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MOULES
La qualité au rendez-vous
Après des années difficiles pour certains bassins français, le cru 2018 s’annonçait
de belle qualité à l’ouverture de la saison, pour la bouchot comme pour la moule de corde.
Pour ne pas décevoir les consommateurs et valoriser des volumes parfois restreints,
les producteurs scrutent les taux de chair.
Ventes décalées pour taux Initiatives marketing Il y a toujours une Tout valoriser :
de chair au rendez-vous bienvenues à la marée moule pour vous des sous-tailles aux filets
P our la troisième année consécutive, la campagne de prospective menée par le comité régional
des pêches avec l’Ifremer et Normandie Fraîcheur Mer (NFM) a conclu à l’absence de moules
sur les gisements de l’est Cotentin et de Haute-Normandie. La pêche restera fermée, à l’exception
pas voulu prendre de risque, d’autant plus
que les aides faisant suite aux mortalités
n’étaient toujours pas versées. « La plupart
du gisement de Ravenoville, ouvert en juillet-août à des bateaux de moins de 8 mètres. ont vendu rapidement, sans attendre que le
Mauvaise nouvelle pour les pêcheurs de l’est Cotentin et de Haute-Normandie qui, en 2015, cap- produit corresponde au cahier des charges
turaient 80 à 90 % de la moule de pêche en France. Dont 5 000 à 10 000 tonnes, selon les années, du label Rouge », indique Benoît Durivaud.
sur le seul gisement de Barfleur ouvert de juin à fin novembre. Une moule dont les profession- Mais qu’en est-il cette année ? « Nous
nels ont su valoriser la qualité et la couleur crème en travaillant sur un cahier des charges avec avons eu de très fortes prédations des
NFM comprenant des taux de chair minimum et le dessablage. macreuses qui sont arrivées un mois plus
L’an passé, la moule de pêche était encore présente vers Dieppe et Le Tréport. Cette année elle tôt, en octobre, pour rester jusqu’en
a disparu là aussi. « Nous avons assisté à des épisodes similaires par le passé, mais ils n’ont jamais avril, soit un mois plus tard. C’est aussi le
duré aussi longtemps », indique Dominique Lamort, responsable qualité chez NFM. cas en baie du Mont-Saint-Michel et en
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L.F.
Bretagne nord », répondait Loïc Maine
en juin. Résultat : des pertes impor-
tantes sur les bouchots les plus acces-
bassin, et 28 à 34 % sur les celles de filière.
Mais l’inquiétude demeurait pour les pro-
ducteurs de bouchot. En cause : un captage
44 574 t
en raison d’un ensemencement tardif et
des conditions environnementales. Enfin,
la normande s’annonce bien, en taille
de moules vivantes
sibles, soit les moules qui sont aussi les abondant en avance d’un mois. « Il faut arri- importées en 2017. comme en remplissage.
plus grosses. « Cela va sans doute déca- ver à vider les pieux pour y mettre les cordes Source : FranceAgriMer Axel Brière, président du syndicat
ler les ventes. Il faut attendre que les plus captées avant qu’elles ne rompent. Sinon, conchylicole de Pénestin, précisait pour
petites poussent. Mais selon les premiers cela risque de compromettre la saison pro- sa part : « Nous avons vraiment un très
constats, le taux de remplissage devrait chaine », expliquait Benoît Durivaud. beau produit, en termes de taille comme
être bon », indiquait-il. « La Charente devrait retrouver un de taux de chair. » Autre bonne nou-
En Charente-Maritime, au même volume normal », anticipe Didier Bezançon, velle : si la saison dernière avait été miti-
moment, certaines zones étaient fermées directeur de Cultimer, à Dol-de-Bretagne gée du fait de la prédation par des étoiles
du fait de la présence de dynophisis, alors (Ille-et-Vilaine). Mais l’incertitude demeure de mer, ces dernières sont moins pré-
que les moules étaient déjà bien pleines. En en baie du Mont-Saint-Michel, du fait de sentes cette année. Les mytiliculteurs,
juin, le taux de chair atteignait déjà 24 à la prédation par les macreuses. Quant à qui ont mis en place un plan de lutte, en
28 % sur les moules de bouchot, qui repré- Saint-Brieuc, le produit est plutôt joli, mais ont pêché seulement 30 tonnes, contre
sentent les trois quarts de la production du il y aura 15 à 20 % de volumes en moins 100 tonnes l’an dernier. n
Initiatives méditerranéennes
❯ Florent Tarbouriech, dirigeant de Médithau, a obtenu les autorisations ❯ À Mèze, la Perle de Thau a choisi d’éle-
nécessaires pour implanter ses dix premières filières en mer au large de Sète. ver, dans l’étang de Thau, des moules cap-
Elles pourraient produire une centaine de tonnes en 2018. Mais le potentiel tées sur ses tables ostréicoles. Très appré-
de l’élevage de moules de corde en mer ouverte au large de Sète serait ciées, elles sont vendues de juin à octobre
de 1 000 à 2 000 tonnes. auprès de grossistes en restauration. « Nous
L’exemple fera-t-il des émules ? L’élevage en mer a existé dans les sommes peu nombreux à procéder ainsi »,
années 1980-1990, mais la prédation croissante par les dorades, les précise Philippe Cambon, son cogérant, qui
tempêtes et les investissements dans des équipements spécifiques ont estime la production totale de moules 100 %
conduit les producteurs à abandonner. Thau à 500 tonnes. Certains l’évaluent à
2 000 tonnes, en comptant les moules d’Ita-
Pour lutter contre la prédation des dorades en mer, l’usage du filet chaussette espagnol, lie ou de Grèce achetées sur corde et repar-
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. au-dessus du filet de catinage, s’avère plutôt efficace quées dans l’étang.
L.F.
du label Rouge ? « Les volumes propo-
La Morisseau, une marque pour les poissonniers. sés étaient trop faibles l’an dernier pour
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le savoir. »
Mais force est de constater que les
n deux ans, les achats de moules « Désormais, pour les Français,
enseignes cherchent à monter en gamme.
vivantes des ménages ont baissé la saison des moules dure de
Pour la bouchot, les critères de qualité
de 4 500 tonnes. L’an dernier, mai à août, ajoute Loïc Maine,
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des cahiers des charges pour les marques
elles dépassaient à peine les vice-président moules du CRC
de distributeurs se situent au minimum
39 000 tonnes selon Kantar Worldpanel. Normandie. Alors que mes
au niveau d’une spécialité traditionnelle
Les Français se détourneraient-ils du pro- grands-parents commençaient
Arrivée en 2015, garantie (STG) et atteignent parfois les
duit ? Du côté des professionnels, on en septembre, à la braderie de Lille,
La Cancalaise niveaux exigés pour l’appellation d’origine
constate plutôt une forte demande de juin pour terminer en décembre. Les moules
commence à protégée (AOP) ou le label Rouge.
à septembre. « Mais le manque de moules étaient de belle taille et bien pleines. » Mais
se faire une place Elles accueillent de façon plutôt bienveil-
s’est traduit par une hausse des prix en aujourd’hui, la concurrence de Hollande se au LS. lante les initiatives marketing de leurs four-
2016. Sur ce produit abordable, cela a un fait sentir dès septembre, puis vient d’Ir-
nisseurs. Ainsi, la moule de corde Krystale,
impact important sur les achats », sou- lande, du Danemark… Les mytiliculteurs
élevée comme l’huître du même nom en
ligne l’un d’eux. « La consommation a français sont contraints de vendre plus tôt.
Bretagne sud et lancée par Cultimer, est
peut-être été plus forte en restauration « Or, un produit qui n’est pas à maturité
très demandée. Certes, les volumes sont
et réduite d’autant à domicile », avance est souvent décevant. Cela peut conduire
confidentiels. Mais le choix a été de jouer la
Stéphane Hesry, dirigeant de Cap à l’Ouest. à s’en détourner », reprend Loïc Maine.
faible densité de production pour aboutir
à une moule haut de gamme, par sa taille
qui oscille entre 4,8 et 5,4 cm et son taux
N’oubliez pas le surgelé de chair compris entre 33 et 40 %.
De son côté, Mytilimer capitalise sur
La Cancalaise, lancée en 2015, avec
au goût distinctif, pourrait, en surgelé, capter une autre clientèle ». Depuis quettes sous atmosphère protectrice, mais
2016, l’entreprise a lancé, en sus de sa chair de moules de bouchot surgelé, une aussi en sachets sous vide sous étui carton,
moule de bouchot entière précuite et surgelée. Elle espère en vendre 300 pour des opérations spéciales en GMS.
à 500 tonnes d’ici cinq ans. Le créneau de la moule entière cuite surgelée Cette année, la gamme s’élargit avec les
est déjà exploré, notamment par Davigel. « Cuite sous vide, elle garde son moules de sélection. Des moules porteuses
eau et son moelleux. D’où un résultat au réchauffage proche d’une moule de l’AOP, mais dont le cahier des charges
vivante cuite », explique Laurent Froget, chef de groupe. La restauration défini en interne va encore plus loin, en
commerciale comme les collectivités l’apprécient, qu’il s’agisse de la moule de termes de taille comme de taux de chair.
pleine eau du Chili ou de la moule d’Irlande bio. Sur les barquettes, les producteurs seront
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de leur offrir une régularité dans la qualité note Magali Coroller, chef de produit.
et un produit différent des rayons marées Depuis quelques années, le rayon marée LS les met aussi en avant avec
des GMS. Faute de volumes, nous ne pou- des offres comme celles de Miti. Ses moules du Chili, ail et persil ou au piment
vons pas toujours répondre à la demande, d’Espelette, biopréservées, ont l’avantage « de ne pas être farineuses. Elles sont moins
souligne toutefois Stéphane Hesry. Il s’agit sèches et ne contiennent aucun conservateur », précise le dirigeant de Miti,
d’un marché de niche. » Avantage d’une Pierre Roffino.
marque, elle permet aussi de s’affran- Enfin, pour l’apéritif, Escal propose des moules à croquer au rayon
chir de la question de l’origine. Ainsi, surgelé. « Un produit ludique qui rajeunit la cible des moules
La Morisseau ne vient pas toujours de la farcies », note Alexia Muller, responsable marketing.
seule baie du Mont-Saint-Michel. « Il y a Et à l’approche de l’hiver, pourquoi ne pas tenter une verrine
aussi de bons producteurs ailleurs. » de velouté de moules Morisseau, au chorizo et à la saint-jacques
Si elle reste confidentielle, la marque selon les recettes imaginées par le chef Christophe Wasser.
s’installe et innove, se fait connaître via
des supports originaux, tel un condition-
nement dans un sac de jute avec un film
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intérieur assurant l’hygiène et la tenue du
produit. Fin juin, une dégustation célé- Au-delà du moules-frites
brait conjointement le lancement de la
saison Morisseau 2018 et les deux ans de Pour stimuler l’imagination des consommateurs européens, le néerlandais
la poissonnerie la Marée Montalbanaise, Delta Mossel lance un kit de moules à cuisiner au wok. Vivantes, en barquette,
tenue par les meilleurs ouvriers de France elles sont proposées avec un mélange de légumes et une dosette de sauce,
Sophie et Jean-Pierre Fernandez. Sur son façon thaïe ou espagnole. « La note exotique peut attirer les jeunes. Mais pour
site web, des films courts tournés grâce à recruter des consommateurs, il faut simplifier la préparation », explique
une caméra portée par ses pêcheurs per- Olivier Camelot, directeur des ventes.
mettent aux consommateurs de se mettre Krijn Verwijs, connue pour sa marque Premier, avait ouvert
à la place des producteurs. la voie l’an dernier sans aller jusqu’à offrir les légumes. Cette
Sur la façade méditerranéenne, « nous année, l’entreprise suggère une cuisson au barbecue,
réfléchissons depuis longtemps à la création en ajoutant à ses packs une barquette en
d’une marque, confie Florent Tarbouriech, aluminium adaptée et un sachet de sauce
dirigeant de Médithau. Pour ce faire, les huile citron. « Ciblant une clientèle plus jeune
différences organoleptiques du produit en quête de rapidité, ces innovations visent aussi
doivent être significatives. Notre équipe la restauration commerciale », confie Ineke Nijssen,
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R & D a donc travaillé sur de nouvelles tech- directrice des ventes.
niques d’élevage. Les résultats sont là. La Au rayon saurisserie, les moules en barquettes micro-
moule Tarbouriech sera bientôt présente ondables de Cipal, des moules « cuites fraîches et flash
sur les meilleures tables, les plus beaux pla- pasteurisées », précise Laurent Padox, sont proposées
teaux de fruits de mer. » Et l’entreprise, qui classiquement à la marinière. Mais « nous pourrions
inaugurait en 2016 sa nouvelle usine de envisager des recettes au curry, à la provençale… ».
Frontignan, entend poursuivre son dévelop-
DR
Vers la valorisation
des coproduits et déchets
Moules sous-taille, byssus, mais aussi filets
en plastique et pieux usagés : tous les bassins mytilicoles
cherchent aujourd’hui des solutions pour valoriser
ces coproduits et déchets.
C.A.
avons essayé de les donner à un industriel leurs embauché un doctorant pour valider
pour les décoquiller, mais les volumes sont des solutions expérimentées en laboratoire La variété des déchets et coproduits est large.
insuffisants pour intéresser une filière. » et passer à l’industrialisation. Le principe :
Même si le goût de la bouchot est un éliminer la matière organique des moules
atout. « La plupart des fabricants de plats sous-taille.
cuisinés utilisent de la moule du Chili pour Le problème est moins sensible ailleurs.
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son prix accessible. » « Les petites moules, rejetées à l’eau tout environnement du CRC. La phase test de
Didier Bezançon, directeur de Cultimer, comme les coquilles vides, permettent un collecte est en cours. Pour l’heure, les pro-
à Dol-de-Bretagne, pointe plusieurs diffi- réensemencement naturel des moulières », à ducteurs volontaires stockent le byssus en
50 %
cultés : la nécessité de conserver le produit note Benoît Durivaud, vice-président bacs ajourés pour un préséchage à l’air
intact jusqu’à son traitement, les coûts de moules du CRC Poitou-Charentes. Plusieurs libre. Il devrait ensuite être séché industriel-
collecte et la complexité du décorticage études, majoritairement financées par les lement et livré à une entreprise d’alimenta-
sur des petites tailles (microbrisures…). pouvoirs publics locaux, ont cependant été la part des coproduits tion animale pour l’élevage de poules pon-
« Quant aux moules décoquillées, trop menées. « Parmi les coproduits de la mytili- de moules sur les parcs. deuses bio. « Nous avons choisi la voie de
petites (600 à 700 pièces/kg), elles n’inté- culture, le byssus a été identifié comme pré- valorisation la plus rapide à mettre en place
ressent guère que le pet food. » sentant une valeur ajoutée pour l’alimenta- auprès de tous les producteurs pour créer
Le compostage alors ? Cela fonctionne, tion animale en raison de son appétence et une filière », reprend Charlotte Rhone. Par
mais là aussi « au prix d’une dépense éner- de sa composition minérale et protéique », la suite, l’objectif sera de travailler sur la
gétique élevée, liée au ramassage journa- explique Charlotte Rhone, responsable nutrition humaine, la pharmacie, la cosmé-
tique… Mais ces débouchés ne sont pas
pour tout de suite, durée des études cli-
niques oblige.
Mussella monte en puissance Parallèlement, des efforts restent à faire
sur les filets, difficilement recyclables du fait
toutefois, concrétiser aussi l’objectif initial : fournir une chair de moules fran- (1) Convention industrielle de formation
çaises aux industries agroalimentaires. par la recherche