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AGROALIMENTAIRE PARTI PRIS

Le véritable coût du poulet


CADEAU

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C’est la viande la moins chère au supermarché. Mais c’est l’une des plus coûteuses pour nos écosystèmes, les
éleveurs et les éleveuses qui la produisent, le bien-être des animaux eux-mêmes. Les mastodontes de la volaille
continuent de miser sur le poulet standard. Il est temps d’en sortir.

Amélie Poinssot
27 février 2022 à 17h54

Lire plus tard O rir l’article PDF

Quand on évoque l’impact environnemental des élevages industriels, on pense


généralement à ceux du secteur bovin, très émetteurs de ce puissant gaz à effet de
serre qu’est le méthane, et grands consommateurs de céréales. On pense également
aux élevages porcins, dont la concentration, en Bretagne, a atteint un tel niveau que
les nitrates véhiculés par les ef uents ont imbibé sols et nappes phréatiques au point
de provoquer une pollution des côtes à grande échelle.

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Climat — Enquête

© Mediapart

On pense plus rarement aux élevages industriels de dindes et de poulets. Et pourtant,


ce sont ceux-là qui comptent le plus grand nombre d’animaux sur terre, et ils
alourdissent considérablement notre dette envers la planète. Selon les chiffres de
Gazprom, un criminel climatique
l’Atlas de la viande 2021 réalisé par Les Amis de la Terre Europe et la fondation russe très implanté en France
allemande Heinrich-Böll, on dénombrait, en 2019, plus d’un milliard de dindes et de par Mickaël Correia
poulets élevés simultanément dans l’Union européenne. À noter que leur croissance
étant souvent limitée à quelques semaines, le volume de bêtes abattues chaque année
Cinéma — Entretien
est plusieurs fois supérieur.
Sergueï Loznitsa : « La responsabilité
des dirigeants européens est très
Si les volailles ne sont pas émettrices de méthane comme les bovins, tout le système
importante »
sur lequel repose cette lière, en revanche, est fortement émetteur de CO2. Il dépend
par Joseph Confavreux
d’importations de céréales d’outre-Atlantique, et chaque étape de la production
nécessite d’importants transports routiers : livraison de poussins dans les bâtiments
d’élevage, livraison du grain, ramassage des poulets pour l’abattoir, distribution des Europe — Reportage

produits transformés auprès des centrales d’achats… Paroles d’exilés en Serbie : « La
Russie n’est plus mon pays »
Tout cela multiplié par autant de lots mis en production chaque année. Dans un par Jean-Arnault Dérens et Philippe Bertinchamps

bâtiment d’élevage de poulets standard – les « poulets de chair » selon le jargon –, ce


sont sept couvées qui sont mises en route chaque année. Numérique
Ukraine : la drôle de cyberguerre
par Jérôme Hourdeaux

Portfolio
Battre la campagne
par La rédaction de Mediapart et La Revue
dessinée

Voir la Une du Journal

Poulets Duc, LDC et autres marques dans un supermarché Carrefour, février 2022. © Photo Amélie
Poinssot / Mediapart

Ces bâtiments gigantesques, énergivores, consomment force gaz et électricité pour


chauffer et faire fonctionner un éclairage alternant jour et nuit à une cadence
arti cielle. Mais aussi pour faire tourner des ventilateurs, car à partir d’une certaine
densité au mètre carré, les animaux suffoquent. Toute cette débauche d’énergie n’a
qu’un but : la croissance à marche forcée de bêtes qui seront emmenées à l’abattoir au
bout de 42 jours – et seulement 35 jours pour les moins chanceuses, celles qui sont
retirées lors de l’opération de « desserrage », une semaine avant terme, a n de laisser
un petit peu de place aux poulets restants.

Cette durée de croissance a été obtenue grâce à une sélection génétique qui a permis
de mettre au point des races spéci ques. D’après une analyse effectuée en 2019 par le
service de recherche du Parlement européen, le taux de croissance des poulets de chair
a ainsi été multiplié par quatre sur le continent pendant la seconde moitié du
XXe siècle.

Ce qui n’est pas sans conséquence sur le bien-être animal : « Les problèmes
couramment rencontrés sont les déformations des pattes, la boiterie, l’ascite
[accumulation de liquide dans la cavité abdominale entraînant une défaillance
cardiaque – ndlr] et le syndrome de la mort subite », peut-on lire dans le rapport.

Dans une vidéo de L214 diffusée mardi 22 février sur le site de l’association, le
témoignage d’un éleveur ayant travaillé pour différents groupes industriels comme
LDC et Terrena en dit long sur la souffrance animale générée par ce système : « Le
squelette ne suit pas vis-à-vis de la croissance, explique-t-il. C’est des poulets qui
tombent par terre. » Les images, tournées par L214 dans une ferme sarthoise travaillant
pour la marque Le Gaulois de LDC, montrent des cadavres et des bêtes bien mal en
point.

Ces élevages, en n, ne sont pas indolores pour leur environnement immédiat. Suivant
le vent, des odeurs d’ammoniac émanent souvent de ces poulaillers, sources de
nuisances colossales pour les voisinages. Mais surtout, la quantité de fumier générée
par ce mode de production augmente la présence de nitrates dans les sols. Le fumier
issu des poulaillers est en effet épandu dans les champs.

Si ce système peut paraître vertueux quand il vient remplacer des fertilisants


chimiques, il peut aussi provoquer de lourds dégâts sur la viabilité des sous-sols et la
Le pire est possible,
qualité des nappes phréatiques quand cela se fait en quantités industrielles. Jusqu’à
essayons le meilleur
rendre l’eau non potable dans des endroits où la ressource en eau, déjà, se raré e. Pro tez de notre o re spéciale
présidentielle : 3 mois pour 9,90€
Puis 9,90€/mois
Entre 39 et 42 kg de poulets au mètre carré Et suivez notre couverture garantie 0%
sondages, 100% indépendante et
Bref, qu’y a-t-il de bon dans ce système ? À peu près rien. Pas même le bien-être des d’intérêt public

éleveurs et des éleveuses, petits maillons de la chaîne qui s’endettent lourdement pour
construire ces bâtiments et se retrouvent pieds et poings liés avec l’industriel jusqu’au J'en pro te
remboursement de leur emprunt, sans parvenir à dégager des revenus dignes de ce
nom. Ce sont à vrai dire les grands perdants de ce système, et les victimes d’une
concentration à marche forcée destructrice de l’emploi agricole dans les campagnes.
Entre 1988 et 2010, le nombre d’exploitations de poulets de chair a baissé de plus de
86 %, selon un rapport de Greenpeace paru en 2020.

Sur le territoire hexagonal, cette industrialisation a été poussée à son maximum.


D’après l’analyse citée plus haut, la majorité des bâtiments d’élevage y atteignent une À ne pas manquer
densité située entre 39 et 42 kg de poulets au mètre carré – soit pratiquement le
La guerre russe contre l’Ukraine — Entretien
record européen, détenu par les Pays-Bas (42 kg de poulets au mètre carré). Dans sa
directive de 2007, la Commission européenne préconise une limite de 33 kg au mètre
carré.

C’est pourtant ce modèle-là qui est toujours favorisé en France par les politiques
publiques. Y compris quand tous les signaux d’alerte sont au rouge. Face à la
quatrième vague de grippe aviaire depuis 2015, qui sévit depuis le mois d’octobre, le
gouvernement a répondu par des mesures contraignant les élevages de plein air à
enfermer les bêtes. Nullement par une tentative de désintensi cation du secteur, où
homogénéité génétique, densité dans les bâtiments et transports à toutes les étapes Étienne Balibar : « Le paci sme n’est
sont les meilleurs vecteurs de propagation d’une épidémie. pas une option »
par Mathieu Dejean
En France, la consommation de viande est en baisse. Mais les préoccupations
sociétales vis-à-vis du bien-être animal et de l’impact environnemental touchent
surtout le bœuf et le porc. La consommation de poulet, elle, progresse encore. À la La guerre russe contre l’Ukraine — Reportage
Lviv s’organise en hub humanitaire
différence des deux autres, elle ne fait pas l’objet d’interdits culturels ou religieux, et
géant de l’Ukraine
dans l’imaginaire collectif, cette viande blanche, souvent vendue sous une forme
par François Bonnet
ultra-transformée (nuggets dans la restauration rapide, blancs de poulet dans les
salades et les sandwichs...), est connotée plus positivement que la viande rouge. Sur
l’étiquette au supermarché, c’est aussi la moins chère, et donc la plus consommée par La guerre russe contre l’Ukraine

toutes celles et ceux qui ont du mal à boucler leurs ns de mois. Les industriels misent Pourquoi l’invasion russe de
l’Ukraine attise la peur nucléaire
là-dessus, et continuent d’augmenter leurs volumes.
par Karl Laske et Donatien Huet

À LIRE AUSSI Pour toutes ces raisons, il nous a semblé crucial d’aller voir
de plus près comment cette viande est produite. Que La guerre russe contre l’Ukraine — Analyse
disent les premières personnes concernées, celles qui Isolé dans sa tour d’ivoire: comment
gèrent ces mégapoulaillers bien fermés ? Avec quels Poutine en est arrivé à lancer
arguments les industriels défendent-ils leur modèle ? l’invasion de l’Ukraine
Comment les décisions de monter de nouveaux élevages de par Julian Colling

volailles sont-elles prises et pourquoi font-elles, si souvent,


l’impasse sur la transparence ? Énergies — Analyse
Ce choc énergétique qui vient
La nouvelle politique agricole Dans le petit village de Chailley, dans l’Yonne, l’industriel
par Martine Orange
commune oublie le changement Duc, producteur historique de volaille et numéro deux sur
climatique
le marché français, s’est lancé dans un redéploiement de
24 octobre 2020 Lire plus tard ses activités. Il y a cinq ans, au bord de la faillite,
l’entreprise était rachetée par le géant de la volaille
néerlandais, le groupe Plukon… Tout cela nous a intrigués
Mesures contre la grippe aviaire :
et nous avons décidé d’enquêter avec le collectif de
les élevages de plein air en péril
journalistes européens Lighthouse Reports avec lequel
14 octobre 2021 Lire plus tard Mediapart travaille, depuis octobre, sur les lobbies de la
viande, tant en France que chez nos voisins européens et
au sein des institutions à Bruxelles.

Notre enquête, publiée ce 27 février, est à lire dans les colonnes de Mediapart, mais
aussi, en néerlandais, dans celles du média Follow the Money. Elle met en évidence un
phénomène européen, où le fossé se creuse entre les discours et la règlementation en
vigueur.

Alors que se déroule, depuis samedi 26 février, le Salon de l’agriculture, grand raout
des défenseurs de l’agro-industrie, de la FNSEA aux grosses coopératives, en passant
par les géants de l’agroalimentaire, et que nous sommes à un mois et demi de
l’élection présidentielle, il est temps de poser dans le débat public la question de
l’avenir des élevages intensifs. Et d’en nir avec ce modèle destructeur tant pour les
écosystèmes que pour l’équilibre économique et social du monde agricole.

Amélie Poinssot

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