours, qui marque la frontière entre le
les terres du Clan du Phénix. Plusieurs temples monde extérieur et l’espace spirituel du temple. Les plus
d’envergure détiennent des copies du texte, complexes de ces portes possèdent deux niveaux et un
parmi les plus anciennes, révérées au plus haut toit décoré, et certaines comportent des alcôves dans les-
point. Les shinséistes considèrent en effet que quelles se dressent des statues. Ces gardiens de pierre
plus la copie est proche de l’original, plus fidèles revêtent une importance certaine, car ils maintiennent les
en sont les enseignements. esprits indésirables à l’extérieur du temple. Ils prennent la
En plus de ces documents, il existe d’innom- forme de diverses créatures, en fonction du temple. Les
brables reliques dans tout Rokugan : certaines komainu, croisement entre un lion et un chien, sont pré-
attendent encore d’être découvertes, tandis sents dans tout Rokugan. Les lions et les dragons sont
que d’autres sont gardées en sécurité dans un considérés comme particulièrement efficaces, notamment
temple. La forme de ces objets sacrés varie, mais sur les terres des clans auxquels ils donnent leur nom.
chacun est rattaché au passé, ainsi que, souvent, Après avoir franchi l’entrée, les visiteurs suivent en
au monde des esprits. Les reliques peuvent être général un chemin qui traverse le jardin du temple. Cette
des textes emplis de sagesse, des armes ayant voie ne mène pas toujours directement au bâtiment prin-
appartenu à des héros, voire aux Tonnerres, des cipal, il arrive ainsi qu’elle serpente ou contourne l’édi-
statues dotées de propriétés surnaturelles, des fice avant d’en atteindre l’entrée. Ces circonvolutions ont
vêtements portés par les Kamis, ou même des deux objectifs : laisser au visiteur le temps de méditer
urnes funéraires. avant d’entrer (une préparation qui permet à l’esprit de se
De fantastiques légendes ont vu le jour au vider) et perturber les esprits qui parviendraient à déjouer
sujet de certaines de ces reliques, en particulier la vigilance des gardiens. Le jardin en lui-même est sacré,
des plus anciennes et des plus mystérieuses. Les et tout ce qui y pousse joue un rôle dans la conception
nombreuses histoires transmises de génération de l’espace. Même si chaque temple ne dispose pas d’un
en génération s’avèrent souvent aussi vieilles jardin, ceux qui en possèdent s’en servent comme d’une
que les reliques mêmes. D’autres sont créées extension, un lieu où raconter l’histoire de Shinsei ou des
de toutes pièces par des visiteurs témoins de Tonnerres et où méditer. Tout comme les éléments sont
phénomènes inexpliqués. Bien plus encore ont équilibrés à l’intérieur du temple, les moines veillent à ce
pour origine les moines qui s’occupent de ces qu’ils le soient dans le jardin.
reliques, et qui cherchent à développer la répu-
tation de leur temple. La confrérie garde une
trace écrite des reliques et de leurs propriétés,
mais cette liste ne cesse de changer et de s’al-
longer. Aucune procédure n’existe pour confir-
mer si une relique est véritable ou fausse, si elle
présente des propriétés surnaturelles, ou s’il ne
s’agit que d’objets historiques précieux pour se
remémorer le passé.
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

Les grands temples présentent souvent un bâtiment


principal semblable à une pagode, où chaque niveau
symbolise un élément différent. Dans certains temples, la
osano-wo
construction la plus proche de l’entrée peut être ouverte : Les mythes qui entourent la vie de la fortune
les murs sont déplacés pour créer un espace relié à la fois du tonnerre et du feu, Osano-wo, sont légion.
au jardin et aux salles intérieures. Les temples sont prin- Second fils du Kami Hida, il aurait eu pour mère
cipalement en bois, mais lorsqu’ils sont situés dans des le dragon du tonnerre, qui inspire nombre
zones dont l’isolement complique l’entretien, ils peuvent de héros. Osano-wo lui-même est un être de
être en pierre. Ce matériau est plus pratique en cas de cli- légende, dont les qualités héroïques de force,
mat difficile, et plusieurs temples en pierre sont si anciens d’honneur et de courage ont fait la réputation.
que personne ne se rappelle qui les a édifiés. Certains En tant que Champion du Clan du Crabe, il a
temples, comme ceux des terres du Clan du Crabe, res- mené ses troupes contre les trolls, allant presque
semblent à des forteresses. À Rokugan, rares sont ceux qui jusqu’à l’anéantissement de cette race ancienne.
sacrifieraient leur honneur pour attaquer un temple, mais Osano-wo eut deux fils de mères différentes.
les ingénieurs du Clan du Crabe ont naturellement envisa- Il désigna le premier, Kenzan, comme héritier.
gé une telle possibilité. À travers lui, la famille Hida peut remonter sa
lignée jusqu’au Kami. L’autre fils de la fortune,
un but plus noble Kaimetsu-Uo partit créer le Clan de la Mante
dans les îles de la Soie et des Épices. De nom-
La présence d’un temple offre aux gens du cru et aux voya- breux marins de ce clan clament fièrement des-
geurs un endroit où prier, mais peut aussi avoir d’autres cendre d’Osano-wo, et le Champion du Clan
utilités pour la communauté. Bénéficier d’un temple impo- de la Mante, Yoritomo, ne fait pas exception.
sant accroît le prestige d’une région, et y attire égale- Son clan a construit, dans la province Inazu-
ment de nouveaux habitants. Des temples plus petits per- ma, l’un des deux plus grands temples d’Osa-
mettent aux locaux de consulter facilement des moines, n - Shinden Sand d n le r r n la
au lieu de s’en remettre aux prêtres itinérants pour obte- réputation. L’autre temple d’importance, Shin-
nir des bénédictions. Les villageois se tournent vers les den Kasai, fut édifié plus tard par les architectes
moines installés près de leurs habitations pour recevoir du Clan du Crabe dans les plaines du Tonnerre.
des conseils en temps de crise ou lorsqu’un avis spirituel
s’avère nécessaire dans une dispute. Le temple est un lieu
à destination des paysans comme des samouraïs de haut
rang, bien que seuls les plus riches et les plus prestigieux d’ailleurs utilisé comme terrain d’entraînement pour les
puissent espérer qu’il marque et bénisse les étapes de leur nouveaux moines, afin de garantir que seuls les meilleurs
vie. La plupart du temps, les Rokugani se rendent simple- r i en e de iennen de ri a le hei d nnerre
ment au temple pour se concentrer sur la vie spirituelle. Les paratonnerres placés en haut des murs créent un spec-
Les moines résidant dans des temples dévoués au Tao tacle aveuglant lors des fréquents orages. Peut-être ont-ils
de Shinsei et aux nombreux sutras qui approfondissent les une fonction plus importante, mais les moines en auraient
enseignements du Petit Maître peuvent en lire des pas- fait un secret bien gardé.
sages aux visiteurs ou même leur apprendre à lire les textes Le sensei en chef est un samouraï du Clan du Lion à la
par eux-mêmes. Puisque l’éducation de base est réservée retraite, connu désormais sous le nom de Kusuburu. Cet
aux samouraïs et aux marchands, il s’agit là d’une occasion h e l ei e la l ar de hei d nnerre
rêvée. Dans une contrée où la religion exige que l’Ordre les défie (et les vainc) tous régulièrement afin de conser-
céleste conserve sa rigidité, cette attitude pose une sorte ver son poste. Son crâne chauve rougi est couvert de cica-
de contradiction, mais permet souvent aux moines de trices. Kusuburu porte un hakama écarlate et garde son
recruter dans leur ordre. Une fois qu’un paysan prometteur torse nu pour exhiber les marques laissées par son long
a prononcé ses vœux, il sort de l’Ordre céleste, et il n’y a séjour au temple.
donc eu aucun mal à lui apprendre à lire.
La construction de la forteresse
shinden kasai Deux cents ans après la mort d’Osano-wo, la confrérie
Ce temple dédié à Osano-wo, fortune du tonnerre et du de Shinsei demanda à la famille Hida de lui confier l’ono
feu, est particulier, car la plupart des moines qui y résident d’Osano-wo, que les Hida n’utilisaient pas, afin de le
sont d’anciens samouraïs du Clan du Crabe. Cette impres- n er er en ri Shinden Sand n e le i r
sionnante forteresse de calcaire a été bâtie par des guer- les terres du Clan de la Mante. Les Hida étaient réticents
riers du Clan du Crabe sur les plaines du Tonnerre, que à envoyer la hache de bataille aussi loin : ils chargèrent
des tempêtes ravagent tout au long de l’année. Pour l’at- donc un samouraï du nom de Kaiu Tomoki de construire
teindre, les visiteurs doivent gravir des rochers qu’aucun un temple capable de rivaliser avec celui du Clan de la
cheval ne peut escalader et se frayer un chemin à travers Mante. Les plaines du Tonnerre furent considérées comme
un labyrinthe parsemé de pièges mortels. Ce dédale est la localisation la plus appropriée, et Tomoki partit avec

181
C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

L’armée d’Osano-wo
les histoires sur le
temple du tonnerre
Shinden a ai n ien ne ar e de hei r a -
bat : tout naturellement, de nombreux commandants ont
donc demandé de l’aide au temple par le passé. Peu
d’entre eux ont réussi à persuader le sensei en chef que
$ Les ingénieurs Kaiu ont installé d’im- leur cause était assez noble pour justifier l’intervention
menses paratonnerres en haut du temple des moines. Seul le Champion d’Émeraude peut comp-
afin d’utiliser les éclairs pour alimenter des ter sur eux, puisqu’ils sont sûrs que gagner le Champion-
pièges, dans lesquels les captifs seraient nat d’Émeraude est la preuve du soutien d’Osano-wo. Le
incinérés. Les moines les plus expérimen- Champion d’Émeraude est l’élu de la fortune du feu et du
tés peuvent se servir des éclairs comme nnerre e le hei d nnerre le i r n a e gl en
d’une arme ! Des moines, seuls ou en petits groupes, quittent parfois
$ Les moines affirment conserver l’ono le temple quelque temps afin de combattre au nom de
d’Osano-wo afin qu’il le trouve à son leur fortune, mais l’Empire n’a pas encore contemplé la
retour, mais personne n’a jamais vu l’arme. r a ie de l’ar e de hei d’ an - dan e
Peut-être ne l’ont-ils jamais possédée, ou sa gloire.
peut-être l’ont-ils perdue ?
$ Les moines scarifient leur corps et se puri-
fient par les flammes. De nombreux aspi-
rants ne survivent pas aux rites d’initiation, ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  4 2
et leurs dépouilles brûlées sont offertes en Takeshi a perdu sa jambe au cours d’un combat contre les
sacrifice à la fortune. créatures de l’Outremonde : il s’est alors retiré à Shinden
$ Certains moines étaient autrefois de dan- Kasai, où il a réappris à se battre. Il a d’abord envisagé
gereux criminels, des meurtriers et des de retourner sur la Muraille, mais Osano-wo lui est apparu
voleurs qui ont échappé à la justice en dans un rêve : il est donc resté sur place afin d’enseigner
entrant dans l’ordre. aux autres moines, et a pris le nom de Takeshi. Ce grand et
redoutable moine accepte de tout cœur sa nouvelle vie et
s’estime chanceux. Il porte une prothèse en bois sous son
hakama, et il se révèle plus agile que ne le laisse penser sa
un contingent d’ingénieurs et de bushi pour bâtir un édi- grande taille. Il s’entraîne dur aux côtés des autres moines
fice à même de protéger l’arme. Les guerriers du Clan du et reste prêt à affronter ses ennemis, même s’il ne sait pas
Crabe restèrent sur place, à développer leurs pratiques quand ni qui il devra combattre.
martiales. Depuis, de nombreux guerriers, de tous les
SOCIÉTAL PERSONNEL
clans et de toutes les castes, les ont rejoints plutôt que
de se retirer dans un monastère plus paisible. La confré- 55 HONNEUR ENDURANCE
16
rie de Shin ei a i ai e e i le hei d e le 4 1
restèrent à part, se gouvernant eux-mêmes, et le sont tou- 45 GLOIRE SANG-FROID
10
jours de nos jours. 1 4
25 STATUT 3 ATTENTION
5
Parés à la guerre +2, –2 VIGILANCE
3
ATTITUDE : INTIMIDANT
Les boyaux de la forteresse contiennent des sanctuaires
dédiés à Osano-wo et aux fortunes qui lui sont associées. ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 2 SOCIAL 2 PRO. 0
La seule lumière qui les éclaire provient des flammes que
le hei ain iennen all e en er anen e e AVANTAGES DÉSAVANTAGES

moines dorment et s’entraînent dans des chambres en si ee r i i iste


pierre vides. Leurs rituels sont physiquement intenses,  martial ; physique  martial ; physique
leur entraînement éreintant, et même ceux qui réussissent
leur initiation en ressortent couverts de brûlures et de ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
cicatrices. Presque toutes les reliques conservées dans le
 : portée 1-2 ; dégâts 5 ; Dangerosité 6 ; Deux mains,
temple sont des armes, dont les plus précieuses sont enfer-
Militaire
mées dans l’imposante salle des coffres où repose l’ono
d’ an - dan l’a en e de n re r e hei ’en- i e e t rt )  : tunique élimée (Résistance phy-
traînent avec ce type de hache, qui est leur arme emblé- sique 1 ; Détérioré, Ordinaire)
matique, mais maîtrisent aussi le ju-jitsu. Ils recherchent
l’Illumination par l’adoration de leur fortune et l’adhésion
à ses préceptes martiaux.

182
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

CAPACITÉS
le temple des
R NN RR
Lorsque Takeshi effectue un test d’action d’Attaque ou de
esprits attentifs
Soutien (Terre), il peut dépenser comme suit : À l’orée des plaines fertiles de la famille Kitsu, le temple
des Esprits attentifs, construit en haut des montagnes,
e erre  : éliminez 1 point de Fatigue par
veille sur le Clan du Lion. De chaque côté du temple, des
dépensé de cette façon.
lions dorés, dont les yeux en cristal flamboient dans la
lumière du soleil, montent la garde. Sur les terres du Clan
du Lion, d’autres temples sont protégés par des répliques
idée d’aventure : de ces statues, façonnées à l’image de ces fidèles repré-

reliques familiales
sentations de la race kitsu. Certains sont persuadés que les
yeux des lions s’embrasent d’une vive lueur à l’approche
d’un danger.
Accroche La famille de Takeshi affirme être La moine en chef du temple se nomme Shizuka. La
propriétaire d’une relique, une lame Kaiu, qu’il couleur de ses yeux, dorés, symbolise la bénédiction de
a emportée avec lui au temple. Elle estime que ses ancêtres kitsu. Elle ne parle que rarement, mais lors-
cet héritage familial n’aurait jamais dû quitter qu’elle s’en donne la peine, tous écoutent : elle incarne la
ses terres, et que Takeshi ne l’a offert au temple sagesse et l’intelligence des kitsu. Elle passe le plus clair de
qu’après être devenu moine, quand cette déci- son temps à l’intérieur du temple, où l’absence de lumière
sion ne lui appartenait donc plus. La famille directe du soleil a rendu sa peau d’une pâleur fantomatique.
envoie donc les PJ la récupérer, et demande Ikoma Eiji est un historien en visite qui a deman-
que la mission soit accomplie rapidement. Elle d a dai de la a ille i la er i i n de i re
fournit aux PJ un katana de qualité moindre pour dans le temple, dans l’espoir d’en apprendre plus sur
remplacer l’original. cette famille… et sur ses ancêtres. Il passe ses journées à
attendre et à espérer que les esprits des kitsu lui accordent
Développement Si les PJ veulent se faufiler des connaissances à ajouter aux histoires officielles. Il a
dans le temple, ils devront se frayer un chemin demandé de l’aide à Shizuka, mais elle lui répond simple-
à travers le labyrinthe. Sinon, ils peuvent se pré- ment d’écouter.
senter aux moines qui les observent du haut des
remparts : s’ils les convainquent de les laisser
en rer r arler a e hi n hei a ara Akodo et les kitsu
et les conduit à travers le dédale. Bien entendu, De nombreux mythes circulent sur la véritable nature des
Takeshi refuse que les PJ prennent l’arme. S’ils ancêtres kitsu, la race de créatures léonines qui arpentait la
demandent à la voir, il leur répond qu’elle est terre avant la chute des Kamis. La légende racontée dans ce
enfermée dans la salle des coffres du temple et temple stipule qu’Akodo a mené une guerre contre les kit-
que seul le sensei en chef, qui conserve la clé su, pensant qu’il s’agissait de bêtes : il ne comprit son erreur
sur lui, y a accès. Si les PJ insistent, Takeshi peut que lorsque ses adversaires apprirent la langue rokugani,
requérir la clé de leur part, mais uniquement si et il leur demanda alors pardon. Pour se repentir d’avoir
l’un d’entre eux l’affronte en duel et prouve sa presque exterminé leur race, il leur offrit une place au sein
valeur : Osano-wo décidera du vainqueur. La de son clan, et les survivants se marièrent avec ses enfants
salle des coffres contient de nombreux objets et fondèrent une nouvelle famille. Les moines du temple
et armes sacrés : identifier la lame prendrait un des Esprits attentifs accordent une grande importance à
temps considérable sans l’aide de Takeshi. l’écoute, à la compréhension et à la réflexion avant l’action.
三 Paroxysme Si les PJ essaient d’échanger
la réplique contre l’original en la présence de En l’honneur des kitsu
Takeshi, il risque de s’en rendre compte et de
les attaquer. Comme pour le duel, il considère Le temple des Esprits attentifs, haut de quatre étages et
leur victoire comme le signe qu’ils méritent de peint en rouge, est visible à des kilomètres à la ronde, mais
réussir. Les PJ peuvent aussi faire preuve de l’atteindre met à l’épreuve la force et la détermination
diplomatie, mais doivent l’approcher comme du pèlerin, car les marches taillées à flanc de montagne
un moine et non comme un ancien samouraï du sont raides et étroites. À l’intérieur des murs se déploie la
Clan du Crabe. richesse du temple, sous la forme d’objets sacrés façon-
nés grâce à l'or offert par Akodo après sa première ren-
contre avec les kitsu et les combats qui s’ensuivirent. Seuls
les membres de la famille Kitsu jouissent d’un libre accès
au temple. Les autres samouraïs du Clan du Lion doivent
obtenir une autorisation pour s’y rendre, et les étrangers
au clan sont rarement les bienvenus.

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des murmures idée d’aventure :


sur le temple des esprits bestiaux
$ D’étranges créatures rôdent dans les mon- Accroche Des plaintes émergent dans
tagnes, la nuit, et leur tête est celle d’un les villages à proximité du temple des Esprits
lion, comme celle des kitsu ! Peut-être attentifs : des chevaux sont tués, des marques
qu’ils ne sont pas éteints et qu’ils vivent de griffes sont découvertes sur les portes et
en secret dans les montagnes. Les moines des gens disparaissent. Les habitants craignent
doivent savoir qu’ils sont là et s’être alliés qu’une bête ou un esprit maléfique rôde, et ils se
avec eux. tournent vers le temple pour obtenir de l’aide.
e dai de la a ille i a ri e l’a a
$ Le sang de ces créatures coule dans les
temple à toute personne pouvant prêter main-
veines de la famille Kitsu. C’est la rai-
forte. Aucun shugenja ne se trouve sur place
son pour laquelle ses membres sont
pour l’instant, et un PJ shugenja peut donc être
si étranges.
contacté directement.
$ Ceux qui restent assis assez longtemps
entendent des voix, mais comment savoir Développement Shizuka apprend aux
si elles appartiennent aux kitsu ou à autre PJ que les esprits des kitsu se sont tus, ce qui
chose ? montre leur mécontentement, et que rien ne
parvient à les apaiser. Les moines ont même
$ Le temple se dresse pour protéger le clan essayé de méditer pendant de très longues
et la famille Kitsu. Rien ne peut leur arriver périodes, sans manger ni dormir, mais ils n’ont
de fâcheux tant qu’il est là. rien obtenu, et ont fini épuisés. Elle a aussi peur
pour Shu, un moine parti dans les montagnes et
qui n’est jamais revenu.

Rester à l’écoute 三 Paroxysme Si les PJ retrouvent Shu dans


les montagnes, il se comporte comme un ani-
Même si la famille Kitsu comprend de nombreux shugenja, mal sauvage et mange de la viande crue d’ori-
y compris les sōdan-senzo qui parlent aux ancêtres, aucun gine douteuse. Lorsqu’ils l’approchent, il attend
d’entre eux n’oserait invoquer des esprits à l’intérieur du qu’on le vénère, et toute autre attitude le fait
temple. Seul le silence permet d’entendre les murmures attaquer sans distinction de cible. Un shugenja
des kitsu défunts qui souhaitent partager leur sagesse. peut comprendre qu’il est possédé par un esprit
Ainsi, les moines qui vivent au temple ne parlent que rare- maléfique, et si les PJ conduisent le malheu-
ment et passent des heures à méditer pour entendre les reux à Shizuka, elle peut l’aider à le vaincre. S’ils
voix des ancêtres kitsu. Les jeunes membres de la famille tuent le moine, ils peuvent ramener son corps au
Kitsu effectuent un pèlerinage dans ce lieu pour leur gem- temple afin qu’il reçoive les rites consacrés aux
puku : ils sont envoyés passer une nuit dans les montagnes défunts, et Shizuka les remercie de leur assistan-
au-delà du temple pour se rappeler la façon dont Akodo ce. S’ils ne trouvent pas Shu, il revient au temple
y a repoussé leurs ancêtres avant d’apprendre à écouter. la nuit pour l’attaquer.

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CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

Shu, moine possédé


des buts secrets
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  5 2
Shu était trop avide d’entendre des murmures. Dans les $ Les carillons rappellent les mots de Shin-
montagnes, il a écouté un mauvais esprit, et s’est retrouvé
sei, gravés sur les cloches.
possédé. Persuadé d’être un kitsu, il se comporte comme
un lion, mais l’esprit qui l’habite se nomme Sasayaki et le $ Les carillons repoussent le mal. S’ils devaient
rend féroce, puissant et violent. Shu porte une tunique en s’arrêtent de sonner chaque heure, ce serait
lambeaux, marche pieds nus et se bat avec des ongles un terrible présage.
devenus de véritables griffes. Il croit qu’il est spécial, qu’il $ Des moines des Quatre Temples vivent dans
a été élu… et que les moines doivent le vénérer. toutes les cours de Rokugan. Ils espionnent
tout le monde et font remonter chaque infor-
SOCIÉTAL PERSONNEL
mation à l’Empereur.
30 HONNEUR ENDURANCE
18
1 2
30 GLOIRE SANG-FROID
10
2 4 de ces temples. Ils font office de conseillers dans les cours
10 STATUT 2 ATTENTION
3 de l’Empire, tout en gardant un œil sur les dirigeants pour
le compte de la population.
+2, –2 VIGILANCE
5 La confrérie de Shinsei n’a pas de chef attitré, l’Empe-
ATTITUDE : SAUVAGE reur étant le dirigeant de la religion shintao, mais le Grand
Maître des Quatre Temples lui sert parfois de porte-parole.
ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 0 SOCIAL 0 PRO. 1
’a elle rande a re e e n e ri e ra aille
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
sans relâche pour empêcher les abbés de chaque temple
de perdre leur temps en disputes… une tâche irréalisable,
A ie s r rte e t s i semble-t-il. Elle estime que sa mission consiste à en savoir
 martial ; physique  social ; mental le plus possible sur les affaires en cours à Rokugan, et à
ne laisser passer inaperçu aucun détail de la vie quoti-
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
dienne au sein de son ordre. Bien qu’elle s’habille et se
Gri es esti es  : portée 0 ; dégâts 4 ; Dangerosité 4 ; comporte comme le plus humble des initiés, elle est facile-
Acéré ment reconnaissable : les autres moines la traitent avec un
respect qui frôle la révérence.
i e e t rt )  : tunique en lambeaux (Résistance Yoshi est le moine en chef du temple de l’ouest. Cet
physique 2, Résistance surnaturelle 2) homme âgé apprécie l’étude du Tao de Shinsei et veut
partager la sagesse du Petit Maître avec tout le monde.
CAPACITÉS
Joyeux, grand et mince, il conserve l’énergie de sa jeu-
R AN N AN nesse malgré son âge.
La Dangerosité des attaques qui prennent Shu pour cible Asahina Atsushi est un jeune courtisan inexpérimenté
diminue de 3 points. De plus, le coût de tout effet de en j rner ūden Se n S n r le l i a a ri-
pour lui infliger un coup critique augmente de 1. bué par défaut plus que par choix, car il n’a montré aucun
talent pour devenir shugenja ou bushi. Il s’habille bien,

les quatre temples mais n’est pas assez débrouillard pour s’en sortir correc-
tement à la cour sans graisser quelques pattes. Heureuse-
e e le e dre en a a re in de ūden Se - ment pour lui, il ne manque pas de ressources financières.
pun, le palais de la famille éponyme, et le surplombent, en
y faisant retentir leurs Carillons de la pureté en harmonie
Trouver la voie
chaque heure de la journée. Des copies du Tao de Shin-
sei, parmi les premières réalisées, y sont conservées, une Les Quatre Temples ont été fondés par les quatre enfants
partie dans chaque temple. Des trésors inestimables sont de Seppun : chacun d’entre eux interprétait différemment
exposés, mais les plus importantes et les plus dangereuses ses enseignements et avait une opinion divergente sur l’im-
des reliques sont enfermées dans des salles protégées par portance des multiples aspects de Shinsei. Les chamailleries
des pièges complexes afin d’empêcher les intrus d’entrer. entre les moines de ces temples sont légendaires, mais sous
Un réseau de moines s’étend dans tout Rokugan à partir la dire i n de ri il n ar i r n n

185
C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

Les quatre aspects de Shinsei CAPACITÉS

Les Quatre Temples immaculés démontrent la richesse de N AR N A A


la confrérie de Shinsei. En plus d’abriter des parties des Lorsqu’un personnage réussit une action d’Attaque ou de
premières copies du Tao de Shinsei, chacun d’entre eux Manipulation dont Jun est la cible, réduisez le nombre de
contient une statue du Petit Maître qui célèbre l’enseigne- succès bonus de 3, jusqu’à un minimum de 0.
ment propre à ce temple. Dans le temple de l’est, la statue
est dans une posture méditative ; dans celui du nord, Shinsei
marche avec un bâton ; dans celui du sud, il frappe du
poing ; et dans celui de l’ouest, il lit un rouleau à voix haute. idée d’aventure :
Chacune de ces statues montre l’activité que les moines du raconter des
temple considèrent comme primordiale : l’introspection, la
compréhension du monde, la maîtrise du corps et de l’es- histoires
prit, et enfin la diffusion de la sagesse de Shinsei.
Accroche Atsushi, un jeune courtisan, de-
mande l’aide des PJ au sujet d’un problème
délicat. Il pense qu’une moine du nom de Jun l’a
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  4 2 entendu dire quelque chose qu’une certaine per-
sonne pourrait juger offensant, et il souhaite que
Jun est une moine bien en chair de taille moyenne. Elle
les PJ la retrouvent dans le temple de l’ouest et
voyage dans les cours de Rokugan pour offrir ses conseils,
lui présentent des excuses, accompagnées d’un
puis revient aux Quatre Temples chargée de nouvelles et
pot-de-vin au besoin, avant qu’elle l’apprenne à
de rumeurs. Elle sourit, plaisante et aime rester évasive si
la personne insultée. Atsushi n’est pas disposé à
cette attitude exaspère ceux qui la questionnent. En tant
répéter son insulte, mais il est évident que si les
que moine du temple de l’ouest, elle ne manque jamais une
PJ l’aident, il leur devra une faveur considérable.
occasion de partager les enseignements de Shinsei. C’est
d’ailleurs le seul sujet dont elle parle librement. Sa vie parmi Développement Jun semble être en train
les courtisans l’a rendue matérialiste, et ses interlocuteurs de méditer dans le jardin du temple. Si les PJ
peuvent l’acheter ou la convaincre avec du saké. Elle estime attendent qu’elle finisse, ce n’est que lors-
que lorsqu’elle est loin du temple, les règles normales de qu’ils abandonnent qu’elle rit et leur adresse
son ordre ne s’appliquent pas. Elle porte un pendentif de la parole. S’ils l’interrompent, elle les houspille,
lotus en or de grande valeur sous sa tunique simple. puis rit quand ils lui présentent leurs excuses.
Jun admet avoir entendu Atsushi raconter bien
SOCIÉTAL PERSONNEL des choses, et elle fait tourner les PJ en rond.
55 HONNEUR ENDURANCE
10 S’ils lui proposent un pot-de-vin, elle accepte de
2 4 ne jamais répéter ce qu’a dit le courtisan, mais
45 GLOIRE SANG-FROID
12 après coup, elle reconnaît en avoir déjà parlé
3 2 au moine en chef du temple de l’ouest, Yoshi.
25 STATUT 3 ATTENTION
6 Elle n’en dira pas plus, puisqu’elle vient de pro-
mettre de garder le silence sur le sujet ! Si les PJ
+2, –2
ATTITUDE : DÉSINVOLTE
VIGILANCE
4 retournent voir Atsushi pour l’informer qu’ils ont
acheté le silence de Jun, il leur demande sans
ménagement si quelqu’un d’autre est au cou-
ARTISANAL 0 MARTIAL 2 SAVANT 3 SOCIAL 3 PRO. 0
rant. Ils peuvent mentir ou se faire un ennemi du
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
jeune courtisan en lui apprenant que c’est le cas
de Yoshi. Atsushi les menace alors de salir leur
ser te r s ti r r er réputation à la cour.
 social ; relations  social ; relations
三 Paroxysme Yoshi se trouve dans le temple
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS de l’ouest. Il ne parlera pas aux PJ avant qu’ils
aient répondu à trois questions sur le Tao de
t e r e : portée 1-2 ; dégâts 6 ; Dangerosité 2 ;
Shinsei. Ils trouveront les réponses dans les trois
Ordinaire
autres temples. S’ils réussissent, Yoshi avoue
i e e t rt ) : tunique de moine (Résistance phy- être l’objet des quolibets du courtisan, mais il lui
sique 1), pendentif de lotus en or (lors d’un test de Médi- pardonne ses calomnies. Yoshi comme Atsushi
tation, ajoutez un dé d’anneau lancé affichant ) diront du bien des PJ à l’avenir s’ils sont parve-
nus jusque là.

186
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

Les monastères les noms N


N N R

Tous les monastères servent le même but : offrir aux Les initiés d’un ordre de moines changent en Une fois les noms japonais
moines un endroit où vivre et apprendre. Dans certains général de nom lorsqu’ils laissent leur ancienne occidentalisés, une partie
vie et leur famille derrière eux. Chaque ordre de leur sens se perd. Les
ordres, les moines passent leur vie entière à l’intérieur
joueurs peuvent décider de
de leur monastère, qui doit alors posséder l’espace et les décide s’il s’agit d’une obligation ou non. Le
la signification d’un nom
accommodations pour leur permettre de chercher l’Illumi- choix du nom peut revenir à l’individu, ou
dans le cadre du jeu, mais
nation. D’autres ordres accordent plus de valeur à l’expé- l’ordre peut lui en attribuer un qu’il juge appro- il n’est pas nécessaire
rience du monde extérieur : ils n’offrent alors aux moines prié, comme dans la Vénérable Demeure de la qu’il corresponde à la
qu’un simple abri pour l’hiver ou pour se reposer en cas Lumière où de nombreuses recrues reçoivent le réalité. Chercher le terme
de maladie. Certains ordres comptent des centaines de nom de famille Togashi. japonais pour une vertu,
moines répartis dans plusieurs édifices dans tout Rokugan, Les moines se font souvent appeler par des un élément, ou même un
d’autres sont limités à une poignée de membres et n’ont noms simples qui revêtent un sens personnel ou animal favori peut faire
besoin que d’un seul bâtiment. Même si certains monas- symbolique approprié à leur ordre. Par exemple, découvrir un nom qui
semble approprié pour
tères sont de gigantesques complexes vieux de plusieurs un moine shinséiste peut choisir de s’appeler
un personnage. Même
générations, d’autres ne consistent qu’en un sanctuaire Hideaki, ce qui signifie sage. Un moine des for-
s’il est peu probable qu’il
entouré de quelques huttes. tunes peut se nommer Ai, amour, pour honorer s’agisse d’un nom propre
Bien que les moines puissent combler leurs besoins Benten, la Fortune des arts et de l’amour roman- dans notre monde réel, ce
physiques dans un monastère, ils n’y recourent que dans tique, ou Kishi, plage, en hommage à Isora, for- terme peut très bien servir
le but d’accomplir des tâches plus importantes. La santé tune des rivages. L’attribution du nouveau nom cette fonction à Rokugan.
spirituelle des moines passe avant l’aspect physique, et le est moins importante que l’abandon du précé-
bien-être de l’ordre avant celui de l’individu. La vie d’un dent. Le changement implique la fin d’une vie et
moine est rude, mais les récompenses spirituelles sont le commencement d’une nouvelle.
multiples : de nombreux samouraïs vieillissants rejoignent
donc un ordre à l’orée du dernier chapitre de leur vie.

une famille spirituelle


Comme pour les temples, de nombreux monastères sont
en inan ar de ri he dai i her hen
à obtenir des faveurs spirituelles ou à impressionner la
confrérie de Shinsei. À l’inverse, certains des plus petits
monastères sont bâtis à peu de frais par un moine ou un
groupe de moines qui se sent contraint de fonder un nou-
vel ordre distinct. Ce dernier reste relié à la confrérie de
Shinsei. Bien que les plus isolés soient ravis de se débrouil-
ler seuls, tous forment une sorte de famille spirituelle.
Le moine en chef de chaque ordre est souvent appelé
abbé ou abbesse, tandis que les autres moines deviennent
des sœurs ou des frères, afin de renforcer leur impression
d’avoir laissé leurs anciennes familles derrière eux pour en
rejoindre une nouvelle. Pour tout Rokugani, l’importance de
la famille ne fait aucun doute, et ces termes rappellent leurs
nouvelles responsabilités aux moines. Même si les querelles
entre monastères sont fréquentes, les moines qui
vivent dans un même temple vont rarement plus
loin que quelques débats animés. Comme le
rappelle la confrérie, tous sont des frères et
des sœurs qui suivent Shinsei.
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

prononcer ses vœux


La plupart des moines choisissent leur vocation, que La vie monacale est une vie de pureté, de céli-
ce soit dans leur jeunesse ou au moment de prendre bat et de simplicité. Ce mode de vie austère et le dur
leur retraite. Toutefois, certains sont des enfants labeur des moines ne conviennent pas à tous, même
abandonnés devant un monastère par des familles si les fidèles aux tendances romantiques ou violentes
trop pauvres pour les élever. Ces moines n’ont jamais peuvent canaliser leurs pulsions en servant Benten ou
rien connu d’autre. Bishamon, dont les ordres suivent des règles diffé-
Le processus d’initiation peut simplement rentes. En entrant dans un ordre, les initiés jurent de
consister à prononcer ses vœux devant le reste des respecter ses idéaux et ses principes. Échouer appelle
membres de l’ordre, ou impliquer des épreuves une punition de la part des moines plus anciens ou
physiques et des tests de volonté. Parfois, l’initié d’une autorité spirituelle plus importante.
ne sait pas qu’il passe un test : il peut alors réussir La décision de rejoindre un ordre ne se prend pas à
ou échouer avant même de réaliser qu’il est évalué. la légère. Même si des moines abandonnent parfois leur
Les ordres adeptes du secret se montrent particu- ordre pour revenir à leur ancienne vie, il n’y a aucun hon-
lièrement prudents dans leur recrutement : l’initia- neur à agir ainsi. Une famille respectable n’acceptera
tion peut inclure de nombreuses épreuves et durer jamais qu’un de ses membres quitte un monastère, sauf
plusieurs années. Une fois qu’un initié a été accep- circonstances exceptionnelles. Il doit y avoir une excel-
té, il se rase la tête : cet acte symbolise l’abandon lente raison pour déserter : une intervention divine, un
des futilités comme la vanité, le rang et les autres danger surnaturel que seul l’ancien moine peut repous-
préoccupations matérielles. ser ou un cas de corruption dans le monastère.

Dans tous les ordres, même les plus grands, les des heures, rassemble les moines, les réveille au matin et
moines savent que leur famille élargie partage une vision les envoie se coucher le soir. L’instrument sert également
du monde, une philosophie et un but commun. Ils s’ap- à prévenir d’un danger, ainsi qu’à communiquer avec les
pliquent donc à incarner l’idéal de la famille rokugani : kamis ou à attirer l’attention d’un Tonnerre. Cette dernière
tous ses membres travaillent de concert pour atteindre utilisation nécessite de particulièrement bien maîtriser
un même objectif. Cependant, comme dans toutes les l’objet et de le manier avec prudence. Les moines qui en
familles, des problèmes peuvent survenir entre membres. ont la charge développent leur art au fil des années, tout
Plus l’ordre est grand, plus le moine en chef doit arbi- d’abord en tant qu’apprenti puis en tant que maître. Entre
trer des disputes ou discipliner des moines qui agissent des mains expertes, le tambour peut gronder comme une
contre les principes de l’ordre. La confrérie de Shinsei peut tempête en approche, le gong peut faciliter une médita-
expulser des membres en cas de graves transgressions : tion sonore et la cloche peut aider à se concentrer.
cette punition est considérée comme pire que la mort. e na re e e de rdre de hei
En général, les infractions sont gérées en interne : du tra- contiennent en général une bibliothèque de sutras que les
vail supplémentaire, des sanctions physiques ou un jeûne moines peuvent étudier et sur lesquels ils peuvent réfléchir,
accompagné de méditation sont des méthodes courantes ainsi qu’un scriptorium où ils peuvent copier les textes. La
pour remettre un moine sur le droit chemin. transmission des enseignements de Shinsei dépend des
écrits, et apprendre ces textes constitue une part importante

l’architecture de la formation de tout moine. Les monastères peuvent aus-


si posséder une pièce séparée et dédiée à l’enseignement
Puisque le shintao est un amalgame de deux religions, de de la sagesse des paroles de Shinsei aux initiés, aux habi-
nombreuses caractéristiques des sanctuaires des fortunes tants de la région et aux visiteurs. Diffuser les leçons de
et de leur architecture se retrouvent dans les monastères, Shinsei est l’un des devoirs les plus sacrés de la confrérie.
y compris ceux consacrés à l’étude du Tao de Shinsei. Aux Des textes originaux sont parfois entreposés aux côtés
portes de chaque monastère, qu’il soit construit en bois ou de reliques et d’icônes que la confrérie estime trop pré-
en pierre, les visiteurs peuvent lire des citations de Shinsei cieuses pour les exposer à la vue de tous. Chaque ordre
aux côtés d’énigmes destinées à déconcerter et à repous- cache ou protège ces trésors d’une manière différente.
ser les mauvais esprits, d’avertissements adressés aux indi- Tandis que les monastères les plus riches vantent la pré-
id i r r ’il e ri ien de an r i- sence d’un célèbre katana ou d’une statue antique afin
muler l’esprit des moines de passage. Le tout s’ajoute aux d’attirer plus de visiteurs, qui se satisfont de se trouver à
torii qui gardent toujours l’entrée des sanctuaires internes. proximité de tels objets même sans pouvoir les voir, les
Chaque monastère dispose de défenses spirituelles, qu’il plus petits cachent ces reliques à bonne distance, sous
soit fortifié contre les attaques physiques ou non. un sanctuaire ou enfermées dans une pièce secrète. Il est
Presque tous possèdent aussi une tour dans laquelle à peine concevable que quelqu’un risque son karma en
un gong, une cloche ou un tambour indique le passage volant des objets sacrés, mais un état mental chaotique

189
C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

ou le désespoir peuvent conduire à d’étranges actes. La leur montrent le respect et la piété attendus… du moins
plupart des moines donneraient leur vie pour protéger les en public. L’influence d’un moine en chef est parfois perçue
reliques de leur ordre, et perdre ces dernières porterait un e ne ena e (e e - re j e i re) ar le dai
coup terrible à ses propriétaires. La communauté locale en local, bien que, comme tous les autres moines, il reste en
serait également dévastée : son bien-être spirituel est lié dehors de l’Ordre céleste, qui définit la place de chacun.
aux terres qui l’entourent et au monastère qu’elle contient. Les moines des Quatre Temples, notamment, consi-
dèrent de leur devoir de suivre et d’influencer la scène

le monde extérieur politique : l’ordre envoie donc des représentants dans


chaque cour d’importance de Rokugan. Aucun autre ordre
Il ne faut pas sous-estimer l’influence de la confrérie de n’essaie ainsi d’intervenir auprès de l’Empereur, et de lui
Shinsei. Les paysans comme les samouraïs comptent sur prodiguer des conseils… désirés ou non. Les moines ne
les moines pour les conseiller sur des sujets spirituels, et cherchent pas uniquement à diffuser la parole de Shin-
aucun seigneur ne peut se soustraire à cette obligation, sei, ils s’assurent aussi que ses préceptes sont respec-
malgré toute la richesse et le prestige dont il bénéficie. tés, et la cour impériale doit montrer l’exemple. De plus,
L’Empereur est le chef de la religion, et, en théorie, son comme Shinsei a commencé à enseigner entre ces murs,
autorité ne peut donc pas être remise en question par celle les moines considèrent que c’est leur droit.
de la confrérie, mais tout autre Rokugani doit s’en remettre Les ordres de moines-guerriers peuvent affecter la des-
à cette dernière pour traiter les questions spirituelles. Mais tinée de Rokugan d’une façon différente, en renversant le
existe-t-il des sujets totalement exempts d’aspects spiri- cours d’une bataille ou en protégeant une communauté
tuels dans une société où la religion est omniprésente ? an d en e e i a i n de hei ne n a -
Bien que, contrairement aux autres communautés, les jours évidentes, et ils restent rarement assez longtemps
na re ne er en a de a e a dai e der- pour expliquer ce qui les a poussés à intervenir dans une
niers accueillent toujours avec bienveillance les moines et bataille plutôt que dans une autre.

les visiteurs la méditation


Les pèlerins visitent des monastères pour prou- Tous les moines s’adonnent à la méditation.
ver leur dévotion religieuse ou pour chercher Par cette pratique, ils apprennent des vérités
des réponses spirituelles. Cependant, il existe que l’étude seule ne permet pas de décou-
de nombreuses autres raisons d’entreprendre vrir, et ils recherchent l’Illumination. La nature
ces voyages. Bien que les initiés soient les seuls de cette activité monacale varie grandement
à abandonner leur nom et leur ancienne vie, les entre les ordres et même entre les moines. Cer-
simples visiteurs peuvent trouver du réconfort et tains scandent des sutras et ne se concentrent
relâcher la pression liée à leur statut dans un lieu que sur le son des mots et sur leur sens caché.
où les rangs de la société n’ont que peu d’im- Certains vident leur esprit et essaient de lais-
portance. Un monastère accueillant est l’endroit ser le monde, ainsi que leurs propres pensées,
idéal pour trouver la paix de l’esprit et prendre derrière eux. D’autres encore se concentrent
le temps de réfléchir, ainsi que pour obtenir des sur une image extérieure : une statue de Shin-
conseils. L’anonymat peut être un changement sei, une bougie, ou la vue offerte du haut d’un
bienvenu pour un samouraï de haut rang, et un pic montagneux. Les moines méditent assis, en
monastère bien choisi peut constituer une excel- équilibre ou pendant leurs tâches quotidiennes.
lente cachette. Les ordres introspectifs ne pose- Dans certains monastères, la méditation obéit
ront probablement aucune question à leur visi- à des règles strictes, et les initiés apprennent
teur, et si les magistrats remontent la piste d’un diverses méthodes de contemplation. Dans
criminel jusqu’à un monastère, ce dernier pour- d’autres ordres, les moines se voient confier le
ra toujours demander à être initié avant de faire soin de trouver des approches dans l’intimité de
face à la justice. leur esprit. Certains méditent en grands groupes
et d’autres dans la solitude.

190
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

la vénérable demeure Seuls les moines peuvent s’y orienter et savent vraiment
ce que renferme la structure, à part les nombreux sanc-
de la lumière tuaires des niveaux supérieurs.
Personne ne sait, ou n’admet savoir, qui a construit la
Au cœur des provinces Togashi du Clan du Dragon, la Vénérable Demeure de la Lumière. Ériger une forteresse
Vénérable Demeure de la Lumière s’accroche au flanc de cette taille aussi haut dans les montagnes est un exploit
d’une montagne et semble hors d’atteinte. Avant de majeur, mais il n’existe aucune trace ni du bâtisseur ni de
rejoindre l’ordre de Togashi, il faut trouver le millier de la date de l’édification. Certaines personnes affirment que
marches qui mènent au monastère, et les gravir en bra- les ise zumi ont construit eux-mêmes leur monastère, tan-
vant la neige et la glace, ainsi que les ennemis spirituels. dis que d’autres sont persuadés que le Kami Togashi l’a
Les visiteurs qui ne désirent que profiter de la sagesse de édifié seul en une nuit.
Togashi Yokuni ou d’un de ses disciples peuvent deman-
der un guide lorsqu’ils atteignent le hameau au pied de la
montagne. La réponse à cette requête dépend toutefois Des tatouages mystiques
du bon vouloir du moine auquel ils s’adressent. La plupart des ise zumi arborent des tatouages qui leur
Togashi Yokuni est à la fois le Champion du Clan du confèrent des pouvoirs précis. En général, seuls la per-
Dragon et le chef de l’ordre de Togashi. On peut l’aperce- sonne tatouée et Gaijutsu connaissent ces propriétés. Les
voir en train de méditer, à l’intérieur comme à l’extérieur visiteurs du monastère sont toujours stupéfaits par la diver-
du monastère, toujours vêtu de son armure de cérémo- sité des tatouages des moines, qui les exhibent fièrement
nie complète et coiffé de son casque. Ceux qui lui posent malgré la fraîcheur de l’air montagnard. Certains motifs se
une question reçoivent en général une réponse d’une retrouvent plus souvent que d’autres, dont le lotus, qui
sagesse cryptique. aide à se concentrer pour méditer, ou le tigre, qui renforce
Togashi Gaijutsu est un maître-tatoueur aveugle. Son la maîtrise du combat à mains nues, mais les représenta-
corps et son cuir chevelu sont recouverts de représen- tions de ces sujets de prédilection varient également gran-
tations à l’encre qui semblent se mouvoir et changer. Il dement : les tatouages de chaque individu sont uniques,
tatoue les ise zumi, les moines de l’ordre de Togashi, dans puisqu’ils reflètent les étapes de leur porteur sur sa voie,
l’air frais et la lumière du soleil de la cour de son atelier. Ses personnelle, de l’Illumination. En dehors de l’ordre, per-
services ne s’achètent pas. Il reçoit parfois des visions, et il sonne ne sait que les pouvoirs singuliers de ces tatouages
les raconte librement à ceux qui l’interrogent. proviennent d’un ingrédient extrêmement rare mélangé à
Togashi Umu vit dans un hameau au pied de la mon- l’encre sacrée : le sang du Kami Togashi.
tagne. Bien qu’elle n’arbore aucun tatouage, elle s’habille
et se comporte comme une ise zumi. Elle est souvent occu-
pée à couper du bois à proximité de sa maison ou à bêcher
le jardin, et elle apprécie le travail manuel. Elle se montre
économe en paroles, mais elle offrira une réponse directe
aux visiteurs qui lui posent une question… en général sous
la forme d’un oui ou d’un non sans plus d’explications.

Le voyage intérieur
Les moines de la Vénérable Demeure de la
Lumière recherchent l’Illumination à travers
la contemplation, la méditation, l’étude
du Tao ou toute autre méthode qu’ils esti-
ment appropriée. Ils affûtent leur esprit et
leur corps : la maîtrise de l’un comme de
l’autre est nécessaire pour devenir un ise
zumi. Le monastère renferme un labyrinthe
de salles en apparence vides, froides et
nues, où les visiteurs peuvent se perdre.
La force mystérieuse qui rend les marches
vers le monastère si difficiles à trouver est
également à l’œuvre dans ce dédale.
C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

des mythes et idée d’aventure :


légendes un noble appel
$ Les ise zumi peuvent faire appel aux élé- Accroche Zurui Chikako, la fille d’un sei-
ments, sauter par-dessus des montagnes gneur local, a disparu. Son père est convaincu
et cracher du feu. que l’adolescente a été kidnappée, et sa mère
demande l’aide des PJ. La jeune fille a été aper-
$ e i e i n de ah - ai e r
çue seule dans les montagnes à proximité de
puissance provient de la magie du sang. Ils
la Vénérable Demeure de la Lumière, mais Sire
représentent un danger pour tout l’Empire !
Zurui n’en a pas tenu compte, estimant qu’il ne
$ Une force étrange est à l’œuvre dans le s’agissait que d’une rumeur.
monastère : elle se fait ressentir de l’exté-
rieur. Peut-être est-ce un esprit captif, un Développement Dans les montagnes, la
portail vers un autre monde, ou une créa- moine Togashi Umu apparaît sans prévenir et
ture plus ancienne que la race humaine. questionne les PJ. Si Umu croit que les PJ s’in-
quiètent sincèrement du sort de Chikako, ils
$ Si vous dormez en vue du monastère, vous
découvrent un chemin après avoir parlé avec la
rêverez des Dragons célestes. Les lieux
moine. Sinon, ils se perdent pendant un temps
sont très probablement bénis. Peut-être
et bravent des ravins escarpés, des bords de
même que les moines peuvent se rendre
précipice qui s’écroulent, des prédateurs affa-
au Tengoku !
més, et même de dangereux esprits avant de
finir par trouver leur route. Celle-ci les mène
à un hameau, où les attend Umu. Si les PJ lui
demandent son aide sans détour, elle leur révèle
que Chikako est au monastère et les y conduit.
Les moines de la Vénérable Demeure de la
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  1 3
Lumière ne tentent pas de cacher la présence de
Chikako est aussi dévouée à l’étude du Tao de Shinsei la jeune fille, mais le monastère n’est qu’un mys-
que déterminée à entrer dans la Vénérable Demeure de térieux labyrinthe, et la trouver sans un guide
la Lumière. Cette jeune fille ne se présente plus que par n’est pas une mince affaire.
son prénom. Elle a abandonné son nom de famille après
avoir ressenti un « appel » en provenance du monastère. 三 Paroxysme Chikako a la tête rasée depuis
Depuis, sa résolution n'a pas failli : elle y restera. Élevée qu'elle a été acceptée dans l’ordre de Togashi.
dans la caste des samouraïs, elle dispose de notions sur Elle explique aux PJ que sa famille ne l’aurait
les jeux de cour et le combat. Petite mais rapide, Chikako jamais laissée entreprendre le voyage jusqu’au
se montre aussi silencieuse qu’obstinée. Malgré son jeune monastère : elle est donc partie en secret. Elle
âge, elle possède une aura spirituelle, et le destin semble demande aux PJ d’annoncer à ses parents qu’elle
lui sourire, comme si elle avait été choisie. Elle s’exprime a trouvé sa place. Les PJ doivent faire un choix :
avec la sagesse et l’assurance d’un moine plus expérimen- respecter les vœux de Chikako et affronter un sei-
té, et si les paroles ne suffisent pas, elle n’a pas peur de se gneur potentiellement en colère, ou essayer de la
battre pour ce en quoi elle croit. convaincre de revenir à son ancienne vie.

SOCIÉTAL PERSONNEL

45 HONNEUR ENDURANCE
10
1 2
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS

45 GLOIRE SANG-FROID
10 i s i : portée 0-1 ; dégâts 3 ; Dangerosité 5/7 ; Acé-
2 2 ré, Cérémoniel
45 STATUT 3 ATTENTION
3 i e e t rt )  : kimono simple (Résistance phy-
sique 1), couteau
+1, +1, –2
ATTITUDE : DÉTACHÉ
VIGILANCE
3
CAPACITÉS

ARTISANAL 0 MARTIAL 1 SAVANT 3 SOCIAL 2 PRO. 0 N N N

AVANTAGES DÉSAVANTAGES
Lorsque Chikako dépense un point de Vide lors d’un test,
elle peut dépenser comme suit :
te r i ti tis e
i e : Chikako gagne 1 point de Vide.
 savant ; mental  social ; mental

192
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

le monastère du silence des contes du


Le monastère du Silence, dédié à Tsugumu, fortune des
secrets, est caché près de la cité des Mensonges. Les
scorpion
membres du Clan du Scorpion dont les secrets pèsent
trop lourd s’y rendent pour soulager leur conscience : ils $ Les moines ne brûlent pas les secrets
apportent des messages et des pages de journal dans les- qu’ils reçoivent : ils les cachent dans leur
quels ce qu’ils savent est transcrit, afin de réduire l’isolement monastère, à l’intérieur des statues des for-
qui découle de la dissimulation permanente. Ils apportent tunes. Récupérer ne serait-ce qu’une seule
aussi des dons pour remercier les moines de conserver d’entre elles permettrait de faire chanter
en lieu sûr les informations qu’ils ne peuvent pas garder la moitié du clan, mais personne ne se ris-
eux-mêmes. Le monastère, un petit complexe entouré de querait à voler le temple.
murs et construit à flanc de colline, est difficile à repérer.
Ses moines font partie de la confrérie de Shinsei, mais cer-
$ Les moines sont complètement silencieux :
taines de leurs pratiques les distinguent des autres ordres. ils ne parlent jamais, et même leurs pas
Par exemple, la plupart de ses membres sont vêtus de noir ne font pas de bruit. Ils sont comme des
et portent un tissu de cette couleur devant leur bouche. ombres ou des shinobi. Ils quittent leur
Le moine en chef est identifiable à sa tunique écarlate. monastère s’ils n’ont pas reçu assez de
Cet homme mince aux traits anguleux présente un regard secrets et vont espionner les habitants de
impassible qui met mal à l’aise même le plus coriace des la cité des Mensonges.
bushi. Il est avide de secrets, et il sait comment les soutirer $ Les moines ne parlent pas, car ils n’ont pas
à ses interlocuteurs, même sans parler. de langue : ils se la tranchent quand ils
intègrent l’ordre. Ensuite, ils la brûlent en
Le secret originel guise d’offrande à Tsugumu.

Les détails de la création et de la construction du monas-


tère du Silence ont été délibérément supprimés des
archives et de l’histoire. Les ingénieurs et les bâtisseurs des De fausses impressions
lieux auraient même rencontré une fin abrupte au terme du
chantier, afin de préserver les secrets de la structure. Les étrangers se sentent vite perdus et désorientés dans
le monastère du Silence. Au lieu de ressentir la tranquillité
qui imprègne la majeure partie de tels lieux, les visiteurs
n’éprouvent qu’un mélange de profond malaise et d’an-
xiété. Ce phénomène n’est pas d’origine spirituelle, mais
résulte des étranges techniques utilisées dans la construc-
tion du monastère et des manœuvres incessantes des
moines pour cacher leurs secrets et fourvoyer les pèlerins.
L’intérieur du bâtiment semble plus grand que vu de
l’extérieur : il est doté de passages et de salles secrètes,
d’étages entiers dissimulés sous le sol ou entre les niveaux,
ainsi que de pièges et d’énigmes destinés à désorienter
et déconcerter les indésirables. Les nombreuses statues
des fortunes sont identiques, de sorte que la plupart
des pièces se ressemblent dans les moindres détails.
Toutes les salles dans lesquelles les moines dor-
ment, s’entraînent ou mangent sont cachées, ce
qui isole encore plus les visiteurs. Ces derniers
attendent dans de petites pièces pourvues
d’ n ai a a i e de h ji a le r d
Clan du Scorpion, jusqu’à ce qu’un moine,
seul, finisse par arriver pour les conduire à
une statue à laquelle ils peuvent alors
confesser leurs secrets.
C H API T R E 5 : L E S V O I E S DE L’IL L U MINATIO N

Aotora Akira, « pèlerin » le monastère du


ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  2 3 vent des plaines
Akira affirme être un courtisan de bonne naissance, et il Le monastère du Vent des Plaines, dédié à Kuroshin, for-
se comporte comme tel. Ce membre typique du Clan du tune de l’agriculture, est une organisation pragmatique
Scorpion se vêt de noir et de rouge, ne répond jamais particulièrement attachée à l’aide qu’elle apporte à sa
deux fois de la même façon à la même question et attise communauté. Les moines et les paysans travaillent la
souvent les soupçons de ceux qui l’entourent en raison de terre côte à côte, s’entraidant et apprenant les uns des
son dégoût pour l’obséquiosité et les attentions. Il change autres, dans les champs comme dans les rizières. Les
d’attitude plus fréquemment que la plupart des samouraïs moines cultivent des plantes médicinales en plus du riz,
ne changent de tenue. Si un interlocuteur se fait trop pres- et ils stockent tout surplus pour participer à l’approvision-
sant, Akira peut verser du poison dans son verre ou le lui nement de l’armée du Clan de la Licorne quand le besoin
appliquer sur la peau d’un geste anodin. Il porte un waki- s’en ressent. Ils apprennent également à se battre avec
zashi mais pas de katana, et cache de nombreux couteaux des outils agricoles pour se défendre.
dans sa tunique. Même si son objectif principal reste d’at-
teindre le monastère et d’échapper à la justice, il ne résiste
pas à une occasion de voler, telle est sa nature. Ses com-
Bénir les champs
pagnons feraient mieux de garder un œil sur leurs objets Quand le Clan de la Ki-Rin revint à Rokugan et finit par récla-
de valeur. mer des terres, ses membres construisirent un petit sanc-
tuaire à Kuroshin, dans l’espoir que la fortune de l’agricul-
SOCIÉTAL PERSONNEL
ture bénirait les étendues qu’ils comptaient cultiver en tant
15 HONNEUR ENDURANCE
10 que Clan de la Licorne. La sédentarisation ne fut pas aisée
2 4 pour le clan de nomades, et au cours de cette épreuve, il
35 GLOIRE SANG-FROID
8 décida d’ériger, à la hâte, un monastère autour du sanc-
2 3 tuaire, afin d’héberger des moines qui s’assureraient de la
35 STATUT 2 ATTENTION
5 bénédiction de Kuroshin. Le clan fit ainsi ses premiers pas
pour bâtir une relation avec la confrérie de Shinsei.
+2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
3
ARTISANAL 0 MARTIAL 2 SAVANT 1 SOCIAL 3 PRO. 2

des histoires
AVANTAGES DÉSAVANTAGES

loufoques
tie t et s ti re se ret
 professionnel ; mental  social ; relations
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
$ Toutes sortes d’étranges plantes poussent
i s i : portée 0-1 ; dégâts 3 ; Dangerosité 5/7 ; Acé- au monastère du Vent des Plaines, y com-
ré, Cérémoniel pris certaines qui donnent des poisons
i e e t rt )  : tunique de cour (Résistance phy- qu’aucun membre du Clan du Scorpion ne
sique 1 ; Cérémoniel, Magnifique), sacoche de poisons connaît. C’est un endroit dangereux.
(cf. page 244 du Livre de Règles), deux couteaux $ La moine Dai peut soigner de nombreuses
maladies, mais le prix à payer est terrible.
CAPACITÉS
Elle invoque des dieux étrangers, et ses
NN R mystérieux rituels mettent en danger l’âme
Quand il s’agit d’identifier du poison, de le préparer ou du patient.
de l’utiliser, Akira possède l’équivalent de 4 rangs en $ « Ça n’a rien à voir avec l’agriculture. Toute
Médecine. Lorsqu’il effectue un test d’action d’Attaque une garnison du Clan de la Licorne se cache
à l’aide d’une arme empoisonnée, il peut dépenser là, en se faisant passer pour des paysans et
comme suit : des moines ! Ils n’ont aucun honneur. »
: l’arme reste empoisonnée (les effets du poi-
son s'appliquent quand même à l'attaque qu'il vient
d'effectuer).

194
CHAPIT R E 5 : L ES V O IES DE L’IL L U MINAT IO N

Guider le peuple
Le monastère du Vent des Plaines est un vaste complexe idée d’aventure : en
en bois, pourvu de granges, d’une infirmerie, de demeures
semblables à des baraquements pour les moines, ainsi
toute discrétion
que d’une cour d’entraînement. Au milieu d’un vaste jardin
de plantes exotiques se dresse le sanctuaire, entouré de Accroche n dai d lan d i n -
bâtiments. Chaque jour, les paysans traversent les terres haite découvrir la vérité au sujet du monastère
du monastère pour se rendre dans leurs champs, situés de du Vent des Plaines : il veut que quelqu’un se
l’autre côté du complexe par rapport à leur village. fasse passer pour un paysan afin d’apprendre les
secrets que renferme ce lieu. Il estime que cette
tâche est indigne de ses honorables samouraïs,
Dai, moine des fortunes et il propose donc cette mission à des étrangers
Dai, RANG
ANTAGONISTE moine des fortunes
DE CONFRONTATION 2 4 au clan. Il leur apprend que les moines offrent le
gîte et le couvert aux malades, suggérant par là
Si le monastère possédait une moine en chef, ce serait Dai. que les PJ feignent la maladie.
Cette descendante du moine qui a suggéré au clan de
construire le sanctuaire est invariablement sollicitée par les Développement Lorsque les PJ explorent
autres moines lorsqu’ils ont besoin de conseils. Elle soigne le monastère, ils découvrent un certain nombre
les malades à l’aide de recettes passées de génération d’éléments qui pourraient intéresser le Clan
en génération, dont l’origine se trouve au-delà des fron- du Lion : des plantes vénéneuses qui poussent
tières de l’Empire. Elle a appris à cultiver des plantes étran- dans le jardin aux côtés de végétaux qu’aucun
gères sur le sol rokugani, et le jardin de plantes médici- d’entre eux ne reconnaît (ce qui est peut-être
nales qui entoure le sanctuaire est son projet personnel. Si plus inquiétant) ; des paysans qui s’entraînent
quelqu’un feint d’être malade, elle ne se laisse pas duper. au combat à l’aide d’outils agricoles ; des
Cependant, elle garde le silence et « soigne » l’individu à réserves de nourriture pour l’armée du Clan de
l’aide de simples au goût déplaisant bien que sans dan- la Licorne ; une infirmerie bien approvisionnée,
ger. Si quelqu’un essaie de lui soutirer des informations, comme si on la tenait prête pour y soigner des
les autres moines se battront pour la protéger, mais si des blessures de guerre. Lorsque les PJ essaient de
visiteurs lui posent poliment des questions, elle se montre partir, ils comprennent qu’ils étaient surveillés
généreuse et coopérative. depuis le début.

SOCIÉTAL PERSONNEL
三 Paroxysme Dai empêche les PJ de partir
et discute avec eux. Elle n’aime pas les men-
50 HONNEUR ENDURANCE
14 songes. D’ailleurs, elle possède des herbes pour
3 2 leur arracher la vérité, s’ils s’entêtent à ne pas
45 GLOIRE SANG-FROID
15
3 2 lui révéler leur objectif. S’ils se montrent prêts
à négocier, la moine les informe qu’elle n’a rien
25 STATUT 3 ATTENTION
4 contre le fait que le Clan du Lion apprenne cer-
taines informations. Elle souhaite d’ailleurs qu’il
+2, –2
ATTITUDE : SÛR DE SOI
VIGILANCE
3 sache que le Clan de la Licorne est puissant, et
elle suggère même aux PJ d’exagérer. Si ces
ARTISANAL 3 MARTIAL 1 SAVANT 2 SOCIAL 3 PRO. 0 derniers préfèrent se battre pour s’échapper
plutôt que de coopérer, ils découvrent que les
AVANTAGES DÉSAVANTAGES moines ne sont pas les seuls à riposter : les pay-
sans du cru se joignent au combat, contre toute
t i t e r te re
tradition rokugani !
 social ; mental  social ; relations
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS

 : portée 1-2 ; dégâts 6 ; Dangerosité 2 ; Ordinaire

i e e t rt ) : tunique (Résistance physique 1)

CAPACITÉS

R R
Lorsque Dai effectue un test de Médecine ciblant un per-
sonnage, elle peut dépenser comme suit :
 : la cible élimine 1 point de Conflit pour chaque
dépensé de cette façon.

195
6
CHAPITRE

Les grands
espaces de
Rokugan
La jeune shugenja ressentait le mal du pays.
Son petit village de pêcheurs natal, sur la
côte septentrionale de la province Nejiro, lui
manquait. Elle aurait aimé sentir l’air marin et
humide et entendre les vagues s’écraser sur
la falaise, en contrebas de sa maison.
Tout cela n’avait aucune importance en
cet instant. Tous leurs sacrifices seraient
récompensés lorsqu’elle reviendrait chez elle
auréolée de gloire. Shiba Daigo avait mené
le groupe au cœur d’Isawa Mori, où il avait
trouvé le légendaire sanctuaire aquatique,
mais ce dernier ne recelait pas le secret que
la shugenja cherchait. Elle pria pour que leur
prochain arrêt le renferme.
Alors que la tombée de la nuit assombris-
sait le ciel rose et orange, la troupe sortit de
la forêt pour découvrir une grande plaine.
Elle vit un petit village encerclé de pins : de
la fumée s’élevait des feux communs qui brû-
laient encore dans l’air immobile. Au-delà,
elle aperçut les ruines imposantes de larges
tours dénuées de toits qui surplombaient la
forêt, comme les doigts d’un géant enter-
ré. L’air était tellement chargé d’électricité
qu’elle pouvait presque la sentir. Elle enten-
dit des murmures, si bas qu’ils provenaient
peut-être de son imagination, la pousser à
poursuivre sa route, lui chuchoter qu’un
secret était enfoui dans la tour centrale
des vestiges de Korihaka.
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Au-delà de l’enceinte les forêts mystérieuses


Rokugan est couvert de forêts, craintes mais nécessaires,

de la civilisation qui s’étendent à perte de vue. Elles abritent autant de dan-


gers que de ressources : pour chaque plante nocive qui y
pousse, une autre nourrit ou soigne ; pour chaque animal
Aux yeux de son peuple, Rokugan, recréé à l’image du
affamé ou enragé qui attaque, un autre sera chassé pour
royaume Céleste, représente l’apogée de la civilisation.
être mangé, transformé en vêtements ou en remèdes.
Néanmoins, l’Empire contient de vastes étendues sau- Le pire danger est sûrement de nature mystique : non
vages. Parcourir quelques kilomètres à l’extérieur de l’en- seulement des kamis y vivent, mais la frontière avec les
ceinte d’une ville ou des fermes d’un village suffit à se royaumes spirituels est proche. Des maléfices anciens
trouver dans la nature indomptée. Forêts denses, vallées et des esprits en colère se tapissent dans les brous-
isolées, pics inhospitaliers et océans regorgent de beauté sailles ou les branchages et s’en prennent aux samou-
et de splendeurs, mais également de dangers. La nature raïs comme aux heimin. Des ogres, des tengu et des
doit être admirée, mais aussi respectée. Les samouraïs se kansen y résident, loin des installations humaines, et ils
considèrent comme les parangons du monde civilisé, mais recourent souvent à la violence lorsqu’ils sont déran-
ils sont souvent obligés de traverser ces grands espaces : un gés. Pourtant, malgré tous ces risques, toute personne
bushi peut devoir tendre une embuscade dans un col mon- dotée de la sensibilité nécessaire peut communier avec
tagneux, un shugenja peut avoir besoin de communier avec de puissants esprits.
les esprits de la forêt, et même un courtisan peut chercher
l’inspiration poétique auprès d’une mare à l’écart.
Les ressources sylvestres
les côtes inexplorées La ressource la plus importante des forêts est le bois
d’œuvre. Au nord, les conifères dominent, tandis que le
La longue côte orientale de Rokugan est composée de sud abrite des feuillus, des bambous et des arbres frui-
plages de sable blanc, doré ou noir et de falaises qui jail- tiers. Les forêts des îles ressemblent à celles du sud, mais
lissent de l’eau comme autant de tours de jade et d’ivoire. les bois y sont moins durs et souvent accompagnés de pal-
Ces plus de mille cinq cents kilomètres de littoral, contrôlés miers et d’une grande variété d’arbres fruitiers. Le bois est
par les Clans du Crabe, de la Grue et du Phénix, contiennent nécessaire à toute construction, à la décoration, aux outils
des ports et des villages de pêcheurs. Cependant, cer- ou aux armes, et la plupart des forêts sont entourées de
taines régions côtières sont trop rocheuses ou trop souvent petits villages de bûcherons.
balayées par des tempêtes pour accueillir des installations. Le bois n’est pourtant pas la seule ressource : les baies,
Ces étendues sauvages abritent parfois des ermites heimin les champignons, les herbes, les fleurs, les feuilles, les
ou de petites familles en quête d’une vie paisible. écorces et les insectes servent soit d’aliments soit de com-
posants dans les médicaments et potions alchimiques.
Les ressources côtières Les chasseurs et trappeurs hinin traquent le gibier (cerfs,
antilopes, lièvres, sangliers, écureuils et faisans) pour sa
Une petite communauté installée dans une région côtière viande, sa fourrure et sa peau, et se rendent parfois au plus
isolée peut survivre en pêchant ; en exploitant le calcaire, profond des forêts, où il est facile de se perdre.
le grès ou la craie des falaises ; ou encore en récoltant des
perles à négocier en ville. Elle peut aussi vendre des res-
sources moins courantes, comme des algues, des coquil-
La culture locale
lages ou de l’encre animale. Les récits et les superstitions relatifs aux forêts sont plus
nombreux que les feuilles sur les arbres. Les légendes
La culture locale insistent sur les dangers que représentent ces mers végé-
tales, autant pour empêcher les enfants de s’y rendre que
Ceux qui vivent sur les littoraux sont en général de pauvres sous forme de métaphore, afin d’illustrer que chaque être
heimin, mais les marins échoués, les samouraïs auto-exilés, vivant contient une part de nature sauvage. Pourtant, mal-
les shugenja et les prêtres qui cherchent à communier avec gré la crainte et le respect qu’elles inspirent, de nom-
des kamis de l’eau ou à construire un sanctuaire ne sont pas breux Rokugani y résident. Certains ont été exilés, d’autres
rares. Les pirates bâtissent souvent des ports et des repaires ont choisi une vie d’ermite pour mener une existence de
secrets dans des criques rocheuses battues par de fortes contemplation calme et solitaire, en autarcie.
vagues. Ils espèrent alors que l’environnement cache leurs Les shugenja peuvent se rendre en forêt ou y vivre,
bateaux. Bien que les ningyo amphibiens, l’une des Cinq voire ériger des sanctuaires en leur cœur, afin d’apaiser
Races antiques, soient rares, ils sont susceptibles d’ériger les kamis locaux et d’épargner leur courroux aux villages
l’une de leurs villes aquatiques près d’un littoral désert. Les alentour. Certaines écoles de shugenja viennent s’entraî-
trolls vivent dans des grottes côtières et représentent un ner dans les bois, où elles enseignent à écouter les esprits
danger pour les humains comme pour les ningyo. et à créer des rouleaux à partir du bois de la région.

197
Les bandits s’y trouvent également, puisque la crainte La culture locale
généralisée éloigne aussi les autorités. Ils construisent
alors des abris dans les arbres ou des petits villages dans La grande majorité des montagnards sont des mineurs ou
les clairières. Qui dit bandits, dit aussi ronin : ces derniers des gestionnaires de mines. Le fer et le jade sont néces-
s’installent souvent en lisière de forêt, loin de la civilisa- saires aux armées, mais d’autres minerais soutiennent
tion, mais suffisamment proches des bourgades de bûche- l’économie. Les villages miniers peuvent aller de quelques
rons pour être embauchés afin de protéger la population dizaines de heimin à des complexes de plusieurs milliers
des brigands, des ogres et de toutes les autres menaces. d’habitants et de marchands supervisés et protégés par
des ashigaru ou des bushi.

les pics inhospitaliers Les moines vivent souvent à la montagne. Ils


construisent des monastères et des écoles à des endroits
Trois chaînes montagneuses sillonnent Rokugan. Les mon- où ils pourront communier avec la nature sans distrac-
tagnes du Crépuscule, des pics érodés situés sur les terres tion. Ils y mènent une existence paisible, en quête d’Illu-
australes du Clan du Crabe, séparent Rokugan et l’Outre- mination. Les ermites, les personnes âgées et les exilés
monde. Les monts de la Grande Muraille Septentrionale cherchent également les vues époustouflantes et pré-
marquent la limite nord des terres des Clans de la Licorne, fèrent échanger les dangers posés par les autres humains
du Dragon et du Phénix. Les montagnes du Toit du Monde contre ceux des chemins escarpés.
forment une fine ligne de pics élevés et de cols périlleux
qui divisent l’Empire en deux, des terres du Clan de la
Licorne jusqu’à la frontière entre celles des Clans du Scor-
les ruines abandonnées
pion et du Lion, avant d’aboutir sur la côte et le territoire Les ruines sont des villes, des temples et des sanctuaires
du Clan de la Grue. abandonnés dont les habitants ont trépassé depuis long-
Les risques y pullulent, et les voyageurs qui n’em- temps. Elles demeurent rares, nichées dans des forêts
portent pas suffisamment de provisions meurent facile- sombres, perchées sur des éperons rocheux ou simple-
ment de faim ou de froid. Les montagnes elles-mêmes ment isolées sur des côtes ou dans des plaines que nul ne
s’avèrent dangereuses : des pierres meubles peuvent créer parcourt. Leur instabilité architecturale s’avère le moindre
des éboulements ou des avalanches sans aucun signe des dangers qu’elles posent puisque la plupart abritent
avant-coureur. Dans le sud, à la saison des pluies, les glis- des menaces qui datent d’avant le Jour des Tonnerres.
sements de terrain sont fréquents. Enfin, les monts de la
Muraille Septentrionale tremblent et crachent cendres et Les ressources des ruines
magma comme s’ils tentaient de se débarrasser des cara-
vanes qui les traversent. Plus les voyageurs gagnent en Les ruines présentent souvent de fortes concentra-
altitude, moins les animaux sont nombreux, mais plus ils tions d’énergies mystiques et d’esprits. Lorsqu’un clan
deviennent dangereux, ours et couguars en tête. en découvre, il en taira probablement l’existence, voire
construira un temple ou un sanctuaire proche pour en pro-
Les ressources des montagnes fiter. Elles offrent également des occasions d’apprendre
des savoirs perdus ou interdits : de nombreux shugenja ont
Les ressources disponibles valent la peine de braver ainsi déterré des techniques disparues après avoir étudié
les dangers de la montagne : pins, poissons d’eau un parchemin trouvé au plus profond d’un ancien temple
douce, eau d’une pureté incomparable, minerai. Le à moitié éboulé. Cet attrait pour les reliques puissantes
basalte, le granit et le marbre servent à la construction attire aussi les bandits et les explorateurs qui espèrent que
et les filons de fer, de cuivre, d’argent, d’or, de pla- de telles découvertes leur vaudront fortune et gloire.
tine, de saphir, de diamant et de cristal sont exploités.
Le jade se trouve dans les rochers aux pieds des mon-
tagnes, tandis que les grottes abritent des minéraux
et pierres précieuses plus exceptionnels. Enfin, des
fleurs et autres plantes utiles, mais rares, se cachent sur
les hauteurs.
survivre à sa propre La vie en pleine nature
nature sauvage Vivre en pleine nature, c’est aussi lutter pour sa survie. Les
repas chauds, la sécurité et parfois même l’eau potable
La survie dans les étendues sauvages s’avère dif-
sont des luxes pour ceux qui habitent aux confins de la
ficile quelles que soient les conditions, mais se
société. Certains se contentent de traverser les étendues
révèle quasiment impossible en adhérant stricte-
sauvages, en route vers des lieux civilisés, et se montrent
ment au bushido. Par exemple, les samouraïs ne
prévoyants : ils emportent armes et provisions pour garan-
doivent pas toucher de chair morte, mais leur sur-
tir un voyage sûr. Malgré les dangers, nombreux sont ceux
vie peut en dépendre. Ils peuvent en effet être
qui ressentent un certain esprit de corps avec les éléments
contraints de pêcher ou de chasser pour se nour-
naturels. Les Rokugani qui vivent en pleine nature appré-
rir ou obtenir du cuir afin de construire un abri ou
cient l’odeur de l’air pur, la sensation de la terre meuble
de confectionner des vêtements s’ils sont perdus
sous leurs sandales ou le goût vif de l’eau froide des cas-
en pleine nature durant de longues périodes. En
cades montagnardes.
y ajoutant les restrictions relatives au comporte-
ment ou à l’hygiène, ils devront effectuer des choix
difficiles entre la stricte adhésion au bushido et les samouraïs
leur survie.
Il est rare que les nobles demeurent longtemps en pleine
Les samouraïs dont les compagnons de voyage
appartiennent à une caste inférieure délèguent de nature. La majorité d’entre eux se contentent de la traver-
telles tâches impures, mais les aventuriers soli- ser pour rejoindre leur prochaine cour ou un champ de
taires peuvent se permettre d’abandonner le code bataille. Ils voyagent souvent en caravane, accompagnés
au nom du pragmatisme, à l’instar du Clan de la de heimin et de hinin qui accompliront les tâches indignes.
Licorne. Les groupes de nobles non accompa- En général, ils passent leur journée à cheval, à discuter
gnés de heimin souffrent le plus, puisque la pres- avec leurs pairs, avec des moines ou avec des prêtres, ou
sion sociale qui les oblige à respecter le bushido à se préparer pour la suite des événements. Leurs tâches
peut être très forte. Désespérés, ils en sont sou- quotidiennes se concentrent sur la réussite du voyage,
vent réduits à faire un choix entre leur instinct de donc sur la planification de l’itinéraire, sur la gestion de la
survie et leur dévouement envers une philosophie. nourriture et sur les périodes de repos. Ils doivent égale-
ment s’occuper de toutes les menaces croisées et accueil-
lir les samouraïs qu’ils rencontrent.
Très rarement, les nobles sont condamnés à l’exil et,
La culture locale devenus ronin, ils passent leur temps à arpenter les éten-
dues désertes en quête d’un but. Certains peuvent même
De nombreuses ruines sont désertées et abandonnées : s’installer quelque part pour surveiller une menace latente,
un shugenja, un moine ou un érudit solitaire peut donc protéger un village proche ou simplement jouir d’un domi-
s’y installer pendant un certain temps. Des caravanes de cile fixe. Quelles que soient leurs raisons de vivre en pleine
prêtres, de moines ou de shugenja, accompagnés de leurs nature, leur existence se divise entre la contemplation et la
serviteurs, visitent également les lieux pour y trouver des lutte pour la survie.
reliques ou des objets légendaires, pour communier avec
certains kamis ou pour chercher une voie vers le Meido,
où les morts attendent leur jugement. De telles excursions
le clergé
attirent autant des groupes d’une dizaine de personnes que Certains moines, et plus rarement des prêtres, passent
des convois de plusieurs centaines de pèlerins, qui peuvent une partie de leur vie dans la nature, où ils vivent en
taire leur véritable but, mais s’adresseront avec la courtoisie autarcie pour étudier ou communier avec les éléments,
qui leur est due à tous les samouraïs qu’ils croisent. les fortunes ou les esprits, loin des distractions urbaines.
Les ruines, qu’elles soient visibles, souterraines ou Les prêtres voyagent souvent jusqu’aux sanctuaires et
sous-marines, abritent parfois de petites bandes des Cinq temples éloignés pour s’entraîner ou méditer, parfois
Races antiques. Des zokujin, des tengu, des trolls, des ningyo pendant des mois ou des années, avant de retourner
ou des kitsu peuvent avoir résidé en ces lieux avant qu’ils ne auprès de leur clan. À l’inverse, les moines choisissent
soient abandonnés, et certains y vivent encore pour garder de vivre pendant des années, voire leur vie entière, en
d’anciens secrets ou objets. Les esprits et les ancêtres des isolement dans la nature. Ils étudient le Tao de Shinsei,
premiers habitants hantent également l’endroit, peu désireux cherchent l’Illumination et établissent un lien fort avec les
ou incapables de passer dans l’au-delà sans aide extérieure. royaumes spirituels.

199
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

La plupart des moines visent l’Illumination en se privant besoins de leur famille durant la saison morte et financer
des conforts primaires ou en entreprenant des travaux érein- leurs provisions quand viendra le temps de repartir.
tants. Les vents froids et l’air rare des montagnes, les tem- Les marchands heimin traversent fréquemment les
pêtes diluviennes des côtes, les ténèbres au plus profond étendues sauvages. Les caravanes bondées de matières
des forêts leur permettent alors de se rapprocher de leur premières et de produits finis transportent les denrées
objectif. Certains peuvent travailler pour nourrir leur entou- des producteurs aux consommateurs, empruntant sou-
rage tout en jeûnant pendant un mois ou demeurer en médi- vent des routes non protégées. La plupart des marchands
tation, immobiles pendant des jours, dans des conditions sont des voyageurs expérimentés qui savent survivre en
météorologiques dangereuses. Les tâches les plus punitives pleine nature, mais ils prévoient généralement suffisam-
sont les plus prisées. D’autres moines préfèrent errer dans la ment de provisions pour manger à leur faim. Malgré tout,
nature plutôt que de s’installer dans un temple précis. Ils col- leurs convois constituent des cibles alléchantes pour les
lectent alors des enseignements en chemin. bandits et, sans escorte, les marchands doivent compter
Les moines, les prêtres et les shugenja voyagent parfois sur le secret et la rapidité pour atteindre leur destination
avec des caravanes. Les membres du clergé en prennent sans problème. La plupart des samouraïs qui voyagent
la tête s’il n’y a personne de plus haut rang mais, sinon, ils pour affaires sont accompagnés, principalement de heimin
conseillent les samouraïs. Leur rôle consiste alors à effec- comme des armuriers, des domestiques, des cuisiniers,
tuer des divinations ou à lire les signes et les présages, des ouvriers, des charretiers, ou encore des palefreniers.
mais certains shugenja peuvent également communier Ce cortège leur permet de se concentrer sur les affaires
avec les kamis locaux avant de partager les informations martiales et les prières plutôt que sur les rigueurs du
ainsi glanées. Ils peuvent aussi quérir la bénédiction d’une voyage. Les heimin supervisent aussi les hinin qui accom-
fortune ou une aide surnaturelle plus concrète pour facili- pagnent la caravane.
ter la traversée des étendues sauvages. Les artisans, qui vivent très rarement dans des régions
reculées, peuvent toutefois prendre une année sabbatique
les bonge pour se ressourcer en pleine nature. Hors des villes qu’ils
connaissent, ils se laissent inspirer par l’odeur de l’air pur
Les travailleurs de Rokugan se rassemblent pour se pro- et par les paysages naturels, vierges des dégradations
téger mutuellement, mais certains fermiers et mineurs humaines. Certains développent des techniques secrètes
vivent dans les étendues sauvages en raison de la nature plus avancées, souvent accompagnées d’une dangereuse
de leur activité. Les marchands transportent leurs biens sur paranoïa. Vivant en ermites, de tels artisans raffinent leur
des routes qui traversent des régions inhabitées. D’autres art, en limitant leurs contacts aux apprentis, aux mar-
bonge accompagnent des samouraïs ou des prêtres iti- chands ou aux mécènes.
nérants, notamment pour accomplir les petites tâches du
quotidien, dont la préparation des repas. Même les arti-
sans, du moins les plus excentriques, peuvent se retirer à la
les hinin
campagne de temps à autre ou s’y installer définitivement, Les régions reculées sont principalement peuplées de
en quête d’inspiration. hinin, qui cherchent souvent à gagner leur vie loin de la
La nature offre de nombreuses ressources uniques et, colère des castes dirigeantes. Un petit nombre d’entre eux
bien que certaines méritent que des villes entières soient sont des criminels ou des bandits endurcis forcés de vivre
construites sur place pour en profiter, d’autres sont exploi- à l’écart. D’autres jouent un rôle important dans les cara-
tées par des petits groupes de heimin spécialisés, qui vanes, où ils accomplissent, en raison de leur statut, les
s’installent dans des camps trop petits pour être qualifiés tâches interdites aux autres. Les hinin urbains doivent éga-
de villages. Ils exploitent, dans ces régions éloi- lement passer une partie de leur temps à la campagne,
gnées et difficiles d’accès, des mines ou du pour effectuer des corvées comme la chasse, la prépara-
bois, voire d’autres ressources rares. Ces tion du charbon ou la gestion des déchets.
camps sont souvent saisonniers, et les Certains Rokugani décident de vivre à l’écart de la
travailleurs s’y rendent en emportant société pour leur propre sécurité. La plupart proviennent
de la nourriture de leur village, qui de villages dirigés par des nobles cruels et impitoyables
se trouve en général à des jours ou qui exécutent les hinin sans raison. Il est ainsi parfois pré-
des semaines de voyage. Les hei- férable d’affronter les dangers des forêts insondables ou
min qui partent travailler dans des cols infranchissables plutôt qu’une mort certaine sous
les zones sauvages doivent la lame affilée d’un katana. Ces hinin parviennent souvent
donc y amasser assez de res- à mener une existence relativement confortable en marge
sources pour subvenir aux de la société.
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Les criminels pullulent dans les contrées éloignées,


des rencontres où ils échappent à la capture et aux autres conséquences

sauvages de leurs actes. Qu’il s’agisse d’escrocs vivant dans la clan-


destinité ou de villages entiers de bandits nichés dans
la forêt, dans des grottes ou dans des criques, de nom-
Les zones naturelles regorgent de créatures, breux hors-la-loi trouvent dans la nature un refuge face
d’esprits et d’énergies magiques. En cas d’échec aux forces de l’ordre. Cependant, la plupart de ces camps
à un test ou si un est dépensé, le MJ peut manquent des biens de première nécessité et affrontent
inclure une rencontre de l’un des types suivants. constamment les dangers naturels. Les légendes qui men-
Les scènes de ressources peuvent mener le tionnent des êtres surnaturels sont une arme à double
groupe à un endroit intéressant. Celles de dan- tranchant pour ces criminels : la présence présumée des
ger peuvent déclencher une nouvelle scène de esprits cruels ou des forces maléfiques repousse leurs
confrontation ou modifier celle en cours. poursuivants, mais les bandits eux-mêmes peuvent finir
es s r e ts e )  : les étendues par se demander si les rumeurs n’ont pas un fond de véri-
sauvages abritent de nombreux dangers mineurs. té. Certains camps de brigands, de plus grande taille, s’ef-
Des plantes, des insectes ou des créatures aqua- forcent d’inventer de telles histoires, et fabriquent parfois
tiques peuvent provoquer des crises d’urticaire même des preuves pour assurer leur tranquillité.
ou des boursouflures. Les baies et champi- Seuls à pouvoir accomplir les tâches subalternes, les
gnons mal identifiés causent des hallucinations, hinin sont inestimables lors de longs trajets : ils dépècent
des maladies ou pire encore. Les primates et les le gibier, vident les poissons, s’occupent des morts et des
oiseaux volent de petits objets aux humains qu’ils déchets. Très rarement, les geishas préférées de samou-
croisent. Voir certains chats sauvages ou volatiles raïs peuvent les accompagner si ces derniers ont joué de
porte malheur. Certains esprits, enfin, cherchent à leur influence pour les y autoriser. D’autres professionnels
perdre les voyageurs, ou du moins à leur jouer de du divertissement se joignent parfois à la caravane, pour
mauvais tours. assister aux faits d’armes des nobles et les relater ensuite
es ers e ) : les ours, les félins, les à la cour par exemple.
chiens sauvages, les loups, les requins et d’autres
prédateurs attaquent les passants sur terre ou en
mer, sans signe avant-coureur. Même les singes
les gaijin
deviennent violents et lancent des projectiles sur Rarissimes au sein de l’Empire durant des générations, les
tout humain qui entre sur leur territoire. Cepen- gaijin possèdent maintenant des enclaves dans les monts
dant, le plus grand risque est posé par les mille- de la Grande Muraille Septentrionale et dans les îles de la
pattes et les araignées, qui peuvent injecter un Soie et des Épices. Les Yobanjin vivent dans les cols et pics
venin mortel en cas de piqûre. Enfin, certains au nord des terres des Clans de la Licorne et du Dragon.
esprits, mal intentionnés ou ignorants de la fra- Ils s’habillent de peaux d’animaux et ne sont pas considé-
gilité humaine, représentent une menace. rés comme des humains puisqu’ils demeurent extérieurs
es ress r es ) : si la nature s’avère dan- à l’Ordre céleste. Cependant, ils tissent les magnifiques
gereuse, elle peut également soigner. Les plantes tapis aux motifs complexes que certains Rokugani appré-
et les herbes rares sont utiles en médecine. Des cient, notamment au sein du Clan de la Licorne. Ce dernier
baies, des fruits, des champignons comestibles ne considère pas les Yobanjin comme des barbares, mais
ou des animaux locaux faciles à chasser sont s’intéresse à leur intrigante culture, rencontrée au cours de
autant de sources de nourriture. La cabane aban- son long voyage de découverte. Les îles de la Soie et des
donnée d’un ermite fournit un abri bienvenu pour Épices accueillent presque autant de Rokugani que de gai-
la nuit. Voir une créature rare, comme un dau- jin. Ces derniers viennent de terres lointaines comme les
phin ou certains insectes, porte bonheur et amé- royaumes d’Ivoire et vivent dans leurs propres cités ou par-
liore l’humeur pour la journée. Il est également mi les membres du Clan de la Mante. Ils commercent et
possible de découvrir une petite quantité d’une échangent des idées librement avec les locaux.
matière première, que ce soit une plante, un
minerai ou une substance plus mystique.

201
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

Les montagnes
et donc nourrir ses armées. Les citernes constellent les
plaines, recueillant l’eau nécessaire pour les plantations et
les animaux, mais aussi pour les paysans qui ne bénéficient
Les montagnes de Rokugan délimitent l’horizon et rap- pas d’un puits proche.
pellent l’époque tumultueuse où le sol s’éleva jusqu’à ce À l’inverse, certains considèrent les terres du Clan de
que la pierre touche le ciel. Autrefois annonciatrices de la Grue comme trop humides. Au sud, les marais Uebe
changements catastrophiques, elles évoquent désormais s’étendent sur des milliers d’hectares. Ils entrent souvent
des géants endormis qui ne seront jamais vaincus, même en crue durant les tempêtes et enrichissent les champs voi-
par les vents océaniques. Leurs formes chaotiques créent sins en nutriments, tout en épuisant les fermiers réduits à
un vaste mur qui définit les frontières de Rokugan ainsi y patauger. Les précipitations de l’est sont donc autant un
que celles des territoires internes, mais les montagnes sont bienfait qu’une malédiction. Le long du Toit du Monde, les
bien plus que de simples barrières. Elles sont aussi les gar- terres arables et fertiles s’érodent, et les glèbes mal entre-
diennes des secrets : elles abritent ceux qui souhaitent se tenues peuvent être balayées par des glissements de ter-
cacher dans leurs vallées et leurs grottes, elles enfouissent rain. Sur les territoires glacés du Clan du Phénix, la pluie
des filons de minerais précieux sous des tonnes de roches, se transforme en flocons et tombe lors de terribles tem-
elles amènent une révélation spirituelle à ceux qui les esca- pêtes de neige.
ladent. Il est impossible de connaître parfaitement toute Le versant occidental du Toit du Monde, plus sec, n’est
une montagne en une vie, et tenter l’expérience expose à pas totalement privé d’eau. Contrairement au sol de l’est,
de grands risques. Chaque secret qu’une montagne recèle ameubli par les tempêtes, les terres de l’ouest ont conser-
peut se révéler dangereux : il est possible que quelqu’un, vé leur rigidité volcanique. Dans cet environnement rocail-
ou quelque chose, l’ait découvert en premier. leux, des rivières profondes alimentées par la fonte des
neiges coulent jusqu’à la baie des Poissons morts ou la

la météo forêt de Shinomen. Les Clans du Scorpion et du Crabe


canalisent l’eau glacée de ces rivières pour arroser leurs
Les montagnes, même endormies, affectent leurs envi- rares champs. Mais toutes les eaux qui dévalent les mon-
rons. La chaîne du Toit du Monde divise l’Empire, et ses tagnes ne sont pas sans danger. À l’ombre du Toit du
pics enneigés sont autant de griffes qui déchiquettent les Monde, des marais libèrent des bulles de gaz nocifs, qui
vents océaniques tentant de les franchir. Une fois rafraîchi, atteignent la roche noire et sont ensuite transportés par
l’air humide revient vers la côte orientale de Rokugan et ruissèlement. Les animaux qui se sont adaptés à ce dange-
arrose les terres fertiles. Même les plaines du Clan du Lion reux mélange sont également devenus venimeux, et sont
sont profondément affectées par les montagnes. Puisque à l’origine de nombreuses toxines utilisées par les assas-
nulle rivière ne traverse une bonne partie de son terri- sins du Clan du Scorpion. Les marais alimentent donc le
toire, ce clan dépend de la pluie pour irriguer les champs dard du Clan du Scorpion.
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

les minerais Malgré l’utilité de l’acier, il n’a pas la beauté du cuivre


ou de l’or. La forge Éclatante du Clan du Lion se consacre
Sans armes, un régiment n’est rien d’autre qu’une foule. à ces métaux, et elle est donc considérée comme la plus
Tout manque, que ce soit une absence de ressources ou belle de tout Rokugan. Des creusets géants font fondre
de poids politique, peut être compensé par des moyens les minerais précieux, et éliminent leurs impuretés avant
financiers. L’or, l’acier et le jade font la force des clans de de verser le métal, semblable à un rayon de soleil liquide,
Rokugan, même si aucun samouraï honorable ne l’admettra. pour le mouler en lingots. Dans le cas du cuivre, le proces-
Les monts de la Grande Muraille Septentrionale s’étendent sus produit un magnifique résidu : des scories vertes simi-
à la frontière nord de l’Empire, telle une couronne pointue laires à du verre. Elles sont ensuite taillées par les artisans
et glacée. La zone surnommée les Montagnes du Dragon en des incrustations qui imitent les pierres précieuses.
fournit au clan éponyme d’importants gisements. La mine
de la Queue du serpent contient la trinité des gisements : les voyages
or, fer et jade. Le Clan du Dragon jouit d’une telle abon-
Pour la plupart des voyageurs, les montagnes sont des bar-
dance de minerais inestimables qu’il peut acheter la majo-
rières presque infranchissables. Des journées sont gâchées
rité de sa nourriture, une nécessité puisqu’il vit dans des
à les traverser, des vies perdues à tenter l’escalade. Le com-
montagnes stériles. Il est cependant un trésor que le Clan
merce entre l’est et l’ouest de l’Empire dépend donc des
du Dragon refuse de vendre, un minerai plus précieux que
cols. Le Toit du Monde en comprend plusieurs, et d’autres
l’or. Une fois par an, lors du solstice d’été, la forge qui se
encore seront sûrement découverts. Cependant, ces routes
trouve au sommet du mont du Fer résonne des chants des
si pratiques ne sont pas dénuées d’inconvénients. Les mar-
shugenja. Dans les fournaises en argile appelées tatara, les
chands empruntent des chemins sinueux surplombés par
sables ferreux sont mélangés à une matière inconnue. La
de hautes falaises, et deviennent ainsi des proies faciles
plupart des forges utilisent du charbon de pin blanc pour
pour les bandits. De nombreux voleurs s’installent dans les
transformer le fer en acier, mais le Clan du Dragon a décou-
grottes et les tours de garde abandonnées non loin des
vert une substance plus puissante et plus ancienne. Ce char-
cols. Ils profitent de la proximité des lieux, mais aussi du
bon hautement raffiné, surnommé le Sang du Dragon, se
flou qui entoure ces zones grises. Les samouraïs et leurs ser-
trouve dans les montagnes, chauffé dans des grottes volca-
viteurs craignent de dépasser leurs frontières et de créer un
niques hermétiques. Une fois mélangé avec le fer, il donne
incident avec un clan rival. Par exemple, des deux côtés du
un acier extrêmement solide et tranchant après le forgeage.
col de Beiden, les Clans du Lion et du Scorpion se préoc-
Avec l’or et le jade, ce métal singulier est l’une des exporta- cupent bien plus l’un de l’autre que d’éventuels bandits.
tions les plus rentables du Clan du Dragon. En plus des malfaiteurs, les pics regorgent de dangers
Un autre minéral unique utile aux armuriers se cache naturels. Au sud des terres du Clan du Phénix se trouvent
sous le Toit du Monde. Sur les terres du Clan de la Grue, les montagnes du Regret, traversées par le bien nommé
une veine sinueuse de fer pratiquement pur traverse la col Périlleux, qui abrite des animaux sauvages et est sou-
montagne. Selon la légende, le filon serait une lance pro- vent ravagé par des glissements de terrain et des inonda-
jetée des cieux par la Fortune Bishamon, et le Clan de la tions. Seuls les plus désespérés se risquent à l’emprunter,
Grue l’a donc surnommé le Minerai céleste. Au sein de la les autres préférant perdre le temps nécessaire pour
forge de la Grue d’acier, l’acier obtenu ne nécessite que contourner les pics sinistres.
quelques plis avant d’être débarrassé de ses impuretés et Ceux qui s’aventurent à escalader les parois rencontrent
de pouvoir devenir une arme. Le grain unique des lames plus de dangers encore. Dans les monts de la Grande
Kakita les orne de magnifiques tourbillons semblables à Muraille Septentrionale, tous les sommets ne sont pas
des vagues qui s’écrasent. endormis. La Colère du Kami est l’un des nombreux vol-
Tous les clans n’ont pas accès à des matériaux de haute cans actifs de la région. Durant l’hiver, ce géant salit la neige
qualité. Les armes du Clan du Crabe font partie des meil- de cendres, et ses fréquentes secousses créent des ava-
leures de tout l’Empire, et elles bénéficient d’un facteur lanches. De tels séismes peuvent aussi survenir dans le sud
spécial : la ténacité des forgerons. À l’exception du Minerai de Rokugan, dans les monts du Mur Bordant l’Océan. Cette
céleste, le fer se trouve généralement en des filons rouillés chaîne est plutôt petite, et ses pics arrondis ont été sépa-
corrompus par des minéraux externes, comme le soufre. rés par le sol instable de la baie des Poissons morts, laissant
Retirer ses impuretés est un processus long et pénible : ce derrière eux de profonds ravins et un terrain inégal.
qui ne fond pas dans le tatara doit être éliminé par une Même endormie, une montagne demeure un adver-
série de plis. Comme tous les grands maîtres, les forge- saire redoutable. Le Toit du Monde rebute tout aven-
rons de la forge Kaiu incluent dans leurs armes trois types turier sur ses deux versants : ses falaises lisses balayées
d’acier : un hagane dur pour la lame, un shingane flexible par les vents à l’est et ses éperons acérés à l’ouest. Les
pour le cœur et un kawagane pour unir les deux. Chaque plus hautes montagnes, vu leur altitude et leur escarpe-
couche nécessite une préparation différente, supervisée ment, représentent un grand danger, mais des pics plus
par un spécialiste. La plupart des forgerons Kaiu consacrent modestes abritent autant de périls. Chacun garde jalou-
leur vie entière à une seule étape du processus, que ce soit sement ses secrets, y compris la nature de ce qui est tapi
le polissage, l’aiguisage ou la trempe. dans son ombre.

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les dangers en la mine de jade du


montagne village des montagnes
L’étendue des montagnes de Rokugan représente un occidentales
défi pour les cartographes : décrire un seul sommet en
Chaque année, la chaleur printanière libère l’accès à la
détail s’avère le travail d’une vie. Durant des généra-
mine de jade des Montagnes occidentales, faisant fondre
tions, les éclaireurs Hiruma ont surveillé les montagnes
les imposantes stalactites qui en bloquent l’entrée. De la
du Crépuscule, qui sont donc les mieux documentées de
condensation se forme sur les murs puis s’écoule lente-
tout l’Empire. Malgré tout, les résidents de l’Outremonde
ment, en un bruit qui résonne aussi fortement qu’une rivière
trouvent encore des chemins inconnus jusqu’aux terres déchaînée, dans les ténèbres sans cela silencieuses. Une
du Clan du Crabe. Les mineurs sont régulièrement atta- fois le dégel terminé, la mine devient encore plus bruyante :
qués par des monstres sapeurs qui cherchent à franchir les ouvriers retournent au village et débarrassent la mine
la Grande Muraille Kaiu. Une fois entrés à Rokugan, ces des sombres habitants qui y ont élu domicile. Leur première
derniers créent des colonies secrètes. Le Toit du Monde entrée est toujours ardue : durant l’hiver, des léopards, des
accueille ainsi des gobelins, et des sorcières vivent sur des ours ou des esprits hostiles ont pu s’installer dans les tun-
pics isolés dans tout l’Empire. nels. Pire encore, les secousses de la baie des Poissons
Les monstres menaçants ne sont pas pour autant l’apa- morts peuvent avoir fragilisé les poutres de soutènement.
nage des montagnes du Crépuscule. Les chimi, des esprits Une fois les tōrō allumés et les tunnels sécurisés, la caco-
malfaisants, peuvent être présents sur n’importe quelle phonie est déclenchée. Un chiffon attaché au-dessus de la
route de montagne. Ils s’entourent d’une brume surnatu- bouche et du nez, les mineurs piochent d’énormes pans de
relle et apparaissent sous la forme d’animaux grotesques roche grise en quête de la translucidité laiteuse du jade, un
à visage humain. Survivre à la rencontre ne signifie pour- travail monotone, mais vital. Au lieu de brandir des épées
tant pas que le reste du voyage se fera sans encombre : et de connaître une mort glorieuse au champ de bataille,
les chimi peuvent transmettre une maladie mortelle à leurs ces héros manient des burins et étouffent lentement dans
victimes. Les montagnes abritent aussi les ōmukade. Il la poussière : ils fournissent ainsi le seul matériau capable
est fréquent de croiser ces sortes de mille-pattes géants de tuer les créatures Souillées de l’Outremonde. Sans eux,
et anthropophages qui vivent dans des grottes. Leur l’Empire d’Émeraude aurait disparu depuis longtemps.
exosquelette impénétrable les protège de tout sauf de leur
seule faiblesse : la salive humaine. Toute arme qui en est
couverte permet de se débarrasser de ces créatures en un
tournemain. Les voyageurs peuvent aussi tomber sur des
les rumeurs des
profondeurs
onikuma, des démons ours communs dans les montagnes,
et bien plus terrifiants que les autres monstres. Énormes,
rapides et territoriaux, ils peuvent facilement couper un
cheval en deux et écraser un samouraï en armure comme $ Au nord, des mineurs ont trouvé une ville
un morceau de papier. abandonnée très différente de toutes les
De nombreux groupes d’humains et d’esprits vivent autres ruines de Rokugan. Ils ont sapé le
dans les monts de la Grande Muraille Septentrionale, tunnel pour qu’il s’effondre et refusent de
sur les pics dénudés au-delà de la forêt, loin de la socié- parler de leur découverte.
té impériale. Les bois sont habités par les tengu, et les
$ Dans les tunnels, les mineurs entendent
Grands Tengu solitaires occupent les plus hauts sommets.
des voix qui semblent sortir de la pierre.
Le gibier foisonnant qui nourrit le Clan de la Licorne ali-
mente également les Yobanjin, ces humains au style de vie $ De nombreux mineurs des Montagnes
nomade qui ont refusé le règne des Kamis, mais aussi les occidentales sont en fait des assassins ou
camps secrets d’un autre groupe d’exilés religieux, la secte des criminels qui s’y sont réfugiés pour
de la Terre Parfaite. échapper à la justice.
$ La plupart des mines de jade sont épui-
sées. Seule la mine des Montagnes occi-
dentales répond à la demande. Si l’ex-
ploitation devait cesser, la situation serait
grave pour l’Empire !

204
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

SOCIÉTAL PERSONNEL

sinistre chasseuse de sorciers 40 HONNEUR ENDURANCE


14
4 3
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  4 1
50 GLOIRE SANG-FROID
14
Haruna est une tsukai-sagasu, une chasseuse de sorciers 3 3
du Clan du Crabe. Elle étudie l’Outremonde depuis sa plus 39 STATUT 3 ATTENTION
6
tendre enfance et en connaît les nombreux périls. Après
avoir été l’apprentie d’un tsukai-sagasu d’expérience, elle +2, –2
ATTITUDE : INTIMIDANT
VIGILANCE
3
a rapidement su montrer ses talents de guerrière féroce.
Cette femme dégingandée ne s’illustre pas par sa beau-
ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 4 SOCIAL 3 PRO. 2
té : son menton asymétrique déforme ses lèvres minces de
sorte qu’elle affiche en permanence un rictus, un sourire AVANTAGES DÉSAVANTAGES
mauvais ou une grimace. Comme de nombreux membres
de la famille Kuni, Haruna couvre son visage de peinture A re i ressi te e rs
Kabuki blanche et rouge, dont la brillance souligne l’obs-  social ; relations  savant ; spirituel
curité inquiétante de ses yeux.
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
Haruna analyse sans cesse ce qui l’entoure et, quand
vient le moment de porter le coup fatal, elle se jette sur sa N i t   : portée 2 ; dégâts 6 ; Dangerosité 6 ; Acéré,
proie avec une cruauté enjouée. Insensible et vulgaire, elle Encombrant, Militaire
a l’habitude caustique de dénigrer les politesses sociales.
Si Haruna pense que quelqu’un lui cache quelque chose, i e e t rt ) : tunique bardée de glyphes (Résis-
elle n’hésitera pas à le harceler jusqu’à ce qu’il laisse tance physique 2, Résistance surnaturelle 4, Sacré),
échapper ce qu’il sait. Cependant, aussi malveillante wakizashi, rubans de prière, parchemins sacrés
qu’elle puisse paraître, elle est sincèrement motivée par
CAPACITÉS
la quête de la vérité. Au cours de sa carrière, elle a vu
des horreurs que le commun des mortels ne saurait ima- A R A
giner. Comme de nombreux membres du Clan du Crabe, Lorsque Kuni Haruna effectue une action d’Attaque contre
elle supporte ces traumatismes avec stoïcisme. En contrai- un personnage qu’elle n’a pas encore attaqué au cours de
gnant les autres à se confronter à la vérité, elle pense leur la scène, elle peut dépenser comme suit :
rendre un service. Bien entendu, elle pourrait s’abstenir de
ricaner et de renifler durant le processus, mais il vaut mieux  : la Dangerosité de l’attaque augmente de 1 point
ne pas le lui faire remarquer. par dépensé de cette façon.
  : les dégâts de l’attaque augmentent de 1 point
par dépensé de cette façon.
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

CAPACITÉS

GAR R R
Une fois par session de jeu, au prix d’une activité de temps
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  3 4 mort, Asako Takahiro peut relater à autant de personnages
De l’avis de tous, Takahiro est un beau jeune homme mince qu’il veut ses observations et suspicions quant à la zone
aux pommettes parfaites et à la mâchoire carrée. Sa seule environnante. Chaque personnage qui lui prête attention
particularité étrange réside dans les yeux tatoués sur les augmente sa Vigilance de 2 points jusqu’à la fin de la ses-
paumes de ses mains, les symboles d’un inquisiteur Asako. sion de jeu.
Il arbore fréquemment un sourire paisible, qui a un effet
calme et désarmant sur ses interlocuteurs. Cependant,
quand ils se sentent à l’aise en sa présence, ils sont tom-
bés dans son piège : il ne fait que jouer le benêt, inexpé-
idée d’aventure :
rimenté et naïf. Une fois que ses cibles se détendent, il les une découverte
pousse à s’incriminer puis, lorsqu’il les tient, il révèle son
génie déductif en se lançant dans un monologue enthou-
Accroche Un éboulement s’est produit dans
siaste. Il dévoile du même coup son plus grand défaut :
la mine de jade des Montagnes occidentales.
son orgueil.
Les étais se sont effondrés après un séisme dans
Bien qu’il soit généralement un bon enquêteur, il a
la baie des Poissons morts. Un mineur, déses-
récemment condamné une femme innocente et n’a réalisé
pérément en quête d’aide, approche les PJ. De
son erreur qu’après l’exécution. Depuis, il s’en tient à un
nombreux travailleurs sont coincés dans le tun-
Noble Silence, une pratique spirituelle de certaines sectes
nel, et certains sont sûrement blessés.
shinséistes. En se taisant, du moins aussi fréquemment
qu’il le peut, il espère purifier son âme et s’ouvrir aux véri- Développement Après avoir déblayé les
tés cosmiques. Cependant, malgré son vœu de silence, il gravats, les PJ s’aperçoivent que les mineurs
demeure hautement éloquent : ses sourcils mobiles, ses piégés dans le tunnel ont disparu. Les travail-
expressions faciales et son non-verbal souvent exagéré leurs présents leur racontent que, au cours des
suffisent à communiquer ses sentiments. Le Petit Maître dernières semaines, ils ont entendu des voix
trouverait sûrement quelque chose à y redire. derrière la pierre. Ils pensent que le séisme pour-
rait avoir libéré un être sinistre. Les personnages
SOCIÉTAL PERSONNEL qui suivent les voix dont l’écho résonne dans le
45 HONNEUR ENDURANCE
12 tunnel finissent par trouver un réseau de grottes
4 4 naturelles et découvrent les mineurs, en compa-
50 GLOIRE SANG-FROID
14 gnie de la tsukai-sagasu Kuni Haruna et de l’in-
3 2 quisiteur Asako Takahiro. Tous deux poursuivaient
40 STATUT 3 ATTENTION
6 des Adeptes du sang lorsque le séisme a ouvert
un passage entre les mines et les grottes. Mainte-
+2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
5 nant que le tunnel est dégagé, ils comptent pour-
ha er le ah - ai e a r ien l’aide de
PJ. Le groupe retrouve rapidement les membres
ARTISANAL 2 MARTIAL 3 SAVANT 4 SOCIAL 4 PRO. 0
du culte, en train de détourner une rivière souter-
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
raine pour inonder la mine.

e e t e te r e s is t t 三 Paroxysme e ah - ai n n r i
 social ; relations  social ; mental un barrage rudimentaire pour dévier l’eau de la
rivière. Haruna suggère de diviser le groupe en
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS deux : Takahiro et ses compagnons feront diversion
tandis que son groupe détruira la construction. Un
itte : portée 0 ; dégâts 3 ; Dangerosité 2 ; Discret, Entrave
échec rendrait la mine rapidement inutilisable, ce
i e e t rt ) : tunique sanctifiée (Résistance phy- qui ne ferait qu’empirer le manque de jade.
sique 1, Résistance surnaturelle 3 ; Cérémoniel), encens,
wakizashi, parchemins sacrés

206
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

les montagnes des potins sur


du dragon les pistes
Toute personne en quête d’humilité peut se présenter au
pied des montagnes du Dragon. Ces pics gigantesques
rendent minuscule tout ce qui les entoure. De nombreux $ Une colonie de kitsu vit dans une vallée isolée
prétendus alpinistes rentrent chez eux après un simple du nord. Ils se métamorphosent en humains
regard, honteux d’avoir eu de si grandes ambitions, mais pour effectuer des échanges commerciaux.
certains ne se laissent pas décourager, et commencent $ Des chasseurs ont repéré une imposante
leur ascension dans la forêt. Accompagnés par le chant créature simiesque, mais ils ne savent pas
des oiseaux, ils empruntent des sentiers anciens parse- à quel type de monstre ils ont affaire. S’il
més de marches formées par les racines ou les rochers. s’agit d’un hihi, il aura de grosses lèvres
Les bois sont peuplés d’animaux : daims, macaques, fai- qui se replient sur ses yeux lorsqu’il rit,
sans, lièvres, sangliers et léopards, tous robustes et témé- ce qui laisse à ses victimes une chance de
raires. Et subitement, plus rien. Les arbres s’espacent s’échapper. Par contre, si c’est un satori,
puis disparaissent : le vent nordique gelé balaie alors un il suivra discrètement les voyageurs pour
sol stérile où les aventuriers doivent composer avec la lire leurs pensées. Si celles de sa cible sont
roche, la brume et le froid. S’ils poursuivent leur chemin, claires, cette créature n’attaque pas.
les dangers se multiplient : un seul faux pas peut engen-
$ Un esprit malfaisant, un yuki-nobō, se fait
drer la mort. Selon la saison, des torrents de neige fon-
passer pour une bienveillante yuki-onna,
due peuvent dévaler les pentes, ou une fragile couche de
une vierge hivernale. Il approche les voya-
glace peut recouvrir le sol. Ceux qui parviennent à sur-
geurs et leur demande de l’eau, puis les
monter le vertige et le mal des montagnes verront leurs
tue. Pour survivre à une telle rencontre,
efforts récompensés par des panoramas magnifiques
une seule solution : donner du thé chaud
sur des vallées verdoyantes, des cascades et tout
à la créature.
l’Empire d’Émeraude, qui s’étire à l’horizon.
$ S j le rand eng i a e de
la plus haute des montagnes du Dragon.
Quiconque aura la chance de le trouver
deviendra son apprenti.
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

personnages sa mixture personnelle d’herbes des mon-


Agasha Susumu, guide érudit tagnes. Ceux qui y goûtent augmentent leur Sang-froid
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  1 2 de 2 points et diminuent leur Vigilance de 1 point, et ce,
jusqu’à la fin de la session de jeu.
Susumu arpente les hauts sommets des montagnes du
Dragon avec une énergie infaillible, pour collecter des
herbes qui serviront à ses expérimentations botaniques.
Ce petit homme aux jambes noueuses présente des
épaules voûtées et un crâne dégarni. Sous le large rebord
Les forêts
de son chapeau takuhatsugasa, son visage buriné est ridé Parmi les chants d’oiseaux et les stridulations des cigales,
par la constante expression joyeuse d’enthousiasme qu’il les échos des autres royaumes se font entendre. Des sil-
arbore. Susumu est passionné par son travail et saute sur houettes éthérées apparaissent furtivement à l’ombre des
la moindre occasion de discuter des nombreuses applica- frondaisons. Même en l’absence de tout son, les forêts res-
tions des herbes. Lors de ses tournées de collecte, il pro- pirent de manière audible : elles sont vivantes et dotées de
pose aussi ses services de guide. Par contre, il détourne leur propre tempérament. Des hinin aux kuge, personne
souvent son attention des voyageurs, qui doivent l’at- n’entre dans une forêt sans en connaître les lois. Dans les
tendre pendant qu’il escalade gaillardement de hautes étendues sauvages, les humains sont des intrus et ceux qui
falaises pour y cueillir une plante intrigante. ne montrent pas de respect sont accueillis sans pitié. Les
Si la moindre question lui est posée (et il insiste lourde- esprits sont tapis partout, à l’affût : à l’intérieur des troncs
ment pour que ce soit le cas), Susumu se lance dans une creux, au cœur des branches emmêlées des ronces et au
diatribe sur n’importe quel sujet, de la spiritualité à la poé- sein des interstices entre les rochers.
sie en passant par la métallurgie et, bien sûr, la botanique.
Ces derniers temps, il a passé plus de temps à collecter
des herbes qu’à se livrer à des expériences. En présence
le bois
de membres de son clan, il se laisse souvent emporter Peu de matériaux sont aussi polyvalents que le bois.
dans des débats relatifs à la secte de la Terre Parfaite. La Essentiel dans la confection d’outils et la construction, il
tolérance dont le clan fait preuve face aux hérétiques l’em- est même utile une fois brûlé, sous la forme de charbon.
barrasse. S’il avait le choix, il chasserait ces derniers des Chaque Rokugani en a besoin, d’où l’importance de pou-
montagnes sacrées par tous les moyens nécessaires. voir le récolter.
Sur les terres du Clan de la Grue, les espaces boi-
SOCIÉTAL PERSONNEL sés pullulent. À l’exception de la forêt du Chas, sacrée,
45 HONNEUR ENDURANCE
12 ils regorgent d’esprits coopérateurs qui acceptent que le
3 2 bois soit exploité. Osari Mori est une magnifique étendue
50 GLOIRE SANG-FROID
14 à la végétation diversifiée. En son cœur, à l’abri d’un cercle
4 3 d’élégants sakura, se trouve Shizuka Toshi, l’école de
39 STATUT 3 ATTENTION
6 diplomate Doji. Plus au sud, la forêt Akagi abrite un bois
de bambous vert pâle aux feuilles argentées. Les duellistes
+2, –2
ATTITUDE : SÛR DE SOI
VIGILANCE
3 Kakita s’en servent pour le tameshigiri, l’essai des lames,
ou s’y rendent pour méditer, au son des tiges creuses qui
s’entrechoquent doucement dans la brise océane.
ARTISANAL 0 MARTIAL 2 SAVANT 4 SOCIAL 1 PRO. 3
Certains clans ont moins d’options. Au cours des géné-
AVANTAGES DÉSAVANTAGES rations, le Clan du Lion a vu sa seule forêt, le Cœur de
la Vigilance, se réduire comme peau de chagrin. En se
e e te ire r s i e rationnant et en replantant, il a réussi à renverser la ten-
 savant ; mental  social ; relations dance. Malgré tout, ces difficultés semblent dérisoires face
au désespoir des Clans du Crabe et du Scorpion. Rares
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
sont les forêts qui poussent sur les versants occidentaux
iser   : portée 0 ; dégâts 2 ; Dangerosité 2 ; Discret, du Toit du Monde, à une exception notable : la forêt de
Ordinaire Shinomen, un lieu ancien et imprévisible, mais dont les
deux clans osent encourir la colère. Leurs bûcherons se
i e e t rt ) : vêtements solides, sac d’herbes
sont habitués aux événements étranges et, de temps à
autre, des villages entiers disparaissent.
CAPACITÉS
Les ouvrages en bois peuvent être aussi bien esthé-
R A A AN tiques que pratiques. Le Clan de la Licorne est connu pour
Une fois par session de jeu, au prix d’une activité de temps sa marqueterie yosegi, un art qui utilise les arbres de la
mort, Susumu peut partager avec un maximum de cinq forêt du Cœur du Dragon pour créer des motifs complexes.

208
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Les artistes se servent du fusain pour les ornements blancs, A ein de end e a age le ingen-d a i nn
du katsura vieilli pour le noir, du mûrier pour le jaune, du a e le Sen le r a e de e ri n ra er an de
bilimbi pour le bleu et du noyer noir dans tous les cas, forêts anciennes, dont Shinomen ou Isawa, il est possible
sans jamais recourir aux teintures. À l’est, le Clan du Phé- d’en rer an le a ir r le erri ire d hi h -d le
nix obtient le meilleur papier de l’Empire grâce aux arbres royaume des animaux, ou du Sakkaku, le royaume de l’il-
de la forêt Isawa. Pour créer leurs parchemins sacrés, les lusion. Souvent, les différences demeurent imperceptibles,
shugenja du Clan du Phénix invoquent des kamis lorsqu’ils mais un observateur avisé remarquera certaines incohé-
pratiquent le suminagashi, une technique de marbrure : rences : des chemins qui empruntent des directions para-
de l’encre est déposée à la surface d’un récipient rempli doxales, des arbres d’écosystèmes lointains ou une météo
d’eau, puis des esprits forment le dessin, sur lequel on inhabituelle pour la saison. Un voyageur se sentira déso-
applique le papier afin de l’en imprégner. rienté tant dans l’espace que dans le temps, mais nul ne
ai i e e ar i lari e inh ren e a Sen la

les esprits et le senkyō conséquence des actes des esprits malicieux du Sakkaku.
La légende veut que quiconque consomme la nourriture
La personnalité d’une forêt est déterminée par les esprits des esprits reste piégé à jamais.
qui y vivent. Ces derniers sont presque inactifs au sein des Les forêts accueillent les cours des royaumes des ani-
satoyama, les rangées d’arbres plantées par l’homme le maux et des kamis facétieux. La forêt du Chas, sur le ter-
long des champs pour limiter l’érosion et approvisionner ritoire du Clan de la Grue, est connue pour abriter les
le village en bois. Les arbres y sont abattus encore jeunes êtres malicieux du Sakkaku. À la pleine lune, ils s’activent,
puisque, après trente ans, ils commencent à montrer leur et leur présence est si forte que les arbres brillent. Heu-
véritable caractère, et les esprits kodama s’installent dans reusement pour le Clan de la Grue, les esprits s’avèrent
les arbres matures. Bien que leur présence ne soit pas sys- bienveillants et n’aiment pas se mêler aux humains. Durant
tématique, les bûcherons vérifient toujours : abattre un son enfance, l’Empereur Hantei XXIII jouait dans la forêt
arbre tue l’esprit qui y habite et inflige une malédiction du Chas : il se faufilait hors du palais impérial et rejoignait
au coupable. un esprit-renard argenté. À son accession au trône, Hantei
Les kodama font partie des milliers de catégories de XXIII proclama ces bois sacro-saints : depuis, il est inter-
kamis, dont la plupart résident dans la nature indomptée. dit d’y couper un arbre et d’y chasser. Au sud se trouve
Les esprits vivent aux côtés de l’humanité sans se faire la forêt Kitsune, où le Clan du Renard coexiste paisible-
remarquer, mais influencent tout de même leurs voisins en a e le en i d hi h -d e d Sa a e e
mortels. L’un des devoirs majeurs des shugenja consiste unité montre que l’humanité peut vivre en harmonie avec
à identifier les shintai (les habitations des kamis) natu- la nature.
rels, pour le compte de Rokugani incapables de perce-
voir la présence des esprits. Les temples et les arches torii
marquent traditionnellement le territoire d’un kami, tout
comme les shimenawa, des cordes épaisses délimitant un
espace sacré.
De tels indicateurs s’avèrent rarement nécessaires
en forêt. Tout comme les montagnes, les zones boisées
regorgent d’esprits, et il serait insouciant de vouloir s’y
promener sans s’attendre à percevoir leur influence.
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

la forêt kitsune des habitants ayant


Après le Jour des Tonnerres, la majorité du Clan de la
plus d'un tour
dans leur sac
Ki-Rin quitta Rokugan sur les traces des ennemis de l’Em-
pire, ne laissant qu’une petite partie de ses effectifs pour
surveiller ses terres. Malheureusement, cette force ne put
résister à l’invasion du Clan du Lion. Les survivants furent $ Les kitsune aiment les pierres précieuses.
repoussés toujours plus au sud, jusqu’à ce que Hantei
Leur butin est probablement caché dans
intervienne pour déclarer que le groupe orphelin était la forêt.
désormais un clan mineur. Il lui octroya le territoire autour
$ Un village de tanuki (des chiens viverrins)
de la forêt Kitsune et le nomma Clan du Renard en l’hon-
organise des fêtes fantastiques : le saké y
neur de son nouvel habitat. Mais cette fin heureuse ne mit
est excellent, les blagues et représenta-
pas un terme aux malheurs de ces samouraïs. L’Empereur
tions théâtrales hilarantes.
Hantei Genji leur avait alloué des terres qui ne leur appar-
tenaient pas : des esprits se les étaient appropriées. Le $ De facétieuses kawauso (loutres de rivière)
Clan du Renard dut s’adapter aux règles de la forêt et, imitent des voix humaines et se réjouissent
de la confusion créée. Certains jeunes par-
gr e a n eil de e ri i ne d Sen le de
ticulièrement espiègles se font passer pour
factions vivent désormais en harmonie. Les kamis des bois
des humains séduisants puis charment les
accordèrent leur protection aux samouraïs, en échange de
voyageurs avant de s’enfuir en riant. Il est
leur respect et de leur vénération.
A AN N
possible de les ignorer sans craindre de
Rares sont les étendues boisées aussi belles que la représailles.
R
forêt Kitsune. Les rayons du soleil filtrent au travers de la
Les kitsune aiment canopée et se teintent d’un vert émeraude qui se reflète
jouer des tours aux partout. Le sol est recouvert d’une mousse parsemée de
humains. Après qu’un minuscules fleurs blanches, parcourue par de petits ruis-
événement étrange et seaux. Les spores cotonneuses apparaissent dans les rais
probablement embar-
de lumière lorsqu’elles passent devant des troncs couverts
rassant est arrivé à un
personnage qui traverse de champignons étagés. Le Clan du Renard nettoie le sol
la forêt Kitsune, ce der- de tout bois mort et traite les arbres malades, de sorte que
nier peut effectuer un la forêt déborde de vie. Les plantes s’avèrent créatives :
test de Théologie (Vide) leurs branches s’entrecroisent pour former des couloirs
ND 2 pour deviner si un et des motifs élégants. Tout est infusé d’une intelligence
kitsune était impliqué.
taquine et les promeneurs se sentent certes souvent
Comme ces esprits sont
souvent associés à la épiés, mais presque jamais menacés. Les esprits
chance, le personnage savent qu’ils doivent faire preuve de patience
peut dépenser envers les humains, mais aussi que ces derniers
pour réagir avec constituent des cibles faciles. La plupart des
humour et regagner kamis ne peuvent pas résister à la tentation
1 point de Vide.
de jouer des tours (souvent inoffensifs)
aux humains. Si les victimes réagissent
avec humour, elles se verront accor-
der des présents par les farceurs.

210
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Ha Iwa, esprit kitsune


idée d’aventure :
A
N R )
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  4 5
une situation Dans chaque village voi-
Ce kitsune adopte l’apparence d’un humain élégant dont
le genre ne se devine qu’au timbre de sa voix. Son visage complexe sin de la forêt Kitsune,
tout le monde connaît
allongé, ses yeux rapprochés, ses sourcils inclinés et ses les imikotoba. Dans le
hautes pommettes correspondent en tous points au faciès Accroche Alors que le groupe de PJ traverse passé, les esprits de
des kitsune gao (femmes au visage de renard). Si ses traits la forêt Kitsune, il est approché par un indivi- la forêt ont demandé
ne le trahissent pas, il est possible de remarquer sa queue, du mystérieux. Tous les personnages dotés de aux humains de ne pas
qui dépasse légèrement de son kimono vert : Iwa n’essaie rangs en Théologie reconnaissent un kitsune, utiliser certains mots
de leurrer personne sur son origine surnaturelle. Il aime lorsqu’ils traversent les
mais même sans cet avertissement, l’utilisation
bois et de plutôt em-
se métamorphoser et sauter, aérien, dans les branches taquine de compétences surnaturelles rend rapi-
ployer des substituts.
d’arbres. Lorsqu’il s’exprime, son langage est formel, mais dement sa nature évidente à tous. Si quelqu’un
son comportement est celui d’un courtisan ivre : il éclate lui demande son nom, le kitsune lève les yeux Mort – Sommeil
de rire à la moindre occasion, cherche les compliments et vers un arbre avant de dire Ha (feuille) puis
Maladie – Repos
l’attention. Cependant, si son interlocuteur ne réagit pas regarde le sol et ajoute Iwa (roche). Il vient visi-
de manière adéquate, son attitude change. Quand Iwa est blement d’inventer ce nom. Larmes – Gouttes salées
frustré, son aspect humain s’estompe et il reprend lente-
ment la forme d’un renard. Il se plaint alors, d’une voix Développement Iwa insiste pour que le Sang – Sueur doulou-
groupe joue avec lui, et il sera impossible de reuse
anormalement forte, du manque de respect dont il a été
victime et, dès qu’il a revêtu sa forme naturelle, il punit refuser. Il propose une partie de cache-cache Viande – Champignons
le coupable. et adopte plusieurs formes différentes, mais
comme tous les kitsune, il ne peut pas changer Tombe – Tas de terre

SOCIÉTAL PERSONNEL sa queue. Bien entendu, il est


également interdit de
05 HONNEUR ENDURANCE
14 三 Paroxysme Si les PJ jouent jusqu’au bout
1 5 et font preuve de respect, Iwa leur donne des
discuter de couper, de
scier, de hacher ou de
25 GLOIRE SANG-FROID
8 pierres précieuses en remerciement. Certains
3 4 samouraïs pourraient y voir une insulte, mais il
casser quoi que ce soit.
De telles conversations
10 STATUT 3 ATTENTION
9 serait imprudent de les refuser. Si les PJ n’ac- angoissent les kodama
ceptent pas de participer ou s’ils énervent le jusqu’à les faire fondre
+2, –2
ATTITUDE : TAQUIN
VIGILANCE
4 kitsune, il les suivra jusqu’à la sortie de la forêt en « gouttes salées »...
et leur jouera des tours, qui peuvent se révéler
ARTISANAL 0 MARTIAL 3 SAVANT 3 SOCIAL 4 PRO. 3 dangereux pour des humains. Iwa aime parti-
culièrement prendre l’apparence d’un PJ pour
AVANTAGES DÉSAVANTAGES semer discorde et animosité au sein du groupe.

e t t e tie e
 social ; relations  savant ; mental
r
 social ; relations
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS

e ts : portée 0 ; dégâts 3 ; Dangerosité 5 ; Naturel

CAPACITÉS

R
Au prix d’une action de Soutien, un kitsune peut adop-
ter une forme humaine (ou reprendre sa forme originelle).
Sous forme de renard, son gabarit est de 1. Sous forme
humaine, il se montrera toujours curieux d’en apprendre
plus sur le mode de vie des mortels, mais il cherchera aus-
si à cacher sa vraie nature. Lorsqu’il est Compromis, ses
pattes, ses oreilles ou sa queue réapparaissent.

211
les esprits violents Le Clan du Scorpion protège un sombre secret sur ses
terres : un bosquet d’arbres trop petit pour être qualifié
Certaines forêts ont été corrompues au point que les arbres de bois, mais trop dangereux pour être ignoré. Contraire-
sont devenus cauchemardesques. Lorsque le Jigoku fait des ment aux autres forêts corrompues, le mal qui y vit ne pro-
er e ra er le Sen le a i e la S ill re vient pas d’un autre royaume, mais d’un terrible rituel. Les
peuvent se changer en de malveillants kansen. Au coucher traîtres du Clan du Scorpion y sont conduits pour y être
du soleil, pendant l’ōmagatoki (le crépuscule), les frontières exécutés, et leur âme est enfermée dans un arbre. Inca-
d Sen di arai en e le e ri erren en li er pables d’atteindre le Meido, les âmes tourmentées lan-
Sous la tour de Kelet réside une abomination contre guissent. Cette prison sadique est surnommée le bosquet
nature. La forêt du Rêveur est la place forte Souillée de des Traîtres.
kansen et, chaque soir, ils se mettent à la recherche de vic- Le Clan du Phénix excelle à manier les esprits, mais il
times humaines. Tandis que les kansen tentent de s’échap- lui arrive aussi de peiner à contrôler certains esprits des
er le ah - ai an e hai en en rer dan la bois. La forêt Isawa est une région paisible, mais en son
forêt pour marchander avec les esprits corrompus. Le Clan cœur résident des kamis misanthropes. Leur habitat s’ap-
de la Licorne a donc implanté une double barrière. Chaque pelle Mori Kuroi, la forêt sombre. Ils ne sont pas corrompus
nuit, des prêtres parcourent le profond fossé creusé autour par le Jigoku, mais ont été traumatisés par des rencontres
du bois en entonnant des chants sacrés et en agitant des avec les humains. En conséquence, ils créent des illusions
ag e e nusa pour purifier le sol. Sur leur chemin, des qui dirigent ces derniers vers des dangers, ou bien ils
paires de statues de komainu, des chiens-lions dont les attaquent directement. Les shugenja du Clan du Phénix
regards sont orientés dans différentes directions, montent ont tenté d’apaiser ces esprits amers, sans succès, et ils
la garde. Lorsque les prêtres approchent, les gardiens n’ont même pas réussi à obtenir que les kamis expliquent
grognent, avant de reconnaître leurs alliés et de se taire. leur rancœur. Mori Kuroi est l’exemple parfait de ce qui
Certains komainu sont brisés, et l’esprit qui les habitait a arrive lorsqu’une forêt est maltraitée. Tous les espaces boi-
disparu. Ces points faibles dans la défense sont consolidés sés, du Cœur de la Vigilance exploité pour ses arbres à la
avec des talismans mineurs qui doivent être remplacés dès douce forêt Osari, peuvent se transformer en des éten-
qu’ils sont activés par un intrus. dues inhospitalières.

un message urgent
J’ai besoin qu’un rituel de purification soit accompli immédiatement à la ferme Tsukuda. Nous habitons à moins
de deux kilomètres de la forêt du Rêveur, et je suis persuadée que quelque chose a su contourner les talis-
mans. Tard dans la nuit, mon mari et moi avons été réveillés par des grattements à la porte. Pendant qu’il allait
voir, je me suis rendormie. Le matin suivant, il était assis sur le lit à mon réveil et lorsqu’il m’a regardée… je ne
saurais pas le décrire. Je sais à quoi ressemble un cadavre, j’ai aidé à préparer le corps de mon père avant sa
crémation. De temps à autre, la chose qui a pris l’apparence de mon mari fait passer de l’air dans sa gorge et
me demande mon nom. Je ne lui ai pas parlé. Si je me déplace, elle me suit. Je vous en prie, ne renvoyez pas
ma fille à la maison après qu’elle vous a donné cette lettre. Pas tant que nous ne saurons pas ce qui a pris la
place de mon mari.

212
la forêt de shinomen les ragots d’une
Plus vaste que certains territoires de clans majeurs, la forêt
de Shinomen est une mer d’arbres qui englobe plusieurs
forêt primaire
écosystèmes. Ce géant, ancien et invincible, n’a jamais
permis à l’humanité d’empiéter sur son domaine au cours $ Le repaire des tueurs de la forêt se trouve
de sa longue histoire. Elle a observé la montée en puis- dans la forêt de Shinomen.
sance et le déclin des Cinq Races antiques, a vu les kamis $ Un village entier apparaît parfois à l’orée de
tomber de leur trône céleste et assistera probablement à la forêt. Ses habitants sont toujours en train
la déchéance de l’Empire d’Émeraude. Shinomen est la de célébrer un festival. Ils portent des vête-
nature incarnée, sauvage et indomptable. Si les Rokugani ments démodés et pensent être en 735. Il
ne se méfient pas, elle pourrait les engloutir. est inutile de tenter de les convaincre du
À l’intérieur de la forêt, les tours délabrées d’une civi- contraire. Selon plusieurs récits, ils revivent
lisation inconnue survivent dans un silence surnaturel, leur sans cesse la même nuit et ne se rappellent
taille pourtant massive rendue ridicule par les arbres alen- jamais de rencontres précédentes.
tour. Tout est sombre, même à midi. Nul souffle de vent ne
se fait entendre, nul bruissement de feuilles. L’air est immo- $ Des sorcières des marais attirent les voya-
bile, piégé entre les troncs et lourd de l’odeur prégnante geurs en leur faisant apparaître des illusions
de la pourriture. Des arbres anciens croissent au-delà des d’auberges, jusqu’à ce qu’ils meurent.
attentes propres à leur espèce : ce sont des géants parmi $ Des okuri inu errent dans la forêt. Si vous
les géants. L’ambiance change soudainement dans la forêt, êtes suivi par un grand chien noir, prenez
indifférente à la présence des mortels qui se promènent garde à ne pas trébucher. S’il vous voit
sous les frondaisons comme des fourmis. Shinomen n’est tomber, l’esprit vous tuera. Pour éviter
pas un endroit malveillant, elle ne cherche pas à piéger les un tel sort, prétendez que votre chute est
visiteurs. Elle agit simplement comme bon lui semble, sans intentionnelle, criez par exemple « Je suis
se soucier des besoins des humains. tellement fatigué que je vais me coucher
Parmi les nombreux animaux et esprits qui y vivent, un instant » ou faites passer votre mala-
une seule créature défie toute catégorisation. Le peuple dresse pour un pas de danse.
rat, appelé nezumi par les rares Rokugani qui admettent
n e i en e ne ai ar ie ni de e ri d hi h -d
ni du règne animal. Les nezumi marchent comme des
humains, mais ont leurs propres culture et langage. Leur
vie est courte, mais leur mémoire collective, conservée par
les Mémoriels, est plus ancienne que l’humanité.

Un peu de géographie
Aux confins orientaux de la forêt de Shinomen, le sol est
composé d’une pierre noire poreuse, les résidus de l’érup-
tion du Toit du Monde. Cette roche accueille les racines
de la ciguë, qui s’y enfoncent profondément, tandis que
les épines desséchées se concentrent dans les crevasses,
où elles forment une gelée pourrissante. Au crépuscule,
de nombreux onibi, des globes de feu bleu, flottent
au-dessus du sol.
Vers l’ouest, le terrain devient meuble et accueille
des arbres à larges feuilles. Les érables sont de mauvais
augure : leurs magnifiques feuilles rouges sont appréciées
à l’automne, mais le reste du temps leur couleur sanglante
constitue un mauvais présage. Ils partagent l’espace avec
des clairières et des marais recouverts de lis.
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

Plus au nord, les plaines se transforment en collines et les


R G A ruisseaux deviennent des cascades qui jalonnent le paysage.
AN N Les arbres sont en grande majorité des conifères, et le sol est ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  1 2
R N jonché de leurs énormes cônes. Durant l’hiver, le vent froid et
N N Iht-zyk est une nezumi, une espèce de rats humanoïdes que
mordant du nord emmène avec lui une fine couche de neige.
les Rokugani croisent parfois dans la forêt de Shinomen et,
Découvrir une mare gelée en été ou libre de toute glace en
NE JAMAIS ouvrir la porte selon certains, dans l’Outremonde. Enfant, elle a appris
après la nuit tombée. PAS plein hiver est annonciateur de la présence d’esprits. les leçons des Mémoriels de la tribu de l’Oreille Fendue :
d’exception. Le sud offre une incroyable variété d’arbres fruitiers, et « Une plante mobile est affamée », « Lorsqu’un esprit parle,
notamment des pommiers, des pruniers et des cerisiers, il suffit de sourire et d’acquiescer », « Les humains pro-
Avant la pleine lune,
qui entraînent les visiteurs à leur perte. En effet, la légende gressent en âge, mais rarement en sagesse » et ainsi de
répandre des graines de
soja grillées et répéter AU prétend que les mortels qui mangent les fruits des esprits suite. Grâce à ces savoirs, elle est devenue une cueilleuse
MOINS vingt fois : « Les ne pourront plus jamais quitter la forêt. D’énormes cam- habile mais, après avoir rencontré des étrangers, elle a
démons à l’extérieur, la phriers montent la garde : ils s’élèvent aussi haut que des développé d’autres ambitions.
chance à l’intérieur ». châteaux et la taille de leurs branches basses permet d’y En mission le long de la frontière est de la forêt, elle
TOUJOURS porter son
construire des maisons. s’est approchée d’un camp de bûcherons du Clan du
talisman omamori À la frontière est de Shinomen, l’écrin infini de verdure Crabe. Pour son plus grand plaisir, les humains se sont
au travail. est vicié par une zone sombre. Les marais Souillés forment avérés aussi curieux d’elle que l’inverse. Incapables de
une blessure purulente, un bassin de boue noirâtre où se parler, ils ont pris un repas ensemble et, au cours des
Si la fille sans yeux jours suivants, Iht-zyk les a remerciés en leur apportant
revient à la fenêtre, lui
baignent des cyprès ou des palétuviers aux racines-échasses.
Les marais sont en réalité un charnier, depuis que les gar- des noix sauvages. Rares sont les membres de la tri-
jeter du sel.
diens serpents ont battu, des siècles auparavant, une armée bu de l’Oreille Fendue qui connaissent la langue des
S’assurer que les bénédic-
de l’Outremonde qui avait eu la maladresse de les réveiller. humains, mais elle a trouvé un ancien qui a accepté de
tions ofuda sont à jour et la lui enseigner.
Leurs âmes Souillées se tortillent dans la boue, corrompant
qu’un papier est placé sur
le plafond, sur la porte et les créatures et les esprits des alentours.
sur CHAQUE mur.

NE JAMAIS CARESSER
LES ANIMAUX DOCILES.

Si un arbre n’était pas idée d’aventure : des enfants égarés


là la veille, NE PAS
Y TOUCHER.
Accroche Les PJ font l’erreur de tenter de traverser la forêt de Shinomen. Alors qu’ils avancent parmi les
NE PAS MANGER DE arbres, leur chemin se trouve soudainement bloqué par un cyprès qui semble s’être déplacé. En regardant aux
FRUITS CUEILLIS DANS alen r il r ali en e le a age a hang il n ran hi le Sen e d rien e n re r
LA FORÊT. dans les marais Souillés.

Développement Alors que les PJ s’habituent à leur nouvel environnement, ils entendent des voix appeler
au secours. Une nezumi sort de la mangrove, deux petits sur son dos. Dans un rokugani approximatif, elle
demande au groupe de bien vouloir l’aider à retrouver son troisième bébé. En retour, elle reconduira les PJ à
la frontière de Shinomen. Sans l’aide d’Iht-zyk, leur voyage serait long et difficile. Grâce à elle, ils éviteront les
vignes fudoshi étrangleuses, les anguilles tsumunagi venimeuses et les fantômes nukarumi Souillés. La piste
laissée par le souriceau les mène jusqu’à une scène tumultueuse : des gobelins encerclent une butte de boue
surmontée d’un pommier en fleurs, autour du tronc duquel un cerf éthéré est lancé dans une course folle. Le
petit nezumi se trouve quant à lui dans les branches de l’arbre.

三 Paroxysme Les PJ peuvent rejoindre le cerf pour défendre le bébé. S’ils échouent, ce dernier tombe de
l’arbre avant d’être emporté dans la forêt par le kami. Iht-zyk est rassurée que son enfant soit protégé par un
esprit bienveillant, et elle décide de continuer seule ses recherches. Malgré l’échec des PJ, elle les reconduit
à l’orée de Shinomen. Si les PJ vainquent les gobelins, le cerf s’éloigne pour permettre à Iht-zyk de récupérer
son bébé. Non seulement elle ramène les PJ à la lisière de la forêt, mais elle parle aussi de leur héroïsme aux
siens, ce qui leur vaudra des alliés au sein de la tribu de l’Oreille Fendue.

214
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Au cours de ses études, elle a trouvé l’amour et,


peu après, elle a eu une portée. La nature affectueuse un rapport de la
d’Iht-zyk ne concerne pas juste sa famille, mais bien toutes
les créatures intelligentes non Souillées. Elle se montre tour de garde
immédiatement amicale et elle craint plus pour la sécu-
rité des autres que pour la sienne. Si elle remarque que
de shinomen
quelqu’un est blessé, elle s’occupera de la personne Sire,
et tentera d’apaiser toute anxiété apparente par des Je vous écris pour vous faire part de mes
caresses. Même si elle semble trop gentille, elle est douée inquiétudes. Une patrouille a récemment décou-
pour la survie et s’avère une bonne guide. vert des ruines inhabituelles à Shinomen Mori.
Les tours étroites surmontées d’un dôme dif-
SOCIÉTAL PERSONNEL
fèrent de ce que les soldats connaissent. Les
25 HONNEUR ENDURANCE
12 structures, enfouies sous la végétation et en
3 2 partie enfoncées dans le sol, semblent très
10 GLOIRE SANG-FROID
10 anciennes. Construites entièrement en pierre,
2 3 elles ont supporté le passage des ans. Elles
05 STATUT 1 ATTENTION
6 sont décorées de manière criarde, et de nom-
breuses sculptures dépeignent des créatures
+2, –2
ATTITUDE : MATERNEL
VIGILANCE
5 entre l’homme et le serpent. Pire, la structure
centrale semble être une sorte de temple, dans
lequel mes hommes ont trouvé des représenta-
ARTISANAL 0 MARTIAL 0 SAVANT 2 SOCIAL 3 PRO. 4
tions blasphématoires de Dame Soleil.
AVANTAGES DÉSAVANTAGES J’ai entendu parler d’un Clan du Serpent qui
aurait été éradiqué il y a des siècles pour son
r te e ti e i i it comportement déshonorable et sacrilège, mais
 professionnel ; mental  social ; relations je ne peux pas croire que ces édifices aient été
construits par des Rokugani. De plus, les lieux
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS
ont l’air plus anciens. Je ne peux pas en être
Gri es : portée 0-1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 2 ; Acéré certain, mais je pense que ces ruines sont plus
vieilles que notre glorieux Empire. Elles me rap-
e ts : portée 0 ; dégâts 4 ; Dangerosité 3 ; Entrave
pellent les contes que nos ancêtres ont ramenés
i e e t rt ) : vêtements confortables, panier de des pays étrangers.
noix et de baies Aussi intrigants que soient ces vestiges, je
ne fais ce rapport qu’en raison d’un fait sup-
CAPACITÉS plémentaire, qui me pousse à craindre une
NNA AN A R menace. À l’intérieur des ruines (même si les
éclaireurs ont hésité à s’y enfoncer trop pro-
Une fois par session de jeu, au prix d’une activité de temps
fondément), des coquilles d’œufs d’une taille
mort, Iht-zyk peut partager avec les personnages une par-
considérable ont été découvertes. Similaires à
tie de la sagesse de la tribu de l’Oreille Fendue. Ceux
des œufs de serpents, elles mesuraient jusqu’à
qui choisissent de l’écouter et d’appliquer ses conseils
deux shaku à leur point le plus large, ce qui
peuvent sacrifier 1 point d’Honneur pour diminuer de 1
est bien supérieur à la taille des œufs de toute
le ND des tests destinés à identifier ou à éviter les dan-
espèce connue. Selon toute vraisemblance,
gers naturels ou spirituels de la forêt de Shinomen, et ce,
ils venaient d’éclore. La présence de serpents
jusqu’à la fin de la session de jeu.
d’une telle taille au sein de Shinomen Mori
N N N serait, en soi, alarmante. Pourtant, ces œufs,
Quand Iht-zyk effectue un test pour se cacher, grimper ajoutés à l’architecture inconnue et aux déco-
quelque part ou se déplacer silencieusement, elle ajoute rations inquiétantes, me poussent à envisager
3 succès bonus à son résultat ou diminue son degré des possibilités plus sombres encore.
d’échec de 3 points (jusqu’à un minimum de 0). À votre service,
Shinjo Kazue

215
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

Les ruines
sages et hermétiques, d’êtres anciens. Malgré leur fonc-
tion, les tumulus ne sont pas maléfiques : les morts y
dorment paisiblement et ne se réveillent que s’ils sont
Les ruines ne meurent jamais totalement. Elles conservent dérangés ou si des présents leur sont offerts. Cependant,
le souvenir de leur passé ainsi que l’angoisse de leur rares sont les tumulus qui existent encore, puisque la plu-
décrépitude. De tels souvenirs forgent leur personnalité. part ont été profanés par Iuchiban lors de sa guerre contre
Les vestiges en pierre, résidus de châteaux ou de Rokugan, ou par les Adeptes du sang qui marchent sur ses
demeures nobles, restent droits malgré l’absence d’entre- traces depuis.
tien. Les murs qui s’écroulent constituent des points de Les esprits de certaines ruines, telles que des villages
repère pour les voyageurs, et des abris en cas de vent ou perdus, attendent simplement une offrande : du riz, un
de pluie. Un hameau peut s’installer autour, redonnant fruit, du saké, des graines de fleur ou d’arbre. D’autres se
ainsi vie à un ancien château. Les enfants jouent alors à montrent plus exigeants et obligent les humains à rester sur
l’ombre des vestiges, ramenant rires et animation dans les place, à leur donner du sang, ou pire encore, à enterrer les
salles désertées. De cette manière, la ruine jouit d’une cer- morts pour leur tenir compagnie, ce qui est interdit par un
taine reconnaissance et de respect, tout comme un vieil- édit impérial. Les vestiges oubliés se détachent du royaume
lard qui demeurerait assis sur la place du village, entouré des mortels et se comportent progressivement comme les
des habitants. royaumes spirituels. Les ruines bienveillantes se rapprochent
Les vestiges en bois pourrissent en une ou deux géné- d e-d e rennen n a e rr el e an a i e
rations : la végétation reprend ses droits et ils finissent par- d hi h -d e de iennen a age e l rian e i
fois oubliés. Les temples et sanctuaires en bois acceptent bien que la faune y trouve refuge. Les ruines contrariées par
la mort en toute quiétude, un peu comme les prêtres et leur destin rejoignent plutôt le Sakkaku et jouent des tours
moines qui s’occupaient d’eux. En général, des arbres aux voyageurs en modifiant le paysage. Cependant, la plu-
majestueux y poussent, puisque le bois nourrit le bois, ce ar her hen en rer a a i-d a in d’a ar enir ne
qui alimente le cycle de la vie. Les voyageurs évoquent famille, à un clan. Mais les endroits désertés et affamés ne
souvent la sérénité ressentie sans réaliser que les sites sont s’en contentent pas et aspirent, parfois littéralement, la vie
nés de l’activité humaine, tellement la nature et la trace de et l’énergie des mortels de passage.
l'homme se confondent en ces lieux oubliés. Les offrandes modestes apaisent généralement les
Les ruines les plus vieilles sont en général des struc- ruines bienveillantes, voire les poussent à accorder de
tures rudimentaires en terre battue ou des tumulus, diffi- petites faveurs en retour, mais si les présents cessent, les
ciles à distinguer des reliefs naturels. Ces vestiges repré- mauvais comportements reprennent et augmentent pro-
sentent souvent les aspirations subtiles et insondables, gressivement en intensité. Au fil du temps, s’ils jouissent
d’une attention continue, des lieux abandonnés peuvent
s’endormir, satisfaits. Parfois, quelqu’un viendra construire
un nouveau bâtiment sur des ruines apaisées et intégrera
l’esprit et sa personnalité dans son édifice. Les architectes
doivent pourtant se montrer prudents : les anciens vestiges
réhabilités pourraient continuer de poser des problèmes.
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Tout bon architecte envoie un prêtre ou un moine avec les villageois, ou encore découvrir une richesse sus-
effectuer une purification, à base de sel consacré ou d’eau ceptible de lui faire atteindre un statut plus élevé, voire
bénite, avant de commencer la construction, ainsi qu’une des titres sur des terres et villages. Si les ruines ont gardé
bénédiction à l’achèvement des travaux. Des rubans spiri- leurs souvenirs, elles peuvent révéler leurs secrets, et un
tuels, des talismans en bois ou des bourses en tissu conte- clan qui les néglige découvrira probablement tôt ou tard
nant des prières écrites sur des morceaux de papier sont que son histoire a été divulguée à ses ennemis.
alors suspendus à toutes les entrées et sorties. Une ruine hantée peut menacer les heimin et seule
Les heimin évitent les ruines, lieux de terreur et de tragé- l’intervention d’une personne à la volonté forte et à l’es-
die. Pourtant, les gens du peuple racontent de nombreuses prit solide saura apaiser les kamis. La personnalité de la
histoires, aussi fictives que réelles, qui s’y rapportent. Un ruine peut lentement infecter les bourgades alentour.
voyageur avisé peut faire le tri et découvrir la vérité dans Dans de tels cas, un village de travailleurs deviendra une
les rumeurs, d’autant que tout le monde connaît quelqu’un région chaotique et une forêt docile un domaine hanté.
qui a rencontré une fortune kitsune. Parmi les récits les plus Des membres de sectes hérétiques, attirés par le pouvoir
tragiques, certains ont pour origine une histoire vraie : la surnaturel, peuvent accélérer la déchéance des lieux dans
disparition de membres d’une famille ou d’amis, la trans- l’anarchie et la corruption.
formation de proches après un voyage, l’apparition sou- Certains samouraïs, en quête de réponses ésoté-
daine de signes de dépression, de manies ou de visions... riques ou spirituelles, visitent des ruines car elles jouissent
Ces événements peuvent tous être les conséquences d’une d’un lien avec les royaumes des esprits et peuvent donc
activité surnaturelle. être source de connaissances. De nombreux contes fan-
tastiques mentionnent la découverte de vestiges perdus
explorer les décombres par des voyageurs, qui reçoivent alors une prophétie des
kamis qui y vivent. Même sans présence spirituelle, des
Les clans ne considèrent pas les ruines à la légère. Il est lieux abandonnés peuvent inspirer la sagesse. Toute enti-
en effet possible d’y exploiter des ressources, et parfois té est vouée à mourir et une ruine, endroit mort, détruit et
nécessaire d’en contenir les dangers. Si les gravats d’un oublié, constitue ainsi une destination idéale pour contem-
bâtiment peuvent se souvenir de leur passé et qu’un pler la nature éphémère de l’humanité.
prêtre parvient à conclure un marché avec l’esprit local, les
vestiges peuvent partager leurs connaissances. Si le kami
est contrôlé, en général en construisant un sanctuaire sur
les occupants
les lieux, les habitants des alentours bénéficient d’un gar- La faune de Rokugan se niche dans les ruines pour se
dien. Les clans placent souvent des reliques et des trésors cacher de l’humanité. Même dans les lieux hantés, les ani-
de grande importance dans de tels sanctuaires. maux coexistent paisiblement avec les esprits, à moins que
Les ruines peuvent retenir l’attention pour des raisons ces derniers ne ressentent une faim, une rage ou une dou-
plus banales. Si l’histoire d’un clan se devine aux murs leur intense, ce qui peut arriver dans les endroits qui s’ap-
solides d’un bâtiment prospère, le désespoir d’un autre se r hen dangere e en d hig ar e e le
lit dans les gravats. Le Clan de la Grue considère les lieux Dans un tel cas, un voyageur avisé remarquera l’attitude
abandonnés comme des taches sur son territoire parfaite- étrange de la faune, liée à l’influence des kamis : les créa-
ment entretenu, à nettoyer et purifier dès que possible. tures douces deviennent belliqueuses, les bêtes agressives
Le Clan du Lion estime qu’ils sont des symboles d’échec. se comportent comme si elles suivaient des ordres ou, au
Le Clan du Crabe y voit un affront à ses prouesses archi- contraire, les animaux tentent de prévenir l’importun ou de
tecturales. Le Clan du Dragon, toujours différent, juge le ramener vers des zones plus sûres.
que les ruines sont des lieux de pouvoir brut et cherche Très rarement, un troll ou un autre monstre s’est instal-
à canaliser les esprits qui y vivent pour qu’ils servent le lé dans des ruines hantées, ou du moins dans des endroits
clan. Contrôler des étendues sauvages où lever sa ban- qui ont la réputation de l’être, attiré par la tranquillité et
nière et rendre à des pans de murs leur splendeur passée l’isolement de l’humanité qu’elles fournissent. Parfois,
sont autant d’accomplissements qui prouvent l’importance un troll reconstruit certaines parties des lieux pour créer
de l’histoire pour ce clan. Les entreprises de restauration un labyrinthe, des impasses et des passages secrets qui
deviennent alors un moyen d’éviter une lente déchéance lui donnent un avantage pour se cacher ou attaquer les
vers l’obsolescence et de promouvoir un nouvel élan d’or- intrus. Une bonne connaissance de la culture troll permet
gueil collectif. de remarquer un motif récurrent dans les dédales : des
Il ne faut pas non plus oublier que de tels endroits cercles concentriques, similaires à ceux qui ornaient les
peuvent abriter des trésors perdus, que ce soit des docu- anciennes cités de ces créatures.
ments, des bijoux, des métaux précieux, des armes, des Les naga sont tout aussi rares. Leurs repaires et leurs
bannières, des sceaux ou tout autre symbole de la fierté cités sont très bien cachés. Le temps n’a pas épargné
familiale. Ils peuvent contenir des preuves sur l’héritage leurs villes, et il arrive que des humains tombent sur ce
d’un samouraï, en termes de terres, de trésors ou de qu’il en reste sans s’en apercevoir. De manière générale,
lignée, jusque-là inconnus. Un guerrier peut ainsi mettre les piliers, arches et murs étaient taillés à même la pierre
au jour un nouveau pan de sa famille grâce à un arbre des montagnes ou des falaises et sont décorés de gra-
généalogique, retrouver des cousins ignorés qui vivent vures complexes représentant des motifs géométriques

217
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

et des illustrations de la vie quotidienne ou du soleil, de la La parcelle de terrain autrefois occupée par le temple
lune et des étoiles. Comme les structures sont dépourvues est plutôt vide : seules demeurent quelques poutres en
d’escaliers ou de tout moyen visible d’accéder aux niveaux bois qui attestent de l’incendie. Les villageois ont placé
supérieurs, les humains considèrent généralement qu’elles des pierres autour, en signe de respect et pour s’assurer
n’ont qu’un seul étage. Tout naga éveillé pourra alors faci- que l’esprit ne les perturbe pas. Parfois, ils installent aus-
lement éviter de se faire repérer en empruntant les spirales si une chaise ou un tatami au centre, mais, la plupart du
taillées dans les colonnes ou les saillies sur les murs. temps, ils n’ont pas le courage de traverser la limite des
pierres, sous prétexte que l’odeur de bois brûlé les incom-

le temple du mode, qu’ils entendent des chants inquiétants ou des mur-

moine brûlé
mures qui corroborent leurs pires angoisses, ou encore
qu’ils sont assaillis par des visions de ténèbres et de feu.
Les dirigeants du Clan du Dragon ont des avis parta-
À Nanashi Mura, un village de ronin à la frontière du Clan
gés sur ce temple en ruines. Un valeureux bushi a disparu,
du Dragon, les guerriers tourmentés par un trouble inté-
mais un autre, après avoir passé une nuit sur place, a mené
rieur testent parfois leur robustesse et leur discipline en
une bande de ronin à prêter allégeance au clan. Bien que
allan di er ne n i dan le r ine de e a Shūd -Shi
les discussions à propos des ruines, et de Nanashi Mura en
no Jiin, le temple du Moine brûlé. Voilà bien longtemps,
général, tournent autour de deux positions (raser le village
un moine refusa de se rendre face à une bande de bri-
ou le ramener officiellement sous la bannière du clan), la
gands, qui incendia le temple où il se trouvait. L’homme
direction du clan, dans l’impasse, ne semble pas prête à
demeura assis, sans émettre le moindre son, alors que le
purifier, reconstruire ou raser les lieux.
bâtiment brûlait. Les bandits, leur soif de sang rassasiée,
partirent sans piller le reste du village. Quand les villageois
allèrent nettoyer les ruines, ils crurent que le gardien était Kaiu « Shibito » Tsuneko
encore en vie. Couvert de suie, il arborait un sourire béat,
mais dès que quelqu’un le toucha, il se réduisit en cendres. KaiuRANG
ANTAGONISTE « Shibito » Tsuneko
DE CONFRONTATION 2 3
La légende affirme de plus que les lieux sentaient les fleurs Tout le poids de son histoire familiale pèse sur les épaules de
plutôt que la fumée. Kaiu Tsuneko. Ses travaux ne se fondaient pas dans le moule
L’histoire se répandit, et une ronin décida qu’elle pouvait et, pour confirmer ses décisions de conception, elle a mené
se montrer tout aussi brave que le moine, ce qui lança une des recherches non seulement sur l’évolution de l’architec-
tradition parmi les samouraïs sans maître de Nanashi Mura. ture Kaiu, mais aussi sur les constructions des civilisations
Lorsqu’un guerrier doit prouver qu’il possède la discipline antérieures à l’humanité. Chaque découverte alimentait son
nécessaire pour servir et la maîtrise de soi indispensable envie de trouver des édifices plus anciens et plus étranges, et
pour suivre des ordres, il va méditer une nuit dans les ruines elle a rapidement abandonné la vocation familiale
du temple. La plupart des ronin ne rencontrent personne, pour se tourner plutôt vers la quête de
mais en sortent plus calmes. Certains croisent le fantôme ruines et de bâtiments anciens.
du moine et renouvellent leur dévouement à l’Illumination.
Rares sont ceux qui fuient en hurlant : ces derniers tombent
en disgrâce et disparaissent. La première ronin entrée dans
le temple retrouva, après en être sortie, un sens à sa vie. Elle
se rebaptisa Hasu, se rasa le crâne et voyagea dans tout
l’Empire pour combattre les bandits et les esprits, ainsi
que pour aider les démunis et les opprimés.

218
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Auparavant simplement consumée par son désir de


révéler des techniques de construction secrètes, elle a vu idée d’aventure :
sa chance et sa santé décliner après une rencontre près de
Morikage Toshi. Elle refuse d’en parler sous peine de châti- la corruption
ment surnaturel. Les siens l’ont désavouée et ont effacé son
nom des archives, mais certains d’entre eux souhaitent la
de sakura
ramener dans le giron familial et la guérir de ses fantasmes.
Peut-être qu’elle se berce d’illusions, mais peut-être Accroche Une samouraï disparue du Clan
a-t-elle simplement trouvé l’inspiration… « Shibito », comme de la Grue, Kakita Sakura, a été aperçue sur les
les villageois l’appellent (et elle répond à ses deux prénoms), terres du Clan du Dragon. Autrefois raffinée et
pense que les morts se remémorent des détails qu’elle altière, elle a soudainement changé et hurle, jure
recherche à propos des constructions anciennes. Elle passe et montre ses émotions en public, tout en refu-
donc plus de temps avec eux qu’avec les vivants. Elle semble sant de retourner auprès de sa famille. Le Clan
pâle et émaciée, ses cheveux sont longs et emmêlés et, à du Dragon cherche à comprendre les raisons de
moins qu'elle ne trouve des offrandes dans un sanctuaire, ce mystérieux bouleversement. Le seigneur de
elle oublie fréquemment de manger ou de boire. Sakura, lui, pense qu’elle est possédée par un
Peu intéressée par les affaires des mortels, Shibito se esprit et demande à ce qu’elle revienne pour
parle souvent à elle-même ou, comme elle le prétend, aux être purifiée.
esprits. Elle demeure une érudite, et il est possible d’en- Développement S’ils interrogent les pay-
gager une conversation avec elle, à condition de connaître sans de Nanashi Mura, les PJ découvrent que
des éléments passionnants sur les kamis, l’architecture, Kakita Sakura a passé une nuit dans le temple
l’histoire ou les arts. du Moine brûlé, pour prouver sa bravoure. Sur
les ruines du temple, ils rencontrent Shibito,
SOCIÉTAL PERSONNEL
l’étrange architecte Kaiu, qui ne répondra à
30 HONNEUR ENDURANCE
14 leurs questions sur Sakura que s’ils acceptent
4 1 de rester une nuit sur place. Les PJ seront assail-
40 GLOIRE SANG-FROID
14 lis jusqu’au matin par des visions terribles mais,
3 3 comme promis, Shibito leur raconte qu’elle peut
35 STATUT 2 ATTENTION
4 attester de la pureté de Sakura et qu’elle est
certaine que la samouraï en vadrouille a atteint
+2, –2
ATTITUDE : DÉTACHÉ
VIGILANCE
2 l’Illumination au temple. Shibito les envoie
ensuite vers le village de Musume Mura, sur les
ARTISANAL 4 MARTIAL 1 SAVANT 3 SOCIAL 1 PRO. 3 terres du Clan de la Grue.
三 Paroxysme Les PJ rencontrent Sakura en
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
train d’initier discrètement des paysans au com-
e rets erstiti bat, tout en leur enseignant les préceptes de la
 social ; relations  savant ; mental secte de la Terre Parfaite. Les PJ doivent donc
décider si sa mort est nécessaire pour empê-
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS cher une révolte, si elle peut être recrutée par le
Clan du Dragon, si elle doit retourner auprès du
i s i : portée 0-1 ; dégâts 3 ; Dangerosité 5/7 ; Acé-
Clan de la Grue ou si elle a véritablement atteint
ré, Cérémoniel
l’Illumination.
i e e t rt ) : vêtements de voyage en lambeaux,
nécessaire de calligraphie, sacoche à parchemins, bourse
d’offrandes

CAPACITÉS

A AR A
Lorsque Shibito effectue un test en lien avec les esprits,
elle peut recevoir 3 points de Conflit pour lancer un
supplémentaire et garder 1 dé supplémentaire, comme si
elle avait dépensé 1 point de Vide.

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C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

wasureta mura, le les murmures


village oublié des esprits
Entre Shinomen Mori et les montagnes du Crépuscule, dans
la vallée des Esprits, un village abandonné depuis long-
$ La nuit, quiconque voit des flammes dans
temps appelle les habitants du hameau voisin pour qu’ils y
les ruines ou à l’orée de la forêt ferait
déménagent. Certains parlent d’une belle personne qui les
mieux de s’enfuir.
aurait invités d’un geste à venir prendre le thé. Les parents
qui cherchent leurs bambins perdus aperçoivent une sil- $ Apporter des jouets en offrande au village
houette enfantine courir dans les bois. D’autres villageois améliore le karma.
entrevoient leurs amis morts depuis longtemps leur faire $ Les offrandes lient les esprits plus solide-
signe de les rejoindre dans la forêt. Ces visions sont toutes ment à ce monde, ce qui ne joue pas en la
les esprits de Wasureta Mura, le village Oublié. faveur de celui qui les présente.
Les histoires relatives à l’abandon du village men-
tionnent un incendie, des bandits ou une malédiction, mais
personne n’a tenté de découvrir la vérité. « Il est toujours
plus facile d’éviter les problèmes en ne les cherchant pas », Certains prêtres pensent que les bourgades proches
comme l'affirme un proverbe local. Pourtant, des gens dis- contiennent des matériaux provenant de Wasureta Mura, ce
paraissent dans la vallée des Esprits, surtout ceux dont le qui invite les esprits et explique les cauchemars des habi-
cœur est lourd. Les passants déçus de ce que la vie leur offre tants. Un simple rituel de purification remédierait au pro-
ou qui ne se sentent pas à leur place entendent Wasureta blème, mais les propriétaires défendent leur demeure avec
Mura plus clairement que les autres, et de manière plus ferveur, clamant haut et fort que leurs ancêtres leur parlent.
audible encore dès qu’ils avancent dans la forêt. Certains villageois ignorants sacrifient une personne
Au contraire, les hommes et femmes qui éprouvent de par année au village Oublié. La plupart du temps, ils se
forts liens avec les vivants, qui sont heureux de leur exis- contentent d’y envoyer des « volontaires », mais la pression
tence, qui s’avèrent passionnés par quelque chose ou qui sociale pour que ces derniers se manifestent s’avère terrible.
ont un objectif auront du mal à découvrir le village : leur Certains villages ont connu des guerres internes pour choi-
lien avec les mortels ne leur permet pas de ressentir ou de sir une offrande réticente. Quelques-uns, plus rares
voir les ruines. La tâche de ceux qui aimeraient chasser les encore, pratiquent les sacrifices avec trop de zèle, ce
esprits s’en trouve ainsi compliquée, puisque leur détermi- i ren r e le r a ia i n n ri el de ah
nation les empêche de dénicher les lieux. La pression sociale empire encore si Wasureta
Les samouraïs qui ont déjà subi une grave blessure, Mura refuse le sacrifice de la personne dési-
qui ont perdu un être cher ou qui avouent leur fascination gnée. Sans domicile, elle serait confron-
pour la mort entendent le village même s’ils sont passion- tée, si elle décidait de rentrer au village,
nés par ailleurs. Trouver facilement Wasureta Mura signifie à la violence des habitants pour avoir
aussi avoir du mal à en repartir. Quelques bushi bien inten- échoué dans l’accomplissement de
tionnés ont tenté de purifier le hameau, et certains n’en son devoir. Lorsqu’elle sombre
sont jamais revenus, frappés par la morosité dont les lieux dans le désespoir, Wasureta
se nourrissent. D’autres affirment avoir vu le village du coin Mura l’accepte enfin parmi
de l’œil et entendu des murmures à peine audibles. ses âmes perdues.
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Kasai, troll morose CAPACITÉS

AN N AN
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  8 4 Kasai est une créature Extérieure de gabarit 4.
Ce troll, qui se fait appeler Kasai, a perdu tant de membres RR A
de son peuple qu’il s’est retiré dans la vallée des Esprits
Dès que Kasai subit au moins 1 point de Fatigue, il reçoit
pour s’éloigner des humains. Il porte les cicatrices phy-
1 point de Conflit. Lorsque son nombre de points de Conflit
siques et émotionnelles des siècles passés à regarder les
dépasse la moitié de son Sang-froid, il subit l’état Enragé.
siens disparaître dans l’Outremonde, morts de causes
naturelles ou tombés sous les coups des mortels. Kasai R R N A
est grand, mais voûté par l’âge ; chaque balafre de son Kasai ne peut pas subir les états Hors de combat ou
corps ou de ses grands bras maigres raconte une histoire, Inconscient tant qu’il est Enragé.
une leçon retenue de trahison et de violence de la part
AG R
des Rokugani.
Pourtant, malgré sa misanthropie, il refuse de tuer Au prix d’une activité de temps mort, Kasai peut partager
des humains de sang-froid. Dans la vallée des Esprits, il d’anciens secrets avec des personnages qui gagnent sa
attaque les intrus pour les repousser : il s’habille en hail- confiance. Ceux qui l’écoutent peuvent acquérir la tech-
lons et se fait passer pour un esprit. Il hurle au plus fort de ni e de ih er le rag n d e an re lir le
la nuit pour faire fuir les voyageurs et, parfois, il laisse des conditions préalables normales.
carcasses pourrir sur les chemins, autant pour effrayer les
humains que pour les éloigner en raison de la puanteur. Il
se définit comme un animal instinctif, mais se comporte de idée d’aventure :
manière civilisée. Il conserve les parchemins et les livres
qu’il trouve sur les cadavres ou qui sont abandonnés par les braises d’un
des humains en fuite. Il récupère des pierres et des arbres
abattus pour construire des structures dans la forêt. Si
incendie
quelqu’un écoutait, la nuit, il pourrait entendre ses chants
gutturaux, terrifiants et solitaires, entonnés à voix basse. Accroche Une prêtresse locale s’est ren-
Il aimerait retrouver ses pairs, mais pour y parvenir, il due dans la vallée des Esprits pour ajouter des
devrait traverser les terres des humains. Sa haine pour leur rubans et des talismans spirituels et apaiser ain-
race s’oppose à la maîtrise de soi qu’il s’impose : il refuse si la forêt troublée, mais elle n’est pas revenue.
de se transformer en monstre et de se tailler un chemin Les villageois ont besoin d’elle pour bénir les
sanglant à travers l’Empire. Il reste donc seul. nouveau-nés et jouir de bonnes récoltes, mais
ils n’ont pas le courage d’entrer dans les bois.
SOCIÉTAL PERSONNEL
Développement Si les PJ suivent la piste
35 HONNEUR ENDURANCE
18 des talismans fraîchement installés, ils trouvent la
4 2 carcasse mutilée d’un cerf qui a attiré une meute
15 GLOIRE SANG-FROID
11 de loups affamés, un arbre hanté qui retient un
4 5 villageois perdu depuis plusieurs jours et, pour
05 STATUT 3 ATTENTION
4 finir, un troll qui les traque. Loin d’être une créa-
ture dénuée d’intelligence, il jaillit de trous dans
+2, –2
ATTITUDE : MOROSE
VIGILANCE
3 la terre pour attaquer les PJ, mais s’éloigne tou-
jours avant de les blesser gravement.
ARTISANAL 1 MARTIAL 3 SAVANT 6 SOCIAL 2 PRO. 2 三 Paroxysme Lorsque les PJ arrivent au bout
de la piste, ils retrouvent la prêtresse en bonne
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
santé à Wasureta Mura, mais elle refuse de ren-
r e r te essi is e trer avec eux. Même si elle a été enlevée par le
 martial ; physique  social ; relations troll, elle pense pouvoir le convertir au shintao
et apaiser ses douleurs. La colère et l’hostilité de
ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS la créature ne font que retarder son entreprise.
r e r i  : portée 2 ; dégâts 9 ; Dangerosité 5 ; Lorsque des mercenaires entrent dans la vallée
Encombrant pour tuer le « monstre », les PJ doivent faire la
part des choses entre la sécurité de la prêtresse,
i e ir te : portée 1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 6 le bien-être du troll et le risque bien réel d’une
violente rencontre entre le troll furieux et des
i e e t rt ) : lambeaux d’armure et épaisse peau
guerriers assoiffés de sang.
écailleuse (Résistance physique 2, Résistance surnatu-
relle 1), saké et parchemins volés

221
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

Les côtes
Les paysans recourent donc aux ordres de prêtres shin-
séistes ou des fortunes pour apaiser les esprits de l’eau
et de l’air. Puisque les tsunamis sont déclenchés par les
Pour faciliter l’agriculture, la pêche, le commerce et les tremblements de terre, ils leur demandent également de
voyages, les Rokugani ont bâti leurs villages, leurs villes calmer les kamis de la terre. La plupart des hameaux, trop
et leurs métropoles sur des sections de côte aisément petits pour être dotés de leur propre prêtre, vont en cher-
accessibles. Le reste du littoral, des falaises rocheuses aux cher un dans de plus grandes villes ou attendent un prêtre
rivages érodés, présente plus de risques que d’avantages itinérant. De nombreuses aventures ont pour point de
et demeure vierge de civilisation. Ces côtes représentent départ un villageois parti en quête d’une âme assez chari-
deux éléments en harmonie ou en conflit : la terre, solide table pour bénir la bourgade.
et constante, et l’eau, fluide et toujours en mouvement, se
combinent pour créer la vie ou provoquer la mort.
Les terres inhabitées du nord sont souvent escarpées,
l’eau et le sel
et les plages généralement rocailleuses. Les grands à-pics, Puisque les Maîtres Élémentaires appartiennent au Clan du
les violents souffles glacés et le rugissement de l’océan Phénix, ce dernier est moins frappé par les catastrophes
froid feraient trembler les plus stoïques des moines s’ils naturelles que les autres clans. Le savoir et l’expertise de
devaient se retrouver encerclés par les éléments déchaînés. ses shugenja permettent aux villages côtiers de profiter
Vers le sud, le littoral devient plus plat et agréable d’une sécurité relative face aux caprices des éléments. Les
grâce aux courants chauds. Avec leurs vents calmes, leur paysans du Clan du Phénix sont conscients de leur dépen-
climat tempéré et leurs plages sablonneuses, ces zones dance envers les prêtres, et lésinent moins que les autres
côtières incitent à la tranquillité, à la paix et à la contem- clans à accueillir et nourrir ces saints voyageurs. Les vil-
plation. Les champs du Soleil levant, dans la province lages côtiers sont également des producteurs de sel, et
Shinkyou, en sont la parfaite illustration, puisqu’ils sont ceux qui offrent le sel le plus pur ont une relation symbio-
consacrés à la non-violence. tique avec les prêtres, qui viennent le bénir en échange
Les îles de la Soie et des Épices incarnent tous les d’une portion pour leurs déplacements.
aspects de cette dualité. L’activité volcanique a créé des
falaises et des rivages inhospitaliers, mais le vent, les pré-
cipitations et l’eau ont érodé certaines plages, devenues
aussi belles que celles du Clan de la Grue. Vu le climat sub-
tropical des îles, la météo est généralement chaude, mais
la pluie et les typhons martèlent les côtes, et modifient leur
apparence d’une année, voire d’un mois, à l’autre.
Cette dualité se reflète aussi dans la manière dont les
paysans considèrent l’océan. La mer est une source de
vie : elle fournit du sel, du poisson, ainsi que des algues,
et nourrit les heimin comme les samouraïs. Des villages de
pêcheurs sont éparpillés sur la côte, permettant à un voya-
geur de se promener sans craindre la solitude, la faim ou
l’absence de refuge. Par contre, l’océan apporte aussi des
tsunamis et des typhons, qui laissent dans leur sillage la
destruction, la mort et la misère.
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

Les membres itinérants du clergé ne doivent toute- et les marins se nourrissent. Si elles sont bénéfiques, les
fois pas surestimer la gratitude d’un village. Rester trop requins, les pieuvres et les autres prédateurs des profon-
longtemps réduit les ressources nécessaires au hameau, deurs posent une menace constante pour les pêcheurs et
et la plupart des habitants n’ont besoin de bénédictions les plongeurs. Les légendes ne manquent pas à propos de
qu’en cas de problème, auquel cas l’argent et la nourri- représentants gigantesques de tels monstres qui auraient
ture manquent déjà sûrement. Les moines et les prêtres entraîné des navires entiers vers le fond des mers.
doivent également faire attention : si leurs bénédictions Les kamis de l’air ou de l’eau menacent également les
demeurent sans effet, ils pourraient se voir refuser le droit côtes. Le meilleur moyen de mettre un terme aux attaques
de revenir au village ou, pire encore, se faire attaquer par demeure de comprendre ce qui a offensé le kami respon-
des heimin affamés et en colère. Enfin, la demande en sable, mais il est parfois difficile de différencier une tem-
prêtres ou shugenja peut obliger les membres du clergé pête naturelle d’un esprit en colère. Une pieuvre géante
à voyager le long de la côte, où ils peuvent être pris pour peut se révéler être l’incarnation d’un kami. Les marins atta-
cible par des animaux, des bandits, des pirates ou des qués versent souvent du saké, du sel bénit ou du riz dans
créatures étranges tapies dans l’ombre. l’océan, tout en priant. De nombreux villages de pêcheurs
Les bourgades situées sur les terres du Clan de la Grue accueillent des sanctuaires où regrouper les offrandes.
sont plus vulnérables aux caprices de la nature, comme l’a Une bourgade qui prend soin de son kami bénéficie d’une
démontré le tsunami survenu il y a trois ans. Même pen- pêche abondante, d’une protection contre les éléments,
dant une année normale, un ouragan peut séparer une mais aussi d’un saint patron qui connaît des savoirs perdus
famille et des amis. Le territoire ne s’est toujours pas remis sur la côte ou qui repousse les pirates.
de la dévastation, et certains villages tombent en ruines, Les marins parlent également de créatures qui vivent
s’ils existent encore. Les réfugiés se sont enfoncés dans dans les profondeurs de l’océan. Ces êtres, mi-humains,
l’intérieur de l’Empire, regagnant les terres fertiles, et cer- mi-poissons, ne semblent pas être des esprits : les
taines tensions ont surgi entre les villages agricoles et les offrandes, bénédictions et prières ne retiennent pas leur
nouveaux venus. attention. Ils nagent derrière les bateaux et regardent les
Le déplacement de la population a perturbé la produc- marins se noyer, mais ne s’intéressent absolument pas aux
tion de nourriture, ce qui a diminué le montant des taxes marchandises. Les villageois rapportent avoir aperçu les
collectées. Le Conseil commercial Daidoji, un groupe d’in- mêmes créatures dans les eaux de l’intérieur des terres,
termédiaires formé des siècles plus tôt pour contrôler les notamment au lac aux Berges blanches, sur les terres du
affaires économiques du Clan de la Grue, a aidé à rétablir Clan de la Licorne. D’après certains récits, il s’agirait de
le commerce après la catastrophe. Par contre, le Conseil ningyo qui vivent dans les ruines de villes et de palais
est affaibli par un mélange de népotisme, d’incompétence engl i e ūden rehei ’a re hi ire a ir-
et de négligence, ce qui force la famille Doji à envoyer ment qu’un mortel qui consommerait la chair d’un ningyo
des représentants à la fois auprès du conseil et au sein deviendrait immortel. Dès que des ningyo sont aperçus,
des zones détruites par le tsunami, afin de vérifier l’éten- des chasseurs désespérés ou cupides fondent sur les vil-
due des dégâts. lages côtiers et sèment chaos et désarroi derrière eux.
Les réfugiés peuvent être victimes de brigands ou de
villageois qui ne veulent pas les aider. Sous le coup de la
la grotte des
enfants de pierre
peur ou de l’avarice, certains les considèrent non comme
des personnes démunies, mais bien comme des cibles vul-
nérables ou des dépenses inutiles de ressources.
Le Clan de la Mante vit et meurt par la mer. Il maîtrise
(ishiko no dōkutsu)
l’eau, mais doit composer avec la terre et le feu. Les vol- Dans la province Umoeru, près d’Akagi Mori, le tsunami
cans des îles de la Soie et des Épices font naître des trem- de 1120 a détruit un sanctuaire consacré aux offrandes
blements de terre, des geysers de vapeur et des sources porte-bonheur et aux bénédictions sur les enfants.
chaudes, mais pour l’instant, les éruptions n’ont jamais Quelques jours plus tard, les parchemins et affiches du
inquiété le clan. La richesse qu’il tire du commerce et de sanctuaire se sont échoués sur la plage d’une crique,
la piraterie, ainsi que son désir de progresser au sein de accompagnés de petites pierres présentant des creux
l’Empire, signifient qu’il propose de bonnes écoles et se et des marques, de sorte qu’elles ressemblaient à des
targue d’un fort taux d’alphabétisation et d’une qualité visages de bébés endormis.
d’éducation égale à celle des clans majeurs. L’eau, l’air, la Un couple, Asaji et Taketoki, a entendu parler des
terre et le feu ne sont pas perçus comme des désastres à pierres. Croyant qu’il s’agissait d’enfants réincarnés, tous
surmonter, mais comme des alliés dans ses succès. deux se sont rendus sur place, espérant retrouver leur
enfant perdu. Ils ont pris les pierres, les parchemins et les
les habitants affiches pour les installer à l’entrée d’une grotte dans la cri-
que. Leur chagrin les pousse à croire que tous ces « enfants
Le poisson, les oursins, le varech, les algues, les seiches, les de pierre » leur appartiennent. Ils errent dans les environs
huîtres et les palourdes ne représentent qu’une partie de et attaquent les voyageurs, craignant qu’ils ne viennent
la grande variété de créatures marines dont les villageois enlever leur progéniture.

223
De plus, ils volent de la nourriture, des offrandes et
des vêtements dans les villages voisins, et il arrive même
les contes de
la crique
que certains habitants manquent à l’appel. Tous les dis-
parus ont également perdu un enfant, et les autres villa-
geois pensent généralement qu’ils se sont simplement
jetés dans l’océan. Questionner Asaji et Taketoki n’a jamais
permis d’en apprendre plus sur les disparitions d’adultes.
$ Certains villageois souffrent de déman-
Mais il est clair que le couple prévoit d’enlever des enfants geaisons, une malédiction lancée par le
de chair et d’os. Par contre, Asaji et Taketoki n’arrivent pas vieux poisson géant qui sommeille dans
à décider s’ils veulent les sacrifier ou les élever comme la crique.
les leurs. $ Un kami a sauvé des pêcheurs qui allaient
La crique, rocailleuse et dangereuse, demande talent se noyer en les transformant en vagues,
et dévouement pour livrer tous ses secrets. Un seul faux mais l'absence d'entretien de son sanc-
pas peut entraîner une grave blessure à la cheville, une tuaire l'empêche de retourner les libérer.
chute d’une grande hauteur ou une entaille profonde. Le
soleil ne semble jamais y briller et, même en pleine jour-
née, la lumière est pâle, malsaine et floue. L’eau est agi-
tée de courants étranges qui ramènent les détritus sur la de fumée, sans chaleur ni feu. Les tunnels, dont certains
plage, mais attirent les nageurs vers le fond et ses tunnels sont inondés, s’avèrent petits et oppressants, occupés par
sous-marins aux rochers tranchants. La texture de l’eau des stalagmites, des stalactites, des rochers coupants et des
reflète parfaitement l’environnement hostile de la crique, virages imprévisibles qui désorientent les visiteurs. Même
et s’y baigner laisse la peau gluante et malpropre. Asaji et Taketoki ne se sont pas aventurés très loin. S’ils
La grotte où Asaji et Taketoki ont placé leurs possessions l’avaient fait, ils auraient entendu des voix d’enfants rire et
s’enfonce profondément dans la falaise, et l’air devient rapi- leur intimer de continuer à voler et tuer, jusqu’à ce que tous
dement épais comme du brouillard et chargé d’une odeur les enfants de Rokugan soient décédés.

224
CHAPITR E 6 : L ES G R ANDS ESPACES DE R O KU G AN

les terres d’été idée d’aventure :


Situés dans la province Wakiaiai, ces marais regorgent de
roseaux délicats et de cigales. Les voyageurs aiment s’y
les enfants perdus
rendre à la fin du printemps pour entendre le craquète-
ment des insectes. L’endroit est une source d’inspiration Accroche Les PJ entendent parler d’une des
réputée pour les poètes, les érudits et les prêtres, mais victimes du tsunami, le courtisan du Clan de la
aussi pour les samouraïs préférant la plume à l’épée. De Grue Asahina Hisayoshi, suite à la découverte
nombreuses auberges ont été construites à leur attention. par un marchand d’un netsuke, un bouton déco-
Le temps sec, les températures douces et les plaines qui ratif gravé qui appartenait au disparu, dans les
offrent un point de vue spectaculaire sur les levers de soleil détritus laissés par la catastrophe. La famille
assurent un séjour idyllique, mais pour vivre pleinement Asahina souhaite ardemment qu’il soit retrouvé
l’expérience des Terres d’été, il faut s’enfoncer dans les sain et sauf, ou au moins savoir ce qui lui est arri-
marais, en quête de solitude et de contemplation, entouré vé, et elle engage les PJ. Cependant, des évé-
seulement des bruits de la saison. nements étranges minent leur enquête. Le vent
les détourne de leur destination, une tempête
Tout voyageur se méfiera des arnaqueurs qui vendent
menace de couler leur bateau, et des esprits de
des cartes des Terres d’été. La plupart sont inoffensives
l’eau les harcèlent toutes les nuits.
et ne mènent nulle part, mais certaines conduisent droit
dans les filets de bandits. Quiconque s’enfonce suffi- Développement Perdus en mer, les PJ par-
samment dans les marais risque de tomber sur le corps, viennent à entrer en contact avec les esprits, et
ou le squelette, d'un promeneur perdu ou de la malen- apprennent que le samouraï du Clan de la Grue
contreuse victime d'une attaque. Les bandits du cru pré- est mort. Lorsqu’une pirate du Clan de la Mante
sentent une apparence étrange : certains ont l’air affamés l’a repêché, il a exigé qu’elle sauve aussi les
et sauvages, plus proches des animaux que des humains. enfants des heimin emportés par le tsunami, ce
D’autres paraissent désespérés, demandant constam- qu’elle a refusé. Hisayoshi a tenté de sauver les
ment l’année en cours aux voyageurs, et les attaquant si enfants seul et a été emporté par les vagues. La
la réponse ne leur plaît pas. D’autres encore ressemblent pirate et les esprits de l’eau des alentours, émus
à des non-vivants : ceux-là entraînent leurs victimes au loin par le sacrifice de l’homme, ont juré de protéger
dans les marais, tout en annonçant la fin des temps. les enfants.
La plupart des visiteurs reconnaissent que les cartes
三 Paroxysme Les enfants, accompagnés de
sont inutiles car les passages changent constamment, ce
quelques adultes, vivent sur l’une des îles du
qui n’est pas étonnant puisque les roseaux poussent rapi- Clan de la Mante. Bien que la pirate les ait bien
dement. Pourtant, certains affirment que le sol lui-même traités au cours des années, le Clan de la Mante
se déplace au gré des saisons. À tout moment, un terrain s’impatiente, dans l’attente d’une rançon de la
boueux peut se transformer en une flaque profonde autour part du Clan de la Grue. De plus, si le Clan de
de laquelle les roseaux demeurent immobiles tandis que la Grue devait apprendre la mort d’Hisayoshi, il
des malheureux y disparaissent. L’une des méthodes pour pourrait chercher à se venger.
explorer les lieux consiste à former une chaîne humaine.
Tant que chacun reste à portée de vue des personnes
devant et derrière, e, il est possible de remonter la chaîne
jusqu’à la civilisation. Cependant, l’envie de découvrircouvrir
quelque chose de nouveau et d’unique en pousse beau-
coup à quitter la chaîne humaine pour s’aventurer seuls
dans les marais.
Chaque explorateur solitaire revient avec une histoire
ente. L’un affirmera avoir vu une arche torii parfaite
différente.
qui menait à l’Illumination. Un autre prétendra
tendra avoir visi-
té une ville étrange, peuplée d’êtres humains croiséss avec
des serpents ou des dragons. Il ajoutera que tous étaient
accueillants et polis, mais réticents à expliquer la raison de
leur présence et absolument incapables d’admettre que
le voyageur était humain. D’autres es encore clameront avoir
découvert un trésor unique : un coffrefre de pièces, une varié-
té de riz qui pousse partout, une épée composée e de rêves.
Interrogés, tous reconnaîtront qu’ils n’ont jamais rien
ditions dans les T
retrouvé de tel lors d'autres expéditions Terres
d’été : ils n’ont été accompagnéss que du bruissement des
roseaux et des stridulations des cigales.

225
C H API T R E 6 : L E S G R A N DS E SPACES DE R O KU G AN

Certaines voix remettent en doute le dévouement de


Manami envers la vie de pirate et le Clan de la Mante. Ceux
qui jalousent son succès et sa popularité émettent l’hypo-
thèse qu’elle a le cœur tendre. En fait, tous craignent son
ANTAGONISTE RANG DE CONFRONTATION  4 2
ambition. Elle a souvent parlé d’envoyer des présents et
Le Clan de la Mante considère Manami comme l'une de des émissaires à Otosan Uchi pour que le Clan de la Mante
ses meilleures pirates, mais cette dernière déteste sa accède au statut de clan majeur. À chaque attaque réussie,
propre réputation, tout comme celle de son clan. Elle vou- cette éventualité devient plus probable, et son nom serait
drait être perçue comme une samouraï légitime. Elle est au sommet de la liste des représentants possibles.
constamment déchirée entre trois désirs : mener une vie
simple sur l’eau, à pêcher ; répondre aux besoins de sa SOCIÉTAL PERSONNEL
famille et de son clan par des actes de piraterie ; jouir de
45 HONNEUR ENDURANCE
10
la reconnaissance et du respect des autres clans. Manami
mène son équipage avec astuce et mauvaise humeur. Elle
1 2
65 GLOIRE SANG-FROID
8
choisit les cibles isolées et riches plutôt que les navires 4 3
plus petits et plus faciles à aborder, pour éviter de faire
30 STATUT 2 ATTENTION
5
couler plus de sang que nécessaire. Si l’une de ses déci-
sions est remise en question, elle résout le problème par
la lutte, et son corps trapu, massif et puissant démontre
+2, –2
ATTITUDE : RUSÉ
VIGILANCE
3
rapidement sa force. Ses succès de piraterie illustrent son
excellent esprit tactique. ARTISANAL 1 MARTIAL 4 SAVANT 2 SOCIAL 3 PRO. 3
Lorsque le tsunami a frappé le territoire du Clan de
AVANTAGES DÉSAVANTAGES
la Grue, plutôt que de fondre sur les cadavres et les vil-
lages pour les piller, Manami a préféré sauver plusieurs ee e ti e e r r er
survivants. Après avoir informé ses marins que le Clan  professionnel ; physique  social ; relations
de la Grue pourrait payer une rançon pour retrouver ses
membres, elle a bien traité les réfugiés, les intégrant dans ARMES ET ÉQUIPEMENT PRÉFÉRÉS

une bourgade proche de Toshi no Inazuma. Cette entre-


t   : portée 1 ; dégâts 4 ; Dangerosité 5/7 ; Acéré,
prise ne s’est pas avérée fructueuse et pourrait consti-
Cérémoniel, Discret
tuer un revers dans sa carrière autrefois parfaite, mais ses
marins demeurent loyaux et sont bien nourris en échange i e e t rt ) : armure dissimulée (Résistance phy-
de leur travail, de sorte qu’ils ne se plaignent pas. sique 2 ; Discret), wakizashi, cruche de saké, livre corné
Cependant, le Clan de la Mante est partagé face à sur l’histoire, l’étiquette ou une histoire d’amour à la cour.
cet acte miséricordieux, d’autant plus qu’il est mainte-
nant responsable de personnes fidèles au Clan de la Grue. CAPACITÉS

RR
Lorsque Manami effectue un test d’action d’Attaque, elle
peut dépenser comme suit :
: un personnage situé à portée 0-2 subit l’état
Désorienté.
7
CHAPITRE

De nouvelles
options de jeu
Les agglomérations de l’Empire d’Émeraude vont des
petits hameaux aux villes tentaculaires, et ses paysages
passent des montagnes enneigées aux forêts denses. Le
peuple de Rokugan n’est pas moins varié, du modeste
hinin a i an dai a a e de a ra re e e
le code du bushido, et comprend des spécialistes dans
de nombreux domaines : chacun d’entre eux remplit des
devoirs uniques selon des approches spécifiques.
Ce chapitre présente de nouvelles options pour les
personnages joueurs de La Légende des Cinq Anneaux :
le Jeu de Rôle, dont de nouvelles écoles, de nouveaux
titres, ainsi que de nouveaux avantages et désavantages.
De plus, vous trouverez dans les pages suivantes les règles
pour créer un personnage issu d’une des trois familles
impériales : les Miya, les Otomo et les Seppun.
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

De nouvelles réponses au que sait votre


personnage—?
N A jeu des vingt questions Tous les personnages des familles impériales
Plusieurs écoles intro- Lorsqu’un joueur crée son personnage, il peut choisir son sont plus au fait des sujets suivants :
duites dans ces pages clan, sa famille ou son école parmi les options suivantes,
constituent des excep-
$ Vous avez des connaissances générales sur
en plus de celles disponibles dans le Livre de Règles.
tions à la règle générale la politique à Otosan Uchi. Vous pouvez citer
selon laquelle le choix les chefs des familles impériales, les fonc-
s’effectue au sein de Les familles impériales tionnaires gradés, ainsi que d’autres diri-
son clan. Les écoles de geants, et vous êtes au courant de leurs posi-
moines des fortunes et A e t ti e  : +1 en Air
tions et de leurs allégeances respectives.
de moines shinséistes A e t ti e te e : +1 en Gouvernement
constituent des t t t : 40 $ Vous connaissez plutôt bien l’histoire impé-
approches générales de Il serait aisé de considérer les familles impériales comme riale, surtout quand elle concerne les actes
la vie monastique pour de simples compléments aux clans majeurs, de même de l’Empereur et des familles impériales.
des samouraïs qui ont que les nombreux clans mineurs. En effet, que ce soit en $ Vous connaissez le protocole et l’étiquette
renoncé à leur loyauté termes d’effectifs, de terres possédées ou de propriétés
envers leur clan. Un en vigueur à la capitale impériale.
détenues, elles sont considérablement plus petites que
saboteur du Kolat peut
provenir de n’importe les clans majeurs. Cependant, elles restent bien plus puis-
quelle famille, et il
maintiendra certaine-
santes et influentes que n’importe lequel d’entre eux, sous
bien des aspects importants. Comme leur nom l’indique,
que signifie le
ment une couverture les familles impériales ont un lien direct avec le trône, bushido pour les
basée sur une école lé-
gitime. Les kitsune qui
bien plus étroit que celui de n’importe quel clan majeur.
La famille Hantei, qui comprend l’Empereur et sa famille
familles impériales—?
vivent parmi la société proche, est véritablement impériale dans la mesure où
humaine imitent les Le devoir et la loyauté envers l’Empire et l’Em-
tous les Empereurs et toutes les Impératrices qui ont régné pereur motivent les familles impériales dans tout
traits de la famille qu’ils
rejoignent : ils choi- sur Rokugan en sont issus. Il existe trois autres familles ce qu’elles entreprennent. Les familles impé-
sissent donc un clan impériales : les Seppun, les Otomo et les Miya. Leur proxi- riales sont unies par les liens de sang et de ser-
et une famille comme mité avec le trône est due à leurs lignées, leurs devoirs et vitude ancestraux qu’elles entretiennent avec la
les autres personnages leurs histoires. Chacune de ces familles détient un pouvoir lignée de Hantei.
joueurs. politique et culturel considérable, sans commune mesure La prospérité de l’Empire d’Émeraude est
avec les traces, peu nombreuses, qu’elles laissent dans tout ce qui compte, et les samouraïs des familles
l’histoire de Rokugan. impériales doivent souvent agir avec moins de
Puisque les familles impériales font partie des kuge, la compassion que les autres nobles.
haute noblesse de l’Empire, elles se distinguent du gros Reportez-vous à la page 301 du Livre de
des samouraïs, les buke, ce qui se traduit de plusieurs Règles pour plus d’informations sur la manière
façons. La plus évidente réside dans leur accès facilité à dont ces éléments influent sur l’Honneur et la
Hantei et aux personnalités incarnant l’autorité impériale Gloire de votre personnage.
(telles que le Champion d’Émeraude, le Conseiller impé-
rial et le Chancelier impérial), que les clans majeurs ne
peuvent que leur envier. Les familles impériales ne pos-
sèdent que peu de terres et de propriétés, mais ces der- membre de famille impériale, le premier traite toujours le
nières sont protégées par un décret impérial permanent second avec le même respect et la même estime que s’il
qui interdit aux clans de les attaquer ou de s’en saisir. Quel parlait à un noble de statut plus élevé. Cependant, ces
que soit le statut de l’individu qui s’adresse à un membre règles ne s’appliquent pas si l’interlocuteur en question
de ces familles, il doit utiliser le suffixe honorifique fait lui-même partie d’une famille impériale, s’il
-sama. De même, quelles que soient les dif- est un fonctionnaire impérial haut placé ou,
férences de statut entre un samouraï et un bien entendu, s’il est l’Empereur.
R NNAG
N A
RA

Bien qu’un personnage


issu d’une famille im-
périale ne fasse partie
La famille Miya Cette confiance permet aux Miya d’être les yeux et
d’aucun clan majeur, il
les oreilles des impériaux : impassibles, ils notent et enre- suit les mêmes règles
A e t ti e  : +1 en Air ou +1 en Terre gistrent avec un minimum de parti pris les événements de création qu’un
A e t ti s e te e : +1 en Courtoisie, +1 en qui affectent l’Empire et les rapportent à Hantei et aux samouraï de clan, à
Culture autres familles impériales. Cette relative candeur et cette une exception près.
G ire : 44 rt e e rt : 8 koku nature ouverte confèrent aux Miya un degré d’accès sans À la question 1 du jeu
La famille Miya est la plus récente des familles impériales : des vingt questions,
égal à tout Rokugan, tout en leur assurant de ne pas cou-
elle n’a été fondée qu’après le décès du premier Hantei. page 41 du Livre de
rir de grands risques lorsqu’ils voyagent sur les terres
Miya, un loyal disciple d’Otomo, était un jeune homme Règles, le joueur ou
des clans. la joueuse répond
charmant et à l’esprit vif, qui devint rapidement un des
Les Miya peuvent aussi tenir d’autres rôles dans l’Em- « familles impériales »
favoris des proches de l’Empereur. Ce fut Miya qui annon-
pire, notamment dans les rangs des légions impériales ou au lieu du nom d’un
ça au premier Hantei, sur son lit de mort, la victoire contre
parmi les magistrats d’Émeraude. Leur réputation de ser- clan majeur. Au regard
Fu Leng. L'Empereur lui ordonna de continuer à répandre des règles, ce choix
viteurs loyaux de l’Empereur et d’interlocuteurs impartiaux
la nouvelle dans tout Rokugan. Par la même occasion, équivaut à opter pour
leur est très utile dans ces deux fonctions. Ces qualités leur
Miya et ses serviteurs aidèrent les citoyens de l’Empire un clan majeur. De
valent aussi de faire souvent office d’arbitres ou de juges
dévasté à reconstruire, laissant sur leur passage l’espoir et même, à Rokugan, la
lors de conflits allant de la simple dispute au sujet de terres position d’un samouraï
la détermination dans le cœur des Rokugani. Lorsque Miya
et de propriétés au duel en bonne et due forme entre au sein d’une famille
revint en héros à Otosan Uchi, le rusé Otomo y vit une
occasion à saisir. Il convainquit le nouvel Empereur, Hantei samouraïs, en passant par les procès complexes suite à de impériale est com-
Genji, d’autoriser Miya (qui était toujours le fidèle disciple graves transgressions de la loi impériale. De plus, le poste parable à celle d’un
de Héraut impérial est héréditaire, et revient traditionnel- membre de clan majeur
d’Otomo) à fonder sa propre famille : une nouvelle famille
le en a dai de la a ille i a dans la hiérarchie de
impériale était née. son clan.
Les Miya ont toujours formé la plus petite des familles Les Miya tiennent un dernier rôle d’importance : l’attri-
impériales, et bénéficié de la moindre emprise directe et bution de la Bénédiction de l’Empereur. Le nom de cette
de l’accès le plus limité au trône. Cependant, ils sont en pratique est hérité du voyage originel de Miya à travers
général appréciés par les habitants de l’Empire, et ils pos- l’Empire. La Bénédiction est devenue un événement offi-
sèdent donc une influence propre. Les hérauts Miya trans- ciel consistant à reconstruire et réparer les zones dans le
portent les décrets et les déclarations de l’Empereur dans besoin. Tous les ans, des charpentiers et des artisans mobi-
tout Rokugan, tandis que les cartographes Miya font le levé lisés pour l’occasion sont ainsi envoyés dans des régions
des terres afin de créer des cartes qui délimitent avec préci- généralement touchées par la guerre ou par une catas-
sion les différentes propriétés des clans. Les membres de la trophe naturelle. La lutte est âpre entre les clans pour
famille Miya sont donc bien accueillis par les tous les clans, accueillir la Bénédiction, mais la décision de son attribu-
qui leur accordent généralement leur confiance, là où un i n re ien l’ ere r en n l a i n a e le dai
Seppun ou un Otomo serait reçu avec plus de prudence. de la famille Miya.

229
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

La famille Otomo De nombreux samouraïs considèrent que faire preuve


d’autant de manipulation et d'implacabilité sans la
A e t ti e  : +1 en Air ou +1 en Eau moindre honte est indigne d’un noble et des sept pré-
A e t ti s e te e  : +1 en Culture, +1 en ceptes du bushido qu’il est censé respecter. Cepen-
Sentiments dant, les Otomo jugent leur rôle absolument essentiel :
G ire : 43 rt e e rt : 9 koku ils empêchent les clans de s’allier contre le trône en les
La famille Otomo fut la deuxième famille impériale créée, forçant à rester sur leurs gardes et, idéalement, occupés
après les Seppun. Le premier Otomo, le plus jeune fils d’un par des tensions, voire des conflits avec les autres clans.
grand seigneur de guerre tribal, était désinvolte, malin et Personne ne sait combien de querelles entre les clans ont
subtil. Grâce à ses formidables capacités de persuasion et démarré suite à un petit coup de pouce de la part d’un
de manipulation, il était passé maître dans l’art de désa- membre de cette famille. Mais un danger demeure : les
morcer les conflits qui menaçaient de détruire sa tribu. Otomo eux-mêmes restent des mortels, imparfaits de
Son astuce et sa ruse devinrent vite inestimables pour le nature, et donc susceptibles de succomber à la tenta-
Kami Hantei qui cherchait à unifier les peuples disparates tion de l’ambition et du pouvoir. Bien sûr, tous réfutent
de l’Empire naissant. Otomo joua un rôle crucial dans la l’hypothèse qu’une telle infamie ait déjà pu survenir, et
création de la famille Miya, une manœuvre qui ne fit que ils affirment que des mesures sont en place pour l’empê-
renforcer sa position au sein de la récente cour impériale. cher. Il est évident que les observateurs sont eux-mêmes
Son approche subtile et indirecte de la politique, mais aus- surveillés, ce qui porte à croire que la vie au sein de la
si de chaque aspect de la vie, caractérise la famille Otomo famille Otomo n’est qu’intrigues et coups d’œil par-des-
depuis cette époque. sus son épaule, à un point proche de la paranoïa, ce que
Dans l’Empire, le rôle si particulier de la famille Otomo ses membres ne nient pas.
consiste à semer la discorde entre les clans. À de nom- Les Otomo remplissent aussi d’autres devoirs pour
breuses reprises dans l’histoire de Rokugan, des conspi- l’Empire : ils pourvoient de nombreux postes clés de l’ad-
rateurs ont cherché à prendre le contrôle du trône. Afin ministration impériale. La famille rivalise avec le Clan de la
d’éviter que les clans s’unissent et gagnent une influence Grue en tant que figure de proue dans les domaines cultu-
excessive (voire s’emparent du trône), les Otomo rels : des œuvres musicales, artistiques et littéraires créées
emploient des méthodes offensantes et préjudiciables, par des Otomo font partie des plus influentes de Rokugan.
parfois à l’encontre de loyaux samouraïs de Rokugan. Ils Ces derniers comprennent que chaque note d’une com-
ne sont cependant jamais malveillants pour le simple plai- position musicale, chaque frappe du maillet sur un burin
sir de l’être. Les Otomo reconnaissent l’existence d’un et chaque coup de pinceau doivent servir un objectif poli-
intérêt supérieur, celui du trône, et ils s’y dévouent corps tique précis. Pour cette famille, la beauté n’est qu’un outil
et âme : ils se servent de flatteries et de faveurs, mais n’hé- de plus pour consolider sa position ou s’assurer que le pou-
sitent pas à recourir aussi à des tactiques sournoises, telles voir ne tombe pas aux mains des mauvaises personnes.
que la tromperie, la corruption ou le chantage. Une pratique impériale importante consiste à faire
adopter le nom de famille Otomo par les plus jeunes
enfants de l’Empereur, qui ne sont pas censés hériter du
trône. À la suite du rite d’Abdication, ces membres de
la fratrie impériale rejoignent en général les rangs de la
famille Otomo, effectuent leur gempuku quel que soit
leur âge et prennent le nom d’Otomo. De cette façon,
la famille aide à préserver la lignée de Hantei : si un
Empereur meurt sans héritier, il est relativement aisé de
remonter jusqu’à son parent le plus direct. Normale-
ment, il s’agit d’un Otomo, qui annule alors son abdi-
cation et monte sur le trône : encore une façon pour
les Otomo d’asseoir leur pouvoir sur l’Empire.
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

La famille Seppun que de leur permettre de dégainer rapidement lors d’une


attaque soudaine, plutôt qu’en duel officiel.
A e t ti e  : +1 en Terre ou +1 en Vide La Garde cachée, quant à elle, est constituée de bushi
A e t ti s e te e  : +1 en Méditation, et de shugenja voués à la compréhension des kamis et aux
+1 en Théologie enseignements de Shinsei. Ils sont tout aussi prêts à s’interpo-
G ire : 45 rt e e rt : 6 koku ser entre l’Empereur et les dangers spirituels que les Gardes
Comme les Otomo, la famille Seppun peut retracer son d’honneur Seppun à faire face aux menaces physiques. De
origine à l’aube de l’Empire. Lorsque les Kamis tombèrent nombreux membres de cette organisation sont d’excel-
des Cieux, huit d’entre eux atterrirent sur ce qui allait lents maîtres des glyphes, capables de dresser des défenses
devenir le mont Seppun, qui porte le nom de la première solides pour protéger les zones que fréquentent Hantei et
mortelle qui les rencontra. Leur arrivée soudaine émut tel- sa famille contre les intrusions ou les attaques magiques. Il
lement Seppun qu’elle proposa de se mettre à leur ser- existe un lien étroit, bien que discret, entre la Garde cachée
vice, avec tous ses disciples. Le Kami Hantei accepta cette et des groupes tels que les chasseurs de sorciers Kuni du
offre, et ils devinrent ainsi les premiers adeptes mortels Clan du Crabe, les inquisiteurs Asako du Clan du Phénix et
des Kamis. De fait, tandis que d’autres doivent se dispu- les Kuroiban, la Garde Noire du Clan du Scorpion.
ter la faveur de l’Empereur, les Seppun en jouissent depuis Tout comme les Otomo, les Seppun remplissent
toujours en vertu de leurs origines. Bien que certains d’autres rôles, qui s’ajoutent à leur devoir principal de
membres de cette famille soient courtisans et nombre protection de l’Empereur, et beaucoup exercent la fonc-
d’entre eux fonctionnaires dans l’administration impériale, tion d’agents de l’administration impériale. Cependant, la
ils sont principalement connus à travers Rokugan pour leur dévotion de ses membres aux enseignements de Shinsei se
fonction de protecteurs de l’Empereur. démarque. La première Seppun, qui rencontra Shinsei lors
Lorsque les Kamis divins tombèrent du royaume de son apparition peu de temps après la chute des Kamis,
Céleste dans celui des mortels, ils acquirent certaines devint une fervente disciple du Petit Maître. Elle prôna for-
des vulnérabilités de ces derniers. Les Seppun décidèrent tement les leçons de ce dernier. Lorsqu’elle mourut, ses
alors de garder et de protéger les Kamis. Cette dévotion enfants érigèrent quatre temples en l’honneur de la philo-
n’a pas faibli depuis et a conduit les Seppun à devenir sophie shinséiste dans différents endroits de Rokugan. À ce
les principaux défenseurs de l’Empereur, toujours prêts à jour, les Seppun font toujours partie des adeptes les plus
se sacrifier à son service. Il ne s’agit pas simplement de dévoués du Petit Maître et restent les plus fervents gar-
fanatisme : c’est là leur devoir et leur raison même d’exis- diens de ses enseignements et de ses archives.
ter dans l’Ordre céleste. Pour faciliter l’exécution de leur La famille Seppun gère aussi une gigantesque biblio-
tâche, les Seppun ont mis en place deux corps de pro- thèque impériale, moins centrée sur les faits historiques que
tecteurs : la Garde du Palais, également appelée Garde sur les pensées, les sentiments et les émotions de ceux qui
d’honneur Seppun, formée par les gardes du corps per- ont pris part aux événements passés. Ce lieu contient de
sonnels de Hantei, qui le préserve des menaces physiques, nombreux poèmes, histoires, pièces de théâtre et journaux
et la Garde cachée, qui défend l’Empereur face aux dan- (intimes ou non) écrits par ceux qui ont vécu à l’époque
gers spirituels et surnaturels. de certains événements historiques. De tels documents
Les Gardes du Palais font partie des guerriers les plus sont bien entendu très subjectifs, mais permettent au lec-
accomplis de Rokugan. Leur incroyable maîtrise n’a qu’un teur d’acquérir des connaissances sur le mode de vie des
seul objectif : protéger Hantei. Ils ont ainsi créé toutes Rokugani du passé, comme leur façon d’interagir et de per-
leurs techniques et tactiques de combat à cette fin. Même cevoir les événements historiques avant de les coucher sur
leur immense maîtrise du iaijutsu n’a pour seule vocation le papier selon leur propre point de vue.
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

PROGRÈS TYPE
École de cartographe Miya Compétences artisanales Grp. de comp.
AR [Artisan, Courtisan] Culture Compétence
R GAN
Les cartographes Miya sillonnent l’Empire pour récol- Forme Compétence

RANG 1
Il n’existe à Rokugan ter les informations qui leur permettront de mettre à jour Survie Compétence
aucun système de les cartes impériales. Par conséquent, ils disposent d’une
coordonnées ou méthode autorisation permanente pour circuler comme ils l’en- Shūji de la erre (rang 1) Grp. de tech.
permettant de répertorier
tendent, sur les terres de tous les clans. Les cartographes = Manœuvres d’esquive e hni e
les lieux. Les cartographes
voyagent souvent jusque dans des lieux reculés, inhospita-
emploient donc divers pro- Seuil infranchissable e hni e
cédés pour évaluer avec liers et en majeure partie inhabités pour faire leurs obser-
précision les distances et vations et prendre des mesures. Ils doivent pouvoir se Compétences savantes Grp. de comp.

les directions, y compris débrouiller seuls, mais se déplacent en général avec des Jeux Compétence
en les estimant à pied et e i gr e de er i e r e de ji ’ le de ar-
en utilisant des points tographe met fortement l’accent sur les sujets théoriques Ar ar ia ( r r ) Compétence

RANG 2
de repère importants du en lien avec la collecte et l’archivage des informations Survie Compétence
paysage. Ils utilisent aussi (comme l’écriture, le dessin et la mémorisation), mais aussi
des pratiques courantes a a (rang 1- )  Grp. de tech.
sur l’athlétisme, l’équitation et l’endurance. Ces samouraïs
en navigation maritime, = Le vent tourne
doivent être prêts à faire face à de longues périodes de e hni e
telles que noter la position
des étoiles, pour vérifier et privation et d’épreuves, loin de toute trace de civilisation Ouverture feinte e hni e
confirmer leurs mesures. et à la merci de nombreux dangers, tels que des bandits,
des animaux sauvages et des esprits hostiles. Compétences professionnelles Grp. de comp.
Ainsi, les cartes rokugani
ressemblent plus à des A e  : +1 en Air, +1 en Terre Courtoisie Compétence
œuvres d’art qu’à des te es e rt  isisse e i ) : +1 en Com-
plans exacts à l’échelle, et Culture Compétence
position, +1 en Culture, +1 en Esthétique, +1 en Forme,

RANG 3
le degré de variation entre +1 en Gouvernement, +1 en Navigation, +1 en Survie Ar ar ia (di an e) Compétence
différents exemplaires
e r : 50 Shūji de l’Air (rang 1- ) Grp. de tech.
est souvent considérable.
e i es essi es : Katas (), Rituels ( ) Shūji ( )
La marge d’erreur a = Assaut des
tendance à augmenter à e i es e rt : e hni e
feuilles pourpres
pourpres 
mesure qu’on s’éloigne
des zones de l’Empire les
$ t s isisse e ) : Détermination du guer- le ar ne n ’ n e hni e
plus densément peuplées rier, Offensive de la Terre
Compétences savantes Grp. de comp.
ou les plus fréquentées, $ i isisse e ) : Estimation de l’artisan, La
et notamment de la Courtoisie Compétence
courtoisie prime
capitale impériale, Otosan
Ar ar ia ( ain n e ) Compétence
Uchi. Cette dernière fait
Gr e r it e) : vous savez toujours
RANG 4

office de point de départ Méditation Compétence


dans quelle direction se trouve le nord, et vous trouvez
officiel pour toutes les
toujours un repère utile pour vous orienter. a a (rang 1- )  Grp. de tech.
mesures cartographiques
impériales. Lorsque vous effectuez un test pour vous souvenir ou = Le roseau plie
établir des informations sur un sujet géographique, poli- e hni e
sous la tempête
tique ou sociétal, vous pouvez ajouter au résultat
Port altier e hni e
un nombre de gardés affichant ou égal
à votre rang d’école. Compétences artisanales Grp. de comp.
i e e t e rt  : vêtements de Commandement Compétence
voyage, wakizashi (sabre court), yumi (arc),
carquois de flèches, couteau, nécessaire Culture Compétence
RANG 5

de calligraphie, sac de voyage, tampon a iga i n Compétence


personnel, assortiment de cartes dans des
Shūji de la erre (rang 1-5) Grp. de tech.
étuis à rouleaux, un suivant (cf. page 64
du Livre de Règles) ou un poney rokugani Effroi céleste e hni e
(cf. page 326 du Livre de Règles). Bravade e hni e

Explorateur d’émeraude (capacité de maî maî--


trise ti ) : une fois par scène, au prix d’une
action de Soutien, vous pouvez effectuer un
test e r ie erre) N  1 prenant pour cible
RANG 6

n er nnage r en n a de r ie e
er nnage ain i ’ n n re de er n- n-
nage l en aire gal n
ign ren le e e n ga i de r ri
de errain j ’ la in de la ne
PROGRÈS TYPE

Compétences sociales Grp. de comp.

Culture Compétence

Forme Compétence

RANG 1
Survie Compétence R A R
AR A
Shūji de l’ a (rang 1) Grp. de tech.

= Ouverture feinte En plus de délivrer les


Technique
messages impériaux, les
La détermination hérauts Miya rapportent
Technique
du courtisan et archivent leurs
expériences avec la plus
Compétences professionnelles Grp. de comp.
grande des objectivités. Ils
Courtoisie Compétence connaissent intimement
Rokugan et sont de fins
Culture Compétence

RANG 2
observateurs de ses
Ar ar ia ( r r ) Compétence événements. Plus d’un
samouraï à un poste de
Shūji de l’Air (rang 1- ) Grp. de tech.
faible importance a essayé
= Flux et reflux Technique de tromper un héraut
Miya ou de lui cacher
A l en d n g e Technique ses activités, se félicitant
École de héraut Miya [Courtisan] Compétences savantes Grp. de comp. de son ingéniosité. Le
malheureux fonctionnaire
Les hérauts Miya sont les messagers de l’Empereur. Leur Commandement Compétence n’en a été alors que plus
devoir consiste à voyager à travers Rokugan pour déli- horrifié de découvrir que
Courtoisie Compétence
RANG 3
vrer les édits et les messages impériaux de manière pré- le Miya avait scrupu-
cise et brève. Ils traversent sans encombre les frontières Survie Compétence leusement rapporté
séparant les clans et autres délimitations : seul un fou ose- l’exact déroulement des
Shūji de la erre (rang 1- ) Grp. de tech.
rait les retarder dans leurs missions. Bien qu’ils sachent événements… y compris
= Effroi céleste Technique ses tentatives de duperie
se défendre au même titre que n’importe quel autre
ou de dissimulation.
samouraï, ils préfèrent utiliser la vitesse et l’évasion pour Le vent tourne Technique
s’assurer de délivrer leurs messages à qui de droit. Les
Compétences artisanales Grp. de comp.
hérauts Miya s’expriment avec les mots de l’Empereur et
l’autorité d’un représentant impérial. Seul un samouraï par- Commandement Compétence
ticulièrement influent ou inconscient oserait les contredire.
Forme Compétence N
RANG 4

A e  : +1 en Air, +1 en Eau N
te es e rt  isisse e i )  : +1 en Survie Compétence
R N
Commandement, +1 en Composition, +1 en Courtoisie, Shūji de l’ a (rang 1- ) Grp. de tech.
+1 en Forme, +1 en Navigation, +1 en Sentiments, La plupart des tech-
= n r e en d e r Technique
+1 en Survie niques indiquées dans
e r : 50 Pilier de sérénité Technique les cursus d’école de cet
e i es essi es : Katas (), Rituels ( ) Shūji ( ) ouvrage sont décrites
Compétences sociales Grp. de comp. dans le Chapitre 4
e i es e rt :
Culture Compétence du Livre de Règles. Les
$ i isisse e ) : Cadence, Évaluation nouvelles techniques,
Sentiments Compétence comme Effroi céleste,
RANG 5

honnête
Survie Compétence
sont signalées en gras.
$ i isisse e )  : Le fardeau du devoir, Ces techniques sont
Sous la surface Shūji d ide (rang 1-5) Grp. de tech. présentées en détail à
la page 248.
Le couteau dans la plaie Technique
i e ere r it e)  : une fois par
round, après qu’un personnage situé à portée 0-4 a réussi ’i a le ain de la ai Technique

un test d’action d’Attaque ou de Manipulation, vous pou- Bénédictions de l’Empereur (capacité de maî maî--
vez lui infliger un nombre de points de Conflit égal à votre trise ti ) : ne i ar ne a ri d’ ne
rang d’école. action de Manipulation, vous pouvez effectuer
i e e t e rt : vêtements de voyage, tenue de un test e e e t Air) N  4 contre
nn re de er nnage r en in rie r
cérémonie, wakizashi (sabre court), yumi (arc) et carquois gal re rang de l ire n a de r ie
de flèches ou tessen (éventail de guerre), nécessaire de le i le d i en a ri ier n n re de in
calligraphie, sac de voyage, sacoche de proclamations d’ nne r gal a d le de le r rang d’ n-n-
ne r e n n re de in de l ire gal a
RANG 6

impériales, tampon personnel, un suivant (cf. page 64 du


d le de le r rang de l ire a an de h i ir
Livre de Règles) ou un poney rokugani (cf. page 326 du de rendre r i le d’ ne a i n d’A -
Livre de Règles). a e e l le de e e a i n a g en e
de e e e er i en j ’ la in de la
ne j ’ e e a a ie n er- er-
nnage a e l’ n de e alli
+ : choisissez un de vos alliés par dépen
dépen--
sé de cette façon. Les effets de cette capacité
’a li en a i a a a e ’e e en le
i le n re le alli h i i
PROGRÈS TYPE

Compétences sociales Grp. de comp.

Composition Compétence

Culture Compétence
RANG 1

Gouvernement Compétence

Shūji de l’Air (rang 1) Grp. de tech.

= La courtoisie prime Technique

= Cérémonie du thé Technique

Compétences savantes Grp. de comp.

Commandement Compétence

Courtoisie Compétence
RANG 2

Ar ar ia ( r r ) Compétence

Shūji de l’ a (rang 1- ) Grp. de tech. École d’intrigant Otomo [Courtisan]


= Effroi céleste Technique
Les intrigants Otomo sont des politiciens parfaits. Ils parti-
alhe r a ai le Technique cipent aux différentes cours de Rokugan, de la cour impé-
riale à Otosan Uchi aux cours plus petites qu’ils jugent
Compétences artisanales Grp. de comp.
d’intérêt, en passant par celles des clans majeurs. Ils font
Commerce Compétence progresser leurs plans dans tout le paysage politique roku-
Courtoisie Compétence gani au nom de l’Empereur, des familles impériales et des
RANG 3

autorités. Les intrigants Otomo accomplis se montrent


Sentiments Compétence
manipulateurs et impitoyables : en politique, ils se révèlent
Shūji d e (rang 1- ) Grp. de tech. extrêmement perspicaces pour accumuler les faveurs,
= Port altier cultiver leur réseau d’alliés et détruire leurs ennemis. Aux
Technique
yeux d’un intrigant Otomo, la fin (préserver la puissance
Le vent tourne Technique ainsi que l’autorité de Hantei et des instances impériales)
Compétences savantes Grp. de comp. justifie presque toujours les moyens.
A e  : +1 en Air, +1 en Feu
h i e Compétence
te es e rt  isisse e i )  : +1 en
Commandement Compétence Commandement, +1 en Composition, +1 en Courtoisie,
RANG 4

+1 en Culture, +1 en Gouvernement, +1 en Sentiments,


ag ille Compétence
+1 en Stylisme
Shūji d e (rang 1- ) Grp. de tech. e r : 45
= n r e en d e r Technique e i es essi es : Katas (), Rituels ( ) Shūji ( )
e i es e rt :
Proposition du loup Technique

Compétences sociales Grp. de comp.


$ i isisse e )  : La détermination du
courtisan, Souffler sur les braises
Composition Compétence
$ i : = Manœuvres d’esquive
Culture Compétence
RANG 5

Stylisme Compétence ter e ti s e ri e r it e) : vous ne sacri-


fiez jamais ni points d’Honneur ni points de Gloire afin de
Shūji de l’Air (rang 1-5) Grp. de tech.
mentir ou de duper autrui pour le bien de Hantei et de l’Em-
Le couteau dans la plaie Technique pire (selon vos critères). Cependant, vous devez sacrifier
deux fois plus de points d’Honneur et de Gloire pour mentir
’i a le ain de la ai Technique
pour votre propre bénéfice (à nouveau, selon vos critères).
Majesté du trône (capacité de maîtrise, Lorsqu’un personnage met en jeu ou sacrifie des
ti ) : ne i ar ne a ri d’ ne a i n points d’Honneur ou de Gloire afin d’agir à l’encontre de
de ani la i n e e e er n test
de Commandement (Eau) renan vos désirs, vous pouvez l’obliger à augmenter ce montant
RANG 6

r i le
a an e er nnage r e -5 e d’une valeur égale à votre rang d’école.
le hai e e de e e e gal a rang i e e t e rt  : tenue de cérémonie, wakizashi
de S a le l le ar i i le n a (sabre court), une arme au choix (rareté inférieure ou égale
de r ie e le i le i en le a
e rien à 6), nécessaire de calligraphie, sac de voyage, un suivant
loyal (cf. page 64 du Livre de Règles).

234
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

PROGRÈS TYPE

Compétences savantes Grp. de comp. École d’astrologue Seppun


Composition Compétence [Shugenja, Artisan]
Magouilles Compétence La Garde du Palais protège l’Empereur et les autres auto-
RANG 1

Tactique Compétence
rités impériales des menaces physiques, et les astrologues
Seppun les tiennent à l’abri des dangers surnaturels et spiri-
N A N
Invocations de l’Eau (rang 1) Grp. de tech. tuels. Dans ce but, leur entraînement spécifique en astrolo- N
= Cœur du Dragon de l’Eau Technique gie et en techniques de divination variées leur permet non
seulement de réagir à ces périls, mais aussi de les anticiper L’école d’astrologue
Ascendance dévoilée Technique
et même de les empêcher. En plus de l’astrologie et des Seppun enseigne les noms
Compétences savantes Grp. de comp. invocations des kamis élémentaires, ces samouraïs utilisent alchimiques des invoca-
des méthodes telles que le kawaru (le lancer de pièces, de tions à ses disciples, qui
Commandement Compétence
pierres, ou autres et la lecture des motifs qui en résultent) et combinent de nombreuses
Composition Compétence pratiques pour remplir
la lecture de présages, ainsi que des pratiques encore plus
RANG 2

leur mission : protéger


Méditation Compétence ésotériques. Les astrologues Seppun recourent aussi beau-
l’Empereur de toutes les
coup aux glyphes et à des mesures similaires pour fournir menaces qui planent sur
Invocations de l’Air (rang 1-2) Grp. de tech.
une protection constante contre les intrusions magiques. Ils lui (cf. Noms traditionnels
= Flux et reflux Technique travaillent en lien étroit avec la Garde du Palais : les deux des invocations, p. 190 du
Symbole de la Terre Technique
groupes coordonnent leurs efforts et se complètent. Livre de Règles).
A e  : +1 en Air, +1 en Eau
Compétences martiales Grp. de comp. te es e rt  isisse e tr is)  : +1 en
Sentiments Compétence Composition, +1 en Gouvernement, +1 en Médecine,
+1 en Méditation, +1 en Sentiments, +1 en Théologie
Forge Compétence
e r : 40
RANG 3

Théologie Compétence e i es essi es : Invocations ( ), Rituels ( ),


Invocations de Shūji ( )
la Terre (rang 1-3)
Grp. de tech. e i es e rt :
= Royaume factice
Technique $ ti  : = Enchaîner les ténèbres
des esprits renards
renards
$ ti s isisse e e)  : Assaut de jade,
Émanation de cauchemar Technique
Le domaine de Suijin
Compétences artisanales Grp. de comp.
$ Rit e s  : Communier avec les esprits, Divination,
Sentiments Compétence Seuil infranchissable
Survie Compétence
t e e is r it it e)  : au
RANG 4

Théologie Compétence début d’une session de jeu ou au prix d’une activité de


Invocations de l’Air (rang 1-4) Grp. de tech.
temps mort, vous pouvez utiliser n’importe quel anneau et
effectuer un test e ie N  1. En cas de réussite,
= Tombe de jade Technique choisissez un nombre de dés gardés inférieur ou égal
Le destin du samouraï Technique à votre rang d’école et réservez-les. Jusqu’à la fin
de la session de jeu ou jusqu’à la prochaine scène
Compétences savantes Grp. de comp.
de temps mort, lorsqu’un personnage effectue
Composition Compétence un test à l’aide de l’anneau choisi, vous pou-
Magouilles Compétence
vez remplacer un ou plusieurs dés gardés par
autant de dés réservés du même type.
RANG 5

Tactique Compétence i e e t e rt  : tunique sanc-


Invocations de tifiée, armure dissimulée, wakizashi
Grp. de tech.
l’Eau (rang 1-5) ( a re r) ( n) ea
Le couteau dans la plaie Technique
nécessaire de calligraphie, sac de
voyage, sacoche à parchemins,
Lame spirituelle Technique nécessaire de divination.
r s e ste ire it e trise)  : une
fois par session de jeu, vous pouvez dépenser
1 point de Vide
Vide pour révéler que vous avez pré pré--
dit l’un des événements de la scène en cours.
RANG 6

Vous pouvez annoncer de manière rétroactive


les préparations que vous avez effectuées, sou-sou-
mises à l’accord du MJ. Si l’une d’entre elles
nécessite un test de compétence (la préparation
d’un glyphe, par exemple), vous effectuez ce
test lorsque vous utilisez cette capacité.
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

PROGRÈS TYPE
École de garde du palais Seppun [Bushi] Compétences martiales Grp. de comp.

Les gardes du palais Seppun sont les gardes du corps per- Commandement Compétence
sonnels des plus importants membres de la famille impé-
Gouvernement Compétence

RANG 1
riale et des fonctionnaires de haut rang. Les meilleurs se
voient confier la protection de l’Empereur en personne. Sentiments Compétence
R AN
Chacun est totalement dévoué au bien-être de la per- Katas (rang 1)  Grp. de tech.
A R
sonne dont il assure la surveillance : il n’hésitera pas à se
= Style du croissant de lune  Technique
Les gardes du palais mettre entre elle et le danger, même au péril de sa vie.
Seppun n’ont tourné leur Pour accomplir la tâche sacrée de protéger l’Empereur, les Le fardeau du devoir Technique
lame contre l’Empereur gardes du palais Seppun perfectionnent leur maîtrise mar-
Compétences martiales Grp. de comp.
qu’une seule fois dans tiale jusqu’à faire partie des meilleurs guerriers de l’Em-
toute l’histoire. Lorsque pire, capables de réagir dans l’instant à n’importe quelle Courtoisie Compétence
Hantei XVI, le Chrysan- attaque, même soudaine ou inattendue. La patience des Culture Compétence
thème d’acier, ordonna
membres de ce corps d’élite est prodigieuse : ils peuvent

RANG 2
la mort de ses frères et Jeux Compétence
rester parfaitement immobiles à l’endroit qu’ils gardent, et
sœurs, puis celle de sa
mère, il fut terrassé par pourtant bien conscients de leur environnement et prêts à Katas (rang 1-2)  Grp. de tech.
des samouraïs persuadés bondir au premier signe d’une menace. = Assaut des
que le destin de l’Empire A e  : +1 en Terre, +1 en Vide feuilles pourpres
pourpres 
Technique
était en jeu. Les gardes te es e rt  isisse e i ) : +1 en Arts
= Courage exemplaire Technique
du palais présents ce martiaux (corps à corps), +1 en Arts martiaux (distance),
jour-là participèrent au +1 en Arts martiaux (mains nues), +1 en Forme, +1 en Compétences savantes Grp. de comp.
régicide ou choisirent de Méditation, +1 en Sentiments, +1 en Tactique
ne pas intervenir. Arts martiaux (corps à corps) Compétence
e r : 50
Tous les membres de la e i es essi es : Katas (), Rituels ( ) Shūji ( ) Commandement Compétence
garde impliqués com- e i es e rt : RANG 3 Magouilles Compétence
mirent ensuite seppuku,
admettant ainsi que, $ t s isisse e )  : = Attaque de iaijutsu : Katas (rang 1-3)  Grp. de tech.
malgré le bien-fondé lame ascendante, = Attaque de iaijutsu : lame = Style du fer dans
de leur action vis-à-vis Technique
horizontale les montagnes 
de l’Empire, ils avaient
personnellement trahi leur $ i isisse e )  : Ascendance dévoilée, Seuil infranchissable Technique
devoir ancestral. Évaluation honnête
Compétences martiales Grp. de comp.

rit es ie it e) : lorsque vous réus- Commandement Compétence


sissez un test d’initiative au cours d’une escarmouche ou
Gouvernement Compétence
RANG 4

d’un duel, ajoutez au résultat un nombre de succès bonus


égal à votre rang d’école. Théologie Compétence
i e e t e rt  : armure laquée, tunique sanc- Katas (rang 1-4)  Grp. de tech.
i i e dai h ( a ana e a i a hi) nagina a i en
= Destruction de l’âme  Technique
couteau, sac de voyage.
Le destin du samouraï Technique

Compétences martiales Grp. de comp.

Sentiments Compétence

Magouilles Compétence
RANG 5

Survie Compétence

Katas (rang 1-5)  Grp. de tech.

Réveil de l’âme Technique

L’immuable main de la paix Technique

Une percée dans les nuages (capacité de maî maî--


trise) : une fois par round, vous pouvez dépen-
RANG 6

dépen-
ser 1 point de Vide
Vide pour ajouter un nombre de
succès bonus égal à votre rang d’Honneur à un
test réussi d’action d’Attaque ou de Soutien.
R N
R N N

Lorsque vous créez


PROGRÈS TYPE un personnage de
moine des fortunes,
Compétences savantes Grp. de comp. vous devez choisir
quelle fortune il révère
Courtoisie Compétence en particulier. Vous
Travail manuel Compétence trouverez ci-dessous les

RANG 1
huit Fortunes majeures,
Méditation Compétence ainsi que des invocations
Shūji de la erre (rang 1) Grp. de tech.
qui leur correspondent.
Il ne s’agit là que de sug-
= Style du croissant de lune  Technique gestions : un moine peut
tout à fait vénérer une
Communier avec les esprits Technique
fortune mineure ou un
Compétences sociales Grp. de comp. kami local, ou même op-
ter pour d’autres invoca-
Ordre des moines des fortunes [Moine] Esthétique Compétence
tions qui représentent sa
Méditation Compétence relation avec la fortune.
Les moines des fortunes révèrent et vénèrent cette mul-

RANG 2
titude d’esprits divins allant des plus puissants d’entre h l gie Compétence Benten : L’appel du vent,
eux (Dame Soleil et Sire Lune) aux Fortunes majeures qui L’impermanence du res-
Shūji de l’ a (rang 1- ) Grp. de tech.
incarnent chacune un aspect important de l’humanité, en sac, Bénédiction d’Inari,
= le ar ne n ’ n Technique Voie de la sérénité,
passant par la myriade de kamis qui existent en chaque
Marcher sur les vagues
chose. Cette philosophie tournée vers l’extérieur plutôt S le de l’a alan he
Technique
que vers l’introspection se concentre sur la compréhen- meurtrière  Bishamon : Armure de
sion du monde. Contrairement aux shugenja de la caste la Terre, Morsure de
Compétences artisanales Grp. de comp.
des samouraïs, ces moines ne peuvent ni voir les kamis l’acier, Courage des sept
ni leur parler. Ils vouent cependant leur vie à la compré- Ar ar ia ( ain n e ) Compétence Tonnerres, Puissance
hension de ces esprits et à leur service. Bien qu’ils n’aient du Dragon de la Terre,
Méditation Compétence
RANG 3

Tetsubō de la Terre
pas accès aux connaissances secrètes des familles de
h l gie Compétence
shugenja, les moines qui obtiennent les faveurs d’une Daikoku : Armure
fortune découvrent souvent que les kamis écoutent leurs a a (rang 1- )  Grp. de tech. rayonnante, Caresse
prières et demandes, et qu’ils y répondent par d’impres- = Port altier de la Terre, Étreinte de
Technique
sionnants effets élémentaires. la Terre, Nuée vorace,
A e  : +1 en Terre, +1 en Eau Flux et reflux Technique Tombe de jade
te es e rt  isisse e tre)  : +1 en Compétences sociales Grp. de comp. Ebisu : Bō de l’Eau,
Arts martiaux (mains nues), +1 en Courtoisie, +1 en Mains des marées, Béné-
Culture Compétence
Culture, +1 en Méditation, +1 en Survie, +1 en Théologie diction d’Inari, Étreinte
e r : 40 Forme Compétence de Suijin, Fragment de
RANG 4

e i es essi es : Katas (), Rituels ( ) Shūji ( ) souvenir


h l gie Compétence
e i es e rt : Fukurokujin : Par la
Shūji de l’Air (rang 1- ) Grp. de tech.
lumière de Sire Lune,
$ t  : = Style de la main ouverte = Entrée en douceur Manteau de nuit, Esprit
Technique
$ Rit e s : Rite de purification, Seuil infranchissable de Fukurokujin, Des
Pilier de sérénité Technique secrets dans le vent,
$ i isisse e )  : Souffler sur les braises, Symbole de la Terre
Compétences savantes Grp. de comp.
Sous la surface
Composition Compétence Hotei : Le domaine
i ti es rt es it e) : vous vous de Suijin, Bénédiction
Méditation Compétence d’Inari, Cri de guerre de
RANG 5

êtes attiré la sympathie de la fortune que vous servez :


Représentations Compétence Matsu, Voie de la séréni-
elle vous octroie alors certaines invocations. Lorsque vous
té, Transfert d’énergie
effectuez un test pour utiliser une invocation apprise de Shūji de la erre (rang 1-5) Grp. de tech.
la sorte, ajoutez un nombre de succès bonus égal à votre Jurōjin : La danse
eil de l’ e Technique des saisons, Cœur du
rang d’école.
Choisissez une fortune comme principal objet de votre e r i n de l’ e  Technique Dragon de l’Eau, Baume
vénération ainsi qu’une invocation appropriée (cf. encart de Jurōjin, Voie de la
e r es rt es it e trise)  : sérénité, Puissance du
es rt es et e rs i ti s ci-contre) pour une fois par scène, vous pouvez soutirer une Dragon de la Terre
laquelle vous remplissez le prérequis de rang. Vous appre-
RANG 6

in ai n n’a e a e in de aire le
nez cette invocation (sans en payer le coût en XP). a ri i e ha i el n e aire ni d’a g en er le Kisshōten : Fragment de
ND. Utilisez la compétence Méditation à la place souvenir, Royaume fac-
Chaque fois que votre rang d’école augmente, vous
du test normalement requis pour cette invoca-
invoca- tice des esprits renards,
obtenez une invocation supplémentaire de cette façon. i n ( ai de e ili er l’annea indi )
i e e t e rt : tunique sanctifiée, tenue de céré- Bénédiction d’Inari,
Transfert d’énergie, Voie
nie ( n) a de age a he ar he in
de la sérénité

237
PROGRÈS TYPE

Compétences martiales Grp. de comp.

Composition Compétence
N
Survie Compétence
RANG 1

Les moines sont des Théologie Compétence


hommes de foi qui font
Katas (rang 1)  Grp. de tech.
office de conseillers, de
maîtres et de gardiens = Chevaucher les nuages Technique
spirituels. Nombre d’entre Chevaucher les nuages
eux passent toute leur vie Poing de terre Technique
dans un sanctuaire, un Compétences savantes Grp. de comp.
temple ou un monastère.
Mais bien plus nombreux Esthétique Compétence
encore sont ceux qui Courtoisie Compétence
RANG 2

parcourent l’Empire pour


apprendre du monde qui Méditation Compétence
les entoure, transmettre
ih de la erre (rang 1- ) Grp. de tech.
leur savoir, offrir conseils
et inspiration ou aider i el (rang 1- ) Grp. de tech. Ordre des moines shinséistes [Moine]
autrui... et sur ce point, = Tous les arts ne font qu’un
la plupart des moines ne
Technique Les moines shinséistes sont dévoués aux enseignements
font pas de distinc- Compétences martiales Grp. de comp.
de Shinsei, le Petit Maître, un saint homme énigmatique
tion entre samouraïs apparu pour guider les Kamis et le peuple de Rokugan
et roturiers. Commandement Compétence pendant la période agitée qui a marqué l’aube de l’Empire.
Jeux Compétence Le shinséisme est plus tourné vers la contemplation intros-
Par conséquent, ces
RANG 3

pective que le culte des fortunes : ses adeptes cherchent à


derniers ont en général Théologie Compétence
une excellente image des atteindre l’Illumination en eux-mêmes. Les enseignements
moines, tandis que les a a (rang 1- )  Grp. de tech. de Shinsei stipulent que tout vient du Vide et y retourne, et
samouraïs considèrent Étreindre le que les divisions entre les éléments, et entre toute chose,
ceux-ci avec une pointe Technique sont illusoires. Les moines qui acceptent pleinement ces
Dragon de la Terre
d’inquiétude : après vérités peuvent surpasser les limitations de ces mirages et
tout, aider le peuple et La voie du saule Technique
utiliser les éléments pour créer des effets qui semblent sur-
l’instruire peut déclencher Compétences martiales Grp. de comp. naturels. En vérité (du moins, selon un moine shinséiste),
une vague de mécontente-
Courtoisie Compétence
ne faire qu’un avec l’univers de cette façon est ce qu’il y a
ment parmi les paysans.
de plus naturel au monde.
Afin de proposer leurs Survie Compétence A e  : +1 en Terre, +1 en Vide
RANG 4

bons soins de manière


efficace, les moines Théologie Compétence te es e rt  isisse e tre)  : +1 en
cherchent à comprendre le Arts martiaux (mains nues), +1 en Composition, +1 en
ih de l’ a (rang 1- ) Grp. de tech.
monde en l’observant et Esthétique, +1 en Forme, +1 en Méditation, +1 en Théo-
ils se concentrent sur les = Pilier de sérénité Technique logie
méthodes d’apprentissage. Pilier de sérénité
La voie de l’étoile filante Technique
e r : 40
Souvent ascétique, leur e i es essi es : Katas () ih ( ), Rituels ( )
approche de la vie en fait [Choisissez un groupe
Grp. de comp. e i es e rt :
des personnes robustes et de compétences]
athlétiques : ils peuvent
Arts martiaux (mains nues) Compétence $ t  : Offensive de la Terre
ainsi supporter les
rigueurs d’une existence Méditation Compétence $ i isisse e e )  : Esprit purificateur, La
RANG 5

faite de longs et difficiles Terre voit sans yeux, Ki protecteur


voyages, ainsi que de Théologie Compétence

privations. Leur but ul- ih d ide (rang 1-5) Grp. de tech. r sser e i e it e) : lorsque vous dépen-
time consiste à atteindre sez 1 point de Vide pour Saisir l’instant (cf. page 36 du Livre
= Réveil de l’âme Technique
cet état insaisissable : de Règles), vous pouvez aussi considérer que les rangs de
l’Illumination. = Réveil de l’âme
LL’immuable
’immuable main la compétence utilisée sont égaux à votre rang d’école. Si
Technique
de la paix vos rangs dans la compétence en question sont supérieurs à
i e e i e it e trise) : une votre rang d’école, ou s’ils sont égaux à 5, vous pouvez à la
fois par scène, vous pouvez utiliser une tech-
tech- place ajouter 1 gardé affichant au résultat.
RANG 6

ni e de ih e ne nnai e a i e e t e rt  : en e rdinaire ( n)


pouvez utiliser la compétence Méditation à la
la e d e n r ale en re i r e ih nunchaku (bâtons reliés), couteau, sac de voyage.
(mais vous devez utiliser l’anneau indiqué).

238
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

PROGRÈS TYPE Tradition d’imposteur kitsune NN R


[Courtisan, Shugenja] R NAR
Compétences martiales Grp. de comp.

Représentations Compétence e i ne n de e ri renard i d hi h -d Les kitsune qui vivent


le royaume des animaux. En de rares occasions, un de comme des samouraïs
Survie Compétence
ces farceurs choisit de rester dans le royaume des mortels
RANG 1

doivent adopter le
Théologie Compétence pour vivre comme un humain. Ces kitsune peuvent tom- code du bushido et
ber amoureux d’un humain ou d’une humaine, voire se s’y conformer, même
Invocations de l’Air (rang 1) Grp. de tech. s’ils n’en acceptent
marier, et les descendants de telles unions adoptent leur
= Attiser les flammes Technique jamais entièrement
héritage spirituel à différents degrés. Souvent, les kitsune
la légitimité. De bien
Aimable plaisanterie Technique qui revêtent leur forme humaine resplendissent de beauté
des façons, le bushido
ou conservent un agréable air de jeunesse. En général, ils entre en conflit direct
Compétences sociales Grp. de comp.
ne peuvent pas s’empêcher de garder leur bonne humeur, avec la nature farceuse
Magouilles Compétence mais ils ont tendance à se montrer curieux au point de des kitsune, ce qui
passer pour impolis ou indiscrets auprès des Rokugani. entraîne d’intenses
Survie Compétence
Plus que leur attitude, leurs queues risquent d’éventer luttes internes. Ainsi,
RANG 2

Théologie Compétence leur secret : elles réapparaissent parfois malgré l’illusion les personnages impos-
grâce à laquelle ils se déguisent en humains. Les kitsune teurs kitsune possèdent
Shūji de l’Air (rang 1- ) Grp. de tech.
une valeur d’Honneur
obtiennent plus de queues à mesure qu’ils vieillissent, et
= Éclatante démonstration Technique comme tout samouraï
les plus âgés et puissants d’entre eux en possèdent neuf.
normal, et ils suivent
= Royaume factice A e  : +1 en Air, +1 en Feu les règles classiques
Technique
des esprits renards te es e rt  isisse e tr is) : +1 en Arts de gains et de pertes
Compétences artisanales Grp. de comp. martiaux (mains nues), +1 en Courtoisie, +1 en Jeux, +1 en d’Honneur.
Représentations, +1 en Survie, +1 en Théologie
Culture Compétence
e r : 30
En tant que kitsune,
vous devez sacrifier
Méditation Compétence e i es essi es : Invocations ( ), Rituels ( ),
1 point d’Honneur pour
RANG 3

Shūji ( ) vous faire passer pour


Théologie Compétence
s t es : Fausse identité (cf. page 247) un noble doté d’un
n a i n de l’Air (rang 1- ) Grp. de tech. e i es e rt : statut plus important
= Style de la (en plus de ceux que
vague déferlante 
Technique $ ti s  : Caresse de la nature, Fragment de vous devez sacrifier
souvenir normalement pour agir
= Port altier Technique de manière déshono-
$ Rit e  : Communier avec les esprits
Compétences sociales Grp. de comp. rante, y compris pour
mentir, alors que vous
Méditation Compétence s rit re r it e)  : votre véritable forme
êtes déguisé).
est celle d’un immense renard à huit queues ou moins si
Sentiments Compétence
vous êtes un kitsune pur-sang, ou celle d’un homme ou
RANG 4

Magouilles Compétence d’une femme présentant certaines caractéristiques vul-


pines si vous êtes également d’ascendance humaine.
Shūji de l’Air (rang 1- ) Grp. de tech.
Au prix d’une action de Manipulation et de Soutien,
= Style de la disparition vous pouvez vous transformer et adopter votre véri-
Technique
du monde  table forme ou votre forme humaine, ou encore celle
Bravade Technique d’une autre créature naturelle de gabarit 1 ou 2, au
choix du MJ (mais vous ne pouvez pas imiter un indivi-
Compétences savantes Grp. de comp.
du précis). Les observateurs dont la Vigilance est infé-
Arts martiaux (mains nues) Compétence rieure ou égale à votre rang d’école plus vos rangs
Méditation Compétence en Représentations ne décèlent aucun défaut dans
RANG 5

votre apparence. Cependant, certains traits carac-


Survie Compétence
téristiques persistent d’une forme à l’autre. Si vous
n a i n de l’Air (rang 1-5) Grp. de tech. devenez Compromis, votre déguisement faillit et
= Destruction de l’âme révèle subtilement vos véritables oreilles, vos
 Technique
pieds ou votre ombre… voire vos queues.
Entrée en douceur Technique i e e t e rt  : prenez l’équipe-
Ascension de la neuvième queue (capacité de ment de départ d’une autre école, appro-
maîtrise) : tant que vous revêtez votre véritable priée à votre fausse identité.
forme (et portez vos neuf queues), les effets sui-
sui-
vants s’appliquent : la valeur de vos Résistances
h i e e rna relle a g en e de in
RANG 6

quand vous efeffectuez


fectuez un test de compétence, vous
pouvez changer le résultat d’un dé qui contient
en un résultat qui contient e d’a i n
d’Attaque rreçoivent
eçoivent la nouvelle aubaine suivante :
: après avoir résolu cette action, si votre
cible est Hors de combat ou Inconsciente, vous
dévorez son corps ou bannissez son âme, ce qui
a pour ef
effet
fet de la tuer instantanément.
PROGRÈS TYPE

Compétences martiales Grp. de comp.

Courtoisie Compétence

Représentations Compétence

RANG 1
Magouilles Compétence

Katas (rang 1)  Grp. de tech.

= Dard
Dard mortel Technique

Sous la surface Technique

Compétences martiales Grp. de comp.

Commerce Compétence
Conspiration de saboteurs
Médecine Compétence
du Kolat [Shinobi]

RANG 2
Magouilles Compétence
Les saboteurs du Kolat ont la réputation,
Katas (rang 1-2)  Grp. de tech.
dans la pègre de Rokugan, de faire partie des
meilleurs assassins. En fait, ces agents infiltrés = Nuage toxique Technique
ou dormants sont de dévoués membres du Kolat,
Affluents du négoce Technique
une secte secrète et subversive décidée, pour éta-
blir le règne de l’humanité, à mettre un terme à la Compétences savantes Grp. de comp.
révérence dont font preuve les Rokugani envers l’Ordre Composition Compétence
céleste. Les revenus de ces activités criminelles four
four-
Forge Compétence

RANG 3
nissent aux chefs de cellule des ressources importantes
et en grande partie impossibles à tracer. Les saboteurs Survie Compétence
du Kolat poursuivent des objectifs variés, différents pour
Katas (rang 1-3)  Grp. de tech.
chaque cellule, mais leur ambition ultime consiste à ins-
tituer « l’ère de l’humanité ». Le véritable objectif d’un Flux et reflux Technique

N saboteur est d’entreprendre des missions pour le Kolat, Tisser sa toile Technique
R selon les instructions de son responsable (un autre indivi-
Compétences martiales Grp. de comp.
du appartenant à sa branche de la conspiration, mais dont
La conspiration des il peut ne pas connaître l’identité, puisque la plupart des Commerce Compétence
saboteurs du Kolat et la membres de la secte vivent sous couverture).
Magouilles Compétence
RANG 4

tradition d’imposteur A e  : +1 en Air, +1 en Eau


kitsune ne sont pas te es e rt  isisse e i ) : +1 en Arts Survie Compétence
comme les autres écoles.
martiaux (corps à corps), +1 en Arts martiaux (distance), Katas (rang 1-4)  Grp. de tech.
À vrai dire, il ne s’agit
+1 en Commerce, +1 en Forme, +1 en Magouilles, +1 en
même pas de véritables = Neutralisation Technique
écoles de samouraïs. Du Médecine, +1 en Méditation
point de vue des règles, e r : 20 Proposition du loup Technique
elles fonctionnent e i es essi es : Katas () Shūji ( )
Compétences martiales Grp. de comp.
comme les autres s t e : Fausse identité (cf. page 247)
cursus, mais d’un point e i es e rt : Commandement Compétence
de vue narratif, elles re-
Commerce Compétence
RANG 5

présentent des individus $ t  : = Style de la menace voilée


extérieurs à la société Magouilles Compétence
classique des nobles.
$ Ni ts  : = Disparition
Katas (rang 1-5)  Grp. de tech.
Les PJ de L5A ont
$ i : Cadence
= Ninjutsu (rang 1-5) Technique
l’habitude de garder
te r r essi e it e)  : une fois par
leurs secrets : intégrer Entrée en douceur Technique
un PJ kitsune ou du session de jeu et au début d’une scène, vous pouvez révéler
Kolat dans un groupe ne qu’un PNJ présent dans celle-ci est la cible de votre mission Instaurer une ère nouvelle (capacité de maî maî--
actuelle. Le MJ décide alors de ce en quoi consiste votre trise)  : au prix d’une activité de temps mort,
devrait donc pas poser
vous pouvez éliminer ou contourner les gardes
de souci. Cependant, ces mission : par exemple, vous pourriez devoir saboter les acti- d’un PNJ ou toute autre mesure de sécurité qui
personnages diffèrent vités en cours de votre cible, organiser un coup monté afin se dresse entre vous deux. Effectuez un test de
des samouraïs ordi- de la faire accuser d’un crime qu’elle n’a pas commis, l’as- Magouilles (Air) prenant pour cible ce PNJ. Le
naires de manière fonda- sassiner ou même vous assurer qu’elle survit pour jouer son ND de ce test est égal au rang de confrontation
mentale et unique : par le plus élevé de votre cible. Si vous réussissez et
rôle dans un sinistre complot à long terme. Jusqu’à la fin si le PNJ est un Sous-fifre ou un Antagoniste que
conséquent, ils peuvent
de la session de jeu, lorsque vous effectuez un test prenant le MJ n’estime pas indispensable à l’intrigue de
ne pas convenir à toutes
la campagne, vous atteignez votre objectif. Ce
RANG 6

les parties. Comme pour cible le PNJ choisi, vous pouvez relancer un nombre
de dés égal à votre rang d’école. dernier peut consister à assassiner votre cible
d’habitude, le MJ et les ou à la menacer de manière efficace, selon la
joueurs doivent collabo- i e e t e rt : tenue de cérémonie, tenue ordi- méthode de votre choix (mais approuvée par
rer pour s’assurer que naire e en de age dai h ( a ana e a i a hi) le MJ). Si le PNJ est un Antagoniste important,
tous les PJ sont adaptés couteau, cinq shuriken, une dose de poison, sac de voyage. vous vous retrouvez seul face à lui. Il est pro-
pro-
à leur campagne. bable qu’une scène de confrontation s’ensuive.
:VVos
os efforts passent inaperçus, sauf peut-
être auprès de la cible.
240 : Si vous assassinez la cible, sa mort passe
pour un accident ou pour un décès lié à des
causes naturelles
naturelles (mais un enquêteur doué pour
pour--
rait découvrir la vérité).
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

De nouveaux avantages
— On dirait bien que ton cabot ne t’aidera pas.
— Yuki, lança-t-elle avec un sourire au moment où le
chien se mit à grogner. Attaque.
Les avantages de cette section proposent de nouvelles
es : relations, mental
options aux joueurs lorsqu'ils créent leur personnage, mais
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
ce dernier peut aussi recevoir des avantages supplémen-
nage bénéficiant de l’aptitude Dresseur :
taires en cours de jeu, comme indiqué en page 99-100 du
Livre de Règles. $ Vous avez de bonnes connaissances au sujet des
comportements des animaux ainsi que sur les tech-
des aptitudes niques les plus efficaces pour les dresser. Vous

particulières reconnaissez également les signes typiques grâce


auxquels les animaux, domestiqués ou sauvages,
Le format de ces aptitudes est identique à celui du expriment leur hostilité.
itre 2 du Livre de Règles. $ Lorsque vous effectuez un test où votre expertise
du dressage vous avantage (par exemple, un test
Ami de la confrérie (Vide) de Médecine [Eau] pour établir un diagnostic sur
un animal, ou bien un test de Survie [Eau] pour
Assis derrière son bol à aumône, le moine chantait. Les fer- apprendre à un animal à répondre à un ordre), vous
miers et les artisans lui offraient un peu de riz, un peu de pouvez relancer jusqu’à deux dés.
fruits ici et là. Les marchands passaient devant lui sans lui
lancer un regard.
— Puis-je m’asseoir ? Héros de [Village] (Feu)
Le moine leva les yeux. Une jeune bushi lui tendait son
Sofu s’assit sur le rocher dans le parc du village, et les en-
bol plein de nourriture.
fants se rassemblèrent autour de lui.
— Je n’ai jamais aimé les racines de lotus. Quelle
— Akio se redressa de toute sa taille. Il frappa sa poi-
idiote je fais d’en acheter autant !
trine nue et rugit : « Je ne suis pas un guerrier, mais vous
Le moine sourit, prit le bol et inclina la tête. allez saigner. »
— Tu es loin d’être idiote, Satoko-kun, et tu n’as ja- Une femme qui passait par là lui jeta un regard :
mais su mentir.
— Chut, Sofu. Ne leur raconte pas cette histoire. Elle
e : relations est trop violente.
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person- — Veux-tu que je mente ? C’est une histoire vraie. Les
nage bénéficiant de l’aptitude Ami de la confrérie : enfants doivent savoir comment Akio a sauvé notre village.

$ Vous êtes connu comme étant un bienfaiteur et es : renommée, relations


un allié de la confrérie de Shinsei, et chacun vous ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
considère comme une personne pieuse et géné- nage bénéficiant de l’aptitude Héros de [Village] :
reuse, sauf en présence de preuves concrètes du
$ Vous vous êtes forgé une réputation héroïque
contraire.
grâce à ce que vous avez accompli pour un village
$ Lorsque vous effectuez un test qui s’appuie sur précis. Les habitants de celui-ci font de leur mieux
votre réputation de pieux samouraï shinséiste (par pour vous aider, quelle que soit votre demande (et
exemple, un test de Courtoisie [Vide] pour établir chantent vos louanges à chaque occasion).
un lien spirituel avec un moine, ou bien un test de
$ Lorsque vous effectuez un test où votre réputation
Théologie [Vide] pour approfondir la sagesse que
héroïque vous avantage (par exemple, un test de
vous tirez du Tao de Shinsei), vous pouvez relancer
Commandement [Feu] pour mobiliser des paysans
jusqu’à deux dés.
afin qu’ils défendent leur village contre des ban-
dits, ou bien un test de Représentations [Feu] pour
impressionner autrui grâce aux récits héroïques
Dresseur (Eau) qui se racontent sur vous), vous pouvez relancer
— Yuki, assis ! jusqu’à deux dés.
Elle montra le sol du doigt, mais le chien d’un blanc im-
maculé préféra sautiller autour d’elle. Les garçons se mo-
quèrent d’elle. Liens avec la pègre (Air)
— Yuki, viens ici ! Asumi abaissa sa manche et montra son épaule. Tous re-
Elle s’accroupit et écarta les bras, mais le chien préféra tinrent leur souffle en apercevant le dragon tatoué qui des-
tirer sur une touffe d’herbe. Un des garçons les plus grands cendait en serpentant le long de son dos. Ils s’inclinèrent
ramassa une pierre et s’approcha de la fille. jusqu’à ce que leur front touche le sol.

241
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

— Je suis désolée de vous révéler ainsi qui m’envoie, — Je ne vous traque pas, mes frères. Vous pouvez échap-
mais pourrions-nous couper court et parler affaires ? En per aux chasseurs si vous vous dirigez vers le soleil couchant.
l’occurrence, celles qui consistent à introduire discrète- Les grognements reculèrent dans les bois et elle aperçut
ment ce dont j’ai besoin sur les terres du Clan de la Grue. un loup s’éloigner en boitant. Elle s’inclina, murmura une
e : relations courte prière, et rangea sa dague dans son fourreau.
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person- es : mental, physique
nage bénéficiant de l’aptitude Liens avec la pègre : ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
nage bénéficiant de l’aptitude Pisteur expert :
$ Vous avez cultivé un réseau d’alliés et d’associés au
sein du milieu criminel rokugani. Vous pouvez uti- $ Vous pouvez détecter les signes du passage d’un
liser ces relations afin d’obtenir des informations,
animal ou d’une personne, aussi subtils soient-
des services ou des biens illégaux.
ils, que d’autres pisteurs ne remarqueraient pas,
$ Lorsque vous effectuez un test où vos liens avec et vous pouvez suivre une piste qui traverse des
la pègre vous avantagent (par exemple, un test de rivières, des villes ou d’autres obstacles qui per-
Magouilles [Air] pour contacter la pègre dans une draient vos pairs.
ville que vous connaissez mal, ou bien un test de
Commerce [Air] pour vendre des objets volés à un
$ Lorsque vous effectuez un test où votre expertise
prix gonflé ou sans attirer l’attention), vous pouvez de la traque vous avantage (par exemple, un test
relancer jusqu’à deux dés. de Forme [Air] pour suivre un animal sans vous
faire remarquer, ou bien un test de Survie [Air] pour
suivre la piste d’un individu), vous pouvez relancer
Lignée kuge (Terre) jusqu’à deux dés.

— Tu crois que c’est un privilège ? aboya Oncle Daiki.


Son neveu balaya la remarque d’un geste de la main. Protecteur spirituel (Vide)
— Porter le nom des Otomo en est un : nous n’avons
pas à salir nos mains au contact des heimin. Les mains jointes en une prière, les jumeaux s’inclinèrent
devant les pierres polies entassées au-dessus de la source
L’oncle secoua la tête :
naturelle.
— Nous avons une responsabilité supplémentaire. Les
— Miyū, veuillez bénir notre famille, chantèrent-ils
clans possèdent les terres et les fermiers pour la labourer :
ils doivent donc superviser leurs serviteurs. Nous sommes d’une seule voix.
dévoués à l’Empereur, et par conséquent tout Rokugan. Entre les arbres, un assassin les observait. Tuer les en-
Nous supervisons tout le peuple. fants pour déséquilibrer la famille. Le chagrin, pensa-t-il,
est une lame acérée.
e : relations
Sa main se mit à trembler. Son cœur bondit. Il se mit à
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
penser à son père, décapité pour trahison. Le souvenir se
nage bénéficiant de l’aptitude Lignée kuge :
transforma, et l’homme vit sa propre tête coupée. Il s’enfuit.
$ Vous êtes né parmi les kuge, la haute noblesse La peur, pensa Miyū, est une lame encore plus
de Rokugan. Les samouraïs de la caste des buke tranchante.
doivent vous traiter avec le plus grand des respects.
e : spirituel
$ Lorsque vous effectuez un test où votre autorité ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
héréditaire vous avantage (par exemple, un test de nage bénéficiant de l’aptitude Protecteur spirituel :
Commandement [Terre] pour faire taire un buke, ou
bien un test de Gouvernement [Terre] pour démon- $ Pour certaines raisons, connues ou non, un esprit
trer vos connaissances sur les pratiques des familles veille sur vous et agit de manière subtile pour vous
impériales), vous pouvez relancer jusqu’à deux dés. protéger. Il peut vous avertir du danger ou placer
un obstacle mineur entre vous et ceux qui veulent
vous blesser.
Pisteur expert (Air) $ Lorsque vous effectuez un test où votre protec-
Les loups s’étaient reposés là la veille et avaient refusé teur spirituel vous avantage (par exemple, un test
d’abandonner leur compagnon blessé. Les loups aussi de Forme [Vide] pour éviter instinctivement une
connaissent la loyauté et le devoir envers leur clan. attaque-surprise, ou bien un test de Survie [Vide]
Elle entendit les grognements face à elle, mais son pour remarquer un danger imminent), vous pouvez
cœur ne s’emballa pas. relancer jusqu’à deux dés.

242
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

Relations influentes (Eau) $ Éliminez 3 points de Conflit après avoir effectué un


test en relation avec un bonsaï (par exemple, un test
« N’oubliez pas d’offrir un cadeau à votre seigneur ou à d’Esthétique [Air] pour tailler ou entretenir un arbre, ou
votre dame à chaque solstice et à chaque équinoxe. Inutile un test de Sentiments [Air] pour identifier la réponse
de vous montrer obséquieux : ce présent symbolise la rela- émotionnelle d’un individu face à un bonsaï).
tion qui vous unit à eux, votre service, et le sabre que vous
levez sous leurs couleurs. Il représente aussi le lien qu’ils
entretiennent avec vous, ainsi que les principes qui leur Chercheur (Air)
imposent de vous guider et de vous défendre, comme un
parent le fait avec son enfant. » Asako Akitoshi respira l’odeur de ficelle, d’encre et
de papier.
— Kōshi, Notes concernant la famille
— Puis-je vous aider ? demanda la relieuse.
e : relations — Je cherche un livre écrit par Tendō.
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
— Samouraï du Clan du Phénix, vous prenez de grands
nage bénéficiant de l’aptitude Relations influentes :
risques à venir à Ryokō Owari Toshi.
$ Vous disposez d’un nombre conséquent de rela- Ses yeux brillèrent :
tions bien placées dans les cours et le gouverne- — Je cherche ce livre depuis deux ans.
ment de Rokugan, et vous pouvez subtilement glis- La relieuse tendit la main sous le comptoir, pour attra-
ser leur nom dans une conversation afin de faire per non pas sa dague, mais Le Labeur, l’Eau.
valoir votre propre importance. — Il ne doit pas quitter l’échoppe.
$ Lorsque vous effectuez un test pour lequel vos rela- Akitoshi s’installa immédiatement sur un tabouret pour
tions vous avantagent (par exemple, un test de enfant dans le coin, le livre sur ses genoux, et les yeux dé-
Courtoisie [Eau] pour impressionner un courtisan, jà dans le lointain.
ou bien un test de Gouvernement [Eau] pour iden-
e : mental
tifier un contact utile au sein de la noblesse locale),
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
vous pouvez relancer jusqu’à deux dés.
nage ayant choisi la passion Chercheur :

Vous pouvez citer de mémoire les ouvrages qui


des passions
$
font autorité dans la plupart des sujets, et vous

particulières $
savez toujours où démarrer vos recherches.
Éliminez 3 points de Conflit après avoir effectué
Le format de ces passions est identique à celui du un test pour mener des recherches sur un sujet
itre 2 du Livre de Règles. (par exemple, un test de Culture [Air] pour locali-
ser un poème particulier, ou un test de Médecine
Bonsaï (Air) [Air] pour mettre la main sur toutes les références
connues à une maladie mystérieuse).
– Non, ne coupe pas ça.
Il lui tapa sur la main pour qu’elle la retire.
– Mais la branche n’est pas à sa place. Cité [au choix] (Eau)
– La nature ne raisonne pas en termes de mauvais po-
Ils franchirent les portes de Toshi no Aida ni Kawa, et aussi-
sitionnement. Elle est, tout simplement.
tôt, Kitsuki Moriko étreignit un homme, à grand renfort de
– Dans ce cas, pourquoi passer autant de temps à tail- cris et de rires. Son compagnon frémit. Il jeta un coup d’œil
ler ces arbres ? Nous allons à l’encontre de la nature, par à la rue, boueuse et bondée de chevaux, de chiens et de
notre action. gens qui se mélangeaient.
– Ah, vois-tu, tu penses que nous ne faisons pas partie Moriko se retourna ; elle tenait quelque chose de blanc
de la nature. Nous pratiquons le bonsaï pour nous souve- et mou, enveloppé dans du tissu :
nir que c’est pourtant le cas.
— Tiens, goûte.
e : mental — Du tofu ?
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person- — Du fromage. Du lait de chèvre caillé, répondit-elle
nage ayant choisi la passion Bonsaï : dans un sourire. Cette cité n’est-elle pas merveilleuse ?
— Si, tout à fait charmante, répliqua-t-il en tentant de
$ Vous disposez de vastes connaissances sur l’art du
retenir un haut-le-cœur.
bonsaï, y compris sur les outils et les techniques
utilisés dans sa pratique. Vous pouvez juger de es : relations, mental
la qualité d’un bonsaï et savoir quand un arbre a ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
été négligé. nage ayant choisi la passion Cité :

243
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

$ Vous connaissez une cité particulière sur le bout e : mental


N
des doigts, comme si vous y aviez vécu depuis ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
Les roturiers de l’Empire votre enfance, des lieux réputés aux zones dange- nage ayant choisi la passion Histoire militaire :
doivent être surveillés, reuses ou peu recommandables, en passant par les
mais ils sont bien trop secrets de polichinelle. $ Vous pouvez rapidement et de mémoire identifier
nombreux pour que les les stratagèmes militaires classiques ou historiques.
$ Éliminez 3 points de Conflit après avoir effectué un
samouraïs s’en chargent La plupart du temps, vous pouvez suggérer une
étroitement. Les dōshin, test pour apprendre quelque chose sur cette ville
tactique appropriée pour la situation en cours en
ces paysans représentants ou pour transmettre vos connaissances à son sujet
vous basant sur un événement historique similaire.
de l’ordre, sont des heimin (par exemple, un test de Courtoisie [Eau] pour vous
à qui un seigneur a or- lier d’amitié avec un habitant du cru, ou un test de $ Éliminez 3 points de Conflit après avoir effectué un
donné de tenir leurs pairs Culture [Eau] pour trouver un établissement sus- test en relation avec votre connaissance de l’his-
ainsi que les burakumin ceptible de vous offrir un service en particulier). toire militaire (par exemple, un test de Comman-
à l’œil. Ils peuvent être dement [Terre] pour remonter le moral des troupes
responsables d’un simple grâce au récit d’une bataille historique comparable,
village comme d’un
district de cité : leur Gourmet [Eau] ou un test de Tactique [Terre] pour préparer une
défense en réponse à la stratégie que votre adver-
territoire consiste en gé-
Près de Higashi Chushin Mura, un fermier du nom de Daichi saire va adopter, selon vous).
néral en une zone habitée
par un grand nombre de produit de délicieux tsukemono d’une grande diversité. Son
paysans ou peu visitée dernier daikon s’accompagne des parfums simples du sel
par les samouraïs. Ils sont et du vinaigre, mais les variétés de tsukemono les plus an- Jardins de rocaille (Vide)
autorisés à porter certains ciennes présentent des saveurs complexes, qui évoquent
types d’armes souvent non des souvenirs de la terre et de la mer. Par exemple, les Doji Kentarō se permit un petit sourire. Il installa la pierre
létales, mais ils n’ont le concombres offrent les riches et délicats arômes du shōyu. (ronde et lisse) en douceur au milieu du jardin de rocaille,
droit de les utiliser que Les généraux veillent à acheter ses prunes marinées, dont se séparant de ce poids rassurant dans sa main. Bien
contre d’autres heimin qu’elle ressorte parmi les galets polis, plus petits, elle était
l’acidité stimulante les aide à sortir de leur torpeur matinale.
ou contre des burakumin. aussi à sa place, une forme gris sombre au centre d’une
De même, les dōshin ne es : mental, relations mer gris clair. Cette pierre est comme moi avec ma famille.
peuvent ni enquêter ni ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
punir un crime si d’autres e : mental
nage ayant choisi la passion Gourmet :
castes que les roturiers
ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person-
sont impliquées. $ Vous pouvez identifier les différentes spécialités gas- nage ayant choisi la passion Jardins de rocaille :
En théorie, les dōshin tronomiques régionales. Vous disposez de vastes
ne rendent des comptes connaissances sur les techniques de préparation $ Vous connaissez les techniques pour bien arranger
qu’aux yoriki, afin culinaires. Vous savez toujours distinguer les ingré- un jardin de rocailles (karesansui), que vous avez
d’éviter à un magistrat dients d’un plat, y compris ceux qui sont potentiel- apprises dans des manuels réputés. Vous pouvez
de perdre son temps avec lement dangereux. expliquer la symbolique et la signification des diffé-
les problèmes et les trans- rents arrangements et caractéristiques.
gressions insignifiantes $ Éliminez 3 points de Conflit après avoir effectué un
des paysans. La plupart test en relation avec de la nourriture de très bonne $ Éliminez 3 points de Conflit après avoir effectué
des dōshin ont une autre qualité (par exemple, un test de Culture [Eau] pour un test en relation avec les jardins de rocaille (par
occupation, sauf si leur trouver un endroit où dîner dans une ville mécon- exemple, un test d’Esthétique [Vide] pour déceler
juridiction est si animée nue, ou un test de Travail manuel [Eau] pour prépa- un sens caché dans l’arrangement d’un jardin de
qu’il leur faut lui consa- rocaille, ou un test de Méditation [Vide] pour don-
rer un bon repas).
crer tout leur temps.
ner du sens à des événements lorsque vous réflé-
chissez devant un jardin de rocaille).
Histoire militaire (Terre)
Le samouraï inclina la tête. Navigateur (Feu)
— Je ne m’attendais pas à ce que Matsu frappe si tôt
le matin. Les archives de la famille la décrivaient tel un esprit errant.
— Tu la pensais fainéante, dépourvue de discipline et Les chasseurs la retrouvaient toujours crasseuse et écheve-
incapable de se lever avant l’aube ? répliqua sa sœur. lée, perdue aux alentours de Shiro Daidoji.
— Non mais… commença-t-il à répondre en secouant Ses lettres dépeignaient pourtant une autre personne.
la tête. Qui agirait ainsi ? Dotée de l’esprit d’un loup, elle avait exploré sans peur les
plaines, les montagnes et les rivières autour des terres de
Elle regarda son frère avec mépris tandis qu’un scribe
sa famille. Elle n’était absolument pas perdue, mais avait
plaçait dans les bras de celui-ci une pile de livres pliés en
communié avec la terre et l’eau, puis avait mis en œuvre
accordéon.
ses talents en prenant la tête de ses rapaces pour repous-
— Petit frère, tu devrais savoir que nous avons utilisé
ser les armées du Clan du Lion à Shiro Shiba.
la même tactique contre le Clan du Lion il y a une géné-
ration de cela. e : mental

244
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

ets  : les avantages suivants s’appliquent à un person- Lignée maudite (Vide) A N


nage ayant choisi la passion Navigateur :
De nombreuses raisons expliquent la disparition du nom de Les malédictions qui
$ Vous pouvez rapidement comprendre les cartes famille des ——. L’ignoble assassinat de l’Empereur a ruiné la peuvent affliger une fa-
les plus archaïques, incomplètes ou méconnues, et réputation des ——, et du surcroît, la malchance n’a jamais mille de samouraïs sont
vous savez toujours où se trouve le nord. quitté les ——. Les offrandes qu’ils déposaient sur les tombes innombrables, et leurs
de la famille se décomposaient immédiatement. L’encre sur particularités relèvent
$ Éliminez 3 points de Conflit après avoir effectué plus du drame, de l’his-
leurs contrats refusait de sécher. Le saké qu’ils entreposaient
un test pour vous orienter (par exemple, un test de toire et du mysticisme
tournait au vinaigre. Pour échapper à leur destin, ils rayèrent
Navigation [Feu] pour tracer une route inconnue que des règles. Elles sont
leur nom de toutes les archives. Ainsi, le court règne de la fa-
en mer, ou un test de Survie [Feu] pour extrapoler en général formulées
mille —— s’acheva et elle disparut dans les ténèbres.
votre position d’après celle des étoiles). dans des termes obscurs
es : relations, spirituel et métaphoriques, et une
famille peut très bien ne
ets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per-
jamais comprendre la

De nouveaux désavantages
sonnage affligé du coup du sort Lignée maudite :
nature de sa malédic-
tion. Voici quelques
$ Votre famille est maudite. Avec le MJ, vous devez
exemples qui pourront
décider de la manière dont cette malédiction vous inspirer :
Les désavantages de cette section proposent de nouvelles
se manifeste.
options aux joueurs lorsqu'ils créent leur personnage, mais La malédiction qui
ce dernier peut aussi en recevoir en cours de jeu, comme $ Lorsque vous effectuez un test qui peut avoir un frappe une famille peut
indiqué en page 99 du Livre de Règles. lien avec votre malédiction (par exemple, un test obliger ses membres à…
de Culture [Vide] pour comprendre l’histoire de

des coups du sort votre famille, ou un test de Théologie [Vide] pour … mourir de vieillesse,
mais jamais au combat.
chercher à obtenir la bénédiction de vos ancêtres),
particuliers vous devez choisir et relancer deux dés contenant
ou . Après avoir résolu le test, si vous échouez,
… être oubliés.

Le format de ces coups du sort est identique à celui du … ne jamais connaître


vous gagnez 1 point de Vide.
itre 2 du Livre de Règles. la paix.

… ne jamais remplir leur


Allergie [au choix] (Air) Méprisé à [une ville] (Eau) plus grand devoir.

… ressentir la folie de
— Maudites fleurs ! — On ne peut pas aller à Toshi no Meiyo Gisei.
Sire Lune.
Les soldats trouvaient le champ magnifique, les cou- — Quoi ? Shinji, c’est juste à deux jours de route, ré-
leurs vives leur faisaient oublier la bataille à venir, mais le pondit Ichirō. … porter le fardeau
d’actes terribles.
général, quant à lui, éternuait. Son beau compagnon secoua la tête, mais un sourire
— Je devrais ordonner qu’on les coupe. effleura ses lèvres. … perdre leurs forces
— Non, non. J’ai… causé quelques tracas là-bas. Une quand ils en ont le plus
Son second s’agenouilla :
femme était impliquée. Puis un homme. Puis une épouse besoin.
— Si tel est votre désir, bien que le moral soit bon,
jalouse. Et ensuite un mari jaloux. Et pour finir, le magistrat. … ne jamais connaître
mon seigneur.
Ichirō jeta son sabre par terre. la bénédiction de
— Non, soupira le général. Laissez-les profiter de… ces Benten.
— Mais enfin, Shiji ! À ce rythme, on va devoir dormir
fichus végétaux.
sur le bas-côté !
e : physique
es : renommée, relations
ets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per-
ets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per-
sonnage affligé du coup du sort Allergie :
sonnage affligé du coup du sort Méprisé à [une ville] :
$ Choisissez une substance naturelle courante. Vous $ Vous êtes tristement célèbre parmi les résidents
présentez une forte allergie à celle-ci, et y être expo- d’une ville en particulier (choisie avec le MJ). Ses
sé vous inflige une gêne sévère, voire une réaction habitants ne coopèrent pas avec vous et peuvent
potentiellement mortelle. même chercher à nuire à vos activités sur place.
$ Lorsque vous effectuez un test qui vous expose à $ Lorsque vous effectuez un test pour obtenir l’aide ou
la source de votre allergie (par exemple, un test de la coopération d’un habitant de la ville où vous êtes
Forme [Air] pour courir à travers un nuage d’abeilles, méprisé (par exemple, un test de Courtoisie [Eau] pour
ou un test de Courtoisie [Air] pour goûter un plat qui découvrir les dernières rumeurs entendues à la maison
contient votre allergène sans offenser votre hôte), de saké, ou un test de Commerce [Eau] pour ache-
vous devez choisir et relancer deux dés contenant ter des biens sur place), vous devez choisir et relancer
ou . Après avoir résolu le test, si vous échouez, deux dés contenant ou . Après avoir résolu le test,
vous gagnez 1 point de Vide. si vous échouez, vous gagnez 1 point de Vide.

245
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

Paysan adopté (Feu) choisir et relancer deux dés contenant  ou .


Après avoir résolu le test, si vous échouez, vous
Même assise au milieu de sa famille adoptive, elle ne gagnez 1 point de Vide.
s’était jamais sentie aussi invisible.
— C’est pour cette raison que nous balayons la pous-
sière du sol du sanctuaire. Toute intrusion étrangère viole Traqué par le
son caractère sacré, affirma son frère.
Chikushō-dō (Terre)
Takako inclina très légèrement la tête.
— Oui, mais parfois, les prêtres saupoudrent du sel Kazuya banda l’arc de son père, mais ses mains, lisses et
dans les coins. Par conséquent, une intrusion étrangère fines, se mirent à trembler, tout comme la pointe de la
peut dans certains cas renforcer la pureté du lieu. flèche, instable. Il pensa aux mains de son père : fortes,
Son frère se raidit. Le reste de sa famille refusa de la re- épaisses, calleuses après les innombrables guerres. Il pensa
garder. Personne n’oublierait cette transgression. au corps de son père, dont le sang se vidait dans la neige.
Il entendit le sanglier grogner, persuadé qu’il réclamait
Type : relations son sang. Si nous mourons tous les deux ici, il n’y aura plus
Effets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per- personne pour guider la famille.
sonnage affligé du coup du sort Paysan adopté :
Quand le sanglier chargea, Kazuya aperçut, dans les yeux
$ Même si une famille de samouraïs vous a adopté, de l’animal, la flamme de la torche en train de s’éteindre.
vous êtes né paysan. Vos pairs au fait de vos ori- Type : spirituel
gines peuvent vous prendre de haut et se servir de Effets : les désavantages suivants s’appliquent à un person-
cette connaissance pour vous nuire socialement. nage affligé du coup du sort Traqué par le Chikushō-dō :
$ Lorsque vous effectuez un test pour interagir de
manière autoritaire ou collégiale avec un samouraï $ Les animaux ne vous apprécient pas et vous le
au courant de votre origine paysanne (par exemple, témoignent de bien des manières. Les chiens aboient
un test de Commandement [Feu] pour donner un en votre présence, les chats feulent, et les animaux
ordre à un subordonné, ou un test de Courtoisie sauvages s’enfuient ou se montrent agressifs.
[Feu] pour remettre en question l’honneur d’autrui), $ Lorsque vous effectuez un test en relation avec
vous devez choisir et relancer deux dés contenant un animal (par exemple, un test de Survie [Terre]
 ou . Après avoir résolu le test, si vous échouez, pour calmer un cheval effrayé, ou un test de Forme
vous gagnez 1 point de Vide. [Terre] pour ne pas vous faire remarquer par un
loup affamé), vous devez choisir et relancer deux
dés contenant  ou . Après avoir résolu le test, si
Scepticisme (Vide) vous échouez, vous gagnez 1 point de Vide.
« Un dirigeant sage fait confiance à son peuple. Le fermier

Des défaillances
sait labourer et fertiliser la terre. C’est là son devoir. Le
marin comprend l’océan. Même le mendiant a sa place
dans la société, pour nous enseigner l’humilité. Penser
que l’existence n’a pas de finalité et questionner sa place
particulières
dans le monde trahissent un manque de confiance envers Le format de ces défaillances est identique à celui du Cha-
l’ordre naturel des choses. » pitre 2 du Livre de Règles.
— Kodaido, Oi no Yama

Types : mental, spirituel Autophobie (Vide)


Effets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per- Une fragile tige d’orge,
sonnage affligé du coup du sort Scepticisme :
Arrachée par un fermier,
$ Vous ne croyez ni en la divinité des Kamis, ni en Vite abandonnée
l’existence des esprits, ni en l’Ordre céleste. Si
Types : relations, mental
cette incroyance venait à être découverte, vous
Effets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per-
seriez accusé d’un grave blasphème, voire de crime
sonnage souffrant de la défaillance Autophobie :
contre l’Empereur.
$ Lorsque vous effectuez un test qui repose sur l’exis- $ Vous retirez du plaisir et de l’énergie des interac-
tence des royaumes des esprits (par exemple, un tions sociales, et vous retrouver seul vous met mal à
test de Médecine [Vide] pour diagnostiquer une l’aise et vous rend morose. Vous cherchez toutes les
maladie de l’âme, ou un test de Théologie [Vide] excuses possibles pour éviter d’être seul, et vous avez
pour déceler la présence d’un kami), vous devez des difficultés à refuser un engagement mondain.

246
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

$ Après avoir effectué un test qui vous oblige à être seul $ L’idée de vous retrouver enfermé dans un petit
(par exemple, un test de Composition [Vide] pour espace ou sans espoir de sortie vous terrorise.
écrire une lettre afin de décliner une invitation au Vous évitez autant que possible d’entrer dans de R R
théâtre, ou un test de Méditation [Vide] pour consa- tels endroits, et lorsque vous vous y trouvez, vous R R
crer un long moment à l’introspection), vous subissez êtes anxieux et distrait.
3 points de Conflit. Si c’est la première fois que cela Les personnages souf-
$ Après avoir effectué un test pour entrer dans un frant de la défaillance
se produit dans la scène, gagnez 1 point de Vide.
espace clos (par exemple, un test de Forme [Eau] Fausse identité se font
pour ramper dans un passage étroit, ou un test de souvent passer pour
Survie [Eau] pour fouiller une grotte), vous subissez des membres d’une
Aversion pour les paysans (Eau) 3 points de Conflit. Si c’est la première fois que cela école de samouraïs,
et pendant longtemps.
Le seigneur avait ordonné le déplacement des villages se produit dans la scène, gagnez 1 point de Vide.
hors de vue de son château. Il détestait les horribles toits À la discrétion du MJ, un
personnage dans cette
de chaume. Bientôt, les villageois moururent de faim, et
les taxes baissèrent. Fausse identité (Air) situation qui atteint le
rang 2 dans sa véritable
Le seigneur refusait de manger ce qu’un paysan lui pré- — Pourquoi avez-vous écrit votre nom avec ces carac- école peut dépenser
sentait, et il engagea donc des domestiques de noble lignée tères ? s’enquit le scribe. 2 XP pour apprendre,
pour le nourrir. Ses coffres se vidèrent à force de les payer. grâce à son observation
La femme se couvrit la bouche pour masquer son sou- prolongée, les bases
Au bout du compte, le seigneur mourut sans un bu en rire nerveux. des enseignements de
poche. Il quitta ce monde plus pauvre que n’importe quel
— Oh, oui, pardon. Ma mère disait toujours que notre l’école qu’il simule.
bonge et plus oublié que n’importe quel hinin. Dans ce cas, il obtient
famille n’était pas douée pour la calligraphie.
la possibilité d’utiliser
es : relations, mental Le scribe fronça les sourcils et cligna des yeux.
la capacité d’école de
ets : les désavantages suivants s’appliquent à un person- — N’était-elle pas une célèbre calligraphe ? l’école qu’il simule une
nage souffrant de la défaillance Aversion pour les paysans : — Ah ? Oh, si, bien sûr ! J’étais simplement modeste. fois par session de jeu,
Ah ah. comme s’il en avait
$ Vous trouvez les paysans répugnants, et vous avez la atteint le rang 1.
chair de poule rien qu’en vous tenant à leurs côtés. D’un geste vif, elle arracha le rouleau des mains du scribe.
Vous faites de votre mieux pour éviter d’être en rela- — Peu importe, je n’ai pas besoin de ces archives fami- Un personnage ne peut
liales, Maître Goichi. bénéficier que d’une
tion avec eux, et votre dégoût est difficile à masquer.
seule fausse école de
— C’est Giichi. cette manière.
$ Après avoir effectué un test où vous êtes obligé
d’interagir avec des paysans (par exemple, un test e : relations
de Culture [Eau] pour observer les coutumes des ets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per-
fermiers, ou un test de Courtoisie [Eau] pour inter- sonnage souffrant de la défaillance Fausse identité :
roger un chef de village), vous subissez 3 points de
Conflit. Si c’est la première fois que cela se produit $ Vous possédez une fausse identité complexe que
dans la scène, gagnez 1 point de Vide. vous avez conservée pendant longtemps. La plu-
part des personnes avec qui vous êtes souvent en
relation vous connaissent sous cette identité, et
Claustrophobie (Eau) vous pouvez même avoir une famille qui n’est pas
au fait de la vérité.
— On peut s’échapper par là ! lança son compagnon en
pointant du doigt une allée bondée, étroite et étouffante.
Son cœur bondit dans sa poitrine. Sa vision refusa de
se focaliser sur leur issue de secours.
— Vas-y. Je vais les retenir.
— Mais ils sont douze !
Je comprends les sabres, pensa-t-elle. Je comprends
le sang et la mort.
Son compagnon se fraya un passage dans l’allée au mo-
ment où leurs poursuivants tournaient à l’angle de la rue.
J’espère vivre assez longtemps pour comprendre
ma peur.

e : mental
ets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per-
sonnage souffrant de la défaillance Claustrophobie :
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

$ Après avoir effectué un test pour préserver votre Survie [Terre] pour installer un camp, ou un test de
fausse identité (par exemple, un test de Courtoisie Commerce [Terre] pour préparer un séjour à l’au-
[Air] pour mentir au sujet de votre passé, ou un test berge), vous subissez 3 points de Conflit. Si c’est
de Magouilles [Air] pour subrepticement dissimuler la première fois que cela se produit dans la scène,
une preuve de la vérité), vous subissez 3 points de gagnez 1 point de Vide.
Conflit. Si c’est la première fois que cela se produit
dans la scène, gagnez 1 point de Vide.

De nouvelles techniques
Les nouvelles techniques présentées ici peuvent être choi-
sies par un personnage qui en maîtrise les prérequis, au
même titre que les techniques incluses dans le Livre de
Règles de La Légende des Cinq Anneaux.

shūji de l’air
Tisser sa toile Rang 3 (Kolat)
Pour faire avancer leurs plans, les membres du Kolat doivent
avoir des yeux et des oreilles (mais aussi des mains) partout.
Chaque conspirateur du Kolat reçoit des ordres de son su-
périeur, et étend sa toile grâce à ses propres recrues.

A ti ti   : une fois par session de jeu, au cours d’une


scène narrative ou au prix d’une activité de temps mort,
effectuez un test e i es Air) N  2 pour recruter
un PNJ au sein de la conspiration du Kolat.
ets  : en cas de réussite, vous recrutez un PNJ mineur
ou inconnu jusqu’ici (à la discrétion du MJ), qui devient
une source pour le Kolat. Notez son nom dans la partie
Relations de votre fiche de personnage. À partir de main-
tenant, une fois par session de jeu, vous pouvez faire
appel à l’une de vos sources que vous pouvez contacter.
Le PNJ vous aide pendant une seule scène, en faisant de
Habitué au luxe (Terre) son mieux pour remplir les tâches que vous lui confiez, ou
Lors de la construction de son premier bâtiment, l’archi- bien il accomplit une seule activité de temps mort. Si vous
tecte Kaiu Ken’ichi refusa de suivre la tradition familiale, avez besoin d’un profil pour le représenter, utilisez un profil
qui imposait de vivre et dormir sur le site. adapté choisi par le MJ.
— Je dormirai dans le château, sur un futon, dans de
belles parures, et près du feu. Pourquoi devrais-je passer Nouvelles aubaines
une semaine à geler sur une paillasse rêche ?
e Air : en cas de réussite, choisissez une compétence.
Sans ce lien avec son propre travail, il ne remarqua pas
Le PNJ dispose d’un nombre de rangs dans cette compé-
une pierre mal fixée qui vint lui fendre le crâne.
tence égal à votre rang d’école et peut effectuer des tests
Sa mère, Tomoko, se servit de cette pierre pour mar- de cette compétence pour vous aider.
quer la tombe de son fils.

e : mental
ets  : les désavantages suivants s’appliquent à un per-
shūji du vide
sonnage souffrant de la défaillance Habitué au luxe :
Effroi céleste Rang 4 (Impérial)
$ Vous vivez dans le luxe et vous ne supportez pas
l’idée de séjourner chez ceux qui vous sont infé- D’un simple geste ou regard, un samouraï des familles impé-
rieurs ou dans les étendues sauvages. riales peut invoquer la puissance du trône du chrysanthème.
$ Après avoir effectué un test pour lequel vous devez A ti ti   : une fois par scène, au prix d’une action d’At-
séjourner dans un logement inacceptable pen- taque et de Manipulation, effectuez un test e
dant une longue durée (par exemple, un test de e e t i e) prenant pour cible autant de personnages

248
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

présents que vous le souhaitez. Le ND de ce test est égal au Daimyō


rang de Statut le plus élevé parmi vos cibles.
ets  : en cas de réussite, chacune de vos cibles subit e dai n de dirigean r gi na i er i en
l’état Aphone. le quotidien de vastes parties de l’Empire d’Émeraude. Ils
sont responsables de la collecte des taxes et, afin de faci-

Des titres supplémentaires


liter celle-ci, de l’infrastructure générale de leur domaine
ainsi que du bien-être de leurs citoyens. Cependant, au
bout du compte, il est rare que les Champions de clan ou
l’ ere r re e en en e i n n dai an e l’in-
Les titres, décrits en page 305 du Livre de Règles, repré-
tégralité de ses impôts est payée à temps. Par conséquent,
sentent un arc narratif important pour un personnage.
le dai di en de grande arge de an re
Les nouveaux devoirs imposés par un titre lui permettent
sur la gestion de leur domaine. Certains cherchent à amé-
d’étudier des compétences et des techniques hors du pro-
liorer la vie des roturiers et des samouraïs qu’ils dirigent,
gramme de son école, représentées par la table de pro-
tandis que d’autres exploitent sans vergogne leurs subor-
grès du titre. Une fois que le personnage achève celui-ci, il
donnés pour faire avancer leurs propres ambitions.
acquiert la capacité qui lui est associée.
Attri r  : les Champions de clan, l’Empereur et
d’autres fonctionnaires de haut rang dans la hiérarchie
Conseiller i riale e en n er n dai e il le n and
n a re dai rend a re rai e d de ien
e n eiller i ien a r de dai de agi ra
quand ils estiment nécessaire de changer le dirigeant
d’Émeraude, de généraux et d’autres notables, en fai-
d’une province.
sant usage de leur esprit et de leurs mots, et offrent à
G i e i ts e t t t  : +20 (jusqu’à un minimum
leurs maîtres des conseils et des idées, en fonction de la
de 55)
demande. Un bon dirigeant doit avoir accès à bien plus
re is r e er e titre : 36 XP
d’informations que ne peut en retenir une seule personne,
i s er i it e titre) : le ND de vos tests
et il emploie donc plusieurs spécialistes et experts qui le
de Commandement prenant pour cible vos vassaux dimi-
tiennent au courant de dizaines de sujets capitaux. Par
nue de 1.
conséquent, nombre de stratégies militaires, décisions
juridiques et accords commerciaux sont rédigés par des PROGRÈS TYPE
conseillers au nom de celui qu’ils servent, et ces individus
disposent ainsi d’un pouvoir considérable. Compétences sociales Grp. de comp.
Attri r  : n dai n agi ra d’ era de n Culture Compétence
chef militaire, un courtisan de haut rang ou d’autres indi-
vidus importants peuvent nommer un conseiller, et le font Gouvernement Compétence
TITRE

comme bon leur semble. Tactique Compétence


G i e i ts e t t t  : +10 (jusqu’à un minimum = La détermination
de 40) du courtisan
Technique
re is r e er e titre : 36 XP
= Sous la surface
i t te t it e titre) : lorsque vous four- Technique

nissez une assistance sur un test de compétence savante, = Souffler sur les braises Technique
en plus d’appliquer les règles d’assistance classiques, le
personnage que vous assistez peut lancer un nombre de
égal à vos rangs dans cette compétence, plutôt qu’à
ses propres rangs de compétence.

PROGRÈS TYPE

Compétences savantes Grp. de comp.

Commerce Compétence

Courtoisie Compétence
TITRE

Stylisme Compétence

= Attiser les flammes Technique

= Ouverture feinte Technique

= Tactique d’obstruction Technique

249
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

Espion Gunsō
Se voir désigner comme espion pose problème à de nom- Bien qu’une armée rokugani soit principalement consti-
breux samouraïs. Par définition, un espion se sert de la tuée d’ashigaru et de conscrits, de nombreux samouraïs
tromperie et du subterfuge pour collecter des informations, sont aussi appelés à servir, que ce soit dans les forces de
et il peut même employer des procédés plus sinistres, allant leur propre clan ou dans les légions impériales. Lorsqu’un
du chantage à l’extorsion, pour atteindre les objectifs que noble prend les armes, il officie souvent à un poste de
lui fixent ses commanditaires. Bien entendu, des méthodes commandement. Même si les troupes de chaque seigneur
aussi infâmes et sournoises vont à l’encontre des préceptes disposent d’une structure et d’une identité qui leur est
de la sincérité, de la droiture et de l’honneur du bushido. propre, des titres communs se retrouvent dans tout Roku-
Des samouraïs particulièrement honorables préféreront gan, pour indiquer des niveaux d’autorité similaires. Lors-
d n e re e l e d’ ir a dai i qu’un seigneur rassemble une grande armée pour com-
leur ordonne d’espionner, même si la situation est déses- a re il e n er n l ie r g n r ’il
pérée. Néanmoins, la plupart des nobles n’ont pas autant dirigent les kashira, qui à leur tour donnent leurs ordres
de scrupules et acceptent de ternir leur honneur si tel est le aux unités individuelles.
devoir que leur confient leurs supérieurs. n g n e re n a le de e la r ara i n de
En réalité, la majorité des espions se contentent d’ob- troupes qu’il commande, y compris de leur entraînement,
server les événements et de rapporter les faits intéressants leur discipline et leur équipement. Lors de la bataille, il
à leurs commanditaires. Cependant, certains finissent par dirige ses guerriers en fonction des directives de ses supé-
développer des méthodes et des techniques plus sophisti- rieurs : il doit donc avoir parfaitement conscience de la
quées, allant jusqu’à la discrétion et au déguisement pour situation de son unité, mais aussi du reste de l’affrontement.
s’introduire dans des zones dont l’accès leur est normale- ai le g n d i en a an aire re e d’ n en
ment interdit, et à la communication d’informations sen- du commandement hors pair au plus fort du combat : leurs
sibles et cruciales grâce à de complexes codes secrets. chefs attendent d’eux qu’ils mènent leurs troupes au front
Attri r : n dai n ha i n de lan n agi - et rallient les soldats pour les empêcher de s’enfuir, alors
trat et des organisations clandestines peuvent confier le même que les pertes s’accumulent et que le moral s’effrite.
rôle d’espion à un samouraï. Bien entendu, contrairement Attri r : n dai e a ri er n a ra n
aux autres titres, cette nomination ne fait pas l’objet d’une rang dans son armée, et les samouraïs qui servent au sein
annonce publique. d’une structure militaire peuvent être promus par un offi-
erte e i ts e t t t : -5 cier supérieur.
re is r e er e titre : 24 XP G i e i ts e t t t : +5 (jusqu’à un minimum de 20)
es rei es rt t it e titre) : une fois par ses- re is r e er e titre : 24 XP
sion de jeu, au prix d’une action de Soutien et de Manipu- e er e re i re i e it e titre) : lorsque
lation ou d’une activité de temps mort prenant pour cible vous venez à bout d’un adversaire lors d’un combat singu-
un lieu ou un groupe social en particulier, effectuez un test lier, votre unité élimine un nombre de points de Panique
e e ti e ts Air) N   4 pour rassembler les rumeurs égal au rang de Gloire de votre adversaire.
actuelles et les passer au crible afin d’obtenir des rensei- Une fois par round, lorsque vous réussissez un test
gnements crédibles. En cas de réussite, vous découvrez d’action d’Attaque au cours d’une bataille rangée, votre
les derniers événements en lien avec votre cible, et vous unité élimine un nombre de points de Panique égal à la
identifiez les fausses rumeurs. Si votre objectif social au moitié des points d’Usure que vous infligez.
cours d’une scène d’intrigue consiste à discerner les qua-
lités d’un individu, vous gagnez un nombre de points de PROGRÈS TYPE
Progression égal à la valeur de votre anneau de l’Air plus
vos succès bonus. Compétences martiales Grp. de comp.

 : vous lancez une rumeur qui se propage chez les per- Commandement Compétence
sonnages présents dans la scène ou appartenant au
Gouvernement Compétence
groupe ciblé (même s’ils n’y croient pas nécessairement).
TITRE

Katas (rang 1-4)  Grp. de tech.


PROGRÈS TYPE = Cri de ralliement Technique

Compétences sociales Grp. de comp. = Souffler sur les braises Technique

Gouvernement Compétence = Courage exemplaire Technique

Sentiments Compétence
TITRE

Magouilles Compétence
= Shūji de l’Air (rang 1-5) Grp. de tech.
= Sous la surface Technique
= Disparition Technique
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

Magistrat de clan Dans plusieurs clans, il existe des groupes de magis-


LES SUBALTERNES
trats de clan spécialisés, tels que les inquisiteurs Asako du
Les magistrats de clan sont similaires aux magistrats d’Éme- Clan du Phénix, les Kuroiban (la Garde Noire) du Clan du De nombreux postes
raude, mais leur autorité s’arrête aux terres et aux propriétés Scorpion ou les purificateurs Kuni du Clan du Crabe. Cha- confèrent l’autorité né-
de leur clan. Les magistrats régionaux ou municipaux, plus cun de ces groupes s’occupe principalement des magies cessaire pour décerner
spécialisés (et de moindre rang), règnent sur une juridiction illégales et blasphématoires, ainsi que des incursions de un titre à quelqu’un.
encore plus limitée, qui se cantonne à une zone spécifique l’Outremonde au sein de l’Empire. Par exemple, un
ou à une ville particulière. Les magistrats de clan enquêtent Attri r  : n ha i n de lan n dai n daimyō peut nommer
autre dirigeant de clan peut nommer un magistrat afin que des conseillers et des
sur la plupart des crimes commis, même s’ils travaillent sou-
gunsō, et les magistrats
vent avec les magistrats d’Émeraude en poste sur les terres ce dernier fasse respecter la loi au sein des terres du clan
d’Émeraude ou de
de leur clan, notamment dans les affaires graves aux réper- et parmi ses vassaux. clan peuvent choisir
cussions nationales, comme la trahison ou l’utilisation d’une G i e i ts e t t t : +10 (jusqu’à un minimum de 45) leurs yoriki. Les PJ qui
magie illégale. Faire collaborer un magistrat de clan avec les re is r e er e titre : 30 XP reçoivent un titre de la
magistrats d’Émeraude en charge d’une enquête sur un ter- sti e i it e titre)  : lorsque vous part d’un autre PJ sont
ritoire permet aux dirigeants du clan de s’assurer que leurs effectuez un test de Commandement ou de Courtoisie appelés des subalternes.
intérêts sont représentés, tout en restant informés des agis- prenant pour cible un membre de votre clan, vous pouvez
Un personnage joueur en
sements de ces agents impériaux sur leurs terres. dépenser comme suit : position de décerner des
En général, les magistrats de clan patrouillent réguliè-  : i e s it i i e au choix du joueur) un titres peut disposer d’un
rement dans les zones sous leur juridiction afin de vérifier nombre de points de Conflit égal au nombre de dépen- nombre de subalternes
les papiers des voyageurs. De plus, ils supervisent la col- sés de cette façon. inférieur ou égal à son
rang de Statut. (Il n’y a
lecte des taxes, y compris les prélèvements annoncés sur
PROGRÈS TYPE pas de limites au nombre
la production de nourriture et de denrées diverses auprès
de titres que peuvent
des roturiers, ainsi que les taxes douanières sur les biens Compétences savantes Grp. de comp. accorder les PNJ.)
vendus ou échangés par les marchands.
Compétences sociales Grp. de comp.

Forme Compétence

Arts martiaux (corps à corps)


TITRE

Compétence

= Style du serpent
Technique
constricteur 
= Malheur aux faibles Technique

= La vérité derrière
Technique
l’écran de fumée
C H API T R E 7 : DE N O UV E L L E S O PT IO NS DE JEU

LES DISEURS DE Moine acolyte Prêtre


BONNE AVENTURE
La plupart des moines de Rokugan ont rejoint la confrérie Lorsque l’appellation « prêtre » désigne un samouraï, les
Les astrologues, les devins de Shinsei ou l’ordre des Dix Mille Fortunes dans leur jeu- shugenja viennent à l’esprit. Peu communs et puissants, ils
et les diseurs de bonne nesse, et ils leur ont dédié leur vie. Cependant, il existe une sont capables de conjurer les kamis élémentaires et de les
aventure de tout acabit autre catégorie de moines : les samouraïs à la retraite, qui pousser à se manifester dans le royaume des mortels grâce
sont des prêtres particu- rejoignent l’un de ces deux ordres à la fin d’une vie au ser- à d’incroyables effets. Cependant, la plupart des prêtres
liers qui cherchent à obte- vice de leur clan en tant que bushi, courtisans, artisans ou ne sont pas des shugenja. Même s’ils font preuve d’une
nir une vision de l’avenir. shugenja. De même, les samouraïs ayant occupé la fonc- dévotion et d’une révérence sincères envers les esprits,
Les premiers essaient de
tion de sensei, guidant et instruisant une jeune génération leur lien avec ces derniers est plus subtil. Malgré tout, leur
prédire les événements
de nobles, finissent par atteindre un âge qui complique leur importance n’en est pas moindre. Les samouraïs cherchent
futurs en étudiant les
mouvements des corps cé- tâche. La plupart rejettent alors leur affiliation à leur clan, se à obtenir les conseils et l’aide de ces prêtres dans la plu-
lestes, y compris les moins rasent la tête et deviennent moines, pour passer le reste de part des sujets spirituels. Ces personnages offrent prières
courants d’entre eux ou leurs jours dans l’introspection et la contemplation. et dévotions aux kamis… et peuvent parfois recevoir des
les porteurs de mauvais Des nobles aux penchants plus guerriers préféreront bénédictions mineures en retour. De plus, ils conduisent la
présage comme les trouver une fin glorieuse au combat, mais il n’y a pas de plupart des cérémonies importantes aux yeux des samou-
météores et les comètes. honte à se retirer pour devenir moine. Sans l’entraînement raïs et des roturiers : par exemple, ils bénissent les champs
Les deuxièmes emploient intensif que reçoivent les jeunes apprentis, ces samouraïs et sanctifient les espaces rituels, officient aux mariages et
d’autres méthodes, plus
la re rai e ar iennen rare en a ri er le ih r aux funérailles, et confectionnent des breloques et des
terre à terre, par exemple
lesquels les moines sont connus. Néanmoins, ils sont parti- talismans bénis par leurs divinités préférées.
le tirage de kawaru : des
pièces, des bâtons, des culièrement révérés, et les jeunes nobles cherchent à obte- Attri r : la plupart des prêtres s’entraînent dès leur
pierres ou d’autres objets nir leurs conseils et leur sagesse. plus jeune âge. Dans de rares cas, un individu qui a fait
similaires sont lancés, et Attri r : la plupart des monastères acceptent toute preuve d’une dévotion particulière ou d’une affinité avec
le motif qu’ils forment personne qui souhaite les intégrer, à condition qu’elle pro- les kamis peut accepter des devoirs dans un sanctuaire ou
en retombant révèle des nonce ses vœux et se rase la tête. Un samouraï qui devient dans un temple, où le prêtre en chef lui octroie son titre.
éléments sur le futur. moine abandonne son ancienne vie, y compris son clan et G i e i ts e t t t  : +10 (jusqu’à un minimum
Les diseurs de bonne son nom de famille, et adopte un nouveau nom. de 40)
aventure n’apprennent i i ti i ts e t t t : votre valeur de Statut re is r e er e titre : 24 XP
que rarement des détails devient égale à 25 er ite r es is it e titre) : vous pouvez sou-
de l’avenir. Ils recueillent re is r e er e titre : 24 XP tirer des invocations aux kamis même si vous n’en connais-
plutôt des aperçus et des i it e titre) : lorsque vous êtes pris pour sez aucune.
impressions qu’ils doivent cible d’une action pour laquelle un test est nécessaire, Lorsque vous soutirez une invocation, n’augmentez
ensuite interpréter. Ce vous pouvez dépenser 1 point de Vide pour augmenter ou pas le ND de 1 (mais vous devez tout de même augmen-
flou fait de ces pratiques
diminuer le ND du test d’une valeur égale à vos rangs de ter le ND si le rang de l’invocation est supérieur à votre
un art utile, mais
Méditation (jusqu’à un ND minimum de 1). rang d’école).
vraiment imprécis.

PROGRÈS TYPE PROGRÈS TYPE

Compétences martiales Grp. de comp. Compétences sociales Grp. de comp.

Compétences savantes Grp. de comp. Composition Compétence

Esthétique Compétence Culture Compétence


TITRE
TITRE

Composition Compétence Théologie Compétence


= Esprit purificateur Technique = Rituels (rang 1-5) Grp. de tech.
= Ki protecteur Technique = La courtoisie prime Technique
= Figer les éléments Technique = Réveil de l’âme Technique
CHAPITR E 7 : DE NO U V EL L ES O PT IO NS DE JEU

Yōjimbō Yoriki
e ji n de garde d r d n Les magistrats sont relativement peu nombreux : ils font
pour défendre une certaine personne à n’importe quel donc largement appel à divers subalternes et assistants,
prix. Même si tous les samouraïs doivent se tenir prêts dont les yoriki, des samouraïs qui font office d’adjoints
e a ri ier r r ger le r eigne r le ji e permanents. La plupart du temps, un magistrat dispose
son dernier rempart. Il peut aussi le représenter lors d’un d’un ou deux yoriki, mais au besoin (et si son statut le lui
duel pour l’honneur, ou avoir le sombre devoir de l’assis- permet), il peut en avoir jusqu’à une dizaine. Les yoriki par-
ter lors de son seppuku, afin de le décapiter pour mettre tagent certains devoirs avec le magistrat qu’ils servent, par
n er e e ran e a l ar de ji i en exemple enquêter sur les crimes, rassembler les témoi-
leur maître jusque dans la mort, s’ils n’ont pas eu la chance gnages (et, dans le cas des yoriki au service des enquê-
de périr à son service. teurs Kitsuki, les preuves matérielles), superviser la torture
Attri r  : n dai n agi ra d’ era de n des criminels pour obtenir des confessions et appliquer les
chef militaire, un courtisan de haut rang et d’autres indi- sentences. Leur autorité est en général limitée quand les
id i r an e en n er n ji e le n coupables font partie de la caste des samouraïs, mais elle
comme bon leur semble. est plus importante quand il s’agit de roturiers. Les yoriki
G i e i ts e t t t  : +10 (jusqu’à un minimum font des rapports réguliers à leur supérieur hiérarchique.
de 40) Souvent, les yoriki proviennent du clan du magistrat
re is r e er e titre : 36 XP qu’ils servent, bien que certains magistrats d’Émeraude
A s ri i e est tr r it e titre) : un emploient des ronin afin d’éviter toute apparence de par-
personnage a été désigné comme étant votre protégé. Il tialité. Un yoriki particulièrement compétent peut être
peut vous ordonner de garder quelqu’un d’autre jusqu’à considéré comme étant un magistrat en formation.
nouvel ordre. Si votre protégé se trouve à portée 0-2, Attri r : tous les magistrats peuvent nommer direc-
vous pouvez dépenser 1 point de Vide pour le rempla- tement leurs yoriki en fonction de leurs besoins.
cer comme cible d’une action d’Attaque. Si vous subissez G i e i ts e t t t : +5 (jusqu’à un minimum de 35)
un coup critique suite à la résolution de celle-ci, gagnez re is r e er e titre : 24 XP
1 point de Vide. Attr e es i ts  it e titre)  : lorsque vous
effectuez une action d’Attaque à l’aide d’une arme d’En-
PROGRÈS TYPE trave, vous pouvez changer autant de dés gardés conte-
nant ou que vous le souhaitez. Positionnez ces dés sur
Compétences martiales Grp. de comp.
le résultat .
Gouvernement Compétence

Médecine Compétence
PROGRÈS TYPE

Sentiments Compétence Compétences sociales Grp. de comp.


TITRE

= Attaque de iaijutsu : Gouvernement Compétence


Technique
lame horizontale 
Arts martiaux (corps à corps) Compétence
TITRE

= Attaque de iaijutsu :
lame ascendante 
Technique Magouilles Compétence
= Katas (rang 1-3)  Grp. de tech.
= Détermination du guerrier  Technique
= Attiser les flammes Technique
= Sous la surface Technique
IN DEX

A Conseil Sentaku. ..............................................72 G


Conseiller (titre) .............................................249
adoption ..........................................................52 Conseiller impérial...........................................51 gaijin ................................................................84
agriculture......................................................110 conspiration des saboteurs du Kolat .............240 a i-d ..........................................................138
alcool ...............................................................65 cosmographie de Rokugan ...........................134 gangs ...............................................................70
Allergie [au choix] (désavantage)...................245 côtes ..............................................................222 Garde du palais Seppun (école) ....................236
Amaterasu .........................................................8 cour d’hiver................................................46, 51 garde du Tonnerre ...........................................74
Ami de la confrérie (avantage).......................241 cour d’hiver impériale................................46, 51 geisha ............................................................121
Astrologue Seppun (école) ............................235 cour impériale..................................................51 gempuku .........................................................36
Autophobie (désavantage) ............................246 cours de province ............................................51 goshi ..............................................................101
avant-poste des Glaces .................................131 cours des clans ................................................51 Gotei................................................................84
Aversion pour les paysans (désavantage) ......247 croyances interdites .......................................162 Gourmet (avantage).......................................244
gouvernance....................................................69
gouvernance d’une ville ..................................71
grand-routes ..................................................123
baie de l’Honneur noyé ...................................74 Daikoku..........................................................140 grotte des Enfants de pierre..........................223
baie des Bandits ..............................................84 ai ( i re) .................................................249 grotte des Vents divins ....................................47
baie des Poissons morts ........................115, 160 dai h ..............................................................36 guerrier rural ..................................................101
bataille du Cerf blanc ......................................16 délits, niveaux ..................................................94 n ( i re) ...................................................250
Benten ...........................................................140 distillerie de la Mouche vrombissante ...........112 g n ...............................................................53
en en Seid .................................................158 district portuaire de Gotei ...............................84
bibliothèque de Kanidoko Itte ........................86 documents de voyage ...................................124
Bishamon .......................................................140 dojo ...........................................................27, 37
Bonsaï (avantage) ..........................................243 d hin ......................................................92, 109 Habitué au luxe (désavantage) ......................248
bosquet des Traîtres ........................................41 Dresseur (avantage) .......................................241 Hachiman.......................................................142
bouffons ..........................................................25 haltes .............................................................126
brasserie Sen’in ...............................................85 hatamoto .........................................................27
Bunraku ...........................................................62 heimin, rural...................................................105
Ebisu ..............................................................140 heimin, urbain..................................................62
échanges d’otages ..........................................52 Héraut Miya (école) .......................................233
Effroi céleste (technique) ...............................248 Héros de [village] (avantage) .........................241
calendrier d'Isawa............................................11 Ekohikei .....................................................45, 72 heures de la journée ........................................29
Cartographe Miya (école) ..............................232 a- ........................................................142 hinin, rural ......................................................106
catastrophes naturelles ....................................99 entremetteurs ............................................27, 52 hinin, urbain .....................................................61
Champion d’Émeraude ...................................90 Espion (titre) ..................................................250 Histoire militaire (avantage) ...........................244
Champion de Jade ..........................................90 étiquette hitojichi ............................................................52
Chancelier impérial..........................................51 approcher d’un sanctuaire ..................146 Hotei ..............................................................141
chantiers navals ...............................................82 arriver dans un village .................100, 104 en h .....................................................131
Charte des magistrats d’Émeraude .................90 arriver dans une cité .............................64
château de la Grande Conjonction .................23 baguettes..............................................64
château des Grands Voyageurs .......................23 déposer ses armes ................................31
château des Vierges de bataille ......................23 hospitalité, château ..................24, 31, 37 île aux Larmes............................................74, 75
châteaux, caractéristiques des ........................32 samouraïs et bonge ............................119 interdits religieux ...........................................147
châtiments, criminel.........................................94 samouraïs et gaijin ..............................122 Intrigant Otomo (école) .................................234
Chercheur (avantage) ....................................243 samouraïs et hinin ...............................121 irrigation ................................................105, 110
hi h -d ..................................................136 samouraïs et paysans ..........................118 ise zumi ..............................voir ordre de Togashi
chute des Kamis ................................................8 étiquette pour le sabre ....................................31 Ishiko no
cimetières ......................................................139 exécution .........................................................94 ...........voir grotte des Enfants de pierre
Cinq Grand-routes .........................................130
Cinq Races antiques ..........................................8
Cité [au choix] (avantage) ..............................243
cité aux Murs verts...........................................74 familles impériales .........................................228 Mine de jade du village
i de la r i ie er de ............................38 Fausse identité (désavantage) .......................247 des Montagnes occidentales.........................204
cité de la Grenouille riche ...............................87 ferme de thé Kaori ........................................116 Jardins de rocaille (avantage) ........................244
cité des Mensonges ........................................74 fermes............................................................107 jardins merveilleux des Doji.............................43
cité interdite ..............................................45, 72 festivals ..........................................................151 Jigoku ............................................................137
Clan du Renard ..............................................210 Fin du Voyage................. voir ari hi jizamurai ..........................................................23
Claustrophobie (désavantage).......................247 forêt de Shinomen .........................................213 jokamichi .........................................................38
clergé itinérant ..............................................105 forêt du Rêveur ..............................................212 Jour des Tonnerres ..................................11, 134
col du Vent glacé ...........................................158 forêt Kitsune ..................................................210 juge .................................................................93
communications, longues distances ................98 forêts .............................................................208 r jin ............................................................141
composition d’un village ...............................109 Fortunes Majeures .........................................140
confrérie de Shinsei .......................................169 Fukurokujin ....................................................141
confrérie des Pieds nus....................................98 funérailles ..............................................150, 172

254
IND E X

montagnes.....................................................202 R
montagnes du Dragon ..................................207
Kabuki..............................................................62 monts Seikitsu ...............................................158 récoltes ..........................................................110
aid ..............................................................123 Moto (famille) ..................................................77 régime alimentaire...........................................64
ar ..................................................................27 Murs Enchantés ...............................................73 relais ..............................................................126
kashira .............................................................54 ela i n in en e (a an age) ......................244
kawa ..............................................................125 N révolution paysanne ......................................102
Khanbulak ..................................................23, 77 rivière de l’Or.................................................128
kimono.............................................................63 na d ......................................................27, 52 rivières ...........................................................125
Kin no Kawa ...................................................128 Nanashi Mura ................................................218 route de l’Empereur ......................................130
Kitsu ...............................................................183 Navigateur (avantage) ...................................244 route de Sable .................................................77
Kitsuki (famille).................................................93 nezumi ...........................................................214 routes.............................................................123
kitsune ...........................................................211 ....................................................................62 ruines .............................................................216
kodama ..................................................160, 209 nourriture .........................................................64 ari hi ...........................................74
Kolat ................................................................78 Ryoshun .........................................................139
Kuroshin.........................................................194
ūden .............................................................33
ūden a hi ...............................................41 offrir des cadeaux ............................................52
ūden ji .....................................................43 Onnotangu ....................................................... 8 s’orienter en ville .............................................70
ūden ei ..................................................47 ordre de Togashi............................................191 Saibanshoki .....................................................88
ūden Se n .............................................185 ordre des moines des fortunes ......................237 saké .................................................................65
ordre des moines shinséistes.........................238 Sakkaku..........................................................136
ordre des sanctuaire de Benten .............. voir en en Seid
Sept Tonnerres ....voir moines des Sept Tonnerres sanctuaire de la Ki-Rin ...................................155
légions impériales............................................54 organisation militaire .......................................53 sanctuaire des Quatre Présents .....................115
Liens avec la pègre (avantage) ......................241 Osano-wo ......................................................181 sanctuaire du Cœur de la Terre .....................113
Lignée kuge (avantage) .................................242 Otomo (famille)..............................................230 sanctuaire du kami Saule-Guérisseur.............160
Lignée maudite (désavantage) ......................245 Otosan Uchi ...............................................45, 72 sanctuaires, caractéristiques des ...................153
sanctuaires, port ..............................................82
sanctuaires, village ........................................110
sauf-conduits .................................................124
magistrat d’Émeraude .....................................89 Scepticisme (désavantage) ............................246
palais de la Mante ...........................................47
Magistrat de clan (titre)..................................251 secte de la Terre Parfaite .........................20, 102
palais de la Soie et de l’Ombre .......................41
magistrats ........................................................89 sénéchaux ........................................................27
palais impérial ...........................................45, 72
magistrats de clan ...........................................91 Sen ...................................................136, 209
passage du temps ...........................................28
magistrats de Jade ..........................................90 sensei...............................................................27
Paysan adopté (désavantage)........................246
ah .............................................................164 Seppun (famille) .............................................231
percepteurs de taxes .....................................107
Main Droite de l’Empereur ..............................49 Se h - e i ....................................................128
phares ..............................................................81
Main Gauche de l’Empereur............................49 Shinden Kasai ................................................181
Pisteur expert (avantage) ...............................242
Mains de l’Empereur .......................................49 Shinomen Mori ..............................................213
plaines ...........................................................128
maison de l’Aube de Jade ..............................78 Shinsei ...........................................................166
pompiers .........................................................68
maisons, rurales .............................................109 shinzoku .............................................................8
pont des Marées............................................125
maisons, samouraïs..........................................63 shiro .................................................................33
ports ................................................................80
malédictions ..................................................164 h hū .............................................................65
ports commerciaux ..........................................83
marais Uebe ..................................................116 shugo ...............................................................22
ports de pêche ................................................81
marchands .....................................................120 sociétés de mendiants.....................................70
ports militaires .................................................82
mariages ........................................................149 hei ..............................................................181
pratiques religieuses, paysans .......................149
maru ................................................................34 système féodal ................................................22
pratiques religieuses, samouraïs ...................148
mazoku ..............................................................8 jouissance des terres .......................................97
Prêtre (titre) ....................................................252
Meido ............................................................138 procès ..............................................................93
Méprisé à [une ville] (désavantage) ...............245 Protecteur spirituel (avantage).......................242
météo ..............................................................99 province Anshin .............................................116
Millénaire paisible............................................11 r in e a ............................................131 taisa .................................................................53
Miwaku Kabe ...................................................73 province Sunda Mizu .....................................115 Tao de Shinsei ...............................................166
Miya (famille) .................................................229 province Wakiaiai...........................................225 taxe douanière.................................................82
mizuki ..............................................................37 pureté spirituelle ...........................................147 taxes ..............................................................102
Moine acolyte (titre).......................................252 témoignages....................................................93
moines d’Osano-wo ......................................171 Temple d’Amaterasu .......................................74
moines de Bishamon .....................................170 Temple d’Osano-Wo ............. voir Shinden Kasai
moines des Sept Tonnerres ...........................170 Temple de Daikoku..........................................74
moines errants ......................voir clergé itinérant quartier des Plaisirs..........................................75 Temple des Esprits attentifs ..........................183
monastère du Silence ....................................193 Quatre Temples .............................................185 Temple du Moine brûlé .................................218
monastère du Vent des Plaines .....................194 temples, caractéristiques des ........................179
monastères, caractéristiques des ..................189 Tengoku .........................................................135

255
INDE X

tenshukaku ......................................................33 villages de hinin ...............................................62


Terres d’été ....................................................225 villages, types de .............................................98
théâtre .............................................................62 vallée des Esprits ...........................................220 ville du Khan ....................................................77
Tisser sa toile (technique) ..............................248 Vénérable Demeure de la Lumière ................191 ille r i e ..................................................38
tombes ..........................................................139 Vénérables Palais de la Grue ...........................43 voie des Gaijin .................................................84
tortionnaires ..................................................121 vêtements, heimin ...........................................63
Toshi Ranbo .....................................................38 vêtements, samouraïs ......................................64
hig ......................................................138 Vide ...........................................................8, 166
Toshisoto .........................................................72 Vierges de batailles .......................................131 Wasureta Mura ..............................................220
tour de Kelet..................................................212 village d’Anbasukai........................................113
tradition d’imposteur kitsune ........................239 village de l’Eau pure ......................................160
ra ar le hi h -d (d a an age) .....246 village de la Corne écarlate.............................78
tribunaux..........................................................93 village de la Grenouille riche ...........................87
Tsugumu ........................................................193 yagura ..............................................................34
village de la Mouche vrombissante ...............112 ji ( i re) ................................................253
ū - ega a ............................voir sauf-conduits village des Montagnes occidentales .............204 Yomi ...............................................................136
village du Bassin tournoyant .........................115 yoriki ................................................................92
village Oublié ................................................220 Yoriki (titre) .....................................................253
villages...........................................................107 e-d ........................................................136

256
L’EMPIRE D’ÉMERAUDE
Bienvenue dans le Monde de Rokugan

L’Empire d’Émeraude est aussi vaste et varié que


les sept clans majeurs qui le dirigent au nom de
l’Empereur Hantei. Dans cette société hiérarchisée
à l’image des Cieux, la culture est baignée d’histoire
et de traditions, et tout manquement au respect des
coutumes et des convenances peut mener à la mort.
Les ancêtres revêtent une importance considérable,
tandis que des esprits façonnent la terre et dessinent
le cours des fleuves et rivières.
L’Empire d’Émeraude vous emmène à la découverte
de Rokugan et de ses habitants, des petits villages
de pêcheurs aux châteaux des puissants daimyō, en
passant par les sombres forêts primitives peuplées
d’esprits. Ce livre détaille tous les aspects de la
vie dans l’Empire d’Émeraude, qu’il s’agisse de
nourriture, de tenues, de religion, de spiritualité ou
de l’étiquette à respecter.
Dans ce supplément pour La Légende des Cinq
Anneaux : le Jeu de Rôle, vous trouverez une mine
d’informations qui facilitera vos parties, y compris :
$ des détails sur l’architecture, la culture, la religion
et tous les autres aspects de la vie quotidienne de
Rokugan, quel que soit le statut des habitants au
sein de l’Ordre céleste ;
$ des idées d’aventures, des profils de PNJ et des
lieux dépassant l’imagination pour vous aider à
donner vie au monde de Rokugan ;
$ de nouvelles options pour des PJ issus des familles
impériales, du royaume spirituel des kitsune ou de
la terrible secte conspiratrice du Kolat.

L’Empire d’Émeraude L5R04FR


EAN 13

180567N

FANTASYFLIGHTGAMES.FR
EDGE-STUDIO.NET

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